Location via proxy:   [ UP ]  
[Report a bug]   [Manage cookies]                

Semiologie Specifique TSA

Télécharger au format docx, pdf ou txt
Télécharger au format docx, pdf ou txt
Vous êtes sur la page 1sur 9

UNIVERSITE LIBANAISE

Faculté de Sante Publique II


Département de psychomotricité

Sémiologie psychomotrice spécifique du trouble du spectre


autistique TSA

1
Sommaire
I. Le bilan psychomoteur
II. Les réseaux neuronaux de la perception-action
III. Troubles du développement psychomoteur
a. Troubles précoces de la motricité
b. Particularités sensorimotrices d’une personne présentant un
trouble du spectre autistique

2
I. Le bilan psychomoteur
Les troubles des interactions sociales, de la communication verbale et non verbale et des
comportements représentent les fondements de la sémiologie clinique des TED en général.
Cependant, les caractéristiques sensori-motrices ne doivent pas être négligées dans cette maladie.
Les anomalies motrices ont été signalées par Kanner lui-même en 1943 dans sa description
initiale de l’autisme : il évoquait des signes de motricité déviante durant les premiers mois de
vie, des bébés « trop calmes », notamment lors des prises alimentaires, ainsi que des réactions
paradoxales aux stimulations diverses, des anomalies du tonus et de la motricité.
La littérature actuelle confirme que les troubles envahissants du développement et l’autisme
notamment sont généralement associés à des troubles psychomoteurs (Manjiviona et Prior,
1995). Le développement psychomoteur de l’enfant autiste présente des particularités (Adrien et
al., 1993 ; Baranek, 1999) qui peuvent être observées très précocement (Teiltelbaum et al., 1998)
et qui résultent d’un trouble fonctionnel et pas d’un déficit lésionnel. Les difficultés persistent
avec l’âge et sont corrélées avec la sévérité de la pathologie. Les recommandations pour la
pratique professionnelle du diagnostic d’autisme insistent donc sur le fait « d’appréhender le
développement psychomoteur et sensorimoteur de l’enfant en examinant sa motricité (globale et
fine), les praxies et l’intégration sensorielle » ; ces particularités pouvant être décrites très
précocement, elles pourront participer au diagnostic précoce de l’autisme.
Les troubles de la motricité sont en effet clairement évoqués dans les critères diagnostiques de
l’autisme infantile de la CIM 10 dans les items suivants :
- « absence d’utilisation adéquate du contact oculaire, de l’expression faciale, de l’attitude
corporelle et de la gestualité pour réguler les interactions sociales ».
- « maniérismes moteurs stéréotypés et répétitifs, par exemple, battements ou torsions des mains
et des doigts ou mouvements complexes de tout le corps ».
Enfin, évaluer le mode de fonctionnement sensorimoteur de l’enfant permet, entre autres, de
mettre en place une prise en charge spécifique.
L’évaluation psychomotrice n’a pas pour objectif principal d’orienter le diagnostic mais plutôt
d’établir un profil de développement de l’enfant et de dresser un tableau le plus complet possible
de ses compétences, de ses difficultés et de ses émergences dans les différents domaines de la
psychomotricité. D’éventuels troubles psychomoteurs associés au TED peuvent être isolés,
orientant le projet thérapeutique vers une prise en charge psychomotrice adaptée.

II. Les réseaux neuronaux de la perception-action

De nombreux modèles cognitifs sont utilisés par la communauté scientifique pour expliquer
le lien entre troubles de la motricité et autisme (McCleery, Elliott, Sampanis, &Stefanidou,

3
2013 ; Miyahara, 2013 pour une revue de littérature). Ces modèles impliquent des réseaux
neuronaux multiples y compris ceux des fonctions exécutives ( Fournier, Hass, Naik, Lodha,
& Cauraugh, 2010) et mettent en cause l’hypo connectivité ccérébrale (Mostofsky et al.,
2009).
a. Couplage (Les neurones miroirs)
D’autres modèles postulent un dysfonctionnement des neurones miroirs. Faire, voir faire ou
imaginer faire activent en commun le système des neurones miroirs. Ainsi ce système réaliserait
le couplage de l’action et de la perception et serait au cœur de l’imitation. Les difficultés
d’imitation dans les TSA ont amené à questionner le fonctionnement des neurones miroirs. Pour
certains, ce ne serait pas tant les neurones miroirs qui seraient dysfonctionnels que les contrôles
descendants qui les modulent, nous ramenant aux réseaux cibles des fonctions exécutives. Ce
défaut de couplage perception-action serait en lien avec le déficit de la fonction d’anticipation et
du mapping / de la représentation spatiales de soi et des autres. Au-delà des difficultés
d’imitation, des entraves gestuelles plus générales sont décrites dans les TSA, relevant du
dysfonctionnement des circuits importants pour l’acquisition de représentations sensorielles du
mouvement et la programmation de la séquence motrice nécessaire à leur exécution. Certains
qualifient ces difficultés de dyspraxie développementale (Mostofsky et al., 2006).

b. Action (Le cervelet)


Le cervelet connu pour son rôle dans le contrôle moteur, a fait l’objet de beaucoup de travaux
dans les TSA. En effet, un dysfonctionnement et des particularités neuroanatomiques du cervelet
ont été décrits dans les TSA. L’atteinte du cervelet et des réseaux cortico-cérébelleux bien que
non spécifiques de l’autisme parait intéressante en tant que localisatrice de région d’intérêt pour
la recherche de marqueurs. Reste que la maturation anatomique et fonctionnelle du cervelet est
principalement postnatale donc sa mise en jeu dans les TSA est probablement secondaire à
d’autres processus en amont.

c. Perception
Les personnes avec autisme présentent des particularités du traitement de l’information
sensorielle.
Alors que le développement neurotypique nous rend expert dans le traitement des informations
sensorielles sociales et à valence émotionnelle, des travaux ont montré l’absence de traitement
préférentiel des ces informations chez les patients TSA.

III. Trouble du développement psychomoteur

4
a. Troubles précoces de la motricité

1. Motricité globale

 Absence d’attitude anticipatrice de la part du bébé


 Manipulations bizarres et répétitives de certains objets
 Présence de mouvements étranges
 Lenteur dans le développement psychomoteur
 Retard d’acquisition motrice : décalage dans l’acquisition du maintien
de la tête, de la station assise et de la marche avec un éveil à
l’environnement tardif. (Rogé, 2003).
 Troubles précoces du tonus : hypertonie ou hypotonie
 Anomalies discrètes sur le plan postural
 Problèmes de coordination
 Chutes fréquentes lors de la station assise dès qu’un mouvement de la
tête ou du bras vient perturber cette posture
 Dysfonctionnement dans les coordinations intersegmentaires lors des
situations de retournement à partir de la position allongée
 À l’âge de 2 ans, la marche est encore immature. Plus tard, la marche
présente des déviances, notamment une asymétrie anormale entre les
mouvements des bras et des jambes et une absence de balancier des
bras.
 Motilité anormale
 Postures inhabituelles
 Hypoactivité générale
 Réactions atypiques aux sons et d’autres stimulations sensorielles
 Marche à quatre-pattes asymétrique

2. Motricité fine

 Persistance du grasping (>3mois1/2)


 Ne peut tenir un hochet (4/5mois)
 Manipulations bizarres et répétitives.
 Ne tient pas un objet dans chaque main (7mois)
 Pas de pince pouce/index (11mois)
 Maniérismes des mains et des doigts
 Ne met pas d’objet et n’enlève pas d’objet d’un récipient.
 N’empile pas 5 cubes (12-24 mois)
 Ne gribouille pas

3. Autres comportements

5
 Trouble des expressions faciales
 Déficit attentionnel
 Attention visuelle pauvre
 Aversion pour le contact physique
 Réactions atypiques aux sons et d’autres stimulations sensorielles
 Retrait
 Jeux sensorimoteurs pauvres

b. Particularités sensorimotrices d’une personne présentant un


trouble du spectre autistique

1) Motricité globale

 Retard psychomoteur de 5 mois par rapport aux enfants du même âge


(Hauck et Dewey, 2001)
 Incoordination motrice fréquente
 Niveau d’activité est souvent fluctuant : signes d’hyperactivité ou
d’hypoactivité
 Mouvements pauvres, ralentis, différés dans leur exécution
 Difficultés lors de l’initiation du geste
 Particularités posturales : la tête inclinée sur l’épaule
 Marche à quatre-pattes caractérisée par une asymétrie entre les
mouvements des membres supérieur et inférieur
 La marche, acquise parfois, révèle quelques particularités spécifiques
aux enfants TED : anomalies de positionnement des bras en flexion ou
en extension, mouvements d’accompagnement inexistants, absence de
ballant des bras (Gilbert, 1989) ou balancier à contretemps
 Persistance de la marche sur la pointe des pieds au-delà de l’âge de 18
mois, problèmes de coordination entre bras et jambes (Hallett et al.,
1993).
 Fonction de coordination des mouvements est perturbée
 Difficulté dans les mouvements d’atteinte et de saisie (Mari et al.,
2003)
 Coordination des informations sensorielles perturbée chez ces enfants
 Habiletés à lancer et rattraper le ballon très diminuées (Tantam, 1991)
 Mouvements stéréotypés interférant avec leurs compétences motrices
 Difficulté dans les mouvements séquentiels
 Déficit dans la planification et l’exécution de mouvements complexes
 Capacités faibles de planification motrice
 Déficit du fonctionnement exécutif
 Dyspraxie
 Difficulté dans la programmation fluide des mouvements

6
2) Motricité fine

 Latéralisation tardive
 Dominance manuelle, ainsi retardée, sera caractérisée par des
problèmes de coordination entre les deux mains
 Développement lent des compétences en motricité fine
 Difficultés dans la manipulation précise des objets

3) Tonus

 Le tonus est souvent altéré : on retrouve des signes d’hypotonie ou


d’hypertonie selon les enfants, et selon le contexte chez un même
enfant
 Attitudes dystoniques principalement en flexion
 Difficultés à moduler, à contrôler son tonus
 Caractéristiques posturales paradoxales
 Hyperlaxité ligamentaire au niveau du tonus de fond
 Dysdiadococinésie au niveau du tonus d’action
 Faible force de la prise manuelle
 Dysharmonie tonique
 Hypertonie du tronc et des muscles proximaux des membres inférieurs
associée à une hypotonie des muscles distaux des membres inférieurs
et des muscles distaux et proximaux des membres supérieurs
 Trouble de l’ajustement et du contrôle postural

4) Equilibre

 Problèmes pour tenir en équilibre unipodal


 Équilibre dynamique déficitaire
 Équilibre sur des surfaces instables difficile

5) Rythme

 Difficulté de reproduire un rythme sur écoute du modèle


 Difficulté d’effectuer un déplacement sur un rythme spécifique

6) Fonctions cognitives

 Altération des fonctions exécutives


 Difficultés d’abstraction
 Tendance à la persévération
 Hypersélectivité dans le traitement de l’information

7
 Trouble de la planification
 Absence d’anticipation
 Peu d’ajustements posturaux anticipés
 Mode de traitement en rétroaction (feed-back) plutôt qu’un traitement
proactif (feed-forward)
 Trouble de l’attention

7) Schéma corporel

 Difficulté de perception corporelle


 Pas de limites corporelles, et c’est pour cela ils se cognent pour les
rechercher
 Ne semblent pas avoir expérimenté la présence corporelle
 Difficulté à se représenter leur corps

8) Graphomotricité

 Écriture souvent illisible


 Graphisme inexistant ou réduit à des traces dépourvues de
l’élémentaire rythmicité

9) Espace

 Tendance à se maintenir dans un espace uni ou bidimensionnel


 Tournoiements autour d’un point
 Exploration de la surface des objets en évitant tout orifice

10) Temps

 Le repérage temporel est uni ou bidimensionnel : temps figé ou


circulaire du « retour du même »

11) Latéralité

 Processus de latéralisation perturbée


 Moindre asymétrie de performances entre les mains dominante et non-
dominante
 Utilisation en première intention de la main non dominante
 Dissociation entre la main préférée et la main la plus performante
comme s’ils ne reconnaissent pas la main avec laquelle ils sont le plus
à l’aise
 Latéralité tonique et gestuelle spontanée indéterminée
 Taux de gauchers chez les personnes TSA supérieur à la population
générale

8
Références bibliographiques
- L’évaluation psychomotrice de l’enfant TED : difficultés et aménagements / mémoire en vue
de l’obtention du diplôme d’état de psychomotricienne / Université Toulouse III, Faculté De
Médecine, Toulouse Rangueil, Institut de formation en Psychomotricité / Fillol Camille, juin
2008, disponible sur :
http://www.psychomot.ups-tlse.fr/Fillol2008.pdf

- Fonctionnement moteur dans le cas d'autisme / Sally Rogers et Loisa Benetto / Collection
Enfance 2002/1 (Vol. 54)

- Place de la structuration de l’image du corps et grille de repérage clinique des étapes évolutives
de l’autisme infantile / Geneviève Haag / Collection Enfance 2009/1 (N° 1)

- Penser le corps chez l'enfant autiste, « Étude clinique » / BEHTANE Abdelkader, Jabali
Noureddine

- Manuel d’enseignement de psychomotricité, Tome 4, Sémiologie et nosographies


psychomotrices, Chapitre 9 : Sémiologie psychomotrice du trouble du spectre de l’autisme,
Coralie Réveillé, Aude Paquet, Cindy Le Menn-Tripi, Céline Laranjeira-Heslot et Julien Perrin /
Collection psychomotricité / Edition De Boeck Supérieur

- Autisme et psychomotricité, Julien Perrin, Thierry Maffre et Cindy Le Menn-Tripi / Collection


psychomotricité / Edition De Boeck Supérieur

Vous aimerez peut-être aussi