Texte Boumghar CREAD Algérie
Texte Boumghar CREAD Algérie
Texte Boumghar CREAD Algérie
1. Introduction
L’aspect procyclique s’est retrouvé dans le domaine des finances à travers la conception de lois
de finances assez restrictives sur les budgets d’équipements et le gel de réalisation d’ouvrages
structurants dans le domaine économique et social. Il est admis dans la littérature théorique et
économique que des politiques conjoncturelles procycliques peuvent induire des biais. Ce biais
peut avoir plusieurs causes. Adler (2008) considère qu’une politique budgétaire procyclique
peut venir de l’incapacité du Gouvernement à emprunter pendant les mauvaises périodes à
cause d’imperfections des marchés de capitaux. Comme on le verra dans cette
communication, cette incapacité a été « levée » en Algérie en recourant au financement non
conventionnel (quantitative easing). Ce recours, prolongé, au financement non conventionnel a
poussé la Banque d’Algérie à relever, le 16 mars dernier, son coefficient de réserves obligatoires
à 12% après qu’il était à 8% pour contenir des poussées inflationnistes éventuelles. Au 31
janvier 2019, le volume du financement non conventionnel a atteint 6556 milliards de dinars
représentant environ 31% de la valeur du Produit intérieur brut (PIB) de l’année 2018.
1
Maître de Recherche – CREAD ‐ Algérie, myboumghar@gmail.com
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Une autre cause de ce biais peut être liée à la question de la soutenabilité de la dette. Les travaux
de Alberola et Montero (2006) vont dans ce sens. Le calendrier électoral peut aussi constituer
une cause de ce biais comme il l’a été démontré dans beaucoup de travaux comme ceux de
l’OCDE (2003) et Turrini (2008).
Le troisième aspect qui sera étudié dans cette communication est la conduite de la politique du
commerce extérieur. Du fait de l’amenuisement des réserves de changes, le reflexe immédiat
du Gouvernement était de réduire les importations. Dans ce sens, des mesures de restriction aux
importations ont été mises en place. Ces mesures ont pris plusieurs formes (quotas, contingents,
listes négatives). Le conflit engendré par ces mesures vis-à-vis de l’engagement de l’Algérie
sur certains accords commerciaux a poussé le Gouvernement à faire un recul sur certaines de
ces mesures. Ceci a engendré une perte de crédibilité à l’international et un certain « aléa
moral » vis-à-vis de certains agents économiques locaux. Ceci a renforcé le phénomène de
captation de l’Etat enregistré au courant de l’année 2014 et qui s’est renforcé par la suite. Tous
ces aspects seront développés dans cette communication au regard des faits observés depuis la
date d’avril 2013. Une illustration de cette situation en sera faite dans deux domaines : domaine
Financement de l’économie et de encadrement du commerce extérieur.
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2. Financement non conventionnel : une fuite en avant
A ce premier facteur, s’est rajouté un second qui est celui de la détérioration des termes de
l’échange. Le déficit commercial s’est creusé de 18,1 milliards de dollars en 2015 à 20,4
milliards de dollars en 2016. Ce creusement du déficit commercial a été compensé, en partie,
par des bénéfices rapatriés plus faibles, ce qui a abouti à une légère résorption du déficit des
transactions courantes en valeur nominale en dollars. Toutefois, en pourcentage du PIB, le
déficit courant s’est légèrement creusé à 16,9 % du PIB. Le taux de change effectif nominal
(TCEN) a été globalement stable en 2016, tandis que le taux de change effectif réel (TCER)
s’est apprécié de 5,6 %, en raison d’une inflation plus forte en Algérie que chez ses partenaires
commerciaux. Le TCER est significativement surévalué, ce qui nuit à la compétitivité de
l’Algérie.
A cette date (2016) , la position extérieure nette de l’Algérie était certes affaiblie mais restée
assez confortable. Les réserves de change avaient diminué de 30 milliards de dollars sur une
année pour se situer à 113 milliards de dollars (hors DTS) Elles représentaient 23 mois
d’importations. La dette extérieure représentait que 2,5 % du PIB en 2016. En situation « hors
banque » depuis 2001, les banques ont commencé à recourir aux avances de la Banque
2
Hors hydrocarbures.
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d’Algérie dans le courant de l’année 2016. La baisse des cours de pétrole à contracté fortement
les excédents de liquidités des banques primaires. Les prêts interbancaires ont Ainsi repris et
les taux d’intérêt ont augmenté. Dans ce contexte de resserrement des liquidités bancaires, la
croissance du crédit à l’économie a ralenti, mais est toutefois restée solide à 9,8 % en 2016.
Cette situation, conjuguée aux tirages réalisés par les autorités sur le Fonds de régulation des
recettes, a contribué à compenser la baisse des avoirs extérieurs nets, de sorte que la monnaie
au sens large a augmentée de 1,8 %.
A côté de ces mesures pour contenir la baisse du prix de pétrole et ses effets sur les
fondamentaux de la politique économique, le Gouvernement a utilisé le levier tu taux de change
en le dépréciant plusieurs fois entre 2016 et 2017. Devant le danger de déprécier
continuellement le taux de change et le refus du Gouvernement de recourir à l’endettement
extérieur, qu’est venue se greffer la solution du financement non conventionnel (FNC) pour
soutenir une politique budgétaire expansionniste matérialisée par les dispositions prises par la
loi de finances de 2018. Cette solution de financement de l’économie (FNC) a été rendue
nécessaire par l’épuisement du FRR et aussi pour le rachat par l’Etat de créances d’entreprises
publiques et de procéder à un transfert de 500 milliards de dinars au profit du Fonds National
d’Investissement (FNI) pour le financement de deux projets clés en main (un port commercial
et une usine de phosphates).
La gestion et l’encadrement du FNC est détaillé dans la loi n°17-10 du 11 octobre 2017
modifiant l’Ordonnance 06-03 du 26 août 2003 relative à la Monnaie et le Crédit modifiant
l’Ordonnance (voir annexe 1). Il est prévu dans le cadre de cette loi que ce financement ne
dépasse un horizon de cinq ans à partir de 2017. Trois objectifs ont été assignés à ce mode de
financement de l’économie :
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Rétablissement des équilibres de la trésorerie de l’Etat.
Rétablissement de l’équilibre de la balance des paiements
ii. D’assurer le suivi de la réalisation des mesures et des actions contenues dans le
programme4.
Le Ministre des Finances est tenu d’informer ce Comité, chaque trimestre, sur les actions et les
mesures effectuées relatives à la réalisation du programme en annexe. De son côté, le Comité
transmet au Gouverneur de la Banque d’Algérie, un état trimestriel faisant ressortir les points
suivants :
i. La mise en œuvre des mesures et des réformes conduites pour la réalisation du
programme.
3
Décret exécutif n° 18‐86 du 5 mars 2018 portant « mécanisme de suivi des mesures et réformes structurelles
dans le cadre de la mise en œuvre du financement non conventionnel ».
4
Le programme détaillé figure en annexe 2 de cette communication.
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La présentation du dispositif appelle les remarques et critiques suivantes :
Il est à remarquer qu’il n’est pas prévu un plafond pour ces emprunts. Ce qui peut
constituer un fort aléa moral en faveur d’un usage inconsidéré du FNC et laisser « filer »
la dépense. C’est le cas actuellement quand on voit les montants mobilisés par ce FNC.
En effet, à la date de janvier 2019, la Banque d’Algérie a mobilisé, pour le compte du
Trésor, un montant de plus de 6552 milliards de dinars (32 % du PIB de 2018). Sur cet
encours, un montant de 2.470 milliards de DA, a servi au financement du déficit du
Trésor, au titre des années 2017 et 2018 et partiellement, au titre de l’exercice 2019. Un
montant de 1.813 milliards de DA, a contribué au remboursement de la dette publique
interne ainsi qu’au financement du remboursement de l’emprunt obligataire pour la
croissance. Un montant de 500 milliards de DA, destiné à la Caisse Nationale de Retraite
(CNR) pour le refinancement de sa dette à l’égard de la CNAS ; un montant de 1.773,2
milliards de DA, destiné au Fonds National d’Investissement pour les opérations de
financement des programmes AADL, du déficit de la CNR et de projets structurants.
Au total, sur le montant global mobilisé à ce jour, de 6.556,2 milliards de DA, seul un
montant de 3.114,4 milliards de DA, a été injecté dans l’économie. Ce qui limite, en
partie, son effet sur l’inflation.
La composition du Comité pose problème. En effet, ce dernier n’est constitué que des
représentants de la partie bénéficiaire (Ministère des Finances) et de la partie créancière
(Banque d’Algérie). De ce fait, un biais est introduit à la base et fait que ce Comité ne
peut jouer un rôle de « garde-fou ».
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Les critiques et remarques faites précédemment ont fait réagir la Banque d’Algérie le 01 avril
dernier5. En parcourant cette mise au point, on comprend que la Banque d’Algérie veut dégager
sa responsabilité sur les effets néfastes de ce type de financement (risque de reprise de
l’inflation, aléa moral qui laisse filer la dépense). Après avoir fait l’éloge de ce mode de
financement à la date de son adoption, la Banque d’Algérie considère maintenant que le FNC
est un « mode extrême » de financement de l’économie. Pour motif de « perte de
souveraineté nationale » , et le Gouverneur de la Banque et le Premier Ministre à cette date
avaient exclu l’endettement extérieur comme mode de financement de l’économie. Dans cette
note , la Banque d’Algérie jette l’opprobre sur la « task force » mise en place par le Premier
Ministre au début de l’année 2017 pour proposer des solutions alternatives au manque de
ressources financières et réfléchir sur un ensemble de mesures pour la reprise économique. A
priori, les arguments présentés dans cette note « tiennent » la route mais le problème que la
Banque d’Algérie n’a jamais fait état d’une manière publique, à cette date, de ses réserves sur
ce mode de financement. Ce qui donne une idée sur le degré « d’indépendance » de la Banque
d’Algérie vis-à-vis de l’exécutif6. Pour limiter sa responsabilité, la Banque d’Algérie a relevé
deux fois le coefficient des réserves obligatoires. La première fois en mai 2018, soit six mois
après la mise en œuvre du FNC, en portant le coefficient à 10% après qu’il était à 8%. Une
seconde fois en février 2019 en le portant à 12%.
Cette « mise au point » de la Banque d’Algérie publiée le 1Er avril dernier a fait réagir deux
membres de la « task force » qui ont travaillé sur cette question le 18 avril dernier7. Les deux
experts reconnaissent que le Gouverneur de la Banque d’Algérie de l’époque, Monsieur Laksaci
, était contre le financement non conventionnel mais favorable à une baisse graduelle du dinar.
Ces différents points de vue étaient exposés lors d’une conférence organisée à Alger en mai
2016 en présence des représentants du FMI. Deux jours après la tenue de cette conférence, le
Gouverneur a été limogé. Cette mise au point des deux experts nous apprend aussi qu’ils avaient
recommandé un volume de financement maximal de 2550 milliards à fin 2019. On voit bien
que ce plafond a été largement dépassé comme on vient de le voir.
5
https://www.bank‐of‐algeria.dz/pdf/financement_non_conventionnel.pdf. Il est à remarquer que ce
communiqué est venu à une date où le poste de Gouverneur de la Banque d’Algérie était encore vacant.
6
Le lecteur intéressé sur la question de l’indépendance de la Banque d’Algérie et de son « autonomie » pourra
lire avec intérêt les écrits de Ilmane (2015) ; ancien vice‐gouverneur de la Banque d’Algérie.
7
https://maghrebemergent.info/boucekkine‐meddahi‐voici‐ce‐que‐dit‐notre‐note‐sur‐le‐financement‐non‐
conventionnel‐contribution/
7 de 17
3. Restrictions aux importations : les limites d’une mesure
En raison de la rareté en devises (baisse continue du prix du pétrole depuis juin 2014), le
Gouvernement a initié un certain nombre de mesures pour réduire sa dépense en général et
économiser de la devise en particulier. C’est dans ce contexte que des mesures de restriction
aux importations ont été prises. La dernière concerne une liste de 851 produits entrée en vigueur
le 7 janvier 20188. On se propose dans cette réflexion de faire un commentaire sur les limites
de cette mesure.
Le premier point à signaler est le caractère temporaire de cette restriction. Dans l’article 2 du
décret susmentionné, il est précisé que cette restriction prendra fin dès « …rétablissement de
l’équilibre de la balance de paiements … ». A titre de rappel, une balance de paiements résume
la position extérieure d’une Nation. Elle est la somme du solde de la balance commerciale et de
la balance des services. Pour avoir une idée, à quelle date probable, cette mesure de restriction
sera levée, examinons l’évolution passée de la balance des paiements ( voir figure 1).
Figure 1 : Evolution de la Balance des paiements ( 2005‐2017)
(en milliards de dollars)
35,00
Solde_Compte_Courant
30,00
25,00
15,00
10,00
5,00
0,00
3e trimestre 2007
3e trimestre 2008
3e trimestre 2009
3e trimestre 2010
3e trimestre 2011
3e trimestre 2012
3e trimestre 2013
3e trimestre 2014
3e trimestre 2015
3e trimestre 2016
2005
‐5,00
‐10,00
‐15,00
On remarque que la balance des paiements est déficitaire à partir du second trimestre de l’année
2013 et elle l’est à ce jour. Donc le déficit de la balance des paiements est antérieur à la baisse
8
Décret exécutif n°18‐02 du 07 janvier 2018.
8 de 17
du prix du baril du pétrole. Du fait des montants faibles des flux de capitaux et de services,
comparativement à ceux des marchandises, le solde de la balance des paiements est déterminé
dans une large mesure par celui de la balance commerciale (à hauteur 82%). Donc la levée de
cette mesure de restriction ne va dépendre que de la valeur des exportations en hydrocarbures
pour les prochaines années. Il se pose alors la question suivante : Est-ce que le Gouvernement
va lever cette mesure dès que le solde redeviendra positif sur un trimestre ou plusieurs (à
définir) ? Du fait de la sensibilité des exportations au prix des hydrocarbures, le solde de la
balance des paiements pourra redevenir subitement négatif après le trimestre ou l’année où il
était positif. Alors il se pose la question évidente suivante : Le Gouvernement remettra-t-il la
mesure de restriction ? Je pense que le fait d’avoir lié cette mesure au solde de la balance des
paiements dans le texte a lié les mains du Gouvernement9 et posera un sérieux problème de
conduite de la politique économique et brouillera la visibilité des agents économiques locaux
et des partenaires internationaux. La dernière évaluation donnée par l’agence Euler Hermes10
va dans ce sens. Dans les différentes déclarations du Premier Ministre et de son Ministre du
Commerce, il était mentionné que cette mesure est un signe pour mettre en place une production
locale de substitution aux importations. A part les producteurs locaux qui existent déjà et qui
vont profiter de cette mesure, il est difficile pour un détenteur de capitaux d’investir dans un
secteur qui, à tout moment, pourra être évincé par les importations. Si l’on se penche sur les
projections de la balance des paiements faites par les services du FMI11 , on remarquera que la
balance des paiements va rester déficitaire jusqu’à 2022 du moins (voir figure 2 ).
Figure 2 : Projections de la Balance des paiements et des exportations totales en
milliards de dollars ( 2019‐2022)
50 Exportations totales
40
30
20
10
0
2019
2020
2021
2022
‐10
‐20 Balance des paiements
9
Sous l’hypothèse qu’il respecte ses propres engagements.
10
http://www.eulerhermes.com/economic‐research/blog/EconomicPublications/country‐risk‐q1‐2018‐map‐
mar18.pdf
11
Malheureusement, à l’heure actuelle ,on ne connait aucun travail similaire fait par les institutions nationales
(Ministère des finances, Banque d’Algérie, etc.)
9 de 17
Source : FMI – Rapport pays – Juin 2017 – page 26.
Ces projections ont été faites sur la base d’un prix moyen de 57$ pour un baril de pétrole. La
diminution de la production physique en hydrocarbures enregistrée depuis le deuxième
trimestre de l’année 2006 démontre que l’ajustement de la balance des paiements ne peut se
faire que par un effet prix (celui du baril de pétrole). Pour que la balance des paiements
redevienne positive, il faut que les exportations dépassent les 50 milliards de dollars et que les
importations ne dépassent les 46 milliards de dollars. Comme l’Algérie est un price-taker
(aucun effet sur la fixation du prix de pétrole sur le marché international), la seule marge du
Gouvernement, à l’heure actuelle, est de comprimer les importations ; d’où la mise en place de
ce système de restriction aux importations.
Si l’on se penche maintenant sur le contenu de cette liste et du profil des produits interdits
d’importation. En termes d’importation, le chiffre « 851 » impressionne à première vue. Il est
important de relever ici que ce nombre de produits est en référence à la nouvelle classification
internationale du commerce international (Système Harmonisé – SH à 10 chiffres). Cette
nouvelle classification comprend près de 16.000 positions tarifaires. Donc la décision prise par
le Gouvernement ne représente, en termes de nombre, qu’un plus de 5% des produits qu’on
peut théoriquement importer. En termes de valeur, la liste des 851 produits représentait en 2016,
un montant d’un peu de 2,3 milliards de dollars ; soit environ 5% du total des importations. Si
l’on s’intéresse au contenu de la liste pour comprendre la logique qui a servi à son élaboration,
on remarque qu’elle est très concentrée. Les 851 produits sont répartis sur 31 chapitres sur les
97 possibles qui existent dans la nomenclature du tarif douanier. Un seul, le chapitre deux,
concentre à lui seul 26% du nombre de produits interdits d’importations. Ce chapitre est relatif
aux « Viandes et abats comestibles » essentiellement congelés. Près de la moitié de ces 227
produits (111 positions) concernent la volaille congelée. Le deuxième chapitre est relatif aux
« Préparations à base de légumes et de fruits » avec 74 produits. La figure 3 donne une idée
sur la répartition de cette liste sur les principaux chapitres.
10 de 17
Ouvrages en pierres,
Figure 3 : Contenu de la liste
plâtres, ciment; 2%
Viandes et abats
comestibles; 27%
Produits céramiques; 3%
Préparation à base de
Préparations de légumes,
céréales, de farines,
et de fruits; 9%
d'amidons; 3%
Appareils d'éclairage ‐
Meubles ‐ Sièges; 3%
Matières plastiques; 5%
Tapis et autres
revêtements de sol; 5%
Fruits comestibles;
6%
Préparations de viandes
et de poissons; 5%
Climatiseurs ‐
Légumes et plantes; 5% Réfrigérateurs ‐ Laits et produits de la
Congélateurs; 6% laiterie; 6%
Il est facile de remarquer que la plupart des produits qui figurent dans cette liste concurrencent
une production locale existante (produits blancs, laits et dérivés, …etc.). Leur interdiction a
généré dans certaines filières (produits blancs et laits et dérivés) une augmentation des prix.
Cette augmentation ne peut être expliquée par la valeur du dinar du fait que ce dernier ne s’est
déprécié que de 2% vis-à-vis de l’euro et s’est même apprécié de près de 1% vis-à-vis du dollar
américain sur la période janvier à avril de cette année.
Interdire les viandes congelées suppose l’existence d’une offre locale suffisante. Les
interventions du Gouvernement en période de forte demande pour influer à la baisse les prix
montrent que cette offre fonctionne sous forme d’un cartel (existence d’ententes sur les prix).
Le mois de Ramadhan prochain en sera un bon test. Il est à craindre que le Gouvernement va
se retrouver à revenir sur une mesure qu’il a lui-même mise en place pour contenir
l’augmentation des prix sur les viandes rouges et blanches habituellement observées en période
de Ramadhan. Pour les autres produits, les demandes formulées par les différents opérateurs,
par voie de presse et autre, a montré que les concepteurs de cette liste n’ont pas pris le soin de
vérifier l’existence d’une offre locale avant d’établir cette liste. Revenir sur une mesure,
défendue au départ, réduit la crédibilité du Gouvernement à l’interne et au niveau international.
11 de 17
Absence totale de production locale de substitution aux produits importés. La mise en
place d’une production locale prendrait du temps et pourrait rendre sa rentabilité
remise quant la mesure sera suspendue à l’avenir.
Difficulté de mettre en place certaines industries locales de substitution du fait que les
étrangers refusent d’exporter leur savoir-faire.
Risque de mise en place de listes négatives similaires par les partenaires étrangers
(risque de réciprocité).
Pour avoir gain de cause auprès du Gouvernement, plusieurs associations d’entreprises privées
organisées par filière (céramique, tisserands, fabricants d’arômes, …etc.) ont saisi le Ministère
du Commerce pour annuler la mesure et/ou pour avoir des autorisations provisoires
d’importation par quota. Ce travail de lobbying a porté ses fruits du fait que le Ministère du
Commerce a revu cette liste dans le sens où une soixante de produits vont être autorisés à
nouveau à l’importation12. L’annonce du Premier Ministre13 de revoir cette liste chaque trois
mois reflète l’absence d’une doctrine bien établie de gestion du commerce extérieur. Cette
révision sera plus le résultat du lobbying des importateurs et des producteurs locaux qu’une
d’une vision claire du Gouvernement en matière de gestion des importations. On remarquera
aussi qu’au sein de cette liste, plusieurs produits n’ont jamais été importés. Si l’on prend l’année
2016, sur les 851 produits, 212 seulement ont été importés soit environ 25% de la liste. Ceci
prouve que la conception de cette liste a été pensée plus par famille de produits qu’en fonction
de la capacité d’industries locales existante ou à mettre en place pour prendre le relais. La
situation d’incertitude actuelle (quatre Ministres du Commerce en trois ans) ne plaide pas en
cette faveur. On a l’impression que le secteur du commerce extérieur a servi de variable
d’ajustement pour économiser de la devise. Cette vision comptable d’une réalité
macroéconomique n’est pas tenable à long terme. Le gain espéré (économie de devises) est
inférieur au coût économique (inflation induite) et perte de crédibilité du Gouvernement vis-à-
vis de acteurs locaux et internationaux. Il était possible d’augmenter les droits de douanes et
certaines taxes pour limiter ces importations sans mettre en place des listes négatives. Les
12
https://www.commerce.gov.dz/actualites/levee‐de‐la‐suspension‐provisoire‐a‐l‐importation‐de‐certains‐
intrants‐necessaires‐a‐la‐production‐de‐plusieurs‐produits‐alimentaires.
13
Conférence de presse du 14 avril 2018.
12 de 17
dispositions de sauvegarde existantes au niveau de l’Accord d’association et les autres
arrangements commerciaux (GZALE, Accords bilatéraux) le permettent. Le bon sens aurait
voulu que le Gouvernement consulte ses partenaires économiques pour faire l’inventaire de ce
qui peut être substituable aux importations avant d’établir cette liste. Il dispose des institutions
et des sources de données suffisantes pour faire ce travail. On aurait pu faire l’économie de ce
retour en arrière préjudiciable pour l’ensemble de l’économie.
4. Conclusion
13 de 17
Le second exemple s’est appuyé sur une expertise locale institutionnelle entre des
fonctionnaires du Ministère du Commerce, des Finances et de l’Industrie. La transition d’un
système de licences, vers celui des quotas et finalement celui des listes négatives avait pour seul
souci une gestion comptable d’un stock de devises à préserver coûte que coûte. Le retour sur
certaines mesures et l’annulation d’autres a introduit un fort aléa moral dans le secteur du
commerce extérieur. Ceci a « flouté » la vision des agents économiques intervenant directement
à ce segment et aussi celui de tous les autres agents qui en dépendent. Comme on l’a démontré
dans cette communication, il existe un fort décalage entre le souhait du Gouvernement (mettre
en place des industries de substitution) et la réaction des agents économiques qui ont besoin de
certaines « certitudes » dans l’acte d’investir. Les deux mesures prises par le Gouvernement le
11 mai et 22 mai dernier sur la question de l’importation des véhicules de moins de trois ans14
et l’industrie de montage dans le secteur automobile en sont la parfaite illustration15. La
première décision est le fait du Ministre de l’industrie tandis que la seconde est le fait du
Ministre du commerce mais les deux impactent directement la même industrie (automobile). Il
est clair que ces deux mesures vont remettre en totalité tous les investissements consentis en
Algérie dans le secteur des usines de montage de véhicules. La première mesure a un souci
« politique » pour calmer le front social tandis que la seconde a un souci d’une gestion
« comptable » des ressources en devises. Il est évident que si l’exécutif jouissait d’une certaine
crédibilité en interne d’un côté et son corolaire construit autour de compétences locales ayant
une vision prospective, on n’en serait pas à cette situation.
14
https://www.tsa‐algerie.com/retour‐de‐limportation‐des‐vehicules‐doccasion‐le‐gouvernement‐explique‐sa‐
demarche/
15
https://www.tsa‐algerie.com/automobile‐le‐gouvernement‐fixe‐les‐quotas‐dimportation‐des‐kits‐ckd‐skd/
14 de 17
5. Références bibliographiques :
Adler (2008), « Original Sin and Procylical Fiscal Policy: Two Sides of the Same Coin? »,
IMF Working Paper, n° 08/209.
Alberola et Montero (2006), « Debt sustainability and procyclical fiscal policies in Latin
America », Banco de España Working Paper, n° 0611.
OCDE (2003), « Cyclicité de la politique budgétaire : le rôle de la dette, des institutions et des
contraintes budgétaires », Perspectives économiques de l’OCDE, n° 74, chapitre IV.
Turrini (2008), « Fiscal Policy and the Cycle in the Euro Area: the Role of Government
Revenue and Expenditure », European Commission, Economic Papers, n° 323.
15 de 17
Annexe 1 : Financement non conventionnel
Loi n° 17-10 du 20 Moharram 1439 correspondant au 11 octobre 2017 complétant l’ordonnance n° 03-11
du 27 Joumada Ethania 1424 correspondant au 26 août 2003 relative à la monnaie et au crédit.
————
Le Président de la République,
Vu la Constitution, notamment ses articles 136, 138, 140-14 et 144 ;
Vu l’ordonnance n° 03-11 du 27 Joumada Ethania 1424 correspondant au 26 août 2003, modifiée et complétée,
relative à la monnaie et au crédit ;
Après avis du Conseil d’Etat,
Après adoption par le Parlement,
Article 1er. — Les dispositions de l’ordonnance n° 03-11 du 27 Joumada Ethania 1424 correspondant au 26 août
2003, modifiée et complétée, relative à la monnaie et au crédit, sont complétées par l’article 45 bis rédigé comme
suit :
« Art. 45 bis. — Nonobstant toute disposition contraire, la Banque d’Algérie procède, dès l’entrée en vigueur de
la présente disposition, à titre exceptionnel et durant une période de cinq (5) années, à l’achat directement auprès
du Trésor, de titres émis par celui-ci, à l’effet de participer, notamment :
— à la couverture des besoins de financement du Trésor ;
— au financement de la dette publique interne ;
— au financement du Fonds National d’Investissement (FNI).
Ce dispositif est mis en œuvre pour accompagner la réalisation d’un programme de réformes structurelles
économiques et budgétaires devant aboutir, au plus tard, à l’issue de la période susvisée, notamment, au
rétablissement :
Un mécanisme de suivi de la mise en œuvre de cette disposition, par le Trésor et la Banque d’Algérie, est défini
par voie réglementaire ».
Art. 2. — La présente loi sera publiée au Journal officiel de la République algérienne démocratique et populaire.
Abdelaziz BOUTEFLIKA.
16 de 17
Annexe 2 :
Programme résumé de mesures et réformes structurelles dans
le cadre de la mise en œuvre du financement non conventionnel
Réforme bancaire et financière pour une diversification de l’offre de financement et une dynamisation
du marché du crédit.
Développement de l’économie numérique en vue de moderniser la gouvernance dans tous les domaines.
Renforcement de la décentralisation.
Amélioration du climat des affaires et de l’attractivité de la destination Algérie pour les IDE.
17 de 17