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On n'est pas des boeufs
On n'est pas des boeufs
On n'est pas des boeufs
Livre électronique164 pages1 heure

On n'est pas des boeufs

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À propos de ce livre électronique

Ce fut moins de la stupeur que du vertige qui s'empara de mes sens quand l'hôtelier me remit ma petite note.

Puis, le sang-froid me revint :

- Cet imbécile, pensai-je, se trompe de facture et me donne celle d'une nombreuse famille installée chez lui depuis fort longtemps.

Mais, non ! pas du tout, c'était bien ma petite note.

Comment diable, en deux jours, dans cet hôtel de troisième ordre, en pleine morte-saison, sans avoir fait l'ombre d'une petite fête, avions-nous pu, à deux, dépenser plus de cent francs.
LangueFrançais
Date de sortie26 sept. 2018
ISBN9782322162215
On n'est pas des boeufs
Auteur

Alphonse Allais

Alphonse Allais est le cadet d'une fratrie de cinq enfants, de Charles Auguste Allais (1825-1895), pharmacien, 6, place de la Grande-Fontaine de Honfleur (aujourd'hui place Hamelin) et d'Alphonsine Vivien (1830-1927). Jusqu'à l'âge de trois ans, il ne prononce pas un mot, sa famille le croyait muet6. À l'école, il semble plutôt se destiner à une carrière scientifique : il passe à seize ans son baccalauréat en sciences. Recalé à cause des oraux d'histoire et de géographie, il est finalement reçu l'année suivante. Il devient alors stagiaire dans la pharmacie de son père qui ambitionne pour lui une succession tranquille, mais qui goûte peu ses expériences et ses faux médicaments et l'envoie étudier à Paris. En fait d'études, Alphonse préfère passer son temps aux terrasses des cafés ou dans le jardin du Luxembourg, et ne se présente pas à l'un des examens de l'école de pharmacie. Son père, s'apercevant que les fréquentations extra-estudiantines de son fils ont pris le pas sur ses études, décide de lui couper les vivres.

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    Aperçu du livre

    On n'est pas des boeufs - Alphonse Allais

    On n'est pas des boeufs

    Pages de titre

    Un excellent truc

    Utilité à Paris

    Le bouchon

    Ingéniosité

    Divertissement de table d’hôte

    La Côte Ouest d’Afrique

    Tonton dans le monde

    Chromopathie

    Les ballons horo-captifs

    Jugement sévère

    Les culs-de-jatte militaires

    Véritable révolution dans la mousqueterie française

    Une nouvelle décoration

    L’aventure de l’homme-orchestre

    La barbe

    Décentralisation

    Automobilofumisme

    Dressage

    Le premier parapluie de M. Francisque Sarcey

    Les misères de la vie conjugale

    Titre

    Un homme modeste

    Comme le prince

    Trois étranges types

    L’inattendue fortune

    Patriotisme

    Une infâme calomnie du Petit Journal

    Irrévérence

    L’or mussif

    Une curieuse industrie physiologique

    Une maison prolifique

    Un saint clou pour l’Exposition de 1900

    Un miracle indiscutable

    Un pèlerinage

    Anecdote inédite sur M. Jules Lemaître

    Supériorité de la vie américaine sur la nôtre

    L’engraisseur

    Le pauvre rémouleur rendu à la santé

    La langue et l’armée françaises

    Titre - 1

    Où l’ivrognerie mène les lapins

    Une affaire de tout premier ordre

    Le méticuleux vieillard

    Légitime revendication

    Page de copyright

    Alphonse Allais

    On n’est pas des bœufs

    Édition de référence :

    Paris, Paul Ollendorff, 1896.

    Un excellent truc

    Ce fut moins de la stupeur que du vertige qui s’empara de mes sens quand l’hôtelier me remit ma petite note.

    Puis, le sang-froid me revint :

    – Cet imbécile, pensai-je, se trompe de facture et me donne celle d’une nombreuse famille installée chez lui depuis fort longtemps.

    Mais, non ! pas du tout, c’était bien ma petite note.

    Comment diable, en deux jours, dans cet hôtel de troisième ordre, en pleine morte-saison, sans avoir fait l’ombre d’une petite fête, avions-nous pu, à deux, dépenser plus de cent francs.

    Alors, j’épluchai mon compte, et, de nouveau, le vertige étreignit mon crâne.

    – Pardon, monsieur l’hôtelier, commençai-je, vous nous comptez quatre jours de présence en votre établissement, alors que nous n’y demeurâmes même pas trois jours, puisque, arrivés lundi soir, à l’heure du coucher, nous filons aujourd’hui jeudi dès le matin.

    – Lundi, mardi, mercredi et jeudi, ça fait quatre jours.

    – Vous n’avez pas, pourtant, la prétention de nous compter la journée de lundi, où nous passâmes vingt minutes chez vous, ni celle d’aujourd’hui jeudi, que nous inaugurons à peine.

    – C’est une habitude de la maison, monsieur, toute journée commencée est due intégralement.

    – Alors, c’est différent... Mais, m’expliquerez-vous pourquoi vous nous comptez deux francs d’éclairage électrique par jour ?

    – Nous comptons un franc de lumière électrique par personne et par jour !

    – Mais, nom d’un chien, nous n’avons même pas aperçu le bout de la queue de votre électricité !

    – L’électricité ne marche pas en ce moment, mais je vous ferai remarquer que vous n’en avez aucunement souffert, puisqu’on vous a donné la bougie à la place.

    – On nous a donné... on nous a donné... vous en parlez à votre aise, car vous nous la comptez fichtre bien sur mon mémoire, votre bougie !

    – Bien sûr que je vous la compte ! Si vous croyez qu’on m’en fait cadeau à moi, de la bougie !

    – Alors, si vous nous comptez la bougie, ne nous comptez pas l’électricité !

    – Impossible, monsieur, l’électricité c’est dans la dépense ordinaire, la bougie c’est de l’extra.

    – Et cette fourniture de papeterie, 1 fr. ? Nous n’avons rien écrit chez vous.

    – Vous, non. Mais on a écrit pour vous chaque jour.

    – Qui ça ?

    – Nous, à l’hôtel. Le soir que vous êtes arrivés, on vous a remis du papier, une plume, de l’encre, pour écrire votre état-civil. Chaque jour, à chaque repas on vous a donné un menu. C’est de la papeterie, ça !... Et encore maintenant, cette note que je vous remets, c’est encore de la papeterie !

    Qu’auriez-vous répondu à cet homme ?

    Je renonçai à poursuivre une discussion où j’étais battu d’avance.

    Cependant, je crus devoir m’en tirer par l’ironie ; mais mon ironie glissa sur l’âme de cet industriel, sans plus l’incommoder que le ferait un bouchon de liège jeté par une petite fille sur la peau de l’hippopotame du Jardin zoologique d’Anvers.

    J’arborai mon air le plus sardonique.

    – Il n’y a qu’une chose que vous avez oublié de compter sur votre note : ce sont les punaises !

    – Ah ! vraiment ! Vous avez eu des punaises ?

    – Des tas !

    – C’est très curieux, ce que vous me dites là !... Nous essayons souvent de les chasser ; quelquefois nous réussissons, mais toujours elles reviennent, les satanées petites bêtes !

    – Ah ! elles reviennent ?

    – Infailliblement !

    – Eh bien ! voulez-vous que je vous donne un truc pour qu’elles ne reviennent pas ?

    – Très volontiers !

    – Voici : la prochaine fois que vous les apercevrez, montrez-leur une note dans le genre de celle-là, et je vous f... mon billet qu’elles ne reficheront jamais les pieds chez vous.

    Je sortis le cœur un peu soulagé.

    Utilité à Paris

    du Bottin des départements

    Vraiment, j’avais beau chercher au plus creux de mes souvenirs, il m’était impossible de me rappeler le monsieur qui me tendait si cordialement la main.

    Ou plutôt, je me le rappelais vaguement, comme un monsieur qu’on peut avoir vu quelque part, mais où ? mais quand ? mais dans quelles circonstances ?

    – Chacun son tour, alors, fit-il d’un ton enjoué. Il y a quelques années, c’est vous qui m’avez reconnu ; aujourd’hui, c’est moi !

    – Monsieur Ernest Duval-Housset, de Tréville-sur-Meuse.

    Je jouai la confusion, la honte d’un tel oubli ! Comment avais-je pu ne point me rappeler la physionomie de M. Ernest Duval-Housset que j’avais connu à Tréville-sur-Meuse, puis revu dans la suite à Paris ?...

    Notez que, de ma vie, je n’ai mis les pieds à Tréville !

    Cette histoire-là est toute une histoire !

    Il y a quelques années, mon ami George Auriol et moi, nous arrêtâmes un jour à la terrasse du café d’Harcourt, et nous installâmes à une table voisine de celle où un monsieur buvait un bock.

    Comme il faisait très chaud, le monsieur avait déposé, sur une chaise, son chapeau, au fond duquel mon ami George Auriol put apercevoir le nom et l’adresse du chapelier : P. Savigny, rue de la Halle, à Tréville-sur-Meuse.

    Avec ce sérieux qu’il réserve exclusivement pour les entreprises de ce genre, Auriol fixa notre voisin ; puis, très poliment :

    – Pardon, monsieur, est-ce que vous ne seriez pas de Tréville-sur-Meuse ?

    – Parfaitement ! répondit le monsieur, cherchant lui-même à se remémorer le souvenir d’Auriol.

    – Ah ! reprit ce dernier, j’étais bien sûr de ne pas me tromper. Je vais souvent à Tréville... J’y ai même un de mes bons amis que vous connaissez peut-être, un nommé Savigny, chapelier dans la rue de la Halle.

    – Si je connais Savigny ! Mais je ne connais que lui !... Tenez, c’est lui qui m’a vendu ce chapeau-là.

    – Ah ! vraiment ?

    – Si je connais Savigny !... Nous nous sommes connus tout gosses, nous avons été à la même école ensemble. Je l’appelle Paul, lui m’appelle Ernest.

    Et voilà Auriol parti avec l’autre dans des conversations sans fin, sur Tréville-sur-Meuse, localité dont mon ami George Auriol ignorait jusqu’au nom, il y a cinq minutes.

    Mais moi, un peu jaloux des lauriers de mon camarade, je résolus de corser sa petite blague et de le faire pâlir d’envie.

    Un rapide coup d’œil au fond du fameux chapeau me révéla les initiales : E.D.-H.

    Deux minutes passées vers le Bottin du d’Harcourt me suffirent à connaître le nom complet du sieur E.D.-H.

    Entrepositaires : Duval-Housset (Ernest), etc.

    D’un air très calme, je revins m’asseoir et fixant à mon tour l’homme de Tréville :

    – Excusez-moi si je me trompe, monsieur, mais ne seriez-vous pas M. Duval-Housset, entrepositaire ?

    – Parfaitement, monsieur, Ernest Duval-Housset, pour vous servir.

    Certes, M. Duval-Housset était épaté de se voir reconnu par deux lascars qu’il n’avait jamais rencontrés de son existence, mais c’est surtout la stupeur d’Auriol qui tenait de la frénésie :

    Par quel sortilège avais-je pu deviner le nom et la profession de ce négociant en spiritueux ?

    J’ajoutai :

    – C’est toujours le père Roux qui est maire de Tréville ? (J’avais à la hâte lu dans le Bottin cette mention : – Maire : M. le docteur Roux père.)

    – Hélas ! non. Nous avons enterré le pauvre cher homme, il y a trois mois.

    – Tiens, tiens, tiens ! C’était un bien brave homme, et, par-dessus le marché, un excellent médecin. Quand je tombai si gravement malade à Tréville, il me soigna et me remit sur pied en moins de quinze jours.

    – On ne le remplacera pas de sitôt, cet homme-là !

    Auriol avait fini, tout de même, par éventer mon stratagème.

    Lui aussi s’absenta, revint bientôt, et notre conversation continua à rouler sur Tréville-sur-Meuse et ses habitants.

    Duval-Housset n’en croyait plus ses oreilles.

    – Nom d’un chien ! s’écria-t-il. Vous connaissez les gens de Tréville mieux que moi qui y suis né et qui l’habite depuis quarante-cinq ans !

    Et nous continuions :

    – Et Jobert, le coutelier, comment va-t-il ? Et Durandeau, est-il toujours vétérinaire ? Et la veuve Lebedel ? Est-ce toujours elle qui tient l’hôtel de la Poste ? etc., etc.

    Bref, les deux feuilles du Bottin concernant Tréville y passèrent. (Auriol, moderne vandale, les avait obtenues d’un délicat coup de canif et, très généreusement, m’en avait passé une.)

    Duval-Housset, enchanté, nous payait des bocks – oh ! bien vite absorbés ! – car il faisait chaud (l’ai-je dit plus haut ?) et rien n’altère comme de parler d’un pays qu’on n’a jamais vu.

    La petite fête se termina par un excellent dîner que Duval-Housset tint absolument à nous offrir.

    On porta la santé de tous les compatriotes de notre nouvel ami, et, le soir, vers minuit, si quelqu’un avait voulu nous prétendre,

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