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Cours 12 Niveaux - Traduction

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©Mirela-Cristina Pop, La traduction.

Aspects théoriques, pratiques et didactiques (domaine français-roumain),


2e édition, Cluj Napoca, Casa Cărții de Știință, Timișoara, Orizonturi universitare, 2015. (extraits)
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XII. LES NIVEAUX DE (LA) TRADUCTION

La linguistique contemporaine a établi l’existence de différents « niveaux de réalisation de


l’acte de communication » que Georges Mounin (rééd.1990 : 179) considère autant de « niveaux de
traduction » :
1) niveau de la fonction de communication sociale (compréhension du vocabulaire et de la
syntaxe de la phrase) ;
2) niveau de la fonction d’élaboration de la pensée (compréhension des jugements de valeurs
du locuteur) ;
3) niveau de la fonction d’expression des valeurs affectives (le récepteur a une compétence
culturelle, extralinguistique) ;
4) niveau de la fonction esthétique du langage (saisie de la nature des vers, des syllabes, de la
rime, des métaphores, etc.).
Les niveaux de traduction ont été réduits à trois par Danica Séleskovitch et Marianne Lederer
(in Interpréter pour traduire, 1986 : 124-135, Lederer, La traduction aujourd’hui, 1994 : 14-15) :
1) niveau du sémantisme lexical (la traduction de la motivation des termes) ;
2) niveau de la parole (la traduction du sémantisme des énoncés ou des phrases : le contexte
verbal limite le nombre de correspondances possibles) ;
3) niveau du texte (la traduction du sens : le sémantisme de la parole est complété par les
compléments cognitifs du traducteur).
Selon Jean Delisle (1980 : 101), l’« exégèse lexicale » est considérée comme un « dialogue
herméneutique intérieur » entre le traducteur et le texte original et comporte trois niveaux :
1) le degré zéro ou le report des vocables monosémiques → opération qui ne suppose
aucun effort d’interprétation de la part du traducteur (ex. : le transfert des noms propres,
des nombres, des termes scientifiques et techniques) ;
2) la réactivation des formes consignées par les systèmes linguistiques → ces formes
figurent dans des dictionnaires bilingues ou dans des ouvrages de stylistique comparée ;
3) la recréation contextuelle qui passe par la recherche d’équivalences contextuelles, en
appliquant des procédés de raisonnement analogique et des inférences.
En faisant une synthèse des points de vue des professionnels du domaine, nous pouvons
distinguer trois niveaux de traduction :

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©Mirela-Cristina Pop, La traduction. Aspects théoriques, pratiques et didactiques (domaine français-roumain),
2e édition, Cluj Napoca, Casa Cărții de Știință, Timișoara, Orizonturi universitare, 2015. (extraits)
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1) le niveau 0 ou niveau du transcodage ;


2) le niveau 1 ou niveau de la parole ;
3) le niveau 2 ou niveau du texte.
(1) Le niveau 0 est le niveau de la langue hors contexte. Ce niveau concerne les éléments
linguistiques que l’on transpose directement d’une langue à l’autre, sans que le traducteur ait à se
soucier du contexte. Ces éléments, appelés transcodables, sont monosémiques, c’est-à-dire, n’ont
qu’une seule signification, figée, hors contexte ou dans le contexte.
Les termes transcodables réfèrent à une réalité identique dans les deux langues. C’est le cas des
éléments linguistiques suivants :
- chiffres et dates : huit / opt, le 8 octobre / 8 octombrie ;
- noms propres de lieux : Turin / Torino, Cologne / Köln, Côte d’Ivoire / Coasta de Fildeş ;
- noms propres de personnalités historiques et religieuses : Louis XIV / Ludovic al XIV-lea,
Michel Ange / Michelangelo, Saint Nicolas / Sfântul Nicolae ;
- termes et collocations : le clonage / clonarea ; télévision par câble / televiziune prin cablu ;
démarche traduisante / demersul traducătorului ;
- mots ou expressions imposés par l’usage (« équivalences obligées » ou « obligatoires ») :
Ancien Testament / Vechiul Testament, Proche Orient / Orientul Apropiat, Nativité /
Naşterea Domnului, etc. ;
- certaines expressions idiomatiques : se coucher avec les poules / a se culca o dată cu
găinile ; se mettre aux quatre épingles / a se îmbrăca la patru ace ;
- certains clichés et figements : la tour d’ivoire / turnul de fildeş, le talon d’Achille / călcâiul
lui Achile; Chien méchant! / Nu intraţi. Câine rău!, Ne marchez pas sur l’herbe / Nu călcaţi
iarba ; Nu rupeţi florile !, Tenir hors de portée des enfants / A nu se lăsa la îndemâna
copiilor;
- certains proverbes : Rira bien qui rira le dernier / Cine râde la urmă, râde mai bine ;
- protocoles du domaine juridique : le jugement est mis en délibéré / juriul deliberează.
Les langues usent de normes formelles différant d’une langue à l’autre, réunies sous
l’appellation de conventions d’écriture (ou conventions de l’écrit). Ces conventions représentent des
exigences formelles imposées par l’usage qui ont fini par être institutionnalisées. C’est le cas des
éléments suivants :
- abréviations conventionnelles : M. / Dl., Mme / Dna ;
- unités de mesure et de temps : 22h / orele 22
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- emploi de la majuscule en roumain et de la minuscule en français : Ministère de la défense


nationale / Ministerul Apărării Naţionale, le bordeaux / vinul Bordeaux;
- emploi de la majuscule en français et de la minuscule en roumain : les Français / francezii ;
- titres de civilité : Monsieur X, Professeur des universités / Profesor univ. dr. X
- ponctuation : les guillemets en français (« ») / en roumain („”)
La traduction de ces éléments linguistiques est univoque ; il s’agit d’un transcodage, d’un
simple « report » d’une langue à l’autre.
Le transcodage représente donc une opération linguistique qui consiste à établir des
correspondances entre deux langues, soit au niveau du lexique, soit au niveau de la phrase isolée.
(2) Le niveau 1 ou niveau de la parole fait intervenir le contexte au moment du choix lexical à
partir des sens enregistrés par les dictionnaires. Le nombre des correspondances se trouve donc limité
suite à l’intervention du contexte. C’est le cas des mots polysémiques dont les significations varient en
fonction du contexte. À ce niveau, le traducteur devra choisir, en fonction d’une liste de
correspondances dans le dictionnaire, l’acception correspondant au contexte où se trouve le mot étudié.
(3) Le niveau 2 est celui de la recréation discursive, contextuelle, de la recherche
d’équivalences contextuelles.
À ce niveau, on privilégie les associations de mots qui découlent du sens de l’énoncé et qui ne
sont répertoriées dans aucun ouvrage de stylistique comparée. Le niveau 2 dépasse les équivalences
trouvées au niveau 1, parce que le traducteur doit prendre en compte le texte dans sa totalité qu’il essaie
de comprendre suivant ses compétences. Lors de la postulation d’une équivalence de traduction, le
traducteur devra faire des hypothèses contextuelles sur l’énoncé de base, émettre des raisonnements,
faire des associations d’idées, user d’analogies, etc. afin de saisir le sens.

Références bibliographiques :

Delisle, Jean, L’analyse du dicours comme méthode de traduction, Presses de l’Université d’Ottawa,
1980.
Lederer, Marianne, La traduction aujourd’hui, Paris, Hachette, 1994.
Mounin, Georges, Les problèmes théoriques de la traduction, Paris, Gallimard, rééd. 1990.
Seleskovitch, Danica, Lederer, Marianne, Interpréter pour traduire, Paris, Publications de la Sorbonne,
1986, rééd. 1993.

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