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Pahad David Sur Berechit

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PAHAD DAVID

Exposs et commentaires sur les sections hebdomadaire de la Torah de


(Petit-fils du Saint et Vnr Rabbi Ham Pinto Zatsal)

Rabbi David Hanania Pinto

Brchit

Paris 26 Elloul 5763

Cet ouvrage est ddi : Mon trs vnr pre Rabbi Moch Aharon Pinto, zatsal, que son mrite nous protge. Ma trs chre mre Mazal Tov, Tihi. Que lEternel lui accorde longue vie, sant et quelle soit comble de bonheur et de satisfaction de tous ses enfants et petits enfants. Amen! Ma trs chre pouse, Tihi; sans elle, je ne serais pas arriv jusquel. Que lEternel lui accorde longue vie, sant et quelle soit comble de bonheur et de satisfaction de tous ses enfants. Amen! Mes enfants, Chyihyou. Que l'Eternel leur accorde la progression dans la Torah et dans la Crainte du Ciel. Amen! Mon cher fils Raphal, Chyihi et son pouse, Ti'hi. Que l'Eternel leur accorde des enfants, la progression dans la Torah et dans la Crainte du Ciel. Amen! Jexprime ici ma plus vive reconnaissance tous ceux qui dploient leurs efforts pour renforcer nos institutions cres au nom de mes illustres anctres, en Isral et ltranger, et contribuer la publication de ce livre. Comme ils sont nombreux, Dieu merci, je ne saurais publier leurs noms, de peur den oublier un seul. Quils sachent cependant tous, quils portent le nom dassocis part entire lpanouissement de nos institutions. Que le mrite de mes illustres anctres les protge tous dans le domaine matriel comme dans le domaine spirituel; quils soient combls de bonheur, eux et leurs enfants, tout au long de leur vie. Amen.

Ce livre a t publi la mmoire des Tsadikim Rabbi Mir Pinto zatsal et Rabbi Raphal Pinto Zatsal. Et la mmoire de Rabbi Yihia ben Esther Harfi, zal, et son pouse Julie Mamah, bat Zhira, zal. Shelomo Teboul, zal. Ichoua Teboul, zal. Albert Teboul, zal. Shimon Teboul, zal. Yaacov Teboul, zal. Hnani Azoulay-Cohen, zal. Elie Harfi, zal. Mardoch Harfi, zal. La Harfi Dray, zal. A la mmoire bnie de mon grand-pre maternel Rabbi Aharon Elkeslassy, zal, et de ma grand-mre Simha Elkeslassy, zal. A la mmoire de Rabbi Aaron Yaacov Ben Rabbi Elizer Kornwasser, zal A la mmoire de Victoria Hazan Bat Leila, zal

Institutions et Collelim au nom de lillustre Rabbi Ham Pinto zatsal : ACHDOD, jrusalem, PARIS, LYON, MONTRAL, Toronto, MANCHESTER prsids par Rabbi David Hanania Pinto fils du grand Rabbi Moch Aharon Pinto zatsal

YECHIVAH PINTO

Bien Chers Amis, Je tiens essentiellement remercier toutes les pesonnes qui mont aid financirement publier la srie de livres Pahad David (Commentaires sur la Torah en Hbreu), Brchith, Chmoth et Vayikra, ainsi que leur traduction en franais. Afin que mes bndictions produisent un effet bnfique, je me garderai bien de ne citer aucun nom, mais chaucun se reconnatra aisment dans ces quelques lignes. Par ailleurs, mes remerciements et bndictions vont en direction des personnes qui mont galement aid en contribuant au financement de la gestion des collelim et des lves qui tudient la Torah au sein de chacun deux. Je ne saurai aussi oublier les personnes qui mont aid construire les Centres de Torah Yismah Moch et Hvrat Pinto travers le monde, construire de mikvaoth, acqurir des Sifr Torah pour les acheminer vers des communauts qui en sont hlas totalement dpourvues. Mes penses vont aussi vers les personnes qui mont permis de doter des jeunes maris, daider financirement les malades dsirant obtenir certains biens spcifiques, de secourir les ncessiteux en toutes circonstances et particulirement lapproche des ftes religieuses. Et pour que nul nen ignore, pour savrer quitte vis vis de Dieu... et du Peuple dIsral de toutes sortes de guzel (intentions frauduleuses) je dclare de faon solennelle, et en mon me et conscience, que la Tsdakah remise par des fidles a t normalement distribue des tiers et dans le cas dune Tsdakah qui se serait rvle suprieure aux besoins valus, le trop peru est revers dautres tiers sous ma seule responsabilit, la dcision mincombant personnellement. Avant de clore mon courrier, je remercie nouveau tous ceux qui, de prs ou de loin, contribuent lallgement des charges qui sont les miennes et les bnis: Que le mrite de Rabbi Ham Pinto les protge. David Hanania Pinto Ce livre est ddi la russite des Amis de la Famille PINTO ainsi que leurs familles respectives, Que le mrite de Rabbi Ham Pinto les protge, Amen.

SOMMAIRE
Introduction de lauteur .............................................................................................. 13

brchit..............................................................................15
La Torah, le Saint Bni-Soit-Il, et Isral. .................................................................... 15 La croyance en D. et lobservance des commandements............................................ 19 La terre dIsral est rserve au peuple juif................................................................ 22 La Torah et Isral, finalit de la cration du monde . ................................................. 25 Le sens cach et le sens rvl de la Torah. ................................................................. 28 La Torah et Isral, base de lexistence du monde. ...................................................... 30 Le renouvellement de luvre de la cration; Un acte de bienveillance..................... 34 La foi se renouvelle avec le renouveau de la cration. .............................................. 36 LHomme fut cr la ressemblance de D.................................................................. 40 La rcompense rserve aux Justes dans le monde venir......................................... 42 La fin de la Torah trouve sa source son dbut.......................................................... 43 La grandeur de lHomme et sa raison dtre. ............................................................. 47 Lamour de D. pour lhomme cr Son image. ........................................................ 50 Le lien entre lHomme et son Crateur. ...................................................................... 53 Adam et Hava, le pouvoir de la prire et des bonnes actions.................................... 57 Ton Crateur Sest rjoui de ton bonheur au Jardin dEden!..................................... 60 La faute de lHomme, une punition pour les gnrations venir............................... 63 La dtrioration de la lumire primordiale................................................................. 68 Le mauvais il, cause de la faute et sa rparation. .................................................... 70 La domination de lhomme sur le monde - Un privilge et non un vol ...................... 72 Consquence de la faute du premier Homme ............................................................. 74 Havel par rapport Can ou la conduite des gnration dans le service de D-ieu.... 77 Le pouvoir de la vue et la saintet des yeux ............................................................... 82 O rside la saintet? Dans les yeux........................................................................... 84 Le crime de Can et lintgrit de Havel . ................................................................... 87 La qualit dhumilit. .................................................................................................. 89 Tenir parole.................................................................................................................. 91

Noah......................................................................................96
Les engendrements des Justes, Leurs bonnes actions et celles de leurs descendants .96 L'influence du Juste en ce monde et dans l'autre ...................................................... 100 De limportance du soutien spirituel autrui .......................................................... 102 Du devoir dexcuter les commandements de faon dsintresse .......................... 105 La paix, rceptacle de toutes les bndictions . ....................................................... 106

lekh lekha....................................................................... 111


Quitte ton pays pour ton propre bien..........................................................................111 La Torah et le repentir protgent et sauvent ..............................................................113

Pahad David La foi et llvation dme permettent de surmonter les preuves ............................115 ..........................................................................117 La rcompense se mesure la peine. Lpreuve de la richesse............................................................................................ 121 Quand le mauvais penchant croit en une rcompense . ............................................ 123 De limportance de la pratique des commandements positifs.................................. 127 Lattrait des richesses, un des empchements servir D.......................................... 129 Largent dtourne de la vie spirituelle. ..................................................................... 132 Les actes des pres sont un exemple pour leurs enfants............................................ 134 Combien grandes sont Tes bonts.............................................................................. 137 De lhritage de la Terre dIsral et de la survie en exil........................................... 140 De lpreuve comme test de perfection dans le service de D.................................... 144 De lesclavage la libert et la rdemption . ........................................................ 146 Lesprit, le cur et lme, richesses essentielles de lhomme................................... 148 LEternel, Homme de guerre................................................................................. 151 Le devoir de lhomme: marche dans Mes voies et sois parfait. ............................ 153 Avraham proclame la souverainet de D. dans le monde. ........................................ 157 Lhospitalit, commandement et vertu....................................................................... 161 Ou bien un compagnon dtude, ou bien la mort...................................................... 163 Lhomme parfait. ....................................................................................................... 167 Lhospitalit dAvraham, exemple pour ses enfants.................................................. 170 Le secret de D. est rserv ceux qui Le craignent - La saintet du signe de .............................................................................................................. 172 lAlliance. Veiller la saintet du signe de lAlliance, source de perfection.............................. 175 Lamour du prochain et la connaissance de la Torah confrent son pouvoir la bndiction................................................................................................................... 177 Accueillir des htes sous les ailes de la protection divine. ....................................... 182 Escorter les htes leur dpart est plus important que les accueillir...................... 183 La force du mrite des Patriarches............................................................................ 184 Enseigner son prochain pour le rendre mritant.................................................... 189 Ceux qui prient ne restent pas les mains vides.......................................................... 190 Le pouvoir du repentir et de labngation................................................................. 193 La foi en D., source des bndictions........................................................................ 194 Le comble de la perfection, tre pur et sans trace de pch. .................................... 196 Le repentir et les vertus forment cran contre le malheur. ....................................... 198 La raillerie et la frivolit engendrent les transgressions........................................... 202 Surmonter les preuves conduit au comble de la perfection..................................... 204 Heureuse lenfance qui ne fait pas honte la vieillesse ....................................... 207 Savoir que la vie nest quune rsidence temporaire aide au repentir...................... 209 La sympathie et lamour du prochain, issues de ltude de la Torah........................ 212

vayrah..............................................................................161

hay sarah........................................................................207

Lamour de Sarah pour tous...................................................................................... 214 Lenracinement du mauvais penchant - le pch est tapi sur le seuil .................. 216 La bndiction de D. Avraham est valable pour tous les temps............................. 218 Nos dfauts nous loignent de D............................................................................... 219 Lducation des enfants dpend des parents. ............................................................ 221 Le meilleur de lducation des enfants...................................................................... 224 La vie ternelle face la vie temporelle.................................................................... 228 Le monde Venir....................................................................................................... 231 Yaakov et Essav: La vente du droit danesse. ......................................................... 233 tre lan est une preuve dans le service de D....................................................... 235 Tu mditeras la loi jour et nuit.................................................................................. 239 La lutte contre le mauvais penchant.......................................................................... 241 ........................................................................................ 244 Le pouvoir du libre arbitre. Lamour de D. pour Isral......................................................................................... 247 Lintgrit de nos Patriarches................................................................................... 249 D. Se dtourne de ceux qui se dtournent de la Torah.............................................. 251 Sil le mrite, son travail sera fait par dautres. ....................................................... 254 ............................................................................. 256 Le repentir est en soi une preuve. La Torah, une eau vive pour lhomme....................................................................... 258 La vrit et la Torah, raison dtre de la cration..................................................... 261 Les enfants sont la couronne des parents.................................................................. 262 La connaissance de la vrit et la perfection............................................................ 266 Essav, prototype du mal............................................................................................. 268 Lorgueil exclut lhomme du monde.......................................................................... 270 Repens-toi un jour avant de mourir........................................................................... 274 La voix est la voix de Yaakov et les mains sont les mains dEssav. ......................... 274 Yaakov sera le chef de ses frres, Essav vivra la pointe de lpe....................... 276 Yaakov et Essav, la saintet face limpuret.......................................................... 279 Ltude de la Torah protge Isral. ........................................................................... 284 La haine dEssav - Sloigner dun mauvais voisin.................................................. 285 Lessentiel nest pas dtudier, mais dagir............................................................... 287 Lpreuve dans lobservance et ltude de la Torah.................................................. 289 Lpreuve, purification du corps et de lme............................................................. 292 La Torah et la prire protgent et sauvent................................................................. 294 Le Temple, source de prosprit pour Isral............................................................. 296 Progresser dans le service de D. tape par tape. .................................................... 297 Deuxime volet. ......................................................................................................... 299 Troisime Volet. ......................................................................................................... 300 Lassiduit dans ltude de la Torah procure une lvation personnelle.................. 301

toldot................................................................................221

Vayetseh............................................................................287

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Pahad David Isral, brebis errante parmi soixante-dix nations. .................................................... 303 Lesprit de sacrifice en lhonneur de D..................................................................... 305 ...................................................................................... 308 La Torah est un lixir de vie. Les Justes vivent une vie de Torah............................................................................. 310 Importance dhabiter dans une rsidence de Torah.................................................. 312 Un mauvais entourage dtourne du service de D.. ................................................... 315 Lhonneur de la Torah na pas de limite. .................................................................. 319 Le vtement de la Torah, cran contre les tentations................................................ 321 Qui est brave ? Celui qui sait vaincre son mauvais penchant................................... 324 La vertu des Matriarches, un exemple damour du prochain.................................... 325 Le mrite des Matriarches......................................................................................... 327

Vayichlah..........................................................................331
Le bon penchant doit toujours surmonter le mauvais penchant................................ 331 Yaakov et Essav: le bien contre le mal..................................................................... 332 Les stratagmes de la guerre contre le mauvais penchant........................................ 336 Lhumilit, cran contre lorgueil.............................................................................. 339 Limportance dun commandement mineur.............................................................. 342 La richesse et les biens matriels servent llvation spirituelle. .......................... 345 La rigueur de la justice divine................................................................................... 349 Le compte des hommes devant D............................................................................... 352 Les secrets appartiennent D.. ................................................................................. 357

Vaychev. ..........................................................................360
La Torah et lamour du prochain, correction de lexil dEgypte. ............................. 360 Les 613 commandements se pratiquent dans la peine en exil................................... 362 Yaakov et Yossef sefforcent doprer la correction de lexil................................... 365 Les preuves et la crainte de D.. ............................................................................... 367 Ltude de la Torah en exil........................................................................................ 371 La tranquillit et loisivet empchent ltude de la Torah....................................... 373 Lexil et llvation dans le service de D.. ................................................................ 375 Le repentir par amour de D....................................................................................... 377 Labandon de la Torah, cause de la destruction du Temple et de lexil.................... 380 La Torah et la bienfaisance prservent du mauvais penchant. ................................. 382 Limage de Yaakov sauve de la faute. ...................................................................... 385 La confiance en D...................................................................................................... 388

Mikets.................................................................................391
Les enfants de Yaakov furent conus en toute puret............................................... 391 La lutte contre le mauvais penchant, une responsabilit collective.......................... 393 Ton serviteur sest port garant de lenfant. ............................................................. 397

vayigach............................................................................399

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Lacquisition de la Torah par lunion du corps et de lme...................................... 399 Yossef se dvoile une remontrance pour toutes les gnrations................................ 402 La connaissance de D., source de toutes les bndictions........................................ 407 La peur du jugement et du chtiment. ....................................................................... 413 La vertu de Yossef (et des Patriarches). .................................................................... 416 Largent vol nest daucun profit. ............................................................................ 419 Lhumilit et laveu de nos fautes mritent louange.................................................. 420 Kriat Chma Lamour de D. et lamour dIsral. ..................................................... 423 La peine de Yaakov Il nest de vie que la Torah....................................................... 427

Vayhi..................................................................................430
Isral est sauv grce au mrite de la Torah............................................................. 430 La remontrance prcde la venue du Messie............................................................. 432 La saintet de Yossef protge Yaakov et tous les Enfants dIsral........................... 437 Lamour dIsral amne la rdemption..................................................................... 439 La division aggrave lexil lunion permet la rdemption.......................................... 441 Lunion, la solidarit et lamour fraternel rapprochent le temps de la rdemption. 445 Le repos du corps et de lme dans ltude de la Torah............................................ 448

APPENDICES.......................................................................450
Section Brchith....................................................................................................... 450 Le livre de la foi et de la confiance en D................................................................... 450 Comme leau adhre au visage, lhomme adhre D............................................... 450 Lhomme vertueux a une bonne influence sur son entourage. .................................. 450 Limage de D. et lanantissement du mauvais penchant. ........................................ 450 La sagesse de lhomme est suprieure celle des anges. ......................................... 451 Section Lekh Lekha.................................................................................................... 451 Encouragement Avraham et toutes les gnrations............................................. 451 Il faut tre pur et simple pour marcher devant D...................................................... 451 Section Vayra........................................................................................................... 452 Le zle........................................................................................................................ 452 Section Vayichlah..................................................................................................... 452 La gloire de la Prsence Divine. ............................................................................... 452 Section Vayigach........................................................................................................ 452 Lamour de D. est plus fort que lamour envers les enfants...................................... 452 La comptition augmente la sagesse. ......................................................................... 453

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Introduction de lauteur
Lou soit le Crateur dont la grce ne me quitte pas et qui ma permis de publier mon commentaire sur le livre Brshit, qui contient les enseignements que jai propags en Yshiva et diverses occasions de par le monde, que jai intitul Pahad David, La Peur de David, car le mot Pahad est compos des initiales des noms Pinto, Hanania, David. Ce livre nest pas destin des rudits qui me sont suprieurs. Il a t crit la demande de nombreux lves afin quils puissent garder mes confrences en mmoire, et puisque cest mon devoir et ma raison dtre, jai accd leur demande. Nos Sages racontent une histoire merveilleuse concernant Hillel lAncien (Vayikra Rabba 34:3). Ses lves lont rencontr en chemin et lui ont demand o il allait. Il leur rpondit quil allait accomplir une mitzva. Laquelle? lui demandent-ils. Je vais aux bains, comme il est dit: je laverai mes mains propres (Thilim 26:6) . Est-ce une mitzva? Pourquoi lui ont-ils demand o il allait? Avaient-ils besoin dtre au courant de sa conduite personnelle? Et pourquoi leur a-t-il dit quil allait accomplir une mitzva? Hillel aurait pu leur dire simplement quil allait aux bains, pourquoi a-t-il labor sa rponse en citant un verset des Psaumes? QuHillel lAncien sorte de chez lui est une chose exceptionnelle, puisque sa place est dans la maison dtude, dans les quatre coudes de la loi . Sil sort, il faut se demander pourquoi. Cest lui qui avait mis en garde ses disciples en leur disant: Ne juge pas ton ami avant de te trouver sa place (Avot II: 5), et ses lves lui demandent o il se rend afin dviter tout soupon! De plus, il leur avait enseign (ibid.): Ne dis pas ce qui ne doit pas sentendre, en fin de compte ce sera divulgu . Comment peuventils prononcer lindicible? Comment peuvent-ils prtendre lavoir vu en dehors des quatre coudes de la loi? Qui les coutera et qui les croira? Cest pourquoi ces hommes justes ont prfr lui demander o il se rendait, et il leur a rpondu quil allait faire une mitzva, justement afin dentamer le dialogue, pour quils lui demandent de quelle miztva il sagissait. Aprs toute une journe passe dans la maison dtude sefforcer, en transpirant, de comprendre la Torah, il parat normal dtre pris du dsir daller aux bains pour se rafrachir. Mais il semble que ce serait abandonner lattachement D. pendant les quelques minutes o lon se libre des tudes, mme pour aller aux bains! Cest pourquoi, ds que lon ressent le besoin daller aux bains, il faut le faire dans la seule intention dtre propre pour servir D. Cest une continuation de ltude qui ne constitue en rien une rupture dans lattachement D. De cette faon, depuis le moment o lon quitte ltude jusquau moment o lon y revient, chaque tape, chaque pas, est compt comme laccomplissement dune mitzva. Si mme lacte de se laver doit tre accompli comme un commandement, plus forte raison celui de terminer sa prire et rentrer chez soi ou vaquer ses occupations ne doit pas rompre le lien qui lie au Crateur. De mme, celui qui doit rompre son tude pour djeuner est susceptible de se laisser entraner par son apptit, ce qui lui ferait perdre plus que ce quil a gagn, car il est plus facile de dtruire que de construire. Il faut toujours penser, quoi que lon fasse et mme dans les activits les plus prosaques, que lon sert D. afin que le lien ne soit jamais rompu. En ces chaudes journes dt, alors que chacun part en vacances se reposer de ses occupations de lanne et va se rfugier dans quelque coin perdu, noublions pas que celui qui Me quitte un jour, Je le quitterai deux jours (Yroushalmi Brachot 9:5). Ceux qui partent deux et trois semaines perdent beaucoup et se font grand tort. Si Hillel lAncien a considr le fait daller aux bains comme une mitzva sous peine de rompre son lien avec D., que dire de nous, qui partons en vacances pour plusieurs semaines? Quel rejet de la Torah! Le Temple fut dtruit pendant les mois dt, Tamouz et Av. Pourquoi justement ce moment-l? Les explorateurs dont parle la Torah ont caus par la suite la destruction du Temple (Taanith 29a). Les Tables de la Loi aussi furent dtruites le 17 du mois de Tamouz (ibid. 26b), car ce jour-l aussi, le peuple navait pas attendu le retour de Mosh, et son dsir de repos lavait incit faire le veau dor qui causa le bris des Tables, des Tables qui sont une muraille quun bref repos vient fragmenter. Cest ce que Mosh leur dit: par votre dsertion, vous avez fait tomber la muraille de la Torah qui vous protgeait (Sotah 21a), comme il est crit: ...les eaux, comme une muraille, slevaient sur leur droite et sur leur gauche (Shemot 14:29), et leau symbolise la Torah (Babba Kamma 17a).

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Pahad David
Pour avoir abandonn un instant la Torah, ils en sont venus transgresser les interdits de linceste, du meurtre et de lidoltrie, comme il est crit: Ils se livrrent des rjouissances (Shemot 32:6). Cest effrayant! La gnration qui a reu la connaissance a commis les fautes les plus graves, simplement pour avoir oubli un instant la Torah! Que dire de nous-mmes? Le danger est dautant plus grand une poque de licence et de dbauche. Evidemment, nous devons prendre du repos, parce que nous devons clarifier nos esprits et acqurir de nouvelles forces. Il est vident quil faut consacrer son temps de vacances ltude de la Torah, et chercher un endroit o les hommes ne se conduisent pas de faon indcente et immorale. Si lon cherche sen protger toute lanne, il faut surtout lviter pendant les mois de Tamouz et de Av, pour ne pas perdre le bnfice de bonnes habitudes. Quel mrite, et quelle rcompense de choix D. rserve tous ceux qui, justement pendant lt, sassoient et tudient la Torah! Cest pour ceux-l que le monde fut cr, pour celui qui brle du feu de la Torah au lieu dtre cras par la chaleur du soleil des bords de mer. Le prophte Yrmia nous dit (Echa 3:40): Examinons nos voies, scrutons-les... (les mots examinons nechapsa, et vacances chofesh, sont composs des mmes lettres v p j). Chacun doit profiter des jours de vacances pour examiner ses voies et faire un bilan. Il ressort de tout ce que nous avons dit que le temps de la rdemption commence le 17 Tamouz, jour o les Tables de la Loi furent brises. Ce mme jour, le tamid, le sacrifice exigible chaque jour de lanne, fut interrompu; ce jour-l, le Sfer Torah fut brl, les Tables de la Loi furent brises. Chaque gnration peut tre soumise des dcrets svres, si elle ne corrige pas ses fautes passes. Nous devons nous trouver, chaque instant, dans les quatre coudes de la loi , de la Torah, ou de la mitzva. Que lEternel veuille bien me venir en aide, que D. maide honorer Son Nom, quIl ouvre nos curs Sa Torah et au dsir de le craindre, et nous aide vaincre chaque instant notre mauvais penchant. Que nos penses soient toujours saintes et pures afin que nous Le servions comme il convient. Amen, quil en soit ainsi .

Parachat brchit

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brchit
La Torah, le Saint Bni-Soit-Il, et Isral
Au commencement D. cra le ciel et la terre... (Brshit 1:1). A propos de ce verset, le commentateur Rashi cite le Midrash (Brshit Rabba 1:4): Cest pour les prmices (rshit) que D. cra le ciel et la terre. Quelles sont ces prmices? La Torah, qui sappelle dbut comme il est dit: LEternel me cra au dbut de Sa cration (Mishley 8:22), et Isral - les Justes - qui sont appels prmices, comme il est dit: Isral, consacr par lEternel, reprsente les prmices de Sa rcolte (Yrmia 2:3) . Le mot mme Brshit a une connotation de prmices . La valeur numrique de la lettre beth est deux. Le monde a t cr pour deux prmices: Isral (les mes des Justes), et la Torah. Nous devons comprendre pourquoi, effectivement, le monde a t cr exclusivement pour Isral et la Torah. Le monde fut cr pour les Justes et la Torah parce quils dvoilent la ralit de lexistence de D. dans le monde. La raison dtre des Justes dans le monde est denseigner aux hommes la foi en D., ce sont eux qui enseignent aux Juifs le chemin suivre et les actions accomplir (Shemot 18:20), et ils enseignent Tes lois Yaakov, et Ta Torah Isral (Dvarim 33:10). Par ailleurs, les Justes de chaque gnration bnficient de miracles vidents, des vnements surnaturels se produisent en leur faveur afin dimprgner le cur de chacun de la ralit de lexistence de lEternel, du fait quil ny a pas dautre dieu que Lui, et que rien nest comparable Son Unit. Dautant plus que D. accomplit la volont de ceux qui Le craignent (Thilim 145:19), des Justes, comme il est dit: D. dcrte et le Juste annule le dcret (Moed Katane 16b), ce qui signifie que chaque Juste dans sa gnration proclame la connaissance du Crateur. De mme, la Torah rvle la vrit et la ralit de D. dans le monde. Lorsque les Juifs tudient la Torah avec ferveur, ils parviennent la connaissance de D., Crateur du monde. Cest ce que la Torah elle-mme proclame lorsquelle parle de la cration et que, propos de lexistence de D., elle dit quIl est Vrit (Tanhouma, Haazinou 8). Etant donn que D. est vrit et que le sceau de D. est Vrit (Shabbat 55a), luvre de Ses mains est marque de Son sceau et tout ce quIl a cr est Vrit (Brachot 5b), comme il est crit: Acquiers la vrit et ne la revends pas (Mishley 23:23). Cest ce que nous affirmons dans la bndiction qui accompagne la lecture de la Torah: Bni sois-Tu... Qui nous as donn la Torah de Vrit . Les mes des Justes, descendants de Yaakov, et tous les Enfants dIsral, sont pntrs de cette Vrit comme il est dit: Tu as donn la Vrit Yaakov (Micha 7:20), ou encore: Les Justes sont Vrit, leurs paroles Vrit, et tout ce quils font est Vrit (Midrash HaGadol, Hay Sarah 23:11). LEternel, la Torah et les Justes (Isral) sont Vrit et cest ce que le Zohar exprime (III 73a): La Torah, le Saint, bni soit-Il, et Isral sont Un . Ce sens est indiqu par le premier verset de la Torah. Les dernires lettres des mots Brshit bara Elokim - Au commencement D. cra... les lettres aleph, mem, tav, composent le mot met, Vrit, car tout ce que D. a cr, la Torah et les mes des Justes, tout est Vrit. Nos Sages ont soulign le lien entre D., la Torah et les Justes, en disant que le Crateur est appel Juste (Shohar Tov 19:7) comme il est crit: LEternel est Juste dans toutes Ses voies (Thilim 145:17). Les Sages ajoutent: Le Juste est vie (Avot DRabbi Nathan 34:10) et la Torah est vie, elle est llixir de vie du monde (Yirouvin 54a). LEternel, les Justes (Isral) et la Torah, sont unis comme des amants insparables. Cest pour la Torah et pour Isral qui sont Vrit, que D. a cr le monde, afin quils dvoilent au monde la vrit de Son existence, et lun ne peut exister sans lautre - ni la Torah sans les mes des Justes, ni Isral sans la Torah, comme il est dit: Isral ne peut vivre que par la Torah (Tanhouma Beshalah 25). Sans la Torah et sans les mes dIsral, la grandeur et la vrit de D. ne peuvent tre connues. Lune dpend de lautre; la vrit de lexistence de D. se manifeste grce la Torah et aux Justes dIsral, prmices de Sa cration, et un triple lien ne se rompt pas facilement (Kohlet 4:12).

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Pahad David
Si par malheur lhomme devait provoquer la rupture de ce lien en fautant, quil sempresse de corriger sa faute, et tout rentrera dans lordre grce son regret et son repentir, qui sont aussi prmices, cration antrieure la cration du monde, comme nous disent les Sages (Pessahim 44b): D. cra sept choses avant de crer le monde , et lune delles est le repentir. Lorsque lhomme regrette sincrement sa faute, D., la Torah et Isral sont nouveau unis par un mme lien. Ce qui prcde nous permet de relier le dernier verset de la Torah: ...aux yeux de tout Isral , son premier verset: Au commencement D. cra... La premire lettre de la Torah, qui souvre par le rcit de la cration, est beth, dans le sens de bayt, maison, et la dernire lettre de la Torah est lamed, ...aux yeux de tout Isral , qui indique le limoud, lenseignement. Le rapprochement de ces deux lettres indique que le monde fut cr et continue dexister grce la maison dtude dans laquelle les Juifs apprennent et transmettent la Torah. La premire lettre de la Torah, le beth du mot brshit, et la dernire lettre, le lamed du mot Isral, montrent que cest pour la maison dtude et pour Isral qui sont rshit, prmices, que le monde fut cr, afin de nous faire connatre la ralit et lomnipotence de D., Crateur du monde. Tel est le lien qui unit la fin de la Torah son dbut qui raconte le commencement du monde, et les Enfants dIsral enseignent cette vrit. Cela explique pourquoi, lors de la fte de Simhat Torah (la Clbration de la Torah), nous ne clturons pas la lecture de la Torah, mais ds que nous en avons termin la lecture par les mots aux yeux de tout Isral , nous enchanons immdiatement Au commencement D. cra... Si la Torah se termine par la lettre lamed qui fait rfrence ltude de la Torah (limoud), comment peut-on la sparer de la lettre beth, qui indique la maison dtude, dautant plus que toute distraction dans ltude de la Torah en fait perdre le bnfice, comme le disent les Sages (Avot III:7): Celui qui est en chemin, et interrompt sa mditation sur la Loi pour admirer un bel arbre est considr comme se mettant lui-mme en danger . Et donc, aprs le mot Isral, dernier mot du Pentateuque, nous enchanons tout de suite: Brshit... ce qui montre quil faut continuer tudier la Torah dans la maison dtude, puisque Isral et la Torah sont lorigine de tout; cest pour eux que le monde fut cr, ce sont eux qui proclament la grandeur de D. dans le monde. Il nous faut mditer la Torah jour et nuit, comme il est crit: Elle est notre vie et la longueur de nos jours, et nous la mditerons jour et nuit . Le Midrash (Shemot Rabba 33:1) dit: Il existe un type de transaction o le vendeur se vend avec lobjet vendu. D. a dit Isral: Je vous ai donn Ma Torah, ne la dlaissez pas, Je vous ai donn un enseignement de qualit, ne labandonnez pas (Mishley 4:2) et cest comme si Je Me suis Moi-mme donn vous. On peut illustrer cela par une allgorie: un roi avait une fille unique. Un prince vint la demander en mariage. Au moment o le prince voulut retourner dans son pays avec son pouse, le roi lui dit: Ma fille, que je tai donne en mariage, est ma fille unique. Je ne peux pas me sparer delle, je ne peux pas non plus tempcher de partir avec elle puisquelle est ta femme. Je te demande donc une faveur: partout o tu iras, rserve-moi une chambre, afin que je puisse loger avec vous, car je ne peux me sparer de ma fille. Cest ce que D. dit Isral: Je vous ai donn Ma Torah. Me sparer delle Mest impossible, vous dire de ne pas la prendre est impossible, mais partout o vous serez, rservez-Moi un lieu o Je puisse rsider, comme il est crit: Ils Me construiront un sanctuaire... (Shemot 25:8) . Figurativement, D. a uni Isral la Torah, selon le Midrash (Shemot Rabba 33:7) concernant le verset: Elle est lhritage (morasha) de la communaut de Yaakov (Dvarim 33:4): Il ne faut pas lire morasha, hritage, mais plutt mourassa, fiance . Cela nous enseigne que la Torah est fiance Isral comme il est crit: Tu mes fiance pour toujours (Osha 2:21) . Partout o Isral et la Torah se trouvent unis, se trouve aussi la Prsence de D. car telle tait la condition pralable de leur union, et cest dans ce sens quil est dit que la Torah, le Saint, bni-soit-Il, et Isral sont unis. Dornavant, la raison dtre de lhomme dans le monde est de maintenir cette union en tudiant rgulirement la Torah et en observant ses commandements. Suivre la voie de la Torah, cest proclamer lexistence et la vrit de D. et faire rgner Sa Prsence dans le monde, comme il est crit: Construisez-Moi un sanctuaire afin que Je rside parmi vous . Sans doute, ce sont des choses difficiles comprendre. Les Sages disent (Brshit Rabba 1:1): Deux mille ans dj avant la cration du monde, le Saint, bni soit-Il, se rjouissait en compagnie de la Torah comme il

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est crit: Jtais dans un enchantement perptuel (Mishley 8:30). Avant quIl ne donne la Torah Isral, elle tait pour Lui une source de joie permanente, elle tait Ses cts ouvrire et pdagogue... Bien que D. soit pour ainsi dire triste de Se sparer de la Torah, Il la donne nanmoins Isral, avec la libert den observer ou non les lois. Est-ce que dornavant D. ne pourra plus continuer se rjouir de la Torah comme auparavant? Les Sages demandent (Brachot 5a): Quelle diffrence y-a-t-il entre un homme qui vend un bien, et D.? Et ils rpondent: Lorsquun homme vend un objet, lacheteur est heureux et le vendeur est triste, mais du moins a-t-il reu une certaine somme dargent en change. Par contre, lorsque D. donne la Torah Isral, Il est heureux comme il est crit: Je vous ai donn un bon enseignement (Mishley 4:2). De quoi D. Se rjouit-Il, car enfin quelle compensation reoit-Il en change? La comparaison nest pas adquate, car le roi continue rsider avec sa fille dans sa nouvelle rsidence et se rjouir en sa prsence, et le Saint, bni soit-Il, ne trouverait-Il plus de joie dans la Torah? Tentons, avec laide de D., dexpliquer cette comparaison. Les Sages tmoignent que D. continue se rjouir de la Torah, mme aprs lavoir donne Isral en acquisition inalinable, comme il est dit: Je vous suis acquis avec la Torah (Shemot Rabba, ad. loc.) et ils ajoutent que D. ne dlaisse pas la Torah: Depuis le jour o le Temple fut dtruit, D. ne dispose plus dans Son monde que des quatre coudes de la loi (Brachot 8a, Zohar III 402b). Et encore: Chaque jour, le Saint, bni soit-Il, renouvelle des aspects de la loi dans la Cour cleste (Brshit Rabba 49:6, 64:4), ou encore: Le Saint, bni soit-Il, est occup par les textes crits le jour, et la nuit par la loi orale (Shohar Tov 19:7). Ceci nest vrai que lorsque les Juifs comprennent limportance et la grandeur de la Torah et quelle emplit leurs penses jour et nuit. Ce faisant, ils satisfont D. et manifestent Sa puissance, comme disent les Sages: Isral donne de la puissance la Cour cleste , ou encore (Dvarim Rabba 2:26): Isral entoure le Saint, bni soit-Il, de dix parures . Surtout, Isral veille sur la Torah: les dcrets rabbiniques la protgent comme des barrires et les exgses en sont les signaux explicatifs (Yirouvin 54b, daprs Yrmia 31:21), accentuant la gloire et la splendeur de la Torah et il ny a pas pour D. de plus grand bonheur. Lorsque Isral et les Justes soccupent de Torah et en observent les commandements, cest pour D. un grand bonheur et une source de joie. Chaque Juif possde une me divine, qui mane de lessence de D., et lorsque le Juif est plong dans la Torah, D. en prouve du plaisir comme il est crit (Dvarim 32:9): Son peuple est la part de lEternel, Yaakov est le lot de Son hritage . Cest dire quIsral est une partie de D., une partie de la Divinit Unique, Isral est Son peuple, le peuple de D. En quoi? Par la Torah qui unit Isral son D. Grce ce lien et au fait quIsral observe la Torah, D. est pour ainsi dire consol et heureux davoir donn la Torah Isral, et cest comme si Lui-mme continuait jouir comme auparavant de la Torah. A prsent, la comparaison est parfaite. De mme que ce roi, pre dune fille unique, demande son gendre de lui rserver une chambre partout o il ira afin quil puisse sy rendre, ainsi le Saint, bni soit-Il, souhaite une rsidence permanente o Il puisse se rjouir avec Isral lorsquil tudie la Torah. Le Saint, bni soitIl, est prsent partout o un Juif consacre du temps ltude de la Torah, et Il tudie avec lui (voir Tamid 32a). Cest ce qui remplit D. de joie. Par contre, celui qui ddaigne ltude des Ecritures Saintes et nen fait pas son bonheur, ne connat pas le plaisir de lme - cette partie divine - que procure la lumire de la Torah, et le Saint, bni soit-Il, en est attrist. Un tel homme perd son me, car Isral ne peut pas vivre sans Torah (Tanhouma Beshalah 25). Les fautes que nous commettons empchent lme de tirer profit des paroles de la Torah et dans ce cas, D. nen retire aucun plaisir et Il ne peut pas se rjouir. Cela nous permet de comprendre le verset (Dvarim 27:26): Maudit celui qui ne respectera pas les paroles de cette Loi... On sait que le mot zoth (cette) indique la Torah, comme il est crit: Ceci est la Torah... (voir Menahot 53b), et zoth fait allusion la Prsence Divine (Zohar Hadash 170b). Celui qui ntudie pas la Torah et ne rserve pas une place dans sa vie la Prsence Divine, est maudit. La Torah na t donne Isral qu condition quil sy attache, pour que la Prsence de D. puisse rsider avec Isral et parmi ses enfants, et que leur lien ne soit pas rompu. Mais si le Juif nobserve pas les prceptes de la Torah, la Prsence Divine le quitte et le lien entre D., la Torah et le Juif, est rompu et il est crit ce sujet: Maudit celui qui ne respectera pas les paroles de cette Loi... Mais celui qui maintient son attachement D. et la Torah est bni, comme il est crit: Bni celui qui observe les paroles de cette Loi...

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Tant quIsral navait pas reu la Torah, D. ressentait crainte et inquitude. Comment pouvait-Il continuer Se rjouir de la Torah qui tait pour Lui joie permanente? Lorsque les Enfants dIsral ont accept le joug de la Torah, la joie de D. fut immense, car dornavant Il ntait plus seul jouir de la Torah, participaient tous ceux qui ltudient, et les Lois de lEternel sont intgres, elles rjouissent les curs (Thilim 19: 9). Cela nous permet de comprendre pourquoi il ny a pas en ce monde de rcompense pour lobissance un commandement de la Torah (Kidoushin 39b). Celui qui se consacre tout entier la Torah et parvient une connaissance claire de la vrit de lexistence de D., a le corps et lme unis dans lUnit de D., et il est ncessairement rempli de bonheur et ressent une joie intense. Son observance de la Torah et de ses prceptes attestent alors de lUnit du Saint, bni soit-Il, et de Sa Prsence en Isral. Cette joie est telle quil nest besoin daucune autre rcompense en ce monde, partir du moment o lhomme a senti et compris que lEternel est bon en tout (Thilim 34:9). La lumire de la Torah et de la Prsence Divine fait sa joie, telle est sa rcompense. A-t-il besoin dautre chose? De plus, ltude de la Torah la amen perfectionner ses qualits, puisquil a pein afin dobtenir les quarante-huit vertus qui permettent dacqurir la Torah (Avot VI:5), jusqu ce que, grce la Torah, il parvienne bnficier de tous les bienfaits cits dans cet enseignement de nos Sages. Se sentir encore plus fortement lis D., approcher encore plus vivement Sa vrit, est la plus grande rcompense possible des Justes, la seule vraie, et ils nont besoin daucune autre rmunration. Cette situation est comparable celle dun fils qui rentre la maison, et qui aperoit de loin son pre, venu sa rencontre. Le fils commence courir plus vite vers son pre quil aime tellement, et au fur et mesure quil se rapproche de lui, son pre lui parat de plus en plus grand, jusqu ce que, de plus en plus prs et sur le point de pouvoir toucher son pre tant aim, il le voit dans toute sa grandeur et dans toute sa splendeur. Combien grande est la joie quil ressent ce moment-l! Aucune fortune au monde ne pourrait remplacer le bonheur quil a de se retrouver auprs de son pre. Il en est de mme entre lhomme et D. Lorsque lhomme se rapproche de D., quil sattache la Torah et la Prsence Divine, sa joie est grande, mais le bonheur est son comble lorsquil est vraiment proche de D. et ce nest quaprs la mort que D. rcompense lhomme de tous les efforts quil a faits cours de sa vie sur terre. Aucune richesse, aucun bonheur ne valent la rcompense quil recevra alors pour avoir ajout splendeur et gloire son me dans ce monde et stre lev un si haut degr. Llvation de son me dans le monde Venir sera sans commune mesure avec sa situation en ce monde, lorsquelle sjournait dans le corps de lhomme. Dans ce monde, lhomme ne fait que sapprocher de plus en plus de D., mais llvation et la rcompense de lme lui sont rserves dans le monde Venir. Ceci explique pourquoi au dbut de la cration (et pour chaque homme individuellement), lme, qui est sainte, souffre lorsquelle doit quitter les Cieux et descendre sur terre. Elle souffre de devoir quitter son sjour dorigine sous le Trne divin et descendre en ce bas monde, car si dans les Cieux elle se nourrit de saintet et jouit de la lumire divine, sur terre, qui sait ce quil adviendra delle? D. amadoue lme et la persuade de descendre sur terre o elle aura la possibilit de slever aux plus hauts degrs, de monter encore plus haut et datteindre les sommets les plus sublimes des Cieux, et ceci lorsque lhomme lie son me - la part divine qui est en lui - la Torah. En vrit, tel est le but de chaque homme en ce monde. La Torah dcrte: Tu aimeras lEternel ton D. de tout ton cur et de toute ton me et de toutes tes forces (Dvarim 6:5) et le Rambam (Sfer HaMitzvot, Commandement Positif 3), crit: Nous avons reu le commandement daimer le Trs Saint, en mditant Ses lois, Ses paroles et Ses actions afin de parvenir une claire connaissance de Lui, et de jouir au mieux de cette connaissance. Tel est le comble de lamour qui nous est ordonn... Cest dire que lamour pour le Crateur provient de la connaissance vraie de Son existence et de Sa divinit, et cest grce cette connaissance que lhomme est proche de son Crateur, dans ce monde et dans le monde Venir. Il est crit (Brshit 1:1): Au commencement D. cra le ciel et la terre , et l le ciel prcde la terre, et par la suite (ibid. 2:4) il est crit: Le jour o lEternel D. cra la terre et le ciel , et l la terre prcde le ciel (voir ce sujet Midrash Brshit Rabba 8:15, o il est dit que le ciel et la terre furent crs simultanment).

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Ce que nous avons dit plus haut nous permet de rsoudre cette contradiction. La Torah tient du Ciel et lhomme tient de la terre, du monde matriel, comme il est crit: Et la terre est donne aux hommes (Thilim 115:16). De mme quil est impossible la Torah - au ciel - de se perptuer sans lhomme qui habite la terre, de mme la terre - lhomme - ne peut pas se perptuer sans le ciel, sans Torah. De mme que le ciel est vital pour la terre et la terre pour le ciel, de mme lhomme est essentiel la Torah et la Torah essentielle lhomme. Telle est la finalit de la Cration: la cration du ciel pour lhomme et la cration de lhomme pour le ciel, tous deux insparablement lis. Plus lobligation de lhomme envers la Torah est grande, plus lobligation de la Torah envers lhomme est manifeste, si bien que la Torah lve lhomme bien au-dessus de sa situation lors de sa venue au monde. Cela enseigne chacun dentre nous combien il est grave de dlaisser la Torah et den abandonner ltude, et combien lourde est la punition, car la Torah est lme suprieure, la partie divine en nous. Cest elle qui donne la vie lme par son attachement D. Combien lme souffre de labandon de ltude de la Torah, et combien la Torah est afflige davoir t dtache du Crateur, bni soit-Il, et de ne plus pouvoir Lui procurer la mme joie que par le pass. Cest pourquoi il est important de ne pas dlaisser ltude de la Torah. Il faut sy plonger rgulirement, jour et nuit, comme nous sommes tenus de le faire, et alors, le lien indissoluble entre la Torah, le Saint, bni soit-Il, et Isral, reste un lien ternel.

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La croyance en D. et lobservance des commandements


Il est crit (Dvarim 34:12): A cause de la main puissante, des miracles et des prodiges que Mosh accomplit aux yeux de tout Isral . Ce verset est li au premier verset de la Torah (Brshit 1:1): Au commencement D. cra le ciel et la terre . Rashi rapporte les paroles de nos Sages (Yalkout Shimoni Shemot 187): Rabbi Yitshak remarque: La Torah aurait d commencer par le verset: Ce mois sera pour vous le premier des mois de lanne (Shemot 12:2) puisque cest le premier commandement qui a t donn au peuple juif. Pour quelle raison commencet-elle par le rcit de la cration du monde? Cest que D. a rvl Son peuple la puissance de Ses actions afin de leur donner lhritage des nations (Thilim 111:6). Lorsque les nations du monde accuseront les Juifs, leur disant: vous tes des voleurs, vous avez conquis les terres des sept peuples Cananens, ils leur rpondront: Toute la terre appartient D. Cest Lui qui la cre et Il la donne selon Sa volont qui Lui plat. Il a voulu la donner aux sept peuples, et Il a voulu la leur prendre et nous la donner . Le monde ne fut cr que pour la Torah, comme il est crit: Si ce ntait pour Mon alliance perptuelle, Je naurais pas fix les lois du ciel et de la terre (Yrmia 33:25) que les Sages expliquent ainsi (Pessahim 68b): Si ce ntait pour la Torah, le ciel et la terre ne pourraient pas subsister . Rabbi Yitshak dit que la Torah aurait d commencer par le premier commandement donn Isral avant la sortie dEgypte, et figurant dans la Torah, Ce mois sera pour vous le premier mois de lanne (Shemot 12:2). Et il explique que D. a rvl Son peuple la puissance de Ses actions, pour que, dans le cas o les nations du monde accuseraient les Juifs de sapproprier des terres qui appartiennent aux sept peuples Cananens, les Juifs puissent leur rpondre que le monde entier appartient D. puisque cest Lui qui la cr. Il a choisi Avraham et sa descendance et Il leur a donn la terre de Canaan. Cest le fondement mme de la cration du monde, et la raison pour laquelle nous ne sommes pas des voleurs. Bien des questions se posent ce sujet. 1) Les peuples du monde ne croient ni en D. Crateur du monde, ni en la prennit du peuple juif. Pour quelle raison les peuples accepteraient-ils largument dIsral selon lequel D. a priv les Cananens de leur terre pour la donner aux Juifs, et cela parce quIl en est, Lui, le Crateur? Quels que soient nos arguments, ils ne les accepteraient pas, comme Pharaon le proclama: Qui est votre D. pour que je lui obisse? (Shemot 5:2). Ce qui nous ramne notre premire question: Pourquoi la Torah commence-telle par le rcit de la cration et non par Ce mois sera pour vous... ? 2) Il est difficile de comprendre pourquoi Rabbi Yitshak remarque que la Torah aurait d commencer par la sanctification de la nomnie qui est le premier commandement de la Torah, alors que celui de la circoncision impos Avraham Avinou et sa descendance le prcde, comme il est crit (Brshit 17: 10): Telle est lalliance entre Moi et vous, que vous garderez toi et ta descendance, de circoncire tout

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mle... Pourquoi selon Rabbi Yitshak la Torah doit-elle commencer par le commandement de sanctifier le nouveau mois et non par celui de la circoncision? 3) Les commentateurs ont expliqu pourquoi la fin de la Torah et son dbut sont traditionnellement lis. Si le dernier verset de la Torah tait li au commandement de sanctifier le nouveau mois, quel serait leur rapport? Afin de rpondre clairement - dans le sens o la conclusion rsume le contenu - je vais tout dabord expliquer le lien entre la fin de la Torah et son dbut, et le reste en dcoulera logiquement. Si lhomme dsire avoir la qualit de rshit, tre prmices de la rcolte de D., comme il est crit (Yrmia 2:3): Isral, consacr par D. est prmices de Sa rcolte , il est vident quil doit viter de regarder des choses interdites et dy penser, comme il est crit (Bamidbar 15:39): Ne vous garez pas suivre votre cur et vos yeux . Les erreurs de vision et de pense dtriorent la foi car la pense errone, entrane ncessairement des carences dans la foi en D. Mme si lon continue pratiquer les lois de la Torah, on nen tire aucun bnfice si lon ne comprend pas parfaitement les commandements que lon applique. Laccomplissement des commandements na aucun sens lorsque la motivation est errone ou que les commandements sont excuts pour des raisons trangres leur raison dtre. Celui qui na pas une comprhension juste risque de ne pas sentir ce qui lui manque, et sa pratique est imparfaite. Avec le temps, sa pratique est tellement dnature quil est incapable doprer un retour sur lui-mme, il ne peut corriger ses faux concepts, ses transgressions sont devenues des habitudes et lui semblent licites (Yoma 86b). Personne ne pourra le convaincre que ses penses et sa conduite sont mauvaises. Tel est le lien entre: Aux yeux de tout Isral et Au commencement D. cra . Tout ce que les Enfants dIsral ont vu - la main puissante de D. et les merveilles impressionnantes, les miracles et les prodiges, non seulement ceux qui taient rvls au grand jour mais aussi ceux qui taient cachs - tout cela les Enfants dIsral lont vu parce que leur regard tait demeur intact et par consquent leurs penses taient claires, ce qui nest pas le cas lorsque lil regarde et le cur dsire (Rashi, Shelah 15:39), car lil et le cur sont les deux agents de la faute (Bamidbar Rabba 10:6). Cest seulement parce quils taient rests purs que les Enfants dIsral ont pu garder une foi infaillible dans le Crateur du monde, Celui qui cra le ciel et la terre, Celui qui est Vrai, comme le disent les Sages (Shabbat 55a): Le sceau du Saint, bni soit-Il, est Vrit et Sa Torah est Vrit (Yroushalmi Rosh HaShana III:8). Les termes Brshit bara Elokim dont les dernires lettres tav, mem, aleph, forment le mot Emet Vrit, indiquent cela. Le commentateur Baal HaTourim remarque que cest une allusion au verset (Thilim 119:160): Le commencement de Ta parole est Vrit . Les Enfants dIsral, qui savaient que Mosh agissait en tout au vu et au su de la communaut tout entire, en ont tir la leon. Si Mosh Rabbeinou, qui a accompli devant nous tous ces miracles, sest spar de sa femme qui est une partie de lui-mme (Menahot 93b) afin de se sanctifier, ce que D. a approuv (Shabbat 87a), et sil lui tait interdit de se trouver dans un tat dimpuret rituelle ne serait-ce quun bref instant, plus forte raison nous, simples fidles, devons-nous nous garder des conversations futiles avec notre femme, et il va sans dire avec une femme trangre (Avot I:5). A plus forte raison est-il interdit de contempler la beaut dune femme, ses vtements de couleur (Zohar III 83b), ou mme son petit doigt (Brachot 24a), faute de quoi nous pourrions tre amens avoir des mauvaises penses et il est certain que notre foi en serait corrompue. La tche principale de lhomme en ce monde est de prserver sa foi en toute circonstance, de la pratiquer durant toute sa vie, et de se garder de tout ce qui pourrait dnaturer la croyance de lhomme en D. Ceci nous permet de comprendre la question pose par Rabbi Yitshak, savoir, pourquoi la Torah ne commence-t-elle pas par la sanctification du nouveau mois, mais par le rcit de la cration du monde qui ne concerne que la foi en D.? Il aurait t prfrable que la Torah commence par la sanctification du nouveau mois qui, elle aussi, symbolise la foi en D. et la rencontre avec la Prsence Divine. Cest effectivement ce que nous proclamons dans la bndiction de la nouvelle lune (Sanhdrin 42a): Cest un enseignement de lcole de Rabbi Ishmal: si Isral navait eu que le mrite de rencontrer la Prsence Divine chaque nouveau mois, cela aurait suffit , et Celui qui bnit le nouveau mois en son temps, cest comme sil avait rencontr la Prsence Divine (ibid.). De plus, la lune symbolise la cration, puisquelle est la seule chose cre qui se renouvelle de mois en mois (ibid.), ainsi que nous proclamons dans la bndiction de la

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nouvelle lune: Et Il ordonna la lune de renouveler la royaut et la gloire de ceux qui sont protgs ds leur naissance . La lune rappelle chaque Juif la cration. Nous aurions donc deux avantages: lexpression de la foi en D. et laffirmation de la vrit de la cration, outre le fait que cest le premier commandement donn par la Torah Isral! Cest justement le premier commandement de la Torah, parce quil peut nous imprgner de la foi en D., Auteur et Crateur du monde. La preuve en est que la lune disparat et reparat rgulirement, sans avoir de place fixe, car elle peut disparatre dun ct du firmament et rapparatre de lautre, ce qui nest pas le cas pour le soleil et les toiles dont le parcours dEst en Ouest est rgulier, comme il est crit (Thilim 104:19): Le soleil connat le terme de sa course . Si la Torah avait dbut par la sanctification du nouveau mois, nous aurions expliqu ainsi le lien entre aux yeux de tout Isral et ce mois sera pour vous : les enfants dIsral ont eu le mrite de voir des miracles et des prodiges, aussi bien ceux qui sont visibles que ceux qui sont habituellement voils et passent inaperus, et ils en ont eu connaissance parce quils navaient pas fauss leur vue - aux yeux de tout Isral - et donc leurs penses aussi taient restes propres et pures. Ce mois sera pour vous nous ordonne de connatre la vrit de la cration et de nous rapprocher de la Prsence divine, ce qui nous permet de raffermir de plus en plus notre foi en D., mais le manque de foi, risque dentraner Sourd sera votre cur (une onomatope des mots de ce mme verset) (Shabbat 147b). Si tel avait t le lien, il aurait t trs clair. Et Rabbi Yitshak demande donc pourquoi la Torah dbute par le rcit de la cration, ce qui, nous lavons montr plus haut, suppose connaissance et foi en D.? Si le but de la cration est lenseignement de la Torah et lobissance ses commandements (sinon D. naurait pas cr le monde), la Torah aurait d dbuter par lessentiel, cest--dire le commandement Ce mois sera pour vous... qui comprend la Torah, et le premier commandement, et la foi en D., Crateur du monde, ainsi que la vrit de la cration qui nous est dmontre par la lune qui se renouvelle chaque mois. Dautant plus que la foi est le fondement de notre service de D., comme il est crit (Habakouk 2:4): et le Juste vit selon sa foi , que les Sages expliquent ainsi (Makot 24a): Habakouk a rsum tous les commandements de la Torah par leur dnominateur commun, le commandement de la foi en D. Le but de tout enseignement de la Torah est de nous faire connatre D. et davoir foi en Lui. Rabbi Yitshak rpond sa propre question: Pour faire connatre Son peuple la puissance de Ses actes et leur donner lhritage des nations... ce qui montre combien D. est plein de bont envers Son peuple. Que les Juifs soient sur leur terre ou exils parmi des peuples hostiles, tant quils observent les commandements et obissent la volont de D., nul na le droit de leur faire du mal et personne ne peut remettre en question leurs droits! Par contre, si les Juifs abandonnent D. pour agir comme bon leur semble, sils recherchent les plaisirs de ce monde et ses vanits, les nations du monde - qui jusque-l navaient rien trouv redire et ne posaient pas de questions parce quils taient conscients que les Juifs reprsentent le peuple lu par D. pour tre Sien - se retournent alors contre les Juifs avec des questions troublantes: Que faites-vous ici? Brigands! Voleurs! Nous savons que lorsque les Juifs vivaient selon la Torah et ses commandements, comme au temps de Shlomo HaMelech, ils vivaient en paix, Yhouda et Isral vivaient en scurit, chacun sous sa vigne et sous son figuier, de Dan jusqu Ber Sheva... (Melachim I, 5:5), et aucune nation voisine nosait les dranger. Par contre, si les Juifs, malheureusement, abandonnent D., des malheurs les frappent. D. envoie contre eux les nations du monde, des peuples qui les attaquent et les accusent dtre des usurpateurs et des voleurs, prtendant quils sapproprient terres et richesses, quils sont avides et extorquent les gens, comme ce fut le cas de Hitler, maudit soit-il, qui disait que les Juifs taient des capitalistes, des voleurs qui, par leur influence, voulaient prendre le pouvoir en sappropriant les biens et les fortunes dautrui. Aujourdhui, comme il y a soixante ans, nous entendons de tels propos dans tous les pays, et les Arabes aussi allguent que la terre dIsral (la Palestine comme ils la nomment) leur appartient et que les Juifs lont vole. Mais nous, que pouvons-nous leur rpondre? Leur rtorquer que D. leur a pris un pays quils considrent

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comme leur pour nous le donner, est un argument dont ils font fi, et ils continueront nous narguer et nous attaquer, comme cest le cas aujourdhui dans le monde. Puisquil en est ainsi, quel avantage tironsnous de la rponse de Rabbi Yitshak, que D. leur a pris la terre et nous la donne? Si ce nest que nous devons savoir que les peuples du monde ne pourront rien contre nous et ne penseront mme pas nous accuser dtre des voleurs et des usurpateurs, si nous vivons selon la Loi de D., si nous obissons Ses commandements et si nous suivons Ses voies. Car, lorsque le peuple juif est uni dans la Torah, aucune nation trangre ne peut le dominer (Ktoubot 66b). Ce nest que lorsque Isral abandonne son D. que les nations nous traitent de bandits et de voleurs. D. envoie contre nous des ennemis afin de nous faire honte et nous faire comprendre comment et pourquoi ces malheurs nous accablent, comment et pourquoi nous sommes has de tous, et pour nous branler et nous faire revenir Lui de tout cur, lorsque nous comprenons enfin que ces malheurs nous accablent parce que nous avons dlaiss la voie de D. Il est crit (Yrmia 9:11-12): Qui est sage... et nous rvlera pourquoi la terre est dlaisse - parce quils ont abandonn Ma Loi... , et le Talmud (Babba Metzya 85a) explique: Ils ont abandonn Ma loi - ils nont pas rcit la bndiction avant la lecture de la Torah . Si nous ddaignons la Torah, nous sommes privs de notre hritage et les peuples trangers en prennent possession. Mais si nous sommes sincrement convaincus de la promesse divine, nous pouvons rpondre sans hsitation aux nations que nous ne sommes pas des voleurs, que cest D. qui les a dpossds de la terre pour nous la donner, ce qui reprsente en soi laffirmation que D. est le Crateur et le Matre du monde. Telle est probablement lintention de Rabbi Yitshak lorsquil dit: D. a donn la terre qui Lui plat... cest dire que D. donne la terre qui agit selon Sa volont, coute Sa voix et obit Ses commandements... Alors effectivement, lorsque les Juifs reconnatront le Crateur, et affirmeront que Lui seul prend et donne, lorsquils auront une foi entire en Lui, les nations du monde aussi accepteront le fait que les Juifs ont reu de D. la terre dIsral, car les nations ne les ont attaqus que sur lincitation de D. pour leur rappeler la vrit de Son existence et renforcer leur foi en Lui. Cela nous montre que lveil un retour vers D. et une foi sincre dcoule de la revendication des nations, chaque fois que les Juifs oublient leur spcificit. Les malheurs causs par les nations et les calomnies contre nous, nous rappellent notre appartenance D. qui nous a crs et nous a choisis entre tous les peuples pour nous donner la Torah, comme nous le proclamons dans la bndiction qui prcde la lecture publique de la Torah (Brachot 11b): ...qui nous a choisis entre tous les peuples et nous a donn Sa Torah . Mais si nous dlaissons la Torah et D., nous ne mritons pas la terre dIsral. Lessentiel du premier verset et du premier commandement de la Torah est la connaissance de D. et le retour vers Lui. Le mot teshouva en hbreu signifie la fois retour, repentir et rponse . La teshouva a deux aspects: Quelle rponse donner aux nations, et comment revenir Dieu de tout cur cause des perscutions? Lorsque le Juif affiche sa foi en D., les nations taisent leurs revendications et cessent de limportuner. Par contre, si le Juif persiste dans son insoumission D., aucune explication, aucune apologie ne satisfera les nations. Que chaque Juif sache clairement, sans lombre dun doute, que D. accomplira pour lui des miracles et des prodiges, et lorsquil affirmera aux nations du monde que la terre dIsral lui appartient de droit divin, ils ne trouveront rien rtorquer et accepteront srement cette rponse, condition que luimme observe fidlement la Torah et ses Lois.

La terre dIsral est rserve au peuple juif


Nous pouvons maintenant comprendre le lien qui rattache la fin au dbut de la Torah: ...les miracles et les prodiges que Mosh accomplit aux yeux de tout Isral - Au commencement D. cra... D. a cr la possibilit de nous repentir de nos fautes avant mme la cration du monde (Pessahim 54b), et le repentir est un commandement de la Torah, comme il est crit (Dvarim 30:2): et tu retourneras lEternel ton D. et tu obiras Sa voix... Il ne sagit pas dun commandement parmi dautres, mais dun commandement fondamental par lequel lhomme revient D., la foi en D., Crateur et Matre du monde. En faisant un tel retour, nous mriterons de voir reconnue notre affirmation que D. est le crateur du monde et que la terre dIsral appartient au peuple juif comme une vrit que les nations du monde admettent comme par miracle, de faon stupfiante, car en fait, ils nont aucune raison logique daccepter ce fait.

Parachat brchit
Ajoutons que cela est indiqu par le mot Brshit, dont les lettres interverties peuvent se lire: Amar Rabbi Itzhak: Te-she-v, Rabbi Yitshak a dit: reviens D. Ce retour est essentiel car il permet Isral de donner aux nations une rponse irrfutable. Ces mmes lettres, dans un autre arrangement, peuvent se lire: Tashouv Eretz Isral lYehoudim , que la terre dIsral soit rendue aux Juifs. Nous venons dapprendre une ide profonde. La Torah commence par le mot Brshit pour nous enseigner quil faut toujours se trouver proche de D., par un retour aux sources, la foi en D., Crateur du monde, et lacceptation, avec amour, de toutes les souffrances, mme si elles sont sans cause apparente, car LEternel rprimande celui quIl aime (Mishley 3:12). Pour lhomme simple, il est difficile daccepter le fait que D. prive celui-ci pour favoriser celui-l, mais D. est sans iniquit, Il est juste et droit (Dvarim 32:4) et Ses jugements sont Vrit, et ce quIl fait est Vrit (Sanhdrin 42a). Alors pourquoi prend-Il celui-ci pour donner celui-l? Mais celui qui se souvient et accepte lide que D. est Tout-Puissant et quIl peut tout pour celui qui obit Sa volont, peut le comprendre. SIl ta pris quelque chose, il y a srement une raison que tu ne peux pas saisir parce que ton esprit trop troit ne le conoit pas, mais sois sr que tu verras des miracles et des prodiges, des splendeurs et des merveilles dans lorigine des choses - grce ta foi et ton retour D. Il est certain quun tel retour D. a de quoi apaiser et rconforter lesprit de lhomme troubl par des doutes. La Torah dbute justement avec Brshit, pour montrer le lien entre lhomme et le repentir qui transforme lhomme en un tre nouveau, comme il est dit (Rambam, Halachot Teshouva, VII:6): Hier il tait ha, rpudi, et tenu en horreur et aujourdhui il est aim, agrable, et tenu en affection , et (Brachot 34:2): Celui qui se repent de ses fautes a une place que les hommes les plus vertueux ne peuvent pas occuper . Cest une grande bont de la part de D. de permettre Son peuple de revenir Lui, et de trouver par l une rponse indiscutable aux accusations des nations. Les Sages soutiennent fortement cette opinion puisquils disent propos du verset (Shemot 33:2): et Jexpulserai le Cananen, lAmorren, le Hten etc. que Yoshoua a combattu les peuples qui occupaient alors la terre dIsral, six en tout. Les Guirgachens ne sont pas du nombre, et la question se pose: que sontils devenus? Les Sages expliquent (Vayikra Rabba 17:6 Rashi ad. loc.): Les Guirgashens se sont retirs devant les Enfants dIsral, ils sont partis deux-mmes. Ils reurent en rcompense de leur reconnaissance du droit des Juifs la terre dIsral, un pays aussi beau que celui qui fut le leur, comme il est crit (Ishaya 36:17): Je suis venu et Je vous ai emmens dans un pays semblable au vtre , il sagit de lAfrique. (Voir aussi Yroushalmi Shevyit VI:1). Il faut se demander pourquoi les Guirgachens avaient une telle foi en D. et en Sa promesse au peuple juif, quils se sont retirs et ont quitt le pays sans chercher combattre Isral comme le firent les autres peuples. Cela prouve la vracit des propos de nos Sages: lorsque les Juifs obissent la volont de D., quils ont foi en Lui, le Crateur et le Matre de tout, quils ne servent que Lui, quils pratiquent la Torah et ses commandements, aucun peuple et aucune nation ne peuvent les dominer (Ktoubot 66b), et les nations reconnaissent, avouent, et savent que D. est Vrit et sa Torah est Vrit et Son peuple, le peuple juif, est le peuple lu par D. et ils ne lui font pas la guerre. Ils admettent que la Terre dIsral appartient au peuple juif, que tous les autres pays ne subsistent que par leur mrite, et ils se font ses tributaires. Les Guirgachens se sont retirs deux-mmes et sont alls vers un autre pays, sans dclarer la guerre, sachant parfaitement que la Terre dIsral appartient aux Juifs, quils ne sont pas des voleurs qui viennent conqurir des terres trangres. Mais les autres peuples, qui sont rests pour combattre Isral, furent anantis par Yoshoua afin que tous les peuples connaissent la punition rserve ceux qui font souffrir Isral sans raison. Remarquons que la Torah ne commence pas non plus par le commandement du Shabbat bien que lobservance de ce jour sacr soit quivalente tous les autres commandements (Shemot Rabba 25:15). Le Shabbat aussi symbolise la cration, puisque D. Sest repos aprs avoir termin Son uvre, comme il est crit (Brshit 2:2): Il Se reposa le septime jour de toute luvre quIl avait faite. Cesser toute activit cratrice le septime jour est un tmoignage flagrant de la foi en D., Crateur du monde et de toutes les cratures. Celui qui observe le Shabbat obira aussi aux autres commandements, si bien quen proclamant

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dans la sanctification du Shabbat: Et luvre du ciel et de la terre fut acheve... nous devenons partenaires de D. dans la cration du monde (Shabbat 119b). Pourquoi la Torah commence-t-elle par Brshit et non par le Shabbat? Afin de nous dire que sans un retour D., tout le reste parat insignifiant, y compris le Shabbat et la sanctification du nouveau mois, premire loi donne Isral. Cela explique aussi pourquoi la Torah ne commence pas par le commandement de la circoncision (cest notre deuxime question) qui fut ordonn Avraham Avinou et sa descendance, car si ce nest un commandement de D., la circoncision na pas de raison dtre. Le lien entre les derniers et les premiers mots de la Torah est clair par le verset (Oshea 14:2): Retourne Isral vers lEternel ton D. car tu nas failli que par ta faute. Le mot vers , d[ form par les lettres ayin-daled, compose aussi le mot [d qui signifie sache . Cest dire que par un retour D. Isral parvient savoir clairement que D. est le crateur de tout ce qui est. Ce nest que par ignorance quils ont failli et faut, mais qui veut se purifier est aid du Ciel (Shabbat 104a). Il suffit que lhomme suscite en luimme le dsir de revenir D. pour que, sans aucun doute, D. lui vienne en aide. Sil en manifeste seulement le dsir, D. lui donne la force et la capacit de Le connatre. A partir du moment o lhomme commence ouvrir les yeux, comme il est dit: lorsque je contemple Tes cieux, ouvrage de Tes doigts, la lune et les toiles que Tu as formes (Thilim 8:4) et quil voit combien grandes sont Tes uvres (ibid. 104: 24), le plus grand des miracles issu de la bont de D. se produit et il bnficie de laide divine. Il suffit lhomme de voir de ses propres yeux la beaut et la splendeur de la cration pour que D. laide affirmer sa connaissance jusqu ce quil en vienne sexclamer combien grandes sont Tes uvres, D! parce quil sest prpar recevoir laide de D. et quil a eu le dsir de Le connatre. Tel est le lien entre la fin et le commencement de la Torah. Que lhomme commence par regarder et contempler de ses propres yeux tous les prodiges et tous les miracles sur lesquels le monde repose, et il en arrivera au commencement , un retour D., savoir et comprendre que D. a cr le monde, quIl est Vrit et que Sa Torah est Vrit. On pourrait demander: Comment les nations savent-elles que, si les Juifs nobservent pas les lois de la Torah, ils sont exils de leur terre et que ce nest que lobservance des lois ordonnes par D. qui justifie leur droit de proprit sur la terre? Comment savons-nous quils admettent cette rgle? La rponse est crite dans la Torah (Dvarim 29:23-27): Tous les peuples diront: Pour quelle raison lEternel a-t-Il fait cela son pays? Pourquoi une si grande colre? Et ils rpondront: Cest parce quils ont dlaiss lalliance de lEternel, D. de leurs pres... que la colre de D. sest enflamme contre ce pays et quIl a fait pleuvoir sur lui toutes les maldictions contenues dans ce Livre (Voir Dvarim, Likoutey R. Itzhak b. Avraham). Concernant le verset (Thilim 79:1): Chant de Assaf. ? Dieu! les trangers ont envahi Ton hritage... , les Sages stonnent (Echa Rabba 4:15): Chant de Assaf? Naurait-il pas fallu dire plutt: Lamentation de Assaf? Mais cest un chant, parce que D. a dvers Sa colre sur du bois et sur des pierres, et non pas sur le peuple dIsral . Les peuples se demandent pourquoi, sils sont vraiment le peuple lu, les Juifs furent exils de leur pays, et pour quelle raison le Temple fut dtruit. Et de rpondre: Cest parce quils ont abandonn leur D. quIl les a exils dans Sa colre . Ils parviennent deux-mmes cette conclusion. Lorsque les Juifs de lexil abandonnent D. ils sont has par les trangers et traits de voleurs et dusurpateurs. Mais partir du moment o les Juifs sont fidles leur D. mme dans lexil, les nations affirment delles-mmes que ce nest pas la haine du Juif qui les a motives; au contraire - diront-elles - nous aimons les Juifs! Cest en soi une vritable sanctification du Nom de D. car les nations trangres en viendront la connaissance du Crateur en voyant la bonne conduite des Juifs. Si au contraire, les Juifs de lexil abandonnent D. et au lieu de sanctifier Son Nom, Le profanent aux yeux des peuples, ceux-ci ne peuvent pas parvenir la connaissance de D. et ils font souffrir les Juifs, les qualifient de toutes sortes dpithtes vexantes, ce quils ne feraient pas si les Juifs observaient les lois de la Torah et sanctifiaient le Nom de D. aux yeux des peuples et des nations. Chaque Juif a le devoir de suivre totalement la voie de D. et dtre un honneur pour son peuple. Ce faisant, il mritera dtre tmoin de prodiges et de merveilles, et il sera tmoin de miracles, vidents et voils. Et sans hsiter, il donnera aux nations du monde une rponse irrfutable: la terre dIsral est nous, D. nous protge, Il est proche de nous, Il ouvre notre cur Sa connaissance et nous permet de Le servir de tout cur. Celui qui veut se purifier est aid du Ciel, quil en soit ainsi. Amen.

Parachat brchit La Torah et Isral, finalit de la cration du monde


Au commencement D. cra le ciel et la terre; et la terre tait un abme informe et les tnbres recouvraient labme et le souffle de D. planait sur la face des eaux; et D. dit: que la lumire soit, et la lumire fut (Brshit 1:1-3). Nous savons que la Torah sappelle rshit, dbut, comme il est crit (Mishley 8:22): D. ma cre au dbut de Son uvre, ds lors, avant toute chose. Le commentateur Rashi (ad. loc.) explique: Au dbut de Sa cration - avant quIl nait cr le monde (Voir aussi Metzoudat David, ibid. verset 23). La Torah a prcd la cration du monde de deux mille ans, comme le disent nos Sages (Avoda Zara 9a) et pendant tout ce temps-l, D. se rjouissait de la Torah comme il est crit (Mishley 8:30): Jtais pour Lui un plaisir permanent (que Rashi explique: pendant deux mille ans). Les Sages disent (Brshit Rabba 1:1): Toute la cration na quun seul but: la Torah, cest pour la Torah qui sappelle rshit, commencement (Brshit Rabba 1:4), et par la Torah que le monde fut cr , ou encore: D. a considr la Torah et Il a cr le monde, elle a t loutil de Son uvre. Son seul but tait de donner Ses lus, le peuple dIsral, la Torah par laquelle et pour laquelle le monde et tout ce quil contient furent crs (Zohar I 24). Nous lisons dans le Talmud (Ndarim 32a): Rabbi Elazar dit: grandiose est la Torah, car si ce ntait pour elle il ny aurait ni ciel ni terre, comme il est dit: Si ce ntait pour Mon alliance ternelle, Je naurais pas fix des lois au ciel et la terre . Cest une preuve supplmentaire que tout fut cr par et pour la Torah. Il est crit par la suite (Brshit 1:2): et le souffle de D. planait sur la face des eaux . Leau symbolise la Torah (Babba Kamma 17a) comme il est crit: Vous qui avez soif, voici de leau , et leau existe ds le dbut de la cration puisque les cieux eux-mmes sont composs de feu et deau, comme lindique le mot shamayim, esh-mayim (voir Rashi, au dbut de son commentaire). Nous voyons que leau fut cre ds le dbut de la cration. La suite du texte indique aussi que le monde fut cr pour la Torah, afin que lhomme puisse servir et observer la Torah et proclamer le Nom de D. dans le monde. Concernant la cration de lHomme, il est dit (Brshit 1:26): Faisons lHomme Notre image et Notre ressemblance, quil domine sur les poissons de la mer et sur les oiseaux du ciel . Maintenant que la cration est parfaite, dans toute sa splendeur et dans toute sa gloire, lHomme est cr limage de D. et Sa ressemblance, pour ressembler D. dans tous Ses actes et tous Ses attributs, pour tre saint comme Lui. Cest ce qui est crit (Vayikra 19:2): Soyez saints car Moi, votre D., Je suis Saint . Et lHomme reoit une tche: Dominez les poissons de la mer , cest dire pntrez les profondeurs de la Loi et de la Torah qui est reprsente par leau (Babba Kamma 17a), car cest pour elle que le monde fut cr. Quel est le but de la cration, sinon dobserver la Torah et dobir aux commandements que D. nous impose? Cest pour cela que lHomme fut cr en dernier lieu, il vient dans un monde o tout est prt et ordonn, afin de lui permettre de recevoir la Torah et ses lois. Sache que la cration tout entire est un secret de la Torah et de la sagesse. LImmanent a voulu lever les esprits nobles, et Il a cr quatre mondes - Atzilout, Bryia, Yetzira, Assyia - dans lesquels il a plac les dix Sphirot: Kter (Couronne), Hochma (Sagesse), Bina (Intelligence), Hessed (Bont), Gvoura (Puissance), Tiphret (Beaut), Netzah (Eternit), Hod (Gloire), Yessod (Fondement), Malkhout (Royaut), qui sont les assises du ciel et de la terre. Sans la Torah, impossible de les connatre ni de les comprendre. Dailleurs les nations du monde, nayant pas reu la Torah, ignorent lexistence de ces principes fondamentaux. Cest dire que toute la cration, et tous les trsors quelle renferme, visibles et invisibles, nexistent que pour la Sainte Torah. Si toute la cration nexiste que pour la Torah, pourquoi celle-ci dbute-t-elle par Au commencement D. cra le ciel et la terre , et non par le verset: D. ma cr au dbut de Son uvre, ds lors, avant toute chose , pour dcrire ensuite lordre de la cration? Cela nous aurait enseign clairement que la Torah avait prcd la cration et que le monde fut cr pour elle. Lorsque le peuple dIsral se trouvait au Mont Sina, il est dit (Shemot 19:17): et ils se runirent au pied [littralement sous ] de la montagne ce qui nous enseigne que D. a brandi la montagne au-dessus de leur tte, et leur a dit: Si vous acceptez la Torah, bien; sinon, ici mme vous serez ensevelis (Shabbat 88a). Mais nous savons quIsral avait dj promis: Nous excuterons fidlement tout ce que D. nous commande (ibid. 24:7).

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Il est difficile de comprendre pourquoi D. choisit dobliger le peuple dIsral recevoir la Torah sous la contrainte de cette menace au-dessus de sa tte, tant donn quil avait dj accept le joug divin de plein gr en disant: nous excuterons fidlement ce que lEternel nous ordonne ? (Voir Shabbat 88a, et Tossaphot ad. loc.). Nous savons que chacun dispose du libre arbitre et a le choix de faire le bien ou le mal en ce monde. Si D. nous contraint recevoir la Torah, quadvient-t-il de notre libre arbitre? Comprenons tout dabord pourquoi les Enfants dIsral ont dit (littralement): Nous ferons et nous entendrons . Logiquement, il faut dabord entendre lordre, pour pouvoir ensuite lexcuter. Nauraientils pas d dire: Nous entendrons et nous ferons ? Cest largument de cet impie qui dit Rabba en se moquant: Isral est un peuple qui agit la lgre, ils ont parl sans rflchir lorsquils ont dit: Nous ferons et nous entendrons (voir Shabbat, ad. loc.). Il est permis de supposer que le peuple dIsral na pas dclar Nous ferons et nous entendrons sous la contrainte, car bien avant de se runir au pied du Mont Sina, les Juifs savaient que D. veille sur eux et les protge, et ils ont toujours eu foi en Sa providence. Ils savaient quils avaient t sauvs de la fournaise dEgypte et des quarante-neuf degrs dimpuret (Zohar Hadash Yithro, 39a) parce quils navaient chang ni leurs noms, ni leur faon de shabiller, ni leur langue - ils parlaient hbreu (Vayikra Rabba 32:5). De tout temps, cest Lui quils adressaient leurs prires, et cest de Lui quils espraient la rdemption de lesclavage dEgypte, comme il est crit (Shemot 2:23): Et les Enfants dIsral crirent et leur appel monta vers D. du fond de leur esclavage. Dj avant davoir reu la Torah, les Juifs avaient accept un certain nombre de commandements Marra (Rashi, Shemot 15:25), y compris celui dapporter lagneau du sacrifice de Pessah (ibid. 12:1), linterdit de consommer ou de possder du levain pendant cette fte (ibid. v. 15 et 19), le commandement de manger la matza (ibid. v. 8), le rachat des premiers-ns du btail (ibid. 13:2), le commandement des Tephilines (ibid. 9-16), tout comme lobservance de la saintet du Shabbat qui est un commandement gal en importance tous les autres commandements (Yroushalmi Brachot I: 5), la circoncision (Brshit ch.17), et beaucoup dautres commandements. Cest dire que les Juifs avaient dj une certaine connaissance de la Torah bien avant quelle ne ft donne au Mont Sina, et ils laffectionnaient particulirement tant donn que Ses voies sont pleines de douceur et tous Ses sentiers emplis de paix (Souca 32a). Cest pourquoi, lorsquils ont dit Nous ferons puis nous comprendrons leur intention tait: ce que nous avons dj pratiqu jusqu maintenant et qui nous est command par D., nous le ferons, car les voies de la Torah sont bonnes et nous Lui obirons en tout sans faille, mais cela ne suffit pas. Nous voulons en savoir plus. Que D. nous donne Lui-mme dautres commandements. Entendre la voix de D. correspond une aspiration profonde du peuple dIsral, et ils veulent lentendre encore. Cest le sens de Yim shamoah tishmah - Si tu coutes, et que tu entends la voix de lEternel ton D... (Shemot 15:26), savoir: si vous respectez sans restriction votre promesse dcouter la parole de D., vous lentendrez encore et encore. Tel est le sens de nous ferons et nous entendrons . Nous comprenons prsent pourquoi les Sages disent (Avot III:7): Celui qui interrompt son tude pour dire Que cet arbre est beau! met sa vie en danger . Larbre symbolise la Torah comme il est crit (Mishley 3:18): Elle est un arbre de vie pour ceux qui sy attachent, heureux ceux quelle soutient . Cest dire que celui qui interrompt son tude pour dire que cet arbre est beau! , comme jai bien appris la Torah jusqu prsent... je connais bien le Talmud et les lois, je suis content de moi-mme, je comprends la Torah et je nai pas besoin de rviser ce que je sais! celui-l se met lui-mme en danger, car la Torah est un lixir de vie (Yirouvin 54a) uniquement si lon continue lapprendre et lapprofondir. La Torah prsente soixante-dix visages; il existe soixante-dix aspects de la Torah (Bamidbar Rabba 13:15) et ltudiant doit rviser son tude, faute de quoi, linstar de celui qui sme mais ne rcolte pas, il oublie ce quil a appris (Sanhdrin 99a). Nos anctres au Mont Sina en sont la preuve: bien quils aient possd une connaissance de la Torah telle quils ont t nomms la gnration de la connaissance , ils ne se contentrent pas dexcuter, ils voulurent aussi entendre la voix de D. pour comprendre la Torah et ses lois. Chacun de nous doit suivre leur exemple car Le sage coute et enrichit son savoir (Mishley 1:8). Le peuple dIsral eut donc raison de faire prcder la comprhension de laction, car celle-ci se rfrait au pass, et la comprhension lavenir.

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Et pourtant, la Torah fut donne sous la menace de la montagne place au-dessus de leur tte, par contrainte, et sans quils aient la possibilit dchapper, et ils navaient donc pas le choix. Etant donn que nous entendrons concerne lavenir, nous pouvons comprendre pourquoi D. a brandi la montagne au-dessus de leur tte, bien quils se fussent dj engags obir la Torah. De mme quil existe un corps et une me, de mme il existe une Torah crite et une Torah orale. La Torah crite est semblable au corps, et la Torah orale lme et lun a besoin de lautre. De mme quil ne peut pas y avoir de corps vivant sans me, il ne peut pas y avoir dme sans soutien corporel. En disant: nous ferons et nous entendrons , les Enfants dIsral navaient accept que la Torah crite. Il leur suffisait dobir aux commandements sans en approfondir le sens et les concepts sur lesquels ils sont fonds. Une obissance dpourvue de toute vellit de dvoiler les secrets de D. est certainement une bonne chose - ne scrute pas ce qui est loin de toi . Mais D. voulait quil en soit autrement. Il les a menacs en brandissant la montagne au-dessus de leur tte, disant: Si vous acceptez la Torah, bien, sinon vous serez ensevelis ici-mme. Les Enfants dIsral navaient pas la possibilit de schapper. Alors D. leur a dit: De mme que vous tes maintenant sous la montagne et que vous navez pas la possibilit de fuir, ni gauche ni droite, et que vous tes dsempars, de mme si vous nacceptez que la Torah crite, vous ne la comprendrez pas et vous resterez perplexes, ne sachant pas o est la gauche, o est la droite, et vous serez privs du bnfice de la Torah et de ses bienfaits, si bien quelle vous ensevelira. Si vous nacceptez que la Torah crite, elle sera pour vous comme un corps sans me quil faut enterrer, et vous serez perdus dans la Torah crite. Vous devez donc accepter galement la Torah orale, et alors de cette montagne, vous pourrez aller et venir, car vous aurez aussi une me. Ceux qui connaissent les profondeurs de la Torah savent que la Torah orale est la rvlation du sens cach de la Torah crite. Le Rabbin Menahem M. Halprin dans lintroduction son livre Eypha Shlema, crit que la Torah cache des secrets sublimes qui en sont lme profonde... La Torah orale est lme et la vie de la Torah crite, et il est impossible de comprendre lune sans lautre. Cela nous permet daffirmer que D. na soumis les enfants dIsral aucune contrainte pour recevoir la Torah, puisquils ont dclar: nous ferons et nous entendrons et que D. dsirait seulement expliquer au peuple juif que les fondements du ciel et de la terre furent crs dans le but de raliser la fois la Torah crite et la Torah orale, qui en est lme et qui est essentielle pour comprendre ce qui est crit - le corps de la Torah. La rponse la question pose plus haut, savoir pourquoi la Torah dbute-t-elle par Au commencement D. cra et non par le verset D. ma cre au dbut de Sa voie , devient claire. Le monde fut cr afin que les Juifs reoivent et observent la fois la Torah crite et la Torah orale. Le mot brshit lindique, car b reprsente la Torah crite, rshit, la Torah orale, qui sont les fondements de la cration du monde, et ce nest quensuite que furent crs le ciel et la terre. Cest--dire: Au commencement, pour la Torah crite et la Torah orale, D. cra le ciel et la terre, lunivers tout entier, et tout ce quil contient. Au commencement de la cration, les cieux furent crs - ils reprsentent la Torah orale qui est cleste, lme de la Torah et ses secrets qui ne sont rvls qu celui qui est assidu, persvrant, qui craint D. et qui dsire ardemment Ses lois (Thilim 112:1), et la terre fut cre - elle figure la Torah crite qui est le corps, et fut donne au Mont Sina, qui est humble et soumis comme la terre. Ensuite il est crit: La terre tait un abme informe et les tnbres recouvraient labme . Cest dire que si lhomme ntudie que la Torah crite (la terre) il ne sera quun abme informe et dsol. Ntant quun corps, il ne pourra pas aller et venir librement, et il lui semblera ntre quun abme recouvert de tnbres. Car lhomme ignorant marche dans les tnbres sans savoir o il va. Mais alors: Le souffle de D. plane sur la surface des eaux . Le souffle de D. qui est la Torah orale, la vie et lme de la Torah crite, plane sur les eaux, et leau cest la Torah (Babba Kamma 17a), et alors lhomme peut saccomplir en ce monde. Comment? Et D. dit: que la lumire soit . Afin de comprendre les secrets cachs de la Torah, la lumire est ncessaire; cest la Torah orale, qui claire la Torah crite. La Torah crite et la Torah orale sont comme deux amants insparables. Cest par leur mrite que le monde et toute la cration existent. Isral et la Torah (crite et orale) forment lessentiel de la cration du monde et le fondement des cieux et de la terre. Ils nous enseignent le sens de la vie et nous indiquent les voies justes. Le monde repose sur le mrite du peuple juif qui observe la Torah crite et orale et obit ses lois telles quelles furent donnes par D., Crateur du monde.

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Pahad David Le sens cach et le sens rvl de la Torah


Il est crit (Brshit 1:1): Au commencement D. cra les cieux et la terre . Rabbi Yitshak demande: Pourquoi la Torah dbute-t-elle ainsi? (Yalkout Shimoni Shemot 187). Les commentateurs de tous les temps se sont penchs sur cette question. Jai voulu me joindre eux moi aussi, dans le sens o il est dit mdite la part de ton hritage . Les Sages disent (Haguigah 11b): Il est interdit de commenter les secrets de la Cration, Maass Brshit, devant deux lves, et les secrets de lexistence de D., Maass Merkava, seulement devant un lve sage qui comprend de lui-mme ce qui est sous-entendu . Et encore (ibid. 13a): Rabbi Amy dit: On ne doit rvler les secrets de la Torah qu celui qui possde les cinq qualits du verset (Ishaya 3:3): stratge et notable, conseiller, expert et connaisseur . Rashi (ad. loc.) explique: Les secrets de la Torah, comme par exemple Maass Merkava, le Livre de la Cration, et Maass Brshit . Nous trouvons ce sujet dans le Livre de ben Syra (Haguiga 13a, Brshit Rabba 8:2, Zohar II 270b) : Ne cherche pas pntrer les mystres ni sonder les choses qui te sont caches, mdite plutt la part de ton hritage, car tu nas que faire des secrets . Le commentateur Maharsha explique ainsi la rptition: Ne cherche pas pntrer les mystres, se rfre au Maass Merkava, ce qui est au-del et en de, les choses qui te sont caches vient ajouter que celui qui ne connat pas les lois de la physique ne peut pas sonder le Maass Brshit. Par contre, mdite la part de ton hritage est un impratif car lhomme doit approfondir sa connaissance de D. par lobservation de Ses uvres, comme le font les scientifiques et les philosophes, mais tu nas que faire des secrets , se rfre au secret des unions, comme par exemple linterdit dpouser la sur de sa femme, alors que Yaakov qui tait pieux et pur (Pessahim 56a) avait pous deux surs, ou linterdit dpouser sa propre sur, alors quau dbut du peuplement du monde Havel et Can avaient pous leur sur (Sanhdrin 58b). Ces sujets sont des secrets de la Torah tout autant que les mystres du Maass Brshit et du Maass Merkava . Nous pourrions humblement ajouter un autre exemple: Ne cherche pas pntrer les mystres concerne Yaakov Avinou et lange de Essav avec lequel il a lutt jusquau petit matin. Yaakov lui demanda alors quel tait son nom. Pourquoi veux-tu savoir mon nom? lui rpondit lange (Brshit 32:30), qui expliqua Yaakov que nous navons pas de nom propre, car notre nom change en fonction de la mission pour laquelle nous sommes envoys (Brshit Rabba 78:4, Rashi ad. loc). Le commentateur Ohr Hahayim ajoute: Nous navons pas de nom dfini, cest un mystre, et si tu me demandes mon nom une autre fois, il sera diffrent car notre nom change . De mme concernant Manoah, le pre de Shimshon, il est crit (Shoftim 13:17-18): Et Manoah demande lange: Quel est ton nom afin que tes paroles saccomplissent et que nous thonorions? Et lange lui rpond: Pourquoi tenqurir de mon nom - cest un mystre . Rashi commente: Cest un mystre: une chose cache, il change selon les occasions et jignore ce quil est aujourdhui . Ne cherche pas pntrer les mystres . Il ne faut pas chercher percer ce qui est cach et qui ne peut pas tre rvl parce quil se transforme (cest une merveille que le nom change en fonction du genre de mission). Les choses qui te sont caches , Maass Merkava et Maass Brshit, sont des secrets quil ne faut pas sonder, comme il est crit (Dvarim 29:28): Les choses caches appartiennent lEternel notre D. Par contre, les lois de la nature nous sont rvles, comme le dit la suite du verset: les choses rvles nous appartiennent, nous et nos enfants, pour toujours . Tu nas que faire des choses caches - de ces lois de la Torah pour lesquelles nous ne trouvons pas dexplication rationnelle et qui nous semblent contradictoires, comme lexemple donn plus haut concernant le mystre des unions interdites. Nous savons quil existe quatre mondes, Atzilout, Bryia, Yetzira, Assyia, (Zohar II 192a). La Torah se trouve dans ce monde-ci, le monde de la Assyia, de laction, et non dans le ciel (Babba Metzya 59b). Malgr cela, par un attachement fervent, lhomme peut parvenir pntrer les secrets de la Torah comme lont fait nos Sages et il est donn chacun de parvenir leur connaissance, comme le dit le Rambam dans son Code de lois (Halahot Teshouva, V:2): Chacun a la possibilit datteindre le degr de perfection de Mosh Rabbeinou . Atteindre cette perfection nest possible que si lon se sacrifie pour la Torah, comme il est crit (concernant les lois de puret et dimpuret) (Bamidbar 19:14): Telle est la loi de la Torah: un homme qui meurt sous la tente... et les Sages expliquent (Brachot 63b): La Torah nappartient qu celui

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qui se meurt pour elle . Cest alors quelle devient sienne, que les secrets de la Torah lui sont rvls, et sil ltudie pour elle-mme (Avot VI 1), tous les secrets et toutes les portes de la Torah lui sont ouverts. Nous comprenons maintenant pourquoi la Torah est appele commencement comme il est dit (Mishley 8:22): LEternel me cra au dbut de Sa cration , et toute la cration nexiste que pour la Torah, qui est le commencement de tout (Brshit Rabba 1:1). Mais sil en est ainsi, on pourrait objecter que la Torah aurait d dire: Le commencement D. cra (Rshit, et non Brshit), puisque la Torah est le commencement. Pourquoi est-il ajout la lettre beth pour former le mot brshit? La Torah crit Brshit, justement pour signifier quavant tout, nous devons apprendre comment aborder la Torah et ses secrets. Tout dabord, il faut apprendre le sens simple de la Torah, ses cinq livres, le Talmud, les lois, les exgses de nos Sages dans les divers Midrashim et les prophties, jusqu tre bien vers dans toutes ses voies pleines de douceur (Mishley 3:17). Il faut apprendre aussi les lois de la nature, sans en scruter les secrets. Et puis, lorsque grce une tude assidue, llve a acquis des notions claires et que toutes ses actions sont droites, il peut alors saventurer et mditer les secrets de la Torah, comme le disent nos Sages (Avoda Zara 20b): La Torah conduit la prudence, la prudence mne au zle, le zle mne la nettet, etc. Lorsque lon est exempt de toute faute et que lon a grimp les chelons dcrits par Rabbi Pinhas ben Yar, jusqu possder la qualit daustrit, comme il est dit (Ybamot 20a): Sois saint, mme dans les choses qui te sont permises , alors seulement on peut commencer aborder les secrets de la Torah. Le mot Breshit lui-mme marque que le commencement indique ce qui est rvl, et non pas ce qui est cach et enfoui. Ce mot a la mme valeur numrique que lexpression nisgav mi-binateynou, au-del de notre comprhension et qui se rfre au sens cach de la Torah. En outre, les mots Brshit bara Elokim ont la mme valeur numrique que lexpression ne cherche pas pntrer les mystres . Le mot Brshit a la valeur numrique des premires lettres de lexpression: ne cherche pas pntrer les mystres ni sonder les choses qui te sont caches si on y ajoute les lettres zayin-khaf, qui forment le mot Zakh pur. Cela indique que celui qui est net et pur peut commencer aborder les secrets cachs de la Torah et ses mystres. La cration de lHomme, une crature enveloppe de lumire qui se tient face au Roi des rois, est un des plus grands mystres de la Torah... LEternel a dit (Brshit 1:26): Faisons lHomme Notre image et Notre ressemblance , mais est-il possible dattribuer D. une forme et une image? (Le saint Rabbi Yhouda Pattia explique cela longuement dans son livre Mahan Yhouda). Cest que lHomme ressemble effectivement son Crateur en ce quil sattache D., Ses secrets et Ses mystres. Ce que racontent les Sages au sujet de Can, (Brshit Rabba 22:12) sapplique tout homme. Tant quil navait pas faut, les animaux le craignaient, mais aprs la faute, cest lui qui eut peur des animaux. Cest dire que tant que lhomme na pas commis de faute, tous le craignent car il est porteur de limage de D., mais sil commet une faute, cette empreinte divine sefface et les animaux ne le craignent plus. Aprs avoir commis son crime, Can eut peur des animaux. Les Sages disent bien que Can a fait un compromis avec son Crateur , cest--dire quil sest repenti (Brshit Rabba 22:28). Mais son crime tait tellement grave, comme il lavoue lui-mme (Brshit 4:13): Mon crime est trop grand pour tre pardonn , que lempreinte de limage divine ne lui fut pas compltement restitue, et il fut seulement marqu par un signe sur le front (Pirkey DRabbi Elizer 21) comme il est crit (ibid. 4:15): Et lEternel marqua Can dun signe . Le Ari zal enseigne que les dix Sphres elles-mmes sont des vtements. Dans son livre Likoutey Taamey Torah (page 293) il crit que la sphre Hod (Gloire) attire sur elle les scories, les impurets, et les dcrets nfastes (voir Tikouney HaZohar 69). Ce sens est cach dans les mots sans trve endolori (Echa 1: 13) [le mot davah, endolori, est form par linversion des lettres du mot hod, Gloire]. Cette ide est aussi indique dans le verset: Majest (hod) et splendeur (hadar), tel est le propre de Son action (Thilim 101:3), car ce qui est beau est un plaisir pour les yeux, et la beaut attire elle les regards impurs. La fin de ce mme verset dit: Sa justice subsiste jamais , ce qui signifie que la majest divine subsiste jamais, car elle attire elle les forces du mal et les pure en liminant les scories, et il en sera de mme pour le Temple, dtruit cause du mal, et qui sera reconstruit.

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En se fondant sur les crits du Ari zal, on peut comprendre le verset (Shmouel I, 15:29): LEternel, Protecteur dIsral (Netzah) nest ni trompeur ni versatile, Il nest pas un tre humain pour se rtracter . Si les forces du Mal avaient la possibilit dengloutir le Bien, le monde serait ananti. Mme lpoque du dluge, linondation a dtruit pour toujours tout ce qui se trouvait la surface de la terre, et les impurets neurent aucune emprise sur le monde. Celui qui est nomm lEternel, (netzah) ne trompe pas, Il ne change pas. Il est significatif de noter que le mot yenahem est compos des mmes lettres que mey Noah, le dluge. Le prophte nous dit au nom de D. (Ishaya 54:9): Jai fait le serment de ne plus jamais occasionner de dluge sur la terre , afin que lon ne puisse pas dire que le dluge stait empar du pouvoir et de la gloire de D. et que ctait la raison pour laquelle le monde fut dtruit (D. ne dtruit plus le monde parce que, dans Sa bont, Il accepte le repentir des hommes). Le sens de Il ne trompe pas , est que le dluge ne fut pas caus par une emprise des forces du Mal. Mais ce sont des secrets de la Torah, et nous navons que faire de secrets...

La Torah et Isral, base de lexistence du monde


Au commencement D. cra le ciel et la terre; et la terre tait un abme informe et les tnbres recouvraient la surface de labme et le souffle de D. planait sur la face des eaux; et D. dit: que la lumire soit, et la lumire fut (Brshit 1:1-3). Et D. dit: Faisons lhomme Notre image et Notre ressemblance (ibid. v. 26). Les exgses, tant classiques que modernes, de ces premiers versets de la Torah sont nombreuses. Nous avons aussi exprim notre interprtation dans dautres chapitres, mais les Sages ayant dit: la Torah prsente soixante-dix facettes (Bamidbar Rabba 13:15), les interprtations du mot Brshit sont inpuisables. Les Sages ont aussi compar la Torah un figuier (Bamidbar Rabba 12:11, Tanhouma Pinhas 11), et cela parce que les fruits des autres arbres peuvent tre cueillis tous en une fois, alors que les figues se rcoltent une une. Nous allons donc tenter dexpliquer le mot Brshit progressivement, ainsi que la cration de lhomme, qui reprsente une partie de la cration du monde, comme disent les Sages (Sanhdrin 37a): chacun doit se dire que cest pour lui que le monde fut cr . 1. Les Sages ont dit (Brshit Rabba 1:1): Le monde fut cr pour la Torah qui est appele le dbut de Sa voie (Mishley 8:22). Dans ce cas, la Torah aurait d dbuter par le verset qui enseigne que la Torah a prcd la cration du monde de deux mille ans, soit neuf cent soixante-dix gnrations (Brshit Rabba 8:2). Pourquoi dbute-t-elle par Au commencement D. cra... ? (Nous en avons dj donn une explication dans le chapitre prcdent). 2. Nous expliquerons galement la cration de lhomme. Et D. dit... , le Nom de D. utilis ici est Elokim, dsignant lattribut de Justice. Pourquoi D. fonda-t-Il tout dabord le monde sur la Justice et non sur la Misricorde? Lauteur du livre Minhat Yhouda: Quel est le sens de faisons lhomme , au pluriel (voir Rashi ad. loc.)? Et lauteur de Minhat Yhouda pose une autre question, encore plus complique: Quel est le sens de Son image et Sa ressemblance , puisque D. nest pas un tre cr pour avoir un corps, une apparence et une forme comme nimporte quelle autre crature? En rponse ces questions, Rashi rapporte dans son commentaire les paroles de nos Sages: Pour la Torah qui est appele le dbut de Sa voie (Mishley 8:22) et pour Isral qui est appel prmices de Sa rcolte (Yrmia 2:3). Sil en est ainsi, le mot Brshit ne signifie pas seulement quau commencement D. cra les cieux et la terre, mais il indique aussi que cest pour la Torah et pour Isral que le monde fut cr. Il est dit aussi (Zohar Trouma 161b): D. cra le monde selon le plan de la Torah et conformment aux principes qui y sont consigns, et le monde et tout ce quil contient fut achev, uniquement par la Parole de D. . La Torah existait donc avant la cration du monde, elle tait Son dlice, comme il est crit (Mishley 8: 30): Jtais pour Lui un plaisir permanent jusqu ce que D. ait dsir crr lunivers pour la Torah. Elle fait le bonheur de D. (Brshit Rabba 1:1), et cest elle que D. souhaita donner ceux quIl aime pour quils obissent ses lois et vivent selon ses commandements, afin que le monde entier soit soumis la souverainet de D. comme il est crit (Yrmia 33:25): Si ce ntait pour Mon alliance perptuelle, Je naurais pas fix les lois du ciel et de la terre . Ce qui causait notre perplexit devient clair prsent: la Torah dbute par Au commencement et non par Au dbut de Sa voie , car la Torah a prcd la cration du monde et elle en est la raison dtre. Nous savons que le but de la cration de lunivers est de

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rendre manifeste la perfection des actes de D., de faire connatre Son Nom et Ses attributs (lIntelligence et la Sagesse) qui sont les secrets de la Torah. Lhomme porte la responsabilit de perptuer et de perfectionner ce monde laide de son me, partie divine de son tre. Le mot Brshit dsigne la Torah et Isral (yashar, ceux qui sont droits), qui sont les prmices (rshit) et cest pour eux que les cieux et la terre furent crs. Le mot B-rshit comprend aussi bien la Torah crite que la Torah orale qui ont prcd la cration du monde et qui, ensemble, sont le dbut de Sa voie (Mishley 8:22). Ce nest quensuite que nous apprenons la cration des cieux et de la terre, et que la Torah dcrit lordre de la cration, comme il est crit: et la terre tait un abme informe (Brshit 1:2). Le verset Au commencement D. cra les cieux et la terre , indique que D. cra tout dabord les cieux , la Torah orale qui contient les secrets les plus sublimes, le sens des commandements qui est lesprit de la Loi, les significations caches dans les accents, les ponctuations, les couronnes des lettres, les valeurs numriques, etc. Seuls ltude applique des voies de la Torah et un mode de vie correct nous permettent de dcouvrir les trsors qui sont cachs dans la Torah et qui nous sont rvls par la grce de D. La terre indique la Torah crite qui fut donne au peuple juif au Mont Sina avec lobligation dobir aux commandements, aux lois et aux statuts qui y sont dcrts, et dont les dtails sont labors dans la Mishna et le Talmud et cods par les dcisionnaires. Ensemble, ils constituent le sujet de ltude de la Torah. Au dbut de la cration, les cieux et la terre taient spars. Tel est le sens de Si ce ntait pour Mon alliance (britti) perptuelle... Le mot britti indique B-briot, deux crations, la Torah crite et orale, sans lesquelles tout le reste serait b-ieter, superflu. Le mot brit a aussi la valeur numrique de six cent treize, soit le nombre total des commandements positifs et ngatifs. Il est dit ensuite: Et la terre tait un abme informe, et les tnbres recouvraient labme . Si lon voulait ne raliser que la terre , la Torah crite, sans apprendre et approfondir paralllement la Torah orale pour comprendre les concepts et les valeurs qui donnent son sens la Loi, on en serait drout et confus et lon ne saurait pas distinguer le vrai du faux, tel celui qui marche dans une obscurit sans fin, dans le sens o il est dit: Le sot marche dans le noir (Kohlet). Pour navoir pas pntr la vrit de la Torah, il risque malheureusement de sgarer, pour lui les tnbres recouvrent labme , car la Torah est profonde comme un abme sans fond, et il est sur le point de se perdre dans ses tnbres. Et D. dit: Que la lumire soit (ibid. 3). D. cra la lumire afin que la Torah devienne pour nous une ralit vivante dont nous comprenons la signification, les allusions, les intentions et le sens cach exprims par chacun de ses mots. Il est vrai que personne ne peut connatre le secret de D. et qui aurait laudace de pntrer son intriorit ? Mais malgr cela, D. rvle Ses mystres ceux qui Le craignent (Thilim 25:14). D. cra la lumire de la Torah pour enseigner cette leon Isral afin que ceux qui sont proches de Lui connaissent Sa volont. Comment parvenir cette lumire? Gotez et voyez que lEternel est bon en tout (Thilim 34:9). Le mot rou (voyez) est compos des mmes lettres que le mot vohr (et la lumire), cest--dire que le commandement est flambeau, la Torah est lumire (Mishley 6:23), et cest aussi le sens de et D. vit que la lumire [la Torah] tait bonne (Brshit 1:4), et Rien nest bon que la Torah (Avot VI:3). Si vous prenez got la Torah, si vous lapprenez, si vous en observez les lois avec amour et avec joie, vous pourrez contempler sa lumire et atteindre les plus hauts sommets. Dans ce sens, il est dit que tout devient bon dans sa lumire (Yroushalmi Haguiga I:7). La lumire inhrente la Torah nous permet de nous corriger, de sentir et de savoir quIl est bon... que Sa lumire est bonne. Jusquo est-il possible de slever grce la Torah? Rabbi Pinhas ben Yar enseigne (Avoda Zara 20b): La Torah conduit la prudence, la prudence au zle, le zle la propret, la propret laustrit, laustrit la puret, la puret la saintet, la saintet lhumilit, lhumilit la crainte de la faute, la crainte de la faute la perfection, la perfection linspiration divine, linspiration divine la rsurrection des morts. Celui qui mdite la Loi de D. jour et nuit (Thilim 1:2) peut atteindre un degr lev, et sil mdite les paroles de D., la lumire se fera et il pourra corriger tout ce qui en lui fut entach dimpuret . Cest le sens de la lumire fut cre . Bien que la Torah crite et la Torah orale aient prcd la cration du monde et en reprsentent le commencement, la possibilit nous est donne de pntrer les profondeurs de la Torah - les mystres cachs et le sens des commandements qui sont la lumire de la Torah, hormis

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certains mystres dont nous navons pas nous occuper. Tout cela est expliqu dans louvrage du Ari zal, Etz Hayim. (Voir ce que notre matre, le Rabbin Mosh Pinto, crit ce sujet dans son livre Shenot Hayim, au nom du Rabbin Avraham ben Atar). Une autre allusion la Torah se trouve dans le mot Brshit, dont les lettres forment les mots brit esh, (une alliance de feu). Brit, lAlliance, cest la Torah, comme il est crit (Yrmia 33:25): Si ce ntait pour Mon alliance perptuelle... et la Torah est appele feu, comme disent nos Sages (Mechilta Yithro 19:18): La Torah est un feu donn dans le feu , comme il est crit (Dvarim 33:2): De Sa droite, Il a donn Son peuple une loi de feu , et sans la Torah Je naurais pas fix les lois du ciel et de la terre . (Ajoutons que la valeur numrique de lexpression miyemino esh dat lamo - de Sa droite, une loi de feu est gale celle de z hou Brshit - cest l le commencement ). Les lettres du mot Brshit forment les mots barata sha, Tu as cr un don, et ce propos, les Sages disent que tous les Enfants dIsral ont une part dans le monde Venir (Sanhdrin 70a). Quelle part et quel don? La rponse cette question est donne par les Sages (Midrash Mishley 8:9): Dans le monde Venir, lEternel donnera en hritage chaque Juste trois cent dix mondes [trois cent dix tant la valeur numrique de sha, don]. Lintention divine, ds le dbut de la cration, fut de donner en hritage ceux qui laiment yesh, tout, pour avoir observ la Torah dans ses moindres dtails. Les lettres du mot Brshit forment aussi lexpression ashrey bayt, Heureux ceux qui logent dans Ta maison (Thilim 84:5) et qui mditent Ta loi crite et orale. Nous pouvons maintenant poursuivre notre explication du verset: Lesprit de D. planait sur la surface des eaux (Brshit 1:2). Les Sages disent (Tanhouma Vayakel 8): La Torah est compare de leau comme il est crit (Ishaya 55:1): Vous tous qui avez soif, voici de leau , et il nest deau que la Torah (Babba Kamma 17a). Avant la cration du monde, D. se rjouissait de la Torah (Brshit Rabba 8:2), et daprs le Zohar (Trouma 161b), D. consulta la Torah et cra le monde, et Il le cra afin de donner la Torah lhomme qui lobserverait et la pratiquerait, afin de conduire le monde la perfection de la connaissance de D. . Tel est le sens de Lesprit de D. planait sur la surface des eaux . Nous en venons la cration de lhomme. Aprs que luvre de la cration fut acheve dans toute sa splendeur, il est dit: Faisons lhomme Notre image et Notre ressemblance, et quil domine les poissons dans les eaux... Lhomme fut cr en dernier lieu, il est le terme et le but de toute la cration et cest pour lui que tout fut cr, comme il est dit: le monde entier na t cr que pour donner des commandements lhomme (Shabbat 30b). Et lhomme fut cr limage de D. afin quil craigne D. et Lui obisse. Dominez les poissons dans les eaux , cest dire: plongez-vous dans les profondeurs de la Torah qui est assimile leau, car si l ntait pas le but, un monde sans valeurs morales et sans pudeur naurait pas de raison dtre, comme il est crit: Si ce ntait pour Mon alliance perptuelle, Je naurais pas fix les lois du ciel et de la terre . Ajoutons cela une interprtation allgorique. Les premires lettres des mots houredou bedgat hayam, dominez les poissons dans les eaux forment le mot havou, comme dans le verset (Thilim 29:1-2): Clbrez (havou) Sa gloire et Sa puissance, rendez hommage (havou) Son saint Nom, prosternez-vous devant lEternel dans la splendeur de Son sanctuaire . Cest en nous plongeant dans les profondeurs pleines de mystres de la Torah jusqu en dcouvrir les secrets enfouis, que nous clbrons lEternel et Lui rendons hommage. Et David HaMelech se lamente (Thilim 119:136): Mes yeux ont vers des torrents de larmes parce que Ta loi nest pas observe , je pleure sur ceux qui nobservent pas Ta Torah et nimaginent mme pas que lunivers tout entier nexiste que par le mrite de la Torah. Il nous reste expliquer pourquoi la cration de lhomme est attribue au nom de D., Elokim (Zohar III 65a), qui reprsente lattribut de Justice? D. sait bien quIsral recevra plus tard la Torah au Mont Sina et que natront des hommes vertueux qui lobserveront! On pourrait croire que cest cause de lopposition des anges, comme il est dit (Sanhdrin 38b, Zohar III 207b): Lorsque D. dsira crer lhomme, Il consulta les anges de la Cour cleste, qui Lui dirent: Quest donc lhomme pour que Tu songes lui? D. leva alors Son petit doigt vers eux et les incendia . D. avait donc dj limin ces anges, et en avait cr dautres qui ne sopposeraient pas Sa volont, car Il na pas rvl ceux-l quAdam engendrerait des hommes

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mchants. Rabbi Hanina dit: Lorsque D. cra lhomme, Il consulta les anges et leur rvla quil engendrerait des hommes vertueux, mais il ne leur dit pas quil engendrerait aussi des hommes mchants (Midrash Talpiot Thilim 76:9). Sil en est ainsi, pourquoi lhomme fut-il cr par lattribut de Justice et non par lattribut de Misricorde? Bien quil soit crit: Elokim dit , Elokim cra , cela nimplique pas que lhomme ft cr seulement avec lattribut de Justice et quil ny et pas participation de lattribut de Misricorde. Nous trouvons dans le verset (Brshit 2:4): Au jour o lEternel D. fit le ciel et la terre lutilisation des deux attributs, la Justice et la Misricorde, pour nous enseigner que D., voyant que le monde ne pourrait pas subsister uniquement par la Justice, lui associa lattribut de Misricorde pour crr le monde (Brshit Rabba 12:15). De mme, concernant la cration de lhomme, D. a associ les attributs de Justice et de Misricorde. Les premires lettres de naass betzalmeynou (faisons Notre image) forment le mot ben, dont la valeur numrique est deux fois celle des lettres du Nom qui reprsente lattribut de Misricorde. Les premires lettres des mots kdmouteynou houredou ( Notre ressemblance, et dominez) ont une valeur de vingtsix, qui est la valeur numrique du saint Nom. Cela montre que lhomme fut aussi cr par lattribut de Misricorde puisquil est destin recevoir la Torah et engendrer des hommes de bien qui la pratiqueront. Par ailleurs, lhomme doit continuer luvre de la cration, comme il est crit (Brshit 2:3): luvre que D. cra pour tre complte , et si des hommes sont destins natre mchants, il sera indispensable dutiliser lattribut de Justice. Les attributs de Justice et Misricorde participent la cration de lhomme de mme quils fonctionnent dans lordre du monde tout entier. Nous avons dit plus haut que les premires lettres des mots naass betzalmeynou forment le mot ben, dont la valeur numrique est deux fois celle des lettres du Ttragramme, et que le nom Elokim aussi est inscrit dans ce verset, ce qui indique que la Justice peut se transformer en Misricorde grce aux actions des hommes vertueux comme le disent nos Sages (Souca 14a): les prires des hommes vertueux transforment lattribut de Justice en attribut de Misricorde . Nous pouvons maintenant rpondre la question pose par lauteur de Minhat Yhouda, savoir pourquoi il est dit Faisons lhomme , au pluriel (voir Rashi, ad. loc.). Il est certain que les anges nont pas particip la cration de lhomme, mais ce pluriel donne la possibilit aux hrtiques de le prtendre. Les Sages (Sanhdrin 38b) ont dj rpondu cette question, mais nous voulons humblement ajouter notre rponse. Puisque D. connat les actions des hommes vertueux et quIl sait davance que de lhomme natront des hommes de bien qui vont recevoir la Torah et dire (Shemot 19:8): Nous ferons tout ce que D. nous ordonne , D. a voulu honorer Adam qui allait engendrer une gnration qui dirait Nous ferons , et Il a fait prcder la cration de lhomme par la parole faisons lhomme , la premire personne du pluriel qui est la formulation utilise par les gens importants. Ici aussi, cause de Sa grande affection pour lhomme, Il dit faisons lhomme au pluriel. Nous savons que D. cra le monde par Sa parole, comme disent les Sages (Avot V:1): Le monde fut cr par Dix Paroles , mais concernant la cration de lhomme, il est dit que D. le cra et le forma de Ses propres mains: Tu me tiens de prs, par-derrire et par-devant (Thilim 139:5), que les Sages expliquent ainsi (Sanhdrin 38a): Adam fut form avec de la terre rassemble des quatre coins du monde, et il est appel luvre des mains de D. (Kohlet Rabba 3:14), parce quil reprsente lessentiel et la finalit de la cration et quil est destin observer les lois de la Torah . Lhomme fut cr en dernier lieu, dans un monde prt le recevoir, o tout est en place pour ses besoins comme une table dresse devant lui (Sanhdrin 38a, Pessikta Zouta, Introduction 17). Cest pourquoi, lorsque D. voulut crer lhomme, Il dit Faisons lhomme pour exprimer laffection particulire que D. a pour lui, et Il la cr de Ses propres mains, afin que lhomme Le serve de tout son cur. Il est possible que le verset Isral, rjouis-toi de ton Crateur (Thilim 159:2) indique que tout le peuple juif se rjouit en D. qui la cr en disant Faisons lhomme , tant Il le chrit. Dans son introduction, le commentateur du Zohar HaSoulam crit: D. qui est parfait de toutes les perfections a cr et form notre corps avec toutes ses tendances, les bonnes et les mauvaises, et il est impossible quun tel artisan produise une uvre vile et imparfaite. Chaque uvre tmoigne des qualits de lartisan, et si un vtement est mal cousu, ce nest pas la faute du tissu, mais celle du tailleur... En disant: faisons lhomme D. exprime Son amour, puisquIl dsire cette crature qui plus tard

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prendra sur elle dobserver la Torah, ce qui est le but de la cration du monde. Cest pourquoi D., qui ne peut en aucun cas tre lauteur et lartisan dune uvre imparfaite et mprisable, a dit Notre image et Notre ressemblance , limage de D., cest--dire rempli de la crainte de D. et possdant une me, partie divine de son tre, lui permettant de pntrer les profondeurs de la Torah. Il est certain quil ne faut pas comprendre limage et la ressemblance dans leur sens littral, puisque D. na pas de corps et pas de forme. A Sa ressemblance signifie plutt que lhomme doit tre lmule de D. dans ses vertus et dans ses actes, comme disent les Sages (Vayikra Rabba 24:4) au sujet du verset: Soyez saints car Moi lEternel Je suis Saint (Vayikra 19:2): De mme que Je suis Saint, vous aussi, vous devez vous sanctifier . Tout cela, afin de dominer les poissons de la mer , qui symbolisent les profondeurs de la Torah, comme nous lavons expliqu plus haut. Mais si, malheureusement, il ne possde pas ces qualits divines, il fait partie de ceux qui traversent la valle des larmes (Thilim 84:7) et cest seulement sil transforme les larmes en image et ressemblance de lhomme [divin], quil ira de victoire en victoire (ibid. v.8) dans le service de D. do la ncessit pour lhomme de raliser en lui limage de D. . Lhomme est cr limage de D. et il a besoin de cette image pour pouvoir surmonter les preuves de ses passions brlantes. Lhomme a reu le libre arbitre de choisir entre ce qui est bon et ce qui est mauvais, comme il est crit (Dvarim 30:15): et tu choisiras la vie . Il subira la punition ou bnficiera de la clmence la mesure des forces spirituelles quil possde. Pour conclure ce chapitre, citons ce qucrit Rabbeinou Behay dans son livre Le Devoir des Curs (La perfection de lAction, chapitre 5): Ce que lhomme accomplit au grand jour ne dpend que de lui. Il agit selon son dsir. Ses actes dcoulent de sa volont et de son libre arbitre, et cest pourquoi il est susceptible dtre puni ou mrite dtre rcompens pour ce quil fait ou ne fait pas . Il est crit (Dvarim 30:15): Vois, je tai donn en ce jour la vie et le bien, ou la mort et le mal, tu choisiras la vie . Et il est dit (Malachy 1: 9): vous tes la cause de cela , et (Yob 34:11): chacun est rtribu selon ses actes , ou encore (Mishley 19:3): Lhomme sot dnature ses actes . Le commentaire de ce livre intitul Pithey Lev explique: La sottise de lhomme le dnature, et sa sottise reflte son chec... ce qui montre que lhomme doit utiliser son libre arbitre pour choisir la vie. Si lhomme choisit de suivre les voies de D., de se sanctifier parce que D. est Saint, il ira de victoire en victoire, et alors il ne tombera pas dans la valle des larmes, et il mritera dtre limage et la ressemblance de D. par son me, cette part divine de son tre, qui est imprissable.

Le renouvellement de luvre de la cration; Un acte de bienveillance


Luvre de la Cration se renouvelle, comme on sait, chaque jour, et nous mentionnons ce fait dans la prire du matin: ...Qui dans Sa clmence claire la terre et ses habitants, qui dans Sa bont renouvelle chaque jour luvre de la cration . Cest un miracle permanent, qui se reproduit de jour en jour. Il nous semble ncessaire dexpliquer le langage de cette bndiction. 1. Quel est le sens de Qui claire la terre et ses habitants ? Car enfin, si D. claire la terre, il sensuit ncessairement que les habitants de la terre bnficient de cette lumire, pourquoi donc ajouter et ses habitants ? 2. Si la lumire tait destine aux habitants de la terre, il aurait suffit de dire: Qui claire les habitants de la terre . Quel besoin y a-t-il de prciser qui claire la terre ? 3. De plus, il faut expliquer le mot clmence . En quoi le fait de donner la lumire aux habitants de la terre est-il un acte de clmence de la part de D.? 4. Pourquoi faut-il prciser de plus que dans Sa bont, D. renouvelle chaque jour les uvres de la cration comme si ce ntait pas une manifestation vidente de la bont de D.? Avec laide de D., nous allons rpondre ces questions. Les Sages nous disent quau moment de la cration, non seulement les anges, mais aussi certaines des Vertus, ont plaid devant D. contre la cration de lhomme parce quil allait fauter, disant: Quest donc lhomme pour que Tu penses lui? (Thilim 8:5). Mais D. dans Sa clmence et Sa bont infinies fit taire ces voix rebelles et accusatrices et Il donna, malgr elles, la lumire la terre, en particulier cette lumire

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dont il est dit (Brshit Rabba 12:6): D. a vu que les hommes mchants ne mritent pas la lumire puisque par leurs mauvaises actions, ils ne font que rpandre lobscurit sur la terre comme il est crit (Ishaya 29: 15): ils agissent dans lobscurit , cest pourquoi D. a cach la lumire primordiale, Il la mit part et la rserva aux Justes lavenir . Sil en est ainsi, la terre entire devrait tre plonge dans lobscurit cause des pchs des hommes, comme ce fut effectivement le cas en Egypte durant la plaie des tnbres (Shemot 10:23) dont il est dit que personne ne pouvait voir son prochain, ni bouger pendant trois jours . Mais les Juifs avaient de la lumire dans toutes leurs maisons car D., dans Sa bont, continuait de donner la lumire aux Juifs. Chaque matin, Il accomplit pour nous ce miracle, et claire le monde et les habitants de la terre. A propos du verset (Shemot 20:24): En quelque lieu que Je fasse invoquer Mon Nom, Je viendrai toi pour te bnir , les Sages disent que si quelquun commet une faute dans un lieu dfini, ce lieu sera dtruit pour toujours, il ne pourra jamais tre reconstruit (Zohar II 28a). La bndiction ne se trouve quen un lieu o le Nom de D. est invoqu et Sa volont accomplie. Mais un lieu o lon commet une faute, o lon transgresse la volont divine, est maudit et mrite dtre dtruit. Nous apprenons dans la Mishna (Avot III:2): Lorsque deux personnes sont runies et ne sentretiennent pas de Torah, cest une runion de persifleurs . Pourquoi le mot exclamatif: voici ? Le livre Beit Aharon explique: Voici est comme une enseigne qui dsigne dfinitivement ce lieu comme un lieu de rencontre de persifleurs. Si dautres voulaient lutiliser, ils ne pourraient pas y tudier, car ce lieu nest pas bni, mais au contraire, charg dinfluence malfique et de maldiction . Nous avons des preuves innombrables que nos sens sont capables de discerner les endroits o des fautes ont t commises ou qui sont entachs dimpuret, et dont il faut sloigner. Lavertissement de sloigner des lieux o se pratique lidoltrie est souvent rpt (voir Avoda Zara 17a). Mme celui qui ne fait que passer subit linfluence dun tel lieu et de ce qui sy pratique et - D. nous en prserve - lesprit impur saccroche lui. Le livre Lev Eliyahou rapporte un fait terrible dont on peut tirer une grave leon. Dans un certain hpital, de nombreux malades furent soudain atteints de maladies graves, inconnues jusqualors. La direction de lhpital procda une enqute et dcouvrit finalement que certains microbes avaient caus ces graves maladies mais quelle ne parvenait ni les isoler ni les neutraliser. Aprs avoir longuement discut du problme, elle conclut que la seule solution tait de dtruire et de brler le btiment de fond en comble. Quun lieu puisse avoir une influence nfaste sur tout ce quil contient nous donne rflchir et nous invite un examen de conscience. La terre ne mriterait pas de recevoir la lumire divine, puisque les hommes, par leurs actes dnaturs et les mfaits quils commettent ont une influence nfaste sur la terre, le lieu de leurs fautes, et par consquent elle devrait sobscurcir le matin, elle devrait tre prive de lumire. Malgr cela, D. dans Son infinie bont, claire la terre et le monde tout entier, y compris les endroits souills qui ne mritent pas dtre clairs. Cest pourquoi il est spcifi dans la bndiction: Qui claire la terre , outre le fait quIl claire les habitants de la terre, ce qui est un prodige admirable et fantastique, qui de plus, se produit chaque jour, sans cesse. En fait, nous sommes tmoins chaque jour dun autre miracle de la cration. Il est dit: De mme que D. fait la paix dans les Cieux, ainsi Il fera la paix sur nous . Quest-ce que la paix dans les Cieux? Chaque commandement est sans limite dans la possibilit que nous avons den perfectionner lexcution, mais ce nest pas le cas de la lumire et de lobscurit, qui sont limites par la volont mme de D., comme il est crit (Brshit 1:5): Et D. appela la lumire Jour, et Il appela les tnbres Nuit . Rashi explique ce sujet (verset 4): Il a vu que la lumire est bonne et il ne convient pas que la lumire et lobscurit oprent ensemble et soient mles lune lautre, et Il leur a fix des limites, lune le jour, lautre la nuit , comme disent nos Sages (Pessahim 2a): D. fit venir la lumire et la prpose aux commandements du jour, et Il fit venir la nuit et la prpose aux commandements de la nuit . Il les limita dans le temps, interdisant chacune dempiter sur le domaine de lautre. Mais la lumire et lobscurit ne cesseraient de sopposer lune lautre si D. navait pas fait la paix entre elles, miracle supplmentaire. La lumire autant que lobscurit dpendent des actions des hommes. Sils sont bons et agissent correctement, ils feront la lumire, sinon, ce sera lobscurit. La bndiction: Qui dans Sa clmence

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claire la terre et ses habitants , signifie que la lumire sur terre provient du mrite des bonnes actions de ses habitants, et D. dans Sa bont renouvelle chaque jour les uvres de la cration , car chaque jour Il rconcilie la lumire avec lobscurit afin dclairer Isral en ce monde. Il nous faut ici dire quelques mots de rprimande au sujet des danses mixtes, lors de diverses clbrations. Combien de fautes sont causes par la promiscuit, combien le pouvoir du mal augmente lorsque, dans ces danses mixtes, les hommes et les femmes ont des contacts physiques impurs les uns avec les autres, ce qui est trs nfaste. Il en est de mme pour un mari qui, en temps normal et en priv, sabstient de tout contact avec sa femme en observant les lois de la puret familiale mais, lors dune festivit o les danses sont mixtes, en viendra ncessairement toucher sa femme sils dansent ensemble. Il est extrmement grave de transgresser les interdits des lois de la puret familiale. Nous sommes aujourdhui tmoins du fait que les fautes de notre gnration et la propagation des impurets nous rendent indignes de la lumire divine. Sans cette lumire nous ne pourrions pas subsister, si D. dans Son infinie bont ne renouvelait pas jour aprs jour luvre de la cration et nclairait pas la terre et ses habitants sans prendre en considration leur mauvaise conduite. Nous jouissons de Sa lumire, indpendamment de nos mrites. Mais ceci dit, nous devons de nous-mmes corriger nos actes afin de mriter en toute justice la bonne influence de la lumire divine, et non en profiter comme un d procdant de Sa grande indulgence, chaque jour, toujours. Sur cette base, nous pouvons comprendre la suite du verset (Brshit 1:5): et ce fut le soir, puis le matin - un jour . Le mot vayehi a une connotation daffliction (Mguilah 10b). Quelle affliction pouvait-il y avoir dans la cration, au point que cette expression daffliction soit rpte chaque jour de la cration? Les Sages disent que chaque jour, lattribut de Justice prsentait ses plaintes au Crateur, Lui demandant de ne pas continuer luvre de la Cration cause des fautes quallait commettre Isral. Il est crit vayehi - ce fut le soir puis le matin au terme de chaque jour de la cration, pour exprimer que D. avait de la peine, autant le jour que la nuit, cause des plaintes avances par lattribut de Justice. Mais D. na pas prt attention ses paroles, et Il a tout de mme cr le monde, jour aprs jour, et cest pourquoi le mot jour est rpt. Le mot yom dsigne la lumire du jour, et cette lumire, cest la Torah, comme il est crit (Mishley 6:23): Le commandement est flambeau et la Torah est lumire . De mme dans le Midrash (Brshit Rabba 1:6), il est dit que la lumire reprsente les bonnes actions des hommes vertueux. Ce qui signifie que D. a cr le monde pour la lumire de la Torah et pour les Justes, et que pour le crer Il a associ lattribut de Misricorde lattribut de Justice. Le jour fait galement allusion la Torah comme il est crit (Thilim 95:7): En ce jour, si seulement vous coutez Sa voix , et de mme il est crit (Dvarim 4:4): Vous tes tous vivants, en ce jour , et (Thilim 19:8): la Torah est un rconfort pour lme , elle dirige le cur de lhomme vers D. et elle donne la vie qui en fait la base de ses activits. Malgr laffliction que Lui cause la cration, D. a associ la Justice la Misricorde, Il a associ la Justice la lumire, la Torah, et Il a cr le monde avec ces deux mesures, car la Justice est ncessaire afin de punir comme il se doit ceux qui mprisent la Torah . La bndiction Qui dans Sa clmence claire la terre et ses habitants est prcise au plus haut point, car il nest de lumire que la Torah, et dans Sa bont Il renouvelle chaque jour les uvres de la cration pour les Justes, malgr les objections de lattribut de Justice. Le but de la cration du monde est quIsral suive la voie des Justes, comme il est crit (Mishley 2:20): Afin que tu poursuives le chemin des hommes de bien et que tu suives la voie des hommes Justes par ton obissance la Torah, et alors les uvres de la cration pourront se renouveler de jour en jour, toujours, selon Sa volont.

La foi se renouvelle avec le renouveau de la cration


Chaque matin dans notre prire, nous reconnaissons et louons D. qui, dans Sa clmence, claire la terre et ses habitants, et qui dans Sa bont renouvelle chaque jour les uvres de la cration . Chaque jour, se produit un renouveau de la cration du monde. Cela nous remplit dadmiration et nous oblige nous exclamer: Combien grandes sont Tes uvres, D, combien pleines de Ta sagesse . De mme que chaque uvre dart tmoigne de lartiste, de mme le monde entier tmoigne de D. qui en est le Crateur. Cest pourquoi, lorsque nous constatons avec quelle perfection et quel ordre D. a cr le monde et ses merveilles en Dix

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Paroles (Avot V:1), nous clamons spontanment notre admiration: Combien grandes sont Tes uvres, D.! Le roi David, le doux chantre dIsral, dit: Les cieux racontent la gloire de D. et le firmament proclame luvre de Ses mains; le jour en fait le rcit au jour et la nuit en donne connaissance la nuit (Thilim 19:2-3), et il exprime cette exaltation encore et encore, de toutes les faons possibles! En mditant luvre de la cration, nous nous rendons compte que D. veille sur Son monde avec bienveillance et bont, et si Sa grande misricorde ny pourvoyait, tout disparatrait en un instant et le monde entier risquerait dtre ananti (comme si, par exemple, la couche dozone qui protge latmosphre venait manquer, car elle aussi est entre les mains de D.). Cela annule fondamentalement les thses des chercheurs, des philosophes et des scientifiques qui soutiennent sans preuves irrfutables que le monde est le produit du hasard et qui nient la Providence Divine. Il existe un Crateur, cest Lui qui dirige le monde, cest Lui qui Sest rvl Avraham notre anctre et lui a dit: Cest Moi le Matre du monde (Brshit Rabba 39:1). Nous devons connatre et comprendre toutes les notions qui mritent examen. Nous devons savoir comment chapper linfluence de tous ces scientifiques et idologues, et refuser dtre induits en erreur par des thories hrtiques qui affirment que le monde existe par lui-mme. La capacit de comprhension de lhomme est limite et il lui est facile de tomber dans le pige de ces ides fausses. Comment consolider notre conviction queffectivement D. renouvelle le monde chaque jour, car il est si facile de se tromper et dtre pour ainsi dire ensorcel par toutes les inventions de la science moderne. Comment peut-on ne croire quen D. face de telles thories? De plus, toute la cration, ce monde-ci comme lautre monde, ne fut cre que pour lhomme (Pessikta Zouta Brshit 1:1), et chacun doit penser cest pour moi que le monde fut cr (Sanhdrin 37a). Cest dire que lhomme est le centre de la cration et il en est la raison dtre. Il est trs difficile de trouver une application de ces propos de nos Sages. Les hommes vertueux, ces gens dont la grandeur dme et la sagesse de cur sont au service de D., qui sont remplis de la crainte et de lamour de D., dont lexistence mme est entirement consacre D., qui ont pntr les secrets de la cration, peuvent effectivement dire cest pour moi que le monde fut cr . Quand bien mme ces mots ne sortent pas de leur bouche, ils savent trs bien dans quel but ils sont venus au monde: pour servir D. sincrement et parfaitement, pour se sanctifier par leurs actes, leur connaissance de la Torah, leur mise en pratique de ses lois, et leurs vertus exemplaires. Sil en est ainsi, ils ont besoin de ce monde pour parvenir au but de leur existence, et ils peuvent dire: Cest pour moi que le monde fut cr . Mais comment peut-on obliger ceux qui ne se distinguent pas par des actes particuliers dire que cest pour eux que le monde fut cr? Le fait est que leur intelligence est trop limite pour pouvoir comprendre ce concept. Et mme si nous voulions les convaincre que cest pour eux que le monde fut cr, comment cette conviction pourrait-elle pntrer leurs curs si rien ne peut leur faire ressentir cette vrit? Cest pour moi que le monde fut cr sapplique chaque Juif, et la croyance provient du cur. Quest-ce qui va faire pntrer cette croyance dans les curs? Nous devons comprendre la rptition de lexpression de la prire: qui dans Sa clmence claire la terre et ses habitants car si D. claire la terre et ses habitants, ils bnficient eux aussi de Sa lumire, et il semble inutile de le prciser. Cest un fait que toutes nos prires reposent sur des bases solides, elles ont t formules par les Sages du Grand Sanhdrin qui ont pes chaque mot avec soin et prcision. Les Sages expliquent (Makot 24a): Vint Habakouk qui rsuma tous les commandements de la Torah en un seul: la foi, comme il est dit (Habakouk 2:4): Le Juste vivra par sa foi . Cest--dire que le fondement de tous les commandements est la foi, et lorsque cette foi est solidement ancre en nous, nous avons la force dobir tous les commandements avec joie, sans rien ajouter et sans rien omettre (Dvarim 13:1). Celui qui agit ainsi vivra, et il pourra tudier la Torah qui est nomme Vie (Yirouvin 54a). Il sera toujours prt obir la volont de D. Il ne fait aucun doute que toute la Torah et tous les commandements ont pour base et pour fondement la foi, comme le dit le roi David (Thilim 119:86): Tous Tes commandements sont ( excuter) avec foi , mais la foi en elle-mme nest pas une chose facile acqurir dans tous ses aspects et dans tous ses dtails, et les Sages ont dj remarqu (Brachot 33b), concernant le verset: Et maintenant Isral, quest-ce que lEternel ton D. te demande, si ce nest de Le craindre (Dvarim 10:12), Tout dpend de la volont

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divine, sauf la crainte de D. . Et les Sages demandent (Brachot ibid.): Est-ce donc que la crainte de D. est une chose si facile? Nous posons la mme question concernant la foi - qui dpend de lhomme - la foi est-elle tellement facile acqurir? Il est vrai quun homme parfait a une foi qui lamne obir tous les commandements et observer toute la Torah, et il le fera facilement, mais comment peut-on demander au reste du peuple dIsral, gens simples, de parvenir, au moyen de la foi, au mme degr dobservance de toutes les limites et de toutes les restrictions que les Sages ont ajoutes aux commandements de la Torah? Est-ce possible? Le saint Ari zal nous a rvl que chaque nuit, lheure o nous dormons, lorsque le sommeil sempare de nous, les Intelligences slvent vers les cieux, sy nourrissent de lclat de la lumire cleste, y reoivent abondance et clart, et nos forces se renouvellent. Cela explique les paroles du prophte Yrmia (Echa 3:21): Elles se renouvellent chaque matin, infinie est Ta constance . Cest dire que chaque matin nous nous rveillons avec des forces spirituelles renouveles, et nous proclamons grande est Ta constance . Notre foi en D. est accrue car les Intelligences ont t alimentes pendant notre sommeil. Elles ont reu de D. une existence nouvelle, et en nous levant le matin, reposs et dispos, nous nous sentons frais comme un nouveau-n. Si chacun de nous nest pas capable de le comprendre et de le ressentir effectivement, les Intelligences elles, ressentent chaque matin ce renouvellement et labondance de clart quelles ont reus de D. et dont elles ont t imprgnes. Ces Intelligences ont la capacit dinsuffler dans le cur de chaque homme la croyance parfaite que tout ce qui est ne fut cr que pour lui, quil est le but de la cration, que tout ce qui existe est l pour le servir et rpondre tous ses besoins, et que son but lui est dobir la volont du Crateur, car il possde une me en commun avec les mondes suprieurs do elle reoit en abondance une nourriture spirituelle. Elle voit clairement comment D. dans le monde cleste, prend plaisir en la compagnie des mes des Justes, elle voit lhommage que les Justes rendent au peuple dIsral lorsquils lui disent: Le monde entier ne fut cr que pour Isral, qui est appel le commencement (Pessikta Zouta, Brshit 1). Et donc, aprs que ces Intelligences ont plan dans les hautes sphres et constat quIsral est le but de la cration, il ne fait aucun doute quelles impriment la foi en D. dans le cur de chaque Juif, mme sil est ignorant, et tous peuvent apprendre que cest pour moi que le monde fut cr grce au renouvellement de chaque matin. A partir de ce moment-l, la voie est ouverte et chacun peut devenir un fervent croyant, car ses Intelligences se renouvellent chaque jour, et il a le pouvoir dacqurir facilement cette foi sil mdite chaque jour le renouvellement de luvre de la cration. Chaque homme a lobligation de dire cest pour moi que le monde fut cr , car chacun dispose de lintelligence ncessaire pour parvenir cette connaissance, sil active les Intelligences et fait de ce potentiel une ralit. Revenons la rptition de lexpression qui claire la terre - et ses habitants que lon prononce dans la bndiction. De mme que le monde se renouvelle chaque jour, toujours, comme il est dit: dans Sa Bienveillance Il renouvelle chaque jour luvre de la Cration, toujours , de mme en est-il de ses habitants. Non seulement la terre elle-mme, cest--dire ses habitants, mais aussi les Intelligences, se renouvellent chaque jour, toujours, afin de remplir nos curs de foi. Ds quAdam, la crature faonne des mains de D. (Kohlet Rabba 3:14) reut le souffle de vie (Brshit 2:7), il sut Qui lavait cr. Et il sut que le monde entier navait t cr que pour lui, il sut de lui-mme appeler D. Matre du monde (Brshit Rabba 17:5) et Roi de toute la cration, et il eut une connaissance parfaite de D. Le renouvellement quotidien des Intelligences est insparable de luvre de la cration. Celui qui ne rflchit pas logiquement, qui ne veut pas croire en D. Crateur du monde, qui rfute le concept que lhomme est le centre de la cration et que le monde fut cr pour lui, ne fait que se mentir lui-mme, puisque les Intelligences lui procurent chaque matin un renouveau et transmettent tout son corps labondance dont D. les remplit pendant la nuit. De mme que celui qui touche un courant lectrique est immdiatement lectrocut, de mme lorsque les Intelligences touchent le corps de lhomme, il est immdiatement rempli de labondance des bienfaits quelles ont reus pendant la nuit dans les mondes suprieurs. Les Sages ont dit (Sanhdrin 38a): un seul homme fut cr le sixime jour... afin dtre invit au repas comme un hte qui trouve tout prpar son arrive. Ceci est compar lhistoire dun roi qui fit construire

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un palais, prpara un festin, et convia ses invits, comme il est dit (Mishley 9:1): La sagesse des femmes btit leur demeure . Il est clair quil ne serait pas de bon ton de commencer nettoyer la maison et de prparer le festin en prsence de linvit, et il convient que tout soit fin prt davance afin de recevoir linvit et lui faire savoir que tout a t prpar en son honneur. Luvre de la cration se renouvelle chaque jour, toujours, expressment pour lhomme. Lorsque lhomme se rveillera de son sommeil, il trouvera tout prt pour ses besoins. Il saura que D. a tout renouvel pour lui. De plus, D. renouvelle aussi ses Intelligences chaque jour, afin de lui permettre darriver la connaissance, et ce, la mesure de son dsir de savoir, de sa rflexion, de sa volont, car tous les moyens de parvenir la connaissance lui sont donns. Nous en venons une explication plausible des paroles du prophte Habakouk: Le Juste vivra par sa foi . En fait, tout Juif est considr comme Juste, comme il est crit (Ishaya 60:21): Ton peuple nest compos que de Justes, ils hriteront de la terre pour toujours . Cest--dire que chaque Juif a une place dans le monde venir, et une part dhritage de la terre dIsral. Mais ce nest que lorsque lhomme se rveille le matin quil est considr comme vivant, car lorsquil dort cest comme sil tait mort puisque le sommeil est un soixantime de la mort (Brachot 57b). Dautant plus quil est alors dans un tat incertain: peut-tre va-t-il se rveiller, peut-tre ne va-t-il pas se rveiller... Ce nest que lorsquil se rveille quil ny a plus de doute et quil est considr comme vivant. Cest ce qui est crit (Habakouk 2:4): Le Juste, cest--dire tout Juif en ce quil est appel Juste, vit par sa foi. Comment? Lorsquil se lve le matin, il a la possibilit de bien agir et il se rveille pour servir D. car ses Intelligences ont pu lui transmettre une foi pure en D. (lon ne comprend pas comment cette foi pntre son cur mais cest justement grce aux Intelligences quelle le pntre). Et alors, plein de foi, il peut pratiquer avec joie les commandements de la Torah dont il est dit quils sont la vie, ce qui nous montre que tous les commandements dpendent de notre foi. Si nous tirons parti des Intelligences qui renouvellent nos forces chaque jour, toujours , nous pouvons vraiment respecter la Torah et en observer les commandements conformment la volont divine, Le servir avec crainte, et remplir notre devoir en ce monde en pleine connaissance et de tout cur. Et alors nous aurons effectivement le mrite dchapper toutes les ides hrtiques de ces scientifiques qui pensent que le monde est le produit du hasard. Alors, mme le plus simple dentre nous pourra dire cest pour moi que le monde fut cr , car il aura foi en D. et en Son monde. Pourtant la condition primordiale ce renouvellement, est lattachement D. par ltude de la Torah, comme dit le prophte (Yrmia 33:25): Si ce ntait pour Mon alliance de jour et de nuit, Je naurais pas cr le ciel et la terre . Chacun doit tudier la Torah jour et nuit, comme il est crit (Dvarim 6:7): Tu en parleras lorsque tu es assis chez toi, lorsque tu vas ton chemin, en te couchant et en te rveillant , et les Sages ont dit (Yirouvin 65a): La nuit na t cre que pour ltude de la Torah . Nous pourrions nous demander comment il est possible dtudier la Torah la nuit, alors que nous avons besoin de la nuit pour dormir et renouveler nos forces afin de pouvoir continuer ltude de la Torah le lendemain. Sil en est ainsi, par quoi le monde continue-t-il exister lorsque lhomme dort? Lhomme peut-il tre responsable du monde entier lorsquil dort? A plus forte raison sil sagit dun homme au cur simple, que la connaissance na pas pntr. En fait, il est du devoir de chacun dtudier la Torah jour et nuit, comme il est crit (Yoshoua 1:8): Tu mditeras la Loi jour et nuit . Il va de soi que dans ce cas, il se retire pour dormir aprs ltude. Interrompre son tude pour aller dormir lui cause une grande peine, il voudrait tellement continuer tudier avec enthousiasme, sans interruption. D. qui connat le fond des curs, voit sa grande peine, et Il considre sa pense comme un acte (Kidoushin 40a). Si son sommeil ntait un obstacle insurmontable, il aurait srement continu tudier toute la nuit, et le sommeil lui serait compt comme sil avait effectivement poursuivi son tude sans interruption. De plus, chaque nuit, son me monte au ciel o elle entend des exgses de la bouche de D. Lui-mme (Zohar I 121b, 122a), cest donc que mme durant les heures de sommeil, bien quil ne le sache pas, sa conscience le sait (Mguilah 3a), et le monde continue dexister grce la puret de ses penses. Un tel homme slve en puret et en saintet, ses Intelligences se sont renouveles pendant la nuit jusquau petit matin, et il avance avec une force toujours croissante (Thilim 84:8), car mme lorsquil dort, il reste attach D. et la Torah, et le monde fut cr et existe pour lui. Le regret de ne pas pouvoir

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continuer tudier et la puret de son intention et de sa pense sont considrs comme des actes, et une foi puissante se renouvelle en lui. A son rveil, il loue D. et Lui dit Je Te remercie de mavoir rendu mon me... et dans cette louange, il ajoute avec compassion - grande est Ta foi pour inclure la foi qui a pntr son cur sous linfluence des Intelligences renouveles. Sil en est ainsi, il faut dormir aprs une tude de la Torah, car sendormir sur des occupations vaines (comme regarder la tlvision ou couter la radio, ou lire un livre qui vhicule des penses fausses ou inutiles) est nuisible, non seulement parce quon na pas ralis le verset tu la mditeras jour et nuit , mais aussi parce quon a mis en danger lexistence du monde dont chacun a la responsabilit, et rompu le lien tabli avec D par ltude de la Torah. Cest cause de cette rupture quun tel homme est dit mort , car les mchants sont appels morts mme de leur vivant (Brachot 18a), comme il est crit: Vous qui tes attachs lEternel votre D. vous tes tous vivants en ce jour (Dvarim 4:4). Seul celui qui est attach D. peut tre appel vivant, dans le sens de: Elles se renouvellent chaque matin, infinie est Ta constance , et le Juste vit par sa foi , ce qui nest pas le cas de celui qui est loign de D. et qui ne mrite pas dtre appel vivant, car ni sa foi ni ses Intelligences ne se renouvellent, et il est dommage quun tel homme qui aurait pu tre si grand soit tomb si bas. Certains individus, lorsquils prient le matin, ont le cur tourn vers des penses trangres tout en prononant les mots de la prire. Quils se demandent donc comment ils ont rempli leur journe et leur nuit prcdentes, avant daller se coucher! Se sont-ils endormis dbordants de foi et dattachement D. ou non? Seul celui qui sendort, le cur empreint dattachement D. aprs avoir tudi la Torah peut se rveiller comme un Juste qui vit par sa foi . Cest lui qui bnficie du renouvellement des Intelligences et de toutes les grces divines!

LHomme fut cr la ressemblance de D.


Les Sages ont dit (Brshit Rabba 1:2): Lorsque D. voulut crer le monde, il consulta la Torah et cra le monde, la manire dun architecte qui consulte les plans pour construire sa maison . Pourquoi D. at-Il besoin de consulter la Torah? La raison en est donne par les Sages (Shemot Rabba 29:9): Lorsque D. a donn la Torah Isral, le monde entier sest tenu coi et aucune crature na mme bronch. Il est difficile de comprendre pourquoi D. ne pouvait pas donner la Torah tandis que le monde continuait vaquer ses occupations habituelles, plutt bruyantes que silencieuses. Il faut galement expliquer pourquoi il est dit dune part que le monde entier sest tenu coi, et dautre part que le son du Shofar tait trs puissant, comme il est crit (Shemot 19:19): Le son du Shofar allait redoublant dintensit . Pourquoi ce clairon? Si le son du Shofar avait pour but dimpressionner les Enfants dIsral et leur faire peur, le fait que D. les ait obligs recevoir la Torah en brandissant le Mont Sina au-dessus de leur tte sans leur laisser dchappatoire (Shabbat 88a), aurait suffi les effrayer. Pourquoi fallait-il sonner du Shofar? Pour rpondre ces questions, citons les paroles des Sages (Brshit Rabba 9:2): D. a cr des mondes et Il les a dtruits plusieurs fois avant de crer ce monde-ci, quIl a maintenu... Il faut comprendre quelle est lutilit de crer des mondes qui seront dtruits. Cest que D. a vu que ces mondes ne pourraient pas subsister sans Torah. Sil en est ainsi, pourquoi les a-t-Il crs? Tout cela sexplique par ce que disent les Sages (Brshit Rabba 8:2) au sujet du verset (Mishley 8:30) Je serai un enchantement perptuel : Pendant deux mille ans avant la cration du monde, D. se rjouissait en compagnie de la Torah, dont Il tirait un grand plaisir sans que rien ne vienne Le dranger, puisquIl tait seul et entour des mes des Justes sous le Trne de Gloire . Il se peut donc que le silence du monde au moment du don de la Torah ait eu pour but de faire sentir aux Enfants dIsral que le monde nexiste pas, nexiste plus, pour quils ressentent le bien-tre de D. et les dlices de la Torah, ce qui leur permettra de conserver lamour de la Torah dont ils ont got la douceur, telle quelle tait avant la cration, sans bruit et sans tumulte. Par ailleurs le son du Shofar retentit trs fort au Mont Sina afin denseigner aux Juifs de toutes les gnrations servir D. sans se laisser dtourner par les problmes temporaires de leur environnement, pour que mme sil rgne beaucoup de bruit lentour, ils ne lentendent pas, afin quaucun tumulte ne les dtourne de ltude de la Torah et ne les en spare. Mme

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si lon entend les bruits du dedans et du dehors, mme si lon est assailli de problmes, on nabandonne pas ltude de la Torah, car tous les soucis, tous les problmes et la privation des bienfaits du ciel, ne sont que la consquence de labandon de la Torah, comme le disent nos Sages (Brachot 5a): Celui qui connat des souffrances, quil en cherche la cause dans ses actes; sil a examin ses actes sans rien trouver, il saura quelles proviennent de son abandon de la Torah , cest--dire que lorsquil voit quil ne bnfice plus des bonts du ciel, il saura que cest pour stre laiss entraner par les bruits de ce monde et avoir abandonn ltude de la Torah de jour et de nuit. Chacun doit percevoir la Torah comme avant la cration, goter ses dlices, dans le sens de gotez et voyez combien lEternel est bon (Thilim 34:9), et il ny a de bon que la Torah (Brachot 5a). Cest pourquoi la cration tout entire sest tue, afin que nous puissions apprcier la Torah, mais la poursuite des vanits et le tumulte de ce monde nous privent des bienfaits que prodigue la Torah et ne nous permettent malheureusement de ne percevoir que lcho des problmes. Maintenant, nous pouvons comprendre ce quont dit les Sages: D. consulta la Torah et cra le monde . Pour nous enseigner que, tous les bruits de la cration ne drangrent nullement D. car Il tait plong pour ainsi dire dans la Torah. Chacun doit apprendre imiter D. et suivre Ses voies, car dans lme de chacun existe une part de la divinit (Zohar I 113a). Chacun a en main larme de la Torah et la possibilit de sabsorber dans son tude malgr tous les bruits de lintrieur et de lextrieur. Certainement, il ne convient pas de dire, concernant D., quIl puisse tre drang par les bruits qui Lentourent, et cela nest dit que pour faire impression et pour donner un bon conseil lhomme, puisque la Torah et les commandements sont les conseillers de lhomme (Zohar II 82b) et pour linviter ressembler D. (Sotah 14a) en prenant exemple sur Lui. Il nous est interdit de tirer profit et de jouir de la lumire des luminaires de la fte de Hanouka (Shabbat 21b). Aprs les avoir allums, nous dclarons dans la bndiction: Ces lumires sont saintes et nous navons pas le droit de les utiliser, mais seulement de les regarder . Pourquoi? Parce que les commandements sont symboliss par les luminaires, comme il est dit (Mishley 6:23): Le commandement est flambeau, la Torah est lumire . Nous devons savoir quils sont sacrs et nous navons pas le droit de les utiliser dans un but personnel, ce qui signifie quil nous est interdit de nous couper de la Torah, mme cause des soucis quotidiens et des bruits environnants, et celui qui interrompt son tude de la Torah se met lui-mme en danger (Avot 3:7). Nous ne devons que les regarder , cest dire en tirer un enseignement, comme il est dit tes yeux contempleront ton matre (Ishaya 30:20), et vous les verrez et vous vous souviendrez des commandements (Bamidbar 15:39), afin den tirer une leon. De fait les luminaires de Hanouka sont des lumires que nous allumons , cest--dire que les commandements, ces lumires, doivent rayonner dans le sens o il est dit il allume et attise la flamme jusqu ce quelle slve delle-mme (Shabbat 21a). Lhomme doit faire des efforts personnels. Cest seulement aprs avoir attis la flamme et quelle slve, quil reoit laide du ciel pour surmonter son mauvais penchant qui sappelle faiseur de bruit car son seul but est de dranger celui qui sert D. Mais il faut fermer les oreilles aux bruits de ce monde, afin de servir D. avec enthousiasme et dvotion et ne pas tre drout par lagitation et les piges environnants. Les Sages ont dit que D. construit des mondes et les dtruit . Pourquoi? Quelle est la raison dtre de ces mondes? Cest pour nous faire comprendre que si nous ntudions pas la Torah et que nous ne nous efforons pas de la mettre en pratique, nous ne faisons que dtruire des mondes dans le sens o sans la Torah, le ciel et la terre cesseraient dexister (Ndarim 32a), et sinon, Je ferai retourner le monde au nant (Shabbat 88a). D. a cr des mondes quIl finit par dtruire, car ils taient dpourvus de Torah. A plus forte raison ce monde-ci qui fut cr pour la Torah et qui tmoigne du Crateur, dont la cration mme est compose des lettres de la Torah, serait rduit nant si lhomme cessait dobserver scrupuleusement la Loi. Assurment cette destruction serait terrible. Chaque lieu o lhomme transgresse la Torah est effectivement dtruit, car lhomme est n pour la peine (Iyov 5:7), peiner pour la Torah (Sanhdrin 79b) et non pour la recherche de gratifications matrielles. En pensant ces choses, je me suis dit que toute la cration est comme un dpt consign entre les mains de lhomme, et quelle lui est confie pour la parfaire, veiller sur elle, lembellir, afin de donner satisfaction au

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Crateur, bni soit Son Nom. Sil en est ainsi, chacun doit sefforcer de ressembler au Crateur et dapporter sa contribution la cration. Tout ce qui ne sert pas ce but est dtruit par D. comme il est dit: lhomme doit consacrer ses efforts ltude de la Torah, car il ne fut cr que pour cela, et non pas pour soccuper des vanits de ce monde et de discussions vaines (Sanhdrin 79b). De plus, chacun doit modeler sa conduite sur celle de D. et Ses attributs (Sotah 14a). D. dans Sa grande misricorde envers Ses cratures, cra le monde sans tenir compte des hommes mchants qui natraient de Adam et cest malgr eux quIl cra le monde. De mme lhomme doit mettre en pratique les valeurs de la Torah, les poursuivre avec dvotion et diligence, afin que le monde puisse se perptuer dheure en heure et de jour en jour. Combien grand et valeureux est lhomme qui tudie la Torah avec diligence, et pourtant un tel homme nest pas sensible aux honneurs qui lui sont rendus et ne sen enorgueillit pas. Au contraire, il est heureux que les gens lhonorent, car il sait que cest la Torah quils honorent en lui, et il ne lui vient pas lesprit de sattribuer cet honneur d D. comme il est crit (Thilim 93:1): LEternel est roi, Il est vtu de majest . Tous ses efforts en ce monde nont pour but que dobir la volont divine, denseigner la Torah et de prserver le monde. Les Sages disent (Mguilah 21a) Depuis la mort de Mosh jusqu Rabban Gamliel, on ntudiait la Torah que debout , mais aprs le monde sest affaibli, comme il est dit (Sotah 59a): A la mort de Rabban Gamliel, lhonneur de la Torah fut perdu . Jusque-l, on ntudiait et on nhonorait que la Torah, ce qui explique pourquoi on tudiait debout, avec dvotion. Il est probable qu cette poque-l, les Sages taient considrs eux-mmes comme un Sfer Torah que tout le monde honore et embrasse sans pour autant quils sattribuent ces marques dhonneur. Et effectivement, lhonneur d aux Sages est la consquence de lhonneur d la Torah (Kidoushin 33b), car les honneurs quils reoivent ne leur viennent que de D. et de la sagesse de la Torah. Il est crit (Brshit 46:28): Et (Yaakov) envoya Yhouda au devant, vers Yossef . Dans quel but? Les Sages nous disent (Brshit Rabba 95:3): Afin de lui prparer une maison dtude do il puisse rpandre lenseignement de la Loi . Notre anctre Yaakov, avant de descendre en Egypte, en un lieu sans pudeur (Brshit 42:9), un lieu de perversion (Shemot Rabba 1:22), un lieu de tumulte (car tout le monde descendait en Egypte acheter des vivres), envoie Yhouda au-devant, justement en ce lieu bruyant, afin douvrir une maison dtude, de Torah, en compagnie de Yossef. Le nom mme Yossef a le sens de lehossif, ajouter, comme il est dit (Taanith 31a): celui qui ajoute (des efforts) augmente (sa connaissance) , et ils progressent avec une force croissante (Thilim 84:8) dans ltude de la Torah. Le nom mme de Yhouda indique que chaque Juif doit slever et progresser dans la Torah, mme dans un lieu bruyant et agit, afin dviter au monde la paralysie et la destruction. Cest justement lorsque les problmes se multiplient dans le monde que nous avons le plus besoin de renforcer ltude de la Torah, et mme de lui ajouter des barrires protectrices. Ce que fit Yaakov en son temps est valable pour tous les temps. Car linverse est vrai aussi: lorsque le monde est paralys, cest--dire lorsque ne rgne pas labondance mais la famine, il nous faut faire du bruit, nous avons besoin de la voix de Yaakov (Brshit 27:22), de la voix de la Torah et de la prire, afin que les mains de Essav ne prennent pas le dessus (Brshit Rabba 65:16), pour que la main de lEgypte, des forces impures, naient pas dinfluence sur les Enfants dIsral et quils ne soient pas corrompus par la culture gyptienne puisque la voix de la Torah soutient le monde et fait vivre les Enfants dIsral.

La rcompense rserve aux Justes dans le monde venir


Et D. cra les grands ctacs (Brshit 1:21), il sagit du couple de Lviathans, que D. cra mle et femelle. Il tua la femelle et Il la conserva dans du sel pour les Justes dans le monde venir, car sils avaient engendr et staient multiplis, le monde naurait pas pu les contenir (Rashi ad. loc., Babba Bathra 74b). Il faut expliquer cette allgorie. Est-il donc difficile pour D. de prserver la femelle du Lviathan jusquau monde venir sans la tuer et la mettre dans le sel pour quelle ne se dcompose pas? Les Sages ont dit que ce sont les fautes des hommes qui causent la prolifration du mal dans le monde et que seule lobissance aux commandements et les bonnes actions sanctifient le monde et propagent la saintet dans tous les univers. Cela nous permet de comprendre pourquoi D. a prserv dans le sel la femelle

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du Lviathan pour le monde venir D. la conserve pour quelle ne se dtriore pas cause des fautes des hommes, et pour la maintenir dans ltat de puret qui convient aux Justes dans le monde venir. Nous apprenons dans ce mme passage (Babba Bathra 75a): Rabba dit au nom de Rabbi Yohanan: lavenir, lEternel donnera un festin pour les Justes avec la chair du Lviathan... Les restes seront distribus et vendus dans les marchs de Jrusalem . Le festin symbolise la saintet. Le Talmud raconte (Souca 55b): Cest comme un roi de ce monde qui dirait ses serviteurs: prparez-moi un grand festin. Au dernier jour de la fte, il dit son ami: prpare-moi un festin modeste, afin que je puisse me rjouir en ta prsence . Cette allgorie se rfre la fte de Soucot, et au huitime jour, le jour de Shmini Atzeret, (Simhat Torah), o lon clbre dans la joie la Torah qui est le symbole de la saintet. De mme les restes sont distribus et vendus dans les marchs de Jrusalem , car Jrusalem est le symbole de la saintet et cest partir de Jrusalem, que la saintet se rpand dans le monde (comme on sait, Jrusalem sappelle la Ville Sainte) et sur tous les Juifs. Les Sages (ibid.) disent aussi: A lavenir lEternel fera de la peau du Lviathan une cabane pour les Justes... car la cabane de Soucot est un symbole de saintet et de puret pour ceux qui sont assis son ombre. Cest donc que tout ce qui est dit concernant les Justes dans le monde venir traite de saintet et de puret. Cest pourquoi D. a conserv dans le sel la femelle du Lviathan afin de la prserver de toute dtrioration due aux fautes des hommes et pour quelle reste sainte et pure. Limpuret sappelle pah, comme il est crit (Thilim 124:7) Notre me sest chappe comme un oiseau du pige (pah) des oiseleurs, le pige sest rompu et nous, nous avons fui . Cela nous permet de dire que D. prserve la femelle du Leviathan du pah, du pige, afin que ce pige nattrape pas dans ses filets la femelle du Lviathan et pour quaucune impuret ne puisse latteindre car elle est la nourriture des Justes dans le monde venir. Les Sages ont dj dit (Zohar I 177a) que limpuret est dtestable D., quIl la tient en horreur, elle na donc aucune place auprs de Lui. Et il est prcis encore (Zohar III 55b) que D. dtruit limpuret du monde, comme il est dit par ailleurs de nombreuses reprises. D. conserve dans le sel la femelle du Lviathan afin de la prserver pure pour le festin auquel les Justes seront convis pour jouir de la splendeur divine (Brachot 17a), dans la Prsence de D. Nous pouvons ajouter que le mot mliha (prservation dans le sel), a la mme valeur numrique que le mot pah. Celui dont le rgne stend sur tous les mondes, dans le sens o il est dit que le rgne de D. stend sur tous les puissants (voir la prire des Jours du Pardon), a prserv dans le sel la femelle du Lviathan pour la sauver de limpuret, afin que le Satan et ses cohortes ne latteignent pas et quelle ne soit pas prise dans les piges quils tendent, car tout ce quils attrapent est ananti. Si lon ne touchait pas cette impuret, elle disparatrait de la terre et le jour serait proche o les Justes, couronns de gloire et jouissant de la splendeur divine, recevraient la rcompense qui leur est rserve, le festin du Lviathan.

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La fin de la Torah trouve sa source son dbut


Il ny a plus eu, en Isral, de prophte tel que Mosh... qui a accompli toutes ces imposantes merveilles aux yeux de tout Isral (Dvarim 34:10-12), Au commencement D. cra... (Brshit 1:1). Il faut examiner et comprendre le lien entre ces versets et pourquoi la fin de la Torah est ancre dans son dbut, qui raconte la cration du monde. Les Sages ont dit (Brshit Rabba 1:4) que D. avait pens crer Isral avant la cration du monde, et que cette pense avait prcd toute autre. Les Sages disent plusieurs fois (ibid. et Pessahim 54 entre autres) que la Torah fut cre deux mille ans avant la cration du monde. Sil en est ainsi, au moment o D. dcida de crer le monde, Isral avait agr cette dcision puisquil occupait dj Sa pense. De plus les Sages disent que le monde ne fut cr que pour la Torah et pour Isral (Midrash, Rashi Brshit 1:1), car les deux sont appels dbuts et que la Torah et Isral sont unis D. (Zohar III 73a). Nous savons que la Torah faisait le dlice de D. avant la cration (Mishley 8:3). Ainsi, avant la cration du monde, Isral jouissait avec D. de ltude de la Torah, et tous deux sont pour D. des dlices. Au moment de la cration, Isral a agr lintention de D. de crer le monde et cest pourquoi lorsque D. donna la Torah aux enfants dIsral, ils lont accepte et ont mme fait prcder lengagement de lexcuter (naass) de celui den connatre le contenu (nishma) (Shemot 24:7), puisquils avaient agr lintention du Crateur mme avant la cration. Cest sur la base de cet accord que le monde fut cr.

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Nous pouvons maintenant comprendre pourquoi la fin de la Torah est lie son dbut. La Torah se termine par les mots aux yeux de tout Isral , cest--dire que la Torah est donne aux yeux de tout Isral, et seulement pour eux. Cest le sens de: Aux yeux de tout Isral - au commencement D. cra . La finalit de la cration est dtudier la Torah mme dans la misre et la pauvret, car le mot aux yeux (eyney) a la mme racine que le mot pauvret (anyout) et le mot humilit (anava), pour exprimer que la Torah ne sacquiert que dans lhumilit (Avot 6:5), elle ne se maintient que chez celui qui est modeste (Derech Eretz Zouta 8), et uniquement chez celui qui se transforme en dsert qui est vide (Midrash Hagada Houkat 21:19), pour que chaque crature sache quelle est dpendante (elle ne doit pas senorgueillir) et connaisse la grandeur du Crateur, comme dit le Rambam ce sujet (Yessodey HaTorah 2:2 et 4:12). Si tu sais que au dbut D. cra le ciel et la terre , tu pourras acqurir la Torah crite et la Torah orale (qui sont symbolises par le ciel et la terre ), et tu pourras parvenir au comble de la perfection possible en ce monde et la connaissance de la Torah. Cela nous permet de comprendre pourquoi la Torah commence par la lettre beth, et en particulier par le mot Brshit (au commencement). Afin de recevoir et contenir la bndiction, Isral doit ressembler la lettre beth, qui a la forme dun rceptacle, cest--dire quIsral doit se faire rceptacle pour contenir la bndiction. La bndiction ne vient que de ltude de la Torah, comme il est dit (Sifri Nasso 6:26): Aucun rceptacle nest plus mme de contenir la bndiction dIsral que la paix et la paix cest la Torah (Pessikta Zouta dbut de Kedoshim). Isral est la raison dtre de la cration car, grce son mrite, la bndiction et la prosprit remplissent le monde qui continue dexister. Isral ressemble dans ses actes un rceptacle: de mme que le rceptacle slargit et se consolide afin de pouvoir contenir en lui labondance, de mme Isral, lorsquil slve toujours plus haut dans ltude de la Torah, dans la crainte et le service de D., est capable de recevoir labondance des bienfaits de D. et cette abondance a une influence sur toute la cration et le monde entier. Telle est la qualit spcifique des Justes: grce leur mrite nous bnficions de la bienveillance divine, car ils sont pareils aux conduits et aux canaux par lesquels se dversent en abondance les eaux qui font pousser et prosprer les fruits, dans le monde matriel comme dans le domaine spirituel crit lauteur de Hessed LAvraham. Cest donc que sans les Justes, le monde na ni mrite ni raison dtre, car les eaux - la prosprit - doivent passer par des canalisations - ce sont les Justes - et sil en est ainsi nous comprenons que le beth du mot Brshit reprsente le rceptacle de la bndiction. Comment ? Grce au rshit. Par lintermdiaire du mrite des Justes de chaque gnration, labondance des bndictions descend sur le monde, cest leur mrite et leur saintet qui propagent labondance des bndictions et la russite dans toutes les sphres. Tous les mondes en sont influencs et Isral aussi est gratifi de tous les biens, car si ce ntait pour lui, le monde naurait pas t cr. Grce au bien quil ralise le monde subsiste, labondance emplit le monde entier, et chaque Juif en particulier prospre. A prsent, nous pouvons comprendre pourquoi lhomme a t cr et quel est son devoir en ce monde, depuis le Premier Homme jusqu nos jours. Immdiatement aprs le rcit de la cration, il est crit (Brshit 1:26): Et D. dit: Faisons lHomme Notre image et Notre ressemblance... mais au moment de sa cration effective il est crit (ibid. 27): Et D. cra lhomme Sa ressemblance... Ceci pose lvidence une difficult. D. est incorporel, Il na pas dimage et pas de ressemblance , cest le troisime des treize principes fondamentaux de notre foi: Je crois avec une foi parfaite que le Crateur, bni soitIl, na pas de corps, quIl est inaccessible aux tres corporels dont la connaissance passe par les sens, et que rien ne peut Lui ressembler . A ce sujet, le prophte a dit (Ishaya 40:18): A qui comparez-vous D., quelle image Lui donnerez-vous? et de mme (ibid. 25): A qui Massimilez-vous que Je sois pareil? Le Rambam explique ce concept longuement (Yessodey HaTorah 1:7, 8, 11). Et donc, quel est le sens de faisons lHomme Notre image et Notre ressemblance ? De plus, comment lhomme, qui est fait de terre et retourne la poussire, peut-il ressembler D.? Notre D., bni soit-Il, a un pouvoir sans limite et sans faille, puisque la sphre cleste se meut toujours , et tant donn quIl nest pas matriel, Il nest pas soumis aux changements de la matire et donc Il est indivisible dans Son unit et ne peut tre autre que Un . Cest Lui qui dtermine le mouvement de toutes les sphres de la cration; qui peut pntrer Sa sagesse et Son intelligence infinies et insondables?

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Concernant le verset Attache-toi Lui (Dvarim 10:20) les Sages commentent (Sotah 14a, Vayikra Rabba 25:3, Ktoubot 111b): Est-il possible lhomme de sattacher la Chechina, lEmanation divine, qui est un feu dvastateur? Mais lhomme doit sattacher aux qualits de D. et tre compatissant de mme que D. est plein de compassion etc. . D. dsire que lhomme Lui ressemble dans ses qualits, et cest le sens de faisons lHomme Notre image et Notre ressemblance cest--dire selon Nos qualits (les mots dmouteynou, ressemblance, et midoteynou, attributs, sont forms des mmes lettres). Certainement, il faut se demander comment lhomme peut vouloir galer les attributs de D., puisque Ses qualits sont insondables, infinies et sans limites? Lorsque D. dit faisons lHomme (Adam) . Il indique Son intention de crer un tre qui pourra se sanctifier la mesure de Sa saintet, une crature doue dun potentiel infini et illimit, qui serait capable de surmonter tous les obstacles de sa condition matrielle. Lorsque lhomme prserve la partie divine qui est en lui, il devient, comme la lettre beth, un rceptacle capable de contenir la bndiction et de dverser les bienfaits sur le monde tout entier, dans le sens o il est dit que le Juste dcrte et D. ralise son dcret (Shabbat 63a), car il nest Adam, Homme , que dans le sens o il drive de la divinit. Cest aussi pourquoi D. na pas dit faisons une personne ou un tre vivant , mais faisons lHomme . Nous trouvons dans le Midrash (Brshit Rabba 8:10): Rabbi Hoshya dit: Lorsque D. cra le Premier Homme, les anges furent induits en erreur et ils voulurent le sanctifier (le commentateur Yaphat Toar explique: Parce quil tait cr la ressemblance de D., ils ont cru quil tait divin ). Que fit le Saint, bni soit-Il? Il fit tomber sur lui un profond sommeil et tous surent que ctait un tre humain... Il est difficile de penser que les anges, que D. a consult avant de crer lhomme (ibid. 8:3), aient pu se tromper lorsque lhomme fut cr et laient pris pour une divinit. Comme nous lavons dit, lhomme a t cr avec une part de divinit, cest pourquoi les anges ont pu se tromper son sujet, mais partir du moment o il a dsir une femme et que D. la fait tomber dans un profond sommeil, les anges ont vu quil tait un tre de chair et de sang et seulement un peu moins que D. (Thillim 8:6). Est-ce que lhomme peut rellement ressembler D. et crer des mondes? Cest ce que le serpent dit la femme (Brshit Rabba 19:4): D. mangea de larbre de la Connaissance et cra le monde, et cest pourquoi D. vous a interdit den manger pour vous empcher de crer dautres mondes . Mais grce la Torah et aux bonnes actions il est possible de perfectionner le monde comme il est crit (Brshit 2:3): luvre que D. a cre pour la parfaire , cest--dire que D. a cr le monde et laiss lhomme le soin de continuer et daccomplir luvre de la cration. Comment lhomme peut-il tre comme D., crateur de mondes? En tant unique comme D. est Unique, ce qui nest possible que sil a dans le cur lamour de D. comme il est crit (Dvarim 6:5): Tu aimeras lEternel ton D. de tout ton cur , si son cur est rempli damour pour son prochain, comme il est crit (Vayikra 19:18): Tu aimeras ton prochain comme toi-mme et sil considre tous les Juifs comme une partie de lui-mme, alors, grce son amour pour D. et son prochain, il ralise tous les commandements de la Torah, et peut continuer la cration et crer des mondes comme D. parce quil est attach D., quil tient de la divinit, et quil est limage de son Crateur. Le livre Mahan Yhouda dfinit ainsi la supriorit de lintelligence de lhomme. Nous voyons que D. a formellement interdit lHomme de manger de larbre de la connaissance et a mme dcrt quil devrait mourir sil en mangeait (Brshit 2:17) alors que la mort nexistait pas encore dans le monde. Pourtant lHomme a eu la grande intelligence de comprendre et de craindre un fait qui nexistait pas encore. Et nous voyons que la faute commise en mangeant de larbre de la Connaissance a donn lHomme lintelligence et lentendement, comme il est crit: Maintenant lHomme sera comme lun de nous, connaissant le bien et le mal (ibid. 3:23), cest--dire comme D., sachant le bien et le mal (ibid. v. 5) . Cest que, avant davoir faut, lHomme tait capable de veiller sur toute la cration, comme il est crit: Et Il le plaa dans le Jardin dEden pour le soigner et le garder (ibid. 2:15), mais il a reu de D. un commandement, linterdit de manger de larbre de la Connaissance, car D. voulait enseigner lHomme que le monde a un Gouvernant et un Matre, que le monde nest pas abandonn lui-mme, et que cest seulement grce lobissance aux ordres du Matre que le monde pourra tre gratifi de prosprit. Mais lHomme a failli dans sa mission, il na pas obi la voix de D., il a faut, et alors il a t chass du Jardin dEden. D. sen lamente: aykha! o es-tu? (Brshit Rabba 19:18), le monde se remplit dobscurit cause de cette transgression (Avoda Zara 8a) et il a t cause de mort pour lui-mme et le monde tout entier (Yirouvin 18b).

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Nous devons nous demander pour quelle raison lHomme a faut, lui qui fut cr limage de D. et pourquoi il devait transgresser un ordre de D.? Cest quen vrit lHomme avait lintention de servir D., et il pensait que manger de larbre de la Connaissance lui permettrait de diffrencier et de choisir entre le bon et le mauvais, et quainsi il pourrait par la suite recevoir beaucoup dautres commandements. Mais ctait une erreur, car sil navait pas transgress lordre reu, sil avait obi, D. lui aurait donn beaucoup dautres occasions de faire le bien puisque une bonne action entrane une autre bonne action (Avot IV: 2). Mais lHomme na pas attendu, et il a transgress le seul commandement quil ait reu, et pour avoir perdu cette occasion, il a entran le monde dans sa chute. Cest une leon pour tous, car nombreux sont ceux qui dsirent accomplir de bonnes actions, mais au dtriment dautres devoirs quils dlaissent. Les Sages nous ont enseign (Rosh HaShana 1:8): Celui qui commence faire une bonne action doit la terminer et Il faut excuter jusquau bout ce que lon a commenc (Tanhouma Ekev 6), sans sarrter en chemin, sans sinterrompre pour faire une autre chose qui semble tout coup plus importante, car nous avons dj t prvenus (Avot II:1): Sois aussi attentif un commandement facile qu un commandement difficile , et celui qui est occup remplir une obligation est exempt dune autre obligation qui se prsente en mme temps (Souca 25a). Cest pourquoi chacun dentre nous doit excuter le commandement qui se prsente lui (Makot 10a), ce qui lamnera observer tous les commandements selon la volont divine et pour Sa plus grande gloire. Chacun peut, grce lobservance des commandements, atteindre la grandeur de lHomme avant la faute, ressembler D., et devenir cet homme qui remplit le monde de prosprit. Nous pouvons comprendre prsent ce que disent les Sages (Shabbat 109b): Il ne faut pas interrompre ltude des enfants, mme pour la construction du Temple , et encore (ibid.): Le monde ne se maintient que grce aux mots murmurs par les enfants qui apprennent la Torah, car ils ne connaissent pas le got du pch . Le mauvais penchant ne domine pas les enfants, et cest pourquoi lorsquils apprennent la Torah, ils sont comme le Premier Homme avant la faute, et alors le monde se maintient et se perptue grce eux. Ils sont eux-mmes comme le Saint des Saints, et leur bouche, exclusivement occupe rpter les mots de la Torah, est pareille un ustensile consacr au service du Temple. Cest parce quils sont considrs comme le Temple lui-mme, et que le monde se maintient grce eux, quils ninterrompent pas leur tude, mme pour construire le Temple. Il est du devoir de lhomme de devenir semblable au Premier Homme avant la faute, alors seulement la Prsence divine habitera ce bas monde. Telle est la raison dtre de la cration. Cest pourquoi la Torah commence par la lettre beth, dans le sens de bayt, maison et habitation pour la Prsence divine, et lhomme est sa rsidence. Tel est le sens du lien entre le dernier verset de la Torah: ...aux yeux de tout Isral et le premier verset: au commencement D. cra ... car lhomme et la Torah sont les rsidences de la Prsence Divine. Comment lhomme peut-il devenir une rsidence pour la Prsence Divine? En tudiant la Torah crite et orale, en accumulant les paroles de Torah comme on accumule des trsors et en se pntrant de la crainte de D. Nous pouvons supposer que cest ce qui est indiqu dans le verset (Brshit 1:26): Et D. dit: Faisons lHomme Notre image et Notre ressemblance et quil domine les poissons dans les mers et les oiseaux dans le ciel . Comme nous lavons vu plus haut, ce verset dcrit lhomme qui tient de la divinit par sa ressemblance avec D. et dont le rle est de dominer les poissons des mers et les oiseaux du ciel. Yam, la mer, reprsente allgoriquement la Torah crite, comme il est dit la mer du Talmud , et la Torah est plus vaste que la terre et plus profonde que les mers (Yov 11:9). Le mot shamayim, le ciel, reprsente la Torah orale, car ce mot est compos de esh, le feu, et mayim, leau (Rashi, dbut de Brshit) qui reprsente la Torah, comme il est dit: il nest deau que la Torah (Babba Kamma 17a), et il nest de feu que la Torah (Midrash Thillim 16:7). Cest donc que la raison dtre de lhomme est de sabreuver de mayim et de shamayim, de Torah crite et orale, comme un trsor, et alors il est Homme , une rsidence pour la Prsence divine, en toute puret et en toute saintet. Les Sages ont dit (Yoma 39a): Celui qui se sanctifie tant soit peu ici-bas est grandement sanctifi en haut, celui qui se sanctifie en ce monde est sanctifi dans le monde venir . Dans la mesure o lhomme

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se sanctifie, D. prolonge et renforce cette sanctification. Cest alors que la majest de D. se dvoile, Son rgne stend dans le monde, et le monde est rempli de la connaissance du Nom de D. Alors tous acceptent de plein cur le joug de D. Roi du monde. Quelle est la voie suivre? Les Sages ont dit: Une bonne action entrane une autre bonne action . Chacun a lobligation dobserver tous les commandements, et ne doit pas abandonner un commandement pour en accomplir un autre, car nous navons reu le droit de ne ngliger aucun commandement. LHomme a transgress le commandement de D., lui interdisant de manger de larbre de la Connaissance du bien et du mal, dans lintention de recevoir dautres commandements, et il en fut puni. Cest un enseignement pour toutes les gnrations.

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La grandeur de lHomme et sa raison dtre


La vie se propage dans tous les mondes par lmanation den Haut, et la propagation de cette plnitude nest possible que grce aux liens qui existent entre eux (pour donner un exemple concret, si les canalisations ne sont pas tanches, leau scoulera au-dehors, travers les fentes, et elle sera invitablement perdue, mais lorsque les tuyaux sont parfaitement hermtiques, leau parvient destination, partout o elle est ncessaire). Le lien entre tous les mondes ne peut tre ralis que par lhomme, car cest pour raliser lunion de tous les mondes quil fut cr, et cest travers lui que labondance des bndictions et de la russite se rpand dans tous les mondes , crit lauteur de Hessed LAvraham, qui poursuit: la vitalit de lhomme tient du monde de la Assyia, son esprit du monde de la Yetzira, et son me du monde de la Bryia. Il porte le nom dAdam, qui tient de tous les mondes, et cest par lui que labondance des bienfaits remplit tous les mondes . Telles sont ses saintes paroles. Du fait que lhomme porte en lui une part de tous les mondes, lui seul peut oprer le lien entre les mondes de Atzilout, Bryia, Yetzira, Assyia, par lentremise desquels labondance se rpand travers tous les mondes. Nous voyons que cest essentiellement lhomme quincombe la responsabilit et la mission de relier ces mondes entre eux, car il tient de chacun deux. Sil supprimait, ne serait-ce quun instant, lun des liens qui relie les diffrents mondes, toute la cration en ptirait! Essayons de le comprendre. Il est crit (Brshit 2:3): En ce jour D. se reposa de luvre de la cration quIl avait cre pour la parfaire . D. a achev luvre de la cration le sixime jour, juste avant lentre du Shabbat - tandis quun jour se termine, lautre commence - et lHomme qui avait Sa prfrence fut cr en dernier lieu, afin dtre responsable de la cration tout entire. Ceci ressemble au roi qui construit un palais splendide dans ses moindres dtails, et qui convoque un serviteur et lui commande de veiller la propret, lui disant: Cette maison est moi et elle doit toujours rester en parfait tat et aussi resplendissante quelle lest prsent! Et pourtant, la fin du verset il est dit pour la parfaire , ce qui montre quil reste encore quelque chose complter, que le monde manque encore de quelque chose. Daprs ce que nous avons vu plus haut, il est clair que lhomme, en ce monde, a pour tche de veiller sur la cration telle quil la reue et dajouter de la beaut du monde. Les Sages ont dit (Sanhdrin 38a): LHomme fut cr la veille de Shabbat... afin de se prsenter tout de suite au festin; cest comme un roi qui btit un palais dans ses moindres agencements, prpare un grand festin, et lorsque tout est prt il y introduit ses invits comme il est dit (Mishley 9:1-3): La Sagesse sest bti une maison, elle en a sculpt les sept colonnes, elle a prpar les animaux pour la viande, elle a mlang les vins, elle a dress la table, et a envoy ses servantes lancer les invitations depuis les hauteurs de la cit... Pour pouvoir accomplir sa tche et prserver la cration tout entire, lhomme doit se soucier avant tout de ne jamais rompre le lien entre tous les mondes, afin que labondance de la lumire ternelle qui mane de D. puisse se propager partout. Nous savons que le Premier Homme fut cr de telle sorte quil comprenait en lui une part de tous les mondes (dans les termes de la Cabbale, il sagit des Dix Sphirot), cest donc lui qui les commande et les relie entre eux, et cest ainsi que la lumire et la plnitude de D. peuvent se dverser dans tous les coins de la cration, car ces mondes sont lis les uns aux autres.

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Comment lhomme peut-il relier les mondes, Atzilout, Bryia, Yetzira, Assyia, et les Dix Sphirot, leur source, D.? Uniquement grce la Torah, comme il est dit: Le nud suprieur des Tphilines est un commandement de la Torah (Menahot 39a). La Torah est la lumire (Mishley 6:23) qui claire tous les mondes. Lintention de D. est que lhomme remplisse sa tche saintement, quil subsiste la sueur de son front sans tre tributaire de la charit. Lorsquil vit dans la saintet et la puret, il reoit de D. une rcompense la mesure de ses bonnes actions, selon la promesse divine. Ceci dit, revenons maintenant au Premier Homme. Le jour o D. cra lHomme, Il le plaa dans le Jardin dEden afin quil le cultive et le soigne (Brshit 2:15), mais ce travail et ces soins noccupaient que quelques heures par jour (voir Sanhdrin 38b). Si ces heures-l, lHomme stait maintenu en tat de puret et de saintet, toutes les canalisations auraient t relies entre elles, et la lumire infinie aurait continu affluer pour la suite des gnrations. Cest ce que disent les Sages (Avoda Zara 5a): D. a montr lHomme toutes les gnrations et leurs dirigeants . Cest dire que toutes les gnrations taient dpendantes du Premier Homme. Sil avait rempli sa mission la perfection, il naurait pas t chass et la mort naurait pas exist dans le monde. Cest ce qui est crit pour la parfaire . D. a laiss lHomme un certain travail accomplir, afin de lui procurer, lui et toutes les gnrations suivantes, le mrite de vivre et de profiter de la lumire infinie, dans le Jardin dEden qui est la rsidence des mes des Justes, qui y jouissent du rayonnement de la splendeur divine (Brachot 17a), cest l aussi que les Justes dansent en rondes et indiquent du doigt: voici notre D... (Taanith 31a). Mais pour notre malheur, lHomme a failli sa tche le jour mme de sa cration, et il fut chass du Jardin dEden. D. Se lamente cause de lui (Brshit Rabba 19:18), cause de cette faute que, jusqu ce jour, nous navons pas expie pour faire rgner D. dans le monde par lentremise des liens qui relient les mondes, Atzilout, Bryia, Yetzira, Assyia. Pourtant, mme de nos jours, lhomme a la possibilit deffectuer cette rgnration. Il possde les moyens et le pouvoir de le faire en tudiant la Torah, comme le disent les Sages (Ndarim 32a): Grande est la Torah, car ntait-ce son mrite, le ciel et la terre ne pourraient pas exister . Cest par ltude de la Torah que lhomme propage labondance travers tous les mondes par les saintes canalisations, et la cration tout entire se perptue par le mrite du nud suprieur des Tphilines qui rattachent lhomme la Torah. A prsent, nous comprenons la ncessit de se tremper dans le bain rituel la veille du Shabbat qui, comme on sait, est un moment bnfique pour oprer la correction de la brit, la marque de lAlliance qui sanctifie le peuple juif. Le mot mila fait allusion aux quarante jours de la formation de lembryon (voir Sotah 2a). Durant ces quarante jours, il est dtermin sil sera homme, un homme qui a pour mission de relier tous les mondes afin den faire jaillir les eaux de la vie - la profusion qui se rpand saintement travers les mondes. Lhomme doit savoir et ne jamais oublier que D. dsire et veut quil soit homme, la fin des quarante jours de sa formation, afin de joindre tous les mondes par labondance qui se rpand travers les canalisations sanctifies qui les relient. Cela nous permet aussi de comprendre ce que disent les Sages (Brachot 60a): Jusqu quarante jours, il est permis de prier et de demander que lenfant ne soit pas dform, quil soit un garon ou une fille, mais aprs quarante jours, il est interdit de prier pour une fille ou un garon, car il est vain et inutile de prier pour lavnement dun fait dj fix . Cest que, nous lavons dit, aprs quarante jours, D. Tout-Puissant a dj dcid de quel sexe il sera. La lettre mem du mot mila a la valeur numrique de 40, les quarante jours de la formation de lenfant, et le mot yeled, enfant, a la valeur numrique de 45, qui est aussi la valeur numrique du Nom de D., Matre du monde (compt avec les lettres du aleph). (Voir le Midrash Otyiot DRabbi Akiva Ch. 1, Alouf cest le Matre du monde). Nous voyons donc que la tche qui incombe lhomme et sa raison dtre est de veiller ne pas endommager la saintet du lien que reprsente le signe de lAlliance, car cest travers lui que tous les mondes sont relis, et cest la marque de lalliance entre lui et D. Quiconque porte atteinte ce signe porte atteinte au Nom de D. autant qu lhomme lui-mme, cr pour tre le lien permanent entre tous les mondes. Sil porte atteinte ce signe, cest comme sil reniait le Nom de D. quil porte en lui - D. nous en prserve.

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Expliquons maintenant la faute du Premier Homme. Celui-ci fut cr le sixime jour. D. lui laissa le soin de continuer luvre de la cration et de la parfaire, durant les quelques heures qui prcdaient le commencement du Shabbat. Sil avait obi la volont de D., la mort naurait jamais exist dans le monde, mais cause de ses graves fautes, il a port atteinte au signe de lAlliance (voir Sanhdrin 38b). Le Ari zal explique que le Premier Homme na pas attendu jusquau Shabbat pour sunir avec Hava son pouse, ce qui a provoqu la jalousie du serpent. La dgradation de lHomme a dbut en consquence avec son union prmature avec Hava. Sil avait attendu la nuit du Shabbat au lieu de sunir avec elle le jour, il aurait t protg par la lumire divine, mais pour navoir pas attendu, il en est venu manger de larbre de la Connaissance. Tout cela sest pass la veille du Shabbat (voir Ari zal, Taamey HaTorah). Le bain rituel de la veille de Shabbat vient corriger la faute du Premier Homme. Quiconque se purifie dans le bain rituel la veille de Shabbat bnficie de la saintet du Shabbat dont la lumire lenveloppe, ce qui prolonge la cration et la formation de lhomme, et lie les mondes entre eux afin de les remplir dabondance. Nous ralisons combien terrible est le secret des eaux purificatrices. Lorsque lhomme descend dans le bain rituel, il prolonge sur lui le rayon de la lumire primordiale infinie partir de laquelle furent crs tous les mondes. De quel rayon sagit-il ? Nous savons que lorsque D. dsira faire connatre Ses cratures Ses bonts et Sa misricorde et leur prodiguer labondance de Ses bonts, Il sest pour ainsi dire rduit pour laisser un vide dans la sphre, et Il y a fait descendre un rayon de la Lumire Infinie manant de Lui et atteignant ce point de nant et de vide. De cette ligne et de ce cercle furent cres les dix Sphres do proviennent tous les mondes. Cette rduction de D. nest valable que vis--vis des hommes, des cratures capables de se rjouir en D., et ds le moment o Il les a crs, Il a remis en leur pouvoir tous les mondes avec lobligation de les relier et de les unir, et ceci est une marque de la grande gnrosit de D. Tel est le secret du bain rituel. En descendant dans le bain rituel qui comporte une mesure deau de quarante Sah, lhomme accepte la souverainet de D., son Crateur. En mme temps, il accepte le fait quau bout de quarante jours de formation dans le sein de sa mre, il soit devenu homme, attach au Nom de D. et qu partir de ce moment-l, tous les mondes sont lis entre eux et reoivent labondance des bonts divines. Lorsque lhomme se trouve dans leau du bain, il prolonge sur lui-mme ce rayon de Lumire Infinie, duquel D. a cr les dix sphres et ce rayon se prolonge pour donner existence tout ce qui existe et remplir tous les mondes dun afflux dabondance. Tout ce que nous affirmons est indiqu dans le mot mikv, le bain rituel. La lettre mem, (dont la valeur est 40), reprsente les quarante Sah deau du bain rituel, et aussi les quarante jours de la formation de lembryon dans le ventre de sa mre, priode qui lui est ncessaire pour quil puisse tre appel homme. La lettre kouf reprsente la ligne (kav) par laquelle la Lumire Infinie descend ds que D. Sest en quelque sorte rduit crant une sphre dans laquelle la lumire sest rpandue, ainsi que les Dix Sphirot et les mondes de Atzilout, Bryia, Yetzira, Assyia. Sans cette lumire, la sphre naurait aucune existence. La lettre hh (dont la valeur numrique est 5), quivaut aux cinq formes de saintet que lhomme acquiert la veille du Shabbat lorsquil est dans le bain rituel. Cest dire combien la rflexion sur le sens et le but du bain rituel est profonde et difficile. Lhomme se plonge dans le bain rituel la veille du Shabbat pour corriger le principe fondamental endommag par le Premier Homme, et recevoir la lumire infinie afin de lier et unir les mondes entre eux, car cest pour continuer luvre de la cration quil fut cr, comme il est dit quIl cra afin de la parfaire . Lhomme doit veiller avec crainte ne pas dtriorer le signe de lAlliance sainte, car ce serait endommager le principe fondamental mme de la cration de lhomme et nier le Nom de D. quil porte en lui. Sil sen garde et se purifie, il devient semblable au Premier Homme avant la faute, et grce la purification dans le bain rituel, il unit les mondes entre eux dans la saintet et la puret et il prolonge sur lui-mme labondance des bienfaits qui affluent travers les mondes partir de ce mme rayon de lumire qui les relie. Cest dans ce but que lhomme fut cr. Par le mrite de la purification et de la sanctification, nous parviendrons au mrite prvu par les Sages (Yoma 39a): Celui qui se sanctifie un peu est grandement sanctifi , celui qui se sanctifie en bas, est sanctifi den Haut, celui qui se sanctifie dans ce monde est sanctifi dans le monde venir. Amen.

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Quelle est la voie suivre? Lunion des mondes Atzilout, Bryia, Yetzira, Assyia dpend de lhomme et nest possible que sil se purifie et se sanctifie. Combien cette pense est terrifiante pour celui qui na pas prserv la saintet du signe de lalliance et qui ne sest pas purifi dans le bain rituel. Seule cette sanctification peut expier la faute du premier Homme et propager dans le monde la saintet et la puret.

Lamour de D. pour lhomme cr Son image


Il est crit (Brshit 1:27): Et D. cra lHomme Son image, la ressemblance de D. Il le cra... et la Mishna (Avot III:14) commente: Lhomme, qui a t cr limage de D., est aim de Lui . Limage de D. en lHomme lui permet de servir son Crateur et davoir connaissance de D., chaque homme selon son intelligence et ses capacits, comme le dit le Rambam dans son Livre de la Connaissance (Yessodey HaTorah 2:2). Cest par sa bonne conduite que lhomme manifeste limage de D. qui est en lui. Cela demande beaucoup de travail sur soi et de grands efforts, car il nous faut corriger nos actes et acqurir des valeurs et des qualits morales assez leves pour nous permettre de discerner limage de D. et de sentir la ralit de D., bni soit-Il. Nous devons prendre lhabitude dagir correctement dans tout ce que nous faisons, en particulier dans les synagogues ou les maisons dtude qui sont spcialement sanctifies par la Prsence de D. (Brachot 6a), comme il est crit: D. se tient dans lassemble qui porte Son Nom (Thilim 82:1). Cest dire que dans une telle assemble plus quen tout autre lieu, nous pouvons sentir la proximit de D. et ressentir vivement la crainte de Lui, de Sa splendeur, de Sa puissance, comme il est dit: Sache devant Qui tu te tiens (Derech Eretz Rabba fin du Ch. 3). Cest seulement lorsque lon connat et que lon est conscient de limage de D. qui est en lhomme, que lon peut savoir devant Qui on se tient - devant le Roi des rois, bni soit-Il. Par contre, si lon ne distingue pas et ne voit pas clairement limage de D. qui est en lhomme, cette image et cette ressemblance seffacent (voir Brshit 1:26), et alors on ne peut ni savoir ni comprendre que lexistence de D. est manifeste en tout lieu. Si lhomme doit prserver limage de D. qui est en lui, il sensuit quil doit prserver cette image en son prochain, qui lui aussi est cr limage de D., et cest pourquoi chacun doit respecter son prochain, comme il nous est enseign: Lhonneur de ton prochain doit ttre aussi cher que ton propre honneur (Avot II 13). Il est dit prcisment ton propre honneur: de mme que tu veilles limage de D. en toi, ainsi tu dois veiller et prserver limage de D. en ton prochain. En commettant une faute envers notre prochain, nous commettons une faute envers D. Notre prochain aussi est cr limage de D. et insulter son prochain est une insulte envers D. Pourtant, celui qui transgresse un de ses devoirs envers D. nest pas comparable celui qui faute dans ses rapports avec son prochain, car vis--vis de son prochain, il a faut la fois envers D. et envers son prochain, cest pourquoi il nous est enseign (Yoma 85a) que si le repentir ou les souffrances procurent le pardon pour les fautes commises envers D. (voir ibid. 85a-b et 86a), les fautes commises envers son prochain ne sont pardonnes que si lon a apais son prochain. Cest seulement aprs que nous avons rendu au prochain limage de D. qui est en lui, que notre repentir est accept et que nous obtenons le pardon de la faute commise envers lui. Cest pourquoi il faut dsirer le bien de son prochain au point de sentir et de distinguer nouveau en lui limage de D. laquelle nous avons port atteinte en fautant contre lui. Alors les choses rentrent dans lordre. Cest ce sujet que Rabbi Akiva a dit, concernant le verset (Vayikra 19:18): Tu aimeras ton prochain comme toi-mme , que cest un principe fondamental de la Torah (Yroushalmi Ndarim 9:4), car si quelquun porte atteinte, D. nous en prserve, lhonneur de son prochain, cest comme sil niait lexistence de Celui qui a donn la Torah et lexistence mme de D. Aimer son prochain comme soi-mme est un principe fondamental de la Torah, dlice permanent de D. A propos de Avraham Avinou, il est dit que le jour o il sest circoncis et quil a obi la Parole divine, il est devenu parfait, et par l porteur de la Prsence divine. Au troisime jour aprs sa circoncision, il est crit (Brshit 18:1): LEternel Se rvla lui dans les plaines de Mamr... et Rashi rapporte le commentaire des Sages (Babba Metzya 86b): Ctait le troisime jour aprs la circoncision, et D. vit combien Avraham regrettait quil ny ait aucun passant accueillir dans sa maison. Cest que D. avait caus une chaleur torride afin quAvraham ne soit pas drang par des visiteurs . Mais Avraham en fut pein et il envoya son serviteur Elizer chercher des invits (ibid.). Tant et si bien que D. eut compassion de lui

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et lui envoya trois anges, Michal, Gabril et Raphal, sous forme de trois Arabes (Brshit Rabba 48:9). Avraham fut rempli de bonheur de pouvoir accueillir des htes et pour ce faire, il demanda D. (Brshit 18:3): De grce, ne quitte pas Ton serviteur et (ibid. verset 2): il courut eux du seuil de la tente . Cela nous montre quAvraham se retire de devant la Prsence de D. pour accourir vers les visiteurs, de faon telle que les Sages (Shabbat 127a) en tirent lenseignement selon lequel accueillir des invits est plus important qualler au devant de la Prsence divine . Cest une chose trs surprenante et qui demande tre explique. 1. Labsence dinvits cause Avraham une peine plus grande que la douleur quil ressent cause de la circoncision et cela au troisime jour - au moment o la faiblesse est la plus grande! (Voir Shabbat 134b, et le commentaire de Rabbeinou Nissim, Ndarim 31b). 2. Avraham se trouvait en Prsence de D. qui tait venu le visiter pour lui apporter la gurison, et malgr cela, il regrette de navoir aucun visiteur. ?tre en Prsence de D. serait donc sans importance? 3. Ds que des visiteurs viennent, Avraham quitte la Prsence de D. et accourt leur rencontre. Convient-il dagir ainsi vis--vis de D.? Cest une chose tonnante! Et quest-ce qui permet aux Sages daffirmer que recevoir des visiteurs est plus important qutre en Prsence de D.? Quest-ce qui nous permet de dire quAvraham a agi correctement lorsquil sest retir de devant la Prsence divine? 4. Pourquoi Avraham a-t-il tant de peine de ne pas avoir de visiteurs, et pourquoi dsire-t-il tellement accueillir des visiteurs dans sa maison? 5. Quy a-t-il dexceptionnel dans le fait que, aprs la circoncision, lorsquil devient parfait, il dsire tant que des passants lui rendent visite? Pourquoi justement ce moment-l? Nous allons tenter, avec laide de D., dexpliquer clairement chacun de ces points. Avraham avait un grand amour de toutes les cratures. Il na jamais considr leur apparence extrieure, au contraire il ne voyait et ne ressentait que leur intriorit, leur essence, ce qui est cach en eux. Comme nous lavons vu plus haut, chaque homme est cr limage de D. et cest cela qui doit tre manifeste. Le rle dAvraham en ce monde est de prouver aux hommes que leur mode de vie est un chec et de les convaincre de leurs erreurs afin de les amener la connaissance de D. et la confiance en Sa Providence, comme disent les Sages propos du verset Et les mes quils ont acquises Haran (Brshit 12:5): Avraham convertissait les hommes (Brshit Rabba 39:21). Cest aussi ce quAvraham dit Elizer son serviteur (ibid. 24:3): LEternel D. du ciel et de la terre... , ce que Rashi, rapportant le commentaire de nos Sages, explique ainsi: Jusqualors, Il ntait que D. du Ciel, mais depuis que jai enseign et habitu les gens proclamer Son Nom, Il est aussi D. de la terre . Avraham fait sentir aux hommes que limage de D. dont ils taient porteurs les avait quitts, et partir de ce moment-l ils lont retrouve - grce son enseignement. A partir du moment o Avraham fut circoncis, il devint parfait et porteur de la Prsence de D. Justement ce moment-l Avraham dsire le plus ressembler D. en tout, il veut tre Son image et Sa ressemblance, comme il est crit Attache-toi Ses voies et Ses qualits: de mme quIl est misricordieux, sois misricordieux, de mme quIl est bienfaisant, sois bienfaisant... (Sotah 14a entre autres). Cest pourquoi en devenant partenaire de D., Avraham ressent une grande peine de ne pas avoir de visiteurs envers lesquels il pourrait tre gnreux comme D. est gnreux, et cest la raison pour laquelle D. lui envoie trois personnages, afin de lui permettre de les recevoir. En voyant les visiteurs, Avraham quitte la Prsence de D. et court leur rencontre, pour deux raisons: premirement pour ressembler au Crateur et faire un acte de bienfaisance, deuximement, parce quil a reconnu en eux limage de D., comme il la voyait en toute personne. Dornavant, chacune des questions poses sexplique et prend sa place. La peine ressentie par Avraham parce quil navait pas de visiteurs est plus grande que la douleur de la circoncision, car il ne dsire que rapprocher les hommes de leur Crateur et les amener Lui ressembler. Ce dsir est si ardent quil en oublie la douleur de la circoncision. Et cela, justement au moment o il sest circoncis et est devenu parfait dans le sens o il peut maintenant tre porteur de la Prsence divine, car cest ce moment-l quil devient partenaire de son Crateur, Son image et Sa ressemblance. Cest la raison pour laquelle, bien quil se soit trouv en Prsence de D., il regrettait de navoir pas de visiteurs, car tre en Prsence de D. nest le but de la perfection que si lon agit avec bienfaisance pour amener les gens sen remettre la Protection divine.

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Nous comprenons prsent pourquoi Avraham se retire de devant D. et court vers les visiteurs. Cest quen eux aussi, il reconnat la Prsence divine et limage de D. et donc il sempresse vers la Prsence divine qui se trouve avec les invits, et cest dans ce sens quaccueillir des invits reprsente un acte plus important quaccueillir la Prsence divine, puisque recevoir des invits cest aussi recevoir la Prsence Divine. Et donc Avraham na pas port atteinte lhonneur de D. en se retirant pour courir accueillir des htes de passage, mais il na fait que manifester envers eux une gnrosit comparable celle du Crateur dont il a suivi Les voies. Cest par de tels actes que la Prsence de D. ne nous quitte jamais. La sainte obligation de tout Juif, descendant dAvraham, est de se conduire comme lui afin de rvler la Prsence Divine, de ramener les hommes D. et de restaurer en eux limage de D. quils ont perdue cause de leurs fautes, non seulement ceux qui ont simplement commis une faute, mais aussi ceux qui ont perptr de grands pchs, et de les ramener D. Les Sages ont dit (Avot V:18): Quiconque fait acqurir du mrite la collectivit est assur de ne commettre aucune faute . Pour quelle raison? Celui qui dote la collectivit de mrite, comme la fait Avraham, agit limage et la ressemblance de D. Quelquun qui agit de la sorte pourrait-il avoir dans le cur un sentiment qui porterait atteinte la Prsence Divine et lamnerait fauter? La crainte de D. seule lempche de commettre une faute, et une telle personne peut faire acqurir tous du mrite puisquil ralise en lui-mme limage de D. et la distingue aussi chez les autres, quil respecte, quil ramne D. et quil renforce dans leur foi. Comment reconnatre limage de D.? Il faut faire beaucoup defforts avant de pouvoir la ressentir et parvenir de grandes russites, en faveur de soi et en faveur des autres. Cela nous permet de comprendre ce qui est dit propos de Mosh Rabbeinou. Il est crit (Shemot 2: 11): En ce temps-l, alors que Mosh avait grandi, il sortit vers ses frres et il vit leurs souffrances... Cest--dire que Mosh a vu combien ses frres souffraient, il a ressenti leur douleur et leur souffrance dans sa propre chair, cest pourquoi il est dit Mosh avait grandi . A partir de ce moment-l, il a eu le mrite de plaider en faveur de son peuple et dtre lenvoy de D. pour sauver Isral, parce quil a vu leurs souffrances (voir Shemot Rabba 1:27), les a ressenties et partages. Ensuite, il est crit: et il vit quun homme gyptien frappait un Juif, un de ses frres, et il tourna son regard droite et gauche, et voyant quil ny avait personne, il frappa lEgyptien mort... Rashi rapporte le commentaire des Sages (Shemot Rabba 1:30): Il la tu en prononant le Nom de D. (Voir Rashi ibid. sur le verset 14). Il faut expliquer comment Mosh, qui tait un prince de la maison de Pharaon, connaissait le Nom de D. Comment lavait-il appris? Cest que Mosh avait fait beaucoup defforts pour perfectionner ses qualits jusqu reconnatre en luimme limage et la ressemblance de D. Lorsquil vit lEgyptien frapper un Juif, il ressentit une grande douleur du fait quun Juif, porteur de limage de D., tait frapp si injustement. Et D., comprenant le fond du cur et de la pense de Mosh et voyant sa douleur, lui insuffla lesprit divin, et cest ainsi quil eut connaissance du Nom de D. qui lui permit de tuer lEgyptien. La grandeur de Mosh tait davoir ressenti en lui limage de D. et de lavoir reconnue en chaque Juif, ce qui nous permet de comprendre clairement le sens du Midrash (ibid. 13): Il sortit le jour suivant, et voici que deux Hbreux se dressent lun contre lautre, et il dit au coupable: Pourquoi frappes-tu ton prochain? Mosh dit lun deux: Ne vois-tu pas en ton prochain limage et la ressemblance de D.? Pourquoi le frappes-tu? Car il est comme toi, cr limage de D. et tu portes atteinte lhonneur de D. et la Prsence Divine qui est sur ton frre... Mosh dit par la suite (ibid. 14): Cest donc une chose connue... dont le sens est, daprs le Midrash (Shemot Rabba 1:30) cit par Rashi: Je comprends maintenant cause de quelle faute Isral, dentre tous les peuples, est cruellement asservi: ils le mritent, car il y a parmi eux des dnonciateurs et des calomniateurs . Mosh pense que lexil se prolonge parce que les tribus dIsral ne se sont pas encore corriges de leurs fautes, nont pas encore ralis leur saintet, cause de la vente de Yossef, et que tant quils ne sont pas unis, ils ne peuvent pas tre sauvs. Nous savons que la calomnie a caus la destruction du Temple (voir Yoma 9b) bien que cette gnration ait compt de grands Sages. Nous savons (Vayikra 26:2) que les soldats du roi David tombaient au combat et taient vaincus parce quil y avait parmi eux des mdisants; par contre les soldats du roi Achav, malgr leurs crimes, partaient en guerre et triomphaient de leurs ennemis, parce quil ny avait parmi eux ni calomniateurs ni mdisants .

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Chacun doit reconnatre limage de D. en lui et en son prochain, ce qui lempchera de fauter, et colporter des mdisances est une faute qui crie au ciel (Arachin 15b), comme il est crit: Leur bouche sattaque au ciel, leur langue trane terre (Thilim 73:9). La mdisance est une faute aussi grave que les trois crimes les plus graves, lidoltrie, limmoralit sexuelle, et le meurtre, et elle est beaucoup plus nfaste (Arachin 15b). Mais si lon est sensible limage de D. qui est en notre prochain, on ne mdira plus son sujet, et il ny aura ni jalousie, ni haine, ni concurrence entre les hommes, car finalement, quel bnfice pouvons-nous tirer de la Torah, de notre intelligence, ou mme de nos bonnes actions, si nous perdons de vue lessentiel, qui est de raliser Cest lEternel que je crains (Brshit 42:18), en tout lieu et tout moment? Il faut respecter son prochain et veiller son honneur comme au sien propre, puisque la Prsence de D. rside sur lui tout moment.

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Le lien entre lHomme et son Crateur


Il est crit (Brshit 1:27): Et D. cra lHomme Son image, Sa ressemblance Il le cra. Nous constatons l la grandeur et la supriorit de lHomme qui a t cr limage et la ressemblance de D., ce quaucune autre crature en ce bas monde (les animaux) ou dans le monde suprieur (les anges qui Le servent et chantent Ses louanges) na en partage. Avant den venir la cration du Premier Homme, il faut poser certaines questions qui ncessitent explication. 1. Pourquoi est-il ajout Sa ressemblance , naurait-il pas suffi de dire D. cra lHomme Son image ? 2. Il faut aussi expliquer le verset qui donne aux hrtiques un argument pour douter et renier un des fondements de notre foi. En effet, D. na ni corps ni caractristique physique, comme il est crit (Ishaya 40:18): A qui donc pouvez-vous comparer D. et quelle image Lui attribuez-vous? et (ibid.): A qui me comparez-vous, qui me faites-vous ressembler? Le verset dit pourtant que lHomme est cr limage et la ressemblance de D. Faut-il comprendre par l que D. a une image? Nous allons tenter, avec laide de D., de rpondre clairement ces questions. Nous savons que lorsque D. dcida de crer lHomme, Il consulta lAssemble de Ses anges. Rashi, dans son commentaire de ce verset, remarque quil nest pas crit Je ferai au singulier mais Faisons , ce qui indique quIl a consult les anges (Brshit Rabba 8:4) et leur a dit: Jai lintention de crer lHomme, une crature quil convient dappeler Homme, dot dun potentiel divin afin quil puisse tendre sa domination sur le monde entier. Etant donn que lHomme ne pourra jamais dominer totalement toute la cration et que jamais toutes les cratures ne se plieront sa volont, le monde entier serait de toute faon abandonn lui-mme. Et voil que lHomme a reu le pouvoir de diriger le monde et dominer les cratures! De plus, lHomme a la possibilit, grce au potentiel divin qui est en lui, grce ses prires et sa connaissance de la Torah, de faire pleuvoir sur le monde une abondance de bienfaits, de bndictions et de russites. Cest ainsi quil faut comprendre le verset: Il cra lHomme Son image , cest--dire que lHomme a une image qui lui est propre, une image dHomme. Quelle est cette image dHomme qui lui permet de subsister? La suite du verset donne la rponse: limage de D. Il le cra . Le mot Tslem image, contient le mot Tsl ombre, cest--dire quil est lombre et sous la protection de D. Lorsque lme quitte son lieu dorigine, quelle se dtache du Trne de Gloire do toutes les mes sont extraites pour descendre en ce monde, elle laisse une ombre et un vide en ce lieu quelle vient de quitter en Haut, auprs de D. Lombre laisse par lme lorsquelle descend dans le monde pour habiter le corps de lhomme, la lie son Crateur. De mme que si lon soulve un objet qui se trouve au soleil, on cre une ombre lendroit o cet objet se trouvait, de mme (toute proportion garde) lorsque lme est extraite de son lieu dorigine - le fondement du Trne de Gloire - une ombre apparat lendroit quelle occupait, et cette ombre est troitement lie D., crant un lien solide et permanent entre lhomme et son Crateur. Cest le sens de D. cra lHomme Son image, limage de D. Il le cra... , une image propre lHomme, une image (tzelem) divine, par le moyen de lOmbre (tzel) lme sous le Trne de Gloire, auprs de D. Cette Ombre confre lme le pouvoir et la vitalit ncessaires pour surmonter tous les obstacles que lhomme rencontre en ce monde, car D. le protge, comme il est crit (Thilim 121:5): LEternel veille

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sur toi, lEternel est plus proche de toi que ton ombre ta droite . Si D. est plus proche de lhomme que son ombre, celui-ci ne peut pas fauter car la prsence de cette Ombre veille sur son me en ce monde et len empche. Plus lhomme perfectionne ses qualits, sa conduite et ses actes, plus il renforce la puissance de D. en ce monde, comme il est dit (Thilim 68:35): Proclamez la puissance de D., Sa grandeur stend sur Isral... Isral proclame la grandeur de D. et cest pourquoi D. veille sur Isral comme une ombre - dune part pour que le rgne de D. puisse stendre sur le monde entier comme il est dit: Son rgne et Sa domination stendent sur tout , et dautre part, pour que lOmbre divine en lhomme puisse produire dans les cieux une impression favorable, et alors toute mchancet svanouira de la terre comme une fume quemporte le vent, et tous les faux dieux seront anantis et le monde se trouvera finalement pur sous la souverainet de D. et grce au mrite des hommes justes et bons. Mais dans le cas o lhomme nuvre pas en ce monde pour amoindrir lemprise du mauvais penchant et des forces du mal, son Ombre, lOmbre divine, est rduite rester dans le monde den Haut et alors des jugements, des dcrets svres et toutes sortes de souffrances sabattent sur le monde do la Prsence de D. fut chasse. Alors, la Gloire divine devient captive de limpuret, ce qui rduit linfluence bnfique de la saintet sur le monde. En consquence, lhomme perd lOmbre qui laccompagne durant sa vie, il ny a plus aucun rapport entre lui et la saintet, le lien avec sa source et son lieu dorigine est rompu et il ne ressemble plus qu un animal sous forme dhomme. Pour avoir perdu son image et sa ressemblance D. il perd, D. nous en prserve, tous les bienfaits quil aurait pu recevoir en ce monde et dans lautre. Cette Ombre donne lhomme le pouvoir dagir en ce monde et elle donne la vie son me dans le monde venir, aprs la mort du corps. Cela nous permet de comprendre les propos de nos Sages (Brachot 17a): Dans le monde venir les Justes sigeront couronns et jouiront de la Splendeur Divine . Aprs la mort, lme monte au ciel et lOmbre retourne sa demeure dorigine auprs de D. Il nest pas pour lme de plaisir plus grand que celui-l. Chaque homme vertueux en jouit selon son rang. Il est interdit lhomme de porter atteinte son me en ce monde ou de se sparer de D. et de Sa Prsence, sil veut jouir de la Splendeur Divine. Pour appuyer ce que nous avons dit concernant la ressemblance D., (autrement dit, lOmbre de lhomme qui le lie D.) qui donne lme et au corps la vie en ce monde, citons un rcit du Talmud (Horayiot 12a, et le commentaire du Maharsha ibid.): Un Sage dit ses lves: Je suis prs de mourir et cest pourquoi je vous demande denseigner la Torah mes enfants et dtudier la Torah pour llvation de mon me. Ses lves lui demandrent: Comment sais-tu que tu vas mourir? Le Matre leur rpondit: Aujourdhui, je nai pas vu mon ombre devant moi . Nous voyons ici explicitement que lombre de lhomme est un signe de vie et si cette ombre se retire, cest un signe que cet homme va mourir, car lorsquil na pas dombre, il na pas non plus de forme et son me retourne la source do elle fut extraite. Cest ce qui est dit (Zohar I 220a): Cette sainte ombre... lui est enleve lorsque la mort approche... et il nest plus quun tre sans protection... Lorsque lhomme arrive au terme de ses jours, limage de D. se retire de lui et il se trouve sans protection. Et donc, la rptition dans le verset des mots son image - limage de D. , signifie que lhomme est une ombre sur laquelle D. veille den Haut. Lorsquil est li son Crateur, il est protg contre le mauvais penchant et peut faire face tous les obstacles qui entravent son chemin, et cest ce qui donne la vie son me jusquau moment o elle va retourner en Haut, vers D, vers la source do elle fut extraite. Cest par elle que lHomme est li de faon permanente son Crateur. Ceci prive les hrtiques et les rengats de tout argument, comme le disent les Sages (voir Brshit Rabba 8:7): Lorsque D. dicta Mosh les mots Son image et Sa ressemblance , Mosh objecta: ces paroles vont soutenir les erreurs des hrtiques... Lintention nest pas de dire que D. a une face et un corps puisquil est crit (Ishaya 40:18): A qui donc pouvez-vous comparer D. mais que lhomme porte lempreinte de D., et par son Ombre, reste proche de D. et li son Crateur. Aprs la fabrication du veau dor, Mosh a pri D. de sparer Isral des nations (Shemot 33:16) et D. a agr sa demande (ibid. v. 17). Et alors Mosh a demand (ibid. v. 18): Rvle-moi, je Te prie, Ta Gloire . D. lui rpondit (ibid. v. 20): Tu ne pourras pas voir Ma face, car lhomme ne peut pas Me voir et vivre... mais lorsque Ma gloire passera... Je tabriterai selon Ma volont et tu ne verras que ce qui est derrire Moi,

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mais tu ne pourras pas Me contempler de face . Quest-ce donc que D. a bien voulu lui dvoiler? Les Sages enseignent (Brachot 7a, Menahot 35b): Rabbi Hanina Bar Bizna dit au nom de Rabbi Shimon Hassida: cela nous enseigne que D. lui a montr le nud des Tphilines . Tentons dclaircir ce passage difficile. 1. Mosh Rabbeinou a demand D. de lui montrer Sa gloire. Est-ce possible? Ne sait-il pas quaucun mortel ne peut voir D., dautant plus quil sait que D. na rien de corporel et na pas de figure visible, comme il est crit (Ishaya 40:18): A qui donc comparer D.? Comment donc Mosh peut-il demander une pareille chose? 2. Il faut de mme expliquer la rponse que D. lui donne car lhomme ne peut pas Me voir et vivre . Quy a-t-il de nouveau dans cette rponse? Nest-ce pas vident? Il faut aussi expliquer le mot vehay, et vivre . 3. D. a montr Mosh le nud des Tphilines. Que reprsente ce nud? 4. Nous apprenons (Menahot 36b): Le Shabbat et les jours de ftes nous ne portons pas les Tphilines qui sont des signes (Shemot 13:9). Cette obligation ne sapplique pas au Shabbat et aux jours de ftes qui sont en eux-mmes des signes (ibid. 31:13 et 17). Quelle est la raison pour laquelle ces jours-l sommesnous dispenss de porter les Tphilines? Nous allons tenter de rpondre ces questions, avec laide de D. Mosh voulait effectivement contempler cette apparence divine limage de laquelle lhomme fut cr et qui est extraite du fondement du Trne de Sa Gloire. Cest ce qui est signifi dans sa demande: Rvlemoi, je Te prie, Ta Gloire , cette Ombre de laquelle je reois la vie - et non quil ait demand voir D. Lui-mme. A cela D. lui rpond: Tu ne pourras pas voir Ma face, car lhomme ne peut pas Me voir et vivre... Aucun homme ne peut contempler mme cette apparence qui est attache lOmbre laisse en Haut par lme, car sil devait la voir, cela obligerait D. la prendre et lui montrer cette Ombre et sans elle, il ne pourrait plus vivre, il devrait mourir, car lhomme ne peut pas Me voir et vivre... Cest pourquoi D. montre Mosh autre chose, le nud des Tphilines, pour lui signifier le lien qui existe entre lhomme et son Crateur, comme il est crit (Dvarim 6:8): Vous les attacherez en signe sur le bras et ils seront une parure sur votre front . Le nud des Tphilines attache lhomme D. et alors il bnficie dune protection sans laquelle il nest pas plus quun animal. Ne pas porter de Tphilines, quivaut nier D. (Menahot 44a), et les Sages parlent avec ddain dun crne qui nest pas couronn de Tphilines (Rosh HaShana 17a). En portant les Tphilines, lhomme manifeste son lien D., sa foi en Lui, et quil ne vit que dans le but de Le servir. En portant les Tphilines, lhomme exprime que son existence ne lui vient que de lOmbre qui a pris la place de son me en Haut, sous le Trne de Sa Gloire; cest elle qui lui vient en aide pour surmonter les obstacles et son mauvais penchant. D. rpond donc la demande de Mosh en lui montrant le nud des Tphilines, comme il est crit (Dvarim 28:10): Et tous les peuples de la terre verront que le Nom de D. est sur toi . A propos de ce verset les Sages disent (Brachot 6a): Il sagit des Tphilines de la tte , cest dire que nous portons le Nom de D. qui est inscrit dans les Tphilines, et alors tout le monde nous craint. Ce nest que grce aux Tphilines que nous pouvons prserver limage de D. qui est en nous et garder notre Ombre jusquau moment de la rendre, aprs la mort; et cest ainsi que nous restons attachs au Crateur, bni soit-Il. Ceci dit, ce lien avec D. concerne les jours de la semaine, cest pourquoi beaucoup dhommes pieux se couronnent tout au long du jour des Tphilines et portent le talit, le chle de prire, afin de maintenir ce lien toute heure du jour et ressentir la saintet de limage de D. qui est en eux. Mais durant les Shabbat et jours de ftes qui sont en eux-mmes des signes et durant lesquels nous acqurons une me supplmentaire (Beytza 16a, Pessahim 102b), nous bnficions dune protection spciale, nous navons pas besoin du nud des Tphilines, puisque mme sans ce nud, nous sommes lis D. Cela nous permet de comprendre les saintes paroles de la Torah: Vous qui tes rests attachs lEternel votre D., vous tes tous vivants aujourdhui (Dvarim 4:4) et Attache-toi Lui (ibid. 10:20). Les Sages demandent ce sujet (Sotah 14a, Vayikra Rabba 25:3): Est-ce que lhomme peut sattacher la Prsence Divine qui est un feu dvorant? (Dvarim 4:23). En fait, il doit sattacher aux qualits de D. et tre

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misricordieux de mme que D. est misricordieux. Il nous semble que justement vous qui tes attachs lEternel votre D. signifie que la raison dtre de la cration de lhomme est de rester attach D. par limage de D. qui est en lui et par son Ombre qui est reste auprs de D., et cela grce lobissance aux commandements de D. et ltude de la Torah qui est appele vie (Yirouvin 54a). Ce faisant, nous ralisons la promesse du verset: vous tes tous vivants aujourdhui , car les Justes sont appels vivants (Avot DRabbi Nathan 34:10). Cest pourquoi Mosh nous demande de nous attacher D. par lobissance aux commandements, ltude de la Torah, et les bonnes actions. Cest cela qui nous permet de ressembler D. et dtre attachs Lui, puisque lme habite en nous, et lOmbre quelle a laisse en Haut est proche de D. ce qui cre un lien troit entre lhomme et son Crateur, bni soit-Il. Nous pouvons prsent expliquer les paroles de nos Sages (Brachot 17a): Dans le monde venir, les Justes seront assis, couronns, et jouiront de la splendeur divine . Quel est le sens de couronns ? Et de mme, comment dfinir la jouissance quils ressentent de la splendeur divine? Comme nous lavons dit, tant que le Juste vit en ce monde, il ne peut pas jouir de la saintet de la Prsence Divine ni la contempler car il en perdrait son Ombre et rendrait lme, comme D. le dit Mosh: lhomme ne peut pas Me voir et vivre . Mais aprs que les Justes ont quitt ce monde pour lautre, chacun deux reoit en abondance les bndictions et les bonts que D. veut leur donner, et ils jouissent sans restrictions de la splendeur divine laquelle leur me tait si attache, par lentremise de leur Ombre, reste en sa demeure dorigine sous le Trne divin. Ils sont couronns comme ce roi qui porte majestueusement la couronne et dont personne nose sopposer aux dcrets (Babba Kamma 60b). Les Justes, bien que limits dans ce monde par les contingences matrielles, deviennent aprs leur mort, des rois capables de tout accomplir et tout contempler et rien ni personne ne peut les freiner. Ils trnent comme des rois, et jouissent de la splendeur divine manant de lOmbre qui les attache D. lorsque leur me retourne au sjour quelle a laiss et reprend la place qui lui revient. Telle est la jouissance des Justes, et il nen est pas de plus grande. Nous pouvons maintenant comprendre lhistoire du roi Hizkiya et du prophte Ishaya. Lors de la guerre de Sanheriv dont les armes furent ananties en une nuit, il fut dcrt que le roi Hizkiya devait mourir (voir en dtail Melachim II, ch. 20, et Ishaya 38). Le prophte Ishaya se rendit au palais de Hizkiya et dit au roi de dicter ses dernires volonts ses gens car tu vas mourir, tu ne vivras pas . Pourquoi la rptition? Les Sages posent la question (Brachot 10a) et rpondent: Tu mourras en ce monde et tu ne vivras pas dans le monde Venir. Le roi Hizkiya demande alors: Pourquoi cela? Parce que tu nas pas eu denfants, lui rpond Ishaya. Tu as refus davoir des enfants parce que tu as eu la rvlation que tu engendrerais des hommes mchants, mais tu nas pas intervenir dans les secrets de D. Tu aurais d engendrer, comme D. te le commande... Et alors Hizkiya lui dit: Dehors, fils de Amotz! Ta prophtie est sans fondement! Jai reu la tradition de la maison de mes pres (le roi David) que mme si lon a une pe sur la gorge, il est interdit de dsesprer de la bont de D. comme il est crit (Yov 13:15): Bien quIl me fasse prir, jespre en Lui . Et alors, Hizkiya se tourna vers D. et pria de tout cur (Brachot 10b) pour que la sentence soit annule (voir les paroles de sa prire dans les textes Melachim II, ch. 20, et Ishaya 38). Effectivement D. agra sa prire et envoya Ishaya annoncer au roi que sa vie serait prolonge de quinze ans (Melachim II, 20:5, et Ishaya 38:5). Hizkiya demanda alors Ishaya de lui donner un signe que D. le gurirait (Melachim II, 20:8). Le prophte Ishaya lui rpondit (ibid.): Voici le signe que lEternel te donne, que lombre du cadran solaire avance de dix degrs ou recule de dix degrs... Et effectivement lombre du cadran solaire recula de dix degrs et le roi Hizkiya gurit, et il vcut encore quinze ans. Tentons de comprendre ce passage dans la mesure de notre entendement. 1. Pourquoi la rptition Tu vas mourir, tu ne vivras pas . Est-ce que vraiment le roi Hizkiya mrite la mort pour ne pas stre mari et navoir pas eu denfants? Et pourquoi une mort tellement svre, non seulement en ce monde, mais aussi dans le monde venir? 2. Quest-ce que Hizkiya veut faire entendre Ishaya lorsquil lui dit: Jai reu la tradition de la maison de mes pres - le roi David ? Et quel rapport avec le verset Bien quIl me fasse prir, jespre en Lui ? Comment savons-nous que la prire peut aider mme dans le cas dun tel dcret? 3. Pourquoi le roi Hizkiya demande-t-il un signe de sa gurison? A-t-il si peu foi en D.? Hizkiya tait un roi juste et bon, qui accomplit avec une sagesse profonde de grandes actions pour Isral (Voir Brachot 10b). Pourquoi demande-t-il un signe?

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4. Et pourquoi Ishaya rpond-t-il sa demande, alors quil aurait pu lui dire: Ainsi parle lEternel , sans plus et sans avoir besoin de lui donner de signe? 5. Et surtout, il faut expliquer en quoi reculer lombre du cadran solaire reprsente un signe. Ny a-t-il pas dautres signes probants? Ce qui a t dit plus haut va nous permettre de rpondre. Le prophte Ishaya dit Hizkiya quil a t dcrt quil mourra en ce monde et ne vivra pas dans le monde venir parce quil ne sest pas mari. Il lui dit spcifiquement: tu ne vivras pas dans le monde Venir , cest--dire ton image, ton Ombre laisse sous le Trne de Gloire ne pourra pas te faire vivre dans le monde venir parce que tu ne tes pas mari et que tu nas pas enfant des fils et des filles en ce monde. Pour navoir pas donn ton Ombre une filiation en ce monde, elle va retourner sa demeure dorigine et elle ne te fera pas vivre dans le monde venir. Et, effectivement, Hizkiya rpond Ishaya quil ne craint pas cette prdiction, car il a reu par tradition de son grand-pre David quil ne faut jamais dsesprer de la misricorde de D. Il mentionne spcifiquement le roi David dont les Sages ont dit (Zohar I 91b) que les annes de la vie de David ntaient pas siennes, mais celles de Adam, le Premier Homme, dont la vie fut raccourcie de soixante-dix annes, lesquelles furent donnes au roi David . Bien quil nait pas proprement parler dannes en ce monde, il peut vivre dans le monde venir et son Ombre peut revenir et veiller sur lui et lui donner la vie. Le roi David fait allusion cela lorsquil dit Je sjournerai dans Ta tente pour toujours , en ce monde et dans le monde venir, pour dire que ses lvres continueront murmurer les louanges de D. dans les synagogues et les maisons dtude mme aprs sa mort, comme le disent les Sages (Ybamot 96b-97a). Cest ce qui est dit dans le verset: Bien quIl me fasse prir, jespre en Lui , cest--dire: Malgr le fait que je vais mourir, jespre en Lui, je continue esprer et prier D. pour que mon image et mon Ombre qui se trouvent auprs de Lui continuent me faire vivre et pour que je reste li et attach lEternel mon D. qui me fait vivre aussi dans le monde venir. Aprs avoir achev sa prire, Hizkiya demande D. de lui donner un signe, pour avoir la confirmation que son Ombre lui serait rendue et quil continuerait vivre comme auparavant. Ishaya montra au roi un signe, car sa demande tait justifie et prouvait que Hizkiya dsirait mriter le monde Venir et faire venir au monde dautres mes, des fils et des filles pour donner suite son Ombre. Quel signe le prophte choisit-il? Un signe li lombre, qui recula de dix degrs sur le cadran solaire (il est possible que ce soit une allusion aux Dix Sphirot). Ce faisant, Hizkiya a pu voir clairement que sa prire tait accepte par lEternel, D. de lunivers, quil verrait son Ombre, quil aurait une succession dans le monde par ses enfants, et qu lavenir il jouirait de la Splendeur Divine et sigerait, couronn comme un roi, avec tous les Justes qui sigent en la Prsence de D., comme il est racont dans Divrey HaYamim. Nous comprenons prsent pourquoi le premier des 613 commandements de la Torah est le commandement de crotre et multiplier . Cest une chose exceptionnelle et merveilleuse que lhomme puisse, grce ce commandement, enfanter des mes saintes et faire prosprer le monde, car les mes qui viennent au monde y multiplient les bonnes actions et tendent la Prsence de D., elles rvlent Sa souverainet, et ce sont elles qui chantent les louanges de D. LOmbre laisse en Haut par lme, continue les faire vivre. Cest pourquoi, si lhomme nobit pas au commandement de crotre et multiplier, il interrompt la propagation de la lumire qui descend dans le monde et il empche lexpansion de la grandeur et de la gloire de D. Telle tait la faute de Hizkiya qui navait pas obi ce commandement, jusqu ce quil se ft repenti sincrement de sa faute. De l nous apprenons que chacun doit se soucier de propager labondance en ce monde par son obissance au premier des 613 commandements qui est de crotre et multiplier, et ainsi de rester attach et li par son Ombre D., Son image et Sa ressemblance, en ce monde comme dans lAutre.

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Adam et Hava, le pouvoir de la prire et des bonnes actions


Il nest pas bon que lHomme soit seul, Je vais lui donner une aide digne de lui, et lEternel D. forma avec la terre toutes les btes des champs et tous les oiseaux du ciel et Il les prsenta lHomme pour quil leur donne des noms... et lHomme donna leurs noms aux animaux et aux oiseaux du ciel... mais il ne trouva pas pour lui-mme de partenaire ses cts. LEternel D. fit tomber la torpeur sur lHomme qui

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sendormit et D. prit une de ses ctes et referma louverture de la chair et lEternel D. faonna la cte quIl prit de lHomme et en fit la Femme... il nomma celle-ci Icha Femme, car elle est faite de Ich lHomme... cest pourquoi lHomme quittera son pre et sa mre et sattachera sa femme, et ils formeront un seul corps (Breshit 2:18-25). Rashi explique les mots une aide ses cts ainsi: Sil le mrite, elle lui sera une aide, sil ne le mrite pas elle sopposera lui (Ybamot 63a). Et il ajoute, concernant la nomination des animaux, que D. prsenta lHomme toutes les espces par couple et lHomme dit: ils ont tous un partenaire, et moi je nai pas de partenaire (Brshit Rabba 17:5), et alors: D. fit tomber sur lHomme une torpeur... Cest un fait connu de tous que le monde fut cr uniquement pour que lhomme reoive les commandements de la Torah (Brachot 6b), et que le monde fut cr pour lhomme (Sanhdrin 37a), afin quil obisse la volont du Crateur et Lui donne satisfaction. Bien que D. ait cr le ciel et la terre en six jours, il neut de repos quaprs avoir cr lhomme, qui en est le but et le couronnement, comme il est dit (Avot DRabbi Nathan 31:3): Un seul homme quivaut toute la cration . Cest seulement aprs avoir achev la cration que D. institua le repos. Et pourtant, la cration dAdam et Hava est enveloppe de mystres difficiles comprendre, et ce qui est cach surpasse ce qui est formul. 1. Pourquoi D. a-t-Il tout dabord cr lHomme sans partenaire, et non pas comme les autres cratures, cres en couple - mle et femelle? Car cest un fait que le monde ne peut pas se perptuer sans la femme qui engendre, comme il est crit (Ishaya 45:18): Il na pas cr (la terre) pour quelle reste dsole, mais pour quelle soit habite . 2. Il faut aussi clarifier ce que disent nos Sages (Brshit Rabba 17:5): D. a prsent Adam tous les animaux afin de lui montrer quils avaient tous un partenaire, afin quil en vienne demander un partenaire pour lui-mme . En vrit, pourquoi D. veut-Il que lHomme demande une Femme, faute de quoi il ne recevrait pas de partenaire? Et pourquoi est-ce justement lHomme qui doit donner des noms aux cratures, et non pas D. Lui-mme? 3. D. ordonne lHomme de ne pas manger de larbre de la Connaissance, comme il est crit (Brshit 2:17): Tu ne mangeras pas de larbre de la Connaissance du bien et du mal... et lHomme transmet cet interdit la Femme, de sorte que tous les deux ont faut en mangeant de ce fruit. Si D. avait cr lHomme et la Femme ensemble et sIl leur avait interdit tous deux de manger de larbre de la Connaissance, Hava aurait srement rflchi srieusement avant de se laisser convaincre par le serpent. Mais D. avait parl Adam au singulier (Tu nen mangeras pas ), et Hava a parl au pluriel lorsquelle a dit au serpent (Brshit 3:2-3): quant aux fruits de larbre qui est au milieu du jardin, D. a dit: vous nen mangerez pas . Sils avaient t crs ensemble et avaient entendu ensemble linterdit, auraient-ils eu la possibilit de fauter? 4. Lorsque D. dcida de crer la Femme, il prit une des ctes de lHomme. Pourquoi? Pourquoi D. na-t-Il pas cr la Femme de manire diffrente? 5. Selon le Midrash (Brshit Rabba 17:11, 18:5), D. cra une premire femme qui prit la fuite, et alors D. la cra une seconde fois. Nous devons nous demander pourquoi D. a cr pour lHomme une partenaire, susceptible de lui chapper? 6. De plus, D. a cr la Femme tourdie par nature (Shabbat 33b, Kidoushin 80b, Zohar II 218a), et donc, elle risque dinciter lHomme fauter. Sil en est ainsi, pourquoi la-t-Il cre durant le sixime jour et non pas juste avant lentre du Shabbat, car elle aurait alors immdiatement t capte par la lumire du Shabbat et naurait pas t amene fauter? 7. Il faut expliquer de faon gnrale le rle de la femme dans la maison, quelle doit tre sa conduite envers son mari, la lumire de ce qui est crit dans la Torah (Brshit 2:20) Pour lui-mme, il ne trouva pas de partenaire ses cts... 8. Un dernier point mais non des moindres: lHomme avant la faute se trouvait dans un tat de perfection sublime, il ne manquait de rien, puisquil vivait dans le Jardin dEden. Il tait aussi loin des dsirs matriels quun bout du monde de lautre et il ny pensait mme pas. Il tait dpourvu de toute exigence, il

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ne demandait rien. Cest pourquoi D. qui est la cause de toutes les causes et la raison de toutes les raisons , (Rambam Yessodey HaTorah 1:1-5-7), lui prsenta toutes les btes et tous les animaux pour lui montrer quils pouvaient procrer et engendrer alors que lui navait pas cette possibilit, pour quil comprenne de lui-mme quil naurait pas de continuation sil navait pas denfants et pour quil en vienne demander D. de lui donner cette facult. Il fallait quil sache que sans demande explicite de sa part, il ne recevrait rien. Il en est de mme pour chaque chose dont lhomme a besoin. Que ce soit les moyens de subsistance, la gurison, la nourriture, la boisson, ou une demeure, il nobtiendra rien sil nen fait pas la demande. Cest ce que D. veut enseigner lhomme en lui prsentant tous les animaux et toutes les btes, car de mme quil est impossible de continuer vivre sans satisfaire des ncessits premires comme la nourriture, de mme il est impossible de poursuivre sa vie sans une descendance quon nobtiendra quaprs en avoir fait la demande. Comment prsenter sa demande? Nous savons que D. dsire ardemment la prire des Justes (Ybamot 64a), puisque leurs prires peuvent abolir et annuler des dcrets svres, comme disent les Sages (Souca 14a): la prire des Justes transforme la colre de D. en misricorde, et annule les dcrets et ce, afin damener les Justes prier dans ce but. Si, D. nous en prserve, ils ne prient pas, la terre produira pour toi des chardons et de livraie (Brshit 3:18). D. dsire enseigner lHomme la prire et cest pourquoi Il cra la Femme telle quelle est, afin quil continue prier sans discontinuer. Mais il nous reste encore comprendre pourquoi D. enseigne lHomme cette leon, justement en lui montrant quil lui manque une partenaire, car il aurait pu le lui enseigner en lui prsentant autre chose qui pouvait lui manquer? Par exemple, si la terre ne produit pas de fruits et que la nourriture vient manquer, lHomme sait quil doit prier pour la pluie, comme il est effectivement crit (Brshit 2:5): Car lEternel D. navait pas fait pleuvoir... Il faut donc dire que D. dsire que lHomme demande justement une chose de la mme nature que lui, laquelle il sera intimement attach et dont il ressent le plus le manque, comme il est crit (ibid. 2:20): Et il ne trouva pas pour lui-mme de partenaire ses cts . LHomme a immdiatement ressenti ce manque, ce qui la amen formuler sa demande et prier. De l, il comprit quil devait prier pour chaque chose dont il aurait besoin. Cela nous permet de comprendre que D. prit lune des ctes de lHomme pour en faire la Femme, plutt quune autre matire, afin de nous faire savoir quels sont le rle et lessence de la femme, matresse de maison, soumise son mari et attache lui, comme il est dit: la femme vertueuse accomplit la volont de son mari (Tanna DBey Eliyahou Rabba 9). Grce la cte partir de laquelle elle fut cre, elle peut avoir une bonne influence sur son mari et lui venir en aide (au lieu de lui tre hostile), et ils peuvent tre unis en un seul corps. Mais si, malheureusement, elle ne laide pas et ne lui obit pas, si elle soppose lui et le contre, cest pour lui une punition personnelle puisque la femme est une partie de lui-mme, et dans ce cas, elle aura une mauvaise influence sur lui et le dtournera du bon chemin. Ainsi, lHomme mangea de larbre de la Connaissance parce que la Femme, qui est une partie de lui-mme, en mangeait. Etant donn quils ne faisaient quun seul corps, ds que Hava mangea du fruit de larbre de la Connaissance, sa seconde moiti mangea aussi de ce fruit. Les vnements senchanrent parce que la Femme navait pas obi lordre de son mari. Car elle-mme ne fut cre que sur la demande de lHomme, et elle aurait donc d obir ce quil lui commandait au nom de D. et lHomme aussi a faut car au lieu de se faire obir par sa femme, cest lui qui fit ce quelle lui demandait. En effet, tout dpend des actes de lhomme, et sil sait commander dans sa maison, sil est matre chez lui (Esther 1:22) et quil dirige sa maisonne dans le bon chemin, il en bnficie lui-mme autant que tous les gens qui vivent sous son toit. Mais si, malheureusement, il nen est pas ainsi, le mari et la femme sont tous les deux jugs. Si lHomme et la femme le mritent, la Prsence de D. est avec eux, sinon, le feu les dvore (Sotah 17a). Chacun deux doit, de son ct, perfectionner ses qualits morales et craindre D. comme le disent les Sages (Brachot 33b): Tout est entre les mains de D. hormis la crainte de D. . Cest pourquoi lhomme choisit son pouse et la sanctifie par les liens du mariage, et non pas le contraire (Rabbeinou Nissim, Ndarim 30a), comme il est crit: Lorsquun homme prendra une femme en mariage... (Dvarim 24:1), et il nest pas crit: lorsque la femme sera prise en mariage par lhomme...

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Ce nest pas la femme qui prend un homme en mariage; elle ne fait que consentir tre lie lui par les liens du mariage, mais cest lhomme qui cherche une pouse, comme le disent les Sages (Kidoushin 2b): il est dans la nature de lhomme de faire la cour sa femme . Lhomme est le matre de la maison et doit la diriger sur les bases de la Torah et de la crainte de D. Il est crit (Brshit 2:24): cest pourquoi lhomme quittera son pre et sa mre et sattachera sa femme, et ils formeront un seul corps . Lhomme tout dabord ressemblait tellement un ange que les anges eux-mmes firent erreur et le prirent pour une divinit (Brshit Rabba 8:9). Ensuite, il demanda une partenaire et sattacha sa femme pour ne former quun seul corps, puisquelle tait du mme genre que lui. Mais il ne sut pas prserver son niveau originel et fut amen fauter. Et voici quaprs la faute, lHomme porte plainte devant D. et Lui dit (Brshit 3:12): La Femme que Tu mas octroye pour compagne ma donn du fruit de larbre et jai mang . Ce qui revient dire: Tu as voulu que je demande une femme en faisant passer devant moi tous les animaux et toutes les btes, sans cela, jaurais pu vivre comme un ange et ne pas fauter cause de la Femme que Tu mas donne. Ce nest qu cause de mon attachement elle, parce quelle est une partie de moi, que jai faut et que jai pch - et en quoi suis-je donc coupable? Mais D. lui rpond quil est ingrat et quen disant cela il a reni les bonts de D. (Avoda Zara 5b). Ma volont tait de te donner une partenaire obissante qui te serait une aide. En te prsentant les animaux et les btes, Je nai fait que te donner la possibilit de demander cette partenaire afin de tenseigner que le monde ne peut pas subsister sans demandes, sans prires, et sans progniture. Mme si Je ne tavais pas prsent les animaux, tu en serais venu te rendre compte quil te faut une femme et tu laurais demande, et donc tout ce que Jai fait, Je ne lai fait quen ton honneur, pour que tu naies pas de regrets. Cela nous permet de comprendre les propos de nos Sages (Ybamot 63a): Sil le mrite, elle est pour lui une aide, sinon elle se tourne contre lui et lattaque . Il est apparemment difficile de comprendre pourquoi lhomme, sil est mritant, est rcompens justement par le fait que sa femme est pour lui une aide, et sinon, sil nest pas mritant, la punition lui vient justement de par sa femme qui se retourne alors contre lui. Pourquoi nest-il pas justiciable dun autre genre de punition? Cest que lHomme lui-mme a demand une Femme, elle est forme dune partie de lui, elle est los de ses os et la chair de sa chair, et donc, quil soit rcompens ou puni par D., la rtribution lui vient de ce qui est le plus proche de lui, de sa femme, comme disent les Sages (Sotah 17a): Sils le mritent la Prsence de D. est avec eux, sinon, le feu les dvore . Sils sont mritants et se comportent correctement, D. est avec eux. La lettre youd du mot ish et la lettre hh du mot isha forment ensemble le Nom de D. ?y-h?, ce qui montre que D. est avec eux, mais sils senflamment (et fautent), le Nom de D. disparat et il ne reste plus que esh, le feu. Il ne reste que les lettres esh de ish, et esh de isha (Kala Rabbati 1). La qualit de leur union ne dpend que de lhomme et de la femme.

Ton Crateur Sest rjoui de ton bonheur au Jardin dEden!


Lorsque nous nous runissons pour rjouir le mari et la marie le jour de leurs noces et de la joie de leur cur, nous devons savoir que nous obissons un commandement, comme il est dit (Yrmia 33:11): Et lon entendra des chants de joie et des chants dallgresse, le chant du fianc et le chant de la fiance . Nous voyons dj, au sujet dAdam et de Hava son pouse que, le jour de leur mariage, D. leur fit honneur et les anges se rjouirent avec eux (Brshit Rabba 18:4). En cette occasion nous disons: Comme ton Crateur Sest rjoui de ton bonheur au Jardin dEden... Toutefois, en ce qui concerne la joie dAdam et de Hava, un certain nombre de questions nous viennent lesprit. 1. Pourquoi les anges se rjouissent-ils et dansent-ils devant Adam et Hava, car ce sont bien Adam et Hava qui sont heureux de se marier et de fonder une famille? Pourquoi les anges prparent-ils le banquet au Jardin dEden (Sanhdrin 59b)? De mme, pourquoi nous rjouissons-nous du bonheur du fianc et de la fiance? Ce bonheur leur appartient, puisquils ont choisi de se marier et quils sont heureux ensemble! 2. Il faut aussi expliquer pourquoi nous clbrons sept jours de festivits, et convions chaque jour de nouveaux invits (Ketoubot 7b)? De plus, le jeune mari est semblable un roi, il ne fait aucun travail durant ces sept jours (Pirkey DRabbi Elizer 13).

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3. Il faut aussi expliquer le festin dAdam et Hava, car les anges nont pu se rjouir avec eux que peu de temps puisquils ont tout de suite faut en mangeant du fruit de larbre de la Connaissance, et donc il faut se demander pourquoi nous, nous festoyons pendant sept jours? Dautre part, nous brisons un verre sous le dais en souvenir de la destruction du Temple (Brachot 31a.) comme il est crit (Thilim 137:5): Si je toublie Jrusalem, que ma force me quitte . Pourquoi devons-nous nous souvenir de la destruction du Temple au moment du mariage et diminuer la joie des poux par le souvenir de la destruction du Temple? Pourquoi est-ce que dune part nous partageons leur grande joie et dautre part nous les attristons? Lorsque nous considrons la cration tout entire, nous voyons bien quelle proclame la gloire du Crateur. Lhomme qui contemple la cration, lve les yeux au ciel et voit Qui cra tout cela (Ishaya 40:26), comme le fit Avraham qui est parvenu la connaissance de D. en contemplant la cration (Rambam, Halachot Akoum 1:3). Il nest pas possible de parvenir la connaissance du Crateur sans savoir quelles sont Ses uvres et combien Il dirige le monde avec bont et misricorde. Le roi David lui-mme chante (Thilim 8:4): Lorsque je considre Tes Cieux et Tes uvres merveilleuses, la lune et les toiles que Tu as fixes et (ibid. 104:24): Combien grandes sont Tes uvres, D! car lhomme est tenu de considrer la nature intrinsque de chaque chose afin dacqurir la connaissance du Crateur. LHomme fut cr unique, la veille du Shabbat (Sanhdrin 38a) afin de voir toute la Cration, l, devant lui. Et alors (Brshit 2:20), lHomme nomma chaque crature selon sa nature et ses qualits particulires, et il appella D. le Matre, car Il reconnut en Lui le matre de tout (Brshit Rabba 17:5). Et pourtant, il ressentit un manque, car toutes les cratures taient accouples et lui se trouvait seul (Brshit Rabba ibid.). Comment le monde peut-il donc se perptuer sil ny a que des animaux domestiques et des btes sauvages qui nont ni intelligence ni comprhension? Mme si le monde pouvait exister de cette faon, il ny aurait personne qui enseigner la connaissance de D. LHomme va-t-il la proclamer aux animaux, aux arbres et aux pierres? Etant donn quil na pas de partenaire avec qui fonder les gnrations futures, qui va-t-il enseigner et transmettre la connaissance de D.? Cest pourquoi lHomme, aprs avoir tent de saccoupler avec les autres cratures, ne fut apais que lorsquil trouva Hava (Ybamot 63a), cest dire que dans sa sagesse, il a cherch savoir sil existait un animal dou dintelligence qui lui permettrait de remplir le monde. Mais il nen a pas trouv. Si bien quil a demand D. de lui donner une partenaire pour propager la connaissance de D. et proclamer Sa souverainet dans le monde. D. a agr sa demande et lui a dit: ta demande est justifie, et Il fit aussitt tomber une torpeur sur lHomme, prit une de ses ctes et referma la chair (Brshit 2:21), pour crer la Femme avec qui il pourrait procrer. Et D. dit Adam et Hava: Croissez et multipliez et remplissez le monde (ibid. 1:28), car il nest pas possible que le monde reste inhabit, sans personne pour savoir Qui a cr tout ce qui est, et voir que le monde est rempli de Sa gloire (Ishaya 6:3). Effectivement, la connaissance de D. nest possible que lorsque le monde est habit par les hommes, qui croissent et se multiplient selon le commandement de la Torah, et qui ont lintelligence de mditer la cration. Les anges ont partag le bonheur dAdam et Hava son pouse, parce que largument quAdam prsenta devant D. tait juste. A prsent, en compagnie de Hava, il va prolonger la cration en remplissant le monde dhabitants dont le but est de parvenir la connaissance de D. Le premier commandement fut celui dengendrer, car Adam et Hava nont pas t crs pour leur propre bien ou pour jouir personnellement des plaisirs de ce monde, mais afin de remplir le monde de la connaissance du Crateur, afin de continuer et de parfaire le monde en proclamant la souverainet de D. Il sensuit que les hommes, en perptuant le monde, permettent D. qui rgne dans le ciel de rgner aussi sur la terre, comme il est crit (Shemot 25:8): Faites-Moi un sanctuaire afin que Je puisse rsider parmi vous . Les anges se sont rjouis du bonheur dAdam et Hava car ce bonheur est un bonheur universel. Mais la suite de la faute, la joie na pas dur longtemps. Adam a transgress linterdit de manger du fruit de larbre de la Connaissance et sest montr ingrat envers D. (Avoda Zara 5b) lorsquil a dit (Brshit 3:12): La Femme que Tu mas donne... En quoi consistait son ingratitude? Car premire vue, il est vrai que sa femme la entran fauter. Mais cest Adam lui-mme qui a demand D. une pouse. Pourquoi, tout coup, dit-il: La Femme que Tu mas donne pour partenaire , alors quil la lui-mme rclame et demande?

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Il faut ajouter cela que lhomme nest complet quaprs stre mari selon les prescriptions de la loi juive et avoir fond un foyer conforme au Judasme, sur la base de la Torah et de ses commandements. Cest alors que la joie remplit sa maison . Jusqu ce jour, le ciel se rjouit chaque fois que quelquun entreprend denseigner la connaissance de D. ses enfants et ses petits-enfants. A ce propos, les Sages ont dit (Ybamot 62b): Celui qui na pas de femme est sans bonheur . Il ne partage pas le bonheur du Premier Homme, il napporte aucune contribution au monde car qui transmettra-t-il la connaissance du Crateur et auprs de qui se manifestera la Prsence de D.? Cest pourquoi les Sages disent (Guitin 90a) qu un divorce est semblable la destruction du Temple , et pour celui qui perd sa premire femme, cest comme si le Temple avait t dtruit de son vivant (Sanhdrin 22a). Si la construction du Temple est lapoge de la Prsence Divine dans le monde, lorsque son pouse meurt ou lorsquil se spare delle, le foyer est dtruit, et le but du foyer juif, autant que dengendrer et de remplir la terre, est dtre habit par la Prsence Divine (Brshit 1:28). Nous en venons comprendre pourquoi nous nous rjouissons avec les jeunes maris de leur bonheur. Si leur seul but est de peupler et dhabiter la terre, de proclamer la connaissance de D., de remplir le monde de Sa prsence et dagir selon Sa volont et pour Sa gloire, nous nous rjouissons avec eux car ils vont raliser le but dsir. Toutefois, si un homme meurt sans femme et sans enfants, il na pas contribu prolonger la connaissance de D. et de la Torah, et cest pourquoi les Sages ont dit (Ybamot 62b): Celui qui na pas de femme, cest comme sil navait pas de Torah . Nous nous rjouissons avec les maris car nous dsirons aussi propager la Prsence de D. dans le monde, comme Adam et Hava. De plus, chaque mariage, la joie est grande dans le monde den Haut. Mais quel bnfice le monde peut-il retirer dun mariage, o lon ne veille pas aux rgles de la pudeur lors des festivits de la noce, quel bnfice le monde peut-il avoir dun tel mariage? Cest une cause de destruction et non de construction. D. regrette la formation dun tel couple et le Ciel aussi est en deuil parce quun tel homme se contredit lui-mme. Dune part, il dit sa fiance: Tu es sanctifie pour moi , en saintet et en puret, pour fonder un foyer durable qui sera consacr au service de D. et dont les enfants connatront le Crateur. Mais en mme temps, il se conduit comme un non-Juif qui na dautre but en ce monde que de satisfaire ses dsirs personnels et jouir de plaisirs matriels. Le fianc, qui est appel roi, doit rgner sur son mauvais penchant qui lui aussi est appel un roi vieux et insens (Kohlet Rabba 4:15). La joie des noces se prolonge pendant sept jours, allusion la dure de la vie de lhomme, comme il est crit (Thilim 90:10): La dure de notre vie est de soixante-dix ans , afin de nous enseigner que de mme que lhomme doit amliorer sa conduite tout au long de sa vie et se renouveler chaque jour dans la Torah et la crainte de D., de mme chaque jour, le fianc invite sa table des visages nouveaux. Car il est comme un roi responsable de son peuple et de son pays. Le fianc a lentire responsabilit de ses actes et de ses gestes et jusquau dernier jour de sa vie, il lui est interdit dagir contrairement la Torah. Il doit dominer ses penchants, comme un roi qui publie des dcrets que personne ne peut annuler (Pessahim 110b). Les noces doivent se faire selon la loi juive, dans la saintet et la puret, afin de parvenir au but dsir. Les fiancs jouissent dun autre avantage. Le jour de leur mariage, toutes leurs fautes leur sont pardonnes (Yroushalmi Bikourim III:3). Ils tournent une nouvelle page de leur vie qui commence par le premier commandement de la Torah, et ils sont vraiment semblables Adam et Hava devant lesquels les anges ont dans. Mais sils profanent ce jour par des danses impudiques, ils causent un grand dommage. Justement ce jour-l, un jour de bonheur fait de lacceptation du joug de la Torah, de ses justes voies, et de la souverainet de D., nous leur rappelons la destruction du Temple. Parce que si, malheureusement, ils ne suivaient pas les voies de D., il en rsulterait une grave destruction, semblable la destruction du Temple que la Prsence Divine a dlaiss. Eux aussi, par leurs fautes, peuvent pousser la Prsence Divine dlaisser le monde au lieu de sy tendre. Cest aussi la raison pour laquelle le fianc brise un verre lorsquil est sous le dais. De mme quAdam a demand une femme - comme il est dit (Kidoushin 2b): cest celui qui a perdu un objet qui le cherche - afin de fonder avec elle une famille qui perptuera dans le monde la connaissance de D., de mme le fianc prend sur lui de continuer dans cette voie. Nous lui rappelons que sil ne remplit pas son rle, il sera cause de destruction dans le monde, et il brise un verre pour signifier quil a compris ce message. Briser un verre signifie aussi quil a bris ses mauvaises tendances et ses dsirs. Cest alors seulement quil est bni par

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les convives de la bndiction Mazal Tov! car en brisant le verre, il est devenu matre de lui-mme. Cette ide est confirme par le Nahalat Elizer, qui cite les Devoirs des Curs (ch. 5): Et toi, tu dois savoir que ton plus grand ennemi en ce monde est ton mauvais penchant qui envahit les forces de ton me et intervient dans lquilibre de ton esprit. Il guide tes sens physiques et spirituels, il domine les secrets de ton me et pie tes fautes, il te donne conseil dans tout ce que tu fais en public ou en priv, et tu suis volontairement ses conseils. Il sme des embches pour dtourner tes pas, tandis que tu dors il te guette, tu ne prtes pas attention lui, mais lui ne te quitte pas des yeux... Pourtant, sil sait que le jour du mariage lhomme devient complet, quil est roi, que toutes ses fautes sont pardonnes et que mme les cieux se rjouissent de son bonheur, le fianc a la possibilit de prolonger les bienfaits de ce jour sanctifi durant toute sa vie, pour rester toujours ce roi qui domine ses instincts. Un homme mari qui participe la joie du fianc et de la fiance se rappelle sa propre joie et continue faire dominer son bon penchant sur le mauvais, sans causer de destruction dans le monde et il prend en cette occasion de bonnes rsolutions pour lavenir. D. tient compte des bonnes penses comme si elles taient des actes (Kidoushin 40a). Prendre de bonnes rsolutions, quivaut dj samliorer. Ce nest pas sans raison que les Sages ont dit (ibid. 49b) Si un homme choisit une femme pour pouse et lui dit: condition que je sois vertueux , elle lui est sanctifie mme sil est vraiment mchant, du seul fait quil a exprim lintention de se corriger. Lessentiel de la dcision concerne lavenir, et quiconque prend de bonnes rsolutions le jour o il est au fate du bonheur, tend ce bonheur au reste de sa vie, parvient la connaissance du Crateur et bnficie de la Prsence Divine.

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La faute de lHomme, une punition pour les gnrations venir


Il est crit (Brshit 2:15-18): LEternel D. prit lHomme et le plaa dans le Jardin dEden pour le cultiver et le garder; et lEternel D. donna un ordre lHomme en disant: de tous les arbres du Jardin tu peux manger, mais de larbre de la Connaissance du Bien et du Mal tu ne mangeras pas, car le jour o tu en mangeras, tu mourras. Et lEternel D. dit: Il nest pas bon que lHomme soit seul, Je vais lui faire une partenaire ses cts . Concernant le verset Il nest pas bon que lHomme soit seul , Rashi rapporte le commentaire des Sages (Pirkey DRabbi Elizer 12): Pour quon ne puisse pas dire quil y a deux souverains, D. seul dans les Cieux sans partenaire, et lHomme seul sur la terre sans partenaire . Nous manquerions de papier pour crire tout ce quil faudrait comprendre au sujet du Jardin dEden et de la faute commise par lHomme. Nous allons tenter de lexpliquer selon nos moyens, aprs avoir pos quelques questions. 1. Le Bney Rouven, au nom du Rav Bachach, rapporte les paroles de Rashi pour que lon ne puisse pas dire quil y a deux souverains. Cest pour cette raison que D. a cr la Femme, car si lHomme voulait senorgueillir et prtendre quil est dieu, on pourrait lui rtorquer: si tu tais D. tu serais unique et non pas deux . Apparemment, cela contredit le verset (3:22): Maintenant lHomme sera comme lun de nous, connaissant le Bien et le Mal, car voil quil pourra tendre la main et cueillir aussi le fruit de larbre de la Vie et le manger et vivre pour toujours , que Rashi explique ainsi: Comme lun de nous - il est unique sur terre comme Moi Je suis unique dans les Cieux (Brshit Rabba 21:5), et maintenant il pourra tendre la main - et sil vivait ternellement il est fort probable quil induirait en erreur les cratures qui le croiraient dieu . Cest une contradiction tonnante. En quoi peut-il tromper les cratures puisquil a une femme et quil est deux , comme il ressort du commentaire de Rashi cit plus haut? 2. Le Bney Rouven, au nom du Minhat Hinouch, pose une autre difficult que nous allons expliquer plus loin. 3. Il nous semble ncessaire dexpliquer le verset (Brshit 2:15): LEternel D. prit lHomme et le plaa dans le Jardin dEden pour quil le cultive et le garde . Le Or Hahayim remarque: le verset nous fait entendre que le jardin a besoin dtre cultiv et gard, mais la ralit contredit ce fait. Y avait-il des voleurs quil faille surveiller le jardin et a-t-il besoin dtre cultiv? 4. Nous devons surtout comprendre comment lHomme, qui tait un Juste (Yirouvin 18b) et la cration des mains mmes de D. (Kohlet Rabba 3:14), a pu se laisser sduire par les paroles du Serpent, ce roi

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vieux et insens (Kohlet), et par celles de Hava son pouse, une femme tourdie (Shabbat 33b), et manger du fruit de larbre de la Connaissance que D. Lui-mme lui avait interdit? Lorsquil dit D. la femme... ma donn du fruit de larbre et jai mang (Brshit 3:12) ctait de sa part une effronterie, et il est mme dit que lHomme fut chass du Jardin dEden pour avoir blasphm et reni D. (Brshit Rabba 19:22). Comment a-t-il pu agir de la sorte? En effet, entre les ordres du matre (D.) et les ordres de llve (lhomme), auxquels devons-nous choisir dobir? Evidemment aux ordres du matre! (Kidoushin 42b). Il est dit aussi dAdam quil sest montr ingrat (Midrash HaGadol Brshit 3:12). Comment lexpliquer? Il faut affirmer tout dabord que les commentaires de Rashi ne se contredisent pas. Lorsque Rashi dit que lHomme a t cr avec la Femme pour nous viter lerreur de croire quil est un dieu, cela concerne les anges prposs aux affaires de ce monde, car ce sont eux qui se sont tromps et lont pris pour une divinit (Brshit Rabba 8:9). D. a cr lHomme et ensuite la Femme, pour quil nait pas laudace de prtendre vis--vis des anges quil tait un dieu, car ils lui auraient rtorqu: Si ce que tu dis est vrai, pourquoi es-tu deux? Mais vis--vis des tres humains domins par leurs penchants et facilement tromps et induits en erreur, il serait facile de faire valoir queffectivement Adam est un dieu et que lui et sa femme ne formaient quun seul tre double visage qui fut par la suite divis. Hava ne contredirait pas cela, au contraire. Cest cela que Rashi souligne: Il induirait les cratures en erreur... les cratures prcisment, et non pas les anges. Mme si Hava devait manger de larbre de la Vie et vivre avec Adam pour toujours, elle pourrait continuer obir la volont de son mari et laider tromper les cratures en leur faisant croire quils sont des divinits, quils forment un seul corps, et donc ne meurent pas. Mme si lon prtendait que Hava fasse savoir aux cratures quil nest pas une divinit mais seulement un tre humain, Adam pourrait rtorquer que lui est divin, contrairement Hava, et que si elle ne meurt pas cest parce quelle a mang de larbre de la Vie. Il est sous-entendu dans le commentaire de Rashi quAdam ne craignait pas les arguments de Hava et quil aurait pu convaincre les gens quil est un dieu. Mme si seule une partie du genre humain lavait cru, cela aurait suffi pour le chasser du Jardin dEden. Et effectivement D. dit: Voil quil pourrait tendre la main... et lEternel D. le chassa du Jardin dEden pour cultiver la terre de laquelle il fut form (ibid. 3:23). Ce nest pas la raison pour laquelle D. a cr la Femme, car D. dispose de nombreux autres moyens dempcher les hommes dtre induits en erreur. Il est dit: Il nest pas bon que lHomme soit seul et les dernires lettres des mots heyot haAdam, forment le mot meth, mort. Aprs avoir interdit lHomme de manger de larbre de la Connaissance, D. a dit: Il nest pas bon que lHomme soit seul car sil mourrait, il manquerait dans le monde une crature, cest pourquoi Je vais lui crer une partenaire (ibid. 2:18) afin que, sil se laisse sduire et mange de larbre de la Connaissance, la Femme lui vienne en aide, comme il est dit (Ybamot 63a): Sil le mrite, elle lui sera une aide . Sil veut dsobir et se rendre coupable, la Femme sopposera lui et laidera ne pas fauter. De plus, avec elle, il veillera comme il convient sur le Jardin car deux valent mieux quun (Kohlet 4:9). Cest pourquoi, aprs avoir mang du fruit de larbre, lHomme dit D. La femme que Tu mas donne ma prsent du fruit de larbre et jai mang (Brshit 3:12), cest--dire: au lieu de sopposer moi et de maider en mempchant de manger pour mviter la mort que Tu as dcrt, elle ma sduit et ma donn manger du fruit et jai mang. La rptition manger et jai mang signifie: jai mang et jai continu manger (Brshit Rabba 19:22) - je me suis laiss sduire et jai mang encore et encore. Comment Adam a-t-il eu laudace de dire D. la femme que Tu mas donne... car enfin, cest D. qui a interdit Adam de manger du fruit de larbre de la Connaissance, et entre les ordres du matre et ceux de llve, auxquels devrait-il choisir dobir? Do lui vient cette audace face D.? A propos du verset (Brshit 2:23): LHomme dit: cette fois-ci... les Sages nous enseignent (Brshit Rabba 18:5) que lorsque D. cra lHomme, Il cra en mme temps la Femme, mais ils se disputaient sans cesse, et elle prit la fuite, si bien que lHomme resta seul. Et alors D. dit: Il nest pas bon que lHomme soit seul (ibid. 2:18) et donc Je vais lui faire une partenaire issue de lui, et ils vivront ensemble sans dispute et sans querelle et Il prit une de ses ctes... et forma la Femme partir de la cte quIl prit de lHomme (ibid. 2:21-22). Il la cra partir de lHomme afin que cette fois, elle ne prenne pas la fuite. Aprs avoir mang de larbre de la Connaissance, Hava sapprocha dAdam son mari pour lui ordonner

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et le presser de manger lui aussi du fruit (voir le commentaire du Kli Yakar). LHomme, craignant que Hava ne meure et que D. ne lui rende la premire femme, celle qui stait enfuie, dcida de manger luiaussi de ce fruit, car il prfrait mourir avec Hava plutt que de vivre avec la premire. Et il fit valoir que cest cause de sa deuxime femme quil avait mang du fruit car il ne voulait pas vivre avec sa premire femme. Un autre argument nous permet de comprendre pourquoi lHomme a mang du fruit de larbre. Il pensait que D., tant misricordieux et compatissant, bien que tous deux se soient rendus coupables, suspendrait la sentence et ne les ferait pas mourir la veille de Shabbat, car alors Il ne pourrait pas se reposer de toutes les uvres quIl avait faites (Brshit 2:2) et nous savons que lHomme a faut la veille de Shabbat (Sanhdrin 38ab). Ce quAdam dit D. signifiait: La femme que Tu mas donne ma invit manger. Mais jesprais que nous resterions en vie, que nous nallions pas mourir avant le commencement du Shabbat . Adam prfrait mourir avec Hava plutt que de rester seul durant le Shabbat, car aprs avoir connu son pouse il avait trouv la paix, comme disent les Sages (Ybamot 63a): lHomme a connu tous les animaux et toutes les btes et ne fut apais quaprs avoir connu Hava . Il lui tait difficile de se sparer delle et il dit D. que ctait elle qui lui avait donn du fruit de larbre, quelle lui plaisait, et quelle tait digne de lui. Daprs la Cabbale (Sfer HaYetzira 1:14), en transgressant linterdit, Adam a viol le signe de lAlliance et la Torah, puisque la Torah est compare un arbre comme il est crit (Mishley 3:18): Cest un arbre de vie... Nous pouvons maintenant rpondre la question pose par le Bney Rouven au nom du Minhat Hinouch (rapporte au dbut de ce chapitre, question 2). Comment peut-on dire que la mort fut dcrte lencontre de lHomme parce quil avait mang de larbre de la Connaissance, alors quil est crit explicitement (Brshit 3:19) Tu viens de la poussire et tu retourneras la poussire ? Et cest effectivement ce que les anges demandent D. (Shabbat 55b): Pourquoi as tu dcrt la mort de lHomme? Etant donn que D. avait dit lHomme (Brshit 2:16): De tous les arbres du Jardin, tu as le droit de manger... nous pouvons supposer que lHomme a mang de larbre de la Vie, puisque cet arbre lui tait permis. Comment peut-il mourir alors que la Torah tmoigne que quiconque mange de larbre de la Vie vit ternellement (ibid. 3: 22)? Et cet auteur explique que le fruit de larbre de la Vie na deffet que conjugu au fruit de larbre de la Connaissance, mais que lun sans lautre na aucun effet . Cette explication ne me satisfait pas compltement. Mme si larbre de la Vie ntait pas interdit lHomme avant sa faute, il navait pas besoin den manger puisquil tait cens vivre ternellement et naurait tir aucun avantage de cette nourriture. Effectivement, jusque l, D. ne craint pas que lHomme mange du fruit de larbre de la Vie, et Il ne le lui interdit pas. Mais, aprs quil eut mang du fruit de larbre de la Connaissance, il fut dcrt quil mourrait et il tait craindre juste titre quil veuille manger aussi du fruit de larbre de la Vie, et il tait donc ncessaire de le lui interdire et de le chasser du Jardin dEden. A mon avis, il est possible dexpliquer autrement linterdit et lexil du Jardin dEden. D. a plac lHomme dans le Jardin dEden pour le cultiver et le garder . De quels travaux et de quelle surveillance sagit-il? D. dsirait que lHomme dracine les broussailles du jardin et enlve les ronces du Rosier Cleste afin de soumettre le monde entier la souverainet de D. Linterdit de manger de larbre de la Connaissance faisait partie de son devoir de veiller sur le jardin, car larbre de la Connaissance avait pour but de rpandre le savoir et la sagesse sans quil soit ncessaire den manger. LHomme navait pas besoin de ce fruit car il possdait dj le savoir. En mangeant du fruit de cet arbre afin daugmenter ses connaissances et son savoir, il se rend passible de la peine de mort car il transgresse la volont du Roi qui a dcrt que cet arbre dispenserait le savoir et la connaissance sans quil soit besoin den manger, et cela afin de prouver la Toute-Puissance de D. Mais Adam, en dsobissant, a profan la foi en D. et cr une impuret, qui puise sa subsistance dans la saintet, ainsi quil est expliqu dans les Livres Saints (voir Or Hahayim, Brshit 1:2). Plac dans le Jardin dEden, au lieu dobir au commandement de D., Adam sest adonn aux plaisirs sensuels. Au lieu de cultiver le jardin, il a satisfait ses sens, et cest alors que les dsirs du Serpent se sont rveills et quil la incit pcher. Sinon, comment le Serpent aurait-il pu les sduire, puisque le mal nexistait pas encore dans le monde?

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Il est crit (Brshit 3:1): Le Serpent tait rus et les Sages remarquent: Il aurait fallu crire ici le verset (ibid. 21): Et lEternel D. fit pour lhomme et pour sa femme des tuniques de peau et il les en revtit, si ce nest que la Torah voulait nous rvler les motivations du Serpent: il les a vus nus et accoupls au grand jour, et il dsira la femme (Brshit Rabba 18:6, Rashi ibid.). Et le Serpent aborda Hava de faon pernicieuse (ibid. 3:1): Est-il vrai que D. a dit: vous ne mangerez daucun de tous les arbres du jardin? Cest--dire: D. vous a-t-Il vraiment interdit de manger de tous les arbres du jardin? Et elle lui rpondit (ibid. 2-3): Nous pouvons manger des fruits des arbres du jardin, mais quant aux fruits de larbre qui est au milieu du jardin, D. a dit: vous nen mangerez pas et vous ny toucherez pas, sous peine de mourir . Nous avons le droit de manger de tous les arbres, sauf de larbre de la Connaissance dont le but est de rpandre le savoir dans le monde comme une source intarissable, et nous devons cultiver et garder le jardin, enlever les broussailles afin de conduire le monde se soumettre la souverainet de D. Il nous est interdit de manger de ce fruit, et mme dy toucher , cest--dire quil est interdit den jouir de quelque faon que ce soit, comme il est dit (Pessahim 21b): Chaque fois quil est crit dans la Torah: Vous nen mangerez pas, cest toute forme de jouissance qui est interdite (voir Ohr Hahayim ibid.). Mais Hava tait dans lerreur. D. ne leur avait pas interdit toute forme de jouissance; sinon il aurait aussi t interdit de regarder larbre puisque sa vue procure du plaisir aux yeux. Les dcisionnaires expliquent (Pessahim 26a): La jouissance de la voix, de la vue ou de lodeur dune chose qui en elle-mme est interdite, ne constitue pas une transgression . Si donc regarder larbre nest pas interdit, il nest pas interdit den jouir. Le Serpent utilisa une ruse: Il a pouss Hava jusqu ce quelle touche larbre et il lui a dit: de mme que le toucher ne tue pas, en manger ne tue pas (Brshit Rabba 19:3), et il ajouta: ce nest pas pour que vous puissiez cultiver le jardin, veiller sur lui et enlever les broussailles que D. vous interdit de manger du fruit de cet arbre, car le Jardin ne manque de rien. D. veut vous faire peur car vous tes les seuls tres humains et aucune crature ne peut vous chasser dici. Il vous a interdit den manger parce que, si vous en mangez, vous deviendrez comme Lui, vous comprendrez beaucoup de choses et D. sait que le jour o vous en mangerez vos yeux seront dessills et vous serez comme les puissants qui connaissent le bien et le mal (ibid. 3:5). Et effectivement par la suite il est crit (ibid. 3:6): Et la Femme vit que larbre tait bon manger, agrable au regard, et satisfaisait lintelligence , cest--dire que ctait le Serpent qui avait raison, et non son mari qui lui avait interdit de toucher l'arbre, c'est--dire den jouir, puisquil tait permis davoir le plaisir de le regarder. Elle rejeta donc linjonction de son mari et couta les paroles du Serpent, car larbre est un plaisir pour les yeux . De mme quil nest pas interdit de le regarder et quil est permis aux yeux den jouir, de mme il est permis den manger et plus forte raison de le toucher. Non seulement il nest pas interdit, mais manger de son fruit permet datteindre les plus hauts degrs de la connaissance: elle cueillit donc de ses fruits et en mangea. Voyant quil nen rsultait aucun mal et que sa mort ntait pas immdiate, elle fut convaincue de la justesse des paroles du Serpent. Les Sages disent quelle obligea son mari manger avec elle (Pirkey DRabbi Elizer 13, Rashi ibid. 3:5): Elle le supplia de limiter, car en voyant que son mari refusait de manger, elle eut peur de mourir alors que son mari vivrait et pouserait une autre femme , et cest pourquoi elle le poussa manger aussi. En voyant que Hava avait mang du fruit et quil ne lui tait arriv aucun mal, Adam se laissa convaincre et il dit D. (ibid. 3:12): La femme que Tu mas donne pour tre mes cts ma donn du fruit de larbre et jai mang . Il ne faut pas penser quAdam, cration des mains de D. (Kohlet Rabba 3:14) et homme vertueux (Yirouvin 18b) a cru les paroles du Serpent, mais il a allgu quen voyant que sa femme ntait pas morte, il en avait dduit que le commandement tait limit, quil ne sappliquait pas en toutes circonstances, et que par la suite linterdit serait lev, et que lui non plus nallait pas mourir mais continuer vivre comme elle, et cest la raison pour laquelle il obit sa femme. Et pourtant aprs avoir mang du fruit de larbre, il est crit (ibid. 3:7): Leurs yeux tous deux se dessillrent et ils surent quils taient nus . Certes, ils virent quils taient dnus dobissance (Brshit Rabba 19:6), car ils navaient pas su garder le seul commandement quils avaient reu, ils avaient transgress linterdit (Shabbat 55a). Au lieu damliorer le monde, ils lavaient dtrior en mangeant du fruit interdit.

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Cest pour cette dsobissance que lHomme fut chass, exil du Jardin dEden, et maudit (ibid. 3: 19): Tu mangeras ton pain la sueur de ton front . Quelle est lintention de cette maldiction? Le pain reprsente la Torah (Brshit Rabba 70:5), comme il est crit (Mishley 9:5): Venez, mangez de mon pain . Jusqualors larbre de la Connaissance et son fruit avaient le mme got (Brshit Rabba 15:7). Adam tudiait la Torah qui est un arbre de vie pour ceux qui sy accrochent (Mishley 3:18), il comprenait facilement et correctement le sens rvl et le sens cach de la Torah, son essence et ses secrets. Mais aprs quil eut faut, le got de larbre disparut et avec lui le sens des secrets de la Torah, qui senveloppa dun voile de mystre. Dornavant tu mangeras ton pain la sueur de ton front , seulement en faisant des efforts comme il est crit (Mishley 17:26): Le travailleur travaille pour lui-mme , et (Yob 5:7): LHomme est n pour la peine et (Sanhdrin 99b): lHomme fut cr pour peiner dans ltude de la Torah. Cest-dire quaprs la faute, la Torah ne sacquiert quavec peine, sueur et efforts; sa comprhension ncessite une tude laborieuse, qui seule permet de goter aux fruits de cet arbre dlicieux. Nous pouvons expliquer ce qui est dit propos dAvraham, au moment o les trois visiteurs arrivent chez lui (Brshit 18:4): Quon aille qurir un peu deau; baignez vos pieds, et reposez-vous sous cet arbre . Pourquoi mentionner spcifiquement cet arbre ? Le mot Ets arbre, et le mot Etsa conseil, ont la mme racine. Lorsquune personne a un problme et ne sait que faire, nous lui proposons une solution susceptible de rsoudre son problme. Cest ce que fit Avraham. A son poque, les hommes taient dans lerreur et adoraient des idoles (Rambam Halachot Akoum 1:2-3) jusqu ce quAvraham leur expliqut le sens rvl et le sens cach de lArbre (etz), de la Torah. Il leur enseigna comment corriger leurs erreurs et il proclama le Nom de D. partout dans le monde (Sotah 10b). Jai trouv une explication semblable dans le commentaire Ohr Hahayim ad. loc.: ...Avraham ordonna de puiser un peu deau - cest--dire de puiser le sens simple de la Torah, et de baigner leurs pieds - cest-dire la matire connue, et de se reposer sous cet arbre - cest--dire la Torah qui sappelle un arbre de Vie (Vayikra Rabba 35:6) et cest pourquoi il dit spcifiquement cet arbre. Il leur offrit aussi un peu de pain - cest--dire ces choses qui ne sont pas explicites dans la Torah, et dit reprenez des forces - cest-dire quils en nourrissent leurs organes internes, littralement le cur . A partir de la faute de lHomme, la Torah est devenue hors de porte; en dcouvrir les secrets demande beaucoup defforts. En effet, la punition dcrte lencontre de lHomme pour sa faute le fut pour tous les hommes. Si lHomme pouvait jusqualors se promener librement dans le Jardin dEden et rencontrer tout moment la Prsence Divine, aprs la faute il en fut chass et il ne put alors parvenir facilement la connaissance de D. Et pourtant il est dit (Divrey HaYamim I, 28:9): Connais le D. de ton pre et sers-Le . La situation peut tre compare celle dun simple ouvrier dusine qui voudrait en connatre le patron, savoir qui est le matre de ce lieu. Il doit faire de grands efforts et se distinguer dans son travail jusqu ce que le patron le remarque et linvite une rencontre. Il en est ainsi pour D. Si nous voulons connatre D. et savoir pour qui nous uvrons, nous devons tudier la Torah et acqurir la connaissance de notre Souverain et Crateur par la dcouverte du sens des commandements et leur raison dtre. Si malheureusement nous ignorons le fondement des commandements, nous risquons de les transgresser ou de les excuter avec une intention incorrecte. Celui qui fait leffort de pntrer les secrets de la Torah mrite de parvenir la connaissance de son Auteur. Selon lopinion dun de nos Sages, larbre de la Connaissance tait du bl (qui tait alors le fruit dun arbre) (Sanhdrin 70b). Le verset (Mishley 28:21): pour une miche de pain lhomme se rend coupable y fait allusion. Cet homme cest Adam, le prototype de lHomme, qui avait faut en mangeant de larbre de la Connaissance. Pour corriger sa faute nous devons tous tendre vers la puret et la saintet, vers la connaissance de ce qui est cach, comme il est crit (Thilim 134:2): Elevez vos mains vers le sanctuaire et bnissez lEternel . Il faut se rincer les mains aprs le repas, ce qui nous permettra de bnir D. Les Sages ont dit (Brachot 53b): Le rinage des mains aprs le repas a pour but de nettoyer la pollution , cest--dire quaprs avoir mang du fruit de larbre de la Connaissance qui tait le bl, il faut nettoyer la pollution et limpuret qui nous enveloppent et cela se fait avec de leau, cest--dire par ltude de la Torah qui est compare leau (Babba Kamma 17a), comme il est dit (Ishaya 55:1): Vous tous qui avez soif, venez, voici de leau .

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Chacun des commandements sous-entend des sens merveilleux, transmis de gnration en gnration par les Prophtes et les Sages. Le mot kabbala vient du mot lkabel, recevoir, pour signifier que chacun doit recevoir et accepter mme les lois qui ne sont pas claires pour lui et les observer mme sil nen comprend pas le sens. Les commandements sont des dcrets divins. Nous avons tendance les remettre en question si nous nen comprenons pas la raison dtre ou le fonctionnement, comme par exemple le sacrifice de la vache rousse, linterdit de manger du porc (Bamidbar Rabba 19:5), le prlvement de la dme sur toute production agricole, ou le jugement de la femme souponne dinfidlit que les eaux amres confirment ou infirment. Ce sont des lois pour lesquelles nous navons pas dexplication rationnelle. Malgr tout, il faut les observer la lettre, comme si nous avions reu la Torah de nos jours, dans le sens o les Sages disent (Pessikta Zouta): Les commandements doivent sembler chaque jour nouveaux comme sils nous avaient t donns aujourdhui mme . En observant les lois de la Torah, nous pouvons oprer la correction de la faute commise par la consommation du fruit de larbre de la Connaissance, et alors la connaissance de D. nous reviendra, et nous serons Ses proches, dans ce monde et dans lautre. Amen.

La dtrioration de la lumire primordiale


Il est crit (Brshit 2:25): Ils taient tous deux nus, lhomme et sa femme, et ils nprouvaient pas de honte et (ibid. 3:1): De toutes les btes de la terre que lEternel D. a cres, le Serpent tait le plus rus Aroum. Les commentateurs remarquent ce sujet (Targoum Yonathan ben Ouziel, Tzda Laderech, Siftey Hachamim): Ils taient tous deux nus (aroumim), tous deux intelligents (aroum), et ils nen avaient pas honte, parce quils navaient pas de penchant pour les plaisirs des sens, de sorte que pour eux il ny avait pas de diffrence entre le bien et le mal, et ils ne ressentaient ni faute ni honte. Rashi ajoute au nom des Sages (Brshit Rabba 18:6, 85,2) propos du verset le Serpent tait rus : Nous apprenons ici ce qui a motiv le Serpent. Il les a vus nus et accoupls au grand jour. Il fut pris de dsir pour la femme, et a incit Hava manger de larbre de la Connaissance . Le Torah Tmima rapporte le commentaire des Sages (Yroushalmi Kidoushin IV:1): Le Serpent sest dit: je sais que D. a dit (Brshit 2:17): le jour o vous en mangerez vous mourrez. Je vais tromper Adam et Hava, ils en mangeront, ils seront punis, et jhriterai de la terre, moi seul . Posons quelques questions: 1. Comment D. a-t-Il pu interdire de manger du fruit de larbre de la Connaissance en prvenant que le jour o vous en mangerez, vous mourrez , si Adam ne savait pas ce quest la mort, et comment une punition dont on ne comprend pas la nature, peut-elle tre dissuasive (Minhat Yhouda)? 2. Comment se fait-il quAdam et Hava, avant davoir faut, naient pas eu honte de leur nudit, et en quoi consiste leur sentiment de honte aprs la faute, lorsque lHomme dit D. (Brshit 3:10): Jai vu que jtais nu et je me suis cach - parce quil avait honte , ajoute Yonathan ben Ouziel? 3. Il faut aussi expliquer pourquoi le Serpent a choisi de pousser la Femme manger du fruit. Pourquoi na-t-il pas essay den convaincre lHomme? Nous allons essayer de rpondre ces questions en nous appuyant sur ce qucrit le Ari zal dans son livre Likoutey Torah. Le mot honte, Boshet a les mmes lettres que le mot Chabbat pour indiquer que si Adam avait attendu jusquau saint Shabbat pour sunir sa femme, le Serpent naurait eu aucun moyen de les sduire, car le Serpent na aucun pouvoir le Shabbat (voir Zohar III 273a). Durant le Shabbat, qui est boshet, la honte, Adam et sa femme auraient t envelopps par la lumire primordiale de la cration comme par un vtement et cette lumire les aurait entours de telle sorte que le Serpent naurait jamais pu avoir demprise sur eux. Mais pour avoir faut et navoir pas attendu jusquau Shabbat, ils sont tombs dans le monde de la matire et ils ont vus quils taient dnus du seul commandement quils avaient (Brshit Rabba 19:6), et quils ntaient pas capables de bnficier de la lumire primordiale. Cest pourquoi le Serpent attaque ds quil a loccasion de les pousser fauter. Et alors ils furent punis et D. les chassa du Jardin dEden comme il est crit (Brshit 3:23-24): Et lEternel D. le renvoya du Jardin dEden... et il chassa lHomme... En disant: Jai vu que jtais nu et je me suis cach (ibid. 3:10), Adam indique: je nai pas t capable de recevoir la lumire de la cration, et je me trouve dcouvert . Telles sont les paroles du Ari zal.

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Mais pour stre accoupls avant le Shabbat, ils ont entam le processus de la dgradation et ils nont plus t capables de senvelopper de la lumire primordiale - le vtement dAdam et de Hava, un vtement qui ne se porte que le Shabbat dont les lettres forment le mot boshet, honte. Et alors ils sont tombs dans le monde de la matire, ce qui a permis au Serpent de dsirer Hava et de les inciter fauter. Il les a sduits afin que D. les punisse et les chasse du Jardin dEden avant le Shabbat et quil hrite de leur place dans le Jardin dEden (Yroushalmi Kidoushin IV:1). En fait, la ruse du Serpent se perptue travers les gnrations, comme la crit notre matre vnr, le saint Rabbi Hayim PINTO de mmoire bnie, dans son pome: Le mal caus par le Serpent poursuit toutes les gnrations, mais nos anctres ont rig contre lui la sanctification . Nous lisons dans les textes du Ari zal: Ceci est le pain de misre que nos pres ont mang en terre dEgypte... (Hagada de Pessah). Le pain de misre reprsente les tincelles de saintet captives des forces du Mal et qui navaient pas le pouvoir de se librer, jusqu ce que nos pres descendent en Egypte et dlivrent les tincelles de saintet captives en exil (Voir Or Hahayim, Brshit 49:9). La confusion sempara du monde et beaucoup dtincelles de saintet restrent captives en terre trangre cause de la mchancet du Serpent qui dsirait ce qui ne lui appartenait pas et cause de la faute dAdam. Ntait-ce le Shabbat, venu le sauver, Adam serait mort sans aucun doute. Au lieu dapporter une amlioration, lHomme a provoqu la dtrioration, et sil tait rest dans le Jardin dEden alors quil tait coupable, il aurait caus encore plus de dommage. Il en fut exil afin de corriger, par la prire, tout ce quil avait endommag, dit le Ari zal. Les Sages nous enseignent (Brshit Rabba 22:28) quAdam sest repenti de sa faute et a dit le Cantique du Jour du Shabbat (Thilim 92:1), car le Shabbat la sauv de la peine de mort. Ensuite, il sest amend et sest repenti, comme il est crit (ibid. 2): Il est bon de rendre grce lEternel . Et il est dit (Tikouney Zohar 69, 113a) que les saints Patriarches Avraham, Yitshak et Yaakov ont reu lme dAdam afin de rparer ce quil avait endommag, et encore (Tikouney Zohar 139b) que les Patriarches viennent combattre et corriger lidoltrie, les relations incestueuses, et le meurtre. Nous avons ici une preuve flagrante que le pch est destructeur. Les Sages disent (Avot V:9): lexil fut dcrt cause de lidoltrie, des relations incestueuses, et du meurtre , et: cause du meurtre, le Temple fut dtruit et la Prsence de D. sest retire dIsral . La faute dAdam est aussi grave que lidoltrie, les relations incestueuses et le meurtre. Elle permet aux forces du Mal et de limpuret dtendre leur domination sur le monde. Par contre, lobissance aux commandements et les bonnes actions ont le pouvoir de les affaiblir et de les liminer, rapidement de nos jours. Amen. A propos du verset (Brshit 1:31): D. vit tout ce quIl avait fait, et voil tout tait trs bon , les Sages remarquent que le mauvais penchant aussi est une bonne chose (Brshit Rabba 9:9). Cest--dire que D. a cr le mauvais penchant et son contraire, le penchant au bien, comme il est crit (Kohlet 7:14): D. a cr chaque chose avec son contraire . Le bon penchant conseille lhomme dtudier la Torah qui est un feu dvorant, comme il est crit (Dvarim 33:2): A Sa droite, une loi de feu . Ce nest quavec laide de ce feu-l que les forces du Mal, qui sopposent au Bien, disparatront de la terre. Maintenant, nous pouvons rpondre aux questions poses, savoir pourquoi le Serpent a sduit justement Hava et na pas essay de convaincre lHomme. Avant la faute, le Serpent servait Adam et Hava comme un esclave (Zohar I 221b), cest pourquoi il na pas tent de persuader lHomme, car un esclave na pas laffront de sopposer son matre, encore moins de le tenter. Le Serpent connaissait parfaitement la grandeur sublime et la saintet de lHomme, cration des mains de D. (Kohlet Rabba 3:14). Il savait que lHomme avait t cr pour servir D. et veiller lordre du monde, et que par son intelligence il tait capable de dominer les trois mondes, Bryia, Yetzira, Assiya. Mme si le Serpent avait voulu sduire Adam par des ruses, comme un esclave familier qui ne craint plus son matre, il ny aurait pas russi. Adam laurait svrement rprimand et laurait peut-tre mme chass de son service. Et sil ne lavait pas chass, il lui aurait expliqu quil est lui (lHomme) rempli de sagesse et dintelligence et quil na aucun besoin de manger de larbre de la Connaissance pour augmenter son savoir et comprendre la diffrence entre le Bien et le Mal. Il sait quel malheur sensuivrait sil en mangeait, comme le fait remarquer lauteur du Minhat Hinouch: est-il possible de dcourager quelquun en le menaant

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de quelque chose quil ne connat pas? Pourquoi donc lui dire: Tu mourras ? LHomme savait sans aucun doute ce que cest que la mort. Pour toutes ces raisons, le Serpent vita de sadresser lHomme. Il prfra sadresser Hava, qui navait pas la mme intelligence quAdam, et qui ne comprenait le sens de la mort qu travers ce que lui en avait dit son mari. En sadressant elle, le Serpent pouvait esprer russir. A cause de ce qui sensuivit, la lumire de la cration fut dtriore. Cela nous enseigne que la lumire de la cration protge durant le Shabbat et cette lumire nous vite de fauter, et nous permet de nous repentir.

Le mauvais il, cause de la faute et sa rparation


Il est crit (Brshit 2:25): Ils taient tous deux nus, lHomme et sa femme, et ils nprouvaient pas de honte. Ctait avant la faute. Mais aprs avoir mang du fruit de larbre de la Connaissance, il est crit (ibid. 3:7): Leurs yeux se dessillrent et ils surent quils taient nus . De quelle connaissance sagit-il? Les commentateurs crivent ce sujet (Targoum Yonathan ben Ouziel 3:10, Ohr Hahayim) que lHomme et sa femme eurent honte de leur nudit, cest pourquoi ils cousirent des feuilles de figuier et sen firent des pagnes (ibid.). Et alors D. dit lHomme (ibid. 3:11): Qui ta dit que tu es nu? Aurais-tu donc mang de larbre dont Je tai interdit de manger? D. demande lHomme: qui ta dit que cest une honte dtre nu? Et tout dabord, comment sais-tu que tu es nu? En effet, jusqu prsent tu navais pas honte, ni vis--vis de Moi, ni vis--vis de Hava ta femme, ni mme vis--vis des anges, car tu tais plus grand queux, comme disent les Sages (Sanhdrin 59b): Adam est install au Jardin dEden et les anges font rtir de la viande pour lui , et ils dansent devant lui en chantant ses louanges (Brshit Rabba 8:9). Et voil que justement maintenant, tu as honte dtre nu! Comment se fait-il que le premier Homme ait faut et ingr une nourriture que D. lui avait interdite? Comment a-t-il su quil tait honteux dtre nu, tant donn quil ntait susceptible davoir aucune mauvaise pense (Rabbeinou Behaye, Brshit 3:6), et de quelle manire exprime-t-il cette connaissance? Si nous approfondissons notre rflexion, nous dcouvrons des ides tout aussi mystrieuses que merveilleuses. Avant davoir faut, lHomme navait aucune notion du mal et de son point de vue, tout tait bon, si bien que mme ces choses que nous jugeons aujourdhui mauvaises et qui constituent des dfauts, comme par exemple le manque de pudeur, lui taient inconnues. Au contraire, le signe de lAlliance, fondamental (Zohar I 189b), est une source de lumire pour lHomme vertueux et une cause de joie pour ceux qui ont le cur pur (Thilim 97:11). LHomme pouvait engendrer durablement des gnrations et faire venir au monde des mes pures et limpides, participant ainsi luvre de la cration et perptuant lexistence du monde. Toutefois, aprs avoir mang du fruit de larbre de la Connaissance, Adam fut totalement priv de la lumire, si bien que le signe de lAlliance devint pour lui un objet de honte. Dornavant, lHomme va devoir se couvrir, veiller prserver sa saintet, et ne se dcouvrir devant personne, afin de ne pas corrompre ses yeux par le spectacle de sa nudit. Car la faute dAdam a commenc avec les yeux, des yeux qui ne connaissaient pas la honte avant la faute, ont failli en regardant larbre de la Connaissance comme il est crit (Brshit 3:6): Il est un plaisir pour les yeux , et ils ont veill en lui le dsir de manger ce dont il navait aucun besoin. Son regard lui fit profaner la saintet du signe de lAlliance et ses yeux sobscurcirent. Cest pourquoi Adam et Hava, auparavant baigns de lumire, ressentent dornavant la honte - car la lumire a disparu. Ils comprirent le mal quils avaient fait, se rendirent compte quils taient incapables dobissance (Brshit Rabba 19:6, Rashi ad. loc.). Ds lors, ils doivent se couvrir et veiller la puret de leurs regards. Aprs stre eux-mmes caus tant de mal, ils doivent se couvrir pour ne pas dgrader davantage leur regard, dans le sens o il est dit que une faute entrane une autre faute (Avot IV:2), car ce qui auparavant tait permis, dornavant ne lest plus. Lhomme doit avant tout contrler ses dsirs. Ce sont les yeux qui rveillent le dsir, comme le disent les Sages (Yoma 74b): Regarder une chose induit la dsirer ou (Tanhouma Shalah 15): Lil voit et le cur dsire , et encore (Yroushalmi Brachot 1:5): Lil et le cur sont les deux agents du pch . Lorsquils se regardrent lun lautre et virent quils taient nus, ils ressentirent quils avaient corrompu leur regard et que le mauvais penchant

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avait pris le dessus. Sils navaient pas regard larbre de la Connaissance, ce que D. avait interdit, ils nen seraient pas venus en dsirer les fruits. A la rflexion, nous comprenons que la faute dAdam tait davoir mis en question les paroles de D. Si lon ne doute pas, si lon a foi en D., on ne transgresse pas Ses commandements. Mais celui qui les remet en question et cherche en peser les raisons finira par fauter. Ishmal ben Elisha en est un exemple (Shabbat 12b). Il savait que les Sages avaient ordonn (ibid. 11a) de ne pas lire le Shabbat la lumire dune lampe huile, ce qui risquait damener pencher la lampe pour en accrotre la luminosit. Rabbi Ishmal se dit: je vais lire et je ne pencherai pas la lampe, mais en fin de compte, plong dans sa lecture, il en est venu transgresser cet interdit. Il en fut profondment contrit, et sexclama: combien grandes sont les paroles de nos Sages qui ont ordonn de ne pas lire la lumire de la lampe! Cest--dire, combien ils sont grands, ils ont dcrt un interdit sans en donner la raison, car il nest pas ncessaire den connatre la raison. Cest une chose stupfiante! Car il ne sagit pas dun homme quelconque, mais dun saint matre du Talmud qui a transgress les paroles des Sages par inadvertance, simplement parce quil connaissait la raison de linterdit. Il en est de mme concernant Adam. Il est la cration de la main de D. (Kohlet Rabba 3:14), et il domine les anges (Zohar Hadash 14), mais partir du moment o il lui fut interdit de manger du fruit de larbre de la Connaissance, il lui fut galement interdit de le regarder, car il faut sloigner autant que possible de ce qui est interdit. Le Ari zal crit quil ne faut pas regarder une chose interdite, comme par exemple une charogne, afin de ne pas se pntrer de son impuret. Les Sages eux-mmes ont dit (Mguilah 28a): Il est interdit de contempler le visage dun homme mchant et ceci, afin de ne pas simprgner de sa mchancet. De mme, lHomme naurait pas d regarder larbre de la Connaissance afin de ne pas veiller en lui le dsir den manger. Car si D. en a interdit la consommation, il sensuit quil est inutile de le regarder. Mais Adam sest tromp, il sest dit quil pouvait contempler larbre sans en manger... et il en est venu en manger. Cest ce regard qui a enflamm le dsir dAdam et de Hava et les a amens consommer le fruit de larbre de la Connaissance. Pourtant, immdiatement aprs la faute, ils en ont compris la gravit, et ils lont regrette. Nous savons quAdam sest repenti (Brshit Rabba 22:28) et a dit le Cantique du jour du Shabbat (Thilim 92:1). Ils se sont rendu compte aussi quils taient nus, dnus du seul commandement quils avaient reu, et se sont couverts pour ne pas exposer leur honte. Cest pourquoi D. ne les a pas mis mort immdiatement mais Il a couvert leur faute comme eux, puisquen se couvrant ils ont exprim leur regret et leur repentir, et ils ont corrig ainsi la faute commise avec les yeux. Expliquons maintenant comment Adam a pu fauter, puisquil navait pas demble de mauvais penchant? Pourtant, ds que D. lui dit de ne pas manger du fruit de larbre de la Connaissance, le mauvais penchant est n en lui et la tent. Cest un paradoxe, car le but de linterdit tait de le protger et de lui permettre de parvenir la perfection, en rcompense de son obissance au commandement de D. et voil justement que cest cet interdit lui-mme qui a suscit en lui la tentation de manger... LHomme aurait d se garder contre cette tentation, mais il sest laiss entraner par ses yeux, en dpit de son intention de regarder larbre sans en manger. Cest ce que disent les Sages (Brachot 61a): Mieux vaut suivre un lion que marcher sur les pas dune femme , car la tentation vis--vis dune femme est plus grande que le danger reprsent par un lion, et de mme quil faut fuir un lion pour ne pas mourir dchiquet, de mme il faut fuir la tentation vis--vis dune femme trangre. En fait, celui qui sait prserver la saintet du signe de lAlliance, saura aussi se prserver contre les btes sauvages, lions et autres. Il est vident que celui qui na pas profan sa saintet pour une femme trangre na rien craindre dun lion. LorsquAdam et Hava se repentirent, il est crit (Brshit 3:21): LEternel D. fit pour lHomme et sa femme des tuniques de peau et Il les en couvrit . Les Sages disent ce sujet (Brshit Rabba 20:29) Dans le Sfer Torah crit par Rabbi Meir le mot ?r/[?, peau, est crit ?r/a?, lumire, (par interversion de la lettre ayin avec la lettre aleph). Cest--dire quaprs quils se sont repentis et ont corrig la faute commise par leurs yeux, la lumire leur est revenue. Il est crit auparavant (verset 17): Ils cousirent des feuilles de figuier et sen firent des pagnes . Si nous y prtons attention, nous constatons que des tuniques de peau

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ainsi que des feuilles de figuier sont deux expressions insparablement lies. Aprs stre regards lun lautre et avoir constat quils taient nus, ils se sont repentis et ont cousu des feuilles tena de figuier - ils se sont levs alh grce au repentir. Bien que D. les ait chasss du Jardin dEden (ibid. 3:23-24), Il leur fit des tuniques de lumire afin de corriger la faute commise par les yeux, ce qui est aussi le sens de feuilles de figuier (alh tena). Lobjet qui a caus la faute a servi sa correction (Sanhdrin 70b), et comme le disent les Sages (Shabbat 105b, Ndarim 32a): La faute et la punition sont la mesure lune de lautre . Sil en est ainsi, un vtement fabriqu avec les feuilles de larbre par lequel ils ont faut, et qui selon lopinion dun de nos Sages (Brshit Rabba 15:8) tait un figuier, reprsente pour eux une rparation de leur faute et une lvation. Lorsquils ressentirent avec honte quils taient dnus du commandement quils avaient reu, D. leur fit des tuniques de peau, ou de lumire, pour les inciter slever, dans le sens o il est dit que par le repentir les fautes intentionnelles sont comptes comme des mrites (Yoma 86b). La feuille de larbre lui-mme est devenue couverture de lumire et cause dlvation. Chacun peut en tirer enseignement. Chaque interdit de la Torah est li un mauvais penchant quil nous faut dominer. Linterdit a pour but de nous loigner le plus possible des tentations et des preuves du mauvais penchant. Seul ce qui est permis, nous est impos, est li au bon penchant et nous devons tendre vers ce qui est bon, et nous habituer faire le bien. Nous apprenons aussi que celui qui a faut doit faire rparation par les voies mmes par lesquelles il a faut. Par exemple, celui qui a dnatur son regard doit corriger son regard, et mme si sa faute a t volontaire, D. la comptera comme mrite. Cette assurance nous permet de nous corriger et de nous lever. Lorsque quelquun se repent de ses fautes involontaires, elles lui sont comptes comme mrites, car tout compte fait, il ne comprend ni la gravit de la faute ni mme sa nature et il ne connat pas la raison de la punition. Quoi quil en soit, en fautant il satisfait un de ses dsirs, et si par la suite il les refrne, il contente D. condition quil dcide de ne jamais plus commettre cette faute (Rambam, Halachot Teshouva 2:2). Celui qui fait plaisir D. corrige le plaisir quil a procur ses propres sens et lorsque son repentir est motiv par lamour de D., mme ses fautes intentionnelles sont transformes en mrites. Tout acte dobissance D. (cest notre obissance qui est pour Lui une source de plaisir) amoindrit le pouvoir du mauvais penchant, et permet la saintet de prendre le dessus. A ce sujet les Sages ont dit (Souca 52b): Le mauvais penchant de lhomme reprend force chaque jour, et cherche le perdre , signifiant que chaque jour il est plus fort que la veille. Mais le mauvais penchant na aucune influence sur celui qui a dcid de ne plus fauter et les tentations dhier sont toutes aujourdhui sans effet. Non seulement il na plus la possibilit de se renforcer, mais il a perdu tout son pouvoir. Celui qui ne cherche qu obir la volont de D. transforme toutes ses fautes passes en mrites, bien que le mauvais penchant essaie toujours de latteindre. Mme les Justes les plus parfaits narrivent pas au niveau de celui qui sest repenti de ses fautes disent les Sages (Brachot 34b). Pourquoi? Parce que quelquun qui se repent de ses fautes regagne en un instant la place qui lui est rserve dans le monde venir, comme il est dit (Avoda Zara 10b, 17a): Il en est qui gagnent leur place dans le monde venir en un instant et un seul instant et une seconde (Zohar I 129a). Celui qui na jamais faut ne peut pas se mesurer celui qui se repent de ses fautes, car il manque du mrite que le repentir accrot en un instant. Cest pourquoi celui qui se repent surpasse le Juste le plus parfait. La force du repentir est tellement grande que nous pouvons comprendre quAdam et sa femme Hava aient pu corriger leur faute en la transformant en mrite et tre revtus de tuniques de lumire. Cest ce qui est crit (Brshit 3:7): Leurs yeux se dessillrent , car la lumire et la saintet des yeux leur furent restitues. Ils ont rpar ce par quoi ils ont faut.

La domination de lhomme sur le monde - Un privilge et non un vol


Concernant le verset (Brshit 3:19): ...jusqu ce que tu retournes la terre do tu as t tir , les Sages disent (Brshit Rabba 26:26): La poigne de terre de laquelle tu as t cr, ne las-tu pas vole? Cest--dire: partir du moment o tu as faut en mangeant du fruit de larbre dfendu, tu as dnatur la raison pour laquelle tu as t cr et donc cest comme si tu avais vol la poussire de laquelle tu viens.

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Il est ncessaire danalyser et de comprendre ce concept. Nous allons prsenter ce sujet un certain nombre de questions. 1. Les Sages disent (Shabbat 55b): Si lHomme navait pas transgress linterdit de manger de larbre de la Connaissance, il aurait vcu ternellement , car tant quil ne faute pas, il ne meurt pas et la terre partir de laquelle il fut cr nest pas considre comme vole. Ce nest que lorsquil a faut quil fut dcrt quil allait mourir, et dans ce cas, nest-il pas dans lobligation de rendre la terre de laquelle il fut cr? 2. Les Sages disent (Sanhdrin 38a-b) que pour crer lHomme, D. a collect de la terre de toutes les parties du monde, sa tte tant forme de la terre dEretz Isral, son corps de Babel, afin quil puisse tre enterr dans nimporte quel endroit du monde o il mourrait. Sil en est ainsi, pourquoi est-il dit quil a vol la terre dont il est form, puisquelle va retourner lendroit o elle fut prise? 3. Les commentateurs posent une autre question au nom du Midrash Yonathan: Pourquoi laccuser davoir vol de la terre, puisque D. lui a donn la terre dont il est form sans le prvenir que ce don tait conditionnel et que sil fautait, cette terre serait considre comme vole par lui? Si lHomme avait su que cette terre serait considre comme vole, aurait-il faut? La rponse ces questions est simple. Toute la cration a t cre laide de la Torah, comme le disent les Sages (Brshit Rabba 1:2): D. a consult la Torah et cr le monde , et cest pour la Torah que tout fut cr (Brshit Rabba 1:1). Mais lHomme fut cr en dernier lieu, car il est le but et lapoge de toute la cration dont il a reu la direction. Cest lui qui a appel par leurs noms toutes les cratures, comme il est crit (Brshit 2:20): Et lHomme donna des noms toutes les btes sauvages et tous les animaux domestiques... car il avait la sagesse de distinguer dans chaque crature la qualit particulire que D. avait voulu lui donner, ce qui lui a permis de lui donner un nom appropri. De mme, son nom lui est Adam, qui a la mme valeur numrique que le Nom de D. (Zohar I 25b), en raison de son origine divine et parce quil a t cr pour faire valoir la volont de D. dans le monde. Telle est sa raison dtre. Mais sil ne remplit pas son rle, son existence en ce monde est en quelque sorte un abus (un vol) puisquil est form de la poussire de toute la terre dont il na le droit de jouissance qu la condition de remplir ce rle. Maintenant nous pouvons rpondre aux questions poses. LHomme comprenait lessence de chaque chose (puisque toute chose lui est lie), ce qui lui a permis de nommer toutes les cratures. Bien que cr pour vivre ternellement, il fut aussi cr partir de la terre, pour que, grce lui, le monde entier atteigne la perfection (le monde entier dpend de lui, puisquil est cr partir de la terre du monde entier). D. la cr avec de la terre prise des quatre coins du monde pour lui permettre de perfectionner le monde entier. Sil navait t cr qu partir de la terre dEretz Isral, cette terre aurait t comme un emprunt et non une possession, puisquil naurait pas pu corriger le monde entier. Avant sa faute, lHomme a le statut de gardien rmunr, puisque D. lui a donn une me avec lobligation de veiller sur elle. Sil veille sur elle comme il convient en observant les Lois de D., il recevra la vie ternelle, en rcompense du soin quil a pris de son me, qui est un dpt et un gage dont il a la garde. Sil faute, il doit payer lusufruit de sa jouissance. De mme, la terre dont il est form lui est prte afin quil domine la cration et la soumette par le mrite de ses bonnes actions. Mais sil faute, il tire une jouissance usurpe de la terre dont il est form, ce qui est un vol. LHomme fut cr avec des penchants naturels, mais avant la faute, le mauvais penchant ne le troublait pas parce quil tait comme endormi et inactif. LHomme aurait d se garder de lattiser et lempcher dentrer dans son cur mais en fautant, il sest soumis lemprise du mauvais penchant au lieu de se soumettre la volont de D. et il a transform en abus sa facult de dominer et diriger le monde, puisquil a tir de son origine terrestre une jouissance contraire la volont manifeste par D. au moment de la cration. Si le mauvais penchant russit couper lHomme de son origine et lui faire oublier sa raison dtre, il en fait un voleur puisquen fautant lhomme jouit des choses de ce monde, et cest comme sil volait D. Les Sages disent (Brachot 35b): Quiconque jouit des biens de ce monde sans bndiction prliminaire, vole un bien appartenant D. et cest comme sil volait son pre et sa mre, comme il est dit (Mishley 28: 24): Voler son pre et sa mre en disant que ce nest pas un crime, cest se faire le compagnon dun artisan

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de ruines . Pourquoi en est-il ainsi? Parce que la bndiction est une prise de possession par laquelle D. donne lhomme le droit de jouir des choses de ce monde afin que lhomme se souvienne que tout ce quil possde lui vient de D. Lhomme est responsable et garant de la cration dont il a reu la garde et son existence repose sur cette condition. Sil abuse dun bien qui appartient D. il se fait le compagnon du destructeur , du mauvais penchant, qui lui tend des piges et lattrape, et il est possible que tel soit le sens du dicton (Zohar II 154b): On ne trouve le mauvais penchant que dans les festins et les beuveries . Nous voyons donc que lexigence de D. envers lHomme est grande (et cette exigence sadresse chaque homme). Avant quil nait faut, son mauvais penchant tait latent, il lui suffisait de ne pas le rveiller afin quil ne puisse pas linciter transgresser la volont du Crateur. La poussire dont il tait form lattachait aux montagnes et aux vallons, aux arbres et aux plantes, aux animaux sauvages et domestiques, etc. ce qui le rendait responsable de toute la cration. Cest dans ce sens quil est dit que lhomme est un monde en miniature et cest pourquoi les Sages ont dit (Sanhdrin 37a): LHomme doit considrer que le monde entier a t cr pour lui , et (Brachot 6b): Le monde entier na t cr que pour celui-ci, pour que tous lui obissent , car tout dpend de lui et est inclus en lui. De plus lhomme a reu lintelligence et la facult de comprendre, ce qui lui a permis de nommer toutes les cratures. Il a aussi une me, une part de divinit, qui le rend suprieur aux anges, car: D. lui a insuffl Son propre souffle (Brshit Rabba 12:8), et Il lui a donn une me qui mane de Sa propre existence. Cest cette me qui donne lhomme le pouvoir de diriger le monde, et sil veille sur sa bonne marche, il en est rcompens dans le monde venir. Mais sil faute, il endommage toute la cration, ses forces internes et ses possessions ne sont plus quusurpation du pouvoir qui lui fut accord, et par consquent il mrite de mourir sur le champ, sans avoir la jouissance de la poussire dont il est form. Cette exigence envers lHomme sapplique tous les hommes. Par son repentir, lhomme reprend possession de la poussire dont il est form. Nous pouvons dsormais comprendre les paroles de nos Sages rapportes plus haut (Sanhdrin 37a): Chaque homme doit considrer que le monde fut cr pour lui . Cest quil possde en lui une part de tout ce que le monde contient et une parcelle de la matire qui forme le monde dont il est responsable. Sil faute, cette poussire nest plus que vol et elle tend retourner do elle est venue. Mais la bont divine soutient lhomme et laide se repentir. Qui peut mieux nous servir de tmoignage que Hillel, Yossef, Rabbi Elazar ben Harsoum? Face eux, les pauvres, les mchants, et les riches nont aucune excuse (Yoma 35b), car ces hommes vertueux ont prouv par leur conduite que malgr la pauvret, la force du dsir, la richesse, qui taient respectivement le lot de chacun deux, ils ont pu dominer les tentations, afin que la poussire dont leur corps tait form ne soit pas un vol, et quils puissent en jouir de bon droit, en toute justice et sans abus, D. ne plaise. Si les Sages disent (Avoda Zara 10b,17a): Il est des gens qui gagnent leur monde en un instant , il est vident que le contraire aussi est vrai et quil en est qui perdent leur monde en un instant. Ce nest que par le repentir que lhomme peut regagner le monde en un instant, et il est crit: Le Juste qui gouverne, gouverne dans la crainte de D. (Shmouel II, 23:3), cest--dire: Cest le Juste qui Me gouverne, car (dit D.) Je prononce un dcret et le Juste lannule (Moed Katane 16b, Shabbat 63b, Zohar II 15a). Sil en est ainsi, cest pour le Juste que le monde fut cr. Comment? Grce ltude de la Torah et lobservance des commandements, lhomme a le droit de jouir de la poussire dont il est form et la rcompense lui est rserve dans le monde venir. Que D. nous accorde de vivre notre vie en ce monde de manire juste et sans reproche daucune sorte, afin de ne pas endommager la cration et de ne pas tre considrs comme des voleurs, mais plutt comme des matres qui dirigent le monde selon la volont de D. Amen, quil en soit ainsi.

Consquence de la faute du premier Homme


Il est crit dans notre section (Brshit 3:23-24): Et lEternel D. le renvoya du Jardin dEden pour cultiver la terre do il avait t tir, Il en chassa lHomme et posta l des chrubins... Lorsque nous considrons la faute de lHomme, nous restons tonns et stupfaits que la crature

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faonne des mains mme de D. (Kohlet Rabba 3:14) ait pu transgresser, en connaissance de cause, lordre de D. Quest-ce qui a pu le motiver, puisque le mauvais penchant navait encore aucune emprise sur lui? Pourquoi sest-il laiss corrompre et na-t-il pas pu obir D., ne serait-ce quune seule heure (Tanhouma Shmini 8)? De plus, pourquoi a-t-il mang du fruit de larbre de la Connaissance? Est-ce quil manquait de quelque chose au Jardin dEden pour avoir voulu manger justement de larbre qui lui avait t interdit? Il ne manquait de rien, comme les Sages en tmoignent (Sanhdrin 59b): Les anges rtissaient pour lui de la viande et distillaient du vin . De plus, il tait un tre intelligent et sens puisquil avait donn des noms aux animaux (Brshit 2:20), et cest un fait que le nom nest pas seulement un moyen didentification mais la description de la qualit intrinsque et de lessence de celui qui porte ce nom. Cette connaissance est le but de toute science et donc lHomme possdait la science et la connaissance les plus labores. Par consquent, nous sommes obligs de chercher comprendre ce qui a pouss lHomme fauter. Nous savons que D. a dabord cr les anges, des tres appartenant au monde den Haut, entirement et uniquement spirituels, des esprits sans corps, et sans mauvais penchant. Paralllement aux anges, D. cra les animaux qui sont entirement corporels et terrestres. Toute leur existence ne tend qu la ralisation de leurs besoins matriels. Mais D. na confi ni aux uns ni aux autres le perfectionnement de la cration, jusqu la cration de lhomme, une crature qui tient la fois du monde suprieur et du monde infrieur (Brshit Rabba 8:11) afin dviter la haine et la jalousie dans la cration, une crature qui a un corps matriel avec des dsirs et des besoins physiques, et une me, qui tient de la divinit, et dont les Sages ont dit (Haguigah 16a): En trois choses lhomme ressemble lanimal, et en trois choses il ressemble lange . Lhomme rflchit sur sa position dans la cration, il mdite sa propre nature, sa place et sa raison dtre dans le monde, et il value sa condition. Il voit que tout ce que D. a cr a une raison dtre et que rien nest sans cause, car chaque chose a t cre avec un but et pour remplir une fonction dans le monde. Dune part, D. a cr le Jardin dEden, dautre part Il a cr lEnfer. Il a cr ce monde, Il a cr le Bien et labsence de Bien qui est le Mal. Adam pensait que si le but et la raison dtre de la cration du monde sont lis explicitement cette crature qui a la possibilit de faire le bien ou le mal, qui tient du monde den Haut et du monde den bas (il sagit de lhomme), il sensuit que la cration elle-mme est compose de ces deux contraires, le Bien et le Mal. Il eut le dsir de manger de larbre de la Connaissance du Bien et du Mal (Brshit 2:10), afin de parvenir distinguer entre le pouvoir du Bien et le pouvoir du Mal. Lorsque lHomme mangea de ce fruit, il est crit: maintenant lHomme sera comme lun dentre nous, connaissant le Bien et le Mal (Brshit 3:22), cest--dire sachant les distinguer et les diffrencier comme le disent les Sages (Yroushalmi Brachot 5:2): Sans la connaissance, qui est capable de diffrencier les choses les unes des autres? Sans la connaissance, comment diffrencier entre la saintet du Shabbat et les jours profanes? Avant davoir mang du fruit de larbre de la Connaissance, lHomme tait entirement bon. Mais il voulait pouvoir diffrencier et distinguer entre le bien et le mal. Il ne se suffisait pas de la seule connaissance de leur existence. Quest-ce qui a pouss lHomme transgresser le commandement de D., pour parvenir ce but sublime? Cest que lHomme ne voulait pas servir D. comme le font les anges, il dsirait distinguer le bon du mauvais. Bien que D. lui ait dit: Tu mourras si tu manges de larbre de la Connaissance , lHomme savait que D. ne dsirait pas le mettre mort; dans quel but lui a-t-Il donc rvl la mort? Cest que sans doute - se dit lHomme - lintention de D. est de me faire savoir que le mauvais penchant me mettra mort, mais en mangeant de larbre de la Connaissance, je pourrai distinguer entre le bien et le mal et combattre ce mauvais penchant. Effectivement D. ne la pas chass tout de suite du Jardin dEden, mais seulement aprs le Shabbat, afin de lui faire sentir le got du monde Venir pendant le Shabbat. De mme D. lui fit une tunique de peau, qui selon lopinion de Rabbi Meir (Brshit Rabba 20:29) serait une tunique de lumire, pour lui permettre de parvenir la lumire de la Torah, et de lutter toujours avec zle contre le mauvais penchant. Sil sert D. effectivement avec diligence, il pourra vaincre le mauvais penchant.

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Et pourtant, malgr le dsir de lHomme de vivre une vie diligente de lutte permanente contre le mauvais penchant, de distinction entre le bien et le mal, D. la expuls du Jardin dEden et lui a interdit de manger de larbre de la Vie, car D. savait que lHomme, dou du libre arbitre, pencherait pour le mal et la facilit afin dviter les preuves et que ses actions ne seraient pas toujours motives par lamour du Ciel. Mais D. cra tout de mme larbre de la Vie, afin de faire savoir lHomme et tous les hommes comment viter les preuves. Comment? En choisissant toujours le bien, car alors, ils ne seraient pas mis lpreuve, ce qui est une manifestation de la grande bont de D. Avant la faute, lHomme navait dans le cur que des penses saintes et sublimes. Aprs la faute les forces impures lont envahi, le bien et le mal se sont mlangs et ses actes ont cr la confusion dans les mondes suprieurs. Avant la faute, lHomme avait le libre arbitre mais ntait pas imprgn par les forces du Mal et il se conduisait avec droiture; tout ce quil faisait tait saint, juste et pur, sans la moindre faille. Son libre arbitre se limitait empcher des mauvaises penses de lenvahir, et cest la raison pour laquelle les forces impures ont fait appel au Serpent pour le tenter de lextrieur, ce qui tait impossible tant que le mauvais penchant tait tapi dans son propre cur. LHomme a agi sous son emprise bien quil lui ait sembl agir de son plein gr, et il sest laiss entraner faire le mal sans se rendre compte quune force trangre ly poussait. Le bien et le mal font maintenant partie intgrante de lui. En empoisonnant lHomme, le Serpent (Zohar I 36b), a caus une grande confusion dans ses actes crit Rabbi Hayim de Volozhin de sainte mmoire dans son livre Nefesh Hahayim (Premire partie, ch. 4). Ce que nous disons est confirm par la guerre du roi Shal contre Amalek. Il est crit (Shmouel I, 15: 9-23): Shal et son arme pargnrent le roi Agag et les meilleures pices des troupeaux et du btail... et ils refusrent de les dtruire malgr lordre donn par le prophte Shmouel au nom de D. Lorsque Shmouel lui en fit remontrance et lui dit: Pourquoi nas-tu pas obi la voix de D.? Shal lui rpondit: le peuple a pris... des btes du menu et du gros btail pour les sacrifier ton D. . Et alors Shmouel lui dit: Est-ce que D. dsire tous ces sacrifices plus quIl ne demande tre obi? Lui obir est prfrable tout sacrifice et suprieur toute la graisse des bliers! Pour avoir mpris la parole de D. tu seras mpris et tu ne rgneras plus". Tout comme Adam, Shal a fait lerreur de croire que les sacrifices consacrs D. sont essentiels. Sil tarde dtruire les animaux du butin, il le fera plus tard, en offrant tout ce btail en sacrifice. Mais non! Obir D. est prfrable tout sacrifice . De mme, Adam pensait amliorer la qualit de son service de D. par une lutte personnelle contre les forces du Mal, cest pourquoi il a mang du fruit de larbre de la Connaissance malgr lordre de D. Et D. lui fit alors de svres reproches: Est-ce donc que tu as mang de larbre que Je tai expressment dfendu? (Brshit 3:11). Pourquoi nas-tu pas attendu, pourquoi Mas-tu dsobi? Voulais-tu en arriver recevoir des commandements plus nombreux et les accomplir plus parfaitement? Est-ce que Je dsire Moi multiplier les commandements? Il est sr que Jexige ton obissance, mais sans que tu ngliges aucun de Mes commandements pour des considrations personnelles... et donc, Adam fut chass du Jardin dEden (Sanhdrin 38b). Mais, comme son intention unique tait de servir D., lHomme ne sest pas vu infliger la peine de mort tout de suite et fut seulement renvoy du Jardin dEden vers le monde physique et matriel, afin de cultiver la terre , l o il pourrait plus facilement soccuper de sparer le bien du mal. Nous voyons l que nombreuses sont les penses du cur de lhomme, mais seule la volont de D. se ralise (Mishley 19:21). Lhomme peut multiplier penses et projets qui lui semblent justes, mais en fin de compte seul le dessein de D. se ralise. Cest le sens du commandement (Dvarim 18:13): Sois entier avec lEternel ton D. cest--dire que D. nous demande simplement de marcher dans Ses voies sans chercher percer lavenir. D. ne veut pas quon Le serve au prix dune transgression. Il a dot lhomme dune intelligence profonde et merveilleuse qui se manifeste dans sa capacit de penser et de prendre des dcisions personnelles, mais cest lorsquil se rend la raison de D., lorsquil annule sa propre volont devant la volont de D. (Avot 2:4), et lorsquil abandonne toute considration personnelle comme sil nen avait pas, quil mrite vraiment dtre appel le serviteur de D. Nous avons prsent la possibilit de montrer comment le roi Shal, aprs avoir transgress le commandement de D., a russi corriger la faute commise lors de la guerre contre Amalek. Lorsque le roi Shal fit appel au prophte Shmouel par lentremise dune ncromancienne (Shmouel I,

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28:11-19), celui-ci dit Shal: Demain toi et tes enfants seront avec moi... , Shmouel lui promet quau terme de sa vie, il sera en sa compagnie au Jardin dEden (Haguigah 4b). De mme le Midrash rapporte (Yalkout Shmouel I, 141): Shmouel dit Shal: si tu coutes mon conseil, si tu tombes par lpe, ta mort te rachtera et tu mriteras dtre avec moi l o je me trouve . Effectivement, Shal suivit le conseil de Shmouel et fut tu avec ses fils la guerre. Le fait dentendre les paroles de Shmouel par la bouche de la ncromancienne aurait permis Shal de les rejeter, mais il a accept le jugement et cest avec une grande joie quil est parti mourir la guerre de son plein gr, afin dobir Shmouel sans dtours. En fin de compte, il a obtenu un pardon total et pris place dans lautre monde aux cts de Shmouel. Sous ce rapport, nous voyons que D. Lui-mme est fier du roi Shal, comme le disent les Sages (Vayikra Rabba 26:7): Resh Lakish dit: ce moment-l, D. appela les anges et leur dit: Venez voir quelle crature Jai cre dans Mon monde. Dordinaire, lorsque quelquun va faire la fte, il nemmne pas ses enfants parce que cela ferait mauvais effet, mais celui-l (Shal) part en guerre avec ses enfants tout en sachant quil y sera tu, et il est heureux dexcuter la sentence . Les paroles merveilleuses du Rav Yossef Salanter de mmoire bnie, dans son livre Ber Yossef (rapportes de Lekah Tov, Vayikra 22) confirment nos propos. Concernant le verset (Vayikra 1:2): Celui dentre vous (adam) qui offrira un sacrifice D. les Sages expliquent dans le Midrash (Tanhouma Vayikra 8): Il est crit adam et non pas ish (les deux mots signifient homme ), pour nous enseigner que celui qui faute comme Adam, le premier Homme, doit apporter un sacrifice D. . Quel enseignement tirons-nous de ce rapprochement entre Adam et les sacrifices? Quel rapport y a-t-il entre eux? demande le Rav Salanter. Et il explique: Nous savons que lessentiel du sacrifice est le regret de la faute commise, et le fondement du repentir est la prise de conscience de la gravit de la faute, du fait que la faute commise est nfaste pour son me, pour sa descendance en particulier et pour le monde entier en gnral. Se rendre compte de la gravit de la faute et de lampleur des consquences, amne lhomme la regretter sincrement et il aura garde, lavenir, de ne plus fauter. Tel est le fondement du repentir. En regrettant sa faute, lhomme prend sur lui la dcision de ne plus agir de faon insense, et son sacrifice est alors reu favorablement par le Matre du monde, comme le dit le Rambam dans son langage pur et prcis (Halachot Teshouva 2:2) . Pour comprendre la gravit de la dsobissance D. et ses consquences, il suffit de considrer la faute dAdam. Lorsquil a mang du fruit de larbre de la Connaissance, il a provoqu sa propre mort, celle de sa descendance et celle du monde entier (Yirouvin 18b) et de plus la terre fut maudite cause de lui (Brshit 3:17), maldiction qui stend toute lhumanit qui doit peiner et transpirer pour sa subsistance cause de lui, comme il est crit (Brshit 3:19): Tu mangeras ton pain la sueur de ton front . La peine et leffort ncessaires pour assurer sa subsistance, associs la peur de la mort, sont la cause de toutes les souffrances du monde en gnral et de lhomme en particulier, de gnration en gnration, et tout cela comme nous lavons dit, en consquence de la faute commise par Adam lorsquil a mang du fruit de larbre de la Connaissance. Sil en est ainsi, nous pouvons maintenant expliquer le verset: Celui dentre vous, adam, qui fera un sacrifice D. : chaque homme doit choisir la voie de la vie et accepter la leon tire de la faute dAdam, afin de ne pas fauter et de ne pas dtruire, et sil commet une faute, de se repentir immdiatement, den faire laveu, dapporter D. un sacrifice, un korban, afin de se rapprocher de D., lhit-karev. Toute faute est terriblement destructrice et la faute dAdam est le prototype de toutes les fautes. Lhomme doit accepter sans arrire-pense le joug divin afin de ne plus se rvolter, mais dtre juste et droit dans tous ses actes, tous les jours de sa vie, avec laide de D.

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Havel par rapport Can ou la conduite des gnration dans le service de D-ieu
Il est crit (Brshit 4:3-4): Aprs un certain nombre de jours, Can prsenta en offrande lEternel des produits de la terre, et Havel apporta lui aussi des premiers-ns de son btail, les plus gras dentre eux . Et plus loin (ibid. 4:6): LEternel dit Can: Pourquoi es-tu fch et pourquoi ce visage dfait? Nombre de dtails de lhistoire de Can et Havel demandent tre prciss, tant ce qui est cach dpasse ce qui est formul dans cet pisode. Nous allons numrer quelques points qui demandent tre claircis, et en tirer les enseignements:

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1. Nous devons comprendre pourquoi la Torah crit ici aprs un certain nombre de jours , une expression qui nest pratiquement pas utilise ailleurs. Par exemple, la section Miketz (Brshit 41:1) commence par les mots au terme dune priode de deux ans , pour nous faire savoir que Yossef est rest deux ans de plus en prison pour avoir demand au matre-chanson la faveur de se souvenir de lui (Brshit Rabba 89:3). Pourquoi est-il dit ici aprs un certain temps ? 2. La description des offrandes de Can et de Havel fait apparatre Can fautif et Havel mritant. Pourquoi cela, tant donn que Can eut linitiative de loffrande, alors que Havel ne fit que limiter? Bien quAdam ait dj fait des sacrifices (Vayikra Rabba 2:8, Bamidbar Rabba 4:6), Havel ntait pas prsent pour le voir. Ce nest quaprs Can quil a apport ses offrandes, et donc en quoi Can, qui eut linitiative, est-il fautif? 3. Il faut aussi sinterroger sur le sens de la rptition Pourquoi es-tu fch - pourquoi ce visage dfait? Une seule des expressions naurait-elle pas suffi, ou une seule expression pour exprimer les deux choses? 4. Surtout, il nous faut comprendre pourquoi Can a tu Havel. Quel tait son grief envers son frre? Pour rpondre, il faut dabord comprendre le sens des sacrifices offerts par Can et Havel, dont dcoule tout le reste. Can fut le premier apporter un sacrifice. Il est certain quadresser une offrande D. dnote de la grandeur de sa part, car il na pas appris cela de son pre Adam. Can, dans sa sagesse, comprit que le but de la vie de lhomme est de servir D. et que pour servir D. il faut prsenter des sacrifices en signe de reconnaissance, destime et de respect. Bien que Can ait t le premier prsenter une offrande D. et que Havel nait fait que suivre son exemple, Havel avait valoris son offrande en apportant des produits de premire qualit, tandis que Can a apport ce qui lui est tomb sous la main , comme le remarquent les Sages (Brshit Rabba 22:5): il apporta des produits de mauvaise qualit, mais Havel de son ct apporta les premiers-ns du btail, ceux qui sont gras, ce quil y a de mieux . Cela nous enseigne un principe fondamental: mme si un homme est mauvais par nature, sil a en lui quelque dfaut, cela ne lempche pas de recler en lui la capacit de reconnatre et de faire ce qui est bon, et il peut tre lun des premiers faire le bien, comme Can, qui avait en lui un ct mauvais et avait pourtant ressenti lobligation dapporter un sacrifice de reconnaissance D. Sil en est ainsi, ce qui est exig de Can est norme. Finalement, cest lui qui le premier en est venu reconnatre la ncessit de faire des sacrifices D. et Havel, qui tait meilleur que lui, na fait que limiter. Mais pourquoi na-t-il pas offert les meilleurs fruits de la terre? Aprs avoir ralis quil convient dapporter un sacrifice D., Can aurait d apporter une offrande de choix et non pas des produits de mauvaise qualit, signe de mpris. Pourquoi na-t-il pas surmont son mauvais penchant? Sa dcision ne fut pas prise la lgre mais aprs mre rflexion, aprs des jours dhsitation et de recherche, comme il est crit Aprs un certain nombre de jours (ce qui rpond notre premire question), cest--dire aprs des jours passs chercher comment remercier D., il en est venu la dcision doffrir un sacrifice. Pourquoi est-ce justement Havel qui a compris ce quil convient ou ne convient pas dapporter en rejetant lexemple de Can qui avait offert la premire chose trouve, bien que ce soit un produit de moindre qualit? Il faut dire que Can voulait servir D. la fois avec le bon et le mauvais, dans le sens o la lumire et les tnbres sont mles ensemble (Brshit Rabba 3:6). Mais Havel ntait pas de cet avis et il a perfectionn le service de D. Il a eu loriginalit de penser quon ne peut servir D. avec le bon et le mauvais ensemble , mais seulement aprs les avoir spars lun de lautre. Can voulait servir D. tantt avec ce qui est bon, tantt avec ce qui est mauvais, mais il ne pensait pas quil tait possible de soumettre le mauvais penchant au service de D. et le transformer en bien, et en cela il sest tromp. Et donc, Havel est venu lui dire quon ne sert pas le Crateur de cette faon, puisquil est crit (Dvarim 6:5) Tu aimeras lEternel ton D. de tout ton cur... que les Sages expliquent (Mishna Brachot 54a) avec les deux penchants de ton cur, le bon et le mauvais . Il faut servir D. avec les deux penchants. Comment? En prenant ce qui mauvais et en le transformant en bien (Zohar I 144b, 201a), mais non en servant D. avec un mlange de bon et de mauvais.

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Cest pourquoi D. agra Havel et son offrande, mais Can et son offrande ne furent pas agrs (Brshit 4: 4-5). Au lieu de tirer un enseignement quant la faon correcte de servir D. pratique par Havel, au lieu de comprendre quil ne convient pas de Le servir avec le bon et le mauvais mls, au lieu dapprendre de Havel de quelle manire se rendre favorable D. puisque D. lavait agr, lui et son offrande, Can est soudain boulevers et son chagrin se lit sur son visage: Can en fut trs fch et son visage sest dfait (Brshit 4:5). Il navait pas appris de Havel comment servir D. comme Havel avait appris de lui quil faut se rendre favorable D. en prsentant des offrandes. Cest justement avec les choses que D. lui donne, que lhomme Le remercie. Nous Lui rendons hommage avec ce quIl nous a donn, comme il est crit (Divrey HaYamim I, 29:14): Car tout vient de Toi et ce que nous Tavons donn Tappartient . Au lieu de cela, Can fut profondment contrari et son visage sest dfait (ici aussi nous avons une rptition, ce qui constitue notre troisime question), parce que laccusation et le reproche envers Can sont doublement svres. La dconfiture de Can, qui na pas pu surmonter lpreuve de la jalousie, est visible. Au lieu dtre heureux davoir pos les principes fondamentaux et enseign aux hommes servir D. - chose qui tait une grande originalit dans le monde - au lieu de perfectionner la manire de Le servir - ce qua fait Havel - il sest fch contre son frre et na pas su transformer sa jalousie en une mulation qui stimule le progrs dans la sagesse (Babba Bathra 21a). Il na pas appris de lui la conduite correcte, il na pas domin sa jalousie naturelle et il fut chass car la jalousie, les dsirs et la recherche des honneurs chassent lhomme de ce monde (Avot 4:21). Une situation semblable peut se produire nimporte quand, mme dans une Yshiva, lorsquun lve prsente une ide nouvelle ou bien explique une difficult du commentaire de Rashi ou des Tossafot, et quun autre dveloppe son ide jusquau bout, la perfectionne et la raffine, ou bien lui ajoute une explication qui la rend comprhensible aux autres. Celui qui a eu lide en premier lieu maintient quil ny a rien ajouter et rien changer ce quil a dit, et il rejette toute amlioration qui lui semble minimiser ses paroles ou les fausser, dans le sens o il est dit (Sanhdrin 29a): Celui qui y ajoute quelque chose, le minimise , tandis que le deuxime reoit toutes les louanges... Cest pourquoi D. a demand Can pourquoi ton visage est-il dconfit ? Au contraire, tu dois tre heureux davoir t le premier enseigner au monde la faon de Me rendre hommage. Mme si ton initiative est incomplte parce que tu ne las pas suffisamment approfondie (sinon pourquoi aurais-tu offert des fruits de qualit infrieure et non les prmices qui sont les meilleures?), mme si tu nes pas all au bout de ton ide et cest ce qui test reproch, il est possible de complter et damliorer ton intention premire et cest ce que Havel ton frre a fait. Tu aurais d apprendre cela de lui et progresser dans la sagesse en transformant ta jalousie en motivation. Mais tu nas pas soutenu cette preuve, dit D. Can. Pourquoi es-tu fch? Pourquoi ton visage est-il dconfit? La rptition vient signifier: pourquoi es-tu fch de ce que Havel a amlior ton initiative et ta dpass, et pourquoi ton visage est-il dconfit par la mesquinerie et la jalousie, parce que son offrande lui a t agre? Si tu te corriges, tu pourras tre agr (ibid. 4:7), cest--dire: si tu avais eu la rigueur de ton frre Havel qui a complt et amlior ton ide, tu nen serais pas dpit et si tu avais fait de ta jalousie une motivation, tu aurais grandi en sagesse et alors, chacun aurait appris quelque chose de lautre dans le sens o il est dit (Thilim 119:99) Jai appris quelque chose de chacun de mes matres . Si tu avais transform ce qui est mauvais en toi en accomplissant quelque chose de vraiment bon, en apportant le meilleur de tes fruits, ta dvotion aurait t parfaite. Havel a pris soin de slectionner le meilleur de son btail pour loffrande, mais toi, tu na pas pris ce soin et tu as offert des produits de moindre qualit. Si tu avais agi comme ton frre, tu te serais lev au plus haut degr. Si tu ne tamliores pas, ta faute est tapie sur le seuil (ibid. 4:7), cest--dire: si tu namliores pas ta conduite tant que tu en as la possibilit, tu ouvres une brche la faute. D. enseigne Can un principe essentiel: partir du moment o lhomme sent quil est en son pouvoir damliorer sa situation, mme si elle est bonne, pour la rendre encore meilleure, et quil ne lamliore pas, il ouvre une brche et la faute est tapie sur le seuil , entre les deux tendances de son cur (la bonne et la mauvaise) (Brachot 61a). Sil a la possibilit de progresser et quil ne le fait pas, il met sa vie en danger.

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Et D. poursuit Ses remontrances Can: La faute saccrochera toi . Si tu persvres de cette faon, o que tu ailles, tu ne pourras pas te librer de la faute et tu seras toujours entran par elle, car les mchants sont pousss par le dsir de fauter (Brshit Rabba 20:7), et les Sages dajouter (Brshit Rabba 20:16) Can avait une forte tendance fauter . La suite du verset dit: Mais toi, domine-le (le dsir de fauter) . Rashi crit au nom des Sages (voir Kidoushin 30b): Si tu veux, tu pourras le dominer cest--dire: si tu as des moments de lucidit et de clairvoyance et que tu comprends que ta tendance fauter nest l que pour taffaiblir, tu dois tout de suite prendre le dessus, car la Torah protge et sauve (Sotah 21a), elle te protgera de tout danger et taidera dominer ta tendance au mal, et la lumire de la Torah te ramnera dans le bon chemin (Yroushalmi Haguigah 1:7). Il ne tient qu toi de tlever et de te dominer. Lorgueil accompagne toute faute Mme aprs ces longues remontrances o D. fit savoir Can, quil avait la possibilit de renforcer ses bonnes tendances et de refrner les mauvaises en offrant le meilleur des produits que D. lui avait donns (et lhomme doit simaginer quil est lui-mme ce sacrifice D. (Ramban, Vayikra 1:9), ce qui est lune des raisons dtre du sacrifice), Can na pu surmonter sa jalousie et il se jeta sur Havel son frre et le tua . Au lieu de mriter le titre de premier avoir prsent des sacrifices , il fut trait par les Sages (Esther Rabba, introduction 10) de premier des meurtriers . Ceci trouble lesprit. Can tue Havel, au lieu daccepter de lui un enseignement concernant la manire correcte de servir D.! Il est racont (Sanhdrin 102a) propos de Yrovam ben Navat, qui avait trangress et incit le peuple transgresser les lois de la Torah que D. le saisit par le pan de son vtement et lui dit: Si tu te repens, nous nous promnerons ensemble dans le Jardin dEden, Moi, toi et David ben Isha. Yrovam demanda D.: Qui marchera devant? et D. lui dit: ben Isha sera en tte. Alors Yrovam rpondit: Sil en est ainsi, je refuse . Il poursuivit ses agissements pervers jusqu sa mort, et il est de ceux qui nont pas de part dans le monde venir (Rosh HaShana 17a). Yrovam ben Navat et ses semblables vont en enfer et y sont jugs pour toujours et il est tenu responsable des fautes commises par la communaut. Nous savons que Yrovam sest surpass en mchancet, pour avoir os sopposer au roi Salomon et avoir barr la route du Temple (Sanhdrin 101b). Il est tonnant de constater quaprs tout le mal commis par Yrovam et toutes les fautes du peuple dont il a lui-mme t la cause, D. sadresse encore lui et lui propose de se repentir! Non seulement il aurait t pardonn, mais il se serait promen en compagnie de D. et de ben Isha (David) dans le Jardin dEden. Pas moins! Yrovam avait la possibilit de se repentir parce que ce ntait qu cause des honneurs lis sa position publique quil avait perdu lesprit, et les honneurs font perdre bien des gens leur part dans le monde futur (Avot 4:21). Au dbut de sa carrire, Yrovam tait bon et les Sages tmoignent (Sanhdrin 102103) que sa Torah tait sans faille, quil avait tudi cent trois aspects diffrents du Midrash Torat Kohanim, et dvoil des sens inconnus jusque-l, et ce nest qu cause de son changement soudain de statut quil commit tant de fautes. Yrovam tait lesclave du roi Salomon pour devenir par la suite, roi de dix tribus dIsral, tandis que le roi Salomon ne rgnait que sur deux tribus (Sanhdrin 101b). Pour navoir pu obtenir les grandes marques dhonneur dues un roi, il devint comme fou, et fit placer des idoles de toutes sortes sur la route de Jrusalem et sur toutes les routes du pays (Sanhdrin 101b, 102b). Cest pour cela que D. le saisit par le pan de son vtement et le secoua afin quil mt un terme sa conduite insense et la folie qui stait empare de lui. Yrovam fut plac devant un choix. Sil avait surmont lpreuve, il aurait pu regagner sa place dans le Jardin dEden. Toute lpreuve consistait accepter que le roi David ait la prsance. Mais lui, au lieu de profiter du moment de lucidit que D. lui accordait afin dopter pour ce qui est bien, a mal choisi. Il refusa parce quil lui tait difficile de renoncer aux marques dhonneur et de respect qui lui taient dues et de marcher derrire le roi David. Il refusait aussi de rester debout dans lenceinte du Temple alors quil tait permis aux rois David et Salomon de sy asseoir (voir ibid. 101b), car la loi stipule que seuls les rois de la maison de David ont la permission de sasseoir dans lenceinte du Temple (Yoma 25b) et il dsirait

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abolir cette loi. Bien quil ait eu une connaissance solide de la Loi, et bien quil ait su que le royaume de Salomon avait t divis parce que celui-ci avait transgress les commandements spcifiques un roi (Shemot Rabba 6:1), Yrovam a ddaign la Loi, et il a continu provoquer la colre de D. Cela montre que D. offrit tout dabord Yrovam la possibilit de lui accorder des circonstances attnuantes pour son orgueil et ses folies et cest pourquoi Il le saisit par le pan de son vtement pour lui enjoindre de se repentir en lui promettant une place de marque dans le Jardin dEden. En fait, nous voyons quil tait parfaitement lucide et navait aucun besoin dtre averti, mais lorgueil et lamour des honneurs lempchait daccepter, au point quil se rvolta ouvertement contre D. Tout cela pour ne pas se soumettre aux rois de la maison de David et leur servir desclave. Cela nous montre le danger de lorgueil et de la jalousie qui excluent lhomme du monde futur (Avot 4:21). Plutt que de renoncer son orgueil, Yrovam tait prt payer un prix norme - celui de ne jamais sortir de lenfer et dy tre jug ternellement (Rosh HaShana 17a). Bien que D. tente de le sauver de ces dfauts mprisables, il prfre fermer les yeux et sattacher ce qui est mauvais, au point que les Sages disent de lui quil est le prototype de la maldiction (Sanhdrin 102b). Il est possible de dire la mme chose concernant Can. Aprs avoir longtemps cherch, puis trouv, de quelle manire servir D., il a prsent une offrande de moindre importance, et il sen est enorgueilli, parce que sa motivation premire ntait pas pure. Par ailleurs, Havel son frre a suivi son exemple mais avec une perfection qui a trouv grce auprs de D. Can, au lieu de se rjouir pour son frre, fut au contraire envahi de rancune et bless dans son orgueil, au point doublier tout amour fraternel. En acceptant lamlioration apporte par son frre, il aurait prouv que son intention premire avait t pure et il aurait bnfici de laide de D. pour comprendre mieux les choses, soit par lui-mme soit grce Havel son frre, et il les aurait acceptes. Ce nest pas ce quil a fait. D. lui reprocha alors sa conduite: si tu amliores ta conduite, tu pourras tre agr , si tu te repens maintenant de ton orgueil et que tu passes outre latteinte ton honneur personnel, tu seras agr, tu tlveras, tes fautes volontaires seront comptes comme des mrites (Yoma 86b), tu te soumettras ton frre qui est meilleur que toi parce quil ta surpass, et tu le suivras. Sinon, ton orgueil te perdra. Quas-tu besoin de cela? Je ten prie, choisis maintenant ce qui est bon, quitte le mauvais chemin que tu as pris et qui tentrane. Vois, Mes mains sont tendues vers toi, comme disent les Sages (Tanna DBey Eliyahou Zouta 22): D. a les mains tendues pour recevoir ceux qui reviennent Lui et Il appelle: quand donc reviendront-ils? Mais Can, semblable en cela Yrovam ben Navat, a refus dcouter D. et a faut de plus belle en tuant celui qui lui avait enseign une loi nouvelle, uniquement par orgueil et par jalousie envers son frre avec lequel il aurait pu apprendre beaucoup dautres lois. Il a non seulement commis un crime envers D. mais a eu de plus larrogance de mentir effrontment (Brshit 4:9): Je ne savais pas que jtais le gardien de mon frre . De mme que D. proposa Yrovam de se repentir et linvita se promener dans le Jardin dEden, de mme Il a propos Can de se repentir et si tu corriges ta conduite, tu seras agr . Mais Can en a perdu le bnfice pour avoir t jaloux et orgueilleux, deux traits qui caractrisent les mchants en ce monde. Et alors D. lui dit (Brshit 4:10): Le cri du sang de ton frre slve jusqu Moi de la terre . Cest dire la voix de la Torah, qui sapprend avec dvotion, slve jusqu Moi de la terre - de lhumilit. Havel et Mosh ont la mme me (Zohar I 28b, 37b). Havel tait, comme Mosh, humble, et comme lui entirement vou la Torah. Havel fut tu pour avoir apport D. une offrande et lavoir servi avec dvotion. Le crime de Can est terrible. Can rpond D. (Brshit 4:13): Mon crime est-il trop grand pour que je sois pardonn? Est-ce un crime impardonnable qui va mempcher de progresser? A partir du moment o Can a repouss la possibilit de samliorer, il a ouvert une brche par laquelle le mauvais penchant est entr dans son cur, et maintenant, les interdits sont ses yeux comme des choses permises (Kidoushin 20a). Pour navoir pas reconnu sa faute, il en vint blasphmer, se rvolter contre D. et se priver de tout ce qui est bon. Cest une leon pour chacun. Ltude de la Torah reprsente un but en elle-mme. Il faut prserver son amour de la Torah, et si quelquun dautre en a une comprhension plus profonde, il faut sen rjouir. Nous ne devons pas nous offenser lorsque notre explication est rejete, comme si ctait une atteinte personnelle

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notre honneur car cela risque dveiller des dsirs de vengeance. En tudiant pour lamour de la Torah et non pas pour nous faire respecter, nous ne transformerons pas la Torah en moyen de parvenir aux honneurs (Avot 4:7) et nous raliserons alors ce qui est dit (Pessahim 88a, Mguilah 14a): Cet enseignement est attribu toi et moi , et la sagesse de la Torah saccrotra dans le monde.

Le pouvoir de la vue et la saintet des yeux


Il est crit (Brshit 4:3-5): Aprs un certain temps, Can apporta des produits de la terre, une offrande lEternel et Havel apporta lui aussi, des premiers-ns de son btail, les plus gras dentre eux, et D. agra Havel et son offrande, mais Can et son offrande ne furent pas agrs. Can en fut trs fch et son visage se dfit . Et (ibid.8): Il advint, comme ils taient aux champs, que Can se jeta sur Havel et le tua . Rashi rapporte ce sujet le Midrash (Brshit Rabba 22:8): Can prsenta en offrande des produits de moindre qualit . Il y a dans ce passage un certain nombre de points qui nous tonnent, et que nous allons exposer un un: 1. Comment se fait-il que Can, lan des fils dAdam, apporte en offrande D. des fruits de moindre qualit et non pas les meilleurs? Na-t-il vraiment pas de respect envers D.? 2. Nous sommes stupfaits de la conduite contradictoire de Can. Dune part, cest lui qui a eu lide dapporter une offrande, et Havel na fait que limiter en apportant lui aussi une offrande. Dautre part, il noffre de ses rcoltes - que D. lui a donnes - que les produits de moindre qualit. Naurait-il pas d comprendre de lui-mme que tout appartient au Matre de tout? Pourquoi a-t-il agi ainsi? 3. Aprs que D. lui a reproch sa conduite et dit (Brshit 4:9): O est ton frre Havel? , Can, au lieu davouer sa faute, rpond (ibid.): Je ne sais pas, suis-je le gardien de mon frre? Est-ce possible! Il faut aussi se demander pourquoi D. le met face sa faute, et lui dit (ibid. 7): Si tu tamliores, tu pourras te relever, mais si tu ne tamliores pas, ta faute sera tapie sur le seuil . Naurait-il pas d comprendre cela de lui-mme? 4. Il reste aussi comprendre pourquoi, lorsque D. na pas agr son offrande, Can en fut fch et son visage se dfit ? Na-t-il pas lui-mme caus le rejet de D. en offrant des fruits de moindre qualit? Pourquoi est-il vex, et de quoi a-t-il se plaindre? 5. Il est encore plus difficile de comprendre do lui est venue lide de tuer son frre, car jusque-l personne ntait encore mort. De qui Can a-t-il appris le meurtre? Les Sages disent de lui (Sanhdrin 37b) quil ne savait pas par quelle partie du corps lme schappe et il a entrepris de frapper Havel sur tous ses membres, jusqu ce quil latteigne la nuque et le tue (ce qui montre quil ne savait pas comment le tuer). Can savait bien que la faute dAdam avait caus la mort dans le monde (Yirouvin 18b), mais il sagissait dune mort accidentelle, venant de D. Comment savait-il que lme sort du corps de par une action meurtrire excute par lhomme? 6. Il faut aussi comprendre autre chose. Aprs le meurtre, D. lui demande: O est ton frre? A quoi il rpond: Je ne sais pas. Suis-je le gardien de mon frre? Les Sages disent ce sujet (Brshit Rabba 22: 28) quil a tromp D. Cest une chose vraiment extraordinaire quil ait cru pouvoir tromper D. Ignorait-il que Celui qui cra le monde sait tout, que rien ne Lui est cach, et quIl connait le fond des curs? Au lieu de reconnatre sa faute, dy renoncer et de se faire pardonner (Mishley 28:13), il ose encore rtorquer D. Est-ce que je suis le gardien de mon frre? Comment est-ce possible? Rappelons la faute dAdam. Il est crit (Brshit 2:25): Il taient tous deux dnuds, Adam et sa femme, et ils navaient pas honte . Et plus loin (3:1): Le Serpent tait rus plus que nimporte quel autre animal . Rashi, au nom des Sages (Brshit Rabba 18:6) demande: Pourquoi la narration du Serpent suit-elle celle dAdam et de sa femme, et quel est le rapport entre la nudit des uns, et la ruse de lautre? Il rpond: Cest pour nous enseigner ce qui a motiv la provocation du Serpent: il les a vus nus et enlacs lun lautre, au grand jour, et le dsir la saisi . Cela aussi est difficile comprendre.

Parachat brchit
1. tant donn que lHomme et sa femme taient dnus de toute mauvaise pense, comment se fait-il quils en soient arrivs une faute aussi grave? 2. Nest-ce pas D. Lui-mme qui a ordonn lHomme: Tu ne mangeras pas de larbre de la Connaissance du bien et du mal car le jour o tu en mangeras, tu mourras (Brshit 2:17)? Et donc, lorsque le Serpent leur a dit malicieusement (ibid. 3:1-4): Est-il vrai que D. vous a dit: Vous ne mangerez daucun de tous les arbres du Jardin... vous ne mourrez pas . Comment se fait-il quils aient cout ses paroles et non les paroles de D.? Nest-il pas tonnant de voir que les incitations du Satan ont russi? Nous devons donc expliquer en quoi consistait le pouvoir dincitation du Serpent. 3. La rponse de lHomme est des plus tonnantes (Brshit 3:12): La femme que Tu mas donne pour partenaire ma donn manger et jai mang . Pourquoi a-t-il rejet le blme sur les autres? Avait-il besoin dobir sa femme? Il est galement difficile de comprendre la rponse de la femme (ibid. 3:13): Le Serpent ma trompe et jai mang . Cest en soi le problme: pourquoi Hava a-t-elle cout ce que le Serpent lui disait, et non la parole de D.? A notre humble avis, la faute dAdam et de son fils an Can est identique et elle a la mme motivation. Cela a dj t indiqu par les Sages (Brshit Rabba 22:28) qui nous disent que tous deux se sont repentis ensemble. Adam a rencontr son fils Can et lui a demand: quel est le rsultat de ton jugement? Can lui rpondit: Jai fait un accord lamiable avec mon Crateur, et cest alors quAdam a entonn le Cantique du Jour du Shabbat... (Thilim 92). Leur faute dcoule de la mme cause. Ils nont pas prserv la puret et la saintet de leur regard, dans le sens o il est crit (Bamidbar 15:39): Ne vous laissez pas garer par votre cur et par vos yeux , et les Sages dexpliquer (Yroushalmi Brachot I:5) que les yeux et le cur sont les deux agents du pch . Cest pourquoi nous allons tout dabord expliquer comment prserver la saintet du regard, qui est essentielle. Les Sages rapportent (Mguilah 28a) au nom de Rabbi Yohanan: il est interdit de regarder le visage dun homme mchant . La raison en est explique dans les livres de Cabbale. Le visage du mchant dgage des manations impures qui imprgnent et risquent de nuire mme celui qui a le regard droit et pur. Pour la mme raison les Sages ordonnent (Avot I:7): Eloigne-toi dun mauvais voisin et ne frquente pas les hommes mchants . Il est certain que nous ne pouvons pas nous protger contre la mauvaise influence dun compagnon ou dun voisin mchant, et la subirons, mme sans nous en rendre compte. Dautre part, nous savons que le regard des Justes est puissant, comme disent les Sages (Brachot 58a): Il na fait que jeter son regard sur lui et la transform en un tas dossements et (Brachot 58a): Il a jet le regard sur lui et la tu , comme Rabbi Shimon Bar Yocha et son fils Rabbi Elazar lorsquils sortirent de la grotte (Shabbat 33b). Les Sages ajoutent que le regard des Justes a une influence sur les autres et peut leur communiquer des forces extraordinaires, comme le dit Rabbeinou HaKadosh (Yirouvin 13b): Je suis plus percutant que mes amis, parce que jai vu Rabbi Meir de dos (tant assis derrire lui la Yshiva, nous prcise Rashi). Si je lavais vu de face, je serais encore plus percutant . Le regard du Juste a un grand pouvoir, ses tincelles brlent comme le feu. Si le regard du Juste est tout de saintet, les yeux du mchant sont tout de perversion et empoisonnent le cur de celui qui les regarde au point de mettre sa vie en danger. Ainsi Rabbi Yoshoua ben Korha (Mguilah 28a) qui on demandait comment il expliquait sa longvit, rpondit: de ma vie je nai pas regard le visage dun homme mchant . Nous trouvons dans les crits du Ari zal, des choses tonnantes ce sujet: il est interdit de regarder la viande dun animal improprement abattu et devenu interdit la consommation, car limpuret sattache pareille viande et imprgne celui qui la regarde. Le saint Rabbi Dov Beer de Mezritch ajoute quil est interdit de lire un livre crit par un homme mchant, un blasphmateur ou un rengat (mme si certaines choses quil a crites sont justes), car la mchancet de cet homme atteint lme du lecteur. Le Hafetz Hayim, dans son livre, rapporte que les mchants inventent sans cesse de nouveaux stratagmes pour entraner les Juifs fauter et priver le monde de bienfaits, par le moyen de la lecture de journaux profanes et vulgaires (les grands de toutes les gnrations ont insist sur ce danger dans leurs dclarations et leurs crits). Le Taharat HaKodesh crit ce sujet que les lettres (hbraques) imprimes par des gens ignorants nont aucun caractre de saintet. Dans le livre Isral Sabba,

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il est dit que les livres des athes et leurs journaux rendent le corps impur et entachent lme, comme le disent les Sages (Tossefta Shabbat 14:5): Les livres athes provoquent la jalousie, la haine, et la rbellion contre D. et il ajoute: Jai dj rpt plusieurs fois quil faut se laver les mains rituellement si lon y a touch . Le Rchit Hochma, dans le chapitre sur la Saintet (8:49-50) cite les paroles des Sages (Zohar Kedoshim 84a) concernant la perfection de celui qui sait protger ses regards. Concernant le verset (Vayikra 19:4): Ne vous tournez pas vers des idoles , Rabbi Shimon Bar Yoha remarque quil y a l un avertissement de ne pas regarder les femmes, quiconque sen garde jouira de la Prsence divine, comme il est dit (ibid.): Je suis lEternel votre D. Si vous observez ce commandement, vous jouirez de Ma Prsence. La raison en est que si lhomme a dans le cur un autre dsir que lamour de D., il en viendra malheureusement lidoltrie, et il est crit: Ne tournez pas votre attention vers des idoles . Paralllement, la Torah promet la protection divine celui qui sen garde. Celui qui nattache pas son regard une chose indcente et na que des penses saintes, mrite sans doute de voir la Prsence Divine de ses propres yeux, car nul ne lignore, la saintet est linverse de limpudeur. Nos Sages ajoutent ce sujet (Ndarim 20a): Rabbi Yocha Bar Rabbi Ishayahou dit: celui qui regarde les femmes finira par fauter et contrairement, celui qui sen garde, mme sil nest pas Cohen, mritera dapporter un sacrifice sur lautel, linstar du Grand Prtre . Jai vu ce sujet des choses terribles dans la deuxime partie du livre Taharat HaKodesh: Regarder une femme est un des interdits les plus svres de la Torah, ne pas transgresser cet interdit assure lentre au Jardin dEden . Les Sages nous enseignent (Yalkout Shimoni Ishaya 439): Rav Maysha petit-fils de Rabbi Yoshoua ben Levi dit: quiconque voit une chose indcente et vite de la regarder, mrite de contempler la Prsence Divine comme il est dit (Ishaya 33:15): qui ferme les yeux et ne voit pas le mal , et il est dit ensuite (ibid. 16): celui-l habitera dans les hauteurs et encore (ibid. 17): Tes yeux contempleront le Roi dans Sa splendeur . Concernant les mots qui ferme les yeux , les Sages expliquent (Babba Bathra 57b): il sagit de celui qui ne regarde pas les femmes lheure o elles battent le linge . Cela indique implicitement que sil les regarde, ses pchs ne seront pas pardonns et il en portera toujours la marque. Il convient de remarquer que Rav Maysha ne dit pas dun tel homme quil mritera de contempler, au futur, mais quil mrite , au prsent, cest--dire immdiatement. Sil voit une femme et ne lui prte aucune attention particulire, sil ne tire aucun plaisir la regarder et sil ne pense pas elle, son me semplit dune grande saintet et en cet instant il reoit la Prsence Divine, mme si son corps ne le ressent pas. En cet instant, son me est pure, le monde entier est plein de bonheur, et la Prsence Divine pose un baiser sur ses yeux purs. Le Tifret Shlomo sur la Torah crit des choses semblables propos du verset (Brshit 38:14): Elle sassit au carrefour des Deux Sources (le mot eynayim signifie la fois la source et les yeux). Il fait remarquer que nous avons l une allusion au fait que la saintet de la Prsence Divine habite le Juste dont la pense est pure parce quil a su prserver ses yeux, comme il est crit (ibid. 21): O est cette prostitue qui se tient sur le chemin des Sources (comme sil tait dit des yeux ), cest dire que la saintet de lhomme dpend en premier lieu de la saintet de son regard, du fait quen chemin, il vite de regarder ce quil est interdit de voir. Selon le dicton bien connu, nombre de barrires et defforts sont ncessaires pour prserver la saintet des yeux, mais il suffit dun seul regard pour rendre impur...

O rside la saintet? Dans les yeux...


Les explications concernant lobligation de veiller la saintet des yeux sont nombreuses et varies. Beaucoup de livres ont t publis qui traitent de ce sujet important, mais il nest pas de maison dtude qui ne produise un nouveau commentaire . Bien quil nous soit impossible de cerner ici le sujet dans toute son ampleur, nous devons toutefois mettre le lecteur en garde. Le regard - mme par mgarde et sans intention - peut avoir des consquences dsastreuses parce quil est prompt sgarer, et que les yeux sont facilement attirs par les choses interdites. Notre amour pour les choses saintes nous a amens crire ces mots, revenons maintenant notre premier sujet, lexplication de la faute dAdam et de Can.

Parachat brchit
Nous avons dj cit le Midrash selon lequel le Serpent a vu Adam et Hava nus et enlacs, et son dsir en fut attis. Cest ce qui fait dire aux Sages (Brshit Rabba 20:5) que le Serpent voulait tuer Adam et pouser Hava . Le Ari zal crit ce sujet dans son livre Likoutey Torah que lHomme aurait d attendre jusquau Shabbat pour sunir sa femme et alors la lumire de la cration qui baigne le Shabbat les aurait envelopps, et le Serpent naurait pu leur faire aucun mal . Les Sages soulignent (Tanhouma Brshit 25) que le rayonnement du visage de lHomme ne la pas quitt jusqu la fin du Shabbat. LHomme et sa femme neurent pas honte parce quil ny avait pas encore de Shabbat (les mots boshet, honte, et Shabbat sont forms des mmes lettres) et cest ce qui a permis au Serpent de les tenter. Le Ari zal stonne de lexpression ils neurent pas honte , qui semble superflue. Sil tait crit seulement: ils taient tous deux nus , nous aurions compris que cest ainsi que D. les avait crs et ils navaient pas reu le commandement de se vtir car ils navaient pas dinclination pour le mal. De quoi auraient-ils honte? Mais Adam na pas attendu jusquau Shabbat qui aurait pu le protger grce la lumire de la cration, ce qui a amen le Serpent dsirer Hava et fomenter ses ruses. Cest ce que disent les Sages (Shabbat 146a): Le Serpent embrassa Hava et elle en fut souille . Lintention nest pas de dire quil eut des rapports avec elle, mais que ce mchant (le Serpent, le Satan) a jet les yeux sur eux. Il les vit enlacs et eux aussi lont regard, ce qui lui a permis de les contaminer de limpuret de son dsir. Cest cette infection qui les a entrans dsirer par la suite dautres plaisirs. Hava fut touche par linfection du Serpent (cest la raison pour laquelle elle sest soumise lui) et sa relation avec son mari fut entache, ce qui lui permit de convaincre Adam de fauter. Le cours de lHistoire aurait t tout autre si le Serpent navait pas russi les contaminer. Les forces du Mal nauraient eu aucune emprise sur le monde, que rien naurait pu priver de sa saintet, jusqu la fin du monde. Mais parce quils ont dnatur la puret de leur regard et ont t contamins par le Serpent, le dsir sest veill, ils se sont laiss entraner par leur mauvais penchant, et ce fut le dbut de leur chute. Ils ont fui et renonc leur tat de saintet et La fuite est le dbut de la chute (Sotah 44b). Le fait mme davoir opt pour les mauvais penchants a caus leur chute. Il tait plus facile de les inciter manger du fruit de larbre de la Connaissance que de les en loigner. Mais aprs en avoir mang, au lieu de reconnatre sa faute, chacun en a port le blme sur lautre! Cela montre clairement la puissance du pch. Lorsque lhomme commet une faute envers D., elle laveugle au point de lui faire nier effrontment son crime, et il ne peut plus reconnatre la vrit (car ses yeux sont aveugls par le mal quil a commis). Ce genre de regard a un pouvoir de destruction immense... et pourtant, Adam lui-mme tait pur, il na pas ressenti la ncessit dattendre jusquau Shabbat tant il tait ignorant du mal, et il na pas imagin que le Serpent, le Satan, ft capable de les souiller par sa jalousie, ses dsirs et toutes sortes de penses meurtrires. Le Satan a russi faire chasser lHomme du Jardin dEden et introduire la mort dans le monde (Yirouvin 18b), pour lui et sa descendance, pour toutes les gnrations futures. Dornavant nous pouvons comprendre ce qui est crit (Brshit 3:15): Je mettrai la haine entre toi et la femme, entre ta postrit et la sienne , car finalement, de quoi la postrit du Serpent est-elle coupable? Cest que le Serpent a corrompu non seulement Adam et sa femme, mais aussi leurs enfants et leurs descendants, jusqu la fin des gnrations, et donc, mesure pour mesure, les enfants et les descendants du Serpent seront poursuivis jusqu leur destruction, jusqu la fin du monde. Sil en est ainsi, toutes les questions poses plus haut concernant la faute de lHomme sexpliquent clairement. Il fut jug et puni la mesure de sa grandeur. Il avait le choix dagir bien ou mal, en fonction de son immense intelligence, et il aurait d comprendre quil lui fallait attendre jusquau Shabbat. Pour navoir pas attendu, il sest expos au regard du Serpent, et fut contamin. Alors, la tendance au mal a commenc battre dans son cur. Le Serpent sen prit dabord Hava. Et lHomme, aprs avoir eu des rapports avec elle, fut atteint lui aussi de cette infection. Cela nous permet de comprendre pourquoi Adam a imput la faute sa femme. En ce qui le concerne, cest elle qui est coupable car cest elle qui la infect du poison du Serpent. Quant Hava, elle imputa la faute au Serpent: cest lui qui la corrompue, elle navait pas ide quil pouvait lempoisonner. Leur faute dcoule directement de ce quils ont contempl le mal.

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Can est issu de cette union impure (Tikouney Zohar 69), et par consquent il est venu au monde entach de la souillure du Serpent, dont il possde les mauvais penchants, savoir la jalousie et les dsirs qui excluent lhomme de ce monde (Pirkey Avot IV:21). En quoi Can possdait-il les dfauts du Serpent? Les Sages disent (Brshit Rabba 22:3): Deux surs jumelles sont nes en mme temps que Havel . Can voulait tuer Havel afin de les pouser, de mme que le Serpent avait voulu tuer Adam afin dpouser Hava. La tendance au meurtre du Serpent (qui voulait tuer Adam) se retrouve dans lme de Can, et cette tendance profonde sest traduite en acte au moment venu. Can a hrit son instinct meurtrier de la souillure du Serpent (ce qui rpond la question 5), et cette tendance fut introduite dans le monde cause de la faute dAdam. Cela nous permet aussi de rpondre aux autres questions que nous avons poses. Can est n avec un grave dfaut, issu des mauvais penchants du Serpent. Cest pourquoi, bien que ce soit lui qui ait eu linitiative de la prsentation dune offrande D. il a tout de mme offert des produits de moindre qualit. Il navait que faire de la perfection puisque son me dfectueuse tait incapable de latteindre. Il na pas compris pourquoi D. avait accept loffrande de Havel et rejet la sienne. Cest pour cette raison que son visage se dfait et quil se fche comme victime dune injustice. Que puis-je faire si je suis n avec une telle tendance? Pourtant D. la confront son amre erreur en lui disant: Pourquoi es-tu fch et pourquoi ton visage est-il dconfit? Si tu amliores ta conduite... , il est vrai, tu es entran par ta nature et tu as, de nature, une tendance au mal, mais cela en soi ne toblige pas mal agir. Mme si le mal est en toi, il ne dpend que de toi de le dominer. Si seulement tu utilisais ta volont pour matriser ta mauvaise nature et te conduire correctement (cest le sens de si tu tamliores ) tu serais pardonn, comme le traduit Onkelos, et ton mauvais penchant te quitterait. Sinon, si tu ne veux pas amliorer ta conduite, il est sr que le pch est tapi sur le seuil , car le mauvais penchant est tapi entre les deux parties du cur (Brachot 61a) et tout ce qui lintresse, cest de te faire fauter. Il ne fait aucun doute quil tentranera dans labme et aucune excuse ne pourra te sauver. Cest que D. a cr toute chose avec son contraire. Paralllement la mauvaise nature que tu as hrite du Serpent, tu as aussi reu des forces incommensurables que tu peux utiliser pour vaincre le mauvais penchant qui est tapi dans ton cur, si seulement tu le souhaites. Dans ce cas, tu tlveras au plus haut degr et tu pourras le vaincre. Mais Can, au lieu daccepter la leon de morale de D. et de se rsoudre faire dornavant leffort de se laver de sa souillure, sest attaqu son frre Havel et la tu. Non seulement il na pas reconnu sa faute, mais il a continu slever contre D. et Lui faire front avec audace. Mme au seuil de lenfer, les mchants ne se repentent pas de leurs fautes (Yirouvin 19b). Et donc, lorsque D. lui demande O est ton frre , afin de le secouer, afin quil tremble de peur et regrette son acte et quil se repente de tout cur, il rpond D. Suis-je le gardien de mon frre? Il na pas compris, il na pas voulu comprendre, le message divin. Il savait parfaitement que D. scrute le fond des curs, quIl connat toutes les penses et que rien ne Lui est cach, mais il la ni, il a essay dchapper D., il pensait pouvoir Le tromper, D. nous prserve dune telle erreur. Can, encore sous linfluence des paroles du Serpent et de leur venin, se souvint que manger de larbre de la Connaissance permet de devenir comme D., connaissant le bien et le mal (Brshit 3:5), et il a pens: est-ce que nous pouvons vraiment tre comme D.? Il commena alors douter de la Toute-Puissance divine. Peut-tre est-elle limite (D. nous prserve dune telle pense)? Cest pourquoi il na pas voulu couter les paroles de D. Alors, D. lui dit: Son sang et le sang de sa descendance crie vers Moi de la terre (Brshit Rabba 22:21), cest--dire: Je sais tout, Je matrise non seulement le prsent mais aussi lavenir, et Je sais que le sang des fils de Havel aussi, jusqu la fin de toutes les gnrations, crie vers Moi, parce que tu as tu ton frre, et Moi Je suis Eternel. Can alors demande tre pardonn. Il espre une rponse favorable lorsquil dit: Est-ce que mon crime est impardonnable? (Brshit 4:13). Ce verset, qui peut se lire comme une affirmation ou comme une interrogation est, selon le commentaire de Rashi, une question, ce qui sous-entend quil a reconnu sa faute et effectivement, il a bnfici dun sursis. Mais en fin de compte, mesure pour mesure, il fut tu par son descendant Lemech (Tanhouma Brshit 11), conformment la sentence divine. A cause du meurtre de la descendance de Havel, la descendance de Can prit fin galement, comme le disent les Sages (Rashi Brshit 4:24): Il fut dcrt que la descendance de Can sarrterait aprs sept

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gnrations, comme il est crit (Brshit 4:24): La punition de Can sera septuple , et cela cause de lorigine vnneuse et empoisonne qui affecte sa descendance, si bien quil ny avait rien dautre faire que de lliminer de la terre, et tous furent anantis dans le dluge. Il est dit ce sujet quau cours des gnrations, cette faute aussi sera corrige. Le Meyrat Einayim (crit par un lve du Ramban), note que lme de Can se retrouve plus tard en Yithro, le Grand Prtre de Midian, qui lui aussi tait idoltre. Lme de Havel se retrouve en Mosh Rabbeinou qui a pous Tsipora, la fille de Yithro, comme il est crit (Shemot 2:21): Et Yithro donna sa fille Tsipora Mosh en mariage . Tsipora possde lme de la sur jumelle de Havel, et cest cause delle, selon une des opinions de nos Sages, que Havel fut tu par son frre Can. Et donc, Can (Yithro) corrige sa faute en ce quil rend Havel (Mosh) sa sur jumelle (Tsipora). Combien lhomme doit se dfendre de tout regard impur. Il doit aussi se garder dveiller la jalousie et lenvie des autres, et viter les invitations sduisantes, dans le sens o il est dit (Thilim 37:32): Le mchant pie le juste et cherche le mettre mort . Qui est plus grand quAdam, et pourtant, malgr sa grandeur et sa saintet, il est tomb dans ce pige! Quel homme est plus sage que le roi Salomon, qui a transgress trois interdits explicites de la Torah (Dvarim 17:16-17): Il ne doit pas possder beaucoup de chevaux... ni beaucoup de femmes... ni amasser beaucoup dor et dargent ? Le roi Salomon sest dit: Je vais en avoir beaucoup et je ne fauterai pas . En fin de compte, il a transgress les trois interdits, et sen est confess (Kohlet 7:23): Je me suis dit: jarriverai la sagesse, et elle est loin de moi . Telle est notre conclusion. Nous devons rpter sans nous lasser cette leon et la comprendre, car il ny a pas de sagesse et pas dintelligence, et pas de connaissance face D. (Mishley 21:30). Nous ne savons que ce que la Torah nous interdit et nous ne suivrons que ses lois, ainsi nous marcherons dans la lumire, tous les jours de notre vie. Amen.

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Le crime de Can et lintgrit de Havel


Il est crit (Brshit 4:1-2): Et Adam connut sa femme Hava qui conut et enfanta Can... et ensuite elle enfanta son frre Havel . Les Sages ont dit (Brshit Rabba 22:3): Une sur jumelle est ne avec Can et deux jumelles avec Havel . Cet enseignement dcoule du fait qu propos de Can la prposition eth est mentionne une seule fois, alors que cette prposition figure deux fois pour Havel. Pourquoi ces surs jumelles ne sont-elles mentionnes que par allusion? Pourquoi la Torah ne les mentionne-t-elle pas explicitement? Avant de rpondre, citons les propos de nos Sages concernant la dispute entre Can et Havel, comme il est crit (ibid. 4:8): Lorsquils furent dans les champs, Can se jeta sur Havel son frre et le tua . Quel tait le sujet de leur dispute? Les Sages disent (Brshit Rabba 22:16): Can et Havel staient partag le monde, Can stait attribu les terres, et Havel les biens mobiliers. Alors Can voulut expulser Havel de son domaine, prtextant quil marchait sur une terre qui ntait pas la sienne, tandis que Havel voulut dshabiller Can, disant quil utilisait des vtements qui ne lui appartenaient pas . Et les Sages ajoutent une autre raison (ibid.): ils se sont aussi disputs au sujet de la deuxime sur jumelle de Havel. Can dit: Cest moi qui lpouse car je suis lan, et Havel dit: Cest moi qui lpouse car elle est ne avec moi . Ils se sont aussi disputs parce que le sacrifice de Havel avait t agr mais pas celui de Can (Brshit 4:4-5), et celui-ci en fut dpit et son visage se dfit (ibid.). Maintenant nous pouvons comprendre. La Torah navait pas encore t donne au monde. La Torah ordonne lhomme dapporter des sacrifices, comme il est crit (Vayikra 1:2): Si quelquun dentre vous (ish, un homme) veut prsenter une offrande D. . De mme, propos des lois de lhritage (Bamidbar 27:11) il est dit (ibid. 27:8): Si un homme meurt sans laisser de fils, vous transfrerez son hritage sa fille , cest donc que sil a un fils, cest lui qui hrite (Ketoubot 52b) et la loi stipule: sil na pas de fils les petits-fils ont la priorit sur sa fille (Rambam, Nahalot ch. I). Ainsi, si la Torah avait mentionn explicitement la naissance de ces surs jumelles, Hava les aurait nommes et alors, lorsque Can et Havel prsentrent leurs sacrifices, les filles auraient accompagn leurs frres. De mme, lorsque Can et Havel se sont partag le monde, les filles seraient venues exiger leur part de lhritage. Et donc, si la Torah ne mentionne pas la naissance de ces filles, cest pour nous enseigner que les femmes sont sous la protection de leur mari (Sanhdrin 28b), quelles ne reoivent pas dhritage et ne font pas de sacrifices.

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Pourquoi Can est-il jaloux de Havel parce quil a une sur de plus, si chacune delles a la libert daller o bon lui semble car la femme sait o elle doit aller (Ybamot 25a) ? Les deux surs qui sont nes en mme temps que Havel lui appartiennent-elles, et nont-elles pas le droit de faire ce quelles veulent? Havel pense que si ses surs sont nes avec lui, elles lui appartiennent puisquelles ne reoivent pas dhritage, et nont pas le devoir de faire des sacrifices. Can, quant lui, pensait que les femmes apportent des sacrifices et reoivent une part de lhritage (avant le don de la Torah), quelles sont libres, et quen tant quan, il a des droits sur la deuxime sur de Havel. Le texte vient donc trancher entre eux, en disant que le sacrifice de Havel fut agr tandis que celui de Can ne le fut pas. Si ce que nous avons dit plus haut est vrai, la sur jumelle de Can (sa femme) aurait apport un sacrifice en mme temps que lui, et son sacrifice elle aurait aussi t rejet. Si le sacrifice de Havel fut accept, cela indique que ses deux surs lui appartiennent. En fait, les trois surs auraient d natre avec Havel, afin de se conformer au dcret de D. selon lequel (Brshit 3:16): La passion tattirera vers ton poux, et il te dominera . Quand cela sapplique-t-il? Lorsque lhomme suit les voies de D., cest lui qui domine. Effectivement, lorsque les surs ont vu que Can ne se conduisait pas bien, elles ont toutes voulu sen remettre la protection de Havel. Deux lui taient dj attaches, et la troisime ne restait auprs de Can que parce quelle tait ne avec lui et quil tait lan. Ceci a provoqu la jalousie de Can envers Havel son frre. La Torah ne mentionne ni la naissance ni les noms des trois surs. Nous savons que Hava a entam le processus de la dgradation en mangeant du fruit de larbre de la Connaissance (Shabbat 31b). Si les noms des trois surs taient cits, elles aussi auraient pu mal agir et causer encore plus de dgts dans le monde, cest pourquoi elles ne sont pas mentionnes. Can a tu Havel par jalousie parce que deux surs sont nes avec Havel et une seule avec lui. Cest probablement de cette troisime sur quil sagit lorsquil est dit (Tikouney Zohar, Tikoun 69:118b): Havel est mort cause dune femme . Cest un grand malheur pour le monde quun Juste comme Havel, qui aurait d donner naissance six cent mille mes, soit mort (ibid. 114a). Tout cela, alors que les filles ne sont pas explicitement nommes - qui sait quel mal elles auraient pu causer si, par malheur, elles avaient t mentionnes! Il faut se demander pourquoi deux surs sont nes avec Havel, et une seule avec Can. Il est probable que la Torah veut nous enseigner quil nest pas bon quun homme ait deux femmes, comme Yaakov, qui se jugeait indigne parce quil avait pous deux surs (Pessahim 119b). Avoir deux femmes cause des rivalits incessantes entre elles, et les Sages disent (Avot 2:7): Celui qui augmente le nombre de ses femmes augmente les actes de sorcellerie dans sa maison . Avoir plusieurs femmes multiplie dautant les obligations du mari. De plus sil a deux pouses, les autres hommes sont jaloux de lui (comme Can fut jaloux de Havel), ils mdisent de lui et peuvent mme chercher lui nuire, D. nous en garde. A prsent, nous comprenons le partage du monde entre Havel et Can. Can pensait que les femmes aussi reoivent une part de lhritage, cest pourquoi il sest attribu toutes les terres, afin de pouvoir les partager avec sa femme. Par contre Havel, qui considrait que les femmes ne reoivent pas de part dhritage, sest content de prendre pour lui-mme les biens mobiliers, le menu et le gros btail, cest--dire une moindre part. On pourrait se demander pourquoi en fait Can sest oppos Havel et voulait tout prendre pour lui, car si Havel lavait voulu, il aurait pu prendre une triple part puisquil avait deux femmes. Cest que Can savait que son frre Havel tait un homme droit et intgre qui ne sopposerait pas aux principes de la Torah (selon lesquels la femme ne reoit pas de part de lhritage) mme sils entranent Can semparer de tout, car Havel est pieux. La preuve en est que Havel a apport les premiers-ns les plus gras de son troupeau (ibid. 4:4), les meilleurs, (Brshit Rabba 22:5), et de plus il a apport des choses saintes (Zohar I 54b), par contre Can a apport les produits les moins bons (Brshit Rabba ibid.) bien que le monde entier lui ait appartenu. En outre, il est dit de lui (Tikouney Zohar, Tikoun 69:114a) quil a apport des choses impures, D. nous en prserve. Cela nous montre combien la mchancet de Can tait grande. Devant le dsintressement de Havel qui stait content sans rancune des biens mobiliers, Can a commenc envier aussi les vertus des femmes

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de Havel qui avaient accept ce partage sans rien exiger pour elles-mmes. Ce fait eut naturellement pour consquence de provoquer la discorde entre Can et sa femme, qui au lieu de le soutenir est devenue belliqueuse (Ybamot 63a). Can ne cessait de dire sa femme: Tu vois, les femmes de Havel lcoutent, mais toi tu ne mcoutes pas , et sa femme de lui rtorquer: Que veux-tu dire par l? Regarde Havel, il est vraiment bon, il a renonc la part de ses deux femmes en ta faveur, mais toi tu tes attribu comme un voleur des choses qui ne sont pas toi . Si bien que, au comble de la jalousie (et de la discorde avec sa femme) Can a rsolu de tuer Havel et dpouser ses deux surs. Can tait jaloux des surs jumelles de Havel (Sotah 9b) et Can a dsir quelque chose qui ne lui revenait pas (Zohar I54b). La discorde entre lui et sa femme concernant le partage du monde enflamma sa jalousie. Tel est probablement le sens de: quelque chose qui ne lui revient pas , car le monde non plus ne lui revenait pas en entier, puisque Havel aurait p revendiquer trois parts. La jalousie de Can la amen tuer son frre Havel et la exclu du monde, mme de cette partie du monde qui appartenait Havel. Et voil que le sang de ton frre crie vers Moi de la terre (Brshit 4:10), cest--dire que le sang de Havel crie de cette partie de la terre que tu tes approprie par le vol. Il est clair que le nom des surs jumelles nest pas mentionn dans la Torah parce que la femme na pas de part dhritage (si elles avaient t mentionnes, elles auraient exig des droits gaux ceux de Can et de Havel), mais aussi parce quelles ont provoqu ce grand malheur, puisque cest cause delles que Can a jalous Havel et la tu. Il est difficile de comprendre pourquoi D. a voulu faire en sorte que Havel meure cause des deux jumelles nes avec lui. Si cest pour prouver la svrit de linterdit dpouser deux femmes, fallait-il pour cela que Havel soit tu? Mais nous pouvons lexpliquer sur la base du Midrash (Brshit Rabba 63:7). Lorsque Rivka tait enceinte, quand elle passait devant les sanctuaires des idoltres, Essav sagitait pour venir au monde, et quand elle passait devant des synagogues et des maisons dtude, cest Yaakov qui sagitait pour venir au monde. Il est possible quil en ait t de mme pour Hava. Can et Havel taient des frres jumeaux (Pirkey DRabbi Elizer 21), et il est possible que Hava aussi, lorsquelle tait enceinte, ait senti Havel sagiter lorsquelle passait devant un lieu saint, et lorsquelle passait devant un lieu impur cest Can qui sagitait et tentait de sortir. Les trois surs jumelles furent conues en mme temps, cest dire que ces filles leur taient dsignes par le Ciel. Deux dentre elles se sont attaches Havel, la troisime navait donc pas dautre choix que de sattacher Can. Cest pourquoi deux dentre elles sont nes avec Havel, et une seule avec Can. En fait, pourquoi y eut-il trois filles et non deux, une pour chaque frre, ce qui aurait vit toutes les rivalits? Cest que Havel, par son essence mme, ne pouvait atteindre la perfection quavec deux femmes. Cest grce ses deux femmes que sa droiture devint manifeste, ce qui ne fut pas le cas pour Can. Nous devons apprendre de Havel nous satisfaire de peu et ne pas rechercher les plaisirs de ce monde, qui ne sont que havel havalim - vanits et bagatelles.

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Aprs avoir tu Havel son frre, Can dit D. (Brshit 4:9): Suis-je le gardien de mon frre? . Le mot Anokhi, je , demande tre expliqu, car il aurait pu dire Ani, terme plus courant. Les Sages disent (Taanith 7a): Rabbi Hanina ben Aydi remarque que les paroles de la Torah sont compares leau, afin de signifier que de mme que leau scoule de haut en bas, de mme les paroles de la Torah ne sont retenues que par celui qui est humble . Lorsque D. Sest rvl aux Enfants dIsral pour leur donner la Torah, Il leur dit (Shemot 20:2): Je suis lEternel ton D. qui tai fait sortir du pays dEgypte... , Je suis est exprim par le mot anochi. Son intention tait de dire Isral: Afin que vous Me connaissiez et afin que vous Me serviez de tout votre cur, vous devez savoir que Je suis lEternel votre D. qui vous ai fait sortir du pays dEgypte, qui

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ai fait pour vous tous les miracles de la sortie dEgypte et toutes les merveilles de la cration du ciel et de la terre... Par consquent, si vous voulez goter aux dlices de la Torah et la connatre, vous devez vous diminuer, amoindrir votre gosme et vous conduire avec humilit. De mme que leau quitte les hauteurs et saccumule dans les plaines, de mme la Torah ne peut tre retenue que par celui qui est humble et modeste. Nous voyons que Mosh a eu le mrite de donner Isral la Torah, qui dailleurs porte son nom, comme il est crit (Malachy 3:22): Souvenez-vous de la Torah de Mosh, Mon serviteur , uniquement parce quil tait humble, comme la Torah elle-mme en tmoigne (Bamidbar 12:3): Lhomme Mosh tait le plus modeste de tous les hommes... et donc vous aussi - Enfants dIsral- soyez humbles. Celui qui est hautain et orgueilleux non seulement ne peut pas recevoir la Torah, mais risque de renier D. et de se rvolter contre Lui, au point que D. dit: Je ne peux coexister avec un homme orgueilleux (Sotah 5a) et il est dit: lorgueil exclut lhomme du monde (Avot 4:21). Pourquoi vous loigner de D.? Soyez conscients de votre insignifiance, et alors les paroles de la Torah vous combleront. Can a tent de sopposer D. Il tait aussi jaloux et manifesta ltendue de son orgueil lorsquil rpondit avec ddain: Suis-je le gardien de mon frre? Il rpondit avec effronterie quil ntait pas responsable et quil navait aucun devoir envers son frre. Tel est le sens de anochi. Il ne pensait qu lui-mme, gostement. Il a tent de tromper D. (Rashi ad. loc.) au point den arriver blasphmer et se rvolter contre D. et il sest retir comme un trompeur et un menteur (Brshit Rabba 22:13). Le commentateur Zev Wolf explique (ad. loc.): De mme que le cochon se vautre dans la boue et met en avant ses sabots fendus comme pour dire: voyez, je suis pur (car les sabots fendus sont un des signes de lanimal pur), de mme Can sest montr correct et repentant, mais son cur tait plein de fausset. Extrieurement, il parle D. avec droiture et humilit (voir Yeff Toar ad. loc.) proclamant: Mon crime est-il trop grand pour tre pardonn? Toi qui portes les mondes den Haut et den bas, ne peux-Tu pas endurer mon crime? Il a fait comme sil tait vertueux et plein dhumilit et lorsquil dit: Suis-je le gardien de mon frre... il cherchait exprimer de lhumilit, comme sil disait: Qui suis-je, pour ressembler mon frre et veiller sur lui? Mais en ralit, il tait rempli dorgueil, il finit par blasphmer et D. le repoussa. Le sang de ton frre crie vers Moi de la terre (ibid. 10), cest dire: cause de ton orgueil et de ta mchancet, le sang de ton frre Havel pousse vers Moi son cri depuis la terre, car Havel tait modeste comme la terre et la poussire, mais toi tu es orgueilleux, cest pourquoi tu las tu. Il est possible dtendre le sens du mot de la terre , et il faut expliquer lallgorie de nos Sages qui comparent la Torah de leau qui scoule de haut en bas. Pourquoi ne reste-t-elle pas dans les hauteurs, et pourquoi repose-t-elle justement dans les plaines? Cest que si les eaux restaient dans les hauteurs, elles se disperseraient et le monde nen tirerait aucun bienfait. Cest pourquoi elles coulent vers le bas, o elles sont collectes en un seul endroit pour former lacs et rivires, cest--dire justement parce quelles vont vers le bas, elles sont bnfiques et le monde entier peut en jouir. De mme la Torah est retenue par celui qui est modeste, et ce nest que sil est modeste que sa Torah est profitable au monde et que lon peut en tirer plaisir et bnfice. Dans les hauteurs, lhomme devient hautain, et cest pourquoi il est dit: Que ceux qui ont soif aillent vers leau (Ishaya 55:1), une expression qui exprime lhumilit. Allez vers leau, quelle vous serve dexemple et de modle, soyez modestes et cest alors que la Torah subsistera en vous. Cest ce que D. a dit Can: Le sang de ton frre crie vers Moi de la terre - le sang de ton frre, chaque goutte de son sang, crie vers Moi. Pourquoi as-tu tu ton frre, pourquoi son sang crie-t-il de la terre? Parce que tu nas rien voulu apprendre de la terre , de leau qui se trouve dans la terre, dans les plaines, tu nas rien appris de la soumission de leau et de la terre (lhumilit est symbolise par la terre, la cendre et la poussire). Au contraire, tu as agi avec arrogance, et cest pourquoi tu en es venu blasphmer et tuer Havel ton frre. Ce nest que par la qualit de modestie que la Torah se perptue, et cest elle qui nous empche de la transgresser car La crainte de D. est le fruit de lhumilit (Mishley 22:4). De plus, si nous obissons aux lois, aux dcrets et aux commandements de D. avec humilit et soumission, nous pouvons mriter le titre dhomme de D., comme Mosh, qui tait le plus modeste de tous les hommes et qui est appel homme de D. (Dvarim 33:1). D. veuille nous faire mriter ce titre! Amen!

Parachat brchit Tenir parole


Concernant le verset (Brshit 5:1): Ceci est le livre des gnrations de lhomme , les Sages ont dit (Yalkout Shimoni Brshit 41): D. a montr Adam les gnrations successives, leurs penseurs et leurs dirigeants, jusquau roi David auquel ntaient octroyes que trois heures de vie. Adam en fut pein et dit: Matre du Monde, ny a-t-il rien faire pour lui? D. lui dit: Tel est Mon dsir. Adam lui demanda: Combien de temps ai-je vivre? D. Lui dit: Mille ans. Adam reprit: Peut-on faire des cadeaux dans le Ciel? D. lui rpondit: Oui. Alors Adam dit: Que soixante-dix ans de ma vie soient transfrs cette constellation . Adam apporta un contrat o il inscrivit ce cadeau et D., le Chef des Anges et Adam signrent. Adam dit: Matre du monde, la beaut, la royaut et les Psaumes lui sont donns en cadeau et durant les soixantedix ans de sa vie, il chantera Ta gloire . Cest ainsi que Adam donna David la royaut et les Psaumes, comme dit le Midrash (Shohar Tov 1:1): Seul David a le droit dexprimer la gloire de D. par des chants (Bamidbar Rabba 14:24): Adam donna soixante-dix ans de sa vie David . Le livre Shney Louhot HaBrit cite le Midrash HaGadol (Brshit 3:17, page 107): Au moment o Adam fut condamn mourir, D. lui accorda le sursis dun jour de D., cest--dire mille ans, comme il est crit (Thillim 90:4): Mille ans, tes yeux, sont comme la journe dhier . De ces mille ans, Adam donna David soixante-dix ans lorsquil vit quil aurait d mourir la naissance. Et effectivement Adam a vcu neuf cent trente ans comme il est crit (Brshit 5:5): Tout la vie dAdam fut de neuf cent trente ans... Mais lorsquarriva lheure de mourir, Adam regretta sa promesse et voulut lannuler. D. lui dit: Adam! Ne fais pas cela! Ce que tu dclares, tu dois lexcuter prcisment (Dvarim 23:24). Regarde tes descendants, et vois quil en est un qui excutera tout ce quil prononce. Il sagit de Yaakov, comme il est crit (Brshit 28:20): Yaakov fit un vu et il tint sa promesse (voir Brshit Rabba 70:1). Alors Adam tint parole. Ce Midrash est rapport par le Rabbin Elazar de Guermisse dans son livre HaRokach: Lorsque lheure de mourir arriva, Adam nia son engagement et D. lui montra alors le contrat sign de sa propre main . Le roi David y fait allusion lorsquil dit (Thilim 146:3-5): Ne vous fiez pas aux paroles des gens gnreux, les fils de lhomme qui ne sont daucun secours. Lorsque son souffle le quitte il retourne la terre, ce jour-l tous ses projets sont anantis. Heureux celui qui le D. de Yaakov vient en aide . Cest--dire, ne vous fiez pas la gnrosit de celui qui a donn soixante-dix ans de sa vie David, car au moment de mourir ses projets sont anantis et il tenta de se rtracter et dannuler toutes ses promesses. Mais heureux celui qui le D. de Yaakov vient en aide , puisque D. a dit Adam que Yaakov remplirait son vu sans faillir, et cest alors quAdam confirma son vu. Il est certain que ce Midrash veille dans le cur de chacun des questions tonnantes: 1. Au nom du Rabbi Hayim Zeitzik, jai lu la question suivante: Adam a fait une promesse sincre, en connaissance de cause, et de grand cur en donnant un certain temps de sa vie afin de sauver le roi David dont dpend lavenir du peuple juif. Comment peut-il se rtracter au moment de lexcuter, et naccepter de remplir les termes du contrat que sous pression? Est-ce possible? Quest-il arriv Adam, que pensait-il au dbut, et que pensait-il la fin? 2. Comment Adam a-t-il pu affirmer: Je nai jamais dit une telle chose (selon le Midrash cit par HaRokach)? Lacte de donation est crit de sa main et sign par lui, comment peut-il sans hsiter renier sa promesse, ses propres paroles? 3. Que D. dise Adam que David ne vivra pas, est galement tonnant. Si le roi David doit mourir avant terme, de qui natra le Messie qui est, comme on sait, descendant de David (Yroushalmi Brachot II:4)? De qui natra le roi Salomon qui va construire le Temple, comme il est crit (Melachim I, 6:1): Dans la quatrime anne du rgne de Salomon sur Isral... il construisit le Temple de D. ? De plus, D. avait inscrit chaque gnration et ses dirigeants, et naturellement David en faisait partie. Sil mourrait, quen serait-il du peuple juif? 4. Il est difficile de comprendre quAdam ait pu rtracter sa promesse, ce qui aurait priv Isral du Messie et du Temple. Sil se rtractait, le roi David manquerait au monde, ainsi que le livre des Psaumes o il chante la gloire et les louanges de D. (Brachot 7b) et o il prie D. pour que celui qui est plong dans les

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Psaumes soit considr comme quelquun qui est plong dans ltude des lois de purification (Midrash Shohar Tov 1:1). Comment Adam a-t-il pu agir de la sorte? 5. Il faut aussi comprendre pour quelle raison D. a montr Adam chaque gnration, ses penseurs et ses dirigeants. Il est dit (Zohar II 82b) que toute la Torah et ses commandements sont des directives indiquant lhomme comment servir D. et comment vaincre son mauvais penchant qui le pousse tout dabord commettre des petites fautes, et aprs lavoir saisi dans ses filets, lui fait commettre des fautes trs graves, lloigne de D. et le conduit en enfer, comme il est dit (Souca 52a): Le mauvais penchant est tout dabord fin comme le fil dune toile daraigne, et en fin de compte pais comme des cordes de charrue et le mauvais penchant se prsente tout dabord comme un visiteur de passage, et en fin de compte il devient le matre de la maison ou encore (Shabbat 108a, Avot DRabbi Nathan 3:2): Aujourdhui il lui dit fais ceci, le lendemain fais cela, jusqu ce quen fin de compte, il lui fasse commettre tous les pchs . De plus, la Torah enseigne lhomme quil a la responsabilit de veiller sur le monde de D. et Chacun doit se dire que cest pour lui que le monde fut cr (Sanhdrin 37a). Chacun doit sentir que le monde et tout ce quil contient, y compris les animaux domestiques et sauvages et tous les peuples, servent les desseins de D. Par ailleurs, il faut savoir quil y a dans le monde beaucoup dennemis susceptibles de nuire, et mme de tuer. Cest pourquoi il faut tre attentif et sarmer contre les dangers du monde par la connaissance de la Torah qui nous sauve de tout mal, comme disent les Sages (Kidoushin 82a): La Torah prserve lhomme de tout mal . Lhomme doit avoir le sentiment quil a la responsabilit du monde que D. a cr pour lui, dans le sens o il est dit (Avot I:14): Si je ne pense pas moi, qui pensera moi? Cest-dire: qui peut part moi veiller sur mon monde et le prserver? ou alors: Qui me prservera des dangers qui existent dans le monde? Ce nest que grce aux conseils de la Torah et notre propre ingniosit que nous pouvons mener cette lutte avec succs. Cest peut-tre lintention de Rashi (Sanhdrin 37a) lorsquil explique: Cest pour moi que le monde fut cr et je ne vais pas mexclure du monde cause dune transgression . Celui qui dtriore le monde, se dtriore lui-mme et tout ce qui lui appartient. Et D. a donc montr Adam chaque gnration et ses dirigeants, de mme que D. fait savoir chaque homme ce qui lui manque et ce quil doit corriger, sur quoi il doit veiller et de quoi il doit se garder le plus. Les Sages disent (Nidah 30b): Lorsque lme dun lhomme descend dans le monde, elle se voit sermonne: Sois bon, et ne sois pas mchant, sache que D. est pur et Ses serviteurs sont purs, et lme qui test donne est pure, prserve sa puret... car lhomme doit veiller sur son monde. Adam est arriv dans un monde o tout tait encore dans un tat de splendeur et de perfection. Effectivement, D. lui montra toute la cration dans sa perfection car il ny manquait rien. Il lui montra le roi David, sa royaut, son livre des Psaumes, le Temple, et le Messie. Lorsquil vit tout cela, D. lui fit savoir que dornavant toute la cration dpendait de sa conduite. Sil se conduit correctement, il prservera le monde dans son intgrit, alors que sil faute, le monde entier en sera affect. Effectivement, tant que lhomme navait pas faut, la souverainet de D. rgnait dans le monde, mais partir du moment o Adam a faut en mangeant du fruit de larbre de la Connaissance, il a endommag toute la cration et port atteinte toutes les cratures quelle recle. Alors D. lui montra la responsabilit quil avait dans la dtrioration du monde. Il lui montra aussi que cest David qui devait amener le monde sa perfection et restaurer la royaut de D. Si David devait manquer au monde cause dAdam, cause de sa faute, quel dsastre pour le monde et pour toute la cration! Adam ressentit quil devait sauver David, cest pourquoi il a demand spontanment grce, et lui a donn en cadeau soixante-dix ans de sa propre vie afin que le monde se perptue sans dommage supplmentaire. Nous tirons de lattitude dAdam une leon de conduite morale, savoir quil ne faut pas compter sur des miracles en ce qui concerne les questions religieuses et lobservance des commandements, mais quil faut prendre des risques en cas de danger. Celui dont les intentions sont pures est aid du Ciel (Yoma 38b), et il faut prendre linitiative en ce monde afin dveiller laide den Haut (Zohar I 235a). Adam ne sen est pas remis D. pour sauver David, mais il est lui-mme accouru son aide et la sauv en lui donnant en cadeau une partie de sa vie.

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Nous apprenons aussi que si quelquun a besoin dtre sauv et appelle laide, il faut agir immdiatement et accourir son secours, et ne pas se dire que cela ne dpend que de D. De mme en tablissant une institution de Torah, il ne faut pas se dire: cela ne dpend pas de moi , mais la soutenir car sil ny avait pas de Juifs qui contribuaient activement et gnreusement en faveur de la Torah et de son enseignement, elle serait oublie. On raconte de Rabbi Hiya (Ketoubot 103b): combien il a uvr pour que les Juifs noublient pas la Torah . Ce nest que grce au mrite de telles personnalits que nous avons pu apprendre la Torah jusqu ce jour. Vous vous demandez peut-tre: tant donn que les institutions de Torah jouent un rle si bnfique, comment se fait-il quelles exigent tant dargent et tant defforts, tant de souffrances et tant de peines? Pourquoi tant dinstitutions croulent-elles sous les dettes? Pourquoi D. nenvoie-t-Il pas largent ncessaire leur budget et ne dote-t-il pas dun enthousiasme redoubl ceux qui les crent, afin quils russissent dans leurs entreprises, alors quau contraire, malgr leur dvouement ils ne rencontrent que peines et dceptions et D. ne leur vient pas en aide? La rponse dcoule de la question: il faut savoir assumer une responsabilit. Toute chose qui est sanctifie exige efforts et dvouement pour exister! Les ralisations saintes dbutent partir de rien, dans le dnuement. Ainsi en est-il du dsir de relever lhonneur de la Torah, partir de rien! Cest ce que nous apprenons dAdam. D. lui prdit la mort du roi David afin quil prouve de la misricorde et lui donne une partie de sa vie en cadeau, pour le bnfice de toutes les gnrations futures, et pour nous enseigner que la russite de nos entreprises dpend de nos efforts et des sacrifices que nous sommes prts faire. Une action sacre, accomplie gnreusement, se perptue travers le temps et propage bont et justice. Cela nous permet aussi de comprendre pourquoi Adam a regrett son cadeau jusqu le nier et affirmer quil ne lavait jamais fait. Tout dabord, Adam pensait queffectivement il devait faire quelque chose, comme D. le lui avait suggr, et il ressentit lampleur de sa responsabilit au point de donner une part de sa vie David. Mais lorsquil ralisa le pouvoir de la Torah, la grandeur de la rcompense, le bien rserv qui lui consacre tout son temps et ses efforts (Zohar I 88b, 184b), les grandes choses qui lui sont attaches (Avot 6:1), sa capacit de sauver de la servitude de lexil (Zohar II 83b), des dsastres (Tanna DBey Eliyahou 18) et de toutes les souffrances (Brachot 5a), il lui devint difficile de renoncer tout cela. Adam souhaitait reprendre son cadeau, car durant ces soixante-dix ans il pouvait corriger sa faute, slever, pratiquer la Torah qui vaut tous les trsors (Moed Katane 9b) et na pas de prix en ce monde. Il pensait, comme le disent les Sages (Babba Metzya 71a): Entre les pauvres de ta ville et les pauvres de la ville voisine, les pauvres de ta ville ont la priorit et donc, durant ces mmes annes, il aurait priorit sur le roi David, dautant plus que tout dpend de la volont divine (Brachot 33b), et si D. le voulait, Il pouvait lui rendre les annes donnes David. Et donc, D. rvla Adam le vu de Yaakov fuyant devant son frre Essav (Brshit 28:20), pour lui enseigner quune promesse doit tre tenue dans tous les cas. En effet, Yaakov fit ce vu avant de senrichir, et une fois riche, il noublia pas de pratiquer des actes de bienfaisance qui sauvent de la mort (Mishley 10:2), rapprochent la rdemption (Babba Bathra 10a, Tanna DBey Eliyahou Zouta 1), annulent les dcrets, prviennent les dsastres et les empchent daccabler le monde (Vayikra Rabba 27:1). Il aurait pu faire valoir quil navait prononc son vu que par peur dEssav et pour tre sauv de la mchancet de Laban. Mme sil navait pas pris dengagement, D. laurait sauv et protg comme Il le lui dit (Brshit 28:15): Je suis avec toi et Je te protgerai partout o tu iras puisque Yaakov perptue la tradition dAvraham et cest grce lui que le monde est bni. D. aurait pu de Lui-mme le dispenser de son vu de donner le dixime de tous les biens que D. lui accorderait (ibid. 28:22), et lui permettre dutiliser son argent sa guise, sans tre tenu par son vu. Mais Yaakov fut puni pour avoir tard accomplir sa promesse (Brshit Rabba 81:1), afin de lui apprendre que si lon fait une promesse ou un vu, ou si lon donne un cadeau, on doit tenir parole, sans chercher ni prtextes ni excuses, mme valables, pour sen dgager. Yaakov aurait pu faire valoir que D. na aucun besoin de son argent ni dun autel? De mme, Adam sest dit: David a-t-il besoin de mes annes? D. peut tout, y compris accorder David une longue vie.

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Lorsque lhomme entreprend de rserver du temps ltude de la Torah comme il en a lobligation (Shabbat 31a), il ne doit pas se rtracter mais au contraire tenir parole, mme sil ne comprend pas ce quil tudie, que le dcouragement le saisit, et quil est tent de dire: En quoi D. a-t-Il besoin que jtudie, puisque cela mest difficile et que je ne comprends pas? Au contraire! Il doit savoir que D. est content et satisfait de chaque mot de Torah prononc avec amour (Zohar III 85b). Cela nous permet de comprendre le Midrash (cit plus haut par le Rokah) selon lequel Adam sest rtract et pour se justifier, a expliqu quil avait fait ce don David uniquement parce quil ignorait les bienfaits quil pouvait tirer personnellement de ltude de la Torah. Il avait fait ce cadeau par erreur, car sil avait su que une heure de repentir et de bonnes actions dans ce monde vaut plus que la vie ternelle (Avot 4:17), il ny aurait jamais renonc, et il aurait dsir continuer vivre en ce monde afin de corriger sa faute et slever. Du point de vue de D., Adam est un rengat car en fin de compte, il savait que la mort de David dcoulait de sa faute, et ce cadeau lui permettait de corriger le dommage caus par lui, Adam. Cest pourquoi, il avait une obligation toute particulire de mettre excution ses paroles et de tenir sa promesse. Cest pour cette raison aussi que D. fit signer Adam un contrat, en prsence dun tmoin (lange). D. savait quen fin de compte Adam finirait par dcouvrir la valeur de la Torah et limportance des commandements et quil tenterait dannuler sa promesse en demandant D. de lui rendre ses annes. D. lui fit signer un contrat afin de pouvoir plus tard le confronter sa signature et Il cita lexemple de Yaakov qui lui aussi avait agi par ignorance. Sil avait su, il naurait pas fait de vu, et il fut puni pour avoir tard laccomplir. Malgr cela, Yaakov ne sest pas plaint, au contraire il a rempli sa promesse comme la Torah nous commande de le faire (Bamidbar 30:3): Tu excuteras tout ce que tu prononces . Les Sages ont dit (Ndarim 22b): Celui qui fait un vu est semblable celui qui construit un autel en dehors du Temple (ce qui est interdit) et il nest pas bon de prendre des engagements que lon ne peut pas honorer, comme il est dit dans le Talmud (ibid. 9a) propos du verset (Kohlet 5:4): Il vaut mieux ne pas faire de vu que den faire un et de ne pas laccomplir , mais aussi Celui qui accomplit son vu, cest comme sil apportait un sacrifice , ce qui montre que les vux sont des choses sacres et lhomme doit apprendre tre lui-mme tel un autel et un sacrifice agrable D. (et non un sacrifice offert sur un autel interdit). Quel est le droit chemin? Il faut accomplir chaque vu prononc. Si lon a pris la dcision de rserver du temps ltude de la Torah, on ne doit pas se rtracter et mme si lon ne comprend pas encore ce que lon apprend, il faut tout au moins raliser sa promesse (de mme que toute rsolution de faire quelque chose de bien), ce qui satisfait grandement D.

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Noah
Les engendrements des Justes, Leurs bonnes actions et celles de leurs descendants
Il est crit (Brshit 6:9): Telles sont les gnrations de Noah: Noah tait un homme juste et intgre en son temps... Le verset parle des gnrations de Noah. Pourquoi ses enfants ne sont-ils pas mentionns? Et pourquoi le nom de Noah est-il rpt deux fois? Rashi rapportant le commentaire des Sages (Brshit Rabba 30:6) explique que ce verset vient nous enseigner que les engendrements principaux de Noah sont ses bonnes actions. Dans son livre Kol Hamevasser, le Rav Simha Bounim de Parchissa (que son mrite nous protge) crit au sujet de cette rptition: Noah lui aussi sest comport comme sil venait dtre engendr et se considrait comme un enfant qui a encore besoin dtre duqu . Nous tirons de ces deux commentaires que les bonnes actions quotidiennes des justes sont comme les engendrements ininterrompus de chaque instant, une sorte dducation journalire qui les habitue devenir des hommes vertueux et intgres. Noah est appel homme (ich): Lhomme doit toujours se comporter en adulte, et lutter avec courage contre le mauvais penchant, comme il est dit (Avot IV:1, Avot DRabbi Nathan 23:1): Qui est courageux? Celui qui domine son mauvais penchant . Juste (tsadik): tre juste vis--vis des autres autant que de soi-mme. Le mode de vie et la faon de servir D. dun tel homme deviennent un exemple et tous disent de lui: Un tel, voyez combien ses actions sont agrables (Yoma 86a, Tanna DBey Eliyahou Rabba 28) tandis que lui-mme accepte les malheurs qui lui arrivent, car il voit bien quil y a dans le monde des Justes qui souffrent et des mchants qui russissent (Brachot 7a, Zohar II 217b, III 231a). Un tel homme apporte aux autres un grand encouragement car il leur apprend les voies de D. en voyant comment le Juste accepte avec amour tout ce qui lui arrive. Intgre (tamim): Lessentiel et le comble de la perfection, est dtre intgre dans la soumission et la crainte de D. comme il est crit (Dvarim 18:13): Sois intgre avec lEternel ton D. , intgre mme dans les choses caches, prives, celles quaucun homme ne voit. Cest lorsque lon se soumet D. et que lon sannule devant Lui que lon peut atteindre la perfection, selon la traduction en Aramen de la Torah qui transcrit le mot intgre par parfait . Les engendrements essentiels des Justes, comme de tout homme, sont de nature telle quils ressentent chaque jour quil y a quelque chose de nouveau apprendre, et quils doivent se considrer comme un enfant qui a besoin dune ducation complmentaire, incessante, pour servir D. Et donc, tout en progressant chaque jour, ils restent tel un jeune homme ayant encore bien des progrs faire. Se sentir encore loin de la vrit, savoir quil faut servir D. encore mieux, et encore plus courageusement, fait aussi partie des bonnes actions des Justes. Des hommes qui se considrent toujours jeunes ressentent un besoin permanent de gnrer et dapprendre. Les Sages demandent pourquoi il est crit (Brshit 6:9): Noah tait un homme juste et intgre... alors que plus loin (ibid. 7:1) il nest pas mentionn et intgre . Et ils expliquent (Yirouvin 18b, Brshit Rabba 32:4): Cest pour nous enseigner quil ne faut pas prononcer la louange de quelquun en sa prsence, alors quen son absence on peut le faire sans rserve . Il convient de remarquer quen son absence, il est dit explicitement que Noah tait un homme juste et intgre, un homme vaillant qui nimitait pas les agissements de ses contemporains, un homme juste qui pouvait servir dexemple tous. Tout ce quil faisait tait valable aux yeux des hommes et agr par D., il tait entier dans sa soumission et sa dvotion, il veillait au signe de lAlliance et cest pour cela quil est appel tamim, entier, comme D. appela Avraham entier au moment o Il lui ordonna la circoncision. Mais lorsque D. sadresse directement Noah, il lappelle seulement juste, mais non entier. Cest que, tant que lhomme est en vie, il ne peut pas tre sr de lui-mme, comme il est dit (Avot II:4): Ne sois pas sr de toi avant le jour de ta mort , et par consquent, il na pas encore atteint la perfection de la dvotion. D. signifie Noah quil doit continuer Le servir et accomplir de bonnes actions jusqu son dernier jour. Cest alors quil mritera de parvenir la cinquantime porte de la Saintet.

Parachat noah
Concernant les actions de Noah et la construction de larche, les Sages ont dit (Brshit Rabba 32:6, Rashi ibid. 7:7): Noah navait pas une foi solide car il ne croyait pas au dluge jusqu ce que les eaux le poussent et lobligent monter dans larche . D., qui voit tout depuis le dbut jusqu la fin des temps, veut lui faire comprendre quil ne doit pas manquer de foi, quil doit continuer servir D. jusqu la fin de ses jours, et cest pourquoi, en lui parlant, Il ne lui dit pas quil est intgre. Cela nous enseigne quil est interdit de dsesprer, quil faut continuer accomplir de bonnes actions toute sa vie, jusqu parvenir au comble de la perfection possible. Personne ne sait de quoi est fait le lendemain (Mishley 27:1) et par consquent il vaut mieux que lhomme sache quil est imparfait afin quil continue progresser (Thilim 84:8) plutt que de se croire parfait, de devenir paresseux, et den venir dire Adieu mon me (Tanna DBey Eliyahou Zouta 1, Pessikta Zouta Vayetz 29:7). Il est crit (Dvarim 18:13): Sois intgre avec lEternel ton D. . Lhomme doit tre intgre face D., se sentir proche de Lui partout o il va et dans tout ce quil entreprend, afin de mriter le monde venir. Comment parvenir ce but? En tudiant la Torah dans la peine et leffort, comme il est crit (Bamidbar 19:14): Telle est la Torah, lorsquun homme meurt dans la tente... et les Sages dexpliquer (Brachot 63b, Zohar II 158b): Les paroles de la Torah ne sont retenues que par celui qui se sacrifie (qui meurt) pour elles . Limportance de leffort pour apprendre la Torah est longuement expliqu, comme il est crit (Yov 5:7): Lhomme est n pour la peine , et (Mishley 16:26): Celui qui peine, peine pour lui-mme , et (Sanhdrin 99b): Lhomme est n pour apprendre la Torah avec peine , ou encore (ibid.): Il uvre pour la Torah de son ct et la Torah uvre pour lui de son ct . Lorsque lhomme peine pour apprendre la Torah, il mrite dacqurir les cinquante portes de la Saintet, mais condition de continuer faire des efforts jusqu son dernier jour, sans interruption, et daccomplir chaque jour de bonnes actions. Pour parvenir ce niveau nous devons nous sentir comme un jeune homme dpourvu dducation, et alors nous arriverons nos fins, avec laide de D. Nous pouvons prsent comprendre la grandeur de Noah et de ses actions au cours de sa vie. Les Sages disent (Souca 45b): Il ny a pas dans le monde moins de trente-six Justes cachs et ce, dans chaque gnration, comme il est crit (Ishaya 30:18): Heureux ceux qui esprent en Lui. Le mot Lo , en lui , a la valeur numrique de trente-six . Ces trente-six Justes luttent toute leur vie contre leur mauvais penchant, et durant toute leur vie ils servent D. de tout leur cur, de toute leur me et de toutes leurs forces, jusqu ce que D. les dclare Justes et intgres, bien queux-mmes ne le sachent pas, car D. seul sait ce qui est cach, comme il est crit (Dvarim 29:28): Les choses caches appartiennent lEternel notre D. Cest pourquoi il est crit au dbut de cette section de la Torah Telles sont les gnrations de Noah . Le mot l (telles) a aussi la valeur numrique de trente-six, ce qui indique que les engendrements de Noah, ses bonnes actions, faisaient de lui lun des trente-six Justes. La rptition du nom Noah, Noah, indique quil a surpass durant sa vie les trente-six Justes cachs. Si Noah tait lun de ces trente-six Justes, et sil sen tait trouv trente-cinq autres dans sa gnration, le monde naurait pas t dtruit, mais tant donn quil tait le seul, lui seul fut sauv. Certains Sages jugent Noah avec admiration, tandis que dautres le considrent avec mpris (Sanhdrin 108a). Ceux-ci vantent son intgrit, disant que, contrairement ses contemporains qui taient tous des hommes mchants, il tait rest intgre au point dtre appel juste. Si, en son temps, alors que ses contemporains taient tous coupables, il fut considr comme un juste, plus forte raison, sil avait vcu lpoque dAvraham, il laurait surpass, et vu le niveau lev de son me, il aurait mme pu tre dun grand secours pour Avraham. Par contre, les Sages qui jugent Noah dfavorablement ont aussi leurs raisons. Si Noah est compt parmi les trente-six Justes, cela indique quil a servi D. avec des forces exceptionnelles, compar ses contemporains qui fautaient en public et en priv. Mais comment se fait-il que ses bonnes actions et ses paroles naient eu aucune influence sur les gens de son temps? Cest une indication que Noah ne pensait qu lui-mme lorsquil accomplissait de bonnes actions. Et donc lpoque dAvraham il ne se serait en rien distingu des autres, et serait rest un Juste qui nagit que pour lui-mme et non pour le bien dautrui. Lorsquun Juste appartient une gnration de gens mchants et dbauchs, il doit sortir de lanonymat et enseigner la Torah comme la fait Avraham qui a proclam dans le monde lexistence de D. (Sotah 10b,

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Brshit Rabba 39:24). Il ne doit pas rester cach car on mprise celui qui multiplie les engendrements quand il pense accumuler de bonnes actions pour son propre avantage. Mme sil a le mrite dtre Juste par rapport des contemporains mchants, il faute en ne sexposant pas pour venir en aide ceux qui sont dans le besoin et les soulager, mme sils sont fautifs. Sil ne leur enseigne pas la bonne conduite, il ne peut pas les corriger: il doit donc sexposer, ne serait-ce que partiellement. Ceux qui dirigent la multitude dans le droit chemin seront comme les toiles (Daniel 12:3), prfrables aux Justes cachs car celui qui dirige la collectivit bnficie du mrite de tous (Pirkey Avot 5:18) et il ne commet aucune faute (ibid., Yoma 87a). Par contre, ceux qui sont inconnus nont aucune influence sur leurs contemporains. Les Justes qui ne se contentent pas dtre religieux pour eux-mmes et guident les autres dans la voie du bien, sont plus dignes dadmiration, quoique personne ne puisse connatre leur vraie valeur et leur importance aux yeux de D. Seul Celui qui connat le fond des curs et des penses les connat, et si de surcrot, ils corrigent les autres, ils ralisent le but essentiel de leurs engendrements . Cest ce qui est crit: Telles sont les gnrations de Noah , cest--dire les engendrements essentiels de lhomme sont ses bonnes actions . Dune part le service de D. doit tre discret, dautre part, il faut tre agrable aux gens, les secourir, leur venir en aide, et les diriger dans les voies de D., comme il est crit (Micha 6:8): Homme! Sache ce qui est bien et ce que D. exige de toi: pratiquer la justice, aimer la bont, et marcher humblement avec ton D . Les Sages expliquent (Makot 24a): Aimer le bien, cest accomplir de bonnes actions , cest--dire secourir et aider les autres, sans relche. Il est dit dun homme qui se conduit ainsi quil est juste et intgre et alors tous acceptent ses directives. Cest effectivement une telle conduite que D. exige de lhomme. Nous pouvons dire que telle tait la manire dtre de Noah. Au dbut, il eut une certaine influence sur ses contemporains, qui il enseignait la crainte de D. La Torah vante dailleurs ses qualits: Noah tait un homme juste et intgre en son temps , car au dbut il est venu en aide ses contemporains qui avaient constat sa bonne conduite, et tous disaient de lui: Celui-l nous soulagera de nos peines et des efforts de nos mains (Brshit 5:29). Et il est dit (ibid. 6:8): Noah trouva grce aux yeux de D. , il trouva grce parce quil ne servait pas D. seulement incognito, mais enseignait ses contemporains les voies de D. Ils ne lcoutaient pas, mais il sobstinait courageusement, comme Avraham qui convertissait les gens et leur enseignait la connaissance de D. (Brshit 39:21, 84:2), mme sils staient dabord moqus de lui et de ses activits. Pourtant, par la suite, Noah ne continua pas dans cette voie car il craignait dtre corrompu par les mauvaises murs des gens de son temps. A partir de ce moment-l il se mit servir D. uniquement en secret, sans se mler des affaires des autres. Il est crit: Noah marcha dans les voies de D. que certains interprtent favorablement car celui qui vise trop haut ne parvient rien, celui qui vise ce qui est accessible latteint (Rosh HaShana 4b, Torat Kohanim Vayikra 16:25) et Noah voulait se protger, lui et ses enfants. D. lui a signifi quil ntait juste quaux yeux de D. comme il est crit (Brshit 7:1): Car Jai vu que toi tu es juste Mes yeux... mais pas aux yeux de ses contemporains. Il a choisi de ne pas se laisser influencer par eux ce qui est tout son honneur, et il a continu accomplir de bonnes actions et servir D. titre priv. Cest rellement une marque de pit parfaite, dans une gnration de mchants, que de ne pas se laisser entraner par eux. Par contre, ceux qui ne le jugent pas positivement arguent quil a mal agi en sabstenant de servir D. ouvertement et en se cachant, bien quil se soit isol par crainte dtre atteint par leur corruption. Aux yeux de ses contemporains il ntait pas un Juste, ce qui aurait d lui faire comprendre que les gens de sa gnration ne le connaissaient pas, et ctait bien dommage. Tout comme Avraham, qui a combattu sans crainte la gnration de la Tour de Babel, le tyran Nimrod, et mme converti nombre de gens, il aurait d lui aussi agir ouvertement! Noah aurait d sortir de son anonymat car le temps est venu dagir pour lEternel, ils ont transgress Ta loi (Thilim 119:126). Ce ntait pas le moment de servir D. en priv. Il fallait se proccuper du bien de tous, de tout le monde, car personne dautre ne pouvait leur enseigner le service de D. Cest dans un cas pareil que les Sages disent (Pirkey Avot 2:5): L o il ny a pas dhomme, sois, toi, un homme (la premire des qualits attribues Noah: un homme). Sil stait conduit de la sorte, ses enfants lauraient aid, et il aurait surpass Avraham puisquil aurait t paul par ses trois fils, ainsi que par Mtoushelach le Juste...

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Le refus de Noah de rprimander ses contemporains a des consquences. Il est crit (Brshit 6:22): Et Noah excuta soigneusement tout ce que D. lui avait ordonn . Les Sages disent (Brshit Rabba 31:14): Il sagit de la construction de larche que Noah fit conformment aux instructions quil reut, et non selon son ide personnelle et selon sa propre fantaisie. Il est dit quil construisit larche en utilisant la science secrte des Noms Saints, prcisment selon les instructions quil reut (Zohar I 59b-60a et le commentaire HaSoulam). Mais par ailleurs, les Sages disent: Noah na pas voulu monter dans larche car sa foi tait faible (Brshit Rabba 32:6). Est-ce possible? Noah le Juste manquait-il de foi? Cest quil na pas rprimand ses contemporains et na pas ralis que le temps est venu dagir pour lEternel, car ils ont transgress Ta loi . Il na pas pris de risques pour rprimander ses contemporains et les ramener D., et si D. a d le pousser pour quil monte dans larche, cest que sa foi ntait pas sans faille. Cest ce que lui reprochent les commentateurs qui le critiquent. Nous pouvons nous demander comment les commentateurs qui louent Noah expliquent que D. ait d pousser Noah entrer dans larche, ce quil na fait que lorsque leau la atteint, comme il est crit (Brshit 7:7): Et Noah entra.... cause des eaux du dluge. Nous pouvons supposer que Noah voulait monter dans larche au moment o les eaux allaient tomber, afin que tous le voient entrer sans pouvoir len empcher, de faon prouver tous ses contemporains que D. veillait sur lui et que seuls lui et ses fils entraient dans larche parce quils avaient toujours servi D. et suivi Ses voies. Bien que Noah ait souffert de devoir rvler nouveau ses qualits aux yeux de tous, il laurait fait en lhonneur de D. Les Sages disent encore (Brshit Rabba 30:7, Sanhdrin 108b, Pessikta Zouta Noah 6:9): Noah a construit larche pendant cent vingt ans afin que tous le voient et retournent vers D. Pendant tout ce temps, ses contemporains posaient des questions concernant larche quil construisait et Noah leur rpondait que D. allait faire pleuvoir un dluge et les anantir sils ne se repentaient pas . Malgr cela, pendant cent vingt ans, nul ne sest repenti. Lorsquil monta dans larche au grand jour (Brshit 7:13), tous purent se rendre compte que seul celui qui sert D. mrite dentrer dans larche (Brshit Rabba 32:8) et il devient clair que les critures parlent de Noah favorablement. Il est crit (Dvarim 32:7): Souviens-toi des jours anciens, mdite les annales de chaque gnration . Lhomme doit se souvenir toujours de ce qui est arriv au cours de lhistoire ancienne, comme au temps du dluge, de la Tour de Babel, etc. Il est difficile de comprendre cela, car la cration tout entire ne fut cre que pour la Torah qui est appele prmices (Brshit Rabba 1:1) et sans Torah le monde serait ananti comme il est crit (Yrmia 33:25): Si ce ntait pour Mon alliance jour et nuit, Je naurais pas tabli les lois du ciel et de la terre . Sil en est ainsi, la Torah aurait d commencer par des sujets qui la concernent, ensuite Mosh aurait racont brivement lhistoire des premires gnrations. Pourquoi raconter longuement les annales du monde? Il semble que ce soit aussi la question pose par Rabbi Yitshak, rapporte par Rashi dans son premier commentaire (Yalkout Shimoni Shemot 187): La Torah aurait d commencer par Ce mois sera pour vous le premier des mois de lanne (Shemot 12:2). En fait, la rponse de Rabbi Yitshak nous explique clairement le rcit de la gnration du dluge: Cest pour enseigner la puissance de Ses hauts-faits Son peuple (Thilim 111:6). Personne ne peut tudier la Torah sans prparation et sans percevoir la puissance de D., ce qui mne la croyance. La narration des vnements de la vie des anctres pntre les curs et renforce le dsir de lhomme de connatre la Torah, puisque nous tirons des Patriarches de grandes leons dthique, de bonne conduite, et de pit. De mme, nous apprenons combien il est possible de pricliter si nous ne nous laissons pas guider par les valeurs de la Torah, linstar de la gnration du dluge et de la tour de Babel. Le peuple juif nest sorti dEgypte quaprs avoir vu la puissance de D., et cru en Lui et en Mosh, comme les critures en tmoignent (Shemot 14:31). La Torah commence par le rcit de la cration et du dluge etc. afin den arriver au don de la Torah. Effectivement, lhomme ne parviendra tudier la Torah que sil est motiv par la recherche de la vrit, et sil croit en D. Sans cela, il ne pourra apprcier les douceurs de la Torah. Mais sil connat D., Crateur du monde, il parviendra goter et voir combien D. est bon (Thilim 34:9).

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Pahad David L'influence du Juste en ce monde et dans l'autre

Il est crit (Brshit 6:9): Tels sont les descendants de Noah, Noah tait un homme juste et intgre son poque, Noah marchait dans les voies de D. . Rashi crit ce sujet au nom des Sages (Sanhdrin 108a): A son poque , pour certains de nos rabbins cest un loge, car sil tait vertueux son poque, plus forte raison, en une gnration dhommes vertueux, il aurait t vertueux. Pour dautres cest un reproche, il tait juste en comparaison de ses contemporains, mais sil avait vcu au temps dAvraham, il ne se serait en rien distingu . Rapportons, en introduction, ce que Rabbi Hiya Bar Ashy dit: Les hommes vertueux nont de repos ni en ce monde ni dans lautre, comme il est dit (Thilim 84:8): Ils vont avec des forces toujours croissantes, pour paratre devant D. Sion (Brachot 64a). Le Gaon de Vilna crit ce sujet, quen ce monde, il est dit de lhomme quil va , car il avance sans cesse et progresse dans la connaissance de la Torah et la pratique des commandements et des bonnes actions, mais dans lautre monde il est dit de lhomme quil se tient debout car dans lautre monde il na plus dobligations. Cest ce qui est crit (Zacharia 3:7): Je te ferai un chemin parmi ceux qui sont debout . Dans le monde venir tous restent stables - comme des anges - et ce nest que dans ce monde que nous avons la possibilit de nous lever. Cest pourquoi il est dit des anges quils se tiennent debout (cest dire: stables) et des hommes quils marchent , car ils doivent toujours tre en mouvement. Il est possible dajouter: Lorsque lon se spare dun mort, on dit va b shalom, en paix et lorsque lon se spare dun vivant, on lui dit va l shalom, vers la paix (Brachot 64a). Cest que la lettre beth reprsente un tat statique et permanent, ce qui est le cas de quelquun qui est mort, tandis que la lettre lamed reprsente le mouvement, lactivit... Pourtant, il est dit dun certain nombre de Justes quils sont en marche mme dans lautre monde, parce que l aussi ils continuent progresser, et les Sages disent deux que mme dans le monde Venir ils nont pas de repos , et continuent slever dans le service de D. Nous voyons donc quil y a deux types dhumains. Ceux qui, arrivs dans le monde den-Haut, restent immobiles, et ceux qui continuent progresser. Quelle est la diffrence entre un homme qui a observ la Torah, obi aux commandements et accompli de bonnes actions en ce monde et qui, dans lautre monde ne progresse plus, et le Juste qui en a fait de mme et continue progresser dans lautre monde? Il est des hommes pieux qui tudient et observent les commandements de la Torah, mais qui malheureusement nuvrent que pour eux-mmes et ne tiennent pas compte des autres. Ils ne transmettent aucun enseignement aux autres, ne prient pas pour eux, ne sinquitent pas du sort ou du moral de leurs prochains, ne corrigent pas leur conduite... Certes, de telles personnes nont pas, elles-mmes de repos en ce monde, mais elles progressent sans tre dranges par les besoins des autres auxquels elles ne viennent pas en aide, et elles restent enfermes dans leurs quatre coudes . Durant toute leur vie en ce monde, ces hommes-l ont progress, mais lorsquils quittent ce monde pour lautre, ils restent au niveau auquel ils sont parvenus au moment o ils lont quitt. Dans lautre monde ils ne peuvent plus agir, comme il est crit (Thilim 88: 6): Libre parmi les morts... ce qui signifie que la mort libre de toute obligation (Shabbat 30a, 151b, Nidah 61b). De ces Justes il est dit quils trouvent la paix dans le monde Venir, o ils nont plus defforts fournir et se maintiennent au niveau o ils sont parvenus. Par contre, il est une autre catgorie dhommes vertueux qui, bien sr, soccupent dtudier la Torah et de pratiquer les commandements, qui eux aussi ont la crainte de D., mais qui possdent la qualit supplmentaire de venir en aide autrui, de les encourager et de les ramener D. Outre leur pit individuelle, ils se mettent au service des autres, et leur rcompense est grande. Bien quils naient pas de repos en ce monde, occups quils sont subvenir aux besoins des autres avec joie, ils sont heureux de secourir les autres, de les diriger dans la bonne voie, de leur enseigner la Torah, et sont rcompenss en voyant le fruit de leurs efforts. Puisque D. ne prive aucune crature de sa rcompense (Babba Kamma 38b, Nazir 23b, Pessahim 118a) et quIl rtribue chacun mesure pour mesure, leur joie et leur rcompense est double dans le monde

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Venir o ils continuent slever et se soucier du sort des Juifs qui restent en vie. Cest ce qui est dit (Brachot 18a, Kohlet Rabba 9:4): Les Justes, mme morts, sont appels vivants . Noah en est un exemple. Comme nous lavons dit plus haut, certains Sages le jugent dfavorablement, bien que la Torah tmoigne du fait quil tait un homme juste et intgre son poque (Brshit 6:9). Pourquoi interprter cela ngativement? Cest que, la fin de la section, il est dit de Noah tout simplement quil tait un homme de la terre (Brshit 9:20). Pourquoi? Parce quil ne se souciait que de se sauver lui-mme sans se proccuper des autres. Son nom mme, Noah, indique le repos (menouha). Noah se souciait de lui-mme, ce qui ntait pas le cas dAvraham qui ne pensait pas seulement lui-mme, mais venait aussi en aide aux autres pour leur enseigner la crainte de D. Il est crit (Brshit 12:5): les mes quils avaient acquises (littralement: faites ) Haran , et les Sages expliquent (Brshit Rabba 39:14): Avraham convertissait les hommes et Sarah les femmes, et la Torah les considre comme les ayant eux-mmes crs . Il est possible que ce soit la raison pour laquelle il est crit Noah marchait dans les voies de D. car il nallait quavec D. dans lobservance des commandements, sans se soucier dautrui. De quoi soccupent les Justes dans lautre monde? demandent les Sages (Zohar I 183a, III 159b, 160a). Et ils rpondent: Dans lautre monde, ils soccupent des mmes choses qui les occupaient en ce monde , savoir, sils ne se sont occups en ce monde que de Torah, ils continueront dtudier la Torah dans lautre monde, mais si en ce monde, outre ltude de la Torah, ils ont aussi aid les autres, pri pour eux et quils ont eu une influence favorable et bnfique sur leurs contemporains, dans le monde venir aussi ils poursuivront dans cette voie. Cest pourquoi les justes nont de repos ni en ce monde ni dans lautre (voir Maharsha, Brachot 64a). Dans lautre monde, ils sont assis et jouissent de la splendeur divine (Brachot 17a, Avot DRabbi Nathan 1:8), et si nous faisons appel leur mrite dans nos prires, nous drangeons leur repos. De plus, nous les attachons au monde matriel, ce qui les drange normment. Il leur est extrmement difficile dmerger de leur repos, l-haut, pour prendre en considration les proccupations de ce bas monde et prier pour nous. Mais malgr tout, lorsque nous leur exposons les problmes du monde matriel, ils se souviennent que, eux aussi, en ont fait partie, ils se rappellent combien il est difficile dy vivre, et alors ils prient pour nous afin de nous octroyer abondance de bndictions et russite. Cela explique pourquoi beaucoup dhommes vertueux promettent, de leur vivant, tous ceux qui les approchent, que sils font appel eux aprs leur mort, ils leur rpondront. Ils sy engagent de leur vivant, car ils savent combien il leur sera difficile de rpondre de telles demandes quand ils seront dans lautre monde, et ils prennent ds maintenant lengagement de se souvenir de leur promesse, engagement quils tiendront sans aucun doute. Il est des hommes qui ne sont pas montrs vertueux ni reconnus comme tels de leur vivant, plus forte raison aprs leur mort. Par contre, dautres ont acquis une rputation universelle, et mme plusieurs centaines dannes aprs leur mort, tous connaissent leurs uvres et le lieu de leur spulture. Ceux dont on se souvient aprs leur mort sont ceux qui ont marqu leur poque. Certains dentre eux ont mme promis dintercder en faveur de ceux qui feraient appel eux, cest pourquoi le mrite des autres leur est attribu (Avot 5:18). Leur renomme nest pas oublie aprs leur mort et ils peuvent venir en aide aux Juifs comme de leur vivant, et cest pourquoi ils ne connaissent pas de repos, mme aprs leur mort. Rabbi Shimon Bar Yocha a protg toute sa gnration de son vivant, au point quil a pu dire (Souca 45b): Jaurais pu pargner au monde entier les catastrophes et il est dit de lui (Brshit Rabba 35:2, Midrash Thilim 36:8, Zohar III 15a) que de son vivant il ny eut pas darc-en-ciel . Aprs sa mort il a continu protger le monde et jusqu ce jour son nom est vnr par tous. Il en est de mme de Rabbi Nahman de Breslev, que son mrite nous protge. Jai entendu dire que lAncien Rabbi de Loubavitch, de son vivant, ressentait le problme personnel de chacun, et sil en tait ainsi de son vivant, que dire aprs sa mort. Ce nest donc pas sans raison que, jusqu ce jour, le Rabbi de Loubavitch lit les demandes et les lettres quil reoit, sur la tombe de son grand-pre, afin de bnficier de son mrite. De mme, il est dit de mon pre et matre, le saint Rabbi Hayim Pinto, que son mrite nous protge, quil avait promis, avant de mourir, que quiconque se recueillerait sur sa tombe le jour anniversaire de sa mort, le vingt-six du mois de Elloul, serait jug avec bienveillance le jour du Nouvel An.

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Pourtant tous les hommes qui ont, durant leur vie, observ la Torah en esprant pouvoir jouir ternellement de la Splendeur divine, ne connaissent pas la clbrit aprs leur mort. Cela ne signifie pas que les Justes qui sont rests inconnus naient pas aid les autres, mais plutt que leurs contemporains taient incapables de reconnatre le degr de saintet de leur me, et cest pourquoi ils sont rests inconnus. Il est donc naturel que certains se trompent et pensent que les hommes clbres pour leur pit ne mritent pas les honneurs quils reoivent, ou quils sont parvenus leur position sans efforts et sans peines. Ce nest pas vrai! Ces hommes vertueux ont beaucoup souffert avant dtre connus, ils ont pein jour et nuit avant de devenir ce Juste dont D. excute le dcret (voir Shabbat 59b) car rien ne sobtient sans effort et sans peine, encore moins la crainte de D., de laquelle il est dit (Brachot 33b, Zohar I 59a): Tout est entre les mains de D., sauf la crainte de D. . Il est certain quils ont beaucoup travaill avant de gagner leur statut. Sans aucun doute, le Juste continue uvrer pour son peuple aprs sa mort, et il gravit des chelons grce ceux qui le suivent et qui accroissent son mrite. Dans nos prires, nous rappelons les Patriarches, et D. agre nos prires grce leur mrite, comme il est crit (Vayikra 26:42): Et Je Me souviendrai de Mon alliance avec Yaakov, et aussi de Mon alliance avec Yitshak ...

De limportance du soutien spirituel autrui


Il est crit (Brshit 6:22): Et Noah excuta ponctuellement tout ce que D. lui avait ordonn . Rashi (ad. loc.) explique quil sagit de la construction de larche (voir Sanhdrin 108a). Le Rabbin Simha Zissel de Klame, dans son livre HaMoussar VHaDaat, crit: la Torah tmoigne que Noah a construit larche dans le seul but dobir au commandement de D. et son intention ntait pas de se sauver ainsi que sa famille . Ce livre donne une explication de bon got: Il faut sefforcer dapprofondir la pit de Noah. Pendant cent vingt ans, Noah est occup construire larche (Brshit Rabba 30:7) et pendant tout ce temps il rprimande ses contemporains et les conjure dabandonner leur mauvaise conduite afin dviter le dluge. Mais ses contemporains, non seulement nont pas voulu lcouter et ont refus de se repentir, mais ils se sont moqus de lui le menaant de dtruire larche quil construisait, comme dit le Midrash (Brshit Rabba 32:8): Comme Noah sapprtait entrer dans larche, ils voulurent dtruire larche et la renverser, mais D. la protg en plaant tout autour des ours, des lions et des tigres afin de les empcher de sapprocher, comme il est crit: D. ferma sur Noah la porte de larche (Brshit 7:16). Noah, malgr tout, ne sest pas laiss dcourager et a persvr dans son entreprise pendant cent vingt ans, afin dobir au commandement de D. (voir Kidoushin 33a), bien quil ft clair pour lui que tous ses efforts taient vains et que personne ne prenait cur de revenir vers D. . Effectivement, il faut se demander pourquoi les contemporains de Noah ne le prenaient pas au srieux et ne se sont pas repentis, alors quils savaient que Noah tait un homme pieux et que ce quil disait tait vrai. Cest parce que ses contemporains nont pas vu la ncessit de prendre au srieux la menace du dluge qui allait peut-tre tout anantir la surface de la terre, car cela les aurait obligs tenter quelque chose pour sauver leur vie. De plus, lide dtre enferms dans larche avec Noah et sa famille, plus forte raison avec des animaux de toutes sortes, leur dplaisait, car - pensaient-ils - mieux valait perdre une telle planche de salut que de sentasser dans un refuge aussi troit. Ces bons vivants ne doutaient pas un seul instant que le monde allait poursuivre son cours habituel et leur procurer les plaisirs quils convoitaient, car sinon, se disaient-ils, pourquoi vivons-nous? poursuit lauteur de HaMoussar VHaDaat. Cela nous permet de comprendre pourquoi le dluge eut lieu, et quelle fut la diffrence entre Noah le pieux et ses contemporains impies. Noah un homme juste et intgre comme en tmoigne la Torah (ibid. 6:9), ne connaissait et ne reconnaissait que la volont du Crateur. Il dsirait obtenir par la construction de larche le bien de tous et le repentir des hommes de son temps. Alors quils ne le prenaient pas au srieux et se moquaient de lui, il a pris des risques et il a continu la construction de larche afin dobir D. Peut-tre cela sauverait-il ses contemporains du dluge? Eux, de leur ct, navaient quune seule ide et un seul but, jouir des plaisirs de ce monde, et ils commettaient sans frein toutes les transgressions les plus graves. Les Sages numrent leurs crimes: ils prtendaient quil ny avait pas de justice divine, que D.

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avait abandonn le monde (Avot DRabbi Nathan 32:3), mme les btes sauvages, les oiseaux, et les animaux domestiques avaient perverti leurs voies (Pessikta Zouta, Rashi Brshit 6:12, Sanhdrin 108a), ils se promenaient nus dans les rues (Tanna DBey Eliyahou Rabba 31, Zouta 10), ils accouplaient des animaux domestiques avec des animaux sauvages, et lhomme avec toutes les btes et toutes les btes avec lhomme (Sanhdrin 108a), toute chair stait pervertie, mme les btes sauvages, les animaux domestiques et les oiseaux saccouplaient les uns avec les autres (Pessikta Zouta, Rashi, Sanhdrin 108a), tous dispersaient leur semence (Kala 2), ils connurent toutes les perversions et leur sentence fut scelle lorsquils commirent des larcins (Sanhdrin 108a), cest parce quils taient dbauchs quils furent anantis par leau (Vayikra 12:4). Ils ont prfr prendre le risque de mourir noys, plutt que dhabiter dans larche avec Noah, sa famille et tous les animaux. Ils ne voulaient pas se joindre lui, car ils savaient quil les obligerait se repentir ce quils refusaient de faire, et ils ont prfr perdre la vie plutt que de vivre ltroit, sous le mme toit que Noah le Juste. Il est difficile de comprendre comment ils ont pu prfrer risquer leur vie sans crainte des eaux du dluge, uniquement pour les jouissances de ce monde. Pourquoi, en fait, refusaient-ils linfluence bnfique des vertus de Noah? Il est certain quils avaient de mauvaises penses. Ils savaient que parfois des gens pervers russissent et des gens honntes souffrent (Brachot 7a). Lorsquun homme mauvais russit, il nimagine pas que le jour viendra o il sera puni de ses fautes et que sa fin sera amre; il pense quil pourra chapper tout et que si un malheur quelconque devait frapper le monde, il sera, lui, pargn. Cest pourquoi le mchant prend des risques et attire lui le flau, sans se rendre compte de la ralit de la menace. Celui qui cherche jouir de tous les plaisirs de ce monde ne peut pas y renoncer, et mme si un homme sage lui explique la gravit de la punition quil encourt pour ses fautes et le risque du jugement, cela ne le pousse pas pour autant changer. Naturellement, tout dabord il coute, il entend, il soupire, mais aprs il oublie toutes les remontrances, car il ne pense pas quelles sadressent lui et quil soit vis par toutes ces menaces de malheur. Dans son cur, il suscite beaucoup de doutes afin de ne pas prendre les avertissements au srieux. Bien des gens ne dsirent pas entendre les remontrances et les sermons pour ne pas renoncer leurs jouissances. Ils se justifient en disant: Il vaut mieux ne pas couter les reproches, ne pas savoir, car il vaut mieux tre de ceux qui transgressent par inadvertance plutt quintentionnellement (Shabbat 148b). Mais ils commettent une grave erreur car le fait mme de savoir qucouter les sermons et les remontrances adresss par les Rabbins comporte une obligation et la nier reprsente une transgression volontaire et non involontaire, puisquils ferment rsolument les oreilles toute leon. La gnration du dluge sest rendue coupable davoir refus dcouter les remontrances de Noah et de stre loigne de lui, parce quelle navait nulle intention de se repentir, ni de vivre avec un homme vertueux et de subir ses reproches et ses discours. De plus, ses contemporains pensaient que leur dignit ne leur permettait pas de vivre en compagnie danimaux de toutes sortes. Ils considraient Noah au mme titre que les animaux et ils ne voulaient pas laider construire larche. Sils avaient aid Noah construire larche, il aurait critiqu leurs fautes et leurs agissements pernicieux. Cest pourquoi ils firent en sorte de ne pas savoir, ils vitaient dapprocher larche, afin de se faire passer pour des fauteurs par ignorance . Ils se moquaient de Noah, et tentrent de le tuer pour ne pas entendre ses critiques et pouvoir poursuivre leurs agissements comme sils ignoraient leur perversit, pensant ainsi pouvoir viter la punition. Mais en fait, D. qui examine les penses et les curs, savait bien que leurs fautes taient prmdites et Il les condamna mourir noys dans leau bouillante (Zevahim 113b), sans bnfice de circonstances attnuantes. Ils avaient joui dun temps de sursis pendant lequel ils avaient eu la possibilit de se repentir sils lavaient voulu (Bamidbar Rabba 14:17). Comme ils ne lont pas fait, D. les a punis pour leurs crimes, dans le sens o les Sages disent (Avot IV:13): Une faute involontaire [due une comprhension errone] de la loi est considre comme une faute volontaire . Ils pensaient pouvoir prtexter quils ignoraient la loi, mais leur crimes taient conscients et ils furent jugs par D. en consquence. La grandeur de la pit de Noah, daprs ce que dit le Rabbin Simha Zissel, est davoir construit larche uniquement pour obir lordre de D. et non pas pour se sauver, ainsi que sa famille, et pourtant, les Sages taient diviss quant ses qualits relles (Brshit Rabba 30:9). Selon lopinion de ceux qui vantent les

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vertus de Noah, nous comprenons que sil tait vertueux son poque, il va sans dire quil laurait t sil avait vcu parmi des gens vertueux, et nous comprenons quil nobissait en toute chose quaux ordres de D. Mais comment peut-on dire que Noah nobissait dans tout ce quil faisait quaux ordres de D. selon lopinion de ceux qui jugent Noah dfavorablement, allguant quau temps dAvraham il ne se serait en rien distingu des autres? Ne sest-il pas mis en danger et na-t-il pas pris des risques rels pour accomplir ce que D. lui a ordonn? Pourquoi ne se serait-il pas distingu au temps dAvraham, puisque Avraham na risqu que sa propre vie dans la fournaise (Brshit Rabba 38:13), tandis que Noah a risqu sa vie et la vie des siens. Est-ce vraiment peu de chose? De plus, ses contemporains refusaient dentrer avec lui dans larche car ils ne voulaient pas vivre sous le mme toit que lui, en compagnie de tous ces animaux, et ils considraient Noah comme une sorte de bte des champs ou doiseau sauvage. Mais nous qui connaissons ses qualits et ses vertus, pouvons-nous dire que sil avait vcu au temps dAvraham il ne se serait en rien distingu? Pourquoi ce jugement dfavorable? Celui qui juge Noah dfavorablement connat ses qualits et nignore certainement pas ses vertus. Mais il pense quil y avait en Noah une faille. D. dit Noah: Jai dcrt la fin de toutes les cratures... je vais les liminer de la terre... fais-toi une arche de bois de gfer... (Brshit 6:13-14) et: Voici, Je vais amener sur la terre un dluge deau qui va dtruire toute chair... tout ce qui est sur terre prira... tu entreras dans larche, toi et tes fils, ta femme et les femmes de tes fils... (ibid. 17-18), et cest alors que Noah construisit larche afin dobir la volont de D. Peut-tre aurait-il d prendre linitiative de construire une arche pour ses contemporains, lorsque D. lui fit entendre quils taient coupables de grands pchs. Peut-tre aurait-il d construire une arche pour eux dans le cas o ils se repentiraient la dernire minute. Non seulement larche quil construisit neut aucune influence bnfique sur ses contemporains, mais elle navait pas pour but de les sauver dans le cas o ils samenderaient et reviendraient D. En fait, Noah lavait construite pour se sauver lui et sa famille, et non pour sauver les autres. Bien que Noah ait fait larche afin dobir lordre de D. comme il est crit (Brshit 6:22): Et Noah excuta ponctuellement tout ce que D. lui ordonna de faire , il ne la pas construite dans le but de sauver ceux qui se seraient repentis, et cest ce qui lui est reproch. A lpoque dAvraham il existait des hommes de bien, et cest eux quAvraham montrait le droit chemin. Si Noah avait vcu au temps dAvraham, il ne se serait en rien distingu des autres car il na agi en rien pour ses contemporains, mais seulement pour lui-mme et sa famille. De plus, ceux qui le critiquent pensent quen fait Noah ne dsirait pas que les hommes reviennent D. Sil lavait voulu, il aurait demand D. la permission de construire de nombreuses arches afin de sauver beaucoup de gens quil aurait ramens D. Peut-tre que sil lavait fait, certains lauraient cout et se seraient repentis, mais du fait quil na construit quune seule arche, pour lui-mme, ils lont pris pour un fou qui leur adressait des propos insenss. Car en fait, comment tout le monde aurait-il pu entrer dans une arche aussi petite? Cest pourquoi ils ne lont pas cru et ne se sont pas repentis. Et cest pourquoi il est jug svrement. De l, nous apprenons que la rprimande exprime de tout cur, avec des arguments acceptables, pntre les curs. Il est possible que Noah ait pens que si tous se repentaient, il ny aurait pas de dluge et donc pas besoin darches... Quelle est la diffrence entre Noah et Avraham, et entre la gnration de Noah et celle dAvraham? En quoi sexprime la diffrence entre ceux qui jugent Noah favorablement, et ceux qui le jugent svrement? Les Sages disent (Brshit Rabba 30:11): Noah marchait dans les voies de D. (Brshit 6:9) mais propos dAvraham il est crit (ibid.24:40) LEternel, dont jai toujours suivi les voies . Noah avait besoin daide, de soutien, alors quAvraham persvrait et progressait de lui-mme dans la voie de la vertu. Ceux qui critiquent Noah considrent quAvraham est plus grand que lui, car il fut le seul au monde a avoir reconnu D. ds lge de trois ans (Brshit Rabba 30:8). Il tait le seul avoir foi en D. et Le servir de sa propre initiative, sans encouragement ni de la part de D. ni de la part dun matre. Mais Noah na pas servi D. de lui-mme. Il vivait une poque pervertie et il risquait de fauter comme ses contemporains. Il avait besoin de laide de D. Tel est le sens de Noah marchait dans les voies de D. Le nom Elokim se rfre

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lattribut de Justice (tandis que pour Avraham, il est dit HaShem , LEternel , nom qui reprsente lattribut de Misricorde). Mais ceux qui jugent Noah favorablement pourraient rtorquer: il est vrai que Noah avait besoin de soutien, mais il a servi D. en surmontant tous les obstacles qui se trouvaient sur son chemin. Ses contemporains taient plus pervers que les gens de lpoque dAvraham, qui lui aussi tait seul contre tous. Il est donc certain que la Torah le loue en disant de lui quil marchait dans les voies de D. Il a surmont tous les dangers et il a persvr dans sa pit et ses vertus. Si, parmi des gens pervers, il sest comport vertueusement, plus forte raison, en dautres temps, il aurait t encore plus grand. Nous tirons de l une leon qui sadresse tout le monde. Il faut aider moralement son prochain, propager la connaissance de D., et il va sans dire quil ne faut pas imiter les mauvaises actions de nos contemporains. En dpit des souffrances, des dcrets et des douleurs, il faut suivre les voies de D. (Dvarim 13: 5), Le servir avec amour, Le servir avec crainte (Sifri Vaethanan 6:5), cest--dire accepter toutes les souffrances avec amour. Comme Noah, de qui les commentateurs crivent (voir Mey Noah sur la Torah): A son poque (littralement: dans ses gnrations au pluriel) signifie: durant beaucoup de gnrations, car Noah a vcu longtemps et toutes les gnrations quil a vues passer taient constitues de gens mchants et pervertis, mais il ne sest pas laiss influencer par leurs murs, parce quil marchait dans les voies de D..

Du devoir dexcuter les commandements de faon dsintresse


Il faut tudier la Torah mme dans un but intress, car, ce faisant, on en viendra ltudier de faon dsintresse (Pessahim 50b, Zohar III 85b). Le but principal est dtudier la Torah pour elle-mme et dobir aux commandements en tant que tels, tel point que dans la bndiction qui prcde ltude quotidienne de la Torah, nous formulons le souhait (Alfassi, Brachot 11b): afin que nous connaissions Ton Nom et que nous tudions la Torah pour elle-mme . Les Sages disent (Sanhdrin 108b): Elizer, serviteur dAvraham, demanda Shem, fils de Noah: Comment avez-vous t sauvs du dluge? Par quel mrite? Et Shem lui rpondit: Cest par le mrite de nos bons soins envers les animaux qui taient dans larche et que nous devions nourrir. Nous tions affairs leurs besoins jour et nuit, car il est des animaux qui mangent le jour et dorment la nuit, et il en est qui mangent la nuit et dorment le jour. Il arriva mme que le lion frappe et morde mon pre Noah parce quil avait tard lui apporter sa ration (voir Brshit Rabba 30:6). 1. Le Meyl Tzedaka demande comment il est possible de dire quils furent sauvs pour avoir pris soin des animaux. La Torah prcise clairement que D. dit Noah (Brshit 7:1): Jai vu que tu es juste Mes yeux en cette poque , cest dire quils furent sauvs parce quils taient des hommes vertueux. Pourquoi Elizer demande-t-il quel mrite les a sauvs? Ignorait-il quils taient vertueux? 2. Il faut analyser la rponse de Shem. Est-ce vraiment pour avoir pris soin des animaux quils furent sauvs? Ils ont pourtant nourri les animaux pour leur propre bnfice, afin davoir eux-mmes de la viande aprs le dluge, et de quelle charit ont-ils donc fait montre? Si le verset dit quils furent sauvs en raison de leur pit, pourquoi Shem na-t-il pas rpondu dans ce sens Elizer,et dit que ctait pour stre occups des animaux? Noah et ses fils craignaient den tirer de lorgueil et de se considrer eux-mmes comme vertueux, faute impardonnable (Brachot 4a, Pessikta Zouta 32:8) dont ils seraient punis. Cest ce qui explique aussi pourquoi Noah nest pas entr dans larche jusqu ce que les eaux montent et que D. ly pousse (Brshit Rabba 32:5). Il ne pensait pas quil mritait de vivre alors que les autres allaient mourir. Noah et ses fils ont vit destimer que cest grce leur propre mrite quils furent sauvs. Cela explique le soin quils ont pris des animaux. Noah et ses fils ne pensaient pas soccuper des animaux afin davoir eux-mmes de quoi manger aprs le dluge. Ils se sont gards dune telle pense, attribuant leur survie aux soins donns aux animaux, afin quon ne puisse pas dire que leurs efforts taient intresss. Ils nont fait quobir lordre de D. qui effectivement leur a demand de faire des provisions de nourriture pour les animaux, comme il est crit (Brshit 6:21): Et toi, prends toutes les nourritures comestibles... , des nourritures de toutes sortes, pour subvenir aux besoins de chaque animal (Tanhouma 58:2). Ils nont fait que remplir leur devoir en soccupant avec tant de soin des animaux. En fin de compte, cela les a sauvs

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du dluge. Le lion est la preuve quils agissaient conformment au commandement de D., car la viande du lion nest pas comestible, et Noah a continu le nourrir mme aprs avoir t mordu, ce qui montre quils agissaient de faon dsintresse. Nous pouvons trouver une autre raison. A ce moment-l, la Justice divine planait sur le monde, luvre de Ses mains est en train de se noyer (Mguila 10b, Sanhdrin 39b) et la parole est lAccusateur. Cest pourquoi, pour quil ne puisse pas plaider quil ny a aucune raison de les sauver alors que le monde entier est dtruit, ils taient occups faire de bonnes actions qui sauvent de la mort (Tanna DBey Eliyahou Zouta 1) comme il est crit (Mishley 10:2): La charit (tzedaka) sauve de la mort et ils ont annul leur volont devant la volont divine. Cest que lAccusateur les dsignait du doigt et demandait justice: Pourquoi nont-ils pas rprimand leurs contemporains? Pourquoi vivraient-ils, alors que les autres allaient mourir? Ils ont plac en premier lieu lintrt des btes et des animaux - grce auxquels ils furent sauvs - ont renonc leur propre confort pour remplir la tche confie par D., ils se sont occups des animaux purs et impurs avec le mme dvouement, et cest pourquoi ils furent sauvs du dluge. Cest la question quElizer, serviteur dAvraham, pose Shem: Quel mrite a russi vous sauver du dluge? Les cratures de D. prissent, et vous navez pas rprimand vos contemporains de manire quils se repentent et soient sauvs (voir Sanhdrin 108b). Et si vous croyez que vous avez t pargns parce que vous tes vertueux, cest que votre orgueil vous induit en erreur! Peut-tre avez-vous pris soin des animaux afin de pouvoir profiter de leur chair aprs le dluge? Vous navez agi que dans votre propre intrt! A cela, Shem le fils de Noah, rpond quils neurent aucune pense de ce genre et aucune intention de profiter personnellement de la viande des animaux. La stricte Justice non plus navait pas de griefs contre eux, car tout ce quils avaient fait pour les btes et les animaux tait dsintress, et la preuve en est que nous avons continu nourrir le lion aprs quil a mordu mon pre . Nous tirons de l une leon de conduite valable pour tous. Lorsquon obit la volont de D., il convient de le faire sans autre motivation, comme il est dit (Avot 2:4): Fais que ta volont soit conforme Sa volont , uniquement parce que D. lordonne. Si D. affirme quun homme est vertueux, il ne doit pas senorgueillir, car D. hait les orgueilleux (Mishley 16:5) et D. ne peut pas cohabiter avec lorgueilleux dans le mme monde (Sotah 5a). Il faut se soumettre D. avec humilit, et sentir que lon nest pas digne dtre appel vertueux, que lon nest pas vertueux. Sinon, le mauvais penchant nous chuchotera loreille comme tu es vertueux! jusqu nous faire perdre tout le bnfice acquis. Cest ce qui est crit (Brshit 6:22): Noah fit tout ce que D. lui ordonna , il sagit de la construction de larche (Brshit Rabba 31:14), ou encore et Noah excuta tout ce que D. lui avait ordonn (ibid. 7: 5), il sagit de son entre dans larche (Rashi ad. loc.). Mme sil ne mritait pas dtre sauv pour ses qualits, il le mritait pour le soin apport aux animaux de larche. Il construisit larche et en fin de compte, y entra, comme D. le lui avait ordonn! Sans orgueil, uniquement pour obir avec exactitude D.

La paix, rceptacle de toutes les bndictions


Dans les commentaires nous trouvons que deux gnrations ont gravement faut, et furent punies en consquence, la gnration du dluge et la gnration de la Tour de Babel. Il existe pourtant entre elles une grande diffrence, en ce qui concerne les fautes commises ainsi que la punition inflige. A propos de la gnration du dluge, il est crit (Brshit 6:11): La terre stait corrompue devant D., elle stait remplie de larcins . Rashi explique: corrompue par linceste et lidoltrie (Sanhdrin 57a). Il est dit galement: La fin de toute chair est arrive devant Moi , ce qui signifie: lanarchie accompagne la dbauche et lidoltrie partout o elles se trouvent (Rashi ibid., Yroushalmi Sotah I:5). De mme les Sages disent (Rosh HaShana 12a, Sanhdrin 108b): La gnration du dluge sest pervertie par le bouillonnement de ses dsirs et elle fut punie dans les eaux bouillantes. Les Sages disent encore (Brshit Rabba 32:7, Yalkout Shimoni 56): Les eaux du dluge tombrent pendant quarante jours et quarante nuits, ce qui correspond au nombre de jours de la cration de lembryon, car ils ont oblig le Crateur crer des btards . Cest ce que dit Rashi concernant le verset (Brshit 6:2): Ils prirent pour femmes toutes celles qui leur plaisaient - y compris les femmes maries et ils saccouplaient aussi avec des hommes et des animaux (voir Yalkout Shimoni 43). Ils se sont tellement dnaturs par leurs perversions que mme

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les animaux domestiques, les btes sauvages et les oiseaux saccouplaient des espces qui ntaient pas de leur genre (Rashi 6:12, Yalkout 50). En dpit de ces graves pchs, le dcret de la gnration du dluge ne fut scell qu cause du vol, car la terre sest remplie de leurs larcins (Sanhdrin 108a). Cela montre la gravit de lescroquerie, puisque si la gnration du dluge a commis toutes les transgressions, son sort ne fut scell qu cause de ses larcins. La question se pose delle-mme. Pourquoi la dbauche et lidoltrie, deux des trois fautes principales de la Torah, nont-elles pas suffi causer la punition? Pourquoi est-ce justement le vol qui a fait pencher la balance et provoqu la dcision de les effacer de la face de la terre? Le Rabbin Ari Lieb pose une autre question. Les Sages disent (Vayikra Rabba 17:4, Tanhouma Tazrya 10): D. ne frappe pas Ses cratures de manire soudaine. Dabord Il les prvient et sils ne prtent pas attention Ses avertissements, Il frappe tout dabord leurs biens, ensuite leur maison et leurs vtements. Ce nest que lorsque ces punitions restent sans effet (elles ne lont pas pouss se repentir et corriger ses fautes), que D. frappe la personne elle-mme, dans son corps. Mais ici nous ne voyons pas quil y ait eu un avertissement quelconque, et il est crit (Brshit 6:7): Je vais effacer lhomme que Jai cr ? Par contre, nous voyons que les hommes de la gnration de la Tour de Babel ont dit (Brshit 11:4): Construisons-nous une ville et une tour dont le sommet atteindra les cieux et faisons-nous une rputation solide, de peur dtre disperss de par le monde . Quel tait leur but? Ils voulaient construire une tour, monter au ciel avec des pioches et combattre D., comme si ctait pensable (Sanhdrin 109a, Brshit Rabba 38:6). Quelle fut leur punition? Ils furent disperss de par le monde, comme il est crit (Brshit 11:8): D. les dispersa et ils cessrent de construire la ville . Ici aussi un certain nombre de questions se posent, que nous allons expliquer: 1. Nest-il pas tonnant que la punition de ces hommes-l, qui connaissaient leur Matre et se rvoltaient contre Lui au point de vouloir monter au ciel et se battre contre Lui, ne ft que la dispersion, lexil, le renvoi dans tous les coins de la terre, sans plus? Nous ne voyons pas les gens de la gnration du dluge se rebeller contre D., mais seulement se laisser entraner par leurs dsirs, et pourtant ils furent totalement dtruits, effacs de ce monde, et mme selon une opinion (Sanhdrin 110b), Ils sont exclus du monde venir . Pourquoi la punition de la gnration du dluge est-elle beaucoup plus svre que celle de la gnration de la Tour de Babel, qui blasphmait? 2. Il faut aussi comprendre comment, aprs le dluge, il pouvait subsister des hommes ingrats et pcheurs, qui reniaient D, et pensaient pouvoir se battre contre Lui. Est-il possible quils aient t tellement stupides? Ne savaient-ils vraiment pas quil est impossible datteindre le Ciel et de combattre D.? 3. Il faut aussi expliquer le verset (Brshit 11:8): D. descendit pour voir la ville et la tour que les hommes avaient construites qui implique que D. Lui-mme descendit. Cest une chose difficile comprendre, est-ce que vraiment D., dont la Gloire remplit le monde et qui connat tous ses secrets, a besoin de faire leffort de descendre pour savoir ce que font les hommes sur terre? Bien que les Sages expliquent (Tanhouma 58:18) que cela enseigne aux hommes (et aux juges) ne pas juger les coupables avant davoir vrifi et examin personnellement les faits , D. sait ce que font les hommes. Pourquoi D. est-Il descendu Lui-mme? 4. Pourquoi D. les a-t-Il punis en confondant leurs dialectes et en les dispersant de par le monde? Pourquoi pas une autre punition, par exemple la perte de leurs richesses, ou une pidmie, ou la mort de certains, ce qui aurait effray les autres et les aurait fait fuir, ou une autre peine de ce genre? 5. Il faut aussi se demander pourquoi, aprs avoir termin le rcit du dluge et de la tour de Babel, la Torah raconte comment Avraham fut prouv: Quitte ton pays, ta terre natale, la maison de ton pre... (Brshit 12:1), mais ne nous raconte pas le miracle extraordinaire de Our Kassdim. Car Avraham fut jet par Nimrod dans la fournaise ardente (Brshit Rabba 38:19) et il fut miraculeusement sauv. Et pourtant, la Torah ne nous raconte que la sortie dAvraham de Our Kassdim et ne rapporte pas lclatant miracle qui y eut lieu. Cest trs tonnant, et cela demande explication! Les Sages nous enseignent (Yoma 85b): Yom Kippour expie les fautes commises par les hommes envers D. sils se repentent et se corrigent par de bonnes actions, mais Yom Kippour nexpie pas les fautes commises envers le prochain, moins davoir obtenu son pardon .

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Les fautes commises par les hommes entre eux, comme le vol, le chantage, la mdisance, sont aussi des transgressions envers D. puisquIl nous a interdit dagir ainsi, dautant plus que celui qui a t victime de son prochain, soit physiquement, soit financirement, est une crature de D. (Kohlet Rabba 3:14). Lhomme qui a commis une faute envers son prochain, nobtient le pardon de D. que sil a obtenu le pardon de son prochain. Ce nest qualors que sa faute est pardonne par le tribunal cleste. Les Sages ont dit (Arachin 15a): Colporter des mdisances sur son prochain quivaut nier D. En disant du mal de son prochain qui fut cr limage de D., lhomme irrite D. Lui-mme. Cest pour cette raison que les fautes commises envers son prochain ne sont pardonnes quune fois la paix faite et le pardon obtenu, de faon restituer limage de D. et cest alors que D. pardonne. Faire honte et mpriser son prochain, cest ddaigner limage de D. qui est en lui et colporter des mdisances sur son prochain, cest dire du mal de limage de D., et celui qui agit de la sorte perd lui-mme sa propre ressemblance D. Ce nest que lorsque celui qui a t bless pardonne loffenseur et quils se rconcilient, que la faute est pardonne et que limage de D. est restitue, et alors D. pardonne, et le fauteur peut continuer vivre en ce monde et dans lautre. Tel nest pas le cas pour les fautes commises envers D., comme par exemple omettre de porter les Tephilines ou transgresser le Shabbat. En se repentant de tout cur de ses fautes, on rpare instantanment le mal caus, et D. dans Sa bont accepte aussitt le repentir, et la faute est immdiatement oublie. Ce que nous venons de dire ne concerne que les fautes individuelles commises par un homme envers son prochain, mais pour les fautes collectives dune communaut, par exemple lorsque tout le monde dit du mal de tout le monde, ou que tout le monde vole, extorque et cause des dommages mutuels, la faute est centuple et limage de D. disparat compltement dune telle socit o tous renient D. Cest alors que D. inflige une punition collective, tant donn que tout le monde est galement fautif et Il ne fait preuve daucune indulgence. A prsent, nous sommes en mesure de cerner notre sujet. D. accorda la gnration du dluge un sursis de cent vingt ans, afin de lui permettre de se repentir (Tanhouma Noah 5), car cest un fait que D. est patient et Il attend que le pcheur revienne Lui de lui-mme, comme il est crit (Yehezkiel 33:11): Est-ce que Je dsire mettre mort le coupable ou quil se repente de ses mauvaises actions et quil vive? Cest pourquoi D. na pas puni ces hommes pour leur dbauche et leur idoltrie qui sont des fautes envers Lui. Mais quand ils commencrent voler et tromper leurs prochains, limage de D. les abandonna. D. a patient cent vingt ans avant de les punir - la dure de la construction de larche - et pendant tout ce temps, Noah les mettait en garde devant lapproche du dluge afin quils se corrigent sincrement de leurs fautes envers leurs prochains. Mais ils ne se sont pas repentis, et D. a excut la sentence. Les Sages disent: le dcret de la gnration du dluge ne fut sign qu partir du moment o ils commirent des vols cest--dire des fautes envers leur prochain, que D. ne pardonne que si le prochain a accord son pardon. Etant donn que tout le monde volait tout le monde (ctait lanarchie totale), et que personne ne demandait pardon lautre et ni ne sexcusait du mal quil lui avait caus, ils taient tous passibles de la peine de mort dcrte par D. Nous comprenons donc pourquoi cest justement le vol, faute de lhomme envers son prochain, qui a scell leur sentence, et non pas la dbauche et lidoltrie, fautes envers D. Pourquoi D. ne les a-t-Il pas tout dabord mis en garde, puis saisi leurs biens, leurs richesses, leurs maisons, et enfin, atteint leur corps, car Il ne frappe pas demble les personnes elles-mmes ? Ici, Il a tout de suite effac lhomme quIl a cr. Cest que si D. avait puni lun deux en le privant de sa subsistance, celui-ci, au lieu den souffrir, serait all voler son prochain et le mal se serait propag sans fin et naurait fait quempirer. La terre stait remplie diniquit , tous taient tellement habitus au vol quils ne craignaient aucune punition et rien ne pouvait les freiner, et cest pourquoi D. ne leur accorda plus de sursis et scella leur sentence. La gnration de la Tour de Babel tait diffrente de celle du dluge. Bien que nagissant pas avec foi, ils savaient que si D. accorde un sursis et pardonne les fautes commises envers Lui, il nen est pas de mme pour les fautes commises par lhomme envers son prochain. Ils se gardaient donc de fauter les uns envers les autres, pour viter de subir le sort de la gnration du dluge. Leurs relations interpersonnelles restaient correctes.

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Malheureusement, leur unit de langage (du bout des lvres) et leurs expressions damour rciproque ntaient pas sincres, ctait un amour motiv par la peur . Pour se librer de leur peur et afin que chacun puisse vivre sa guise, ils complotrent une guerre contre D. (comme si une telle chose tait possible!) voulant ainsi se librer de toute obligation, mais ils se gardaient de commettre des larcins et tout le monde parlait la mme langue et disait les mmes mots (Brshit 11:1) afin dviter la colre divine. Leur amour mutuel ne reposait que sur la peur de la colre de D. et ils entreprirent de construire une tour, dont le sommet devait atteindre le ciel. Il ne fait pas de doute quils navaient pas lintention datteindre effectivement le ciel, car cest une chose impossible, mais ils voulaient que cette tour symbolise et reprsente aux yeux du monde entier leur dsir de combattre D. Sils avaient eu la possibilit de construire une tour qui atteindrait le ciel, ils lauraient fait sans hsiter. Telle tait la perversion de cette gnration. Ils craignaient que D. ne les punisse comme Il a puni la gnration du dluge mais ils ne craignaient pas de combattre D. Lui-mme. Pour exprimer leur rbellion, ils avaient construit une tour qui aurait atteint le ciel, si seulement ils en avaient t capables. Il est crit: D. descendit pour voir... ce qui signifie que D. a pntr le fond de leurs penses, la vraie motivation de leur amour du prochain, qui ntait que la crainte de la punition alors quau fond de leur cur ils se hassaient les uns les autres. Mais D. ne considre pas une mauvaise pense comme un acte effectif (Kidoushin 40a) et cest pourquoi Il ne les a pas anantis mais punis la mesure de leur faute. Ils exprimaient extrieurement quils taient unis dans une mme langue et des mmes mots et cest pourquoi leur langues furent confondues, comme il est crit (Brshit 11:9): Cest l que D. confondit le langage de tous les hommes , et les Sages disent (Brshit Rabba 38:15): lorsque leurs langages furent confondus et quils ne pouvaient plus se comprendre les uns les autres, ils sentreturent. Lorsque lun demandait du ciment, lautre lui apportait une poutre, et ils finissaient par se frapper lun lautre.... Ils devaient construire une ville dans lintention dtre unis et D. leur rendit la pareille, mesure pour mesure, en ce quIl les a dsunis et disperss de par le monde. Cette gnration dpassait en mchancet la gnration du dluge car dans le fond de leur cur, ils navaient aucun amour lun pour lautre. Sans foi en D., en Le reniant, en se rebellant contre Lui, on ne peut aimer son prochain. Mais parce quils nont pas commis de fautes effectives envers leurs prochains, leur punition fut seulement lexil et non lanantissement, linstar de la gnration du dluge. Cest ce qui est crit leur sujet: Voici un peuple uni, o tous parlent la mme langue (Brshit 11: 6), et plus haut: Toute la terre parlait la mme langue et les mmes mots. Cest--dire que lamour des uns envers les autres ne sexprimait que par des mots, des paroles, il ne venait pas du fond du cur et D. a confondu leurs langues avant quil ne soit trop tard. Si la situation avait empir, chacun en serait venu har ouvertement son prochain et se battre mort avec lui, et alors D. aurait t dans lobligation, encore une fois, de les dtruire tous, comme lors du dluge. Or D. avait dj promis quil ny aurait plus de dluge sur la terre (Brshit 9:11). Cest pourquoi D. les dispersa aux quatre coins du monde. Le texte continue: Dornavant, rien ne les empchera de faire tout ce quils projettent (Brshit 11: 6). Jusqu prsent, chacun pensait du mal du prochain mais ne passait pas lacte, de peur de subir le sort de la gnration du dluge. Dornavant, ils oublieront leur peur, et rien ne les empchera de faire tout ce quils projettent . Ils sentretueront et alors D. sera oblig de dtruire le monde. Il fallait donc les disperser ds maintenant et les sparer les uns des autres. Ainsi se manifestent la misricorde et la bienveillance de D. Il ne les a pas anantis, mais Il les a punis, mesure pour mesure, en les dispersant de par le monde, et ils renoncrent la construction de la ville. Pourtant, celui qui tait passible de la mort par le feu fut brl dans la tour elle-mme et chacun a reu la punition quil mritait. Cela nous permet de comprendre le nom qui fut donn cette gnration: dor haphlagua - la gnration divise. Car ils voulaient tre spars, coups et compltement dtachs de D. qui les a punis en consquence. En vrit, connatre son Matre et se rvolter contre Lui (Torat Kohanim Behoukotay 26: 14, Rashi Noah 10:9) ne peut pas aller de pair avec lamour du prochain. Il est impossible daimer son prochain si lon naime pas D. et il est impossible daimer D. sans aimer son prochain, car ces sentiments dpendent lun de lautre.

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La Torah commande (Vayikra 19:18): Tu aimeras ton prochain comme toi-mme, Je suis lEternel . Il faut aimer son prochain et se pntrer de lamour de D. A propos de ce verset, Rabbi Akiva dit (Yroushalmi Ndarim 9:4): Cest un fondement de la Torah . Pourquoi? Parce quen aimant son prochain, en fait, on aime limage de D. qui est en lui, et on en vient naturellement aimer D. Cest le sens de aime ton prochain comme toi-mme - Je suis lEternel , car ton prochain aussi porte en lui limage de D., cest pourquoi tu dois laimer. Lorsque le peuple juif sest tenu au Mont Sina, il est crit (Shemot 19:2): Isral a camp face au Mont et les Sages commentent (entre autres, Mechilta Yithro 19:2): comme un seul homme, avec un seul cur . Cest--dire que pour recevoir la Torah, pour se tenir face au Mont Sina et entendre la parole de D., ils devaient tre unis par lamour mutuel et se conduire comme un seul homme. Lunit et lamour du prochain permettent davoir le mrite de recevoir la Torah, tel est le fondement de la Torah . Il y a une diffrence profonde entre la gnration du dluge et celle de la Tour de Babel. Au temps du dluge, tant que la gnration ne fautait que par la dbauche et lidoltrie, D. leur donna le temps de se repentir, car ces fautes taient spcifiquement commises envers Lui, mais lorsquils commencrent voler et fauter envers leurs prochains, ils perdirent limage de D. et il ny eut plus aucun espoir quils se corrigent, cest pourquoi ils furent immdiatement dtruits. Ce nest pas le cas de la gnration de Babel qui tait plus pervertie, car ces hommes-l se rvoltaient contre le Matre du monde, mais montraient de la cordialit et de lamour les uns envers les autres, et bien que leur amour nait pas t sincre, D. dans son infinie misricorde, ne les a pas compltement anantis mais Il les a seulement disperss afin de les empcher de fauter effectivement les uns envers les autres. Mais pour stre rendus coupables envers D., les Sages disent que la gnration de Babel na pas de place dans le monde Venir (Sanhdrin 110b). Pour stre rvolts contre D., ils ne mritent plus de se tenir dans Son ombre. Cela nous permet de comprendre pourquoi la Torah ne dcrit pas le miracle dAvraham Our Kassdim, et ne raconte ni comment il fut jet par Nimrod dans la fournaise, ni comment il en fut sauv. Avraham ne sest pas prostern devant les idoles, il na pas cd aux pressions de Nimrod, il na pas reni D. La Torah ne stend pas l-dessus, car le destin de lhomme et sa raison dtre est dobir la voix de D., sans rechercher la notorit. Nous comprenons aussi pourquoi le rcit de la Tour de Babel et celui de lpreuve dAvraham sont juxtaposs. D. a cr les contraires. Dun ct, les uns agissaient contre D., de lautre, Avraham, qui vivait parmi eux ne se conduisait pas comme eux. Lamour du prochain, lamour de toutes les cratures, tait sa raison dtre, il attachait les hommes D. et leur enseignait Le servir. Et cela, justement par des actes qui rglent les bonnes relations entre les hommes. Cette manire dagir faisait tellement partie de la vie dAvraham que lorsque D. lui dit quitte ton pays , ce fut pour lui une dure preuve. Il ne pensait pas quitter les habitants de ce lieu quil sauvait et auxquels il enseignait la connaissance du Nom de D. Il voulait continuer inculquer les penses justes et les bonnes actions. Les Sages demandent (Avot V:2): Pourquoi compter le nombre des gnrations jusqu Avraham? Et ils rpondent: Pour nous enseigner quAvraham reoit la rcompense de toutes . Pourquoi? Parce quil tait parfait autant vis--vis de D. que vis--vis des hommes. Mais si on les compare lune lautre, la gnration de la Tour de Babel apparat prfrable celle du dluge, car ces hommes taient cordiaux et honntes les uns envers les autres. Il est certain que la paix est le meilleur des rceptacles pour les bndictions (Sifri Nasso 6:26, Yroushalmi Brachot II:4, Bamidbar Rabba 21:1, Dvarim Rabba 5:14).

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Quitte ton pays pour ton propre bien
Il est crit (Brshit 12:1): Et lEternel dit Avram: quitte ton pays, ton lieu de naissance, la maison de ton pre et va vers le pays que Je tindiquerai. Et Rashi commente au nom des Sages (Midrash Hagada): Pour ton propre bnfice et pour ton propre bien. De plus, l-bas tu auras des enfants, mais pas ici (Rosh HaShana 16b), et en outre, Je ferai connatre au monde entier qui tu es (Brshit Rabba 39:2). Nous voyons que D. promet ici Avraham de grandes faveurs, contrairement lpreuve du sacrifice dYitshak, o D. dit Avraham (Brshit 22:2): Prends ton fils, ton fils unique, celui que tu aimes... sans rien lui promettre en change. Nous devons donc comprendre le sens de cette preuve quitte ton pays. 1. Pourquoi D. ordonne-t-Il Avraham de quitter Haran, alors quil russissait convertir les gens, les amener la connaissance de D. (Brshit Rabba 39:21) et faire proclamer par tout le monde le Nom de D. (Sotah 10b, Brshit Rabba 54:8), comme il est crit (Brshit 21:33): Et il y proclama le Nom de D., Matre du monde. Sil en est ainsi, pourquoi doit-il maintenant abandonner ses activits religieuses? Si cest pour recevoir en Eretz Isral la rcompense de ses efforts, on ne peut pas dire que ce soit une preuve, puisque que cest pour son propre bien. 2. De plus, lordre de la narration nest pas chronologique, car il aurait fallu dire dabord de la maison de ton pre, ensuite ton lieu de naissance, et ensuite ton pays. Les commentateurs ont dj remarqu cette interversion. Pour expliquer le renversement de lordre logique, les Sages disent (Moed Katane 17a, Haguiga 16a, Kidoushin 40a): Si quelquun sent que son dsir prend le dessus, quil aille en un lieu o personne ne le connat quil shabille en noir... et quil se dbarrasse de son dsir. Il ne faut pas se tromper et penser quil va commettre ailleurs des transgressions, mais les vtements noirs... lamneront temprer ses dsirs et se repentir (Tossafot au nom de Rabbeinou Hananel). Le fait est que dans un endroit o personne ne le connat, il ne sera pas drang et il pourra se repentir et se corriger car personne ne viendra lui rappeler ses fautes passes. Il en tait ainsi de Avraham lorsque D. lui dit quitte ton pays car ailleurs, l o personne ne te connat, tu pourras mieux progresser dans le service de D. ce qui nest pas le cas ici, en prsence du pervers roi Nimrod et de son entourage. Dans la maison de ton pre non plus, tu ne pourras pas servir D. car ses habitants ten empchent, et mme si tu parviens rsister aux pressions de ces hrtiques, ils napprcieront jamais tes actes. Avraham nhsita pas un seul instant, il rassembla tout de suite toute sa famille et les mes quil avait faites Haran (Brshit 12:5), cest--dire tous ses adeptes, et il sortit rapidement, conformment lordre de D. comme il est dit (ibid. 12:4): Et Avram partit comme le lui avait dit lEternel, car la parole de D. est un ordre. L nous constatons la grande pit dAvraham, et sa profonde humilit. En fait il aurait pu rester pieux, mme parmi ces hrtiques et rsister leurs pressions toute sa vie. Dautant plus que toutes ses actions taient uniquement motives par lamour de D., et quil ne recherchait ni la notorit ni la renomme. Il aurait donc pu se dire quil resterait dans son pays sans dvier, en dpit de lopposition de son environnement. Mais il na pas pos de questions et tout de suite aprs que D. lui eut parl, il sortit de Haran en direction de Eretz Isral, car il savait que si D. lui ordonnait de quitter son pays et la maison de ses pres, Il avait Ses raisons. La premire raison: Avraham savait quil navait pas craindre dtre lui-mme mal influenc par son entourage mais tous ceux que lui et sa femme Sarah avaient convertis ntaient pas encore parvenus un niveau qui leur permt de surmonter les preuves du lieu et du temps, et eux risquaient de reprendre leurs mauvaises habitudes. Il craignait cela juste titre. La deuxime raison: Avraham comprit que son rle ntait pas de servir D. tout seul en secret, mais au contraire au grand jour, au vu et au su de tous, afin que tous soient tmoins de ses actes, et cest effectivement ce quil fit, comme le dit le Rambam (Halachot Akoum, II: 2-3): Son seul but tait de sauver les gens de leurs erreurs et leur faire savoir quil ny a quun seul Crateur et les amener la connaissance de D..

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Et pourtant, Avraham se pose des questions. Est-ce quen Eretz Isral aussi il pourra convaincre les habitants de croire en D. comme il la fait Haran, dautant plus quil ne sait pas quel pays D. va lui indiquer? Ctait une grande preuve pour quelquun qui toute sa vie avait combattu pour D. malgr lopposition quil rencontrait sur son chemin. Car il ne faut pas oublier que ctait lpoque de la Tour de Babel, lpoque o les peuples furent disperss pour stre loigns de D. et avoir pratiqu lidoltrie. Mais Avraham a soutenu lpreuve car il savait que tel tait son devoir ce moment-l. Certainement D. connaissait les sentiments dAvraham, combien il lui tait difficile de quitter son pays, bien quil ft prt renoncer la renomme pour poursuivre sa mission sacre. De plus, il craignait que le voyage ne lui fasse perdre ses adeptes, dans le sens o il est dit que la renomme de celui qui prend la route diminue (Bamidbar Rabba 11:4), et la renomme de D. dans le monde diminuerait... Pourtant, pour le mettre lpreuve, pour lui donner une plus grande rcompense, D. lui ordonne de quitter sa maison, et de surmonter toutes ces difficults. Quitter son pays est donc une preuve pour Avraham, et ses yeux, ce nest ni un bienfait ni un bnfice. A Haran, il russit, mais va-t-il russir dans un autre pays? Quel bienfait et quel bnfice seront les siens dans un pays tranger? Mais Avraham a soutenu cette preuve. Si D. dit pour ton bien et pour ton propre bnfice, il faut faire ce que D. ordonne. Et effectivement, aprs avoir soutenu cette preuve et quitt Haran, Avraham sest rendu compte de quel bnfice il tait question car ds son arrive en terre de Canaan, il ressentit la saintet de la terre que D. avait promise lui et ses descendants, comme il est crit (Brshit 12:7): Et D. dit: Je te donnerai cette terre, toi et tes descendants. Il sut alors combien vraies taient les paroles de D. lorsquIl lui avait dit: quitte ton pays, pour ton bien et ton bnfice, car il ny a pas de plus grand plaisir pour le cur et lme que celui de ressentir la saintet dun lieu, dautant plus que lon est rcompens pour chaque pas fait en Eretz Isral, pays qui surpasse en saintet tous les autres pays. Avraham est au comble de la joie lorsque D. lui dit (Brshit 13:14-15): Lve les yeux et regarde, de l o tu es, au nord et au sud, lest et louest, car Je donne tout le pays que tu vois toi et tes descendants, pour toujours. D. lui promet que, pour avoir surmont lpreuve de tes enseignements se rpandront largement (Mishley 5:16), ici aussi tu russiras rapprocher les gens de D. et grce toi tous sauront que le monde a un Crateur et alors, tous les peuples de la terre seront bnis par toi (Brshit 12:3). Tu te trompes si tu crains de ne pas russir ici comme tu as russi Haran. Ici aussi tout ce que tu feras sera couronn de succs, et tu pourras mme y accrotre tes activits. A prsent nous comprenons lordre des mots dans le verset: ton pays, ton lieu de naissance, la maison de ton pre. Cest quAvraham tait plus occup au dehors que dans sa maison, dans le sens o il est dit lessentiel nest pas ltude, mais laction (Avot I:17, Zohar III 218a). Avraham passait la plus grande partie de son temps dehors, il parlait aux gens, sa maison navait quune importance secondaire, cest pourquoi D. lui dit tout dabord ton pays, qui tait essentiel pour lui, et ensuite la maison de ton pre, qui pour lui tait secondaire. Cest sans doute pour cette raison que lpreuve tait grande, car il tait attach au lieu, au pays, et il doutait de russir dans un nouveau pays. Mais il soutint lpreuve et D. lui promit que dans un nouveau pays il pourrait continuer ses activits. Avraham fut le premier rapprocher les hommes de D. Partout, il proclamait la grandeur du Crateur: LEternel seul est D., il nen est pas dautre (Dvarim 4:35). Dans les gnrations futures aussi (puisque les actes des anctres sont des modles pour leurs enfants), la terre sera purifie, comme il est crit (Zacharia 13:2): Je ferai disparatre de la terre les penses impures, car alors, les non-Juifs prendront exemple sur les Juifs, et eux aussi connatront D., comme il est crit (Ishaya 66:23): A chaque nomnie, chaque Shabbat, toute chair viendra se prosterner devant Moi, dit lEternel. Et alors, se ralisera la prophtie (Zacharia 8:22): et de nombreux et puissants peuples viendront rechercher D. Jrusalem et ils proclameront Sa justice (Thilim 22:32), et nombre de peuples se rallieront au peuple de D. en ce jour-l et ils seront Mon peuple (Zacharia 2:15). Amen, ainsi soit-il!

Parachat lekh lekha La Torah et le repentir protgent et sauvent

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Et lEternel dit Avram: Quitte ton pays, ton lieu de naissance et la maison de ton pre et va vers la terre que Je tindiquerai (Brshit 12:1). Tous les faits et gestes des Patriarches nous enseignent le chemin de la vie, valable pour toutes les poques. Lorsque nous scrutons et approfondissons les dtails de leur conduite, nous nous rendons vite compte que nous avons devant nous un trait complet des vertus, de lthique, de la conduite que chaque Juif doit adopter, dans le sens o il est dit: les actes des pres sont un modle pour leurs enfants (Sotah 34a), afin de savoir quel chemin nous mne jusqu la Maison de D. Le grand matre Rabbi Shimon Bar Yocha (Zohar III 149b) mprise ceux qui considrent la Torah comme une pope. Loin de nous une telle pense! La Torah, au contraire, nous enseigne le chemin de la vie. Effectivement, le commandement de D. Avraham quitte ton pays vient nous enseigner que chaque Juif dsireux de slever dans le service de D. doit progresser courageusement, comme il est crit (Thilim 84: 8): Ils savancent avec une force toujours croissante et, de mme quAvraham reut lordre de quitter sa maison, de mme chaque Juif qui va la synagogue ou la maison dtude, doit abandonner ses mauvaises habitudes et celles de son entourage. Nous voyons quAvraham, pour avoir quitt la maison de son pre, a pu par la suite creuser des puits deau vive, qui reprsentent la sainte Torah, des puits de Torah, des maisons de prire et des maisons dtude, car il ny a deau que la Torah (Babba Kamma 17a, Tanna DBey Eliyahou Rabba 2:18, Zouta 1) et ces eaux, la voie de la Torah, jaillissent des maisons de prire et des maisons dtude. Yitshak a suivi la voie de son pre, il a creus des puits de Torah, et les Sages tmoignent de lui (Shemot Rabba 1:1,Tanhouma Shemot 1) il ressemblait en tout son pre, en beaut, en sagesse, en richesse et par ses bonnes actions. Il a, lui aussi, creus des puits et raffermi les fondements de la Torah que son pre Avraham avait commenc tablir et cela, malgr les Philistins qui se sont attaqus lui et ont tent de len empcher, comme il est dit (Brshit 26:15): Tous les puits quavaient creuss les serviteurs de son pre, du temps de son pre Avraham, furent combls par les Philistins et remplis de terre. Malgr cela, Yitshak na en rien cd, il a continu creuser dautres puits chaque tape de sa route, sefforant dancrer la Torah partout o il allait. Yaakov poursuit cette uvre. Il est crit (ibid. 56:28): Yaakov envoya Yhouda en avant, vers Yossef, pour quil prpare lentre en terre de Goshen et les Sages expliquent (Brshit Rabba 95:3, Tanhouma ibid. 11): pour lui prparer une maison dtude do se rpandra la Torah. Tout comme Yitshak son pre qui se souciait dhabiter dans un lieu dot dune maison dtude, Yaakov a fond une maison dtude. En fin de compte, Yitshak a vaincu les Philistins qui ne lui ont pas disput le dernier puits creus, celui de Rhovot (largissement), qui tient son nom du fait que D. nous a largis et nous prosprerons dans le pays (Brshit 26:22), cest dire que dornavant nous pourrons vivre selon la Torah sans tre drangs. Cela pour avoir suivi la voie de son pre qui ntait pas rest sur place, et parce que le commandement de D. son pre, quitte ton pays, retentissait toujours ses oreilles - savoir quun Juif doit aller de lavant courageusement. Avraham qui fut prouv dix fois et qui a surmont toutes les preuves (Avot 5:4, Brshit Rabba 15:9), a ouvert le chemin ses enfants, afin queux aussi, au cours de toutes les gnrations, imitent sa conduite et surmontent les preuves. Il en sera ainsi, grce au mrite des puits que lui, Avraham, et Yitshak son fils ont creuss, cest--dire grce la Torah qui est concrtement reprsente par leau, et grce leur effort pour creuser les puits, effort comparable celui que ncessite ltude de la Torah, comme il est crit (Mishley 16:26): Celui qui peine reoit la rcompense de ses peines. Il est crit Ce puits, les princes lont creus, les chefs du peuple - nedivim (Bamidbar 21:18). Il sagit des Patriarches qui nous ont prpar le chemin de la Torah et nous ont enseign comment la mettre en pratique, puisque Avraham est appel nadiv (Haguiga 3a). Les Sages ont dit (Sotah 34a) que les faits et gestes des pres sont un modle pour leurs enfants, et nous en voyons lapplication dans la gnration du dsert. Dans le dsert, les Enfants dIsral se nourrissaient de manne, un pain cleste (Shemot 16:4), le pain dont se nourrissent les anges (Yoma 75b), comme il est crit: A cette vue, les Enfants dIsral demandrent les uns aux autres: Quest-ce? car ils ne savaient pas ce que ctait. Et Mosh leur expliqua: Cest le pain que lEternel vous donne comme nourriture (Shemot 16:15).

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La manne tombait quotidiennement dans le dsert, chaque matin, sans interruption, pendant les quarante ans de leur sjour dans le dsert. Et nos Sages disent ce sujet (Shemot Rabba 25:13): Pour quelle raison et dans quel but la manne tombait-elle chaque jour? Afin que les Enfants dIsral sen remettent D. chaque jour, comme il est dit (Shemot 16:12): Parle ainsi [aux Enfants dIsral] et dis-leur: Vers le soir, vous mangerez de la viande, au matin vous vous rassasierez de pain et vous saurez que Je suis lEternel votre D. Autrement dit, le fait que la manne tombe chaque jour vous rappellera que Je suis lEternel votre D. La manne tombait du ciel chaque jour, infailliblement, sauf le Shabbat, comme il est crit (Shemot 16:26): Le septime jour, le Shabbat, il ny en aura pas. Au lieu de cela une double ration de manne tombait du ciel le sixime jour, comme il est crit (Shemot 16:5): Le sixime jour... la rcolte sera double et (ibid. 22): Le sixime jour ils rcoltrent une double provision. Par contre, les Enfants dIsral rcriminrent plusieurs fois contre le manque deau, comme Marra (Shemot 15:24): Et le peuple sen plaint Mosh, lui disant: Que boirons-nous? et (ibid. 17:2): Le peuple querelle Mosh, lui disant: Donne-nous de leau, que nous buvions, et (ibid. 3): Et l, le peuple, assoiff, murmura contre Mosh. Pourquoi leau ne leur tait-elle pas donne du ciel, sindignrent-ils auprs de Mosh et Aaron? En fait, nous lisons que les Enfants dIsral avaient un puits deau dans le dsert grce Miriam (Taanith 9a). Avant que ce puits ne ft dvoil, et aprs la mort de Miriam, lorsque le puits se fut dessch (Taanith ibid.), ils se plaignaient de navoir pas deau. Pourquoi D. na-t-Il pas donn aux Enfants dIsral de leau du ciel, comme Il leur envoyait la manne? De mme quil est impossible de vivre sans eau, mme si la nourriture est abondante (la manne tombait chaque jour), de mme il est impossible de vivre sans Torah et sans observance des commandements qui sont la vie de lhomme. La Torah est compare leau qui coule des hauteurs vers les profondeurs (Taanith 7a) et leau, cest la Torah (Babba Kamma 17a, Tanna DBey Eliyahou Rabba 2:18) comme il est dit: Vous qui avez soif, venez vous abreuver (Ishaya 55:1); mme sil y a abondance de nourriture et que le monde ne manque de rien, le monde ne peut pas exister sans Torah comme le disent les Sages (Pessahim 68b): Sans Torah, le ciel et la terre cesseraient dexister, et (Yrmia 33:25): Si Mon alliance avec le jour et la nuit pouvait ne plus exister, Je naurais pas tabli les lois du ciel et la terre. Voici qui illustre et tmoigne de ce fait: si lon demande un homme pratiquant et croyant comment il se porte, malgr tous ses problmes, il rpond: Que D. soit bni chaque jour (Thilim 68:20), car il a une foi totale en D. Par contre, si lon demande un incroyant: comment allez-vous?, il rpondra: Jai des problmes, que de problmes, la vie na pas de sens. Un tel homme est loin de la Torah et pour lui, la vie na pas de sens. Cest pourquoi D. a fait en sorte que les Enfants dIsral manquent justement plusieurs fois deau; plus ils ressentent le manque deau, mieux ils comprennent que la Torah est infinie, et quelle ne sacquiert que par des efforts, comme il est crit: Soyez occups tudier la Torah, car (Mishley 15: 26): Celui qui fait des efforts bnficie des fruits de son labeur (Torat Kohanim Vayikra 26:3). Seuls notre dsir et nos efforts dans ltude et la pratique nous permettent de comprendre la Torah. Si tel est le cas, nous pouvons concevoir ce que Mosh Rabbeinou dit aux Enfants dIsral propos de la Torah (Dvarim 30:11-14): ...elle ne test pas cache et elle nest pas loin de toi... non, elle est trs proche de toi, dans ta bouche et dans ton cur, afin que tu lobserves. En fait, il faut comprendre ce que Mosh Rabbeinou entend lorsquil dit que lobservance des commandements et ltude de la Torah sont faciles et proches de nous, car combien defforts devons-nous fournir et combien dempchements et dobstacles devons-nous surmonter, avant de pouvoir tudier la Torah et en pratiquer les commandements? Dautant quaujourdhui, en mme temps que se dveloppent et progressent les sciences et les technologies, nous nous loignons de plus en plus de la Torah, et sil en est ainsi, comment Mosh peut-il affirmer que la loi est trs proche de toi? Avant de rpondre, nous allons prsenter une brve introduction. Shlomo HaMelech a dit (Shir HaShirim 1:6): Ne me regardez pas [avec ddain] parce que je suis noirtre, car cest le soleil qui ma hle. Pourquoi le roi Salomon dit-il noirtre et non pas noire? Cest quil y a une diffrence entre noire et noirtre. Ce qui est noir lest par nature, telle est sa couleur, par contre ce qui est noirtre est noirci de salet sans tre fondamentalement noir, et peut tre lav. Cest ainsi que le roi Salomon dcrit ceux qui se repentent et reviennent D. Lorsquils se prsentent devant D., les Anges Destructeurs se tiennent face eux et les accusent: Vois ces hommes, ils ont pass tous

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les jours de leur vie des futilits, nont pas tudi la Torah, nont pas port les Tphilines. De mme, ils accusent les femmes des fautes quelles ont commises jusque-l. Mais alors lme, la partie divine, rpond aux accusations et aux accusateurs: Ne me regardez pas [avec ddain] parce que je suis noirtre, cest dire: ne me considrez pas comme si javais perdu tout espoir. Bien que jaie faut devant D., je nai pas perdu lespoir et jai gard la possibilit de changer, car je ne suis pas intrinsquement noire, je peux me corriger. En fait, il nest pas une seule personne fautive qui nait fait quelque bonne action au cours de sa vie, et les Sages disent delle (Brachot 57a, Yirouvin 19a, Shir HaShirim Rabba 4:5): Mme les plus vides sont riches de bonnes actions, comme la grenade est riche de grains. Et donc, je suis noirtre, je peux encore me corriger, jai la possibilit de me blanchir et de me laver de mes fautes, comme D. le dit Isral (Ishaya 1:18): Vos fautes fussent-elles comme un objet cramoisi, elles seront blanchies comme la neige. Jtais noire, non pas parce que je ne veux pas obir aux commandements, mais seulement parce que le soleil ma hle, parce que le mauvais penchant ma pousse. Le mot shemesh (soleil) compt avec les lettres peles, a la mme valeur numrique que les mots yetzer hara mahtie - le mauvais penchant fait fauter. Maintenant nous pouvons expliquer pourquoi la Torah est trs proche de toi, alors que beaucoup de circonstances nous loignent delle, entre autres les sciences et les acquis technologiques avancs. Shlomo HaMelech dit ce propos (Shir HaShirim 5:2): Je dors et mon cur est veill, la voix de mon bien-aim appelle, cest dire: mme si lon est endormi, le cur reste veill (cela est vrai aussi dans le monde physique: lorsque lon dort le cur continue de battre, et sil sarrtait, lhomme cesserait de vivre). Il en est de mme sur le plan spirituel. Bien que je dorme et que je naccomplisse aucune bonne action (Mguila 13b), mon cur est veill et il est dsireux de sapprocher de Toi, cest dire de se repentir. Yom Kippour le prouve, car ce jour-l mme ceux qui oublient la Torah le reste de lanne, se repentent de tout cur. O et quand la voix de mon bien-aim appelle-t-elle? Chaque jour! Chaque jour, une voix se fait entendre du Mont Horeb (Avot 6:4, Shemot Rabba 41:9), car il ne se passe pas un seul jour sans miracle, comme nous le disons dans la prire et nous Te sommes reconnaissants des miracles que Tu fais pour nous chaque jour, et cela dans le but de nous ramener Lui. Le fait mme quen nous rveillant chaque matin nous disions: Je Te remercie de mavoir rendu lme... est lexpression de ce grand miracle, mais il faut aussi veiller son esprit, comme il est dit: ouvrez-Moi une brche comme le chas dune aiguille... (Shir HaShirim Rabba 5:3). Qui sarrte un instant pour mditer cela, comprendra toute la vrit. Ce que Mosh Rabbeinou dit aux Enfants dIsral: Car cest une chose trs proche de toi, est clair et simple. En nous rveillant le matin, nous remercions D. de nous avoir rendu lme et nous louons notre Crateur de nous avoir donn la force physique et spirituelle dtre bons et sincres, remplis de la crainte de D., puisque ds le lever nous allons prier, nous bnissons D. de nous donner notre nourriture, et nous allons servir D. en tout, comme disent les Sages (Avot 4:2, Avot DRabbi Nathan 25:4): Une bonne action entrane une autre bonne action. Mais vaincre le mauvais penchant demande de la rflexion et un esprit pos. Cest une chose trs proche de toi, dans ta bouche et dans ton cur afin que tu lobserves, car en vrit, il est possible de lobserver! Cette chose qui est proche de nous, cest la teshouva, le repentir, comme il est crit (Osha 14:3): Apprenez les paroles [littralement les choses] de la Torah et servez D., servez-Le de tout cur, comme il est crit (Divrey HaYamim I, 28:9): Sache qui est le D. de tes pres et sers-Le de tout cur (avec les deux penchants de ton cur) et avec enthousiasme. Amen! Quil en soit ainsi!

La foi et llvation dme permettent de surmonter les preuves


Il est crit dans notre section (Brshit 12:1-2): Et lEternel dit Avram: Quitte ton pays, ton lieu de naissance et la maison de ton pre et va vers le pays que Je tindiquerai; et Je ferai de toi une grande nation.... Quitte ton pays pour ton bien et pour ton avantage... (Rashi ad. loc. Midrash Hagada). Nous apprenons quAvraham subit dix preuves et les surmonta toutes (Avot 5:3), pour nous enseigner combien D. aime Avraham. Celle-ci fut la premire. Si D. dsire prouver Avraham, pourquoi Lui dit-il: quitte ton pays pour ton bien, ce qui implique que lpreuve est chose bonne et bnfique?

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De plus, si cest pour son bien et son avantage, il ne fait pas de doute quAvraham doit tre satisfait de quitter son pays natal et daller vers la terre que D. lui montrera. En quoi consiste lpreuve? Rabbi Elazar dit: pars pour ton bien, pour que tu puisses progresser, il nest pas dans ton intrt de rester ici, parmi ces gens coupables (Zohar Lech Lecha 77b). D. fit savoir Avraham que tant quil resterait Haran parmi des gens pervers et coupables, il ne pourrait pas parvenir aux degrs levs et suprmes quil dsirait atteindre. Il lui ordonne de quitter son pays, afin de perfectionner ses qualits personnelles, de grandir et de multiplier. Donc notre question est bien fonde. Avraham, qui est aim de D. comme il est dit Avraham que Jaime (Ishaya 41:8), sert D. avec une lvation dme quil nous est difficile, dans notre ignorance, dimaginer, et malgr cela il aspire une perfection et une connaissance suprieures. Et voil que soudain, D. Lui-mme lui dit: cest seulement dans le pays que Je tindiquerai que tu pourras parvenir ce niveau, et l-bas tu raliseras tes dsirs les plus chers. Est-il possible quil ne se rjouisse pas de tout cur, quil ne soit pas rempli du bonheur de tout abandonner et de se diriger vers la terre promise, bien quil ne sache pas laquelle, afin de parvenir la perfection et dabreuver son me assoiffe de la connaissance de D.? Peut-on vraiment parler dune preuve? Pour comprendre le fond des choses, il faut considrer la voie spirituelle dAvraham Avinou. Nous savons quAvraham a cherch pendant longtemps savoir qui est le Matre du monde. Tout dabord, il crut que le soleil dirigeait le monde, mais en voyant le soleil disparatre lhorizon, il sut quil nen tait rien, et il se dit que peut-tre la lune dirigeait le monde, mais le jour mettant fin la nuit, il sut que la lune non plus ntait pas le vrai matre. Puis il considra les toiles, etc. Les Sages expliquent sa qute par une analogie: Cela ressemble une citadelle remplie de lumire. Vint un homme qui, voyant la citadelle, demanda: qui donc appartient-elle? Le propritaire de la citadelle lui fit signe et lui dit: Cest moi, le propritaire (Voir Brshit Rabba 39:1). Avraham Avinou sappliqua connatre le Matre du monde, jusqu comprendre que toute la cration est au service de D, que la Providence divine stend sur toutes les cratures, petites ou grandes, et que Lui seul dirige ce monde merveilleux. A lge de trois ans, Avraham connaissait dj son Crateur, dautres disent lge de quarante-huit ans (Ndarim 32a). Cest dire que toute sa vie, sans relche, il a cherch connatre la vrit, explorer lessence des choses, jusqu ce que, grce ses facults spirituelles, il soit parvenu connatre la volont de D. et la voie suivre. Il a observ mme les dcrets rabbiniques (Yoma 28b), et il a observ tous les commandements de la Torah avant quelle ne ft donne au Mont Sina (Kidoushin 82a). Il ne prenait pas de repos, il ne sarrtait pas dans sa qute incessante et toujours plus approfondie, il navait ni pre ni matre pour lui enseigner la Torah, mais ses propres entrailles sont devenues des sources de savoir, et dversaient la sagesse (Brshit Rabba 61:1). Pourtant, il sentait bien quil ntait pas encore parfait, il savait quil lui manquait quelque chose, quil avait encore beaucoup apprendre, amliorer ses vertus, et perfectionner son service de D. Et voil que D. Se rvle Avraham et lui dit: Quitte ton pays... et va vers le pays que Je tindiquerai, pour ton bien et ton bnfice propre, car l-bas, sur la terre promise, tu trouveras tout ce que tu cherches. Ici tu ne parviendras rien, mais l-bas, tu nauras pas besoin de faire tant defforts extnuants. Si bien que lorsque D. dit Avraham: pars pour ton bien et ton bnfice propre dans lintention de le soulager de ses efforts personnels, cela reprsente pour lui une grande et dure preuve, car il dsire slever et se perfectionner lui-mme, par ses efforts personnels. Partir pour son bien est pour Avraham une preuve difficile. Et pourtant, D. lui dit intentionnellement: quitte ton pays pour ton bien, afin de le mettre lpreuve par ce voyage et purifier son me, car alors il jouira de laide de D. Lhomme est guid dans la voie quil choisit de prendre (Makot 10b) et Avraham dclare (Brshit 24:40): LEternel que jai toujours servi; en terre sainte aussi, jai suivi Ses voies, je Lai servi, jai mdit Sa Torah, si bien que lon peut lui appliquer le verset: Cest pour lui-mme que lhomme laborieux travaille (Mishley 16:26), il travaille de son ct et la Torah travaille pour lui, de lautre (Sanhdrin 99b). Nous avons vu avec quel degr spirituel nos saints Patriarches ont servi D., au point dtre appels les amis et les bien-aims de D. dans le sens o il est dit: En faveur de mes frres et de mes amis, je te bnis de paix (Thilim 122:8). Ils taient prts sacrifier beaucoup davantages et de russites mondaines

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pour obir aux commandements de D. Et mme si les ordres de D. allaient lencontre de leur pit habituelle et de leur dsir de parvenir une conduite parfaite par leurs efforts personnels, il y renonaient pour Lui obir. Avraham jouit de toutes les bndictions, dornavant cest lui qui bnit les autres, tous dpendent de lui et de son mrite, comme il est crit: Je bnirai ceux qui te bnissent, et qui te maudira sera maudit, et tous les peuples de la terre seront bnis travers toi. Je ferai de toi une grande nation comme nous le disons dans la prire, se rfre au D. dAvraham. Je te bnirai comme nous le disons, se rfre au D. dYitshak. Je te donnerai la renomme comme nous le disons, se rfre au D. de Yaakov. Nous pourrions terminer la bndiction en mentionnant tous les Patriarches, si ce ntait que la Torah ajoute: tu seras bni, et donc nous concluons la bndiction en ne mentionnant quAvraham (Pessahim 117b). Nous devons suivre la voie dAvraham, ne pas chercher la facilit et nous satisfaire de peu, ne pas nous reposer sur les promesses de D. mais continuer faire des efforts personnels pour distinguer quel est le bon chemin et quel est le service agrable D. Ce nest pas une chose facile, au contraire, elle est trs ardue, le monde entier est comme un pont troit, lessentiel est de le traverser sans peur et il ne faut pas sarrter en chemin. Il ne faut pas dire: Malheur moi je suis perdu! ou croire: jai dj atteint le but, pourquoi me fatiguer? D. scrute ses serviteurs avec prcision (Ybamot 121b) et si parfois ce qui nous manque nous semble trs peu de chose, vis--vis de D. cest dj beaucoup, et malheur celui qui ne se corrige pas. Ce nest que par la Torah et les efforts raliss pour lacqurir que lon peut oprer cette correction, et distinguer quelles sont ces choses infimes (quil faut corriger), afin quil ne nous manque rien, dans le sens o il est crit Quen tout temps, tes vtements soient blancs (Kohlet 9:8), propres et agrables. On exige beaucoup de notre peuple et en notre temps. Nos bibliothques sont remplies de livres, et la couronne de la Torah est prsente, qui veut sen emparer, quil vienne et sen empare (Yoma 72b). Il y a aujourdhui des livres qui traitent de tous les aspects et de tous les sujets de la Torah. Chacun peut venir et choisir ce qui lui convient, transcendant les proccupations terrestres et matrielles. Mais nous sommes paresseux, nous ignorons tout simplement ces livres, tout en sachant quils existent, nous ne les ouvrons pas, nous ne mditons pas la Torah, et nous ne savons plus comment servir D. Les Sages demandent (Bamidbar Rabba 14:22): Pourquoi la Torah est-t-elle compare la lumire, comme il est dit (Mishley 6:23): Le commandement est la bougie et la Torah est la lumire? Parce que la Torah claire le chemin que lhomme doit suivre et lui montre ce quil doit faire. Et ils disent aussi (Yroushalmi Haguiga I:7): Sa lumire ramne lhomme dans le droit chemin. Mais nous sommes comme des ignorants qui marchent dans lobscurit (Kohlet 2:14) et nous ne savons pas combien il est important dtudier la sainte Torah, car enfin elle nest pas dans le ciel... et elle nest pas au del des mers... elle est trs proche de toi... (Dvarim 30:12-14). Pourquoi donc rester paresseux, et ignorant? Chaque jour une voix sort du Mont Horev et proclame: Malheur aux cratures qui ddaignent la Torah (Avot VI:2), car nous mprisons la Torah si nous ne sommes pas occups ltudier. Examinons la diffrence entre les gnrations passes et la ntre. Autrefois, les gens se sacrifiaient pour sanctifier le Nom de D., et D. oprait pour eux des miracles, alors quil ne le fait pas pour nous (Brachot 20a). Mme sils navaient ni pre ni matre et ne possdaient pas de livres, ils sefforaient de se perfectionner, et sils pensaient quil leur manquait peut-tre quelque qualit, ils sefforaient de lacqurir. Quant nous, o cacher notre honte, notre dshonneur et notre humiliation? Car la Torah est lapanage de chacun de nous comme nous le disons dans la prire, et les exgtes disent que le mot Isral est form des premires lettres de la phrase qui signifie: Il y a six cent mille lettres dans la Torah. (Nombre qui symbolise tout le peuple juif). Cest donc que nous devons tirer la leon des gnrations passes, suivre la voie dAvraham et nous lever constamment.

La rcompense se mesure la peine


Les Sages disent (Ybamot 62b): Un homme qui nest pas mari reste sans joie, sans bndiction, sans Torah, sans protection... et le Talmud appuie cet enseignement en basant chacun de ces attributs sur un verset de la Torah. Mme si un homme est parfaitement pur et saint, il naura de bonheur et ne sera bni

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que sil est mari. Cest aussi la raison pour laquelle lHomme fut cr seul. Ce nest que lorsquil ressentit labsence de joie, de bndiction, de Torah, que lEternel D. lendormit et lui prsenta la Femme et il est dit (Brshit 2:24): Cest pourquoi lhomme quittera son pre et sa mre et sattachera sa femme, et ils seront unis en une seule chair. Tant que lhomme vit dans la maison de ses parents, clibataire, il est incomplet, mais lorsquil se marie, il atteint la plnitude, comme il est dit: Il les appela homme le jour o ils les cra (ibid. 5:2), car la femme est incluse dans le terme homme, et elle est son partenaire. Mme si lhomme ressent un grand bonheur sortir de la maison de son pre et de sa mre pour pouser sa femme, il doit savoir que cest alors que vont commencer les preuves, telles que lobligation de pourvoir la subsistance de sa famille et les autres soucis quil doit surmonter. Quitte ton pays... la maison de ton pre et va vers la terre..., quitte la maison de ton pre et de ta mre, quitte tes parents, pour aller vers la terre, vers la femme, qui est symboliquement reprsente par la terre, comme disent les Sages (Sanhdrin 74b): La femme est la terre du monde, elle est aussi appele un champ (Shabbat 118b), que Je tindiquerai, tel est ton destin et cest pour ton bien, car elle est ton autre moiti, celle qui test dsigne par le ciel, et tu vivras avec elle. Il se peut que lhomme prfre ne pas se marier du tout, comme ce fut le cas de ben Aza qui stait entirement consacr ltude de la Torah (Ybamot 63b) et qui a dit: Comment porter un joug sur les paules et tudier la Torah? (Kidoushin 29b), ou du roi Hizkya. Le Talmud raconte (Sanhdrin 94b) que le roi Hizkya aurait plant une pe devant la porte des coles en disant: quiconque ntudie pas la Torah sera transperc par cette pe. A son poque, en cherchant de Dan jusqu Ber Sheva et ne trouvant pas un seul garon ou une seule fille qui ne connaissent parfaitement les lois de puret et dimpuret. D. aurait mme fait de lui le Messie si le roi Hizkya navait pas renonc se marier dans la crainte dengendrer des enfants mchants (Brachot 10a) et dtre soumis lpreuve du mariage. Mais lhomme ne peut viter cette preuve. Il faut quil comprenne quelle doit lui tre profitable. Seul le mariage permet lhomme datteindre la perfection voulue, mme si les difficults en sont multiples. En fait, de quelle faon lhomme peut-il parvenir la vie ternelle par le mariage? Grce la lumire qui les enveloppe, lui et sa femme, sous le dais nuptial. A cet instant-l, le Nom de D. rside sur eux, comme le disent les Sages (Sotah 17a): Lorsque lhomme et la femme le mritent, la Prsence divine les accompagne, car dans le mot ish, (homme) se trouve la lettre Youd, et dans le mot isha, (femme) la lettre H, qui forment ensemble le Nom de D. Youd-H. Dans le mot Houpa - le dais nuptial - se trouvent les lettres Vav et H et ces quatre lettres runies forment le Nom de D. dont la protection les garde de tout mal. Ceci, lorsquils se marient avec lintention dobserver la Torah et les commandements, et de btir un foyer fond sur la Loi et la crainte de D. Cest alors que la lumire divine les enveloppe, et alors, du mot houppa, le dais nuptial, il ne reste que les lettres hap, qui signifie dnu, car ils sont dnus de toute faute. Lorsquils se trouvent sous le dais dans lintention de btir un foyer dans la saintet et la puret, ils sont sauvs du jp, (le pige), mot form par les lettres de pj inverses et qui reprsente ce que lon rejette, et dans ce cas la lumire cleste les enveloppe et fait leur bonheur tous les jours de leur vie (cest le sens de ils seront unis en une seule chair). Lpreuve du mariage est grande, mais la condition quelle soit surmonte, D. prodigue toutes Ses bndictions. Voyez combien grand est cet homme, Avraham Avinou, grand parmi les gants (Brshit Rabba 14: 6). Lorsquil entendit lordre de D. Quitte ton pays pour ton bien et ton bnfice propre, il fut prt renoncer toutes ses entreprises et toutes ses activits, sans protester et sans tarder: Avram partit comme le lui avait dit lEternel (Brshit 12:4), Avram partit, dirigeant ses pas vers le sud (ibid. 9) sans savoir o le conduisaient ses pas. Et voici quil arriva en Terre Sainte, quil parcourut du nord au sud, et dest en ouest, et il reut la rcompense de chacun de ses pas (Brshit Rabba 39:12, Babba Bathra 100a). Alors il y eut la famine dans le pays et Avram descendit en Egypte (ibid. 10). En dpit de la promesse de D., Avraham trouve en Isral une terre aride, qui ne produit rien, alors que sa voisine, lEgypte, qui est remplie de corruption et de dbauche (Shemot Rabba 1:22) et qui est pleine de sorcelleries et dimpit (Voir Menahot 85a, Shemot 7:22, Rashi) abonde en produits agricoles. Avraham ne se plaint pas et il descend, contre son gr, en Egypte, cette terre impure, car il accepte les ordres de D. avec amour, et surmonte toutes les preuves quil rencontre.

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Telle est la faon de servir D. Le mauvais penchant instille le doute dans le cur de lhomme, justement lorsquil doit, sans raison apparente, affronter nombre de problmes. En effet, si en obissant aux commandements de D. de tout cur, on est atteint de souffrances et de malheurs, cela nous amne naturellement nous interroger sur les voies de D. Il faut savoir rsister aux insinuations du mauvais penchant qui nous entrane au doute, et au contraire, affronter ces preuves et les surmonter, et cest ainsi que lon sera compt parmi les soldats du Roi, car D. nenvoie lhomme que des preuves quil puisse surmonter. Celui qui accepte de telles preuves peut sans aucun doute les surmonter et les vaincre, et cela lui permet de slever jusqu des hauteurs insouponnes. Il convient de citer lavis du Gaon de Loppian de mmoire bnie, dans son livre Lev Eliyahou au sujet de la guerre dAvraham contre les rois: Cette guerre est tonnante, car il est clair quelle sest droule de faon surnaturelle, et ce nest que grce des miracles vidents quAvraham fut victorieux. Selon une opinion, il est parti en guerre accompagn seulement de son serviteur Elizer, selon une autre opinion, accompagn de trois cent dix-huit serviteurs seulement (Ndarim 32a, Brshit Rabba 43:2). Quoi quil en soit, ce petit nombre dhommes a vaincu les armes de quatre rois dont la puissance est atteste par leur victoire spectaculaire dans leur guerre contre les cinq rois qui avaient dissmin tous les peuples qui se trouvaient sur leur chemin, entre autres les Rfayim, appels ainsi parce que quiconque les voit est affaibli (rf) (Brshit Rabba 26:16, Zohar III 160b), et les Aymim, qui terrorisent (ayem) tout le monde (Brshit Rabba 26:16). Comment Avraham a-t-il russi les vaincre? La poussire quil leur lanait se transformait en flches et en projectiles (Brshit Rabba 43: 4). Il est vident que tous les peuples environnants furent tmoins des miracles accomplis pour Avraham. Et il faut donc stonner que ces peuples-l se soient justement rendus tellement coupables. Est-il pensable quils aient vraiment oubli quil existe un Juge et quil existe une justice? Comment en sont-ils venus une si grande perversion en ayant t tmoins de tels miracles? Cest que justement, celui qui se prsente la possibilit de connatre la vrit et qui se trouve sur le chemin du repentir, risque dtre soumis de dures preuves, et au lieu de recevoir les bienfaits et les bndictions de D., il ne connat que malheurs et souffrances. En dpit de la bndiction et de la promesse attaches Lech Lecha afin de lui permettre damliorer ses qualits et les perfectionner, il ne rencontre qupreuves et souffrances, destines mettre lpreuve ses forces, comme il est crit (Dvarim 8:2): Afin de te mettre lpreuve par ladversit et pour dvoiler ce que tu as dans le cur, si tu es prt obir Ses commandements ou non et (ibid. 16): Afin de tprouver par ladversit pour te combler de biens pour le reste de tes jours. Le roi de Sodome en voyant de ses propres yeux pareils miracles et merveilles, et la victoire totale dAvraham, lui dit: Donne-moi les captifs et garde pour toi les biens (Brshit 14:21). Il renonait tous les trsors et tout le butin. Mais en fin de compte, il est lui-mme retomb dans sa terrible hrsie et a opprim son peuple, au point que le nom de son pays est devenu le symbole de la cruaut et de la tyrannie, et dune humanit ayant perdu limage de D. au cours de lHistoire. Il est tonnant que les gens de Sodome et de Gomorrhe, nonobstant de si grands miracles, soient tombs si bas (Haguiga 5b). Pourquoi? Parce quils nont pas surmont les preuves infliges par D., et par consquent ne se sont pas levs. Laffection exprime par le roi de Sodome envers Avraham tait intresse. Elle tait fonde sur les miracles et il est dans la nature de lhomme, lorsque les miracles cessent ou sont effacs de la mmoire, de retomber dans lhrsie - ainsi lamour du roi de Sodome a disparu lorsque ce qui la motiv a disparu (Avot 5:20). Celui qui fait un retour D. doit se garder de retomber dans ses doutes et les laisser lenvahir. Il doit savoir que sil doit aimer D. ce nest pas en tenant compte des miracles passs ou futurs quIl ralise pour lui, car lamour risquerait alors de disparatre avec sa cause. Au contraire, il doit fortifier son attachement D. avec une nergie renouvele, sans condition pralable et sans recherche de gratifications. Avraham reprsente lantithse des gens pervers de Sodome et Gomorrhe. Il aimait D. dun amour dsintress, et chaque fois quil recevait un ordre de D., il obissait sans arrire-pense et sans considrer les avantages personnels quil en tirerait. Il savait que seul D. est le Matre de la cit (Brshit Rabba 39:1), cest Lui quil faut adresser ses prires et cest Lui quil faut servir, Lui seul est le Crateur de la

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lumire et des tnbres, Il fait rgner la paix, rien ne Lui est cach, rien nchappe Son regard et Lui seul dirige le monde. Lorsque Avraham parvint un tel degr de foi solidement ancr, rien au monde ne put len dtourner. Cest ce qui est crit (Nehemia 9:7-8): Cest Toi... qui as choisi Avraham... Tu as trouv son cur fidle... Dans toute circonstance et chaque vnement il est rest pur dans sa foi, dans le sens de: sois entier! Avraham, dont les Sages disent quil est le premier de tous les hommes vertueux (Shir HaShirim Rabba 4:15), le premier des Patriarches (Brshit Rabba 59:9), le premier des circoncis (Ptiha Esther Rabba 10), Avram est le mme homme quAvraham, vertueux du dbut jusqu la fin (Mguila 11a) car il tait le fidle serviteur de D. La dernire preuve, le sacrifice dYitshak, tait la plus difficile de toutes. D. dit Avraham: Je te prie, ne me dois pas dans cette preuve (Tanhouma Vayera 22). Pourquoi une telle prire? Est-ce quAvraham a besoin que D., pour ainsi dire, le supplie? Avraham, qui a rassembl et multipli les adeptes de la Torah, qui les a amens se placer sous la protection divine, qui les a habitus proclamer le Nom de D. (Sotah 10b, Brshit Rabba 43:7), qui a converti nombre de fidles au Judasme et a expliqu tous quils doivent abandonner leurs idoles et ne servir que D., doit-il sacrifier son fils? Est-ce justement lui, qui de ses propres mains, va devoir dtruire lavenir du peuple juif en sacrifiant son fils unique, son bien-aim? Cette preuve est effectivement des plus difficiles! Dans son livre Lev Eliyahou, le Gaon de Loppian crit: Cela ressemble un roi qui dirait son premier ministre, celui quil aime et qui a duqu et lev les fils du roi: voici, je te donne en cadeau cette pe aiguise, mais la condition expresse que tu dcapites tous les fils du roi dont tu prends soin. Si tu ne mobis pas, cette pe te transpercera le cur... Il est certain que ce ministre rtorquera au roi: Je suis prt mourir de bon gr dune mort prmature, et me transpercer moi-mme le cur avec ma propre pe, pour ne causer aucun mal aux fils du roi que jaime tant et ne pas les dcapiter. Bien plus, mon refus prouve au roi mon amour pour lui, et peut-tre nest-ce que pour prouver ma fidlit que le roi me donne un pareil ordre. Si jchoue et que jobis lordre du roi, il me dcapitera moi, en disant: Cest ainsi que tu aimes le roi! Il en est de mme pour Avraham. Comment peut-il sacrifier son fils de ses propres mains, se priver de descendance, et causer tant de peine autour de lui? Mais cest le mauvais penchant qui insinuait que lpreuve du sacrifice tait destine le rcompenser si en fin de compte, il nobissait pas. Avraham, le serviteur de D., ne tient pas compte de tous les calculs qui vont lencontre de lordre de D., et il rejette de tels raisonnements, apparemment justifis et vidents. Au contraire, il sempresse dobir car il place sa confiance en D., sachant quIl ne veut pas lentraner faillir en lui ordonnant de faire quelque chose qui serait contraire Sa volont. D. qui connat le fond des curs et des penses, sait quAvraham ne dsire que sanctifier Son Nom dans le monde, Il connat sa fidlit, et en fait, Il ne lui a pas ordonn de sacrifier son fils, mais seulement de le prsenter sur lautel, tu las prsent sur lautel, maintenant dtache-le (Brshit Rabba 56:8). Pour conclure, disons que la Mishna (Avot V:3) qui dtaille les preuves dAvraham cache un sens profond. Avraham fut prouv dix fois et il a surmont toutes les preuves, afin de nous enseigner le grand amour de D. pour lui. Les actes des pres sont des modles pour les enfants (Sotah 34a) et nous devons prendre modle sur Avraham et comme lui, surmonter les preuves. De plus, D. savait que le satan allait plus tard accuser les Enfants dIsral la Mer des Joncs, en disant queux aussi, comme les Egyptiens taient des idoltres (Shohar Tov 15:5). Cest ainsi que D. fit prcder la maladie du remde (Mguila 13b) et Il a prouv Avraham dix fois, dans le but de faire bnficier ses enfants du mrite des miracles en Egypte et la Mer des Joncs. Avraham dut tre prouv, non pas pour lui-mme mais pour nous, afin de prserver notre propre avenir. Cest le sens de afin de nous enseigner le grand amour de D. envers lui, car D. la prouv pour faire savoir aux accusateurs combien Avraham tait aim de D. La Mishna, en disant il les a toutes surmontes, veut nous faire savoir quil est dans la nature humaine de fuir et dviter les souffrances, et elle veut souligner quAvraham na pas considr que les preuves laffaiblissaient, mais plutt quelles le fortifiaient. Cest le sens du mot nissayion, preuve, qui est de la mme racine que le mot

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ness, tendard, comme dans le verset: Levez ltendard sur les nations (Ishaya 62:10), Redressez-vous, soyez glorifis (Zohar I:140a et b). De mme, les preuves que chaque homme subit ont toutes pour but de llever de plus en plus haut, des degrs toujours suprieurs de spiritualit. (Ce chapitre reproduit le discours prononc dans la maison du Rabbin Akiva Klein de Montral, au cours des Sheva Brachot de sa fille, le cinquime jour de la Parasha Lech Lecha 5751)

Lpreuve de la richesse
Il est crit (Brshit 12:1-2): Et lEternel dit Avram quitte ton pays... vers la terre que Je tindiquerai, et Je ferai de toi une grande nation, et Je te bnirai, et Je te donnerai la renomme et tu seras bni. Rashi explique (ibid): Voyager entrane un triple dsavantage: au plan des enfants, de la richesse, et de la renomme; cest pourquoi [Avraham] avait besoin de ces trois bndictions et D. lui a promis une descendance, la richesse et la renomme. Si D. le bnit de renomme, de richesse, et surtout dune descendance que jusqu ce jour il a tant espre, en quoi consiste lpreuve? Qui naccepterait de quitter son pays, sa terre natale, et la maison paternelle et daller mme vers un pays inconnu, sil lui est assur de telles rcompenses de la part de D.? Cest que celui qui est riche et clbre a trs peu de temps libre, comme le disent les Sages (Avot II:7): Celui qui accumule les biens accumule les soucis. Son esprit nest pas libre pour soccuper de choses spirituelles et de son lvation personnelle. Sil en est ainsi pour tout un chacun, combien plus pour quelquun comme Avraham. Avraham avait commenc servir D. de tout son cur, de toute son me et de toutes ses forces, ds son jeune ge. A lge de trois ans Avraham connaissait son Crateur (Brshit Rabba 30:8). Il a aussi observ toute la Torah (Vayikra 2:9, Yoma 28b), il mditait sans cesse la Loi de D. et la pratiquait en tout. Pour lui, quitter son pays tait donc une grande preuve, car sil devenait trs riche et trs clbre et que les gens viennent lui demander de laide, des conseils et le dranger toute heure, il en rsulterait quil naurait pas le temps de soccuper de la Torah et de servir D. Cest en soi une grande preuve, et cest pourquoi D. lui dit: L-bas, Je te bnirai par la richesse, la renomme et une progniture et malgr cela tu continueras servir D., si tu russis cette preuve. Et effectivement, Avraham quitte sa maison sans savoir vers quel pays il va, il devient trs riche, sa renomme stend dans le monde entier, et de partout les gens viennent rechercher ses conseils et recevoir ses bndictions. De plus, Avraham se souciait de satisfaire leurs besoins la fois spirituels et matriels. Il les amenait la connaisance de D. (Brshit Rabba 39:21), il fonda Ber Sheva une auberge ouverte tous (Brshit Rabba 48:9): La tente de Avraham avait une ouverture dans chacune des quatre directions afin que les gens venus de toutes les directions naient pas chercher lentre. Son serviteur de longue date, Elizer, tait charg de veiller sur ses biens et de grer toutes ses possessions (Brshit 24:2). Avraham lui confia la tche de soccuper du budget et de distribuer la part due aux pauvres, comme le traduit Onkelos (ibid. 15:2): il gre la maisonne. Les Sages (voir Rashi ibid. 15:2) interprtent le mot Damassek, Damascen, comme sil tait dit: dolh oumashkh, Elizer puise la Torah chez son matre et la rpand autour de lui. Quelle est la Torah de son matre? Rapprocher ceux qui sont loigns de la connaissance de D., distribuer de largent aux pauvres et pourvoir aux besoins des ncessiteux. Elizer est charg de toutes ces fonctions, et Avraham, au lieu dtre domin par ses richesses, les domine. Ceci dit, Avraham na pas denfants et le fils de sa maisonne - celui qui gre ses biens - est son serviteur Elizer de Damas. D. lui dit (ibid. 15:4): Celui-ci nhritera pas de toi, mais celui qui natra de toi, sera lui, ton hritier. Le Sforno crit (ibid.): ton fils grera avec succs tes biens de ton vivant. Ce nest pas ton serviteur Elizer qui hritera de toi car il ne sait pas grer tes biens, mais le fils qui natra de toi, lui, saura grer tes biens et ta fortune. Ceci est difficile comprendre. D. promet Avraham un fils qui saura grer ses biens, au lieu de le bnir en lui promettant un fils pieux et saint qui hritera de toutes ses vertus! Avraham peut-il se contenter dun fils qui se bornerait administrer ses biens, et qui ne le suivrait pas dans le chemin dune vie spirituelle et sanctifie? Sil en est ainsi, en quoi consiste la promesse? A la lumire de ce que nous avons dit plus haut, nous pouvons comprendre. Avraham savait trs bien comment grer ses biens, il dominait ses richesses et ne leur tait pas assujetti; il distribuait une partie de ses biens aux pauvres, il dpensait ses richesses pour faire le bien autour de lui, et cest en cela quil a soutenu

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lpreuve de la richesse afin quelle ne le distraie pas et ne lempche pas de servir D. Cest pourquoi il a hrit de la promesse divine que le fils qui natrait de lui utiliserait ses richesses de la mme faon et surmonterait lpreuve de la richesse, un fils qui saurait comment grer les biens, dominer lopulence et sen servir pour faire le bien, ce qui ntait pas le cas de son serviteur Elizer. Bien quil ait t un serviteur fidle, sil avait d hriter de cette fortune, il naurait pas su comment la grer, car il navait pas les qualits sublimes dAvraham Avinou. De mme quAvraham a rsist lpreuve de la richesse et ne sest pas laiss dtourner par elle, de mme notre poque, le saint Rabbin Isral de Rozhin et autres hommes vertueux et pieux, ont surmont lpreuve de la richesse et ne se sont pas laiss dtourner de D., de Ses voies et de Son service. Cest un enseignement moral valable pour tous, car la richesse est une preuve bien plus grande que la pauvret. Il ne faut pas tomber dans ses piges, mais au contraire, grce largent, excuter les commandements et faire de bonnes actions, en tout temps et toute heure, et ne pas ressembler ceux dont il est crit (Ishaya 2:10): Je leur ai donn la fortune et ils en ont fait des idoles. Les Sages (Brachot 32a) comparent cela ce fils qui a faut parce quil avait reu beaucoup dor et dargent de son pre. Il faut consacrer sa fortune faire le bien, aider son prochain, obir aux commandements, suivre en tout lexemple dAvraham Avinou. Amen! Ainsi soit-il! Jai entendu une explication sympathique de la part du Grand Rabbin dAutriche, le Rabbin Reizberg. Il dit que lpreuve de quitte ton pays est lpreuve la plus probante et la plus difficile de toutes les preuves dAvraham, car toutes les autres taient ponctuelles, mais celle-l est une preuve permanente, celle de progresser toujours, de succs en succs, dans la Torah et la prire, cest dire dtre constamment occup servir D. Nous dsirons humblement ajouter encore quelques mots. A propos du verset (Vayikra 26:3): Si vous marchez dans Mes lois... [dans le sens de excutez], Rashi commente: Il ne suffit pas dexcuter les commandements, il faut aussi tudier la Torah. Dans ce verset nous voyons que la Torah est appele loi et pas commandement. En effet, ltude de la Torah saccompagne dpreuves difficiles. Le mauvais penchant dsire entraver cette tude, il trouble celui qui tudie par toutes sortes darguments dans le but de lui faire abandonner cette tude. Cest pourquoi D. ordonne: marchez dans Mes lois, pour nous enseigner que ltude de la Torah est une loi quil ne faut pas transgresser, mme si lon ne comprend pas le sens et la raison dtre de ce dcret, et tous les arguments mis en avant par le mauvais penchant pour empcher cette tude ne sont que des stratagmes. Ltude de la Torah est une loi qui a sa propre raison dtre, cest un dcret divin qui doit nous amener lobservance de tous les commandements, et ce faisant, vaincre le mauvais penchant. Cela nous permet dexpliquer pourquoi ltude de la Torah est appele loi, et pourquoi la Torah utilise lexpression marcher. Daprs le Ohr Hahayim, dans ses divers commentaires du verset Si vous marchez dans Mes lois, il ressort en bref: Faites tout ce que vous devez faire: mangez, buvez, parlez... faites tout ce que la nature exige, afin de pouvoir vous occuper de Torah et (ibid. verset 4): Mes lois (houkim) sont les rations de subsistance que Je dispense (le mot hok en Hbreu a le double sens de loi et ration), et si vous voulez recevoir votre part de nourriture, vous devez de mme obir Mes commandements. Il est crit: Si vous marchez dans Mes voies, et dans ce mme verset, si vous obissez Mes commandements, cest--dire autant en ce qui concerne la relation de lhomme envers D. quen ce qui concerne les relations des hommes entre eux. Lhomme parviendra facilement vaincre lpreuve de la richesse sil pratique ce qui est stipul dans le verset: Que chacun assiste son prochain et donne du courage son frre (Ishaya 41:6). Une telle victoire sur lpreuve permet datteindre les plus hauts degrs de perfection, jusqu tre compt parmi les proches de D. Cest le devoir sacr de tout homme de persvrer avec force dans ltude de la Torah, dans la peine et la sueur, tout en observant les commandements et en faisant de bonnes actions. Tel est sans doute le sens de la Mishna (Avot II:2): Il est beau de joindre ltude de la Torah (la loi religieuse qui gre la relation de lhomme D.) la bonne conduite dans le monde (la loi civile et sociale qui gre les relations des hommes entre eux) car lobservance de lune et de lautre, conjointement, empche de commettre des fautes. Si lhomme pratique les commandements qui lui incombent, alors il peut tre heureux et dans ce monde et dans lautre.

Parachat lekh lekha Quand le mauvais penchant croit en une rcompense

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Avraham fut mis lpreuve dix fois, et il triompha de toutes les preuves (Avot V:3, Zohar III 263b). La premire est celle de Lech Lecha, (quitte ton pays), et cette preuve est longuement relate dans la Torah. Ctait une preuve plus difficile que lpreuve dOur Kassdim, o Avraham fut jet dans la fournaise ardente (Brshit 35:19), mais dont la Torah ne fait aucune mention explicite. Lexpression Lech Lecha (va, va pour toi), est rpte. Sil ne suffit pas de dire Lech une seule fois, sans aucun doute cest parce quAvraham avait du mal se draciner, si bien que D. laida en lui promettant des enfants, la prosprit, et la renomme. Mais il nous faut mditer et comprendre lessence de cette preuve, et pour cela nous demander: 1. En quoi cette preuve est-elle tellement difficile pour Avraham? Qui nagirait pas comme il la fait, partir du moment o D. lui promet tant de faveurs et tant de bndictions? 2. De plus, qui est plus grand quAvraham, qui a toujours obi la volont de D.? Pourquoi faut-il tant de promesses pour le convaincre et pourquoi na-t-il pas excut tout de suite lordre de D. sans sappuyer sur Ses promesses et Ses bndictions? 3. Le Zohar (I 78a) crit que D. a montr Avraham que chaque pays tait soumis au gouvernement dun ange tutlaire, sauf la Terre Sainte, qui nest sous la domination daucun prpos du Ciel. Avraham dsirait donc savoir ce que cette terre avait de particulier et D. lui rpondit alors, que pour connatre cette terre, sa spcificit et sa supriorit, et pour pouvoir vrifier quelle dpendait directement de la souverainet de D., il devait sy rendre. Pourquoi ne part-il pas tout de suite, du fait que cela reprsente pour lui une preuve? 4. Et la question la plus difficile de toutes: pourquoi lpreuve dOur Kassdim nest-elle pas considre pour Avraham comme une grande preuve? Ne sest-il pas jet dans la fournaise ardente afin de sanctifier le Nom de D. (et la Torah ne sattarde pas sur cet pisode)? Est-ce parce quil sagissait de sanctifier le Nom de D. quil na pas ressenti cela comme une preuve? De mme, au moment o Rabbi Akiva fut mis mort par les Romains, ctait lheure de dire Kriat Shema. Tandis que sa chair tait lacre par des peignes de fer, il disait Shema Isral, marquant lacceptation du joug divin. Ses lves lui demandrent: Matre! Tu vas jusque-l? Il leur rpondit: Toute ma vie jtais pein par le verset: Tu aimeras lEternel ton D. de toute ton me - mme sIl te prend ton me. Je me demandais: quand aurai-je loccasion de raliser ce commandement? Maintenant jen ai loccasion et je ne le ferais pas?! Il prolongea le mot Echad, Un, jusqu ce que son me senvole sur le mot Un, laffirmation de lUnit de D. Une voix se fit entendre du Ciel et dit: Heureux Akiva, tu as rendu lme en prononant le mot Echad. Les anges demandrent D.: Telle est la Torah, et telle est sa rcompense? Cest Toi qui mets mort... (Thilim 17:14). D. leur rpondit: Ils font partie des vivants (ibid.). Et la voix du Ciel dit: Heureux tu es Rabbi Akiva, qui es destin la vie ternelle! Rabbi Akiva aussi tait prt donner sa vie pour sanctifier le Nom de D., comme Avraham, avec joie, dune faon peu commune, et pour sanctifier le Nom de D. il considrait ngligeable le fait dtre mis mort. Mais ses lves y ont vu une preuve, puisquils lui ont demand avec tonnement: Notre matre! Tu vas jusque-l? Il nous faut donc comprendre en quoi lpreuve de quitter son pays est considre pour Avraham comme plus difficile que lpreuve dOur Kassdim, et pourquoi le fait de sacrifier sa vie ne compte pas ses yeux? Cest une chose connue que plus un homme est vertueux et plus lamour de D. est profondment ancr en lui, plus son me est enflamme du dsir dtre proche de D. comme il est crit (Thilim 84:3): Mon me soupirait et languissait aprs les parvis du Seigneur... Si lon voulait tenter de sparer un tel homme de son Crateur et lamener trahir et renier D., il est certain quil prfrerait, et mme dsirerait mourir plutt que de vivre dtach de son Crateur. Il est difficile, mme pour le mauvais penchant, davoir une influence quelconque sur un homme aussi vertueux, attach D. par chaque fibre de son me, et que mme les souffrances ne parviennent pas faire cder, surtout pas aux derniers instants de sa vie. Par contre, le mauvais penchant a plus de pouvoir dans les situations o nous ne sommes pas obligs de sacrifier notre vie. Quil sagisse des relations envers le prochain ou envers D., de lexcution des commandements ou de ltude de la Torah, le mauvais penchant cherche, et parfois russit, avoir le dessus mme sur lhomme vertueux, comme il est crit (Kohlet 7:20): Il nest pas dhomme vertueux sur terre

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qui fasse le bien et ne faute pas. Dautant plus que les Sages ont dit (Souca 52a): Plus un homme est grand, plus son mauvais penchant est fort. Ceci, parce que le mauvais penchant a mille stratagmes pour dtourner lhomme vertueux et; cela va sans dire, lhomme simple. Mme les preuves faciles saccumulent et augmentent au fur et mesure que le temps passe, et deviennent finalement insurmontables, comme le disent les Sages (Souca 52b, Kidoushin 30b): Le mauvais penchant de lhomme prend le dessus chaque jour, rellement un peu plus chaque jour. En fin de compte, lhomme ne peut faire le bien ni corriger une dfaillance quelconque sans tre troubl dans ses efforts par le mauvais penchant qui cherche le dtourner de toute bonne action et lempcher de laccomplir. Mme lorsque lhomme se trouve (D. nous en prserve) confront une situation qui lui rappelle la mort (voir Brachot 5a), le mauvais penchant continue le provoquer et lui insuffler de mauvaises penses, cest un fait. Mais nous savons que la rcompense est la mesure de la peine (Avot V:26, Zohar III 278b) et plus on se donne de peine, plus la rcompense qui sensuit sera grande. A ce sujet jai lu un rcit merveilleux propos dun Tzadik. Un de ses opposants, qui contestait sa faon de servir D., lui rendit visite et lui demanda une somme norme pour le mariage dun de ses enfants. Le Tzadik nhsita pas un seul instant, ouvrit le tiroir de sa table et compta devant lui la somme requise. Lorsque le frre de ce Tzadik eut connaissance du fait, il se montra furieux. Il se rendit chez son frre et lui demanda, plein de reproches, pourquoi il avait donn cet homme une somme norme sans penser la situation de ses propres enfants qui eux aussi devaient se marier, et qui il ne restait plus rien, et pour comble, ce don avait t au bnfice de lun de ses opposants! Le Tzadik rpondit son frre: Sache que tu nes pas le premier me critiquer, tu as t prcd par quelquun qui ma tenu exactement le mme langage, mais je lai repouss. Qui est-il, celui qui est venu avant moi? demanda le frre avec grand tonnement. Le Tzadik rpondit: Celui qui est venu avant toi nest autre que le mauvais penchant. Nous voyons dans ce rcit merveilleux que le mauvais penchant nhsite pas un seul instant troubler mme les hommes pieux qui ne dsirent que ressembler leur Crateur. Les hommes pieux donnent leurs opposants ce dont ils ont besoin, sans compter, tout comme D. pourvoit aux besoins et la subsistance de tous, mme de ceux qui sopposent Lui et ne suivent pas Ses justes voies, sans sattendre des remerciements de leur part. Cest le mauvais penchant qui a tent dempcher ce Tzadik de faire don de cette somme importante, surtout lun de ses opposants, lui disant peut-tre: si tu veux rpandre des bienfaits, il vaut mieux le faire envers un pauvre de tes proches, arguant que les pauvres de ta ville ont la priorit sur les pauvres dune autre ville (Babba Metzya 71a, Tanhouma Mishpatim 15). Malgr cela, ce Tzadik a eu le mrite de rsister ces mauvais conseils, et il est possible que le mauvais penchant ait alors essay de le dissuader par dautres arguments, en lui disant: Il est certain que tu as lobligation de faire le bien, mais sache que tu en tireras un grand bnfice personnel, car cet opposant va devenir lun de tes plus grands adeptes, lui et toute sa famille, car il te sera reconnaissant toute sa vie de ta bont, et tu as intrt acheter son cur en lui faisant un tel don. Cest--dire que le mauvais penchant insuffle dans le cur de lhomme vertueux la pense errone que sa gnrosit na pour but que de recevoir en change un bnfice, et quil nagit pas de faon dsintresse. Mais le Tzadik na pas non plus prt loreille cet argument, et il a donn cette somme son opposant sans arrire-pense, de tout cur, et sans sattendre recevoir en retour un avantage quelconque. Mme sil devait continuer le contrer, le Tzadik naurait aucun grief contre lui. Le mauvais penchant prend les allures dun homme de bien qui encourage lobissance des commandements, tout en insufflant la pense errone que le but dune bonne action est dobtenir un certain avantage. Il faut viter ce genre de penses. Cela nous permet de rpondre la question que nous avons pose concernant les preuves dAvraham: en quoi quitter son pays reprsente-t-il une preuve tellement difficile? Cest que lorsque D. a ordonn Avraham de quitter son pays, sa terre natale et la maison de son pre, son mauvais penchant sest dress contre lui, arguant: Comment peux-tu quitter la maison de ton pre et transgresser le commandement de respecter ton pre et ta mre, comme il est crit (Shemot 20:12): Honore ton pre et ta mre, dautant plus que ce commandement quivaut tous les commandements de la Torah et des Sages (Kidoushin 28b, Vayikra Rabba 2:9). Et donc Avraham hsite. Dun ct, il doit quitter la maison de son pre, de lautre, il est oblig de lhonorer. Comment savons-nous quil hsita? Les Sages disent (Yalkout Shimoni Lech

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Lecha 12): Avraham craignait de partir en se disant: si je quitte, je vais causer une profanation du Nom de D. car les gens vont dire que jai abandonn mon vieux pre et que je suis parti... D. lui dit: Va, va, Je te dispense dhonorer ton pre et ta mre. Toi, tu es dispens de cette obligation, mais nul autre. On pourrait objecter (comme le font les commentateurs) : Comment D. peut-Il dispenser quelquun dobir un commandement et obliger quelquun dautre le faire? Le mme commandement et la mme Torah sadressent tout le monde, et si chacun doit honorer son pre et sa mre, Avraham aussi a cette obligation, comment peut-il alors transgresser ce commandement et de plus, mriter den retirer une bndiction? Et pourtant! La rponse se trouve dans le verset (Vayikra 19:3): Craignez, chacun, votre pre et votre mre et observez Mes Shabbatot. Les Sages demandent (Babba Metzya 32a): Quel est le lien entre ces deux commandements? Je tai command de craindre ton pre, mais si ton pre te demande de profaner le Shabbat, tu ne lui obiras pas. Il en est de mme pour tous les autres commandements. Sil en est ainsi, la Torah dispense Avraham du devoir dhonorer son pre car on nest pas oblig dhonorer des parents qui exigent de transgresser la Torah, cest pourquoi D. a dit Avraham: Je ten dispense. Etant donn que ton pre nobserve pas la Torah et les commandements, et quil est idoltre, tu as le droit de le quitter. Mais Je ne dispense pas les autres, et si les enfants se rvoltent contre leurs parents, Je compterai cela comme une transgression. Quoi quil en soit, Avraham dcida de quitter la maison de son pre, puisque telle tait la volont de D. Cest alors que le mauvais penchant lui souffla une ide fausse: en fait, tu obis au commandement de D. parce que tu en tireras un grand bnfice personnel et nombre de bndictions. Cest alors que commence vraiment lpreuve pour Avraham Avinou. Va-t-il triompher de toutes ces penses et quitter Haran uniquement parce que D. le lui commande, et non pas cause des bienfaits qui lui sont rservs par la suite, ou du niveau spirituel qui lui est assur sil quitte Haran? Mais Avraham ne sattarde pas aux arguments du mauvais penchant, comme il est crit (Brshit 12:4): Et Avram partit comme D. le lui avait ordonn. Prcisment parce que D. le lui a ordonn et non pas pour obtenir un profit quelconque. Il est crit (ibid. 12:9): Et Avram partit, dirigeant ses voyages vers le sud. Les Sages expliquent (Brshit Rabba 39, Rashi ad. loc.): Lexpression il partit, dirigeant ses voyages... indique des tapes, sarrtant ici un mois ou plus, puis partant de-l et plantant sa tente ailleurs. Tout cela afin de montrer quil obissait au commandement de D. sans penser la rcompense qui lui tait destine (car il obit aussi D. dans le fait mme de partir, de voyager, ce qui ne va pas sans peine), tout comme le Tzadik qui a donn sa fortune sans couter les conseils du mauvais penchant, afin de ne pas dnaturer le sens du commandement. Ne soyez pas comme des serviteurs qui sattendent un salaire Cela explique clairement ce qui est arriv Aher, dont les Sages disent (Kidoushin 39a, Houlin 142a): Pourquoi est-il devenu athe? Parce quil a vu une fois un homme dire son fils: va et apporte-moi les oisillons qui sont dans le nid sur le toit. En redescendant, ce fils est tomb de lchelle et il est mort. Aher a demand: Nest-il pas crit (Dvarim 22:7): Tu chasseras la mre et tu prendras les oisillons afin dtre heureux et de prolonger tes jours? O donc est son bonheur et o est sa longue vie? Il ne savait pas que Rabbi Yaakov, fils de la sur de Aher, avait expliqu que lexpression afin dtre heureux sapplique au monde qui nest que bonheur, et afin de prolonger tes jours sapplique au monde ternel. Si bien que Rabbi Yossef dit de lui (Houlin 142a): Si Aher avait compris le verset selon linterprtation de Rabbi Yaakov, il nen serait pas venu commettre une si grave erreur. Ce rcit est trs tonnant et demande tre expliqu et approfondi: 1. Pourquoi cet homme est-il mort justement au moment o il ralisait le commandement de chasser la mre du nid? Mme si de ce fait sa vie en ce monde na pas t prolonge, pourquoi doit-elle tre raccourcie? 2. Comment se fait-il quAher nait pas connu linterprtation de Rabbi Yaakov: afin dtre heureux dans le monde qui nest que bonheur... car Aher tait rellement un grand rudit, comme le Talmud en tmoigne plusieurs endroits (Voir Tossafot Haguiga 15a)? Comment a-t-il pu devenir athe? Cest que le mauvais penchant poursuit tout le monde, y compris lhomme vertueux, et chacun peut en arriver commettre lerreur daccomplir un commandement uniquement pour recevoir la rcompense promise. Une telle pense est inspire par le Satan. Il faut savoir que lon pratique les commandements

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uniquement pour faire la volont de D. et non pour recevoir une rcompense, comme le disent les Sages (Avot I:3, Avoda Zara 19a): Ne soyez pas comme des serviteurs qui servent leur matre afin de recevoir une rcompense... Mme si D. promet une rcompense, il ne faut pas compter dessus, mais au contraire, craindre quune faute quelconque nous prive de cette rcompense, comme Yaakov, qui dit (Brachot 4a, Shabbat 32a, Bamidbar Rabba 19:32): Je crains davoir commis une faute quelconque qui me livre entre les mains dEssav. Nous pouvons appuyer cette thse sur le verset (Dvarim 14:22): Tu prlveras la dme... que les Sages expliquent (Shabbat 119a, Taanith 9a, Tanhouma Reh 18): Prlve la dme afin de tenrichir, cest-dire: en prlevant la dme de tes rcoltes, tu accrotras ta fortune. Nous constatons que beaucoup de gens riches distribuent de grosses sommes dargent des bonnes uvres, et sappauvrissent malgr tout. Et donc, la question se pose delle-mme: O donc se ralise la promesse des Sages: Prlve la dme afin de tenrichir? Ce nest pas une chose tellement vidente, car D. qui examine le fond de nos penses et de nos curs, sait trs bien pourquoi un tel homme ne sest pas enrichi. Il est possible aussi quau lieu dargent, un tel homme ait reu la longvit, cest--dire un trsor de jours, comme il est crit (Mishley 21: 21): Celui qui cherche faire la justice et la bont trouvera la vie, la justice et lhonneur, il sera riche en jours, comme il est dit (ibid. 3:16): A droite, elle donne la longvit, gauche la richesse et lhonneur. Il se peut aussi que quelque bienfait ait annul un dcret qui planait sur ses enfants, telle la mort, comme il est crit (ibid. 10:2, 11:4): Un acte juste sauve de la mort. Et donc, il ne faut pas sarrter la rcompense prvue la suite de ce commandement, car les choses caches appartiennent lEternel notre D. (Dvarim 29:28). Il faut obir aux commandements sans penser la rcompense, mme si le mauvais penchant persuade lhomme dobir uniquement pour recevoir une rcompense. La rcompense nest pas accorde en ce monde, mais seulement dans le monde Venir, comme il est dit: il ny a pas de rcompense en ce monde pour ceux qui obissent aux commandements (Kidoushin 39b, Houlin 142a). Cest dans le monde Venir, dans la vie ternelle, que la rcompense des actes accomplis en ce monde est acquise. Mais selon largument du mauvais penchant, la rcompense est assure mme si lon nagit pas de faon dsintresse. A lcouter, on finirait mme par commettre lidoltrie car aujourdhui il dit: fais ceci, demain il dit: fais cela, jusqu ce quen fin de compte il dise: va adorer des idoles... (Shabbat 108b, Avot DRabbi Nathan 3:2). Tout commence lorsquil nous conseille dagir selon la volont de D. mais avec une arrire-pense, celle de la rcompense. Si lhomme agit dans lespoir dune rcompense comme le lui conseille le mauvais penchant, celui-ci ne le lche plus. Le lendemain, il viendra lui dire: Hier tu as excut tel commandement et tu nen as pas t rcompens, tu as prlev la dme et tu ne tes pas enrichi. Au contraire, tu tes appauvri! Pourquoi obir aux commandements? Jusqu ce quen fin de compte, il lui dise: va adorer des idoles, et cela bien que, la veille encore, le mauvais penchant lui ait conseill dobir aux commandements. Il faut tout de mme se demander pourquoi cet homme est mort, justement lorsquil est mont sur lchelle pour prendre les oisillons, comme son pre le lui avait demand? Il est mont sur lchelle signifie allgoriquement quil tait parvenu au plus haut degr dlvation possible. Il avait perfectionn son me sous tous ses aspects, et il ne lui manquait que lexcution du commandement de renvoyer la mre du nid pour tre parfait, cest pourquoi en le ralisant, il a atteint la perfection de sa vie en ce monde et en redescendant de lchelle, il est tomb et il est mort. Aher interprtait littralement le verset: afin dtre heureux et de prolonger tes jours, comme si la rcompense tait donne en ce monde. Il ignorait la vraie interprtation donne par Rabbi Yaakov: afin dtre heureux dans un monde qui nest que bonheur, et afin de prolonger tes jours dans le monde ternel. Il a cout son mauvais penchant qui lui prchait des ides apparemment vraies mais qui, en fin de compte, se rvlent fausses. Nous pouvons dire de faon plus approfondie quAher na pas compris que les versets sont parfois des allusions qui demandent tre expliques. Bien quil ait jusque-l obi beaucoup de commandements, il les avait toujours accomplis dans lintention de recevoir une rcompense. Le mauvais penchant la induit en erreur, et il na pas tenu compte du fait que cet homme [qui est tomb de lchelle] tait peut-tre parvenu la perfection de faon arriver vers le monde qui nest que bonheur. Il sest laiss induire en erreur, au point de devenir athe.

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En quittant Haran pour Eretz Isral, Avraham na fait qucouter la voix de D. qui rsonnait ses oreilles; il na pas cout les insinuations du mauvais penchant, et cest pourquoi il a russi. Cest une leon qui doit guider chacun de nous dans la vie. Celui qui veut connatre la vrit, doit savoir reconnatre clairement la voix de D. et lui obir, et repousser les conseils du mauvais penchant. Car seule la voix de D. est une voix ternelle. Il est crit dans la Torah (Dvarim 4:30, 30:2): Et tu reviendras lEternel ton D. et tu obiras Sa voix... et encore (ibid. 27:10): Tu obiras la voix de lEternel et aussi : Lorsque tu reviendras lEternel, cest--dire: tu reviendras D. de toi-mme, de ta propre initiative, tu ncouteras que Sa voix. Tu ne pourras pas revenir D. si tu coutes des mauvais conseils... Et donc il faut prier sans cesse et demander D. de nous diriger dans le bon chemin, et de veiller sur nous afin que nous nobissions qu Sa voix, la voix de D., et alors grande est la rcompense en ce monde et dans lautre.

De limportance de la pratique des commandements positifs


Il est dit dans le Midrash (Brshit Rabba 55:8): Rabbi Lvi Bar Hitta remarque: Lexpression Lech Lecha est utilise deux fois dans la Torah et nous ne savons pas laquelle comporte le plus damour, la premire, quitte ton pays (Brshit 12:1-2), ou la deuxime, va vers la terre de Moriah (plus loin 22: 2). Mais tant donn quil est dit vers la terre de Moriah, nous comprenons que la deuxime comporte plus damour que la premire. Ce Midrash demande tre expliqu: 1. Quest-ce qui incite le Midrash comparer ces deux preuves, au point que nous ne pourrions pas savoir laquelle comporte plus damour, si ce ntait crit explicitement? De plus, quelle est la rponse du Midrash? En quoi le mot Moriah indique-t-il un amour plus grand? 2. Il faut aussi comprendre pourquoi D. devait dire Avraham de quitter son pays pour son bien et son bnfice propre, car sans aucun doute Avraham aurait t heureux de partir mme sans une telle promesse, uniquement pour obir la volont de D.! Avraham pensait-il un seul instant que D. avait lintention de lui causer du tort, au point quil ait t ncessaire de lui dire pour ton bien et ton bnfice? Pensait-il que D. lui ordonnait de partir sans raison? 3. Si effectivement D. lui rvle quil quitte son pays pour son bien, est-il possible de qualifier ce commandement dpreuve? 4. Mme si quitter son pays et sa famille constitue une dure preuve, de toute faon Avraham tait dj mari, et tel est le sort de lhomme. La Torah le dit: lhomme quittera son pre et sa mre et sattachera sa femme (Brshit 2:24). Il tait donc dj dtach de sa famille. De plus, en ce qui concerne Avraham, vu les circonstances, son lien avec sa famille ntait pas tellement fort, tant donn que sa famille et son entourage taient idoltres. Nous allons expliquer tous ces points, un un. Lessentiel de lpreuve dAvraham ne consistait pas dans le fait de quitter effectivement sa famille et son lieu dhabitation, en rompant les liens naturels quil avait avec eux mais plutt, de rompre les liens spirituels quil avait, comme le disent les Sages (Brshit Rabba 39:14) propos du verset les mes quils ont faites Haran (Brshit 12:5): Avraham convertissait les hommes et Sarah les femmes. Le sens de lpreuve de quitter son pays est expliqu par les activits dAvraham Haran. L, il avait entrepris de convertir les gens et de les rapprocher de D., l il commena lui-mme servir D. en extirpant lidoltrie de sa famille et de son pays, l son influence tait norme. Cest l quil fut sauv de la fournaise (Brshit Rabba 38:13), ce qui le fit connatre dans tout le pays, au point quil fut nomm prince et choisi comme dirigeant (Bamidbar Rabba 15:14). Tout le monde savait que ce quil disait tait vrai (Brshit Rabba 42:7) et cela lui permettait daccomplir des merveilles. Et puis soudain, il reoit un ordre divin: Quitte ton pays, ta famille et mets toi en route vers un pays tranger, vers la terre que Je tindiquerai, au point quil semble que lessentiel est de quitter son pays et son lieu dhabitation, sans plus. Avraham aurait pu, en son cur, se poser des questions et hsiter: quadviendra-t-il de mes entreprises? Par ailleurs, que faire de lordre divin? Est-il ncessaire daller dans un autre pays, puisque cest partout pareil (Kidoushin 27b). Ce quil va faire l-bas, il le fait dj ici, et si lessentiel est de proclamer la souverainet de D. dans le monde, en quoi le lieu importe-t-il, dautant que, dans son nouveau pays, il devra

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tout recommencer depuis le dbut? Ce cas est comparable celui dun rabbin qui dirige une importante communaut juive sur laquelle il exerce une grande influence, et qui soudain, au comble de sa russite, on vient annoncer: Quitte ton poste et va ailleurs... Mme si on lui promettait ailleurs de grands avantages, la fortune et la renomme, ce serait une chose trs difficile, une dure preuve. Cest justement en cela que la chose est tonnante, en ce qui concerne Avraham. Lorsquil arrive en terre de Canaan, nous ne savons pas sil y acquit des adeptes. Jusque-l, Avraham parcourait le pays et rassemblait le peuple de ville en ville et de contre en contre, jusqu ce quil arrive au pays de Canaan... (Halachot Akoum I:3). Au pays de Canaan, Avraham apporta des sacrifices, fit de bonnes actions, pria en faveur des autres, et mme pratiqua la circoncision... faits qui montrent quil slevait sans cesse. Cependant tout cela ne concernait que lui-mme, et nous ne savons pas sil fit quoi que ce soit pour convertir les autres! Cela lui fut mme reproch par les Sages (Ndarim 32a): Pourquoi Avraham fut-il puni, et ses enfants devinrentils esclaves en Egypte? pour navoir pas pris chez lui les otages, lorsque Avimelech lui dit (Brshit 14: 21): Donne-moi les gens et prends pour toi les biens. Rabbeinou Nissim crit (ad. loc.): Avraham les a remis Avimelech. Sil les avait retenus auprs de lui, il les aurait convertis. Cest donc quau pays de Canaan il ne cherchait pas rassembler les gens dans la foi en D. Rappelons, si vous le voulez bien, la question bien connue concernant les gens convertis par Avraham et dont nous nentendons plus parler par la suite. Que sont-ils devenus et quel fut leur sort? Nous savons quil y a deux faons de servir D. Lune en agissant positivement (les commandements positifs), et lautre en nagissant pas (les interdits, les commandements ngatifs). Ne pas agir consiste viter et sloigner de tout ce que la Torah interdit, de tout ce qui est mauvais et honteux, comme le mensonge, la tromperie, attitudes au plus haut point dtestables et dont il faut sloigner tout prix. Il est dit ce propos (Kidoushin 39a): Celui qui vite de commettre une transgression reoit une rmunration gale celle dune bonne action. Aux actes positifs, il faut ajouter les interdits, en mettant un accent particulier sur la pratique assidue des commandements positifs de la Torah. Ces deux conduites sont indiques succinctement dans le verset (Thilim 34:15): Evite le mal et fais le bien. Bien que la voie ngative - viter de commettre des transgressions - soit certainement leve et difficile car il faut draciner les ronces et arracher les orties, elle ne conduira pas une lvation effective et permanente dans le service de D. Ce nest pas le cas pour celui qui cherche, en tout temps et toute heure, faire tel ou tel acte qui lui est command. Celui-l slve de jour en jour par une pratique assidue. Se garder de transgresser les interdits empche lhomme de tomber sous lemprise du mal, mais cela ne suffit pas pour lui viter ce risque. Par contre, celui qui obit aux commandements positifs de la Torah, est hors datteinte de lemprise du mal, dautant plus que la meilleure dfense cest lattaque, ceci est bien connu. Et donc, en pratiquant les commandements positifs, on attaque le mal de front et on lloigne de nous. Nous pouvons expliquer dans les deux sens le verset (Thilim 119:105): Ta parole est un flambeau qui claire mes pas, elle est une lumire qui rayonne sur mon chemin. Les interdits sont comme un flambeau qui claire mes pas, afin que je ne trbuche pas et que je ne tombe pas, ils me permettent de garder ma place et de veiller ma position. Par contre, les devoirs sont une lumire qui claire ma route, qui me permettent de progresser afin que je ne reste pas sur place. Les Sages expliquent le verset dans ce sens: Les Justes sont semblables cet homme qui marche en chemin, avec une lumire pour clairer ses pas: il rencontre une pierre, il lvite, il rencontre un foss, il le contourne. Cest ce que dit le roi David: jtais sur le point de profaner le Shabbat, la Torah ma clair... (Yalkout Shimoni, Thilim 878). Le flambeau sert viter les pierres et les fosss, viter ce qui est mal et chapper au mauvais penchant qui sappelle pierre (Souca 52a). La lumire est la bonne action, la lumire de la Torah et des commandements. Telle est lducation que lhomme se donne lui-mme et donne ses enfants. Etre duqu dans ce sens et habitu viter de commettre des transgressions, ne suffit pas en soi laisser une impression profonde dans lme, mais une ducation qui met laccent sur la pratique des commandements positifs, surtout sils sont pratiqus avec joie et enthousiasme, ancre dans lme une habitude qui pntre tous les domaines de la vie et laisse une trace ineffaable. Il est crit (Mishley 6:23): Le commandement est un flambeau et la Torah une lumire comme le disent les Sages (Sotah 21a, Yalkout Shimoni, Mishley 938): le flambeau se rapporte la mise en garde, aux interdits, comme nous lavons dit.

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Cela explique ce que sont devenus tous ceux quAvraham avait convertis Haran. Ils nont pas transmis lenseignement leurs enfants, tant donn quAvraham insistait particulirement sur la ncessit de servir D. en vitant de fauter. Avraham les avait convaincus et ils staient rendus lvidence quil est stupide et mme dtestable de se prosterner devant des idoles fabriques par lhomme (voir Rambam, Halachot Akoum I:3). Lorsquils en furent convaincus, ils acceptrent la souverainet de D. mais du fait quils nexprimaient pas leur amour de D. par des actes positifs, cela ne fit aucune impression sur leur me, et par consquent ce quils ont transmis leurs enfants na pas subsist. Toutefois, Avraham a russi transmettre la pratique des commandements positifs ses enfants et sa famille, comme il est crit dans la Torah (Brshit 18:19): Si Je lai distingu, cest pour quil prescrive ses enfants et sa famille aprs lui, dobserver la voie de lEternel et de pratiquer la vertu et la justice. A prsent, nous pouvons comprendre quen arrivant en terre de Canaan, Avraham se consacra justement de plus en plus la pratique des commandements positifs. Lech Lecha - quitte ton pays pour ton bien comme lordre de Lech Lecha prononc au moment du sacrifice dYitshak, est pour ton bien et ton propre essor spirituel. Tant quil tait Haran, Avraham sappelait Avram, et partir du moment o il arriva en Eretz Isral, juste avant la circoncision, il fut nomm Avraham, dont la valeur numrique est deux cent quarante-huit, le nombre des commandements positifs de la Torah (Ndarim 32a), car dornavant il sert D. par des actes positifs. Nous sommes maintenant en mesure de rpondre la question pose en tte de ce chapitre. Quel est le rapport entre lordre Lech Lecha, quitte ton pays, et lordre Lech Lecha intim avant le sacrifice dYitshak? De mme que lesprit humain ne peut pas saisir quel bien et quel bnfice sont cachs dans le fait de prsenter son fils sur lautel, de mme lesprit humain ne peut pas saisir quel bien et quel profit sont cachs dans le fait de quitter son pays, un lieu o jusque-l nont t nenregistres que des russites. Cest ce que dit le Midrash: nous ne savons pas laquelle comporte le plus damour, tant donn que les deux occasions ont un mme fondement: servir D. simplement, sans poser de questions et sans hsiter. Et le Midrash rpond: Du fait quil est crit: Va au pays de Moriah, cela montre que la seconde fois comporte plus damour. Bien que les deux vnements soient des preuves difficiles, elles sont diffrentes. Quitter son pays et sa famille exprime laspect des commandements ngatifs, tandis que prsenter son fils sur lautel cest servir D. par un acte positif, et D. prfre la mise en pratique effective. Cela est exprim par le fait quil est crit le pays de Moriah. Moriah vient du mot moreh drech, celui qui indique le chemin, selon linterprtation de lun des Sages (Taanith 16a): Le Mont Moriah, do Isral reoit lenseignement, Oraha. Et cest l quIsral sert D. en pratique. Et les Sages disent encore (Brachot 6a) propos du verset: Et tous les peuples verront que tu portes le Nom de D. et ils te craindront (Dvarim 28:10). Cela se rfre aux Tphilines de la tte. Cest--dire que par la pratique des commandements positifs, le Nom de D. est sur nous, et nous parvenons faire ce qui est bon et ce qui est bon cest la Torah (Brachot 5a, Avoda Zara 19b), et ce que la Torah nous ordonne nous rend meilleurs (Yroushalmi Haguiga 1:7) et encore Isral reoit lenseignement de la Torah et les peuples du monde nous craignent (mora) - tous ces sens sont compris dans le mot Moriah. Cest pourquoi cette preuve, qui concerne la mise en pratique effective, est plus mritoire aux yeux de D. A propos de lexpression Shamor vezachor, Souviens-toi et observe le jour du Shabbat, les Sages ont dit (Rosh HaShana 27a): Souviens-toi et observe, fut dit dans un mme souffle, car sans doute une stricte observance des interdits du Shabbat est indispensable la prservation du Shabbat, comme il est crit (Ishaya 56:2): Heureux celui qui observe le Shabbat et ne le profane pas et qui se garde de toute action mauvaise. Une grande rcompense est promise celui qui observe le Shabbat, car la suite du verset il est crit (ibid. 4-5): LEternel parla ainsi: aux eunuques qui observent Mes Shabbatot... Je donnerai dans Ma maison et dans Mes murs un mmorial et une renomme prfrable des fils et des filles. Mais pour mriter la saintet et lillumination du Shabbat, il faut en pratiquer les commandements positifs qui sont exprims dans le mot Zahor. Car D. prfre de loin la pratique des commandements positifs.

Lattrait des richesses, un des empchements servir D.


Ds son trs jeune ge, Avraham, ce gant, a commenc rflchir... il navait ni matre ni personne pour lui enseigner le savoir, car il vivait Our Kassdim parmi les idoltres... Lorsquil parvint la connaissance

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vritable... il exposa au peuple son erreur, il brisa ses idoles, et il commena proclamer publiquement quil ne convenait pas de servir des idoles mais de servir D., Crateur du monde, et ne se prosterner que devant Lui... Il parcourait le pays et rassemblait les gens de ville en ville, et de contre en contre, jusqu son arrive en terre de Canaan o il proclama le Nom de D. comme il est crit (Brshit 21:33): Avraham y proclama le Nom de D. Matre du monde, et des milliers de gens se rassemblaient autour de lui. Il ancra dans leur cur le fondement des fondements qui est la vraie connaissance de D., crit le Rambam (Halachot Akoum I:3). Le Raavad discute cette loi du Rambam (ad. loc.): Je mtonne des propos du Rav, car cette poquel vivaient Shem et Evr. Comment est-il possible de penser quils ne protestaient pas, eux aussi, contre lidoltrie? Et il poursuit: Ils protestaient contre lidoltrie, mais ils nont pas bris les idoles, comme le fit Avraham. Cest effectivement une grande difficult, car Shem, le fils de Noah tait aussi un grand sage et Yaakov lui-mme tudia dans sa Yshiva, comme il est crit (Brshit 25:27): Et Yaakov est un homme droit, assis dans les tentes, dans les tentes de Shem et Evr (Brshit Rabba 63:15). Ce lieu dtude tait ouvert tous, comment peut-on donc dire que seul Avraham enseignait la connaissance de D. ses contemporains? Le Migdal Oz (ad. loc.), ainsi que Rabbeinou Shem Tov, fils de Rabbi Avraham Bar Gaon le Spharade, expliquent la diffrence entre Shem et Evr, et Avraham. Shem et Evr, effectivement, protestaient contre lidoltrie de leurs proches et leur enseignaient la vraie foi dans leurs maisons dtude mais ils nont pas risqu leur vie pour sanctifier le Nom de D. comme Avraham qui prenait des risques et se mettait en danger en brisant publiquement les idoles, en convertissant les masses et en les amenant la connaissance de D., comme il est dit (Brshit Rabba 39:21, Shir HaShirim Rabba 1:22): Avraham convertissait les hommes et Sarah les femmes. Ctait une entreprise trs courageuse, et ce nest pas sans raison quil sappelle Avraham HaYvri, lHbreu, car il se trouvait dun ct du monde, et tous les autres se trouvaient de lautre ct (Brshit Rabba 42:13, Pessikta Rabba 33). Il allait vers les gens et amenait ceux qui taient dans lerreur la connaissance du Crateur, et leur apprenait Laimer. Jusquici nous navons mentionn que trs peu de choses concernant la qute dAvraham. Nombre de questions se posent, que nous tenterons dlucider: 1. Les commentateurs demandent: comment il se fait quAvraham soit justement celui qui a dit Loth: Spare-toi de moi, si tu vas gauche jirai droite, et si tu vas droite, jirai gauche (Brshit 13:9)? Autrement dit: je ne veux pas de ta compagnie, alors que par ailleurs il a risqu sa vie pour sauver Loth son neveu dans la guerre contre les cinq rois, comme il est crit (ibid. 14:14): Et Avraham apprit que son neveu tait captif, et il a arm ses gens... (voir Rashi, ibid. 13:9). Comment donc a-t-il pu repousser Loth alors quil runissait les masses autour de lui pour servir D.? 2. Elizer, le serviteur dAvraham alla Haran chercher une femme pour Yitshak. Il sarrta prs dun puits, et l tous les signes quil stait donns pour reconnatre la femme digne de son matre se rvlrent. Il vit aussi que les eaux du puits montent delles-mmes vers Rivka (Brshit Rabba 60:5). Rivka remplit les cruches, elle lui donna boire, et abreuva aussi les chameaux (Brshit 24:18-20). Elizer comprit alors que D. avait dirig ses pas et il remit Rivka un anneau dor et deux bracelets (ibid. 24:22). La jeune fille courut raconter sa mre et sa famille tout ce qui tait arriv (ibid. 24:28), elle leur fit savoir que le serviteur dAvraham tait arriv et lui avait donn des bijoux en or. Aprs cela, la Torah nous raconte que Rivka a un frre du nom de Laban. Laban sort en courant vers le serviteur qui se trouve auprs du puits (ibid. 24:29). Pourquoi court-il si vite? demandent nos Sages. Et ils rpondent: Lorsquil vit lanneau en or (ibid. 30) il se dit que cet homme tait riche, et il convoita sa fortune (Yalkout Brshit 109, Rashi ad. loc.). Il voulait le dpossder, ou le tuer pour prendre tous ses biens. Et alors, il est crit (ibid. 30): Il sapprocha de lhomme qui se tenait ct des chameaux, auprs du puits. Pourquoi la Torah a-t-elle besoin dajouter ct des chameaux? Les Sages expliquent (Yalkout ibid. 109) quElizer a prononc le Nom de D. et sest lev dans lair avec les chameaux. Voyant quElizer tait un homme exceptionnel, Laban sest rsign et lui a dit (ibid. 24:31): Sois le bienvenu, bni de D., jai prpar la maison et un endroit pour les chameaux. Quel est le sens de jai prpar la maison (littralement dans le texte: Jai vid la maison)? Les Sages expliquent (Brshit Rabba 60:7, Iguereth Brshit 16): Jen ai retir toutes les idoles.

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De deux choses lune: ou bien Laban vide sa maison des idoles afin daccueillir Elizer, ou bien il sort en courant dans lintention de voler sa fortune? Comment rendre compatibles ces deux intentions contradictoires? Car sil vide sa maison pour recevoir Elizer, pourquoi court-il afin de voler ses biens? 3. Il faut comprendre la conduite de Laban. Nous constatons quil avait une certaine foi en D. puisque lorsque Rivka part avec Elizer, il lui dit (Brshit 24:60): Notre sur! Puisses-tu devenir des milliers de myriades! ce que Rashi explique ainsi: Nous souhaitons que ta descendance vienne de cet homme et pas dun autre (Voir Brshit Rabba 60:13, Yalkout Brshit 109). Sil croit aux bndictions du Ciel, pourquoi est-il idoltre? Dautre part, il a aussi des traits de caractre mprisables, au point que la Torah tmoigne de lui (Dvarim 26:5): LAramen qui voulait anantir mon pre... et il est dit aussi quil voulait tuer Elizer en lempoisonnant (Brshit Rabba 60:12, Yalkout 109). Est-ce dire que Laban tait plus hassable que Essav qui voulait tuer Yaakov? Pour rpondre ces questions, il faut comprendre que le sentiment qui dtourne le plus du service de D. et empche de surmonter les preuves, est la cupidit. Nous voyons, propos des Enfants dIsral, que la faute du veau dor fut cause par largent et lor que D. leur donna en abondance dans le butin reu en Egypte et la Mer des Joncs (Brachot 32a), comme il est crit (Osha 2:10): Je lui ai donn de largent et de lor en abondance, et il en a fait des idoles. Ce nest pas sans raison que lhomme prie D.: Ne me donne ni la pauvret ni la richesse... (Mishley 30:8). Mais lpreuve de la richesse est plus pnible que lpreuve de la pauvret. Jai dj soulign que lorsque D. a dit Avraham de quitter Haran, ctait pour lui une dure preuve, lpreuve de la richesse, puisque D. lui avait promis de lenrichir, comme le disent les Sages (Bamidbar Rabba 11:4). Avraham aurait pu ne pas triompher de cette preuve et risquait dtre dtourn du service de D. Cest le cas lorsque quelquun se juge vertueux et croit craindre D. alors quen fait, il aime accumuler les richesses pour les jouissances quelles lui procurent. Il faut apprendre avoir plus de considration pour ses biens que pour son propre corps (Sotah 12a, Houlin 71a), non pas pour jouir de ses richesses, D. nous en prserve, mais pour les utiliser pour pratiquer les commandements et faire de bonnes actions. Rabbeinou HaKadosh nous sert dexemple. Il tait incomparablement riche, mais il nutilisa pas sa fortune pour lui-mme. Avant de mourir il leva les deux mains au ciel et attesta que mme mon petit doigt na pas joui des biens de ce monde (Ktoubot 104a). Les Sages ajoutent (Brachot 57b, Avoda Zara 11a) propos du verset: Tu portes deux peuples dans ton ventre (Brshit 25:23), il sagit de Rabbi [Rabbeinou HaKadosh] et de Antoninus qui avaient sur leur table, t comme hiver, des radis et du raifort. Rabbi se contentait de peu: Il na pas joui des biens de ce monde, mais nombreux taient les gens qui mangeaient sa table (voir Tossafot, Avoda Zara 11a). Pour lui-mme, Rabbi se suffisait de peu, mais pas pour les autres. De mme (Yoma 35b) les Sages disent de Rabbi Elazar ben Harsoum quil tait trs riche. Il avait reu de son pre en hritage mille villes sur les continents, et mille bateaux sur les mers. Et malgr sa grande richesse, il nemportait pour chaque jour de voyage quune outre de farine quil portait sur le dos, et il allait de ville en ville, et de contre en contre, afin dtudier la Torah. Et les Sages disent aussi propos dElizer, le serviteur de Avraham, quil tait riche, puisquil est dit de lui (Brshit 24:2): celui qui gouvernait tous les biens [dAvraham]; sa richesse, malgr tout, ne la pas empch dtudier la Torah. Il ressort de ce que nous avons dit que si lon ne rsiste pas lpreuve de la richesse, on risque den venir se croire vertueux. Il faut rsister lpreuve de la richesse et de largent, comme il est dit (Dvarim 6:5): Tu aimeras lEternel ton D. de tout ton cur, de toute ton me et de toutes tes forces. Quel est le sens du mot modecha, de toutes tes forces? Avec tout le pouvoir que te confre ton argent (Brachot 54a). Il est impossible daimer la fois D. et largent. Cest une grande preuve pour chaque homme riche qui craint D. Celui qui ne sattache pas la Torah, qui ne soutient pas ceux qui ltudient, et qui ne distribue pas ses biens aux ncessiteux, na pas surmont lpreuve de largent, et mme sil distribue ses biens, mais contre-cur, il perd tout mrite, car il ne sest pas dtach de lamour des biens. Daprs les livres dthique, lorsque nous donnons aux pauvres, nous ne devons pas le faire comme pour nous dbarasser dune obligation, mais en ressentant dans le cur que cest un devoir damour, dans le sens o il est dit: tu aimeras ton prochain comme toi-mme (Vayikra 19:18). Nous devons ressentir ce qui manque aux autres avec la mme acuit que nous ressentons ce qui nous manque. Cest l une grande qualit.

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Pahad David Largent dtourne de la vie spirituelle

Ceci dit, revenons notre premier sujet, le dsaccord entre Avraham et Loth son neveu. Nous savons que Loth a appris dAvraham accueillir des htes (Brshit Rabba 50:8, Pirkey DRabbi Elizer 25), au point que nous le voyons se mettre en danger pour ses invits lorsquil soppose aux gens de Sodome qui dsirent tuer Loth et capturer ses htes, (Brshit 19:4-9). Il a transmis cette noble qualit sa famille, car il est dit dune de ses filles, quelle donna du pain aux pauvres, et que les gens de Sodome lont brle pour ce crime (Sefer HaYashar 14, Yad Yossef, page 21). Ce Midrash se rfre au verset (Brshit 18: 20): Le cri de Sodome et Gomorrhe est grand, la perversit est excessive. Mais par ailleurs, Loth tait tellement attach ses biens quil tardait sortir de la ville pour pouvoir sauver ses richesses (Brshit Rabba 50:17, Rashi Brshit 19:16), tandis que les anges le pressaient de sauver sa vie (ibid. 19:17): Quil te suffise de sauver ta vie et la vie des tiens, ne tarrte pas de largent! Lamour de largent dominait Loth. Il est crit (ibid. 13:7): Il y eut une dispute entre les bergers du troupeau dAvram et les bergers du troupeau de Loth. Quel tait le sujet de cette dispute? Les chameaux dAvraham ne broutaient pas dans les champs des autres, tandis que les troupeaux de Loth se nourrissaient par vol (Brshit Rabba 41:5, Rashi ad. loc.). Bien que Loth ait aid les ncessiteux et fait de bonnes actions, la cupidit et mme la tendance au vol le dominaient. Les Sages lincluent dans la maldiction: que le nom des mchants pourrisse (Mishley 10:7) pour stre spar dAvraham et avoir plant ses tentes jusqu Sodome (Brshit 13:12), un lieu dont il est dit: Les gens de Sodome taient mchants et pervers, ce qui ne la pas empch dhabiter parmi eux (Yoma 38b), car comme eux, il avait une tendance au vol, et de plus, il est dit (Souca 56b): Malheur au mchant et malheur son voisin. La cupidit le dominait. Comme nous le savons, D. hait les voleurs, comme il est crit (Thilim 11:5): Le mchant et celui qui aime la violence, Il les hait de toute son me et larrt de mort de la gnration du dluge ne fut scell que lorsquelle commit des vols (Sanhdrin 108a). Et donc Avraham dit Loth: Spare-toi de moi, je te prie... (Brshit 13:9), car il ny a pas lieu de donner aux pauvres de largent vol, ce serait obir un commandement par la transgression dun autre (Souca 30a) et cest le Satan qui pousse voler, piller, et ensuite donner cet argent aux pauvres. Avraham dit Loth: sil test difficile de surmonter ton amour de largent au point de voler les autres, nous ne pouvons pas servir D. ensemble. Mon argent nest pas comme le tien, le mien est la proprit de tous et prt subvenir aux besoins du ncessiteux, sans priver personne. Par consquent, spare-toi de moi, je te prie. Il mest difficile de te le demander, mais je te prie de te sparer de moi, car jai enseign tout le monde lhonntet. Il est impossible de craindre D. et tre en mme temps un voleur rempli de lamour du gain afin de jouir des plaisirs quil offre. Cela mne voler afin daccumuler davantage de richesses, sans connatre de limites. Il sera difficile de convaincre une personne avide de jouissances de se conduire correctement parce que pour elle, renoncer ses plaisirs personnels exige trop defforts. Loth ne fut sauv de Sodome que parce quil bnficia du mrite dAvraham, et parce que le Messie (David) est lun de ses descendants (Zohar I 79a). Il est vident que du moment o il choisit la voie qui mne la ruine, il tait parfaitement interdit de rester en sa compagnie. Cela nous permet aussi de comprendre Laban lAramen. Dun ct il avait foi en D., et sans aucun doute il avait connaissance des miracles raliss pour Avraham. Trah lui-mme, le pre dAvraham sest repenti la fin de sa vie (Brshit Rabba 30:4, Tanhouma Shemot 18, Zohar III 111b), Laban savait donc quil ne faut servir que D. Mais lamour de largent et des plaisirs quil peut procurer battait si fort dans son cur que cela lui fit perdre la tte et la priv de sa place dans le monde venir, comme il est dit (Avot IV:21, Pirkey DRabbi Elizer 13): La jalousie, les dsirs, et la recherche des honneurs excluent lhomme de son monde. Dune part, Laban vida la maison des idoles et proclama devant le monde entier quil reconnaissait la souverainet de D., et par ailleurs, il sortit en courant dans lintention de tuer Elizer et de lui voler son argent. Par la suite aussi, lorsque Yaakov arriva chez Laban, il est crit (Brshit 29:13): Et Laban court laccueillir et il le tient dans ses bras et lembrasse, et les Sages (qui nattribuent pas de bonnes intentions aux hommes dont on connat la mchancet) disent: Laban pensait que Yaakov aussi apportait beaucoup dargent, comme Elizer. De plus, Laban na jamais cess de pratiquer lidoltrie et cest la raison pour laquelle Rahel lui vola ses idoles, comme il est crit (Brshit 31:34): Rahel prit les idoles de son pre. Largent la rendu fou, il lui a fait perdre la tte et trahir D. Cela peut arriver

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nimporte qui, car tout le monde risque de se laisser sduire par lamour de largent. Pour tre prserv de ce danger, laide du Ciel est essentielle. Ce fut la faute de Korah. Les Sages disent de lui (Pessahim 119a, Sanhdrin 110a) quil trouva en Egypte un centime de la fortune de Yossef, mais la richesse nest amasse que pour le malheur de celui qui la possde (Kohlet 5:12). Korah na pas surmont lpreuve de la richesse et il en est mort (Pessahim 119a, Rashbam ad. loc.). Bien quil ft rudit, quil ait eu la tche sacre de porter lArche dAlliance (Bamidbar 18:3) et quil possdt aussi le don de prophtie, il utilisa le pouvoir que lui donnait sa richesse pour sopposer Mosh Rabbeinou. La fortune donne lhomme son statut (Pessahim 119a, Bamidbar Rabba 18:1), comme il est crit: Tous les biens qui laccompagnent (Dvarim 11:6), et Korah utilisa la sienne pour contester lautorit de Mosh. Ce fut aussi la faute de la gnration du dsert, la gnration qui avait reu la connaissance (Vayikra 9: 1, Pessikta Rabba 14:9), car elle rigea le veau dor avec largent et lor du butin dEgypte et de la mer des Joncs, comme nous lavons expliqu plus haut. Cet argent et cet or lui ont fait perdre la tte et trahir D., le Ciel nous en prserve. Largent met lhomme lpreuve, afin de vrifier sil est prt se sacrifier pour sanctifier le Nom de D. Il est possible de dclarer du bout des lvres quon aime D. et quon est prt donner sa vie, comme il est dit dans notre profession de foi, le Kriat Shema. Mais comment savoir si on est effectivement prt le faire de tout son cur et de toute son me si lon ne sest jamais trouv dans la situation de sacrifier sa vie? Peut-tre disons-nous des choses sduisantes du bout des lvres, des paroles mensongres... (Thilim 78:36-37), et quen fait, nous navons pas lintention de sacrifier notre vie? Il est vrai que D. connat le fond des curs et les penses de chacun et Il sait qui est prt se sacrifier, sincrement, sans hsiter. Mais comment cet homme lui-mme peut-il le savoir? Il nous semble humblement que cest la raison pour laquelle il est crit dans le Kriat Shema (Dvarim 6: 5): Tu aimeras lEternel ton D. de tout ton cur, de toute ton me et de toutes tes forces. Pour de toute ton me les Sages ont dit (Brachot 54a, Sifri Dvarim 6:5): Mme sIl te prend ton me, et pour de toutes tes forces ils ont dit (ibid.) avec toute ta fortune. Comment peut-on savoir si lhomme est prt donner effectivement sa vie par amour de D. mme sIl prend son me? Cest pourquoi il est dit la fois de toute ton me et de toutes tes forces, avec toute ta fortune. La mise lpreuve de la fortune permet de savoir si lhomme est prt donner aussi son me, car nous savons combien lhomme est attach son argent. Sil est prt donner son me, cest--dire toute sa fortune pour lamour de D., il sensuit que lorsquil lui sera demand de sacrifier effectivement sa vie, il nhsitera pas un seul instant, et donnera sa vie pour D. avec joie. Il est crit (Seder HaDorot) que Rabbi Y. ben Yilem a demand au prophte Eliyahou: qui se trouvera mes cts au Jardin dEden? Il lui rpondit: Nanass le boucher. Est-ce possible, demande le Tzadik avec tonnement, que je sois en compagnie de Nanass le boucher? Il alla demander ce boucher quoi il attribuait un tel mrite. Le boucher lui rpondit: Jai des parents qui sont vieux et je dpense tout mon argent pour quils puissent vivre honorablement. Selon une autre version, il aurait rpondu: Une fois, je suis all acheter une bte pour ma famille et moi, mais en route jai rencontr une femme qui pleurait, elle avait besoin dargent pour marier sa fille et je lui ai donn tout largent que javais. Cest donc quil avait triomph dune preuve importante, car le boucher et toute sa famille vivaient de cet argent, et en le donnant, il risquait sa vie et la vie des siens. Mais en donnant tout son argent, il a montr son amour pour D., de toutes ses forces. Il est capable de donner entirement D., tant son argent que sa vie, et mrite de se trouver au Jardin dEden avec les plus minents Justes. Cet homme, qui agit avec une telle grandeur dme et une telle noblesse est sans aucun doute capable de sacrifier sa vie pour sanctifier le Nom de D. Chez Loth, chez Laban, chez Korah, lamour de largent prit le dessus. A leur sujet, il est dit (Mishley 11:4): La fortune ne sera daucun secours au jour de la colre. Laban a vid sa maison des idoles qui sy trouvaient, et Korah avait pour tche de porter lArche Sainte, mais bien que conscients de lexistence de D. ils ntaient pas prts sacrifier leur vie pour sanctifier le Nom de D. De mme Loth avait appris dAvraham la connaissance de D. mais il navait pas acquis les qualits requises pour sattacher Lui de tout son cur et de toute son me.

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Avraham demanda conseil Anr, Eshkol et Mamr propos de la circoncision (Brshit Rabba 42:14). Il est difficile de comprendre pourquoi, alors que D. lui ordonne la circoncision, il va demander conseil. Mais il voulait entendre ce quils allaient lui rpondre, afin de savoir sils taient dignes dtre de ses amis ou pas. Il ne voulait pas sassocier qui nest pas sincrement attach D. Ainsi, chacun doit savoir avec qui sassocier, et se sparer dun partenaire susceptible de le dtourner du service de D., et tre prt luimme donner sa vie pour sanctifier le Nom de D.

Les actes des pres sont un exemple pour leurs enfants


Aprs sa victoire, lors de la guerre contre les cinq rois, Avraham fit le serment de ne rien garder du butin pour lui-mme, comme il est crit: Et Avram dit au roi de Sodome: je jure devant lEternel, D. suprme... ni une lanire ni une courroie de sandale, je ne prendrai rien de ce qui est toi, pour que tu ne puisses pas dire: cest moi qui ai enrichi Avram (Brshit 14:22-23). Le Talmud (Sotah 17a, Houlin 89a) rapporte ce sujet: Rava explique: cest parce quAvraham a dit ni une lanire ni une courroie de sandale, que ses enfants furent rcompenss et mritrent deux commandements, la cordelire bleue des Tzitzit et la courroie des Tphilines. La courroie des Tphilines est certainement une rcompense (Rashi ad. loc.), comme il est crit: Tous les peuples du monde verront que tu portes le Nom de D. et ils te craindront (Dvarim 28:10), et Rabbi Elizer HaGadol enseigne (Houlin ibid, Brachot 6a, 57a) que ce verset se rfre aux Tphilines de la tte. Mais quel est le mrite de porter la cordelire bleue des Tzitzit? Il est enseign (Menahot 43b): Rabbi Meir dit: pourquoi la couleur bleue... parce que lazur rappelle la mer, et la mer rappelle le ciel, et le ciel rappelle le Trne de Gloire. Tel est lenseignement du Talmud. Le Rabbin Teboul, directeur de notre Kollel ma demand: Quel est le rapport entre le fait quAvraham ait refus de prendre pour lui-mme des objets de si peu de valeur, quune lanire et une courroie, et le fait que ses enfants aient mrit pour cela les commandements des Tzitzit et des Tphilines? Ces deux commandements sont compts parmi les six cent treize commandements de la Torah. Est-ce dire que si Avraham navait pas fait ce serment et avait pris pour lui ne serait-ce que des lanires ou des courroies de sandales du butin, les Juifs nauraient pas reu les commandements des Tzitzit et des Tphilines, qui sont des commandements de base du Judasme? Il est dit propos des Tzitzit (Bamidbar 15:39): Vous les verrez et vous vous souviendrez de tous les commandements de D. et vous les excuterez. Les Tzitzit rappellent tous les autres commandements. Quant aux Tphilines, ils symbolisent le commandement qui nous lie D. et nous protge, comme le Talmud nous lenseigne (Menahot 43b, Tossefta Brachot VI): D. aime Isral, et Il la entour de commandements - les Tphilines sur la tte et sur le bras (2), les Tzitzit sur le vtement quatre coins (4), la Mezouza sur le montant des portes (1), et cest ce propos que David HaMelech a dit (Thilim 119:164): Je Te louerai sept fois par jour pour Tes lois justes. Le Maharsha (Hidoushey Agadot) crit: D. les entoure de ces sept commandements pour les protger. Est-ce que vraiment, si Avraham avait gard pour lui une lanire ou une courroie de sandale, ses enfants auraient t privs de ces deux commandements tellement importants, au point de perdre cette protection, dautant plus qu propos des Tzitzit, les Sages ont dit (Menahot ibid. Ndarim 25a, Shavouot 29a): Ce commandement quivaut tous les autres commandements de la Torah? Nous constatons ici la grandeur dAvraham. Il a montr ses enfants le chemin de la vertu et de la justice comme il le leur a enseign (Brshit 18:19), afin quils suivent son exemple et sa conduite droite et pure, dans le sens o les Sages disent (voir Sotah 34a): les actes des pres sont un exemple pour leurs enfants. Les actes dAvraham Avinou navaient pour but que de sanctifier le Nom de D. dans le monde. Ctait galement sa seule intention et son seul but lorsquil risqua sa vie dans la guerre contre les rois puissants. Les Sages disent ce propos (Brshit Rabba 43:2) quil nest parti en guerre quavec son serviteur Elizer, ne reculant devant aucun risque pour librer les captifs, les ramener vers D., et sanctifier le Nom de D. publiquement. Avraham a combattu avec courage les cinq rois et les a vaincus. Il avait donc lgitimement le droit de garder une bonne partie du butin sauv de la main des oppresseurs au risque de sa vie. Malgr cela, il fit le serment solennel de ne rien garder, car au moment o il avait pris la dcision daller en guerre, il ne lavait fait que pour sanctifier le Nom de D. et pour librer les captifs afin de leur permettre de vivre sans entraves selon les voies de D.

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Comme nous le savons, les vtements et les chaussures sabment et se dchirent au cours dun dur combat, et donc au moins ces fins, Avraham aurait pu juste titre garder les lanires pour rparer les vtements dchirs, et les courroies pour les chaussures. Avraham a renonc ces objets de peu de valeur, afin que nul ne puisse prtendre que le butin lavait enrichi et rendu prospre. Il voulait que tous sachent, sans lombre dun doute, que sa richesse et sa russite ne lui venaient que de D., comme il est crit (Haga 2:8): Largent est Moi et lor est Moi, dit lEternel, et pour que lon sache quil navait bnfici que de laide de D., et quil ne stait pas enrichi par chance ou grce sa victoire. Cest de cette faon quAvraham a sanctifi le Nom de D. dans le monde. Cela nous permet dexpliquer ce qui rattache Avraham ces deux commandements des Tzitzit et des Tphilines, et comment Avraham a permis ses enfants de les mriter. Bien que ces commandements aient dj t destins aux Juifs puisquils font partie des six cent treize commandements de la Torah, D. a rvl Avraham que pour avoir sanctifi Mon Nom dans le monde, tu as mrit que ces deux commandements fondamentaux qui protgent les Juifs soient ceux qui perptueront le lien entre les Juifs et D. Spcifiquement grce ces deux commandements, D. se souviendra du mrite dAvraham qui tait plein de misricorde et se mit en danger pour sauver les captifs sans penser lui-mme un seul instant. Ainsi, D. protgera les Juifs, et mme sils commettent des transgressions, mme si elles sont nombreuses et graves et quils mritent dtre punis pour leurs fautes, D. veillera sur eux, Il aura piti deux, et Se souviendra en leur faveur du mrite dAvraham. Nous faisons appel ce mrite dans la prire de Yom Kippour: SouviensToi de lalliance dAvraham et du sacrifice dYitshak... et dans la prire Neyla, la dernire de ce jour, au moment o les Portes du Ciel se referment, nous prions D. en invoquant le mrite dAvraham: Notre pre Ta connu depuis le plus jeune ge... et donc Toi aussi souviens-Toi de nous, Tes enfants. Cest une juste rtribution. De mme quAvraham a sanctifi le Nom de D. publiquement, la sanctification du Nom se perptue dans le monde grce ses enfants, car Tous les peuples du monde verront que tu portes le Nom de D. et ils te craindront. Les Juifs sont protgs par le mrite des Tzitzit et des Tphilines en rcompense de tous les efforts dAvraham. Cest vraiment une chose merveilleuse: parce quAvraham a refus de garder une seule lanire et une seule courroie (objets pourtant ncessaires aprs la guerre), ses enfants mriteront dtre protgs, de sanctifier le Nom de D., et dtre attachs Lui. Il est dit (Sotah 17a) que la rcompense du commandement des Tphilines est que tous les peuples du monde sauront que tu portes le Nom de D. et ils te craindront, cest--dire que tous les peuples du monde sauront que tu es attach D., que D. te protge, et alors ils te craindront, car ils auront peur de te faire du mal. La rcompense des Tzitzit est de jouir de la Prsence Divine (ibid.), ce qui est une juste rtribution, puisque ce commandement nous accompagne partout. Cest aussi le sens de ce qui est crit: Tu les verras et tu te souviendras... et vous ne suivrez pas les dsirs de vos curs et de vos yeux... Il nous est interdit de donner la priorit nos intrts personnels, au contraire, il faut suivre la voie dAvraham qui ne pensait quaux autres, et cest alors que porter les Tzitzit nous protge de tout malheur, de toute souffrance, de toute attaque et de tout danger. A prsent, nous pouvons comprendre pourquoi le Talmud enseigne que ces sept commandements protgent lhomme. La mzouza reprsente, comme on le sait, une protection du lieu dhabitation et le Nom Sha-day, compos des premires lettres de lexpression Shomer Daltot Isral, le Protecteur des Portes dIsral, y est inscrit. Ces sept commandements sont sous-entendus dans le verset: Je Te louerai sept fois par jour pour Tes lois justes - tzidkeyha. Ce mot fait allusion au roi de Sodome qui a offert Avraham de partager le butin, et dont le nom est Melchi Tzedek (Brshit 14:18). Je Te louerai sept fois par jour, cest--dire avec ces sept commandements et cela, cause de Tes lois justes, puisque Melchi Tzedek fit savoir tous quAvraham avait refus son offre. Il est possible que tzidkeyha indique le fait que Melchi Tzedek a accueilli Avraham avec du pain et du vin (ibid.). Le pain rappelle la table ainsi que lautel des sacrifices, comme il est crit (Yhezkiel 41:22): Et Il me dit: cest la table dresse devant lEternel. Le prophte avait commenc par mentionner lautel, et termin par la table, pour nous enseigner que lorsque le Temple est construit, lautel pourvoit au pardon, mais aujourdhui que le Temple est dtruit, la table de chacun lui vaut le pardon (Brachot 55a, Haguiga 27a), lexemple dAvraham qui a nourri tous les gens de passage. Le vin fait allusion ce que disent les Sages (Sanhdrin 103b): Le pouvoir dune gorge est immense car elle rapproche ceux qui sont loin. Cest ce que fit Avraham qui rapprochait ceux qui taient

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loin de D. Les Juifs sont sauvs par le mrite de ses actes puisque, eux aussi, suivent la voie dAvraham et sanctifient le Nom de D. Nous avons dit quIsral a mrit les commandements des Tzitzit et des Tphilines en rcompense des lanires et des courroies de sandales quAvraham avait refus de prendre. Le Maharsha (Hidoushey Agadot Houlin 89a) le confirme: La raison principale des Tzitzit et des Tphilines est explique dans la Torah, mais les commandements qui sy ajoutent, comme le cordon de couleur tchelet que lon ajoute aux Tzitzit et les courroies des Tphilines, ont t ajouts en souvenir de la lanire et de la courroie... Cest dire que seuls le cordon de couleur tchelet et le nud des Tphilines proviennent du mrite dAvraham, afin que les Juifs soient intimement attachs D. par son mrite. Effectivement, chacun est oblig de sanctifier le Nom de D. lexemple dAvraham, sachant que si je ne sanctifie pas le Nom de D., qui le fera? Avraham na jamais pens lui-mme, mais uniquement lhonneur de D. Chacun doit ressentir comme un devoir de prendre exemple sur lui et sil le mrite, D. lui rserve une rcompense incommensurable. Mais il est interdit de sattendre recevoir la rmunration de ses actes si lon sert D. avec pit, ou si lon aide les ncessiteux. Car aider celui qui est dans le besoin avec lintention de recevoir une rcompense nest pas lexemple dAvraham, qui na voulu profiter des biens de personne. Il faut aider son prochain sans rien demander en contrepartie, et il est prfrable de recevoir une rcompense accrue dans le monde Venir, comme il est dit (Kidoushin 39b): Il ny a pas de rcompense dans ce monde pour lobissance aux commandements. Celui qui sanctifie le Nom de D. aux yeux de tous, est protg par ses actes en ce monde et dans lautre, les peuples du monde le craignent, et il mrite de jouir de la Prsence Divine. Jai expriment cela personnellement. Une fois, quelquun a profr contre moi des calomnies vraiment grossires. Au bout dun certain temps, le sort a voulu que cet homme fasse faillite, et pour surmonter cette situation, il avait besoin de mon aide car jtais le seul pouvoir le sortir de limpasse dans laquelle il se trouvait. videmment, je lai aid en tout dans la mesure de mes moyens, au point quil put remonter la pente et mme senrichir de nouveau. De plus, je suis all chez lui, jai plac une Mzouza sur le montant de sa porte, je lai bni, etc. Cet homme et sa femme furent trs tonns de mon soutien, au point quils ne savaient que faire pour me remercier. Je navais gard aucune rancune dans mon cur, et javais agi comme sil ne stait rien pass... En fin de compte je leur ai prsent un joli cadeau, un beau portrait du Tzadik le Rabbin Hayim Pinto, que son mrite nous protge. Ils mont remerci avec effusion et les larmes coulaient de leurs yeux, et moi je continuais les bnir... Aprs cela, ils voulurent me payer pour me remercier de mon aide, mais jai refus leur don. Ils en ont pleur, mais je les ai consols de tout. Et effectivement, le couple a sincrement fait teshouva, avec laide de D., et pratique aujourdhui la Torah et observe les commandements. Si javais accept leur argent en rtribution, ils auraient jug cela suffisant pour lexpiation de la mdisance, et ils nauraient pas accompli un retour sincre D. Jai pens quil faut suivre la voie dAvraham qui na rien pris pour lui-mme et qui a aid les autres sans sattendre une rmunration. Effectivement, cest ce que jai fait, et je leur ai dit: Il ny a pas de rcompense pour la pratique des commandements en ce monde (Kidoushin 39b), le Patron paiera fidlement le salaire de ton travail (Avot II:21) et il faut pratiquer les commandements sans sattendre en recevoir le salaire. Si javais accept leur rcompense, ils auraient t convaincus que je navais agi que par intrt, et ils nauraient ressenti aucune obligation envers D. Mais ils ont sincrement mdit les vnements et ils ont compris o se trouvait la vrit... et ils se sont repentis de tout cur. Nous comprenons prsent un autre pisode dans lequel Avraham a prouv combien il tait bienveillant. Lorsque Avraham se rend en Egypte avec sa femme Sarah, il lui dit (Brshit 12:13): Je te prie de dire que tu es ma sur, pour que je sois heureux grce toi et que jaie la vie sauve. Ceci est difficile comprendre, car Avraham tait un homme courageux, qui avait combattu Nimrod, qui fut jet dans la fournaise dont il fut sauv, qui est intervenu dans la guerre des quatre rois contre les cinq rois, et ici, Avraham montre aux Egyptiens quil les craint? Naurait-il pas pu se battre contre les Egyptiens et sauver sa femme Sarah? Il est vrai quAvraham aurait pu se battre contre les Egyptiens, mais il tait misricordieux, comme il est crit (Micha 7:20): Tu as donn la vrit Yaakov, la bienveillance Avraham, et il essayait toujours de transiger plutt que de combattre. Avant de dclarer la guerre, il faut proposer la paix, comme il est crit

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dans la Torah (Dvarim 20:10): Lorsque tu tapprocheras de la ville pour lui faire la guerre, tu lui offriras la paix. Cest ce qua fait Avraham. Pour lui-mme il ne fit pas la guerre et prfra supporter lpreuve, mais lorsquil sagissait de courir la dfense des autres, de Loth, ou de sauver les captifs, il partit en guerre courageusement contre les rois puissants, ceci afin de sanctifier le Nom de D. dans le monde.

Combien grandes sont Tes bonts...


Il est crit (Brshit 15:1): Aprs ces vnements, lEternel apparut Avram dans une vision, disant: Ne crains rien Avram, Je te protge, Rabbi Levi et les autres Sages discutent de cela (Brshit Rabba 44:5). Rabbi Levi dit: Avraham avait peur, il se disait: parmi les populations que jai tues, se trouvaient peuttre un homme innocent ou quelquun qui craignait D., tandis que les Sages disent: Avraham avait peur et se disait: Je fus jet dans la fournaise et je fus sauv (Brshit Rabba 39:18), Je suis parti en guerre contre les rois et je fus sauv (Brshit 14:15), et il pensait: Jai dj reu ma rtribution en ce monde, et il ne me reste rien faire valoir dans le monde venir. D. lui dit: Ne crains rien Avram, Je te protge, tout ce que Jai fait pour toi en ce monde, Je lai fait gratuitement, ta rcompense reste entire dans le monde venir, comme il est crit (Thilim 31:20): Combien grandes sont les bonts, que Tu rserves pour ceux qui Te craignent... Cela nous permet dexpliquer que la peur dAvraham avait uniquement pour cause le fait que bnficier dun miracle reprsente un dsavantage car ce bnfice est pris sur le compte de ses mrites (Shabbat 32a). Dautre part: Il est interdit de compter sur des miracles (Pessahim 64b), et cest pourquoi D. dit Avraham: Ne crains rien Avram, Je te protge, ta rcompense sera grande... Cela demande une explication. Avraham ne sattendait pas des miracles, au contraire, il avait lintention de se sacrifier pour sanctifier le Nom de D. Pourquoi a-t-il peur lorsque D. accomplit pour lui un miracle auquel il ne sattendait pas? Effectivement Avraham navait pas demand D. de raliser un miracle, mais en fin de compte il en avait tout de mme tir un profit personnel, et donc, il craignait juste titre que le bnfice de ce miracle ne ft soustrait de ses mrites. Cest pourquoi D. lui dit: Ne crains rien Avram, Je te protge, ta rcompense sera trs grande, cest--dire, bien que tu aies bnfici dun miracle, cela ne diminuera en rien ta rcompense. Et cela, parce que cet avantage, le miracle dont tu as bnfici, te fut donn en tant que don gratuit. Il ne diminue en rien tes mrites, ni dans ce monde ni dans le monde Venir. Malgr tout, beaucoup de dtails dans cette section demandent tre prciss: 1. Pourquoi Avraham a-t-il peur que ses mrites ne soient diminus dans le monde venir parce quil a t sauv dOur Kassdim? Au contraire, il aurait d tre heureux davoir bnfici dun miracle et davoir sans aucun doute multipli ses mrites pour avoir accept de se jeter dans la fournaise ardente, au milieu des flammes normes. Il ne tire personnellement aucun avantage de cet acte, et il ne la fait que pour proclamer: lEternel est D., il nen est point dautre (Dvarim 4:35). Il ne fait aucun doute que son but tait la glorification du Nom de D. et donc Avraham aurait d sauter de joie, et ne pas avoir peur! 2. Il est certain quAvraham ne sest pas jet dans la fournaise en comptant sur un miracle, puisque les Sages ont dit (Sifra Vayikra 22:32): Quiconque se sacrifie en comptant sur un miracle, ne bnficie pas dun miracle. Haran, le frre dAvraham, avait fait un pari: Si Avraham est sauv, je suis des siens et avec D. et je me jetterai aussi dans la fournaise, sinon, je reste avec Nimrod (Brshit Rabba 39:18), et en fin de compte, il fut brl dans la fournaise o il stait jet en comptant sur un miracle. Il est donc vident quAvraham sest jet dans la fournaise en pensant quil y brlerait. Mais D. a vu quAvraham tait fidle, comme il est crit: Tu as trouv son cur fidle Toi (Nhmia 9:8), et Il a voulu le sauver du feu, et pourquoi donc sa rcompense en serait-elle diminue? Est-il possible dtre la fois battu et de payer des dommages? Il ne fait aucun doute que le miracle tait un don inconditionnel qui ntait pas retenu sur ses mrites. Comment expliquer la peur dAvraham? 3. Une autre difficult subsiste. Nous viendrait-il lesprit de penser quAvraham partit en guerre contre les rois afin de se faire une rputation dhomme courageux, de rentrer chez lui couronn de victoires, et de senrichir du butin captur? Son intention tait pure et dsintresse, il voulait librer les captifs, comme il est crit (Brshit 14:14): Avraham apprit que son neveu avait t fait captif et plus loin (verset 16): Et il reprit tous les biens et aussi Loth son frre, car il partit en guerre pour sauver les opprims de lemprise

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de leurs oppresseurs. Ce faisant, il a sanctifi le Nom de D. aux yeux de tous. Mme les peuples les plus loigns, en entendant ces hauts faits, aimeront D. de tout cur car ils admireront lesprit de sacrifice dAvraham et la puret de son intention en accourant au secours des innocents. Dautant plus quen fin de compte, tous les peuples sauront que la victoire ne vient que de D., qui a fait des miracles afin de rvler son Omniprsence. De quoi donc Avraham a-t-il tellement peur? 4. Nous devons comprendre pourquoi D. dit Avraham que la rtribution reue tait un don inconditionnel. Au contraire, Avraham mrite en toute justice dtre rtribu, et dans ce cas, en quoi est-ce un don gratuit? Si D. ne le sauve pas, qui enseignera Sa voie et qui proclamera Sa souverainet, comme la fait Avraham (Brshit Rabba 59:8)? Et si Avraham navait pas t sauv, les adeptes quil avait runis autour de lui auraient t perdus pour toujours car ils auraient repris leurs mauvaises habitudes en voyant que le serviteur fidle de D. navait pas t sauv, et cela aurait affaibli leur foi dans la Providence Divine. 5. Nous devons aussi expliquer en quoi consiste la rcompense rserve aux Justes dans le monde venir, et pourquoi Avraham avait tellement peur de la perdre et den tre priv, au point que D. dut lui dire: Ta rcompense sera trs grande? 6. Enfin, Avraham ignorait-il quil ny a pas de rcompense pour la pratique des commandements en ce monde (Kidoushin 39a)? Pourquoi pense-t-il quil a reu en ce monde la rcompense qui lui tait rserve dans le monde venir, pour avoir t sauv de la fournaise ardente et avoir triomph dans la guerre contre les rois? Heureux celui qui craint toujours (Mishley 28:14). Ce verset dcrit la qualit particulire dAvraham qui progressait de jour en jour dans le service de D. comme il est dit: Ils avancent avec une force toujours croissante (Thilim 84:8), et il ressentait chaque jour ses imperfections de la veille. Atteignant chaque jour un niveau suprieur, il avait limpression que sa conduite de la veille tait dfectueuse. On raconte propos du Rav Saadya Gaon (Lekah Tov Dvarim 225) quil se repentait chaque jour. Il expliqua ses lves: Aujourdhui je comprends que ce que jai fait hier est une faute en ce qui me concerne, par la perception laquelle je suis parvenu aujourdhui. Cest pourquoi je me repens. Cest aussi la raison pour laquelle Avraham ressentait quil ne mritait pas les miracles dont il avait bnfici, dautant plus quil navait pas encore reu lalliance de la circoncision, lempreinte sacre ne lui avait pas encore t rvle. Il ressentait que sil avait t sauv malgr son manque de perfection, la rcompense rserve dans le monde venir, le monde de la vrit, en aurait t diminue. Il y a plus. Justement parce quil nexiste pas de rcompense la pratique des commandements en ce monde, il lui tait difficile de recevoir deux rcompenses (une fois lorsquil fut sauv de la fournaise, une autre fois lorsquil fut sauv dans la guerre contre les rois), et donc il aurait prfr mourir dans un acte de sanctification plutt que de perdre sa place dans le monde venir, cette place, propos de laquelle il est crit: Combien grandes sont les bonts que Tu rserves ceux qui Te craignent. Les Sages disent du monde venir (Brachot 34b): aucun il humain ne la vu (Ishaya 64:3), mais ils nous le rendent sensible en disant (Avot IV:17): Un instant de batitude dans le monde venir vaut mieux que toute la vie en ce monde. Qui accepterait, ne serait-ce que le temps dune pense furtive, de renoncer la jouissance de la Splendeur divine dans lautre monde, en change de la russite temporaire et matrielle en ce monde? Seul un ignorant ou un imbcile peuvent vouloir renoncer la vie ternelle pour la vie phmre en ce monde, un monde matriel et infrieur. Le bonheur du monde Venir nest-il pas une chose merveilleuse laquelle toute me aspire au cours de sa vie en ce bas monde? Puisque le but de tous les hommes vertueux en ce monde, dans tout ce quils font au cours de leur vie, est de pouvoir parvenir la jouissance de toutes les bonts qui leur sont rserves dans le monde venir, et de baigner dans la Splendeur divine dans lautre monde, sans sattendre recevoir de rcompense en ce monde, D. agit envers eux de mme, et Il veille ne diminuer en rien leur part dans lautre monde. D., qui est la cause de toutes les causes, dirige le cours des vnements de manire leur donner inconditionnellement des bienfaits de Son trsor, afin quils parviennent se perfectionner. Ceux qui tudient la Torah nont de repos ni en ce monde ni dans lautre (Brachot 64a). Les Sages nous expliquent que ce qui occupe les Justes en ce monde les occupera aussi dans le monde Venir. Sil en est ainsi, Avraham qui en ce monde soccupait de ramener les hommes vers D., qui nourrissait les

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affams, soignait les malades et les gurissait, continue sans aucun doute, dans lautre monde, avoir la mme influence, plus grande encore quen ce monde, puisque lopacit du monde matriel qui spare le corps de lme a disparu, et alors il peut rconcilier le cur de Ses enfants avec leur Crateur et les amener un repentir total. Cela nous permet de comprendre clairement pourquoi Avraham a peur. Il a doublement et triplement peur. Dune part il craint de ne pouvoir continuer ses saintes activits dans le monde venir, dans le cas o ses mrites seraient rduits cause des miracles dont il a bnfici en ce monde. Dautre part, il craint que le fait mme davoir t sauv, bien quil ne mrite pas de tels miracles, lempchera de jouir pleinement de la batitude qui lui est rserve dans le monde venir. Avraham avait donc trs peur, jusqu ce que D. lui apparaisse et le console en lui disant: Tout ce que Jai fait pour toi en ce monde, Je lai fait sans condition, et ta rcompense est intacte dans le monde venir. Bien quapparemment, la Justice mobligeant te sauver, car nul autre que toi ne peut proclamer Ma souverainet dans le monde, ce nest pas pour cela que Jai agi. Au contraire, si tu tais mort en sanctifiant Mon Nom, cela aurait accru dautant Ma gloire en ce monde, comme il est dit: Je suis sanctifi par ceux qui Me sont proches (Vayikra 10:3) et les Justes sont plus grands dans leur mort que durant leur vie (Houlin 7b). Mais en fait, tu ne seras en rien priv de ta rcompense dans lautre monde, et tous les bienfaits que Je tai accords en ce monde, Je te les ai accords gratuitement. Cela est assez troublant. Avraham, malgr sa vertu, ne se jugeait pas lui-mme digne, comme il est dit: Je ne suis que poussire et cendre (Brshit 18:27). De mme, chacun doit se sentir indigne et honteux lorsquil demande D. une faveur, et de plus il doit savoir que ce sentiment de honte le submergera dans lautre monde, lorsquil comprendra quil a chang la rcompense rserve dans lautre monde pour un bnfice passager en ce monde... Cest que les penses de la Torah sont fort loignes des penses du commun des mortels... Jai constat que les gens pensent le contraire: ils exigent de D. une rcompense en ce monde pour chacune de leurs bonnes actions et ils ne prennent pas cur de rflchir et de comprendre que leur rcompense en sera diminue au centuple dans lautre monde. Il ne faut donc dans ce monde demander D. que la faveur de dons gratuits, dans le sens o il est crit: Je ferai grce qui Je veux faire grce et Je serai misricordieux envers qui Je veux tre misricordieux (Shemot 33:19), afin de ne pas tre couvert de honte et ne pas chouer sans espoir dans lautre monde - le monde ternel. Il convient vraiment de mditer les qualits des hommes vertueux, desquels les Sages ont dit (Sifri, dbut de Vaethanan): Les Justes, bien que susceptibles de mettre en valeur leurs bonnes actions, ne demandent D. que des dons gratuits. Il est clair que lorsquun miracle se produit pour un Juste, il ignore sil lui est octroy inconditionnellement, ou sur le compte de ses mrites. Le Juste peut parfois recevoir en ce monde la rcompense de ses actes, au dtriment de sa rcompense dans lautre monde. Ce fut le cas de Rabbi Elizer, qui ses lves rendirent visite lorsquil tait malade (voir Sanhdrin 101b). Rabbi Akiva, en voyant la souffrance de son Matre, comprit quil recevrait une rcompense entire dans lautre monde. Rabbi Elizer lui demanda: Akiva, est-ce que jai failli en quoi que ce soit la Torah? Rabbi Akiva lui rpondit: Notre Matre nous a enseign quil ny a pas dhomme en ce monde qui fasse le bien et ne faute pas (Kohlet 7:20). Mais le Juste choisit de se repentir par amour de D. et alors ses fautes, mme intentionnelles, sont comptes comme des mrites (Yoma 86b), et il accepte avec amour toutes les souffrances de ce monde plutt que de voir sa rcompense diminue dans lautre. Lorsque quelquun jouit de la faveur divine et de la tranquillit en ce monde, sans subir de souffrances et sans essuyer dchecs, il est certain quil sagit dun don gratuit et dun bienfait inconditionnel. Ce fut le cas de Rabbeinou HaKadosh, qui associait la connaissance de la Torah la clbrit (Guitin 59a), chose inconnue en ce monde depuis le temps de Mosh Rabbeinou. Il ne manquait sa table ni radis, ni raifort, ni courgettes, t comme hiver (Avoda Zara 11a). De tels aliments montrent quil ne cherchait pas le luxe, les dlicatesses et les bienfaits de ce monde et effectivement, avant de mourir, Rabbi, levant les mains au ciel, dit: je nai fait qutudier la Torah et pas mme mon petit doigt na joui des biens de

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ce monde (Ktoubot 104a). Il ne voulait pas profiter des bienfaits et des richesses quil possdait en ce monde, afin de ne pas perdre la rcompense qui lui tait rserve dans lautre monde, le monde ternel, le monde o ne rgne que le Bien. Il est du devoir de chacun de renforcer sa pratique de la Torah, des commandements et des bonnes actions, prier D. de lui rserver sa rcompense dans le monde venir, ne dpendre en tout que de la grande misricorde de D., nesprer quen Sa bienveillance, et ne recevoir tous les bienfaits que comme des dons gratuits. Ajoutons que si quelquun jouit dun miracle pris sur le compte de sa rcompense dans lautre monde, et quil sinquite de ce quil va perdre dans lautre monde (comment savoir si ce bienfait est un don gratuit ou une rcompense pour ses mrites?), alors D., dans son infinie bont, lui restitue la rcompense de tous ses mrites qui nest en rien diminue puisquun tel homme, de lui-mme, craint ce miracle et ne le dsire pas. Il est possible que ce soit la raison pour laquelle, aprs avoir bnfici dun miracle ou dun profit quelconque, nous louions D., comme il est crit (Thilim 13:6): Je veux chanter les louanges de lEternel car Il ma combl de Ses bienfaits, car nous reconnaissons ce bienfait comme un don gratuit de la Providence. Ajoutons humblement que nous, les enfants dAvraham, Yitshak et Yaakov, lorsque nous sommes accabls de souffrances, de soucis, ou par une maladie, D. nous en protge, nous faisons appel au mrite des Patriarches, ou nous nous prosternons sur la tombe des Justes, ou nous distribuons la dme des uvres de bienfaisance, ou nous faisons un vu quelconque, comme le disent les Sages (Brshit Rabba 81:2): Lorsque lon est dans la peine, on fait un vu, afin que la rcompense qui nous est rserve dans lautre monde nen soit pas diminue. Paralllement, nous apprenons quil y a certains commandements qui, mme sans que nous demandions en tre rcompenss, produisent des bnfices dont nous jouissons en ce monde, et dont le capital reste entier dans lautre monde (Pah I:1). En rsum: Nous apprenons ainsi que chacun de nous doit progresser dans ltude de la Torah et dans la crainte de D., afin de mriter de recevoir des dons gratuits, et de jouir de la vie ternelle et de la Splendeur divine. Quelle est la juste conduite tenir? Dans des moments de difficults, de peines ou de maladie, D. nous en prserve, nous faisons appel au mrite de nos Patriarches, ou nous nous prosternons sur leur tombe, nous distribuons la dme de bonnes uvres, etc. afin dannuler un dcret svre sans tre obligs dimputer ce bnfice sur nos mrites et diminuer la rcompense qui nous est rserve dans lautre monde.

De lhritage de la Terre dIsral et de la survie en exil


D. annonce Avraham (Brshit 15:7): Je tai tir dOur Kassdim pour te donner cette terre en possession et Avraham Lui demande: Eternel D., comment saurai-je que jen deviendrai possesseur? (Brshit 15: 8). Avraham demande D. par quel mrite ses enfants hriteront de la terre dIsral, ainsi quun signe qui lui confirmera cette possession. Nombre daspects demandent explication: 1. Apparemment, la question dAvraham dnote un certain manque de foi en la promesse divine puisque D. lui a dit (Brshit 12:7): Et je donnerai cette terre ta descendance, promesse rpte plus loin (ibid. 15:7): pour te donner cette terre en possession. Est-il pensable quAvraham manque de foi? Est-ce que vraiment il ne croit pas que D. ralise Sa promesse de donner ses descendants la terre dIsral? 2. Si effectivement Avraham a faut en demandant un signe confirmant la possession de la terre, et mritait une punition pour son manque de foi, est-ce que ses enfants, eux, ont faut? Car il est bien crit (ibid. 15:13): Sache-le, tes enfants seront des trangers dans un pays qui nest pas le leur. Pourquoi les Enfants dIsral doivent-ils tre punis, cruellement asservis et torturs? 3. Si vraiment Avraham a faut, D. aurait d le lui faire savoir, et il se serait repenti. Si D. ne lui a rien dit, cest quAvraham na pas faut en demandant D. un signe. Pourquoi donc ses enfants sont-ils punis, tant donn que lui non plus na pas faut?

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Pour expliquer ces points, citons tout dabord ce que disent les Sages (Yalkout Toldot 111, Tanna DBey Eliyahou Zouta 19) concernant Yaacov et Essav. Dj dans le ventre de leur mre, Yaacov et Essav ont partag entre eux le monde spirituel et le monde matriel. Yaacov prit pour sa part le monde venir, et Essav ce monde-ci. Lorsque Essav dit (Brshit 33:9): Jai normment de richesses, il entend: je possde les biens de ce monde. Il faut expliquer pourquoi Yaacov voulait le partage des deux mondes, et ceci avant mme sa naissance. Nous allons expliquer le fond des choses. A propos du verset (Ishaya 29:22): Ainsi parle lEternel la maison de Yaakov, Lui qui a libr Avraham..., les Sages disent que Le mrite de Yaakov a sauv Avraham de la fournaise (Brshit Rabba 63:2, Yalkout Ishaya 436). Avraham naurait-il pas pu tre sauv de la fournaise ardente grce son mrite personnel? Est-ce pensable? Car, sans le mrite protecteur dAvraham et dYitshak, Yaakov naurait pas pu chapper la mauvaise influence de son frre Essav. En quoi le mrite de Yaakov est-il plus grand que celui dAvraham? Avraham, malgr les grandes vertus quil possdait et qui lui valurent dtre appel le pre de nombreuses nations, naurait pas pu tre sauv de la fournaise si ce ntait le mrite de Yaakov, qui dj dans le sein de sa mre affronte Essav et partage avec lui les deux mondes, Yaakov choisissant le monde venir, et Essav ce monde. Cest le mrite dun acte aussi noble par lequel Yaakov renonce aux jouissances de ce monde pour se consacrer entirement servir D., qui sauva Avraham de la fournaise. Nous constatons chez Yaakov un esprit de sacrifice exceptionnel. Lorsquil traverse le fleuve avec ses enfants et ses biens, il est crit: Et Yaakov resta seul (Brshit 32:25), et les Sages disent (Houlin 91a, Rashi ad. loc.): Il tait retenu par de menus objets, cest--dire quil a retravers le fleuve pour chercher des ustensiles de peu dimportance quil avait oublis sur lautre rive. Nous apprenons aussi, disent les Sages, que pour les justes, leurs biens sont aussi importants que leur corps. Mais cela ne lempche pas doffrir tout ce quil possde Essav son frre, puisque Essav avait pris en partage ce monde. Il na rien gard pour lui-mme, bien que personne nait voulu len priver, car Yaakov avait choisi pour sa part la Torah, comme il est dit de lui: Tu donnas la Vrit Yaakov (Micha 7:20), et Il nest dautre vrit que la Torah (Yroushalmi Rosh HaShana III:8, Tanna DBey Eliyahou Zouta 21). Cest donc le mrite de la Torah de Yaakov et de ses descendants, et sa grande vertu, qui a sauv Avraham de la fournaise. videmment Avraham est redevable Yaakov de lavoir sauv de la fournaise, car sil avait t brl, ni Yitshak ni Yaakov ne seraient ns, et le monde ne fut cr que pour la Torah qui est le dbut de tout (Brshit Rabba 1:1, Rashi ibid. 1:1), comme il est dit (Yrmia 33:25): Si ce ntait pour Mon Alliance Je naurais pas tabli les lois du ciel et de la terre. Sans Torah, le monde perd sa raison dtre. Avraham, voyant que la Torah ne serait donne ses enfants que longtemps plus tard, et quen attendant le don de la Torah, ils risquaient de porter atteinte la cration et la raison dtre du monde, a demand: par quoi saurai-je? Le mot ba-mah (par quoi) indique deux choses: la lettre Beth indique la Torah crite (Brshit) et la Torah orale (Brachot, les bndictions), Mah indique lhomme, Adam, car ces deux mots ont la mme valeur numrique 45. Avraham demande: Jusqu ce que la Torah soit donne, comment seront-ils protgs contre le mauvais penchant, et par quel mrite recevront-ils la terre dIsral? Sils se laissent entraner par le mauvais penchant, ils ne pourront pas prendre possession de leur hritage, la terre que D. leur donne. Et il demande en outre comment ils pourront bnficier de la Prsence divine sils sont dpourvus de Torah, (sans Beth), sans ces choses pour lesquelles Yaakov sest sacrifi et a donn toutes ses possessions, car il avait choisi le monde venir? Autrement dit, comment ce partage peut-il devenir effectif sans Torah? Plus spcialement, Avraham dsirait savoir comment ses enfants survivraient en exil, assujettis aux exactions des nations dont le but est de leur faire renier leur appartenance au Judasme, et qui les perscuteraient sils refusaient de trahir leur religion? Comment survivraient-ils en exil et comment surmonteraient-ils les tribulations de la servitude sans porter atteinte la cration et sa raison dtre, et sans tre privs de la protection divine? Il ressort de ce que nous avons dit quAvraham na commis aucune faute en demandant comment sauraije, au contraire, il voulait consolider le partage des mondes entre Yaakov et Essav, et la possession exclusive de Yaakov - dont le mrite la sauv du feu de la fournaise. Yaakov a incit toutes les gnrations futures

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ne pas jouir des biens de ce monde afin de ne pas en venir oublier la Torah. Cest un fait que les gens occups amasser des richesses matrielles oublient la Torah, dans le sens o il est dit Je suis prsent l o la Torah est prsente (Avot VI:9), et non dans un lieu rempli dargent, dor et de pierres prcieuses. Les Sages ont dit (Ndarim 81a): Prenez-garde aux pauvres, car cest deux que sort la Torah - justement des pauvres. Les descendants de Yaakov ne jouiront en ce monde que de ce que D. leur donne pour leur permettre dobserver les commandements. Avraham, nayant pas faut, ne fut pas puni. Mais Avraham voulait savoir comment les Juifs survivraient en exil, dans le cas o ils en viendraient fauter. Les Sages (Mguila 31b) confirment cette interprtation: Avraham dit D: Matre du monde, peut-tre, malheureusement, Isral transgressera-t-il Tes commandements, et Tu le puniras comme Tu as puni la gnration du dluge et celle de la Tour de Babel? D. lui rpondit: Non. Et il demanda: Comment le saurai-je? D. lui dit: Prpare-Moi une gnisse ge de trois ans... (Brshit 15:9). Avraham dit: Matre du monde, ces sacrifices sont valables au temps du Temple, mais quel sera le sort de mes enfants lorsquil ny aura pas de Temple? D. lui dit: Je leur ai donn les lois des sacrifices; lorsquils les tudieront, Je considrerai que cest comme sils Mavaient effectivement apport des sacrifices, et Je leur pardonnerai toutes leurs fautes. Aprs avoir dit Avraham: Prpare-Moi une gnisse ge de trois ans, D. ajoute (Brshit 15:13): Sache-le, tes enfants seront des trangers dans un pays qui nest pas le leur, ils seront asservis et opprims pendant quatre cents ans, mais Je jugerai le peuple qui les opprimera et aprs cela ils sortiront avec de grandes richesses. Avraham ne se souciait que du sort de sa descendance. Comment seraient-ils sauvs de la cruaut des nations, de leurs propres fautes, et par quoi? Et D. lui rpondit que les sacrifices leur procureraient le pardon, et lorsquil ny aura pas de Temple o apporter les sacrifices, quils en tudient les lois (Maharsha, Taanith 27b). Cela nexplique encore pas comment les Enfants dIsral observeront les autres commandements de la Torah, car les peuples chercheront les en dtourner, et sil en est ainsi, comment se perptuera le partage des deux mondes? A cela, D. rpondit (Shemot 1:12): Plus les nations les oppriment, plus ils se multiplient et grandissent. Une gnisse, Egla, de trois ans fait allusion lexil, car la lettre Ayin a la valeur numrique de soixantedix, ce qui indique que D. ne les abandonnera pas durant leur exil parmi les soixante-dix nations du monde, et que partout o les Juifs seront exils, la Prsence Divine les accompagnera et elle reviendra aussi avec eux de lexil (Mguila 29a). D. ordonne aussi Avraham de prendre un bouc, Ez, de trois ans, cest--dire que grce la Torah et leur attachement D, il seront forts, Azim, et capables de tenir tte aux nations car Isral est le plus dur dentre les peuples (Beytza 25b, Shemot Rabba 42:9). Et D. lui ordonna galement de prendre un blier, Ayil, de trois ans, ce qui indique les quarante-huit faons dacqurir la Torah (Avot VI: 5, Kala 8), qui est la valeur numrique du mot VAyil compt avec le mot lui-mme. Cest--dire mme lorsquils seront dans le pays de leurs ennemis, Je ne les ddaignerai pas et Je ne les rejetterai pas au point de les anantir et de rompre Mon alliance avec eux car Je suis lEternel, leur D. (Vayikra 26:44). Mme en exil, ils seront soutenus par la Torah, ils ne rompront pas lalliance avec D. et ils progresseront dans les quarante-huit faons dacqurir la Torah. Enfin, Avraham prend une tourterelle et une jeune colombe, ce qui indique le dernier exil, le plus dur de tous, car les nations tentent de semparer de lhritage des Juifs, de les dtourner de la vrit de la Torah, de leur faire renoncer la pratique de ses lois, et de les amener une coexistence pacifique puisque la Torah est universelle. A cette poque-l, les blasphmateurs domineront, la gnration aura une face de chien, laudace sera extrme, les enfants se rvolteront contre les parents, la vrit disparatra et il ne nous restera plus qu nous tourner vers notre D. (Sotah 49b). La preuve est que, jusqu ce jour, en exil, les peuples assassinent les Juifs. Mais, malgr cela, les Juifs ne perdent pas leur foi car Moi - dit D. - Je veille sur eux, et Jaccrotrai leur rcompense. Tel est le sens de et aprs cela, ils sortiront avec de grandes richesses (Brshit 15:14), cest--dire quils surmonteront toutes les souffrances et toutes les peines et prospreront. Malgr la nuit et la terreur qui accabla les Enfants dIsral lorsquils descendirent en Egypte, de mme que durant toutes leurs errances, Je suis avec eux, et le partage des mondes entre Yaakov et Essav reste valable aussi en exil.

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Et D. promet encore Avraham que mme lorsque lathisme dominera et que les peuples voleront la Torah aux Juifs en y introduisant des transformations, mme alors, Tout instrument fabriqu contre Toi sera impuissant (Ishaya 54:17). Les Juifs surmonteront aussi cela, et le soleil finira par briller, la lumire stendra, et le monde parviendra la perfection voulue lors de la cration. Tout cela explique la division des mondes entre Yaakov et Essav. Mais il reste encore un autre point claircir. Les peuples formulent un reproche apparemment justifi envers Isral. Ils prtendent que les Juifs se trouvent partout, la mer est remplie de Juifs, comme ils disent. Et ils se plaignent aussi que les Juifs occupent tous les postes et quils sont la cause de tous leurs maux. Ils accusent les Juifs de leur prendre leur argent et leur or, de semparer des moyens de production, de dominer toutes les entreprises commerciales du monde et partout o ils se trouvent, de voler tout ce qui tombe sous leur main, et ils finissent par attribuer aux Juifs les pidmies qui ravagent lhumanit, exactement comme les Egyptiens, en leur temps, avaient dit Pharaon (Shemot 10:7): Fais sortir ces gens... avant quon ne te dise que lEgypte est perdue. Pourquoi perdue? A cause des Enfants dIsral... Nous savons que dj en Egypte les Enfants dIsral avaient dlaiss D. A propos du verset Ils remplirent tout le pays (ibid. 1:7), les Sages rapportent le verset: Ils ont trahi lEternel, car ils ont enfant des enfants trangers, et maintenant Il les consumera, en un mois, eux et leurs biens (Osha 5:7) et disent: cela nous enseigne quaprs la mort de Yossef, les Juifs ont arrt de pratiquer la circoncision, disant: nous serons comme les Egyptiens (Shemot Rabba 1:10). Et les Sages ajoutent (Yalkout Shimoni Shemot 1): Ils remplirent tout le pays, ils remplirent les thtres et les cirques, cest--dire que les Enfants dIsral, aprs la mort des chefs des tribus, ont commenc prendre du bon temps en Egypte, ils prenaient plaisir aux vanits de ce monde, choses qui appartiennent par contrat Essav et non Yaakov. Les nations demandent donc: pourquoi viennent-ils nous voler notre part? Des souffrances terribles peuvent dcouler dun tel abus. Nous pouvons constater quil en est ainsi. Les Sages disent (Echa Rabba 2:17): Ne crois pas que la Torah rside parmi les nations, et ils ajoutent que ce que les non-Juifs donnent sous forme de charit nest pas un bienfait car ils ne sont gnreux que pour tre respects et (Babba Bathra 10b): Tous les bienfaits et toutes les gnrosits des nations sont considres comme des fautes, car ils nagissent que pour se faire valoir, pour obtenir la prolongation de leur domination, senorgueillir et nous insulter, comme il est crit (Mishley 14:34): La gnrosit des nations est un pch Pourquoi? Pour le non-Juif, il ny a pas de monde venir, et ses bonnes actions ne sont pas prises en compte. Ce nest que lorsque le non-Juif pratique les sept commandements des fils de Noah (voir Babba Kamma 38a), quil est considr comme un Juste des nations.Autrement, le non-Juif na aucune part au monde spirituel. De son ct, le Juif na pas de part la jouissance des plaisirs de ce monde, surtout pas celles qui caractrisent les non-Juifs. La Torah interdit de ressembler aux non-Juifs dans leur faon de shabiller, leurs coutumes et leurs modes de vie, comme il est crit (Shemot 23:24): Tu nimiteras pas leurs rites et (Vayikra 20:23): Nadoptez pas les lois des nations. Il va sans dire quil est interdit de sassocier eux car, toute leur vie, ils ne sadonnent qu des vanits et des futilits, aux jouissances physiques et matrielles, dans leurs runions de persifleurs. Il faut savoir que la division des mondes entre Yaakov et Essav est valable de tout temps. Jusqu ce jour, le Juif et le non-Juif suivent des voies diffrentes, et aucun nempite sur le domaine de lautre. Si le Juif transgresse la frontire des fils dEdom (Essav) et veut prendre part leurs plaisirs, leur ressembler et sassocier eux, les non-Juifs auront vite fait de le harceler pour avoir empit sur leur domaine. Des souffrances multiples, des dcrets svres et toutes sortes de malheurs affligent les Juifs, et ils en souffrent tellement que les Sages disent (Ybamot 47a): Isral est devenu incapable de supporter ni un grand bien, ni un grand mal, tant il est faible, abattu et afflig. Et alors, il revient lEternel son D. qui, dans Sa grande misricorde et Son infinie bont, sauve les survivants. Les Sages disent (Makot 23b, Avot DRabbi Nathan 41:17): D. a voulu accrotre le mrite dIsral, cest pourquoi il lui a donn la Torah et tous ses commandements. Cest dire que lhomme est rcompens pour son obissance, et cela bien que les commandements naient pas t donns pour en tirer bnfice (Yirouvin 31a, Yroushalmi, fin de Troumot). De toute faon, sans le vouloir, celui qui obit la volont divine en tire un bnfice, mais il doit savoir que tout avantage quil reoit pour son obissance aux commandements doit tre accept avec crainte et amour, uniquement pour la gloire de D. dans le monde, car telle est Sa

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volont. Lorsque D. donne celui qui marche dans Ses voies la prosprit, la richesse, les honneurs afin de lui permettre de se perfectionner, ces faveurs namoindrissent pas le domaine des fils dEssav, puisque celui qui pratique les commandements se suffit du monde spirituel qui est la part que D. lui a attribue. Celui qui va la mer se baigner avec eux, qui passe ses heures de loisirs dans les thtres et les cirques comme ils le font, qui imite leurs actes de brigandage et de vol, qui travaille le Shabbat, empite sur le domaine des fils dEssav, car ces choses-l sont le lot des nations, comme le dit Rabbi Shimon Bar Yocha (Shabbat 33b): Toutes les amliorations que les Romains ont ralises (lorsquils occupaient Isral), ils les ont faites pour leur propre profit: ils construisirent des places publiques pour y installer des prostitues, des bains publics pour leur plaisir... et non pas pour le bien des Juifs, et donc il est interdit un Juif de partager ces distractions. Sil devait en jouir, il empiterait sur un domaine qui ne lui appartient pas, et la punition divine sensuivrait, puisquil serait entr sans permission dans la proprit dEssav. Il ressort de tout ce que nous venons de dire que Yaakov avait une nette vision de lHistoire, et dsirait que ses descendants comprennent le sens profond de la Torah et de ses voies, quils sy attachent, comme il est crit: Cest un arbre de vie pour qui sy attache (Mishley 3:18) et mme quils soient prts donner leur vie pour ltudier, comme il est crit (Bamidbar 19:14): Telle est la Loi, lhomme qui meurt sous la tente... que les Sages expliquent (Brachot 63b, Zohar II 158b): La Torah ne se garde que par celui qui se sacrifie pour elle. Bien avant le don de la Torah, Yaakov a fait savoir ses enfants quils ne devaient pas sassocier aux descendants de Essav, bien quappartenant la mme famille, car lavenir ceux-ci, et essentiellement les empires perse et romain, domineraient le monde (Avoda Zara 2b, Yoma 10a), et leur domination est plus tyrannique que celle dIshmal. Il est ncessaire de maintenir des barrires et des frontires entre nous et les descendants dEssav, il faut viter leur compagnie afin de ne pas en venir sunir eux, et il est interdit de cohabiter avec eux. Car tels sont les termes du contrat entre Yaakov et Essav: ce monde et ses plaisirs appartiennent Essav et ses descendants. Si lon empite sur le domaine des fils dEdom, on remet lordre du jour la validit de leur accord, et le monde connat bien des problmes, D. nous en prserve. De mme, si les fils dEdom et leurs partenaires tentent de nous imiter et de ressembler aux Juifs, ils sont passibles de la peine de mort par le tribunal divin, car seul ce monde leur appartient, et le monde venir est nous. Seul ce mrite-l nous permet dhriter de la terre dIsral, comme il est dit: Par quoi saurai-je... et nous survivrons lexil jusqu la venue du Messie. Amen! Ainsi soit-il!

De lpreuve comme test de perfection dans le service de D.


Le but et la raison dtre de la cration de lhomme est de surmonter les preuves difficiles et amres quil doit affronter chaque jour, durant toute sa vie et den triompher. Le premier Homme, cration des mains de D. (Kohlet Rabba 3:14) fut le premier avoir t prouv par D. qui lui dit (Brshit 2:17-18): Tu peux manger de tous les arbres du jardin, mais de larbre de la Connaissance du bien et du mal tu ne mangeras pas, car le jour o tu en mangeras, tu mourras. LHomme na pas surmont lpreuve, il na pas respect linterdit une seule heure (Tanhouma Shmini 8). Mais D., de Son ct, dsire malgr tout que lhomme vive, Il ne dsire pas sa mort. Cest pourquoi Il nous ordonne dans la Torah un choix: Tu choisiras la vie (Dvarim 30:19). Il faut comprendre que le libre arbitre constitue lpreuve la plus difficile de lhomme qui est somm de choisir la vie, de choisir ce qui est bon, et de suivre linjonction (Dvarim 17:11): Tu ne tcarteras pas de ce quils [les dcisionnaires] te diront, ni droite ni gauche, car D. a cr dans le cur de lhomme des tendances qui sont mauvaises ds son enfance (Brshit 8:21) et quil doit vaincre. Sil choisit de faire ce qui est bien et bon aux yeux de D., cest effectivement quil a surmont lpreuve. Comment lhomme peut-il surmonter les preuves et parvenir ne faire que ce qui est bien? Uniquement sil se sacrifie, dans le sens o il est crit: Si quelquun dentre vous prsente un sacrifice lEternel... (Vayikra 1:2). La vie de lhomme est faite dpreuves quotidiennes, il y est confront de tous cts et chaque instant. Celui qui apprend renoncer ses dsirs, celui pour qui D. est prsent devant lui en permanence, comme il est dit Jai fix mon regard vers lEternel, toujours (Thilim 16:8), toujours, cest--dire: lorsque je mange, lorsque je dors, dans toutes mes occupations, celui-l, lorsquil est mis lpreuve devant une nourriture interdite, saura srement y renoncer et surmonter ses apptits. Telle est la victoire de lhomme sur son mauvais penchant, et alors son libre arbitre ne le fera pencher que vers le bien.

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Pourtant, il est difficile pour lhomme, de par sa nature-mme, de surmonter les preuves, et il a besoin que D. lui vienne en aide, et si ce ntait le soutien du Ciel, il ne pourrait pas remporter cette lutte (Kidoushin 30b). Nous avons vu des hommes pieux qui ont failli succomber lpreuve, si D. ne leur tait venu en aide. Ce fut le cas de Rabbi Akiva (Kidoushin 81a), dont le mauvais penchant prit la forme dune femme attrayante. Pour sauver son me, il grimpa sur un arbre, et fut sauv avec laide de D. Il en fut de mme pour David HaMelech qui voulait tre mis lpreuve, comme il est crit (Thilim 26:2): Metsmoi lpreuve, D., sonde mes reins et mon cur, mais qui na pas pu la surmonter, comme le disent les Sages (Yoma 22b): David a t prouv deux fois et na pas rsist... Et ils ajoutent (ibid.): David fut atteint de lpre pendant six mois, le Sanhdrin sest spar de lui et la Prsence de D. la quitt... Les Sages en tirent un enseignement (Sanhdrin 107a): Rabbi Yhouda au nom de Rabbi dit: Il ne faut jamais rechercher lpreuve car David HaMelech a voulu tre prouv et il a chou. Il est possible que David ait espr surmonter lpreuve par lui-mme, mais cest une chose impossible, sans le soutien de D. Il faut se garder de penser que lon peut triompher par ses propres forces. Il est crit: Et D. appela Mosh... (Vayikra 1:1). La lettre Aleph du mot vayikra est petite, pour nous enseigner que Mosh - bien que D. lui parle directement, comme il est dit Je lui parle face face (Bamidbar 12:8), bien quil soit le plus grand de tous les prophtes (Vayikra Rabba 1:15), le dirigeant et le roi du peuple dIsral (Tanhouma Tissa 28), de sorte que les Sages disent de lui (Sifri et Rashi, Bamidbar 9: 8): heureux celui qui est n dune femme et avec qui D. parle en tout temps - est rest personnellement humble, comme il est dit (Bamidbar 12:3): lhomme Mosh est trs humble. Mme proche de D., il faut rester humble, et cela aussi constitue une preuve surmonter. Mais ajoutons un mot concernant lhritage de la terre dIsral par les Juifs. Avraham a demand D. un signe (Brshit 15:8): Par quoi saurai-je que je vais en hriter? D. lui rpondit (verset 13): Sache-le, tes enfants seront des trangers dans un pays qui nest pas le leur, ils seront asservis et opprims pendant quatre cents ans, mais Je jugerai le peuple qui les opprimera et aprs cela ils sortiront avec de grandes richesses. Est-ce que ses enfants doivent vraiment souffrir un exil de quatre cents ans parce quAvraham a demand Par quoi saurai-je? Cest pourtant ce que disent les Sages (Yalkout Shimoni Lech Lecha 77): Pour avoir dit: par quoi saurai-je? il fut puni doublement (cest--dire dune punition svre car le mot [dt [dy, sache..., est rpt deux fois). Pourquoi une telle punition? Car Avraham aurait pu se repentir puisque les Portes du Repentir sont toujours ouvertes (Echa Rabba 3, Pessikta Soucota), et les Portes des Larmes ne sont jamais fermes (Brachot 32b, Zohar I 132b) et dans ce cas, le dcret aurait pu tre annul. Pourquoi les Enfants dIsral doivent-ils tre punis si svrement cause de la demande dAvraham? Une autre question se pose. Comment se peut-il quAvraham, qui avait une foi inbranlable en D. et dont il est crit: Il eut foi en D. et ce fut son mrite (Brshit 15:6), et aussi: Tu trouvas son cur fidle envers Toi (Nehmia 9:8) ait pu mettre en doute lhritage de la terre et demander un signe de confirmation? Mme si lon voulait dire quil navait aucun doute et quil voulait transmettre ce signe pour en assurer ses enfants, nous lisons que le roi Hizkya aussi, sur le point de mourir, a demand et reu un signe lui confirmant sa longvit, et il ne fut pas puni comme il est crit (Ishaya 38:5, 7-8, Divrey HaYamim II, 32:24): Je prolongerai ta vie de quinze ans... Ceci est le signe que taccorde lEternel pour te prouver quil accomplira la parole quIl prononce, je vais faire revenir de dix degrs en arrire lombre qui tait descendue sur le cadran solaire de Ahaz. Il faut donc comprendre pourquoi Avraham fut puni pour avoir demand un signe. En rponse, chaque homme est capable de parvenir la connaissance du Crateur. Cest une chose vidente et facile. Beaucoup de gens admettent quil y a un Crateur, ils savent quIl est le souverain et ils Lui sont fidles, mais lorsquils doivent affronter une mise lpreuve de leur foi, ils se montrent incapables de la surmonter. Avraham est parvenu un niveau suprieur de perfection uniquement parce quil a vaincu toutes les preuves comme le disent les Sages (Avot V:3): Avraham subit dix preuves, et il triompha de toutes. Cest pourquoi, lorsquAvraham entend que D. donne ses descendants la terre de Canaan, et promet mme quils seront nombreux comme les grains de sable sur la terre et les toiles du ciel, il a peur. Il

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pensait que peut-tre tant de promesses de la part de D., et tant de bienfaits accords sans quil soit ncessaire de rien faire pour les obtenir, feraient perdre aux Enfants dIsral leur statut dans le sens o il est crit: Et Yeshouroun, devenu gras, regimbe (Dvarim 32:15), et alors lexistence mme du peuple juif serait en grand danger. Cest pourquoi Avraham demande un signe de confirmation de lhritage. Il demande un signe par lequel il saura que ses enfants prserveront lhritage, resteront toujours fidles et continueront servir D. Par quel mrite se tiendront-ils toujours devant Toi, et comment russiront-ils prserver leur Judasme et la connaissance de la Torah? Et D. rpondit Avraham: Sache-le, tes enfants seront des trangers dans un pays qui nest pas le leur, ils seront asservis et opprims pendant quatre cents ans, mais Je jugerai le peuple qui les opprimera et aprs cela ils sortiront avec de grandes richesses (Brshit 15:13). D. lui rpondit que les Enfants dIsral subiront beaucoup dpreuves et devront lutter avec courage contre tous les ennemis qui cherchent les briser, mais quaprs cela ils sortiront avec de grandes richesses. Quelles sont ces richesses? La rsistance aux preuves, une rsistance que lhomme acquiert lorsquil a surmont les preuves. Tel est le sens de la rponse de D. et ce nest pas une punition pour avoir demand un signe. D. lui a expliqu que les Enfants dIsral vivront en exil, exposs aux murs des nations, et malgr cela ils ne cderont pas, surmonteront les preuves, et ensuite sortiront de leur exil avec de grandes richesses, recevront la Torah, et prendront possession de la terre dIsral. Nous savons quen Egypte, les Enfants dIsral nont chang ni leurs noms, ni leur langue, ni leur faon de shabiller, ce qui les a sauvs (Vayikra 32:5). Ils risquaient de se fondre parmi les Egyptiens, et pourtant ils ont rsist cette preuve et ce mrite les a sauvs. Cest que lexil lui-mme a renforc dans leur cur leur foi ancestrale. Il faut se demander pourquoi les Egyptiens nont pas oblig les Enfants dIsral modifier ces trois choses, puisquils opprimaient les Juifs cruellement, et lobligation de changer ce qui les diffrenciait des autres aurait t pour eux une grande souffrance. Pourquoi ne les ont-ils pas obligs le faire? Sans aucun doute, il faut y voir la volont de D. Les Juifs subissent de grandes humiliations cause de leur diffrence, et ces trois choses les exposent tous en tant que Juifs (voir Zohar II 14b). Sils surmontent cette preuve en prservant leur identit, ils se trouvent enrichis par lacquisition la plus prcieuse, celle davoir vaincu lpreuve. Il faut noter en passant que ce nest pas seulement le fait de ne pas changer leur nom, leur vtement distinctif et leur langue, qui symbolise la volont et la capacit de surmonter lpreuve. Il en est de mme de tout autre commandement qui semble plus facile garder, comme lcrit le Rav Berlzer de mmoire bnie: Lorsque quelquun donne de largent un ncessiteux, ou prie devant D., cela constitue une preuve. Pourquoi? Parce que, sil est capable de se discipliner afin de pratiquer les commandements, il sera aid par le ciel, et sil doit donner sa vie pour sanctifier le Nom de D., il le fera aussi. Ajoutons ce sujet que le mauvais penchant sappelle mchant (Kidoushin 30b). Si lhomme coute les conseils de ce mchant et faute, sil tombe sous son emprise, cest comme sil se faisait son esclave, et cela est tout fait semblable la pratique de lidoltrie, puisquil nous est interdit de servir quelquun dautre que D. Lhomme qui, tous les jours de sa vie, lutte contre le mauvais penchant avec courage et rsiste toutes ses incitations, fait preuve dune grande domination sur lui-mme, et alors, le mauvais penchant na aucune emprise sur lui. Pourtant, il reste au mauvais penchant une dernire possibilit de faire faillir lhomme et cela avant sa mort, par des souffrances. La souffrance de lhomme sur le point de mourir est cause par lange de la mort, qui remplit son cur de penses rebelles - cette preuve est trs dure. Il est dit (Avot II:4): Ne sois pas sr de toi-mme jusquau jour de ta mort. Heureux celui qui triomphe de cette preuve. Sil a vraiment fait taire le mauvais penchant ce moment-l, et passe victorieusement cette dernire tape, il surmonte cette preuve en consacrant son me la sanctification du Nom de D.

De lesclavage la libert et la rdemption


Certains demandent pourquoi loccasion de la fte de Pessah, beaucoup de gens font de grands prparatifs avec une stricte rigueur, alors que pour les autres ftes solennelles, nous ne voyons pas nos frres Juifs saffairer et nous ne les voyons pas non plus observer strictement la loi. Pourquoi une telle tendance justement pour la fte de Pessah?

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Les Sages ont dit (Pessahim 116b): A chaque gnration, chacun doit se considrer comme si lui-mme tait sorti dEgyte. Pessah signifie passer par-dessus, comme il est crit et Il passera par-dessus la porte (Shemot 12:23), et cest le sacrifice du passage en lhonneur de lEternel (ibid. 12), car D. a pargn les maisons des Enfants dIsral en passant au-dessus delles. Bien que lon ne prpare aucune des autres ftes avec tant dattention, durant la fte de Pessah lhomme passe dun seul bond de limpuret la saintet, comme le disent les Sages (Rashi, Shemot 12:11, Yalkout Shimoni 199): Vous aussi faites tout ce que vous faites pour commmorer le fait que D. est pass par-dessus vos maisons et vous a pargns et alors, les curs se remplissent de la saintet de la fte qui clbre notre libration, et nous offrons le sacrifice de Pessah D. Nos anctres en Egypte, bien quidoltres (Yalkout Shimoni Shemot 206) avaient rsist bien des preuves, puisquils navaient chang ni leurs noms ni leur langue ni leur faon de shabiller. Ils navaient pas prpar non plus de provisions de route en sortant dEgypte (Shemot 12:39), ce qui nest pas naturel, et cela nous montre combien tait grande leur foi en D., comme le prophte en tmoigne (Yrmia 2:2): Je garde le souvenir de laffection de ta jeunesse... quand tu me suivais dans le dsert, une terre inculte, et ils sont passs dun seul bond dun tat dimpuret un tat de saintet. Il est dit (Zohar Hadash Yithro 39a): les Enfants dIsral taient plongs en Egypte dans les quarante-neuf degrs dimpuret et ils furent sauvs avant de parvenir au cinquantime. Chacun doit puiser dans la clbration de la fte de Pessah du courage et des forces pour toute lanne. Il faut comprendre pourquoi D. passa par-dessus les portes des maisons des Juifs en Egypte, lorsquIl frappa les Egyptiens et nous sauva, alors quIl aurait pu anantir dun seul mot tous les premiers-ns dEgypte. Pour quelle raison a-t-Il agi de la sorte? Si ce nest pour nous enseigner que les Enfants dIsral taient idoltres et ne mritaient pas dtre sauvs, ni par un ange ni par un sraphin (Yalkout Shimoni Shemot 199) puisquils taient plongs dans les quarante-neuf degrs dimpuret. D. a pargn leurs maisons en passant au-dessus delles dun bond, pour indiquer queux aussi pouvaient passer outre limpuret et se sanctifier, passer outre les mauvaises actions, raliser de bonnes actions, et mriter la rdemption. Effectivement, les Enfants dIsral ne firent mme pas de provisions de route, ils nont rien prpar, mme pas pour les vieillards, et les enfants nont pas demand comment pouvons-nous sortir sans provisions et sans rserves? Ils sortirent dEgypte grce leur foi, et cest grce leur foi quils eurent linspiration divine de chanter les louanges de D. en traversant la Mer des Joncs (Shemot Rabba 23:2). Ils furent sauvs pour avoir surmont leurs mauvaises habitudes et suivi le droit chemin. Il est certain que D. a voulu leur donner cet exemple. La mme leon se renouvelle chaque gnration et danne en anne, justement la clbration de la fte de Pessah, anniversaire de la sortie dEgypte. Mme celui qui na pas de quoi manger, qui na pas de provisions de route, et mme les gens les plus simples, ressentent la saintet de la fte, et la prparent scrupuleusement en triomphant de toutes les difficults. La bar mitzva est un autre exemple. Pendant treize ans, lenfant a poursuivi avec ardeur les plaisirs matriels de ce monde et na cherch qu satisfaire toutes ses envies, et le jour o il prend sur lui le joug des commandements, on le revt dun ensemble, dun chapeau, et on le couronne comme un roi, avec les Tphilines de la tte et du bras, puis on lui dit: Cest fini! partir daujourdhui, tu es un homme parmi les adultes, tu prends maintenant sur toi le joug de la Torah et des commandements, dsormais tu nes plus sous lemprise des dsirs de ton cur pour faire ce que bon te semble, comme tu las fait jusqu ce jour. Quel bond soudain, quel saut du monde matriel au monde spirituel, dun extrme lautre, des plaisirs gostes la discipline de la Torah et des commandements. Le mot joug, l/[, a la mme valeur numrique que le mot wq, une ligne directrice, car dornavant il prend une nouvelle direction, il choisit la rectitude et le bien, il ne laissera pas son cur pencher vers le mal. De plus, on place sur lui effectivement un joug: jusqu prsent il ntait pas tenu de respecter les six cent treize commandements, et partir de ce jour, il prend sur lui dobserver tous les commandements. Cest pour lui une grande preuve et une grande responsabilit. Cest pourquoi on fte dans la joie le jour de ses treize ans, on le clbre par un repas, pour que ce jour soit ancr dans son souvenir, et que cette joie le conduise une autre joie, celle daffronter les preuves du temps et de vaincre les vagues malveillantes du mauvais penchant.

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Il est dit pour les Juifs, ce ntait que joie lumineuse, contentement, allgresse, et honneur (Esther 8: 16), ce que les Sages expliquent ainsi (Mguila 16b): La lumire cest la Torah, lhonneur ce sont les Tphilines. Cela indique que le jour o lenfant parvient lge du devoir, grande est sa joie de porter les Tphilines et de prendre sur lui le joug de la Torah et des commandements qui lui permettront de faire son chemin dans la vie. (A ce sujet, je veux proclamer publiquement, vu le comportement rprhensible dont nous sommes tmoins quotidiennement, que la joie vritable du bar mitzva se transforme en chagrin et en deuil, lorsque la fte est accompagne dattitudes et de danses indcentes. Au lieu denseigner au jeune homme ds son jeune ge les commandements et la faon de se dtacher des plaisirs mondains et matriels et de prendre sur lui le joug divin, sincrement et avec respect, on commet de plus la faute de lui enseigner comment se dbarrasser du joug de la saintet, et il devient semblable au buf dpourvu de joug. On lencourage poursuivre les plaisirs et participer des danses indcentes, en lui disant: tu es un homme... Malheur aux yeux qui lont vu, aux oreilles qui lont entendu. Ny a-t-il vraiment pas de Juge et pas de justice? Quiconque craint la Parole de D. et respecte les choses sacres sloignera de ceux qui se conduisent de la sorte et vitera de participer ces tristes festivits qui dtruisent notre prcieux hritage. Son abstention lui sera compte comme laccomplissement dun commandement. Cela aussi fait partie des preuves, que D. nous vienne en aide). La section de la Torah concernant les Tphilines fait suite la section de la sortie dEgypte (Bo, Shemot 13). Le jeune garon qui est arriv lge de quitter un monde de jouissances matrielles pour prendre sur lui le joug du royaume de D. en portant les Tphilines, ressemble au peuple tout entier au moment de la sortie dEgypte, passant dun bond de limpuret la puret et slevant. Jusque-l, ils taient ancrs dans lesclavage dEgypte; maintenant ils sont sanctifis. De mme, ce jeune garon qui, jusqu prsent, tait habitu satisfaire ses dsirs et ntait pas soumis la discipline de la Torah, porte dornavant sur les paules un joug, le joug du royaume de D., tout comme le peuple juif qui, sortant des quarante-neuf degrs dimpuret et didoltrie, et sans poser de questions, sest mis en route comme D. lui a enseign de le faire en passant par-dessus ses maisons, enseignement valable pour toutes les gnrations. Nous comprenons prsent pourquoi Avraham ne dsirait pas que ses descendants, aprs lui, reoivent la terre qui abonde en lait et en miel sans tre soumis des preuves, car cela aurait pu les desservir, et ils nauraient pas t capables dhriter de la terre promise et dy servir D. Par quoi vont-ils mriter les quarante-huit conditions qui permettent dacqurir la Torah, la connaissance du Crateur du monde, au point de rester attach Lui et Ses qualits, comme il est crit: Et dtre attach Lui (Dvarim 11: 25) cest--dire attach Ses qualits (Sotah 14a)? Et la rponse de D. est immdiate: par lexil en terre trangre, par le fait dtre esclaves et de surmonter les preuves en Egypte, ils seront sauvs, ils sortiront avec de grandes richesses, ils passeront dun bond du mal au bien, et les Tphilines en sont la preuve... chacun doit surmonter les multiples preuves de la vie, et alors tous les jours de sa vie seront sanctifis dans le service de D. Quelle est la bonne voie? Chacun doit avoir le courage de ne pas se laisser entraner par les preuves du temps. Il faut fuir les festivits indcentes et leurs foules, afin de ne pas plonger dans les quarante-neuf degrs dimpuret. Que D. nous vienne en aide.

Lesprit, le cur et lme, richesses essentielles de lhomme


Il est crit (Brshit 15:13-14): Et [D.] dit Avraham: Sache que tes descendants sjourneront dans une terre trangre o ils seront asservis et opprims pendant quatre cents ans... ensuite ils sortiront avec de grandes richesses. Nous savons que lors de lAlliance entre les Morceaux (Brit Habtarim) D. annonce Avraham le dcret dexil pour ses enfants. Mais en mme temps, D. lui promet quen fin de compte, ils sortiront avec de grandes richesses. Et nous voyons que cest effectivement ce qui sest produit la sortie dEgypte. D. ordonna Mosh (Shemot 11:2): Parle, Je te prie (na), au peuple et fais-leur entendre que chaque homme aille demander son voisin, et chaque femme sa voisine, des ustensiles dargent et des ustensiles dor.

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Lcole de Rabbi Yana enseigne que le mot na indique une supplique. D. dit Mosh: Je te prie de demander aux Egyptiens des ustensiles dargent et dor, afin que ce Juste (Avraham) ne puisse pas dire que la servitude sest ralise, mais pas la sortie avec de grandes richesses. Les Enfants dIsral ont rpondu Mosh: pourvu seulement que nous sortions nous-mmes (Brachot 9a, Rashi ad. loc.). Ce qui nest pas dit dpasse de loin ce qui est dit, et nous allons tenter de lexpliquer: 1. Pourquoi est-il tellement important de faire savoir Avraham que les Enfants dIsral sortiront avec de grandes richesses, si bien que D. doit raliser ce quIl a promis Avraham et quIl prie le peuple de demander aux Egyptiens de leur donner de largent et de lor? De toute faon, le butin de la Mer des Joncs fut beaucoup plus important que le butin dEgypte. D. aurait pu dire Avraham que les Enfants dIsral recevraient toutes leurs richesses du butin de la Mer des Joncs? 2. Le Rabbin Shimon Akavitz cite une question du Mahaz Avraham: Pourquoi D. ordonne-t-il Mosh daller dire au peuple que chacun demande des objets son voisin, sous forme demprunt, alors que nous savons que celui qui emprunte un objet est tenu de le rendre son propritaire (voir Shemot 22:13, Rambam Halachot Shela I:5)? Nous ne voyons pas que les Enfants dIsral aient restitu ce quils ont emprunt aux Egyptiens, et il ny a pas lieu de dire que les possessions des Egyptiens sont une compensation pour lesclavage endur chez les Egyptiens (voir Kli Yakar, Shemot 11:2) car, sil en est ainsi, il aurait suffi que D. leur ordonne de sapproprier les richesses et les possessions des Egyptiens, et il naurait pas t ncessaire de les prier de prendre ces biens sous forme demprunt. 3. Le Maharsha au nom du Ayin Yaakov pose une autre question (Brachot 9a): Il convient de se demander quel est le sens de cette formule: Parle Je te prie, tant donn que ctait une chose avantageuse pour Isral... pourquoi est-il ncessaire de prsenter la demande sous forme de prire? En rponse: Au moment de lAlliance entre les Morceaux, ce ne sont pas les richesses matrielles qui inquitaient Avraham lorsquil entendit pour la premire fois le dcret dexil pour ses enfants, mais leur avenir spirituel, leur devenir aprs tant dannes dexil en terre trangre. Nous savons que les Enfants dIsral furent exils en Egypte afin dy corriger les deux cent quatre-vingthuit tincelles de saintet qui taient captives dans ses profondeurs, comme lexplique le Ohr Hahayim concernant le verset: Lobscurit planait sur la surface des eaux... (Brshit 1:2). Comment sopra cette correction? Uniquement par la souffrance des Enfants dIsral en Egypte. Le Ari zal explique dans ses crits que ce que nous disons dans la Hagada de Pessah: Ce pain de misre (la Matza) indique les tincelles de saintet qui taient captives en Egypte, et lexpression que nos anctres ont mang en Egypte indique que nos anctres les ont corriges. Seuls les enfants dAvraham taient capables doprer la correction de ces deux cent quatre-vingt-huit tincelles de saintet, afin de ramener la cration sa perfection premire, de sorte que la Prsence Divine retrouve sa place dans le monde de la Assyia, de laction, et D. donne la Torah aux Enfants dIsral. Tant que ces deux cent quatre-vingt-huit tincelles de saintet navaient pas t corriges, D. na donn Sa Torah aucun peuple, ni mme nos anctres, Avraham, Yitshak et Yaakov, bien quils en aient observ dj tous les commandements, mme les ordonnances rabbiniques. La Torah ne fut pas donne aux Patriarches mais au peuple tout entier, publiquement, sur le Mont Sina, aprs que les deux cent quatre-vingt-huit tincelles de saintet eurent t corriges. Et pourtant, Avraham, en entendant la sentence et la promesse, non seulement ne fut pas heureux, mais son monde sassombrit, comme il est crit dans lAlliance entre les Morceaux (Brshit 15:12): Et voici quune angoisse sombre, profonde, pesa sur lui. Il craignait que la peur et les souffrances qui seraient le lot des Enfants dIsral en Egypte, non seulement ne corrigeraient pas ce quils taient senss corriger mais causeraient encore plus de mal, et alors ils ne pourraient jamais sortir de lemprise de ce peuple qui allait les asservir. De plus, Avraham craignait que mme sils pouvaient corriger les deux cent quatre-vingt-huit tincelles de saintet par les souffrances et la servitude, ils risquaient de subir des dommages dans leur me et dans leur cur, et de tomber dans le cinquantime degr dimpuret, et ne mriteraient alors plus dtre sauvs et resteraient sans protection. D. connat les craintes dAvraham et ses penses. Cest pourquoi Il lui annonce et lui promet quaprs les souffrances et lesclavage, ses enfants sortiront de lexil avec de grandes richesses, cest--dire: tu nas

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aucune raison de craindre que tes enfants savilissent et ne sortent pas dEgypte - au contraire, non seulement ils sortiront grce leurs souffrances mais de plus, ils sortiront avec de grandes richesses, cest--dire quils emporteront dans leurs sacoches ces mmes tincelles de saintet qui sont une grande richesse. De plus D. promet Avraham que ses enfants natteindront pas le cinquantime degr dimpuret parce que leur me et leur cur nen seront pas atteints et cela aussi est une grande richesse. Effectivement, les Enfants dIsral furent sauvs ds quil parvinrent au quarante-neuvime degr dimpuret (Zohar Yithro 39a), et D. ne les laissa pas atteindre le cinquantime degr. Le verset lui-mme y fait allusion. Les premires et dernires lettres des mots Et ensuite ils sortiront avec de grandes richesses, ont la mme valeur numrique globale que les mots le cur et lme, cest--dire que D. promet Avraham que ses enfants ne sombreraient pas dans le cinquantime degr dimpuret et que ni leur cur ni leur me ne seraient affects, et quils sortiraient dEgypte avant darriver ce stade. Cest ce qui sest pass. Ils sortirent, le cur et lme intacts, richesse essentielle pour lhomme, lui permettant de servir D. durant sa vie. De mme, D. a promis Avraham quaprs lesclavage de ses enfants en terre trangre, ils sortiraient avec, outre une grande richesse spirituelle, de grandes richesses matrielles. Cet or et cet argent ntaient pas une compensation de leur servitude, mais un emprunt, afin de ne pas donner lAccusateur la possibilit de demander pourquoi ils recevaient de grandes richesses, puisque ceux-ci (les Egyptiens) sont des idoltres, et ceux-l (les Enfants dIsral) sont des idoltres (Shohar Tov 15:5, Zohar II 170b). Pourquoi ont-ils droit une compensation? Sils remontent ces quarante-neuf degrs dimpuret (avant de recevoir la Torah) et slvent aux cinquante degrs de saintet, alors cette fortune deviendra effectivement leur, sans aucune contestation possible. Certains prtendent que cette fortune est donne en contrepartie de leur servitude et non pas titre demprunt. Il convient de leur rappeler ce que Gvia ben Passissa a rpondu aux nations (Sanhdrin 91a): Si ctait un paiement, les Enfants dIsral ont t asservis pendant deux cent dix ans, et un simple calcul montre quils auraient d recevoir une quantit dargent et dor incomparablement plus leve. Il est crit: et ensuite ils sortiront avec de grandes richesses. Prcisment: ils sortiront et non ils prendront de grandes richesses, ce qui aurait indiqu quils les auraient prises en compensation de leur servitude, tandis que ils sortiront indique quil sagit dun emprunt qui sera restitu. Mais lorsquils corrigeront les quarante-neuf degrs dimpuret dans lesquels ils furent plongs en Egypte, largent et lor, tout dabord emprunts, se transformeront en saisie dfinitive, sans retour, et resteront leurs (cela aussi est indiqu par allusion dans le verset, car les mots ensuite ils sortiront avec de grandes richesses a exactement la mme valeur numrique que les mots Lemprunt appartiendra totalement tous les Juifs). La promesse de D. Avraham comprend deux tapes: lune, ds leur sortie dEgypte, lorsquils ont pris leurs voisins de largent et de lor sous forme demprunt afin dviter toute contestation. La deuxime tape aura lieu lorsquils parviendront au cinquantime degr de saintet, et alors cet argent leur appartiendra sans contestation. Il est certain que les Enfants dIsral ne seront plus lobjet daucune accusation puisque D. rtorquera lange tutlaire de lEgypte que les Enfants dIsral ont pris cette richesse bon droit. Mme sils taient idoltres en Egypte, ils se sont immdiatement corrigs, ils ont abandonn lidoltrie et se sont levs en saintet. Mais une autre question se pose: quel moment la deuxime tape a-t-elle commenc? Elle dbuta avec le butin de la Mer des Joncs, comme le disent les Sages (Bamidbar Rabba 13:19, Tanhouma Bo 8, Rashi Shemot 15:22): Le butin de la Mer des Joncs surpassait de loin le butin dEgypte, comme il est crit (Shir HaShirim 1:11): Nous te ferons des chanons dor avec des paillettes dargent. Si les Enfants dIsral navaient rien demand ni emprunt aux Egyptiens, ceux-ci auraient apport tout leur argent et leur or la Mer des Joncs, et l les Enfants dIsral auraient tout reu. Par consquent, la Mer des Joncs, mme ce quils avaient emprunt est devenu leur (par allusion, les lettres du mot zahav (lor) sont les premires lettres des mots qui signifient: ctait leur possession), et ils nont pas le rendre. Au moment de la sortie dEgypte, D. dit Mosh: Parle, Je te prie, au peuple, et quils demandent... Il na pas attendu quils arrivent la Mer des Joncs pour leur donner toutes les richesses qui leur revenaient. Il convient que Je remplisse exactement Ma promesse afin quils sortent avec de grandes richesses,

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autant spirituelles que matrielles, comme Je le leur ai promis, et lon sait que toute promesse divine se ralise.

LEternel, Homme de guerre


Abram tait g de quatre-vingt-dix-neuf ans, et lEternel lui apparut et lui dit: Je suis le D. Tout-Puissant, marche dans Ma voie, et sois parfait.... Et Avram tomba sur sa face... (Brshit 17:1-3). Rashi explique: Sois irrprochable - cela reprsente un commandement de plus, celui dtre sans faille dans Mes preuves. Daprs le Midrash (Yalkout Shemot 80): Marche dans Ma voie, par la circoncision, et en cela tu seras parfait. Car tant que tu es incirconcis tu es imparfait Mes yeux. Et Avram tomba sur sa face - par crainte de la Prsence Divine car ntant pas circoncis, il navait pas la force de se tenir debout (Yalkout Shemot 18). Il est dit de mme, au sujet de Bilaam (Bamidbar 24:4): Il tombe (sur sa face), mais son il est ouvert... Plusieurs fois dj, D. tait apparu Avraham mais il ntait pas tomb sur la face bien que ntant pas encore circoncis. Pourquoi ici seulement, na-t-il pas la force de se tenir debout? Afin dexpliquer cela clairement, je vais tout dabord prsenter en guise dintroduction la question que pose le ben Ish Ha propos du verset: D. est Matre de la Victoire la Guerre (Ich Milhama, littralement: un homme de guerre) (Shemot 15:3). Pourquoi justement, au moment de la guerre, D. est-Il appel Homme de Guerre?. Et le ben Ish Ha rpond ainsi sa propre question: Parce que, lorsquIl ralise des miracles pour les Juifs, au moment o les nations leur dclarent la guerre ou les oppriment comme ce fut le cas en Egypte (o ils furent cruellement asservis pendant deux cent dix ans), il Lui faut manifester trois des Noms par lesquels Il agit dans le monde pour amener la rdemption. Le premier est le Nom E-l (le Tout-Puissant, qui reprsente la Bienveillance divine, comme il est crit (Thilim 52:3): La bont du Tout-Puissant est permanente). D. manifeste par ce Nom Son courroux envers les accusateurs dIsral, ceux qui prtendent quils ne mritent pas la rdemption et qui rappellent leurs fautes en les comparant aux nations, ceux-ci sont idoltres et ceux-l sont idoltres, (Shohar Tov 15:5, Zohar II 170b). Avec le Nom E-l, D. leur impose le silence et infirme leurs arguments, tandis quIl accomplit Sa volont de protger Isral de Ses bonts. Le second est le Nom Sha-day (le Suffisant), celui qui bouleverse les projets que les nations fomentent contre Isral, en faisant tomber tout dabord lange tutlaire prpos chaque peuple. Le troisime Nom, le Ttragramme (qui ne se prononce pas), est celui par lequel D. ralise les miracles en anantissant les peuples qui dominent Isral et libre Son peuple de leur emprise. Nous savons que les miracles sont toujours raliss par ce Nom comme il est crit (Shemot 17:16): LEternel est ma bannire, nissi (le mot sn a les deux sens de bannire et de miracle). Les premires lettres de ces trois Noms, E-l, le Ttragramme, et Sha-day forment le mot ish, homme. Au moment de la guerre, lorsque D. dirige le combat pour Isral, ces trois Noms, dont les initiales forment le mot ish, agissent ensemble. Cest pourquoi D. est appel un homme de guerre (Telles sont les paroles du ben Ish Ha. ). Sur cette base nous pouvons comprendre aussi la fin de ce verset (Shemot 15:3): LEternel est Son Nom. Lessentiel du miracle en faveur dIsral provient de la manifestation du Ttragramme (comme il est dit plus haut LEternel est ma bannire, nissi), cest pourquoi il est dit tout dabord LEternel, Homme de Guerre et ensuite LEternel est Son Nom pour signifier que lessentiel du miracle vient du fait que Hashem (le Ttragramme se lit ainsi) est Son Nom. Et de mme, il est crit (Shemot 34:7): Eternel, Eternel, D. Tout-Puisant, clment, misricordieux... A laide de la proclamation de trois de Ses Noms dont les initiales forment le mot ish, homme, D. donne la victoire et accomplit des miracles pour Isral. Il nous semble pouvoir expliquer sur cette base le verset (Thilim 29:11): LEternel donne la force Son peuple, lEternel bnit Son peuple par la paix. Car les trois Noms Sha-day, E-l, et Hashem ont, selon un certain calcul, la valeur numrique de shalom, paix. Le verset sexplique ainsi: Dans le mme temps o D. par Son Nom E-l fait taire les accusateurs, par Son Nom Sha-day Il bouleverse leurs projets en faisant tomber tout dabord lange tutlaire de la nation qui tyrannise Isral, tandis que par le Nom Hashem D.

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accorde Isral une victoire miraculeuse en anantissant cette mme nation. Cest alors quIsral, qui a souffert des cruauts de cette nation, est bni par la paix dans toutes ses demeures, comme il est dit: il ny a pas de meilleur rceptacle pour les bndictions que la paix (fin du Trait Ouktzin, Dvarim Rabba 5:14). Comment fait-Il rgner la paix? Par la proclamation de ces trois Noms, dont la valeur numrique est la mme que shalom, paix. Cest ce qui est crit: LEternel donne la force Son peuple, en ce quIl dtruit la nation qui opprime Isral, afin de montrer que Lui seul est Roi. Le monde entier, qui est tmoin de lanantissement surnaturel de cette nation, en vient reconnatre la puissance du D. dIsral et la paix rgne sur Isral dans toutes ses demeures. Nous savons par ailleurs que D. bnit de paix celui qui na jamais dnatur la saintet du signe de lAlliance (la circoncision), comme ce fut le cas de Pinhas, fils dElazar, fils dAaron HaKohen qui a dtourn Ma colre des Enfants dIsral en prenant jalousement Mon parti parmi eux (Bamidbar 25:11), et qui a tu Zimri, fils de Salou et chef de la tribu de Shimon, pour avoir pch aux yeux de tous avec Kozbi, fille de Tzour, prince de Midian. Pinhas na certainement jamais port atteinte au signe de lAlliance et il a publiquement frapp mort Zimri pour avoir trahi le signe de lAlliance. En rcompense de son zle, Pinhas reut de D. une alliance de paix ternelle, comme il est crit (ibid. 12): Je lui accorde Mon alliance de paix, shalom. Ces mmes Noms de D. qui sont indiqus dans le mot shalom lont protg, et les Sages dcrivent les nombreux miracles qui se sont produits pour Pinhas lorsquil a tu Zimri et la Midianite (Sanhdrin 82b, Tanhouma Balak 21). Cela nous permet de comprendre pourquoi Avraham est tomb sur la face justement ce moment-l, ce quil navait fait en aucune occasion prcdente: Il est crit: Et lEternel lui apparut, sous le Nom Hashem, puis il est crit: Je suis E-l Sha-day.... Il en ressort que D. est apparu Avraham sous ces trois Noms, dont la valeur numrique est shalom. D. est apparu Avraham pour le bnir par la paix. Mais Avraham, parce quil ntait pas encore circoncis, est tomb la vue de la Prsence Divine venue le bnir, car il pensait quil ne mritait pas encore cette bndiction puisquil ntait pas parfait et navait pas encore la paix en lui. Avraham nest devenu parfait quaprs la circoncision (Ndarim 31b), et seul celui qui est circoncis est parfait et bni par la paix. Cela explique aussi pourquoi, les fois prcdentes, Avraham nest pas tomb sur la face bien que ntant pas encore circoncis. Cest que D. ne Se rvlait pas lui avec ces trois Noms, et ne venait pas pour le bnir par la paix. D. console Avraham qui est tomb sur sa face, en lui disant: Marche dans Ma voie et sois parfait, car celui qui ne porte pas atteinte au signe de lAlliance sainte est appel tam, parfait, complet dans les deux cent quarante-huit membres de son corps par le signe de lAlliance sacre. (Les mots Chalom, paix, et Chalm, complet, ont la mme racine et dans le verset de la bndiction Pinhas, fils de Elazar, la lettre Vav de Chalom est plus petite que les autres, car cette lettre reprsente ici le signe de lAlliance, la qualit de yessod. Sans la lettre Vav, il reste le mot Chalm, parfait, complet - Tam - comme il est dit Avraham sois parfait). Nous pouvons expliquer cela autrement. Avraham est tomb sur sa face car il lui tait difficile de soutenir une rvlation des trois Noms de D. du fait quil ntait pas encore circoncis. Mais D. lui dit: sois parfait en ce que tu veilleras, toi et tes enfants, observer toujours le commandement de la circoncision, et alors Moi aussi, Je raliserai Mon alliance, Je combattrai toujours aux cts de ta descendance et Je la sauverai de lemprise de ses ennemis, comme il est dit plus loin: Je raliserai Mon alliance entre Moi et toi, et tes descendants aprs toi, pour toutes les gnrations. Mais si vous nobservez pas le commandement de la circoncision, si toi ou un de tes enfants est incirconcis, vous serez imparfaits Mes yeux et Je ne pourrai pas combattre vos ennemis par la manifestation des trois Noms par lesquels Je Me suis rvl toi. Ces Noms nauront aucune influence sur les Enfants dIsral. Il est possible dajouter un autre point de vue. Le cas de Mosh Rabbeinou nous servira dintroduction. Lorsque D. Se rvla Mosh pour la premire fois, il est crit (Shemot 6:3): Je suis apparu Avraham, Yitshak et Yaakov en tant que E-l Sha-day, et Je ne leur ai pas fait connatre Mon Nom Hashem. Le Ben Ish Ha remarque que beaucoup de commentateurs se sont demand comment il faut comprendre ce verset, tant donn quil est explicitement crit plusieurs fois dans la Torah que D. Sadressa aux Patriarches

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par Son Nom Hashem. Le Rabbin Shayk, de mmoire bnie, cit par le Ben Ish Ha, explique ce verset ainsi: Jai pourvu leurs besoins et Je leur ai rvl Mes trois Noms, car avec Mon Nom Hashem Jai aussi agi pour eux. Mais malgr cela Je ne leur ai pas fait connatre, cest--dire quils nen ont pas eu une connaissance claire et explicite, ce qui nest pas le cas de Mosh Rabbeinou qui D. Sest rvl clairement et explicitement. Cela nous permet de rpondre la question pose plus haut, savoir, pourquoi Avraham est-il tomb sur sa face lorsque D. Sest rvl lui (comme aux autres Patriarches) par Ses trois Noms, Hashem, Shaday, et E-l? Etant donn que cette rvlation ntait pas claire et explicite, Avraham ne pouvait pas rester debout, et cest pourquoi il tomba sur la face. Il ne pouvait pas se tenir debout devant une rvlation qui manquait de clart. Il faut se demander pourquoi, effectivement, D. ne Sest rvl aux Patriarches que de faon peu claire tandis quIl Sest rvl Mosh ouvertement et clairement? La rponse est merveilleuse. Comme nous le savons, du temps dAdam, deux cent quatre-vingt-huit tincelles de saintet furent englouties et perdues, et lpoque des Patriarches ces tincelles navaient pas encore t retrouves et libres, si bien que lobscurit rgnait sur le monde cause de lidoltrie. Les tincelles de saintet taient caches, ce qui empchait une rvlation claire de la Prsence Divine, et donc toutes les manifestations de D. envers les Patriarches taient obscurcies, non parce quils ne mritaient pas une rvlation lumineuse, mais parce que leur poque nen tait pas digne. Mais lpoque de Mosh, Isral avait rgnr les deux cent quatre-vingt-huit tincelles de saintet et le temps de la rdemption tait arriv, cest pourquoi D. Sest manifest Mosh par une rvlation claire et des miracles vidents alors quIl Sest rvl aux Patriarches secrtement. Vous vous demandez peut-tre pourquoi Mosh avait besoin de savoir tout cela. Quel est le rapport entre cette connaissance et la plainte que Mosh formule la fin de la section prcdente (Shemot 5:2223): Pourquoi as-Tu rendu ce peuple misrable? Le sort du peuple a empir et Tu nas pas sauv Ton peuple? Lexplication est merveilleuse. Mosh a dit D.: Il est vrai que Tu mas fait savoir que Tu ne Tes rvl aux Patriarches que par la manifestation secrte et voile de Tes trois Noms, mais Tu as quand mme accompli pour eux nombre de miracles, alors que maintenant Tu Te rvles moi tout fait ouvertement par la manifestation de Tes trois Noms, mais non seulement Tu ne fais ni miracles ni merveilles pour les Enfants dIsral et Tu nas pas sauv Ton peuple, mais au contraire, leurs souffrances deviennent encore plus grandes et Pharaon encore plus cruel. Mais D. lui rpond: Pour les Patriarches, il tait ncessaire de faire des miracles en secret car les deux cent quatre-vingt-huit tincelles de saintet navaient pas encore t dlivres. Mais prsent, cause des souffrances que Pharaon a accumules sur Mes enfants durant leur esclavage, presque toutes les tincelles ont t rgnres. La preuve en est que Je parle avec toi, que Je me rvle toi par la proclamation vidente de Mes trois Noms. Et donc, dsormais, Je vais dlivrer les Enfants dIsral et avec une main puissante, Je les ferai sortir dEgypte (Shemot 6:1), par de grands miracles et des merveilles manifestes.

Le devoir de lhomme: marche dans Mes voies et sois parfait


Il est crit (Brshit 17:1-2): Et lEternel apparut Avram... et lui dit... marche dans Mes voies et sois parfait, et Je maintiendrai Mon alliance avec toi et Je te multiplierai grandement (littralement: beaucoup beaucoup). 1. Comment lhomme peut-il marcher devant D.? puisque la terre entire est remplie de Sa gloire (Ishaya 6:3). Par ailleurs, quel est le sens de marcher devant Lui? Sil tait crit aprs Lui nous aurions expliqu la chose comme lont fait les Sages (Sotah 14a, Vayikra Rabba 25:3, Sifri Ekev 11:22) concernant le verset (Dvarim 13:5): Cest lEternel votre D. quil faut suivre propos duquel ils disent: Est-il possible pour lhomme de suivre la Prsence Divine? Nest-il pas dit (Dvarim 4:24): Car lEternel votre D. est un feu dvorant? Mais cela signifie quil faut suivre Ses voies et se conduire selon Ses qualits. Mais comment marcher devant Lui? 2. Il faut aussi comprendre le rapport entre lexpression marche devant Moi et sois parfait, et de manire plus gnrale, en quoi le fait de marcher devant Lui est li aux versets concernant lAlliance,

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comme Je donnerai Mon Alliance (ibid. 2), et Voici Mon Alliance (ibid. 4), Et Jtablirai Mon Alliance entre Moi et toi (ibid. 7). Quelle est lintention de D. lorsquIl dit: Marche devant Moi (dans Mes voies)? Lhomme nat en ce monde avec la tche dy faire rgner la souverainet de D., surtout aprs la faute du Premier Homme qui a endommag la cration tout entire en mangeant de larbre de la Connaissance. Chacun de nous a le devoir de corriger cette faute, tant donn que lme de chaque individu est lie lme de lHomme (Tikouney Zohar 56, 90b), et de ce fait, toutes les mes ont got de larbre de la Connaissance. Mme si lon voulait objecter quelles y ont got malgr elles, en fin de compte elles jouissent de la faute et par consquent, elles doivent la corriger et restituer lHomme sa grandeur passe, draciner le mauvais penchant jusqu larrive du Messie, quil arrive rapidement de nos jours. Amen! Cest une erreur de croire quil est impossible de corriger le monde et de draciner le mauvais penchant, sous prtexte que le mauvais penchant est une ralit, comme il est crit (Yob 2:1): Or le jour arriva o les fils de D. vinrent se prsenter devant lEternel. Le Satan aussi vint avec eux... et si le mauvais penchant est ce diable, comment un homme de chair et de sang peut-il lui faire face et vaincre ses stratagmes? Dautant plus que le mauvais penchant accompagne lhomme ds sa naissance comme il est crit (Brshit 8:21): Les conceptions du cur de lhomme sont mauvaises ds son enfance, et les Sages disent (Yroushalmi Brachot 3:5, Brshit Rabba 34:10): Ds que lhomme sort du sein maternel, il est dot du mauvais penchant. Comment donc le vaincre? Cette objection na aucune base et aucune raison dtre, pour deux raisons: 1. Nous savons que lme est la partie divine manant den Haut, elle a son origine dans le monde suprieur, elle est taille dans la carrire des mes, sous le Trne divin (Zohar I 113a, III 29b) et Celui qui insuffle la vie la place dans le corps de lhomme. Si, malgr cela, le corps de lhomme nest pas brl par la lumire divine, qui est un feu dvorant (Dvarim 4:24), il est vident quil ne sera ni brl ni troubl par le feu du mauvais penchant, condition de pas vouloir ltre, dautant plus que D. lui vient en aide dans la peine et dans la souffrance. 2. Les Sages disent, propos du verset: Son flambeau brillait sur ma tte (Yob 29:3), que lorsque lenfant se trouve dans le sein de sa mre, un ange lui enseigne la Torah et une lumire est allume au-dessus de sa tte (Nidah 30b) afin quen venant au monde, lhomme soit capable de surmonter et de vaincre le mauvais penchant. Si lhomme nest pas brl par cet ange, il est certain quil ne sera pas non plus brl par le feu du Satan - le mauvais penchant. Cela ne dpend que de lhomme lui-mme, qui doit choisir entre le bien et le mal, et quel que soit son choix, son me lui vient en aide, puisque Lhomme est dirig dans la voie quil choisit de prendre (Makot 10b, Bamidbar Rabba 20:11, Zohar I 198b) et Les pieds de lhomme sont garants de lui (Souca 53a, Brshit Rabba 100:3). De plus, le mauvais penchant est inclus dans ce qui est dsign comme trs bien (Brshit Rabba 9: 9), car cest lui qui aide lhomme perfectionner sa faon de servir D., comme il est dit (Brachot 54a): De tout ton cur (crit Lvav au lieu de Lv), cest--dire avec les deux tendances de ton cur, la bonne et la mauvaise, et cest lui qui aide lhomme perfectionner le monde sous le rgne de D. et liminer la tyrannie des mchants. En particulier, la Torah le soutient, le protge et le sauve (Sotah 21a), comme lpe et le bouclier protgent contre les attaques extrieures. La construction du Temple nous sert dexemple. D. nous ordonne (Shemot 25:8): Faites-Moi un sanctuaire, afin que Je sjourne parmi eux et quils soient appels de Mon Nom. Apparemment cela aussi demande tre expliqu, puisque la terre est remplie de la Gloire de D. (Ishaya 6:3). Pour quelle raison D. a-t-Il besoin dun sanctuaire? Mosh lui-mme ne la pas bien compris (Yalkout Trouma 365, Pessikta). Mme si lon voulait dire queffectivement D. souhaitait dsigner un lieu spcifique, il reste encore comprendre pourquoi il naurait pas suffi quIl fasse rsider Sa gloire sur le Mont Moriah, et pourquoi il fallait Lui construire un btiment de poutres et de pierres, comme sIl avait besoin dun btiment pour rsider sur la montagne qui porte Son Nom? Nous avons vu que D. a sanctifi le Mont Sina pour un temps limit trois jours, comme Mosh la dit D. (Shemot 19:23): Tu nous as avertis en disant: dfends la montagne et dclare-la sainte. Il a aussi interdit dy monter (ibid. 12-13). Tout cela pour un temps

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spcifique, comme le disent les Sages (Yalkout Shemot 282): Tant que la Prsence Divine est rvle sur la montagne, quiconque touche son flanc mourra, ds que la Prsence Divine se retire, tous ont le droit dy monter, et il ny avait l aucun btiment. Pourquoi donc faut-il un sanctuaire, et pourquoi nest-il pas possible de sanctifier le Mont Moriah pour tous les temps, mme sans y construire un btiment? Cela cache srement des secrets divins merveilleux. Il est le Crateur, Il est le Formateur, Sa gloire remplit le monde, qui peut Lui dicter son action? (Kohlet 8:4), Il ralise toutes Ses volonts (ibid. 8:3), Il nest influenc par personne, il nen est point dautre que Lui (Dvarim 4:35), Il est Un et Son Nom est Un (Zacharia 14:9), Il peut tout, et Son dsir est que les mes qui se sont dgrades en mangeant de larbre de la Connaissance retournent leur condition premire et retrouvent ce qui a t perdu par la faute de lHomme. Et la lumire cache sera alors restitue lavenir (Haguiga 12a) et le monde retrouvera la perfection quil avait lors des six premiers jours de la cration. Tel est le sens du verset marche dans Mes voies (devant Moi). A cause de la faute de lHomme, toute la cration a rgress, et D. se trouve pour ainsi dire derrire lhomme. La tche de lhomme est de corriger ce quil a endommag, cest ce qui est dit: Marche devant Moi: va devant et corrige ce que tu as abm, afin que Je puisse unifier le monde sous Mon rgne. Et D. ordonne aussi: sois parfait. Cet ordre de D. Avraham sadresse, de gnration en gnration, chaque homme pour quil parvienne la perfection voulue lors de la cration. En fait, Avraham est le premier avoir entrepris la rparation du monde aprs le dluge, comme le disent les Sages (Avot V:2): Toutes les gnrations avaient excit la colre divine jusqu ce quelles soient noyes... enfin vint Avraham, qui reut la rcompense de tous. Cest pourquoi D. met Avraham en garde justement en lui disant: Marche dans Mes voies, afin de Me mettre en avant par ton obissance inconditionnelle. Et D. ajoute (Brshit 17:2): Jtablirai Mon alliance entre Moi et toi, cest--dire: seuls tes descendants, Isral, et aucune autre nation, sont capables doprer cette correction. Et Je te multiplierai grandement, cest--dire malgr les preuves du mauvais penchant, vous vous efforcez de Me servir, et justement cause du mauvais penchant, votre rcompense sera grande. Mme sil vous talonne, vous lcraserez. Cest pourquoi vous serez doublement rcompenss, tout dabord pour votre volont de Me connatre, et ensuite pour avoir lutt contre le mauvais penchant et lavoir vaincu. D. dsire que les Enfants dIsral construisent justement un sanctuaire, afin de leur faire savoir et bien comprendre que tant que le sanctuaire nest pas construit, D. se tient pour ainsi dire derrire. Cest seulement aprs la construction du sanctuaire quil peut faire rsider Sa Prsence parmi eux et tre pour ainsi dire visiblement prsent, et que toute la cration retrouvera sa perfection. Le sanctuaire qui est construit par lhomme lui enseigne quil doit se construire lui-mme: ainsi nous remarquons (pour ne donner ici que cet exemple) que les quarante-huit planches qui en forment les cts correspondent aux quarante-huit faons dacqurir la Torah (Avot VI:6). Cette construction voque la perfection le monde cr, et la Prsence divine est la manifestation du rgne de D. sur le monde. Cest ce que dit David HaMelech (Thilim 16:8): Mes regards sont toujours tourns vers D.. En servant D., lhomme est toujours tourn vers Lui, il Le place devant lui, et non pour ainsi dire derrire. Tous les versets de cette section qui mentionnent lalliance sont lis. Cest seulement si les Enfants dIsral continuent au cours des gnrations observer lalliance conclue avec Avraham, que la correction du monde soprera, et alors D. sera devant eux pour veiller sur eux et les protger contre tout malheur. Remarquons que les forces du mal sont appeles les arrires, comme crit ce sujet le Ari zal, et comme il est indiqu dans le Zohar (Zohar Hadash Aharei 59a), parce que le mal atteint toujours lhomme par derrire. Cest pourquoi D. a dit Avraham Marche devant Moi afin que Lui, D., soit derrire lui pour le protger et pour laider triompher du mal qui le poursuit. Cela nous permet dexpliquer ce que D. dit Avraham (Brshit 12:1): Quitte ton pays, ta terre natale et la maison de ton pre. Daprs les textes de la Cabale, ce commandement sadresse lme, cest-dire que D. soudoie lme pour quelle veuille bien quitter le monde de la Vrit pour aller vers la terre, l o Il la destine. Cest pour elle une grande peine que de quitter le monde des mes et de descendre en ce bas monde.

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Lorsque lme descend en ce monde, elle quitte sa place auprs de D., sous le Trne de Gloire. Mais elle en souffre, elle craint de se dtriorer au lieu de se corriger. Cest pourquoi cette sparation est tellement difficile. Et alors D. apaise lme qui descend en ce monde contre son gr, et lui dit: Marche devant Moi, cest--dire: va dans le monde, et Moi je descendrai derrire toi, afin de veiller sur toi et de te protger pour que tu puisses parvenir la perfection. Ensuite il est dit: Je maintiendrai Mon alliance entre Moi et toi, une alliance ternelle, pour ton bien et ton bnfice propre. Je te multiplierai grandement cest--dire Je multiplierai ta rcompense pour avoir surmont les embches qui se trouvaient sur ton chemin en vue de te faire faillir dans les preuves de la vie en ce monde, ce qui te permettra de rsider auprs de Moi par le mrite de tes propres efforts et non par une faveur de Ma part. Comment lme surmonte-t-elle ces preuves? Uniquement grce laide et au soutien de D. qui Se tient auprs de chacun pour lui venir en aide. Ajoutons que D. demande lhomme dtudier la Torah sans arrire-pense et de sen tenir ce quelle dit avec crainte et amour, avec abngation et soumission, pour la faire sienne par les quarante-huit faons dacqurir la Torah (Avot VI:6) et pour acqurir la Torah... mne une vie de privations... (Avot VI: 4, Kala 8, Tanna DBey Eliyahou Zouta 17). Si bien que lhomme, rempli de la crainte de D., domine effectivement la cration jusqu pouvoir annuler les dcrets du Ciel. De plus, la Torah a t donne lhomme, ce qui permet aux dcisionnaires de lgifrer selon leur sagesse. Ce fut le cas, par exemple, du fourneau de tuiles (Babba Metzyia 59b) au sujet duquel il y avait une divergence dopinion entre Rabbi Elizer et les Rabbins, Rabbi Elizer layant dclar impur tandis que les Rabbins lavaient dclar pur. Bien que Rabbi Elizer ait t soutenu par une voix venant du ciel confirmant son opinion, Rabbi Yoshoua lui objecta: La Torah nest pas dans le ciel (voir Dvarim 30:12), et que lon ne tient pas compte dune voix qui descend du ciel pour dterminer la loi. Les Sages tmoignent que D. sexclama alors, plein de joie: Mes enfants Mont vaincu! De mme, au moment du don de la Torah, D. dit Mosh (Yalkout Shimoni Yithro 285): Tu as parl juste, et plus tard, D. a agr une autre dcision de Mosh (Shabbat 87a, Shemot Rabba 19:3), lui disant: Mosh, tu mas fait (pour ainsi dire) revivre et Je te suis reconnaissant (Brachot 32a). Tel est le sens de: Marche devant Moi: D. dit lhomme quil parviendra la perfection du corps, de lesprit et de lme qui lui permettra dannuler les dcrets, comme il est dit: D. dcrte et le juste annule les dcrets (Moed Katane 16b, Shabbat 63a, Babba Metzya 85a). Cette exigence de D. envers lhomme est trs difficile remplir et exige une grande discipline. Mais si lhomme se souvient que ses efforts multiplient sa rcompense et lui vitent bien des malheurs, comme il est crit (Thilim 97:10): Il veille sur lme de ses serviteurs, les sauve de la main des mchants et de mme (ibid. 121:4): Il ne dort ni ne sommeille, le Gardien dIsral! il sortira vainqueur de la guerre permanente contre son mauvais penchant, et cest de cette faon que le mauvais penchant aide lhomme parvenir la perfection. Sa russite est alors tellement grande que D. dit: Mes enfants Mont vaincu, ce qui est pour Lui une cause de grande joie. Par ailleurs, le but de lhomme est de progresser et de marcher devant D. jusqu ce que le monde ait atteint sa perfection. Toutes les excuses de lhomme qui na pas atteint ce but et qui a laiss la Prsence Divine derrire lui, sont vaines. Ce nest pas sans raison que les Sages ont dit (Ybamot 121b, Vayikra Rabba 27:1, Zohar I 150a): D. est trs pointilleux dans Ses exigences envers Ses proches, et (Bamidbar Rabba 19:10, Tanna DBey Eliyahou Rabba 2, Tanhouma Houkat 16): Les Justes sont punis pour leurs moindres fautes. Ils sont punis proportionnellement leur capacit de comprendre et de connatre D., afin quils se rappellent leur tche en ce monde. Si quelquun est assailli par des souffrances, quil examine ses actes. Sil la fait et na pas trouv la cause de ses souffrances, quil les attribue ses lacunes dans ltude de la Torah (Brachot 5a), cest--dire que D. ne punit pas lhomme sans raison, et ce nest que par amour quIl le rappelle lordre, comme il est crit (Mishley 3:12): lEternel chtie celui quIl aime, et (Ishaya 53:10): D. accable de maladie qui Il dsire, car les souffrances sont pour le bien de lhomme (voir Menahot 53b, Tanna DBey Eliyahou Rabba 13). Puisquil en est ainsi, lhomme doit examiner ses actes, sil les a passs en revue et na pas trouv de cause ses souffrances, quil les attribue une ngligence de ltude de la Torah, ne serait-ce quun instant - une ngligence qui lui aurait fait oublier son devoir. Vous vous demandez peuttre en quoi abandonner la Torah un petit instant est tellement grave? Cest quun oubli aussi infime peut causer un grand dommage toute la cration puisque D. a consult la Torah et a cr le monde (Brshit

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Rabba 1, Zohar Trouma 161b), et donc lexistence mme de la cration dpend de lexistence de la Torah, et la moindre dviation de la Torah cause un grand mal la cration tout entire. De mme, la moindre dviation dans nos comportements, comme par exemple le fait de se nourrir sans remercier D. ou jouir de biens matriels inutiles, sans tre unis D., cause un grand tort la Torah. Marche devant Moi est le but et la raison dtre de lhomme en ce monde, et effectivement Avraham est parvenu ce but, si bien que les Sages disent de lui (Yoma 28b, Vayikra 2:9) quil a observ toute la Torah, mme les ordonnances rabbiniques, comme il est crit (Brshit 26:5): afin dobserver Mes commandements, Mes prceptes, Mes lois, et Mes doctrines. Nous savons quAvraham est parvenu la perfection, puisquil a dit son serviteur Elizer (ibid.24:40): LEternel dont jai toujours suivi les voies, ce qui signifie clairement quil est parvenu la perfection exige de celui qui marche devant D. Si nous suivons la voie de nos Patriarches, D. nous aide parvenir la perfection et prparer le lieu o Sa prsence est manifeste, pour tre face nous et nous soutenir, et cela nous aide corriger nos origines et inciter le monde se soumettre au rgne de D., selon Sa volont. Amen! Quil en soit ainsi!

Avraham proclame la souverainet de D. dans le monde


Il est crit (Brshit 17:1-2): Avram tant g de quatre-vingt-dix-neuf ans, D. lui apparut et lui dit: Marche dans Mes voies et sois parfait. Et Je maintiendrai Mon alliance avec toi et Je te multiplierai grandement. Malgr sa grandeur et sa foi profonde dans le Crateur de tous les mondes, Avraham ne pouvait pas parvenir la perfection tant quil ntait pas circoncis, comme le disent les Sages (Ndarim 31b): Avraham ne fut considr parfait quaprs stre circoncis. Cest seulement aprs stre dbarrass de ce morceau de chair quil a pu se tenir debout et parler D. car tant quil ntait pas circoncis il navait pas la force de se tenir debout face la Prsence Divine (Pirkey DRabbi Elizer 29, Rashi ad. loc., Tanhouma Lech 20). Il reste expliquer clairement le sens de la circoncision et lpreuve du sacrifice dYitshak, la dernire preuve que D. imposa Avraham: 1. Avraham consulta ses amis, Anr, Eshkol et Mamr avant de se circoncire, et leur demanda conseil. Anr et Eshkol lui dirent de ne pas se circoncire, tandis que Mamr lui conseilla de le faire (Brshit Rabba 42:14, Tanhouma Vayra 3). Il faut se demander pourquoi Avraham prit conseil, tant donn quil avait reu un ordre de D. Anr et Eshkol ntaient pas des gens quelconques mais les allis dAvraham (Brshit 14:13). Avaient-ils une raison valable de lui conseiller de ne pas se circoncire? Pourquoi Mamr de son ct lui a-t-il conseill de le faire? 2. Les Sages ont dit (Midrash Shmouel, ch. 12): LorsquAvraham signa un pacte dalliance avec Avimelech Ber Sheva, comme il est crit (Brshit 21:32): Et ils contractrent une alliance Ber Sheva, D. se fcha et le mit lpreuve par le sacrifice de son fils Yitshak. Il faut comprendre pourquoi, effectivement, Avraham a contract une alliance avec un tranger. Quelle tait son intention? 3. En quoi consiste lpreuve du sacrifice, car nous savons bien que beaucoup de peuples sacrifiaient leurs enfants dans des rites idoltres? Tout dabord, il faut citer les paroles du Zohar (Vayera 97b, 98a): Lorsque D. dit Avraham de se circoncire et quil le fit, le monde sest consolid et la Parole de D. fut rvle. Concernant le verset (Brshit 18:1): Et D. se rvla lui, Rabbi Elazar remarque que cette rvlation eut lieu aprs la circoncision. Car avant la circoncision, D. ne sadressait Avraham que de faon imprcise, et les plus hauts degrs de prophtie ne lui parvenaient pas. Lorsquil fut circoncis, il est crit: Et D. se rvla lui, sans prciser qui. Sil avait t dit: Et D. se rvla Avraham cela aurait impliqu quil ny avait aucune diffrence qualitative entre les rvlations prcdentes et celle-l. Mais ce verset cache un secret: D. se rvla lui comme il ne lavait pas fait prcdemment, et maintenant la Voix divine est rvle en mme temps que Sa parole. Et le Zohar poursuit (Bo II 36a): Rabbi Abba rapporte deux versets: Il tait assis au seuil de la tente, et (Brshit 24:1): LEternel bnit Avraham en tout, et il explique: ce seuil est la dixime couronne, le seuil du saint sanctuaire du monde den-Haut (cest la Sphira de la Royaut, le seuil de toutes les Portes et des Sphirot suprieures). Il est assis au seuil de la tente - au seuil du monde suprieur... (Zohar I 98b).

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Ziv HaZohar (ainsi que le commentaire HaSoulam) explique ainsi cette section: Tant quAvraham ntait pas circoncis la Royaut tait faible et il lui manquait la perfection ncessaire pour sunir aux Sphirot suprieures, dune union comparable lunion du mle et de la femelle. Avant la circoncision, Avraham nentendait quune voix, il navait pas la rvlation de la parole dont il navait quune comprhension vague. Aprs la circoncision, lunion parfaite sest opre entre la Royaut qui est la Parole et la Splendeur, qui est la Voix, et cest alors quAvraham entendit clairement la Parole de D., lorsque les Sphirot suprieures se rvlrent et devinrent visibles dans leur clart. Nous allons expliquer ce passage, selon notre humble avis. Aprs stre circoncis, Avraham mrita de devenir le support de la Prsence Divine (voir Or Hahayim, dbut de la section Vayera), et il eut la rvlation de toutes les Sphirot dans leur lumire, parce quil tait maintenant li la Royaut. La Royaut, qui est la dernire des Dix Sphirot et la base de la Prsence Divine, est comme une ouverture qui permet datteindre les autres Sphirot. De mme, il est dit de Tamar (Brshit 38:14): Elle sassit au carrefour des Deux-Sources, cest--dire quelle sassit et attendit que Yhouda, porteur de la Royaut, passe (Brshit Rabba 92:5, Tanhouma Korah 12). Yhouda sappelle le seuil parce quil perptue la ligne de la royaut juive jusqu la venue du Messie, grce auquel se rvlera la lumire des autres Sphirot et ainsi nous mriterons la rvlation de D. Sur cette base, il nous semble pouvoir aussi expliquer pourquoi D. dit Isral: A Rosh HaShana, dites devant Moi les versets relatifs Ma royaut, afin que Je me souvienne de vous favorablement (et que Je vous pardonne) (Rosh HaShana 16a). Cest qu Rosh HaShana (le Nouvel An), grce au lien des Enfants dIsral avec la Royaut, la dernire des Dix Sphirot, il est possible de parvenir aux Sphirot suprieures et de recevoir leur clart jusqu parvenir la perfection qui convient, et alors les prires sont agres. Pendant les dix jours de pnitence entre Rosh HaShana et Yom Kippour, nous disons dans la prire le Roi de Justice au lieu de D. de Justice, afin de nous attacher la Royaut, qui permet de slever et de recevoir la lumire des Sphirot suprieures jusqu parvenir la Couronne, la Justice. Cest ce qui est dit par la suite dans le Zohar (Vayikra III 14): Ouvrez-moi les Portes de la Justice, et je viendrai louer lEternel... les justes y pntrent (Thilim 118:19-20): Dites devant Moi les versets de la Royaut Rosh HaShana, pour que votre souvenir monte favorablement devant Moi grce lappel du Shofar. Nous en venons maintenant lpreuve du sacrifice dYitshak, dont certains Sages ont dit (Brshit Rabba 55:8, Yalkout Vayera 62): Cette preuve fut plus difficile que lpreuve de quitter son pays. Ntait-ce pas la coutume de beaucoup de peuples de sacrifier leurs enfants aux idoles? On pourrait penser que cette preuve tait difficile pour Avraham parce quil avait toujours conjur le monde dentendre la Voix de D. (Sotah 10a), et dsavou la pratique des sacrifices humains pour gagner la faveur des dieux, mais une telle considration ne constitue pas un argument valable puisque Avraham na jamais tenu compte de lopinion publique; lui qui naspirait qu obir D. naurait-il pas couru avec joie accomplir la Volont divine? Mais aprs la circoncision Avraham ressentit quil tait parvenu la perfection, que toutes les Sphirot lilluminaient. Juste ce moment-l, au moment o il pensait tre parvenu au comble de la grandeur, D. lui dit: Va vers le pays de Moriah (Brshit 22:2), cest--dire, uniquement par le fait que tu vas vers le pays de Moriah pour sacrifier ton fils, tu pourras parvenir la vraie perfection. Un grand tonnement emplit le cur dAvraham. Est-ce quil pourra vraiment parvenir au comble de la perfection par le sacrifice de son fils Yitshak? Comment le sacrifice de son fils sur lautel peut-il lui procurer la perfection? Dautant plus quun tel acte le laissera sans descendance? Cette preuve est trs grande et trs difficile, parce que les nombreuses questions quAvraham se posait restaient sans rponse. Comment Avraham peut-il parvenir la perfection sur le compte dYitshak, au moment o il est attach sur lautel pour le sacrifice? La rponse est donne par le fait quils allrent tous deux ensemble (Brshit 22:8), unis dans la mme intention et dun seul cur (Brshit Rabba 56:4, Rashi ad. loc.), cest-dire que chacun soutenait lautre. Avraham parvint la perfection lge de cent ans grce Yitshak, et Yitshak parvint la perfection grce son pre Avraham, lge de trente-sept ans, lorsquil fut attach sur lautel, en sacrifice. Les Patriarches Avraham et Yitshak, qui reprsentent la Bienveillance et la Puissance (Zohar III 302a), sont parvenus la perfection, Avraham en vainquant son amour paternel, et Yitshak en ayant eu le courage de soffrir en sacrifice. Ce nest pas sans raison que nous rappelons dans la prire quotidienne, la prire

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du matin, ce mrite: Matre du monde! De mme que Avraham a vaincu sa misricorde afin de faire Ta volont de tout cur, de mme, que Ta misricorde surmonte Ta colre, que Ta bont prenne le dessus, et montre-Toi plein de grce envers nous. Cela explique pourquoi Avraham a tard pratiquer la circoncision, et a mme demand le conseil dAnr, Eshkol et Mamr, et pourquoi il na pas obi tout de suite avec joie et dun cur heureux. Nous savons quAvraham servait D. de tout son cur, avec le bon et le mauvais penchant, mais il le faisait avec une certaine difficult, une certaine retenue, du fait quil tait encore incirconcis. Avraham avait russi surmonter et vaincre ces difficults, si bien que mme sa chair incirconcise, signe dimpuret, servait D. avec le bon penchant. Telle tait la question dAvraham ses amis. Est-il prfrable dattendre pour me circoncire, et en attendant, de continuer servir D. dans la peine, avec mon impuret, ou peut-tre est-il prfrable dtre compt parmi ceux qui sont zls et obissent sans tarder (Pessahim 4a, Tanhouma Vayera 22) - zle qui nous est dailleurs enseign justement par Avraham - bien quune fois circoncis, rien ne me retiendra de servir D. Anr et Eshkol lui ont rpondu quil valait mieux attendre, et pour le moment continuer surmonter son imperfection, ce qui lui confre un grand mrite. Mme si lon voulait objecter cet argument que ceux qui accomplissent un commandement ne sont pas mis en danger (Pessahim 8b, Zohar III 273a), il est probable quune fois circoncis, D. veuille malgr tout lprouver et le mettre en danger. De plus, il est possible que la circoncision ne le fasse pas parvenir la perfection et lillumination. Par contre Mamr conseille Avraham dobir D. et de pratiquer la circoncision tout de suite. Grce elle, il parviendra lillumination et mme sil ne parvient pas une perfection totale, mieux vaut soutenir cette preuve. Effectivement, Avraham couta son conseil et fut rcompens de sa diligence. Cest justement ce moment-l quil est devenu une base pour la Prsence Divine. Mamr non plus na rien perdu pour avoir donn ce bon conseil. Il eut le mrite que D. Se rvle Avraham justement dans ses terres (Tanhouma Vayra 3) comme il est dit: Et D. se rvla lui dans les plaines de Mamr (Brshit 18:1): Il a conseill Avraham de se circoncire, et cest pourquoi D. sest rvl Avraham dans son domaine. Jai trouv une confirmation de ce point de vue dans le livre du Admor Sar Shalom de Belz de mmoire bnie, Midbar Kodesh, qui crit: Le jour o D. a contract une alliance avec Avraham par la circoncision, le pouvoir du Serpent fut bris. Cela sous-entend quAvraham devait lutter contre le pouvoir du Serpent qui avait une emprise sur sa chair depuis quatre-vingt-dix-neuf ans, jusquau jour o il sest circoncis, et alors le pouvoir du Serpent fut bris (voir aussi Zohar I 148a). Il est vrai quavant la circoncision aussi, il aurait pu rompre cette emprise, mais le jour o il fut circoncis il sen est compltement libr. Cela nous permet aussi de comprendre lalliance dAvraham avec Avimlech, alliance contraire la volont de D., et qui lui valut dtre mis lpreuve par le sacrifice de son fils. Avraham ne voulait que servir D. tout le temps et slever travers les difficults les plus grandes, comme il avait servi D. avant la circoncision. Aprs stre circoncis, il pourrait servir D. en toute srnit (ce qui lui fit prendre conseil auprs de ses amis). Il dsirait continuer servir D. difficilement, sans sattendre une rcompense (Avot I:3), et il russissait dans cette voie. Avraham le Juste, dans sa pit, dsirait servir D. dans la peine. Lorsquil fut circoncis, le service de D. fut allg et facilit pour lui, car il stait dbarrass du poids de limpuret, et cela linquitait. Et donc, il est possible quil ait contract une alliance avec Avimelech, roi des Philistins, afin dtre li un nonJuif, fait semblable limpuret, afin de continuer servir D. malgr ce lien, dans la peine, comme son me le dsirait. Pour cette raison, Avraham entreprit de voyager chez les Philistins aprs la circoncision (tout cela sest pass en un temps trs court). Justement aprs tre dbarrass, grce la circoncision, du poids de limpuret qui tait un fardeau dans son service de D., il alla chez les Philistins signer un pacte avec Avimelech, ce qui lui permettrait de servir D. avec amour et avec crainte, malgr (il faudrait dire grce ) lalliance quil avait contracte avec un non-Juif comme Avimelech. Il est clair que tel est prcisment le lien entre la circoncision et lalliance avec Avimelech.

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Nous devons signaler surtout quAvraham dsire faire rgner D. (la Sphira de la Royaut comme nous lavons dit plus haut) sur toute la cration, par sa faon de servir D. en tout temps. Il contracta cette alliance avec Avimlech, afin de lamener, grce cette alliance, reconnatre D. et Le servir. Pourtant, telle ntait pas la volont de D. qui dit Avraham: Jai voulu te dbarrasser de ton impuret corporelle afin que tu puisses mieux Me servir, et toi tu vas contracter une alliance avec ce non-Juif, Avimelech. Tu veux que ce non-Juif sattache toi, mais Moi Je ne le dsire pas, mme pas titre dpreuve... Si tu dsires tre prouv, voici, je vais te donner une preuve plus difficile que la premire, cest lpreuve du sacrifice (tel est le lien entre lalliance avec Avimelech et le sacrifice dYitshak), par laquelle tu parviendras la perfection requise pour faire rgner Ma Royaut sur toute la cration. Nous devons tous tirer un enseignement de la conduite dAvraham, comme le disent les Sages (Sotah 34a): les actes des pres sont des exemples pour leurs enfants.

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Lhospitalit, commandement et vertu
Il est crit (Brshit 18:1-3): LEternel Se rvla lui dans les plaines de Mamr, alors quil tait assis lentre de la tente dans la chaleur du jour. Et il leva les yeux et vit que trois personnages se tenaient debout devant lui... il courut du seuil de la tente leur rencontre et se prosterna terre... et il dit: Seigneur, si jai trouv grce tes yeux, ne passe pas outre ton serviteur... Combien notre intelligence limite est loin de pouvoir saisir le sens de telles paroles. 1. Avraham se tient devant D. venu le visiter au troisime jour de la circoncision (Babba Metzya 86b), Il parle avec lui, exprience que nimporte quel individu espre et qui le rendrait tellement heureux! Justement ce moment-l, tout coup, Avraham quitte la Prsence Divine et court accueillir ces htes inconnus, des gens de passage, peut-tre sont-ils vertueux, peut-tre sont-ils, malheureusement, pervers? Est-ce quil convient vraiment de se conduire de la sorte lorsque lon est en tte tte avec la Prsence Divine? Convient-il de quitter ainsi la Prsence de D.? 2. Les Sages tirent de cela un enseignement (Shabbat 127a): Accueillir des htes est plus important quaccueillir la Prsence Divine, puisque Avraham sest spar de D. pour accueillir ses htes . Mais comment Avraham lui-mme savait-il que lhospitalit est un commandement plus important que celui daccueillir la Prsence Divine, et comment savait-il quil convient dagir ainsi? Avraham tait bienveillant, telle est sa qualit principale (Zohar III 302a), comme il est crit (Micha 7:20): Tu tmoignas Yaakov la fidlit, Avraham la bienveillance . Il avait naturellement tendance courir laide de tout un chacun, car il voyait en chacun limage de D., et donc il se devait de lui venir en aide et de le soutenir, sans vrifier si ce ncessiteux tait vertueux ou criminel. Au contraire, sil savait quun tel tait coupable, il sefforait dautant plus de le corriger et de le ramener dans le bon chemin jusqu ce que limage et la ressemblance divines qui lavaient quitt cause de ses fautes lui soient restitues. Avraham sefforait de restituer chaque homme lme et la spiritualit qui lavaient abandonn, car quel est le sens de la vie dun homme sil ne porte pas limage de D. et sil nagit pas en imitant les vertus divines? Dans ce cas, il est comme mort. Telle tait ltendue de lactivit dAvraham qui ramenait sous la protection de D. ceux qui sen taient loigns. Nous pouvons maintenant comprendre. D. visite Avraham chez lui, parce quil est malade, et Il lui parle. Avraham tait attach D. et Ses vertus, comme le disent les Sages (entre autres, Sotah 14a) concernant le verset et attachez-vous Lui (Devarim 10:20): Attache-toi aux vertus divines, de mme quIl est misricordieux, sois misricordieux, de mme quIl est plein de compassion, sois compatissant . De lui-mme Avraham faisait le bien, comme D., et il tait parvenu une telle lvation quil est dit que ce jour-l, il tait devenu le porteur de la Prsence Divine [Le Or Hahayim au dbut de la section Vayra crit: Il semble que lintention de la Torah est de nous faire savoir que D. a fait planer Sa Prsence sur Avraham et la choisi pour tre porteur de la Prsence Divine, comme lont dit les Sages (Brshit Rabba 82:7): Les Patriarches sont le char de la Prsence Divine... et cest alors que se rvla dans sa chair lempreinte sacre]. Lorsque Avraham vit les trois hommes qui se tenaient devant lui, il vit en eux limage et la ressemblance de D. et il comprit queux aussi avaient besoin dtre lis et attachs D. car eux aussi portaient Son image et Sa ressemblance. Ce serait certainement un dommage spirituel pour le Crateur du monde de les perdre sil ne courait pas leur rencontre et ne les invitait pas sous son toit, et donc il valait mieux quitter D. et courir leur rencontre, car D. aussi en prouverait de la joie. On peut comparer cette situation celle de ce roi qui avait lhabitude de consommer du poisson mais qui fut retenu, lui et sa suite, loin de son palais dans un endroit o il tait presque impossible de trouver du poisson. Le roi fut pris du dsir de manger du poisson. Et alors son pcheur, qui laccompagnait avec sa suite, jeta son hameon leau tandis que le roi tait assis ses cts et conversait avec lui en attendant une bonne prise pour le repas. Tout coup, le pcheur sentit quun poisson quelconque mordait lhameon... quelle fut sa raction? Naturellement, et mme

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brusquement, il interrompit sa conversation avec le roi (malgr le respect qui lui devait) et promptement il remonta le poisson attrap, avant que celui-ci ne schappe et ne retourne au fond de leau, et ce afin de satisfaire la volont et le dsir du roi. Le roi ne considra en aucun cas le fait davoir interrompu la conversation comme un manque de respect envers lui, au contraire, ses yeux, le succs du pcheur tait tout son honneur, et ce pcheur mritait mme de recevoir du roi de grandes marques de reconnaissance pour avoir pch pour lui ce poisson, surtout en cet endroit isol. Telle tait la situation spirituelle du temps dAbraham. Le monde entier niait lexistence et lunit de D., et personne ne Le craignait. Seul Avraham, lunique, le grand parmi les grands (Midrash Avot, Zohar II 53a), qui de tout son cur et de toute son me proclamait lunit de D., faisait connatre Son Nom dans le monde et le proclamait D. du ciel et de la terre . Et donc, tandis que D. lui parlait, Avraham vit trois personnes debout devant lui, et il comprit que les amener sous la protection divine et les attacher D. tait justement ce qui plairait D. Ce ne serait en aucun cas considr comme un manque de respect envers le Roi des rois, le Saint, bni soit-Il. Au contraire, le fait quil russit amener trois autres mes sous la protection de D. serait considr comme une marque de respect et un hommage, dautant plus que par ses bonnes actions, il les amnerait se repentir, et que sur leur visage se reflterait limage de D. En agissant de la sorte, Avraham se conduisit conformment aux vertus de D., avec bienveillance et compassion. Cest la raison pour laquelle il interrompit soudain sa conversation avec le Roi - D. - pour sempresser daccueillir les htes de passage. En fait, Avraham na jamais quitt D. ne serait-ce quun bref instant, puisquil court vers la Prsence Divine, vers Son image et Sa ressemblance, en Son honneur et pour Lui rendre hommage. Il savait que le fait mme de se diriger vers eux et de les inviter, joyeusement et chaleureusement ferait plaisir D. puisquIl dsire que ces hommes reviennent Lui et Le bnissent. Il semble que le commandement dhospitalit confre lhte lui-mme une double lvation: Tout dabord, en invitant des htes, il accueille aussi la Prsence Divine chez lui et, si avant daccueillir des htes, la Prsence Divine ntait pas trs sensible, prsent elle va tre manifeste car les invits aussi partageront la connaissance de D. et Le loueront. Ensuite, par son hospitalit, il fait plaisir Son Crateur, en ce quil est attach Ses vertus, quil se proccupe du bien-tre de toutes les cratures et leur apporte des bienfaits matriels et spirituels. Il parvient ainsi au degr suprme dattachement D. Combien il peut tre heureux en ce monde et dans lautre! Il faut ajouter une autre considration concernant la grandeur du commandement dhospitalit. Le jour de Kippour pardonne les fautes commises envers D., mais les fautes envers le prochain ne sont pardonnes que si lon a obtenu le pardon de son prochain (Yoma 85b). Que doit-il faire sil est dans limpossibilit de lui demander pardon? Dans ce cas-l, sa faute est grande, et il doit mme aller sur la tombe de la personne envers qui il a eu des torts, et lapaiser (Yoma 87a, Shoulhan Arouch Orah Hayim 606:2). A ce propos, le Talmud (Taanith 21a) rapporte une histoire terrible, concernant Nahoum Ish Gamzou: Une fois jtais en chemin... javais avec moi trois nes chargs... un pauvre est venu vers moi et ma dit: Rabbi, donne-moi manger. Je lui ai dit: Attends que je dcharge lne. Je navais pas achev de le dcharger que le mendiant rendit lme. Je suis all vers lui, je suis tomb sur lui, et je lui ai dit: que mes yeux qui nont pas eu piti de toi deviennent aveugles, que mes mains que je nai pas tendues vers toi soient estropies, que mes pieds qui nont pas couru vers toi soient amputs, et je nai trouv de repos que lorsque jai dit: que tout mon corps se recouvre dulcres . Tel est lessentiel de cette histoire. Les Sages ont dit (Babba Metzya 86b): Ce jour [o les visiteurs sont venus chez Avraham] tait le troisime jour aprs la circoncision, et D. avait caus une chaleur torride afin quil ne soit pas drang par des htes de passage . Donc, lorsquAvraham vit trois personnes debout devant lui, il pesa en pense ce quil devait faire: devait-il rester devant D. ou bien Le quitter et courir vers les passants, car il faisait extrmement chaud dehors et qui sait depuis combien de temps ils navaient ni bu ni mang? Ils taient peut-tre en danger de mort. Cest pourquoi il dcida de quitter la Prsence de D. au risque que ce geste lui soit compt comme une faute et un pch, mais les fautes vis--vis de D. peuvent tre pardonnes Yom Kippour et srement cette faute lui serait pardonne. Par contre, sil navait pas couru vers les htes de passage, cela aurait t

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une faute envers le prochain pour lequel il naurait pas de pardon Yom Kippour tant quil naurait pas obtenu le pardon de son prochain, et qui sait sil aurait encore loccasion de se faire pardonner par ces trois visiteurs, de leur vivant? Peut-tre allaient-ils mourir avant quil ait eu le temps de les nourrir et de leur donner boire, comme ce fut le cas pour Nahoum Ish Gamzou, et ne pourrait demander leur pardon quaprs leur mort (et trouverait-il des gens qui accepteraient de laccompagner sur leurs tombes)? Ne serait-ce pas un crime trop lourd porter? Cest pourquoi Avraham, qui tait naturellement bienveillant, misricordieux, attach aux vertus de D. (Sotah 14a), et voyait en chacun un ami et un proche, a pris sur lui-mme le risque de quitter la Prsence de D., et a prfr courir vers les htes de passage pour leur servir manger et boire; si le devoir de sauver une vie repousse mme les interdits du Shabbat (Shabbat 132a), que dire dans ce cas? Les Sages lont dj dit: mieux vaut transgresser un Shabbat pour sauver quelquun afin de lui permettre dobserver par la suite beaucoup dautres Shabbatot (Yoma 85b). Si la personne que lon aurait pu sauver en venait mourir, elle ne pourrait plus pratiquer aucun commandement, mais en lui sauvant la vie, on lui donne loccasion et la possibilit de servir D. tous les jours de sa vie. Cest la raison pour laquelle Accueillir des invits est une action plus importante quaccueillir la Prsence Divine . Nous voyons l la grandeur sublime dAvraham, qui, chaque instant, cherchait par quoi et comment faire davantage plaisir son Crateur, au point quil comprit que D. voulait quil aille ce moment-l vers les htes de passage. Il aime D., do il sensuit quil aime les cratures (Avot VI:1) et dsire leur bien, comme Aaron HaKohen (Avot I:12). Effectivement, il a mrit dtre nomm par D. Avraham que Jaime (Midrash Avot, Zohar I 85a, 89a). Chaque Juif doit se conduire selon cette vertu-l, et il sera heureux dans ce monde et dans le monde venir.

Ou bien un compagnon dtude, ou bien la mort


Il est crit (Brshit 18:1): LEternel Se rvla lui dans les plaines de Mamr, tandis quil tait assis lentre de sa tente, dans la chaleur du jour . Rashi rapporte le commentaire des Sages (Brshit Rabba 42:8, Zohar I 98b): Dans les plaines de Mamr, qui donna un bon conseil Avraham concernant la circoncision, cest pourquoi D. sest rvl lui dans son domaine . Le Midrash Tanhouma pose la mme question: Pourquoi dans les plaines de Mamr? Et il donne une autre rponse: Cest que le Saint, bni soit-Il, ne prive aucune crature de son d (Babba Kamma 38b, Pessahim 108a). Avraham avait trois amis: Anr, Eshkol et Mamr. Lorsque D. dit Avraham de se circoncire, il alla les consulter. Il alla dabord chez Anr et lui rapporta les paroles de D. Anr lui rpondit: Il veut te rendre infirme! Avraham le quitta et se rendit chez Eshkol qui lui dit: Tu es vieux, si tu te circoncis, tu perdras beaucoup de sang, tu ne pourras pas le supporter et tu mourras! Il le quitta et alla chez Mamr. Cest ce sujet que tu me demandes conseil? lui-dit-il. Cest Lui qui ta sauv de la fournaise ardente, cest Lui qui a fait pour toi des miracles... Il a sauv les deux cent quarantehuit membres de ton corps, et tu demandes conseil propos dun petit bout de peau? Et Avraham fit ce que D. lui avait ordonn. D. dit Mamr: Tu lui as donn un bon conseil. Nest-il pas juste que Je Me rvle lui dans ton domaine, dans les plaines de Mamr? Il faut se demander pourquoi Avraham va demander conseil concernant la circoncision: 1. Les Sages ont dit quAvraham a observ toute la Torah, mme les ordonnances rabbiniques, bien avant le don de la Torah (Yoma 28b, Vayikra Rabba 2:9). Sans aucun doute il connaissait le commandement de la brit mila qui est un commandement de base, et il savait aussi quil devait se dfaire de limpuret qui sattache cette partie du corps. Comment se fait-il quil ne lait pas fait de lui-mme? 2. Si lon voulait dire quil y a dans le commandement de la circoncision une alliance entre D. et Avraham, comme il est crit (Brshit 17:7): Et Jtablirai Mon Alliance entre Moi et toi , et cest pourquoi il attendit que D. le lui ordonne (puisquune alliance exige ncessairement lassentiment des deux parties), cela ne rsoudrait pas la difficult. En effet, les commandements du Shabbat et des Tphilines ont aussi laspect dune alliance entre D. et Isral, comme il est crit concernant le Shabbat (Shemot 31:17): Entre Moi et les Enfants dIsral cest un signe ternel , et concernant les Tphilines (ibid. 13:9): Tu les porteras en signe sur ton bras... et donc si Avraham portait les Tphilines et observait le Shabbat et les

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ordonnances rabbiniques de son propre chef, comment se fait-il quil nait pas accompli la circoncision de lui-mme? 3. Pourquoi Avraham demande-t-il lavis dAnr, Eshkol et Mamr concernant la circoncision? D. Lui-mme lui ordonnait de le faire, et entre les paroles du matre et les paroles de llve, lesquelles fautil couter? (Kidoushin 42b, Tanhouma Houkat 10). Pourquoi demander conseil? 4. Si Anr, Eshkol et Mamr sont les allis dAvraham (Brshit 14:13) et quil les estime, ils sont srement des hommes vertueux car Avraham ne se serait pas li damiti avec des gens mchants, et ils avaient vu de leurs propres yeux les grands miracles raliss par D. pour Avraham durant la guerre. Sil en est ainsi, comment peuvent-ils donner un mauvais conseil lencontre de la volont de D. en Qui ils ont foi? Nauraient-ils pas d lencourager obir avec empressement lordre de D.? 5. Selon le Midrash, Mamr, qui a conseill Avraham de se circoncire, reut pour rcompense que D. Sadresse Avraham (et non lui) dans son domaine. En quoi est-ce une rcompense? 6. Pourquoi est-il crit: LEternel Se rvla lui... , sans mentionner le nom dAvraham, et pourquoi nest-il pas crit: LEternel Se rvla Avraham , comme il est crit ailleurs? Le Ohr Hahayim pose une autre question: Pourquoi la Torah change-t-elle lordre de la phrase et mentionne celui qui voit (Avraham), avant celui qui est vu (lEternel)? (Une construction grammaticale qui nest pas sensible dans la traduction. Comparer avec Brshit 12:7 et 17:1 o LEternel est mentionn avant Avraham). 7. La plus grande difficult concerne Anr et Eshkol. Comment ont-ils os dtourner Avraham de la circoncision et leffrayer, sachant quAvraham stait jet dans la fournaise pour sanctifier le Nom de D. (Brshit Rabba 38:13), et stait mis en danger dans la guerre contre les cinq rois afin de dlivrer les captifs? Pensaient-ils que justement maintenant, Avraham craindrait de devenir infirme, ou de perdre beaucoup de sang? Pourquoi voulaient-ils leffrayer et le dcourager? Le Zohar (III 149b) crit: La Torah ne raconte pas des anecdotes , et (II 82b): La Torah donne lhomme des rgles de conduite, afin quil sache ordonner son mode de vie et organiser ses actes conformment la volont de D. . Chaque commandement a sa raison dtre; y adhrer et lobserver dans tous ses dtails permet datteindre les plus hauts degrs dlvation et de perfection viss par ce commandement. Avraham qui de tout son tre a toujours exprim la sagesse de la Torah, navait ni pre ni matre chez qui apprendre, mais ses entrailles sont devenues un puits de sagesse et cela, pour avoir consacr son intelligence la recherche de la vrit. Il dsirait de toute son me savoir comment tre agrable D. et Le servir (Rambam, Halachot Akoum I:2-3). Il reut laide du Ciel pour comprendre le sens profond de chaque dtail des commandements, et ce quil comprenait par sa propre intelligence et son propre raisonnement sajoutait ce quil avait appris, jusqu ce quil arrivt comprendre et pratiquer toute la Torah, y compris les ordonnances rabbiniques. Pourtant, une chose chappait son entendement, justement la ncessit de retrancher le prpuce. De mme que les fondements dun btiment sont creuss et enfouis sous terre et ne se voient pas, de mme le fondement et le secret de ce commandement lui tait cach. Pourquoi? Afin quil ressente un malaise, quil sache quil ntait pas presque lgal des anges (Thilim 8:6), et ressente limperfection qui ne lui avait pas encore t rvle (cela explique notre premire question). Cette imperfection tait pour Avraham une preuve norme, car plus il slevait en saintet et en puret, plus il ressentait son imperfection. Mais il ne sest pas laiss dcourager ni affaiblir par ce manque. Au contraire, il a continu slever, et plus il slevait, plus il ressentait son imperfection. D. lui avait cach le secret de la circoncision et sabstenait de venir contracter avec lui une alliance. Comment pouvait-il, lui, Avraham, tablir une alliance avec D. si D. ne ly invitait pas et ne le dsirait pas? Cest pourquoi il ne la pas fait de lui-mme (cela rpond notre deuxime question). Un grand dilemme se posait Avraham. Dun ct, D. lui exprimait un amour tout particulier, Il lui rvlait le sens cach de lexil, Il ajoutait une lettre son nom, comme il est crit (Brshit 17:5): Ton nom ne sera plus Avram, mais Avraham , Il lui promettait descendance et fortune, Il lui promettait cette terre en hritage, et Il avait dj fait pour lui des miracles et des prodiges. Par ailleurs, Avraham ressentait que D. lui cachait quelque chose et ntablissait pas dalliance avec lui. Cest pourquoi il ne savait pas sil

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mritait une telle alliance. Peut-tre ne la mritait-il pas? Et donc une douleur profonde remplissait le cur et lme dAvraham. Il ressentait limpuret de son corps, sans en connatre le sens et la raison. Mais bien que son impuret lui pest, Avraham continuait servir D. en sattachant son Crateur par le commandement des Tphilines et lobservance du Shabbat par lesquels il tmoignait que LEternel est le souverain du monde, et quil ny a pas dautre D. que Lui. Mais ce nest que par Son alliance que D. rvle quIl a choisi Avraham et lu sa descendance, le peuple dIsral, pour tre Sien. Avraham continue approfondir le sens de la Torah en attendant dtre soulag de ses souffrances par lAlliance entre lui et D., et parvenir alors la perfection. Cest un principe fondamental. Lorsque des malheurs nous atteignent, nous ne devons pas dsesprer de la misricorde divine, comme il est dit: Ne dsespre pas dans le malheur (Avot I:7), comme le disent les Sages (Brachot 10a, Sifri Vaethanan 3:26): mme si une pe est pose sur son cou, que cela ne lempche pas desprer . Lorsque lon est atteint par un malheur, il faut penser quon ne sest peut-tre pas corrig comme il convient, et ce nest pas par hasard que ce malheur est arriv. Cela donne le courage de comprendre que ce qui arrive ne dpend que de nous, et alors notre me languira de raliser la correction de nos fautes en priant D. de Le sentir sans tre accabl par les souffrances. Alors, on saura que D. nous aime, quIl na choisi que nous, comme il est dit du roi David (Shmouel I, 18:14): Et David russissait dans tout ce quil faisait et D. tait avec lui . De mme D. sera avec nous dans tout ce que nous ferons. Les Sages disent (Menahot 43b): Le roi David sest exclam (Thilim 119:164): Sept fois par jour je clbre Tes louanges en raison de Tes justes dcrets . Lorsque David tait aux bains, nu, il se disait: Malheur moi, qui suis dpourvu de tout commandement. Mais lorsquil se souvint de la circoncision dans sa chair, son esprit fut apais, et la sortie des bains, il chanta les louanges de D. (Thilim 12:1): Au chef des chantres, le huitime, psaume de David , cest--dire propos de la circoncision qui se pratique le huitime jour . Et donc, combien la douleur et les souffrances dAvraham taient grandes puisquil ne bnficiait pas, en entrant aux bains, de la protection de la circoncision, mais cela ne la pas empch de servir D. avec ferveur. Lorsque D. lui commanda de contracter lAlliance par la circoncision, il est certain quAvraham ressentit une joie immense, car il avait souffert de ce manque pendant les longues annes durant lesquelles il aspirait la perfection, et prsent, enfin, il pouvait y parvenir, dautant plus que cette Alliance avec D. comprenait aussi ses descendants. Il ne fait aucun doute que sa joie tait infinie. Nous pouvons prsent revenir notre sujet, concernant lchange qui eut lieu entre Avraham et Anr, Eshkol et Mamr. Jusqu prsent ils taient tous unis, Avraham, Anr, Eshkol et Mamr, par le fait quils taient tous incirconcis et avaient, malgr cela, la crainte de D. Il ny avait aucune raison pour quAvraham ne se lie pas damiti avec eux, mme sil les surpassait tous. Mais maintenant quil allait se circoncire et atteindre la perfection qui lui permettrait de ressentir la Prsence de D. dans toute Sa splendeur et dans toute Sa gloire, il devait savoir qui taient ses vrais amis, qui il convenait de sattacher, et sil pouvait continuer les frquenter ou bien sil devait peut-tre sen loigner. Cest la raison pour laquelle il leur demanda conseil au sujet du commandement qui allait le faire entrer dans une Alliance avec D. qui lui permettrait datteindre le comble de la perfection. En fait Avraham lui-mme navait aucun doute quil faille obir ce commandement, lui qui avait attendu avec impatience loccasion de le faire depuis toujours. Il les consulte uniquement pour les tester, connatre le fond de leur cur, et dcider en fonction de leur rponse sil allait continuer les frquenter ou non (cela rpond notre troisime question). Sils sont effectivement vertueux et dsirent son bien, ils lui diront: Ce commandement, que tu espres de toute ton me, test donn dans la peine et la douleur. Il va sans dire que tu dois montrer ton esprit de sacrifice comme tu las fait par le pass pour pratiquer chaque commandement, et le pacte dalliance avec D. va te sanctifier et te rendre parfait , comme le disent les Sages (Ndarim 31b): Avraham nest appel parfait quaprs la circoncision . Nous tirons de l une leon de conduite et un grand principe. Plus lhomme se perfectionne, plus il doit tre prudent quant aux personnes quil rencontre et quil frquente, comme il est dit Ne vous associez pas avec les mchants (Avot I:7). Avraham a examin ses amis pour savoir quel conseil ils allaient lui donner

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afin de tester le degr et la sincrit de leur crainte de D. - peut-tre ntait-elle quune dclaration faite du bout des lvres, auquel cas ils ne seraient pas capables de passer le test et il devrait se sparer deux. Il est possible aussi quils craignent pour eux-mmes quAvraham ne les quitte et que, pour ne pas perdre son amiti, ils limitent. Avraham voulait aussi quils constatent sa foi en D. en se mettant en danger pour se circoncire son ge, ce qui leur permettrait de renforcer leur propre foi. Cest pourquoi il na pas attendu dtre lui-mme circoncis pour les mettre lpreuve aprs coup, mais leur a demand conseil avant, afin quils expriment ce quils ressentaient. Effectivement, Anr et Eshkol rvlrent le fond de leur cur. Ils connaissaient les forces spirituelles dAvraham, ils savaient quil ne reculait devant aucun danger pour servir D., et quil ne se laisserait pas dcourager par un acte qui demandait de prendre des risques lorsquil sagissait de glorifier D., mais ils pensaient que, si Avraham leur demandait maintenant conseil au sujet dun ordre de D., ctait srement quil y avait en lui une faille et quil faiblissait. Et donc, comme il tait vieux, et que la chose reprsentait pour lui un grand risque, ils lui ont donn le conseil de ne pas se circoncire. En fait, pourquoi ces hommes pourtant vertueux, lui ont-ils donn ce mauvais conseil? Cest quils craignaient, en lui disant de se circoncire, de devoir eux-mmes le faire et de devenir infirmes ou de perdre beaucoup de sang, et ils avaient peur de servir D. au risque de leur vie. Au lieu de lencourager et de lempcher de faiblir en lui faisant valoir que sil avait survcu beaucoup dautres dangers et avait t sauv, il est certain quil serait aussi sauv de ce danger, puisquil obissait lordre de D. (ce qui revient dire que D. dsire quil se mette en danger), au lieu dapprcier lamour dAvraham leur gard, puisquil vient leur demander conseil, ils lui donnent le mauvais conseil de ne pas se circoncire, de ne pas obir au commandement de D. En effet, sils lui avaient donn le conseil qui convenait, ils auraient perdu son amiti, tant donn quils navaient pas lintention, eux, de faire une chose pareille. Leur mauvais conseil a donc rvl quils taient essentiellement impurs (et cela rpond aux questions 4 et 7), et donc Avraham sait quil doit sloigner de leur compagnie. Chacun doit chercher connatre ses partenaires et ses amis, mme dans ltude de la Torah. Un lve assidu de Yshiva voulut savoir un jour si son partenaire dtude craignait D. et il le mit lpreuve. Il linvita laccompagner au thtre et son ami accepta... Il sut alors quel tait ltat desprit de son partenaire et ds lors il sloigna de lui. Mais son partenaire en eut rellement honte, il regretta sa conduite... et en fin de compte, les deux lves reprirent leur tude commune, faite de discussions qui clarifient la loi, et ils progressrent ensemble dans ltude de la Torah et la crainte de D. Cest que chacun doit encourager son partenaire, mme en le mettant lpreuve, comme il est crit (Ishaya 41:6): Lun prte assistance lautre et chacun dit son frre: Courage! , de peur quil ne tombe. Cest ce que dit Rabba Houni HaMaguel (Taanith 23a): Ou bien un compagnon dtude, ou bien la mort , ce qui mon sens signifie: ou bien une amiti fonde sur la Torah et la crainte de D. ou bien la mort quand lun a une mauvaise influence sur lautre. Chacun a besoin dun partenaire pour laider clarifier la loi, et cest ainsi quils la retiennent. Anr et Eshkol ne se proccupaient que de leur relation avec Avraham. Ils ne considraient en lui que ce qui pouvait leur procurer un avantage personnel; cest pourquoi ils craignaient, en lui conseillant dobir D., de le voir parvenir la perfection, et ils allaient devoir ou bien perdre son amiti ou bien suivre son exemple. Cest pourquoi ils ont tent de profiter de ses hsitations pour le convaincre de ne pas obir au commandement de D., afin de ne pas perdre son amiti. Il nen fut pas ainsi de Mamr, qui lui, tait vertueux et droit. Il ne se souciait gure des consquences personnelles en donnant Avraham un conseil appropri, et il ne craignait pas non plus de perdre son amiti. Au contraire, il comprit quil devait tirer de la conduite dAvraham un enseignement concernant la faon de parvenir la perfection. Cela nous montre que Mamr fut de tout temps bon et droit et que son cur avait toujours t entirement tourn vers D. Cest pourquoi, maintenant aussi, il encourage Avraham et lui conseille de ne pas faiblir et de se circoncire sans crainte, faisant valoir quau contraire, maintenant, dans son vieil ge, il doit servir D. avec encore plus de dtermination et plus de courage. Il ny a aucune raison de craindre de perdre du sang ou de devenir infirme tant donn que D., qui la sauv dans le pass,

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le sauvera aussi maintenant et lui viendra en aide, dautant plus que ce commandement lui permettra de parvenir au comble de la perfection tant espre. Cela est indiqu dans son nom. Les mots loney Mamr (littralement les arbres de Mamr ) montrent sa pit, car la Torah est appele arbre comme il est dit (Zohar Korah 176a): Celui qui met tous ses efforts dans la Torah est uni larbre de la Vie . La Torah est aussi un remde pour lhomme, comme le disent les Sages (Yirouvin 54a) propos du verset: elle donnera la sant ton corps, la sve tes membres (Mishley 3:8), car la Torah est un lixir de vie pour lhomme, et elle sappelle elle-mme la vie (Avot DRabbi Nathan 34:10). Cest ce que Mamr dit Avraham: Le mrite de la Torah qui est appele arbre de Vie te gurira de linfirmit et de la perte de sang, et tu ne risques rien. Cela souligne la diffrence entre Anr et Eshkol dune part, et Mamr de lautre. A premire vue, le pass dAnr et Eshkol tait louable, et ils taient aussi des proches dAvraham, comme il est dit (Brshit 14:13): Ils sont les allis dAvraham . Mais maintenant quAvraham les met lpreuve, la diffrence entre lui et eux devient claire. Cest ce qui se passe pour tout un chacun. Chacun peut se croire vertueux et craignant D. mais cest au moment de lpreuve quil rvle sa vraie nature, et cest alors quil risque dchouer, et dentraner les autres dans sa chute, D. nous en prserve. Ce fut le cas dAnr et Eshkol. Au moment de la guerre, ils avaient pris de grands risques en se joignant Avraham, comme il est dit deux (Brshit 14:24): si ce nest la part des hommes qui mont aid, Anr, Eshkol et Mamr , mais dans ce cas, alors que le danger nest pas certain car il est possible darrter la perte de sang, non seulement ils ne se sont pas circoncis comme Avraham, mais ils ont aussi essay de le dissuader de faire ce que D. lui commande. Cest pourquoi D. sest mu de leur lchet, et na donn une juste rcompense qu Mamr. Chacun doit, au moment o il est mis lpreuve, sefforcer de suivre les voies de D. sans dvier ni gauche ni droite, ce qui lui permettra de surmonter toutes les preuves. Maintenant nous pouvons rpondre la cinquime question: en quoi le fait que D. parle Avraham dans le domaine de Mamr, constitue pour ce dernier une rcompense? Nous savons que lorsque lArche de lAlliance tait chez Oved Edom le Ghitten, D. lui donna une grande rcompense, comme il est crit (Shmouel II, 6:11): LArche de lEternel se trouva trois mois dans la maison de Oved Edom le Ghitten et D. bnit Oved Edom et toute sa maisonne . Quelle fut sa rcompense? Les Sages disent (Brachot 63b, Bamidbar Rabba 4:21): Oved Edom fut bni pour avoir gard lArche dans son domaine; sa femme, sa belle-mre et ses huit belles-filles donnrent chacune naissance six enfants en une seule couche . De mme ici, concernant Mamr, la rcompense nest pas que D. ait parl Avraham dans son domaine, mais ce fait lui a procur labondance et la prosprit en rcompense du conseil sens quil a donn Avraham. De mme quOved Edom fut bni de prosprit pour avoir gard lArche de lAlliance dans son domaine, de mme Mamr reut une abondance de bienfaits pour lui et sa maisonne de par la rvlation de la parole de D. dans son domaine.

Lhomme parfait
Il est crit (Brshit 1:27): Et lEternel cra lhomme Son image, Son image Il le cra... Est-ce dire que D. a une image et une figure? Les commentateurs se sont longuement penchs sur la question mais comme il ny a pas de maison dtude qui ne dcouvre pas de sens nouveaux la Torah (Haguiga 3a, Yroushalmi Haguiga), je veux moi aussi, avec laide de D., apporter ma part cette discussion. Cest un fait connu de tous, que plus quelquun se perfectionne dans lobservance des voies de D. et sattache Lui et Ses qualits, plus il ressemble effectivement son Crateur. Cest ce qui est crit: Et lEternel D. cra lhomme Son image . Ce verset est en quelque sorte une exigence. D. demande et dsire que chaque homme cr Lui ressemble dans ses vertus et dans ses actes. De mme que chaque objet suscite une ombre lorsque le soleil lclaire, et que cette ombre a la forme de lobjet en question, de mme par analogie, lhomme est en quelque sorte lombre de D., dans le sens o il est dit: LEternel est ta droite comme ton ombre tutlaire (Thilim 121:5), D. fera de toi Son ombre. Limage de D. a le sens de Son ombre . Le mot Tslem, image, vient du mot Tsl, ombre.

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Le Midrash le confirme: Lorsque D. cra lHomme, les anges furent induits en erreur et voulurent le sanctifier. D. la alors endormi et tous surent quil tait un homme (Brshit Rabba 8:9). Nous voyons donc que lHomme fut cr effectivement limage de D., de sorte que les anges se sont tromps jusqu penser quil tait divin. Cela, parce quil fut cr avec une part divine, lui permettant de ressembler son crateur. Il fut aussi cr avec un potentiel norme, afin de pouvoir servir D. humblement, par lannulation de soi. Cest dans cette intention que lhomme fut endormi, comme il est crit (Brshit 2:21): Et lEternel D. fit peser une torpeur sur lHomme et il sendormit . Le sommeil et la torpeur montrent la faiblesse de lhomme, afin de lui enseigner lhumilit. En constatant lannulation de sa vitalit, les anges surent que lhomme tait oblig de se soumettre et de sannuler. Et lhomme aussi comprend de Qui il dpend et devant Qui il doit rendre compte: devant Celui qui peut lui retirer ses forces vitales en un instant, tout instant. Nous constatons que lhomme est form pour ressembler son Crateur, ce qui nous permet de comprendre quil est dit dune part (Bamidbar 12:8): Cest limage de D. mme quil [Mosh] contemple , et dautre part (Shemot 33:20): Tu ne saurais voir Ma face, car aucun homme ne peut Me voir et vivre , deux versets qui sont premire vue contradictoires. Mais il ny a pas relle contradiction. Mosh contemplait limage de D., cest dire quil cherchait dcouvrir Ses qualits pour savoir en quoi Lui ressembler, et de mme que limage tmoigne de la ralit et de la totalit de lobjet contempl, de mme Mosh contemplait lensemble des vertus divines pour y rendre conforme sa conduite, mais il est vident quil ne pouvait pas voir D. de ses yeux, puisque aucun homme ne peut Me voir et vivre . Nous pouvons maintenant rpondre la question que nous avons pose au dbut de ce chapitre savoir, pourquoi le verset dit: Et D. se montra lui , au lieu de dire Avraham . Pourquoi son nom nest-il pas mentionn? Et pourquoi (en Hbreu) le sujet de la phrase (D.) est-il plac aprs le complment ( lui), et fait prcder celui qui voit de celui qui est vu, cest--dire quAvraham est mentionn avant D.? Nous expliquerons aussi ce que les Sages ont dit (Shabbat 127b, Shavouot 35b): La pratique de lhospitalit prvaut contre laccueil de la Prsence Divine, cest une chose qui nous est enseigne par Avraham . Mais comment Avraham connaissait-il cette rgle? Le jour o Avraham sest circoncis, il a acquis une perfection qui fit de lui le support de la sainte Prsence Divine (Brshit Rabba 82:7, Zohar I 213b) comme le Ohr Hahayim lexplique au dbut de cette section. A partir du moment o lui fut rvle la marque de lAlliance sacre, il devint partenaire de la cration. Cest ce qui est crit (Brshit 18:1): Il tait assis au seuil de la tente, dans la chaleur du jour , assis - cest--dire comme lombre qui est toujours pour ainsi dire assise aux pieds de lhomme, dans la chaleur du jour - cause du soleil, analogue la Prsence de D., bni soit-Il, comme si Avraham en tait devenu lombre. Quand? Lorsquil contracta lAlliance avec D. Le mot shalem, (complet, parfait) a la mme valeur numrique que les mots Avraham tzel, Avraham est une ombre (compts en ajoutant le nombre de mots), ce qui fait allusion au fait quen devenant parfait il est devenu lombre de D. Maintenant nous pouvons comprendre pourquoi il nest pas dit Et lEternel se montra Avraham , mais seulement lui . La Torah indique ltat auquel il tait parvenu. Il tait devenu lombre de D, il tait Son image par ladhsion toutes Ses qualits: par sa gnrosit, sa misricorde etc. Un tel homme est dcrit (sans nom) uniquement par ses qualits et la Prsence divine repose toujours sur lui. LorsquAvraham vit les trois personnages debout devant lui (Brshit 18:2), il fut rempli de bienveillance et de misricorde, ces vertus divines quil faut imiter (Sotah 14a). Il est certain quen ce jour de grande chaleur, il devait courir leur rencontre et les inviter se restaurer, car sil ne le faisait pas, qui laurait fait? Est-ce que D. ferait un miracle pour eux? Nous savons que D. amne des bonnes choses par lintermdiaire de gens bien intentionns (Shabbat 32a, Bamidbar 13:17, Pessikta Rabba Emor 24:12). Si loccasion se prsente toi de faire le bien, ne la laisse pas chapper (Mechilta Bo 12:17, voir aussi Makot 10a), et si loccasion se prsente daccueillir des invits, cest quils sont envoys du Ciel. Il est vident que cette ombre (Avraham) est oblige de courir en avant pour raliser sans tarder ce qui est bon et juste car il ne fut cr que dans le but de ressembler au Crateur par ces vertus. Il est certain quAvraham va choisir le devoir dhospitalit et quil ne laissera pas passer cette occasion, puisque D. veut quil les accueille. Et lorsque lombre court , lobjet qui est la cause de cette ombre laccompagne, ce qui montre qu accueillir des invits est plus important quaccueillir la Prsence Divine .

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Cest une chose merveilleuse. Au lieu que ce soit le mouvement de lobjet qui cause un dplacement de lombre, cest lombre (analogie Avraham) qui ici incite lobjet (analogie D.) la suivre, ce qui contredit lordre naturel des choses. Mais D. fait la volont de ceux qui Le craignent (Thilim 145:19), cest--dire que D. se comporte conformment la volont des Justes. Les Sages font dire D. (Moed Katane 16b, Shabbat 63a, Zohar I 45b): Qui Me gouverne? Le Juste, car Je prononce une sentence et le Juste lannule . Lorsque le Juste modle sa conduite sur les vertus de D. il a le pouvoir de transformer la volont divine (et de lamener o il veut aller), et alors D. peut sexclamer: Mes enfants mont vaincu! Mes enfants ont raison! Cela permet de comprendre que Les Patriarches sont un support pour la Prsence Divine (Brshit Rabba 47:8, 82:7, Pessikta Zouta Lech Lecha 17:22, Rashi, Brshit 17:22). A partir du moment o ils ont atteint la perfection, D. repose sur eux comme il est crit (Ishaya 19:1): Voici le Seigneur, Il chevauche sur un nuage lger . Et de mme que le support meut ce qui est support, de mme les Justes, les saints Patriarches, portent la connaissance de D. et glorifient Son Nom partout o ils vont. Grce eux D. est rvl aux yeux de tous, partout o Il veut paratre. Dans lanalogie de lombre qui porte lobjet, les Patriarches sont les porteurs de la Prsence Divine. Quelle est limportance du char royal pour un roi? Nous lisons (Sanhdrin 22a, 95a, Shemot Rabba 8:1, Bamidbar Rabba 14:10): Il est interdit de chevaucher le cheval du roi , cest--dire quil est interdit de se servir de son char, comme il est interdit de sasseoir sur son trne ou dutiliser ses vtements, et malgr cela il est dit du roi Shlomo (Shemot Rabba 8:1) que D. la plac sur Son propre trne, comme il est crit (Divrey HaYamim I, 29:23): Et Shlomo prit place sur le trne de lEternel et rgna . A propos de son rgne, il est crit (Melachim I, 1:33): Et le roi (David) leur dit: Faites-vous accompagner par les serviteurs de votre matre, vous ferez monter Shlomo mon fils sur ma propre mule... et vous le sacrerez roi dIsral . Les commentateurs (Rashi, Radak, Ralbag) expliquent (ad. loc.): La mule et le char personnels du roi, pour signifier que Shlomo sera roi, puisquil est interdit un homme du commun den faire usage . Nous voyons aussi quAvisha ben Tzrouya (Sanhdrin 95a), lorsquil apprit que David HaMelech tait en danger chez les Philistins, a demand au Sanhdrin la permission dutiliser le char et le cheval rapide du roi. Haman, fils de Hamdatta le Ghitten, dit lui-mme (Esther 6:8): Quil le pare du vtement du roi et quil chevauche le cheval du roi... car cest ainsi quil convient dhonorer celui qui a sauv le roi . Cest que le char a une grande importance, ainsi que tout objet dont se sert le roi, et les Patriarches ont mrit de devenir eux-mmes le char de la Prsence de D., ce qui prouve leur grandeur insigne. Cest la raison pour laquelle Avraham nest pas nomm (il est dit: lui ). De mme que D. na pas de nom et tous les Noms saints ne sont que des attributs qui indiquent les manifestations de D. dans le monde, de mme lhomme pieux qui a intgr ces attributs pour en faire sa seconde nature, nest pas nomm. Il nest pas mentionn par son nom, car il nest plus que lombre de D. et le support de Sa Prsence, et cest la raison pour laquelle il nest pas dit: LEternel se rvla Avraham . Cela explique aussi pourquoi la mention lui , prcde la mention de D. (une construction grammaticale intraduisible en Franais), car Avraham est lombre qui entrane lobjet aprs elle, et cest pour exprimer cela quAvraham ( lui ) est mentionn dans ce verset avant D. Nous pouvons donner une autre explication au fait que le nom dAvraham nest pas mentionn dans le verset. LEternel se montra lui signifie aussi quil fut rvl dans son ombre qui est devenue le support de la Prsence Divine. D. se rvla dans son ombre , en tout conforme lui-mme, et effectivement Avraham fut bni en tout , comme il est crit (Brshit 24:1): Et lEternel bnit Avraham en tout , en tout - totalement. Le pouvoir de cette bndiction lui permet davoir une influence bnfique sur tout. En tout signifie: connais D. dans toutes tes voies, afin dtre comme Lui, juste, et en tout conforme Ses qualits. Et donc, en voyant de loin les gens de passage, il courut les accueillir comme lombre prcde lhomme qui court. Accueillir des htes est chose plus grande quaccueillir la Prsence Divine , puisque Avraham a prcd la Prsence Divine comme lombre prcde lhomme, afin de raliser le commandement dhospitalit, et cest seulement ensuite que D. Se joint lui. Ce faisant, il enseigne toutes les gnrations futures que le but de chacun est de ressembler au Crateur en adoptant Ses qualits, comme il est crit (Devarim 11:22):

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Et dadhrer Lui , que les Sages expliquent (Shabbat 133b, Sotah 14a, Tanna DBey Eliyahou Rabba 26): Attache-toi aux qualits de D., sois comme Lui bienfaisant, misricordieux et bon. Il est dit (Zohar III 257a) que les saints Patriarches sont les amis et les bien-aims de D. . Cela nous ramne notre premire question, et nous allons conclure ce chapitre par o nous lavons commenc: Acquiers-toi un ami . Avraham a demand conseil Anr, Eshkol et Mamr pour la circoncision afin de les mettre lpreuve et pour savoir sil allait continuer les frquenter ou non. Cest quen devenant maintenant le support de la Prsence Divine et le bien-aim de D., il fait pour toujours partie de Ses proches et semblable Son ombre. Mamr sattache ces qualits sans chercher de bnfice personnel, et sous linfluence dAvraham, il dsire aussi adhrer aux voies de D. Il est exemplaire. Avant la circoncision, Avraham pouvait sassocier tout le monde, mais aprs, ses obligations ne lui permettent pas un mode de vie ordinaire, et il doit se tenir lcart, tout comme le monde se spare de lui. Cest par lui que nous apprenons quel doit tre le mode de vie et de conduite de tout Isral, pour toutes les gnrations. Quel est le chemin suivre? Les Sages ont dit: Ou bien un compagnon dtude ou bien la mort . Cest quau moment o lon slve dans le service de D., on doit vrifier que ses amis (ou ses partenaires dtude) sont effectivement dvous de tout cur D. Sinon, il faut sloigner deux car, un moment de difficult, ils risquent de rgresser et dentraner les autres leur suite. Il faut se faire un ami (ou un partenaire dtude) avec lequel il est possible de progresser dans le service de D., dans ltude et la prire, dans les bonnes actions, conformment la volont de D.

Lhospitalit dAvraham, exemple pour ses enfants


Lorsque les visiteurs se prsentent chez Avraham, nous lisons (Brshit 18:2): Il leva les yeux et regarda, et vit trois personnages debout devant lui . Rashi rapporte le Midrash (Brshit Rabba 48:9): Ces trois personnages sont des anges, qui lui sont apparus sous la forme de trois nomades Arabes et ils sont venus chez lui afin de lui donner la possibilit de pratiquer lhospitalit . A ce sujet, le Rabbin et Docteur David Waknine ma demand, au nom de son pre, pourquoi les anges ont pris la forme de trois nomades Arabes et ne sont pas apparus sous forme de Cananens ou dEgyptiens? Pourquoi justement comme des Arabes? Je lui rpondis: Nous savons que ce jour-l tait le troisime jour aprs la circoncision dAvraham, comme il est dit (Babba Metzya 86b): et D. provoqua une chaleur torride afin quAvraham ne soit pas drang par des gens de passage , mais lorsque D. vit quAvraham regrettait de ne pas avoir de visiteurs et quil tait assis dehors par une grande chaleur depuis dj quatre heures, Il lui envoya ces trois anges, sous forme de trois nomades Arabes (voir Brshit Rabba 48:8, 10). Mais D. ne voulait pas quAvraham se mette en peine, cest pourquoi il lui envoya des anges qui ne mangent pas et ne boivent pas, et donc qui nimportuneront pas Avraham par leurs exigences. Nous savons quAvraham demandait ses invits quels taient leurs dsirs afin de les satisfaire, comme le disent les Sages (Bamidbar Rabba 54:6 propos du verset (Brshit 21:33): Il installa une auberge . Les lettres du mot lva, auberge, forment le mot lav, demander. Les anges nont pas de besoins puisquils ne mangent pas et ne boivent pas, cest pourquoi Avraham a d insister tellement pour les convaincre de reprendre leurs forces (ibid 18:5) et les nourrir (ibid. verset 8). Avraham demandait chaque invit ce quil dsirait manger, il faut penser quil leur demandait quelle nourriture ils avaient lhabitude de manger dans leur pays et leur lieu dhabitation, afin de leur prparer un repas leur got et pour quils se sentent comme chez eux et mangent selon leur habitude. La plupart des passants en ce lieu taient arabes, et Avraham avait en permanence chez lui les mets auxquels ils sont habitus, cest pourquoi D. lui envoie des anges sous cet aspect afin quil nait pas se donner du mal, quil nait pas besoin de prparer des plats nouveaux, et pour quil puisse leur prsenter des plats tout prts - de ceux qui plaisent aux Arabes.

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Et pourtant Avraham, qui pratiquait lhospitalit avec un grand amour courut vers le troupeau, choisit un veau tendre et gras (Brshit 18:7), et dit Sarah: Vite, prends trois mesures de farine de pur froment, ptris-la et fais-en des gteaux (ibid. verset 6), et Il prit de la crme et du lait (ibid. verset 8). Les Sages disent: il leur servit trois langues la moutarde (Babba Metzya 86b, Yalkout Shimoni Vayra 18), et Sarah prpara de grandes fournes de gteaux dlicieux (Brshit Rabba 48:12). Bien quil ait eu en rserve, tout prts, des plats qui conviennent des nomades Arabes, il sest mis en peine pour leur prparer des viandes fraches, sans tenir compte de son tat physique et de la douleur qui est extrme au troisime jour de la circoncision. Cela nous permet de comprendre ce qui est dit (Zohar I 127b): Comment Avraham savait-il o se trouvait le caveau de Machpela [que plus tard, il demande acheter]? Il est crit (Brshit 18:7): Avraham courut vers le troupeau . Pourquoi court-il? Cest que le veau stait chapp et Avraham le poursuivit jusquau Caveau de Machpela, cest ainsi quil dcouvrit le caveau . D. le rcompensa et lui fit connatre, grce cette bte, lemplacement du Caveau de Machpela. Les Sages disent (Babba Metzya 86b): Lcole de Rabbi Ismal enseigne: en rcompense de la crme et du lait, ils ont reu la manne, en rcompense du fait quil se tenait debout pour les servir, ils ont reu la colonne de nue, en rcompense de leau, ils ont reu le puits de Miriam . Les Enfants dIsral ont bnfici de grandes bonts divines en rcompense des grandes bonts dAvraham envers les trois anges . Pourquoi ses enfants furent-ils rcompenss pour ce quAvraham avait fait en cette occasion, plus que pour tous les autres bienfaits quil prodigua au cours de sa vie en ce monde? Cest que, justement en cette occasion, Avraham dvoile la profondeur de son amour pour les invits. Malgr sa maladie (et un malade est exempt de beaucoup de commandements comme par exemple de monter Jrusalem et se prsenter au Temple durant les ftes (Haguiga 2a), ou (Houlin 110a) de porter les Tphilines sil souffre du ventre), Avraham se met en peine et, ngligeant sa grande douleur, il reoit ses htes avec une gnrosit redouble et il leur prpare des mets nouveaux bien quil dispost de plats dj cuisins. Pour cela, plus que pour tout autre bonne action, ses enfants furent rcompenss. Cela nous enseigne que nous devons nous conduire comme Avraham et accueillir des invits comme il convient, toute heure et en toute occasion. Comme lon sait, ce jour-l tait le troisime jour aprs la circoncision, et Avraham, marqu prsent de lempreinte sacre, tait devenu le support de la Prsence Divine. Au lieu de se rjouir grandement du fait quil tait parvenu cette lvation, il dplore qu cause de la chaleur torride, aucun passant ne se prsente comme laccoutume, et quil ne puisse pas pratiquer lhospitalit. Mais D. dsire quAvraham soit heureux en tout temps, et il lui envoie ces htes. Lorsque Avraham les voit, il court leur rencontre les inviter avec le mme bonheur quil ressentait toujours mais auquel sajoute maintenant le bonheur dtre le support de la Prsence Divine, et cest pourquoi il court vers eux avec tant dempressement et ne les laisse pas passer leur chemin. Il les prie de sarrter chez lui, car il ne faut pas tarder obir un commandement qui se prsente (Mechilta Bo, Rashi Shemot 12:17). Cela prouve que les passants sont venus jusque chez lui afin quil puisse raliser ce commandement, comme il leur dit (Brshit 18:5): Cest dans ce but que vous tes passs prs de votre serviteur , et si vous tes passs par ici, cest que vous devez venir chez moi, pour que je puisse vous recevoir comme il se doit. Avraham ne laisse pas passer une telle occasion de recevoir des invits, et surtout en ce jour o il est rempli de joie, ils mritent dtre accueillis avec tous les honneurs qui leur sont dus. Il se met en peine pour eux, ce qui ajoute une lvation supplmentaire dans sa saintet. Nous apprenons ainsi que nous devons aspirer galer les vertus de D. comme le fit Avraham, et souhaiter: quand donc mes actes atteindront-ils la perfection des actes de mes anctres , et nous montrer gnreux et bienfaisants envers chaque crature qui porte en elle limage de D. pour faire ainsi plaisir D. dans tous nos actes.

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Pahad David Le secret de D. est rserv ceux qui Le craignent - La saintet du signe de lAlliance

LEternel se montra lui dans les plaines de Mamr (Brshit 18:1). Pourquoi dans les plaines de Mamr? Bni soit le Nom de D. qui ne prive aucune crature de sa rcompense (Babba Kamma 38b, Nazir 23b). Avraham avait trois amis, Anr, Eshkol et Mamr. Lorsque D. dit Avraham de se circoncire en signe dAlliance, il alla consulter ses amis. Anr lui dit: Tu veux te rendre infirme, et permettre aux proches des rois que tu as tus de te tuer? Tu ne pourras pas leur chapper! Avraham le quitta et alla chez Eshkol qui lui dit: Tu es vieux, tu perdras beaucoup trop de sang, et tu mourras . Avraham le quitta et se rendit chez Mamr et lui demanda: Que me conseilles-tu? Mamr lui rpondit: Cest ce sujet que tu me demandes conseil? Celui qui ta sauv de la fournaise ardente (Brshit 38:19) et a fait pour toi tant de miracles, qui ta sauv des rois qui, ntait-ce Sa Toute-Puissance, tauraient tu, Celui qui a veill sur tous tes membres te demande un petit morceau de chair et tu ne sais pas quoi faire? Fais ce quIl te commande! Le Saint, bni soit-Il, dit Mamr: Tu lui as donn le conseil de se circoncire, Je ne Me rvlerai lui que dans ton domaine , cest ce qui est crit LEternel se montra lui dans les plaines de Mamr (Tanhouma Vayra 3, voir aussi Brshit Rabba 42:14). Tous les commentateurs sont remplis dtonnement. Comment est-il possible de dire quAvraham, cet homme pieux qui avait surmont tant dpreuves, demanda conseil pour savoir sil devait obir D. ou non? Avait-il des doutes quant lun des commandements de D.? Le Siftey Hachamim pose une autre question. Pourquoi demande-t-il conseil justement propos de la circoncision? LAdmor de Satmar, de mmoire bnie, demande quant lui: Si Anr, Eshkol et Mamr avaient le mrite dtre les allis dAvraham (Brshit 14:13), ils taient certainement des gens nobles, sinon Avraham ne les aurait pas choisis pour amis et allis et il ne les aurait pas consults. Comment des gens de cette stature ont-ils pu dire Avraham de ne pas faire ce que D. lui commandait? Ne savaient-ils pas que ce ntait pas une chose facultative mais un ordre, ce que seul Mamr avait compris? Pour expliquer le Midrash, il faut tout dabord citer ce que le Rem dit ce sujet: Avraham les a consults afin de les tester et de savoir sils craignaient vraiment D. et sassurer quils continueraient tre des allis fidles comme par le pass, ou si leur crainte de D. ntait que superficielle, auquel cas il lui serait impossible de se fier eux . Et le Rem continue: Il se peut aussi quAvraham ait su quils lui conseilleraient de ne pas se circoncire, et il ne leur demanda leur avis quafin dentendre leurs arguments et les repousser, ce qui lui permettrait de sanctifier le Nom de D. ouvertement . La premire explication semble peu probable. Dabord, les raisons quils ont fait valoir ne nous rvlent rien de leur amour ou manque damour envers Avraham, au contraire, ils lui donnent des raisons senses, pour son bien, lui disant de ne pas se mettre en danger par une ventuelle hmorragie. Il est vrai quils auraient d avoir confiance en D., mais leurs arguments sont rationnels, ne constituent pas une preuve quils ne sont pas parvenus un niveau spirituel lev, et nindiquent pas un manque damour pour Avraham. De plus, ils savaient par exprience quAvraham ne craignait pas de risquer sa vie avec enthousiasme pour faire la volont de D. comme il est crit (Thilim 66:12): Nous avons pass par le feu et par leau, mais Tu nous a remis dans labondance et (Thilim 69:2): Sauve-moi D! car les flots mont atteint - Ce feu est le feu de la fournaise ardente allume par Nimrod (Brshit Rabba 38:19) et cette eau est leau de la rivire lorsquil tait en chemin pour le sacrifice dYitshak, le Satan sopposa lui sous la forme dune rivire (Tanhouma Vayra 22, Yalkout Shimoni 99). Pourquoi les consulter? Il est clair que les amis dAvraham ont cru que ce commandement tait facultatif, et cest pourquoi ils se sont prononcs contre. Mais si Avraham leur cachait que son intention relle tait de les mettre lpreuve, la question se repose: quelle preuve avons-nous de leur affection, ou de leur manque daffection? Par ailleurs, lexplication donne par le Rem ne rpond pas de faon satisfaisante au Siftey Hachamim, savoir pourquoi Avraham ne demande pas conseil pour les autres preuves et les autres commandements? Pourquoi justement demanda-t-il conseil propos de la circoncision? Le Siftey Hachamim dclare: Sans doute, Avraham navait-il pas besoin de demander conseil pour

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les autres commandements, car dans le cas o il aurait reu par la suite un tel ordre de D., cela ne laurait pas empch daccomplir un tel acte avant dy tre oblig, puisquil pouvait toujours le refaire par la suite, aprs en avoir reu lordre, ce qui nest pas le cas de la circoncision - une fois circoncis, il ne peut pas se circoncire nouveau . Cest dire quil prit conseil avant davoir reu lordre de D. et il a demand sil devait pratiquer la circoncision sans y tre oblig, ou bien sil valait mieux attendre dy tre astreint? Ce nest que pour la circoncision que se pose une telle question, car elle ne peut se pratiquer deux fois. Cette explication soulve une grande difficult. Si toute la question tait de savoir sil valait mieux attendre de recevoir lordre de faire une chose qui ne peut se faire quune fois, et cest pourquoi Anr et Eshkol lui ont rpondu de ne pas le faire, il a dj t dit (Kidoushin 31a): Celui qui agit sur ordre a plus de mrite que celui qui le fait de son propre chef . Et donc, le conseil dAnr et Eshkol (de ne pas agir et dattendre) est meilleur que le conseil de Mamr, qui lui dit dagir tout de suite, sans tarder. De plus, daprs le Siftey Hachamim, Avraham demanda leur avis avant davoir reu le commandement de D. (car aprs, il ny a plus lieu de mettre en avant largument que celui qui reoit un ordre a plus de mrite que celui qui nen reoit pas ) et ce nest pas le cas! Les Midrashim disent explicitement que lorsque D. lui dit de se circoncire il alla demander conseil , et pas avant. Cela nous conduit une explication diffrente. A propos du verset Faisons lHomme Notre image et Notre ressemblance (Brshit 1:26), Rashi rapporte le Midrash (Brshit Rabba 8:7): Bien que les anges ne Laient pas aid dans la cration de lHomme, et que le pluriel utilis puisse donner lieu lhrsie de croire quil y a plusieurs divinits, la Torah ne se prive pas [ cause de ceux qui veulent se tromper] denseigner une leon de morale et de donner un exemple dhumilit tout tre puissant, qui doit parfois consulter et demander lavis de ses infrieurs . Autrement dit, si un homme important ne veut pas demander lavis de plus humble que lui, et dit: Quy a-t-il de commun entre nous? on lui rtorquera: Prends exemple sur ton Crateur qui a cr le ciel et la terre, et qui, sur le point de crer lhomme, demanda lavis des anges . Le Midrash ajoute lopinion de Rabbi Shimon ben Lakish: Il ny eut aucune consultation . Le Etz Hayim (ad. loc.) explique: Faisons lhomme, nexprime pas le fait que D. consulta qui que ce soit, mais quIl sexprime comme un matre qui parle ses serviteurs pour savoir ce quils pensent... de toutes faons, il fera ce quil veut, afin de leur montrer que cest lui qui dtient le pouvoir et quil a la capacit de faire plus que tout ce quils peuvent imaginer . Le Midrash propose une analogie: Cest comme un roi qui se promne au seuil de son palais et voit une grande pierre de taille abandonne. Il demande ses gens que faire de cette pierre. Certains lui proposent den faire un sauna, dautres lui disent den faire une maison de bains, et alors le roi dclare: Je vais en faire un monument et nul ne peut men empcher . Le Etz Yossef explique: Les serviteurs ont pens que dune chose tellement insignifiante le roi ne pourrait tirer que quelque chose dinsignifiant, comme des saunas et des maisons de bains, mais le roi leur rpondit quil allait en faire un monument Sa propre Gloire . Lanalogie rside en ce que D. a dit aux anges faisons lHomme afin de voir ce que chacun deux pensait, et chacun rpondit selon son entendement, car ils ne concevaient pas que lhomme serait plus quun animal, mais D. leur dit: Il sera Mon image et Ma ressemblance . Cest une chose tonnante, qui demande tre explique. Si lon prend conseil auprs dun infrieur, si on lui demande son avis, cela signifie que lon accorde de limportance ce quil pense et que lon tiendra compte de son avis dans la dcision finale. Mais par ailleurs, il est dit (le Midrash ibid., Sanhdrin 38b): Lorsque D. dcida de crer lhomme, il prit conseil auprs des anges, leur disant: Faisons lHomme Notre image et Notre ressemblance. Les anges rpondirent: Matre du monde! Quest lhomme pour que Tu penses lui? Le fils de lHomme pour que Tu le protges? (Thilim 8:5). Il ne mrite pas dtre cr! Rav Houna de la ville de Tzipori ajoute: Tandis que les anges discutaient entre eux du sujet et remuaient la question, D. avait dj cr lHomme . Cela prouve que lavis des anges ne changea rien, et par consquent, pourquoi leur demander leur avis? Cest quil y a nombre de points de vue et nombre dopinions pour valuer chaque situation dans tous ses aspects. Il y a dune part lopinion des anges, qui pensent, pour des raisons qui leur sont propres, quil vaut mieux ne pas crer lHomme, mais dautre part, il y a la raison du Roi du monde, et nulle crature ne

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peut sonder Sa volont, car vos penses ne sont pas Mes penses et vos voies ne sont pas Mes voies, dit lEternel (Ishaya 55:8). Cela nous permet de comprendre le cas dAvraham. Il est all demander conseil ses amis afin denseigner tous la qualit dhumilit ncessaire au maintien de bonnes relations, et pour nous montrer quil existe plus dun point de vue et plus dune faon de servir D., celle dAnr et Eshkol, et celle de Mamr. Nous pouvons comprendre de deux faons diffrentes le sens de la discussion entre Avraham et ses amis. La premire concerne le bons sens. La question tait de savoir si lintelligence et la logique exigent de pratiquer la circoncision ou non. A cela, Anr et Eshkol ont rpondu selon leur entendement que ni lintelligence, ni la ralit nobligent la circoncision, cause du danger quelle reprsente. Par contre, Mamr avance que si telle est la volont et lordre de D., il existe une autre vrit dont il faut tenir compte, et ce qui semble nos yeux chose impossible et irrelle traduit justement la ralit qui nous impose cette obligation. Il existe un autre sens, qui ncessite une brve introduction. A propos du verset: LEternel communique Son secret ceux qui Le craignent, Il rvle Son alliance ceux qui Le connaissent , les Sages expliquent (Tanhouma Lech Lecha 19): Quel est le secret que D. rvle ceux qui Le craignent? Cest la circoncision, et il na rvl les mystres de la circoncision qu Avraham . Avraham dit: tant que jtais incirconcis, des gens de passage sarrtaient chez moi, maintenant que je suis circoncis ils ne viendront plus. D. lui dit: Quand tu tais incirconcis, des incirconcis venaient chez toi, maintenant cest Moi et Ma suite qui nous prsentons chez toi, comme il est dit (Brshit 18:1-2): Et lEternel Se rvla lui... et il leva les yeux et il vit trois personnages debout devant lui... (Brshit Rabba 48:9). Nous savons aussi que le fait de ntre pas circoncis reprsente une impuret et une carence, comme il est dit au sujet du chant de gloire que Mosh et les Enfants dIsral ont chant lors de la traverse de la Mer des Joncs (Shemot Rabba 23:12): Les enfants dIsral ont dit D.: Il nous est agrable de chanter Ta gloire car nous ne portons aucune impuret, et la circoncision de notre chair est la preuve que nous sommes purs , et delle il est dit (Pessahim 92a): Celui qui se spare de cette chair se spare de la tombe . Le Midrash nous donne une cl pour comprendre notre sujet. Tant quil tait incirconcis, Avraham servait D. en peinant constamment et il tait parvenu une lvation suprme et hors du commun si bien que lorsque D. lui dit: Marche dans Mes voies et sois parfait (Brshit 17:1), il fut saisi de terreur, pensant quil avait peut-tre en lui un dfaut honteux. Mais lorsque D. lui dit: Et Jtablirai Mon alliance entre Moi et toi (ibid. verset 2) il fut rassur (Ndarim 32a, Yalkout Shimoni Brshit 81). Et voil que maintenant, il doit changer ses habitudes, retrancher limpuret de son corps par la circoncision, ce qui lui permettra de servir D. sans entrave. Effectivement, la circoncision opre un bouleversement complet et radical de lessence de lhomme (comme en tmoignent un grand nombre de personnes qui, pour diverses raisons, furent circoncises lge adulte - tels les immigrants Russes - et qui ont ressenti de faon relle et concrte quil ne sagit pas seulement daccomplir un commandement semblable aux autres commandements de la Torah, mais dune transformation radicale de leur essence). Avraham tait proche de tout le monde, afin de rallier ceux qui taient loigns. Or prsent il va devoir se sparer deux, comme il le dit effectivement D. A partir du moment o je serai circoncis, ils ne viendront plus chez moi. . Sil sloigne deux, envers qui pourra-t-il manifester sa bienfaisance? A cela, D. rpondit: Il est vrai quil en est qui sloigneront de toi, ceux qui sont incirconcis, mais Moi et Mes ministres paratrons devant toi. Quiconque dsire partager les secrets de D. et se conduire avec une gnrosit toujours accrue, doit savoir que les gens se plaindront de lui et lui feront des reproches arrogants et hypocrites. Ses proches, ses amis et ses connaissances diront de lui: Hier seulement tu tais avec nous, comme nous, tu mangeais et buvais dans le mme plat que nous, que tarrive-t-il aujourdhui, est-ce que Shal aussi est prophte ? (Shmouel I, 10:11). Il est clair quil est difficile la plupart des hommes de renoncer leurs mauvaises habitudes, il est difficile de changer. Dans le fond de leur cur, ces gens sont jaloux de celui qui a russi justement l o eux ont chou. Par ailleurs, ce quils disent peut veiller des doutes, peut-tre est-il prfrable de sloigner de

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la saintet, et progresser tout en restant parmi son peuple (Melachim II, 4:13). Mais la circoncision recle un mystre: elle sanctifie lhomme par la signature du Nom de D., comme il est dit: Il imprima le sceau sacr de lAlliance sur ses enfants (Shabbat 137b). Ce nest que grce cette Alliance que lon peut continuer slever en la compagnie de D., sans prter attention aux dires des calomniateurs et des moqueurs. Tel est le secret et le mystre qui furent rvls Avraham, afin de nous enseigner queffectivement la circoncision nous spare des non-Juifs, mais par ailleurs cest elle qui nous rend proches de D. Ce fut le sujet du dbat entre Avraham et ses amis Anr et Eshkol, qui ont avanc des raisons logiques mais qui en fait ne voulaient pas quAvraham se spare deux et des autres. Il na pas suivi leur conseil. Il est un autre aspect au secret de la circoncision. Les Sages disent (Ndarim 31b): La circoncision est une grande chose, puisque Avraham ne fut appel parfait que lorsquil fut circoncis . Et ils ajoutent (Tanhouma 96:14): Tous les Juifs ont une place au Jardin dEden . Cest que D. a marqu Isral de Son Nom, le Nom Sha-day La lettre Shin est imprime dans la forme du nez, la lettre Dalet dans le bras, et la lettre Youd dans la circoncision. Sils ne sont pas circoncis, il leur manque la lettre Youd, et il ne reste que les lettres Shin et Dalet, qui forment le mot shed, le diable, qui les conduit en enfer. Les Sages ont dit (Yirouvin 19a): Avraham fait mme sortir les coupables de lenfer, sils sont circoncis . Nous pouvons donc comprendre: Avraham qui a sans aucun doute pratiqu toute la Torah (Yoma 28b), ntait pas parvenu au comble de la perfection tant quil navait pas imprim dans sa chair le signe de lAlliance de D., et seule la circoncision la sanctifi. La sanctification par la circoncision concerne le peuple juif tout entier, les descendants dAvraham, afin de les sparer des non-Juifs et des hommes malfaisants, et de leur permettre de progresser uniquement dans la voie de la saintet et de la puret, de jour en jour et en tout temps.

Veiller la saintet du signe de lAlliance, source de perfection


Il est crit (Brshit 18:1): LEternel Se rvla lui dans les plaines de Mamr... et (ibid. verset 2): Il leva les yeux et vit trois personnages debout devant lui, et il courut leur rencontre du seuil de la tente et se prosterna devant eux . Prsentons dabord quelques questions afin de mieux comprendre ces versets: 1. Les Sages disent (Sotah 14a, Babba Metzya 86b): Ctait le troisime jour aprs la circoncision dAvraham, et D. vint lui rendre visite comme on va visiter un malade . Si Avraham est malade, o puiset-il la force de se lever et de courir vers les gens de passage en dpit de la grande douleur quil ressent? 2. Il est crit: Il tait assis sur le seuil de la tente , ce qui nous indique quAvraham voulait se lever, mais D. lui dit: reste assis, et Moi Je me tiens debout. Ce sera un signe pour tes enfants, comme il est crit (Thilim 82:1): D. Se tient debout dans lassemble de Ses gens (Brshit Rabba 48:7). La question se pose: Avraham dsirait se lever respectueusement devant la Prsence de D. mais D. linvite rester assis. Y a-t-il l pour ses enfants lindication que, lorsquils sigeront, D. se tiendra debout parmi eux? Quel signe est-ce l? 3. Surtout, comment Avraham a-t-il pu quitter la Prsence de D. et courir vers les htes de passage? Lorsque Avraham est devenu parfait par lempreinte sacre de la circoncision, il est aussi devenu le support de la Prsence Divine, comme le disent les Sages (Brshit Rabba 82:6, Zohar I 213b): Les Patriarches constituent le Char divin . Maintenant il est la ressemblance de D. dans tous ses attributs. Cest ce qucrit le Ohr Hahayim (Brshit 18:1) concernant le verset LEternel Se rvla lui : La Torah veut indiquer que la Prsence de D. lenveloppe et il en devient le support . Aprs la circoncision, le Youd de lempreinte sacre est imprim dans sa chair, et cest ce qui est dit (Zohar I 95a): Celui qui est marqu de lempreinte sacre, la Prsence de D. est avec lui . Avraham ressentit ce moment-l des forces nouvelles prodigieuses, et bien quil ait, avant la circoncision, servi D. avec une dtermination hors du commun, maintenant tait n en lui un lan qui effaait toute douleur physique. Lorsquil vit les gens de passage debout devant lui, il bondit vers eux pour les inviter entrer chez lui.

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Cela nous enseigne que quiconque porte atteinte ce signe sacr, ou bien nest pas circoncis, ne peut pas servir D. convenablement, car il nest pas entr dans lAlliance. Mais ds quil corrige ce manque et reoit les bndictions lors de la crmonie de la circoncision - des bndictions qui, on le sait, se rfrent Avraham, laim de D., qui fut lu et sanctifi par D. ds sa conception (voir Tossafot Menahot 53b) - il va de soi que se rveillent et se rvlent en lui, en chacun, des forces nouvelles et un lan nouveau pour le service de D. (cest lessence de la diligence dAvraham). Lorsque quelquun ressent un manque denthousiasme pour le service de D., il est certain que cest parce quil a port atteinte au signe de lAlliance, et il doit se corriger. Sa vivacit sera restaure, et il pourra servir D. avec des forces renouveles. Aprs la circoncision, Avraham fut rempli de forces inconnues jusque-l, il ntait plus le mme homme. Son corps fonctionnait maintenant avec une alacrit supplmentaire, car il dominait les deux cent quarantehuit membres et les trois cent soixante-cinq tendons de son corps, comme le disent les Sages (Ndarim 32b, Tanhouma Korah 12): Tout dabord il sappelait Avram car il ne dominait que les deux cent quarantetrois membres de son corps, et en fin de compte il sappela Avraham comme il est crit (Brshit 17:5): Ton nom ne sera plus Avram, mais Avraham , car il dominait deux cent quarante-huit membres (la lettre H de Avraham est gale cinq) , et il tait alors en pleine possession de toutes ses forces. Lorsque ses yeux virent les gens de passage, ses jambes se mirent courir vers eux avec toute la bienveillance dsire par D. A prsent nous pouvons comprendre le signe que D. a donn Avraham pour ses enfants, lorsquIl lui dit: Reste assis, et Moi Je Me tiens debout, ce qui sera un signe pour tes enfants . Effectivement, si D. linvite rester assis, il doit y avoir une raison? Il est possible que D. tienne compte des douleurs aigus dAvraham, douleurs dues la circoncision. Mais au moment o il vit les trois personnages debout face lui, il neut aucun doute que D. souhaitait quil coure les accueillir, bien quun instant auparavant, Il lui ait dit de rester assis. Avraham eut le mrite de surmonter ses douleurs de sa propre initiative et dexprimer son grand amour de D. justement par le fait de ntre pas rest assis, mais de sempresser vers les htes de passage. Nous apprenons ainsi que lhospitalit est plus importante que de recevoir la Prsence de D. (Shabbat 127a), puisque D. a agr son geste. Seul lhomme qui est parvenu la perfection, peut distinguer que lintention relle de D. nest pas quil reste assis, mais quil sempresse daccueillir les passants. Cest ce que D. lui rpondit: Reste assis tandis que Moi, Je Me tiens debout, et ce sera un signe pour tes enfants . D. lui indique que ses enfants veilleront au signe de lAlliance et parviendront la perfection, puisque les faits et gestes des pres sont un signe pour leurs enfants (voir Sotah 34a). Ils sigeront en Prsence de D. Eux aussi sauront quand il convient de se lever et courir accueillir des invits, car ils domineront les deux cent quarante-huit membres et les trois cent soixante-cinq tendons de leur corps. Ils ont hrit cela de leur anctre, et sils se conduisent comme lui, D. sera prsent parmi eux, et ils sauront distinguer quand il est possible et ncessaire de se lever et daller au secours du prochain, comme la fait Avraham. Nous comprenons maintenant pourquoi le Roi des rois, le Saint, bni soit-Il, Sest rvl Avraham au troisime jour de la circoncision. A propos du verset: LEternel Se rvla lui , le Ohr Hahayim crit: Il faut comprendre pourquoi la Torah change lordre de la phrase et mentionne lobjet (celui qui est vu) avant le sujet (celui qui voit), et il faut comprendre ce que D. dit Avraham dans cette prophtie. Les Sages nous enseignent (Tanhouma Vayra 2), que D. vint le visiter aprs la circoncision comme on rend visite un malade, mais cela nest pas indiqu dans le texte. Il semble que lintention de la Torah est de nous faire savoir que la Prsence de D. tait avec lui, quil en tait devenu le support, et cest pourquoi le mot lui prcde la mention de D., pour indiquer que la Prsence de D. sest rvle lui, ce que nous naurions pas su si lordre grammatical de la phrase navait pas t invers (La traduction en Aramen de ce verset, celle dOnkelos ainsi que celle de Yonathan, traduit Il se montra - Il se rvla , pour indiquer quil sagit dune prophtie). Avraham pria pour que ses enfants suivent les voies de D. et restent attachs au fond de leur me aux Patriarches Avraham, Yitshak et Yaakov, et pour quils aient le mrite dtre eux aussi le support de la Prsence de D. Cest ce qui est dit dans les livres: Lire les rcits de la vie des hommes pieux (avec le dsir de leur ressembler et dagir comme eux), quivaut une mditation des sciences divines . Cest dire

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que quiconque modle sa conduite sur les actes des Patriarches, sattache la connaissance de D., et par lveil quil produit dans ce bas monde, il veille les mondes den-Haut , comme le Talmud le rapporte longuement (Haguiga 13a, 14b). Chacun peut, selon ses capacits, parvenir ce niveau grce la foi quil a dans les hommes pieux et leur bonne influence sur lui. Cela nous permet de comprendre aussi ce qui est crit dans la section du sacrifice dYitshak (Brshit 22:11): Un envoy de D. lappela du Ciel et lui dit: Avraham, Avraham! Pourquoi deux fois? Lorsque le nom de quelquun est rpt, cest une marque damour (Brshit Rabba 56:7). Le Midrash (ibid.) ajoute: Lorsque lange lui dit (Brshit 22:12): Ne porte pas la main sur le jeune homme, ne lui fais aucun mal , Avraham ne la pas cout et voulait tout de mme faire couler un peu de sang (en sacrifice), si bien que lange lui dit: Ne lui fais aucun mal . Nest-ce pas difficile comprendre? Comment Avraham pouvait-il vouloir transgresser un commandement de D. En effet sil avait accompli ce geste, il aurait finalement commis un meurtre. Une telle chose est-elle pensable? Si ce nest quAvraham savait quen sacrifiant son fils comme D. le lui avait ordonn, son obissance lui vaudrait, lui et ses descendants aprs lui, un grand mrite, D. se souviendrait favorablement de ce jour-l et pardonnerait aux Juifs leurs fautes, jusqu la fin des temps. Cest ce que les Sages expliquent, propos du verset: Avraham dnomma cet endroit D. pourvoit (ibid. 22:14), parce que D. se souvient (de ce qui aurait pu devenir) des cendres dYitshak runies et destines pourvoir le pardon pour toutes les gnrations (Yroushalmi Taanith II:4). Avraham dsirait exprimer son amour envers D. comme D. exprima Son amour pour lui en lappelant Avraham, Avraham , et Son amour pour Ses enfants lorsquIl leur enseigna les treize attributs de la Misricorde divine, comme il est crit (Shemot 34:6): Eternel D. Tout-Puissant, clment et misricordieux... Cest ce qui est crit la fin de notre section (Brshit 22:17): Je te comblerai de bndictions et Je multiplierai ta descendance... Les Sages expliquent (Brshit Rabba 56:11): Une bndiction pour le pre et une bndiction pour son fils . Avraham fut bni pour son amour infini de D., et D. rcompense mesure pour mesure (Shabbat 105b, Ndarim 32a). Il se savait le bien-aim de D. puisque D. ne met lpreuve que ceux quIl aime, comme il est crit LEternel chtie celui quIl aime (Mishley 3:12). Avraham dsirait gagner lamour de D. pour ses enfants aprs lui - une bndiction pour le pre et une bndiction pour son fils - et de mme que D. laime et lappelle Avraham, Avraham, deux fois, de mme Il aimera ses enfants et sera plein de misricorde envers eux: Tout-Puissant, clment et misricordieux .

Lamour du prochain et la connaissance de la Torah confrent son pouvoir la bndiction


Nous avons dj consacr plusieurs chapitres lhospitalit dAvraham mais la Torah a soixante-dix facettes (Otyiot DRabbi Akiva) et nous voulons donc ajouter ici quelques commentaires. 1. Avraham tait devenu le support de la Prsence de D. comme le disent les Sages: Les Patriarches sont le Char divin (Brshit Rabba 47:8), et ils ajoutent: Il ne devint parfait quaprs la circoncision (Ndarim 32a), Il est devenu un des piliers du monde (Zohar I 59b), Il convertissait les gens au Judasme (Brshit Rabba 39:21, 84:2), Il surmonta toutes les preuves (Avot V:3). Va-t-il soudain quitter la Prsence de D. pour courir accueillir des htes de passage? Est-ce une chose convenable? Que dire si cest D. Lui-mme qui lui a envoy ces visiteurs pour quil nait pas de regret (Babba Metzya 86b)? 2. Il faut expliquer aussi pourquoi il pensait quils taient des nomades arabes (Rashi Brshit 18: 2, Babba Metzya ibid.). Comment les Sages savent-ils que ces passants taient arabes, et mme si lon voulait dire que leur vtement en tmoigne, quelle ncessit y a-t-il de souligner ce dtail? Car chaque mot de Rashi et des Sages a sa raison dtre. 3. Pourquoi Avraham fait-il tellement defforts personnels pour recevoir les htes, alors que pour une dmarche aussi importante que trouver une femme pour son fils Yitshak, il envoya son serviteur Elizer? Ici aussi, il aurait pu demander Elizer de les recevoir. Pourquoi prend-il la peine de le faire lui-mme, si bien quil est oblig de quitter la Prsence de D. et de courir leur rencontre?

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Pour expliquer cela, citons tout dabord ce que disent les Sages (Brshit Rabba 43:11): Comment Isral a-t-il mrit la Birkat Kohanim, le commandement de la bndiction des prtres? Rabbi Yhouda dit: dAvraham, car il est dit (Brshit 15:5): Ainsi sera ta descendance, et (Bamidbar 6:23): Ainsi vous bnirez les Enfants dIsral . Les Sages ajoutent (Bamidbar Rabba 11:4): Les prtres bniront Mes enfants ainsi que Je lai dit leur pre Avraham: Tu seras une bndiction (Brshit 12:2). Cest dire que la bndiction des prtres est donne Isral grce au mrite dAvraham. Il nous faut donc comprendre le verset qui commande aux prtres de bnir le peuple (Bamidbar 6:23): Parle Aaron et ses fils et dis-leur: Ainsi vous bnirez les Enfants dIsral, vous leur direz... 1. Pourquoi D. a-t-Il choisi justement les Kohanim pour bnir Isral? 2. Quel est le sens des mots vous leur direz , tant donn quil est dj dit et dis-leur ? Il semble quil y ait une rptition apparemment inutile. 3. Puisque nous en sommes venus parler des prtres, les fils de la tribu de Lvi, une autre question se pose nous. En Egypte, la tribu de Lvi ne fut pas esclave (Shemot Rabba 5:20) mais tait occupe par ltude et la pratique de la Torah (voir Bamidbar Rabba 3:4), et na pas non plus particip la faute du veau dor (Yoma 66b), comme il est crit (Shemot 32:26): Tous les Lvites se grouprent autour de [Mosh] . De plus, si lon sarrte considrer leur nombre, on constate quils taient peu nombreux comme il est crit (Bamidbar 3:39): Le recensement total des Lvites... vingt-deux mille , pas plus. Ils auraient d tre plus nombreux, puisquils taient pieux (ibid. 3:5) et aims de D. plus quaucune autre tribu (ibid. 3: 8, Tanhouma 17). Pourquoi sont-ils si peu nombreux? Il est dit propos dAvraham (Brshit 18:19): Je lai distingu afin quil prescrive ses enfants... ce quOnkelos prcise dans sa traduction: Je sais quil prescrira ses enfants... Si D. tmoigne quAvraham transmettra la connaissance de la Loi ses enfants, ce nest pas en vain. Pourtant, bien que D. connaisse le cur de chaque homme, il est dit (Yov 15:15): Mme dans Ses saints Il na pas foi , ce qui signifie que, tant quils sont en vie, D. na pas une confiance absolue dans la pit des justes, car mme un homme trs vertueux est capable de fauter ou de se tromper, comme il est crit (Kohlet 7:20): Il nexiste pas de juste sur terre qui fasse le bien et ne faute . Et les Sages ont dit (Avot II:4): Ne sois pas sr de toi-mme jusquau jour de ta mort , comme ce fut le cas de Yohanan le Grand-Prtre (Brachot 29a) qui servit dans le deuxime Temple pendant quatre-vingts ans, et qui, la fin de sa vie, est devenu Saducen, ou dElisha ben Abouya, appel lAutre (Haguiga 14b, Shir HaShirim Rabba 1:25) qui la fin de sa vie est devenu athe. Mme de Hanoch il est dit: Il nest plus, car D. la enlev (Brshit 5:24), et les Sages soulignent: D. craignait quil ne faute et cest pourquoi Il la enlev avant son temps (Brshit Rabba 25:1). Mais propos dAvraham, il est dit: Je sais quil prescrira ses enfants... et D. Lui-mme tmoigne quil restera saint et pur tous les jours de sa vie, et quil enseignera ses enfants aprs lui la voie de la justice, et les actes des pres sont des modles pour leurs enfants (Sotah 34a). La qualit essentielle dAvraham est la gnrosit (Zohar III 302a) et la pratique des devoirs envers le prochain. Nous concluons la premire bndiction de la prire en disant qui protge Avraham (Pessahim 117b). Nous savons quAvraham reprsente la vertu de Bienfaisance (Zohar I 146). Ce nest que par sa gnrosit et ses actes de bienveillance quil a pu amener les gens connatre D., car il tait le premier avoir la foi que chaque homme est cr limage de D. et quen lui montrant de lamour, on lui restitue cette image, sil la perdue en commettant quelque pch. Avraham ramenait les pcheurs dans le droit chemin, non par la rudesse dun Enfin! Arrte de fauter... mais par laccueil chaleureux quil leur rservait dans son auberge. Aprs les avoir restaurs et logs, dans le sens o il est dit (Sanhdrin 103b): Une gorge est une grande chose, car elle rapproche ceux qui sont loin , et aprs les avoir nourris et rassasis, il disait ses htes: Ce nest pas moi quil faut remercier, rendez grce D. qui a pourvu votre subsistance... (Brshit Rabba 54:8). Voyons-nous de nos jours de nombreux Juifs revenir au Judasme aprs avoir t invits en toute simplicit pour un repas de Shabbat ou de fte, et le simple fait de manger avec eux les a-t-il fait revenir D. de tout cur? Cela nous permet de comprendre pourquoi les Sages ont prcis que ces passants taient des nomades arabes. Ce dtail est important parce quil nous montre de quelle faon Avraham recevait ses invits. En tout, il agissait avec diligence (Pessahim 4a), comme il est crit (Brshit 18:6): Et Avraham sempresse...et

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(ibid.7): Et Avraham court au troupeau... Les commentateurs remarquent quil nattendait pas la venue des htes pour savoir ce quil fallait leur servir, mais quil avait toujours des mets prts pour tous, quils fussent arabes (ou japonais qui mangent du riz, ou franais...) si bien que quiconque entrait dans sa tente, de quelque direction quil vienne (Brshit Rabba 48:9, Yalkout Vayra 18), recevait tout de suite ce qui lui convenait, conformment la coutume de son pays, indique par son vtement... Avraham nhsitait pas non plus laver les pieds des voyageurs qui sarrtaient chez lui pour les nettoyer de la poussire de lidoltrie quils pratiquaient (Babba Metzya 86b). Aprs un tel accueil, il nest pas tonnant que chaque invit ait eu honte de ses fautes, car le fait mme dtre reu aussi chaleureusement lamenait rviser sa propre conduite, et vouloir savoir qui tait ce Crateur unique dans lequel son hte, Avraham, avait foi (Manifestons-nous de telles marques dhonneur envers nos propres invits?). Avraham prenait soin de chaque invit dans son auberge, eshel, dont les lettres indiquent la nourriture, la boisson et le logement, et son empressement les amenait reconnatre la vrit de la doctrine quil professait. Nous comprenons maintenant pourquoi Avraham se souciait personnellement de ses htes, alors que, pour trouver une pouse pour son fils Yitshak, il envoya son serviteur Elizer. En ce qui concerne lhospitalit et lenseignement de la bonne conduite, il ne se fiait pas un intermdiaire et il prenait soin personnellement de leurs besoins. Les Sages disent que Ce quil fit de lui-mme fut compt ses enfants mesure pour mesure (Babba Metzya 86b, Shemot Rabba 25:5), de lui-mme , cest--dire sans intermdiaire. Amener les gens se repentir et prendre le bon chemin est une grande chose, car cest rendre lhomme qui a faut limage de D. quil a perdue, puisque chacun, mme celui qui faute, porte cette image dans son me, la partie divine en lui (Zohar I 113a). Sil fait le mal, il perd cette image, il sannule, mais lorsquil regrette sa faute et se corrige, limage de D. lui est restitue. Dans cette activit spirituelle, Avraham agissait avec bont et bienfaisance, sans aucun intermdiaire. Si Avraham a ramen les gens D. et leur a restitu leur image divine, ce nest pas en quittant la Prsence de D., mais en allant dune Prsence de D. lautre , vers limage de D. qui est en lautre, surtout si lon se rappelle que la Prsence de D. est partout (Shemot Rabba 2:9). Accueillir des htes est une action plus grande quaccueillir la Prsence divine (Shabbat 127a) parce que lhospitalit honore en lhte limage de D. qui est en lui. Plus le peuple Juif observe la Torah et les commandements, plus la saintet lillumine, sinon, D. nous en prserve, lobscurit sempare du monde, et la splendeur (hod) se transforme en tout le long du jour cest la dtresse , diva (les lettres de hod inverses) (Echa 1:13). Le Ari zal crit ce sujet: la Prsence de D. est l, mais elle se roule dans la poussire, et il ny a pas de honte plus grande que lorsque lhonneur de D. est dchu et que tout le monde Le ddaigne . Cest ce qui est dit (Zohar I 203a, III 6): Nous avons lobligation de relever la gloire de D. de la poussire . Nous dduisons de tout cela que la qualit fondamentale dAvraham tait lamour du prochain, la sympathie pour lautre. Il ne se contentait pas de laimer comme soi-mme (Vayikra 19:18), il laimait beaucoup plus que lui-mme. Avraham connaissait le cur de chacun, il honorait chaque homme et il tait motiv par le dsir de magnifier lhonneur de D. Nous pouvons maintenant expliquer la signification du nombre des Enfants dIsral, et des Lvites, du point de vue de la bndiction des Prtres et la raison pour laquelle elle est lie Avraham. Les Sages ont dit (Bamidbar Rabba 4:2): A cause du grand amour quil a pour eux, D. les dnombre chaque occasion: la sortie dEgypte, la suite du pch du veau dor Il compta les survivants... Cest une chose tonnante, car D. connat chacune de Ses millions de cratures, bien quil ny ait pas de chiffre pour les compter. Il les connat par leurs noms, comme il est crit (Thilim 147:4): Il dtermine le nombre des toiles, toutes Il attribue des noms (de mme que les hommes ont des noms, les animaux ont des noms, ainsi que tout ce qui est cr). Il connat individuellement chacun de Ses serviteurs, Il donne la subsistance toutes Ses cratures selon leurs besoins, comme il est crit (ibid. verset 9): Il donne leur pture aux btes, mme aux petits des corbeaux qui la rclament . Et pourtant Il compte, justement, les Enfants dIsral. Pour quelle raison? Est-ce que sans cela, D. ne saurait pas combien il y a de Juifs dans le monde et quel est leur nom?

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Il faut comprendre que ce dnombrement nest pas prendre au sens littral, mais quil indique que D. scrute les actes de chaque Juif individuellement, afin que chacun sache quil a de limportance aux yeux de D., qui lexamine pour voir sil progresse ou si, malheureusement, il rgresse. Lorsque lhomme sait que D. le regarde, cela lencourage vouloir jauger ltat dans lequel il se trouve, et comment il se prsente devant D. Cela lui permet de progresser et de slever toujours plus haut. Car lhomme ne doit pas rester sur place (rester sur place est en fin de compte une rgression), mais slever, dans le sens o il est dit (Thilim 84:8): Ils progressent avec une force toujours croissante . De mme quun homme riche accumule toujours plus de richesses et dsire senrichir plus chaque jour, de mme il nous faut enrichir notre service de D. jour aprs jour. Les enseignements de Ta Torah sont plus prcieux pour moi que des milliers de pices dor et dargent (Thilim 119:72), car il faut augmenter son acquis comme cet homme riche, et ne pas se satisfaire de ce que lon possde... Savoir que D. dnombre Son peuple incite se demander si lon a fait des progrs ou non, si lon a corrig la faute du veau dor, si lon est sorti des quarante-neuf degrs dimpuret davant la sortie dEgypte (Zohar Hadash Yithro 39a). Telle est la raison dtre du dnombrement des Enfants dIsral. La tribu des Lvites tait la moins nombreuse de toutes les tribus, bien que pieuse et vertueuse (Shemot Rabba 15:1, Midrash Thilim 104:14). Beaucoup de ses membres taient comme ben Aza de qui les Sages ont dit (Ybamot 63b): Celui qui na pas denfants, est considr comme sil tait meurtrier . Ben Aza lui-mme dit de celui qui na pas denfants: cest comme sil amoindrissait limage de D. quoi les Sages rtorquent: ben Aza! Tu parles bien, mais tu ne fais pas ce que tu dis (puisquil ntait pas mari) . Ben Aza leur rpondit: Que faire? Mon me est amoureuse de la Torah, et le monde peut tre peupl par les autres . Comme ben Aza, les Lvites avaient lme attache la Torah, avant mme quelle ne ft donne, et ils lui taient entirement consacrs. Comme lui, Nadav et Avihou, qui taient des Lvites, fils de Aaron, ne staient pas maris (Vayikra Rabba 20:7), mais il en furent punis, car aprs le don de la Torah, tous avaient lobligation de se marier et davoir des enfants. Les Lvites furent choisis pour bnir les Enfants dIsral, car seuls ceux qui se consacrent la Torah peuvent savoir et apprcier limportance de lamour du prochain et sont capables de bnir le peuple, comme Avraham qui observait toute la Torah avant quelle ne ft donne (Yoma 28b, Vayikra Rabba 2:9) et qui tait dot de lamour du prochain, ce qui lui permettait de bnir tout le monde comme il est crit (Brshit 12:2): Tu seras une bndiction , cest dire: Les bndictions sont en ton pouvoir (Tanhouma Nasso 9). De mme, chaque homme qui tudie la Torah est semblable aux Lvites (Rambam, Shmita VeYovel 13:13) et peut bnir le peuple de ses propres paroles. Expliquons la bndiction des prtres. Les Sages font un rapprochement entre deux versets de la Torah, celui qui ordonne la bndiction des prtres: Ainsi vous bnirez les Enfants dIsral et celui qui fait appel aux bndictions de D. (Devarim 26:15): Jette un regard du haut des cieux, Ta sainte demeure et bnis Ton peuple Isral . Et ils commentent: La communaut dIsral dit devant D.: Matre du monde! Tu dis aux prtres de nous bnir, mais nous navons besoin que de Tes bndictions Toi, que Toi-mme Tu nous bnisses, comme il est crit: bnis Ton peuple Isral. D. leur rpondit: Bien que Jai dit aux prtres de vous bnir, Je suis avec eux et cest Moi qui vous bnis (Tanhouma Nasso 8, Yalkout Shimoni ibid. 710). Et les prtres lvent les mains, pour indiquer la Prsence de D. comme il est dit (Shir HaShirim 2: 9): Le voici qui se tient derrire notre muraille - entre les doigts carts des prtres, qui regarde par les fentres - au moment o ils tendent les bras (Shir HaShirim Rabba). Faut-il penser que D. regarde justement entre les doigts des prtres? Quel est le sens de ce regard? Que regarde-t-Il? Les mains, les dix doigts, reprsentent les Dix Sphirot et Toute la prosprit du monde descend par les Dix Sphirot (Zohar III 179a, 300b). Les mains en sont le rceptacle, et les doigts rappellent les Sphirot. Dire que D., qui est la source de toute abondance, regarde entre les doigts des prtres, cest dire quIl fait descendre la prosprit travers les doigts des prtres. Que regarde-t-Il? Il regarde les prtres, Il connat leur intention, leur pense, Il sait sils bnissent le peuple de tout cur ou sils ne font que dire des mots du bout des lvres - cest cela quIl regarde. Cest ce que disent les Sages (Bamidbar Rabba 11:12): D. dit aux prtres: Ce nest pas parce que Je vous ordonne de bnir les Enfants dIsral quil faut le faire par obligation, contre cur et htivement, bnissez-les de tout cur, afin quils soient bnis. Et alors, vous serez aussi bnis, car Moi Je les bnis , Je bnis les

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prtres et Isral (Houlin 49a). Le prtre doit ressentir lveil et lillumination qui lui viennent de D. et alors il peut dire la bndiction (Bamidbar 6:24), de tout son cur, avec de bonnes intentions et avec amour. Il doit penser celui qui la bndiction est destine, comme Avraham qui pensait toujours aux besoins des autres et les bnissait de tous les bienfaits quils mritaient. En agissant ainsi, les prtres eux-mmes sont bnis par D., mesure pour mesure (Shabbat 105b): Et je les bnirai , et la bndiction descend entre leurs doigts. Les Sages ont fix la formulation des bndictions que nous disons avant daccomplir certains commandements, et avant de bnir le peuple, les prtres disent (Sotah 39a): ...qui nous a command de bnir Son peuple Isral avec amour . Les prtres doivent bnir Isral avec amour, et ressentir cet amour pour Isral dans tout ce quils font. Cest alors que D. leur promet et Je les bnirai , car Il prodiguera aussi aux prtres une profusion de bienfaits (Houlin 49a). Nous trouvons dans les livres un principe merveilleux: Lorsque quelquun prononce une bndiction, cette bndiction appartient D. et lhomme nest quun intermdiaire . Tel est le pouvoir de la bndiction confie par D. Avraham, et par la suite aux Lvites, pour leur attachement la Torah. De mme, chaque gnration, le pouvoir de bnir est confi aux grands de la Torah. Bien que de nos jours nous soyons tous impurs, du fait du contact avec les morts puisque nous navons pas les cendres de la vache rousse pour nous purifier (Pessikta Zouta, Tazryia 13:2), et que nous ne savons pas avec certitude qui appartient la tribu des Lvites, au moins savons-nous que le pouvoir de la bndiction est confi aux hommes qui ont en commun avec les Lvites la vertu, et chacun a potentiellement la possibilit de parvenir au niveau de la tribu des Lvites. Ce pouvoir est un hritage reu dAvraham, qui tait connu pour son amour dIsral et pour sa grande gnrosit. Lessentiel de la Torah cest lamour, comme lenseigne Rabbi Akiva (Yroushalmi Ndarim IX: 4): Tu aimeras ton prochain comme toi-mme - cest lun des grands fondements de la Torah . Lamour du prochain est fondamental, et non accessoire. Moi-mme je ne sais pas si je peux my mesurer. (Cest comme si un homme qui sait que je connais les numros gagnants de la loterie, me suppliait de les lui rvler. Dun ct, moi aussi jai besoin dargent pour mes Yshivot, et de lautre, ce frre Juif me supplie de lui rvler les numros gagnants... je ne sais pas ce que je ferais si je me trouvais confront une telle preuve). Si lon hsite, cest que lon nest pas encore parvenu aimer son prochain comme soi-mme. Il faudrait pouvoir se comporter comme Avraham, pour qui une telle chose ntait mme pas une preuve, car ses intrts personnels ne comptaient pas face ceux du prochain, dont il ne dsirait que le bien. Cest pourquoi il pouvait bnir chaque homme en fonction de sa nature. Ajoutons encore un mot propos du verset (Thilim 122:8): Pour mes frres et mes amis, je toffre mes vux de bonheur ; dans le Talmud (Brachot 64a) ce verset est appliqu aux hommes de Torah qui rpandent la paix dans le monde. Nous savons que D. est appel un ami et un proche des hommes pieux, surtout des Patriarches (Zohar III 257a), et Il est aussi appel Roi (Tanhouma Noah 13). Avraham La nomm le Matre du monde (Brachot 7b). Il est certain que nous avons le devoir daimer D. puisque tu aimeras ton prochain comme toi-mme se rfre lamour envers D., cest--dire: de mme que tu taimes toi-mme, tu dois aimer D. . Etant donn quAvraham aimait D. plus que lui-mme, il a pu, malgr les douleurs aigus quil ressentait aprs la circoncision, courir vers les htes de passage et les inviter sous son toit. Que D. nous vienne en aide et quIl insuffle dans nos curs Son amour, un amour sincre et total, et alors lamour du prochain y sera aussi imprim, comme il est dit (Avot VI:1): Celui qui aime D. aime les hommes . Un tel amour peut nous conduire sur la voie royale, la voie de D., Roi du monde, et si nous agissons ainsi, tous les bienfaits nous seront rservs en ce monde et dans lautre. Amen! Ainsi soit-il! (Ce commentaire fut prononc dans la maison de la famille Krenberg pour sa gnreuse hospitalit, Zurich Suisse, 13 Sivan 5751).

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Pahad David Accueillir des htes sous les ailes de la protection divine

Il est crit dans notre section (Brshit 18:1): LEternel Se rvla lui dans les plaines de Mamr, il tait assis sur le seuil de la tente dans la chaleur du jour . Ce jour-l tait le troisime jour aprs la circoncision dAvraham, et D. est venu visiter le malade. Lorsque D. vit quil souffrait de la circoncision, Il provoqua une grande chaleur afin de ne pas limportuner par des visiteurs de passage (Babba Metzya 86b). Avraham tait connu pour son hospitalit, puisque sa tente avait une entre chacune des quatre directions, afin que les visiteurs puissent entrer sans peine, quelle que soit la direction do ils venaient (Brshit Rabba 48:9, Yalkout Meam Loez Brshit 420). Nayant pas de visiteurs ce jour-l, Avraham envoya Elizer chercher des invits. Mais Elizer revint bredouille, et alors Avraham sortit lui-mme en qute de passants, disant Elizer quil ne le croyait pas, car il tait son esclave, et on ne peut pas faire confiance aux esclaves . Le Rabbin Yossef Srouya ma demand: Elizer tait le serviteur fidle et llve dAvraham, proche de lui comme un fils, comme Avraham lui-mme le dit (Brshit 15:3): Voici, lenfant de ma maison sera mon hritier , et Elizer puisait dans la Torah de son matre et la rpandait alentour (Yoma 25b, Pessikta Zouta, Rashi Lech Lecha 15:2). Pourquoi Avraham ne croit-il pas son serviteur Elizer en ce qui concerne les visiteurs, alors quil lui fait confiance dans le choix dune femme pour son fils, de qui natra le peuple Juif? Jajouterai cela une autre question. Comment penser quElizer puise dans la Torah de son matre et la transmet fidlement aux autres et quil enseigne la vrit de la Torah tous ceux qui se runissent chez Avraham sil nest pas possible de lui faire confiance en ce qui concerne lhospitalit? Comment peut-il enseigner la Torah de D. aux autres? En rponse, il faut dire quElizer, le serviteur dAvraham, tait son hritier avant la naissance dYitshak, comme il est crit Le fils de ma maison est Elizer, le Damascen (Brshit 15:2) et voici le fils de ma maison va de moi hriter (ibid. 24:2), et donc il est directement concern par lhritage. Cest pourquoi Avraham a une raison de souponner quElizer, son hritier, na pas cherch suffisamment et a laiss passer un visiteur. Il est donc possible dattribuer Elizer la pense quAvraham, heureux dtre circoncis, va, justement maintenant, cause de sa grande joie, donner tout ce quil possde aux pauvres, et il ne restera rien en hritage son serviteur. Il ne veut pas inviter dhtes, afin de ne pas tre priv de son hritage. Avraham ne lui fait pas confiance parce quil sait quil agit de faon intresse, cest pourquoi il sort luimme la recherche des gens de passage. Pourtant, lorsquil a fallu trouver une pouse pour Yitshak, Avraham a fait confiance son serviteur Elizer, sachant que sans aucun doute il reviendrait avec une jeune fille de bonne famille et vertueuse, comme il convenait son fils, et cela pour deux raisons: Premirement, ce nest plus Elizer qui va hriter mais Yitshak, selon la promesse divine: Ce nest pas celui-ci qui hritera de toi mais celui qui natra de toi qui hritera (Brshit 15:4) et donc, partir de ce moment-l Yitshak est le matre de tout ce quil possde, Elizer deviendra le serviteur dYitshak et ne recevra pas dhritage, puisque ce que lesclave possde appartient son matre (Pessahim 88b). Par consquent, il ny a pas lieu de souponner quElizer revienne avec une femme qui ne convient pas Yitshak, car il voudra pouvoir dire Yitshak que cest lui qui a choisi sa femme, une femme vertueuse, et Yitshak lui en sera reconnaissant toute sa vie. De plus, Elizer a dit Avraham Peut-tre (oulay) que la femme ne voudra pas venir avec moi (Brshit 24:5). Le mot oulay est crit sans la lettre Vav et peut se lire lay, ce qui fait dire aux Sages (Brshit Rabba 59:9): Elizer avait une fille de ce nom, et il voulait la donner en mariage Yitshak, mais Avraham refusa, lui disant: Mon fils est bni, et toi tu es maudit [de la maldiction du jeune fils de Noah], et celui qui est maudit ne sassocie pas celui qui est bni (Brshit Rabba 59:12). Il est certain que la fille dElizer tait une femme vertueuse, sinon Elizer naurait pas os la proposer en mariage, mais Avraham a rejet cette union, car ses yeux, la fille dElizer ne mritait pas dpouser Yitshak et de donner naissance au peuple Juif. Et donc, justement pour cette raison, Avraham ne doutait pas quElizer pt revenir avec

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une femme qui ne conviendrait pas Yitshak. Elizer comprendrait de lui-mme que si sa fille avait t repousse, malgr ses qualits, il ne devait pas choisir une femme ayant des qualits moindres. Il y a donc lieu de penser quil reviendrait srement avec une femme aux qualits exceptionnelles pour le fils de son matre, et en cela Avraham lui fit confiance. Cela explique aussi le serment quAvraham fait prter Elizer (ibid. 24:3). Avraham demande son serviteur Elizer de prter serment, de peur que ses yeux ne le trompent et ne linduisent voir en une femme quelconque des mrites plus grands que ceux de sa fille, et pour quil cherche et vrifie scrupuleusement la ralit des qualits de la femme qui mriterait dpouser son fils Yitshak. Maintenant nous avons une rponse notre deuxime question. Elizer tait un homme pieux, et sa fille tait vertueuse. Et donc, on ne risquait pas de le croire incapable denseigner aux autres la Torah de son matre. Pourtant, en ce qui concerne lhospitalit, surtout ce jour-l - le troisime aprs la circoncision - il en tait autrement. Comme nous le savons, Avraham na jamais confi la tche daccueillir des htes dautres que lui. Ctait toujours lui qui allait lui-mme les accueillir, les servait, les nourrissait et leur versait boire. Il se souciait personnellement de tous leurs besoins, mme spirituels, jusqu ce que le Nom de D. ft connu de tous et invoqu par tous (Yalkout Shimoni Hay Sarah 107, Sotah 10a). Mais ce jour-l, exceptionnellement, Avraham demanda son serviteur Elizer daller qurir des invits (et mme si lon voulait dire quil avait souvent envoy Elizer chercher des htes, il trouvait toujours quelquun inviter), mais ce jour-l, D. avait provoqu une chaleur torride pour quAvraham ne soit pas importun par des passants. LorsquElizer revint seul, Avraham fut tellement du quil le souponna de craindre que son hritage ne ft distribu aux pauvres, et cest pourquoi il ne le crut pas. Mais dans tout ce quil faisait par ailleurs, Elizer tait un serviteur fidle et vertueux. Il est possible de dire, par analogie, que cest aussi le sens de lhospitalit, et de mme quil ne faut pas apprendre la Torah pour soi-mme, de mme il faut accueillir des htes et leur enseigner la Torah de D., dans le sens o il est dit: Fusses-tu avanc dans ltude de la Torah, ne ten vante pas... (Avot II:9) afin de rpandre la connaissance de D. en tout lieu et au bnfice de tout fils dIsral.

Escorter les htes leur dpart est plus important que les accueillir
Le Rambam dans son Code de Loi (Halachot Avel 14:2) crit: Accompagner ses htes reprsente un mrite qui surpasse les autres. Cest une loi quAvraham a dicte par sa conduite pleine de compassion. Il recevait les gens de passage et les escortait leur dpart. Accueillir des invits est plus important quaccueillir la Prsence Divine... et les escorter quand ils sortent est plus important que les recevoir . Le Rabbin Hayim Kravitz dAnvers en Belgique, ma demand ce sujet: Il va de soi que lorsque lon reoit un invit, quon laccueille gnreusement, quon lui donne manger et boire toutes sortes de bonnes choses, on a accompli le commandement dhospitalit. Mais lorsquil quitte la maison, on na plus la possibilit de lhonorer ainsi; pourquoi donc le fait de lescorter son dpart est-il considr comme lessentiel de lhospitalit. Est-ce que cela ne devrait pas tre le contraire? A quoi, je lui ai rpondu: Combien il est juste de considrer le fait descorter linvit sa sortie comme une chose plus importante que le fait mme de laccueillir et de le recevoir. Car sans doute lorsque linvit est sous notre toit et jouit de toutes les bonnes choses quon lui offre boire et manger, viande, poisson et beaucoup de mets dlicieux, il se sent bien. Mais si on ne lescortait pas sa sortie, si on lui faisait sentir quon le chasse comme quelquun de peu dimportance, toutes les bonts envers lui en seraient annules et perdues, car linvit maudirait linstant o il est entr dans notre maison. Quel bienfait en a-t-il tir, si aprs avoir t reu, il est rejet avec mpris et ddain! Cest donc que lessentiel du commandement dhospitalit est son aboutissement, au moment o lon accompagne lhte son dpart. Cest ce que les Sages disent (Sotah 13b): Laccomplissement dun commandement est attribu celui qui lachve . Tant que linvit se trouve dans la maison, tout va bien et tout le monde est satisfait, mais au moment de prendre cong, il risque de ressentir de la gne et de penser quil a t une charge et quil a importun le matre de maison. Mais en voyant avec quelle bienveillance et quelle chaleur son hte lescorte sa sortie, il ne ressent pas de honte, il se sent bien, et il peut le bnir

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de la bndiction de linvit envers le matre de maison (voir Brachot 46a) quil ne connaisse aucune honte ni en ce monde ni dans lautre, et quil prospre dans tout ce quil entreprend , il le bnira en son cur pour toutes les bonts quil a reues, et il bnira D. de lui avoir donn loccasion dune rception aussi honorable. Il est crit (Devarim 28:6): Bni sois-tu ton arrive et bni sois-tu ton dpart . Cest un grand honneur pour un invit dtre escort sa sortie par le matre de maison, avec amabilit et respect. Nous avons dj vu (Brshit Rabba 54:8) quAvraham avait lhabitude descorter ses invits. Il enseignait ceux quil asseyait sa table ne pas le remercier lui, mais rendre grce D. pour la nourriture quIl leur avait donne (Yalkout Shimoni Brshit 21:33), et il les raccompagnait leur sortie avec beaucoup damabilit. Il est donc clair que le commandement dhospitalit nest accompli que si lon escorte son hte avec bienveillance. Il faut lescorter afin quil parte avec un bon sentiment, quil se sente laise, quil ne ressente ni honte ni gne, et quil emporte avec lui une grande joie. Le Rabbin dAnvers fut trs heureux de lexplication et ajouta: Cest peut-tre pour cela que les Sages ont dit (Brachot 31a): Il faut se sparer de son compagnon sur des paroles de la Loi, car ces dernires paroles resteront graves dans sa mmoire . Cest--dire quil gardera un bon souvenir de laccueil quil a reu . Jai ajout: Cest un fait. Etant donn que la sparation doit se faire sur des paroles de la Loi, il faut escorter linvit sa sortie, car lobligation de lescorter est une loi! Lorsquil escorte son hte jusqu la porte et au-del, il complte le commandement dhospitalit . Il en est de mme lorsque lon reoit un ami pour une simple visite. Cest un des aspects du commandement daimer son prochain comme soi-mme (Vayikra 19:18) que de lui faire honneur et de lescorter avec amabilit. Alors cet ami se souviendra de nous et dsirera nous imiter, exprimer le mme amour envers chaque Juif et tre bon envers tous ses frres, comme nous avons t bons envers lui. Si la sparation sest faite sur des paroles de Torah, le commandement a t excut la perfection.

La force du mrite des Patriarches


Il prit de la crme et du lait, et le veau quil avait prpar et les servit, et lui se tenait devant eux sous larbre tandis quils mangeaient... (Brshit 18:8). Les Sages disent (Babba Metzya 86b): Lcole de Rabbi Ismal enseigne: en rcompense de la crme et du lait, ils ont reu la manne, en rcompense du fait quil se soit tenu debout pour les servir, ils ont reu la colonne de nue, en rcompense de leau quon aille qurir un peu deau, lavez vos pieds (ibid. verset 4), ils ont reu le puits de Miriam . Cela demande tre explicit: 1. Avraham avait lhabitude daccueillir des invits et il convertissait les hommes (Brshit Rabba 39:21) mais le faisait-il pour mriter une rcompense? 2. Y a-t-il une commune mesure entre le repas quil a servi ses invits et la grandeur des rcompenses, telles la manne, la colonne de nue et le puits? 3. Le Maharsha dans son commentaire de ce passage du Talmud, remarque que cela contredit un autre passage (Taanith 9a): Rabbi Yossi fils de Rabbi Yhouda dit: Isral avait trois bons dirigeants, Mosh, Aaron, et Miriam... et ils bnficirent grce leurs mrites de trois choses: le puits, la colonne de nue, et la manne. Grce Miriam, ils reurent le puits, grce Aaron, la colonne de nue et la manne grce Mosh . Est-ce dire que ces choses nont pas t donnes en rcompense de la conduite dAvraham? 4. Le Maharsha soulve, dans le mme esprit, une autre difficult. Il est dit: En rcompense de prenez un peu deau Isral a reu le puits de Miriam, et sil est dit le puits de Miriam, cest que cest grce elle quils reurent le puits (car sinon il aurait t dit le puits , sans prcision, comme il est dit: ils reurent la manne, et la colonne de nue, sans prcision). Pourquoi, en ce qui concerne le puits, est-il dit quen rcompense de prenez un peu deau , Isral a reu le puits de Miriam la prophtesse? Le Maharsha entreprend de donner une rponse aux questions quil a souleves. Par le mrite dAvraham, ils nauraient reu ces trois choses - la manne, la colonne de nue et le puits - que temporairement, selon

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les besoins du moment, mais grce au mrite de Mosh, Aaaron et Miriam, ils les ont reues pour une priode prolonge de quarante ans . Effectivement, lorsque Mosh mourut, la manne cessa de tomber (Kidoushin 38a), lorsque Aaron mourut, la colonne de nue disparut (Rosh HaShana 3a, Taanith 9a), et lorsque Miriam mourut, le puits se tarit. Le Torah Tmima remarque que lexplication du Maharsha est surprenante et force, et il suggre une autre explication: en rcompense des trois actes accomplis par Avraham, ses enfants ont eu le mrite davoir leur tte trois bons chefs comme Mosh, Aaron et Miriam, grce auxquels ils bnficirent de la manne, de la colonne de nue et du puits . Son explication ne nous semble pas ressortir des deux sections du Talmud, ce qui nous donne la possibilit de formuler un autre avis. Mais avant de rsoudre la contradiction entre les enseignements de Rabbi Ismal et de Rabbi Yossi, il faut se demander pourquoi les Sages ont attribu la manne justement Mosh, la colonne de nue Aaron, et le puits Miriam. Quel est le rapport entre ces dirigeants et les bienfaits qui sont attribus leur mrite? Chacun deux eut le mrite de pourvoir Isral dun don particulier, mais pourquoi justement ce don-l? Les Sages racontent (Brachot 28a) que lorsque Rabban Gamliel visita Rabbi Yoshoua pour se rconcilier avec lui, il vit que les murs de sa maison taient noircis de fume et il lui dit: les murs de ta maison montrent que tu es charbonnier . Rabbi Yoshoua lui rpondit: Malheur la gnration dont tu es le dirigeant, car tu ignores la souffrance des hommes de Torah et tu ne sais pas comment ils gagnent leur vie et de quoi ils se nourrissent . Rabbi Yoshoua nous enseigne ici une grande leon. Le vrai chef nest autre que celui qui connat la peine de tout un chacun, qui sait comment vivent et de quoi se nourrissent les gens de son temps. Ce souci doit tre la priorit de tout dirigeant, qui ne doit pas viser faire des merveilles ni chercher se distinguer par des bouleversements sociaux, car ces actions-l ne sont pas prioritaires et peuvent attendre. Les expressions de Rabbi Yoshoua: comment ils gagnent leur vie et de quoi ils se nourrissent , indiquent que mme si un lve travaille et reoit un revenu quelconque, cela ne dispense pas son matre du devoir de sintresser cet tudiant, de savoir de quoi il se nourrit, et comment il vit. Il doit vrifier si les apparences correspondent sa situation relle. Mme Rabban Gamliel, prsident du Sanhdrin, a lev les yeux vers les murs enfums de la maison, sans voir quen fait Rabbi Yoshoua vivait dans le plus grand dnuement. Cest la raison des deux expressions, car le dirigeant doit savoir de quoi les lves vivent et de quoi ils se nourrissent, et non juger de leur situation sur des apparences. Expliquons un autre Midrash (Shemot Rabba 2:3): D. ne donne la grandeur un homme quaprs lavoir test sur des dtails, et seulement ensuite Il llve une position dominante . Mosh et le roi David furent tout dabord jugs sur leur conduite envers leur troupeau, et ce nest quensuite quils furent choisis pour tre les bergers du peuple juif. Pourquoi justement sur de petites choses? Parce que ce nest que dans les petites choses, celles qui sont accomplies sans ostentation, sans publicit et loin des projecteurs, que lon peut constater la vraie nature et le caractre de la personne, tester ses qualits et savoir si ses vertus exceptionnelles sont effectivement un acquis et font partie intgrante de sa nature, ou bien si ses actes sont la consquence de dcisions prcipites et dlans passagers, dont le seul but est dacqurir lassentiment des autres. Ce nest que lorsque quelquun se conduit avec un esprit de sacrifice et ne mprise pas les petites choses (Zacharia 4:10), surtout lorsque personne ne le voit et quil est seul face D., quil prouve effectivement sa vraie nature, et quil est possible, sil en a les dispositions, de lui donner de grandes responsabilits. Ce nest pas le cas de celui que lon ne connat que par les grandes choses accomplies en public et dont on ignore le comportement dans le priv, car il ne fait pas de doute que dans les grandes ralisations se mlent une large mesure dhonneur et probablement une certaine dose dintrt. Il sensuit que deux points caractrisent le bon dirigeant: 1) une sympathie totale et sincre pour toute peine que peut ressentir son prochain. 2) une attention particulire aux choses qui semblent peu importantes, ce qui garantit quil soccupera de choses importantes avec la mme puret dintention quil a manifeste dans les petites choses.

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Les trois dirigeants du peuple juif, Mosh, Aaron et Miriam, possdaient ces deux qualits. Il est dit: la grandeur nest accorde qu celui qui sest rvl dans de petites choses. Mosh fut test dans son comportement avec le troupeau (Shemot Rabba 2:3). Mosh, qui stait enfui dEgypte dans le dsert, tait devenu le berger du troupeau de Yithro, qui est la fois son beau-pre et le Grand-Prtre de Midian. Un jour, une brebis schappa du troupeau et il la poursuivit jusqu Hassouah o se trouvait une tendue deau. La brebis sest mise boire, alors Mosh sapprocha delle et dit: Je ne savais pas que tu ttais chappe parce que tu avais soif! Tu dois tre fatigue... Et il la porta sur ses paules sur le chemin du retour. D. dit: Tu es misricordieux envers le troupeau dun homme, Je te promets que tu seras le berger de Mon troupeau Isral . Nous voyons que notre Matre Mosh, le dirigeant que D. a choisi pour mener Son troupeau Isral, possdait vraiment ces deux qualits. Il a compati la peine de cette brebis assoiffe et fatigue, et il soccupait de dtails apparemment ordinaires. Il fit preuve de compassion naturelle, puisque cela sest pass dans le dsert, terre aride, et non face un public, et il nescomptait aucune rcompense, aucun honneur ni aucune admiration. Cela montre clairement pourquoi la manne est attribue Mosh et que cest grce lui quelle fut donne Isral. Cest lui qui dirigeait le peuple juif, cest lui qui avait la responsabilit du bien-tre de chacun, et ce bien-tre dpendait de leur subsistance... La manne est appele pain , comme il est crit (Thilim 78:25): Tous eurent manger de ce pain de dlice . Cest grce au mrite de Mosh quIsral reut la manne. Nous en venons Aaron. De lui il est dit (Malachy 2:6): Il a march devant Moi en paix et en droiture, et beaucoup grce lui ont renonc au crime . Le Midrash (Yalkout Shimoni Houkat 764, Avot DRabbi Nathan 12:3) rapporte: Lorsque deux personnes se querellaient, Aaron allait sasseoir chez lun deux et lui disait: Sais-tu ce que dit ton ami? Mon cur est dchir, mes penses vacillent, je marrache les cheveux, comment puis-je regarder en face mon ami? Jai honte du mal que je lui ai fait... Et Aaron restait auprs de lui jusqu ce quil ne lui reste plus aucune trace de rancune dans le cur. Puis il allait chez lautre et lui parlait de mme, si bien que lorsquils se rencontraient, ils sembrassaient lun lautre chaleureusement, cest pourquoi toute la Maison dIsral a pleur Aaron pendant trente jours (Bamidbar 20:29). Les Sages disent en outre (Avot I:12): Soyez compts parmi les disciples dAaron, qui aimait la paix et recherchait la paix . Il est clair que la poursuite de la paix est plus puissante que le simple dsir de paix, car la poursuite indique que lon ne se donne pas de repos et que lon ne connat pas la tranquillit jusqu ce que lon obtienne la paix tant souhaite. Aaron ressentait la peine de lautre et connaissait les soucis de chacun, mme dans les plus petits dtails. Cest pourquoi la colonne de nue est attribue au mrite dAaron HaKohen. Les Sages ont dit (Shabbat 23b): On allume une lumire le Shabbat pour faire rgner la paix dans le foyer , parce quen marchant dans lobscurit, on risque de se cogner et de tomber et cela causerait une dispute (Rashi explique : L o il ny a pas de lumire il ny a pas de paix, car on trbuche en marchant dans lobscurit ). De mme que la lumire du Shabbat est une source de paix dans le foyer, de mme les colonnes de nues qui montraient la route le jour et lclairaient la nuit faisaient rgner la paix, comme le disent les Sages (Tanhouma Beshalah 3): Il y avait sept nues: une en haut et une en bas, et quatre autres dans les quatre directions. Lune allait devant le camp comme il est crit: LEternel les guidait le jour par une colonne de nue qui leur indiquait le chemin, la nuit par une colonne de feu qui les clairait, afin quils puissent marcher jour et nuit (Shemot 13:21). Cette colonne tuait les serpents et les scorpions, galisait les montagnes, et brlait les ronces... Les colonnes de nues supprimaient tous les obstacles afin que le peuple dIsral puisse avancer en toute scurit, et cest la raison pour laquelle elles sont attribues au mrite de Aaron, dont tous les efforts tendaient faire rgner la paix entre les amis et les poux. De mme nous pouvons expliquer le puits de Miriam, la prophtesse. Miriam tait connue pour son dvouement envers les autres, puisque les Sages ont dit (Shemot Rabba 1:17): Qui taient les sagesfemmes? Rabbi Shmouel Bar Nahman dit: une mre et sa fille, Yochebed et Miriam . Miriam navait que cinq ans. Elle accompagnait sa mre Yochebed et la servait en tout avec diligence, cest ce que dit le roi Shlomo (Mishley 20:11): Lenfant se rvle par ses actes .

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A propos du verset elles laissaient vivre les garons (Shemot 1:17) les Sages ajoutent : Non seulement elles ne les tuaient pas, mais elles les revigoraient en leur donnant de leau et de la nourriture (Sotah 11b), ce qui montre lesprit de sacrifice de Miriam et de sa mre Yochebed, car le roi dEgypte leur avait personnellement ordonn de tuer les garons (ibid. v. 17) et elles ont transgress cet ordre au risque de leur vie. Non seulement elles nont pas tu les garons, mais elles se souciaient de les faire vivre par des soins tout particuliers et des actes sublimes que le Midrash rapporte longuement (ad. loc.). Plus tard, Miriam agit envers son frre Mosh avec le mme esprit de sacrifice quelle avait rvl envers tous les enfants Juifs, lorsquil fut plac dans un berceau tanche et jet leau. En rcompense du fait quelle soit reste un moment ses cts au bord de la rivire, les Enfants dIsral firent halte pendant sept jours en son honneur quand elle eut la lpre et sjourna hors du camp dIsral (Sotah 9b). Cest pourquoi il convient de la compter parmi les dirigeants valeureux du peuple dIsral. Le puits deau qui accompagnait Isral dans le dsert lui fut donn justement grce au mrite de Miriam, car leau est source de vie, comme il est crit (Zacharia 14:8): En ce jour, les eaux vives spancheront de Jrusalem . Pour avoir laiss vivre les nouveau-ns, et pour avoir sauv Mosh son frre, elle a gratifi Isral dun puits - symbole de vie. Nous avons demand en tte de ce chapitre en quoi le fait de donner du pain et de leau - ce qui nest pas une chose trs difficile, compare aux actes de courage permanents dAvraham - peut procurer une aussi grande rcompense? Le Gaon Rabbi Hayim Shmoulevitz, dans ses crits, pose la question, et explique: Ce ne sont pas les actes grandioses qui tmoignent de la grandeur de la personne, mais la grandeur de la personne qui dtermine la grandeur de ses actes. Ce que fait un homme de valeur est sans commune mesure avec le mme geste accompli par un homme ordinaire, et les Sages le confirment lorsquils disent quen rcompense du beurre et du lait que Avraham a servis, ses enfants ont reu la manne du ciel. Il nest pas un seul Juif qui ne pratique lhospitalit, en quoi le beurre et le lait offerts par Avraham dterminent-ils une telle rcompense, alors que nous ne sommes pas rtribus galement pour le mme geste? Sans aucun doute, Avraham reut une juste rcompense car la valeur de son acte est sans commune mesure avec le mme geste accompli par nous, bien quils se ressemblent superficiellement (il faut lire dans ses crits comment il labore ce point). Malgr tout, cela nexplique pas pourquoi D. a trouv bon de prendre en considration justement cet acte-l dAvraham plus que tout autre, et pourquoi pour ce seul repas il reut une telle rcompense. Les Sages disent propos du verset: Et lEternel se rvla lui dans les plaines de Mamr - il tait assis au seuil de la tente, dans la chaleur du jour (Brshit 18:1): Pourquoi est-il dit dans la chaleur du jour ? Rabbi Hama Bar Hanina dit, ce jour-l tait le troisime jour aprs la circoncision. D. tait venu visiter Avraham, et Il avait provoqu une chaleur torride (une chaleur telle quil ny aurait pas de voyageurs sur les routes - Rashi), afin de ne pas importuner ce Juste par des visites. Avraham envoya Elizer chercher des invits, il partit et revint seul. Avraham lui dit: je ne te crois pas, car on ne peut pas faire confiance aux esclaves . Il sortit lui-mme et, craignant que la Prsence Divine ne le quitte, il dit: Ne passe pas ainsi devant ton serviteur (ibid. verset 3) et il dfit son pansement ( cause de la circoncision - Rashi), car il nest pas convenable de se lever de la sorte (Babba Metzya 86b). Si nous considrons la situation dAvraham, nous sommes stupfaits. Voici un vieil homme au troisime jour de sa circoncision, jour o les douleurs sont les plus fortes et o le danger est grand (voir le Targoum Brshit 34:25, Shabbat 134b, Maharsha Babba Metzya 86b ad. loc.), et voici que justement dans ces conditions Avraham dcide quil nest pas pour autant dispens du commandement de lhospitalit, et quil ne le transgressera pas quoi quil arrive. Mais cause de sa grande faiblesse, il ne sort pas lui-mme, il envoie son vieux et fidle serviteur, son lve assidu, Elizer, chercher des htes, car il est possible quil trouve quelquun qui ait besoin (justement cause de la grande chaleur) dun abri pour se reposer, dune boisson pour se rafrachir et dun repas pour se restaurer . Et voil quElizer, qui puisait dans la Torah de son matre et la transmettait aux autres (Yoma 25b), sort, et dclare son retour, navoir trouv personne. Sil le dit, on peut le croire, car en tant que serviteur dAvraham il avait acquis son service de grandes qualits. Et pourtant, Avraham ne le croit pas! Il na pas confiance en son serviteur! Il lui tait tellement difficile daccepter que le jour passe sans pouvoir accomplir le devoir dhospitalit quil se leva, enleva

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le pansement de la circoncision qui le gnait, et sortit lui-mme. Alors D., voyant combien il tait pein de navoir pas de visiteurs, lui envoya trois anges sous laspect de marchands arabes (Babba Metzya 86a, Brshit Rabba 48:9) et Avraham sempressa de les accueillir avec la joie immense de pouvoir accomplir ce qui lui tenait tant cur. On pourrait penser quAvraham est satisfait, et quil va maintenant pouvoir se reposer et dlguer dautres le soin de les recevoir, selon le principe quun messager est en tout comme celui qui lenvoie (Brachot 44b, Kidoushin 41a). Mais non, au contraire Avraham court vers le troupeau (Brshit 18:7), et personnellement, il se tient debout devant eux, sous larbre, tandis quils mangent (ibid. 18:8), afin dtre sr quils ne manquent de rien. Voici un exemple dhospitalit hors du commun, dabngation incomparable. Avraham oublie ses douleurs et ses souffrances, comme si elles nexistaient pas! Il est transport par une telle joie quil ne ressent plus aucune douleur, il ne pense qu soulager la peine des autres, qu la fatigue de ces voyageurs. Il leur dit: Prenez un peu deau et lavez-vos pieds (ibid. 18:4) pour vous rafrachir, et il se tient debout devant eux pour les servir. Un tel dvouement dans des conditions aussi difficiles (le troisime jour de la circoncision), est une preuve de grandeur exceptionnelle. Cest pourquoi il convient que cette qualit soit profondment grave dans lme de ses descendants. Bien que D. cache habituellement les miracles et quIl et pu pourvoir les enfants dAvraham de pain et deau par des voies naturelles, Il accomplit dans ce cas des miracles vidents. Il fit descendre dans le dsert, lieu aride et dsol, le pain des nobles , la manne, comme il est crit: Tous eurent manger de ce pain de dlice (Thilim 78:25), un pain dont se nourrissent les anges (Yoma 75b), et Il changea les lois de la nature car dans lordre naturel des choses, le pain vient de la terre et la rose tombe du ciel, mais dans le dsert, le pain tombait du ciel et leau sortait de la terre (Tanhouma Beshalah 20). Dinnombrables merveilles accompagnaient la manne (Otyiot de Rabbi Akiva, Ot Aleph, Bamidbar Rabba 7), parce quAvraham aussi avait agi de faon exceptionnelle, D. la rtribu, mesure pour mesure, au-del de lordinaire. De mme quAvraham stait souci quil ne manque rien ses invits, de mme D. envoya du ciel une sorte de pain cleste ayant le got de tous les plats et de tous les mets du monde (ibid. Bamidbar), et mme des bijoux tombaient du ciel avec la manne pour les femmes (Yoma 75a), et toute femme pouvait se parer avec des perles de manne (Sifri Bahalotcha 9). Cet enseignement nous ouvre les Portes de lEntendement et nous permet de comprendre la contradiction note par le Maharsha entre deux passages talmudiques. Ils ne sont pas contradictoires! Chacun deux a un sens propre et tous deux sont les paroles du D. vivant . Il est vrai que le mrite de ses trois nobles chefs a procur tout Isral trois bienfaits, mais ce mrite ne leur aurait permis que de les recevoir de faon naturelle, sans plus. Le mrite dAvraham leur ajouta leur aspect miraculeux, au del des lois de la nature, car son comportement aussi tait hors du commun. Tu vois donc clairement que tout ce qui arrive est conforme la justice rigoureusement, autant en ce qui concerne le mrite dAvraham que celui des trois dirigeants mrites du peuple juif. Cela explique le passage cit en tte de ce chapitre: En rcompense de quon aille qurir un peu deau, lavez vos pieds les Juifs ont reu le puits de Miriam. De deux choses lune: ou bien cest le mrite de Avraham, ou bien cest le mrite de Miriam qui leur a valu le puits? Il est dit dune part quIsral reut trois bienfaits par lintermdiaire de trois dirigeants, et dautre part que ce fut grce au mrite propre dAvraham, et non pas grce leur intermdiaire. Comment le comprendre? Cest qu cette poque, Isral ne mritait pas les bienfaits que ses dirigeants Mosh, Aaron et Miriam, pouvaient obtenir. Mais en ajoutant le mrite dAvraham, mesure pour mesure, Isral reut ces bienfaits en tant que don absolu, pour lequel il nest pas ncessaire de faire des efforts, et de faon miraculeuse comme un cadeau auquel on ne sattend pas. Tel est le pouvoir du mrite des Patriarches, un mrite qui se perptue ternellement (Yroushalmi Sanhdrin 10:1, Brshit Rabba 74:9).

Parachat vayrah Enseigner son prochain pour le rendre mritant

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Avant la destruction de Sodome et de Gomorrhe, il est crit: Et lEternel dit: Tairai-Je Avraham ce que Je vais faire? (Brshit 18:17), et ensuite: Je le connais, afin quil prescrive ses enfants et sa maisonne aprs lui dobserver les lois de lEternel et de pratiquer la vertu et la justice... (verset 18). D. rvle Ses projets Avraham, non pas parce quil est vertueux, droit et saint, mais parce quil transmettra Ses lois ses enfants, sa maisonne et toute sa descendance aprs lui. Cela demande explication. D. connat les curs et les penses, comme il est dit (Yrmia 11:20): rien ne Lui est cach et rien nchappe son regard, tout est rvl devant Sa gloire . Il connat srement le fond du cur dAvraham. Qua-t-Il vu de spcial en Avraham pour dire: Je le connais, afin quil prescrive ses enfants et sa maisonne aprs lui ? Srement D. a discern en lui quelque chose dexceptionnel qui prouvait incontestablement quil allait prescrire la Loi ses enfants et sa maisonne aprs lui. Effectivement, D. a examin le fond du cur dAvraham et Il a surtout distingu son esprit de sacrifice en faveur des autres en toutes sortes doccasions et en toutes circonstances, preuve quil allait instruire ses enfants et sa maisonne. Quest-ce qui en tmoigne? Les Sages disent au sujet dAvraham et de sa femme Sarah (Brshit Rabba 24:2, 39:21): Avraham convertissait les hommes et Sarah les femmes, comme il est crit et les mes quils firent Haran (Brshit 12:5). Ils les rapprochaient de D. avec dvotion, ils les soutenaient et ils encourageaient chacun deux individuellement. De plus, Avraham a surmont avec courage et fiert la grande preuve de quitter son pays et son lieu de naissance... (Brshit 12:1), ce qui lui valut des bndictions innombrables comme il est crit (ibid. 2): Je ferai de toi un grand peuple, Je te bnirai et Je rendrai ton nom glorieux... et les Sages disent (Brshit Rabba 39:11): Tu auras des enfants, tu deviendras riche, et renomm . Y a-t-il chose plus importante que la promesse de prosprit, dune descendance viable, de richesse etc. et de bndictions sans fin? Malgr tout, Avraham na pas tenu compte de tous les bienfaits qui lui taient assurs, et il sinquitait pour tous les gens de Haran quil avait convertis. Quel bnfice peut-il tirer de toutes les bndictions que D. lui donne en partage si ces hommes se sparent de lui et retournent leurs mauvaises habitudes? Cest justement pourquoi il les a emmens avec lui en quittant Haran, afin de continuer leur enseigner la loi de D. en tout temps et en tout lieu. Avraham enseignait ses htes de passage rendre grce D. et Lui adresser leurs bndictions et non lui-mme, (Brshit Rabba 43:7), jusqu ce quil ait habitu tout le monde invoquer le Nom de D. (Sotah 10b, Yalkout Shimoni Hay Sarah 107) car la qualit essentielle dAvraham tait son abngation. Si Avraham est capable de se dvouer pour son prochain et lui enseigner avec amour la connaissance de D., il va sans dire quil enseignera cette connaissance ses propres enfants, et sa descendance aprs lui. Tous ses actes prouvent quil enseignera aussi ses enfants les voies de D. et il est possible que ce soit le sens du verset dobserver les lois de lEternel et de pratiquer la vertu et la justice . Avraham leur enseignera sans aucun doute comment transmettre cet enseignement dautres afin dobserver les lois de D., et il leur enseignera aussi comment pratiquer la justice, comme il le faisait lui-mme envers chacun, de telle sorte que son hritage spirituel aura une suite et une continuit travers les ges. Confrer du mrite aux autres est un principe bien connu. Celui qui confre du mrite aux autres par son abngation, va, plus forte raison, investir toute son me et toute son nergie dans lducation de ses propres enfants, cela est vident et ne fait aucun doute. Cest ce que disent les Sages au sujet de Rabbi Hiya: Combien grands sont les actes de Rabbi Hiya qui a agi en faveur des autres avec un don de soi sans limite, afin de leur faire connatre la volont de D., et qui a investi toutes ses forces afin que la Torah ne soit pas oublie... Son pouvoir tait tel que sa prire tait toujours entendue et il aurait pu faire venir la rdemption avant son temps (Babba Metzya 85b). Il est des gens qui servent D. de tout leur cur, de toutes leurs forces, et de toute leur me, et se sentent probablement proches de D. de toutes les fibres de leur corps, et qui pourtant ne consacrent pas de temps aux autres, car ils ne veulent que servir D. Cest une grave erreur. Un tel homme nest pas proche de D. Sil ne transmet rien aux autres, plus forte raison il ne transmettra rien ses enfants et sa descendance

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aprs lui. Quadviendra-t-il de sa Torah? Va-t-elle tre enterre avec lui? D. ne rvle pas Ses secrets un tel homme. Par contre, ceux qui procurent du mrite aux autres ont eux-mmes un grand mrite, au point que les Sages disent leur sujet (Avot V:18, Yoma 87a): Quiconque donne du mrite aux autres na pas loccasion de fauter . Leur propre mrite est grand, et celui des autres leur est attribu, leon qui nous est enseigne par Avraham. De mme quil sest sacrifi pour le bien des autres en toute occasion et dans chaque circonstance, de mme aprs sa mort, il continue tre source de mrite pour tous, car tout le monde prend exemple sur sa bonne conduite. Celui qui enseigne le droit chemin aux autres, lenseignera srement aussi ses enfants. Celui qui est dot de la capacit dapprendre a le devoir denseigner aux autres, dans le sens o il est dit (Avot II:8): Si tu as une bonne connaissance de la Torah, ne sois pas fier de toi-mme , va la propager auprs des autres. Mme si lon se moque de toi, ta rcompense sera grande. Enseigner la Torah exige une grande humilit et une annulation totale de soi, linstar dAvraham qui a dit je ne suis que cendre et poussire (Brshit 18:27). Un tel homme sexpose beaucoup dhumiliations, car au premier abord, les gens ne comprennent pas son comportement hors du commun, mais en fin de compte, ses qualits et ses vertus peuvent avoir une influence favorable, et alors ce quil dit pntre les curs et il est compris. Le mrite de tous dpend de lui. Nous lisons dans la Mishna (Avot I:1): Mosh reut la Torah au Mont Sina et la transmit Yoshoua, Yoshoua aux Anciens... Pourquoi, propos de Mosh est-il dit quil la transmise tandis qu propos de Yoshoua et de toute la ligne de la transmission orale, il est dit seulement Yoshoua aux Anciens, les Anciens aux Prophtes, etc.? Seul celui qui se sacrifie pour lautre, pour les autres, qui ne ressent aucun sentiment de jalousie et qui transmet fidlement et intgralement sa connaissance avec une grande humilit, est un homme important . Et son sujet, on parle de transmission effective. Mosh possdait toutes ces qualits. Il avait du mrite et en fit bnficier le peuple en lui enseignant la Torah. Mosh ne jalousait personne, comme il le dit Yoshoua qui se plaignait de Eldad et Meidad (Bamidbar 11:29): Tu es jaloux pour moi? Plt au Ciel que tout le peuple de D. soit compos de prophtes! Mosh dsirait le bien de tout le peuple, et il tait extrmement humble, comme il est crit (ibid. 12:3): Cet homme, Mosh, tait le plus humble de tous les hommes qui se trouvent sur terre . La Mishna indique que Mosh reut la Torah au Mont Sina , cest--dire que lhomme Mosh tait aussi humble que le Mont Sina est petit, comme il est crit (Thilim 68:17): Pourquoi, montagnes aux croupes leves, pourquoi jalousez-vous la montagne... Le Mont Sina est des plus bas, et cest ce qui lui a donn le mrite dtre choisi par D. comme lieu du don de la Torah (Yalkout Shemot 284), justement cause de son humilit. De mme, Mosh a t lu cause de sa grande humilit, et il a transmis tout ce quil avait reu de D. Yoshoua son fidle disciple. A la mort de Mosh, la Torah tmoigne de lui (Devarim 34:10): Il na plus paru, en Isral, un prophte tel que Mosh , car lui seul tait capable de transmettre toute la Torah en une transmission fidle et prcise et cest pourquoi, au sujet de son enseignement, il est dit quil a transmis la Torah. Mosh, comme Avraham, se dvouait avec amour pour le bien de tous. La Torah vit en eux et par eux, et elle ne se maintient que chez les hommes vertueux, qui la transmettent avec abngation, de gnration en gnration. Quelle est la voie suivre? Servir D. dans lintimit ne suffit pas, il faut aussi faire mriter les autres, comme Avraham qui a enseign les voies de D. ses descendants, et comme Mosh qui a transmis toutes les lois Yoshoua ben Noun, sans aucune jalousie. Celui qui pousse les autres tre mritants ne peut en aucun cas tre cause dune faute quelconque.

Ceux qui prient ne restent pas les mains vides


Il est crit (Brshit 13:13): Les habitants de Sodome taient pervers et pcheurs devant lEternel au plus haut degr , et (ibid. 18:20): La conduite de Sodome et de Gomorrhe est criante, leur perversit est excessive . Malgr cela, Avraham prie pour tenter de sauver les habitants de Sodome et de Gomorrhe au nom de la justice divine (ibid. 18:23): Anantirais-tu dun mme coup linnocent et le coupable? Peuttre y a-t-il...

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Il faut claircir plusieurs points: 1. D. sait sans doute quil ny a Sodome ni cinquante, ni quarante, ni mme un seul homme innocent. Quelle est la raison de ces longs pourparlers entre D. et Avraham? D. dit Avraham: Si Je trouve Sodome cinquante justes... Je pardonnerai... (ibid. 18:26), Je ne svirai pas si Jen trouve quarante-cinq (ibid. 28), Je Mabstiendrai pour ces quarante... (ibid. 29). D. aurait pu dire demble Avraham: Sache quil ny a pas mme dix hommes vertueux dans toute la ville . Quelle est la raison de cet change entre D. et Avraham? Nous savons quil ny a dans la Torah aucune lettre inutile, et de plus, sil y avait Sodome dix Justes D. naurait pas, pour eux, dtruit la ville, mais il ne se trouvait dans la ville aucun homme innocent. 2. Les commentateurs posent une autre question (voir Ohr Hahayim): Pourquoi est-il dit: Cacherai-Je Avraham ce que Je veux faire? (ibid. 18:17). Le mot utilis en Hbreu signifie littralement CouvriraiJe , et non Cacherai-Je . Le terme couvrir nest pas prcis. Nous savons que les gens de Sodome taient trs pervers, ils connaissaient le Matre du monde et voulaient se rvolter contre Lui (Sanhdrin 109a), ils taient avides de satisfaire leurs dsirs et leurs gots dpravs (Brshit Rabba 41:10, Tanhouma Vayra 7). Ils taient tellement dnaturs quil leur tait difficile davoir foi dans le Crateur de lUnivers, leur conduite inique mettait en danger lexistence du monde, qui est bti sur la bont (Thilim 89:3) alors queux poussaient le monde la destruction par leur licence et leur ngation de tous les fondements qui justifient son existence. Ils savaient que D. avait fait le serment, aprs le dluge, de ne plus dtruire le monde (Shavouot 36a, Brshit Rabba 34:10) et ils profitaient de cette promesse pour perptrer leurs abominations, pensant quils ne seraient pas punis. Leurs mchancets allaient jusqu dpasser la satisfaction de leurs apptits pervers. Mais ils ntaient pas pires que la gnration du dluge de laquelle il est crit (Brshit 6:13): La terre tait remplie diniquit cause deux ; ils fautaient doublement les uns envers les autres et tous envers D. Tout dabord D. dsirait cacher Avraham son intention de dtruire Sodome et Gomorrhe, parce quIl savait quAvraham allait prier afin que mme ces hommes pervers puissent se repentir, comme il est crit (Thilim 104:35): Que les pchs disparaissent de la terre . Il nest pas dit les pcheurs mais les pchs (Brachot 10a). Mais D. ne voulait pas quils soient sauvs, et Il ne leur envoya pas de prophte pour les rprimander et les corriger, comme Il lavait fait pour la gnration du dluge qui fut prvenue par Noah (Sanhdrin 108a), et comme Il fit pour Ninive, en leur envoyant le prophte Yona. En fait, les gens de Sodome et Gomorrhe taient pires que ceux de la gnration du dluge, propos de laquelle les Sages ont dit (Sanhdrin 108b, Brshit Rabba 30:7, Tanhouma Noah 5): Noah a construit larche pendant cent vingt ans, et pendant tout ce temps il les appelait au repentir. Mais ils ne lont pas cout car ils avaient perverti leurs voies sur la terre (voir Brshit 6:12) et leurs perversits remplissaient la terre. Mme si D. avait envoy un prophte rprimander publiquement les habitants de Sodome et de Gomorrhe, ils ne lauraient pas cout, car lhomme na pas une tendance naturelle donner raison un autre homme, mme envoy par D., et il est dans la nature de lhomme mchant de voler, bien quil sache sans aucun doute combien la chose est grave. Il arrive un moment o rien ne peut corriger un tel homme, au point que mme Avraham, qui son serviteur Elizer racontait les agissements des gens de Sodome et de Gomorrhe, nest pas all les rprimander et les exhorter se repentir. En fait, pourquoi? Cest quil les savait incapables de se corriger. Tout dabord, D. cacha Avraham son intention de les dtruire, car Il savait quil tenterait de sopposer ce dcret et quil allait sans aucun doute remuer ciel et terre afin de les sauver de lanantissement. Mais en disant: Tairai-Je Avraham ce que Je veux faire? , D. voulait que le plaidoyer dAvraham bnficie justement aux Enfants dIsral. SIl cache Avraham la punition des gens de Sodome et de Gomorrhe, fait qui sera connu par la suite, cest quil sait quAvraham en sera dsol et craindra que si les Enfants dIsral, eux aussi, devaient fauter, D. leur cacherait la punition. Sils sont privs de la possibilit de se corriger, le dcret sera sign et la punition trs svre. D. pensait pour ainsi dire: Il Mest impossible de cacher Avraham ce que Je veux faire Sodome, car il va prier en leur faveur et sa prire ne sera pas vaine, elle profitera ses enfants, comme il est crit tout de suite aprs (Brshit 18:19): Je le connais, afin quil prescrive ses enfants et sa maisonne aprs lui

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. Avraham veillera ce que les Enfants dIsral ne ressemblent pas aux gens de Sodome et de Gomorrhe, car ils recevront une bonne ducation et suivront les voies de leur pre. Mme sils fautent, ce nest pas par mchancet comme les gens de Sodome et de Gomorrhe, mais parce que le mauvais penchant les pousse et prend le dessus, dans le sens o il est dit: Cest le levain de la pte qui en est la cause (Brachot 17a). Sans aucun doute le peuple juif ne manque pas de Justes. Et donc D. ne peut pas cacher Avraham la punition prvue pour Sodome et Gomorrhe, car sa prire bnficiera ses enfants. Maintenant nous pouvons aussi comprendre le plaidoyer dAvraham qui demanda grce en faveur de cinquante Justes, quarante, trente, etc. D. ne lui rvla pas quil ny avait pas un seul Juste Sodome, parce quIl dsirait quAvraham continue prier pour leur survie, afin que cette prire serve ses descendants aprs lui. Sil devait se lever un accusateur contre Isral, il pourrait faire valoir le mrite de la prire dAvraham en faveur des mchants. Avraham craignait bien dveiller la colre divine cause de son insistance, mais il a continu prier en faveur des fautifs, et cette prire est pour les Enfants dIsral une assurance quils seront toujours prvenus avant dtre punis. De plus, Avraham a pri sans relche pour le nombre de Justes - il est possible que, par rapport aux autres, certains possdent quelque mrite - jusqu ce quil lui ft dit quil nexistait aucun Juste Sodome et que tous taient coupables au plus haut degr, et alors il se tut. Mais cette prire protge ses enfants, et elle a de plus le mrite de cacher au Satan, aux forces du mal, les fautes dIsral, afin quil ne puisse pas les accuser. Sil voulait les accuser, la prire dAvraham en faveur des mchants les protgerait, et laccusateur devrait cder, puisquils ne sont srement pas pires que les gens de Sodome, pour lesquels Avraham a intercd. Cest un enseignement important valable pour tous les temps. Cela nous apprend que lorsque lon prie pour sauver les mchants, cette prire protge celui qui la prononce, ou ses descendants aprs lui, des accusations du Satan. De plus, D. avant de punir, envoie au fautif des avertissements, des souffrances qui doivent lamener se repentir, comme il est crit (Ishaya 53:10): LEternel a rsolu de le briser, de laccabler de maladies et les Sages expliquent: Les souffrances sont pour le bien de lhomme (Tanna DBey Eliyahou Rabba 13, Zouta 11), et Isral corrige ses voies grce aux souffrances (Menahot 53b). En effet, D. dsire que les fautifs se repentent et se corrigent de leurs fautes, cest pourquoi Il ne leur cache pas la punition, ce qui annulerait dfinitivement la possibilit de la prire et du repentir. Maintenant nous pouvons comprendre pourquoi D. rvle Avraham ce quIl va faire. Cette rvlation est un bienfait pour Isral, tant donn quAvraham va prouver son dvouement en leur faveur. Il nous est permis de penser quAvraham avait pri en faveur des gens de Sodome bien avant que D. ne lui rvle ce quIl allait faire. Mais aprs cette rvlation, Avraham sest mis en danger en prenant le risque dveiller la colre divine contre lui-mme. Mais non, D. na pas montr de colre envers lui, au contraire, Il la laiss plaider longuement car Il dsirait que cette prire bnficie ses enfants, pour toutes les gnrations. Cest ce qui est crit: Je lai distingu, pour quil prescrive ses enfants, et sa maisonne aprs lui, dobserver la voie de lEternel, en pratiquant la vertu et la justice... (ibid. 18:19). Malgr toutes les preuves et tous les obstacles quAvraham a traverss, ses actions sont pour nous un enseignement, et donnent du mrite ses descendants aprs lui, afin quils surmontent les preuves, se repentent de leurs fautes, et servent D. avec une dvotion totale. En rsum: Le plaidoyer dAvraham en faveur des habitants de Sodome, et la rponse de D.: Tairai-Je Avraham ce que Je veux faire? ont une raison dtre. Malgr la perversit incorrigible des gens de Sodome et de Gomorrhe, Avraham pria en leur faveur et D. lui donna la possibilit de multiplier ses suppliques, afin que cette prire protge ses descendants aprs lui et fasse taire les accusations du Satan. En effet, les enfants dAvraham ne sont srement pas pires que les gens de Sodome et de Gomorrhe et ils ont, eux, la possibilit de se repentir.

Parachat vayrah Le pouvoir du repentir et de labngation

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Le pouvoir du repentir est si grand quil atteint le Trne de Gloire (Yoma 86b, Rosh HaShana 17a), et Mme les hommes les plus vertueux ne peuvent pas se tenir l o se tiennent ceux qui se repentent (Brachot 34b, Sanhdrin 99a). Sil en est ainsi, aucun ange et aucun sraphin na la possibilit daccuser celui qui par son repentir sest rapproch de D., comme on le voit dans le cas du roi Mnash, pour qui D. a creus un refuge sous Son trne, hors daccs des anges (Ruth Rabba 5:6). Lorsque D. dvoila Avraham son intention de dtruire les villes de Sodome, Gomorrhe, Adma, Tzevouyim, et Tzoar, Avraham savana et dit: Anantirais-Tu, dun mme coup, linnocent avec le coupable? (Brshit 18:23). Et la Torah rapporte les nombreuses supplications dAvraham en faveur des habitants de Sodome et des autres villes. Malgr tout, il na pas russi les sauver, D. na pas agr sa requte et les villes furent dtruites sous une pluie de soufre et de feu du Ciel. Pourtant, Loth, dont la mauvaise conduite est connue puisquil avait choisi de vivre parmi les gens de Sodome et Gomorrhe (Brshit Rabba 42:12), en apprenant que les villes allaient tre dtruites, demanda la possibilit de senfuir et de se rfugier dans un village voisin, disant aux envoys du Ciel: Cette ville est assez proche pour que je puisse menfuir l-bas et elle est peu importante, je peux my rfugier, vu son peu dimportance, et avoir la vie sauve (ibid. 19:20). Il craignait de ne pas pouvoir atteindre ce village le flau matteindra et je mourrai (ibid. 19). Lange lui rpondit: Je vais agrer ta demande, je ne dtruirai pas la ville dont tu parles (ibid. 21). Les commentateurs stonnent que la demande de Loth dpargner la petite ville ait t agre (Yeff Toar, Vayra 19:21, Meam Loez, Vayra 378): Avraham navait pas russi sauver ne serait-ce que cette petite ville et Loth, qui est fautif, a russi! Comment est-ce possible? Il faut dire que les anges ont vu en Loth une conduite irrprochable du moment o ils sont arrivs chez lui jusqu ce moment-l. Loth savait quils taient des anges (Brshit Rabba 50:2), il insista pour les accueillir dans sa maison, il leur fit prendre un dtour pour que les gens de Sodome ne sachent pas quils taient chez lui, il les hbergea, offrit de leur laver les pieds afin quon ne lui demande pas combien de temps ils taient rests chez lui et o ils avaient dormi (ibid. 4). Bien que dans la ville de Sodome personne ne pratiqut lhospitalit (ibid. 10), Loth mit sa vie en danger pour les hberger, ce qui montre combien ce devoir lui tenait cur. Lorsque les anges lui annoncrent (Brshit 19:13): Nous allons dtruire cette contre , il comprit que Sodome allait tre dtruite de fond en comble et quil nen resterait que des ruines et il courut dire ses gendres (deux de ses filles taient maries), de sortir immdiatement de la ville. Malheureusement, ses gendres se moqurent de lui (ibid. 14). Surtout, il mit sa famille en danger lorsquil dit aux habitants de Sodome qui assaillaient sa maison: De grce mes frres, ne leur faites point de mal! Jai deux filles la maison... je vais vous les amener... mais ne faites rien ces hommes... (ibid. 7-8). En fin de compte, il ne sest pas moqu des anges comme ses gendres, et il les supplia de lui donner le temps de senfuir. Les anges virent que Loth avait une grande foi en D. Les anges se sont dit: si Loth est prt risquer sa vie et celle de sa famille parce quil a foi en ce que nous lui avons annonc au nom de D. et sil fait tant defforts pour nous accueillir chez lui, cest quil a la possibilit de lutter contre le mauvais penchant et de se repentir, et mme damener dautres gens se repentir et croire en D. Crateur du monde. La preuve en est quil sait que D. est le Juge, et que la rgion va tre dvaste et les villes ananties cause des pchs commis par les habitants de Sodome et des autres villes. Et donc, sans aucun doute, lorsquil parviendra au village en question, et quil racontera que lui, Loth, un des notables de Sodome et son magistrat (Brshit Rabba 50:3) seul a survcu, ses rprimandes seront entendues, et les gens se repentiront sincrement grce lui. Cest la raison pour laquelle lange lui rpondit: Jaccde ta demande... je ne dtruirai pas la ville , cest--dire: Nous ne dtruirons pas Sodome et Gomorrhe avant que tu naies atteint le village, et si vous vous repentez de vos fautes, D. vous pargnera et ne dtruira pas ce village. Avraham navait pas russi, malgr sa prire, faire annuler le dcret de Sodome, de Gomorrhe et des autres villes, mais Loth a russi sauver la petite ville de Tzoar, car il avait le pouvoir damener ses habitants se repentir, ce qui sauva la ville entire. Le Kli Hemda (19:21-22) crit, propos du verset: Je ne vais pas dtruire la ville , que la demande de Loth fut agre dans le sens o la ville fut sauve de la destruction, seuls ses habitants furent tus et

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brls . On en trouve une confirmation car il est crit Il dtruisit ces villes... (ibid. 19:25), et Rashi explique: Les quatre villes taient bties sur un rocher et elles furent dtruites de fond en comble . Cest donc que seules quatre villes furent dtruites, Sodome, Gomorrhe, Adma, et Tzvouyim, alors que la ville de Tzoar fut pargne grce Loth. Nous savons que la ville de Tzoar ne fut pas dtruite comme il est crit (Devarim 29:22): une terre de soufre et de sel, partout calcine... ruine comme Sodome et Gomorrhe, Adma et Tzevouyim que lEternel bouleversa dans Sa colre et Son courroux . Tzoar nest pas mentionne dans ce rappel de la destruction, car elle ne fut pas dtruite, grce au mrite et au dvouement de Loth, qui avait le pouvoir damener les hommes se repentir de tout cur. Le nom mme de la ville lindique. Tzoar, est li aux mots netzar, arrt, atzira, arrt, et atzeret, rassemblement qui indique la fte du don de la Torah. Le verset (Shmouel I, 21:8): L se trouvait, ce jour-l, un des serviteurs de Shal, retenu (netzar) en prsence du Seigneur... indique ce sens puisque Rashi explique: Il tardait dans la tente dassignation o il tudiait la Torah (voir Sanhdrin 93b). Dans notre cas aussi, Loth avait fait suspendre la sentence dans lespoir de les amener se repentir et suivre les voies de la Torah, ce qui les sauva du dcret de destruction totale. Tel est le pouvoir de lhomme qui se sacrifie pour obir aux commandements. Car celui qui met sa vie en danger pour obir, ne serait-ce qu un seul commandement, prouve quil croit en D. dont la Prsence est partout, quil a foi en Lui, et mme quil regrette tout le mal quil a fait auparavant, sinon pourquoi se mettrait-il en danger pour obir ce commandement? Sans aucun doute un tel homme est appel vertueux, et son mrite a le pouvoir dannuler un dcret pour toute une ville, comme le disent les Sages (Kidoushin 40b): Quelquun qui obit un commandement fait pencher la balance du monde entier vers le mrite . De mme, le prophte Yona, se repentit et alla en fin de compte Ninive o il proclama publiquement (Yona 3:4): Dans quarante jours Ninive sera bouleverse . Lorsque les habitants entendirent cet avertissement, ils rparrent leurs fautes, comme il est crit (ibid. 3:8): Ils invoqurent D. avec ferveur et chaque homme renona sa mauvaise conduite et aux objets vols qui taient dans ses mains . De mme, Loth amena les gens de Tzoar se repentir lorsquil leur dit quil tait le seul survivant de tous les habitants de Sodome et de Gomorrhe. Les Sages disent: Raphal est lange qui amena la gurison Avraham et qui fut envoy pour sauver Loth (Babba Metzya 86b, Brshit Rabba 50:2). Mais nous savons quun mme ange nest pas charg de deux missions (Brshit Rabba 50:2). De plus, D. ne manque pas de serviteurs, comme il est crit (Thilim 104:4): Il fait des vents Ses messagers, des flammes ardentes Ses ministres , que Rashi (ad. loc.) explique: Mme les vents et les flammes peuvent faire la volont de D. et donc, pourquoi nenvoyer quun seul ange pour ces deux tches? Aucun ange ne dsirait sauver Loth, car il tait tout aussi fautif que les habitants de Sodome, et il ny avait personne pour linnocenter si ce nest Avraham qui savait queffectivement il tait capable de se repentir et damener une ville entire se corriger. Cest lui qui la protg. Cest pourquoi le mme ange, envoy pour gurir Avraham, est all la demande dAvraham sauver Loth, et cest ce que disent les Sages (Brshit Rabba 50:11): Sauve-toi vers la montagne , cest--dire par le mrite dAvraham qui est compar une montagne, tu seras sauv . Avraham avait la possibilit de prier pour que son neveu Loth au moins soit sauv, car le Juste peut annuler un dcret , et le Juste demande et D. ralise sa demande (Moed Katan 16b). Cest pourquoi Raphal, qui a guri Avraham, a aussi sauv Loth.

La foi en D., source des bndictions


Il est crit (Vayikra 18:3): Ne vous conformez point leurs lois , et encore (ibid. 20:23): Nadoptez point les lois des nations . La Torah vient nous enseigner notre devoir de nous distinguer des nations du monde dans nos voies et notre conduite, de nous garder de les imiter ou dadopter leurs lois et leurs coutumes. Bien quil ny ait aucune diffrence physique entre le Juif et le non-Juif, D. a voulu les diffrencier par le signe distinctif de lAlliance contracte avec Avraham, comme il est crit (Brshit 17:2): Jtablirai

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Mon alliance entre Moi et toi , cest pourquoi tout descendant dAvraham doit tre spar des nations en vertu de cette Alliance, et se distinguer du non-Juif dans tout ce quil fait. Avraham, le pre du peuple juif, a profondment ancr dans le cur de ses descendants cette diffrence, par une foi en D. base sur la connaissance et qui sexprime par des actes de bienveillance, sans espoir de contrepartie (Voir Rashi Brshit 47:29), de mme que celui qui donne un pauvre ne pense pas que ce pauvre lui rendra la pareille. Cest ce qui est crit propos dAvraham (Brshit 15:6): Il eut foi en D. et ceci lui fut compt comme un mrite . La foi est considre comme un mrite quand elle ne repose pas sur lespoir dune rcompense. Il est dit des Juifs quils sont croyants, fils de croyants (Shabbat 97a), en cela ils sont diffrents des autres nations, comme le disent les Sages (Pessikta Rabba 15:5): Isral est diffrent de toutes les autres nations par ses murs, ses vtements, son langage et (Shir HaShirim Rabba 2:10): Isral en Egypte avait foi en D. avant mme davoir entendu Sa voix, comme il est crit (Shemot 14:31): Ils eurent foi en D. et en Son serviteur Mosh . Nous trouvons la mme chose chez Avraham et Loth, le fils de son frre, qui tous deux vcurent sous le mme toit. Lun tait vertueux, parfait, et fidle dans son service de D., lautre, Loth, stait rendu fautif en se liant damiti avec les habitants de Sodome et de Gomorrhe et en sadonnant aux vanits de ce monde, au point que les Sages remarquent, concernant le verset (Brshit 13:14): LEternel dit Avraham aprs quil se fut spar de Loth... que tant que Loth tait avec lui, D. ne pouvait pas Sadresser Avraham (Tanhouma Vayetz 10), et cest seulement aprs que Loth se fut spar dAvraham que D. put lui rvler Sa parole . Nous voyons cette mme diffrence entre Yaakov et Essav. Leurs voies taient spares, celuici est vertueux et celui-l est mchant (Brshit Rabba 63:10), car Yaakov tait un homme parfait, qui vivait sous la tente (Brshit 25:27) tandis que Essav tait un habile chasseur, un homme des champs (ibid.), qui se rebellait contre D. et ne recherchait que les plaisirs, description destine nous enseigner que le Juif et le non-Juif sont diffrents dans leurs modes de vie, celui-ci a foi dans le vrai D. et celui-l place sa foi dans les vanits illusoires et transitoires de ce monde. Ajoutons une explication concernant lalliance contracte entre Avraham dune part et Avimelech et Kipol, le gnral de son arme, dautre part. Il est dit ce sujet (Brshit 21:28): Avraham mit de ct sept brebis du btail , cest--dire quil contracta une alliance avec Avimelech mais resta de ct , spar de lui. Dans le mme sens, il est crit: ils conclurent tous deux un trait (ibid. 21:27). Malgr cela ils restrent tous deux , spars, le Juif et le non-Juif, Avraham et Avimelech, pour nous enseigner quil est possible de conclure un trait de paix avec le non-Juif condition de rester spar et diffrent de lui, de ne pas lui ressembler, de ne pas imiter ses manires, et de ne pas esprer en lui. Cela nous explique le sens de ces sept brebis du btail . Les brebis font allusion Isral qui est compar une brebis, une brebis parmi soixante-dix loups (les soixante-dix nations du monde) (Pessikta Rabbati 9), et le nombre sept fait allusion au Shabbat, le septime jour o D. Sest repos de luvre de la cration (Shemot 20:11), ce qui signifie que lon peut sans doute vivre en paix avec le non-Juif, mais en ce qui concerne les commandements, comme lobservance du Shabbat qui quivaut tous les autres commandements de la Torah (Shemot Rabba 25:16), il faut placer les sept brebis part, mettre Isral part des autres nations car Cest un peuple qui vit solitaire et qui ne se confondra pas avec les autres nations (Bamidbar 23:9). Sanctifier le Shabbat tmoigne de notre foi que D. a cr le ciel et la terre et tout ce quils contiennent en six jours et que le septime jour, D. se reposa de toute Sa cration. Cest cette sparation qui fait la diffrence entre Isral et les nations du monde. Telle est la diffrence entre Avraham et Loth. A propos dAvraham, il est dit (Brshit 18:2): Il leva les yeux et vit trois personnages debout devant lui . Il vit les trois anges venus lui annoncer la naissance dYitshak et sa propre gurison, comme des personnes ordinaires, et mme sous forme de trois nomades arabes (Babba Metzya 86b, Brshit Rabba 48:9, Yalkout Vayra). Avraham possdait la saintet dun homme qui a foi de tout son cur et de toute son me, il tait comme lgal des anges, au point que les Sages disent (Brshit Rabba 82:7): Les Patriarches, et Avraham en tte, sont le support de la Prsence Divine , cest pourquoi ces anges clestes lui apparurent comme des hommes, des Arabes, des hommes semblables lui.

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Mais propos de Loth il est crit (Brshit 19:1): Les deux anges arrivrent Sodome le soir, Loth tait assis la porte de Sodome . Cest qu Loth, dont les facults et la saintet taient moindres, et dont les fautes taient grandes puisquil avait choisi de sinstaller en compagnie des gens de Sodome et de Gomorrhe, les visiteurs apparurent comme des anges (Brshit Rabba 50:3) alors qu Avraham, dot de saintet suprme et de grandes facults, ils apparurent comme des hommes. Cest une chose tonnante. Ils apparurent Avraham comme des hommes, des Arabes, ce qui ne la pas empch de croire tout ce quils lui dirent et de savoir que leurs paroles taient dictes par D., au point de prier de tout son cur pour sauver les cinq villes de la destruction divine, tant la foi dAvraham en D. tait grande, ce qui prouve quil tait parfait et irrprochable. Nous avons l tmoignage indiscutable de ce que la Torah veut nous enseigner la vraie foi, car toutes les souffrances et toutes les fautes sont causes par un manque de foi et une croyance errone dans les opinions et les lois des nations, ainsi que la peur de ce quelles vont penser et dire de nous... tout cela cause de la faiblesse humaine, du mauvais penchant, qui loigne lhomme de sa foi en D. le Tout-Puissant. Quiconque se trouve dans la peine ou proccup par un problme, va prier avec une concentration toute particulire, et avec une grande foi afin que sa prire soit entendue. Si sa prire est effectivement agre, combien cet homme sera heureux de voir que ses vux se sont raliss! Combien il faut donc se dsoler quon ne prie pas chaque jour avec une telle intensit et une telle foi! Nest-ce vraiment que lorsque lon souffre quil faut prier avec intensit, sachant que lon sera exauc? Lhomme peut voir ses demandes exauces chaque jour, sil prie avec intensit, avec motion, en vidant son cur avec une foi pure et simple. Le manque de foi provient du mauvais penchant qui trouble lhomme et tente de le priver de son me. Il faut le vaincre comme il est dit: Ils eurent foi en D. et en Mosh Son serviteur (Shemot 14:31), et cest alors quun tre reoit toutes les bndictions et que tous ses dsirs se ralisent. Quil en soit toujours ainsi!

Le comble de la perfection, tre pur et sans trace de pch


Il est crit (Brshit 21:8): Lenfant grandit et il fut sevr et Avraham fit un grand festin le jour o lon sevra Yitshak . Selon une certaine opinion (Brshit Rabba 53:14), Yitshak avait treize ans lorsquil fut sevr du mauvais penchant et que le bon penchant le saisit , car le bon penchant ne pntre lhomme que lorsquil atteint lge de raison (Kohlet Rabba 4:15, Avot DRabbi Nathan 16:2, Zohar I 165b). Selon une autre opinion, il fut sevr du lait de sa mre lge de deux ans. Il faut expliquer pourquoi Avraham na fait un festin que lorsquYitshak atteignit lge de deux ans, ou de treize ans, et non pas le jour de la circoncision de son fils, car ce jour-l prcisment, la joie est grande dexcuter ce commandement? Les Sages remarquent (Midrash Lekach Tov 21:8) que le mot HiGaML, sevr, est compos des lettres H qui a la valeur numrique 5, et Guimel qui a la valeur numrique 3, qui ensemble font 8, le huitme jour, celui de la circoncision (MaL), ce qui implique que ce jour-l aussi Avraham donna un grand festin. Pourquoi nest-ce pas dit explicitement dans les versets? Cest la question pose par Imrey Yehezkiel, qui ajoute quapparemment le mot et il grandit est superflu, de mme que la fin du verset le jour o lon sevra Yitshak et il aurait suffit dcrire Et lenfant fut sevr et Avraham fit un grand festin . Il est tonnant quAvraham nait pas marqu le jour o lui-mme contracta lalliance par un grand festin. Il y a cela deux raisons: 1) Pour que les gens ne se moquent pas de lui et ne le mprisent pas, car il tait vieux et se mettait en danger. 2) Lorsquil se circoncit, il souffrait et il ne pouvait pas soccuper lui-mme des invits et les servir comme il avait lhabitude de le faire, et il en aurait t trs pein. Il ne fit donc pas de festin pour lui-mme. On peut donner une autre explication au fait de savoir pourquoi il fit un festin le jour o son fils Yitshak fut sevr, et non pas le jour de sa circoncision, jour de grand bonheur.

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Il faut dire que lessentiel du sevrage de lenfant a lieu lorsquil est accompli et net de toute faute. Cest le sens de et lenfant grandit et il fut sevr , car le but essentiel de lhomme est de parvenir la perfection en toutes ses qualits tout en restant pur comme un enfant innocent, dont les Sages disent (Shabbat 109b) quil ne connat pas le got de la faute. Cest effectivement une chose merveilleuse. Tel tait Yitshak. Il grandit en ge, devint homme, et pourtant il tait rest comme un enfant, intgre dans toutes ses qualits et ignorant du pch. Bien que vivant avec Ismal il na pas imit son comportement (voir Brshit Rabba 53:15). Cela est exceptionnel et dnote une grande perfection. Lexemple dYitshak montre que lhomme vertueux peut vivre avec le mchant sans imiter ses mauvaises manires. Nous retrouvons la mme chose plus tard chez son fils Yaakov qui vivait avec Essav et avec Laban et ne suivait pas leurs mauvaises voies. Il tudiait la Torah dans les tentes de Shem et Evr (Brshit Rabba 63:15), et il dit Essav Jai vcu avec Laban... signifiant: Jai vcu avec Laban et jai observ les six cent treize commandements de la Torah et je nai pas imit sa mauvaise conduite (Midrash Hagada Brshit 32:5). Cela nous permet de comprendre pourquoi Avraham fit un grand festin le jour o Yitshak fut sevr. Il voyait bien que son fils tait parfait et lui ressemblait par toutes ses qualits et toutes ses vertus. Son intgrit tait parfaite et la Prsence Divine ne le quittait pas. Avraham convia tout le monde ce festin, afin que tous puissent voir que cet homme dj adulte tait pur comme un enfant, et tirent une leon de sa conduite. De plus, Avraham voulait faire taire les jaloux et les mauvaises langues qui disaient que Sarah avait conu Yitshak dAvimelech (Agadat Brshit 37:2, Brshit Rabba 53:10, Yalkout Shimoni Vayra 93), ou qui simaginaient quYitshak - loin de nous cette pense - tait tout aussi mchant quIsmal, et que les enfants dAvraham nhriteraient pas de la terre dIsral puisquils ne le mritaient pas. Mais Avraham fit taire leurs calomnies et prouva publiquement au monde entier quYitshak tait bien son fils, quil tait parfait et saint et quen aucun cas un tel enfant ne pouvait tre le fils dAvimelech. Ce que nous disons est indiqu dans le verset. Les dernires lettres des mots vaygamel vayass Avraham (il fut sevr et Avraham fit) forment le mot shalem - parfait. Avraham offrit ce festin lorsquYitshak atteignit la perfection. En quoi consistait cette perfection? Les premires lettres des mots gadol beyom higamel eth Yitshak (un grand festin le jour o lon sevra Yitshak) ont la mme valeur numrique que le Nom de D. Ehyh (D. sera) pour signifier que lorsque le Nom de D. est grav dans le cur de lhomme, lorsquil est attach D. quotidiennement par lexcution des commandements, il parvient la perfection et la Prsence Divine laccompagne. Cest ce sujet que les Sages disent (Derech Eretz fin du chapitre 2): Lorsque Isral fait la volont de D., Il rgne dans le septime Ciel et Il ne sloigne pas de Son monde , cest--dire quIl rgne sur nous, nous protge et nous accorde la prosprit. Les Sages ont dit (Mguila 9a, Rashi ad. loc.): Lorsque Yitshak est n, lexil a commenc, ctait le commencement du dcret: Ta descendance sjournera sur une terre qui nest pas la sienne (Brshit 15: 13), jusqu la sortie dEgypte du peuple dIsral. Les Midrashim nous enseignent que les Enfants dIsral observaient le Shabbat en Egypte (Shemot Rabba 22:5, Mechilta Beshalah, 15:25), ils pratiquaient aussi la circoncision, et cest ce qui les a sauvs (Pessikta Zouta Shemot 6:6). De plus, ils reurent le commandement des Tphilines prcisment au moment de leur sortie dEgypte. Nous constatons que tout cela est inclus dans le Nom de D. Ehyh, car cest par ce Nom quils furent sauvs dEgypte, comme il est crit (Shemot 3:14): Tu parleras ainsi aux Enfants dIsral: Ehyh ma envoy auprs de vous. Ce Nom a la valeur numrique de vingt et un, correspondant trois choses: 1) Les six jours de la semaine o lon porte les tphilines. 2) Le Shabbat qui est le septime jour de la semaine. 3) La circoncision, qui se fait le huitime jour aprs la naissance. Six, plus sept, plus huit font un total de vingt et un. Avraham enseigne tout le monde que le but principal de lhomme est dtre attach D. par les Tphilines, le Shabbat et la Milah, qui sont les fondements de la perfection, et par le mrite de ces commandements nous sommes sauvs de toute dtresse. Dans le verset Avraham fit un grand festin , les 3 premires lettres

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du mot MiShT, festin, indiquent la Milah, le Shabbat, et les Tphilines. Ce niveau de perfection acquis par Yitshak put tre constat par tous. Comment peut-on parvenir la vraie perfection? Celui qui croit en D. ne porte pas atteinte limage de D. dont un autre homme est porteur, car ce serait porter atteinte D. Lui-mme, comme il est dit (Tikouney Zohar 18:37b): Honorez lapparence du Roi . La mdisance reprsente une atteinte limage de D. et la dtruit. Avraham corrigea ses contemporains qui colportaient des calomnies contre lui en disant quYitshak ntait pas son fils et que Sarah lavait conu avec Avimelech. Il prouva tous quYitshak tait parfait, quil tait son fils, car sil en tait autrement, comment pouvait-il tre parfait? Le mot Hayled, lenfant, a la valeur numrique de quarante-neuf, indiquant les quarante-neuf portes de la saintet et de la perfection auxquelles Yitshak tait parvenu. Cest alors quAvraham fit un grand festin pour ses contemporains, un festin o furent invits tous les grands de son temps (Brshit Rabba 53:14, Yalkout Shimoni Vayra 93), afin de leur faire savoir que la circoncision, le Shabbat et les Tphilines ne sappliquent qu sa descendance, comme il est dit propos des Tphilines (Shemot 13:9): Ils seront un signe sur ton bras - ton bras toi prcisment. Lorsque nous plaons les Tphilines, nous disons (Osha 2:21): Je tai fianc moi pour toujours , ils sont le lien entre Isral et D. A propos de la Milah, il est dit (Shabbat 137b): Il a marqu ses descendants du signe de lAlliance sainte - la circoncision ne concerne que les descendants dAvraham, dYitshak et de Yaakov, les Enfants dIsral (Tossafot, Menahot 53b). Nous apprenons aussi (Ndarim 31b): Seuls les non-Juifs sont appels incirconcis , comme il est crit (Yrmia 9:25): Tous les peuples sont incirconcis car la Milah ne sapplique qu Isral comme D. le dit Avraham (Brshit 17:7) Jtablirai Mon alliance entre Moi et toi, et ta descendance aprs toi . De mme le Shabbat ne concerne quIsral, comme il est crit (Shemot 31:17): Entre Moi et les Enfants dIsral cest un signe ternel , et un don Isral (Shabbat 10a).

Le repentir et les vertus forment cran contre le malheur


Il est crit dans notre section (Brshit 21:9): Sarah vit le fils dHagar lEgyptienne, que celle-ci avait enfant Avraham, se livrer des railleries... . Le mot metzahek indique quil se livrait lidoltrie, linceste et au meurtre (Rashi, Brshit Rabba 53:15). Ce qui montre quIsmal commettait tous ces crimes. Il faut expliquer ce Midrash. Il est crit propos dIsmal (ibid. 21:17): D. entendit lappel de lenfant slever de lendroit o il gisait , ce qui nous enseigne que chaque personne est juge en fonction de ses actes du moment (Rosh HaShana 16b). Quest-ce dire? Les Sages racontent (Echa Rabba 2:5, Tanhouma Vayetz 5): Lorsque les enfants dIsral furent envoys en exil ( Babel), ils eurent trs soif et ils demandrent aux enfants dIsmal un peu deau boire. Les Ismalites leur donnrent manger du poisson sal, et ensuite des gourdes gonfles dair. Lorsquils voulurent boire de ces gourdes, lair remplit leur corps et ils en moururent . Lorsque D. voulut sauver le jeune Ismal qui tait en train de mourir de soif, les anges Lui dirent: Les descendants de cet Ismal vont lavenir faire mourir Tes enfants de soif et Tu lui sauves la vie? D. leur demanda: A cette heure, est-il coupable ou innocent? Ils rpondirent: Il est innocent! Cest pourquoi, dit D., Je ne le juge pas en fonction de ses actes futurs, mais en fonction de ce quil est maintenant, et maintenant il est innocent Nous avons ici le tmoignage qu ce moment-l Ismal tait innocent, mais plus haut nous avons vu quil tait coupable didoltrie, dinceste et de meurtre, et cest pourquoi Sarah la renvoy. La Torah vient nous enseigner ici que Rien ne rsiste au repentir (Yroushalmi Pah 1:1), que Les portes du repentir sont toujours ouvertes (Echa Rabba 3, Soucota ), et Combien grand est le pouvoir du repentir qui parvient jusquau Trne divin (Yoma 86a, Rosh HaShana 17a). Aucun ange na le droit daccuser celui qui se repent puisque D. le reoit pour ainsi dire bras ouverts, dans le sens o il est dit Ta droite est tendue pour accueillir les repentants (Pirkey DRabbi Elizer 33), et Il accepte son repentir en lui faisant une place sous Son Trne de gloire. Celui qui se repent est semblable un nouveau-n, tout comme celui qui se convertit (Ybamot 22a, Bechorot 47a), et toutes ses fautes passes lui sont pardonnes.

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Cest ce que D. dit aux anges: Est-ce quIsmal est maintenant innocent ou coupable? Il est vrai quil jouait (le mot metzahek a le sens de jouer) avec Yitshak lidoltrie, linceste et au meurtre, mais cet Ismal-l qui, sans aucun doute, avait appris la Torah avec son pre Avraham, se trouve maintenant dans le dsert, sur le point de mourir de soif. Il est certain quil regrettait toutes ses fautes, et son repentir fut agr. Il est donc maintenant innocent aux yeux de D. ce qui prive les accusateurs de leurs arguments. Si Ismal sest repenti et que son repentir a t accept par D., pourquoi les Sages ne donnent-ils pas Ismal en exemple du pouvoir du repentir pour montrer que l o se tiennent les hommes repentants, les hommes les plus parfaits ne peuvent pas se tenir (Brachot 34b, Sanhdrin 99a)? Ils donnent plutt lexemple du roi Mnash pour nous enseigner que celui qui se repent atteint le monde venir (Sanhdrin 102b, 103a). D. a accept la prire de Mnash et son repentir, et Il lui a creus un refuge dans le Ciel et une place sous le Trne divin, mais Ismal na-t-il pas prcd Mnash de plusieurs centenaires? Mnash tait le fils de Hizkya, roi de Jude. Son repentir fut accept et les Sages prfrent donner lexemple dun Juif repenti plutt que celui dun non-Juif comme Ismal. De plus, le repentir dIsmal eut lieu avant le don de la Torah. Lorsque la Torah fut donne, les non-Juifs, et parmi eux les Ismalites, perdirent, comme on sait, le privilge du repentir. D. offrit la Torah tous les peuples avant de la donner Isral, mais ils lont refuse (Yalkout Shimoni Shemot 286). De plus, propos du verset: Il se lve et la terre vacille, Il regarde et fait sursauter les peuples (Habakouk 3:6), les Sages remarquent que D. voit que les peuples nobservent mme pas les sept commandements que les Enfants de Noah ont pris sur eux, cest la raison pour laquelle ils sont privs de la terre (Babba Kamma 38a, Yalkout Shemot 286). Il est donc certain que ces peuples avaient aussi refus de se repentir de leurs crimes et ils sont impardonnables. Quauraient-ils vraiment perdu sils avaient accept de recevoir la Torah et de se repentir comme Ismal, fils dAvraham. Et pourtant, ils sont rests attachs leurs fautes, et ils furent privs de la possibilit de se repentir cause de leur enttement. Les Sages donnent donc lexemple de Mnash, un roi Juif qui sest repenti, car les non-Juifs, pour le moment, nont pas cette possibilit. Ismal eut le privilge dtre sauv ce moment-l, bien que, plus tard, ses enfants aient d se rendre coupables envers Isral, ce qui enseigne que lhomme est jug en fonction de son tat du moment . Ismal fut circoncis lge de treize ans, comme il est crit (Brshit 17:25): Et Ismal avait treize ans lorsque la chair de son excroissance fut retranche . Ce quil fit avec joie et sans hsitation (Brshit Rabba 55:4) et cest ce privilge qui la protg (Zohar II 32a). Pour avoir eu ce mrite, D. lui promit quil engendrerait douze princes et deviendrait un grand peuple (ibid. 17:20). Bien quidoltre et trompeur, il a tout de mme marqu ses descendants du sceau sacr (Shabbat 137b), et celui qui respecte cette marque est appel saint (Zohar I 59b). Cest ce que D. fit valoir: En ce moment, est-il juste ou coupable? Cest--dire que maintenant il porte sur lui le mrite de la circoncision qui est Ma signature, et les anges rpondirent: Cest vrai! Cest pourquoi D. leur dit: Je ne juge lhomme quen fonction de son tat du moment, et en ce moment il sanctifie Mon Nom dans le monde, il sest circoncis lge de treize ans sans hsiter, et donc Je dois raliser Ma promesse et lui donner douze princes, le mrite de la circoncision le protge. Cela nous montre combien ce commandement est important, et comment il a le pouvoir de sauver lhomme de la mort. Lobservance de ce commandement exprime une sanctification publique du Nom de D. Mme si la personne est trs fautive, D. est patient et attend son repentir. Lobservance dun seul commandement protge et sauve le coupable (Souca 21a), parce que pratiquer ne serait-ce quun seul commandement veille des sentiments de regrets et de repentir sincres et le dsir de revenir D. totalement, ce qui permet par la suite de continuer sanctifier le Nom de D. par lobservance de beaucoup dautres commandements. Les Sages enseignent (Babba Bathra 16b): Ismal sest repenti la mort dAvraham, puisquil a permis Yitshak, plus jeune que lui, de marcher devant , comme il est crit (Brshit 25:9): Il fut enterr par Yitshak et Ismal ses fils . Cest une leon de conduite pour la vie, valable pour tout homme. Ismal fut circoncis lge de treize ans, ce quil fit avec joie et sans hsitation. Ce mrite le protgea et le sauva, un moment de grand danger, des accusations des anges. Il accorda son frre Yitshak la priorit lors de lenterrement de leur pre Avraham, faisant savoir publiquement quil acceptait Yitshak comme hritier lgitime dAvraham, comme D. la fait savoir (Brshit 21:12): Cest la postrit dYitshak qui portera ton nom et Ismal sera son second. Et la Torah ajoute (ibid. verset 13): Le fils de lesclave aussi, Je le ferai devenir une grande nation

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. D. a vu, et Il a montr aux anges qu la fin de la vie dAvraham, Ismal ferait le bien, et Il la sauv de leurs accusations. Cela montre quil faut sefforcer dobserver les commandements et sanctifier le Nom de D., car nous ne savons pas quel mrite nous protgera en un temps de malheur, et en particulier la fin de notre vie, afin de pouvoir mourir en tant que juste parfait. Tu nauras pas de dieu tranger Nous pouvons expliquer dune autre faon les jeux idoltres dEssav. En Hbreu lexpression il jouait ne signifie pas quil tait effectivement idoltre et il ny a aucune preuve quil ait pratiqu lidoltrie. Il construisait des autels, attrapait des sauterelles et les sacrifiait... (les lettres du mot MTsaHeK, jouait, sont les premires lettres des mots Tsad, chasser, Hagavim, sauterelles, Makriv Korban, offre des sacrifices) (Brshit Rabba 53:15). Le commentateur Etz Yossef (ad. loc.) explique tuer des sauterelles de cette faon ne correspond aucune pratique idoltre, et il ne faisait que jouer . Mais une telle conduite est contraire lesprit de la Torah et la volont de D., et toute pratique trangre la Torah et aux commandements est de lidoltrie . Cest pourquoi Sarah craignait que son fils Yitshak, consacr D., napprenne dIsmal une conduite contraire lesprit de la Torah - et pas ncessairement la pratique de lidoltrie en soi. Il est certain que personne ne pouvait souponner Ismal didoltrie, car dans la maison dAvraham, qui fut lui-mme jet dans la fournaise ardente pour avoir bris les idoles de son pre (Brshit Rabba 38:19), il navait pas la possibilit de faire ouvertement des choses contraires la Torah, telles bien entendu lidoltrie, contre laquelle Avraham avait lutt toute sa vie. Malgr cela, Sarah qui tait le pilier du foyer et de qui dpendait lducation des enfants puisque lducation dpend de la femme (Brachot 17a), voyait tout ce qui se passait autour delle et elle accordait une attention toute particulire lducation de son fils Yitshak. Elle sentit quIsmal avait des dfauts, quil tait loin de servir D., et elle craignait de plus en plus pour lavenir de son fils. Il est possible que ce qui nest aujourdhui quune mauvaise tendance, faible et latente, puisse se dvelopper et susciter par la suite beaucoup dautres penchants indsirables. Quen sera-t-il dYitshak? Peut-tre sera-t-il influenc par lexemple de son frre? Pour cette raison, Sarah tait trs exigeante sur la conduite dIsmal et demanda Avraham de le renvoyer. Mais Avraham, qui ne se rendait pas compte que la conduite dIsmal tait mauvaise, vit dun mauvais il le renvoi dIsmal, comme il est crit (Brshit 21:11): La chose dplut fort aux yeux dAvraham cause de son fils . D. lui dit de ne pas avoir de peine et tout ce que Sarah te dit, obis sa voix (ibid. 12), car elle pressent les dfauts dIsmal que les autres ne ressentent pas, et il est vrai quil finira par pratiquer effectivement lidoltrie, tant une faute entrane une autre faute (Pirkey Avot IV:2). Nous comprenons prsent ce que disent les Sages (Echa Rabba 2:5): Lorsque Ismal gisait sans connaissance dans le dsert, D. voulut le sauver, mais les anges accusrent ses descendants qui allaient lavenir faire mourir de soif les Enfants dIsral et par consquent il ne mritait pas dtre sauv. Les anges ne lont pas accus didoltrie, car en fait, il ne la pratiquait pas. Sinon, il naurait pas t jug innocent. Mais il avait de mauvaises tendances, contraires lesprit de la Torah, et un comportement inconvenant qui nest pas proprement parler de lidoltrie et ne le rend pas passible de la peine de mort. Ce nest quafin de lempcher davoir une influence sur Yitshak que Sarah rsolut de le chasser. Cest la raison pour laquelle les accusations des anges portent sur les actes de sa descendance. tant donn quelles ne concernent pas Ismal lui-mme, il ny a pas lieu de le condamner mort. Combien chacun doit faire attention sa conduite, surtout lorsquil est dans la maison dtude, en compagnie dautres jeunes gens, et veiller ce quaucun comportement, mme dans les choses les plus insignifiantes, naille lencontre de lthique de la Torah, de la prire et du service de D. de peur davoir une influence nfaste sur son entourage. La preuve en est qu cause dun seul dfaut, Ismal fut chass de la maison dAvraham, afin quYitshak ne soit pas influenc par son tat desprit. En fin de compte cet tat desprit, mme sil reste latent, finit par tre la cause de fautes graves sil nest pas corrig temps, et stend invitablement aux autres. Les Sages disent (Shabbat 114a): Un tudiant de la Loi qui a une tache sur son vtement mrite la mort comme il est dit (Mishley 8:36) ceux qui Me hassent aiment la mort - il ne faut pas lire ceux qui me

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hassent , mais ceux qui causent le dgot de Moi et me font har . Pourquoi les Sages expriment-ils une telle svrit en exagrant la gravit dune tache sur le vtement? Cest que la tache indique un dfaut, elle entache lme. Si ltudiant de la Loi ne corrige pas ce dfaut, en fin de compte, il commettra beaucoup de fautes, des fautes plus graves qui elles, sont passibles de la peine de mort. Il faut le rendre attentif corriger tout de suite ce dfaut, alors quil en est encore temps. Ajoutons le commentaire de Rashi (ad. loc.): Ils causent le dgot de Moi aux yeux des autres, qui disent: malheur ceux qui tudient la Torah et qui sont sales et mprisables, ce qui les amne har la Torah (voir aussi Rambam, Halachot Dot V:9, Halachot Yessodey HaTorah V:11). Selon le Rambam, cest une profanation du Nom de D. qui poussera les autres commettre des fautes parce quils ont la haine de la Torah. Les commentateurs du Rambam ont expliqu que son intention tait de souligner que la faute est appele une tache. Cest ce qui est dit (Zohar III 101b): lme, le vtement et mme le corps de celui qui tudie la Torah lenveloppent jusquau jour de sa mort, ou jusquau jour o il se repent compltement de ses fautes . Il ne suffit pas ltudiant de la Torah de se repentir dans lintimit, il doit reconnatre ses fautes publiquement, afin que tous ceux qui lont vu fauter voient son repentir. Pourquoi cela? Cest que, lorsque celui qui tudie la Torah commet une faute, mme si personne nen est tmoin, il suscite un ange accusateur (Avot IV:11, Zohar III 17a) qui proclame: Je fus cr par la faute dun tel, et le pouvoir de cet ange est si puissant quil peut polluer lair autour du coupable et le souiller . Beaucoup sont induits en erreur par cette souillure (Zohar I 53b) et commettent la mme faute que cet tudiant de la Torah. Tant que la tache nest pas efface, elle affecte de plus en plus de gens. Cest ce que dit le Rambam: les gens les considrent avec dgot, car ils entranent dautres mal agir. Mais lorsque ltudiant de la Torah se repent publiquement, le pouvoir de cet ange est ananti, et avec lui la pollution quil rpand, et tous ceux qui ont faut cause de lui se repentent aussi de tout cur. Lorsque Sarah distingua dans le comportement dIsmal une petite tache, il va sans dire quelle le lui reprocha, mais il ne la pas coute, et cest pourquoi, pour lempcher davoir une influence sur Yitshak, elle navait pas dautre choix que de le faire renvoyer. Elle a bien fait, puisque D. a agr sa dcision, car elle a prvu les consquences lointaines de cette conduite. Mais malgr tout, D. a sauv Ismal de la mort lorsquil tait dans le dsert, car lhomme nest jug que sur la base de son tat du moment (Rosh HaShana 16b, Brshit Rabba 53:19, Zohar I 121b) comme il est crit: D. a entendu la voix de lenfant dans ltat o il est (Brshit 21:17), et ce moment-l il tait innocent. Nous apprenons l un grand principe. D. ne considre ni le pass ni lavenir, mais ltat du moment. Il juge lhomme dans son tat prsent, sans prendre en considration ce quil fut ou ce quil sera, mais seulement ce quil est! Le saint Rabbi Elimlech de Lyzansk, auteur de Noam Elimlech remarque: Sil en est ainsi de la servante (Hagar), plus forte raison de la matresse (Sarah), car Rosh HaShana les Juifs plaident devant D. et en ce jour, ils dclarent: nous sommes tous ensemble runis dans les synagogues et nous prions, nous dversons nos prires silencieuses devant notre Seigneur, nous revenons Toi dans un repentir sincre, nous sonnons du Shofar comme Tu nous las command, veuille donc nous juger dans ltat o nous sommes, entirement occups faire Ta volont. Si Tu as entendu la prire dIsmal, le fils de la servante Hagar,et que Tu las jug en fonction de son tat du moment, sans considrer ce quil avait fait avant ou ce quil ferait par la suite car il sest repenti, plus forte raison juge-nous en fonction de ce moment mme, o nous nous repentons sincrement, o nous faisons ce que Tu nous as ordonn, sans tenir compte de ce qui fut ou de ce qui sera . Sans doute, D. entend notre prire, et effectivement Il nous juge Rosh HaShana en fonction de notre tat du moment, sans considrer nos actes passs ou futurs, ni ce que nous avons fait, ni ce que nous ferons, et Maintenant, nous nous repentons de nos fautes (Brshit Rabba 21:6, 38:14). Ajoutons cela que les mots baasher hou sham (dans ltat o il est) dits propos dIsmal, compts avec le nombre attribus aux lettres, ont la mme valeur numrique que les mots Rosh HaShana , cest dire qu Rosh HaShana les Juifs sont considrs comme Justes, et D. les juge en fonction du moment prsent.

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Dans Sa grande misricorde et Sa grande bont envers nous, Son peuple Isral, D. nous a donn un argument puissant lorsquIl entendit la prire dIsmal, fils dHagar, dans ltat o il tait , car de mme quIl a entendu la prire dIsmal, Il entend les supplications dIsral. A Rosh HaShana, D. entend nos pleurs et nos prires, dans le sens o il est dit: Pour que Je me souvienne deux favorablement en ce jourl (Rosh HaShana 16a). Si quelquun voulait accuser Isral, D. Lui-mme ferait taire ses accusations contre nous en faisant valoir que de mme quIl a entendu la prire dIsmal et entendu ses gmissements dans ltat o il tait, de mme il convient quIl reoive nos prires et nos pleurs, dans ltat o nous sommes ce jour-l, sans considrer ce que nous avons fait ou ce que nous ferons, car en ce jour-l nous sommes tous vertueux Ses yeux. (Je rends grce D. du bonheur davoir eu linspiration de cette explication). Quelle est la conduite correcte? Tout homme, quel quil soit, et en particulier le jeune tudiant de la Torah, doit se garder dtre entach de la moindre faute, car il risque dinciter tout son entourage suivre son mauvais exemple. Une faute entrane une autre faute, et il doit donc se conduire avec droiture et tre parfait dans sa manire dtre et tous ses actes.

La raillerie et la frivolit engendrent les transgressions


Et Sarah vit le fils quHagar lEgyptienne avait enfant Avraham se livrer des railleries (Brshit 21:9). Pourquoi Ismal nest-il pas nomm dans ce verset qui aurait pu dire: Sarah vit Ismal, le fils dHagar... ? Nous devons expliquer le fait tonnant que le nom dIsmal ne soit pas explicitement mentionn dans toute cette section, mais seulement par allusion, une fois il est appel lenfant, comme il est crit (ibid. 21:16): Je ne veux pas voir mourir cet enfant , une fois adolescent (verset 20): D. accompagna cet adolescent, et il grandit , et une fois fils dHagar . Pourquoi le nom dIsmal nest-il pas mentionn dans toute la section? Nous voyons souvent des gens de bonnes familles, qui ont reu une ducation irrprochable et qui pratiquent les commandements avec empressement, prendre tout coup un mauvais chemin, bien quils frquentent des personnes convenables et naient nglig jusque-l aucun commandement. Comment expliquer quils aient pu par la suite prendre un mauvais chemin? Ce fut le cas dIsmal. Il avait grandi dans un entourage dhommes forts et bons, dans la maison dAvraham et en compagnie dYitshak. A lge de treize ans, il fut circoncis avec joie, sans hsitation (Brshit Rabba 55:4), ce qui montre quil a excut ce commandement avec un esprit de sacrifice. Lorsque Yitshak est n, alors quAvraham avait cent ans et Sarah quatre-vingt-dix ans, le monde fut rempli de joie. Beaucoup de femmes striles ont enfant en mme temps quelle (Tanhouma Toledot 3). Tous taient heureux (Brshit Rabba 53:8). Lorsque Yitshak atteint lge de deux ans, Avraham fit un grand festin le jour o lon sevra Yitshak (Brshit 21:8), et tous les grands de son temps y participrent (Brshit Rabba 53: 14). Rashi rapporte ce fait dans son commentaire de la Torah. Tous ces vnements bouleversants et merveilleux furent accompagns de miracles. Ismal, bien que tmoin de toutes ces merveilles, au lieu daffermir sa foi et sa crainte de D. et de slever de plus en plus dans la connaissance de la Torah, dlaissa tout, et commena au contraire jouer avec Yitshak lidoltrie, linceste et au meurtre (Brshit Rabba 53:15), cest dire quil a commenc par des moqueries, des railleries et des frivolits inacceptables. Il en perdit le titre de fils dAvraham et il ne convient pas que le nom Ismal - que D. a entendu - lui soit attribu. Dornavant il est le fils dHagar, lEgyptienne, seulement un enfant qui fait des sottises, un adolescent qui ne sait rien et ne se rend pas compte de ce quil fait. Au lieu de tirer un enseignement de tout ce quil voit autour de lui, et du fait mme quil a pratiqu la circoncision avec un esprit de sacrifice, il va jouer lidoltrie, soccuper de choses contraires D. et la voie de la Torah, et se dtourner de toute lvation spirituelle.

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Son nom Ismal nest pas mentionn dans le verset, mais seulement le fils dHagar , et il est dcrit comme enfant et adolescent . Il nest pas digne dtre appel le fils dAvraham puisque sa conduite tourdie ne fait pas honneur son pre. Quelquun peut tre un homme grand et important, il peut frquenter des gens vertueux, mais sil est railleur, sil se moque et se rit de tout, il risque de perdre en un instant tous les mrites, et tomber au plus bas (Haguiga 5b). La preuve incontestable est le cas dIsmal, qui est tomb si bas que les Sages disent de lui (Shemot Rabba 1:1, Tanhouma Shemot 1): Il se tenait aux carrefours et pillait les passants . Le fait est quil ne tenait pas compte des remontrances et des menaces de punition, comme le disent les Sages (Shevet Moussar): Une seule raillerie annule cent rprimandes . Cest ce que dit le roi David, au dbut de ses Psaumes (Thilim 1:1-2): Heureux lhomme qui ne suit pas le conseil des mchants... qui ne prend point place dans la socit des railleurs, mais qui dsire la Loi de lEternel et qui mdite la Torah jour et nuit . La raison dtre et le but de lhomme est dacqurir la sagesse de la Torah et de ne pas se laisser entraner par des futilits sans avenir. Si, comme il ressort clairement ici, il commence se moquer et persifler, il perd son nom, comme Ismal qui nest pas nomm et qui nest plus considr comme le fils dAvraham, car ses railleries lont dshonor au point quil nest plus que le fils dHagar . Essav fut influenc par son oncle Ismal et il lui ressemble, comme le disent les Sages (Shemot Rabba 1:1): Essav alla chez Ismal apprendre de lui ses mauvaises voies . Et ils ajoutent (Yoma 38b): Essav tait mchant, car il vivait entre deux personnes vertueuses, Yitshak son pre, et Rivka sa mre, en compagnie de son frre Yaakov, et il na rien appris de leur conduite . Nest-il pas tonnant quil nait rien appris du comportement de ces gens vertueux? En fait, Essav a quand mme appris quelque chose de ses parents. Il a reu la mme ducation que Yaakov comme le disent les Sages: ils ont appris ensemble lire la Torah (Brshit Rabba 63:10). Et pourtant, il avait en lui une tendance la raillerie et la moquerie, qui eut pour consquence de lamener renier D., rfuter la rsurrection des morts (Babba Bathra 16b), et commettre sans frein les transgressions les plus graves. De l, il en vint renier la Torah et D., Crateur de lunivers. Tout ce quil faisait ntait que tromperie, et les Sages le comparent au cochon qui montre tous ses sabots fendus [un des signes de puret de lanimal] comme pour dire: voyez, je suis pur (Brshit Rabba 65:1). Extrieurement, Essav se montrait pur et joyeux, il plaisantait avec tous jusqu ce quils tombent dans ses filets, et nombreux sont ceux quil prenait au pige des railleries dont il tait coutumier. Il se conduisait avec lgret et frivolit ce qui, on le sait entrane lhomme commettre des actes interdits (Avot III:17). Le fils dYitshak se comportait comme sil tait le fils de Laban ou de son oncle Ismal. Il avait mme russi tromper son pre en lui demandant comment prlever la dme du sel et du foin [choses qui ne sont pas soumises la dme] (Brshit Rabba 63:10, 97:9), et de l, il en tait venu la promiscuit et la dbauche, Essav pourchassait les femmes, les enlevait leur mari, et les violait (Brshit Rabba 65:1). Tout cela cause de son esprit moqueur. Il est crit (ibid. 25:29): Essav revint des champs fatigu . Fatigu de quoi? Davoir tu tant de gens (Babba Bathra 16b, Brshit Rabba 63:12) comme il est crit Mon me est fatigue cause des meurtriers (Yrmia 4:31). Pour comble, en rentrant ce jour-l, il vit que son frre Yaakov avait prpar un plat de lentilles pour son pre Yitshak, alors en deuil de la mort dAvraham (Babba Bathra 16b, Brshit Rabba 63: 16, 19) et il dit son frre (ibid. 25:30): Laisse moi avaler de ce plat tout rouge, car je suis fatigu . Pourquoi Essav dsirait-il tant ce plat de lentilles, un plat de gens en deuil et de pauvres (Ibn Ezra ad. loc. 25:34)? Cest quil tait malhonnte - il trompait tout le monde. Il dsirait une nourriture de gens endeuills et pauvres pour faire croire tous quil tait vertueux, quil se nourrissait de plats simples. De plus, il voulait montrer au monde entier que lui aussi portait le deuil dAvraham... Malgr sa fatigue extrme, il continuait tromper tout le monde, tant la raillerie tait devenue chez lui une habitude. Malheur nous pour ce que nous avons dfinitivement perdu . Essav a tout perdu par sa propre faute. Lhomme est test au moment de lpreuve, car cest alors que lon sait sil est sincre ou non. Au lieu de se repentir en entendant quAvraham avait quitt ce monde, fatigu au point dtre lui-mme au seuil

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de la mort, comme il le dit Yaakov (ibid. 25:32): Moi aussi je vais mourir , au lieu de remercier D. davoir trouv de quoi faire revivre son me, il renie ce moment-l son droit danesse (Rashi ibid. 25: 34, Babba Bathra 15b), et cest justement le jour de la mort dAvraham, quil prit le mauvais chemin (Babba Bathra 15b), et renia la croyance en la rsurrection des morts . Essav et Ismal avaient en commun la tendance la raillerie et la moquerie, qui liminent lhomme de ce monde (Zohar I 163a), et qui sont mres de toutes les transgressions. Tandis quEssav est rest sur le mauvais chemin, Ismal a surmont ses mauvaises tendances et sest repenti le jour de la mort dAvraham (Babba Bathra 16b), et sa descendance bnficie de son mrite jusqu ce jour. Cela nous enseigne, nous aussi, quil faut viter la raillerie qui risque de nous amener commettre les fautes les plus graves. Au contraire, il faut craindre D. de tout cur, et alors combien grand sera notre bonheur davoir notre part en ce monde et dans lautre. Amen.

Surmonter les preuves conduit au comble de la perfection


Rabbi Lvi dit: Lexpression lech lecha, va, quitte, figure deux reprises dans la Torah, une premire fois quitte ton pays (Brshit 12:1) une autre fois va vers le pays de Moriah (ibid. 22:2) au moment du sacrifice dYitshak. Mais nous ne saurions pas laquelle de ces preuves est plus valeureuse, si ce ntait que lexpression le pays de Moriah montre que la seconde a la prfrence (Brshit Rabba 39:11, 55:8). Et les Sages disent dAvraham que mme si D. lui avait demand la prunelle de ses yeux, il la Lui aurait donne. Il Lui aurait donn non seulement la prunelle de ses yeux, mais sa vie mme (Sifri 313). Nous savons que Avraham a ralis toute la Torah, mme les ordonnances rabbiniques (Yoma 28b, Vayikra Rabba 2:9), et quil navait ni pre ni matre, mais ses deux reins sont devenus comme deux sources qui labreuvaient de Torah (Brshit Rabba 61:1, Avot DRabbi Nathan 33:1, Tanhouma Vayigash 11). Et pourtant il manquait quelque chose. Il ne suffisait pas de donner D. la prunelle de ses yeux ou mme sa vie. Pour mriter dtre choisi par D. pour tre le pre de la nation Juive, Avraham a d tout dabord quitter son pays natal et la maison de son pre, afin de se perfectionner. Ce nest quen Terre dIsral quil pourra atteindre le sommet de la perfection. Rabbi Elazar rapporte: Quitte ton pays, afin de te corriger et de perfectionner tes qualits (Zohar I 77b). Ce nest quen quittant Haran quAvraham peut se perfectionner jusqu en venir prsenter son fils Yitshak en sacrifice sur lautel. Cest donc que ces deux preuves sont lies lune lautre. Pour avoir surmont la premire preuve, Avraham a pu aussi russir dans toutes les autres jusqu la dernire, le sacrifice dYitshak. La premire preuve conduit ncessairement la suivante et jusqu la dernire, et cest pourquoi la dernire est la plus mritoire, et la plus grande de toutes. Nous devons comprendre lintention des Sages lorsquils disent que si D. avait demand Avraham la prunelle de ses yeux ou mme sa vie, il les aurait donnes. Avraham tait prt mourir Our Kassdim pour sanctifier le Nom de D. Avraham risquait non seulement la prunelle de ses yeux mais sa vie mme pour D. Cela nous oblige nous demander ce que les Sages ajoutent ici. Il faut savoir que plus un homme est grand, plus son mauvais penchant se dveloppe, comme le disent les Sages (Souca 52a): Plus un homme surpasse un autre par sa grandeur dme, plus son mauvais penchant aussi le surpasse , et il lui faut mettre en uvre beaucoup de dtermination pour le surmonter. Avraham tait parvenu une grande lvation et donc son mauvais penchant aussi tait plus grand. Malgr cela, il la surmont afin dobir la volont divine. D. lui demanda de sacrifier son fils, ce quil avait de plus cher au monde, et il le fit sans tenir compte de la rprobation publique ni des critiques des nations. Lui qui, durant toute sa vie, avait fustig ceux qui sacrifiaient leurs enfants dans des rites paens, devait lui-mme, maintenant, en ses vieux jours, sacrifier son propre fils D. sans tenir compte des protestations pourtant senses contre un tel acte. Il obit avec joie cette exigence apparemment insense de D., sans poser de questions et sans hsitation. Il nous est difficile de comprendre comment Avraham est parvenu un amour de D. tel quil prsenta son fils en sacrifice (olah). Il aurait pu demander D. des explications, poser des questions et prsenter des contre-arguments concernant ce sacrifice, mais il a gard le silence, comme le disent les Sages (Brshit Rabba 56:8): Lorsque D. dit Avraham: prends, Je te prie, ton fils, ton unique... et prsente-le en holocauste

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(Brshit 22:2), Avraham aurait pu dire D. : Tout dabord, Tu mas dit: la postrit dYitshak portera ton nom (ibid. 21:12) et maintenant Tu me dis de le prsenter en holocauste! Mais malgr tous les arguments possibles, il fit ce que D. lui avait ordonn, et cest une chose extrmement tonnante. O Avraham a-t-il puis une assurance que lentendement humain a du mal concevoir et ne peut pas saisir? Mais Avraham jugeait de faon diffrente. Il savait clairement que cest justement en sacrifiant son fils sur lautel quil pouvait servir D. au mieux. La Torah en tmoigne effectivement son sujet (ibid. 22:12): Maintenant Je sais que tu crains D. car tu ne Mas pas refus ton fils, ton fils unique . Cest que chacun peut croire quil aime D. de tout son cur et de toute son me, mais lheure de la vrit, il constate combien son cur est faible. Dj, avant lpreuve du sacrifice dYitshak, Avraham tait dtermin, dans son cur et dans son esprit, faire tout ce que D. exigerait de lui sans poser de question et sans opposer un seul argument, ce qui est un signe indiscutable damour inconditionnel, de la part dAbraham. Au lieu de protester, il cherche de quelle faon il peut raliser au mieux lordre de D. Aucun cueil ne pouvait arrter Avraham sur sa route au moment du sacrifice. Il lui fallut trois jours pour parcourir le court chemin de son lieu dhabitation jusquau Mont Moriah, car il ne rencontra sur sa route que des obstacles. Tout dabord le Satan sest oppos lui par la force, sous forme dun fleuve infranchissable qui lui barrait la route, pensant ainsi le dcourager et lui faire rebrousser chemin. Mais Avraham sest content de prier D. et de supplier (Thilim 69:2): Sauve-moi, D.! car les flots ont atteint mon me (Yalkout Vayra, 99). Il tait dtermin ne pas se laisser dtourner. Lorsquil fut sauv de ce danger, il remercia D en disant (ibid. 66:12): Nous avons travers leau et le feu, et Tu nous as sortis et mis laise . Alors, le Satan sest plac sur son chemin pour lensorceler par des arguments convaincants : Vieillard! Vieillard! Tu as perdu la tte! Tu as eu un fils lge de cent ans et tu vas lgorger? (Brshit Rabba 56: 5). Enfin, le Satan le tente par des paroles de vrit: Jai entendu dire, au Ciel: une brebis en holocauste, et non Yitshak en holocauste (Yalkout Shimoni, Vayra 96). Mais Avraham ne croit rien de tout ce que le Satan insinue, et lui rpond que cest justement pour cette raison quil veut obir au commandement de D. et il continue sa route pour excuter avec joie lordre de D. et sacrifier son fils. Toutes les preuves passes ntaient quune prparation lpreuve du sacrifice dYitshak. Avraham les avait toutes surmontes, si bien quil pouvait aller maintenant avec son fils, tous deux unis par une mme intention, pour le sacrifice (Brshit Rabba 56:4, 5, Etz Yossef ad. loc.), tant son amour de D. tait sans bornes. Le Satan, le mauvais penchant, tente toujours, par tous les moyens, de faire obstacle celui qui veut obir la volont de D., surtout sil sagit dun commandement qui va augmenter son amour de D. et lui confrer une plus grande lvation, car le mauvais penchant est l pour instiller linscurit et le doute dans le cur de lhomme. Mais lhomme doit tre sr de lui-mme, ferme comme Avraham qui est appel solide (Rosh HaShana 11a, Zohar III 238b). Il ne doit pas faiblir et couter les mauvais conseils, mais seulement la voix de D. Nous savons maintenant o Avraham a puis la force dme ncessaire pour sacrifier son fils. Tout a commenc par la premire preuve quitte ton pays natal . Il avait russi surmonter cette preuve et taire les questions qui se posaient naturellement lui. A ce moment-l, D. lui avait dit de la faon la plus simple qui soit: quitte ton pays . Et Avraham, sans poser de questions, comprit que sil surmontait les difficults de cette preuve, ce serait pour lui le moyen de slever et de se renforcer dans le service de D. et de mriter la promesse pour ton bien et ton bnfice propre qui accompagnait cet ordre. Sil surmonte la premire preuve, il pourra surmonter une preuve mme aussi difficile que le sacrifice dYitshak, sans prouver de doutes. Cest un exemple pour chacun. Il faut surmonter la premire difficult qui se prsente afin dacqurir la force ncessaire pour affronter les difficults, comme il est crit (Thilim 84:8): Ils vont avec une force toujours croissante , sans sarrter, jusqu entendre: Va vers le pays de Moriah et l tu parviendras au vritable amour de D., un amour sans bornes. Dire que la premire preuve ntait quune prparation la dernire, celle du sacrifice, de lamour sans bornes, cest dire que la dernire preuve est plus mritoire que la premire.

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Aprs la dernire preuve, celle du sacrifice, Avraham a demand D. de ne plus le mettre lpreuve et de plus, de lui en faire le serment (Brshit Rabba 56:18). Non pas quAvraham et t incapable de surmonter dautres preuves par la suite, mais parce que les actes des pres sont des signes pour leurs enfants (Souca 34a), et ses enfants aprs lui seraient prouvs par toutes les preuves quil a lui mme subies. Ils se souciait pour eux, il craignait quils ne puissent pas, eux, surmonter des preuves au-dessus

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Heureuse lenfance qui ne fait pas honte la vieillesse
Il est crit (Brshit 23:1): La vie de Sarah fut de cent vingt-sept ans, telles sont les annes de la vie de Sarah . Rashi remarque que la rptition telles sont les annes de la vie de Sarah indique quelles furent toutes galement bonnes. Mais il est difficile de comprendre pourquoi Rashi interprte ainsi la rptition, puisque ce sens est dj indiqu dans le fait que shana, lan, est au singulier, et il est dit littralement: cent ans et vingt ans et sept ans ce qui nous montre que chaque anne est gale aux autres, et donc la question se repose: pourquoi est-il dit les annes de la vie de Sarah ? Nous allons lexpliquer clairement. Rashi rapporte le commentaire des Sages (Brshit Rabba 58:1): A cent ans, elle tait sans faute comme une jeune fille de vingt ans. De mme quune jeune fille de vingt ans est sans faute, cent ans elle tait sans faute, et vingt ans elle tait splendide comme une enfant de sept ans . La Torah tmoigne ici des vertus de Sarah, lge de sept ans. A cet ge o lon aime jouer, o lon na aucune responsabilit ni envers soi-mme ni envers les autres, elle tait comme une jeune fille de vingt ans, adulte et responsable. Elle tait vertueuse et connaissait son crateur tant lge de vingt ans qu lge de sept ans. A vingt ans elle tait sage comme une femme de cent ans, et inversement, de mme qu vingt ans elle tait en pleine possession de ses forces, lge de cent ans elle tait en pleine possession de tous ses sens et de toutes ses forces. Non pas quelle ft reste au mme niveau, mais elle avait progress danne en anne, et bien que dans le jeune ge la force du mauvais penchant soit grande, elle avait fait de grands efforts pour parvenir avec les mmes vertus lge de cent ans. Telles furent les annes de la vie de Sarah. A propos du roi Shal il est crit (Shmouel I, 13:1): Shal avait un an lorsquil devint roi , et les Sages demandent (Yoma 22b, Yalkout Shmouel 1:117): Shal avait-il vraiment un an? Il tait adulte! Mais il tait comme un enfant dun an qui ne connat pas le got du pch . Tel tait Shal. Le but de lhomme en ce monde est de parvenir la perfection, cest--dire que toute sa vie, du dbut jusqu la fin, doit tre galement sans tache et sans faute. Cela ne peut exister que si lon progresse avec une force toujours croissante . De mme, un enfant qui vient de natre, qui grandit, qui devient vieux, est nanmoins le mme depuis sa naissance jusqu sa mort, si ce nest que ses membres ont grandi, sans cependant tre diffrents. Au dbut de sa vie ils taient petits, et prsent ils sont grands. De mme, lhomme nat avec une me pure, et il doit vivre sa vie du dbut jusqu la fin, sans laltrer. De mme que ses membres ne changent pas, mais deviennent ceux dun enfant, puis dun adulte, puis dun vieillard, de mme lhomme doit amliorer sa situation, grandir et progresser dans sa connaissance de la Torah et multiplier les bonnes actions, dans le sens o il est dit: Cet homme devint grand et sa grandeur allait croissant, et enfin il fut trs grand (Brshit 26:13). Sarah tait cent ans comme vingt ans, et vingt ans comme cent ans, sept ans comme vingt ans, et vingt ans comme sept ans, cest--dire quelle na pas got au pch, mais quelle a progress dans le service de D. sans faillir. Cela explique clairement pourquoi le verset rpte les annes de la vie de Sarah . La vie de Sarah tait faite dannes qui avaient deux aspects (en Hbreu lexpression shney hay peut se comprendre: deux vies). Le mot hay a la mme valeur numrique que le mot koah, force, ce qui montre quelle avait acquis une puissance extraordinaire durant sa vie en ce monde. A sept ans comme vingt ans montre que lorsquelle avait sept ans, elle tait srieuse comme une jeune fille de vingt ans qui a le sens des responsabilits, et elle exigeait delle-mme un comportement de jeune fille. Et vingt ans elle tait comme une femme de cent ans , ce qui indique qu vingt ans elle avait lesprit pos comme celui dun vieux sage, duquel il est dit (fin du trait Kinin): Plus ils sont vieux, plus ils sont poss et (Shabbat 152a): Ils deviennent de plus en plus sages . La sagesse grandit avec les annes, mais la Torah stipule que Sarah, lge de vingt ans, avait dj une force dme extraordinaire. Sarah vcut une vie exemplaire.

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Elle possdait en outre une autre qualit tout aussi difficile acqurir. A sept ans comme vingt ans, et vingt ans comme sept ans , cest--dire qu vingt ans, elle servait D. comme une enfant de sept ans avec une foi tout innocente, puisquun enfant na pas de mauvais penchant, et dailleurs le tribunal cleste ne le punit qu partir de lge de vingt ans (Bamidbar Rabba 18:3), et cest comme si lenfant ne commettait pas de fautes. De mme, lge de cent ans, lge o une vieille femme est faible et sans forces, elle servait D. avec vigueur comme vingt ans, en possession de toutes ses forces. Celui qui sert D. dans son vieil ge avec la mme vigueur que dans sa jeunesse mrite quon dise de lui (Souca 53a): Heureuse lenfance qui ne fait pas honte la vieillesse . Dans sa vieillesse, il naura pas honte de sa jeunesse. En approfondissant ce concept, nous comprenons clairement que chaque homme possde un potentiel dnergie cach, et quil doit le raliser par la pratique des commandements et le service de D., durant toute sa vie. Chaque homme a des forces naturelles, connues et disponibles, quil met en uvre pour ne pas profaner le Shabbat, ne pas voler, ne pas cambrioler, ne pas tuer, honorer ses parents comme il se doit, choses videntes pour tous. Mais, paralllement, il a en lui des forces dme caches, quil doit veiller et mettre en uvre. Il doit aussi crer et acqurir des forces quil ne possde pas naturellement. On raconte de Rabbi Tarfon (voir Kidoushin 31b, Yroushalmi Kidoushin I:7) que lorsque la chaussure de sa mre stait dchire, il plaa la paume de ses mains terre afin que sa mre y pose son pied. Ce geste indique une grande force dme de la part de sa mre qui accepta un tel acte, ainsi quune grande soumission de la part de Rabbi Tarfon qui pria sa mre de marcher sur ses mains. Malgr cela, lorsquil tomba malade, les Sages ont dit la mre de Rabbi Tarfon: il nest pas encore parvenu la moiti de ce que la loi exige pour quon honore ses parents . La Torah ne rvle pas la rcompense des commandements, parce que chaque commandement, mme le plus facile, peut sexcuter avec un dvouement et un amour incommensurables, et donc il ny a pas lieu de rvler la rcompense qui sensuit. Le mme geste peut exiger un grand don de soi ou trs peu deffort et la Torah rcompense leffort et lintention rels et non le geste en soi. Il nest pas possible den connatre la rcompense car lexcution dun commandement na pas de limite. Lhomme possde des forces caches qui lui permettent datteindre le comble de la perfection, et tout ce quil y ajoute de lui-mme avec joie, est apprci et valoris par D. Il est dit que D. dans Sa bont renouvelle chaque jour luvre de la cration , autrement dit: selon les lois naturelles, le monde vieillit, mais il est renouvel et rajeuni jour aprs jour. De mme lhomme a des forces caches qui se renouvellent chaque jour. En vieillissant il peut sembler jeune et, inversement, ressembler un homme qui navigue sur un bateau et ne peut plus ramer parce quil na plus de forces et que les rames lui tombent des mains, et qui soudain, puisant une nergie nouvelle, saisit les rames, domine les vents, et dirige le bateau avec succs jusquau port. Il en est de mme pour les forces morales. Chaque homme doit puiser en lui-mme des forces nouvelles, car chaque homme a en lui la capacit de renouveler ses forces, en multipliant de lui-mme celles quil possde naturellement, car il a reu, avec le libre arbitre, la volont. Tout dpend de sa volont, et des efforts quil fait pour entretenir et dvelopper ses forces naturelles. Il ne suffit pas dtudier la Torah et dexcuter ses commandements, nous avons aussi lobligation dy consacrer tous nos efforts, dans le sens o le Gaon Rabbi Isral Salanter, de mmoire bnie, dit que les efforts dans la Torah, sont comme la sueur qui perle effectivement pendant ltude . Cest alors que lon est vraiment plongs dans la Torah et que lon progresse effectivement avec des forces grandissantes . Lorsque D. voulut donner la Torah Isral, Il dit: Prsentez-Moi des garants qui assureront que vous la mettrez en pratique (Midrash Shohar Tov Thilim 8:5, Tanhouma Vayigash 2). D. refusa que ceux qui avaient reu la Torah fussent eux-mmes garants. Il refusa aussi la garantie des Patriarches, et mme celle des prophtes. Mais lorsque Isral dit: Nos enfants seront nos garants , D. accepta cette garantie et leur donna la Torah. Il faut expliquer pourquoi D. na pas dit demble Isral: Je vous donne la Torah, condition que vos enfants se portent garants , et pourquoi a-t-Il attendu quIsral, de lui-mme prsente ses enfants comme garants?

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Il semble tout simplement que D. ait voulu donner aux Enfants dIsral la libert de choisir leurs garants. Sils veulent vraiment excuter la Torah, ils ont lobligation de se choisir des garants qui assurent la continuit de sa pratique. Sils dsirent effectivement la Torah, D. a voulu leur signifier que ce dsir doit tre sincre, en leur demandant de prsenter des garants. En quoi les enfants constituent-ils une garantie? Il faut une grande assurance pour proposer les enfants comme garants. Lhomme est naturellement prt sacrifier sa vie pour ses enfants, surtout pour un enfant unique, mais ici, il risque la vie de ses enfants en en faisant ses garants, dans le sens o il est crit Je poursuis le crime des pres sur les enfants (Shemot 20:5). Accepter que leurs enfants soient leurs garants tait un grand risque et dnote une ferme conviction. Etre prt mettre en danger la vie des enfants montre une assurance peu commune que la Torah sera toujours observe.

Savoir que la vie nest quune rsidence temporaire aide au repentir


Examinons la conduite dAvraham au moment de lenterrement de Sarah. Avraham dit aux fils de Heth (Brshit 23:4): Je ne suis quun tranger, un rsident parmi vous, accordez-moi la proprit dune spulture . Le Maguid de Douvna remarque que le verset comporte une contradiction: sil est tranger il nest pas rsident, et sil est rsident il nest pas tranger. Quest-ce quAvraham veut signifier par un tranger et un rsident ? Rashi explique: Je suis un tranger venu dailleurs, et je me suis install chez vous . Il nous semble quAvraham voulait signifier aux fils de Heth (le mot heth veut dire en Hbreu un pcheur) que tous ceux qui commettent des fautes et nen ont aucun regret mourront sans stre repentis. Ils fautent sans remords uniquement parce quils considrent quils habitent ce monde pour toujours. Ils ne pensent pas quun jour ils mourront, et ils ne se considrent pas comme des rsidents temporaires qui nhabitent ce monde que pour un laps de temps dtermin. Sils sentaient quils ne sont que des rsidents temporaires, et que chaque jour de leur vie peut tre le dernier, il est sr quils voudraient se corriger avec nergie et quils se repentiraient de leurs fautes. Tel est le sens de toshev, rsident, qui comporte aussi la notion de tshouvah, le repentir. Avraham dit aux fils de Heth: Je ne suis quun tranger, un rsident parmi vous, et savez-vous pourquoi Sarah a toujours t trs vertueuse, mme Haran parmi des gens mchants? Cest parce quelle ne considrait pas ce monde comme un sjour ternel, mais comme une rsidence temporaire. Sarah ne se considrait en ce monde que comme une trangre, ce qui lui permit de se garder des fautes des habitants du pays. Le verset fait allusion cela dans la brivet de son expression, car les mots guer vtoshav imachem, (compts avec le nombre de lettres et le nombre de mots) a la mme valeur numrique que Sarah Tzadeket , Sarah est vertueuse. Chacun doit se considrer comme rsident temporaire, car de plus, cela lui permet de vaincre plus facilement le mauvais penchant. Car le mauvais penchant drange toujours ceux qui se fixent quelque part. Ce fut le cas de Yaakov qui pensait sinstaller dans le pays dhabitation de son pre (Brshit 37:1) et vivre en toute tranquillit, se sentir rsident dans un pays o Yitshak navait t quun tranger. Il fut atteint par le malheur de Yossef qui le sauva de cette erreur en lui signifiant que son pre aussi navait t quun tranger. Par contre, les personnes qui se trouvent encore en exil et qui voyagent dun lieu lautre ont une vie dj difficile et D. ne les accable pas de souffrances quils seraient incapables de supporter. Cest ce quAvraham signifie aux fils de Heth: Bien que je sois habitant de ce pays puisque D. me la donn, je vis ma vie en tant qutranger et je nai rien appris de vous, fils de Heth. Sans aucun doute, il faut une dtermination exceptionnelle pour vivre en tranger dans un lieu qui vous appartient! En outre, Avraham a demand aux fils de Heth la proprit dune spulture pour Sarah, il leur dit (Brshit 23:4): Accordez-moi la proprit dune spulture . Avraham les a rprimands et les a amens se repentir comme il en avait lhabitude, en leur montrant comment il se comportait. Les fils de Heth vivent sur une terre qui nest pas la leur (elle appartient Avraham), ils y sont des rsidents trangers mais ils se considrent comme des habitants part entire, ce qui est trs audacieux de leur part. Avraham aurait pu juste titre les chasser de sa terre, mais il na fait que leur signifier cela oralement. Il agissait selon la qualit du hassid, qui dit ce qui est moi est toi, et ce qui est toi est toi (Avot 5:11), et la bienveillance est, comme on le sait, la qualit essentielle dAvraham (Zohar III 302a). Il a renonc sa part de la terre, au point de dire Efron: si tout tappartient, je dsire te payer pour le Caveau.

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Nous pouvons maintenant comprendre pourquoi chacun des Patriarches a dot le monde de quelque chose de nouveau (Babba Metzya 87a, Brshit Rabba 65:4, Tanhouma Hay Sarah 1). Avraham a demand quil soit donn lhomme des signes de vieillesse qui jusqu son poque nexistaient pas, comme il est dit (Brshit 24:1): Et Avraham devint vieux, avanc en ge , ce qui tait une nouveaut. Yitshak a offert au monde lexpiation que constitue la souffrance (Brshit Rabba 65:4). Yaakov a rvl la maladie (Babba Metzya 87a, Pessikta Zouta Vayhi 48:1): Jusquau temps de Yaakov la maladie nexistait pas, comme il est crit (Brshit 48:1): Il fut dit Yossef: voici que ton pre est malade... Cest grce la vieillesse, aux souffrances et la maladie quil est possible de corriger le monde. Comment? Avraham a introduit dans le monde les signes de la vieillesse. Comme chacun sait, lorsque lhomme parvient lge de la vieillesse, il risque de mourir chaque moment, il commence donc obligatoirement se sentir tranger en ce monde et cest ainsi quil en vient se repentir lorsquil voit que la vieillesse le saisit et que la mort approche. Cest le sens de guer vtoshav, un tranger qui se repent, comme nous lavons dit plus haut. Yitshak a introduit le phnomne de la souffrance dans le monde. Bien que lhomme ne soit pas encore vieux, sil est saisi par les souffrances, il peut se rappeler quil nest quun rsident tranger en ce monde et se repentir, comme le disent les Sages (Brachot 5a): Celui qui est atteint par des souffrances doit examiner sa conduite et ne pas attendre de devenir vieux pour se corriger car il va peut-tre mourir, malheureusement, avant son temps. Cest donc que les souffrances aussi rappellent lhomme quil nest quun tranger en ce monde, et grce aux souffrances il retrouve le droit chemin, comme le disent les Sages (Menahot 53b): Isral ne prend le droit chemin que par les souffrances . Yaakov a introduit la maladie dans le monde, car lhomme shabitue aux souffrances comme le pauvre accepte la pauvret et le fait que lindigence est son lot en ce monde. Mais le sort peut lamener voler ou perdre sa dignit, tandis que sil tombe malade et si la maladie le fait souffrir, il se rappelle quil est un tranger en ce monde et il revient D. Les Sages ont dtermin strictement les voies du repentir afin que les gens ne se noyent pas dans leurs fautes, mais quils sachent ce quils doivent faire chaque tape. Le roi Hizkya avait cach les livres de mdecine, acte que les Sages ont lou (Pessahim 56, Avot DRabbi Nathan 2:4). Jusque l, chaque malade consultait ces livres et gurissait de sa maladie, sans avoir accompli lessentiel, qui est de se repentir. Et les Sages disent encore (Tanna DBey Eliyahou Rabba 13, et Zouta 11): Toutes les souffrances de lhomme sont pour son bien ; cest dire que les souffrances et les maladies sont un bienfait pour lhomme quand elles lui rappellent quil nest quun tranger de passage dans ce monde; alors il prie et revient D. de tout son cur. Il rectifie ainsi la pense errone quil rside pour toujours en ce monde, quil ne mourra pas, ou que la vie na pas de sens. Les Patriarches ont introduit dans le monde la vieillesse, la souffrance et la maladie, afin de nous enseigner que nous ne sommes ici-bas que des rsidents temporaires. Les mots zikna, issourim, mahalot, (vieillesse, souffrance, maladie) ont la mme valeur numrique que les mots guer vtoshav anochi, (je suis tranger et rsident). Ce qui confirme notre explication. A ce propos, prsentons le cas dIshmal, le fils dAvraham, dont il est crit (Brshit 25:17): Tel est le nombre des annes de la vie dIshmal, cent ans et trente ans et sept ans . Ce verset comporte aussi une rptition - les annes de la vie dIshmal comme il est dit de Sarah. Dans la narration de lenterrement dAvraham, il est crit (ibid. 25:9): Ses fils Yitshak et Ishmal lont enterr... et les Sages remarquent ce sujet (Babba Bathra 16b): Pourquoi Yitshak est-il mentionn avant Ishmal, car Ishmal est bien lan? Cela nous enseigne quIshmal sest repenti et a donn Yitshak lhonneur dtre devant . En quoi le fait davoir donn la priorit Yitshak indique-t-il quIshmal sest repenti? Peut-tre Yitshak avait-il la prsance parce quil avait reu les bndictions directement de D. ou parce quil ressemblait en tout Avraham (Brshit Rabba 53:10), ou encore parce quAvraham avait gard Yitshak auprs de lui tandis quil avait renvoy les enfants des concubines (ibid. 25:6). Tous ces faits justifient quYitshak passe le premier. Quelle preuve avons-nous donc quIshmal sest repenti? Si la Torah nous signale quIshmal donna la priorit Yitshak, cest une indication quil na pas contest que la royaut revenait ce dernier et quil tait lhritier lgitime. A ce moment-l, il ny avait aucune divergence dopinion entre eux. Cest la preuve quIshmal sest repenti sincrement.

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Cela explique aussi pourquoi la Torah rpte lexpression les annes de la vie dIshmal comme il est dit les annes de la vie de Sarah . Les Sages disent (Avoda Zara 10b, 17a): Il en est qui gagnent la vie ternelle en un instant , et les portes du repentir sont ouvertes mme pour les hommes les plus mchants, au point que les fautes intentionnelles sont comptes comme des erreurs, voire comme des mrites (Yoma 86b, Babba Metzya 33b). Au moment o Ishmal sest retir devant Yitshak en reconnaissant en lui le vritable hritier dAvraham auquel les bndictions reviennent juste titre, la Torah considre que cest comme si toutes les annes de sa vie avaient t vcues dans la droiture. Il na pas contest les droits dYitshak, ce qui montre quil sest soumis la volont de D. De l nous concluons quil sest repenti et toutes les annes de sa vie sont rtrospectivement considres comme galement bonnes. Par contre Korah, pour avoir contest lautorit de Mosh et remis en question sa souverainet, a cr une division dans le peuple, sest oppos la volont de D. et sest rendu coupable (Bamidbar Rabba 18: 1). Est-ce possible? Car Korah tait un homme grand et sage, de ceux qui avaient reu la tche de porter le Tabernacle (ibid. 18:2), il tait vertueux, il aurait pu tre Grand Prtre (voir Zohar III 176b), et il possdait linspiration divine. Mais D. ne la pas protg comme Il veille sur les pas de Ses adorateurs (Shmouel I, 2:9), parce que Korah a choisi de semer la discorde, cause de bien des maux., et D. efface jusquau souvenir tous ceux qui prennent part une discorde (Bamidbar Rabba 18:3, Tanhouma Korah 3). Ishmal lui, na pas contest les droits dYitshak, bien quil ait t plus g que lui. Il a reconnu sa supriorit, et il sen suit quil en est venu reconnatre D., et donc toutes les annes de sa vie sont considres comme galement bonnes puisquil a mrit de vivre jusquau jour o il sest repenti. En respectant les droits de son prochain, on se soumet coup sr D., on sannule devant Lui et lon se repent, et alors toutes les annes passes sont rtroactivement considres comme bonnes. Paroles de lauteur: Jcrivais ce chapitre lors dun voyage en train de Lyon Paris, o javais deux rendez-vous importants pour nos institutions Lyon. Cela faisait une heure dj que le train tait arrt en route cause dune panne. Sans aucun doute, les rendez-vous seraient annuls. Ctait pour moi une rude preuve, car javais attendu longtemps avant dobtenir ces rendez-vous et il tait pratiquement sr quils nauraient pas lieu. Javais besoin ce moment-l de grandes forces pour surmonter les mauvaises penses qui massaillaient cause de mon manque de confiance en D. et cela, parce que le mauvais penchant me talonnait: Cest en vain que tu as pris tant de peine pour voyager de Lyon Paris. La fin du mois approche. Comment vas-tu payer les lves du Kollel? Tu perds ton temps . Tel tait le fil de mes penses. Javais besoin de beaucoup de confiance en D. pour surmonter ces doutes et il me fallait un surplus de confiance pour lutter contre le mauvais penchant qui essayait de saper ma foi, et mme des forces au-del de ma nature afin de maider combattre les mauvaises penses qui menvahissaient et pour sentir que D. est Tout-Puissant et quIl dispose de centaines de messagers pour dispenser Ses bonts et Ses bndictions. Je pensais aussi toutes mes responsabilits. Sil y a un dficit dans la caisse de la Yshiva, ce sera cause de moi, cause de mon manque de foi que je dois surmonter, car ce nest srement pas sans raison que le train sest arrt soudain pendant si longtemps, mais pour me permettre de me ressaisir et de trouver un regain dnergie qui me permettra davancer avec des forces toujours croissantes , des forces nouvelles, comme Sarah qui a renouvel dans son vieil ge les forces de sa jeunesse. Veuille D. nous venir en aide et nous donner la force de faire Sa volont toujours, comme Il lexige de chacun la mesure de ce quil est. Amen! Quil en soit ainsi! Enfin, D. soit lou, le train dmarre. Il ne dpend que de D. que les rendez-vous aient lieu ou non ce soir, tout vient de Lui, bni-soit-Il, et ce nest pas nous de percer Ses raisons... tout ce qui nous arrive est une preuve que nous devons surmonter, et il faut accepter la volont de D.

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Pahad David La sympathie et lamour du prochain, issues de ltude de la Torah

Il est crit (Brshit 23:1): La vie de Sarah fut de cent ans et vingt ans et sept ans... cest dire que toutes les annes de sa vie furent galement bonnes et quelle na commis aucune transgression durant toute sa vie. Cela soulve une question: Pourquoi la Torah spare-t-elle chaque dtail et ajoute-t-elle aprs chacun le mot ans , pour nous faire savoir que Sarah na jamais faut? Quelquun voudrait-il la souponner davoir commis quelque faute au point quil soit ncessaire la Torah de tmoigner du contraire? Cette femme, dont les Sages disent que durant toute sa vie, sur cette terre, une nue de Gloire flottait au-dessus de sa tente, une flamme y brlait en permanence, et la pte quelle ptrissait pour le pain tait bnie (Brshit Rabba 60:9); cette femme que les Sages ne cessent de louer, incitait les femmes idoltres croire en D. et avoir foi en Lui, et elle leur restituait leur dignit humaine. Comment penser quelle ait pu fauter durant sa vie, au point que la Torah doive affirmer le contraire? En lisant les propos des Sages dans le Talmud et les Midrashim, nous voyons quAvraham et Sarah jouissaient de qualits et de vertus gales, puisque ...et les mes quils ont faites Haran (Brshit 12: 5) nous enseigne qu Avraham convertissait les hommes et Sarah les femmes (Brshit Rabba 39:21, 84:2), chacun agissant dans son domaine propre. Pourtant, la conduite de Sarah tait de loin suprieure celle dAvraham, car Avraham rapprochait les hommes de D., tandis que Sarah rapprochait les femmes, et il est plus difficile de convaincre les femmes de se repentir car elles sont moins rflchies (Shabbat 33b). Il est naturellement difficile de les convaincre de leurs torts et de changer leurs sentiments pour ne laisser subsister dans leurs curs que lamour et la crainte de D. De plus, Sarah en tant que matresse de maison, prparait la nourriture et les boissons, vaquait aux soins du mnage, prparait les repas pour les nombreux visiteurs, les vtements et les provisions de route des hommes et des femmes qui venaient chez eux, et son zle instillait en eux une grande foi en D. et leur inspirait de lenthousiasme. Tout cela montre que non seulement Sarah tait gale Avraham pour le service de D., mais quelle le dpassait dans de nombreux domaines. Lors du repas offert aux trois anges, Avraham mentionne de la farine et Sarah prpara de la fleur de farine . Que signifie ce changement? Nous apprenons que la femme est plus parcimonieuse que lhomme envers les invits (Babba Metzya 87a). Cest une chose extrmement tonnante et mme effrayante! Est-il possible de penser quelle tait parcimonieuse, elle, que les Sages mettent sur le mme plan quAvraham? Elle, qui avait la force dme de pousser les femmes se convertir et obir D., elle qui avait une si grande aptitude faire le bien, et malgr tant de dvouement, est-il possible de dire quelle tait parcimonieuse envers les invits? Sil en tait ainsi, tous se seraient loigns delle et auraient refus dentrer dans sa maison et de lcouter. Il ne fait pas de doute que le fait mme quelle les ait invits savourer la saintet du Shabbat dans sa maison et se sentir chez elle comme des membres de la famille, lui donnait le mrite de pouvoir les attacher D.. Pourquoi donc les Sages disent-ils de Sarah quelle tait parcimonieuse envers les invits? Nest-ce pas surprenant? Il est vrai que de faon gnrale la femme est par nature parcimonieuse envers les invits, mais ce ntait pas le cas de Sarah. Elle tait diffrente, exceptionnelle et gnreuse. Nous en avons des preuves indiscutables. Cest donc Avraham qui pensait quelle possdait ces caractristiques communes toutes les femmes et quelle ne verrait pas les invits dun bon il, et cest pourquoi il prpara lui-mme le repas, sans demander son aide. Mais elle ntait pas comme toutes les femmes, puisque la Torah explicite quelle uvrait exactement comme Avraham et quelle possdait toutes les vertus dAvraham. De plus, lducation des enfants de tous ces invits reposait sur elle, comme le disent les Sages (Brachot 17a): Quelle est la rcompense des femmes? Lducation des enfants dans les voies de D. et le fait quelles attendent le retour de leur mari . Sarah prparait aussi les provisions de route pour les innombrables passants. Sarah avait dautres qualits. Cest par leur sagesse que les femmes construisent leur foyer (Mishley 14:1), Heureux qui a trouv une femme vaillante... (ibid. 31:10), Elle ceint de force ses reins et arme ses bras de vigueur (ibid. 31:17) - telle tait Sarah. Avraham allait chercher les htes, Sarah prparait la nourriture, les boissons, et leur fournissait des provisions de route. Avraham naurait pas pu accomplir sa tche sans laide de Sarah. Tout le monde sait combien il est difficile pour un baal teshouva (un Juif qui

213 revient au Judasme) de vivre avec un conjoint qui na pas encore choisi de vivre selon la Torah. Il est certain quAvraham sappuyait sur sa femme Sarah et lorsquil poussait un homme se repentir, il comptait sur elle pour convertir sa femme, et donc, Avraham et Sarah, ensemble, ramenaient le mari, la femme et les enfants D. Les efforts dAvraham auraient t vains et vous lchec si seul le mari tait revenu vers D. Cest donc que Sarah uvrait exactement comme Avraham, et mme le distanait. Les Sages disent: Lme de Sarah la quitte lorsquelle entendit dire que son fils Yitshak avait failli ne pas tre sacrifi sur lautel (Vayikra Rabba 20:2), cest--dire que toute lexistence de Sarah et tout son tre taient uniquement consacrs laccomplissement de la volont de D., et cest pourquoi son me la quitte lorsquon lui dit que le sacrifice navait pas t parfait. Tout ce quelle faisait pour ramener D. les hommes et les femmes tait fait avec une sagesse profonde et une grande intelligence. Avraham lui-mme ntait pas au courant de tout ce quelle faisait, bien quil reconnt sa grandeur et ses vertus, comme il est crit (Brshit 12:11): Maintenant je sais que tu es une femme belle et prestigieuse . Jusque-l, Avraham navait pas observ sa femme Sarah, il ne connaissait pas sa beaut extrieure et intrieure et ce nest que maintenant, cause des circonstances, quil la regarde (Tanhouma Lech Lecha 5). Sarah, de son ct ne sest jamais plainte de son manque dintrt, comme la plupart des femmes qui veulent que leur mari leur prte attention et leur exprime des marques damour. Elle nattendait pas de lui des paroles tendres, comme la plupart des maris en adressent leur femme. Cest que Sarah navait pas les mmes sentiments que la plupart des femmes simples... et il est certain quelle ntait pas parcimonieuse envers les invits. Il ne fait aucun doute que lamour du prochain remplissait son cur pur et saint. Mosh, qui tait le plus grand des hommes et le pre de tous les prophtes (Vayikra Rabba 1:15), tait parvenu une telle grandeur grce son humilit exceptionnelle, comme il est crit (Bamidbar 12:3): Lhomme Mosh tait le plus humble de tous les hommes . De mme, Sarah, qui surpassait son mari, Avraham, par ses dons prophtiques, agissait avec sagesse et pudeur. Nul, pas mme Avraham, ne voyait ce quelle faisait. Lorsque Avraham dit: Maintenant je sais... Le mot atta, maintenant, indique le repentir pour signifier qu Avraham sest repenti et a demand pardon sa femme pour ne pas lavoir juge sa juste valeur (Brshit Rabba 21:6). Il pensait quelle avait les mmes sentiments que tout autre femme mais ce ntait pas le cas! Elle soccupait des invits avec autant de zle quAvraham et peut-tre mme plus que lui, comme nous lavons soulign plus haut. Sarah avait dautres qualits. Les Sages racontent son sujet des choses vraiment merveilleuses: ce jour-l, jour de la naissance dYitshak, les femmes emmenrent leurs enfants et Sarah les a tous allaits (Babba Metzya 87a, Brshit Rabba 53:13, Pessikta Zouta), leur prodiguant aussi une nourriture spirituelle. Le jour o Sarah fut visite, beaucoup de prires furent entendues en mme temps que la sienne. Beaucoup de femmes jusque-l striles conurent, et ce jour-l la joie tait son comble dans le monde (Brshit Rabba 53:8). Sarah tait la premire des mres de la nation et la plus parfaite des matresses de maison (Bamidbar Rabba 14:23). A cent ans, alors quon pourrait croire quelle tait vieille et affaiblie par lge et quelle navait plus la force de prparer manger, boire, et de loger les invits de sa maison, elle le faisait avec autant de vigueur quune jeune fille de vingt ans, pourvoyant tous leurs besoins. Sa grandeur tait telle quil est dit (Zohar I 128a): Hava eut honte, la mort de Sarah, quune femme aussi exceptionnelle soit enterre ses cts car elle tait lumineuse, comme le soleil son apoge . Cela est indiqu dans le verset car les premires lettres des mots Sarah Ma Shana (Sarah a cent ans) forment le mot ShMSh, soleil. Tous voyaient, aussi clairement que la lumire du soleil, toutes les merveilles quelle accomplissait. Les qualits de Sarah sont un modle de conduite et un enseignement pour toute femme, lencourageant tre un soutien et une aide pour son mari dans tous les domaines et dans tous les cas, et mriter la rcompense des femmes , et alors le Nom de D. accompagne les poux. Ce nest pas seulement dans les domaines qui lui sont propres que la femme doit aider son mari, mais aussi dans son domaine lui, afin de le soulager du fardeau de son travail et de ses problmes, et alors elle verra que son mari a confiance en elle et elle ne manquera de rien (Mishley 31:11).

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Pahad David Lamour de Sarah pour tous

Ce que nous avons dit permet dclairer dautres points, car tout est li dans la Torah: 1. Nous avons dj dit que durant toute sa vie, une nue de Gloire surmontait la tente de Sarah, une flamme y tait allume en permanence, et la pte quelle ptrissait tait bnie. Mais il nous faut expliquer quoi font allusion ces trois choses: la nue, la flamme, et la pte. Pourquoi justement ces trois lment peuvent-ils dmontrer combien Sarah tait vertueuse? 2. Le verset dit: Et Avraham vint prononcer loraison funbre de Sarah et la pleurer (Brshit 23: 2). Dans le mot lebachta, la pleurer, la lettre Chaf est plus petite que les autres. Quest-ce que cela nous enseigne? 3. Il est crit: tu aimeras ton prochain comme toi-mme (Vayikra 19:18) et Rabbi Akiva explique que cest un principe fondamental de la Torah (Brshit Rabba 24:7). Cela demande rflexion: pourquoi est-il crit rha (ton prochain), et non pas par exemple havereha (ton ami)? Mieux encore. Pourquoi est-ce justement lamour du prochain qui est un principe fondamental de la Torah? Ny a-t-il pas dans la Torah dautres commandements qui pourraient constituer eux aussi des principes fondamentaux? Ce que nous avons dit plus haut nous permet de rpondre toutes les questions poses. La Prsence divine habitait la maison de Sarah parce quelle tait une aide pour Avraham, et cest le sens de la nue qui indique la Prsence divine (le mot eyv, nuage, a une valeur numrique de soixante-douze, indiquant le Nom de D. de soixante-douze lettres). Il en est de mme des nues de Gloire qui accompagnaient le peuple dIsral dans le dsert (voir Zohar I 176b). La flamme allume symbolise les commandements, comme il est crit le commandement est une flamme et la Torah la lumire (Mishley 6:23). Sarah sacquittait la perfection de toutes les obligations de la Torah, sans arrire-pense. Et la flamme est lme, comme il est crit (ibid. 20:27): Lme de lhomme est un flambeau divin . La pte quelle ptrissait symbolise la prsence dinvits, et Sarah y excellait. Sa pte tait bnie, car parfois elle prparait du pain pour un certain nombre dinvits et soudain la maison accueillait bien plus de monde et, malgr tout, il y avait assez de pain pour tous. Cest donc quelle agissait de bon cur en toute chose. Lorsque Sarah disparut, la maison se vida de la vie qui la remplissait. Cest alors quAvraham comprit quel point elle avait t une aide et un soutien, et combien elle tait une femme exceptionnelle. De plus, il vit que le nuage, la flamme, et la bndiction de la pte avaient disparu avec elle. Lorsque Avraham vint prononcer son oraison et la pleurer, le mot pleurer Lbakota (qui est crit avec un petit Khaf) peut se lire Lbeta, du mot maison - Avraham a pleur sa maison vide, il a pleur cause du grand vide laiss par la mort de Sarah. Cest seulement alors quil a senti combien sa pudeur cachait damour, au point que personne navait remarqu sa grandeur. Cest ce quil a exprim dans son oraison funbre et ce qui explique ses larmes. Quel est le sens du mot ton prochain dans le verset tu aimeras ton prochain comme toi-mme , et pourquoi nest-il pas dit ton ami ? Cest pour indiquer que mme si quelquun se conduit mal envers toi et te hait, tu dois laimer et le respecter. Le mot recha (ton prochain) peut se dcomposer en ra-lecha (mchant envers toi). Malgr sa mchancet envers toi, aime-le comme toi-mme, et ce faisant, tu pourras attendrir son cur, car il pensera: Cet homme maime malgr le tort que je lui ai fait , et cela lamnera se repentir. A une poque o tant dhommes taient idoltres et hassaient Avraham et Sarah (comme lidoltre hait quiconque est proche de D.), Avraham et Sarah exprimaient envers tous un amour et une affection immenses et ramenaient D. ceux qui taient loigns de Lui. Cest la raison pour laquelle Rabbi Akiva dit que lamour du prochain est un principe fondamental de la Torah. Autrefois, les gens taient prts mourir pour sanctifier le Nom de D. et aimaient leur prochain, mme sil tait mchant. Mais les hommes deviennent plus faibles de gnration en gnration, comme le disent les Sages: Si les gnrations dantan taient semblables des anges, nous sommes semblables des hommes, sils taient semblables des hommes, nous sommes semblables des nes, et mme pas semblables lne de Rabbi Pinchas ben Yar (qui avait refus de manger des graines dont on navait pas prlev la dme) (Shabbat 112b, Yroushalmi Shabbat). Sil en est ainsi, comment pouvons-nous obir au commande-

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ment daimer son prochain sil est mchant envers nous, et de plus, comment est-il possible de demander chacun de ressentir envers son prochain exactement ce quil ressent envers lui-mme? Les Sages racontent (Shabbat 31a) quun homme venu voir Hillel lAncien, lui dit: Convertis-moi et enseigne-moi toute la Torah tant que je suis capable de me tenir sur une seule jambe . Hillel lui rpondit: Ce que tu juges hassable, ne le fais pas ton prochain. Maintenant va tudier . Pourquoi a-t-il rpondu ainsi, et pourquoi ne lui a-t-il pas dit: aime ton prochain comme toi-mme ? Nous savons que les Enfants dIsral, avant le don de la Torah, avaient eu besoin dune prparation de quarante-neuf jours, soit sept semaines, avant de recevoir la Torah. Le Gaon Rabbi Isral Salanter crit ce sujet que les quarante-neuf jours taient une prparation aux quarante-huit vertus ncessaires pour acqurir la Torah (Avot VI:6), le quarante-neuvime jour tant le jour o lon rvise tout ce que lon a appris afin dtre prt recevoir la Torah . Ce nest quen liminant ses dfauts que lhomme peut acqurir la Torah qui est lapanage de D. (Avot VI:10). Il est certain que ce nest que lorsque lon a effac toutes les mauvaises penses de son cur, que lon peut ressentir lamour du prochain, car lhostilit et la haine des uns pour les autres viennent de la jalousie, de lanimosit, de la calomnie etc. Quiconque a acquis la Torah et a intgr en lui les qualits de cur quelle enseigne, parvient sans aucune difficult ressentir un amour parfait du prochain. Cest grce lacquisition de la Torah que lon parvient lamour dIsral. Les Sages disent (Avot III:17): Sans savoir-vivre il ny a pas de Torah, sans Torah il ny a pas de savoirvivre et (Yroushalmi Haguiga I:7): ltude de la Torah et sa lumire nous conduisent dans le bon chemin . Cest la Torah qui nous permet dliminer lun aprs lautre nos dfauts et de ressentir un grand amour pour notre prochain, recha, mme si celui-ci est ra lecha, mchant envers nous. Celui qui na aucune connaissance de la Torah, ne la jamais tudie de sa vie, na pas de savoir-vivre ne peut pas aimer son prochain, plus forte raison sil est mchant. Afin de comprendre que cet amour est un principe fondamental et non pas une loi parmi dautres, il faut tudier beaucoup. Cela explique pourquoi Hillel na pas dit ce candidat la conversion aime ton prochain comme toi-mme mais lui a rpondu par un principe ngatif: Ce que tu hais, ne le fais pas aux autres . Cest--dire: de mme que tu ne voudrais pas que quelquun te fasse du mal, ne fais pas, toi, de mal autrui, de mme que tu ne veux pas que les autres disent du mal de toi, ne dis pas, toi, du mal de ton prochain, ne donne pas manger un autre un mets peu apptissant (ou interdit) dont tu ne voudrais pas toi-mme. Ce langage-l, mme un non-Juif, et un candidat la conversion qui nont jamais rien appris de la Torah peuvent le comprendre, mais pour comprendre aime ton prochain comme toi-mme qui contient toute la Torah, il faut tudier la Torah et ce nest pas une dmarche que seule lintelligence permet. Nous arrivons maintenant comprendre comment parvenir lamour dIsral. Tous les Juifs sont garants les uns des autres (Shavouot 39a), lme de chacun est lie celle des autres. Si lui-mme ressent la part divine qui est en lui, il ressent ncessairement aussi que lme de son prochain est attache la sienne. Son me le porte vers lautre, puisque tous deux sont semblables et originaires de la mme source dont toutes les mes dcoulent, tous deux viennent de ce lieu qui se trouve sous le Trne de Gloire, origine de toutes les mes (Zohar III 29b). Il est dit dans la Torah au sujet des Chrubins qui surmontent lArche Sainte (Shemot 25:19): Fais ressortir un chrubin dun ct, et un chrubin du ct oppos . Ces Chrubins, qui symbolisent lunion et lamour de D. pour Son peuple, ne sont pas spars lun de lautre, car ils ont les ailes tendues en avant au-dessus du propitiatoire, et leurs visages sont tourns lun vers lautre... (Shemot 25:20). Le propitiatoire recouvre lArche dAlliance qui contient les Tables de la Loi (ibid. v. 16) ce qui symbolise le fait que la Torah doit siger dans le cur de lhomme, dans ses entrailles, comme il est crit (Thilim 40:9): Ta loi a pntr jusquau fond de mes entrailles , et les Sages ont expliqu propos de lexpression Le Saint qui rside en toi (Osha 11:9): Cest comme si le Saint rsidait au fond de tes entrailles (Taanith 11a). Si les Chrubins symbolisent lunit dIsral, pourquoi sont-ils placs dans le Saint des Saints? Il semble quil aurait t prfrable de les placer en dehors, pour montrer que la Prsence de D. rgne sur Isral lorsque nous sommes unis, et chacun en tirerait la leon que nous devons nous conduire fraternellement les uns envers les autres.

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En fait, lessentiel de lamour du prochain est cach dans le cur, sans manifestations extrieures, cest-dire quil faut aimer son prochain comme soi-mme, sans ostentation. Nous ne pouvons ressentir cet amour que lorsque la Torah est dans nos entrailles et dans nos fibres, comme les Tables de la Loi sont dans lArche dAlliance, une alliance entre tous les Juifs, puisque la Torah est une alliance (Shabbat 33a), et les paroles de la Torah sont un serment (Pessahim 38b), un serment dalliance et damour entre les Juifs. Comment y parvenir? Dans lintimit du cur, comme les Chrubins qui sont placs dans le secret du Saint des Saints. Il est crit (Shemot 25:8): Ils Me construiront un sanctuaire pour que Je rside parmi eux . Si D. peut faire rsider Sa Prsence sur des planches de bois et des pierres (le Sanctuaire se rfre aussi au Temple), Il atteindra le fond du cur et de la pense de tout homme dot de qualits de base, dans le sens o il est dit: une conduite honnte prcde la connaissance de la Torah (Avot). Nous y parvenons si nous prenons exemple sur les Patriarches et les Matriarches, et sur ces Chrubins dans le Saint des Saints. Si nous calquons notre conduite sur la leur, notre rcompense sera grande en ce monde et dans lautre. Amen!

Lenracinement du mauvais penchant - le pch est tapi sur le seuil


Il est crit: [Avraham] leur parla ainsi: Si vous trouvez bon que jensevelisse mon mort... quil me cde le Caveau de Machpela qui est lui... quil me le cde contre argent comptant... Efron rpondit... le champ, je te le donne et le caveau qui sy trouve je te le donne aux yeux de tous mes concitoyens... une terre qui vaut quatre cents sicles dargent, quest-ce entre nous? Enterre-l ton mort. Avraham compta le prix quEfron avait nonc (Brshit 23:8-16). La discussion entre Avraham et Efron porte sur le paiement. Avraham offre un bon prix pour le Caveau de Machpela et Efron le Hithen, de son ct, lui propose en cadeau le Caveau avec le champ qui lentoure, mais en fin de compte Efron parle beaucoup et ne ralise pas une seule de ses promesses (Babba Metzya 87a), et il exige quatre cents sicles dargent pour le caveau, en ajoutant mme: quest-ce entre nous? Les commentateurs remarquent ce sujet quAvraham ne demande qu acheter le Caveau qui tait au bout du champ, tandis quEfron prcise plusieurs fois le champ et le caveau . Pourquoi veut-il lui donner le champ en plus du caveau, alors quAvraham ne le lui demande pas? Finalement, Avraham achte aussi le champ, comme il est crit (ibid. 17-18): Ainsi le champ dEfron, situ Machpela en face de Mamr, le champ avec son caveau, les arbres qui le couvraient dans toute son tendue la ronde, fut dvolu Avraham comme acquisition, en prsence des fils de Heth . Pourquoi, en fait, Avraham achte-t-il aussi le champ? Pour expliquer cela, il faut savoir que lon trouve toujours limpuret parallle la saintet, parasite qui sattache et qui se nourrit de la saintet. Si elle ne trouve pas de nourriture, elle meurt delle-mme et disparat. Comment peut-on effectivement empcher limpuret de se nourrir? Grce lamlioration des qualits personnelles, ltude assidue de la Torah, la prire sincre, et aux bndictions que lon dit avec lintention adquate. Ce sont ces choses-l qui empchent limpuret de salimenter et la font mme disparatre, ce qui accrot la saintet, la renforce et lui permet de grandir et de se propager. Et alors le Nom de D. est glorifi dans le monde, comme il est dit dAvraham quil invoqua le Nom de D. et enseigna aux gens linvoquer (Sotah 10b, Yalkout Shimoni, Hay Sarah 27). Nous pouvons expliquer quEfron dsirait donner Avraham le champ en plus du caveau, de deux faons: 1. Efron a beaucoup parl mais na pas traduit ses paroles en actes et personne ntait plus pervers que lui. Pour gagner les curs des habitants de sa ville, afin dtre honor par eux, il a montr tous combien il tait gnreux et prt venir au secours des ncessiteux; non seulement il donne le Caveau mais il consent aussi donner gratuitement le champ qui lentoure! Cela le rendra trs riche et il aura droit des louanges ternelles, pour avoir donn le caveau et le champ nos Patriarches. 2. Efron veut donner le champ en plus du caveau, afin que son nom lui, Efron limpur, soit pour toujours inscrit sur le caveau ct de celui dAvraham, ce qui immortaliserait son souvenir. Mais Avraham a compris les mauvaises intentions dEfron et, dsirant les saper, il refusa ce cadeau. Il voulait, lui, extirper le nom dEfron de ce lieu, et prouver aux yeux du monde entier quEfron tait hypo-

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crite et mal intentionn; cest pourquoi il paya les quatre cents sicles dargent en monnaie tintante. Cest justement pour cela que le nom dEfron est maudit, comme il est crit (Mishley 10:7): Que le nom des mchants pourrisse , et ainsi limpuret ne pourra plus se nourrir de la saintet du lieu. Avraham acheta finalement le champ, bien quil nen ait eu aucun besoin. Mais voyant la grande effronterie dEfron, et dsol de sa grande impuret, il ne dsira pas tre son voisin et donner tout le monde loccasion de dire que le caveau appartenant Avraham se trouvait au bout du champ dEfron. Une telle association aurait profit Efron et cest pourquoi Avraham accepta tout de suite dacqurir le champ avec le Caveau. Ceci dit, la mchancet dEfron prsente un autre aspect. Dans le rcit de lenterrement de Sarah, le mot enterrer prcde six reprises le mot ton mort . Ce nest qu la fin du rcit quEfron dit (ibid. 23:15): Ton mort, enterre-le . Pourquoi aprs la conclusion de la vente, lordre des mots est-il invers? Les gens du pays se rfraient Sarah avec respect, et par respect, ils mentionnaient lenterrement avant la mort, pour ne pas commencer leurs phrases par le mot mort . Mme Efron, qui tait mchant et trompeur, sexprimait envers elle avec respect. Et pourtant, la fin, il a rvl sa grande honte tout son mpris: 1) Tout dabord il a dclar devant tous les habitants de sa ville quil donnait gratuitement le caveau Avraham, et en fin de compte il en demande un prix norme, en argent comptant. 2) Lorsquil dit Avraham quel prix il voulait pour la vente, il ajouta avec ddain: et ton mort, enterre-le . Ce ddain est typique des gens mchants, qui parlent des hommes vertueux avec respect, mais en fin de compte, les mprisent. Tout ce qui est considr comme bon par les mchants est considr comme mauvais par les hommes vertueux (Ybamot 103a, Zohar I 141a). Il faut viter ces gens-l comme la peste. Cela enseigne chacun sloigner dun mauvais voisin (Avot I:7), et viter de recevoir des cadeaux de quelquun de mchant, pour ne pas satisfaire sa mchancet et lui donner une raison de senorgueillir et de chercher dominer. De plus, un tel cadeau va aussi avoir une influence sur celui qui le reoit. Pourtant, lhomme vertueux, grce sa saintet et sa prire, peut liminer limpuret dont le cadeau est entach en le faisant sien par une acquisition complte et ainsi en oprer la purification. Ceci concerne les gens qui sont simplement mchants. Par contre, lhomme vertueux doit refuser tout commerce avec les gens pervers dont lattitude est plus grave. Lhomme vertueux doit absolument viter de recevoir deux des cadeaux. Le pouvoir de limpuret vient du mauvais penchant, et nous voyons combien est puissant le mauvais penchant, qui trouve toujours le moyen daccompagner lhomme et de sattacher lui, comme les Sages le disent (Shabbat 198b): Aujourdhui il lui dit fais ceci, demain fais cela... Cest chez lui un art. Il est capable de convaincre lhomme quen fait il ne veut que son bien, quil ne cherche qu laider, comme si sans lui lhomme ne pouvait pas vivre. Lhomme doit en toute circonstance surmonter le mauvais penchant et le draciner de son cur, mme si cela lui cote, car finalement, le mauvais penchant est un roi vieux et bte (Kohlet Rabba 4:15), et il ne faut pas couter un vieux qui radote... Il faut viter les plaisirs passagers quil fait miroiter et le repousser vigoureusement, lui et ses conseils. En rejetant ses arguments, on montre publiquement tous combien ses conseils sont mauvais, comme la fait Avraham qui refusa de recevoir un cadeau dEfron et acheta le champ et le caveau au prix fort, afin de lcarter de lui autant que possible. Il est du devoir de lhomme vertueux de dmasquer les stratagmes du mauvais penchant qui ne fait que se moquer des gens en leur faisant croire quil est leur ami, quil veut leur bien, quil dfend leurs intrts, uniquement pour se faire une rputation et se faire accepter. Cest lessence mme dEfron dont le nom est li celui de Pharaon qui est le prototype du mal et de limpuret (voir Zohar II 17a, 52b), et qui a voulu se faire une renomme parmi les fils de Heth pour mieux les dominer. Cest ce qui est crit dans la Torah: Le pch est tapi sur le seuil (Brshit 4:7), car lorsque lhomme a le malheur de lui ouvrir la moindre brche, quil lcoute et suit ses conseils, il sensuit ncessairement que le Satan - le mauvais penchant - qui tout dabord tait tapi sur le seuil, va ensuite lhabiter, et devenir le matre de la maison. Mais celui qui ouvre une brche la parole de D., comme le disent les Sages

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(Shir HaShirim Rabba 5:3): Ouvrez-moi seulement une brche de la grandeur du chas dune aiguille , D. ouvre les portes toutes grandes. Il est sauv de ce Satan, dlivr de limpuret, et sanctifi dans le service exclusif de D. Quelle est la voie suivre? Avraham a refus loffre gratuite dEfron. Cela nous enseigne que nous devons nous loigner des hommes mchants et refuser leurs cadeaux, afin quils naient aucune emprise sur nous.

La bndiction de D. Avraham est valable pour tous les temps


Avraham tait vieux, avanc en ge, et lEternel bnit Avraham en tout (Brshit 24:1). Les Sages expliquent (Brshit Rabba 51:2): partout o il est crit et lEternel , il sagit de D. et de la Cour cleste . Et donc ici aussi, D. avec toute Sa Cour bnit Avraham. Pourquoi lAssemble cleste a-t-elle joint ses bndictions celles de D.? Parce qu Avraham fut prouv dix fois et il surmonta toutes les preuves (Avot V:3), et parce qu Avraham a enseign tous invoquer le Nom de D. (Sotah 10b, Yalkout Shimoni Hay Sarah 27). Cest pourquoi il reut une double bndiction, celle de D. et celle de tous les anges. Apparemment, il faut comprendre pourquoi il tait ncessaire lAssemble des anges de bnir Avraham. La bndiction de D. ne suffit-elle pas pour bnir Avraham de toutes les bndictions cites (voir Bamidbar 11:23), Lui qui est la source de toutes les bndictions donne la Sienne et cela ne suffit-il pas? Pour expliquer cela, remarquons que, dans lordre naturel des choses, aucun tre enfant par une femme naurait la force de surmonter les dix preuves dAvraham, et pourtant, la dernire, celle du sacrifice dYitshak, il a montr que son amour de D. tait si fort quil dpassait son amour pour son propre fils. Avraham a fait ses preuves, il a limin son mauvais penchant dans ses paroles, ses penses et ses actes. Le Satan voulait le faire faillir et lempcher dcouter la voix de D., mais Avraham la vaincu, et la chass. Les anges ont constat tout cela et ils ont voulu joindre leurs bndictions la bndiction de D., afin de nous faire savoir quAvraham mritait toutes les bndictions que D. lui avait donnes. Les anges lont acclam et lont bni aussi. Cette bndiction des anges envers Avraham, en accord avec celle de D., a un sens important et profond. Si les descendants dAvraham fautent et que les accusateurs les condamnent, les anges ne se joignent pas ces accusations car ils se souviennent des mrites dAvraham et ils se font les avocats de tout Isral, dans le sens o les actes des pres sont un signe pour leurs enfants (Sotah 34a). Avraham est un signe que ses enfants aussi sont bnis et ne peuvent pas tre accuss, car la bienveillance et la misricorde dAvraham les protgent, et de mme, D. pardonnera leurs fautes et effacera leurs pchs et Il les dfendra afin dannuler toutes leurs transgressions. Cela explique aussi pourquoi D. a accept que les anges se joignent Lui pour bnir Avraham. D. est appel le Pre dIsral, comme nous le disons dans la prire: Notre Pre misricordieux , et nous sommes Ses enfants, cest pourquoi Il est proche de nous pour Se faire notre avocat, comme il est dit D. est proche dIsral (Esther Rabba 7:17). SIl est proche dIsral, et que par ailleurs la loi stipule que les proches ne peuvent pas servir de tmoins pour les membres de leur famille (Makot 5b), comment peutIl tmoigner en notre faveur et se faire notre avocat? Cest pourquoi Il doit Sadjoindre lavis favorable des anges lorsque Isral fait appel au mrite des Patriarches, comme les Sages lont dit (Shabbat 55a, Yroushalmi Sanhdrin X:1), le mrite des Patriarches est inpuisable . Et les Juifs bnficient donc du mrite dAvraham pour tous les temps. D. fait taire les accusateurs, car les anges aussi ont bni Avraham et sa descendance aprs lui. Ils deviennent eux-mmes les avocats dIsral et font taire lAccusateur et sa cohorte. Cest la raison pour laquelle D. a accept de joindre la bndiction de la Cour cleste celle quIl a donne Avraham et sa descendance aprs lui. Les anges ont lou D. pour les bndictions quIl a donnes Avraham et ses enfants qui sont appels les enfants de lEternel comme il est crit (Osha 2: 1): Les fils du D. vivant , pour tous les temps. Nous pouvons trouver aussi une allusion cela dans le verset lEternel bnit Avraham en tout . Le mot bachol, (en tout) a la mme valeur numrique que deux fois le Nom de D., cest--dire une fois la bndiction de D. et une fois celle des anges qui ont bni Avraham et sa descendance, au nom de D., pour toujours.

Parachat hay sarah Nos dfauts nous loignent de D.

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Avraham tait vieux, avanc en ge... et Avraham dit son serviteur... je tadjure par lEternel D. du ciel et de la terre de ne pas choisir une pouse pour mon fils parmi les filles de Canaan o jhabite. Va dans mon pays et mon lieu de naissance et choisis une pouse pour mon fils, pour Yitshak (Brshit 24:1-4). Jai entendu dire au nom de Rabbeinou Nissim (dans ses commentaires): Pourquoi Avraham ne voulait-il pas choisir pour son fils Yitshak une pouse parmi les filles dAnr, Eshkol et Mamr, ou celles des habitants du pays? Si vous pensez que cest parce quils taient idoltres, on peut rtorquer que les enfants de Laban ainsi que leurs gens taient idoltres. En effet, Laban dit Elizer (Brshit 24:31): Jai prpar la maison et il y a de la place pour les chameaux et les Sages expliquent: Laban a enlev les idoles qui sy trouvaient (Brshit Rabba 60:9). Nous pouvons aussi remarquer que si Avraham convertissait les hommes et Sarah les femmes, il devait y avoir beaucoup de gens vertueux autour deux, des gens qui suivaient la voie de D. grce Avraham et Sarah. Pourquoi ne pouvait-il pas choisir parmi eux une pouse pour son fils Yitshak? Pourquoi voulait-il justement une femme de sa famille, bien quelle ait t idoltre? Lorsque Avraham dit Elizer de ne pas choisir une pouse parmi les filles de Canaan o jhabite , il incluait parmi les gens du pays les filles dAnr, Eshkol et Mamr (Yalkout Shimoni Hay Sarah, 107). A propos des habitants de Sodome il est dit (Brshit 13:13): ils taient trs pervers et mchants envers D. et les Sages expliquent (Tanhouma Vayra 7, Pessikta Zouta Lech Lecha 13:13): mchants - les uns envers les autres, pervers - dans la promiscuit, envers D. - ils blasphmaient, beaucoup - idoltres et criminels. Cest dire quils taient dpravs surtout dans leurs relations envers le prochain, ce qui leur valut dtre condamns la destruction et ils nont pas de place dans le monde venir (Sanhdrin 109a). Quiconque venait habiter dans leur entourage tait expos leur mauvaise influence, cest pourquoi la Torah nous commande dliminer et danantir les sept peuples Canaanens qui considrent comme leur la terre dIsral (Rambam Sefer HaMitzvot, Commandement Positif 187, Sefer Hahinouch 425), comme il est crit (Dvarim 7:2): Tu les frapperas danathme, point de pacte avec eux, point de merci... car il dtournera ton fils de Moi et [tes enfants] iront adorer des idoles trangres (ibid. v. 4). Sils restent parmi nous, il est certain que nous finirons par imiter leurs murs, ce qui amnera malheureusement la ralisation de la fin de ce mme verset: la colre de lEternel sallumera contre vous et vous anantira . De plus, il est dit des peuples Cananens (Bamidbar 13:32): Tous les peuples que nous avons vus sont des gens de taille , ce qui en Hbreu inclut le sens de des gens mauvais , comme le traduit Yonathan ben Ouziel, et comme Rashi lexplique dans son commentaire: un homme querelleur - un homme de taille , pour indiquer leur mchancet. Un homme mchant a beaucoup de mal changer sa nature, si ce nest par un grand travail sur lui-mme et des efforts normes, sans garantie de russite. Cest pourquoi, cause de la perversit de son entourage, Isral a d compter quarante-neuf jours avant de recevoir la Torah, des jours de prparation et de rhabilitation personnelle qui lui permettront de recevoir la Torah. Le chiffre quarante-neuf correspond au mot mida (qualit, vertu), cest--dire que les Enfants dIsral doivent extirper les mauvaises habitudes acquises durant leur exil en Egypte, et ensuite, il leur est command de disperser, dliminer, et danantir tous les habitants du pays, sous peine de retomber dans leurs faiblesses anciennes, car il est trs facile dapprendre et dimiter les mauvaises murs de lentourage. Avraham voyait que les gens quil avait convertis, en arrivant dans le pays o habitaient des Cananens et des Prizites, imitaient leurs manires et retrouvaient leurs mauvaises habitudes passes et cest pourquoi il ne voulait pas sunir eux. Il prfrait pour Yitshak une pouse de sa famille. Bien que ses parents aient t eux aussi idoltres, ils ntaient pas pervers, et il y avait mme parmi eux des gens de bien. Cest le cas de Rivka, qui ds lge de trois ans, possdait une gnrosit dme exceptionnelle, elle qui a donn boire Elizer et ses chameaux sans quil lui ait demand de le faire, comme il est crit (Brshit 24: 46): Bois mon matre, et puis jabreuverai les chameaux . Elizer aurait pu lui-mme faire puiser leau par ses nombreux serviteurs, mais elle a couru avec zle pour labreuver. Elizer lobservait stupfait. Il sut que D. lui assurait le succs de sa mission quand il vit que Rivka comprenait et assurait les besoins de chacun, sans quon le lui ait demand. Elle sest fait connatre aussi par ses qualits spirituelles, comme

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le disent les Sages (Brshit Rabba 63:4): son frre tait malhonnte, son pre tait malhonnte, ainsi que tous les habitants du lieu, et cette femme vertueuse se distinguait comme une rose parmi les ronces (Brshit Rabba 60:6). Un idoltre peut tout de mme faire preuve de qualits et il a encore la possibilit dopter pour la vrit. Nous avons lexemple du roi Ahav, qui tait, lui ainsi que tous les gens de sa gnration, idoltres, mais victorieux dans leurs guerres, car il ne se trouvait pas parmi eux de gens querelleurs et mdisants, et ils taient dous de qualits. Par contre, au temps du roi David et du roi Shal, parfois ils partaient en guerre et taient vaincus, car il y avait parmi eux des gens mdisants (Vayikra Rabba 26:2, Yroushalmi Pah 1: 1). Un idoltre est encore capable de changer et de slever, sil cherche connatre la vrit par ltude et la rflexion, car ses yeux souvrent alors, et il peut distinguer le vrai du faux et grimper larbre de la Vie. Au temps o Isral suivait les faux prophtes de Baal, o toutes les tables taient recouvertes de vomissure et dexcrments, sans un coin propre (Ishaya 28:8), et que lidoltrie se pratiquait partout, le prophte Eliyahou runit le peuple et le rprimanda svrement. Ils reconnurent alors leur erreur: Ils se prosternrent et dirent: LEternel est le vrai D.! LEternel est le vrai D.! (Melachim I, 18:39). Un clair de vrit suffit liminer lobscurit et la mort. Il a dj t dit (Tzda Laderech 12): Un peu de lumire chasse beaucoup dobscurit . Il est beaucoup plus difficile de corriger des dfauts personnels, cela exige un dur et patient travail sur soi, et le succs final dpend de beaucoup de facteurs. Un moraliste a remarqu quil est plus facile dtudier tous les traits du Talmud que de corriger un seul dfaut... et il existe une discussion dans la Mishna (Avot II:13-14) afin de savoir quelle est la qualit principale que lhomme doit choisir comme rgle de conduite, car le sens de la vie de lhomme dpend de son lvation morale, et de sa conduite. Bien quidoltres, les gens de la famille dAvraham avaient en eux des caractristiques qui leur permettaient de dvelopper leurs bonnes tendances. Mme chez Laban lAramen nous trouvons de la bont cache, puisquil a pris la peine de vider la maison pour Elizer, serviteur dAvraham. Et plus tard, il reoit bras ouverts Yaakov qui se prsente chez lui dnu de tout - aprs avoir t poursuivi et dpouill de tous ses biens par Eliphaz, le fils de son frre Essav (Sefer HaYashar, Vayetz). Laban laccueille chez lui, esprant sans doute recevoir une rcompense et tirer quelque profit, comme il est crit: Quoi! parce que tu es mon parent, tu me servirais gratuitement? (Brshit 29:15, Rashi ad. loc.), mais il navait aucune assurance quil y gagnerait quelque chose. Il ne fait pas de doute quen comparaison des gens pervers de Sodome et de Gomorrhe, Laban devait avoir bon cur. Nous constatons que le Nom de D. est mentionn dans la maison de Laban et de Bthouel: Viens, bni de D.! (Brshit 24:31), comme la dcid lEternel (ibid. 51). De plus, en entendant le rcit dElizer, la famille de Laban a reconnu que tous les vnements miraculeux quElizer leur raconte sont dus la Providence divine, et ils ont dit La chose mane de D. Lui-mme! (ibid. 50). Bien que les gens de la famille dAvraham aient t idoltres, lespoir de les faire revenir la croyance en D. Un et Unique ntait pas perdu, ce qui est impossible pour des gens qui possdent des dfauts intrinsques, surtout dans leurs relations envers le prochain, comme la jalousie, la haine, la cruaut, la colre, la mdisance et la mchancet. Il est trs difficile pour de telles personnes de changer et dacqurir des qualits de cur. Nous voyons que D. Lui-mme, qui pardonne les fautes envers Lui, ne pardonne pas les fautes commises envers le prochain, si le coupable nobtient pas le pardon de son prochain (Yoma 85b). Ces fautes-l loignent grandement de D. car elles contredisent le respect et lamour dus au prochain et le mal quelles causent est une insulte envers D. Cest pourquoi chacun doit se conduire correctement, afin dtre heureux en ce monde et dans lautre monde.

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Lducation des enfants dpend des parents
Il est crit (Brchith 25:19): Telles sont les gnrations dYitshak fils dAvraham. Avraham engendra Yitshak. Et Yitshak avait quarante ans... Ce verset est tonnant sur plusieurs plans. 1. Si la Torah dit Telles sont les gnrations dYitshak , elle devrait mentionner Yaakov et Essav. Pourquoi dit-elle Avraham engendra Yitshak , et pourquoi la fin du verset nest-elle pas la suite logique de son dbut? 2. Pourquoi la fin du verset dit-elle Avraham engendra Yitshak ? Si cest pour donner une rponse aux railleurs qui disaient que Sarah avait conu Yitshak dAvimelech (Baba Metsya 87a, Tanhouma Toledoth 1), il est dj dit au dbut du verset quYitshak est le fils dAvraham, ce qui indique que les traits du visage dYitshak taient identiques ceux dAvraham, de qui il est n et qui il ressemblait en tout (Brchith Rabah 53:10, 84:8). Quest-ce que la fin du verset nous enseigne de plus? 3. De mme lexpression Avraham Holid (littralement enfanta ) Yitshak est trange, puisquun homme nenfante pas. 4. Que vient nous apprendre la Torah lorsquelle crit (Brchith 25:20): Yitshak avait quarante ans lorsquil prit Rivka pour pouse . Yaakov, lui, avait quatre-vingt-quatre ans lorsquil pousa deux surs, Rahel et Lah (Brchith Rabah 70:17), mais la Torah crite ne le mentionne pas, comme elle ne donne pas lge dAvraham au moment de son mariage. 5. Par la suite il est dit (ibid. 25:21): Yitshak implora lEternel au sujet de sa femme qui tait strile . Rivka tait strile, ainsi quYitshak. Il leur fallait beaucoup prier pour faire annuler ce dcret. Pourquoi la section commence-t-elle par les mots: Telles sont les gnrations dYitshak , alors quil est ici question de Rivka et dYitshak qui sont striles? Pourquoi la Torah parle-t-elle dengendrements, alors quils nont pas encore denfants? Pour rpondre ces questions, il faut rappeler que lessentiel des engendrements des hommes vertueux sont les commandements quils accomplissent et leurs bonnes actions (Brchith Rabah 30:6; Rachi au dbut de la section Noah). Ces bonnes actions produisent des fruits qui sont bons et doux, comme il est dit: Luvre du Juste est un arbre de vie, gagner les curs est le fait du Sage (Michley 11:30), des fruits qui ont les qualits de celui qui les engendre, et qui sont ses engendrements. Plus la connaissance quont les hommes vertueux est grande, mieux ils pntrent les secrets de D., et leur capacit de produire augmente et ne les abandonne pas, ni eux ni leurs enfants, jusqu la fin des temps. Cest ce dont la Torah tmoigne propos dYitshak, dont tous les actes taient bons depuis son enfance grce lducation quil avait reue dAvraham. Cest ce qui est crit: Avraham enfanta Yitshak , prcisment (la fin du verset est maintenant comprhensible et elle a mme un sens spcifique, ainsi que le mot enfanta ), tels sont ses engendrements, car il lui ressemblait dans tous ses actes. Avraham a investi beaucoup defforts dans lducation de son fils Yitshak. Sil navait pas chass Ichmal de sa maison comme le voulait Sarah (Brchith 21:10): Chasse cette servante et son fils, car le fils de cette servante nhritera pas avec mon fils, avec Yitshak , les consquences nauraient pas t aussi fructueuses, car Yitshak aurait pu tre influenc par la mauvaise conduite dIchmal. Bien quAvraham ait eu beaucoup denfants dHagar, comme il est crit (ibid. 25:4): Tous ceux-l sont les enfants de Ktoura , cest Yitshak qui reut lessentiel et le meilleur de son attention, car Avraham avait plac en lui tous ses espoirs pour quil suive sa voie. Cest ce qui est crit: Telles sont les gnrations dYitshak, fils dAvraham . Llvation spirituelle laquelle Yitshak est parvenu vient du fait quAvraham la engendr et a investi en lui toutes ses forces spirituelles, et il a tu son affection pour Ichmal en lloignant dYitshak, de mme quil a renvoy les enfants de Ktoura (Brchith Rabah 61:7), afin quils naient pas dinfluence sur Yitshak. Cest ce que disent les Sages (Baba Bathra 71a-b): Lorsque Avraham mourut,

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tous les peuples du monde ont dit: malheur la gnration qui perd son dirigeant, malheur au bateau qui perd son capitaine . Ils pensaient que le monde tomberait alors dans lobscurit, et ils ne savaient pas qui tait lhritier lgitime dAvraham. Mais lorsquils virent que son fils Yitshak avait hrit de toutes les qualits dAvraham, ils comprirent que cest lui qui continuerait dans sa voie. Cela explique que lessentiel des efforts ducatifs ntait ncessaire quenvers Yitshak, fils dAvraham et Sarah, et hritier des bndictions de D. (Brchith Rabah 61:6). Avraham lui-mme tait le fils de Trah, dont il navait reu aucune ducation et cest tout seul et par ses propres efforts quil tait parvenu la connaissance du Crateur (Rambam, Halakhoth Akoum I:3): Ds lge de trois ans (certains disent quarante-huit) il parvint la connaissance de D. (Ndarim 32a; Bamidbar Rabah 18:17), et il est appel Avraham lYvri, (celui qui est pass de lautre ct), car il se tient dun ct et le reste du monde se tient de lautre (Brchith Rabah 42:13). Yaakov ne ncessitait pas autant defforts ducatifs parce quil tait le fils dYitshak et le petit-fils dAvraham, mais Yitshak avait besoin dune ducation attentive et de beaucoup de soins pour guider sa conduite. Il est crit: Yitshak avait quarante ans lorsquil prit Rivka pour pouse pour nous enseigner quYitshak, pendant ses quarante ans de clibat, navait pas faut et navait pas profan le signe de lAlliance. De plus, alors que Rivka tait dj chez lui, il attendit quelle grandisse et soit en ge de se marier (Pirkey DRabbi Elizer 31), et cela grce aux forces quAvraham lui avait instilles. Cela montre que les efforts que les parents investissent dans lducation de leurs enfants ne sont jamais perdus, pas plus que le temps consacr leur enseigner quelles sont les voies de D., et comment Le servir. Avraham est lou pour le temps quil a consacr lducation de ses enfants, puisquil est crit (Brchith 18:19): Pour quil prescrive ses enfants et sa maisonne aprs lui dobserver la voie de lEternel en pratiquant la vertu et la justice . D. rvla Avraham ce quil adviendrait de Sodome et de Gomorrhe, parce quil se souciait de lducation de ses enfants. Les bonnes actions des Patriarches servent dducation leurs enfants. Yitshak savait que sa femme tait strile, quelle ne pouvait pas enfanter. Il aurait pu se sparer delle, comme le disent les Sages (Ybamoth 64a), et comme le veut la loi (Rambam, Ichout 15:7; Choulhan Aroukh Even HaEzer 154:10): Si un homme est mari pendant dix ans et que sa femme ne lui a pas donn denfants, il divorce . Mais Yitshak na pas divorc de sa femme, au contraire, il pria pour elle. Il connaissait ses vertus et ne voyait que ses qualits. Lorsquelle entra dans la tente de Sarah, les trois miracles, la lumire allume, la bndiction de la pte, la nue sur la tente, rapparurent (Brchith Rabah 60:15). Yitshak ne considrait que la vertu et la noblesse de Rivka. En cela, il suivait la voie de son pre qui na vu la beaut de sa femme que pouss par les vnements (Tanhouma Leh Leha 5), comme il le lui dit (Brchith 12:11): Je sais que tu es une femme belle . Lui, ne voyait que ses vertus et son inspiration divine, bien que tous admiraient sa beaut (Mguilah 14a). Mais Avraham ne voyait que ses qualits morales et les efforts quelle faisait pour convertir les femmes (Brchith Rabah 39:21, 84:2). Yitshak suivait le chemin de ses parents. Rachi explique (ad. loc.), Yitshak multiplia les prires et les supplications afin que D. accorde sa femme Rivka des enfants en bonne sant . Il priait vis--vis de sa femme , cest--dire pour navoir des enfants que delle et non pas dune autre, et pour quensemble ils transmettent leur descendance ce quil avait reu de son pre Avraham. La grce est mensongre et la beaut phmre, la femme qui craint D. mrite les louanges (Michley 31:30). Toute femme ne dsire pas se consacrer lducation des enfants, mais les Sages louent celles qui le font (Brachoth 17a): De quoi les femmes sont-elles rcompenses? De lducation quelles donnent leurs enfants... La femme daujourdhui qui prfre se parer de vtements et de bijoux afin de plaire son mari, pense sans doute qu Une femme agrable est un plaisir pour lhomme (Brachoth 57b), mais il nen est pas ainsi car une telle proccupation pourrait lamener ngliger les soins dus aux enfants et les astreintes de leur ducation. Si elle se proccupe de sa beaut, son mari sera attir par son apparence et il prtera moins attention lducation des enfants. Nous savons (Tanhouma Ki Tts 1) propos de David HaMelekh que cest parce quil a pous une femme pour sa beaut quAvchalom et Amnon sont ns. Le Midrach cit souligne aussi quil y a un lien de cause effet entre la section de la Torah qui prescrit: Quand tu iras la guerre contre tes ennemis et que lEternel ton D. les livrera entre tes mains et que tu prendras des otages, si tu vois parmi les prisonniers une femme belle

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qui te plat, que tu dsires, tu la prendras pour pouse... (Devarim 21:10-11) et la section qui suit: Si un homme a un fils libertin et rebelle... (ibid. 21:18) car la beaut physique est trompeuse. Par contre, si lon prte moins attention la beaut extrieure qu la beaut intrieure et aux qualits intrinsques, car une femme qui craint D. mrite les louanges (Michley, ch. 30), il est possible de donner une bonne ducation aux enfants et de graver les valeurs spirituelles des parents dans le cur des enfants. Telle tait la grandeur dAvraham qui avait plac tous ses efforts en Yitshak et qui navait vu que la beaut intrieure de Sarah. Cest pourquoi Yitshak lui ressemble dans toutes ses qualits et dans tous ses actes. Yitshak est lou pour avoir continu dans la voie dAvraham, pour lui avoir ressembl, lui qui na pas pous Rivka pour sa beaut. Grce la bonne ducation quYitshak a reue dAvraham, il a pu continuer gnrer dans le monde des bonnes actions, et tre lun des trente-six Justes qui sont les piliers du monde (Soucah 45b). Nous avons des preuves de la noblesse, de la vertu et de la pudeur de Rivka. Personne ne la connaissait, par contre Yitshak tait connu et reconnu par tous pour tre le fils dAvraham. Il tait surtout connu parmi les Philistins, voisins du pays de Canaan. Il est certain quAvimelech, roi des Philistins, connaissait Yitshak comme il avait connu son pre Avraham. Lorsque Yitshak arriva, cause de la famine, au pays des Philistins avec sa femme Rivka (Brchith 26:1), il dit: Elle est ma sur (ibid. v. 7). Ce nest que lorsque Avimelech vit Yitshak jouer avec Rivka quil lui dit (ibid. v. 9): Assurment, cest ta femme , ce qui montre que les gens ne la connaissaient pas et ne savaient pas qui elle tait, tant elle tait pudique et sa beaut tout intrieure, qualit qui est ncessaire pour guider les enfants dans le service de D. Cela nous permet de comprendre ce que disent les Sages (Chir HaChirim Rabah 1:24 entre autres): Au moment de donner la Torah, D. demanda Isral des garants. Ce nest que lorsquils proposrent leurs enfants comme garants que D. accepta . D. savait quAvraham ordonnerait ses enfants dobserver la Torah et den pratiquer les commandements, comme il est crit (Brchith 18:19): Pour quil prescrive ses enfants et sa maisonne aprs lui , cest--dire quils se portent garants de lui, et il est certain que les Patriarches ont institu la garantie des enfants. Ce sont les Patriarches qui ont ancr dans les gnrations futures la capacit de surmonter toutes les preuves et de les vaincre comme eux-mmes les ont vaincues. Tout ce quils ont fait est un exemple pour leurs enfants (Soucah 34a). Les pres ne peuvent pas tre les garants de leurs enfants, puisque Yitshak est le garant dAvraham, et Yaakov le garant dYitshak, et les enfants de Yaakov sont ses garants jusqu lexil en Egypte - aprs cela ils oublirent la Torah cause de loppression de lesclavage. Cest lenfant qui veille sur la tradition des anctres. Le verset: Telles sont les gnrations dYitshak, fils dAvraham, Avraham engendra Yitshak indique que les engendrements essentiels dYitshak proviennent dAvraham et de sa capacit enseigner ses enfants le service de D. Cest dans ce sens qu Avraham engendra Yitshak , afin quil se porte garant de lui, faute de quoi il naurait pu sassurer un avenir. Cela nous permet de comprendre le verset (Ichaya 29:22): Ainsi parle lEternel la maison de Yaakov, le librateur dAvraham . Il est difficile de comprendre pourquoi les bonnes actions dAvraham ne lui suffisent pas se librer, et pourquoi il a besoin de Yaakov pour le sauver. De plus, pourquoi nest-ce pas Yitshak qui a sauv Avraham, grce son sacrifice, pur et parfait? Pourtant, sur la base de ce que nous avons dit plus haut, cela est clair. Avraham eut des enfants imparfaits, dont Ichmal, qui ntaient pas capables dtre ses garants. De mme Yitshak a donn naissance Essav qui ntait pas un garant acceptable, puisque les fautes et la mauvaise conduite dEssav ont caus laffaiblissement de la vue dYitshak (Tanhouma Toledoth 8), comme il est dit (Brchith 27:1): Yitshak vieillit et sa vue sobscurcit . Cest aussi cause de la mauvaise conduite dEssav que la vie dAvraham fut abrge et il est mort avant son temps afin de ne pas voir son petit-fils prendre un mauvais chemin (Baba Bathra 16b; Brchith Rabah 63:16). Loin de nous lintention de dire quAvraham et Yitshak taient imparfaits, au contraire ils taient parfaits et saints, mais ils craignaient la mauvaise influence dIchmal et dEssav. Par contre, Yaakov a engendr ses enfants dans la saintet et ils taient tous vertueux et saints comme lui (Pessahim 56a; Sifri Devarim 6:4). Lorsque Yaakov quitte Ber Cheva et se marie, il est capable de

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surmonter les preuves que Laban lui fait subir, pires que celles quil subit avec son frre Essav (Brchith Rabah 75:6), et cest lui qui a donn naissance aux tribus de lEternel en tmoignage dIsral (Thilim 122:4). Il est donc, lui, un garant solide, car il est parfait en tout. Il tait un garant solide pour Yitshak son pre et pour Avraham son grand-pre. Celui dont la garantie est solide mrite de venir au secours dAvraham, le pre de la nation et le pre de toutes les nations (Brchith Rabah 46:6), et le premier proclamer la vraie foi. Comment Avraham a-t-il russi dans tout ce quil entreprenait? Srement grce la garantie et au mrite de Yaakov et de ses enfants, grce auxquels il fut sauv de la fournaise ardente, comme le disent les Sages (Brchith Rabah 63:2 entre autres). Tout dpend du mrite des enfants et du pouvoir des parents, et essentiellement du succs dune ducation parfaite.

Le meilleur de lducation des enfants


Il est crit propos de Rivka (Brchith 25:22-23): Les enfants se repoussaient lun lautre dans son sein, et elle dit: Sil en est ainsi, quen est-il de moi? Elle alla consulter lEternel, qui lui dit: Deux nations sont dans ton sein et deux peuples sortiront de tes entrailles; ils se spareront; un peuple sera plus puissant que lautre, et lan sera soumis au plus jeune . Rachi crit ce sujet: Ils se repoussaient, car tous les deux remuaient pour sortir. Lorsque Rivka passait devant les tentes de Chem et Ever, Yaakov poussait pour sortir, et si elle passait devant des lieux o se pratiquait lidoltrie, cest Essav qui tentait de sortir (Brchith Rabah 63:7). Elle alla consulter lEternel auprs de Chem (Brchith Rabah ibid.). Deux nations (Goyim est crit avec deux Youd), ce sont Rabbeinou HaKadoch et Antoninus, dont la table ne manquait ni de navet ni de raifort, t comme hiver (Brachoth 57b; Avodah Zarah 11a); sortiront de tes entrailles et se spareront , ds les entrailles, ils se distingueront lun de lautre, celui-ci dans le mal, celui-l dans le bien . A la lecture du verset, les questions qui se posent mritent autant dexplications que les rponses du Midrach. 1. Rivka na-t-elle pas senti quelle portait des jumeaux dont lun tait bon et lautre pervers? Pourquoi a-t-elle consult Chem et Ever et quel est le sens de leur rponse, si elle savait dj quelle portait deux enfants dans son sein? 2. Rachi explique: il sagit de Rabbeinou HaKadoch et dAntoninus . Quel est le rapport entre les deux nations et justement Rabbeinou HaKadoch et Antoninus? 3. Le Talmud explique propos du verset Son flambeau brillait sur ma tte (Yov 29:3), quune lumire est allume au-dessus de la tte du bb dans le ventre de sa mre et quun ange lui enseigne la Torah (Nidah 30b). Et donc, comment comprendre quEssav, qui un ange enseignait la Torah, ait tent de sortir pour adorer des idoles? Est-ce possible? Rachi rapporte les paroles des Sages (Yrouchalmi Brachoth III:5; Brchith Rabah 34:10) propos du verset (Brchith 8:21): Les tendances du cur de lhomme sont mauvaises ds son enfance , et dit: Le mot son enfance est crit dans la Torah sans la lettre Vav, pour signifier que lenfant est frapp du mauvais penchant ds quil commence remuer dans le ventre de sa mre . Est-ce que lenfance commence ds les premiers mouvements de lenfant? Nous trouvons dans le Talmud (Sanhdrin 91b) qu Antoninus a demand Rabbeinou HaKadoch: Est-ce que le mauvais penchant se saisit de lhomme ds sa conception ou bien au moment de la naissance? Rabbi lui rpondit: ds la conception. Et Antoninus dit Rabbi: sil en tait ainsi, il se rvolterait dans le ventre de sa mre et sortirait. Mais le mauvais penchant ne le saisit qu la naissance. Rabbi dit: Antoninus ma enseign cela, et la Torah soutient son opinion car il est crit (Brchith 4:7): le pch est tapi sur le seuil . Le Pilpoula Harifta cite la question pose par le Maharcha (Sanhdrin ad. loc.): Le Talmud Yoma (82b) demande quelle est la loi concernant une femme enceinte qui ressent le besoin de manger Yom Kippour (comme on sait, le bb est en danger sil nest pas nourri). La question fut prsente Rabbi Hanina. Il leur conseilla: Soufflez dans loreille de la mre que cest aujourdhui le Jour de Kippour, il est possible que cela apaisera sa faim. Mais le bb continuait rclamer manger. Rabbi Hanina a alors appliqu le verset: Ds le sein de leur mre, les mchants sont fourvoys (Thilim 58:4) et effectivement Chabta

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naquit et il fut mchant . Cest donc que le mauvais penchant saisit lhomme dj dans le ventre de sa mre. Pourquoi Rabbi dit-il quil ne le saisit qu la naissance? Le Maharcha pose une autre question: Essav voulait sortir, attir par les idoles, cest donc que le mauvais penchant le dominait dj dans le ventre de sa mre. Pourquoi Rabbi a-t-il accept lopinion dAntoninus? Pourtant, une chose sexplique par lautre. Le verset rapport plus haut: Son flambeau brillait sur ma tte , nous apprend quun ange enseigne la Torah au bb dans le ventre de sa mre, et nous avons demand: sil en est ainsi, comment expliquer quEssav se dbattait pour sortir adorer des idoles alors quil tait sous la direction dun ange? Cest que le mauvais penchant commence dranger lhomme dj dans le sein de sa mre, sans avoir encore une emprise totale sur lui. Cest ce que Rabbi a voulu dire: quil domine lhomme dj dans le ventre de sa mre. Il fondait son opinion sur le cas dEssav qui se dbattait pour sortir adorer les idoles. Mais en fin de compte, il sest rendu lopinion dAntoninus selon laquelle le mauvais penchant na pas encore demprise et ne fait que dranger. Lange, le bon penchant, se tient face lui et il lui enseigne la Torah, et dj dans le ventre de sa mre, il a sur lui une influence (sans le dominer), afin de le guider dans le bon chemin. Tout dpend de llvation de lme elle-mme, et de la faon dont elle vient au monde. Si ds sa conception, elle vient au monde dans la puret et la saintet du pre et de la mre, elle penche vers le bien. Sinon, cette me tendra vers le mal, dj dans le sein de sa mre, malgr les enseignements de lange. Mais ni le bon ni le mauvais penchant nont encore demprise sur elle, et chacun tente de lattirer lui au dtriment de lautre. La domination du mauvais penchant ne commence que le jour de la naissance - comme la fait valoir Antoninus, et Rabbi partage cet avis - conformment au verset: le pch est tapi sur le seuil... Lhomme ne commence tre mauvais qu partir de son enfance. Maintenant nous pouvons comprendre les questions poses par le Maharcha concernant cette femme enceinte qui dsirait manger Yom Kippour, ce qui tendrait indiquer que le mauvais penchant avait dj une emprise sur son enfant. Le fait est que lembryon a des dsirs, mais tout dpend de la mre. Cest elle qui a veill lapptit de son enfant car en voyant cette nourriture, elle la dsire, et elle a communiqu ce dsir au bb. Cest ce que nous avons dit plus haut, que les actes des parents ont une influence sur les enfants, bonne ou - malheureusement - mauvaise. Il est crit que si un enfant ou un adulte dsire une nourriture interdite et impure, il faut vrifier si sa mre na pas peut-tre got quelque nourriture non kacher durant sa grossesse - ce qui aurait eu une influence sur lenfant. Il est possible que Rabbi Hanina ait ordonn de lui murmurer loreille que ctait Kippour, pour que cette mre protge son enfant et quil ne devienne pas avide cause delle. Mais comme elle na pas renonc son dsir, lapptit de lenfant ne sest pas apais non plus, et en fin de compte elle donna naissance un homme mchant. Cette mre tait coupable de ne pas avoir domin son apptit, et ce nest pas sans raison que Rabbi Hanina a appel lenfant mchant . Le mauvais penchant na pas encore demprise sur lenfant dans le ventre de sa mre et tout dpend de linfluence quelle a sur lui. La seconde question du Maharcha concernant Essav est galement lucide. Si Rivka ntait pas passe devant les lieux didoltrie, Essav naurait pas ressenti le dsir de sortir, cest donc Rivka qui a provoqu ces lans, et la puissance impure des idoles a agi sur le bb dans le sein de sa mre. Ceci sajoutait aux autres tendances nfastes quEssav avait dj dans le ventre de sa mre (o le mauvais penchant se fait sentir sans pour autant dominer). Si le mauvais penchant avait domin Essav, il serait effectivement sorti. Comment savons-nous quEssav avait dj, dans le sein de sa mre, de mauvaises tendances? Lorsque Rivka passait devant les temples idoltres, Yaakov ne bronchait pas. Pourquoi? Parce que Rivka navait aucune mauvaise intention lorsquelle passait devant de tels lieux, elle allait son chemin innocemment, sans intention de tirer un plaisir quelconque de lidoltrie, et Yaakov avait une tendance naturelle au bien. Par contre, lorsquelle passait devant les lieux dtude de la Torah de Chem et Ever, cest Yaakov qui se dbattait pour sortir, pouss par le bon penchant. A plus forte raison, lorsquelle tait la maison, Yaakov profitait de la saintet qui y rgnait et il y puisait sa subsistance. Mais Essav na pas profit de la conduite des gens vertueux de la maison (Yoma 38b), ce qui montre quil avait des tendances mauvaises qui ont pris le dessus, et lodeur de lidoltrie le poussait vouloir sortir.

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Nous voyons l combien lembryon est influenable par la mre. Plus elle est sainte et pure, plus elle est capable dinfluencer positivement son enfant, lui traant le chemin de la vie ds sa conception. Les parents doivent sefforcer de minimiser lemprise du mauvais penchant sur leurs enfants non seulement ds leur conception mais mme avant. La Kabalah nous enseigne quel risque plane sur lme au moment o elle descend des mondes suprieurs, du domaine des mes qui se trouve sous le Trne de Gloire (Zohar I, 113a), car le mauvais penchant est dj prt semparer de cette me. La femme doit observer les lois de puret familiale, et se purifier dans le bain rituel avant de sunir son mari, afin que cette union soit sainte et pure comme la loi lexige. Les Sages rapportent (Ndarim 20b) que Rabbi Elazar, lorsquil sunissait sa femme, simaginait tre pouss par le diable, tant tait grande sa crainte de D. Chacun doit savoir que le plaisir quil ressent - que ce soit le plaisir de manger ou le plaisir li au commandement dengendrer - ne doit provenir que de laccomplissement dun devoir et non pas de la satisfaction dun plaisir goste. A un pareil moment, lhomme doit tre reconnaissant envers D. et Le remercier du plaisir qui lui est donn - un plaisir naturel et positif sans lequel il ne pourrait pas engendrer, car sans ce plaisir il naurait aucun dsir. Cest pourquoi ce dsir ne vient que de D. qui veut perptuer le monde, car le monde a t cr non pas pour tre dsert, mais pour tre habit (Ichaya 45:18). Pourtant les Sages disent (Yirouvin 31a; Roch HaChanah 28a): les commandements nont pas t donns pour notre jouissance . Tout plaisir que nous tirons de la ralisation dun commandement na pour but que de servir D. et il faut transformer le plaisir naturel en plaisir dobir la volont de D. Lorsque les Sages disent de Rabbi Elazar quil se sentait comme pouss par le diable, cela signifie quil ne ressentait aucun plaisir goste, autre que celui dobir la volont divine de faire venir au monde une descendance sainte, conformment la volont de D. Il faut surtout veiller sur cette me qui va venir au monde afin quelle ne soit pas entache dimpuret et pollue par lambiance du monde. Cela est possible si lon observe les lois de purification rituelle et les restrictions lies aux relations conjugales, afin de pratiquer ce commandement en toute saintet et en toute puret. Cela nous permet de comprendre le cas de Rivka. Elle savait parfaitement quelle portait des jumeaux, puisque chacun deux se dbattait en elle lorsquelle passait devant des lieux diffrents, et pourtant elle sest dit: Sil en est ainsi quen est-il de moi? et elle alla consulter Chem et Ever. Elle ntait pas sre. Si le mauvais penchant na pas demprise sur lembryon dans le ventre de sa mre mais seulement sa naissance, pourquoi en ce qui la concerne, le mauvais penchant sen prend-il lun de ses enfants qui veut sortir attir par lidoltrie? Cest le sens de Quen est-il de moi? Pourquoi justement chez moi nen estil pas ainsi? Et de plus, elle ne comprenait pas pourquoi chez elle, dans la maison dYitshak, le second enfant ne cherchait pas natre, car enfin la maison dYitshak ntait pas moins attrayante que la maison dtude de Chem et Ever? Cest pourquoi elle est alle consulter Chem et Ever pour savoir pourquoi, pour elle, les choses taient diffrentes. Et ils lui ont rpondu: Tu demandes pourquoi, en toi, le mauvais penchant domine dj lenfant? (Cest en fait le sujet de la discussion entre Rabbi et Antoninus pour savoir quel moment le mauvais penchant se saisit de lhomme). Il y a deux nations dans ton sein, qui se spareront , car la loi est conforme lopinion dAntoninus, que Rabbi a accepte. Sils te font dj souffrir alors quils ne sont pas encore ns, ce nest pas cause du mauvais ou du bon penchant, car lhomme na pas ces penchants dans le ventre de sa mre mais uniquement des tendances implicites. En ce moment, le choix se prsente chacun des enfants de savoir quel chemin il va prendre, sans intervention du bon ou du mauvais penchant. Et en fait, en passant devant les maisons didoltrie lun est pouss par ses tendances au mal et cherche sortir, mais lautre veut sortir justement devant les maisons dtude de la Torah. Quant nous, nous avons lassurance que lan sera soumis au plus jeune , cest--dire le bon penchant, plus jeune que le mauvais puisque lhomme ne le dcouvre qu lge de treize ans (Kohleth Rabah 4:15; Avoth DRabbi Nathan 16:2; Zohar III, 165b), finira par vaincre le mauvais penchant. Nous nous sommes demand pourquoi les deux nations se rfrent Rabbeinou HaKadoch et Antoninus? Et de faon plus gnrale, quel est le sens des mouvements violents dEssav et de Yaakov? Ce que Chem et Ever voulaient dire Rivka propos de ses deux enfants, cest quils partageaient la mme divergence dopinion que Rabbeinou et Antoninus, et que le choix commenait dans le ventre de la mre (bien que ce ft sans contrainte). Rivka leur demanda alors si le sort de lenfant tait dcid dj dans le ventre de

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sa mre, sil serait bon ou mchant. Ils lui rpondirent: Non! Comme disent les Sages (Nidah 16b): Une proclamation est faite pour chaque goutte propos de ce quil adviendra delle... mais il nest pas dcrt au ciel sil sera bon ou mchant , car chacun dispose du libre arbitre, comme il est crit: Tu choisiras la vie (Devarim 30:19), et chacun peut amliorer sa conduite. Ils ont tay leur rponse justement sur le cas de Rabbi et dAntoninus qui sest converti et a mrit la vie ternelle (Yrouchalmi Mguilah I:11; Yrouchalmi Sanhdrin X:5). Il est aussi dit de lui: Antoninus vient en tte des convertis au Judasme . Quel mrite lui a permis de choisir le D. dIsral? Il est possible que ce soit parce que la mre de Rabbi la allait (Tossafot Avodah Zarah 10b), et la nourrice autant que la mre a une influence sur le bb. Nous constatons ce fait chez Moch Rabbeinou. Il a refus le lait des Egyptiennes, parce quil allait plus tard parler avec D. (Sotah 12b), si bien que sa sur Miriam dit la fille de Pharaon (Chemoth 2:7): Je vais aller te qurir une nourrice parmi les femmes juives . Chem et Ever ont dit Rivka quEssav avait la possibilit de devenir bon, car lui aussi avait t nourri du lait de cette femme vertueuse. Ce sont des choses quil faut bien comprendre. Ils lui dirent aussi que le sort de lhomme nest pas dtermin dans le ventre de sa mre, car ce nest qu sa naissance que le mauvais penchant commence le dominer. Mais malgr tout un peuple sera plus puissant que lautre , cest--dire si lhomme fait leffort ncessaire il peut surmonter ses mauvaises tendances, et alors le mauvais penchant (qui est plus g), sera soumis au bon penchant (au plus jeune). Ils lui ont aussi fait savoir que les enfants se spareraient ds la naissance et quun peuple deviendrait plus puissant que lautre. Toute personne qui revient D. peut soumettre son mauvais penchant, comme il est dit de tout ton cur , avec les deux penchants de ton cur, le bon et le mauvais (Brachoth 54a). Le fait que ni les radis (tsnone), ni le raifort (hazeret), ne manquaient la table de Rabbi et dAntoninus, t comme hiver, nous fait comprendre quils refroidissaient (tsanene) leur mauvais penchant et revenaient (hazor) D. Chacun a la possibilit den faire de mme. Les enfants ne se battaient pas dans la maison parce que lambiance dans la maison dYitshak tait, en un certain sens, semblable celle du Jour de Kippour. Elle offrait tous le pardon. Tandis que le coupable va la synagogue prier, quil jene et se repent de ses fautes ce jour-l, le mauvais penchant le quitte et lAccusateur na pas le pouvoir de plaider le jour de Kippour, comme le disent les Sages (Yoma 20a; Ndarim 32a): Le mot le Satan a une valeur numrique de trois cent soixante-quatre, pour indiquer quun jour par an (le jour de Kippour) il na pas droit la parole . Il est du devoir de lhomme dtendre la saintet de ce jour au reste de lanne, et sil ne profite pas du jour de Kippour, Kipour, il se transforme en Kofer, rengat, qui nie la Parole de D. dont il connat pourtant la souverainet et qui, en connaissance de cause, transgresse Sa volont. Cest ce quils dirent Rivka: Il y a deux nations dans ton sein , la maison ils se ressemblent, car lambiance de ta maison est semblable celle du Jour de Kippour, mais deux peuples sortiront de tes entrailles et se spareront , cest--dire lorsquils sortent de la synagogue la fin du jour de jene, lorsquils sortent de la maison sanctifie, ils commencent se disputer et se quereller lun lautre, pour savoir sil faut prolonger la saintet de ce jour sur tous les autres jours de lanne, ou si ce nest pas ncessaire. Chacun doit savoir que de mme quil est capable de surmonter son mauvais penchant pendant le Jour de Kippour, il peut le surmonter durant toute lanne sil prolonge la saintet de ce jour sur le reste de lanne. Essav ne veut pas de cela. Bien que dans la maison dYitshak il ressemble Yaakov, au dehors sa mauvaise nature reprend le dessus. Quelle est la conduite convenable? Lorsque quelquun est pris du dsir de manger une nourriture interdite, il convient de se demander si sa mre a peut-tre t tente par quelque aliment interdit lorsquelle tait enceinte. Il est du rle de la femme de rduire lemprise du mauvais penchant sur son bb en observant les lois de la puret familiale et les restrictions des jours impurs, et il va sans dire que les relations conjugales elles-mmes doivent tre pratiques dans la puret et la saintet.

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Pahad David La vie ternelle face la vie temporelle

Il est crit (Brchith 25:24-25): Les enfants se bousculaient lun lautre dans son sein, et elle dit: sil en est ainsi quen est-il de moi? Elle alla consulter lEternel. Et lEternel lui dit: deux nations sont dans ton sein, et deux peuples sortiront de tes entrailles, ils se spareront, un peuple sera plus puissant que lautre, et lan sera soumis au plus jeune . Rachi rapporte les paroles de nos Sages (Brchith Rabah 63:7): Lorsque Rivka passait devant les lieux dtude de la Torah, Yaakov poussait pour sortir comme il est crit (Yrmia 1:5): Avant de te former Je te connaissais , et si elle passait devant des lieux o se pratiquait lidoltrie, cest Essav qui sempressait de vouloir sortir, comme il est crit (Thilim 58:4): Ds le sein de leur mre, les mchants sont pervertis . Elle alla consulter lEternel auprs de Chem et Ever . Le sens est clair. Yaakov tait saint par essence et tout son tre consacr D. Par contre Essav tait au dpart mchant vis--vis de D. car il tendait de tout son tre aux plaisirs interdits, aux actes mauvais et licencieux. Lorsque leur mre passait devant les maisons dtude, Yaakov voulait sortir et Essav tentait de le retenir, il se battait avec lui afin de lempcher de sortir et ceci, pour que lui-mme, Essav, ne ft pas entran vers les lieux dtude de Torah. Mais lorsque Rivka passait devant les temples idoltres, cest Essav qui sempressait de vouloir sortir et Yaakov qui tentait de len empcher, et il se dbattait contre lui et le saisissait par le talon (ibid. 25:26) pour le retenir, car Yaakov craignait dtre entran sa suite vers ces lieux didoltrie, comme disent les Sages (Avodah Zarah 27b): Lhrsie est diffrente car cest une chose qui attire et entrane . Cest pourquoi ils se bousculaient lun lautre. En fait, Yaakov tait la cause principale; parfois il poussait et tait pouss, parfois il empchait et tait empch, et cest pourquoi Rivka pensait que tous ces mouvements taient peut-tre dus un seul enfant qui se tournait parfois dans un sens, parfois dans lautre, et elle alla consulter D. ce sujet auprs de Chem et Ever. La raison de cette agitation est explique dans le Tana DBey Eliyahou (Zouta 19, au nom du Yalkout Toledoth 32:4), que nous allons citer entirement, tant ses paroles nous sont chres: Nos Sages ont dit, lorsque Yaakov et Essav taient dans le ventre de leur mre, Yaakov dit Essav: Essav mon frre, nous sommes frres dun mme pre, et il y a deux mondes devant nous, ce monde-ci et le monde Venir. Dans ce monde on mange et on boit, on se marie et on a des fils et des filles, mais dans le monde Venir il ny a rien de tout cela. Si tu veux, prends pour toi ce monde-ci, et moi, je prendrai le monde Venir... Dj dans le ventre de leur mre ils ont partag entre eux les mondes, la sanctification et limpuret. Yaakov a choisi pour sa part le monde Venir, il a opt pour une vie sainte, tandis quEssav a choisi pour sa part ce monde, et opt pour limpuret, ce qui explique pourquoi Yaakov sagitait pour sortir devant les maisons de Torah et Essav devant les maisons didoltrie, et pourquoi ils se bousculaient. Les questions qui se posent sont nombreuses: 1. Rivka alla consulter D. auprs de Chem et Ever. Elle na pas t chez des mdecins demander des soins mdicaux car elle comprenait bien que ce quelle ressentait ntait pas un problme physique. Lorsque lun voulait sortir vers les maisons dtude lautre len empchait, tandis que, devant les maisons didoltrie le second cherchait sortir et le premier len empchait; il est donc sr que lun tait vertueux et lautre mchant. Pourquoi na-t-elle pas compris cela delle-mme, et pourquoi est-elle alle demander une explication Chem et Ever? Il est certain quelle porte deux enfants, lun bon lautre mchant, et quil y a dans son ventre deux forces qui sopposent, la saintet et limpuret. Quel besoin a-t-elle de consulter D.? 2. Il faut expliquer le sens de lexpression Quen est-il de moi? 3. Pourquoi est-ce que Yaakov voulait sortir devant les maisons dtude de la Torah, puisque les Sages disent (Nidah 30b): Le bb dans le ventre de sa mre a une lumire qui brille au-dessus de sa tte, et un ange lui enseigne toute la Torah ? Pourquoi Yaakov fait-il souffrir sa mre en voulant sortir tudier la Torah, alors que dans le ventre de sa mre aussi il apprend la Torah? 4. Si un ange enseigne la Torah Yaakov dans le ventre de sa mre, forcment il lenseigne aussi Essav. Est-il possible quil fasse cet ange laffront de vouloir le quitter, au milieu de ltude, pour aller vers les maisons didoltrie?

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5. Est-il possible quEssav, issu dune famille de gens vertueux comme le sont Yitshak et Rivka, nait pas bnfici de leur bonne influence? De plus, il avait une foi profonde dans les bndictions de son pre Yitshak (Brchith 27:34, 39), pourquoi a-t-il tout de mme dnigr et vendu le droit danesse pour un plat de lentilles? 6. Pourquoi est-ce seulement devant les maisons dtude ou les maisons didoltrie que les enfants se dbattaient, tandis que dans la maison dYitshak ils ne se disputaient pas? Yaakov naurait-il pas d vouloir sortir pour jouir de la saintet qui y rgnait, et Essav pour la fuir? 7. En quoi lexplication donne Rivka, deux nations sont dans ton sein et deux peuples sortiront de tes entrailles, ils se spareront... est-elle satisfaisante? 8. Il faut aussi expliquer pourquoi la vie de Yaakov fut faite de difficults et dembches quil dut sans cesse surmonter? Pourquoi ne lui fut-il pas donn de servir D. dans le calme? Pourquoi fut-il submerg de soucis en ce monde, les soucis causs par Essav, par Laban, par Dina, (Rachi, Brchith 43:14) et autres, qui ne lui laissaient pas de repos? 9. Le Midrach Tana DBey Eliyahou nous enseigne le partage des mondes entre Yaakov et Essav. Il faut se demander pourquoi ce partage sest fait justement dans le ventre de leur mre? De plus, pourquoi est-ce Yaakov qui a pris linitiative de proposer la chose Essav, et non pas le contraire? Surtout, pourquoi est-ce aprs le partage des mondes entre eux que Yaakov et Essav ont commenc se bousculer lun lautre dans le ventre de leur mre? Pour rpondre toutes ces questions prsentons les propos de Rabbeinou Raphal Berdugo, auteur de Mey Menouchot. Il rapporte le verset (Kohleth 1:1): Vanits des vanits, dit lEcclsiaste, vanits des vanits, tout nest que vanit et demande: Comment Chlomo HaMelekh, le plus sage de tous les hommes, a-t-il pu penser que les uvres de D. sont des vanits, alors quil est crit (Thilim 104:31): Que la gloire de lEternel dure jamais! Que lEternel Se rjouisse de Ses uvres! et que la Torah est explicite (Brchith 1:31): Et D. vit tout ce quIl cra, tout tait excellent . Comment dire que ce sont des vanits? Tel est lessentiel de sa question. Cest que nous voyons quil y a deux chemins dans la vie, celui de Yaakov et celui dEssav. Le seul but de Yaakov en ce monde tait de gagner sa place dans le monde Venir car ce monde nest que le vestibule qui permet de pntrer dans le palais, le monde ternel (Avoth IV:21). Par contre Essav navait pour but que de jouir de ce monde, de ses plaisirs, de ses gratifications matrielles et phmres dans le sens o il est dit mangeons et buvons, car demain nous serons morts . Les choses de ce monde taient sa raison dtre et il ne voyait rien gagner dans le monde Venir. Il prfrait voler et tuer, jouir de tous les plaisirs en transgression de tous les prceptes de la Torah, pourvu quil obtnt la satisfaction de ses dsirs maintenant, justement maintenant, en ce bas monde. Cest cela que Chlomo HaMelekh se rfre lorsquil dit: Vanits des vanits, tout nest que vanit , sadressant celui dont le seul but est la vie transitoire de ce monde, auquel il dit: Sache et comprends que si tu suis la voie de ceux qui fautent et font le mal, ton monde nest que vanit, il est rempli de vide, et pour de telles vanits, ta vie na pas de sens. Ce nest pas le cas du Juif qui sattache aux vertus de Yaakov dont la vie en ce monde est consacre la Torah et au service de D., car D. peut alors Se rjouir des uvres quIl a cres, et tmoigner que tout ce quIl a fait est extrmement bon, lorsque que le monde suit la voie indique par la Torah qui est bonne (Brachoth 5a), comme il est crit: Je vous ai donn un bon enseignement, nabandonnez pas Ma Torah (Michley 4:2). Ce nest que lorsque nous menons une vie vertueuse que la cration du monde se rvle une bonne chose. Telles sont les deux voies, celle de Yaakov et celle dEssav. Le but de Yaakov en ce monde est de parvenir au monde ternel, et ce monde nest que le dbut du chemin. Pour comprendre le sens de ce qui est bon , les Sages remarquent (Brchith Rabah 9:5): Nous avons vu que dans le Sfer Torah de Rabbi Meir il est crit au lieu de Tov Mod, tout tait trs bon, Tov Mavt, la mort est une bonne chose . Cest parce que tout ce qui est bon en ce monde ne se rvle quaprs la mort, dans la vie ternelle, et cela uniquement grce la Torah, car sans Torah le ciel et la terre ne pourraient pas exister (Ndarim 32a). Pourquoi ce monde nest-il quun vestibule qui permet de parvenir au monde Venir ? De quelle faon? En observant la Torah, en obissant ses commandements, et en faisant le bien. Sans cela, le monde

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entier nest effectivement que vanit! Essav, dans sa mchancet, navait dautre but dans la vie que la jouissance des choses de ce monde quil sappropriait pour le court instant que dure la vie, par le vol, les abus et le crime, sans tenir compte de la vie ternelle dans lautre monde. Cest cause dune telle licence que le monde est priv des bndictions divines et que seules perdurent les futilits, tout nest que vanit, sans raison dtre, sans saintet, et sans puret. Cela nous permet de comprendre le comportement de ces deux frres, Yaakov et Essav. Pour Yaakov, conformment sa philosophie de la vie, lhomme nat en ce monde afin duvrer et de peiner dans la voie de la Torah et la pratique de ses commandements. Les Sages enseignent effectivement que lhomme est n pour la peine, pour peiner dans ltude de la Torah et servir D. (Sanhdrin 99b). Ce qui explique pourquoi Yaakov sefforait de sortir devant les maisons dtude - il voulait faire leffort dacqurir la Torah et den pratiquer les commandements, et il ne se contentait pas dtre assis face lange comme un lve devant son matre (ce qui rpond notre troisime question). Il voulait liminer les vanits de ce monde sous le souffle de la Torah quil apprendrait de lui-mme, et ainsi raliser ce qui est trs bon dans toute la cration, en transformant les vanits de ce monde (Havalim), en souffle (Hvel) de Torah. Par contre, Essav aspirait de toute son me aux vanits de ce monde. Pour lui, cest justement lorsque lhomme ddaigne les choses de ce monde, lorsquil se prive de ses plaisirs, que tout devient vanit, cest pourquoi il recherchait les plaisirs de ce monde. Le monde ternel ne comptait pas ses yeux. Il pensait sans doute ne pas le mriter, et refusait de renoncer ce qui est sr pour miser sur lincertain? Ce que lange lui enseignait ne lintressait pas, ne lui plaisait pas... il ne voulait pas entendre ses leons car il ne voulait pas renoncer aux plaisirs et aux vanits de ce monde. Il nprouvait aucune gne quitter lange au milieu de ltude pour tenter de sortir lorsque sa mre passait devant les lieux didoltrie, car pour lui la vie navait de sens que si lon jouit de ses plaisirs. Il navait que faire des plaisirs ternels et vrais du monde Venir. Au milieu de ltude, il se dbattait pour sortir vers les pratiques idoltres (ceci rpond la question 4). Son seul but tait de jouir des joies de ce monde, et cest la raison pour laquelle lenseignement de lange, en ce qui le concerne, tait une mauvaise chose (et non pas trs bonne ) et il courait vers lidoltrie. En fait, Yaakov connaissait bien Essav. Il stait saisi de son talon, quil ne lchait pas, il tentait de lempcher de courir vers les idoles, dliminer ses mauvaises penses et de le ramener dans le bon chemin pour lui faire mriter la vie ternelle - la vie dans lautre monde. Voyant quil ny russissait pas, Yaakov dcida, en tant quan puisquil fut conu par la premire goutte (Brchith Rabah 63:8), de parler son frre Essav dj dans le ventre de leur mre du partage des deux mondes, ce monde-ci et le monde Venir (ce qui rpond la question 9). Cest que Yaakov vit trs tt que son frre ne tirait pas profit de lenseignement de lange, et il se dit que si maintenant, alors quil navait pas encore de bon ou de mauvais penchant, il se conduisait de la sorte, plus forte raison lorsquil viendrait au monde et que le mauvais penchant le saisirait, il tait sr quil fauterait de plus belle et quil valait mieux ds maintenant partager les deux mondes afin qu leur naissance chacun suivt son propre chemin - Yaakov vers une vie faite de spiritualit et Essav vers une vie de profits matriels. Il voulait priver Essav de la possibilit de se plaindre par la suite davoir perdu sa part du monde ternel, car il aurait pu prtendre que sil avait su que pour gagner la vie ternelle il fallait surmonter les embches et les tentations de ce monde, il est possible quil aurait accept de le faire... Afin dter Essav la possibilit de prsenter un tel argument lavenir, Yaakov dcida de partager ds maintenant les deux mondes, en expliquant Essav: il y a ce monde, o on peut jouir de tous les plaisirs matriels, et il existe lautre monde qui ne sacquiert que par la connaissance de la Torah, lobservance des commandements et la pratique des bonnes actions, choses qui ne sont ralisables quen ce monde, et par des souffrances, comme le disent les Sages (Brachoth 5a): Erets Isral, la Torah et le monde ternel ne sacquirent que dans la peine . Les nombreuses peines et les grandes souffrances que nous devons surmonter en ce monde nous permettent de gagner la vie ternelle de lautre monde et sil nen tait pas ainsi, effectivement la vie en ce monde, sans discipline, ne serait que vanit. Essav avait dautres penses. Les plaisirs du monde Venir peuvent-ils tre suprieurs ceux qui lui sont donns en abondance en ce monde? Il accepta donc de partager les mondes et de prendre ce monde pour lui. Aprs ce partage, les coups commencrent se faire sentir violemment dans le ventre de Rivka, car Yaakov voulait sortir vers les maisons dtudes pour apprendre la Torah par ses efforts personnels, au lieu dcouter passivement ce que lui enseignait lange, son matre, et il dsirait ardemment en raliser

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les prceptes car lessentiel nest pas ltude mais la pratique (Avoth I:17). Essav le drangeait. De son ct Essav ne dsirait quassouvir ses apptits, il niait lexistence de lautre monde, il dnigrait les enseignements de la Torah, et cest pourquoi il tentait de sortir vers les maisons didoltrie afin de ne rien perdre des attraits de ce monde. Chacun tentait dattirer lautre lui, tant Yaakov quEssav, et il est crit (ibid. 25:26): Il tenait dans sa main le talon dEssav , ce qui montre que Yaakov voulait attirer Essav dans son domaine - le monde Venir - mais sans succs.

Le monde Venir
Ce que nous avons dit permet de comprendre le verset (ibid. 25:31): Vends-moi, ce jour, ton droit danesse , littralement comme ce jour . Yaakov dit Essav: vends-moi ce droit comme tu las fait lorsque nous avons partag les mondes dans le ventre de notre mre. Si je ntais pas lan, je naurais pas entam ce sujet avec toi. Par la suite (ibid. 25:32) il est crit: Essav dit: en fait, je vais mourir, quaije faire du droit danesse? Yaakov a expliqu son frre quafin de mriter le droit danesse et le monde ternel, il faut non seulement pratiquer les commandements de la Torah et faire le bien en dpit des souffrances et des difficults, sans se laisser entraner par des plaisirs illusoires, mais il faut aussi vivre en ce monde, cest pourquoi il a demand le droit danesse. Essav, qui ne croyait pas en lautre monde et qui refusait la vie ternelle, dit Yaakov: Je vais mourir cause de ce droit danesse, car je crois quil faut se rjouir en ce monde et non pas dans le monde Venir, je ne veux pas faire leffort dtudier la Torah et de pratiquer les commandements afin de mriter lautre monde auquel je ne crois pas. Il ajouta: quai-je faire du droit danesse? car il niait la rsurrection des morts (Pessikta 12:4), il ne croyait pas en la vie ternelle de lme, et il se disait: Je nai aucune raison de peiner en ce monde, de ne pas tuer, de ne pas voler, et de ne pas fauter, uniquement pour gagner lautre monde, auquel je ne crois pas plus quen la rsurrection. Si tu veux, prends pour toi le droit danesse que tu dsires. En fait, je ne comprends pas pourquoi tu as besoin dacheter ce droit tant donn que tu las dj reu dans le ventre de notre mre. Sans attendre de rponse, Essav refusa le droit danesse, nia la rsurrection des morts, le monde ternel, et il ne lui resta plus que les plaisirs et les jouissances de ce monde. Revenons ce que nous avons dit propos de Rivka. Ne savait-elle pas quelle portait un tre vertueux et un tre mchant, et que chacun deux tirait de son ct pour aller son chemin? Pourquoi dit-elle: Quen est-il de moi? Et cela nous conduit une autre question: Quel est le sens de la rponse quelle reut: Deux nations sont dans ton sein ? Il nous semble, en toute humilit, que Rivka savait bien quelle portait en elle un homme vertueux et un homme mchant, car elle sentait leurs mouvements contraires, mais cest justement pourquoi elle est alle consulter D. auprs de Chem et Ever, car ce quelle ressentait tait un phnomne hors du commun: Premirement, chaque fois quelle passait devant une maison de prire ou une maison dtude, elle entendait slever de son ventre une voix qui criait: Moi! , cest pourquoi, pleine dtonnement, elle sest demand Quen est-il de Moi? (Cela rpond la question 2). Pourquoi est-ce que devant les maisons de prire jentends cette voix crier Moi! et devant les maisons didoltrie jentends aussi une voix qui crie Moi! . En vrit Moi est la parole de D. (Chemoth 20:2) comme il est dit: Je suis Moi lEternel ton D. Comment se fait-il que devant les maisons didoltrie jentende aussi Moi ? Cest ce quelle a demand Chem et Ever, afin de savoir ce qui lattendait, et ils lui rpondirent: Il est vrai que tu entends slever une voix qui dit Moi autant devant les maisons dtude et de prire que devant celles des idoltres. Cest parce que tu portes deux nations dans ton sein, deux peuples qui, au sortir de tes entrailles, se spareront car ils ont dj partag entre eux ce monde-ci et le monde Venir. Le mchant a pris pour lui ce monde, et le vertueux a pris lautre monde. Devant les maisons dtude et de prire, tu entends la voix de Yaakov, le vertueux, qui est comme le peuple dIsral qui, lorsquil reut la Torah et ses commandements au Mont Sina, a entendu la voix de D. dire Je suis Moi lEternel ton D. qui tai fait sortir de la terre dEgypte (ibid.). Par contre, lautre voix est celle dEssav le mchant, qui est comme la tourbe qui sest jointe au peuple dIsral la sortie dEgypte, ceux qui ont commis la faute du veau dor et qui ont dit Voici ton dieu, Isral, qui ta fait sortir du pays dEgypte . Et pourtant un peuple sera plus puissant que lautre , cest--dire que leur guerre se poursuivra en tout temps et durant toutes les gnrations, car Yaakov luttera toujours pour sanctifier le Nom de D. et Essav pour justifier ses profanations et ses plaisirs mondains. Et

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Rivka demanda: Que sera la conclusion de tout cela? Il lui fut dit: Lan sera soumis au plus jeune , Yaakov triomphera dEssav, comme il est crit: Les librateurs monteront sur la montagne de Sion pour faire justice au mont dEssav, et la royaut appartiendra lEternel (Ovadia 1:21). Deuximement Rivka savait quelle portait deux fils, lun bon et lautre mauvais, et donc elle tait tonne quils ne se bousculent que lorsquelle passait devant des maisons de Torah ou didoltrie, mais que par contre, lorsquelle tait chez elle, ils fussent calmes et sans se bousculer pas dans son ventre (cela rpond la question 6). Si chacun cherchait aller son chemin, lorsquelle tait la maison, celui qui tait vertueux aurait d tenter de sortir afin de jouir de la saintet qui remplissait le foyer, et le mchant aussi afin de fuir cette saintet et cette puret. Il faut donc se demander pourquoi il ne se dbattait pas dans la maison. Rivka en tait fort tonne, et elle consulta Chem et Ever afin dlucider cette nigme. Ils lui firent savoir quelle portait deux nations, deux puissances, lune bonne, lautre mauvaise, chacune dsireuse de se sparer de lautre. Celui-ci optait pour une vie de Torah et celui-l pour une vie de plaisirs matriels. Mais lintrieur de la maison, il ny avait aucune lutte entre eux parce que lenvironnement dans lequel ils se trouvaient - la maison sainte dYitshak - avait une bonne influence sur eux, et tous deux taient heureux de passer leurs jours lintrieur de cette maison. L, dans la maison de son pre, loin des attractions de ce monde, Essav se sent bien, et il va sans dire que Yaakov aussi, car il est saint et pur. Mais ds quils quittent la saintet de ce lieu o rgne la Prsence Divine et quils sortent dans la rue, la bousculade commence, parce que hors de linfluence puissante de la maison dYitshak, chacun veut aller son chemin - Essav vers les vanits et les futilits, et Yaakov vers ce qui saint et pur. Lorsque Rivka entendit ces explications, elle en fut effectivement apaise (cela rpond notre question 7). Nous voyons quel point un lieu baign de saintet peut avoir une influence favorable sur ses habitants. Par exemple, nimporte quel homme simple qui entre dans une pareille maison se sent immdiatement lev au-dessus de ses proccupations quotidiennes. Il se couvre la tte, il dit les bndictions, il prie, tout en jouissant de tant de saintet et de bont. Par contre, au dehors, il se retrouve dans la situation o la faute est tapie sur le seuil (Brchith 4:7), car l le mauvais penchant reprend le dessus, et alors de nouveau il se dcouvre la tte, mange et boit sans bndiction, et commet mme des fautes, tout comme Essav qui est Juif chez lui et goy dehors . Il est vrai que linfluence du foyer et sa saintet auraient pu marquer Essav lextrieur aussi, sil lavait voulu, mais sa philosophie de la vie le portait rechercher les jouissances dun monde futile, courir aprs les plaisirs temporaires et mpriser la vie ternelle - le monde Venir. Dans la maison paternelle il navait pas le choix, il tait oblig de se conduire correctement car il habitait avec des gens vertueux, observant la Torah et les commandements, comme Yitshak son pre, Rivka sa mre, et son frre Yaakov. Il est possible quen faisant un petit effort, en prenant les choses srieusement, il aurait pu se rendre compte combien sa situation tait prcaire et quil avait intrt modifier son comportement lextrieur. Il aurait mme pu devenir comme son frre Yaakov. Mais ce nest pas ce quil voulait. Son calme dans la maison ntait quune faade, il ne cherchait qu tromper son pre Yitshak et sa mre et leur faire croire quil tait tout aussi vertueux que Yaakov, mais ce ntait quune apparence. Ds son enfance, il trompait son pre en lui demandant comment prlever la dme sur le sel ou le foin (Brchith Rabah 63: 10) ce qui montre quil tait fondamentalement mauvais et ne cherchait qu faire le mal, contrairement Yaakov qui tait saint en tout ce quil faisait. Telle est la diffrence entre Yaakov et Essav. Elle explique pourquoi Essav na pas subi linfluence de ses parents et pourquoi les vnements de la vie de Yaakov sont empreints de souffrances, sans quil trouve de repos (cest la rponse aux questions 5 et 9). Essav tait un habile chasseur, un homme des champs (Brchith 25:27), et la traduction en Aramen explique: Un homme qui navait rien faire et qui chassait les animaux sauvages et les oiseaux , tandis que Yaakov tait un homme accompli, qui restait dans la tente (ibid.). Yaakov a rejet toute sa vie les tendances de lhomme des champs, homme oisif, attach la terre, la poussire, la matrialit, car il voulait slever au-dessus des choses matrielles afin datteindre les sommets de la spiritualit, auxquels il nest possible de parvenir que par leffort et la souffrance. Les hommes vertueux souffrent en ce monde mais en fin de compte ils connaissent le repos (Brchith Rabah 66:5). De lhomme attach la Torah, il est dit (Brachoth 17a): Heureux celui qui tudie la Torah... et qui donne satisfaction son Crateur (par ses actes) , cest pourquoi la vie de Yaakov est une suite de souffrances et de douleurs, afin quil

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mrite les grands bienfaits qui lui sont rservs, lui et tous les hommes vertueux, dans la vie ternelle, le monde Venir. Quant Essav, il est oisif, et loisivet conduit lennui (Ktouboth 59b). Il ne vit que pour les plaisirs matriels et les jouissances passagres. Il a laiss Yaakov son frre le lot des peines qui sont pour lui un objet de dgot, et il naspire quaux gratifications du monde matriel. Il trompe son pre, il est paresseux pour apprendre la Torah que lui enseigne lange dans le ventre de sa mre, il nie la rsurrection des morts et la ralit de la vie ternelle, il trompe les gens par ses mensonges. Ses saints parents nont pas dinfluence sur lui - bien quil ait la possibilit dtre bon - car il adore des dieux trangers, un culte qui conduit ses pratiquants au fin fond de lenfer. Il faut suivre lexemple de Yaakov en dpit des nombreuses souffrances, car les Sages ont dit (Midrach HaGadol, Vayhi 47:28): Les hommes vertueux ont des dbuts douloureux dans la vie, mais leur fin est heureuse et lavenir, les hommes vertueux sigeront couronns et jouiront de la Splendeur Divine (Brachoth 17a). Tout cela, grce la Torah et aux commandements quils ont pratiqus et multiplis durant leur vie en ce monde, car le but de lhomme en ce monde est de mriter la vie ternelle - le monde Venir.

Yaakov et Essav: La vente du droit danesse


Les enfants se bousculaient dans son sein... et les enfants grandirent, Essav tait un habile chasseur.... Yitshak aimait Essav parce quil tait un habile chasseur... Yaakov faisait cuire un plat... Yaakov dit: vends-moi ton droit danesse... et il vendit son droit danesse Yaakov... et Essav ddaigna le droit danesse (Brchith 25:22-34). Les rapports entre Yaakov et Essav qui avaient dj partag entre eux les deux mondes dans le ventre de leur mre (Tana DBey Eliyahou 19) et leurs divergences ont t longuement expliqus et institus en loi (Sifri Behaaloteha 9:10): Il est une loi immuable: Essav hait Yaakov . Plus nous approfondissons leur cas, plus nous nous tonnons des tribulations de ces deux frres depuis le jour de leur naissance jusquau jour de leur mort. Nous allons essayer de le comprendre dans la mesure du possible, aprs avoir formul les questions qui se posent. 1. A propos du verset Ils se bousculaient dans son sein (ibid. 25:22), les Sages expliquent que devant les maisons didoltrie Essav tentait de venir au monde (Brchith Rabah 63:7). Par ailleurs, les Sages disent (Nidah 30b): Avant de natre, un ange enseigne lenfant la Torah comme il est dit (Yov 29:3): Son flambeau brillait sur ma tte . Comment Essav na-t-il pas eu au moins la crainte de lange et tentait-il de fuir pour courir vers les idoles? 2. Pourquoi est-ce justement lorsque Rivka tait au dehors que les enfants se poussaient lun lautre, et non pas dans la maison dYitshak, o tout au moins Yaakov aurait d avoir le dsir de sortir, attir par la saintet qui y rgnait? De plus, aprs leur naissance, la Torah ne nous raconte pas leur enfance. Pourquoi? 3. Il est tonnant quYitshak ait eu une prfrence pour Essav parce quil chassait pour lui du gibier (ibid. 25:28). Si les Sages disent quEssav captivait les gens par ses tromperies et son double langage (Brchith Rabah 63:15, 97:9), comment se fait-il quYitshak nait pas discern ses mensonges? Est-ce que Rivka ne lui en a pas parl afin quil le corrige? 4. Pourquoi Essav a-t-il exig de Yaakov le plat que ce dernier avait prpar pour son pre, en deuil de la mort dAvraham survenue ce jour-l (Baba Bathra 16b; Brchith Rabah 63:16)? Manquait-il de quoi manger dans la maison de son pre au point de dsirer ce plat de lentilles qui est, comme on le sait, une nourriture de pauvres? Lorsquil lui demande ce plat, pourquoi dit-il de ce plat rouge (ibid. 25:30), et non pas de ce plat de lentilles ? Et pourquoi la rptition du mot rouge - doah doah m hzh? 5. Yaakov profite dun moment de faiblesse, o son frre Essav est affam, pour lui demander de lui vendre son droit danesse en change du plat de lentilles, comme il est crit (ibid. 25:31): Vends-moi ce jour ton droit danesse . Si Essav ne lui avait pas vendu son droit danesse, est-ce que Yaakov ne lui aurait pas donn manger? Il faut aussi expliquer pourquoi Yaakov demande Essav de lui prter serment, comme il est dit (ibid. 25:33): Jure-le moi aujourdhui . Essav a agi pouss par une grande faim

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(et cela le troublait tel point quil en avait mme oubli le nom du plat et la appel doah doah, de ce rouge ) et dans ce cas, comment valider ce serment fait sous la contrainte, puisque celui qui agit sous contrainte est exempt (Baba Kama 25b). Ce fut le cas de Rabbi Akiva (Kala Rabbati 2) qui avait fait un serment en paroles, mais lavait annul dans son cur, car il tait dans une situation de vie ou de mort. De mme David HaMelekh, fuyant devant Shal, se rfugie Nov o il arrive presque mort de faim, et l, il reoit manger le pain sacr (dont la consommation est interdite celui qui nest pas prtre), comme il est crit (Chmouel I, 21:7): Le prtre lui donna le pain sacr car il ny avait rien dautre que les pains de proposition... et les Sages nous enseignent ce sujet (Yalkout ad. loc. 130) quen cas de danger de mort, linterdit est lev. Et alors comment Yaakov peut-il se fier au serment dEssav? Nous allons tenter de rpondre ces questions. Yaakov et Essav, enfants, avaient un comportement adulte puisque dj dans le ventre de leur mre ils se bousculaient comme des gens raisonnables qui savent ce quils font. Leur naissance aussi tait hors du commun, en dehors des lois de la nature, puisque Yaakov, qui avait dcid de retenir son frre tout prix, tenait dans sa main le talon dEssav (Brchith 25:26) afin de lempcher de natre le premier, car cest Yaakov qui fut conu le premier (Brchith Rabah 63:8) et cest pourquoi il sappelle Yaakov, (du mot kev qui dsigne le talon). Il est dit que les enfants grandirent , sans nous raconter leur enfance car ils ne se conduisaient pas comme des enfants. Bien quils aient ensemble tudi la Torah (Brchith Rabah 63:14; Yalkout Chimoni 110), ce nest qu lge de la bar mitsva que la diffrence entre eux se fit sentir, Essav prenant un mauvais chemin, trompant les gens, et Yaakov tant assidu dans ltude de la Torah. Considrons le sens du verset: Yitshak aimait Essav car il tait un habile chasseur . Quelle est la raison de cet amour, et quel est le rapport entre cette prfrence pour Essav et lart de la chasse? Citons tout dabord le Rambam (Halakhoth Akoum 1:3): Avraham fut le premier proclamer la connaissance de D. dans le monde, comme il est crit (Brchith 21:33): Et l, il proclama le Nom de lEternel, D. du monde . Le Raavad (ad. loc.) fait remarquer que Chem et Ever ont prcd Avraham et les Patriarches qui tudiaient la Torah chez eux (Mam Loez, Noah 257). Comment se fait-il que Chem et Ever naient pas protest contre les pratiques des gens de leur temps et bris les idoles? Les commentateurs (Kessef Michn ad. loc.) rpondent cela que Chem et Ever enseignaient la voie de D. leurs lves, mais nont pas proclam Son existence comme le fit Avraham, et cest en quoi il leur est suprieur . Chem et Ever restaient dans leur Ychivah, seuls ceux qui venaient y tudier recevaient des directives quant la vraie croyance et au service de D., et ces gens-l taient peu nombreux. Le Migdal Oz explique: Ils corrigeaient leurs proches et comme Yaakov enseignaient ceux qui venaient les couter, mais ils ne se sont pas sacrifis, comme Avraham qui en a fait sa vocation et en a pay le prix. Cest pourquoi la vertu de gnrosit sur laquelle reposent le ciel et la terre est attribue Avraham . Cet auteur se rfre au commentaire des Sages (Brchith Rabah 12:8; Chohar Tov 104; Zohar I, 138a): Telles sont les origines du ciel et de la terre lorsquils furent crs , o le mot Bhibarham (quand ils furent crs) est interprt par les Sages comme sil tait crit, bAvraham, pour signifier que le monde fut cr pour Avraham qui fut le premier proclamer devant tous la connaissance de D. Cest en cela quAvraham surpassait Chem et Ever, car cest avec un don total de soi quil allait vers les gens, de ville en ville, afin de leur faire connatre la souverainet de D., contrairement Chem et Ever dont tous les efforts se limitaient habiter la saintet dun lieu clos. Yitshak se figurait quEssav, qui se comportait dans la maison comme Yaakov, suivait aussi la voie dAvraham lorsquil tait hors de la maison. En disant quEssav tait un habile chasseur , il voulait dire quEssav attrapait les gens qui prenaient le mauvais chemin et les dirigeait dans le sens de la vraie foi et du repentir. Cest pourquoi il le prfre son frre Yaakov qui apprenait la Torah dans les quatre coudes de la maison dtude, sans la propager publiquement - il pensait quEssav suivait la voie dAvraham. Cest ce que Rashi explique (ibid. 25:27) citant les Sages (Brchith Rabah 63:14) propos du verset les enfants grandirent : tant quils taient petits, ils ne se distinguaient pas lun de lautre par leurs actes... , cest--dire quil ny avait aucune diffrence entre Yaakov et Essav. Lun agissait mal en cachette, lautre agissait bien en cachette, et personne ne les voyait.

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Mais vint le jour du test. Ce fut le jour du dcs dAvraham. Yaakov prpara un plat de lentilles pour le repas de son pre en deuil, un plat qui rappelle le jour de la mort, car ce nest quen se rappelant le jour de la mort que lon se repent de ses fautes, comme le disent les Sages (Brachoth 5a): Il faut sans cesse combattre le mauvais penchant laide du bon penchant... et se rappeler du jour de la mort . Yaakov servait son pre Yitshak, et comme on le sait, celui qui est en deuil ne peut pas tudier la Torah (qui est une source de joie) (Moed Katane 15a, 21a; Smahoth Ch. 7). La coutume est de manger des lentilles et une coutume juive a force de loi (Tossafot Menahoth 30b; Math Ephram 610), afin de se souvenir, pendant ce repas, du jour de la mort, car la vie est une roue qui tourne (Baba Bathra 17b). Yaakov et Yitshak saffairaient aux rites du deuil lorsque Essav rentra des champs fatigu (Brchith 25:29), fatigu davoir commis ce jour-l cinq transgressions majeures, et mme tu Nimrod (Baba Bathra 16b; Brchith Rabah 63:16, 65:12). Malgr sa fatigue et sa faim, il ne se rendit pas chez lui, mais chez son pre car sans aucun doute il avait appris le dcs de son grand-pre Avraham et savait que toute la famille en deuil tait runie dans la maison dYitshak. Il savait aussi que dans la maison de son pre, se succdaient des jours pleins de joie et des jours de tristesse et de douleur qui ont chacun leurs lois propres, et il est all chez son pre apprendre quelle nourriture doit tre servie aux gens en deuil. Cest une des failles dEssav, qui, au lieu daller partager la douleur de son pre et le consoler, est all aux cuisines voir ce quon y prparait manger, cest--dire quil y allait pour se sustenter, attir quil tait par la nourriture et les boissons.

tre lan est une preuve dans le service de D.


Il faut comprendre le raisonnement de Yaakov. En cette heure difficile, alors quEssav rentre des champs, fatigu et affam, aprs avoir tu le roi Nimrod qui avait incit les autres se rebeller contre D. (Yirouvin 53a, Haguigah 13a; Zohar I, 73b), et pris en butin les prcieux vtements dAdam qui effrayent les animaux (Brchith Rabah 65:12; Pirkey DRabbi Elizer 24), il voit que Yaakov prpare un plat de lentilles, qui rappelle lhomme quil est mortel afin de lui donner du courage. Essav est extnu, et cest dans cette situation que Yaakov le presse de lui vendre le droit danesse! Nest-il pas crit (Vayikra 19: 16): Ne te dtourne pas du sang de ton prochain . Peut-tre Essav va-t-il mourir soudain de soif et de faim avant davoir le temps de vendre le droit danesse? Nous savons combien Nahoum Ich Gamzo (Taanith 21a) sest mortifi pour avoir tard donner manger un pauvre qui, sous ses yeux, mourut dinanition. La question revient donc: Pourquoi Yaakov a-t-il profit, justement ce moment-l, de la faiblesse dEssav pour lui demander de lui vendre le droit danesse, sans craindre quentre temps Essav ne risque de mourir de faim et de soif? Cest quen fait, Essav ntait pas en danger de mort car dans ce cas, il se serait empress de rentrer chez lui se restaurer. Il sest rendu chez son pre Yitshak pour savoir quelles sont les coutumes en priode de deuil et quels sont les plats qui conviennent une telle occasion. Il convoita le plat que Yaakov avait prpar, ce qui fit comprendre Yaakov quEssav avait toute sa raison. Sil demande manger avant de visiter son pre, cest que seul son apptit le proccupe. Yaakov a donc saisi ce moment pour le mettre lpreuve et savoir sil mritait ou non de se consacrer au service de D. par la suite en tant quan. (voir Bamidbar Rabah 4:6). Mme si lon pense que jusqu ce moment-l, Yaakov ignorait la mchancet dEssav, on peut dire quil la dcouverte au moment o Essav, au lieu daller consoler son pre, a prfr, dans sa gourmandise, un plat de lentilles. Essav se faisait passer pour vertueux aux yeux du monde, semblable au cochon qui expose ses sabots fendus et dit: voyez! je suis pur! (Brchith Rabah 65:1). Sil avait mang de la viande et du poisson, choses quune personne en deuil ne consomme pas, il aurait certainement perdu le respect des gens. Cest pourquoi Yaakov a choisi justement ce moment-l pour mettre Essav lpreuve. Ce jour-l, Essav avait tu Nimrod, dont le nom signifie quil avait incit les autres se rvolter (limrod) contre D. (Haguigah 13a). Les actions de Nimrod taient contraires celles dAvraham et Yitshak, car il semait, lui, la confusion dans lesprit des gens propos de D. (Zohar III, 73b), et donc, il semblerait premire vue

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quEssav lavait tu pour lamour du Ciel. Sil avait vraiment agi pour lamour du Ciel, il est certain que sa victoire aurait constitu la preuve quil avait bnfici de laide et la protection de D. pour tuer et liminer Nimrod, prototype des tyrans. De plus Yaakov, voyant quEssav dsirait manger de ce plat de lentilles, comprit quil y avait une tincelle de bont en lui, puisquil participait au deuil en partageant son repas. Si par contre Essav na pas agi pour lamour du Ciel, cela prouve rtrospectivement que sa mchancet dpasse de loin celle de Nimrod, ce qui rvle sa vraie nature. Son dsir de manger de ce plat de lentilles ntait quun faux semblant pour tromper tout le monde. Cest pourquoi Yaakov, en lui donnant de ce plat, explique Essav que les lentilles rappellent tous quils doivent mourir (Brachoth 17a) et quil doit se repentir sincrement de ses fautes. Comment? En tudiant la Torah chaque jour (Menahoth 43b) comme il est dit dans le verset (Devarim 10:12): Et maintenant, Isral, lEternel ton D. ne te demande que de craindre lEternel, ton D., de suivre toutes Ses voies, de Laimer, et de Le servir de tout ton cur et de toute ton me . Mais aujourdhui quil est interdit dtudier la Torah cause du deuil (Smahoth ch. 7), il faut mditer profondment sur le jour de la mort afin de ne pas fauter. Telle tait la premire preuve que Yaakov fit subir Essav afin de savoir sil allait accepter les coutumes ancestrales, sil allait dire les cent bndictions quotidiennes - surtout le jour o il avait tu Nimrod, et tait capable datteindre les plus hauts degrs sil prenait sur lui le joug divin pour devenir vertueux - ou sil allait refuser cette voie. Essav lui rpondit: Laisse-moi dvorer, je te prie, ce plat tout rouge... cest pourquoi il fut nomm Edom (le Rouge) (ibid. 25:30), cest--dire: Je nai aucune part dans ces cent bndictions qui apportent la prosprit dans le monde, car les nations du monde se suffisent de la prosprit quils reoivent pour et par Isral (Yrouchalmi Guitin, fin du Ch. 5), et je nai aucune part non plus dans cette prosprit, pas plus que dans les coutumes juives qui sont des lois . Tout cela est indiqu dans lexpression laisse-moi dvorer , autrement dit: Je vais ouvrir ma bouche comme celle du chameau, et sans que je peine, tu vas la remplir (Brchith Rabah 63:12): Je ne veux que jouir de labondance et des bndictions que vous faites venir dans le monde, sans mobliger prendre la peine de prier, de prononcer les bndictions et dobserver toutes les coutumes. Cest le sens de la rptition: ce plat rouge-rouge . Les mots ha-adom ha-adom ont la valeur numrique de cent, le nombre des bndictions dont Essav voulait profiter sans peiner, sans faire lui-mme leffort de prier et de dire les bndictions. Cest comme sil avait dit ce qui est toi est moi, et ce qui est moi est moi - attitude qui caractrise les habitants de Sodome et les gens mchants (Avoth 5:11). Tu peux prier, moi je veux jouir. Essav a transmis cette attitude ses descendants qui sont appels Edom, tous mchants comme lui, qui volent et pillent et jouissent des biens des autres. Cest la deuxime preuve de la mchancet dEssav (la premire tant quau lieu daller consoler son pre, il sest rassasi, ne pensant quaux jouissances de ce monde). Malgr tout, Yaakov continue juger Essav favorablement comme le disent les Sages (Avoth 1:6; Tana DBey Eliyahou Zouta 16): Tu dois juger chaque personne favorablement . Peut-tre ce mauvais comportement (il ne partage pas le deuil, il nglige les cent bndictions et nobserve pas les coutumes ancestrales) est-il passager, d la fatigue, et ses intentions sont-elles bonnes. Cest pourquoi Yaakov le met lpreuve une seconde fois, cette fois par le biais du droit danesse, afin de savoir si ce droit a de limportance ses yeux ou non. Jusqu linauguration du Tabernacle dans le dsert, la prtrise tait confie aux premiers-ns (Bchorot 4b; Brchit Rabah 63:18) et ce nest que le jour o le Tabernacle fut inaugur quils perdirent la prtrise pour avoir particip au crime du veau dor, et la tribu de Lvi fut charge de tous les devoirs du service du Temple. Nous savons que les Patriarches faisaient des sacrifices (Brchith 12:18, 35:7) car ils taient des premiers-ns, consacrs D. Si Essav avait lintention de servir D. et que son mauvais comportement ntait d qu la fatigue, il est certain que le droit danesse compte pour lui et quil ny renoncera pour rien au monde. En effet, les sacrifices autant que le droit danesse, sont des moyens puissants de se rapprocher de D., et Can navait tu Havel que pour sassurer ces droits (Brchith Rabah 22:16).

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Si vraiment Essav tient de son grand-pre Avraham qui est mort ce jour-l - un grand-pre qui na pas discut les raisons de D. et qui tait prt sacrifier son fils unique - il ne renoncera pas au droit danesse et ne le vendra pas. Il prfrera mourir plutt que de faire une chose pareille! Et alors, Yaakov, voyant quEssav refusait de lui vendre le droit danesse, aurait su queffectivement il avait tu Nimrod avec laide de D., chose que mme son grand-pre Avraham navait pas russi faire dans sa guerre contre les cinq rois. Et donc, il aurait t convenable et juste quil soit lan, et il aurait t tout fait possible Essav de se repentir de tout cur. Dautant plus quen refusant de vendre le droit danesse, il aurait montr quil dsirait servir D., comme le dit Rachi ce sujet (ibid. 25:32): Essav demanda Yaakov en quoi consistait ce service? exprimant par l quil tait encore attach son droit danesse. Et donc il aurait pu slever progressivement jusqu surpasser Yaakov, et rtrospectivement, lamour de Yitshak se serait rvl justifi, si Essav avait t sincre, vertueux et droit. Mais Essav a ddaign le droit danesse, il la mpris (Brchith Rabah 63:18), il a refus la Loi de D., les coutumes juives, et les obligations religieuses. Il saimait lui-mme plus quil naimait son pre, puisquau lieu daller le consoler il ne pensait qu dvorer des mets apptissants. Il tait tellement avide quil dsirait jouir non seulement de ce qui lui appartenait, mais aussi de ce qui appartenait aux autres. Yaakov, dans sa sagesse, rvla au grand jour la vraie nature de Essav. Si personne, auparavant, ne se rendait compte de sa mchancet, dornavant tous sauraient faire la distinction entre les descendants dAvraham et les descendants dEssav qui vivent la pointe de leur pe (Brchith 27:40). Sa fin prouve que depuis le dbut il ntait quun voleur et un brigand, plein de ruses et de tromperies. Il est crit dans le Beit Isral de lAdmor de Gour (Section Toledoth, 5728, article 2): Vient ensuite le droit danesse que Yaakov a acquis, au moment de la mort dAvraham. Ce moment tait favorable une telle acquisition, parce que ce jour-l le monde fut dlivr de lemprise de Nimrod. Yaakov sest appropri le droit danesse, ce qui lui permit de sapproprier plus tard les bndictions et de devenir, lui, lan grce cette vente . Selon le Beit Isral, Yaakov aurait prouv Essav afin de savoir sil mritait le droit danesse, sil tait capable de prsenter les sacrifices devant D. avec lintention de Le servir. Sil avait tu Nimrod et par l affaibli lemprise du mal, le droit danesse et les bndictions lui seraient revenus de droit et Yaakov naurait pas pu les acqurir. Ctait pour Essav une occasion propice de slever en surmontant cette preuve. Cest pourquoi Yaakov lui dit: Vends-moi ce jour le droit danesse . Un refus de la part dEssav aurait signifi quil ntait pas prt renoncer son privilge de prsenter les sacrifices, et cela lui aurait permis de se repentir. Mais en acceptant de vendre ce droit, il ne fait que confirmer sa dchance, et il vaut mieux lui acheter le droit danesse et le priver des bndictions afin de diminuer son pouvoir de faire le mal. Maintenant nous comprenons que les Sages disent (Baba Bathra 16b): Essav a reni le principe de la rsurrection des morts . Comme nous lavons dit plus haut, Yaakov a expliqu Essav que nous mangeons des lentilles uniquement pour nous rappeler le jour de la mort afin de nous repentir de nos fautes, mais Essav lui a rpondu (ibid. 25:32): Je vais vers la mort - je ne crois pas quil y ait une vie aprs la mort, au contraire il ny a pas de Juge et il ny a pas de Justice (Vayikra Rabah 28:1; Midrach Thilim 47:6). Celui qui meurt est mort pour de bon; ainsi certains non-juifs pensent que chaque jour est un cadeau de vie et quil ny a pas de vie ternelle de lme. Cest ce qui est dit dEssav: il ddaigna le droit danesse (ibid. 25:34), ainsi que la rsurrection (Brchith Rabah 63:20), ce qui montre quil tait en pleine possession de son esprit lorsquil vendit le droit danesse, proclama navoir aucune part ni dans la Torah ni dans les lois juives, et ne pas dsirer tre compt parmi les descendants dAvraham qui sont appels Yhoudim, cause de la qualit de misricorde qui les caractrise linstar dAvraham (Zohar III, 302a). Essav prfre se sparer de Yaakov et former un peuple diffrent, Edom, qui se caractrise par la force de son bras (voir Brchith Rabah 63:17), comme il est crit: Tu vivras la pointe de ton pe (Brchith 27:40). La fin confirme le dbut, et la fin dEssav confirme ce quil tait dans le fond, mchant et destructeur ds le dbut. Malgr le fait que les deux frres ont grandi et ont t levs dans la mme maison, sous linfluence dYitshak leur pre, lun des enfants tait vertueux et lautre mchant. Essav tait encadr de deux personnes vertueuses mais il na rien appris de leur conduite (Yoma 38b). A plus forte raison, sil

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avait grandi en compagnie de gens mchants, il aurait t encore pire, cause de ses apptits - lapptit de largent, du vol, et des plaisirs matriels, le got du mensonge et de la tromperie, car il tait un homme des champs (Brchith 25:27), et latmosphre du foyer navait eu aucun effet sur lui. Chacun est aid par le Ciel dans la voie quil choisit de suivre (Makoth 10b; Zohar I, 198b). Yaakov choisit un chemin spirituel et sanctifi, Essav sest tourn vers les choses impures. Nous comprenons maintenant pourquoi Essav navait aucune crainte de lange qui lui enseignait la Torah dans le ventre de sa mre et quil voulait sortir adorer les idoles (ce sont nos questions 1 et 2). Cest que dj dans le ventre de sa mre il avait le choix, ce nest pas le mauvais penchant qui le dominait, mais de lui-mme il avait choisi pour sa part le monde matriel (dans le partage quil fit avec Yaakov), et lange na fait que le conforter dans son choix. A vrai dire, il aurait pu choisir le bien car lenfant dans le ventre de sa mre est comme le premier Homme avant la faute. Il a mang de larbre de la Connaissance, parce quil avait reu le libre arbitre et non pas cause du mauvais penchant. Nous connaissons lavis dAntoninus (Sanhdrin 91b; Brchith Rabah 34:12) selon lequel le mauvais penchant ne sempare de lhomme qu sa naissance , un avis que Rabbi a partag. Essav, dj dans le ventre de sa mre, avait fait son choix, et lange confirma: Cest comme tu veux! Chacun, quel quil soit, doit viter de se laisser entraner par les plaisirs phmres de ce monde. Sil na pas le courage, comme Yaakov, de dominer son mauvais penchant, il risque, malheureusement, de se laisser entraner comme Essav. Yaakov et Essav voulaient natre prmaturment, chacun pour des raisons propres. Yaakov ne voulait pas rester dans le ventre de sa mre car aprs avoir got la vie ternelle dans son tude avec lange, il dsirait tudier dans les maisons dtude de Chem et Ever et mettre en pratique les lois de la Torah et ses commandements. Par contre Essav dsirait natre parce quil voulait goter la vie de ce monde et il mprisait son tude avec lange. Il voulait devenir un homme des champs , cest--dire quen lui brlait dj le penchant au vol et au brigandage. Yitshak reconnut que les mains sont les mains de Essav , qui accumule pleines mains le vol et les larcins. Sa mchancet est indique par les mots ich sadh, (un homme des champs) dont la valeur numrique est la mme que celle des mots ech byado (du feu dans ses mains), cest--dire que dans ses mains, en son pouvoir, se trouve le feu de lapptit pour toutes les choses interdites. Nous pouvons donc comprendre pourquoi cest uniquement dehors, devant les maisons dtude ou bien les maisons de dbauche que les enfants cherchaient natre, tandis que dans la maison dYitshak ils taient calmes. Essav nignorait pas que tout homme a lobligation de se conduire avec pudeur et saintet, quil doit se dtacher des vanits de ce monde et ne sattacher quaux valeurs de la Torah et ce qui conduit la vie ternelle. Il est donc certain quil ressentait un grand plaisir lorsque sa mre tait la maison, dans la maison dYitshak, en prsence de Yaakov et de lange qui lui enseignait la Torah. Mais lorsque sa mre passait devant les lieux de dbauche, il narrivait pas surmonter ses dsirs et, ayant le plein exercice de son libre arbitre, il se dbattait pour natre. Un tel choix se prsente devant tout jeune homme lorsquil sort de la Ychivah. Il doit se conduire comme ses parents et ses matres le lui ont enseign, de peur dtre entran par les multiples attraits de la rue. Cest l que commence la lutte acharne pour savoir qui sera le plus fort, le pouvoir dattraction du mal ou effectivement, le choix du bien. De son ct, Yaakov encore dans le ventre de sa mre, se sentait bien lorsquelle tait chez elle, mais lorsquelle sortait il tait mis lpreuve par son mauvais penchant qui le tirait vers lidoltrie, cest pourquoi il se dbattait pour natre devant les maisons de prires, car en fait, il ne voulait pas que sa mre quitte la maison, il voulait quelle rentre soit la maison soit dans la maison dtude, afin de sloigner autant que possible du mauvais penchant et mettre en pratique le principe: Si ce vilain te rencontre, entrane-le dans la maison dtude (Soucah 52b; Kidouchin 30b). Nous pouvons ajouter cela que lorsque Rivka tait la maison, Essav ne voulait pas natre. Il ne voulait pas entrer dans ce monde o il devrait observer la Torah et ses commandements, ce dont il tait dispens dans le ventre de sa mre. Cest pourquoi il ne la drangeait pas dans la maison. Mais lorsquelle sortait,

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il ne pouvait pas surmonter son mauvais penchant et il pensait quelle allait peut-tre accoucher de lui; cest pourquoi il voulait natre devant les maisons didoltrie afin de ne pas devenir prisonnier dun monde spirituel. Yaakov, lui, se sentait la maison comme sil tait la Ychivah, il ne cherchait pas natre, mais lorsquelle tait dehors, il tentait de sortir pour atteindre la Ychivah. Tel doit tre le dsir de chaque Juif: une vie dobservance de la Torah, de pratique de ses commandements, une vie de sanctification et de puret.

Tu mditeras la loi jour et nuit


Lpoque de la dlivrance arriva, il se trouva quelle portait des jumeaux (Brchith 25:24). Le mot Tomim, jumeaux, est crit sans la lettre aleph, et Rachi explique au nom des Sages (Brchith Rabah 63: 9) que cette omission indique que lun des jumeaux tait vertueux et lautre impie . Cela nexclut pas le droit dajouter humblement une autre explication. A propos de Moch, il est crit: Moch sjourna sur la montagne quarante jours et quarante nuits (Chemoth 24:18). Pourquoi la Torah souligne-t-elle quarante nuits , tant donn que la journe comprend la nuit, comme il est dit: Et il fut soir, et il fut matin - un jour (Brchith 1:5), ce qui indique que le jour est la continuation de la nuit. En ce qui concerne le service du Temple, la nuit est la continuation du jour pour former une journe (Houlin 83a), et sur la montagne, Moch tait en Prsence de D. comme dans le service sacr, mais dune faon ou dune autre, sil est dj dit quarante jours , quel besoin dajouter quarante nuits ? Pour expliquer cela, il faut remarquer quil est naturel dtre fatigu la fin de la journe, dtre puis la nuit par les activits de la journe, et il est naturel de reprendre des forces grce un sommeil rparateur, comme le disent les Sages (Yirouvin 65a): La nuit na t cre que pour le sommeil . Mais cela ne sapplique pas Moch Rabbeinou. Au contraire, pour lui, la nuit tait en toute chose comme le jour, dans le sens o il est crit: La nuit est lumineuse comme le jour, lobscurit est pareille la lumire (Thilim 139:13), au point quil ne ressentait aucune fatigue ou lassitude nocturne, par son dsir ardent dapprendre la Loi de la bouche mme de D. Les Sages ajoutent (Chemoth Rabah 47:8) que durant les quarante jours o il tait sur la montagne, le jour il tudiait la Torah en Prsence de D. et la nuit il rvisait ce quil avait appris, afin denseigner aux Enfants dIsral quils doivent rserver un temps pour mditer la Torah autant le jour que la nuit. Si la Torah navait pas crit quarante nuits , nous aurions pu penser que Moch, vu sa grandeur et ses capacits, a effectivement tudi la Torah la nuit, comme il est crit: Tu mditeras la loi jour et nuit (Yochoua 1: 8), mais que, malgr lui, il a peut-tre pris quelque repos et peut-tre somnol! Cest pourquoi la Torah dit explicitement quarante jours et quarante nuits pour souligner que les nuits taient semblables aux jours et de mme quil tudiait assidment la Torah avec D. pendant la journe, il ltudiait aussi la nuit sans connatre la fatigue. Ajoutons cela que la volont et le dsir dtudier la nuit, les yeux ouverts et lesprit vif, dcoulent de ltude de la journe. La capacit de lutter contre lemprise naturelle du sommeil et dtudier la nuit, est proportionnelle aux efforts et la persvrance dans ltude de la Torah pendant la journe, et cest alors que lhomme parvient ce que les Sages lui promettent (Haguigah 12b): Celui qui tudie la Torah la nuit est couronn dun halo de bienveillance divine le lendemain . En outre, celui qui mdite la Torah la nuit, cest--dire en ce monde qui ressemble la nuit, est entour dun halo de bienveillance divine dans le monde Venir, dans le monde qui est parfait et ternel (ibid.). Il me semble pouvoir appliquer cela au verset: Heureux ceux qui habitent Ta maison, sans cesse ils chantent Tes louanges (Thilim 84:5). Quel est le sens de sans cesse ils chantent Tes louanges ? Cest que celui qui mdite la Torah avec assiduit dans la journe a un dsir accru de poursuivre son tude pendant la nuit, et cela lui permet de surmonter sa fatigue naturelle. D. lui donne alors la force de continuer. tudier la Torah, rgulirement chaque jour, des heures fixes, permet de surmonter la fatigue, de continuer avec des forces renouveles, comme Moch qui a tudi la Torah pendant quarante jours et quarante nuits en prsence de D.

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Dire que la Torah affaiblit les forces de lhomme (Sanhdrin 26b), cest dire que ltude affaiblit en lhomme les tendances de son mauvais penchant et ses besoins naturels en sont diminus, mais elle affirme ses lans spirituels, ce qui lui permet de retrouver lnergie de sa jeunesse et de sadonner ltude avec des forces renouveles. Nous savons quune telle assiduit, au-del des forces naturelles, est possible dans ltude de la Torah, et nous la rencontrons non loin de nous, chez les Sages de notre temps. Le Gaon Hayim de Brisk eut la visite matinale dune femme qui venait lui demander conseil. Layant trouv profondment plong dans son tude, elle sassit et attendit... jusquau lendemain matin! Une journe entire! Jusqu ce que le Gaon se libre de son tude pour couter sa requte. Nous avons aussi entendu parler de lassiduit extraordinaire du Gaon de Vilna, qui ne dormait que deux heures par nuit! Seulement deux heures... Cela montre clairement que lassiduit dans ltude de la Torah dune part, et dautre part laide particulire que D. procure ceux qui font des efforts, dpendent lun de lautre. Laide de D. multiplie les forces de lhomme, lui permettant de continuer le lendemain, jour aprs jour. Le Zohar explique des choses merveilleuses concernant ceux qui sefforcent dtudier la Torah la nuit, et de quelle faon D. Sattache eux. Nous allons en citer quelques unes: Celui qui se donne de la peine pour comprendre la Torah sattache larbre de la vie (Zohar Korah 176a), Connais le Nom de D. et dlivre-toi de la prison (ibid. III, 176a), Celui qui soccupe de Torah en ce monde trouvera ouverts un certain nombre de portiques dans le monde Venir (ibid. III, 213a), Celui qui tudie la Torah de jour et de nuit acquiert deux mondes: le monde suprieur et le monde infrieur (ibid. I, 189b), Il ralise lunit de D. (ibid. III, 9b), Cest comme sil se tenait sur le Mont Sina et recevait lui-mme la Torah (ibid. III, 179b), Il mourra dans un baiser de D. (ibid. I, 168a). Cest dire que celui qui surmonte sa fatigue pour tudier la Torah fait la joie de D., au point quil est dit que D. lembrasse en disant: Voyez quelle crature Jai cre dans Mon monde et pour un tel homme La rcompense est la mesure de la peine (Avoth V:26). Paralllement Moch qui a tudi la Torah quarante jours et quarante nuits sur la montagne, nous trouvons dans la Torah une personnalit compltement diffrente, et bien que ce ne soit pas ici notre sujet, la comparaison avec elle nous permet dexpliquer et de comprendre le sujet qui nous concerne. Il sagit dEfron le Hthen, qui a vendu le caveau de Machpela Avraham. Tout dabord, Efron avait dit Avraham: Tu es le reprsentant de D. parmi nous (Brchith 23:6), et en prsence de tous ceux qui taient venus la porte de sa ville, il dit: le champ je te le donne, le caveau qui sy trouve, je te le donne galement (ibid. v. 10-11). Apparemment, il agissait avec le respect crmonieux d au reprsentant de D. qui il faisait don de tout, gratuitement. Mais au moment de raliser sa promesse, il rvla quelle tait son intention relle: une terre qui vaut quatre cents sicles, quest-ce entre nous? (ibid. v. 15). Cela nous montre quEfron, un trompeur de lengeance dEssav, mentait ouvertement. Tout comme Essav trompait les gens, Efron se faisait passer pour vertueux et gnreux en public, mais ce ntait quune apparence, comme le prouve la fin. Efron fait partie de ces hypocrites qui parlent beaucoup mais ne font rien de ce quils disent (Baba Metsya 87a), car leurs paroles ne sont que mensonges. Le monde fut dtruit par le dluge en punition des crimes commis par les hommes les uns envers les autres. Aprs le dluge, D. contracta une alliance avec Noah, promettant toutes les cratures qui sont sur terre quil ny aurait plus de dluge. Il dsigna larc-en-ciel en signe de cette promesse, comme il est crit: Jai plac Mon arc dans la nue et ce sera le signe de lalliance entre Moi et la terre (Brchith 9:13). Si D., lavenir voulait nouveau dtruire le monde larc apparatra dans la nue... et Je me souviendrai de Mon alliance avec vous... et les eaux ne deviendront plus un dluge anantissant toute chair... (ibid. 14-16). Il ny aura pas dautre dluge. Efron, par ses tromperies et ses bassesses, aurait pu causer un autre dluge, si ce ntait que le signe de lalliance - larc-en-ciel - len empchait. Cela est indiqu dans son nom, Efron qui sans la lettre Vav a la valeur numrique de quatre cents. Ajouts aux quatre cents sicles dargent quil extorqua Avraham, nous trouvons le nombre huit cents, la valeur numrique du mot Ksht, arc-en-ciel. Larc-en-ciel aurait d apparatre dans le ciel lorsque Efron trompa Avraham aux yeux de tous les habitants de la ville.

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Quindique le mot Tomim, jumeaux, crit sans la lettre Alef ? Lorsque Rivka se rendit la Ychivah de Chem et Ever (Brchith 63:6) afin de les consulter quant son avenir et au sens des mouvements quelle ressentait, il lui fut dit que bien quelle portt des jumeaux - ce qui normalement indique une ressemblance - ses enfants taient tout fait diffrents lun de lautre: deux peuples sortiront de tes entrailles et ils se spareront (Brchith 25:23), celui-ci ira son chemin dans les pas de Moch qui tudie la Torah jour et nuit, et celui-l suivra le chemin dEfron le Hthen, qui trompe et cherche blouir les gens. En dcomposant le mot toumim nous obtenons tou, et mem . Tou a la valeur numrique du nom Efron, qui rappelle Essav le menteur, et mem doubl, a la valeur numrique du nom de Yaakov, qui est semblable Moch qui a tudi la Torah quarante jours et quarante nuits, sans interruption.

La lutte contre le mauvais penchant


Il est crit et le premier qui est n tait tout roux, tout son corps tait pareil une pelisse et on lui donna le nom dEssav. Aprs lui est n son frre et il tenait dans sa main le talon dEssav, et on lui donna le nom de Yaakov. Yitshak avait soixante ans leur naissance (Brchith 25:25-26). Il faut se demander 1. pourquoi la Torah nous raconte dans quel ordre sont ns Yaakov et Essav. Le Zohar maudit celui qui croit que la Torah nous raconte des anecdotes (III, 149b). Il ny a pas dans la Torah de mot inutile, et chaque mot contient un enseignement merveilleux. Quel est donc le sens de la narration de la naissance de Yaakov et dEssav? 2. pourquoi Yaakov saisit le talon dEssav et non une autre partie de son corps. Si la Torah nous prcise ce dtail, il est certain quil a une signification particulire. Nous avons dj pos ces questions, mais la Torah peut sexpliquer de multiples faons. Ce rcit nous enseigne que la lutte contre le mauvais penchant commence ds avant la naissance, et plus lme est sainte, plus cette lutte est difficile, comme il est dit: plus quelquun est grand, plus son mauvais penchant aussi est grand (Soucah 52a). Il y avait une lutte acharne entre Yaakov et Essav davant leur naissance, et cest un exemple de la lutte de lhomme vertueux contre son mauvais penchant. Essav est n le premier - le mauvais penchant - et Yaakov le tenait par le talon, kev, mot qui signifie aussi empchement. Cest dire quil le tenait afin de lempcher de dominer, car Yaakov dsirait lui, dominer Essav - le mauvais penchant. Cest une leon valable pour tous, qui nous enseigne que la lutte contre le mauvais penchant est permanente, quil ne faut pas lui donner loccasion de vaincre, ne serait-ce quun seul instant. Lui laisser une brche risquerait malheureusement de nous faire tomber sous son emprise, comme il est crit (Brchith 4:7): la faute est tapie sur le seuil , prte nous induire en erreur car le mauvais penchant est tapi entre les deux parties du cur de lhomme afin de le faire fauter (Brachoth 61a). Si lhomme laisse la moindre brche ouverte, il tombe dans ses filets comme il est crit (Thilim 37: 32): Le mchant fait le guet pour attraper le juste, et il cherche le mettre mort . Cest une lutte de tous les jours puisque le mauvais penchant prend le dessus sur lhomme chaque jour et cherche le mettre mort (Soucah 52b; Kidouschin 30b). En tout temps et en toute circonstance, il faut tre prt lutter contre le mauvais penchant, tre toujours en position de le saisir par le talon afin de lempcher de prendre le dessus, comme le disent les Sages (Brchith Rabah 34:11): Les justes dominent les dsirs de leur cur , et (Avodah Zarah 5b; Tana DBey Eliyahou 1): Celui qui est plong dans la Torah domine ses penchants car il les retient par le talon. Nous tirons de cette section une leon de morale: bien quEssav ait pens chapper lemprise de Yaakov, celui-ci russit le retenir et le dominer. Cest ce qui est crit (Brchith 27:36): Il ma supplant deux fois , une fois lorsque Yaakov la priv du droit danesse et une autre fois, lorsquil la priv des bndictions. De mme, celui qui domine toujours ses penchants et se garde de tomber sous leur emprise, transforme son mauvais penchant en esclave qui lui est soumis et il en fait un serviteur fidle de D., comme il est crit (Devarim 6:5): Tu aimeras lEternel ton D. de tout ton cur , que les Sages expliquent (Brachoth 54a): avec les deux penchants de ton cur, le bon et le mauvais . Cest une grande victoire pour lhomme que de russir surmonter et soumettre son mauvais penchant afin de servir D. avec les deux penchants de son cur.

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Effectivement le mauvais penchant tente toujours dattraper lhomme dans ses filets. Cela aussi est indiqu dans le rcit dEssav, qui symbolise le mauvais penchant, et dont il est dit: tout son corps tait pareil une pelisse (Brchith 25:25), un homme velu (ibid. 27:11) o le mot Sar, velu, est compos des mmes lettres que le mot Racha, mchant, qui pousse la faute. Et il est dit aussi quEssav est roux Adom, un mot qui comprend le mot Dam, sang, cest--dire prt verser le sang (Baba Bathra 16b; Brchith Rabah 63:11; Chemoth Rabah 1:1), prt tuer, inciter les gens nier D. comme il le faisait lui-mme, et cela afin de les dtourner du bon chemin et leur faire commettre des transgressions. Celui qui combat et domine son mauvais penchant est, comme Yaakov, un homme la peau lisse , Ich Halak (Brchith 27:11) car il a gagn sa part, Hlek, dans le monde Venir comme il est dit: Chaque Juif a une place dans le monde Venir (Sanhdrin 90a; Zohar I, 59b). Il faut pourtant comprendre que lessentiel de la lutte contre le mauvais penchant commence ds lenfance et mme avant la naissance, comme nous lavons montr plus haut. Les parents ont le devoir dduquer leurs enfants ds leur plus jeune ge et de les habituer saisir leurs mauvaises tendances par le talon. Les Sages disent (Chabath 119b; Zohar I 1b, II 39b): Le monde ne se perptue que grce au souffle des enfants qui apprennent la Torah, et qui ne connaissent pas le sens de la faute . Cest donc que leur souffle est saint et pur. Ces paroles sublimes des Sages nous montrent limportance pour les enfants dtudier la Torah, car effectivement le mauvais penchant les craint, et lorsquils sont plongs dans la Torah ds leur plus jeune ge, ils dominent dj leur mauvais penchant. Yaakov, llu des Patriarches (Brchith Rabah 76a; Zohar I, 119b) a effectivement russi ds sa naissance dominer le mauvais penchant, et il est vident que, vu sa grandeur, il a russi le faire grce au souffle de la Torah. Sur cette base, nous pouvons expliquer le verset (Devarim 7:12): En consquence (ekev) de votre obissance ces lois... , o la Torah nous fait savoir que lhomme est capable de comprendre les lois de D. et de les pratiquer uniquement sil se saisit du mauvais penchant. Ce verset vient dire: Si vous saisissez le mauvais penchant par le talon (ekev), il sera sous votre emprise, et par consquent vous mriterez, sans aucun empchement de sa part, de comprendre les lois de D. et de pratiquer tous Ses commandements. Nous avons reu de nos anctres lassurance que lorsque nous nous trouverons la croise des chemins, en fin de compte, nous vaincrons le mauvais penchant, ce qui fait dire aux Sages (Chemoth Rabah 23: 11): Les enfants dIsral, mme sils sont fautifs, se repentent et ne sont pas exclus du sein du peuple , cest--dire quils restent les descendants de Yaakov qui est appel Isral (Brchith 32:29), et D. dirige les vnements afin de leur donner loccasion de se repentir. Cela nous montre que la lutte de Yaakov pour se saisir du mauvais penchant et le vaincre (et il est un exemple pour les gnrations futures) se perptue pour toutes les gnrations. A propos du verset (Brchith 32:25): Un homme lutta avec lui jusqu laube , les Sages disent (Houlin 91a); cet homme tait lange tutlaire dEssav, et la poussire souleve par leur lutte parvint jusquau Trne divin , pour montrer combien cette lutte tait violente. Il faut expliquer ce propos. 1. Le Hafetz Hayim demande pourquoi le Satan, cet ange tutlaire dEssav, sen est pris Yaakov, et non Avraham ou Yitshak. Pourquoi a-t-il attendu de sattaquer justement Yaakov? 2. Pourquoi sest-il attaqu Yaakov justement la nuit, dans lobscurit, et pas le jour? Et pourquoi justement cette nuit-l? 3. Surtout, il est crit (Brchith 32:26): Il lui pressa la cuisse et la cuisse de Yaakov se luxa... Pourquoi le pressa-t-il justement la cuisse et pas sur une autre partie du corps? Cest que lange tutlaire dEssav est comme le mauvais penchant, entirement vou la destruction et la dpravation. Il est interdit un homme de Torah de sortir seul la nuit (Houlin 91a), et pourtant Yaakov tait seul cette nuit-l car il avait laiss de la petite vaisselle de lautre ct du fleuve et il est retourn la chercher . Ce faisant, il a ouvert une brche au mauvais penchant - lange tutlaire dEssav - qui jusque-l se trouvait sous la domination de Yaakov qui le tenait par le talon. Mais justement cette nuit-l, loccasion lui tait donne de lutter avec lui, et cette lutte fut tellement violente que la poussire quelle soulevait atteignit le Trne divin. Une lutte difficile, car lange tentait de se librer (de librer son talon) de lemprise de Yaakov. Mais il ne pouvait pas. Yaakov tait puissant, sa Torah le soutenait et cest elle qui la aid sortir victorieux de cette guerre contre le mauvais penchant.

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Nous comprenons prsent pourquoi cet ange sest attaqu justement Yaakov et non Avraham ou Yitshak bien quils fussent extrmement vertueux et que le monde entier repose sur leur mrite. En effet, les Sages disent dAvraham: Il amena beaucoup de peuples la croyance en D. (Brchith Rabah 39: 21, 84:2), il tait heureux de voir les gens bnir D. (ibid. 54:6), il fit proclamer le Nom de D. dans le monde (Soucah 10a), il a mme pratiqu tous les commandements de la Torah avant quelle ne soit donne, y compris les ordonnances rabbiniques (Yoma 28b; Vayikra Rabah 2:9), et sa qualit intrinsque est la bienveillance (Zohar III, 302a). Malgr tout, lange dEssav na pas tent de lui nuire pour ne pas risquer de subir son influence, ne ft-ce quun minimum. De plus, Avraham a donn naissance Ichmal, et le Satan compte sur Ichmal pour avoir une mauvaise influence sur Yitshak sans attirer sur lui-mme la colre dAvraham. Effectivement, nous avons vu que le Satan avait dj tent de dtourner Avraham lors du sacrifice dYitshak. Il stait alors transform en rivire prte le noyer et larrter en chemin (Yalkout Chimoni, Vayra 99), et Avraham pria et dit (Thilim 69:2): Sauve-moi, D. car les flots atteignent mon me . Nous savons aussi que lorsque Avraham a donn sa vie pour sanctifier le Nom de D. Our Kassdim, le Satan a tent en vain de le faire faillir en lui conseillant de se prosterner devant Nimrod (Yalkout Mam Loez, Brchith 1, page 261 au nom du Chevet Moussar). Le Satan ne sest pas mesur Yitshak non plus. Ou bien parce quil a donn naissance Essav et le Satan comptait sur la mauvaise influence quil aurait sur Yaakov son frre, ou bien parce quil savait sans lombre dun doute quil ne pourrait pas vaincre Yitshak, dont la qualit essentielle est la Puissance (Zohar III, 302a) et qui aurait facilement eu le dessus (bien que ce ne soit pas explicite dans la Torah), ou bien encore parce quYitshak aussi amenait les gens la connaissance de D. (Brchith Rabah 84:2), et pratiquait toute la Torah (Vayikra 2:8; Tana DBey Eliyahou Rabah 6), et surtout parce que son me tait exceptionnelle, elle tenait de lautre monde et, comme le dit le Ari zal, aucun pouvoir tranger navait demprise sur lui . Mais le Satan, lange tutlaire dEssav, le mauvais penchant, sen prend Yaakov dont la qualit essentielle est la Gloire (Zohar III, 302a) et qui est la couronne des Patriarches . Le Satan craint plus que tout la bndiction un peuple sera plus puissant que lautre (Brchith 25:23), et la pense que Yaakov et ses enfants puissent propager dans le monde entier ltude de la Torah et la pratique de ses lois lui est insupportable. Cest pourquoi lange tutlaire dEssav veut sattaquer Yaakov directement, ce qui affaiblira aussi sa descendance aprs lui. Comment est-ce que lange tutlaire dEssav pense pouvoir affaiblir Yaakov dans son attachement la Torah? En portant atteinte sa cuisse! Pourquoi justement la cuisse? Tout dabord parce que la cuisse, les jambes, qui le conduisent toujours vers les maisons dtude et les maisons de prire, ne pourront plus courir et cela nuira son tude de la Torah, ainsi que celle de ses descendants qui ne pourront plus remplir le devoir de sempresser vers la maison dtude (Brachoth 6b; Rambam, Halakhoth Tfilah 8:2). Ensuite, parce que lange tutlaire dEssav, aprs avoir tent en vain de laffaiblir par toutes sortes de stratagmes, cherche latteindre la cuisse pour le faire boiter, et sil devient boiteux, cela laffaiblira dans son service de D. Le mot [lox, boiteux, est compos des mmes lettres que le mot lx[, paresseux, cest--dire quil dsirait le rendre paresseux et ngligent dans les maisons dtude et de prire. Si la marque de cette blessure (spirituelle) tait reste, elle se serait transmise ses enfants et tous ses descendants. Cest pour nous un enseignement moral, nous devons comprendre que le mauvais penchant, sil ne parvient pas nous prendre dans ses filets, tente de nous affaiblir, comme par exemple durant la prire. Lorsque vient le temps de la prire, lheure du Kriat Chema, notre mauvais penchant tente de nous convaincre de rester encore un peu au lit, afin de nous habituer la paresse et la faiblesse dans notre service de D., jusqu faire de nous des paresseux qui ont perdu le dsir dobir aux commandements et qui trouvent toutes sortes dexcuses: il y a un chacal au milieu de la route! un lion parcourt les rues! (Michley 26:13). Tant et si bien que nous laissons passer lheure du Kriat Chema et de la prire, par paresse. Il en est de mme de tout autre commandement, dont il est dit (Mekhilta et Pessikta Zouta Chemoth 12:17): Lorsque se prsente la possibilit de raliser un commandement, il ne faut pas laisser passer ce moment . Mais le mauvais penchant arrive nous convaincre que nous avons le temps et la possibilit daccomplir ce commandement plus tard, et nous devenons ngligents dans la pratique, nous laissons chapper le bon moment. Les Sages

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nous ont pourtant avertis (Avoth II:14; Chohar Tov 119:57): Ne dis pas: jtudierai quand jaurai le temps, car peut-tre nauras-tu pas le temps , et (Avoth I:14): Si ce nest pas maintenant, quand donc? Il faut surmonter cette paresse et pratiquer sans tarder les commandements et ltude de la Torah. Lange tutlaire dEssav voulait affaiblir Yaakov. Mais Yaakov, malgr la blessure la cuisse qui lhandicapait, sempara de lui par le talon grce la force que lui donnait la Torah. De mme, toute personne qui ne tombe pas sous lemprise du mauvais penchant et qui le vainc grce la Torah peut tre heureuse, comme le disent les Sages (Sotah 21a): La Torah protge et sauve . Un tel homme suit en cela la voie de Yaakov et peut surmonter le Satan, le mauvais penchant, lange tutlaire dEssav et toutes ses cohortes. Yaakov qui a russi vaincre lange tutlaire dEssav, ne sest pas content de ce succs personnel, il voulait le transmettre en hritage ses descendants, afin de nous donner la force de vaincre, nous aussi, le mauvais penchant. Cest pourquoi il est ordonn aux Juifs (Brchith 32:33): Les Enfants dIsral ne mangeront pas le nerf sciatique . Nous ne mangeons pas le nerf sciatique pour nous souvenir de ce que lange dEssav fit Yaakov, pour ne pas nous reposer sur cette partie du corps quil a touche et qui nous incite tre paresseux dans notre service de D., pour nous rappeler la diligence dans le service de D., et pour aller avec empressement et enthousiasme vers les maisons dtude et de prire. Il nous est interdit de manger le nerf sciatique parce que Yaakov fut atteint la cuisse, pour nous enseigner que le mauvais penchant tend nous rendre paresseux et faibles (Les mots de ce verset: Cest pourquoi les enfants dIsral ne mangeront pas le nerf sciatique ont la mme valeur numrique que les mots: il est interdit dtre paresseux vis--vis de D. ). Ces choses sont surprenantes. En effet, si lange tutlaire dEssav avait russi vaincre Yaakov, nous porterions la marque de cette paresse et de cette faiblesse, et nous naurions jamais pu tre sauvs dEgypte ou de lexil parmi les nations. Mais lattachement de Yaakov la Torah nous soutient et nous sauve, comme le disent les Sages (Pessikta Zouta Vaethanan 4:32): Isral nest sauv des nations que par le mrite de la Torah . Cest que le pouvoir de la Torah de Yaakov nous protge au long des gnrations, et nous permet de surmonter notre faiblesse, dempoigner le mauvais penchant, de le dominer ds le plus jeune ge, et de nous attacher toujours plus fortement la Torah, ses prceptes, la crainte et au service de D., de faon parfaite.

Le pouvoir du libre arbitre


Et Essav dit Yaakov: Laisse-moi, je te prie, avaler de ce mets rouge rouge... Yaakov dit: vends-moi aujourdhui ton droit danesse. Essav rpond: Certes, je vais mourir, quoi me sert le droit danesse? Yaakov dit: Jure-le moi aujourdhui. Et il lui en fit le serment et vendit Yaakov le droit danesse (Brchith 25:30-33). Les actes des anctres sont un exemple pour leurs enfants (Sotah 34a). Nous devons donc approfondir le sens du rcit de la vente du droit danesse, une vente qui marque le dbut dune lutte acharne entre Yaakov et Essav qui se poursuit jusqu nos jours, et jusqu larrive prochaine du Messie. Avant den tirer la leon, il faut se demander: 1. Pourquoi Yaakov achte-t-il le droit danesse, puisque de toute faon il est appel le premier-n, comme le disent les Sages (Tanhouma Chmini 2): Il est le premier-n aux yeux de D. , et il est crit (Chemoth 4:22): Mon premier-n Isral ? 2. On ne peut pas penser que Yaakov voulait le droit danesse afin de recevoir les bndictions dYitshak, car nous voyons par la suite quYitshak la bni sans savoir que Yaakov avait achet ce droit. Ce nest que par la suite, lorsque Essav lui dit (Brchith 27:36): Il ma supplant deux fois, il ma pris mon droit danesse et voici que maintenant il prend ma bndiction , quYitshak apprit que Yaakov tait effectivement lan, comme le dit Rachi, rapportant le commentaire des Sages (Tanhouma Yachan 23): Il craignait davoir bni le plus jeune avant lan, mais en entendant que Yaakov tait lan il se dit: maintenant il est lan et je lai bni - il restera bni (Brchith 27:33). Est-ce donc que les bndictions sont indpendantes de la vente? 3. Surtout il faut comprendre pourquoi Essav consentit conclure ce march? Nous savons que lan hrite dune double part (Brachoth 51b), et donc, en vendant ce droit il perd volontairement la moiti de

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son hritage. Pourquoi y renonce-t-il si facilement, alors que nous savons combien il est avide de richesses, au point de satisfaire tous ses apptits par le vol (Brchith Rabah 65:13)? Yaakov et Essav sont diffrents. Yaakov est un homme intgre, il tudie la Torah (Brchith 25:27), il sert D. en tout, avec foi, sans voler, sans tromper, et sans causer aucun dommage. Par contre, Essav vole, brigande et tue. Il vole les femmes leur mari (Brchith Rabah 65:1), il a commis cinq crimes en un seul jour (Baba Bathra 16b; Midrach Thilim 9:7), il trompe tout le monde par ses mensonges, il se fait passer pour vertueux, semblable au cochon qui montre ses sabots fendus comme pour dire: voyez, je suis pur (Brchith Rabah 65:1), apparemment il a beaucoup de respect pour son pre (Chemoth Rabah 46: 3; Devarim Rabah 1:14), mais il nest pas sincre, il le trompe, et il commet toutes les transgressions. Yaakov tait en train de prparer un plat de lentilles selon la coutume des gens endeuills car Avraham tait mort ce jour-l. Lorsque Essav rentre des champs, fatigu des meurtres commis, il tait naturel quil demande son frre de lui accorder la faveur de lui donner quelque chose manger pour calmer sa faim. Il est vident que Yaakov (dont le nom a la mme valeur numrique que lexpression: baal lev ham, qui a un cur chaleureux et hou igmalekha kol tov, il te rendra tout le bien ) aurait accd sa demande et lui aurait donn ce plat de bon cur. Pourtant Essav laborde violemment et grands cris (Brchith 25:30): Fais-moi avaler je te prie de ce mets rouge rouge , et comme le disent les Sages (Brchith Rabah 63:12; Bamidbar Rabah 21:18; Tanhouma Pinhas 13): Il a ouvert la bouche grande comme celle dun chameau en disant: moi jouvre la bouche, toi tu verseras comme dans la gorge dun chameau . Cest--dire que, de gr ou de force, il a exig non seulement de manger, mais dtre nourri, ce qui montre jusquo va sa mchancet car les mchants exigent de force ce qui ne leur revient pas et quils ne mritent pas, et ils veulent le recevoir sans faire aucun effort. Yaakov comprit quEssav allait transmettre cette tare ses enfants, et dans ce cas, comment les Enfants dIsral pourraient-ils faire face la cruaut dEssav et de ses descendants qui seraient capables de les avaler vivants? Cest pourquoi il voulut affaiblir le pouvoir malfaisant dEssav, et il dit (Brchith 25:31): Vends-moi aujourdhui ton droit danesse , pour amoindrir quelque peu lemprise de sa mchancet. Mais Essav savait que mme si Yaakov lui achetait le droit danesse, il ne recevrait pas une double part de lhritage de son pre, puisque dj dans le ventre de leur mre, ils avaient partag entre eux les deux mondes, ce monde-ci et le monde Venir (Tana DBey Eliyahou Zouta 19), et donc il navait aucune crainte ce sujet. De plus, pensait-il, qui croirait que Yaakov avait achet le droit danesse, est-ce une chose qui peut se vendre? Cest ainsi quil ddaigna le droit danesse et ses devoirs envers D. (voir Brchith Rabah 63:13-14), comme il est crit (Brchith 24:34): Et Essav ddaigna le droit danesse . La sagesse de Yaakov fut de navoir demand ni argent, ni richesse, ni hritage en change du plat de lentilles. Son seul but tait de vaincre et daffaiblir la mchancet dEssav. Nous savons aujourdhui de quelle faon les nations ont vol et pill les Juifs durant tout le temps de leur exil, et nous pouvons imaginer ce quils nous auraient fait si Yaakov navait pas utilis cette ruse et navait pas achet Essav le droit danesse. Tout cela nous enseigne le pouvoir du libre arbitre. Essav savait combien le mal et limpuret sont puissants car tout compte fait, il est aussi le fils dYitshak. Lorsque Yaakov proposa de lui acheter le droit danesse, il avait devant lui deux possibilits: il aurait pu refuser de vendre ce droit, ce qui aurait renforc son pouvoir de faire le mal et lui aurait permis de dominer Isral. Ou bien, il pouvait accepter et, ce faisant, affaiblir sa capacit de nuire lavenir. Un bon choix au dbut aurait pu avoir une suite favorable sil avait renforc ce choix en se rappelant quAvraham tait mort ce jour-l et en regrettant sa propre mchancet; cette pense en elle-mme aurait suffi veiller en lui le dsir de se repentir. Mais Essav na choisi ni la premire possibilit, ni la deuxime. Il dcida de vendre le droit danesse, non pas pour affaiblir son pouvoir de faire le mal et pour se repentir, mais au contraire, il comptait sur cette part de mal qui restait en lui aprs la vente pour continuer nuire Isral. Cest pourquoi il accepta ce march et ddaigna le droit danesse. Cela nous permet de comprendre ce que D. dit dEssav (Melakhi 1:2-3): Jai aim Yaakov, mais Essav Je le hais, si bien que Jai livr ses montagnes la dvastation et son hritage aux chacals du dsert .

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Essav avait le choix, un choix qui aurait pu faire de lui, en un instant, un homme vertueux, mais il na pas agi dans ce sens. Au contraire, il a ddaign le droit danesse, il ne renonait pas sa mchancet, et cest pour cette raison que D. le hait, une haine qui sexprime par la ruine de ses montagnes (cest--dire laffaiblissement de son pouvoir) et la dvastation. Cela montre bien quEssav a mal choisi. Les Sages disent (Sanhdrin 29a; Zohar II, 233b): Celui qui en fait trop, fait trop peu et celui qui minimise dplait D., comme il est dit (Devarim 4:2): Najoutez rien ce que Je vous prescris et nen retranchez rien , cest--dire quil est interdit dajouter ou de retrancher quoi que ce soit ce qui est crit dans la Torah. La conduite licencieuse dEssav illustre cet interdit, car il cherchait toujours ajouter des choses la loi, comme lorsquil demanda comment prlever la dme sur le sel et le foin. Il honorait grandement son pre (Chemoth Rabah 46:3), et pour le servir, il portait les vtements prcieux dAdam quil stait appropri du butin de Nimrod (Brchith Rabah 65:12, Pirkey dRabbi Elizer 24), mais tous les raffinements quil ajoutait taient en fait un amoindrissement, car cest en honorant son droit danesse quil aurait fait honneur son pre Yitshak et voil que soudain, Essav mprise ce droit et le vend pour un plat de lentilles. En outre, il pensait servir son pre des nourritures voles, comme le disent les Sages propos du verset (Brchith 27:5) Il mettait du gibier dans sa bouche - il trompait son pre en lui disant quil tait lan, sans lui dire quil avait vendu ce droit Yaakov. De plus, il a mpris les bndictions et ne les a pas prises au srieux. Comment pouvait-il penser que ces bndictions se raliseraient pour lui sil donnait manger son pre de la viande vole et mme impure, comme il est dit dans la traduction de Yonathan ben Ouziel: Il a tu un chien et la apport son pre . Cest quil ddaignait les bndictions tout autant que le droit danesse (Brakha, la bndiction, a les mmes lettres que Bkhora, lanesse...) si bien que lorsque Rivka entendit ce que Yitshak disait Essav son fils - et Yonathan ben Ouziel prcise quelle lentendit par rvlation divine (Brchith 27:5) - elle conseilla Yaakov de prparer pour Yitshak des mets son got, de porter les vtements prcieux dEssav, car il convient lan de servir son pre vtu de tels habits. A vrai dire, lorsque Essav sut, en rentrant des champs, quYitshak avait bni Yaakov, il prit conscience de son erreur et il comprit combien il avait perdu de son pouvoir. Il regretta le libre arbitre quil avait mal utilis et il poussa de grands cris pleins damertume (Brchith 27:34). Loccasion lui tait donne de tirer la conclusion qui simpose et de se repentir davoir choisi, au moment de la vente de son droit danesse, de poursuivre son mauvais chemin. Sil avait compris son erreur en constatant tout ce quil avait perdu, il aurait su quil recevait la juste revanche de ses actes car, de mme quil avait utilis les vtements prcieux pour tromper les gens, de mme Yaakov les avait utiliss pour prouver son pre que ce nest pas le vtement qui est essentiel mais lintention, car il faut que nos paroles refltent ce quon a dans le cur (Pessahim 63a) et soient sincres. Essav avait encore la possibilit de choisir la bonne voie et de donner un sens sa vie. Mais tel un chien revenant sur ses traces, Essav rpte son erreur et au lieu dutiliser son libre arbitre pour se repentir en cette occasion exceptionnelle qui lui tait donne de le faire, il persiste dans sa mchancet et manigance le meurtre de Yaakov, comme il est crit (Brchith 27:41): Le temps du deuil de mon pre approche et je tuerai Yaakov mon frre . Bien quil ait su que son pre et sa mre taient habits par linspiration divine et connaissaient ses intentions de tuer son frre innocent, il se rebella contre eux en connaissance de cause. La honte dEssav est mise jour car nous voyons quil navait pas lintention dhonorer ses parents, mais de les tromper, et nous savons que telle est, de tout temps, la faon dagir des gens mchants qui prononcent des paroles de paix envers leur prochain mais dans leur cur lui tendent des piges (Yrmia 9:7), Ils le bnissent en paroles, mais au fond de leur cur ils le maudissent (Thilim 62:5), et ...son cur est plein de tromperies (Michley 26:24) - ils se montrent extrieurement pleins damiti mais ils nont dans leur cur que tromperie, rancune, haine et jalousie. Celui qui fait partie du peuple juif ne se conduit pas de la sorte, il est droit et sincre, il najoute rien et ne retranche rien , il affaiblit le pouvoir du mal et renforce celui de la saintet en utilisant son libre arbitre pour choisir la vraie vie, la vie ternelle.

Parachat toldot Lamour de D. pour Isral

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Il est crit (Brchith 18:19): Je lai distingu pour quil prescrive ses enfants et sa maison aprs lui dobserver la voie de lEternel en pratiquant la vertu et la justice afin que lEternel accomplisse envers Avraham ce quIl a dclar son gard . Rachi explique ainsi ce verset: Parce quil prescrit la loi ses enfants, Je me dois daccomplir ce que Jai dclar... Nous tirons de l une ide profonde. D. dsire rvler Avraham ce quIl compte faire Sodome et Gomorrhe, sans rien lui cacher, parce quIl sait quAvraham ordonnera ses enfants et sa maisonne dobserver la voie de D. Cest un concept difficile comprendre. Si Avraham prescrit ses enfants et aux gens de sa maison la voie de D., est-ce que D. doit en retour lui exprimer ouvertement son amour? D. dsire quAvraham prie en faveur des habitants de ces villes, mais cela indique-t-il quelle est limportance des enfants de Avraham aux yeux de D.? Si les habitants de Sodome taient pervers et pcheurs devant lEternel (Brchith 13:13), pourquoi D. dsire-t-Il la prire dAvraham? Il est crit (Malakhi 1:2-3): Je vous ai pris en affection, dit lEternel, et vous avez dit: En quoi nous as-tu tmoign Ton amour? Essav nest-il pas le frre de Yaakov? dit lEternel, or Jai aim Yaakov, mais Essav Je lai ha si bien que Jai livr ses montagnes la dvastation et son hritage aux chacals du dsert. 1. Il faut effectivement se demander pourquoi D. aime les Enfants dIsral et quel grand mrite ils ont. Est-ce parce quils sont les enfants de Yaakov? Car si D. aime Yaakov parce quil est intgre et saint, est-ce que cela oblige D. aimer par la suite ses enfants, qui peut-tre ne se conduiront pas toujours correctement? Pourquoi D. doit-Il les tenir en affection? En quoi le verset: Essav nest-il pas le frre de Yaakov exprime-t-il lamour de D. pour Yaakov? 2. Ce verset implique que D. hait les enfants dEssav, au point de livrer, dans les gnrations futures, leurs montagnes la dvastation... Pour quelle raison? Si Essav est ha de D., en quoi ses enfants sont-ils coupables? Car enfin les Portes des Larmes ne sont jamais fermes (Brachoth 23b; Baba Metsya 59a; Zohar I, 238b) et les Portes du Repentir sont toujours ouvertes (Ekhah Rabbati 3; Midrach Thilim 65:4), les mains de D. sont tendues pour recevoir ceux qui se repentent (Pessahim 119a; Tana DBey Eliyahou 22) et Il leur accorde un sursis afin quils aient le temps de se repentir (Pessikta Zouta Bechalah 15:6). Pourquoi les enfants dEssav sont-ils tenus en aversion? Nous tirons de l une leon de morale et de bonne conduite. Les Enfants dIsral sont aims de D. principalement grce aux Patriarches. D. les aime parce quIl sait que le seul dsir des pres de la nation fut de transmettre en hritage et de dicter leur mode de conduite leurs enfants aprs eux, et parce quils avaient consacr leur vie cette tche, comme il est crit propos dAvraham: Je lai distingu pour quil prescrive... Tous les efforts des Patriarches avaient pour but denseigner leurs enfants le service de D. afin quils sachent transmettre ces prescriptions et cette ducation leurs enfants aprs eux, et pour que leurs descendants suivent la voie de la Torah (Chohar Tov 1). Le Baal HaTourim (Brchith 18:19) fait remarquer que les dernires lettres des mots acher yetzav eyt banav forment le mot Torah. De plus les mots acher yetzav, compts avec le nombre de mots, ont la mme valeur numrique que le mot Torah. Etant donn que D. connaissait le fond de la pense des pres de la nation (comme Onkelos le traduit: Je sais quil prescrira ses enfants... ) et quIl savait leur dsir de perptuer lattachement D. dans les gnrations futures, tant donn aussi limportance des Patriarches aux yeux de D. et Son estime pour leur conduite, tout se passait comme si leurs enfants suivaient dj la voie de la Torah, avant mme leur naissance. Maintenant nous comprenons que lamour de D. pour Isral dcoule de la vertu des Patriarches, quil est la rcompense de leur dsir dduquer correctement leurs enfants, et D. sait queffectivement les enfants suivront la voie de leurs pres et surmonteront toutes les preuves, comme nous pouvons le constater jusqu nos jours. D. dsire quAvraham prie pour les habitants de Sodome et Gomorrhe, pour leur donner la possibilit de revenir D. et de suivre la voie ouverte par Avraham. Par contre, Essav ne suit pas le chemin de Yaakov. Il est crit: Essav nest-il pas le frre de Yaakov? Yaakov et Essav ont tudi ensemble lorsquils taient enfants (Brchith Rabah 63:14), tous deux furent

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duqus dans la maison de leur pre Yitshak, mais seul Yaakov a choisi de suivre la voie de la Torah toute sa vie (Brchith Rabah 95:2) et dtudier dans les tentes de Chem et Ever (Mguilah 17a). Essav quant lui, dlaisse le droit chemin et bien quayant la mme possibilit de se sublimer que Yaakov, abandonne tout; cest pourquoi D. le hait, ainsi que ses descendants. Essav sait ce qui est vrai et bon, mais il est de ceux dont il est dit: ils connaissent leur matre mais ils se rvoltent contre lui (Torat Kohanim Vayikra 26:14; Rachi Brshith 10:9). Certainement D. le hait, mme de son vivant, car il ny a rien esprer de lui, ni sattendre quil duque correctement ses enfants. Cest la raison pour laquelle ses enfants aussi sont has de D., et nous voyons effectivement que les descendants dEssav nont pas fait un retour vers D. Yaakov, lui, a mrit lamour de D. Il est possible desprer de lui quil ordonne ses enfants de suivre son exemple, dans le sens o les gestes des pres sont des exemples pour leurs enfants (Sotah 34a). Et donc D. affectionne aussi ses descendants, car ils suivent la voie de leurs pres, la voie choisie par Yaakov. Mme sils fautent ou ne se conduisent pas correctement, en fin de compte ils reviendront sur le droit chemin, et reprendront la route que les Patriarches ont trace. Il sensuit que chaque pas et chaque geste des Patriarches et des Matriarches avaient pour consquence de tracer la route leurs enfants afin quils slvent dans la voie de la Torah et lobservance de ses lois, et en particulier pour quils ne se laissent pas entraner par des mauvais compagnons. Avraham renvoya les enfants de Ktoura, comme il est crit (Brchith 25:6): Quant aux fils des concubines dAvraham, il leur fit des prsents, et il les renvoya loin dYitshak son fils, de son vivant . Il les loigna en disant: Tant que vous pouvez avancer du ct de lOrient, continuez avancer, afin de ne pas tre consums par le feu dYitshak (Brchith Rabah 61:7). Pourquoi? Parce quAvraham vit quils ne suivaient pas le bon chemin, et quils ne sappliquaient pas servir D. Il craignait que leur conduite ninduise les gens penser que, si les enfants dAvraham se conduisaient ainsi, ctait signe que cela tait licite. Surtout, il ne voulait pas quils sattachent Yitshak, afin de ne pas tre consums par son feu , ni quYitshak les imite. Cest justement cause de lui quil les renvoya comme il est prcis dans le verset: Il les renvoya loin dYitshak, son fils . Avraham les priva aussi de toute marque de saintet pour ne pas induire les gens en erreur, et il les renvoya au loin, leur transmettant les appellations de limpuret (Sanhdrin 91a) afin que le monde sache que, bien quils sont les enfants dAvraham, ils soient impurs car ils ne se conduisent pas saintement, comme lui. De cette faon, il duqua tout le monde. Nous voyons aussi que Sarah a loign de son foyer Ichmal, le fils dHagar, lEgyptienne, comme il est crit (Brchith 21:10): Renvoie cette esclave et son fils, car le fils de cette esclave nhritera pas avec mon fils, avec Yitshak . Sarah vit quil ne se conduisait pas selon les directives quAvraham donnait ses enfants et sa maisonne, et quil commettait lidoltrie, la dbauche, et le meurtre (Brchith Rabah 53:15). La conduite des Patriarches sert de fondement au Judasme et de directive pour les gnrations venir. Mais si les enfants ne suivent pas les traces de leurs pres et ne se conforment pas la bonne ducation quils ont reue, et sils se rebellent comme Essav, les fils de Ktoura et Ichmal, il faut sloigner deux et de leurs semblables. Ils sont has par D. car il ny a rien esprer deux. Nous pouvons ajouter cela que lamour de D. pour les Enfants dIsral dcoule de la grandeur de Yaakov qui est un homme intgre, qui vit sous la tente (Brchith 25:27), et du fait quil sest spar dEssav et na pas imit ses mauvaises actions. Mme lheure des repas, il sloignait de lui. A propos du verset: Yaakov faisait cuire un plat (Brchith 25:29), les Sages demandent: Yaakov avait-il lhabitude de faire la cuisine, ny avait-il pas de nourriture dans la maison de son pre? Cest que Yaakov prparait les plats ailleurs, afin de ne pas manger la mme table que son frre Essav dont il se sparait lheure des repas. La mme ide est indique dans le verset (Brchith 25:23): Deux nations sont dans ton sein, elles se spareront... , dj avant la naissance, ils taient spars. Ils sont diffrents jusque dans leur nourriture, car Yaakov est un homme juste qui ne mange que pour apaiser sa faim (Michley 13:25), et Essav a le ventre des mchants, il nest jamais rassasi (ibid.). Telle est la distance qui spare Yaakov dEssav. Cest Yaakov qui a tabli, pour toutes les gnrations aprs lui, la ncessit fondamentale de se prserver de linfluence dun mauvais environnement et de se tenir loign autant que possible des hommes mchants, surtout lheure des repas, car ils mangent sans se laver les mains, sans prononcer les bndictions, et

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avec gloutonnerie, tel Essav qui a dit avec insolence (Brchith 25:30): Laisse-moi dvorer ce plat rouge rouge... Cest galement le sens de: Je vous ai pris en affection dit lEternel... Jai aim Yaakov, mais Essav Je lai ha car Yaakov se conduit avec retenue et puret dans le domaine matriel, mais Essav et ses descendants sont hassables cause de leur rudesse. Cest pour soustraire Yaakov la mchancet dEssav quYitshak lenvoya Aram (ibid. 28:5). Malgr tout, Yitshak bnit Essav, justement de vivre la pointe de lpe (ibid. 27:14), afin que la diffrence entre Yaakov et Essav soit reconnaissable, car Essav suit son chemin, celui de la violence, du vol, du brigandage, du meurtre, tandis que Yaakov est studieux (Mguilah 17a, Brchith Rabah 63:15) et se garde de tout mal. Cela nous permet de comprendre le conseil de nos Sages (Avoth I:7; Avoth DRabbi Nathan 9:1): Eloignetoi dun mauvais voisin, ne frquente pas les gens mchants . Le mot voisin, Chakhen, est apparent au mot Chekina, la Prsence Divine, et au mot Michkane, le Tabernacle, qui tient la fois de la maison dtude et de la maison de prire, comme le disent les Sages (Mguilah 29a) propos du verset Je leur aurais t en quelque sorte un sanctuaire (Yhezkel 11:16): Il sagit des maisons dtude et des maisons de prire . Les Sages veulent nous faire savoir que celui qui sest approch de la Prsence Divine en recevant de ses matres la Torah, qui la tudie, et qui refuse de suivre la voie de D. est appel mauvais , et donc, cher lecteur, loigne-toi dun mauvais voisin, loigne-toi dun homme qui est loin de D. et qui ne reprsente pas un sanctuaire en miniature . Nos Patriarches staient vous transmettre leurs descendants la saintet, dans le sens de: Je lai distingu afin quil prescrive ses fils... Ils agissaient de faon dsintresse, non pas pour tre importants aux yeux de D. ou respectables aux yeux du monde, mais pour que leurs enfants aprs eux en fassent de mme, comme le disent les Sages (Avoth I:3; Avodah Zarah 19a): Ne soyez pas comme des serviteurs qui servent leur matre dans lintention den tre rcompenss... mais de faon dsintresse .

Lintgrit de nos Patriarches


Expliquons prsent en quoi consiste la saintet des Patriarches. Nous voyons que D. associe son Nom au leur, comme nous le disons dans la prire: Le D. dAvraham, le D. dYitshak, le D. de Yaakov . Sil en est ainsi, cest sans aucune doute parce que les Patriarches recevaient avec amour la parole de D. et nont jamais contest Sa faon de diriger le monde. Lorsque Moch dit D. (Chemoth 5:22): Pourquoi as-Tu rendu ce peuple misrable, et dans quel but mas-Tu envoy?, D. lui rpondit (ibid. 6:1): Maintenant, tu vas voir ce que Je vais faire Pharaon , et les Sages expliquent (Sanhdrin 111a; Chemoth Rabah 5: 22): Tu as critiqu Ma faon de faire, mais Avraham ne Ma pas critiqu. Je lui ai dit: Cest la postrit dYitshak qui portera ton nom (Brchith 21:12), et ensuite Je lui ai dit: Prsente-le Moi en sacrifice, et il na pas protest . Cest que tous les Patriarches servaient D. sans se plaindre et sans poser de questions. Les Sages disent (Brchith Rabah 56:12; Yafat Toar ibid.): Lorsque D. dit Avraham: Prends Je te prie ton fils, ton unique, celui que tu aimes, Yitshak, et prsente-le en sacrifice (Brchith 22:2), Avraham avait un argument solide prsenter devant D. Il aurait pu se baser sur ce que D. lui avait promis (ibid. 21: 12): Cest la postrit dYitshak qui portera ton nom, cest dire que de ce fils-l doit natre tout le peuple juif, et voil que Tu me demandes de le sacrifier! Comment va se raliser Ta promesse? Mme un roi de ce monde ne revient pas sur ses promesses, plus forte raison lEternel dont aucune parole nest vaine. Bien quun tel argument et t justifi et quAvraham et pu au moins demander comprendre cette contradiction, il ne la pas fait, il na pas dout des paroles de D., et Avraham a soutenu cette preuve et il se leva de bon matin (ibid. 22:3), avec diligence. Ce faisant, Avraham Avinou surpasse Moch Rabbeinou, qui a demand (Chemoth 5:22): Pourquoi as-Tu rendu ce peuple misrable? et qui a port plainte (ibid. 17:4): Ils vont bientt me lapider . Si Moch, le plus grand de tous les prophtes (Vayikra Rabah 1:15) na pas saisi et na pas pntr le fond de la pense divine, comment un simple mortel pourrait-il soutenir des preuves aussi difficiles? Bien quil sagisse de choses trs profondes qui surpassent notre entendement, nous voyons explicitement quAvraham na pas mis en cause les raisons de D., et cela, bien quil ait pu faire valoir des arguments justifis.

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Si nous tentons dexpliquer, pour autant que nous puissions le comprendre, largument quAvraham aurait pu avoir vis--vis de D., nous nous rendons compte que nous navons aucune ide de la vertu dAvraham. Il avait alors cent trente-sept ans, il navait pratiquement aucun espoir davoir dautres enfants. Il naspirait qu transmettre ses enfants aprs lui, sa connaissance de la faon de servir D. Il ne se souciait pas de savoir qui hriterait de ses richesses, mais qui poursuivrait sa tradition spirituelle et il dsirait tant un fils qui hriterait de ses vertus et poursuivrait ses voies sanctifies. Cest pourquoi lorsque D. lui dit de prsenter son fils Yitshak en sacrifice, ce fut une preuve immense. Qui allait maintenant perptuer sa voie? Qui prescrirait sa descendance de servir D. de faon dsintresse? Il aurait pu juste titre faire valoir: Si je sacrifie mon fils, qui va proclamer Ta connaissance dans le monde? Quadviendra-t-il de Ta gloire? Qui dira: Il nest dautre que Toi (Devarim 4:35) et Parmi tous les dieux, aucun nest comme Toi (Thilim 86: 8)? Si personne nobserve la Torah et ses lois, le monde entier se transformera en Sodome et Gomorrhe, et quen sera-t-il de toutes les mes juives qui doivent natre et pour lesquelles le monde fut cr (Brchith Rabah 1:1)? Malgr toutes ces objections valables, Avraham accepta lpreuve sans rien dire. De mme, Yitshak son fils possdait cette qualit suprme de ne pas contester la direction divine du monde. Yitshak tait dans le mme tat desprit que son pre, et de plus il tait alors la fleur de lge et en pleine possession de ses forces alors quAvraham tait dj vieux. Yitshak aurait pu sans grand effort empcher Avraham de le sacrifier. Mais il na pas bronch, il na pas rsist, et ils ont march ensemble (Brchith 22:8). Les Sages nous racontent (Brchith Rabah 56:11; Yafat Toar ad. loc.) que lorsque Avraham attacha Yitshak pour le sacrifier, Yitshak dit son pre: Pre, je suis jeune, je crains que mon corps ne tremble de peur en voyant le couteau et je vais te causer de la peine, peut-tre le sacrifice ne sera-t-il pas effectu dans les rgles et ce sera comme si tu navais rien fait. Lie-moi les bras et les jambes trs fort. Et il lia Yitshak son fils (Brchith 22:9) car il nest pas possible dobliger un homme de trente-sept ans sil nest pas consentant, et alors Avraham tendit la main et saisit le couteau... (ibid. 22:10). Rabbi Shimon Bar Yoha (Zohar I, 102a) applique Yitshak le verset (Nahoum 1:6): Le fils est respectueux de son pre . Cest dire quil avait, outre des arguments justifis, la force physique de sopposer cet acte, mais il alla vers le sacrifice avec joie, de tout cur (Brchith Rabah 56:3-4) et soumis comme une brebis, afin dobir son pre et la volont de D. Pourquoi? Parce que, si telle est la volont de D. personne ne peut sy opposer. Il est le Crateur, cest Lui qui fait, cest Lui qui dcide, et Il tient tout entre Ses mains. Sil veut quYitshak soit sacrifi, quAvraham nait pas dautres enfants, il est impossible de contrecarrer Sa volont. Les Patriarches sont parvenus un degr suprme de soumission la volont divine, si bien quaprs lpreuve, D. dit Avraham (Brchith 22:12): Dsormais, je sais que tu crains D. car tu ne Mas pas refus ton fils, ton unique . Cest--dire, tu nas pas protest, bien que tu eusses pu le faire. Cest quil est tout fait impossible dtre plus dans le vrai que D. La comprhension de lhomme est limite et tout compte fait, il nest qu un peu moins que les tres divins (Thilim 8:6). Comment pourrait-il sopposer D. qui est Suprme, et dont la parole est Vrit et Justice? La Torah tmoigne propos dAvraham: Tu nas pas refus ton fils . Le mot hassakhta, est apparent au mot hochekh, lobscurit, pour dire que les yeux dAvraham se sont obscurcis, tant il avait dobjections valables la pense quil ny aurait pas de peuple juif, mais cela ne la pas empch dobir la volont de D. Il a repouss tous les arguments, il nen a tenu aucun compte, et na pas demand dexplications. Tel est le sens de: Dsormais, Je sais que tu crains D. car tu nas pas refus ton fils , ce fils qui seul peut faire connatre Ma Bont, ton fils tant aim parce que tu peux lui prescrire, lui et ses descendants, comment Me servir, et tu as obi Ma voix sans poser de questions. On en vient Yaakov, llu des Patriarches (Brchith Rabah 76:1). Lui non plus na pas mis en cause les voies de D., bien quil ait eu aussi des arguments valables. Aprs avoir reu les bndictions de D. dans la vision de lchelle o D. lui dit (Brchith 28:15): Je veillerai sur toi partout o tu seras , et aprs avoir bnfici des promesses divines alors quil tait chez Laban (ibid. 31:3): Je serai avec toi , il apprit quEssav venait lui faire la guerre accompagn de quatre cents hommes, et donc il aurait pu se plaindre et protester. Mais au contraire, Yaakov sest fait tout petit, disant (ibid. 32:11): Je ne suis pas digne de tous les bienfaits et toutes les bonts que Tu as tmoigns pour Ton serviteur . Il craignait aussi quune faute

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nait peut-tre diminu ses mrites et quil ne ft entach dune quelconque transgression (Brachoth 4a; Chabath 32a; Bamidbar Rabah 19:32), ce qui montre quil suivait la voie dAvraham et dYitshak. Le mrite des Patriarches qui ne se sont jamais plaints nous protge jusqu ce jour. De mme quils ne posrent aucune question, acceptrent la volont de D. et firent face toutes les preuves - mme celles qui dfient le bon sens et lentendement - et nen attriburent la faute qu eux-mmes afin de taire en eux toute protestation, de mme leurs enfants, aprs eux, ont hrit cette qualit de reconnatre et daccepter la justice divine. Comment parvenir un tel niveau? Comment sen approcher, ne serait-ce quun peu? Grce lattachement D. En tant proches de Lui, on comprend parfaitement quil ny a rien redire Sa volont. Lattachement D. et Ses voies donne la vie lhomme, comme il est dit (Devarim 4:4): Vous qui adhrez D., vous tes tous vivants aujourdhui . Aujourdhui fait allusion au jour qui est entirement bon, au jour ternel, le monde Venir, comme le disent les Sages (Pessahim 2): Le monde Venir est semblable au jour, comme il est crit (Zakharia 14:7): Ce sera un jour unique - D. seul le connat - o il ne fera ni jour ni nuit, et cest au moment du soir que paratra la lumire . Lhomme en ce monde, un monde matriel, doit se sentir attach D. comme sil tait dans le monde de la Vrit o tout est rvl et ouvert devant D. Afin de ressentir cet attachement puissant, il faut surmonter les preuves de ce monde, et rester attach aux voies de D., comme il est crit (Devarim 11:22): afin de suivre Ses voies et de sattacher Lui et de mme quIl est bienfaisant et misricordieux, toi aussi, sois bienfaisant et misricordieux... (Sotah 14a; Rachi Devarim 13:5). Tels sont le but et la raison dtre de la vie de lhomme en ce monde. La Splendeur et la Gloire de D. en ce monde ne sont manifestes que grce ceux qui parviennent cet attachement et aux voies de D. Celui qui est attach aux voies de D., ne se laisse pas subjuguer par des raisonnements rationnels, mme justifis, car il ny a pas changer la volont de D. mais laccepter sans discuter et sans poser de questions. Marcher dans Ses voies , cest accepter Ses dcrets et Ses raisons sans arrire-pense. Ce fut le cas dAvraham, dont D. tmoigne (Brchith 26:5): Avraham a cout Ma voix et observ Ma discipline, Mes prceptes, Mes lois et Mes doctrines , et les Sages expliquent (Yoma 67b; Rachi ad. loc.): Les lois, ce sont les ordonnances que le mauvais penchant et les nations du monde remettent en question, comme par exemple linterdit de manger du porc et linterdit de porter des vtements faits dun mlange de laine et de lin, qui ne sont que les dcrets du Roi et des lois quIl impose Ses serviteurs . Avraham a aussi observ et pratiqu ces lois-l, et il a ancr dans le cur de ses descendants la volont de les accepter sans discuter. Mais afin de pouvoir accepter et obir ces dcrets dans un monde o le mauvais penchant se renouvelle chaque jour en lhomme, le domine et tente de le mettre mort (Soucah 52a; Kidouchin 30b; Kala 2), il faut tre attach D. dun attachement fait damour, ressentir cet amour de tout son corps et de toute son me, et cest ce qui donne la force de vaincre le mauvais penchant et de pratiquer tous les commandements, de surmonter toutes les preuves, mme les plus difficiles, sans protester contre les raisons et les voies de D. Et alors, comme dans leau le visage reflte le visage (Michley 27:19), D. aussi aimera un tel homme, comme Il aime Yaakov. Dans Son amour pour nous, pour Son peuple Isral, D. vient notre secours et Il nous donne la rdemption lorsque nous oprons un retour Lui, grce au mrite des Patriarches, comme le disent les Sages (Yrouchalmi Taanith 1:1; Chohar Tov 106:9): La rdemption dIsral vient grce... au mrite des Patriarches et au repentir... Et alors toute mchancet se dissipe comme la fume... et il ne reste que lamour de D. pour Yaakov. Amen!

D. Se dtourne de ceux qui se dtournent de la Torah


Il est crit (Malakhi 1:2-3): Je vous ai aims dit lEternel. Vous dites: En quoi nous as-Tu aims? Essav nest-il pas le frre de Yaakov? dit lEternel or Jai aim Yaakov, mais Essav Je lai ha . Il faut expliquer pourquoi D. prit Essav en haine de son vivant, car finalement, Essav aurait pu se repentir, puisque les Portes du Repentir sont toujours ouvertes (Ekhah Rabah 3; Chohar Tov 65:4) et que les Portes des Larmes ne sont jamais fermes (Brachoth 32b; Baba Metsya 59a; Zohar I, 132b). Essav aurait

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pu pleurer sur ses crimes et se repentir sincrement devant D., dautant plus que D. est tardif la colre, plein de bienveillance et dquit (Chemoth 34:6), Il est patient mme avec les mchants (Bamidbar Rabah 14:17; Midrach Thilim 86:7), et pourquoi donc a-t-Il pris Essav en aversion de son vivant? Nat-il donc aucun espoir? Il y a une raison profonde cette aversion. Etant petit, Essav avait la connaissance de D. Jusqu lge de treize ans, il allait lcole avec Yaakov et apprenait avec lui la Torah (Brchith Rabah 63:14), et nous savons que cest grce ltude de la Torah que lon parvient la connaissance de D. Crateur du monde, comme il est crit (Thilim 34:9): Gotez et sachez que D. est bon . Comment goter cette bont? Grce la Torah qui est dite bonne (Brachoth 5a; Avodah Zarah 19b). Si Essav mditait la Torah, sil avait reu la mme ducation que Yaakov, il avait la possibilit de continuer dans le droit chemin, mais il la abandonn en commettant de nombreux crimes et en se rvoltant contre D. (Brchith Rabah 63:10). Il a choisi la licence, ses fautes lont loign de D., qui la pris en aversion. Un homme qui a eu la connaissance de D. et Labandonne, est hassable et D. le prive de Sa protection. De mme pour Aher, Elicha ben Abouya, propos duquel il est dit (Haguigah 15a): le repentir de tous est agr sauf le sien, puisquune voix cleste a proclam: Revenez tous, enfants rebelles, sauf Aher . Lui aussi avait eu la connaissance de D. grce son tude de la Torah (Tossafoth ad. loc.) mais en fin de compte il abandonna D. et se rendit mme coupable de monter cheval un jour de Kippour qui concidait avec le Chabath. A partir de ce moment-l D. la priv de la possibilit de se repentir. Il est tout de mme difficile de comprendre comment Essav, le frre de Yaakov, qui reut la mme ducation que lui, na pas tir un enseignement de la bonne conduite de ses parents, comme les Sages le remarquent (Yoma 38b): Essav habite entre deux personnes vertueuses et napprend rien de leur conduite . Comment se fait-il quil soit devenu dprav et licencieux? Cest quil avait un dfaut dont dcoule toute sa conduite, il tait foncirement menteur. A propos du verset (Brchith 25:28): et Yitshak aimait Yaakov parce quil lui chassait du gibier les Sages disent (Brchith Rabah 63:15; Tanhouma Toledoth 8): Essav trompe Yitshak et lattrape par ses mensonges, lui demandant comment prlever la dme sur le sel et le foin . Le mensonge fait partie de sa nature, or la Torah est vrit (Yrouchalmi Roch HaChanah III:8; Tana DBey Eliyahou Zouta 20). Celui qui connat la vrit de la Torah et ment malgr cela, est incapable de faire vivre ces vrits, dans le sens o il est dit: Acquiers la vrit et ne la rejette pas (Michley 23:23). Il na acquis la Torah que pour en tirer un profit personnel, comme le disent les Sages (Avoth IV:5; Ndarim 62a): il utilise la Torah pour se donner de limportance, pour en tirer profit . Essav faisait croire son pre quil tait studieux et quil craignait D., de sorte que les Sages le comparent un cochon (Brchith Rabah 65:1) qui prsente ses sabots fendus comme pour dire: voyez, je suis pur . Une telle conduite nest ni bonne ni conforme la Torah, et en fin de compte il sest dgrad au point dtre hassable aux yeux de D. devenant voleur, brigand et meurtrier. Nous en restons perplexes. Essav avait le libre arbitre de choisir entre le bien et le mal, et les Sages disent de lui (Chemoth Rabah 46:3; Devarim Rabah 1:14) quil honorait grandement son pre, plus mme que Yaakov. De mme quil excellait pratiquer le commandement dhonorer les parents avec application, il aurait pu sappliquer pratiquer beaucoup dautres commandements, et effectivement nous voyons quil fut profondment meurtri lorsque Yaakov reut les bndictions (Brchith 27:34, 38). Il ne dpendait que de lui de suivre la voie de la Torah mais il ne la pas fait, ce qui la amen commettre de graves transgressions pour lesquelles D. le hait. Il faut ajouter une autre raison la haine de D. envers Essav. Dj dans le ventre de sa mre, Essav empchait Yaakov dapprendre la Torah, comme il est dit (Brchith 25:22): Les enfants se bousculaient dans son sein , et les Sages expliquent (Brchith Rabah 63:5): Lorsque Rivka passait devant des lieux de dbauche Essav poussait pour sortir, et lorsquelle passait devant des maisons dtude, ctait Yaakov qui tentait de sortir . Cest dire que non seulement il napprenait pas la Torah dans le sein de sa mre, mais il essayait dempcher Yaakov de le faire. Les descendants dEssav, de tout temps, ont suivi sa conduite mchante et mprisable, et ces maudits ont toujours dcrt contre les Juifs des sanctions cruelles, leur interdisant ltude de la Torah et la pratique des commandements. Cette opposition est dj indique dans la Torah (Brchith 27:22): La voix est la voix de Yaakov et les mains sont les mains dEssav pour

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dire que lorsque la voix de Yaakov murmure dans les maisons de prire et les maisons dtude, les mains dEssav nont aucun pouvoir (Brchith Rabah 65:20; Pessikta Zouta Toledoth 27:22, Introduction de Ekhah Rabah 2) et lorsque la voix de Yaakov prononce la prire et les paroles de la Torah, les mains dEssav sont tendues pour len empcher (voir Brchith Rabah 65:20). Il y a une guerre permanente entre les descendants de Yaakov et ceux dEssav. En effet, D. a en horreur ceux qui dlaissent la Torah et Il aime ceux qui sy attachent avec assiduit, jour et nuit. Chacun doit redouter dtre comme Essav, ha par D., parce quil se dtourne de la Torah et incite les autres sen dtourner. Nous constatons la mme chose aujourdhui. Jai souvent vu des jeunes tudiants de Ychivah, studieux et appliqus la Ychivah mais qui, lextrieur se laissaient aller aux actions les plus viles. Pourquoi? Cest que, lorsquils taient assis sur les bancs dtude, leur corps ne se nourrissait et ne vivait que de ltude, et leur cur ne se laissait pas dtourner par des penses futiles. Mais ds linstant o ils cessaient dtudier et que leur esprit tait libre, ils commenaient penser des futilits. Non seulement ils ntudient plus, mais ils se mentent eux-mmes et leur entourage, disant quils continuent poursuivre la voie de la Torah. Ils se trompent et trompent les autres, si bien quen fin de compte ils se dgradent, comme Essav, qui trompait son pre en lui faisant croire quil poursuivait ltude de la Torah. Il faut se garder dinterrompre soudain ltude de la Torah, et mme la sortie de la Ychivah, il faut continuer se fixer des temps dtude. Une des questions qui sera pose chacun de nous le Jour du Jugement sera de savoir si nous nous sommes fix des temps rguliers pour ltude (Chabath 31a), et si nous nous sommes dlects de llixir de vie quest la Torah (Chabath 88b), comme il est crit (Thilim 19:8): La Loi de D. est parfaite, elle restaure lme . Je me suis souvent demand pourquoi il y a des gens qui dtestent ceux qui tudient la Torah, pour quelle raison la haine des ignorants envers les gens de la Torah est plus grande que celle des antismites envers Isral (Pessahim 49b; Tana DBey Eliyahou 16)? Non seulement eux-mmes ntudient pas la Torah, mais ils ne peuvent pas supporter ceux qui ltudient, quils considrent comme des parasites. Jai vu de tels gens! Ils me surprennent. Comment est-ce possible? Et alors, jai pens que le plus grand ennemi du mauvais penchant est celui qui est plong dans ltude, car D. a cr le mauvais penchant, et Il a cr son remde... si tu rencontres ce vilain, entrane-le dans la maison dtude (Kidouchin 30b). Cest donc que celui qui prie, qui aide les ncessiteux, qui pratique les commandements, est protg contre linfluence de son mauvais penchant qui drange ceux qui tudient autant quil drange les autres, mais na pas sur eux autant demprise. Cest que celui qui est attach la Torah perptue luvre de la cration (Zohar I 134b, II 161a) car si ce ntait pour la Torah, le ciel et la terre cesseraient dexister (Ndarim 32a). La Torah a le pouvoir dannuler les forces du mal, et de plus, celui qui est attach la Torah, qui sen nourrit et en fait une partie de lui, devient lui-mme Torah. Il la porte comme un vtement qui lenveloppe et comme une couronne sur sa tte (Zohar I, 5a, 76a), elle le protge de tous cts, grce elle il est capable de pratiquer tous les commandements, et il rapproche le temps de la rdemption (Zohar III, 270a; Tikouney Zohar Introduction 15a). Pour lui, le mauvais penchant devient insignifiant. Les gens ignorants qui sont sous lemprise du mauvais penchant, du Satan, ont comme lui la haine des gens de la Torah. Peu leur importe tous ces gens qui prient, qui viennent en aide aux pauvres, qui pratiquent les commandements. Ds que ces ignorants aperoivent des gens de Torah, ils leur posent des entraves, sans savoir ce qui les pousse. Par contre, lorsquon arrive faire entendre raison ces mmes personnes ignorantes, lorsquils prennent got la Torah, elles se transforment, leur cur souvre. Leur faon de considrer les gens de Torah change, et ils finissent par les aimer. Il y a une autre raison la haine des ignorants envers les gens de Torah. Rabbi Akiva a dit: Lorsque jtais ignorant, je me disais: si seulement javais devant moi un homme de Torah, je le mordrais comme un ne (Pessahim 49b). Il faut expliquer ce quil voulait dire. Rabbi Akiva est compar Moch Rabbeinou, de sorte que les Sages ont dit de lui (Bamidbar Rabah 19:4): il avait compris plus de choses que Moch lui-mme , il expliquait une profusion de lois propos de chaque mot de la Torah (Menahoth 29b) et

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il est sorti indemne du Pards (Haguigah 14b). Est-ce que quelquun de cette envergure peut penser mordre un Sage de la Torah avec la violence dun ne? Par ailleurs, sil avait pareil dsir, quest-ce qui la empch de le raliser, de les mordre et de les attaquer? En rponse, il faut dire que Rabbi Akiva, bien quignorant, ntait ni mchant ni rengat, et lorsquil est devenu lun des grands matres dIsral, il a ressenti les dfaillances des sages de son temps qui navaient pas fait defforts pour lui enseigner la Torah et qui lavaient laiss dans son ignorance comme un ne, sans connaissance de la Torah. Cest pourquoi, voyant que les sages ne venaient pas son secours et ne cherchaient pas remplir son vide spirituel et sa vie en tant que Juif, il en conclut quil fallait les mordre comme un ne, comme un ne qui ne sait pas ce quil fait, car ils taient coupables de son ignorance. Mais en fait, il ne les a pas mordus, il navait pas le cur de faire une chose pareille, car il les respectait quand mme. Quel que soit le degr de la foi et lassiduit dans la pratique des commandements, lattachement aux tenants de la Torah nest daucun profit si elle nest pas soutenue par une tude personnelle qui permet de comprendre le sens des commandements, comme il est dit (Torat Kohanim, Vayikra 26:3): Approfondissez ltude de la Torah, car cest ainsi que vous en viendrez observer Mes commandements . Ltude entrane la pratique correcte des commandements. Cest pourquoi Rabbi Akiva dit: lorsque jtais ignorant, lorsque je ne moccupais pas dtudier la Torah bien que jaie pratiqu les commandements et eu foi en D., je haissais les gens de la Torah (car jtais ignorant) au point de vouloir les mordre. Ma confiance en eux tait faible puisque je ne moccupais pas moi-mme de comprendre la Loi et de comprendre les voies de D. Cela nous montre que les Sages de la Torah ont lobligation daider tout le monde, mme les ignorants, qui nauraient, de ce fait, plus de raison de les har. Plus les gens se consacrent ltude de la Torah, plus la confiance dans les garants de la loi est grande. La mchancet dEssav venait du fait quil avait reu de son pre la connaissance, mais avait abandonn la voie de la Torah tout en le trompant en lui posant des questions savantes . Pour cette raison, D. le prit en aversion et le priva de la possibilit de se repentir. Essav hassait Yaakov qui tait attach la Torah, et il cherchait len dtourner, dans le sens o il est dit il faute lui-mme, et il pousse beaucoup dautres fauter (Sanhdrin 107b; Avoth DRabbi Nathan 40:3). Son crime est tellement grand que, nous lavons dit, mme D. le hait, alors que ceux qui adhrent la voie de la Torah sont Ses bien-aims. Quelle est la conduite correcte? Celui qui dsire ne pas oublier la Torah quil a apprise et continuer se nourrir de cet lixir de vie, doit poursuivre son tude aprs avoir quitt lcole ou la Ychivah, car sil arrte, il se coupe de sa source de vie, et il risque dtre dtourn des voies de la Torah. Il faut fixer des priodes rgulires pour ltude de la Torah, afin quelle nous protge.

Sil le mrite, son travail sera fait par dautres


A propos du verset: Yitshak sema dans ce pays et rcolta cette anne-l au centuple, et lEternel le bnit (Brchith 26:12), le saint Rabbin I. Z. Morguenstern de Sokolov-Kotsk crit dans son livre Cherit Yitshak des choses merveilleuses, que nous allons citer longuement, tant elles nous sont chres. La Torah attribue Yitshak le fait de semer, mais il est certain quYitshak, qui fut sanctifi comme un sacrifice consacr (Brchith Rabah 64:3) na pas lui-mme effectu de travail profane, de mme quil est interdit un animal consacr dexcuter un labeur quelconque. Dautres faisaient ce travail pour lui. De plus, Yitshak qui tait sorti de la catgorie des Enfants de Noah, avait des serviteurs qui taient tous non-juifs. Un non-juif ne peut pas tre nomm missaire dun Juif, de telle sorte que ce quil fait ne peut pas tre attribu un Juif (Baba Metsya 71b). A propos des puits, il est crit une fois (Brchith 26:18): Yitshak se remit creuser les puits et ailleurs il est crit (ibid. v. 9): Les serviteurs dYitshak creusrent... il faut donc expliquer pourquoi cet acte est attribu une fois Yitshak, une autre fois ses serviteurs. Cela nous permet de corroborer lopinion du Mahan Ephram (Halakhoth Chelouhin 31) qui stipule quun ouvrier, mme non-juif, peut agir au nom de son matre. Le Chaar HaMelekh, dans les Halakhoth Troumot, est en dsaccord avec lui, avanant que si Yitshak a converti des gens (Brchith Rabah 84: 2), ils avaient le statut de Juifs, ce qui permet dattribuer ce quils font celui qui les envoie, et lorsquun

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travail quelconque tait attribu Yitshak il faut comprendre quil avait des employs qui excutaient ce travail en son nom. Mais il reste comprendre pourquoi, selon les versets, ce travail tait excut une fois par ses serviteurs, et une autre fois par lui-mme. Il faut par ailleurs souligner que les gens qui se convertissaient au judasme au temps des Patriarches, avant que la Torah ne soit donne, bien quils soient appels convertis , gardent leur statut dEnfants de Noah en ce qui concerne la possibilit den faire des envoys, puisque nous ne trouvons nulle part dans les paroles de nos Sages que ces convertis aient perdu leur statut de non-juif, mis part les Patriarches euxmmes (Moreinou HaRav Yaff, Brchith 16:9; Vayigach 93:5). Et pour ceux qui pensent que mme les Patriarches nont pas perdu leur statut dEnfants de Noah (Hahmey Tsfat rapport dans le commentaire du Ramban sur la Torah Vayikra 24:10), cela ne rpond pas la question, car dans ce cas, si les non-Juifs peuvent tre des missaires, la question revient de savoir pourquoi le travail est attribu Yitshak . Rachi commente (Brachoth 35b): Quiconque tudie la Torah et se soumet la volont de D. a le mrite de voir son travail excut par dautres . De plus, celui qui tudie la Torah est lui-mme semblable un sacrifice (voir Zohar III, 80b), comme il est crit (Vayikra 1:2): Si lun dentre vous prsente un sacrifice... (qui en Hbreu peut se lire: si lun dentre vous se prsente en sacrifice ), et sil est dit quil est lui-mme un sacrifice, il sensuit quil lui est interdit de faire un labeur quelconque. Sil sadonne la Torah, il aura le mrite de voir son travail accompli par dautres, comme le dit Rabbi Chimon Bar Yoha. Par la suite, il est crit: Il rcolta cette anne-l au centuple, et lEternel le bnit . Naurait-il pas fallu dire quil eut une rcolte aussi abondante aprs avoir t bni? Il sagit ici srement de semailles dans le sens spirituel, cest--dire que la pratique des commandements et ltude de la Torah sont les semences de chacun en ce monde, comme Il est dit de celui qui tudie quil sme (Sanhdrin 99a). Nous trouvons la mme analogie concernant les actes de bienfaisance et lobissance aux commandements, comme il est crit (Ocha 10:12): Faites de la justice vos semailles et vous rcolterez selon votre amour du bien... et les Sages expliquent (Baba Kama 17a): Ce que lon acquiert est proportionnel leffort investi . De mme, les cent bndictions que chacun doit prononcer quotidiennement (Menahoth 43b) font allusion aux mah charim - une moisson cent fois plus abondante que la normale. Cest que chaque bndiction a sa mesure (voir Zohar III, 271a) et cest de cette faon quYitshak grandit (Brchith 26:13), et il progressait avec une force toujours croissante (Thilim 84:8) dans la Torah et la crainte de D. La vie dYitshak tait faite dpreuves. Il fut sanctifi de la saintet dun sacrifice prsent sur lautel, ce qui lobligeait se garder de tout travail profane, et il tait plus saint que le Nazir dont il est crit (Bamidbar 6:3): Il sabstiendra de vin enivrant, ne boira ni vinaigre de vin, ni liqueur de vin, ni une infusion de raisins, et ne mangera pas de raisins frais ni secs alors que tout travail tait interdit Yitshak. Ctait pour lui une grande preuve, car il avait beaucoup de travail et de nombreux biens comme il est crit (Brchith 26:14): Il avait des possessions en menu btail, des possessions en gros btail et des cultures considrables . Son travail se faisait par lentremise danges qui agissaient en son nom, comme fonds de pouvoir. Il est crit (ibid. 26:18): Yitshak se remit creuser les puits... car les anges venus faire son travail taient comme lui, dans le sens o il est dit: Lenvoy de quelquun est comme lui (Brachoth 34b; Kidouchin 41b) - il est en tout point comme lui. Cest pourquoi tout le monde pensait quYitshak lui-mme creusait les puits, mais en fait le travail tait fait par ses envoys. En effet, Yitshak lui-mme tenait de lange, car au moment du sacrifice son me senvola et elle lui fut rendue avec un niveau encore plus lev (Yalkout Chimoni Vayra 101; Zohar I, 60a), comme cela est expliqu dans les crits du Ari zal. Cest aussi la raison pour laquelle Yitshak a la qualit de Puissance (Zohar III, 302a), car il nest pas facile pour un tre cleste de vivre dans ce bas-monde, comme il est crit propos des fils de la race divine (Brchith 6:2) qui ont faut en ce monde (Yalkout Brchith 44; Zohar III, 208a). Mais Yitshak les surpassait, et mme en ce bas-monde, il russit slever. La Torah crit: Les serviteurs dYitshak creusrent des puits (Brchith 26:19); ceci indique que grce au mrite de la Torah quil avait acquise durant sa vie, tous les objets de ce monde se mettaient son service et agissaient selon sa volont, si bien que son travail se faisait de lui-mme, sans quil lui soit ncessaire dintervenir.

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Nous apprenons ici un principe fondamental. Rabbi Chimon Bar Yoha nous enseigne que si quelquun a effectivement le mrite de soccuper de choses sacres, dadhrer la Torah et dtre rempli de la crainte de D., son travail sera fait sans aucun doute par les autres, et mme par des anges. Nous savons (Zohar Ruth 92a) que lexcution dun commandement cre un bon ange, qui ressemble exactement celui qui a pratiqu ce commandement , qui est son missaire. Rabbi Ichmal nest pas de cette opinion car beaucoup de gens ont agi comme Rabbi Chimon Bar Yoha, mais nont pas eu le mme succs que lui (Brachoth 35b). Selon Rabbi Ichmal, quelquun qui travaille beaucoup (il voulait se comporter comme tout le monde afin de ne pas tirer profit de la Torah) perd de sa dignit car tout homme est considr comme un sacrifice comme il est dit (Vayikra 1:2): Si lun dentre vous (se) prsente (en) un sacrifice . Comment peut-on la fois tudier la Torah et excuter un labeur lorsquon est considr comme aussi saint que lest le sacrifice prsent sur lautel? Les Sages ont dit (Menahoth 110a; Midrach Thilim 134; Or Hahayim 120) propos de lange Michal quil sacrifie les mes dIsral, des Justes, sur lautel , ce qui montre bien quils sont considrs comme des sacrifices. Leur serait-il interdit de faire un travail quelconque, comme cela est interdit lanimal offert en sacrifice? Est-il vraiment impossible dassocier ltude de la Torah au travail? Cest pourquoi Rabbi Ichmal pense quil faut sappliquer tudier la Torah avec ferveur, et tenter par l de devenir ce sacrifice pur que lange Michael prsente sur lautel devant D. Tous les anges seront alors les missaires de ceux qui sont parvenus au degr de sanctification dYitshak. Chaque Juif doit sefforcer de ressembler Yitshak, car Les actes des pres sont un exemple pour leurs enfants (Sotah 34a).

Le repentir est en soi une preuve


Il est crit (Brchith 26:15): Les puits quavaient creuss les serviteurs de son pre, du temps de son pre Avraham, les Philistins les comblrent en les remplissant de terre . Cest tonnant! Rien nest plus profitable au monde que les bienfaits dun puits deau pour apaiser la soif. Comment est-ce que ces Philistins ont eu le cur de combler des puits que les serviteurs dAvraham avaient creuss pour leur survie? Quelquun qui se repent ne doit pas croire que ce repentir suffise rsoudre toutes les difficults et quil aura maintenant la vie facile et que les portes, jusque-l fermes, lui seront ouvertes. Les Sages nous disent (Brachoth 32b; Baba Metsya 59a): Les Portes des Larmes ne sont jamais fermes et (Ekhah Rabah 3; Pessikta Soucota, Chohar Tov 65:4): Les Portes du Repentir sont toujours ouvertes . Les Portes des Larmes et du Repentir sont ouvertes, mais il ne sensuit pas ncessairement que toutes les portes du ciel soient ouvertes, et que maintenant il lui sera facile de se corriger en tout. La ralit prouve quau contraire, lorsque le pcheur se repent, cest justement alors quil doit affronter toutes sortes dpreuves. Parfois ces preuves sont tellement difficiles et amres quil risque de retomber encore plus bas, aprs avoir fait le premier pas du retour vers D. Chacun doit savoir que le but du diable est de capter en son pouvoir et de rattraper dans ses filets celui qui se repent et qui reprsente pour lui une perte. Et donc, il le tente par toutes sortes dpreuves difficiles concernant son salaire, son mnage, par des preuves dues des propos antismites de la part de son entourage ou bien par lisolement, si bien quil voit effectivement les portes se fermer devant lui, car cest avec un enttement surhumain que le diable tente de le miner en brisant sa volont. Ou bien, cest D. Lui-mme qui met parfois lhomme lpreuve, afin de lui faire expier ses fautes antrieures et lui faire ressentir lamour de D., comme il est crit (Devarim 8:2): Afin de tprouver par ladversit, afin de connatre le fond de ton cur, si tu restes fidle Ses lois . Malgr tout, son amour de D. ne doit pas dpendre de la rcompense mais tre un amour qui brle dans son cur inconditionnellement (Avoth V:16). Selon ce que nous venons de dire, lorsque le pcheur se repent et entreprend de se corriger, il affronte une premire preuve, la dcision de ne pas rpter les fautes passes, comme lcrit le Rambam (Halakhoth Tchouvah II:2): Jusqu ce que D. qui connat tous les secrets, tmoigne de lui quil ne rptera plus jamais ses fautes passes . De plus, de nombreuses portes se ferment devant celui qui sest repenti, et donc le fait mme de se repentir est une preuve des plus difficiles, car il faut veiller tout particulirement ce que ce repentir soit sincre, comme un amour dsintress.

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Nous devons soulever une autre question. Il est crit au sujet dAvraham (Brchith 12:5): Les mes quils ont faites Haran que les Sages expliquent (Brchith Rabah 39:21, 84: 2): Avraham convertit les hommes et Sarah les femmes . Il faut donc se demander o sont toutes ces mes que Avraham et Sarah ont converties? O ont-elles disparu, puisque la Torah ne les mentionne plus par la suite? Cest tonnant! Tous ces gens qui se sont convertis ont disparu comme sils navaient jamais exist, parce que leur repentir tait intress. Ils croyaient quen sattachant D., ils verraient souvrir devant toutes les portes du Ciel, et toutes leurs entreprises russiraient sans obstacle et sans dfaillance. Ils nont pas pens que le repentir nest quun dbut et quils devraient continuer progresser malgr les difficults et accepter le joug divin chaque instant sans dfaillance, jusqu ce que la preuve soit faite quils ne retomberont pas dans leurs fautes passes. Il faut savoir que cest le diable qui leur prsente ces difficults et quil naura de repos quaprs les avoir rcuprs dans ses filets. Sans effort permanent, il est impossible de russir. Gagner une place dans le monde ternel exige beaucoup defforts et ne se ralise pas sans peine. Ces gens qui se sont convertis du temps dAvraham jouissaient de grands bienfaits tant quAvraham tait en vie, mais aprs sa mort, lorsque les preuves commencrent, ils furent incapables de les surmonter. Leur repentir tait motiv par lespoir dune rmunration, leur amour tait intress. Cest pourquoi ils faillirent face aux nombreux obstacles affronter et ils finirent par retourner leur mode de vie antrieur, pour navoir pas russi surmonter les preuves du temps. Ils prfrrent une vie sans entraves et sans problmes, car ils ne comprenaient pas lessence de lpreuve du repentir. Voyant quils avaient bien vcu au temps dAbraham et quaprs sa mort ce confort stait transform en peines et en souffrances, ils se tournrent contre Avraham qui les avait amens se repentir et qui tait devenu la cause de leurs souffrances. Ce sont eux les Philistins dont il est dit quils comblrent les puits creuss par Avraham (Zohar III, 302b), les puits deau vive de la Torah qui est compare leau (Baba Kama 17a), et qui est appele vie (Avoth DRabbi Nathan 34:10), car ils ont abandonn le joug de leur conversion. Il est possible quils aient bouch ces puits afin deffacer tout souvenir dAvraham qui les avait convertis. Telle est la reconnaissance des mchants, et il est dit en ce sens: Maudits les mchants, car mme le bien quils font prsente des dfauts (Brchith Rabah 89:9; Tanhouma Mikets 3). Les hommes vertueux les guident dans le droit chemin et les protgent, et eux rendent le mal pour le bien (voir Brchith 44:4). Lorsquils affrontent des difficults, ils comblent les puits deau vive, renient la Torah qui est appele puits (Brachoth 56b) comme il est crit (Bamidbar 21:18): Ce puits, des princes lont creus... et ils oublient les bonts reues et les compensent par le mal. Chacun doit savoir que le repentir est non seulement lessentiel de lpreuve, mais que la vie elle-mme et ses exigences ne constituent quune seule grande et dure preuve. Les preuves natteignent pas seulement ceux qui se repentent, mais chaque Juif est prouv tout moment et en toute occasion. Quelquun qui toute sa vie a distribu ses biens aux pauvres, qui soutient ceux qui tudient la Torah, comme Issakhar soutenait Zevoulon (Vayikra Rabah 25:2), qui donne le dixime de ses revenus aux uvres de bienfaisance, voit tout coup la chance se tourner contre lui et il perd tous ses biens. Celui qui une telle chose arrive peut, juste titre, se tourner vers D. et dire: il est crit (Devarim 14:22): Tu prlveras la dme , Donne la dme afin de tenrichir (Chabath 119a; Taanith 9a; Tanhouma Reh 18), et moi qui ai distribu bon nombre de mes biens pour aider les ncessiteux, qui ai soutenu ceux qui tudient la Torah, qui ai multipli gnreusement les bienfaits, jai perdu tous mes biens! Sil en est ainsi, quen est-il de Ta promesse? Il est certain que perdre tous ses biens est une rude preuve, mais il faut la surmonter, car la douleur pourrait entraner au dsespoir, D. nous en prserve. Il faut accepter ce dcret puisque D. a donn et D. a repris, que le Nom de D. soit bni (Yov 1:21), et dire: Tu es juste dans tout ce que Tu fais envers nous . Il faut sefforcer dtre en toute circonstance celui dont il est dit: Qui est sage? Celui qui prvoit les vnements (Tamid 32a). Cela signifie que ds le moment o il senrichit, il doit savoir que cette fortune nest pas lui, mais que tout appartient D., comme il est crit (Divrey HaYamim I, 29:14): Tout Tappartient et cest de Ta main que nous tenons ce que nous Tavons donn , car cest Lui qui donne et il est en Son pouvoir de reprendre. D. aurait pu choisir de ne rien lui donner pour commencer. SIl lui a donn des richesses, et sIl a dcid de len priver, cest sans aucun doute quil y a une raison. Il est possible que D. lait priv de sa richesse afin de lui faire subir une preuve proportionnelle sa grandeur dme,

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afin de lui donner plus de mrite et de le purifier. Ou bien D. la priv de ses biens avant quil nen abuse, car D. a prvu et vu quen fin de compte il abuserait de sa richesse. Il est possible aussi quIl lait priv de ses richesses pour avoir, un moment ou un autre, fait honte un homme de Torah, acte dont les Sages ont dit (Chabath 119a): Quiconque mprise un homme de Torah, na pas de remde pour le mal quil a caus . Il est mme possible que D. lait tout dabord enrichi pour quil corrige quelque faiblesse de sa personnalit et maintenant quil sest corrig, cette richesse lui est retire. Lpreuve de la richesse ou de la pauvret est des plus difficiles. Chlomo HaMelekh a pri (Michley 30: 8): Ne me donne ni pauvret ni richesse , qui risquent damener lhomme au dsespoir, ou boucher les puits de la Torah, se rebeller et se rvolter. Il faut se renforcer travers ces preuves, dans le sens o il est dit: Ne jette pas de pierre dans le puits dont tu as bu leau (Baba Kama 92b; Bamidbar Rabah 22:4), il ne faut pas nier les bonnes actions accomplies, mais au contraire savoir que tout provient de D. et que nous devons bnir D. pour les choses nfastes qui nous arrivent de mme que nous Le remercions pour les bonnes choses car on ne connat pas la finalit des vnements (Brachoth 54a; Zohar II, 174a). Celui qui accepte ce fait continue suivre le bon chemin, comme il est crit (Michley 2:20): Afin de suivre le chemin des hommes de bien et de tattacher la voie des hommes vertueux . Que D. nous vienne en aide.

La Torah, une eau vive pour lhomme


Tous les puits quavaient creuss les serviteurs du pre dYitshak, au temps de son pre Avraham, les Philistins les comblrent en les remplissant de terre. Avimelech dit Yitshak: quitte-nous, car tu es beaucoup plus puissant que nous... Et Yitshak se remit creuser les puits quon avait creuss du temps dAvraham son pre et que les Philistins avaient combls aprs la mort dAvraham... (Brchith 26:15-18). Il nous faut comprendre le sens de la dispute entre les serviteurs dYitshak et ceux dAvimelech, au sujet des puits que les serviteurs dYitshak creusaient et que ceux dAvimelech comblaient. Pour quelle raison ont-ils bouch ces puits et pourquoi cette dispute? En quoi ces puits drangeaient-ils les serviteurs dAvimelech? En effet, quiconque avait soif pouvait sy abreuver et leau de ces puits ne pouvait qutre un bienfait pour les individus et la communaut, aussi bien que pour le gros et menu btail. Nous devons aussi comprendre pourquoi Avimelech chassa Yitshak en lui disant: Quitte-nous car tu es beaucoup plus puissant que nous . Un trait de paix avait dj t sign depuis longtemps entre Avraham et Avimelech, comme il est crit (Brchith 21:27): Ils conclurent mutuellement une alliance . Pourquoi soudain, Avimelech sen prend-il au fils dAvraham et le renvoie-t-il de chez lui? Nous savons que les gestes des pres sont des exemples pour leurs enfants (Sotah 34a). Tout ce que les Patriarches ont fait fut transmis en hritage leurs descendants. Et nous savons quAvraham sest vou toute sa vie rpandre la connaissance de D. Yitshak et Yaakov aussi ont converti les gens la connaissance de D., comme le disent les Sages (Brchith Rabah 84:2): Yaakov fit des convertis, de mme quYitshak , et ils enseignaient tous les lois de la Torah et la faon de servir D. correctement. Cest pour cette raison quune dispute clata entre les serviteurs dAvimelech et ceux dYitshak. Car Yitshak fondait des maisons dtude et des Ychivoth en tout lieu afin denseigner au peuple la parole de D. qui est Loi (Chabath 138b). La Torah est appele vie (Avoth DRabbi Nathan 34:10), elle est un lixir de vie pour le monde et un puits deau vive (Brachoth 56b). Telle est la signification des puits quYitshak a creuss. Beaucoup de gens venaient sabreuver ces puits - ces Ychivoth - apprendre la parole de D. Yitshak leur enseignait clairement le service de D., ce qui veilla la colre dAvimelech et de ses serviteurs. Ils jalousaient Yitshak et ses nombreuses activits spirituelles, et cest pourquoi ils cherchaient lhandicaper en fermant (en comblant) les lieux denseignement de la Torah afin de dcourager ceux qui souhaitaient se convertir. Le mot Ber, puits, a la mme valeur numrique que le mot Guer, converti. Les hommes quYitshak convertissait, devenaient rudits et riches, car on sait que la richesse accompagne la Torah, comme il est crit (Michley 3:17): Ses sentiers aboutissent la richesse et aux honneurs , et comme le disent les Sages (Avodah Zarah 19b): Quiconque sattache la Torah voit ses biens prosprer et (Tanhouma Ki Tissa 28): La Torah est la source de ses revenus, il senrichit et russit ce quil entreprend . Pour toutes ces raisons, Avimelech et ses serviteurs jalousaient Yitshak, et cest pourquoi ils ont combl de terre les puits dtude de la Torah.

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Mais Yitshak ne sest pas laiss dcourager et na en rien rduit ses activits. Il est all ailleurs ouvrir une autre Ychivah. Les serviteurs dAvimelech ly suivirent, et l aussi mirent des entraves sur son chemin, mais en vain. Voyant quYitshak russissait en tout et quil tait invincible, Avimelech le chassa du pays des Philistins, lui disant: Quitte-nous car tu es beaucoup plus puissant que nous grce ces gens qui deviennent tes adeptes. Si tu continues ainsi, il ne restera plus personne ni dans mon peuple ni dans ma famille pour perptuer lalliance contracte avec Avraham ton pre. Avimelech ne dit cela que parce quil jalousait la russite dYitshak et sa popularit; en effet quel mal y a-t-il donc ce que tous les Philistins croient en D.? Avimelech lui-mme croyait en D. comme il est crit (Brchith 26:28): Nous navons aucun doute que D. est avec toi . Sil navait pas cru en D. comment aurait-il reconnu que D. protge Yitshak? Mais sa jalousie envers Yitshak la rendu insens, comme le disent les Sages (Avoth IV:21; Pirkey DRabbi Elizer 13): La jalousie, les dsirs, lamour des honneurs abrgent la vie de lhomme . Il renvoya Yitshak pour cette seule raison. Avimelech a transmis cette jalousie et cette haine des Juifs au monde entier. La preuve de cette haine est flagrante: peu leur importe si un non-juif russit senrichir (ils ne font rien son encontre), mais lorsquils voient un Juif rudit ou riche, qui russit dans tout ce quil entreprend, ils le jalousent, ils le chassent, ils lui font honte. Mme si un Juif est pauvre, ils ne le laissent pas en paix, et ils lui reprochent le fait mme de respirer (aujourdhui aussi, nous sommes entours par de nombreuses nations qui ne veulent que notre destruction, tant ils nous hassent). Tout cela est la consquence de la jalousie quAvimelech a ancre en ses descendants parce quil voyait dun mauvais il la russite dYitshak et de ses descendants, et cela malgr le trait de paix contract entre Avimelech et Avraham. Cest quAvimelech ne voulait pas quYitshak russisse, simplement parce quil tait Juif! (Cette ide est tire du commentaire de la Torah du Rav Yhouda Nahchoni). La conduite dYitshak est un enseignement et une leon de morale pour chacun. Celui qui veut apprendre la Torah, ou qui revient D. et veut pratiquer les commandements doit savoir que le Satan et ses cohortes le guettent pour len empcher et le faire chouer, comme il est crit (Thilim 37:32): Le mchant guette lhomme vertueux, il cherche le mettre mort , et comme le disent les Sages (Kidouchin 30b): Le mauvais penchant de lhomme prend le dessus chaque jour, et cherche lanantir . Il faut surmonter bien des preuves difficiles, soit cause dun manque de revenus, soit cause dune maladie ou autres difficults, mais il ne faut pas couter les conseils du mauvais penchant et quitter le droit chemin. Il faut surmonter ces preuves, tenter sa chance ailleurs, comme Yitshak qui partit ailleurs, car la dlivrance et le salut surgiront dailleurs pour les Juifs (Esther 4:14) et savoir quen fin de compte on trouvera le repos, comme Yitshak lorsquil creusa le dernier puits qui ne lui fut pas contest et quil appela Rehovot... car D. nous a largis et nous prosprerons dans la contre (Brchith 26:22). Effectivement! Il faut se renforcer et surmonter les premires entraves et avoir confiance en D., mme si les preuves saccumulent et que nous sommes obligs de nous exiler. Pourquoi en est-il ainsi? Parce que lorsque le Satan voit quil ne russit pas dominer quelquun, il laccuse et le calomnie jusqu lui faire perdre le repos, mais si lon surmonte ces preuves, on en est grandement rcompens. Nous tirons cet enseignement du comportement dYitshak concernant les puits. Les puits deau font allusion aux gens quil a amens sous la protection de D. et auxquels il a enseign la Torah qui est appele eau , comme il est crit (Ichaya 55:1): Vous qui avez soif, venez, voici de leau et les Sages expliquent (Baba Kama 17a; Tana DBey Eliyahou Rabah 2:18): Il ny a deau que la Torah . Yitshak a souffert cause des serviteurs dAvimelech qui le drangeaient dans son travail, qui fermaient les lieux o il enseignait la Torah et la connaissance de D. Yitshak, sans peur, se rendit ailleurs, mais partout les serviteurs dAvimelech continuaient de le dranger dans son travail. Yitshak nen fut pas pour autant dcourag, il a simplement poursuivi ailleurs, malgr les tentatives de lui faire renoncer ses activits religieuses. Avec courage et fiert, il surmonta toutes les preuves qui lassaillaient afin de propager et de renforcer la connaissance de la Torah. Bien quen fin de compte Avimelech lait chass de son pays, il continua creuser des puits, fonder des institutions de Torah, sans se laisser aller au dsespoir ni au dcouragement (Il faut signaler que le nom du dernier puits, Rehovot, a la mme valeur numrique que le mot Torah ajout aux lettres y et a qui sont les premires lettres des mots Yitshak Avinou, ce qui indique par allusion quYitshak a continu soccuper de Torah et instituer des lieux dtude ouverts tous).

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Nous devons maintenant expliquer le propos des Sages: Il ny a deau que la Torah , ce qui nous permettra de mieux comprendre les activits dYitshak. Nous savons que celui qui est dpourvu de Torah est semblable un rcipient vide. Mme sil est riche et respect, sil na pas de connaissance de la Torah, il ressent au fond de lui-mme un manque. Le seul moyen de combler ce manque est daller vers la Torah, vers leau qui symbolise la Torah, comme il est crit: Vous qui avez soif, venez, voici de leau... Cest une chose merveilleuse, pourtant il est difficile de comprendre pourquoi il est dit venez vers leau, alors quil aurait fallu dire buvez de leau? Pour expliquer cela, citons ce qucrit le doux chantre dIsral (Thilim 34:9): Gotez et sentez combien D. est bon . Pourquoi gotez ? Lorsque lhomme ne ressent pas le bonheur de vivre, sa vie na pas de got, et il lui est conseill de goter le got de la Torah, car la Torah est ce qui est bon (Avoth 6: 3; Brakhoth 5a). Il ressentira immdiatement des prmices de bonheur. De mme, quiconque a soif de connatre la Torah et ressent un certain manque, qui cherche un got la vie, doit aller vers leau, vers la maison dtude, mme sans tudier. L, il verra des ranges dhommes plongs dans les paroles de Torah, oublieux de leur situation financire et de la pauvret dans laquelle ils vivent, et heureux dtudier la Torah comme le jour o elle fut donne au Mont Sina. Il est certain que cela veillera dans son me lamour de la Torah. Lhomme qui est loin du Judasme et dune vie rgle par la Torah, ressemble celui qui vit dans une pice sombre et risque dtre aveugl sil sort tout coup au moment o le soleil est le plus brillant, car ses yeux ne sont pas habitus la lumire. Il doit ouvrir la porte petit petit, jusqu shabituer la lumire du soleil et alors elle ne lui causera pas de mal. De mme, afin daborder une vie de Torah, il faut restreindre ses attaches aux affaires de ce monde et se rendre de temps en temps la maison dtude pour voir de ses propres yeux comment les gens y tudient, et ainsi shabituer entendre les paroles de Torah. Mme si tout dabord il nest pas motiv, il finira par ltre (Pessahim 50b; Kala 8; Yrouchalmi Haguigah 1:7), et il parviendra se rapprocher de D. Voyez et gotez... dit David HaMelekh. Si tu te trouves dans lobscurit et que tu ignores le got de la Torah, ne multiplie pas les jenes et les mortifications. Si seulement tu pouvais savourer un peu le got de la Torah, voir ceux qui ltudient, tu thabituerais toi-mme la pratiquer. Cest aussi ce que dit le prophte: Vous qui avez soif, venez, voici de leau . Il ne dit pas: venez boire de leau , car celui qui a trs soif (le mot en Hbreu indique par onomatope que la soif brle en lui et le fait soupirer...) risque de strangler sil boit dun seul coup. Il faut tout dabord quil aille vers leau, quil la voie, quil la regarde, ce qui rduira quelque peu la tension de sa soif et il se sentira dj un peu mieux sachant quil a de quoi boire... quil ne va pas mourir de soif, et ce nest quaprs quil pourra boire, petites gorges. Il en est de mme pour celui qui a soif de Torah. Sil se plonge tout coup dans la Torah quil ne connat pas, il risque de se noyer. Il doit progresser pas pas, tout dabord en sapprochant de la maison dtude, et en pratiquant quelques commandements. Lorsquil commence voir et comprendre la vrit de la Torah, il en vient la connaissance de D. Cest pourquoi la Torah dit (Vayikra 26:3): Si vous marchez dans Mes voies... dsignant une marche, faites des efforts dans les voies de la Torah (Torat Kohanim ad. loc.). Tout dabord il faut aller vers leau, vers la Torah, et ensuite, si vous faites cet effort, et au lieu de vous rendre dans des lieux de divertissements et des assembles de railleurs (Thilim 1:1), vous vous rendez dans la maison dtude, vous vous rendrez compte que D. est bon. Et alors vous pratiquerez les commandements de bon gr, et non pas par obligation, avec amour de la Torah et de D. Selon le Zohar (II, 82b) les six cent treize commandements indiquent lhomme comment vivre en ce monde et comment y organiser sa conduite pour devenir un homme de D. Cest donc que celui qui marche dans la voie de la Torah et qui, de tout son tre, aspire aux eaux de la Torah, en vient ncessairement remplir ces conditions. Celui qui dsire goter et boire les paroles purificatrices de la Torah, est aid du Ciel, comme il est dit (Chabath 104a; Yoma 38b; Pessikta Zouta Bo 10:11): Celui qui vient se purifier est aid du Ciel .

Parachat toldot La vrit et la Torah, raison dtre de la cration

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Il est crit (Micha 7:20): Tu as donn la Vrit Yaakov, Avraham la Bienveillance . En quoi se reconnat la vertu de Vrit attribue Yaakov? Pourquoi est-elle attribue spcifiquement Yaakov, et quelle en est la signification profonde? Rabbi Simon dit: Lorsque D. dcida de crer lhomme, les anges tutlaires se grouprent en diverses factions, certains prfraient quil ft cr, dautres non, comme il est crit (Thilim 85:11): La Bienfaisance et la Vrit se rencontrent, la Justice et la Paix sembrassent . La Bienfaisance dit: Quil soit cr, car il fera le bien. La Vrit dit: Quil ne soit pas cr, car il sera sujet aux mensonges. La Justice dit: Quil soit cr car il fera le bien. La Paix dit: Quil ne soit pas cr car il sera querelleur. Que fit D.? Il saisit la Vrit et la jetta terre, comme il est crit (Daniel 8:12): La vrit est jete terre... (Brchith Rabah 8:5). Tout dabord, il faut se demander pourquoi D. leur demanda leur avis, comme il est crit (Brchith 1:26): Faisons lhomme Notre image et Notre ressemblance . Le mot Faisons est un pluriel qui indique que D. a pris conseil des anges et leur a demand sil fallait crer lhomme ou non. Il faut aussi se demander pourquoi D. a jet justement la Vrit et non la Paix, qui sopposait aussi la cration de lhomme. La rponse de Rachi est rapporte dans le commentaire Ets Yossef sur le Midrach (ad. loc.): Lopposition de la Paix ntait pas un empchement aussi srieux que celle de la Vrit . Le Rabbi Menachem Mendel de Kotzk dit ce sujet que lorsquon renvoie la vrit, il sensuit ncessairement quon fait la paix, car personne ne peut plus affirmer que cest lui qui a raison... Si nous comprenons pourquoi la Vrit fut jete terre, nous comprendrons pourquoi la vertu de Vrit est attribue spcifiquement Yaakov. Nous savons que le monde fut cr avec la qualit de Vrit, puisquelle est le sceau de D. (Chabath 55a; Yrouchalmi Sanhdrin I:1), et la cration confirme la vrit de lexistence du Crateur. Les dernires lettres des mots Brchith bara Elokim forment le mot Emet, vrit (voir entre autre Yilana DHay). La Vrit dit D. de ne crer ni lhomme ni le monde, et quil valait mieux laisser les choses ainsi. Mais D. lui rpondit que ctait essentiellement et principalement pour lhomme que le monde avait t cr car il est le but de la cration dans le projet divin. Le monde entier lui sera confi, et il recevra la Torah qui est Vrit (Yrouchalmi Roch HaChanah 3:8) comme il est crit: Acquiers la Vrit et ne labandonne pas (Michley 23:23). Dire que D. a cr le monde pour la Torah et pour Isral, cest dire quil y a une ncessit la cration du monde, et lhomme doit ncessairement tre cr avec la Vrit - la Torah - afin quil puisse comprendre sa raison dtre et que le monde puisse se perptuer. La Vrit na donc pas prsent un argument valable devant D. Si lhomme nest pas cr, il ny a pas de raison de crer le monde, et cest pourquoi D. a jet la Vrit terre. Mais Il na pas jet la Paix, car il se peut que son argument ne se soit pas rfr la Torah mais seulement au fait que lhomme serait querelleur et Chalom, la Paix, est un des Noms de D. (Chabath 10b; Yrouchalmi Brachoth II:4), cest pourquoi D. ne la pas jete terre. Il est dit de Yaakov (Brchith 25:27) que cest un homme intgre, assis dans les tentes , ce qui indique quil tudiait la Torah dans les maisons dtude de Chem et Ever (Brchith Rabah 63:15). Cest spcifiquement pour les hommes comme lui que le monde fut cr, car il tait un homme intgre, attach la vrit, et selon Rachi, qui ne sait pas mentir . Le fait que la Vrit soit attribue Yaakov est indiqu dans le mot Ish, homme, dont la premire lettre (Alef) et les lettres du mot Tam (intgre, entier) ensemble forment le mot Emet, vrit. Yaakov est la raison dtre du monde comme il est crit (Devarim 32:9): Ce peuple est la part de lEternel, Yaakov est le lot de Son hritage et il est llu des Patriarches (Brchith Rabah 71:1). Il convient donc quil soit cr et quil vienne au monde. Nous comprenons pourquoi D. fut tellement fch contre la Vrit qui sopposait la cration de lhomme alors que la cration de lhomme est une bonne chose puisque plus tard Yaakov, dont la caractristique essentielle est la Vrit, devait natre. La vertu de Bienfaisance, attribue Avraham, a agr la cration de lhomme, ce qui montre que le mrite de Yaakov - lhomme intgre - suffit pour justifier la cration du monde puisque D. dsire les actes des hommes vertueux, comme le disent les Sages (Brchith Rabah 2:5): Leurs actes sont lumineux . D. est satisfait et se rjouit de voir que le monde ne manque pas dhommes

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vertueux, et lexistence dhommes mchants namoindrit pas le plaisir que Lui procurent les gens vraiment vertueux. Nous savons que cest grce au mrite de Yaakov que le monde fut cr, car de lui natront par la suite les douze tribus dIsral, les tribus de lEternel, en tmoignage dIsral (Thilim 122:4). Isral, le nom de Yaakov qui dsigne le peuple tout entier, est form des mots Yasar, droit, et -l (lun des Noms de D.), ce qui signifie quen tout lieu et en tout temps, les tribus dIsral sont des tmoins de la sagesse et de la justice divines. Elles tmoignent de la justice de D., de Sa fidlit dans tout ce quIl fait, et de Sa bont dans la cration de lhomme. Les traits et la forme de Yaakov Avinou sont gravs sur le Trne divin (Tikouney Zohar 22, 65, Zohar I, 168a) en tmoignage de la bont, de la bienfaisance et de la justice de D. dans la cration du monde et de lhomme, et de son ct le peuple dIsral reconnat la justice divine et tmoigne que le monde a un Crateur. La colre de D. fut grande envers la Vrit parce que cest justement la qualit de Vrit, la Torah, qui ncessite et justifie la cration du monde et de lhomme, et la Torah est le but de la cration. La tche de lhomme est de la pratiquer, de ltudier, et dobir ses commandements.

Les enfants sont la couronne des parents


Il est crit (Ichaya 29:22): Ainsi parle lEternel la maison de Yaakov, le librateur dAvraham... Rabbi Chmouel Bar Yitsak dit: Avraham fut sauv de la fournaise ardente grce au mrite de Yaakov... Nimrod avait condamn Avraham mourir brl, mais D. a vu que Yaakov allait tre issu de lui plus tard et Il dit: Avraham mrite dtre sauv grce Yaakov, cest ce qui est crit: Ainsi parle lEternel la maison de Yaakov... (Brchith Rabah 63:2; Yalkout Chimoni Ichaya 436). Cest ce qui fait dire aux Sages que les enfants sont la couronne de leurs parents . Le Rabbin Aaron Kotler dans son livre Nichmat Aaron commente clairement cet enseignement: Avraham avait la connaissance de son Crateur, il pratiquait de lui-mme toute la Torah, il en tait venu de lui-mme la connaissance de D. et de Ses justes voies, il avait lutt contre le tyran Nimrod, les magiciens, les rois, contre les lgislations de tous ces peuples hrtiques pour qui lidoltrie tait sacrosainte. Il avait dcouvert la voie du bien et de la bont qui dcoulent du principe de la foi en D., et il stait laiss jeter dans la fournaise ardente pour sanctifier le Nom de D., mais tout cela naurait pas suffi pour le sauver de la fournaise. Sans aucun doute, il aurait reu une juste rcompense de ses mrites dans le monde Venir, mais il naurait bnfici daucun miracle, ntait-ce que Yaakov a libr Avraham . Cette citation veille notre tonnement et soulve un certain nombre de questions: 1. Le courage manifest par Avraham pour sanctifier le Nom de D. serait rest inconnu. Ni son intgrit, ni sa droiture, ni ses mrites personnels nont sauv Avraham, mais seul le mrite de Yaakov le sauva. Est-ce possible? 2. Nest-il pas crit (Michley 13:24): Mnager les coups de bton cest har son fils, mais celui qui laime a soin de le corriger ? Les Sages demandent (Yalkout Chimoni, Michley 950): Y a-t-il un pre qui hasse son fils? Et ils rpondent: Sil ne le rprimande pas et ne le dirige pas dans la voie de la Torah, de la sagesse et de la bonne conduite, il finira par le har . En le corrigeant il montre quil laime, et sil le rprimande il lui devient cher. Les Sages (Brchith Rabah 53:16) appliquent Avraham le verset: Celui qui ferme les yeux et ne veut pas voir le mal... (Ichaya 33:15) car il avait ferm les yeux sur la mauvaise conduite dIchmal. Sil lavait rprimand et corrig comme il duquait son fils Yitshak, Ichmal naurait (peut-tre) pas chut. Les Sages disent aussi propos dYitshak: Cest parce quil a justifi la malfaisance dEssav que sa vue a faibli (Brchith Rabah 65:3), comme il est crit (Ichaya 5: 23): Ceux qui se laissent soudoyer et innocentent le mchant, qui refusent aux innocents la justice qui leur est due , car Yitshak stait laiss soudoyer par Essav en acceptant les produits de sa chasse. Si Yitshak avait rprimand et corrig son fils Essav de la mme faon quil duquait Yaakov, Essav naurait pas chut, et la vue dYitshak naurait pas faibli. De mme, si Avraham navait pas rprimand et corrig son fils Yitshak et quYitshak son tour net pas rprimand et corrig son fils Yaakov, ce dernier naurait pas eu une descendance dhommes vertueux. Avraham a duqu Yitshak, ce qui a permis Yitshak, son tour, dduquer Yaakov dans la voie de D. et den faire un homme vertueux. Cest donc le mrite

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dAvraham qui a sauv Yaakov des mains dEssav et de Laban. Mais le Midrach nous dit au contraire que cest Yaakov qui a sauv Avraham. Comment le comprendre? 3. Il y a une autre difficult. Le mrite dAvraham est plus grand que celui de Yaakov, car Avraham a vcu dans une socit idoltre, et de lui-mme, sans aucune aide extrieure, il en est venu la connaissance de D. Combien dpreuves et de souffrances il a supportes et surmontes afin de connatre la vrit, comme lcrit le Rambam (dbut de Halakhoth Akoum), et cela durant le rgne du cruel roi Nimrod. Cest certainement un grand mrite, car il fut le premier se sacrifier pour sanctifier le Nom de D. Tel nest pas le cas de Yaakov qui a grandi chez Yitshak dans la voie de la Torah, et qui na pas subi dpreuves durant son enfance. Il apprenait la Torah en compagnie de son pre et dans les tentes de Chem et Ever (Mguilah 17a; Brchith Rabah 63:15). En quoi donc le mrite de Yaakov est-il plus grand que celui dAvraham, au point que cest lui qui a sauv Avraham de la fournaise ardente? Pour rpondre, citons tout dabord les paroles de nos Sages (Sotah 49a): Lorsque Rabbi Akiva est mort, lhonneur de la Torah a disparu . Il y avait pourtant au temps de Rabbi Akiva et aprs lui, beaucoup dhommes sages et vertueux, qui chrissaient lhonneur de la Torah. Pourquoi est-il dit qu sa mort, lhonneur de la Torah a disparu? Est-ce concevable? Cest que Rabbi Akiva avait une faon toute particulire dhonorer la Torah, que lon ne rencontre chez aucun autre. Rachi explique que Rabbi Akiva laborait sur chaque ponctuation de la Torah des montagnes de lois. Tel est lhonneur de la Torah, elle na rien de superflu (Menahoth 29b). Il faut rappeler que Rabbi Akiva, durant toute sa vie, se souciait particulirement de ce que la Torah ne soit pas nglige dans le sens o il est dit Si ce nest pas maintenant, quand? (Avoth I:14). Chaque minute qui nest pas consacre la mditation est perdue, et chaque minute peut tre utilise expliquer des montagnes de lois propos de chaque ponctuation. De toutes ses forces, Rabbi Akiva veillait lhonneur des Sages qui fixent la tradition, les exgses de la Torah, et les lois qui sont aussi importantes que les mots de la Torah. Nous apprenons que lorsque Rabbi Akiva tait en prison, son serviteur Yochoua Hagarsi lui apporta de leau pour assouvir sa soif, mais Rabbi Akiva lutilisa pour purifier ses mains et ne voulut pas boire (Yirouvin 21b). Il aurait pu boire leau et se couvrir les mains pour manger le pain (Rambam Halakhoth Brachoth VI:18; Choulhan Aroukh 163:1), mais il ne voulait pas transgresser les dcrets des Sages et lablution rituelle des mains est, comme on le sait, une ordonnance rabbinique (Houlin 105a): Nous devons obir aux dcisions des Sages, et le lavage rituel des mains avant la consommation de pain est un commandement des Sages (Rachi ad. lod.). Il observait ponctuellement les ordonnances rabbiniques, plus que tout autre son poque. Son respect des Sages tait tel quil alla personnellement visiter Rabbi Elizer que les Sages avaient excommuni cause dune dispute concernant la purification dun four en cramique (Baba Metsya 59b). Cest justement Rabbi Akiva qui alla le visiter, parce quil honorait les Sages et leurs ordonnances, et il savait quil devait lui-mme visiter Rabbi Elizer. Nous apprenons aussi (Sanhdrin 68a) que lorsque Rabbi Elizer (qui avait t excommuni) tomba malade, Rabbi Akiva et ses collgues allrent lui rendre visite et ils sassirent une certaine distance de lui, cause de lexcommunication. Rabbi Elizer dit: Je serai tonn quils meurent dune mort naturelle (nous savons que les Sages qui le visitrent font partie des dix martyrs supplicis par les Romains). Rabbi Akiva lui demanda: Quelle sera ma mort moi? Rabbi Elizer lui rpondit: Ta mort sera plus douloureuse que la leur . Rachi explique: Parce que ton cur est vaste comme un hall et si tu mavais servi, tu aurais beaucoup approfondi la Torah . Qui est plus grand que Rabbi Akiva qui a si bien respect lhonneur de la Torah et son enseignement, et dont il est dit (Ketouboth 63a) quil a tudi pendant douze ans sans interruption. Au bout de douze ans il rentra chez lui et il entendit, travers la porte, sa femme dire quelquun qui stonnait de labsence de son mari: Si Rabbi Akiva mcoutait, il retournerait la Ychivah tudier la Torah douze ans encore . En entendant ces mots, Rabbi Akiva nest mme pas rentr chez lui voir sa femme, il a fait demi-tour et est retourn la Ychivah poursuivre son tude douze ans encore. Il na mme pas salu sa femme aprs douze ans dabsence!

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Nous savons que Rabbi Akiva eut des disciples. Le Talmud raconte (Yirouvin 53b) que Rabbi Yossi HaGlili a rencontr Brouria, la femme de Rabbi Meir. Il lui demanda: Quel chemin prendre pour aller Lod? Elle lui rpondit: Glili! Imprudent! Tu aurais d demander: Vers o Lod? Les Sages nont-ils pas dit (Avoth I:5): Ne prolonge pas la conversation avec ta femme... plus forte raison avec la femme de ton ami! Elle voulait lui signifier quau lieu de prononcer des mots inutiles, il est prfrable de les consacrer des paroles de Torah, veiller lhonneur de la Torah et de ceux qui ltudient, et ne pas perdre un seul instant de Torah. La Michna des Pirkey Avoth ajoute: De l ils ont tir la conclusion que quiconque est prolifique en paroles inutiles... est vide de paroles de la Torah . Au lieu de prononcer de vaines paroles, quil mdite la sagesse de la Torah. Cela nous indique de quelle faon honorer la Torah. Tous ceux qui suivent lenseignement de Rabbi Akiva et imitent ses actes grandioses tiennent de lui et cest comme si Rabbi Akiva ntait venu en ce monde que pour leur enseigner comment servir D., et cest donc pour le mrite de ses disciples que Rabbi Akiva vint au monde. Mme si personne ne peut agir exactement comme lui, de toute faon, la grande humilit de ses disciples justifie leur venue au monde qui na pour but que denseigner Isral comment honorer la Torah, lexemple de leur matre. Cela signifie que ce sont les lves de Rabbi Akiva qui lui ont donn la force denseigner la voie de D. chaque gnration. Le mrite de ses lves augmente son propre mrite et la grandeur de Rabbi Akiva est davoir russi tablir fermement lhonneur de la Torah. Il en est de mme de Moch Rabbeinou. Il a toujours pri pour les enfants dIsral, mais lorsquils commirent la faute du veau dor, D. dit Moch: Va, descends... (Chemoth 32:7), et les Sages expliquent (Brachoth 32a): Descends de ta grandeur que Je ne tai accorde quen faveur dIsral . Bien que Moch ait t lhomme le plus grand de son temps, cest uniquement grce au mrite des Enfants dIsral quil a pu tre un grand prophte, pre de tous les prophtes (Vayikra Rabah 1:15). Lorsque le peuple fauta, Moch perdit son prestige, car dornavant, il navait plus dascendant sur Isral. Il est dit de lui (Bamidbar 12:3): Lhomme Moch tait le plus humble de tous les hommes qui soient sur terre , ce qui signifie que sa grandeur ne dpendait que des Enfants dIsral. Son humilit extrme fait sa grandeur, et sa puissance lui vient de tout le peuple, car cest le peuple tout entier qui lui donnait cette force. Nous constatons que le pouvoir de D. aussi grandit et slve en fonction du mrite des Enfants dIsral. La Kabalah demande: Pourquoi D. a-t-Il cr le monde? Et de rpondre que D. est bienveillant et misricordieux, et sIl navait pas cre le monde, envers qui serait-Il bienveillant et misricordieux, et sur qui rgnerait-Il? Sa Providence veille sur les Enfants dIsral, et ce nest que par leur mrite que D. est proclam Roi, puisquil ny a pas de Roi sans peuple (Kad HaKemah, Roch HaChanah 70a). Dans la prire, nous proclamons D. Roi, afin daccepter Sa souverainet et de prendre sur nous le joug divin (Roch HaChanah 15a). A propos du verset (Thilim 25:8): Les fautes de mon jeune ge et mes crimes... les Sages expliquent: D. dit Isral: Je vous suis reconnaissant, car cest pour vous que Jai cr le monde, et si ce ntait pour vous, tous les bienfaits que Jai en rserve, qui les aurais-Je donns? (Yalkout Chimoni 702). Les Sages disent (Ekhah Rabah 1:35): Lorsque Isral obit la volont de D., il donne plus de pouvoir aux cohortes clestes . Surtout le jour de Kippour, lorsque nous nous repentons et que nous nous rachetons de nos fautes, nous rachetons aussi D. dans le sens o il est dit que Yaakov a rachet Avraham car nous donnons du pouvoir aux cohortes clestes. Cest que le pouvoir de D. se manifeste dans le monde grce au peuple juif, et Il ressent un grand plaisir lorsque nous affirmons Sa Toute-Puissance. Il en est de mme dAvraham qui fut sauv de la fournaise ardente grce au mrite de Yaakov, qui reprsente la qualit de Splendeur (Zohar III, 302a), pour quAvraham puisse enseigner Yaakov comment servir D. avec dvotion. Partout o il allait, durant toute sa vie, Yaakov tait attach la Torah (Brchith Rabah 95:2; Tanhouma Vayigach 11); mme dans les circonstances les plus difficiles, il est rest intgre, et il a toujours exig de ses enfants un attachement la Torah (Chemoth Rabah 1:1). Si Avraham navait pas t sauv de la fournaise ardente, Yaakov naurait eu personne pour lui apprendre la Torah et naurait pas su comment servir D. avec une dvotion parfaite. Et donc, par le mrite de llve (Yaakov), le matre (Avraham) est sauv, afin denseigner ses descendants aprs lui comment servir D. (de mme que le succs de Rabbi Akiva vient du mrite de ses lves, et que le mrite des Enfants dIsral fait la grandeur de Moch et confirme la Toute-Puissance de D.). Si Avraham navait pas d avoir denfants, il naurait pas t

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sauv. Ce nest pas Yitshak qui la sauv, car Yitshak a enfant Essav, quil na pas russi corriger. Cest Yaakov - qui a su chtier ses enfants - qui a sauv Avraham et lui a permis de surmonter les dix preuves qui lassaillrent (Avoth V:3; Midrach Thilim 18:25; Pirkey DRabbi Elizer 26) et de poursuivre de luimme la voie de la justice (Brchith Rabah 30:10). Il faut attribuer son succs au mrite de Yaakov. Il est crit: La maison de Yaakov racheta Avraham . Ce rachat a le sens de dlivrance, pour dire que cest grce lenseignement que Yaakov reut dAvraham quAvraham fut sauv de la fournaise ardente. Le mot Pada, rachet, y fait allusion, puisque ce mot a la mme valeur numrique que le mot Taf, les jeunes enfants. Ce sont eux - Yaakov et ses enfants - dtenteurs de la tradition enseigne par Avraham, qui lont sauv, puisque le pouvoir dAvraham vient de Yaakov qui poursuit sa voie, la voie de la Torah et de la pratique des commandements pour toutes les gnrations, et donc ce sont ces jeunes enfants qui lont sauv de la fournaise. Il est crit (Brchith 12:1): Et lEternel dit Avraham quitte ton pays, ton lieu de naissance etc. . Nous savons que sortir de Haran o il avait grandi pour se diriger vers la terre de Canaan, tait une dure preuve, mais Avraham devait obir lordre de D. et il quitta Haran sans opposer de rsistance. Bien que D. lui ait dit de quitter Haran, ce lieu impur, un lieu qui soulve la colre divine - haron af (Rachi, fin de la section Noah), il lui tait difficile de quitter un environnement qui lui tait tellement familier. Par contre, il est crit Yaakov sortit de Ber Cheva (Brchith 28:10). Son pre lui ordonna de quitter ce lieu saint o planait la Prsence Divine, et daller Haran, ce lieu qui soulve la colre divine. Avraham dut quitter un lieu impur pour se rendre vers un lieu saint, tandis que Yaakov reut lordre de quitter un lieu saint pour se rendre en un lieu impur, afin que les preuves quil allait subir chez Laban lui permettent de parvenir une lvation encore plus grande. Il est vrai que Yaakov aurait pu envoyer un missaire Haran pour lui trouver une pouse, mais il obit lordre de son pre. Il est certain que si Yitshak navait pas bien connu les qualits de Yaakov, il ne laurait pas envoy l-bas. Quoi quil en soit, Yaakov sortit joyeusement de sa ville sainte pour se rendre Haran, tandis quAvraham eut des difficults quitter son pays natal pour aller en terre de Canaan. Cette constatation nous permet de comprendre la grandeur de Yaakov. Avraham a donn naissance Yitshak - celui qui sest port en sacrifice comme un pur holocauste (Brchith 64:3) - et Yitshak a enfant Yaakov, mais le mrite de Yaakov fut plus grand que le leur, comme il est crit (Micha 7:20): Tu as donn la Vrit Yaakov . La vrit est la qualit intrinsque de Yaakov, et la Torah est Vrit (Yrouchalmi Roch HaChanah III:8; Tana DBey Eliyahou Zouta 21). Yaakov na jamais abandonn la Torah et na jamais cess dtre attach elle, mme lorsquil tait dans une socit de gens malfaisants, comme il est dit (Midrach Hagadah Brchith 32:5): Jai habit chez Laban... Le mot garti, jai habit, a la valeur numrique de six cent treize, le nombre total des commandements de la Torah, et cest comme si Yaakov avait dit: Jai observ toute la Torah chez Laban . Cest cela qui lui donne la supriorit et le mrite de pouvoir sauver Avraham de la fournaise ardente. Lorsque Avraham fut jet dans la fournaise, cest le mrite de Yaakov, rest fidle la Torah dans les circonstances les plus difficiles, qui la sauv. Bien quAvraham ait t sans aucun doute trs grand, Yaakov avait dj choisi la Torah avant sa naissance. Dj dans le ventre de sa mre, il avait choisi pour sa part le monde Venir (Tana DBey Eliyahou Zouta 19). Et surtout, cest le portrait de Yaakov, grav sur le Trne de Gloire (Brchith Rabah 2:2; Tanhouma Bamidbar 19), qui protge tous ceux qui sont attachs la Torah. Il a galement protg Moch, dont les Sages disent (Chabath 88b): Lorsquil monta recevoir la Torah, les anges voulaient le brler, mais D. lui dit: accroche-toi Mon Trne et rponds leurs arguments , et le portrait de Yaakov est grav sur le Trne de Gloire, pour avoir combattu et vaincu lange dEssav (Houlin 92a). Cest comme si D. avait dit Moch: le mrite de Yaakov est suffisamment grand pour te protger de leur feu et te permettre de leur rpondre. Le mrite de Yaakov est suprieur celui dAvraham, et cest ainsi quAvraham fut sauv de la fournaise grce Yaakov.

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Pahad David La connaissance de la vrit et la perfection

Il arriva, comme Yitshak tait devenu vieux, que sa vue sobscurcit. Un jour il appela Essav, son fils an, et lui dit: Mon fils! Il rpondit: Me voici! Yitshak reprit: Vois, je suis devenu vieux, je ne connais point lheure de ma mort. Maintenant, je te prie, prends tes armes, ton carquois et ton arc, va aux champs et attrape du gibier pour moi. Fais-men un ragot comme je laime, sers-le moi et que jen mange, afin que mon cur te bnisse avant ma mort. Or, Rivka entendit ce quYitshak disait Essav son fils. Essav alla aux champs pour chasser du gibier et le rapporter. Rivka dit Yaakov, son fils: coute, jai entendu ton pre parler ainsi Essav ton frre: Apporte-moi du gibier et apprte-moi un ragot que je mangerai, et je te bnirai devant le Seigneur avant de mourir. Maintenant, mon fils, sois docile ma voix, sur ce que je vais tordonner (Brchith 27:1-8). 1. La nourriture manquait-elle dans la maison dYitshak pour quil et demander Essav son fils de prendre ses flches et daller aux champs chasser et lui apporter du gibier? 2. Est-il possible quYitshak qui fut lev la saintet dun sacrifice (Yalkout Chimoni Toledoth 111) et qui tait comme le Saint des Saints, dise: prpare-moi un plat comme je laime ? Est-il possible de penser quYitshak aimait les gourmandises et les recherchait? 3. Yitshak parle son fils sur un ton de prire et de supplication (Brachoth 9a). Il connaissait son fils, il savait quil le respectait, puisque Essav se distinguait par le respect quil avait envers ses parents (Brchith Rabah 76:2). Il lui aurait suffi den faire la demande et Essav lui aurait prpar un repas avec empressement. 4. Pourquoi Yitshak accorde-t-il de limportance Essav en lappelant son fils an (littralement le grand )? Ignorait-il que son fils Essav avait vendu son droit danesse Yaakov en change dun plat de lentilles (Brchith 25:33-34)? 5. Il dit Afin que mon cur te bnisse . Le mot Nafshi, littralement mon me, semble superflu. Naurait-il pas suffi de dire afin que je te bnisse avant de mourir ? 6. Rivka entendit ce quYitshak dit son fils Essav et elle sopposa son projet. Pourquoi ne veutelle pas quil reoive la bndiction de son mari? Si elle soppose ce projet parce quelle sait quEssav ne la mrite pas, pourquoi a-t-elle gard le silence jusque-l et na-t-elle rien dit Yitshak au cours des annes passes? 7. Pour quelle raison Essav a-t-il ddaign et vendu le droit danesse, alors quil a refus de renoncer aux bndictions de son pre, quil dsirait sapproprier? Nous avons dj rpondu ces questions de diverses faons aux chapitres prcdents. Mais comme on sait, il nest pas dtude sans nouveaut (Haguigah 3a), et les rponses donnes ici sajoutent aux autres, dans le sens o il est dit: Ce que la Torah ne mentionne pas un endroit, elle llabore ailleurs . Il faut tout dabord dcrire lessence dEssav, fils dYitshak et frre de Yaakov. Essav, tout comme Yaakov son frre, avait une grande connaissance de la Torah; en effet, comme lui, il avait tudi auprs de Chem et Ever (Brchith Rabah 63:10). Lui aussi avait grandi auprs dYitshak son pre et Avraham son grand-pre. Il avait des qualits semblables celles de son frre Yaakov et un potentiel norme. Comme Yitshak, Essav sest mari lge de quarante ans (Brchith 26:34, 25:20), se disant: Mon pre Yitshak sest mari lge de quarante ans, je vais en faire de mme (Brchith Rabah 65:1), parce quil voulait ressembler son pre. Mais en fait, il na pas bien utilis ses qualits, au contraire, il les a mises au service du mal. Il y a beaucoup de preuves de la grandeur dEssav. La Torah tmoigne quil obit immdiatement la demande dYitshak et alla chasser du gibier, ce qui montre quil croyait de tout son cur et de toute son me aux bndictions quil allait recevoir. La Torah tmoigne en outre que lorsquil apprit que son frre Yaakov stait sournoisement appropri les bndictions il poussa un grand cri plein damertume et dit son pre: bnis-moi aussi, mon pre... ne mas-tu pas rserv une bndiction? (Brchith 27:34, 36). Il regrettait profondment que les bndictions aient t donnes Yaakov un moment de grce et quil en ft priv, comme Yitshak le lui dit (ibid. v. 37-38): Je ne peux rien pour toi, mon fils . Mais Essav continuait de supplier: Bnis-moi aussi et il versait des larmes amres. Essav croyait fermement aux bndictions de son pre. La Torah le loue pour sa faon exceptionnelle de respecter ses parents, et

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en fait mme un modle: Les Sages dirent la mre de Rabbi Tarfon que son fils, qui lui montrait tant de marques de respect (voir Kidouchin 31b), navait pas encore atteint le niveau dEssav dans la pratique de lhonneur d aux parents et le respect des Sages (Pessikta Zoutarti Toledoth 27). Ce commandement si important dhonorer son pre et sa mre - un commandement qui promet la longvit (Chemoth 20:12) - tait ancr au plus profond de lme dEssav, et il le pratiquait de la faon la plus parfaite. Personne ne peut se mesurer lui en cela. De plus, le respect quil tmoignait son pre et sa mre tait tellement grand quYitshak avait la ferme conviction quil ne lui servirait pas une viande interdite, bien quEssav ft un homme rustre, un homme mchant, qui se serait permis dapporter son pre un gibier impropre la consommation, si Yitshak ne lui avait pas prcis: un plat comme je laime . Essav jouissait de la confiance de son pre, tant il tait attach ce fondement essentiel de la Torah. Il faut se demander comment Essav pouvait avoir de si grandes qualits et une telle foi dans les bndictions de son pre - et sil avait foi en son pre, il avait foi en D. source de toutes les bndictions - et pourtant rester malfaisant et nutiliser ses capacits que pour faire le mal toute sa vie. Comment de telles contradictions peuvent-elles coexister dans son me? Cest quEssav tait naturellement mchant, livr sans frein ses apptits. Il poursuivait dans limpuret la satisfaction immdiate de tous ses dsirs, chose qui la corrompu, il ne recherchait que les plaisirs phmres et passagers de ce monde, au lieu de dsirer la vie ternelle, que lon gagne par la pratique des lois de la Torah, de ses commandements, et par les bonnes actions. Il avait choisi de vivre sans aucun frein (Guitin 13a), il voulait lindpendance, tre libre de toute obligation spirituelle et de toute contrainte religieuse. Dj dans le ventre de leur mre, Yaakov et Essav avaient partag les mondes entre eux. Essav prit pour sa part ce monde-ci, et Yaakov le monde Venir. En voyant que Yaakov revenait de chez Laban avec quatre femmes et beaucoup denfants, des serviteurs et des servantes, du btail, de largent et de lor, il lui dit: Yaakov mon frre, ne mas-tu pas dit que tu prenais pour ta part le monde Venir, et moi ce monde-ci? Do te viennent tous ces biens matriels? Pourquoi tapproprier les jouissances de ce monde? Yaakov lui rpondit: Ce sont les quelques biens que D. ma donn pour mes besoins en ce monde. Alors Essav changea davis et se dit que si D. avait donn tant de biens Yaakov qui na pas de part en ce monde, quelle sera la rcompense quil recevra dans le monde Venir (Tana DBey Eliyahou Zouta 19, au nom de Yalkout Toledoth p. 32, 4me col.). Essav na rien rpondu cela, il na pas contest cette assertion, au contraire, il pensait en lui-mme que si Yaakov recevait une rtribution en ce monde, dans lautre monde qui est son lot il recevrait bien davantage. Cela montre quEssav savait quil y a un autre monde o les bienfaits sont rservs aux Justes. Il avait foi aussi en la rcompense que D. accorde aux Justes en ce monde, puisquil na rien rpondu Yaakov, et le silence quivaut lassentiment (Ybamoth 87b). Sil avait la foi, il ne fait pas de doute quil savait aussi quil est possible de changer en un instant car un instant de repentir suffit (Zohar I, 129a). Mais il a choisi de rester mchant, et mme ce moment-l, il nexprima aucun dsir pour la vie ternelle et les bienfaits du monde Venir. Pourquoi? Comme nous lavons dj dit, Essav a conserv toute sa vie une personnalit ambigu. Il navait aucune attirance pour lautre monde, au contraire, il ne dsirait que les plaisirs de ce monde phmre, telle tait sa faiblesse. Il na pas tir parti de ses capacits extraordinaires pour se sanctifier mais au contraire pour se dpraver, et il a ddaign le droit danesse (sa part de lautre monde) en change dun plat de lentilles. A la mort dAvraham, Yitshak son fils est devenu son hritier spirituel. Essav accepta le fait puisque, au moment du partage, il avait dit Yaakov: Je prends pour ma part ce monde, prends, toi, le monde Venir , cest toi lhritier spirituel de notre pre, il me suffit de ce monde... il me suffit de cette vie... A cela, Yaakov objecta tout de suite: Effectivement, mais tu es quand mme attach au monde Venir par ton droit danesse, et si tu veux te dfaire du monde Venir, tu dois me vendre ce droit . Essav consentit sans hsiter et sans rserve, comme il est dit (Midrach Hagadah p. 64): Lorsquil acheta le droit danesse, Yaakov souligna limportance et llvation de ce droit et alors Essav rpondit: Je vais mourir, quai-je faire de ce droit? (Brchith 25:32).

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Dune part, Essav reconnaissait lexistence de valeurs spirituelles, mais il est de ces gens dont il est crit (Thilim 12:9): la vilenie domine parmi les hommes , parce quils les ddaignent (Brachoth 6b). Apparemment il est croyant, mais il ne vit pas selon sa foi et il mprise les choses sacres. Il nutilise ses capacits que pour satisfaire ses dsirs, non seulement de petites choses comme un plat de lentilles, mais surtout, et plus forte raison, ses dsirs effrns au point de penser pouvoir tromper le Ciel (voir Brchith Rabah 22:13), et vendre son droit danesse, agissant en tout comme quelquun qui est la fois croyant et athe...

Essav, prototype du mal


Nous pouvons prsent rpondre aux questions poses plus haut. Yitshak appelle Essav son grand fils (Gadol veut dire la fois an et grand), en reconnaissance des qualits quil possdait et qui lui auraient permis de devenir son hritier spirituel, puisquil connaissait les valeurs spirituelles et suprieures (bien quil ft mchant). Mais Essav se connaissait aussi lui-mme. Il savait quil ntait pas capable de slever, il ne dsirait pas le monde ternel, et se satisfaisait de ce monde. Cest pourquoi Yitshak le prie, le supplie: si vraiment tu mhonores, sil te plat, corrige-toi, dautant plus que mes jours sont compts. Si tu te corriges, tu pourras devenir mon hritier spirituel car tu en as les capacits. Yitshak laimait et lui promit de le bnir avant de mourir, un moment de grce o toutes les bndictions se ralisent. Et il poursuit: Va aux champs me chasser du gibier , cest--dire: sors, je te prie, de ton attachement aux plaisirs de ce monde, va avec toutes tes armes, tes flches et ton arc, et fais la chasse au mauvais penchant qui tente de te faire fauter chaque instant, et cest ainsi que tu gagneras la vie ternelle, grce tes flches (cest--dire grce aux moyens et aux forces spirituelles qui sont cachs en toi). Prpare-moi un ragot comme je laime , autrement dit: donne-moi une raison de me rjouir de te voir bon, et alors mon me te bnira car alors ton me sera attache la mienne. Si tu te repens, tu pourras devenir mon hritier spirituel. Mais il y avait une diffrence entre la pense dYitshak et celle dEssav. Yitshak avait devin le potentiel dEssav. Il esprait donner Essav la possibilit de faire le bien et de se sanctifier. Pour le moment, se disait-il , il utilise ses capacits faire le mal mais dans le fond de son cur, il est vraiment croyant . Essav de son ct savait quil ntait pas capable de se librer de lemprise du mal et de se dtacher de ses mauvaises habitudes, car il tait entran dans lengrenage de ses fautes. Et Essav alla aux champs chasser du gibier pour lapporter son pre (Brchith 27:5). Les mots pour lapporter semblent superflus. Pour lexpliquer, Rachi cite le Midrach (Brchith Rabah 65:13): Il partit avec lintention de chasser des animaux sauvages mais, au cas o il nen aurait pas trouv, dapporter du gibier vol . Srement, Essav possdait des moutons et des chevreaux quil aurait pu prparer pour son pre, avait-il besoin de voler du gibier? Yitshak promit de bnir Essav au moment le plus propice, afin de lui faire mriter le monde Venir. Mais il y avait une condition: quil contrecarre vigoureusement son mauvais penchant. Essav fit mauvais usage de cette condition. Il comptait effectivement sur les promesses de son pre et il savait quen optant pour ce qui est bien et droit, il recevrait tous les bienfaits, mais il imposa sa propre condition: si je russis vaincre le mauvais penchant, bien, sinon je resterai tel que je suis maintenant, et je continuerai dans ma voie. Il partit avec diligence accomplir la volont de son pre, mais par ailleurs il tenta sa chance pour savoir sil russirait ou non. Mais nous savons quil ne faut pas poser de conditions ni faire de calculs lorsque lon se repent, comme il est crit (Devarim 6:16): Ne tentez point lEternel... En posant des conditions, nous perdons tous les bienfaits qui nous sont rservs, car le devoir de lhomme est de partir en guerre contre le mauvais penchant afin de le vaincre coup sr. Penser davance que lon peut perdre la bataille entrane coup sr la dfaite. Si Essav navait pas impos de conditions, et sil avait eu la ferme intention dobir la volont de son pre - au lieu de le tromper - Rivka ne serait pas intervenue, car les intentions positives dEssav auraient t claires. Mais il partit en guerre contre le mauvais penchant avec des conditions dans son carquois, des si , des peut-tre , des condition que , de telle sorte quil a tout perdu et que le mauvais penchant a pris le dessus. Lorsque lon part en guerre contre le mauvais penchant, il faut tre dtermin sortir vainqueur du combat. Il est crit (Devarim 21:10): Lorsque tu partiras en guerre contre ton ennemi (lorsque tu partiras

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en guerre avec lintention de gagner), lEternel ton D. le livrera en ton pouvoir . Essav fit un mauvais calcul. Il partit en guerre contre son ennemi avec des doutes et des arrire-penses. La Providence Divine intervint alors et rvla Rivka quEssav ne mritait pas de recevoir les bndictions et cest pourquoi elle nest intervenue qu ce moment-l. Jusque-l elle navait rien dit Yitshak car, alors seulement, il tait vident quEssav prenait un mauvais tournant.... Elle demanda Yaakov de prendre la place de son frre; lui seul mritait dsormais des bndictions. Mais Yaakov a peur. Si Essav se repent sincrement et mrite de ce fait les bndictions, Yitshak le maudira de son subterfuge. Si par hasard mon pre me tte , il sentira que je ne suis pas Essav, et jaurai attir sur moi la maldiction et non la bndiction (Brchith 27:12), car Essav mrite les bndictions tandis que moi, qui ne sors pas de la maison dtude, jaurai failli, et au lieu dtre bni je serai maudit. Et alors, Rivka sa mre lui dit: Je prends sur moi ta maldiction, mon fils (ibid. v. 13). Les maldictions se raliseront en moi, et toi tu seras bni. Elle savait avec certitude - par inspiration divine - quEssav sortirait de chez son pre avec lintention de le tromper et elle navait aucun doute quil ne mritait pas les bndictions. Aussi, conseilla-t-elle Yaakov de se couvrir les mains et le cou de vtements de fourrure, mais de parler de sa propre voix, la voix de Yaakov, afin de signifier son pre quEssav navait pas lintention de changer, et ce nest quextrieurement, hypocritement, quil cherchait ressembler son frre. Yaakov obit sa mre et fit ce quelle lui commanda - il avait confiance en elle, sinon il naurait pas os se prsenter de la sorte devant Yitshak son pre. La Torah nous informe queffectivement Yaakov, en entrant chez son pre, lui dit: Je suis Essav ton an (ibid. v. 19) et Rachi explique: Je suis moi, et Essav est ton an , pour exprimer quEssav est rest le mme et ne sest nullement amlior. Et alors Yitshak a senti quune odeur semblable lodeur du Jardin dEden tait entre avec Yaakov (Brchith Rabah 65:22), une odeur quYitshak avait dj sentie au moment du sacrifice lorsque son me lavait quitt pour aller au Ciel (Yalkout Chimoni Vayra 22:13), et il lui dit: Approche, que je te tte, mon fils . Yaakov approcha et Yitshak lui dit: La voix est la voix de Yaakov, et les mains sont les mains dEssav (ibid. v. 22), cest--dire: ces mains qui auraient d se battre contre le mauvais penchant sont restes les mains dEssav, mais ta voix est bonne, cest la voix de Yaakov (dautant plus que lodeur du Jardin dEden taccompagne). Ensuite, il est crit: Yitshak respira lodeur des vtements et le bnit . Il le bnit un moment de grce, car telle tait effectivement la volont de D., et les bndictions se ralisrent pour Yaakov. Lorsque Essav entra plus tard, Yitshak vit que lenfer tait ouvert sous ses pieds (Brchith Rabah 67:2), il eut trs peur, une frayeur extrme sempara de lui, et il bnit Yaakov une seconde fois, comme il est crit (ibid. v. 33): Aussi, il restera bni! tandis quil octroya Essav quelques bndictions, par charit, uniquement cause de ses pleurs et de ses cris. Essav, malgr ses capacits, malgr sa foi, na pas utilis ses qualits latentes pour faire le bien. Cest un enseignement et un avertissement pour tous ceux qui gaspillent leurs forces spirituelles et ne pensent pas en faire bon usage; ils doivent savoir que leur fin sera amre comme celle dEssav, malheureusement pour eux. Cela nous permet de conclure quEssav est appel juste titre le fils an parce quil possde, enfouies au fond de lui, des qualits. Mais ses mauvaises habitudes sont devenues chez lui une seconde nature, une partie intgrante de lui-mme. En fin de compte, ses aspirations aux plaisirs de ce monde ont pris le dessus et il tait incapable de les dominer, ce qui est bien dommage. Nous pouvons comprendre maintenant le sens des paroles du prophte (Malakhi 1:2): Je vous ai aims dit lEternel, et vous avez dit: En quoi nous as-Tu aims? Essav nest-il pas le frre de Yaakov? dit lEternel. Or Jai aim Yaakov mais Essav Je lai ha... Pourquoi cette haine? Cest que Mme au seuil de lenfer, les mchants ne regrettent rien (Yirouvin 19a). Essav se savait fautif, et cest en connaissance de cause quil a perdu les nombreuses occasions de mriter les bndictions de son pre et de gagner la vie ternelle. Il est de ceux qui agissent comme Zimri et exigent la rcompense de Pinhas (voir Sotah 22a). Il tait tellement dangereux quYitshak fut oblig de le sparer de Yaakov et partir de ce moment-l, Essav se mit har Yaakov, au point de dsirer le tuer (Brchith 27:41).

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Le fait est quil existe des hommes au double visage qui, dune part se rebellent sans cesse contre D. et profanent tout ce qui est sacr et, par ailleurs, se montrent bienveillants envers les autres et peuvent mme tre pratiquants. Etant donn quils font parfois le bien, nous risquons dtre leurrs, dtre tromps par leur conduite, et mme dtre influencs par eux, pensant quils sont bien intentionns. De mme quYitshak a spar Yaakov dEssav, nous aussi, nous devons nous loigner le plus possible de ces gens qui agissent comme Zimri et exigent la rcompense de Pinhas . Nous devons les laisser loin derrire nous pour nous consacrer de toutes nos forces une vie sanctifie par lobservance de la Torah, selon la volont de D. Les bienfaits de ce monde et de lautre couronneront nos efforts. Amen! Quil en soit ainsi! La voie suivre Nous devons nous loigner des gens dont les actes sont mensongers et les paroles vaines, et nous rapprocher de D., obir Sa volont. Alors la russite nous est assure dans ce monde et dans lautre.

Lorgueil exclut lhomme du monde


Il arriva, comme Yitshak tait devenu vieux, que sa vue sobscurcit. Un jour il appela Essav, son fils an, et lui dit: Mon fils! Il rpondit: Me voici! Yitshak reprit: Vois, je suis devenu vieux, je ne connais point lheure de ma mort (Brchith 27:1-3). Rachi rapporte le Midrach (Brchith Rabah 65:7): Rabbi Yochoua ben Korha dit: lorsque quelquun approche de lge quavaient ses parents leur mort, quil sinquite cinq ans avant et cinq ans aprs. Yitshak avait cent vingt-trois ans et il se dit: Japproche de lge de ma mre qui avait cent vingt-sept ans lorsquelle est morte, et jai quatre ans de moins, cest pourquoi il dit: Je ne sais pas quand je vais mourir, peut-tre lge de ma mre, peut-tre lge de mon pre . 1. Si Yitshak voyait arriver la fin de ses jours lge de ses parents, pourquoi a-t-il voulu bnir son fils an justement ce moment-l, et pourquoi na-t-il pas eu le dsir de bnir aussi son fils Yaakov qui passait moins de temps chez lui puisquil tudiait dans les maisons dtude de Chem et Ever (Brchith Rabah 63:15)? Pourquoi Yitshak neut-il pas le dsir de bnir aussi son fils Yaakov? 2. Nous savons (Yalkout Chimoni Toledoth 114; Pirkey DRabbi Elizer 32) que les bndictions furent prononces la nuit de Pessah, la Nuit Prdestine (Chemoth 12:42), une nuit o les Juifs sont protgs contre tous les dangers (Pessahim 109b). Puisque Yitshak avait dcid de bnir Essav, pourquoi a-t-il choisi de le faire justement la nuit de Pessah, la Nuit Privilgie pour les Juifs mais non pour les autres peuples? Pourquoi na-t-il pas attendu un autre moment pour le bnir? Avant de rpondre, il faut expliquer le fondement du repentir et des bonnes actions. Nous savons que selon les voies de D., si un homme faute et se rend coupable de transgressions, mme passibles de la peine de mort, D. ne le punit pas tout de suite. Au contraire, Il attend et espre que cet homme va regretter et rparer ses fautes, afin de le faire vivre comme il est crit (Yhezkiel 33:11): Je ne souhaite pas la mort du mchant, mais Je veux quil renonce ses mauvaises actions et quil vive . Parfois D. lui fait subir des souffrances afin de lveiller au repentir, car Les souffrances absolvent toutes les transgressions de lhomme (Brachoth 5a; Zohar III, 57b). D. frappe les mchants afin quils regrettent leurs fautes et Il les poursuit afin de les faire revenir Lui. Les douleurs qui purgent le corps de lhomme et le ramnent sur le bon et droit chemin sont un des moyens que D. utilise dans ce but. Lorsquun homme faute, mme trs gravement, mais quil pratique tout de mme ne serait-ce quun seul commandement quil excute avec prcision et diligence sans faillir, ce commandement peut lveiller et le sauver de ses mauvaises tendances dans dautres domaines aussi. Dautant plus que le commandement quil pratique le protge et le sauve (Sotah 21a). Puisquil parvient dominer son mauvais penchant dans la pratique dun commandement, cela prouve quil a la capacit de se corriger mais il a parfois besoin dune aide extrieure afin dtre soustrait lemprise de son mauvais penchant. Le rle de lhomme vertueux est de venir en aide au coupable en remplissant son cur de foi et de confiance en D., dans le sens o il est dit: Le Juste vit de sa foi (Habakouk 2:4), et il fait vivre les autres par sa foi en D. Il explique au coupable que la terre et tout ce quelle contient appartiennent D. (Thilim 24:1) et que D. prive lun et comble lautre, quIl est la cause de tout ce qui est, quil ny a pas dautre dieu que Lui, Il est Un et Son Nom est Un, et Il remplit fidlement toutes Ses promesses... Lhomme vertueux a la possibilit de draciner lorgueil, la jalousie et la haine qui obstruent le cur des fautifs, afin de les dlivrer de leur

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soumission au mauvais penchant, de les dtacher des vanits de ce monde, et de les amener accepter le joug du royaume de D. Cela nous permet de comprendre le cas dEssav. Dune part il commet les transgressions les plus svres, comme la ngation de la rsurrection des morts (Pessikta Rabah 12:4), lidoltrie, les relations interdites, le meurtre, et toutes sortes de crimes. Pourtant, il pratiquait avec ferveur un commandement, celui dhonorer son pre et sa mre (il a peut-tre hrit cela de son pre Yitshak, de qui il est dit (Tana DBey Eliyahou 26) que cest par respect pour son pre quil sest donn en sacrifice comme une brebis). Essav sefforce de pratiquer ce commandement de toutes ses forces, par tous les moyens et dans les moindres dtails, au point que les vtements tant convoits de Nimrod (Brchith Rabah 65:12; Tanhouma Toledoth 3; Pirkey DRabbi Elizer 24), sont les vtements prcieux quEssav portait lorsquil servait son pre. Essav, lorsquil servait son pre, ne portait en son honneur que des vtements royaux (Brchith Rabah 65:12). Mme lorsquil essayait dinduire son pre en erreur et de lui faire croire quil tudiait la Torah et agissait correctement, il est possible que son intention nait pas t de le tromper, mais de lui pargner la peine de penser que son fils ne suivait pas son exemple. Essav devait bien se douter quYitshak, qui possdait linspiration divine, connaissait ses tromperies et ses mensonges, mais il pensait tout de mme faire ainsi plaisir son pre. Ctait aussi dans ce but quEssav prit pour femme une des filles dIchmal, comme il est crit (Brchith 28:9): Alors Essav alla vers Ichmal et prit pour femme Mahalath, fille dIchmal fils dAvraham, sur de Nevayot, en plus de ses premires femmes . Nous savons aussi quEssav navait pas lintention de se venger de Yaakov et de le tuer du vivant de son pre, comme il est crit (ibid. 27:41): Le temps du deuil de mon pre approche et aprs, je tuerai Yaakov, mon frre . Et cela aussi, pour ne pas dshonorer son pre et sa mre. Nous savons que le respect des parents (qui est lun des dix commandements) est un principe de base de la Torah et que sa rcompense est grande (Chemoth 20:12). Lorsque Rabbi Tarfon est tomb malade, les Sages sont venus le visiter. Sa mre leur dit quil devrait tre en bonne sant du fait quil lui exprimait beaucoup de marques dhonneur. Ils lui demandrent: En quoi? Et le Talmud rapporte tout ce que Rabbi Tarfon faisait en lhonneur de sa mre. Les Sages lui rpondirent: Malgr tout ce quil fait, il na pas encore accompli la moiti de son devoir tel quil est exig par la Torah (Kidouchin 31b), ce qui montre combien ce commandement est difficile. De mme, dans notre cas, Yitshak voyait quEssav pratiquait le commandement dhonorer ses parents propos duquel il est dit: afin que tu parviennes au bonheur dans le monde qui nest que bonheur et que tu prolonges tes jours dans le monde qui est ternel (voir Houlin 132a). Il pensait quil suffirait de lencourager afin de lamener un repentir complet de toutes ses fautes, justement parce quil pratiquait ce commandement avec une grande application. Cest pour cette raison quil lui rappela le jour de sa mort, car telle est la voie de la nature, lanimal est destin tre gorg avant dtre consomm et lhomme est destin mourir (Brachoth 17a). Lhomme doit sy prparer et corriger ses fautes. Yitshak voulait surtout signifier Essav quil navait aucun intrt har son frre Yaakov. Comment? Justement en le bnissant la nuit de Pessah, cette nuit qui protge de tous les dangers, cette nuit o les Juifs seront sauvs de lemprise du cruel Pharaon, le plus grand des tyrans, par les dix plaies que D. envoya en punition du mal quil fit aux Juifs car quiconque fait du mal aux Juifs porte atteinte, pour ainsi dire, la prunelle des yeux de D. (Guitin 57a; Bamidbar Rabah 20:6) et D. Se venge de lui. Essav na donc aucun intrt lutter contre Yaakov et le har, puisque Yaakov, ainsi que sa descendance aprs lui, sont unis D. et cest en eux que se ralisent toutes les promesses de D. Cest la descendance de Yaakov qui hrite de la terre dIsral, car lalliance dAvraham, appele lalliance entre les morceaux fut contracte avec eux, et cette occasion il est dit (Brchith 15:14): La nation qui les asservira sera juge et ils la quitteront avec de grandes richesses . Il est dans lintrt dEssav de faire la paix avec son frre, puisquil a la preuve que cest uniquement grce au mrite de Yaakov que lui, Essav, reoit maintenant les bndictions, en cette nuit de Pessah. Si Essav avait effectivement conclu une paix dfinitive avec son frre, il ny aurait pas eu de bndiction plus grande que celle-l pour Yaakov, qui aurait pu vivre en paix avec Essav son frre et soccuper de Torah sans devoir lutter sans cesse et souffrir. Yitshak fit beaucoup defforts pour ramener Essav dans le bon chemin, car les Portes du Repentir sont toujours ouvertes (Ekhah Rabah 3). Le meilleur exemple est donn par le roi Mnach dont les Sages

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disent (Sanhdrin 102b): Il sappelle Mnach parce quil a abandonn, oubli (nech) D. ; dautres disent parce quil a incit le peuple oublier D. . Personne navait commis de fautes plus graves que celles de Mnach, il a mme tu son grand-pre, le prophte Ichaya, effac de la Torah les Noms de D. et dtruit lautel des sacrifices (Ybamoth 49b; Sanhdrin 103b). Malgr tout, il sest repenti cause des souffrances qui laffligeaient (Sanhdrin 101b): Mnach, fils de Hizkya, ne sest repenti que harcel par les douleurs , et D. lui fit une sorte de cache dans le Ciel (Sanhdrin 103a) et Il lui creusa un refuge sous le Trne divin (Ruth Rabah 5:6) ce qui montre que son repentir sincre fut agr bien quil nait accompli aucune bonne action. Mnach est la preuve que D. accepte ceux qui se repentent (Tanhouma Nasso 28). A plus forte raison, si Essav qui pratiquait le commandement si important du respect des parents, avait t bni la nuit de Pessah, il est certain, pensait Yitshak, que cela laurait aid regretter toutes ses autres transgressions et vivre en paix avec Yaakov son frre. Et pourtant, les promesses dYitshak nont servi rien. Essav tait trop orgueilleux pour se repentir et ce trait dtestable constituait une barrire. Il nacceptait pas que Yaakov ft le premier et que lui, Essav, bnficit du mrite de son frre. Par orgueil, il choisit le mal, jusqu ce quil ft chass de devant D. comme il est crit (Michley 16:5): LEternel a en horreur tout homme au cur hautain . On sait que D. et lhomme orgueilleux ne peuvent pas coexister (Sotah 5a; Arachin 15b) et que La jalousie, les envies, la recherche des honneurs excluent lhomme du monde (Pirkey Avoth IV:21), cest pourquoi Essav na mme pas dsir corriger ses fautes. Yrouvam ben Navat fautait et incitait beaucoup dautres fauter. Les Sages racontent son sujet des choses stupfiantes (Sanhdrin 102a). Il rva que D. Lui-mme Se rvlait lui, le saisissait par le vtement, et lui disait: Si tu te corriges, Moi, toi, et le fils de Icha (David) nous nous promnerons ensemble dans le Jardin dEden . Yrouvam demanda: Qui marchera en tte? D. lui dit: Le fils de Icha ira le premier . A quoi Yrouvam rpondit: Sil en est ainsi, je refuse . Cest surprenant! D. est prt pardonner Yrouvam ben Navat toutes les fautes commises au long de sa vie. Il avait refus de se tenir debout dans la cour du Temple alors que seul un roi de Jude a la permission de sy asseoir comme la loi le stipule (Yoma 25a): Seuls les rois de la ligne de David ont le droit de sasseoir dans la cour du Temple, et non les rois dIsral (lorsque la royaut fut divise) . Son rejet de la loi fut le dbut de la dchance, car il fut le premier roi lavoir transgresse (Sanhdrin 102b). Il avait construit deux temples, et cest par orgueil quil refusait de se tenir debout. Non seulement il a faut lui-mme mais il a caus des dissensions entre Isral et D. (ibid. 101b). Malgr tout, D. lui est apparu en songe, lui offrant de renoncer ses fautes et de se repentir afin dtre pardonn, mais il tait tellement orgueilleux que, mme en rve, il refusa cette offre. A plus forte raison, si D. lui avait fait une telle proposition ltat de veille, il laurait refuse. Il prfrait renoncer au Monde Venir plutt que dtre au second rang et soumis au fils dIcha. Son orgeuil le perdit. Pourtant, les Sages tmoignent son gard (Sanhdrin 102a): Sa Torah tait sans faille, il en donna des explications inconnues jusqualors; le sens des commandements de la Torah tait clair pour lui, il exposait la loi des Kohanim de cent trois faons diffrentes , et cest pourquoi D. dsirait quil choist le droit chemin. Il navait pas lhumilit du roi David, et il senorgueillit au point den perdre le sens commun car il ne ressentait aucune crainte devant le Roi des rois. Cest ce que les Sages disent (Yirouvin 19a): Les mchants, mme au seuil de lenfer, ne se repentent pas de leurs fautes , et il est dit de Yrouvam (Roch HaChanah 17a) que lui et ses semblables tombent en enfer et y reoivent une punition ternelle . Tout cela cause de leur orgueil. Il en est de mme pour Essav. Lorsquil apprit que toutes les bndictions quil allait recevoir de son pre durant la nuit de Pessah ne lui seraient donnes que grce au mrite de Yaakov, son frre, quil hassait, Essav se dit: Je vais aller prparer pour mon pre les plats quil aime et je vais recueillir les bndictions sans tre oblig de me repentir de mes fautes. Et puis je tuerai Yaakov mon frre et alors toutes les bndictions quil aurait d recevoir dans cette nuit de Pessah me reviendront moi seul. Son orgueil, ainsi que sa haine envers Yaakov, lavaient rendu ce point insens. Rabbi Chimon Bar Yoha dit (Sifri Behaaloteha 9:10): Cest une loi connue: Essav hait Yaakov , ce qui lempche de se repentir malgr la gravit de ses fautes et la punition quil encourt. Rivka perut les penses secrtes dEssav. Elle dit Yaakov, son jeune fils, quEssav lan ne dsirait pas changer mais uniquement sapproprier les bndictions . Il convient que tu les reoives; toi, tu mrites ces bndictions de la nuit de Pessah, elles te reviennent juste titre , dit-elle.

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Yaakov tout dabord craignait dentrer chez son pre pour recevoir les bndictions, car Essav est un homme velu, et moi jai la peau lisse (Brchith 27:11). Il avait peur dtre maudit; ainsi au lieu dune bndiction, cest une maldiction que jaurai attire sur moi (ibid. verset 12). Mais sa mre lui fit une promesse: Je prends sur moi ta maldiction, mon fils. Obis seulement ma voix et va me chercher ce que jai dit (verset 13). Yaakov entra chez son pre, et lodeur du Jardin dEden pntra avec lui (Brchith Rabah 65:18). Yitshak sut immdiatement qui tait entr. En effet, il dit explicitement: La voix est la voix de Yaakov et les mains sont les mains dEssav , et de plus lorsque Yaakov dit lEternel ton D. ma donn bonne chance (verset 20), Yitshak pensa: Essav na pas lhabitude dinvoquer le Nom de D. (Brchith Rabah 65:19), mais chez Yaakov, cest une chose naturelle. Et alors Yitshak accorda Yaakov les bndictions qui lui revenaient. Ceux qui ne sont pas ses descendants ne les mritent pas pour avoir refus le repentir. Comment, en fait, Yitshak savait-il quEssav refusait de se repentir de sa mauvaise conduite? Il semble quYitshak le comprit du fait mme que Yaakov tait entr chez lui pour recevoir les bndictions. Rivka la prophtesse et Yaakov le Juste nont discern chez Essav aucun sentiment de regret qui aurait pu indiquer son repentir. Essav apporta son pre du gibier vol comme il est dit dans la traduction de Yonathan (Brchith 27:31): Essav na pas trouv danimal pur chasser, mais il rencontra un chien quil tua et apporta son pre . Essav naurait-il pas pu avouer son pre quil navait pas trouv de gibier, ce quYitshak lui aurait sans aucun doute pardonn? Mais, en entrant chez son pre, lenfer laccompagnait et tait ouvert sous ses pieds (Brchith Rabah 65:18), et il sadressa son pre avec audace: que mon pre se lve et mange (Brchith 27:31). Pour navoir pas voulu changer, il est tomb de plus en plus bas. Le verset indique quEssav a faut en refusant de se soumettre Yaakov et de se conduire humblement. Lorsquil apprit que Yaakov avait reu les bndictions, grce son subterfuge, il pleura devant son pre et sexclama: Ne possdes-tu quune seule bndiction, mon pre? Mon pre! Bnis-moi aussi mon pre! (verset 38). Pourquoi na-t-il pas dit plus simplement: Bnis-moi aussi ? Cest quEssav a dit son pre: pourquoi ne veux-tu me donner quune partie des bndictions de Yaakov lie la nuit de Pessah, pourquoi ne me donnes-tu pas une bndiction toi? Je ne veux pas dpendre de Yaakov, et mme si cause de mes fautes je ne mrite pas dtre bni, aie piti de moi comme un pre a de la compassion pour ses enfants et donne-moi une bndiction qui ne sapplique pas Yaakov, afin que je ne sois pas dpendant de lui. Il ma tromp deux reprises, il ma ravi le droit danesse, et maintenant mes bndictions (ibid. verset 36). Et alors, effectivement, Yitshak la bni, lui disant: Tu vivras la pointe de ton pe (ibid. v. 40). Pourquoi justement une bndiction aussi dshonorante? Cest quYitshak qui avait vu que lenfer tait ouvert sous ses pieds comprit quEssav ne regrettait rien et que Yaakov avait bien agi en lempchant de recevoir les bndictions, et il ajouta: Yaakov restera bni (verset 33), car il avait vu que les bndictions se raliseraient en lui. De plus, il avait remarqu quEssav lui avait apport du gibier vol, et il tremblait la pense quil ny avait aucun espoir quEssav se repente de ses fautes. Combien tout cela est stupfiant. Lhomme trouve de nombreuses occasions de se corriger, dautant plus que toutes les portes et toutes les voies lui sont ouvertes. Il pourrait acqurir le monde Venir en un instant. Mais lhomme se prive lui-mme de tous les bienfaits et de toutes les bndictions quil aurait pu recevoir, parce quil a honte davouer ses fautes devant son prochain, son orgueil lempche de demander pardon son prochain, ou de se soumettre un autre. Il est alors priv de la possibilit de se repentir, comme Yrouvam ben Navat qui D. a ouvert la voie du repentir, et Essav qui Yitshak a offert la possibilit de se corriger. Ils ont, lun comme lautre, repouss cette offre par orgueil, Yrouvam en refusant que le roi David marche en tte, et Essav en refusant que Yaakov soit le premier. Lorsque quelquun faute et transgresse un commandement explicite de la Torah, il est de ceux dont la Torah dit (Devarim 27:26): Maudit celui qui ntablit pas ce qui est dit dans la prsente Loi et ne le met pas en pratique . Celui qui ne regrette pas une transgression commise, senorgueillit face D. en ce quil se proclame dispens de Lui obir, et il est maudit . Il est essentiel de briser lorgueil, il faut se rendre compte que LEternel est Roi, Il est revtu de Grandeur (Thilim 93:1). Le vtement de la grandeur ne sied qu D. et il ne convient pas lhomme de sen revtir. Lorsque lhomme brise son orgueil et son go, il se ceint ncessairement dhumilit et il peut servir D. sincrement et honntement, avec crainte et sans rserve.

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Pahad David Repens-toi un jour avant de mourir

Il arriva, comme Yitshak tait devenu vieux, que sa vue sobscurcit; un jour il appela Essav, son fils an, et lui dit... Vois, je suis devenu vieux, je ne connais point lheure de ma mort... (Brchith 27:1-3). Pourquoi Yitshak devait-il rappeler le jour de sa mort? Ne lui aurait-il pas suffi de dire Essav: prpare moi un plat comme je laime, sers-le moi, afin que je te bnisse sans mentionner le jour de sa mort? Quel est le sens de ce rappel? Pourquoi Yitshak dsire-t-il bnir un fils aussi mchant, qui a caus sa ccit cause de lencens des crmonies idoltres que les pouses dEssav pratiquaient (Tanhouma Toledoth 8)? De plus, il est certain quYitshak connaissait les transgressions et la mauvaise conduite dEssav. Pourquoi veut-il bnir Essav, son fils indigne? Il faut croire quYitshak dsire corriger Essav de ses fautes en lui rappelant le jour de la mort (Brachoth 5a) car cette pense permet de vaincre le mauvais penchant. Yitshak savait quEssav dsirait ces bndictions. Effectivement, il scria: Ne mas-tu pas rserv une bndiction? (Brchith 27:36), et il dit son pre: Ne possdes-tu quune seule bndiction, mon pre? (ibid. v. 38). Yitshak pensait quen allant aux champs chasser du gibier pour lui, Essav rflchirait sur sa conduite et se repentirait, quil considrerait le jour de la mort, ce qui lui permettrait de mriter les bndictions bon droit et non pas de les recevoir comme une faveur. Mais Essav niait la rsurrection des morts (Pessikta Rabah 12:4), il ne croyait pas en une punition aprs la mort. Il na donc pas mdit le sens de la mort, il pensait prfrable et plus sens de profiter de linstant prsent et de jouir des plaisirs de ce monde, et il navait aucune raison de se repentir. Cest pourquoi il est rest malfaisant durant toute sa vie. En fin de compte il neut pas le mrite de recevoir les bndictions dYitshak. Rivka, qui possdait le don de prophtie, savait que son fils Essav ne croyait pas en une rtribution aprs la mort - lenfer pour les pcheurs, et la vie ternelle pour les hommes vertueux - et elle envoya Yaakov recevoir les bndictions. Si Essav renie la vie ternelle, il ne mrite pas les bndictions dYitshak. Les Sages nous ont dj avertis: Celui qui dit: je vais fauter et me repentir, fauter nouveau et me repentir nouveau, na plus la possibilit de se repentir (Yoma 88b; Tana DBey Eliyahou Rabah 6). Seul Yaakov mrite les bndictions de son pre. Celui qui se repent sincrement mrite dtre bni et rcompens de tous les bienfaits rservs aux Justes dans le monde Venir.

La voix est la voix de Yaakov et les mains sont les mains dEssav
Et Rivka prit les plus beaux vtements dEssav son fils an, qui se trouvaient sous sa main dans la maison, et elle en revtit Yaakov son plus jeune fils (Brchith 27:15). Chacun peut comprendre quelle a agi de la sorte parce que Yaakov avait peur, comme il dit (ibid. v. 12): Si par hasard mon pre me tte, je passerai ses yeux pour un trompeur... car Yaakov avait la peau lisse et Essav tait un homme velu. Sa mre lhabilla dune peau de fourrure, pour le faire ressembler Essav. 1. Pourquoi Yaakov craignait-il que son pre ne le tte, alors quil ne craignait pas quYitshak reconnaisse sa voix, diffrente de celle dEssav. Effectivement Yitshak constata: La voix est la voix de Yaakov (ibid. v. 22). Pourquoi na-t-il pas essay de changer sa voix lorsquil se prsenta devant son pre? 2. Quoi quil en soit, comment se fait-il quYitshak, en disant la voix est la voix de Yaakov, les mains sont les mains dEssav , nait pas compris que Yaakov le trompait? Cest que Yaakov ne craignait pas quYitshak ne reconnaisse sa voix, car souvent Essav imitait la voix et les intonations de Yaakov lorsquil se trouvait auprs de son pre. Ctait une de ses nombreuses tromperies pour cacher sa brutalit et se faire passer pour un homme aussi vertueux que Yaakov. Il agissait ainsi (sous le couvert de la voix de Yaakov et son dtriment) pour se faire aimer dYitshak. Il est possible que ce soit le sens du verset (ibid. 25:28): Yitshak aimait Essav car il lui apportait du gibier... non pas quYitshak laimait vraiment, mais parce quEssav rusait pour gagner sa prfrence.

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Pour cette raison, Yaakov ne craignait pas de parler avec sa propre voix, quYitshak avait lhabitude dentendre mme dans la bouche dEssav. Par contre, Yaakov craignait quYitshak ne le reconnt au toucher et ne se mt en colre. Cest pourquoi il se revtit de vtements de fourrure pour se prsenter devant son pre. Tout dabord, Yitshak ne fut pas tonn par la voix de Yaakov, quil avait lhabitude dentendre. Mais lorsque Yaakov dit: LEternel ton D. ma donn bonne chance (ibid. 27:20) il fut surpris dentendre la mention du Nom de D. quEssav navait pas lhabitude dinvoquer (Brchith Rabah 65:19). Yitshak sest rendu compte que ce ntait pas Essav mais bien Yaakov qui tait devant lui. Et alors, il lui dit: Approchetoi, que je te tte, mon fils, pour savoir si tu es mon fils Essav ou non (verset 21), et il constata: La voix est la voix de Yaakov et les mains sont les mains dEssav , il invoque peut-tre le Nom de D. comme Yaakov... mais les mains sont les mains dEssav. Et cest alors quil le bnit de toutes les bndictions. Cette hypothse est confirme par le Ramban qui, propos du verset: Si par hasard mon pre me tte... (ibid. 27:12) crit: il est possible dimiter la voix dun autre . Yitshak navait pas reconnu Yaakov parce que ses mains taient velues, mais il avait des soupons, et les Sages disent (Brchith Rabah 65:18, Zohar I, 147a): Lorsque Yaakov entra chez Yitshak, lodeur du Jardin dEden laccompagnait . Les vtements dEssav taient imprgns de lodeur de ses fautes et de ses pchs... tandis que les vtements de Yaakov avaient lodeur du Jardin dEden et Yitshak sexclama (ibid. 27:27): Voyez! lodeur de mon fils est pareille lodeur dun champ bni par lEternel! . Non seulement ses vtements, mais les plats quil servit avaient une odeur divine, comme le disent les Sages (Brchith Rabah 67:3) propos du verset Jai mang de tout avant ton arrive (Brchith 27:33): Jai got toutes les dlices rserves pour lautre monde . Lorsque Yitshak se rendit compte du subterfuge et quil ralisa que ctait Yaakov qui se trouvait devant lui, il en fut trs heureux, car il comprit que dornavant cest lui qui mritait de recevoir toutes les bndictions, et de plus: Il restera bni! (verset 33). Sa joie fut si grande que non seulement il na pas retir ses bndictions, mais les a confirmes. Nous savons (Orah Hayim 240:14; Rambam Halakhoth Dot 4:19) que quiconque a une mission de sperme inutile ou qui abuse de relations sexuelles a une mauvaise odeur corporelle, et cela entache aussi son me. Pourtant ici, nous voyons que Yaakov avait une bonne odeur, semblable celle dun champ bni par D., et effectivement les Sages disent de lui (Ybamoth 76a; Brchith Rabah 79:1) que de sa vie il neut pas dmission inutile , comme il est crit (Brchith 49:3): Rouven, tu fus mon premier-n, ma force et les prmices de ma vigueur . Il faut rappeler que Yaakov avait dj soixante-trois ans lorsquil reut solennellement les bndictions dYitshak (Mguilah 17a), et pourtant il manait toujours de lui, de son corps, de son esprit et de son me, une bonne odeur. Ce rcit fait allusion la Torah et aux qualits quelle requiert dun homme. La voix de Yaakov est la voix de la Torah, et la bonne odeur qui mane de lui provient de ses vertus. Mais il ne faut pas croire quil suffise dtudier la Torah dans une Ychivah pour tre quitte de ses obligations envers D. et envers soimme. Le but essentiel de ltude est lacquisition de vertus, car la bonne conduite prcde lacquisition de la Torah (Vayikra Rabah 9:3). Il faut se pntrer des valeurs morales qui sont comme le parfum de la Torah, et alors la voix de Yaakov est effectivement la voix de la Torah, pure et agrable comme lodeur dun champ bni qui remplit le corps, lesprit, et lme. Ceci nous permet de comprendre autre chose. Il est crit (Brchith 25:28): Rivka aimait Yaakov . Cela demande une explication. Essav nest-il pas aussi son fils? Nest-il pas tonnant quelle naime que Yaakov? Yaakov est suprieur Essav, puisque la voix est la voix de Yaakov et les mains sont les mains dEssav , et donc il est naturel quil soit le prfr. Rivka a bien tent de corriger Essav, puisqu la fin de notre section, il est crit (Brchith 28:2): Rivka, la mre de Yaakov et dEssav . Ne savons-nous pas dj quelle est leur mre et quelle les a enfants tous les deux? Il faut noter que Rachi dit au sujet de ce verset: Je ne sais pas ce que la Torah veut nous enseigner par l . Faut-il croire que Rachi ne savait pas comment expliquer le sens de ce verset, ou bien quil a voulu, dans sa grande modestie, laisser dautres moins connus que lui la possibilit de lexpliquer?

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Il est possible que la Torah veuille laisser entendre que Rivka avait plus damour pour Yaakov que pour Essav, mais quelle aimait aussi Essav malgr ses dfauts, et srement, elle ressentait envers lui la misricorde dune mre envers son fils. Nous avons une preuve flagrante de lamour de Rivka lorsquelle dit Yaakov qui sapprtait aller Haran (ibid. 27:45): Pourquoi perdre deux fils en un seul jour? Si chacun attaque lautre et le tue, cela me causera une double douleur. Si lon voulait supposer que Rivka naimait que Yaakov et ne craignait que pour lui, que lui importe que Yaakov tue Essav? Et donc la Torah nous dit: La mre de Yaakov et dEssav pour signifier que, tout en prfrant Yaakov, elle a aussi enfant Essav et elle ressent pour lui aussi laffection dune mre, car il est dans la nature des parents davoir de la compassion envers leurs enfants mme sils sont mchants et malfaiteurs, et cest pourquoi elle craignait de perdre ses deux fils en un seul jour. Il est possible aussi que si Rivka avait eu encore plus damour et de compassion envers Essav, il aurait pu corriger sa mauvaise conduite. Il faut supposer quelle avait tent de le corriger et quelle dsirait le voir changer, mais constatant quelle navait pas russi et que la voix est la voix de Yaakov et les mains sont les mains dEssav , elle a loign Yaakov de son frre afin quil ne subt pas sa mauvaise influence. Quelle est la bonne conduite? La voix est la voix de Yaakov, cest--dire de la Torah, et la bonne odeur reprsente les vertus. Il ne suffit pas dapprendre la Torah, mme en Ychivah, mais il faut aussi acqurir des qualits morales, car la bonne conduite prcde la connaissance de la Torah.

Yaakov sera le chef de ses frres, Essav vivra la pointe de lpe


Nous avons dj expliqu la bndiction dYitshak ses fils Yaakov et Essav, mais nos matres et nos pres nont pas puis les points de vue possibles, et il nous ont laiss le mrite dajouter un nouvel clairage. 1. Pourquoi Yitshak veut-il bnir Essav, alors quen fait cest Yaakov qui mrite les bndictions? Dautant plus quYitshak dit (ibid. 27:2): Je ne sais pas quand je vais mourir , et cest peut-tre la dernire occasion de le faire quil me reste. Naurait-il pas d bnir Yaakov en cette occasion, et non Essav? 2. Pourquoi Yitshak voulait-il octroyer cette bndiction loccasion dun repas son got, puisquil tait devenu vieux, que sa vue stait affaiblie, et quil ne pouvait donc pas apprcier un tel repas? Quel est le sens de lexpression mon got ? 3. Nous avons dj demand plusieurs fois pourquoi Yitshak envoya Essav la chasse? Ny avait-t-il pas de quoi manger dans sa maison? Sil dsire bnir Essav, pourquoi Rivka intervient-elle en faveur de Yaakov? Lorsque Yaakov se prsente devant son pre, pourquoi ne change-t-il pas sa voix, afin quYitshak ne se fche pas contre lui? Aprs avoir bni Yaakov, pourquoi Yitshak dit-il Essav: Ton frre a us de ruse (ibid. v. 35), ce qui va attiser la haine dEssav envers Yaakov, tel point quil voudra le tuer? 4. Il est crit: Ton frre a us de ruse , et Onkelos traduit le mot ruse par intelligence . De quelle sorte dintelligence est-il question, demande le Rabbin Rabinovitch au nom de son pre? 5. Lorsque Essav dcouvrit la chose, il scria douloureusement: Ne possdes-tu quune seule bndiction mon pre? Mon pre, bnis-moi aussi! (ibid. verset 38). Mme si Essav avait eu droit aux bndictions, il tait un voleur et un usurpateur, et en quoi donc les bndictions peuvent-elles lui profiter, et pourquoi en a-t-il besoin? Pourquoi entre autre, dit-il nas-tu quune seule bndiction, mon pre? Yitshak na-t-il vraiment quune seule bndiction donner, quil doive en crer une spcialement pour Essav, ce qui signifierait que la plainte dEssav serait justifie? Nous allons rpondre clairement toutes ces questions. Yitshak voulait bnir Essav justement durant la nuit privilgie de Pessah qui appartient Yaakov et ses descendants (Pirkey DRabbi Elizer 32), afin de faire la paix entre Yaakov et Essav et viter toute guerre entre eux, puisque cest cette nuit-l que les Enfants dIsral sortiront dEgypte, et pour que lexil en terre dEdom ne soit pas trop pnible pour les Juifs. Le Talmud (Mguilah 6a) souligne quYitshak et Yaakov ont tous deux pri pour que lexil en terre dEdom ne soit pas trop cruel. Cest la raison pour laquelle Yitshak voulait bnir Essav justement cette nuit-l, une nuit protge. Bien quil st que les bndictions dAvraham seraient transmises aux

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descendants de Yaakov que D. avait choisis pour tre Siens, Yitshak dsirait quEssav ait une part de ces bndictions afin que les descendants de Yaakov ne souffrent pas de ses cruauts. Yitshak a agi de la sorte parce quil connaissait bien les vertus de Yaakov. Essav consentit tout dabord (apparemment) partager les bndictions de cette nuit sainte et bnficier du mrite de Yaakov et de ses descendants. Mais en fait, il cachait son pre et son frre le fond de son cur. Il navait pas lintention de renoncer sa haine envers Yaakov, et il pensait le priver des bndictions. Il navait aucune intention de partager le destin de Yaakov, mais il cachait ses vraies penses. Cela nous permet de comprendre quYitshak demanda Essav de ne pas lui apporter de gibier vol mais seulement le produit de sa chasse (Brchith Rabah 65:8). Ctait lavertir de ne pas voler Yaakov les bndictions qui lui revenaient grce sa fidlit la Torah. Mais Essav avait dans le cur dautres penses. En temps de paix comme en temps de guerre, il se battrait contre lui pour lliminer. Cest pourquoi Yitshak voulait le bnir justement au moment dun repas, malgr son vieil ge qui lui tait tout apptit. Il voulait que les bndictions donnes sur une nourriture permise et non vole encouragent Essav se corriger. Mais Rivka savait quEssav ne dsirait pas vivre en paix avec Yaakov, que la haine dEssav envers Yaakov tait incorrigible, et quil allait apporter son pre du gibier vol (Brchith Rabah 65:10) dans lintention perverse de nuire Yaakov et de tromper son pre, car il ne voulait pas partager le sort de Yaakov et de ses descendants. Mais Yitshak ne perdait pas lespoir quEssav se corrigerait, puisque D. a dou les tres humains, mmes ceux qui sont mchants, du libre arbitre, comme il est dit Tu choisiras la vie (Devarim 30:19). Si D. devait faire mourir les hommes prmaturment, ce serait les priver du temps ncessaire lexercice de leur libre arbitre. Yitshak avait tent de faire comprendre Essav que Yaakov tait parfait parce quil avait choisi le bien et quil fuyait le mal. Toi aussi, tu peux abandonner le mal et choisir le bien, ne pas voler du gibier, ne pas har Yaakov, transformer ta haine en amour. Tu mriteras alors ta part de toutes les bndictions de Yaakov. Par contre, Rivka savait sans lombre dun doute quil ny avait aucun amour possible entre Essav et Yaakov et quEssav ne samliorerait en aucune faon. Prophtiquement, elle vit que la haine dEssav envers Yaakov persisterait, quelles que soient les circonstances. Lorsque Yaakov vint recevoir les bndictions, il ne transforma pas sa voix, afin de dmontrer Yitshak que mme lorsque la voix de Yaakov est une voix pacifique, les mains dEssav sont agressives. Et donc - tel est largument de Yaakov - il na pas lintention de partager avec Essav les bndictions. Lorsque la Torah se fait entendre dans le monde, la paix rgne et la domination dEssav disparat, mais lorsque la Torah est oublie, ce sont les mains dEssav qui dominent (Brchith Rabah 65:16). Lorsque Essav arriva portant le plat quil avait prpar afin de mriter les bndictions en cette sainte nuit de Pessah, Yitshak lui dit: ton frre ta supplant et il a pris ta bndiction (ibid. verset 35). De mme que toi tu as voulu le tromper et profiter de ses bndictions tout en continuant le har et en refusant de faire la paix avec lui (et la preuve en est que tu mapportes du gibier vol), de mme, mesure pour mesure, Yaakov te rend la pareille et il a pris ta bndiction par ruse , cest--dire avec lintelligence de la Torah (Brchith Rabah 67:4, Targoum). Il ne dsire partager avec toi ni le pouvoir ni le mrite de sa Torah, et tu ne pourras pas le dominer. Tu auras le dessus uniquement sil abandonne la Torah et donc, il restera bni (ibid. verset 33). Je confirme ses bndictions, car il ne convient pas que vous viviez ensemble, puisque tu nas pas lintention de tamliorer. Cet pisode est entirement en accord avec la volont de D. En fait, il est tonnant que Yaakov se soit prsent devant son pre avec ruse, puisque sa qualit essentielle est la franchise comme il est crit (Micha 7:20): Tu as donn la vrit Yaakov . Comment a-t-il pu mentir en shabillant de vtements qui ne sont pas les siens et mme dire (Brchith 27:19) Je suis Essav ton an ? Cest que justement Yaakov sest comport avec franchise, car il a confirm son pre quEssav ntait pas vertueux et quil ne mritait pas les bndictions. Cest lui qui les mrite, car il a dj reu en toute justice le droit danesse dEssav. Il agit de la sorte pour quYitshak ne soit pas induit en erreur par Essav. Yaakov na pas dvi de sa qualit de vrit, il a seulement t loyal envers lhomme loyal... et artificieux avec le pervers (Thilim 18:26-27). Parfois cest grce la ruse et aux stratagmes qui ressemblent des

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tromperies que lon peut exposer la vrit. De mme, chacun doit ruser avec son mauvais penchant qui lui fait miroiter des vrits illusoires afin de linduire en erreur et le capter dans ses filets. Si le mauvais penchant veut le tromper et le capter, il faut lattaquer de mme par la ruse, et lentraner vers la maison dtude (Soucah 52b; Kidouchin 30b), o le mauvais penchant sera vaincu coup sr. Lorsque Essav se rendit compte de sa perte, il scria: Nas-tu quune seule bndiction mon pre? Cest--dire: Ne peux-tu pas me bnir dune bndiction qui nest pas lie Yaakov? Je suis incapable de laimer et de faire la paix avec lui aprs quil ma supplant, et voil quil prend aussi pour lui les bndictions de la nuit de Pessah et moi je nai rien! Tu dois donc me bnir dune autre bndiction. Et Yitshak dit: Certes, je lai institu ton suprieur (ibid. verset 37). Tant que Yaakov et ses descendants ralisent cette supriorit par la pratique de la Torah, tu ne peux pas les dominer, mais cest seulement par la Torah quils sont suprieurs. Par contre, sils abandonnent la Torah, tu les domineras et aprs avoir pli sous son joug, ton cou sen affranchira (verset 40). Mais pour le moment, tu vivras la pointe de ton pe , car tu as choisi le mal, et tu nas pas renonc la violence, au vol, au brigandage et au meurtre. Ce sont des maldictions, car D. ne peut pas bnir un meurtrier. De plus, mme si les Enfants dIsral se rendent fautifs, les enfants dEdom, eux, sont incorrigibles. Nous pouvons ajouter ceci: lorsque Yitshak dit Essav quil vivrait la pointe de son pe, il lui signifia que tel tait son sort et telle tait sa part. Ce nest pas le cas des Enfants dIsral, qui ne dpendent pas du sort, comme il est dit: Isral nest pas soumis aux astres (Chabath 156a; Ndarim 32a), mais directement des bonts de D. Lorsque les descendants dEdom firent la guerre aux descendants dIsral, qui taient dpourvus darmes et de moyens et qui se tournaient vers le Ciel pour leur salut, D. accomplit pour eux des miracles visibles, et ils survcurent leurs ennemis. Par contre, les enfants dEssav qui sont sous la domination des astres, ne bnficient pas de miracles. Ils se reposent uniquement sur la force de leur pe et la puissance de leurs armes. Ce nest quen faveur des Enfants dIsral que D. bouleverse lordre naturel du monde. Nombreux sont les exemples de cette intervention divine. Les Hachmonens ntaient quune famille de treize hommes, et joints quelques centaines dhommes, ils vainquirent toutes les armes trangres. Bar Kochba (Yrouchalmi Taanith 4:5; Ekhah Rabah 2:4) a vaincu les Romains, alors quil avait demand D. de ne pas le soutenir pourvu quIl naide pas ses ennemis. Yhochaphat, roi de Jude (Melakhim I, 22; Divrey HaYamim II, 20), est parti en guerre avec quelques soldats contre les Amonites, les Moabites, et les Amalkites. Hizkya, roi de Jude, a combattu larme de Sanhriv, le puissant roi dAssyrie, et la vaincu (Melakhim II,19; Divrey HaYamim II, 32), car les Juifs ne dpendent que de D. Telle tait la bndiction de Yaakov et la maldiction dEssav. Mais Essav pensait quil tait bni, car chacun est aid dans le chemin quil choisit de prendre (Makot 10b; Bamidbar Rabah 20:11), sil sattache faire le mal, il est aid dans ce sens, comme il est dit: Celui qui veut se corrompre est exauc (Yoma 38b) et celui qui est attach la saintet reoit le soutien du Ciel pour se sanctifier (ibid.). La lutte entre Yaakov et Essav a commenc ce moment-l, lun choisissant le bien, la voie de D., lautre ne poursuivant la plupart du temps que le mal et il reste savoir si la volont dEssav se ralisera ou non. A partir de l, les choses se droulent comme delles-mmes. Essav commena har Yaakov, si bien quYitshak spara ses enfants pour quils ne se frquentent pas. De plus, Yitshak bnit Yaakov une seconde fois (Brchith 28:1), il lui conseilla daller chez Laban, de ne pas prendre pour pouse une femme de Canaan et de ne pas se lier avec les habitants du pays. Yaakov couta ses parents et il alla tudier la Torah pendant quatorze ans dans les tentes de Chem et Ever (Mguilah 17a), afin de raliser la voix est la voix de Yaakov non seulement dans son pays, mais aussi et surtout en exil (o le pouvoir du mauvais penchant est grand) et alors les mains dEssav ne pouvaient pas latteindre. Essav avait du mal accepter que Yaakov ait acquis les bndictions grce au mrite de la Torah. Il voulait recevoir de son pre une bndiction qui affaiblirait le pouvoir de Yaakov. Mais au contraire, Essav est devenu dpendant des bienfaits de Yaakov. Lorsque les Enfants dIsral obissent la volont de D., ils reoivent tous les bienfaits qui proviennent du trsor de D., en quelque endroit quils se trouvent (Yrouchalmi Guitin, fin du Ch. 5), et alors les nations du monde jouissent aussi de la prosprit grce au mrite des Enfants dIsral. Tout dpend de la conduite des Enfants dIsral.

Parachat toldot Yaakov et Essav, la saintet face limpuret

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Rivka entendit ce que Yitshak disait Essav son fils... [et elle dit Yaakov] Va au menu btail, prendsmoi deux beaux chevreaux... (Brchith 27:9). Avant dexpliquer la seconde partie de la vie de Yaakov et dEssav, prsentons quelques-unes des questions souleves par les Midrachim: 1. Les Sages disent (Tanhouma Toledoth 8): La vue dYitshak sobscurcit cause de la fume de lencens que les femmes dEssav brlaient dans leurs rites idoltres , pourtant, il dsirait bnir son fils Essav! Le mrite-t-il? Et pourquoi choisit-il de le bnir la nuit de Pessah (Pirkey DRabbi Elizer 32), une nuit prdestine aux descendants de Yaakov? 2. Pourquoi Rivka envoie-t-elle Yaakov prendre deux beaux chevreaux? Bien que les Sages expliquent (Rachi ad. loc., Pirkey DRabbi Elizer 32) que ctait Pessah et que lun deux tait destin au sacrifice, Yitshak navait pas demand Essav de chevreuil pour le sacrifice. Pourquoi Rivka prit-elle linitiative dun tel changement? 3. Comment se fait-il quEssav nait pas hsit apporter du gibier vol? Il pensait que sil ne trouvait rien la chasse, il pourrait apporter du btail vol, alors quYitshak lui avait explicitement demand de chasser et de ne pas voler (Brchith Rabah 65:8; Rachi ad. loc.). Comment Essav osa-t-il transgresser un ordre de son vnrable pre? 4. Nous devons aussi comprendre lintention profonde de Rivka. Si Yitshak prfre bnir son fils Essav, pourquoi Rivka intervient-elle pour que Yaakov reoive ces bndictions? Comment a-t-elle pu prendre sur elle une telle responsabilit, alors quEssav avait la possibilit de se repentir? Et comment na-telle pas craint quYitshak sirrite contre Yaakov et le maudisse, alors quelle a pris sur elle la maldiction (ibid. v. 13)? 5. Comment se fait-il quYitshak nait pas prt plus attention la voix de Yaakov? Il est vrai quil dit la voix est la voix de Yaakov (ibid. v. 22), mais il a senti que les mains taient celles dEssav. Nauraitil pas d vrifier plus attentivement lidentit de la personne qui se trouvait devant lui et proclamait je suis Essav ton fils (verset 19) avant de le bnir? Sil savait quil bnissait Yaakov, pourquoi a-t-il eu tellement peur lorsque Essav est entr? Il lui dit: ton frre sest substitu toi (verset 35), et pourtant il a confirm ses bndictions Yaakov! Yitshak aimait Essav, et il dsirait lui transmettre les bndictions hrites dAvraham (Brchith 61: 6) parce quil esprait concilier les tendances contradictoires dEssav. Dune part il tait un homme des champs qui sortait de chez lui pour ramener les gens vers D. comme le faisait son grand-pre Avraham, et en cela il tait suprieur son frre Yaakov qui ne sortait pas de la maison dtude, mais par ailleurs il avait des dfauts personnels et dune telle personne il est dit: Il parle bien mais il nagit pas conformment ses paroles . Yitshak dcida quil valait mieux partager les bndictions donnes par D. Avraham et lui-mme entre Essav et Yaakov afin que tous deux en bnficient, lun enseignant la Torah au peuple et lautre lenseignant dans les maisons dtude. Dautant plus, pensait Yitshak, que sils sont bnis des bndictions de la nuit de Pessah, cela aiderait Essav perdre ses dfauts. En effet, si Essav avait surmont cette preuve et avou son pre quil avait renonc au droit danesse en faveur de Yaakov, cet aveu sincre lui aurait permis dliminer toutes les impurets, de sattacher la vrit, et de slever au plus haut degr. En demandant Essav de lui apporter le produit de sa chasse et non du btail vol, Yitshak voulait lui faire liminer sa tendance au vol et ancrer en lui la qualit de ces hommes dont les Sages disent (Midrach Pliah 132): Les hommes vertueux se nourrissent de choses voles et disent: cela aussi est pour le bien (le mot guzel, vol, est form des premires lettres de lexpression gam zo ltova, cela aussi est pour le bien), cest--dire quils donnent une tournure positive aux vnements. Yitshak aspirait ce but. tant donn que ce jour-l tait la veille de Pessah, Yitshak ne lui demanda pas de lui apporter nimporte quel plat, mais des plats son got (en Hbreu le mot mataamim est un pluriel), cest--dire deux btes, une pour le sacrifice de Pessah et une autre pour le repas. Avant la construction du Sanctuaire, les

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sacrifices taient effectus par les premiers-ns (Bechorot 4b; Brchith Rabah 63:18), et ce plat serait comme un sacrifice prsent par Essav. La preuve en est que Rivka ordonna Yaakov: Va au menu btail, prends-moi deux beaux chevreaux - pour le sacrifice de Pessah (Pirkey DRabbi Elizer 32), car telle tait lintention dYitshak. Mais pour avoir vendu son droit danesse Yaakov, il tait interdit Essav doffrir des sacrifices (Brchith Rabah 63:18). Cest la raison pour laquelle il sest dit que dans le cas o il ne trouverait pas de gibier la chasse, il apporterait du gibier vol (ibid. 65:10). Il pensait pouvoir tromper son pre et lui faire croire quil apportait un animal pour le sacrifice de Pessah mais Rivka dcouvrit le stratagme. Sachant quil tait interdit Essav doffrir ce sacrifice, elle savait quil ne mritait pas les bndictions dAvraham et dYitshak. Et elle ordonna donc immdiatement Yaakov de lui apporter lanimal du sacrifice de Pessah et de le sacrifier. Elle ne voulait pas quYitshak faute par inadvertance conformment au commandement Ne place pas dobstacle devant un aveugle (Vayikra 19:16 et 14). Yitshak navait que faire de plats dlicieux et il ne dsirait ni les plaisirs de ce monde, ni des nourritures voles ou impropres. Sa seule intention tait doffrir le sacrifice de Pessah, comme il est dit mon got (Brchith 27:4). Si D. agre avec bienveillance le sacrifice, Yitshak en sera heureux. Etant donn quil est interdit Essav doffrir le sacrifice, Rivka ordonna son fils Yaakov de le faire. Il est facile de comprendre lintention dYitshak, et paralllement, celle de Rivka. Yitshak dsirait quEssav profitt des bndictions de la nuit de Pessah destines Yaakov et ses descendants, pour faire rgner la paix et la bonne entente entre eux, chacun partageant la peine de lautre. Beaucoup de maux auraient t vits sils avaient t lis par des liens damour et non de haine. Mais Rivka savait quEssav ne mritait pas doffrir des sacrifices et elle ordonna Yaakov dapporter son pre lanimal du sacrifice de Pessah. Des penses bien diffrentes remplissaient la tte dEssav. Il ne voulait pas participer au destin de Yaakov. Il navait aucun dsir de partager avec lui ni la Torah ni son mode de vie, il ne voulait pas non plus du droit danesse quil avait vendu, et il ne croyait pas dans les bndictions car il ne pensait pas que les Juifs sortiraient un jour de lexil dEgypte. Il voulait une bndiction qui ne sappliqut qu lui, sans lien avec le sacrifice de Pessah et sans rfrence la sortie dEgypte. Pour toutes ces raisons, il nhsita pas tromper son pre en lui apportant une nourriture vole. Limpuret dEssav (Zohar III, 163b) aurait atteint son pre, sil en avait mang, et Essav aurait reu la bndiction dans limpuret et non dans la saintet, ce qui lui aurait permis de se lapproprier sans obligation de la partager. Il est possible que Yitshak Yaakov et ses descendants, entaches dimpuret, les auraient pervertis et empchs de sortir dEgypte. Telle tait la mchancet foncire dEssav. Il est vrai quil honorait profondment son pre (Chemoth Rabah 46:3; Devarim Rabah 1:14), mais parce quil pensait nourrir son pre de nourriture vole et impropre, provenant dun sacrifice mensonger, toute sa personnalit en fut corrompue pour toujours. Il est dit (Yonathan ben Ouziel, Brchith 27:31) qu Essav ne trouva pas danimal pur, mais il rencontra un chien quil tua et apporta son pre . Comme on le sait, le chien est le symbole mme de limpuret (Zohar III, 197a; Tikouney Zohar 21-62b). Essav dsirait que limpuret profite du pouvoir dYitshak dont la qualit est la Puissance (Zohar III, 302a) laquelle soppose toujours au Mal et lImpuret. Sil avait russi, limpuret aurait pris le dessus et la Puissance aurait t soumise aux forces impures. Nous comprenons prsent pourquoi Rivka prit sur elle une telle responsabilit au risque de faire maudire Yaakov si Yitshak devait se mettre en colre. Il nous reste toutefois expliquer pourquoi Yitshak na pas t plus attentif et na pas vrifi lidentit de celui qui se tenait devant lui. Il avait bien remarqu quelque chose dinhabituel puisquil dit la voix est la voix de Yaakov (ibid. 27:22). A propos du verset je suis Essav ton an , il est dit (ibid. Rachi v. 19; Zohar I, 167b): Cest moi qui apporte le plat, et Essav est ton an . Comment expliquer quYitshak nait pas dcouvert que ctait Yaakov qui se tenait devant lui? Si lon voulait dire quYitshak dsirait effectivement bnir Yaakov, pourquoi est-il dit quil eut trs peur lorsque Essav entra (verset 33)? Sil ne ralisa qu ce moment-l quil avait bni Yaakov, pourquoi dit-il Essav (verset 35): ton frre sest substitu toi , ce qui devait enflammer la haine dEssav envers Yaakov? Naurait-il pas t prfrable de ne pas mentionner la ruse de Yaakov et de bnir Essav dune bndiction quelconque, afin de temprer sa haine?

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En considrant la suite des vnements nous dcouvrons une chose tonnante. Tout de suite aprs quYitshak eut ordonn fais-moi un plat mon got (verset 4), il est dit (verset 5): Et Essav alla aux champs pour chasser du gibier et le rapporter , cest--dire quil na pas tard, il est parti tout de suite. Ne trouvant rien la chasse, il a vol un animal et la apport son pre. Dans ce mme laps de temps, Yaakov a pu de son ct faire les prparatifs en toute puret et en toute saintet, et apprter des plats avec les meilleures intentions, sachant quil ferait plaisir son pre et recevrait les bndictions dAvraham. Il ne fait aucun doute quYitshak, conformment la volont divine, avait lintention dadresser ses bndictions uniquement lan vritable, celui qui va dans le droit chemin. Cest pourquoi lorsque Yaakov se prsenta, Yitshak lui demanda qui es-tu mon fils? (verset 18). Autrement dit: comment se fait-il que tu sois revenu si vite? . A cela, Yaakov rpondit: Je suis Essav ton an , cest--dire: Je suis Yaakov, et si tu crois quEssav est ton an, il nen est rien! Il ma vendu son droit danesse et dornavant je suis moi ton an de droit, maintenant il lui est interdit doffrir les sacrifices. Essav lui, ne pense qu te tromper et timprgner de son impuret en tapportant du gibier vol... Etant donn que celui qui reoit la bndiction a besoin de sy prparer autant que celui qui la donne, Yitshak demande nouveau (verset 20): Quest ceci? tu as t prompt chasser mon fils! cest--dire: comment as-tu pu venir si vite, alors quil faut beaucoup de prparation avant de mriter labondance des bndictions? Yaakov rpondit: Cest que lEternel ton D. ma donn bonne chance , cest--dire: D. mest venu en aide la chasse et donc jai consacr tout le temps qui me restait me prparer recevoir labondance des bndictions, jai bnfici de laide du Ciel pour me prparer les recevoir en toute saintet et en toute puret. Yitshak comprit alors que la voix est la voix de Yaakov , toujours prompt obir la volont divine, dautant plus que lodeur du Jardin dEden laccompagnait (Brchith Rabah 65:22; Rachi, verset 27), une odeur quYitshak avait dj senti quatre-vingt-six ans auparavant, au moment o il fut prsent sur lautel, lorsque son me le quitta et refusa de retourner sur terre jusqu ce quelle ft remplace par une autre (Zohar I, 60a; Tossefta) et elle-mme est reste au Jardin dEden (voir ce sujet les crits du Ari zal). La rponse de Yaakov remplit Yitshak de joie car elle montrait quil stait prpar correctement recevoir labondance des bndictions. Lorsque Yaakov dit: Je suis Essav ton an il signifiait: il ny a que toi qui pense quil est lan, mais en vrit je suis moi lan, et effectivement cest moi qui ai sacrifi pour toi le chevreau de Pessah. Si je ntais pas lan, je naurais pas pu offrir ce sacrifice. Lodeur du Jardin dEden qui laccompagnait, confirmait la vracit de ses propos. Et alors Yitshak lui dit (verset 21): Approche que je te tte, mon fils autrement dit: approche-toi de moi que je tembrasse, de mme que les adeptes et les disciples embrassent les hommes vertueux afin dexprimer leur attachement et leur amour, dans le sens o il est dit (Kohleth Rabah 3:7): Si tu rencontres un groupe dhommes vertueux, lve-toi et va les serrer, les embrasser, les treindre , car un sage est semblable un Sfer Torah (voir Makot 22b). Yitshak voulait embrasser Yaakov pour savoir sil russirait effectivement soumettre la mchancet dEssav, le dominer et tre vraiment suprieur lui. Effectivement aprs lavoir tt, il dit (verset 22): La voix est la voix de Yaakov et les mains sont les mains dEssav , cest--dire: Je vois clairement que tu tiens Essav sous ton emprise, et ce nest que grce toi que jai mrit de ne pas fauter en mangeant une nourriture vole. Il ne mrite ni le droit danesse ni les bndictions. Cest ce quYitshak dit Essav (verset 37): Je lai institu au-dessus de toi, jai fait de tous tes frres ses serviteurs , car il ta subjugu, toi, ta puissance et ta descendance, sous son pouvoir, grce sa Torah, son intgrit et ses vertus. Essav, prototype du mal La section des bndictions ne se termine pas l. Comme Yitshak achve de bnir Yaakov, Essav vient (verset 30) avec le plat quil avait prpar prcipitamment. Il y avait une diffrence vidente entre le plat de Yaakov et celui dEssav. Yaakov avait prpar des mets avec de bonnes intentions et en toute puret pour que les actions dici-bas veillent les bienfaits den-Haut (Zohar I, 88a), tandis quEssav prpara les siens avec de mauvaises intentions, sans invoquer le Nom de D. Lorsque Yitshak entendit Essav son fils dire (verset 32): Je suis ton fils an Essav , il fut saisi dune frayeur extrme (verset 33) et les Sages disent (Brchith Rabah 67:2; Tanhouma 11) qu Yitshak vit lenfer ouvert sous ses pieds .

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Pourquoi, en fait, Yitshak eut-il si peur? Lenfer ntait-il pas ouvert sous les pieds dEssav, et non sous les siens? Cest quYitshak eut peur en comprenant quEssav voulait lentraner une transgression en lui faisant manger des choses impures et impropres, lui qui avait t une offrande parfaite sur lautel (Brchith Rabah 64:3). Il fut saisi dune frayeur extrme en se rendant compte quil tait impossible de faire confiance Essav et quau contraire, il fallait se tenir loign de lui. Et Yitshak demande Essav: Comment peux-tu mapporter le sacrifice de Pessah? Tu nas pas le droit doffrir des sacrifices, et la preuve en est que lodeur du Jardin dEden manait de celui qui ta prcd, cest lui le premier-n. A cela, Essav prsente des excuses (verset 36): Est-ce parce quon la nomm Yaakov quil ma supplant deux fois? cest--dire: Yaakov ma pris le droit danesse afin de prendre aussi les bndictions, mais il a agi sournoisement. Cest une tromperie. Ici, Essav avoue son pre quil voulait lui cacher quil avait renonc au droit danesse. Ses accusations contre Yaakov taient mensongres puisque Yaakov lui avait expliqu les devoirs du premier-n (Brchith Rabah 63:18). Essav stait montr oublieux et ingrat, car Yaakov lui avait sauv la vie en lui donnant manger lorsquil tait fatigu et affam, et il lui avait propos de lui acheter le droit danesse uniquement pour le mettre lpreuve et lui lancer un dfi, afin de lencourager se surmonter. Quiconque nie les bienfaits quil reoit, est comme quelquun qui nie D. (Kohleth Rabah 7:4; Midrach Chmouel 23). Telle tait la mchancet dEssav. Il a ni les bonts de Yaakov envers lui, et il a aussi ni D. lorsquil a mpris le droit danesse, comme le remarque Rachi: La Torah tmoigne de sa mchancet pour avoir ddaign le service de D. . Yitshak comprit et confirma les bndictions: Il restera bni (verset 33). Afin quon ne dise pas que si Yaakov navait pas tromp son pre, il ne les aurait pas reues, Yitshak la bni une seconde fois en connaissance de cause (Brchith Rabah 67:2; Rachi ad. loc.), sachant queffectivement Yaakov mritait le droit danesse et les bndictions divines. Par la suite, Essav comprit que son pre tait dans un moment de grce malgr sa colre envers lui, et il poussa de grands cris suppliants pour que son pre le bnt, lui disant: Ne possdes-tu quune seule bndiction, mon pre? (verset 38). Aprs tout, il avait tout de mme obi son pre en allant la chasse, et cest uniquement parce quil navait rien trouv quil avait apport du gibier vol. Cest pourquoi son pre la bni: Tu vivras la pointe de lpe (verset 40), cest--dire: tant donn que tu dsires continuer voler, je vais te bnir pour que tu russisses dans la voie que tu as choisie, de voler, dassassiner, et deffrayer les gens en brandissant lpe, de telle sorte que la diffrence entre toi et Yaakov ton frre sera vidente aux yeux de tous. Dornavant, tu vas har ton frre de telle sorte quil saura se protger contre tes attaques. Tu ne pourras plus exprimer extrieurement de lamour et le har en secret... Yitshak appela Yaakov et lenvoya Padan Aram (ibid. 28:1-2), afin que chacun de ses fils suive son propre chemin, afin de les sparer, ce qui aurait pour consquence de partager les habitants du monde entre eux deux. Il est impossible que des gens aux tendances si contraires coexistent en paix. Nous constatons la mme chose entre Avraham et Loth. Loth profitait de biens vols, cest pourquoi Avraham se spara de lui (ibid. 13:9). Bien que la maison de Loth ft grande ouverte aux invits, hospitalit quil avait apprise dAvraham (Brchith Rabah 50:4), cette gnrosit navait aucune valeur sil nourrissait ses invits de viandes voles. Il nous reste comprendre pourquoi Yitshak envoie Yaakov Padan Aram, car si son intention est rellement de lextraire de lemprise dEssav et de linfluence de ses mauvaises actions, pourquoi lenvoiet-il chez Laban, le plus grand de tous les trompeurs (Tanhouma Vayichlah 1), dont la mchancet surpasse celle dEssav (Brchith Rabah 75:6)? Que gagne-t-il le sauver dun danger ici, sil lenvoie se mettre en danger ailleurs? Nous savons que Laban tait pire quEssav. Lorsque Yaakov senfuit, Laban le poursuivit avec tant dempressement quil parcourut une route de sept jours en une seule journe (Brchith Rabah 74:6). D. apparut Laban en rve et lui dit (Brchith 31:24): Garde-toi de parler Yaakov, que ce soit en bien ou en mal . Quest-ce dire? Les Sages expliquent (Ybamoth 103b): Tout ce que les hommes vertueux jugent bon est mauvais aux yeux des hommes mchants . Cest dire que mme les paroles favorables que Laban aurait exprimes pouvaient porter prjudice Yaakov et ses descendants et avoir une mauvaise influence

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sur eux. Pourquoi? Les paroles bienveillantes quun homme mal intentionn prononce devant un homme vertueux peuvent amener ce dernier laffectionner, ce qui, en fin de compte, lui causera prjudice. Il est interdit de regarder le visage dun homme mchant (Mguilah 28a), mme sil se montre, apparemment, correct. Cest pourquoi D. met Laban en garde de ne pas causer de tort Yaakov. Pourtant, lorsque Eliphaz poursuivit Yaakov pour le tuer sur lordre de son pre (Sfer HaYachar), il nest pas dit que D. commanda Eliphaz de ne pas tuer Yaakov. De mme, avant la rencontre entre Yaakov et Essav, lorsque Yaakov lui envoie de nombreuses offrandes... il nest pas dit que D. ordonne Essav de ne faire aucun mal Yaakov. Cest que personne ntait aussi nuisible que Laban lAramen qui voulait tout dtruire jusquaux fondements (Zohar I, 164b, 167a). Lorsque Essav et Yaakov se rencontrent, ils pleurent en sembrassant comme il est crit (Brchith 33:4): Essav courut sa rencontre, lembrassa... et ils pleurrent et Rabbi Chimon Bar Yoha remarque (Sifri Bamidbar 9:10): A ce moment-l, Essav eut des lans damour sincres et la embrass de tout cur . La question reste pose: Pourquoi Yitshak exile-t-il Yaakov Padan Aram, chez Laban, dont la mchancet est extrme? Lamour dYitshak pour Essav ntait motiv que par le fait quil tait un homme des champs celui qui sort pour ramener les Juifs perdus, tandis que Yaakov mditait les profondeurs de la Torah pour lui-mme. Cest pour cette raison que Yitshak avait une prfrence pour Essav. A prsent, comprenant quaucun de ses deux fils ne diffusait la Torah, il envoie Yaakov Padan Aram, au pays du Levant, l o son grand-pre Avraham avait commenc faire connatre aux foules le Nom de D.. Yaakov avait pass assez de temps dans les quatre coudes de la loi , maintenant il devait enseigner la Torah quil avait apprise, lexemple de son grand-pre. Effectivement, Yaakov obit son pre et il entreprit denseigner la Torah partout o il allait. A propos du verset Et Yaakov partit... (Brchith 28:10), les Sages disent: Lorsquun homme vertueux quitte un lieu, son dpart laisse une vive impression. Tant quil habite la ville, il en fait la gloire, la lumire et la splendeur. Lorsquil part, la gloire, la lumire et la splendeur quittent la ville (Brchith Rabah 68:6). Lorsque Yaakov quitta la ville pour enseigner la Torah comme lavait fait son grand-pre, tous ressentirent son absence comme un grand vide. A partir de ce moment-l, Yaakov enseigna la Torah au peuple et institua des lieux dtude, comme le disent les Sages (Brchith Rabah 95:3) propos du verset Il envoya Yhouda (Brchith 46:28): afin dinstituer des lieux dtude de la Torah... . Etant donn que la qualit essentielle de Yaakov est la Splendeur (Zohar II, 302a), qualit qui reprsente le juste milieu entre la qualit de Bienveillance dAvraham et la Puissance dYitshak, les Sages demandent (Pirkey Avoth II:1): Quelle est la voie la meilleure, celle que lhomme doit adopter? Et ils rpondent: Celle qui lui procure sa propre estime et lestime des autres . Il sagit de la qualit de Splendeur, celle qui caractrise Yaakov, qui agit autant en faveur de lui-mme quen faveur des autres. Nous avons expliqu prcdemment que le pouvoir de Yaakov a commenc se manifester lorsquil a acquis le droit danesse. Un hritage important tait attach ce droit, et Essav aurait pu tuer Yaakov pour sapproprier cet hritage. Et pourtant, Yaakov ne fut pas dcourag, au contraire, il lutta contre Essav en transmettant ses descendants la force de lutter et de vaincre le mauvais penchant. Cela nous permet de comprendre les paroles du prophte (Malakhi 1:2-3): Je vous ai aims dit lEternel... Jai aim Yaakov mais Essav, Je lai ha... Quelle est la raison de cette haine? Les portes du Repentir ne sont-elles pas toujours ouvertes (Midrach Thilim 65:4) mme pour un pcheur comme Essav? Et surtout, en quoi lamour de D. envers Isral est-il spcial, au point que le prophte doive le souligner? Sur la base de ce que nous avons dit plus haut, la rponse est claire. Yaakov voulait amener Essav veiller sur sa part, en lui expliquant le privilge du droit danesse, bien quil ait eu la possibilit de prendre le droit danesse sans chercher lui venir en aide. Mais il dsirait voir son frre slever mme plus haut que luimme, sil choisissait seulement de se repentir. Cest pourquoi Yaakov est aim de D., car sil est capable de venir en aide un homme aussi mchant quEssav, il est srement capable de rpandre le bien. Essav, lui, est ha de D. Bien quil ait tu le tyran Nimrod (Brchith Rabah 65:12; Pirkey DRabbi Elizer 24), ce que mme Avraham navait pas russi faire, et lui avait drob les vtements dAdam, il navait pas compris ce que ces vtements reprsentent. Essav se parait de ces vtements pour tromper tout

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le monde. Il mprisa le droit danesse, rejeta toutes les occasions de se repentir (que ce soit avec Yaakov pour le droit danesse, ou avec Yitshak loccasion des bndictions). Il mprisait aussi les pratiques et les lois des Enfants dIsral. Cest la raison pour laquelle il est devenu hassable aux yeux de D., lui et tous ses descendants. Par contre, lamour de D. pour Yaakov est sans mesure, juste titre. Malgr tout, Essav ntait-il pas plus correct que Laban? Cest justement parce quil possdait des capacits exceptionnelles quil est dtestable aux yeux de D., car il stait dtourn de la vie spirituelle et naspirait qu une vie matrielle. Yitshak bnit Essav en lui souhaitant de vivre la pointe de son pe, cest--dire: vis comme tu lentends, continue voler, piller, tuer les gens pour temparer de leurs richesses. Mais sache que tu ne pourras pas bnficier des mrites de Yaakov . Cest dans ce sens quil est dit: Pour faire le mal, on a recours aux hommes mchants (Chabath 32a; Bamidbar Rabah 13:17; Tana DBey Eliyahou Rabah 16), et ceux qui doivent tre punis tomberont toujours entre les mains dEssav. Yaakov pourra ainsi avoir un peu de repos. Il est interdit de vivre aux cts dEssav, car personne ne peut vivre avec un serpent sous le mme toit (Ybamoth 112b; Ketouboth 72a), et donc Yaakov quitta Ber Cheva pour se rendre Padan Aram. Il sappuyait sur le pouvoir de la Torah, il avait confiance en sa protection car la Torah protge et sauve (Soucah 21a). Nous apprenons l comment chapper aux piges des mauvaises tendances et de la mchancet, et slever par tapes dans la voie de la sanctification. Cest une leon pour chaque Juif, et pour tous les temps. Il est possible de surmonter le mauvais penchant, de se purifier et de se sanctifier.

Ltude de la Torah protge Isral


La voix est la voix de Yaakov et les mains sont les mains dEssav (Brchith 27:22). Il faut expliquer le sens de ce verset. Lorsque la voix est la voix de Yaakov, cest--dire lorsque lhomme vit selon la Torah et dans la crainte de D., que sa bouche nexprime que la sagesse de la Torah, la voix de Yaakov fait entendre la voix de la Torah, qui sattache la sienne, se joint lui, au point que la voix dun tel homme devient effectivement la voix de Yaakov, et il est protg contre les attaques malveillantes. Lorsque la voix de Yaakov chante dans les maisons dtude et de prire, les mains dEssav sont impuissantes (Brchith Rabah 65:16). Lorsquun tel homme fait entendre la voix de Yaakov lentour, il ne peut lui arriver aucun mal car la bndiction de lEternel enrichit (Michley 10:22), et les bndictions divines qui descendent sur Yaakov se rpandent sur lui, puisquil est attach et li Yaakov. Si au contraire, par malheur, lhomme choisit de faire le mal, ses mains deviennent les mains dEssav, et un tel homme est apparent Amalek, qui de tout temps, a poursuivi les Enfants dIsral pour les amener fauter et les faire dvier du droit chemin, D. nous en prserve. Il est dit (Tikouney Zohar 22:65b;, Zohar I, 168a): Le portrait de Yaakov est grav sur le Trne de Gloire, et lorsque les Juifs sont assaillis par les souffrances, ou lorsque D. est en colre, Il contemple le portrait de Yaakov, Sa colre svanouit et Il prend le monde en piti . Il faut expliquer pourquoi le portrait de Yaakov est grav sur le Trne de Gloire, et pourquoi cest lui justement qui apaise la colre divine? La raison est claire. Le monde entier fut cr pour la Torah qui est appele rchit (Brchith Rabah 1: 6) et (Ndarim 32a; Pessahim 68b): Si ce ntait pour la Torah, le ciel et la terre cesseraient dexister , et aussi: D. a pos une condition la cration: Si Isral pratique la Torah, tout sera bien, sinon... (Chabath 88a). Cest donc que le monde entier na t cr que pour la connaissance et la pratique de la Torah. Les Sages attribuent D. ces paroles (Yrouchalmi Haguigah I:7): Peu Mimporte quils Mabandonnent Moi, pourvu quils observent Ma Loi! . D. sait et tmoigne quen fin de compte, grce ltude de la Torah, les Enfants dIsral sattacheront Lui et Le serviront de tout leur cur. Cest pourquoi, lorsque D. est furieux contre des Enfants dIsral, la voix de la Torah slve jusqu Lui et cette voix sassocie celle de Yaakov. La voix de la Torah que rcitent les Enfants dIsral en ce monde se fait entendre et, immdiatement, D. se souvient, Il se souvient combien il fut difficile pour Yaakov dtudier la Torah en compagnie de son frre Essav, il se rappelle que, malgr de nombreuses souffrances, il est rest intgre et a

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continu frquenter la maison dtude dans les circonstances les plus difficiles, mme lorsquil descendit en exil en Egypte. Lorsque la voix de Yaakov se fait entendre, D. Sarme de bienveillance envers les Enfants dIsral, qui linstar de Yaakov, sont poursuivis et souffrent un cruel exil o ils sont prouvs par les perscutions et le mauvais penchant. Malgr tout, ils continuent tudier la Torah avec amour, et alors D. est plein de compassion pour Isral grce la voix de Yaakov dont le portrait est grav sur le Trne de Gloire. Et Yaakov arriva sans dommage la ville de Chekhem (Brchith 33:18). Les premires lettres des mots Yaacov Shalm forment le mot Ych (qui veut dire il y a , et a le sens de tout ) pour signifier quun tel homme reoit tous les bienfaits que D. rserve dans le monde Venir chaque homme vertueux et parfait dans ses actes (fin du trait Ouktsin, Zohar II, 166b). Quand? La lettre Vav de Vayavo, et il arriva, a comme valeur numrique six, ce qui indique la fin du sixime millnaire de lexistence du monde, et cela parce que la voix de la Torah la protg pour tre rest attach la voix de Yaakov et la Torah.

La haine dEssav - Sloigner dun mauvais voisin


Il apprta lui aussi, un ragot et le prsenta son pre en disant: Que mon pre se lve et mange... et Yitshak lui demanda: Qui es-tu? Il rpondit: Je suis ton fils, ton premier-n, Essav... (Brchith 27:3132). Il y a lieu de stonner. Comment se fait-il quYitshak nait pas reconnu la voix de son fils an Essav, et quil ait d lui demander: Qui es-tu? Il faut se demander comment Essav ose se prsenter comme le premier-n, alors quil avait vendu son droit danesse Yaakov (ibid. 25:33) et quil ddaignait ce droit (verset 34), ce qui srement navait pas chapp son pre? Il faut aussi se demander pourquoi Yitshak dit Essav: Ton frre a us de subterfuge et a pris ta bndiction (verset 35)? Yitshak naurait-il pas d garder le silence pour ne pas allumer le feu de la haine entre les frres? En effet, la haine dEssav envers Yaakov est devenue immuable aprs cet pisode: Cest une loi, Essav hait Yaakov (Sifri Behaaloteha 9:10), une haine dont nous souffrons jusqu ce jour. Pour quelle raison Yitshak provoque-t-il une telle situation par ses paroles? Si quelquun ressent le regret de ses fautes et veut se repentir mais nutilise pas toutes ses capacits pour donner suite cette prise de conscience et entreprendre de corriger ses fautes, il perd coup sr limage de D. qui est en lui, et ses traits se dforment dautant plus. Il est possible de supposer quYitshak vit Essav revenir de la chasse et lui prparer un plat, mais l la Torah ne prcise pas quil prpara un mets comme laime son pre , ce qui indique quil cherchait tromper son pre, lui faire croire quil stait repenti, ce qui ntait pas le cas. En trompant et lui-mme et son pre, il a dtruit son me au point de ntre plus identifiable, de sorte que mme son pre lui demande: Qui es-tu? Et en lui rpondant Je suis ton fils, ton an, Essav , il voulait dire: Je dsire reprendre mon droit danesse car je me suis repenti de tout cur de mes agissements... En entendant cela Yitshak son pre fut saisi dune trs grande frayeur (verset 33), car il vit lenfer ouvert sous ses pieds (Brchith Rabah 65:22, 67:1). Les Sages nous enseignent que les hommes mchants, mme au seuil de lenfer, ne regrettent pas leurs fautes (Yirouvin 19a). Yitshak comprit quil ny aurait jamais de paix entre les deux frres, et quil tait prfrable de les sparer tout de suite. Il demanda quel est cet autre qui a pris du gibier et me la apport? (verset 33). Le mot Mi (qui ), dune valeur numrique de cinquante, fait allusion aux quarante jours du don de la Torah et aux dix commandements qui ne furent donns qu Isral. Ce mot dsigne celui qui va plus tard recevoir la Torah qui fut donne en quarante jours (Menahoth 99b), et qui a accept les dix commandements avec amour et avec crainte. Celui-l ta prcd et ma apport du gibier - la pratique des commandements et des bonnes actions - jy ai got le got et lodeur du Jardin dEden et je lai bni. Et bien, il restera bni . Je ne lui retire pas mes bndictions, elles lui sont transmises en don inalinable. Depuis le dbut de cet pisode jusqu ce moment-l, Yitshak na pas du tout prononc le nom de Yaakov... Le Emek Davar signale quYitshak navait pas encore rvl Essav quil sagissait de Yaakov, car cela aurait t de la mdisance. Il esprait toujours, et peut-tre encore ce moment, quEssav voudrait bien se

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repentir et accepterait que les bndictions fussent lapanage de ce chasseur de gibier . Mais Yitshak a pu constater que ses paroles ne faisaient aucun effet sur Essav (le propre des gens mchants est de rester attachs leur mchancet, et mme au seuil de lenfer ils ne se rtractent pas). Lorsqu Essav clata en sanglots (verset 38), ce ntait pas par regret davoir perdu la vie ternelle mais plutt les bienfaits de ce monde. Et alors Yitshak dvoile le fond de sa pense - quil ne convient pas ces deux frres de vivre ensemble, au contraire. Il est juste que la haine et une profonde animosit les sparent pour le reste des temps, une haine si grande quelle ne faiblira pas et ne disparatra pas, mme aprs de nombreuses annes, et cela afin que Yaakov et ses descendants aprs lui ne soient pas influencs par Essav et ses pareils. Et alors Yitshak lui dit donc ouvertement: Ton frre est venu par ruse et il a pris ta bndiction . Il lui rvle quil sagit de Yaakov, mettant ainsi fin leur amour fraternel pour toutes les gnrations futures, afin de sparer pour toujours les mchants des vertueux et mettre une barrire entre les nations et les Juifs. Essav pensait que dornavant Yaakov serait dpendant de lui pour ses besoins matriels, et quil lui serait asservi pour toujours... Et voil quil entend de la bouche de son pre que Yaakov a reu non seulement le monde Venir, mais aussi ta bndiction , la russite en ce monde! De plus Je lai plac au-dessus de toi, jai fait de tous tes frres ses esclaves (verset 37) et tout ce quun esclave acquiert appartient son matre (Brchith Rabah 67:5), cest donc Yaakov qui domine! La chose dplut profondment Essav. Si Yaakov hrite des deux mondes, il ma supplant deux fois , que peut faire Essav maintenant? Il insiste pour que son pre le bnisse lui aussi: Ne te reste-t-il pas une bndiction? (verset 36), et alors Yitshak lui promet: Aprs avoir pli sous le joug, ton cou sen affranchira (verset 40), tant quIsral est attach la Torah, il ne tombe pas en enfer (Chemoth Rabah 51:8), tant quIsral obit la volont de D., aucune nation trangre ne peut le dominer (Ketouboth 66b, Avoth DRabbi Nathan 34:4), mais si tu vois que ton frre se libre du joug de la Torah, tu peux lui dclarer la guerre et le dominer (Brchith Rabah 67:7) et alors tu taffranchiras de son joug. Cela nous montre que seul le joug de la Torah, sa pratique et son tude, protgent Yaakov et ses descendants, les empchent de tomber sous lemprise dEssav, comme disent les Sages (Brchith Rabah 65:20): Lorsque la voix de Yaakov se fait entendre dans les maisons de prire et dtude, les mains dEssav ne le dominent pas . Si par malheur, ils abandonnent la Torah, Essav saffranchira du joug de son frre, et continuera faire souffrir Isral comme il en a lhabitude, comme le disent les Sages (Bamidbar Rabah 19:11): de tout temps Amalek sert de fouet pour Isral - il les frappe afin quils se repentent sincrement de leurs fautes. Tel est de tout temps le rapport entre Yaakov et Essav: ou bien lun est esclave de lautre, ou bien il le domine. Cest ce que disent les Sages (Mguilah 6a): Si lon te dit que Jrusalem et Rome sont toutes deux dtruites, ne le crois pas. Que toutes deux sont prospres, ne le crois pas. Que lune est dtruite et lautre prospre, cela tu peux le croire, car il est dit: Je vais tre comble, puisquelle est ruine (Yhezkel 26: 2): lorsque lune est comble, lautre est ruine, comme il est dit (Brchith 25:23): un peuple dominera lautre . Nous voyons l limportance de la bndiction donne par Yitshak ses enfants en ce quelle provoqua dans le cur dEssav une haine profonde de Yaakov, afin quils ne se frquentent pas et que les enfants de Yaakov napprennent pas imiter la mauvaise conduite dEssav. Cest ainsi que Yitshak veille de trs loin sur Yaakov et ses descendants, pour tous les temps.

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Lessentiel nest pas dtudier, mais dagir
Et Yaakov quitta Ber Cheva et se rendit Haran (Brchith 28:10). Il convient dapprofondir le sens de ce verset, car la Torah a dj dit, la fin de la section prcdente, que Yaakov avait quitt Ber Cheva pour Haran. Pourquoi cette rptition ? Et de plus, pourquoi la Torah ne dit-elle pas plus brivement Yaakov quitta Ber Cheva pour Haran ? Selon les Sages (Avoth I:17): Lessentiel nest pas ltude, mais laction . Quest-ce dire ? Celui qui tudie la Torah dans la rclusion de la maison dtude est imprgn, par la force des choses, de linfluence spirituelle de la Ychivah. Il est soumis linfluence de la Torah et des matres qui le dirigent, lui enseignent la crainte et le respect de D. et veillent ce quil ne dvie ni droite ni gauche. Il peut progresser en sagesse et en vertus, loin de tout souci, et surmonter facilement ses mauvaises tendances. La vraie lutte commence lorsque cet tudiant quitte la Ychivah pour aller son chemin, loin de linfluence de ses matres, de leur surveillance, et de la crainte quils lui inspirent. Cest alors que commence la guerre contre le mauvais penchant, comme le disent les Sages (Chemoth Rabah 27:9): Celui qui pntre dans larne, est soit vaincu, soit vainqueur ou il surmonte son mauvais penchant et lanantit, ou le mauvais penchant lattrape dans les filets quil tend et lentrane commettre toutes les transgressions, et cest ainsi que les jours passent: une fois celui-ci frappe celui-l, une autre fois, il est frapp. Lessentiel nest pas ltude, mais laction disent les Sages. Lorsque quelquun se trouve dans la Ychivah, disciplin dans son cadre et sous linfluence de ses matres, il est certain quil est capable de surmonter ses mauvaises tendances, et mme sil peut avoir des hauts et des bas , le fait dtre dans un milieu religieux lui garantit la possibilit de surmonter tous les obstacles et de progresser dans la Torah et la crainte de D. Mais tel nest pas le but essentiel de lhomme! Lessentiel est la mise en pratique de lenseignement reu, lheure o lon quitte la Ychivah pour se rendre ailleurs, dans un lieu o il ny a ni Torah ni personne pour veiller sur nous. Cest alors que lpreuve commence, nous devons faire nos preuves, par nos actes, la pratique de notre foi, notre comportement. A la lumire de ces considrations, nous pouvons comprendre le cas de Yaakov. Tant quil se trouvait dans la maison de ses parents et quil tudiait la Torah, il tait soumis leur influence et avait en exemple leurs bonnes actions. Mais la Torah nous fait comprendre que ce nest pas seulement chez ses parents que Yaakov tudiait la Torah. Lorsquil se rendit Haran, lieu habit par des gens malfaisants (voir Brchith Rabah 63:4), il nimita pas leur comportement et il resta intgre et vertueux comme il est dit plus tard: Jai vcu avec Lavan (Brchith 32:5) cest--dire: Jai observ toute la Torah et je nai pas imit ses mauvaises actions (Midrach Hagadah, ad. Loc.). Son dpart et son voyage sont mis en parallle: de mme quen sortant de la maison de son pre il tait vertueux, de mme Haran, en ce lieu dprav, il est rest vertueux. Cest pourquoi la Torah rpte : Il quitta... et il alla . Nous pouvons ajouter que Yaakov dsirait enseigner ses enfants et tous ses descendants que lessentiel nest pas ltude, mais laction , cest pourquoi ds quil reut lordre de son pre: Ne prends pas de femme parmi les filles de Canaan, lve-toi, va en terre dHaran, chez Bthouel, le pre de ta mre, et l prends une femme (Brchith 28:1-2), Yaakov obit son pre et sa mre et il se rendit en terre de Aram (verset 7), ce qui montre quil leur obit sans tarder. Il savait que cela lui permettrait dengendrer les tribus de lEternel, selon la charte dIsral (Thilim 124:4), il avait su par la prophtie quil allait pouser quatre femmes et donner naissance aux douze tribus. Cest eux quil dsirait transmettre le principe que lessentiel nest pas ltude, mais laction , et dans ce but, il quitta Ber Cheva immdiatement. Yaakov quitta Ber Cheva , afin dobir son pre et fonder une gnration dhommes droits et bnis, pour lesquels la pratique de leur foi est essentielle. Dans ce but, il sarrta en route pendant quatorze ans dans la maison dtude de Chem et Ever pour apprendre la Loi (Mguilah 17a) non seulement dans la saintet du foyer de son pre et de sa mre, mais dans un lieu clos, o il pouvait tudier en toute tranquillit, sans les soucis et les tracas qu Essav lui causait. Ensuite, il alla pouser quatre femmes et donner naissance aux douze tribus de lEternel. Les premires lettres du mots Vayets Yaakov , Yaakov quitta, ont comme

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valeur numrique seize; ces lettres indiquent les quatre femmes et douze tribus auxquelles Yaakov a transmis le principe que lessentiel nest pas ltude, mais laction . Citons en passant lhistoire merveilleuse du Gaon Rabbi Meir Shapira, dirigeant de la Ychivah Hachmey Loublin, en Pologne. Il avait grav sur le fronton de sa Ychivah le verset: Venez mes fils, coutez-moi, je vais vous enseigner la crainte de lEternel . Lorsquon lui demandait pourquoi il avait choisi ce verset, il rpondait: Ce nest pas une preuve de sagesse de rester tudier entre les quatre murs de la Ychivah, car la Ychivah a une bonne influence sur les gens. Je veux faire comprendre mes lves quen quittant la Ychivah, la Torah et la crainte de D. doivent rester graves dans leur cur . Nous pouvons maintenant comprendre un autre fait extraordinaire, li au dpart de Yaakov. Les Sages nous racontent (Sfer Hayachar Vayets; Yalkout Mam Loez Vayets 28:10 page 54) que lorsque Yaakov sortit de Ber Cheva, Essav envoya son fils Eliphaz sa poursuite pour le rattraper et le tuer, faire disparatre le corps, prendre tous ses biens et revenir. Eliphaz obit son pre. Lorsquil rattrapa Yaakov, celui-ci lui demanda: Pour quelle raison viens-tu? Eliphaz lui rapporta les paroles de son pre. Alors Yaakov lui dit: Voici, prends tous mes biens. Maintenant cest comme si jtais mort, car celui qui est pauvre est comme mort (Ndarim 7b), ainsi tu as accompli la volont de ton pre . Eliphaz se laissa convaincre, prit tous les biens de Yaakov, labandonna dnu de tout, et retourna chez son pre. Il se pose un certain nombre de questions: Nous savons qu Eliphaz affectionnait Yaakov et avait tudi la Torah avec lui. Comment a-t-il pu songer obir son pre et tuer Yaakov, car lui obir, ctait commettre un crime? Comment a-t-il pu penser faire une chose pareille? Pourquoi Yaakov, le plus parfait des Patriarches (Brchith Rabah 76:1), tait-il sur la dfensive et supplia-t-il Eliphaz de ne pas le tuer mais de prendre plutt ses biens, car il tait un homme vaillant et il aurait facilement pu lutter contre Eliphaz et lcraser dun coup puissant? Pourquoi lui a-t-il donn toute sa fortune? Il est difficile aussi de comprendre comment Eliphaz eut le courage de pourchasser Yaakov, car en ralit il savait que Yaakov tait fort et capable de la vaincre facilement. Surtout, pourquoi Essav envoie-t-il Eliphaz la poursuite de Yaakov son frre, plutt quun bataillon de soldats? Il savait que Yaakov tait ingnieux et capable de vaincre Eliphaz par ses stratagmes, comme il le fit effectivement. Essav avait dj expriment de faon cuisante la ruse de Yaakov. Pour rpondre toutes ces questions, citons tout dabord les paroles des Sages (Sanhdrin 26b): La Torah amoindrit les forces de lhomme , cest--dire que celui qui tudie la Torah devient faible et fragile. Nous comprenons donc pourquoi Eliphaz na pas craint de poursuivre Yaakov pour le tuer. Il savait que Yaakov tudiait la Torah jour et nuit. Il tait certain quil avait perdu de ses forces, quil tait trop faible pour lui opposer une guerre dfensive. Et donc, sans aucun doute, Eliphaz pensait pouvoir le vaincre et le tuer. Cest pour cette mme raison, quEssav pensait suffisant denvoyer Eliphaz la poursuite de Yaakov, et quil ntait pas ncessaire de recruter un bataillon de soldats. Et donc, il envoya justement Eliphaz qui le connaissait et qui ne se laisserait pas prendre ses ruses. Mais D. en avait dcid autrement et Yaakov trouva grce aux yeux dEliphaz qui sest laiss convaincre. Il sest content de semparer de tous ses biens, et lui a laiss la vie sauve. De son ct, Yaakov tait rest un vaillant homme de guerre, car au contraire, la Torah lui avait ajout vitalit et puissance, et il puisait en elle autant de forces spirituelles que physiques. Il avait assez de vigueur, avec laide de D., pour mater Eliphaz sans devoir lui remettre ses biens. Mais Yaakov, chaque fois quil se trouvait en difficult, se prparait prsenter des cadeaux, prier, ou faire la guerre, comme ce fut le cas lors de sa rencontre avec Essav et ses quatre cents hommes (Tanhouma Vayichlah 6). Tout dabord, il se prpara lamadouer par des cadeaux et des prires, et ce nest que lorsquil ne lui resta pas dautre choix, quil se prpara la guerre. De mme, il pria D. de sauver son me des attaques dEliphaz et effectivement, se voyant sauv, il lui donna en cadeau tous ses biens sans avoir besoin de lui faire la guerre. Nous pouvons ajouter que Yaakov na pas fait la guerre contre Eliphaz, probablement parce quil ne voulait pas peiner son pre Yitshak par le meurtre dEliphaz, qui tait son petit-fils, ou parce quil ne voulait pas attiser et augmenter la haine de son frre Essav envers lui et ses descendants en tuant son fils, ou

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encore afin de ne pas annuler la prophtie de Chem et Ever. Nous savons que lorsque Rivka tait enceinte, elle se rendit la Ychivah de Chem et Ever (Brchith Rabah 63:6) pour savoir ce quil adviendrait delle (Brchith 25:22). Ils lui rpondirent : Deux nations sont dans ton sein, deux peuples sortiront de tes entrailles (Brchith 25:23), cest--dire Yaakov et Essav/Edom. Si Yaakov avait tu Eliphaz, Essav naurait pas eu davenir et Edom naurait pas exist Pour toutes ces raisons, Yaakov ne la pas tu, il la seulement soudoy avec ses biens, et il a russi. Eliphaz na pas considr le fait quobir son pre serait commettre un crime, car Yitshak avait bni Essav tu vivras la pointe de ton pe (ibid. 27:40) et Essav pensait que tant que la voix est la voix de Yaakov (ibid. 22), les mains dEssav ne dominent pas et ne peuvent lui faire aucun mal (Brchith Rabah 65:20). A prsent que Yaakov est en route, sa voix ne se fait pas entendre, et Eliphaz pensait quil lui tait permis de le tuer conformment la bndiction reue dYitshak tu vivras la pointe de ton pe . Essav se mfiait grandement de Yaakov. Il ne pouvait pas vivre tranquille et en paix tant que Yaakov tait vivant, et cest pourquoi il voulait se dbarrasser de lui en le tuant. Essav navait-il pas dit: les jours de deuil de mon pre approchent et je vais tuer mon frre Yaakov (Brchith 27:41)? Il faut donc se demander pourquoi il veut le tuer ds maintenant? Peut-tre avait-il chang davis, car telle est la caractristique des ennemis dIsral de changer tout le temps davis. Il lana Eliphaz la poursuite de Yaakov pensant que Yaakov avait abandonn la Torah cause des tribulations du voyage, et quil pourrait le vaincre. Malgr le respect dEssav pour son pre (Brchith Rabah 65:12; 82:15; Chemoth Rabah 46: 3; Devarim Rabah 1:14), il na pas tenu compte de la peine quil lui causerait par la mort de Yaakov; son frre apparemment en cela, il ne le respectait pas. Il est possible dinterprter ce verset: les jours de deuil de mon pre approchent et je tuerai Yaakov, mon frre , bien que cela puisse causer la mort de mon pre prmaturment, car il va srement mourir de chagrin, malgr tout, je veux tuer mon frre Yaakov maintenant. Yaakov savait que lessentiel nest pas ltude mais laction , en effet il se prparait la guerre, la guerre de la Torah. Mme en route, il continuait mditer la Loi, et donc cest la voix de Yaakov qui eut le dessus, et les mains dEssav restrent impuissantes. De tout temps, pour chaque Juif, lorsque la voix de Yaakov domine et que la voix de la Torah se fait entendre sur les hauteurs , les mains dEssav sont impuissantes, et il est possible de vaincre facilement la haine de nos ennemis ainsi que le mauvais penchant et ses cohortes, et rester en vie, une vie vraie et ternelle, pour continuer progresser dans la Torah.

Lpreuve dans lobservance et ltude de la Torah


Il est crit (Brchith 28:10): Et Yaakov quitta Ber Cheva et se rendit Haran . Mais concernant le verset et Trah mourut Haran (ibid. 11:32) Rachi crit: La lettre noun du mot Haran est inverse, pour nous enseigner que la colre de D. tait enflamme jusqu la naissance dAvraham . Le mot Haran indique la colre (haron) divine envers tous les idoltres de ce temps-l. Il faut expliquer ce que la narration du dpart de Yaakov de Ber Cheva et son voyage vers Haran veut nous enseigner. Le Moussar Vedaat pose une question: Pourquoi Yaakov na-t-il pas envoy un missaire pour lui choisir une pouse parmi les filles de Lavan, comme le fit Yitshak, mais alla lui-mme Haran? Un homme peut choisir une pouse par lentremise dun missaire (Kidouchin 41a). Les prgrinations ne linciteront-elles pas abandonner ltude de la Torah? Il faut rappeler que Yaakov navait jamais quitt la maison dtude. Rachi crit (Brchith 25:27), rapportant le Midrach (Brchith Rabah 63:10): Jusque-l Yaakov se trouvait ou chez son pre Yitshak, ou dans la maison dtude de Chem et Ever . Il est donc certain quil continuerait suivre la voie de ces hommes vertueux et veillerait pratiquer leur enseignement. Mais par ailleurs, Yaakov navait pas encore connu lexprience de vivre dans un lieu sans Torah. Si, en rsidant parmi des gens mchants, il sattache la Torah et observe ses commandements, il restera vertueux. Yaakov accueille cette preuve dans lintention de samliorer davantage dans le service de D., ce qui lui permettra datteindre la perfection voulue. Cest la raison pour laquelle il alla personnellement Haran, ce lieu qui faisait lobjet de la colre divine, ce lieu habit par des gens malfaisants et idoltres. Il y fut effectivement mis lpreuve, mais il resta vertueux et nimita pas leurs mauvaises actions.

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Le verset met en parallle la sortie de Yaakov de Ber Cheva et son voyage vers Haran, pour dire que, de mme qu sa sortie il tait vertueux, de mme il est rest vertueux en route, et mme Haran il surmonta les preuves et resta intgre. Nous comprenons donc pourquoi il alla lui-mme Haran choisir une pouse, au lieu denvoyer un missaire: il dsirait tre mis lpreuve personnellement, habiter Haran parmi des gens pervers et malgr cela, prouver quil resterait vertueux du dbut de son sjour jusqu la fin. Ce que nous avanons permet dexpliquer le dbut de la section Vayichlah: Yaakov envoya des messagers en avant, vers Essav son frre... (ibid. 32:4). Rachi, sur ce verset, rapporte le Midrach (Brchith Rabah 75:4, 10): Il sagit littralement danges (en hbreu le mot malah signifie la fois messager et ange ). Par la suite (ibid. v.5) il est dit Il leur ordonna: Vous parlerez ainsi mon seigneur, Essav. Ainsi parle ton serviteur Yaakov, jai sjourn chez Lavan Rachi explique que le mot garti, jai sjourn, a la valeur numrique de six cent treize, ce qui signifie que Yaakov informe Essav: Jai habit avec Lavan, jai observ chez lui tous les commandements de la Torah et je nai pas imit sa mauvaise conduite . Il faut comprendre pourquoi Yaakov veut faire savoir son frre Essav, justement par lintermdiaire danges, quil a observ toute la Torah! Yaakov voulait prouver Essav quil nest pas facile de vivre avec Lavan Haran, chez des gens pervers. Il lui envoie justement des anges pour lui expliquer la gravit et la saintet des commandements, et combien il est difficile de les pratiquer dans une telle socit, chose que seuls les anges sont capables dexpliquer. Yaakov ajouta : Jai habit chez Lavan , pour signifier quil avait observ tous les commandements de la Torah chez Lavan dont la rputation dhomme pervers et trompeur stait rpandue dans le monde entier (Zohar I, 166b), il tait pratiquement impossible de vivre avec lui tout en restant vertueux. Yaakov voulait dmontrer quil tait innocent, contrairement lopinion de ceux qui pensaient quen habitant avec Lavan il stait dprav. Il envoya des anges vers son frre Essav pour linformer que quiconque souponne linnocent est lui-mme puni physiquement (Chabath 97a; Yoma 19b). Jai habit avec Lavan et jai observ toute la Torah, je nai pas imit ses mauvaises actions et je suis rest intgre. La preuve en est que je tenvoie des anges. Si je navais pas de mrite, je ne pourrais pas parler avec des anges et les envoyer transmettre mon message. Il est possible de donner une autre explication: La narration de la sortie de Yaakov de Ber Cheva et son voyage pour Haran nous enseigne la grandeur de Yaakov. Yaakov a senti quil tait imparfait en ce quil navait pas atteint le niveau souhait, dans le service de D. Il pensait quhabiter avec son frre Essav ntait pas une preuve suffisamment difficile tant quil profitait de linfluence de son pre Yitshak et de son entourage. Cest pourquoi il quitta Ber Cheva, cest--dire la source de la Torah (voir Brchith Rabah 68:7) pour se rendre en un lieu habit par des hommes de la trempe de Lavan et l, affronter lpreuve et la surmonter. Au lieu de se laisser entraner par lentourage, il allait amener les gens la connaissance de D. (comme avait fait son grand-pre), et prcisment Haran amener les gens se repentir sincrement. Tel tait le but de Yaakov, car sil navait pour but que de se marier, il aurait pu envoyer des missaires chez Lavan avec la mission de lui ramener une pouse. Tout le monde savait dj que la fille ane (Lah) est destine au fils an (Essav), et la plus jeune (Rahel) Yaakov (Bava Bathra 123a; Brchith Rabah 70:16; Tanhouma Vayets 4). Yaakov navait donc pas craindre quun envoy ne lui trouve pas une femme. Il saisit loccasion daller Haran pour se renforcer dans la pratique de la Torah et surmonter les preuves qui lattendront chez Lavan. Mais en apprenant que Yaakov partait vivre chez Lavan, certains pensaient navement que Yaakov allait se pervertir sous son influence et en sa compagnie. Essav le pensait aussi, et il na pas pris la peine denvoyer Haran des mercenaires pour tuer Yaakov (bien quil ait toujours dsir le tuer) car il se disait: Pourquoi tuer mon frre Yaakov cause des bndictions quil ma voles, car il habite Haran, parmi des gens pervers, et il va sans aucun doute subir leur influence et devenir tout aussi pervers queux et les mchants sont considrs comme morts mme de leur vivant (Brachoth 18b). Il en perdra le bnfice des bndictions, et jen tirerai profit. Mais un tel raisonnement tait sans fondement. Yaakov a pu surmonter avec succs les preuves qui lavaient assailli Haran, et il envoya vers Essav des anges pour linformer quil

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avait habit chez Lavan sans pour autant changer. Au contraire, il tait devenu encore plus fort, slevant en connaissance, en sagesse et en courage dans le service de D. Et donc, Yaakov ne craignait pas Essav. Comment peut-on dire que Yaakov a pratiqu les six cent treize commandements de la Torah, car il ne pouvait en ralit pas honorer ses parents durant son absence? Cest que ltude de la Torah est quivalente tous les commandements (Pah 1:1). Yaakov stait consacr ltude de la Torah et D. le lui comptait comme sil en pratiquait tous les commandements. Bien quil ait dit: Jai tard jusqu prsent (ibid. 32:5), Je me suis dj repenti de cette faute sincrement (voir ce sujet Brchith Rabah 21:6; 38:14; Tanhouma Bchalah 15), et si je nai pas pratiqu le respect des parents, jai tudi la Torah, et mon pre et ma mre seront heureux de savoir que je suis rest le mme Yaakov, intgre et vertueux. Le mrite que tu as, Essav, davoir honor nos parents pendant mon absence, ne taidera pas dans la guerre que tu me dclares, car mes mrites dpassent les tiens. Ce nest que grce la Torah, que Yaakov a pu vaincre les dangers et surmonter les obstacles. Il excellait dans ltude, quelles que soient les circonstances et les conditions, quelles soient favorables ou non. De mme quil tudiait la Torah Ber Cheva, de mme en se rendant Haran un lieu qui provoque la colre de D. il continua ltudier. Et donc, il envoya des anges son frre Essav pour lui faire savoir par leur entremise quil continuait observer les lois de la Torah qui le protgent, et donc quil ne le craint pas. De mme lorsque Yaakov vcut dans le pays des prgrinations de son pre (Brchith 37:1), malgr tout ce quil avait souffert cause dEssav, de Lavan, de Dina, malgr toutes ses luttes et toutes les souffrances, il resta entier dans sa Torah, comme dit le Midrach (Brchith Rabah 79:2): Il sortit entier dentre la gueule des lions et il continua servir D. sans se plaindre des circonstances et sans remettre en question Ses raisons. Il acceptait tout ce qui lui arrivait avec amour et dvotion. Ceci est indiqu dans les trois sections: Vayets, Vayichlah, Vaychev. Les deux premires lettres de ces trois mots, runies, ont comme valeur numrique quarante-huit (Vav/youd x 3 = 16x3), qui forme le mot Ham, chaleur, pour nous apprendre quen toute circonstance, mme les plus difficiles, Yaakov servait D. chaleureusement, autant par son tude que dans sa pratique. Telle est la teneur du message de Yaakov Essav: Je sers D. avec ardeur bien que jai habit chez Lavan, et toi, qui es rest chez notre pre, tu nas pas chang et tu es rest le mme homme mal intentionn. Malgr tout, Yaakov craignait davoir commis une faute quelconque (Brachoth 4a), car Essav tait rput pour son respect des parents, et cela lui donnait un certain avantage. Yaakov lui, avait quitt son pre et stait attard en route, ce qui tait une faute, de celles qui demandent tre pardonnes par la personne blesse (Yoma 85b). Il envoie des anges vers Essav, pour quils le protgent de la punition et laident le vaincre. Yaakov nous enseigne, nous ses descendants, de ne pas avoir honte cause de ceux qui se moquent de nous, et de prserver notre judasme avec fermet, avec fiert, dans le sens de jai habit avec Lavan et jai observ toutes les lois de la Torah ce qui encouragera dautres Juifs tre fiers de leur judasme. Tel est le sens de jai tard jusqu maintenant, o les mots ad atta, expriment le repentir (Brchith Rabah 21:6) cest--dire : jai mme amen dautres gens se repentir, et donc, je nai aucune crainte, ni de toi, ni de tes semblables. Nous pouvons tirer un autre enseignement. La Torah que Yaakov a apprise durant son sjour chez Lavan le protge, et toute la Torah est Paix (Tan houma Yithro 9). Nous savons que les tudiants de la Torah apportent la paix dans le monde (Brachoth 64a), grce la Torah. Et donc Yaakov envoie vers Essav des anges dans lintention de lui proposer tout dabord de faire la paix, avant de lui dclarer la guerre, comme le fit Moch avant la guerre contre Sihon: Et jenvoyais, du dsert de Kdmoth, des messagers Sihon avec des paroles de paix (Devarim 2:26). Essav ne sest pas repenti tandis que Yaakov a russi, grce la sagesse de la Torah, surmonter toutes les difficults quil rencontrait chez Lavan, et mme enseigner dautres la connaissance de D. Il nous enseigne comment nous renforcer et russir dans le service de D., toujours.

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Pahad David Lpreuve, purification du corps et de lme

Il est crit (Brchith 28:10): Et Yaakov quitta Ber Cheva et se rendit Haran . Mais il ne se rendit pas immdiatement Haran, il sest attard en route, et pendant quatorze ans il a tudi la Torah dans la Ychivah de Chem et Ever (Mguilah 17a). Ce verset ainsi que son commentaire demandent tre expliqus. Pourquoi nest-il pas dit Yaakov alla de Ber Cheva Haran ? Et surtout, comment expliquer que Yaakov ne sest pas rendu tout de suite Haran, car en fait, il se rendait Haran pour chercher une pouse, et dans ce cas, pourquoi a-t-il tard pendant quatorze ans, ce qui ntait pas conforme lordre reu de son pre? Rachi rapporte les paroles des Sages (Brchith Rabah 68:6) dans son commentaire sur ce verset: Lorsquun Juste quitte un lieu, son dpart laisse une marque profonde Lorsquil part, la splendeur, la gloire et la beaut quittent la ville . Il est difficile de le comprendre, car seul Yaakov a quitt Ber Cheva, Yitshak sy trouvait encore. Pourquoi la gloire, la splendeur et la grandeur dYitshak nont-elles pas combl le vide laiss par le dpart de Yaakov? Est-ce que seul Yaakov avait des qualits telles, que Rachi ressente le besoin de faire remarquer quil est crit (littralement) il sortit et non pas il est all ? Pourquoi Yaakov doit-il aller lui mme Haran se marier? Yitshak aurait pu envoyer un missaire avec la mission de trouver une femme pour son fils, comme le fit Avraham lorsquil envoya son fidle serviteur Elizer et lui dit : Va dans mon pays natal prendre une femme pour mon fils, pour Yitshak (Brchith 24:4). Prsentons tout dabord la version du Zohar (Leh Leha I, 77b): Avraham sortit de Our Kassdim sur lordre de D., dans le but de corriger sa personnalit, de perfectionner ses qualits, et pour parfaire son service de D. Ce nest que grce ses efforts personnels quil parviendra lpanouissement des qualits qui lui manquent . Or Yaakov possdait toutes les qualits, au point quil est dit de lui: il est le plus parfait et le plus digne des Patriarches (Brchith Rabah 76:1; Zohar I, 119a). La Torah le dcrit comme un homme intgre (Brchith 25:27), qui approfondissait sa connaissance et son service de D. dans les maisons dtude de Chem et Ever (Brchith Rabah 63:15). Yitshak connaissait les qualits de Yaakov, mais il lui manquait pourtant quelque chose; il navait pas t mis lpreuve en dehors de la maison dYitshak. Nous savons qu Avraham fut prouv et surmonta toutes les preuves (Avoth V:3). Il a mme t au-devant des preuves, pour enseigner le courage ses descendants. Avraham sest laiss jeter dans la fournaise ardente afin de sanctifier le Nom de D. et en fut sauv (Brchith Rabah 38:19). Surtout il est dit de lui (Brchith 21:33): L, il invoqua le Nom de lEternel, Matre du monde , cest--dire quil enseigna aux gens invoquer le Nom de D. (Sotah 10b; Brchith Rabah 39:24). Partout o il allait, et malgr des preuves et des difficults normes, il soccupait de rpandre la connaissance de D. dans le monde. Yitshak agit de mme, il convertit les gens (Brchith Rabah 84:2), surmonta lpreuve du sacrifice avec un parfait don de soi, au point quil fut appel un sacrifice parfait (Brchith Rabah 64:3). Il hrita des bndictions de D. Avraham, comme il est crit (Brchith 25:11): Aprs la mort dAvraham, D. bnit Yitshak, son fils , et les Sages expliquent (Brchith Rabah 61:6): Aprs la mort dAvraham, les bndictions divines furent transmises Yitshak . Il est vrai que Yaakov aussi convertissait les gens (Brchith Rabah 84:2), quil tait intgre et entier, comme il est dit: Tu as donn la vrit Yaakov (Micha 7:20), et toutes les bndictions donnes ses pres sappliquent lui et ses descendants, mais il navait pas encore eu affronter des obstacles, et il navait pas encore t mis lpreuve pour savoir sil serait capable de les surmonter ou non. Cest pourquoi Yisthak lui demanda de faire preuve de courage et daller lui-mme Haran (ce qui rpond la troisime question), ce lieu qui fait lobjet de la colre de D., et l de faire face la masse et de se renforcer dans le service de D., en surmontant victorieusement les grandes preuves quil allait affronter dans la maison de Lavan. Effectivement, Yaakov subit chez Lavan beaucoup dpreuves. Celui-ci lui donna une autre pouse que celle pour laquelle il avait travaill pendant sept ans, comme il est crit (Brchith 29:25): Or le matin,

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il se trouva que ctait Lah Nest-ce pas pour Rahel que je tai servi? Pourquoi mastu tromp? Lavan la aussi tromp concernant son salaire, comme Yaakov en fit la remarque ses pouses (ibid. 31: 7): Votre pre sest jou de moi et a chang mon salaire dix fois . Lorsque Yaakov tait en route pour se rendre chez Lavan, Eliphaz lattaqua dans lintention de le tuer, mais Yaakov la convaincu de se satisfaire en prenant ses biens (Sfer Hayachar Vayets 29:14), si bien quil arriva chez Lavan dnu de tout. Pour cette raison, Lavan ne voulait pas laccueillir (Mam Loez Vayets, ad. loc. Yalkout Chimoni 124). Bien quil lui ait dit: Quoi! Parce que tu es mon parent, tu me servirais gratuitement? (Brchith 29:15), et (verset 14): Tu nes rien moins que mon corps et ma chair , ds le premier mois, Lavan lui jeta des os comme un chien (Meam Loez ibid.). Avant de rencontrer Essav, Un homme lutta avec lui jusquau lever du jour (Brchith 32:25), et comme nous le savons, Yaakov lutta contre un ange, lange dEssav (Houlin 91a; Brchith Rabah 78:6). Mais Yaakov surmonta toutes ces preuves. Si Yaakov tait rest chez son pre, il naurait jamais connu dpreuve, et son amour de D. naurait pas t manifeste comme il le devint en un temps dpreuves et de souffrances. Yitshak lui demanda de se rendre lui-mme Haran chercher la femme de sa vie, afin quil affronte firement les preuves du temps, et quil mrite les bndictions et les faits promis. Les Sages disent (Brachoth 54a; Zohar II, 174a): Il faut bnir D. pour les souffrances de mme quon Le bnit pour les bienfaits , cela fait partie des preuves du temps. Yaakov partit lui-mme, pour faire entendre la voix de la Torah non pas comme elle se fait entendre, dans la srnit et la scurit de la maison de Yitshak, mais pour la faire entendre mme en des temps de souffrances et dpreuves. (Le nom mme de Yaakov fait allusion cela, car sa valeur numrique est la mme que celle du mot hanissayon, lpreuve, auquel est ajout le mot). Pourtant, il tait difficile pour Yaakov dobir son pre, de sortir de chez lui o il vivait la Torah et exprimait sa crainte de D. sans restriction, pour aller vers une terre inconnue. Il dt rassembler tout son courage pour prendre la route, contre son gr, et quitter un lieu qui lui tait cher pour se rendre en un lieu rempli de la colre de D. La Torah utilise le mot sortir : et Yaakov sortit pour exprimer quil a d rassembler toutes sa force dme pour quitter un lieu agrable et se rendre vers un lieu plein de dangers. Il allait avoir besoin de forces spirituelles supplmentaires pour surmonter les preuves, les obstacles et les souffrances. Dans ce but, il sattarda dans la Ychivah de Chem et Ever, o il tudia la Torah pendant quatorze ans, jusqu ce quil se sente suffisamment arm de Torah pour pouvoir affronter les preuves qui lattendaient chez Lavan, le plus grand des trompeurs (Tanhouma Vayichlah 1) et qui, comme on le sait, surpassait Essav en mchancet et en perversit (Brchith Rabah 75:6). Ce sens est indiqu dans le verset et dans le commentaire de Rachi. Concernant les mots et il se rendit Haran , Rachi explique: Il est sorti afin de se rendre Haran . Effectivement, en sortant, il avait lintention de se rendre Haran immdiatement. Mais lorsque les preuves commencrent avec lattaque dEliphaz, il sentit quil avait besoin de forces supplmentaires au moment o il quittait sa famille. Yaakov a donc dvi de sa route pour se rendre la Ychivah de Chem et Ever afin dapprofondir sa connaissance de la Torah, et de l, il alla Haran. Ceci est une leon de conduite pour chacun de nous. Afin de surmonter les preuves qui nous assaillent en ce monde, nous devrons quitter notre famille pour tudier la Torah en Ychivah. Lorsque nous sortirons affronter le monde au grand jour, il est certain que nous serons capables de faire face aux difficults et aux preuves du temps. Il est vrai que quitter la maison de ses parents est tout dabord difficile pour le jeune tudiant. Mais cest justement pourquoi il doit runir toutes ses forces et obir la voix de son pre, la voix de la Torah (Zohar III, 290a), qui lappelle et lui dit: Quitte ton pays la maison de ton pre et va tudier la Ychivah. Ce nest quaprs avoir tudi quil pourra faire face aux preuves de la vie, il en sera dautant plus aim de D. et lui-mme aura un amour plus fervent de D. Yaakov possdait toutes les vertus quil avait acquises dans la maison de son pre. Il tait rempli de tous les bons souvenirs quil y avait engrangs. Effectivement, le moindre bon souvenir peut venir en aide dans la lutte contre le mauvais penchant. Nous avons dj t tmoins du fait quun certain nombre de personnes se sont repenties et dautres ont t sauves de la perdition pour stre rappel de quelque chose quelles avaient vue ou entendue. Cest sans doute lintention des Sages, lorsquils disent que quand un homme vertueux quitte un lieu, il laisse un vide... Effectivement, lorsque Yaakov partit, il emportait dans son souvenir ce quil avait vu,

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entendu et fait durant son sjour. Il emportait tout cela dans son cur afin que cela le soutienne dans les moments difficiles. Il emporta toute chose qui laisse une impression . Tout le monde ressentit profondment son dpart, tant il tait prsent partout. Maintenant, ils se rendaient compte de la diffrence entre Yaakov et Essav son frre, car jusqu lge de treize ans, Yaakov et Essav avaient tudi ensemble (Brchith Rabah 63:14) et les gens ne les distinguaient pas, mais prsent que Yaakov tait parti, ils ressentaient la diffrence entre eux en constatant le vide. Yitshak, lui, tait aveugle, comme il est crit (Brchith 27: 1): Lorsque Yisthak devint vieux et que sa vue sobscurcit il ne sortait plus de chez lui, si bien que les gens ne rencontraient que ses fils, cest pourquoi labsence de Yaakov fit une forte impression sur les gens de la ville, et tous reconnurent ses qualits. Yaakov faisait une grande impression sur tout le monde, mais lui-mme savait quil avait besoin de dvelopper et daffermir les forces dont il aurait besoin pour surmonter les preuves et faire face aux obstacles quil allait rencontrer. Aprs son rve, Yaakov dit (ibid. 28:21): Si je retourne en paix dans la maison de mon pre... Questce dire? Rachi interprte le mot Bchalom, en paix, comme sil tait dit chalem, indemne, et il explique: Si je retourne sans faute car je nimiterai pas la conduite de Lavan . Cest dire que les prparatifs de Yaakov et toutes les forces quil accumulait, navaient pour but que de lui permettre de rsister linfluence pernicieuse de Lavan quil craignait plus quEssav, car Lavan ne se montrait vertueux que dans le but dentraner Yaakov sa perte. Le verset prcise: ...dans la maison de mon pre , cest--dire: Je retournerai aprs avoir rempli lordre de mon pre et atteint la perfection . Cest une leon valable pour tous les temps.

La Torah et la prire protgent et sauvent


Il est crit (Brchith 28:10-11): Yaakov quitta Ber Cheva et se rendit Haran, et il atteignit le lieu o il tablit son gte, car le soleil stait couch . Les Sages disent (Brachoth 26b): Vayifgaa, il atteignit, est un des mots qui indiquent la prire, pour nous enseigner que Yaakov institua la prire du soir . Nous avons dj analys dans les chapitres prcdents ce verset, mais nous navons pas pour autant puis le sujet: Pourquoi est-il prcis que Yaakov quitta Ber Cheva, puisque nous savons dj quil sy trouvait? Et pourquoi est-il prcis il se rendit Haran , puisque nous savons dj que telle tait sa destination? Naurait-il pas t plus bref de dire: Yaakov partit pour Haran ? Il faut comprendre pourquoi le mot Yayifgaa, indique la prire? De plus, pourquoi est-ce justement en cette circonstance que Yaakov institua la prire du soir, et non un autre moment? Yaakov dit (ibid. verset 16): Assurment, lEternel est prsent en ce lieu, et je ne le savais pas et les Sages expliquent (Midrach Hagadah): Si javais su, je naurais pas dormi en ce lieu saint . Yaakov ignorait-il la saintet de ce lieu o son pre Yitshak avait t prsent en sacrifice? Il faut ajouter une question encore plus difficile. Cest en ce lieu que Yaakov reut linspiration dinstituer la prire du soir. Il est certain que si ce lieu ntait pas saint, il naurait pas eu une telle inspiration et il ny aurait pas non plus tabli son gte. Sil en est ainsi, comment se fait-il que Yaakov nait pas ressenti tout de suite la saintet du lieu, dautant plus que les Sages nous disent que Yaakov tait prophte? Le livre Brchith, qui relate la vie de nos Patriarches, est rempli de secrets et dallusions, et les actes des pres sont des signes pour leurs enfants (Sotah 34a). Chacun des plus petits gestes de nos Patriarches est significatif, et chaque lettre de la Torah est un rcit complet. Chacun doit apprendre les dcoder et en dvoiler la sagesse cache, afin de sarmer dans sa lutte contre le mauvais penchant ou pour avoir la force, grce aux bons conseils quil y puise, de suivre le chemin de la Torah tout au long de sa vie. Et donc notre section cache un enseignement, enfoui et secret, concernant les voies de D., le chemin que nous devons suivre et ce que nous devons faire. A partir du moment o Yaakov quitta Ber Cheva, le temps de lexil commena. Jusque-l, Yaakov se trouvait protg dans la maison de son pre, respect par tout le monde pour sa connaissance de la Torah et sa bonne conduite (Brchith Rabah 63:15), et voil que maintenant il doit quitter son foyer. Il lui fallait faire beaucoup defforts afin dtre sauv des dangers de lexil et des prgrinations qui lobligeaient rduire ltude de la Torah. Sil devait tomber sous lemprise des tentations, il sattirerait la colre divine.

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Cest ce que la Torah nous indique. Afin dtre sauv des tentations, afin de ne pas tre influenc par les peuples trangers et la vie en exil, afin que la colre de D. ne nous atteigne pas, il faut adhrer la Torah, qui est notre source de vie (voir Brachoth 56b). Cest elle qui nous protge (Sotah 21a), cest elle qui nous accompagne dans la maison, en chemin, au coucher et au lever (Devarim 6:7), cest--dire, constamment. Cest le sens de Yaakov quitta Ber Cheva . Yaakov cest chaque Juif, car tous les Juifs sont les Enfants dIsral, de notre Patriarche Isral Yaakov. Lorsquil part en exil, il doit tre envelopp de Torah et ce nest que grce elle quil est sauv, ce nest quen elle quil trouve du rconfort. Cest ce que le verset nous indique: Yaakov sortit de Ber (le puits) Cheva cest--dire quen partant pour lexil il faut tre rempli des eaux puises dans notre source de vie. Le mot Ber (puits), a la mme valeur numrique que le mot guer (tranger), car lorsque lon se trouve exil en pays tranger, il faut tre rempli de Torah, cest la seule chose qui nous prserve de lassimilation et qui apaise toutes nos faims (le mot cheva peut aussi se lire seva, rassasi). Lorsque nous nous contentons dun peu de pain avec du sel, de leau avec mesure, et de coucher sur la dure (Avoth VI:4), la colre de D. nous est pargne. Il est crit il alla Haran , un mot qui dcrit le chemin que lon prend, pour nous indiquer quil faut prendre le chemin de la Torah, comme il est crit: Si vous marchez dans Mes lois (Vayikra 26:3), cest-dire Si vous vous occupez de suivre la Torah (Torat Kohanim ad. Loc.). Grce nos efforts pour apprendre la Torah, nous en venons en pratiquer les commandements et nous cartons de nous, et de tout le Peuple Juif, la colre de Dieu. Notre section nous enseigne aussi que le dpart de Yaakov a laiss une impression sur les gens du lieu (Brchith Rabah 68:6). Il est dit: Yaakov sortit de Ber Cheva Vayets Yaakov miBer Cheva. Les dernires lettres de ces mots (aleph, beth, rech) forment le mot Ber ce qui indique que lorsque le Juste habite un lieu, il le marque de son empreinte et il en est la gloire et la splendeur. Mais lorsque Yaakov sortit de Ber Cheva, il emportait avec lui sa Torah qui allait laccompagner et le protger en exil contre les dangers de toutes sortes. Cest alors que lempreinte dont il a marqu sa ville se fait sentir, car il en fut la gloire, la lumire et la splendeur. Malgr son soutien, la Torah ne suffit pas nous faire chapper aux dangers encourus en exil, il nous faut aussi prier et supplier Celui qui a cr le monde surtout en exil o limpuret domine et o linfluence de cultures trangres est norme. Nous avons besoin autant de la Torah que de la prire pour rendre le Satan impuissant, et surtout de la prire du soir, celle qui est attache la nuit, lobscurit, lexil, comme le dit le Rabbi de Gour dans son livre Beit Isral sur notre section (anne 5717, article I): Les Sages enseignent que Yaakov institua la prire du soir. Mon saint matre et pre ma confi que la prire du soir est celle que lon dit dans lobscurit, en exil Et il ajoute (ibid. anne 5721, article 1): Le soir indique lobscurit des gnrations faibles. Bien quenvelopps dobscurit, les Juifs peuvent prier et se rapprocher de D Autrement dit, mme dans lobscurit de lexil, lhomme a besoin de prier. Yaakov ne sest pas seulement arm de Torah, il sest aussi renforc par la prire, car maintenant il se rend Haran, vers un lieu impur et un entourage nfaste. Il a besoin des forces que procure la prire, surtout la nuit, lorsque lattribut de Justice prend le dessus (Zohar I, 169b, III, 282a). La prire du matin et de laprs-midi ne suffisent pas puisque maintenant commence le temps de lexil et cest pourquoi Yaakov institua la prire du soir. Cela nous enseigne une leon fondamentale, qui sajoute ce que nous avons dj dit. Les Sages nous disent (Soucah 52b; Kidouchin 30b): Si tu te heurtes ce vilain (le mauvais penchant), entrane-le dans la maison dtude . Il est certain que Yaakov savait que ce lieu o il faisait halte tait saint, habit par la Prsence de D. et quil devait sy comporter avec une crainte supplmentaire. Dans pareil lieu, il faut se dfaire du mauvais penchant grce la Torah et la prire, car le Satan sagite pour dranger lhomme dans son service de D., justement en un lieu sanctifi comme la synagogue etc. o lon est assailli par toutes sortes de penses distrayantes. Cest pourquoi, lorsque le mauvais penchant vient ta rencontre pour tattraper, il faut lentraner dans la maison dtude, de Torah et de prire, afin de te dbarrasser de lui dfinitivement. Yaakov dit: Assurment, lEternel est prsent en ce lieu . Il ne voulait pas dormir dans ce lieu saint, il aurait prfr renoncer aux bndictions et mme au songe et aux promesses, plutt que de dormir dans ce lieu saint. Mais le mauvais penchant voulait justement quil y dorme, afin de lui nuire et de lui causer du mal. Yaakov le surmonta, et grce sa prire il russit le vaincre et ne pas tomber dans ses filets.

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Et Yaakov sexclama: Que ce lieu est redoutable! Ceci nest autre que la maison de D., et cest ici la porte du Ciel (ibid. 28:17). Yaakov savait que ce lieu tait saint, il ignorait seulement que ctait le Saint des Saints, et il lutta vigoureusement pour ne pas sy endormir. Mais D. fit tomber sur lui un lourd sommeil et le soleil se coucha prmaturment (Houlin 91b), non pas cause de son mauvais penchant quil avait domin, mais parce que telle tait la volont de D. qui voulait rvler dans un songe les promesses et les bndictions. Cest la raison pour laquelle la prire est appele entre autres pgia, atteinte: ou lhomme est atteint par le mauvais penchant et dans ce cas, malheur lui; ou le mauvais penchant est atteint par lhomme, et malheur au mauvais penchant qui tombe sous la main de lhomme. Avec laide de D., lhomme peut vaincre le mauvais penchant. Il est crit (Devarim 21:10): Lorsque tu pars en guerre contre ton ennemi et que lEternel ton D. le livrera en ton pouvoir , de mme tu vaincras le mauvais penchant grce laide de D. Nous allons humblement ajouter autre chose. La prire du soir est importante, car elle est dite la nuit, dans lobscurit, lexil, lorsque lattribut de Justice domine. Ce nest que grce la prire que lon peut surmonter les souffrances de lexil, comme Yaakov qui pria au moment de se rendre en exil. Cest pourquoi il atteint le lieu . Il voulait se soustraire lemprise du mal, pour que ses descendants apprennent sattacher D. Ce nest que grce la Torah, au service de D. (par la prire) et aux actes de bienveillance, trois choses qui sont les piliers du monde (Avoth I:2), quil est possible de vaincre le mauvais penchant et les tentations. Tel est le fondement de la prire du soir, institu par Yaakov. Les premires lettres des noms des Patriarches : Avraham, Yitshak, Yaakov (aleph, youd, youd) ont la mme valeur numrique que le nom de D. (Aleph Hh Youd Hh) pour indiquer que le Nom de D. nest entier que grce aux trois prires que les Patriarches ont institues (Brachoth 26b). Cest Yaakov toutefois qui les a compltes, car la prire du soir indique la victoire de la saintet sur limpuret. Lorsque Isral fut rduit en esclavage sous le joug des Egyptiens, D. se rvla eux par Son Grand Nom, disant Ainsi tu parleras aux Enfants dIsral: cest lEtre Invariable (Aleph, Hh Youd Hh) qui ma envoy vers vous (Chemoth 3:14), et alors ils crirent et leur plainte monta vers D. du sein de lesclavage (ibid. 2:23). Bien quils naient pas connu la nature des prires que les Patriarches avaient institues, ils ont du moins cri vers D. et invoqu le mrite des pres, comme nous le disons dans nos supplications: Toi qui as agr notre pre Avraham et Yitshak.. et Yaakov agre-nous . D. entendit leurs prires et voulut les dlivrer dEgypte par Son Grand Nom. De mme, Yaakov a surmont le mauvais penchant en invoquant le Grand Nom de D., afin dtre sauv des dangers de lexil.

Le Temple, source de prosprit pour Isral


Il est crit (Brchith 28:11-17): Il atteignit le lieu et y tablit son gte et il eut un songe: voil une chelle dresse sur la terre dont le sommet atteignait le ciel et voil, des anges de D. montaient et descendaient de lchelle Yaakov sveilla de son sommeil et saisi de crainte, il dit: Que ce lieu est redoutable! Ceci nest autre que la maison de D. et cest ici la porte du Ciel . Lorsque Yaakov arrive ce lieu saint, le Mont du Temple (Houlin 91b), il se reposa, et dans son rve il voit une chelle dont les pieds sont sur terre et dont le sommet atteint le ciel, et des anges qui montent et qui descendent sur lchelle. Dans son rve, D. lui promet (Brchith 28:14): Ta postrit sera nombreuse comme la poussire de la terre , mais ce nest quen se rveillant quil comprit la saintet de ce lieu, puisquil dit: Ceci nest autre que la maison de D. Cet pisode est difficile comprendre et nous remplit dtonnement. Pourquoi la providence divine amne-t-elle Yaakov se coucher justement sur le lieu du Temple, et non pas ailleurs? Et de plus, pourquoi D. Se rvle-t-Il lui justement en cet endroit, alors quIl aurait pu aussi bien Se rvler ailleurs Yaakov et le bnir? Nous devons aussi comprendre et expliquer le lien qui existe entre lchelle sur laquelle les anges montent et descendent, et la promesse de D. Yaakov (Brchith 28:13): Cette terre sur laquelle tu reposes, Je la donne toi et ta postrit . Quest-ce que D. veut lui signifier?

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La volont de D. est que Yaakov, llu dentre les Patriarches (Brchith Rabah 76:1) se repose justement en ce lieu o le Temple sera rig plus tard, pour nous faire savoir quel mrite permet aux Juifs de pntrer dans le Temple, de sapprocher du Saint des Saints, de sattacher D., et pour nous faire comprendre que la prosprit, les bndictions et la russite viennent de ce lieu. De mme cette nuit-l, Yaakov a joui dun haut niveau physique et spirituel en sendormant dans ce lieu, aprs avoir pass quatorze ans sans dormir comme le disent les Sages (Brchith Rabah 68:11): Yaakov na dormi quen ce lieu, mais pendant les quatorze ans quil passa dans la maison dtude de Chem et Ever il na jamais dormi car il tudiait sans interruption Effectivement, aprs avoir ressenti la saintet de ce lieu, il fut saisi de frayeur et sexclama: Combien ce lieu est redoutable! Ceci nest autre que la maison de D. Cest--dire quune telle plnitude de saintet et de puret ne peut se trouver que dans le Temple, et alors il comprit que de l, de ce lieu destin au Temple, jaillit la source de toute saintet. Ceux qui viendront le visiter baigneront dans la saintet de la maison de D. le sanctuaire et les curs dIsral resteront attirs et attachs D. (le mot michkan sanctuaire et le mot mocheh , attir, ont la mme racine), et se sanctifieront . Cest ici la porte du Ciel , cest--dire que le temple (et le mrite quil nous procure) nous lve, nous sanctifie et nous attache la Torah qui sacquiert de quarante-huit faons (Avoth VI:5; Kala 8). Lorsque lhomme sattache son Crateur, il jouit dune exaltation suprme et ressemble cette chelle qui est pose sur terre et dont le sommet atteint le ciel (Brchith 28:12), et il slve de plus en plus haut. Pourtant, les Enfants dIsral risquent de monter et descendre dans leur vie spirituelle, tantt vainquaient le mauvais penchant, tantt taient vaincus par lui, comme le disent les Sages (Chemoth Rabah 27:8): Lorsque lon pntre dans larne, ou bien on en sort vainqueur, ou bien on en sort vaincu . Cela nous enseigne une leon valable la vie durant. Aujourdhui, alors que nous sommes en exil, que le Temple est dtruit cause de nos fautes, et que ce qui fut notre gloire, notre protection et notre sanctification, nous a quitts, il ne nous reste plus que la Torah, qui seule nous permet dtre sauvs de linfluence de lexil amer (Zohar I, 152b; III, 176a). Il ne nous reste pour nous sanctifier que les synagogues et les maisons dtude qui sont des Temples en miniature (Mguilah 29a). Il faut les frquenter afin dchapper aux influences nfastes. Les Sages ont dit (Brachoth 8a; Zohar III, 202a): Depuis le jour o le Temple fut dtruit, il ne reste plus D. en ce monde que les quatre coudes de la loi , quatre coudes de Torah et de prire. Il est dit aussi (Thilim 87:2): LEternel aime les portes de Sion, plus que toutes les demeures de Yaakov . Les portes de Sion , cest la porte du Ciel dont Yaakov eut la vision, et les demeures de Yaakov indiquent la maison dtude et la maison de prire qui nous tiennent lieu de sanctuaire et de Temple. Ce nest que lorsque nous les visitons que nous sommes sauvs de la chute, et comme le disent les Sages (Sotah 21a): La Torah protge et sauve .

Progresser dans le service de D. tape par tape


Il eut un songe: voil, une chelle dresse sur la terre et son sommet atteignait le ciel (Brchith 28: 12). Les commentateurs disent ce sujet que lchelle symbolise lhomme qui est plac sur terre, debout sur ses deux jambes, mais qui par les forces quil acquiert, peut atteindre les hauteurs du ciel. Prcisons cette ide. Si la Torah veut nous faire sentir que lhomme bien quattach la terre par sa nature physique et terrestre, est susceptible de senvoler et dacqurir la capacit de parvenir un niveau spirituel semblable celui des anges, pourquoi doit-elle rendre cette ide justement en montrant Yaakov une chelle? Pourquoi ne lui fut-il pas montr quil parvenait lui-mme au Ciel? Quel est le sens prcis de lchelle? Il faut remarquer quune chelle est faite dchelons qui permettent de monter ou de descendre ce qui serait chose impossible sans ces degrs. Cela signifie que pour atteindre les hauteurs lhomme est oblig de se mettre en danger et de prendre sur lui de faire des efforts, car le service de D. est une lvation progressive. Celui qui monte les chelons se fatigue, sessouffle et geint tant cause des efforts de plus en plus grands quil doit fournir pour continuer grimper, qu cause du temps qui se prolonge avant datteindre le but (ce qui est le contraire de la descente qui ne ncessite que peu deffort et peu de temps), car le but auquel

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il aspire, le sommet de lchelle, est encore loin. De mme celui qui veut progresser et parvenir des fins spirituelles, doit avancer par ses propres forces, progressivement et slever par tapes. Cest justement par une lvation progressive sur lchelle de la perfection que lon peut parvenir jusquau sommet. Plusieurs fois dans le Talmud nous trouvons lenseignement suivant (Chekalim 6a; Avoda Zara 20b; Yrouchalmi Chabath 1:3): Rabbi Pinhas ben Yar dit: La Torah conduit la prudence, la prudence conduit lattention, lattention conduit la propret, la propret conduit lascse, lascse conduit la puret, la puret conduit la pit, la pit conduit lhumilit, lhumilit conduit la crainte de la faute, la crainte de la faute conduit la saintet, la saintet conduit linspiration divine, linspiration divine conduit la rsurrection, et la pit est la plus grande de toutes les qualits . Dans les livres dthique, cet enseignement est appel lchelle de Rabbi Pinhas ben Yar et il sert de base au livre de Rabbi Moch Ham Luzzatto, Messilat Ycharim (Le Gaon de Vilna a dit de ce livre quil ny a pas trouv un seul mot de trop). Le mot soulam (chelle) a comme valeur numrique cent trente, ce qui indique les cent trente ans durant lesquels Adam sest spar de sa femme Hava (Yirouvin 18b), aprs avoir mang le fruit de larbre de la Connaissance. Adam voulait se sparer et se dissocier des choses matrielles, tant il se mortifiait davoir caus la mort dans le monde, et cette sparation lui valut dtre appel pieux (Yirouvin 18b; Zohar III, 76b). Cela nous enseigne que pour parvenir au degr de la pit qui est le sommet de lchelle (puisque la pit est la plus grande des qualits de lchelle de Rabbi Pinhas ben Yar), lhomme doit sloigner autant que possible de dsirs pour les futilits de ce monde, et cest alors quil pourra slever de plus en plus haut dans les degrs de la sanctification. Aprs avoir gravi avec succs tous les degrs qui conduisent la pit, il parviendra au comble de la perfection. Lchelle de Yaakov et son secret reprsente la marche progressive, la monte pas pas, qui permet datteindre les hauteurs, jusqu parvenir la vertu de pit et la rsurrection des morts. Nous devons ajouter que le verset: Et voil, des anges de D. montaient et descendaient de lchelle (Brchith 28:12), nous enseigne quabandonner les attraits et les tentations de ce monde est tellement difficile que malgr lui, lhomme monte et descend , il progresse et il chute. Mais lhomme ne doit ni paniquer ni se dcourager, car il est dit tout de suite aprs: lEternel Se tenait debout au sommet . Si lhomme comprend que D. Se tient au-dessus de lui, quIl est l pour le soutenir malgr ses montes et ses descentes dues au fait mme quil est sur la terre , attach aux choses matrielles et terrestres, en fin de compte D. laide monter toujours plus haut et parvenir aux plus hauts degrs et il atteint le Ciel. Pourtant, lhomme risque de se dcourager et de se dire: comment est-il possible quun tre comme moi de chair et de sang, de poussire de la terre, et ancr dans la matrialit, grimpe et atteigne le niveau dun ange cleste? Mais cette pense ne doit pas le dranger. Il doit savoir que D. laime et ne labandonne pas, mais quIl exige de lui toujours plus defforts. Il est clair que ce nest pas une chose facile, parce que le mauvais penchant se tient aux aguets et cherche quotidiennement tuer lhomme vertueux (Kidouchin 30b), lattraper dans les filets quil lui tend, et le faire tomber au plus bas. Lhomme doit se garder contre ces dangers, sachant que D. veille sur lui et lappelle Le servir et Lhonorer de tout son cur. Effectivement nous voyons que Yaakov sest lev progressivement, mme au-dessus des anges, comme dans sa lutte contre lange tutlaire dEssav (Houlin 91a), quil a vaincu et auquel il a dit: Je ne te laisserai pas partir que tu ne maies bni (Brchith 32:27). Mais lange ne pouvait pas partir sans la permission de Yaakov (Brchith Rabah 78:2). Il lui dit: laisse-moi partir , et celui qui renvoie est suprieur celui qui est renvoy , et (ibid. 78:6): Tu as lutt avec les puissances clestes et tu les as vaincues, tu as lutt avec les puissances terrestres et tu les as vaincues. Les puissances clestes font rfrence lange dEssav . Il nous semble ncessaire de lier cet pisode au verset (Brchith 28:14), Tu ttendras au couchant et au levant, au nord et au midi que Rachi explique ainsi : Tu ttendras tu seras puissant , puissant dans le service de D. Rabbi Hiya explique le verset Bnissez lEternel, vous Ses anges, hros qui excutez Ses ordres (Thilim 103:20) ainsi: les anges, ce sont les hommes vertueux de la terre qui sont, aux yeux de D., comme des tres clestes car ils surmontent hroquement leurs dsirs, comme lhomme courageux surmonte ses ennemis et dornavant, qui peut se tenir leurs cts, sinon ceux qui sont sanctifis et que la Prsence Divine ne quitte jamais... (Zohar I, 90a, 108).

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Le monde entier reoit sa subsistance grce aux hommes vertueux (Zohar III, 216a). Lorsque Isral marche dans les voies de la Torah et que tout Ton peuple est vertueux (Ychaya 60:21), toute la prosprit quils reoivent du Ciel leur revient de droit, et les nations du monde en jouissent aussi, grce Isral (Zohar III, 147b). Dans un tel cas, les Enfants dIsral, qui ont comme on sait le statut de fils de rois (Chabath 67a; Baba Mtzia 113b), sont comme le roi lui-mme, qui ouvre le chemin (Pessahim 110b), allant de lavant et russissant tout ce quils entreprennent, car tout fut cre pour eux et pour leur mrite. Cela nous permet de comprendre ce que D. dit Yaakov: Tu ttendras , cest--dire tu auras la force de monter et de tlever sur lchelle de la perfection et cela te permettra de recevoir ce qui test promis: En toi, toutes les familles de la terre seront bnies (ibid. v. 14), cest--dire que tous les peuples seront bnis et jouiront de la prosprit qui vient de toi. Malheur sil devait en tre autrement, si le Peuple Juif devait ne pas suivre les voies de la Torah et de la justice, car alors les nations du monde recevraient les bienfaits destins Isral. Grce un comportement vertueux, nous pouvons dominer tant nos propres dsirs que nos ennemis, et nous lever sur lchelle de la perfection jusqu la pit et la rsurrection. Qui est lhomme pieux? Celui qui se montre pieux envers son Crateur (Zohar Michpatim 114b; Pinhas 222b). D. se tient ses cts et veille sur lui comme Il a veill sur Yaakov, et Il laide franchir les degrs et slever toujours plus haut.

Deuxime volet
Et Yaakov fit un vu en ces termes: Si le Seigneur est avec moi, sIl me protge dans la voie o je marche (Brchith 28:20). Rachi explique ainsi ce verset: sIl garde la promesse quIl ma faite de maccompagner, comme Il me la dit: Je serai avec toi . La suite de ce verset dit: Si je retourne en paix la maison de mon pre, lEternel aura t mon D. et cette pierre rige en monument sera la Maison de lEternel et tous les biens que tu maccorderas (verset 21), et Rachi explique: Si Tu fais cela pour moi, moi aussi jaccomplirai mon vu, et de tous les biens que Tu maccorderas, je Ten offrirai la dme (verset 22). Il convient de sarrter sur ces versets. Tout dabord, est-il possible de dire que Yaakov avait des doutes concernant les promesses de D. et leur ralisation? En ralit D. lui a dit explicitement Je serai avec toi et Je veillerai sur toi Comment peut-il en douter? Deuximement, la condition que Yaakov pose est tonnante. Si les promesses de D. ne se ralisaient pas pour quelque raison que ce soit, Yaakov ne remplirait-il pas le vu prononc envers D.? Est-ce possible? Il sait quune faute quelconque peut causer lannulation de ces promesses (Brachoth 4a) et donc que veut-il dire par moi aussi je remplirai ce vu ? Pourquoi fait-il dpendre son vu de la ralisation des promesses de D.? Dautant plus que les promesses de D. sont conditionnelles elles se raliseront sil reste vertueux comme il le fut dans la maison de son pre, sinon, elles sont nulles et sans fondement. Cest que, ce moment-l, il lui tait trs difficile de quitter la maison de son pre et de quitter la Terre Sainte, de laquelle il puisait sa saintet, pour aller se mesurer ailleurs avec des gens mauvais et des malfaiteurs comme Lavan, lAramen. Il a donc besoin, surtout maintenant, de laide supplmentaire de D., non seulement pour ne pas fauter, mais aussi pour pouvoir continuer progresser et servir D. avec des forces toujours grandissantes. Afin de se garder de toute dfaillance, il fit un serment, comme le disent les Sages (Tanhouma Bhaaloteha 10): Les hommes vertueux font prter serment leurs mauvaises tendances . Pourquoi cela ?En vrit, il lui fut promis tellement de choses favorables. Justement pour cette raison! Il craint que la richesse lincite oublier D. au fur et mesure quil senrichit, comme il est crit: La richesse est amasse pour le malheur de celui qui la possde (Kohlet 5:12) et cest pourquoi il sest institu de lui-mme une barrire protectrice en faisant ce vu, pour ne jamais oublier la Providence Divine et pour se rappeler que tout ce quil reoit est un don gracieux de D., dans le sens o il est dit Tout vient de Toi, et nous ne Te donnons que ce qui Tappartient (Divrei Hayamim I 29:14). Cest pourquoi il sest engag prlever la dme de tous les biens que D. lui accordera dans Sa grande gnrosit. Nous savons que quiconque vit hors de la terre dIsral est semblable quelquun qui ne connat pas D. (Ketouboth 110b). Cest la raison pour laquelle il a senti la ncessit de se protger en faisant un vu, afin que tous les biens et toutes les richesses quil recevrait ne le dtournent pas du service de D. Alors il

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confirmera sa confiance en D., et il ne trbuchera pas. Telle tait la voie que Yaakov stait trace, dj dans la maison de son pre. Yaakov supplie D. de veiller sur lui et de lui donner des forces dans ses nouvelles entreprises, et des choses aussi essentielles que le pain et les vtements (il ne demande pas de grandes richesses) sans lesquelles il ne pourra pas servir D. efficacement et avec lesprit libre. Si D. lui accorde ces besoins de base, il est sr quil retournera sans dommage la maison de son pre, entier dans son corps, entier dans ses biens et entier dans sa Torah (Chabath 33b), comme ce fut effectivement le cas. Et alors: LEternel sera mon D. et cette pierre, sur laquelle il eut la rvlation de la Prsence de D., deviendra un monument , un chose solidement tablie. Il dsire utiliser ses forces et ses biens efficacement afin de prserver tout au moins le niveau spirituel quil a dj atteint, car il a lassurance quil ne subira pas la mauvaise influence de lentourage dprav qui pse sur lui. Mais il ne suffit pas quil ne descende pas de son niveau spirituel actuel, il faut qu son retour cette pierre soit plus quun simple monument, elle doit tre comme la Maison de D., cest--dire que Yaakov continuera monter lchelle de la perfection jusquau plus haut degr possible, et plus haut que les anges. Bien que parmi des gens pervers, il est difficile de maintenir son niveau et encore plus de progresser, Yaakov pourra le faire. La grandeur de Yaakov est davoir vcu dans une socit dprave sans douter de sa survie, et en aspirant aux plus sublimes russites. Tout ce que Yaakov demande D., cest de laider continuer dans la voie quil a choisie, celle de son grand-pre, et cette aide divine le sauvera et soutiendra ses progrs. Cest pourquoi il sest impos de prlever la dme sur tous les biens que D. lui promet afin de se rappeler que la moindre chose quil reoit lui vient directement de D. Aprs les promesses divines, Yaakov prie D. pour quIl laide, et de son ct, il promet que lEternel sera son D. en exil de la mme faon quil ressent la souverainet de D. en Terre dIsral. Il est possible que ce sens aussi soit inclus dans lexpression une chelle se tient sur terre , cest--dire: quil est encore plong dans les proccupations terrestres, parmi des gens mchants entirement adonns aux choses matrielles, il dsire sassurer quil aura la tte dans le Ciel quil sera entirement li et attach D. Bien que nous ayons dit que sortir dIsral, quitter la maison de son pre, tait un pas douloureux pour Yaakov, la fin de sa prire il est crit (Brchith 29:1): Yaakov se mit en route (littralement: les jambes de Yaakov le portrent), et Rachi explique: le cur de Yaakov portait ses jambes et il marchait lgrement , car il venait de recevoir une bonne nouvelle et alors tous ses membres et tous ses muscles se firent lgers et il fut en pleine possession de ses forces (Yalkout Chimoni 123). Ce soulagement tait signe que sa prire avait t agre et que D. serait avec lui, ltranger aussi. Il marchait tellement que ses pieds soulevaient la poussire du chemin. La suite du verset dit: Il alla vers la terre des Enfants de lOrient artza bn kedem , les initiales de ces mots forment le mot avak poussire (ce qui indique aussi la poussire souleve par sa lutte contre lange dEssav, car il sleva alors au-dessus des anges). Du fait que sa prire avait t agre, il marchait rapidement et avec joie pour servir D. dans tout ce quil faisait. Ce sens est aussi indiqu dans le mot il marcha , comme il est crit: Si vous suivez (littralement: marchez) Mes lois (Vayikra 26:3): tudiez les lois de la Torah (Torat Kohanim ad. loc.), et lorsque tu vas ton chemin (Devarim 6:7), cest--dire quen toute circonstance il faut soccuper de Torah (et il sarrta en chemin pendant quatorze ans dans la maison dtude de Chem et Ever). Seul celui qui progresse pas pas avance avec des forces grandissantes (Thilim 84:8) et a la possibilit de sassurer que la tte atteint le Ciel , quil verra D. Sion , et quil slvera mme au-dessus des anges.

Troisime Volet
Il atteint un endroit o il tablit son gte, car le soleil tait couch. Il prit une pierre de lendroit, la plaa sous sa tte et passa la nuit en ce lieu (Brchith 28:11). Il faut prciser le sens du mot atteint . Pourquoi nest-il pas dit par exemple il parvint , ou il arriva? Rachi nous explique, sur la base de ce que disent les Sages (Brachoth 26b), que cela indique la prire, comme il est dit (utilisant le mme mot): Nintercde pas pour ce peuple auprs de Moi (Yrmia 7:

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16), ce qui nous enseigne que Yaakov institua la prire du soir, mais la Torah nutilise pas le mot il pria, pour nous enseigner aussi quil parcourut une grande distance dun seul bond. Il nous reste comprendre pourquoi la Torah fait entendre, justement ici, que Yaakov institua la prire du soir. Rachi rapporte ce que disent les Sages (Brchith Rabah 68:11; Mguilah 17a): Il se coucha en ce lieu, en ce lieu, mais pas ailleurs. Pendant les quatorze ans o il avait tudi dans les tentes de Chem et Ever, il navait pas dormi car il tait plong dans la Torah . Yaakov na pas dormi pendant les quatorze ans o il tudiait chez Chem et Ever, de mme quil na pas dormi pendant toutes les annes o il tait au service de Lavan, comme il est crit explicitement (Brchith 31:40): Le jour, la chaleur me rongeait, et le gel la nuit, et mes yeux nont pas connu le sommeil . Comment se fait-il que justement en cet endroit, il se coucha pour dormir? Cest que D. voulait que Yaakov sendorme en ce lieu, comme le disent les Sages (Houlin 91b): Est-il possible quun homme vertueux me rende visite et que je le laisse partir sans lui avoir donn le gte? Lorsque Yaakov atteignit ce lieu qui est le Mont Moriah, le lieu du Temple, il ressentit un sommeil tout fait spcial, une fatigue comme il nen avait jamais connue, et il devait lutter vigoureusement contre lui-mme pour ne pas tomber de sommeil en ce lieu saint. Dormir dans un tel lieu est une grave offense. De plus, lheure de la prire tait arrive, cette prire que Yaakov allait instituer. Comment pouvait-il se tenir debout pour la prire du soir dans ce lieu saint, alors quil tombait de sommeil? Il en tait extrmement pein, mais D. vouait quil dorme en ce lieu afin de Se rvler lui dans un songe et lui indiquer que la tte atteint le Ciel , que malgr sa fatigue il serait capable de surmonter sil le voulait tous les obstacles et de slever sur lchelle de la perfection, tape par tape, jusqu des sommets qui atteignent effectivement le Ciel. Nous apprenons aussi, ici, la grandeur des hommes vertueux, qui mme lorsquils se sentent fatigus, regrettent la faiblesse passagre qui les entrave et entache leur service de D., surtout lorsquelle les empche dtudier ou de prier, car ils aspirent des niveaux suprieurs toute heure et tout moment. Cest pour nous une leon. Si nous agissions de mme, combien nous pourrions tre heureux!

Lassiduit dans ltude de la Torah procure une lvation personnelle


Concernant le verset (Brchith 28:12): il eut un songe; voil une chelle dresse sur la terre, son sommet atteignait le ciel et des anges montaient et descendaient de lchelle , Rabbi Berachya au nom de Rabbi Meir dit: cela nous enseigne que D. montra Ya akov lange prpos au royaume de Babylone montant et descendant, celui de la Grce, celui dEdom Yaakov fut alors saisi de frayeur et il se dit: de mme que ceux-l tombent, vais-je moi aussi tomber? D. lui dit: Ne crains pas, Isral, si tu montes, tu ne retomberas pas. Mais il na pas eu foi en la parole de D. et il nest pas mont Alors D. lui dit: Si tu avais eu foi et si tu tais mont, tu ne serais jamais tomb, mais puisque tu nas pas eu foi et que tu nes pas mont, tes Enfants seront asservis en ce monde ces quatre royaumes (Yalkout Chimoni Vayets 121; Brchith Rabah 68:21). Le Rabbin Eliahou Dessler, de mmoire bnie, auteur du livre Michtav MiEliyahou, a pos la question suivante: Comment est-il possible que Yaakov, llu dentre les Patriarches, nait pas eu foi dans la parole de D.? car D. Lui-mme lui a garanti que sil montait il ne retomberait pas et quil ne serait pas semblable aux autres nations du monde qui montent et qui chutent. Pourquoi Yaakov na-t-il pas eu foi en D. et en Sa parole? Il faut poser une autre question. Concernant le verset: Et Yaakov demeura dans le pays des prgrinations de ses pres (Brchith 37:1), Rachi rapporte le Midrach (Brchith Rabah 84a), Yaakov cherchait vivre tranquillement, et cest pourquoi le malheur de Yossef le saisit. D. dit: la rcompense qui leur est rserve dans lautre monde ne suffit-elle pas aux Justes pour quil exigent en plus de vivre tranquillement en ce monde? Cest la raison pour laquelle il fut frapp par le malheur de Yossef . Effectivement, tous les jours de sa vie, Yaakov a souffert. A peine la souffrance cause par Dina fut-elle apaise, que le malheur de Yossef arriva, et ensuite celui de Chimon, etc. Il subit beaucoup de souffrances (Tanhouma Mikets 10). Pourquoi fut-il frapp du malheur de Yossef? Pourquoi D. ne permit-il pas Yaakov de vivre tranquillement quelque temps en ce monde? Pourquoi laccabla-t-il du malheur de Yossef?

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Si D. ne dsire pas que Yaakov connaisse la tranquillit, pourquoi lui faire subir un malheur comme celui de Yossef, et pas un autre malheur, puisque D. a beaucoup de moyens? Pourquoi choisit-Il justement celui-l? Quel en est le sens? Il faut comprendre que D. a Ses raisons dempcher Yaakov de vivre tranquille en ce monde. Les Sages disent concernant le verset Si vous obissez Mes lois (Vayikra 26:3): tudiez la Torah (Torah Kohanim ad. loc.), et concernant le verset: Cest pour lui-mme que travaille le laborieux (Michlei 16:26), les Sages disent: Il uvre dun ct et la Torah uvre pour lui de lautre (Sanhdrin 99b). Autrement dit, lhomme doit faire des efforts pour connatre la Torah, ce qui lui permet de progresser dans les vertus les plus sublimes et de ne pas oublier ce quil a appris, comme il est dit (Sanhdrin 99a): Celui qui tudie et ne rvise pas ce quil a appris est semblable celui qui sme mais ne rcolte pas , il oublie ce quil a appris. D., qui sait que Yaakov aspire quelque repos en ce monde pour tudier la Torah dans la tranquillit, sans efforts, ne le lui permet pas, car la Torah ne se retient que si lon peine pour lapprendre, et non pas si elle est acquise facilement. Il fut donc frapp par le malheur de Yossef. Yaakov, en subissant ces malheurs et ces souffrances, va passer en revue ses actes, comme le disent les Sages (Brachoth 5a): Sil ne trouve pas dans ses actes de raison ses malheurs, quil les attribue son abandon de la Torah . Ainsi Yaakov passa en revue ses actes et nayant pas trouv de faute, il attribua ses malheurs un abandon de la Torah, cest--dire un manque dassiduit. Loin de nous la pense que Yaakov manquait dassiduit, lui dont la Torah tmoigne quil est intgre et passe son temps dans les tentes de la Torah (Brchith 25:27), et qui de sa vie na pas abandonn la Torah. Mais compte tenu de sa grandeur, sil tudie dans la facilit, cest comme sil nacqurait rien, car D. a des exigences rigoureuses envers ses proches (les hommes vertueux) (Ybamoth 121b). Cest la raison pour laquelle D. le frappa du malheur de Yossef. Cela explique pourquoi D. ne dsire pas que Yaakov vive dans la tranquillit en ce monde (et cela rpond la deuxime question pose). Lorsque D. invita Yaakov monter sur lchelle, lui disant que sil montait, il ne tomberait pas, Yaakov comprit que D. laiderait et lui donnerait la force de progresser, mais cela signifiait aussi quil ne monterait pas par ses propres moyens. Cest que Yaakov tient de son grand-pre Avraham, de qui il est dit: Marche devant Moi et sois parfait (Brchith 17:1), ce qui signifie quAvraham avanait par ses propres forces, contrairement Noah de qui il est dit Noah se conduisait selon D. (ibid. 6:9). Les Sages expliquent (Brchith Rabah 30:10) que Noah avait besoin daide, dencouragement, de soutien, mais Avraham avanait de lui-mme, par ses propres forces . Cest que lessentiel des efforts de lhomme doit tre consacr progresser par ses propres moyens, sans compter sur laide de D. De mme, le Gaon de Vilna refusa dapprendre la Torah avec le prophte Eliahou, prfrant apprendre tout seul. Cest aussi ce que Yaakov pensait. Il voulait grimper lchelle par ses propres forces. Et D., voyant que Yaakov refusait Son aide afin de mettre en uvre ses propres forces, lui dit: Tes descendants seront asservis quatre royaumes , ils seront exils, car cest en exil que lon est pourchass, et cest alors quil faut apprendre surmonter tous les obstacles, et slever par ses propres forces, sans laide de D. (ce qui explique la question du Rav Dessler, de mmoire bnie). Nous voyons queffectivement Yaakov seffora dtudier la Torah toute sa vie bien quil ait t sans cesse pourchass. Nous pouvons maintenant rpondre la troisime question. Pourquoi fut-il frapp par le malheur de Yossef, et non par un autre malheur? Justement, D. dit Yaakov: Tu as choisi de progresser par tes efforts personnels, sans Mon aide? Dans ce cas, quas-tu besoin de vivre tranquille? Yossef et sa disparition vont marquer le dbut de lexil. Lexil commence maintenant, et dornavant tu pourras servir D. de tes propres forces, comme tu le dsires. Nous trouvons une confirmation de la ncessit de progresser par des efforts personnels chez Yhochoua, le serviteur de Moch Rabbeinou. Il est dit (Trouma 15b-16a): Trois mille paragraphes de la loi furent oublis pendant la priode du deuil de Moch. Pourquoi? Parce que Yhochoua dsirait laide de D., il aspirait bnficier des capacits de son Matre Moch et il ne cherchait pas slever par ses propres forces. Nous trouvons aussi dans le Midrach (Yalkout Meam Loez, Devarim 34:5): Lorsque Moch disparut, Yhochoua simposa un deuil trop svre, et il pleura amrement. D. lui dit: Pourquoi prends-tu le deuil? Cest Moi qui dois porter le deuil, quant toi, va mener le peuple dans la voie de la Torah Bien que

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le deuil pour la disparition dun Juste soit obligatoire, nous savons quun deuil prolong risque de nous faire perde notre espoir en D. Au contraire, immdiatement aprs les sept jours de deuil, il faut sarmer de courage et poursuivre ltude de la Torah. Celui qui porte le deuil trop longtemps perd plus quil ne gagne, comme ce fut le cas de Yhochoua qui oublia trois mille paragraphes de la Loi. Il ne faut pas porter le deuil trop longtemps. Il ne faut pas non plus se reposer sur le soutien des hommes vertueux qui sont comme des guides et une aide divine, car chacun doit progresser de lui-mme et slever par ses propres efforts et sa propre observance. Cest alors que lon mritera tous les bienfaits, en ce monde et dans lautre.

Isral, brebis errante parmi soixante-dix nations


Les Sages disent (Brchith Rabah 68:21;Yalkout Chimoni Brchith 121) concernant le verset: Il eut un songe: voil une chelle dresse sur la terre et des anges montent et descendent (Brchith 28:12): Cela nous enseigne que D. montra Yaakov lange tutlaire de Babylone montant et descendant, celui de la Perse montant et descendant, celui de la Grce et dEdom A ce moment-l Yaakov eut peur, il se dit: de mme que ceux-l tombent, moi aussi, si je monte, je vais tomber. D. lui rpondit: Ceux-l montent et redescendent, mais toi, tu ne connatras pas de chute . Yaakov vit les anges tutlaires des empires qui dominent tous les hommes par la crainte, et il fut saisi de peur. Il demanda D. : Est-ce que mes descendants aussi, les Enfants dIsral qui observent la Torah et en pratiquent les commandements, seront soumis la domination des empires? Et D. lui rpondit que les nations du monde montent et descendent et ils disparaissent de la terre car le temps de leur apoge est court, mais les enfants dIsral, lorsquils montent narrtent pas de monter, et mme sils fautent, ils se repentent de leurs fautes , ils bondissent en avant pour atteindre des hauteurs encore plus leves. Effectivement, nous voyons quil en est ainsi jusqu nos jours. Le Peuple Juif a survcu de nombreux empires comme Babylone, la Grce, lAssyrie, la Perse, Rome, etc. qui furent en leur temps des empires imposants par leur grandeur et leur puissance, et qui sont tombs. Aujourdhui, ils sont effacs de la carte du monde, tandis que le Peuple Juif, comme une rose entre les ronces (Chir Hachirim 2:2), une brebis errante (Yremia 50:17), un agneau entre soixante-dix loups (Esther Rabah 10:11), est toujours vivant! Il est vrai que nous sommes toujours en exil, parmi des gens qui se moquent de notre peuple et qui nous oppriment au point que la souffrance est chaque jour plus grande que celle de la veille, et chaque jour est plus maudit que le prcdent (Sotah 49a). Les peuples nous mprisent, nous privent de nos droits, ne nous considrent pas comme des hommes libres, et sils nous montrent de la sympathie et de lamour ce nest quen apparence, car dans leur cur ils profrent notre gard les pires maldictions, comme il est crit: Ils ouvrent contre moi leur gueule, comme le lion qui dchire de ses crocs et qui rugit (Thilim 22:14), et dans leur cur ils tendent des piges (Yrmia 9:7). Nous avons survcu toutes leurs attaques et nous sommes rests vivants, de sorte que mme en exil nous nous sentons, nous Juifs, les plus heureux du monde. Telle est la nature du Juif. Nous sommes heureux lorsque le Chabath tend ses ailes sur le monde et lorsque les jours de ftes approchent. Nous les prparons lavance en hommes libres qui dominent la cration, comme si elle navait t cre que pour nous. Les Sages ont dit (Sanhdrin 37a): Chaque homme doit considrer que cest pour lui que le monde fut cr , et le monde fut effectivement cr pour celui qui observe la Torah et pratique les commandements, comme le disent les Sages (Brachoth 6a; Zohar III, 48a): Le monde entier ne fut cre que pour cet homme l . Le mrite du Juif qui obit aux ordres de son Crateur et Matre est vraiment grand. Telle est la diffrence entre le Juif et les autres peuples du monde. Bien que les nations soient toujours en progrs, et dominent le monde au point de croire que rien ne peut sopposer leur pouvoir, elles sont incapables de rsister un moustique qui sappelle le Juif, car elles ne parviennent pas lcraser et lanantir. Ni parce que les Juifs sont nombreux, ils sont les moins nombreux dentre les peuples (Devarim 7:7), ni parce quils sont puissants, car ils sont faibles, ni parce quils ont beaucoup darmements, car ils nont pas darmes, mais parce que les Juifs possdent larme la plus sophistique qui soit, la Torah, qui les protge, comme le disent les Sages (Sotah 21a): La Torah protge et sauve, jour et nuit . Ils ont aussi foi et

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confiance en D. qui veille sur eux, comme il est crit (Thilim 121:4): Le protecteur dIsral ne sommeille pas et en dort pas . Et de plus, ils sont unis, et nous savons que Lorsque les Juifs sont unis, la Prsence Divine rside parmi eux (Bamidbar Rabah 1:14 concernant le verset Devarim 33:5), et Lorsquils sont unis, ils peuvent faire venir la Rdemption (Tanhouma Nitsavim 1). Par le mrite de ces vertus ancres dans le Peuple Juif, tous les projets nfastes et toutes les intentions malfiques des nations envers les Juifs sont djous et elles ne peuvent pas les vaincre, comme il est crit (Ychaya 8:10): Fomentez des projets, ils choueront, proclamez des rsolutions, elles ne se raliseront pas, car D. est avec nous . Nous constatons que lorsque le Juif observe la Torah et les commandements et quil se conduit fraternellement envers son prochain, la Torah le protge en toute circonstance. Pourtant, il arrive parfois que des souffrances et des malheurs frappent aussi celui qui observe et pratique la Torah, et il traverse des preuves quil doit accepter avec amour, comme il est dit: Les souffrances qui sont motives par lamour (de D. envers celui qui en est atteint) nempchent pas ltude de la Torah et la prire (Brachoth 5a), et les Sages ont dit (ibid. Zohar III, 57b, 199b): Les souffrances effacent les fautes de lhomme . Mme sil ne se rend pas compte quil a faut tant sa faute est infime, les souffrances effacent ses fautes. Celui qui D. envoie de souffrances sans raison (apparente) est aim de Lui (Brachoth 5a) et il est crit (Michlei 3:12): D. rprimande celui quIl aime . D. la choisi pour les souffrances afin dpargner, grce son mrite, les dirigeants du peuple et le monde entier. Une grande rcompense est rserve un tel homme dans lautre monde, comme il est crit (Thilim 31:20): Combien est grande la bont que tu tiens en rserve pour ceux qui Te craignent . Celui qui ne met pas en question les voies de D. et Ses dcrets a un grand mrite, il est vertueux, et D. ne lui rserve que des bienfaits. Pour expliquer le rve de Yaakov concernant les anges tutlaires des empires qui montent et qui tyrannisent tout le monde et Isral, il faut ajouter un autre aspect. Les nations du monde ne deviennent puissantes que pour avertir Isral et lamener se repentir sincrement de ses fautes. Ds que les Juifs se repentent, les puissances du monde seffondrent et disparaissent, car la seule raison de leur suprmatie tait de ramener Isral D. Nous voyons l clairement que lorsque les Juifs fautent, ils donnent aux nations la possibilit de dominer et de menacer le monde entier, jusqu ce que les Juifs retournent D., comme il est dit (Zohar I, 229b): Par ses fautes, Isral amne les nations du monde dresser la tte . Le contraire aussi est vrai: lorsque Isral revient D., les nations perdent leur pouvoir, et leur chute aussi dpend des actes dIsral. Lorsquils observent la Torah et ses lois, aucune nation du monde ne peut les dominer, comme ce fut le cas pendant de longues priodes, et comme il est crit dans la Torah (Devarim 28:10): Et tous les peuples du monde verront que vous invoquez le Nom de D. et ils vous craindront . Pendant deux cent dix ans, les Juifs furent esclaves en Egypte. Nous savons que la fte de Pessah clbre notre libration. Dans la Hagadah nous disons: Lan prochain, des hommes libres . Quel est le sens de lesclavage et de la libration dEgypte? Les Juifs furent asservis la plus grande et la plus puissante nation de lpoque. Pourquoi? Lesclavage fut caus par le fait quil y avait dans le Peuple Juif des calomniateurs et des gens mdisants, comme le dit Moch (Chemoth 2:14): Je vois que la chose est connue et les Sages expliquent (Chemoth Rabah 1:35): Jusqu prsent, je ne savais pas pourquoi les Juifs taient asservis, mais sil y a parmi eux des calomniateurs, ils mritent lesclavage . Ils avaient aussi abandonn la Torah, et cest pourquoi ils furent asservis. Par contre, la tribu de Lvi ne fut pas asservie aux Egyptiens (Chemoth Rabah 5:20) ni rduite lesclavage, et son mrite tait si grand que les Sages disent (Pessikta Zouta Chemoth 6:16), Tant que Lvi tait vivant, les Juifs ne furent pas asservis aux Egyptiens . Cest que la tribu de Lvi observait la Torah et sa pit tait parfaite comme le disent les Sages: tous les membres de la tribu de Lvi taient des hommes vertueux (Chemoth Rabah 16:5; Bamidbar Rabah 3:1-4), contrairement aux autres Juifs qui devinrent idoltres en Egypte (Chemoth Rabah 16:2). Tous les membres de la tribu de Lvi taient des hommes pieux (Chohar Tov 104:14), comme il est crit: Les ourim et les toumim lhomme qui Test dvou (Devarim 33: 8). Ils observaient la Torah et cest la raison pour laquelle ils ne furent pas asservis, car quiconque prend sur lui le joug de la Torah est dispens du joug des gouvernements et du joug du travail (Avoth III:5). Ils furent aussi librs du joug du mauvais penchant et de la domination des nations, car seul celui qui est ancr dans la Torah est libre (Avoth VI:2), comme il est crit graves sur les tables (Chemoth

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32:16) o le mot harout, grav, peut se lire hrout, libert. La Torah nous libre des restrictions qui nous emprisonnent et quiconque soccupe de Torah est libr de toutes les restrictions et de tous les obstacles. Vous pourriez objecter: D. a dit Avraham dans le pacte dalliance (Brchith 16:13): Sache que tes descendants seront esclaves dans un pays tranger, ils seront asservis et maltraits pendant quatre cents ans et il nest pas dit sauf la tribu de Lvi ? Les membres de la tribu de Lvi ont habit en terre trangre sans tre ni asservis ni maltraits, parce quils veillaient sur la Torah et quils taient pieux (dans le verset cit, les mots guer zaarha, tes descendants, seront trangers, ont la mme valeur numrique que lexpression qui signifie cela inclut la tribu de Lvi . Par contre les mots vayeanou otam, ils seront maltraits, ont la mme valeur numrique que lexpression signifiant cela ninclut pas la tribu de Lvi . Cest une allusion merveilleuse). Mais les autres tribus dIsral, qui avaient abandonn la Torah et taient coupables de calomnie, furent cruellement asservies. Il est vrai que lorsque les Enfants dIsral commencrent se repentir et implorrent D. de tout leur cur, comme il est crit (Chemoth 2:23): Les Enfants dIsral gmirent sous le poids de lesclavage, ils poussrent des cris et leurs lamentations slevrent vers D. du fond de lesclavage , D. envoya Moch pour les sauver. Alors, les Egyptiens furent jugs et punis, et ils reconnurent la puissance divine et surent que quiconque fait souffrir Isral, nest pas pargn. Pharaon lui-mme dit: Qui est gal Toi parmi les dieux (Yalkout Chimoni 176; Pirk DRabbi Elizer 42), et la grandeur de D. se fit connatre travers le monde, lorsque Pharaon avoua: LEternel est Juste, et cest moi et mon peuple qui sommes coupables (Chemoth 9:27), car il avait appris quil est interdit de faire du mal Isral, aim et lu de D. Les commentateurs se demandent pourquoi Pharaon et son peuple furent punis. Sil a t dcrt que les Juifs seraient assujettis en Egypte, quelle faute Pharaon a-t-il commise? Lui et son peuple nont fait que raliser la sentence divine! Pourquoi furent-ils frapps par dix plaies, dautant plus que cest D. Lui-mme qui a endurci le cur de Pharaon, et dans ce cas, de quoi est-il coupable et pourquoi est-il puni? Comme nous lavons dit plus haut, lesclavage nest dcrt que dans le cas o les Enfants dIsral abandonnent la Torah et nobservent pas les commandements. Et donc, ds quils commencrent dlaisser la Torah et rapporter des calomnies, lesclavage commena et le dcret se ralisa, mais par la suite, lorsque Moch vint leur annoncer que D. lui avait dit: Jai fix Mon attention sur vous et sur ce que vous avez subi en Egypte (Chemoth 3:16), les Enfants dIsral ont fait un retour vers D. et Pharaon aurait d cesser de les opprimer. Mais Pharaon ignorait D. Non seulement il continua les faire souffrir, mais il redoubla de cruaut, disant: Il ne vous sera pas donn de paille et vous fournirez la mme quantit de briques (Chemoth 5:18) car rien ne sera soustrait de votre production quotidienne (ibid. v. 11). Cela indique que Pharaon transgressa la condition fixe par D.: Si les Enfants dIsral retournent vers D. , il lui est interdit de les faire souffrir, et D. le punit en endurcissant son cur, comme il est crit (ibid. 7:3): Jendurcirai le cur de Pharaon et il refusera de laisser les Enfants dIsral sortir dEgypte afin de le punir comme il le mrite par de lourdes catastrophes. De mme D. punit les nations du monde des mauvais traitements quils font subir Isral et Il endurcit le cur des hommes malfaisants afin que tous puissent tre tmoins de leur destruction (Chemoth Rabah 11:7; Lekah Tov Bo 10:1). D. endurcit leur cur afin de redoubler leur punition, et Il venge Isral de ses ennemis lorsquil observe la Torah et les commandements. Celui qui fait souffrir Isral ce moment-l, fait souffrir D. Lui-mme, celui qui touche un seul Juif, cest comme sil portait atteinte la prunelle de Ses yeux (Guitin 57a) et sa punition est trs svre.

Lesprit de sacrifice en lhonneur de D.


Nous nous trouvons encore dans un exil amer, et nous ne savons pas quand la Rdemption sera totale. Elle est proche, mais le terme nous est cach. Souvent, au cours de mes confrences, je cite les paroles du roi David (Thilim 44:23): Pour Toi, nous subissons la mort tout au long du jour . Subissons-nous vraiment la mort chaque jour, des Juifs succombent-ils tous les jours? Ne sommes-nous pas vivants? Lorsque nous pratiquons les commandements avec dvotion et empressement, lorsque nous luttons courageusement contre le mauvais penchant qui nous freine, cest comme si nous subissions la mort tout au long du jour, pour ce commandement que nous pratiquons avec un esprit de sacrifice. Comme le combattant

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qui en temps de guerre ne sait pas sil reviendra sans dommage de la bataille, celui qui fait face au mauvais penchant qui tente de lempcher de pratiquer les commandements de la Torah, part en guerre contre cet ennemi et se sacrifie pour pratiquer ce commandement pour Toi, pour sanctifier Ton Nom. Nous pouvons ajouter une autre explication de ce verset. Il nest pas de plus grande souffrance que de ressentir de la honte. Par exemple, lorsquun Juif portant la kipah, barbu, marche dans la rue et que les gens rient, se moquent de lui et le montrent du doigt en disant: Cest un Juif , ou lorsquun Juif demande son patron de ne pas travailler le jour du Chabath et que son employeur se moque de lui devant tous ses collgues, ou encore si un Juif prie dans le train ou dans lavion, et que les voyageurs sarrtent ct de lui et le raillent, ou si dans la rue des passants lui crient sale Juif! , dans de telles circonstances le Juif subit, chaque jour et en tout instant, honte et humiliation de la part des antismites. Et le Juif continue pratiquer les commandements en lhonneur de D., avec amour et esprit de sacrifice, sans rpliquer ceux qui le narguent car il est de ceux qui agissent avec amour et acceptent les souffrances (Chabath 88b; Yoma 23a). Il est vident que toutes ces humiliations sont pires que la mort et celui qui doit subir de telles offenses prfrerait sans doute mourir. Cest pourquoi le roi David dit: Pour Toi nous subissons la mort tout le long du jour car nous sommes sans cesse humilis par les nations cause de notre religion, et ils se rient des signes de notre Judasme. Cest comme si nous subissions la mort, car la honte est plus grave que la mort, et malgr tout, nous acceptons les souffrances par amour de D. Cette honte nous rachte de nos fautes en ce monde, et elle est prfrable la honte que nous ressentirons dans lautre monde devant tous les Justes qui sigent aux cts de D., cause des fautes commises en ce monde. Cela nous permet de rpondre une question difficile que je pose souvent. Les Sages ont dit (Vayikra Rabah 32:5; Midrach Thilim 114:4): Isral fut sauv dEgypte grce trois choses; ils navaient chang ni leurs noms, ni leur langue, ni leur faon de shabiller . Il est difficile de comprendre pourquoi les Egyptiens ont permis Isral de prserver leur langue, leur vtement et leurs noms, justement en Egypte, car les Egyptiens voulaient que les Enfants dIsral sassimilent, ils les obligeaient pratiquer lidoltrie (Chemoth Rabah 16:2) et transgresser les commandements de la Torah. Ils voulaient faire tomber les Enfants dIsral jusquau trfonds de limpuret et leur faire abandonner le Judasme. Et pourtant ils leur permirent de prserver leur nom qui indique leur appartenance au Peuple Juif, leur langue qui tmoigne de leur foi en D. qui cra le monde en Hbreu, la langue sainte (Brchith Rabah 31:8), et leur vtement spcifique qui indique que les Juifs se distinguent des autres peuples et ne se conduisent pas comme eux. Pourquoi les Egyptiens permirent-ils aux Juifs de prserver ces trois coutumes qui les distinguent des autres peuples et ne font que renforcer leur foi en D.? Une telle contradiction est-elle possible? Dune part ils les obligent pratiquer lidoltrie, de lautre ils permettent aux Juifs la pratique de leur culte. Comment concilier ces deux choses? Ce que nous avons dit va nous permettre de rpondre. La plus grande punition possible du malfaiteur dans son Jugement final est la honte quil ressentira. On lui montrera, comme dans un film, tous les vnements de sa vie depuis sa naissance jusqu sa mort, et on lui montrera le droulement de toutes les penses quil a eues durant sa vie, mme sil na pas ralis ses projets. On lui exposera tous ses faits et gestes. Il reverra son pass et toute sa vie sur terre, en prsence de D. et de lassemble des Justes. Cest probablement ce sujet que les Sages ont dit (Brchith Rabah 93:11) que les frres de Yossef furent incapables de soutenir ses reproches et scrirent: Malheur nous au jour du Jugement! Malheur nous au jour du reproche! car nous ne pourrons pas faire face aux reproches de D. lorsquIl nous montrera le droulement de notre vie, et malheur nous pour cette honte et cette humiliation. Combien grande sera la honte de lhomme qui se tient dans une grande assemble et revoit, comme dans un film, sa vie et que tous lui crient: comment as-tu os te rebeller contre D.? Les Sages ont dcrit la punition de lhomme dans lautre monde. Lorsquil verra tout cela, il voudra senfuir, mais il ne pourra pas chapper et viter le jugement et la sentence, car les anges de la destruction le poursuivront et le propulseront ici et l (Chabath 152a). Malheur celui qui ne mdite pas, ne serait-ce quune seule fois dans sa vie, et ne rvise pas en conscience ses actes en vue du terrible Jugement final, lorsquil se tiendra devant D., le Souverain Suprme.

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Cela nous permet dexpliquer pourquoi les Egyptiens nont pas oblig les Enfants dIsral changer leurs noms, leur langue et leur faon de shabiller, et pourquoi ils leur ont accord la libert de leurs pratiques religieuses. Le fait est que les Egyptiens voulaient que les Juifs restent reconnaissables pour que tous sachent quil sont Juifs et se moquent deux, les humilient (comme ils disent aujourdhui: Juif puant aux travaux forcs ). Ils pensaient ainsi maudire les Juifs, les rabaisser et les dmoraliser, les remplir de honte, les dcourager, et les amener deux mmes demander changer leur identit, faute de pouvoir supporter cette honte pire que la mort. Mais les Egyptiens firent une faute grave. Il est impossible de dmoraliser et denlever au Peuple Juif sa fiert nationale. Plus ils taient opprims, plus leur nombre augmentait et stendait (Chemoth 1: 12). Lorsque les Egyptiens humiliaient les Enfants dIsral, ceux-ci se renforaient dans leur foi et elle clatait au grand jour. Ils observaient avec une assiduit encore plus grande leur Judasme et leur foi en D. En rcompense, ils furent sauvs dEgypte, comme le disent les Sages (Yalkout Chimoni, Bchalah 240): Nos anctres ne furent sauvs dEgypte que grce leur foi, cest leur foi qui les inspira lorsquils chantrent les louanges de D. en traversant la mer (Chemoth Rabah 23:2), ce qui est tout le contraire de ce que les Egyptiens visaient: leur faire perdre la foi. Nous savons que Lme de lhomme est une lumire (Michlei 2:27) et les Sages disent ce sujet (Chabath 32a): D. dit lhomme: veille sur Ma lumire et Je veillerai sur la tienne . Aucune force au monde ne peut teindre le feu allum par la lumire de lhomme, et les nations du monde sont incapables dteindre la lumire de lme juive et de la dtruire. Il convient donc dappliquer aux Juifs le verset: Pour Toi, nous subissons la mort tout au long du jour . Les Egyptiens les humiliaient afin de les amener renoncer leur Judasme par lassitude, mais ils restrent fermes comme une muraille face leurs oppresseurs. Les Enfants dIsral sortirent triomphalement, beyad rama (Chemoth 14:8). Le mot rama est form des mmes lettres que le mot mara, amertume, cest--dire, que lamertume de la servitude et de lesclavage quils avaient soufferts en Egypte sest transforme lorsque les Enfants dIsral furent librs de leurs oppresseurs et de leurs dtracteurs, et ils sortirent dEgypte triomphalement. Il me faut mentionner ce que disent les Sages concernant Pessah et la Rdemption que nous vivons aussi de nos jours, chaque heure et chaque instant. Les Sages ont dit (Pessahim 116b): A chaque gnration, chaque homme doit considrer que cest comme si lui-mme sortait dEgypte car ce ne sont pas seulement nos anctres qui furent sauvs, mais nous aussi . Quest-ce dire nous aussi ? Un Juif, o quil se trouve en exil o il a une vie difficile et amre, o il subit des humiliations de la part des peuples qui lentourent, o il est dnigr quotidiennement et endure son lot de honte sans se laisser dcourager et russit, avec laide de D., surmonter ces preuves ce Juif-l ressemble ses anctres en Egypte qui ont subi eux aussi de grandes humiliations parce quils prservaient leur Judasme. Et donc, nous, nous sortons dEgypte chaque jour... comme nos anctres. Ces Juifs qui, aujourdhui aussi sont humilis, sont ceux qui amnent la Rdemption, car elle ne viendra que grce leur mrite. Eux seuls sont appels des hommes libres car ils sont vraiment librs de leur mauvais penchant et de leur honte, et ils se renforcent dans leur foi en D. A ce propos, il me semble quaujourdhui, alors que nous sommes toujours dans un exil amer, nous devons nous renforcer et surmonter tous les maux grce notre foi, sous peine de nous laisser dcourager dans notre pratique religieuse. Sil en est ainsi tout le long de lanne, Pessah, qui est le temps de notre Rdemption, combien plus nous devons prendre sur nous de pratiquer les commandements de la Torah sans honte, en hommes libres qui attendent la dlivrance et esprent en la grce de D. Il ne faut pas se laisser dcourager par ceux qui se moquent de nous (Orah Hayim 1:1). Cest ainsi que nous nous sentirons libres, librs des tentations de nos dsirs et prts accueillir le Messie notre Roi, et non pas comme ces hommes qui pratiquent un commandement une fois, et une autre fois le transgressent. Nous devons nous conduire en ce monde en hommes vraiment libres, afin de mriter la libert totale dans lautre monde. Il arrive pourtant quun homme accabl de malheurs dsespre, ce qui lamne remettre en question les motifs de D. Mme si un tel homme est rudit, il nest pas dit de lui quil est libre, car il est esclave de ses sentiments et prisonnier de ses ides personnelles qui linduisent en erreur et lui font croire que D. impose des malheurs sans raison, ce qui nest pas vrai. De telles penses nont aucun fondement, car de

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D. ne sort que le bien et aucun mal et tout ce quIl fait est bon. Qui sait cela sera toujours libre face aux dtracteurs. Cest ainsi que le Juif se diffrencie des nations trangres qui lentourent, en tant qulu et aim de D., pour toujours.

La Torah est un lixir de vie


Yaakov sveilla de son sommeil et dit: assurment lEternel est prsent en ce lieu et je ne le savais pas. Il fut saisi de crainte et ajouta: que ce lieu est redoutable! Ceci nest autre que la maison du Seigneur, et cest ici la porte du Ciel (Brchith 28:16-17). Et Rachi commente: Je ne le savais pas si javais su je naurais pas dormi en ce lieu . Il est tonnant que Yaakov, llu dentre les Patriarches (Brchith Rabah 76:1), se couche et sendorme en ce lieu saint. Sil stait rendu compte de la saintet de ce lieu, il ny aurait pas dormi. Est-il possible que ce lieu do les prires dIsral montent au Ciel (voir Brchith Rabah 69:7; Pirkei DRabbi Elizer 38), ce lieu auquel les Sages se rfrent lorsquils disent (Yrouchalmi Brachoth 4:5): Le Temple denHaut est exactement au-dessus du Temple den bas , soit justement lendroit que Yaakov ait choisi pour dormir? Nous avons dautres sujets dtonnement propos de cette section, trop profonde pour en expliquer tous les dtails. Concernant le verset: Il tablit son gte en cet endroit car le soleil stait couch (ibid. verset 11), les Sages expliquent que D. fit disparatre le soleil avant son heure, afin dobliger Yaakov sarrter en cet endroit (Sanhdrin 95b). Il est difficile de comprendre pour quelle raison D. obligea le soleil se coucher avant son heure justement pour que Yaakov dorme en ce lieu? Pourquoi ne resterait-il pas veill? Tout dabord il est dit: Il prit des pierres de lendroit et les plaa sous sa tte (verset 11), et ensuite il est dit: Yaakov se leva de grand matin et il prit la pierre quil avait place sous sa tte (verset 18), et non pas un certain nombre de pierres, comme il est dit prcdemment. Les Sages expliquent (Houlin 91b): Yaakov prit douze pierres quil plaa sous sa tte, mais les pierres se disputrent entre elles, chacune disant: cest sur moi que cet homme vertueux va reposer sa tte, si bien que D. transforma toutes ces pierres en une seule . D. ne fait pas de miracle sans raison, et donc, quel enseignement tirer de celui-l? A ce propos, il faut aussi se demander pourquoi, le lendemain matin aprs ce miracle, les pierres sont restes unies, car ce moment-l, le miracle ntait plus ncessaire, et les pierres auraient pu retourner leur tat initial de douze pierres spares? Il est crit : Il prit la pierre et lrigea en monument, et il rpandait de lhuile sur son fate . Pourquoi verser de lhuile sur la pierre? Que signifie cette onction? Comme nous le savons, le Temple allait tre construit plus tard en ce lieu o Yaakov stait endormi, car ctait le Mont Moriah (Houlin 91b). D. dirigea les vnements de telle sorte que Yaakov sendormit justement en ce lieu do toutes les prires des Juifs montent au Ciel, car Il dsirait Se rvler lui et lui faire savoir quen cet endroit, le Temple allait tre plus tard construit. D. fit tomber la nuit avant son heure, justement pour que Yaakov sendorme en ce lieu et pour lui apparatre en songe et lui faire savoir ce qui allait advenir des Enfants dIsral. Pour quelle raison? Yaakov tait un homme intgre, qui passait son temps dans les tentes (de la Torah) (Brchith 25:27), et Durant les quatorze ans o il avait tudi la Torah dans les tentes de Chem et Ever, il navait pas dormi (Brchith Rabah 68:14) comme il est crit: et il dormit en ce lieu prcisment en ce lieu, mais pas dans les tentes de la Torah . La Providence pourvoyait ses besoins matriels. D. changea en sa faveur lordre naturel du monde, puisque Yaakov parcourut la route dun seul bond (Sanhdrin 95b). D. voulait aussi lui pargner les fatigues de la route, et pour lui rvler le lieu o le Temple allait tre construit plus tard, Il fit tomber sur lui un lourd sommeil, justement en cet endroit. L, Il Se rvla et lui promit la prosprit, lui et ses descendants. D. rvla Yaakov que le Temple ne serait dtruit que si lunit et les liens de fraternit entre les douze tribus dIsral devaient se rompre. Nous savons que le deuxime Temple fut dtruit cause de la haine gratuite (Yoma 9b). Ce nest que si tous les Juifs sont unis que le Temple peut continuer exister. Pour symboliser ce fait, D. prit douze pierres reprsentant les douze tribus et les fondit en une seule (Pirkei

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DRabbi Elizer 35), sur laquelle Yaakov reposa sa tte, et il pria pour que ses Enfants restent unis et maintiennent des liens fraternels afin que le Temple ne soit jamais dtruit. Cela explique aussi pourquoi, lorsquil se rveilla le matin, les douze pierres ne se sont pas spares, mais sont restes unies, pour nous enseigner que lunit est le fondement de tout, comme il est crit: Tu aimeras ton prochain comme toimme (Vayikra 18:19), qui est un principe fondamental de la Torah (Yrouchalmi Ndarim 9:4). Lorsque lunit rgne entre les individus, entre lhomme et son prochain, le Temple peut durer ternellement et il est indestructible. Mais Yaakov savait prophtiquement que deux Temples allaient tre dtruits, quils nallaient pas durer toujours, et donc que le Peuple Juif ne serait pas toujours uni. Il fut rempli de peur et de crainte pour ses descendants, il fut inquiet de ce qui allait leur arriver la fin des temps, et il ne savait pas comment ils allaient pourvoir survivre ce long et amer exil. D. le rconforta tout de suite pour ne pas assombrir le grand bonheur de Yaakov en raison de tous les bienfaits que D. lui promettait, lui et ses descendants. Pour le rassurer, D. lui procura miraculeusement cette huile donction (Brchith Rabah 69:7; Pirkei DRabbi Elizer 35) afin de la rpandre sur la pierre. Le Peuple dIsral est compar de lhuile, et Rabbi Chimon Bar Yoha dit (Chir Hachirim Rabah 1:21; Chemoth Rabah 36:1): Comme lhuile qui est tout dabord amre et en fin de compte douce, de mme Isral subit tout dabord des souffrances, et en fin de compte connat la srnit, comme il est dit: humbles auront t tes dbuts, mais combien brillant sera ton avenir (Yov 8:7). De mme que lhuile ne se mlange pas aux autres liquides, ainsi Isral ne se mle pas aux autres nations, de mme que lhuile flotte au-dessus des autres liquides, ainsi Isral sera toujours au-dessus . Lhuile (le mot chmen, huile, est compos des mmes lettres que le mot nchama , lme) fait allusion lme juive, et Yaakov qui comprenait cette allusion prit lhuile et en oignit la pierre dresse en monument (qui symbolise lunit du Peuple Juif), afin de signifier que mme si lunit devait se rompre et que le Temple tait dtruit ( cause de la haine gratuite), D. leur viendrait en aide et les sauverait de leurs oppresseurs, parce que les Enfants dIsral sont comme lhuile qui remonte toujours la surface. Ils ne se mlangeront pas aux peuples du monde et ils nimiteront pas leurs murs. Lorsquils verront combien les actes de D. sont grands, ils reviendront Lui de tout cur, ils corrigeront leurs fautes, suniront de nouveau, et ils seront sauvs et dlivrs, comme le disent les Sages (Tanhouma Nitsavim 1): Les Juifs ne seront dlivrs que lorsquils seront unis comme un seul corps . Nous voyons donc que seule la Torah a le pouvoir de protger Isral en tant que peuple, et chaque Juif en tant quindividu. Celui dont tous les dsirs et tous les actes sont fonds sur la Torah est protg par la Torah, et elle le sauve (Sotah 21a), elle le soutient et le dirige puisque lhomme est aid dans la voie quil se choisit (Makoth 10b). Sil suit la voie de la Torah, sil veut se purifier, il reoit laide du Ciel (Yoma 38b), et il russit dans tout ce quil fait et partout o il va. Bien que Yaakov nait pas dormi pendant les quatorze ans passs chez Chem et Ever, son regard ne stait pas terni et sa vigueur ntait point puise (Devarim 34:7), il ne stait pas affaibli, il navait pas connu la maladie. Au contraire ses forces physiques taient accrues par son attachement D. dans le sens o il est dit ils progressent avec des forces toujours grandissantes (Thilim 84:8), et il a mrit que la fin de ce verset aussi sapplique lui: et il verra lEternel Sion , car cest en ce lieu que D. se rvla lui. Yaakov avait acquis des forces qui lui permettaient de continuer approfondir la Torah sans devoir dormir. Ce nest que pour se marier quil quitta la maison dtude de Chem et Ever, malgr son grand dsir de continuer tudier sans se donner de repos. Si son intention avait t de dormir, il naurait pas pris des pierres pour en faire son chevet, car il est impossible de dormir sur des pierres, et il est donc certain quil a repos sa tte sur ces pierres uniquement pour quelles lempchent de sendormir profondment, car il ne voulait prendre quun bref repos. Mais D. dirige les vnements, et Il ralisa pour Yaakov un miracle vident. Toutes les pierres se sont unies en une seule, afin quil puisse dormir profondment et pour que D. vienne lui parler dans un songe. Il est certain que le sommeil de Yaakov ntait pas un sommeil ordinaire, comme nous pourrions limaginer selon nos propres critres. Son sommeil est considr par D. comme une prire, et cest ce que disent les Sages (Brachoth 26b): Ici, il institua la prire du soir . Les pierres sont restes unies en une seule, pour lui montrer que la volont de D. tait quil se repose et sendorme sans tre drang, et il se consola davoir dormi dans un tel lieu, puisquil y eut la rvlation divine.

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Les Sages nous enseignent que Yaakov nest pas mort (Taanith 5b), il est toujours vivant, comme ses descendants. Le mot mort nest pas mentionn son sujet. Lange de la mort na aucun pouvoir sur celui dont toute la vie est plonge dans la Torah, comme Yaakov (Baba Bathra 17a). A plus forte raison, lange du sommeil naura aucune emprise sur lui puisque le sommeil est un soixantime de la mort (Brachoth 57b). Il est certain que Yaacov navait aucune intention de dormir car il navait aucun commerce avec le sommeil avec la mort. Mais la Providence a voulu lui faire goter un peu de lautre monde durant sa vie. Il en est de mme pour tout homme, quel quil soit. Lorsquil tudie la Torah et y consacre toute son nergie, il reoit laide du Ciel et il est capable de surmonter de nombreux obstacles. Il reoit aussi la force et le courage de dominer ses besoins naturels. La Michnah (Avoth VI:1) dnombre les qualits de celui qui tudie la Torah de faon dsintresse et les grands mrites quil acquiert. La Torah lui donne conseil, succs, intelligence et force (Michlei 8:14). Surtout, elle est pour lui un lixir de vie comme le disent les Sages (Taanith 7a): Rabbi Bnaa enseigne: la Torah est lixir de vie pour quiconque lapprend pour elle mme . Nous savons quil existe des hommes dans les gnrations passes ou rcentes, qui nont jamais dormi, comme par exemple le roi David qui tmoigne de lui mme (Thilim 119:62): Je me lve au milieu de la nuit pour Te rendre grce et les Sages expliquent (Brachoth 3b; Bamidbar Rabah 15:12): Avant minuit, il dort un peu, semblable au cheval, et se dresse ensuite comme un lion pour servir D. Plus prs de nous, nous avons le Gaon de Vilna, le Rabbin de Brisk et dautres, pour qui Yaakov est un modle et un exemple, et qui ont surmont le sommeil par leur tude assidue de la Torah, comme il est dit: La nuit na t cre que pour ltude (Yirouvin 65a). Quiconque agit ainsi acquiert du mrite pour lui et pour ses descendants, et, comme Yaakov, il a la rvlation de ce qui arrivera ses descendants afin quil puisse les bnir dune bndiction qui se ralisera.

Les Justes vivent une vie de Torah


Maintenant nous pouvons comprendre que les Sages disent (Brchith Rabah 84:1): Yaakov dsirait vivre une vie tranquille mais le malheur de Yossef le saisit la plnitude rserve aux hommes vertueux dans le monde venir ne leur suffit-elle pas pour quils dsirent aussi vivre une vie tranquille en ce monde? Il est difficile de comprendre que Yaakov, llu dentre les Patriarches, ait pu vouloir vivre tranquillement en ce monde. Dsirait-il le repos uniquement pour pouvoir se reposer? Et sil dsire vivre tranquillement dans le but de slever et de mieux servir D. et non pas pour son propre confort, pourquoi le lui refuser? Yaakov est toujours vivant de mme que la Torah est vivante (Midrach Michlei 10), elle est un arbre de vie pour ceux qui sy attachent (Michlei 3:18), et les Justes sont considrs comme vivants mme aprs leur mort (Avoth DRabbi Nathan 34:10). Yaakov est un homme de vrit, comme il est crit Tu as donn la Vrit Yaakov (Micha 7:20), et la Torah est appele Vrit (Yrouchalmi Roch Hachanah III:8). La mort navait aucune emprise sur Yaakov. Il servait D. dans les conditions les plus difficiles, il ne connaissait ni le sommeil qui est un soixantime de la mort ni la mort, car la Torah laidait ne pas connatre le got de la mort. A partir du moment o il aspirerait une vie tranquille, cette tranquillit pourrait lamener au repos, et le repos au sommeil, et le sommeil la mort. Cest pourquoi D. dit : Le repos qui lui est rserv dans lautre monde ne lui suffit-il pas? Cest--dire durant toute sa vie, il sefforce dentrer vivant dans lautre monde sans connatre le got de la mort, et maintenant, il veut dj y renoncer? Le malheur de Yossef le saisit afin de lempcher de vivre tranquille et serein, pour que la mort nait pas demprise sur lui et quil reste vivant ternellement. Quel est exactement le malheur de Yossef qui le saisit? Yaakov savait par prophtie que si aucun de ses fils ne mourait de son vivant, ce serait pour lui signe quil mritait lautre monde (Rachi, Mam Loez Brchith 37:35; Tanhouma Vayigach 9), dans le sens o il est dit: tu sauras de ton vivant quel monde tu appartiens . Et voil que son fils Yossef disparat, peut-tre est-il mort, ce qui indiquerait quil nest pas parfait et quil va perdre sa part de lautre monde. Quelle est la raison dun tel malheur? Lorsque ses fils lui annoncent que Yossef est toujours vivant (Brchith 45:26), la vie revint dans le cur de Yaakov leur pre (ibid. v. 27) car il sut alors quil navait rien perdu, que tous ses fils avaient t saintement conus, et il est revenu la vie , dans le sens quil ne connatra pas la mort et mritera le monde Venir.

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Cest justement grce au malheur de Yossef que Yaakov le comprit. Il est crit: Tels sont les engendrements de Yaakov, Yossef (Brchith 37:2), et les Sages expliquent (Brchith Rabah 84:6): tout ce qui arriva Yaakov arriva Yossef . De plus Yaakov tudiait beaucoup avec Yossef, il lui enseigna tout ce quil savait (Brchith Rabah 84:8) et cest justement Yossef qui la sauv, car lorsque Yaakov fut pris du dsir de vivre tranquille en ce monde (ce qui laurait amen dormir et mourir), le malheur de Yossef lempcha de dormir tant il craignait la svrit du dcret. Maintenant, en apprenant que Yossef est vivant et que lui, Yaakov, mriterait le monde Venir, il fut saisi dun bonheur immense et dit: Il suffit! Mon fils Yossef vit encore! (Brchith 45:28), cest--dire: Jai un grand mrite que mon fils Yossef soit vivant, car cest grce lui que jai tant souffert, et je nai perdu ni ma vie dans lautre monde, ni ma vie en ce monde, mais je reste vivant, dans le sens o il est dit: Les engendrements de Yaakov, Yossef . Maintenant nous pouvons expliquer et comprendre pourquoi les souffrances saccumulent sur lhomme, au point quil en vient se demander: Pourquoi D. agit-Il ainsi envers moi? Dautant plus quil sagit dun homme qui possde une grande crainte de D. et qui ne dsire quaccomplir Sa volont. Pourtant, nombreuses sont les penses de lhomme, mais cest la volont de D. qui se ralise (Michlei 19:21), et Mes penses ne sont pas vos penses, et vos voies ne sont pas Mes voies (Ychaya 55:8), et tout ce que D. fait, Il le fait pour le bien (Bachoth 60b; Zohar I, 181 a), car D. qui est la source de tous les faits a dautres projets pour le bien de lhomme. Bien que lhomme ne comprenne pas pour quelle raison il lui arrive tant de malheurs et tant de souffrances, il doit les accepter avec amour car D. ne cherche pas prendre lhomme en faute (Avodah Zarah 3a), et il va sans dire quIl ne dsire pas lui causer de souffrances. SIl le fait parfois souffrir, ce nest que pour son bien, afin de lui pargner dautres souffrances plus grandes et plus douloureuses. A-t-il se plaindre des voies de D.? Le Midrach Chemouel (Pirkei Avoth VI:3) crit: Les gens accomplis, et surtout les rudits qui visent la perfection de lintelligence, ne sont pas labri des dangers de la vie mais de leurs effets nfastes, et ils ne se plaignent pas de leur sort. Au contraire, ils acceptent les peines de bon cur, car il savent que ces souffrances-l natteignent et ne dtruisent que le corps, mais pas lesprit, et ils acceptent les malheurs avec amour Pour toutes ces raisons, les Sages ont ordonn (Brachoth 44a): Il faut bnir D. dans le malheur tout comme on Le bnit dans le bonheur , car il ne fait pas de doute quun malheur conduit un bonheur encore plus grand, et mme si pour le moment on nen ressent pas le bienfait, on doit ds prsent en remercier D. car lorsque le mauvais moment sera pass, on sentira le bienfait qui nous a t rserv, et donc on doit ds prsent agir avec amour et tre heureux de nos peines (Yoma 23a), car D. rprimande celui quIl aime (Michlei 3:12). La preuve nous est donne par Yaakov qui fut accabl par le malheur de Yossef au point que tous disaient avec tonnement: Pourquoi lui arrive-t-il un tel malheur? Car toute sa vie il a tudi la Torah avec une grande assiduit malgr les terribles souffrances subies (Tanhouma Vayichlah 8), exceptes les quelques annes de srnit passes en Egypte. Pourquoi est-il puni par le malheur qui frappe son fils Yossef quil aime tant? Il est vrai que Yaakov ne rcriminait pas contre les voies de D., comme disent les Sages (Tanhouma Buber Toledot 14): Lorsque Yaakov pratiquait un commandement dans la peine, il ne se plaignait pas contre les dcrets divins . Il est certain quil craignait de ntre pas parfait, quil acceptait les souffrances avec amour, et quil passait en revue ses actes, comme le disent les Sages (Brachoth 5a): Si quelquun se voit accabl de malheurs, quil examine ses actes, sil les a examins et nen a pas trouv la cause, quil attribue les malheurs un abandon de la Torah . Il est certain que D. souffrait de devoir causer de la peine Yaakov, mais Il avait Ses raisons. Il ne voulait pas que Yaakov vive tranquille en ce monde, afin de lui faire mriter le monde Venir, afin de lui donner et ce monde et lautre monde, sans lui faire connatre le got de la mort. Et donc, le malheur qui lui arriva tait pour son bien, afin quil reste vivant, mme aprs avoir quitt ce monde. Cela nous permet dexpliquer un autre enseignement de nos Sages (Rachi Brchith 37:33; Tanhouma Vaychev 2): Les frres de Yossef ont associ D. dans le serment dexcommunication quils ont prt contre celui qui rvlerait Yaakov laffaire de la vente, et D. a consenti . Pourquoi? Sur la base de ce que nous avons dit plus haut, il est clair que D. avait Ses raisons de vouloir que Yaakov ressente cette

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grande douleur, afin quil mrite de rester vivant en ce monde et dans lautre. Cest pourquoi D. a agre le serment dexcommunication. Malgr tout, il reste un point obscur. Concernant le verset: Cette fois je peux mourir puisque jai vu ta face, puisque tu es toujours vivant (Brchith 46:30), Rachi explique au nom du Midrach (Tanhouma Vayigach 9): Je pensais que jallais mourir deux fois, une fois en ce monde et une fois en lautre, parce que la Prsence Divine mavait quitt, et je pensais que D. me demanderait compte de ta mort, mais maintenant que tu es toujours vivant, je ne mourrai quune seule fois . Ce qui signifie que tout au moins en ce monde, Yaakov va mourir. Ce nest quune faon naturelle de parler. Yaakov tait tellement heureux de navoir commis aucune faute qui lamnerait perdre le monde Venir, quil acceptait de mourir au moins une fois, en ce monde. Mais lintention de D. tait de lui faire mriter de ne mourir ni en ce monde ni dans lautre et de rester ternellement vivant. Ce sens est indiqu dans les paroles mmes de Yaakov, o le mot rav, (littralement beaucoup, et traduit ici: il suffit!) est interprt par Rachi: Jai encore beaucoup de joies et de bonheur, cest--dire en ce monde et dans lautre . Pour conclure ce que nous avons dit, celui qui tudie la Torah avec assiduit, malgr toutes ses tribulations et toutes les souffrances qui peuvent le saisir, est soutenu par D. qui renouvelle ses forces et lui donne la longvit en ce monde et dans lautre, ce qui permet de surmonter la lassitude et la mort, et de quitter ce monde sans douleur, comme ce fut le cas pour Moch, Aharon, Miriam, qui sont morts dans un baiser (Baba Bathra 17a; Midrach Hagadah Houkat 20:27; Moed Katane 28a) et les Justes sont appels vivants mme aprs leur mort (Brachoth 18a). Ceux qui esprent en D. acquirent des forces renouveles ils courent et ne se fatiguent pas (Ychaya 40:31). Mais est-ce que les Sages ne disent pas que la Torah affaiblit les forces de lhomme (Sanhdrin 26b), alors que nous voyons que Yaakov, non seulement ne fut pas affaibli, mais que ses forces furent accrues et quil navait pas besoin de dormir? Et pourtant, il ny a aucune contradiction. La Torah affaiblit les lans pour les choses matrielles, elle affaiblit les dsirs et les apptits, tandis que les forces physiques restent intactes, et au contraire, celui qui est plong dans la Torah ralise que en elle est sa vie (Vayikra 18:5). Il est dit aussi: La Torah nest prserve que chez celui qui se sacrifie pour elle (Brachoth 63b), cest--dire que la Torah annule lgosme et les apptits matriels, mais elle laisse les forces physiques intactes. Cest pourquoi lange de la mort na pas demprise sur Yaakov et ne lui fait pas peur. Seul D. est au-dessus de lhomme qui a renonc au matrialisme et qui sest entirement sanctifi par sa dvotion (cest le sens profond de la mort dans un baiser ). Il est dit que la Torah affaiblit les forces de lhomme, cest--dire sa nature terrestre, mais lui-mme en est purifi et il devient semblable un ange divin en ce quil est pur et saint, et alors il ne peut pas mourir, et il est vivant en ce monde et dans lautre.

Importance dhabiter dans une rsidence de Torah


Rabbi Yossi ben Kisma raconte: jtais en route un jour et un homme vint ma rencontre et me salua. Je lui rendis son salut et il me demanda: Rabbi, do viens-tu? Je lui rpondis: Je viens dune grande ville de sages et de scribes. Il continua: Rabbi ne veux-tu pas venir vivre avec nous, chez nous? Je te donnerai des milliers dcus en or, des pierres prcieuses et des perles. Je lui rpondis: Mme si tu me donnes tous les trsors du monde, je ne veux habiter que dans un lieu de Torah De plus, quand on meurt, ce ne sont pas lor et les pierres prcieuses qui nous accompagnent, mais la Torah que nous avons acquise et les bonnes actions que nous avons faites (Avoth VI:9). Pourquoi cet homme a-t-il demand Rabbi Yossi Ben Kisma do il venait? Sil cherchait un rudit, quimporte son lieu dorigine? Pour savoir sil avait affaire quelquun qui avait une responsabilit quelconque dans son lieu dorigine, naurait-il pas pu poser la question directement? Pourquoi cet homme dit-il: vivre avec nous, chez nous ? Une rptition qui semble superflue! Et puis, pourquoi Rabbi Yossi Ben Kisma refuse-t-il une offre si gnreuse, parce quil ne veut vivre quen un lieu de Torah? Ne semble-t-il pas que toute la discussion entre les deux hommes ne concerne que le lieu dhabitation?

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De plus, la rponse de Rabbi Yossi Ben Kisma est, premire vue, surprenante. Au contraire, il vaudrait mieux quil aille vivre dans cette ville (o il gagnera une grande fortune mme si ce nest pas son but), quil y enseigne la Torah, et quil fasse de cette ville un centre spirituel! Pourquoi refuse-t-il cette offre? Il faut mditer surtout la rponse de Rabbi Ben Kisma: Quand on meurt, ce ne sont ni lor ni les pierres prcieuses qui nous accompagnent , une remarque qui est sans rapport avec la demande de cet homme. Il me semble que les commentateurs de la Michnah ont dj soulev cette question. Nous assistons ici une dispute enflamme entre cet hommes et Rabbi Yossi Ben Kisma, une dispute qui se fait entendre jusqu nos jours et leurs voix tintent encore dans nos oreilles. Nous allons expliquer leurs arguments. Il y a des gens qui pensent: Pourquoi nous enfermer dans un ghetto communautaire, car il nest pas ncessaire de sisoler, tre un Juif religieux nempche pas de vivre une vie sociale et davoir de bons rapports avec la population environnante. Quel besoin avons-nous de regrouper tous ceux qui vivent selon les lois de D. en un seul lieu? Au contraire, dispersons-nous, ce qui nous donnera une plus grande influence sur notre entourage, et dautres arguments de ce genre. Cest justement l le problme. Les gens qui soutiennent cette opinion ont oubli la Torah ancestrale et se sont soustraits linfluence et la saintet que lon tire du fait mme que lon vit dans un lieu rempli de Torah et de crainte de D. Mme lhomme le plus mchant se retiendra de faire le mal sous linfluence dun environnement sanctifi. Dautre part, un lieu sans Torah et sans crainte de D. est comme un puits vide, o il ny a pas deau (Brchith 37: 24), il ny a pas deau, mais il y a des serpents et des scorpions (Chabath 22a). Les murs et la faon de vivre dune telle socit ne font que rendre licites le lucre et la dpravation, et de tels gens ne font que profrer des paroles vaines et tout ce quils font nest que mensonge (Thilim 144:8, 11). Ces gens pervers sont capables den venir au meurtre, comme le dit Avraham: Il ny a pas de crainte de D. en ce lieu et les habitants sont capables de me tuer (Brchith 20:11), et cest pourquoi il dit de Sarah sa femme: elle est ma sur (ibid. 20:2). En arrivant chez Avimelekh au pays des Philistins, il avait dit sa femme Sarah: Dis, je te prie, que tu es ma sur (Brchith 12:13). Pourtant, en arrivant au pays de Canaan, nous ne voyons pas quil prit cette prcaution! Faut-il en conclure que les Cananens taient meilleurs que les Egyptiens ou les Philistins ? Nous savons quAvraham ordonna explicitement son serviteur Elizer: Tu ne prendras pas de femme pour mon fils parmi les filles de Canaan (ibid. 24:3), parce quil voulait rester attach sa famille, et il est dit de Canaan quil manie des balances frauduleuses (Ocha 12:8). Pourquoi Avraham est-il si mfiant envers les Egyptiens et les habitants de Gurar? La rponse est donne par Avraham Avimelekh: Cest quil ny a pas de crainte de D. en ce lieu et les habitants vont me tuer . Non pas parce que les habitants de ce lieu naient pas la crainte de D. mais ce lieu, en lui-mme, a une mauvaise influence. Mme un Juste qui a toutes les vertus ne pourrait pas se protger contre le meurtre et autres mfaits, comme il est dit (Chemoth Rabah 1:22): Les Egyptiens sont pleins de dbauche . Cest pourquoi il est dit dans la Torah propos de la terre dIsral (Devarim 11:12): Cest une terre sur laquelle lEternel ton D. veille, elle est constamment sous lil de lEternel ton D., depuis le commencement de lanne jusqu la fin . La Providence Divine est permanente en ce lieu, ce pays en est sanctifi et ses habitants en reoivent une bonne influence. Cest aussi la raison pour laquelle la Terre Sainte ne peut pas supporter les fautes et les pcheurs, comme il est crit: Afin que la terre ne vous vomisse pas si vous la souillez (Vayikra 18:28). Et les Sages ajoutent (Pessikta Zouta 37:1): La terre dIsral vomit les mchants , ce quon ne rencontre dans aucun autre pays. Cela nous permet de comprendre la diffrence entre la terre de Canaan et lEgypte, et le pays des Philistins. LEgypte et le pays des Philistins sont entachs de crimes, il y manque la crainte de D. et la saintet. Ce sont des lieux remplis de racines do naissent des fruits vnneux (Devarim 29:17), pleins dabominations et de pchs, car cest un fait quil ny a pas de vide dans le monde, ou bien le lieu se remplit de saintet et de puret, ou bien au contraire il devient le repaire du pch et de ceux qui sy adonnent. Nous voyons dans le cas de Yaakov quun lieu saint est imprgn de la crainte de D. La Torah dcrit les instants merveilleux du rveil de Yaakov qui scria: Certes D. est prsent en ce lieu et je ne le savais

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pas! . Et la Torah continue: Il fut saisi de frayeur et ajouta: Que ce lieu est redoutable! Ceci nest autre que la maison de D. et cest ici la porte du Ciel (Brchith 28:17). De tels sentiments naissent de la saintet du lieu: une frayeur terrible nat du sentiment que D. est prsent en ce lieu. Un lieu saint, non seulement incite lhomme craindre D., mais lamne aussi une bonne conduite, morale et vertueuse. Comme lexplique le saint Rabbin Hourwitz de Nouvhardok, Yaakov ressemble un tranger errant, qui na pas o se reposer, qui na pas dargent et pas de biens puisque Eliphaz, le fils dEssav, la priv de toutes ses possessions (Sfer HaYachar Vayets; Mam Loez Vayets) et il ne demande quun peu de pain pour sa nourriture et un vtement pour se couvrir (Brchith 28:20). Et dans son sommeil, il entend clairement la promesse de D. Je suis avec toi et Je veillerai sur toi partout o tu iras Je ne tabandonnerai pas (ibid. v. 15). La premire raction de Yaakov en se rveillant aurait d tre de remercier D. avec joie pour Sa promesse. Mais non! Au contraire, sa premire raction est une autocritique: D. est prsent en ce lieu et je ne le savais pas! Car si javais su, je naurais pas dormi ici, parce quil ne convient pas de sendormir dans un tel lieu . Yaakov ressentit en ce lieu une peur faite de rvrence et de crainte. Le Midrach nous enseigne combien un lieu saint a de linfluence sur ceux qui sy trouvent (Brchith Rabah 64:18; Yalkout Chimoni 115): Lorsque nos ennemis voulurent pntrer sur le Mont du Temple, il dirent: quun Juif entre dabord. Ils cherchrent et finirent par trouver un homme du nom de Yossef Mechita qui tait prt y pntrer. Ils lui ordonnrent dentrer et lui dirent: Tout ce que tu prendras sera pour toi . Celui-ci entra et prit le candlabre en or. Ils prtextrent quun homme simple na que faire dun tel objet et ils semparrent du candlabre. Retourne, et tout ce que tu prendras sera pour toi . Il refusa. Ils lui promirent quil serait exempt dimpts pendant trois ans. Il persista dans son refus, disant: Ne suffit-il pas que jai provoqu la colre de mon D. une fois, faut-il que je recommence? Que firentils Ils le firent pitiner par un cheval de labour et cet homme hurlait: malheur! combien jai mal agi envers mon Crateur! . Le Gaon Rabbi Ham Chmoulevitz demande: Quarriva-t-il ce Juif pendant ces quelques minutes o il pntra dans laire interdite du Temple? Comment est-il arriv en tre tellement boulevers? Quelques minutes auparavant, il avait os pntrer dans ce lieu saint o mme les cruels trangers craignaient de pntrer les premiers. Nayant aucune crainte de ce lieu saint et terrible, il stait laiss soudoyer pour le profaner, au point de tomber plus bas que ces trangers. Il faut donc se demander ce qui lui est arriv pour quil refuse maintenant avec vhmence de retourner dans le Temple, et prfre mourir pour son refus dans des souffrances atroces. Do provient ce courage indomptable? Et le Gaon Rabbi Ham rpond: Cela nous montre combien leffet dun bref instant dans un lieu saint est puissant. Car pour y tre entr, pour y avoir pass un peu de temps, il en fut transform. Pour tout lor du monde, il ne voulait pas retourner dans le Temple, car il ntait dj plus le mme homme. Cest que le lieu lui-mme purifie lme, et allume en elle ltincelle de saintet enfouie dans toute me juive. Il fut enflamm par cette tincelle au point dtre prt non seulement perdre toutes les faveurs qui lui furent promises, mais aussi la vie elle-mme. Un grand sacrifice de soi et un grand courage! Tel est le rsultat dun moment pass dans lenceinte du Temple! Cela nous permet de comprendre maintenant la discussion entre cet homme et Rabbi Yossi Ben Kisma. Les paroles de cet homme nous laissent perplexes: est-ce ainsi que lon recherche un rabbin rudit pour la communaut? De plus, sil dsirait tant engager pour sa ville un rabbin, quil tait prt payer une grande fortune, il est certain quil tait riche. Pourquoi nallait-il pas, lui, habiter dans la ville de Rabbi Yossi Ben Kisma? Troisimement, il nest pas de bon ton dentamer la conversation avec un rabbin par des promesses allchantes pour le cas o il accepterait la proposition. Naurait-il pas t plus propos de discuter avec lui de sujets concernant la communaut et la ville? Pensait-il pouvoir acheter Rabbi Yossi Ben Kisma? La conduite de cet homme montre quil est, tout comme les gens de sa ville, plus attir par les richesses matrielles que spirituelles, cest--dire que chez eux, les valeurs sont inverses. Peu leur importe qui sera le rabbin de leur ville, pourvu quil y en ait un! Car de leur point de vue, tous les rabbins se valent cet homme demanda Rabbi Yossi Ben Kisma: De quelle ville viens-tu? Afin se mesurer limportance quil accordait sa ville et son lieu de rsidence, et jusqu quel point il tait attach son entourage, compos

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de gens rudits. Et alors, lorsque Rabbi Yossi lui rpondit: Dune grande ville de sages et de scribes , cet homme comprit quil louait sa ville dorigine en tant que lieu de Torah, et il tenta de le convaincre en lui offrant une grande somme dargent, mais Rabbi Yossi rpondit: Sache quon ne peut pas macheter avec de lor, quel quen soit le montant, car je ne peux vivre que dans un lieu de Torah, et vous qui habitez dans un lieu sans Torah, vos valeurs sont inverses. Les problmes spirituels sont pour vous secondaires et nont pas la priorit dans votre chelle de valeurs. Non seulement il vous manque le respect et le sens des valeurs de la Torah, mais vous vous loignez de jour en jour encore plus du but auquel il faut tendre, parce que vous investissez toutes vos forces et tout votre temps dans des vanits temporelles, et votre seul but est daccumuler de grandes richesses et rien de plus. Sachez donc que ce nest pas la bonne voie et ce nest pas la bonne ville. Car lheure de sa mort, ce nest pas la richesse accumule qui accompagne lhomme, mais les bonnes actions quil a multiplies de son vivant. Pourquoi viendrais-je chez vous enseigner la Torah, alors que vous ne dsirez pas cet enseignement et que vous ne recherchez que les biens matriels? Celui qui est entour par des rudits en Torah, des gens sanctifis par leurs actes, parviendra coup sr redresser ses dfauts, mme malgr lui, et se sanctifier, se purifier et acqurir des vertus suprmes. Chacun doit aspirer nhabiter que dans un lieu qui respire la Torah! Je me souviens quen lan 5743 (1983), lorsque jai accompagn mon pre et matre, de mmoire bnie, au Maroc pour nous prosterner sur la tombe du Saint Rabbi Ham Pinto, nous avons travers le Mlah. Mon pre me raconta quelle communaut merveilleuse vivait en ce lieu du temps de son pre. Enfin, mon pre sarrta, comme sil voulait conclure tout ce quil avait dit pendant la visite, et il sexprima peu prs en ces termes: Grce aux murs du Mlah, un certain nombre de Juifs furent sauvs de la perte et de lassimilation . Aujourdhui, je comprends quelque peu ce que mon pre, que son mrite nous protge, voulait dire.

Un mauvais entourage dtourne du service de D.


Et Yaakov fit un vu en ces termes: Si lEternel est avec moi, sIl me protge dans la voie o je marche, sIl me donne du pain manger et des vtements pour me couvrir (Brchith 28:20). Il faut expliquer ce verset: A lheure o Yaakov est poursuivi par son frre Essav qui veut le tuer, il sinquite de pain et de vtements? Est-il si difficile dobtenir un peu de pain et quelques vtements pour se couvrir? Et surtout, si D. a promis Yaakov de veiller sur lui partout o il irait (ibid. 28:15), une telle protection physique implique certainement de subvenir tous ses besoins, y compris le pain et les vtements, qui sont des besoins primordiaux sans lesquels lhomme ne peut pas vivre, donc pourquoi Yaakov demande-t-il spcifiquement du pain? Cest que, sans aucun doute, Yaakov navait pas lintention de demander que D. pourvoie ses besoins matriels, mais plutt ses besoins spirituels, choses qui ne furent pas incluses dans les promesses de D. (voir Kli Yakar ad. loc.), et cest pourquoi il demande du pain manger . Le pain symbolise la Torah, comme il est crit (Michlei 9:5): Venez manger de mon pain et les Sages expliquent (Brchith Rabah 70:5; Yalkout Chimoni Vayets 123): La Torah est appele pain , et ils ajoutent (Avoth III:17): Sans pain pas de Torah, sans Torah pas de pain , car lun dpend de lautre. De mme, si Yaakov demande des vtements pour se couvrir, il ne veut pas dire littralement des vtements, mais une protection physique et spirituelle contre linfluence de son entourage. Pourquoi une telle prire? Yaakov savait quil se rendait prsent chez Lavan, le plus grand des trompeurs (Tanhouma Vayichlah 1), et quil aurait grand besoin de laide de D. afin dtre sauv de sa mauvaise influence, car il est dans la nature humaine dtre influenable, en bien comme en mal. Le Rambam lgifre ce sujet (Halakhoth Dot VI:1): Il faut se tenir loign des gens mchants qui marchent dans lobscurit, afin de ne pas imiter leurs faons dagir De mme, si quelquun se trouve dans une ville dont les dirigeants sont mauvais et dont les habitants ne se conduisent pas correctement, il doit aller vivre dans une ville o les gens sont vertueux et se conduisent correctement Yaakov craignait linfluence nfaste de lentourage et cest pourquoi il demanda D. de veiller sur lui. Cette explication est taye par le commentaire du Sforno sur le verset (Brchith 28:20): Si D. est avec moi cest--dire, sIl me protge de tout oppresseur et entrave les desseins de ceux qui cherchent

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dtourner lhomme de sa foi, comme il est dit (Yirouvin 41b): Trois choses incitent lhomme perdre sa foi les trangers, un mauvais esprit et les misres de la pauvret . Et il poursuit: Prserve-moi des gens mchants . Le Ramban dans son commentaire approfondi de la Torah, (Brchith 33:15) avance le mme argument concernant Yaakov et Essav. Pour donner un exemple, Rabbi Meir Baal Haness (Brachoth 10a) avait pour voisins des voyous qui le troublaient et il souhaitait leur mort, mais sa femme lui dit: Il nest pas crit que les pcheurs disparaissent mais que les pchs disparaissent (Thilim 104:35). Prie plutt quils se repentent . Cet pisode montre que Rabbi Meir craignait linfluence nfaste de son entourage. Les Sages ont dit aussi (Avoth I:7; Avoth DRabbi Nathan 9:1): loigne-toi dun mauvais voisin et ne frquente pas les hommes mchants. Sil en est ainsi, nous comprenons un autre aspect de la personnalit de Yaakov. Concernant le verset (Brchith 37:1): Yaakov sinstalla dans le pays des prgrinations de ses pres Les Sages expliquent (Brchith Rabah 4:5; Rachi ad. loc.): Yaakov vit tous les chefs des tribus dEssav cits prcdemment. Il fut saisi dtonnement et se dit: qui pourra les vaincre tous? Et il est dit ensuite (ibid. 37:2): Voici la descendance de Yaakov, Yossef . Cela nous laisse perplexes. Yaakov avait reu la promesse explicite de D. quIl veillerait sur lui contre les attaques des chefs des tribus dEssav et il ne fait aucun doute quil avait confiance en cette promesse divine, dautant plus que ses fils taient des hommes vertueux et courageux et quils ntaient entachs daucune faute (Chabath 146a; Chemoth Rabah 1:1). Que craignait-il sil tait protg contre les attaques dEssav lui-mme? Ce que nous avons dit plus haut nous donne la rponse. Yaakov craignait pour ses Enfants linfluence de leurs voisins, ces descendants dEssav qui vivaient sans soucis, car il avait dj eu lexprience de la cohabitation avec son frre et il savait combien linfluence dune mauvaise frquentation est nfaste. Bien auparavant, lorsquils staient rencontrs, il est dit: Essav courut vers lui et lembrassa et spancha sur son paule et le baisa et ils pleurrent (Brchith 33:4). Nous savons que ces larmes et ces baisers ont caus beaucoup de pleurs par la suite (pour lindiquer, le mot vaichakhou, il le baisa, est accentu par des points dans le texte). Et donc Yaakov craignait tous ces chefs de tribus dEssav, mais en fin de comte, lorsquil vit que la maison de Yaakov serait un feu, la maison de Yossef une flamme, la maison d Essav un amas de chaume; ils le brleront, le consumeront et rien ne survivra de la maison dEssav, cest lEternel qui le dit (Ovadia 1:18), il fut rassur, car une tincelle issue de Yossef les brle tous (Brchith Rabah 84: 5) et Yossef est, comme on le sait, le destructeur dEssav (Pessikta Zouta; Rachi Vayets 30:25; Zohar I, 155a). Dautant plus que D. a promis (Baba Bathra 123b): Les descendants dEssav ne tomberont quentre les mains des descendants de Yossef . Il se cache autre chose dans le fait quun mauvais entourage a une influence nfaste. Il est dit de Rabbi Yossi Ben Kisma (Avoth VI:9) quil refusa daller vivre dans une ville o il recevrait de grandes richesses et il prfra rester dans sa ville, une grande ville habite par des Sages et des scribes, afin de vivre dans un lieu de Torah, comme le dit le roi David (Thilim 119:72): Ta Torah est pour moi plus prcieuse que des monceaux de pices dor et dargent , et il est dit (Michlei 3:14): Son commerce (de la Torah) est prfrable au commerce de largent . Les commentateurs demandent (Midrach Chemouel ad. loc. et Abarbanel): Pourquoi est-ce que Rabbi Yossi Ben Kisma na pas donn cet homme et aux gens de sa ville la possibilit de venir vivre avec lui, ce qui leur aurait sans doute permis de profiter de ses enseignements, comme il est dit: la prosprit de lhomme vertueux profite son voisin (Ngayim VI:12; Soucah 56b)? Pour donner une explication diffrente de celle expose dans le chapitre prcdent, citons tout dabord les paroles de nos Sages concernant le verset (Devarim 4:5): Voyez, je vous ai enseign des lois et des statuts selon ce que ma ordonn lEternel mon D. afin de vous y conformer dans le pays o vous allez entrer pour le possder . Les Sages disent (Ndarim 37a): De mme que je vous ai enseign la loi gratuitement, de mme vous lenseignerez gratuitement . Cest--dire quil est interdit de recevoir un salaire pour lenseignement de la Torah et il faut la transmettre aux autres gratuitement. Il nous faut comprendre pourquoi la Torah interdit de recevoir un salaire pour lenseignement de la Loi. Car en fin de compte, il est possible quen payant lapprentissage de la Torah, llve apprcie mieux cet enseignement, comme tout ce qui sacquiert grand prix? Cest que la Torah est un besoin vital, et elle est

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tout aussi ncessaire que lair que lon respire. De mme que lair que lon respire nous fait vivre, de mme en se pntrant de Torah on simprgne de la lumire cache du monde Venir, que D. a mise en rserve pour les Justes (Haguigah 12a) et elle claire ce monde. Nous savons que la Torah est lumire et cette lumire comme lair est donne lhomme qui tudie la Torah. Sans la lumire de la Torah, la vie de lhomme na pas de sens. Elle est un arbre de vie pour ceux qui sy attachent (Michlei 3:18) et comme disent les Sages (Avoth DRabbi Nathan 34:10): La Torah est appele vie . Il sensuit ncessairement quelle na pas de prix, sa valeur est sans limite et aucune valuation ne peut en traduire le prix, dans le sens o il est crit (Thilim 119:72): La Torah est pour moi plus prcieuse que des monceaux de pices dor et dargent . Cest pourquoi on ne doit pas se faire rmunrer pour son enseignement, pas plus que lon ne paie pour lair que lon respire. De plus, la Torah se garde de lier des questions dargent ltude car il est interdit de rechercher largent et de sy attacher et il est interdit daller dans des lieux o largent est essentiel, de peur dtre entran par lamour du gain, ce qui pourrait nous amener abandonner la Torah. Afin dempcher que lhomme se laisse aveugler par largent, surtout de nos jours o linfluence trangre est grande, il est certain quil convient de se dtacher des richesses. Cest ce que disent les Sages (Chabath 147b): Le vin de Prougayta a eu le dessus sur les dix tribus , car ces tribus se sont laisses entraner par les plaisirs matriels. On peut aussi expliquer cet interdit par le fait qu il ny a pas de rcompense en ce monde pour lobissance aux commandements (Kidouchin 39b; Houlin 142a), et il ny a pas de commandement plus important que celui denseigner la Torah, au point que les Sages ont dit (Baba Mtsia 85a): Celui qui enseigne la Torah a le mrite de siger dans la Ychivah Cleste et mme si D. a prononc un dcret, il est capable de lannuler , et aussi (Sanhdrin 19b): Celui qui enseigne la Torah au fils de son prochain, cest comme sil lavait lui-mme enfant . Il est donc certain quil ne reoit pas de rcompense en ce monde, et quil doit attendre de recevoir la rcompense qui lui est rserve dans le monde Venir, o sa rcompense sera de continuer soccuper de Torah comme le disent les Sages (ibid. 92a): Quiconque enseigne la Torah en ce monde a le mrite de lenseigner aussi dans le monde Venir . Linfluence de lentourage est telle quil faut sloigner dune socit qui court aprs les richesses et largent. Celui qui sen loigne mritera tous les faits. Nous sommes en mesure de comprendre le don de la Torah. La Torah renferme beaucoup de secrets et comme on sait, il ne faut rvler ces secrets qu celui qui est capable de les comprendre. Il est interdit de les rvler quelquun qui na pas le sens des responsabilits. Cest pourquoi les Sages ont dit (Chabath 88a; Chemoth Rabah 29:9): Au moment du don de la Torah, toute la cration sest immobilise et tous ont gard le silence, les oiseaux ne volaient pas, les oisillons ont cess de chanter Pourquoi? Pour faire savoir que les secrets de la Torah ne sont rvls qu ceux qui sont responsables et dtachs des plaisirs de ce monde. Lorsque D. rvla les secrets de la Torah, toute la cration se tint coite. Celui qui reoit un salaire nest pas dtach des contingences matrielles et les secrets de la Torah ne lui sont pas dvoils. (Le mot hinam, gratuitement, a la mme valeur numrique que celle des mots z hou hassod, tel est le secret). Lhomme doit tre reconnaissant D. pour les secrets quIl lui a rvls. Le mot Kabalah signifie: ce qui est reu, cest--dire que les Enfants dIsral ont eu le mrite de recevoir aussi les secrets sotriques de la Torah. Pourquoi? Le mot Kabalah (lorsque les lettres sont comptes avec le mot lui-mme) a la mme valeur numrique que le mot Lekhah, lenseignement moral, comme il est dit (Michlei 4:2): Car je vous donne dutiles leons, Lekhah Tov , cest--dire que ce sont les secrets de la Torah qui sont bons et utiles. D. nous a fait la grce de nous rvler les secrets de la Torah, car Il aurait pu ne nous donner que la Torah crite, sans plus. Mais tait-ce suffisant pour nous permettre datteindre la perfection? Allgoriquement, cest comme si quelquun donnait son ami une belle armoire pleine dustensiles en or sans lui remettre les clefs de cette armoire Puisque D. nous a fait la bont de nous rvler les secrets de la Torah, il nous est interdit dtre ingrats et cest pourquoi nous devons tre la hauteur de notre responsabilit, faire taire en nous les attraits de ce monde et ne pas recevoir de salaire pour lenseignement de la Torah. Nous devons pourtant comprendre une chose fondamentale. Pourquoi D. veut-il enseigner les secrets de la Torah au peuple dIsral? Mme sans cet enseignement, ils eurent foi en D. comme il est dit avant le don de la Torah (Chemoth 14:31): Ils eurent foi en D. et en Moch Son serviteur . En outre, avant mme de savoir ce que la Torah ordonnait, les Enfants dIsral avaient dit (ibid. 24:7): Nous obirons et nous

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entendrons , ce qui leur valut dtre taxs de peuple cervel qui parle avant davoir cout (Chabath 88a), et ils en ignoraient les secrets. Pourquoi D. leur rvla-t-Il les secrets de la Torah? Pour rpondre, il faut rappeler que D. a oblig les Enfants dIsral recevoir la Torah (et en cela, il leur fit une grande faveur, comme nous lavons dit plus haut) car D. a brandi la montagne au-dessus de leur tte et leur a dit: Si vous acceptez la Torah, cest bien, sinon vous serez ensevelis ici mme (Chabath 88a; Avodah Zarah 2b; Zohar III, 125) et cela, malgr leur grande foi. Cest quen des endroits o linfluence extrieure joue un rle nfaste, la foi risque de flancher sous sa pression, et cest pourquoi le silence, lisolation, une vie calme loin des distractions de ce monde sont ncessaires. Cet isolement nous protge comme une muraille imprenable contre linfluence de la socit environnante. Malgr sa grande foi, Isral a reu de D., en mme temps que la Torah, les secrets qui y sont cachs, son sens secret qui le protgeront lorsque les temps seront durs, et les sductions nombreuses. Nous avons l, la rvlation dun secret des plus merveilleux. Au moment du don de la Torah il est dit (Chemoth 19:16, 18, 19): Au troisime jour il y eut du tonnerre et des clairs et un son de cor trs intense le Mont Sina tait couvert de fume la fume slevait comme la fume dune fournaise et le son du cor redoublait dintensit Les Sages expliquent (Yalkout Chimoni Chemoth 286): Au moment du don de la Torah le monde entier trembla , car le don de la Torah sest fait grand fracas, et il est dit aussi (Choftim 5:4): La terre trembla, les cieux aussi Mais navons nous pas dit par ailleurs que toute la cration sest tue, sans mme faire entendre un souffle? De quelque ct quon les considre, les deux descriptions se compltent. Tout dabord, il y eut un grand fracas, mais D. na pas voulu que ce bruit se prolonge car les Enfants dIsral auraient pu sy habituer, et comme nous lavons dj dit, ils pourraient shabituer vivre sous linfluence de leur bruyant entourage et cela leur porterait prjudice et cest pourquoi, aprs ce grand bruit, au moment de la proclamation des Dix Commandements, le monde entier sest tu. Cela nous enseigne que lhabitude peut parfois tre nuisible, car en fin de compte on shabitue aussi fauter. Nous connaissons lhistoire de ce rabbin de Londres qui passa, un Chabath, devant un magasin pourvu dune mzouza sur le seuil, et qui tait ouvert Le rabbin en fut choqu et protesta. Plusieurs Chabatoth de suite, il passa devant ce magasin et en fin de compte il ne sarrtait plus Lui, comme beaucoup dautres, stait habitu au fait quun magasin juif puisse malheureusement tre ouvert le Chabath. Cela montre que lhabitude peut nous amener tolrer une faute au point de nen tre plus choqus. Mais il est interdit de shabituer, il faut au contraire surmonter les mauvaises habitudes justement en adhrant la Torah, et la voix de la Torah fait taire les bruits extrieurs et les mauvaises influences. Il est dit: La Torah, D. et Isral sont unis (Zohar, Aharei moth 73a), ce qui indique que si la Torah comprend des secrets, Isral aussi a ses secrets et chaque juif porte le Nom de D. (le mot Yhoudi, Juif, comprend les lettres du Nom de D. et ce mot a aussi la valeur numrique du Nom de D. compt en chiffre rduit). D. est cach, nous ne pouvons pas comprendre le fond de Sa pense, Il est invisible, Il na pas de corps, Il est sans dbut et sans fin (Rambam, Yssodei HaTorah 1:7) et on ne peut Le connatre qu travers la Torah. De mme, chaque Juif est un secret et ce nest que grce la Torah quil peut savoir quelles est sa place dans le monde. Cest un principe de base. Pour comprendre la grandeur de la Torah et de ses secrets, remarquons que les gens demandent avec un tonnement justifi: En quoi les gens qui tudient la Torah contribuent-ils et participent-ils la construction du monde, alors quils naspirent qu leur propre perfectionnement et ne cherchent que leur propre rudition? Pourquoi sommes-nous obligs de les soutenir, comme Zvoulon soutient Issahar? (Vayikra 25:2). Le Rabbin Eliahou Loupian rpond ainsi: Si lon savait combien de dcrets dfavorables celui qui tudie la Torah, annule grce son tude, dans le sens o il est dit: la Torah protge et sauve (Sotah 21a), et elle protge lhomme de tout mal (Kidouchin 82a), non seulement on donnerait toute sa fortune un tel tudiant, mais on suivrait sa voie . Retournons notre premier sujet, la raison du refus de Rabbi Yossi Ben Kisma de vivre dans une ville riche et prospre et pour laquelle il prfrait rester dans sa ville, lieu de Torah habit par des sages et des scribes. Cest que Rabbi Yossi Ben Kisma lui mme tait un homme trs riche, mais les richesses navaient aucune valeur ses yeux. Il y avait renonc afin de se consacrer de tout son cur et de tout son esprit ltude de la Torah, sans tre drang par des proccupations mondaines. Nous avons expliqu plus haut

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que la possession de biens drange dans le service de D. Et donc, lorsque cet homme voulut le convaincre par une offre sduisante, Rabbi Yossi Ben Kisma eut trs peur. Il savait que la Torah est aussi vitale que lair quon respire, et quelle ne sachte pas avec de largent, comme il est crit (Ychaya 55:1): Vous qui avez soif, allez boire de leau, vous qui navez pas dargent, venez, approvisionnez-vous et mangez, gratuitement, sans rtribution, venez, fournissez-vous de vin et de lait et on ne peut pas trouver la Torah chez des marchands et des commerants (Yirouvin 55a), cest--dire chez ceux qui sont riches (Maharcha, ad. loc.). Largent met la Torah en danger, car se sont deux mondes qui se contredisent lun lautre. Cest pourquoi Rabbi Yossi refusa de vivre avec des voisins dont le seul but tait daccumuler des richesses. Nous pouvons aussi comprendre maintenant ce que disent les Sages concernant Yaakov et Essav (Tana DRabbi Eliahou Zouta 19): Dj dans le ventre de leur mre, ils avaient partag entre eux les deux mondes, Yaakov prit pour sa part le monde Venir et Essav prit ce monde en hritage . Cest que Yaakov savait que lon ne peut pas obtenir les deux mondes, car ce monde est en contradiction avec le monde Venir. Il ny a pas de rcompense en ce monde pour lobissance aux commandements, et lhomme na en ce monde que ce que D. lui donne. Il ne faut pas se laisser influencer par un entourage mauvais, mais progresser sans cesse dans le service de D.

Lhonneur de la Torah na pas de limite


Yaakov fit un vu et dit: Si lEternel est avec moi, sIl me protge dans la voie o je vais, sIl me donne du pain manger et des vtements pour me couvrir, et si je retourne en paix la maison paternelle (Brchith 28:20-21). Est-il possible que Yaakov qui se distingue par la qualit de vrit (Micha 7:20), et la Torah est vrit (Yrouchalmi Roch HaChanah 3:8; Ptiha Ekhah Rabah 2) ait pri D. de pourvoir ses besoins matriels, la nourriture et les vtements, lui qui avait renonc au sommeil puisque pendant les quatorze ans quil passa tudier la Torah, il navait pas dormi (Brchith Rabah 68:11), au lieu de prier pour une comprhension plus profonde et une crainte de D. plus grande? Il nous semble queffectivement Yaakov demanda D. de lui donner la comprhension des secrets et des mystres de la Torah qui est compare au pain, comme il est crit (Michlei 9:5): Venez, mangez de mon pain , nourrissez-vous de Torah, car lhomme ne vit pas que de pain (Devarim 8:3), et il faut dsirer en tout premier lieu le pain de la Torah. Que demande-t-il exactement? Il demande dtre revtu de Torah et den faire une partie de lui-mme, dtre pntr de Torah, et de mriter davoir une place parmi les hommes vertueux en ce monde et dans lautre. En demandant du pain manger, Yaakov prie pour une plus grande et une meilleure comprhension de la Torah, il veut savoir de quoi il se nourrit, cest--dire ce quil apprend, et dsire faire de la Torah son occupation essentielle jusqu ce quelle devienne sienne, comme le vtement dont il se couvre. Celui qui poursuit un tel but parvient sans aucun doute comprendre ce quest vraiment la grandeur de la Torah car il sait que, de mme quil est impossible de vivre sans pain et sans eau, il est impossible de vivre sans la Torah qui est un lixir de vie (Yirouvin 54a), comme il est dit: Elle est un gage de vie pour ceux qui en font leur sagesse (Michlei 4:22). Celui qui sait et ressent que la Torah fait partie de son existence, ne pourra pas en venir la ddaigner, car il naura pas lide de ddaigner une partie de lui-mme, cest-dire la Torah qui lenveloppe comme un vtement. De mme que lon veille la propret de ses vtements, de mme il faut veiller lhonneur de la Torah qui est comme un vtement, comme il est dit (Zohar III, 29b): La Torah est le vtement de lme, et aussi sa nourriture . Y a-t-il une limite lhonneur d la Torah? Comment mesurer lamour de la Torah? De mme que lon saime soi-mme, et que lon fait tout ce quil faut pour son bien-tre corporel par respect de soi, de mme (toute proportion garde) il convient de respecter la Torah, car elle est une partie insparable de nous. Cest la raison pour laquelle la Torah comprend un total de six cent treize commandements: deux cent quarante-huit commandements positifs correspondants aux deux cent quarante-huit membres du corps humain, et trois cent soixante-cinq interdits correspondants aux trois cent soixante-cinq muscles et tendons (Midrach Thilim 32:4; Zohar I, 170b), ainsi les commandements sont insparables du corps et aucun ne peut exister sans lautre. Cest le sens du verset: Lhomme ne vit pas que de pain, il vit de toute parole que D. prononce . Il existe diffrentes sortes de pains: un pain que lon mange sans tre rassasi,

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et un pain qui nourrit et rassasie. La Torah est appele pain (Brchith Rabah 70:5) comme il est dit: Venez, mangez de mon pain (Michlei 9:5). Le vtement est celui dont se couvrent les sages, le vtement franges. Et les Sages ajoutent (Brchith Rabah 8:1; Zohar I, 130b): Celui qui le mrite, jouit de deux festins cest--dire quil jouit tant des biens matriels que des biens spirituels? Tel tait le contenu de la prire de Yaakov D. Le Rabbin Dessler crit ce sujet: Chlomo HaMelekh a compar la Torah au pain pour deux raisons. De mme que le pain est une ncessit quotidienne et que lon ne peut pas dcider de jener pendant plusieurs jours en disant que lon compensera en mangeant la part de chaque jour plus tard en une seule fois, de mme on ne peut pas repousser ltude de la Torah en se disant que lon compensera plus tard le temps perdu. Lobligation dtudier la Torah est une obligation de chaque heure et de chaque instant, de jour comme de nuit, et il ny a pas de compensation possible, sauf pour celui qui est malade (Rambam, Halakhoth Talmud Torah 1:1). Un jour pass sans tude fait oublier ce que lon a appris la veille, comme il est dit (Sifri Ekev 11:22): Si tu me dlaisses un jour, je tabandonnerai deux jours . De plus, il faut ouvrir lapptit de ltude comme on ouvre lapptit pour le pain (par un vin apritif et des choses qui stimulent lapptit comme le disent les Sages (Pessahim 107b): les boisson fortes ouvrent lapptit ). Cest un fait que le manque dapptit est un signe de maladie et dans ce cas, la nourriture est nuisible, tandis que lhomme en bonne sant a bon apptit. Il en est de mme de ltude de la Torah; quiconque na pas lapptit de ltude nest pas en bonne sant, son me est malade, et il doit prendre garde de ne pas rejeter la Torah . Quel est le remde pour pareil malade qui na pas dapptit pour la Torah? Quil aille sasseoir dans la maison dtude, quil coute ce que les autres disent, sans aucun doute son apptit de ltude en sera stimul et il en viendra faire ce que tout dabord il navait pas lintention de faire (Pessahim 50b; Kalah 8; Zohar III, 85b). Parce que vous avez abandonn Ma Torah, la terre dIsral fut dvaste . Pour expliquer ce verset, les Sages disent: La terre fut dvaste parce quils nont pas fait prcder leur tude de la bndiction de reconnaissance pour le don de la Torah (Ndarim 81a), ce qui indique quils navaient pas de respect pour la Torah. Pour navoir pas prononc la bndiction de la Torah comme ils le faisaient avant de consommer du pain, leur apptit pour la Torah en fut diminu, et en fin de compte le Temple fut dtruit et la terre dIsral dvaste. Cest un fait connu de tous que les plaisirs matriels, si rpandus de nos jours, ne sont que des tentations diaboliques qui nous dtournent de la voie de la Torah, et nous font abandonner la mditation non seulement le jour, mais aussi la nuit, au profit de la tlvision, mre de tous les vices, qui attire elle tant de gens, et qui est cause de tant de transgressions. Cest que le diable sait bien que le fils de David (le Messie) ne viendra que lorsquil y aura une gnration sans faute (Sanhdrin 98a), et il est donc de notre devoir de pallier labandon de la Torah. Cest ce que le prophte dit concernant la destruction de Jrusalem et de la terre dIsral (Yrmia 9:11-12): Qui est sage pour comprendre cela, qui pourra transmettre ce que la parole de D. lui rvla? Pourquoi le pays est-il ruin, dvast comme le dsert o personne ne passe? LEternel la dit: Cest parce quil ont abandonn Ma Loi Le mauvais penchant prend le dessus, et il faut agir avec beaucoup dingniosit pour le vaincre, comme le disent les Sages (Soucah 52b; Kidouchin 30b): Si tu rencontres ce vilain, entrane-le dans la maison dtude . Nous trouvons dans la Torah elle-mme un exemple de lhonneur d la Torah et son tude. Concernant Yaakov et Yossef, il est crit (Brchith 37:2): Telle est la descendance de Yaakov, Yossef g de dixsept ans et les Sages expliquent (Brchith Rabah 84:8): Yaakov a transmis son fils Yossef tout ce quil avait appris chez Chem et Ever . Il est difficile de comprendre que Yaakov ait pu semer la jalousie et la haine entre les frres en donnant son fils Yossef une tunique de soie, parce que Isral aimait Yossef plus que ses autres Enfants (Brchith 37:3), auxquels il ne donna pas de tunique en soie. De plus il enseignait Yossef tout ce quil avait appris chez Chem et Ever, mais il na pas transmis cet enseignement aux autres. Les Sages en concluent (Chabath 10a; Brchith Rabah 84:8): Il ne faut jamais crer de dissension entre ses Enfants, car cest ce qui a caus lexil de nos anctres en Egypte et leur esclavage . Effectivement, pourquoi Yaakov a-t-il provoqu une telle haine de ses fils envers Yossef? Si lon voulait dire que cest parce que Yossef tait le fils de sa vieillesse (ibid. v.3), Binyamin tait plus jeune que lui, et pourquoi est-ce Yossef qui est appel le fils de sa vieillesse ?

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Il est crit (Ovadia 1:18): La maison de Yaakov sera un feu, la maison de Yossef une flamme , ce qui nous enseignent (Pessikta Zouta Vayets 30:25) que Yossef est lennemi dEssav, qui ne tombera quentre les mains du fils de Rahel (Baba Bathra 123b), consum par le feu de Yossef. Yaakov vit prophtiquement que la maison de Essav tombera entre les mains de Yossef. Pour cette tche, Yossef (autant que ses descendants) a besoin dtre protg par un grand mrite. Etant donn que plus quelquun est grand, plus son mauvais penchant est grand (Soucah 52a; Zohar I, 155a), il lui faut faire plus defforts pour le surmonter. Afin de donner Yossef le pourvoir dliminer les ennemis de la maison dEssav, Yaakov, son pre, se souciait plus de lui et eut envers lui plus de considration. Il lui enseigna la Torah afin de le renforcer dans sa tche, et pour que lui et ses descendants aient le pouvoir de vaincre leurs ennemis. Etant donn que toutes les tribus bnficieraient dune telle prparation, Yaakov tait certain que les frres ne haraient pas Yossef et ne seraient pas jaloux de lui, car ils savaient tous que Yossef tait le feu qui brlerait la maison dEssav. Comment le vaincra-t-il? Seulement grce la Torah, puisque Yossef est compar un feu flamboyant, comme la Torah, ainsi quil est crit (Devarim 33:2): Sa droite, une loi de feu et les Sages ont dit (Tanhouma Yithro 12): La Torah est un feu et elle fut transmise dans le feu , cest--dire que cest grce la Torah quil consumera Essav. Yaakov savait la ncessit denseigner la Torah Yossef, pour lui permettre de vaincre Essav pour le plus grand bien de tout Isral. Essav est semblable Amalek, au Satan, au mauvais penchant, et Yossef est le Juste fondement du monde parce quil na pas trahi le signe de lAlliance (Zohar I, 59b), et la Torah, elle aussi, est le fondement du monde (Avoth I:2). Les Sages disent (Kidouchin 30b; Sifri Ekev 11:18): Jai cr le mauvais penchant, et Jai cr son remde: la Torah , car la Torah permet lhomme de vaincre le mauvais penchant. Yaakov enseigna la Torah Yossef qui tait beau de taille et beau de visage (Brchith 39:6), afin de lui permettre de surmonter le mauvais penchant, surtout en Egypte pays de licence et dont les habitants sont pervers (Chemoth Rabah 1:22) pour quIsral puisse parvenir rapidement la Rdemption de lesclavage en Egypte, et la Rdemption de lesclavage au mauvais penchant et ses cohortes. Il est possible que, pour cette mme raison, Yaakov le favorisa en lui donnant une tunique en soie . Le mot passim a plusieurs sens, dont lun indique que Yossef sauvera Isral des tentations du mauvais penchant, et lautre que, grce Yossef, le temps de la Rdemption arrivera plus tt (voir Baal HaTourim, Brchith 37:3). Cela nous permet de comprendre pourquoi deux tabernacles accompagnent le peuple juif dans le dsert, lun ct de lautre: larche qui contenait les ossements de Yossef et larche de la Prsence Divine . Tout le monde se demandait pourquoi lun tait aux cts de lautre? Cest que celui-ci a pratiqu tout ce que celui-l ordonna (Sotah 13b entre autres). La puissance de Yossef lui vient de ce quil a surmont le mauvais penchant en Egypte, et cela lui a valu lhonneur davoir son cercueil port aux cts de larche qui contenait les Tables de la Loi. Pour avoir fait de la Torah, partie intgrante de lui-mme, il convenait quaprs sa mort il accompagne larche Sainte. Ltude de la Torah lui a valu aussi de mriter cette tunique de soie. Le commentateur Baal HaTourim montre que les lettres du mot ZKNIM, de son vieil ge, sont les premires lettres des mots Zrayim, Kedochim, Nachim Ychouot, Moed, qui sont les traits du Talmud. Malgr tout, ses frres le jalousaient davoir tudi la Torah crite et orale, bien que cette tude ait t son arme dans la guerre contre Essav. Ils navaient pas compris cette ncessit et cest comme sils avaient ddaign la Torah elle-mme. Ce qui nous enseigne combien il est important de veiller lhonneur de la Torah.

Le vtement de la Torah, cran contre les tentations


Et Yaakov fit un vu en ces termes: Si lEternel est avec moi, sIl me protge dans la voie o je marche, sIl me donne du pain manger et des vtements pour me couvrir si je retourne en paix dans la maison paternelle, alors lEternel aura t un D. pour moi (Brchith 28:20-21). Ce sont des mots au sens troublant. Nous avons dj analys ces versets plusieurs fois, mais il ny a pas de maison dtude qui ne dvoile pas de nouvelles significations (Haguigah 3a). Est-il possible que Yaakov ait eu des doutes concernant la promesse que D. lui fit de le protger, tels quil doive y mettre une condition?

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Comment Yaakov a-t-il pu demander D. de lui procurer du pain et des vtements, alors que nous savons que D. ne pourvoit aux besoins de lhomme quen fonction de ses mrites? Pourquoi est-il ncessaire de demander ces choses, tant donn que mme sans cette prire ses besoins seront assurs? Quel est le sens de LEternel aura t un D. pour moi ? Car Yaakov ne met tout de mme pas en doute la souverainet de D., mme lorsquIl le soumet des preuves. Est-ce seulement si D. lui donne du pain manger et un vtement pour se couvrir que lEternel sera un D. pour lui? Il ne faut pas comprendre les paroles de Yaakov littralement, au contraire, elles font allusion de grands secrets et elles sont remplies de considrations qui concernent tout le monde. Un homme comme Yaakov ne demanderait pas des choses aussi courantes. Lui qui, durant de longues annes, stait consacr sans relche servir D., ltude assidue de la Torah, qui pendant quatorze ans navait pas dormi, qui avait eu dans son rve des rvlations extraordinaires, lui qui la Providence avait fait goter un peu du monde Venir lorsquil stait endormi dans ce lieu saint, lui qui avait aussi reu dans son rve nombre de bndictions et trouv par miracle de lhuile pour oindre lautel (Brchith Rabah 69:7), un tel homme ne demande pas D. des choses futiles, de simples biens matriels. Le rve de Yaakov vient justement nous enseigner combien sa prire est spciale et juste. Yaakov tait parvenu un niveau de grandeur que les autres Patriarches navaient pas atteint, au point dtre appel le lot de Son partage (Devarim 32:9). Cest grce lui quAvraham fut sauv de la fournaise ardente (Brchith Rabah 63:2) et malgr tout, il avait une grande humilit. Il fut saisi de frayeur pour navoir pas senti la saintet de ce lieu (Brchith 28:17). Il reconnut sa faute, admettant que sil avait su, il naurait pas dormi en ce lieu (Midrach Hagadah). Les Justes ne sattribuent jamais le mrite de leurs bonnes actions. Au contraire, ils sattribuent des dfauts, justement lorsquils sont de haut niveau, cest pourquoi Yaakov fut dsol de navoir pas ressenti la saintet de ce lieu, ce qui tait pour lui une indication quil navait pas atteint la perfection vers laquelle il tendait. Nous pouvons ajouter que nous avons l un enseignement valable pour tous. La conduite sainte et pure de Yaakov est un modle pour nous. Tous les vnements furent dirigs par la Providence Divine, tant le fait quil sendormit que le fait quil y mdita la Torah (comme le souligne le commentateur Baal HaTourim propos du verset (Brchith 28:16): Yaakov sveilla de son sommeil que les Sages (Brchith Rabah 69:7) prononcent michnato au lieu de michnato) car mme dans son sommeil, il mditait ce quil avait appris. Il bnficie en ce lieu de grandes promesses, il y eut la rvlation de D., et il fut saisi de frayeur, scriant combien ce lieu est terrible! Combien plus un homme simple, qui se trouve dans un synagogue ou une Ychivah, lieux o rgne la Prsence Divine (Brachoth 6a; Bamidbar Rabah 11,3; Zohar III, 4b), doit savoir devant Qui il se tient (Brachoth 25b), faute de quoi il ne fait que dnigrer la saintet dun tel lieu. Transgresser publiquement le commandement Rvrez Mon sanctuaire (Vayikra 19:30) est une faute grave et la punition est svre. Nous pouvons comprendre que lorsque Yaakov ressentit quil ntait pas vraiment parfait, il pria D. de veiller sur lui, non pas quil mettait en doute les promesses de D. mais parce quil ressentait que sil ntait pas parfait, il ne mriterait pas les promesses qui lui taient faites en ce lieu saint. Et donc, il exprime son regret, il prie avec soumission et repentir devant le Matre du monde, dans le cas o il aurait, sans le savoir, transgress le moindre commandement cause dune imperfection et dun manque de sensibilit. Et Yaakov fit sa demande justement ce moment-l. Au moment o il se rend chez Lavan, il a besoin dune protection encore plus grande afin dtre sauv des perversits et de linfluence de Lavan, dont lintention tait dexterminer toute la descendance de Yaakov. Il prie pour une protection supplmentaire. Son frre Essav ne la pas tu lorsquil se mit en route pour se rendre chez Lavan, car il savait que Yaakov risquait dy perdre sa part du monde Venir et cette pense lui tait agrable. Sachant cela, Yaakov prie D. de veiller sur lui de plus prs, car les Justes ne se contentent pas de ce que D. leur donne, ils Lui demandent une protection et une aide supplmentaires. Et Yaakov demande donc du pain manger, cest--dire des forces supplmentaires pour faire face Lavan et le vaincre, manger , cest dire pour consommer et annihiler le mauvais penchant. Il est possible aussi que sa prire concerne la Torah, comme il est crit (Michlei 9:5): Venez, goter de mon pain cest le pain de la Torah (Brchith Rabah 70:5). Autrement dit, Yaakov demande D. de laider

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soccuper de Torah sans que Lavan puisse len dtourner, malgr tout ce quil tentera de faire dans ce but. Il demande aussi un vtement pour se couvrir, ce qui se rfre la Torah, esprant que chez Lavan il pourra tudier la Torah et acqurir le vtement de la sagesse (Yalkout Chimoni sur ce verset). Et alors je retournerai en paix dans la maison paternelle , cest--dire, cest elle qui lui permettra de retourner sans dommage chez son pre (ce qui, daprs la Kabalah, fait rfrence D.), et ceci grce la Torah qui la protg comme un vtement. Cest ce vtement, propre et sans tache, que lhomme porte devant D. Roi du monde, dans le monde Venir. Celui qui se rend dans un lieu sans Torah, (surtout sil sagit dun tudiant de Ychivah en vacances ou qui passe les vacances chez ses parents) doit savoir combien il est important de prier avant de sortir dans le monde, sous peine dtre happ par toutes les frivolits qui risquent de le dtourner et de lui faire abandonner la Torah, D. ne plaise, sous linfluence nfaste de lentourage. Cest le sens de et je retournerai en paix (sans dommage cause dune faute quelconque, comme lexplique Rachi). Je retournerai vers D. et alors lEternel sera pour moi D. Autrement dit, jaurai t marqu par le Nom de D. du dbut de mon sjour ltranger jusqu la fin et aucun de mes Enfants ne sera indigne (Sifri Devarim 6:4), aucune faille naura entam ma perfection, comme ce fut le cas lorsque jai dormi en ce lieu. Alors, tous mes descendants, tous les fruits de mon labeur, seront parfaits et je porterai le Nom de D. qui me protge et me soutient. Et Je prlverai la dme sur tous les biens que Tu me donneras (ibid. 28:22), cest--dire: tous les biens que Tu donnes sont Toi, je ne veux pas en tirer de jouissance personnelle, mais seulement men servir pour accomplir Ta volont et pratiquer des bonnes actions. Telle tait la prire de llu des Patriarches: Je tenrichirai de bonnes actions, car Yaakov ne veut que satisfaire D. et tre sauv des mchancets de Lavan. Il demande la force de lutter contre le mal, de mriter de porter le manteau des sages en ce monde, et de ne pas tre dtourn de ltude de la Torah. Il est possible que cela rachte son manque de perfection pour avoir dormi dans ce lieu saint. Cela nous enseigne quen tout temps, tout homme a besoin de demander laide de D. sans se reposer sur ses propres capacits, et remercier D. de laide reue dans le pass jusqu ce jour, ainsi qu lavenir. Yaakov sollicite laide de D. et Sa protection quotidienne contre Lavan, ce qui lui permettra dapporter dans la Maison de D. tous les biens quil va acqurir, lorner de son obissance et de ses bonnes actions, et amener le monde la reconnaissance exclusive de la souverainet de D. comme le fit son grand-pre Avraham (Sotah 10b). Cest ainsi quil sanctifie le Nom de D. dans le monde et proclame Sa gloire. La grandeur de Yaakov fut de ne pas avoir demand des biens matriels mais spirituels, et pri pour laide de D. afin de Lhonorer par ltude et le vtement de la Torah. A prsent, nous comprenons mieux la relation de Yaakov son fils Yossef. Il est crit (Brchith 37:3): Yaakov prfrait Yossef ses autres enfants, parce quil tait le fils de son vieil ge, et il lui fit une tunique de soie . Il faut expliquer cette prfrence. Nous savons que Yaakov a transmis Yossef tout ce quil avait appris dans la maison dtude de Chem et Ever (Brchith Rabah 84: 8). Les Sages ont dit (ibid.): Il ne faut jamais causer de jalousie entre ses enfants, car cause de la tunique que Yaakov fit faire pour Yossef, il provoqua la jalousie de ses frres, et le droulement des vnements a conduit les Enfants dIsral en Egypte . Pourquoi Yaakov a-t-il provoqu cette jalousie? De plus, Yossef sentait la prfrence de son pre son gard, ce qui lamena en fin de compte mdire de ses frres (Brchith Rabah 84:7), comme il est crit (Brchith 37:2): Il dbitait sur leur compte des mdisances leur pre, rapportant quils mangeaient de la viande arrache un animal vivant, quils mprisaient les fils des servantes, et quils avaient une conduite indcente . Est-ce possible? On pourrait croire que Yaakov prfrait Yossef parce quil lui ressemblait, non seulement par les traits du visage, mais en tout (Brchith Rabah 84:8). Yaakov savait que tous ses enfants avaient t conus saintement (Pessahim 56a), et voil que par prfrence personnelle pour Yossef, il provoquait entre ses fils la jalousie et risquait de rompre lunit de la famille! Mais Yaakov savait que Yossef tait le plus puissant dentre tous ses fils. Ce nest pas par hasard que Yaakov quitta la maison de Lavan justement aprs la circoncision de Yossef, comme le souligne Rachi, car maintenant que lennemi dEssav tait n, il navait plus le craindre. Yaakov transmit la tradition et la sagesse de la Torah, parce quil tait destin sauver tout le peuple juif, et pour que le peuple juif puisse rsister aux attaques dEssav. Il va sans dire que si le fondement est solide, la maison qui y est construite

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rsistera tous les vents. Et si la maison est btie dans un lieu dangereux, le fondement doit tre dautant plus solide. Cest pourquoi Yaakov devait donner Yossef plus de forces qu ses frres, en lui enseignant la Torah, afin quil puisse rsister toutes les nations du monde. Yaakov dsirait que ses enfants sachent que Yossef tait ce fondement, alors que D., dans Ses desseins, leur avait cach ce fait, afin que Yossef soit vendu en Egypte et devienne le gouverneur du pays, comme il est crit (Brchith 42:6): Or Yossef tait le gouverneur de la contre, ctait lui qui faisait distribuer le bl tout le peuple du pays . Grce lui tous furent approvisionns et ne prirent pas durant la disette, et il sauva toute sa famille. Effectivement, en fin de compte, ses frres se sont soumis lui, comme il est crit (ibid. 50:18): Nous sommes prts devenir tes esclaves , car ils reconnurent quil tait le fondement et quils lui taient redevables de leur survie. Combien Yaakov eut raison de faire pour Yossef une tunique de soie, un vtement de Torah (de mme que Yaakov demanda un vtement pour se couvrir), car Yossef fut vendu en Egypte, lieu de dbauche. Si ce ntait lenseignement quil avait reu de son pre (Brchith Rabah 84:8) qui le protgea comme une muraille et un bouclier contre les perversions de lEgypte, il se serait assimil. Ce nest que grce la Torah quil fut sauv, comme il est crit (Brchith 39:13): Elle vit quil avait laiss son vtement entre ses mains et quil stait enfui au dehors . Cest qu ce moment-l, Yossef se souvint de son pre et de la Torah quil lui avait enseigne, et ce souvenir lempcha de fauter avec Zliha, la femme de Poutiphar (Zohar III, 290a, qui souligne que la Torah reprsente autant le pre que la sagesse). Le Midrach dit que lorsque Yossef eut la vision de son pre, il senfuit en laissant son vtement entre les mains de la femme de Poutiphar, et il ne lui resta que son vrai vtement, la tunique de soie, le vtement de Torah que son pre lui fit faire et qui le sauva des tentations de cette femme, et il sortit en homme de Torah (En Hbreu celui qui se conduit selon la Torah est appel ben Torah, littralement fils de la Torah , et cest dans ce sens que la Torah est appele pre ). Nous trouvons dans le Talmud (Avodah Zarah 18b) lhistoire tonnante de Rabbi Meir Baal Haness. Alors quil fuyait devant les Romains, il entra dans une maison de dbauche o se pratiquaient les transgressions les plus graves. Lorsque les Romains le virent entrer dans ce lieu de dbauche ils nen crurent pas leurs yeux. Comment pouvait-il entrer dans une maison de dbauche et ne pas tre amen fauter? Mais Rabbi Meir y entra et en sortit indemne, sans fauter, et il surmonta toutes les tentations. Comment ? Les Romains ne pouvaient pas comprendre comment il est possible de sortir indemne, mais nous, les Enfants dIsral, nous le comprenons parfaitement seul celui qui est revtu de Torah peut tre sauv de lpreuve des tentations. Les Romains, qui nont aucune ide de la valeur de la Torah, nont pas cru que Rabbi Meir sortirait indemne, mais le vtement de Torah la protg. Sans ce vtement, Rabbi Meir ne se serait pas mis dans un tel danger. De mme, il est crit: Le buisson tait en feu mais ntait pas consum (Chemoth 3:2), cest--dire lorsque le Juif se fait humble comme un buisson, la Torah quil apprend est inaltrable, car elle ne se prserve que chez celui qui est humble (Taanith 7a). Cest alors que D. nous garde, et que nous rsistons au feu du mauvais penchant sans tre brls. Nous apprenons tout cela de Yaakov qui a surmont toutes les preuves grce la Torah quil avait apprise dans les maison dtude de Chem et Ever (Brchith Rabah 63:15), cest elle qui le protgea et veilla sur lui contre les dangers. Malgr tout, il demanda une protection divine supplmentaire. Cest ainsi que chacun doit se comporter, il faut demander une protection divine supplmentaire pour rsister toutes les tentations et tudier la Torah qui aide lhomme surmonter toutes les difficults et mriter la vie ternelle. Amen!

Qui est brave ? Celui qui sait vaincre son mauvais penchant
Il fit rouler la pierre de dessus le puits (Brchith 29:10), Comme quelquun qui dbouche une bouteille (Brchith Rabah 70:12), ce qui nous montre combien Yaakov tait fort. Il est crit: Lorsque Yaakov vit Rahel, fille de Lavan, frre de sa mre, et le troupeau de Lavan, il savana et fit rouler la pierre de dessus le puits . Pourquoi na-t-il pas fait rouler la pierre plus tt, mais seulement lorsque Rahel vint avec le troupeau?

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Si effectivement Yaakov avait tant de force, pourquoi, lorsque Eliphaz le poursuivit pour le tuer sur lordre de son pre (Sefer HaYachar; Vayets), ne fit-il pas face cette attaque? Il navait pas besoin de lui donner tous ses biens. Sil tait si fort, il aurait pu se battre contre Eliphaz et le vaincre facilement. Il y a plusieurs rponses possibles cette deuxime question. Sil avait tu Eliphaz, la haine dEssav son frre en aurait t attise, car il ne lui aurait jamais pardonn ce crime. Nous savons quEliphaz avait grandi chez Yitshak et fut lev dans le chemin de la Torah (Sfer HaYachar ibid.), et les Sages ajoutent (Devarim Rabah 2:13, Tanhouma Buber Vayra 38) quEliphaz, fils dEssav, tait un homme vertueux qui avait de plus linspiration divine. En le tuant, Yaakov aurait caus beaucoup de peine Yitshak et cest pourquoi il ne la pas tu. En fait, Yaakov voulait voir si Eliphaz se contenterait de prendre ses biens et lui laisserait la vie sauve. Cest effectivement ce qui se passa. Mais si Eliphaz ne stait pas content de ne prendre que les biens, il est fort probable que Yaakov se serait battu contre lui. Effectivement, Yaakov aurait pu se battre. Mais D. voulait donner les biens de Yaakov Eliphaz, car malgr les bndictions que Yaakov avait reues dYitshak et les promesses que D. lui avait faites, Eliphaz le poursuivait pour le tuer ou lui prendre ses biens. Cest que D. ne dsirait pas que Yaakov senrichisse de lhritage de son pre, mais de ce que D. allait lui donner. Enfin, Yaakov voulait attnuer les dcrets qui frapperaient ses descendants au cours des gnrations, et les actes des pres sont des exemples pour leurs enfants (Sotah 34a). Dans le cas o les descendants dEssav voudraient nuire aux Enfants dIsral, ils ne pourraient que les atteindre dans leurs possessions, et non dans leurs corps, ils ne pourraient que sapproprier leurs biens sans parvenir les liminer. Cest aussi la rponse la premire question. Yaakov na fait preuve de tant de force que lorsquil vit Rahel sapprocher avec son troupeau, afin quelle le voie et raconte son pre Lavan combien il tait fort et quil navait donc pas intrt lui faire la guerre. Au contraire, il tait prfrable de lui donner garder le troupeau sur lequel il veillerait jour et nuit. Il y a un enseignement moral tirer de la force de Yaakov. Lorsquun homme est faible et quil na pas le courage de lutter contre le mauvais penchant qui brle en lui, il tombe dans ses piges. Mais chacun peut apprendre de Yaakov comment se renforcer dans ltude de la Torah (Torat Kohanim Vayikra 26:3), et se soustraire au mauvais penchant qui est appel une pierre (Soucah 52a; Zohar II, 263a), comme Yaakov, qui fit rouler la pierre de dessus le puits, car il avait la force que donne la Torah qui est compare un puits deau vive, comme le disent les Sages (Berakhoth 56b; Yirouvin 54a; Avoth DRabbi Nathan 34:10), la Torah sappelle vie, elle est un lixir de vie pour tous les membres du corps et ils ajoutent (Soucah 52b, Kidouchin 30b): Si tu rencontres ce vilain, entrane-le dans la maison dtude, sil est de pierre il clatera, sil est de fer il fondra, comme il est dit (Yrmia 23:29): Est-ce que Ma parole ne ressemble pas au feu dit lEternel, nest elle pas comme le marteau qui fait voler en clats le rocher ? Tel est le pouvoir de la Torah.

La vertu des Matriarches, un exemple damour du prochain


Il est crit (Brchith30:1-2): Rahel vit quelle ne donnait pas dEnfants Yaakov et Rahel jalousa sa sur et elle dit Yaakov: donne-moi des Enfants, sinon je suis morte. Yaakov se fcha contre Rahel et dit: suis-je la place de D. qui ta refus la fcondit? Rachi commente: Rahel jalousait les bonnes actions de Lah, elle se disait que si sa sur ntait pas plus vertueuse quelle, elle naurait pas eu denfants. Et il est crit (ibid. v. 22): D. Se souvint de Rahel, Il exaua sa prire et lui rendit la fcondit . Et l, Rachi dit: D. Se souvint quelle donna sa sur les signes de reconnaissance, parce que Lah craignait dtre unie Essav, mais maintenant cest Rahel qui craint dtre rpudie parce quelle na pas denfants. Essav le pensait aussi lorsquil apprit quelle navait pas denfants Il faut rpondre toutes les questions qui se posent nous. Rahel craignait que Yaakov la rpudie parce quelle navait pas denfants, mais pourquoi sensuit-il quEssav lpouserait, de sorte quEssav y pensa en apprenant quelle navait pas denfants? Pour quelle raison voudrait-il prendre une femme strile pour pouse, et pourquoi Rahel doit-elle craindre une telle chose?

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Comment Rahel, si vertueuse, a-t-elle pu penser que Yaakov la renverrait parce quelle navait pas denfants, car il est dit explicitement quelle stait sacrifie en faveur de sa sur Lah lorsquelle lui donna les signes de reconnaissance. Est-il pensable que Yaakov renvoie une femme aussi vertueuse, qui avait donn sa sur les signes de reconnaissance pour la sauver dune union avec Essav, le pervers? La Torah nous dit que les yeux de Lah taient faibles (Brchith 29:17) parce quelle pleurait beaucoup. Elle entendait les gens jaser et dire: lane pour lan (Lah pour Essav) et la plus jeune pour le plus jeune (Rahel pour Yaakov) , et elle en pleurait au point que ses cils en taient tombs (Baba Bathra 123a). Pourquoi penser que Yaakov renverrait une femme aussi vertueuse que Rahel, et quil aimait (ibid. 29: 18)? Pourquoi Rahel dit-elle Yaakov: sinon je suis morte ? Pourquoi le fait de navoir pas denfants est-il assimil la mort? Les Sages ont dit (Ndarim 64a): Qui na pas denfants est considr comme mort , mais pourquoi Rahel utilise-t-elle justement cet argument lorsquelle demande Yaakov de lui donner des enfants? Quel est le sens de cette expression? De plus, comment se fait-il que Rahel se soit mise en danger lorsquelle donna sa sur Lah les signes de reconnaissance? Elle aurait pu en tre maudite par Yaakov, et elle aurait pu tre unie Essav si Yaakov avait refus de lpouser pour lavoir tromp. Mme si Lah entendait les gens jaser et dire quelle serait unie Essav, quel mal y avait-il l pour quelle en pleure? Elle aurait pu vivre dignement et confortablement avec Essav, et de plus le ramener dans le droit chemin. Quel mal y a-t-il cela? Et surtout, comment Lah a-t-elle pu comprendre que lane pour lan voulait dire justement Lah pour Essav ? Car nous savons quEssav avait vendu son droit danesse Yaakov (Brchith 25:33), et par consquent Yaakov tait lan. Quel besoin de saffliger et de tant pleurer? Tout ce rcit vient nous enseigner des merveilles concernant les qualits sublimes de nos Matriarches. En considrant attentivement les raisons des Matriarches et leur faon de servir D., nous nous rendons compte quelles ne tenaient pas compte de leur propre intrt, et ne considraient que le bien-tre dautrui, mme si cela devait les mettre en danger et leur coter la vie. Elles ne considraient que le bien des autre, pour les aider, les soutenir, les encourager, et les rconforter. De quelle faon? Rahel est peine de voir sa sur verser tant de larmes la pense quelle devrait pouser Essav. Elle dcide de cder sa sur rivale, Lah, sa place auprs de Yaakov, en prenant le grand risque dtre ellemme rejete et de tomber entre les mains dEssav. Car Yaakov risquait de se fcher et de refuser de lpouser pour lavoir tromp. En dpit de ce risque, Rahel agit sans tenir compte de son propre avantage, uniquement pour que Lah cesse de pleurer. Elle renona devenir la matresse de maison en faveur de sa sur, bien que cela puisse lobliger elle, vivre le reste de sa vie malheureuse dans la maison dun voleur, dun brigand, dun maudit comme Essav. Mais elle accepta ce risque pour lamour du Ciel, car il ne fait pas de doute quelle ne ddaignait pas son droit de vivre avec Yaakov, mais le bien dautrui a prim sur toute autre considration. Les Sages disent (Tanhouma Vayets 6) que Yaakov envoya des cadeaux de mariage Rahel et Lavan les donna Lah . Rahel voyait ces cadeaux entre les mains de Lah et se taisait, car elle la voyait heureuse. Cela nous montre de faon indubitable combien Rahel tait noble et vertueuse. Yaakov aussi le voyait, et il stonnait de tant de vertus. Au lieu de se mettre en colre et de la rejeter pour avoir us de cette ruse, il eut pour elle encore plus damour non pas pour sa beaut et sa prestance (Brchith 29:17) car La grce est mensongre et la beaut nest que vanit, mais une femme qui craint lEternel, celle-l est digne de louanges (Michlei 31:30), mais parce quil sut combien son cur tait bon, son me sensible, et combien elle tait gnreuse. Il stonnait au plus haut point des sacrifices quelle faisait en faveur de sa sur. Les Sages disent de Rahel (Ptiha Ekhah Rabah 24; Brchith Rabah 70: 17; Mguilah 13b) quelle se cacha sous le lit, et cest elle qui rpondit Yaakov concernant les signes de reconnaissance, afin quil nentende pas la voix de Lah Chacun est stupfait par la bont de cur et lesprit de sacrifice de Rahel envers sa sur! Lorsquelle entend Yaakov parler sa sur et lui poser diverses questions, au moment daccomplir le premier commandement de la Torah de crotre et de multiplier en toute puret et saintet, justement la nuit de ses

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noces, au dbut de leur vie conjugale, au lieu de protger son droit et de garder les signes de reconnaissance pour elle-mme (afin que Yaakov sache quon lavait tromp), elle se tait, elle se domine, et transmet sa sur les signes de reconnaissance. Ce faisant, elle se prive de lavenir heureux qui aurait pu tre le sien. Il est possible que Rahel aurait prfr ne pas donner ces signes, mais elle savait la honte de sa sur, si Yaakov la renvoyait et si elle pousait Essav comme le proclamait la rumeur. Elle rpondit la place de Lah et lui transmit les signes, uniquement pour ne pas causer de honte et de peine sa sur, car elle ne dsirait que son bien. Malgr tout, il faut se demander pourquoi Rahel sest sacrifie pour sa sur en se mettant elle mme en danger? Fallait-il quelle soit la victime de sa sur? Et pourquoi Lah pleure-t-elle parce quelle ne veut pas pouser Essav? Naurait-elle pas vcu aisment, comme nous lavons dit plus haut? Justement Rahel voyant que Lah ne cessait de se lamenter sur son sort, comprit que Lah prfrait une vie dans la pauvret et lexil, une vie de souffrances et de restrictions avec un homme vraiment vertueux, plutt que de vivre une vie aise et agrable en ce monde en compagnie dun homme mchant, et cest de cela quelle se lamentait. Elle en pleurait au point de fltrir sa beaut, car Lah tait tout aussi belle que Rahel par ses traits et sa stature, si ce nest que ses cils taient tombs et que sa vue stait affaiblie (Tanhouma Vayets 12). Rahel sest dit quelle devait faire quelque chose pour une crature aussi vertueuse. Nous voyons ici la grandeur et la noblesse de Lah qui prfre vivre dans la pauvret pourvu que ce soit avec un homme intgre, plutt que dans le luxe avec un homme mchant. Dautre part, nous voyons la grandeur et la noblesse de Rahel, qui comprit comme sa sur tait mritante, au point quelle tait prte lui cder sa place et son bonheur ternel. Mais D. qui sonde les curs et les reins, D. quitable (Thilim 7:10), avait pntr les sentiments et les penses de Rahel, Il avait vu sa bont de cur envers sa sur Lah. Et D. augmenta lamour et la bienveillance de Yaakov pour Rahel, et il laima et la respecta plus quauparavant. Au lieu de laccuser de lavoir tromp, Yaakov accusa Lavan et lui dit (Brchith 29:25): Nest-ce pas pour Rahel que jai servi chez toi? Pourquoi mas-tu tromp? Il tait fch contre Lavan de lavoir oblig pouser Lah, et davoir voulu obliger Lah accepter Essav contre son gr si Rahel dans sa bont, ne lavait pas sauve dun tel sort. Cest pourquoi Yaakov aima Rahel encore plus, au point de servir Lavan sept ans de plus.

Le mrite des Matriarches


Par la suite, nous trouvons encore une fois un exemple de la bont de Rahel envers autrui. Lorsquelle vit quelle ne donnait pas denfants Yaakov, et que justement sa sur rivale, qui avait ds le dbut pris sa place et son bonheur, donnait naissance aux tribus dIsral, elle ne dplora pas la svrit de son sort. Au contraire, elle comprit rtrospectivement quelle avait cd sa place sa sur Lah parce que ce qui est maintenant prouv Lah tait plus mritante quelle, sinon cest elle qui aurait enfant les chefs des tribus dIsral, des hommes vertueux et vaillants comme Rouven, Chimon, Lvi etc. Rahel se sentit dornavant superflue dans la maison de Yaakov. Si elle ne remplissait pas son rle de matresse de maison, elle ne mritait pas de vivre aux cts de Yaakov. Rahel jalousa sa sur Lah, elle jalousait ses bonnes actions, elle se disait que si sa sur ntait pas plus vertueuse quelle, elle naurait pas mrit davoir des enfants (Rachi ad. loc.). Elle reconnaissait que Lah avait le mrite de fonder le peuple dIsral, et elle comprit quelle avait bien fait de lui confier les signes de reconnaissance. Mais Rahel dsirait le bien de son mari Yaakov. Elle lui dit: Donne-moi des enfants , autrement dit: prie pour que je mrite davoir des enfants, afin davoir une part dans les douze tribus dIsral, sinon je suis morte , cest--dire: je suis considre comme morte, comme superflue, puisque je ne remplis pas mon rle et ma raison dtre, qui est denfanter les saintes tribus dIsral, selon la Torah et ses commandements, et donc que vaut ma vie et que valent tous mes efforts? De plus, Rahel pensait que si elle navait pas denfants, Yaakov allait la renvoyer, et elle acceptait et justifiait cette sentence puisquelle ne remplissait pas son rle. Mais alors, elle serait comme morte, car Essav allait lpouser et, pouser un tel homme ctait comme mourir, puisque les hommes mchants sont considrs comme morts mme de leur vivant (Brachoth 18b; Brchih Rabah 39:7), et dans ce cas elle aussi serait considre comme morte.

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Nous pouvons ajouter que Rahel savait combien Yaakov tait saint, donc elle savait certainement que chaque jour pass en compagnie dun tel homme reprsente un jour o le monde est amlior. Si elle ne pouvait pas participer avec Yaakov la construction et la correction du monde (du fait quelle navait pas denfants), cest comme si elle ne vivait pas, comme si elle ne mritait pas de vivre avec cet homme vertueux qui tait lui-mme la vie, comme il est dit (Avoth DRabbi Nathan 34:10): Les Justes sont ternellement vivants . Elle craint, juste titre, que Yaakov ne la renvoie et quEssav lpouse. Mais pourquoi Essav pouserait-il une femme strile qui ne peut pas lui donner denfants? Justement Essav savait combien Rahel tait vertueuse, quelle tait source de saintet, il aurait t trs heureux de lpouser. Cela lui aurait permis de puiser la saintet qui tait en elle pour rduire limpuret qui tait en lui, acte pour lui bien plus profitable que davoir des enfants. Cest justement de cela que Rahel eut trs peur. Rahel, voyant que son mariage avec Yaakov navait pas de but et quil ny avait aucune raison pour quelle continue dtre son pouse si elle ne lui donnait pas denfants, lui demanda de prier pour elle pour quelle ait des enfants, sinon elle serait comme morte. Mais Yaakov navait nulle intention de renvoyer Rahel de chez lui. Surtout pas aprs avoir constat combien elle tait noble, vertueuse, et avait bon cur. Cest pourquoi il se fcha et dit: Suis-je la place de D.? Une telle chose ne dpend pas de moi, mais de la volont divine, et il ny pas chercher les raisons de D. Il lui fit comprendre que cest D. qui lavait prive denfants Il ta prive certes, mais Il ne ma pas priv, et si jai des enfants, tu nen es pas moins importante dans ma maison. La rponse de Yaakov nous montre quil ne partage pas lopinion de Rahel et quil ne la considre pas inutile parce quelle nenfante pas. Au contraire, il la console du fond du cur, lui disant quelle na pas craindre dtre renvoye, dautant plus quEssav risquait alors de lpouser et de profiter de sa saintet. Yaakov lui promet quelle sera toujours la matresse de maison, comme disent les Sages (Brchith Rabah 71:3): Rahel tait la femme prfre de Yaakov . Malgr ses paroles consolantes, Yaakov fut puni pour navoir pas pri en faveur de Rahel. Elle ne fut pas enterre ses cts (Brchith Rabah 72:3), parce quil la console mais na pas pri en sa faveur comme elle le lui avait demand. Mais D. Se souvint de tout le bien quelle avait fait et Il lui donna la fcondit. Nous devons essayer de comprendre, au mieux de notre entendement, pourquoi Yaakov na pas pri pour elle. Cest quil navait aucune intention de la renvoyer, et encore moins de la donner en mariage Essav. Cest elle qui souleva le problme et la question en premier lieu. Yaakov avait du mal comprendre ses craintes, il se fcha et en oublia de prier pour elle, tant il tait soucieux de lui faire oublier ses craintes. Il faut se demander pourquoi Yaakov doit tre puni du fait que Rahel ne sera pas enterre ses cts, car en fin de compte, de quoi est-il coupable? Nous voyons ici combien la justice de D. est rigoureuse. Si D. avait rprimand les Patriarches, ils nauraient pas pu rsister Ses reproches (Chohar Tov Thilim 26:1; Yalkout ibid. 703). Dune part, il est crit: Rends-moi justice, Seigneur, car jai march dans mon intgrit et dautre part: Ne porte pas jugement sur Ton serviteur car nul vivant ne peut se trouver juste Tes yeux (Thilim 143:2). David HaMlh dit devant D.: Matre du monde! Lorsque Tu portes un jugement sur les coupables, juge-moi (car par rapport eux je suis vertueux), mais lorsque Tu juges les Justes, ne portes pas de jugement sur Ton serviteur . Et donc ici aussi, D. a jug Yaakov pour navoir pas pri en faveur de Rahel comme elle lui demandait de le faire, ce qui donnait Essav la possibilit de penser, ne serait-ce quune fraction de seconde, quil profiterait de cette occasion et pouserait peut-tre Rahel. Dans ces cas l il est dit: nul vivant ne peut sestimer juste Tes yeux et cest pourquoi Yaakov fut jug svrement et na pas mrit que Rahel soit enterre auprs de lui. Malgr la distance qui les sparait, Essav savait que Yaakov pensait pouser Rahel. De mme, de nos jours, les nations savent ce qui se passe chez nous et ils savent quand nous ne suivons pas le droit chemin, mme en priv. Cela leur donne la possibilit de tramer contre nous leurs projets haineux. Mais lorsque nous, les Enfants dIsral, suivons la voie que D. nous a trace, aucun peuple et aucune nation ne peuvent rien contre nous (Ketouboth 66b) car nous sommes les proches de D. SIl nous renvoie de Sa maison, cest avec lintention de nous faire revenir, car nous sommes pour toujours les Siens.

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Nous avons vu combien Rahel tait vertueuse, et combien elle eut de compassion envers sa sur, et nous avons vu la vertu de Lah, qui elle aussi ne prenait en considration que ce qui tait bon pour lautre. Il est dit que les yeux de Lah taient faibles tant elle avait pleur parce quelle ne voulait pas pouser Essav. Tout autant que sa sur Rahel, elle voulait vivre avec un homme vertueux. Le mot rahot, qui dcrit la faiblesse de ses yeux, vient du mot rah, doux, ce qui indique que Lah navait pas dambitions, mais quelle tait humble, elle baissait les yeux, elle ne se plaignait pas et naccusait personne. En fait elle navait aucune raison de pleurer en entendant les commrages puisque Essav avait vendu son droit danesse Yaakov (Brchith 25:33), dornavant ctait lui lan et ctait donc lui qui devait lpouser, contrairement au bruit qui courait Rahel pour Yaakov et Lah pour Essav . Mais Lah, parce quelle tait si vertueuse, se soumit la sentence et seffaa devant sa jeune sur. Elle accepta son destin, mais elle en pleurait, et cest le sens de les yeux de Lah tait faibles , elle baissait les yeux devant sa sur et dplorait que le sort veuille lunir Essav. Mais elle na pas port grief contre sa sur ou contre son pre Lavan, tant elle tait humble. Combien les qualits de Lah sont tonnantes et sa conduite exceptionnelle. Elle savait quelle avait raison, en dpit des rumeurs. Elle aurait pu revendiquer ses droits auprs de Yaakov, mais elle se tut, et elle accepta la honte et les moqueries sans se plaindre, comme le disent les Sages (Chabath 88b; Yoma 23a): Les gens vertueux sont offenss mais noffensent pas, ils entendent les insultes mais ils ne rtorquent pas . Mais LEternel prouve les curs (Michlei 17:3). Il connat le fond des curs et des penses. Il sait la noblesse de Lah, Il sait quelle ne fait grief ni sa sur Rahel ni son mari Yaakov, mais quelle pleure en silence au point den perdre les cils et daffaiblir sa vue. Elle prie D. de lui pargner de tomber entre les mains dEssav. La justice est de son ct, puisque contrairement lopinion publique, cest Yaakov qui est lan. Et donc, D. dirigea les vnements de telle sorte que lane pouse lan (Yaakov), en poussant Rahel renoncer son bonheur en faveur de Lah qui est son ane, et la laisser pouser Yaakov qui est lan, comme dit Lavan (Brchith 29:26): Ce nest pas lusage dans notre pays de marier la cadette avant lane . Les paroles de nos Sages (Tanhouma Vayikra 3) se sont ralises en Lah: Celui qui fuit les honneurs se voit poursuivi par les honneurs , et cest justement parce quelle eut la modestie de ne pas revendiquer le droit danesse que ce droit lui revint et quelle pousa Yaakov. Nous voyons ici combien les Matriarches avaient de respect lune envers lautre. Chacune seffaait devant lautre, chacune dsirait le bonheur et la joie de lautre, au dtriment de son propre bonheur. D., qui dirige les vnements et connat le fond des curs, savait que toutes deux mritaient ddifier les douze tribus de la Maison dIsral, les tribus de lEternel, et Il a organis la suite des vnements de telle sorte que Yaakov pouse les deux femmes. Bien quil ait aim Rahel, il pousa tout dabord Lah, et ensuite il travailla sept ans de plus pour Rahel. Lah, qui tait modeste et baissait les yeux, fut rtribue mesure pour mesure, elle pousa Yaakov la premire, car les honneurs la poursuivaient, et lenchanement des vnements fut dirig par le Ciel. Cest une leon pour chacun de nous. Les Matriarches, qui se sont toujours sacrifies pour le bien de lautre sans penser leur propre intrt et sans mettre en avant leurs droits, sont pour nous un exemple. Nous retrouvons cette mme vertu des Matriarches justement la sortie dEgypte, chez les femmes de cette gnration, comme le disent les Sages (Sotah 11b; Bamidbar Rabah 3:4): Cest grce au mrite des femmes vertueuses que les Enfants dIsral furent sauvs dEgypte , car elles se sont sacrifies pour le bien du peuple. De mme, lors de la faute du veau dor, les femmes refusrent de donner leurs boucles doreilles en or pour ne pas participer sa fabrication (voir Rachi Chemoth 32:2; Zohar I, 172a). Il est crit: Dtachez les pendants dor qui sont aux oreilles de vos femmes ce qui montre quil fallut les prendre contre leur gr, de force, car elles ne voulaient pas les donner. Leur refus de participer la fabrication du veau dor reprsente une sanctification du Nom de D., par contre, lorsquil fallut faire des offrandes pour la construction du sanctuaire, ce sont les femmes qui furent les premires offrir leurs bijoux pour difier le sanctuaire et ses ustensiles (voir Zohar II, 196b, 224a). Les vertus des femmes taient telles, quavant le don de la Torah, D. Sadressa elles en particulier (sparment des hommes), comme il est crit (Chemoth 19:3): Ainsi tu diras la Maison de Yaakov,

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tu parleras aux Enfants dIsral et les Sages expliquent (Yalkout Chimoni Yithro 276): La Maison de Yaakov, ce sont les femmes . De plus, Rachi souligne (ad. loc.): tout dabord, il est crit: tu diras ce qui indique envers les femmes un langage doux, et ensuite tu parleras aux hommes, svrement, et cela parce que les femmes sont lessentiel de la Maison dIsral . Les Sages ont demand (Brachoth 17a): Par quoi les femmes gagnent-elles du mrite? puisque lobligation dtudier la Torah ne sapplique quaux fils, et pas aux filles (Kidouchin 29b). Il est dit aussi (Sotah 20a): Celui qui enseigne la Torah sa fille, cest comme sil lui enseignait des futilits . Mais elles envoient leurs fils lcole, elles veillent aux lois de puret familiale, elles attendent le retour de leur mari, et elles veillent aux commandements qui grent les relations sociales, et cest pourquoi les femmes aussi se lveront et chanteront la Gloire de D. lors de la rsurrection des morts, bien quelles ntudient pas la Torah. Parce que leur dvouement et leur empressement dans la pratique des commandements sont grands, elles reoivent leur rcompense dans ce monde et dans lautre.

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Le bon penchant doit toujours surmonter le mauvais penchant
Il est crit (Brchith 32:4): Et Yaakov envoya des messagers en avant, vers Essav son frre... Rachi explique, rapportant le Midrach (Brchith Rabah 75:4) que ces messagers sont littralement des anges. Nous avons dj expliqu ce verset plusieurs fois, mais toute tude rvle des aspects nouveaux. 1. Pourquoi Yaakov envoie-t-il des messagers Essav son frre? Ne pouvait-il pas laborder directement, mme par surprise, et le rencontrer sans se faire prcder par des messagers? 2. Sil veut linformer de son arrive, pourquoi le faire par lintermdiaire danges et non par de simples messagers? Si cest pour limpressionner et lui faire peur, il aurait pu tout dabord envoyer de simples messagers, et seulement par la suite des anges. A propos du verset (Brchith 33:8) Quest-ce que toute cette troupe venant de ta part, que jai rencontre? les Sages remarquent que Les anges ont frapp Essav plusieurs reprises (Brchith Rabah 78:11). 3. Plus loin, il est dit (ibid. 32:8): Yaakov partagea ses gens en deux camps . Pourquoi partager les membres de sa famille en deux camps? Si des anges le servent et veillent sur lui, srement D. Lui-mme est avec lui. Que craint-il? En outre, il a peur dEssav au point de lappeler mon seigneur , comme il est crit (ibid. v. 5): Vous parlerez ainsi mon seigneur, Essav . De quoi Yaakov a-t-il tellement peur, pour faire tant dhonneur Essav en lappelant mon seigneur ? Il est crit (Brchith 25:25-26): Le premier sortit tout roux... et on le nomma Essav. Ensuite naquit son frre, tenant dans sa main le talon de Essav et on le nomma Yaakov . Pourquoi en venant au monde, Yaakov saisit-il Essav par le talon? Et pourquoi justement par le talon? Cest que celui qui veut surmonter son mauvais penchant doit ds sa naissance, ds son entre dans le monde, le tenir en main, comme un prisonnier, comme il est dit (Avodah Zarah 5b): Lorsque les Enfants dIsral obissent D., ils dominent leurs mauvaises tendances . De quelle manire? En consacrant quotidiennement de leur temps ltude de la Torah. Dans lautre monde, il sera demand chacun: As-tu consacr du temps ltude de la Torah? (Chabath 31a). Les directives de la Torah permettent de surmonter le mauvais penchant, car Jai cr le mauvais penchant, et Jai cr son remde, la Torah (Kidouchin 30b; Baba Bathra 16a). La Torah affaiblit les penchants de lhomme et les soumet sa volont. Cest le sens de Il tenait dans sa main le talon dEssav . Lhomme doit se saisir de son mauvais penchant afin quil nchappe pas son contrle. Le mot kev, talon, est compos des mmes lettres que le mot kva, permanent. Lorsque le mauvais penchant est fait prisonnier, il cherche fuir et se sauver. Il faut le rattraper et le dompter, comme il est dit: Il faut toujours que le bon penchant domine le mauvais penchant (Brachoth 5a; Zohar I, 202a), et Yaakov nous enseigne comment amener le bon penchant dominer le mauvais. Ce que nous venons de dire nous permet de comprendre pourquoi Yaakov envoie des anges Essav son frre: il ne fit que ce que les Sages recommandent de faire. A titre dillustration: deux ennemis sont en guerre, chacun lutte avec des armements sophistiqus afin de sassurer une victoire totale, chacun observe son ennemi afin de discerner de quel ct il est faible pour lattaquer. Mais il est possible de vaincre lennemi, mme sil possde des armes meilleures, si on le frappe soudain dun premier coup fatal qui ne lui laisse pas le temps de ragir et dutiliser ses armes, mme si elles sont des plus modernes et des plus sophistiques. Il en est de mme dans la guerre de lhomme contre son mauvais penchant. Si lon veut tre sr de vaincre cet ennemi puissamment arm, il faut savoir lui opposer le bon penchant et mme sans tre trs fru dans lart de la guerre, on peut frapper le mauvais penchant dun premier coup fatal qui assure la victoire. Cest ainsi que le bon penchant domine le mauvais. Cest ce que fit Yaakov. Il voulait signifier Essav, au mauvais penchant, quil le dominait. Cest pourquoi il lui envoya tout dabord des anges, non pas de simples messagers mais des messagers clestes, et pas nimporte quels anges non plus, mais ceux quil avait lui-mme crs par ses bonnes actions, pour faire savoir Essav quil ne le craignait pas. Ces anges tmoignent que Yaakov na jamais abandonn

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ltude de la Torah et que Lorsque la voix de Yaakov se fait entendre dans les maisons dtude et les maisons de prire, les mains dEssav ne peuvent pas prendre le dessus (Ptiha Ekhah Rabah 2, Pessikta Zouta Toledoth 27:22), les mains de Yaakov ont alors le dessus et saisissent le talon dEssav - du mauvais penchant. Yaakov exposa la puissance de ses armes, la Torah et sa pratique, un coup fatal pour le mauvais penchant pour lequel ces armes-l sont des plus menaantes et des plus effrayantes. Mais il ne faut pas penser que cela suffise pour vaincre le Satan. Il faut toujours le craindre, comme il est dit (Michley 28:14): Heureux celui qui craint toujours , car le mauvais penchant peut reprendre le dessus, et mme sil a t une fois mat, Il reprend de nouvelles forces tous les jours et cherche sans cesse nous faire chouer (Soucah 52b, Kidouchin 30b), et il ne connat ni calme ni repos. Il faut toujours le craindre, comme le disent les Sages (Avoth II:4): Ne sois pas sr de toi jusquau jour de ta mort . Nous avons lexemple de Yohanan le Grand Prtre, qui servit dans le Temple pendant quatre-vingts ans et devint hrtique la fin de sa vie (Brachoth 29a, Tanhouma Bechalah 3). Yaakov a divis les membres de sa famille en deux camps, galement afin de signifier Essav, au mauvais penchant, quil tait prt lui faire la guerre. Si lun des camps est vaincu, le second pourra chapper (Brchith 32:9) pour continuer dans la voie de la Torah et servir D. En faisant deux camps, il indique en outre Essav et aux gnrations futures que lhomme ne doit pas tre sr de lui-mme, il ne doit pas penser quil a dfinitivement domin son mauvais penchant, mais quil faut toujours continuer lutter. Cela explique aussi pourquoi Yaakov envoie des offrandes Essav. Les offrandes indiquent les commandements, pour signifier que chacun est oblig de pratiquer tous les commandements qui lui sont dun grand secours, en cas de besoin, et quil ne doit pas se reposer sur une partie seulement des commandements. Malgr tout, Yaakov avait peur. Il savait quEssav honorait son pre avec plus de rigueur que lui-mme (Brchith Rabah 82:15; Chemoth Rabah 46:3). Yaakov craignait le mrite dEssav. Il est possible quil ait appel Essav mon seigneur (ce qui est une allusion lange dEssav) afin dattnuer ce mrite, ce qui lui permettrait de prendre le dessus. Cest tonnant! Yaakov, llu des Patriarches, un homme intgre, de ceux sur qui le monde repose, craignait Essav parce quil pratiquait un commandement aussi important que lhonneur d aux parents! Il le craignait au point de lappeler mon seigneur et de le soudoyer par des cadeaux. Cela enseigne chacun quil faut faire tout son possible pour pratiquer tous les commandements, surtout celui daimer son prochain comme soi-mme (Vayikra 19:18) ce qui, selon lopinion de Rabbi Akiva, est le principe fondamental de la Torah (Yrouchalmi Ndarim 9:4). Et alors, le mauvais penchant ne pourra pas le prendre en faute et sera totalement dtruit. Tout cela ne sapplique qu celui qui est protg par la pratique des commandements car cest ce qui le rend pur, comme le disent les Sages (Makoth 23b; Avoth DRabbi Nathan 41:17): D. veut donner du mrite Isral et le purifier, cest pourquoi il lui a donn la Torah et tellement de commandements , et ils ajoutent (Menahoth 43b; Pessikta Zouta Bechalah vers la fin): Isral est aim de D., cest pourquoi Il lentoure de commandements . Mais celui qui ne shabitue pas la pratique des commandements saffaiblit, et cette faiblesse devient une partie de sa nature. Cela est indiqu dans le mot jlvyw, il envoya, qui est compos des mmes lettres que le mot vljyw, il faiblit, car Yaakov se sentit dans un tat de faiblesse par rapport au commandement dhonorer ses parents quEssav pratiquait, cest pourquoi il avait peur dEssav et prit tant de prcautions. Chacun doit pratiquer tous les commandements de la Torah, ce qui lui permettra de vaincre le mauvais penchant en toute circonstance.

Yaakov et Essav: le bien contre le mal


Et Yaakov envoya des messagers en avant... et il leur ordonna: Ainsi vous parlerez mon seigneur, Essav, et vous lui direz: Ainsi parle ton serviteur Yaakov: Jai sjourn chez Laban et jai tard jusqu prsent. Jai acquis des bufs et des nes, du menu btail, des esclaves et des servantes, jenvoie cette dlgation mon seigneur afin dobtenir faveur ses yeux (Brchith 32:4-6). Rachi explique: Guarti, jai sjourn: je ne suis devenu ni ministre ni personnalit importante, je suis rest un Gur, un tranger. Tu nas aucune raison de me har parce que ton pre ma bni me souhaitant

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dtre chef de tes frres (ibid. 27:29), car cette bndiction ne sest pas ralise. Dautre part, Guarti a la valeur numrique de six cent treize: jai observ tous les commandements de la Torah durant mon sjour chez Laban et je nai rien imit de ses agissements pervers (Midrach Hagadah ad. loc.). Le Midrach (Brchith Rabah 75:6) commente: Jai acquis des bufs et des nes... le buf reprsente le Grand-Prtre oint pour la guerre, comme il est dit (Devarim 33:17): Le taureau, son premier-n, quil est majestueux! Lne reprsente le Messie comme il est dit (Zakharia 9:9): Voici que ton roi vient.... humble, mont sur un ne . Le menu btail reprsente Isral, comme il est dit (Yhezkel 34:31): Et vous Mes brebis, brebis que Je fais patre, vous tes Homme, Moi Je suis votre D. dit lEternel... Et plus loin (section 12) le Midrach ajoute: Le buf, cest Yossef comme il est dit: Le taureau, son premier-n . Lne cest Issakhar comme il est dit (Brchith 49:14): Issakhar est un ne puissant . Le menu btail reprsente Isral comme il est dit (Thillim 116:16): Je suis Ton serviteur, fils de Ta servante... Tous les commentateurs ont dj analys ces versets, et nous allons prsenter les questions quils ont souleves: 1. Dans son commentaire de la Torah, lAdmor de Satmar remarque: La premire explication de Rachi est claire, et nous pouvons comprendre que Yaakov envoya dire Essav quil ntait pas devenu ministre ltranger, afin de trouver grce ses yeux. Sil ne recherche pas les honneurs et le pouvoir, cest quil se soumet Essav. Mais en quoi la seconde explication que donne Rachi (quil a observ toute la Torah), peut-elle trouver grce aux yeux dEssav? Est-ce que la pratique des commandements est une chose qui compte ses yeux? 2. Il pose une seconde question: La raison pour laquelle Yaakov informe Essav quil a acquis des bufs et des nes nest pas claire... ni pourquoi il envoie cette dlgation afin dobtenir grce ses yeux. En quoi le fait davoir ces possessions lui gagnera-t-il la faveur dEssav, qui possde richesses et honneurs ainsi que des bufs, des nes, des esclaves et des servantes? Si Yaakov dsire exprimer sa soumission Essav, pourquoi lui faire savoir quil possde toutes ces richesses? En quoi est-ce un signe de soumission? 3. Sa troisime question se rfre au Midrach cit plus haut, que le buf reprsente le Grand-Prtre oint pour la guerre, lne le Messie, et le menu btail Isral: Quest-ce que Yaakov veut faire savoir Essav par ces signes? (Ajoutons que la deuxime partie du Midrach demande aussi tre explique). Le Rabbin Avraham Koriat (disciple de Rabbi Hayim Pinto) se rfre cette question dans son livre Brith Avoth. 4. Le Divrey Hayim analyse la partie du Midrach qui dit que le buf reprsente Yossef. Yaakov informe Essav quil a un fils du nom de Yossef et donc quil ne le craint pas puisque Yossef est celui qui vaincra Essav (Brchith Rabah 73:7) et une tradition ancestrale nous enseigne qu Essav sera vaincu par les enfants de Rahel (Baba Bathra 123b), et il demande: Quest-ce que Yaakov veut faire savoir Essav? Nous allons humblement tenter de rpondre ces questions, en prsentant tout dabord quelques commentaires. Il est dit (Brachoth 13a, Yirouvin 95b): La pratique des commandements doit tre intentionnelle . Lorsque lon pratique un commandement en comprenant clairement son sens, on se cre pour ainsi dire le vtement que lon portera dans le monde Venir sans craindre davoir honte devant le Crateur, car lobissance aux commandements est une soumission lautorit divine et lexpression dune crainte sincre de D. Concernant le verset: Et maintenant Isral, lEternel ton D. te demande seulement de rvrer lEternel... (Devarim 10:12), les Sages demandent (Brachoth 33b): Est-ce que la crainte de D. est une chose si futile (pour quil soit dit seulement )? Nous pouvons rpondre queffectivement, la crainte de D. est une chose simple et chacun peut la ressentir lorsquil obit et pratique les commandements. Il est certain quune pratique consciente des commandements nous amne la crainte de D. Cela ne dpend que de notre volont, et si seulement nous le voulions, nous pourrions parvenir la crainte de D. Revenons la relation entre Yaakov et Essav. Rachi explique de deux faons Jai sjourn avec Laban . Sont-elles compatibles? Yaakov dit son frre Essav: Je ne suis devenu ni un personnage important, ni un ministre, cest--dire: je nai pas dambitions, je ne recherche pas les honneurs et je ne dsire pas te dominer. Je suis rest le mme tranger, le mme simple tudiant de la Torah, non pas comme du temps o jhabitais chez notre pre Yitshak, mais lorsque jai sjourn chez Laban lAramen, jai continu mon

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tude et jai observ et pratiqu tous les commandements de la Torah avec attention et prcision malgr les difficults et les nombreux empchements. Etant donn que je ne recherche pas le pouvoir, mais cherche uniquement poursuivre mon tude de la Torah, tu nas aucune raison de me har. Tout le temps o Yaakov tait chez Laban, Essav souponnait quil allait encore une fois le tromper comme il lavait fait en lui achetant le droit danesse en lui prenant les bndictions. Sil devient puissant et riche ltranger, il lui volera les biens de ce monde et le dominera et Essav sera oblig de le servir puisque leur pre a bni Yaakov de suprmatie sur lui. Maintenant, Essav va tre rassur, car Yaakov lui fait savoir quil nest pas devenu grand et puissant et que la bndiction de leur pre ne sest pas ralise, quil ne pense aucunement devenir roi ou ministre, mais veut rester le mme Yaakov, un homme intgre assis dans les tentes de la Torah et servant D. Il est difficile de soccuper la fois des affaires de ltat et dtudier la Torah, car les soucis du gouvernement sont lourds et dtournent de la mditation. Cest ce message que Yaakov communique Essav. Je ne suis pas devenu un personnage important car je navais pas le temps de moccuper des affaires de lEtat, mais jai observ tous les commandements de la Torah et jai continu mon tude. Et donc je ne suis pas devenu un personnage prestigieux et la bndiction de notre pre ne sest pas ralise, tu nas donc aucune raison de me har car je nai pas lintention de prendre le pouvoir et de te dominer. Mais, par la suite, le Midrach (Zouta 19) nous raconte que lorsque Yaakov revint de chez Laban et quEssav vit les richesses quil possdait, lor et largent, les bufs et les nes, et tous les biens de ce monde, il lui demanda: Tu mavais pourtant promis de ne prendre que le monde Venir, pourquoi tappropries-tu les biens de ce monde? Tu veux me tromper encore une fois! Et Yaakov lui rpondit: Ces quelques biens, D. me les a donns pour mes besoins en ce monde. En disant: Jai acquis des bufs et des nes, du menu btail, des esclaves et des servantes , il signifie: Je navais pas la possibilit de menrichir parce que jtais tout le temps occup par ltude de la Torah, et effectivement, je nai fait aucun effort pour menrichir et je ny pensais pas. Les biens que tu vois en ma possession, cest D. qui me les a donns pour mes besoins en ce monde, en cadeau et en rcompense de la Torah et des commandements que jai observs chez Laban. Mais toutes ces richesses ne me donnent pas envie de prendre le pouvoir, et comme je te lai dj dit, je veux continuer tudier la Torah et servir D. sans te dominer. Je veux rester un homme simple. La fin du verset: Jenvoie cette dlgation mon seigneur afin dobtenir faveur ses yeux indique: Je tenvoie tout cela pour te dire que tu es mon seigneur, et que je ne dsire pas te dominer, tu nas aucune raison de me craindre pour mes richesses. Certes de telles paroles avaient de quoi plaire Essav, qui souponnait son frre de vouloir le dominer et le priver de sa part en ce monde. Mais de tels soupons sont sans fondement, et il navait donc pas raison de le craindre. Essav pouvait aussi se rjouir de la preuve avance par Yaakov quil avait continu tudier la Torah chez Laban, sans que ses richesses lempchent de servir D. Cela montre quil est rest un homme de Torah et navait aucune ambition de prendre le pouvoir. De plus, Essav pouvait aussi se rjouir la pense que toutes ces richesses risquaient de dtourner Yaakov du service de D. ce qui lui ferait perdre sa place dans le monde Venir, et alors Essav serait sorti gagnant de toute cette affaire. Nous voyons combien Essav est pervers. Peu lui importe que Yaakov tudie la Torah car lui-mme ne ressent aucun besoin dune vie spirituelle. Essav avait mpris le droit danesse (Brchith 25:34), reni la rsurrection des morts (Pessikta Rabah 12:4), pris le mauvais chemin, et perptr cinq crimes le jour de la mort de son grand-pre Avraham (Baba Bathra 16b, Chemoth Rabah 1:1), et il commettait dinnombrables fautes. Que lui importe que Yaakov observe la Torah et quil possde quelques biens en ce monde, puisque lessentiel de ses biens lui est rserv dans lautre monde. Et pourtant! Essav a peur que Yaakov devienne ministre, quil ne prenne le pouvoir et doive le servir le cas chant. Mais il est clair que Yaakov navait aucune intention de prendre le pouvoir, dclaration qui avait de quoi plaire Essav et le rassurer. Effectivement, Yaakov linforme quil ne recherche pas les honneurs en ce monde mais qu lavenir la souverainet lui reviendra, en lui disant quil a acquis des bufs et des nes. Le buf reprsente le Grand-Prtre oint pour la guerre, lne reprsente le Messie, et le menu btail Isral, ce qui signifie: lavenir, la souverainet reviendra Isral comme il est crit: Les librateurs monteront sur la montagne de Sion pour se faire les justiciers du mont dEssav, et la royaut appartiendra lEternel (Ovadia 1:21),

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et alors Isral dominera Essav. Mais Essav ne croit pas en la rdemption, il nie la rsurrection des morts, et donc peu lui importe qu lavenir les Enfants dIsral aient la souverainet sur les enfants dEssav et que toutes les offrandes quil reoit maintenant soient lavenir rendues au Messie (Brchith Rabah 78:12). Tout ce quil veut cest jouir de plaisirs immdiats, comme il dit (Brchith 33:12): Partons et marchons ensemble, je me conformerai ton pas , cest--dire: je serai maintenant ton partenaire (Brchith Rabah 78:14), et en ce monde, cest moi qui domine. A quoi Yaakov rpondit: Je cheminerai ma commodit, jusqu ce que je rejoigne mon seigneur Seir (Brchith 33:14), et il ajouta (ibid.): Que mon seigneur veuille passer devant son serviteur . Autrement dit: Je reconnais ta supriorit en ce monde, mais en fin de compte, je te rejoindrai Seir. Quand? A la fin des temps, comme il est crit: Les librateurs monteront sur la montagne de Sion... Essav ne craint pas cette prophtie. Sil avait eu le moindre doute concernant la vracit des paroles de Yaakov, il naurait pas accept de passer devant, mais il ne croit ni en la rdemption ni en la royaut du Messie ni en la rsurrection des morts, et il nattacha donc aucune importance au message de Yaakov et son enseignement. Lessentiel pour lui tait de pouvoir jouir de ce monde maintenant. Il considrait que les paroles de Yaakov taient fausses, et il accepta donc tout ce quil disait. Yaakov comprenait bien son frre, il savait que ses paroles plairaient Essav. Cela rpond aux trois questions poses par le Rabbin de Satmar, de mmoire bnie. Au sujet du deuxime Midrach (et de la deuxime question du Divrey Hayim), il faut dire que Yaakov connaissait le caractre dEssav son frre, il savait combien il tait matrialiste et combien il commettait de transgressions. Pour ne pas veiller sa colre, il lui dit quil ntait pas devenu un personnage important mais que chez Laban il tudiait et pratiquait la Torah, et quil navait donc pas le temps de soccuper daffaires publiques. Toute sa richesse ne lui venait que du mrite de sa Torah. Yaakov navait aucune intention de se soumettre Essav et ses plans, et il le lui fit savoir clairement: Jai acquis des bufs et des nes. Le buf reprsente Yossef et lne Issakhar, ce qui revient dire: Je dsire continuer consacrer ma vie ltude de la Torah sans en tre dtourn, comme Issakhar qui est le prototype de ltudiant de la Torah (Brchith Rabah 72:4). Il est crit: Issakhar est un ne puissant et les Sages demandent: De quel genre dne sagit-il? Et ils rpondent (Avodah Zarah 5b): Celui qui tudie la Torah doit se considrer comme un buf sous le joug et comme un ne sous sa charge (comme un buf est aussi une rfrence Yossef), et dIssakhar il est dit (Divrey HaYamin I, 12:32): Et parmi les enfants dIssakhar des experts en la connaissance des temps , cest--dire qui possdent la sagesse de la Torah. Yaakov signifie Essav que tous ses descendants se consacreront la Torah et la mettront en pratique, lui disant: Je nai aucun dsir daccumuler les richesses ou les honneurs, mais si tu venais me dranger, moi ou mes descendants, dans notre pratique, sache que Yossef aussi est avec moi, et la maison de Yaakov sera un feu, la maison de Yossef une flamme, la maison dEssav un amas de chaume... (Ovadia 1:18), Nous produirons une tincelle et nous te brlerons compltement (Brchith Rabah 84:5), et tu ne pourras pas nous nuire car Yossef est Le taureau premier-n dont les cornes sont les cornes du rem qui terrassent les peuples (Devarim 33:17) - nous allons te terrasser et craser nos agresseurs. Yaakov parle ainsi Essav pour lui faire peur, pour dcourager ses attaques. Dune part, il se montre soumis; dautre part, il le menace et le met en garde de ne pas attaquer ses enfants. Si Essav veut la guerre, il devra faire face au mrite dIssakhar et de Yossef, le feu qui brle tout ce qui se trouve sur son chemin. Tant quIsral est plong dans la Torah, qui est compare un feu (Devarim 33:2), aucune puissance au monde ne peut le vaincre (voir Ketouboth 66b; Avoth DRabbi Nathan 34:4), et les Sages ont dit (Baba Kama 17a): Quiconque est plong dans la Torah et fait preuve de gnrosit, reoit lhritage de deux tribus, celui dIssakhar et celui de Yossef (justement celles qui sont les adversaires dEssav) et ses ennemis tombent devant lui, comme devant Yossef . Essav ne peut pas venir dtourner les descendants de Yaakov de la Torah et de la pratique de la Torah. Nous apprenons deux choses: Les hommes pervers, ceux qui suivent les voies dEssav, ne pensent pas au monde Venir, ils se satisfont de plaisirs matriels et agissent comme bon leur semble. Bien quils sachent qu une heure de batitude dans lautre monde est prfrable toutes les jouissances de ce monde (Avoth IV:17), ils ny prtent pas attention, ils ny croient pas. Mme si un homme vertueux et pieux vient leur faire des reproches, ils nen tiennent pas compte parce quils ne sattachent qu ce quils peuvent voir et sentir - les plaisirs de

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ce monde - et sen contentent. Ils ne croient pas en un autre monde qui ne se voit pas. Il faut viter cette grave erreur et prendre exemple sur la droiture de Yaakov. Par ailleurs, certains dsirent effectivement suivre la voie de Yaakov, mais ils se dcouragent en voyant quil existe beaucoup de gens clbres et riches qui ont poursuivi des vanits (Melakhim II, 17:15) et que les richesses ont dtourns dune vie spirituelle. A propos de tels gens, il est crit: Yechouroun engraiss regimbe (Devarim 32:15), et Ton cur senorgueillira et tu oublieras lEternel (ibid. 8:14), et encore La jalousie et la recherche des honneurs les excluent du monde (Avoth IV:21), cest--dire du monde ternel. Au lieu de rendre grce D. pour les richesses et les bienfaits quIl leur procure, ils suivent leurs propres dsirs, ils se dtournent de la pratique du bien, ils recherchent les profits court terme, et ils se dtournent progressivement de la bonne voie quen fin de compte ils abandonnent. Celui qui veut suivre la voie de Yaakov et tre un homme intgre , doit tudier et comprendre la finalit des choses. Bien que Yaakov ft bni de richesses et dhonneurs, il expliqua Essav quil ntait pas devenu un personnage important, que la richesse ne laveuglait pas, quil tait rest le mme Yaakov, craignant D. et pratiquant Sa loi, car lor et largent ne lavaient pas empch de pratiquer toute la Torah, et la clbrit ne lavait pas empch de faire le bien tous les jours de sa vie. Telle est la leon que nous devons tirer de la conduite de Yaakov. Comme lui, nous devons aspirer trouver grce auprs de D. faute de quoi nous risquons de perdre lesprit cause de nos richesses. Nous ne devons pas rechercher le prestige et les honneurs, mais une vie de Torah et de bonnes actions, et rester comme un rg, un tranger, tranger aux choses matrielles et proche de D. Cest ainsi seulement que nous mriterons la vraie rdemption future. Nous apprenons autre chose de Yaakov. Que veut-il faire savoir Essav lorsquil lui dit: Jai sjourn chez Laban ? Est-ce que son lieu de sjour a de limportance ses yeux? Cest quil faut toujours se demander quest-ce qui est prfrable? Est-il prfrable de servir D. dans un lieu dont les habitants sont pervers et se moquent des Juifs, et malgr tout continuer pratiquer la Torah et le Judasme, ou bien habiter dans un endroit dont tous les habitants observent la Torah et ses commandements, et o il est plus facile de servir D.? Il est certain que servir D. dans un endroit dont les habitants nont pas la crainte de D. est plus difficile et donc plus louable, et la rcompense en est plus grande. Cest ce que Yaakov dit Essav: Jai sjourn chez Laban , en un lieu de gens malfaisants, o tous se riaient et se moquaient de moi, surtout Laban qui dnigrait chaque commandement que je pratiquais. Les premires lettres des mots ytrg bl [, jai sjourn avec Laban, forment le mot g[l, moquerie - malgr leurs moqueries, jai observ toute la Torah, je ne me suis pas laiss dtourner et jai continu pratiquer. D. ma donn une grande rcompense en compensation des affronts et de la honte que jai d subir chez Laban et je me suis enrichi, mais la rcompense pour lobissance aux commandements mest rserve dans le monde Venir, comme le disent les Sages (Pah 1:1): Le capital reste intact dans le monde Venir . Mais toi, tu as habit avec des gens vertueux et tu nas rien appris de leurs actes (Yoma 38b). Pourquoi es-tu incorrigible? Il faut imiter Yaakov et ne pas craindre ceux qui se moquent de nous. Persvrons dans la pratique des commandements de la Torah afin dtre heureux en ce monde et dans lautre.

Les stratagmes de la guerre contre le mauvais penchant


Il est crit (Brchith 32:4-5): Et Yaakov envoya des messagers (selon une autre interprtation: des anges) au-devant... au pays de Sir, en terre dEdom. Il leur donna lordre de dire Essav... ainsi parle ton serviteur Yaakov. Jai sjourn chez Laban et jai tard jusqu prsent . Plus loin (verset 8), il est crit: Yaakov fut effray et plein danxit . Les Sages expliquent (Tanhouma Yachan, Vayichlah 6; Rachi Brchith 32:9): Yaakov craignait Essav et cest pourquoi il stait prpar faire trois choses: lui offrir des cadeaux, prier, lui faire la guerre. Beaucoup de questions se posent, auxquelles nous devons rpondre. 1. Pourquoi Yaakov envoie-t-il des anges pour apaiser Essav? Il sait quEssav le hait, comme le lui a dit sa mre (Brchith 27:42): Ton frre Essav veut se venger de toi, il veut te tuer . Essav le hait pour

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lavoir priv de son droit danesse et des bndictions et tout lor du monde ne suffirait apaiser sa haine. Envoyer des anges sa rencontre peut sembler une provocation et une dclaration de guerre. Naurait-il pas mieux valu que Yaakov prenne une autre route pour se rendre chez son pre Yitshak, afin dviter de rencontrer Essav quil navait pas vu depuis longtemps? Ils ne se seraient pas rencontr et Yaakov naurait eu aucune raison davoir peur. 2. Si Essav hassait Yaakov depuis si longtemps, pourquoi na-t-il rien fait jusque-l? Durant ces vingt-deux ans, il aurait pu aller Haran faire la guerre contre Yaakov, car Essav ne manquait pas daudace. Est-ce donc quil craignait Laban? 3. Pourquoi Yaakov craignait-il Essav? Lorsquil quitta la maison de son pre, D. lui promit: Je veillerai sur toi partout o tu iras et Je te ramnerai dans ce pays car Je ne tabandonnerai pas... (ibid. 28: 15) et chez Laban aussi D. lui promit Je serai avec toi (ibid. 31:3). Pourquoi avait-il donc si peur dEssav, et pourquoi avait-il besoin de se prparer toute ventualit par des offrandes, la prire et la guerre, sil navait effectivement aucune raison davoir peur? 4. Il faut expliquer lintention de Yaakov lorsquil dit Essav: Jai sjourn chez Laban . Est-ce quEssav ne savait pas que Yaakov avait habit tout ce temps chez Laban? En fait, durant le temps que Yaakov passa chez Laban, il stonnait de ce que son frre ne vnt pas Haran lui dclarer la guerre car Essav ne craignait pas Laban et il avait le pouvoir de lutter la fois contre Yaakov et contre Laban. Mais lorsque Yaakov comprit combien Laban tait menteur et malfaisant, il comprit juste titre quEssav navait pas lintention de le tuer en le privant de la vie, mais quil voulait le tuer sans verser de sang. Si Yaakov se laissait influencer par son oncle Laban, il devenait mchant lui aussi et Les mchants sont comme morts mme de leur vivant (Brachoth 18b, Brchith Rabah 39:7), et telle serait sa fin... il sensuivrait ncessairement quil perdrait le bnfice de toutes les bndictions dYitshak. Cest pourquoi Essav navait aucune raison daller Haran dclarer la guerre Yaakov, puisque Laban obtiendrait ce que lui-mme voulait, et Essav tait heureux de chaque instant que Yaakov passait Haran en compagnie de ce vilain (Rachi, Brchith 24:50), appel par tous le roi des menteurs (Tanhouma Vayichlah 1). Cest la raison pour laquelle Yaakov lui fait dire: Jai sjourn chez Laban ce qui signifie (Midrach Hagadah ad. loc.): Jai observ toute la Torah et je ne suis pas devenu malfaisant, comme tu le penses. Au contraire, pendant tout ce temps, jai continu suivre la voie de la Torah. Bien plus, jai appris de Laban quelle est la conduite viter, comme il est dit (Thilim 119:98): Tes commandements me rendent plus sages que mes ennemis . Tous les biens que je possde, je les ai acquis par mon dur travail, et par consquent les bndictions de mon pre nont pas t amoindries, et elles restent valables pour moi et mes descendants jusqu la fin des temps. Il reste expliquer pourquoi Yaakov na pas prfr prendre une autre route pour se rendre chez son pre, plutt que daffronter Essav? Cest que Yaakov veut enseigner toutes les gnrations comment servir D. Il nous enseigne quil est interdit de senfuir devant le Satan, qui est le mauvais penchant, qui est lange de la mort (Baba Bathra 16a). Au contraire, il faut lui faire face et le dominer, comme il est dit (Brachoth 5a; Zohar III, 113): Il faut toujours faire dominer le bon penchant sur le mauvais , que Rachi explique ainsi (ad. loc.): Il faut lui faire la guerre afin de lanantir pour toujours. De plus, il est possible de linvestir dans le service de D. comme il est dit (Brachoth 54a): Tu aimeras lEternel de tout ton cur - avec les deux penchants de ton cur, le bon et le mauvais . Tout comme nous avons peur de faire la guerre, nous devons craindre la guerre contre le mauvais penchant, tout en gardant une pleine confiance en D. Crateur du monde, et savoir quIl nous vient en aide et nous procure la victoire. Cest ce que fit Yaakov lorsquil alla intentionnellement au-devant dEssav, afin de le rencontrer, de laffronter et de le vaincre. Mais Yaakov craignait quune faute quelconque de sa part ne lui ft perdre cette guerre (Brachoth 4a; Chabath 32a; Bamidbar Rabah 19:32), comme il est crit (Thilim 51:5): Mon pch est sans cesse devant mes yeux. Pourquoi? Parce quEssav respectait la perfection lhonneur des parents (Chemoth Rabah 46:3; Devarim Rabah 1:14), tandis que Yaakov, durant sa longue absence, navait pas pu honorer son pre, et cette faute risque dentraner sa dfaite. Et ainsi, lorsque Yaakov attaqua Essav, il commena par se repentir de navoir pas servi son pre.

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Bien que Yaakov nait aucune raison de craindre Essav puisque D. lui avait promis de veiller sur lui, il craignait pourtant quen rencontrant Essav, il noublie, ne serait-ce quun instant, la protection de D. et que cette faute ne le perde et cest pourquoi il sest prpar offrir des cadeaux, prier et faire la guerre. La conduite de Yaakov est une leon pour ses enfants. Elle vient leur apprendre quil faut toujours tre en position dutiliser ces trois moyens: les cadeaux, la prire et la guerre. Comment? En tudiant la Torah et en suivant ses voies, nous sommes assurs de pouvoir surmonter le mauvais penchant, puisque la Torah est le remde contre les mauvaises tendances (Kidouchin 30b; Baba Bathra 16a; Sifri Ekev 11:18) et elle protge et sauve (Sotah 21a). Malgr cela, au moment de la lutte contre le mauvais penchant, nous risquons de nous dtacher de D., ne serait-ce quun instant, ce qui pourrait sceller la dfaite. Et Yaakov nous prvient donc que, mme dans le feu de laction, nous ne devons pas oublier la crainte de D. et que toute rupture dans notre lien avec D. peut nous faire perdre la bataille. Il faut donc tre prt trois choses: A faire la guerre, cest--dire attaquer le mauvais penchant, comme nous lavons dit plus haut, prier D. de nous sauver de lemprise de cet ennemi, et surtout faire des cadeaux, cest--dire saisir la Torah qui est un cadeau. En effet, il est crit (Bamidbar 21:19): De Mattana Nahaniel et de Nahaliel Bamot (des tapes dans le parcours du peuple juif dans le dsert) . Se fondant sur le fait que le mot Mattana signifie cadeau , les Sages ont dit (Brachoth 5a; Chemoth Rabah 1:1; Chohar Tov 94:2): La Torah sappelle un cadeau , et elle est un enseignement, comme il est crit: Je vous ai donn un bon enseignement, nabandonnez pas Ma Torah (Michley 4:2). Si nous restons constamment attachs elle, elle nous aidera sans aucun doute vaincre le mauvais penchant. Bien que nous ayons la promesse de D., si nous dtachons nos penses de Lui, ne serait-ce quun instant, la promesse peut ne pas se raliser. Cest ce que Yaakov craignait, et cest cette leon quil transmit ses descendants, pour toutes les gnrations. Il y a une autre leon tirer de la conduite de Yaakov avec Essav. Il faut poursuivre le mauvais penchant partout o il se cache, et cela parce quil a plusieurs appellations, comme le disent les Sages (Soucah 52a): Le mauvais penchant a sept noms , il sappelle le grand roi (Kohleth 9:20), David lappela Pcheur (Zohar I, 165), il se nomme aussi Impur et Ignoble (Zohar III, 101b), et il peut donc paratre sous des formes aussi diverses que varies, et il peut tre l sans que lon se rende compte de sa prsence. Il faut se mfier de lui et le guetter de tous cts, comme nous le disons dans la prire: Retire le Satan de devant nous et de derrire nous , cest--dire de quelque ct quil puisse venir. Cest que le mauvais penchant peut se prsenter devant nous sous la forme dun homme plein de vertus, tout comme il peut nous attaquer par derrire comme un vilain qui en veut notre vie. Les exemples qui illustrent ce fait ne manquent pas. Parfois le Satan se prsente nous de bon matin, il nous rveille pour la prire, et effectivement, nous nous rveillons et faisons tout ce que nous avons faire. Mais ensuite, le mauvais penchant nous rend orgueilleux: je me suis lev de bon matin... jai pri... , et alors il nous insuffle des mauvaises penses qui nous font dire: je suis fatigu, je me suis lev si tt... et il nous est impossible dtudier tout le reste de la journe... Il faut donc le devancer et frapper le premier coup, comme il est crit: Lorsque tu partiras en guerre contre ton ennemi... (Devarim 21:10), il faut agir avec la crainte des fautes commises, ne pas senorgueillir, et ne pas rompre le lien avec D. au moment du combat. Cest ce que Yaakov dit Essav: Jai sjourn chez Laban, et je nai rien appris de sa mauvaise conduite, mais toi tu as vcu chez Yitshak, homme vertueux, et tu es rest mchant, tu nas rien appris de sa bonne conduite , comme le disent les Sages (Yoma 38b): Essav habitait chez deux personnes vertueuses et na rien appris de leur conduite . Et Yaakov ajoute: Jai tard jusqu prsent , cest--dire: ne crois pas que jaie imit ses mauvaises manires du fait que jai vcu longtemps chez lui; au contraire, jai habit chez lui pendant vingt-deux ans, et malgr cela je suis rest vertueux et je nai pas faut comme lui. Il en est de mme de la rencontre de Yaakov avec lange dEssav. Aprs avoir envoy son message Essav, Yaakov affronte lange dEssav et lutte contre lui , lui dont le but tait justement de lui faire oublier D. en lui causant une grande douleur la cuisse. Cette lutte eut lieu la nuit, car le Satan et les esprits malfaisants et destructeurs rgnent ce moment (Baba Kama 60b; Zohar III, 113; Rachi Chemoth 12:22). Pourtant,

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il est dit (Brchith 32:26): Lange vit quil ne pouvait pas le vaincre , cest--dire que le Satan na pas russi dtourner Yaakov de son attachement D. et il na fait que le blesser la cuisse, et Yaakov est rest vertueux tout le temps de cette lutte. Et lange lui dit ensuite (ibid. 32:29): Ton nom ne sera plus Yaakov mais Isral, car tu as lutt avec la divinit et avec les hommes, et tu as gagn . Isral a le sens de Yachar, droit, car durant cette lutte Yaakov est rest intgre et attach D. et cest pourquoi il a gagn. Lange dEssav fut contraint de se rendre, et en particulier dagrer les bndictions reues de son pre par Yaakov (Brchith Rabah 78:2), comme Essav le concda par la suite (ibid. 33:9): Mon frre, garde ce que tu as . Yaakov, qui fut victorieux dans cette guerre, enseigne ses enfants et ses descendants qu avec des stratagmes, tu entreprendras la guerre (Michley 24:6), avec des cadeaux, avec la prire, avec le combat, et ainsi tu parviendras craser le mauvais penchant et toi, Juif, tu survivras et tu progresseras dans une vie faite de spiritualit et de pit.

Lhumilit, cran contre lorgueil


Ainsi parle ton serviteur Yaakov: Jai sjourn chez Laban et jai tard jusqu prsent... les messagers revinrent auprs de Yaakov en disant: Nous sommes alls trouver ton frre Essav, et lui-mme vient ta rencontre, accompagn de quatre cents hommes. Yaakov eut trs peur et fut rempli danxit (Brchith 32:5-8). Nous avons dj cit le commentaire de Rachi bas sur le Midrach, mais il nous reste encore quelques questions. 1. Nous nous sommes demand plusieurs reprises ce que Yaakov veut faire comprendre Essav? Yaakov attise la colre de son frre, et la haine dEssav sera dautant plus vive que son pre a bni Yaakov en disant: Lorsque la voix de Yaakov se fait entendre dans les maisons dtude et de prire, les mains dEssav sont impuissantes (Brchith Rabah 65:16; Zohar I, 171a). 2. Comment est-il possible que Yaakov ait observ tous les commandements de la Torah chez Laban alors quil tait en exil o il ne pouvait ni honorer ses parents, ni pratiquer les commandements qui ne sappliquent quen terre dIsral, ni probablement respecter dautres obligations? 3. Pourquoi Essav se fait-il accompagner de quatre cents hommes? Quest-ce que ce chiffre indique? Et pourquoi Yaakov a-t-il si peur de lui puisquaprs avoir russi vaincre lange dEssav (Houlin 92a; Brchith Rabah 78:2), il aurait srement pu le vaincre aussi? Pour rpondre ces questions, citons tout dabord le verset (Ocha 14:3): Armez-vous de paroles suppliantes et revenez D. , que Rachi explique ainsi: Veuille agrer les paroles que nous prononons en remplacement des sacrifices que nous aurions d Toffrir . Et les Sages disent (Menahoth 110a): Celui qui tudie la Torah est considr comme sil prsentait un sacrifice , ce qui signifie que ltude des lois qui grent un certain commandement de la Torah est considre comme quivalente la pratique de ce commandement. Et donc Yaakov, qui avait tudi toutes les lois de la Torah fit savoir Essav que cette tude le sauverait sans aucun doute de ses attaques. Il est possible dajouter que Yaakov avait observ le Chabath dans la maison de Laban (Brchith Rabah 79:6; Pessikta Rabah 23:9). Le Chabath quivaut tous les commandements de la Torah (Yrouchalmi Brachoth 1:5, Chemoth Rabah 25:16), et cest comme sil avait observ tous les commandements, sans exception. Ceci dit, expliquons le sens des paroles de Yaakov la lumire du fait quEssav vient, accompagn de quatre cents hommes, attaquer Yaakov. Le chiffre quatre cents symbolise lexil, comme il est crit (Brchith 15:13): Et D. dit Avram, sache avec certitude que tes descendants seront trangers dans un pays qui ne leur appartient pas, ils y seront asservis et souffriront pendant quatre cents ans . Nous savons que lexil a commenc avec Yaakov (Zohar II, 2b, 5b). Tel est le message que Yaakov transmet Essav: jtais en exil chez Laban, et malgr cela je nai pas imit ses mchancets. Au contraire, jai tudi les dtails des six cent treize commandements de la Torah et jai progress, au point que mme les anges sont mon service. Mais toi, Essav, tu nas pas vcu Haran mais en terre dIsral dont latmosphre procure la sagesse (Baba Bathra 158b), tu ntais pas en exil, tu as habit chez notre pre Yitshak, et malgr cela tu nas rien appris de sa pieuse

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conduite (Yoma 38b). Toi, tu aurais pu progresser et tlever au point davoir des anges ton service. Tu veux meffrayer avec ces quatre cents hommes, avec lexil! Cest justement en exil que je suis parvenu au plus haut degr, mais toi tu as perdu, car tu aurais pu te repentir de tes fautes et tlever dans la Torah et dans la crainte de D. Nous tirons de l une leon profonde. Combien il est dommage quun jeune tudiant de Ychivah, entour de matres, ne profite pas de cette occasion pour se perfectionner dans la crainte de D. et au lieu de cela, perd un temps prcieux. A lavenir, il se rendra compte quil na pas tir profit du potentiel norme dont il disposait et il regrettera ce quil a perdu. Quelle honte, quelle grande peine et combien sa punition sera svre! Mais Essav pensait que lexil rend paresseux et pousse abandonner ltude de la Torah, car celui qui vit hors de la terre dIsral est comme quelquun qui vit sans D. (Ketouboth 110a, Zohar III, 29b). Essav est venu accompagn de quatre cents hommes, afin de faire savoir Yaakov quil se trouvait toujours en exil. Car Essav dsirait que Yaakov reste en exil, et du fait quil y tait comme quelquun qui vit sans D., il en serait puni. Essav esprait ainsi le dominer. Mais Yaakov lui rpond que cest le contraire qui est vrai: Jai sjourn chez Laban, et sil est vrai que vivre hors de la terre dIsral quivaut vivre sans D., moi je suis rest proche de D. Lorsquun lve est exil (dans une ville de refuge), son matre sexile avec lui (Makoth 10a), et la Torah est ce qui nous lie D. La Prsence Divine maccompagnait et ma sauv de lexil. Les mots bl [, avec Laban, ont la mme valeur numrique que les mots bakol mikol kol (une expression qui indique la plnitude), et que les mots hadda Yaakov, Je suis Yaakov (en Aramen). Ce qui indique: jai sjourn chez Laban et jai tout domin (bakol mikol kol). Jai tudi la Torah et jen ai observ toutes les lois. Au lieu de tomber, je me suis lev, si bien que jai mrit davoir des anges mon service (Brchith Rabah 75:4) et la rvlation de la Parole de D. Les anges que je tenvoie sont un signe que tu ne peux pas nier. Les Sages nous disent (Brchith Rabah 78:11) que les anges ont frapp Essav, ce qui indique la puissance de Yaakov, car les messagers sont comme la personne qui les envoie (Brachoth 34b; Kidouchin 41b). Si les anges ont cette puissance, cest aussi le signe que Yaakov est plus fort quEssav, car mme en exil, il a continu progresser. Essav est plus faible que Yaakov, car il na ni tir parti de son potentiel ni atteint le niveau de Yaakov. Il na pas danges son service, car il a perdu son temps des choses vaines et il est rest ce quil tait. Mais Essav nest pas impressionn par les propos de son frre, et il dcide de lattaquer en utilisant ses pouvoirs impurs (Zohar III, 163b), et la puissance de quatre cents ans dexil. Avec leur aide, il pense pouvoir vaincre Yaakov. Cest ce que les anges rapportent Yaakov: Nous sommes alls trouver ton frre Essav, et lui-mme vient ta rencontre, accompagn de quatre cents hommes (ibid. 32:7). Il me semble que nous avons l une indication de la stratgie du Satan. Mme lorsquun homme vertueux le domine, le mauvais penchant ne se rend pas. Avec les forces qui lui restent, il tente encore de le combattre, si bien que lhomme vertueux a besoin de prier D. de laider tous les jours de sa vie, comme disent les Sages (Soucah 52b; Kidouchin 30b): Sans laide de D. il serait impossible de vaincre le mauvais penchant . Mme si lhomme vertueux a russi le vaincre une ou plusieurs fois, il nen est pas dbarrass dfinitivement car le mauvais penchant ne renonce jamais et laide permanente de D. est indispensable. Yaakov, en voyant avec quel orgueil Essav vient laffronter, et quelles forces malfaisantes il met en uvre, choisit de le vaincre en lui opposant la qualit dhumilit. Il a pri, disant: Je suis trop petit pour toutes les faveurs... (Brchith 32:11), cest--dire: Je ne suis pas digne de tous ces miracles. Et Yaakov poursuit sa prire (Brchith 32:12): Sauve-moi, de grce, de la main de mon frre, de la main dEssav , cest--dire, sauve-moi de son orgueil, que je ne menorgueillisse pas en le voyant, car il est interdit de regarder le visage dune personne mchante (Mguilah 28a), et je ne veux que rester petit. La main dEssav, cest son orgueil, et les Sages disent (Brchith Rabah 75:7; Rachi ad. loc.): Sauve-moi de la main dEssav qui ne se conduit pas envers moi comme un frre mais comme un ennemi. Un frre ressent de la sympathie, mais Essav nexprime aucune sympathie, mme pas extrieurement. Cest pourquoi Yaakov prie D. de le sauver du mal que, dans son orgueil, son frre veut lui causer disant: sauve-moi de la main de mon frre, de lorgueil quil cache dans son cur de frre et qui transparat sur son visage et dans ses paroles.

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Lorgueil et la mchancet dEssav lui font perdre lesprit, et mme aprs avoir vendu son droit danesse, il poursuit ses mchancets, sachant pourtant que Yaakov est lan et lhritier lgitime. Nous trouvons une situation parallle, lors de la mort dAvraham. Il est crit (Brchith 25:9): Il fut inhum par Yitshak et Ichmal, ses fils , et les Sages disent (Baba Bathra 16b; Brchith Rabah 38:12): Cela nous enseigne quIchmal sest repenti . Au moment de lenterrement, il a laiss Yitshak, lhritier de leur pre, marcher devant lui. Mais la mort dYitshak, il est crit (ibid. 35:29): Essav et Yaakov ses fils, lensevelirent , ce qui montre que mme la mort dYitshak, Essav ne sest pas repenti et na pas permis Yaakov de le prcder. Non seulement il navait pas chang, mais il a caus jusque dans la tombe une grande peine son pre lorsquil sest prcipit devant Yaakov ce jour-l. Peu lui importait la vente du droit danesse et le fait que Yaakov succde son pre, il est rest tout aussi mchant quavant et ne sest pas repenti comme Ichmal. Cest pourquoi D. aussi le hait, comme le dit le prophte (Malakhi 1:3). Le grand orgueil qui lhabite est dtestable. Il refuse de reconnatre la vrit et de se rendre lvidence. Il avait pourtant une occasion exceptionnelle de se corriger: son pre si pieux et quil servait avec tant de respect, venait tout juste de mourir. La mort donne rflchir et il ny a pas de moment plus propice au repentir. Cest ce que disent les Sages (Avoth III:1): Considre trois choses, et tu ne fauteras jamais... ou encore: Repens-toi un jour avant ta mort (Avoth II:10; Chabath 153a, Zohar III, 33a). Mais non! Essav non seulement ne change pas, mais il senorgueillit et prcde Yaakov au moment de lenterrement de son pre, au mpris du respect d son pre en cette heure solennelle. Les Sages disent (Avoth IV:21; Pirkey DRabbi Elizer 13): La recherche des honneurs exclut lhomme du monde , cest--dire que lhomme orgueilleux ne pense qu lui mme, et il ne fait dj plus partie du monde parce que le monde entier et tout ce quil contient ne compte pas ses yeux, tant son orgueil est grand. Nous avons lexemple dun tel orgueil chez Hiram, roi de Tyr (Yalkout Chimoni Yhezkel 367), qui se prenait pour un dieu, crateur de tout. Il fit construire un modle gant des sept firmaments afin de pouvoir y habiter, car habiter en ce monde tait pour lui un dshonneur. Pharaon aussi se faisait passer pour un dieu, comme il est crit: Le fleuve est moi, cest moi qui me le suis fait! (Yhzekel 29:3). De mme Bilaam pensait que tout lui appartenait et il en fut puni (Bamidbar Rabah 20:8); Yrouvam ben Navat aussi sest enorgueilli et il fut condamn lenfer perptuel (Roch HaChanah 17a); Nabuchodonosor se faisait passer pour un dieu, disant (Ichaya 14:14): Je monterai sur les hauteurs des nues, je serai lgal du Trs-Haut . Ils se sont tous exclus du monde (Chemoth Rabah 8:3), car ils se sont rvolts contre D. qui les a crs, et ont refus dentendre Sa voix. Mais Yaakov, lui, est insult par Essav, dshonor, et pourtant il ne dit rien, car il est de ceux qui sont insults et ninsultent pas (Chabath 88b; Yoma 23a). Il est possible que le verset Tes amis rayonneront comme le soleil dans sa gloire (Choftim 5:31) se rfre ces gens qui sont insults et ne rpliquent pas, car Yaakov est compar au soleil (Brchith Rabah 84:10). Cela nous montre encore une fois la grandeur de Yaakov et la mchancet dEssav. Maintenant nous pouvons expliquer pourquoi Yaakov craint Essav, bien quil ait vaincu lange et reu sa bndiction. Il ne craint pas lange ou les blessures quEssav peut lui causer, mais il craint daffronter lorgueil dEssav... Il a besoin dune aide toute spciale du Ciel afin quaucun des membres de sa famille ne subisse linfluence dEssav comme il est crit: Je crains quil ne mattaque et ne me frappe, joignant la mre aux enfants (Brchith 32:12), cest--dire quil craint sa mauvaise influence sur les membres de sa famille. Les Sages remarquent au sujet du verset (ibid. v. 7): Lah aussi sapprocha avec ses enfants, et ils se prosternrent; puis Yossef sapprocha avec Rahel, et ils se prosternrent , que Les mres savancrent au-devant des enfants, mais Yossef prcda Rahel. Il sest dit: Ma mre est belle, peut-tre ce vilain vat-il la dsirer. Je vais me placer devant elle et lempcher de la voir (Brchith Rabah 78:13; Zohar III, 202b). Pour avoir agi de la sorte, Yossef fut bni dtre comme un rameau fertile au bord dune fontaine, il dpasse les autres rameaux qui grimpent la muraille (Brchith 49:22). Est-ce dire que Lah, Bilah et Zilpa navaient pas besoin dtre protges? Seule Rahel avait-elle besoin dtre cache aux regards dEssav?

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Cest que les autres pouses de Yaakov ntaient pas destines Essav et donc elles ne craignaient pas ses regards, mais ce ntait pas le cas de Rahel qui avait donn sa sur Lah sa place auprs de Yaakov, et la rumeur courait: lane pour lan et la cadette pour le cadet (Brchith Rabah 70:15), Yaakov ayant acquis prcdemment le droit danesse, Yossef craint quEssav ne la remarque car le regard des mchants et des orgueilleux laisse des traces qui auraient port prjudice Rahel. Yossef se tient devant sa mre pour la cacher Essav. Lui-mme ne craint pas Essav car il est son principal adversaire (Pessikta Zouta Vayets 30:25; Zohar I,158a), il est le feu qui va consumer Essav (Ovadia 1:18), mais il veut lempcher de voir sa mre. La prire de Yaakov a protg ses enfants de lorgueil et de linfluence nfaste dEssav. Ce que Yaakov na pas fait, Yossef la fait, lui qui ressemblait son pre en tout (Bamidbar Rabah 14:16), afin dempcher Essav de dsirer Rahel et de senorgueillir davoir joui de la vue de cette femme vertueuse. Grce la prire de Yaakov, Rahel fut capable de prier pour les enfants de Yaakov, comme il est crit (Yrmia 31:14): Rahel pleure pour ses enfants... Essav na pas jet son regard sur elle, et elle peut venir en aide Yaakov et Yossef pour le vaincre. Face eux, Essav a failli: les quatre cents hommes qui laccompagnaient se sont enfuis, comme le disent les Sages (Brchith Rabah 78:16) propos du verset (Brchith 33:16): Et Essav reprit en ce jour le chemin de Sir - Essav est reparti tout seul . Essav na bnfici en rien de sa rencontre avec Yaakov et ses gens, car la saintet et lhumilit de Yaakov et de Yossef ont russi annuler ses prtentions orgueilleuses, et les Enfants dIsral ont prserv leur saintet.

Limportance dun commandement mineur


Commentant le verset (Brchith 32:25): Yaakov resta seul et un homme lutta avec lui jusqu laube , Rabbi Elazar dit (Houlin 91a): Yaakov sest attard pour ramener de menus objets, de petits ustensiles, ce qui montre que les hommes vertueux font plus cas de leurs biens que de leur personne, et cela parce quils ne possdent rien de vol . Dans cette mme section, le Talmud rapporte lopinion de Rabbi Yitshak: Cela nous enseigne quun homme sage ne sort pas la nuit tout seul (puisque Yaakov rest seul cette nuit-l de lautre ct du fleuve, fut attaqu). Pourquoi Yaakov sest-il mis en danger pour aller chercher de menus objets? Naurait-il pas d veiller sur lui-mme plus que sur ces objets? De plus, est-il possible quun homme comme Yaakov oublie de rassembler ces menus objets, puisque nous savons que Les hommes vertueux font plus cas de leur biens que de leur personne ? Comment se fait-il quil les ait oublis de lautre ct du fleuve? La prfrence que les hommes vertueux accordent leurs biens vient de ce quils savent que leur corps nest quun instrument qui leur permet de servir D. Les Sages enseignent (Brachoth 18b) que Les mchants sont appels morts mme de leur vivant , parce quils nutilisent pas les forces quils ont pour servir D. et leur corps est comme mort, mme de leur vivant. Ce nest pas le cas des hommes vertueux qui mme aprs leur mort sont appels vivants (ibid.), car ils progressent continuellement dans le service de D., sans aucune arrire-pense et tous leurs actes clbrent Sa gloire. Leurs possessions leur sont plus chres que leur corps car elles leur donnent le moyen de faire beaucoup de bien, comme par exemple aider le prochain, le soutenir matriellement, racheter les otages, enseigner la Torah. Leur seul but est daccomplir la volont de D., ils ne possdent rien qui provienne dun vol, leurs biens ne sont pas entachs de fraude, et tout ce quils possdent est justement acquis. Les hommes vertueux savent aussi que sans argent, ils nauraient pas la possibilit daccomplir des choses qui exigent une dpense, et ils failliraient beaucoup dautres commandements, comme par exemple acqurir les quatre plantes qui composent le loulav de la fte de Soucoth, ou les matzoth de la fte de Pessah. Chaque centime compte, et la loi est la mme concernant une petite ou une grande somme (Sanhdrin 8a). Largent leur donne la possibilit de faire des choses quils ne pourraient raliser autrement, et de plus, il leur permet de subvenir leurs besoins, de se consacrer au service de D. et de slever spirituellement comme il convient. Cela nous permet de comprendre que Yaakov est retourn ramasser ces menus objets sans valeur mais prcieux, parce quil les avait souvent utiliss dans un but sacr et il navait aucune raison de les abandonner. Il pouvait continuer les utiliser, les donner aux pauvres, ou les vendre et distribuer largent aux ncessiteux, cest pourquoi il est retourn de lautre ct du fleuve, seul et la nuit, pour chercher ces menus objets.

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Nous constatons que Yaakov sinquite de son prochain, quil pense sans cesse aider les autres, car telle est sa raison dtre, comme celle de tous les Patriarches qui sont le support de la Prsence Divine sur terre (Brchith 82:7). Tous se sont efforcs en ce monde daider les autres autant spirituellement que matriellement, leurs actions ne visaient qu satisfaire leur Crateur, et Yaakov est all tout seul la nuit pour chercher des objets apparemment sans valeur, car la moindre bont est si importante ses yeux quil est prt risquer sa vie! Que Yaakov soit prt risquer sa vie pour faire quelque chose dont le bnfice nest pas vident nos yeux nous remplit dtonnement. Cela nous permet dimaginer avec quel enthousiasme il accomplissait des commandements plus importants et plus stricts... Nous navons aucun moyen de savoir comment nos Patriarches vivaient leur vie quotidienne, mais nous tirons une grande leon de leur aptitude au don de soi et de leur esprit de sacrifice. Les Sages nous enseignent (Avoth II:1): Observe strictement autant les prceptes qui sont en apparence peu importants que ceux qui sont svres, car tu ignores la rcompense attache lobservance de chacun deux . Il ny a pas de critre pour dterminer quel prcepte est plus important que lautre, car un geste aussi facile que celui de soulager la peine du prochain peut avoir des consquences normes. Ajoutons cela que tous les ustensiles des hommes vertueux - mme de menus objets sans valeur - sont aussi importants leurs yeux que les objets du culte , surtout ceux dont Yaakov se servait, qui avaient une saintet particulire. Il les utilisait pour servir D., cest pourquoi il sest risqu, seul et de nuit, pour les ramener. Il craignait quEssav ne les trouve et ne les profane par un mauvais usage, cest pourquoi il choisit de se mettre en danger pour empcher Essav de rpandre le mal dans le monde par leur utilisation impropre. D., qui connat le fond des curs et des penses, savait que les intentions de Yaakov taient pures et Il lui donna la force et le courage de vaincre lange dEssav qui lutta avec lui toute la nuit (Houlin 92a), car cet ange aussi tait venu profaner la saintet de Yaakov. Avec laide de D., Yaakov combattit bravement et non seulement il vainquit lange, mais il reprit ses objets de culte afin quils ne tombent pas entre les mains de quelquun qui en et fait un mauvais usage, et il les sauva de la profanation par des mains impures. Les hommes vertueux attachent plus de prix leurs possessions qu leur propre personne car leur but est de veiller ce que leur argent et leurs biens ne tombent pas entre les mains de ceux qui les profaneraient par un mauvais usage et ils veulent les priver de cette possibilit. Nous devons faire preuve dun grand esprit de sacrifice pour sanctifier le Nom de D. dans le monde, et nous devons savoir quil est interdit de minimiser la valeur dun commandement quel quil soit et den retarder lexcution. Au contraire, il faut lexcuter tout de suite, mme si un tel acte semble avoir peu dimportance et que lon nen voie pas le bnfice. On ne connat pas la rcompense de chaque commandement, mme des moindres, et il faut les pratiquer tous dans lintention de rpondre la volont divine. Qui est plus grand que Yaakov qui, chaque instant de sa vie tait plong dans la Torah, en pratiquait les commandements et accomplissait de bonnes actions, et qui a divis ses gens en deux camps en disant (Brchith 32:9): Si Essav attaque lun des camps et le met en pices, lautre camp sera sauv (et pourra continuer servir D.). Malgr cela, il a risqu sa vie pour ces menus objets en sortant la nuit, afin de pouvoir par la suite venir en aide autrui. Les hommes vertueux, mme lorsquils sont absorbs dans la mditation spirituelle, noublient pas les autres et se mettent en danger pour pouvoir les aider, et cest une grande leon pour chacun de nous. Nous pouvons donner une autre explication: Les hommes pieux essayent de servir D. justement en faisant des choses difficiles dans des conditions difficiles, afin de se mesurer au mauvais penchant qui les talonne sans cesse, car cest justement dans cette lutte quils expriment leur grand amour de D. Ils mettent en uvre toutes leurs forces pour servir D. en surmontant le mauvais penchant et ses tentations, et en cela ils slvent dans la Torah, la crainte de D., la saintet et la puret. Combien merveilleuses - et probantes - sont les paroles de David HaMelekh, le doux chantre dIsral et la quatrime roue du Char Cleste (Zohar I, 99a)! A propos du verset de la Torah (Vayikra 26:3): Si vous suivez Mes lois... , les Sages (Vayikra Rabah 35:1) citent le verset des Psaumes: Jai rvis ma conduite

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et je suis revenu vers Tes statuts (Thilim 119:59), et ils expliquent: David a dit: Matre du monde! Chaque jour je pensais ce que jallais faire, que jirais tel endroit, que je visiterais telle maison, mais mes jambes me conduisaient vers les maisons de prire et les maisons dtude... En fin de compte, David HaMelekh se rendait chaque jour dans les maisons de prire et les maisons dtude pour y servir D. de tout son cur et de toute son me. Il faut se demander pourquoi il disait tout dabord chaque jour je pensais ce que jallais faire ? Pour quelle raison et dans quel but David HaMelekh perdrait-il un temps prcieux penser des choses futiles (comme se promener en tel lieu ou aller visiter telle maison) qui najoutent rien au service de D.? Au moment de raliser ses projets, il nen faisait rien, et il se rendait dans les lieux o il pouvait chanter les louanges de D. Pourquoi, vraiment, pensait-t-il tout dabord des choses vaines? Y avait-il un bnfice quelconque concevoir de telles penses? Justement! David HaMelekh, qui vouait D. une grande dvotion, se mettait lui-mme lpreuve. Il ne se contentait pas de lutter sans cesse contre le mauvais penchant, il le provoquait continuellement, chaque jour il pensait telle ou telle faute et le mauvais penchant veillait en lui un grand dsir de commettre cette transgression, et justement ce moment-l, au moment o il semblait que David allait se soumettre aux conseils du mauvais penchant et commettre cette faute, il surmontait de toutes ses forces ce dsir, et allait vers la maison dtude se consacrer la Torah. David HaMelekh servait D. de la faon la plus difficile qui soit, en faisant des efforts normes, et il dominait en permanence le mauvais penchant. Ce sont des choses tonnantes. Il est rapport (Chmouel I, 19:18) que David senfuit de devant Shal qui voulait le tuer, et il est dit: David prit la fuite pour tre sauv et il arriva chez Chmouel Rama. Il lui dit tout ce que Shal lui avait fait, et il allrent, avec Chmouel, sinstaller Nayiot . (Rachi explique quil sagit dune maison dtude). En ce lieu, David et Chmouel tudiaient ensemble. Rav Houna, fils de Rabbi Yossi, dit que cette nuit-l, lorsque David sest enfui de devant Shal, il apprit du prophte Chmouel ce quaucun lve du meilleur niveau nest capable dapprendre en cent ans... (Yalkout Chimoni ad. loc.). Cela nous laisse perplexes! David tait ce moment-l en danger de mort, la menace qui planait sur lui tait terrifiante, et il aurait t naturel quil ne pt se concentrer, mais il surmonta la peur et le danger, et se plonga dans ltude de la Torah. Il acquit cette nuit-l ce quun tudiant du meilleur niveau apprend en cent ans. Ce quil a appris en cette nuit valait tout ce quil avait appris et allait apprendre durant toute sa vie (puisquil na vcu que soixante-dix ans), ce qui nous montre combien il tait attach la Torah et plein de dvotion, justement en ces circonstances et en ces temps tellement difficiles - car telle tait sa faon de servir D. Il en est de mme pour Yaakov. Il savait que lange dEssav dsirait lattaquer et lui faire la guerre, le calomnier et laccuser, et cest pourquoi Yaakov la provoqu. Il laissa intentionnellement quelques menus objets derrire lui, afin de donner lange dEssav le sentiment quil pourrait se les approprier, sen servir comme bon lui semble, et lui faire croire quil pourrait vaincre Yaakov sil le prenait en faute (puisquil est interdit dabandonner des objets qui peuvent servir). Cest justement ce moment-l, lorsque la situation tait des plus tendues, que Yaakov retourna chercher ces objets sans mettre en danger un seul de ses hommes, puisquil partit tout seul. Et alors, il priva le Satan de sa proie. Il lutta contre lui toute la nuit jusqu laube, et ce faisant, il le vainquit dfinitivement et il reprit toute la saintet que le Satan stait approprie. Yaakov Avinou, tout comme David HaMelekh, servait D. en provoquant le mauvais penchant. Les hommes vertueux, lorsquils servent D., ne permettent pas au mauvais penchant de prendre le dessus, au contraire, ils laffrontent et lui font croire quils sont prts commettre une faute ou transgresser un commandement de D., uniquement pour le tromper et lui porter un coup fatal. D. les aide vaincre le mauvais penchant car Il sait que leurs intentions sont bonnes, et Il connat le fond de leur cur. Il en fut de mme pour Rabbi Akiva. Sur le point de mourir, il tait rempli dune joie sublime. Ses lves lui demandrent: Notre Matre! tu vas la mort et tu es heureux?! Il leur rpondit: Toute ma vie, jtais proccup par le commandement: Tu aimeras lEternel ton D. de tout ton cur, de toute ton me et de toutes tes forces (Devarim 6:5), je ne savais pas quand jaurais loccasion de le faire et maintenant que jen ai loccasion, je ne le ferais pas avec joie? (Brachoth 61b). David, Yaakov, Rabbi Akiva, se trouvaient dans des situations extrmes. Nous, qui nous trouvons dans une situation moins difficile, ou mme aise et propice au service de D., nous devons pratiquer mme les commandements qui nous semblent difficiles

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avec une joie intense, et exprimer cette joie aux yeux du monde entier afin de sanctifier le Nom de D. Cest une leon pour chaque Juif. Si Yaakov a combattu et vaincu lange dEssav grce sa Torah et la pratique ponctuelle des commandements, cela nous enseigne que chaque Juif a la capacit et le pouvoir de surmonter le mauvais penchant sil remplit les devoirs que la Torah lui impose. Yaakov a combattu lange dEssav jusqu la pointe du jour, et ce jour , cest la Torah puisquelle est appele lumire (Michley 6: 23), la lumire du jour, comme le dit le prophte (Ichaya 58:8): Lorsque la lumire poindra comme laube, ta gurison sera prompte . De plus, la lumire symbolise les actes des hommes vertueux (Brchith Rabah 1:6), ce qui montre que la lumire de la Torah permet lhomme de slever (comme le jour se lve). La Torah lui donne le courage de lutter et mieux il la comprend, mieux il est arm dans sa lutte quotidienne contre le mauvais penchant. Le Satan lui-mme avouera devant la Cour cleste quun tel a lutt contre lui et la vaincu, et il deviendra Isral cest dire Yashar E-l, droit devant D. comme il est crit (Brchith 32:29): Tu as lutt contre des puissances clestes et humaines, et tu es rest fort grce la Torah que tu as acquis durant ta vie. Cest elle qui ta permis de vaincre le mauvais penchant et de mriter les grands bienfaits rservs aux hommes de bien dans le monde Venir. Comment faut-il se comporter? La loi est la mme concernant une petite ou une grande somme. Il ne faut donc pas mpriser les choses qui ont peu de valeur, car toute somme permet de faire le bien et daider son prochain.

La richesse et les biens matriels servent llvation spirituelle


Lorsque Yaakov rencontre Essav et le prie daccepter ses prsents, Essav lui rpond (Brchith 33:9): Jai amplement mon frre, garde ce que tu as . Mais Yaakov insiste en disant (ibid. v. 11): Reois le prsent qui test offert de ma part, car D. ma favoris et je possde de tout . Rachi explique: Yaakov dit: jai tout ce dont jai besoin, mais Essav sest enorgueilli en dclarant: jai amplement, bien plus que ce dont jai besoin . Il faut expliquer ces versets, avant den venir commenter tout le rcit. 1. Pourquoi Essav refuse-t-il le prsent de Yaakov puisque les hommes avides ne refusent rien? Ils ne sont jamais satisfaits et dsirent toujours davantage, Celui qui possde un cu en veut deux (Kohleth Rabah 1:34), et ils se trouvent ainsi toujours en manque. Il est donc extrmement tonnant quEssav fasse valoir ses nombreuses possessions et refuse de recevoir ces cadeaux (cf. Kli Yakar). Cest contraire la nature des gens avides pour qui Ce qui est moi est moi, et ce qui est toi est moi (Avoth V:13). Pour sapproprier ce quils dsirent, ils sont mme capables de voler et de tuer. Essav aurait-il chang? 2. Pourquoi Yaakov insiste-t-il auprs dEssav pour quil accepte ces cadeaux? Sil na que ce dont il a besoin et quEssav possde des biens au-del de ses besoins, pourquoi lui offrir des cadeaux? 3. Il ressort des versets et des Midrachim que Yaakov avait plus que ce dont il avait besoin, puisque Essav lui dit (ibid. 33:8): Quest-ce que tout ce camp, venant de ta part, que jai rencontr? et Rachi explique que ce verset parle des gens qui portaient les cadeaux, cest donc que Yaakov avait envoy Essav beaucoup de gens chargs de cadeaux, ce qui montre quil possdait une grande fortune et beaucoup de biens, et quil tait trs riche. Dautant plus quEssav lui dit: Garde ce que tu as , ce que le Midrach interprte ainsi (Brchith Rabah 78:11): Ici, Essav confirme les bndictions de Yaakov car Yitshak lavait bni de grandes richesses et de prosprit. Ces bndictions se sont ralises et Yaakov est devenu riche. Tout cela prouve que Yaakov possdait des biens au-del de ses besoins. Nous constatons la diffrence norme qui existe entre les paroles dEssav qui dit: Jai amplement, et je nai pas besoin de tes cadeaux et celles de Yaakov qui dit: Jai de tout , cest dire tout cela est moi et cela me suffit pour vivre, mais malgr tout, ne refuse pas mon offrande. En disant: Quest-ce que tout ce camp, venant de ta part, que jai rencontr? Essav voulait dire: Etant donn que nous avons partag entre nous les deux mondes (Tana DBey Eliyahou Rabah 19), que tu as pris pour toi le monde Venir et que tu mas laiss ce monde, quest-ce que toute cette fortune que tu possdes? Cela contredit notre accord selon lequel tous les biens de ce monde sont moi, et donc je refuse tes cadeaux puisque tout mappartient et toi, tu ne possdes que le monde Venir. En disant: garde ce

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que tu as , Essav signifie Yaakov que seul le monde Venir est toi, mais ce monde-ci mappartient de droit, dj avant la naissance . A cela Yaakov rtorque: Il est vrai que jai pris pour ma part le monde Venir, mais afin que jarrive intact dans le monde Venir, il faut que la voix de Yaakov reste intacte en ce monde, comme il est crit: la voix est la voix de Yaakov (Brchith 27:22). Les richesses permettent de raliser de bonnes actions et de nombreux autres commandements ordonns par la Torah, tant donn quil faut se prparer dans le vestibule (en ce monde) avant de pouvoir pntrer le palais (le monde Venir) (Avoth IV:16). La preuve en est que lange dEssav qui a lutt avec Yaakov (Houlin 91a), a agr en fin de compte les bndictions et a mme ajout (Brchith 32:28): Ton nom ne sera plus Yaakov, mais Isral , un nom qui indique une progression dans le service de D. Les mots mais Isral ont la mme valeur numrique que les mots le bonheur de ce monde , qui revient aussi Yaakov. Cest ce quexpriment les paroles de Yaacov: D. ma favoris et je possde de tout , cest dire je possde tout ce quil faut pour mriter lautre monde (indiqu par le mot lk, tout), comme il est dit (Sanhdrin 90a): Tout Isral a une part dans le monde Venir . Jai besoin autant de la voix, Kol, de Yaacov, que de richesse, Mamone (le mot Mamone a la mme valeur numrique que Kol). Largent que je possde nest pas moi pour que je devienne riche et fortun, mais pour que je ralise mes devoirs, pour faire le bien et pour aider les ncessiteux, lmule du Crateur comme il est crit (Devarim 11:22): Vous vous attacherez Lui , cest--dire Ses qualits, De mme quIl est bon soyez bons, de mme quIl est plein de bienveillance, soyez pleins de bienveillance (Sotah 14a, Yrouchalmi Pah I:1). Ce nest pas sans raison que D. ma favoris, mais pour me prparer en ce monde, qui est comme un vestibule, Il maide entrer dans le monde Venir. Et Yaakov insiste donc pour quEssav accepte ses cadeaux. Il veut lui signifier que la conduite correcte en ce monde nest pas de garder son argent pour ses propres besoins, mais de lutiliser pour satisfaire aux besoins des gens dfavoriss et soutenir ceux qui tudient la Torah comme Zvouloun soutint Issakhar (Vayikra Rabah 25:2), comme il est crit (Michley 3:18): Elle est un arbre de vie pour ceux qui sy tiennent et ceux qui la soutiennent sont heureux . Il faut distribuer largent dans ces lieux o la voix de Yaakov se fait entendre, la voix de la Torah et de la prire. Mais ce nest pas tout, il faut insister pour que les lves acceptent cet argent mme sils nen ont pas besoin, car cela donne du mrite ceux qui les financent. Largent nous sert gagner le monde Venir qui est appel lk, tout, et non pas pour en jouir dans ce monde, puisque Quand il mourra, il nemporte rien avec lui et son luxe ne le suit pas dans la tombe (Thilim 49:18). En entendant les paroles de Yaakov, que mme son ange a agres, Essav a cd, car il avait la confirmation que la seule intention de Yaakov tait de donner sa fortune aux coles de Torah o la voix de Yaakov se fait entendre afin de mriter lautre monde. Mais Essav savait aussi que le mauvais penchant est puissant, que lhomme est faible et quil risque de chuter, et il se rjouissait la pense que tout cet argent lui reviendrait et quil reprendrait possession de tous les biens de ce monde. Ce mme Juif gnreux perd sa fortune si la voix de Yaakov se tait, et il perdra sa part dans le monde Venir, et il sera oblig de peiner et de souffrir nouveau en ce monde. Si la voix de Yaakov, la voix de la Torah, devait cesser de se faire entendre, tous les biens de ce monde reviendraient de nouveau Essav. Yaakov parla sagement lorsquil lui dit: Je possde de tout , cest--dire tout ce dont jai besoin. Le surplus est consacr au service de D., ltude de la Torah, et est sanctifi par de bonnes actions afin que je mrite le monde Venir qui est entirement bon et qui est appel lk, tout. Cest ce qui est dit: Tout Isral a une part dans le monde Venir (Sanhdrin 90a; Zohar I, 59b), car toute richesse nest donne que pour mriter tout , pour soutenir les gens de Torah et les aider. Mais Essav se plat penser que Yaakov va succomber aux preuves du temps et de la richesse comme beaucoup, et alors il pourra reprendre possession de toutes les richesses. De toute faon, il recevra la fortune de Yaakov. En analysant les paroles de Yaakov, nous constatons sa grandeur et ses vertus. On sait que ce monde est compar un vestibule troit et restreint, et Yaakov ne sest appropri dans ce monde que ce dont il avait besoin. Cest justement dans le vestibule que reprsente ce monde quil faut affronter le mauvais

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penchant dans une guerre de survie permanente, au risque de sombrer dans les tentations qui remplissent le monde et dont linfluence est nfaste et pernicieuse. Et donc, en disant: Jai tout , Yaakov voulait signifier que mme en se satisfaisant du peu dont il avait besoin en ce monde, il considrait que ctait tout . Il se contente de peu et il vit avec parcimonie, comme Rabbi Hanina ben Dossa qui se nourrissait de quelques caroubes toute la semaine (Taanith24b; Zohar III, 216b), et ce peu lui suffisait amplement atteindre le monde Venir, le palais confortable. Essav se rjouissait la pense que Yaakov (et ses descendants) allait souffrir ltroit, et quil devrait lutter contre le monde entier o tout nest que vanit (Kohleth 1:2). Il tait tout spcialement heureux dentendre parler de choses matrielles, dargent, car lapptit de largent est dangereux, comme le disent les Sages (Avoth IV:21): La jalousie, les dsirs, et la recherche des honneurs excluent lhomme du monde , et lui font perdre le monde Venir. Cela nous montre combien Essav est malveillant, combien il prouve de mpris pour son frre vertueux. Dans quel sens? Ce jour mme, Essav reprit le chemin de Sr (Brchith 33:16), et les Sages expliquent (Brchith Rabah 78:15): Quatre cents hommes lavaient accompagn (ibid. v. 1), que sont-ils devenus? Tous lont abandonn et sont partis . Bien que tous laient abandonn et quEssav ft rest seul, il eut quand mme laudace de sopposer son frre et tous ses enfants, seul contre tous, et de rclamer sa part intgrale et non seulement des cadeaux, tant donn que Yaakov et ses descendants avaient choisi la Torah et le monde Venir. Mais Yaakov lisait dans sa pense et lui dit quil devait traverser ce monde qui est un vestibule afin de parvenir tout , au palais, au monde Venir, et cest pourquoi il lui fallait de largent pour subvenir ses besoins en ce monde. Le surplus ntait pas pour son propre bnfice, mais pour pouvoir accomplir des bonnes actions, comme il est crit (Michley 3:16): A sa droite la longvit, sa gauche richesse et honneurs . Mais Essav, comme nous lavons dit, tait sduit par la pense quil valait mieux cder Yaakov cet argent plutt quautre chose, quil tait prfrable que cette fortune reste entre les mains de Yaakov car lpreuve de la richesse est une dure preuve, comme il est crit (ibid. 30:8): Ne me donne ni pauvret ni richesse . Lpreuve de la richesse est difficile surmonter, et en fin de compte, il se peut que les Enfants dIsral ne russissent pas cette preuve et quils perdent alors les deux mondes. Tout cela nous permet de comprendre aussi la suite du rcit. Nous savons qu Essav hait Yaakov (Sifri Bhaaloteha 9:10). Comment se fait-il quil lui ait dit: Partons et marchons ensemble (Brchith 33: 12), comme sil se proposait de laccompagner et de veiller sur lui? Cest quEssav voulait se joindre Yaakov et marcher avec lui afin dinfluencer les enfants de Yaakov, ce qui leur aurait fait perdre le monde Venir au cas o ils auraient pens largent et non pas la Torah. Yaakov devina les mauvaises intentions dEssav et il lui rpondit (ibid. v. 13): Mon seigneur sait que les enfants sont dlicats, que ce menu et ce gros btail qui allaitent exigent mes soins . La marche leur est difficile et Yaakov doit donc avancer lentement, seul avec ses enfants, et non pas lallure dEssav. Il voulait dire par l que pour duquer ses enfants qui sont comme un troupeau, il faut un berger attentif, ils ont besoin de recevoir la bonne influence de ce seul berger, et ce parce quils dpendent de lui et quils lui sont chers. Ils ont grandi chez leur grand-pre Laban sans tre influencs par lui, et Yaakov tient les protger aussi de la mauvaise compagnie dEssav, comme il est dit: (Avoth I:7; Avoth DRabbi Nathan 9: 1): loigne-toi dun mauvais voisin . Ce nest que lorsquils auront grandi en ge et en sagesse quils pourront rejoindre Essav Sr, comme Yaakov le dit (ibid. v. 14): ...jusqu ce que je rejoigne mon seigneur Sr . Quand cela? A lavenir Yaakov jugera Essav (Brchith Rabah 78:14), et cest alors que les Enfants dIsral ne craindront plus Essav et sa mauvaise influence et pourront le dominer facilement. Cela nous montre la mchancet des nations: tout dabord ils dsirent tuer, dtruire et anantir les hommes, les femmes et les enfants Juifs, et lorsquils ne parviennent pas leur but parce que D. nous protge et accomplit pour nous des miracles chaque instant, les nations tentent de fraterniser et de lier des liens damiti avec Isral afin de nous assimiler, et cest un danger norme qui risque de nous faire perdre la vie et le monde Venir, pour la vanit et les futilits de ce monde.

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Il faut sloigner de linfluence des nations autant que possible, car elles ont la possibilit de capter sous leur mauvaise influence mme les Juifs qui se trouvent dans le vestibule troit. Mais si les Juifs sont dtermins, ce vestibule troit devient spacieux et ample, comme le disent les Sages (Avoth V:7; Avoth DRabbi Nathan 35:1): Personne na jamais dit: je nai pas de place o dormir Jrusalem (lors des ftes) , parce quils ne pensent pas ltroitesse du lieu lorsque toutes leurs penses sont tournes uniquement vers D. et Sa Loi, afin de parvenir au but qui est le palais. Tout cela est indiqu dans la Torah. Yaakov dit Essav (Brchith 33:14): Que mon seigneur passe devant son serviteur , car il ne nous est pas possible datteindre le but si nous sommes avec toi. Mes enfants et moi, nous sommes dans le vestibule et le moindre dtour risque de nous causer du tort. Je vais avancer lentement, afin datteindre mon but qui est lautre monde, et pour cela je dois avancer tout seul, sans massocier toi, car alors je perdrai le tout cause de ta passion du gain et des biens matriels qui, eux aussi, sont appels tout . Mais Essav ne cde pas. Il tente toutes sortes de ruses, et il dit Yaakov (ibid. v. 15): Je vais te faire escorter par une partie de mes hommes . Il veut faire accompagner Yaakov par ses hommes mchants afin de le faire dvier de son but, qui est lautre monde. Mais Yaakov lui rpond (ibid.): A quoi bon? Je voudrais trouver grce aux yeux de mon seigneur , cest--dire que Yaakov refuse catgoriquement. Avec sagesse, il russit se sauver de lemprise dEssav. En fin de compte, Essav subit une rude dfaite, car Ses mercenaires labandonnent et il rentre tout seul dans sa ville (Brchith Rabah 78:15). Lentrevue entre Yaakov et Essav est un modle pour leurs descendants (Sotah 34a). Elle nous enseigne une leon pour la vie. Si lon observe la Torah et ses commandements comme il se doit, toutes les preuves que les nations du monde nous font subir ne russiront pas nous affaiblir, et les nations en subiront une dfaite cuisante et amre. Si effectivement nous observons la Torah et ses lois, nos besoins seront combls et nous aurons assez dargent et de biens pour mettre en pratique les commandements et faire le bien, comme la Torah nous lordonne. Nous apprenons cela dans la suite des versets. Il est crit (ibid. 33:18): Yaakov arriva sans dommage la ville de Chekhem . Telle est la perfection de lhomme qui surmonte la sduction des richesses, les obstacles de la vie, les attaques de ses ennemis, et qui dans ce cas ne subira certainement pas non plus linfluence des nations du monde. Telle est la perfection laquelle il faut aspirer. Il ne suffit pas dtudier la Torah pour tre sauv, il faut peiner pour la comprendre, comme il est crit (ibid. v. 13): Yaakov se dirigea vers Soucoth , il marcha dans les voies de la Torah, il alla tablir des centres dtude, Il se btit une maison et fit un enclos pour son btail (ibid.), cest--dire quil construisit une maison dtude du nom de Soucoth en souvenir de sa victoire sur les quatre cents hommes dEssav. Il est dit propos de Yaakov: Il arriva sans dommage , entier, ce qui signifie quil avait vit la compagnie des mchants, quil avait atteint la perfection, et quil tait parfait dans laccomplissement de la Torah (Chabath 33b). A la ville de Chekhem , l il construisit une Ychivah. Les lettres du mot Chekhem forment le mot Mochekh, attirer, cest--dire quil avait entran le mauvais penchant dans la maison dtude. Chacun doit agir de la sorte - ds que le mauvais penchant commence le dranger, il faut lentraner vers la maison dtude. Sans un lieu de Torah, comment peut-on tre sauv du mauvais penchant, et jusquo peut-il nous entraner? Car le mauvais penchant est capable de nous attirer lui... cest pourquoi, il nous faut des lieux de Torah, afin dy entraner le mauvais penchant. Le comble de la satisfaction que lon peut tirer de largent est de sen servir pour obtenir le monde Venir et acqurir la Torah. Nous avons de cela une preuve flagrante. Aprs ces vnements, il est crit (ibid. 34:1): Dina, la fille de Lah sortit faire la connaissance des filles du pays . Dina sortit des limites, de la maison de Yaakov, du vestibule troit et restreint, elle est sortie de la tente de la Torah. Dina est sortie des limites de la Torah afin de faire la connaissance des filles du pays, dont linfluence est nfaste. Cest alors que le malheur arriva! Hamor le fils de Chekhem la vit... Il lenleva et lui fit violence (Brchith 34:2). Elle fut entrane par Chekhem, et au lieu quelle lentrane, elle, vers la maison dtude, cest lui qui lenleva et lui fit violence. Ce malheur est arriv parce quelle na pas su dominer sa curiosit. Il faut viter de se laisser entraner par les mauvais instincts, et les corriger dans la maison dtude par ltude assidue de la Torah, la cration de centres dtude, et le soutien des lves. Cest de cette manire que lon obtient tout , le monde Venir, le monde qui est entirement bon. Amen!

Parachat vayichlah La rigueur de la justice divine

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Personne ne connat la rigueur de la justice divine, comme il est dit (Devarim 1:17): Car la justice est D. (Brchith Rabah 65:12). Un autre Midrach (cit par le Nfesh Hahayim I:7) ajoute: D. dit Mosh: va dire Isral que Mon Nom est Celui Qui est . De mme que tu es avec Moi, de mme Je suis avec toi. Et David dit: Cest lEternel qui te garde, lEternel qui est ta droite comme ton ombre tutlaire (Thilim 125:5), de mme que si tu te joues de ton ombre, ton ombre se joue de toi, et si tu pleures, ton ombre pleure devant toi, si tu es fch ou content, elle te rend la pareille, de mme D. est semblable ton ombre, comme tu es avec Lui, Lui est avec toi. Il est crit (Brchith 32:4): Yaakov envoya des messagers au-devant, vers Essav son frre et Rachi rapporte le Midrach (Brchith Rabah 75:4): Ces messagers sont des anges . Ensuite il est crit Yaakov fut fort effray et plein danxit... je suis peu digne de toutes les faveurs et les bienfaits que Tu as tmoigns envers Ton serviteur et nos Sages expliquent (Chabath 32a; Taanith 20b; Rachi ad. loc.): Mes mrites sont diminus puisque Tu mas favoris de tant de bienfaits, cest pourquoi je crains quune faute que jaurais commise depuis Ta promesse ne puisse causer ma dfaite devant Essav . Le Chaarey Torah remarque: Comment Yaakov tait-il parvenu un si haut degr dattachement D., pour que des anges le servent et quil les envoie au devant dEssav comme sils taient des hommes sous ses ordres? Et il ajoute: Un homme tel que Yaakov qui avait des anges son service qui il donnait des ordres, a-t-il craindre davoir commis une faute quelconque et que lui et ses enfants soient vaincus par Essav? Cest tonnant! Yaakov, dont le portrait est grav sur le Trne Cleste (Brchith Rabah 82:2), qui est rest attach D. au point davoir des anges pour messagers, pour qui les mondes suprieurs sont familiers, craindrait davoir commis quelque faute, et malgr la promesse que D. lui fit de le protger partout o il irait (Brchith 28:15), de tomber, avec ses enfants, sous le pouvoir dEssav, ce qui mettrait en danger tout lavenir du peuple juif! Est-ce possible? Mme si la volont de D. avait pu se raliser autrement, par une autre voie, est-il possible que le fondement du peuple juif sur la base des trois Patriarches et des douze tribus soit remis en question? De plus, il semble que Yaakov ignorait quelle faute il avait commise, puisque rien nest dit ce sujet. Est-il possible quune faute infime (puisquelle est ignore de Yaakov, cet homme si pieux) ait pour consquence une punition aussi svre? Cest une chose terrible, quil faut expliquer. A propos du verset: Il prit ses onze enfants (Brchith 32:23), les Sages demandent (Brchith Rabah 76:9): O tait Dina? Et ils rpondent: Elle tait enferme dans une arche, loin des regards dEssav. Yaakov en fut puni, car elle aurait pu corriger Essav, et elle fut enleve par Chekhem . A ce moment-l, lorsque Yaakov a cach Dina pour la drober aux yeux dEssav, il ignorait que cela lui serait compt comme une faute, mais D. examine avec rigueur les actes des hommes vertueux (Ybamoth 121b). Yaakov pensait que cacher Dina tait plus important que compter sur laide spirituelle quelle aurait pu apporter Essav, ce niveau il y avait un choix faire. Yaakov na fait quutiliser son libre arbitre. Et ainsi, avant de rencontrer Essav, Yaakov a cach Dina dans une arche. Il ne pouvait pas savoir que cela lui serait compt comme une faute, et que D. examinait chacun de ses actes avec rigueur. Yaakov sait bien qu Une mauvaise pense nest pas assimile un acte (Kidouchin 40a). Il ne pensait pas avoir mal agi en cachant Dina, et il a donc pu continuer donner des ordres aux anges, comme il lavait fait jusque-l. Mais, au plus profond de lui-mme, Yaakov avait le sentiment, davoir commis une faute quil ignorait... une frayeur indicible remplit son cur, davoir quelque chose corriger. Il en est ainsi non seulement pour Yaakov mais pour tous les hommes pieux en tout temps. Bien quils ne commettent pas de fautes, ils ont dans le cur une peur constante de la moindre faute, comme il est crit: Il nest pas dhomme juste sur terre qui fasse le bien et ne faute pas (Kohleth 7:20), et ils ont toujours peur. Mais D. veille sur les mes de Ses pieux serviteurs, Il les dlivre de la main des pervers (Thilim 97:10), pour quil ne leur arrive aucun mal. Yaakov, ressentant de la peur en son cur, craint davoir commis une faute quelconque quil ignore ou quil ne considre pas comme une faute, mais qui le livrera, lui et ses enfants, entre les mains dEssav.

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Cela rpond aux questions poses par le Chaarey Torah . Dune part Yaakov ne sait pas avec certitude quil a faut, et il continue donc employer les anges son service. Mais cette peur indicible le talonne, et il craint la rigueur de la justice divine concernant lintention qui la motiv quand il cacha Dina dans larche, dautant plus que les anges son service reprsentent une rcompense quil reoit en ce monde, en soustraction de ses mrites. Sil est fautif, la chane des gnrations sera interrompue et le peuple juif devra se perptuer autrement... cause dune faute qui peut effectivement causer une punition svre puisque D. juge svrement les hommes pieux. Si Yaacov navait pas cherch protger Dina et quil sen tait remis avec confiance D., il naurait pas eu peur dEssav, mais sil a cach sa fille par crainte dEssav, cest quil avait failli dans sa foi en D. et doutait de Sa promesse de veiller sur lui en tout. Combien cela nous laisse perplexes! Yaakov ne voulait pas juste titre que sa fille pouse cet homme mchant, et en cela il na pas commis de faute, cest pourquoi il ne comprend pas do lui vient cette peur. Mais D. savait que Dina aurait pu amener Essav un repentir sincre et ni elle, ni Yaakov, ni aucun autre membre de la famille nauraient subi de dommage. Tous auraient t pargns de tout malheur puisque la promesse de D. est effective et Il les protge. Et par consquent la faute de Yaakov, bien que minime, est trs grave aux yeux de D. et, pour une telle faute, lhomme risque de perdre de nombreux bienfaits et mme le fruit des efforts de toute sa vie tant la justice divine est rigoureuse. Cest une chose terrible. Nous sommes des tres ptris de matire qui retourne la poussire qui se dissipe comme la fume. Notre vie est comme un rve passager et notre faible esprit est incapable de comprendre la rigueur de la justice de D., surtout en ce qui concerne les saints Patriarches, dont Yaakov est le plus important. Nous savons que la nuit de la sortie dEgypte, D. nous a ordonn dasperger le sang du sacrifice de Pessah sur les linteaux de nos portes afin que lange exterminateur ne pntre pas dans nos maisons et ne nous touche pas (Chemoth 12:23). Il faut se demander pourquoi? D. a-t-Il besoin de ce signe de sang pour distinguer entre une maison juive et une maison gyptienne? Les Sages nous enseignent (Baba Kama 60a): Lorsque le dcret dextermination est prononc, il ny a pas de diffrence entre le juste et le coupable . Rachi ajoute (ad. loc.) que Les esprits destructeurs et malfaisants ont la permission dagir la nuit . Justement la nuit de la rdemption, peut-tre cause dune faute quelconque que lon ignore et que lon ne ressent pas, lange destructeur a la permission dagir, dans lobscurit (qui symbolise les fautes et les transgressions). Non seulement il ne distingue pas entre le juste et le coupable mais le chtiment commence par les justes. De plus, penser commettre une faute mme sans la raliser, est en soi une faute. Cela sapplique spcialement aux Patriarches, les grands de ce monde, car justement cause de leur grandeur D. est trs svre leur gard. En tudiant de prs les paroles de nos Sages, nous dcouvrons que mme sans commettre de faute prcise, lhomme peut perdre de nombreux bienfaits cause de la svrit de la justice divine. Le roi Hizkya aurait pu tre le Messie (Sanhdrin 98b) mais... lorsque Sanhriv et sa puissante arme furent vaincus en une nuit (ibid. 95a, Tana DBey Eliyahou Rabah 7), le roi na pas tout de suite chant les louanges de D. pour cette victoire, et cest pourquoi il fut puni, et neut pas le mrite de devenir le Messie. Sans doute, le roi Hizkya se rjouissait de la dfaite de Sanhriv, car toute la nuit et tout le jour, Isral clbra avec une joie immense cet vnement, mais il fut puni de son manque dempressement louer D. A la chute de Sanhriv, il avait le devoir de louer D. immdiatement. Pour ne lavoir pas fait, il fut puni dune punition trs svre, cause de laquelle nous souffrons encore de lexil. Il faut clairer dautres points concernant la rigueur de la justice divine envers Yaakov: 1. En ressentant une peur indicible au fond de son cur, Yaakov sest demand ce qui pouvait en tre la cause. Mais il na pas pens que le fait de cacher Dina aux yeux dEssav pouvait lui tre reproch et serait considr comme un manque de foi. A ce moment-l, avant de rencontrer Essav, il pria D. de veiller sur lui: Sauve-moi, de grce, de la main de mon frre, de la main dEssav, car je crains quil ne mattaque et ne frappe tous ceux qui maccompagnent, la mre et les enfants, et Tu as dit: Je te comblerai de faveurs... (Brchith 32:12-13). Comment Yaakov peut-il prier ce moment-l pour que D. le sauve, lui et sa famille, alors quil craint davoir commis une faute quelconque quil doit corriger, bien quil ne sache pas laquelle? Naurait-il pas d plutt prier concernant cette faute?

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2. Cette mme nuit, Yaakov traversa le Jourdain avec toute sa famille, et puis il retourna seul sur lautre rive. Pourquoi? Les Sages disent (Houlin 91a) quil tait all chercher de menus objets oublis. Nous savons que les esprits destructeurs rgnent la nuit (Rachi, Chemoth 12:23). Comment se fait-il que Yaakov ne craigne pas de traverser tout seul le Jourdain pour chercher ces menus objets? 3. Les Sages disent: Yaakov a travers le Jourdain pour combattre lange dEssav , et il est crit (Brchith 32:25): Un homme lutta avec lui jusqu laube , et La poussire quils soulevrent avec leurs pieds atteignit le Trne cleste (Houlin 91a; Brchith Rabah 77:3). Si Yaakov avait tellement peur dEssav, comment se fait-il quil nait pas eu peur de lange dEssav, avec lequel il lutta de nuit, alors que les anges destructeurs ont la permission de nuire? 4. Chimon et Lvi sont des frres, leurs armes sont des instruments de violence (Brchith 49:5). Lorsque Dina fut enleve et viole par Chekhem, fils de Hamor, Chimon et Lvi attaqurent la ville de Chekhem au moment o ses habitants sy attendaient le moins, et ils turent tous les hommes (ibid. 34: 25), afin de librer leur sur Dina. A ce moment-l Chekhem promit Dina de lpouser et cest ce quil fit par la suite (Brchith Rabah 80:11), et de sa relation avec Chekhem est ne Osnat (qui sera plus tard la femme de Yossef). Lorsque Yossef, devenu gouverneur de lEgypte, emprisonna Chimon pour le sparer de Lvi (Brchith 42:24), pourquoi Chimon et Lvi nont-ils pas attaqu Yossef comme ils ont attaqu la ville de Chekhem? Et pourquoi Yossef retient-il justement Chimon et non Lvi, car si son intention tait de les sparer pour quils ne complotent pas de le tuer comme ils ont tu ensemble les habitants de Chekhem, il aurait pu prendre Lvi comme prisonnier. Pourquoi a-t-il choisi darrter Chimon? 5. Lorsque Lah attendait son septime enfant, elle savait quelle enfanterait un garon, et elle se fit justice elle-mme (Brachoth 60a): Si cest un garon, dit-elle, ma sur ne sera mme pas lgale dune des servantes (qui avaient chacune deux fils alors que Rahel navait pas encore denfants). Lah pria et lenfant quelle portait fut miraculeusement chang en fille, Dina. Cela est indiqu dans le verset (Daath Zknim, Brchith 30:21): Elle enfanta une fille et la nomma Dina . Il nest pas crit elle conut et enfanta une fille , ce qui nous permet de dduire que ctait une fille au moment de la naissance, mais pas au moment de la conception... Il nous faut donc dire que Lah voulait rendre sa sur la bont quelle lui avait manifeste en lui confiant les signes de reconnaissance la nuit de ses noces, lorsque Laban remplaa Rahel par Lah (Midrach Hagadah 30:22). Il faut expliquer le rapport entre le fait que Rahel a donn sa sur les signes de reconnaissance et la prire de Lah pour que cet enfant soit une fille. Quel est le secret de la prire de Lah en faveur de sa sur? Nous allons expliquer tous ces points clairement. Cest justement parce que Yaakov, dans le fond de son cur, craignait davoir commis une faute quil ignorait, quil pleura devant D. et pria pour tre sauv des mains dEssav, ce qui lui permettrait de corriger toutes ses fautes, mme celles qui nont fait queffleurer sa pense. D. accepta sa prire et Il la effectivement sauv des mains de son frre qui ne se comporte pas envers lui en frre, mais en ennemi (Rachi ibid. 32: 12). Parce que sa prire fut agre, il retrouva ses forces, sa peur disparut, et cest pourquoi il russit, de nuit, en un temps o les dangers sont nombreux, retourner sans dommage de lautre ct du Jourdain. La foi et les forces physiques et spirituelles lui permettant de se mesurer lange dEssav lui furent restitues, et il put alors bondir, tel un lion, dans son combat contre lange dEssav. Malgr cela, la rigueur de la justice planait sur Yaakov parce quil avait cach sa fille Dina et empche damener Essav se repentir. Il en fut puni et Dina fut enleve par Chekhem, le fils de Hamor. Si la moindre faute, le moindre mouvement, peuvent avoir des consquences aussi graves, cela montre combien une faute marque lme, et combien le jugement est svre. Cest un temps dangoisse pour Yaakov, mais il en sortira triomphant (Yrmia 30:7). Ctait un temps dangoisse pour Yaakov lorsque sa fille Dina fut enleve par Chekhem, mais il fut sauv de cette angoisse, et ce malheur engendra quelque chose de bon car Osnat est ne de cette union interdite entre Dina et Chekhem, la fille adoptive de Poutiphar, grand-prtre de Honne (Pirkey DRabbi Elizer 38). Poutiphar et sa femme taient striles, ils navaient pas denfants et ils avaient adopt Osnat pour fille. Yossef pousa Osnat (Brchith 41:45), tandis que Chimon pousa Dina, ce qui cra des liens encore plus proches entre Chimon et son frre Yossef. Cest la raison pour laquelle Yossef a retenu Chimon plutt que

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Lvi, il voulait attnuer la rigueur du jugement, autant le sien que celui de Chimon cause de lunion de Dina avec Chekhem. Chimon lui-mme, alors prisonnier dans la maison de Yossef, ne pouvait rien dire, et ne voulait pas lutter contre Yossef (bien quil ignort que ctait son frre Yossef) car tout au fond de son cur, il savait que la sentence tait attnue. Nous pouvons prsent expliquer la prire de Lah et celle de Rahel, et le don des signes de reconnaissance. Rahel a remis sa sur les signes de reconnaissance bien quelle dsirt de tout cur pouser Yaakov et avoir des enfants de lui. En change, Lah pria de tout cur en faveur de sa sur Rahel et demanda que lenfant qui devait natre soit une fille, ce qui est une chose incroyable! Les Matriarches voulaient enfanter le plus de tribus possible (Brchith Rabah 72:5), et Lah prie justement pour le contraire! Elle prie de ne pas minimiser la part dhritage de sa sur. Et voil quelles sont toutes deux lies lune lautre, Lah donne naissance Dina, et Rahel donne naissance Yossef qui pousera la fille de Dina. Cest ainsi que la rigueur du jugement fut attnue et Yossef enfanta deux des tribus dIsral, comme il est crit (Brchith 48:5): Ephram et Menach seront comme Rouven et Chimon , car Ephram a droit aussi lhritage des tribus dIsral, et il est dit Ephram est pour moi un fils chri, un enfant choy... (Yrmia 31:20). Nous constatons dune part combien la sentence peut tre svre, puisque Yaakov fut puni davoir cach Dina, et dautre part combien une bonne intention est importante puisque lintention de Yaakov fut rcompense et cest justement la fille ne de cette union interdite qui a pous Yossef le Juste, fondement du monde (Zohar I, 59b) et donn naissance Menach et Ephram qui est appel lenfant choy . Ainsi, le lien entre les enfants de Lah et ceux de Rahel est renforc, un lien qui malgr la rigueur du jugement a multipli les tribus dIsral, et cest ce que disent les Sages (Pessahim 54b): Sept choses sont caches , lune delle tant la sentence, car les hommes sont incapables, vu la faiblesse de leur entendement, de la comprendre. Mais D. du fond mme de la sentence, apporte la rdemption, la bndiction, et la prosprit au peuple juif.

Le compte des hommes devant D.


LEternel parla en ces termes Moch dans le dsert du Sina... faites le relev de la communaut des Enfants dIsral... (Bamidbar 1:1-2). Par amour pour eux, D. les compte en toute occasion, Il les compte la sortie dEgypte; aprs la faute du veau dor beaucoup sont tombs et Il compte ceux qui restent, et Il les compte avant de faire descendre Sa Prsence sur eux. Le premier du mois de Nissan, le Tabernacle fut lev et Il les compte le premier du mois dIyar (Rachi, Midrach Hagadah). Le Chiourey Torah stonne de ce commentaire de Rachi. Comment est-il possible de faire une telle comparaison et de dire que de mme que lhomme a la tendance naturelle de compter toute heure ce qui lui est cher, de mme D. compte les Enfants dIsral toute heure, tant Il les aime. Si lhomme fait le compte de ses possessions, cest pour en savoir le nombre, mais D., de qui aucun mystre nest cach (Daniel 4:6), a-t-Il besoin de les compter pour le connatre? Les hommes recomptent ce quils possdent pour vrifier sils ne se sont pas tromps, mais D. peut-Il Se tromper et avoir des doutes? Il est impossible de comparer le compte de D. aux comptes que font les hommes, puisque rien nest cach D. Il sait ce quil y a dans le cur et dans la pense de chaque individu et Il connat le nombre des constellations et le nom de chacune delles... Sa sagesse est sans limite... Il donne la pture aux btes, aux petits des corbeaux qui la rclament (Thilim 147:4-5, 9). Si D. sait le nombre de toutes les cratures vivantes, plus forte raison Il connat le nombre de Ses enfants sans avoir besoin de les compter. Et pourtant, par amour, Il les compte et les recompte... Cest que lhomme doit savoir que D. tient compte de lui toute heure, mme sil est tomb au plus bas. Dans ce cas, D. lexamine pour savoir quelle punition lui donner, pour ces fautes que seul D. connat et quaucun homme ne peut voir. D. examine les progrs de lhomme avec amour pour lui donner tous les bienfaits quil mrite en ce monde, et le faire bnficier de Sa Prsence. Le Midrach dit: Parce quIl les aime, Il les compte toute heure , pour signifier que lamour de D. est le mme, que lhomme progresse ou quil rgresse, car LEternel chtie celui quIl aime (Michley 3:12). Nous sommes Ses enfants et Il nous dit: Tu sauras dans ton cur que lEternel ton D. te chtie comme un pre chtie son fils (Devarim 8:5). Mais lhomme doit savoir que lorsquil tombe et quil faute, D. le punit

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et le compte, et sil se repent de ses fautes par des bonnes actions, D. le compte avec amour. Lhomme doit toujours passer ses actes en revue (Brachoth 5a), pour ne pas tre compt lorsquil tombe mais plutt lorsquil slve, et cest pourquoi le verset dit: Faites le relev de toute la communaut dIsral (littralement: levez), pour indiquer que lhomme doit toujours slever, et alors il est compt pour le bien et les bndictions, et il reoit toutes les bonts. Sinon, il est puni mme sil ne sait pas pour quelle faute, car D. ne fait pas justice sans justice (Brachoth 5b). A prsent, nous comprenons le sens du Midrach. Parce que D. les aime, Il les compte chaque occasion - lorsquils slvent ou lorsquils sabaissent. La communaut dIsral fut compte la sortie dEgypte, alors quelle tait engloutie dans les quarante-neuf degrs de limpuret avant dtre sauve (Zohar,Yithro 39a), et pourtant ils furent compts avec amour, et D. dans Sa grande misricorde, les sauva de la fournaise dEgypte (voir Devarim 4:20). Il les a compts aprs la faute du veau dor pour sparer le coupable de linnocent, car Il ne punit pas celui qui na pas faut, comme il est crit (Yrmia 17:10): Moi lEternel, Je scrute les curs, Je sonde les reins, Je rtribue chacun selon ses voies, selon le fruit de ses uvres . Ceci lorsquils sont tombs, afin de leur faire comprendre quils sont punis pour avoir quitt la source de leur vie et stre abreuvs dans des citernes perces . De mme, lorsquils ont inaugur le Tabernacle et que D. dsirait y faire reposer Sa Prsence, comme il est crit (Chemoth 25:8): Faites-Moi un Sanctuaire pour que Je rside parmi eux , Il les compte pour les prparer la perfection voulue, car D. ne peut pas faire rsider Sa Prsence parmi eux sils ne sont pas resplendissants comme lclat du firmament (Daniel 12:3). D. rtribue chacun selon ses actes. Expliquons la rigueur du jugement de D. envers Yaakov. Yaakov aurait d sentir de tout son cur et de toute son me que la promesse de D. de le protger tait valable aussi pour la protection de sa fille Dina contre la convoitise dEssav. Yaakov na pas craint quEssav prenne sa femme Rahel, bien quil ft dbauch et quil volt les femmes leur mari (Brchith Rabah 65:1). Cest Yossef qui sest plac devant sa mre pour la cacher aux yeux dEssav (Brchith Rabah 78:10) mais Yaakov na rien fait pour la protger et ne la pas cache dans une carriole. De mme, il naurait pas d cacher Dina. Yaakov, qui tait trs sensible et qui avait lme dlicate, se rendait compte quil navait pas agi correctement. Il craignait davoir commis quelque faute, mais il ignorait laquelle. Le fait est quil avait peur, car mme si une faute est minime, elle entrane la peur, comme il est crit: Les mchants sont terrifis Sion... (Ichaya 33: 14). Nous ne connaissons pas les raisons du Ciel, mais nous savons par tradition que nous devons tirer une leon des faits et gestes des Patriarches. Les Sages ont dit (Brachoth 10b) Il ne faut pas se tenir sur une hauteur pour prier, car personne ne peut slever devant D. comme il est crit (Thilim 130:1): Des profondeurs je Tinvoque, Eternel! . Le Chiourey Torah souligne que nous devons tre impressionns par la sensibilit la moindre faute des Sages, qui ont institu une telle loi. Leur intention nest pas de dire quil faut se tenir en un lieu bas, mais que la prire doit jaillir du fond du cur, comme le dit le Maharal de Prague. Les Sages soulignent quil y a un rapport entre un lieu lev et un cur orgueilleux, de mme quil y a un rapport entre le corps et lme, et ils ont tenu compte du fait quil est impossible la prire de jaillir du fond du cur - ce qui exige de lhumilit et de la soumission - lorsque lon se tient sur une hauteur. Celui qui se tient sur une hauteur, quelle quelle soit, ressent de lorgueil, et mme si ce sentiment est peine perceptible, il suffit dtriorer un tant soit peu sa prire. Tous les dcisionnaires le disent (Choulhan Aroukh 90:1-2): Il est interdit de prier sur une hauteur de plus de 30 cm au-dessus du sol , mais mme une lvation moindre veille lorgueil. Il faut tre soumis et humble dans la prire, et elle doit jaillir du fond du cur. Nous pouvons ajouter ce que le Tanya (I, Likoutey Maamarim, ch. 51) crit au sujet du verset: ...de ma chair je verrai D. (Iyov 19:26): De mme que lme habite toutes les parties de son corps, de la tte aux pieds, mais rside essentiellement dans le cerveau do elle stend tous les membres... de mme cest avec le cerveau que lhomme a connaissance de tous les gestes de ses membres et de ses muscles. Tout ce qui leur arrive passe par le cerveau... Ce qui signifie que lhomme a lobligation de se tenir en bas , sur le sol, pour prier, afin de mieux sentir sa petitesse et sa dpendance de D. Lorsquil ne cherche pas un endroit bas, mais que ses pieds - qui sont commands par la tte - le conduisent vers un endroit lev pour prier, il est motiv par un orgueil qui est nuisible la prire. Ceci ne sapplique pas seulement celui qui prie avec la communaut, car il se trouvera toujours quelquun pour lui indiquer sa faute mais aussi celui

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qui prie seul, lorsquil ny a personne pour lui faire remarquer son orgueil. Il faut toujours chercher lendroit le plus bas, afin que la prire soit des plus parfaites, prononce avec humilit et soumission. Lorgueil ne permet pas la prire dtre entendue car celui qui prie se tient en jugement devant D., comme il est crit (Thilim 62:13): Tu rmunres chacun selon ses actes . Il est crit (Brchith 34:1): Et voil que Dina, la fille de Lah, sortit voir les filles du pays . Le Midrach commente (Brchith Rabah 80:4): Mon droit parlera pour moi au jour venir (Brchith 30:33), Rabbi Yhouda, fils de Rabbi Simon, dit: Ne te flicite pas du lendemain car tu ne connais pas le lot de chaque jour (Michley 27:1), et toi Yaakov, tu as dit: Mon droit parlera pour moi au jour venir? Demain, ta fille sortira et elle sera enleve, comme il est dit: Et Dina sortit... Rabbi Hanina, au nom de Rabbi Abba HaKohen, fils de Rabbi Elazar, dit: La sympathie de ses amis devrait sadresser celui qui se consume de chagrin, eut-il mme renonc la crainte de D. (Iyov 6:14). Tu nas pas eu de bienveillance lgard de ton frre... tu nas pas voulu donner ta fille en mariage de faon permise, elle se mariera de faon interdite . Le Nahalat Elizer crit ce sujet: La premire interprtation attribue le malheur de Dina lassurance exagre de Yaakov. Yaakov a eu raison de dire Laban: Mon droit parlera pour moi au jour venir , mais en disant cela il inclut les membres de sa famille, ce qui montre quil ne les souponnait daucune faute. Il ne surveillait donc pas les tendances de sa fille Dina et il ne se rendit pas compte de sa curiosit lgard des filles du pays. Peut-tre a-t-il aussi t puni pour avoir utilis une expression qui montre sa certitude en lavenir. Nous constatons combien chacun doit tre prudent dans ses paroles et choisir soigneusement ses mots pour viter des implications errones. Dun ct, nous voyons que Yaakov tait sr de lui-mme, de sa famille, et mme de sa fille Dina. Il tait sr de son bon droit, mme pour lavenir. Sil en est ainsi, pourquoi, par ailleurs, a-t-il si peur et cache-t-il Dina dans la carriole? Si sa droiture devait parler pour lui au jour venir, lorsquil rencontrerait son frre Essav, pourquoi craignait-il pour Dina? Cest quil fut pris au mot. Son assurance ntait pas tellement grande, son droit ne parla pas pour lui ce jour-l et Dina fut enleve par un non-juif. Yaakov avait agi avec une bonne intention et dans la crainte de D. en ne voulant pas quEssav pouse sa fille, car Il faut marier sa fille un homme qui possde la Torah (Pessahim 49a), et non un vilain comme Essav. Malgr sa mchancet, sa fausset, son hypocrisie, Essav avait tudi la Torah dans la Ychivah de Chem et Ever, et il possdait des qualits enfouies quil utilisait parfois pour faire la volont de D., comme honorer ses parents, et il avait foi en la bndiction de son pre Yitshak comme lexprime le grand cri quil poussa en apprenant que Yaakov lui avait pris sournoisement les bndictions (Brchith 27:34, 36, 38). Sil a foi dans les bndictions de son pre, cest quil a foi en Celui qui pourvoie toutes les bndictions, en D., dont la Gloire emplit le monde, et son avidit pour les plaisirs de ce monde ntait peut-tre pas un dfaut incorrigible. Le Rabbin Yaakov Hayim Sofer, auteur de Ismah Isral, crit des choses merveilleuses concernant la grandeur dEssav. A propos du verset: Il se jetta son cou et lembrassa et ils pleurrent (ibid. 33:4), cet auteur crit: Pourquoi pleurent-ils tous deux? Il est possible que Yaakov pleure parce quil sait quEssav va plus tard dtruire le Temple (Essav, cest Rome. Voir Avodah Zarah 2b) et exiler Isral de sa terre et de son pays. Et Essav pleure car il sait qu lavenir, la fin des temps, toutes les bndictions dont Yitshak a bni son fils Yaakov se raliseront, et que lui Essav disparatra du monde, comme il est crit (Ovadia 1: 21): Et les librateurs monteront sur la montagne de Sion, pour se faire les justiciers du mont de Essav, et la royaut appartiendra lEternel . Nous voyons l que mme Essav a eu une divination en cet instant de vrit (lorsquil rencontra son frre Yaakov) car, spontanment, il pleura sur son destin et le destin de ses descendants qui seraient livrs aux enfants de Yaakov. A ce moment-l, il ne manquait Essav quun lger soutien, et il est possible - qui sait - que ce soutien ait pu venir justement de Dina, la fille de Yaakov. Mais pour lavoir cache, Yaakov a priv Essav de cette aide, car sil lavait pouse lgalement, elle laurait srement corrig et amen un repentir sincre, vu quil possdait certaines qualits. Yaakov est responsable de ce qui est arriv et D. la puni en faisant contracter sa fille un mariage interdit, pour avoir selon les mots du Midrach (rapports ibid. par Rachi) empch son frre de lpouser, peut-tre laurait-elle corrig... Tout est entre les mains de D., sauf la crainte de D. (Brachoth 33b). Lhomme transgresse le commandement de craindre D., parce que D. lui a donn le libre arbitre. Essav, malgr ses fautes, avait la

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possibilit de choisir la vie (Devarim 30:19), et il aurait pu se repentir en un instant et en un clin dil (Zohar I, 129a), tout comme il a pu en un instant commettre de grandes fautes. Qui sait? Si Essav avait vu Dina, une jeune fille pudique et vertueuse, il aurait peut-tre regrett ses fautes, et mme sil lavait pouse pour des raisons gostes, en fin de compte il en serait venu faire le bien pour le bien (Pessahim 50b). A ce moment-l, Yaakov aurait lui-mme sauv son frre du feu de lenfer, et qui sait? cela aurait peut-tre chang le cours de lhistoire... Mais nous navons que faire de telles spculations qui sont au-del de notre entendement, et la justice divine a des raisons quil nous est parfois difficile de comprendre. Lvnement en lui-mme est significatif. Yaakov, qui avait une si grande confiance en D., aurait d peser ses mots afin de ne pas contredire sa confiance en D. Sil tait tellement sr de Dina quil la laissa se promener seule dans la ville de Chekhem, une ville de gens mchants (Brchith Rabah 80:2; Makoth 10a, Sanhdrin 102a) sans craindre quil ne lui arrive malheur car il avait confiance en D., il aurait d avoir la mme confiance concernant la rencontre avec Essav et ne pas craindre quil la dsire. tait-il possible que D. annule Sa promesse de le protger dans tout ce quil ferait, justement lorsquil allait rencontrer Essav? Il est certain quEssav naurait eu aucun penchant pour elle, puisque D. le protge. Dans ce cas, pourquoi Yaakov a-t-il peur dEssav au point de cacher Dina ses regards? Il y a plus. Quel profit Yaakov tire-t-il du fait davoir cach Dina? Essav aurait pu apprendre que Yaakov avait une fille en plus de tous les garons quil voyait devant lui, et demander la voir. Le fait quil na pas cherch savoir sil avait une fille prouve que Yaakov a mal jug son frre. En effet, si la promesse de D. est toujours valable, de quoi a-t-il peur? Cela soulve une autre question: Pourquoi Essav na-t-il pas demand si Yaakov avait une fille? Cela montre quEssav est rest ce quil tait, il avait en lui des tendances contradictoires, il ne demanda pas si Yaakov avait une fille car il ne dsirait pas pouser la fille du roi puisquil ne voulait pas changer son mode de vie mais bien continuer jouir des plaisirs de ce monde, pour le reste de ses jours. Il aurait pu en tre autrement si Essav avait vu Dina de ses propres yeux, puisque tout homme jouit du libre arbitre et il aurait eu alors la possibilit de se corriger grce Dina, et cest Yaakov qui len a empch. Cest de cela que Yaakov fut puni. Il accomplira ce quil a dit Ce qui a t dit nous permet de comprendre plus clairement la rigueur de la justice divine. Aprs lenlvement de Dina, il est crit (Brchith 35:1): Et D. dit Yaakov: Va, monte Bthel y sjourner, et lves-y un autel au D. qui tapparut lorsque tu fuyais devant Essav ton frre . Rachi rapporte le commentaire des Sages (Tanhouma ad. loc.): Parce que tu as tard en chemin (tu nas pas ralis ta promesse de rentrer tout de suite), tu as t puni, et ce malheur est tomb sur ta famille . 1. Plus haut, nous avons cit le Midrach Rabah (76:9) selon lequel la faute de Yaakov tait davoir cach Dina (ibid. 80:4) et davoir manqu de bienveillance envers son frre. Ici, le Midrach Tanhouma dit que Yaakov fut puni pour avoir tard en route et tard accomplir son vu. 2. Le Nahalat Elizer pose une autre question. Nous lisons dans le Midrach (ibid. 81:2): Rabbi Abba Bar Kahana dit: A lheure o tu tais dans la peine, tu as fait un vu, et maintenant que tu es dans le confort, tu as oubli... D. dit Yaakov: Tu as oubli ton vu! Va, monte Bthel, la maison de D., et lves-y un autel au D. qui ta appel. Si tu ne le fais pas, tu es comme Essav qui prononce des vux et ne les ralise pas. Le Nahalat Elizer demande sil est vraiment possible de comparer Yaakov Essav parce quil a tard raliser son vu? Yaakov a toujours sincrement eu lintention de remplir son vu, et il a seulement tard le faire (il avait promis (ibid. 28:21-22): Si je retourne en paix dans la maison paternelle... cette pierre que je viens driger en monument deviendra la maison du Seigneur et de tous les biens que Tu maccorderas, je prlverai la dme ), mais Essav a trahi son serment car il avait fait le serment de vendre Yaakov son droit danesse (ibid. 27:33), et finalement il a dit: Yakov a pris mon droit danesse (ibid. 27:36) comme si Yaakov le lui avait vol. Il a trahi son serment parce quil regrettait de lui avoir vendu son droit danesse tout fait lgalement, et il voulait mme tuer son frre (ibid. verset 41). 3. Si D. Lui-mme tmoigne quEssav est mchant et na pas lintention de raliser sa parole, Yaakov a raison de vouloir cacher Dina au regard dEssav. Sil en est ainsi, pourquoi en serait-il puni par lenlvement de Dina?

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Pour rpondre ces questions, il faut dire que la qualit qui caractrise Yaakov est la vrit, comme il est crit (Micha 7:20): Tu as donn la vrit Yaakov . Yaakov est un homme intgre (t) dont la valeur numrique compte avec le mot lui-mme, est gale celle de tma, vrit. Il ny a donc pas lieu de le comparer Essav qui est menteur, voleur, brigand, et commet dinnombrables transgressions. Lorsque Yaakov senfuit chez son oncle Laban, il fit le serment que sil retournait en paix dans la maison de son pre, il passerait par Bthel et y raliserait son vu et prlverait la dme de tous ses biens, mais par la suite, sa peur dEssav prit le dessus et il se dit quil avait peut-tre commis quelque faute, mme sil ne savait pas laquelle. Tout cela, avant sa rencontre avec Essav, mais en se revoyant, les deux frres se sont embrasss et ont pleur, la peur de Yaakov disparut et donc il aurait d sentir quil avait caus du tort son frre en lui cachant Dina. De plus, Essav savait que les bndictions de Yaakov se raliseraient et par consquent Dina aurait pu lamener se repentir. Pourquoi Yaakov a-t-il persist dans sa mfiance envers son frre et na-t-il pas reconnu sa faute envers lui? Mme si Yaakov a tard en route, sil avait reconnu et corrig sa faute envers son frre, il est possible que la sentence lencontre de Dina aurait t annule. Non seulement il na pas reconnu sa faute, mais il a aussi tard en route, et cest pourquoi lattribut de Justice a pris le dessus: Non seulement tu nas pas reconnu ta faute (si tu lavais reconnu, la sentence aurait t annule, puisque tu vois quEssav na pas demand si tu as une fille), mais tu as aussi tard en route et tu nas pas empch ta fille de sortir dans les rues de la ville de Chekhem, expose la convoitise de tous. La justice la poursuivi cause de ces deux fautes: pour avoir cach Dina sans se rendre compte du tort que cela causait Essav, pour avoir tard et pour avoir laiss sa fille se promener dans Chekhem (Yaakov la cache Essav mais pas Chekhem), et cest pourquoi il fut puni par le malheur qui arriva Dina, ce qui montre que les divers Midrachim ne se contredisent pas. Du fait que Yaakov na pas reconnu sa faute envers Essav et quil a tard raliser son vu, D. la compar Essav. De mme quil a priv son frre de la possibilit de se repentir et que cest cause de lui quEssav est rest ce quil tait - un homme sans parole - de mme Yaakov ne tient pas sa parole, et ses fautes sont comptes la mesure de sa valeur, lui qui est un homme de vrit. En tant que tel, une fois sa peur vanouie, il aurait d reconnatre le tort quil avait caus son frre, et monter tout de suite Bthel, sans tarder en route. Il ne la pas fait, et donc, aprs le dshonneur quil a subi cause de Dina, D. lui dit: Va (littralement debout!), monte . Afin de corriger tes lacunes, tu dois tlever, cest cette lvation qui palliera tes failles. Maintenant, nous pouvons comprendre les implications de ce rcit. Celui qui fait un vu doit le raliser au plus vite, en surmontant les empchements qui peuvent se trouver sur sa route, comme le montre lenchanement des vnements. Lorsque Yaakov alla de la maison de son pre vers la maison de Laban, il avait lintention daccomplir son vu, mais la condition de son vu ntait pas remplie tant quil navait pas rencontr Essav. Aprs lavoir rencontr, va-t-il fauter envers lui? Il aurait d sappuyer sur les promesses de D. et sil ressent de la peur, cest peut-tre - aurait-il d se dire - parce quil a cach Dina dans la carriole? Pourquoi ne craint-il pas pour sa femme Rahel? Pourquoi ne se mfie-t-il pas des gens de Chekhem? Pourquoi ne se rend-il pas compte quil fait du tort son frre? Pourquoi tarde-t-il en route et ne naccomplit-il pas son vu? Un tel comportement ne risque-t-il pas de le faire ressembler son frre, qui ne tient pas sa parole? Mais le danger quil court est bien plus grand! Le fait quil nait pas reconnu sa faute, le fait quil ait tard en route et son manque de mfiance envers les gens de Chekhem ont appel sur lui les foudres de la justice divine et cest pourquoi il fut puni en ce qui est arriv Dina. Le Tiphret Tsvi crit: Le sens de beaucoup de rcits de la Torah nous chappe, parce que nous essayons de les comprendre selon le langage auquel nous sommes habitus, mais dans notre langage nous, ils nont aucun sens. En fait, la langue de la Torah est diffrente de la ntre et ses critres sont diffrents des ntres. Chez nous, la faute ou la bonne action commence lorsque nous agissons, mais dans la Torah, le dbut de laction est de loin antrieur lacte lui-mme et commence avec la saintet, la puret et la propret de la pense qui le prcde . Cela explique la grande colre de D. envers Yaakov, et pourquoi il fut puni, mme si la rigueur de la justice divine est une chose qui nous est difficile comprendre.

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Citons ce quen dit le Rambam, dans son Code de Loi (Halakhoth Meyla VIII:8): Il convient chacun de mditer les lois de la sainte Torah et den comprendre la raison dtre dans la mesure de ses capacits, [mais] si lon nen comprend pas la raison dtre et si lon ne leur trouve pas de sens, il ne faut pas pour autant saventurer slever contre D. sous peine de provoquer Sa colre (voir Chemoth 19:24). Il ne faut pas penser D. comme on pense aux ralits de la vie courante. Voyez combien la Torah est svre envers celui qui fait un usage impropre des choses saintes. Si du bois et des pierres, de la cendre et de la poussire, partir du moment o ils ont t sanctifis ne serait-ce quen parole, deviennent sacrs [et interdits tout usage profane] au point que celui qui les utilise commet un abus (meyla) doit apporter un sacrifice expiatoire mme sil a commis cet abus par inadvertance, plus forte raison il ne faut pas se rebeller contre les commandements que le Saint, bni soit-Il, nous a donns et dont nous ne comprenons pas le sens. Il ne faut pas substituer nos raisons qui sont fausses celles de D. et Lui attribuer les penses que nous avons vis--vis des choses profanes . Telles sont les paroles en or du Rambam. Le saint Rabbin Aaron Kotler a parl de ce sujet dans un congrs dducateurs, en lan 5721 (1960-61), et nous allons citer ici un extrait de ce quil dit: La sainte Torah est plus vaste que la terre et plus profonde que les mers (voir Iyov 11:9). Si lhomme aborde la Torah avec son intelligence limite et sa comprhension quasi nulle, il rabaisse la Torah au niveau de son intelligence et de sa comprhension restreintes, et il ny a pas de plus grande profanation des choses sacres... Ainsi parle le Rambam (Halakhoth Avodah Zarah II 3): Il nest pas seulement interdit de tourner ses penses vers lidoltrie, mais nous devons aussi nous dtourner de toute pense contraire aux principes fondamentaux de la Torah... parce que la comprhension de lhomme est faible, et peu de gens sont capables de parvenir la vrit telle quelle est... la Torah nous met en garde contre cela en disant (Bamidbar 16: 39): Ne suivez pas les penchants de votre cur... cest--dire quil nous est interdit de suivre notre opinion troite et de croire avoir atteint la vrit . Les Sages disent propos de Rabbi Elizer HaGadol (Avoth DRabbi Nathan 25:3; Zohar I, 99a): Si toutes les mers taient faites dencre, et tous les bosquets de roseaux, si tous les hommes taient des scribes, et tout le firmament un parchemin, nous ne pourrions pas crire toute la sagesse que Rabbi Elizer HaGadol a reue de ses matres, et qui, par rapport la science de ses matres, nest quune goutte deau dans la mer . Quelle diffrence entre la comprhension de la Torah de Rabbi Elizer et celle de ses matres! Nous sommes donc loin de pouvoir comprendre la Torah et le sens des rcits de nos anctres ou de comprendre les indications qui nous sont donnes de la rigueur de la justice divine, et de mme que nous navons aucun moyen de saisir ce que sont les anges, nous navons aucun moyen de saisir la grandeur de nos saints Patriarches.

Les secrets appartiennent D.


Yaakov a tant souffert quil disait de lui-mme: Je viens peine de sortir du malheur de Dina, du malheur de Yossef, du malheur de Laban... (Tanhouma Miketz 10), et il a rvl dans ces circonstances toute sa grandeur, comme le disent les Sages (Tanhouma Toledoth 14): Il souffre mais ne se plaint pas de la rigueur de la Justice . Jai mdit ces propos. Pourquoi Yaakov, qui a engendr les douze tribus de D. (Thilim 122:4) et dont le visage est grav sur le Trne de Gloire (Pessikta Zouta Vayets 28:13), a-t-il tant souffert durant sa vie, surtout du malheur de voir Dina viole par un non-juif (Brchith 34:2) et profane (ibid. 34:5)? Pourquoi Yaakov doit-il souffrir de tout cela? (Nous avons dj propos une rponse dans le chapitre prcdent, mais chaque tude rvle un sens nouveau). Cest peut-tre pour signifier aux gnrations futures que la conduite de Dina, sortant de la carriole - qui est assimile une Ychivah - nous enseigne que chaque Juif doit viter de sortir des murs de la maison dtude et que, sil en sort, il doit en subir les consquences. Il faut crer des instituts denseignement de la Torah afin de servir de protection contre lassimilation. Quoi quil en soit, il convient de se demander pourquoi Dina fut enleve et viole par ce non-juif sans scrupule.

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Nous apprenons l combien la Justice est stricte, car mme envers les Patriarches qui taient le support de la Prsence Divine (Brchith Rabah 47:8; Zohar I, 213) et taient parvenus la perfection, qui taient aussi resplendissants que les anges qui les servaient (Brchith Rabah 75:4), le jugement fut trs svre. Bien quils aient eu des anges leur service - des anges crs par les bonnes actions quils pratiquaient uniquement pour obir la volont du Crateur - ils ntaient pas protgs contre la rigueur de la Justice. Yaakov venait tout juste datteindre une grande noblesse puisquil avait vaincu lange dEssav (Houlin 92a), et repouss la proposition dEssav (Brchith 33:12): Partons, marchons ensemble, je me conformerai ton pas . Essav ne voulait laccompagner et se joindre lui que pour lui nuire et lempcher de progresser. Yaakov aurait donc d accomplir immdiatement son vu afin de parvenir une plus grande perfection, car la perfection na pas de limite, chaque jour lhomme approfondit sa connaissance du moment. Lhomme doit continuer progresser avec des forces toujours croissantes, sans se contenter de ce quil a dj acquis. Il faut progresser chaque jour, chaque heure, chaque instant, car la vraie perfection est sans bornes. Lorsque Yaakov parvint ce degr de perfection, il aurait d continuer. Il avait encore beaucoup faire pour atteindre le tout du monde Venir, dans le sens de Tout Isral a une place dans le monde Venir (Sanhdrin 90a), et ce tout est sans limite. Ce nest que laccomplissement de son vu qui peut lui assurer la perfection (Brchith Rabah 81:2) et cest pourquoi il fut puni par le malheur qui frappa Dina. Yaakov cherchait fondamentalement sloigner du mal puisquil avait dit Essav (Brchith 33:13): Mon seigneur sait que ces enfants sont dlicats, que ce menu et gros btail qui allaitent exigent mes soins... Il a expliqu son frre quil ne dsire pas vivre avec lui pour ne pas tre drang dans lducation de ses enfants, une ducation qui lui cote tant dargent et ncessite tant defforts, et cest pourquoi il lui dit: Je cheminerai ma commodit, selon le pas de la suite qui maccompagne et selon le pas des enfants (Brchith 33:14). Autrement dit: Jirai dtape en tape, de force en force, car ce nest que grce la Torah que je parviendrai au tout , au monde Venir, sans tre dtourn de mon but par la richesse qui elle aussi est appele tout comme il est crit (Thilim 49:18): Quand il mourra il nemportera rien [littralement: pas tout ], son luxe ne le suivra pas dans la tombe . Yaakov possdait ce dont il avait besoin, puisquil dit (Brchith 33:11): D. ma favoris et je possde tout ce dont jai besoin , cest--dire quil tait riche dans le sens o il tait satisfait de son sort (Avoth IV:1), et il utilisait gnreusement le surplus de ses biens pour accomplir des actes de bienveillance. Et pourtant, la rigueur de la Justice sen est prise lui considrant quil y avait une faille dans sa perfection pour navoir pas rempli tout de suite son vu et sa promesse. Loin de nous la pense que Yaakov navait pas tenu parole, mais son sjour Chekhem fut considr comme une faille, malgr la maison dtude quil y avait institue. Il nous est difficile de discerner avec prcision comment la Justice sest alors manifeste contre lui, bien quil ait progress dans dautres domaines, et cela pour navoir pas encore rempli son vu envers D. qui venait tout juste de le sauver des mains dEssav et de confirmer les bndictions (Brchith Rabah 78:11). Seul laccomplissement de sa promesse lui aurait permis datteindre le comble de la perfection. Bien quil soit dit qu ce moment-l, prcisment, Yaakov arriva Chalem (chalem, entier) (Brchith 33:18), entier dans son corps, dans ses biens et dans sa Torah (Chabath 33; Brchith Rabah 79:5), il ntait pas parvenu au comble de la perfection en tout , ce qui enseigne aux gnrations futures la rigueur de la Justice, et combien elle est pointilleuse. Celui qui fait vu de servir D. de toutes ses forces est jug fautif tant quil ne ralise pas son vu ou sil ne le ralise que partiellement, mme si dans dautres domaines il a une conduite irrprochable. Les Sages disent (Brchith Rabah 80:4): Pour avoir t enferme dans la carriole, Dina finit par tomber entre les mains de Chekhem, fils de Hamor . Pourquoi cela? Parce que la sentence avait dj t prononce contre Yaakov cause de son manque de perfection. Si D. avait promis de veiller sur lui et sa famille, pourquoi craignait-il le regard mal intentionn dEssav? Si aprs lavoir cache dans la carriole, Yaakov stait empress daccomplir son vu, il est possible que la sentence ait t annule. Nous aurions alors expliqu que Yaakov aurait pu repousser la demande en mariage dEssav en prtextant que Dina tait encore trop jeune. Mais nous voyons quil sarrte Chekhem et quil tarde accomplir son vu. Telle est la rigueur de la Justice envers celui qui manque de perfection. La conduite de Yaakov nous enseigne aspirer toujours plus de perfection.

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En rsum: Yaakov a subi durant sa vie beaucoup de malheurs, dont lenlvement de Dina par Chekhem. Pourquoi? Bien que Yaakov ait progress avec des forces toujours croissantes en sloignant dEssav, en instituant une maison dtude, en faisant le bien, la rigueur de la Justice a pes sur lui parce quil navait pas accompli son vu temps. Le malheur de Dina le frappa parce quil navait pas craint les habitants de Chekhem. Il faut parvenir au comble de la perfection en tout, et il ne suffit pas de progresser uniquement dans certains domaines, et cela, afin dviter la rigueur de la Justice. Quelle est la conduite convenable? Chacun doit accomplir ses bonnes rsolutions et tenir ses promesses pour progresser dans le service de D., dans tous les domaines. Il ne faut pas remettre plus tard la possibilit de progresser, et par exemple, ds que lon est libr des occupations courantes, il faut courir vers la maison dtude, faute de quoi la rigueur de la Justice psera sur notre tte car nous aurons laiss chapper la possibilit de raliser temps de bonnes actions avec nos bnfices, comme Yaakov nous en donne lexemple.

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La Torah et lamour du prochain, correction de lexil dEgypte
Et Yaakov sinstalla (Vayshv) dans le pays des prgrinations de son pre, dans le pays de Canaan (Brchith 37:1). Le Midrash explique: Yaakov esprait vivre une vie sereine, mais il en fut empch lorsque le malheur caus par la disparition de Yossef le saisit. La promesse du monde Venir ne suffit donc pas aux Justes, pour quils aspirent encore une vie tranquille en ce monde-ci! (Brchith Rabah 84:1). Il nous faut comprendre le sens de lexpression Vayshv (littralement: il sassit ). Pourquoi la Torah nutilise-t-elle pas le mot habiter ? Cest que lintention du texte est prcisment dindiquer la position assise, de mme que la Ychivah est le lieu dtude de la Torah. Yaakov Avinou dsirait se consacrer ltude de la Torah et au service de D. en toute tranquillit, mais laffliction qui laccabla cause de Yossef lempcha de le faire dans la tranquillit. Parfois ltude de la Torah peut se faire tte repose, mais souvent cette tude exige de surmonter bien des obstacles. Cest ce que disent nos Sages: La Torah sacquiert par des souffrances (Brachoth 5a). Les peines quil faut endurer pour ltude de la Torah sont autant dpreuves pour celui qui lacquiert travers des souffrances. Yaakov Avinou dsirait riger en pays de Canaan un lieu permanent dtude de la Torah afin dannuler la sentence dexil qui fut dcrte contre les enfants dAvraham, car ltude de la Torah a le pouvoir dannuler les punitions, comme le disent les Sages: La Torah nous protge et nous sauve (Sotah 21a). Pourquoi fut-il frapp dun si grand malheur? Cest que D. dsirait lui faire comprendre que ltude de la Torah nest pas une activit aise, effectue tte repose dans le confort et le calme mais quil faut aussi tudier la Torah malgr les tourments de lexil et, mme si les douleurs et les tourments que lon y rencontre sont grands, il ne faut pas pour autant ngliger ltude de la Torah. Il semble que les mots B-retz Cnaan (au pays de Canaan) dont les dernires lettres forment le mot Ntz (bourgeon) indiquent lide que le temps de lexil pour ainsi dire bourgeonne et approche, comme il est dit: Les boutons des fleurs apparaissent sur la terre (Chir HaChirim 2:12) que Rachi explique ainsi: Les jours dt sont proches . De mme propos de notre verset, le temps de lexil approche. A pareil moment, il ne convient pas de se reposer sur les piliers de la Torah et de la pit, il faut surmonter les souffrances et tudier la Torah afin dannuler les rigueurs de lexil. Effectivement, lexil dEgypte, au lieu de se prolonger quatre cents ans (selon le dcret de D. Abraham), na dur que deux cent dix ans, justement parce que Yaakov na pas connu de tranquillit en ce monde. Pour avoir surmont toutes les souffrances, il a pu rduire lexil de cent quatre-vingt-dix ans et attnuer la svrit du dcret. Si nous considrons de plus prs notre section, nous voyons que lexil fut caus par une conduite fautive et apparemment mauvaise. tudier la Torah ensemble, quon lapprenne ou quon lenseigne, entretient lamour du prochain, des sentiments de fraternit, et conduit lamiti des uns envers les autres. Yossef enfant, passe son temps avec les fils de Bilha et les fils de Zilpa, pouses de son pre (Brchith 37:2). La Torah tmoigne expressment que Bilha et Zilpa sont les pouses part entire de Yaakov, mais Yossef souponnait ses frres, ns de Lah, de mpriser les fils de Bilha et de Zilpa comme sils ignoraient ce fait. Rachi explique: Yossef passait son temps avec les fils de Bilha parce que ses frres les mprisaient et il voulait, lui, les rconcilier par des rapports amicaux . Etant donn que la Torah tmoigne que Bilha et Zilpa taient les pouses de Yaakov, il va sans dire que leurs enfants ntaient pas mpriss par les autres frres et les soupons sans fondement de Yossef ont caus un grand tort et finalement conduit lexil dEgypte. On peut maintenant comprendre la fin du verset: ...et il profra, sur leur compte, des mdisances leur pre . De quelles mdisances sagit-il? Nos Sages nous disent: Lorsque Yossef voyait ses frres, les fils de Lah, mal agir, il rapportait la chose son pre, lui disant quils mangeaient de la viande arrache une bte vivante, quils mprisaient les fils des servantes en les traitant desclaves, et quils avaient une conduite immorale (Midrach Brchith Rabah 84:7; Rachi ad. loc.). Pour comprendre Yossef, il nous faut savoir quil passait son temps avec les fils de Bilha et de Zilpa, pouses de son pre, cest dire quil

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stait li damiti avec eux, mais pas avec les fils de Lah, ce qui la amen les souponner de dnigrer les fils des servantes. De tels soupons concernant les pres des tribus dIsral sont dplacs. Comment les tribus de lEternel, tmoins dIsral (Thilim 122:4) peuvent-elles dnigrer leurs frres et les traiter desclaves! Yossef fut puni mesure pour mesure et il fut lui-mme vendu comme esclave, ce qui en fin de compte a caus lexil de nos anctres en Egypte. Lorsque Yossef fut vendu comme esclave, Yaakov refusa toute consolation: Non, je porterai le deuil de mon fils jusquen enfer (Brchith 37:35). Pourquoi? Nos Sages nous disent: Yaakov savait que si aucun de ses fils ne mourait de son vivant, ce serait pour lui lindication quil ne verrait pas lenfer. Mais maintenant, pensant que Yossef est mort, il croit quil a manqu de perfection dans ses relations maritales et quil lui faudra subir les peines de lenfer (Mam Loez ad. loc.; Tanhouma Vayigach 9). Si tous sont vivants, cest pour Yaakov la garantie quil ne verra pas lenfer mais, si un seul dentre eux disparat, cest quil naura pas t parfait, et Yaakov redoutait cela tout particulirement. Maintenant nous pouvons mieux comprendre ce qui a t dit plus haut: Yossef frquentait les fils de Bilha et de Zilpa, pouses de son pre, ce qui donnait penser quil naimait pas ses autres frres, les fils de Lah et cest la raison pour laquelle il rapportait son pre Yaakov des calomnies leur sujet. Cest effectivement ce que Yossef le Juste, qui ne frquentait pas ses grands frres, insinue par ses accusations. Si les frres traitent les fils des servantes desclaves, il en dcoule quen tant quesclaves ils nont le droit dpouser que des servantes et quil leur est interdit dpouser des filles de familles libres. Tel est le sens de laccusation dimmoralit, tandis que le fait de leur imputer du mpris envers les fils des servantes et de rapporter sur eux des mdisances est de lordre de la consommation dun membre arrach un animal vivant . Yossef aurait d sen garder. Compte tenu de sa propre grandeur, il navait aucun besoin de limiter ses relations fraternelles aux fils des servantes et de provoquer la mfiance de ses autres frres envers lui. Au contraire, il aurait d se conduire avec tous de la mme faon. Pour ne lavoir pas fait, il fut puni. Les Sages nous mettent en garde: Un pre ne doit pas favoriser lun de ses fils plus que les autres, il ne doit pas passer plus de temps auprs de lun dentre eux au dtriment des autres, car cest la prfrence de Yaakov pour Yossef qui a amen ses frres le jalouser, et qui en fin de compte les a tous conduits en Egypte (Brchith Rabah 84:8). Yossef lui-mme, en montrant une prfrence pour les fils des servantes, na fait quimiter son pre, ce qui a caus lexil en Egypte. Revenons maintenant notre premire ide. Les accusations de Yossef ont caus un amer exil, mais ltude de la Torah dans des conditions difficiles est un remde qui peut corriger les trois fautes quil leur reprochait: la viande arrache un corps vivant, le mpris de lautre et limmoralit. Voyons comment? Les Sages nous disent: La Torah sappelle la vie (Avoth DRabbi Nathan 34:10), et La Torah est un lixir de vie pour le corps tout entier (Yirouvin 54a; Chohar Tov 78:1), cest dire quune vie sanctifie par la Torah annule la faute de consommer un membre arrach un animal vivant, comme la Torah est un remde pour le corps. Les Sages disent encore: La Torah est un arbre de vie, elle est un remde contre la mdisance (Tanhouma Metsorah 2), cest dire quelle corrige le mpris des autres et les calomnies contre ceux qui ne sont asservis rien dautre qu la Torah. Ou encore: La Torah et Isral sont lis lun lautre comme des fiancs (Sifri Bracha 4), cest donc que la Torah corrige limmoralit, dans le sens o la Torah est figurativement reprsente par la femme vertueuse (Ybamoth 63a), cest dire quelle nous protge et nous sauve de toute inconduite. Cela va de pair avec lamour du prochain, ce qui indique que la Torah - qui sapprend et senseigne en groupe - peut compenser les souffrances de lexil et rapprocher le temps de la rdemption. De lhistoire de Yossef, qui a t puni pour stre attach aux fils des servantes et pas aux fils de Lah, nous apprenons le devoir de fraterniser avec chaque Juif, comme il est dit: Tous les juifs sont lis damiti les uns aux autres . Surtout, il faut dsirer le bien de chacun (Avoth 4:15) et chercher raliser lunit de tous jusqu tre comme un seul homme avec un seul cur (Mekhilta Yithro 19:2). Inversement, puisque de ce qui est dit nous entendons ce qui nest pas dit (Bamidbar Rabah 9:47), celui qui sattache aux uns lexclusion des autres manifeste ce faisant un manque damour, et il est interdit de ne pas aimer

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un autre Juif, comme il est crit: Tu ne haras pas ton frre en ton cur (Vayikra 19:17). Cest ce qui est dmontr par la conduite de Yossef, pour laquelle il fut puni. A chaque Juif de se lier damiti avec tous les autres Juifs, cest ce qui nous sauvera et amnera la rdemption, promptement et de nos jours. Amen.

Les 613 commandements se pratiquent dans la peine en exil


Yaakov sinstalla dans le pays des prgrinations de son pre, dans le pays de Canaan. Voici lhistoire de la descendance de Yaakov, Yossef... (Brchith 37:1-2). Rabbi Aha dit: Lorsque les Justes dsirent vivre tranquillement en ce monde, le Satan vient les accuser, en disant: Ne suffit-il pas aux Justes de recevoir la rcompense qui leur est rserve dans le monde Venir, pourquoi veulent-ils aussi vivre tranquillement en ce monde? Yaakov a voulu sinstaller tranquillement en ce monde, et le malheur de Yossef la atteint (Brchith Rabah 84:1). Les Sages ajoutent (Mguilah 17a; Rachi Brchith 28:9): Yaakov fut puni pour navoir pas honor ses parents pendant les vingt-deux ans o il fut spar deux. Il fut puni travers Yossef et spar de lui pendant vingt-deux ans, mesure pour mesure (Chabath 102b; Ndarim 32a). Ces versets et ces Midrachim veillent en nous de nombreuses questions, et nous allons en prsenter quelques unes: 1. Le Rabbin Avraham Yaffen remarque que ces Midrachim se contredisent lun lautre puisque dun ct, la faute de Yaakov fut de stre spar de ses parents pendant vingt-deux ans durant lesquels il na pas pu les honorer, mais par ailleurs, il est dit quil a dsir sinstaller et vivre tranquillement et cest pourquoi le malheur de Yossef la atteint. 2. Pourquoi Yaakov dsire-t-il vivre tranquillement? Est-ce quun Juste comme lui ignore quil ny a pas de tranquillit en ce monde, de sorte que le Satan peut laccuser? 3. Il faut aussi comprendre la longueur du plaidoyer du Satan. Pourquoi a-t-il besoin daccumuler les arguments, ne lui suffit-il pas de dire que le repos est interdit aux Justes en ce monde, ce qui nous aurait fait comprendre que la rcompense leur est rserve dans le monde Venir? Pourquoi le Satan avance-t-il des arguments qui vont de soi? 4. Pourquoi la vente et la descente de Yossef en Egypte sont-elles dsignes par le mot Roguz, malheur ? Nous savons que sa descente en Egypte tait ncessaire pour prparer la venue de la famille de Yaakov, et les Sages ont dit (Chabath 89b; Brchith Rabah 86:1): Yaakov aurait d descendre en Egypte enchan dans des fers, mais le mrite de Yossef lui a pargn cette honte . Il est vrai que Yaakov fut puni pour navoir pas honor ses parents pendant vingt-deux ans et pour avoir voulu vivre tranquillement, mais pourquoi penser que la vente de Yossef et sa descente en Egypte est une punition et un malheur, alors que ctait une chose ncessaire et bnfique? Yossef le prcde en Egypte pour prparer la venue de Yaakov et celle de ses enfants et les recevoir royalement. Cest certainement prfrable une descente honteuse, et la vente de Yossef eut une consquence heureuse. En quoi consiste la punition? Si le Satan navait pas plaid contre Yaakov, Yossef ne serait pas descendu en Egypte, naurait pas rgn, et Yaakov et ses enfants seraient honteusement descendus, enchans dans des fers. La vente de Yossef nest donc pas un malheur, mais un bienfait. 5. Le Rabbin de Satmar pose une autre question: Pourquoi le malheur de Yossef a-t-il atteint Yaakov pour avoir voulu sinstaller tranquillement? Nous savons que D. accomplit la volont de ses fidles (Thilim 145:19). Pourquoi ne recevrait-il pas la tranquillit quil demande? Pourquoi D. le priverait-Il de ce bienfait, dautant plus que Yaakov ne voulait que servir D. pieusement, et il ne recherchait pas son propre bien-tre matriel? Son aspiration la srnit tait-elle un mal pour quil ft terrass par la disparition de Yossef? 6. Il faut expliquer lemploi du terme Roguz, malheur (littralement: colre), au lieu de Tsaar, la peine, par exemple. 7. Il faut aussi expliquer pourquoi justement le malheur tomba sur Yossef, et non sur un autre de ses fils.

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8. Pourquoi est-il dit: dans la terre des prgrinations de ses pres , au lieu de: Yaakov sinstalla dans le pays de Canaan ? Quest-ce que cela nous enseigne de plus? Avant de rpondre ces questions selon mon humble avis, je veux tout dabord citer ce que dit la Torah (Vayikra 26:3): Si vous vous conduisez [littralement: marchez] selon Mes statuts, si vous gardez Mes commandements et les excutez... ou Si vous gardez Mes commandements , se rfre la pratique des commandements. Il faut donc comprendre que Si vous marchez selon Mes statuts se rapporte la connaissance de la Torah, afin den garder et den excuter les lois, comme il est crit (Devarim 5:1): Etudiez-les et appliquez-vous les suivre (Rachi, Torat Kohanim). Nous voyons donc que lessentiel de la pratique des commandements et de ltude de la Torah saccompagne defforts et de peines, et ne se fait pas dans la tranquillit et le confort. Le Or Hahayim explique le verset: Si vous vous conduisez selon Mes lois sur la base de ce que disent les Sages (Avoth IV:14; Chabath 147b; Tana DBey Eliyahou Rabah 14): Exilez-vous dans un lieu de Torah , cest--dire quil faut aller mme pied dun lieu lautre pour tudier la Torah. Le Talmud (Haguigah 5a) rapporte que tous les Sages allaient dun endroit lautre pour tudier, lun deux voyagea mme pendant un an, six mois aller et six mois retour, pour couter son matre pendant un jour. Si vous marchez selon Mes lois indique la recherche de la Torah, dun endroit lautre . En sexilant dans un lieu de Torah, on parvient la connaissance grce aux efforts investis, si bien que lorsquil faudra obir un commandement, il est certain quon laccomplira sur le champ, puisque lon a fait beaucoup defforts pour le comprendre. Malgr lexil, la connaissance de la Torah et la pratique des commandements augmentent. Nous pouvons ajouter aussi que lorsque lon prend la peine dtudier et de comprendre la loi, lorsque lon sy attache, on sattache larbre mme de la Vie, comme il est dit (Zohar I, 193a): Celui qui fait leffort dapprendre la Torah et sy attache, est attach larbre mme de la Vie (Michley 3:18), et celui qui est attach larbre de la Vie en ce monde y est attach aussi dans le monde Venir, et tous les Enfants dIsral sont attachs larbre de la Vie par leurs efforts pour connatre la Torah . Le Zohar nous enseigne que les efforts et lattachement la Torah assurent lhomme une place sur larbre de la Vie. Mais il faut savoir que larbre a des branches, des feuilles, une corce, un tronc, des racines, qui ensemble constituent larbre et en sont des parties intgrantes. Celui qui tudie de toutes ses forces - dit le Zohar - se renforce et en quelque endroit quil sattache larbre de la Vie, il est attach larbre tout entier, au corps tout entier, avec ses branches, son corce, etc. Afin de mriter la tranquillit dans lautre monde, dans le corps mme de larbre de la Vie, il nous faut nous occuper de Torah en ce monde, et cest ce qui nous attachera larbre de la vie dans lautre monde. Cela explique pourquoi Yaakov voulait sinstaller tranquillement. Pourquoi est-ce justement ce moment-l quil eut ce dsir? Est-ce quil en avait t empch jusque-l, et que maintenant seulement il en avait la possibilit! Yaakov ne dsirait pas tout simplement le confort et la tranquillit, mais quelque chose de plus profond. Il voulait annuler le dcret punissant dexil sa descendance, et cest pourquoi il dsirait sinstaller, justement, dans la terre des prgrinations de ses pres, dans la terre de Canaan, sy installer et pas seulement y habiter comme Yitshak, qui il est dit (Brchith 26:3): Habite dans ce pays , en tant que rsident tranger, et non comme citoyen. Yaakov voulait se fixer dans la terre de Canaan en permanence et investir tous ses efforts dans ltude de la Torah, ce qui aurait annul le dcret de lexil annonc Avraham dans la prophtie de lalliance entre les morceaux (ibid. 15:13): Sache que ta postrit sjournera dans une terre trangre o elle sera asservie et opprime pendant quatre cents ans , et aurait pargn aux Enfants dIsral toutes ces souffrances. Cest alors que la colre du Satan sveilla contre lui, car il voyait linstallation de Yaakov en terre de Canaan comme un danger. Lequel? Si Yaakov sinstalle en terre de Canaan, il y rgnrera toutes les tincelles de saintet, sans quaucun de ses enfants ne descende en Egypte, et cela parce que - le Satan le sait bien - Yaakov tait devenu trs puissant. Sil a maintenant la paix, sil est libr de tout soucis, il sadonnera, grce lapprofondissement de la Torah, la correction des tincelles de saintet afin de les lever et les restituer leur source originelle, sans quil soit ncessaire de descendre en Egypte, comme le

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disent les Sages (Kala 8): Ltude de la Torah annule la punition de lexil . Nous savons que les Enfants dIsral furent exils aprs la destruction du premier Temple pour avoir abandonn ltude de la Torah, comme le disent les Sages (Ndarim 81a): Pourquoi la terre fut-elle dtruite? Parce quils ont abandonn la Torah... Cest donc que la Torah de Yaakov, en Eretz Isral, aurait annul le dcret de lexil. Le Satan savait que Yaakov avait le pouvoir dannuler un dcret de D., comme le disent les Sages (Chabath 59b): Le Juste dcrte et D. accomplit son dcret , et (Moed Katan 15b; Baba Metsya 85a; Zohar I, 45b): D. dcrte un dcret et le Juste lannule . Cest pourquoi le Satan sen est pris Yaakov et a plaid devant D. pour quil nannule pas le dcret de lexil. Dans quel but? Quelles sont ses raisons? Selon largumentation du Satan, Yaakov navait ni le mrite de la persvrance, ni celui des errances vers les lieux de Torah, ni celui des efforts pour sattacher larbre de la Vie. Ltude de la Torah doit se faire dans la peine et non dans la tranquillit, et voil que Yaakov dsire annuler le dcret de lexil en sinstallant tranquillement, il est donc passible de lexil. De plus, la Torah ne sacquiert que par celui qui voyage pour la chercher, comme il est dit: Exilez-vous dans un lieu o il y a la Torah , et Yaakov dsire habiter en terre de Canaan en tant que rsident. Enfin, lessentiel du service de lhomme consiste dans les efforts quil fait pour sattacher larbre de la Vie dans le monde Venir, et sil soccupe de Torah, dans la tranquillit, en ce monde, il ne fait aucun effort (comme il est dit dans le Zohar). Comment sera-t-il attach larbre de la Vie dans lautre monde? Il manque Yaakov ces trois choses: il na ni le mrite des efforts, ni celui des dplacements, ni celui de lattachement larbre de la Vie dans le monde Venir. Mais cela ne suffit pas au Satan. Il renforce son plaidoyer par un argument supplmentaire en disant que Yaakov na pas honor ses parents pendant vingt-deux ans, et sans aucun doute il mrite den tre puni. On pourrait se demander comment Yaakov a pu dire Essav: Jai sjourn chez Laban (Brchith 32: 5), signifiant Jai pratiqu tous les commandements de la Torah (Midrach Hagadah ad. loc.), sil na pas pratiqu un des six cent treize commandements pendant son absence? Yaakov fit savoir Essav quil navait pas abandonn la Torah, mme en exil chez Laban, et D. a tenu compte de ses efforts dans ltude et lui a compt son tude comme la pratique elle-mme. Il dsirait effectivement de tout cur pratiquer toute la Torah, mais certaines circonstances indpendantes de sa volont len empchrent, puisquil fut chass de la maison (justement cause dEssav qui voulait le tuer). Sans aucun doute, D. considre une bonne pense comme lacte lui-mme (Kidouchin 40a; Yrouchalmi Pah 1:1), et de plus, les Sages disent (Brachoth 6a): Si quelquun pense accomplir un commandement mais quil en est empch contre son gr, D. considre quil la accompli . Et donc, cest comme si Yaakov avait effectivement pratiqu tous les commandements. Mais maintenant que Yaakov sinstalle dans le pays des prgrinations de ses pres, au lieu de se conduire comme son pre en rsident tranger , il soppose son pre, il ne veut pas rsider mais sinstaller dans la tranquillit afin dannuler le dcret de lexil. Sil y avait une possibilit dannuler ce dcret, pourquoi Avraham et Yitshak ne lont-ils pas annul? Cest que ce dcret doit sans aucun doute se raliser, et donc - argue le Satan devant D. contre Yaakov - cest la preuve que Yaakov soppose son pre, quil ne le respecte pas maintenant non plus. Au contraire, il se donne de limportance, commettant la faute denseigner la loi en prsence de son pre (qui est son matre), il se rebelle contre lui, il est fautif (Yirouvin 63a), ses annes doivent tre abrges (Tanhouma Tetsav 9) et il est passible de la peine de mort (Brachoth 31a; Vayikra Rabah 20:6). Rtrospectivement, toute la Torah quil a tudie chez Laban pendant les vingtdeux ans durant lesquels il fut spar de son pre (et qui lui sont compts comme sil avait honor ses parents) et tout ce quil a tudi chez Chem et Ever (Brchith Rabah 63:15), ne laide en rien, pas plus que son dsir de pratiquer ce commandement, sil a maintenant la possibilit de le faire, et ne le fait pas. Cela montre quil ne respecte pas son pre comme il le devrait et il est puni aussi pour les vingt-deux ans durant lesquels il est rest spar de lui. Pour toutes ces raisons le Satan sen prend lui justement maintenant. Le Satan accuse Yaakov. Il espre que si Yaakov et ses fils sont exils en Egypte, ils ne seront peut-tre pas capables de rgnrer les tincelles de saintet, et ils tomberont dans les cinquante degrs dimpuret, avec toutes les consquences que cela suppose. Il ny aurait pas de Torah en Isral, et nous, nos parents et nos enfants, serions rests les esclaves de Pharaon jusqu ce jour. Mais nous savons que le Satan na pas atteint son but, et cest justement en Egypte que les Enfants dIsral ont russi corriger les tincelles de

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saintet et les restituer leur source, la Rose Cleste, car D. na pas permis que nos anctres tombent dans le cinquantime degr dimpuret (Zohar II, 189b) et ils furent sauvs lorsquils atteignirent le quaranteneuvime degr (Zohar Hadach Yithro 39a) et ils sortirent mme dEgypte en grande pompe.

Yaakov et Yossef sefforcent doprer la correction de lexil


Il est vrai que Yaakov a dsir tout dabord sinstaller dans la tranquillit afin dannuler le dcret de lexil. Il aspirait une rsidence permanente, et non pas tre un rsident tranger comme ses pres, justement dans le pays des prgrinations de son pre (ce qui rpond la question 8) et il voulait vivre tranquillement bien que les Justes naient pas de repos en ce monde, car son intention tait dannuler le dcret de lexil (et cela rpond la deuxime question). Cest alors que le Satan sen est pris lui, disant quil ne mritait pas de vivre en paix, et Yaakov fut puni pour les deux raisons indiques dans le verset: pour avoir voulu sinstaller tranquillement en ce monde - et selon largumentation du Satan cest l, chose impossible, puisque lessentiel dans ltude de la Torah est la peine quon se donne et il est interdit de rechercher la tranquillit. Mais pour cette seule raison, il est possible que les Enfants dIsral naient pas t exils de leur pays. A cela sajoute une autre raison indique dans la fin du verset: dans le pays des prgrinations de ses pres . Yaakov na pas honor ses parents et au lieu dtre comme son pre un tranger de passage, il dcide de devenir un rsident permanent, au mpris de la volont de son pre. Il mrite donc, rtrospectivement, dtre puni pour navoir pas honor ses parents pendant ses vingt-deux ans dabsence. Les deux raisons sajoutent lune lautre, et Yaakov fut priv de repos pour navoir pas honor ses parents. Il est possible que si Yaakov avait tent dannuler le dcret aprs la mort de son pre, le Satan naurait pas pu sen prendre lui. Mais pour avoir tent dannuler le dcret du vivant de son pre, il a fourni un argument au Satan, car il ne convient pas que Yaakov se conduise comme un rsident en terre de Canaan, alors quYitshak y a vcu en tranger jusquau jour de sa mort. Cest ce qui attira sur Yaakov la punition. Nous pouvons prsent rpondre la question pose par lAdmor de Satmar: Pourquoi le malheur de Yossef la-t-il atteint, si D. exauce la volont de ses fidles et que le seul but de Yaakov tait de servir D. honorablement? Pourquoi est-il dit Roguezo, son malheur, un terme qui indique la colre, et non Tsaaro, sa peine? Sur la base de ce que nous avons avanc, lessentiel de laccusation du Satan provenait de ce quil voulait que les Enfants dIsral descendent en exil, car il est possible que l-bas, ils ne russissent pas corriger les tincelles de saintet. Et donc le Satan prtend quil nest pas permis de sinstaller tranquillement, quil faut tudier dans la peine, et que la Torah ne sacquiert que par celui qui se meurt pour elle (Brachoth 63b; Chabath 83b), dans la souffrance (Brachoth 5a), et avec de grands efforts (ibid. 63b). Et la Torah ne sacquiert que par celui qui va sa recherche, et Yaakov veut sinstaller tranquillement... ce qui est une faute, mme si lintention de Yaakov tait de servir D. et non pas de vivre confortablement en ce monde. Selon le plaidoyer du Satan: les Justes ne se contentent pas de ce qui leur est rserv dans le monde Venir quils veulent aussi la tranquillit en ce monde? (ce qui rpond la question 3, concernant la longueur du plaidoyer du Satan). Cela nous enseigne combien il faut tre attentif tant aux commandements faciles pratiquer qu ceux qui sont difficiles, (Avoth II:1; Tanhouma Ekev 1), car nul ne sait quelle est la rcompense de chaque commandement. Parfois, un commandement pratiqu uniquement pour obir D., peut attirer sur soi la colre de la Justice si on la ddaign une seule fois sans stre repenti de ce ddain. Chacun doit peser ses actes et ses gestes, car la fin de toute chose est dans la pense qui la motive . Yaakov dsirait la tranquillit pour slever et se sanctifier, afin que toutes ses actions soient limpides et pures, et que le monde soit bni de prosprit. Il voulait corriger la faute dAdam et restituer toutes les tincelles de saintet leur source, et il avait combattu et vaincu lange dEssav (Houlin 92a). De plus, il est dit de lui quil est le plus parfait des Patriarches (Brchith Rabah 76:1), son visage est grav sur le Trne de Gloire (Tikouney HaZohar 22, 65b; Zohar I, 168a), il est lui-mme appel un trne (Zohar I, 97a). Du fait de sa grandeur, de ses vertus, et de son attachement D., il aurait pu corriger tout ce qui devait ltre, et le dcret de lexil pour ses enfants aurait t annul. Ses enfants lauraient mme aid dans

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cette tche car tous sont Justes et sans dfaut (Chabath 146a; Chemoth Rabah 1:1), et Yaakov aurait pu corriger tout ce qui le ncessitait. Bien quil ait quitt Ber Cheva contre son gr cause de son frre, et bien quil ait continu soccuper de Torah ce qui aurait pu le protger et lexcuser de navoir pas rempli son obligation dhonorer ses parents, la colre du Satan sveilla contre lui pour avoir dsir annuler la sentence de lexil, et il fut frapp justement du malheur de Yossef et non dun autre de ses fils (ce qui est notre septime question). Cest que Yaakov comptait tout spcialement sur son fils Yossef, qui est appel Juste, fondement du monde (Zohar I, 59b) pour avoir respect le signe de lAlliance. De plus, Yossef est celui qui doit vaincre Essav (Pessikta Zouta et Rachi Vayetz 30:25; Zohar I, 158a), et Yaakov espre justement que Yossef laidera annuler lexil, anticiper la rdemption et amener le monde se soumettre au rgne de D. Mais il a fait lerreur de ne pas attendre la mort de son pre et de commencer faire cette correction du vivant dYitshak. Il est dit: Yaakov sinstalla dans la terre des prgrinations de ses pres, le pays de Canaan , pour indiquer que le pays de Canaan navait pas encore atteint lapoge de ses fautes qui causerait son extinction, et ne pouvait pas encore servir de rsidence permanente pour Yaakov, et cest la raison pour laquelle Yitshak sy conduisait comme un tranger et un rsident de passage. Mais Yaakov a apparemment ddaign lhonneur de son pre en ce quil dsirait sinstaller tranquillement pour soccuper de la correction du monde... alors que le temps de cette tche ntait pas encore arriv. Cest pour toutes ces raisons que le Satan sen est pris lui. Pour avoir compt sur Yossef pour laider annuler le dcret de lexil, son projet fut annul, et le dcret sest ralis justement en Yossef qui fut spar de son pre pendant vingt-deux ans, de mme quil stait lui-mme spar dYitshak pendant vingt-deux ans, une priode bien plus longue que le temps fix par Rivka. Dornavant, ils ne pourront pas corriger ensemble la faute dAdam en terre de Canaan, et cest justement Yossef qui eut des songes et qui descendit en Egypte, et non un autre de ses frres. Comme nous lavons postul dans notre quatrime question, il ne sagit pas du malheur de Yossef mais dun bienfait, car sa descente en Egypte tait ncessaire afin de prparer la venue des Enfants dIsral, honorablement, et non honteusement, enchans dans des fers. Il est dit de Yossef (Brchith Rabah 84:7; Zohar I, 189b) quil avait une conduite enfantine, il se frottait les yeux, sautillait, sarrangeait les cheveux... Comment comprendre que ce Juste se livrait de telles vanits, surtout en prsence de son pre et de son grand-pre? Et comment comprendre quils ne laient pas rprimand? Mais ce que nous avons dit, lexplique. Yaakov voulait que Yossef laide annuler le dcret de lexil parce que Yossef, qui est appel le Juste, est celui qui doit vaincre Essav. Cela nous permet de comprendre que Yossef na pas voulu sembellir gratuitement, mais pour conqurir lange dEssav et le faire tomber. Le mot B-Saaro, par ses cheveux, est compos des mmes lettres que le mot B-Risho, par sa mchancet, pour faire allusion au fait quil ne voulait pas sembellir pour plaire mais pour surmonter son mauvais penchant et faire tomber lange dEssav. Les lettres du mot B-Saaro, forment aussi les mots Rav Essav, pour indiquer que Yossef sest par de bonnes actions afin de pouvoir vaincre lange dEssav. Cela explique pourquoi il se conduisait de la sorte en prsence de son pre et de son grand-pre, et pourquoi ils ne lui firent aucun reproche: ils connaissaient ses intentions. Nous voyons quen Egypte aussi, dans la maison de Poutiphar, Yossef sarrangeait les cheveux... (Brchith Rabah 87:3), et D. lui dit: Je vais envoyer contre toi un ours, va te mesurer lui . Pour stre embelli, il fut puni en tant tent par la femme de Poutiphar, car D. lui dit (Tanhouma Vayechev 8): Ton pre porte le deuil cause de toi, et toi tu bois, tu manges et tu tarranges les cheveux! Je vais tenvoyer un ours... Est-ce que Yossef cherchait plaire, ou bien cherchait-il dominer son penchant, comme il lavait fait en prsence de son pre et de son grand-pre, au pays de Canaan? En fait, le temps de la correction et de la rdemption ntait pas encore arriv, bien que Yossef ait pens le contraire. Yaakov fut puni justement travers Yossef, car cest lui qui sarrangeait les cheveux et qui voulait anticiper le temps de la rdemption, dj en terre de Canaan. Yaakov aurait d le lui reprocher, puisque le temps de la correction de la faute dAdam ntait pas encore arriv, seul lexil accomplira cette correction.

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Pour navoir pas rprimand Yossef, Yaakov fut frapp par ce malheur, car le Satan a invoqu contre lui tous les arguments cits plus haut. Bien que la descente de Yossef en Egypte, une descente honorable et respectable, ait t ncessaire pour prparer la venue de ses frres, ctait un malheur et une punition pour Yaakov qui navait pas rprimand son fils. Le fait mme que Yossef soit descendu en Egypte est la preuve que le temps de la rdemption ntait pas encore arriv et quil ntait pas donn dannuler le dcret de lexil. Mais une fois en Egypte, Yossef y a prpar la venue de Yaakov et de ses enfants, car seul lexil devait permettre doprer la correction voulue, qui ne se ferait pas en Erets Isral. Aprs avoir t puni et exil en Egypte pour avoir voulu aider son pre prcipiter la venue de la rdemption avant son temps (en jouant avec les boucles de ses cheveux), pourquoi continue-t-il le faire en Egypte, tant donn quil savait alors que le temps de la rdemption ntait pas encore venu? Yossef savait que son pre tait en deuil et en peine cause de lui, et il aurait d comprendre que seul, sans Yaakov, il ne pouvait rien corriger. Mais Yossef pensait que justement en Egypte, dans ce pays dprav (Chemoth Rabah 1:22), il devait poursuivre dans sa voie lui, se boucler les cheveux, non pas pour plaire, mais pour surmonter le mauvais penchant et vaincre le mal. Et effectivement, il la vaincu! Il est certain quen voyant sa beaut, le mauvais penchant a tent de le faire faillir et de lattacher des plaisirs mondains. En effet, les Sages disent que les jeunes filles Egyptiennes se promenaient le long des murailles pour voir Yossef passer, et de l, elles jetaient des bagues en or en direction de son char dans lespoir quil lve les yeux vers elles (Pirkey DRabbi Elizer 39; Rachi Brchith 49:22). Mais cela nempchait pas Yossef de servir D. Il dominait les tentations comme un lion, et bien que tout le monde ait t heureux uniquement en le regardant, il aurait d choisir une autre faon de servir D. Pourquoi cherches-tu vaincre le mal de la sorte? Ton pre est dans la peine, pour ne tavoir pas rprimand lorsque tu tais chez lui, et ton comportement nest pas naturel aux yeux des gens . Cest ainsi que Yossef subit lpreuve de la femme de Poutiphar. Ce rcit nous enseigne quil est interdit de chercher faire avancer le temps de la rdemption, et que lexil permet de parfaire la correction ncessaire. La correction et la rdemption ne commencrent quaprs la descente des Enfants dIsral en Egypte, et les Sages disent que cest grce au mrite de Yaakov et de Yossef que les Enfants dIsral furent sauvs dEgypte (Bamidbar Rabah 13:19).

Les preuves et la crainte de D.


Yaakov demeura dans le pays des prgrinations de son pre, dans le pays de Canaan. Voici la descendance de Yaakov, Yossef g de dix-sept ans... (Brchith 37:1-2). Rachi rapporte le Midrach (Brchith Rabah 84:1): Yaakov voulut sinstaller tranquillement et cest alors quil fut atteint du malheur de Yossef... la rcompense qui est rserve aux Justes dans le monde Venir ne leur suffit-elle pas, pourquoi veulent-ils aussi vivre tranquillement en ce monde? Cest pourquoi il fut atteint du malheur de Yossef . Bien que nous ayons dj expliqu de diffrents points de vue le malheur qui atteint Yaakov, nous navons pas puis les questions qui se posent. 1. Est-il possible de croire que Yaakov voulait vivre tranquillement afin de jouir des plaisirs de ce monde et passer son temps agrablement? Yaakov est un homme intgre, assis dans les tentes (Brchith 25:27), les tentes de la Torah, o il tudie jour et nuit (Brchith Rabah 63:15), et sil dsire la tranquillit, cest sans aucun doute pour progresser dans le service de D. Il faut donc se demander pourquoi D. len empche? 2. Il faut comprendre la formulation du Midrach: La rcompense qui est rserve aux Justes dans le monde Venir ne leur suffit-elle pas, pourquoi veulent-ils aussi vivre tranquillement en ce monde? Yaakov demandait-il une rcompense quelconque pour que D. lempche de sinstaller dans la tranquillit en ce monde? Quel rapport y a-t-il entre la rcompense dans lautre monde et la tranquillit en ce monde? 3. Est-il vraiment interdit lhomme davoir un peu de tranquillit en ce monde? Est-ce le destin de lhomme de souffrir de grandes peines en ce monde, sans espoir de repos?

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4. Le Avodat HaLvi crit: Le principe de base est, comme le Ramban lcrit dans son livre HaEmouna VHabitahon, que malgr la promesse de D., Yaakov craignait davoir peut-tre commis une faute quelconque (Brachoth 4a) de navoir pas servi D. correctement. Chacun doit servir D. chaque instant et se rjouir de voir les bienfaits dont bnficie Isral. Si malheureusement ce nest pas le cas, il doit sassocier leurs peines, car quiconque sassocie aux souffrances de la communaut a le mrite de se rjouir de sa consolation (Taanith 11a) et il doit se conformer aux vertus divines dont il est dit (Thilim 91:15): Je suis avec lui dans la peine . Il faut toujours se mfier davoir faut et de navoir pas servi D. comme il convient. Yaakov avait constamment la crainte de navoir pas rempli son devoir. Cest le sens de il demeura dans la terre des prgrinations de son pre , cest--dire, toujours dans la crainte, car le mot Mguourei, lhabitation, a aussi le sens de crainte comme il est crit (Thilim 31:14): la terreur (Maguor) alentour . Il craignait de ne pas avoir servi D. comme il convient. Son pre aussi tait dou de cette qualit de crainte, comme il est dit: la crainte dYitshak (Brchith 31:42) car Yitshak servait D. avec crainte (voir Zohar III, 302a). 5. Enfin, nous devons comprendre que si la Torah dit: Telle est la descendance de Yaakov , il ne sagit pas seulement de Yossef... car Yossef nest pas le seul descendant de Yaakov, qui a donn naissance aux douze tribus. Il faut donc se demander pourquoi la Torah distingue Yossef entre tous et le met en valeur? Pour rpondre ces questions, citons tout dabord le Midrach (Brchith Rabah 87:4): Il arriva aprs ces faits, que la femme de son matre jeta les yeux sur Yossef (Brchith 39:7). Aprs ces faits (littralement: ces paroles ), indique que des penses quelconques ont prcd ces vnements. Les penses de qui? De Yossef, qui se disait: Lorsque jtais chez mon pre, il me donnait la meilleure portion et mes frres en taient jaloux, maintenant que je suis ici, javoue que je vis dans le confort. D. lui dit: Tu nas pas de soucis? Et bien, je vais tenvoyer lourse . Ou bien Yossef sest dit: Mon pre a t prouv, mon grandpre a t prouv, et je ne serai pas prouv? D. lui dit: Sur Ma vie! Je vais te faire passer une preuve encore plus difficile que les leurs (Voir ce qucrit Nahalat Elizer ce sujet.) Pour avoir reconnu devant D. quil vivait confortablement et sans preuve, Yossef fut prouv et subit des souffrances. Pourquoi? Le Ramhal crit (Messilat Ycharim, ch. 1): Lessentiel de lexistence de lhomme en ce monde est son obissance la volont de D. et son courage face aux preuves . Cest--dire que la raison dtre de lhomme en ce monde est de servir D. en surmontant les preuves. Les commentateurs (voir Hafetz Hayim sur la Torah) ont remarqu que le mot Nissayone, preuve, a un double sens. Outre le sens premier; D. met lhomme lpreuve pour savoir sil est intgre et appliqu dans le service de D. comme le dit David HaMelekh (Thilim 26:2): Eternel, mets-moi lpreuve, sonde mes reins et mon cur , ce mot a aussi le sens de Ness, une bannire, comme il est crit (Ichaya 62:10): Levez ltendard pour les nations . Cest que grce lpreuve, lhomme slve de plus en plus (les deux sens sont lis), et ce nest que grce aux preuves que lhomme est sauv de lemprise du mauvais penchant et ne se soumet qu D. Le Rabbin Isral Salanter crit ce sujet dans son livre Or Isral: La crainte de D. est ncessaire pour surmonter les preuves et cette crainte diminue la difficult de lpreuve. Lorsque lhomme est prouv, sa crainte de D. doit crotre et ltude des livres de morale laide . Il est interdit lhomme de sinstaller dans la tranquillit en ce monde, car la tranquillit conduit au repos, et le repos conduit lautosatisfaction et lorgueil dattribuer ce repos et cette scurit ses propres mrites. Chaque homme doit souhaiter: Que le pied de lorgueil ne matteigne point (Thilim 36:12). Et D. ne laisse donc pas lhomme jouir de la tranquillit, et au lieu du repos il affronte des preuves accompagnes de souffrances et de douleurs qui lattachent D. par la crainte. D. ne dsire pas que lhomme soit fier de lui-mme, et Il le purifie et le nettoie par les preuves. D. purifie les Justes en leur faisant savoir quen ce monde, ils ne peuvent sapprocher de Lui qu travers des preuves et des souffrances. Le mot Shalva, tranquillit, a la valeur numrique du mot Asham, culpabilit. En sinstallant dans la tranquillit, lhomme risque den arriver commettre des fautes - que ce soit en pense, en parole, ou par des actes indsirables. Cest ce qui est arriv Yossef qui, ayant remerci D. de lui avoir procur quelque repos en ce monde, a failli commettre le crime dadultre avec la femme de son matre. Sa tranquillit

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aurait pu le dvaluer et compromettre son sjour en Egypte, ce qui nous explique pourquoi Yossef fut mis lpreuve de cette faon. Sa tranquillit en fut la cause, et lpreuve a purifi son me. Nous pouvons dire aussi que Yossef avait une grande crainte de D., comme il le dit lui-mme (Brchith 42:18): Je crains D. . Il savait que les Patriarches ntaient parvenus leur haut niveau que parce quils avaient courageusement vaincu toutes les preuves quils subirent. Yossef aussi dsire atteindre de tels sommets, il veut servir D. dans la crainte et accrotre ce sentiment par lpreuve, puisque telle est la raison dtre de lhomme (comme lcrivent le Ramhal et le Rabbin Salanter), et donc il demande lui-mme tre mis lpreuve, en disant: mes parents furent prouvs et je ne le serais pas? Et D. lavertit et lui envoie une preuve encore plus difficile. Yaakov a dsir sinstaller dans la tranquillit, mais D. Lui-mme ne lui a pas permis le repos qui risquait de lamener fauter. Il jouira du repos dans lautre monde. Pour avoir vaincu les preuves de ce monde et son mauvais penchant, il parviendra la vie ternelle dans le monde Venir. Le but des preuves en ce monde (outre llvation qui conduit au monde Venir) est double. Dune part, lpreuve nous met en garde contre les fautes, mme les plus infimes, elle nous empche de nous reposer en ce monde et dacqurir des mauvaises habitudes, ce qui nous conduirait oublier notre dpendance de D. et avoir moins confiance en Lui. Dautre part, elle remplit notre cur de la crainte de D. qui augmente dans les preuves, ce qui nous permet datteindre la perfection dsire. Nous apprenons de Yaakov et de Yossef un principe fondamental (ce qui rpond toutes les questions poses ci-dessus). Yaakov na pas connu de repos dans sa vie, il a seulement eu le dsir de sinstaller dans la tranquillit, mais D. na pas ralis son dsir afin que son sentiment de crainte de D., hrit de son pre Yitshak, nen soit pas diminu. Il doit continuer grandir dans la peur et la crainte de D. et il lui est interdit de vivre dans le repos (ce qui rpond aux questions 1 et 4). Le sort de lhomme est dendurer des peines en ce monde, et de supporter bien des souffrances, afin daugmenter sa crainte de D. et ne pas prendre le risque de fauter (cest la rponse la question 3). Il faut servir D. comme Yaakov, et craindre constamment davoir commis quelque faute, et cest pourquoi D. administre le remde avant mme la maladie (Mguilah 13b). Il fit en sorte que Yaakov Le serve avec crainte et soutienne les preuves, en lui faisant savoir que sil surmontait les preuves il parviendrait la vie ternelle et la rcompense qui lui tait rserve. Il lui est interdit de sinstaller dans la tranquillit en ce monde (ce qui rpond la question 2), afin de parvenir la perfection voulue. Cest pourquoi il est crit: Telle est la descendance de Yaakov, Yossef... sans mentionner les autres tribus (ce qui rpond la question 5), car lessentiel des engendrements des Justes sont leurs bonnes actions (Rachi Brchith 6:9), comme il est dit (Yalkout Noah 48): Les fruits des Justes sont les commandements quils pratiquent et leurs bonnes actions . De mme que D. na pas laiss Yaakov vivre tranquillement en ce monde pour ne pas nuire sa crainte de D. et pour lui permettre de continuer progresser, de mme son fils Yossef, ds quil eut un instant de repos, fut mis lpreuve sur le champ. Tout ce qui est arriv Yaakov est arriv Yossef dit le Midrach (Brchith Rabah 84:6): de mme que celui-ci dsirait un peu de repos et fut atteint par tant de malheurs, de mme celui-l fut reconnaissant de connatre un peu de rpit et fut atteint de souffrances et de peines - Yaakov comme Yossef.

Les preuves et la crainte de D. chez Yaakov En approfondissant ces ides, nous dcouvrons des trsors. Les Sages disent (Brchith Rabah 76:9) que pour avoir cach Dina aux yeux dEssav, Yaakov fut puni par lenlvement de sa fille. Ce qui montre que Yaakov sest caus lui-mme ces amres souffrances. Yaakov savait que le repos lui amnerait des preuves et des souffrances, et justement il recherchait le repos afin dtre prouv dans sa crainte de D. Yossef aussi le savait puisquil dit expressment: Mon pre a t prouv, mon grand-pre a t prouv... Il savait que les preuves allaient purifier son me, et cest pourquoi il remercia D. de lui avoir donn loccasion dtre prouv pour prouver quil tait capable de surmonter lpreuve et dviter de commettre une faute quelconque afin de se perfectionner dans le service de D. Combien les paroles de nos Sages sont prcieuses. Ils disent (Brachoth 64a): Les gens qui soccupent de Torah nont de repos ni en ce monde ni dans lautre comme il est dit (Thilim 84:8): Ils savancent avec une force toujours grandissante, ils contemplent lEternel Sion . Nous avons dj expliqu que les

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Justes soccupent dans lautre monde de ce qui les a occups en ce monde, ils sy font les avocats dIsral et Isral est alors bni dune large prosprit et de russite. Cest pourquoi ils ne connaissent pas le repos dans lautre monde. Mais D. ne leur permet pas le repos en ce monde. Si le but de lhomme, et surtout du Juste, est de servir D. dans les souffrances afin daugmenter sa crainte de D., il lui est interdit de jouir du repos en ce monde. Et maintenant Isral, quest-ce que D. te rclame, si ce nest de Le craindre... (Devarim 10:12). Lhomme doit, lui aussi, prendre le remde avant de tomber malade, et sachant que son sort est de subir des preuves, il doit sarmer de la crainte de D. et les surmonter. Inversement, comment un homme qui ne craint pas le Ciel soutiendrait-il les preuves? Mme si dans son cur il a peur et si lpreuve est difficile, il est peu probable quil ait la capacit de la surmonter. Il faut donc que lhomme vive toute sa vie dans la crainte de D., et cest alors que les preuves laident slever et se perfectionner dans le service de D. Avraham fut soumis dix preuves et les a toutes surmontes (Avoth 5:3). Aprs avoir surmont la dernire preuve, celle du sacrifice dYitshak, la plus difficile de toutes, il est crit (Brchith 22:12): Maintenant je sais que tu crains D. . Cest--dire, grce la crainte de D., tu as pu surmonter cette preuve et toutes les autres, et maintenant que tu as surmont lpreuve la plus difficile et que tu as vaincu, Je sais que la crainte de D. est profonde en toi. Finalement, il nous reste encore une question, comment lhomme peut-il effectivement parvenir la vraie crainte de D., tellement ncessaire pour vaincre les preuves quil devra affronter? Le Mikdach Mat, citant le Dreh Moch, nous offre une rponse: D. fait taire tous les arguments du Satan contre Isral, et dans Sa grande misricorde Il dit: que laccusateur se taise, que lavocat de la dfense prenne la parole! Mais si laccusation porte sur un manque de crainte de D. de la part dIsral, ou un manque de respect envers les maisons de prires, ces sanctuaires en miniature (o les gens tiennent des conversations futiles et se conduisent avec lgret), D. fait taire les arguments de la dfense et donne immdiatement au destructeur le droit de dtruire par la peste, Dvr, qui peut se lire Davar la parole. Car ce sont les paroles vides prononces dans les maisons de prires et les maisons dtude qui crent les anges destructeurs, qui anantissent lhomme comme la peste lanantit . La synagogue et la maison dtude, qui sappellent des temples en miniature (Mguilah 29a) sont des lieux privilgis o lon peut ressentir la crainte de D. comme il est crit: Jai t pour eux un petit sanctuaire (Yhezkel 11:16). Il faut savoir que l, lorsque dix hommes sont runis, la Prsence de D. est la plus perceptible (Sanhdrin 39a; voir aussi Zohar I 80a; III 126a). Celui qui comprend que le rgne de D. stend sur tout et que Sa gloire se trouve partout, surtout dans la synagogue, sait quil ne peut pas Lui chapper. Comment ne serait-il pas rempli de crainte et de honte en bavardant dans un lieu saint? La punition de celui qui prononce des paroles vaines dans une synagogue est lourde (voir Zohar II, 131b). Lorsque le cur de lhomme est pntr de cette crainte et que son me est pure, il sait ce quil doit faire. Il sait quil doit se conduire correctement en tout lieu, surtout dans une synagogue qui est sanctifie par la Prsence Divine, et il ne pourra pas se permettre de converser lheure de la prire, face D. Serait-il insensible ce point? Lhomme lui-mme est un petit sanctuaire, comme il est crit Faites-Moi un sanctuaire que Je rside parmi vous (Chemoth 25:8), au fond du cur de chacun de vous. Il est possible de dire que tel est le sens du verset: Maintenant, Isral, quest-ce que lEternel ton D. te demande, si ce nest de Le craindre , cest--dire que D. exige quelque chose qui est en toi, qui fait partie de toi, la partie divine que tu portes en toi. Il te demande de Le craindre, de sentir chaque instant et tout moment Sa prsence, et alors la crainte sera plus vive, et tu seras capable de surmonter toutes les preuves, tous les jours de ta vie. Nous pouvons maintenant expliquer la question du Talmud (Brachoth 33b): Est-ce que la crainte de D. est une chose tellement simple? Au contraire, cest une grande chose qui permet de surmonter toutes les preuves! Et le Talmud explique: Pour Moch, cest une chose simple . Mais nous, gens simples, nous devons renforcer notre crainte de D. Mais cela ne suffit pas. Il faut sentir la ralit de D. en tout lieu et tout moment, surtout dans le sanctuaire en miniature , comme il est dit: Jai toujours devant mes yeux la Prsence de D. (Thilim

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16:8). Cest en ressentant la Prsence de D. quon en vient Le craindre. Lorsque lhomme ralise que le Saint, bni soit-Il, dont la Gloire remplit le monde, se tient au-dessus de lui et voit tout ce quil fait, il est certain quil se remplira de crainte et de soumission lgard de D. (Kitsour Choulhan Aroukh 1:1). Cest ce qui est crit (Yrmia 23:24): Quelquun peut-il se cacher dans un lieu occulte sans que Je le voie? dit lEternel. Est-ce que Je ne remplis pas le ciel et la terre? La crainte de D. est un commandement de la Torah (Sfer Hahinouh 432), et nous empche de fauter, nous soutenant et nous permettant de vaincre toutes les preuves. Cest une leon de conduite pour chacun. Si notre cur est rempli de la crainte de D., si nous ressentons toujours Sa prsence planer sur nous, si nous sommes prts accomplir Sa volont, notre crainte ira croissant et se renforant. Lhomme doit savoir que ce monde est fait de multiples preuves dont le but est de le renforcer et de llever (Zohar I, 140a-b), afin de lui procurer tous les bienfaits. Il faut accepter tout ce qui arrive avec amour et avec joie, et se fortifier dans la crainte de D. pour Le servir avec joie et sincrit. Amen. Quelle est la conduite tenir? Lpreuve et la crainte de D. sont insparablement lies lune lautre, mais lessentiel de la crainte de D. se ressent dans les synagogues et les maisons dtude. Il est interdit dy avoir des conversations futiles et de sy conduire avec lgret. Il faut en respecter la saintet et ne pas imiter ceux qui ddaignent ce sanctuaire en miniature . Mme dans les synagogues, les preuves sont nombreuses et il faut les surmonter, ce qui permet de slever dans le service de D., dans le sens o il est dit: Levez la bannire sur les nations.

Ltude de la Torah en exil


Yaakov demeura dans le pays des prgrinations de son pre, dans le pays de Canaan (Brchith 37: 1). Rachi rapporte le Midrach (Brchith Rabah 84:1): Yaakov dsirait sinstaller dans la tranquillit, cest alors quil fut atteint par le malheur de Yossef . 1. Il est difficile de croire que Yaakov ait pu faire lerreur de vouloir vivre dans la tranquillit. Car il est dit de Yaakov quil est un homme intgre, assis dans les tentes (Brchith 25:27), cest--dire dans les maisons dtude de Chem et Ever (Brchith Rabah 63:15). Le mot Tam, intgre, est form des mmes lettres que le mot Mth, mort dans le sens de peine, et il est dit (Brachoth 63b; Chabath 83b): Seul celui qui peine pour apprendre la Torah en retient les enseignements . Et si Yaakov sest mis mort dans la maison dtude, sans se donner de repos, comment est-il possible de dire quil recherchait la tranquillit, et pourquoi serait-il frapp dun tel malheur et dune telle punition? Dautant plus que les Sages disent de lui (Yoma 28b): Yaakov sest fait vieux et se trouvait dans la maison dtude , cest donc que jusqu un ge avanc, il na cess dtudier la Loi avec dvotion. Comment peut-on dire de lui quil aspirait la tranquillit? 2. Il est possible de croire que Yaakov dsirait la tranquillit afin de se consacrer entirement ltude, et sil en est ainsi, pourquoi serait-il puni pour avoir voulu tudier dans le calme, libre de tout souci? Ltude de la Torah consiste en deux choses: dune part leffort dans ltude, comme il est crit (Vayikra 26:3): Si vous suivez Mes Lois : les Sages dduisent quil sagit de leffort dans ltude (Torat Kohanim ad. loc.), dautre part, la poursuite de ltude en exil, comme le disent les Sages (Avoth 4:14; Chabath 147b; Tana DBey Eliyahou Rabah 14): Exilez-vous dans un lieu de Torah . Celui qui sexile afin dtudier ailleurs, montre combien la Torah lui est chre, puisquil a pris la peine de venir jusque-l pour tudier. Effectivement, la plupart des tudiants sexilent afin dtudier, et ils en voient les rsultats car ils retiennent ce quils ont acquis dans la peine. Yaakov a faut en recherchant ce moment la tranquillit, car sa vie durant, il stait exil pour tudier dans les tentes de Chem et Ever. Concernant le verset (Brchith 33:18): Yaakov arriva intgre dans la ville de Chehem... les Sages commentent (Chabath 33b; Brchith Rabah 79:5): Indemne dans son corps, dans ses biens et dans sa Torah , ce qui montre quil sexila dans un lieu de Torah afin de parfaire ses vertus et de progresser. Et voil quil dsire sinstaller tranquillement dans le pays des prgrinations de son pre, et tudier sur place la Torah, dans le repos et la saintet! Quelquun comme Yaakov doit tre

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un modle de conduite pour ses enfants et pour tous ceux qui tudient la Torah. En fait, Yaakov est appel le plus parfait des Patriarches parce quil avait acquis la Torah dans la peine et quil stait retir dans un lieu de Torah. La volont de Yaakov de sinstaller tranquillement est une erreur, car ses descendants vont vouloir eux aussi sinstaller et tudier dans le confort, et alors la priorit ne sera plus la Torah. Mme si Yaakov lui-mme navait pas besoin de sexiler car il savait dominer son mauvais penchant et ainsi il nen serait pas venu abandonner la voie de la Torah, ses enfants, ses descendants et tout le peuple juif rechercheront la tranquillit et ne feront pas les efforts ncessaires pour adhrer la Torah. Telle nest pas la voie de la Torah, elle ne sacquiert pas dans le confort mais par leffort. Il faut manger du pain avec du sel, boire de leau avec mesure, coucher sur la dure, accepter une vie de privations sil le faut, afin de pouvoir sadonner ltude de la Torah (Avoth 6:4). Yossef fut exil de la maison de son pre pendant le mme nombre dannes que Yaakov lui-mme avait t absent, contre son gr, de la maison de son pre (Mguilah 17a). Cest justement travers Yossef quil fut puni, car cest lui que Yaakov avait transmis lessentiel de sa sagesse (Brchith Rabah 84:8), et tout ce qui arriva Yaakov arriva aussi Yossef (Bamidbar Rabah 14:16). Yossef fut exil afin de raliser la Torah justement en exil, o il fut rudement prouv. Yossef surmonta les preuves, et il parvint une grande lvation, comme le disent les Sages plusieurs reprises. Citons-en quelques unes: Yossef eut le mrite de sanctifier secrtement le Nom de D. en exil, et une des lettres du Nom de D. fut ajoute son nom (Sotah 10:36; Mehilta Bo 12) comme il est crit: Cest un tmoignage quil tablit pour Yossef en Egypte (o Yossef est crit Yehossef) (Thilim 81:6), Yossef expose au grand jour les fautes des mchants, car si quelquun voulait plaider devant le Tribunal Cleste: jtais troubl par les tentations, jtais trop beau... il lui sera rpondu: tais-tu plus troubl et plus beau que Yossef? (Yoma 35b). La grandeur de Yossef est prouve par le fait que Moch transporta personnellement ses ossements et soccupa de son enterrement (Sotah 9b). Il est dit par ailleurs que les douze tribus auraient pu natre de lui (Sotah 36b) et que les descendants dEssav ne tomberont quentre les mains des descendants de Yossef (Baba Bathra 123b), de plus il a observ le Chabath avant que D. ait ordonn ce commandement (Brchith Rabah 92:4; Bamidbar Rabah 14:9) comme il est crit (Brchith 39:11): Il arriva en ce jour quil tait venu la maison faire sa besogne , or si ce jour tait Chabath, quelle besogne avait-il faire? Cest qu il est all la maison pour rviser ce que son pre lui avait appris (Yalkout Chimoni Vayechev 146). Pour avoir domin la tentation, il acquit toutes les perfections (Yalkout Chimoni Thilim 817). Comment a-t-il russi? Il stait exil dans un lieu de Torah o il tudiait jour et nuit, il sefforait de connatre les lois de la Torah afin de les pratiquer, et il eut le mrite dtre imit par toutes les gnrations futures. Lorsque lon se trouve en bonne compagnie on est, par la force des choses, entran se conduire correctement et avec droiture. La vraie mise lpreuve a lieu lorsque lon est loin dun environnement correct et sans soutien contre les tentations. Dans un tel cas, si lon russit suivre les voies de la Torah, on slve aux plus hauts degrs et lon jouit dune grande prosprit. Lexil a donc deux avantages, celui daccentuer limportance de ltude de la Torah puisquon sest exil pour tudier, et en exil lhomme prend lhabitude de surmonter de lui-mme son mauvais penchant puisquil ny a personne pour laider le faire. L, il sefforce de mettre en pratique tout ce quil a appris dans la maison de son pre ou la Ychivah. Sil pratique les commandements en exil et se garde de cder aux tentations (comme Yossef qui na pratiqu ce quil avait appris de son pre quaprs avoir quitt le foyer), il fait ses preuves. Cest aussi la raison pour laquelle Yaakov ne fut pas puni dans son corps ou dans ses biens pour avoir voulu tudier dans la tranquillit, mais par le fait que Yossef fut exil en Egypte, car Yaakov aurait d vouloir que ses fils sexilent dans un lieu de Torah o ils pourraient perfectionner leurs vertus, et non pas rester la maison o ils ne pourront le faire comme il convient. Nous pouvons prsent expliquer ce que disent les Sages (Brachoth 5a): Si quelquun se voit assailli par des souffrances, quil rvise ses actes, sil les a rviss et na pas trouv de cause ses souffrances, quil les attribue labandon de la Torah . Cest que toutes les souffrances viennent de ce que lon abandonne la Torah. Un tel abandon cause la diphtrie dans le monde et la mort des jeunes enfants (Chabath 32b,

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33b). Lorsque lon est atteint de souffrances, il faut tout dabord vrifier si lon na pas abandonn la voie de la Torah. Si lon a vrifi ses actes et constat que lon na pas abandonn la Torah, il ny a pas lieu dattribuer ces souffrances un abandon de la Torah . Dans ce cas, les souffrances ne sont causes ni par les fautes commises puisquon sest conduit correctement, ni par un manque dassiduit dans ltude puisque lon tudie, mais parce que lon ne fait pas assez defforts, que lon ne sest pas exil dans un lieu de Torah, et cest en cela que lon a abandonn la Torah. Lorsque Yaakov fut frapp par le malheur de Yossef et bien dautres souffrances (Tanhouma Miketz 10), il passa en revue ses actes et il put constater quil tait rest entier dans son corps, dans ses biens et dans sa Torah. Le malheur de Yossef la frapp parce quil ne sest pas exil dans un lieu de Torah et na pas envoy ses enfants se perfectionner, et cest pourquoi Yossef fut exil de la maison de son pre. Si lhomme ne sexile pas de lui-mme vers un lieu de Torah, les circonstances lamneront sexiler, car dfaut dexil il en viendrait abandonner la Torah, D. nous en prserve. Nous pouvons ajouter que du temps des Patriarches, les tincelles de saintet rendues impures par Adam navaient pas encore t rgnres et ctait la tche des Patriarches doprer cette correction. Il fallait donc que Yaakov descende en Egypte afin de corriger ces tincelles de saintet et de les restituer leur origine suprieure (Or Hahayim Brchith 49:9, entre autres). Si Yaakov tait rest en terre de Canaan et avait tudi dans la tranquillit, ces tincelles de saintet nauraient pas t rassembles, elles seraient restes parpilles en Egypte. Ce nest quaprs les avoir corriges, aprs avoir chass de ce monde le rgne du mal, que Yaakov aurait pu sinstaller dans la tranquillit. Il restait en Egypte de ces tincelles, et Yossef devait prcder Yaakov en Egypte afin de commencer prparer cette uvre. Ce nest quensuite que Yaakov et toute sa famille descendront en Egypte pour poursuivre le travail de correction des tincelles de saintet, comme il est dit (Zohar II, 189b): Isral tait en Egypte comme une rose parmi les ronces, pour fleurir et faire fleurir les tincelles, les jets de fleurs, et les restituer leur source . Ce nest que par lexil, avec toutes les difficults de se trouver dans un pays qui nest pas le sien, que lon peut affiner ses qualits et parvenir la perfection. Comment? Uniquement en sexilant vers un lieu o lon nest pas connu, et l, slever dans lacquisition de la Torah, de quarante-huit faons (Avoth VI:5; Kala 8), tudier la Torah dans la souffrance, et ainsi se corriger et amener le monde entier se soumettre la souverainet de D. Amen.

La tranquillit et loisivet empchent ltude de la Torah


Yaakov dsirait sinstaller dans la tranquillit, lorsquil fut atteint du malheur de Yossef... (Brchith Rabah 84:1). Yaakov dsirait-il vraiment la tranquillit en ce monde, un monde qui ne lui appartenait pas puisquil avait partag les mondes avec son frre Essav (Tana DBey Eliyahou Zouta 19). Comment peut-il vouloir sinstaller dans la tranquillit en ce monde? Et pourquoi le malheur atteint-il Yossef et non pas un autre de ses enfants? Cest que Yaakov ne dsirait pas la tranquillit pour en jouir, lui qui symbolise la souffrance dans ltude. Il voulait allger pour ses enfants le fardeau de lexil. Mais D. ne voulait pas que Yaakov sinstalle dans la tranquillit, car dans ce cas, ses enfants risquaient de saffaiblir, dabandonner ltude et doublier la Torah. Le mot Vaychv, il sinstalla, peut se dcomposer en vay - chev, et sexpliquer ainsi: pour avoir seulement aspir sinstaller dans la tranquillit (Chv), Yaakov incite les gnrations futures rechercher le confort, ce qui a des consquences nfastes (Vay) car la Torah sacquiert dans la souffrance. Et donc, le malheur de Yossef le saisit, justement lui, comme son nom lindique: Yossef a le sens de qui ajoute - accrot (Taanith 31a): il faut faire des efforts supplmentaires pour ltude de la Torah, sans prendre de repos, cest la seule chose qui peut corriger lexil. Le Michpat Tsdek confirme nos thses. Il rapporte les paroles merveilleuses du Zohar (III, 66a): Si les Enfants dIsral savaient pourquoi D. les rprimande plus que tout autre peuple, ils sauraient que D. a renonc ce qui Lui revient... Et il explique: D. cra des lgions danges pour Le servir. LorsquIl cra le peuple juif, Il le cra sur le modle de lAssemble Cleste (Zohar II, 169b; III 66a), et Il fit en sorte que tout ce qui advient dans le monde dpende des Juifs. Lorsque Isral abandonne la Torah et le

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service de D., les anges aussi se mettent en chmage, car tout dpend des actes des hommes. Lorsque Isral abandonne la voie de la Torah et ne sert plus D., la cour cleste cesse de remplir la volont de D., comme il est dit aussi (Zohar III, 4b): Lorsque Isral ne se conduit pas avec perfection en ce monde, le Nom de D. nest pas complet dans le Ciel. Et alors D. dit: Si vous saviez que vos actes empchent toutes les nombreuses lgions de Me servir, vous sauriez aussi que vous ne mritez pas de continuer vivre en ce monde, pas mme une heure . Cest grce la Torah de Yaakov - qui est la tte du Char Cleste (Brchith Rabah 82:7), dont le portrait est grav sur le Trne divin (Pessikta Zouta Vayets 28:13), et qui est lui-mme un trne (Zohar I, 97a), dont D. est si fier (Ichaya 49:3), qui est le fondement de la Splendeur (Zohar III, 302a) - que lon glorifie D. Si Yaakov aspire la tranquillit, ne serait-ce quen pense (mme dans lintention de se consacrer la Torah), il commet une faute qui se transmet tous ses descendants. Sur cette base, jai voulu expliquer lexpression: La voix est la voix de Yaakov (Brchith 27:22). Pourquoi le mot voix est-il rpt deux fois? Cest que lorsquon entend en ce monde la voix de la Torah prononce par les Enfants dIsral, la voix de Yaakov se fait entendre aussi dans les Cieux. Cest vers lui que se tournent toutes les lgions des anges. Ils savent que la voix de la Torah se fait aussi entendre dans le monde den bas et que les hommes servent D., comme il est dit (Sifri Bracha 33:5): Lorsque Isral est uni dans ce monde pour servir D., le Nom de D. est lou dans le monde cleste . Lorsque la voix de la Torah se fait entendre, les mains dEssav ne dominent pas (Brchith Rabah 65:20), et aucun peuple ne peut vaincre Isral lorsquil suit les voies de la Torah (Ktouboth 66b). Sinon, il ne peut pas survivre, ne serait-ce quun seul instant. Pourquoi? Cest que, lorsque les Enfants dIsral oublient la Torah, D. aussi dtourne Sa face dans le monde den-Haut, les anges ne peuvent plus voir le portrait de Yaakov grav sur le Trne de Gloire, et ils interrompent leur service. Seul D. a le portrait de Yaakov prsent devant Lui et grce lui, D. ne punit pas ses enfants pour leurs fautes avec la svrit quils mriteraient, comme il est dit (Yalkout Chimoni Esther 1057): Lorsque les Enfants dIsral fautent, D. fait comme sIl dormait . Que soit lou le Nom de D., qui a accord plus dimportance lhonneur des Enfants dIsral qu celui des anges clestes qui accomplissent Sa parole, puisque ce nest que ltude de la Torah et le service des Enfants dIsral qui donnent aux anges la force de chanter les louanges de D. Cest que les Enfants dIsral comptent plus que les anges, puisque les anges se tiennent debout alors que les Enfants dIsral sont en marche , comme il est crit (Zaharia 3:7): Je te donnerai accs parmi ceux qui sont l debout . Les Enfants dIsral sont comparables llectricit qui fait fonctionner le moteur, qui son tour active les roues - de mme Isral met en marche tous les mondes. Les Sages ont dit (Chemoth Rabah 29:9): Lorsque D. a donn la Torah, Il a fait taire toute la cration. Pourquoi tait-ce ncessaire? Jusquau don de la Torah, les anges obissaient la volont de D. mais partir du moment o elle fut donne Isral, celui-ci est devenu le porteur du destin du monde et tout dpend de son mrite. Au moment du don de la Torah, le monde entier se tint coi. Il y eut une brve interruption dans le service des anges. Ce nest que par ltude de la Torah que le monde se perptue, et les anges et les sraphins prposs aux affaires de ce monde poursuivent leurs activits lorsquils entendent la voix de Yaakov, la voix de la Torah qui se fait entendre dans la bouche des Enfants dIsral. Mais si Isral abandonnait la Torah, le monde ne pourrait pas survivre. Si Mon pacte avec le jour et la nuit pouvait ne plus subsister, si Je cessais de fixer des lois au ciel et la terre... (Yrmia 33:25), cest-dire Si ce ntait pour la Torah, le ciel et la terre ne se maintiendraient pas (Ndarim 32a), car alors les anges prposs aux affaires de ce monde ne pourraient pas poursuivre leur tche puisquils dpendent des Enfants dIsral, et sils se donnent du repos, les anges aussi se mettent au repos. Chaque Juif a une grande part de responsabilit envers la Torah, surtout durant les priodes de vacances, dans son temps libre, et durant les longues nuits dhiver. Sil ntudie pas, il met le monde en danger. Nous apprenons de Yaakov quil ne faut pas rechercher le repos, et Yftah en son temps est gal Chmouel en son temps (Roch HaChanah 25b). Si nos efforts ne sont pas la mesure de nos capacits, la punition est grande. Par contre si nous nous levons dans ltude de la Torah la mesure de notre comprhension et de notre entendement, nous veillons la Rose Cleste dans les mondes suprieurs, et nous glorifions D. dans toute Sa splendeur.

Parachat vaychev Lexil et llvation dans le service de D.

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Lorsque Yossef arriva prs de ses frres, ils le dpouillrent de sa tunique, la longue tunique dont il tait vtu, ils le saisirent et le jetrent dans la citerne. La citerne tait vide, sans eau (Brchith 37:23-24). Plusieurs marchands Midianites vinrent passer, qui tirrent Yossef de la citerne et len firent sortir, puis ils le vendirent aux Ismalites pour vingt pices dargent.... Rouven revint vers la citerne, et voyant que Yossef ny tait pas, il dchira ses vtements. Il retourna vers ses frres et leur dit: lenfant ny est plus, et moi, o irai-je? (ibid. 28-30). Nombre de questions se posent nous concernant la vente de Yossef. 1. Pourquoi les frres ont-ils dcid de le vendre? Pourquoi ne lont-ils pas par exemple donn en cadeau, car en fin de compte, il aurait t vendu de toute faon, selon les coutumes de lpoque? 2. Le texte nous fait entendre (comme les commentateurs le soulignent, voir entre autres le Rachbam), que ce sont les Midianites qui ont tir Yossef de la citerne, et il faut se demander pourquoi les frres ont repris Yossef aux Midianites afin de le vendre. Ils auraient pu le laisser entre leurs mains, puisque ce sont eux qui lavaient sorti du puits? 3. Il est crit (Amos 2:6): Ainsi parle lEternel: cause du triple et du quadruple crime dIsral: Je ne rvoquerai pas Mon arrt, pour avoir vendu le juste pour de largent et le pauvre pour une paire de sandales . Et les Sages disent ce sujet (Pirkey DRabbi Elizer 38): Les frres de Yossef se sont achet des sandales avec les vingt pices dargent de la vente de Yossef . Pourquoi ont-ils achet justement des sandales et pas autre chose? Que nous importe de savoir ce que les frres ont fait de largent quils ont reu? 4. Pourquoi Rouven a-t-il tant de peine de la vente de Yossef, quil en dchire ses vtements et pleure lenfant disparu? Avait-il pour cela des raisons que les autres navaient pas? Pour rpondre, il faut tout dabord expliquer le sens de la vente et de lesclavage. Par la vente, lhomme devient esclave (lesclave de D.) comme il est crit dans la Torah (Vayikra 25:55): Les Enfants dIsral sont Moi, Mes esclaves et (Chemoth 21:2) Si tu achtes un esclave hbreu , un esclave de D. Cest aussi ce que dit la reine Esther Ahachvroch, le deuxime soir du festin (Esther 7:4): Nous fmes vendus, moi et mon peuple... si au moins nous avions t vendus pour tre des esclaves et des servantes, jaurai gard le silence... Cet esclavage fait allusion lexil, car lexil est une punition pour navoir pas obi la voix de D. qui est le Pre misricordieux, et pour avoir refus de Le servir comme le disent les Sages (Ekhah Rabah 4:17; Zohar II, 175b): D. nous a alors pour ainsi dire vendus des matres cruels, afin que nous sachions la diffrence entre la domination de D. et celle dun nouveau matre cruel . Dans un tel exil, lesclave ressent sa condition et son exil de la faon la plus aigu qui soit. Par ailleurs, cet exil fait allusion une autre sorte dexil, lexil vers un lieu de Torah (Avoth IV:14; Chabath 147b; Tana DBey Eliyahou 14), o lhomme ressent un esclavage authentique: celui dtre le serviteur de D. En exil, o lhomme est pourchass et souffre de dures preuves, il a la possibilit de slever de plus en plus et il peut parvenir aux degrs les plus levs. Sil affronte les preuves, si malgr son errance dun lieu lautre, il continue observer la Torah et les commandements, et sil surmonte les obstacles, il atteint le plus haut niveau quil soit donn lhomme datteindre. Cest pourquoi nous voyons que les hommes les plus vertueux sont parvenus la grandeur, justement en sexilant dans un lieu de Torah. Cest ainsi que lon devient vraiment un esclave aux ordres de son matre et donc lhomme doit accepter lexil de son plein gr, sans se plaindre. Sil ne le fait pas volontairement, D. lexilera de force, et lesclavage amer de lexil lui fera ressentir D. plus vivement. A prsent, nous pouvons comprendre la vente de Yossef et le rle de ses frres. Il est certain que leurs intentions taient pures, et quils lont vendu afin que ses rves saccomplissent. La comptition augmente la sagesse (car elle stimule le progrs) (Baba Bathra 21a; Zohar I, 126b); les frres sentaient que Yossef les dpassait en saintet et cest pourquoi ils ne lont pas tu mais seulement jet dans le puits, ce qui prouve quils savaient quil ny mourrait pas. Et effectivement, il faut se demander pourquoi ils lont vendu et non donn gratuitement (ce qui rpondra aux questions 2 et 3)? Cest quils voulaient lui faire ressentir sa condition desclave et la diffrence entre la maison de son pre et celle dun autre matre, car cest alors justement, quil devra surmonter les preuves qui lattendent, sans dsesprer.

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Il y a deux sortes desclaves. Ceux qui ds quils sont vendus tombent dans le dsespoir, et ceux qui au contraire, en devenant esclaves, font tout ce quils peuvent pour plaire leur nouveau matre afin de gagner ses faveurs, jusqu ce quil les libre. De mme, ses frres indiquent Yossef quil doit sexiler dans un lieu pervers, dbauch, immoral, et sil surmonte tous les obstacles quil y rencontre, il slvera plus haut quil ne laurait fait dans la maison de son pre. Cela montre aux gnrations futures quil est possible de parvenir la saintet et la puret en exil, et quil faut se garder de tomber dans le dsespoir cause de lexil. Comme nous lavons dj soulign, Yossef est rest vertueux, mme en Egypte (Vayikra 32:5; Chir HaChirim Rabah 4:24), il a mme circoncis les Egyptiens (Brchith Rabah 91:5), il a veill la saintet de lAlliance au point dtre appel un Juste, fondement du monde (Zohar I, 59b), et ce, justement dans un pays o rgne la dbauche. Il cra en Egypte un lieu de Torah, car cest lui qui prpara le terrain pour que son frre Yhouda puisse instituer des maisons dtude (Brchith Rabah 95:3; Tanhouma Vayigach 11), comme il est dit (Brchith 46:28): Yaakov envoya Yhouda en avant, vers Yossef... Justement vers Yossef, car cest lui qui prpara le terrain et le nettoya de ses impurets. Cela nous permet aussi de comprendre pourquoi les frres ont achet des sandales avec largent de la vente. Le mot Naal, chaussure, peut se lire Naa-Al, lerrance qui permet de slever. En slevant, on crase limpuret comme les chaussures crasent la terre et la poussire. En apprenant que Yossef tait rest vertueux dans un pays dbauch, dans lEgypte cruelle, la vie revint dans le cur de Yaakov (Brchith 45:27). De plus, D. lui dit explicitement (ibid. 46:4): Moi-mme Je descendrai avec toi en Egypte et Je ten sortirai , ce qui montre que le but de cette descente est une lvation (Makoth 7b), et quune saintet accrue sensuivra. Cest pourquoi il est crit par la suite (Brchith 47:28): Yaakov vcut dans le pays dEgypte pendant dix-sept ans , comme Rabeinou HaKadoch dit de lui-mme quil vcut Tzipori pendant dix-sept ans (Yrouchalmi Ktouboth 12:3; Brchith Rabah 96: 9) et Les dix-sept ans de Yaakov en Egypte furent les meilleures annes de sa vie . Comme nous lavons indiqu plusieurs reprises, ce qui est bon se rfre la Torah (Brachoth 5a). Il est impensable que Yaakov se soit donn du repos en Egypte, puisque partout o il allait il consacrait tous ses efforts la Torah (Brchith Rabah 95:2), et dj en Erets Isral, D. ne lui a pas permis de sinstaller dans le repos. En quoi le sjour de Yaakov en Egypte tait-il bon? Bien quil ait t en exil en Egypte, dans un pays de dbauche, un lieu impur et dprav, o il lui tait difficile de vivre saintement. Cest justement l quil institua des maisons dtude de la Torah. Le Or Hahayim souligne quil ressentait que la Prsence Divine tait descendue avec lui en Egypte pour laider et le soutenir, car la source de llvation se trouve en exil (le mot Mitsrayim compos de Tsar (la peine) et Mayim (leau) y fait allusion, car Yaakov a surmont en Egypte toutes les peines grce la Torah). Justement cause des peines de lexil, Yaakov a vcu les meilleures annes de sa vie en Egypte, o il a surmont les souffrances et tudi la Torah, comme il est dit: Tu as donn la vrit Yaakov (Micha 7:20). (Le mot Shana, ans est li au mot Shinoune, rpter un enseignement, car pendant dix-sept ans, Yaakov a rpt lenseignement de la Torah et le mot b/f, bon, a la valeur numrique dix-sept). Yaakov a atteint une plus grande connaissance de la Torah justement en Egypte o la Prsence Divine ne la pas quitt. Et alors, dans son lieu derrance (Naa), il sleva (Al) dans son service de D. Cest un exemple pour ses descendants, pour chacun de nous, qui nous enseigne quen fixant notre habitation dans un lieu de Torah, mme en un lieu impur, la Prsence de D. nous soutient et nous vient en aide. De plus, en nous exilant dans un lieu de Torah, nous pouvons progresser plus quen restant chez nous, si la chose nous tient cur. Il y a pourtant une condition pralable: il ne faut pas veiller limpuret de ce lieu impur. Cest pourquoi Yaakov ne voulait pas tre enterr en Egypte, comme il le dit Yossef (Brchith 47:29): Je te prie, ne menterre pas en Egypte , et ceci afin que les Egyptiens ne fassent pas de lui une idole (Brchith Rabah 96:5), ce qui montre quil ne dsirait pas veiller lesprit dimpuret et didoltrie. Chacun doit comprendre quen suivant cet exemple, il est certain de slever quand il est en exil. Les frres ont vendu Yossef car ils savaient que lexil devait avoir lieu, comme D. lavait dit Avraham (Brchith 15:13) Sache que tes descendants sjourneront dans une terre trangre... et donc Yossef,

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le plus dou de tous, tait capable de leur prparer le chemin de lexil. Yossef aussi le savait et il serait descendu de son plein gr en Egypte, ce pays impur, mais les frres pensaient que si Yossef descendait volontairement dans ce lieu impur, il risquait dy tre perdu sans espoir. Il tait donc prfrable quil y descende malgr lui, comme esclave, afin dapprcier la diffrence entre la maison paternelle et celle de son nouveau matre, ce qui enseigne toutes les gnrations futures quil est possible de slever mme dans un lieu impur, justement en surmontant les preuves quotidiennes. Lorsque lhomme slve et craint D. de plus en plus, les forces du mal en sont amoindries. Tout cela nous permet de comprendre lvolution de Yossef. Lorsque la femme de Poutiphar cherche le faire fauter, il est dit (Brchith 39:12): Il abandonna ce vtement dans sa main et senfuit au dehors . Il aurait pu sopposer elle et reprendre son vtement qui a t la cause de lexil. Cest cause de ce vtement quil fut jet en prison, jusqu ce quil ait t finalement nomm souverain et que ses frres descendent en Egypte. Pourquoi na-t-il pas repris possession de son vtement? Cest que Yossef ne craignait pas les malheurs, il ne voulait que surmonter les preuves afin de slever dans le service de D. Cet incident lui procura la grande joie de servir dexemple aux gnrations futures. La Torah loue sa conduite. Nous en venons maintenant Rouven qui se lamenta de la vente de Yossef. En quoi consistait son dsaccord avec ses frres? Rouven tait de lavis de Yaakov et il craignait la mauvaise influence de lexil. Il aurait prfr un exil en Erets Isral dont lair inspire la sagesse (Baba Bathra 158b). Le sjour en Erets Isral tait considr en ce temps-l comme un exil puisquelle nappartenait pas encore aux Enfants dIsral et que les Amorens et les Cananens y habitaient alors. Par contre les frres pensaient autrement. Ils associrent D. leur serment de ne pas rvler la vente de Yossef, chose que D. a agre (Tanhouma Vayechev 2, Pirkey DRabbi Elizer 38). Effectivement D. avait dcrt: Ils seront asservis et ils souffriront mais ensuite ils sortiront avec de grandes richesses (Brchith 15:14), cest--dire que lessentiel de la rdemption et de la richesse leur viendra grce leurs souffrances en terre trangre. Tout dabord, afin de savoir quelle est la diffrence entre les autres matres et D. souverain, ensuite, pour mriter de recevoir la Torah et ses lois, malgr les difficults et les souffrances ncessaires pour acqurir la Torah (Avoth VI:4; Brachoth 5a). Ce nest quen surmontant les souffrances de lexil quils seront capables de dominer le mauvais penchant et de pratiquer la Torah, car ils auront acquis lexprience ncessaire pour repousser toutes les tentations. Afin de surmonter les preuves du mauvais penchant, de mriter llvation et de parvenir aux plus hauts degrs de lentendement, il faut passer par lexil, car lexil prouve devant D. combien lhomme est prt se sacrifier pour Le sanctifier. Lhomme natteint pas une telle lvation en restant chez lui dans la srnit, mais justement en terre trangre o il ne connat pas de repos, o il doit pratiquer la Torah dans la peine, la saintet et la connaissance de D. David HaMelekh, le doux chantre dIsral, a dit (Thilim 116:16-17): Seigneur, je suis Ton serviteur, fils de Ta servante, puisses-Tu dnouer mes liens, Toi joffrirai un sacrifice de reconnaissance et je proclamerai le Nom du Seigneur . David demande D. de le dnouer des liens de lexil, car il est dj Son esclave, il a atteint la connaissance de D. et mme sans exil, mme dlivr de ses liens, il continuera proclamer Son Nom et Le servir. Cela nous enseigne que lexil nous permet datteindre la connaissance de D. et de nous lever dans Son service.

Le repentir par amour de D.


Rouven revint au puits et voyant que Yossef ny tait plus, il dchira ses vtements (Brchith 37:29). Rachi rapporte le Midrach (Brchith Rabah 84:18): Il ntait pas prsent lors de la vente, occup quil tait jener pour avoir attent au lit paternel. Et alors D. lui dit: Personne na jamais faut et regrett sa faute comme toi, tu es le premier homme stre repenti de sa faute. Je jure quun de tes descendants sera le hraut du repentir. Il sagit du prophte Ocha, qui dit Armez-vous de paroles suppliantes et revenez vers D. (Ocha 14:3).

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1. Les commentateurs remarquent que bien avant Rouven, Adam et son fils Can se sont repentis, comme il est dit (Brchith Rabah 22:28): Can se retira de devant D. (Brchith 4:16). Adam le rencontra et lui demanda: Quelle fut ta sentence? Il lui rpondit: Je me suis repenti et jai obtenu un accord lamiable. Adam sexclama: telle est la puissance du repentir! Et il scria (Thilim 92:1-2): Cantique du jour du Chabath, comme il est bon de louer D... Cest donc que le repentir date de bien avant Rouven. 2. Les Sages disent quOcha introduisit ses paroles par un appel au repentir, ce qui est tonnant car, bien avant lui, les prophtes ont exhort au repentir comme (Ichaya 55:6): Cherchez le Seigneur pendant quIl est accessible et (ibid. 6:10): Que son cur comprenne, quil samende et quil soit guri , et (Yrmia 3:22): Revenez, enfants rebelles! et (ibid. 4:1): Si tu reviens Isral, reviens Moi... Il faut donc se demander pourquoi donner la priorit au prophte Ocha? Les Sages ont dit (Baba Kama 92a): Mosh a demand grce en faveur de Yhouda, et il dit: Matre du monde, nest-ce pas Yhouda qui a permis Rouven de regretter sa faute (pour avoir attent au lit paternel - Rachi)? Les Tossafoth commentent cette section du Talmud: Le regret de Rouven prcda laveu de Yhouda, mais Rouven na pas fait daveu public avant davoir vu Yhouda le faire, lorsquil dit: Elle est plus juste que moi . Sur la base de cette remarque des Tossafoth, nous pouvons dire que Yhouda a t le premier faire des aveux publics, de mme le repentir de Rouven est diffrent de celui dAdam et de Can. Nous allons expliquer en quoi. Raba dit: Soyez prts couter les paroles des Sages... et ne soyez pas comme ces tourdis qui fautent et qui apportent un sacrifice expiatoire sans se repentir... (Brachot 23a). Cela nous montre que quelquun peut dpenser de largent, acheter un animal coteux pour le sacrifier, prendre la peine de lamener au Temple en expiation de sa faute... et malgr tout, son repentir est insens sil pense que largent suffit obtenir le pardon de sa faute. Cest comme sil pensait acheter le pardon de D. Bien que son effort soit louable, puisquil reconnat sa faute et veut lexpier en apportant un sacrifice, il est tout de mme considr comme sot, parce quil ne comprend pas le sens et le but du repentir et du sacrifice. En effet, celui qui apporte un sacrifice doit faire laveu de sa faute (Rambam, Halahoth Tchouvah 1:1), et il doit mme considrer que cest lui qui devrait tre sacrifi la place de cet animal et quil mrite quon lui fasse tout ce qui est fait cet animal (Ramban, dbut de Vayikra). Cest uniquement dans Son infinie bont que D. accepte le sacrifice en change et la place de la personne elle-mme. Lhomme doit prendre la dcision de ne pas rpter sa faute, et D. qui connat tout ce qui est cach, tmoigne de lui quil ne rptera jamais sa faute (Rambam, Halahoth Tchouvah 2:2). Can commit une telle tourderie. Dune part il dit D. : Mon crime est trop lourd porter (Brchith 4:13) ce qui montre quil avait connaissance de la gravit de son crime. Par ailleurs, il est dit de lui (ibid. 4:16): Can se retira de devant lEternel , et les Sages soulignent (Brchith Rabah 22:28): Comme quelquun qui trompe D. et (Midrach ad. loc.): Rav Brekhyia au nom de Rabbi Elazar, fils de Rabbi Chimon dit: Il sest retir comme quelquun qui ment et trompe son matre . Les Sages ajoutent (Ybamoth 21a): La punition des fautes commises dans les poids et mesures est plus svre que celle de la transgression de relations interdites . Cest parce que le repentir comprend trois aspects: laveu explicite de la faute, le regret davoir commis une transgression, et la dcision de ne plus fauter lavenir (Rabbeinou Yona a longuement expliqu cela dans son livre sur le repentir, auquel il est conseill au lecteur de se rfrer). Laveu, la reconnaissance de la faute, est la premire tape du repentir, et cela explique pourquoi la punition des fautes commises dans les poids et mesures est plus svre que celle sanctionnant les relations interdites, car il est difficile lhomme de se repentir dune faute quil ignore. Au moment de la transaction, il lui est difficile de raliser quil commet une faute car ce moment-l, il ne pense quau gain quil va tirer de cette affaire. Cette proccupation laveugle, et il ne surveille pas de prs ses intentions. Il lui sera donc difficile de parvenir la premire tape du repentir qui est la reconnaissance de la faute, et il ne veut pas admettre quil a commis (par exemple) un vol. Les Sages ont dit que personne ne saccuse lui-mme (Ybamoth 25b; Ketouboth 18b; Sanhdrin 9b), et sil pense quil na pas commis de faute, il est jug pour avoir dit: Je nai pas faut... (Yrmia 2:35). Il nen est pas de mme concernant les relations interdites, car dans ce cas, lhomme sait parfaitement quil

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commet une faute, ce qui est dj une attnuation de sa punition, et son regret reprsente aussi un espoir quil ne fautera plus lavenir. Cela explique la diffrence entre le repentir de Rouven et celui de Can. Il est vrai quAdam et Can ont constat le pouvoir du repentir, et quils ont reconnu leur faute, mais leur repentir ntait pas parfait car ils se sont contents davouer leur faute, sans plus. Ils nont pas ressenti de regret et ils ne se sont pas purifis par des jenes. Il est crit (Thilim 92:2): Il est bon de rendre grce D. rendre grce dans le sens de reconnatre ses fautes, car D. exige cet aveu. Les Sages ont dit (Tanhouma 96:6): Il nest dautre repentir devant D. que laveu . Par contre Rouven a ajout cette conception du repentir la notion que les dfauts dintention sont aussi punis, car il na port atteinte au lit de son pre quaprs la mort de Rahel, en ne pensant qu la justice et lhonneur dus sa mre. Il voulait rparer laffront commis envers elle (Pessikta Zouta Vayehi 49:4): Une servante prendrait-elle la place de la matresse de maison? Il est trs difficile de sentir et de reconnatre quil y a l une faute, mais Rouven, bien quil ait agi pour venger lhonneur de sa mre, a reconnu quil avait mal agi, surtout en tant quun des chefs des tribus dIsral, dont la position rend la faute encore plus grave. Et donc, cest Rouven qui le premier a exprim la gravit des manquements personnels, et un tel repentir amne la rdemption, comme il est dit: Le fils de David ne viendra que lorsque tous les dfauts seront corrigs (Aroukh Midot, au nom des Sages). Rouven a t le premier regretter sa faute de tout son cur et de toute son me. Il jena et porta le deuil de longs jours pour se faire pardonner (Brchith Rabah 84:18; Bamidbar Rabah 13:17). Le Midrach fait dire D.: Je jure quun de tes descendants sera le hraut du repentir. Il sagit dOcha . Nous avons remarqu quil y eut, avant Ocha, des prophtes exhortant le peuple se repentir. La rponse cette objection se trouve dans le Midrach lui-mme (Pessikta Rabati 44): Tous les prophtes appellent le peuple juif se repentir, mais pas de la mme faon quOcha. Yrmia a dit (4:1): Si tu reviens Isral, reviens Moi... , Ichaya a dit (55:6): Cherchez le Seigneur pendant quIl est accessible , mais ils nont pas enseign quil fallait faire laveu de ses fautes. Ocha lui, les exhorte se repentir et il enseigne comment obtenir le pardon: Armez-vous de paroles suppliantes et revenez vers D. (Ocha 14:3). La supriorit dOcha, descendant de Rouven, consiste en ceci: non seulement les avoir amens reconnatre leurs fautes et les regretter, mais aussi purifier leur me et exprimer leur regret et leur repentir. Il avait appris cela de son anctre Rouven, qui fut le premier se repentir de la sorte. A cela, nous pouvons ajouter une autre explication propose par Ismah Isral: Il y a deux sortes de crainte: la crainte de D. et la crainte de la faute. Pour les diffrencier, il faut dire quil est des hommes qui ne se retiennent de fauter que par peur de la punition et dont le repentir provient de la crainte du jugement. Il en est dautres qui se retiennent de fauter essentiellement parce quils craignent la faute elle-mme et les dommages quelle cause au corps et lme, car la faute entache lme. Ce repentir-l provient de lamour. Celui qui se repent par amour de D. ne veut pas se tenir devant le Roi vtu de haillons, entach et sali de fautes. Il se repent par amour, car il a la crainte de la faute, et il craint le mal caus par la faute elle-mme. De l, on compte deux catgories de pnitents: lun se repent par crainte de la punition qui le menace, Il confesse ses fautes et y renonce, et obtient le pardon (Michley 28:13). Lautre se repent aprs rflexion sur la faute elle-mme. En voyant comment il est entran par des futilits et des occupations sans avenir, comment sa recherche de plaisirs le fait tomber de plus en plus bas parce quil en a fait une habitude, il a honte de sa chute et de sa dchance et il se ressaisit, il se prive, il se met en peine, afin de corriger ses mauvaises habitudes et de purifier son me, et il obtient le pardon. Un tel repentir est motiv par lamour. Le repentir dAdam et de Can ntait pas parfait, et la preuve en est que jusqu ce jour, nous, les Enfants dIsral, sommes occups corriger la faute dAdam. Les Sages ont dit (Yirouvin 18b; Zohar III, 76b; Bamidbar Rabah 14:24): Adam a jen, il sest spar de sa femme et il sest mortifi pendant cent trente ans . Faut-il donc comprendre que, comme Rouven, il sest mortifi pour corriger sa faute? Et pourtant, son repentir ntait pas parfait, car justement pendant ces cent trente annes, il donna naissance des dmons et des esprits comme le disent les Sages (ibid.), cest donc quil navait pas corrig les imperfections de son me. Le Ari zal, dans son Sfer HaGuilgoulim (rdig par son lve Rabbi Hayim Vital) crit: Le fils de David ne viendra pas avant que le meurtre de Havel ne soit corrig . Cela montre que le repentir dAdam et de Can nest pas parfait, jusqu ce jour.

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Par contre, le repentir de Rouven tait diffrent, il sest repenti par amour, par crainte de la faute. Il craignait les imperfections et les souillures de son me, et un tel repentir, accompagn de mortifications, a un grand pouvoir de purification et peut effacer les marques qui entachent lme. Cela nous permet de comprendre les propos de nos Sages (Yoma 86b) concernant celui qui se repent par amour: Ses fautes volontaires sont considres comme des mrites . Telle est la qualit du repentir de Rouven qui a ouvert un chemin que tous peuvent suivre.

Labandon de la Torah, cause de la destruction du Temple et de lexil


Ere, le premier-n de Yhouda ayant dplu D., D. le fit mourir... La conduite de Onan dplut D. qui le fit mourir de mme quEre, et Yhouda dit Tamar sa belle-fille: demeure veuve dans la maison de ton pre, jusqu ce que mon fils Chla grandisse (Brchith 38:7-11). Le rcit dEre et Onan demande quelques claircissements. 1. Pourquoi la Torah nous raconte-t-elle la faute dEre et dOnan, qui selon les Sages, refusaient davoir des enfants (Brchith Rabah 85:5), Ils refusaient Tamar des enfants pour quelle garde sa beaut (Ybamoth 43b). Cest un fait connu que quiconque dispense sa semence en vain est puni par le ciel de la peine de mort. 2. Nous savons aussi quune femme dont deux maris sont morts na plus le droit de se remarier (Ybamoth 64b). Comment se fait-il que Yhouda ait dit Tamar sa belle fille dattendre que son fils Chla devienne grand? Si la mort de deux maris lui est attribue, de toute faon elle ne pourra pas pouser Chla lorsquil sera grand, puisquelle reprsente pour lui un danger. Il est certain quil y a dans ce rcit des secrets effrayants, et les versets ne leur servent que de revtement. Il faut comprendre le sens du rcit de Yhouda, Tamar, Ere, Onan et Chla, travers les allusions de la Torah, et nous savons que la Torah ne raconte rien de superflu (Zohar III, 149b). Pour expliquer cette section, il faut indiquer quelle se rfre aux deux Temples, la Torah, au Messie, et la Prsence de D. Il nous faut prsenter une brve introduction qui nous amnera une comprhension correcte et claire. Cest un fait que D. fait rgner Sa Prsence en ce bas-monde afin que nous puissions nous attacher Lui. La Prsence de D. sattache nous lorsque nous donnons satisfaction notre Crateur, ce qui nous permet de recevoir et de jouir en abondance des bonts de D. Lhomme a t cr pour obir la volont de son Crateur, mais il doit ressentir que D. lui a insuffl lme et la vie (Brchith 2:7), il faut quil reoive limage de D. (comme lcrit le Sforno) et quil ressente que D. observe ceux qui Le craignent et que la lumire qui sattache lhomme le fait vivre. Cest alors que lhomme se soumet inconditionnellement son Crateur. Telle tait la grandeur dAdam, le premier homme. Il se savait ternel, puisque D. lui avait interdit de manger de larbre de la Connaissance sous peine de mourir (ibid. 2:17), ceci indique que sil nen avait pas mang il ne serait pas mort (Brchith Rabah 9:6; Kohlet Rabah 3:17). Adam na pas mang du fruit de larbre de la Vie avant la faute, puisquil navait pas besoin de cette proprit. Comment peut-il mourir puisque D. lui a insuffl la vie? Mais aprs la faute, sa vie fut abrge et Adam perdit de sa grandeur. David HaMelekh dit de lui (Thilim 82:6): Javais dit: vous tes des tres suprieurs, tous des enfants du Trs-Haut . Adam tait tellement plein de sagesse que les anges le prirent pour un dieu, et voulurent le sanctifier (Brchith Rabah 8:9). Il nous est difficile dimaginer, nous, gens ordinaires, comment et sous quelle forme D. cra lhomme et lui insuffla la vie... Les Sages nous enseignent au sujet de larbre de la Connaissance (Chabath 55b; Tanhouma Buber Chemini 13): Jai donn Adam un commandement facile et il la transgress , lui qui fut cr limage de D., et ils ajoutent (Brchith Rabah 12:5; Haguigah 12a) que Adam avait une perception qui allait dun bout du monde lautre . Il nous est difficile dimaginer et de dcrire son niveau spirituel. Nous comprenons combien Adam a chut, pour avoir mang du fruit de larbre de la Connaissance, et quil mrite la peine de mort. Sil navait pas entendu la voix de D. savancer dans le Jardin (Brchith 3:8), la Torah tmoigne (ibid. v. 22) quil aurait vite fait de manger aussi du fruit de larbre de la Vie afin de vivre ternellement (Brchith Rabah 21:6). Il fut immdiatement chass du Jardin dEden (ibid. v.

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23), avant quil en vienne manger du fruit de larbre de la Vie, tant il est vrai quune faute commise entrane une autre faute (Avoth IV:2; Avoth DRabbi Nathan 25:4). Afin de minimiser sa punition, D. la immdiatement chass du Jardin dEden. Il faut ajouter cela que lorsque Adam mangea le fruit de larbre de la Connaissance, il porta atteinte toutes les tincelles de saintet que les Patriarches et les Enfants dIsral ont ensuite extraites et purifies durant leur exil en Egypte, et restitues leur source (Or Hahayim Brchith 49:9). Le monde entier aurait pu tre corrig et soumis la souverainet de D., quand le mauvais penchant fut dracin du cur des Enfants dIsral (Kohlet Rabah 3:14) comme il le fut lors du don de la Torah (Chir HaChirim Rabah 1:16; Zohar I, 63b), et ils auraient pu entrer en Erets Isral immdiatement aprs leur sortie dEgypte. De mme, ils auraient pu alors construire le Temple, qui aurait t indestructible, comme il est dit (Sotah 3b): Avant quils commettent le pch du veau dor, la Prsence Divine accompagnait chaque Isralite , et le Messie serait venu, puisquils avaient accept la souverainet inconteste de D. en disant: D. rgnera pour toujours (Chemoth 15:18). Mais le Satan les a confondus et tromps, ils ont ador le veau dor, ils sont retombs entranant dans leur chute toutes les tincelles de saintet quils avaient restaures. Lorsquils se repentirent de cette faute, ils mritrent dentrer en Terre dIsral, et ils auraient pu amener la rdemption dfinitive. Mais ils fautrent de nouveau lorsque les explorateurs dcrirent le pays quils avaient explor (Bamidbar 13:32) et cest alors quil fut dcrt que pour stre laments, ils se lamenteront chaque gnration future (Taanith 29a; Sotah 35a) jusqu larriv du Messie, lorsque de nouveau toutes les tincelles de saintet seront restaures. Bien que le Messie puisse venir chaque gnration, il tarde cause de nous, parce que nous perptuons la faute des explorateurs, et la rparation de leur faute dpend de nous et de nos capacits. En attendant, le premier Temple fut dtruit, ainsi que le deuxime Temple, cause des disputes, de lidoltrie et de la haine gratuite (Yoma 9b), ainsi que pour avoir abandonn la voie de la Torah . Le prophte se lamente: Pourquoi ce pays est-il ruin, dvast comme un dsert o personne ne passe? LEternel la dit: Cest parce quils ont abandonn la Loi que Je leur avais propose, parce quils nont pas cout Mes ordres, et ne les ont pas suivis (Yrmia 9:11:12). Nous savons que Jrusalem fut dtruite parce quils avaient abandonn la Torah (Chabath 119b), si bien que D. soupire (Yrouchalmi Haguigah I:7): Si seulement ils Mavaient abandonn Moi, mais observ Ma Torah... car la lumire de la Torah leur aurait indiqu la bonne voie. A prsent, nous sommes en mesure de comprendre le rcit dEre et Onan, Yhouda, Tamar et Chla, car tout est li. Yhouda indique mtaphoriquement lEternel qui donne la Torah, car ce nom est compos des lettres du Nom de D. Tamar reprsente les Justes, comme il est crit (Thilim 92:13): Le Juste fleurit comme un palmier (tamar) . Il y a de nombreux points communs entre le Juste et le palmier, par exemple: Le palmier veille le dsir, et les Justes ont le dsir de la connaissance de D. (Brchith Rabah 41:1), le palmier a des piquants, tout comme les Justes ont des piquants, et il est interdit de leur porter atteinte (Yalkout Chimoni 690; Tanhouma Bamidbar 16). Le palmier indique aussi figurativement la Torah, car tous deux sont doux comme il est crit (Thilim 34:9): Gotez et sentez quil est bon... et les paroles de la Torah sont plus douces que le miel et le suc des rayons (Thilim 19:11). Le palmier indique aussi le Temple et la Torah, car la Prsence Divine habite le Temple grce la Torah, et de mme que le palmier ne se laisse affecter par aucun vent, de mme la Torah ne change pas, en aucune circonstance. Ere et Onan, eux, figurent les Enfants dIsral auxquels D. a donn la Torah afin de soumettre le monde Sa souverainet et amener la rdemption. Ce que nous venons de dire peut se lire en filigrane dans les versets: Yhouda (qui figure D.) donna Tamar (la Torah) Ere et Onan (les Enfants dIsral). La Torah fut donne en cadeau Isral parce quil a restitu leur source les tincelles de saintet. Par la suite, ils ont faut dans le dsert, mais ils peuvent se purifier de leur faute grce la Torah, puisque limpuret natteint pas la Torah (Brachoth 22a) et la rdemption ne viendra que grce la Torah. La Torah continue le rcit, en racontant comment les Enfants dIsral (Ere et Onan), au lieu doprer la correction, de soumettre le monde la souverainet de D. et damener le temps de la rdemption, ont

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profan la Torah (Tamar). Le Temple fut dtruit cause de labandon de la Torah, du fait quEre et Onan ont gaspill leur semence. Ils semblaient justes et occups de Torah, mais en fait ils dispersaient leur semence, pratiquaient lidoltrie, et ils se hassaient mutuellement sans raison, si bien que les deux Temples furent dtruits. Ce nest pas sans raison que les Sages associent la Torah et lexil au palmier, comme ils le disent (Pessahim 87b), D. na exil les enfants dIsral Babel que pour quils sy nourrissent de dattes et soccupent de Torah , cest--dire quils ne furent exils quafin de rparer les fautes qui ont caus la destruction du Temple et labandon du pays. Les Sages ont dit aussi (Yrouchalmi Taanith IV:4): Quarante ans avant la destruction du Temple et lexil, ils ont plant des palmiers Babel . Pour avoir port atteinte la Torah qui a t donne en quarante jours (Menahoth 99b), quarante ans auparavant dj (un an pour chaque jour), les Sages avaient prpar le chemin de lexil, les palmiers, cest--dire ltude de la Torah, afin de corriger la faute qui a caus lexil. Cest pour toutes ces raisons que D. a puni Ere et Onan de mort. De quelle mort? Lexil des Enfants dIsral, qui furent chasss du pays de leurs pres pour avoir abandonn la voie de la Torah, et nous savons que les enfants meurent cause de labandon de la Torah (Chabath 32a). Telle fut la mort des enfants de Yhouda. Malgr tous les retards, les Juifs croient toujours que lexil aura une fin larrive du Messie. Ceci est indiqu dans les paroles de Yhouda Tamar: Jusqu ce que Chla grandisse . Cest dire que les Enfants dIsral attendront larrive du Messie, qui est aussi appel Chla (Sanhdrin 98b), cest--dire quils corrigeront leurs fautes jusqu lavnement du Pacifique (Chilo) auquel obiront tous les peuples (Brchith 49:10) et la reconstruction du Temple. En attendant, ils resteront en exil o ils se feront pardonner leurs fautes. Lorsque le Messie viendra, il les ramnera en terre dIsral et reconstruira le Temple. Jusqu ce jour, les Enfants dIsral veillent garder la Torah dans la crainte de D. afin de rparer tout ce qui a t endommag. Lorsquils auront opr cette correction, le Messie nous sera envoy pour nous unir et construire le Temple, et il enseignera aux Enfants dIsral les secrets de la Torah, et nous connatrons la vraie rdemption, avec laide de D. Amen.

La Torah et la bienfaisance prservent du mauvais penchant


Il arriva aprs ces faits, que la femme de son matre jeta les yeux sur Yossef... (Brchith 39:7). Dans le Midrach, Rabbi Meir, Rabbi Yhouda et Rabbi Chimon commentent ce verset (Brchith Rabah 87:3): Comment agit Le Saint, bni soit-Il? Il rtribue chacun selon ses uvres (Yov 34:11). Plus haut, il est dit: Yossef tait beau de taille et beau de visage. Ceci est comparable un homme brave qui se tient sur la place publique, se frotte les yeux, arrange ses cheveux, et avance sur la pointe des pieds, comme pour dire: Je suis beau! Je suis prestigieux! Je suis vaillant! D. dit Yossef: O est ta beaut et o est ta prestance? Je vais tenvoyer lourse, va, mesure-toi elle! 1. Il faut comprendre lintention des Sages, car il est difficile de croire que Yossef se tient effectivement sur la place publique avec les yeux colors et les cheveux arrangs, sans craindre le mauvais penchant! Surtout en Egypte! 2. Ce Midrach implique lide dune rmunration, mesure pour mesure (Chabath 105b; Ndarim 32a) puisquil cite: Il rtribue chacun selon ses uvres . Le Midrach a dj remarqu plus haut (Brchith Rabah 84:7) que Yossef est appel enfant cause de son comportement: il se frottait les yeux, il sarrangeait les cheveux, il avanait sur la pointe des pieds... Alors dj, il se conduisait ainsi. Pourquoi ne fut-il pas mis lpreuve ce moment-l, comme il fut mis lpreuve en Egypte, avec la femme de Poutiphar? 3. Il faut comprendre pourquoi, ici, en Egypte, il est dit que la conduite de Yossef fait allusion son apparence, alors quauparavant, elle tait considre comme une conduite enfantine? Citons tout dabord les paroles de nos Sages (Kidouchin 81a): Rabbi Meir se moquait des hommes qui se rendent coupables. Un jour, le Satan se prsenta lui sous la forme dune femme qui laborda de lautre ct du fleuve. Il ny avait pas de barque pour traverser le fleuve. Il se saisit dune corde tendue au-dessus du fleuve pour le traverser. Arriv au milieu du fleuve, la corde se rompit. Le Satan lui dit: Si ce ntait que le Ciel nous avait mis en garde de ne faire aucun mal Rabbi Meir cause de sa Torah, je taurais mis en morceaux . Il est racont aussi: Rabbi Akiva se moquait des hommes qui se rendent coupables. Un jour, le Satan lui apparut sous forme dune femme qui se tenait en haut dun arbre. Il se saisit de larbre et

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y grimpa. Arriv mi-hauteur, le dsir labandonna. Le Satan dit: Si ce ntait que le Ciel nous avait mis en garde de ne faire aucun mal Rabbi Akiva cause de sa Torah, je taurais mis en morceaux . 1. Ce sont des rcits extraordinaires. Comment expliquer que Rabbi Meir et Rabbi Akiva aient failli fauter aussi gravement, eux qui se moquaient des gens incapables de dominer les tentations car ils pensaient quils taient, eux, capables de dominer les tentations volont (Rachi ad. loc.)? 2. Ignoraient-ils que le Satan se tient sur le seuil (Brchith 4:7), et quil risque de les induire en tentation toute heure et en toute circonstance. Y a-t-il lieu de se moquer des gens qui ne lui rsistent pas? 3. Il faut aussi stonner du comportement du Satan. Sil savait davance quil serait incapable de les faire fauter, quel bnfice pensait-il tirer du fait de les mettre lpreuve, puisque finalement, il sera vaincu? De plus, quimporte au Satan si Rabbi Meir et Rabbi Akiva se moquent des coupables? 4. Il faut comprendre pourquoi il est dit: Nous avons t mis en garde de ne faire aucun mal Rabbi Meir et Rabbi Akiva cause de leur Torah. Pourquoi seulement eux? 5. Pourquoi le Satan vient-il tenter Rabbi Meir au bord du fleuve et Rabbi Akiva du haut dun arbre? Cest la seule diffrence entre les deux rcits, qui part ce dtail, sont semblables. 6. Pourquoi le Satan cesse-t-il de les tenter mi-chemin (au milieu du fleuve, mi-hauteur de larbre)? Pourquoi ne pas attendre quils arrivent jusqu lui pour les rprimander davoir failli fauter? Ces rcits nous enseignent des choses merveilleuses. Aprs une tude approfondie de la Torah et une obissance assidue, lhomme arrive une comprhension tellement leve quil sait quel point le monde est rempli de futilits; il sait que toutes ses attractions sont imaginaires et insignifiantes compares au monde ternel. Celui qui est parvenu ce degr de comprhension ne peut pas comprendre les gens qui consacrent leur vie quotidienne des vanits, sans espoir de rconfort et sans lvation. Le Talmud exprime cela en disant que Rabbi Meir et Rabbi Akiva se moquaient des gens qui fautent, et comme lexplique Rachi: parce quils pouvaient, eux, dominer les tentations volont . Cest--dire que mme sans laide de la Torah, uniquement par la force de la volont et par lintelligence, il est facile de surmonter le mauvais penchant (cela rpond notre deuxime question), et ils taient capables de surmonter les tentations grce leur entendement. Mais ici, le Satan possde une arme. Il veut leur prouver quils se trompent. Le Satan est fait de feu, et eux ne sont que des hommes. Ils seraient incapables de le vaincre, si ce nest grce au pouvoir de la Torah qui elle aussi est un feu (Mkhilta Yithro 19:18), comme le disent les Sages (Soucah 52b; Kidouchin 30b): Si tu rencontres ce vilain, entrane-le vers la maison dtude, sil est de pierre il se brisera, sil est de fer, il fondra . Seul le feu de la Torah peut vaincre le mauvais penchant, il ny a pas dautre remde, et pas dautre mthode contre lui. D. dit: Jai cr le mauvais penchant, et Jai cr son remde, la Torah (Kidouchin 30b). Ce nest pas une exagration, mais une ralit! Qui que ce soit, mme le plus grand des hommes, le plus pur des gens de bien, le plus intelligent des savants, ne possde rien qui puisse le sauver de lemprise de son mauvais penchant sil na pas de Torah; il risque de commettre les fautes les plus graves, mais sil possde la discipline de la Torah, il domine ses dsirs (Avodah Zarah 5b). Cest une chose bien connue. Le Satan dit Rabbi Meir: Si ce ntait que le Ciel nous a mis en garde de ne te faire aucun mal cause de ta Torah, je taurais mis en pices. Si tu avais voulu topposer moi uniquement grce ton intelligence, sans le pouvoir de la Torah, jaurais pu te dominer, te faire fauter et te mettre en pices, car ton intelligence dhomme ne suffit pas me vaincre. Cest pourquoi le Satan a ajout et ta Torah (ce qui rpond la question 4), cest--dire que le Satan fut mis en garde de ne pas considrer Rabbi Meir simplement en tant quhomme et de sen prendre son intelligence, mais de considrer le pouvoir de la Torah qui le protge. Tout dabord, Rabbi Meir et Rabbi Akiva se sont fis leur intelligence humaine, et du Ciel on dcida de leur prouver quelle ne suffisait pas, cest pourquoi ils furent tents de commettre une si grande faute, bien quils aient lhabitude de se moquer de ceux qui sont incapables de surmonter leurs dsirs (ce qui rpond la question 1). Cest aussi pourquoi le Satan est venu les tenter tout en sachant quil ne russirait pas, afin

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de leur dmontrer que ce nest pas avec lintelligence quon pouvait le vaincre, et donc quils navaient aucune raison de se moquer des coupables (ce qui rpond la question 3). Tu peux croire que les nations ont la connaissance, mais ne crois pas quils ont (la sagesse de) la Torah (Ekha Rabah 2:17). Un non-juif peut sans aucun doute discerner entre le bien et le mal, on peut faire appel son sens des valeurs morales et lui dire ce qui est permis et ce qui est interdit, tel Hillel qui dit cet homme (Chabath 31a): Ce que tu trouves dtestable, ne le fais pas aux autres . Mais au moment de la mise lpreuve, lhomme est incapable de surmonter ses tendances et ses dsirs, et sans Torah, uniquement par lintelligence humaine, il est impossible de savoir de quelle faon se restreindre. Les non-juifs, dpourvus de Torah, ne peuvent pas savoir comment vaincre le mauvais penchant. Les Sages nous disent combien Rabbi Meir avait une comprhension profonde de la Torah. Lorsquil enseignait, il le faisait avec une telle puissance quil est dit: Il dracine des montagnes et les met en poudre (Sanhdrin 24a) et Il rend les Sages aveugles (Yirouvin 13b). Nous comprenons donc que le Satan se prsenta lui au bord du fleuve, au bord de leau qui scoule, de la Torah, comme il est crit (Ichaya 55: 1): Vous qui avez soif, buvez de leau et il nest deau que la Torah (Baba Kama 17a; Tana DBey Eliyahou Rabah 2; Zouta 1). Rabbi Akiva, par contre, tait connu pour sa bienveillance et son amour de D. Et donc, lui, le mauvais penchant sest montr en haut dun arbre, comme il est crit (Thilim 92:13): Le Juste fleurit comme le palmier , ce qui indique quil a vaincu le mauvais penchant grce la Torah et ses bonnes actions. Nous comprenons pourquoi le mauvais penchant les a abandonns mi-chemin. Il voulait leur signifier que lattirance pour une femme nat dans limagination, et ce nest que grce aux directives de la Torah et une conduite discipline que lon peut surmonter cette attraction des sens et la faire disparatre. Nous sommes en mesure prsent dexpliquer les contradictions dans les rcits que nous avons cits concernant Yossef. Il est crit (Brchith 37:3): Isral prfrait Yossef ses autres enfants... une prfrence dont Rav Nhmia dit: toutes les lois que Chem et Ever ont transmises Yaakov, Yaakov les a transmises Yossef (Brchith Rabah 84:8). Lorsque Yossef parvint en Egypte, un pays pourri par la dbauche (Chemoth Rabah 1:22), il ne pouvait pas comprendre comment il tait possible dtre happ sans frein par des apptits grossiers, et il se moquait des Egyptiens dpravs. Cest pourquoi il sembellissait, se coiffait, se faisait les yeux etc. comme le raconte le Midrach, et comme il est dit (Avoth 4:1; Avoth DRabbi Nathan 23: 1): Qui est courageux? Celui qui domine ses penchants . Il agissait de la sorte par raillerie envers les Egyptiens dbauchs. Il est dit de lui quil tait beau de taille et beau de visage , car cette coquetterie et cette moquerie avaient un but. Il est impossible dattribuer Yossef une autre intention, si ce nest quil tait sr de ne pas fauter. Lorsquil tait jeune homme, il tait trop jeune pour se moquer des gens qui fautent, et cest pourquoi son comportement tait alors considr comme un enfantillage . La diffrence entre son comportement en tant quenfant, et son comportement en tant quadulte, est que dans la maison de son pre, dans la maison dtude, le mauvais penchant navait pas demprise sur lui, ce qui montre combien un environnement de Torah protge et sauve de toute dfaillance et de tout danger. Yaakov non plus ne craignait pas le mauvais penchant et il avait fait faire pour Yossef une tunique qui accentuait sa beaut et sa prestance. Yossef navait pas encore t mis lpreuve. Mais en Egypte, au milieu de gens dbauchs, lorsque Yossef commena se moquer des coupables, le mauvais penchant trouva loccasion de sen prendre lui car il ntait plus dans un entourage protecteur, et il fut mis lpreuve par la femme de Poutiphar. Pourquoi? Pour la mme raison que Rabbi Meir et Rabbi Akiva furent mis lpreuve. Le mauvais penchant voulait lui montrer quil ny a pas lieu de se moquer des autres et de se fier sa propre intelligence humaine, mais uniquement au pouvoir de la Torah. Si limage de son pre Yaakov ne lui tait pas apparue (Sotah 36b) - et comme on sait Yaakov reprsente le mrite de la Torah - Yossef aurait faut, car seule la Torah peut sauver. Si limage de Yaakov ne lui tait pas apparue, Yossef aurait-il faut? Navait-il pas suffisamment de mrite personnel pour le protger? Il alla sous lordre de son pre voir comment se portaient ses frres (Brchith 37:13-14), et Les messagers qui obissent un commandement ne risquent rien (Pessahim

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8b; Zohar III, 273a). Malgr tout, ce qui devait arriver arriva, et il fut vendu comme esclave. Pourtant, il ne sest pas plaint des voies de D. Plus tard, il fut emprisonn pendant douze ans (Brchith Rabah 86:6) bien quil nait pas faut avec la femme de Poutiphar, et il a accept la sentence sans crier linjustice, ce qui prouve ses vertus (Zohar I, 59b). Comment se fait-il que justement la vue de limage de son pre lait empch de fauter? Cest que cette image reprsente le pouvoir de la Torah car lhomme, quelle que soit sa grandeur, ne peut pas vaincre son mauvais penchant lui-mme, mais uniquement grce la Torah. Cela nous permet dexpliquer pourquoi les commentateurs (Yoma 35b) disent que lexemple de Yossef sert dargument contre les pcheurs. En quoi consiste laccusation, tant donn que Yossef ne fut pas sauv par son propre mrite, mais grce limage de son pre? Cest que lapparition de limage de son pre reprsente la Torah apprise de son pre, la Torah qui protge (Soucah 21a), et donc telle est laccusation contre le pcheur: Tu tais effectivement troubl par tes tentations, mais tu aurais d prendre exemple sur Yossef et savoir que la Torah protge lhomme en toute circonstance, mme les plus difficiles. Nous devons, nous aussi, en tirer la leon et savoir que la Torah (comme dans le cas de Rabbi Meir) et les actes de bienfaisance (comme dans le cas de Rabbi Akiva) protgent en toutes circonstances et tout moment.

Limage de Yaakov sauve de la faute


Il arriva une de ces occasions, o il tait venu dans sa maison pour faire sa besogne... (Brchith 39: 11). Quelle besogne? Les Sages expriment diverses opinions ce sujet (Sotah 36b). Certains disent quil sagit dun travail effectif, dautres disent quil serait venu pour rencontrer la femme de Poutiphar, mais voyant limage de Yaakov son pre, il navait pas faut. Comment est-il pensable que Yossef ait failli fauter avec la femme de son matre? Yossef est un Juste, fondement du monde (Zohar I, 59b) et toute sa Torah lui venait de son pre Yaakov (Brchith Rabah 84: 8). Il aurait srement d suivre la voie de son pre et se garder de fauter, car Yaakov stait mari lge de quatre-vingt-quatre ans (Ybamoth 76a; Brchith Rabah 79:1; Zohar Hadach 5) et navait jamais faut. Yossef aurait donc d suivre son exemple. Est-il possible de croire quil se serait abaiss avec Zelicha, la femme de Poutiphar sil navait pas vu soudain limage de son pre? Il est crit (Brchith 37:2): Voici lhistoire de la descendance de Yaakov, Yossef... Lessentiel de la raison dtre de Yaakov en ce monde est de combattre le mal et de lliminer, ce quil ne peut faire que grce sa descendance, afin damener le monde reconnatre la souverainet de D. De tous ses enfants, cest justement Yossef, grce ses qualits particulires, qui tait le plus apte laider dans cette tche, car il lui ressemblait en tout (Brchith Rabah 84:7). Cest Yossef qui doit vaincre Essav (Pessikta Zouta Vaytse 25; Zohar I, 155b), et il est dit de lui (Ovadia 1:18): La maison de Yaakov sera un feu, la maison de Yossef une flamme et la maison dEssav du chaume . Il est certain que tous deux, Yaakov et son fils Yossef, sont capables de rduire le mal nant. En approfondissant cette ide, nous dcouvrons une chose merveilleuse. Dans la maison de son pre, Yossef sembellissait etc. (Brchith Rabah 84:7) et il est dit ce sujet quil tait occup des enfantillages (Brchith 37:2). Mais son pre ne le rprimandait pas, au contraire, il le prfrait ses autres enfants et lui fit faire une tunique raye (ibid. 37:3) ce qui mettait encore plus en valeur sa prestance. Comment concilier ces deux faits? Cest que les actes de Yaakov et de Yossef taient apparemment en contradiction avec la saintet, afin de tendre des piges aux forces du mal et les liminer justement de cette faon. Ce nest quau moment o Yossef jouait avec ses cheveux que le Satan se prsenta lui pour le tenter, mais Yossef la vaincu car sa conduite navait pour but que dacqurir plus de saintet, et lorsque la saintet augmente, limpuret diminue proportionnellement. En Egypte aussi, avant davoir t mis lpreuve avec la femme de Poutiphar, il jouait avec les boucles de ses cheveux (Brchith Rabah 87:3), de sorte que D. lui dit: Je vais tenvoyer lourse . Mais en fait, comme nous lavons soulign plus haut, ses intentions taient pures. Il dsirait se sanctifier aussi en Egypte,

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ce lieu de perversion (Chemoth Rabah 1:22; Pessikta Rabah 1:20), et de dbauche (Brchith 42:9) pour vaincre le Satan dfinitivement. De mme David HaMelekh dit: Jai mdit mes voies et ramen mes pas vers Tes statuts (Thilim 119:59). Les Sages expliquent (Vayikra Rabah 35:1): Tous les jours, David disait: Je pensais aller tel endroit... mais mes jambes me conduisaient vers les maisons dtude et les maisons de prires . Si David savait quen fin de compte il ne ferait rien de mal et quil se rendrait la maison dtude, pourquoi faisaitil chaque jour de tels projets? Cest quil voulait sattaquer au mauvais penchant, comme le disent les Sages: Il faut sans cesse que le bon penchant attaque le mauvais penchant (Brachoth 5a; Zohar I, 202a), et lorsque le mauvais penchant cherchait faire fauter David, il le surmontait et le bon penchant le conduisait dans la maison dtude (Soucah 52b; Kidouchin 30b). La conduite de Yossef est donc claire. Il retourna la maison pour rencontrer la femme de Poutiphar, afin de tendre un pige au Satan, comme le font tous les hommes vertueux, et le vaincre. Il vit alors limage de son pre, non pas de faon ngative pour lempcher de commettre la faute, mais de faon positive. Etant donn que Yossef ressemblait en tout son pre, chaque fois que le Satan se prsentait lui pour le faire fauter, Yossef voyait limage de son pre en se regardant lui-mme, et il pouvait sattaquer au mal et limpuret, aid de son pre, comme il lavait toujours fait. Cela nous montre combien les enfants peuvent procurer du mrite leurs parents, car ils sont la couronne des parents (Brchith Rabah 63:2), comme il est crit (Michley 17:6): La couronne des veillards, ce sont leurs enfants . Ce nest vrai que si les parents duquent leurs enfants dans les voies de D. si bien quen grandissant, ils procurent du mrite leurs parents grce leurs bonnes actions, car dans tout ce quils font ils refltent limage de leurs parents (qui leur indiquent le bon chemin). Si par malheur ils en arrivaient fauter, la faute retomberait aussi sur les parents car la faute de lenfant a son origine chez son pre et sa mre (Soucah 56b). Parents et enfants sont lis lun lautre pour le bien ou pour le mal, et le fils peut attribuer soit le mrite, soit la faute, son pre, car il est conditionn par lducation reue dans son enfance, dans la maison de ses parents. Yossef na jamais eu lintention de fauter, il voulait seulement enseigner aux gnrations futures des principes de base: Le premier: Mme lhomme le plus vertueux, sil ne prend pas garde, risque dtre entran par son mauvais penchant et de commettre des fautes graves. Mais sil veille sur lui-mme, lorsque le mauvais penchant vient le tenter, il peut, grce limage de D. qui est en lui, sabstenir de commettre la faute. Ce nest possible que sil est toujours attach D., de tous ses membres et de toutes ses forces. Le deuxime: Lhomme peut augmenter ses mrites sil attaque toujours le mauvais penchant laide du bon penchant et le domine, comme lont fait Yossef et David. Dans la prire de Roch HaChanah zikhronot nous disons: Car Toi, lEternel, Tu te souviens de tout ce qui est oubli . D. voit que lhomme se repent et regrette sincrement ses fautes alors, Il lui pardonne et oublie les fautes commises. D. ne retient que les fautes que lhomme a oublies. Si lhomme se repent par amour, D. transforme les fautes volontaires en mrites (Yoma 86b), mais si lhomme continue fauter, pensant quil peut se repentir et recommencer fauter impunment (ibid. 88b), alors effectivement, il ne lui est pas donn la possibilit de se repentir et D. se rappelle toutes les fautes que lhomme a oublies, car D. nest pas un homme pour oublier . Cest que, comme nous lavons dj dit, limage de Yaakov est grave sur le Trne de Gloire (Brchith Rabah 82:2) afin quil puisse prendre la dfense des Enfants dIsral en plaidant la puissance du mauvais penchant: Moi, Yaakov, jai combattu de toutes mes forces durant toute ma vie, et par consquent, Toi aussi, Tu dois leur pardonner et effacer leurs fautes. Lorsque lhomme continue fauter (aprs avoir obtenu le pardon), les fautes oublies lui sont rappeles. Mais D., bni soit-Il, est plein de compassion (Yrouchalmi Taanith 82:1; Zohar I, 140a). Il est patient avec un tel homme, Il ne le punit pas de mort, Il ne prte pas attention aux accusateurs. Car D. noublie pas les vertus de Yaakov, dont le portrait est grav sur le Trne de Gloire et Yaakov prend la dfense du pcheur. Tout comme limage de Yaakov a aid Yossef surmonter les tentations, elle aide tout homme surmonter son mauvais penchant.

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Il faut se demander pourquoi cest justement limage de Yaakov qui lui vient en aide et permet Yossef de surmonter lpreuve, et pas autre chose? Il y a l un secret. Yossef menait la lutte contre le mal avec Yaakov, bien quil ait t loin de lui, et il na russi dans cette tche que grce limage de son pre. Il est clair que Yossef voulait provoquer le mauvais penchant, et le vaincre grce limage de son pre (et limage de D.). Lessentiel de lducation des enfants, est de leur enseigner la crainte de D. et la puret. Le rsultat est proportionnel aux efforts que les parents investissent dans lducation de leurs enfants, et les efforts portent leurs fruits lorsque les enfants qui risqueraient de fauter ne commettent pas la faute, soutenus quils sont par lducation quils ont reue. Sils restent fidles D., mme lorsque la tentation est grande, ils verront limage de leurs parents et ne commettront pas la faute, comme il est dit: Il naperoit point diniquit en Yaakov, il ne voit point de mal en Isral (Bamidbar 23:21). Pourquoi? Parce que LEternel son D. est avec lui (ibid.). Cest que mme lheure o il est tent par la faute, il reste attach limage de D. et il vitera de commettre une transgression. Cela explique les propos des Sages concernant le verset (Brchith 45:28): Et Isral scria: Il suffit! Yossef mon fils est encore en vie! Jirai et je le verrai avant de mourir! Yaakov dit: La force de Yossef est grande, car il a subi de nombreuses souffrances, et il est rest beaucoup plus vertueux que moi qui ai faut en pensant (Ichaya 40:27): Ma voie est inconnue de lEternel, mon droit chappe mon D. (Brchit Rabah 94:4). 1. Comment est-il possible que Yaakov puisse dire que Yossef est beaucoup plus vertueux que lui? 2. Dans son livre Kovets Sihoth, le Rabbin Nathan Meir Wachtfoygel demande: En quoi le pouvoir de Yossef tait-il suprieur celui de Yaakov? Ce que nous avons dit plus haut nous permet de rpondre cette question. Yaakov avait raison, car son intention lui, en habitant la terre de Canaan, tait deffacer le mal de ce monde, et dans son combat avec lange dEssav (Houlin 92a; Brchith Rabah 77:3), Yaakov ne visait rien moins que la victoire finale, celle de lavenir (Brchith 33:14). Je ne parviendrai pas maintenant au Mont Ser, mais dans lavenir, afin de juger Essav et Edom (Yrouchalmi Avodah Zarah II:1; Brchith Rabah 78:14), comme il est dit (Ovadia 1:21): Les librateurs monteront sur la montagne de Sion, pour se faire les justiciers du mont dEssav, et la royaut appartiendra lEternel . Cest alors que Yaakov achvera sa tche, mais en attendant, il a donn Essav tous les biens de ce monde (Tana DBey Eliyahou Zouta 19). Tout seul, Yaakov ne remportera pas la victoire. Pour cela il a besoin justement de laide de Yossef qui lui ressemble en tout et qui il a transmis la vraie tradition reue dans la maison dtude de Chem et Ever (Brchith Rabah 63:15, 84:8). Yossef avait lhabitude de se boucler les cheveux et de sembellir, et Yaakov accentua encore sa beaut en lui donnant une tunique raye! En accentuant sa beaut, Yossef le Juste affronte les incitations du Satan, il le domine grce ses grandes vertus, et ce faisant, il diminue la puissance et linfluence du mauvais penchant dans le monde. Il est possible quen agissant de la sorte, il dsirait aussi rgnrer les tincelles de saintet, afin que les Enfants dIsral naient pas besoin de descendre en Egypte. Mais cause de nos fautes, le dcret na pas t annul et Yossef fut emmen en Egypte et achet par Poutiphar... (Brchith 39:1), et l, en Egypte, il continua lutter contre les forces du mal, sans laide de Yaakov son pre. Lorsque Yaakov lapprit, il stonna de la puissance de Yossef et scria: Lorsque Yossef tait avec moi en terre de Canaan, nous avons uvr ensemble pour diminuer linfluence des forces du mal, et chacun aidait lautre dans cette lutte. Maintenant, Yossef se trouve seul en Egypte, il continue seul lutter contre le mauvais penchant, et il russit le surmonter, comme en tmoigne lpisode de la femme de Poutiphar. Cest une preuve indiscutable que le pouvoir de Yossef est norme, car il est seul, il est encore jeune, comme il est crit (Brchith 41:12): Il y avait l avec nous un jeune Hbreu... et pourtant, il russit surmonter les tentations. Yaakov qui toute sa vie avait tudi la Torah dans les tentes de Chem et Ever (Brchith Rabah 63:15) et habitait la maison de son pre, navait pas subi une telle preuve. Tel est le sens de Ma voie est inconnue de lEternel (Ichaya 40:27), car la conduite de Yaakov tait inconnue, mais Yossef agissait ouvertement. Il a fait dominer le bon penchant, et donc, il est certain que le pouvoir du fils est plus grand que celui du pre (Chavouoth 48a).

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De son ct, Yossef, a attribu sa russite et son pouvoir au mrite de Yaakov, dont la bonne influence se manifestait en ce quil avait toujours prsente lesprit limage de son pre, bien quil se soit trouv seul en Egypte. Il lui suffisait de voir limage de son pre pour affronter le Satan, ce qui montre que son succs lui venait de son pre. Yaakov savait que la russite de son fils venait de ce quil avait prsente lesprit son image, et que ce souvenir lui venait en aide. La question revient donc savoir en quoi le pouvoir de Yossef est plus grand que celui de Yaakov (comme le dit le Midrach)? Cest une chose dtre aid directement par son pre (lorsque Yossef tait effectivement avec lui en terre de Canaan), cen est une autre dtre soutenu uniquement par son souvenir. Tout compte fait, limage ne suffit pas. Combien defforts lhomme doit-il faire, pour sentir effectivement la Prsence de D. et pouvoir se retenir de fauter, car le mauvais penchant le tente matin et soir. Voir limage de son pre - cest ainsi que Yaakov raisonnait - nest quun soutien. Yossef a combattu tout seul contre le mauvais penchant, de ses propres forces, sans tre aid. Il ne fait pas de doute que les forces de Yossef sont donc plus grandes que celles de Yaakov. Cest la raison pour laquelle il russit surmonter toutes les difficults.

La confiance en D.
Si tu te souviens de moi lorsque tu seras heureux, rends-moi, de grce, un bon office: parle de moi Pharaon et fais-moi sortir de cette demeure (Brchith 40:14)... Mais le matre-chanson ne se souvint plus de Yossef et il loublia (ibid. v. 23). Rachi rapporte le Midrach (Brchith Rabah 89:2-3): Le matre-chanson ne se souvint pas de lui ce jour-l, et par la suite aussi, il loublia. Yossef est rest prisonnier deux ans de plus pour sen tre remis au bon souvenir de lchanson, comme il est crit (Thilim 40:5): Heureux lhomme qui a confiance en lEternel et ne se tourne pas vers les grands de ce monde . Il sagit de Yossef qui a confiance en D. et ne sappuie pas sur les Egyptiens . Et le Midrach ajoute: A cause de ces mots, souviens-toi et parle de moi, il est rest deux ans de plus en prison, comme il est crit (ibid. 41:1): Au bout de deux ans... Yossef fut puni pour avoir demand au matre-chanson de se souvenir de lui. Cest une chose dimportance primordiale quil nous faut expliquer. 1. Comment se fait-il que Yossef le Juste, fondement du monde (Zohar I, 59b), ait plac sa confiance en un tre humain, car Maudit est lhomme qui met sa confiance en un mortel, qui prend appui sur un tre de chair, et dont le cur sloigne de D. (Yrmia 17:5). Est-il possible de dire que Yossef est maudit? (loin de nous une telle pense)! Dautant plus que nous savons que Yossef est rest vertueux en Egypte (Tanhouma Nasso 28), et quil servait D. en tout lieu. Comment comprendre les paroles de nos Sages? 2. Le Midrach lui-mme se contredit, comme le souligne le Ymerey Hen. Tout dabord, selon le Midrach, le verset Heureux lhomme qui place sa confiance en D. sapplique Yossef, ce qui indique que Yossef a gard confiance en D. Mais la fin, le Midrach dit que Yossef fut puni et resta deux ans de plus en prison pour avoir plac sa confiance en le matre-chanson, lorsquil lui demanda de se souvenir de lui et de parler en sa faveur Pharaon. Est-ce dire quil a plac sa confiance en lui et non en D.? Tout dabord, examinons comment Yossef a prserv son Judasme dans la maison de Poutiphar, avant dtre jet en prison, ce qui nous permettra dvaluer sa confiance en D. et nous montrera quil nacceptait pas de faveurs de la part des hommes. Il est crit (Brchith 39:10): Il ne cda point ses appels pressants pour venir ses cts, pour avoir commerce avec elle . Pour venir ses cts , en ce monde, pour avoir commerce avec elle , dans le monde Venir. Bien que Yossef ait t vendu comme esclave en Egypte, il ne sest pas laiss influencer par son entourage. Il resta vertueux malgr tous les efforts de Zelicha, femme de Poutiphar, pour le sduire comme il est crit (ibid. v. 10): Quoiquelle en parlt chaque jour Yossef, il ne cda pas... Les Sages expliquent (Yoma 35b): Il ne voulait pas se rendre coupable envers D. en venant ses cts pour avoir commerce avec elle , cest--dire quil ne voulait mme pas se trouver en sa prsence sans commettre de faute, car tout dabord le mauvais penchant invite lhomme sapprocher et toucher la chose interdite, et ensuite en faire usage (Brchith Rabah 87:6). Si Yossef avait accept de se trouver en sa prsence, mme sans agir, il aurait pu jouir dune promotion dans la maison de son matre. Malgr tout, il sest domin et il

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sest mis en danger pour ne pas commettre de faute envers D. et ne pas donner libre cours ses penchants, car ouvrir la moindre brche la faute cest fauter envers D. comme le disent les Sages (Brchith Rabah 22:6): Lorsque le mauvais penchant voit un homme occup, ne serait-ce qu sarranger les cheveux, il se dit: celui-l mappartient , et cest dans ce sens que penser une faute est plus grave que commettre la faute elle-mme (Yoma 29a). Yossef se garda de fauter avec la femme de son matre. Par la suite aussi, en prison, il est certain quil sest gard de fauter, comme par exemple en consommant des nourritures interdites (Meam Loez, Ramban et Siftey Kohen). Il ne sest pas laiss entraner par les coutumes gyptiennes non plus, ce qui exige une ferme volont et de grandes forces. Il navait honte ni des moqueries ni du mpris, ni dtre appel par dnigrement lesclave Hbreu (Brchith Rabah 89:7), comme il est dit (Brchith 41:12): Il y avait l un jeune Hbreu, esclave du chef des gardes . Chaque Juif, en tout temps, apprend de lexemple de Yossef que, malgr les moqueries des non-juifs cause de ses coutumes, de son nom et de sa faon de shabiller qui lui sont spcifiques, (Vayikra Rabah 32:5; Pessikta Zouta Chemoth 6:6), il doit garder une grande foi en D. car sans son aide, il ne pourrait pas survivre parmi les non-juifs, ne serait-ce quun seul jour. Pourtant, malgr les vertus de Yossef, sa demande au matre-chanson de parler en sa faveur Pharaon est considre comme une faute, et cela bien que la Torah nous oblige tenter tout ce qui est en notre pouvoir pour amadouer les dirigeants et chapper aux souffrances qui nous affligent. Cest que Yossef savait que la Providence avait voulu quil descende en Egypte, quil y soit fait prisonnier, et il savait aussi que sa descente et son sjour en Egypte navaient pour but que lexil des Enfants dIsral. Toutes les souffrances de Yossef et des Enfants dIsral - et mme le fait que Yossef ait t nomm gouverneur dEgypte - proviennent de la volont de D. Il tait donc interdit Yossef de faire le moindre effort pour sortir de prison, et il naurait pas d tenter une libration prmature, il devait rester en prison jusqu ce que D. dirige les vnements pour le librer. Sa demande tait une faute, un manque de confiance en D., et il fut puni la mesure de sa grandeur et de sa saintet. Son emprisonnement fut prolong afin dexpier cette faute, car il aurait d savoir que son sjour en Egypte et en prison taient des dcrets divins, et il ne devait pas chercher prcipiter les vnements. Il nous est impossible de dire que Yossef navait pas confiance en D., car qui servait D. avec autant de foi que lui? Mais son dsir de prcipiter les vnements fut une faute, puisquil savait que tout dcoule de la volont de D. Sil avait confiance en D., pourquoi a-t-il demand au matre-chanson de le rappeler Pharaon? Cest que Yossef craignait davoir peut-tre commis quelque faute, tout comme Yaakov craignait davoir commis quelque faute qui le livrerait entre les mains dEssav (Brachoth 4a; Chabath 32a; Rachi Vayichlah 32: 11). Yossef craignait de rester en prison cause dune faute quelconque quil aurait peut-tre commise. Il fut puni, afin que dautres sachent quil ne faut avoir confiance quen D. Yossef lui-mme a tent par la suite de corriger cette faute, comme nous le voyons lorsquil a expliqu le rve de Pharaon. Il est crit (Brchith 41:16): Et Yossef rpondit Pharaon: Ce nest pas moi, cest D. qui saura tranquilliser Pharaon . Sa rponse est tonnante car cest finalement Yossef qui a interprt le rve. Tout dabord, il faut savoir que lorsquun homme commet une faute dans quelque domaine que ce soit et quil veut se corriger, il doit se repentir de la mme manire quil a faut . Lorsque loccasion se prsente nouveau de fauter dans les mmes circonstances et quil ne commet pas la mme faute, alors: Celui qui connat toutes les raisons tmoigne quil ne commettra plus cette faute (Rambam, Halakhoth Techouva 2:2). Si la mme faute se prsente lui de nouveau et quil ne la commet pas, son regret et son repentir sont accepts et son mauvais penchant ne lincitera plus fauter de nouveau, et alors, disent les Sages (Yoma 86b): son repentir est complet et total . Il en est de mme de lhomme dot dun dfaut naturel quelconque. Sil veut se corriger, ds que cette tendance naturelle se manifeste, il doit la rprimer et dominer ses sentiments sans faiblir, et ds lors il est assur que cette vilaine tendance disparatra, faisant place une qualit. Par exemple, le contraire de lorgueil, cest lhumilit, le contraire de lavidit, cest le contentement, le contraire dun manque de confiance en D., cest la confiance en D.

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Cela nous permet de dire que le repentir de Yossef tait un repentir par l o il avait faut . Lorsque Yossef se tint devant Pharaon pour lui expliquer son rve, il aurait pu sans aucun doute sattribuer luimme le pouvoir de divination, et dire Pharaon: Je vais texpliquer ton rve selon ma sagesse , ce qui lui aurait procur de grands honneurs et srement une grande fortune. Mais Yossef savait quil avait faut en plaant sa confiance en un homme et quil avait manqu de confiance en D., cest pourquoi devant Pharaon, il se mit en danger en proclamant que seul D. peut tranquilliser Pharaon , lui signifiant: moimme je nai aucune connaissance et aucune sagesse, car la sagesse ne vient que de D. et Lui seul peut tranquilliser Pharaon. Cest dire quil plaa toute sa confiance en D. et il se repentit justement de la mme manire quil avait faut. Ce faisant, Yossef sest mis en danger. Nous savons que Pharaon se faisait passer pour un dieu (Chemoth Rabah 8:3; Tanhouma Vayra 9), et quil se vantait: Le fleuve est moi, cest moi qui lai cr . Pharaon ne croyait en aucune divinit autre que lui-mme, et lorsque Yossef lui dit: D. tapaisera , il aurait pu lui rpondre: Qui est D. pour que jcoute Sa voix? (Chemoth 5:2), il ny a pas dautre divinit que moi... et il aurait pu jeter de nouveau Yossef en prison. Mais Yossef ne craignait pas cela, car il savait quil avait commis une erreur en se fiant au matre-chanson au lieu davoir confiance en D., cest pourquoi il exprima en cette occasion, devant tout le monde, sa confiance totale en lEternel, disant Pharaon que seul D. lapaiserait, et personne dautre. Justement, en cet instant critique o son sort allait tre dcid o il allait, soit tre puni soit tre sauv, il a rpar son erreur, attribuant la grandeur Qui elle appartient (Brchith Rabah 89:9). Yossef affirma sa confiance en D. sans crainte dtre renvoy en prison, il corrigea sa faute en se repentant comme il faut le faire dans une situation semblable o lon corrige ce qui est dfectueux. Nous voyons donc que le Midrach a raison de dire que le verset: Heureux lhomme qui place sa confiance en D. sapplique Yossef (Brchith Rabah 89:2), car au moment critique, il exprima sa confiance en D., de mme que par le pass il stait tenu lcart des Egyptiens et spar deux dans la maison de Poutiphar, sans imiter leurs coutumes. Mais il savait quil avait faut pour avoir plac, ne serait-ce quun bref instant, sa confiance en un homme, et voil quau lieu darguer de sa sagesse, il fit dpendre lexplication du rve de linspiration divine sans craindre dtre rejet en prison car ce moment-l, il se rappela sa faute, et plaa toute sa confiance en D. En fait, D. manifesta sa bont en le gardant en prison deux ans de plus. Si Yossef avait t libr deux ans plus tt, avant le rve de Pharaon, celui-ci naurait pas entendu parler de Yossef et ne laurait pas convoqu pour quil lui explique le sens de son rve, et alors, Yossef naurait pas pu corriger sa faute et exprimer sa confiance en D. Sil avait t libr plus tt, un autre matre laurait achet comme esclave, laurait peut-tre emmen dans un autre pays, et toutes ses prophties de grandeur ne se seraient pas ralises. Mais il est rest en prison, et par la suite, il fut nomm gouverneur de lEgypte et toutes ses prophties se ralisrent. Le Midrach confirme ce que nous disons (Brchith Rabah 89:3; Tanhouma Vaychev 9): Pourquoi Yossef resta-t-il deux ans de plus en prison? Afin que Pharaon rve, que Yossef lui en donne linterprtation, et quil soit nomm gouverneur de lEgypte . Chacun de nous doit mettre sa confiance uniquement en D. qui procure le bien en ce monde et dans lautre.

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Les enfants de Yaakov furent conus en toute puret
Yaakov leur pre leur dit: Vous marrachez mes enfants! Yossef a disparu, Chimon a disparu, et vous voulez mter Benyamin! (Brchith 42:36). Rachi rapporte le Midrach (Brchith Rabah 91:9): Il les souponnait de vouloir tuer ou vendre Benyamin, comme ils avaient vendu Yossef . La vente et le rcit de la tunique entache de sang auxquels Yaakov fait allusion maintenant nous montre quil les souponne, ce qui est nouveau. Il faut se demander pourquoi il ne croit pas leur rcit. Citons tout dabord quelques-uns des versets qui traitent de ce sujet, ce qui nous permettra de comprendre clairement tout cet pisode. Il est crit (Brchith 37:33, 35): Il scria: cest la tunique de mon fils! Une bte froce la dvor! Yossef, Yossef a t mis en pices! et il refusa toute consolation et dit: non! Je rejoindrai, en pleurant, mon fils dans la tombe! Et son pre continua de le pleurer . Par la suite, lorsquils durent aller acheter du bl en Egypte, il est crit (ibid. 42:2): Jai ou dire quil y a du bl en Egypte. Allez-y, achetez-nous du bl et nous resterons en vie au lieu de mourir . Et effectivement les dix fils de Yaakov descendirent en Egypte sur la demande de leur pre (ibid. 42:3) pour y acheter de quoi se nourrir. Dans les versets qui relatent la vente de Yossef et la douleur de Yaakov, ce qui nest pas dit va bien audel de ce qui est dit. 1. Pourquoi le deuil de Yaakov est-il si grand? Il a confiance en D. et il sait que tout ce qui est arriv vient de Lui. Que craint-il? 2. Comment se fait-il quil souponne les frres? Ne sait-il pas que celui qui souponne un innocent est puni (Chabath 97a; Yoma 19b; Tanhouma Metsora 4)? Il est certain que les frres, chefs des tribus dIsral (Thilim 122:4) sont des hommes sans dfaut, vertueux et justes (Chabath 146a, Chemoth Rabah 1:1). Comment les souponner sans preuve et sans raison? En outre, aprs la vente de Yossef, Yaakov perdit linspiration divine (Tanhouma Vayechev 2). Comment donc pouvait-il savoir que ses fils, chefs des saintes tribus dIsral, taient coupables (puisque D. ne le lui avait pas rvl)? 3. Il faut aussi expliquer pourquoi les dix frres de Yossef descendent en Egypte acheter du grain. Un seul ou deux auraient pu accomplir cette mission. Les Sages nous disent (Chabath 89b; Brchith Rabah 86:1; Yalkout Chimoni 39): Yaakov aurait d descendre en Egypte enchan dans des fers mais son mrite le protgea . Les frres nont pas pens un seul instant la peine quils allaient causer Yaakov, leur pre, lorsquils lui annonceraient la perte de son fils, et combien il serait difficile de le consoler. Yaakov de son ct aurait certainement prfr descendre en Egypte, mme enchan dans des fers, afin de raliser la prophtie ta descendance... sera asservie et opprime pendant quatre cents ans (Brchith 15:13), plutt que de souffrir la peine de la vente de Yossef et la perte de linspiration divine (Tanhouma Vayechev 2; Pirkey DRabbi Elizer 38), et ce nest que lorsquil apprit que Yossef tait en vie que la vie revint au cur de Yaakov, leur pre (Brchith 45:27). Yaakov servait D. dans la douleur, cause de lannonce de la mort de Yossef, dautant plus quil avait reu de D. lassurance que si aucun de ses fils ne mourrait de son vivant, il ne verrait pas lenfer (Tanhouma Vayigach 9; Midrach Hagadah). Il refusait de se laisser consoler, il craignait quun manque de perfection (Pessahim 56a; Chir HaChirim 5:15) ne lempche de devenir un soutien pour la Prsence Divine (Brchith Rabah 47:8; Pessikta Zouta Leh Leha 17:22), et que son image ne soit pas grave sur le Trne de Gloire (Brchith Rabah 82:2; Pessikta Zouta Vayets 28:13). Si tout cela devait lui chapper, ce serait signe quil tait en faute, si bien quil scria: Je rejoindrai mon fils dans la tombe! tant sa peine et son deuil taient grands la pense quil en tait la cause. Nous pouvons ajouter, propos du verset assurment (Akh) il a t dvor (Brchith 44:28), que le mot Akh exprime toujours une restriction (Pessahim 5a; Yrouchalmi Brachoth 9:7), ce qui nous indique que Yaakov ne sait pas avec certitude si son fils a t dvor par une bte sauvage ou non, et cest la raison pour laquelle il refuse toute consolation. Les Sages disent mme (Brchith Rabah 84:19): Cest

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une loi que le dfunt est oubli, puisque lon naccepte pas de consolation pour quelquun qui est en vie (Brchith Rabah 84:21; Sofrim 21). Yossef est peut-tre en vie, et dans ce cas, Yaakov peut continuer prier pour que D. dans Sa bienveillance lui fasse retrouver son fils, et alors il saura que sa couche a t parfaite. Yaakov na jamais perdu lespoir de retrouver son fils Yossef en vie. Nous pouvons comprendre pourquoi Yaakov hsitait tellement envoyer son fils Benyamin en Egypte, comme il dit: Vous voulez mter Benyamin! (Brchith 42:36). Cest que toutes les routes sont dangereuses (Yrouchalmi Brachoth 4:4; Kohlet Rabah 3:2), et le Satan ne se montre qu lheure du danger (Yrouchalmi Chabath II:6; Brchith Rabah 91:9). Yaakov craignait quun malheur lui arrive en route et vous ferez descendre, sous le poids de la douleur, mes cheveux blancs dans la tombe (Brchith 42:38). Si Benyamin devait mourir, cest que la couche de Yaakov naurait pas t parfaite. Nous voyons l combien de souffrances lhomme est prt accepter, pourvu que la Prsence Divine ne le quitte pas. Cest ce que dit David HaMelekh (Thilim 51:12-13): D. a cr en moi un cur pur et fait renatre dans mon sein un esprit droit. Ne me rejette pas de devant Ta face, ne me retire pas Ta sainte inspiration . Cest--dire: D. ma donn un cur pur afin que je ne faute pas et un esprit droit afin que je puisse supporter les souffrances, pour quIl ne me rejette pas loin de Lui, quIl ne me prive pas de Sa sainte inspiration. Cest un fait connu quil est des Juifs qui se proclament tels mais nhsitent pas pour autant pouser des femmes non-juives. Ils doivent savoir que non seulement la Prsence Divine les abandonne lorsquils sloignent du D. dIsral, mais ils mettent en grand danger le peuple tout entier et, surtout, ils font souffrir leurs parents de la douleur de voir leurs enfants quitter leur peuple pour aller brouter dans des champs trangers . De tels parents prfreraient mourir plutt que de voir leurs enfants sassimiler des peuples trangers. De tels enfants sont coupables dgosme, nayant agi ainsi que pour satisfaire leurs propres dsirs, sans penser la douleur et aux souffrances dont ils sont la cause. Lorsque D. vit la douleur de Yaakov qui aspirait la perfection, Il lui restitua, dans Sa grande bont, un peu de linspiration divine, comme il est crit (Brchith 42:1): Il vit quil y avait vente de bl en Egypte et les Sages remarquent (Brchith Rabah 91:6): Par inspiration divine, il vit quil y avait de lespoir du ct de lEgypte (La valeur numrique du mot chever, compt avec le mot lui-mme, est la mme que celle de lexpression: Son fils Yossef, un juste fondement ). Le mot Chever, brisure, indique que Yaakov informa ses fils quil ny avait pas lieu davoir peur en Egypte, puisquil sy trouvait quelquun appartenant notre peuple. En apprenant que son fils Yossef tait en vie, quil tait le gouverneur de toute la contre (Brchith 42:6), la vie revint dans le cur de Yaakov (Brchith 45:27) et Rachi explique: Linspiration divine qui stait spare de lui, lui revint (Tanhouma Vayechev 2). Yaakov craignait que sa couche nait peut-tre pas t totalement pure, et que pour cette raison la Prsence Divine lavait quitt. Mais prsent, en apprenant que Yossef tait le gouverneur de lEgypte et quil tait rest vertueux, il comprit quil nen tait rien, et la preuve en est que linspiration divine lui fut restitue. Lorsque linspiration divine lui revint, il sut aussi que ses fils, ceux qui avaient vendu Yossef, avaient prpar la descente en Egypte, et que leur intention avait t pure, puisque D. Lui-mme avait pris part au serment de ne pas rvler Yaakov la vrit (Tanhouma Vayechev 2; Pirkey DRabbi Elizer 38). Yitshak, qui savait que Yossef tait vivant, na rien dvoil non plus, se disant: Si D. ne le fait pas savoir Yaakov, vais-je moi rvler ce secret? (Brchith Rabah 84:21). Pour quelle raison, jusque-l, Yaakov souponnait-il ses fils? Tout le monde sait que les bienfaits de ce monde nadviennent que grce au mrite des Justes, et le monde entier jouit de la prosprit grce eux, comme il est dit (Taanith 24b; Zohar III, 216b): Le monde entier ne se nourrit que grce au mrite de Mon fils Hanania . Effectivement, Yaakov crut tout dabord que son fils tait mort, et il en porta le deuil. Mais par la suite, voyant que lEgypte jouissait de la prosprit matrielle et spirituelle, il comprit que ctait grce Yossef. Effectivement, cest Yossef qui conseilla Pharaon de mettre en rserve les rcoltes, lui disant (Brchith 41:35): Quon amasse toute la nourriture des annes fertiles... Yaakov navait plus de doute que son fils ft vivant et quil ft rest vertueux, comme en tmoignent les Sages (Vayikra Rabah 32:5; Chir HaChirim Rabah 4:24, Tanhouma Nasso 28),

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et il navait donc plus de raison de souponner ses fils de la vente de Yossef. Il comprit que tout avait t motiv par des intentions pures, afin de prparer la descente des Enfants dIsral en Egypte. Maintenant nous pouvons expliquer pourquoi Yaakov envoya ses dix fils (sauf Benyamin) en Egypte. La joie fut trs grande dans la maison de Yaakov lorsquil annona quil y avait vente de bl en Egypte, non pas quils aient manqu de subsistance, puisque nous savons quils avaient encore des rcoltes (Taanith 10b), mais parce que linspiration divine fut restitue Yaakov et il se prparait dj rencontrer Yossef. Il envoya donc tous ses fils faire la paix avec Yossef et se faire pardonner, et finalement, il envoya aussi Benyamin pour que tous les frres soient runis. Sil ny avait pas eu de famine en terre de Canaan, les fils de Yaakov nauraient pas pu descendre en Egypte chercher Yossef sans veiller les soupons de leur pre. La famine obligea les frres descendre en Egypte, ce qui leur donna un prtexte pour chercher Yossef sans veiller les soupons de Yaakov. Yossef aussi savait tout cela. Cest pourquoi, quand il rencontre ses frres et se confesse eux, il est crit (Brchith 45:1): Yossef ne pouvait plus se contenir . Yossef voulait en finir avec lexil. Comment? Citons le Pitouhey Hotam (page 88), concernant ce verset: Il est possible quil y ait l une indication de la fin des temps. Toutes les dates sont passes et nous attendons toujours, et D. aussi attend. Nos yeux sont tourns vers Lui afin quIl nous prenne en piti, et Lui attend le moment o Il nous ramnera Lui et Il est en peine pour nous et pour Sa propre gloire. Cest lattribut de Justice qui cause le retard, mais nous avons confiance quIl sauvera le peuple de Son hritage et nous dvoilera Sa Prsence. Tel est le sens du verset Yossef ne pouvait plus se contenir . Ce verset indique notre long exil, et parle au cur des Enfants dIsral, leur enjoignant de ne pas perdre espoir . Dans le mme sens, les Sages disent (Yrouchalmi Brachoth 89:3): Rahel fut lune des premires prophtesses. Elle prie pour mettre un terme lexil, comme il est dit: Rahel pleure pour ses enfants... (Yrmia 31:15) . Elle sait que la rdemption ne viendra quaprs six mille ans, qui correspondent aux six jours de la cration du monde (Zohar II, 176b, 181b; III, 9b), et que la permanence du monde ne dpend que de lattribut de Misricorde, bien que lattribut de Justice domine. Cest pourquoi elle appela son fils Yossef, indiquant par ce nom la fin de lexil. Le Nom de D. est indiqu dans les premires lettres des mots Yossef ne pouvait plus (Vlo Yakhal Yossef) (Vav, Youd, Youd = 26), et les dernires lettres forment le mot Elef. Dans le sixime millnaire D. amnera la rdemption. Ainsi, Yossef indiqua ses frres lapproche du temps de la rdemption, et la venue du Messie. Quelle est la voie suivre? Chacun doit sefforcer de ne pas chasser la Prsence Divine et de ne pas causer les souffrances et les peines qui sont la consquence des mariages mixtes et de lassimilation, choses qui sont svrement punies. Il faut rester attach au peuple de D. et Son hritage, de faon tre heureux en ce monde et dans lautre.

La lutte contre le mauvais penchant, une responsabilit collective


Au dbut de la section Vayigach, il est crit: Alors Yhouda savana vers lui (Yossef) en disant: De grce seigneur! que ton serviteur parle aux oreilles de mon seigneur et que ta colre nclate pas contre ton serviteur! (Brchith 44:19). Le Rabbin Nahoum de Tchernoville, crit dans son livre Mor Einaym, au dbut de la section Vayigach: Il faut comprendre pourquoi ce rcit est crit dans la Torah qui nest pas un livre de rcits, maudit celui qui fait de la Torah un livre danecdotes (Zohar III, 149b). Il est crit: Mon D.! Tu es infiniment grand, Tu es revtu de splendeur et de majest! (Thilim 104:1). La splendeur et la majest reprsentent la Torah, comme il est crit (ibid. 8:2): Tu as rpandu Ta majest sous les cieux! , et il est dit que D. est revtu de splendeur et de majest, car le Crateur Sest envelopp de la Torah qui est compare un feu comme il est crit (Yrmia 23:29): Est-ce que Ma parole ne ressemble pas au feu dit lEternel . De mme quil est impossible de saisir le feu sans protection, de mme la Torah est appele un feu parce quil est impossible de la saisir sans outils, et sans protection. Parfois la Torah est compare de leau, comme il est crit (Ichaya 55:1): Vous qui avez soif, venez, voici de leau! Apparemment, il est difficile de comprendre

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comment la Torah peut tre compose de deux lments contraires, le feu et leau. Une telle chose nest possible que parce que D., bni soit-Il, tablit la paix du haut de Ses demeures clestes (Yov 25:2), et les Sages remarquent (Haguigah 12a) que le mot Shamayim, les cieux, est compos de Esh, le feu, et de Mayim, leau, que D. a mls pour crer les cieux. Il les lie ensemble et les unit, car Il est au-dessus deux et les contrle . Nous devons comprendre le sens cach de ltonnant dialogue entre Yhouda et Yossef. 1. La section Mikets raconte lhistoire de la coupe qui fut finalement trouve dans la sacoche de Benyamin. Lorsque le serviteur de Yossef rattrape les frres de Yossef et les accuse davoir vol la coupe de leur matre, Yhouda prend linitiative et sans avoir t invit dcider de son sort, il rpond immdiatement: Celui de tes serviteurs qui laura en sa possession, quil meure; et nous-mmes nous serons les esclaves de mon seigneur (Brchith 44:9). Il est impossible de revenir sur une telle dclaration. Lorsque finalement la coupe est dcouverte dans la sacoche de Benyamin, pourquoi Yhouda commence-t-il par discuter du sort de Benyamin, alors que lenvoy a dj rduit la svrit de la sentence en disant que seul celui chez qui la coupe sera trouve sera son esclave, et que les autres frres seront quittes (ibid. 44:10). Yhouda navait-il pas prononc sa propre sentence? 2. Si lon voulait signifier que Yhouda parlementait avec cet homme parce quil stait port garant de lenfant, de Benyamin, comme il est crit (ibid. 43:9): Cest moi qui rponds de lui, cest moi que tu le redemanderas... au point quil tait prt perdre les deux mondes pour lui, comme le disent les Sages (Brchith Rabah 91:10), pourquoi na-t-il pas pes ses paroles plus soigneusement, avant mme que le serviteur de Yossef nentreprenne ses recherches? Naurait-il pas pu sy refuser et sauver Benyamin, sans cette discussion? 3. A propos du verset: Alors Yhouda savana vers lui... , les Sages disent (Brchith Rabah 93: 6): Il sapprocha de Yossef autant dans lintention de lapaiser que de le combattre, en le menaant: si je tire mon pe, je commencerai par toi, et je terminerai par Pharaon . Cest troublant. Pourquoi Yhouda veut-il combattre Yossef cause de Benyamin, alors que lui-mme avait dcrt une sentence de mort pour celui qui dtiendrait la coupe (et ce nest que lenvoy qui muta la sentence)? 4. Le Rabbi Menachem Mendel de Loubavitch dans son livre Likoutey Sihot sinterroge ce sujet: Effectivement Yhouda sest port garant de Benyamin, comme il est crit (Brchith 44:32): Ton serviteur sest port garant de lenfant , mais pourquoi Yhouda tenait-il combattre Yossef? car en ralit Yhouda et ses frres taient peu nombreux, et Yossef tait gouverneur de toute lEgypte. Sil dclarait la guerre contre les frres, il les vaincrait certainement. Bien que Yhouda ait t un combattant exceptionnel, Yossef et ses fils taient encore plus vaillants que lui, comme le disent les Sages (Brchith Rabah 97:7): Yhouda et ses frres ont frapp des pieds et toute la terre dEgypte en a trembl . Face eux, le fils de Yossef rvla une force extraordinaire car il a frapp du pied la colonne de pierre qui lui servait de sige et en a fait un amas de poussire . Yhouda fut trs surpris et se dit: Celui-l est plus fort que moi. Cela montre que Yhouda stait mis en danger en dclarant la guerre Yossef! 5. En dernier lieu, nous devons comprendre le sens de la mission du serviteur envoy par Yossef. Il est crit (ibid. 44:4-5): Yossef dit lintendant de sa maison: Va, cours aprs ces hommes, et aussitt que tu les auras rattraps, dis-leur: Pourquoi avez-vous rendu le mal pour le bien? Nest-ce pas dans cette coupe que boit mon matre, et ne lui sert-elle pas pour la divination? Vous avez trs mal agi . La squence nest pas claire. Apparemment, il aurait d dire tout dabord que son matre buvait dans cette coupe et quelle lui servait pour la divination, et seulement ensuite il aurait d leur faire savoir que, grce cette divination, il savait quils allaient voler cette coupe et quil les avait poursuivis pour cette raison. Il les souponne, et donc pourquoi rendez-vous le mal pour le bien? Tout dabord il aurait d leur dire ce quil leur reprochait, et seulement ensuite les rprimander de leur conduite, au lieu de commencer par la rprimande, et leur faire savoir ensuite en quoi ils avaient mal agi. Avant de rpondre aux questions souleves, remarquons des choses merveilleuses dans cette section: la coupe, dissimule dans la sacoche de Benyamin, les paroles de Yhouda lenvoy de Yossef, enfin laffrontement entre Yhouda et Yossef.

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Le rcit de Yhouda et Yossef donne chacun une leon de morale en indiquant comment vaincre le mauvais penchant, lloigner, ne pas lcouter, se repentir de tout cur, confesser ses fautes et se rapprocher de D. Si lhomme faute et quil regrette sa faute, il doit savoir que la confession est lessentiel du repentir, comme lcrit le Rambam (Halahoth Tchouvah 1:1): Laveu de ses fautes est un commandement de la Torah, comme il est crit (Bamidbar 5:6-7): Si un homme ou une femme ont caus quelque prjudice... ils doivent confesser les fautes commises . Les fautes commises lge adulte transforment rtrospectivement toutes les fautes de lenfance en fautes volontaires, parce que maintenant nous sommes responsables de nos actes dont nous comprenons le sens et la gravit. Il est donc indispensable de nous repentir et, de ce fait, nos fautes se changent en mrites (Yoma 86b). Le Satan continue provoquer et faire fauter mme celui qui a dj pris la dcision de se repentir de ses fautes et de voir un peu de lumire, la lumire de la Torah, comme il est crit: La Torah est une lumire (Michley 6:23; Mguilah 16b), et qui dsire se librer de son matrialisme, comme il est crit: Le matin venu, on laissa partir ces hommes, eux et leurs nes (Brchith 44:3). Il ne laisse pas lhomme la possibilit de lui chapper (ibid. 44:4), il le poursuit et latteint , ou bien pour lapaiser, ou bien pour le combattre. Le mauvais penchant dit lhomme dsireux de se repentir (sur la base de la discussion entre les frres de Yossef et son envoy): la voie des mchants russit. Tant que tu tais en ma prsence tu russissais, pourquoi me dlaisses-tu prsent et pourquoi veux-tu me rendre le mal pour le bien? Au lieu dtre puni pour toutes tes fautes, tu aurais russi... Cest seulement grce moi que tu tes enrichi et que tu as progress. Pour le convaincre de revenir vers lui (vers le mauvais penchant) et pour le maintenir sous son emprise, le mauvais penchant numre en dtail les avantages reus, et lui reproche de lui rendre le mal pour le bien. Mais il ne mentionne pas le mal que lhomme qui se repent cause au mauvais penchant lorsquil sloigne de lui, sans compter les malheurs qui arrivent lhomme en consquence de ses fautes et de ses transgressions. Celui qui se repent a le devoir de rfuter les arguments du mauvais penchant et de faire valoir que tant quil ne stait pas repenti sincrement, il tait comme un enfant qui ignore en quoi consiste sa faute et quelles en sont les consquences, mais prsent, il sest repenti de ses fautes, non pas quil veuille rendre au mauvais penchant le mal pour le bien mais parce quil a dcid de surmonter toutes les difficults et peu lui importe dtre priv de toutes ses bonts qui sont en fin de compte nfastes. Il sait que les souffrances et les ennuis proviennent des avantages douteux quil tire de sa mauvaise conduite. Dornavant, il est mme prt mourir, plutt que de fauter sur les conseils du mauvais penchant et il prfre tre lesclave de D., dont il a reconnu la bont et la bienveillance, chaque instant de sa vie. Ceci est indiqu dans le verset (Brchith 44:9): Celui de tes serviteurs qui laura en sa possession, quil meure; et nous-mmes nous serons les esclaves de mon seigneur . Il prfre mourir, parce quil choisit dtre le serviteur de son seigneur, de D. Le mauvais penchant ne lche pas pour autant son homme, le menaant de lamener regretter de lavoir abandonn, et menaant aussi tous ceux qui se repentent den subir les consquences et daffronter des preuves jusqu ce que vous reveniez sous mon joug, comme auparavant , comme il est dit dans le verset: Celui qui en sera trouv possesseur sera mon esclave (Brchith 44:10). Dans la lutte entre celui qui se repent et le mauvais penchant, chacun essaie de faire chouer lautre, dans le sens o il est dit: Ils se htrent chacun de descendre leurs sacs terre (ibid. v. 11). Bien que celui qui se repent soccupe de Torah et dsire sabreuver de cet lixir de vie, il risque de retomber dans les piges du mauvais penchant dont lhabilet est connue. Il est capable de lui faire croire que, sil sest appauvri et a perdu sa situation, cest pour avoir adopt le chemin de la Torah et avoir nglig ses besoins matriels - tels sont les arguments du mauvais penchant, mme envers un homme de Torah. Mais il faut le vaincre, et savoir que cette chute est ncessaire llvation, que lespoir nest pas perdu et que grce lassiduit et aux prires, nous remonterons la pente, avec laide de D. Si le mauvais penchant demande: Comment se fait-il que justement maintenant, alors que nous suivons les voies de la Torah, nous nous trouvions dans une situation dsespre, qui semble sans avenir? Cest dans le but de nous convaincre de suivre ses conseils, en nous faisant miroiter plus de succs que par le pass. Il faut lui rtorquer que le

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Tout-Puissant a su atteindre liniquit de tes serviteurs (Brchith 44:16), cest--dire: cause des fautes que jai commises, je suis tomb dans la situation difficile o je me trouve aujourdhui, mais malgr tout, je continue - et je dsire continuer - tre le serviteur de D. Le mauvais penchant nen est pas dcourag pour autant, et il ne se laisse pas affaiblir, comme le disent les Sages (Tanhouma Bechalah 3): Le mauvais penchant grandit avec lhomme depuis son enfance jusqu sa vieillesse, et il tente chaque jour de le faire faillir , et (Soucah 52b; Kidouchin 30b): Le mauvais penchant de chaque homme prend le dessus chaque jour et tente de le faire tomber. Tout dabord, il se prsente comme un invit... et en fin de compte il devient le matre , et (Brchith Rabah 22:11): Il tente de lattraper dans ses piges . Chaque jour il se prsente sous une forme diffrente et avec des arguments nouveaux afin de lui faire commettre quelque dlit, et il ne laisse lhomme aucun rpit. Jusquau jour de sa mort, il tente par tous les moyens de lloigner de D., et de le maintenir assujetti, comme auparavant. Mais il faut tre prt risquer mme sa vie dans la lutte contre le mauvais penchant puisque lhomme est garant de lenfant , de lenfant quil tait, et alors les fautes volontaires sont considres comme des fautes par inadvertance et elles lui sont pardonnes et effaces. Mais prsent, Comment retournerai-je auprs de mon pre sans ramener son enfant? (Brchith 44:34), car prsent, il ralise la gravit des transgressions et la justesse de la punition ainsi que de la rcompense pour lobissance aux commandements, et sil commet une faute maintenant, il est jug rtrospectivement pour les fautes commises durant son enfance, comme sil avait agi en connaissance de cause. Cest la raison pour laquelle lhomme doit dclarer une guerre sans merci au mauvais penchant qui est le Satan, qui est lange de la mort (Baba Bathra 16a), bien quil sache que le Satan est plus fort que lui car il est un ange de feu (Zohar I, 80a), et que lui nest fait que de chair et de sang (comme nous le disons dans la prire de Yom Kippour). Malgr tout, la victoire est promise lhomme qui lutte, comme il est crit: Quand tu dclareras la guerre tes ennemis, que lEternel ton D. livrera en ton pouvoir... (Devarim 21:10). Celui qui avoue ses fautes est semblable Yhouda qui na pas eu honte davouer sa faute, et qui finit par hriter, effectivement, du monde Venir (Sotah 7ab). [Il est essentiel de ne pas tomber dans les piges que le mauvais penchant tend celui qui se repent et commence labandonner. Tout dabord le mauvais penchant se prsente lui en ami soucieux de son bien et il lui demande: pourquoi me rends-tu le mal pour le bien? Le repentant lui rpondra que jusqu prsent il ignorait que sa conduite tait contraire la volont de D. et quil avait suivi ses conseils, mais que, maintenant, il prfrerait mourir plutt que de lcouter car il dsire rester le serviteur de D. Alors, le mauvais penchant tente de le persuader quil a perdu sa situation parce quil a choisi la Torah et une vie religieuse. Or il ne faut pas se laisser prendre cet argument, et comprendre que cette nouvelle conduite lui fait pardonner ses fautes passes. De mme que le mauvais penchant nous dclare la guerre, de mme nous avons le devoir de le combattre ouvertement et avec dtermination, et les mots vayassiguem, vayigach, indiquent une approche belliqueuse]. Chacun doit savoir quil est ncessaire de prendre bien garde aux piges du mauvais penchant et aux preuves quil nous propose car il risque fort de nous causer beaucoup de souffrances, de nous priver de nos moyens de subsistance ou de nous prouver par une maladie, mais il faut le repousser. Le mauvais penchant nous souffle: tant que tu nobservais pas la Torah et que tu ne toccupais pas de faire des bonnes actions, tu russissais et maintenant, non seulement la Torah ne te soutient pas, mais elle te nuit, tu as perdu tes moyens de subsistance, et tu nas mme pas la possibilit de faire ce que la Torah commande... Il faut surmonter cette preuve, il faut combattre le mauvais penchant au risque de sa vie, puisque lon est garant de son pass (le mot Arv, garant, est form des mmes lettres que le mot Avar, pass), afin que les fautes commises nous soient pardonnes. Combien grande est notre perte si nous tombons dans les piges du mauvais penchant qui nous aborde tantt en ami, tantt en ennemi. Il faut avoir confiance en D. qui vient en aide et soutient, et se dire: D. est avec moi, en moi, et je nai aucune raison de craindre le mauvais penchant, bien quil soit fait de feu . Effectivement, D. habite en chaque homme et il ny a pas de raison de craindre le Satan et ses exhortations. Il faut uniquement craindre D.

Parachat mikets Ton serviteur sest port garant de lenfant

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Expliquons maintenant le sens simple de ces crits. Yhouda na pas pens un seul instant que lun de ses frres ait pu voler la coupe de Yossef, puisquil est dit des chefs des tribus (Thilim 122:4): Cest l que montent les tribus, les tribus de lEternel, selon la charte dIsral, pour clbrer le Nom du Seigneur . Pourquoi ces hommes saints voleraient-ils la coupe? Il eut donc laudace daffronter le serviteur de Yossef venu les accuser davoir vol la coupe de son matre. Il tait tellement sr quaucun de ses frres navait vol la coupe, quil a dit que celui de tes serviteurs qui laura en sa possession meure , et il a renchri en ajoutant que tous les autres frres seraient ses esclaves. Mais le serviteur de Yossef craignait que, sil trouvait la coupe dans une des sacoches, les frres le tueraient, et il savait quils taient puissants et tenaient parole. Cest pourquoi il a rejet demble les paroles de Yhouda, en disant que seul celui chez qui se trouverait la coupe deviendrait esclave, et que les autres frres seraient considrs innocents. Nous avons demand pourquoi le serviteur de Yossef ne leur fit pas savoir demble de quoi il les accusait, mais commena par leur demander pourquoi ils avaient rendu Yossef le mal pour le bien. Il y a deux rponses cette question: 1. Il voulait leur signifier que Yossef tait devin mme sans coupe. Il leur fit savoir quil ne doutait pas quils neussent pas tous vol la coupe, mais que lun deux let vole et en cela ils avaient rendu le mal pour le bien. 2. Il leur a intentionnellement dit tout dabord quils avaient rendu le mal pour le bien afin de les troubler, pour leur faire dire que le coupable devrait mourir ou devenir son esclave. Sil avait abord demble le sujet lamiable, les frres auraient sans doute cherch la coupe sans prononcer de sentence contre le voleur. Dans ce cas, Yossef aurait tout perdu. Mais parce quil sest adress eux avec duret, quil les a troubls en leur disant quils avaient rendu le mal pour le bien, Yhouda a tout de suite pris les devants afin dextirper tout soupon du cur du serviteur de Yossef, et cela parce quil na pas pens un seul instant que lun des frres ait pu commettre un tel vol puisquils taient tous les tribus de lEternel . Cela nous montre la grande sagesse de Yossef qui russit confondre ses frres grce aux paroles pleines de sagesse quil mit dans la bouche de son envoy. Par ailleurs, nous constatons la grandeur de Yhouda et des autres frres. Sils avaient voulu senfuir dEgypte, sans revenir chez Yossef, ils auraient pu le faire, puisquils taient dj hors de la ville, comme il est crit (Brchith 44:4): Ils venaient de quitter la ville, ils en taient peu de distance... Bien quils nen fussent pas loin, ils auraient pu senfuir car ils taient dj sortis de la ville. De plus, ils taient tous vaillants, ils auraient pu tuer lenvoy de Yossef et poursuivre leur route. Mais parce que Yhouda avait jur que celui chez qui se trouverait la coupe serait passible de la peine de mort et les autres esclaves, ils retournrent tous chez Yossef autant pour sexpliquer avec lui que pour effacer tout soupon de son cur et lui faire savoir quils navaient rien vol. Ils taient certains que Benyamin tait innocent, dautant plus que la divination leur tait interdite, comme il est crit (Vayikra 19:26): Ne vous livrez pas la divination. Benyamin lui-mme tait un homme pieux et vertueux qui, de sa vie navait pas got au pch, comme disent de lui les Sages (Baba Bathra 17a): Il nest mort qu cause de la faute du serpent (Il est possible aussi de dire quil avait tellement de peine de cette accusation que cest comme sil en tait mort, car le mot Nahash, serpent, ressemble au mot Nihoush, la divination). En elles-mmes, les paroles de Yhouda ne constituaient aucune obligation car il savait quil sagissait dune accusation sans fondement et quil ny avait pas lieu de souponner Benyamin davoir vol la coupe. Mais, pour tenir sa parole, il accepta que les autres frres deviennent esclaves, pourvu que Benyamin retournt chez son pre, parce quil stait port garant de lui. Celui qui est garant dun autre prend sa place et, si Benyamin est accus de vol, Yhouda peut recevoir sa place la punition qui lui revient. Le mot Arv, garant, est form des mmes lettres que le mot Avour, en faveur de, cest--dire quil se porte garant de lui, et Yhouda ne trahirait pas sa parole en prenant sur lui-mme la punition de Benyamin. Cest comme si lui - Yhouda - tait le voleur, ce qui est correct puisque quiconque se porte garant dun autre doit se mettre en danger pour lui.

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Yhouda dclare donc la guerre Yossef, car il se sentait lui-mme accus la place du jeune homme dont il stait port garant. Il savait quil devait se tenir la place de lautre et il na trahi ni sa promesse, ni son serment, ni sa parole. Cest une grande leon pour chacun. Chacun doit savoir quil est le garant de ses enfants et que ses enfants sont garants de lui, comme le disent les Sages (Kala 2; Chir HaChirim Rabah 1:24; Yalkout Chimoni Yrmia 267): Au moment du don de la Torah, les Enfants dIsral ont pris leurs enfants pour garants, et D. a accept cette garantie . Lhomme doit savoir que ses enfants sont ses garants. Lorsque nous transgressons les commandements de D., nos enfants qui sont nos garants sont punis, ce qui est aussi une punition pour le pre, comme il est crit (Chemoth 34:7): Il poursuit les mfaits des pres sur les enfants, sur les petitsenfants, jusqu la troisime et la quatrime gnration , et ailleurs il est crit (Yrmia 32:18): Tu fais retomber la faute des pres sur la tte de leurs descendants . Pourquoi les enfants sont-ils punis? Parce que les parents ont priv leurs enfants de la Torah, ne les ont pas habitus obir ses commandements et ne les ont pas duqus dans la voie de D. Telle est la responsabilit des Enfants dIsral les uns envers les autres, comme le disent les Sages (Chevouot 39a; Sanhdrin 27b; Sotah 37a): Si lun faute, lautre qui est son garant (et aurait d len empcher) est aussi puni , et cest pourquoi les Sages enseignent la responsabilit rciproque sur la base du verset (Vayikra 26:37): Ils trbucheront lun sur lautre... car du fait quils sont lis les uns aux autres, lun est puni pour la faute de lautre, et tous deux sont coupables. Nous comprenons que Yhouda ait pris un tel risque et ft prt se faire esclave la place de Benyamin dont il stait port garant. Chacun doit se porter garant de lautre, laider et le soutenir dans lobservance de la Torah et de ses commandements, afin quaucun ne soit puni et que chacun reoive sa juste rcompense.

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vayigach
Lacquisition de la Torah par lunion du corps et de lme
Alors Yhouda savana vers lui, lui disant: de grce, mon seigneur! Que ton serviteur fasse entendre sa parole aux oreilles de mon seigneur, et que ta colre nclate pas contre ton serviteur, car tu es lgal de Pharaon (Brchith 44:18). Ce verset est difficile comprendre. Pourquoi dcrit-il aussi longuement la faon dont Yhouda aborde Yossef? Et pourquoi est-ce Yhouda qui aborde Yossef, et non pas un autre des fils de Yaakov? Si cest parce que Yhouda sest port garant de Benyamin, comme il le dit Yossef (ibid. 44:32): Ton serviteur a rpondu de cet enfant son pre , il faut se demander pourquoi la garantie de Yhouda fut accepte et pas celle dun autre de ses frres? Avant la descente de Yaakov en Egypte, nous lisons: Yaakov envoya Yhouda en avant vers Yossef, pour quil lui prpare lentre en Gochen (ibid. 46:28). Les Sages disent ce sujet (Brchith Rabah 95: 3): Afin de lui prparer une maison dtude do sortira la Torah . Pourquoi est-ce justement Yhouda qui reoit la mission daller au-devant prparer une maison dtude, et non pas un autre des fils de Yaakov? Pour rpondre, il faut citer le Zohar (I 206b): Rabbi Elazar dit: Pourquoi est-ce Yhouda qui savana vers Yossef? Il convient que ce soit justement lui, parce quil stait port garant, comme il est dit (Brchith 44:32): Ton serviteur a rpondu de cet enfant son pre . Il y a l un sens cach. Ils auraient d savancer lun vers lautre, car Yossef est le Juste et Yhouda le Roi, mais cest Yhouda qui sest approch de Yossef. Ce rapprochement a apport nombre de bienfaits dans le monde, il a gnr la paix entre les tribus, la rconciliation entre Yhouda et Yossef, et rendu le souffle de vie Yaakov, comme il est dit (ibid. 45:27): La vie revint au cur de Yaakov leur pre , ce qui montre que leur rapprochement tait ncessaire tous les points de vue possibles . Ces paroles du Zohar sont merveilleuses. 1. Il est vident que Yhouda doit savancer. Nest-il pas le garant de lenfant? 2. Pourquoi est-ce justement le Roi qui doit sapprocher du Juste, si bien que seul Yhouda pouvait sapprocher de Yossef? Et quel est le secret qui explique pourquoi Yhouda savance vers son frre Yossef? Chaque homme est form de deux parties. La premire est le souffle de vie qui habite son corps qui est la Royaut, par lequel il domine tout ce que D. a cr dans le monde et sans lequel il lui est impossible dagir, que ce soit en bien ou en mal. Cest ce qui est indiqu figurativement dans le verset (Esther 5:1): Esther se revtit de ses atours de reine . Lautre partie de lhomme est son me, laspect divin en lui, appel le Juste (et cest le sens du nom Menach, le fils de Yossef, dont les lettres sont les mmes que celles du mot Nchama, lme). Ces deux aspects correspondent au ciel et la terre, comme le disent les Sages (Brchith Rabah 8:11): Lhomme tient du monde den-Haut et du monde den-bas , possdant la fois un corps et une me, il tient de la Royaut et du Juste. Chacun sait que le corps, qui est matriel, est attir par les choses matrielles de ce monde et ses plaisirs, sans plus. Mais lme, toute spirituelle, est attire par les choses spirituelles, car elle vient du Trne de Gloire et elle est originaire des mondes suprieurs. Pour que ces deux aspects, la Royaut et le Juste qui sont le corps et lme, soient lis lun lautre et coexistent amicalement, fraternellement, et pacifiquement, pour que tous deux puissent ensemble servir D., chacun a des devoirs envers lautre, et chacun bnficie de lautre. Le corps physique bnficie de ce monde matriel en puret et saintet, sans aucun usufruit, et tous ses gestes sont motivs par lamour du Ciel, comme le disent les Sages (Avoth 2:17): Que le but de toutes tes actions soit de plaire D. , et alors le corps se sanctifie et devient auxiliaire de la saintet de lme. De son ct, lme profite de labondance et de lillumination quelle reoit den-Haut, ce qui lui permet de slever toujours davantage. Mais ce nest possible que si la paix et lharmonie rgnent entre le corps et lme, lorsque le corps est subordonn lme, cest--dire lorsque la Royaut se plie devant le Juste.

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Le premier verset de notre section: Yhouda savana vers lui fait allusion ce rapport. Cest justement Yhouda, cest--dire le corps (qui indique la Royaut, comme Yhouda) qui sapproche de Yossef le Juste, lme. Il se soumet lui et lui dit mon seigneur , cest--dire: toi, lme sainte qui se trouve en moi, tu es appele Juste et donc je dois me soumettre devant toi et tappeler mon seigneur , car tu es primordiale et je suis moi, secondaire. Et le verset continue: Que ton serviteur fasse entendre sa parole aux oreilles de mon seigneur , moi, le corps, je suis ton serviteur, et toi lme, tu es le matre, et je dsire te faire une demande: Que ta colre nclate pas contre ton serviteur, car tu es lgale de Pharaon , cest-dire: jusqu prsent jai faut envers toi et je tai caus du tort, mais je le regrette. Ne te mets donc pas en colre contre moi et ne me quitte pas cause de mes fautes. Pourquoi? Car tu es lgale de Pharaon , cest--dire que toi, lme, tu appartiens D. qui rtribue fidlement (le mot Pharaon (Paro et le mot Praone, rtribution, ont la mme racine), et D. est fidle au pacte de bienveillance en faveur de ceux qui Laiment et obissent Ses lois jusqu la millime gnration, mais Il punit Ses ennemis directement... (Devarim 7:9-10), et Il attend et espre que lhomme regrette ses fautes comme il est crit (Yhezkiel 33: 11): Je ne souhaite pas que le mchant meure, mais quil renonce sa voie et quil vive! et (Malakhi 3: 7): Revenez Moi et Je reviendrai vous! De mme, lme doit tre pure comme D. est pur puisquelle est la partie divine de lhomme. Cela nous permet de comprendre pourquoi Yaakov envoya au devant justement Yhouda pour tablir une maison dtude do sortirait la Torah. Yhouda, dont il est dit (Brchith 49:8): Yhouda, tes frres te rendront hommage, ta main fera ployer le cou de tes ennemis, les enfants de ton pre sinclineront devant toi , reprsente la Royaut, le corps, et cest lui qui ira en terre de Gochen vers Yossef le Juste, fondement du monde (Zohar I, 59b), qui est lme. Cest grce la rencontre entre le corps et lme quils peuvent sasseoir ensemble pour tudier la Torah et servir D. sincrement et de tout cur. La bndiction de Yaakov Yhouda nous enseigne que lorsque le corps sapproche de lme et se plie devant elle, lhomme peut slever de plus en plus haut, mme si le corps a t spar de lme pour quelque temps. Il est crit (Brchith 49:9): Tu es un jeune lion Yhouda, quand tu reviens, mon fils, avec ta capture! Il se couche... cest le repos du lion et du lopard: qui oserait le rveiller? Rachi explique: Avec ta capture - Je tai souponn parce quune bte froce la dvor! Yossef, Yossef a t mis en pices! (Brchith 37:33) et Yhouda est compar au lion. Tu reviens, mon fils... - Tu tes retir et tu as dit: Quel avantage si nous tuons notre frre? (ibid. v. 26) . Comme nous lavons dit, Yaakov dit Yhouda (qui reprsente la Royaut et le corps): Je tai souponn davoir tu Yossef le Juste qui reprsente lme... mais lorsque tu as dit quel avantage , tu as signifi et prouv que tu nas pas tu Yossef, au contraire, tu as commenc faire la paix et te rconcilier avec lui, avec lme (lexpression quel avantage indique le dbut de la rconciliation et de la paix). Grce ce dbut de rconciliation, en tapprochant de lui, tu as runi le corps et lme et tu as probablement russi par l amener la prosprit dans le monde, et le prparer recevoir le Messie, notre sauveur. Un tel rapprochement et une telle rconciliation sont le repos du lion et du lopard: qui oserait les rveiller? Autrement dit, lorsque le corps et lme sont ensemble soumis D., dans une mme intention, le mauvais penchant ne se rveille pas, il ne peut pas placer des embches. Grce la rconciliation et la paix entre lme et le corps, lhomme peut faire venir lpoque de la rdemption. Lessentiel est que le corps se soumette lme, la partie divine en lhomme. A prsent, prtez loreille et coutez une explication merveilleuse. Comment le corps et lme peuventils, effectivement, vivre ensemble? Le corps a des besoins matriels et des tendances physiques, tandis que toutes les aspirations de lme sont spirituelles, il est donc impossible quils vivent ensemble, dautant plus que le corps ne veut que parcourir la terre, l o ses yeux et ses dsirs le conduisent, mme vers ce qui est interdit, dans le sens o il est dit: Lil voit, le cur dsire, et le corps commet la transgression (Rachi, Chelah 15:39). Il sadonne entirement aux plaisirs de ce monde, tandis que lme nest attache qu D., bni soit-Il. Pourtant, grce la connaissance de la vrit, le corps peut se plier et se soumettre lme. Prcisment par la connaissance de la vrit, car la vrit, cest la Torah (Yrouchalmi Roch HaChana III:8; Tana DBey Eliyahou Zouta 21). Ce nest que grce la Torah que le corps et lme peuvent vivre ensemble, et cest elle qui les unit.

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Il est donc ais de comprendre pourquoi Yaakov envoya Yhouda vers Yossef pour instituer une maison dtude. Yhouda, qui reprsente la Royaut (comme le dit le Zohar), et le corps (comme nous lavons dit), fut envoy vers Yossef qui est le Juste (comme le dit le Zohar) et lme (comme nous lavons dit). Si Yhouda, qui reprsente le corps, institue une maison dtude et soccupe de Torah, il se soumettra lme. De cette faon, Yaakov aussi soccupera de Torah, et nous savons que lattribut de Vrit est attach Yaakov, comme il est crit (Micha 7:20): Tu as donn la vrit Yaakov , et cette Vrit, cest la Torah. Tu as donn la vrit Yaakov , signifie que la Torah retourne vers lui, et que le cur de lhomme battra toujours pour elle, pour quil ne loublie jamais, comme le disent les Sages (Baba Metsya 85a): Dornavant, la Torah cherche retourner dans son lieu dhabitation , cest--dire dans le cur de lhomme. Chaque jour, une voix se fait entendre du Mont Horev, elle proclame et se lamente: Malheur aux cratures pour leur mpris de la Torah (Avoth 6:2; Chemoth Rabah 41:9; Kala 8). Le Baal Chem Tov explique: Cette voix se fait entendre chaque jour dans le fond du cur de chaque homme qui a abandonn la Torah , ce qui indique que la Torah cherche pntrer le cur de lhomme. Effectivement, lorsque lhomme approfondit sa connaissance de la Torah, le corps et lme peuvent vivre ensemble et slever dans le service de D, Le servir avec amour et crainte, sincrement et de tout cur. Si nous mditons les paroles du Zohar cites au dbut de notre section, nous constatons que le fait mme que le corps se rapproche de lme et se soumette elle, procure lhomme la victoire sur le mauvais penchant et lui permet de samliorer, comme nous allons le montrer. Les Sages ont dit (Avoth V:22): Celui qui possde les trois qualits suivantes est un disciple dAvraham, les trois vices opposs caractrisent les disciples de Bilaam limpie. La gnrosit, lhumilit et labngation caractrisent les disciples dAvraham; lenvie, lorgueil et lambition, ceux de Bilaam . Certains commentateurs font remarquer que les premires lettres des mots Ayin Tova (un bon il, cest--dire la gnrosit), Nfsh Nmouka (un esprit de soumission) et Rouah Shfla (une me petite, cest--dire labngation) forment le mot NaAR, un jeune garon. Quel est le sens du rapprochement du corps et de lme (de Yhouda et de Yossef) daprs le Zohar? Le Zohar crit (ibid. p. 206a): Cest le rapprochement de ce bas-monde (qui est assimil la femelle, la vitalit, et qui est appel Yhouda) vers le monde den-Haut (qui est le fondement divin, le souffle, et qui est appel Yossef), afin que tout soit uni . Cest dire que la vitalit du corps physique doit soutenir et faire la paix avec le souffle et lme qui sont divins pour quils soient unis dans le service de D., bni soit-Il, et contre le mauvais penchant, qui comme on le sait est tapi sur le seuil (Brchith 4:7), et qui sinstalle comme un tranger dans le corps de lhomme (Chabath 105b). Le Zohar explique clairement pourquoi Yhouda savance vers Yossef. Yhouda doit se rapprocher de Yossef parce quil sest fait le garant de lenfant, cest--dire que le corps est garant du NaAR, de lenfant, qui sont les premires lettres de Nefesh, Ayin, Rouah ces trois vertus - un il bienveillant, un esprit soumis et une me modeste - et les qualits essentielles exiges de lhomme - des qualits qui sont le secret de la russite. Lunion du corps et de lme est le secret et le fondement de la cration tout entire, cette union garantit la paix entre les tribus, cest--dire dans le monde entier, la paix entre Yhouda et Yossef, entre le corps et lme, la paix avec Yaakov leur pre, qui indique D. Lui-mme, comme il est dit (Mguilah 18a; Brchith Rabah 98:4) D. a appel Yaakov E-l . Nous savons que le nom Yaakov reprsente sept fois la valeur numrique du Nom de D. Nous pouvons maintenant comprendre les paroles de nos Sages (Ndarim 32b): Rami Bar Aba demande: quel est le sens du verset (Kohlet 9:14): Une petite ville, avec peu dhabitants? (La suite du verset dit: Un roi puissant marcha contre elle, linvestit et leva autour delle de grandes redoutes. Mais il se trouva dans cette ville un homme pauvre dou de sagesse: cest lui qui sauva la ville par son esprit ). La petite ville reprsente le corps, les quelques habitants sont les organes, le grand roi qui entre dans la ville et linvestit, cest le mauvais penchant... il y rencontre un homme pauvre et sage, cest le bon penchant, qui a sauv toute la ville grce sa sagesse, ce sont le repentir et les bonnes actions . Nous avons l trois concepts: le mauvais penchant, le bon penchant, et le corps. Dune part le mauvais penchant incite lhomme fauter et il lattaque avec force, dautre part le bon penchant, pauvre mais sage,

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tente de ramener lhomme dans le droit chemin. Le corps, habit par ces deux tendances est compar une petite ville qui doit vaincre lennemi. Comment? En quoi le corps est-il finalement responsable des actes de lhomme, puisquil nest quun lieu dhabitation, une ville, et rien de plus? Pourtant, comme nous lavons dit plus haut, le corps est responsable en tant que garant, ton serviteur sest port garant de lenfant , le bien-tre du corps et sa sant morale ne proviennent que de son union avec le bien et lme, qui sopposent au mauvais penchant. Cela nous permet dexpliquer (dune autre faon) le dbut de cette section et toutes ses implications. Yhouda a conseill de vendre Yossef en Egypte, en disant quel bnfice... vendons-le aux Ismalites (ibid. 37:26), cest--dire que le corps abandonne lme limpuret, la perversit du pays. Lorsque la coupe est dcouverte dans la sacoche de Benyamin (et le mot Gaviaa, coupe, compt avec le nombre de lettres, a la mme valeur numrique que le mot Gouf, le corps), Yossef dit: Quavez-vous fait? , cest-dire que lme accuse le corps de lavoir abandonne et jete au fond du puits . Et alors Yhouda - le corps, sapproche de Yossef - lme, lui disant: Mon seigneur , comme sil se parlait en quelque sorte lui-mme, son me, en ces termes: tu es mon matre , il convient que je madresse toi cette fois aussi, et que ta colre nclate pas contre ton serviteur, car tu es lgale de Pharaon, cest--dire, de mme que toi, mon me, tu mas attir vers les choses saintes, de mme le Satan, Pharaon (symbole du mal) habite en moi et cest lui qui mattire vers les choses impures, cest lui qui me pousse fauter et commettre des actes interdits, D. nous en prserve. Mais lorsque le corps sapproche de lme et se soumet elle, il peut effectivement se corriger grce la sagesse du bon penchant, la Torah, au repentir et aux bonnes actions. Le corps nattend pas lme mais fait le premier pas vers les choses saintes, car il est garant. Tel est le sens cach du verset: Nous ferons et nous entendrons . Nous ferons avec le corps, et nous entendrons avec lme. Lorsque lme slve, le corps aussi se renforce et slve vers la spiritualit, et cest ainsi que le mauvais penchant est vaincu, que la Torah devient une proprit personnelle, et que lhomme se transforme tout entier en esclave de D. , de tout son cur et de toute son me.

Yossef se dvoile une remontrance pour toutes les gnrations


Yhouda savana vers lui, en disant: De grce mon seigneur... (Brchith 44:8). Rabbi Yhouda dit: il sapprocha pour lui faire la guerre. Rabbi Nhmia dit: pour se rconcilier. Les Sages disent: pour supplier (Brchith Rabah 93:4; Yalkout Chimoni Ocha 22). Cest dire que Yhouda, en abordant Yossef, tait prt toutes ces ventualits. Il tait prt se battre contre lui, et il est certain que Yhouda stait mis en danger face aux soldats de Yossef et larme dEgypte, parce quil stait port garant de Benyamin, comme il est dit (Brchith 43:9): Cest moi qui rponds de lui, cest moi que tu le redemanderas. Si je ne te le ramne pas, si je ne te le remets pas, je me dclare jamais coupable envers toi . Tout ce qui est dit dans cette section est merveilleux, et nous tenterons dclaircir les questions qui se posent. 1. Les Sages disent (Brchith Rabah 92:8; Yefat Toar, fin de la section Mikets): Lorsque lenvoy de Yossef dcouvrit la coupe dans la sacoche de Benyamin, tous les frres commencrent le frapper et linsulter en le traitant de voleur, lui rappelant que sa mre avait vol les idoles de Laban. Mais Benyamin proclamait son innocence, si bien que les frres comprirent que la coupe trouve dans la sacoche de Benyamin tait un stratagme. Sil en est ainsi, pourquoi Yhouda prend-il des risques supplmentaires et met-il en danger la vie de Benyamin en retournant en ville, chez Yossef? Il aurait pu le renvoyer sur-lechamp chez son pre avec les frres ou certains dentre eux, et aller seul chez Yossef, pour la vie ou pour la mort, dans la guerre quil lui dclare. Stant port garant envers Yaakov, il est retourn en Egypte dans lintention de se faire esclave. Il naurait permis aucun prix que Benyamin devienne esclave, comme il le dit Yossef (Brchith 44:33): Que ton serviteur, la place du jeune homme, reste esclave de mon seigneur, et que le jeune homme parte avec ses frres! Pourquoi ne la-t-il pas envoy tout de suite chez Yaakov, et pourquoi est-il retourn avec lui en ville, chez Yossef. 2. Les frres ont compris que Benyamin navait pas vol la coupe, et que Yossef voulait tout simplement les provoquer et rgler ses comptes avec eux. La situation tait difficile, ils auraient d tuer lenvoy de

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Yossef et continuer leur route. Le fait quils soient retourns en ville chez Yossef dnote leur faiblesse, leur manque dassurance. Ils mettent la vie de Benyamin en danger car, si une guerre clatait, Benyamin ne risquait-il pas dy perdre la vie? 3. Il faut aussi expliquer pourquoi, aprs quil se fut dvoil ses frres (Brchith 45:3), aprs quil leur eut montr quil tait circoncis (Brchith Rabah 93:8), les frres de Yossef ne purent lui rpondre, car ils taient frapps de stupeur (Brchith 45:3). Les Sages disent ce sujet (Brchith Rabah 93:10): Malheur nous au jour du jugement, malheur nous au jour des reprsailles . En effet, Yossef tait le plus jeune des frres et, sils ne pouvaient pas affronter les accusations dont il tait lobjet, cest une preuve que nous-mmes aurons du mal faire face aux accusations le jour du jugement. Il faut expliquer ce Midrach. O le fait que Yossef fit des reproches ses frres et quil les a accuss est-il indiqu dans le verset, pour que nous en tirions une leon concernant les reproches qui nous seront faits lavenir? Le verset dit seulement que dans leur stupfaction, ils firent un bond en arrire, et Yossef leur dit (ibid. 45: 4): Approchez-vous de moi je vous prie, et ils sapprochrent . Comment savons-nous quil leur fit des reproches? 4. Les Sages disent (Tanhouma Vayigach 5): Lorsque Yossef se dvoila et se fit connatre de ses frres, ils voulurent le tuer . Comment est-ce possible? Il est dit aussi (Brchith Rabah 91:6) que lorsque les frres arrivrent en Egypte, ils se dispersrent afin de chercher Yossef dans tout le pays car ils sinquitaient sur son sort. Pourquoi, lorsquils le retrouvent enfin, lauraient-ils tu? Pourquoi les Sages disent-ils quils voulaient le tuer? Les frres ont constat la bravoure de Yossef (Brchith Rabah 93:7), il est gouverneur du pays, cest lui qui distribue le bl tout le peuple (Brchith 42:6), il est rest juste et aussi vertueux la fin de sa vie quau dbut car lorsquil tait esclave il craignait D. tout autant que lorsquil tait roi (Tanhouma Nasso 28), et tous les Egyptiens se sont circoncis sous son ordre (Brchith Rabah 91:5). Si les frres avaient tu Yossef, toute lEgypte aurait alors appris la chose, et cette nouvelle serait parvenue aux oreilles de Yaakov en Erets Isral. Quel intrt pouvaient-ils tirer dun tel malheur? Dautant plus que Yaakov leur dit (ibid. 42:1): Il y a vente de bl en Egypte , et les Sages expliquent (Brchith Rabah 91:6): Il eut la rvlation que son espoir tait en Egypte, il sagit de son fils Yossef . A prsent, les frres comprirent que Yaakov leur avait parl de Yossef. Nest-il pas tonnant qu ce moment prcis, ils aient voulu le tuer? Et comment D. pourrait-Il agrer une telle chose? Pour expliquer toute cette section, nous devons savoir que la Torah ne rapporte pas des vnements historiques ou des anecdotes, et le Zohar a dj maudit ceux qui croient que la Torah raconte des faits divers (III, 149b). Certains rcits de la Torah sont incomprhensibles, parce que nous nen saisissons pas le sens profond, cach dans ces rcits. Nous essayons seulement de les comprendre tels quels, superficiellement. Nous devons savoir que, dans tous les rcits de la Torah, dans leurs moindres dtails, figurent des directives et des enseignements pour tous les temps et pour toute situation dans laquelle lhomme pourrait se trouver, et dont il doit tirer leon. Notre section aussi cache en elle des choses sublimes. Par la grce du Roi Suprme, nous allons expliquer le rcit de Yossef et ses frres, comme il se doit. Yossef le Juste dit ses frres (Brchith 42:18): Faites ceci et vous vivrez. Je crains le Seigneur . Il est surprenant quen Egypte, dans ce pays rempli didoles et dimpuret et connu pour ses dbauches (Chemoth Rabah 1:22), lun des souverains de ce pays dclare quil craint le Seigneur... Cest une chose tonnante car la crainte de D. fait partie des fondements de la foi dAvraham, Yitshak et Yaakov, qui avaient vraiment la crainte de D. et qui inculqurent cette crainte dans tous les curs et amenrent les gens se soumettre D. Et justement l, en Egypte, lieu qui ignore la crainte de D., les frres dcouvrent que rgne un roi grand et puissant, bienveillant envers tous les peuples, qui ne garde pas ses rcoltes uniquement pour son propre peuple mais les distribue dans tous les pays, comme il est crit (Brchith 41:57): De tous les pays on venait en Egypte... Yaakov eut la vision quon vendait du bl en Egypte; autrement dit, il vit quil y avait en Egypte un rejeton de ses descendants, caractris par la bienveillance et la gnrosit. Effectivement, si ces qualits se rencontrent en Egypte, cest signe quil sy trouve quelquun qui craint D. et a une grande confiance en Lui, car il ne se soucie pas seulement de son propre pays, mais de tous les pays atteints par la famine.

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De plus, les frres ont pu constater quen Egypte, pays de voleurs et de brigands, il existe pourtant des gens honntes. Lorsque les frres viennent rendre largent quils ont trouv dans leur sacoche, en disant (Brchith 43:21-22): Quand nous sommes arrivs dans lauberge et que nous avons ouvert nos sacoches, largent de chacun tait dans son sac, notre mme poids dargent: nous le rapportons, ainsi quune autre somme pour acheter des vivres... , les Egyptiens leur rpondent (ibid. 43:23): ...votre argent nous est parvenu , cest--dire que votre argent est dj entr dans les caisses de ltat et il nous est interdit de recevoir de vous un autre paiement. Est-ce possible? Les frres en furent impressionns et ils comprirent que le matre et gouverneur du pays tait effectivement un homme juste, saint et rempli de la crainte de D. Cest pourquoi Yhouda ne craint pas de retourner dans la ville avec Benyamin et tous ses frres (ce qui rpond la premire question), car il savait que le roi du pays craignait le Ciel et quil serait possible de parvenir avec lui un compromis, sans dispute ni querelle. En approfondissant davantage, nous trouvons dautres raisons qui ont effac toute crainte du cur de Yhouda si bien quil consentit retourner en ville, mme avec Benyamin. Yossef demanda ses frres (Brchith 43:27): Comment se porte votre pre, ce vieillard dont vous avez parl? Vit-il encore? Il est certain que celui qui pose une telle question se laissera amadouer et acceptera un compromis, afin de ne pas causer de peine un vieux pre. Par ailleurs, Yhouda ne dsirait pas tuer lenvoy de Yossef et retourner en terre de Canaan vers son pre, pour que le Nom de D. ne soit pas profan. Sil avait agi de la sorte, tous y auraient vu la preuve quils avaient vol la coupe. De plus, le roi (ils ne savent pas que cest Yossef) craint D. Sil apprend que les fils de Yaakov ont fait une telle chose, il risque de perdre sa crainte de D. et de penser dans son cur: si les fils de Yaakov qui enseignent la crainte de D. agissent ainsi, cest que il ny a pas de Juge et il ny a pas de Justice (Vayikra 28:1; Chohar Tov 47:6), et ils en concluront que tout est permis. A propos dune situation semblable, les Sages ont dit (Avoth I:11; Avoth DRabbi Nathan 11: 4; Tana DBey Eliyahou Rabah 82): Sages, mesurez vos paroles! Vous pourriez tre condamns lexil et dports dans un lieu o les eaux sont malsaines (cest--dire o des principes contraires aux vtres sont enseigns). Les lves qui suivent vos enseignements pourraient en boire et mourir, et le Nom de D. serait profan , cest--dire que dautres parviendraient des conclusions qui ne sont pas conformes la vrit. Yhouda prend donc la peine de retourner auprs de Yossef, et ne tue pas lenvoy (ce qui rpond la question 2), pour ne pas amener Yossef douter de D. Cest le sens de: Yhouda sapprocha de lui . Il sapprocha pour lui faire la guerre, la guerre de la Torah, afin de sanctifier le Nom de D. publiquement, et il retourna vers Yossef avec Benyamin et tous ses frres afin de se justifier devant Yossef quil considrait comme un homme ayant la crainte de D. Telle tait la voie de Yhouda qui avouait ses propres fautes, sans honte (Sotah 7b). Il ne pensait pas un seul instant quen retournant vers Yossef, il lui ferait effectivement la guerre. En arrivant devant Yossef, il lui dit: Je suis venu avec mon frre Benyamin et je ne me suis pas enfui vers mon pre en terre de Canaan, parce que ton serviteur a rpondu de cet enfant son pre (Brchith 44:32). Le mot br[, garant, est form des mmes lettres que le mot r[b, insens, cest--dire que si javais fui, ou si javais tu lenvoy, jaurais profan le Nom de D. par un acte insens. A cause de moi, tu en serais venu douter de D. Cest pourquoi je prends le risque de venir vers toi ouvertement, vers toi qui es lgal de Pharaon qui ne craint pas D. et qui ne croit pas en Lui. Jai fait tous ces efforts afin de ne pas causer de profanation du Nom de D. La qualit de Yhouda est de reconnatre ses fautes. Si lon trouve la coupe dans la sacoche de Benyamin, Yhouda doit reconnatre que Benyamin est, apparemment, le voleur. Il ne peut pas nier cette vidence. Effectivement, il sy conforme, et cest pourquoi il se prsente avec Benyamin devant Yossef. Il avoue, pour ne pas causer de profanation du Nom de D., de mme quil le fit envers Tamar sa belle-fille, en confessant publiquement (Brchith 38:26): Elle est plus juste que moi . Malheur nous au jour du jugement et de la rtribution Maintenant nous pouvons comprendre les reproches que Yossef adresse ses frres et surtout Yhouda. Ses reproches taient si virulents que tous furent saisis de stupeur et bondirent en arrire. Il lui suffit de leur dire: Je suis Yossef (Brchith 45:3) pour causer leur stupeur. Ces paroles-l ont rappel aux frres la rtribution dans le monde Venir: Malheur nous au jour du jugement . Comment pourront-ils laffronter? Nous apprenons ainsi quil y aura, lavenir, un jugement.

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Comment savons-nous que Yossef leur fit de telles remontrances? Quelle tait lintention de ses propos (ce qui rpondra la question 3)? Yossef parle ainsi Yhouda: Toi, tu te distingues par la qualit de laveu, car tu as confess publiquement ta faute. Lorsque ta belle-fille Tamar fut condamne tre brle et quelle ta dit: Souviens-toi Qui ta cr , tu as sanctifi le Nom de D. (Brchith Rabah 85:12), sans tenir compte de lopinion publique. De mme, tu nas pas tu lenvoy lorsquil a trouv la coupe dans la sacoche de Benyamin, au contraire, tu es revenu ici avec Benyamin pour te proposer comme esclave sa place. En cela aussi tu as avou, afin de ne pas profaner le Nom de D. Pourquoi, lorsque je suis venu vous rendre visite, envoy par mon pre, as-tu t le premier vouloir me tuer, comme il est crit (Brchith 37:20): Or a, venez, tuons-le, jetons-le dans quelque citerne . Ensuite vous mavez jet dans la citerne (verset 24), dans un puits qui tait vide deau mais plein de serpents et de scorpions (Chabath 22b). Pourtant ces serpents et ces scorpions ne mont pas mordu, et cest une preuve vidente que je nai pas port atteinte au sceau de lAlliance sacre. Si je fus pargn, cest la preuve que je suis saint et pur, et si toutes vos accusations contre moi avaient du vrai et que javais commis une faute quelconque, je naurais pas t sauv de ces serpents et de ces scorpions. Pourquoi, lorsque je suis venu vous visiter, nas-tu pas fait valoir que jtais votre frre sans hsiter, comme tu le fais prsent? Pourquoi en fin de compte mavez-vous vendu alors que je navais rien fait de mal? Pourquoi avez-vous commis une telle faute? En disant Je suis Yossef, votre frre , il leur montra quil tait circoncis, quil navait pas port atteinte au signe de lAlliance et quil tait rest fidle lui-mme. Il tait all Chehem sur lordre de son pre, et donc - tel est largument de Yossef - bien que jaie su que vous me hassiez cause de mes rves et de mes paroles (Brchith 37:4 et 8), jai obi avec dvouement lordre de mon pre. Mais vous, vous avez voulu me tuer et vous lui avez caus une grande peine. O est la justice? O est la sanctification du Nom de D.? Comment peut-on servir D. fidlement tout en ayant un meurtre sur la conscience? Pourquoi navezvous pas tenu compte alors de la peine de notre pre qui a tant souffert cause de moi et qui a refus de se laisser consoler? Pourquoi ne tes-tu pas port garant de moi afin de me sauver, comme tu tes port garant de Benyamin? Si mon pre me prfrait, cest quil avait sans doute une bonne raison pour cela. Pourquoi as-tu voulu mloigner et lui causer une peine profonde et irrmdiable? Est-ce seulement parce que tu en as fait la promesse notre pre que tu te sacrifies maintenant? Si tu ne ttais pas port garant de lenfant, tu laurais abandonn ici, comme tu as abandonn Chimon lorsque je lai arrt et mis en prison, comme il est crit (Brchith 42:19): Lun de vos frres sera dtenu en prison et (ibid. v. 24), Il spara deux Chimon quil fit incarcrer en leur prsence . Ne faut-il pas toujours se sentir responsable de lenfant , se sentir responsable des autres, mme si lon nen a pas fait le serment ni la promesse? En outre, tu plaides devant moi: Comment retournerais-je auprs de mon pre sans ramener son enfant? (ibid. 44:34) ce qui serait envers lui un crime mais, si tu es puissant, si tu es le roi (Brchith Rabah 92:5) et que tu peux tout, pourquoi nas-tu pas tent de me sauver, moi? Et si tu dis: De grce, mon seigneur! pour signifier que le Nom de D. est inscrit dans ton cur, vous avez vous-mmes jur et associ D. votre serment de ne pas rvler notre pre que vous mavez vendu (Tanhouma Vayechev 2). Votre conduite est-elle correcte? Nous avons beaucoup apprendre des reproches de Yossef ses frres, dans le sens o il est dit: malheur nous au jour du jugement . Et que dire lorsque D. fera des reproches chacun de nous pour sa conduite? Est-il possible de se conduire avec lgret dans la synagogue et ensuite prier intensment - celui qui agit ainsi est la cause de sa propre confusion... Sil interrompt sa prire pour parler de choses et dautres et quau moment o lon sort le Sfer Torah de larche, il lembrasse avec vnration, mais parle pendant la lecture de la Torah, est-ce une conduite convenable? Comment peut-on exprimer la fois des marques de respect et se conduire avec tant de lgret? Cest un des reproches qui nous sera fait au jour du jugement. Lorsque nous voyons sur le bras de quelquun les marques des courroies des Tephillin, nous savons que cet homme est attach D., comme nous le disons dans la prire: Que toutes les forces de mon me et de mes sens soient soumises au service de D., bni soit-Il , et nous ajoutons le verset: Je te fiancerai

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moi pour toujours, tu seras ma fiance par la droiture et la justice, par la tendresse et la bienveillance, ma fiance en toute loyaut, et alors tu connatras lEternel (Ocha 2:21-22). Les Sages disent propos du verset (Devarim 28:10): Tous les peuples de la terre verront que le Nom de lEternel est associ au tien et ils te redouteront , quil sagit des Tephillin que lon porte sur la tte (Brachot 6a). Mais si, tout de suite aprs, nous nous conduisons avec ddain envers autrui ou si nous ne prions pas avec la concentration requise, nous serons exposs des accusations et des reproches trs lourds, car est-il possible dtre la fois attach D. et de sloigner de Lui? Est-ce pensable? Les reproches de Yossef taient tellement crasants que les frres en ressentirent une grande honte et, incapables de lui faire face, ils en vinrent vouloir le tuer effectivement. Quand un homme important ressent tout coup quil nest quun objet vide de tout, quil nest rien, quil est perdu et sans espoir, il devient dautant plus menaant et dangereux que son dsespoir peut lamener commettre un acte de folie (D. nous en prserve), au point de vouloir tuer. Si ce ntait que les anges ont repouss les frres et les ont spars (Tanhouma Vayigach 5), ils auraient tu Yossef pour ne pas affronter ses svres reproches, car il leur dmontrait combien ils taient peu de chose... tout le contraire de ce quils pensaient tre. Chacun doit rester gal lui-mme en toute circonstance et ne pas se conduire de faon inconstante. Il faut plus que tout viter de senorgueillir et de se conduire avec fiert, en se croyant capable de rester intact jusquau jour de la mort. Yohanan le Grand Prtre, qui a servi pendant quatre-vingts ans, est devenu Saducen la fin de sa vie (Brachot 29a; Yoma 9a), comme le disent les Sages (Avoth 2:4): Ne te fie pas toi-mme jusquau jour de ta mort (ce qui rpond la question 4). Le reproche de Yossef consiste leur faire remarquer que par leurs actes ils perdent tout, comme dit le Midrach (Chemoth Rabah 35:1): D. a cr beaucoup de choses, mais le monde ne mritait pas den faire usage et Il les a caches , pour nous faire savoir combien le monde a perdu en ne mritant pas de faire usage de ces crations. De mme Yossef fait savoir ses frres combien de bienfaits ils ont perdus pour lavoir ha et stre conduits de faon inconstante. Les Sages disent (Tanhouma Vayigach 5): Lorsque Yossef vit que ses frres taient disperss dans tous les coins, il entreprit de les apaiser et leur dit : Approchez-vous de moi. Ils sapprochrent et ils se rconcilirent avec lui . Nous voyons l que celui qui fait des reproches doit aussi apaiser celui quil a critiqu afin quil nen vienne pas se dsesprer cause de la honte ressentie. Il est possible que nous ayons une indication de cela dans le commandement de la Torah (Vayikra 19:17): Tu reprendras ton prochain et tu nassumeras pas de pch cause de lui . Il ne faut pas lui causer une telle honte quil en viendrait vouloir tuer celui qui lui fait des rprimandes. Le Sefer Hahinoukh crit (Commandement 239): Dans le Midrach Sifra (Vayikra 19:17) il est dit : Est-il permis de lui faire des reproches au point quil en blmisse? La Torah commande: Tu nassumeras pas de pch cause de lui , ce qui nous enseigne quil faut tout dabord prononcer les rprimandes avec douceur, en priv, avec des paroles acceptables, afin de ne pas faire honte au coupable, mais si lon craint quil naccepte pas les reproches et quil se retourne contre nous, nous sommes dispenss de lui faire des reproches . Ainsi Yossef les a tout de suite apaiss pour quils nen viennent pas vouloir le tuer. De mme, un voleur pris en flagrant dlit est ce moment-l extrmement dangereux puisquil sest fait prendre et quil a t vu au moment o il a commis le vol. Cest en soi un reproche norme que le voleur est incapable daffronter, et cest pourquoi il faut tout de suite lapaiser, le tranquilliser, lamadouer, afin dliminer le danger imminent, et lamener se corriger. Puisque les frres nont rien fait contre Yossef lorsquils se sont approchs de lui, cela montre quils ont reconnu le bien-fond de ses propos, et quils ont accept de se rconcilier avec lui. Les reproches de Yossef sont tellement svres et la honte des frres tellement profonde quils ont voulu le tuer pour y chapper, tant ils taient incapables de soutenir sa prsence. Cela nous enseigne combien, lorsque D. accusera lhomme pour toutes les penses et les intentions caches de son cur, pour toutes les fautes et les transgressions commises durant sa vie - et cela en prsence de tous les Justes - combien grandes seront sa honte et sa dchance! Il voudra senfuir, mais il naura pas o fuir de devant le Trne de Gloire, comme il est crit (Thilim 139:7): O me retirerais-je devant Ton esprit? O chercherais-je

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un refuge pour me drober devant Ta face? Tel sera le reproche que nous devrons affronter lavenir, malheur nous au jour du jugement, malheur nous au jour des reproches. Si les frres de Yossef nont pas pu soutenir sa prsence et quils ont voulu le tuer pour chapper la honte, plus forte raison notre propre honte et notre propre dchance seront immenses, et nous naurons mme pas o nous enfuir. Nous pouvons prouver autrement pourquoi les frres de Yossef dsiraient le tuer, et en tirer un enseignement important. Les frres de Yossef le hassaient cause de ses rves et parce quils pensaient quil voulait les dominer, comme il est crit (Brchith 37:8): Rgnerais-tu sur nous? Deviendrais-tu notre matre? Cette ide ne les quittait pas: Pourquoi veut-il rgner sur nous? Mais partir du moment o ils vendirent Yossef et quils virent la peine et la douleur inconsolables de leur pre, qui dit (ibid. 37:35): Je rejoindrai, en pleurant, mon fils dans la tombe , la haine et la jalousie quils nourrissaient envers Yossef seffacrent de leur cur, et ils dsirrent le librer tout prix. Ils se dispersrent dans toute lEgypte la recherche de Yossef et ils le cherchrent jusque dans les quartiers des prostitues (Tanhouma Mikets 8). Mais ils navaient pas pens quil deviendrait le gouverneur tout-puissant de lEgypte, ils supposaient quil avait t vendu pour tre lesclave de quelque matre gyptien. Au moment o ils apprirent quil tait le roi dEgypte, leur haine se raviva de plus belle. Ils nacceptaient pas le fait quil les domine, et ils taient prts tout simplement le tuer, si lange ne les avait pas repousss, sauvant Yossef de leurs attaques. Malgr leur grandeur et leur saintet, les frres navaient pas corrig leur dfaut comme il convient. Ils navaient oubli leur haine que momentanment mais ils navaient fait aucun effort pour la draciner compltement de leur cur. Sils lavaient dracine, ils auraient t heureux de le savoir roi et de voir ses rves prophtiques raliss car des rves qui ne sont pas envoys par D. ne se ralisent pas. Mais, parce quils navaient pas dracin le fondement de leur haine, elle sveilla alors de plus belle. Nous constatons souvent un tel phnomne. Lorsque quelquun hait son prochain et quil le perd de vue pour longtemps, il oublie sa haine et il semble quelle a disparu. Mais au moment o ils se rencontrent de nouveau (et surtout sil constate que celui quil hait le dpasse en grandeur), la haine ancienne, revivifie, devient encore plus forte quauparavant. Pour lliminer totalement, il faut draciner la raison mme qui en est la cause. Aprs avoir t repousss et disperss grce lintervention dun ange, les frres eurent peur car ils comprirent que telle tait la volont de D. Chaque homme peut tirer de lexemple que si quelquun parvient une position leve et dominante, cest que D. la voulu ainsi. Accepter ce fait permet de dissiper la jalousie. En effet, Yossef tait un homme vertueux, saint et pur, et sil eut de tels rves, cest quils avaient un sens profond. Les frres ne pouvaient pas manquer de savoir que ctait justement Yossef qui tait destin vaincre Essav, et que Les descendants dEssav seront soumis justement par les descendants de Yossef (Baba Bathra 123b; Zohar I, 155a). En le hassant, ils mirent leur propre vie en danger tout autant que la sienne. Si son nom avait t effac par leur faute, qui aurait men pour eux la guerre contre Essav? Cela montre que leur susceptibilit a t un obstacle pour les frres. Cest une leon valable pour tous les temps - malheur nous au jour du jugement et au jour des reproches - elle nous enseigne que nous devons liminer toute susceptibilit personnelle. Ce nest que de cette faon que nous pourrons aborder le Roi des rois, bni soit-Il, le jour du jugement. Puissions-nous en tre capables!

La connaissance de D., source de toutes les bndictions


Et Yossef dit ses frres: Je suis Yossef... (Brchith 45:3). Le Hafets Hayim crit ce sujet dans son commentaire de la Torah: Lorsquils allrent en Egypte pour la premire fois pour acheter du bl, Yossef se conduisit comme un tranger vis--vis deux et leur parla durement, comme il est crit (ibid. 42:7): Il se dissimula vis--vis deux et leur parla rudement , et il les accusa dtre des espions (ibid. v. 16). Les frres se posaient beaucoup de questions, ils cherchaient comprendre la raison dun tel comportement, comme il est crit (ibid v. 28): Quest-ce donc que le Seigneur nous fait l? Ils cherchaient une explication et ils saccusaient mutuellement, disant (ibid. v. 21): Nous sommes coupables cause de notre frre . De mme, lorsquils descendirent en Egypte pour la deuxime fois, ils se demandrent: Quest-ce donc que le Seigneur nous fait l? Lorsquils entendirent

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de la bouche de leur frre les mots: Je suis Yossef , toutes leurs questions, tous leurs doutes et tous les vnements quils ne pouvaient pas sexpliquer sclaircirent, et ils comprirent ce qui stait pass . Et il poursuit: De mme, lorsque les nations du monde entendront les mots: Je suis lEternel , ils comprendront tout ce quelles navaient pas compris jusque-l concernant la direction du monde, car la Providence divine est une chose tonnante. Alors tout leur deviendra clair, transparent et limpide et tous les hommes ensemble en seront tmoins: cest la bouche de lEternel qui a parl (Ichaya 40:5), et tous verront que tout ce que D. a voulu est pour notre bien . Ressentir le sens de Je suis lEternel , connatre lexistence de D., est le but essentiel de lhomme en ce monde. Il faut sentir et mme vivre ces paroles et alors, dans nimporte quelle situation, en priode de crise ou dans le bonheur, on sentira lexistence de D. Cest ce que disent les Sages (Brachot 54a; Yrouchalmi Brachot 9:5): Lhomme doit bnir D. tant pour les malheurs que pour les joies cest--dire quil faut sentir effectivement, mme dans le malheur ( D. ne plaise), la Providence divine et Le bnir pour tout. Et les Sages ajoutent (Brachot 60b; Zohar I, 181a): Tout ce que D. fait est pour le bien , comme il est crit (Ekhah 3:38): De la bouche de lEternel nmane pas le mal, mais le bien . Il advient dans le monde des circonstances que lhomme a du mal accepter, des choses qui lui semblent mauvaises. Comment peut-on dire que de tels incidents soient pour le bien? Pourtant, lorsque lhomme ressent, mme dans une situation difficile, lexistence de D. - Je suis lEternel - il prend conscience quen fin de compte tout est pour le bien, et le doute disparat de son cur. Comment lhomme parvient-il ressentir lexistence de D. en toute circonstance, au point de toujours justifier les vnements qui lui arrivent, comme il est crit (Thilim 19:10): Les jugements de lEternel sont vrit, ils sont tous ensemble parfaits ? Si lhomme se rappelle les paroles de David HaMelekh (ibid. 16:8): Je fixe constamment mes regards sur lEternel! la fin du verset se ralisera aussi: SIl est ma droite, je ne chancellerai pas! Lorsque la coupe fut dcouverte dans la sacoche de Benyamin, tous les frres commencrent le frapper au dos, lui disant: Ta mre aussi a vol les idoles de son pre Laban, comme il est crit (Brchith 31:19): Rahel droba les pnates de son pre . Tu fais comme elle, tu as vol la coupe de divination... Mais Benyamin ne ragit pas et ne dit rien (Brchith Rabah 92:8; Yefat Toar fin de Mikets). Un autre Midrach dit au contraire que Benyamin leur fit remarquer que ctait la vente de Yossef qui tait cause de leur malheur tandis que, selon le Midrach Tanhouma, Benyamin na pas rpondu leurs accusations. D. dit Benyamin: parce que tu nas rien rpondu, Je jure que le Temple sera construit sur ton territoire (Tanhouma Mikets 10), comme il est crit (Devarim 33:12): ...qui lui prte son abri pour toujours, qui rside entre ses paules (une allusion aux collines de Jrusalem) , et lon sait que le Temple est appel la nuque (Zohar I, 209b) et quil est construit en partie sur le territoire de Benyamin. Nous dcouvrons l une ide merveilleuse et sublime. A cause de quelques coups reus sur les paules et auxquels il na pas ragi, Benyamin mrita la rcompense incommensurable de voir le Temple construit sur son territoire et cela parce quen se taisant, il avait amoindri une haine sans fondement. Sil leur avait rpondu et stait oppos eux en soutenant quil ntait pas un voleur, qui sait quelle en aurait t la consquence? Peut-tre ses frres lui en auraient-ils gard rancune et qui aurait pu redresser les torts qui en auraient rsult? Mais Benyamin na pas ragi, il a gard le silence et attendu quils finissent de dverser leur colre sur lui et quils se rendent compte par eux-mmes de leur mauvaise conduite. Effectivement, Yhouda finit par dire que la vie de Benyamin tait attache celle de son pre (Brchith 44:30), et il se proposa comme esclave sa place afin que Benyamin puisse rentrer avec ses frres (ibid. 33:34). Il faut se demander pourquoi en fait, Benyamin ne rpond pas? Comme le dit Rabbi Chimon ben Elazar (Avoth IV:23): Nessaye pas de calmer ton prochain lorsquil est dans le feu de la colre et les Sages ont dit (Brachot 7a): On napaise pas son prochain lorsquil est en colre car cela ne fait que lexciter. Benyamin, bien quinnocent, na pas rpondu et cest pourquoi il a mrit que le Temple soit construit sur son territoire. La nuque indique une base. Les frres lui firent honte en le frappant justement sur le dos entre les paules, mais il ne leur rpondit rien, il se laisse insulter et ninsulte pas, il entend leurs calomnies et il ne rpond rien... (Chabath 88b; Yoma 23a, Guitin 36b). Cest pourquoi il reut une si grande rcompense, mesure

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pour mesure (Chabath 105b; Ndarim 32a; Sanhdrin 90a). Il a vit une dispute qui en fin de compte naurait caus que destruction et catastrophe. Sa rcompense est donc que le Temple sera construit sur son territoire, car la Maison de D. symbolise lunion, comme il est dit (Zohar I, 84b): Le Temple est le cur du monde , et (Chemoth 25:8): Je rsiderai parmi eux - dans le cur de chacun deux. Le Temple, qui est le symbole de lunit, est construit sur le territoire de Benyamin qui est appel le bien-aim de D. (Devarim 33:12) car cest lui qui a consolid lamiti dans le monde en teignant le feu de la discorde entre lui et ses frres. Cela nous montre quelle est la rcompense rserve celui qui pratique les commandements, surtout les commandements inter-personnels qui apportent le bien-tre, la bndiction, la prosprit et lhonneur tant celui qui les pratique quau monde entier et surtout Isral. De quelquun qui ne pratique quun seul commandement mais fond, les Sages disent (Kidouchin 40b; Kohleth Rabah 10:1): Heureux celui qui a fait pencher sa balance et la balance du monde entier favorablement , et cela, si le nombre de ses fautes est gal au nombre de ses mrites (et alors, une seule bonne action fait pencher la balance). Cest pourquoi il faut multiplier la pratique des commandements et des bonnes actions car il est impossible de mesurer la consquence de chaque commandement pour soi et pour le monde entier. Cest ce qui est dit (Avoth II:1): Observe les prceptes les moins importants en apparence aussi soigneusement que les prceptes les plus svres, car tu ignores quelle est la rcompense attache laccomplissement de chacun deux . Benyamin na rien rpondu ses frres bien quils laient frapp sans raison et ce, parce quil gardait toujours lesprit la notion de Je suis lEternel . Il savait que sil devait essuyer ces coups et ces blessures, cest que telle tait la volont de D. Il nen doutait pas, il savait parfaitement que D. nenvoie pas le mal lhomme et que tout ce qui arrive est en fin de compte bnfique; et donc il a donc gard le silence et na pas ragi. Il savait que D. chtie celui quIl aime (Michley 3:12), et il savait aussi que Comme un pre qui chtie son fils, lEternel ton D. te chtie (Devarim 8:5). La consquence heureuse de cet vnement malheureux fut que le Temple soit construit sur son territoire. Cela nous enseigne un principe fondamental: D. veut doter lhomme de mrite, un mrite dont le monde entier profitera, et la rcompense de ses actes lui est rserve au centuple dans lautre monde, comme il est dit (Makoth 23b; Avoth DRabbi Nathan 41: 17): D. a voulu donner du mrite Isral, cest pourquoi il a multipli pour lui lenseignement de la Torah et le nombre des commandements grce auxquels la prosprit remplit le monde, et comme le disent les Sages (Chabath 32a; Bamidbar Rabah 13:17; Pessikta Zouta Emor 24:12): Le mrite est transmis par lintermdiaire dune personne mritante . D. place lhomme dans des situations difficiles afin quil les surmonte, et alors, grce son mrite, le bien-tre est dispens dans le monde. Pour pouvoir affronter une situation difficile sans dsesprer, lhomme doit ressentir en permanence que Je suis lEternel, il doit savoir que sil reoit des coups, cest la volont de D. Il ne faut pas avoir de doute l-dessus ni stonner ou mettre en question les voies de D. Depuis longtemps dj, je conseille aux gens qui souffrent ou qui se dbattent avec des problmes juridiques ou de sant, de ne pas sempresser daller consulter un avocat ou un mdecin, mais tout dabord de reconnatre la Justice divine et de ressentir vraiment que LEternel la voulu ainsi (Thilim 118:23), et que Tout ce que D. fait dans Sa bont est pour le bien . Loin de nous la pense que D. nous frappe sans raison, puisque les Sages nous ont enseign (Brachot 5a) que D. ne frappe de souffrances que celui quIl aime . Si lhomme accepte ces souffrances, cest un signe quil en reconnat la justice, car elles lui sont infliges pour les fautes et les transgressions commises mme son insu soit quil ait ignor que telle ou telle chose tait interdite, soit quil ait commis une faute quelconque par inadvertance. Il est possible aussi que D. ait dsir lui donner du mrite, lui et au monde entier, et que grce lui le bnfice de ce mrite stendra son entourage. Les Sages racontent propos de Rabeinou HaKadoch (Baba Metsya 85a; Brchith Rabah 96:9; Yrouchalmi Kilayim 9:3): Tant quil souffrait de rages de dents, aucune femme en Isral na fait de fausse couche , cest--dire que ses douleurs protgeaient tout le monde contre les maladies et les souffrances. Chacun doit donc tout dabord accepter son sort, et seulement aprs, aller avec une confiance totale en D., consulter un avocat ou un mdecin. Ce nest que grce son attachement D., ses prires et lacceptation du jugement divin quil veillera la misricorde divine en sa faveur et quil sera sauv et guri par lintermdiaire du traitement prescrit par le mdecin. Mais si lhomme naccepte pas le jugement de D., sa maladie ou son problme risquent de durer, et il ira dun mdecin lautre sans trouver de soulagement.

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Lorsque Benyamin et Yossef se rencontrrent, il est crit (Brchith 45:14): Il se jeta au cou(s) de Benyamin son frre, et pleura, et Benyamin aussi pleura dans ses bras . Dans son commentaire de ce verset, Rachi rapporte les paroles des Sages dans la Torah (Mguilah 16b; Brchith Rabah 93:12): Estce que Benyamin avait deux cous (car le mot Tsavarav est le pluriel du mot Tsavar, le cou)? Ce pluriel indique que Yossef eut la vision prophtique que deux Temples allaient tre construits lun aprs lautre sur le territoire de Benyamin et quils seraient dtruits, et Benyamin pleura parce quil vit que le sanctuaire de Chilo, tabli dans le territoire de Yossef, serait dtruit . Ce commentaire est trs tonnant. Yossef et Benyamin se rencontrent enfin, aprs vingt-deux ans de sparation, et au lieu de se rjouir de ces retrouvailles, ils fondent en sanglots cause de la destruction des deux Temples qui ntaient pas encore construits! Nauraient-ils pas pu dplorer ce fait un autre moment, et pleurer alors de joie et dmotion en cette rencontre merveilleuse? Cest que Yossef et Benyamin chrissaient la notion de Je suis lEternel , ils savaient que la Providence divine dirige les vnements. Maintenant, ils se rendaient compte en toute lucidit que leur sparation de vingt-deux ans tait le fait de la volont divine. Ils nont donc aucune raison de pleurer cause de cette longue sparation. Au contraire, ils doivent en reconnatre la justification, puisque de grands bienfaits en ont rsult, comme Yossef le dit ses frres : Le Seigneur ma envoy au devant pour vous donner des ressources dans ce pays et pour vous sauver (Brchith 45:7). Mais ils taient envahis dmotion, ce qui est une chose naturelle aprs une si longue sparation, et incapables de retenir leurs larmes bien quils aient accept la justice des voies de D. et que la ralit de Je suis lEternel les ait habits. Tout compte fait, lhomme est homme, et ils ont tir parti de ces quelques instants dmotion pour pleurer, chacun de son ct, sur lavenir de lautre. La haine gratuite que les frres de Yossef ressentaient envers lui (Brchith 37:4) fut la cause de leur longue sparation, et au pralable de sa vente. Bien que Yossef et Benyamin aient accept leur malheur comme un bienfait venant de D. et dont ils reconnaissaient la justice, il nen reste pas moins vrai que la haine peut causer la destruction, puisque le Temple fut dtruit cause de la haine qui na pas de raison dtre (Yoma 9b). La notion de Je suis lEternel qui les habitait poussait chacun deux se soucier de lautre (chacun pleure le Temple qui sera dtruit car ils ont pu constater ce que la haine est capable de faire), et ils ont surmont leurs sentiments personnels pourtant naturels. Vous vous demandez donc pourquoi Yossef pleura sur les paules de son pre? Peut-tre pleurait-il de joie parce que son pre lui avait tant manqu? Cest quen cet instant, Yossef constata la puissance de son pre qui tait capable de taire ses sentiments personnels et qui prononait le Kriat Chma, et lui-mme pleura le temps perdu, les longues annes passes loin de son pre Yaakov. Les saints Patriarches taient aims de D., comme il est dit leur sujet (Thilim 122:8): Pour mes frres et mes amis , parce quils avaient la force dme dignorer leurs sentiments naturels et leurs dsirs personnels, afin daugmenter leur amour de D., mme dans les situations les plus difficiles. Il sensuit que nous pouvons aussi comprendre pourquoi il est dit, au moment de la sortie dEgypte: Je suis lEternel , comme il est crit (Bamidbar 15:41): Je suis lEternel votre D. qui vous ai fait sortir du pays dEgypte . Chaque homme doit sentir que D. la fait sortir lui-mme dEgypte, comme le disent les Sages (Pessahim 116b): A chaque gnration, chaque homme doit considrer quil est lui-mme sorti dEgypte , mais sil na pas la connaissance de Je suis lEternel , il ne peut pas considrer quil est lui-mme sorti dEgypte. Le sentiment de la sortie dEgypte fait allusion la libration de lhomme de lemprise de son mauvais penchant. Seul celui qui entend chaque instant et en toute occasion la voix qui proclame Je suis lEternel , peut le ressentir, comme ce fut le cas lors de la sortie dEgypte. Cette expression est rpte la fin du verset pour indiquer aussi bien la sortie dEgypte que la libration de notre sujtion au mauvais penchant, puisque la condition pralable lacceptation du joug du royaume de D. est de vivre avec la conscience de Je suis lEternel . Yaakov, qui avait cette connaissance, prononait le Kriat Chma, qui est la proclamation de lacceptation du joug divin. On raconte propos du Gaon de Vilna que, lorsque sa sur vint lui rendre visite aprs quelques dizaines dannes dabsence, il ouvrit la porte, senquit de sa sant, et referma immdiatement la porte pour retourner son tude. Elle lui demanda de lui ouvrir la porte pour le voir et lui parler, mais il nen fit rien. Il refusa, lui disant quil tait dommage de perdre un temps prcieux pour des conversations mondaines, et que dans lautre monde, ils pourraient discuter tout loisir...

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Le Gaon de Vilna a agi la manire des Patriarches dont les gestes sont un modle pour leurs enfants (Sotah 34a). Il consacra D. et la Torah justement cet instant de rencontre avec sa sur, si plein dmotion. Nous pouvons ajouter: Hlas pour ce que nous avons perdu, et qui ne se retrouvera plus (Sanhdrin 111a; Chemoth Rabah 6:4), hlas pour les instants prcieux que lhomme perd dans sa vie et qui sont perdus pour toujours. Non seulement le Gaon de Vilna, mais tous les hommes pieux qui ont en permanence la notion de Je suis lEternel , ne sont jamais dtachs de D., mme pas lorsquils mangent ou lorsquils dorment. Cest ce qui leur permet davoir une influence favorable sur leur entourage et dtre une bndiction pour le monde entier et une source de russite et de bienfaits pour tous.

Savoir ce que signifie Je suis lEternel unifie


Lorsque nous considrons les rcits de la rencontre entre Yossef et son frre Benyamin et celle de Yossef avec son pre (dont nous avons parl plus haut), nous voyons que cest la connaissance quils avaient au fond deux-mmes de Je suis lEternel qui eut une influence bnfique sur leur entourage et sur toutes les gnrations futures auxquelles ils ont enseign une conduite fraternelle et sympathisante envers les autres. Considrons tout dabord la rencontre de Yossef avec son jeune frre Benyamin. Nous avons dj cit le Midrach selon lequel ils ont pleur lun sur lpaule de lautre. Ils pleuraient la destruction des deux Temples et celle du sanctuaire de Chilo. Nous avons dj remarqu qu ce moment-l ils auraient d se rjouir de leurs retrouvailles aprs vingt-deux ans de sparation, au lieu de pleurer. Mais Lorsque Yossef vit son frre Benyamin, il le prit part et lui rvla quil tait Yossef son frre, mais il lui enjoignit aussi de ne pas rvler ce fait ses frres (Meam Loez Mikets, Sefer HaYachar). Sil en est ainsi, il faut se demander pourquoi ils ont pleur la destruction des deux Temples seulement lors de leur deuxime rencontre? Il est possible que, la premire fois, ils aient pleur de joie et ce nest quensuite, lors de leur deuxime rencontre, quils ont pleur la destruction des Temples. Mais cette explication est insuffisante car rien nindique que cette fois-l ils aient pleur. Pour rpondre, il faut comprendre le sens et les implications de Je suis lEternel , quils ressentaient profondment. La notion de Je suis lEternel a amen Yossef et Benyamin enseigner un mode de vie et une leon leurs frres et tous les Juifs, pour toutes les gnrations. Yossef et Benyamin prvoyaient que la haine gratuite serait la cause de la destruction des deux Temples et du sanctuaire de Chilo (Yoma 9b). Il est donc clair que ce nest quen prsence de leurs frres quils en pleurrent la destruction. Ils dsiraient montrer leurs frres que seuls lamour et la fraternit permettent de remdier la haine gratuite et aux disputes qui sont la cause de tant de destruction, et de lexil. La rdemption ne peut venir que grce lunion (Tanhouma Nitsavim 1). En cet instant sublime o ils spanchrent lun sur lpaule de lautre, ils ne pensaient pas eux-mmes mais leurs frres qui les regardaient et qui en tireraient la leon, et comprendraient que la haine loigne la Prsence divine dIsral, comme il est crit (Chemoth 25:8): Je rsiderai parmi eux , en chacun deux, lorsquils seront unis (Sifri Bracha 33:5). Sils comprennent cette leon, ils se corrigeront tout de suite et nen viendront pas causer la destruction. Mais les deux Temples furent dtruits parce que la haine navait pas t entirement limine du cur. Nous constatons dj cette haine lors de la rencontre entre les frres et Yossef, Chehem. Il est crit (Brchith 37:4): Ils ne pouvaient pas se rsoudre lui parler amicalement , et les commentateurs remarquent que leur seule faute tait de navoir pas parl avec Yossef, ce qui les empchait de se rconcilier avec lui. Cela met en relief la grandeur de Yossef et de Benyamin qui, malgr leur motion, nont pas donn libre cours leur propre joie mais se souciaient du sort dautrui avec gnrosit et grandeur dme. Le Baal Chem Tov et ses disciples enseignent quil faut se sacrifier en faveur de chaque Juif. Si lon voit quil est dans le besoin, ou par malheur dans la peine, et quil souffre, il faut faire tous les efforts possibles, jusquau sacrifice, afin de le soulager. Sil en est ainsi pour les besoins matriels, plus forte raison, lorsquil sagit dune peine de lme, il faut se dvouer pour sauver son prochain de la perdition. Si lon constate quun autre Juif sloigne du bon chemin, il est certain quil faut tout faire pour le sauver. Mais il est impossible daider lautre si lon ressent envers lui de la haine, au contraire il faut aimer son prochain comme soi-mme. Les squelles dune haine qui na pas t compltement dracine causeront beaucoup de tort. Moch, lorsquil tait encore en Egypte, a dit (Chemoth 2:14): La chose est donc connue,

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et Rachi explique au nom des Sages (Chemoth Rabah 1:35): Je comprends maintenant une chose qui ma toujours tonn: pourquoi, de toutes les nations du monde, seul Isral est soumis lesclavage? Je vois maintenant quils le mritent . Lorsque Moch vit que deux Juifs - Dathan et Aviram - lavaient dnonc Pharaon pour avoir tu lgyptien, il comprit quil y avait parmi les Juifs des calomniateurs et cela lui expliquait pourquoi les Juifs taient encore en exil. Lesclavage et les souffrances quils subissaient en Egypte, au lieu de les amener entretenir des relations fraternelles et amicales, taient la cause de disputes, de mdisances, de dnonciations aux inspecteurs de Pharaon. Si la mdisance domine leurs relations, cest le signe que la haine nest pas encore compltement efface et na pas t dracine. La descente de Yossef en Egypte, lexil dIsral, la destruction du sanctuaire de Chilo et celle des deux Temples, tout cela fut caus par la haine gratuite et la mdisance. Cest pourquoi, justement au moment o les frres sont sur le point de descendre en Egypte cause de la mdisance et de la haine qui ont caus leur exil, Yossef et Benyamin ont dcid que ce ntait pas le moment de faire des comptes et daccuser lautre davoir t la cause de lexil, ce qui les aurait amens des disputes au lieu de les conduire llimination de la haine et lamour. Cest pourquoi Yossef dit ses frres, avant quils ne retournent en Erets Isral vers Yaakov: Point de rixes durant le voyage! (Brchith 45:24), cest--dire: Ne vous accusez pas les uns les autres, afin de ne pas en venir perdre le contrle de vous-mmes et vous disputer. De plus, les frres auraient pu faire valoir Yossef quil tait seul coupable de tout, puisque Il rapportait sur leur compte des mdisances leur pre (Brchith 37:2), Il lui disait quils consommaient les membres arrachs de btes vivantes, quils avaient un comportement indcent, etc. (Brchith Rabah 84:7; Zohar I 182). Sil navait pas colport ces mdisances, ses frres ne lauraient pas ha et ne lauraient pas vendu comme esclave. Yossef de son ct aurait pu leur rtorquer quil navait pas eu lintention de raconter des mdisances sur leur compte, mais quau contraire, il dsirait leur bien et quil ne mritait pas davoir t vendu. Et pourtant! Yossef dans sa sagesse a domin ses sentiments personnels, il a pleur le premier, il sest accus davoir t responsable de cet exil, et il a lui-mme mis en avant les arguments que ses frres auraient pu faire valoir. Il voulait se corriger lui-mme avant dexiger la mme chose des autres (Baba Bathra 60b). Alors, ses frres comprirent quils avaient leur part de responsabilit dans cet exil, et quils taient tous coupables de ce qui leur arrivait maintenant et de ce qui leur arriverait plus tard, cause de la haine qui bouillonnait encore en eux. Nous sommes maintenant en mesure dexpliquer la deuxime rencontre, celle de Yossef avec son pre Yaakov. Les Sages nous enseignent que Yaakov, au lieu dembrasser Yossef aprs vingt-deux ans de sparation, pronona le Kriat Chma! Daprs la loi, si ctait lheure de dire le Kriat Chma, il faut se demander pourquoi Yossef ne la-t-il pas prononc. Sinon, il est certain que Yaakov avait dj dit Kriat Chma en son temps. Pourquoi rpter cette profession de foi maintenant et pourquoi, lorsquil rencontre Yossef, nembrasse-t-il pas son fils mais dit Kriat Chma? Nous avons dj expliqu plus haut que justement en cet instant si charg dmotion, au lieu de fondre en larmes sur lpaule de son fils, Yaakov prononce le Kriat Chma pour nous enseigner qu un moment dmotion intense ou de danger extrme, il faut sattacher D. et sen remettre Lui, avec un amour qui surpasse tout autre. Yaakov prononce le Kriat Chma afin de ne pas tre, ne serait-ce quun seul instant, dtach de lamour de D., et cest justement ce moment-l quil a rassembl toute sa force dme, prcisment parce quil tait rempli de la notion de Je suis lEternel . Il est certain que Yaakov voulait emplir ses enfants et toutes les gnrations futures de la notion de D. Un et Unique, qui veille sur les Enfants dIsral lorsquils Le glorifient tous ensemble et quils sont unis, sans haine des uns envers les autres. Tel est le sens du Kriat Chma et de la connaissance de Je suis lEternel . Il faut avoir la connaissance de lUnit de D., comme il est dit (Zohar Aharey Moth 73a): Le Saint, bni soit-Il, la Torah et Isral forment un tout . Je suis lEternel - cest--dire Un, unique et sans pareil. Mais Yossef ne pronona pas le Kriat Chma. Il savait quil avait une part de responsabilit dans lveil de la haine de ses frres envers lui, et il pleurait sur lpaule de son pre la peine quil lui avait cause durant les vingt-deux ans de leur sparation, pour avoir mdit de ses frres. Il pleurait la pense quil navait pas valu correctement la conduite de ses frres pour savoir si elle tait conforme ou contraire la loi. Le Hafetz Hayim dit ce sujet (Chmirat HaLachon II, section Vayeshev) que Yossef se trompait

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en pensant que les frres consommaient la viande dun membre arrach un animal vivant, etc. Si ses soupons taient fonds, il aurait d les empcher de le faire sur le champ, car le commandement de faire des remontrances sapplique mme un lve envers son matre, et il navait pas besoin de rapporter le fait leur pre au pralable. Il en fut puni mesure pour mesure. Qui peut rester insensible devant deux hommes vertueux, Yossef et Yaakov, qui se tiennent lun en face de lautre, lun pleurant et lautre disant le Kriat Chma, et ne pas comprendre? Combien denseignements avons-nous tirer de ces rcits! Le prsent exil, long et amer, se prolonge uniquement parce que nous navons pas encore corrig nos fautes. Que D. nous aide nous repentir de tout cur, comme Il le veut. Amen. Quil en soit ainsi! Quelle est la voie suivre? Nous apprenons-l une rgle de conduite valable pour tout homme accabl dun problme quelconque, juridique ou mdical: Il doit tout dabord accepter sa situation du fait quil ressent la vrit de Je suis lEternel , que tout ce qui lui arrive vient de D. Il lui faut aussi savoir que D. veut le faire bnficier de mrite, lui et au monde travers ses souffrances. Ce nest quaprs avoir accept ce fait quil pourra aller consulter les mdecins ou les avocats, tout en priant D. et en sachant que tout ce quIl fait est juste.

La peur du jugement et du chtiment


Et Yossef dit ses frres: Je suis Yossef... mais ses frres ne purent lui rpondre, car il les avait frapps de stupeur, et il leur dit: Approchez-vous de moi, je vous prie, et ils sapprochrent. Il reprit: Je suis Yossef votre frre, que vous avez vendu lEgypte (Brchith 45:3-4). Ils ne crurent pas quil tait Yossef; cest pourquoi il les fit approcher et leur montra la circoncision disent les Sages (Brchith Rabah 93:11; Tanhouma Vayigach 5). Il y a lieu dexpliquer les versets concernant la rencontre de Yossef avec ses frres. 1. Tout dabord il faut se demander en quoi le fait dtre circoncis est plus convaincant que le fait de parler Hbreu (Brchith Rabah 93:10). Pourquoi Yossef doit-il donner ses frres un signe de reconnaissance supplmentaire? 2. Sils furent frapps de stupeur, cest quils lont cru. Pourquoi, par la suite, ont-ils dout au point quil fut ncessaire de leur donner une preuve? 3. Pourquoi leur dit-il tout dabord: Je suis Yossef , et najouta que la deuxime fois: votre frre? 4. Il est certain que Yossef voulait se rconcilier avec ses frres lorsquil se rvla eux et quil leur montra le signe de la circoncision. Pourquoi leur rappelle-t-il justement ce moment-l quils lont vendu lEgypte? Un tel rappel ne risquait-il pas de minimiser quelque peu les chances dune rconciliation? 5. Il faut aussi se demander pourquoi Yossef dit ses frres de sapprocher de lui. Ils taient en sa prsence pendant ce pourparler, comme le souligne le Midrach (Brchith Rabah 93), pourquoi leur demander de sapprocher? 6. Nous devons aussi comprendre comment Yossef tait tellement sr que ses frres le croiraient lorsquils verraient le signe de la circoncision, et en quoi ctait une preuve, puisquen ce temps-l, les enfants dIchmal et ceux de Ktoura taient aussi circoncis. tait-ce une preuve quil tait bien Yossef? La rencontre de Yossef, le roi, avec ses frres fait allusion au Jour du Jugement, o tous passent en revue devant D., le Roi des rois (Roch HaChana 16a). Si ses frres furent frapps de stupeur et incapables de rpondre ses reproches, lorsque Yossef leur demanda de sapprocher de lui, et quil leur fit savoir la vrit merveilleuse qui expliquait et lucidait leurs doutes et tous les vnements jusque-l inexplicables, nousmmes, tres de chair et de sang, quel point serons-nous incapables daffronter les reproches que D. - qui est la fois juge et partie - nous fera, car Il juge chacun tel quil est vraiment, sans aucun favoritisme. Chacun doit se prparer chaque jour pour le Jour du Jugement, car aprs avoir t cr, lhomme doit examiner et peser ses actes (Yirouvin 13b) afin de les amliorer, progresser dans la voie de la moralit et pouvoir se tenir devant le Juge. Faute de quoi, que rpondrons-nous, et comment nous justifierons-

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nous, lorsque le Juge nous reprochera nos fautes, nos transgressions et nos pchs? Le Tout-Puissant a su dvoiler liniquit de tes serviteurs (Brchith 44:16). Comment pourrait-on se tenir devant Lui en jugement lorsquIl jugera le monde? D., Crateur de toutes choses, connat et value tout, Il est la fois tmoin, partie et juge, bni soit-Il! En Lui, il ny a ni injustice, ni oubli, ni corruption et Il tient compte de tout (Avoth IV:29). Quels avocats aurons-nous pour dfendre nos actes devant Lui, et qui parlera en notre faveur? En quoi avons-nous plac notre confiance pour mriter dtre acquitts au Jour du Jugement? Il est bon de se rappeler, chaque jour de lanne, les confessions de Rabeinou Nissim Gaon, ainsi que celles du Rabbin Chem Tov Ardoutiel (prononces durant le service de Moussaf de Yom Kippour), afin dtre imprgns de la crainte du jugement, car il est plus facile de se repentir chaque jour de ses fautes et de ses transgressions, et selon lopinion dun de nos Sages (Roch HaChana 16a) Lhomme est jug chaque jour . Combien difiantes sont les paroles de la suite de cette Michna (Avoth IV:29) qui nous enseigne le repentir: Ne te laisse pas aveugler par tes passions et ne timagine pas que la tombe sera un refuge. Cest malgr toi que tu as t cr et malgr toi que tu as vu le jour; cest sans ton consentement que tu vis, cest contre ton gr que tu mourras et que tu devras rendre compte de tes actions devant le Roi des rois, le Saint, bni soit-Il . Nous serons couverts de honte et de confusion lorsque nous nous prsenterons devant Son Trne le Jour du Jugement en ralisant notre petitesse et notre insignifiance par rapport la grandeur sublime de D. Nous tirons de l une leon pour la vie. Parfois lhomme se trouve dans un milieu de Torah, sa bouche et son cur rptent les paroles de la Torah, il en pratique tous les commandements la lettre, ceux qui sont faciles autant que ceux qui sont difficiles, et il peut se croire proche de D. Mais la vrit, il en est aussi loin quun ple de lautre, sil ne fait pas tout ce qui est en son pouvoir, et mme au-del, pour rester li et attach D. Il est certain que ce nest pas le lieu en soi qui dtermine la proximit D. puisque D. est la Place du monde et le monde nest pas la place de D. (Chohar Tov 4:10). Quelquun peut se trouver entre les quatre murs de la maison dtude, ou bien dans la synagogue au moment des prires, et pourtant tre trs loin de D. Par exemple, sil est ngligent dans son tude (et les Sages nous ont enseign (Yoma 19b): Tu prononceras des paroles de sagesse, et non pas des paroles vaines), ou bien sil ne concentre pas sa pense au moment de la prire, et le prophte se lamente ce sujet (Ichaya 29:13): Ce peuple ne Me rend hommage quen paroles et Mhonore du bout des lvres, il tient son cur loign de Moi... Par contre, un autre peut se trouver loin de ces lieux et pourtant tre attach D. et se trouver en Sa prsence, comme il est dit: Partout o Mon Nom est invoqu, Je serai prsent et Je te bnirai , car tre proche de D. ne dpend que des actions de lhomme lui-mme, comme le disent les Sages (Edouyot V:7): Tes actes te rapprocheront et tes actes tloigneront . Nous pouvons prsent expliquer la suite du verset: Et Yhouda savana vers lui en disant: de grce, mon seigneur! (Brchith 44:18). Il ne faut pas lire mon seigneur, mais Seigneur, D. . Yhouda dit Yossef: nous sommes tellement lis et attachs D. que Sa Prsence est en nous en permanence, comme il est crit: Je rsiderai parmi eux (Chemoth 25:8), en eux et non entre eux, et il est dit aussi: Je fixe constamment mes regards sur le Seigneur (Thilim 16:8). Il ne faut donc pas me souponner davoir vol la coupe, car D. est en moi, au fond de moi, de Lui ne vient que la vie. Nous ne pouvons ni voler ni mentir, puisque lexistence de D. et Son sceau sont Vrit (Chabath 55a). Cest pour cette mme raison aussi que je ne te crains pas. Et alors, Yossef lui rpondit: Si ce que tu dis est vrai, o tait donc la Prsence de D. lorsque vous avez vendu Yossef votre frre lEgypte? Il aurait mieux valu pour vous et pour lui le tuer, car au moins il serait mort innocent, ce qui est prfrable que de devenir esclave et vivre parmi les non-juifs o il risque de sassimiler et de se perdre. Afin de nous mettre en garde, les Sages enseignent: Il est plus grave de faire commettre un autre une transgression que de le tuer (Brchith Rabah 21:5). Vous tes donc dans lerreur si vous pensez que vous pouvez rester lis et attachs D. alors que vous avez une telle faute sur la conscience. La Prsence de D. vous a quitts, limage de D. nest plus en vous. En entendant ces reproches svres, les frres de Yossef furent saisis de stupeur, et ils furent incapables de lui rpondre. Lorsque les frres descendirent en Egypte la premire fois, Yhouda dit: Le plus jeune est auprs de notre pre en ce moment et lautre nest plus (Brchith 42:13), et maintenant il dit explicitement que

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son frre est mort (ibid. 44:20), ce qui est une contradiction. Comment se fait-il que Yhouda nait pas craint de mentir? Dautant plus que Yossef leur avait montr quil tait capable de vrifier leurs dires laide de la coupe qui lui servait la divination (Tanhouma Vayigach 4), et il pouvait savoir si ce frre tait vivant ou mort. Rachi crit ce sujet que Yhouda a prononc ce mensonge par peur, car sil avait dit que son frre tait vivant, Yossef lui aurait demand de le faire venir. Mais je vais apporter une autre rponse cette question. Nous savons que les mchants mme de leur vivant sont appels morts (Brachot 18b). A partir du moment o Yossef fut emmen en Egypte, lieu de dbauche et dimpuret tant les Egyptiens taient pervers (Chemoth Rabah 1:22), les frres ont pens que, sans aucun doute il stait assimil et avait abandonn la voie du Judasme. Pour cette mme raison, Yaakov ne les a pas crus lorsque les frres lui dirent que Yossef tait vivant, comme il est crit (Brchith 45:26): Mais son cur restait froid, parce quil ne les croyait pas jusqu ce quil vt les chars (Agalot) que Yossef avait envoys pour lemmener (ibid. v. 27). Ce nest quen voyant le signe de reconnaissance envoy par Yossef que la vie revint au cur de Yaakov leur pre (ibid. v. 27), car il stait spar de lui alors quils tudiaient la loi de la gnisse Egla dont on brise la nuque (Brchith Rabah 94:3). Ce qui nous permet de dire que Yhouda avait lintention de signifier que son frre tait mort spirituellement, car il le croyait perdu parmi les non-juifs. Yossef, en se faisant reconnatre de ses frres leur dit seulement Je suis Yossef sans ajouter votre frre . Il rpondait leur pense: Je suis Yossef, je suis rest vertueux, je nai en rien chang depuis que jai quitt la maison de mon pre, comme Rachi lexplique (Chemoth 1:5): Yossef est devenu roi et il est rest le mme homme vertueux . Mais comme ils ne lont pas cru, il leur dit de sapprocher de lui, de se rendre compte par eux-mmes quil tait rest tout aussi vertueux quavant, le fils bien-aim de Yaakov, et tout comme son pre, fidle et attach D. Mais la seconde fois, lorsquil les rprimanda, il leur dit: Je suis Yossef votre frre . Je suis votre frre, pourquoi mavez-vous vendu lEgypte? Il leur signifiait que dornavant tous les fils de Yaakov mritaient dtre frres, car effectivement il avait conserv la pratique du Judasme, la fin de sa vie comme au dbut. Comme preuve, il sest dcouvert et leur a montr le signe de la circoncision (Brchith Rabah 93:9). Lintention de Yossef tait de leur montrer quil navait pas port atteinte ni dnatur le signe de lAlliance jusqu ce jour. Et il ajouta: ...que vous avez vendu lEgypte , pour signifier que ce nest que lorsque lhomme se trouve face une preuve que lon peut savoir jusqu quel point il a les regards fixs toujours sur le Seigneur . Si eux avaient eu toujours leurs regards fixs sur le Seigneur, ils se seraient gards de le vendre et ils ne lui auraient pas fait courir ce grand risque de tomber au plus profond de lenfer, parmi les Egyptiens pervers. Si je ntais pas rest toujours proche de D., je naurais pas pu surmonter toutes les preuves que jai d affronter. Lorsque la femme de Poutiphar a tent de me sduire avec tous ses charmes et de me faire fauter, je me suis souvenu du visage de mon pre Yaakov qui est grav sur le Trne de Gloire (Sotah 36b; Brchith Rabah 82:2). Cest ainsi que jai russi surmonter la tentation . Nous savons que cest parce que Yossef fut capable de vaincre ses penchants quil est devenu gouverneur de toute lEgypte (Tanhouma Nasso 28). Comme nous lavons dit, le Midrach nous fait entendre que dans les temps venir aussi, les reproches que D. nous fera nous laisseront sans rponse. LorsquIl nous demandera: Avez-vous tudi la Torah, avezvous pri, etc. (Chabath 31a), nous rpondrons que nous frquentions les maisons dtude, que nous avons tudi la Torah, pri, etc. mais alors D. dira: Vous ne Mavez rendu hommage que du bout des lvres et Il rprimandera chacun selon les intentions de son cur: Si effectivement tu Me connais, pourquoi as-tu t ngligent dans ltude, pourquoi as-tu eu tant de conversations futiles, pourquoi as-tu vilipend lhonneur de la Torah, pourquoi nas-tu pas pens aux sens des paroles que tu as prononces dans la prire? Non seulement il nous sera demand compte de notre conduite dans les maisons dtude et de prires qui sont des temples en miniature (Mguilah 29a) o nous aurions d ressentir la Prsence de D., mais aussi en dehors de ces lieux, en quelque endroit o nous tions. Le reproche sera dautant plus svre envers celui qui se considre, ou que les autres considrent, comme serviteur de D., et il sera jug pour avoir tromp D. et les hommes. Chacun sera jug selon ses actes.

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Dans tout ce que nous faisons et partout o nous nous trouvons nous devons nous efforcer dtre sincrement proches de D. et Il sera proche de nous, comme il est crit (Thilim 145:18): LEternel est proche de ceux qui Linvoquent, de tous ceux qui Lappellent avec sincrit . Mais ceux qui Mhonorent du bout des lvres et dont le cur est loin de Moi , sont loin du Roi du monde et leur punition sera svre et amre. Lhomme, qui est un tre de chair, doit considrer quil fait peut-tre partie de ces gens-l, D. ne plaise, mais il est incapable de se tester lui-mme et de se faire lui-mme des reproches, si ce nest lheure de lpreuve. Mme un homme dot de suprmatie doit sexaminer, surtout celui que D. a dou de sagesse et de comprhension se doit de servir D. avec plus de perfection que les autres, la mesure de sa plus profonde connaissance de D. Un tel homme doit sefforcer dautant plus de se perfectionner dans la pratique de la Torah et lobservance des commandements. En remplissant son cur de crainte et de terreur, en se rendant compte combien son entendement est restreint, combien ses fautes sont grandes, combien il a endommag les choses sacres et caus de dgts aux canaux de la saintet et de la prosprit par ses mauvaises actions, il aura honte de ses fautes, il sera dconfit cause de ses pchs, et il dversera ses supplications devant D., afin de ne pas entrer en jugement avec Ton serviteur car nul vivant ne peut se trouver juste Tes yeux (Thilim 143:2). Seules les bonts de D. et Sa grande misricorde peuvent le soutenir. La peur du jugement le conduira rapidement raliser que la misricorde et la bont de D. sont infinies et lamnera se repentir. Celui qui a pour seul but de slever spirituellement prosprera dans ce monde et dans lautre.

La vertu de Yossef (et des Patriarches)


Et il dit: Je suis Yossef votre frre que vous avez vendu lEgypte, maintenant ne vous affligez pas, ne soyez pas irrits contre vous-mmes de mavoir vendu ce pays car cest pour votre salut que le Seigneur my a envoy avant vous... Le Seigneur ma envoy au-devant pour vous prparer des ressources dans ce pays et pour vous conserver la vie de faon merveilleuse (Brchith 45:4 - 7). Nous avons ici une preuve indiscutable que les chefs des tribus nont pas vendu Yossef par haine mais quils furent les instruments de D. (voir Or HaHayim ad. loc.) et quils lont envoy en Egypte pour y prparer des ressources et les faire vivre afin dannuler les forces du Mal qui ont leur origine dans la dbauche de lEgypte, et pour quil soit plus facile aux Enfants dIsral de corriger les tincelles de saintet dAdam, disperses en Egypte (voir Or Hahayim Brchith 49:9). De mme, le Pitouhey Hotam crit que Yossef dit ses frres: le Seigneur ma envoy au-devant afin de prparer le terrain pour la correction des deux cent quatre-vingt-huit tincelles de saintet. Nous savons quOsnat, la femme de Yossef, tait la fille que Dina enfanta Chehem (Pirkey DRabbi Eliser 38), et il est dit (ibid.) de Yaakov quil inscrivit le Nom de D. sur une plaque quelle portait. Elle descendit en Egypte afin daider Yossef prparer le terrain pour la correction des tincelles de saintet avant larrive de ses frres, puisque la vente tait dcrte par le Ciel et leur haine inspire par D. Yossef dit ses frres: Le Seigneur ma envoy au-devant pour vous prparer des ressources dans ce pays, et pour vous sauver la vie , pour vous sauver des forces du Mal et vous donner une protection contre tous les accusateurs, jusqu la fin des temps. Auparavant il dit (Brchith 45:3): Je suis Yossef, est-ce que mon pre vit encore , pour leur signifier la fin des temps. Lorsque D. rvlera Sa souverainet et quIl jugera les descendants dEssav et dIchmal pour toutes les souffrances quils ont fait subir aux Juifs, le monde atteindra sa perfection, comme il est crit (Ovadia 1:21): Et les librateurs monteront sur la montagne de Sion pour se faire les justiciers du mont dEssav, et la royaut appartiendra lEternel . Cest ce que Yossef leur fit entendre en disant: Je suis Yossef . Le nom Yossef a une valeur numrique gale six fois le Nom de D. correspondant aux six millnaires, indiquant par l qu la fin des temps, aprs six mille ans dHistoire, viendra le temps de la rdemption et de la punition pour tous nos oppresseurs. En disant: Est-ce que mon pre vit encore? il rappelle que le mrite des Patriarches ne spuise pas (Yrouchalmi Sanhdrin 10:1) et nous sauvera. Il est crit (Brchith 46:4): Yossef te fermera les yeux . Pourquoi justement Yossef? Comme nous lavons dit, Yossef est li lAlliance qui indique la saintet du regard qui ne se pose pas sur ce qui est

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honteux (voir Zohar III, 84a) ou interdit. Cest ce que disent les Sages (DerekhErets Zouta 1; Midrach Hagadah): Lorsque Yaakov rencontra Yossef, il pronona le Kriat Chma . Pourquoi justement cette profession de foi et pas une autre prire? Cest parce que, lorsque Yaakov descendit en Egypte, D. lui promit (Brchith 46:4): Moi-mme je descendrai avec toi en Egypte, Moi-mme aussi Je ten ferai remonter , cest--dire: tu ne connatras aucune chute de spiritualit. Et donc, en voyant Yossef, en constatant lampleur du travail quil avait ralis en Egypte, cette terre de dbauche et de perversion (Chemoth Rabah 1:22) et en voyant comment il avait rgnr les tincelles de saintet, il pronona justement le Kriat Chma, o il est dit (Bamidbar 15:39): Ne vous garez pas la suite de votre cur et de vos yeux, allusion Yossef, la saintet de ses yeux. En effet, les Sages disent de Yossef (Brchith Rabah 87:3): Dans la maison de la femme de Poutiphar, il avait lhabitude de se frotter les yeux et elle na pas russi linciter fauter car Yossef ne se laissait pas entraner par les yeux. Elle lui disait: je vais taveugler, et il lui rpondait: LEternel rend la vue aux aveugles (Thilim 146:8). En fin de compte elle plaa une tige de fer sous sa gorge pour quil lve les yeux sur elle et, malgr tout, il nen fit rien... (Brchith Rabah 87:11). Yossef tant le prototype de celui qui prserve ses yeux, D. dit Yaakov que ctait justement Yossef qui lui fermerait les yeux. De plus, avant de mourir, Yaakov craignait une quelconque faille dans sa descendance, mais ses enfants, les tribus de lEternel selon la charte dIsral (Thilim 122:4), lui rpondirent que tous ses enfants furent conus saintement, et pour en donner la preuve, ils ont prononc ensemble le Kriat Chma - coute Isral, lEternel est notre D., lEternel est Un (Pessahim 56a; Brchith Rabah 98:4), fondement de la foi du peuple juif. Les Sages disent (Pessikta Zouta Chemoth 6:6): Les Enfants dIsral furent sauvs dEgypte par le mrite de la circoncision et (Tanhouma Chemoth 4): Ils furent sauvs par le mrite de Yaakov et de Yossef (Bamidbar Rabah 13:19), et surtout (Brchith Rabah 87:10): Par le mrite des ossements de Yossef, la mer des joncs sest ouverte devant eux . Tout cela est li, car le Kriat Chma est fondamental, et lAlliance aussi (Zohar I, 66b). Grce ces deux attributs, les Enfants dIsral furent sauvs et la mer souvrit devant eux. Le pouvoir du Kriat Chma est grand. On met la main sur les yeux (pour ne pas regarder), de mme que Yossef te fermera les yeux . Le Kriat Chma protge les yeux, puisquil y est dit (Bamidbar 15:39): Ne vous garez pas la suite de votre cur et de vos yeux . Lessentiel de la correction du signe de lAlliance provient de la saintet des yeux, comme il est dit dans les livres saints - propos du verset (Brchith 38: 21): O est la prostitue qui se tient aux Deux-Sources, BaEnayim, (le mot Enayim dsigne les yeux), sur le chemin? (voir Tiphreth Chlomo sur ce verset). Cela explique pourquoi Yossef ne pronona pas le Kriat Chma lors de sa rencontre avec Yaakov son pre. Cest que seul Yaakov, en arrivant en Egypte, put apprcier le travail de Yossef dans ce pays de dbauche et il pronona le Kriat Chma pour la protection des yeux, comme nous lavons expliqu plus haut. Mais Yossef qui rsidait en Egypte depuis longtemps dj et qui sy tait habitu, avait appris se protger la vue et il navait pas besoin de dire le Kriat Chma cette occasion. Selon le Zohar, Yaakov est le corps et Yossef lalliance, et tous deux ne font quun , ce qui nous permet de comprendre le verset (Brchith 45:27): La vie revint au cur de Yaakov leur pre lorsquil vit les chars que Yossef avait envoys pour lemmener (ibid.). Quels sont ces chars? Les Sages disent (Brchith Rabah 94:3, 95:3): Lorsque Yossef se spara de Yaakov, ils taient occups tudier la section concernant la gnisse dont on rompt le cou Egla dsigne la fois un char et une gnisse). En voyant les chars, il se sentit revivre, il retrouva son lien avec Yossef car les chars indiquent des choses qui sont attaches les unes aux autres et il se sentit revivre. Tout le temps o il avait t spar de Yossef, il avait port le deuil et refusait dtre consol (Brchith 37:35) car il lui manquait le lien avec Yossef et il craignait de voir lenfer, sil perdait un de ses enfants (Tanhouma Vayigach 9; Midrach Hagadah) et de ne pouvoir oprer la rectification de la saintet. Il ignorait la vente, car les frres avaient fait le serment de ne rien dire Yaakov et avaient associ D. leur serment (Tanhouma Vayechev 2; Yalkout Chimoni ibid. 142). Mais maintenant que ce ntait plus un secret et que la vrit tait connue, Yaakov comprit que le signe de lAlliance de Yossef navait pas t dnatur et que mme en Egypte son fils tait rest vertueux (Brchith Rabah 94: 4), cest pourquoi la vie lui fut rendue, comme quelquun qui retrouve un objet perdu. Yaakov ne se mit

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pas en colre en apprenant que Yossef avait t vendu, il ne maudit pas ses fils car il savait que telle avait t la volont de D. Cest pourquoi il est crit: La vie revint dans le cur de Yaakov leur pre , il tait toujours leur pre, et il les aimait comme un pre aime toujours ses enfants. Il faut se demander pourquoi les frres, les tribus de lEternel (Thilim 122:4) ont vendu Yossef et pourquoi ils ont associ D. leur serment de ne pas rvler la chose Yaakov. Est-ce pensable? Cest que les frres savaient que Telle est la descendance de Yaakov, Yossef , quils ne font quun et que tout ce qui arrive na pour but que de confondre et dannuler les forces du Mal. Il est impensable que les frres aient pu vouloir faire du mal Yossef. Au contraire, voyant que Yaakov veillait sur Yossef avec une attention toute particulire et laffectionnait au point de lui faire une tunique spciale (Brchith 37: 3), cest--dire un vtement rserv aux gens honorables, ils comprirent quil y avait l un secret. Aprs avoir entendu le contenu de ses rves ils en dduisirent quil tait le fondement du monde (puisque dans son rve, ils se prosternent devant lui). Lui seul saura corriger le monde et lamener se soumettre la souverainet de D. Cest pourquoi, pour le mettre lpreuve et avoir la confirmation de ses dires, ils lont vendu lEgypte, pays de dbauche, o il pourrait prouver sa facult de vaincre le Mal par la puissance de son secret issu de lattribut du Fondement. Pour lucider ce mystre, nous voyons que les frres avaient une intention profonde en vendant Yossef. Dans le Chaar HaKavanot, le Ari zal dit quil faut se concentrer en prononant le verset (Daniel 9:18): Ouvre les yeux et vois nos ruines car la valeur numrique du mot Pkah, ouvre, indique le saint Nom. Cette mme valeur numrique se retrouve dans les propos de Yhouda ses frres (Brchith 37:26): Quel avantage, si nous tuons notre frre et si nous scellons sa mort? Venez, vendons-le aux Ismalites , autrement dit: comment le Nom de D. peut-il nous clairer si nous tuons notre frre, et donc venez, vendons-le aux Ismalites , comme il est dit (Ichaya 2:5): Maison de Yaakov, venez, allons dans la lumire de lEternel , cest--dire venez, justement dans la lumire de lEternel, ne le tuons pas mais vendons-le car si nous le tuons, le Nom de D. ne nous clairera pas. En outre, les frres ont mis lpreuve la vertu de Yossef en le jetant dans une citerne, mais la citerne tait vide, sans eau (Brchith 37:24). Si elle tait vide, il est certain quil ny avait pas deau. Il ny avait pas deau mais il y avait des serpents et des scorpions (Chabath 22a). Malgr tout, les serpents et les scorpions nont pas fait de mal Yossef car il portait en lui le signe de lAlliance sainte et Les btes sauvages nont pas demprise sur lhomme qui na pas port atteinte au signe de lAlliance (Zohar 71a; Tikouney Zohar 94b). Yossef tait pur, il navait que dix-sept ans (Brchith 37:2). Le mot Tov, bon, a la valeur numrique de dix-sept et comme nous le savons ce mot indique lalliance, comme il est dit de Moch (Chemoth 2:2): Elle vit quil tait bon , cest--dire quil tait n circoncis (Sotah 12a; Chemoth Rabah 1:24) et le signe de lAlliance brillait comme le soleil son apoge. De mme, Yossef tait bon. En arrivant en Egypte, il savait que lintention de ses frres avait t de servir D., qui avait agr leur serment. Il tait pein davoir t spar de sa famille, mais il tait rest vertueux mme loccasion de la grande preuve avec la femme de Poutiphar. Les frres, sachant quil tait rest vertueux et un Juste, fondement du monde (Zohar I, 59b), descendirent en Egypte sa recherche, jusque dans les quartiers des prostitues (Brchith Rabah 91:6) et ils taient mme prts le racheter pour une ranon leve (ibid. 91:7). Mais Yaakov de son ct refusait dtre consol jusqu ce quil revoie Yossef, et ce nest quen apprenant que Yossef continuait tre un Juste, fondement du monde, quil sapaisa, et que la vie revint dans son cur (Brchith 45:27). Aprs le dcs de Yaakov, Yossef dit ses frres (Brchith 50:20): Vous aviez mdit contre moi le mal, D. la pens en bien , cest--dire: vous avez pens me mettre lpreuve en me vendant pour voir ce quil adviendrait et vous mavez caus du tort mais D. a transform le mal en bien, Il a pens au bien qui en rsulterait pour les Enfants dIsral lorsquils seraient sauvs dEgypte. Ce que vous avez pens en mal, D. la pens en bien. Le verset indique aussi: il vous sera demand des comptes, non pas maintenant mais lavenir, puisque D. est dsign dans ce verset par Son attribut de Justice (Zohar III, 30b). Comment les chefs des tribus furent-ils punis? Il est dit que leur me se retrouve dans les dix Sages martyriss par les Romains (Houpat Eliyahou Brchith 45:15; Kli Yakar 45:4), cause de la peine quils ont cause Yossef, car D. juge Ses proches avec rigueur (Yebamot 121b; Vayikra 27:1).

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Il est crit propos dYitshak (Brchith 25:28): Yitshak prfrait Essav parce quil mettait du gibier dans sa bouche . Il est difficile de comprendre pourquoi il aimait Essav, car il savait pourtant quEssav tait mauvais et que seul Yaakov tait vertueux. Il savait aussi quEssav hassait Yaakov puisque cest une loi (Sifri Behaalotekha 9:10). Sil exprimait ouvertement de lamour pour Yaakov, Essav le harait davantage. Afin damoindrir cette haine, il montrait une grande affection envers Essav. Mais il est certain que dans son cur il aimait Yaakov (il est possible que lexpression du gibier dans sa bouche indique quil ne lui exprimait sa prfrence quen paroles, mais dans son cur il naimait que Yaakov). Yitshak dit Yaakov (Brchith 28:2): Lve-toi, va dans le territoire dAram, dans la demeure de Bthouel, le pre de ta mre, et choisis une femme parmi les filles de Laban, le frre de ta mre . Ce pays tait peupl de gens mchants mais Yaakov y alla afin de les confondre et anantir les forces du Mal parce que le Juste, fondement du monde, ntait pas encore n, comme il est expliqu dans les livres de Cabale concernant la venue dune grande me en ce monde... cest justement l-bas, en ce lieu de gens mchants, que les chefs des tribus sont ns, et en dernier lieu Yossef, vainqueur dEssav (Brchith Rabah 73:5). Lorsque Yossef est n, Yaakov demanda quitter Haran, comme il est crit (Brchith 30:25): Aprs que Rahel eut donn le jour Yossef, Yaakov dit Laban: Laisse-moi partir, que je retourne chez moi, dans mon pays . Il savait que ladversaire dEssav tait n. Yaakov pousa deux surs (voir Pessahim 119b) bien que la Torah linterdise et que les Patriarches aient observ toute la Torah (Pessikta Zouta Mikets 43:43). Il le fit conformment la volont de D. (Yalkout Meam Loez Brchith 2:571-73). Yossef le Juste, fondement du monde, va oprer la rgnration des tincelles de saintet enfouies en Egypte, et sans lui les Enfants dIsral nauraient pas t sauvs dEgypte. Sil avait par malheur faut, les Enfants dIsral nauraient obtenu ni le don de la Torah, ni la Terre dIsral, ni le Temple, ni le nom du Messie et le monde entier serait retomb dans le nant primordial. Lme de Yossef tait donc spciale et cest pour elle que D. a dsir que Yaakov confonde le Satan et lui a ordonn dpouser deux surs, chose que la Torah interdit, afin dter au Satan la possibilit de laccuser. Yossef, le Juste, pourra venir au monde tandis que le Satan se dira quil est impossible que Yossef naisse dune union interdite par la Torah. Cela permettra Yossef doprer facilement la rgnration des deux cent quatre-vingt-huit tincelles en prparant la descente des tribus en Egypte. Lorsque Yossef surmonta les preuves et fut nomm gouverneur de lEgypte, le Satan perdit les moyens de sen prendre lui. Cest alors que dbuta la famine qui constituait une preuve de plus pour Yossef et sa famille puisquil se spara de sa femme Osnat comme il se doit en temps de famine (Taanith 11a), comme il est crit (Brchith 41:50): Il naquit Yossef deux fils, avant la priode de disette . Mais Yossef tait prt ces preuves et il les surmonta afin de prparer la venue de Yaakov et de sa famille en Egypte, et pour y confondre et annihiler les forces du Mal.

Largent vol nest daucun profit


Ils prirent leurs troupeaux et les biens quils avaient acquis dans le pays de Canaan et vinrent en Egypte, Yaakov et avec lui toute sa famille (Brchith 45:4 - 7). Rachi rapporte ce sujet les paroles des Sages (Chemoth Rabah 31:17): Yaakov a donn Essav tout ce quil avait acquis Padan Aram en change de sa place dans le Caveau des Patriarches, disant que les biens acquis en dehors de la terre dIsral navaient pas de valeur ses yeux, comme il est crit plus loin (Brchith 50:5): Tu menseveliras dans la spulture que jai acquise en terre de Canaan . Il plaa devant lui un amas dor et dargent, et lui dit: reois cela! (voir le commentaire de Rachi ad. loc.). 1. Comment Yaakov, qui a uvr jour et nuit afin de gagner son salaire (Brchith 31:40-41 et 31: 7) et qui comme nous le savons, a bnfici de nombreux miracles dans la maison de Laban, a-t-il pu considrer les biens quil y avait acquis comme peu de chose? 2. En fait, si les hommes vertueux considrent leurs biens plus que leur propre personne (Sotah 12a), quelle est la diffrence entre les biens acquis en Erets Isral et ceux acquis ltranger? Surtout pour Yaakov, dont il est dit (Brchith 32:25): Yaakov resta seul , cause de menus objets laisss en arrire (Houlin 91a), ce qui montre quil attachait une importance particulire ses biens. Pourquoi les donne-t-il son frre Essav?

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Yaakov ne voulait tirer aucun profit des biens acquis chez Laban. Il le savait trompeur et voleur, il craignait quune partie de cet argent nait t mal acquise par ce roi de tous les menteurs (Tanhouma Vayichlah 1). Bien que Yaakov lait servi fidlement et nait reu que son d, il ne voulait pas profiter dargent dorigine douteuse et il avait mis cet argent de ct pendant des annes, sans sen servir. Yaakov na pas mlang largent gagn chez Laban avec le sien propre, car il pensait quil y avait de largent vol dans les monnaies que lui donnait Laban et il ne voulait en tirer aucun profit, bien quil lait gagn honntement. Il na pas utilis cette somme et il ne dsirait pas que ses enfants en hritent. Avant de descendre en Egypte, il a donn toute cette fortune Essav en change de sa part dans le Caveau des Patriarches, de mme quAvraham avait donn des prsents aux enfants de ses concubines (Brchith 25:6) afin que ses enfants et sa descendance ne jouissent en terre de Gochen que dun argent honntement gagn. Cest une chose fort tonnante! Pendant trente-neuf ans, Yaakov na fait aucun usage de cet argent dorigine douteuse et il sest content de le mettre de ct! Nous voyons l, la grandeur des hommes vertueux et combien ils sont attachs aux valeurs morales. Bien que leurs possessions soient prcieuses, largent dorigine douteuse na aucune valeur leurs yeux. Cest un enseignement pour tous. Il faut faire la diffrence entre de largent honntement gagn et de largent qui provient dune transaction malhonnte, entre un gain qui soutient lhomme (Pessahim 119a) et qui est bon, et une possession quil ne faut pas utiliser, mme si elle a t acquise en toute bonne foi, car elle peut avoir quelque tare, surtout si elle provient de gens sans scrupule, habitant un lieu qui, comme Haran, attire la colre de D. . Effectivement, il ne faut utiliser que de largent pur de toute transaction malhonnte.

Lhumilit et laveu de nos fautes mritent louange


Yaakov avait envoy Yhouda en avant, vers Yossef, pour quil lui prpare lentre en terre de Gochen (Brchith 46:28), Afin de lui prparer une maison dtude qui diffusera lenseignement de la Torah (Rachi, Brchith Rabah 95:3; Tanhouma Vayigach 11). 1. Pourquoi Yaakov envoie-t-il Yhouda et non pas un autre de ses enfants pour instituer une maison dtude? Il est dit (Avoda Zara 5b): Lhomme doit se faire comme un taureau qui porte un joug, et comme un ne qui porte une charge, pour apprendre la Torah . Issakhar est compar un ne muscl (Brchith 49:14) et (Divrey HaYamim I, 12:33): Les gens dIssakhar, experts en la connaissance des temps pour dcider la conduite tenir par Isral . Sil en est ainsi, Yaakov aurait pu envoyer Issakhar au devant. Si lon voulait expliquer quil avait envoy Yhouda parce quil avait la prsance en tant que roi (Brchith Rabah 92:5) et que lui seul tait capable de prparer une maison dtude pour la diffusion de la Torah, il faut remarquer quil nest pas besoin denvoyer quelquun possdant spcifiquement les qualits dun roi dans ce but. Nimporte quel autre fils aurait pu accomplir cette mission! 2. Nous devons aussi comprendre pourquoi Yaakov devait envoyer quelquun au-devant pour instituer une maison dtude. Apparemment, il aurait pu attendre et dcider lui-mme, en arrivant en Egypte, du lieu le mieux appropri la construction dune Ychivah. Dans ce cas, il aurait bnfici dun soutien accru du Ciel, puisque D. lui avait promis explicitement: Moi-mme, Je descendrai avec toi en Egypte (Brchith 46:4). Avec laide de D., il aurait pu trouver facilement un lieu pour la Ychivah, dautant plus que les Sages disent (Yoma 28b): Durant toute leur vie, les Patriarches nont cess dtudier, mme lorsquils taient en Egypte... La base de lacquisition de la Torah est de savoir que, si lon veut en acqurir la sagesse, il faut se faire petit et humble. Les Sages disent (Taanith 7a): La Torah est compare leau - de mme que leau scoule de haut en bas, de mme la Torah ne sacquiert que par celui qui se fait petit , cest--dire quelle nglige les gens hautains et arrogants et ne rside que chez les gens petits et humbles. La Torah est appele figurativement de leau (Baba Kama 17a), comme il est crit (Ichaya 55:1): Vous qui avez soif, venez! Voici de leau . Nous avons vu que notre matre Moch a reu la Torah parce quil tait extrmement humble (Bamidbar 12:3) et si le Mont Sina eut le mrite dtre choisi pour le don de la Torah cest parce quil est peu lev (Sotah 5a). Pourquoi la Torah ne sacquiert-elle que dans lhumilit? Celui qui est modeste est capable, en voyant quil se trompe au sujet dune loi ou de quelque enseignement, de reconnatre tout de suite son erreur, sans

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avoir honte de son ignorance et il progresse dans son tude, avec laide de D. Ce nest que sil admet son erreur quil peut la corriger, et sa comprhension tout dabord errone lui permet par la suite de pntrer les paroles du D. Vivant. Ce nest que sil reconnat ses erreurs quil est capable de les liminer, de ne pas les ritrer, et de sanctifier le Nom de D. publiquement. Une des quarante-huit faons dacqurir la Torah est de connatre sa place (Avoth VI:6), cest--dire de savoir reconnatre ses erreurs. Les Sages disent (Chabath 119a; Guitin 43a) On ne retient les enseignements de la Torah quaprs avoir fait des erreurs , et la reconnaissance des erreurs garantit la russite. Il est toutefois extrmement difficile de reconnatre son erreur. Sil sagit dun matre, avouer son erreur en public est incomparablement plus difficile. Sil ne la reconnat pas, il perd beaucoup plus que ce quil gagne (Avoth V:12). Mais sil ne tient pas compte de ses sentiments personnels et quil avoue lerreur quil a commise en tudiant, sa rcompense sera grande en ce monde et dans lautre. La grandeur et limportance de lcole de Hillel taient que les matres y enseignaient tout dabord lopinion de lcole de Shama, et seulement aprs leur propre opinion (Yirouvin 13b). Nous trouvons aussi dans le Talmud (Haguigah 2b) une discussion concernant le statut de celui qui est moiti esclave et moiti homme libre. Lcole de Hillel a rtract son opinion et a enseign la loi selon la dcision de lcole de Shama ce qui montre son extrme humilit. Cest en hommage cette qualit que les Sages disent: La loi est conforme la dcision de lcole de Hillel, et non pas celle de lcole de Shama (Yirouvin 6b; Yrouchalmi Kidouchin 1:1). Nous savons par ailleurs que Hillel lui-mme tait descendant de Yhouda (sa mre tait descendante de David, de la tribu de Yhouda, et son pre descendant de la tribu de Benyamin) (voir Seder HaDorot). Yhouda avait cette qualit de reconnatre ses fautes sans honte (Sotah 7b), surtout aprs les rprimandes de Yossef, et cest pourquoi il est envoy en avant pour chercher un lieu qui convient linstitution dune Ychivah o les lves apprendront avec modestie, seront prts reconnatre leurs erreurs et nauront pas honte de rviser leur opinion, ce qui leur permettra de parvenir la perfection dans ltude et la pratique des commandements, tel Yhouda qui avouait ses fautes sans honte et retenait les enseignements de la Torah. Il est possible de dire que cest prcisment le sens du verset: Il avait envoy Yhouda en avant , littralement: devant lui, cest--dire que chaque Juif, descendant de Yaakov, doit sentir quil y a toujours quelquun devant lui dans la Ychivah, quelquun qui est plus grand que lui. Celui qui apprend la Torah ou lenseigne, qui reconnat ses fautes et na pas honte de les avouer , sachant quil en est qui sont plus instruits que lui, acquiert la Torah et la met en pratique en toute humilit. Cest lenseignement de nos saints Patriarches, pour tous les temps. Nous pouvons maintenant comprendre le sens profond des paroles de nos Sages (Pessahim 118b, 119a) qui rapportent la grande richesse de Yossef en Egypte, et comment elle fut transmise dune nation lautre. Le Talmud pose la question: Qui recevra, lavenir, cette fortune? Rabbi dit: toi et tes amis... Plus loin, le Talmud demande: Quel est le sens de assis devant lEternel ? Rabbi Elazar rpond: Il sagit de celui qui connat la place de son compagnon dans la Ychivah. Dautres disent en son nom: Il sagit de celui qui accueille son compagnon dans la Ychivah . Rachi explique: Qui connat la place de son compagnon , cest--dire qui sait dire: ici est la place dun tel, et l la place dun tel. Sil connat la place de chacun, cest quil se trouve la Ychivah tout le temps . Il faut expliquer: 1. En quoi le fait dtre assis tout le temps la Ychivah est-il une preuve de grandeur, au point de mriter pour cela le trsor de Yossef? 2. Quelle diffrence y a-t-il entre celui qui connat la place de ses compagnons dans la Ychivah et celui qui accueille son compagnon? 3. Si tous les deux se trouvent dans la Ychivah, pourquoi ces deux opinions ne sont-elles pas confondues en une seule, pour dire celui qui se trouve tout le temps la Ychivah ? Cest quen fait, il sagit ici de deux sortes dlves. Celui qui connat la place de son compagnon est un lve qui nest pas des plus distingus, mais qui connat sa propre place et la place de son compagnon. Il sait qui est meilleur lve que lui (dans le sens o nous avons expliqu devant lui ), il le respecte et

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lhonore et en reoit une grande rcompense. Par contre, celui qui accueille son compagnon fait partie de ces lves distingus qui ne senorgueillissent pas de ltendue de leurs connaissances et reoivent leurs compagnons, les aident et les soutiennent, et qui, sils se trompent eux-mmes, avouent leur erreur sans honte car ils savent admettre la vrit. Eux aussi reoivent une grande rcompense, car leur humilit est la qualit fondamentale requise pour lacquisition de la Torah. Sils reoivent la fortune de Yossef, cest parce que Yossef nous a enseign ce prcepte par ses remontrances et ils ont suivi cet enseignement sans honte. Pour toutes ces raisons, Yaakov envoya Yhouda au-devant de lui. Il faut ajouter que nous apprenons de Yaakov un principe essentiel la vie spirituelle de lhomme o quil soit - en ce quil envoya Yhouda au-devant de lui en Egypte. Lorsque quelquun veut aller vivre dans une ville ou un pays, il doit tout dabord se soucier de savoir sil y a dans cette ville ou dans ce pays une maison dtude, sil y a un lieu de Torah, un bain rituel et une cole religieuse. Il ne doit pas sy installer dabord et y chercher ensuite un lieu de Torah car, avant de trouver un lieu de Torah pour assouvir son me assoiffe de spiritualit, il risque de tomber sous lemprise de multiples tentations. Un lieu sans synagogue et sans maison dtude est sans aucun doute dpourvu de la Prsence Divine puisque la Prsence divine ne rside que dans un lieu saint et pur (Avoth III:6). Lhomme se met en grand danger en vivant dans un lieu dpourvu de centre dtude de la Torah, cest pourquoi, avant mme de sy rendre, il faut chercher savoir si la Prsence Divine sy trouve et, seulement alors, sy rendre. En ce qui concerne lducation des enfants, sil ny a pas dcole de Torah, cest beaucoup plus grave. Rabbi Yossi ben Kisma dit (Avoth 6:9): Je ne vis que dans un lieu o il y a la Torah . Lhomme doit se soucier avant tout de sa vie spirituelle, et seulement ensuite de ses besoins matriels. Nous apprenons cela de Yaakov. Avant de se rendre en terre de Gochen, la plus fertile de toute lEgypte, comme il est crit (Brchith 45:18): Je veux vous donner la meilleure province de lEgypte et lon sait quil sagit de la terre de Gochen (ibid. 47:6), il se soucia tout dabord dy installer un lieu de Torah o il pourrait se rendre immdiatement. Sil devait chercher un lieu dtude, plusieurs jours risquent de passer, parfois des mois, et il est dommage de perdre un seul instant. De plus, ce serait mettre les descendants de Yaakov en danger que de les faire venir en un lieu prospre et agrable dpourvu de Torah, o ils goteraient les dlices de la terre - ce qui pourrait avoir sur eux une mauvaise influence, comme les Sages le racontent (Chabath 147b): Le vin de Proguite et les bains de Dioumas ont caus la ruine des dix tribus car ils furent entrans par les plaisirs de ce monde. Nous savons (Soucah 52b; Kidouchin 30b; Zohar I, 190a) que si tu rencontres ce vilain (le mauvais penchant), entrane-le dans la maison dtude . Mais pour cela il faut tre dans un lieu o il existe une maison dtude o lentraner et le soumettre. Yaakov craignait pour ses enfants en Egypte, pays de dbauche et de gens pervers (Chemoth Rabah 1:22), il craignait que lun deux ne se laisse entraner par le mauvais penchant... Aujourdhui nombre de gens se soucient avant tout davoir une belle maison, spacieuse, dans un endroit o lair est frais et pur, mme sil ny a pas de centre dtude et pas de bain rituel. Il est impossible de mesurer le danger que cela reprsente car comment chapper alors lemprise du mauvais penchant, ce vilain, ce dtestable? Il faut chercher passer mme les vacances, priode o lon voyage vers des lieux de repos, dans une ville o il y a un centre dtude, et se fixer un temps dtude. Rabbi Elazar ben Arach se rendant Proguite et Dioumas se laissa sduire par leur vin et leurs eaux et oublia ce quil avait appris (Chabath 147b). Il est certain quen se rendant dans un lieu de Torah, on peut vaincre le mauvais penchant. Quelle est la voie suivre? La Torah sacquiert avec humilit; cest pourquoi chacun doit savoir apprcier celui qui est plus instruit que lui et reconnatre ses propres erreurs. De mme, quel que soit lendroit o lon choisit de fixer sa rsidence, il faut sassurer quil y a l un lieu dtude, rempli de saintet. Mme pour des vacances, il faut chercher une ville dote dun lieu dtude o lon pourra entraner le mauvais penchant, ce vilain, et le vaincre tout moment.

Parachat vayigach Kriat Chma Lamour de D. et lamour dIsral

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Yossef fit atteler son char, et alla au-devant dIsral son pre Gochen. Il le vit et se prcipita son cou et pleura longuement dans ses bras (Brchith 46:29), Mais Yaakov ne sest pas prcipit au cou de Yossef et ne la pas embrass, il tait occup prononcer le Kriat Chma (Rachi, Midrach Hagadah ad. loc). Nous avons parl du Kriat Chma prcdemment mais nous allons prsenter ici un autre point de vue. Nous savons que le Kriat Chma doit tre dit avec concentration, faute de quoi on na pas rempli son devoir et il faut le dire de nouveau (Brachot 13a; Orah Hayim 60:5). Pourquoi Yaakov na-t-il pas repouss laccomplissement de ce devoir plus tard, aprs sa rencontre, et sil tait urgent de prononcer le Kriat Chma, pourquoi na-t-il pas repouss le moment de la rencontre, afin de dire le Kriat Chma avec la concentration qui se doit? Il nous faut expliquer tout dabord lexigence de concentration au moment de prononcer Kriat Chma. A propos du verset (Devarim 6:5) Tu aimeras lEternel ton D. de tout ton cur , les Sages enseignent: Chacun doit exprimer son intention de se sacrifier pour sanctifier le Nom de D. (Sifri ad. loc.). Cette intention doit tre sincre, au point quon ressente effectivement, chaque instant, quon est prt donner son me, son corps, son esprit, pour sanctifier le Nom de D. Comment avoir la certitude que cette dclaration est sincre? Il est possible que nous nous trompions quant nos intentions relles et que nous fassions une dclaration en paroles, mais qu lheure o nous devrons mettre en pratique nos intentions, nous ne puissions pas soutenir cette preuve suprme, difficile, et sacre. Bien sr, il faut que les paroles qui sortent de notre bouche soient conformes aux penses du cur (Pessahim 63a), mais au moment de la mise en pratique, il devient clair rtrospectivement que ces paroles ntaient pas sincres, et que lon na fait que se mentir soi-mme. De plus, au Jour du Jugement, lorsque lhomme se rendra compte que toutes ses dclarations ntaient que des paroles vides quil naurait pas mises en pratique, laccusation sera lourde. Bien que D. ne compte pas une mauvaise pense comme une transgression effective (Kidouchin 40a; Yrouchalmi Pah 1:1), cela ne sapplique pas dans notre cas car nous sommes ici concerns par la sanctification du Nom de D. et lhomme na t cr que pour ce faire. Nous avons dj expliqu le verset: Faisons lhomme Notre image et Notre ressemblance (Brchith 1:26). D. na ni corps, ni forme physique, ni image. A Sa ressemblance signifie que D. a dot lhomme de vertus qui lui permettent de ressembler son Crateur, comme il est crit (Devarim 30:20): ...et dadhrer Lui . A ce sujet, les Sages expliquent (Sotah 14a; Vayikra Rabah 25:3): Adhrez aux attributs de D., soyez misricordieux de mme quIl est misricordieux, bienveillants comme Lui est bienveillant... Chaque homme doit ressentir la peine de lautre, de mme que D. ressent nos peines, comme il est crit (Thilim 91:15): Je suis avec lui dans la peine , et D. souffre la douleur dIsral, si un Juif a mal la tte ou au pied, D. pour ainsi dire, ressent sa douleur et en prouve de la peine (Yalkout Chimoni Thilim 843). De mme, chacun doit sentir la peine et souffrir la douleur de son prochain. Il en est de mme pour Moch, de qui il est dit (Bamidbar 12:8): Cest limage mme de D. quil contemple ce qui est difficile comprendre puisquil est dit aussi (Chemoth 33:20): Nul homme ne peut Me voir et vivre . Comment Moch a-t-il pu contempler limage de D. ? Mais comme nous lavons dit plus haut, Moch adhre D. par ses vertus, il a contempl les actes de D. et Ses attributs et il les a imits, agissant avec bienveillance envers toutes les cratures. Il fut choisi pour diriger le peuple juif justement aprs avoir prouv sa bienveillance et sa dvotion au bien de tous. Il est racont comment Moch Rabeinou a port sur ses paules un agneau qui stait chapp du troupeau de Yithro quil gardait (Chemoth Rabah 2:2). D. dit: Si pour sauver un agneau il sest mis en danger, et si malgr le nombre lev dagneaux dans le troupeau, il connat les besoins de chacun deux et pourvoit tous, plus forte raison il saura tre bienveillant envers Isral et chaque Juif sera cher ses yeux. De lui il convient de dire Moch tait berger (Chemoth 3:1). Moch avait appris cela de D. Il se conduisait envers chaque Juif avec la mme bienveillance que D. a pour chacune de Ses cratures et il venait en aide chacun afin de ressembler son Crateur. Moch ressemblait aussi D. par une autre vertu, celle de lhumilit, comme en tmoignent les critures (Bamidbar 12:3):

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Lhomme Moch tait le plus humble de tous les hommes , et de D. il est dit (Mguilah 31a): Partout o il est mentionn la Toute-Puissance de D., Son humilit est mentionne en mme temps, comme il est crit (Ichaya 57:15): Sublime et saint est Mon trne! Mais il est aussi dans les curs contrits et humbles, pour vivifier lesprit des humbles, pour ranimer le cur des affligs . Chacun doit faire leffort de ressembler par sa conduite son Crateur. Et de mme que D. ne Sattend pas une rtribution de notre part pour Ses bonts envers nous, de mme chaque homme doit faire le bien sans sattendre une rtribution. De plus, si lhomme pense fauter en public ou en priv, quil se rappelle lalliance qui le lie tous ses frres Juifs, comme le disent les Sages (Chevouoth 39a; Sanhdrin 27b; Chemoth Rabah 27:8): Tous les Juifs sont garants les uns des autres . Sil faute, il ne subira pas tout seul la punition mais tous les Juifs seront punis cause de lui. Il ne faut pas se dire: que mimporte ce que font les autres et quimporte aux autres ce que je fais puisque ma punition ne fera de mal personne dautre. Ce nest pas vrai! Sil y a un groupe de gens dans un bateau et que lun deux perce un trou la place o il se trouve dans le bateau en disant: Que vous importe? Le trou est de mon ct... il se met en danger non seulement lui-mme, mais tous les gens qui sont avec lui sur le mme bateau, dit le Midrach. Comment peut-on obliger quelquun qui na pas piti de lui-mme avoir piti des autres? Une telle personne peut-elle avoir de la compassion pour la Prsence Divine en exil et La relever de la poussire ? Mais si, malgr tout, un homme se ressaisit et que, par la force de la responsabilit mutuelle qui lie tous les Juifs entre eux, il se retient et ne faute pas afin que les autres ne soient pas punis cause de lui, il est sr quun tel individu deviendra vraiment misricordieux, ce qui laidera avoir piti de lui-mme et ne pas fauter. Maintenant nous pouvons comprendre ce que disent les Sages (Sanhdrin 37a; Pessikta Zouta Ekev 11:9): Chacun doit se dire que cest pour lui que le monde fut cr . Chacun doit sentir combien sa responsabilit est grande puisque tous les tres sont lis lui et, sil se fait du mal lui-mme, il porte atteinte au monde entier. Cela nous explique aussi pourquoi au moment du don de la Torah la cration tout entire sest tue, aucun oiseau na vol, aucun oisillon na battu de laile (Chemoth Rabah 29:9). Il est dit qu ce moment-l (Thilim 76:9): La terre a vu et sest tue , afin que chacun sente que cest pour lui que la cration se tait. Chacun doit valuer sa responsabilit et agir positivement, faute de quoi il cause la destruction. Au moment du don de la Torah, tout Isral tait uni comme un seul homme avec un seul cur (Mkhilta Yithro 19:2), et il faut perptuer cette unit. Effectivement, si lhomme est prt se sacrifier en faveur de son prochain et si la vie du prochain lui est aussi chre que la sienne, comme il est dit: lhonneur de ton prochain doit tre aussi cher tes yeux que le tien (Avoth II:13; Avoth DRabbi Nathan 15:1), sil aime son prochain comme lui-mme (Vayikra 19:18), exactement comme lui-mme, il est certain quil a accd au degr le plus sublime que lhomme puisse atteindre. Telle est la raison du don de soi exig de chacun. Chacun peut examiner ses capacits et savoir si les paroles quil prononce sont conformes aux penses de son cur. Est-il prt se sacrifier pour les autres, est-ce que la peine de son prochain a pntr et rempli son cur et pas seulement ses oreilles, la ressent-il comme sa propre douleur? Sil est parvenu ce degr, il est capable aussi de sanctifier le Nom de D. Tel est le fondement du Kriat Chma. Avant de prononcer le Kriat Chma o lon se dclare prt sanctifier le Nom de D., il faut savoir si lon est prt soutenir lautre et lui venir en aide, si lon entend dune oreille attentive ses appels au secours. Si on aime effectivement son prochain au point de se sacrifier pour lui, il est sr que lon sera capable de sanctifier le Nom de D. - preuve difficile, des plus difficiles qui soient. La vracit de toutes nos dclarations deviendra vidente et notre dclaration de foi se rvlera sincre si nos paroles sont conformes nos intentions et si nous sommes prts tout moment agir de tout notre cur et de toute notre me. Il est crit (Devarim 6:5): Tu aimeras lEternel ton D. de tout ton cur, de toute ton me et de tout ton pouvoir . Les Sages disent (Brachot 54a; Yoma 82a): De tout ton pouvoir - avec tous tes moyens financiers . Celui qui veut savoir sil aime vraiment D. de tout son cur et de toute son me, sans aucune arrire-pense, doit se demander sil utilise dans ce but tout son pouvoir et sil ressemble D. dans Sa misricorde et dans Sa bienveillance. De mme que D. pourvoit et nourrit le monde entier, lhomme doit

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donner de ses ressources aux autres. Il est crit: Des poids exacts et loyaux (Devarim 25:15), et les Sages remarquent (Baba Bathra 88b): le mot loyaux tenseigne que tu dois ajouter du tien . En Hbreu, la monnaie sappelle Damim, et le mot Dam signifie le sang, pour indiquer que largent est comme le sang de lhomme. Si lhomme est prt consacrer son argent, son corps et son me en faveur de son prochain, cest l le signe certain quil aime D. de tout son cur, de toute son me et de tout son pouvoir puisquil agit comme Lui et imite Ses attributs. Il sensuit que lessentiel du Kriat Chma est de nous enseigner tre attentif aux besoins des autres, ce qui conduit un vritable amour de D. Yaakov pronona le Kriat Chma en rencontrant Yossef et il choisit justement le moment de cette rencontre, aprs une absence de vingt-deux ans pour expliquer ses enfants quils nen seraient pas venus vendre leur frre Yossef, tre exils en terre dEgypte et draciner Yaakov du pays de ses pres si chacun deux avait t attentif aux cris et aux appels de son prochain, sils avaient prt loreille aux supplications de Yossef qui slevaient du fond de la citerne, sils avaient prt attention ses rves, sans le har (Brchith 37:8), sils lavaient jug favorablement (Avoth I:1) et si Yossef lui-mme avait essay de comprendre les sentiments de ses frres sans les souponner (Brchith 37:2) et sans rapporter des mdisance sur leur compte (Brchith Rabah 84:7). Mais ils taient diviss, aucun ncoutait lautre. Yaakov leur dit quils devaient regretter leur conduite: comment pouvez-vous sacrifier votre vie pour sanctifier le Nom de D., alors que la sanctification vritable est base sur laide et le soutien que lon apporte au prochain? Lorsque lhomme ne ressent pas la douleur de son prochain et na pas de misricorde pour ses souffrances, il nest pas sincre non plus envers D. car sa conduite trahit ses professions de foi, comme il est crit (Thilim 78:36-37): Ils Lamadouaient avec leur bouche, en paroles ils Lui offraient des hommages mensongers mais leur cur ntait pas de bonne foi Son gard, ils ntaient pas sincrement attachs Son alliance . Nous constatons que le jour de Kippour pass, lhomme recommence fauter et commettre des transgressions. Bien que, le jour de Kippour, il ait pris la rsolution daimer D. de tout son cur et de toute son me et bien quil se soit confess et repenti de toutes ses fautes, il recommence et retombe des sommets aux bas-fonds (Haguigah 5b) pour ne stre pas rconcili sincrement avec son prochain avant le jour de Kippour. Lessentiel du repentir envers D. dpend du repentir des fautes commises envers son prochain, comme le disent les Sages (Yoma 85b; Pessikta Rabah 39): Yom Kippour ne pourvoit au pardon des fautes commises envers le prochain que si ce dernier les a lui-mme pardonnes . Avant le jour de Kippour, chacun doit demander son prochain de lui pardonner les fautes commises envers lui non pas avec un sourire et seulement en paroles mais en ressentant profondment le mal caus son prochain et en lui demandant sincrement pardon. Il me semble appropri de rapporter ici propos du Kriat Chma, le rcit terrifiant dun pisode qui sest pass durant lHolocauste. A cette poque, beaucoup denfants juifs trouvrent refuge dans les monastres chrtiens, non pas ncessairement pour tre convertis. Les parents dsesprs voulaient sauver la vie de leurs jeunes enfants et ils choisirent parfois ce moyen. Ils confirent les nouveau-ns et les bbs aux pensionnats grs par lglise et l, les enfants reurent un toit et du pain. Un grand nombre denfants furent ainsi sauvs des chambres gaz. A la fin de la guerre, le gnocide perptr par les Nazis, de mmoire maudite, prit fin. Des centres de renseignements et de rencontres entre proches parents soccupaient de runir les familles et de collecter des informations mais le nombre des enfants disparus surpassait de loin celui des enfants retrouvs. Petit petit, des renseignements arrivaient concernant les enfants confis la garde des monastres et il se rvla que le nombre denfants qui se trouvaient chez les Chrtiens tait norme. Il ny avait personne pour les recueillir. Une dlgation de rabbins dirige par le Rabbin Silver et le Rabbin Gourfinkel vint spcialement des tats-Unis et dAngleterre dans le but de restituer ces enfants leur peuple. Les Rabbins parvinrent au premier monastre et demandrent parler avec le directeur. Ils furent reus avec un sourire poli: Bien sr, dit le prtre, je ne moppose pas restituer les enfants juifs leur famille, ou tout au moins leur peuple . Les Rabbins furent heureux dentendre ces paroles.

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Mais , et le prtre leur posa une question pertinente tandis que ses yeux brillaient de malice, comment reconnatrez-vous que tel garon ou telle fille sont juifs? Nous navons pas lhabitude dinscrire lorigine et la religion de chaque enfant La liste des noms nous aidera rpondirent les rabbins. Nous allons passer en revue la liste des noms, si des enfants portent un nom juif, nous saurons quils sont juifs . Non, non, non! nous nagissons pas de la sorte chez nous, protesta le prtre Allemand avec des accents offusqus, nous devons tre prcis. Nous ne voulons aucune erreur. Jexige une certitude cent pour cent, rien de moins . Prenez par exemple le nom Miller, poursuit le prtre qui examina la raction de ses htes, vous direz tout de suite que cest un nom qui a des rsonances juives certaines, mais en est-il ainsi? Nombreux sont les non-juifs qui portent ce nom. De mme le nom Reichman ou Deutsch! Ce sont des noms rpandus en Allemagne et en Pologne. Il ne nous viendrait pas lide de librer des enfants uniquement sur la base dun nom qui a une certaine rsonance juive Les rabbins tentrent damadouer le prtre, de toucher son cur, mais il maintenait sa position. Je ne donnerai mon accord de librer les enfants que sur la base de documents tmoignant avec certitude quils sont juifs . Que faire? La plupart des enfants avaient t spars de leur mre alors quils taient bbs et ils ne pouvaient pas se souvenir de leur origine. O trouver des documents aprs la terrible destruction? Les rabbins tentrent encore une fois de convaincre le prtre. Celui-ci perdit patience. Je regrette, dit-il schement, je vous ai couts trop longtemps, dcidez vous-mmes quoi faire. Je peux vous accorder encore trois minutes, pas plus . Il semblait que tous les efforts taient vains. Le cur des deux rabbins se fendit de douleur. Vu les informations quils avaient reues, des dizaines denfants juifs se trouvaient dans ce monastre et ils navaient que trois minutes pour les dsigner... Leurs lvres murmuraient des prires au Matre du monde, le suppliant de les clairer dune ide qui leur permettrait de dsigner parmi les centaines denfants lesquels taient Juifs, et cela dans les trois minutes, et de faon convaincre le prtre pointilleux. Leur prire fut entendue. Lun des rabbins eut une ide. Pouvons-nous bnficier de ces trois minutes notre convenance? demanda-t-il. La rponse fut: Oui . Bien, soupira le rabbin soulag. Nous reviendrons lheure o les enfants vont se coucher . A sept heures prcises indiqua le prtre. La dlgation se spara de lui jusquau soir. Le prtre ne cachait pas son ddain envers les rabbins convaincus quils allaient russir dans leur mission - dans le fond de son cur il attendit avec impatience que la septime heure sonne. Il voulait vraiment savoir ce que les rabbins prparaient, et pourquoi ils prenaient la peine de se retirer et de revenir. A sept heures prcises, les jeunes pensionnaires, habitus des horaires stricts, taient tous couchs dans les lits rangs les uns ct des autres dans une vaste salle. Les rabbins avancrent jusquau centre de la salle; lun deux monta sur une chaise basse et attendit. Le silence tait total. De tous cts, les yeux brillants des jeunes enfants taient poss sur lui. Et alors, voix basse, le rabbin pronona seulement six mots qui remplirent la salle, dun bout lautre: Chma Isral! coute Isral! LEternel est notre D., lEternel est Un! A ce mme instant, des murmures se firent entendre de tous les cts de la salle. Des voix frles, des pleurs touffs, des souffles entrecoups: Maman, Mamma, Imma... chaque enfant dans sa propre langue, cherchait soudain sa maman, qui deux ans auparavant, lorsquelle le mettait au lit et le couvrait pour la nuit, avant de lembrasser sur le front et de lui souhaiter bonne nuit, lui murmurait loreille ces mots chers et le pntrait de la foi enracine en tout enfant juif: coute Isral, lEternel est notre D., lEternel est Un. Le prtre baissa les yeux, vaincu. Les rabbins avaient gagn. Ils avaient repr les enfants perdus. Les quelques minutes que la mre avait consacres ses enfants chaque soir avant de coucher, les avaient sauvs de la conversion et de lassimilation... Ce tmoignage impressionnant, rapport par le bulletin HaMer, est pour nous une grande leon. Le temps que les parents consacrent leurs enfants pour pntrer leur cur de lamour de D. les soutient, non seulement dans leur amour de D. mais aussi dans lamour du prochain. Ds le plus jeune ge, lorsque

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lenfant commence parler, ils lui enseignent prononcer le Chma Isral (Devarim 6:4), ce qui le conduit non seulement lamour de D. mais aussi lamour dIsral, un amour ternel. Lorsque les rabbins prononcrent avec ferveur Chma Isral , ces paroles pntrrent les oreilles des enfants car ces rabbins staient dvous faire revenir ces enfants leur peuple et les sauver de la conversion. Ils se sont soucis de ces enfants comme ils se seraient soucis deux-mmes et cest pourquoi ils furent aids par le Ciel. De leur ct, les enfants se souvinrent de ce que leur mre leur avait appris et leur cur pntr de lamour de D. sveilla lappel douloureux des rabbins. Cest ce mrite qui leur permit de revenir au Judasme, de retourner leur peuple dorigine. Que D. veuille pntrer notre cur damour et de crainte sincres afin que nous Le servions de tout cur! Amen!

La peine de Yaakov Il nest de vie que la Torah


Isral stablit dans le pays dEgypte, dans la province de Gochen, ils en prirent possession, ils y crrent et sy multiplirent prodigieusement. Yaakov vcut dans le pays dEgypte pendant dix-sept ans. La dure de la vie de Yaakov fut de cent quarante-sept ans (Brchith 47:27-28). Rabbi Yohanan dit (Sanhdrin 106a): le mot Vayshv, il stablit, exprime la peine, comme par exemple: Isral stablit Chittim. L, le peuple se livra la dbauche avec les filles de Moab (Bamidbar 25:1) et (Brchith 37:1-2): Yaakov sinstalla dans le pays des prgrinations de son pre... et Yossef dbitait des mdisances sur leur compte... et (Brchith 47:27-29): Isral stablit dans le pays de Gochen... et les jours dIsral approchaient de leur terme... Il faut expliquer ce commentaire point par point. 1. Est-ce que le sjour dIsral en terre de Gochen tait vraiment pnible alors quil est dit (Or Hahayim; Baal HaTourim Vayehi) que justement les dix-sept annes de Yaakov en Egypte furent les meilleures de sa vie , et (Tana DBey Eliyahou Rabah 5): La fin de sa vie est bonne... ou encore (Yrouchalmi Ketouboth 12:3; Brchith Rabah 96:9): Rabbi a appliqu ce verset lui-mme, disant: Rabbi sinstalla Tzipori pendant dix-sept ans - ce qui contredit lopinion de Rabbi Yohanan. Le verset: Isral sinstalla dans le pays des prgrinations de ses pres , indique quil vivait dans la peine, et les Sages remarquent (Brchith Rabah 84:3): Yaakov dsirait sinstaller tranquillement lorsquil fut frapp par le malheur de Yossef . Mais notre verset indique que les annes de Yaakov en Egypte furent heureuses et sereines puisquil est dit propos du sjour des Enfants dIsral en Egypte: Ils loccuprent, y crrent et sy multiplirent prodigieusement (Brchith 47:27). Il est dit ensuite: Les jours dIsral (Yaakov) approchaient de leur terme , ce qui indique que toutes ces annes furent bonnes et sereines. Pourquoi considrer que le terme Vaychev exprime la peine? 2. Pourquoi la rptition dans le pays dEgypte, dans la province de Gochen ? Nous savons que Gochen est en Egypte. Quest-ce que la Torah veut nous faire comprendre par cette rptition? Cest que le fait mme de sinstaller dans la tranquillit conduit loisivet, mre de toutes les fautes, comme le disent les Sages (Ketouboth 59b): Loisivet conduit lennui et la perversion et (Brachot 64a): Les hommes sages ne connaissent pas de repos, ni en ce monde ni dans lautre . Il en est de mme des hommes vertueux (Brchith Rabah 84:3). Sils prenaient du repos, ils en viendraient loisivet et ne seraient plus aussi vertueux; or ce nest que dans lautre monde que le mauvais penchant na plus demprise. De plus, la tranquillit en ce monde semble tre une rcompense pour les bonnes actions accomplies, et il ny a pas de rcompense en ce monde pour lobissance aux commandements (Kidouchin 39b; Houlin 142a). Les Justes ne doivent pas dsirer recevoir leur rcompense en ce monde, mais uniquement dans lautre monde, o ils sont assis couronns... (Brachot 17a; Zohar III, 236b). Nous apprenons de Yaakov un principe de base valable pour toutes les gnrations, savoir que les Enfants dIsral ne doivent pas rechercher la tranquillit en ce monde, mme si elle leur est accessible, car Yaakov aurait pu sinstaller dans la tranquillit mais il ne la pas fait parce que cette tranquillit aurait t considre comme sa rcompense et il ny a pas de rcompense en ce monde . Nous trouvons dans le Talmud (Taanith 25a) un rcit propos de la femme de Rabbi Hanina ben Dossa. Elle aspirait un peu de confort en ce monde et moins de peines car ils taient trs pauvres. Rabbi Hanina

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pria, sa prire fut agre et voici quune main du Ciel leur tendit un pied de table en or. La nuit, la femme de Rabbi Hanina vit dans un rve tous les Justes assis au Ciel autour dune table trois pieds tandis quelle et son mari taient assis une table deux pieds. Au rveil, elle se plaignit auprs de son mari: Est-il possible que tous aient une table trois pieds et que nous avions une table laquelle il manque un pied? Prie donc quon nous reprenne le pied de table en or en ce monde! Sa prire fut agre. Le sens de ce rcit est quune vie tranquille en ce monde amoindrit dautant la plnitude rserve dans lautre monde. Rabeinou HaKadoch tait extrmement riche. Avant de mourir, il tmoigna navoir jamais tir la moindre jouissance des choses de ce monde (Ketouboth 104a; Tana DBey Eliyahou Rabah 26) et nous savons les grandes douleurs physiques quil subit durant sa vie (Baba Metsya 85a; Brchith Rabah 96:9). Le Talmud nous dit (Yoma 35b) que Rabbi Elazar ben Harsoum servira de tmoin contre les gens riches car sa grande richesse ne la pas empch dtudier la Torah... Le confort conduit loisivet et la faute, surtout en Terre Sainte o la tranquillit risque dveiller le mauvais penchant. Cest surtout sur une terre sainte comme Isral quil faut sefforcer de ne pas rester oisif et de pratiquer la Torah, dautant plus quil ny a pas de Torah comme celle de la Terre dIsral (Brchith Rabah 16:7; Sifri Ekev). Les Sages ajoutent (Yirouvin 19a): Une des entres de lenfer se trouve face Jrusalem , cest--dire qu Jrusalem et en Isral en gnral, le pouvoir du mauvais penchant est considrable et il faut le dominer par un attachement permanent la Torah et au service de D. dans la saintet qui convient la Terre dIsral qui est plus sainte que tous les autres pays (Klim 1:6; Bamidbar Rabah 7:8), Un pays sur lequel lEternel veille et qui est constamment sous lil du Seigneur, dun bout de lanne lautre (Devarim 11:12). Si lon nest pas plong dans la Torah et que lon se complat dans la tranquillit, le mauvais penchant nous dtournera du service de D., et une fois quil a attrap lhomme dans ses filets, il lloigne du bon et droit chemin. Depuis le temps de notre Matre Moch jusqu lpoque de Rabban Gamliel, on ntudiait la Torah que debout, mais aprs sa mort les gens se sont affaiblis et ntudiaient plus la Torah quassis (Mguilah 21a) et Lorsque Rabban Gamliel est mort, la grandeur de la Torah fut perdue (Sotah 49a). Tant que Rabban Gamliel tait en vie, les gens tudiaient la Torah debout, avec effort. Cette coutume fut maintenue jusqu la priode de la destruction du Temple et de lexil, tant tait grande linfluence de Rabban Gamliel sur sa gnration. Mais aprs sa mort, personne neut un tel ascendant sur ses contemporains et cest pourquoi, la gnration stant affaiblie, cette coutume sest perdue. Si, sur une terre sainte comme la Terre dIsral, Yaakov a subi le malheur de Yossef pour avoir voulu vivre dans la tranquillit, plus forte raison en Egypte, il ne fallait pas sinstaller dans le confort. La province de Gochen tait riche et prospre, comme il est crit (Brchith 47:6): Etablis ton pre et tes frres dans la meilleure province , la plus riche de toute lEgypte. Il ne fait aucun doute que le mauvais penchant est puissant et il faut se garder de rechercher le confort, mais soccuper de Torah et servir D. afin dtre protg comme par une muraille contre les tentations environnantes. Concernant le verset (Brchith 46:28): Yaakov envoya Yhouda en avant vers Yossef , les Sages disent (Brchith Rabah 95:3; Tanhouma Vayigach 11): Afin dinstaller une maison dtude do la Torah se rpandrait dans le monde . Il na pas attendu darriver lui-mme en Egypte et il a fait les prparatifs lavance, afin que ses enfants trouvent immdiatement un lieu de Torah o ils puissent aller tudier ds leur arrive, sans perdre un seul instant. Maintenant nous voyons combien Rabbi Yohanan a raison de dire que lexpression il sinstalla en Egypte exprime la peine. Il sagit de la peine dans ltude de la Torah, comme il est dit: La rcompense est la mesure de la peine (Avoth 5:25; Zohar III, 278b). Le verset loue Yaakov qui, mme dans un pays de dbauche comme lEgypte, et mme dans une province agrable comme celle de Gochen, a persvr dans la voie de la Torah et le service de D., sans se donner de repos. Ce que nous avons dit explique aussi la rptition au pays dEgypte, en terre de Gochen , qui nous indique les qualits de Yaakov. Le verset dit: Ils en prirent possession, ils y crrent et sy multiplirent prodigieusement , ils crrent dans la Torah et en prirent effectivement possession, dans le sens o il est dit: Elle est un arbre de vie pour ceux qui sen saisissent (Michley 3:18).

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Combien Rabbi Yohanan a raison de dire que la peine se rfre ce qui est dit par la suite: Les jours dIsral approchaient de leur terme car, toutes les peines subies pendant ces dix-sept ans, sajouta une peine supplmentaire: Yaakov sentit quen terre dEgypte il tait possible de servir D. de faon grandiose en luttant sans cesse contre le mauvais penchant et il tait heureux de servir D. fidlement, justement en Egypte, dans la province de Gochen. Ces annes-l furent les meilleures de sa vie, des annes dlvation dans le service de D. avec des forces toujours croissantes. Cest pourquoi, lorsque ses jours arrivrent leur terme, il ressentit un grand chagrin, car il aurait voulu continuer servir D. dans la peine et les souffrances et il tait pein de voir quil allait quitter ce monde et que le service de D. allait prendre fin pour lui. Nous apprenons ici un principe fondamental. Justement en exil, lhomme peut parvenir des sommets levs dans le service de D. Sil nen tire pas parti, il y perd lourdement. Yaakov enseigne toutes les gnrations qui se trouvent dans cet exil amer, comment slever et parvenir la correction voulue. Il est bon de le faire temps, afin de ne pas quitter ce monde avec le regret davoir failli sa tche. Par la suite, il est crit (Brchith 49:1): Yaakov fit venir ses fils et leur dit: Rassemblez-vous, je veux vous rvler ce qui vous arrivera dans la suite des jours . Les Sages expliquent ce sujet (Pessahim 56a): Yaakov voulait leur rvler la fin des temps, mais la prophtie lui chappa . La date de la fin des temps lui chappa mais il rvla tout de mme quelque chose ses enfants. En leur disant rassemblez-vous , il leur donna deux conseils qui protgeront les Juifs durant leur long exil. Premirement, dtre unis comme un seul corps, deuximement, daugmenter ltude de la Torah. Le mot Asfou, a aussi le sens de ajouter , et les Sages disent (Taanith 31a): Celui qui persiste (Mossif), augmente (Yossif) . Ltude de la Torah et leur unit protgeront les Enfants dIsral contre le mauvais penchant qui ne peut pas dtourner les multitudes de Juifs attachs la Torah et na demprise que sur quelques personnes faibles et isoles. Les Sages ont dit (Kidouchin 30b): Si vous vous occupez de Torah (unis), le mauvais penchant na pas demprise sur vous , et ils ajoutent (Ketouboth 66b): Lorsque Isral obit la volont de D., aucune nation et aucun peuple ne peuvent le dominer , et D. a dit Moch (Vayikra Rabah 25:1): Dis au peuple de soccuper de Torah et il naura rien craindre des autres peuples . Lunit a un grand pouvoir, comme il est crit propos du verset (Ocha 4:17): Ephram est coll aux idoles, quon le laisse! , cest--dire: Mme lorsquils adorent les idoles, sils sont unis, ils sont invincibles . La rdemption finale ne viendra que grce lunit des Juifs, comme le disent les Sages (Tanhouma Nitsavim 1; Yalkout Chimoni Amos 549): La rdemption dIsral naura lieu que lorsquils seront unis et cest uniquement grce la Torah quils peuvent ltre. Il est possible que ce sont ce que les Sages ont voulu signifier (Taanith 11a; Tana DBey Elizer Zouta 1) lorsquils disent: Celui qui souffre des souffrances de la communaut (cest--dire qui en est solidaire) mritera de participer la consolation de la communaut et de voir la rdemption et (Tana DBey Elizer Zouta 17): Quiconque se donne de la peine en ce monde pour tudier la Torah... D. place sur sa tte une aurole de bienveillance . Concernant le verset lui-mme, notons que le mot yjyw se dcompose en deux parties: vay et hay, cest-dire que toutes les annes de Yaakov en Egypte taient vay, remplies de peine, comme nous lavons dit plus haut, et pourtant ces dix-sept annes (la mme valeur numrique que le mot tov, bon) furent toutes bonnes, car il avait vaincu le mauvais penchant et stait lev dans la Torah par ses efforts constants. Il fut pein lorsque sa vie approcha de son terme. Ceci est trs difiant.

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Isral est sauv grce au mrite de la Torah
Yaakov vcut dans le pays dEgypte pendant dix-sept ans, la dure de la vie de Yaakov fut de cent quarante-sept ans (Brchith 47:28). Rachi rapporte dans son commentaire les paroles des Sages (Brchith Rabah 96:1): Pourquoi cette section est-elle ferme (cest--dire que dans le texte de lcriture aucun espace ne la spare de la prcdente)? Cest que lorsque Yaakov mourut, les yeux et le cur dIsral se fermrent cause des souffrances de lesclavage qui commena alors. Il y a aussi une autre raison: il voulait leur rvler la fin des temps, mais cette prophtie lui chappa . La tradition reue du prophte Ezra nous dit que cette section est ferme dans lcriture, et nous navons rien ajouter ce sujet, mais nous pouvons tout au moins chercher en comprendre le sens. 1. Si cest parce quil sagit de la mort de Yaakov, la fin de la section prcdente il est crit (ibid. 47:27): Isral stablit dans le pays dEgypte, dans la province de Gochen; ils en prirent possession, y crrent et sy multiplirent grandement , ce qui tait srement une cause de joie. Pour quelle raison cette section est-elle ferme ? Les Sages disent (Taanith 5b; Tanhouma Vayhi 2): Yaakov Avinou nest pas mort et de mme quil est vivant, ses descendants le sont aussi... et si son enseignement se perptue de gnration en gnration, sa mort nest pas triste. 2. Les Sages disent: Lorsque Yaakov mourut, les yeux et le cur dIsral se fermrent cause des souffrances de lesclavage qui commenait alors , ce qui contredit ce qui est dit par ailleurs propos du verset (Chemoth 6:16) La dure de la vie de Lvi fut de cent trente-sept ans : La dure de la vie de Lvi nous est rapporte pour nous faire savoir la dure de lesclavage. Tant que lun des pres des tribus tait en vie, il ny avait pas desclavage, comme il est dit (ibid. 1:6-8): Yossef mourut ainsi que tous ses frres... et un roi nouveau rgna sur lEgypte... et Lvi vcut plus longtemps que tous les autres (Sder Olam Rabah 3; Rachi ad. loc.). Cest donc que lesclavage a commenc la mort de Lvi et non la mort de Yaakov, et donc la question se pose de nouveau pourquoi notre section est-elle ferme ? 3. La deuxime raison donne par les Sages est que Yaakov dsirait rvler ses enfants la fin des temps mais la prophtie lui chappa, ce qui est difficile comprendre, car notre section ne traite de cette rvlation que par la suite (Brchith 49:1): Rassemblez-vous, je veux vous rvler ce qui vous arrivera dans la suite des temps , et les Sages remarquent (Pessahim 56a; Rachi ad. loc.): Il dsirait leur rvler la fin des temps mais la prophtie lui chappa . Pourquoi cette section de la Torah est-elle ferme ds le dbut et non cet endroit? 4. Si Yaakov dsire rvler la fin des temps ses fils, il faut chercher comprendre pourquoi il en est empch? Il faut aussi se demander pourquoi Yaakov veut faire une telle rvlation, car de toutes faons les souffrances dIsral vont durer, et en quoi une telle connaissance peut-elle les consoler? Si les Enfants dIsral se repentent des fautes qui causent leurs souffrances, la dlivrance sera anticipe, comme il est crit (Ichaya 60:22): prcipitamment, en son temps , car la fin des temps nest pas une date fixe. Quel avantage y a-t-il rvler la fin des temps? Surtout, il faut comprendre pourquoi nous navons que des prophties vasives concernant la fin des temps et aucune indication prcise. 5. Concernant le verset Yaakov vcut dans le pays dEgypte pendant dix-sept ans... , les commentateurs (Or Hahayim, Kli Yakar) expliquent quil tait alors en pleine possession de ses forces et quil vivait enfin une vie sereine, aprs cent trente ans de vie de souffrances. Dans le pays des prgrinations de ses pres, il na pas eu la possibilit de vivre dans la tranquillit puisquil fut atteint par le malheur de Yossef (Brchith Rabah 84:3), et cest justement en Egypte, dans ce pays de perversion (Chemoth Rabah 1:22; Pessikta Rabah 1:20), quil eut la possibilit de vivre en repos pendant dix-sept annes. Est-ce possible? Il faut comprendre que les deux raisons donnes par les Sages sont lies lune lautre et se compltent. Tant que les Juifs taient peu nombreux en Egypte, quils se sentaient en scurit, ils se soutenaient mutuellement et navaient besoin de rien. Mais plus tard, lorsquils se multiplirent (ibid. 47:27), ils taient

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sans doute heureux de cette croissance mais, en mme temps, ils commencrent ressentir la servitude, car ils taient forcs de travailler chez les Egyptiens pour assurer leur subsistance. Le fait est que lorsquon est habitu lindpendance, on accepte mal de devoir recevoir un salaire en travaillant pour un patron. Dj ce moment-l, du vivant des chefs des tribus, les Enfants dIsral avaient commenc ressentir la servitude et le poids de lexil. Bien quon ne pt encore parler desclavage, ils ne se sentaient pas chez eux, comme en terre de Canaan o ils taient respects. En fait, tant que Yaakov tait vivant, son statut les protgeait. Son influence tait bnfique et il soutenait leur moral, mais aprs sa mort et la mort de ses fils, les Enfants dIsral ressentirent un manque, ils durent travailler chez les Egyptiens pour assurer leur subsistance, et lesclavage et lexil commencrent (Chemoth Rabah 1:4; Yalkout Chimoni Chemoth 1). A la fin de sa vie, Yaakov a senti et prvu lesclavage de ses enfants car il voyait sur le visage de ses enfants et de ses petits-enfants cette expression de crainte quant leur avenir. Il dsirait leur rvler la fin des temps pour les encourager en leur faisant savoir que cette situation prendrait fin. Mais il en fut empch et cest pourquoi cette section est ferme ds son dbut. Malgr tout, cette situation a quelque chose de positif. La Torah spcifie que Yaakov vcut en terre dEgypte pendant dix-sept ans, valeur numrique du mot Tov, bon, qui symbolise la Torah comme il est dit (Michley 4:2): Je vous ai donn de bonnes leons, nabandonnez pas mon enseignement et (Avoth 6:3): Il nest de bon que la Torah . Cest justement en Egypte que Yaakov mena une vie pleine de Torah. Il ne faut pas en conclure que Yaakov se soit install dans le confort en Egypte, puisque D. ne laisse pas les Justes vivre dans le confort en ce monde mais Il leur rserve leur rcompense dans le monde Venir (Brchith Rabah 84:3). Mais cest justement en Egypte que Yaakov a connu un peu de repos et cette poque est considre comme la meilleure de sa vie: en effet il y servait D. de toutes ses forces, et ces annes-l furent des annes o lui et ses enfants taient runis. Les Enfants dIsral sinstallrent en Egypte (dans la Torah), ils y crrent (en comprhension), sy multiplirent (par la discipline). Lenseignement de Yaakov continuait se propager et il ny avait pas craindre les effets de lexil. Pourtant Yaakov dsirait en rvler le terme ses enfants. Pourquoi? Il est crit (Thilim 19:9): Les prceptes de lEternel sont droits, ils rjouissent le cur car La Torah rjouit le cur et elle sacquiert dans la joie (Avoth 6:6) et Il nest de joie que celle dobir aux commandements (Rokah 3:1). Lorsque Yaakov se sentit heureux, il dsira rvler la fin des temps puisque La prophtie nest donne que dans la joie (Midrach HaGadol Vayigach 45:27), et Lesprit saint nhabite que chez celui qui est heureux (Chabath 30b; Pessikta Zouta Vayechev 37:33; Zohar I, 180b). Mais cette prophtie lui fut cache. Du Ciel, on voulait lui signifier que celui qui reste attach la Torah na rien craindre puisque la Torah le protge contre tout mal (Kidouchin 82a; Yrouchalmi Kidouchin IV:2) et de plus la rdemption peut venir avant son temps, comme le disent les Sages (Pessikta Zouta Vaethanan 4:32): Les Enfants dIsral ne seront sauvs que grce au mrite de la Torah . La rdemption dpend de notre attachement la Torah. Une autre raison indique pourquoi cette prophtie chappa Yaakov. Il dsirait faire savoir ses enfants que la rdemption finale aurait lieu aprs six mille ans (Avoda Zara 9; Sanhdrin 97a), et leur faire connatre le cours de lHistoire. Mais il est possible de prcipiter les vnements et danticiper la rdemption grce la Torah et au repentir, et le Messie peut venir tout moment: cest pourquoi Yaakov na rien pu rvler. Les dernires lettres des mots du verset Rassemblez-vous, je veux vous rvler ce qui vous arrivera dans la suite des temps (Brchith 49:1) forment le mot Meth, mort, ce qui sous-entend: je veux vous dire quand D. jugera le monde et quand le Satan mourra, lui qui est lange de la mort (Baba Bathra 16a). Il leur rvla que la Torah et lobservance de ses lois peuvent anticiper la rdemption, qui peut se raliser chaque jour et chaque gnration. Il est dit du roi Hizkya quil aurait pu tre le Messie (Sanhdrin 94a). Les Sages disent aussi (Yoma 69b) que du temps dEzra, le mauvais penchant fut aveugl et quil ninduisait plus les gens fauter. Or, le temps de la rdemption ntait pas encore arriv parce que les Juifs staient assimils aux peuples, avaient pous des femmes trangres, quils staient asservis aux nations et que tous les Juifs navaient pas encore quitt lexil pour habiter en Isral comme les prophtes en tmoignent (Ezra 9; Nhmia 9). Il est rapport dans le Talmud (Sanhdrin 98a) que Rabbi Yochoua ben Levi rencontra

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le Messie aux portes de Rome et lui demanda: Quand donc mon matre se rvlera-t-il? Il lui rpondit: Aujourdhui - aujourdhui, si vous coutez la voix de D.! De mme les Justes de tous les temps, comme le Baal Chem Tov, le Maguid de Kouznitz, le Voyant de Lublin, le saint Rabbi de Marimnov dsiraient anticiper la rdemption. Etant donn que la rdemption peut venir tout moment et ne dpend que de nous, D. ne veut pas que les Enfants dIsral connaissent la date de la fin des temps, comme il est dit (Devarim 30:14): La chose est proche de toi: dans ta bouche et dans ton cur, pour que tu puisses lobserver! et il est dit (Pessikta Zouta Vaethanan 4:32): Les Enfants dIsral ne seront sauvs de lemprise des nations du monde que par le mrite de la Torah . En fait, sachant quil navait pas le droit de vivre tranquillement en ce monde, pas mme en Terre dIsral, Yaakov ne sest pas install confortablement en Egypte mais il sest plong dans ltude de la Torah afin dtre sauv de linfluence nfaste de ce lieu pervers. La Torah est appele Vie, elle est un lixir de vie et un arbre de vie (Michley 3:18), et celui qui sattache la Torah est attach larbre de vie (Zohar III, 176a). La Torah elle-mme tmoigne que pour Yaakov, pendant dix-sept ans, elle a t source de vie. Cest un enseignement pour tous ceux qui vivent dans des pays o lidoltrie, limmoralit et le crime sont chose courante. Pour se prserver de linfluence nfaste de cet entourage, il faut sattacher aux valeurs de la Torah qui protge et sauve de tout mal et de toute souffrance.

La remontrance prcde la venue du Messie


Yaakov vcut dix-sept ans dans le pays dEgypte (Brchith 45:28). Rachi rapporte le Midrach (Brchith Rabah 98:3): Cette section est ferme parce que Yaakov voulait rvler ses enfants la fin des temps, mais la Prsence divine la quitt . Nous lisons par la suite (ibid. 49:1): Yaakov fit venir ses fils et leur dit: Rassemblez-vous, je veux vous rvler ce qui vous arrivera dans la suite des temps . Rachi commente au nom des Sages (Pessahim 56a): Il voulait leur rvler la fin des temps, mais la Prsence divine se retira et il commena parler dautre chose . Nos Sages utilisent trois termes diffrents pour dsigner la fin des temps: 1) les douleurs de lenfantement du Messie (Sanhdrin 98b), 2) sur les talons du Messie (Sotah 49b), 3) lpoque messianique (Sanhdrin 99a). Ces trois termes dcrivent le temps de la venue du Messie et le temps de la rdemption. Tout dabord, nous allons expliquer le sens de chacune de ces trois expressions. Les douleurs de lenfantement du Messie est un concept que lon trouve dans le Trait Chabath (118a): Quiconque remplit lobligation des trois repas du Chabath chappe trois catastrophes: les douleurs du Messie, le feu de lenfer, la guerre de Gog et Magog . Rachi commente ce passage ainsi: Il est dit (Ketouboth 112b): la gnration qui verra la venue du fils de David connatra des disputes entre les sages, comme il est dit (Ichaya 6:13): A peine un dixime y survivra, qui son tour sera dvast... mais la race sainte verra subsister une souche , et les douleurs sont les douleurs de lenfantement du Messie, comme il est crit (Ocha 13:13): les douleurs dune femme en travail lui arrivent . De mme quune femme sur le point daccoucher ressent de fortes contractions avant lenfantement, et plus le terme est proche, plus ces douleurs sont violentes jusqu la dlivrance , de mme la venue du Messie sera accompagne de douleurs violentes et de nombreuses souffrances dans le monde. Ensuite, la lumire du Messie sera dvoile grce au repentir, la prire, la bienveillance, et lobservance de la Torah, comme le disent les Sages (Yrouchalmi Taanith 1:1): La rdemption se fera par la douleur, la prire, le mrite des anctres, le repentir, le terme de la fin des temps , et ce sera un soulagement pour nous et pour le monde entier. Il est dit (Brachot 8b): Csar a demand Rabbi Yochoua ben Hanina: en combien de temps le serpent se reproduit? Il lui rpondit: tous les sept ans... Le Gaon de Vilna explique que cette section se rfre la priode de la venue du Messie, que les crits assimilent aux douleurs de la grossesse alors que la rdemption est compare lenfantement. Il est dit (Sanhdrin 97a): Des sept ans (du cycle marqu par une anne de chmage de la terre) durant lesquels le fils de David viendra... la septime sera marque

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par des guerres, et la fin des sept ans, le fils de David viendra . Il sagit des sept ans de la grossesse et la fin des sept ans, le Messie viendra. Et le Gaon de Vilna souligne que, daprs le Zohar, la communaut dIsral conoit le Messie en tout temps (Zohar III, 34b). Si le peuple juif le mritait, le Messie serait dj l mais, cause de nos fautes, la communaut perd son enfant sans cesse parce que nous nadhrons pas toutes les ordonnances de la Torah. Cest pourquoi le Messie est appel dans le Talmud (Sanhdrin 96a) un avorton , car la communaut subit un avortement. Sur les talons du Messie: Les Sages disent (Sanhdrin 98a): Le Messie est assis aux portes de Rome parmi les mendiants, et il souffre de la peste, comme il est crit (Ichaya 53:5): Cest pour nos pchs quil a t meurtri , et (ibid. 4): Il est charg de nos maladies... Et le Talmud raconte quil enlve un bandeau, nettoie sa plaie, remet le bandeau, puis en dfait un autre... il ne retire jamais deux bandeaux en mme temps, pour ne pas tre retard sil est appel pour aller sauver Isral (Rachi ad. loc.). Ainsi, il est assis et souffre cause de nos fautes, afin dobtenir notre pardon et de prcipiter le temps de notre rdemption. Il attend avec tellement dimpatience quon lui demande de venir nous dlivrer quil panse ses plaies de manire ne pas tarder, le moment venu, ne serait-ce quun seul instant. Il y a pourtant une condition: quIsral se repente de ses fautes comme le disent les Sages (Sanhdrin 98a): Lorsque Rabbi Yochoua ben Lvi demanda au Messie: Quand donc viendra mon matre? il lui rpondit: Aujourdhui! Quest-ce dire aujourdhui? Aujourdhui, si seulement aujourdhui vous coutez Sa voix! (Thilim 95:7). Tant que le Messie nest pas guri de ses plaies, cest une indication quIsral ne sest pas repenti de ses fautes. Entre temps, il est assis et il attend, et il se lamente que la Prsence divine soit encore en exil et il pleure le malheur de ses fils... Cela nous permet de comprendre le sens de lexpression sur les talons du Messie . Ce que nous venons de dire montre clairement que nous sommes la cause des plaies de notre Messie et, plus lexil se prolonge, plus nous lui causons de blessures. Les gnrations antrieures latteignaient la tte et ces plaies-l gurissaient du jour au lendemain, les gnrations suivantes latteignaient dans les membres, et en fonction de la dgradation des gnrations suivantes, les plaies descendirent sur le corps du Messie, jusqu ce que nous, gnration qui a perdu le sens de toutes les valeurs humaines et spirituelles, latteignions au plus bas, aux talons. Il est donc clair que cette maladie se gurit par tapes, et il ne reste plus beaucoup de temps au Messie pour gurir compltement. Lorsque les talons aussi seront guris, le temps de la rdemption viendra. Nous apprenons qu lpoque o les plaies du Messie ne toucheront que les talons, lhumanit aura atteint le niveau spirituel le plus bas, celui o la peur et la frayeur se rpandront cause des tyrans qui rgneront par linjustice, la cruaut et limmoralit, car ils verront que la fin de leur suprmatie est proche et quils sont condamns la destruction et loubli. Et donc, en ce temps-l, la mchancet psera de tout son poids, les tyrans essayeront dtendre leur influence partout dans le monde, ils causeront des guerres sanglantes, pratiqueront limmoralit, la haine, lincroyance, la ngation de la Providence divine et commettront tous les pchs afin dempcher lhumanit de reconnatre D. Nous vivons aujourdhui des vnements que lhumanit na jamais connus depuis sa naissance, une poque de destruction aux proportions effrayantes, avec la menace atomique ou autres instruments de destruction massive si rpandus dans le monde. De mme, les relations immorales ont pris des proportions normes et bnficient dune approbation lgale. Chacun se donne la libert de se conduire comme bon lui semble et de penser ce quil veut, et la profanation se propage dans le monde entier. Bien que les dits et les pratiques idoltres aient t limines, elles ont t remplaces par des pratiques que nos pres navaient pas imagines et qui proviennent du rejet des treize principes fondamentaux de la foi, de la ngation de lexistence du D. Vivant et de linsoumission Sa volont. Nos Sages ont prdit notre poque et ils lont dcrite avec prcision. A lpoque qui prcdera la venue du Messie, laudace sera extrme, le sens du respect sera perdu, la vigne produira son fruit et pourtant le vin sera hors de prix, les dirigeants blasphmeront et il ny aura personne pour les rprimander, les assembles des sages seront abandonnes au vice et lon sy adonnera la prostitution, la Galile sera dtruite et le Golan dsert, les gens des frontires erreront de ville en ville sans trouver de repos, la sagesse des matres sera ddaigne et les gens vertueux mpriss, la vrit disparatra, les jeunes insulteront les vieux, les vieillards se tiendront debout devant les enfants, le fils insultera son pre, la fille attaquera sa mre, la belle-fille sa

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belle-mre, les gens dune mme maisonne seront ennemis, la face de la gnration ressemblera la face du chien, le fils naura pas honte devant son pre, et sur qui pourra-t-on sappuyer? Uniquement sur notre Pre qui est dans les Cieux (Sotah 49b). La vision prophtique de nos Sages est tonnamment prcise, dautant plus que les faits dcrits ne sont pas naturels, au contraire, ils sont imprvisibles et inexplicables. Qui peut prdire une poque de grande prosprit agricole et conomique o pourtant les produits seront hors de prix ? Ce sont deux choses qui sexcluent mutuellement, et qui se risquerait de tels pronostics? Nous voyons de nos propres yeux se raliser tout ce que les Sages dcrivent et leurs paroles sont comme un fleuve de feu (Avoth 2:15). Que la cendre remplisse la bouche de quiconque voudrait dnigrer leurs saintes paroles! Quant nous, nous sommes heureux davoir eu le mrite de connatre effectivement la saintet de nos Sages, et cela nous oblige avoir une foi entire en eux, une foi qui nous permet de nous lever dans le service de D. Sans aucun doute, ces prophties ont pour but de nous faire comprendre clairement que lorsque nous verrons les vnements dcrits, nous pourrons nous prparer la venue du Messie, nous repentir de tout cur, multiplier les actes de bienfaisance et ltude de la Torah et donner nos enfants une ducation conforme la tradition ancestrale. Tout cela, afin de gurir rapidement les plaies du Messie, surtout celles dont il souffre aux talons - les talons du Messie, do cette poque tire son appellation. La gurison du Messie ne dpend que de nous. Lpoque messianique: Cest le temps qui suit lpoque o se raliseront les signes dcrits et o le Messie se rvlera. Cette priode ne durera que quelques jours seulement si nous le mritons, comme le disent les Sages (Sanhdrin 98a): Le fils de David ne viendra que dans une gnration entirement mritante, ou entirement fautive . Dans ce cas, il est vident que les signes nfastes dcrits ne sont que les tentatives enttes du Satan pour retarder la rdemption. Si effectivement la gnration est entirement mritante, toutes les difficults dcrites ne dureront que peu de temps. Mais dans le cas contraire, malheureusement, les souffrances que nous endurerons justifieront les paroles de Oula (Sanhdrin 98b): Que le Messie vienne, pourvu que je ne le voie pas . Il est dit que, dans ce cas, le Messie se rvlera comme un pauvre mont sur un ne (Zakharia 9:9), cest--dire quil se rvlera trs lentement, et avec beaucoup de difficults. A propos du verset: On lavera son vtement dans le vin, et dans le sang des raisins sa tunique (Brchith 49:11), le Or Hahayim (Chemoth 21:11) commente: Sil ny a pas dhommes de Torah au temps de la rdemption, elle adviendra cause du poids et de la svrit de lexil, car les tincelles de saintet seront purifies par les souffrances, comme elles auraient pu ltre par la Torah. Le Messie viendra alors comme un pauvre mont sur un ne et son apparition se fera conformment aux lois de la nature. Mais si la rdemption se fait grce au mrite dIsral, elle se ralisera de faon merveilleuse, et le Messie se rvlera miraculeusement, dans une colonne de feu venue du Ciel .

Deuxime volet
La Michna ( la fin du trait Sotah) dit: A lpoque qui prcdera la venue du Messie, il ny aura pas de remontrance . Rachi explique: Il ny aura personne capable de faire des remontrances, car tous commettront des transgressions. Si quelquun fait un reproche un autre, il lui sera rtorqu: Tu fais la mme chose! Il est dit de tels gens: Recueillez-vous, tchez de vous ressaisir, gens sans vergogne (Tsphania 2:1). Cest--dire: Tout dabord corrige-toi, aprs tu pourras ten prendre aux autres (Baba Metsya 107b). Quas-tu me faire des remontrances alors que tu commets toi-mme des transgressions? Ainsi, plus personne ne fait de remontrances, et les gens fautent sans frein et sans borne. 1. Il va de soi quune socit ne saurait se perptuer sans possibilit de remontrance, dont la raison dtre est de redresser les torts et de guider les hommes dans le droit chemin, comme la Torah lordonne: Reprends ton prochain et tu nassumeras pas de pch cause de lui (Vayikra 19:17). Lune des quarantehuit qualits requises pour lacquisition de la Torah est daccepter les remontrances (Avoth VI:6). Sans remontrance, comment la socit peut-elle tre saine et comment ceux qui errent dans des sentiers perdus peuvent-ils revenir dans le droit chemin? 2. Apparemment, cela ne concerne pas spcifiquement la gnration du temps du Messie, puisqu propos du verset Du temps des juges... (Ruth 1:1), Rabbi Yohanan dit (Baba Bathra 15b): Du temps o les juges taient eux-mmes jugs. Le juge dit: enlve lpine dentre tes dents, et il lui est rpondu:

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enlve, toi, la poutre dentre tes yeux . A propos de la section Dans la quarantime anne, le onzime du mois, le premier jour du mois... (Devarim 1:3), le Midrach ajoute (Sifri ad. loc.): Moch na fait des remontrances au peuple dIsral quavant de mourir, chose quil a apprise de Yaakov qui na fait des remontrances ses enfants quavant de mourir, leur disant: Rouven, je ne tai pas fait de reproches pendant toutes ces annes afin que tu ne tenfuies pas pour aller tassocier Essav. De mme, les dirigeants Yochoua et Chmouel nont fait des reproches au peuple quavant de mourir . Il est extrmement difficile daccepter les remontrances et cest effectivement ce que disent nos Matres, comme Rabbi Tarfon (Arachin 16b): Je serais tonn de trouver aujourdhui quelquun qui accepte de recevoir des remontrances . 3. Pourquoi ces dirigeants ont-ils jug bon de faire des remontrances justement avant de mourir? 4. Comment est-il possible que les fils de Yaakov, anctres des douze tribus dIsral, aient mal agi, ce que Yaakov leur reprocha avant de mourir, comme il fit des reproches son fils an Rouven? Le but des remontrances est de redresser les curs, de montrer lhomme en quoi il a mal agi afin de lamener se perfectionner, mais ici, la consquence aurait pu tre, malheureusement, inverse. Dautant plus quil ne sagit pas de nimporte quel pre envers un fils quelconque, mais de Yaakov, le plus parfait des Patriarches (Brchith Rabah 76:1), celui qui symbolise la perfection et la vrit, et dun fils comme Rouven dont il est crit (Brchith 49:3): Tu es mon premier-n, mon orgueil et le prmice de ma vigueur . Cest Rouven qui le premier a ouvert la voie du repentir et il est dit (Pessahim 87b; Brchith Rabah 84:19) que son descendant Ocha a aussi appel au repentir. Est-il possible que la remontrance puisse tre mal accepte justement de sa part? 5. Il faut aussi expliquer pourquoi il est dit que cest de Yaakov que Moch a appris ne faire des remontrances quavant de mourir. Quy a-t-il dexceptionnel cela? Nest-ce pas une chose naturelle quun pre dirige ses enfants dans le droit chemin, surtout avant de mourir, car au seuil de la mort ses paroles ont le plus grand effet? Pourquoi Moch doit-il apprendre de Yaakov quand faire des remontrances aux Enfants dIsral? 6. Beaucoup de commentateurs demandent comment raliser le commandement Reprends ton prochain avant la venue du Messie, puisque la Torah est ternelle et nest pas soumise aux changements de lieu et de temps. 7. Est-il possible de dire que Moch et Yaakov nont pratiqu ce commandement quavant de mourir? Rappelons une anecdote: On critiqua Rabbi Leib Comment peux-tu faire tous les jours des remontrances aux Juifs? Les Sages nont-ils pas conseill de nexprimer des reproches quavant de mourir? A cette critique, il rpondit: Les Sages ont dit aussi: Repens-toi un jour avant de mourir (Avoth 2:10). Chaque jour est pour lhomme le jour qui prcde sa mort, et cest pourquoi je fais des remontrances tous les jours. Avant de rpondre toutes les questions poses, citons ce que disent les Sages (Torat Kohanim Chmini, 27): Pourquoi est-il dit que tous les Enfants dIsral (hommes et femmes) ont pleur la mort dAharon, tandis qu la mort de Moch il est dit: Les Enfants dIsral (seulement les hommes) pleurrent la mort de Moch... (Devarim 34:8) et non pas tous les Enfants dIsral? Cest parce quAharon na jamais dit un Juif, homme ou femme, tu tes rendu coupable , mais la mort de Moch, qui leur fit des reproches maintes occasions, il est dit seulement les Enfants dIsral . Le Midrach Sifri rapporte que Moch rappelle au peuple chaque endroit o celui-ci a provoqu la colre de D., mais il ne rappelle leurs fautes que par allusion, par respect pour eux. Il y a deux faons de faire des remontrances. Soit directement, soit indirectement. Lorsque lon dit quelquun: tu tes rendu coupable et quon lui dcrit sa faute, il ressent sans doute de la honte et cela peut lui tre dun grand service pour se corriger et slever spirituellement. Mais en mme temps, cela risque de le vexer et de le conduire au dsespoir. Il est certain que lacceptation dun reproche dpend de la personne qui ladresse. Si le reproche est prononc par quelquun qui lui-mme nest pas dnu de faute, celui qui il sadresse ne sera pas convaincu quil se soucie de son bien, et il le souponnera dagir par intrt personnel. Il lui rtorquera: avant de me faire des critiques, corrige-toi toi-mme car tu nes pas moins coupable et honteux que moi. Parfois, on

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obtient le contraire de leffet dsir, et le fautif continue et persvre dans sa mauvaise conduite. Modifier sa conduite serait exprimer son acceptation de la remontrance et il simagine quune telle acceptation serait une atteinte son honneur, une marque de faiblesse, et donc il sentte dans sa mauvaise voie. Si, par contre, la remontrance est prononce avant de mourir, elle peut sexprimer directement (cest la diffrence entre Moch et Aharon) puisquil ny a plus de rivalit inter-personnelle et le fautif na aucune raison de souponner que celui qui lui fait des reproches cherche le rabaisser ou poursuit un intrt personnel quelconque. Alors, le cur de celui auquel sadresse le reproche souvre et il peut accepter les remontrances qui lui sont faites. Il naura pas non plus besoin davoir honte des critiques lorsque celui qui les prononce nest plus. Nous comprenons donc pourquoi Yaakov, qui dsirait reprocher son fils Rouven davoir attent au lit paternel (Chabath 55b), ne le fit qu la fin de sa vie. La motivation de Rouven, qui voulait rparer laffront fait sa mre, laurait empch daccepter les remontrances, et il se serait senti tellement insult quil aurait pu aller se rfugier chez Essav (ce qui rpond la question 4). Yaakov fut le premier le comprendre. Moch, Yochoua et Chmouel ont appris de lui ne faire des remontrances au peuple quavant leur mort (ce qui rpond aux questions 3 et 5), mais il ne suffit pas de faire des reproches, il faut aussi savoir que la remontrance est une arme double tranchant. Avant de lutiliser il faut comprendre en quoi et pourquoi un tel a mal agi, faute de quoi on risque de manquer le but vis. Mme si celui qui fait des remontrances a une influence semblable celle de Yaakov ou de Moch, il doit veiller ne pas prononcer de paroles dures qui ne seront pas acceptes. Il est vrai que Moch parla au peuple, car il tait leur matre et leur dirigeant, et il est certain quil ne voulait que leur bien, mais tout le monde ne la pas pleur sa mort, tandis que tous les Enfants dIsral ont pleur la mort dAharon qui ne leur avait jamais rappel directement leur culpabilit, et ne chapitrait les coupables que par allusion. Nous en concluons que Moch a rprimand les Enfants dIsral durant toute sa vie par allusion mais, avant de mourir, il a employ un langage direct, et malgr tout, certains nont pas pu accepter ces remontrances et nont pas pleur sa mort. Cela nempche pas quil avait rprimand les Enfants dIsral par allusion durant toute sa vie (ce qui rpond la question 7). Les Sages disent que durant la priode prcdant la venue du Messie, nul ne pourra faire de remontrances. Il va sans dire que la remontrance nest efficace que lorsque celui qui la prononce na pas dintrt personnel et parle uniquement par souci du bien des autres (ce qui rpond la question 6). Il faut ajouter quune remontrance prononce avec dlicatesse permet de prserver de bonnes relations. Avant la venue du Messie la remontrance sera sans effet car les conditions ncessaires feront dfaut. Pour tre efficace, elle doit tre prononce par des gens parfaits comme Moch ou Yaakov. La remontrance prononce par quelquun qui est lui-mme fautif est refuse demble: Corrige-toi toi-mme, car tu nes pas meilleur que moi! (ce qui rpond la question 2). Avant la venue du Messie, il peut se trouver des gens qui feront des remontrances par allusion et indirectement et ce commandement pourra tre pratiqu, cette poque aussi, par une personne comptente. Effectivement, nous voyons de nos propres yeux et tout instant un grand nombre de Juifs qui retournent leur source et leur origine. La fin des temps que Yaakov mentionne est divise en trois priodes: les douleurs de lenfantement du Messie, la priode prcdant la venue du Messie, et lpoque messianique. Chaque priode est caractrise par une certaine sorte de remontrance. Celui qui les prononce doit viser le bien de la personne qui il sadresse sans avoir dintrt personnel ce quil dit. Il doit aussi parler avec dlicatesse et peser chacun de ses mots - quil parle directement ou par allusion - et tre lui-mme sans reproche. Ce nest que lorsque tous reviendront D. que le Messie sera guri de ses plaies et quil se rvlera nous, rapidement. Mme dans ses critiques, Moch avait beaucoup de respect pour les Enfants dIsral et il prononait ses reproches avec dlicatesse. Rachi remarque propos du verset ...dans le dsert, dans la plaine en face de Souf (Devarim 1:1) que tous ces lieux rappellent par allusion des fautes commises . Ce premier verset du livre Devarim dit: Ce sont l les paroles que Moch adressa tout Isral de lautre ct du Jourdain, dans le dsert, dans la plaine en face de Souf, entre Paran et Tofel, Laban, Hatseroth et Dey-Zahav . Expliquons chaque partie de ce verset:

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Ce sont l les paroles... - Moch dsire que le peuple retourne sincrement D. et se repente, comme il est dit Armez-vous de paroles et revenez D. (Ocha 14:3); ...que Moch adressa tout Isral - il nest pas dit aux Enfants dIsral , car il parle aussi pour toutes les gnrations futures; ...de lautre ct du Jourdain - le mot Hayarden, du Jourdain, dont les lettres comptes avec le mot ont la mme valeur numrique que le mot Raa, mal, indique quil faut se repentir de tout le mal commis dans le pass car ver, de lautre ct signifie aussi le pass; ...dans le dsert, dans la plaine - le mot Midbar, le dsert, veut dire aussi la parole (Dibour), et le mot Arava, la plaine, est form des mmes lettres que le mot Avrah, la transgression, cest--dire quil faut aussi corriger les fautes commises en paroles, comme la mdisance et les indiscrtions auxquelles on ne prte pas assez dattention et quil faut regretter; cest pourquoi Moch les mentionne sparment. Comment peut-on parvenir un repentir complet? La rponse est donne par la suite du verset: ...en face de Souf - indique quil faut toujours se rappeler la fin (Sof), du jour de la mort, comme disent les Sages (Brachot 5a): Lhomme doit toujours se rappeler le jour de la mort et tous les jours de sa vie, il doit entraner ce vilain vers la maison dtude (Soucah 52b) afin de le vaincre. Une telle attitude est utile en toute circonstance et permet de surmonter les preuves; ...entre Paran et Tofel - que lon se trouve dans une situation honorable (Paran est associ au mot tipheret) et respectable, ou que lon se trouve dans une situation humiliante et abaissante (Tofel est associ au mot Tiflout), ayant rejet le joug divin, D. nous en prserve; Vous retournerez Ramatta (un lieu lev) grce au repentir et un retour D., lou soit-Il au-dessus de toute louange. Si nous effectuons un retour sincre D., Moch nous promet et Laban, Hatsrot et Dey-Zahav Laban signifie blanc , et il est dit: Vos pchs fussent-ils comme le cramoisi, ils peuvent tre blanchis comme la neige (Ichaya 1:18), cest--dire que nous serons blanchis de nos pchs, et nos fautes, mme intentionnelles, seront comptes comme des mrites (Yoma 86b). Alors D. acceptera notre repentir et nous pardonnera, comme le disent les Sages (Chavouoth 39a): Il pardonne ceux qui reviennent Lui ; Hatsrot (qui veut dire les cours intrieures) indique que nous marcherons dans la Maison de D., comme il est crit (Thilim 92:14): Plants dans la Maison de lEternel, ils sont florissants dans les parvis de notre D. , et alors nous aurons mrit la construction du Temple et nous recevrons la rcompense de Dey Zahav, de lor en quantit suffisante, comme il est crit: Je rpandrai sur vous la bndiction au-del de toute mesure (Malakhi 3:10), et nous serons bnis. Le mot Zahav, lor, a la mme valeur numrique que le mot Day, en suffisance, et il est dit: Jusqu ce que vos lvres susent dire: assez! (Day) (Chabath 32b; Yrouchalmi Taanith III:9). Les Sages remarquent (Devarim Rabah 1:6): Chlomo HaMelekh nous enseigne que celui qui accepte les remontrances est bni, comme il est crit (Michley 24:25): La bienveillance ceux qui rprimandent, ils seront bnis de bonheur . Ainsi soit-il.

La saintet de Yossef protge Yaakov et tous les Enfants dIsral


Tu agiras envers moi avec bont et fidlit, tu ne menseveliras pas en Egypte (Brchith 47:29). Telle est la prire de Yaakov son fils Yossef. 1. Pourquoi est-ce Yossef quil demande de ne pas lenterrer en Egypte, plutt qu un autre de ses enfants qui taient tous aussi courageux et vertueux que Yossef (Chemoth Rabah 1:1)? Eux aussi auraient eu la possibilit de faire sortir son cercueil dEgypte. tait-il interdit de sortir un mort dEgypte pour lenterrer ailleurs, pour quil faille demander pareille permission Yossef, gouverneur du pays? 2. Il faut aussi comprendre pourquoi, avant de mourir, Yossef adjura les Enfants dIsral en disant: Le Seigneur vous visitera et alors, vous emporterez mes ossements dici (Brchith 50:25). Ce serment les empchait de sortir dEgypte sils nemportaient pas avec eux le corps de Yossef. En fait, les Sages remarquent quils prirent les ossements des autres chefs de tribus (Brchith Rabah 100:12) qui, eux aussi en firent la demande. Pourquoi seule la demande de Yossef est-elle transcrite dans la Torah, et non la demande des autres frres?

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Le Darkey Moussar rapporte la question du Rabbi de Rodzin concernant le verset (Brchith 45:9): Htez-vous, retournez chez mon pre et dites-lui... D. ma fait le matre de toute lEgypte : Quel message y a-t-il dans lannonce que Yossef est le matre de lEgypte? Cet honneur apparent a-t-il une quelconque importance aux yeux de Yaakov? . Et il rpond: Son intention est de signifier: Je suis le matre divin en Egypte . Autrement dit, Yossef fit savoir son pre quil avait imprgn lEgypte de la crainte et de la connaissance de D. et proclam la souverainet de D. sur tout lempire. Une telle nouvelle fut certainement rconfortante pour Yaakov, heureux de savoir que les Egyptiens avaient, grce Yossef, connaissance de D. La grandeur et la saintet de Yossef proviennent de ce quil a russi influencer les Egyptiens au point dtre accept par eux comme leur souverain de droit divin. Sa vertu tait en opposition avec toutes les impurets de la socit gyptienne, quil chassait partout o il allait, au point que les Egyptiens finirent par adopter facilement la foi en D. Cest ce que Yossef dit son pre: D. ma rendu matre de toute lEgypte, viens auprs de moi, ne tarde pas! Cest--dire: Tu ne dois pas craindre de descendre en Egypte, car jai dj prpar le terrain pour les Enfants dIsral, nous avons dj bti des Ychivoth et les Enfants dIsral pourront continuer ici tudier. Yossef nest pas all lui-mme en terre de Canaan chercher son pre, car Yaakov naurait pas permis son fils de retourner en Egypte et il aurait fallu lenchaner dans des fers pour le faire descendre en Egypte (Chabath 89b; Brchith Rabah 86:1). Mais au moins, Yossef console-t-il son pre en lui disant avoir proclam le Nom de D. dans toute lEgypte, de sorte quil na rien craindre des dbauches et des impurets du pays. Bien que Yaakov ait t convaincu par ce message, il envoya Yhouda au devant pour lui prparer une maison dtude (Brchith Rabah 95:3; Tanhouma Vayigach 11). Cest tonnant! Yossef avait dj institu des lieux dtude puisque Menach et Ephram ont tudi la Torah, et il faut se demander pourquoi Yaakov voulait fonder un autre lieu de Torah et ne se contentait pas de ceux de Yossef. Nous tirons de cela un principe fondamental. Lhomme ne doit pas se contenter des forces quil possde mais aspirer les augmenter et amliorer son service de D. En ce qui concerne la Torah, il ne faut pas se satisfaire de ce que lon a dj acquis, il faut chercher lapprofondir. Cest pourquoi, bien que Yaakov ait connu lexistence des Ychivoth de Yossef, il voulait sassurer personnellement quil lui serait possible de soccuper de Torah en Egypte. Yossef sy trouvait dj depuis de nombreuses annes mais ses autres enfants ny descendaient que maintenant munis de la Torah et de la crainte de D. acquises en Terre dIsral. Il leur fallait un centre qui rponde leurs besoins. Nous sommes prsent en mesure de rpondre toutes les questions poses. Il est dit (Zohar II, 8b): Lorsque les Enfants dIsral descendirent en Egypte, lexil avait dj commenc et il ny avait aucun moyen den sortir . Yaakov savait quils ne pourraient pas sortir son corps dEgypte et que seul Yossef, celui qui avait russi craser limpuret sous ses pieds et proclam le Nom de D., aurait le pouvoir de faire sortir son corps afin que les Egyptiens ne puissent pas en tirer un profit quelconque. Les autres enfants navaient pas le pouvoir que Yossef avait acquis grce sa conduite vertueuse dans ce lieu impur. Cest pourquoi Yaakov demande Yossef de lenterrer en terre de Canaan afin que les Egyptiens ne fassent pas, aprs ma mort, une idole de mon corps (Brchith Rabah 95:6), ce qui te ferait perdre le rsultat des efforts que tu as investis pendant tant de temps . Il faut ajouter cela que si Yaakov avait t enterr en Egypte, la sortie des Enfants dIsral en aurait t retarde car, aprs avoir fait du corps de Yaakov une idole, les Egyptiens auraient aussi maltrait ses enfants et aggrav leur situation. Dans ce cas, ils nauraient pas pu purifier les tincelles de saintet (voir Or Hahayim, Brchith 49:9). Il nest pas ncessaire de dvelopper ce sujet pour celui qui le comprend. D. dit Yaakov (Brchith 46:4): Moi-mme Je descendrai avec toi en Egypte, Moi-mme aussi Je ten ferai remonter et Yossef te fermera les yeux . D. promet Yaakov quil sera enterr en Isral (Yrouchalmi Sotah I:10; Kohleth Rabah 7:2) et Yaakov comprend que seul Yossef te fermera les yeux signifie seul Yossef tenterrera en Isral . Yossef lui aussi demande ses frres de sortir son corps dEgypte. Il est dit (Houlin 7b): Les Justes sont plus grands aprs leur mort que de leur vivant . De mme que de son vivant, Yossef (et personne dautre)

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avait eu le pouvoir de soumettre les forces du Mal, de mme aprs sa mort, lorsque les Enfants dIsral sortiront dEgypte aprs avoir purifi les tincelles de saintet, il aura une bonne influence sur eux. Lorsque les Enfants dIsral taient au bord de la Mer des Joncs, les anges accusateurs ont protest: Ceux-l (les Egyptiens) sont idoltres, et ceux-l (les Juifs) sont idoltres. Pourquoi seraient-ils jugs diffremment? (Chohar Tov 15:5; Zohar II, 170b). A cause de largument de lange tutlaire des Egyptiens, lattribut de Justice planait au-dessus de leur tte. Yossef savait, dj de son vivant, que la mer ne souvrirait pas devant les Enfants dIsral et que lui seul pourrait faire taire cet accusateur et faire se fendre la mer, comme il est effectivement crit (Thilim 114:3): La mer a vu et sest enfuie . Qua-t-elle vu? Elle a vu le cercueil de Yossef, qui avait fui devant la femme de Poutiphar (Chohar Tov ad. loc.). Yossef demande donc ses frres de le faire sortir dEgypte afin que, grce son mrite, la mer puisse se fendre et que les Enfants dIsral puissent recevoir la Torah et entrer en Terre dIsral. Ce nest pas sans raison que les Sages disent (Sotah 13 a/b): Le corps de Yossef et le Tabernacle o sont enfermes les Tables de la Loi, allaient dans le dsert cte cte, parce que celui-ci avait pratiqu ce qui est crit dans celui-l . Cest--dire que Yossef, grce sa saintet, avait le pouvoir de protger les Enfants dIsral et de veiller sur eux. Seul Yossef avait le pouvoir de faire taire les accusateurs qui slveraient la Mer des Joncs, pour avoir abandonn son vtement entre les mains de la femme de Poutiphar (Brchith 39:12) bien que ce vtement pt servir de preuve contre lui. Au bord de la Mer des Joncs, il devint vident que ses enfants taient capables de la mme saintet que lui. Laccusation de lange tutlaire de lEgypte, eux aussi sont idoltres , ne sappliquait qu ceux qui furent amens pratiquer lidoltrie sous la contrainte (Chemoth Rabah 16:2). Yossef navait commis aucune transgression et malgr tout il fut jet en prison, ce qui reprsentait une grande souffrance. Sa conduite a pourtant donn aux Enfants dIsral le mrite dtre tmoins de grands miracles lors de la traverse de la Mer des Joncs, o la moindre servante a vu ce que le prophte Yhezkiel ben Bouzi na pas vu (Mekhilta ad. loc.). L, ils parvinrent une foi totale en D. et en Moch (ibid. 14:31), au point de recevoir la manne et la Torah, de conqurir la Terre dIsral et de construire plus tard le Temple. Cela montre combien la pratique de chaque commandement est une arme puissante puisque laccomplissement dun commandement prcis un moment prcis, protge lhomme et toute sa descendance, mme quatre cents ans aprs. Cest que D. sait tout ce qui fut et tout ce qui sera, et chaque chose est prise en compte. Il connat le rsultat de chaque acte, bon ou mauvais. Lorsque Moch demande D. (Chemoth 5:22): Pourquoi as-Tu rendu ce peuple misrable? , cest-dire pourquoi doivent-ils tellement souffrir? D. lui rpondit: A prsent, tu seras tmoin de ce que Je vais faire Pharaon , cest--dire, justement cause de ces souffrances, ils reviendront Moi. Le mot ht[ prsent, est interprt comme exprimant le repentir (Brchith Rabah 21:6; 38:14). Par leur repentir, Pharaon sera puni et lange tutlaire de lEgypte ne pourra pas protester contre les plaies qui frappent les Egyptiens alors que les Enfants dIsral, qui sont tombs dans les quarante-neuf degrs dimpuret (Zohar Hadach, Yithro 39a), sont pargns. Les souffrances quotidiennes des Juifs avaient pour but de leur permettre dtre sauvs. Justement travers les souffrances, les Enfants dIsral acquirent la force de rsister et ces souffrances les dlivrent. D., bni soit-Il, dirige les affaires du monde selon Sa volont et pse ce que lon perd excuter un commandement par rapport ce que lon y gagne, et ce que lon gagne commettre une transgression par rapport ce que lon perd (Avoth 2:1). La saintet de Yossef a effectivement protg tous les Enfants dIsral.

Lamour dIsral amne la rdemption


Isral tendit sa main droite, la posa sur la tte de Ephram qui tait le plus jeune mit sa main gauche sur la tte de Mnach. Il croisa ses mains, bien que Mnach ft lan (Brchith 48:14). Nous relevons alors un dsaccord entre Yossef et Yaakov (ibid. v.17-19): Yossef remarqua que son pre posait sa main droite sur la tte dEphram et cela lui dplut.... et il dit son pre: Pas ainsi mon pre! car celui-ci est lan... Son pre sy refusa et dit: Je sais, mon fils, je sais. Lui aussi sera grand, mais son jeune frre sera plus grand que lui, et sa postrit formera plusieurs nations . Il faut expliquer cet pisode. Les Sages ont dit (Chabath 10a; Yalkout Chimoni Vayechev 150): Parce que Yaakov prfrait Yossef ses autres enfants, il lui fit faire une tunique prcieuse, ce qui causa la

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jalousie de ses frres et conduisit nos anctres en Egypte . Sil en est ainsi, pourquoi croise-t-il les mains et place-t-il sa main droite sur la tte dEphram, le plus jeune enfant, au risque de provoquer la jalousie de Mnach? De plus il dit (verset 20): Que D. te fasse devenir comme Ephram et comme Mnach . Pour quelle raison le plus jeune est-il mentionn avant lan? Sil les a bnis dune telle bndiction, pourquoi la Torah ajoute-t-elle: Et il plaa Ephram avant Mnach ? Une telle priorit serait source de jalousie, et Yossef demanda Yaakov; son pre, de placer sa main droite sur la tte de Mnach, le premier-n. Mais Yaakov mit intentionnellement Ephram et Mnach lpreuve, de mme quil mit lpreuve ses propres enfants afin de vrifier quils staient rconcilis de tout cur avec Yossef. La concorde est la base de leur avenir. Si leurs descendants savent seffacer les uns devant les autres, leurs fautes seront pardonnes (Yoma 23a; Mguilah 28a). En se conduisant avec respect envers son prochain, en pensant tout dabord au bien de son prochain, on garantit de bonnes relations sociales, des relations de respect et damour. Pour mettre ses petits-fils lpreuve, Yaakov dit tout dabord: Qui sont-ils? (ibid. 48:8). Rachi explique: Do viennent ces enfants qui ne mritent pas la bndiction? Car Yaakov eut la vision que Yrouvam et Ahav natraient dEphram, et que Yhou et ses enfants natraient de Mnach (Tanhouma Vayhi 6) et il en fut troubl . Si tous deux ont des descendants galement mauvais, il faut se demander pourquoi il donna la prfrence lun deux, si ce nest pour les mettre lpreuve et savoir sils accepteraient cette prfrence et continueraient saimer. Dans ce cas, les fils des autres tribus aussi apprendraient vivre en paix les uns avec les autres, sans conflit. Yossef fit remarquer son pre son erreur, mais les tribus acceptrent la dcision de Yaakov et rsolurent de se conduire avec amour les unes envers les autres. Il plaa Ephram avant Mnach , au vu et au su de tous, afin que tous sachent quils ne devaient pas se jalouser mais se conduire avec fraternit et amour les uns envers les autres. La suite du rcit devient claire. Il est crit (ibid. 49:1-2): Yaakov fit venir ses fils et leur dit: Rassemblezvous, je veux vous rvler ce qui vous arrivera la fin des temps. Runissez-vous et coutez... Yaakov voulait leur signifier que ce nest que grce lunion fraternelle et lattention que chacun prtera aux sentiments de lautre, quils seront sauvs, comme il est dit (Tanhouma Nitsavim 1): Il ny aura de rdemption que lorsque tout le peuple dIsral sera uni . Il nous reste expliquer pourquoi, lorsque Yaakov voulut rvler ses fils la fin des temps, linspiration divine le quitta (Pessahim 56a). Il pensait quil y avait en eux quelque dfaut. Ses fils lui dirent: coute Isral, lEternel est notre D., lEternel est Un . Il sexclama alors: Bni soit Son rgne tout jamais . Il est difficile de comprendre que Yaakov ait pu souponner ses fils davoir un doute quelconque concernant lunit de D. au point quils furent obligs de faire cette proclamation. Pourquoi ont-ils dit justement: coute Isral ? Et quel est le sens de la rponse de Yaakov: Bni soit Son rgne... ? Par ailleurs, si effectivement ils taient intgres dans leur foi en lunit de D., pourquoi Yaakov fut-il priv de linspiration divine? Pour rpondre clairement ces questions, il faut souligner que la haine et la jalousie risquent dentraner lhomme dtriorer limage de D. qui est en son prochain. Y porter atteinte, cest nier lexistence de D. (Brchith Rabah 34:20) comme sil y avait plusieurs divinits, et renforcer le pouvoir des forces du Mal. De plus, chaque commandement pratiqu par un homme dont la foi nest pas entire renforce une croyance errone et, et dans ce cas, ses bonnes actions profiteront la personne quil a calomnie (Hafetz Hayim, Chmirat HaLachon, HaZechira 7), et il perd toute ressemblance divine. En effet, comment porterait-il encore limage de D. aprs avoir ni limage de D. en lautre? Les Sages disent que Yaakov a effectivement rvl ses enfants la fin des temps car, en les runissant et en les unissant, il leur fit savoir que cette unit amnerait la rdemption. Cest lorsquil voulut leur rvler les dtails de la rdemption que linspiration divine le quitta. Et alors il eut la crainte quil ne subsiste encore dans leur cur un sentiment de haine envers Yossef parce quil lui avait donn une portion suprieure celle de tes frres, portion conquise sur lAmorren, laide de mon pe et de mon arc (Brchith 48:22). A partir du moment o Yossef fut vendu en esclave, jai perdu linspiration divine (Tanhouma Vayechev 2), et elle ne mest revenue que lorsque vous vous tes rconcilis, comme il est crit (ibid. 45:27): La vie revint au cur de Yaakov leur pre . Et voil que soudain, linspiration divine me quitte nouveau! Peut-tre nourrissez-vous de nouveau de la haine contre Yossef parce que je lui ai donn la priorit? ou parce que je lui ai donn la ville de Chehem? ou encore parce que jai donn ses fils Ephram et Mnach

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deux parts dhritage (Tanhouma Vayhi 6), comme il est crit (ibid. 48:5): Ephram et Mnach seront pour moi comme Rouven et Chimon ? Est-il possible que vous prouviez encore de la haine? Et alors, ses fils lui rpondirent: coute Isral, lEternel est notre D., lEternel est Un , cest--dire: nous nprouvons aucune haine et aucune jalousie, D. ne plaise, ni envers Yossef ni envers un autre. La dclaration Chema Isral signifie quavant de pouvoir parvenir lamour de D., une vraie crainte de D. et une foi entire, il faut aimer son prochain, tre attentif ses sentiments et partager ses souffrances. Les enfants de Yaakov lui ont dit quils aimaient leur prochain et taient solidaires les uns des autres, et que ce ntait pas cause deux que linspiration divine lavait abandonn. Yaakov rpondit: Bni soit Son rgne... autrement dit, lhonneur et le rgne de D. sont intacts uniquement lorsque les Enfants dIsral sont unis, alors Son Nom est entier et Son rgne manifeste. Linspiration divine labandonna uniquement en ce quil ne put pas leur rvler les dtails des vnements de la fin des temps. Plus tard, au moment de les bnir, Yaakov fit des remontrances ses fils mais sans provoquer leur jalousie. Bien quil ait fait certains des reproches et bni les autres, il les a tous englobs dans une seule unit (Bamidbar Rabah 13:8; Tanhouma Vayhi 16), car ils taient tous unis dans une mme intention lors de leur dclaration commune, Chema Isral . Il se peut aussi que Yaakov ait cru que ses enfants navaient pas compris la leon donne lors de sa rencontre avec Yossef. Il donna Yossef la ville de Chehem (Midrach Hagadah Vayigach 28:29), justement pour ter de leur cur toute jalousie. Lorsquils rpondirent: Ecoute Isral , Yaakov comprit quils staient rconcilis avec Yossef et quils ntaient pas jaloux quil ait reu cette ville. Il est crit ...avec mon pe et avec mon arc (ibid. 48:22), cest--dire avec ma prire et mes suppliques (Baba Bathra 123a). Cest un fait connu quune chose acquise par la prire ne provoque pas la jalousie car elle na pas t obtenue par des moyens naturels. Cest que lhomme doit sanctifier son esprit autant que son corps et les consacrer D. De mme que si un homme a consacr sa maison D. elle est sanctifie (Vayikra 27:14), de mme le corps de lhomme et tout son tre sont sanctifis lorsquil sert D. avec enthousiasme. Personne ne peut alors le jalouser, et lamour dIsral se rpand et rapproche le temps de la rdemption.

La division aggrave lexil lunion permet la rdemption


Et Yaakov fit venir ses fils et leur dit: Rassemblez-vous, je veux vous rvler ce qui vous arrivera dans la suite des jours. Pressez-vous pour couter... (Brchith 49:1-2). Il voulait leur rvler la fin des temps, mais linspiration divine labandonna, et il leur parla dautre chose (Rachi ad. loc., Pessahim 46a). Ce verset ainsi que le commentaire des Sages demandent tre expliqus, car ils sont tonnants. 1. Pourquoi linspiration divine abandonna-t-elle Yaakov, si bien quil fut incapable de rvler la fin des temps? Naurait-il pas t prfrable de rvler ses enfants ce qui arriverait car, en voyant toutes les prophties se raliser, leur foi en aurait t renforce, ce qui les aurait aids se repentir, et ils auraient eu la consolation de savoir que le temps de la rdemption tait proche. 2. Il nous faut aussi comprendre pourquoi Yaakov est appel un homme de vrit , comme il est crit (Zakharia 7:20): Tu donnas la vrit Yaakov . Tout ce quil disait se ralisait et il tait impossible que sa bouche profre une parole mensongre ou quelque mot quil pt regretter, car D. ne cause pas daccident par lintermdiaire dhommes vertueux (Yebamoth 99b; Ketoubot 28b; Houlin 5b). 3. Si lon suppose que D. ne dsirait pas que Yaakov rvle la fin des temps ses enfants, pourquoi ne pas linterdire? Dans ce cas, il naurait pas dit ses enfants: Rassemblez-vous, je veux vous rvler ce qui vous arrivera dans la suite des jours , mais il les aurait bnis comme lavaient fait ses parents. Pourquoi ne pas lempcher de parler en tout premier lieu? A vrai dire, Yaakov ne pronona rien dquivoque. Il dit exactement ce quil avait lintention de dire, et ses allusions sont claires pour qui veut les comprendre. Linspiration divine labandonna parce quil voulait leur dire des choses explicites, mais il gardait le droit de rvler par allusion les raisons de lexil, la rdemption et la fin des temps. Chacun doit savoir que tout ce qui lui arrive dpend de sa propre conduite. Chacun doit comprendre que ses problmes ou ses souffrances sont des signes de sa propre dfaillance. Il doit alors passer en revue ses actes et les corriger (Brachot 5a) pour hter sa propre rdemption. Car tout est entre les mains de D.

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sauf la crainte de D. (Brachot 33b; Zohar I, 59) qui ne dpend que de lhomme. Le fait est quil ny a pas de terme fixe pour la fin des temps ni de date dtermine pour la fin de lexil. Chacun a la possibilit de hter la rdemption ou de la retarder. Nous en avons la preuve dans lAlliance entre les Morceaux entre D. et Avraham, o D. dcrta que les Enfants dIsral seraient exils pendant quatre cents ans (Brchith 15:13). Mais comme ils se sont repentis et ont veill observer de nombreux commandements, ils ont ht le temps de la rdemption, comme il est dit (Vayikra 32:5; Bamidbar Rabah 13:17): Les Enfants dIsral ont prcipit la rdemption dEgypte et ils furent sauvs par de grands miracles au bout de deux cent dix ans . Tout dpend de la conduite de lhomme. Les Enfants dIsral ne devaient sjourner que peu de temps dans le dsert avant dentrer en Terre dIsral, mais pour avoir mdit du pays, ils furent retenus dans le dsert pendant quarante ans (Bamidbar 14:34; Sifri Devarim 1:2), Selon le nombre de jours que vous avez explor le pays, autant de jours, autant dannes vous porterez la peine de vos crimes, pendant quarante ans . On pourrait se demander: Ny avait-il pas en Egypte de gens qui ne mritaient pas dtre sauvs? En quoi labrviation du sjour en Egypte est-elle une preuve que la rdemption fut anticipe, tant donn quil y avait des gens qui, par leur conduite, retardaient la rdemption? Cest que, lorsque D. voit que la majorit de la gnration mrite la rdemption, Il donne aux coupables leur d et fait venir la rdemption, comme il est dit (Chemoth Rabah 14:3; Rachi Chemoth 10:22) concernant la plaie de lobscurit: Il y avait en ce temps-l des gens mchants qui ne voulaient pas sortir dEgypte. Ils sont morts durant les trois jours dobscurit afin que les Egyptiens ne voient pas leur enterrement et ne disent pas: eux-aussi sont atteints par les plaies, comme nous . D. a limin ceux qui voulaient causer des divisions parmi les Enfants dIsral pour les empcher de sortir, ceux qui voulaient plonger dfinitivement le monde dans lobscurit, et il ne resta que ceux qui mritaient de sortir et qui furent promptement sauvs. Nous comprenons maintenant pourquoi D. priva Yaakov de linspiration divine et lempcha de rvler ses enfants la fin des temps. La fin des temps ne se dtermine pas une date fixe puisque tout dpend des actes de lhomme, sils sont bons ou mauvais. Cest ce qui est dit (Edouyot 5:7): Tes actes te rapprocheront (du but) et tes actes ten loigneront . Sil nest pas possible de rvler la fin des temps explicitement, il est possible dindiquer comment hter la rdemption. Cest ce que fit Yaakov. De quelle faon? Il est crit: Rassemblez-vous... pressez-vous... coutez... Yaakov met ses enfants en garde et leur fait savoir que leur manque dunit tait la seule raison de lexil et que sils taient unis fraternellement, sans divisions, la rdemption serait venue delle-mme. Il en est de mme de la fin du dernier exil, comme il est dit (Tanhouma Nitsavim 1): La rdemption ne viendra que lorsque les Enfants dIsral seront unis . Cest un principe fondamental de la Torah (Yrouchalmi Ndarim IX:4), comme le dit Rabbi Akiva propos du verset (Vayikra 19:18): Tu aimeras ton prochain comme toi-mme . Il est dit Rkha, ton prochain, et non Haverkha, ton ami, afin de nous signifier que mme si le prochain est Raa Lekha, mchant envers toi, et quil a envers toi des mauvaises penses, il faut laimer comme toi-mme. Cest cet amour qui unit tout le peuple, avec laide de D. Mais afin de parvenir cet amour, il faut, par de grands efforts personnels, corriger ses propres dfauts, et ainsi nous hterons le temps de la rdemption. Outre la ncessit dtre unis, nous trouvons dans les paroles de Yaakov ses enfants dautres allusions. Il leur a rvl la suite des poques, ainsi que le fait que le Messie serait un descendant de la tribu de Yhouda, comme il est crit (Brchith 49:10): Jusqu lavnement de Chilo, auquel obiront les peuples, et Chilo est lun des noms du Messie (Sanhdrin 98b). Il a aussi fait allusion au fait que Rouven avait perdu le droit danesse au profit de Yossef (Brchith Rabah 98:5) lorsquil lui dit: Tu es imptueux comme londe, tu as perdu ta noblesse car tu as attent au lit paternel, tu as fltri lhonneur de ma couche (Brchith 49: 4). Rouven perdit ses privilges de fils an cause de son impulsivit. Dans ses bndictions, Yaakov indique Chimon et Lvi combien lunit est importante et combien on perd tre dsuni. Le clan de Korah (de la tribu de Lvi) fut puni pour avoir caus des dissensions entre les Enfants dIsral, et ils furent engloutis. Yaakov prie (ibid. 49:6): Ne tassocie point leurs desseins, mon me! Mon honneur, ne sois pas complice de leur alliance! Il ne veut pas que son nom soit associ aux dissidences entre les tribus de Chimon et Lvi. Et Zimri, chef de la tribu de Chimon, a faut avec

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Kozbi, fille de Tsour (Bamidbar 25:14). Yaakov leur expliqua que de tels actes aggravent lexil et que les dissensions sont un dshonneur envers D. (Sanhdrin 109b). Ceci dpasse lentendement. Comment les chefs des tribus dIsral pouvaient-ils douter des paroles de Yaakov? Comment pouvaient-ils ignorer que les dissensions entranaient des dommages et provoquaient la colre de D.? Les Sages remarquent (Bamidbar Rabah 18:10) que le mot MaHLoKT, division, est form des premires lettres des mots: Maka (coup), Harone (colre), Lakouy (manque), Klala (maldiction), Toava (abomination). Combien de gens se laissent entraner des dissensions! Et pourtant, Yaakov nous a prvenus! (Il a parl ses fils uniquement par allusion, car si eux-mmes ne commettaient pas cette faute, leurs descendants pourraient sen rendre coupables, et D. tient compte de tout et rien ne Lui est cach). Ce qui nous montre que Yaakov fit ses enfants des rvlations importantes, mais la seule chose quil aurait voulu leur dire et qui lui fut cache est la date exacte de la rdemption, et cela pour deux raisons: 1. La rdemption dpend de lhomme, qui doit faire leffort de la mriter, et chacun a la possibilit davancer ou de retarder le temps de la rdemption. 2. Le repentir peut amener la rdemption avant le temps fix, comme ce fut le cas pour les Enfants dIsral qui sont sortis dEgypte avant les quatre cents ans dcrts dans lAlliance entre les Morceaux . Il est dit (Zohar I, 129b): Le repentir peut se faire en un instant et tout moment, et alors il est possible de bouleverser littralement tous les mondes , et aussi (Avoda Zara 10:17): Il en est qui gagnent leur monde en un instant , car un repentir total peut transformer le monde et amener la rdemption avant son temps. Et donc D., dans Sa grande bont, empcha Yaakov de rvler ses fils la date exacte de la fin des temps, et ne lui permit que de parler par allusion. Lhomme est dot du libre arbitre. Sil fait un retour sincre et total D., il peut effectivement transformer les vnements. Il est possible que les Enfants dIsral se repentissent et que la rdemption se fasse plus tt que le temps annonc par Yaakov, et il en rsulterait rtrospectivement que Yaakov aurait prononc une prophtie mensongre, D. ne plaise! Mais D. ne cause pas daccident par lintermdiaire dhommes vertueux (Ktouboth 28b), et cest pourquoi Yaakov ne rvla pas le temps de la rdemption, mais parla dautres choses, et uniquement par allusions. Nous voyons que la dissension drange lordre naturel du monde, et combien les disputes et les discordes sont nfastes. Par contre lunion est bnfique lordre du monde, et elle rapproche le temps de la rdemption, comme lindiquent les bndictions de Yaakov ses fils. Nous pouvons maintenant expliquer les penses qui ont motiv les dcisions de Pharaon, roi dEgypte. 1. Il est difficile de comprendre le comportement de Pharaon envers les Enfants dIsral. Si Pharaon se sentait menac par leur croissance, comme il est dit (Chemoth 1:10): Usons dexpdients contre eux, autrement ils se multiplieront et se joindront nos ennemis pour nous combattre et nous chasser du pays , pourquoi les a-t-il laisss en vie? Il aurait d dcrter la peine de mort contre tous, et pas seulement contre les nouveau-ns mles, ou bien les renvoyer avant quils ne reprsentent un danger dmographique vritable, dautant plus que ses astrologues lavaient prvenu (Chemoth Rabah 1:18): Il va natre chez les Juifs un enfant qui dtruira lEgypte et fera sortir les Juifs en grande pompe . Pourquoi use-t-il de stratagmes contre les enfants mles et laisse-t-il en vie les hommes et les femmes, ce qui signifie prendre un grand risque? 2. Si Pharaon ne craint pas vraiment les Juifs et quil cherche seulement profiter de leur prsence et de leurs comptences, il est difficile de comprendre quel avantage il espre obtenir en leur imposant un cruel esclavage. Pharaon savait combien le gouvernement de Yossef avait t bnfique, combien il avait affermi le royaume et fait de lEgypte un puissant empire. A plus forte raison, un peuple tout entier pouvait tre dun grand profit lEgypte, sil avait t bien trait. Mais au lieu de cela, il use dexpdients, il les oblige par un dur esclavage lui construire des villes dapprovisionnement, Pithom et Ramss, et il tue les nouveau-ns mles. Pharaon sest lui-mme priv des bienfaits quil aurait pu obtenir des Juifs, de leurs capacits et de leur sagesse. Pourquoi a-t-il agi de la sorte? 3. Ce qui est tonnant par-dessus tout cest que, lorsque les Enfants dIsral faiblirent, Pharaon nomma des commissaires gyptiens et des surveillants parmi les Enfants dIsral qui il ordonna: Dsormais, vous ne fournirez plus de paille au peuple pour la prparation des briques (Chemoth 5:6-7), quil y ait

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une surcharge de travail, et quils y soient astreints (ibid. v. 9). Il est difficile de comprendre pourquoi Pharaon ne se fie pas aux surveillants gyptiens, mais se repose sur les prposs juifs? Naurait-il pas d faire confiance aux surveillants gyptiens, plutt que de se fier aux prposs juifs qui taient leurs frres et qui ne feraient pas leur travail avec le mme enthousiasme et les mmes rsultats? Nous voyons quils ne fournissaient pas le travail exig deux (ibid. 5:14): On frappa les surveillants des Enfants dIsral (que les commissaires de Pharaon leur avaient prposs), en disant: Pourquoi navez-vous pas rempli votre tche? Pourquoi Pharaon nomme-t-il des surveillants juifs qui ne lui sont daucun profit, au contraire? Quelle tait son intention? Pour rpondre ces questions, il faut expliquer que Pharaon savait que Yaakov avait fait son testament en faveur de ses enfants et leur avait conseill de vivre unis et attachs les uns aux autres afin damener la rdemption. Dathan et Aviram dnoncrent Moch, comme il est dit (Chemoth 2:14): La chose est dcouverte... et les Sages commentent (Chemoth Rabah 1:34): Moch se demandait avec tonnement en quoi les Enfants dIsral taient plus fautifs que les autres nations pour tre soumis un dur esclavage mais, ce moment-l, il se rendit compte quils mritaient leur sort cause de leurs calomnies . Moch fut contraint de fuir lEgypte et il habita au pays de Midian pendant quarante ans (Pessikta Zouta Chemoth 4:10; Tanhouma ad. loc.), dautres disent pendant soixante ans. Ce nest qu son retour quil rapporta aux Enfants dIsral la parole de D.: Jai fix Mon attention sur vous et sur ce que lon vous a fait en Egypte et Jai rsolu de vous faire sortir du servage de lEgypte (Chemoth 3:16). Les Enfants dIsral ont compris quil ne leur suffisait pas de vivre spars des non-juifs sils se calomniaient les uns sur les autres, et quils devaient rester solidaires, tout comme ils navaient pas chang de noms, de langue et de faon de shabiller. Il ne nous suffit pas de nous sparer des trangers, nous devons aussi tre unis entre nous et nous imposer une conduite encore plus parfaite afin de hter la rdemption. Pharaon, le roi dEgypte, savait tout cela. Dun ct il dsirait faire bnficier son pays des comptences et du savoir-faire des Enfants dIsral ainsi que de leur courage mais, par ailleurs, il craignait leur unit exemplaire. Il aurait prfr quils vivent assimils aux Egyptiens. Lui-mme, autant que ses conseillers et ses ministres, savait quil tait impossible dobtenir lassimilation des Juifs tant quils taient unis. Cest pourquoi il dcida de briser tout dabord leur unit et leur foi. Comment parvenir ce but? En les soumettant un dur esclavage (Chemoth 1:13) qui les amnerait au dsespoir et au doute. Cest un fait que le dsespoir conduit des querelles, des disputes et empche de se soucier du bien-tre des autres. Dans une telle situation, chacun ne soccupe que de lui-mme et de son propre intrt, et ne cherche qu se sauver lui-mme, sans tenir compte de lautre. Tel tait le but vis par Pharaon. Celui qui rside dans les Cieux en rit, le Seigneur se raille deux (Thilim 2:4). Dans Sa grande bont, D. a djou les plans et les projets de Pharaon afin de lempcher de nuire aux Juifs et Plus il les opprimait, plus la population se multipliait et augmentait (Chemoth 1:12). Les Enfants dIsral comprirent les ruses de Pharaon, ils savaient quil voulait les amener se disputer et se har afin quils se confondent aux nonjuifs et ne sortent jamais dEgypte. Mais les Enfants dIsral restrent fraternellement unis, leurs femmes gardrent leur amour et encouragrent leurs maris en leur apportant des poissons pchs dans le fleuve, ainsi que de leau boire et de quoi se laver et elles enfantaient dans les champs, sous les pommiers en fleurs (Sotah 11b). Cest grce au mrite des femmes vertueuses de cette gnration que les Enfants dIsral furent sauvs dEgypte (Bamidbar Rabah 3:4). Grce elles, D. fit pour nous des miracles. En voyant que ses projets chouaient et quau lieu dtre dsunis et de se har, les Enfants dIsral multipliaient les manifestations damour rciproque et sentraidaient dans la peine, Pharaon ourdit un autre plan: il nomma des surveillants juifs pour inciter les travailleurs se rvolter contre eux. Dans ce but, il ordonna de ne plus leur donner de paille tout en maintenant leur obligation de fournir quotidiennement la mme quantit de briques (Chemoth 5:8), chose irralisable. Certainement, ils allaient vite en venir des disputes. Il est difficile de croire quil ait pu penser russir semer des dissensions et que des Juifs allaient faire souffrir leurs frres. Effectivement, son plan choua car les surveillants avaient compris lintention de Pharaon et au lieu dtre des Nogshim, des oppresseurs, ils sont devenus des Niguashim, ils les ont soutenus et aids si bien que les commissaires gyptiens battaient les surveillants eux-mmes. Les Enfants dIsral parvinrent souder une union dautant plus forte quils voyaient avec quelle cruaut leurs surveillants taient battus cause deux. Pharaon esprait amoindrir leur foi en D. et en Moch, mais il ne parvint ni

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briser leur unit ni semer le doute dans leur esprit. Les surveillants juifs partageaient les souffrances de lesclavage avec leurs frres et leur solidarit leur permit de rsister aux dcrets de Pharaon. Cest que les paroles de Yaakov avaient pntr le cur de ses enfants. Ils savaient que leur fraternit pouvait prcipiter le temps de la rdemption malgr des souffrances qui auraient pu les conduire au dsespoir, et ils savaient quil est interdit de dsesprer. Au contraire, ils se sont renforcs dans leur foi, unis comme un seul homme avec un seul cur (Mekhilta Yithro 19:2). Sils sont unis, aucun peuple et aucune nation ne peut les dominer. Lunion est une chose tellement puissante que les Sages ont dit (Tanhouma Choftim 18): Lorsque les enfants dIsral sont unis, mme sils commettent lidoltrie, lattribut de Justice ne les atteint pas , comme il est crit (Ocha 4:17): Ephram est coll aux idoles, quon le laisse! , mme sils se prosternent devant du bois, sils sont unis, quon les laisse . Dans la Hagadah de Pessah nous disons (Pessahim 117b): Ce ne sont pas seulement nos anctres que D. a sauvs dEgypte, Il nous a sauvs nous aussi . Non seulement nos anctres furent sauvs pour tre rests unis face aux dcrets de Pharaon, mais nous aussi nous serons sauvs comme eux, pour peu que nous restions unis avec amour que nous ne cdions pas aux pressions de ceux qui poursuivent le travail de Pharaon et cherchent nous entraner faillir et que nous rsistions linfluence des nations trangres.

Lunion, la solidarit et lamour fraternel rapprochent le temps de la rdemption


La responsabilit collective est une consquence directe de lunion, de la coexistence pacifique et de lamour fraternel. Tous les Juifs sont garants les uns des autres (Sanhdrin 27b; Chavouoth 39a; Chemoth Rabah 27: 8). La garantie des uns envers les autres nous unit comme un seul corps, et alors, par la force des choses, nous sommes unis D. qui est le lien entre tous les Enfants dIsral. Le but de lhomme est de sattacher D., cest pourquoi nous disons: coute Isral au singulier, et non pas coutez Isral . D. est Un et Son Nom est Un, et Son peuple Isral est Un, comme un seul corps. Bien que nous commencions par dire coute Isral au singulier, nous continuons au pluriel lEternel est notre D. . Il faut se demander pourquoi nous ne disons pas lEternel est mon D. ? Cest que justement seul lamour du prochain (Vayikra 19:18) nous amne tre unis D. qui est notre D., le D. de chacun de nous, et Il est Un. En Egypte, les Juifs se sont efforcs dtre garants les uns des autres, et cest ce qui les a prpars recevoir la Torah. Il est crit (Chemoth 19:2): Isral a camp face au mont , et Rachi rapporte le Midrach (Mekhilta ad. loc.): Comme un seul homme avec un seul cur . Comment sont-ils parvenus un tel rsultat en quelques jours seulement? Cest quils staient exercs durant les nombreuses annes qui ont prcd le don de la Torah, lorsquils souffraient sous le joug des Egyptiens qui cherchaient les dsunir, dtruire leur foi et les exterminer. Malgr tout, les Enfants dIsral ressentaient la responsabilit collective qui les unissait, et chacun savait que tous les autres partageaient sa peine et le soutenaient, et quil y avait six cent mille compagnons qui se souciaient de lui et voulaient son bien, comme Yaakov le leur avait enseign. Il est crit (Chemoth 14:8): Les Enfants dIsral sortirent triomphalement . Ils avaient vaincu les efforts des Egyptiens pour rompre leur unit et au contraire, plus les Egyptiens les opprimaient, plus ils consolidaient leur union, ce qui les rapprochait de D. et leur permit de se librer du joug de lesclavage. Le deuxime Temple fut dtruit cause de la haine gratuite (Yoma 9b) et cette gnration fut punie de lexil dans lequel nous nous trouvons encore. Par contre (Tana DBey Eliyahou 14): Au temps du premier Temple, il y avait des hommes vertueux et bienfaisants, et le terme de lexil leur fut rvl, comme il est crit (Yrmia 29:10): Quand Babylone sera au terme de soixante-dix ans pleinement rvolus, Je prendrai soin de vous et Jaccomplirai en votre faveur Ma bienveillante promesse de vous ramener en ces lieux . Ils sortirent de lexil au bout de soixante-dix ans. Pour expliquer cette diffrence, les Sages disent (Yoma 9b): Les fautes des premires gnrations taient connues, cest pourquoi le terme de la punition fut rvl . Cest donc que lexil amer dans lequel nous nous trouvons encore aujourdhui est plus grave que le premier exil puisque son terme nest pas connu. Mais si ce dernier exil na pas de terme fixe, sa dure ne dpend que de nous. Il est en notre pouvoir dy mettre fin. La destruction du Temple fut cause par les fautes commises les uns envers les autres, la haine rciproque et les discordes, et il ne dpend que

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de nous de corriger ces fautes tt ou tard et de mettre fin au temps douloureux de lexil, car celui qui veut se purifier est aid par le Ciel (Chabath 104a; Yoma 38b; Pessikta Zouta Bo 10:1). Malgr les difficults accrues au cours des temps et qui nous affaiblissent de gnration en gnration, malgr les diffrences physiques, les diffrences de caractre, de penses, etc., nous devons rester unis comme un seul homme avec un seul cur . Cest ce qui est crit dans la Torah au sujet de lhomme et de la femme (Brchith 2: 24): Cest pourquoi lhomme quittera son pre et sa mre et sattachera sa femme et ils ne formeront quun seul corps . Bien quils soient des tres diffrents lun de lautre, lun homme lautre femme, appartenant apparemment deux mondes diffrents, ils ne formeront quun seul corps et sils sont unis, la Prsence divine les accompagnera (Sotah 17a). Atteindre une telle unit nest possible que si chacun renonce son gosme, sil ne se contente pas simplement de dclarer quil aime son prochain mais ressent vraiment cet amour et cette communion au fond de son cur et sil est de tout cur avec lui dans ses peines et dans ses joies. Malheureusement, nous sommes affligs de grandes fautes et il est devenu courant de dnigrer le prochain, bien que chaque homme ait t cr limage de D. Ce faisant, nous nous causons du mal nous-mmes et nous finissons par dnigrer la Torah et ses commandements. A ce sujet, les Sages ont dit (Sotah 49b; Sanhdrin 97a): Avant la venue du Messie, la face de la gnration sera comme la face du chien . Nous devons comprendre le sens de cette comparaison. Pourquoi justement comme la face du chien? Nous savons que par nature, le chien regarde son matre avec des yeux suppliants, afin dveiller sa compassion, mais par ailleurs, il marche toujours devant son matre, cest--dire quil se place en tte. La comparaison indique que de mme, avant la venue du Messie, les gens auront la face du chien, chacun regardera son prochain avec des yeux pleins de compassion comme sil dsirait son bien, mais dans son cur il saccordera la priorit et partout, il voudra tre le premier. Pareille conduite montre que lamour pour le prochain nest pas sincre et il faut se mfier et sloigner de telles marques damour hypocrites. Jusqu ce jour, lattitude des nations envers Isral est semblable celle de Pharaon envers nos anctres, ils ne nous montrent leur sympathie que pour nous briser. Combien nous devons prendre cur le conseil de Yaakov et rester sincrement unis, car cest la seule attitude qui nous profitera et nous sauvera. A ce sujet, il me semble propos de rappeler le commandement de donner le demi-chekel, acte qui enseigne la solidarit. Moch dit devant le Saint, bni soit-Il: Matre du monde, par quoi relveras-Tu lhonneur dIsral? D. lui rpondit: Par ce que tu compteras (Baba Bathra 10b). Il est difficile de comprendre comment le dnombrement des Enfants dIsral ralis lorsque chacun apporte son demi-chekel, relve justement lhonneur dIsral. Celui qui est pauvre apporte un demi-chekel tout comme celui qui est riche. Le pauvre ne se plaint pas dtre impos au mme titre que le riche qui a plus de moyens. De mme, le riche ne se vexe pas dapporter un demi-chekel, comme un pauvre, ce qui nest pas en son honneur puisquil a la possibilit de donner davantage. Tous deux apportent la mme somme, dans une galit parfaite, et cest alors que lhonneur dIsral est relev. Dautant plus quen donnant un demi-chekel, chacun prend conscience quil nest quune moiti (et imparfait) et ce nest quen sassociant lautre quil se complte, quil devient entier. D. ordonna chacun dapporter un demi-chekel afin dtre dnombr, et non pas dinscrire son nom sur un billet ou dapporter chacun une brebis, un taureau ou un objet. D. a voulu que tous soient gaux devant ce commandement, et non pas que lun soit suprieur ou infrieur lautre, pour que chacun ressente la fois ses lacunes et les qualits de son prochain, que chacun dsire laide de son prochain pour corriger ses propres dfauts, afin de lui permettre de pratiquer ce commandement dans la joie. Nous sommes en mesure de comprendre ce que disent les Sages (Tanhouma Ki Tissa 9): Moch avait du mal a comprendre le sens du commandement du demi-chekel. D. lui montra une pice de monnaie de feu et lui dit: quils donnent cela . Est-il possible que Moch nait pas connu la valeur du demi-chekel, de sorte que D. dt lui montrer cette pice de monnaie? Certes, Moch en connaissait la valeur, mais il ne comprenait pas pourquoi chacun devait apporter un demi-chekel, quil ft pauvre ou riche. Il est vident que la Torah dcrte une mesure identique pour chacun afin de signifier que tous sont gaux devant D.

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Nous pouvons aussi comprendre pourquoi Haman dit au roi Ahachveroch (Esther 3:9): Je pserai dix mille kikars dargent (cest--dire la valeur de 300 000 chkalim) la disposition des agents et ils seront verss dans les trsors du roi . Pourquoi voulait-il verser cet argent dans les caisses du roi afin de tuer les Juifs? Cest qu cette poque-l, les Juifs ntaient pas gaux entre eux, ils taient dsunis, si bien quHaman put dire au roi (verset 8): Il est une nation rpandue, dissmine parmi les autres nations . Ils sont dsunis, leurs coutumes sont varies, ils se diffrencient les uns des autres, ils se distinguent les uns des autres, et sil en est ainsi, les pices dargent dHaman seront capables de faire pencher la balance au dtriment des Enfants dIsral. Pourtant, lorsque les Juifs sunirent, le dcret fut annul comme Esther le dit Mordeha (ibid. 4:15): Va rassembler tous les Juifs , quils sunissent et se rassemblent. Et par la suite, ils sont rests unis comme il est crit (ibid. 9:14): Les Juifs se rassemblrent encore , unis par une mme volont. Les Juifs donnaient le demi-chekel Pourim, afin dexprimer leur union et de proclamer que seule cette unit les avait sauvs du dcret dHaman, comme il lavoua lui-mme (Esther Rabah 10:4): Vos chekels ont eu la priorit sur les miens , les liens qui vous unissent vous ont sauvs, grce Esther qui a associ son sort celui de son peuple, lorsquelle a dit: Va rassembler les Juifs et les unir . Au moment du don de la Torah, D. a demand aux Enfants dIsral damener des garants qui assureraient quils (les parents) allaient pratiquer toute la Torah. Ils prirent leurs enfants comme garants, et D. les accepta (Chir HaChirim Rabah 1:24; Yalkout Chimoni Yrmia 263). Le Lev Eliyahou demande pourquoi D. exige des garants avant de leur donner la Torah, tant donn quils ont dit explicitement: Nous ferons, et nous couterons (Chemoth 24:7)? D. qui connat le fond des curs sait que les Enfants dIsral ont une foi sans faille, surtout aprs avoir t tmoins des grands miracles de la sortie dEgypte, de la Mer des Joncs et de la guerre contre Amalek. Pourquoi nest-ce quaprs quils eurent prsent leurs enfants comme garants que D. leur donna la Torah? Pour rpondre, il faut remarquer que, malheureusement, nous voyons de nos propres yeux que mme la garantie supplmentaire que les Enfants dIsral ont prsente D. ne suffit pas empcher parents et enfants de commettre des fautes et dabandonner la Torah. Combien la situation aurait t plus grave sils navaient pas eu de garants! D. sait bien que le mauvais penchant est puissant et quil pousse les hommes fauter, justement par labandon de la Torah. Peu importe au mauvais penchant que les Enfants dIsral pratiquent de nombreux commandements et fassent des bonnes actions, ce qui le drange surtout cest de nous voir occups tudier la Torah. D. Lui-mme dit (Yrouchalmi Haguigah 1:7; Ekhah Rabah Petiha 2): Si seulement ils Mabandonnaient Moi, mais soccupaient de Torah , car la lumire de la Torah leur permettra toujours de revenir D. Et donc, D. demande des garants pour pouvoir leur donner la Torah qui est le remde contre le mauvais penchant. Les Sages ont dit (Brachot 5a): Si quelquun est assailli de souffrances, quil examine ses actes. Sil les a examins et na pas trouv de cause ses maux, quil les attribue labandon de la Torah . Pourquoi? Cest que D. ne punit pas tout de suite les enfants (les garants) de celui qui a abandonn ltude de la Torah, mais Il le prvient par lintermdiaire de souffrances et de malheurs pour quil examine sa conduite et trouve la raison de ses maux. Sil na pas trouv de raison, quil les attribue son abandon de la Torah. Mais sil persvre dans cette conduite, alors ses enfants seront punis. Une grande peur saisira quiconque ralise que, sil dlaisse la Torah, ses enfants en subiront les consquences. Il nest pas de peine plus grande que celle qui atteint nos propres enfants, et les Sages ont dit (Chabath 32b): A cause de labandon de la Torah, les enfants meurent et ce, parce quils sont les garants des parents. Il faut se rappeler ce que dit Rabbi Chimon Bar Yoha: Il nest pas de peine plus grande que celle inflige nos enfants . Sils prennent le mauvais chemin, ils sont considrs comme morts, D. nous en prserve, par la faute des parents qui ont dlaiss la Torah. Les Enfants dIsral ont dclar sincrement: Nous ferons et nous couterons , mais D. a ajout quils doivent savoir combien le mauvais penchant devient puissant en les voyant occups de Torah et quil fait tout ce quil peut pour les dtourner de cette tude. Cest pourquoi D. leur demanda de prsenter des garants qui les empcheraient dabandonner la Torah, des garants qui leur rappelleraient leur devoir. D. refusa quils se portent garants deux-mmes, puisquils taient directement concerns et intresss. Il refusa aussi la

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garantie des Patriarches, parce queux-mmes avaient besoin de garants, mais Il accepta leurs enfants qui taient assurment de solides garants. La peine subie par les enfants est effectivement trs douloureuse pour les parents. Il est dit de Tsidkiyahou, roi de Jude (Melakhim II, 25:7): On gorgea les fils de Tsidkiyahou sous ses yeux, et puis on lui creva les yeux, on le jeta dans les fers et on lemmena Babylone . Les Sages disent ce sujet (Yalkout Chimoni ad. loc. 252): On lui creva les yeux avec des poinons en fer mais il nen devint pas aveugle, aprs quoi on gorgea ses enfants sous ses yeux et il pleura jusqu en perdre la vue . Les Babyloniens ne russirent pas lui faire perdre la vue avec leurs poinons en fer et ce nest quen gorgeant ses enfants sous ses yeux quils le rendirent aveugle. Cela montre quil nest pas de peine plus grande que celle qui atteint les enfants. Cest un fait connu que lon prfrerait nimporte quelle souffrance, celle de voir ses enfants atteints, au point que les Sages appellent de telles souffrances les souffrances de lamour (Brachot 5b). La pense que nos enfants (qui sont nos garants) risquent de souffrir cause de notre abandon de la Torah est tellement effrayante quelle nous donne la volont inbranlable de lutter contre le mauvais penchant. Remarquons que la punition du clibataire est plus grave. Sil na pas de femme, il na pas denfants et il na personne pour se porter garant de lui. La condition mme du don de la Torah est davoir des enfants qui seront garants de sa pratique. Quiconque na pas denfants annule cette condition primordiale. De plus, celui qui na ni femme ni enfants est mis lcart du Ciel (Pessahim 113b). Ben Aza, lun des quatre Sages avoir pntr le Pards (Haguigah 14b; Chir HaChirim Rabah 1:28), en est mort, bien quil ft attach la Torah de toute son me (Brchith Rabah 34:14), et que tous les Sages dIsral soient comme une pelure dail compars lui (Brachot 58a). Pourtant il est mort parce quil navait pas de garants. De mme le roi Hizkiya sest rendu coupable par son refus de se marier pour ne pas enfanter de fils indigne (Brachot 10a). Il na pas pratiqu le premier commandement de la Torah qui est de crotre et de multiplier . Bien que Hizkiya ait su par voie de prophtie quil aurait un fils indigne, il aurait t puni dans lautre monde sil ne stait pas, en fin de compte, mari (Tana DBey Eliyahou 8). Pourquoi? Cest que les enfants sont garants des parents en ce monde et dans lautre, car Le fils donne du mrite son pre aprs sa mort (Sanhdrin 104a; Zohar II, 273b). Le pre qui duque ses enfants dans le chemin de la Torah et la pratique des commandements, fait que la Torah reste toujours vivante. Tel est le but de la garantie.

Le repos du corps et de lme dans ltude de la Torah


Issakhar est un ne musculeux couch entre les collines. Il a got le charme du repos et les dlices du pturage, il a livr son paule au joug, et il est devenu tributaire (Brchith 49:14-15). Rachi dans son commentaire que tous tudient, crit: Issakhar est un ne musculeux - un ne aux os solides, il supporte le joug de la Torah comme un ne charg dun lourd fardeau (Brchith Rabah 99:9). Cest ce que disent les Sages (Avoda Zara 5b): Il faut tre comme un taureau qui porte le joug et comme un ne qui porte un fardeau lorsque lon tudie la Torah. Couch entre les collines - tel un ne qui marche jour et nuit de ville en ville. Lorsquil veut se reposer, il sarrte quelque part entre les villes o il a apport sa marchandise. Il a got au charme du repos - il a reu pour sa part dhritage une terre bnie et fructueuse. Il a livr son paule au joug - au joug de la Torah. Il est devenu tributaire - il dispensait tous ses frres lenseignement de la Torah et savait compter les annes, comme il est crit (Divrey HaYamim I, 12:32): Les gens dIssakhar sont experts dans la connaissance des temps, pour dcider de la conduite dIsral (Brchith Rabah 98:12) . La bndiction de Yaakov Issakhar concerne le joug de la Torah et les dcisions lgales qui rglent la conduite dIsral. Malgr tout, le verset reste obscur. Sil sagit du joug de la Torah, pourquoi est-il dit: Il a got au charme du repos , car il ny a pas de repos dans ltude de la Torah, ni de jour ni de nuit, et pourquoi le fardeau de la Torah est-il assimil au repos entre les villes, puisquil est dit aussi: Il a livr son paule au joug . Si lon se repose, il ny a pas de fardeau (la question fut pose par le directeur de notre Kollel le Rabbin Ham Walknine, intendant de la Ychivah Ateret Isral).

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Le mot Hamor, ne, a une valeur numrique de deux cent quarante-huit, pour indiquer quil porte le fardeau de la Torah avec les deux cent quarante-huit membres de son corps, comme un ne aux os solides qui soccupe de Torah de toutes ses forces. Garm, musculeux, indique la Gumara quil tudie de jour comme de nuit. Entre les collines cest--dire entre les pages de la Gumara. Il soccupe de Torah de jour et de nuit, de tous ses membres, cest son repos et lessentiel de son commerce. Son repos et son dlice en ce monde est de soccuper de Torah de tous ses membres (Torat Kohanim, Vayikra 26:3), il voit les fruits de ses peines, et il est appel sage car il comprend de lui-mme (Haguigah 14a; Sanhdrin 93b). Il est expert en la connaissance des temps , car il a acquis le got de la Torah, comme il est crit (Thilim 34:9): Gotez et sentez combien Il est bon... Celui qui soccupe de Torah jour et nuit en ce monde est rcompens dans lautre monde, le monde du repos et le vrai hritage, comme il est crit (Yrmia 31:16): Tu seras rcompens de tes efforts . Celui qui ressent un vrai plaisir ltude de la Torah et comprend sa valeur en deviendra tributaire, il profitera de chaque instant pour tudier et il ne perdra pas son temps des choses vaines. Il ressentira alors le vrai repos et le vrai dlice et ses efforts seront rcompenss. Les gens disent dune telle personne: Heureux celui qui a t lev dans la Torah, qui en a port le joug, et qui donne satisfaction son Crateur (Brachot 17a). De plus Il avance avec des forces grandissantes (Thilim 84:8) afin de parvenir son but et sa vraie destination qui est lautre monde. Cest l quil reoit la pleine rcompense de ses efforts, car il ny a pas de rcompense pour lobissance aux commandements, en ce monde (Kidouchin 39b; Houlin 142a). La suite du verset dit: Il a livr son paule au joug , signifie quau lieu de rechercher le calme et la tranquillit, lhomme doit supporter le joug de la Torah, y tre effectivement soumis comme un travailleur qui remplit son devoir, afin de faire plaisir son Matre et Crateur (Brachot 17a) grce son labeur, et mme en sexilant si ncessaire. Cest alors quil ressemble un ne musculeux qui se couche entre les collines - lorsquil prend le chemin de lexil pour aller tudier ailleurs. Le Talmud (Chabath 147b) raconte quElazar ben Arach demanda ses collgues de laccompagner dans la ville o habitait sa femme, une ville rpute pour la puret de ses eaux et labondance de ses sources. Ses collgues ne rpondirent pas favorablement sa demande, et pour sy tre rendu tout seul, il oublia tout ce quil avait appris. Nous devons mditer ce rcit. Est-il possible de croire que Elazar ben Arach ait voulu dlaisser ltude et se reposer, et quil ait invit ses collgues en faire autant? Srement pas! Il est certain que Rabbi Elazar ben Arach les a invits venir tudier avec lui en ce lieu dont leau est bonne - et leau, cest la Torah (Baba Kama 17a; Tana DBey Eliyahou Rabah 2:18), comme il est crit: Vous qui avez soif, venez vous abreuver (Ichaya 55a). Rabbi Elazar ne voulait pas abandonner la Torah mais seulement tudier dans le calme. Les autres Sages craignaient ce calme qui risquait de les entraner loisivet (cest ce qui arriva Rabbi Elazar, qui oublia tout ce quil avait appris). Ses collgues avaient raison. Ils sont alls tudier ailleurs et ils ont progress, tandis que lui oublia ce quil avait dj acquis. Nous apprenons l quil ne faut pas se fier sa propre intelligence (Michley 3:5; Avoth 4:14), ni compter sur ses propres forces, mais au contraire tudier dans la peine qui seule nous permet de retenir les enseignements et de gagner le vritable repos. Les deux explications que nous avons donnes se compltent lune lautre, car il sagit de la paix procure par ltude de la Torah. Il est possible que ces Sages aient appris se mfier du calme mentionn dans notre verset: Il a got le charme du repos ... il a livr son paule au joug, et il est devenu tributaire . Ce nest quen tudiant la Torah avec peine que lon en retient les enseignements et que lon parvient au vritable repos, celui de lautre monde, o D. nous rserve une juste rcompense.

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APPENDICES
Section Brchith Le livre de la foi et de la confiance en D.
Brchith est le livre de la foi et de la confiance en D., comme il est crit (Habakouk 2:4): Le Juste vit de sa foi . Cest dire que le Juste est celui qui a foi en D. Lexpression il vit indique le livre Brchith qui est le commencement de la vie de lhomme, et la Loi le fait vivre (Vayikra 18:5), lorsque sa vie est ancre dans la Torah. Toute lanne lhomme vaque ses occupations et, lorsqu la fin de lanne, durant les Jours du Grand Pardon, il se repent de ses fautes, il redevient comme une crature qui vient de natre, comme il est dit de celui qui se convertit au Judasme quil est comme un nouveau-n et toutes ses fautes antrieures lui sont pardonnes (Ybamoth 22a; Bechorot 47a). Cest comme sil avait t cr aujourdhui, comme nous le disons dans la prire: Ce jour est le jour de la cration du monde . Lorsquil sest repenti de ses fautes passes, il renat pour une vie nouvelle.

Comme leau adhre au visage, lhomme adhre D.


Dans quel but D. cra-t-Il le monde? Les Sages disent que D. cra le monde pour la Torah et pour Isral (Brchith Rabah 1:1). Ne suffit-il pas que les anges et les sraphins servent D.? En quoi ce monde ajoute-t-il la gloire de D.? Lorsquun homme construit une maison, cest pour en jouir. Quelle jouissance ce monde procure-t-il D.? A-t-il besoin de ses richesses, alors que Largent est Mien, lor est Mien, dit lEternel (Haga 2:8). Lessentiel des engendrements des hommes vertueux, ce sont les commandements quils pratiquent et leurs bonnes actions (Brchith Rabah 30:6). Cest dire que la cration a pour but la satisfaction que lhomme procure D. par sa bonne conduite, car il fut cr dans le but de raliser le bien, et il nest de bon que la Torah (Avoth VI:3), ou encore il nest de bon que lhomme vertueux (Yoma 38b). Il plat D. de voir que lhomme, dont Il veut le bien, exprime sa reconnaissance en obissant Sa volont. La Torah commence par le rcit de la cration afin de faire connatre Son peuple la puissance de Ses uvres (Thilim 111:6; Yalkout Chimoni Chemoth 187). Les paroles et les actes dun homme ne nous sont connus que lorsquil devient clbre mais personne ne prte attention aux hommes simples et ce nest que lorsque quelquun a acquis une certaine rputation que ses paroles sont considres avec srieux. De mme, D. Sest fait connatre lorsquIl cra le monde - et cest partir de ce moment-l que toutes les cratures eurent connaissance de Ses uvres - et ce afin de dicter Sa loi aux Enfants dIsral qui la pratiqueront. Cest dans ce but que le monde fut cr.

Lhomme vertueux a une bonne influence sur son entourage


Il est crit (Brchith 1:2): Lesprit de D. planait sur la surface des eaux . Quel est cet esprit? Il semble quil sagisse de linfluence des hommes vertueux sur leur entourage. Ils propagent une atmosphre de saintet qui est capable dannuler mme les dcrets les plus svres et de chasser limpuret. Quiconque aspire la saintet bnficie de leur influence en sapprochant deux, comme il est crit: ...sur la surface des eaux - leau vive, leau pure. Ceux qui se trouvent en leur prsence bnficient de leur saintet. On raconte que Rabbi Pinhas ben Yar avait un ne qui refusait de manger une nourriture dont la dme navait pas t prleve (Chekalim 13a; Brchith Rabah 60:10) car il avait acquis cette habitude chez son saint matre. A ce sujet, les Sages disent (Chabath 112a): Si les gnrations antrieures sont comme des anges, nous sommes des hommes en comparaison; sils sont comme des hommes, nous sommes comme des nes, et mme pas semblable lne de Rabbi Pinhas ben Yar . Si seulement nous pouvions avoir ce mrite...

Limage de D. et lanantissement du mauvais penchant


Le Talmud (Ketouboth 8a) nous enseigne les sept bndictions du mariage, dont lune est: Qui cra lhomme Son image et Sa ressemblance... Limage que D. a donne lhomme est la Sienne, une

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image que lhomme ne voit pas, car sil pouvait la voir il en mourrait, comme il est crit (Chemoth 33: 20): Lhomme ne peut pas Me voir et vivre . Telle est limage de D. en lhomme, celle qui ne peut pas se voir. En fait, D. cra lhomme Son image afin deffrayer le mauvais penchant, le Satan, qui connat limage de D. dans les mondes invisibles. Cest un fait connu que le Satan (le mauvais penchant) sert D. le quatrime jour de la semaine, puisque les Sages disent (Taanith 23a) concernant le verset (Vayikra 26:4): Je donnerai les pluies en leur temps - le quatrime et le septime jour de la semaine, le Chabath, car les hommes ne sortent pas habituellement ces jours-l cause des mauvais esprits (Pessahim 112b). Les Sages disent aussi que les mauvais esprits rgnent la nuit et dans la journe du quatrime jour de la semaine . Ces mauvais esprits sont Lilith (Zohar III, 272b, 282a), les esprits impurs qui montent et parcourent le monde (ibid. I, 169b). Il faut donc se prserver de leurs mfaits (ibid. II, 205a). La bndiction Qui cra lhomme Son image est la quatrime des sept bndictions du mariage, ce qui indique que lme, la partie divine en lhomme, peut surmonter les forces du Mal qui rgnent le quatrime jour. Ainsi se ralise la promesse: Je donnerai les pluies en leur temps , cest--dire une abondance de bienfaits spirituels et matriels.

La sagesse de lhomme est suprieure celle des anges


Il est crit (Brchith 1:26): Et lEternel dit: Faisons lhomme Notre image... ce qui indique que dj avant sa cration, il est appel par D. homme . Lorsque lhomme donna des noms tous les animaux, D. lui demanda: quel est ton nom toi? Lhomme lui dit: Il convient de mappeler Adam, puisque jai t cr partir de la terre (hmda) (Brchith Rabah 17:5). Si D. avait dj nomm lhomme Adam, pourquoi lui demander quel tait son nom? Cest que D. voulait dmontrer aux anges la sagesse de lhomme, non seulement en ce quil donne des noms aux animaux mais en ce quil connat son propre nom. Si lhomme est capable de discerner lintention de D., tous peuvent constater son intelligence et sa comprhension de toute chose, comme le dit le Rabbin Zev Wolf. Les anges constatrent que lhomme avait une intelligence suprme, cette partie divine qui lui vient du Trne de Gloire (Zohar I, 113a; III, 29b), et quil tait capable de connatre la pense de son Crateur lorsquil tait exempt de toute faute. De mme, lhomme qui est pur de toute faute a une comprhension qui englobe tout, au point de pouvoir atteindre le niveau de prophtie de Moch Rabeinou. Il est crit (Brchith 2:7): Il souffla dans ses narines le souffle de vie . D. insuffla lhomme quelque chose qui tait Lui, le souffle de vie, afin quil suive Ses voies et quil parvienne la connaissance vritable.

Section Lekh Lekha Encouragement Avraham et toutes les gnrations


Lorsque D. dit Avraham: Quitte ton pays, ta terre natale, la maison paternelle , Il voulait lui signifier ce que Akiva ben Mehalellel nous enseigne afin de nous mettre en garde contre la tentation de fauter (Avoth 3:1): Considre trois choses et tu ne fauteras jamais: do tu viens, dune goutte putride (cest ta terre natale), o tu te rends, la poussire (cest ton pays), devant qui tu devras rendre compte de tes actes, devant lEternel, Roi des rois (cest la maison de ton pre) . Ctait tout de mme une grande preuve pour Avraham, ce qui nous montre combien le pouvoir du Satan est grand et combien il est capable dinsuffler de mauvaises penses. Il faut le vaincre.

Il faut tre pur et simple pour marcher devant D.


Lorsque D. ordonna la circoncision Avraham, Il lui dit (Brchith 17:1): Marche devant Moi et sois parfait . Est-ce que lhomme peut marcher devant D. ? La rponse cette question se trouve dans les paroles mmes de D. Avraham: Sois parfait , cest--dire que la perfection de lhomme dpend de la puret de son cur comme il est crit (Devarim 18:13): Sois entier avec lEternel ton D. . Cela nous montre que parvenir la perfection dpend de la puret dintention de lhomme qui risque de chuter sil nest pas entier avec D., dans son cur et dans ses penses.

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Pahad David Section Vayra Le zle

Il est crit (Brchith 22:1-3): Il arriva aprs ces faits que D. prouva Avraham... Prends ton fils, ton fils unique, celui que tu aimes, Yitshak... Avraham se leva de bon matin... il se mit en chemin vers le lieu que D. lui avait indiqu . Pourquoi, avant de se mettre en route pour accomplir la volont de D., Avraham na-t-il pas dit Sarah o il allait? Sarah avait enfant Yitshak et si Avraham lui avait rvl sa mission, elle aurait srement particip ce commandement et elle ne serait pas morte en apprenant soudain lvnement. Avraham nous donne lexemple du zle (Pessahim 4a). Il na pas dit sa femme Sarah o il allait de crainte quelle ne le retienne. Il faisait toujours ce que D. lui ordonnait sans tarder, et le zle est une des vertus de lchelle de Rabbi Pinhas ben Yar (Avoda Zara 20b). Une des raisons qui a retard la sortie dEgypte tait le manque de zle. Les Enfants dIsral y frquentaient les thtres et abandonnaient la Torah (Yalkout Chimoni 2:1), et leurs fautes les ont fait sombrer dans le quarante-neuvime degr dimpuret (Zohar Yithro 39a). Mais lorsquils se sont repentis, D. leur dit: Je me souviens de la bienfaisance de ta jeunesse (Yrmia 2:2) car ils suivaient nouveau la voie dAvraham Avinou, celle de la bienfaisance et du zle qui le caractrisent. Cest ce qui amena leur rdemption.

Section Vayichlah La gloire de la Prsence Divine


Il est crit dans notre section (Brchith 35:22): Il arriva, tandis quIsral rsidait dans cette contre, que Rouven alla cohabiter avec Bilha, concubine de son pre. Isral, son pre, en fut instruit . Les Sages ont dit (Chabath 55b): Rouven na pas faut avec elle mais la mort de Rahel, Yaakov alla habiter chez Bilha. Rouven a voulu dfendre lhonneur de sa mre, il pensait que Yaakov devait vivre avec Lah et non avec Bilha, mais la Torah considre cette intervention comme sil avait attent au lit de son pre . Dans son commentaire, Rabeinou Behaye explique ainsi la faute de Rouven. Personne ne connaissait la grandeur de la saintet de Yaakov. Partout o il se trouvait, la Prsence divine laccompagnait et le soutenait. Aprs la mort de Rahel, la Prsence divine accompagna Yaakov dans la tente de Bilha. Rouven, en entrant dans la tente de Bilha, a attent au lit de son pre pour sauver lhonneur de sa mre, faisant preuve dune bonne intention, mais ce faisant, il a port atteinte la Prsence Divine puisquil voulait en changer le lieu de rsidence et la sparer de Yaakov . A propos de la naissance dIssakhar (Brchith 30:16), il est dit: Yaakov revint des champs le soir. Lah sortit sa rencontre et dit: Cest mes cts que tu viendras car je tai retenu en change des mandragores de mon fils . Les Sages disent ce sujet (Nidah 31a): Cette nuit-l, D. la favorise et Issakhar est n . Cest que Yaakov avait fix sa demeure dans la tente de Rahel et la Prsence Divine y rsidait. En rentrant des champs, il pensait aller chez Rahel. Lorsque Lah vint sa rencontre et linvita dans sa tente, Yaakov y pntra sans y tre prpar et sans y avoir fix la Prsence Divine. Cest pourquoi il avait besoin de laide spciale de D. et de la prire de Lah pour la naissance dIssakhar (Rabeinou Behaye, Vaye hi). Il est trs important dhonorer la Prsence de D. dont la saintet est bien suprieure ce que nous pouvons en saisir.

Section Vayigach Lamour de D. est plus fort que lamour envers les enfants
Le Rambam (Sefer Hamitsvoth, commandement positif 3) dfinit ainsi lamour de D.: Il faut aimer D. aussi en pense . Cet amour-l ne sexprime pas seulement en actes et en paroles, mais aussi par la pense du cur. Le Rambam ajoute quaimer D. cest aussi Le faire aimer par les autres, comme il est dit que le Nom de D. soit affectionn grce toi (Yoma 86a; Tana DBey Eliyahou Rabah 28), et enseigner aux autres

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les voies de D. Cela signifie que lamour de D. consiste procurer du mrite aux autres, comme le disent les Sages (Avoth V:18): Quiconque procure du mrite aux autres est assur quil ne fautera pas . Il nous semble que le vrai amour de D. est exclusif, il ne sadresse qu D. seul, sans quinterfre aucun autre amour. Les Sages ont interdit dembrasser les enfants dans les synagogues, ces temples en miniature (Rama, Orah Hayim 98:1) pour quil ne semble pas quon aime ses enfants plus que D. De plus, celui qui embrasse ses enfants dans la synagogue ou au moment de la prire, rompt en cet instant son lien avec D., et toute rupture est interdite. Nos Patriarches taient entirement consacrs D. et ils ne dtachaient pas leurs penses de Lui, ne seraitce quun instant. Toute leur existence tait faite dabngation et tous leurs gestes taient au service de D. au point que mme La conversation des serviteurs des Patriarches est pleine de sagesse (Brchith Rabah 60:8). Sil en est ainsi de la conversation de leurs serviteurs, que dire de leurs propres conversations! Pendant vingt-deux ans Yaakov navait pas vu son fils, il ne savait pas sil tait mort ou vivant et on sait que lon naccepte pas de consolation pour quelquun qui est vivant (Sofrim 21) et qui on pense sans cesse. Yaakov craignait quau moment de la prire ou de ltude, la pense que Yossef ft vivant surgisse dans son cur et provoque un soupir. Il craignait davoir ml lamour de son fils son amour pour D., ne serait-ce quen pense, ne serait-ce quun instant, et il ne fait pas de doute quil le regrettait. Nous ne pouvons pas comprendre quel point les Patriarches taient attachs D. En voyant Yossef, au lieu de se rjouir, Yaakov consacra toute sa pense et tous ses sentiments D., il ne ressentit que lamour de D. et il pronona le Kriat Chma afin de se faire pardonner le jour o quelque pense autre que lamour de D. avait pu pntrer son cur, et o il avait ml lamour de ses enfants lamour de D. Cest que les Patriarches remettaient sans cesse en question leur conduite, de crainte davoir commis une faute qui devait tre corrige. Les actes des pres sont des exemples pour leurs enfants (Sotah 34a).

La comptition augmente la sagesse


Yossef na pas pleur sur lpaule de son pre parce quil lui avait manqu pendant vingt-deux ans. Il pleura en constatant la grandeur dme de Yaakov et quel degr il avait atteint dans le service de D. Yossef sentit combien il tait loin de ce niveau et quil lui fallait encore beaucoup de temps, de pratique et de rflexion avant de parvenir cette lvation. A ce moment-l, Yossef apprit que dans le service de D. la comptition augmente la sagesse (Baba Bathra 21a; Tana DBey Eliyahou 21), une concurrence positive, celle qui conduit plus denthousiasme. Quelquun qui voit son prochain servir D. de faon entirement dsintresse et enthousiaste, doit sans doute pleurer de ne pas pouvoir en faire autant. Seuls ce regret et cette jalousie authentiques permettent dacqurir la sagesse. Si lon approfondit cette ide, il semble que le mauvais penchant aussi peut provoquer en lhomme une jalousie authentique envers son prochain qui sert D. mieux que lui... et linciter servir D. de mme, avec une intention pure et mme meilleure que celle de son prochain. Le mauvais penchant y perdra ce quil pensait y gagner. Les Sages disent (Taanith 7a; Makoth 10a): Jai appris beaucoup de choses de mes matres, de mes compagnons... cest--dire: jai appris servir D. mais ce nest ni par imitation ni par jalousie. Aprs avoir limin les sentiments gostes, aprs avoir pleur devant D., on ne jalousera pas son prochain mais on continuera laimer, lui qui nous a enseign un chapitre, une loi, ou un verset, et qui mrite dtre appel notre matre (Avoth VI:3). Ce que nous venons de dire explique le premier verset de la section Bechalah (Chemoth 13:17): D. ne les dirigea pas par le pays des Philistins qui tait proche parce que le peuple aurait pu se raviser la vue de la guerre et retourner en Egypte . Ce verset nous montre que D. conseille lhomme de ne pas traverser le pays des Philistins, cest--dire de ne pas affronter des preuves, et il ne faut pas croire que lon puisse traverser les dangers impunment. Le Talmud (Avoda Zara 17b) rapporte que deux Sages discutent entre eux pour savoir sil est moins dangereux de passer par un endroit o se trouvent des idoltres ou un endroit o se trouvent des prostitues. Cest une erreur de croire que lon peut ctoyer des gens mauvais sans tre influenc par leur conduite et sans avoir

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de mauvaises penses. Il nous est interdit de fermer les yeux pour ne pas voir le mal (Ichaya 33:15), et sil y a une autre route, on se met en faute si on ne la prend pas (Baba Bathra 57b), car le risque de fauter est grand. Le mauvais penchant tapi dans le cur de lhomme (Soucah 52b), lui tend des piges. Cest lui qui inspire de telles penses et qui conseille lhomme daller au-devant des dangers justement dans des endroits o se trouvent des hommes mchants, en lui faisant croire quil ne fautera pas. Mais dans de tels endroits, cest la guerre, une guerre difficile entre lhomme et le mauvais penchant, et alors ils retourneront en Egypte , cest--dire que lhomme risque de retomber sous lemprise du mauvais penchant. Lhomme qui veut rester attach D., ne doit pas se mettre en danger inutilement. Sil est tent de prendre des risques non pess, il doit se rappeler que de telles penses sont inspires par le mauvais penchant. Il ne faut pas lcouter quand il conseille de servir D. travers des preuves ou par jalousie envers son prochain... Il faut servir D. uniquement parce que D. nous lordonne. Si lon jalouse son prochain, que ce soit uniquement par dsir de mieux servir D., de le surpasser en sagesse, et davoir une meilleure connaissance du Crateur.

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