Dictionnaire critique et interdisciplinaire de la participation, Jun 28, 2013
Espace public désigne improprement la qualité de ce qui est ouvert (Öffentlichkeit) tant dans les... more Espace public désigne improprement la qualité de ce qui est ouvert (Öffentlichkeit) tant dans les débats que dans les espaces urbains. La recherche en sciences sociales peut se donner pour tâche d'étudier empiriquement les processus d'intéressement et d'enrôlement qui fondent et maintiennent cette ouverture.
Environment and Planning A: Economy and Space, 2016
In this article, we start by jointly examining the shortcomings contained in the substantial defi... more In this article, we start by jointly examining the shortcomings contained in the substantial definitions of publicity commonly applied to the analysis of both public spaces (physical) and public spheres (political). We propose instead to consider publicity as a potential and publicization as a process, observable both in urban spaces and in the media. Building on John Dewey, we argue that when this process reaches its logical end, it determines and brings together a problem, a place, a sphere and a group of people that it makes public. It also leads to mechanisms of political action that constitute the ends of public space. Using the example of New Orleans post Katrina, we illustrate this process by discussing three obstacles that often stall or reverse publicization processes, which we believe deserve further study. Finally, we ground the values on which the process of publicization rests on the shared experience of trouble in potentially public spaces. This pragmatists approach op...
This intervention is grounded on the analysis of experts’ interventions in Swiss public debates a... more This intervention is grounded on the analysis of experts’ interventions in Swiss public debates about “in vitro fertilisation” (IVF) and “Nazi Gold” issues. On the one hand, we will observe how these discourses are made accountable as stand-taking in public debates. On the second hand, we will show how these debates display categorisation devices which make private and past situations accountable as problems requiring the unfolding of public courses of action. In conclusion we will address theoretical questions about the relations between categorisation processes and the constitution of democratic public spheres.
Environment and Planning A: Economy and Space, 2016
In this article, we start by jointly examining the shortcomings contained in the substantial defi... more In this article, we start by jointly examining the shortcomings contained in the substantial definitions of publicity commonly applied to the analysis of both public spaces (physical) and public spheres (political). We propose instead to consider publicity as a potential and publicization as a process, observable both in urban spaces and in the media. Building on John Dewey, we argue that when this process reaches its logical end, it determines and brings together a problem, a place, a sphere and a group of people that it makes public. It also leads to mechanisms of political action that constitute the ends of public space. Using the example of New Orleans post Katrina, we illustrate this process by discussing three obstacles that often stall or reverse publicization processes, which we believe deserve further study. Finally, we ground the values on which the process of publicization rests on the shared experience of trouble in potentially public spaces. This pragmatists approach op...
Cédric Terzi, Alain Bovet, « La composante narrative des controverses politiques et médiatiques. ... more Cédric Terzi, Alain Bovet, « La composante narrative des controverses politiques et médiatiques. Pour une analyse praxéologique des actions et des mobilisations collectives », Réseaux 2005/4 (n o 132), p. 111-132.
For many years now, our work on human cognition, trust, and public experience has been driving us... more For many years now, our work on human cognition, trust, and public experience has been driving us to combine ethnomethodological analysis with a pragmatist perspective (mostly Dewey's one). We thus fully agree with M. Emirbayer and D. Maynard's diagnosis. For us, it is good news: we didn't understand why, up to now, ethnomethodologists were prone to ignore or to discard pragmatism; a possible reason for this neglect is that they (wrongly) confused it with symbolic interactionism. As Emirbayer and Maynard put it, there are such fundamental commonalities between pragmatism and ethnomethodology, that "we can make valuable progress toward realizing the aims they share, each enterprise fortified, perhaps, by the insights and admonitions of the other." Despite the reciprocity of this formulation, they present pragmatism somehow as a comprehensive philosophical justification of EM/CA's program. As a consequence, they suggest that pragmatism has more to learn from EM (particularly from its methodological naturalistic empiricism-which is correct) than EM from pragmatism. And their paper tends to present pragmatism as mere instructions for empirical research. Such a contextualization is not irrelevant, since it can help to avoid the inclination of some current EM/CA developments to slip into mere technical undertakings. The focus on the implications of pragmatism for social sciences is an appropriate strategy for Emirbayer and Maynard's purpose, i.e. claiming that EM remains an original-and even unique-empirical approach for the sociological inquiry. However, this strategy has major consequences. It focuses on specific aspects of pragmatist thought, and thus dramatically reduces the definition of experience, leaving apart some
B rigitte Le Grignou et Érik Neveu (2011) opposent une sévère critique au « Jeu de la mort ». Pou... more B rigitte Le Grignou et Érik Neveu (2011) opposent une sévère critique au « Jeu de la mort ». Pour l'essentiel, leur propos consiste à dévoiler le caractère militant de ce documentaire et à déconstruire sa prétention de « fonder le discours critique sur une démonstration scientifique ». C'est dire que, dans leur perspective, le « jeu de la mort » se caractérise avant tout comme un discours qui se décline en un « texte »-le documentaire télévisé-et un « paratexte »-« son livre d'accompagnement » et les entretiens que ses auteurs ont accordés à différents médias. Brigitte Le Grignou et Érik Neveu (ibid. : p. 220) rapportent ce discours à un argument qui « [impute] à la télévision […] un pouvoir alarmant ». Leur entreprise ne consiste donc pas en une « analyse de l'émission »-quoi qu'ils en disent en conclusion de leur texte. Ils proposent plutôt une critique argumentée de son discours. Plus précisément, ils s'emploient à réfuter l'argument du documentaire et sa prétendue assise scientifique. Symptomatiquement, les rares passages descriptifs de leur article ne présentent le documentaire que de manière très elliptique. Au terme de cet article, le lecteur qui n'a pas vu l'émission serait bien en mal de dire en quoi consiste son déroulement, son dispositif scénique, son montage ou même quelques unes de ses séquences. Il faut dire que dans la perspective de Brigitte Le Grignou et Érik Neveu (ibid. : p. 223), le dispositif télévisuel n'est qu'une « mise en scène » qui assure la mise en visibilité du discours par « des procédés qui flirtent avec le Grand Guignol […] : cris amplifiés de la victime, gros plans et plan de coupes sur les mains qui poussent les boutons commandant les décharges électriques, musiques appuyées ». Dans ces conditions, il n'est nul besoin de s'appesantir sur ces artifices. L'enjeu de l'analyse est plutôt de dévoiler les structures du discours de l'émission, afin de démontrer que sa thèse n'est pas fondée scientifiquement. Ce qui conduit les auteurs à dénoncer la « régression politique » engendrée par une émission pourtant « née d'un dessein politique au sens noble » : celui « de susciter la réflexion sur le pouvoir de la télévision » (ibid. : p. 235).
En hommage à Jean Widmer, cet article présente quelques points forts de sa pensée. L&... more En hommage à Jean Widmer, cet article présente quelques points forts de sa pensée. L'originalité de sa démarche tient notamment à son refus d'instrumentaliser l'analyse de discours comme une technique d'enquête, et à son ambition d'en faire un ressort essentiel pour toute ...
Ce Dossier de SociologieS a pour finalite de donner un apercu de la pluralite des receptions du p... more Ce Dossier de SociologieS a pour finalite de donner un apercu de la pluralite des receptions du pragmatisme en sciences sociales dans le monde francophone . Elle s’inscrit dans la continuite d’un seminaire qui s’est tenu pendant l’annee 2012-2013 a l’Ecole des hautes etudes en sciences sociales (EHESS-Paris), coorganise par Alexandra Bidet, Daniel Cefai, Antoine Hennion, Roberto Frega, Joan Stavo-Debauge et Cedric Terzi . Ce seminaire s’est poursuivi en 2013-2014 par une cooperation de Daniel...
Pragmata, Figures du public : enquêter, expérimenter, éduquer, 2021
Cet article explore quelques difficultés qui contrarient
l’ambition d’établir des faits par l’ob... more Cet article explore quelques difficultés qui contrarient l’ambition d’établir des faits par l’observation. Depuis la formulation de la conception pragmatiste de l’enquête par Dewey, le préjugé réaliste s’est effondré. Il a été remplacé par un préjugé sceptique, lequel jette par principe le soupçon sur toute prétention à établir un fait à partir d’une perspective située, que ce soit celle d’un reporter, d’un témoin oculaire ou d’un preneur d’images. Comment redéployer une démarche pragmatiste pour répondre à ce défi sceptique ?
in Michaël Pfister (dir.), actes du Congrès contre la démocratie, Arteplage mobile du Jura, Expo 02
En 1998, les Suisses ont été appelés à se prononcer sur un initiative visant à restreindre drasti... more En 1998, les Suisses ont été appelés à se prononcer sur un initiative visant à restreindre drastiquement les possibilités du génie génétique dans le domaine non-humain. A cette occasion, les citoyens suisses risquaient de ramener, démocratiquement et en un seul tour de scrutin, la Suisse à l’âge de la pierre taillée. Le prix Nobel de médecine Rolf Zinkernagel a vu le péril venir et pris les mesures qui s’imposaient.
Les cas de blasphème constituent des polémiques prenant forme quand les défenseurs d'une sacralit... more Les cas de blasphème constituent des polémiques prenant forme quand les défenseurs d'une sacralité religieuse s'opposent à ceux des libertés publiques. Les « tiers » y sont pris à partie, appelés à la fois à reconnaître le caractère « religieux » de l'événement dénoncé comme sacrilège et à statuer sur la légitimité-ou non-de la profanation dénoncée. Cette dynamique est analysée à la lumière des protestations soulevées à la suite de la diffusion du film d'animation Persepolis (Satrapi et Paronnaud, 2007) par une chaîne de télévision tunisienne. On observe que des institutions étrangères-françaises et iraniennes-s'opposent d'emblée autour de l'enjeu religieux de la représentation physique de Dieu. Cette polémique finit par s'imposer en Tunisie au cours d'une procédure pénale qui, loin d'instituer la figure d'un « tiers garant », deviendra l'arène d'un affrontement entre deux conceptions antagonistes de l'identité tunisienne.
« Devenir public : expérimenter un potentiel et sa réalisation contingente. Quelques concrétisations incertaines de la transition tunisienne » in Loïc Ballarini & Céline Ségur Devenir Public. Modalités et enjeux, Paris, Mare et Martin, 2018
GIS Démocratie et Participation, Actes du Colloque “Les expérimentations démocratiques aujourd'hui. Convergences, fragmentations, portées politiques”, Saint-Denis, 26-28 janvier 2017
En Suisse, depuis le milieu des années 1990, l’Union Démocratique du Centre a développé un usage ... more En Suisse, depuis le milieu des années 1990, l’Union Démocratique du Centre a développé un usage inventif des droits de participation populaires qui a contribué à redessiner le paysage politique suisse. Rompant avec la longue tradition qui conduisait l’écrasante majorité des initiatives à être rejetées en votation populaire, cette mobilisation a permis l’organisation d’une succession de scrutins qui ont conduit à l’adoption de modifications constitutionnelles. Ces décisions populaires ont sensiblement infléchi la politique fédérale, particulièrement dans les domaines de la maîtrise des frontières. Elles ont marqué un net durcissement des politiques migratoires et des naturalisations, donnant corps à une Suisse « indépendante et neutre » , se tenant en retrait des institutions internationales. Afin d’illustrer et de mettre en perspective la tournure qu’a prise ce mode de participation populaire, je vais rappeler brièvement le déroulement d’une initiative qui visait à interdire la construction de minarets en Suisse. Ce cas particulier illustre de manière exemplaire l’interprétation des droits populaires qui prévaut désormais en Suisse et que je m’efforcerai de caractériser. Le déroulement de cette enquête me conduira à appeler les analystes à faire œuvre de vigilance critique à l’égard du mode de figuration et d’exercice du pouvoir engagé par toute organisation de la participation populaire.
Le 29 novembre 2009, les citoyens suisses ont adopté une initiative populaire visant à modifier l... more Le 29 novembre 2009, les citoyens suisses ont adopté une initiative populaire visant à modifier la Constitution fédérale par l’adjonction d’un alinéa stipulant que « la construction de minarets est interdite. » Le résultat de la procédure démocratique est clair et sans équivoque. Pourtant, des constitutionnalistes considèrent que l’ordre juridique en vigueur en Suisse n’exclut pas qu’une communauté musulmane qui manifesterait sa volonté de rehausser sa mosquée d’un minaret se voie accorder un permis de construire. Comment une décision démocratique, adoptée par une large majorité de citoyens exerçant ses droits de participation politique, peut-elle demeurer lettre morte ? Afin de comprendre ce qui s’est passé, cet article revient à l’origine de cette initiative et retrace la procédure de son adoption.
Dictionnaire critique et interdisciplinaire de la participation, Jun 28, 2013
Espace public désigne improprement la qualité de ce qui est ouvert (Öffentlichkeit) tant dans les... more Espace public désigne improprement la qualité de ce qui est ouvert (Öffentlichkeit) tant dans les débats que dans les espaces urbains. La recherche en sciences sociales peut se donner pour tâche d'étudier empiriquement les processus d'intéressement et d'enrôlement qui fondent et maintiennent cette ouverture.
Environment and Planning A: Economy and Space, 2016
In this article, we start by jointly examining the shortcomings contained in the substantial defi... more In this article, we start by jointly examining the shortcomings contained in the substantial definitions of publicity commonly applied to the analysis of both public spaces (physical) and public spheres (political). We propose instead to consider publicity as a potential and publicization as a process, observable both in urban spaces and in the media. Building on John Dewey, we argue that when this process reaches its logical end, it determines and brings together a problem, a place, a sphere and a group of people that it makes public. It also leads to mechanisms of political action that constitute the ends of public space. Using the example of New Orleans post Katrina, we illustrate this process by discussing three obstacles that often stall or reverse publicization processes, which we believe deserve further study. Finally, we ground the values on which the process of publicization rests on the shared experience of trouble in potentially public spaces. This pragmatists approach op...
This intervention is grounded on the analysis of experts’ interventions in Swiss public debates a... more This intervention is grounded on the analysis of experts’ interventions in Swiss public debates about “in vitro fertilisation” (IVF) and “Nazi Gold” issues. On the one hand, we will observe how these discourses are made accountable as stand-taking in public debates. On the second hand, we will show how these debates display categorisation devices which make private and past situations accountable as problems requiring the unfolding of public courses of action. In conclusion we will address theoretical questions about the relations between categorisation processes and the constitution of democratic public spheres.
Environment and Planning A: Economy and Space, 2016
In this article, we start by jointly examining the shortcomings contained in the substantial defi... more In this article, we start by jointly examining the shortcomings contained in the substantial definitions of publicity commonly applied to the analysis of both public spaces (physical) and public spheres (political). We propose instead to consider publicity as a potential and publicization as a process, observable both in urban spaces and in the media. Building on John Dewey, we argue that when this process reaches its logical end, it determines and brings together a problem, a place, a sphere and a group of people that it makes public. It also leads to mechanisms of political action that constitute the ends of public space. Using the example of New Orleans post Katrina, we illustrate this process by discussing three obstacles that often stall or reverse publicization processes, which we believe deserve further study. Finally, we ground the values on which the process of publicization rests on the shared experience of trouble in potentially public spaces. This pragmatists approach op...
Cédric Terzi, Alain Bovet, « La composante narrative des controverses politiques et médiatiques. ... more Cédric Terzi, Alain Bovet, « La composante narrative des controverses politiques et médiatiques. Pour une analyse praxéologique des actions et des mobilisations collectives », Réseaux 2005/4 (n o 132), p. 111-132.
For many years now, our work on human cognition, trust, and public experience has been driving us... more For many years now, our work on human cognition, trust, and public experience has been driving us to combine ethnomethodological analysis with a pragmatist perspective (mostly Dewey's one). We thus fully agree with M. Emirbayer and D. Maynard's diagnosis. For us, it is good news: we didn't understand why, up to now, ethnomethodologists were prone to ignore or to discard pragmatism; a possible reason for this neglect is that they (wrongly) confused it with symbolic interactionism. As Emirbayer and Maynard put it, there are such fundamental commonalities between pragmatism and ethnomethodology, that "we can make valuable progress toward realizing the aims they share, each enterprise fortified, perhaps, by the insights and admonitions of the other." Despite the reciprocity of this formulation, they present pragmatism somehow as a comprehensive philosophical justification of EM/CA's program. As a consequence, they suggest that pragmatism has more to learn from EM (particularly from its methodological naturalistic empiricism-which is correct) than EM from pragmatism. And their paper tends to present pragmatism as mere instructions for empirical research. Such a contextualization is not irrelevant, since it can help to avoid the inclination of some current EM/CA developments to slip into mere technical undertakings. The focus on the implications of pragmatism for social sciences is an appropriate strategy for Emirbayer and Maynard's purpose, i.e. claiming that EM remains an original-and even unique-empirical approach for the sociological inquiry. However, this strategy has major consequences. It focuses on specific aspects of pragmatist thought, and thus dramatically reduces the definition of experience, leaving apart some
B rigitte Le Grignou et Érik Neveu (2011) opposent une sévère critique au « Jeu de la mort ». Pou... more B rigitte Le Grignou et Érik Neveu (2011) opposent une sévère critique au « Jeu de la mort ». Pour l'essentiel, leur propos consiste à dévoiler le caractère militant de ce documentaire et à déconstruire sa prétention de « fonder le discours critique sur une démonstration scientifique ». C'est dire que, dans leur perspective, le « jeu de la mort » se caractérise avant tout comme un discours qui se décline en un « texte »-le documentaire télévisé-et un « paratexte »-« son livre d'accompagnement » et les entretiens que ses auteurs ont accordés à différents médias. Brigitte Le Grignou et Érik Neveu (ibid. : p. 220) rapportent ce discours à un argument qui « [impute] à la télévision […] un pouvoir alarmant ». Leur entreprise ne consiste donc pas en une « analyse de l'émission »-quoi qu'ils en disent en conclusion de leur texte. Ils proposent plutôt une critique argumentée de son discours. Plus précisément, ils s'emploient à réfuter l'argument du documentaire et sa prétendue assise scientifique. Symptomatiquement, les rares passages descriptifs de leur article ne présentent le documentaire que de manière très elliptique. Au terme de cet article, le lecteur qui n'a pas vu l'émission serait bien en mal de dire en quoi consiste son déroulement, son dispositif scénique, son montage ou même quelques unes de ses séquences. Il faut dire que dans la perspective de Brigitte Le Grignou et Érik Neveu (ibid. : p. 223), le dispositif télévisuel n'est qu'une « mise en scène » qui assure la mise en visibilité du discours par « des procédés qui flirtent avec le Grand Guignol […] : cris amplifiés de la victime, gros plans et plan de coupes sur les mains qui poussent les boutons commandant les décharges électriques, musiques appuyées ». Dans ces conditions, il n'est nul besoin de s'appesantir sur ces artifices. L'enjeu de l'analyse est plutôt de dévoiler les structures du discours de l'émission, afin de démontrer que sa thèse n'est pas fondée scientifiquement. Ce qui conduit les auteurs à dénoncer la « régression politique » engendrée par une émission pourtant « née d'un dessein politique au sens noble » : celui « de susciter la réflexion sur le pouvoir de la télévision » (ibid. : p. 235).
En hommage à Jean Widmer, cet article présente quelques points forts de sa pensée. L&... more En hommage à Jean Widmer, cet article présente quelques points forts de sa pensée. L'originalité de sa démarche tient notamment à son refus d'instrumentaliser l'analyse de discours comme une technique d'enquête, et à son ambition d'en faire un ressort essentiel pour toute ...
Ce Dossier de SociologieS a pour finalite de donner un apercu de la pluralite des receptions du p... more Ce Dossier de SociologieS a pour finalite de donner un apercu de la pluralite des receptions du pragmatisme en sciences sociales dans le monde francophone . Elle s’inscrit dans la continuite d’un seminaire qui s’est tenu pendant l’annee 2012-2013 a l’Ecole des hautes etudes en sciences sociales (EHESS-Paris), coorganise par Alexandra Bidet, Daniel Cefai, Antoine Hennion, Roberto Frega, Joan Stavo-Debauge et Cedric Terzi . Ce seminaire s’est poursuivi en 2013-2014 par une cooperation de Daniel...
Pragmata, Figures du public : enquêter, expérimenter, éduquer, 2021
Cet article explore quelques difficultés qui contrarient
l’ambition d’établir des faits par l’ob... more Cet article explore quelques difficultés qui contrarient l’ambition d’établir des faits par l’observation. Depuis la formulation de la conception pragmatiste de l’enquête par Dewey, le préjugé réaliste s’est effondré. Il a été remplacé par un préjugé sceptique, lequel jette par principe le soupçon sur toute prétention à établir un fait à partir d’une perspective située, que ce soit celle d’un reporter, d’un témoin oculaire ou d’un preneur d’images. Comment redéployer une démarche pragmatiste pour répondre à ce défi sceptique ?
in Michaël Pfister (dir.), actes du Congrès contre la démocratie, Arteplage mobile du Jura, Expo 02
En 1998, les Suisses ont été appelés à se prononcer sur un initiative visant à restreindre drasti... more En 1998, les Suisses ont été appelés à se prononcer sur un initiative visant à restreindre drastiquement les possibilités du génie génétique dans le domaine non-humain. A cette occasion, les citoyens suisses risquaient de ramener, démocratiquement et en un seul tour de scrutin, la Suisse à l’âge de la pierre taillée. Le prix Nobel de médecine Rolf Zinkernagel a vu le péril venir et pris les mesures qui s’imposaient.
Les cas de blasphème constituent des polémiques prenant forme quand les défenseurs d'une sacralit... more Les cas de blasphème constituent des polémiques prenant forme quand les défenseurs d'une sacralité religieuse s'opposent à ceux des libertés publiques. Les « tiers » y sont pris à partie, appelés à la fois à reconnaître le caractère « religieux » de l'événement dénoncé comme sacrilège et à statuer sur la légitimité-ou non-de la profanation dénoncée. Cette dynamique est analysée à la lumière des protestations soulevées à la suite de la diffusion du film d'animation Persepolis (Satrapi et Paronnaud, 2007) par une chaîne de télévision tunisienne. On observe que des institutions étrangères-françaises et iraniennes-s'opposent d'emblée autour de l'enjeu religieux de la représentation physique de Dieu. Cette polémique finit par s'imposer en Tunisie au cours d'une procédure pénale qui, loin d'instituer la figure d'un « tiers garant », deviendra l'arène d'un affrontement entre deux conceptions antagonistes de l'identité tunisienne.
« Devenir public : expérimenter un potentiel et sa réalisation contingente. Quelques concrétisations incertaines de la transition tunisienne » in Loïc Ballarini & Céline Ségur Devenir Public. Modalités et enjeux, Paris, Mare et Martin, 2018
GIS Démocratie et Participation, Actes du Colloque “Les expérimentations démocratiques aujourd'hui. Convergences, fragmentations, portées politiques”, Saint-Denis, 26-28 janvier 2017
En Suisse, depuis le milieu des années 1990, l’Union Démocratique du Centre a développé un usage ... more En Suisse, depuis le milieu des années 1990, l’Union Démocratique du Centre a développé un usage inventif des droits de participation populaires qui a contribué à redessiner le paysage politique suisse. Rompant avec la longue tradition qui conduisait l’écrasante majorité des initiatives à être rejetées en votation populaire, cette mobilisation a permis l’organisation d’une succession de scrutins qui ont conduit à l’adoption de modifications constitutionnelles. Ces décisions populaires ont sensiblement infléchi la politique fédérale, particulièrement dans les domaines de la maîtrise des frontières. Elles ont marqué un net durcissement des politiques migratoires et des naturalisations, donnant corps à une Suisse « indépendante et neutre » , se tenant en retrait des institutions internationales. Afin d’illustrer et de mettre en perspective la tournure qu’a prise ce mode de participation populaire, je vais rappeler brièvement le déroulement d’une initiative qui visait à interdire la construction de minarets en Suisse. Ce cas particulier illustre de manière exemplaire l’interprétation des droits populaires qui prévaut désormais en Suisse et que je m’efforcerai de caractériser. Le déroulement de cette enquête me conduira à appeler les analystes à faire œuvre de vigilance critique à l’égard du mode de figuration et d’exercice du pouvoir engagé par toute organisation de la participation populaire.
Le 29 novembre 2009, les citoyens suisses ont adopté une initiative populaire visant à modifier l... more Le 29 novembre 2009, les citoyens suisses ont adopté une initiative populaire visant à modifier la Constitution fédérale par l’adjonction d’un alinéa stipulant que « la construction de minarets est interdite. » Le résultat de la procédure démocratique est clair et sans équivoque. Pourtant, des constitutionnalistes considèrent que l’ordre juridique en vigueur en Suisse n’exclut pas qu’une communauté musulmane qui manifesterait sa volonté de rehausser sa mosquée d’un minaret se voie accorder un permis de construire. Comment une décision démocratique, adoptée par une large majorité de citoyens exerçant ses droits de participation politique, peut-elle demeurer lettre morte ? Afin de comprendre ce qui s’est passé, cet article revient à l’origine de cette initiative et retrace la procédure de son adoption.
Tunis. Automne 2011. Le départ de Ben Ali n’a pas suffi pour faire advenir la démocratie. Ceux qu... more Tunis. Automne 2011. Le départ de Ben Ali n’a pas suffi pour faire advenir la démocratie. Ceux qui l’avaient espéré comprennent que la transition politique reste à inventer. Cet ouvrage documente avec finesse une histoire dont les enjeux sont pratiques et concrètement politiques. Le déroulement de la polémique soulevée suite à la diffusion télévisée du film Persepolis montre que le recours à la justice n’ouvre pas nécessairement l’espace d’une libre controverse. Bien au contraire. Les procédures pénales peuvent exacerber des causes identitaires, susceptibles de se muer en guerre des libertés. Être pris dans un tel combat, c’est se trouver assigné, de gré ou de force, dans un camp belligérant, et confronté à l’exigence d’en assumer les conséquences morales et politiques. La menace que les affrontements identitaires font peser sur le pluralisme apparaît de manière vive dans les moments révolutionnaires. Pourtant, toute vie démocratique implique l’institutionnalisation du conflit. C’est vrai en Tunisie. Mais aussi partout ailleurs.
Ce Dossier de SociologieS a pour finalité de donner un aperçu de la pluralité des réceptions du p... more Ce Dossier de SociologieS a pour finalité de donner un aperçu de la pluralité des réceptions du pragmatisme en sciences sociales dans le monde francophone. Elle s’inscrit dans la continuité d’un séminaire qui s’est tenu pendant l’année 2012-2013 à l’École des hautes études en sciences sociales (EHESS-Paris), coorganisé par Alexandra Bidet, Daniel Cefaï, Antoine Hennion, Roberto Frega, Joan Stavo-Debauge et Cédric Terzi. Ce séminaire s’est poursuivi en 2013-2014 par une coopération de Daniel Cefaï et Howard Becker autour du thème « Relire la sociologie de Chicago » et reprend sous une forme élargie en 2014-15 avec le groupe de 2012, qu’ont rejoint Yves Cohen et Bénédicte Zimmermann. L’entreprise entre également en résonance avec la création récente, en 2014, d’une association d’études pragmatistes dans le monde francophone, Pragmata, qui fédère les chercheurs en sciences humaines et sociales, mais aussi dans d’autres domaines comme la philosophie morale et politique, l’épistémologie, les sciences formelles, les sciences de la nature, les sciences du langage, les sciences cognitives… Dans cette livraison, nous avons invité, au-delà du noyau du séminaire, un certain nombre de collègues francophones, connus pour leur intérêt pour le pragmatisme, à y participer : Mathieu Berger, Francis Chateauraynaud, Jean-François Côté, Louis Quéré et Joëlle Zask. Nous espérons ainsi donner un aperçu des apports foisonnants de cette transplantation et de cette acclimatation d’une philosophie nord-américaine dans les sciences sociales de langue française – en Belgique, en France, au Québec et en Suisse.
Depuis 1995, les médias suisses ont largement participé aux débats relatifs à la seconde guerre m... more Depuis 1995, les médias suisses ont largement participé aux débats relatifs à la seconde guerre mondiale. L’affaire dite des fonds juifs et de l’or nazi a été au coeur de ces débats, regroupant ou rapprochant au moins quatre problématiques avec leurs acteurs spécifiques : les « fonds en déshérence » appartenant à des victimes de l’Holocauste et non restitués par des institutions privées, banques, assurances ou fiduciaires ; l’affaire de « l’or nazi » qui concerne principalement les transactions entre la Banque nationale suisse et le régime nazi ; le refoulement aux frontières de victimes du nazisme ; les oeuvres d’art volées par les Nazis et pas restituées à la fin de la guerre. Revinrent à la surface en cette période également les collaborations industrielles avec les Nazis, les compromissions ou d’éventuelles doubles jeux de responsables suisses durant cette période etc. La période de 1995 à 1999 fut marquée par une intense production médiatique, éditoriale, filmique. Elle vit également l’apparition de nouveaux acteurs institutionnels, la « Task Force » ou la « commission Bergier » pour en nommer deux, ainsi que de multiples sous-affaires, des péripéties du gardien de banque Meili ou de l’ambassadeur Jagmetti jusqu’à la menace de mise en accusation du conseiller national et professeur J. Ziegler pour atteinte à la sûreté de l’Etat.
Les travaux réunis ici ne concernent qu’un choix restreint des multiples aspects de ces débats. Ils se limitent pour l’essentiel à l’analyse du discours de la presse écrite : une analyse des manières dont la presse a cadré, expliqué, évalué ces débats constituant ainsi une scène publique où non seulement une opinion pouvait se former mais également une reproduction/reélaboration des formes du lien politique en Suisse.
Les textes ont été élaborés dans le cadre d’un séminaire de deuxième cycle en 1997/1998. Y participaient une cinquantaine d’étudiantes et d’étudiants qui font leurs études à Fribourg, à la Faculté des lettres de Lausanne, ou encore en Allemagne ou en Espagne, réunis là grâce aux conventions d’échanges – et par la conviction que nous pouvons comprendre nos manières de comprendre, ce que depuis Kant on nomme la critique.
Cette intervention vise à élucider les relations entre images et témoignages. Je montrerai qu’il ... more Cette intervention vise à élucider les relations entre images et témoignages. Je montrerai qu’il n’y a pas d’analogie entre les images et les témoignages, mais qu’ils entretiennent un rapport indirect, fondé sur des propriétés communes. Premièrement, j'indiquerai que les images et les témoignages tirent tous deux leur intelligibilité de leur ancrage dans un monde pratique . Deuxièmement, je soulignerai que les images comme les témoignages tirent leur force d’authentification du fait de leur attachement à une perspective singulière sur ce monde pratique, laquelle est fondée en dernière instance sur le corps perceptif qui est à leur origine. Afin de donner un fondement empirique à cette élucidation des relations entre images et témoignages, je vais prendre appui sur des enquêtes publiées, consacrées à un cas où des images télévisées ont été mobilisées à des fins testimoniales dans le cadre d’un procès.
La radio suisse romande demandait il y a quelque temps à ses auditeurs : « Des taxes universitair... more La radio suisse romande demandait il y a quelque temps à ses auditeurs : « Des taxes universitaires plus chères pour les étrangers: discriminant? » Cette question peut être considérée comme incongrue à deux titres. D’abord, en regard de l’usage ordinaire des mots : quel sens y a-t-il à se demander si une discrimination (ici, le fait de faire payer des tarifs différenciés en fonction de la nationalité) est discriminatoire ? Ensuite parce que cette question est réglée dans le droit. En ratifiant les accords bilatéraux, la Suisse s’est interdit toute pratique discriminatoire à l’encontre des ressortissants de l’Union européenne. Quel sens y a-t-il dès lors à demander aux Suisses s’ils entendent pratiquer de telles discriminations ?
« Ici, c’est nous qui décidons » – claironne la nouvelle initiative populaire de l’UDC.
Le parti... more « Ici, c’est nous qui décidons » – claironne la nouvelle initiative populaire de l’UDC. Le parti souverainiste entend répondre aux menaces qui, selon lui, pèsent sur l’autodétermination, l’indépendance et la souveraineté du peuple suisse. Ces enjeux servent de fil conducteur à la dernière livraison de son Edition spéciale. Sur la première page, l’éditorial du président Toni Brunner donne le ton. Intitulé « Rester libre ! », il tient lieu de mot d’ordre pour cette année électorale. Quel péril pèse sur la liberté des Suisses pour que le principal parti du pays doive les appeler à l’émancipation et à la résistance ? Et, surtout, pour qu’il le fasse au moyen d’un imprimé diffusé à cinq millions d’exemplaires dans les trois langues nationales ? – Un tirage à faire pâlir d’envie n’importe quel média helvétique.
Le 23 avril 2015, lequotidien gratuit "20 minutes" publiait un article intitulé "La Suisse champi... more Le 23 avril 2015, lequotidien gratuit "20 minutes" publiait un article intitulé "La Suisse championne du monde du bonheur". Ce n’est pas tant le contenu de l’article qui m’intrigue que sa formulation. Cette affirmation sans équivoque du bonheur des Suisses est publiée dans l’édition helvétique de 20 minutes. Le journal adresse l’annonce de la bonne nouvelle à des compatriotes. Pourquoi afficher ainsi le bonheur des Suisses à leur propre attention? Quel peut être le sens d’une telle publication?
Le 14 octobre 2000, des intempéries provoquent la crue violente du Rhône et de ses affluents. Il ... more Le 14 octobre 2000, des intempéries provoquent la crue violente du Rhône et de ses affluents. Il en a résulté des inondations, des coulées de boue et des éboulements qui ont touché plusieurs dizaines de communes. Elles ont tué 16 personnes et exigé l’évacuation de plusieurs milliers de personnes. La plupart des victimes ont été causées par un éboulement, qui a fait céder un mur de protection en amont du village de Gondo, dans le Haut Valais, à proximité de la frontière italienne. Cette catastrophe naturelle a fait l’objet d’une forte médiatisation les jours suivants. Nous avons enregistré, retranscrit et analysé les éditions du journal régional de la Télévision suisse romande dans la semaine qui a suivi la catastrophe, soit entre le 16 et le 20 octobre 2000. Ceci nous a permis de documenter la façon dont la catastrophe a été traitée dans l’espace public suisse. La dimension la plus frappante de ce traitement réside dans la façon dont la catastrophe s’est muée au fil des jours en une grande opération de manifestation de la solidarité nationale orientée vers la reconstruction des villages et des habitations touchées dans les régions de montagne.
Prenant appui sur mes enquêtes empiriques, j'avance un argument: Tout phénomène social (et donc t... more Prenant appui sur mes enquêtes empiriques, j'avance un argument: Tout phénomène social (et donc toute action politique) comporte une composante narrative. Je ne veux pas seulement dire que tout phénomène social peut s’exprimer sous une forme narrative. Je prétends plus radicalement que la narrativité est un aspect constitutif de tout phénomène social en tant qu’il est intelligible. Ce que j’appellerai la « composante narrative » des phénomènes sociaux et politiques, ne s’épuise pas dans l’infinie variété des récits qui sont susceptibles d’en devenir les formulations ou les manifestations.
Bien souvent, la collecte de données est considérée comme un moment trivial de l'enquête sociolog... more Bien souvent, la collecte de données est considérée comme un moment trivial de l'enquête sociologique. Pourtant, ces opérations fondent les conditions de possibilité de la recherche sociologique. A ce titre, elles comportent des implications épistémologiques et théoriques que je tâcherai de mettre en évidence. Mon exposé sera loin d'être exhaustif. Je me limiterai ici à la présentation de quelques observations issues d'une analyse du traitement médiatique de la question « des fonds en déshérence ». Je tâcherai en particulier de pointer les questions théoriques et épistémologiques que la collecte de données pose à la sociologie des problèmes publics.
Je compte ouvrir ici une interrogation sur le mode d'existence public des événements médiatisés à... more Je compte ouvrir ici une interrogation sur le mode d'existence public des événements médiatisés à une époque où les comptes-rendus audiovisuels des événements sont couramment produits sur le vif, par des témoins munis d'appareils de prise de vue numériques.
Le titre donné à mon intervention pourrait être gros d'un malentendu que je tiens à dissiper d'em... more Le titre donné à mon intervention pourrait être gros d'un malentendu que je tiens à dissiper d'emblée. Je dois avouer ma parfaite incompétence en matière de projets d'animation. Et pour tout dire, j'ai de bonnes raisons de penser que je serais parfaitement incapable d'en monter un.
Mon intervention aura pour objectif d’interroger la manière dont l’écriture journalistique contri... more Mon intervention aura pour objectif d’interroger la manière dont l’écriture journalistique contribue à l’organisation de diverses formes d’expériences dont je m’efforcerai de caractériser les moments esthétiques.
1) Je prendrai pour point de départ les résultats des analyses anthropologiques et historiques consacrées à l’écriture. J’en retiendrai principalement que l’écriture a permis la désindexicalisation de la communication, laquelle est au fondement d’une forme de vie sociale, intellectuelle et politique organisée en référence à une saisie factuelle du monde et des événements qui le traversent.
2) Ce rappel servira d’arrière-plan à mon argument central. Je proposerai de considérer qu’á son origine, le travail journalistique a étroitement été associé au développement de l’écriture imprimée. Et qu’il a donc a partie liée avec cette manière de saisir le monde et avec l’institution de la forme de vie collective qui lui est associée. Plus précisément, je suggérerai que le journalisme peut être analysé comme une institution de factualisation, au même titre que la justice et la science.
3) Je conclurai sur une inquiétude qui a progressivement pris forme au cours des mes recherches consacrées au traitement médiatique de controverses politiques. Au cours de ces enquêtes, j’ai vu apparaître des discours journalistiques qui, loin d’enrichir le monde, de renforcer la possibilité de le penser, et de multiplier les prises pour y agir, tendent au contraire à nous renvoyer à la seule expérience de notre impuissance.
Présentation au XVIIe congrès international des sociologues de langue française, Tours, juillet 2... more Présentation au XVIIe congrès international des sociologues de langue française, Tours, juillet 2004 1. Controverses socio-techniques et démocratie participative Ces dernières années, l'analyse des politiques publiques a été animée par des enquêtes consacrées aux controverses socio-techniques. Ces études ont notamment étudié les débats qui ont surgi au sujet le stockage des déchets nucléaires, la culture et la consommation d'organismes génétiquement modifiés ou le traitement de l'épidémie de sida. A la lumière de ces discussions, ces travaux ont éclairé les espaces publics sous l'angle des représentations politiques et scientifiques qui les animent. Ces travaux ont en particulier mis en évidence des procédures de délégation fort peu démocratiques, qui consacrent la participation légitime des élus et des scientifiques à des débats dont sont tenus à l'écart les profanes et les citoyens ordinaires. Ces enquêtes ont donc significativement renouvelé la vielle opposition entre les procédures démocratiques dites délégatives par opposition à leurs formes participatives. Ces recherches fournissent présentent d'innombrables cas empiriques dans lesquels des énigmes socio-techniques, réputées extrêmement complexes, n'auraient pas été résolues sans la contribution active de profanes et de citoyens ordinaires. Elles présentent donc d'excellentes raisons pour privilégier des dispositifs qui favorisent des formes des controverses ouvertes aux contributions des profanes et des citoyens ordinaires. En revanche, à trop se concentrer sur la participation de ces derniers, elles ne détaillent pas ses modalités. Or, celle-ci peut s'avérer décisive s'agissant d'évaluer le caractère démocratique d'un débat et de l'espace public dans lequel il se déroule. Je vais tenter de le montrer à partir d'un exemple suisse, c'est-à-dire d'un cas intéressant en ce sens qu'il s'est déroulé dans environnement politique caractérisé par un système de démocratie semi-directe, réputé pour le haut degré de participation laissé aux citoyens.
Presentation for the Manchester Ethnographic Group, 1.3.2001 Alain Bovet and Cédric Terzi, Univer... more Presentation for the Manchester Ethnographic Group, 1.3.2001 Alain Bovet and Cédric Terzi, University of Fribourg (Switzerland) This intervention is grounded on the analysis of experts' interventions in Swiss public debates about "in vitro fertilisation" (IVF) and "Nazi Gold" issues. On the one hand, we will observe how these discourses are made accountable as stand-taking in public debates. On the second hand, we will show how these debates display categorisation devices which make private and past situations accountable as problems requiring the unfolding of public courses of action. In conclusion we will address theoretical questions about the relations between categorisation processes and the constitution of democratic public spheres.
Recension de : Liora Israël, Robes noires, années sombres. Avocats et magistrats en résistance pe... more Recension de : Liora Israël, Robes noires, années sombres. Avocats et magistrats en résistance pendant la Seconde Guerre mondiale Cédric Terzi L'enquête présentée par Liora Israël enrichit l'analyse de la résistance et de ses enjeux au prix d'une respecification des concepts habituellement tenus pour acquis en sociologie des professions et du droit ainsi qu'en histoire de la Résistance. Ainsi, cette recherche porte le ferment d'une interrogation radicale des manières habituelles de mener les recherches en sciences sociales. Une enquête exemplaire Cette enquête est exemplaire, dans la mesure où l'analyse détaillée d'une vaste documentation empirique sert d'appui pour interroger des pans entiers de l'historiographie de la résistance et de la théorie sociologique. Elle est présentée en sept chapitres qui peuvent être regroupés de manière à distinguer quatre parties. La première a une vocation introductive. L'ouvrage s'ouvre sur une présentation des formes d'actions politiques des juristes à l'époque de l'entre-deux-guerres. Le deuxième chapitre montre que la spécificité des professions juridiques n'a pas joué de rôle structurant dans les activités résistantes menées par des avocats et des magistrats durant la première année de l'Occupation. La deuxième partie, qui porte sur la « résistance des professions » est également composée de deux chapitres. Ils sont consacrés aux activités résistantes menées entre l'été 1941 et l'été 1944 par des avocats (chapitre 3) et par des magistrats (chapitre 4).
Dans une tribune à « l'Obs », deux sociologues rappellent que le recours au référendum ne se rédu... more Dans une tribune à « l'Obs », deux sociologues rappellent que le recours au référendum ne se réduit pas à une simple technique institutionnelle : il mobilise et constitue le peuple-souverain qui peut tomber dans le piège de sa toute-puissance.
Depuis l’apparition de rumeurs complotistes, le monde semble coupé en deux et chacun sommé de cho... more Depuis l’apparition de rumeurs complotistes, le monde semble coupé en deux et chacun sommé de choisir son camp.
«Der Verschwörungswahn ist seit 2001 zum Politikum geworden», sagt Cédric Terzi. Der Soziologe be... more «Der Verschwörungswahn ist seit 2001 zum Politikum geworden», sagt Cédric Terzi. Der Soziologe betrachtet ihn als polemische Beziehung zwischen zwei Lagern: auf der einen Seite die Ankläger (die Klarsichtigen), auf der anderen die Angeklagten (die Getäuschten). Seiner Meinung nach lässt dieses Misstrauensverhältnis wenig Raum für eine demokratische Debatte und öffnet dem Rassismus Tür und Tor.
Secondo Cédric Terzi, il complottismo è assurto a questione politica nel 2001. Il sociologo lo co... more Secondo Cédric Terzi, il complottismo è assurto a questione politica nel 2001. Il sociologo lo considera un rapporto polemico che oppone due parti: gli accusatori (i lucidi) e gli accusati (i fessi) – un rapporto inquisitorio appoggiato dalle autorità che lascia poco spazio alla discussione democratica e contribuisce ad alimentare il razzismo.
« Le complotisme est devenu un enjeu politique dès 2001 », affirme Cédric Terzi. Le sociologue le... more « Le complotisme est devenu un enjeu politique dès 2001 », affirme Cédric Terzi. Le sociologue le considère comme une relation polémique qui oppose deux camps : les accusateurs (les lucides) et les accusés (les dupes). Selon lui, ce rapport inquisiteur cautionné par les autorités laisse peu de place au débat démocratique et contribue à alimenter le racisme.
Le film "Persepolis' de Marjane Satrapi et Vincent Paronnaud sur la révolution islamique en Iran ... more Le film "Persepolis' de Marjane Satrapi et Vincent Paronnaud sur la révolution islamique en Iran est censuré en Tunisie depuis 2011. Diffusé à la suite de la révolution de jasmin, il a fait lʹobjet dʹaccusation de blasphème. Une polémique révélatrice de lʹislamisation de la société tunisienne dʹalors. Décryptage avec Smaïn Laacher et Cédric Terzi, sociologues, au micro de Noriane Rapin.
https://www.rts.ch/play/radio/babel/audio/persepolis-en-tunisie-les-dessous-dune-censure?id=11613145
RELIGION -Les nombreux Français qui ont réagi aux attentats terroristes de Paris, Montrouge et Vi... more RELIGION -Les nombreux Français qui ont réagi aux attentats terroristes de Paris, Montrouge et Vincennes ne s'y sont pas trompés. Ces trois événements posent brutalement la question de leur unité politique. Les manifestants ont placé leurs rassemblements sous le slogan « Je suis Charlie », les érigeant comme autant de symboles de résistance collective à la terreur (« même pas peur ») et de remparts contre les menaces de division (« pas d'amalgame »).
Histoire vivante, Radio Suisse romande, 20-22 septembre 2016
De l’histoire à la recherche - Retou... more Histoire vivante, Radio Suisse romande, 20-22 septembre 2016 De l’histoire à la recherche - Retour sur l’Affaire des fonds juifs en déshérence
Cette semaine, Histoire Vivante a choisi de revenir sur l'Affaire des fonds en déshérence, une affaire financière qui a éclaté durant les années 1990, en Suisse puis dans le monde, concernant l'argent des comptes disparus durant la Seconde Guerre mondiale. Nous nous entretenons aujourd'hui avec Cédric Terzi, sociologue, auteur d'une thèse soutenue il y a quelques années à l'Université de Fribourg: "Qu'avez-vous fait de l'argent des Juifs?".
L’un des actes fondateurs de l’anthropologie des "affaires" a été l’analyse de procédures judicia... more L’un des actes fondateurs de l’anthropologie des "affaires" a été l’analyse de procédures judiciaires polarisées autour de cas de blasphème dans la France du 18ème siècle. Nous mettrons ces affaires en perspective avec une situation formellement similaire qui s’est déployée, en octobre 2011, dans la Tunisie postrévolutionnaire. La description puis l’analyse de ce cas viseront, entre autres, à attirer l’attention sur les limites d’une description fondée sur l’acception des "systèmes actanciels" d’inspiration structuraliste qui s’est imposée comme une marque de fabrique de la sociologie dite "pragmatique" . Nous montrerons qu’une telle démarche structurale, pourrait conduire à établir des analogies indues entre des situations historiques incommensurables, et aboutir à de sérieux contre-sens, susceptibles d’alimenter de fâcheuses conséquences politiques.
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Papers by Cédric Terzi
l’ambition d’établir des faits par l’observation. Depuis la
formulation de la conception pragmatiste de l’enquête par
Dewey, le préjugé réaliste s’est effondré. Il a été remplacé
par un préjugé sceptique, lequel jette par principe le
soupçon sur toute prétention à établir un fait à partir
d’une perspective située, que ce soit celle d’un reporter,
d’un témoin oculaire ou d’un preneur d’images. Comment
redéployer une démarche pragmatiste pour répondre
à ce défi sceptique ?
Afin d’illustrer et de mettre en perspective la tournure qu’a prise ce mode de participation populaire, je vais rappeler brièvement le déroulement d’une initiative qui visait à interdire la construction de minarets en Suisse. Ce cas particulier illustre de manière exemplaire l’interprétation des droits populaires qui prévaut désormais en Suisse et que je m’efforcerai de caractériser.
Le déroulement de cette enquête me conduira à appeler les analystes à faire œuvre de vigilance critique à l’égard du mode de figuration et d’exercice du pouvoir engagé par toute organisation de la participation populaire.
Comment une décision démocratique, adoptée par une large majorité de citoyens exerçant ses droits de participation politique, peut-elle demeurer lettre morte ? Afin de comprendre ce qui s’est passé, cet article revient à l’origine de cette initiative et retrace la procédure de son adoption.
l’ambition d’établir des faits par l’observation. Depuis la
formulation de la conception pragmatiste de l’enquête par
Dewey, le préjugé réaliste s’est effondré. Il a été remplacé
par un préjugé sceptique, lequel jette par principe le
soupçon sur toute prétention à établir un fait à partir
d’une perspective située, que ce soit celle d’un reporter,
d’un témoin oculaire ou d’un preneur d’images. Comment
redéployer une démarche pragmatiste pour répondre
à ce défi sceptique ?
Afin d’illustrer et de mettre en perspective la tournure qu’a prise ce mode de participation populaire, je vais rappeler brièvement le déroulement d’une initiative qui visait à interdire la construction de minarets en Suisse. Ce cas particulier illustre de manière exemplaire l’interprétation des droits populaires qui prévaut désormais en Suisse et que je m’efforcerai de caractériser.
Le déroulement de cette enquête me conduira à appeler les analystes à faire œuvre de vigilance critique à l’égard du mode de figuration et d’exercice du pouvoir engagé par toute organisation de la participation populaire.
Comment une décision démocratique, adoptée par une large majorité de citoyens exerçant ses droits de participation politique, peut-elle demeurer lettre morte ? Afin de comprendre ce qui s’est passé, cet article revient à l’origine de cette initiative et retrace la procédure de son adoption.
Les travaux réunis ici ne concernent qu’un choix restreint des multiples aspects de ces débats. Ils se limitent pour l’essentiel à l’analyse du discours de la presse écrite : une analyse des manières dont la presse a cadré, expliqué, évalué ces débats constituant ainsi une scène publique où non seulement une opinion pouvait se former mais également une reproduction/reélaboration des formes du lien politique en Suisse.
Les textes ont été élaborés dans le cadre d’un séminaire de deuxième cycle en 1997/1998. Y participaient une cinquantaine d’étudiantes et d’étudiants qui font leurs études à Fribourg, à la Faculté des lettres de Lausanne, ou encore en Allemagne ou en Espagne, réunis là grâce aux conventions d’échanges – et par la conviction que nous pouvons comprendre nos manières de comprendre, ce que depuis Kant on nomme la critique.
Premièrement, j'indiquerai que les images et les témoignages tirent tous deux leur intelligibilité de leur ancrage dans un monde pratique .
Deuxièmement, je soulignerai que les images comme les témoignages tirent leur force d’authentification du fait de leur attachement à une perspective singulière sur ce monde pratique, laquelle est fondée en dernière instance sur le corps perceptif qui est à leur origine.
Afin de donner un fondement empirique à cette élucidation des relations entre images et témoignages, je vais prendre appui sur des enquêtes publiées, consacrées à un cas où des images télévisées ont été mobilisées à des fins testimoniales dans le cadre d’un procès.
Cette question peut être considérée comme incongrue à deux titres.
D’abord, en regard de l’usage ordinaire des mots : quel sens y a-t-il à se demander si une discrimination (ici, le fait de faire payer des tarifs différenciés en fonction de la nationalité) est discriminatoire ?
Ensuite parce que cette question est réglée dans le droit. En ratifiant les accords bilatéraux, la Suisse s’est interdit toute pratique discriminatoire à l’encontre des ressortissants de l’Union européenne. Quel sens y a-t-il dès lors à demander aux Suisses s’ils entendent pratiquer de telles discriminations ?
Le parti souverainiste entend répondre aux menaces qui, selon lui, pèsent sur l’autodétermination, l’indépendance et la souveraineté du peuple suisse. Ces enjeux servent de fil conducteur à la dernière livraison de son Edition spéciale. Sur la première page, l’éditorial du président Toni Brunner donne le ton. Intitulé « Rester libre ! », il tient lieu de mot d’ordre pour cette année électorale.
Quel péril pèse sur la liberté des Suisses pour que le principal parti du pays doive les appeler à l’émancipation et à la résistance ? Et, surtout, pour qu’il le fasse au moyen d’un imprimé diffusé à cinq millions d’exemplaires dans les trois langues nationales ? – Un tirage à faire pâlir d’envie n’importe quel média helvétique.
La plupart des victimes ont été causées par un éboulement, qui a fait céder un mur de protection en amont du village de Gondo, dans le Haut Valais, à proximité de la frontière italienne.
Cette catastrophe naturelle a fait l’objet d’une forte médiatisation les jours suivants. Nous avons enregistré, retranscrit et analysé les éditions du journal régional de la Télévision suisse romande dans la semaine qui a suivi la catastrophe, soit entre le 16 et le 20 octobre 2000.
Ceci nous a permis de documenter la façon dont la catastrophe a été traitée dans l’espace public suisse. La dimension la plus frappante de ce traitement réside dans la façon dont la catastrophe s’est muée au fil des jours en une grande opération de manifestation de la solidarité nationale orientée vers la reconstruction des villages et des habitations touchées dans les régions de montagne.
Je ne veux pas seulement dire que tout phénomène social peut s’exprimer sous une forme narrative. Je prétends plus radicalement que la narrativité est un aspect constitutif de tout phénomène social en tant qu’il est intelligible.
Ce que j’appellerai la « composante narrative » des phénomènes sociaux et politiques, ne s’épuise pas dans l’infinie variété des récits qui sont susceptibles d’en devenir les formulations ou les manifestations.
1) Je prendrai pour point de départ les résultats des analyses anthropologiques et historiques consacrées à l’écriture. J’en retiendrai principalement que l’écriture a permis la désindexicalisation de la communication, laquelle est au fondement d’une forme de vie sociale, intellectuelle et politique organisée en référence à une saisie factuelle du monde et des événements qui le traversent.
2) Ce rappel servira d’arrière-plan à mon argument central. Je proposerai de considérer qu’á son origine, le travail journalistique a étroitement été associé au développement de l’écriture imprimée. Et qu’il a donc a partie liée avec cette manière de saisir le monde et avec l’institution de la forme de vie collective qui lui est associée. Plus précisément, je suggérerai que le journalisme peut être analysé comme une institution de factualisation, au même titre que la justice et la science.
3) Je conclurai sur une inquiétude qui a progressivement pris forme au cours des mes recherches consacrées au traitement médiatique de controverses politiques. Au cours de ces enquêtes, j’ai vu apparaître des discours journalistiques qui, loin d’enrichir le monde, de renforcer la possibilité de le penser, et de multiplier les prises pour y agir, tendent au contraire à nous renvoyer à la seule expérience de notre impuissance.
https://www.rts.ch/play/radio/babel/audio/persepolis-en-tunisie-les-dessous-dune-censure?id=11613145
De l’histoire à la recherche - Retour sur l’Affaire des fonds juifs en déshérence
Cette semaine, Histoire Vivante a choisi de revenir sur l'Affaire des fonds en déshérence, une affaire financière qui a éclaté durant les années 1990, en Suisse puis dans le monde, concernant l'argent des comptes disparus durant la Seconde Guerre mondiale.
Nous nous entretenons aujourd'hui avec Cédric Terzi, sociologue, auteur d'une thèse soutenue il y a quelques années à l'Université de Fribourg: "Qu'avez-vous fait de l'argent des Juifs?".
La description puis l’analyse de ce cas viseront, entre autres, à attirer l’attention sur les limites d’une description fondée sur l’acception des "systèmes actanciels" d’inspiration structuraliste qui s’est imposée comme une marque de fabrique de la sociologie dite "pragmatique" . Nous montrerons qu’une telle démarche structurale, pourrait conduire à établir des analogies indues entre des situations historiques incommensurables, et aboutir à de sérieux contre-sens, susceptibles d’alimenter de fâcheuses conséquences politiques.