Delanoe Benoit
Delanoe Benoit
Delanoe Benoit
RECHERCHE
Benoit DELANOE
Préparé sous la direction de M. Éric BIDET, Responsable de la formation
2019 - 2020
Remerciements
Que tous ceux qui ont contribué à mener à bien ce stage trouvent ici l’expression de ma
parfaite considération.
1
Introduction
2
TABLE DES MATIÈRES
Remerciements 1
Introduction 2
3
II - Quelles sont les réponses apportées par l’Économie Sociale et Solidaire pour
une alimentation nouvelle, durable et de qualité ? 43
Conclusion 74
Références bibliographiques 76
4
Première partie :
5
I - 1 - Qu’est ce qu’un système alimentaire ? Comment fonctionne notre
système alimentaire ?
6
I - 1 - 2 - Comment fonctionne notre système alimentaire ?
Le système alimentaire est alors résumé en plusieurs étapes fondamentales que sont la
production, la transformation, la distribution et la consommation. Pour mieux
comprendre cet enchaînement d’étapes, il y a lieu de définir et de comprendre chacune
d’entre elles.
Tout d’abord, la production alimentaire est résumée comme l’ensemble des activités qui
permettent d’obtenir des aliments issus de l’agriculture, la chasse, la pêche et la
cueillette pour des fins de transformation, de consommation et de commercialisation
d’aliments consommables. On distingue essentiellement deux types de production
alimentaire, il y a d’un côté l’autoproduction et d’un autre l’agriculture commerciale. La
première concerne les aliments qui sont consommés par les personnes qui les ont
produits à travers leurs potagers, vergers, élevages personnels ou encore jardins
partagés. La seconde constitue une production d’aliments destinée à être vendu sur le
marché, qu’il soit local, national ou à l’exportation, on y retrouve différentes
productions selon les types d’aliments, qu’ils soient animales, végétales ou transformés.
7
L’étape de distribution constitue la troisième étape du système alimentaire. Elle est
quant à elle définie comme l’ensemble des activités qui participent à chacune des autres
étapes du système alimentaire par l’acheminement des matières premières, des aliments
transformés ou encore des produits finis d’une étape à une autre. Plus généralement, la
distribution est résumée comme l’étape consécutive à la transformation par le fait
qu’elle concoure à ce que les produits alimentaires issus des premières étapes
parviennent à la dernière étape, la consommation. On distingue ici deux types de
distribution, la distribution marchande réalisée par des entreprises spécialisées ou par
les producteurs eux-mêmes et la distribution non marchande effectuée par des
associations comme la banque alimentaire ou des proches de manière bénévole pour des
personnes fragiles ou des personnes d’une même famille. C’est ici que nous pouvons
exposer la distinction entre les circuits longs et les circuits courts, les premiers
correspondent à une mode de distribution impliquant un intermédiaire au plus entre
l’étape de production et l’étape de consommation tandis que les seconds impliquent
quant à eux plusieurs intermédiaires, en règle générale des entreprises de transformation
alimentaire ou de simples négociants. Enfin, on constate une dernière classification de
distribution alimentaire entre la distribution de “gros”, “semi-gros” et de détail. Comme
son nom l’indique, la distribution de gros signifie un acte d’achat de produits
alimentaires en grande quantité pour une redistribution en quantités variables à des
commerçants finaux de tailles différentes. Pour ce qui est de la distribution de
“semi-gros”, elle se fait aux niveaux des supermarchés ou encore des marchés
alimentaires, la différence avec les distributeurs en “gros” est que la vente se fait
directement entre un producteur et un détaillant, sans négociants intermédiaires, c’est
une forme de mise en marché en circuit court. La distribution au détail se fait par le
producteur lui-même, en effet il n’y a ni d’intermédiaires négociants, ni de commerçants
alimentaires spécialisés. La distribution alimentaire est effectuée du producteur au
consommateur.
8
Pour ce qui est des choix de consommations alimentaires, le consommateur prend en
compte différents paramètres comme son régime alimentaire, ses envies alimentaires,
l’éthique des produits achetés, les prix, ou encore les routines ou les normes religieuses.
Enfin, vient le moment de la consommation finale qui marque la dernière étape du
processus du système alimentaire. Cela correspond très simplement au moment où la
nourriture est ingérée par le consommateur finale, ce moment dépend lui aussi de
plusieurs variables liées aux habitudes et envies du consommateur.
La nouvelle étape que constitue la gestion des matières résiduelles alimentaires peut être
définie comme suit “une série d’opérations qui couvrent l’entreposage, le tri et
l’élimination des déchets”. Il est à noter que les déchets alimentaires peuvent être
produits par différents acteurs, que ce soit les ménages, les industriels, les commerçants
ou encore les institutions publiques, à chaque étape du système alimentaire il peut y
avoir des pertes et une forme de gaspillage alimentaire qui se réalise. En règle générale,
la gestion des déchets alimentaires implique une distinction entre la gestion par des
acteurs publics et la gestion par des acteurs privés. Pour ce qui est de la gestion publique
des résidus alimentaires, elle englobe la collecte des déchets réalisée par les éboueurs
dépendant des institutions publiques ainsi que la production de résidus alimentaires par
les institutions publiques, dans les cantines scolaires par exemple. Le plus souvent, les
institutions publiques essayent de montrer l’exemple en gaspillant le moins possible, en
mettant en place des centres de valorisation des déchets à travers le compostage ou des
centres d’élimination des déchets à travers les incinérateurs. Pour ce qui est de la
gestion privée des déchets alimentaires, on recense une panoplie d’acteurs avec des
problématiques spécifiques à chacun d’entre eux. Nous pouvons citer ici les ménages,
les commerces, les producteurs et les intermédiaires intervenants dans le système
alimentaire expliqué précédemment. Les ménages sont responsables de leur gestion des
déchets et mettent le plus souvent en place des pratiques visant à limiter le gaspillage et
ses effets économiques pour ces derniers à travers le compostage ou la consommation
des résidus alimentaires. Les autres acteurs cités font quant à eux appel le plus souvent à
d’autres acteurs spécialisés pour prendre en charge leur gestion des déchets. Il est à
noter que la gestion et la valorisation des déchets prise en compte dans notre système
alimentaire, ne l’est pas nécessairement pour l’ensemble des populations qui constituent
notre monde, en effet, le développement durable et la préoccupation de l’environnement
sont principalement présents dans les pays développés.
9
Cela s’explique par le fait que la préoccupation première des pays sous-développés ou
peu développés reste la sous-nutrition voir la famine, en Afrique notamment ainsi que
dans une partie des pays du Sud.
Suite à cette explication complète du système alimentaire et de ses diverses étapes, nous
pouvons désormais connaître l’ensemble des variables qui influent ou sont influencés
par ce système et ses effets. On peut résumer le système alimentaire actuel par le
schéma ci-dessous.
10
I - 1 - 3 - État des lieux de notre système alimentaire
Afin de mieux comprendre le système alimentaire qui est le nôtre, que ce soit à l’échelle
internationale ou mondiale, il y a désormais lieu de se pencher sur les valeurs actuelles
de chacune des variables qui influent sur notre système alimentaire. L’exposition de
chiffres concernant notre système alimentaire devrait nous aider.
Pour commencer, il y a lieu de s’arrêter sur des données concernant les crises
alimentaires afin de se rendre compte de l’importance de ces dernières à l’échelle
mondiale. Une crise alimentaire peut être définie soit comme une forme d’intoxication
alimentaire très répandue et impactant de nombreuses populations, soit comme une
situation se rapprochant d’une pénurie alimentaire, voir d’une famine pour les pays les
plus pauvres connaissant de grandes difficultés à s’alimenter de manière convenable.
Lorsque l’on parle de crise alimentaire, on pense le plus souvent aux années 2007-2008
qui ont vu les prix des matières premières alimentaires augmenter de manière
exponentielle, ce qui s’est répercuté sur le prix des denrées alimentaires dans le monde.
Cela a engendré de graves famines dans les Pays les Moins Avancés (PMA) où la
majeure partie des dépenses des ménages est consacrée à l’alimentation. Dernièrement,
la crise alimentaire de 2018 a touché le Yémen, l'Ethiopie, le Congo et le Soudan
principalement pour voir près de 72 millions de personnes en état d’insécurité
alimentaire aiguë.
La malnutrition est parfois assimilée à une forme de crise alimentaire, elle est
simplement définie comme un état nutritionnel qui s’éloigne des besoins nutritionnels
normaux que ce soit en matière de quantité comme de qualité. On y retrouve à la fois la
sous-alimentation et la suralimentation selon la Food Agriculture Organization, à la fois
le manque et la surabondance. C’est pourquoi l’Organisation Mondiale de la Santé
(OMS) recensait pas moins d’1,1 milliards d’être humains souffrant de malnutrition en
2017.
11
L’insécurité alimentaire aiguë se caractérise par le fait qu’une personne ou qu’un groupe
de personne se retrouve dans l’incapacité de combler ses besoins alimentaires et que
cette situation influe sur ses conditions d’existence et menace sa vie selon la Food
Agriculture Organization (FAO).
Selon le dernier rapport présenté en 2019 conjointement par l’Union Européenne,
l’Organisation des Nations Unies pour l’Alimentation et l’Agriculture, 113 millions de
personnes vivant dans 53 pays différents auraient connu une situation qualifiée
d’insécurité alimentaire aiguë, contre 124 millions en 2017. Nous constatons donc
naturellement une légère baisse malgré le fait que la population mondiale ait augmenté,
mais cette donnée inquiétante fait tout de même état du fait que 1 % de la population
soit dans un état d’insécurité alimentaire aiguë. Pour faire face à ce défi, l’Union
Européenne a débloqué pas moins de 9 milliards d’euros pour financer diverses
initiatives dans des domaines variés allant de la sécurité alimentaire à l’agriculture
durable dans une soixantaine de pays entre 2014 et 2020.
La Food Agriculture Organization (FAO) a défini cinq grandes phases pour classer la
population mondiale en fonction de sa situation et sa gestion de ses besoins
alimentaires.
La première phase est appelée “Minimal”, ici les individus sont entièrement capables de
répondre à leurs besoins alimentaires comme non alimentaires essentiels à leur
existence sans avoir à mettre en place une stratégie particulière pour accéder à des
revenus leur permettant de se nourrir convenablement.
La seconde phase est appelée “Stress”, ici les individus sont tout à fait capable d’avoir
une consommation alimentaire minimale suffisante mais ne sont nullement en mesure
de faire face à leurs besoins non alimentaires essentiels sans la mise en place de
stratégies d’adaptation relativement néfastes pour rythme de vie ou leur santé.
La troisième phase est appelée “Crise”, ici les individus connaissent de réelles
difficultés à avoir une consommation stable et répondant à leurs besoins de chaque
instant, ils sont le plus souvent dans un état de sous alimentation supérieure à la
moyenne. Ces derniers connaissent également une forme d’épuisement de leurs
ressources pour faire face à leurs besoins alimentaires relativement rapidement, ce qui
entraîne des écarts de consommation dans le temps pour de mêmes individus.
La quatrième phase est appelée “Urgence”, ici les individus font face à de très
importants écarts de consommation alimentaire dans le temps, ce qui a pour
conséquence une malnutrition très élevée voir une mortalité importante. Ils doivent faire
face le plus souvent à de grandes pertes de moyens de subsistance, car ils sont très
dépendants alimentairement comme financièrement.
La dernière phase de la FAO est appelée “Famine”, ici les individus sont en manque
extrême de produits alimentaires, de produits d’hygiènes de base, ils n’ont peu ou pas
de moyens financiers pour faire face à l’ensemble de ces besoins. La conséquence de
cela est évidente, c’est la famine et le plus couramment la mort qui en suit.
12
La question que l’on doit se poser ici est simplement de rechercher les causes de ces
inégalités alimentaires et plus généralement de ces inégalités de développement et de
chance à la naissance. Nous allons commencer par exposer ici les principaux moteurs de
l’insécurité alimentaire dans le monde que sont les chocs climatiques, les chocs
économiques et les conflits.
Une des raisons peut être notre simple système alimentaire et les lourdes conséquences
de celui-ci sur notre environnement. En effet, le climat et les catastrophes naturelles
sont indirectement responsables de situations d’insécurité alimentaire aiguë touchant
pas moins de 29 millions de personnes en 2018. Ce désastre alimentaire est
principalement dû aux changements climatiques, la plupart des personnes touchées se
trouvant sur le continent africain, en Éthiopie, au Malawi, au Kenya ou au Mozambique.
En dehors des chocs climatiques, les chocs économiques sont également le moteur
indirect des inégalités alimentaires dans le monde. On recensait en 2018 pas moins de
10 millions de personnes en situation d’insécurité alimentaire aiguë à cause des chocs
économiques, principalement au Burundi, au Zimbabwe et au Soudan.
Enfin, les conflits entre les populations d’un même pays comme entre les pays
eux-mêmes entraînent une situation d’insécurité qui constitue le premier moteur de
l’insécurité alimentaire aiguë dans le monde en 2018. En effet, c’est pas moins de 74
millions de personnes sur les 113 millions en situation d’insécurité alimentaire aiguë qui
sont concernés ici que ce soit en Afrique pour plus de la moitié, en Asie ou au
Moyen-Orient pour le reste.
La Food Agriculture Organization a fait des prévisions sur la décennie à venir et elles
vont dans le sens actuel, autrement dit, ils ne prévoient pas de diminution ni de
ralentissement de l’insécurité alimentaire et de ses conséquences. Ce devrait être encore
principalement dû nombreux conflits persistants sur les territoires concernés aujourd’hui
ainsi qu’aux conséquences du réchauffement climatique qui devrait s’aggraver bien que
l’écologie et le développement durable aient le vent en poupe dans les pays développés
européens. L’Organisation des Nations Unies dédié à l’alimentation et à l'agriculture
ajoute même un nouveau facteur qu’est l’évolution et l’apparition de nombreuses
maladies et épidémies comme le choléra, la rougeole et plus récemment le coronavirus.
On peut en conclure que le système alimentaire mondial est bien loin d’être égalitaire,
alors que notre planète possède les moyens de nourrir l’ensemble des êtres humains, la
répartition et l’utilisation des ressources naturelles pour produire et distribuer des
produits alimentaires ne sont donc pas optimales. Après avoir exposé les principales
causes de l’insécurité alimentaire, charge aux grandes puissances mais aussi à chacun
d’entre nous de prendre conscience de la situation et d’agir sur les facteurs de
l’insécurité alimentaire mondiale afin de la réduire ou au moins de ralentir sa
progression.
13
I - 2 - Quelles sont les conséquences du fonctionnement de notre système
alimentaire sur différentes variables ?
Dans cette seconde sous-partie, nous allons nous pencher sur les différentes
conséquences relativement néfastes que peut avoir notre système alimentaire et chacune
de ses étapes. Nous commencerons par détailler les conséquences de celui-ci sur
l’environnement puis sur le renforcement des inégalités avant se concentrer sur les
effets négatifs de notre alimentation sur notre santé.
Il existe un lien étroit entre notre système alimentaire et l’environnement. Nous avons
défini précédemment ce qu’était notre système alimentaire et ses relations avec de
nombreuses variables, nous allons désormais nous pencher sur l’environnement et
effectuer le même travail. Le concept d’environnement apparaît en France dans les
années 1960, il peut être défini selon différents points de vues que ce soit de manière
scientifique, économique ou simplement terminologique. Nous allons essayer de
produire une définition de l’environnement de la façon la plus transversale possible.
L’environnement est un ensemble d’éléments de différentes natures, physiques,
chimiques et biologiques combinés à des facteurs sociaux comme économiques qui
influent les uns sur les autres en ayant différents effets, directs, indirects, immédiats,
différés, ces relations sont également fortement impactés par l’activité des êtres vivants
et les activités humaines. C’est cet ensemble d'interactions, d’acteurs, de données qui
constituent l’environnement. Ce dernier est plus généralement défini comme l’ensemble
des composants naturels que constitue la Terre avec l’eau, la terre, les végétaux, les
animaux qui impactent et sont impactés par l’activité humaine. En effet, on oppose
vulgairement l’environnement à l’activité humaine, car cette dernière influe et impact
fortement l’environnement.
Ici, nous allons nous intéresser plus particulièrement aux conséquences que peut avoir
notre système alimentaire de la production alimentaire à la production de déchets en
passant par la consommation alimentaire. Pour ce faire, il y a lieu de détailler chaque
point important de la chaîne alimentaire afin de connaître l’impact environnemental de
chaque étape de cette dernière en nous concentrant particulièrement sur la production
alimentaire française. Nous nous appuierons sur des données collectées par l’Agence De
l’Environnement et de la Maîtrise de l’Énergie (ADEME) qui dépend directement du
Ministère chargé de la Transition Écologique et Solidaire.
14
I - 2 - 1 - 1 - La production alimentaire
Pour la suite, on remarque des impacts de différentes intensités et conséquences sur bon
nombre d’éléments naturels que ce soit sur la qualité de l’air, de l’eau, la fertilité des
sols mais également la biodiversité. Nous allons détailler ces impacts sur l’ensemble de
ces éléments naturels par ordre d’énonciation.
15
Premièrement les impacts de notre production alimentaire sur la qualité de l’air sont
nombreux bien que l’agriculture ne soit pas la seule responsable de la détérioration de la
qualité de l’air. En effet, un rapport sénatorial a estimé un coût pour la France de plus de
100 milliards d’euros lié à la pollution de l’air et ses conséquences sanitaires puisque
cette commission sénatoriale nous apprend que 42 000 personnes décèdent chaque
année à cause de la pollution atmosphérique. De plus, le non-respect de l’ensemble des
règles et normes européennes, l’inaction politique globale face à ce fléau et la
substitution de la pollution liée à l’industrie par une pollution liée à l’agriculture, le
logement et le chauffage. La part de l’agriculture dans ces 100 milliards est relativement
difficile à déterminer de par le fait que l’activité agricole pollue l’air de différentes
manières. D’un côté, on remarque que l’activité agricole est directement responsable de
19 % des émissions de particules fines1 et 48 % des particules en suspension, d’un autre
côté la part de l’agriculture dans l’émission de particules d’ammoniac est de 94 %. Pour
essayer d’enrayer ce phénomène, les pouvoirs publics par le biais du Ministère de
l’Agriculture et de l’Alimentation et de l’Union Européenne se questionne sur la
stratégie à adopter, soit taxer les grands pollueurs soit les accompagner vers d’autres
méthodes de production agricole. Plus précisément, les éléments utilisés pour l’activité
agricole responsables de la pollution de l’air sont les pesticides, les carburants, les
engrais, les poussières ou encore les déjections animales qui émettent des polluants
naturels. Reste à savoir comment transformer l’activité agricole soit pour remplacer ou
supprimer l’utilisation de certains de ces produits, soit pour trouver des débouchés
comme la méthanisation2 aux déjections animales.
Dans un second temps, nous allons nous intéresser à l’impact de l’activité agricole sur
les sols. Il faut rappeler qu’en France, pas moins de 54 % de la surface hexagonale est
utilisée à des fins agricoles, ce n’est que 12 % de la surface mondiale qui est concernée,
ce qui fait de la France une grande puissance agricole mondiale. Cependant, plus il y a
de surface exploitée agricolement, plus les sols sont pollués par l’utilisation plus ou
moins intensive de produits chimiques que ce soit des engrais, des pesticides ou divers
produits phytosanitaires. D’après une étude de la Food Agriculture Organization (FAO),
un tiers des sols dans le monde seraient dégradés pour plusieurs raisons, on peut citer ici
l’érosion, la salinisation3, la diminution de la matière organique, la pollution et toutes
autres raisons liées à des pratiques agricoles non durables.
1
Particules fines : particules provenant d’éléments non-naturels présents dans l’air ou dans l’eau,
quantifiables par filtration, responsables de l’augmentation de la pollution de l’air et de ses conséquences
sur l’environnement et la santé. LAROUSSE
2
Méthanisation : Traitement naturel des déchets organiques qui conduit à une production de gaz
convertible en énergie provenant de la décomposition biologique des matières organiques dans un milieu
en raréfaction d’air (Biogaz). LAROUSSE
3
Salinisation : Phénomène d’augmentation de la teneur en sel dans le sol ou dans l’eau qui contribue à
l'altération de la qualité de la matière naturelle. LAROUSSE
16
Pour enrayer la dégradation des sols, plusieurs solutions sont possibles, cela peut passer
par la diminution progressive de l’utilisation de produits phytosanitaires, par de
nouveaux choix de consommation chez chacun d’entre nous, par la limitation du
gaspillage alimentaire ou encore par une réforme globale de notre système alimentaire
et nécessairement de notre production agricole.
En ce qui concerne la consommation en énergie importante induite par l’activité
agricole, il y a également des progrès à faire puisque comme nous le savons 85 % de
l’énergie produite en France est produite par des énergies fossiles contre seulement 15
% par des énergies renouvelables. En effet, l’exploitation agricole connaît différents
postes de consommation d’énergie que peuvent être les engins agricoles, le
fonctionnement des bâtiments d’élevage, le chauffage de certaines surfaces, le stockage
de céréales ainsi que le transport de ces dernières. Dès lors, plusieurs axes
d’amélioration apparaissent, on peut notamment citer ici l’utilisation et la production
d’énergies renouvelables avec la présence de panneaux solaires sur les bâtiments
agricoles. On peut également citer l’optimisation de l’utilisation des ressources
énergétiques dans le processus de production agricole, la diminution de la quantité de
déchets ou encore la réduction de l’impact environnemental du transport par le
développement des circuits courts.
Ensuite, nous pouvons nous intéresser aux différents impacts sur l’eau et la qualité de
l’eau de l’activité agricole. On note tout d’abord que l’irrigation agricole représente pas
moins de 70 % de l’utilisation de l’eau dans le monde selon l’Organisation de
Coopération et de Développement Économique (OCDE), en France, ce sont 5 milliards
de mètres cube d’eau qui sont utilisés chaque année pour l’agriculture, c’est 3 fois plus
que l’eau à usage domestique. L’usage de l’eau pour l’agriculture est tout simplement
nécessaire mais il est possible de diminuer l’usage de l’eau ou de changer notre
consommation en optant pour des produits alimentaires moins consommateurs d’eau
dans leurs processus productifs. En effet, un kilo de pommes de terre nécessite 100
litres d’eau, un kilo de blé ce n’est pas moins de 1 500 litres d’eau et enfin pour la
production d’un kilo de boeuf, ce sont 16 000 litres d’eau qui sont consommés, c’est
pourquoi un changement alimentaire en limitant la consommation de viande réduirait,
par voie de conséquence, la consommation d’eau dans l’agriculture.
Dans le même temps, l’activité agricole et ses pratiques contribuent à la pollution des
rivières et des nappes phréatiques4, en effet, on recense que 60 % des nitrates présents
dans nos nappes phréatiques et nos rivières sont directement liés à l’activité agricole.
Bien que les nitrates ne sont pas dangereux, leurs transformations en nitrites ont un
impact négatif sur la santé si des êtres vivants viennent à consommer ce type de
substance.
4
Nappes phréatiques : Masse d’eau contenue dans les fissures du sous-sol accessible grâce à un puit ou
un forage. FUTURASCIENCE
17
C’est également le cas du phosphore5 présent dans les cours d’eau à cause de l’activité
agricole et du ruissellement des produits phytosanitaires utilisés dans les cultures
agricoles. Ce dernier n’est pas dangereux en quantité raisonnable puisqu’il est
naturellement présent dans le corps humain mais en trop grande quantité, il peut être à
l’origine de problèmes de santé divers. Au total, ces produits phytosanitaires utilisés
pour l’agriculture sont présents dans la majeure partie des cours d’eau et dépassent la
norme autorisée de 25 % dans chacun des cours d’eau recensés.
Alors comment réduire l’impact des activités agricoles sur l’eau ? Il faudrait à la fois
réduire les pollutions liées à l’agriculture mais aussi limiter l’utilisation de l’eau pour
les cultures et l’élevage. Premièrement, afin de limiter les prélèvements en eau induits
par l'activité agricole, il faudrait optimiser la quantité d’eau utilisée pour chaque plante
en utilisant que la quantité nécessaire, cela peut se faire par le développement de
nouveaux systèmes d’irrigation tel que la micro-irrigation6, mettre en place de nouveaux
outils permettant de préserver l’humidité du sol en le recouvrant d’herbes fraîches ou de
copeaux de bois. Enfin, il est nécessaire de changer notre agriculture dans sa globalité
en cultivant des espèces végétales adaptées aux conditions environnementales de chaque
territoire afin de faire face à l’impact des conditions climatiques sur l’évaporation de
l’eau par exemple. Deuxièmement, afin de limiter la pollution de l’eau induite par
l’agriculture, la solution la plus simple serait de limiter voir de supprimer l’utilisation de
produits phytosanitaires ou au moins de recourir à ce type de produits de manière
raisonnée. De plus, il faut réfléchir à l’organisation physique des cultures et de l’activité
agricole en favorisant les effets naturels de certaines espèces sur les éléments nuisibles
des cultures, pour ce faire, l’installation de haies ou de bandes d’herbes au bord des
champs ou des rivières, empêcherait les éléments polluants de l’agriculture de s’étendre
vers les points d’eau.
L’agriculture a donc des effets dévastateurs sur l’air, le sol, l’eau mais également la
biodiversité et l’ensemble des êtres vivants autour des cultures ou des élevages que ce
soit des végétaux ou des animaux. On s’intéresse ici non seulement à l’agriculture
terrestre mais également à la pêche et à la pisciculture7, en effet la surexploitation des
océans et des terres agricoles impact fortement la biodiversité.
Afin de réduire les différents impacts négatifs de l’activité agricole sur toutes les
données énoncées précédemment, plusieurs concepts apparaissent comme
l’agroécologie proche de l’agriculture biologique et qui sera développé prochainement
dans ce mémoire de recherche.
5
Phosphore : Élément chimique présent dans l’ADN du corps humain et présent en grande quantité dans
les produits phytosanitaires utilisés pour l’agriculture. LAROUSSE
6
Micro-irrigation : Forme d’irrigation dans laquelle l’eau est distribuée sous faible pression près du pied
des plantes, à l’aide de tuyaux percés de petits orifices. LAROUSSE
7
Pisciculture : production de poissons par élevage dans des bassins dédiés. LAROUSSE
18
I - 2 - 1 - 2 - La consommation alimentaire
19
Au total, c’est plus d’énergie et plus de matières premières consommées ainsi que la
présence systématique d’un emballage important dans des matières pas forcément
recyclables.
Enfin, notre consommation alimentaire a un impact néfaste sur l’environnement de par
le fait que nous achetons n’importe quel produit en toutes saisons, ce qui signifie que
soit la production de certaines denrées ne suit pas les saisons, soit nous consommons
des produits importés alors que nous pouvons en consommer d’autres en suivant les
saisons. Ce phénomène concerne principalement les fruits et les légumes que nous
retrouvons sur les étals de nos supermarchés quelle que soit la saison. Ces produits
peuvent être soit importés par avion ou bateau, leur transport est alors synonyme d’une
empreinte carbone importante, soit ils sont cultivés sur place en reproduisant
l’environnement des saisons chaudes sous des serres chauffées qui ont elles aussi une
empreinte carbone forte par l’émission de gaz à effet de serre en quantité non
négligeable. Plus concrètement, la production d’une tomate hors saison nécessite quatre
fois plus d’eau et dix fois d’énergie que la production d’une tomate lors de la saison qui
lui est dédiée. De plus, les fruits ou les légumes produits hors saison dans des serres ou
importés sont le plus souvent de moins bonne qualité avec des propriétés gustatives
moins bonnes que des produits locaux de saison, l’arbitre entre ces deux produits reste
le prix pour le consommateur. Pour cet exemple en particulier, les premiers
responsables de l’impact environnemental de notre consommation sont les
consommateurs eux-mêmes qui par leurs choix de consommation orientent la
production. C’est donc à chacun d’entre nous de faire les choix de consommation qui
nous semble justes et respectueux de l’environnement pour que cela influ directement
sur l’ensemble des parties prenantes de la chaîne alimentaire qui feront alors évoluer
leurs offres vers des produits de saisons ou au moins des produits plus respectueux de
l’environnement.
20
I - 2 - 1 - 3 - La production de déchets
Nous allons ici nous intéresser à la production de déchets consécutive aux différentes
étapes de notre système alimentaire. En effet, on ne parle pas uniquement ici de
gaspillage alimentaire mais également du gaspillage lié à la production alimentaire, la
distribution alimentaire ainsi que le stockage alimentaire.
Chaque année c’est pas moins d’un tiers des aliments produits dans le monde qui ne
sont pas consommés, en France le gaspillage alimentaire représente 10 millions de
tonnes de denrées alimentaires par an soit l’équivalent de 18 milliards de repas jetés à la
poubelle. Il faut savoir que le gaspillage commence bien avant que la nourriture n’arrive
dans nos assiettes, lors de la phase de production et de transformation des aliments,
pendant le transport, la distribution en magasin pour arriver enfin à la consommation.
Lors de la phase de production, toutes les cultures ne sont pas ramassées et certaines
denrées alimentaires restent en terre, ensuite ces dernières sont triées selon différentes
caractéristiques que peuvent être la taille, la forme ou encore la couleur pour les fruits et
les légumes particulièrement. Ensuite, pendant la phase de transformation, on estime à
10 % le taux de perte entre les aliments entrants et les aliments sortants de cette phase.
Puis c’est la phase de commercialisation consécutive au transport et aux pertes
consécutive à celui-ci, avec l’endommagement d’une partie de la marchandise ou encore
une rupture de la chaîne du froid dans certains cas. Pour la commercialisation, certains
aliments ne sont pas vendus assez vite, certains emballages sont abîmés et donc non
présentable selon les commerçants, ces derniers sont alors jetés. Enfin pendant la
dernière phase, la consommation par les ménages, les restaurants ou les collectivités,
une partie des aliments est jetée car elle n’est pas consommée avant la date limite de
consommation ou simplement parce qu’au moment des repas, certaines personnes ne
mangent pas toute leur assiette et jettent alors leurs restes à la poubelle plutôt que de les
manger plus tard.
Au total en France, la grande distribution jette chaque année 750 000 tonnes de
nourriture, les cantines et les restaurants plus d’un million de tonnes et les ménages
gaspillent environ deux millions de tonnes, soit entre 20 et 20 kilos de nourriture par
personnes et par an. Si l’on décompose ce gaspillage par type d’aliments, ce sont les
légumes qui sont les plus gaspillés, ils représentent 25 % des aliments gaspillés, les
fruits représentent 18 % des aliments gaspillés, le pain 15 %, les restes cuisinés 13 % et
le reste 29 % (fromage, boissons et autres).
Dans un monde où près d’un milliard de personnes souffrent de la faim ou de
malnutrition, le gaspillage alimentaire est une forme d'aberration. En France, près d’une
personne sur dix a du mal à se nourrir correctement. Le gaspillage alimentaire a
également un impact sur l’environnement, car gaspiller de la nourriture c’est gaspiller
de l’eau et des ressources énergétiques. Au final, ce phénomène est aussi un gaspillage
économique, en France le gaspillage alimentaire représente ainsi pour les ménages plus
de 10 milliards d’euros soit 159 euros par personne et par an.
21
I - 2 - 2 - Les conséquences du fonctionnement de notre système alimentaire sur
l’augmentation des inégalités
En dehors des conséquences que peut avoir notre système alimentaire et nos habitudes
alimentaires sur l’environnement, ce dernier a également de lourdes conséquences sur
l’augmentation des inégalités. Plus concrètement, nous allons voir ici, les conséquences
du fonctionnement de notre système alimentaire sur l’accès à la nourriture, les prix des
produits alimentaires de premières nécessités et sur le niveau de vie des producteurs.
22
L’Organisation des Nations Unies dédiées à l’agriculture et l’alimentation, la Food
Agriculture Organization (FAO), n’oublie pas que l’accès à la nourriture doit se faire en
corrélation avec l’accès à l’eau. En effet, selon l’Organisation Mondiale et la Santé
(OMS), près de 11 % de la population mondiale n’a toujours pas accès à l’eau potable
en 2019, cela représente pas moins de 844 millions de personnes principalement en
Afrique et en Asie de l’Est. Bien que de nets progrès ont été constatéS en ce qui
concerne l’accès à l’eau puisque c’était 24 % de la population qui était privée d’eau
potable dans les années 1990, de nombreuses disparités persistent en Afrique
notamment. Aujourd’hui en Afrique du Nord 90 % de la population a accès à l’eau
potable contre seulement 61 % en Afrique sub-saharienne.
23
I - 2 - 2 - 2 - Des inégalités causées par les prix
24
En effet, la demande croissante en produits laitiers et en viande nécessite d’abord de
nourrir les animaux d’élevage avec des céréales qui pourraient nourrir des êtres
humains. Cette demande est également responsable d’une augmentation de l’occupation
des terrains agricoles pour l’élevage, ce qui fait indirectement croître le prix des céréales
dédiées à la nourriture humaine. Enfin, l’apparition des bio-carburants qui devraient se
substituer aux ressources fossiles est synonyme d’une augmentation de la
consommation de céréales pour un autre but qu’un but alimentaire.
La spéculation financière est également une raison importante de la progression des prix
de la nourriture, notamment après 2008 et les conséquences de la crise financière
mondiale des subprimes. Les spéculateurs et les multinationales jouent sur les prix des
denrées alimentaires en bourse pour s’enrichir personnellement sans se préoccuper des
conséquences que cette activité peut avoir sur la part du pouvoir d’achat qu’une partie
de la population mondiale consacre à son alimentation. On peut lier la spéculation sur
les produits agroalimentaires avec la spéculation sur les énergies fossiles telles que le
pétrole. En effet, l’activité agricole nécessite une grande consommation de pétrole pour
la production, la transformation et principalement le transport des denrées alimentaires.
Suite à la crise financière ou aux différents chocs pétroliers, l’augmentation du prix du
baril s’est répercutée directement sur l'augmentation des prix des produits alimentaires.
Historiquement, on note que le prix des denrées alimentaires sur les marchés financiers
alimentaires a baissé entre les années 1960 et les années 2000 pour augmenter lentement
jusqu’en 2008 et la crise des subprimes9 où ils ont fortement augmenté avant que
l’augmentation s'atténue jusqu’à aujourd’hui. Ces augmentations du prix des aliments
ont eu des répercussions négatives sur le pouvoir d’achat de nombreux pays en voie de
développement, leurs populations connaissent des difficultés à avoir accès à la
nourriture. En ce qui concerne les pays les plus pauvres, ils sont grandement dépendants
des importations à hauteur de plus de 90 %, leur accès aux denrées alimentaires s’est vu
considérablement réduit.
La flambée constatée des prix des produits alimentaires a impacté plus d’un milliard de
personnes dans le monde, ce sont des populations qui consacrent plus de 80 % de leurs
revenus mensuels à l’alimentation.
9
Crise des subprimes : phénomène provoqué par des prêts immobiliers risqués que les
emprunteurs n’ont pas pu honorer provenant des États-Unis qui a provoqué une crise financière
mondiale. LAROUSSE
25
I - 2 - 2 - 3 - Des inégalités de revenus pour les agriculteurs
Notre système alimentaire et son fonctionnement sont des facteurs d’inégalités sociales
non seulement en ce qui concerne la consommation alimentaire mais également la
production alimentaire. Il existe dans le monde deux grands types d’agriculture avec
l’agriculture qui nourrit localement les populations et l’agriculture qui nourrit la planète.
La première de ces deux formes d’activités agricoles est présente dans les pays pauvres
avec une agriculture qualifiée de traditionnelle. Ce qualificatif signifie simplement que
ces agriculteurs n’ont pas les moyens de se procurer des outils, des machines, des
semences ou encore des pesticides afin d’accroître leurs rendements, ce sont les paysans
avec leurs mains qui travaillent la terre. La seconde de ces deux formes d’activités
agricoles est quant à elle présente dans les pays développés, elle est qualifiée
d’agriculture productiviste. Cette dernière a pour objectif à la fois de nourrir la
population locale et à la fois de nourrir le reste de la planète en exportant la majeure
partie de sa production. La différence avec la première forme d’agriculture réside dans
le fait que les agriculteurs ont les moyens nécessaires pour se procurer des matériels
agricoles, des engrais et tous types de pesticides pour une optimisation des rendements.
Normalement, l’agriculture est un levier permettant d’agir positivement sur la pauvreté
tout en étant un facteur de croissance et en permettant de nourrir la population. Pour
prendre l’exemple de l’agriculture française, elle fait face et va faire face à de nombreux
défis dans un avenir proche. En France, nous comptons actuellement 435 000
exploitations agricoles selon la Mutuelle Sociale Agricole (MSA), cette donnée a
diminué de 11 % en 10 ans mais, logiquement, les surfaces agricoles de chacune d’entre
elles augmentent dans le même temps. On note également une nette progression des
exploitations agricoles d’agriculture biologique passant de 11 000 en 2002 à 32 000 en
2016 pour arriver à représenter pas moins de 5 % de la surface agricole exploitée en
France. Le travail d’exploitant agricole étant dur physiquement, répétitif et relativement
exigeant, nous pouvons nous attendre à ce que ces derniers récoltent le fruit de leur
travail de manière raisonnable. Ce n’est malheureusement pas le cas puisque selon
l’Institut National de la Statistique et des Études Économiques (INSEE), environ 20 %
des agriculteurs ne peuvent se verser de revenus chaque année, malgré cela le revenu
médian de ces derniers est situé à 1 390 € mensuels avec de grandes disparités. En effet,
les agriculteurs dans des situations relativement précaires cultivent des céréales ou font
de l’élevage en quantité trop peu importante. Ce manque à gagner pour une partie des
agriculteurs s’expliquent par le fait qu’ils vendent le plus souvent leur production à de
grandes entreprises de l’agroalimentaire qui fixent des prix d’achat de matières
premières au plus bas, ainsi que par l’ouverture des marchés agricoles en Europe et dans
le monde. La signature de différents accords de libre-échange entre États met en
concurrence des agriculteurs du monde entier, et les agriculteurs français ne sont pas les
plus compétitifs, c’est pourquoi ils orientent leurs productions sur des produits agricoles
de qualité afin de se différencier et de pérenniser leur activité.
26
Depuis quelques années, de nouveaux modes de commercialisation plus juste pour les
producteurs voient également le jour en dehors de l’agriculture biologique comme les
circuits-courts, le commerce équitable, les Associations pour le Maintien d’une
Agriculture Paysanne (AMAP) ou encore les coopératives agricoles qui cherchent des
débouchés pour leurs adhérents agriculteurs. Nous expliquerons le fonctionnement de
chacune de ces innovations sociales agricoles en deuxième partie de ce mémoire.
Pour conclure sur les défis que devra relever l’agriculture française prochainement, il y
a non seulement le revenu de ces acteurs mais également la moyenne d’âge de ces
derniers. Celle-ci s’établissait à 52 ans en 2017 selon le Ministère de l’Agriculture et de
l’Alimentation, cette profession n’attire donc pas la jeunesse pour les différentes raisons
évoquées précédemment. On relève également que cette profession est en majeure partie
masculine puisque ces derniers représentent pas moins de 70 % des exploitants
agricoles en France aujourd’hui. Pour attirer davantage de jeunes agriculteurs, l’Europe
et la Politique Agricole Commune (PAC) travaillent à ce que les agriculteurs de demain
puissent bénéficier d’un revenu décent soit grâce aux aides européennes soit grâce à des
productions agricoles innovantes et spécifiques notamment avec les circuits courts ou
l’agriculture biologique.
27
I - 2 - 3 - Les conséquences du fonctionnement de notre système alimentaire sur
notre santé
Tout d’abord, la production alimentaire commence par l’agriculture où peut être utilisé
des produits non seulement néfastes pour l’environnement mais également pour notre
santé, que ce soit des engrais, des produits phytosanitaires ou des pesticides. Ensuite
vient l’étape de la transformation alimentaire pour arriver au produit prêt à la
consommation, c’est ici que bon nombre d’éléments mauvais pour notre santé peuvent
être ajoutés.
De plus, il est constaté quelquefois la présence de certaines substances non-indiquées
dans les composants inscrits sur les emballages de certains produits alimentaires. Ces
découvertes peuvent avoir de graves répercussions sur la santé des personnes qui les
consomment à leurs insus. On appelle plus couramment ces découvertes, des scandales
sanitaires, les principaux sont exposés dans la frise chronologique ci-dessous.
28
Notre système alimentaire commercialise des produits alimentaires de qualité différente,
celle-ci est liée le plus souvent au type de production et aux éléments chimiques ou
naturels utilisés au cours du processus de production agricole et du processus de
transformation.
La production alimentaire industrielle et la consommation des produits en provenant
peut provoquer chez les consommateurs de graves maladies telles que l’obésité, le
diabète ou encore l’hypertension. Nous pourrions alors rendre responsable le
consommateur dans ses choix de consommation, mais bon nombre de ces derniers se
nourrissent en fonction de leurs pouvoirs d’achat avant de leurs envies. Leur
alimentation peut alors être déséquilibrée ou trop riche en matières grasses ce qui peut
être un facteur de l’apparition de diverses maladies. Nous pouvons citer en exemple le
cas des États-Unis où 34 % de la population est en situation d’obésité, ce peut être dû ici
à l’omniprésence des Fast-foods ou à la surconsommation de plats cuisinés surgelés ou
en boîte, trop riches en conservateurs ou en sucre.
Le problème qui réside dans le monde pour les conséquences de l’alimentation sur la
santé est donc l’accès à une alimentation saine et de qualité puisque les aliments les plus
impactants négativement sur la santé sont les plus accessibles. En outre, les différents
choix alimentaires ne se limitent pas au seul pouvoir d’achat. Cela peut aussi dépendre
de la catégorie socio-professionnelle, les habitudes alimentaires lors de l’enfance ou
encore le niveau de diplôme comme nous pouvons le voir ci-dessous.
29
On note également que la consommation de produits issus de l’agriculture biologique
diffère non seulement selon les revenus mais également selon la catégorie
socio-professionnelle puisqu’un cadre consomme deux fois plus de produits biologiques
qu’un ouvrier. Nous pouvons voir dans le graphique ci-dessous les différents facteurs
influents sur les choix de consommation des Français selon le niveau de diplôme.
30
Enfin sur ce dernier graphique, nous pouvons indirectement mettre en relation le niveau
de diplôme et la prévalence en surpoids et en obésité pour les Français.
L’ensemble de ces données sont à prendre en compte mais également à nuancer puisque
certes le niveau de revenu ne rentre pas en compte directement mais le plus souvent les
personnes diplômés ont des revenus plus importants. Dès lors, ces derniers sont moins
regardant sur les prix et ont accès à des produits de qualité supérieure par rapport à des
personnes peu diplômées et par conséquent avec des revenus inférieurs. Nous pouvons
en conclure que l’alimentation est un marqueur d’inégalités sociales puisque ces
inégalités n’offrent pas à chacun les mêmes accès à des produits sains et de qualité, par
conséquent les personnes les moins aisées sont en moyenne davantage atteint par le
surpoids ou l’obésité.
31
I - 3 - Qu’est ce qui doit changer concrètement dans notre système
alimentaire ? Quelles sont les solutions possibles ?
Après avoir présenté notre système alimentaire et ses conséquences sur différentes
variables, nous allons exposer dans cette sous-partie ce qui doit changer. En premier
lieu, nous verrons ce qui doit changer dans notre façon de produire, et nous présenterons
le concept d’agroécologie. Puis en second lieu nous verrons ce qui doit changer dans
notre façon de consommer et nous étudierons de nouveaux modes de consommation
alternatifs.
Notre façon de produire des denrées alimentaires impacte l’ensemble des éléments
décrits précédemment et principalement l’environnement, c’est cet élément qui est
invoqué le plus souvent par les États et les pouvoirs publics. En effet, notre façon de
produire, notre agriculture atteint notre agrosystème.
32
Le premier d’entre eux impacte plus ou moins directement l’environnement par la
pollution liée aux apports d’engrais en quantité variable dans les cultures. Il faut savoir
qu’un engrais peut être un élément chimique comme naturel permettant simplement de
rendre le sol cultivé davantage fertile en épandant ou enfouissant par diverses
techniques agricoles cet élément. En effet, une partie des engrais apportée peut aller
jusqu’à atteindre les nappes phréatiques souterraines, ou aller vers les cours d’eau les
plus proches et ainsi polluer les océans. C’est pourquoi, nous constatons parfois que
l’eau qui peut être prélevée dans les nappes phréatiques et qui est destinée à la
consommation peut contenir des nitrates en quantité trop importante. Cela peut avoir de
lourdes conséquences sur la santé des personnes fragiles qui consommeraient une eau
trop chargée en nitrates. En plus d’effets néfastes pour la santé, nous constatons
également des effets négatifs sur l’environnement liés l’eutrophisation10, il s’agit là de la
cause principale des divers effets du dérèglement environnemental, tel que les marées
vertes d’algues qui envahissent parfois les plages ou encore la diminution de la
biodiversité animale comme végétale couplée à l’augmentation de la biomasse.
Le second d’entre eux impacte quant à lui, à la fois directement l’environnement, mais
également l’état de santé général des populations. On parle ici des effets toxiques des
pesticides et des divers produits phytosanitaires existants. Il faut savoir que les
pesticides sont définis comme des substances chimiques utilisées pour lutter contre des
organismes naturels le plus souvent qui sont considérés comme nuisibles ou indésirables
pour les cultures. Il existe quatre grandes catégories de pesticides, que sont les
insecticides qui, comme son nom l’indique luttent contre les insectes, les herbicides qui,
grossièrement, luttent contre les mauvaises herbes, les rodenticides qui luttent contre les
rongeurs et enfin les fongicides qui luttent contre les maladies qui peuvent être
développées par l’apparition de germes ou de champignons dans les cultures. Bien que
ces produits aient des effets positifs sur les rendements agricoles et l’état général des
cultures, les pesticides ont des effets négatifs sur les écosystèmes et les agrosystèmes de
par leur toxicité. En effet, certaines espèces animales ou végétales ingèrent de
différentes manières des pesticides qui se concentrent dans leur organisme et modifient
leurs propriétés naturels et leurs métabolismes11. De plus, ce phénomène s’observe de
manière plus importante chez les espèces en fin de chaîne alimentaire, que ce soit des
prédateurs divers et variés ou même l’Homme. On constate chez ce dernier que les
intoxications liées à l'ingestion ou à l’exposition à des pesticides peut provoquer divers
troubles liés à la reproduction, au développement physique et mental ou encore au
système nerveux.
10
Eutrophisation :
11
Métabolisme : Ensemble des processus complexes et incessants de transformation de matière et
d’énergie par la cellule ou l’organisme, au cours des phénomènes d’édification et de dégradation
organique ; Ensemble des transformations chimiques et biologiques qui s’accomplissent dans
l’organisme. - LAROUSSE 2019
33
Le troisième effet négatif lié aux outils et pratiques utilisés pour augmenter les capacités
et les rendements de nos agrosystèmes actuels concerne les ressources naturelles et
principalement la surexploitation de l’eau ainsi que des sols. D’un côté, l’agriculture
moderne nécessite de forts prélèvements en eau, cette situation pose problème car le
dérèglement climatique implique une augmentation des températures en moyenne et par
conséquent une diminution des ressources en eau disponibles. D’un autre côté, la
surexploitation des sols par les cultures d’année en années implique une baisse de
fertilité de ces derniers, en effet, les pratiques agricoles modernes ne sont pas sans
conséquence sur l’état des sols qui sont jamais ou rarement laissés en jachère.
Enfin, le dernier des effets négatifs des outils et pratiques utilisés dans l’exploitation
intensive de nos agrosystèmes concerne les différents risques liés aux modifications et
améliorations génétiques des espèces, autrement dit les Organismes Génétiquement
Modifiés (OGM). On remarque tout d’abord que la sélection génétique utilisée dans nos
agrosystèmes actuels engendre une nette diminution de la biodiversité naturelle, cet
effet est renforcé par l’utilisation de produits phytosanitaires ainsi que par le
dérèglement climatique, la modification des environnements naturels de certaines
espèces ne leur permet pas toujours de survivre. On note également de nombreux effets
néfastes des Organismes Génétiquement Modifiés (OGM) sur la stabilité des gènes des
espèces végétales, certains de ces nouveaux gènes peuvent se “transmettre” d’une plante
à une autre, ce qui modifie en partie la biodiversité et particulièrement les
caractéristiques de certaines plantes sauvages.
Nous pouvons en conclure que nos agrosystèmes actuels connaissent leurs limites, elles
sont principalement liées à l’environnement, la biodiversité et à la santé humaine. Bien
que ces méthodes et outils soient pour le moment les seules réponses apportées pour
répondre aux besoins alimentaires en constante augmentation dans le monde, nous
pouvons tout de même réfléchir à d’autres solutions. Il est impossible de ralentir
l’augmentation de la population mondiale, mais il est envisageable et nécessaire de
modifier les habitudes de consommation alimentaire d’une partie de la population
mondiale, en réduisant la consommation de viande, en favorisant les productions
alimentaires locales ou encore en mettant en avant une nouvelle agriculture, durable et
écologique avec des conséquences moindres sur l’environnement, la biodiversité et
notre propre santé.
34
I - 3 - 1 - 2 - Quelles sont les nouvelles façons de produire que nous pouvons
développer ? Le cas de l’Agroécologie
De nouvelles façons de produire voient le jour petit à petit pour faire face à l’agriculture
intensive et ses effets désastreux sur l’environnement. C’est alors que l’on commence à
entendre parler d’agroécologie. Il faut savoir que ce terme a été utilisé pour la première
fois dans les années 1930, il désignait alors l’utilisation de méthodes dites
“écologiques” sur les pratiques agricoles de l’époque, il s’agit là de recherches
scientifiques effectuées par l’Institut National de la Recherche Agronomique (INRA).
Ensuite, dans les années 1960, un ouvrage entier définit l’agroécologie et son impact sur
notre système alimentaire, il est réalisé dans le cadre d’une analyse croisée des diverses
interactions biologiques et des pratiques agricoles. C’est la première fois que les notions
d’écologie et d’agronomie font état d’une étude commune et complémentaire. Enfin,
dans les années 1980, davantage d’articles et de travaux scientifiques sont publiées à
propos de l’agroécologie. Cette progression temporelle des études à ce sujet voit la
définition même de l’agroécologie se modifier dans le temps avec deux approches
principales. D’un côté, une approche disciplinaire alliant les sciences de la vie,
l’agronomie ou encore l’écologie avec les sciences sociales et d’un autre côté un
approche spatiale s’intéressant aux variables microéconomiques et macroéconomiques
de notre sujet, on étudie ici les plantes, les parcelles, les exploitations agricoles, les
territoires et notre système alimentaire. On remarque également des différences notables
entre les pays dans la définition et la manière d’aborder l’agroécologie. En France, par
exemple, l’agroécologie est étudiée comme un ensemble de pratiques lié à une
discipline scientifique et en moindre mesure à un mouvement social, alors qu’aux
États-Unis c’est une discipline scientifique liée à un mouvement social en moindre
mesure à des pratiques spécifiques. Malgré cette diversité constatée dans la manière
d’aborder l’agroécologie on recense tout de même trois principes communs avec une
importance différente selon les points de vue.
Le premier de ces principes est que l’agroécologie est une discipline scientifique qui
associe à la fois l’agronomie, l’écologie mais aussi les sciences sociales en privilégiant
une approche systémique, autrement dit une méthode d’analyse globale pour
comprendre l’ensemble des caractéristiques du système final. Le second principe de
l’agroécologie qui ne fait pas débat est qu’elle constitue un ensemble de pratiques et de
méthodes. Ce principe est même défini par l’Institut National de la Recherche
Agronomique (INRA) comme “un ensemble cohérent de pratiques qui permet de
concevoir des systèmes de production agricole en s’appuyant au maximum sur les
fonctionnalités offertes par les écosystèmes, mais aussi de réduire les pressions sur
l’environnement et de préserver les ressources naturelles”. Le troisième et dernier
principe fondamental de l’agroécologie est qu’elle provient d’un mouvement social pour
la modernisation de l’agriculture, la promotion des circuits courts, la souveraineté
alimentaire mais aussi le respect de l’environnement.
35
En lien avec les trois principes communs dans chacune des définitions de
l’agroécologie, le Ministère de l’Agriculture et de l’Alimentation met en lumière deux
objectifs à l’agroécologie, que sont l’accroissement de la biodiversité dans les
agrosystèmes et le renfort des régulations biologiques.
Après avoir présenté brièvement ce qu’était les principes et caractéristiques de
l’agroécologie, reste à savoir ce que c’est concrètement en gardant en tête que l’objectif
est de réduire l’empreinte environnementale et de tenir compte de la biodiversité. Il
s’agit donc ici d’essayer d’adopter des pratiques qui respectent les équilibres naturels en
limitant l’utilisation de produits non-naturels que sont les pesticides, les engrais, les
antibiotiques, les carburants et dans le même temps d’optimiser l’utilisation de l’eau et
des aliments pour le bétail. En dehors de l’impact environnemental de l’utilisation de
ces éléments, ces derniers représentent également un coût économique important pour
les agriculteurs estimé entre 50 et 60 % de leur chiffre d’affaires. Cependant, l’ensemble
de ces ressources non-naturelles sont utilisées afin de maximiser les rendements et de
maintenir une certaine productivité pour les exploitants agricoles.
Il est à noter que l’agroécologie n’est qu’une idéologie, un mode de pensée, une
approche agricole qui n’est pas concrétisée par un quelconque label même si
l’agriculture biologique et la certification “Agriculture Biologique” qui y est associée
représente le mieux le modèle de l’agroécologie. On recense également la certification
“Haute Valeur Environnementale” (HVE) qui impose un cahier des charges très stricte
pour les exploitants agricoles motivés à changer leur mode de production et qui se
rapproche également du modèle agroécologique. Plus précisément, cette dernière
certification contraint les exploitants au respect de deux indicateurs agroécologiques. Il
y a d’un côté, l’obligation de ne pas dépasser une part maximale de 30 % d’intrants dans
le chiffre d’affaires et d’un autre côté une part minimale de 10 % des surfaces agricoles
qui doit être composée d’éléments paysagers pouvant accueillir de la biodiversité
comme des bandes d’herbes, des haies ou des mares.
Nous allons prendre l’exemple d’un agriculteur exploitant afin de savoir ce qui change
concrètement dans son activité professionnelle. Afin de respecter l’indicateur lié au
pourcentage de ses terres cultivables dédiées à la biodiversité, il peut découper une
parcelle en plusieurs plus petites parcelles en les séparant avec des haies. Ce choix lui
permet non seulement de respecter l’indicateur de Haute Valeur Environnementale mais
également d’attirer différentes espèces qui se nourrissent des ravageurs de cultures que
peuvent être les pucerons par exemple. Notre agriculteur voit également la rotation de
ses cultures s’allonger de par ce nouveau découpage, cela a pour conséquence la
limitation du développement de plantes ravageuses et de nombreuses maladies influents
la qualité des récoltes. On constate alors une diminution des besoins en intrants et
notamment en matière de produits phytosanitaires, c’est un gain pour l’environnement
mais aussi un gain économique et un gain de temps pour l’agriculteur exploitant.
36
En s’investissant dans l’agroécologie comme l’agriculture biologique, les agriculteurs
gagnent plus en terme de temps et d’argent tout en produisant certes moins mais en
produisant des produits d’une meilleure qualité. Cela s’explique par la réalisation d’une
agriculture moins consommatrices en ressources provenant de l’extérieur, une
agriculture davantage diversifiée, une agriculture adaptée au mieux au territoire et par
voie de conséquence, une agriculture moins polluante et plus respectueuse de
l’environnement. L’agroécologie présente une valeur ajoutée autre que la productivité,
c’est une valeur ajoutée environnementale, sociale et éthique des produits agricoles.
37
I - 3 - 2 - Changer notre façon de consommer
Après avoir présenté pourquoi nos habitudes de consommation alimentaire impact plus
qu’on ne le pense l’environnement, nous allons essayer de déterminer quelques
solutions ou au moins de nouvelles habitudes afin de réduire l’empreinte
environnementale de notre consommation alimentaire. L’ensemble des bonnes pratiques
que je vais présenter ici repose uniquement sur la volonté de chacun de faire des choix
de consommation alimentaire différents sans pour autant se priver de manger ce que
chacun souhaite.
La première des bonnes pratiques est relativement simple et consiste tout bonnement à
consommer des produits de saison, que ce soit des fruits ou des légumes, l’idéal est de
privilégier la consommation d’aliments produits en extérieur et localement autant que
faire se peut.
La seconde des bonnes pratiques consiste alors à consommer des produits locaux. Cette
idée refait surface depuis peu alors qu’elle était la norme avant les années 1960 et
l’apparition des supermarchés. Les termes et expressions “locavores” ou encore “du
producteur au consommateur” sont désormais d’actualité puisque la prise de conscience
écologique et la volonté d’une majeure partie de la population de changer notre système
alimentaire commencent à révolutionner les pratiques alimentaires. Les circuits courts,
l’achat à la ferme ou sur les marchés, les Association pour le Maintien de l’Activité
Paysanne (AMAP) ont le vent en poupe. Ces nouveaux modes de consommation
alimentaire permettent à la fois aux producteurs locaux de vivre décemment de leur
métier de producteur ainsi qu’au consommateur de profiter de produits alimentaires de
qualité avec une traçabilité totalement transparente. Ces avantages sont le plus souvent à
nuancer pour le consommateur puisque les prix des produits locaux sont généralement
plus élevés que les prix des autres produits, dès lors l’accessibilité aux produits locaux
n’est pas aisée pour tous.
La troisième des bonnes pratiques est en partie corrélée à la seconde, puisqu’il s’agit
d’éviter de consommer des produits alimentaires provenants de pays lointains. En effet,
bon nombre de produits transformés ou non peuvent parcourir la moitié de la planète
avant d’arriver dans l’assiette du consommateur final. Dès lors, l’empreinte carbone liée
au transport de ce type de produit est significative, le plus souvent ces produits sont
transportés par voie aérienne et le transport par avion impacte davantage
l’environnement que le transport par voies maritimes ou terrestres.
38
Au moment des choix de consommations dans les supermarchés, il est alors intéressant
de vérifier la provenance des produits que l’on souhaite acheter et consommer afin de
choisir les aliments produits au plus proche de notre localisation pour réduire les
émissions de gaz à effet de serre liées au transport.
Enfin, nous allons nous intéresser aux produits labellisés “bio”, ces derniers garantissent
en générale une production alimentaire respectueuse de l’environnement et du bien-être
animal. En effet, l’utilisation de pesticides, de produits chimiques ou d’Organismes
Génétiquement Modifiés (OGM) n’est pas admise dans la production de produits
biologiques. Il existe deux principaux labels pour les produits biologiques avec un
cahier des charges aux exigences différentes pour chacun, il y a d’un côté le label
agriculture biologique français et d’un autre côté le label agriculture biologique
européen.
39
I - 3 - 2 - 2 - Quelles sont les nouveaux modes de consommation que nous pouvons
développer ?
Dès lors, il faut réfléchir à des solutions pour faire face à l’aberration que constitue le
fléau du gaspillage alimentaire. Les producteurs, les industriels, les commerçants et les
consommateurs sont les grands acteurs qui peuvent agir en faveur de la réduction du
gaspillage en prenant chacun leurs responsabilités. Les producteurs peuvent par
exemple favoriser la pratique du glanage12 et du don pour les fruits et les légumes qui
n’auraient pas été récoltés ou non commercialisés à cause de leur taille, de leur forme ou
de leur couleur. Certains industriels travaillent dans ce sens avec les producteurs et les
distributeurs pour alléger les critères de calibrage des produits, d’autres travaillent sur
des emballages qui permettent une meilleure conservation des aliments. Quelques
distributeurs et quelques commerçants agissent déjà en vendant à des prix plus
intéressants des produits alimentaires dont la date limite de consommation est la plus
avancée. Enfin, plusieurs chaînes de supermarchés développement des partenariats avec
des associations comme la Banque Alimentaire qui récupèrent les invendus et les
distribuent aux personnes qui en ont le plus besoin. Pour ce qui est des cantines ou des
restaurants, il est souvent conseillé aux consommateurs d’adapter les quantités servies à
leurs envies et à leurs besoins, il est également possible dans tous les restaurants
désormais de demander aux restaurateurs de demander à emporter ce qui n’a pas été
consommé dans un “Doggy Bag13” pour le consommer plus tard chez soi.
Dernièrement, nous pouvons tous lutter contre le gaspillage alimentaire à la maison,
tout d’abord en achetant les quantités dont nous avons réellement besoin même si la
peur du manque, les publicités et les offres commerciales ne vont pas forcément dans ce
sens en nous incitant à acheter davantage. Il faut également apprendre à ranger les
aliments au réfrigérateur en surveillant les dates limite de consommation de chacun
d’entre eux mais aussi apprendre à préparer les justes quantités en transformant les
restes pour en faire de nouveaux plats par exemple. Toutes ces pratiques servent à la
fois à bien conserver nos aliments, à limiter le gaspillage alimentaire chez soi ainsi qu’à
économiser de l’argent.
12
Glanage : Action de récolter ou de ramasser des produits agricoles manuellement afin de réduire les
pertes liées aux récoltes mécaniques. LAROUSSE
13
Doggy Bag : Terme anglais désignant un sachet ou une boîte proposé aux clients des restaurants pour
qu’ils emportent chez eux ce qu’ils n’ont pas consommé. LAROUSSE
40
Pour ce qui est du label Agriculture Biologique français
“AB”, il identifie des produits alimentaires et non alimentaires
100 % biologiques ou contenants au moins 95 % de produits
agricoles biologiques pour les produits biologiques
transformés. Cette certification est délivrée par des
organismes de notations privés dépendants tout de même
indirectement du Ministère de l’Agriculture et de
l’Alimentation. L’obtention de ce label signifie qu’aucun
produit chimique ainsi qu’aucun Organisme Génétiquement
Modifié (OGM) n’ont été utilisés dans la confection de ces
produits et que la réglementation française a été respectée.
Certains produits alimentaires arborent les deux labels que ce soit celui de l’Agriculture
Biologique français et le label Eurofeuille européen.
41
Nous pouvons conclure cette partie consacrée à comprendre pourquoi nous devons
changer notre système alimentaire et notre alimentation en résumant les arguments
avancés dans cette première partie.
Tout d’abord, il faut souligner le fait que toutes les étapes de notre système alimentaire
doivent être réformées, à commencer par l’étape de production alimentaire que l’on peut
assimiler à l’agriculture et ses pratiques. C’est ensuite à l’étape de transformation
alimentaire, puis celle de distribution avant la commercialisation et enfin les choix de
consommation des consommateurs finaux. Chacune de ces étapes a de lourdes
conséquences sur différentes variables, que ce soit l’environnement, l’augmentation des
inégalités sociales mais également la santé des consommateurs finaux. L’état de notre
système alimentaire nous interpelle de par les nombreuses disparités existantes dans le
monde en ce qui concerne l’accès à la nourriture et toutes les conséquences que cela a,
de la malnutrition à la famine. C’est pourquoi, nous devons changer principalement
notre façon de produire comme notre façon de consommer. De nouvelles pratiques
voient le jour, l’agroécologie pour la production alimentaire, les produits issus de
l’agriculture biologique pour la consommation alimentaire. On remarque de nombreux
changements dans les habitudes des consommateurs des pays développés, cela permet
indéniablement de contribuer à la sauvegarde de notre environnement mais cela n’a
aucun effet sur les difficultés d’accès à la nourriture que connaissent les habitants des
Pays les Moins Avancés (PMA). On note également des disparités dans l’accès à la
nourriture dans les pays développés, les inégalités sociales en sont le déterminant le plus
souvent. C’est pourquoi, nous allons nous intéresser en deuxième partie à l’Économie
Sociale et Solidaire et ses pratiques pour aller vers une alimentation nouvelle, durable et
de qualité.
42
Deuxième partie :
43
II - 1 - Qu’est-ce que l’Économie Sociale et Solidaire ?
14
Label Entreprise Solidaire d’Utilité Sociale (ESUS) : Agrément délivré depuis 2014 à des entreprises
commerciales classiques respectant un cahier des charges précis comprenant l’idée que cette entreprise
fonctionne de manière solidaire et a une utilité sociale démontrée. LAROUSSE.
44
II - 2 - De nouveaux modèles de production alimentaire
Dans cette sous-partie, nous allons nous pencher sur différents modèles de production
alimentaire mis en avant par l’Économie Sociale et Solidaire. Il s’agit là de détailler ces
modèles nouveaux ou peu connus du grand public qui agissent positivement sur notre
système alimentaire. Nous allons nous arrêter successivement sur les coopératives
agricoles puis sur les enseignes alimentaires spécialisées comme Biocoop avant
d’aborder l’arrivée de nouveaux régimes alimentaires qui bousculent notre système
alimentaire.
45
C’est pourquoi, l’ensemble des formes de sociétés coopératives doivent respecter
l’ensemble de ces pratiques, que ce soient les coopératives de commerçants, les banques
coopératives, les assurances coopératives, les coopératives de production ou encore les
coopératives d’utilisateurs. En ce qui nous concerne, nous allons nous intéresser plus
particulièrement aux coopératives agricoles qui opèrent le plus souvent sous le statut
juridique de Société Coopérative Agricole (SCA).
Tout d’abord, le premier intérêt pour un agriculteur d’adhérer à une coopérative agricole
est d’ordre financier. En effet, les adhérents profitent de la solidarité entre les membres
qu’implique l’adhésion. Plus concrètement, cela permet aux agriculteurs d’acheter en
groupe les matières premières, les engrais, les semences, de partager le coût d’achat et
l’utilisation des matériels agricoles tout cela pour payer au final moins cher l’ensemble
des éléments cités que s’ils les achètent seuls. En dehors des achats, la coopérative
agricole offre à ses membres l’accès aux locaux de stockage que peuvent être les silos
ou divers entrepôts de stockage pour le lait ou encore les fruits et les légumes. Enfin, la
coopérative agricole permet aux agriculteurs de trouver des débouchés plus facilement
en ce qui concerne la vente de leur production, ces débouchés peuvent être interne à la
coopérative ou externe mais l’avantage est que le prix auquel est vendue la production
des adhérents est relativement juste et permet à ces derniers de vivre convenablement de
leur travail d’agriculteur. Les débouchés à la production agricole peuvent être de la
vente directe sans transformation, de la vente à des filiales des coopératives agricoles
pour la transformation et la commercialisation sous l’égide de marques alimentaires, ou
encore la vente à des entreprises extérieures par le biais de la coopérative à des tarifs
justes.
46
De même, nous remarquons que l’intérêt de la coopérative pour les agriculteurs peut
être la rémunération qui en ressort avec la ristourne coopérative. Il s’agit là d’une part
du bénéfice effectuée par la coopérative sur un exercice qui est versée à l’agriculteur
coopérateur selon le volume de ses transactions effectuées avec la coopérative sur ce
même exercice. Pour finir, les bénéfices d’une coopérative sont donc entièrement versés
aux adhérents ou investit dans le fonctionnement interne de la structure. L’avantage des
structures coopératives par rapport aux structures commerciales classiques réside dans
le fait que le résultat n’est pas imposable et qu’il n’y a donc aucun impôt sur les sociétés
de prélevé.
Le second intérêt pour un agriculteur d’adhérer à une coopérative agricole peut être de
nature politique de par le fonctionnement même de ce type de structure. En effet, le
fonctionnement de la coopérative est géré directement par ses membres, les agriculteurs
adhérents. Elle fonctionne avec un conseil d’administration composé des adhérents et
une assemblée générale où les membres élisent un président et un bureau qui seront en
charge de gérer la coopérative en matière stratégique, économique, commerciale et
comptable. L’intérêt réside donc dans le fait que chaque membre de la coopérative
détient un pouvoir de vote et de décision selon le principe “un homme, une voix” pour
valoriser son travail et sa production. Les adhérents sont indirectement les employeurs
des salariés et décident démocratiquement des grands axes stratégiques à suivre par les
salariés. On remarque que la majeure partie des coopératives agricoles sont elles mêmes
adhérentes à la fédération des coopératives agricoles dénommée, La Coopération
Agricole. Elles échangent entre elles sur leurs pratiques, leurs difficultés comme leurs
réussites pour avancer ensemble et permettre aux producteurs de trouver des débouchés
à leurs productions agricoles à des prix justes.
47
Les coopératives agricoles cherchent à valoriser les produits agricoles de par le
processus gouvernance démocratique des adhérents agriculteurs. C’est une forme
d’innovation même si les premières coopératives agricoles sont apparues au XIXème
siècle. Cette forme de structure met en avant les producteurs et permet indirectement de
réduire les inégalités sociales en garantissant des revenus juste et décent aux
producteurs. De plus, les coopératives agricoles contribuent directement à dynamiser
l’économie locale et rurale en garantissant la pérennité des activités économiques
agricoles et agroalimentaires locales. La présence de ces structures garantit également
des emplois sur le territoire, une certaine dynamique économique et parfois la
renommée d’un territoire par l’exportation de ces produits sur le territoire national voir
même international. Enfin, la dernière étape du système alimentaire de
commercialisation se fait de manière plus juste et durable, les consommateurs peuvent
avoir connaissance de la provenance de leurs produits alimentaires grâce à la traçabilité
de ces derniers. Les produits alimentaires finaux commercialisés par les coopératives
agricoles sont le plus souvent des produits de qualité issus parfois de l’agriculture
biologique. Bien que le prix de ces produits peut être parfois plus élevé que la moyenne
ou que les autres produits non issus de la coopération agricole, le choix final revient au
consommateur, ce dernier à la charge de choisir de payer un peu plus cher sa nourriture
pour garantir des revenus décents aux producteurs alimentaires ou de payer sa nourriture
au prix le plus faible et d’acheter des produits d’une qualité inférieure avec une
empreinte écologique souvent liée au transport, plus forte.
48
II - 2 - 2 - Des enseignes spécialisées pour une nouvelle alimentation : le cas de
Biocoop
49
L’Agriculture Biologique a une histoire bien particulière en France puisqu’elle a vu le
jour il y a de nombreuses années mais ne s’est réellement développée que très
récemment.
C’est à partir des années 1980 que l’Agriculture Biologique est reconnue en France avec
la promulgation de la loi d’orientation agricole vers une agriculture “n’utilisant pas de
produits chimiques de synthèse”. En réalité, l’agriculture biologique est apparue dans
les années 1950 avec les premiers refus d’une intensification de l’activité agricole et la
réduction de l’utilisation d’engrais et de produits chimiques par certains exploitants.
Suite à cela, les acteurs de l’agriculture biologique française cherchent à se rassembler
pour former un mouvement d’avenir solide. C’est dans cette idée qu’est créée en 1978,
la Fédération Nationale d’Agriculture Biologique (FNAB) par plusieurs agriculteurs
biologiques. L’idée générale de cette fédération est alors “d’étudier et de défendre les
intérêts économiques, matériels, juridiques et moraux de la profession d’agrobiologiste
dont elle assure la représentation nationale et internationale” .
Ce n’est que dans les années 1990 que les producteurs et certains consommateurs se
sont vu animés par une même volonté, le soutien de l’agriculture biologique pour tendre
vers une consommation de produits biologiques et de qualité. Ces derniers se sont
réunis pour former des coopératives de consommateurs.
Les coopératives de consommateurs se sont développées en vue de proposer des
produits de meilleure qualité à des prix plus attractifs tout en respectant les territoires,
leur environnement et les producteurs. On dénombre trois objectifs principaux pour le
consommateur à son adhésion à une coopérative de consommateur. Il y a tout d’abord
l’idée de réduire les prix de vente des produits consommés par les intéressés, améliorer
la qualité de ces produits et contribuer à satisfaire leurs besoins en agissant directement
sur ces derniers. Les premières coopératives de consommateurs de produits biologiques
voient le jour en 1983 avec Intercoop et en 1984 avec Biopais, celles-ci fondent une
charte régissant leurs activités et leurs relations avec l’ensemble de leurs parties
prenantes en 1986.
50
En ce qui concerne particulièrement l’histoire de Biocoop, nous allons la détailler ici.
C’est donc en 1986 que l’association Biocoop voient le jour avec la réunion de
l’ensemble des entreprises coopératives signataires de la charte fondatrice de ce
mouvement la même année. Cette association compte alors 40 magasins de distribution
de produits alimentaires issus de l’agriculture biologique, après son développement, on
recense 100 magasins Biocoop en 1992. L’année suivante, Biocoop met en place un
“Cahier des Charges Biocoop” définissant l’ensemble des règles collectives à suivre
pour les sociétés coopératives et non coopératives qui l’a compose. Elles portent sur le
choix des produits à vendre, la gestion de l’association et l’utilité sociale que cette
dernière peut avoir. En 2002, l’association Biocoop se voit requalifier sur demande de
ses membres en Société Anonyme Coopérative, les membres deviennent alors
sociétaires de la coopérative.
En 2016, Biocoop fête ses 30 années d’existence et inaugure son 400ème magasin.
Aujourd’hui l’entreprise coopérative compte 630 magasins répartis sur le territoire
national, ce qui en fait le leader de la distribution alimentaire biologique mais également
de produits non alimentaires biologique tels que des cosmétiques ou du prêt à porter.
Nous pouvons constater dans le schéma ci-dessous ce que représente la coopérative
Biocoop aujourd’hui en 2020.
51
Aujourd’hui, l’agriculture biologique et la commercialisation de produits issus de cette
dernière ont le vent en poupe. En effet, nous assistons à une croissance rapide de la
consommation de produits biologiques puisqu’en 2018, le marché français a progressé
de 15 % pour atteindre 9,7 milliards d’euros. Cela représente pour chaque ménage
environ 5 % de sa consommation alimentaire totale. L’autre avantage réside dans le fait
que ces produits sont le plus souvent produits localement puisque 70 % des produits
biologiques consommés en France sont produits dans l’hexagone. Le schéma ci-dessous
nous éclaire sur la répartition des achats de produits biologiques en France en 2018 par
catégories de produits.
Nous pouvons conclure cette partie dédiée aux bienfaits de l’agriculture biologique sur
notre alimentation en mettant en avant le fait que ce sont le plus souvent dans des
organismes relevant du champ de l’Économie Sociale et Solidaire que ces activités se
développent. La cohérence entre les valeurs véhiculées par l’Économie Sociale et
Solidaire et l’Agriculture Biologique font de cette coopération un élément d’avenir pour
notre alimentation. En effet, le développement des produits alimentaires biologiques est
à la fois positif pour la santé des consommateurs puisque la qualité des produits est
notable, à la fois positive pour l’environnement puisque la production de ces denrées
alimentaires n’altère pas l’environnement et à la fois positif pour les producteurs qui,
sous forme de coopérative, peuvent vendre leur production à des prix justes.
52
II - 2 - 3 - De nouveaux régimes alimentaires
Pour finir cette sous-partie destinée à faire un tour d’horizon des nouveaux modes de
production alimentaire en lien avec le champ de l’Économie Sociale et Solidaire, nous
nous intéresserons plus particulièrement à l’apparition de nouveaux régimes
alimentaires. Nous étudierons plus particulièrement les raisons du développement de ces
nouveaux régimes alimentaires avant de détailler le végétarisme, le véganisme, le
locavorisme et le flexitarisme.
Tout d’abord, nous allons nous attacher à définir l’ensemble de ces nouveaux régimes
alimentaires afin que la compréhension de la suite de cette sous-partie soit plus aisée.
Nous définirons donc successivement le végétarisme, le véganisme, le flexitarisme et le
locavorisme.
Le végétarisme se résume au fait de consommer tous types d’aliments à l’exception de
la chair animale. Cela revient à ne pas manger de viande, de poissons, de crustacés, de
gélatine d’origine animale ou encore certains fromages pressurisés. Il existe des
variantes de végétarisme comme le lacto-végétarisme qui ne mange également pas
d’oeufs ou encore les ovo-végétariens qui ne consomment pas non plus de produits
laitiers.
Le véganisme n’est pas seulement un régime alimentaire, c’est plutôt un mode de vie ou
une philosophie de vie voir un mouvement social. En effet, les vegans bannissent tous
les produits d’origine animale non seulement les produits alimentaires mais aussi les
produits vestimentaires ou encore les cosmétiques. Ils sont également contre toutes les
pratiques impliquant l’exploitation animale comme les zoos ou les cirques. Ces
personnes se nourrissent exclusivement de produits issus de la terre ou des arbres, que
ce soit des fruits, des légumes ou des céréales.
Le flexitarisme est quant à lui un régime alimentaire plus souple et en pleine expansion.
Il s’agit là de personnes qui ne s'interdisent de consommer aucun produit alimentaire
que ce soit la viande, le poisson ou toutes denrées alimentaires issus de l’exploitation
animale. L’idée est simplement de limiter la consommation de tous les produits cités
précédemment d’où le terme flexitarien. Il leur est possible de manger de la viande mais
en quantité limitée pour des raisons écologiques, médicales et morales.
Enfin, le locavorisme est un régime alimentaire proche d’un mouvement social se
rapprochant davantage de l’Économie Sociale et Solidaire. Les personnes qualifiées de
locavores consomment tous types de produits alimentaires y compris les produits issus
de l’exploitation animale. L’idée est simplement de consommer des produits locaux
autrement dit produits sur le territoire de chacun dans un rayon d’une centaine de
kilomètres autour de chez soi. L’objectif de ce régime est de réduire l’impact
environnemental du transport de produits alimentaires et d’aider les producteurs locaux
en consommant leurs produits qui sont le plus souvent issus de l’Agriculture Biologique
et d’une qualité supérieure.
53
Les principales raisons qui ont poussé des personnes à se convertir au végétarisme, au
véganisme ou au flexitarisme sont relativement simple, il s’agit principalement du fait
qu’ils se soucient davantage des droits et du bien-être des animaux. Mais il y a d’autres
raisons qui peuvent expliquer l’apparition et le développement de ces nouveaux régimes
alimentaires.
Tout d’abord, la première raison invoquée par les végétariens, les végans ou encore les
flexitariens est le droit des animaux et le respect de leur bien être. Ces consommateurs
reconnaissent les animaux comme des êtres vivants au même rang que les êtres
humains, ils sont dotés d’une certaine sensibilité et d’une conscience que l’on se doit de
respecter. La souffrance animale liée à leur élevage ainsi qu’à leur abattage sont une
cause invoquée par ces consommateurs pour bannir la consommation de produits issus
de l’exploitation animale.
Enfin, la dernière raison avancée par les adeptes de ces nouveaux régimes alimentaires
est une raison médicale liée à la santé. En effet, leurs régimes alimentaires seraient plus
variés que le régime carnivore et donc bénéfique pour la santé. De plus, la
consommation de viande en grande quantité peut provoquer de graves maladies
cardiovasculaires. Les divers scandales sanitaires de ces dernières années vont dans le
sens de ces nouveaux consommateurs puisque qu’ils ne touchent que des produits issus
de l’exploitation animale.
54
L’apparition et le développement de nouveaux régimes alimentaires depuis une
vingtaine d’années dans le monde connaissent plusieurs raisons principalement
climatiques, relatifs aux droits des animaux, à l’approvisionnement alimentaire mondial
ou encore à la santé des consommateurs. Cependant, ces nouveaux régimes alimentaires
ont une histoire qui a commencé dans les années 1950. En effet, le terme “végétarien” a
été inventé en 1944 en référence au latin vegetus signifiant “sain, frais et vivant” pour
désigner les personnes ne consommant que des produits frais et bien entendu aucun
aliment issu de l’exploitation animale ou de l’élevage. Pour ce qui est du véganisme, il a
été inventé en 1951 pour désigner le fait de vivre et de se nourrir sans avoir à exploiter
les animaux. Aujourd’hui ces régimes alimentaires sont très présents dans les pays
développés principalement et continuent à faire de nouveaux adeptes partout dans le
monde. En plus des différents régimes cités précédemment, il existe des régimes
alimentaires liés aux problèmes de santé de ces nouveaux consommateurs. On peut citer
par exemple les régimes sans gluten15, sans lactose ou encore des régimes en lien avec la
religion de ses consommateurs. Le schéma ci-dessous nous permet de faire un tour
d’horizon de la part des consommateurs aux régimes alimentaires particuliers sur
l’ensemble des consommateurs européens en 2017.
15
Gluten : substance composée de protéines présentes dans certaines céréales comme le blé qui peut avoir
des effets néfastes sur la santé s’il est consommé en trop grande quantité ou si les consommateurs de
gluten ont des prédispositions négatives face au gluten. LAROUSSE
55
Pour terminer cette partie dédiée aux nouveaux régimes alimentaires comme nouveaux
modes de consommation alimentaire pour faire face aux méfaits de notre système
alimentaire, nous allons nous intéresser au label Écotable qui promeut de nouvelles
manières de consommer.
Écotable est un label qui a été fondé sous forme associative en 2008 comme une
communauté de restauration durable. L’idée du créateur est de mettre en avant de
nouveaux modes de consommation alimentaire dans des établissements de restauration.
Tous types de restaurants peuvent prétendre à l’obtention de ce label, c’est après un
audit du fonctionnement de ces établissements que la communauté décide ou non de
l’attribution de ce label. Cette attribution repose sur six critères principaux :
❏ La carte du restaurant doit changer en fonction des saisons.
❏ Le restaurant doit proposer au moins un menu végétarien.
❏ 15 % des produits proposés doivent être issus de l’Agriculture Biologique.
❏ L’établissement doit absolument faire le tri sélectif.
❏ Les plats doivent être élaborés et transformés sur place.
❏ Les oeufs de poule élevés en cage sont interdits.
Outre le respect de ces critères fondamentaux, le label est composé de différents
niveaux. Chaque établissement peut monter du premier jusqu’au troisième niveau s’il
respecte d’autres critères additionnels aux critères fondamentaux.
Chaque restaurateur est membre de l’association et adhère à cette dernière contre le
versement d’une cotisation à un prix libre.
L’objectif de cette structure est de proposer une nouvelle manière de consommer dans
les restaurants en ayant une consommation responsable, de qualité et juste pour chacune
des parties prenantes de notre système alimentaire. Ce label résume parfaitement les
valeurs fondamentales de l’Économie Sociale et Solidaire et prend en compte
l’ensemble des nouveaux régimes alimentaires cités dans cette partie.
Nous pouvons conclure cette partie en mettant en avant le fait que l’apparition et le
développement de nouveaux régimes alimentaires comme ceux détaillés dans cette
partie contribuent aux changements de consommation alimentaire. En effet, ces régimes
ont indirectement des effets positifs sur notre environnement, sur la santé des
consommateurs, la rémunération des producteurs ainsi que les conditions de vie des
animaux. De plus, les valeurs véhiculées par ces régimes alimentaires ainsi que leur
mise en place sont tout à fait en adéquation avec les valeurs de l’Économie Sociale et
Solidaire.
56
II - 3 - De nouveaux modèles de commercialisation alimentaire
Tout d’abord, nous allons définir ce qu’est une coopérative de commerçants et essayer
de comprendre son fonctionnement. Elles sont régies par le Code de Commerce sous
l'appellation de Sociétés Coopératives de Commerçants Détaillants (SCCD). La
définition légale de l’objet de ce modèle coopératif est la suivante, “améliorer par
l’effort commun de leurs associés les conditions dans lesquelles ceux-ci exercent leur
activité commerciale” . Cependant toutes les activités commerciales ne sont pas
autorisées dans le cadre des coopératives de commerçants. On ne retient que celles-ci :
❏ Le fait de regrouper dans une même enceinte, les commerces appartenant à leurs
associés et d’avoir une gestion et des locaux communs.
❏ Le fait de fournir à chacun des associés l’ensemble des matières premières ou
marchandises dont ils ont besoin pour l'exercice de leur activité commerciale.
❏ Le fait de faciliter l’accès à divers moyens de financement comme le crédit par
exemple pour les associés et à leur clientèle.
❏ Le fait d'exercer des activités complémentaires notamment l’ensemble des
fonctions supports qui sont mises en commun : les fonctions comptables,
techniques, financières ou de maintenance.
❏ Le fait de mettre en place des politiques commerciales communes aux associés
avec une organisation juridique propre, avec des marques et enseignes
particulières et avec le mise en place de centrales d’achats.
❏ Le fait que chacun des associés peuvent prendre des participations minoritaires
ou majoritaires dans chacune des sociétés commerciales de la coopérative.
57
Les premières coopératives de commerçants sont apparues à la fin du XIXème siècle en
Angleterre avec Rochdale16et la première forme de société coopérative. En France, c’est
en 1894, qu’apparaît la première coopérative de commerçants détaillants sous
l’enseigne de “Le Pain Quotidien”, cette forme coopérative réunissait quatre épiciers
exerçant leur activité dans des locaux communs. Il faudra ensuite attendre la fin de la
Seconde Guerre Mondiale pour voir une réelle envolée du nombre de coopératives en
France, les commerçants français ont pris le parti de se réunir pour répondre à
l’augmentation de la demande liée à la reconstruction et aux Trentes Glorieuses17. Ces
dernières ne disposent d’aucun cadre légal pour exercer leurs activités avant 1947 et la
loi sur la coopération. Cette loi offre alors un cadre juridique à l’ensemble des
coopératives et particulièrement les coopératives de commerçants, bon nombre d’entre
elles voient le jour consécutivement à la promulgation de cette loi.
16
Rochdale : Première société coopérative fondée en 1844 en Angleterre réunissant 28 tisserands, ils sont
les fondateurs du mouvement coopératif. LAROUSSE
17
Les Trentes Glorieuses : Expression de Jean Fourastié désignant la période de forte croissance
économique consécutive à la seconde guerre mondiale de 1945 à 1975. LAROUSSE
58
Cette forme d’organisation de commerçants sous forme de coopérative facilite la
gestion de chacune des sociétés de par la mutualisation de bon nombre de services. En
2018, il existait pas moins de 74 coopératives de commerçants détaillants en France,
représentant 156,5 milliards d’euros de chiffre d’affaires autrement dit 35 % du
commerce de détail dans l’hexagone. Ce mouvement emploie pas moins de 569 000
personnes réparties dans 50 000 points de ventes et il est en plein essor puisque son taux
de croissance entre 2018 et 2019 est évalué à 3 %.
Pour le grand public, l’appartenance de grandes enseignes au mouvement des
coopératives de commerçants et associé est souvent ignorée bien que celui-ci fréquente
quotidiennement ces enseignes. Les coopératives de commerçants exercent leur activité
dans tous les domaines qu’ils soient alimentaires ou non alimentaires bien que les plus
connues soient des acteurs majeurs de la grande distribution alimentaire. Les logos
ci-dessous sont les logos de grandes enseignes de coopératives de commerçants
alimentaires et non alimentaires.
Dans le cadre de ce mémoire, nous allons orienter notre analyse des coopératives de
commerçants sur celles d’entre elles exerçant leur activité dans le secteur alimentaire
principalement. Autrement dit, nous allons nous intéresser aux coopératives de
commerçants que peuvent être Leclerc, Système U et Intermarché pour les plus
importantes coopératives du secteur en présentant leurs avantages et leurs
inconvénients.
Pour ce qui est des avantages que procurent les coopératives de commerçants du secteur
alimentaire, nous pouvons simplement citer le fait qu’elles profitent aux associés
coopérateurs. Ces derniers sont parfois des producteurs, parfois des distributeurs ou
parfois de simples négociants qui ne font que de l’achat pour la revente dans l’idée d’en
sortir une marge. Dans le cas des producteurs alimentaires en tant qu’associés, cela
permet à ceux-ci d'écouler leurs productions à des prix raisonnables puisqu’ils sont le
plus souvent fixés par ces mêmes producteurs. Ils sont à l’origine de la gestion même de
la structure et de son orientation stratégique.
59
Ce type de structure géré par des producteurs ne présente que des avantages y compris
pour les consommateurs qui ont la possibilité d’avoir accès à des produits alimentaires
de toutes sortes sans avoir à payer un intermédiaire. Enfin il ne faut pas oublier le
principe même de la coopérative de commerçants qui est de mutualiser les tâches et les
fonctions supports pour l’ensemble des associés pour ensuite répartir le résultat entre
ces mêmes associés commerçants.
Pour ce qui est des inconvénients que peut représenter ce type de structure, il s’agit
principalement de la façon dont la structure coopérative est gérée. Pour rappel, les
coopératives de commerçants citées précédemment se doivent de respecter l’ensemble
des principes coopératifs et les valeurs de l’Économie Sociale et Solidaire sous peine
d’être requalifiées dans le cadre de la révision coopérative. Si l’on pense ici aux grandes
coopératives de commerçants comme Leclerc, la gouvernance est bien démocratique, le
partage des bénéfices se fait bien entre les associés seulement les associés de ce groupe
coopératif sont tous issus de la famille Leclerc, et l’entrée de nouveaux associés
coopérateurs n’est pas possible. De plus, les groupes coopératifs que peuvent être
Système U, Leclerc ou Intermarché ont une forme coopérative pour ce qui est de la
société mère mais l’ensemble de leurs filiales sont sous forme commerciale. Dès lors,
l’ensemble des bénéfices de ces grands groupes sont replacés au sein de la société mère
coopérative puisque les coopératives ne sont pas assujetties à l’Impôt sur les Sociétés
avant le versement de la ristourne coopérative à l’ensemble des associés coopératives.
Enfin, pour ce qui est de l’impact des coopératives de commerçants en tant qu’acteur de
l’Économie Sociale et Solidaire sur notre système alimentaire, il est nul ou presque. En
effet, l’activité et les prix proposés par ces structures sont les mêmes que ceux des
concurrents non coopérateurs que peuvent être Auchan ou Carrefour par exemple.
Nous pouvons conclure cette partie dédiée aux coopératives de commerçants comme un
nouveau modèle de commercialisation alimentaire en soulignant que la forme
d’exercice de commerçant alimentaire est nouvelle puisque ces commerçants exercent
leur activité sous forme coopérative. D’un autre côté, l’activité et les prix proposés par
ces structures coopératives sont les mêmes que ceux de leurs concurrents
non-coopérateurs, dès lors le système alimentaire comme notre alimentation ne sont pas
directement impactés par cette forme d’organisation de l’Économie Sociale et Solidaire.
60
II - 3 - 2 - Les circuits courts : le cas des AMAP
Nous allons commencer cette nouvelle sous-partie dédiée aux circuits courts par définir
ce phénomène avant de faire son historique.
Tout d’abord, la loi de 2014 sur l’Économie Sociale et Solidaire propose une première
définition aux circuits courts comme des “circuits courts économiques et solidaires”. Il
s’agit là “d’une forme d’échange économique valorisant le lien social, la coopération,
la transparence et l’équité entre les acteurs de l’échange” . Le Ministère de
l’Agriculture et de l’Alimentation propose également une définition des circuits courts.
Pour ce dernier, un circuit court “est un mode de commercialisation des produits
agricoles qui s’exerce soit par la vente directe du producteur au consommateur soit par
la vente indirecte à condition qu’il n’y ai qu’un seul intermédiaire”. Cette dernière
définition est d’autant plus précise pour définir ce qui appartient ou non au cadre légal
des circuits courts. Elle précise ensuite des exemples de circuits courts avec notamment
la vente sur les marchés, la vente à la ferme, les commerces de proximité, les
Associations pour le Maintien d’une Agriculture Paysanne, ou encore les ventes
collectives au panier.
D’un autre côté, la définition formulée par l’Économie Sociale et Solidaire est moins
restrictive puisqu’elle englobe non seulement la vente de produits alimentaires mais
également la finance solidaire ou encore les coopératives d’habitants, d’où l’idée
“d’économique et solidaire”.
Dans les deux cas, ces définitions englobent notre sujet, à savoir les circuits courts
alimentaires en ne posant que deux contraintes. D’un côté, il y a une contrainte liée au
nombre d’intermédiaires, limité à un seul et d’un autre côté une contrainte liée à la
localisation et la provenance des denrées alimentaires, limitée entre 100 et 250
kilomètres autour de chez soi.
Il est à noter que la vente en circuit court ne signifie pas que c’est de la vente directe
puisqu’un intermédiaire est autorisé. Il ne faut donc pas confondre vente directe et vente
en circuit court.
61
Après avoir défini le concept de circuit court, intéressons nous à son histoire et son
évolution pour en arriver jusqu’à ce que l’on connaît actuellement. Historiquement, les
circuits courts étaient les seuls modèles de distribution alimentaire avant la
mondialisation, l’arrivée des supermarchés et l’ensemble des mutations sociétales que
cela a pu engendrer.
Par le passé, chacun produisait ses aliments sur sa propre terre ou allait se fournir en
denrées alimentaires chez les agriculteurs ou les maraîchers les plus proches. C’était le
cas en ville comme en campagne puisque les marchés et les Halles parisiennes étaient
approvisionnées par les maraîchers de la région parisienne sous une forme d’agriculture
périurbaine. C’est ensuite au XVIIIème siècle que l’on recense la première notion de
circuit court au sens moderne du terme avec la création d’un commerce nommé
“Grimod et Compagnie” à Lyon. L’idée de ce commerce est de rassembler les fonctions
d’épicerie, de droguerie, de parfumerie et de broderie dans un seul et même lieu tout en
sachant que l’ensemble des produits et des services fournis se font directement du
producteur au consommateur à un prix fixe. Après un déclin de ce type d’échange et de
commerce jusque dans les années 1990 à cause de la mondialisation et diverses
variables, les circuits courts réapparaissent dans le domaine alimentaire au milieu des
années 1990 et continuent à se développer jusqu’à aujourd’hui. Avec la crise sanitaire
du Covid-19 et le confinement qui en a suivi, les circuits courts ont été fortement mis à
l’épreuve mais également fortement médiatisés et demandés.
On remarque que le nombre d’exploitations proposant de la vente en circuits courts
diminuent depuis les années 1980 puisque ce chiffre est passé de 400 000 exploitations
en 1980 à 107 000 en 2010. Ce chiffre est à nuancer puisque le nombre d’exploitations
agricoles totales diminue à une vitesse supérieur. Aujourd’hui, les exploitations
agricoles proposant de la vente en circuit court représentent 21 % des exploitations
agricoles totales avec de fortes disparités selon les territoires. En ce qui concerne les
achats en circuits courts par les consommateurs, ils représentaient seulement 9 % des
achats alimentaires totaux en 2016 pour autant ce chiffre est en constante augmentation.
De plus, selon un sondage mené par l'institut IPSOS en 2013, 38 % de la population se
dit intéressée par les circuits courts et les Associations pour le Maintien d’une
Agriculture Paysanne. Nous pouvons voir sur le graphique ci-dessous les achats de
produits alimentaires en circuits courts par types de produits alimentaires.
62
En matière de circuits courts, l’Agence pour la Défense de l’Environnement et la
Maîtrise de l’Énergie recensait en 2015 pas moins de 1 200 marchés de producteurs et
250 magasins de producteurs. Elle dénombre également plus de 1 600 Associations pour
le Maintien d’une Agriculture Paysanne (AMAP).
Maintenant reste à savoir qu’elles sont les avantages que peuvent procurer les circuits
courts aux producteurs comme aux consommateurs adeptes de ce nouveau système de
commercialisation alimentaire.
Tout d’abord, pour les producteurs, la vente de leur production agricole leur permet de
s’assurer de vendre leur production sans qu’un nombre incalculable d’intermédiaires
profitent de cet échange pour prendre une marge. En effet, la quasi-totalité du prix de
vente revient directement au producteur de par le fait que le nombre d’intermédiaires
soit limité à un seul. On remarque que les prix des denrées alimentaires vendus dans le
cadre des circuits courts sont fixés pour une période donnée, ce qui garantit d’autant
plus un revenu stable au producteur sur cette même période. Ensuite, le fait que le
transport soit limité à un certain kilométrage, pour que l’échange soit qualifié de vente
en circuit court, permet au producteur de limiter ses charges et par conséquent de
proposer un prix plus attractif ou alors d’avoir une marge plus importante. De plus, le
producteur est valorisé à juste titre dans cet échange non seulement en terme d’argent
mais également en terme de notoriété sur son territoire, le producteur bénéficie
économiquement et socialement de ce nouveau modèle de commercialisation
alimentaire.
Pour ce qui est des consommateurs, la vente de produits alimentaires en circuit court
leur permet d’avoir accès à des produits de qualité avec une traçabilité sans pareille
mesure. De plus, les produits sont frais et la consommation de ces produits suit les
saisons. Ce dernier point est positif en plusieurs points, les consommateurs mangent
alors des produits alimentaires variés, cela au cours de repas équilibrés. L’impact
environnemental de la vente en circuit court est nul ou presque puisque la suppression
totale ou presque des intermédiaires limite le transport tout comme le fait que la
provenance de ces denrées alimentaires soit limitée à un kilométrage n'excédant pas les
250 kilomètres. Dans le même sens, les produits vendus en circuits courts ont le plus
souvent un emballage limité, ce qui permet par conséquent de réduire les déchets des
consommateurs. Enfin, pour le consommateur le prix reste attractif pour un produit
d’une telle qualité d’autant plus que ce dernier sait que le prix payé revient directement
au producteur.
63
On reconnaît dans l’ensemble des avantages cités ici, les valeurs prônées par le
mouvement de l’Économie Sociale et Solidaire, on reprend notamment la solidarité, la
proximité, la coopération ainsi que l’utilité sociale. De plus, la majeure partie des
structures oeuvrant en circuit court le font sous des formes juridiques associatives ou
coopératives, des formes juridiques entrant parfaitement dans le champ de l’Économie
Sociale et Solidaire.
Pour finir cette sous-partie dédiée aux nouvelles modèles de commercialisation
alimentaire et plus particulièrement aux circuits courts, nous allons faire un zoom sur
les Associations pour le Maintien d’une Agriculture Paysanne (AMAP).
64
II - 4 - La lutte contre les inégalités liées à notre système alimentaire
Pour terminer ce mémoire et cette partie dédiée aux actions des structures de
l’Économie Sociale et Solidaire sur notre système alimentaire, nous allons aborder le
sujet de la lutte des inégalités en lien avec notre système alimentaire. Pour ce faire, nous
étudierons en premier lieu le commerce équitable et ses effets pour les agriculteurs du
monde entier puis en second lieu nous traiterons la précarité alimentaire et les moyens
mobilisés par l’Économie Sociale et Solidaire pour lutter contre ce fléau.
II - 4 - 1 - Le commerce équitable
Dans cette dernière sous-partie dédiée à la lutte contre les inégalités liées à notre
système alimentaire, nous allons nous intéresser au commerce équitable et sa relation
avec l’Économie Sociale et Solidaire. Nous commencerons par définir le commerce
équitable pour ensuite comprendre en quoi il réduit les inégalités induites par notre
système alimentaire classique.
L’histoire du commerce équitable remonte aux années 1950 en Europe, c’est une
association néerlandaise qui en est à l’origine, cette dernière importait des produits de
pays en développement en supprimant tous les intermédiaires entre le producteur et le
consommateur. Au début des années 1970, les premiers magasins de commerce
équitable voient le jour en Angleterre et aux Pays-Bas sous le nom de “Magasins du
Monde”. Suite à cela, le mouvement du commerce équitable commence à se structurer
avec la création de la Fédération Artisans du Monde en 1981 et finalement la création
du très connu label “Max Havelaar” aux Pays-Bas en 1988. Ce dernier est à l’origine de
l’internationalisation de ce modèle avec, en 1989, la création de la World Fair Trade
Organisation qui est un organisme regroupant et structurant l’ensemble des acteurs du
commerce équitable. À l’échelle nationale en France, nous assistons également à une
structuration de ce mouvement dans les années 1990 avec la création de Commerce
Équitable France en 1997 qui regroupe l’ensemble des acteurs français du commerce
équitable. Enfin la loi de 2014 sur l’Économie Sociale et Solidaire permet une certaine
extension de la définition des produits issus du commerce équitable, puisque désormais
le label de commerce équitable est étendu aux relations avec tous les producteurs du
monde, non seulement dans les pays en voie de développement mais aussi avec les pays
développés. Autrement dit, désormais un producteur français peut vendre ses produits
avec un label commerce équitable à un consommateur français.
En 2018 en France, le commerce équitable représentait 1,3 milliards d’euros de ventes
de produits issus de ce modèle avec une augmentation exponentielle de 22 % entre 2017
et 2018. Dans l’ensemble de ces ventes, 66 % proviennent de produits issus du
commerce équitable international et 34 % du commerce équitable français.
65
Bien que le commerce équitable soit présent dans la majeure partie des pays du monde,
ce modèle de distribution alimentaire peut être définie de plusieurs manières. La
première des définitions a été posée par l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC)
en 2001, ici le commerce équitable est vu comme “un partenariat commercial fondé sur
le dialogue, la transparence et le respect, dont l’objectif est de parvenir à une plus
grande équité dans le commerce mondial. Il contribue au développement durable en
offrant de meilleurs conditions commerciales et en garantissant les droits des
producteurs et des travailleurs marginalisés. Les organisations du commerce équitable
s’engagent activement à soutenir les producteurs, à sensibiliser l’opinion et à mener
campagne en faveur de changements dans les règles et les pratiques du commerce
international conventionnel” . Cette définition pose les grandes lignes du commerce
équitable au niveau international.
66
Il existe plusieurs labels de commerce équitable, “Fair Trade” en anglais, en France et
dans le monde, délivrés par autant d’organismes de certification, nous pouvons voir les
principaux ci-dessous. Les produits qualifiés d’équitable doivent donc respecter un
cahier des charges relativement stricte pour pouvoir arborer les différents logos relatifs
au label obtenu.
On remarque quelques différences entre les labels, elles sont relatives à la provenance
des produits ou bien au pourcentage de matières premières issu du commerce équitable
dans le produit fini labellisé “Produit Équitable”. Par exemple, les labels Fairtrade Max
Havelaar et Les Producteurs Paysans ne concernent que des produits dont les matières
premières proviennent des pays en voie de développement, plus généralement des pays
du Sud. Pour ce qui est de World Fair Trade Organization ou encore Fair For Life, ils
labellisent tous les produits issus du commerce équitable, quelle que soit leur
provenance géographique. Enfin, il existe des labels nationaux, comme Agri-Éthique
France qui ne labellise que des produits du commerce équitable produits sur le territoire
français. De plus, on remarque depuis quelques années l’apparition de marques
d’entreprises proche des labels existants du commerce équitable, c’est le cas de la
marque “Ensemble” de Biocoop par exemple.
Ensuite, on note qu’au sein même d’un label, il peut y avoir deux labels qui préexistent
avec des critères différents de labellisation, c’est le cas de Fair Trade Max Havelaar. Le
logo noir de ce label représente des produits dont 100 % des ingrédients sont issus du
commerce équitable. Cependant, dès lors qu’une flèche noire est apposée à côté de ce
logo, cela signifie que le poids des ingrédients équitables représente au moins 20 % du
poids total du produit. Il existe également le logo blanc de ce même label qui identifie le
fait qu’un seul ingrédient du produit final est issu du commerce équitable, le nom de cet
ingrédient est indiqué à côté du logo.
Nous pouvons donc en conclure que beaucoup de labels de commerce équitable existent
avec des critères différents et des règles différentes, ce qui implique que le
consommateur peut parfois être perdu entre tous ces labels sans savoir ce que signifie
chaque labellisation.
67
Nous pouvons observer ci-contre un schéma
du commerce équitable et ses bienfaits le long
de la chaîne de production et de distribution
pour la lutte contre les inégalités liées à notre
système alimentaire. L’idée générale est que
les petits producteurs de denrées alimentaires
du monde entier et principalement des pays du
Sud18 peuvent vendre leurs productions à des
prix juste leur permettant de vivre décemment
et de pérenniser leur activité. Dès lors, ces
producteurs peuvent profiter de conditions de
vie meilleures, ils peuvent avoir accès à
l’éducation et peuvent alors se développer
économiquement et humainement.
Le commerce équitable a également un impact
positif sur l’environnement et la biodiversité
puisque les produits issus du commerce
équitable sont dans la majorité des cas
également labellisés comme des produits issus
de l’Agriculture Biologique bien que ce soit
souvent des produits importés.
Le commerce équitable présente également
des avantages pour le consommateur. Ce
dernier peut profiter de produits dont la
provenance est parfaitement identifiée et dont il ne pourrait pas forcément avoir accès
habituellement en tant que produit issus de l’Agriculture Biologique ou en tant que
produit sans impact négatif sur l’environnement.
Nous pouvons conclure cette partie dédiée au commerce équitable en mettant en avant
le fait qu’il réduise directement les inégalités de notre système alimentaire par une
répartition plus équitable des richesses liées à notre alimentation. En effet, les
producteurs du monde entier peuvent alors profiter de meilleures conditions de vie grâce
à un revenu stable et juste lié à leur activité de production alimentaire. Le fait que la loi
de 2014 sur l’Économie Sociale et Solidaire régisse ce modèle en France souligne
l’importance de la relation entre l’Économie Sociale et Solidaire le commerce équitable
pour une consommation plus juste, plus durable pour le producteur comme pour le
consommateur.
18
Pays du Sud : pays caractérisés par un Indice de Développement Humain (IDH) et un Produit Intérieur
Brut (PIB) par habitant faible, ils sont le plus souvent situés dans l’hémisphère sud de la planète.
LAROUSSE
68
II - 4 - 2 - La lutte contre la précarité alimentaire
Pour continuer cette sous-partie consacrée aux inégalités provoquées par notre système
alimentaire, nous allons aborder le sujet de la précarité alimentaire, ses facteurs et les
solutions misent en place par les organismes de l’Économie Sociale et Solidaire pour
contrer cette forme de précarité. Pour ce faire, nous définirons ce phénomène avant de
présenter les associations oeuvrant dans ce domaine et leurs actions, enfin nous
présenterons ce qu’est un Projet Alimentaire Territorial (PAT).
La lutte contre la précarité alimentaire dispose d’un cadre légal depuis la loi EGAlim du
30 octobre 2018, elle est alors définie par le Code de l’Action Sociale et des Familles.
L’objectif affiché dans cette nouvelle loi pour la lutte contre la précarité alimentaire est
celui-ci, “favoriser l’accès à une alimentation sûre, diversifiée, de bonne qualité et en
quantité suffisante aux personnes en situation de vulnérabilité économique ou sociale” .
Cette même loi précise les acteurs concernés par la réalisation de cet objectif, on
recense les associations, les Centre Communaux et Intercommunaux d’Action Sociale
(CCAS), l’État, les collectivités territoriales, les acteurs économiques et enfin les
personnes en situation de précarité alimentaire.
Pour ce qui est des moyens mis en place pour lutter contre ce fléau, la loi EGAlim cite
l’aide alimentaire et définit ses conditions d’attribution. Selon la loi du 30 octobre 2018,
l’aide alimentaire c onsiste “à fournir des denrées et à proposer un accompagnement à
des personnes en situation de vulnérabilité économique ou sociale. A ce titre, il s’agit
d’une des réponses à la lutte contre la précarité alimentaire.” . Elles sont financées à
hauteur d’un tiers par l’État, d’un tiers par des fonds privés et enfin un tiers par la
valorisation de l’action de bénévolat. Ces aides alimentaires ne sont pas distribuées aux
personnes dans le besoin directement mais aux Centres Communaux d’Action Sociale
(CCAS) ou aux associations qui s’occupent ensuite de distribuer les denrées
alimentaires aux personnes concernées.
69
L’ensemble de ces dispositifs de lutte contre la précarité alimentaire sont régis par le
Programme National pour l’Alimentation (PNA) qui a pour objectif de fournir à
l’ensemble des Français une alimentation saine, de qualité, durable et accessible. Pour
ce faire, les acteurs du PNA travaillent autour de trois axes que sont la lutte contre la
précarité alimentaire, la lutte contre le gaspillage alimentaire et l’éducation alimentaire.
Les dispositifs cités précédemment concernent une part non négligeable de la
population française. En effet, toujours à l’échelle de la France, l’Institut National de la
Statistiques et des Études Économiques (INSEE) estime à 9,3 millions, le nombre de
personnes vivant sous le seuil de pauvreté19. Cela concerne 31 % des étudiants, 8 % des
retraités et 33 % des personnes vivant dans une famille monoparentale.
Selon une étude réalisée par Les Banques Alimentaires en 2018 sur les bénéficiaires de
leurs aides et leurs actions, 70 % des ménages aidés vivent avec moins de 1 000 € par
mois. Cela s’explique par le fait que 30 % d’entre eux soient au chômage et que les 70
% restants travaillent à temps partiel.
Les organisations de l’Économie Sociale et Solidaire sont les principaux privés de cette
lutte contre la précarité alimentaire à travers diverses associations faisant appel aux dons
pour ensuite pouvoir distribuer des denrées alimentaires aux personnes dans le besoin.
Les grands acteurs associatifs de ce mouvement de lutte contre l’insécurité alimentaire
sont les Banques Alimentaires, les Restaurants du Coeur, le Secours Populaire ou
encore la Croix Rouge Française.
Les Banques Alimentaires constituent le premier réseau français d’aide alimentaire, ils
ont distribué pas moins de 226 millions de repas à 2 millions de personnes en France en
2018.
19
Seuil de pauvreté : Il correspond à 60 % du niveau de vie médian de la population pour une période
donnée, les personnes étant sous ce seuil sont considérées comme pauvres. Il est à 1 050 € par mois en
France en 2020. LAROUSSE.
70
D’un côté, nous pouvons penser que la précarité alimentaire d’une partie de la
population est la conséquence d’un niveau de vie de trop faible pour ces personnes, et
que la solution à envisager pour cette partie de la population serait simplement
d’augmenter les salaires ou les minimas sociaux.
D’un autre côté, nous pouvons penser que la précarité alimentaire de cette même partie
de la population est la conséquence d’un système alimentaire trop inéquitable, injuste
avec des prix proposés trop élevés pour les denrées alimentaires de bases. Pour cette
deuxième hypothèse, la solution serait de réformer notre système alimentaire en
profondeur pour proposer un système alimentaire plus stable, plus juste avec un accès à
l’alimentation pour tous à des prix raisonnables.
Évidemment, il n’existe aucune solution toute faite pour résoudre ce problème de
précarité alimentaire non seulement en France mais dans le monde. Pour autant, les
acteurs de l’Économie Sociale et Solidaire oeuvrent pour réduire ce fléau tant bien que
mal avec leurs moyens. L’idéal serait de permettre à chacun de manger à sa faim sans
que l’accès à la nourriture soit conditionné par des moyens économiques ou sociaux
puisqu’il s’agit là d’un droit universel. Le problème qui persiste est que nous sommes
actuellement 7,6 milliards d’êtres humains sur Terre pour autant nous n’arrivons pas à
nourrir équitablement et sainement chacun d’entre nous. Alors qu’en 2050, la
population mondiale serait estimée à 10 milliards d’êtres humains, d’où la nécessité de
réformer notre système alimentaire pour permettre à chacun d’entre nous aujourd’hui et
aux générations futures de pouvoir avoir accès à la nourriture en quantité suffisante.
Pour compléter cette sous-partie dédiée à la lutte contre la précarité alimentaire, j’ai pris
le parti de présenter un dispositif nouveau de lutte contre la précarité alimentaire et
d’organisation d’un nouveau système alimentaire, ce sont les Projets Alimentaire
Territoriaux (PAT).
Le dispositif de Projet Alimentaire Territorial a vu le jour en 2014 au cours de la
promulgation de la loi pour d’avenir pour l’agriculture et l’alimentation. Ce type de
projet est financé principalement par des fonds publics nationaux mais également
européens ainsi que des fonds privés sous forme de dons généralement.
Comme son nom l’indique, l’idée de ce type de programme est de créer un nouveau
système alimentaire à une échelle réduite localement à un territoire donné. Pour ce faire,
il suffit de choisir un territoire donné pour effectuer un diagnostic partagé des besoins
alimentaires de celui-ci et de la production agricole et alimentaire de ce même territoire.
Reste ensuite à prendre en compte l’ensemble des atouts et des contraintes de ce
territoire dans la mise en place d’un micro-système alimentaire. Suite à cela, il faut
identifier l’ensemble des acteurs de ce territoire, les acteurs publics, les producteurs, les
associations, les commerçants et essayer de faire un compromis de l’ensemble des
demandes et offres de chacun afin de créer un système alimentaire sain et viable sur ce
territoire.
71
Nous pouvons voir sur le schéma ci-dessous l’ensemble des acteurs à prendre
nécessairement en compte pour la réalisation d’un Projet Alimentaire Territorial (PAT).
Nous pouvons enfin conclure cette sous-partie destinée à mettre en lumière l’ampleur de
la précarité alimentaire en France et les actions menées par les structures de l’Économie
Sociale et Solidaire pour réduire les effets de celle-ci en soulignant l’importance de
réformer notre système alimentaire pour réduire l’ensemble des inégalités d’accès à
l’alimentaire. Les solutions apportées par les associations d’aide alimentaire sont
nécessaires mais elles ne constituent nullement une solution de long terme pour les
personnes en situation de précarité alimentaire. L’augmentation constante de la
population mondiale inquiète de plus en plus, pour autant le système alimentaire actuel
et ses travers en matière d’inégalités d’accès à l’alimentation ne bougent pas. C’est
pourquoi les Projets Alimentaires Territoriaux peuvent être une des solutions à
envisager pour aller vers un système alimentaire plus égalitaire.
72
Nous pouvons conclure cette deuxième partie consacrée à comprendre la place que tient
le mouvement de l’Économie Sociale et Solidaire dans les réponses apportées pour
combler les méfaits de notre système alimentaire en résumant l’ensemble des sujets
évoqués dans cette deuxième et dernière partie.
Tout d’abord, les acteurs de l’Économie Sociale et Solidaire participent directement à la
promotion et à la mise en place de nouveaux modes de productions alimentaires. C’est
le cas des coopératives agricoles et de leur mode de fonctionnement démocratique, elles
oeuvrent pour une production alimentaire plus soutenable, juste, et de qualité que des
organisations classiques de production alimentaire. Également cité dans ce mémoire, les
enseignes spécialisées en produits alimentaires issus de l’Agriculture Biologique
soutiennent le développement de nouveaux modèles de production plus viable, durable
et sans conséquences néfastes sur l’environnement comme sur la santé des
consommateurs. Ces deux exemples de modes de productions alimentaires relèvent tous
deux du champ d’action de l’Économie Sociale et Solidaire et partagent par conséquent
les valeurs de ce mouvement.
Ensuite, nous avons développé l’idée que les acteurs de l’Économie Sociale et Solidaire
participaient également au développement de nouveaux modèles de commercialisation
alimentaire. Nous avons cité ici le cas des coopératives de commerçants détaillants,
elles sont omniprésentes sur le secteur du commerce alimentaire mais leur appartenance
à l’Économie Sociale et Solidaire est trop souvent ignorée. Cela peut s’expliquer par la
taille importante de bons nombres de ces structures qui peuvent parfois avoir des
valeurs relativement éloignées des valeurs fondamentales de l’Économie Sociale et
Solidaire. Puis, nous avons développé une partie sur les circuits courts et leurs effets
positifs sur notre système alimentaire. Que ce soit en matière de rémunération pour les
producteurs, en matière de qualité des produits consommés pour les consommateurs, ce
modèle relevant de l’Économie Sociale et Solidaire semble est un bon compromis pour
tendre vers un système alimentaire plus juste et plus durable à l’avenir.
Enfin en dernière partie, nous nous sommes intéressés à la place occupée par les acteurs
de l’Économie Sociale et Solidaire pour réduire les inégalités induites par notre système
alimentaire. Dans ce cadre, nous avons pu citer le commerce équitable comme une
innovation permettant de rémunérer au mieux les petits producteurs du monde entier.
Pour finir, nous nous sommes attardés aux diverses actions menées pour la lutte contre
la précarité alimentaire, notamment par des associations et des programmes financés par
l’État et l’Europe. Enfin, nous avons évoqué une innovation qui permet de conclure à
merveille cette partie, il s’agit là des Plans Alimentaires Territoriaux. Ce dispositif
permet de réformer notre système alimentaire en créant de petits systèmes alimentaires
locaux pour une alimentation durable, locale, accessible et de qualité. Cet exemple, nous
montre que les acteurs de l’Économie Sociale et Solidaire ne peuvent pas réformer notre
système alimentaire seuls mais ils sont et seront acteurs de ces réformes à l’avenir.
73
Conclusion
Pour conclure ce mémoire consacré aux réponses apportées par l’Économie Sociale et
Solidaire pour faire face aux travers et méfaits de notre système alimentaire et de notre
alimentation, nous allons en premier lieu résumer notre propos avant d’ouvrir en second
lieu ce travail à d’autres recherches complémentaires pour que notre système
alimentaire connaisse un avenir meilleur.
Tout d’abord pour résumer les arguments avancés au coeur de ce mémoire, nous allons
commencer par expliquer pourquoi notre système alimentaire n’est ni juste, ni propre, ni
équitable, ni soutenable. Ensuite, nous évoquerons les innovations proposées par
l’Économie Sociale et Solidaire pour tendre vers un nouveau système alimentaire.
Il est à noter que l’ensemble des étapes de notre système alimentaire de la production à
la consommation alimentaire affectent de nombreuses variables et sont lourdes de
conséquences sur l’environnement, la santé des consommateurs et le renforcement des
inégalités sociales. Alors comment faire face à l’ensemble de ces travers induits par
notre alimentation ? Plusieurs pistes de réponses sont évoquées de l’agroécologie à
l’agriculture biologique pour pallier les disparités de notre système alimentaire et ses
conséquences environnementales. Cependant, on remarque qu’aucune organisation ni
État ne prennent en charge et ne cherchent à pallier les méfaits de notre alimentation.
C’est pourquoi l’Économie Sociale et Solidaire s’empare de la question au travers de
ces organisations pour travailler vers une alimentation nouvelle, durable et de qualité.
La suite de l’argumentaire présenté dans ce mémoire est donc consacrée aux réponses
apportées par l’Économie Sociale et Solidaire pour dommages liées à notre système
alimentaire.
Le mouvement de l’Économie Sociale et Solidaire présente comme particularité son
caractère non-lucratif avec un objectif d’utilité sociale, ce qui fait de ses organisations,
des organisations pouvant s’impliquer pleinement dans ce type de travaux. Nous
pouvons citer ici la proposition de nouveaux modèles de production avec les
coopératives agricoles et les enseignes spécialisées comme Biocoop. Mais également, la
promotion de nouveaux modèles de commercialisation alimentaire plus juste avec
notamment les coopératives de commerçants détaillants et le commerce équitable. Enfin
l’Économie Sociale et Solidaire et ses organisations travaillent quotidiennement à une
répartition plus équitable des denrées alimentaires pour lutter contre la précarité
alimentaire.
74
Pour autant, le chemin est encore long pour que ce type de structure et l’ensemble de
ces changements se généralisent à l’échelle de la planète afin que nous puissions avoir
de réels effets sur notre système alimentaire.
Le travail réalisé pour ce mémoire permet d’avoir un tour d’horizon de bon nombre des
pratiques alimentaires innovantes provenant du secteur l’Économie Sociale et Solidaire.
Pour autant, il ne prend pas en compte le fait que les consommateurs puissent changer
d’eux même leur consommation après une forme de prise de conscience ou le fait que
les États ou les organisations publiques prennent à bras le corps les enjeux liés à
l’alimentation mondiale.
De plus, la méthodologie utilisée pour ce mémoire est sous forme de recherche
documentaire sans entretiens ni questionnaires auprès d’un panel de personnes issus
d’horizons différents. Nous pouvons tout de même penser que le résultat aurait pu être
proche, simplement les enjeux et les actions correctives auraient été expliquées sous un
autre angle.
75
Références bibliographiques
76