Comment interpréter la tendance des premiers textes de Goffman à traiter leurs objets non pas de manière conceptuelle, mais en développant des métaphores filées ? Cette façon de procéder est-elle rigoureuse ? Peut-on attribuer une valeur...
moreComment interpréter la tendance des premiers textes de Goffman à traiter leurs objets non pas de manière conceptuelle, mais en développant des métaphores filées ? Cette façon de procéder est-elle rigoureuse ? Peut-on attribuer une valeur heuristique aux métaphores goffmaniennes ? Faut-il, comme P . Manning, faire de la métaphore filée une méthode par défaut, ou peut-on lui reconnaître une fonction théorique propre ? Enfin, toutes les métaphores filées du corpus (métaphore théâtrale, métaphore ludique et métaphore rituelle) se fondent-elles sur le même procédé et ont-elles le même statut épistémologique ? Cet article essaiera de soutenir plusieurs thèses. Tout d'abord, il y a une rigueur du procédé métaphorique : les métaphores filées ouvrent des perspectives incongrues sur leur objet, établissent une série d'analogies entre deux ordres de réalités qui permettent, par examen des propriétés structurelles et fonctionnelles du comparant, de mettre en évidence les propriétés structurelles et fonctionnelles du comparé, et ce faisant de construire des modèles conceptuels de basse portée à l'usage d'investigations sociologiques. Si bien que la métaphore n'a de valeur que pour ce qu'elle permet d'énoncer en termes conceptuels. On le comprendra en démontrant que le procédé métaphorique n'est pas le propre de Goffman, mais qu'il correspond, dans toute sa complexité et sa sophistication, à une façon d'écrire, et plus précisément de produire des modèles, propre à la sociologie chicagoane, et dont le procédé se trouve théorisé chez des auteurs tels que Spencer ou Small et Vincent. On verra d'autre part que le recours à de multiples métaphores permet de produire une multiplicité de perspectives exploratoires complémentaires sur le social. Mais on verra enfin qu'il est exclu de parler de méthode de la métaphore, dans la mesure où toutes les métaphores filées n'ont pas le même statut épistémologique chez Goffman : si la métaphore théâtrale vise au simple développement d'une perspective et d'un modèle, les métaphores rituelles, en revanche, servent à importer les concepts issus d'autres perspectives scientifiques dans l'approche goffmanienne, tandis que les métaphores ludiques exercent en partie une fonction critique vis-à-vis des théories des jeux de Schelling ou de Von Neumann et Morgenstern ainsi que de leur application à des objets sociologiques. Consultable à l'adresse suivante :
http://www.publifarum.farum.it/ezine_articles.php?art_id=316