Le non-dit est à la littérature ce que le silence est à la musique. Ce n'est pas un hasard si la rhétorique classique a catégorisé les degrés de densité expressive (et aussi leur absence) : ils vont de l'hyperbole à la litote, de la...
moreLe non-dit est à la littérature ce que le silence est à la musique. Ce n'est pas un hasard si la rhétorique classique a catégorisé les degrés de densité expressive (et aussi leur absence) : ils vont de l'hyperbole à la litote, de la répétition à l'ellipse, de la redondance à la prétérition, de l'allusion à l'aposiopèse, etc. Mais il y a également le présupposé, l'insinuation, la suggestion, qui entrent à leur tour en lice, et il faut reconnaître que le non est plus qu'un jeu : ne peut-il pas exprimer, dans certains cas, l'indicible même ?
La thématique pourra donc refléter à la fois les problèmes de l'interdépendance entre littérature et peinture, cette dernière ayant été saluée par Lessing comme étant « une poésie muette », cependant que la poésie pouvait être considérée comme une « peinture parlante », mais au-delà, réfléchir les limites même du langage et le recours fréquent de ses usagers à des procédés autres, qui vont des gestes, des jeux de regard, de l'affectation et de l'insistance à des somatisations et finissent souvent dans des formes violentes.
Du mutisme au geste qui signifie, la communication non-verbale offre à notre époque un vaste champ d'activité pour expérimenter, dans une perspective pluridisciplinaire, des textes épiques, lyriques et dramatiques des lettres européennes dans leur ensemble, sans que soient négligés les apports des autres arts, à commencer par la peinture, choisis à partir de leur pertinence et de leur représentativité. Tout en cherchant à placer au centre l'analyse et l'histoire littéraires, les séminaires et le colloque de l'ILLE au cours de l'année 2010-2011 feront appel à des linguistes, historiens, sociologues, psychologues, théologiens, etc., car le non-dit, le secret, le tu, se dit et se lit entre les lignes et s'il est vrai que la parole a été donnée à l'homme pour déguiser sa pensée, selon le mot de Talleyrand, réfléchir dans notre université, avec des spécialistes de plusieurs disciplines, aux ressorts profonds de mécanismes de la recherche de la vérité et de sa dissimulation est se rendre compte de la santé mentale d'une époque, d'une société donnée – ou de son absence.