Le crépuscule des idoles
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À propos de ce livre électronique
Friedrich Nietzsche
Friedrich Nietzsche was a German philosopher and author. Born into a line of Protestant churchman, Nietzsche studied Classical literature and language before becoming a professor at the University of Basel in Switzerland. He became a philosopher after reading Schopenhauer, who suggested that God does not exist, and that life is filled with pain and suffering. Nietzsche’s first work of prominence was The Birth of Tragedy in 1872, which contained new theories regarding the origins of classical Greek culture. From 1883 to 1885 Nietzsche composed his most famous work, Thus Spake Zarathustra, in which he famously proclaimed that “God is dead.” He went on to release several more notable works including Beyond Good and Evil and The Genealogy of Morals, both of which dealt with the origins of moral values. Nietzsche suffered a nervous breakdown in 1889 and passed away in 1900, but not before giving us his most famous quote, “From life's school of war: what does not kill me makes me stronger.”
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Aperçu du livre
Le crépuscule des idoles - Friedrich Nietzsche
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Copyright © 2013 / FV Éditions
Photographie de la Couverture :G. Schultze.
Traduction : H. Albert
ISBN 978-2-36668-537-4
Tous Droits Réservés
LE CRÉPUSCULE
DES IDOLES
OU
COMMENT ON PHILOSOPHE AU MARTEAU
par
Frédéric Nietzsche
(Traduit par Henri Albert, 1908)
Photographie de Nietzsche prise en 1882
par G. Schultze.
AVANT-PROPOS
Conserver sa sérénité au milieu d’une cause sombre et justifiable au-delà de toute mesure, ce n’est certes pas un petit tour d’adresse : et pourtant qu’y aurait-il de plus nécessaire que la sérénité ? Nulle chose ne réussit à moins que la pétulance n’y ait sa part. Un excédent de force ne fait que prouver la force. — Une Transmutation de toutes les valeurs, ce point d’interrogation si noir, si énorme, qu’il jette des ombres sur celui qui le pose, — une telle destinée dans une tâche nous force à chaque instant de courir au soleil, de secouer un sérieux qui s’est mis à trop nous peser. Tout moyen y est bon, tout « événement » est le bienvenu. Avant tout la guerre. La guerre fut toujours la grande prudence de tous les esprits qui se sont trop concentrés, de tous les esprits devenus trop profonds ; il y a de la force de guérir même dans la blessure. Depuis longtemps une sentence dont je cache l’origine à la curiosité savante a été ma devise
Increscunt animi, virescit volnere virtus.
Un autre moyen de guérison que je préfère encore le cas échéant, consisterait à surprendre les idoles... Il y a plus d’idoles que de réalités dans le monde : c’est là mon « mauvais œil » pour ce monde, c’est là aussi ma « mauvaise oreille »... Poser ici des questions avec le marteau et entendre peut-être comme réponse ce fameux son creux qui parle d’entrailles gonflées — quel ravissement pour quelqu’un qui, derrière les oreilles, possède d’autres oreilles encore, — pour moi, vieux psychologue et attrapeur de rats qui arrive à faire parler ce qui justement voudrait rester muet...
Cet écrit lui aussi — le titre le révèle — est avant tout un délassement, une tache de lumière, un bond à côté dans l’oisiveté d’un psychologue. Peut-être est-ce aussi une guerre nouvelle ? Et peut-être y surprend-on les secrets de nouvelles idoles ?... Ce petit écrit est une grande déclaration de guerre ; et pour ce qui en est de surprendre les secrets des idoles, cette fois-ci ce ne sont pas des dieux à la mode, mais des idoles éternelles que l’on touche ici du marteau comme on ferait d’un diapason, — il n’y a, en dernière analyse, pas d’idoles plus anciennes, plus convaincues, plus boursouflées... Il n’y en a pas non plus de plus creuses. Cela n’empêche pas que ce soient celles en qui l’on croit le plus ; aussi, même dans les cas les plus nobles, ne les appelle-t-on nullement des idoles...
Turin, le 30 septembre 1888,
le jour où fut achevé le premier livre de
La Transmutation de toutes les valeurs.
Frédéric Nietzsche
.
MAXIMES ET POINTES
1.
La paresse est mère de toute psychologie. Comment ? la psychologie serait-elle un... vice ?
2.
Le plus courageux d’entre nous n’a que rarement le courage d’affirmer ce qu’il sait véritablement...
3.
Pour vivre seul il faut être une bête ou bien un dieu — dit Aristote. Il manque le troisième cas : il faut être l’un et l’autre, il faut être — philosophe...
4.
« Toute vérité est simple. » — N’est-ce pas là un double mensonge ? —
5.
Une fois pour toutes, il y a beaucoup de choses que je ne veux point savoir. — La sagesse trace des limites, même à la connaissance.
6.
C’est dans ce que votre nature a de sauvage que vous vous rétablissez le mieux de votre perversité, je veux dire de votre spiritualité...
7.
Comment ? l’homme ne serait-il qu’une méprise de Dieu ? Ou bien Dieu ne serait-il qu’une méprise de l’homme ? —
8.
À l’école de guerre de la vie. — Ce qui ne me fait pas mourir me rend plus fort.
9.
Aide-toi, toi-même : alors tout le monde t’aidera. Principe de l’amour du prochain.
10.
Ne commettez point de lâcheté à l’égard de vos actions ! Ne les laissez pas en plan après coup ! — Le remords de conscience est indécent.
11.
Un âne peut-il être tragique ? — Périr sous un fardeau que l’on ne peut ni porter ni rejeter ?... Le cas du philosophe.
12.
Si l’on possède son pourquoi ? de la vie, on s’accommode de presque tous les comment ? — L’homme n’aspire pas au bonheur ; il n’y a que l’Anglais qui fait cela.
13.
L’homme a créé la femme — avec quoi donc ? Avec une côte de son dieu, — de son « Idéal »...
14.
Comment ? Tu cherches ? Tu voudrais te décupler ? Te centupler ? Tu cherches des adhérents ? — Cherche des zéros ! —
15.
Les hommes posthumes — moi, par exemple — sont moins bien compris que ceux qui sont conformes à leur époque, mais on les entend mieux. Pour m’exprimer plus exactement encore : on ne nous comprend jamais — et c’est de là que vient notre autorité...
16.
Entre femmes. — « La vérité ? Oh ! vous ne connaissez pas la vérité ! N’est-elle pas un attentat contre notre pudeur ? » —
17.
Voilà un artiste comme je les aime. Il est modeste dans ses besoins : il ne demande, en somme, que deux choses : son pain et son art, — panem etCircen...
18.
Celui qui ne sait pas mettre sa volonté dans les choses veut du moins leur donner un sens : ce qui le fait croire qu’il y a déjà une volonté en elles (Principe de la « foi »).
19.
Comment ? vous avez choisi la vertu et l’élévation du cœur et en même temps vous jetez un regard jaloux sur les avantages des indiscrets ? — Mais avec la vertu on renonce aux « avantages »... (à écrire sur la porte d’un antisémite).
20.
La femme parfaite commet de la littérature, de même qu’elle commet un petit péché : pour essayer, en passant, et en tournant la tête pour voir si quelqu’un s’en aperçoit, et afin que quelqu’un s’en aperçoive...
21.
Il ne faut se mettre que dans les situations où il n’est pas permis d’avoir de fausses vertus, mais où, tel le danseur sur la corde, on tombe ou bien on se dresse, — ou bien encore on s’en tire...
22.
« Les hommes méchants n’ont point de chants. » D’où vient que les Russes aient des chants ?
23.
« L’esprit allemand » : depuis dix-huit ans une contradictio in adjecto.
24.
À force de vouloir rechercher les origines on devient écrevisse. L’historien voit en arrière ; il finit par croire en arrière.
25.
La satisfaction garantit même des refroidissements. Une femme qui se savait bien vêtue s’est-elle jamais enrhumée ? — Je pose le cas où elle aurait été à peine vêtue.
26.
Je me méfie de tous les gens à systèmes et je les évite. La volonté du système est un manque de loyauté.
27.
On dit que la femme est profonde — pourquoi ? puisque chez elle on n’arrive jamais jusqu’au fond. La femme n’est pas même encore plate.
28.
Quand la femme a des vertus masculines, c’est à ne plus y tenir ; quand elle n’a point de vertus masculines, c’est elle qui n’y tient pas, elle qui se sauve.
29.
« Combien la conscience avait à ronger autrefois ! quelles bonnes dents elle avait ! — Et maintenant ? qu’est-ce qui lui manque ? » — Question d’un dentiste.
30.
On commet rarement une seule imprudence. Avec la première imprudence on en fait toujours de trop, et c’est pourquoi on en fait généralement une seconde — et maintenant, c’est trop peu...
31.
Le ver se recoquille quand on marche dessus. Cela est plein de sagesse. Par là il amoindrit la chance de se faire de nouveau marcher dessus. Dans le langage de la morale : l’humilité. —
32.
Il y a une haine contre le mensonge et la dissimulation qui vient d’une sensibilité du point d’honneur ; il y a une haine semblable par lâcheté, puisque le mensonge est interdit par la loi divine. Être trop lâche pour mentir...
33.
Combien peu de chose il faut pour le bonheur ! Le son d’une cornemuse. — Sans musique la vie serait une erreur. L’Allemand se figure Dieu lui-même en train de chanter des chants.
34.
On ne peut penser et écrire qu’assis (G. Flaubert). Je te tiens là, nihiliste ! Rester assis, c’est là précisément le péché contre le Saint-Esprit. Seules les pensées qui vous viennent en marchant ont de la valeur.
35.
Il y a des cas où nous sommes comme les chevaux, nous autres psychologues. Nous sommes pris d’inquiétude parce que nous voyons notre propre ombre se balancer devant nous. Le psychologue doit se détourner de soi, pour être capable de voir.
36.
Faisons-nous tort à la vertu, nous autres immoralistes ? — Tout aussi peu que les anarchistes aux princes. Ce n’est que depuis qu’on leur tire de nouveau dessus qu’ils sont solidement assis sur leurs trônes. Morale : il faut tirer sur la morale.
37.
Tu cours devant les autres ? — Fais-tu cela comme berger ou bien comme exception ? Un troisième cas serait le déserteur... Premier cas de conscience.
38.
Es-tu vrai ? ou n’es-tu qu’un comédien ? Es-tu un représentant ? ou bien es-tu toi-même la chose qu’on représente ? En fin de compte tu n’es peut-être que l’imitation d’un comédien... Deuxième cas de conscience.
39.
Le désillusionné parle. — J’ai cherché des grands hommes et je n’ai toujours