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De La Solidarité Comme Moyen de Réparation Du Préjudice en Agrique À La Notion D'assurance-Thése

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De la solidarité comme moyen de réparation du

préjudice en Afrique à la notion d’assurance : le cas du


Bénin et de la Mauritanie
Louis Rodrigue Kotoko

To cite this version:


Louis Rodrigue Kotoko. De la solidarité comme moyen de réparation du préjudice en Afrique à la
notion d’assurance : le cas du Bénin et de la Mauritanie. Droit. Normandie Université, 2017. Français.
�NNT : 2017NORMC028�. �tel-01701711�

HAL Id: tel-01701711


https://theses.hal.science/tel-01701711
Submitted on 6 Feb 2018

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teaching and research institutions in France or recherche français ou étrangers, des laboratoires
abroad, or from public or private research centers. publics ou privés.
THESE
Pour obtenir le diplôme de doctorat

Spécialité Sciences juridiques

Préparée au sein de l’Université de Caen Normandie

De la solidarité comme moyen de réparation du préjudice


en Afrique à la notion d’assurance : le cas du Bénin et de
la Mauritanie

Présentée et soutenue par


Louis Rodrigue KOTOKO

Thèse soutenue publiquement le 11 décembre 2017


devant le jury composé de

Professeur des Universités


Mr Bernard BEIGNIER Rapporteur
Université de Toulouse

Professeur des Universités


Mr Thibault DOUVILLE Rapporteur
Université du Maine

Professeur des Universités


Mme Véronique NICOLAS Examinateur
Université de Nantes

Maitre de conférences, HDR


Mme Armelle GOSSELIN-GORAND Examinateur
Université de Caen

Maitre de conférences, HDR


Mme Véronique MIKALEF-TOUDIC Directrice de thèse
Université de Caen

Thèse dirigée par Véronique MIKALEF-TOUDIC, EA 967- Institut DEMOLOMBE

1
L’Université de Caen-Normandie n’entend donner aucune approbation ni
improbation aux opinions émises dans cette thèse ; ces opinions doivent être
considérées comme propres à leur auteur.

2
DEDICACES ET REMERCIEMENTS

DEDICACES

Je dédie cette thèse à ma famille :

- A la mémoire de mon père KOTOKO Anastase, pour son travail et son éducation ;
- A ma mère Yvonne AFFOUDJI, pour son sacrifice ;
- A mes frères et sœurs : Aziz, Philomène, Nicolas, Anne Marie, Hervé, Diarra, Yaye
Fatou, Aminata, Fatou, Françoise, Henriette, Saly ;
- A Mon épouse Cindy KOTOKO qui m’a toujours soutenu et encouragé, je lui exprime
tout mon amour constant ;
- A nos enfants Anastasia et Anaëlle ;
- A mes amis : Salem, Alfred, Malick, Pascal, Epiphane, Hyacinthe, Acka, Awa,
Moussa, Adama Jules, Apolin, Epiphane, Stan, Médoune, Almamy, Madické,
Athanase, Léon, Amadou ;
- A mes tous mes collègues : Victor, Phillipe, Emilie, Éric, Lok, Bernard, Maxime…

REMERCIEMENT

Mes remerciements vont tout d’abord à Madame Véronique MIKALEF-TOUDIC pour avoir
accepté d’être ma directrice de thèse, mais surtout pour la confiance et la liberté qu’elle m’a
accordées. Je lui suis très reconnaissant pour ses annotations précieuses son soutien
indéfectible, sa disponibilité et sa patience.

Je tiens à remercier les Professeurs Bernard BEIGNIER et Thibault DOUVILLE qui se sont
acquittés de la délicate tâche de rapporteur sur cette thèse. Toute ma gratitude s’adresse aussi
au Professeur Véronique NICOLAS et à Madame Armelle GOSSELIN-GORAND qui m’ont
fait l’honneur d’examiner cette étude et de participer à la soutenance de cette thèse.

Ma sincère gratitude va également à tous mes amis qui, tout au long de l’élaboration
de cette thèse m’ont témoigné d’un indéfectible soutien, qu’ils en soient ici remerciés.

Je remercie également les membres de l’école doctorale de droit de l’Université de Caen-


Normandie en l’occurrence, Mme Esther CAMUS, Madame Elodie SAILLANT et Madame
Jaël MOKIENKO pour leur disponibilité et leur soutien.

3
4
LISTE DES PRINCIPALES ABREVIATIONS, SIGLES ET

ACRONYMES

AIBA : Association des courtiers africains

en assurance

Al. : Alinéa

Arb. : Arbitrage

Art. : Article

AUA : Acte uniforme sur l’arbitrage

Bull. Civ. : Bulletin des arrêts de la Cour de

cassation chambres civiles

Bull. crim. : Bulletin des arrêts de la Cour de

cassation chambres criminelles

CAF : Code des Assurances françaises

CAM : Code des assurances mauritanienne

CEMAC : Communauté Economique et Monétaire des


Etats de l’Afrique Centrale

CICA : Conférence Internationale des Contrôles

d’Assurances

CICA RE : Compagnie commune de réassurance des

Etats membres de la CIMA

CIMA : Conférence Interafricaine des Marchés

d’Assurances

CMU : Couverture Médicale Universelle

CNSS : Caisse Nationale de Sécurité Sociale

C A. : Cour d’appel

Cass. : Arrêt de la Cours de cassation

Cass.com : Cour de cassation, chambre commerciale

5
C. civ. : Code civile

CCJA. : Cour Commune de Justice et

D’Arbitrage

CIPRES : Conférence Interafricaine de Prévoyance


Sociale.
Cf. : (Confer) Se référer ou se reporter

Civ. 1ère : Arrêt de la première Chambre civile de la

Cour de cassation

Civ. 2ème : Arrêt de la deuxième Chambre civile de la


Cour de cassation

COBAC Commission bancaire de l’Afrique


Centrale

C.O.C. : Code des obligations et des contrats

Coll. : Collection
C.com. : Code de commerce

D. : Recueil Dalloz-Sirey

Dir. Sous la direction

€. : Euro

Ed. : Edition (s)

FANAF : Fédération des sociétés d’assurances de

droit national africaines

Fasc. : Fascicule

F CFA : Franc de la Communauté Financière


Africaine
FGA : Fonds de Garantie Automobile
F.M.I : Fonds Monétaire International

Ibid. : Ibidem (le même ouvrage)

Idem. : De même

In : Dans

6
GAREAT Gestion de l’assurance et la réassurance des
risques Attentats et actes de Terrorisme

Gaz.Pal. : Gazette du Palais

Infra. : Ci-dessous

IARD Incendie, accidents et risques divers

IMF Institut de Micro finance

JCP Jurisclasseur périodique

J.O. : Journal officiel

L. : Loi

L.G.D.J : Librairie générale de droit et de

jurisprudence

Mél. : Mélange

N° : Numéro (s)

Not. : Notamment

Op. Cit. (Opere Citato) : Dans l’ouvrage cité.

O.H.A.D.A : Organisation pour l’harmonisation en

Afrique du droit des affaires.

OUA : Organisation de l’unité Africaine

p. ou pp. : Page (s)

P.A.S Programmes d’ajustement structurel

P.U.A : Presses universitaires d’Afrique

P.U.F : Presses universitaires de France

R.G.A.T : Revue générale des assurances terrestre

R.G.D.A : Revue générale de droit des assurances

R.I.D.C : Revue internationale de droit comparé

s. : suivante

SA. : Société Anonyme

Supra. : Ci-dessus.

7
OIT : Organisation Internationale du Travail

RIM : République Islamique de Mauritanie

SMIG : Salaire minimum interprofessionnel

garanti

t. : Tome

TGI : Tribunal de grande instance

th. préc. : thèse précité

UA : Union africaine

UEMOA : Union Economique et Monétaire Ouest

africaine

UM : Ouguiya

V. : Voir.

Vol. : Volume.

8
SOMMAIRE1
Les chiffres renvoient aux numéros de pages
INTRODUCTION GENERALE…………………………………………………………...12

PREMIERE PARTIE L’EVOLUTION DU CONCEPT D’ASSURANCE EN AFRIQUE


FRANCOPHONE…………………………………………………………………………...30
TITRE I : Du concept traditionnel de l’assurance aux réalités d’une industrie
d’assurance……………………………………………………………………………………32
Chapitre I : Solidarité traditionnelle ou pratiques assimilables à une assurance……..33
Chapitre II : L’impact de la colonisation……………………………………………..65
Chapitre III : Un système juridique d’inspiration française…………………………..91
TITRE II : L’évolution et les caractéristiques de l’industrie d’assurance au Bénin et en
Mauritanie…………………………………………………………………………………...123
Chapitre I : Naissance et évolution du secteur………………………………………125
Chapitre II : Les assurances de personnes…………………………………………...144
Chapitre III : Les assurances de dommages……………………………………...….169
DEUXIEME PARTIE ORGANISATION, PRATIQUE ET FONCTIONNEMENT DES
ASSURANCES EN AFRIQUE……………………………………………………………202
TITRE I : Régime juridique de l’assurance et pratique de l’indemnisation……………...…204
Chapitre I : Le contrat d’assurance et les obligations des parties………………...…207
Chapitre II : La procédure de l’indemnisation et le règlement des litiges…………..252
TITRE II : Modèles, état des lieux, perspectives et alternatives…………………………….311
Chapitre I : Des modèles de réussite et l’état des lieux du marché………………….312
Chapitre II : Réflexion sur des alternatives de développement de l’assurance
classique……………………………………………………………………………………..359
CONCLUSION GENERALE…………………………………………………………….....411
Bibliographie ………………………………………………………………………….…….418
Table des matières …………………………………………………………………………..438

1
Voir la table des matières détaillée en fin d’ouvrage.

9
RESUME

Depuis l’aube des temps, quelle que soit la forme qu’elle a pu revêtir, l’une des
préoccupations majeures de l’homme a été et demeure sa protection, celle de ses proches et de
ses biens contre les aléas de la vie. C’est d’ailleurs dans cette perspective que les assurances
ont été instituées.

En Afrique, avant l’introduction de cette notion, c’est la solidarité sous ses diverses formes
(assabiya, touiza, lahwa ou encore tontine) qui a servi de moyen de réparation du préjudice.

Le droit des assurances qui a pour mission de régir l’activité, a, en Afrique une configuration
intimement liée à l’histoire coloniale. L’étude de l’évolution de la notion d’assurance en
Mauritanie et au Bénin, nous met face à deux systèmes juridiques, ayant des particularités
relevant tantôt du droit musulman, tantôt du droit coutumier. Toutefois, le point de
convergence de ces deux systèmes demeure les lois françaises en matière d’assurance dont ils
ont hérité via la colonisation. Ce droit importé a t’il été assimilé par ces deux Pays ?

Le Code CIMA, et le Code des Assurances Mauritaniennes nous permettrons d’appréhender


le contrat d’assurance, l’indemnisation et, l’activité d’assurance : éléments indispensables
pour dresser un état des lieux du secteur des assurances au Bénin et en Mauritanie. En
Afrique, même si dans certains pays, le secteur des assurances est en nette croissance, les
questions suscitées par cette thèse, seront relatives à l’adaptabilité de l’assurance
conventionnelle aux pays africains dont le secteur des assurances peine à se développer.

En tout état de cause, il sera nécessaire de mener une réflexion sur des alternatives de
développement en Afrique de l'assurance conventionnelle.

Mots clés : Solidarité - Afrique - droit des assurances – Islam - préjudice – réparation
– Bénin – Mauritanie – CIMA -takaful- tontine - assabiya – microassurance.

10
ABSTRACT

Since the dawn of times, whatever the shape it has had, one of the major worries of mankind
has been and still is his protection, the protection of the people close to him and that of his
belongings against the hardship of life. In that perspective, Insurance companies have been
created.

In Africa, before the introduction of that notion, it is the solidarity in its various forms
(assabiya, touiza, Iahwa or else tontine) that has served as means to repair damage.

Insurance law that has for mission to govern the activity, has, in Africa a configuration that
was intimately connected to the colonial history. The study of the evolution of the notion of
insurance in Mauritania and in Benin puts us in front of two legal systems having
peculiarities sometimes stemming from the islamic law or common law. However, the point of
convergence of these two systems remains the French law which they inherited via
colonization. This imported law has it been learned by these two countries?

The CIMA code and the Mauritanian insurance code will allow us to fully grasp the
insurance contrat, the compensation and the activity of insurance : essential elements to raise
the current situation of the sector of the insurances in Benin and in Mauritania. In Africa,
even if in certain countries the sector of the insurance is in net growth, the questions raised by
this thesis will be relative to the adaptability of the conventional insurance in the African
countries in which the sector of insurance has difficulty developing.

In any case, it will be necessary to lead a reflexion on alternatives of the developement in


Africa of the conventional insurance.

Key - words : Solidarity – Africa- insurance law - islam – prejudice – reparation -


Benin- Mauritania – CIMA - takaful – tontine - assabiya - microinsurance.

11
INTRODUCTION GENERALE

1. Depuis l’aube des temps, l’une des préoccupations premières de l’Homme a été sa
protection. D’ailleurs, on pourrait faire remonter le premier besoin de couverture de l’être
humain à la chute2, époque où selon les écrits, Adam3 a senti cette nécessité de se vêtir. Par la
suite, les hommes se protégeront des attaques des animaux sauvages, puis d’autres hommes,
enfin et surtout les hommes devront se protéger des évènements dépendant du hasard. Plus
tard, l’accroissement démographique4, puis l’augmentation des besoins, ont eu pour effets
particulièrement, l’expansion commerciale et avec elle, l’explosion du risque et ce, dans
toutes les activités de la vie courantes : agriculture extraction minière industrie transport
tourisme ce phénomène a incité les sociétés humaines à mettre en place un système de
précaution ou de réparation, face au risque que le vocabulaire juridique définit comme étant
un: « évènement dommageable dont la survenance est incertaine quant à sa réalisation ou à
la date de cette réalisation se dit aussi bien de l’éventualité d’un tél évènement en général,
que de l’évènement spécifié dont la survenance est envisagée »5 Ainsi, les personnes
physiques, leurs biens et les personnes morales à travers les facteurs de productions6
nécessitent une couverture. C’est dans cette perspective que les assurances ont été instituées.
Mary Douglas, écrivait en ce sens que : « les sociétés humaines peuvent toujours être
analysées comme des formes de protection contre les risques extérieurs, les aléas de la vie »7.

2
La tentation et la chute, V. Genèse 3.1-3.
3
Dans les croyances Juives, Chrétiennes et Musulmanes, il s’agit du premier homme créé par Dieu.
4
Un récapitulatif de l'histoire de la croissance démographique nous révèle que : 10000 ans avant JC, la
population était estimée entre 1 et 10 millions d'individus. En 1804, elle avait atteint le cap de 1 milliard de
personnes. En 1930, elle était de 2,07 milliards. En 1970, elle passait à 3,690 milliards. En 2013, la population
mondiale était de 7,2 milliards. Si les choses continuent à ce rythme, l’ONU estime la population mondiale en
2050 à 9,6 milliards. V. https://www.terresacree.org/surpopulationmondiale.htm, consulté le 12 septembre 2017
5
V. pour la définition du risque, G. CORNU, Vocabulaire juridique, 10ème édition, 2014, PUF, p. 930.
6
Les facteurs de productions sont les différentes entités, personnes physiques ou objets économiques, dont les
services sont utilisés lors des opérations de production. On distingue classiquement trois facteurs de production :
la terre, le travail et le capital.
7
F-X. ALBOUY, Principe de précaution, prévention et assurance, Revue d’économie, financière, mars
2005, n°80.

12
2. Les premières traces d’une forme d’assurance ont été constatées il y a 4500 ans avant
Jésus Christ. En effet, des découvertes ont attesté que les tailleurs de pierres en Egypte
antique, recouraient déjà à une sorte de secours mutuelle. Il s’agissait à l’époque, du payement
préalable de cotisations visant à mutualiser les risques aléatoires (maladies, accidents,
décès…). Le but étant le droit à une prestation en cas de réalisation du risque8. Il en découle
que l’Afrique aurait été le « berceau » de l’assurance ou du moins aurait eu dans le passé cette
culture de la prévention du risque. Par ailleurs, au moyen-âge, il a été attesté, l’existence de
quelques institutions proches par certains de leurs aspects du futur contrat d’assurance. Dans le
même ordre d’idée, une autre application marquante de l’idée de mutuelle, sera constituée par
les avaries communes dont les signes du concept remontent à la Lex Rhodia de jactus (loi
Rhodienne sur le jet), plus connue par le texte du Digeste de Justinien9. Cette ancienne forme
de partage des risques du transport maritime dont les premières pratiques ont été attribuées aux
phéniciens puis consacrées par les Romains s’est rependue avec l’expansion commerciale. A
la base, il prévoyait que : « si le navire s’enfonce et ne réagit plus à la lame, s’il prend de
l’eau, si trop lourdement chargé, il ne peut gagner de vitesse le pirate qui le poursuit, bref s’il
est menacé d’un péril et que, pour s’en protéger, on décide de jeter une partie de sa cargaison
à la mer, il faut que tous ceux qui sont sauvés participent au sacrifice »10. Ce système a
survécu jusqu’à une date récente dans le régime des avaries communes que connaît le droit
maritime11.

3. On retrouve le corpus juridique moderne des avaries communes dans les Règles d'York
et d'Anvers12 qui sont périodiquement actualisées13. Les Phéniciens seraient aussi à l’origine

8
J. YEATMAN, L’assurance en Afrique : une émergence difficile, In, Risque septembre 2007, n °71 p.72.
9
Le Digeste, appelé aussi Pandectes est un recueil méthodique d’extraits des opinions et sentences des juristes
romains, réunis sur l’ordre de l’empereur Justinien. Sous la direction de Tribonien, une commission avait
rassemblé les écrits des juristes pour en extraire les citations et les classer par matière. Le Digestes comprend
cinquante livres, divisés en titres, portant l’ensemble du droit privé (personnes, propriétés, obligations, droit
successoral, droit pénal…) l’aspect du digeste qui nous intéresse est traité par le Digeste, Livre XIV Titre 2, Fr 1.
10
Ibid.
11
Loi n°67-545 du 07 juillet 1967 relative aux évènements de la mer. Abrogée par l’ordonnance n°2010-1307 du
28 octobre 2010, Les disposition sur ce point sont inspirées des actualisations de 2004 des règles d’York et
d’Anvers.
12
Dans la seconde moitié du 19 ème siècle, suite au développement considérable du transport maritime et
de son internationalisation de plus en plus prononcée, le besoin s’est fait jour, pour éviter d’insolu bles
conflits, de surmonter les divergences apparues dans les différentes législations et pratiques nationales
susceptibles de pouvoir s’appliquer à un même voyage et donc à une même avarie commune. C’est ainsi
qu’est née l’idée de rédiger un Code international de l’avarie commune qui a été concrétisé à l’occasion
de Congés réunissant juristes et praticiens tenus à York (1864) puis à Anvers (1877).

13
d’une autre préfiguration d’un contrat d’assurance, le nauticum fœnus14, devenu plus tard le
prêt à la grosse aventure.

4. La position de l’Eglise sur le caractère aléatoire et surtout les intérêts15 énormes


pouvant aller jusqu’à 100% du fonds prêté conduit en 124816, le pape Grégoire IX à prendre
une décrétale interdisant tout simplement la stipulation d’un intérêt usurier caractérisant le prêt
à la grosse aventure. La décrétale Naviganti précise : « Celui qui, prêtant une somme donnée à
un marchand naviguant ou se rendant à une foire, parce qu'il soupçonne un risque pour lui,
s'apprête à recevoir plus que son lot, est réputé usurier. Celui qui donne dix sous d'or, pour
que plus tard lui soit rendue la contre-valeur en grain, en vin ou en huile, ne doit pas être
réputé usurier, quoique ces marchandises valent plus à la résolution du contrat, si on était
vraiment incertain des valeurs futures au moment de la conclusion. En raison de ce doute, est
relaxé celui qui vend des pains, du grain, du vin, de l'huile ou autres marchandises, dans le
but de recevoir en échange plus qu'elles ne valent après un temps donné, si toutefois ce n'est
pas cette dernière opération qui avait déterminé la première »17. Cette interdiction entraine
rapidement l’abandon du prêt à la grosse aventure par les commerçants vivant dans les pays
catholiques. Mais, les armateurs Italiens le remplacèrent par une construction juridique qui ne
manque pas d’ingéniosité. En effet, ils mirent au point un nouveau système consistant à
scinder le contrat en deux parties : d’un côté le prêt, de l’autre côté une prime en échange du

13
Pour tenir compte des évolutions constantes du transport maritime, de ses techniques et des
marchandises qu’il concerne, les Règles d’York et d’Anvers, sur initiative de l’International Law
Association (I.L.A) puis du Comité Maritime International (C.M.I), ont été remaniées complètement en
1890, 1924, 1950, 1974, 1990, 1994 et 2004.
14
Le contrat de prêt à la grosse, « argent trajectrice » ou nauticum foenus (intérêt nautique), est à l’origine en
droit romain, un contrat portant sur « l’argent trajectrice », autrement dit, destiné à être transporté par mer. Le
principe de ce contrat jusqu’à une période relativement récente , même s’il n’est plus que d’un intérêt purement
historique était qu’une partie prête une certaine somme d’argent à un emprunteur, propriétaire du navire ou
chargeur, affecté à des objet faisant partie d’une expédition maritime, avec la condition, qu’en cas de perte de ces
choses, par accident de mer ou force majeure, la somme ne sera pas restituée par l’emprunteur, et en cas
d’heureuse arrivée, l’emprunteur devra rembourser au prêteur la somme prêtée avec un certain profit convenu
lors de la formation du contrat. A une époque où l’assurance n’était pas née, ce procédé juridique a eu le mérite
de promouvoir l’essor des échanges commerciaux par voie maritime. Voy. R-J. POTHIER, Traité du contrat
d’assurance, t. VI, p. 273, n° 4
15
Cet interdit est exprimé dans l'Ancien Testament, Deutéronome 23 chapitre 20-21 « Tu ne prêteras pas à
intérêt à ton frère, intérêt d'argent ou intérêt de nourriture, de toute chose qui se prête à intérêt. » Le verset
suivant (23-20) comporte cependant une restriction importante : « Tu pourras tirer un intérêt de l'étranger, mais
tu n'en tireras point de ton frère, afin que l'Éternel, ton Dieu, te bénisse dans tout ce que tu entreprendras au
pays dont tu vas entrer en possession. »
16
R-J. POTHIER, A.-M.-J.-J. DUPIN, Œuvres de POTHIER contenant les traits du droit français, Paris, 1824,
p. 523.
17
V. Décrétale Naviganti 1248.

14
danger encouru18. Ainsi, le navire ou la cargaison est vendu à celui qui accepte de couvrir le
risque mais sous condition résolutoire de l’arrivée à bon port, le payement du prix étant de son
coté soumis à la condition suspensive du naufrage ou de l’avarie ; l’acheteur cependant a droit
dans tous les cas à une certaine somme non soumise à la condition suspensive. L’assurance
proprement dite allait sans doute se dégager de cette nouvelle convention. Elle apparut en
Italie, au XVIe siècle, dans les ports qui étaient devenus le théâtre d’un commerce maritime
intense (Gène, Venise etc.…). Les premières couvertures concernaient des navires et des
cargaisons assurés contre les périls de la mer.

5. A ses débuts l’assurance remplissait bien son rôle de contrat aléatoire dans la mesure où
le risque n’était pas mathématiquement prévisible. Le risque était certes transféré de l’assuré à
l’assureur s’il se réalisait, le succès de l’opération dépendant aussi de la solvabilité de
l’assureur non soutenu à l’époque, par les mécanismes éprouvés de la technique actuelle.
Certains pensèrent tirer profit sans scrupule de la nouvelle institution en assurant certains biens
pour une valeur excessive puis en provoquant le sinistre en vue de bénéficier de l’intervention
de l’assureur. De tels excès conduisirent à l’apparition d’un début de réglementation de
l’assurance aux XVe et XVIe siècle19, notamment à Gène, Barcelone, Burgos, Bruxelles et
Anvers. Ces textes limitaient en général le montant assurable à la valeur effective soumise à
risque en tenant compte d’autres assurances éventuelles, du montant des prêts à la grosse
aventure et d’un découvert obligatoire. C’était déjà l’application de l’un des principes
fondamentaux du droit des assurances, le principe indemnitaire20. Cette conception de
l’assurance fut reprise dans le Guidon de la mer21.

6. L’assurance-vie apparut également en rapport avec la navigation maritime, elle dérive


des premiers contrats conclus en vue de couvrir, en cas de captivité, les rançons exigées par les
pirates Maures22. Il faut tout de même préciser que l’assurance-vie connut des débuts

18
V°. C. BELLENGER, Histoire de l’assurance dommage en France, Thèses Université Panthéon-Assas, 2011,
p. 15
19
En fait, « c’est à la conjonction de l’individualisme et de la spéculation que va naitre l’assurance moderne » V.
J. FAVIER, De l’or et des épices. Naissance de l’homme d’affaire au moyen âge, éd. Pluriel, 2013, p.311.
20
Voir infra, n°530.
21
L’une des premières études sur le droit et l’assurance maritime parue à Rouen au XVIe siècle d’auteur inconnu
il servira de base à l’ordonnance de la marine d’août 1681 dite ordonnance Colbert.
22
J. ERNAULT, Droit de l’assurance vie. Bruylant, 1987, p.8.

15
balbutiant en ce sens que la valeur humaine d’un homme libre 23 était jugée inestimable 24 et de
surcroît hors du commerce. D’autre part, l’assurance-vie était considérée comme étant
contraire aux bonnes mœurs25. Ces spéculations firent paraître un peu partout en Europe, dès le
XVe siècle des réglementations prohibant l’assurance de la vie humaine dans un premier
temps. Par la suite, on assura la vie en elle même et toutes les autres activités de la vie
courante.

7. L’assurance terrestre allait cependant prendre un véritable départ avec l’apparition de


l’assurance incendie, à la suite du grand incendie qui détruisit quasiment Londres en 1666 26. Il
donna cependant une grande impulsion à l’assurance incendie dans le domaine terrestre. Des
compagnies se créèrent en Angleterre d’abord vers 168427. Le phénomène se rependra très
rapidement sur le continent européen.

8. Deux faits marquants allaient positivement influencer le développement de l’assurance.


En premier lieu se constitua à Londres au début du XVIIIe siècle, la corporation du Lloyd’s28.
Le groupe de Lloyd’s allait se développer et contribuer pour beaucoup au progrès de
l’assurance maritime ainsi qu’à l’avènement de Londres comme centre mondial de l’assurance.
L’autre évènement fut d’ordre scientifique29 : Blaise PASCAL dans la seconde moitié du
XVIIe siècle élabora les bases de la probabilité, ses travaux furent poursuivis par FERMAT,

23
En ce sens, R-J. POTHIER disait : « la nature du contrat d’assurance étant que l’assureur se charge de payer
l’estimation de la chose assurée, la vie d’un homme libre n’étant l’objet d’aucune estimation, elle ne peut pas
par conséquence être susceptible du contrat d’assurance ». Voy. R.J. POTHIER, Traité du contrat d’assurance,
Marseille, R -LAMBERT, 1810, n° 27, p. 34
24
R-J. POTHIER, Traité du contrat d’assurances, Marseille, Roux- Lambert ,1810 n° 27, p.34.
25
Ordonnance de la marine du mois d’août 1681, Paris C. OSMONT, 1714, p. 257.
26
B. BEIGNIER, Droit du contrat d’assurance, PUF, 1999, p.5.
27
La Friendly Society Fire Office fut la conséquence directe du grand incendie qui détruisit le centre de Londres
: plus de treize mille maisons furent détruites ainsi que la cathédrale Saint Paul et quatre-vingt-neuf églises, en ce
sens voir : J. HEMARD, Théorie et pratique des assurances terrestres, tome I : la notion, l’évolution, la science
de l’assurance terrestre, Paris, Recueil Sirey, 1924, p.164.
28
C’est un groupe d’assureurs maritimes dont l’origine était l’habitude prise par les gens de la mer de se réunir
dans la taverne d’Edouard Lloyd pour y échanger des informations, Voir, B. BEIGNIER, op.cit., p.15.
29
Les premiers écrits sur les probabilités sont l'œuvre de Jérôme Cardan. Un problème qui intéressait Cardan
était le suivant : comment doit-on répartir les mises d'un jeu de dés si le jeu venait à être interrompu ? La même
question fut posée en 1654 à Blaise Pascal par son ami le Chevalier de Méré, qui était un joueur impénitent. Un
joueur parie qu'il tirera un as en huit coups de dés, mais la police interrompt le jeu après le troisième coup. Les
assistants protestent, mais comment doit-on répartir les mises ? Cette question fut à l'origine d'une
correspondance entre Pascal et Fermat, et leurs réflexions furent publiées en 1657 dans, Tractatus de ratiociniis
in aleae ludo (Traité sur les raisonnements dans le jeu de dés)

16
HUYGENS et BERNOULLI30. Ces recherches aboutirent et démontrèrent qu’il était possible à
partir d’un grand nombre d’observations de prédire les chances de survenance d’évènements
aléatoires31. Bien que l’astronome HALLEY eût établi une première table de mortalité en
169332, et que PRICE eût bientôt dénoncé du point de vue de la statistique, les précarités des
bases sur lesquelles travaillaient plusieurs compagnies britanniques d’assurance. Il fallut
attendre 1762 pour voir une première mutuelle, pratiquer en Angleterre l’assurance-vie sur la
base des résultats d’études statistiques. Une fois l’idée reçue, l’assurance scientifique allait
progressivement se développer. Elle se généralisa à partir du XIXe siècle. L’adoption de bases
techniques solides allait permettre à l’assurance de prendre son essor définitif, car elles
conféraient à l’opération la sécurité nécessaire. L’actuaire en assurance est devenu capable bien
souvent de calculer ses primes de manière qu’elles suffisent très probablement à couvrir les
sinistres à venir. L’assuré pouvait ainsi compter sur l’aptitude de l’assureur à remplir ses
engagements en cas de sinistre.

9. Au XXIe siècle les bonnes mœurs ou l’immoralité ne constituent plus un frein au


développement de l’industrie de l’assurance en Occident. Le droit applicable en matière
d’assurance évolue également et les assurés (consommateurs) sont de plus en plus protégés par
les législations impératives et les directives communautaires.

10. Compte tenu du réchauffement climatique, des conséquences des avancées


technologiques, des faits humains liés aux nouvelles formes de conflit (terrorisme), et des
nouvelles pandémies, le XXIe siècle débute par de nouveaux phénomènes dévastateurs qui
remettent en cause les lois même de la probabilité. L’assurance, on peut affirmer sans risque de
se tromper ne peut que constituer un rempart aux maux qui commencent à sérieusement miner
la planète. L’Afrique n’est pas en reste quant à l’explosion des risques énumérés. En plus de ce
constat, la tragédie s’accentue par le fait que les africains, hormis une exposition aux risques,

30
J. BERNOULLI, Ars Conjectand (Art de la conjecture), 1713, Œuvre posthume qui formule la loi des grands
nombres. Le principe général de cette loi est : « il est probable que si l’on fait un nombre suffisamment grand
d’expériences, la fréquence d’un événement converge notablement de sa probabilité ».
31
Ces scientifiques posent les jalons du calcul actuariel et démontrent la nécessité de réserves mathématiques
dans les sociétés d'assurance vie. C'est donc très logiquement en Angleterre : « les actuaires anglais eurent pour
fonctions spéciales l'étude des combinaisons d'assurance et des calculs de toutes natures qui s'y rattachent »
Voir, B. D'AUDIBERT, La carrière des assurances, Paris, L. Dulac, 1913, Tiré d'une Conférence de Fleury,
actuaire du Phénix, secrétaire adjoint de l'Institut des actuaires français, Archives historiques des AGF.
32
En 1693, Edmond HALLEY a publié la première table de mortalité. Au départ de la population de Breslau en
Pologne, il en déduit un calcul des annuités, des primes annuelles, exigibles pour les contrats des assurances-vie.

17
ne peuvent ni les prévoir, et encore moins les réparer. L’Afrique a besoin d’assurance 33 !
Comme cela se fait dans les pays développés, les pays africains gagneraient plus à capitaliser
les fruits de leurs propres efforts dans le domaine des assurances, et ce, de manière autonome
et durable que de rester sous le joug de la dépendance.

11. Avant de présenter le champ de cette étude, il est nécessaire de s’enquérir des
définitions du contrat d’assurance. En effet, en raison de l’immense diversité et du
particularisme des contrats d’assurance, l’opération connaît plusieurs acceptions pouvant être
de nature stricte, juridique34 ou doctrinale. A l’origine, le terme d’assurance provient du latin
securus, qui signifie sûr35. Au sens strict, pour reprendre les termes même de Joseph
HEMARD, le contrat d’assurance est « une opération par laquelle une partie, l’assuré, se fait
promettre moyennant une rémunération, la prime, pour lui ou pour un tiers, en cas de
réalisation d’un risque, une prestation par une autre personne l’assureur »36. Cette définition
bien que non retenue lors de l’élaboration de la loi de 1930 par le droit français ressemble
fondamentalement à la définition adoptée par le Code des assurances mauritanienne (CAM)37
qui s’en est sans doute inspiré.

Sur les diverses définitions doctrinale 38


de l’assurance que nous avons pu rencontrer, deux
définitions ont pu attirer notre attention, il s’agit de la définition donnée par les Professeurs :

33
Voir M. VATE, "Contre la pauvreté, l’Afrique a besoin d’assurance" Institut Thomas More décembre 2005 ;
Pour plus de précision voir https://www.ecolabs.org/adams2/IMG/pdf/64_fr_MVateContrelapauvrete-
nov2005.pdf visité le 30 aout 2017.
34
En droit français, la loi fondatrice et fondamentale relative au contrat d’assurance, du 13 juillet 1930
contrairement à beaucoup de législations étrangères comme la Mauritanie ne s’est pas hasardée à donner une
définition du contrat d’assurance en général. Le Code CIMA non plus n’a pas défini le contrat d’assurance. Voy
en ce sens. V. NICOLAS, Droit des contrats d’assurance, Economica, 2012, p. 75.
35
M. CHAGNI, L. PERDRIX, Droit des assurances, Manuel. LGDJ, 2009, p. 15.
36
J. HEMARD, op. cit., p.73.
37
V. infra, n° 24.
38
Pour POTHIER, « Le contrat d’assurance est un contrat par lequel l’un des contractants se charge du risque
des cas fortuits auxquels une chose est exposée et s’oblige envers l’autre contractant de l’indemniser de la perte
de la perte que lui causeraient ces cas fortuits s’ils arrivaient moyennant une somme que l’autre contractant lui
donne ou s’oblige de lui donner pour le prix des risques dont il a la charge » Voy. R-J. POTHIER, op. cit., p.
248.
Selon le Professeur LAMBERT-FAIVRE, sur le plan juridique, « l'assurance est une convention par laquelle en
contrepartie d’une prime, l’assureur s’engage à garantir le souscripteur en cas de réalisation d’un risque
aléatoire prévu au contrat » Voir Y-LAMBERT FAIVRE, L. LEVENEUR, Droit des assurances, Paris, Dalloz,
13ème éd., 2011, p.40.
Puisque, de nos jours, l'assurance est basée sur des calculs statistiques on peut la considérer comme étant : « le
contrat par lequel une partie, l'assuré, se fait remettre moyennant une rémunération (la prime), pour lui ou pour

18
ASSI-ESSO, ISSA-SAYEGH et LOHOUES-OBLE, qui définissent l’assurance comme étant :
« une convention par laquelle, moyennant paiement d'une prime ou cotisation, une personne
appelée souscripteur, obtient d'une autre, appelée assureur, le paiement à soi-même ou à un
tiers, d'une certaine prestation si se réalise un évènement prévu au contrat appelé risque »39.
Une définition assez complète du contrat d’assurance est donnée par Monsieur BRAUDO qui
considère le contrat d’assurance comme étant : « un contrat aléatoire par lequel un organisme
dit "l'assureur", autorisé par le ministère des Finances à exercer ce type d'activité, s'engage
envers une ou plusieurs personnes déterminées ou un groupe de personnes, le ou les
« assurés », à couvrir, moyennant le paiement d'une somme d'argent dite "prime d'assurance",
une catégorie de risques déterminés par le contrat dit "police d'assurance" ou par des
conventions additionnelles dites "avenants" …»40.

12. L’Afrique est un continent très vaste avec une superficie de plus de 30 millions de
kilomètres carrés et une population de plus d’un milliard d’habitants. Il apparaît donc utopique
d’envisager de traiter de l’assurance sur tout le continent. Notre étude sera donc axée
essentiellement sur l’Afrique subsaharienne francophone. La délimitation du sujet nous amène
inéluctablement à circonscrire l’angle géographique de l’étude aux pays membre de la CIMA
en l’occurrence le Bénin d’une part, et à la Mauritanie d’autre part. Pour mieux évaluer
l’assurance dans notre espace nous allons dans une certaine mesure procéder à une
comparaison avec des systèmes juridiques différents. Il s’agit de pays africains qui parviennent
tant bien que mal à voir leur secteur de l’assurance se développer (Afrique du Sud, Maroc).

13. Il semble évident que l’Afrique dispose d’une culture riche, de traditions très marquées
et d’un investissement humain et religieux très prononcés. Si ces qualités suscitent fascination
et admiration chez certains, les assureurs africains considèrent cela comme une entrave au
développement de leur activité. Par ailleurs, la rapidité de la croissance de la population

un tiers, en cas de réalisation d'un risque, une prestation par une autre partie, l'assureur, qui, prenant en charge
un ensemble de risques, les compense conformément à la loi de la statistique ». S. GUINCHARD et T.
DEBARD, Lexique des termes juridiques, 23ème Edition, Paris, Dalloz, 2015-2016, p.273.
M. PICARD et A. BESSON ont donné en 1970 une définition de l’assurance qui reste d’actualité. Ils ont
écrit : « L’assurance est le produit de la vertu de prévoyance (…) Ce besoin de sécurité individuel auquel répond
est d’autant plus grand aujourd’hui que la vie moderne se caractérise par un accroissement des risques, donc
par une augmentation de l’insécurité. », Voir M. PICARD, A. BESSON, Les assurances terrestres en droit
français, t.1 Le contrat d’assurance, 3e édition, Paris, LGDJ, 1970.
39
A-M. ASSI-ESSO, J. ISSA-SAYEGH et J. LOHOUES-OBLE, CIMA Droit des assurances, Bruylant
Bruxelles, 2002, p. 165.
40
Voir. https://www.dictionnaire-juridique.com/definition/assurance.php, visité le 12/09/2017.

19
africaine est une caractéristique majeure de l'évolution contemporaine du peuplement des pays
du Tiers-monde. En 2013, 48 % de la population des pays en développement résident dans des
agglomérations, contre seulement 17 % en 195041. A l’image de ce qui s’est produit en
Occident42 au XIXe siècle, l’urbanisation et l’industrialisation, d’une part, le déclin de la
solidarité familiale, d’autre part, favoriseront-ils l’essor remarquable des compagnies
d’assurances et des mutuelles au cours du XXIe siècle en Afrique ?

14. L’assurance au sens moderne est une industrie récente en Afrique. Elle fut apportée par
la colonisation43. Traditionnellement les Africains organisaient la sécurité autour du noyau
familial, tribal, clanique, ethnique ou encore villageois. Les grandes catastrophes sont
considérées par endroit comme un message divin et l’on s’en remet toujours dans ces cas à la
volonté de la providence44.

15. Une réflexion sur le modèle assuranciel de deux anciennes colonies françaises, qui se
sont inspirées des lois françaises essentiellement, mérite un aperçu ou une présentation globale
de leurs particularités. Le premier contact avec l’Europe, s’étant affirmé dans la seconde moitié
du XIXe siècle, a abouti à la colonisation française. Cette période s’accompagne d’une
introduction de la législation française dans plusieurs domaines du droit45. Toutefois, ces textes
passeront par le filtre de la spécialité législative46 afin de les adapter aux intérêts métropolitains
dans les colonies africaines.

16. D’une manière générale, Le droit applicable aujourd’hui au Bénin ancien Dahomey47,
est caractérisé par le dualisme juridique, c'est-à-dire la conjonction d’un droit écrit dit moderne

41
Voir, Etude de l’INED (Institut français d’études démographiques) publiée le 02 octobre 2013.
42
Y. LAMBERT-FAIVRE, L. LEVENEUR, Droit des assurances, 12ème édition Dalloz, 2005 pp.7.8.
43
J. YEATMAN, L’assurance française en Afrique francophone, Risque n° 57, mars 2004.
44
K. K NGUWAY, Une introduction aux relations internationales africaines. L’Harmattan, 2008.
45
D. ABARCHI, Problématique des reformes législatives en Afrique : le mimétisme juridique comme méthode
de construction du droit, Revue de droit des pays d’Afrique. Penant n° 842, pp 88-105.
46
Dans les anciennes colonies françaises, les lois adoptées par les assemblées Nationales françaises avaient
vocation à s’appliquer. Mais, pour ce faire, un texte devrait le requérir expressément ; soit la loi elle-même, soit
un décret.
47
Selon l’histoire, le roi Akaba obtient des chefs Gedevi (souverain locaux) une permission de s’installer sur le
plateau d’Abomey. Il demande des terrains additionnels à un chef important dénommé Dan, qui lui répond de
façon sarcastique « dois-je ouvrir mon ventre et y construire une demeure pour toi ? » ou alors « veux-tu t’établir
jusque dans mon ventre ? » Akaba vexé réussit par la suite à tuer son adversaire Dan et débute la construction de
son palais à l’endroit où l’exécution aurait eu lieu d’où le nom Danhomé Dan (prènom) ho (ventre) mé
(intérieur).

20
et d’un droit coutumier48 dit traditionnel49. Toutefois, il faut reconnaître qu’au lendemain des
indépendances la législation sur le contrat d’assurance, contrairement aux autres branches du
droit laissée par la France, ne fit l’objet d’aucune étude d’adaptabilité aux réalités
économiques, socioculturelles, confessionnelles locales etc… En conséquence, elle s’est
appliquée, en principe, tel quel dans la majorité50des anciens pays de l’Afrique occidentale
française (AOF)51. Cela s’explique part le fait qu’au lendemain des Indépendances vu
l’éminence et l’imminence de la mise en place d’un système d’assurance, pratique méconnue
dans les Etats nouvellement indépendants, le manque de structures juridiques et de techniques
appropriées n’a pu trouver qu’un système calqué sur le modèle français52. Cette situation a
permis au Doyen BOCALLI d’affirmer que « les lois métropolitaines étaient servilement
reproduites dans les colonies, sans qu’elles aient préalablement, subi la moindre
adaptation »53.

17. La fin de la colonisation pour le Bénin s’annonce après que celle-ci se proclame une
république le 04 décembre 1958. Le pays sera officiellement indépendant le 01 août 1960. Il
s’avéra que les douze premières années de son indépendance seront caractérisées par une
grande instabilité politique marquée par une succession de plusieurs régimes aussi bien civils
que militaires. De 1972 à 1990, on assiste à une expérience révolutionnaire militaro-marxiste.
La crise économique et sociale de cette période conduira le régime d’alors à organiser une
conférence regroupant toutes les forces vives de la nation afin de définir une nouvelle politique
de développement54.

48
On en retrouve encore des traces de ces coutumes dans des recueils nommés, coutumier du Dahomey ouvrages
qui regroupe l’ensemble des coutumes dahoméennes, et rendue applicable par la circulaire A-P 128 du 19 mars
1931.
49
A- N. GBAGUIDI, Droit applicable et application du droit en République du Bénin, Bulletin de droit et
d’information de la Cour suprême du Bénin, N° 1, 1997, p.12 et s.
50
J. ISSA-SAYEGH, L’intégration juridique des Etats africains dans la zone franc, Penant N° 823, p .9.
51
Fédération qui regroupa de 1895 à 1958 le Sénégal, la Mauritanie, le Soudan (ancien Haut-Sénégal-Niger), la
Haute-Volta, le Niger, la Guinée française, la Côte d'Ivoire et le Dahomey ; 4 425 000 km2. La capitale en était
Dakar.
52
J. RIVERO, Les phénomènes d’imitation des modèles étrangers en droit administratif, in Mélanges W. J.
Ganshof Van Der Meersch, tome III, Bruxelles, Bruylant, Paris, LGDJ, 1972, p. 620.
53
V-E. BOCALLI, Le nouveau droit du contrat d’assurance des Etats membres de la CIMA, n° 009, 1995, p.37.
54
La « Conférence Nationale » tenue à Cotonou du 19 au 28 février 1990 et a opté pour la création d’un « Etat
de droit et de démocratie pluraliste dans lequel les droits fondamentaux de l’Homme, les libertés publiques, la
dignité de la personne humaine et la justice sont garantis, protégés et promus comme la condition nécessaire au
développement véritable et harmonieux de chaque Béninois tant dans sa dimension temporelle, culturelle que
spirituelle ».

21
18. Le point marquant d’un début d’institutionnalisation de l’assurance en Afrique
francophone est sans doute la mise en place de la CICA 55 (Conférence internationale des
contrôles d’assurances) qui est née le 27 juillet 1962. Sous l’égide de la France qui en était
membre, elle était soucieuse de préserver le bon fonctionnement des sociétés et agences
d’assurances implantées dans les anciennes colonies françaises d’Afrique occidentale (AOF),
centrale, Madagascar et France. Les objectifs de la conférence sont : l’harmonisation des
législations et réglementions nationales, la coordination de l’exercice du contrôle des
entreprises et la coordination de la formation des cadres africains d’assurances.

19. L’importance du secteur des assurances dans le processus de développement d’un pays
a déjà été admise depuis la première session de la Conférence des Nations Unies sur le
Commerce et le Développement (CNUCED), en 1964. En juin 1972, se tint à Santiago du Chili
l’Assemblée (CNUCED) dont l’une des recommandations fortes enjoignait aux pays en voie de
développement de maîtriser leurs marchés nationaux d’assurances, en favorisant la création de
sociétés d’assurances de droit national et en prenant les mesures nécessaires pour leur
développement harmonieux56. L’objectif recherché était que ces entreprises nationales
d’assurances puissent pleinement jouer leur rôle d’investisseurs institutionnels pour le
financement du développement. Un solide secteur de l’assurance est une caractéristique
essentielle d’un système économique performant, car il contribue à la croissance économique
et favorise l’emploi. Le principal du chiffre d’affaire des sociétés d’assurances africaines
provient du secteur formel. Dans le champ de notre étude, on peut affirmer sans risque de se
tromper que l’économie informelle contribue énormément à la hausse du pourcentage du PIB
des pays en voie de développement. Pour autant, le caractère assurable de ce secteur est
assurable de ce secteur est peu ou pas assez exploité.

20. Le marché africain de l’assurance représente moins de 1,5% du marché mondial, part
dans laquelle on voit l’Afrique du Sud se tailler la part du lion avec 80% des cotisations du
marché. Il serait utile de se pencher sur son modèle de réussite ainsi que celui du Maroc qui
sort du lot des pays souffrant d’un marché d’assurance patent. Dans le contexte de crise
économique actuelle l’avenir des sociétés d’assurances africaines dépendra aussi de la capacité
des marchés locaux à s’adapter à aux réalités économiques de plus en plus difficile et dans un

55
Conférence internationale des contrôles d’assurances des Etas africains signée à Paris, le 27 juillet 1962 et
regroupant les Etats suivants : France, Cameroun, Centrafrique, Congo, Côte d’Ivoire, Dahomey (aujourd’hui
Bénin), Gabon, Haute-Volta (aujourd’hui Burkina Faso), Mauritanie, Madagascar, Niger, Sénégal et Tchad.
56
Voir en ce sens, Acte de la conférence des nations unies sur le commerce et le développement IIIe session
Santiago (Chili) 13 avril-21 mai 1972.

22
environnement fortement influencé par les Technologies de l’Information et de la
Communication.

21. Dans le domaine des assurances, depuis sa création en 1962, le Bénin, est resté membre
de la CICA devenue plus tard CIMA57, organisation qui regroupe à ce jour quatorze membre et
qui de par son Code édicte les lois applicables en matière d’assurance dans une grande partie
de l’espace OHADA58. Le Code CIMA est en vigueur depuis 1995. Dans la zone CIMA, ce
texte constitue une innovation en divers points, notamment dans la procédure
d’indemnisation59 pour la réparation des préjudices corporels causés par les accidents de la
circulation automobile.

Concernant le contrôle nous verrons les avancées majeures en matière de rigueur et de


sanction des organes communautaire de régulation du secteur de l’assurance60. En dehors des
mesures disciplinaires évoquées, la CIMA a régulièrement procédé au relèvement du capital
social minimal des sociétés d’assurances, afin de renforcer leurs assises financières et leur
solvabilité : ainsi de 250 millions de francs CFA en 1995, le capital social minimal autorisé
des sociétés anonymes d’assurances a été porté à 500 millions de francs CFA en avril 1999
puis, lors de la session de la CRCA tenue à Dakar (Sénégal) en avril 2007, à un milliard de
francs CFA61

22. La Mauritanie62 est un point de passage, entre l’Afrique du nord et l’Afrique noire.
Quand bien même elle demeure un pays multiethnique de par sa composition ethnique arabo-
berbère et négro-africaine qui suppose ainsi une subdivision, le ciment qui soude la

57
Traité du 10 juillet 1992 instituant une organisation intégrée de l’industrie des assurances dans les Etats
africains.
58
Organisation pour l’harmonisation en Afrique du Droit des Affaires. Cette organisation regroupe à l’heure
actuelle 17 pays à savoir : le Bénin, le Burkina-Faso, le Cameroun, la Centrafrique, les Comores, le Congo, la
Côte d’Ivoire, le Gabon, la Guinée, la Guinée-Bissau, la Guinée Equatoriale, le Mali, le Niger, la RD Congo, le
Sénégal, le Tchad et le Togo.
59
V. supra, n°200 et suivants.
60
En 2013, la Commission régionale de Contrôle d’assurances(CRCA), a décidé de sanctionner
systématiquement une dizaine de sociétés qui ne payaient pas diligemment les sinistres. Sanctions qui consistent
au paiement d’une amende allant de 0.1% à 2% du chiffre d’affaires de l’exercice précédent. En ce sens, voir,
73ème session, du 21 au 26 octobre 2013 à Cotonou de la CRCA.
61
Voir. Note de M. ZIGUELE pour CAP Afrique, juillet 2008 p.5.
62
Le nom Mauritanie résulte d’une autorité administrative française issue d’une décision ministérielle du 27
décembre 1899 qui désigne ainsi les espaces désertiques situées au nord du fleuve Sénégal. Voir P.
MARCHESIN, Tribus ethnies et pouvoirs en Mauritanie, Karthala, 1992, p .73.

23
conscience collective du peuple reste la religion musulmane (religion officielle)63. Dans ce
sens, A. TRAORE écrivait : « La Mauritanie est le seul pays au sud du Sahara où les
missionnaires chrétiens s’avouaient battus l’avance »64

Concernant ce pays toujours, Francis de CHASSAY soutient que : « La foi dynamise, légitime
et cimente la conquête qui est aussi une opération commerciale… ; le commerce, y compris le
plus pacifique, charrie de la foi »65. De ce qui précède, il découle que dans le système
juridique mauritanien, les interdits religieux comme il a été précédemment fait mention pour
le prêt à la grosse aventure a soulevé la même polémique.

23. Déjà en droit français, l’aléa qui est un élément caractéristique du contrat d’assurance
a valu au contrat d’assurance et au prêt à la grosse aventure d’être classés parmi les contrats
aléatoires à l’instar du jeu et du pari, d’une part, le contrat de rente viagère, d’autre part66. A
ce titre, la transposition des lois françaises en matière d’assurances pourrait être incompatible
avec les principes d’une république islamique. En effet, l’aléa (gharar)67 n’est admis en droit
musulman que dans les contrats suivants : moudaraba (commandite avec association capital-
travail), de musaraka (société pour l’ensemencement avec partage de la récolte) et le
khamassa (le métayage au quint)68. Cet élément assimilé au jeu de hasard ou au pari est illicite
sur le plan religieux69 et, ne peut être que source de polémique voire de rejet par la société
mauritanienne qui est à près de 100% musulmane70. En réalité, deux71 courants de pensées
islamiques s’opposeront quant à la licéité du contrat d’assurances. Pendant que certains le
jugent contraire aux préceptes religieux en le qualifiant de contrat usuraire et aléatoire
d’autres l’assimilent à une commandite avec association autorisé en droit musulman et le

63
S. PAPI, L’influence juridique islamique au Maghreb, l’Harmattan, 2009, p. 317.
64
Voy. A. TRAORE, L’Islam en Mauritanie, in LAVROFF (dir.) Introduction à la Mauritanie, Editions CNRS,
1979, p.155 Cité par P. MARCHESIN, Tribus ethnies et pouvoirs en Mauritanie, Karthala, 1992, p.49.
65
F. DE CHASSEY, L’étrier, la houe et le Livre, Société traditionnelle au Sahara et au Sahel occidental,
Anthropos, 1977, p.26.
66
Voir article 1964 du Code civil français.
En elle seule, la notion gharar comporte les trois éléments que sont l’incertitude, le risque et la spéculation. V.
67

M. El GAMAL, La finance islamique, aspect économiques légaux et pratique, De Boeck, Bruxelles, 2012.
68
L. MILLIOT, Introduction à l’étude du droit musulman, Sirey, 1953, p.644-668.
69
Coran, Sourate II, verset 219 : « ils s’interrogent sur le vin et je jeu de hasard, dis : dans les deux cas, il y’a un
grand péché et quelques avantages pour les gens ; mais dans les deux cas le péché est plus grand que l’utilité.
70
Voir article 5 de la constitution mauritanienne du 20 juillet 1991 : « l’Islam est la religion du peuple et de
l’Etat ». Voir S. PAPI, op.cit. p.300.
71
S. ALDEEB SAHLIHEH, Religion et droit dans les pays arabes, Presse Universitaire de Bordeaux, 2008, p.
506-510.

24
prônent de par son aspect de solidarité. Dans un premier temps, l’ordonnance 83-164 du 9
juillet 1983 qui prévoyait que les juges statuent « suivant la règle du droit musulman » et qui
constituait une entrave au développement de l’assurance sera abrogée par le Code de
procédure civile commerciale et administrative issu de la loi 99-035 du 24 juillet 1999.

En Mauritanie, la nouvelle rédaction72 a remplacé la référence au droit musulman par celle,


plus neutre, aux « règles de fonds applicables aux litiges »73. Ensuite contre l’avis des
Oulémas, l’Etat va limiter les effets du droit musulman dans le domaine économique. En
effet, dans la mesure où l’islam interdit l’usure le prêt à intérêt et par déduction le contrat
d’assurance, il était nécessaire pour l’Etat mauritanien d’agir et d’affirmer sa maitrise des
règles juridiques en matière économique et, surtout en fonction du processus de
développement et de l’intégration de la Mauritanie dans l’économie internationale74.

24. Pour répondre donc aux exigences que nous venons d’évoquer, le recours au droit
occidental est inéluctable. On en ressent l’influence dans le Code des obligations et des
contrats promulgués en 1989, dans le Code des assurances ou encore dans le Code du
commerce.

Les autorités mauritaniennes tout en affirmant respecter le droit musulman défendent


également l’idée de textes juridiques étant conçus dans le but de favoriser le développement
économique et la modernisation de la société mauritanienne. Autrement dit, les autorités
issues de la légitimé du peuple doivent être capables de produire des normes juridiques en
fonction de ces objectifs75. Il s’agit là de définir un compromis entre l’action volontariste de
l’Etat et l’application des principes du droit musulman. C’est ce qui synthétise le Code des
assurances mauritanienne qui est en réalité un toilettage des lois françaises en matière
d’assurance pour les rendre applicables 76
à son système juridique. Dans ce sens, la latitude
donnée au juge Mauritanien de pouvoir puiser tour à tour dans le droit musulman et le droit
positif occidental pour dégager les règles applicables en matière d’assurances dénote bien de

72
V. Loi n° 99-035 du 24 juillet 1999 portant Code de Procédure civile, commerciale et administrative.
73
V. Loi n° 99- 035 du 24 juillet 1999 portant Code de Procédure civile, commerciale et administrative.
74
C. MAYRARGUE, L’Afrique politique 2002. Islams d’Afrique : entre le local et le global, Paris, Karthala,
2002. p. 84.
75
C. MAYRARGUE, op.cit., p. 85.
76
L-K. N’GAIDE, L’adaptation du droit des sociétés aux besoins de l’économie mauritanienne, thèse,
Université de Bordeaux I, 1985, p.3.

25
la volonté de monopole du secteur et surtout une certaine indépendance du législateur
mauritanien77.

Cet emprunt à chacune des deux sources du droit des assurances en Mauritanie met en
évidence le caractère ambivalent78 du système juridique Mauritanien. Cela s’explique par le
fait que les règles qui sont tirées tantôt de la charia79, tantôt du droit civil se trouvent
imbriquées les unes aux autres. Les limites à l’application de la charia constituent le
commencement de l’application du droit civil et vice-versa80.

Rappelons à ce titre que le contrat d’assurance se définit en droit mauritanien comme « la


convention portant sur une opération par laquelle, une personne, l’assuré se fait promettre,
moyennant une rémunération ou prime, une prestation par une autre partie l’assureur, en cas
de réalisation d’un risque »81. Il ressort de cette définition une volonté manifeste du
législateur mauritanien d’omettre la notion d’aléa qui, tout de même reste sous entendu, car
on ne saurait imaginer l’existence d’un contrat d’assurance sans l’aléa82. Les deux systèmes,
qui constituent les sources d’inspiration du droit des assurances en Mauritanie, a priori
différents, ne sont pas toujours incompatibles en certains points.

25. Depuis quelques décennies, on assiste à une profonde modification du mode de vie en
Afrique. Les signes de ce bouleversement sont essentiellement hormis un fort exode rural une
industrialisation et une urbanisation incontrôlée. On observe un recours massif aux nouvelles
technologies, et moyens de locomotion. En somme, il s’avère que de nouveaux risques ont
accompagné les nouvelles structures de la société Africaine. Avant d’aboutir de manière hâtive
à cette conclusion selon laquelle l’omniprésence du risque qui est devenue une réalité en
Afrique devrait de manière logique entrainer la hausse de la demande d’assurance, une série de

77
Par exemple, le Code pénal mauritanien du 9 juillet 1983 mélange en réalité des dispositions de l’ancien Code
issu de la colonisation, et certains principes issus du droit musulman. Il s’agit par exemple de la diya pour les
réparations civiles par exemple.
78
H. RAMDAN, Le fonctionnement de la justice dans les pays en voie de développement : Le cas de la
Mauritanie, L’Harmattan, 2011, p .41.
79
Voir l’ordonnance 83-164 du 09 juillet 1983 portant institution d’un Code Pénal.
80
M-Y-A. WEDOUD, Le système judiciaire mauritanien après l'indépendance, RJPIC n°2, mai-août 2001, p.
141 et s.
81
Article 3 de la loi 93-40 du 20 juillet 1993 portant Code des assurances In JO n°812 du 15 aout 1993.
82
La Cour de cassation française pour lever l’équivoque souligne que : « l’aléa constitue l’essence même du
contrat d’assurance », ou encore que « le contrat d’assurance est par nature aléatoire » (2e Civ., 7 octobre
2010, pourvoi n° 10-30.233 ; 2e Civ., 1er juillet 2010, pourvoi n° 09-10.590, Bull. 2010, II, n° 129 ; 3e Civ.,
10 octobre 2007, pourvois n° 06-11.129 et n° 06-14.205)

26
questions méritent d’être posées. En effet, l’entrée timide de cette industrie dans l’économie
des pays africains lors de la colonisation n’a pas suffi à consolider ou à parfaire la formation
d’un marché local de l’assurance à l’exception de l’assurance obligatoire du fait que les
sociétés africaines postcoloniales étaient restées pendant longtemps en marge de la vie
économique moderne.

26. La première question qui s’impose consiste à se demander si l’assurance


conventionnelle de par son mécanisme de collectivisation qui le rapproche de la solidarité
mécanique ancestrale africaine peut supplanter aisément celle-ci ?

L’expérience a pu démontrer qu’il ne suffit pas de disposer d’un cadre législatif et


réglementaire moderne, souvent calqué sur le droit des pays développés, pour assurer sa bonne
exécution ou pour que l’économie bénéficie pleinement de ses effets.

Ainsi, tout arsenal juridique dédié à l’assurance peut rester inefficace si les conditions de
succès ne sont pas réunies. Ces conditions, peuvent être constituées essentiellement des
dispositifs d’incitation d’ordre contractuel et institutionnel, visant l’encouragement à la
souscription de contrats d’assurance. A ce titre l’on peut se demander si les assureurs africains
disposent vraiment des arguments nécessaires aussi bien sur le plan technique, juridique et
fiscal pour convaincre les assurables ?

S’il est avéré que le droit mauritanien ainsi que le droit béninois des assurances ont pu naître et
se développer grâce au droit français des assurances, on devra se demander quelles sont les
particularités du droit mauritanien ou béninois en matière d’assurance ? La thèse relative à
l’assurance en Afrique impose donc de s’interroger sur le rôle du droit des assurances pour
l’épanouissement de l’activité elle même. En effet, depuis l’indépendance des pays africains,
l’on a assisté à une certaine modification au fil du temps des lois transmises par la France. Le
droit des assurances n’en est pas exempté. Quel bilan peut-on en tirer ?

Bien qu’étant anciennes colonies françaises, le Bénin et la Mauritanie ont dû appréhender


l’assurance de manière différente. Car, la survivance de certains usages et coutumes, les
interdits religieux on n’aura cesse de le dire auront un impact certain sur l’émergence du
secteur des assurances en Afrique. Depuis quelques années l’émergence d’une assurance
islamique, confirmera la recrudescence de la polémique concernant la licéité de l’assurance
donnant naissance même à la création de compagnies d’assurances islamiques en Mauritanie.
On assiste également à un nouvel appel à l’application de la charia devenant le centre de la
revendication des mouvements islamiques extrémistes un peu partout dans les pays

27
musulmans. En effet, pour être en conformité avec la religion, le droit musulman a vocation à
régir les adeptes de l’islam, dans leurs relations entre eux, et dans leur relation à Dieu83

Ces réalités socioculturelles, constitueront-elles un frein au développement d’un marché


d’assurance ?

27. Au regard de ce qui précède, les systèmes d’assurance des pays d’Afrique noire sont
loin de satisfaire aux objectifs attendus du fait de leur retard. Le but de cette étude sera aussi
d’apporter une explication au retard de certains marchés africains sur d’autres. En nous
intéressant à certains modèles assuranciels, comme l’Afrique du Sud ou le Maroc, notre
objectif est de trouver un début de solution aux problèmes structurels que connaît le marché
africain à l’heure actuelle. La question suscitée par notre démarche est : quid de la pratique
de l’assurance au Bénin et en Mauritanie ?

28. Enfin, un intérêt pour les besoins réels des populations africaines en matière
d’assurance nous orientera vers une exploration de la micro assurance. En effet, La pratique
montre alors qu’il y a des écarts en matière de commercialisation des contrats d’assurance,
certaines questions restent ouvertes sur ces écarts. Mais, encore faut-il que les souscripteurs de
contrats, soient suffisamment informés et conseillés afin de choisir, lors de la souscription, le
contrat convenablement adaptés à leurs besoins ?

En réalité, il faudrait songer à l’élaboration d’un modèle efficace de couverture ne serait ce


que pour lutter contre la pauvreté la misère et faire face aux fléaux du XXIe siècle dont
l’Afrique n’est malheureusement pas prête à affronter d’une part et à surmonter par ailleurs.
Alors, quel modèle d’assurance est à même de répondre aux besoins des populations d’une
Afrique en mutation ?

Si un intérêt particulier est accordé à un tel sujet, c’est justement compte tenu de l’enjeu
important de l’assurance dans les économies modernes. L’assurance est incontournable et les
africains en sont conscients. Pour parvenir à bénéficier efficacement des retombées du
secteur des modifications, des innovations doivent intervenir aussi bien sur le plan législatif,
juridique, que pratique.

29. Ceci étant, le plan proposé pour répondre efficacement à la problématique de cette
thèse s’articule autour de deux parties essentielles, d’une part : l’évolution du concept
d’assurance permettra d’étudier les sources et les étapes de l’évolution de la pratique et du

83
L. MILLIOT, F-P BLANC, Introduction à l’étude du droit musulman, Paris, Dalloz, 2001, p.1.

28
droit des assurances en Mauritanie et au Bénin (première partie). D’autre part, un
développement portant sur l’organisation, la pratique et le fonctionnement du secteur des
assurances dans ces deux pays aura pour mission de dresser un état des lieux de la situation à
travers une analyse montrant les lacunes et, partant de là préconiser des solutions ou des
alternatives de part quelques propositions dans le but de faire croître durablement une
industrie africaine de l’assurance (deuxième partie).

29
PREMIERE PARTIE :

L’EVOLUTION DU CONCEPT D’ASSURANCE


EN AFRIQUE

30
30. Plusieurs siècles, et étapes auront été nécessaires pour atteindre le niveau actuel
du secteur des assurances existant dans les pays développés. Contrairement aux institutions et
unités de productions qui existaient déjà depuis plusieurs siècles, en occident, l’industrie
d’assurance est inconnue en Afrique avant la période coloniale. Durant la colonisation,
l’objectif était simple. Il s’agissait de transposer ou calquer des modèles économiques ou
juridiques des sociétés occidentales aux différentes colonies. On a pu constater que plusieurs
éléments n’ont pas été pris en compte par le colonisateur. Dans la réalité, divers facteurs
opposent la France et ses anciennes colonies : culture, religion, mode de vie, coutumes,
système politique, modèle d’organisation etc…

31. Dans le domaine des assurances, la nécessité d’une sauvegarde des investissements de
la métropole en Afrique est sans doute l’une des principales raisons de l’apparition du concept
dans les colonies nouvellement indépendantes. En effet, l’accroissement des activités
commerciales et industrielles européennes dans les anciennes colonies ne peuvent impliquer
qu’un besoin de couverture.

L’objectif pour les anciennes puissances coloniales et singulièrement la France est de


protéger leurs intérêts par la transposition du modèle occidental d’industrie d’assurance qui on
doit le dire a atteint sa maturité en Europe.

32. Notre étude va du concept traditionnel de l’assurance aux réalités d’une industrie
d’assurance (titre I). Après avoir décrit les formes traditionnelles de l’assurance en Afrique,
nous allons étudier le processus ainsi que les différentes stratégies utilisées pour initier les
pays d’Afrique occidentale à l’assurance en tant que modèle occidental de couverture du
risque. Ensuite, il sera question d’étudier le degré de réussite de la transposition du modèle
assuranciel français en Afrique à travers l’évolution et les caractéristiques de l’industrie
d’assurance au Bénin et en Mauritanie. (Titre II)

31
Titre I :

Du concept traditionnel de l'assurance aux réalités d’une industrie

d'assurance

33. Pour être exhaustive, l’étude de la solidarité comme moyen de réparation du préjudice
dans les systèmes juridiques africains suppose, au préalable une description des systèmes de
garanties voisins de l’assurance et utilisés jusqu’à l’avènement de l’assurance
conventionnelle. Il s’agit de la solidarité traditionnelle ou des pratiques assimilables à une
assurance (Chapitre I).

34. En Afrique, au début du siècle, les colonies françaises vont connaître un essor
démographique significatif du fait de l’immigration de populations venue d'Europe et du
développement des entreprises locales. C’est d’ailleurs, ce qui va engendrer, entre autres, le
besoin en assurance en Afrique, en l’occurrence pour les expatriés Français ainsi que les
entreprises françaises.

Nous allons étudier l’impact de la colonisation (Chapitre II), en tant que source d’inspiration
du droit des assurances en Afrique. La règlementation du secteur de l’assurance comme dans
toute autre activité va constituer une étape incontournable dans des sociétés jusque-là régies
par des pratiques, usages, ou coutumes. Le système juridique français doit être désormais
intégré au droit local des pays francophones en question.

35. La colonisation qui a si profondément bouleversé les structures sociales en Afrique


noire francophone ne pouvait épargner le secteur des assurances. En résumé, il s’agit bien de
l’introduction d’une réglementation en matière d’assurance dans un système où l’expérience
ne sera pas des moindre. Ce chapitre sera consacré à un système juridique d’inspiration
française (Chapitre III).

32
Chapitre I : Solidarité traditionnelle ou pratiques assimilables à une
assurance

36. Héritée du droit romain84, l’expression « solidarité » est restée en France pendant
longtemps exclusivement consacré au domaine du droit.

Une première définition juridique lui sera d’ailleurs donnée en 1693. Ainsi, la solidarité se
définit comme étant : « ce qui unit les personnes tenues par une obligation solidaire »85.

37. La complexité et la polysémie du concept de solidarité demeure indiscutable. Dans son


acception sociale, la solidarité est une démarche humaniste de personnes qui choisissent ou
ressentent une obligation morale d'assister une autre personne. La solidarité se distingue de
l'altruisme. L'altruisme peut souhaiter aider autrui sans pour autant se sentir concerné par ce
qui lui arrive, et inversement on peut se rendre solidaire d'autrui simplement par intérêt bien
compris (Attente d'une réciprocité) et non par altruisme, très souvent, on présente sous cette
forme positive des formes des solidarités plus ambiguës :

- une forme d'échange mutuel ou chaque membre se rend solidaire des autres parce
que les autres se rendent solidaires de lui. C'est donc un calcul (économique) et non
une démarche généreuse.

- une forme de solidarité imposée, où chaque membre se trouve obligé d'adhérer au


groupe sous peine de perdre certains bénéfices (Frais de copropriété...), voire sous la
naissance de sanction (partie socialisée du salaire, impôts, conscription)86

38. Dans son approche assez universelle de la solidarité, Elie FAURE estime, qu'on le
sente ou non, qu'on le veuille ou non, une solidarité universelle unit tous les gestes et toutes
les images des hommes, non seulement dans l'espace, mais aussi et surtout dans le temps87.

84
J.V.-L. LEWANDOWSKI, De la solidarité, en droit romain et en droit civil français, Thèse Faculté de droit
de Paris, BNF, Ed, 1866.
85
Arrêt ds Rec. gén. des anc. lois fr., éd. Isambert, t. 20, p. 202. Voir
http://www.cnrtl.fr/etymologie/solidarit%C3%A9, consulté le 12 septembre 2017
86
M. LUSENGE, Solidarité, famille et développement socio-économique en ville de Butembo, Mémoire online
2008, consulté le 12septembre 2017.
87
E. FAURE, Histoire de l’art. L’esprit des formes, 1927, G. Crès, Paris, 1927 p. 13.

33
Dans une certaine mesure, la solidarité est cette dépendance mutuelle entre les êtres humains,
existant à l'état naturel et due au besoin qu'ils ont les uns des autres. Henry BERGSON
considère la solidarité de fait comme étant : « humaine, mutuelle, naturelle ; solidarité des
hommes, avec les hommes, des âmes ; solidarité dans le mal ; solidarité étroite, profonde,
réciproque ; lien, sentiment de solidarité. Des âmes privilégiées ont surgi qui se sentaient
apparentées à toutes les âmes et qui, au lieu de rester dans les limites du groupe et de s'en
tenir à la solidarité établie par la nature, se portaient vers l'humanité en général dans un élan
d'amour » 88

39. Quand on parle de l’Afrique, un cliché assez répandu a tendance à surgir. Il s’agit du
qualificatif de terre de solidarité, par opposition au monde individualiste européen. Plus
qu’une option, la solidarité dans certaines contrées africaines est un devoir de conscience qui
s’est généralement traduit en une obligation tacite.

La Charte Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples consacre clairement le devoir « de
préserver et de renforcer la solidarité sociale et nationale singulièrement lorsque celle-ci est
menacée »89. Dans cette thèse, nous nous intéresserons essentiellement à la solidarité en tant
que lien social et non en tant que lien juridique90.

40. Toujours, dans sa connotation sociale, Emile Durkheim91 définit la notion de solidarité
sociale en tant que lien moral entre individus d'un groupe ou d'une communauté. Selon lui,
pour qu'une société existe, il faut que ses membres éprouvent de la solidarité les uns envers
les autres. La solidarité est intimement liée à la conscience collective qui fait que tout
manquement et crime vis-à-vis de la communauté suscite l'indignation et la réaction de ses
membres. DURKHEIM développe les concepts de « solidarité mécanique » et de « solidarité
organique ». Il aboutit à la conclusion selon laquelle : une mutation de la solidarité mécanique

88
H. BERGSON, Les deux sources de la morale et de la religion, 1932, p.97.
89
Voir Charte africaine des droits de l’Homme et des peuples adoptée le 26 juin 1981 et entrée en vigueur le 21
novembre 1987 article 29.
90
Selon le Code civil français qui traite de la notion dans un chapitre spécifique (art 1997-2016), il y a solidarité
entre débiteurs si ces derniers ont engagé ensemble un emprunt et sont tous responsables pour son
remboursement : « il y a solidarité de la part des débiteurs, lorsqu'ils sont obligés à une même chose, de manière
que chacun puisse être contraint pour la totalité, et que le paiement fait par un seul libère les autres envers le
créancier. » article 1200 du Code civil français. Le Code civil dispose également que : « la solidarité ne se
présume point ; il faut qu'elle soit expressément stipulée» article 1202 du code civil français c’est-à-dire qu'elle
doit résulter d'une mention explicite de la loi ou d'un contrat. Rajoutons que la solidarité relative aux créanciers
est active et, celle qui concerne les différents débiteurs est passive voir respectivement articles 1197 et 1204 du
Code civil français.
91
E. DURKHEIM, De la division sociale du travail social, 1893.

34
se transformerait en une solidarité organique. La distinction entre les deux types de société se
fait notamment par l'étude d’un phénomène objectif. Le droit dans les sociétés primitives, les
normes coutumières et les règles s’imposent à tous les individus. Le droit dans les sociétés à
solidarité mécanique est donc avant tout un droit répressif. Ainsi, la personnalité individuelle
est subordonnée au groupe, qui gouverne la conscience collective de tout un chacun.
Caractéristique des sociétés de faible importance numérique, cette organisation sociale très
segmentée produit une solidarité mécanique où l’intégration se fait essentiellement par la
ressemblance entre les différents individus, qui poursuivent les mêmes buts collectifs. Ceci
permet la reproduction et la sauvegarde des valeurs immuables de la collectivité. A l’inverse,
dans les sociétés modernes, la division du travail nécessite une spécialisation dans les activités
professionnelles, et une interdépendance dans les échanges de compétence. La forme du droit
y est donc coopérative. La diversification des rôles et des statuts engendre par ailleurs la
naissance d’une conscience individuelle.

41. De nos jours pendant que la solidarité perd de la valeur en campagne l’indifférence est
grandissante dans les grandes villes africaines. Le sens de la générosité et de la solidarité qui
caractérisait jadis l’Afrique noire est en train de s’effacer au profit de l’individualisme92. La
solidarité en Afrique, solidarité mécanique avant la colonisation est un phénomène associant
sentiments et actions. Ainsi, la solidarité se définit dans le sens de notre étude comme
l'ensemble des prestations matérielles et immatérielles, auxquelles est soumis l'individu de par
son incomplétude et son appartenance à une communauté ; prestations caractérisées par la
participation, le partage et la réciprocité. Il revêt diverses formes et appellations que nous
analyserons par les principes de l’assabiya (les lawhas, la touiza ) et la tontine (Section I). Le
but de l’assurance étant au font la réparation, nous allons en (Section II), nous attarder sur les
formes traditionnelles de la réparation.

92
E. SHORTER, Naissance de la famille moderne, Paris, seuil, 1977, p.27.

35
Section I : Les principes de l’assabiya (les lawhas, la touiza) et la tontine

42. Ce qu’il convient de rappeler, c’est la diversité des formes de la solidarité qui est liée
directement à la différence de culture qui caractérise les sociétés en général et africaine en
particulier. Dans les populations d’Afrique noire, la forme la plus répandue de solidarité
demeure la tontine. Elle est à ce titre très populaire au Bénin ainsi qu’au sein de la population
négro mauritanienne qui pratique aussi le piyé93. Si l’appellation du principe varie en fonction
de groupe ethnique, la pratique reste quasi identique à divers points de vue. L’Afrique blanche
ou le Maghreb ainsi que la société Maure qui est une des composantes de la population en
Mauritanie a tendance à privilégier l’assabiya, les lahwa et la touiza qui, on le verra, tirent
leurs origines des sociétés arabes préislamiques. Nous allons aborder l’assabiya, source
d’inspiration de la lahwa (Paragraphe I). Puis, la tontine qui demeure la forme de solidarité la
plus courante en Afrique noire sera traitée (Paragraphe II)

Paragraphe I : L’assabiya source d’inspiration de la lahwa.

43. Pour mieux aborder le concept de lahwa, il s’avère nécessaire de chercher ses origines,
ce qui nous conduira nécessairement à l’assabiya. Il faut admettre que même si elle tire ses
origines de l’assabiya, la lahwa a su dégager une certaine particularité. Il s’agit dans un
premier temps faire ressortir les différentes acceptions de l’assabiya et sa pratique (A). Puis
nous allons nous intéresser à la lahwa (B).

93
Expression de la communauté Halpularren (ayant en commun la langue peul) pour désigner la tontine.
Toutefois, depuis une trentaine d’années, le phénomène tontinier n’est plus le fait exclusif des populations
négros africaines. Les Maures et essentiellement les Haratines y recourent voir B OULD HAMZETTA, in
solidarité sociale et lutte contre la pauvreté 2003 http://ged.u-bordeaux4.fr/SBHAMZETTA.pdf , visité le 27
aout 2017.

36
A- Les différentes acceptions du concept d’assabiya et sa pratique

44. Le concept d’assabiya a été vulgarisé par Ibn KHALDUN bien que mentionné dans un
hadit94 : « Est-ce assabiya d’aider son peuple ? Non, répondit le prophète Mohamed, mais
c’est assabiya d’aider son peuple dans des aons injuste »95. Malgré l’ancienneté du concept
c’est Ibn KHALDUN surtout à travers ses écrits qui systématisa le concept en lui donnant un
sens plutôt exhaustif96. L’assabiya est une notion assez complexe pour ne pas dire ambiguë.
Elle a été introduite par diverses expressions97. Nous retiendrons cependant l’étroite relation
de l’assabiya avec le mécanisme de solidarité.

A la lumière des concepts posés par Ibn KHALDUN : « les liens du sang », ont une
force que presque tous les hommes reconnaissent par un sentiment naturel. Leur influence
porte à ce qu’on se préoccupe de l’état de ses parents et de ses proches, toutes les fois qu’ils
subissent une injustice ou qu’ils risquent de perdre la vie »98. A partir de cette thèse, on
comprend aisément, l’importance du lien social et essentiellement sanguin source d’alliance
dans la pratique et la survie de l’assabiya. En effet, c’est à l’origine un terme employé dans un
contexte tribal ou clanique, caractérisant les sociétés nomades arabes. Mais selon certaines
acceptions il peut désigner également le nationalisme au sens moderne, assez revendiqué ces
dernières années dans les pays arabes. Toutefois, il a souvent une connotation négative, car il
place la loyauté au-dessus des circonstances99.

94
Hadith est un mot arabe qui signifie propos ou communications ; après la mort du prophète en effet lorsque les
nouveaux musulmans étaient confrontés à un problème de la vie quotidienne, et qu’ils n’avaient personne vers
qui se tourner. Si la solution ne se trouvait pas dans le Coran par exemple, comment trancher ? C’est pourquoi,
ils prirent l’habitude de se tourner vers les compagnons du Prophète et de leur demander comment ce dernier
aurait réagi face à telle ou telle situation. De là, les hadiths seront les propos tenus par le prophète. Par extension,
on a appelé hadiths, toutes les paroles (aqwâl), actes (afâl) ou même les situations qui se sont déroulés devant les
yeux du prophète et qu’il a tacitement approuvé (taqir)
95
Voir : J. BALLET J, K. RADJA, Le capital social en action. Territoires et transferts Paris, L’Harmattan,
2005, p. 210.
96
Dans : le livre des exemples, Ibn KHALDUN utilise l’expression près de cinq cents fois, cité par J. BALLET,
K. RADJA Ibid p. 210.
97
« Vitalité de l’Etat », (Enan MOHAMED 1941), « force vitale du peuple » (Ayad M-KAMIL 1930), « esprit
public » (Silvestre De SACY 1868) « solidarité » (Claude CAHEN 1958). V. Ibid. p.211.
98
IBN KHALDUN, Les Prolégomènes., Section II, chap. 8, Œuvre traduite par W. Mac Guckin DE SLANE, p.
270.
99
« Au sens négatif, le terme signifie clanisme, familisme, ces dernières décennies il a souvent été utilisé pour
décrire la dictature baassiste en Syrie, au Maroc ou du Liban »…Source :
https://fr.wikipedia.org/wiki/Asabiyya, visité le 27 aout 2017.

37
Ibn KHALDUN définit l’assabiya comme le lien de cohésion dans un groupe humain
formant une communauté. Ce lien existe à tous les niveaux de la civilisation, allant de la
société nomade aux Etats et aux empires. Mais l’assabiya est forte surtout à l’état nomade.
Son influence diminue évidemment au gré de l’avancée de la civilisation ou encore de
l’ouverture. Ibn KHALDUN souligne que : « pour que la défense et la protection soient
efficaces, il faut un esprit de corps unifié et une ascendance commune. C’est ce qui fait la
puissance d’une tribu et la rend ainsi redoutable, car le sentiment familial et clanique est ce
qu’il ya de plus important »100. Le premier caractère de l’assabiya sera donc l’existence d’une
structure tribale ou clanique permettant la mise en place d’un mécanisme de protection contre
le monde extérieur au groupe. Ibn KHALDUN voit dans ce fait l’explication de la grande
difficulté avec laquelle les armées musulmanes firent au VIIe siècle la conquête de l’Afrique
du Nord dont les populations se révoltaient sans cesse 101

Le rapport de l’assabiya à la religion demeure assez confus. Il faut d’abord signaler


que les fondements de la religion s’opposent à la nature de l’assabiya. Alors que la religion
tente de rassembler et d’unir, l’assabiya divise et oppose Cependant, Ibn KHALDUN estime
que la religion ne peut réussir que si elle prend appui sur l’assabiya. En effet, l’histoire de la
naissance de l’Islam atteste elle-même de l’importance de l’assabiya. Car s’il est vrai que
l’assabiya divise et oppose, par ailleurs, elle unie et fraternise. Elle est donc aussi vectrice de
force et d’union. La religion a beau bannir l’assabiya, elle ne peut s’en passer. En fait, il n’y a
pas de religion, ni de propagande religieuse sans assabiya. Pour argument, Ibn KHALDUN
fait allusion à l’histoire même des prophètes. En effet, il est dit que « Dieu n’envoie jamais un
prophète aux hommes à moins que ce messager divin n’ait des protecteurs dans son propre
peuple ». Si la religion prend naissance d’une source divine, qui est la révélation, elle ne peut
se maintenir et se propager, selon Ibn KHALDUN, que grâce à une forte assabiya102.

45. Déjà du vivant du prophète Mohamed, les soldats en guerre ont eu à se partager la
charge de la diya chaque fois que l’un d’entre eux se trouvait responsable d’un préjudice
corporel103. Le payement de la diya104, opéré sur des bases autres que le sang, révèle le

100
IBN KHALDUN op cit., p. 381.
101
Y. LACOSTE, Ibn KHALDUN., Naissance de l’histoire, passé du tiers monde, éd. La Découverte
1998.p. 139.
102
IBN KHALDUN, op. cit., p. p.326.327
103
Dans la pratique, il s’agit d’une solidarité fondée sur les liens professionnels. Les membres d’une profession
se partage la charge de la réparation d’un préjudice devant des circonstances particulières (éloignement du
responsable du dommage de son groupe social, période de guerre…), V. Samba GAYE, L’étude des sources

38
pragmatisme de certains oulémas qui considèrent, à juste titre, la solidarité sociale comme
essentielle, indépendamment des voies entreprises pour l’engager. A ce titre, le fardeau de la
réparation reviendrait aux membres du groupe social, les acebs105…, duquel est issu l’auteur
du dommage. Cette indemnisation incombe surtout aux ascendants et descendants en ligne
directe et certains collatéraux. Le groupe social devant « collecter » la diya peut être plus ou
moins élargi en fonction de la solvabilité de ses membres. Ainsi grâce à la participation de
tous les acebs, l’auteur du dommage trouve plus facilement le moyen de payer la diya. Cette
volonté de sauvegarder les intérêts de la victime par la garantie d’une réparation équitable du
préjudice prend également en considération le quantum applicable en tant qu’aspect
fondamental de la diya car jouant un rôle essentiel d’équilibre et de stabilité au sein de la
communauté.

46. Pour faire face aux aléas de la vie, les groupes par souci de prévoyance sociale
développent des mécanismes de régulation qui se concrétisent sous forme de solidarité
sociale. Notre illustration reposera sur l’analyse d’un mécanisme de protection originale
pratiquée par la communauté Maure : la lahwa.

B- La lahwa

47. En Mauritanie, chaque communauté a tendance à développer ses propres formes de


capital social et ou adapte les formes de réseaux qui répondent à ses normes et valeurs
sociales. L’aménagement de l’assabiya par la société Maure de la Mauritanie consista à
démunir le concept de son aspect guerrier ou conflictuel. De la sorte, la lahwa bien qu’ayant
été inspirée par l’assabiya se manifeste autrement car, la subtilité de la lahwa réside dans sa
mission consistant aussi à éviter les conflits avec les autres groupes. Le cas du recours à la
lahwa en cas d’homicide du membre d’un clan par le membre d’un autre clan illustre
parfaitement cette opposition106. Toujours est-il que derrière la lahwa se cache comme dans

d’inspiration du droit des assurances en Mauritanie via l’indemnisation des victimes d’accident, mémoire 2002,
p.17.
104
Entendons par diya le prix du sang, la suite du développement nous permettra de mieux saisir ce concept.
105
Ce terme utilisé dans le droit des successions en Islam désigne l’héritier universel qui est celui qui a droit à la
totalité de la succession lorsqu’il n’y a pas d’autre héritier ou à ce qui en reste après le prélèvement des parts des
héritiers réservataires. V. Art. 150 du Code de la famille de la république algérienne.
106
Voy. J. BALLET, op. cit., p.215.

39
l’assabiya une solidarité communautaire. La Mauritanie est constituée d’habitants de cultures
et de races différentes il reste toutefois difficile de connaître le pourcentage de chaque
ethnie107. L’histoire de l’identité de la Mauritanie s’est forgée au fil des âges. C’est la
colonisation qui va tenter de réunir les différentes identités en place108. La société maure s’est
essentiellement installée dans l’ouest saharien initialement occupée par les agriculteurs noirs
(bafours)109. Cette région est marquée par le carcan de la sécheresse qui impose son rythme
de la vie hostile et rude. Ces contrées réputées jadis peu riches et désertiques étaient
marquées par des conflits perpétuels pour les points d’eaux et le pâturage sans lesquels la
survie était impossible. L’isolement dans le désert ne pouvant entraîner que le risque de mort
va faire naitre la nécessité de la solidarité et de l’indépendance des maures à travers la
consolidation de tribus et clans. L’élément essentiel de la constitution des tribus Maures est
en principe l’appartenance à la même généalogie110. L’expression « Ould » (fils de en
berbère) renvoie toujours à un ancêtre commun en ce sens P. GUYON écrit : « les maures
ont une conception biologique de l’histoire les liens du sang comptant seuls »111

48. La lahwa est un système d’engagement à une cotisation à part égale entre les membre
d’une même tribu, ou d’un même clan se caractérisant par une cotisation monétaire à part
égale des membres du groupe en vue de faire face à un évènement pouvant toucher un de
leurs membres. Les situations qui conduisent au recours à la lahwa sont multiples : incendie
ayant affecté le magasin d’un commerçant membre d’une tribu. Dans les cas de maladies à
traitements coûteux, la somme est fixée et répartie entre les différents membres. Elle couvre
souvent l'hospitalisation, le traitement et le transport du malade. Cette somme peut être très
importante quand l'hospitalisation se fait à l'étranger puisqu'elle couvre tous les frais, y

107
Selon une enquête de l'INSEE, en 1957-1958 ils se répartissent ainsi : Toucouleurs, 55 % ; Peuls, 16 % ;
Sarakollé ou Soninké, 27 % ; Ouolofs, 2 %. Les résultats du recensement effectué en 1976 n'ont pas été publiés ;
on estimait toutefois que les Maures, y compris les haratines, représentaient 75 à 80 % de la population totale et
les Négro-Africains 20 à 25 %. Certains dirigeants négro-africains contestent ces chiffres ; assimilant les
haratines à leurs ethnies, ils affirment constituer 50 à 60 % de la population.
108
P. MARCHESIN, op.cit., p.33.
109
A-J. LUCAS, Considérations sur l'ethnique maure et en particulier sur une race ancienne : les Bafours. In :
Journal de la Société des Africanistes. 1931, tome 1 fascicule 2. p. 152.
110
Des études réalisées démontrent le contraire : sur les 1579 tentes (expression pour désigner un ménage dans la
société Maure) en 1944 de la tribu des Oulad Ebieri, seule 280 ménages descendaient effectivement du même
aïeul. Sans doute une stratégie du nombre peut entraîner « des adoptions » (plus la tribu est grande, plus elle est
influente et dominatrice Voir P. MARCHESIN. op.cit.., p. 32.
111
P. GUYON, Présentation de la Mauritanie, 1964, CHEAM n° 3896, p.20, cité par P. MARCHESIN, op.cit.,
p.30.

40
compris le billet d'avion si nécessaire etc… Elles sont souvent utilisées dans les cas de décès,
quelle qu'en soit la cause, et généralement de maladie grave ou durable. Dans le cas des
décès, la participation est moins formelle et exigeante. Elle est libre et s'arrête le troisième
jour après le décès. Il peut aussi s’agir d’un évènement qui affecte les membres d’un autre
groupe mais, dont l’auteur du préjudice est membre du groupe. Dans ce cas la lahwa sert de
moyen de réparation du préjudice causé à autrui. Le même mécanisme est aussi utilisé en cas
d’homicide112.

Dans la pratique, après de longues tractations entre les sages de la famille de la


victime ceux de l’auteur du crime, ces derniers s’engagent à verser une indemnité au
représentant légal du défunt mettant ainsi fin à une situation qui aurait peut-être débouché sur
un conflit entre clans. Rappelons toutefois que le montant versé dépendra en principe du
quantum applicable en matière de diya113. Nous retiendrons le caractère assez inégalitaire de
la cotisation car ne prenant pas en compte la capacité financière des membres. Il existe des
conditions quant à l’obligation de cotisation : appartenir au groupe, être de sexe masculin
avoir dix-huit ans révolus être apte à jeûner114 et de travailler (l’inactivité professionnelle ne
constitue pas un motif d’exemption de cotisation). Seules Les personnes frappées
d’incapacité avérées (infirmes) sont exemptées de l’obligation de cotisation. On pourrait
remarquer que la cotisation individuelle peut varier en fonction de la taille et surtout le
nombre de participants. Quant à l’échéance elle peut s’avérer très courte (une à deux
semaines). Dans le cas que nous venons d’évoquer, la diya fait office d’un aveu collectif
destiné à présenter le membre du groupe auquel appartient l’auteur du préjudice comme un
corps soudé et solidaire. La conscience collective sous-jacente à cet agissement (cotisation) a
pour finalité, un partage implicite de la responsabilité afin de diluer toute velléité de
vengeance de la part d’un ou des membres du groupe adverse. A l’instar de l’assabiya, la
lahwa trouve son ancrage dans la conscience collective. Les relations sociales sont régies par
la valeur ou la norme collective. Les individus imbriqués dans ces relations ne peuvent pas

Ministère Mauritanien de l’Economie et des Finances, projet RAMS, Profils sociologiques, Les Maures,
112

Nouakchott, février 1955, p.55, cité par P. MARCHESIN, op. cit., p .33.
113
La diya varie de deux cent mille UM à un millions d’UM.1 Euro équivaut de nos jours à 400 UM. Dans
l’hypothèse d’un homicide volontaire, la loi du Talion s’applique à moins que les héritiers de la victime n’optent
pour la Diya. Dans tous les cas, le prix du sang doit leur être versé au plus vite. Voir Amadou DIOP, La finance
informelle en Mauritanie : fondements et évolution récentes.
114
Dans le droit islamique il s’agit des personnes en âge de pratiquer le ramadan

41
s’y soustraire aisément. On peut rajouter, au contraire, le caractère obligatoire des cotisations
ne prenant nullement en compte la capacité financière des membres.

49. A l’inverse de son but initial on pourrait affirmer que la lahwa peut aggraver les
risques de tensions. Le cas traditionnel de l’homicide peut en être une illustration. En ce sens
que la protection d’un criminel et la réparation en nature du préjudice n’est pas dissuasif à
tous les coups et ne met pas un mais plusieurs membres du groupe à l’abri d’une résurgence
de la loi du talion. Pour corroborer le caractère inégalitaire de la lahwa, on pourrait évoquer
le rang d’une victime ou d’un auteur qui peut influencer le choix de la mise en place ou non
d’une lahwa par les chefs dans la mesure où la décision leur revient.

Cependant le refus de la contribution d’une lahwa même inégalitaire est rare. En plus de la
marginalisation il y-a aussi le risque d’expulsion du groupe avec ses conséquences. La
conscience collective, le sentiment du devoir ajoutés à la crainte de se retrouver en marge du
réseau tribal ou clanique, pousse souvent leur membre à se démêler mains et pieds pour
cotiser comme les autres. C’est ainsi qu’en se débrouillant l’individu peut s’endetter, ou
vendre à perte les biens matériels qui sont en sa possession, comme ses terres, ses tapis, ses
bijoux ou son troupeau, pour sauver son honneur et éviter d’être considéré comme non
solidaire du groupe115. Vue sous ces angles, la lahwa peut produire de nombreux effets
pervers.

50. Aujourd’hui la lahwa est entrain de subir de profondes mutations. L’évolution du


cadre de vie des populations, l’urbanisation galopante impliquent une réadaptation des
lahwas pour servir et être utile dans de nouveaux contextes. Traditionnellement les lawhas
n’étaient pratiquées qu’en cas de catastrophes, de maladie grave, d’incendie, de meurtre etc.
Mais aujourd’hui elles ont pris des formes nouvelles. En raison de l’absence ou d’une
carence de système de solidarité nationale, en Mauritanie, le recours à la lahwa est assez
fréquent. Si les lahwas étaient traditionnellement destinées à faire face aux catastrophes ou
tragédies, aujourd’hui elles prennent en compte des évènements heureux comme les mariages
les baptêmes... Elles servent aussi à des raisons politiques (campagne électorale)

Dans des cas isolés, elles peuvent parfois même servir à des personnes peu
scrupuleuses pour des intérêts purement personnels. C’est le cas du recours à une lahwa pour
le remboursement d’une fraude lorsqu’un membre du groupe commet un détournement de
deniers publics par exemple. A ce titre l’amende prévue est répartie entre les membres de la

115
B. OULD HAMZETTA, Solidarité sociale et lutte contre la Pauvreté en Mauritanie, op.cit., p.8.

42
tribu en question. Offrant ainsi une issue favorable au fraudeur. On notera que la sanction en
cas de délit de vol commis par un des membres de la tribu des Rguibates est la déchéance du
droit à « l’assurance contre le meurtre »116.

C-La touiza

51. L’expression touiza vient du mot berbère « touizi » qui veut dire « entraide et
solidarité », on l’utilise notamment, en milieu rural. Cette expression est souvent employée
lorsqu’il est question d’un travail d’utilité publique (récolte, creusement de puis, construction
de monuments à usage communautaire etc.…). Cette autre forme de solidarité sociale se
résume à un investissement humain consistant à effectuer un travail collectif en y faisant
participer activement les membres d’un groupe, d’une classe d’âge ou d’un même clan. Son
objectif est de répondre aussi bien à un besoin de production qu’à un besoin de secours. Par
exemple pendant la saison pluvieuse lors des cultures, ou de récolte les membres d’une classe
d’âge peuvent effectuer collectivement un travail de défrichage de tous les champs des
membres du groupe et ceci à tour de rôle. L’individu dont le champ devrait être défriché par
la collectivité se doit de préparer en contre partie ce jour-là un repas pour l’ensemble des
membres du groupe. Cela va occasionner bien sûr un investissement mais, il est clair que le
rendement escompté par la suite peut aussi bien profiter à l’individu qu’à la collectivité.
Aussi, le stock de capital social ne peut qu’en sortir renforcé dans la mesure où cette forme de
solidarité vise surtout à renforcer l’entraide, la confiance et l’interdépendance mutuelle entre
les membres du groupe.

52. A l’échelle culturelle la pratique de la touiza se fonde sur l’esprit associatif et


d’entraides africaines. Ce dernier se manifeste à plusieurs niveaux de la vie sociale. Par
exemple on verra plusieurs hommes prêter main forte à l’un des leurs quand il s’agit de
reconstruire sa case endommagée, ou de réparer sa barque au bord du fleuve et ce sans
contrepartie. Du point de vie éthique et religieux, le coran et les hadiths prophétiques ne
cessent d’inciter les musulmans à venir en aide les uns aux autres117.

116
Voir, La tribu in UNESCO, Recherches sur la zone arides Nomades et nomadisme au Sahara, 1963, p. 34,
cité par P. MARCHESIN, op. cit., p.33.
117
A ce sujet un hadith dit : « Dieu vient en aide au fidèle tant que celui-ci vient en aide à son frère fidèle »
(ANAWAWI)

43
53. Dans sa forme traditionnelle la touiza est une pratique collective qui procure un
rendement soit collectif soit individuel mais en plus de cela elle démontre combien les
membres du groupe sont solidaires et jusqu'où l'effort collectif d'entraide pourrait servir de
moyen de lutte contre la pauvreté, l'exclusion et la marginalisation. En effet, la valeur de la
solidarité était centrale dans la vie sociale africaine les ressources économiques dont
disposaient les individus et les familles en Afrique étaient si modestes qu’on n’avait
pratiquement pas de doute sur l’intérêt de se prémunir, avec les autres, des aléas de la
pauvreté et du besoin118.

54. Aujourd’hui, la touiza se pratique sous forme de participation à la réalisation de petits


projets collectifs (digues, barrages, écoles etc.). Plusieurs partenaires s'associent et
investissent ensembles pour réaliser un petit projet. La nature des participations n'est pas très
importante, car les partenaires peuvent participer physiquement ou en cotisant. L'exemple le
plus édifiant à ce sujet se sont les touizas organisés par les associations de parents d'élèves en
collaborant avec les communes par exemple pour réaliser l'équipement d'une salle de classe,
le reboisement d'une superficie publique ou le désensablement d'une école. Certaines ONG
explorent les terrains de la touiza pour élaborer des petits programmes de développement en
s'associant avec des groupes sociaux pour réaliser des centres de santé, des mosquées, des
habitations (l'exemple du quartier Mallah, oumoul koura) à Nouakchott en est un exemple
édifiant. En effet plusieurs ménages naguère incapables de construire un habitat décent se
trouvent aujourd'hui dotés d'une à deux chambres en dur avec toilettes, grâce au système de la
touiza qui met en valeur et la contribution des pauvres eux-mêmes et celle de l'ONG du nom
de Touiza. Dans ce cas précis les indigents contribuent à hauteur de 20 à 40 mille ouguiyas 119,
alors que l'ONG se charge de procurer, les briques, le ciment, la main d’œuvre. On peut
remarquer que les lahwas sont conjoncturelles et circonstancielles alors que les touizas
peuvent être pratiquées à toutes les occasions (construction d’écoles, de digue, défrichement
ou récolte des champs, mise en état de rues, etc). Par ailleurs, L’État Mauritanien s’est inspiré
de cette pratique traditionnelle en mettant en place un projet de logements sociaux ainsi : 1730
logements sociaux ont été financés et 2668 micro crédits ont été alloués aux populations
pauvres des quartiers périphériques de Nouakchott120.

118
M. ELHARRAS, Les solidarités sociales au Maroc, évolution et état actuel, étude thématique intégrée au
Rapport « 50 ans de développement humain au Maroc et perspectives pour 2025 ». 2005.
119
Pour rappel, L’ouguiya est la monnaie nationale mauritanienne.
120
H. KANE, (2003), « Economie sociale et développement local en Mauritanie » in « création de richesse en
contexte de précarité : Expérience de l’Afrique de l’Ouest » sous la direction de Favreau L, Cahier Collectif.

44
55. La transmission intergénérationnelle d’une telle forme de solidarité sociale ne peut que
renforcer la confiance, l’entraide mutuelle et la cohésion sociale, tout en assurant un minimum
de développement économique dont profitent les membres d’une communauté. Toutefois,
L’accélération du changement social actuel a entraîné des dysfonctionnements dans les
sociétés africaines. Car, la famille traditionnelle qui était un « noyau » des valeurs de
solidarité et un « refuge » pour les individus en difficulté l’est de moins en moins aujourd’hui.

Paragraphe II : La Tontine

56. La pratique de la tontine est universelle et remonte à plusieurs siècles. Cependant,


c’est en Afrique et en Asie qu’elle se pratique encore à outrance. En Afrique, bien que
prenant souvent des formes et des appellations différentes d’un pays à l’autre, elle présente
partout les mêmes caractéristiques, qui tiennent à ce que les relations entre les membres
soient dans la majorité des cas particulièrement étroites. A partir des expressions utilisées
pour désigner la tontine on comprend mieux sa portée les vocables (adjalou gbé ou encore
so…)121 définissent clairement leurs objectifs.

57. En Afrique, l’intérêt d’études poussées sur le phénomène est réel 122. Les différentes
études sur la tontines en Afrique aboutissent toutes à la conclusion selon laquelle, la pratique
courante actuelles du phénomène découlerait d’une monétarisation des habitudes
traditionnelles de collectivisation, et de l’existence, dans les sociétés africaines
traditionnelles, de regroupements entre voisins ou entre personnes d’un même groupe d’âge,
pour s’entraider à tour de rôle lors des différents travaux (labours, récoltes, restauration des
toitures…).

En somme, ce n'est que plus récemment, lorsque la monnaie a commencé à circuler,


qu’on a eu recours à des tontines d'argent. Cette hypothèse met l’accent sur une forme d’agir
économique, qui privilégie d’une manière générale la collecte des facteurs de production
pour le besoin de tout un chacun. Ce système de cotisation apparaît comme éminent au Bénin

121
Au Bénin, adjolou signifie travailler dans les champs, gbé ou so signifie cotiser en vue d'une cérémonie
religieuse ou familiale. Au Congo, denké veut dire creuser une tombe...
122
De nombreux auteurs à savoir : D. KESSLER, P.A. ULLMO, Epargne et Développement, Ed. Economica,
1985 Paris ; M. LELART, L'épargne informelle en Afrique : les tontines béninoises, Revue Tiers-Monde, 1989 ;
C. MAYOUCOU, Le système des tontines en Afrique : un système bancaire informel, L'Harmattan, 1994.

45
et dans la majorité des pays africains. Depuis plusieurs décennies, on observe que la
mobilisation de l'épargne dans les pays en voie de développement, et plus précisément en
Afrique est régulièrement d’actualité. Cette situation est liée aux différentes crises bancaires
survenues en Afrique123. Ce sont donc les carences des banques locales qui expliquent la
double portée des tontines : elle est à la fois un moyen d’épargne et un mode de financement
des projets, la majorité des membres de tontine considère que ces dernières vont plus loin en
matière de célérité que les institutions financières en cas de besoin ou d’urgence.

58. L’étude de la tontine nous amène à nous intéresser à la définition et à l’origine du


concept (A). Porter un intérêt à la particularité des tontines ouest africaines (B) nous
permettra de comprendre le fonctionnement du système tontinier béninois.

A- Définition et origine du concept

59. A l’inverse du continent africain, la pratique tontinière est de plusieurs siècles plus
ancienne dans le continent asiatique. Au Japon par exemple, l'apparition des premières
tontines monétaires daterait de 1275. En Corée, le « Kye »124 serait peut-être apparu dès le
neuvième siècle. Des auteurs, spécialisés dans l'étude des tontines asiatiques, pensent même
qu'elles sont apparues dès le II è siècle après Jésus-Christ. L'hypothèse qui parait la plus
vraisemblable à leurs yeux est que les tontines de crédit, qui étaient en réalité des sociétés
d'entraide, doivent leur origine a l'influence bouddhique et au rôle joué par les moines. Les
Mujins auraient alors pris leur essor a la fin du VIIe siècle.

Quelle que soit leur ancienneté, ces pratiques n'ont guère cessé depuis, tout en
évoluant. Il y a donc plusieurs siècles, des sociétés pécuniaires, qui ressemblent fort aux
tontines actuelles, étaient pratique courante dans l'empire chinois où tout le monde se
réunissait par groupe et mettait ses ressources en commun. Dans les tontines asiatiques la
contrainte était très forte, et il n'y avait quasiment pas de défaillance. L'initiateur de cette
société pécuniaire profitait en général toujours du premier tour, mais si un membre était en

123
Au Bénin, les premiers signes de la crise économique apparaissent en 1982 et conduisent à la crise du secteur
bancaire classique. Les trois banques d'État sont progressivement liquidées : la Caisse Nationale de Crédit
Agricole (CNCA) en 1987 ; la Banque Béninoise pour le Développement (BBD) en 1989, la Banque
Commerciale du Bénin (BCB) en 1990.
124
Les tontines dans les pays en développement voir https://www.gdrc.org/icm/french/matthieu/contents.html ,
visité le 17 aout 2017.

46
grosse difficulté, il pouvait obtenir l'argent en priorité. Certains avaient même imaginé que
chaque mois la mise de ceux qui n'avaient pas encore profité du lot serait légèrement
augmentée ; c'était là un moyen original d'introduire l'intérêt dans ces opérations d'épargne et
de crédit. L'intérêt est lui aussi toujours présent, bien que de façon différente. C'est le
système des enchères, qui est encore utilisé dans bien des pays asiatiques. Nombreux sont les
auteurs qui confirment cette thèse en assimilant la tontine à un pari, un jeu, une gageure la
rapprochant quelque peu de l’assurance de part son caractère aléatoire125 . Cependant, s’il est
vrai que les tontines sont des sociétés inspirées d’un souci d’entraide et de solidarité, et qu’il
est tout aussi vrai que les opérations qu’elles pratiquent n’ont qu’un rapport lointain avec
l’assurance au point que le contrat tontinier n’est pas un contrat d’assurance sur la vie, ni
même un contrat d’assurance et que les opérations tontinières ne sont pas de véritables
assurances.

60. Plusieurs auteurs accordent à Lorenzo TONTI l’introduction dudit concept en France.
En effet, le mot vient de ce financier italien nommé TONTI qui avait convaincu MAZARIN,
en 1653, d'utiliser une nouvelle formule d'emprunt pour renflouer les caisses de l'Etat. Il
s’agit donc d’une dérivation du nom du financier napolitain Lorenzo TONTI. Le principe
s’apparente à un emprunt public. Dans sa conception initiale l’État proposait aux Français de
lui prêter de l’argent. Il récupère le capital et en échange verse une rente à tous les
souscripteurs jusqu’à leur mort. A la mort de chaque souscripteur, les survivants se partagent
sa part, percevant ainsi plus d’intérêts. La première Tontine royale suscita peu
d’enthousiasme à vrai dire. Le renouvellement du concept en 1689 connaîtra un véritable
succès. Il s’en suivit une succession de neuf autres tontines sous Louis VIX et Louis XV. En
Europe, il existe par ailleurs des précédents, quant à l’usage du concept car, déjà à cette
époque, des rentes viagères ou perpétuelles sont largement répandues à Gênes, Venise,
Florence et dans bien d’autres villes d’Italie126. Créés par des banquiers, ces produits
financiers sont proposés aux différents duchés ou cités-États dont les gouvernements
n’arrivaient plus à faire face aux charges des dépenses publiques. Il s’agit en quelque sorte

125
P. PICARD, A. BESSON, Les assurances terrestres, Le contrat d’assurance, Tome 1, 5ème édition, Éditions
L.G.D.J., 1982, p.695.
126
Certains croient que le système du monte delle dos qui consistait, pour un père, à remettre au Mont-de-Piété
une somme de cent écus au moment de la naissance de sa fille pour en recevoir mille lors de ses 18 ans a inspiré
TONTI. Voy. T. PAIRAULT, Approches tontinières (première partie) : de la France à la Chine en passant par la
Cochinchine et autres lieux archives ouvertes 1990, p.10.

47
d’une obligation publique sur laquelle l’État accorde en retour un paiement en rente viagère
ou perpétuelle garantie par des impôts indirects.

61. Dans le droit français actuel, la tontine est considérée comme une institution se
présentant sous deux formes qu’il convient de distinguer. D’une part, la tontine peut relever
des mécanismes de l’assurance127, elle désigne alors la constitution en commun par un
groupement de personnes d’un capital destiné à être réparti entre les survivants à une
échéance convenue. D’autre part, elle peut aussi désigner un contrat par lequel les parties
prévoient qu’au décès du ou des prémourants, la part de ceux-ci reviendra, sans indemnités,
aux survivants, de telle sorte que le dernier vivant sera réputé seul propriétaire de la totalité
du bien. Ainsi, la tontine également dénommée clause d’accroissement constitue un pacte
post mortem, puisque chacun est réputé seul propriétaire de la totalité du bien sous condition
suspensive de sa survie et sous condition résolutoire de son prédécès.

62. En Afrique et en Asie, l’usage de l’expression tontine reste encore un mystère. On la


rencontre même dans le Chitt Funds Act promulgué à Singapour en 1971 qui s'y réfère
expressément. En Malaisie, également, l'expression tontine est une appellation légale128.
Selon T. PAIRAULT, le terme semble avoir été utilise pour la première fois par un juriste
français dans un ouvrage publie à Saigon en 1905129...l'année même où une nouvelle loi sur
les tontines est promulguée en métropole, ceci expliquant cela ! Les tribunaux d'Indochine
ont ensuite à plusieurs reprises utilisé la formule, les commentateurs d'arrêts l'ont expliqué, et
les juristes ont fini par se rendre compte que dans les pays voisins ces pratiques étaient les
mêmes, et donc une appellation commune serait beaucoup plus simple. Cette explication
laisse cependant sans réponse la question de savoir comment l'expression est passée du
continent asiatique au continent africain par exemple.

Dans sa conception africaine :« les tontines sont des associations regroupant des
membres d'un clan, d'une famille, des voisins ou des particuliers, qui décident de mettre en
commun des biens ou des services au bénéfice de tout un chacun, et cela a tour de rôle ».
Cette définition se rapproche assez de celle donnée par BOUMAN en 1977. La forme la plus
simple de la tontine consiste donc en une formule d'épargne et de crédit qui fonctionne de la
manière suivante.

127
Article R322-139 et s du Code des Assurances françaises
128
J. MORICE, La tontine Contrat asiatique de crédit mutuel, Revue Juridique et Politique. Indépendance et
Coopération, 36 (2), 1982. pp. 813 et 822, cité par T. PAIRAULT, op. cit., p.16.
129
T. PAIRAULT, op. cit., p. 17.

48
Les participants à la tontine versent régulièrement (jour, semaine ou mois) des
cotisations de montant fixe à un fonds commun qui est distribué tour a tour à chacun des
membres, désigné en principe par un tirage au sort. Quand chaque membre a reçu le fonds
une fois, le cycle doit normalement recommencer. Il faut noter que le premier membre à
recevoir les fonds bénéficie d'un prêt sans intérêt, tandis que le dernier à le recevoir épargne
tout au long du cycle sans être rémunéré en raison des fluctuations et autres aléas liés à la vie.

63. En Afrique, les premiers écrits mentionnant la tontine sont récents. Même si la
pratique en elle-même aurait subsisté bien avant la colonisation, c’est à partir de 1952 qu’elle
va commencer à susciter un intérêt130. L’originalité et l’importance de la tontine en Afrique
mérite que l’on s’intéresse à ses particularités.

A- Particularités des tontines ouest-africaines

64. La pratique de la tontine est observable dans toutes les couches sociales en Afrique.
La tontine est prisée par les groupes en situation de précarité ou d’exclusion sociale
populations pauvres des campagnes et des villes africaines, à leur niveau elle permet
d’assurer leur protection sociale cette organisation peut leur porter assistance en cas de
maladie, et servira aussi pour l’organisation éventuelle de funérailles dans sa famille. Elle est
beaucoup utilisée par la diaspora vivant en Europe et en Amérique. L’une des finalités de la
tontine hors du pays d’origine est, le rapatriement de la dépouille des membres en cas de
décès survenu dans un pays étranger par exemple.

65. A partir du développement précédent, on arrive aisément à distinguer la tontine


occidentale, de la tontine africaine. Elles sont différentes à divers points de vue. On constate
d’emblée que n’étant pas formelles, les tontines africaines ne s’appuient nullement sur une
réglementation et encore moins sur des conventions écrites.

En effet, en France, les observations démontrent que l’institutionnalisation de la tontine y a


été synonyme d’une intégration progressive du secteur de l’assurance au point où, certains
auteurs soutiennent que : « la tontine est à l’assurance sur la vie ce qu’est l’astrologie à

130
En 1952, W.R. BASCOM parle de l'Esusu au Nigeria et dans les pays voisins où il est pratiqué couramment
par les musulmans yorubas. Selon ARDENER, l'Esusu serait apparu en réalité vers le milieu du 19eme siècle.
Cité par M. GASSE-HELLI, les tontines dans les pays en voie de développement. Voir
https://www.gdrc.org/icm/french/matthieu/contents.html, consulté le 8 juin 2014.

49
l’astronomie »131 . Cette analogie n’est pas valable en droit béninois encore moins en droit
mauritanien. En effet, le CAM et le Code CIMA ne font aucune allusion aux opérations
tontinières. A l’opposé, le droit français et plus précisément l'article R.322-139 du Code des
assurances françaises définit les tontines en ce « Les sociétés à forme tontinière réunissent
leurs adhérents en groupes distincts dénommés associations et répartissent, à l'expiration de
chacune de ces associations, les fonds provenant de la capitalisation en commun de leur
cotisation déduction faite de la partie affectée aux frais de gestion et d'acquisition statutaire,
entre les survivants des associations en cas de vie ou entre les ayants droit des décédés des
associations en cas de décès, en tenant compte de l'âge des adhérents et de leurs versements
». En droit français, l'opération est une sorte de pari que les personnes font sur leurs chances
de survie ou de décès, à une date préalablement fixée. Il s'agit plus d'une distinction que
d'une opposition puisque les opérations de capitalisation sont soumises à un certain nombre
de dispositions communes à l'assurance-vie.

66. En Afrique les tontines trouvent leur force exécutoire dans la coutume, la confiance,
l’importance de l’engagement oral est au cœur de la sécurité du système, reprenant ainsi
l’adage : « l’homme est le remède de l’homme »132 . Sur le plan formel, la rédaction d’un
acte, celle des statuts, ou la constitution d’une personne morale telle une association n’est pas
nécessaire, compte tenu de l’importance du ciment social. Du reste, le mécanisme de la
tontine africaine écarte la condition résolutoire du décès observée précédemment en droit
français. Au contraire, c’est précisément lors de la survenance de cet événement que la
tontine verra peut-être son utilité dans certains cas. Sur ce plan on pourrait citer le Bénin où
dans la réalité les funérailles sont des cérémonies d'importance capitale qui établissent le
degré d'intégration, ainsi que le statut social d'une famille dans le clan ou la communauté. Vu
sous cet angle, dépenser de l'argent pour des funérailles équivaut à se procurer un respect et
une forte considération. Le coût de ces cérémonies funéraires grimpe plus vite que les
revenus des Béninois, et les familles sont de ce fait capables de contracter aisément des dettes
considérables pour offrir des funérailles « digne de ce nom »133 d’où le recours à la tontine
comme moyen de financement entre autres. Selon le type de tontine, la logique sociale peut

131
J. HEMARD, Théorie et pratique des assurances terrestres, Tome II, 1925, cité par Hoang Dieu TRAN, Les
opérations tontinières d’épargne Thèse Université de Paris II, septembre 2011. p.25.
132
A. DIOP In, Actes du II° Congrès mondial des africanistes, éd, Présence africaine, 1972, p. 16.
133
Les funérailles désignent dans ce contexte toute cérémonie rattachée à un défunt, y compris les rites
commémoratifs qui peuvent être célébrés plusieurs décennies après le décès.

50
prévaloir sur la logique économique et financière et inversement. L’implantation dans la
partie subsaharienne de la tontine a donné naissance à plusieurs types de tontines, « il
n’existe pas de cadre officiel s’imposant comme un modèle (…). Ainsi, c’est la tontine qui
s’adapte aux besoins de ses membres »134.

67. En matière de structure, comme dans toute organisation et en fonction de leur taille,
on peut retrouver un président, des vices présidents, des secrétaires, des trésoriers, des
commissaires aux comptes, un censeur pour le maintien de la discipline, des conseillés voir
d'autres spécialités selon le cas. Par ailleurs, dotée pour certaines d’un règlement intérieur et
de statuts la tontine évolue en tant qu’association disposant d’éléments de preuve pour ne pas
être frappé d’un vide juridique en la matière. Ce sont des documents que l’on retrouve de
plus en plus, même lorsque l’association tontinière n’est pas déclarée. Le règlement intérieur
peut être considéré comme un acte et donc justiciable devant les tribunaux.

68. L'ordre des levées est en principe souvent déterminée par un tirage au sort dans ce
cas, dès le début on connaît l'ordre des levées. Un tirage au sort lors de chaque réunion est
aussi possible. L’ordre peut aussi être consensuel : ce sera toujours celui qui a le plus besoin
qui sera autorisé à lever les fonds. Mais le bénéficiaire peut céder son tour à un partenaire
gratuitement, à charge de revanche dans une prochaine tontine, ou contre un
dédommagement fixé par accord entre les intéressés, voire fixé au préalable135. Deux
adhérents qui ont les mêmes besoins d'argent peuvent se partager les fonds disponibles... ils
se les partageront plus tard une seconde fois.

69. La tontine fonctionne ainsi comme une caisse de prévoyance qui offre à chacun de ses
membres une relative sécurité. Les tontines mutuelles sont les plus répandues en Afrique.
Elles reposent sur la solidarité entre membres qui se connaissent bien le lien de sang n’est pas
une condition obligatoire. Le succès des tontines mutuelles repose sur l’esprit de la solidarité
ancestrale africaine qui hante ses membres. En effet, l’élan associatif basé sur les liens de
parenté ou l’appartenance au même milieu social, qui s’est toujours exprimé dans les travaux
agricoles, à une certaine époque a essentiellement influencé la création des tontines

134
M. LELART, La tontine, pratique informelle d’épargne et de crédit dans les pays en voie de développement,
in, Les tontines : quelle typologie ? Les Bulletins d’Information du Mardi et autres discussions, (BIM) n° 86, du
10 octobre 2000, p .1, cité par E. FOUOMENE, Les protections traditionnelles et le développement du système
de sécurité sociale au Cameroun, Thèse, université de Genève, 2013, p. 49.
135
N. CHEVILLARD, 1989. De la banque à la tontine des passerelles à investir. Afrique industrie, mars 1989,
p.65, cité par F KAMBALE LUHUNGU, Mémoire de maîtrise, Etude comparative du système des tontines et
systèmes de crédit des COOPEC de Goma.

51
mutuelles : « Le fait d’appartenir à la même catégorie sociale ou d’exercer le même métier
suppose que les membres partagent les mêmes problèmes, éprouvent des besoins
comparables et prévisibles, s’associent pour trouver des solutions communes »136. C’est ainsi
que la constitution d’une tontine mutuelle est fondée sur le principe de la mise en commun de
la force du travail, des revenus et des risques sociaux auxquels peuvent être confrontés les
membres. Ces critères d’adhésion qui reposent sur des affinités, favorisent l’homogénéité du
groupe.

70. La pérennité et le bon fonctionnement des tontines mutuelles reposent généralement


sur les valeurs socioculturelles qui sous tendent la cohésion sociale. L’intégrité, la notoriété
et la disponibilité du responsable ou du promoteur lui confèrent une place de premier ordre
dans les prises de décisions importantes. Le respect qu’il inspire au groupe est aussi renforcé
par l’importance de ses propres mises qui dépassent quelque fois celles des autres membres.
Par ailleurs, le bon fonctionnement des tontines mutuelles est sous tendu par les règles
sociales édictées, parfois par les croyances vaudou au Bénin. En ce sens par exemple, « dans
certaines localités du sud du Bénin, le groupe peut recourir au « Lègba »137 « zangbéto » ou
autres fétiches vaudou138 pour amener les membres à honorer leurs engagements139. Les
tontines mutuelles peuvent s’entendre comme des fonds d'épargne rotative.

Compte tenu de son objectif, les levées bénéficient à chacun des sociétaires selon un ordre
préétabli, mais révisable. Chacun peut prêter et emprunter et remplacer une créance par une
dette. Ces créances et ces dettes ont plusieurs caractéristiques particulières. Elles ne sont
assorties d'aucun intérêt. En effet, les créances ne rapportent rien, et les dettes ne coûtent rien
non plus, ainsi le prêt et le crédit sont gratuits, sans intermédiation. Ainsi, tous les adhérents
ont des créances et des dettes, les uns envers les autres. Cependant du fait que la tontine n’est

136
Rapport National sur le Développement Humain au Bénin, édition 2003, p. 96.
137
Il est matérialisé par une motte de terre plus ou moins géante érigée souvent à l’entrée des villages, des
maisons ou au cœur des marchés. Il est censé apporter protection, paix et prospérité, il peut également punir.
138
Le vaudou est un culte religieux ancien et une tradition philosophique originaire de la « côte des Esclaves »
d’Afrique occidentale. Il est encore pratiqué d’abord en Afrique parmi les Fons au Bénin, les Yorubas au Nigéria
les Ewe au Togo au Brésil…
En termes de statistiques, le christianisme (catholiques, protestants sans parler des nombreuses églises
évangéliques, célestes) représente 70% et l’islam 30%, des chiffres qui ne signifient pas grand-chose dans la
mesure où l’on peut très bien être à la fois chrétien ou musulman et pratiquer effectivement le culte de ses
ancêtres « le Vaudou ».
139
Rapport National sur le Développement Humain au Bénin, édition 2003, p. 96, Cité par E. FOUOMENE
Thèse précitée p. 53

52
pas dotée de la personnalité juridique, les créances et les dettes se compensent parfaitement
tout au long du cycle et s'annulent au dernier tour rendant ainsi l'accumulation que
temporaire.

71. En cas de décès d’un membre de la tontine, ce sont les ayants droits qui prennent
éventuellement le relais dans le but de la continuité. Le payement de la cotisation par les
représentants ne constitue pas, pour autant une substitution du de cujus mais,
l’accomplissement des obligations de celui ci.

L’impossibilité d’une substitution du de cujus pour les autres tours vaudra à la tontine aussi
le qualificatif de contrat intuitu personae car c’est la personne du tontinier qui justifie son
appartenance à la tontine. Néanmoins à la fin du cycle, une concertation entre les membres
de la tontine peut intégrer le représentant du de cujus qui deviendra membre à part entière de
la tontine.

72. La durée de la tontine est assez variable et obéit à un cycle renouvelable. Une tontine
peut être à durée indéterminée impliquant la tacite reconduction après chaque tour. Tout
dépend de l’entente et de l’option choisie à ce titre, plus le lien entre les membres est fort
plus une tontine à tendance à perdurer. La tontine s’achève après un cycle 140 ou plusieurs
cycles successifs. Elle prend fin tout simplement, sans formalités (rencontres entre membres,
repas, fêtes). Elle peut constituer aussi le début d’une nouvelle tontine qui définit les
nouvelles modalités de participation en termes de contribution et de détermination du tour de
prise par les membres. Par ailleurs, lorsque le cycle est trop long, il peut engendrer une
certaine lassitude des membres, ce qui conduit à des démissions, des oublis de paiement ou
parfois des refus de paiement.

73. Les défaillances de plus en plus fréquentes des membres dans le contexte de crise, de
pauvreté et d’exclusion constituent une source de difficultés qui entame dangereusement le
principe de la confiance déjà évoqué. De même, le recours de plus en plus fréquent des
tontiniers aux tribunaux141 pour le recouvrement de leurs créances dénote la fragilité des
fondements de cette institution, pourtant en pleine expansion. La prétention à un vide

140
Dans le fonctionnement d'une tontine, le « tour » échoit au moment où un membre reçoit des cotisations
versées par l'ensemble des membres de son association. L'ensemble de ces « tours » constitue un « cycle ».
Celui-ci correspond à la rotation complète des tours. La durée du cycle ne s'exprime donc ni en semaine ou en
mois, encore moins en année, mais par le produit de la multiplication du nombre des membres par la périodicité
des tours
En se fondant sur La Liberté d’association au bénin peut accorder une personnalité juridique aux tontines.
141

Voir Article 25 de la Constitution béninoise.

53
juridique en matière de détournement ou autres abus dans la tontine s’avère inexacte. En
effet, le refus du juge de statuer peut-être constitutif de déni de justice. Du point de vue
juridique et dans la pratique judiciaire, de tels faits peuvent être constitutifs soit d’abus de
confiance, soit d’escroquerie ou alors de rétention sans justification de la chose d’autrui en
fonction du cas d’espèce. Sur ce point, la victime qui n’a pas pu recouvrer ses fonds, a
incontestablement intérêt à agir puisqu’on est en présence d’infractions pénales. Par ailleurs,
les risques de perte, de vols ou d’incendie sont également les plus encourus par les tontines
communautaires, le seul moyen pour éviter, ou du moins pour limiter ces différents risques
est de « déposer le plus tôt possible, les fonds collectés dans des institutions financières
formelles ».

74. La tontine fait l’objet de nombreuses critiques en Afrique. Critiques de la part des
gouvernements qui y voient un frein au développement du pays par la mise en place de
financements parallèles. Critiques aussi de la part des banquiers qui y voient une fuite de
liquidités. Le véritable reproche économique que l’on puisse faire à ce système, porte sur
l’égalité des membres : le premier bénéficiaire profite d’un prêt gratuit immédiat, tandis que
le dernier obtient un prêt lorsque tous les autres en auront profité. Ainsi, comme il ne touche
pas d’intérêts durant cette attente et comme l’inflation risque d’éroder la cagnotte, l’égalité est
rompue.

75. Enfin, la plupart des banques dans ces pays de l’Afrique subsaharienne n’ont pas
cherché à s’adapter à la population comme le fait si bien la tontine. Si leur caractère discret et
informel constitue un obstacle à cette légalisation, n’empêche que l’absence d’un cadre
juridique approprié contribue également à leur épanouissement. Aussi, une frustration
financière ressentie par les participants par rapport aux circuits financiers modernes et
l'inadéquation des services offerts par ceux-ci aux besoins exprimés par ceux-là. La deuxième
motivation ne tient plus compte des avantages comparatifs, mais traduit au contraire un
avantage spécifique de la tontine qui est d'offrir aux adhérents, compte tenu de leur caractère
et de leur environnement, un cadre approprié à la réalisation d'une épargne individuelle «
volontairement forcée ».142

142
J-M. SERVET, Vers de nouvelles hypothèses, in Epargne et liens sociaux, Etudes comparées d'informalités
financières, 1995, p. 419 -432.

54
76. Au Bénin toutes les personnes majeures participeraient à une tontine143. Ce qu’on
appelle communément « la solidarité africaine » est, au mieux, une entraide mutuelle qui
s’exerce essentiellement dans le cadre de liens parentaux ou amicaux. On dénombre
l’existence de plusieurs types de tontines, chacune d'entre elles étant, dans sa constitution, à
dominante professionnelle, géographique, confessionnelle.

Section II : Les formes traditionnelles de la réparation

77. Traditionnellement, le système de réparation du préjudice était propre à chaque


société. En Mauritanie, du fait de l’usage de la charia, la majorité des préjudices corporels
provoqués par acte de violence sont réglés selon les modalités de la compensation. C’est ce
qu’on a coutume à appeler la diya ou l’arch (Paragraphe I) L’expression variera en fonction
du préjudice. La diya désigne au sens étymologique ce qui est donné en payement. En droit
musulman, elle correspond à l’ensemble des biens déterminés par la loi 144, dus aux victimes
d’une atteinte à la vie ou à l’intégrité physique. L’expression s’applique plus précisément à la
compensation versée en cas d’homicide ; celle relative aux lésions est désignée sous le nom
de « l’arch ».

78. Au Bénin l’ancien système de réparation est différent de celui de la Mauritanie. En


effet, il n’était pas codifié mais était loin d’être anachronique. C’est pourquoi on parle de
l’organisation de la réparation au Dahomey (Paragraphe II).

Paragraphe I : La diya et l’arch

79. Il est opportun de rappeler au préalable que l’institution de la diya est préislamique.
Elle tire son origine des pratiques juridiques tribales difficilement repérables dans l’histoire
de l’évolution des religions monothéistes. Dans la religion musulmane, on attribue au grand
père du prophète Mohamed, Abdul MUTTALIB la première fixation du montant de la diya à
cent têtes de chameaux. Bien avant cela plusieurs passages de la bible évoquaient, sans
ambiguïté aucune, que tout sang versé se doit d’être expié. Tenant ses sources du verset

143
Cette réalité est bien mise en évidence dans les travaux de D. KESSLER et P. A. UMO dans leurs
contributions à l'ouvrage collectif publié sous leur direction, Epargne et développement, Paris, 1983, cités par
M. LELART Ibid.p.272.
144
Le Coran cite le terme diya à deux reprises dans le même verset : IV, 92.

55
coranique n° 91 (sourate des femmes) et du hadith du prophète, la diya devait constituer une
base solide et incontournable dans la réparation du préjudice en droit musulman. En même
temps qu’elle constituait des remparts solides contre le talion ou vengeance privé, la diya est
restée un moyen de lutte contre la désintégration sociale.

80. De par son importance et le rôle éminemment social qu’elle n’a cessé de jouer, à
travers les temps, mais aussi en raison des difficultés pratiques qu’elle pose parfois,
(évaluation en numéraire ou en nature, barème applicable pour la diya en cas de blessures), la
diya n’a pas manqué de diviser la communauté des érudits musulmans sur certains de ces
aspects.

Il faut toutefois reconnaître qu’en dépit des points de divergence en matière de diya, les
oulémas semblent être unanimes sur certains éléments déterminants de la diya. C’est le cas
notamment du nombre de cent chameaux retenus pour la diya en cas de mort. Ce nombre ne
semble guère soulever de controverse. Il faut peut-être préciser que l’on retient la possibilité
pour le juge musulman de renforcer ou d’alléger cette diya. Selon qu’il s’agisse d’homicide
volontaire ou non, le nombre de chameaux reste le même, cependant le choix de l’âge du
chameau quant à lui sera fixé par le juge. Le tableau145suivant qui est une illustration du
quantum applicable en matière de diya est semble t’il le barème sur lequel la majorité des
oulémas semble d’accords.

145
Voir. S. GAYE, op. cit., p.21.

56
Le nez, une diya complète 100 chameaux

La langue une diya complète 100 chameaux

Un œil 50% de la diya

Une main 50% de la diya

Une lèvre 50% de la diya

Une jambe 50% de la diya

Une oreille 50% de la diya

Un doigt 10 chameaux

Une dent 5 chameaux

Une côte 1 chameau

A l’issue de ce tableau on pourrait comprendre que le montant de la diya du meurtre est dû


chaque fois qu’une lésion entraîne la perte totale et définitive d’une faculté de l’usage ou de la
beauté d’un organe. En raison de sa gravité, la perte d’une faculté ou d’un organe est
assimilée à la mort.

Le montant d’une diya complète s’élève à cent chameaux. Cependant on constate au


vu des lois et jurisprudence islamiques surtout, que ce nombre varie plus ou moins compte
tenue du lieu du préjudice du statut de la religion ou du sexe de la victime. Ainsi dans le
Tagant146 mauritanien, le capitaine GAILLARD révélait en 1917 que le montant de la diya
était de 425 pièces d’étoffes de qualité dite « filature », mais de seulement trente à 100 pièces
pour un esclave147.

81. L’arch des organes uniques du corps, tels que la chevelure, la langue, le nez, etc.,
s’élève à une diya complète. On pourrait ajouter que deux organes semblables du corps

146
Le Tagant est une Wilaya (région administrative) située au centre de la Mauritanie.
147
Rapport du capitaine Emile GAILLARD, commandant du Tagant, 1er mars 1917, Archives nationales de la
RIM, Serie E, Dossier E/85, sous dossier HORMA, cité par P BONTE in, L’émirat de l’Adrar mauritanien,
1984, p. 354.

57
humain valent comme un organe unique. Dès lors, la perte d’un œil ne donnera lieu qu’au
payement de la moitié de la diya en cas de mort. Evidemment, si la victime ne dispose que
d’un œil sain c’est le payement d’une diya entière qui est à envisager. Encore faut il que l’œil
atteint ne l’ait pas été à a suite de l’exercice d’un qiyas148sur cette personne, ou que celle-ci ait
déjà perçu l’arch dû pour la perte de son œil.

82. En droit musulman la diya peut varier en fonction du sexe ou de la religion de la


victime et de l’espace spatio-temporel. Dans le dernier cas, le montant de la diya, fixé à cent
têtes de chameaux, est convertible en d’autres moyens de paiement. La diya d’une femme
décédée à la suite d’un homicide est égale à la moitié de celle attribuée à un homme. En
principe, chaque fois que l’arch dû pour une blessure ou autre lésion chez une femme dépasse
le tiers de la diya du meurtre d’un homme, l’indemnité perçue par la femme ou ses ayants
droits ne sera que la moitié de celle attribuée à un homme ou à ses ayants droits au-dessous du
tiers, le traitement est équivalent. Si le barème des amputations est de nature à faciliter le
travail du juge musulman pour une évaluation de la diya, les blessures autres que les
amputations exigent plus d’attention.

83. Entre autres nuances, il est à rappeler que la diya peut être dérisoire lorsqu’il s’agit de
la réparation du préjudice subi l’éventualité d’un évènement futur, incertain ou d’un terme
indéterminé, ne dépendant pas exclusivement de la volonté des parties et pouvant causer la
perte d’un objet ou tout autre dommage par un esclave. Cette distinction ou discrimination
sans aucun doute injuste dans le droit occidental moderne. L’exemple marquant de cette
distinction que citent nombre d’ouvrages est le cas où l’on attribue aussi bien à l’homme qu’à
la femme trente chameaux pour l’ablation de trois doigts, alors que s’il s’agit de quatre doigts,
cette dernière n’a droit qu’à vingt chameaux (moitié de ce que toucherait un homme). Le
fondement de ce traitement est dans la plupart des cas, antérieur à l’islam et issu des cultures
arabes ou du monde en général dans l’antiquité149.

On observe aussi cette discrimination à l’égard de la femme dans le Dahomey


précolonial. Les femmes hormis celles appartenance à la famille royale étaient en principe

148
Terme considéré ici dans un cadre juridique et le plus souvent rendu par raisonnement et déduction par
Analogie. Il s'agit donc d'appliquer une règle stipulée dans les textes à propos d'un élément particulier, à un
autre élément particulier – dont les textes n'ont rien dit –, et ce parce que ce dernier est semblable au premier
dans la mesure où il contient lui aussi ce qui justifiait la règle (ce que l'on nomme en Fiqh la " 'illa"). V :
http://www.lescahiersdelislam.fr/glossary/Qiy%C4%81s-%D9%82%D9%8A%D8%A7%D8%B3_gw153.html ,
consulté le 14 septembre 2017.
149
M. MOTAHHARI, L’ordre du droit de la femme en islam, Téhéran, 1986, Ve édition.

58
exclues de l’héritage sauf dans quelques rares exceptions150. Le motif évoqué est qu’elles
étaient susceptibles de faire passer les biens familiaux chez les étrangers et nuire ainsi au
développement de la communauté151. La place de passivité de la femme en cas de guerre, la
dot que verse l’homme ainsi que la situation de la femme en matière d’héritage sont autant de
raisons évoquées pour justifier cette infériorité.

84. La Cour spéciale de justice mauritanienne fonde ses arrêts en matière d'assurance sur la
loi du 13 juillet 1930 tout en respectant le principe indemnitaire de la Diya accordée aux
héritiers de la femme pour moitié152. Les non musulmans eux aussi connaissent des situations
similaires en matière d’indemnisation, c’est le cas notamment des dhimmi153 qui, par exemple,
en raison de leur religion ont droit selon les écoles à la moitié ou au tiers de la diya d’un
musulman. A ce niveau seul les hanafites154 accordent une diya complète pour le meurtre d’un
dhimmi (les juifs et les chrétiens auxquels la loi musulmane garantit la protection des croyants
parce qu’il subsiste entre eux un certain pacte, arguant de ce que le Coran dans le verset 92 de
la sourate des femmes prescrit la diya sans distinction de religion.155

Dans les rares cas où les femmes pouvaient hériter c’était dans le but de consigner des biens destinés à des de
150

mineurs qu’elles sont susceptibles de transmettre aux mineurs males une fois leur majorité atteinte.
« On n’emporte rien d’une famille dans un autre » voir. A. LE HERISSE, L’ancien royaume du Dahomey.
151

Mœurs, Religion, Histoire. 1911, BNF, 251-252.


152
L'article 1er du Code de procédure civile commerciale et administrative (CPCCA) édicte : « Les juridictions
connaissent de toutes les affaires découlant du statut personnel, financières, civiles, commerciales et
administratives et jugent suivant la règle du droit musulman selon la procédure prévue par le présent Code ».
« Attendu que le décret invoqué par... est contraire sur toute la ligne à la charia et ne saurait, en aucun cas, être
appliqué, même plus, il est en contradiction avec les principes de l'équité et du droit. Il consacre l'acte illicite
connu en droit sous la dénomination "d'enrichissement sans cause ».
153
Le statut de dhimmi : gens du livre, désignant les chrétiens et les juifs est initié par le prophète Mohamed. Ce
statut est sacralisé par Le Kalif Omar, qui est le premier à combattre des colonies importantes de chrétiens et de
juifs avec qui il a fini par signer des pactes. Pacte se résumant en un contrat indéfiniment reconduit, la dhimma,
et dont la condition essentielle est que les bénéficiaires en terre musulmane, respectent la domination de l’islam.
Le monde sépharade, Civilisation (volume II), sous la direction de S. TRIGANO, Le statut des juifs en terre
d’Islam, essor et disparition de la dhimmitude par Simon SCHWARZFUCHS, pp 25-37 (Seuil, 2007).
154
Le hanafisme ou hanéfisme est la plus ancienne des quatre écoles sunnites du droit musulman ou sa
jurisprudence. Elle est basée sur l'enseignement de Abû Hanîfa Al-Nu'man Ibn Thabit, théologien et législateur
qui vécut à Koufa en Irak, et de ceux qui ont suivi son enseignement.
155
L. GARDET, La cité musulmane, IIIe édition, Paris, Vrin, 1969, p. 64.

59
Paragraphe II : L’organisation de la réparation au Dahomey

85. Appréhender les systèmes de réparation en Afrique noire avant la conquête coloniale,
est une tâche assez délicate entre les empires de la zone sahélienne et les formations côtières de
l’Afrique de l’ouest, les sociétés étaient profondément différentes. Non seulement les
communautés étaient nombreuses, mais il est difficile par ailleurs de saisir la réalité de leur
fonctionnement.

On retiendra cependant que le principe de réparation par définition coutumier, était


informel en ce sens que ses modes de saisine et de règlement n’ont pas été établis par des
textes. La réparation reposait avant tout sur la prédominance de la culture de l’oralité sur
l’ensemble du continent africain. Les règles, principes et coutumes qui fondent le droit
coutumier se trouvent dans les supports de la morale sous formes de proverbes, de contes, de
légendes, d’adages, de maximes, de dictons, de panégyriques familiaux, de paraboles, de
chants ou encore de récits de griots. Ceux-ci permettent d’organiser et de réguler la société
selon les valeurs traditionnelles des différentes communautés. Sans être formellement codifiée,
la justice coutumière connaît quasiment la même organisation dans toutes les contrées : son
contenu, son mode de fonctionnement, l’autorité attachée à ses décisions ainsi que ses acteurs
sont pratiquement les mêmes. On peut à ce titre citer le juriste sénégalais Kéba MBAYE, pour
qui « il existe comme l’affirme GONIDEC, un Droit coutumier africain et non des droits
différents »156.

86. La particularité que fait ressortir les chercheurs est sans doute la mise en évidence de la
prévalence dans les systèmes juridiques africains de l’harmonie du groupe, de l’importance du
sang et de la parenté, dans un ordre social et cosmogonique baigné de sacralité157

Avant l’arrivée des religions monothéistes et encore aujourd’hui, les Dahoméens restent
convaincus que tout individu devient après sa mort vaudou. Dans la mesure où il est
susceptible d’actes de malfaisance ou de bienfaisance. Cela peut justifier le culte voué aux
morts ainsi que les cérémonies grandioses qui sont organisées pour ces évènements. La
grandeur de la cérémonie varie aussi bien de l’âge que de la position sociale des défunts.

156
Entre tradition et modernité, La justice coutumière au Benin et au Mali. Voir.
https://issafrica.s3.amazonaws.com/site/uploads/NO12OCT09.PDF , consulté le 3 juillet 2017.
157
J. POIRIER, L’originalité des droits coutumiers de l’Afrique noire, Paris : Sirey 1959, p. 485-495.

60
Le culte des morts depuis toujours et encore aujourd’hui constitue le levier le plus
important de leur énergie productive. Comme chaque famille tient à honorer ses morts, les
décès entrainent des dépenses considérables. Cependant il est évident que dans une société où
l’épargne est inconnue, il était quasiment impossible de se procurer instantanément des fonds
pour organiser des grandes cérémonies. D’autre part l’éloignement de certains membres de la
famille et jusqu’à une certaine date, le défaut de moyen de communication entrainait le report
des cérémonies qui se transforme bien souvent en cérémonies commémoratives, ce qui peut
avoir lieu bien des années plus tard. Dans la conscience collective des Dahoméens les
funérailles restent l’occasion de marquer les esprits et l’appartenance à telle ou telle famille
montrer l’honneur et de l’orgueil des familles sont en jeu. L’information la fixation de la date
des cérémonies ainsi son organisation reviennent au chef de famille qui prévient à l’avance la
famille et les alliés du défunt. Le but pour la famille pendant les préparatifs est d’amasser le
maximum d’argent. Ce qui suppose que les jeunes en ces périodes accroissent leur activité158.

87. Le Dahomey était constitué de nombreux royaumes plus ou moins structurés. Le plus
connu d'entre eux est l'ancien royaume du Danxomé ou du Danhomè à cette époque, la
population se divisait en quatre classes :

- les princes ;

- les grands dignitaires ;

- les gens du peuple ;

- les esclaves.

Les gens du peuple ainsi que les esclaves étaient considérés comme des choses du fait de leur
considération en tant que propriété du roi. Les pouvoirs du Roi étaient très étendus. Le statut
du Roi lui permettait de dire le droit et de fixer les sentences pour les affaires pénales en
l’occurrence les homicides et pour les affaires civiles d’une certaine importance. Les affaires
moins importantes étaient jugées par les ministres du Roi et les chefs de villages.

88. En matière d’homicide, la sentence était une prérogative exclusive du souverain qui
décidait de la peine de mort qui devait être exécutée sur le champ ou de la grâce159. Il n’existait
précise le professeur Maurice Ahanhanzo GLELE pas de distinction entre les diverses

158
A. LE HERISSE, op.cit., p. 159.
159
M. A GLELE, Le Danxomé, du pouvoir Aja à la nation Fon, Paris, Nubia, 1974, p. 144.

61
homicides160 (volontaire ou involontaire). Le fondement de ce principe de droit est le désir de
faire disparaitre avec le meurtrier toute discorde et velléité de vengeance de la famille de la
victime. En effet, dans cette société assez anarchique laisser courir l’auteur d’un meurtre
pouvait provoquer des conflits assez violents.

La responsabilité pénale devait rester individuelle, mais il appartenait aux proches, qui
ont une obligation d’entraide, de répondre du méfait du coupable. Cette obligation de secours
concerne les crimes et délits, qui peuvent être réparés en espèces ou en nature, et non les
infractions passibles de la peine de mort, de la mutilation ou d’un châtiment corporel161.

Selon Etienne le Roy : Lorsque l’ordre du monde est atteint par une infraction ou un
accident, « il faut qu’il soit réparé selon les exigences de la coutume et les rituels de
purification »162

89. Dans certaines situations délictuelles la preuve est quasi impossible en fait (certains cas
de vol ou d'adultère) ou en droit (sorcellerie). Le tribunal, pour suppléer à la carence des
moyens humains de preuve, s'en remet alors au jugement divin : la preuve de la culpabilité ou
de l'innocence dépend alors de la réussite ou de l'échec à une épreuve imposée. Dans ce cas
précis, on retrouve le ministre des cultes, l’ajaxò. En effet, ce dernier est le détenteur d’une
potion toxique composée d’extraits d’écorce et destinée à faire connaître la vérité. Il
l’administre en public à un coq (qui représente le prévenu). Si ce dernier résiste à la potion, le
prévenu se trouve innocenté, sinon sa culpabilité est attestée et l’on passe à la phase du
jugement. L’ajaxò joue en quelque sorte la fonction de juge d’instruction, afin de faire émerger
la vérité163.

90. Toutefois, le raisonnement qui précède connait quelques exceptions toujours dictées par
la prudence ou une logique de crainte de représailles. C’est pourquoi en cas de légitime défense
ou de meurtre par accident, la sanction peut consister en un enrôlement dans les troupes. Une
autre exception subsiste, elle concerne les esclaves qui pouvaient être amenés à subir les

160
« Qui a tué qui a tué » est la formule qui conforte la réalité de l’époque : voir, M.A GLELE, Naissance d’un
État noir : L’évolution politique et constitutionnelle du Dahomey de la colonisation à nos jours, Paris, LGDJ,
1969 p. 75.77.
161
T. O. ELIAS, La nature du droit coutumier africain, p. 108-110, cité par B. BRUNET-LA RUCHE, Crime et
châtiment aux colonies : poursuivre, juger, sanctionner au Dahomey de 1894 à 1945, Thèse, Université de
Toulouse le Mirail, 2013, p. 67.
162
Étienne LE ROY, Les Africains et l’institution de la Justice, cité par B. BRUNET-LA RUCHE op. cit., p. 66.
163
Voir notamment B. BRUNET-LA RUCHE, op. cit., p.72.

62
épreuves judiciaires pour prouver ou non la culpabilité de l’auteur, en lieu et place de leur
maître164. Le Roi peut aussi par clémence enjoindre l’auteur à quitter le village donc à
s’exiler165. La sentence n'est pas seulement motivée par la question de droit mais par l'effet du
jugement sur les relations futures entre les parties, qui sont d'une importance vitale pour la
communauté

91. Au Bénin, les règles qui régissaient la société avant la colonisation ont été jugées assez
importantes pour que le colonisateur décide de leur maintien, à travers l’article 27 du titre VI
du décret du 20 juillet 1894 pris sur rapport du ministre des Colonies concernant la colonie du
Dahomey : « sont maintenues, les juridictions indigènes actuellement existantes tant pour le
jugement des affaires civiles entre indigènes que pour la poursuite des contraventions et des
délits commis par ceux-ci envers leurs congénères. » Cependant, c’est seulement en 1931 qu’a
été élaboré et publié « le coutumier du Dahomey » qui recensait toutes les « coutumes
juridiques ». Dans le coutumier du Dahomey, on constate un chevauchement entre le droit
pénal et le doit civil166.

164
B. BRUNET-LA RUCHE, op cit., p.67.
165
A. LE HERISSE, op.cit., p.76.
166
Selon l’article 325 du coutumier, Le dommage volontaire était puni de la captivité ou de mort chez les Fons,
les blessures entrainaient la captivité ou une indemnité, l’incendie, la vente comme esclave, le vol la restitution
et l’emprisonnement.

63
Conclusion du Chapitre I

92. La solidarité de la communauté est dans la culture africaine, la meilleure des


« assurances » en cas de coup dur ou d’évènement inattendu voire malheureux. C’est ce qui
ressort en tout cas de notre raisonnement jusque-là167. En effet nous avons pu remarquer que
des modèles de réparation ont toujours existé en Afrique évidemment, sous des formes variant
d’une société à l’autre. Qu’ils soient codifiés ou coutumiers, ces systèmes de réparation étudiés
auront eu pour objectif premier la stabilité de l’équilibre social des sociétés pré coloniales. A
l’heure actuelle, leur survivance dans certaines contrées et même en ville semble constituer un
des obstacles au développement de l’assurance.
Aujourd’hui, avec l’évolution du concept d’assurance, ayant pour origine la
colonisation, nous verrons si les nouveaux systèmes d’assurance font l’unanimité ou contribue
efficacement à l’équilibre des systèmes sociaux existant.

167
V. supra, n° 67 et s.

64
Chapitre II : L’impact de la colonisation

93. Après la colonisation, l’Afrique poursuit toujours son rôle de fournisseur régulier de
matières premières pour les industries des pays occidentaux. Cependant, les échanges ne se
font plus dans un seul sens et le continent africain devient un marché parmi d’autres de
l’industrie européenne où sont vendus du matériel industriel, des produits finis, les outils
mécaniques et différents accessoires manufacturés symboles « du mode de vie occidental ».
Au fil de la colonisation, l’Afrique sera donc amenée à jouer un rôle nouveau dans l’évolution
du contexte économique mondial. Outre ces échanges et la mise en place d’infrastructures
(écoles dispensaires, routes…), le système colonial a introduit également dans presque toutes
les parties de l’Afrique de nouvelles institutions : une nouvelle bureaucratie (ou
administration), un nouveau système judiciaire, et essentiellement un modèle de droit que
l’indépendance n’entamera pas.
94. Au regard de notre objectif qui est de présenter le processus de formation du droit des
assurances existant actuellement au Bénin et en Mauritanie ; le point de départ de notre
réflexion sera orienté vers les pionniers en la matière (Section I). Une étude approfondie nous
permettra de mesurer l'effort d'assimilation de l'assurance classique par les systèmes
juridiques africains (Section II).

Section I : L’époque des pionniers

95. La recherche des origines de l’assurance moderne en Afrique nous renvoie dans un
premier temps aux professionnels en la matière (assureurs) qui posent les premiers jalons
d’une assurance moderne (Paragraphe I). La Lloyd's et les grandes compagnies anglaises
enverront par la suite des intermédiaires (Paragraphe II) (Courtiers experts) dans tous les ports
du monde y compris en Afrique pour y accompagner les progrès du commerce international à
travers des offres de garanties.

65
Paragraphe I : Les premiers jalons d'une assurance moderne

96. A vrai dire, avant les indépendances, sauf en Egypte168, l’assurance sous une forme
institutionnelle et en se limitant aux anciennes colonies des pays d’Afrique subsaharienne, est
associée à l’arrivée des Anglais au XIXe siècle (A). Quelques années plus tard avec
l’augmentation de ressortissants Français et la croissance du nombre d’entreprises françaises
accompagnant sur place le développement économique et démographique de ses colonies, les
principales sociétés françaises se sont à leur tour intéressées à ces marchés assurables (B).

A- Les assureurs britanniques

97. D'abord installés pour les besoins de leurs clients dans la branche transport, les
assureurs anglais ont peu à peu étendu leur offre de garanties pour couvrir les risques des
entreprises étrangères installées sur place ainsi que de leurs dirigeants expatriés. Dans les
anciennes colonies d’Afrique subsaharienne, dans la période précédant la deuxième guerre
mondiale, ce sont surtout des sociétés britanniques parmi lesquelles la Northern, la Guardian,
la Commercial Union, la Royal Exchange, la London & Lancashire, sans rappeler la Lloyd’s
de Londres qui se sont intéressées aux quelques risques d’entreprises et de transport
susceptibles d’être assurés dans le continent. En effet, comme les compagnies, la Lloyd’s
assurait depuis bien longtemps les vaisseaux négriers et les esclaves en provenance
d’Afrique169.

Les tarifs pratiqués étaient élaborés à Londres au Fire Offices Committee pour
l’incendie et les risques divers et à l’Institute of Marine Underwriters pour les corps
maritimes et fluviaux et les facultés transportées.

168
Il a été publié, en date du 14 janvier 1957, la loi n° 23, posant comme préalable à l’enregistrement de toute
Compagnie d’Assurances désirant poursuivre ses activités de prendre la forme de société égyptienne par actions ;
cette loi précise également que les noms, actionnaires, et membres du conseil d’administration soient égyptiens.
Sous peine d’être déclarées illégales, il était accordé aux compagnies un délai maximum de cinq ans pour
satisfaire aux conditions stipulées. Voir le monde diplomatique mars 1972. V. https://www.monde-
diplomatique.fr/1972/03/A/30832, consulté le 15 aout 2017.
169
Un fait divers, le 29 novembre 1781, le capitaine COLLINGWOOD noie 122 de ses esclaves pour toucher
l’assurance- décès car, la loi anglaise autorisait les navires négriers à se débarrasser des esclaves malades pour
sauver le reste de la « marchandise », Voir. http://www.bondamanjak.com/29-novembre-1781-le-capitaine-
collingwood-noie-122-de-ses-esclaves-pour-toucher-lassurance-deces/, consulté le 12 septembre 2017.

66
98. Après la période des indépendances, des législations nationales ont été adoptées
imposant l'obligation, pour les risques situés dans un pays, d'être assurés auprès d'un assureur
agréé dans ce même pays 170. En outre, ces législations exigeaient des assureurs agréés la
représentation dans le pays des actifs représentatifs des engagements techniques, ainsi que la
fourniture de nombreux états aux autorités locales de contrôle. Ces obligations ont fait fuir les
assureurs anglais de la plupart des pays d'Afrique et ont beaucoup réduit le nombre
d'assureurs européens encore présents sur le continent.

B- Les assureurs français

99. C’est sous la libération que se manifesta chez les assureurs français, l’intérêt d’une
expansion de leur marché vers les territoires d’Outre-Mer. Cependant l’essor véritable de
l’assurance dans les territoires d’Afrique est arrivé sous l’impulsion des pouvoirs publics qui
ne voulaient pas laisser aux mains d’assureurs étrangers en l’occurrence anglais, les marchés,
notamment celui des assurances maritimes, et qui étaient d’autant plus expérimentés en la
matière. Par ailleurs, la propriété des trente-quatre sociétés d’assurances les plus importantes
venait d’être transférée à l’État par la loi de nationalisation de 1946171. Ces évènements
marquent le début d’une extension rapide du réseau d’agents généraux issus de sociétés
françaises. Il s’en suit, une impulsion donnée par un groupe de jeunes assureurs animé par
Guillaume LEGRAND (La Préservatrice), Yves PAULDEPASSE (Assurances Générales) qui
s’étaient réunis à la fin de la guerre afin d’élaborer les bases d’un développement ambitieux
pour l’assurance française, y compris son expansion hors métropole et c'est-à-dire en Afrique
francophone.

100. Pour accompagner l’installation des compagnies françaises d’assurance, des


organisations professionnelles françaises ont mis en place des mesures en vue d’améliorer le
suivi et la gestion des risques locaux : tenue de statistiques communes, inspection des risques,
etc. Ces initiatives sont bénéfiques en termes de structure et de développement des marchés de
l’assurance africains.

170
V. article 199 du CAM et art. 308 du Code CIMA.
171
En 1956, dans son ouvrage : l’Histoire des institutions d’assurance en France, P. J. RICHARD précise que
« la loi française de 1946 sur la nationalisation des plus importantes compagnies d’assurance s’efforçait
principalement de rendre à l’État la gestion des organismes dont l’importance pouvait faire échec à l’intérêt
général ».

67
Néanmoins, ces politiques contribueront au retard de la prise en main des Africains sur leur
propre marché. Au demeurant, les indépendances n’y changeront pas grand chose sur le fond
durant les premières années172.

101. Très tôt, les Européens ont compris que la présence d’assureurs ne suffisait pas à
conquérir durablement un marché. Ainsi, un recours aux intermédiaires d’assurance sera
nécessaire et leur permettra en réalité d’assoir leur présence dans les marchés africains.

Paragraphe II : Les intermédiaires coloniaux

102. L’implantation des premières sociétés d’intermédiation d’assurance en Afrique


francophone remonte à la période pré-indépendance et avait donc pour objectif
d’accompagner les entreprises étrangères qui n'avaient pas de représentation propre sur place.
En tant que filiales, ces agences pouvaient bénéficier de l’assistance de leurs maisons mères
basées en Europe et plus particulièrement en France qui mettaient à leur disposition tous les
moyens nécessaires ainsi que des techniques pour assurer la pérennisation de l’activité. Ces
opérateurs (agent généraux et courtiers) (A) ont un objectif clair, développer le secteur des
assurances.

103. Relevons que toutes les sociétés de l’époque avaient la particularité de se réassurer
hors du continent africain. L'absence de cadres nationaux et de législation propre à chaque
pays Africain pouvant assurer le fonctionnement et le contrôle des sociétés d'assurance justifie
d’une certaine manière le recours aux réassureurs (B).

172
V. Article publié en 2012 par A. KAMEGA, F. PLANCHET, Présentation du marché de l’assurance vie en
Afrique subsaharienne francophone, p.8.

68
A- Les agents généraux et les courtiers.

104. Les intermédiaires d'assurance173 sont les personnes habilitées pour solliciter ou
recueillir la souscription d'un contrat d'assurance ou l'adhésion à un tel contrat, ou pour
exposer à un adhérent ou souscripteur éventuel, en vue de cette souscription, les conditions de
garantie de ce contrat. La Lloyd's, comme partout ailleurs dans le monde, comptait sur ses
courtiers pour prospecter les divers risques assurables et les sociétés donnaient des mandats
d’agence aux anciennes sociétés de commerce implantées sur place.

105. A l’époque coloniale, le statut d’agent d’assurance est accordé à des occidentaux ayant
pour particularité une excellente connaissance du marché africain. Les véritables défricheurs
des marchés d’assurances en Afrique sont ceux qui étaient sur place, sur le terrain, c’est-à-dire
les agents généraux. L’impulsion la plus décisive au développement de l’assurance dans les
années d’après-guerre est due à l’activité de ces personnes physiques. Contrairement à aux
qualités requises de nos jours pour la professions174, certains étaient partis vivre en Afrique
par esprit d’aventure et se sont passionnés pour le métier d’assureur, parfois choisi selon les
hasards de la vie, toujours exercé dans les conditions difficiles175 qu’impliquaient les
méthodes de travail et de déplacement de l’époque. Il fallait bien souvent des jours de voyage
en voitures tout terrain, par des pistes de brousse non encore bitumées et souvent coupées,
dans le seul but d’aller inspecter les risques situés hors des capitales de territoires, encaisser
les cotisations, vérifier les circonstances d’un sinistre, ou pour contrôler les comptes des sous-
agents chargés de servir la rare clientèle des petites villes de l’intérieur. Ces tournées de
prospection et d’inspection avaient toujours un goût d’aventure et de chaleur humaine qu’ont
très souvent évoqué ceux qui les ont vécues, exaltés d’exercer dans des conditions si
périlleuse le métier d’assureur qui, ailleurs, avait la réputation d’être le plus casanier et
routinier qui soit.

106. Le courtier Faugère & Jutheau, alors numéro un du courtage français, a aussi joué un

173
Voir infra, n° 720.
174
Aujourd’hui dans la zone CIMA l’agent général et le courtier doivent justifier d’une garantie financière qui
doit être au moins égale à 10 millions de F CFA (environ 15.245 euros). Cette garantie doit croître en fonction
des primes perçues par ces intermédiaires en vue d’être reversées aux entreprises d’assurance (art 524 et 525 du
Code CIMA). Le courtier doit justifier d’un contrat d’assurance couvrant les conséquences pécuniaires de sa
responsabilité civile professionnelles.
175
Rappelons que c’était bien avant l’arrivée de l’air conditionnée, internet, des routes goudronnées des grandes
lignes d’aviation régulières.

69
rôle décisif dans le développement local de l’assurance tant avant qu’après les indépendances.
L’attachement de ses dirigeants à l’Afrique était tel, que lorsque le groupe a été vendu au
courtier américain Marsh & Mc Clennan, Le dirigent de Faugère & Jutheau Monsieur Robert
HUSSON et sa famille ont gardé les implantations africaines et les dirigent encore connu sous
le nom d’ASCOMA. Par la suite le nouveau numéro un français, Gras et Savoye, a créé une
Direction Afrique très dynamique, animée par Pierre HORARD, qui traite une part importante
des marchés locaux et est l’un des supports essentiels de la présence de l’assurance française
dans la région176.

Ces agents ayant pratiqué leur métier avec une réussite remarquable. BERNINAU
serait venu en Afrique à cause de sa passion du pilotage d’avions, a été amené à créer la
première compagnie aérienne Air-Mauritanie. D’autres, au contraire, ont perdu le fruit de leur
travail après les nationalisations intervenues au Congo, au Bénin, en Mauritanie....

107. L’indépendance des colonies mettra fin cependant un terme à ces années fastes
dominées par les grandes compagnies d’assurances françaises. Certes l’arrêt ne fut pas brutal
mais inévitablement initié puisque les nouveaux Etats se dotèrent de leur propre
réglementation en matière d’assurance177.

Dans le cas particulier du Bénin (ex Dahomey), la politique nouvelle d'indépendance


nationale alla même jusqu’à complètement évincer les compagnies d’assurances françaises en
leur substituant une société d’assurance d’Etat créée en 1974. Certains de ces agents, qui ont
eu la chance de s’implanter dans des territoires où le tissu économique s’est développé
fortement et qui ont conservé une structure libérale pour l’organisation de leur marché
d’assurance après l’indépendance, ont créé des entreprises importantes et constituées des
portefeuilles de grande valeur. Ce fut le cas au Sénégal, en Côte d’Ivoire ou au Cameroun

108. L’intermédiaire d’assurance en sa qualité de distributeur a beaucoup évolué depuis les


indépendances178. En effet, on ne recherche plus les mêmes qualités que celles qui
caractérisaient les intermédiaires de l’époque coloniale. Une autre activité a beaucoup marqué
les années postcoloniales en matière d’assurance : il s’agit de la réassurance.

176
J. YEATMAN, op. cit.,
177
J. YEATMAN, op. cit.,
178
V. infra, n° 721

70
B- Les réassureurs

109. Il est difficile déterminer la date exacte de l’origine de la réassurance. Cependant, en


tant qu’activité internationale, la réassurance est pratiquée depuis des siècles en Asie. En
effet, les premières techniques de transfert ou de partage de risques ont été élaborées et
pratiquées par des commerçants chinois et babyloniens à une époque aussi ancienne que le III
ème ou le II ème millénaire avant Jésus Christ.

Toutefois, le premier contrat de réassurance fut signé vers 1370, date à laquelle un
souscripteur du nom de Giuliano GRILLO passa un contrat avec Goffredo BENAIRA et
Martino SACCO pour réassurer un navire qui partait de Santa Clara de Gènes en Italie à
l’Ecluse aux Pays-Bas, portion jugées la plus dangereuse par l’assureur179.

En 1825, le premier contrat de réassurance tel qu’on le connaît aujourd’hui, un traité en


Incendie, fut signé en Allemagne.

110. En tant que mécanisme de transfert de risques, la réassurance joue un rôle essentiel
dans la promotion de la croissance et du développement des économies nationales. En effet,
les compagnies d’assurances peuvent accepter des risques qui excèdent leur capacité et leur
expertise car une partie de ces risques peuvent être transférés, principalement à des
compagnies de réassurance. En général, les compagnies de réassurance « s’engagent » à
indemniser les compagnies d’assurances si les risques réassurés venaient à se réaliser.

Le réassureur est l’assureur de la compagnie d’assurance (la cédante). Le réassureur cède à


son tour à d’autres réassureurs une partie de ses risques. Toutes les compagnies se réassurent
les unes les autres, le but étant de répartir au maximum les risques. I1 se constitue ainsi une
sorte de fonds international pour la réassurance, qui par son importance et la diversité de ses
détenteurs donne son assise à la réassurance.

111. En Afrique, des compagnies de réassurance locales sont apparues à la veille des
indépendances vers 1957 quand fut créée l’Egyptian Reinsurance Corporation.

Jusqu’aux années 1960, les marchés d’assurances sont très cloisonnés ; il n’existe pas encore
de véritables opérateurs internationaux, à l’exception de rares groupes anglo-saxons se
limitant au domaine du transport et de l’aviation. En Afrique, la réassurance pratiquée par des

179
J. BLONDEAU, C. PARTRAT, La réassurance : approche technique, Economica, 2003, p.10.

71
sociétés implantées en Europe pendant la période coloniale permettait une sortie déguisée
d’une partie de devises dont disposaient les nations colonisées. Conscient de cela, le souci des
institutions financières africaines de l’époque : Banque Africaine de Développement (BAD) et
la Conférence Internationale des Contrôles d’Assurances (CICA) était de limiter les sorties de
devises du continent africain induites par le système de la réassurance180 ; devises qui, prenant
le chemin des pays développés ne pouvaient participer au financement des économies
nationales.

C’est pour remédier à cette situation que la BAD a proposé dans les années 70, la
création d’une société africaine de réassurance : elle verra le jour en 1976, sous la
dénomination sociale AFRICA-RE, impliquant tous les États membres de l’OUA181. I1 fut
alors décidé suite à un accord182 que toutes les sociétés, étrangères ou de droit national,
devaient confier à l'AFRICA-RE 5% du montant de leurs (contrats de réassurance) et les
sociétés étrangères 5% de leur chiffre d’affaire. Au début, les différences de situation
monétaire entre les pays africains ont posé des difficultés de fonctionnement à AFRICA-RE.

Les pays à monnaie indépendante, principalement anglophones, de même que la


Mauritanie, connaissent de grandes difficultés pour payer les soldes de réassurance. L'accord
habilite également tout Etat membre à transférer à ses institutions nationales, notamment les
banques ou compagnies d’assurance, le pouvoir d’acquérir les actions qui lui sont réservées
afin de permettre aux cédantes de participer davantage aux activités de la société et d’être
associées à sa gestion.

112. Un tiers du capital d'AFRICA RE a été ouvert en 1992 aux compagnies d’assurances
ayant un actionnariat national majoritaire. Il a en outre été décidé d’élargir le Conseil
d’administration aux représentants des compagnies d’assurance en leur réservant trois sièges.
Par ailleurs, en 2001, l'Assemblée générale a décidé de porter le capital de la Société à 100

180
En 1974, avant la création d’institutions africaines de réassurance, l’Afrique avait exporté en Europe plus de
200 milliards de f. CFA en prime de réassurance, http://www.politique-africaine.com/numeros/pdf/031102.pdf ,
consulté le 11 septembre 2017.
181
La Société africaine de réassurance (AFRICA RE) a été créée le 24 février 1976 à Yaoundé (Cameroun) sur
recommandation de la Banque africaine de développement, par la signature, par les représentants
plénipotentiaires de 36 Etats membres de l’Organisation de l’unité africaine (OUA) et ladite banque d'un accord
international, en vue de réduire la sortie des devises du continent africain en retenant une partie substantielle des
primes de réassurance. A ce jour, AFRICA RE compte 41 membres, la Banque Africaine de Développement en
est le principal actionnaire (avec 200 actions) et de plus de 100 compagnies africaines d’assurance et de
réassurance, qui détiennent ensemble une participation de 75% du capital de la compagnie.
182
Ce document, plus connu sous l’appellation d’Accord portant création de la Société africaine de réassurance
confère à AFRICA RE son statut actuel ainsi que le pouvoir légal d’exercer ses activités.

72
milliards de dollars et de l’ouvrir à des investisseurs non africains, c’est dans le but répondre à
la nécessité de nouer des alliances stratégiques. C’est ainsi que quatre institutions de
financement du développement (IFD) ont souscrit et libéré 21% du capital d’AFRICA RE,
portant à cinq le nombre d’actionnaires notés AAA et à 29% leur participation au capital de la
société.

113. En 2012, IRB-Brasil Re, principale compagnie de réassurance du Brésil, est devenu
actionnaire d'AFRICA RE. Récemment une ouverture de capital a permis à l’assureur AXA
de s’intégrer à la CICA RE183 rendant la compagnie plus compétitive à l’échelle mondiale.

En 2013, AFRICA-RE a enregistré un chiffre d’affaires de 505 millions d’euros et un résultat


net de 64 millions d’euros184.

Les chiffres montrent l’importance de la réassurance dans le continent africain. En effet, la


réassurance totalise 7% des primes de réassurance mondiales, un poids beaucoup plus
important que celui des primes d’assurances directes qui constitue (1%) du volume mondial,
en raison notamment des faibles niveaux de capitalisation des assureurs. AFRICA RE est
l’institution de référence en matière d’assurance et de réassurance sur le continent africain.
L’essentiel de son activité porte sur la réassurance de risques dits « IARD »185 ainsi que sur
les risques maritimes, aviation et vie. La connaissance des marchés sur lesquels elle intervient
et les relations tissées avec les compagnies d’assurance du continent lui ont permis de se
positionner comme un acteur incontournable de ce secteur. Elle dispose, par ailleurs, d’une
influence importante sur la définition des pratiques et des réglementations régissant l’activité
de réassurance en Afrique Subsaharienne.

Avec une part de marché de 8%, AFRICA-RE se situe au troisième rang des réassureurs du
continent, ce qui lui confère le statut de premier groupe panafricain de réassurance.

114. En 1981, l’impulsion de la CICA186, l’existence d’une monnaie unique va constituer


un facteur favorable à la mise sur pied d’une autre compagnie de réassurance : Compagnie
Commune de Réassurance des Etats membres de la CICA dont les buts sont :

Le groupe acquiert une participation de 7,15% dans AFRICA-RE, une opération dont le montant s’élève à 61
183

M$ (53 M€)
184
Voir, communiqué de presse AXA : Paris, 20 février 2015, Source : Information Mémorandum, basé sur le
chiffre d’affaires 2013.
185
(Incendie, accidents et risques divers) voir supra, n° 313 et svt.
186
Dès 1966, l’Assemblée générale de la CICA a été amenée à étudier la constitution d’une société
multinationale d’assurances et de réassurances. Le projet a été pris en intérêt par les instances de I’OCAM, mais

73
- de promouvoir le développement des activités nationales d’Assurances et de
Réassurances dans les pays membres ;

- de favoriser la croissance des capacités de souscription ;

- de rétentions nationales, régionales et sous régionales ;

- de contribuer au développement économique de l’Afrique.187

La compagnie CICA-RE a débuté ses activités le 1er janvier 1984 avec un capital initial de
600 millions de F CFA. Par ailleurs, la compagnie affirme avoir réalisé un bénéfice de 2,1
milliards de FCFA pour l’exercice 2013 contre 1,4 milliard de FCFA, l’année précédente.
CICA-RE a également enregistré l’augmentation substantielle de son chiffre d’affaire de
(20,25%) passant de 21,5 milliards en 2012 à 25,9 milliards de FCFA en 2013.188

L’actionnariat de la CICA-RE est composé d’une part de douze Etats membres à savoir, la
Côte d’Ivoire, le Gabon, le Burkina Faso, le Tchad, le Congo, le Cameroun, le Sénégal, le
Togo, le Bénin, le Mali, le Niger, la République Centrafricaine et d’autre part de sociétés
d’assurances de l’espace CIMA et d’institutions financières que sont la BOAD et le Fonds de
Solidarité Africaine (FSA). L’Etat de Côte d’Ivoire et les privés ivoiriens détiennent la
majorité des actions de la CICA-RE avec une part de 24 %.
La CICA-RE bénéficie d’une cession légale de 15% sur les traités des sociétés de droit
national, et 5% au 1er franc sur les souscriptions des sociétés de droit étrangers.

115. Aujourd’hui, la réassurance en Afrique subsaharienne, est donc pour une large part, le
fait des deux institutions que sont l’AFRICA-RE à l’échelle de l’ensemble des pays membres
de l’OUA, et la CICA-RE pour les pays membres de la zone CIMA. Selon les instances de
l’époque : « AFRICA-RE et CICA-RE œuvrent aujourd’hui de façon concomitante et
complémentaire à l’intégration des assurances en Afrique. Elles poursuivent le même but qui
est de promouvoir le développement des activités nationales d’assurance et de réassurance
dans les pays africains, de favoriser la croissance des capacités de souscription et de

a dû être abandonné du fait de certaines contingences politiques mais surtout techniques (notamment le manque
de cadres qualifiés pour animer une telle entreprise). Source : entretien accordé par Ahmadou KOUROUMA à
C. BRENEY et M. PILON : http://www.politique-africaine.com/numeros/pdf/031102.pdf , visité le 12 aout
2017.
187
Voir article 3 de l’accord portant création de la CICA-RE
188
Ce bilan financier a été publié par les dirigeants le 26 juin 2014 lors de la 32ème assemblée générale ordinaire
tenue à Abidjan (Côte d’Ivoire).

74
rétention nationales, sous régionales et régionales et de soutenir le développement
économique de l’Afrique »189

La multiplication des compagnies de réassurances nationales concoure à un meilleur


fonctionnement du système global de la réassurance, par le jeu d’une plus grande répartition
des risques

A l’heure actuelle, les sociétés d’assurances françaises présentes en Afrique ne sont


plus aussi nombreuses qu’au lendemain des indépendances. Les risques ne sont plus souscrits
par des agences ou des délégations de sociétés étrangères, mais par des sociétés d’assurances
de droit local. Celles-ci ont des capacités financières limitées alors même qu’elles doivent
s’engager parfois à couvrir des capitaux très importants, voire illimités dans le cas de la
responsabilité civile automobile190.

116. La survie de ces sociétés dépend de la disponibilité de réassureurs capables d’apporter


les compléments de capacités financières indispensables, mais aussi les conseils relatifs à la
tarification et la souscription de risques dont certains sont en très petit nombre sur chacun des
marchés pris séparément et peuvent donc difficilement faire l’objet de statistiques locales
utilement exploitables. C’est au niveau de la réassurance que peut être constituée une
mutualité de risques compensables par les lois de la statistique, base même de l’assurance.
Dans le même temps, les compagnies locales d’assurance en Afrique font face aux problèmes
d’approvisionnement de la capacité, surtout pour les risques grands et complexes, dont la
couverture est souvent obtenue à des taux exorbitants et à des conditions sévères à cause
d’une cote de sécurité. Du reste, très peu de réassureurs africains sont évalués favorablement
par les Agences Internationales de Notation en raison des profils de risque élevés de ses pays.
En outre, les Agences de Notation basées en Afrique ne sont pas entièrement reconnues. Les
grandes sociétés étrangères basées en Afrique ont tendance à sélectionner les bonnes sociétés
d’assurance pour traiter et ne souscrivent qu’en cas de bonnes offres de garanties,
généralement en devises étrangères. Les compagnies africaines de réassurance locale en
général se voient refuser la possibilité de participer à ces risques.

189
Rapport du Conseil d’administration de la CICA-RE couvrant la période du 26 novembre 1982 au 31
décembre 1983, p. 3.
190
Une réalité différente du principe économique de la réassurance car : Economiquement, la politique de
transfert de risque répond à la nécessité de protection de fonds propres de l’assureur. De même qu’un assuré
sait consciemment ou non ce qu’il peut supporter et ce contre quoi il doit se prémunir, une compagnie
d’assurance doit rendre sa ruine impossible. Voir : J. BLONDEAU, C. PARTRAT, op.cit., p.1.

75
117. En Mauritanie cette situation est source de controverse voire problématique. En effet,
quand bien même les dispositions de l’article 199 du Code des assurances mentionnent :

« interdiction d’assurance directe à l’étranger des risques situés en Mauritanie sauf pour
certaines dérogations temporaires », la majorité des entreprises installées en Mauritanie au
cours de ces dernières années auraient souscrit une assurance à partir de l’étranger, en
violation totale de la loi en vigueur191. Cet appel aux assureurs internationaux s’explique par
le fait que l’essentiel de ces grandes entreprises investissent en Mauritanie principalement
dans les mines et l’extraction pétrolière ce qui laisse entendre des investissements très lourds.
Le caractère important de leurs actifs d’exploitation ne peut logiquement pas être couverts par
les assureurs mauritaniens. Pour leur part, les professionnels du secteur estiment que cette
anomalie dans l’application du Code des assurances relève d’une défaillance des pouvoirs
publics et d’une absence de contrôle.

118. En Afrique, pendant la colonisation, les conditions essentielles au développement et à


la modernisation de l’assurance en sont quelque peu réunies à travers l’implantation de
compagnies d’assurances et la prolifération d’agents généraux et courtiers. Cependant, pour
que l’assurance entre dans les mœurs, une assimilation de celle-ci par les populations locales
est nécessaire.

Section II : L'effort d'assimilation de l'assurance classique par les systèmes


juridiques africains

119. Pour assurer une bonne intégration de l’assurance dans le mode de vie des pays
africains nouvellement indépendants, la France va réfléchir à la mise en place d’institutions
dont la mission principale serait de donner une grande impulsion à ce secteur de l’assurance
en Afrique. Pour appréhender cette entreprise qui n’est manifestement pas des plus aisées,
nous serons amenés à parler des moyens d’intégration et des obstacles (Paragraphe I). La
création d’organismes de coopération (Paragraphe II) sera aussi un moyen de dynamisation du
secteur. Le but de ces différents organismes sera le même : une harmonisation et une
dynamisation du secteur en l’Afrique en particulier.

191
Source : La Tribune n°4242 Alioune OULD MOHAMED directeur commercial de l’AGM

76
Paragraphe I : Les moyens d’intégration et les obstacles.

120. C’est la Direction des assurances du ministère français des Finances qui a joué un rôle
prépondérant dans la mise en place de ces nouvelles législations et des administrations de
tutelle de la profession. Deux membres de la Direction des assurances ont été particulièrement
présents en Afrique à cette époque : Yvette CHASSAGNE, alors sous-directeur à la Direction
des assurances, puis directeur au ministère de la Coopération, avant de devenir plus tard
présidente de l’Union des assurances de Paris (UAP) et de plusieurs de ses filiales africaines,
ainsi que Antoine BRUNET.
121. Depuis 1960, il existe en Afrique de l’Ouest un marché unique des assurances, qui a
donné lieu à la création d’une organisation, la Conférence Internationale de Contrôle des
Assurances (CICA) (A). Ayant été le point de départ de l’existence du marché actuel de
l’assurance en Afrique subsaharienne, la CICA compte tenu de certaines lacunes va cesser
d’exister pour des raisons que nous nous efforcerons d’expliquer à travers le bilan ou les
leçons tirées de l’expérience de l’échec de la CICA (B).

A- La conférence internationale des contrôles d’assurances (CICA)

122. Sous l’égide de la France, les États africains francophones, ont organisé dès 1962, la
Conférence Internationale des Contrôles d’Assurance (CICA), dont la mission concernait les
questions relatives à l’assurance. La CICA s’est d’abord attelée à la promotion de l’assurance,
d’une part par la création d’un institut de formation, l’Institut international d’assurance, à
Yaoundé, chargé de former des cadres compétents au marché en devenir, d’autre part en
encourageant la création de sociétés de droit national. Ainsi, le 27 juillet 1962, une
Convention est signée entre treize Etats africains (Bénin, Burkina, Cameroun, Centrafrique,
Congo, Côte d’Ivoire, Gabon, Mali, Niger, Sénégal, Tchad, Togo, Madagascar) et la France.
Les principaux objectifs étaient de la convention sont :

- l’harmonisation et la réglementation des législations nationales ;

- la coordination du contrôle des entreprises ;

- et la coordination de la formation des cadres africains.

Au fur et à mesure que les cadres africains sont formés et que les Etats ont pris conscience de

77
l’importance de ce secteur pour l’économie de leur pays, d’autres mesures sont envisagées
pour assurer le développement des marchés nationaux d’assurances. L’idée se répand avec le
concours de la Conférence des Nations Unies sur le Commerce et le Développement
(CNUCED) de créer des sociétés à capitaux totalement ou majoritairement nationaux et
dirigées par des cadres nationaux. L’autre préoccupation était de limiter la fuite des capitaux
par le biais des sociétés d’assurances et de réassurances étrangères.

123. Afin de concrétiser ces objectifs, une deuxième convention sera signée le 27 novembre
1973. Cette convention remplace celle du 27 juillet 1962 et conduit à l’africanisation de la
CICA. Elle regroupe désormais douze Etats africains (ceux précédemment cités) à l’exception
du Madagascar et de la France192. Il s’en suit un transfert du siège de Paris à Libreville en
1976 et, une modification du statut juridique par laquelle la France, au par avant membre à
part entière, devient désormais simple observateur dans la CICA. Dans le même contexte
d’africanisation du secteur, les agences représentant les compagnies étrangères vont se
conformer aux nouvelles exigences réglementaires, pour être autorisées à exercer. Cependant,
la crise économique des années 80 a considérablement ralenti l’essor des activités dans le
domaine des assurances.

124. Les efforts d’élaboration d’une législation unique dans les pays de la CICA vont se
poursuivre à travers diverses modifications. Ainsi, une réunion de la Zone Franc tenue à Paris
a abouti en date du 20 Septembre 1990, à une nouvelle convention de coopération signée par
les Etats africains qui ont relevé des insuffisances dans le fonctionnement et les attributions de
la CICA. En effet, les décisions de cette institution se heurtaient à l’indifférence des pays
membres étant entendu qu’elle n’avait pas un réel pouvoir de coercition.

125. La Convention de Coopération pour la Promotion et le Développement de l’Industrie


des Assurances (CCDPIA) voit ainsi le jour, avec comme innovation la création de deux
organes en son sein à savoir : un Conseil des Ministres des Assurances et une Commission
Inter étatique de Contrôle des Assurances. En soi, le fonctionnement de la CIMA constitue
une notable exception dans une Afrique habituée à la dispersion des énergies et à l’extrême
diversité des réglementations et des pratiques professionnelles d’un pays à l’autre. Elle a en
effet permis la constitution d’un espace juridique et professionnel commun fondé sur un Code

192
« Ces sociétés de droit national ont pour but de favoriser le développement des économies nationales alors
que par le passé, c’était les sociétés étrangères, par le canal des agences qui profitaient essentiellement du
développement des marchés. La modification de la CICA a été la conséquence de cette évolution ». V. Argus n°
5440 : « entretien avec Barthélémy TOE secrétaire général de la CICA »

78
unique des assurances pour tous ses États membres, un organisme unique de supervision et de
contrôle des marchés nationaux, une procédure unique d’agrément des compagnies
d’assurances, une institution communautaire de formation (l’Institut International des
Assurances de Yaoundé au Cameroun), une société commune de réassurance, etc….

126. L’idée qui sous tend l’existence de la CICA est fort louable. Cependant, les objectifs
fixés ont nécessité un temps considérable et un investissement humain important.

Malgré la mobilisation de tous ces efforts, la durée de vie de la CICA n’excédera pas trente
années. Il serait utile dès lors de s’interroger sur les raisons de la fin de la CICA et, surtout sur
le bilan de celui-ci.

B- Bilan ou leçons tirées de l’échec de l’expérience CICA.

127. Les raisons de l’échec de la CICA sont diverses, à l’issue de ses trente années
d’existence, le développement des marchés de l’assurance n’est toujours pas d’actualité. Cette
situation a été à l’origine des remises en question qui conduisent, en 1990, à la réalisation
d’un diagnostic ayant permis de constater une dégradation persistante des marchés
d’assurances dans la zone CICA. Les conclusions du diagnostic sont claires et sans appel :

- mauvaise gestion de la part des sociétés nationales ;

- inefficacité des services de contrôle au niveau national ;

- impuissance de la CICA comme organe de contrôle et d’harmonisation au niveau


régional ;

- tarifs inadaptés ;

- absence de marché financier ;

- absence de barème d’indemnisation adapté au tarif en assurance automobile, d’où


des condamnations disparates et exagérées au niveau des tribunaux ;

- faiblesse de l’assurance vie ;

- exiguïté des marchés nationaux pour permettre un développement satisfaisant de


l’industrie d’assurance.

79
128. Néanmoins, on peut observer que la CICA aura eu le mérite de favoriser la création de
sociétés de droit national et des directions nationales de contrôle des assurances, En outre,
elle a permis de garantir la formation des techniciens et des cadres d’assurances en créant
l’Institut International des Assurances (IIA) à Yaoundé, de créer la Fédération des Sociétés
d’Assurances de droit National Africaines (FANAF) de créer en collaboration avec cette
dernière, la Compagnie Commune de Réassurance des pays membres de la CICA (CICARE).
En définitive, elle a permis de jeter les bases d’une véritable coopération et même
d’intégration dans le secteur des assurances.

Paragraphe II : Les organismes de coopération.

129. C’est afin de mieux encadrer le développement de leur secteur d’activité que, les
assureurs et les dirigeants africains vont opter pour la coopération et l’intégration régionale ou
sous régionale dans le but d’atteindre une croissance assez forte et autonome du secteur de
l’assurance et devenir ainsi des acteurs importants et effectifs au niveau mondial. Cette
convergence de point de vue est le vecteur de la création de deux organismes de coopération
régionale africaine en matière d’assurance : la FANAF (La fédération des sociétés
d’assurances de droit national africaines) (A) et OAA (L’organisation des assurances
africaines) (B).

A- La Fédération des Sociétés d’Assurances de Droit National Africaines


(FANAF)

130. La création de la FANAF rentre dans le cadre de la mise en avant de la coopération en


tant qu’outil de promotion du secteur de l’assurance. L’étude de la FANAF passe par son
origine, son évolution (2) et, les réformes opérées par celle-ci (3).

80
1) L’origine de la FANAF

131. Pour remédier aux lacunes et au retard des marchés de l’assurance193, Dakar est la
capitale africaine où a germé l’idée de fonder une fédération en 1974. C’est lors de la réunion
de quelques directeurs généraux de compagnies d’assurance. A cette époque, il s’agissait de
mettre en commun les moyens nécessaires au développement de l’assurance dans la zone
franc194. L’autre objectif de ces assureurs étant la présence de sociétés d’assurances purement
locales avec des capitaux entièrement ou partiellement africains sur le secteur. Il faut admettre
qu’à cette époque, il est apparu nécessaire au fil des événements, de trouver une solution au
développement de toutes les compagnies qui commençaient à prendre forme de manière
anachronique sans que des normes claires et consensuelles accompagnent ce mouvement. Il
faudra deux années pour que le projet prenne forme195. Ainsi, le projet se concrétisera à
Yamoussoukro le 17 mars 1976. Dans le processus de création de la fédération des sociétés
d’assurances de droit national africaines, on peut retenir que la rencontre du mois d’août 1974
marque aussi une étape essentielle en ce qu’elle aura permis, de jeter les bases 196 de la mise
sur pied d’une organisation professionnelle des assurances, grâce à l’appui de la Conférence
des Nations Unies pour le commerce et le développement (CNUCED) et de la CICA.

193
Rappelons que ces difficultés ont a été remarquées et plusieurs fois signalées à une certaine époque par les
spécialistes et les acteurs du monde de l’assurance.
194
La zone Franc a été créée en 1945 par le général De Gaulle, réunissant les colonies françaises. Le franc CFA
signifiait alors le franc des colonies françaises d'Afrique. Aujourd'hui, les français ont redéfini le franc CFA
comme le « franc de la communauté française d'Afrique. Certains pays avaient choisi, lors de leur indépendance
ou après, de quitter la zone franc coloniale : soit l'Algérie (1963), le Maroc (1959), la Mauritanie (1973),
Madagascar (1973), l'ex Indochine (Cambodge, Laos et Vietnam) en 1954. Le Mali a quitté la zone Franc en
1962 pour la réintégrer en 1984. Aujourd'hui la zone franc compte 15 pays repartis comme il suit : les pays de la
communauté économique et monétaire de l'Afrique centrale (Cameroun, Tchad, Gabon, Congo-Brazzaville,
Centrafrique, Guinée équatoriale), les Etats de l'union monétaire et économique de l'Afrique de l'Ouest (Sénégal,
Burkina-Faso, Mali, Côte d'ivoire, Togo, Niger, Guinée-Conakry, Guinée Bissau) et l'union des Etats des
Comores. Voir https://www.monde-economique.ch/fr/posts/view/zone-franc-cfa-faut-il-en-sortir, consulté le 12
septembre 2017.
195
En dépit de quelques réticences, la Fédération des Sociétés d’Assurances de Droit National Africaines
(FANAF) voit le jour grâce à la volonté des autorités ivoiriennes de l’époque sous le parrainage du Président
Félix HOUPHOUET-BOIGNY.
196
Au cours d’une réunion qui s’est tenue à Dakar du 21 au 25 août de la même année réunissant l’ors de la
rencontre de Dakar en 1974 rencontre a été l’occasion pour les sociétés d’assurances du continent venues
principalement du Bénin, du Burkina Faso, du Cameroun, du Congo, du Mali, de la Mauritanie, du Togo, du
Sénégal et encore d’autres représentants de la CICA

81
132. Depuis sa création la FANAF s’est élargie. Aujourd’hui elle compte quelque 189
sociétés197. L’organisation compte aujourd’hui une vingtaine de pays africains198. Elle est
dotée d’organes de délibération tels que l’Assemblée générale (constituée des sociétés
membres de l’association). Chaque société est représentée par un membre, soit de sa
direction, soit de son conseil d’administration. L’Assemblée générale de la fédération se
réunit en principe une fois par an ; si possible pendant le premier trimestre. Elle est dirigée par
le Président ou à défaut par le Vice-président. La FANAF s’est fixée comme principaux
objectifs :
«
- la promotion le développement de l’assurance et de la réassurance en Afrique;

- la représentation et la défense des intérêts des assureurs et des réassureurs;

- l’augmentation du volume de rétention des marchés africains d’assurances;

- la promotion de la formation continue du personnel du secteur de l’assurance ;

- la vulgarisation et l’accès de l’assurance grâce à la publication de documents écrits,


visuels et audiovisuels »

- Evolution et premières réalisations de la FANAF »

2) L’évolution de la FANAF

133. A ses débuts, l’association était essentiellement composée de sociétés d’Etat ou


d’économie mixte de marchés de monopole comme ce fut le cas du Bénin. Les membres
fondateurs se réunissent à Douala, capitale du Cameroun du 22 au 23 novembre 1976, pour
adopter les statuts et le règlement intérieur de la Fédération. Toutefois, l’adoption des textes

197
A sa réunion en date du 31 mars 2014 la FANAF comptait 189 Sociétés Membres dont : 49 Sociétés Vie ; 119
Sociétés Non Vie ; 18 Sociétés de Réassurances et 3 Fonds de Garantie Automobile (FGA) opérant dans les pays
tels que : l’Afrique du Sud, le Bahreïn, Bénin, Faso, Burundi, Cameroun, Côte d’Ivoire, Gabon, Ghana, Maroc,
Mauritanie….
198
Parmi les pays qui composent l’association, on peut citer : le Bénin, l’Afrique du Sud, la Centrafrique, le
Burkina Faso, le Cameroun, le Mali, la Cote d’Ivoire, le Gabon, la République de Guinée, la Mauritanie, le
Nigeria, le Niger, la République démocratique du Congo (RDC), la République populaire du Congo, le Rwanda,
le Togo, la Tunisie, le Tchad et le Sénégal.

82
ne règle pas pour autant la question vitale du fonctionnement de la Fédération199. En dépit de
l’enthousiasme qui a guidé les premiers pas de l’association, des blocages ne tarderont pas à
naître progressivement liés aux modes de fonctionnement de la structure. L’assemblée
générale du 22 janvier 1979 à Abidjan se chargera de remettre tout cela en ordre, à travers la
création d’une commission ad hoc dont la mission principale sera de diagnostiquer les maux
dont souffre la FANAF. Ceci dans le but de proposer des solutions durables de sortie de crise.

Cette commission va proposer à l’issue de ces concertations et travaux un certain nombre de


propositions :

- la concentration des organes de direction dans un même pays ;

- la mise en place d’un budget conséquent pour le fonctionnement de l’association ;

- la mise en place d’un secrétariat permanent doté d’un personnel salarié et qui
travaille à plein temps pour la structure ».

134. L’Assemblée générale tenue le 15 mai 1979 à Yaoundé va donner une impulsion à la
FANAF en adoptant ces recommandations de la commission ad hoc. Par ailleurs, c’est
l’assemblée générale de Lomé du 18 au 19 octobre 1979 qui donnera mandat à une
commission composée de deux membres seulement de contacter toutes les sociétés dites de
droit national africaines opérant sur le marché africain pour les amener à adhérer au cadre
nouveau offert par l’association. D’ailleurs, cette même commission, à l’issue de cette autre
mission, qui va être érigée en Bureau exécutif provisoire qui concentre tous les organes de la
Fédération au sein d’un seul marché200.

Le bureau élu réalisera des résultats importants qui vont pousser les participants à l’assemblée
générale tenue en 1982 de lui renouveler sa confiance pour un nouveau mandat. La FANAF
entre ainsi dans l’ère des grandes mutations.

135. Le bureau exécutif sera à l’origine de la création du secrétariat permanent et du


recrutement d’un nouveau Secrétaire général. Cette structure qui a démarré avec un personnel
assez restreint composé seulement de deux personnes, va contribuer très largement à la
redynamisation et à la montée en puissance de l’organisation. Avec patience, détermination, le

199
FANAF, célébration du trentième anniversaire Thème : 1976-2006, 30 ans déjà et pourtant… Yaoundé, 20
février 2006.
200
FANAF, célébration du trentième anniversaire, op.cit.

83
Secrétariat permanent a réussi à hisser la FANAF parmi les organismes les plus crédibles en
matière d’assurance et de réassurance dans le continent africain.

Dans l’effort d’organisation et de structuration de la FANAF, la décennie 1984-1995 a été


déterminante. Elle a été assimilée par les spécialistes de l’assurance comme celle qui met fin
au mandat élogieux des pionniers et qui fait entrer la FANAF dans l’ère de l’enracinement.
Cette période est celle qui coïncide avec l’arrivée d’un nouveau bureau exécutif élu au cours
de l’année 1984201.

3) Les réformes opérées par la FANAF

136. Le mandat du bureau de 1984 a été placé sous le signe de l’assainissement de la


branche automobile. Tout en renforçant les acquis qui lui avaient été légués par l’ancien
bureau, la nouvelle équipe a fait du rétablissement de l’équilibre de la branche automobile son
principal cheval de bataille. Il faut préciser que celle-ci représentait à l’époque 50% du
volume total des émissions du marché de la FANAF accusait de manière paradoxale, des
résultats techniques et financières particulièrement mauvais. Aussi la dégradation des résultats
de l’assurance automobile était liée principalement au système d’indemnisation des préjudices
corporels en vigueur dans la quasi-totalité des marchés de la FANAF. Il s’agissait clairement
du système de la réparation intégrale dont l’application par les tribunaux avait entraîné des
dérives financières très importantes. La principale conséquence de cette pratique était que la
situation de l’assurance automobile menaçait gravement l’équilibre et la solvabilité de tout le
marché de l’assurance en Afrique, surtout au niveau de l’espace FANAF202.

Face à une telle situation, une réactivité était obligataire. C’est ce qui va d’ailleurs pousser les
autorités de tutelle et la profession à se réunir autour d’un colloque tenu à Yamoussoukro du
18 au 25 avril 1986 autour de la problématique d’une indemnisation des préjudices corporels
compatibles avec les moyens financiers de l’assurance africaine.

A l’issue de cette rencontre qui a réuni environs trois cents délégués composés
essentiellement d’avocats, de magistrats, de contrôleurs des assurances, d’assureurs et

201
Equipe composante du bureau : Président : Paul TSALA ; Vice-président : Idy ANGO, Aly LO, membre :
Richard COULIBALY.
202
FANAF, célébration du trentième anniversaire, op.cit.

84
d’autres intermédiaires, d’importantes recommandations destinées à la barémisation des
systèmes d’indemnisation des préjudices corporels consécutifs aux accidents, seront prises.

Les conclusions de cette session qui a marqué les esprits de l’époque seront remises aux
président Félix HOUPHOUET-BOIGNY. Signalons que ce dernier comme tant d’autres de
ses homologues de la sous-région, tous effrayés par la déstabilisation annoncée d’un secteur
économique aussi important, avait décidé de remettre de l’ordre dans le système de réparation
des préjudices corporels en vigueur dans les marchés de la FANAF.

137. C’est ainsi que seront adoptées la Loi togolaise du 5 juillet, l’Ordonnance
camerounaise du 13 décembre 1989, ou encore la Loi ivoirienne N°89-129 du 18 décembre
1989. Tout ce mouvement a redonné de la vie et du crédit au secteur de l’assurance
automobile en particulier et à l’industrie de l’assurance en général en lui permettant de
retrouver une seconde jeunesse.
138. La FANAF se situe dans l’ère de la consolidation des acquis et tous les progrès notés
au cours de la décennie 1995-2005 vont le confirmer en permettant au secteur tout entier de
retrouver une situation financière moins préoccupante. Et à côté de ses actions amorcées à
travers l’introduction d’un système d’indemnisation avec son barème, le Bureau exécutif a
poursuivi une politique d’élargissement des sociétés et des pays membres afin d’amplifier
l’audience de la FANAF. Des marchés nouveaux s’ouvrent du côté de l’Afrique centrale avec
l’arrivée de l’Afrique du Sud, du Rwanda, du Burundi, de Madagascar, du monde arabe avec
la Tunisie.
Le combat pour l’harmonisation des systèmes d’indemnisation des préjudices corporels
gagné, la FANAF n’en poursuit pas moins son travail d’approche et d’élargissement de son
influence dans le continent. On peut retenir que cette période charnière a été conduite par un
bureau composé de M. Jean Kakou DIAGOU, en qualité de président, M. Bruce
MOUBOUYI, comme Vice-président, Alpha BA, Founeké KEITA, Richard LOWE, Moussa
MAIGA, comme membres.

139. La décennie 1995-2005 correspond à l’âge de la maturité et des grands tournants. Il


s’agissait pour l’organisation de jeter un regard sérieux et critique sur le futur en partant des
acquis qui ont été enregistrés depuis la naissance de l’association. Et dont les faits saillants
sont :

- la création de la CICARE;

- la mise sur pied du pool maritime d’Abidjan;

85
- la réforme du système d’indemnisation des préjudices corporels ;

- la modernisation et l’adoption d’une réglementation dans les principaux pays avec le


Code CIMA, le Code guinéen et le projet de Code au Rwanda ;

- l’assainissement des marchés et le renforcement des capacités financières des


sociétés ;

- le symposium sur l’assurance automobile tenu à Yamoussoukro en 1986…

Les marchés de l’espace FANAF étaient confrontés à beaucoup de maux dont certains ont
frappé l’ensemble du système et qui ont pour noms :

- le blocage des tarifs en assurance automobile ne permet nulle part d’équilibrer les
recettes et les dépenses ; d’où l’impossibilité pour les compagnies d’assurances de
régler à temps les sinistres ;

- le taux d’impulsion élevé du risque incendie;

- le montant important des impayés de primes;

- l’assurance accordée à crédit;

- la rétention des primes par les intermédiaires

- l’absence d’un contrôle rigoureux par les autorités compétentes;

- l’absence d’instruments financiers de placements et d’un marché immobilier


rémunérateur;

- le taux de frais généraux élevés.

Tous ces handicaps, étaient à l’origine des nombreuses situations d’insolvabilités. Il faut
insister sur le fait que pendant cette période la situation des assurés n’était pas du tout
enviable203.

140. Cette situation va encourager les Ministres des Finances de la zone Franc à se réunir à
Ouagadougou (Burkina Faso) avec comme mot d’ordre : la formation d’un groupe d’études
chargé de réfléchir au rôle de l’assurance dans la mobilisation de l’épargne.

203
Voir en ce sens M. NKOUENJIN-YOTNDA, Un mort qui rapporte 198 millions : les compagnies
d’assurances en péril ? Penant, 1985, n° 788-789, p. 219.

86
Ce comité a pris place en juillet 1991 à N’Djamena (Tchad) avec comme objectif principal la
remise d’un projet sectoriel sur l’assurance au conseil des Ministres. C’est ainsi qu’à l’issue
de plusieurs rencontres de ce type que le Conseil a adopté le 10 juillet 1992 à Yaoundé

(Cameroun), le traité instituant la Conférence Interafricaine des marchés d’assurances


(CIMA)204.

141. En matière de contribution dans le secteur de l’assurance,, la première réalisation dont


peut aujourd’hui se vanter la FANAF est la tenue régulière de ses assemblées générales
annuelles. Un rendez-vous devenu incontournable pour tous les assureurs, les réassureurs, les
courtiers et les contrôleurs d’assurance. On peut ajouter l’élargissement du cercle des sociétés
et marchés membres de six marchés et seulement quelques vingt-huit sociétés à ses débuts, la
FANAF est passée à cent-vingt sociétés venant d’une vingtaine de pays. L’accroissement du
volume des émissions de primes tant en assurance-vie qu’en dommages dans l’ensemble des
pays de la FANAF. On peut aussi citer d’autres réalisations majeures, comme l’émergence de
groupes africains d’assurance ayant des implantations dans plusieurs marchés de la FANAF.

L’organisation de forums de discussions visant à favoriser des échanges d’expériences entre


les différents acteurs de l’assurance et de la réassurance est aussi d’une grande utilité. Enfin,
l’africanisation progressive du personnel de la majorité des compagnies d’assurance opérant
dans la zone FANAF contribuera à donner plus d’influence aux Africains dans les prises de
décision. Une autre forme de coopération en matière d’assurance a vu le jour avec la création
de l’OAA.

B- L’organisation des assurances africaines (OAA)

142. L’organisation non gouvernementale que constitue l’OAA a le mérite d’une


reconnaissance de la part de plusieurs pays Africains205. Il a été créé en 1972 et a signé un
accord de siège avec le Cameroun où se trouve son secrétariat permanant. L’adhésion à
l’OAA est ouverte aux assureurs, réassureurs, courtiers, organes de contrôle des assurances,
aux éducateurs et formateurs ainsi qu’aux associations d’Assurance d'Afrique. L’OAA s’est
fixé comme objectif, la promotion de la Coopération interafricaine et le développement d'une

204
Voir Décret n° 93-262 du 5 novembre 1993 portant ratification du traité instituant la Conférence
Interafricaine des marchés d’assurances par le Bénin.
205
L'OAA compte actuellement 285 membres dans 43 pays Africains.

87
industrie de l'assurance et de la réassurance saine, en Afrique. En matière de structure, l’OAA
a un Secrétariat dirigé par un Secrétaire Général. L’organe suprême de l’organisation est son
Assemblée Générale qui nomme le Président, le Vice-président ainsi que les Membres du
Comité Exécutif.
143. L’OAA tient une conférence annuelle à laquelle prennent part des professionnels de
l'assurance venus d'Afrique et d'ailleurs durant cette assemblée générale annuelle, ils débattent
des questions d’intérêt commun, y compris des échanges d’affaires et de coopération dans
différents domaines. A ce jour, elle a organisé vingt-huit conférences. L’OAA organise un
certain nombre de séminaires et d’ateliers visant à améliorer la compétitivité des marchés
africains des assurances. Les sujets actuels de ces ateliers portent entre autres sur la gestion de
l’assurance, l’informatisation, l’assurance vie, la réassurance, l’assurance agricole, la notation
des membres, etc. Elle publie de façon régulière le Rapport annuel des assurances africaines,
les documents de conférence, les rapports de séminaire. Elle entretient également au jour le
jour le site web sur les marchés africains de l’assurance.

144. Plusieurs organismes qu’elle a créés s’épanouissent de manière assez autonome tout
en restant sont couverts. on pourrait citer à tire d’exemple : l'Association des Courtiers
d'Assurance206, l'Association des autorités Africaines de Contrôle des Assurances207 le Pool
Aviation Africain208, le pool Africain des Risques Pétroliers et Energétiques209 l’Association

206
L’AIBA vise à promouvoir la compétence, la déontologie et les normes des courtiers africains et d’autres
exerçant la profession en Afrique. Elle vise également à améliorer le service de courtage au sein de l’industrie
africaine de l’assurance.
207
Cette association est l’organe sous le couvert duquel se réunissent les autorités de tutelle des assurances de
toutes les parties d’Afrique. Ses principaux objectifs sont de promouvoir la coopération entre les autorités de
tutelle, d’apporter son assistance aux pays dans le développement des ressources humaines, et de créer un forum
pour la normalisation des lois de l’assurance et les structures de contrôle dans le continent. Elle est aussi
actuellement engagée dans la sensibilisation des pays africains sur la nécessité des préparatifs spécifiques en
assurance en vue des négociations avec l’OMC. Elle a organisé un nombre important d’ateliers et de séminaires
avec le soutien de la CNUCED (Conférence des Nations unies sur le Commerce et le Développement et le
gouvernement de Luxembourg.
208
Le Pool Aviation Africain souscrit des affaires dans nombre de compagnies aériennes africaines et
internationales et a présenté une croissance et une rentabilité très satisfaisantes. 37 compagnies d'assurance et de
réassurance de 14 pays africains opèrent avec le Pool. Voir : www.africaninsurance.net
209
Ce pool compte 28 membres de 9 pays africains qui souscrivent. Il continue de présenter une croissance
soutenue depuis quelques années voir : www.africaninsurance.net

88
Africaine des Educateurs, le centre africain des risques catastrophiques210 et entre autre
réalisation l’OAA a institué un Forum des réassureurs africains qui se tient dans la première
semaine du mois d’octobre de chaque année, pour permettre aux assureurs, réassureurs et
courtiers africains de promouvoir des échanges bilatéraux en réassurance. Elle a aussi institué
un prix pour la meilleure publication pour encourager la publication des travaux de recherche
dans le domaine des assurances en Afrique, fait par des académiciens et des professionnels
africains en assurance. Elle est aussi à l’origine de la mise sur pied d’un programme de l’OAA
pour la notation de la solidité financière avec le concours de la S&P Insurance Ratings,
Londres et la CNUCED. Pour l’avenir l’OAA s’est fixé comme objectif la consolidation et le
renforcement des pools déjà existants et les associations qu’elle a créées. A l’instar de la
FANAF elle compte poursuivre la promotion, l’éducation et la formation en matière
d’assurance. De même qu’une promotion de l’informatisation au sein des marchés
d’assurance africains.

210
Le CARC a été créé, le lundi 11 Avril 2005 à Casablanca, par l’Organisation des Assurances Africaines
(OAA), en partenariat avec la CNUCED et la Banque Mondiale et ce suite aux recommandations de la
Conférence organisée par l’OAA et la CNUCED sur l’assurance des risques catastrophiques à Casablanca en
Avril 2004. Il est abrité et géré par la Société Centrale de Réassurance (SCR), à qui l’OAA a confié la
Présidence. Il a pour mission de développer l’assurance, la réassurance à travers la prévention des risques
catastrophiques en Afrique. Pour réaliser cette mission, le Centre va œuvrer à :

- assister les Pouvoirs publics et l’industrie africaine de l’assurance et de réassurance à développer des
programmes de couvertures assurantielles des risques catastrophiques ;

- sensibiliser le public africain sur la nécessité des couvertures d’assurance des risques catastrophiques
pour le développement durable de leurs sociétés ;

- promouvoir des pôles africains de compétences dans les métiers liés au développement des assurances
des risques catastrophiques ;

- faciliter les partenariats interafricains et la coopération internationale dans la gestion et la couverture


des risques catastrophiques ;

- minimiser les dommages causés par les catastrophes en encourageant la recherche et la promotion des
méthodes de réduction et de prévention des risques catastrophiques »

89
Conclusion du chapitre II

145. Il ressort de notre développement que plusieurs étapes préliminaires auront permis aux
assureurs coloniaux de poser les bases d’une assurance moderne en Afrique. Donc, il semble
clair, compte tenu de ce qui précède que les Anglais et les Français sont les pionniers en
matière de pratique de l’assurance dans le continent. En réalité, ce sont les intermédiaires
coloniaux qui auront concrètement posé les jalons d’une assurance moderne, il s’agit de
courtiers et de réassureurs essentiellement.

Les autorités françaises ont compris assez tôt, l’importance d’une coopération pour
une meilleure intégration de l’assurance dans les mœurs africaines. A citre, elles auront initié
et contribué à la mise en place d’institutions qui existent encore aujourd’hui et dont l’objectif
reste le développement de l’assurance en Afrique.

146. En somme, la configuration du droit des assurances en Afrique est intimement liée à
l’histoire coloniale. Pour le Bénin, il faut dire que le processus CIMA entamé par la CICA a
permis une certaine harmonisation interne de son droit de assurances ainsi que de celui des
pays de l’organisation. En Mauritanie, le droit des assurances qui reste d’inspiration française
n’a malgré tout pas laissé de côté le droit musulman qui intervient dans la quasi-totalité des
branches de son droit.

Par ailleurs, la colonisation n’explique pas à elle seule l’introduction de l’assurance en


Afrique. En effet, n’eut été l’expansion mondiale du commerce, l’assurance dans sa forme
actuelle n’aurait pas eue raison de d’être en Afrique.

147. Pour accompagner le développement de l’assurance en Afrique, l’existence de textes


régissant l’activité est plus que nécessaire. La transposition du droit français des assurances
dans les systèmes juridiques africains semble avoir été le moyen le plus simple pour cela.

90
Chapitre III : Un système juridique d’inspiration française

148. Les anciennes colonies françaises auront hérité du doit français via la colonisation.
Ainsi, au regard de leurs législations en matière d’assurance, le Bénin comme la Mauritanie
sont des pays fortement influencés par la tradition juridique française. En effet, les Codes des
assurances en vigueur dans ces différents pays même s’ils datent des années 1990 ont repris la
rédaction des Codes français dans leur état de 1930. En République du Bénin par exemple,
jusqu'en 1992, le droit des assurances était régi par la loi française du 13 juillet 1930, ou
encore la loi n° 65-01 du 04 mars 1965 rendant obligatoire la souscription d’assurance par
tout utilisateur d’un véhicule terrestre à moteur c'est-à-dire cinq années après avoir son
accession à la souveraineté internationale. Cette loi fut la première étape pour l'ensemble des
branches d'assurances pratiquées à l'époque c’est une reproduction de la loi de 1958 en
matière d’assurance en France ou encore, la loi 62-24 du 17 juillet 1962, portant
réglementation des organismes d’assurances de toute nature et des opérations d’assurances.
Ces textes ont été abrogés par le traité instituant une organisation intégrée de l'industrie des
assurances dans certains États africains. C'est la Conférence Interafricaine des Marchés
d'Assurances (CIMA).

149. La Mauritanie, n’est pas restée dans le processus CICA qui a abouti à la conférence
CIMA. Cependant, elle est restée, malgré quelques modifications de son Code des assurances,
toujours attachée au modèle du droit français. A l’instar des anciennes colonies françaises, on
constate que les lois qui y régissent le secteur des assurances constituent une reproduction
quasi textuelle des lois de 1930 et plus tard, de la loi du 05 juillet 1985... Encore aujourd’hui,
la Cour spéciale de justice Mauritanienne qui a pour charge de légiférer en matière
d’assurances continue de fonder ses réglementations en matière d'assurance sur la loi du 13
juillet 1930 tout en respectant le principe indemnitaire de la diya accordée aux héritiers de la
femme pour moitié par exemple211. Dans ce sens, certains magistrats mauritaniens citent
l’article 1240 du Code civil français après avoir relaté le hadith correspondant à la
responsabilité du fait des choses qui serait fondée sur la règle d'interdépendance entre le
risque et le profit212.

B. DIOP, La réforme de la justice et la protection des droits de l’homme en Mauritanie. 2007. Mémoire de
211

Master 2, V. http://www.memoireonline.com/05/08/1082/m_reforme-justice-protection-droits-de-l-homme-
mauritanie0.html, consulté le 12 septembre 2017.
212
V. B. DIOP op. cit.,

91
150. Nous allons étudier les processus d’intégration de ces lois à travers : la mise en
application des lois coloniales (Section I). Dans la recherche d’une solution aux multiples
problèmes liés à l’application des premières lois nationales en matière d’assurance des
techniques d’organisation juridique seront traitées via l’assainissement du secteur et
l’uniformisation du droit des assurances (Section II)

Section I : La mise en application des lois coloniales.

151. La plupart des pays Africains francophones ont accédé à l’indépendance dans les
années 1960. Il ressort de notre étude que les législations applicables n’étaient pas exactement
celles en vigueur en France à la même époque. La règle de la « spécificité législative »
inscrite par la Constitution française prévoyait que les lois, décrets adoptés en France
métropolitaine ne s’appliquaient pas de plein droit à ses colonies. Les décrets portant
règlement d’administration publique décidaient, l’extension partielle ou complète des décrets
et lois français sur une partie du territoire ou sur son ensemble. Généralement, des
aménagements étaient apportés aux textes originaux en considération de réalités économiques
et des impératifs locaux. Pour réaliser son objectif, deux options se présentent au colonisateur.
Soit une transposition du droit français au droit des anciennes colonies. Ce qui consisterait à
déclarer systématiquement applicable tous les textes ayant cours légal en France : c’est le
principe de l’assimilation. Soit de préserver le droit coutumier déjà existant, en introduisant
dans cet espace, au coup par coup, les textes jugés adaptables aux colonies : c’est le principe
de la spécialisation. Dans tous les cas l’objectif reste le même : faire assimiler aux indigènes
le droit français en ce sens qu’un droit local de l’assurance n’existe pas en Afrique. Le grand
projet était de doter chaque État d'un système juridique nouveau, susceptible de d’accélérer
son développement.

Dans les matières qui avaient suscité beaucoup de problèmes à l'époque de la


colonisation, à savoir le droit de la famille et le droit foncier, le modernisme devait l'emporter
sur la tradition. La mesure la plus radicale est celle contenue à l'article 5 de l'ordonnance
guinéenne n° 47 P.R.G du 20 novembre 1960 qui abolit officiellement le droit coutumier

92
offrant ainsi une porte d’entrée au droit français. La majorité, des anciennes colonies
empruntent cette voie en adoptant adaptant des lois françaises213.

152. Nous devons retenir que, les premières lois en matière d’assurance remontent à la
période coloniale. Ce sont ces mêmes lois qui régiront l’activité au lendemain des
indépendances (Paragraphe I). Pour la suite, nous évoquerons les modes et stratégies
d’intégration des lois françaises (Paragraphe II).

Paragraphe I : Les lois postcoloniales en matière d’assurance

153. Contrairement à la conception de la loi de MONTESQUIEU pour qui les lois


« …doivent être tellement propres au peuple pour lequel elles sont faites que c'est un très
grand hasard si celles d'une nation peuvent convenir à une autre »214, le droit français a
influencé la totalité des systèmes juridiques d’Afrique francophone. En effet, le droit existant
aujourd’hui en Afrique, résulte simplement d’une exportation des textes applicables en
métropole. A ce titre, le droit des assurances applicable en France aura servi de référence aux
législateurs béninois et mauritaniens pour la codification de l’assurance leurs pays. Deux lois
que nous évoquerons corroborent cette remarque, il s’agit de la loi du 13 juillet 1930 relative
aux assurances terrestres (A) et, de la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985 dite loi Badinter (B)

A- La loi du 13 juillet 1930 relative aux assurances terrestres

154. L'antériorité de l'assurance maritime sur l'assurance terrestre a été marquée par la
législation napoléonienne. Le second livre du Code de commerce consacré au commerce
maritime comportait en 1807 une soixantaine d'articles concernant les assurances, en réalité
inspirée de l'ordonnance de la marine de 1681 (Colbert) tandis que le Code civil mentionnait
seulement le contrat d'assurance parmi les contrats aléatoires se limitant à faire référence aux

213
Pour le Dahomey (Bénin) Loi 64-28 du 9 déc. 1964, J.O. 1er fév. 1965, p. 2, Ordonnance 71.11 CP du 9 mars
1971, J.O. 9 mars 1971, p. 934, Loi 81-004 du 23 mars 1981. Pour la Mauritanie Loi du 20 juillet 1965 Lire sur
ce point S. MELONE, Du bon usage du pluralisme judiciaire en Afrique, Revue camerounaise de droit, n°31,
1986, p. 5.
214
MONTESQUIEU, De l’esprit des lois, I.3.

93
lois maritimes renvoyant au Code de commerce. Le tout premier Code régissant les
assurances dans leur totalité en France a vu le jour en 1976 215. Avant cette date, l'activité était
régie par une multitude de textes ne faisant pas l'objet d'un regroupement dans un ouvrage
unique. Quelques textes importants ont pourtant marqué l'histoire récente de l'assurance elles
auront la particularité d’influencer à tout point de vue le droit des assurances au Bénin et en
Mauritanie216.
Donc, jusqu'en 1930, l'assurance terrestre s'organisait par la seule liberté des conventions sous
le contrôle de la jurisprudence qui s’appliquait à la matière par le biais de l'interprétation de la
volonté des parties, certaines règles issues de l'assurance maritime réglementée dans le Code
de commerce. Au demeurant, les assureurs, rédacteurs des contrats, ne tardèrent pas à abuser
de cette liberté contractuelle pour imposer des clauses préjudiciables aux assurées comme le
désistement.

155. Aussi le législateur est-il intervenu pour protéger les assurés en rétablissant l'équilibre
contractuel et un certain nombre d'usages dégagés par la pratique. Cela conduit à une
préparation par une commission dirigée par Henry CAPITANT de la loi du 13 juillet 1930
relative au contrat d’assurance terrestre. Il s'agit de la première loi visant principalement la
protection des assurés. L’objectif de rétablir l'égalité entre les parties contractantes en
améliorant la situation de l'assuré afin qu'il ne soit plus livré sans défense aux volontés de
l'assureur217. La grande innovation des initiateurs de la loi est d’avoir établi le principe du

215
C'est à l'Europe que l'on doit d'avoir mis un peu d'ordre dans ce qu'il était difficile de ne pas qualifier de
maquis juridique. En effet, en 1973, une directive de la Commission de la communauté économique européenne
imposa un ordonnancement, bien nécessaire. Les travaux effectués de cette date à 1976 aboutirent à la
publication des décrets et arrêtés du 16 juillet 1976 (Journal officiel du 21 juillet 1976) constituant le Code des
assurances. Cet ouvrage est la réunion et la classification méthodique de tous les textes concernant l'assurance. Il
se compose de trois parties : les lois, dont la numérotation commence par la lettre L ; les décrets d'application, ou
partie réglementaire (R) ; les arrêtés fixant les modalités de mise en œuvre des lois et décrets (A). Chaque partie
est divisée en cinq livres : 1. le contrat d'assurance ; 2. les assurances obligatoires ; 3. les entreprises
d'assurance ; 4. l'organisation et les régimes particuliers d'assurance ; 5. les intermédiaires d'assurance, V.
http://www.universalis.fr/encyclopedie/assurance-histoire-et-droit-de-l-assurance/2-le-cadre-juridique-de-l-
assurance/, consulté le 17 juillet 2017
216
Il s’agit des lois suivantes :
- loi du 9 avril 1898 réglementant la constitution des sociétés d'assurance ;
- loi du 13 juillet 1930 concernant le contrat d'assurance terrestre ;
- décrets des 14 juin et 30 décembre 1938 visant la création et le fonctionnement de toute société
d'assurances ;
loi du 27 février 1958 instaurant l'obligation d'assurance des véhicules terrestres à moteur
217
La loi du 13 juillet 1930 est l’œuvre de Justin GODART qui se réclama lui-même de la tradition des
encyclopédistes : « Evidemment çà prête à rire, délégué de la France au Bureau international du travail,

94
caractère impératif de tous les textes de la loi. Seuls les articles énumérés, ayant une valeur
supplétive ou déclarative, peuvent être modifiés. C’est le sens de l’article 2 : « ne peuvent être
modifiées par convention les prescriptions de la présente loi, sauf celles qui donnent aux
parties une simple faculté et qui sont contenues dans les articles 6,10, 11, 23, 30, 31, 32, 33,
34, 36, 38, 40, 41, 45, 50, 51, 52, 56, 65, 70, 73 et 74 »218.

156. Des lois subséquentes à la loi de 1930 existent et ont leur importance. C’est ainsi que
le législateur a imposé un statut aux entreprises d'assurances. Un décret-loi du 14 juin 1938
les a soumis au contrôle de l'Etat et leur imposa la constitution d’une réserve spéciale et d’une
comptabilité particulière. Puis une loi du 25 avril 1946 organisa l'industrie des assurances par
la création d'un conseil national des assurances et d'une caisse centrale de réassurance et
nationalisa les plus importantes entreprises d'assurances par transfert à l'Etat de toutes leurs
actions. Ensuite, de nombreux décrets ou arrêtés rendirent souvent l'assurance obligatoire, si
bien que l'abondance de ces textes imposait une codification prévue par la loi du 8 novembre
1955 qui ne fut accomplie que vingt ans plus tard grâce à des directives européennes de 1973
relatives à la liberté d'établissement en matière de responsabilité de dommages. La direction
des assurances a mis à profit cette obligation pour mettre en œuvre une codification ce qui
conduisit au Code des assurances réalisées par deux décrets et un arrêté du 16 juillet 1976. Ce
Code qui constitue la source du droit des assurances en France, a repris les textes et
dispositions antérieures notamment les lois du 11 juillet 1930 et du 3 juillet 1967 sur les
assurances maritimes. Ce Code a aussi permis d’apporter à nos législations un certain nombre
de d’amélioration à cause de l’Europe et dues à des critiques antérieures. Ce Code est divisé
en trois parties : législative, réglementaire, arrêtés.

157. Le Code des assurances Mauritaniennes ou le Code CIMA ont été conçus pour
remplacer la loi française du 13 juillet 1930 sur les assurances, elle-même votée pour
introduire une certaine discipline dans le monde de l’assurance et remédier aux abus commis
par les compagnies d’assurance avant la réglementation de ce secteur. La loi de 1930 avait

président de la ligue contre le cancer, président de l’Armée du salut en France, Chevalier de l’ordre de Malte,
président des gastronomes, des marionnettes internationales, ministre, membre de l’Académie de médecine, et
les Arméniens, et les Albanais ? (…) Si l’on y réfléchit, tout cela de niveau et communiquant par des
ressemblances soudain révélées, n’est-ce pas ainsi qu’est né et s’est réalisé l’esprit des encyclopédistes,
précurseur de l’esprit républicain ? C’est de quoi je me recommande : être en familiarité avec tout l’univers.
C’est d’eux dont je suis le fils. » Voir. A WIEVIORKA, J. GODART : un homme dans son siècle, 1871-1956,
CNRS histoire. Histoire contemporaine, Paris, CNRS, édition 2004, p. 9, cité par C. BELLENGER, op. cit., p.
220.
218
Voir C. BELLENGER, op. cit., p. 223.

95
vocation à s’appliquer en Afrique francophone après la colonisation. Si elle a été modifiée à
plusieurs reprises en France, les législations africaines n’ont pas toujours suivi rendant ainsi
leur système juridique obsolète.

A- La loi No 85-677 du 5 juillet 1985 dite loi Badinter

158. Certains auteurs ont beaucoup abordé le fléau social provoqué par les accidents de la
circulation219. En matière d’indemnisation dans le contexte africain et même français, jusqu'à
la loi n° 85 /677 du 5 juillet 1985220, seules les règles du droit commun de la responsabilité
civile fondées sur les articles 1382 et suivants du Code civil étaient applicables221. Elles
laissaient très souvent la victime sans indemnité, ou avec une indemnité partielle en cas de
faute. Aussi à la suite du désordre de l'arrêt Desmares en 1982222, et au consensus qui s'établit
dès 1981 sur la nécessité d'une loi pour créer un régime spécial d'indemnisation des victimes
qui jusque-là sont peu protégés223, le Gouvernement de Laurent FABIUS et son ministre de la
justice Robert BADINTER déposent un projet de loi au bureau de l’Assemblée Nationale.

La loi BADINTER a un double objet : elle tend, d'une part, à l'amélioration de la situation des
victimes d'accidents de la circulation et, d'autre part, à l'accélération des processus
d'indemnisation (offre transactionnelle). C'est une loi essentielle qui concerne l'indemnisation

219
Y. CHARTIER, La loi n°85/677 du 5 juillet 1985 tendant à l'amélioration de la situation des victimes
d'accidents de la circulation et à l'accélération des procédures d'indemnisation : étude analytique, jurisprudence
générale Dalloz ; 1986 ; Y- LAMBERT FAIVRE, La réforme du droit français de la responsabilité civile,
Presses Universitaires d'Aix Marseille, 1985, p. 25, cité par Hubert DIE KOUENEYE ; Mémoire DEA,
université de SCHENG Cameroun, 2006.
220
Dite Loi BADINTER, tendant à l'amélioration de la situation des victimes d'accidents de la circulation et à
l'accélération des procédures d'indemnisation
221
V. articles 1240 et suivant du Code civil français.
222
Cass. Civ. 2ème, 21 juillet 1982, arrêt DESMARES, GAJC 11 ème éd. n° 205, D. 1982, Jur. p.449, JCP 1982, II
n° 19861 : « Seul un événement constituant un cas de force majeure exonère le gardien de la chose instrument
du dommage de la responsabilité par lui encourue par application de l’art. 1384 al. 1 er que, dès lors, le
comportement de la victime, s’il n’a pas été pour le gardien imprévisible et irrésistible, ne peut l’exonérer même
partiellement ».
223
La deuxième chambre civile de la Cour de Cassation avait instauré un système du "tout ou rien", en
considérant que la faute de la victime (comportement des piétons imprudents) n'exonérait en rien le gardien, sauf
s'il s'agissait d'un cas de force majeure. Cette solution fût abandonnée pour revenir à une exonération en partie du
gardien lorsque la faute de la victime était à l'origine du dommage (chambre civile de la Cour de Cassation du 6
avril 1987).

96
du préjudice corporel d'un très grand nombre de victimes, de leurs familles et ou leurs ayants
droits.
159. La notion d'accident implique que les faits causent un dommage involontaire. La
notion de circulation est plus complexe, il s'agit d'une notion large, puisqu'un véhicule qui
n'est pas en mouvement peut être impliqué (véhicule en stationnement).

De même, la Cour de Cassation a reconnu l'implication des véhicules au sens large 224ce qui
englobe les cyclomoteurs, les tracteurs agricoles, les moissonneuses, les engins de chantier,
les engins de damage de piste de ski, les chariots élévateurs voire une tondeuse à gazon « auto
portée », pelleteuses, à l'exception des véhicules strictement immobilisés dans un lieu privé. Il
faut que le véhicule soit impliqué pour que la loi Badinter s'applique. La notion d'implication
a été largement comprise par la Cour de Cassation225 il faut qu'il y ait un contact avec le
véhicule.

160. Les non conducteurs sont particulièrement protégés par cette loi (piétons, cyclistes et
passagers transportés). Ils sont indemnisés de tous leurs dommages corporels, sauf s'ils ont
commis une faute inexcusable. Un partage de responsabilité peut également être reconnu. Les
enfants de moins de 16 ans et les personnes âgées de plus de 70 ans, ainsi que les personnes
titulaires au moment de l'accident d'une incapacité permanente ou d'une invalidité égale ou
supérieure à 80%, sont indemnisés de leurs dommages corporels de plein droit, sauf si elles
ont volontairement recherché ce dommage. En ce qui concerne les conducteurs, la loi dispose
que leur faute a pour effet de limiter ou d'exclure l'indemnisation des dommages qu'ils ont
subis. Ainsi, pour ces derniers, le principe de la responsabilité demeure.

La loi a également instauré la procédure d'offre d'indemnisation obligatoire. L'assureur


qui garantit la responsabilité civile du véhicule qui a occasionné l'accident doit faire une offre
indemnitaire aux victimes. Si l'assureur a connaissance de la consolidation de l'état de la
victime dans les trois mois de l'accident, il doit dans les six mois de la consolidation, proposer
une offre définitive. Dans le cas contraire, il doit présenter une offre provisionnelle dans le
délai de huit mois, et une offre définitive dans les cinq mois suivants la date à laquelle il a eu

224
Cass. Civ. 24 juin 2004. (Bull. n° 308)
225
La loi du 5 juillet 1985 est applicable dès lors qu’un véhicule terrestre à moteur est impliqué, c’est à dire dès
lors qu’il est intervenu d’une manière ou d’une autre dans cet accident, et même en l’absence de heurt à
condition dans ce cas que ce véhicule ait eu un rôle perturbateur. Voyez Cass. Civ. 28 février 1990, Cass. Civ. 8
juillet 2004, pourvoi n° 03-15045.

97
connaissance de l'accident. Pour les victimes par ricochet le délai d'offre est de 8 mois à
compter de la demande d'indemnisation.

161. Dans le contexte africain, et particulièrement celui des pays membres de la CIMA, il a
fallu attendre l'entrée en vigueur du Code des assurances des Etats membres le 15 février
1995 pour avoir une certaine harmonisation des législations nationales des dits Etats sur la
question. Avant ce Code en effet, bon nombre de législations nationales avaient mis sur pied
des textes spécifiques relatifs à l'indemnisation des victimes d'accidents de la circulation.

L'assurance en Mauritanie était organisée fut un temps selon les normes de la conférence
internationale du Contrôle des Assurances en Afrique (CICA)226. La sortie de ce pays de
l’organisation CICA entraîne une réglementation nationale de l’assurance par l’adoption de la
loi Du 20 juillet 1993 en matière d’assurance. Des dispositions du Code des assurances
reprendront plusieurs alinéas de la loi Badinter. En cas de non-respect des délais, le règlement
d'une pénalité égale au double des intérêts légaux peut être prononcé par les tribunaux. L'offre
manifestement insuffisante est également sanctionnée par les tribunaux. Cette loi donne
compétence exclusive au Tribunal de Grande Instance pour connaître des litiges relatifs aux
accidents de la circulation. La jurisprudence a considérablement évolué depuis 1985 en
donnant de plus en plus de droits aux victimes pour la réparation de leurs dommages. La Cour
de Cassation n'a cessé de rendre des arrêts considérant que la victime a droit à la réparation
intégrale de son préjudice.

162. En droit mauritanien une modification a été apportée à ce principe en réduisant les
délais de l’indemnisation. A cet effet l’article 30 de la nouvelle loi dispose : « l’assureur doit
proposer à l’assuré une offre d’indemnisation détaillée par chefs de préjudice dans un délai
de trois mois à compter de la réception de la déclaration de sinistre. Toutefois, en ce qui
concerne l’indemnisation des dommages corporels ayant entraîné une incapacité permanente
partielle de 10% ou plus ou en cas de décès, le délai de présentation de l’offre est porté à
cinq mois pour donner le temps aux deux parties de réunir les documents nécessaires à la
détermination des responsabilités en cause et à l’évaluation correcte du montant du
préjudice. Le délai d’offre est prorogé, comme il est dit à l’article 29 par le retard mis par
l’assuré, mais aussi au cas où l’assuré ou la victime se soustrait à l’exigence d’une expertise
demandée par l’assureur. Le délai est augmenté de deux mois si la personne qui demande à

226
La Mauritanie et Madagascar sortiront de l’organisation juste après la signature de la deuxième convention de
la CICA, celle du 27 novembre 1973, tandis que le Mali l’intégrera en 1975.

98
être indemnisée réside à l’étranger. En cas de dépassement par l’assureur du délai fixé par
cet article, l’indemnisation doit être majorée de 5%. Un exemplaire de tout procès-verbal
relatif à un accident matériel ou corporel de la circulation doit être automatiquement
transmis par l’officier de police judiciaire aux compagnies d’assurances impliquées, aux
assurés et aux victimes. Le délai de transmission du procès-verbal est de 15 jours au
maximum à compter de la date d’établissement ».227

163. Dans le contexte de la CIMA, on observe que le nouveau droit à l'indemnisation


contenu dans le Code est donc un texte « sui generis » qui détermine lui-même les conditions
et les voies d'indemnisation des victimes d'accidents de la circulation. Il établit un système
autonome de responsabilité qui ne se situe pas dans la sphère de la responsabilité civile
classique du Code civil. Il instaure un régime de réparation spécifique à l'instar de la loi
Badinter du 5 juillet 1985 en France, mais avec un esprit propre et des règles particulières
dans l'ensemble plus favorables à la victime que celles du droit commun de la responsabilité
qui se sont révélées, même en France, inadaptées au fil des années pour la réparation des
dommages corporels228. Le recours à un droit étranger, français en l’occurrence, semble se
justifier par le fait qu’en accédant à l’indépendance, les pays d’Afrique francophone ont tenté
de façon différente de légiférer pour élaborer un droit en phase avec le développement
économique et les modifications sociales opérées pendant la colonisation 229. Cette démarche
était compréhensible dans la mesure où il fallait poursuivre le processus d’autonomie et
surtout trouver une solution à l’absence de législation que pouvait laisser paraitre la fin de la
colonisation. Il est clair que les législations étaient le plus souvent disparate, imprécise, mal
connue, ou inadaptée. Toujours est-il que pour une adaptation des législations françaises dans
les systèmes juridiques africains, une certaine organisation était nécessaire.

227
Ordonnance abrogeant, remplaçant et modifiant certaines dispositions de la Loi n° 93 – 040 du 20 juillet
1993, portant Code des Assurances.
228
Avant l’adoption de la loi Badinter, en raison des contestations doctrinales sur l'application du droit commun
de la responsabilité civile en matière d'accidents de la circulation routière, diverses études ont proposé des
systèmes de spécifiques en vue de garantir l'indemnisation des victimes de la façon la plus équitable. On pourrait
citer celles de A. TUNC, J. BEDOUR, H. MARGEAT, et H. GROUTEL
229
P. TIGIER, Le droit des affaires en Afrique OHADA, PUF, 1999, Que sais-je ? , p. 9.

99
Paragraphe II : Modes et stratégies d’intégration des lois françaises

164. Lorsque l’on emploie l’expression réception en faisant allusion, à un système de droit
ou à un droit quelconque, il s’agit de l’ensemble des moyens dont dispose les autorités
publiques pour manifester expressément l’acceptation de ce système ou de ces règles de droit
pour permettre ainsi son entrée dans ce que les juristes appellent l’ordre juridique national ou
interne. Si l’idée d’importation reste propre au vocabulaire de l’économie et de la science
politique230, sur le plan juridique, l’acception qui lui est conférée s’accommode d’une
transplantation du système juridique occidental. En fait, c’est une vocation naturelle pour les
juristes de recourir aux meilleures formules qui ont fait recette dans d’autres contrées, puisque
les assurances ont contribué à l’expansion de l’occident.

165. Dans cette œuvre législative, on peut constater qu’aussi bien dans les anciennes
colonies britanniques que françaises, le droit n’a pas été abrogé du simple fait de l’accession à
l’indépendance. En effet, ces lois ont fortement influencé les systèmes africains (A) Dans le
domaine des assurances, il existe encore des traces ou séquelles du mimétisme juridique en
matière de droit des assurances (B).

A- L’influence des lois coloniales sur le système juridique africain en


général.

166. Les Constitutions des pays d’Afrique francophone prévoyaient une clause, maintenant
en vigueur les lois et règlements issus de la période coloniale231. Les cours continuaient donc
d’appliquer le droit d’origine coloniale, c’est à ce titre que la cour d’appel du Gabon avait
décidé en 1963 que, « L’indépendance du Gabon n’a pas pour conséquence de remettre en
cause les textes promulgués lors de la souveraineté française, mais de les nationaliser au sens
gabonais »232.

230
B. BADIE, L’Etat importé. L’occidentalisation de l’ordre politique, Paris, Fayard, 1992.
231
Encore faut-il que ces lois soient conformes à la constitution.
232
Recueil Penant 1963, p. 548.

100
L’Afrique subsaharienne a été l’une des terres fertiles d’exportation du droit233. En
effet, Le droit Africain a continué son évolution tout en étant influencé de manière
significative par le droit issu de la puissance coloniale. Il a été placé progressivement en
situation de dépendance. L’activité normative n’était pas l’œuvre des Africains pour des
Africains répondant ainsi à des spécificités particulières. Ainsi, à travers le processus de
colonisation et de tutelle, on a voulu imposer le modèle juridique de la France à toutes ses
colonies, sous prétexte que celui-ci serait soi-disant universel et prétendument supérieur234.
Les Etats nouvellement indépendants ont proclamé le principe de continuité en matière
juridique235. Il n’y a donc pas eu de rupture brutale entre l’ordre juridique colonial et l’ordre
juridique de ces jeunes Etats. L’orientation nouvelle du droit était de ce fait hantée par le droit
européen. On peut expliquer cette obstination à se référer au droit français, par l’influence
exercée par les experts que ce soit les fonctionnaires, les professeurs de droit, mis à la
disposition des Etats236. La présence de ces conseillers techniques était systématique aux
lendemains des indépendances. Cette influence s’est manifestée de différentes manières.
Certains experts mandatés pour élaborer de nouvelles législations n’avaient qu’une
connaissance limitée des Etats dans lesquelles ils étaient envoyés. Il était donc aisé pour eux
d’utiliser un modèle préexistant, peu adapté. En effet, il faut avoir à l’esprit les écarts de
développement économique et social entre la France et ses anciennes colonies237.

La coopération en matière de formation serait aussi à l’origine de l’imprégnation du


droit africain par le droit français. Dans ce sens, Jean FOYER, alors Garde des sceaux en
1961 écrivait : « Nous vous avons communiqué et nos concepts, et notre terminologie, et nos

233
P. LAMPUÉ, L’influence du droit français et du droit coutumier sur les lois civiles africaines, in Dynamiques
et finalités des Droits africains, G. CONAC (dir.), Economica, 1980, p. 14 et s.
234
V. M. ALLIOT, Cours d’institutions privées africaines et malgaches, Les cours de droit, 1966-1967, p.182.
Cité par M. THIOYE, Part respective de la tradition et de la modernité dans les droits de la famille des pays
d’Afrique noire francophone. In : Revue internationale de droit comparé. Vol. 57 N°2,2005. p. 369.
235
J. VANDERLINDEN, Les systèmes juridiques Africains, PUF, Que sais-je ? , n° 2103, p.57, cité par O.
MINKO M’OBAME, l’uniformisation du droit des affaires en Afrique par le traité OHADA, mémoire de
maitrise, Université d’Auvergne, année 2000, p.16.
236
Du fait de la carence en matière de juristes, on constate en effet qu’au Rwanda par exemple, en 1972 on
comptait une demi-douzaine de juristes pour satisfaire la totalité des besoins du pays, Voy. J. VANDELINDEN
op. cit., p. 59.
237
V. O. MINKO M’OBAME op.cit., p. 14.

101
habitudes de rédaction, et nos méthodes de construction juridique, et tout cela, il est
vraisemblable que vous ne le perdrez pas de sitôt »238.

167. La raison avancée par les autorités françaises ou africaines pour justifier la
transposition du droit français dans les systèmes juridiques africains est le désir de combler le
retard par rapport à l’Europe, en imitant son modèle juridique. Il est important dans ce cas de
s’attarder sur les effets de cette transposition.

B- Les effets du mimétisme juridique en matière d’assurance

168. Aristote en son temps tentait de justifier le mimétisme. En ce sens il écrivait : « Dès
l'enfance, les hommes ont, inscrites dans leur nature, à la fois une tendance à imiter et
l'homme se différencie des autres animaux parce qu'il est particulièrement enclin à imiter et
qu'il a recours à l'imitation dans ses premiers apprentissages »239. Aristote nous enseigne
ainsi que l'imitation se loge au cœur de la culture. En tant que matrices de l'ordre
socioculturel, les processus mimétiques ont été abordés par la doctrine juridique pour désigner
les modes de formation des normes et d’élaboration du droit dans le contexte colonial ou
postcolonial240.
Le mimétisme juridique procèderait ainsi d’une appropriation acclimatation délibérée
de la norme. Le transplant de prototypes, la standardisation du droit, sa modélisation sont
autant de manifestations du mimétisme normatif. Sa dynamique induit une identification, une
imitation ou une interprétation de la norme241.
169. La situation des marchés d’assurance n’a pas changé immédiatement après les
indépendances, mais chacun des nouveaux Etats s’est doté d’une législation propre sur les
assurances, quasiment copiée sur les lois françaises. En Afrique du Sud, ce sont les
contraintes liées au boycott international entraîné par l'apartheid, qui ont laissé le champ libre
aux assureurs nationaux. Ailleurs, comme au Nigeria, les activités financières ont été
réservées à des investisseurs nationaux excluant en ce cas les participations majoritaires

238
J. FOYER, Les destinées du droit français en Afrique, Revue Penant, , janv-mars 1962, p.1.
239
Aristote, Poétique, chap. 4, 1448 b 4-27.
240
F. KI-ZERBO, Mimétisme en matière de droit privé en Afrique, In Environnement africain, n° 37-38, vol. X,
1-2, Dakar, enda, 1995, pp. 69,70.
241
V. NEGRI, I. HULTE-TENCKHOFF, Réflexions autour de la construction mimétique du droit : jalons pour
une recherche, p.7.

102
d'assureurs étrangers. Dans d'autres cas, les modes idéologiques marxisantes ont amené les
gouvernements locaux à nationaliser les activités des sociétés d'assurances et à créer des
monopoles d'État.
Le mimétisme en matière de loi française dans le domaine des assurances a eu pour premier
effet, par l’introduction de l’agrément la réduction rapide du nombre de compagnies car, les
nouvelles législations vont décourager les compagnies britanniques en particulier. La
nécessité d’agréments pour toute poursuite activité et surtout le respect des nouvelles normes
relatives aux actifs admis à représenter sur place les provisions techniques. Beaucoup de
sociétés se sont donc retirées des marchés africains au cours des années 1960, à commencer
par les dernières sociétés britanniques encore présentes comme la Northern. La Lloyd’s,
malgré le lobbying de M. de CANNECAUDE, son représentant en France, n’a pu se
maintenir comme assureur direct et n’est plus intervenu que comme réassureur. Le dernier
assureur britannique de la région, la Greacam, filiale de Guardian Royal Exchange implantée
dans la zone anglophone du Cameroun, a été rachetée par la SNAC, filiale de La Préservatrice
foncière, à la fin des années 1980242.
170. L’expérience de la transposition de la loi de 1930 a eu des effets divers et variés. Il est
indéniable qu’elle sert et continue de servir de base aux pays membres de la CIMA ou à la
Mauritanie afin qu’ils puissent se doter de textes « modernes ». Toutefois, Le principal
reproche fait à cette expérience vient de son manque d’aménagement qui s’est traduit par une
application souvent brutale de textes destinés à régir un pays diffèrent à divers points de vue.
Par la suite, les Africains sentiront un moment donné le besoin d’intervenir dans le processus
de développement de leur marché d’assurance. C’est d’ailleurs, ce qui explique une nécessité
d’assainissement et d’uniformisation du doit des assurances.

242
http://revue-risques.fr/revue/risques/html/Risques_57_0021.htm/$file/Risques_57_0021.html.tmp , consulté
le 12 sept.-17

103
Section II : L’assainissement du secteur et l’uniformisation du droit
des assurances.

171. L'importance des actifs gérés par les compagnies d'assurances et la volonté de
maîtriser l'industrie de l'assurance face aux influences financières a, presque depuis le début,
conduit les pouvoirs publics à s'intéresser assez tôt à ce secteur d'activité. C’est ce qui justifie
d’ailleurs la présence d’autorités autonomes dotées d’une personnalité juridique et ayant pour
rôle un contrôle et un assainissement des compagnies d’assurances. Initialement, les
opérations d’assurances étaient soumises au contrôle exclusif de l’Etat concerné. Ce contrôle
dévolu à l’époque au ministre des finances, était prévu par un texte datant des années 1960.
Précisons que la règlementation de cette période une fois en désuétude nécessitait
incontestablement un toilettage. Aujourd’hui, l’objectif principal de ces organismes est de
veiller à la protection du souscripteur et à la promotion d’un marché sûr et efficace, en
s’assurant que les lois régissant le secteur soient respectées par les sociétés en place Pour
cela, il faut les organes de régulation et de contrôle (paragraphe I).

172. L’existence d’un Code unique gouvernant le secteur des assurances dans plusieurs
pays africains anciennes colonies françaises peut constituer à l’image de l’OHADA, un signe
ou un espoir dans l’uniformisation et l’harmonisation de certaines branches du droit en
Afrique. En effet, suite à l’inadaptation et surtout à l’inefficacité du droit hérité de la
colonisation en matière d’assurance, l’un des objectifs majeurs de certains pays africains
reste une sécurisation du secteur afin de répondre aux exigences d’un marché prometteur des
opérateurs économiques243. C’est donc pour relever ce défi que la Conférence interafricaine
des marchés d’assurances (CIMA) (paragraphe II) existe.

P.G. POUGOUE, Instrument d’intégration juridique, In Revue africaine des sciences juridiques, Vol. 2, n° 2,
243

2001, p.11-.13.

104
Paragraphe I : Les organes de régulation et de contrôle

173. L’assurance fait partie des activités qui ne peuvent supporter le manque de
transparence. Pour respecter les exigences de l’activité en question, un contrôle est
inéluctable.

Au niveau global, il convient de noter l'existence d'une organisation mondiale qui n’est autre
que l'Association Internationale des organismes de contrôle des Assurances (IAIS) qui a
élaboré et mis en place des normes mondialement reconnues pour les systèmes de supervision
et de contrôle de l'assurance dans chaque pays. Elle a mis en place des principes244 bien
connus, et normalement universellement appliqués. Dans la pratique :

- elle fonctionne de façon indépendante; elle rend compte de l’exercice de ses missions
et pouvoirs;

- emploie et forme un personnel suffisant de haut niveau professionnel;

- traite de façon appropriée l’information confidentielle245.

174. Pour réguler le secteur et surtout pour lutter contre les abus voire l’anarchie246 dans le
domaine des assurances, des organes nationaux ou supranationaux de contrôle peuvent
exister. Le pouvoir d’un organe de contrôle se manifeste essentiellement à travers sa capacité
de sanction. Dans la zone CIMA, la surveillance du secteur des assurances est assurée par une
autorité régionale, à s’avoir la Commission Régionale de Contrôle des Assurances (CRCA)
(A). En Mauritanie, la responsabilité du contrôle des assurances incombe à la mission de
contrôle des assurances qui répond devant le ministère de l’économie. Nous étudierons cette
particularité (B).

244
Il s’agit de 28 Principes de base en matière d’assurance (PBA)
245
Voir, AICA, Principes de base en matière d’assurance approuvé à Singapour le 3 octobre 2003 PBA 3
246
Au Cameroun par exemple en 2006, sur 368 bureaux contrôlés dans six provinces, seuls 30,4% étaient en
conformité avec la réglementation. A l’inverse, 52,2% opéraient dans la clandestinité, sans agrément ni
autorisation d’exercer tant pour les dirigeants que pour leurs structures respectives. V en ce sens, J-V
NGUE président de l’ASAC au Cameroun, l’assainissement : Patiemment… et Sûrement in Assurances et
sécurité N° 013 novembre 2008, cité par E. TCHOMTE, Les sociétés d’assurance en difficulté, article publié le
04 mai 2016 in Legavox.

105
A- Le contrôle des assurances dans la zone CIMA

175. Il faut préciser que des organes nationaux de contrôle subsistent et travaillent
étroitement avec les organes de contrôle de la CIMA. Ainsi, chaque Etat membre dispose
d’une Direction Nationale des Assurances. En principe celle-ci constitue le relai à l’action et
aux décisions de la CRCA. En outre, elle dispose des attributions générales et spécifiques247.
La Direction Nationale des Assurances (DNA) est un organe national qui existe dans chaque
Etat membre de la CIMA. Elle est prévue par l’annexe II du traité instituant la CIMA. Cette
annexe qui précise la mission de la DNA, laisse pour son organisation la charge aux Etats
membres. Examinons comme exemple l’organisation de la DNA béninoise (1), puis abordons
l’organisme régional qu’est la CRCA (2)

1) La direction des assurances du Bénin

176. A l’image de toutes les Directions Nationales des Assurances des pays membres de la
CIMA, institution d’intégration du secteur de l’assurance dans la zone, la Direction des
Assurances du Bénin sert de relai à l’action de la Commission Régionale de Contrôle des
Assurances (CRCA). A ce titre, elle s’inscrit à la suite de l’obligation de collaboration que la
CIMA met à la charge de chacun des Etats membres. C’est ce que laisse entendre l’art 46 du
traité CIMA. D’ailleurs, l’Etat qui manque à cette obligation de collaboration peut être mis en
demeure par le conseil à la demande de la commission ou du Secrétaire Général, de prendre
les mesures nécessaires au rétablissement du bon ordre juridique.
Bien avant l’entrée en vigueur de la CIMA, un certain contrôle du secteur des assurances
existait au Bénin. En effet, la Direction des assurances du bénin existe depuis le 29 décembre
1988248. Depuis sa création, plusieurs textes modificatifs dans un souci d’amélioration ont été
pris par l’autorité compétente. Aujourd’hui, elle est au terme de l’arrêté
n°098/MFE/DC/SGM/DGE du 1er mars 2006 une direction opérationnelle placée sous la
tutelle de la direction Générale de l’Economie. Cependant, dans le cadre de l’exécution de ses

247
Voy. Annexe II Code CIMA.
248
Elle a été créée par le Décret n°88-528 du 29 décembre 1988.

106
attributions, elle subit l’influence des dispositions prescrites à l’annexe II du traité de la
CIMA qui énonce l’attribution des Directions Nationales des Assurances.

2) La commission régionale de contrôle des assurances (CRCA)

177. La CRCA mérite une attention particulière dans la mesure où elle constitue la pièce
maitresse de l’assainissement du marché de la zone CIMA. De par ses compétences elle
s’identifie à la commission de contrôle des assurances françaises instituée par la reforme
française du 31 décembre 1989. Pour rappel, le domaine de prédilection par excellence de
cette commission est la régulation du secteur. C’est d’ailleurs ce qui lui donne son
importance. Une étude de la Commission nécessite que l’on s’attarde sur ses membres (a),
avant de porter un intérêt à son fonctionnement (b)

a) Les membres constituant la Commission

178. Placée sous l’autorité du conseil des ministres, onze membres constituent la CRCA.
En sa qualité de supérieur hiérarchique, le conseil des ministres nomme neuf des onze
membres de la commission ayant voix délibérative. Alors que six sont des représentants des
directions nationales des assurances, trois sont nommés pour leur expérience notoire en
matière des assurances. Il s’agit :

- d’un jurisconsulte ayant une expérience en matière d’assurance nommé par le


conseil ;

- d’une personnalité ayant exercé des responsabilités dans le secteur des


assurances, choisie pour son expérience du marché africain ;

- d’une personnalité ayant acquis une expérience des problèmes du contrôle des
assurances en Afrique dans le cadre de l’aide technique fournie par les Etats
tiers ou organisations internationales, nommée par le conseil

Sont aussi membres de la commission : le directeur général de la CICA-RE ainsi qu’une


personnalité qualifiée dans le domaine financier désignée d’un commun accord par le

107
gouverneur de la banque des Etats de l’Afrique centrale (BEAC) et celui de la banque centrale
des Etats de l’Afrique de l’Ouest (BCEAO).

Le mandat de ces membres est de trois ans renouvelable. Pour ce qui est des représentants des
directions nationales des assurances, le renouvellement se fait par rotation. Le président est
nommé par le conseil parmi les personnes que nous venons de désigner.

Siègent es qualité à la commission sans voix délibérative :

- le président de la fédération des sociétés d’assurances de droit national africain


(FANAF)

- le secrétaire général de la conférence assure le secrétariat de la commission ;

- le directeur général de l’Institut International des Assurances (IIA)

- et un représentant du ministre chargé des assurances dans l’Etat membre où


opère chaque société faisant l’objet d’une procédure disciplinaire ou sollicitant
un octroi d’agrément.

179. Dans le cadre de sa mission de contrôle, la commission dispose d’un corps de


commissaires contrôleurs chargé d’effectuer le contrôle des sociétés sur pièces et sur place. Ils
sont recrutés sur concours, et formés à leur tâche avec l’assistance de l’Autorité de Contrôle
des Assurances et des Mutuelles de France (ACAM)249

L’indépendance des contrôleurs à l’égard des compagnies et Etats membres est reconnue par
le Code CIMA qui dispose que « dans l’exercice de leur fonction, les membres de la
commission ne sollicitent ni n’acceptent d’instructions d’aucun gouvernement ni d’aucun
organisme »250.

Une obligation en matière de secret professionnel incombe à la fois aux membres sans voix
délibérative et aux membres avec voix délibérative. Cependant, l’obligation peut être levée à
l’égard d’une autorité judiciaire agissant dans le cadre d’une procédure judiciaire251. Quant à
l’obligation de loyauté, elle pèse uniquement sur les membres ayant voix délibérative. Ceux-

249
V. M. ZIGUELE, op. cit.,
250
V. art. 319, Al.2, du Code CIMA.
251
Art 5 in fine des statuts de la Commission

108
ci doivent s’abstenir de tout acte incompatible avec les devoirs d’honnêteté et de délicatesse
attachés à l’exercice de leur fonction252.

Avant leur entrée en fonction, les membres de la commission prêtent serment. Le conseil
reçoit le serment du président. Celui-ci reçoit le serment écrit des autres membres de la
Commission. Sur le plan formel, les actes sont enregistrés par le Secrétariat Général253.

La commission se réunit chaque fois qu’il est nécessaire et au moins deux fois par an sur
convocation de son président, soit à l’initiative de celui-ci, soit à la demande du tiers de ses
membres. Elle ne peut siéger que si neuf des membres la composant sont présents ou
représentés par leur suppléant. Le président arrête sur proposition du secrétaire général,
l’ordre du jour des réunions en y incluant le cas échéant les matières énoncées dans la
demande de convocation de la commission.

Le mandat des membres de la CRCA ne siégeant pas ès qualité est de trois ans ; il est
renouvelable. Celui des représentants des directions nationales des assurances est
renouvelable par rotation254.

Selon l’article 26 du traité : « En dehors des renouvellements réguliers, et des décès, le


mandat des membres de la Commission prend fin par la démission volontaire ou d’office ».
En outre, tout membre ayant manqué à ses obligations peut être déclaré démissionnaire par le
Conseil des ministres255.

b) Le fonctionnement de la CRCA

180. Dans sa mission de régulation, la commission est chargée du contrôle des sociétés
d’assurance, elle assure la surveillance générale et concourt à l’organisation des marchés
nationaux d’assurance.

252
En ce sens, l’art 4 du statut de la commission, dans un but préventif refuse la qualité de membre aux
personnes frappées d’interdiction résultant d’une décision de justice, de diriger d’administrer ou de gérer une
société, un organisme ou une administration d’assurance, ainsi qu’une entreprise commerciale, industrielle ou
artisanale sur le territoire d’un Etat membre.
253
Voir notamment article 9 du statut de la Commission.
254
Art.24 du Traité CIMA.
255
V. art 27, Traité CIMA.

109
Le contrôle peut s’effectuer à titre préventif ou curatif. Le contrôle préventif se traduit par
l’avis conforme de la CRCA qui conditionne l’octroi d’agrément. Cette solution est la même
en matière bancaire où l’agrément des établissements de crédit est subordonné à l’avis
conforme de la Commission bancaire de l’Afrique centrale (COBAC). Le contrôle curatif
quant à lui, est un contrôle permanent qui intervient tout au long de l’existence de la
compagnie. Celui-ci implique l’existence d’une certaine liberté dont l’exercice est surveillé à
postériori. C’est dire que le contrôleur ne peut se borner qu’à rechercher les failles de la
société d’assurance. Il a aussi pour mission de veiller à la survie de la compagnie dans
l’intérêt général256.

Le contrôle peut revêtir deux aspects : il peut être sur pièces ou sur place. Il s’agit en réalité
du contrôle financier qui porte sur les engagements règlementés des compagnies. En effet, les
engagements des assureurs envers les assurés sont garantis par les « provisions techniques »
dont la représentation à l’actif du bilan ne peut être faite que par des « placements
règlementés ».

181. En somme, il est à relever que la CRCA est un organe incontournable du dispositif de
la CIMA. C’est d’ailleurs pour cette raison qu’elle attache beaucoup d’importance au choix de
ses membres qui doivent être hautement qualifiés. Par ailleurs, des moyens suffisants sont mis
à leur disposition pour mener à bien leur mission dont les réalisations sont globalement
satisfaisantes257.

B- La direction de contrôle des assurances en Mauritanie

182. Quand bien même on dénote des lacunes dans le contrôle, des réformes sont
introduites et prévoient des dispositions supplémentaires. Ces modifications portent sur les
détails techniques, la redéfinition du rôle de la Commission de contrôle des assurances,
l'adaptation de l'organisation de l'expertise juridique. La première258 forme de la commission
de contrôle des assurances était instituée avec une composition de membres ayant voix
délibérative et des membres ayant seulement voix consultative.

256
A. YOKA-GALLOY, mesures d’assainissement des marchés d’assurances et efficacité des contrôles dans la
zone CIMA. Mémoire DES-A 1998 p. 54, cité par E. TCHOMTE op. cit.,
257
V. infra n° 733.
258
Voy. art 318 CAM 1993.

110
Les membres ayant voix délibérative sont :

- le Directeur représentant le Ministre chargé du contrôle des assurances ;

- trois personnalités ayant exercé des fonctions de direction générale ou de hautes


fonctions de direction de sociétés d'assurance en Mauritanie, choisie en fonction de
leur expérience et n'étant plus impliqués dans l'activité des entreprises contrôlées;

- un magistrat siégeant dans les juridictions spéciales d'assurance ;

- un juriste de haut niveau ayant acquis une réputation en matière d’assurance ou, le cas
échéant, étranger ayant acquis une réputation en matière d’assurance ;

- un représentant de la Banque Centrale de Mauritanie ;

Les membres ayant voix consultative sont :

- un représentant des experts judiciaires d'assurance ;

- le président en exercice du comité technique des sociétés d'assurance ;

- un représentant des avocats et un représentant des structures syndicales chargés de


1'expression des intérêts des assurés. Depuis 2007 à l’article 318 du CAM relatif

Une modification a été apportée l’organisation de la commission de contrôle. L’article 318


nouveau du CAM dispose : « Il est institué une Commission Consultative des Assurances
composée de spécialistes des questions d’assurance dont le rôle est d’émettre les avis requis
par le Ministre de tutelle des Assurances notamment dans les matières énumérées à l’article
338 »

Aujourd’hui, cette Commission est composée de :

- du Directeur du Contrôle des assurances ;

- d’un représentant du Ministère de la Justice ;

- d’un représentant du Ministère des Finances ;

- d’un représentant de la Banque Centrale de Mauritanie ;

- d’un représentant de la Fédération des Assureurs de Mauritanie259 ;

259
La Fédération nationale des assureurs mauritaniens (FNAM) a été créée en 2006. Cependant elle mais n’a pas
d’activité à cause du manque de confiance entre compagnies, de la concurrence malsaine, de l’opacité, et du
manque de professionnalisme de certaines compagnies. Une association professionnelle forte aurait cependant de
nombreux avantages pour le secteur (représentation des intérêts du secteur, promotion du secteur, etc.). Voy.

111
- d’un représentant des assurés ;

- bâtonnier de l’ordre des avocats ou son représentant.

183. C’est le Ministère de tutelle du secteur des Assurances à savoir : le ministère du


commerce où se trouve aussi le siège de la commission qui définit et organise les modalités
du contrôle sur pièces et sur place des entreprises d’assurances par les commissaires
contrôleurs. Il définit, en particulier, les formulaires et états statistiques et comptables que les
entreprises doivent lui remettre à date fixe, pour permettre aux commissaires contrôleurs
d’évaluer leur solidité financière respective.260 Les contrôles peuvent s’effectuer au moins une
fois par an auprès de chaque entreprise d’assurance. Il s’agit des opérations de contrôle sur
pièces et sur places261 définies par le directeur du Contrôle des Assurances. Des contrôles
inopinés peuvent être effectués à tout moment sur demande du Ministre de Tutelle du secteur
des Assurances. La Direction du Contrôle des Assurances a aussi la possibilité de se faire
communiquer toute information et communication de tout document nécessaire à l’exercice
de sa mission et de celle des commissaires contrôleurs. Le Ministre de tutelle du secteur des
assurances doit consulter la commission consultative des assurances avant de prendre les
décisions concernant :

➢l’octroi ou le retrait d’agrément d’une entreprise d’assurance ;

➢le transfert de portefeuille de contrats, soit à la demande d’une entreprise, soit pour
sanction ;

➢la désignation d’un administrateur provisoire après mise à l’écart des dirigeants
statutaires de l’entreprise ;

➢la mise en liquidation d’une entreprise d’assurance ;

➢la modification du capital minimum exigé des sociétés d’assurances.

184. La Commission doit aussi être consultée sur tous les projets de lois, de décrets et
d’arrêtés dont l’adoption modifie la législation préexistante.

document relatif à la stratégie et au plan d’actions pour le développement du secteur financier en République
Islamique de Mauritanie, p.19.
260
Article 325 CAM (Nouveau) relatif à l’organisation du Contrôle.
261
Les contrôles sur pièces sont limités aux tarifs auto et le contrôle financier est limité aux situations critiques.
Voy. Notamment, document relatif à la stratégie et au plan d’actions pour le développement du secteur financier
en République Islamique de Mauritanie, p.19.

112
La Commission peut se saisir de toutes questions de sa compétence pour adresser des
recommandations au Ministre de Tutelle du secteur des Assurances dans le but d’améliorer le
fonctionnement du marché et les services rendus aux assurés. Théoriquement262 des sanctions
sont prévues en cas de manquement à certaines obligations ou missions des assureurs. Quand
il constate la non-observation de la réglementation par une entreprise d’assurance ou un
comportement mettant en péril l’exécution des engagements contractés envers les assurés, le
Ministre de Tutelle du secteur des Assurances, enjoints celle ci de prendre les mesures de
redressement qu’il fixe sur rapport du Directeur du Contrôle des Assurances. Le Ministre peut
notamment demander l’établissement d’un plan de redressement, pour lequel le cas échéant
l’avis de la commission consultative sera requis. En cas de non réalisation de mesures de
redressement fixées, le Ministre, après mise en demeure des dirigeants de l’entreprise
d’assurance de présenter leurs observations dans un délai déterminé peut :

➢ dresser des mises en garde et avertissement ;

➢ interdire la réalisation de certaines opérations ou investissements et prononcer toute


autre limitation de l’activité ;

➢ suspendre temporairement un ou plusieurs dirigeants et exiger leur remplacement ;

➢ prononcer des sanctions pécuniaires en fonction de la gravité des manquements sous


forme d’astreinte ou d’amende ;

➢ procéder au transfert d’office de tout ou partie du portefeuille de contrats ;

➢ désigner un administrateur provisoire pour diriger l’entreprise ;

➢ prononcer le retrait d’agrément total ou partiel de l’entreprise pour effectuer des


opérations d’assurances.

185. En guise de solution au problème de contrôle des assurances en Mauritanie, deux


options ont été considérées : il s’agit soit d’octroyer la responsabilité du contrôle à la Banque
Centrale de Mauritanie (BCM) qui a une longue expérience dans la supervision d’institutions
financières263, ou mettre la Commission sous la tutelle exclusive du Ministère des Finances.

262
Il n’existe pas de trace de sanction, encore moins de retrait d’agrément depuis la création de la direction, et
pourtant, des manquements existent.
263
La BCM a procédé en 2010 au retrait de six agréments. Une décision considérée comme un marqueur positif
de l’efficience de la BCM dans son rôle de supervision du secteur. D’autre part la BCM porte atteinte à sa
crédibilité en prenant part à la gouvernance de l’agence de promotion des Caisses populaires d’Epargne et de
Crédit (PROCAPEC) par sa participation au Conseil d’Orientation.

113
Une étude sera nécessaire pour déterminer les avantages et inconvénients de chacune des deux
options. Des ressources humaines et matérielles devront être affectées à la nouvelle autorité
de contrôle. L’établissement d’une supervision solide est une priorité. Quant au contrôle des
compagnies lui-même, il se concentrera sur la mise à niveau de celles-ci et impliquera, au
départ, un audit de chacune d’entre elles.264

Au final, force est de constater que le contrôle du secteur de l’assurance par un organe
autonome est incontournable pour la surveillance, la régulation et l’assainissement de celui-ci.
Si les dénominations de l’organe de régulation varient, l’objectif demeure le même : le
contrôle.

186. Pour la Mauritanie on parlera plus de supervision que de contrôle du secteur des
assurances. En effet, des anomalies sont à déplorer avec des conséquences pouvant être
néfastes pour le secteur en question. Il s’agit en réalité de mission de contrôle non accomplie
faute d’une capacité de financement limitée. A cela, on peut ajouter les lacunes du cadre
réglementaire qui ne fait pas du contrôle des assurances une activité incontournable. Par
ailleurs, le manque de compétences spécialisées en matière de contrôle nuit au développement
et à la crédibilité de l’activité.

187. Dans le contexte de la CIMA, il est à relever que la surveillance est double car
effectuée au niveau national par chaque Etat membre et zonale par la CRCA qui est une
Commission incontournable du dispositif de la CIMA. Pour en arriver là, la CRCA mise
beaucoup sur la haute compétence de ses membres. Aussi, pour garantir la rigueur et le
sérieux, des moyens suffisants sont mis à la disposition pour mener à bien leur mission dont
les réalisations sont globalement satisfaisantes, surtout en matière de répression265.

188. C’est à partir d’une recherche de marché unique fiable qu’à été instituée la CRCA.
Elle constitue une entité non négligeable de la Conférence Interafricaine des marchés
d’assurance CIMA (paragraphe II) qui œuvre depuis plusieurs décennies au développement
du secteur de l’assurance dans ses pays membres.

264
Voir Document relatif à la stratégie et au plan d’actions pour le développement du secteur financier en
République Islamique de Mauritanie, p. 20.
265
V. infra, n° 732 et suivants.

114
Paragraphe II : La Conférence Interafricaine des Marchés d’Assurances (CIMA)

189. Une entente dans un but ambitieux de perfectionnement de leur marché a amené les
gouvernements des Etats membres à la signature le 20 septembre 1990, toujours à Paris, de la
troisième convention de la CICA dite Convention pour la Promotion et le Développement de
l’Industrie des Assurances (CPDIA). Cette CPDIA a rapidement cédé la place au Traité
instituant une Organisation Intégrée de l’Industrie des Assurances dans les Etats africains
avec comme organisme communautaire la Conférence Interafricaine des Marchés
d’Assurances en abrégé CIMA signé le 10 juillet 1992 à Yaoundé par les gouvernements des
Etats membres suivants : Bénin, Burkina, Cameroun, Centrafrique, Comores, Côte d’Ivoire,
Congo, Gabon, Guinée Equatoriale, Mali, Niger, Sénégal, Tchad et Togo. Des quatorze Etats
signataires, seules les Comores n’ont pas encore ratifié le Traité266. La Guinée Bissau a adhéré
à la CIMA le 15 avril 2002.

190. Pour aborder la CIMA, nous allons procéder à sa présentation (A), Ensuite nous feront
le point sur le bilan d’un système d’indemnisation uniforme qu’elle a mis en place (B).

A- Présentation de la CIMA

191. Les hautes parties contractantes instituent entre elles une organisation intégrée de
l’industrie des assurances dans les Etats africains dénommée Conférence Interafricaine des
Marchés d'Assurances, en abrégé CIMA. C’est une autorité supranationale de l'industrie des
assurances des quatorze Etats africains membres de la zone franc, chargée notamment de
veiller au respect, par les sociétés d'assurances et de capitalisation, et les sociétés d'assurances
mutuelles régies par le Code des assurances, des dispositions réglementaires qui leur sont
applicables, ainsi que des engagements contractuels qui les lient aux assurés et aux
sociétaires.

Un principe directeur nouveau caractérise la CIMA : transformer les marchés

266
Ce traité met en place une loi unique, appelée « Code des assurances CIMA », applicable dans l'ensemble des
pays de la zone, en vigueur depuis le 15 février 1995.
Elle se substitue aux lois nationales anciennes, éparses et inadaptées, résultant pour l'essentiel de la transposition
des lois françaises d'avant 1960.

115
d’assurance en un grand marché disposant de règles et d’une autorité commune tendant vers
un meilleur équilibre des mécanismes institutionnels en établissant entre eux une organisation
commune dotée de compétences et d’organes propres agissant dans la limite des pouvoirs qui
leur sont conférés par le Traité267. Pour assurer la continuité des réalisations des organisations
précédentes, CICA en particulier, l’article 63 alinéa 2 du Traité prévoit que : « Le Secrétariat
Général de la Conférence bénéficie des droits et assure les charges et obligations
précédemment dévolues à la Conférence Internationale des Contrôles d'Assurances des États
Africains (CICA). Il acquiert la propriété de tous les biens de cette organisation ».

192. La volonté d’intégration s’affirme désormais selon l’article 1er du traité avec plus de
vigueur dans les objectifs principaux que s’est fixée la Conférence, car elle cherche
dorénavant essentiellement à :

- assurer la formation de cadres de l’assurance ;

- accompagner le développement du secteur ;

- harmoniser les politiques en matière d’assurances ;

- promotion de la coopération.

193. La Conférence ainsi que les institutions autonomes ont leur propre personnalité
juridique. Elles bénéficient toutes dans les Etats membres, des droits, immunités et privilèges
octroyés aux organisations internationales. Leurs sièges sont établis dans les capitales des
États membres ayant signé un accord de siège avec chacune d'entre elles268.

En plus du traité CIMA, il existe des textes législatifs et réglementaires qui en sont les
annexes :

- Règlement Intérieur du Comité des Experts des Assurances ;


- Statuts de la Commission Régionale de Contrôle des Assurances ;
- Statuts du Secrétariat Général de la CIMA ;
- Statuts du personnel du Secrétariat Général de la CIMA ;
- Règlement Financier et Comptable de la CIMA ;
- Règlement du Concours de recrutement des Commissaires Contrôleurs des assurances.
194. La CIMA dispose de plusieurs organes que nous allons analyser tour à tour. Il s’agit :

267
A-M. ASSI-ESSO, J. ISSA-SAYEGH et J. LOHOUES-OBLE, CIMA Droit des assurances, op. cit., p. 13.
268
V. art 58 du traité CIMA.

116
du Conseil des Ministres des Assurances CIMA (1), De la Commission Régionale de Contrôle
des Assurances (CRCA) et le corps des contrôleurs269, du Secrétariat Général de la CIMA (2),
du comité des experts (3).

1) Le Conseil des Ministres

195. Le Conseil des ministres est l’organe directeur de la CIMA. C’est dans les articles 6 à
15 du Traité CIMA que sont définis sa composition, sa compétence, ainsi que son mode de
fonctionnement. Il est composé des ministres chargés du secteur des assurances dans les Etats
membres, chaque Etat membre étant représenté par un membre270. Il a pour mission principale
la réalisation des objectifs de la CIMA. D’ailleurs, c’est ce qui lui permet d’être investi des
pouvoirs les plus larges. A cette fin, il adopte la législation unique des assurances, définit la
politique de la Conférence en matière de formation dans le secteur des assurances, veille à
l'application de la législation unique par les États membres et à l'exécution par eux des
obligations découlant du Traité271. Il statue sur les manquements d’un Etat à ses obligations et
peut par conséquent mettre celui-ci en demeure de rétablir le bon ordre juridique272.

196. La présidence du Conseil des ministres est assurée par tour de rôle par chaque Etat
signataire, pendant un an. En cas d'absence ou d'empêchement du président en exercice lors
d'une réunion du Conseil, la présidence est exercée par le doyen d'âge des membres présents.
Le Conseil des ministres se réunit et délibère valablement si les trois quarts au moins de ses
membres sont présents ou représentés273. L’article 11 du Traitre est consacré à la périodicité
des réunions. Il dispose : « Le Conseil se réunit deux fois par an en session ordinaire en
marge de la réunion des Ministres de la zone franc. Il se réunit en session extraordinaire sur
convocation de son Président à l'initiative de celui-ci ou à la demande d'au moins deux de ses
membres. Dans l'intervalle des réunions du Conseil, une procédure écrite de décision peut

269
V. infra, n° 179.
270
V. art 8 du Traité CIMA.
271
Art.6 du Traité CIMA. Depuis son entrée en vigueur le 15 Janvier 1995, le Code des assurances des États
membres de la CIMA a été modifié à plusieurs reprises par le Conseil des Ministres. La dernière en date est
effectuée par le Règlement N° 005/CIMA /PCMA/CE/2016 modifiant et complétant les dispositions de l’article
308 du Code des Assurances, portant Assurance Directe à l’Etranger.
272
Art. 46, al 3 du Traité CIMA.
273
Art.9 du Traité CIMA.

117
être mise en œuvre par son président à l'initiative de celui-ci ou à la demande d'au moins
deux États membres. La procédure écrite ne peut pas être mise en œuvre pour l'adoption ou la
modification de la législation unique des assurances, pour l'exercice du recours contre les
décisions de la Commission, pour l'application des dispositions de l'article 7 du présent
Traité ». Le contrôle de l’assurance dans les Etats membres est assuré par un second organe,
la CRCA.

2) Le Secrétariat Général de la CIMA.

197. Selon l’article 31 du traité CIMA, le Secrétariat Général concourt aussi à la réalisation
des objectifs du Traité CIMA. Il est composé du Secrétaire général et de deux Secrétaires
généraux adjoints qui sont désignés par le Conseil des ministres pour une durée de cinq ans
renouvelables une fois274. Leur compétence en matière d’assurance doit être justifiée du fait
de leur expérience notoire dans des postes de responsabilité en matière d’assurance 275. Les
Secrétaires généraux adjoints peuvent recevoir délégation du pouvoir de secrétaire général276.

L’article 31 auquel nous venons de faire référence fait du Secrétariat général, la cheville
ouvrière de la CIMA puisque c’est par lui que transitent toutes les opérations,
correspondances et la documentation de cette organisation277.

274
En dehors des renouvellements réguliers et décès éventuels, la fonction des Secrétaires généraux peuvent
prendre fin par leur démission ou encore par leur révocation, par le Conseil des ministres, pour faute grave ou
pour non-respect des conditions d’exercice de leur profession. V. art 37 du Traité CIMA.
275
V. art. 32 du Traité CIMA.
276
Art.36 du Traité CIMA.
277
Il accomplit plusieurs missions :
- préparation, exécution et suivi des travaux du Conseil des ministres ;
- suggestion des propositions tendant modifier ou compléter la législation en matière d’assurance ;
- transmission au Conseil des ministres des différents rapports et dossiers concernant le secteur des
assurances . Voir A-M. ASSI-ESSO, J. ISSA-SAYEGH et J. LOHOUES-OBLE, op. cit., p. 23.

118
3) Le Comité des experts

198. Le traité CIMA ne s’attarde pas sur le Comité des experts. En effet, seul l’article 15 du
traité lui est consacré. Il dispose en son premier alinéa que : « Dans le cadre de l'instruction
des propositions et des dossiers qui seront soumis au Conseil, le Secrétaire Général de la
Conférence prend l'avis technique d'un comité des experts qui a en outre pour tâche de
préparer les travaux du Conseil et de donner l'avis prévu à l'article 50 alinéa 1 du présent
Traité ». Conformément à l’alinéa 2 de l’art 15, le comité d’expert est composé :

- un expert national du secteur des assurances désigné par chaque membre du Conseil ;

- le directeur de l’Institut Internationale des Assurances de Yaoundé ;

- le directeur générale de la CICA- RE

- deux représentants de la FANAF

199. D’une manière générale, on peut assimiler le Comité des experts, à un organe de
consultation, ou de conseil qui donne son avis avant présentation de certains projets au
Conseil des ministres.

B- Le bilan d’un système d’indemnisation uniforme.

200. Le bilan se définissant comme une opération destinée à dresser l’actif et le passif
d’une entreprise ou le résultat d’une opération quelconque, cet exercice se prête parfaitement
à l’œuvre de la Conférence Interafricaine des Marchés d’assurance. La CIMA existe depuis
vingt-cinq ans et l’uniformisation du droit des assurances qu’elle apporte présente
d’indéniables avantages. On peut d’emblée noter que par l'encadrement du principe de la
réparation intégrale qu'il a institué, par l’instauration d’une barémisation, le Code CIMA a pu
mettre un terme aux abus constatés devant les juridictions et qui ont failli porter un coup fatal
à l'industrie des assurances dans les Etats membres compte tenu de l'importance de
l'automobile dans le portefeuille des compagnies d'assurances.

On peut rajouter aussi que l’uniformisation a permis de limiter pour ne pas dire mettre un
terme aux distorsions juridiques qui peuvent être à l’origine de déséquilibres économiques
importants en matière d’indemnisation d’un pays à l’autre.

119
201. Par ailleurs, avec l’avènement du Code CIMA disparaissent de manière progressive
les conflits de lois en matière de droit de réparation et les conséquences fâcheuses de leur
solution (lenteur des procédures pour résoudre la question préalable de la loi compétente pour
trancher un litige ; choix par le juge d’une législation non prévue par les parties ou
défavorable à leurs intérêts communs) ; en effet, dans la mesure où la loi des affaires est
identique d’un pays à l’autre de la zone intégrée, il est indifférent que ce soit telle ou telle loi
nationale qui soit finalement retenue par le juge pour l’appliquer au litige puisqu’il s’agit de la
même loi dans tout l’espace CIMA.

202. Pour des raisons d’ordre économique, une certaine rigueur était indispensable pour la
conception du système d’indemnisation des victimes d’accidents de la circulation dans la zone
CIMA. Le droit qui en a été issu met en avant une réparation harmonisée. Désormais, A la
place de la réparation intégrale appliquée jusque-là, le système se fonde désormais sur un
barème.

En choisissant la légalisation d’un barème, la loi CIMA vise le respect d’une méthodologie de
réparation du dommage corporel et par voie de conséquence, l’harmonisation de
l’indemnisation. En effet, les rédacteurs ont voulu rationnaliser les indemnités278.

L’évaluation au cas par cas devient inopérante. Le droit uniforme porte expressément atteinte
à la souveraineté du juge279.

203. Comparée aux années CICA, le marché de l’assurance en Afrique se porte


relativement bien. Dans l’ensemble le chiffre d’affaires est en progression même si les
primes sont nettement en deçà de ce qu’elles auraient pu être. Compte tenu du faible niveau
de pénétration de l’assurance dans les marchés de la FANAF, l’assemblée recommande aux
autorités la promulgation d’une loi sur les assurances obligatoires accordant une plus grande
sécurité aux personnes et aux biens et permettant ainsi un accroissement progressif du taux
de pénétration de l’assurance. De la mise en place des mesures incitatives pour encourager
l’assurance vie, notamment en défiscalisant les cotisations280.

204. La CIMA, très largement inspirée des textes français, a connu des modifications pour

278
L’application impérative du barème garantirait « la certitude de l’égalité devant la loi » V. M- M. FIUME,
op. cit., p.76.
279
L’article 239 in fine dispose en ce sens que : « Le juge fixe l'indemnité suivant les modalités fixées aux
articles 258 et suivants ».
280
Discours du Président de l’ASSAR à l’ouverture de la 36ème assemblée générale de la FANAF Kigali Le 20
janvier 2012.

120
s’adapter non seulement au développement du marché africain mais également aux réalités
de nouveaux membres (Guinée-Bissau) qui a fait son entrée le 14 avril 2002. Aujourd’hui, ce
traité est traduit en anglais et certains pays s’en inspirent pour leurs législations nationales.
Cependant, il ne demeure pas moins vrai qu’il est perfectible.

121
Conclusion du chapitre III

205. En fonction du pays colonisateur, l’Afrique est partagée entre le droit civil et la
common law. Dans les pays d’Afrique subsaharienne francophone, assimilés aux pays de la
zone CIMA (Conférence interafricaine des marchés de l’assurance) et FANAF (Fédérations
des sociétés d’assurance de droit national africaines), le droit des assurances est d’inspiration
française. Elles ont pour support la loi du 13 juillet 1930 et de la loi Badinter. Même si on
assiste à la mutation progressive des textes régissant les assurances dans la zone CIMA,
l’emprunte du droit français est présente. Les juristes mauritaniens qui sont en majorité
formés en France sont certes restés en conformité avec les préceptes religieux islamique en
matière d’assurances mais se sont inspirés du droit français.

Conclusion du titre I

206. D’une manière générale, l’étude que nous venons de faire a porté sur l’évolution du
concept traditionnel de l'assurance aux réalités d’une industrie d'assurance. Elle a mis en
évidence les difficultés de l’adoption par les pays africains de l’assurance telle que conçue
par les pays développés. Toujours est-il que pour arriver à la situation actuelle et surtout pour
ne pas se trouver en porte-à-faux par rapport aux réalités des sociétés africaines, un effort
d’assimilation a été nécessaire de la part des législateurs. Il s’agit de l’aménagement des
textes hérités du droit français et on en conclu que l'impact du droit français en Afrique est
énorme. On peut relever toutefois que la réglementation des sociétés d’assurances et celle
portant sur les contrats, par exemple, mérite d’être plus concise. En effet, pour plus
d’efficacité, elle peut être simplifiée pour ne retenir que les éléments essentiels. En la
matière, l’Afrique du Sud a réalisé un exploit, réussissant à adapter ses contrats d’assurance
au niveau d’instruction de sa population. A titre d’exemple, des contrats « prêts à l’emploi »,
remplis à l’aide d’une approche « cases à cocher » sont mis à la disposition des souscripteurs.
Une innovation bien réaliste qui devrait peut-être inspirer nos systèmes juridiques.

207. Depuis une vingtaine d’années, le droit et surtout la pratique de l’assurance sont en
évolution dans les pays africains. Ce sont les caractéristiques de l’industrie d’assurance au
Bénin et en Mauritanie qui nous permettrons d’en évaluer les avancées.

122
Titre II

L’évolution et les caractéristiques de l’industrie d’assurance au


Bénin et en Mauritanie.

208. Assez tôt, et dans plusieurs domaines, la Mauritanie et le Bénin vont manifester leur
désir de prendre leur destin en main. Cependant, en matière d’assurance juste après les
indépendances, n’était-il pas trop tôt pour passer à un marché monopoliste ?

L’apparition de l’assurance est considérée comme un phénomène relativement récent même


dans les pays développés. Dès lors, l’on peut comprendre que cette notion soit restée
longtemps inconnue dans des pays africains tels que le Bénin ou la Mauritanie, dans la mesure
où les facteurs économiques et sociaux qui sont à la base du développement de l’assurance
n’ont pas connu partout la même évolution. Au Bénin en l’occurrence, l’introduction de
l’assurance remonte à l’installation de succursales de compagnies d’assurances étrangères, au
cours des années 1960.

Les marchés béninois et mauritaniens ont considérablement évolué durant les périodes
ayant suivi les indépendances. De marchés d’agences étrangères, ils sont devenus des marchés
servis par des compagnies nationales d’assurances de droit local. Evinçant ainsi les premières
compagnies coloniales, ils deviendront plus tard des marchés libéraux.

209. Il faudra donc retracer le processus d’introduction de la notion d’assurance. Cela


commence par la naissance et l’évolution du secteur des assurances (Chapitre I). Ensuite il
serait intéressant de porter un regard sur la typologie et les caractéristiques des assurances à
travers les assurances de personnes (Chapitre II). D’un premier abord, il faut considérer que
les assurances de la personne couvrent les risques inhérents à la vie humaine et proposent un
ensemble complet de solutions adaptées à chaque situation. Certains contrats prévoient des
prestations en cas d’atteinte à l’intégrité physique de la personne : décès, invalidité
(assurances en cas de décès), d’autres permettent la constitution d’une épargne et le versement
de celle-ci sous forme de rente ou de capital si la personne assurée est en vie au terme du
contrat (assurances en cas de vie).

Une autre catégorie d’assurances regroupe à la fois des assurances de responsabilité

123
(responsabilité civile familiale, responsabilité civile du conducteur, responsabilité
professionnelle…) et des assurances de biens (assurance des biens meubles et immeubles, des
dommages causés au véhicule…). Ce sont, les assurances de responsabilité (Chapitre III) que
nous aborderons pour clore notre second titre.

124
Chapitre I : La naissance et l’évolution du secteur des assurances.

210. L'histoire moderne de l'assurance en Afrique a réellement débuté avec l'arrivée des
Européens et surtout l'expansion internationale du « marché de Londres », au XIXe siècle.
Pendant longtemps les contrats d'assurance proposés en Afrique auront été rédigés en
Europe : d’abord à Londres, puis progressivement à Paris à Lisbonne etc… Insuffisamment
ancrés dans les systèmes de gouvernement indigènes, inconnu des populations autochtones,
les contrats d’assurances visaient essentiellement les entreprises appartenant aux colons et à
leur personnel. A cette époque on ne pouvait pas parler d’une industrie d’assurances.

211. A la veille des indépendances, c'est-à-dire à partir de 1959, la Direction des


Assurances de France va organiser une série de rencontres (conférences, séminaires tables
rondes, stages) au profit des représentants des pays de la zone Franc. Ces rencontres ont eu
pour principal objectif la mise en place des premiers textes relatifs au secteur de l’assurance
en Afrique francophone.

212. Une fois un cadre législatif élaboré, l’aspect concret du processus d’introduction
consiste en la création des premières compagnies (Section I). L’autre aspect du processus
d’évolution des marchés concerne la libéralisation du secteur de l’assurance (Section II)

Section I : Les premières compagnies d’assurance

213. On nous rappelle que c’est d’abord les comptoirs implantés par des maisons de
commerce qui, en premier, effectuaient des opérations d’assurance. Avec le développement
des activités, les compagnies d’assurance étrangères se sont fait représenter sous forme
d’agences ou de succursale. En cette période, les dossiers à forte valeur ajouté ou d’une
grande importance étaient traités en Europe généralement au sein de sièges sociaux des
agences mandatés.

214. Cette partie de l’étude sera consacrée aux compagnies d’assurances de l’époque
coloniale (paragraphe I) et à la période des nationalisations (paragraphe II)

125
Paragraphe I : Les compagnies d’assurance de l’époque coloniale.

215. Durant la période coloniale, il a été établi qu’il existait déjà des compagnies
d’assurances européennes en Afrique. Cependant, Les premières compagnies d’assurance
installées dans les pays d’Afrique étaient forcément étrangères. La conséquence de
l'inexistence d'une industrie d'assurances réellement insérée dans l'économie nationale se
manifeste essentiellement par le transfert dans les pays respectifs des représentations
présentes des revenus mobilisés par l’activité. L’assurance en tant que système de protection
devait bien s’implanter pour protéger le patrimoine colonial. L’augmentation des échanges, le
développement du commerce entre les pays colonisateurs et les colonies exigeait la mise en
place urgence de compagnies d’assurances.

216. C’est pourquoi, au lendemain de l'indépendance du Bénin au 1er août 1960, on


dénombre près de vingt-deux Compagnies d'assurances étrangères (dix-sept compagnies
françaises, quatre Compagnies britanniques, et une Compagnie suisse) opéraient sur le marché
béninois par le biais d'Agences ou de succursales installées sur place.

Les souscriptions d’assurances étaient fournies essentiellement par quatre agences à savoir
l'Union des assurances de Paris, la SOGERCO, l'agence des assurances générales de France et
enfin l’agence Gaston Nègre.
A l'origine filiales de groupes français, les compagnies d'assurances sont comme les
autres des entreprises industrielles, commerciales ou de services installés au Dahomey. La
nationalisation par la suite des activités d'assurance a sonné le glas de ces sociétés et a donné
naissance à la SONAR qui a connu par la suite des problèmes de gestion.
217. En Mauritanie, pendant longtemps, le marché Mauritanien a été occupé par des
agences de sociétés européennes composées de quinze françaises et une britannique. Plusieurs
groupes sont représentés en Mauritanie à cette période. Il s’agissait essentiellement :

- de la foncière (entreprise Buhan de l’entreprise Teisere) ;

- des assurances Générales Paul Deville (Ets Lacombe) ;

- de la Compagnie Générale d'Assurances (Sté Mauritanienne J. Vincent) ;

- de la Concorde (SOAEM) ;

- Groupes des Mutuelles du Mans (UMIMA) à Nouadhibou.


Les tarifs des assurances automobiles au tiers s'élevaient à l’époque à :

126
- Pour les voitures de tourisme de trois à six chevaux 13.600 Fcfa /an (TTC) ;
- 7 à 10 chevaux fiscaux : 19.300 Fcfa/ an (TTC) ;
- pour les véhicules utilitaires de 11 à 14 chevaux fiscaux : 28.000 Fcfa/an (TTC) ;
- 15 à 23 chevaux fiscaux : 36.300 Fcfa/an (TTC)281
218. Au début des années 70, les politiques intérieures vont changer de cap en Afrique
donnant ainsi la prééminence à plus d'indépendance et de souveraineté nationale. Les Etats
africains nouvellement indépendants pensent trouver le salut dans les politiques de
nationalisation. Il s’en suit des vagues de nationalisation qui n’épargneront guère le secteur
des assurances. En effet, les premiers signes d’hostilité à l’encontre des sociétés étrangères se
sont manifestés au cours des décennies 60 et 70, mais leur point culminant se situe dans la
première moitié de la décennie 70282, avec des expropriations et des nationalisations d’actifs
étrangers en grand nombre.

Paragraphe II : Le temps des nationalisations

219. Dans aucun des États où a été institué un monopole étatique de l'assurance (Bénin,
Algérie, Mauritanie, Angola, Mozambique, République démocratique du Congo, Madagascar,
etc.), le marché de l'assurance ne s'est vraiment développé en faveur des populations qui ont le
plus besoin des garanties proposées par les assureurs. Ces monopoles d'État, non stimulés par
la concurrence et par la nécessité d'innover pour mieux servir les assurables, se sont trop
souvent transformés en administrations chargées d'encaisser les cotisations des assurances
obligatoires et très peu soucieuses d'honorer leurs engagements en matière de sinistres,
donnant ainsi au public une très mauvaise image des entreprises d'assurances. Certaines
sociétés d'État, surtout dans les pays où des concurrents du secteur privé restaient autorisés,
ont pourtant été dirigées par des professionnels compétents et soucieux d’exercer leur métier
de la meilleure façon, mais ont été empêchées de le faire par le manque de liberté dont ils
disposaient dans le placement des actifs représentatifs des provisions techniques. Celles-ci
devaient être placées strictement selon les directives des autorités publiques au mépris des

281
Source : étude de la commission des communautés européennes, Les conditions d’installation d’entreprises
industrielles dans les Etats africains et malgache associés, Volume 1 République Islamique de Mauritanie,
Décembre 1972 p. 90
L’année 1975 marque l’apogée de cette période, avec 83 cas d’expropriations dans 29 pays différents, selon
282

CNUCED - World Investment Report 1994: Transnational Corporations, Employment, and the Workplace;
United Nations Publications, New York, Geneva, p. 9

127
principes de répartition, de sécurité et de rendement, pourtant textuellement prévus dans le
Code des assurances. Ces malheureux assureurs, qui ne pouvaient refuser les ordres de ceux
qui les avaient nommés à leur poste, et qui étaient d'ailleurs leurs actionnaires et leurs
autorités de tutelle, ont dû placer leurs disponibilités en fonds d'État dont les intérêts n'ont pas
été régulièrement servis, voire dont le capital n'a pas toujours été remboursé, ou en prêts à des
banques d'investissement ou de développement rural qui ont fait faillite, ou encore en
investissements immobiliers imposés et sans rentabilité. En ce sens Jérôme YEATMAN se
souvient avoir audité une société d'assurances africaine, très sainement et professionnellement
gérée sur le plan technique, mais qui s'était lancée dans la construction d'un complexe
immobilier, destiné entre autres à abriter son siège social, dont le coût dépassait largement
non seulement les fonds propres, mais même la totalité des actifs représentatifs des provisions
techniques. Cette construction avait exigé la souscription d'emprunts très importants qui
laissaient la société en situation permanente de découvert bancaire, si bien que pour tout
règlement de sinistre, ou même pour tout paiement de salaire, cette société devait négocier un
nouveau découvert auprès de son banquier. Les dirigeants lui avaient expliqué que c'était
volontairement que le conseil d'administration avait dû se résoudre à décider cette
construction qui dépassait de beaucoup les nécessités de leur société car c'était le seul moyen
qu'il avait trouvé pour mettre fin aux prélèvements forcés de la part du chef de l'État de
l'époque, lequel considérant qu'une société d'État ne pouvait être que son bien personnel,
vidait le compte en banque de l'entreprise chaque fois qu'il avait besoin de ressources. Rendre
systématiquement négatif le compte bancaire avait été la seule parade trouvée pour éviter ces
pillages.283
220. Nous allons maintenant étudier le cas des deux premières sociétés d’état ayant été
créées à l’occasion des nationalisations survenues en Mauritanie avec la SMAR (A) et au
Bénin avec la SONAR (B).

283
Source : http://revue-risques.fr/revue/risques/html/Risques_71_0015.htm/$file/Risques_71_0015.html,
consulté le 12 septembre 2017.

128
A- La Société Mauritanienne d’assurance et de Réassurance (SMAR)

221. La Société Mauritanienne d’assurance et de réassurance (SMAR) a été créée par la loi
N° 74.160 du 27 juillet 1974. Elle répond à la volonté de mainmise de l’Etat mauritanien sur
l’industrie d’assurance. Sa création reste aussi dans le cadre de ce qu’appelaient les dirigeants
de l’époque, la reconquête de l’indépendance économique dont les premiers jalons furent la
création d’une monnaie nationale en 1973 et surtout en juillet 1972, la nationalisation de la
MIFERMA (Minerais de fer de Mauritanie) qui est devenue l’actuelle SNIM (Société
Nationale d’Industries Minières)

Dans le cas des nationalisations, il ne s’agissait pas de nationalisation comme ce fut le cas en
France en 1946 mais, la création d’un marché national des assurances avec dotation sur fonds
public284. Cette dotation initiale par l’Etat s’élève à cent millions d’UM libérés à 95%.
D’autre part, l’Etat s’engage à garantir les créances des tiers envers la SMAR contrairement à
la nationalisation en France qui ne s’est pas accompagnée de cette garantie.

Ainsi a débuté un monopole d’état sur toutes les opérations d’assurance et de réassurance.
Monopole institué par l’article 3 de la loi N° 74.160 du 27 juillet 1974 au profit de la SMAR.
Afin que celle-ci exerce aisément ce monopole, la loi lui accorda un certain nombre
d’avantages. D’une part, elle va l’exempter de tous les droits, perceptions et autres taxes285.
D’autre part, elle va rendre caducs tous les agréments accordés aux sociétés étrangères
d’assurance autorisées à exercer jusque-là en Mauritanie286. C’est dans le même temps, la
consécration par la loi du retrait de la Mauritanie de la CICA.

Contrairement à la situation précédent sa création où les sociétés étrangères autorisées à


exercer en Mauritanie étaient des sociétés de capitaux privées, la SMAR était une société à
capitaux publics comme en témoigne l’article premier de la loi N° 74.160 du 27 juillet 1974.

Grace à l’origine de ses capitaux287 la SMAR échappe à la loi française de 1867 régissant les
sociétés par action ainsi que celle de 1925 relative aux sociétés à responsabilité limitée, toutes
deux applicables en Mauritanie à cette période288.

284
Voir art. 1 de la loi 74.160 du 27/07/1974.
285
Art. 4 de la loi 74.160 du 27/07/1974.
286
Art.5 de la loi 74.160 du 27/07/1974.
287
Le capital de la SMAR appartenait à 100% à l'Etat (51% à la BCM et 49% au Trésor Public).

129
222. La SMAR a été régie pendant sept ans par la loi N°77.046 du 21 février 1977 fixant le
régime des établissements publics. Loi qui a été remplacée le 25 février 1984 par
l’ordonnance N°84.038 dont le domaine est beaucoup plus étendu puisqu’elle concernait aussi
bien les établissements publics que les sociétés d’économie mixte (S.E.M) ainsi que les
personnes morales privées bénéficiant du concours de l’Etat.

223. L’ordonnance N° 84.038 dans son titre premier relatif aux établissements publics
distingue trois types d’établissements publics289 :

- d’une part, les établissements publics à caractère administratif (E.P.A) dont l’activité,
le mode de gestion et, les rapports avec les tiers sont analogues à ceux des services
publics non personnalisés.
- d’autre part, les établissements à caractère industriel et commercial (E.P.I.C) dont
l’activité, le mode de gestion, et, les relations avec les tiers sont similaires à ceux des
entreprises privées.
- enfin, les établissements publics à caractère professionnel (E.P.P) chargées de la
représentation et de l’organisation d’une profession ou d’un groupe de professions.
La SMAR pour sa part appartenait à la deuxième catégorie d’établissement à savoirs les
entreprises publiques à caractère industriel et commercial.

Pendant plus de dix-huit ans, le SMAR a bénéficié du monopole sur les opérations
d'assurance sur le territoire mauritanien.

224. Soumis à une gestion frauduleuse et abusive, la SMAR finit par rendre l'âme sous
l'effet conjugué des décisions uniques des juridictions compétentes et des pratiques
apocryphes notamment dans le secteur de la pêche où les gérants des armements ont
transformé les assurances corps de navires de pêche en système de préfinancement de leurs
déficits de gestion. Pour preuve, de février à octobre 1991, il y eût dix pertes totales de
navires de pêche soit par incendie soit par naufrage dans des conditions rocambolesques ou en
tout cas jamais élucidées. Sous la pression des institutions de Bretton Woods pendant la
période d'ajustement structurel. Le programme d’ajustement structurel (PAS) en Mauritanie
couvre la période 1985-1995 et il est intitulé : Programme de « Réforme économique ». Les
PAS ont eu pour objectif de rétablir les équilibres financiers, pour permettre une reprise de la

288
V. L-K. NGAIDE, op.cit., p.1.
289
Voir art. 3 de l’ordonnance N°84.038.

130
croissance économique290. La notion de programme d’ajustement structurel, appliquée aux
pays sous-développés, est étroitement liée à la spirale infernale de l’endettement international,
ainsi qu'à la crise de paiement qui l’a suivie au début des années 1980. Limité, au départ, à
certains pays de l’Amérique latine, le phénomène de cessation de paiement s'était généralisé
pour toucher plusieurs pays producteurs de pétrole, notamment après le contrechoc pétrolier
de 1986. Face à l’ampleur du phénomène d’insolvabilité, les bailleurs de fonds internationaux,
notamment le FMI et la Banque Mondiale, avaient décidé d’exiger des pays emprunteurs de
s’engager à prendre des mesures économiques et financières radicales, pour parvenir à
dégager des excédents financiers et rembourser leur dette extérieure. Ces mesures étaient
consignées dans des programmes annuels ou pluriannuels appelés « Plans ou programmes
d’Ajustement Structurel »291.

Pour réaliser les objectifs fixés par les PAS, l'Etat accepta de se retirer du secteur des
assurances et de le confier à terme au secteur privé. En Février 1991, le monopole résultant de
la loi 74.160 du 27/07/74 portant création de la SMAR fût dès lors abrogée.

Par ailleurs, la non-conformité de l’assurance automobile en l’occurrence à l’Islam


justifie les écarts et abus de la part des médecins, policiers, gendarmes, experts, juges avocats
et quasiment de l’ensemble du personnel de la SMAR qui coopèrent afin de soutirer à la
société ses réserves. Ce qui fait dire à Mohamed FALL OULD BAH que : « la liquidation de
la SMAR mériterait à elle seule un livre »292

Il a fallu attendre encore quelques années avant de voir le marché s'ouvrir à la concurrence.
En Décembre 1993, la SMAR a d’abord été liquidée, La Nationale d’assurance et de
réassurance a pris le relais à parti du 01/01/94 sous la forme de société nationale comme sa
devancière avant d'être privatisée partiellement au début de 1995 puisque le groupe dit Etat

290
Dès les années 80, la majorité des États africains ont eu recours à des politiques dites d’ajustement structurel.
L’objectif de ces dernières est de résoudre le double déficit des comptes macroéconomiques et micro-financiers,
en assurant principalement l’équilibre de la balance de paiements, l’égalité entre l’offre et la demande de
monnaie et la réduction des déficits publics. En effet, En 1993, sur 88 Etats membres des Nations Unies qui
avaient conclu des accords d’ajustement structurel avec les institutions financières internationales, on pouvait y
compter 41 Etats africains, soit près de la moitié. Voir en ce sens, le Rapport de la Conférence générale de
l’UNESCO sur les effets des programmes d’ajustement structurel sur l’éducation et la formation. Conférence
générale, 28ème session, Paris, 25/08/1995, p. 2.
291
V. M. OUCHICHI, L’obstacle politique aux reforme économiques en Algérie, Thèse, Université Lyon 2
2011.
292
Voy. M-F O. BAH, Les systèmes financiers islamiques, Approche anthropologique et historique, Karthala,
2011, p.264.

131
(SNIM, Air Mauritanie, SONELEC, PANPA et Port Autonome de Nouadhibou) détenait 34%
du capital.

225. En somme, La SMAR fut privatisée alors qu’elle se trouvait en situation de faillite
suite aux fraudes et malversations de tout genre. Elle est reprise par le groupe MAOA 293 et a
continué à bénéficier du monopole de fait de l’activité d’assurance en Mauritanie en attendant
la libéralisation du secteur de l’assurance en Mauritanie.

B- La Société Nationale d’Assurance et de Réassurance au Benin (SONAR)

226. A l'occasion du Discours-Programme du 30 novembre 1972, prononcé avant l'adoption


formelle du socialisme comme voie de développement pour le Bénin, le président de la
république Mathieu KEREKOU, proclamait : « La caractéristique fondamentale et la source
première de l'arriération de notre pays est la domination étrangère. [...]. C'est pourquoi, la
seule voie qui s'offre à nous aujourd'hui est celle d'une politique nouvelle d'indépendance
nationale ; Le but de cette politique nouvelle serait ainsi de réorganiser toute la structure
économique, culturelle et sociale du pays dans le sens d’une libération de la domination venue
d’étranger294. La fin de l'année 1974 a vu s'amorcer ce processus d'étatisation qui a abouti à la
nationalisation de toutes les banques en activité au Bénin. Ainsi, le 2 décembre 1974, les
pouvoirs publics décidaient de la "prise en charge par l'Etat" des deux plus importantes
banques qui exerçaient sur le territoire national. Il s’agissait :

- D’une part, de la Société Dahoméenne de Banque (filiale du Crédit Lyonnais de


l’époque, actuel LCL)

227. D’autre part de la Banque Dahoméenne de Développement. Des deux ordonnances


promulguées le 20 décembre 1974 afin ratifier ces deux nationalisations, celle relative à la
SDB (ordonnance n° 74-78) stipulait, par exemple, ceci : "Article Premier - Pour compter du
3 décembre 1974, la Société Dahoméenne de Banque (S.D.B.) est propriété exclusive de l'Etat
dahoméen. Article 2- Les actions de la S. D. B. précédemment détenues par le Crédit
Lyonnais, la Deutsche Bank A. G. et la Banca Italiana Holding S.A. seront rachetées par
l'Etat dahoméen. Le rachat de ces actions fera l'objet de négociations entre le Gouvernement

Le groupe Mohamed Abdallah Ould Abdallah (MAOA) est sans doute le plus puissant groupe d’affaires en
293

Mauritanie. V. M. FALL OULD BAH, op. cit., p.231.


294
Voir Plaquette reprenant le discours-programme du 30/11/1972 et conçue par l'Office National d'Edition, de
Presse et d'imprimerie (ONEPI), p. 4 et s.

132
de la République du Dahomey et les autorités des banques susvisées. Article 3 - Le Ministre
des finances est chargé de l'application de la présente ordonnance qui sera exécutée comme
loi de l'Etat. En somme, Avant la fin de cette année, le monopole s’était généralisé et avait
atteint toute l’économie du pays, qui relevait désormais de la responsabilité de l’Etat et du
parti295.

228. Il convient de préciser que le secteur bancaire lui aussi n’échappera pas non plus à la
mauvaise gestion de l’Etat qui a conduit à sa faillite spectaculaire. Cet échec financier
s’explique essentiellement par la gabegie et le clientélisme instaurés par le Parti de la
Révolution Populaire du Bénin (PRPB). En effet, toutes les banques étaient sous la tutelle des
responsables politiques, qui pesaient ainsi fortement sur les instances de décisions des
banques296. Outre les nationalisations opérées, L’Etat dahoméen continua à créer des sociétés
à côté de celles déjà nationalisés et très souvent sans capital nécessaire. C’est ainsi qu’un an
après l’adoption de marxisme-léninisme par le Bénin, le pays comptait en tout et pour tout
une douzaine d’entreprises publiques297. Mais vers la fin des années 1980 et de celle du parti
unique, le Bénin avait à son compte plus de cent entreprises d’Etat, qui ont laissé aux
contribuables béninois une dette de plus de soixante milliards de francs CFA298.

229. dans le domaine des assurances, en optant en 1974 pour la voie socialiste de
développement économique et en décidant de la prise en charge par l'Etat des secteurs vitaux
de l'économie nationale, le Bénin a institué, par une ordonnance299 le monopole des
opérations d'assurance et de réassurance au profit d'une seule société d'Etat : la Société
Nationale d'Assurance et de Réassurance (SONAR) une société publique qui offrait des
services d’assurance-vie et IARD. C’est ainsi que, dans le cadre de la nouvelle philosophie
économique engendrée par l’avènement de la révolution marxiste-léniniste au Bénin, les
gouvernants ont décidé du monopole d’Etat en matière d’assurance. L’objectif de cette
décision, de haute portée économique, était de concentrer toutes les énergies autour de l’idéal
d’un développement endogène de l’assurance béninoise. Ainsi, au terme de l’Ordonnance

295
Parti de la Révolution Populaire du Bénin (PRPB).
296
V. D. DIA, Les dynamiques de démocratisation en Afrique noire francophone, thèse université Lyon III 2003
p.75.
297
V. D. DIA, Ibidem
298
Voir Le point, n° 921 du 14 mai 1990, cité par D.DIA, Ibidem
299
Ordonnance N° 74 – 85 du 30 Décembre 1974 instituant au profit de l’Etat, le monopole des opérations
d’Assurances et de Réassurances.

133
N°74-85 du 30 décembre 1974, il a été institué sur toute l’étendue du territoire national, le
monopole des opérations d’assurances et de réassurances au profit de l’Etat. La mise en œuvre
de ce monopole a été concédée à la Société Nationale d’Assurances et de Réassurances
(SONAR). A cet effet, les portefeuilles de toutes les sociétés étrangères qui opéraient sur le
territoire national ont été transférés à la SONAR. Au cours de son existence, la SONAR a
commercialisé tous les produits d’assurance, tant dans la catégorie vie que dans la catégorie
IARDT.

230. Pendant près de deux décennies, le secteur des assurances au Bénin s’est résumé à
cette entreprise d’Etat monopolistique. Gravement sous exploité et représentant un poids
relativement faible dans le système financier, ce secteur a réalisé de nombreuses contre-
performances qui ont amené les pouvoirs publics, dans le cadre des réformes instiguées par
les institutions de Bretton Woods, à mettre fin au monopole d’Etat. La Société Nationale
d'Assurance et de Réassurance (SONAR) était le seul organisme habilité à exercer des
activités d'assurance. Les branches les plus développées concernaient l'assurance automobile,
l'assurance des marchandises transportées, d'autres branches comme l'assurance-vie étaient
quasi inexistantes.

231. En 1989, avec l’échec des institutions financières étatiques, du fait que ces institutions
étaient soumises à des influences extérieures, notamment, des pressions politiques, le
gouvernement a opté pour la privatisation totale du secteur.
L'enjeu que devait constituer pour l'Etat béninois l'institution du monopole n'a pas été mis à
profit pour orienter l'épargne collectée vers la réalisation d'infrastructures susceptibles
d'assurer le décollage de l'économie nationale. En effet, plus de vingt ans après l'institution
du monopole, le marché est caractérisé par : une absence de concurrence préjudiciable aux
assurés qui ne peuvent choisir librement leurs assureurs, une ingérence des autorités de tutelle
dans la gestion technique, financière et administrative de la société d'Etat, des limitations
sévères en matière d'investissements et de placements et un environnement institutionnel et
réglementaire inefficace. C'est dans ce contexte, qu'en prélude à la libéralisation du secteur
des assurances, un plan de restructuration de la SONAR a été œuvré en 1990. Il s'est traduit
par une réduction du personnel qui est passé de 256 à 100 personnes, une dynamisation du
service commercial et par une meilleure politique de placements axée sur la rentabilité
232. Le monopole de l’Etat mauritanien et de l’Etat béninois sur le secteur des assurances
n’aura pas atteint vingt années. Force est de constater que la politique de nationalisation des
assurances s’est révélée désastreuse pour les deux pays. Les tribulations du secteur de

134
l’assurance, provoquées par les politique de nationalisation ont confirmé le manque
d’expérience et de rigueur des acteurs de l’assurance de l’époque. Néanmoins, on peut
admettre que l’échec des monopoles aura permis d’installer tout de même, les bases de la
libéralisation du secteur de l’assurance.

Section II : Les politiques de dénationalisation

233. Dans les années 90, bon nombre de pays africains ont commencé à expérimenter puis à
appliquer d’importantes réformes structurelles. Ces réformes aboutiront à l’abolition ou la
libéralisation du contrôle des prix, ainsi qu’au démantèlement de quelques monopoles
inefficients du secteur public et surtout à la privatisation de nombreuses entreprises.

En effet, Les exigences de la mondialisation les échecs dans la gestion des sociétés nationales
ainsi que la pression de la communauté internationale via les organismes internationaux sont
des faits qui de fil en aiguille vont encourager les pays africains dans une logique d’ouverture
de leur marché par le biais de la libéralisation de leurs économies. Les formes de cette
libéralisation varient en fonction des objectifs politico économiques de chaque pays.

234. Nous allons d’abord évoquer la libéralisation des assurances en Mauritanie


(Paragraphe I), puis celle des assurances au Bénin (Paragraphe II).

Paragraphe I : La libéralisation de l’économie mauritanienne

235. La Politique de libéralisation en République Islamique de Mauritanie a démarré, par


un processus de réforme de l’environnement national des affaires. Ce processus a permis une
plus grande ouverture économique notamment avec la privatisation de nombreuses entreprises
du secteur parapublic, la suppression du contrôle de prix, la suppression de l’autorisation
préalable d’import-export et la révision des systèmes fiscaux et financiers. Ces réformes se
sont traduites par la libéralisation de l’économie, le désengagement de l’Etat des activités
industrielles et commerciales et la reconnaissance du secteur privé comme moteur de la
croissance économique. Cette politique de libéralisation a visé d’abord les entreprises non
rentables, qui ne présentaient pas d’intérêt stratégique pour le pays. De 1990 à 1996, plusieurs
entreprises opérant dans divers secteurs (pêche, industrie, banque, assurance, transport…) ont

135
fait l’objet d’une privatisation

236. L’une des étapes de cette réforme concerne justement la libéralisation du secteur des
assurances (A). Un inventaire des sociétés actuelles présentes sur le marché sera à envisager
pour présenter l’état actuel de l’assurance en République Islamique de Mauritanie (B)

A-La libéralisation du secteur des assurances en Mauritanie

237. C’est surtout depuis le début des années 90, que la Mauritanie a engagé des réformes
économiques visant à libéraliser son économie, son commerce extérieur et à renforcer son
cadre législatif. L’économie mauritanienne a commencé à être libéralisée à partir de
l’ordonnance 91-09 du 22 avril 1991 relative à la liberté des prix et à la concurrence dont les
conditions d'application sont fixées par décret300. Dès cet instant, l’État mauritanien s’est
engagé à réduire son champ d’intervention dans l’économie. Il ambitionne de jouer un rôle
stratégique et exclusif de conception des politiques et de stratégies de développement et
d’adoption des normes, lois et règlements qui régissent l’activité économique.

238. Les principales réformes ont été axées sur les aspects suivants : libéralisation des prix
et élimination des obstacles au commerce international ; libéralisation des changes ;
assainissement du secteur financier ; privatisation progressive des entreprises publiques ; et
réformes fiscale, douanière et judiciaire301. La Mauritanie s'est engagée dans un processus
d'ajustement structurel soutenu par les bailleurs de fonds. « Bonne élève du F.M.I », elle
bénéficie de toute l'attention des bailleurs de fond à la recherche de pays stables. En effet
depuis 1992, la mise en œuvre d'un programme de réformes économiques a favorisé une
croissance annuelle de 4,4 % entre 1992 et 1999 et permis de réduire sensiblement les
déséquilibres financiers. Encouragé par la libéralisation. La stratégie entreprise par l’Etat
depuis 1992 et visant à réformer le secteur financier mauritanien comporte trois volets
principaux : la privatisation, la libéralisation de la politique monétaire et des changes, et
l’amélioration de la sécurité du système financier. Les organismes financiers sont au nombre

300
Décret N° 92-040 du 20 août 1992 fixant les conditions d'application de l'ordonnance 91-09 sur les prix et la
concurrence.
301
Voir en ce sens. Ordonnance 91-09 du 15 septembre 1991 sur la liberté des prix et de la concurrence ; décret
92-039 du 20 août 1992 portant composition et fonction du Comité de surveillance du marché ; décret 92-040 du
20 août 1992 fixant les conditions d'application de l'ordonnance 91-09 sur les prix et la concurrence.

136
de 33 unités. Les principaux types d’activités sont les banques, les bureaux de change, les
organismes de crédit et l’assurance. 302
Enfin, la libéralisation et la privatisation des services
tels que les services financiers et les services d’assurance, ainsi que les services de transport
aérien, de la santé et de l’éducation ont été parachevés avant l’année 2000.

239. Le secteur des assurances en Mauritanie a été libéralisé en 1993 ; auparavant la


Société Mauritanienne d'Assurance et de Réassurance (société publique liquidée) détenait le
monopole sur le marché local des assurances. La Loi 93-94 du 20 juillet 1993 portant Code
des assurances a levé ce monopole, et a ouvert le secteur des assurances au secteur privé et à
la concurrence. Il n'existe pas de société mauritanienne de réassurances, cependant les
assureurs nationaux peuvent accéder aux services de réassurances des sociétés étrangères.

Les textes réglementaires régissant le secteur des assurances en Mauritanie sont : la Loi n°
93-40 du 20 juillet 1993 portant Code des assurances ; le Décret 96-017 du 6 mars 1996
portant application de l'article 340 du Code des assurances ; le Décret 98-46 du 18 juin 1998
autorisant l'agrément des entreprises d'assurances et de réassurance en Mauritanie ; et l'Arrêté
n° R-717 du 7 mars 2000 portant dérogation à l'article 199 du Code des assurances.

240. Aujourd’hui, pour le marché de l’assurance en Mauritanie, près de vingt-cinq ans


après la vague de privatisation pilotée par les institutions financières internationales et mis en
application par l’Etat ; l’heure est au bilan. Il s’agit de procéder à une description de l’état
actuel du marché de l’assurance en Mauritanie.

C- L'état actuel du marché mauritanien de l’assurance.

241. Les réformes structurelles ont établi les bases pour un développement économique
soutenu et ont nettement amélioré le climat global des d'affaire en Mauritanie. Le point de
départ de la prolifération des compagnies d’assurances remonte à 1993. Depuis lors, une
quinzaine de compagnies se partagent le marché mauritanien de l’assurance. La libéralisation
du marché de l’assurance a entrainé une prolifération incontrôlée des compagnies. Par
ailleurs, le caractère familial ou tribal de la majorité des compagnies d’assurance
mauritanienne est flagrant303.

302
V. http://unctad.org/fr/Docs/iteiia20044_fr.pdf, consulté le 25 aout 2017.
303
V. M. Fall OULD BAH, op. cit. p. 265.

137
Le marché mauritanien des assurances est aujourd’hui composé compte tenu de sa taille d’une
d’un nombre trop important de compagnies dont les plus en vue restent DAMAN assurances,
la Nationale d’assurances et de réassurances (NASR), les Assurances générales de Mauritanie
(AGM), la Société d’assurances et de réassurance (SAAR), Taamin (Assurances islamiques),
et Wafa Assurance. Le chiffre d’affaires de l’assurance en Mauritanie ne représente que 1,5
milliards d’ouguiyas. (6 millions de dollars, soit, 0,5% du PNB contre 2,5% pour les pays du
Maghreb)304. Le rôle du secteur de l’assurance est faible en République islamique de
Mauritanie. En effet, le volume annuel des primes avoisine les trois milliards d’Ouguiyas dont
60% sont absorbées par les assurances transport (assurance automobile et assurance transport
aérien), des branches boostées par l’assurance obligatoire. A cela on peut ajouter le fait que
les secteurs vitaux de l’économie mauritanienne à savoir la pêche, ou encore l’agriculture ne
sont pas couverts par le champ de l’assurance. Par ailleurs, les industries minières, ou
d’extraction de matières premières ne sont généralement pas assurées en Mauritanie.

242. Les sociétés d’assurance exerçant sur le marché mauritanien devront depuis peu verser
un montant minimum de 300 millions d’ouguiyas, soit environ 900000 dollars au trésor public
en guise de fonds de garantie. Cette nouvelle réglementation a été examinée et a été adoptée
en conseil des ministres le jeudi 06 juillet 2017. Elle rentre dans le cadre de l’assainissement
du secteur de l’assurance.

243. En somme, les maux dont souffre le secteur de l’assurance en Mauritanie sont :
l’exiguïté de celui-ci, la faible capacité de rétention de prime, le laxisme des professionnels.
On remarque que l’assurance vie et l’assurance maladie ne représentent que 5% du marché
national, un pourcentage trop faible. Pourrons nous dire pour la suite que marché béninois
est-il mieux loti ?

Paragraphe II : Le processus de libéralisation de l’économie béninoise

244. Au Bénin comme un peu partout en Afrique, les politiques de nationalisation se sont
révélées désastreuses. En effet, la politique d'étatisation de l'économie, caractérisée par la
prise en charge par l'Etat des principaux secteurs d'activité économique au cours de la période
1974-1982, a abouti à de graves déséquilibres aussi bien au niveau interne et externe et sur

304
M. Fall OULD BAH, op. cit., p.267.

138
une crise financière, conséquence directe d’une paralysie de l'ensemble du système bancaire
et financier et l'accumulation substantielle d'arriérés de paiements intérieurs et extérieurs.

Afin d'œuvrer pour l'amélioration de leurs marchés respectifs catastrophiques, plusieurs


nations constituant la zone CIMA à l'instar du Benin vont développer des stratégies
économiques basées sur la restructuration des assurances à travers la libéralisation de ce
secteur. En réalité, la plupart des sociétés étatique était en faillite et il fallait concrètement
s’orienter vers la mise en place d'un cadre favorable au développement du secteur privé.

245. Après avoir exposé la libéralisation du marché béninois de l’assurance (A), nous
présenterons sous sa forme libéralisée, le marché béninois de l’assurance aujourd’hui (B)

A- La libéralisation du marché béninois l’assurance.

246. De manière générale, il est à noter que la libéralisation du secteur financier a débuté au
Bénin à la veille des années 1990 avec la mise en place de Programmes d’Ajustement
Structurel305. C’est en juin 1989 que le Bénin va signer son premier PAS, ce qui marque son
adhésion pour une émergence du privé. A ce titre le PAS de 1989 visait en l’occurrence :

- la réduction de la taille du secteur public ;


- la création d’un environnement plus propice au secteur privé ;
- l’assainissement des finances publiques ;
- la réforme du cadre règlementaire ;

247. La dénationalisation de la SONAR en mars 1998 va favoriser l’éclosion d’un nouveau


marché des assurances essentiellement privé. Bien avant cette date, en 1995 déjà on assistait à
une libéralisation de la branche vie de l’assurance. Cette libéralisation va susciter la création

305
Il s’agit en réalité de trois PAS. « Le premier PAS (1989-91) était adopté dans un contexte de crise
économique et sociale et a marqué la fin d’une stratégie fondée sur l’étatisation et le dirigisme adopté entre
1975 et 1982. Le deuxième programme (1992-94) a été adopté dans l’intention de consolider les acquis du
premier programme et de remédier à ses insuffisances. Le troisième programme (1995-97) a été adopté dans le
contexte de la dévaluation du FCFA en janvier 1994 et le Groupe de la Banque y a contribué par le biais d’une
restructuration de son portefeuille de prêts. Ces trois programmes ont été sponsorisés par le FMI, la Banque
mondiale et d’autres partenaires au développement dont le Groupe de la Banque. Les acquis de ces trois PAS
ont été consolidés et renforcés par un programme d’appui budgétaire (PARB) initié par la Banque mondiale à
partir de 1999. Ce programme a été soutenu par un prêt du FAD pour un montant de 14 millions d’UC en
2001 ». V. Bénin PROGRAMMES D’AJUSTEMENT STRUCTUREL I, II ET III Rapport d’évaluation de
performance de projet (REPP). Département de l’évaluation de l’évaluation des opérations (OPEV) 19 novembre
2003.

139
de trois compagnies :

- l’Union Béninoise d’Assurance Vie (UBA-Vie)

- l’Assurance et Réassurance du Golfe de Guinée (ARGG)

- Groupama-Vie du Bénin (GVB).

248. En 1997, la branche incendie-accident et risques divers (IARD) fut à son tour
libéralisé. La branche IARD est rythmée par l’arrivée de trois nouvelles sociétés :

- l’Africaine des assurances ;

- la Nouvelles société d’Assurance du Bénin ( NSAB) ;

- La Fédérale des assurances du Bénin.

249. On pouvait compter en 2009 douze compagnies d’assurance sur le marché béninois :
six sociétés en assurance vie et six sociétés en assurance non vie.

Ce secteur a également connu ces dernières années des mouvements de sorties et d’entrées de
sociétés, ce qui n’a pas pour autant eu d’impact sur l’évolution de la croissance du secteur. On
a noté l’entrée de NSIA-Vie, de la Société Africaine d’Assurances et de Réassurances du
Bénin (SAARB) et l’Africaine Vie respectivement en 2007 et 2008 ; ainsi que des retraits
d’agrément.

250. La libéralisation du secteur a entraîné une dynamisation du secteur au niveau interne.


Mais le constat est que ce secteur souffre encore de plusieurs insuffisances dont
principalement une domination du marché par la branche Incendie, Accident et Risques
Divers (IARD) au détriment de la branche vie. Ainsi, depuis la libéralisation de ce secteur en
1998, le marché béninois des assurances a connu un véritable essor avec l’entrée sur le
marché d’autres compagnies et le développement de nouveaux produits (l'assurance vie,
l’assurance santé, etc.). Aussi, afin d’assurer un meilleur fonctionnement de ce secteur, divers
textes ont été adoptés par les pouvoirs publics pour définir les règles et conditions d'exercice
de la profession d'assurance au Bénin.

140
B- L’aspect du marché des assurances au Bénin

251. Le marché béninois de l’assurance a la particularité d’être de taille relativement


restreinte. Aujourd’hui, une vingtaine de compagnies et sociétés de courtage en assurances
réunies, animent le secteur des assurances au Bénin. La stratégie de spécialisation adoptée par
le Gouvernement béninois suit deux principaux pôles : la branche des assurances-vie et la
branche des Incendies, Accidents et Risques Divers (IARD). L’évolution de l’économie
béninoise suivie de la libéralisation du secteur de l’assurance a entraîné une forte croissance
du marché d’assurance et une augmentation du nombre de compagnies.

252. D’une seule société avant la libéralisation, aujourd’hui, les sociétés IARD sont au
nombre de huit306. Il y’a également huit sociétés d’assurances vie sont présentes au Bénin307

En matière de bilan, excepté l’année 2014, où le secteur a enregistré une régression de


3,4%308, depuis la libéralisation du secteur de l’assurance au Bénin, le chiffre d’affaire des
compagnies d’assurance est en progression.

- 306
l’Africaine des Assurances ;
- la Nouvelle Société Interafricaine d’Assurances du Bénin (NSIA Bénin) ;
- la Fédérale d’Assurances (FEDAS) ;
- la Générale des Assurances du Bénin (GAB);
- les Assurances Générales de France au Bénin (AGF Bénin) ;
- La Société Africaine d’Assurances et de Réassurance du Bénin (SAARB) ;
- Allianz Bénin ;
- ARC-EN-CIEL-ASSURANCES (ARECA
- 307
SUNU Assurance vie anciennement (Union Béninoise d’Assurances) ;

- Assurances et Réassurances du Golfe de Guinée (ARGG) ;


- Colina Vie Bénin (Colina) ;

- Avie Assurances (AVIE) ;


- Société d’Assurances pour le Développement Economique et Social du Bénin (SADES Bénin) ;
- Agence pour la Promotion et l’Appui aux Petites et Moyennes Entreprises Vie (PAPME Vie Bénin).
- Allianz Vie Bénin
- la Nouvelle Société interafricaine d’Assurances-Vie du Bénin.
308
La régression du chiffre d’affaires observée en 2014 s’explique par la progression exceptionnelle de 22%
constatée en 2013 due à des affaires réalisées en fronting qui sont des souscriptions de circonstance, qui ne sont
pas renouvelées nécessairement.

141
253. Ces dernières années, un certain nombre de réformes entrant dans le cadre de
l’assainissement du marché ont été entreprises. Parmi elles, on peut citer :

- l’aboutissement du processus de dématérialisation du certificat d’assurance maritime


enclenché en 2014. Ainsi, depuis août 2015, date de lancement du système de
dématérialisation de la liasse documentaire de pré-dédouanement au Port de Cotonou,

- la souscription en ligne de l’assurance transports est devenue une réalité au même titre
que les autres documents de pré- dédouanement ;

- la tarification de l’assurance maladie par tête est devenue une réalité depuis janvier
2015 ;

- la mise en application de la liste des prestataires "santé" agréés par l’ASA-BENIN ;

- l’accord formel du Gouvernement à rendre obligatoire l’assurance des risques


techniques au Benin ;

- la création du POOL des véhicules à 2 Roues avec le soutien du Gouvernement ;

- l’adoption de la Convention d’Indemnisation Rapide des assurés pour limiter les


recours entre compagnie ;

- la mise en place d’un processus de rencontre bilatérale entre compagnie sur les recours
en instance sous la supervision de l’Association ;

- la mise en place d’une collaboration avec le Centre Hospitalier Universitaire de


Cotonou pour la prise en charge rapide, dès admission des victimes d’accident309.

309
Forum annuel des marchés FANAF année 2015.

142
Conclusion Chapitre I

254. Il faut souligner que les intermédiaires d’assurance constituent des maillons importants
de la chaîne des animateurs du marché des assurances béninois et depuis la libéralisation de ce
secteur, ils sont en nette croissance. Ainsi, on distingue des courtiers (personnes physiques) et
sociétés de courtage, les mandataires non-salariés et les salariés ou prospecteurs.
Actuellement sur le marché béninois, ces courtiers sont au nombre de onze avec un nombre
important d’agents généraux et apporteurs libres.

255. Les premières entreprises d'assurances ont été introduites par les Occidentaux durant
la période coloniale. En effet, il s’agissait des succursales ou des filiales des entreprises
occidentales310. La première étape d’appropriation de leur marché a consisté pour le Bénin et
la Mauritanie à une politique de nationalisation des compagnies étrangères présentes au
moment des indépendances. Bien que cette politique offre une opportunité de gestion
personnelle du secteur par les Etats, il n’en demeure pas moins que la politique se révèle
désastreuse d’où, un recours à la dénationalisation ou libéralisation du secteur de l’assurance
qui permettra l’arrivée d’un nombre important de compagnies d’assurances. Quelle que soit la
place qu'auraient pu tenir les motivations idéologiques dans le processus de décision qui a
abouti à la nationalisation du secteur des assurances au Bénin ou en Mauritanie, l'observation
du mode de fonctionnement des assurances dans ces deux pays les années, nous conduit à
émettre de sérieux doutes sur l'aptitude de ces compagnies à promouvoir ou à soutenir des
changements décisifs dans les rapports économiques et sociaux antérieurs aux années de
nationalisation

256. A l’heure actuelle, les compagnies d’assurances présentes sur les marchés se partagent
un secteur prometteur, encore faut-il que le désordre qui caractérise le secteur soit à terme
réglé. En effet, compte tenu du nombre de sociétés d’assurances présentes dans nos marchés,
l’organisation du marché doit impérativement passer par un respect de la typologie des
assurances. Il faut espérer que face aux tristes réalités évoquées plus haut, l’assurance peut,
d’une certaine matière, constituer une solution pour aider les Africains à surmonter beaucoup
d’aléas. L’objectif est donc de classifier les assurances afin d’en dégager les particularités et
portées pour en justifier la nécessité.

310
D. NIANE, Une caisse nationale de réassurance, pourquoi ? in Argus international, 1987, p. 13 et s.

143
Chapitre II : Les assurances de personnes

257. L’Afrique demeure le continent du sous-développement avec des populations pauvres,


malnutritions, analphabètes et victimes de nombreuses pathologies dont les grandes endémies
telles la fièvre jaune, le paludisme le SIDA et ces derniers temps, Ebola. De plus, on le décrit
comme le continent à forte démographie, aux infrastructures sanitaires quasi inexistantes, au
taux de mortalité élevé, une espérance de vie faible et un revenu par tête d’habitant très bas.
Sans parler de la grande instabilité sociopolitique caractérisée par des crises et des conflits
armés quotidiens. L’Afrique a tendance à porter l’étiquette du continent au lendemain
incertain. Dans cet imbroglio, l’assurance peut-elle être le remède aux différents maux qui
ronge l’Afrique ? Comment mettre en place la prévention des risques en assurances de
personnes en Afrique ?

258. La prévention des risques en assurances de personne en Afrique soulève à nouveau le


délicat problème de la justesse de la transposition des systèmes de gestion des produits
d’assurances de personne de l’Europe en Afrique. L’atteinte physique est le point de départ de
l’action à l’indemnisation en matière d’assurances de personnes. Encore faut-il que ce
préjudice soit mesurable. Pour cela, qui d’autre, plus qu’un expert311 en santé, c’est-à-dire un
médecin pourrait mieux apprécier les préjudices corporels ou moraux ?

L’expertise joue alors à juste titre un rôle de baromètre permettant à l’assureur de mesurer de
façon judicieuse le coût des dommages corporels, cela dans la limite des différents barèmes
existant dans la quasi-totalité des cas en Afrique.

259. Dans la mesure où il est question de réparation, nous allons d’abord nous attarder sur
les préjudices corporels indemnisables (Section I). Un développement relatif aux assurances
sur la vie, l’assurance maladie et les risques professionnels sera par ailleurs envisagé (Section
II)

311
L'expertise médicale est effectuée en vue d'évaluer le préjudice corporel de la victime d'accident de la
circulation. L'expert médical désigné par la compagnie doit justifier d'une compétence incontestée. Aux termes
de l'article 272 du Code CIMA, « Le médecin ou l'expert technique désigné par l'assureur mandaté doit justifier,
soit de sa qualité d'expert judiciaire inscrit sur la liste établie à cet effet, soit de la possession de diplômes
appropriés, soit de cinq années d'activité ininterrompue dans le domaine concerné. Chaque Etat tient le répertoire
des experts habilités à exercer ».

144
Section I : Les préjudices corporels indemnisables.

260 Le préjudice corporel de la victime correspond à l’ensemble des conséquences du


dommage corporel (blessures ou décès), qu’il s’agisse de l’atteinte à l’intégrité physique (frais
médicaux, incapacité temporaire ou permanente.) de l’atteinte morale ou économique (perte
de gain pendant l’arrêt de travail).

261. Parmi les victimes, on distingue :

- les tués : toute personne qui décède sur le coup ou dans les trente jours qui suivent
l'accident ;
- les blessés ;

262. Parmi les blessés, on distingue :

- les blessés hospitalisés : victimes admises comme patients dans un hôpital plus de 24
heures ;
- les blessés légers : victimes ayant fait l'objet de soins médicaux mais n'ayant pas été
admises à l’hôpital plus de 24 heures.

263. Après avoir énuméré les types de préjudice corporel les plus courant, il serait opportun
de s’intéresser à leur mode d’évaluation. Dans notre cas il s’agit de la mission d’expertise
médicale pour l’évaluation du préjudice. (Paragraphe I). Il va s’en suivre l’étude relative au
Fonds de Garantie Automobile (Paragraphe II) qui est en organisme d’une grande importance
dans la réparation de bon nombre de dommage corporels causés aux accidents de la
circulation.

145
Paragraphe I : La mission d’expertise médicale pour l’évaluation du préjudice.

264. Même si la procédure varie, dans la plupart des systèmes juridiques, la désignation de
l’expert est en principe libre sous la seule réserve de la qualité requise pour l’exercice de la
mission d’expert312. L’évaluation du dommage corporel fait l’objet, en fonction de leur gravité,
soit d’un avis sur pièces313, soit d’une expertise médicale. L’expertise médicale est effectuée en
cas de préjudice corporel, à la demande de l’assureur par un médecin spécialiste choisi en
fonction de la nature des lésions de la victime. Elle est réalisée dans le but d'évaluer le
préjudice corporel d’une victime. Contrairement au Code CIMA, Le Code des assurances
mauritaniennes ne s’attarde pas sur les conditions de l’évaluation du préjudice corporel. On a
pu constater en effet que, des dispositions sur l’organisation l’expertise médicale y sont quasi
inexistantes314. Toutefois, A l’instar du Code CIMA, le CAM juge que l'expert médical désigné
par la compagnie doit justifier d'une compétence reconnue par les autorités315.

265. Dans le droit CIMA, Aux termes de l'article 272 du Code CIMA, « Le médecin ou
l'expert technique désigné par l'assureur mandaté doit justifier, soit de sa qualité d'expert
judiciaire inscrit sur la liste établie à cet effet, soit de la possession de diplômes appropriés, soit
de cinq années d'activité ininterrompue dans le domaine concerné. Chaque Etat tient le
répertoire des experts habilités à exercer ». Au cas où l’assureur fait établir un bilan médical

312
V. Y. LAMBERT-FAIRE, S. PROCHY-SIMON, Droit du dommage corporel, Système d’indemnisation, 8é
édition, Dalloz, 2016. p.72.
313
Il s’agit de l’évaluation des dommages corporels après examen des pièces médicales (certificats médicaux,
certificats d’arrêt de travail, ordonnances de traitement…) par un médecin missionné par l’assureur. Cette
pratique ne concerne exclusivement les dommages corporels très légers. En effet, sur la base des différents
certificats médicaux établis par le médecin traitant, et sur la base de l'examen physique de la victime, le médecin
expert de la compagnie d'assurance dresse un rapport d'expertise médicale sur lequel il devra se prononcer sur les
différents chefs de préjudice subis par la victime.
314
En tout, trois articles sont consacrés à la procédure d’évaluation du dommage corporel :
- l’article 32 relatif à la faculté de l'assuré de se faire assister d'un conseil de son choix ;
- l’article 33 concernant l’obligation de l’assureur de faire connaître les noms des Personnes en
charge du dossier d’Indemnisation
- et l’article 34 portant sur l’obligation de l’assureur de convoquer l’Assuré aux Opérations
d’expertises.
315
« Nul expert ne peut être désigné pour une expertise judiciaire en matière d'assurance s'il n'est pas agréé
spécialement au titre de l'assurance et s’il n'appartient pas à l'Ordre des experts judiciaires d’assurance » article
350 CAM.

146
par un médecin expert, une convocation est adressée au moins quinze jours avant l’examen
(article 244 du Code CIMA). L'article 252 du Code CIMA accorde la possibilité à la victime de
contester le choix du médecin désigné par l'assureur (qui peut alors demander la désignation
d’un médecin par le juge des référés) et donc de refuser de se soumettre à l'examen médical.

266. Outre cette contestation, l'article 252 bis donne aux parties la faculté de recourir d’un
commun accord à une tierce expertise ; lorsque les conclusions du médecin mandaté par
l'assureur sont divergentes de l'avis du médecin conseil de la victime, il en découle que l'avis
du tiers expert doit s'imposer. Cette procédure proroge d’un mois le délai imparti à l’assureur
pour présenter l’offre d’indemnité316.

En matière de dommage corporel, pour établir le bilan de l’état médical de la victime, le


médecin évalue les différents dommages en fonction des incapacités et déficits fonctionnels317.

267. Lors d’un sinistre, il peut arriver, que l’un des véhicules impliqués ne soit pas assuré ou
tout simplement que le responsable prenne la fuite et ne soit pas retrouvé. Se pose alors le
problème de l’indemnisation des personnes atteintes par le sinistre. C’est pour éviter les
conséquences désastreuses de la non assurances ou l’absence de responsable que le Fonds de
Garanties Automobile existe.

Paragraphe II : L’indemnisation par le Fonds de Garantie Automobile

268. Tout automobiliste, même modèle ayant un comportement responsable et exemplaire,


peut un jour être confronté à un accident de circulation. L’évènement peut s’avérer délicat si
le conducteur responsable de cet accident n’est pas assuré, ou décide tout simplement de
prendre la fuite sans être identifié. Ce sont ces diverses raisons qui ont justifié d’abord en
France318, puis plus tard en Afrique, la nécessite de la création du Fonds de Garantie
Automobile. En Afrique, l’institution d’un FGA peut dans une certaine mesure encourager le
non-respect de l’obligation d’assurance319. Néanmoins, à l’image de nombre de pays de la

316
Art 242 in fine.
317
V. infra, n° 508.
318
V. supra, n° 270.
319
« Si en Afrique, la création de Fonds de Garantie Automobile dont le but est de faire face à des situations qui
mettent en péril la vie des victimes, rencontre des difficultés, c'est bien parce que les pouvoirs publics redoutent
l'accentuation de la non-assurance » V. P. DIOUF, Le Fonds de garantie automobile sénégalais et

147
communauté internationale, le bénin en application des dispositions de l’article 600 du Code
CIMA va légiférer sur la mise en place dès 2007 un Fonds de Garantie Automobile. Cet
engouement pour l’institution d’un FGA s’explique par les conséquences du risque accidentel
élevé au Bénin qui est dû à son ouverture maritime. En effet, le Bénin sert de pôle de transit
pour plusieurs pays enclavés de la sous-région comme le Nigéria, le Mali, le Burkina-Faso, le
Niger, le Tchad le Cameroun…Cette situation accroît considérablement le nombre de
véhicules qui circulent sur les routes du pays, et rend très dangereux le transport routier. De
plus, le phénomène « venant de France »320, a augmenté considérablement le parc automobile
béninois. Selon Madame Margaret CHAN, directrice générale de l’OMS : « L’Afrique a un
taux de morts sur les routes quasiment deux fois et demi plus élevé qu’en Europe »321 .

269. Il sied à partir des origines du concept du Fonds de Garantie Automobile (A), de
présenter l’organisation juridique et financière du Fonds de Garantie Automobile (B) afin
d’évaluer l’importance du mécanisme en question.

A- Origines du concept du Fonds de Garantie

270. Le Fonds de Garantie Automobile fit son apparition en France en 1951322 pour assurer
une mission d’intérêt général à savoir : indemniser les victimes d’accidents de la circulation
dont les auteurs n’étaient pas assurés ou insolvables ainsi que les auteurs non identifiés323.
Au fil des années, en France ses compétences ont été étendues et il est devenu par la loi n°
2003-706 du 1er août 2003 de sécurité financière le FGAO324.

l’indemnisation des préjudices corporels consécutifs aux accidents de la circulation, thèse, Université de Paris
X, 2000, p. 10.
320
« Le commerce de véhicules d’occasion au Bénin, né dans les années 1980, a connu un essor considérable
ces dernières années, passant de près de 50.000 véhicules en 1996, à 200.000 et 250.000 véhicules importés en
respectivement 2000 et 2001 » V. C. PERRET, Le commerce des véhicules d’occasion au Bénin Problématique
régionale et impacte nationale. Echanges régionaux, novembre 2002.p. 04.
321
http://www.jeuneafrique.com/171651/societe/l-afrique-en-t-te-de-la-mortalit-sur-les-routes , consulté le 16
aout 2017
322
V art.15 de la loi finance n°51.1508 du 31 décembre 1951.
323
Voir Y-L. FAIVRE, L. LEVENEUR Droit des assurances 13e édition Dalloz 2011 n° 855.
324
S. ABRAVANEL- JOLY, Le Fonds de Garantie des accidents de la circulation rebaptisé Fonds de Garantie
des assurances obligatoires de dommage, RCA 2004, chron. n° 4, cité par Y-L. FAIVRE, L. LEVENEUR op.
cit., p.695.

148
En effet, la compétence du Fonds a été étendue notamment aux accidents de chasse 325, aux
dommages causés par une personne circulant au sol, ou par un animal, dans un lieu ouvert à
la circulation publique. Plus tard, la loi du 17 décembre 2007 portant diverses dispositions
d’adaptation au droit communautaire viendra apporter des modifications326.

Dans sa conception initiale en France, le Fonds de Garantie Automobile regroupe


obligatoirement les assureurs français et étrangers agréés pour pratiquer les risques de toute
nature résultant de l'emploi des véhicules terrestres à moteur327. A ces débuts, le F.G.A. ne
couvrait que les dommages corporels. C'est après qu'une loi du 30 novembre 1966
interviendra pour prendre en compte les dommages matériels. Le Fonds de Garantie
Automobile français aurait attendu plus de quinze ans avant de prendre la décision d’étendre
son domaine d'intervention aux dommages matériels. Une prudence observée qui était sans
doute dictée par le souci de garantie d’une solidité financière.

271. Dans la zone CIMA c’est la révision de certaines dispositions du Code CIMA et
l'introduction de deux articles instituant le Fonds de Garantie, qui sans doute, encouragea
certains Etats sceptiques quant à la nécessité de la création d'un Fonds de Garantie
Automobile à côté d'une assurance automobile obligatoire328. Il est contenu dans les livres II
relatifs aux assurances obligatoires et le livres VI instituant Le Fonds de Garantie
Automobile. A ce titre l’article 600 du Code CIMA dispose : « Dans chaque Etat membre, il
est institué un Fonds de Garantie Automobile chargé, lorsque le responsable des dommages
demeure inconnu ou n’est pas assuré, sauf par l’effet d’une dérogation légale à l’obligation
d’assurance, de supporter, dans la limite des plafonds fixés par les textes de chaque Etat
membre relatifs audit Fonds, les frais médicaux et d’indemniser les victimes des dommages
résultant d’atteintes à leurs personnes nés d’un accident causé par un véhicule terrestre à
moteur en circulation, ainsi que ses remorques ou semi-remorques, à l’exclusion des chemins
de fer et des tramways. Le Fonds de Garantie Automobile paie aux victimes ou à leurs ayants

325
Voir loi n° 66-497 du 11 juillet 1966.
326
Au terme de ces réformes, ce Fonds de Garantie est régi par les articles : L421-1à 421-17, R.423-18 et A.421-
1à A.421-3 du Code des assurances françaises.
327
Dans un arrêt du 20 mars 1962, la cour de Cassation a condamné une compagnie américaine à verser pour le
compte du F.G.A. la somme mise à la charge de son assuré en vertu de la règle de l'inopposabilité de la
limitation de la garantie : RGAT. 1951 p. 324.
328
Le Comité des Experts de la CIMA qui s'est réuni à Dakar du 15 au : 21 avril 1999, a proposé l'introduction
d’un Fonds dans le Code CIMA. Proposition qui a été entérinée par le Conseil des Ministres de la Zone Franc, le
22 avril 1999. Les articles 600 et 601 lui sont à ce titre consacrés.

149
droit les indemnités qui ne peuvent être prises en charge à aucun autre titre, lorsque
l’accident ouvre droit à réparation ».

272. L’article 601 du même Code concernant les modalités laisse à chaque Etat la liberté
quant à la forme juridique et les modes de financement du fond de garantie automobile. Avant
le 25 septembre 2001, la plupart des législations africaines sont caractérisées par l’inexistante
d’un Fonds de Garanties329. Une situation que Madame Jacqueline LOHOUE-OBLES qualifia
de « lacune grave »330. En effet, c’est le règlement n° 0007 /PCMA /CE /SG/CIMA/ qui
institue ce Fonds dans la zone CIMA. En Afrique, le Cameroun ayant été l’un des pionniers
en ce qui concerne la création de ce type de structure l’a mis en place au cours des années
1960. Le Fonds de garantie automobile camerounais a dû être liquidé dans les années 90 suite
à une conjoncture économique difficile. Le projet de création d’un nouveau Fonds surviendra
quatorze ans après l’expiration du délai fixé par la CIMA331.

L’indemnisation par le FGA n’est pas acquise d’office. En effet, suivant le principe de la
subsidiarité, le Fonds de Garantie Automobile n'a pas à intervenir lorsque l'assurance a
vocation à le faire. L'intervention du F.G.A. suppose que l'assurance fait défaut ou que
l'Assureur est insolvable ou qu'il n'a pas pu être identifié parce que l'auteur est inconnu ou que
l'assurance existe mais ne s'applique pas332. Au Bénin, les victimes pouvant prétendre à une
indemnisation par le Fonds de garantie automobile sont : les victimes d’accidents de corporels
causés par un véhicule terrestre à moteur, ses remorques ou semi- remorques, ou les ayant
droits lorsque :

- l’auteur est inconnu ;

329
A titre d’exception le Sénégal disposait d’un Fonds de garanties automobile qui a été créé par une assemblée
constitutive du 23 mai 1995 sous la forme d’une société anonyme à participation publique majoritaire. Elle était
régie notamment par la loi 90-07 du 26 juin 1990 relative à l’organisation et au contrôle des personnes morales
de droit privé bénéficiant du concours financier de la puissance publique. Voy. P. DIOUF, op. cit., p. 91.
330
J. LOHOUE OBLES, disait en ce sens que : « L’indemnisation des victimes de la circulation dans la zone
CIMA. Jamais l’intervention d’une réforme n’a été tant souhaitée et bienvenue que celle qui est relative à
l’assurance des véhicules terrestres dont le corollaire est l’indemnisation d’accidents de la circulation. », in
L’assureur africain, Bulletin semestriel de la FANAF n° 23 juillet 1996.
331
Depuis le 22 juin 2015, les parlementaires examinent un projet de loi portant création du Fonds de garantie
automobile du Cameroun. A travers la mise en place de cette structure longtemps réclamée par les assureurs
locaux, le gouvernement camerounais accèdera peut-être à une prescription du Code CIMA
332
Voir P. DIOUF op. cit., p.47.

150
- l’auteur est connu mais non assuré333.

En matière d’indemnisation les soins sont pris en charges ou remboursés sur la


présentation de certificats médicaux. Si besoin est, l’avis d’un médecin du fonds peut être
nécessaire.

Le Fonds peut décider de statuer sur l’état de la victime à ce titre, les incapacités,
aussi bien temporaires que permanentes ainsi que les souffrances physiques ou encore les
préjudices esthétiques sont indemnisés sur la base de barème du Code CIMA frappé dans
certains cas d’un abattement de 50%. Les frais funéraires peuvent être remboursés sur la base
des pièces justificatives à hauteur de 50% du SMIG annuel.

273. Si le FGAO français a été qualifié de personne morale de droit privé, le FGA béninois
compte tenu de la participation de l’autorité publique à son financement en fait une
organisation semi-publique à part entière. Il est à ce titre soumis aux règles de droit commun
tout en étant surveillé par l'administration en ce qui concerne sa gestion334. Le F.G.A. jouit de
la personnalité civile, c'est-à-dire qu'il a le droit d'avoir un patrimoine particulier et d'agir en
justice pour se défendre.

274. Pour l’heure, dans la zone CIMA, l’objectif n’est pas à l’extension du domaine de
compétence de FGA. Au Bénin, le F.G.A se focalise d’abord sur la réparation des dommages
corporels. En effet, Un fonds de garantie automobile qui prend en charge de manière efficaces
les dommages corporels de victimes éligibles à celui-ci ne peut être que salutaire. C’est par
une bonne organisation juridique et financière que cela est envisageable.

B- Organisation juridique et financière du fonds de garantie automobile

275. Dans l’espace CIMA, en cas de dommages corporels suite à un accident de la route, et
de surcroit, en l'absence d'assurance, les victimes restaient livrées à leur propre sort. Il fallait
mettre en place une structure capable de faire face au besoin parfois urgente de réparation. Il
s’agit en l’occurrence, de la prise en charge des préjudices corporels des accidentés sans

Voir notamment art. 2 al 1 du décret N° 2007-618 du 31 Décembre 2007 Fixant le régime d’indemnisation du
333

Fonds de Garantie Automobile du Bénin.


334
Bien que l'Etat français ne participe pas au financement du budget du Fonds de Garantie, il n'en exerce pas
moins un contrôle sur la gestion de celui-ci.

151
couverture. C'est fort de cette préoccupation d'assurer aux victimes d'accidents de la
circulation une indemnisation que le Bénin institua le 31 décembre 2007 par le décret
n° 2007-617 du 31 décembre 2007 fixant le régime financier du Fonds de Garantie
Automobile ainsi que le décret n° 2007-618 du 31 décembre 2007 fixant le régime
d’indemnisation du Fonds de Garantie Automobile du Bénin.

A l’évidence, suivant le principe de la subsidiarité, le Fonds de Garantie Automobile n'a pas à


intervenir lorsque l'assurance a vocation à le faire. L'intervention du F.G.A. suppose que
l'assurance fait défaut, que l'auteur ou alors son assureur sont déclarés insolvables ou qu'il n'a
pas pu être identifié parce que l'auteur est inconnu ou que l'assurance existe mais ne peut
s'appliquer. Il ressort de ces décrets que, les indemnités doivent résulter d’une décision
judiciaire exécutoire ou d’une transaction ayant reçu l’assentiment du Fond de Garanties
Automobile du Bénin335.

A l’inverse, le fond de garantie automobile exclut :

- le conducteur du véhicule pour les dommages qu’il a subis ;

- les victimes se trouvant en situation d’infraction (vol et complice de vol)

Cependant, cette exclusion n’est applicable que si le Fonds apporte la preuve de la


connaissance de vol du véhicule par les personnes transportées336 ;

- les victimes de véhicules à deux roues non-assurés337.

276. Le mode de financement ainsi que le régime juridique du Fonds de garanties


automobiles sont contenus dans la loi n° 2007-617 du 31 Décembre 2007.

Malgré des sources de financement bien que plus nombreux qu’en France338, le FGA
béninois dispose de moyens financiers très limités. Cette situation s’explique par la part faible
du marché de l’assurance dans la zone CIMA en général et singulièrement au Bénin qui

335
Voir pour plus de clarté art. 2 al 2 du décret N° 2007-618 du 31 Décembre 2007 fixant le régime
d’indemnisation du Fonds de Garantie Automobile du Bénin.
336
Art.3 décret N°2007-618.
337
Art.3 al.2 du décret N°2007-618 du 31 décembre 2007
338
En France le FGAO est une personne morale de droit privé. Contrairement au FGA béninois, il n’est pas
subventionné par l’Etat. Voy Y-L. FAIVRE, L. LEVENEUR Droit des assurances, op. cit., pp.696-697.

152
finance en grande majorité la structure. Cette situation justifie que l’offre d’indemnisation du
FGA soit soumise à un régime d’indemnisation spécifique339.

277. Pour le cas de la Mauritanie, à ce jour, l’on peut observer que le Fonds de Garanties
Automobiles n’est pas encore opérationnel, bien que prévu par le Code des assurances. En
attendant la mise en place d’un fond de garantie automobile, la part de dommage du
conducteur non assuré est théoriquement supportée par les autres assureurs. A un stade
encore conceptuel, il reste en suspens. La dernière tentative en date d’une institution de FGA
reste un projet de décret fixant les modalités de fonctionnement du Fonds de Garantie
automobile.340

Le projet de décret doit mettre en application les dispositions prises par les articles 345 à 349
de la loi 93-040 du 20 juillet 1993 portant Code des assurances ; il est relatif à la création et
aux modalités de fonctionnement d'un Fonds de Garantie Automobile341. Toutefois, le Fonds
de Garantie qui serait susceptible d’assurer une mission d'intérêt général permettant
l'indemnisation des victimes d'accidents de la circulation pour lesquels le responsable est
inconnu ou n'est pas assuré, n'a jamais été mis en place malgré son importance sociale.

278. Lorsque décède le soutien famille (père, mère), le conjoint, les enfants, ou encore les
parents peuvent ne plus disposer des ressources financières nécessaires pour maintenir leur
train de vie. À l’inverse, en cas de survie plus longue qu’anticipé d’un individu, la joie de
cette longévité peut être nuancée par des problèmes financiers si celui-ci ne dispose pas
d’une épargne suffisante et que plus personne n’est en mesure de l’aider. Aussi, des
problèmes de revenus peuvent aussi survenir en cas d’arrêt de travail consécutif à un accident
ou à une maladie. Tant de risques que peuvent couvrir les assurances sur la vie ou les
assurances sociales.

339
Si en cas de décès les assureurs garantissent une indemnité à auteur du SMIG pour les frais funéraires, ce
montant est de 50 % du SMIG par le FGA au Bénin.
340
Voy. Communiqué du conseil des ministres du jeudi 23 février 2012.
341
L'Article 345 dispose : « Il est institué un fonds de garantie pour l'indemnisation des victimes d'accidents de
la circulation pour lesquels le responsable est inconnu ou n'est pas assuré. Seules les victimes atteintes dans leur
intégrité corporelle sont concernées par ce fonds ».

153
Section II : Les assurances sur la vie, les assurances sociales et les
risques professionnels

279. Les assurances de personnes peuvent être regroupées en deux catégories : dans un
premier temps, nous étudierons l’assurance-vie qui regroupe l’assurance décès, la prévoyance,
retraite, invalidité, etc. (Paragraphe 1). Nous aborderons en second lieu les assurances sociales
(Paragraphe II) ayant pour but d’aider les individus à faire face à certains évènements de la
vie et de fournir un revenu de remplacement aux travailleurs suite à l'interruption ou la
cessation de leur activité professionnelle.

Paragraphe I : L’assurance vie.

280. Le contrat de prévoyance est celui dans lequel l’assuré choisit de prémunir sa famille
contre les conséquences financières de son décès ou de son invalidité. Dans ce cas,
l’assurance prend la forme d’une assurance en cas de décès où le décès de l’assuré entraîne le
versement du capital prévu au contrat à un bénéficiaire. Quant au contrat d’épargne, l’objectif
est de constituer pour les vieux jours, un capital qui est alimenté par des primes uniques ou
périodiques capitalisées durant la période d’activités. Ici, l’assuré, plutôt que de gérer son
argent, le confie à un assureur qui fait fructifier les sommes investies par l’assuré et les lui
reverse sous forme de capital ou de rente à une date déterminée à l’avance si celui-ci est
encore en vie.

Cependant, il existe une assurance mixte qui est une juxtaposition d'une assurance en cas de
décès et d'une assurance en cas de vie garantit la prestation de l'assureur peu importe que
l'assuré décède avant la date fixée par le contrat ou soit encore en vie à cet instant342.

Dans tous les cas, l’assurance vie est souscrite soit en cas de vie où le risque est
constitué par la survie de l’assuré à une échéance donnée, soit en cas de décès où le risque
concerne le décès avant un terme fixé, ou encore en cas de combinaison des deux
formules343. Ainsi, les besoins de sécurité ressentis par les assurables peuvent s’exprimer

342
J. ERNAULT, Droit de l’assurance-vie, contrats individuels, grandes branches, Bruxelles, Bruylant, 1987, p.
33.
343
V. J. ERNAULT, ibidem.

154
sous diverses formes. Pour y répondre, les assureurs sur la vie font appel à plusieurs types de
contrats dont notamment les contrats d’épargne et de prévoyance.

281. La notion d’assurance vie étant relativement vaste. Nous allons l’aborder à travers les
principes et dispositions qui la caractérisent (A). Un intérêt sera porté à ses formes les plus
répandues à savoir : la capitalisation et les assurances de groupe (B). Pour clore l’étude
consacrée à ce type d’assurance, nous allons nous intéresser à quelques obstacles au
développement de l’assurance vie (C).

A- Les principes et les dispositions en matière d’assurance-vie.

282. L’assurance sur la vie est le contrat par lequel, l’assureur s’engage envers le
souscripteur, moyennant une prime, à verser au bénéficiaire désigné une somme
déterminée ; l’exécution de son obligation dépendant de la vie de l’assuré. On en déduit qu’il
s’agit en réalité d’une sorte de sécurité344. Bien que relevant du domaine des assurances de
personnes, l’assurance sur la vie obéit à certains principes qui lui sont propres. Il s’agit
essentiellement :

- de l’absence du principe indemnitaire : les sommes assurées en assurance vie sont


librement fixées à l’avance dans la police par le souscripteur ou l’assuré. Sous réserve de la
bonne foi des contractants, les hypothèses de sur assurance, de sous assurance ou
d’assurances cumulatives n’existent donc pas en assurance vie, la vie humaine n’ayant pas de
prix. On dit que les assurances sur la vie sont soumises au principe forfaitaire.

- En droit mauritanien, l’assurance en cas de décès est de nul effet si l’assuré se donne
volontairement et sciemment la mort. Le Code CIMA accepte cette probabilité après deux
années d’ancienneté du contrat.

- de l’absence de subrogation légale au profit de l’assureur, conséquence logique du


principe forfaitaire.

- de la liberté du contractant de ne pas payer la prime, en tant qu’engagement


contractuel, sans encourir des mesures de contrainte notamment par voie judiciaire. Ce
principe, légal, a des effets qui se traduisent quelquefois par des ruptures anticipées des

344
A-M. ASSI-ESSO, J. ISSA-SAYEGH et J. LOHOUES-OBLE, op. cit., p. 297.

155
contrats d’assurance vie. En effet, aux termes de l’article 73 du Code CIMA, au contraire des
assurances de dommages345, l’assureur vie n’a pas d’action en justice pour exiger le paiement
de la prime d’assurance. En conséquence, le paiement de la prime en assurance-vie est
facultatif pour le débiteur qui a la liberté de mettre fin quand il le désire au processus
d’assurance. Dans le même ordre d’idée, le Code des assurances mauritaniennes, en son
article 78, dispose que : « L’assureur n’a pas d’action pour exiger le paiement des primes
lorsqu’une prime ou fraction de prime n’est pas payée dans les dix jours de son échéance,
l’assureur adresse au contractant une lettre recommandée par laquelle il l’informe qu’à
l’expiration d’un délai de quarante jours à compter de l’envoi de cette lettre, le défaut de
paiement, à l’assureur ou au mandataire désigné par lui, de la prime ou fraction de prime
échue ainsi que les primes éventuellement venue à échéance au cours dudit délai, entraîne
soit la résiliation du contrat en cas d’inexistence ou d’insuffisance de la valeur de rachat soit
la réduction du contrat. L’envoi de la lettre recommandée par l’assureur rend la prime
portable dans tous les cas. L’entreprise de capitalisation n’a pas d’action pour exiger le
paiement des cotisations. Le défaut de paiement d’une cotisation ne peut avoir pour sanction
que la suspension ou la résiliation pure et simple du contrat et, dans ce dernier cas la mise à
la disposition du porteur de la valeur de rachat que ledit contrat a éventuellement acquise ».
Ce n’est donc qu’à l’expiration du délai de 40 jours, en cas d’inexistence ou d’insuffisance de
la valeur de rachat qu’intervient automatiquement la résiliation du contrat d’assurance sur la
vie, qui n’est rien d’autre qu’une rupture anticipée du contrat.

La résiliation implique la suppression pour l’avenir du contrat d’assurance vie346.

Elle ne peut intervenir que sur la seule décision de l’assureur. Par ailleurs, le fondement de ce
principe est d’ordre essentiellement pratique, en ce sens qu’en la matière, il ne saurait y avoir
de contrainte, afin de préserver le caractère d’acte de prévoyance de l’assurance sur la vie. De
même, sans cette souplesse qu’apporte cette règle à l’exécution du contrat d’assurance sur la
vie, peu de personnes engageraient un processus d’épargne, qui s’il est obligatoire, risque de
paraître d’autant plus lourd que l’intérêt moral qui a justifié la souscription du contrat peut
disparaître.

283. Comme l’autorisent le Code CIMA et le CAM en leurs articles 58 et 86 : « La vie


d'une personne peut être assurée par elle-même ou par un tiers, plusieurs personnes peuvent

345
Voir article 9 Code des assurances Mauritanienne.
346
Voir alinéas 2 et 3 de l’article 73 Code CIMA.

156
contracter une assurance réciproque sur la tête de chacune d'elles par un seul et même
acte. »

Cependant, dans les systèmes assuranciels d’inspiration française « Il est défendu à


toute personne de contracter une assurance en cas de décès sur la tête d’un mineur âge de
moins de douze ans, d'un majeur en tutelle, d’une personne placée dans un établissement
psychiatrique d'hospitalisation. Toute assurance contractée en violence de cette prohibition
est nulle. »347.

284. L'assurance remplit aussi des fonctions d'épargne et de crédit. Le contrat de


capitalisation en est un exemple.

B- Le contrat de capitalisation et les assurances de groupes

285. L’étude portera d’une part sur le contrat de capitalisation (1). D’autre part, des
assurances collectives seront abordées à travers les assurances de groupe (2)

1) Le contrat de capitalisation

286. Les assurances de capitalisation sont des assurances souscrites à long terme et dont les
primes sont capitalisées selon la méthode des intérêts composés348. Dans ce type de contrat,
l’entreprise d’assurance s’engage, moyennant un versement unique ou des versements
périodiques à payer un capital déterminé, soit à l’échéance du contrat, soit par anticipation. En
somme, l’opération de capitalisation bien que partageant de nombreux points communs avec
l’assurance vie n’est pas en réalité une opération d’assurance dans la mesure où elle n’a pas
vocation à garantir un quelconque risque. En outre, elle ne comporte pas d’assuré et ne
dépend pas de la vie humaine. Enfin, en cas de décès du souscripteur, le capital ainsi épargné
est en principe intégré dans l’actif successoral pour être soumis aux droits des successions.

347
Article 88 CAM, article 60 du Code CIMA, L’alinéa 5 du même Code en Mauritanie prévoit : « L'assureur et
le souscripteur sont en outre passibles pour chaque assurance conclue sciemment en violation de cette
interdiction d'une amende de 50.000 à 500.000 Ouguiyas. ». Le montant de cette contravention qui correspond à
la plus forte amende correctionnelle selon le Code CIMA.
348
Y. LAMBERT-FAIVRE, Droit des assurances, Dalloz, 1998, p.48.

157
Les branches gérées en capitalisation sont les assurances sur la vie (assurance en cas de vie ou
assurance en cas de décès). L’article 64 du Code CIMA détermine les mentions du contrat ou
titre de capitalisation

Par ailleurs, l’article 64-1 du même Code exige la communication des frais prélevés
sur les contrats en cas de vie ou de capitalisation. Ainsi, « Les contrats d'assurance en cas de
vie (avec ou sans contre-assurance) ou de capitalisation doivent indiquer les frais prélevés
par l'entreprise. Ces frais peuvent être libellés dans la monnaie du contrat ou calculés en
pourcentage des primes, des provisions mathématiques, du rachat effectué, du capital garanti
ou de la rente garantie. Les autres contrats comportant des valeurs de rachat doivent
indiquer les frais prélevés en cas de rachat ».

287. Contrairement au Code CIMA, le CAM ne s’est pas attardé sur les mentions du contrat
de capitalisation. En effet, c’est l’article 105 qui est relatif aux mentions obligatoires du
contrat de capitalisation. Il dispose : « Aussi longtemps que le contrat donne lieu a paiement
de cotisation, l'entreprise de capitalisation doit communiquer chaque année au contractant,
outre la valeur de rachat, le montant du capital au terme de la cotisation, compte tenu des
attributions de participations bénéficiaires qui ont un caractère définitif. Lorsque le contrat
ne comporte plus, de paiement de cotisation, les informations visées à l'alinéa précédent ne
sont communiquées pour une année donnée qu'au contractant qui en fait la demande. Le
contrat doit faire la référence à l'obligation d'information prévue aux alinéas précédents ».

288. Certaines assurances peuvent être souscrites pour plusieurs personnes. Ces types
d’assurances collectives qui offrent divers avantages se présentent comme étant des
assurances de groupes.

2) Les assurances de groupes

289. Le CAM et le Code CIMA le définissent en ces termes : « Est un contrat d'assurance
de groupe le contrat souscrit par une personnelle morale ou un chef d'entreprise en vue de
l'adhésion d'un ensemble de personnes répondant à des conditions définies au contrat, pour
la couverture des risques dépendant de la durée de la vie humaine, des risques portant
atteinte à l'intégrité physique de la personne ou liés à la maternité, des risques, d'incapacité
de travail ou d'invalidité ou de risque de chômage. Les adhérents doivent avoir un lien de

158
même nature avec le souscripteur. »349. Il ressort de la disposition précitée que les assurances
de groupe sont basées sur une relation contractuelle réunissant trois personnes à savoir :
l’assureur, le souscripteur et l’adhérent. Le souscripteur est la personne morale ou le chef
d’entreprise qui contracte avec l’entreprise d’assurance.

290. Quant aux assurés, ils se contentent d’adhérer à ce contrat auquel ils n’ont participé.
Cette situation amène les législateurs à instituer une obligation d’information à son égard. Le
contenu de cette obligation se trouve dans les articles 109 du CAM et 98 du Code CIMA.

Ainsi, le souscripteur est tenu :

- de remettre à l'adhérent un document établi par l'assureur qui définit les garanties et
leurs modalités d'entrée en vigueur ainsi que les formalités à accomplir en cas de
sinistre ;

- d'informer par écrit les adhérents des modifications qu'il est prévu, le cas échéant,
d'apporter à leurs droits et obligations.

L’obligation d’information à la charge du souscripteur va au-delà même de la souscription.


Elle est de mise durant la vie du contrat. En effet, le Code CIMA comme le CAM offrent à
l’adhérent de l’assurance de groupe la faculté de dénoncer son adhésion en raison des
modifications lorsqu’il en a été informé. Il est à préciser que cette faculté de dénonciation
connait une exception : « … lorsque le lien qui l'unit au souscripteur rend obligatoire
l'adhésion au contrat »350.

291. Même si, le CAM précise toutefois que la preuve de la remise de la notice à l'adhérent
et de l'information relative aux modifications contractuelles incombe au souscripteur351,
aucune des législations ne prévoit une sanction en cas de défaut d’information. En l’absence
de texte, il est clair que la jurisprudence devra opter pour la mise en œuvre de la
responsabilité du souscripteur qui n’a pas remis aux adhérents la notice d’information soit,
opter pour l’inopposabilité. Cette inopposabilité contrairement à la mise en œuvre de la
responsabilité qui est une sanction ne concerne que les actes effectués352.

349
Les arts. 106, CAM, et 95, Code CIMA reprennent textuellement les dispositions de l’article L 141-1 du CAF
tel qu’il résulte de la loi n° 89-1014 du 31 décembre 1989.
350
Art.109, al.5 du CAM, V. art 98, al. 5 du Code CIMA
351
Article 109 du CAM.
352
A-M. ASSI-ESSO, J. ISSA-SAYEGH et J. LOHOUES-OBLE, op. cit., p. 287.

159
C- Quelques obstacles au développement de l’assurance-vie.

292. Au Bénin, la libéralisation du secteur de l’assurance-vie date de 1995. Au début elle a


suscité un engouement pour la souscription des contrats d’assurance-vie. Mais après une
décennie d’activités, la croissance des émissions d’assurance-vie a ralenti. Ainsi, les effets
attendus de l’ouverture de cette catégorie d’assurance demeurent approximatifs et sont moins
patents. Pire, la commercialisation de l’assurance-vie est confrontée depuis quelques années à
une demande massive de rachats des contrats353. Le caractère posthume du gain ne se conçoit
pas le Béninois aspire à un gain immédiat susceptible de résoudre des problèmes354.

Pour corroborer la conception morbide de l’assurance vie chez les Africains, J.


YEATMAN a évoqué le cas d’un homme qu’il essayait de convaincre de prendre une
assurance obsèques ce dernier lui a fait l’objection suivante : « …si quelqu’un dans ma
famille venait à savoir que le jour où je mourrai un assureur serait tenu de verser quelques
millions de franc CFA, et bien vous, pourrez être sûr que je mourrai dans la semaine ! »355.
Pour éviter cette tentation le CAM et le Code CIMA dans la même logique qui sous-tend
l’indignité successorale356 existant en droit français ont prévu que : « Le contrat d’assurance
cesse d’avoir effet à l’égard du bénéficiaire qui a été condamné pour avoir donné
volontairement la mort à l’assuré. Le montant de la provision mathématique doit être versé
au contractant ou à ses ayants cause, à moins qu’ils ne soient condamnés comme auteurs ou
complices du meurtre de l’assuré. Si le bénéficiaire a tenté de donné la mort à l’assuré, le
contractant a le droit de révoquer l’attribution du bénéfice de l’assurance même si les

353
Le rachat ou rupture anticipée du contrat est une opération par laquelle, à la demande de l’assuré-souscripteur,
la société d’assurance est obligée de reprendre la dette conditionnelle ou à terme dont elle est tenue vis-à-vis du
bénéficiaire. Plus prosaïquement, il s’agit d’une opération par laquelle l’assureur met fin au contrat d’assurance
vie comportant une provision mathématique, avant le terme prévu, en remboursant le montant de ladite
provision. Voir : Etude sur les ruptures anticipées de contrats d’assurance sur la vie, Direction des assurances
du Bénin, mars 2007. p.7.
354
« azo ewa eo gbe we e nono bo dodu » ce qui se traduit par : "Le fruit du travail exécuté se jouit du vivant". :
voir. Etude sur les ruptures anticipées de contrats d’assurance sur la vie, op. cit., p.26.
355
J YEATMAN in Revue risque, op. cit., p.74.
356
L’indignité successorale est une peine civile privant une personne de la possibilité de recueillir une succession
en raison de certaines fautes graves qu’elle aurait commise à l’encontre du de cujus. V. art.726 et 727 du Code
Civil français.

160
bénéficiaires avaient accepté la stipulation faite à son profit. » Selon les termes de l’article 78
du Code CIMA357,

293. Quelle que soit sa situation, aussi pauvre et malade qu’il soit, l’Africain aspire, à vivre
aussi longtemps que possible. Il reste dans l’espérance d’un lendemain meilleur et cet espoir
est sans aucun doute la seule motivation qui le rend tenace devant les épreuves de la vie.
Aussi, la mort est une réalité effrayante voire tabou en Afrique. Au Bénin, la mort n’est
évoquée que par euphémisme : les Béninois n’aiment pas parler de leur mort, en parler, c’est
tout comme l’invoquer en ce sens, Basile KOSSOU affirme que : « le Noir a une vision du
monde comme engrenage de forces. Dans une nature où se manifestent continuellement des
forces qui le défient, le Noir aurait pris conscience de sa faiblesse et de son insécurité totale.
Il n’est que sur " le qui-vive ", dans la crainte et la résignation avec un imaginaire nourri de
fantasmes et d’hallucinations »358.

294. Aujourd’hui, le contexte de la famille africaine montre bien souvent des besoins de
sécurité assez diverses et variés, liés ou non à la durée de la vie humaine. Les Africains
deviennent de plus en plus soucieux des conséquences que pourraient avoir leur disparition
brutale sur les conditions d’éducation et de bien-être de leurs enfants par exemple. Ils peuvent
aussi s’interroger sur comment parer à l’éventualité du non remboursement d’un emprunt en
cas d’accident ou d’incapacité permanente…C’est ce qui pourrait donner un sens à la
souscription à des contrats d’assurance sur leur personne qui en fin de compte réduit les
risques liés aux imprévus.

295. En Afrique, un autre fléau touche particulièrement les populations. Il s’agit du


problème de la couverture de la santé des populations actives, et celle des membres de leurs
familles. C’est le domaine de prédilection des assurances sociale (assurance maladie) qui
garantit aussi les risques liés à toute activité professionnelle formelle.

357
Article 102 du CAM.
358
B. KOSSOU et L -V. THOMAS, Se et gbe : Dynamique de l’existence chez les Fon, Paris, La pensée
Universelle, 1983, p.83.

161
Paragraphe II : Les assurances sociales

296. Les systèmes de protection sociale modernes constituent une forme d’assurance
instaurés au XIXe siècle pour satisfaire les besoins sociaux de la classe ouvrière urbaine nés
de l'industrialisation. Aujourd’hui, les systèmes des assurances sociales se sont répandus
partout dans le monde. La sécurité sociale revêt une importance capitale. Le droit à la sécurité
sociale est érigé en droit fondamental de la personne humaine. Parmi les branches, on
identifie généralement trois catégories : celle des prestations familiales (y compris prestations
de maternité), celle des accidents du travail et des maladies professionnelles et celle de la
vieillesse, de l’invalidité et du décès (prestations de survivants).

297. Au Bénin, le système de Sécurité Sociale destiné à la couverture des salariés soumis
aux dispositions du Code du travail, remonte aux temps coloniaux359. Nous envisageons
d’aborder l’assurance sociale à travers l’assurance maladie et les prestations sociales (A) puis,
la garantie des risques professionnels (B)

A- L’assurance maladie et les prestations sociales

298. Comme le souligne la CIPRES360, la prévoyance sociale en Afrique trouve ses sources
dans la Déclaration universelle des droits de l’homme du 10 décembre 1948, qui précise dans
son article 22 que : « Toute personne, en tant que membre de la société, a droit à la sécurité
sociale; elle est fondée à obtenir la satisfaction des droits économiques, sociaux et culturels
indispensables à sa dignité et au libre développement de sa personnalité, grâce à l'effort
national et la coopération international, compte tenu de l’organisation et des ressources de
chaque pays. » et dans la convention n°102 de l’Organisation Internationale du travail (OIT)
qui fixe la norme minimale de la sécurité sociale.

359
. Sur le plan évolutif, le système béninois de sécurité sociale, est le fruit d'une construction dans le temps. Il a
été mis en place par l'arrêté n° 225 ITLS/D du 26 janvier 1956, portant organisation de la Caisse de
Compensation des Prestations Familiales du territoire du Dahomey.
360
La Conférence Interafricaine de la Prévoyance Sociale (CIPRES) a été instituée par un Traite signe en
septembre 1993 à Abidjan, par quatorze pays d’Afrique subsaharienne (les douze pays de l’actuelle zone
CIMA/FANAF, augmentes des Comores et de la Guinée Equatoriale) La République Démocratique du Congo a
été admise au sein des Etats membres de la CIPRES le 27 février 2009.

162
La Convention n°102 de l’OIT définit les prestations qui forment le noyau de la norme
minimale, à savoir : les soins médicaux, les indemnités de maladie, les prestations de
chômage, les prestations de vieillesse, les prestations en cas d’accident du travail et de
maladie professionnelle, les prestations aux familles, les prestations de maternité, les
prestations d’invalidité ou les prestations de survivants. Les prestations sont généralement
organisées en régimes et en branches. Parmi les régimes, on distingue généralement le régime
des fonctionnaires et celui des salaries relevant du Code du travail. Comme au Bénin, en
Mauritanie, c’est la Caisse Nationale de Sécurité Sociale (CNSS) qui est chargée de la gestion
des risques vieillesse, invalidité, décès (survivants), prestations familiales, et ce sous la tutelle
du Ministère de la Fonction Publique et du Travail. La Caisse Nationale d’Assurance Maladie
gère aussi les risques professionnels.

299. Les branches essentiellement prévues par nos systèmes d’assurances sont relatives aux
prestations familiales. Elles sont octroyées au travailleur salarié en vue de lui permettre de
faire face aux charges de famille qui ne sont pas prises en compte par l’employeur lors de la
détermination de leur salaire de base. Les régimes de la sécurité sociale, en Mauritanie et au
Bénin, il est important de le dire ne couvre pas le risque chômage.

Dans le système béninois, les prestations sociales comprennent :

- les allocations prénatales ;

- les allocations familiales ;

- les indemnités en faveur des femmes salariées en couche ;

- les prestations en nature relatives à l’action sanitaire et sociale361.

On observe qu’il s’agit plus de sommes modiques et symbolique que de véritables aides 362.
Pour bénéficier des prestations que nous venons d’énumérer, trois conditions doivent être
remplies lorsqu’il s’agit du modèle béninois de la sécurité sociale :

- Etre travailleur salarié(e) pendant au moins six mois sans interruption chez un ou
plusieurs employeurs ;

361
Dans le système mauritanien, les allocations comprennent les allocations prénatales, la prime de naissance de
l’indemnité journalière de maternité et les allocations familiales.
La prime de naissance est de 2800 Um en Mauritanie, moins de dix euros, l’allocation familiales s’élève à
362

moins d’un euro par mois en Mauritanie et à environs trois euros au Bénin.

163
- Avoir un ou plusieurs enfants à charge, soit son épouse en état de grossesse, soit être
femme salariée en état de grossesse ;

- Avoir constitué un dossier à la Caisse.

300. Dans le système béninois, pour bénéficier des allocations familiales, il faut :

- avoir travaillé 18 jours ou 120 heures par mois et perçu comme salaire au moins le
SMIG ;

- Avoir des enfants à charge âgés de 0 à 21 ans au maximum ;

- Avoir le nombre d’enfants ouvrant droit aux allocations familiales est fixé à 6 au
maximum, mais remplaçable progressivement en cas de majorité ou décès363.

A- Les risques professionnels.

301. Les risques professionnels couvrent une vaste catégorie de travailleurs. Au Bénin cette
assurance permet la couverture des travailleurs salariés, les élèves, les étudiants les stagiaires.

En Mauritanie, les travailleurs indépendants ne sont pas couverts pour les risques accidents du
travail-maladies professionnelles. Ils n’ont pas droit non plus aux prestations familiales.
Cependant, ils cotisent à hauteur de 9% au risque maladie sur la totalité de leurs revenus, ce
qui leur permet d’avoir droit à une couverture en cas de maladie364.

302. La branche des risques professionnels a pour but de prévenir et de réparer les accidents
du travail (1) et les maladies professionnelles (2). Cette réparation se traduit par des
prestations en nature et en espèces.

363
La sécurité sociale mauritanienne exige d’être salarié, d’avoir au moins un enfant à charge, d’avoir accompli
un minimum de travail de 18 jours ou 120 heures, d’avoir perçu un salaire au minimum égal au SMIG
364
http://www.cleiss.fr/docs/regimes/regime_mauritanie.html#adtmp, consulté le 10 septembre 2017.

164
1) L’accident de travail

303. L’accident de travail est un accident survenu par le fait ou à l’occasion du travail,
quelle qu’en soit la cause, à tout travailleur relevant du régime général de sécurité sociale.
C’est également un accident survenu au travailleur pendant un voyage dont les frais sont à la
charge de l’employeur. C’est enfin un accident survenu au travailleur pendant le trajet de sa
résidence au lieu de travail et vice-versa ou pendant le trajet entre le lieu du travail et le lieu
où il prend habituellement ses repas et vice-versa dans la mesure où le parcours n’a pas été
interrompu ou détourné pour des motifs d’ordre personnel ou indépendant du travail.
L'employeur doit déclarer l'accident ou la maladie dans les 48 heures365. Les prestations
servies comprennent essentiellement les soins médicaux nécessités par la lésion résultant de
l'accident et dans les cas suivants :

- incapacité temporaire de travail l’indemnité journalière ;

- incapacité permanente, totale ou partielle, la rente ou l’allocation d’incapacité ;

- décès, les rentes de surveillants et l’allocation des frais funéraires.

En matière de frais liés aux soins, à l'exception des soins de première urgence qui sont à la
charge de l'employeur, les soins médicaux sont fournis par la caisse ou par les établissements
choisis parmi les formations officielles et les formations privées agréées par les autorités
médicales, auquel cas les soins font l'objet d'un remboursement sur la base du tarif forfaitaire
établi par voie d'accord entre ces établissements et la caisse.

La rémunération de la journée complète au cours de laquelle le travailleur a cessé son travail


est intégralement à la charge de l'employeur.
L'indemnité journalière est versée dès le lendemain de l'accident et son montant est égal aux
deux tiers de la rémunération journalière moyenne de la victime jusqu'à sa complète guérison.

En cas d'incapacité permanente totale dûment constatée, la victime a droit à une rente
d'incapacité totale égale à 85 % de la rémunération moyenne mensuelle.

La pension est majorée de 50 % si l'intéressé a besoin de l'assistance d'une tierce personne.

365
Il est aussi de 48 heures au Bénin. Cependant, en droit béninois, sauf cas de force majeur, impossibilité
absolue ou de motif légal, l’employé est tenu de prévenir son employeur dans les 24 heures, Voy. Article 56 de
la loi n°98-019 du 21 mars 2003 portant Code de la sécurité sociale en République du Bénin.

165
304. La victime d'un accident du travail atteinte d'une incapacité partielle permanente a
droit à une rente lorsque le degré de son incapacité est égal ou supérieur à 15 %.

Le montant de la rente d'incapacité permanente partielle est, selon le degré d'incapacité,


proportionnel à celui de la rente à laquelle la victime aurait eu droit en cas d'incapacité
permanente totale. L'allocation d'incapacité est versée en une seule fois lorsque le degré de
l'incapacité est inférieur à 15 %. Le montant de l'allocation d'incapacité est calculé en
multipliant par trois le montant annuel de la rente correspondant au degré d'incapacité de la
victime. Lorsque la victime décède suite à l'accident du travail, les survivants ont droit aux
rentes de survivants et à une allocation de frais funéraires366.

305. Les régimes de sécurité sociale des pays africains ne couvrent généralement que les
salariés du secteur formel lesquels constituent une faible partie de la population à majorité
agricole. En Afrique subsaharienne, entre 5 et 10 % seulement de la population active sont
couverts367.

2) La maladie professionnelle

306. Une maladie professionnelle est un état pathologique résultant de l'exposition


habituelle à une nuisance déterminée au cours du travail. Il est très difficile de donner une
définition plus précise, tant les formes cliniques de ces maladies ne se distinguent pas
vraiment des formes sans exposition professionnelle. C'est pour cette raison qu’ont été
définies les maladies professionnelles indemnisables. La maladie doit en principe figurer dans
la nomenclature arrêtée par la législation de la sécurité sociale. Deux éléments caractérisent la
maladie professionnelle :

- le travailleur doit avoir été exposé au risque pendant une certaine période ;

- le travailleur doit présenter les symptômes de la maladie dans un délai limité.

Les déclarations sont recevables même après que le travailleur ait cessé d’être exposé au
risque dans la limite des délais d’incubation prévus par les textes.

366
Au Bénin, les frais funéraires sont remboursés par la CNSS dans la limite de cinq fois la rémunération
mensuelle minimale servant de base au calcul de l'indemnité journalière (2/3 du salaire journalier).
367
W. VAN GINNEKEN, Sécurité sociale pour un secteur informel : un nouveau défi pour les pays en
développement in, Revue internationale de la sécurité sociale, 1999, p. 61.

166
L’avantage de la sécurité sociale est sa rapidité en matière d’indemnisation. En effet, les
victimes sont directement indemnisées sans devoir nécessairement rechercher la
responsabilité. Aussi, il n'est pas nécessaire que l'auteur du dommage soit identifié et que son
rôle actif dans la réalisation du dommage soit démontré368. La majeure partie des systèmes
africains de sécurité sociale est en deçà du minimum requis par la Convention 102 de
l'Organisation Internationale du Travail.

307. A l’image de l’état des compagnies d’assurances durant les périodes de


nationalisation, le régime de la sécurité sociale des pays d’Afrique subsaharienne est peu
reluisant. Une inspiration du modèle Sud-africain peut permettre une sortie de crise. En effet
le rôle majeur du secteur des assurances de l'Afrique du Sud résulte en partie du succès
enregistré dans la branche vie. L'assurance-vie Sud-Africaine bénéficie des cotisations
perçues dans le domaine de la sécurité sociale. Contrairement à la pratique existante dans
d'autres pays africains, la gestion de la sécurité sociale en Afrique du Sud est assurée par les
entreprises privées369.

308. Aujourd’hui pour garantir les biens de la personne et pour faire face aux conséquences
des responsabilités de celle-ci, les assurances de dommages sont indispensables.

368
G. VINEY, Le déclin de la responsabilité civile, Paris, L.G.D.J., 1965, p. 6.
369
Laurent NZOSABA, A la recherche d’un système d’indemnisation des victimes d’accidents de la circulation
routière adapté au contexte socio-économique africain, Thèse, Université Catholique de Louvain, 2005. p.311.

167
Conclusion du chapitre II

309. Dans les assurances de personnes, c’est l’intégrité physique de l’assuré qui est prise en
considération : il est protégé contre les risques qui le menacent dans son existence, son
intégrité, sa santé ou ses capacités. C’est pourquoi l’évaluation et la réparation du dommage
sont primordiaux. En matière d’assurances, les assurances de personnes constituent une
catégorie à part. En effet, elles regroupent l’assurance-vie qui demeure indubitablement le
plus important des contrats relatifs aux assurances de personnes. Ce type d’assurance apparait
comme étant « un contrat par lequel, en échange d’une prime, l’assureur s’engage à verser au
souscripteur ou au tiers par lui désigné, une somme déterminée (capital ou rente) en cas de
mort de la personne assurée, ou de sa survie à une époque déterminée ». Les assurances contre
les accidents corporels et contre la maladie, aussi appelées assurances de personnes non-vie,
constituent la seconde catégorie d’assurances de personnes. L’assurance contre les accidents
corporels a pour objet de garantir l’assuré contre les conséquences d’accidents corporels dont
il pourrait être victime. Il s’agit d’une assurance des accidents subis par l’assuré, et non une
assurance des accidents causés par lui (assurances dommage). Habituellement elle couvre les
risques de décès, d’incapacité temporaire et d’invalidité permanente de l’assuré, à laquelle
s’ajoute en règle générale une garantie de remboursement des frais médicaux et hospitaliers.
L’assurance contre la maladie a pour objet de couvrir l’assuré contre les conséquences
financières de maladies qui pourraient l’atteindre. Contrairement aux assurances de
personnes, dans les assurances de dommages, le risque concerne le patrimoine de l’assuré : il
peut frapper soit ses actifs dans l’assurance de choses ou de biens, soit créer à sa charge une
dette de responsabilité.

310. Pour plus d’efficacité, la prévention des risques dans les assurances de personnes en
Afrique doit réellement s’adapter à l’environnement et au contexte socio-économique. Les
assurances de personnes ne suffisent pas à elles seules à garantir les aléas de la vie. En effet,
en plus de sa personne, l’assuré se doit de garantir ses biens et sa responsabilité par les
assurances de dommages.

168
Chapitre III : Les assurances de dommages

311. Les assurances de dommages visent la réparation des conséquences d’un événement
dommageable affectant le patrimoine de l’assuré ou celui d’un tiers. De manière classique, les
types d’assurances dommages sont classifiés en deux groupes :

- Les assurances de choses (Section I) couvrent les biens de l’assuré Il s’agit de


garantie incendie, mortalité de bétail, dégâts des eaux, vols bris de glace, bris de machine,
grêle. Ces assurances ont la particularité en Afrique d’être difficiles à commercialiser, en
raison des coûts de gestion et de mise en place importants (visite de risques, évaluation des
sinistres, risque moral et fraude). La majorité des potentiels clients ne comprennent pas le fait
que les fonds versés soient acquis à l’assureur si l’événement garanti ne se produit pas.
- Les assurances de responsabilité (Section II) soumises au principe indemnitaire elles
couvrent les dommages corporels ou aux biens causés par l’assuré à des tiers. Dans ce type
d'assurance, le mécanisme d'assurance met en jeu trois personnes : l'assureur, l'assuré
responsable et la tierce victime non partie au contrat mais pouvant devenir bénéficiaire de
l'assurance.

Section I : Les assurances de choses

312. L’objet principal de l’assurance de choses est l’indemnisation de l’ayant droit pour le
préjudice matériel qu’il subit en raison de la détérioration, de la destruction de la perte ou de
la disparition de la chose assuré. Les faits volontaires de l’assuré, ou l’usure n’étant pas
garantis, il serait utile de s’interroger sur les sources potentielles du dommage : l’IARD
(Paragraphe I). Ensuite, deux catégories d’assurances seront analysées : les facultés à
l’importation et l’assurance-crédit (Paragraphe II).

169
Paragraphe I : Les sources potentielles d’un dommage : l’IARD

313. L'IARD est un sigle utilisé dans le domaine des assurances pour désigner les clauses
d'un contrat dont l'objet porte sur les dommages et les biens. IARD signifie "Incendie,
Accidents, Risques Divers". Le secteur IARD comprend par exemple les clauses contenues
dans les assurances auto ou les assurances multirisques habitation. Ces assurances sont à
distinguer de celles portant sur la protection de la personne (accident corporel, décès, santé,
...). L’IARD est constitué essentiellement des aléas liés à l’incendie (A), et des autres risques,
autrement dit risques divers (B)

A- L’assurance incendie

314. L'assurance incendie est une assurance de dommage c'est-à-dire que le montant de
l'indemnité dépend de l'évaluation du préjudice causé par le sinistre. Elle est soumise au
principe indemnitaire370. Selon le CAM de même que le Code CIMA : « L'assureur contre
l'incendie répond de tous les dommages causés par conflagration, embrasement ou simple
combustion. Toutefois, il ne répond pas, sauf convention contraire, de ceux occasionnés par
la seule action de la chaleur ou par le contact direct et immédiat du feu ou d'une substance
incandescente s'il n'y a eu ni incendie, ni commencement d'incendie susceptible de dégénérer
en incendie véritable. »371.

Ce type d’assurance couvre aussi les dommages occasionnés par l’incendie (feu
violents incontrôlés et fortement destructeurs ou combustions avec flammes en dehors d’un
foyer normal, y compris les fumées consécutives) l’explosion la chute directe de la foudre les
fuites accidentelles de sprinklers.

370
Deux considérations d'ordre public justifient l'existence et l'application du principe indemnitaire. D'abord, il
faut éviter que l'assurance incite l'assuré à des sinistres volontaires et, ensuite, il faut éviter la spéculation de
l'assuré souscrivant une forte assurance dans l'espoir que, indépendamment de sa volonté, le sinistre se réalise et
lui procure en conséquence un enrichissement, Z. YIGBEDEK, L'assurance automobile, théorie et pratique,
1ère édition, 1997. p.202, cité par F-Y. MONTCHO-AGBASSA, Les obligations de l'assuré en matière
d'assurances dommages.
371
Article 61 CAM. Article 45 Code CIMA.

170
B- Des risques divers assurables

315. Le risque peut être défini comme un événement éventuel, incertain, dont la réalisation
ne dépend pas exclusivement de la volonté des parties. Et pouvant causer un dommage.372 Il
est l'élément fondamental du contrat. C'est lui qui détermine la volonté de l'assureur à
s'engager. Le législateur a fait de sa déclaration une obligation en vue de protéger l'assureur
contre l'assuré qui, volontairement ou non, chercherait à sous-évaluer le risque déséquilibrant
ainsi la mutualité.

La garantie contre le vol est une des protections majeures contre la hausse
spectaculaire des cambriolages dans les différentes capitales africaines. Le type d'habitation,
la zone géographique, la valeur des biens couverts... Tous ces éléments influent sur
l’assurabilité contre le vol. Les conditions de sécurité ne sont globalement pas réunies pour
pouvoir encourager les assureurs à garantir ce type de risque. A cela peut s’ajouter le risque
de fraude. Même si des textes existent, l’assurance contre le vol reste peu développée.

316. Il existe des garanties complémentaires que l’on pourrait citer il s’agit des destructions
et détériorations mobilières et immobilières consécutives aux faits délictueux accidentels ou
naturels. Initialement, la garantie en matière d’assurance de dommage se limite aux incendies.
Cependant, pour adapter la disposition aux réalités climatiques, existantes sur son territoire, la
Mauritanie, a étendu les garanties assurables aux effets du vent dus aux tempêtes, ouragans ou
cyclones. Ainsi, les catastrophes naturelles retenues par le système des assurances
mauritaniennes à travers son Code des assurances se limitent aux effets du vent. Les
perspectives de croissance économique des pays en développement sont sérieusement
entravées par les catastrophes naturelles et autres chocs exogènes, qui génèrent souffrances
physiques et difficultés financières à court et plus long terme. Les solutions en matière
d'assurance sont reconnues de plus en plus en tant qu'instruments efficaces de réduction des
risques liés aux catastrophes naturelles que sont les sécheresses, les inondations, les cyclones
et les tremblements de terre. Des risques qui touchent fortement le secteur agricole de même
que les activités d’élevage. C’est à la micro assurances que revient l’essentiel de la couverture
de risques liés aux aléas de la nature373.

372
S. GUINCHARD et T. DEBARD, op.cit., p. 969.
373
V. infra, n° 750.

171
317. L’agriculture est une entreprise risquée. Tout d’abord, les agriculteurs font face à
plusieurs risques liés au marché et à la production ce qui rend leur activité instable. Ensuite,
les prix des intrants peuvent augmenter sans anticipation alors que les prix de vente peuvent
chuter et les récoltes moisir dans les entrepôts. Les agriculteurs peuvent aussi être exposés à
des catastrophes naturelles telles que la sécheresse, les inondations ou les infestations qui
détruisent les cultures et les récoltes.

Au Bénin, bien que définie par les textes374, l’assurance agricole n’est pas
opérationnelle. Ainsi, il est universellement admis que l'activité agricole est sujette à de
nombreux risques, notamment climatiques, pouvant entraîner des dommages parfois
importants, qui affectent les revenus des agriculteurs. L’assurance agricole est l’un des
moyens les plus efficaces pour gérer les risques liés à l’activité agricole. Elle constitue un
instrument financier, puisque les indemnisations jouent un rôle stabilisateur des revenus. En
effet, l’agriculteur qui subit une perte dans son exploitation perçoit une indemnisation qui lui
permet de reprendre ses activités. Elle constitue également une garantie pour l’obtention de
crédits, car elle permet la solvabilité financière par la stabilité des revenus. Un autre avantage
réside dans le fait que l’agriculture contribue à la fixation des populations en milieu rural, et
permet une plus grande régularité des revenus contribuant à réduire les tensions
inflationnistes sur les prix des produits agricoles.

En tout état de cause, le marché des assurances agricoles aussi bien en Mauritanie375
qu’au Bénin reste peu développé, la gamme de contrats d’assurances n’a pas été adaptée à
l’évolution récente des besoins des agriculteurs. En Afrique subsaharienne, la grande
majorité des agriculteurs ne peuvent compter que sur la solidarité ou à défaut sur leurs
propres forces lorsqu’ils sont touchés par une sécheresse ou une inondation376. Celle-ci freine
l’augmentation et l’intensification de la production agricole, gêne la construction de filières
de transformation, handicape les produits locaux contre les produits importés. Les
agriculteurs non assurés remboursent moins leurs crédits. Cela déstabilise les établissements
financiers et grève par la même occasion le budget de l’État, lorsqu’il s’agit de banques

374
Article 55 Code CIMA.
375
Les sécheresses sont un phénomène récurrent en Mauritanie. Toute les 10-15 ans en moyenne, le pays est
obligé de faire face à une crise alimentaire plongeant une grande partie des Mauritaniens dans un état d'extrême
vulnérabilité.www.noorinfo.com
376
La variabilité spatio-temporelle des pluies des régions soudano-sahéliennes est parmi les plus importantes du
monde et constitue une contrainte majeure à laquelle les paysans se sont adaptés par des systèmes de culture
extensifs. Voir par exemple AFFHOLDER, 1997 ; DE ROUW, 2004

172
publiques.

318. En France, toutes les personnes qui possèdent pour leurs biens une assurance
« dommages contre les effets des catastrophes naturelles » sont automatiquement
indemnisées si ces dernières surviennent. La loi du 13 juillet 1982377, reprise dans l'article L-
125-1 (et les suivants) dans le Code des assurances, puis modifiée par la loi du 4 août 2003,
fixe le cadre de cette indemnisation. Cette couverture automatique, repose sur un régime de
solidarité nationale, est conditionnée par le fait que l'événement doit être reconnu comme une
« catastrophe naturelle » par les pouvoirs publics. Pour cela, un arrêté interministériel doit
être officialisé pour autoriser, ensuite, les victimes à constituer un dossier auprès des
assurances en vue du dédommagement des préjudices subis.

Depuis la réforme de la loi du 16 juillet 1992, les effets des catastrophes naturelles
sont les dommages matériels directs non assurables, ayant eu pour cause déterminante
l’intensité anormale d’un agent naturel, lorsque les mesures habituelles à prendre pour
prévenir ces dommages n’ont pu empêcher leur survenance ou n’ont pu être prise.

Les solutions en matière d'assurance sont reconnues de plus en plus en tant


qu'instruments efficaces de réduction des risques liés aux catastrophes naturelles que sont les
sécheresses, les inondations, les cyclones et les tremblements de terre.

319. Dans les pays en développement, les solutions d'assurances traditionnelles ne sont pas
parvenues, loin s'en faut, à couvrir les risques liés aux catastrophes naturelles. Par exemple
le CAM en son article 26 alinéa 2, laisse à l’assureur, le libre choix de garantir ou non les
dommages résultants des cas fortuits. Cependant, il faut que l’assureur, dans la police
d’assurance stipule, de manière formelle son désengagement en cas de dommage.
Contrairement à l’article 26, du CAM précédemment cité, l’article 67 du même Code dispose
« sauf convention contraire, l’assurance ne couvre pas les éruptions de volcan, les
tremblements de terre et autres cataclysmes ». Le point de convergence de ces deux articles
réside dans la faculté des parties au contrat des stipuler, de manière expresse, les dommages
garantis.

320. De prime abord, la garantie se limite aux incendies. Cependant, pour adapter la
disposition aux réalités climatiques, existant sur le territoire de la Mauritanie, la garantie sera
étendue aux effets du vent dus aux tempêtes, ouragans ou cyclones. Ainsi, les catastrophes

377
Loi n°82-600 du 13 juillet 1982 relative à l’indemnisation des victimes de catastrophes naturelles.

173
naturelles retenues par le système des assurances mauritaniennes à travers son Code des
assurances se limitent aux effets du vent.

En couvrant une partie des risques financiers liés aux catastrophes, l'assurance peut
aider à répondre aux besoins financiers des populations touchées et, par là même, à préserver
leurs moyens d'existence et éviter leur paupérisation rapide consécutivement à une
catastrophe.

321. Au vue de leur contribution dans le PNB ou de leur poids dans domaine financier, les
facultés à l’importation et l’Assurance-crédit méritent notre attention.

Paragraphe II : Les facultés à l’importation et l’Assurance-crédit

322. Une première étape de notre cheminement nous oblige à nous focaliser sur l’assurance
des facultés à l’importation (A). L’émergence de l’assurance-crédit (A) est indéniable en
Afrique. C’est à travers une étude que nous arriverons à en démontrer l’importance.

A- L’assurance des facultés à l’importation

323. L’assurance des facultés à l’importation est la deuxième catégorie d’assurance


obligatoire énoncée par le Code CIMA (dans son livre II, titre II, article 278). Nous devons
souligner qu’une condition doit être remplie pour que cette assurance soit vraiment
obligatoire. En effet, le Code CIMA ne rend cette assurance obligatoire que dans la mesure où
la législation nationale envisagée le prévoit378. Les facultés à l’importation désignent tous les
biens et marchandises acheminés vers le Bénin. Ainsi cette obligation d’assurance aboutit à
interdire un achat fait en coût assurance et frais (CAF) car dans ce mode d’importation,
l’assurance est déjà comprise et relève de la compétence du vendeur situé à l’étranger et qui
bien évidemment n’utilisera pas un assureur béninois.

378
Au Bénin l’assurance des facultés à l’importation est rendue obligatoire et se trouve régie par le décret n°99-
79 du 12 février 1999.

174
324. Dans le secteur du transport routier, les risques caractérisés prévus par l’article 3 379

sont ceux correspondant aux événements suivants :

Collision du véhicule et/ou attelage ou de son chargement avec un véhicule ou un corps fixe
ou mobile ; rupture d’essieu ; bris de châssis ; renversement du véhicule et/ou attelage ; chute
d’arbres, de constructions, de câbles aériens ou de rochers sur le véhicule et/ou l’attelage ou
sur leur chargement ; éboulement subit de terre ou de montagne ; affaissement subit de route
ou de chaussée ; écroulement de ponts ou de bâtiments, tunnels ou autres ouvrages d’art ;
rupture de l’attelage ; chute dans les fossés, ravins, précipices, rivières, fleuves, incendies ;
explosion du véhicule et/ou de son attelage ou de leur chargement ; vol avec violence ou
agression, vol des marchandises avec le véhicule et/ou l’attelage. En Mauritanie, ce sont les
articles 177 et 178, titre V chapitre II du CAM qui prévoit l’obligation d’assurance pour les
facultés importées.

325. L’initiative d’entreprise et l’apparition de classe moyenne voire de nouveaux riches font
que le crédit est en nette croissance en Afrique. Pour que l’opération soit garantie et perdure,
il est important que l’assurance-crédit se développe.

B- L’émergence de l’assurance-crédit en Afrique

326. Comme toute activité, le crédit présente des risques, d’abord pour le créancier qui
redoute l’insolvabilité du débiteur, mais aussi pour le débiteur dont le surendettement peut
conduire à la faillite s’il est commerçant, ou à la déconfiture s’il est débiteur privé. A
l’origine, l’assurance-crédit était basée sur deux concepts qui ont inspiré sa création : une
approche purement commerciale qui considérait l’assurance-crédit comme un moyen pour un
vendeur de couvrir les risques d’insolvabilité de ses acheteurs, que ceux-ci se trouvent ou non
à l’étranger et une approche plus politique qui défend l’idée que l’assurance-crédit est un
moyen d’accroître les exportations d’un pays ce qui explique que cette attitude a été défendue
dans de nombreux pays par les gouvernements eux-mêmes.

327. Dans la logique du schéma classique de développement économique qui veut que la
croissance soit alimentée par les exportations et les investissements étrangers, l’assurance-

379
Voir Décret n° 99-79 du 12 février 1999 applicable au Bénin « Le mode d’assurance est librement choisi par
les parties. Toutefois, à défaut d’une couverture « tous risques », l’assurance doit être souscrite en cas de
transport maritime aux conditions minima de la garantie « Franc d’Avaries Particulières sauf » (FAP Sauf). »

175
crédit en Afrique s’est essentiellement inspirée de la seconde approche et a le plus souvent été
l’émanation du pouvoir politique soucieux d’accroître au plus vite les exportations des pays
africains en vue de favoriser ainsi leur croissance et leur diversification économique.
L’assurance-crédit a un champ très vaste d’activité ; elle porte sur des personnes (physique ou
morale, exerçant une activité lucrative ou non…) ; mais des personnes préalablement
identifiées. Il est nécessaire que la personne soit identifiable dès la signature de la police, car,
par hypothèse, l’assureur, ayant payé une indemnité, à un recours direct et à concurrence de la
somme due sur le débiteur, qu’il doit donc identifier avec certitude380.

328. L'assurance-crédit a pour objectif d'apporter des réponses concrètes pour des questions
relatives à la prévention et gestion du risque d'impayé, au recouvrement des créances en
souffrance, à une indemnisation rapide. En effet, pour trouver la solution adéquate au besoin
spécifique, les compagnies d'assurance ont réfléchi à diverses formes d'assurance :
l'assurance-crédit dans ce cas l'assureur prend une position qui se rapproche de celle de la
caution moyennant le versement d'une prime à la charge de l'emprunteur et l'assurance
incendie qui permet un dédommagement en cas de destruction, de dégradation ou du vol d'un
des biens de l'entreprise qui peut servir de suretés.

L’assurance contribue au développement du crédit car les banques et les sociétés de


financement acceptent plus facilement d’accorder des prêts quand elles savent que
l’emprunteur possède une garantie en cas de décès ou d’invalidité. L’assureur se substitue à
l’emprunteur décédé ou invalide pour rembourser le crédit.

Les organismes de crédit souscrivent souvent des contrats d'assurance de groupe couvrant
leurs futurs emprunteurs contre les risques de décès, de maladie et d'invalidité. L'assureur
s'engage à rembourser le capital restant dû à la banque en cas de survenance de l'un des
évènements garantis. En effet, afin de garantir la bonne fin du crédit accordé, une banque peut
souscrire plusieurs types de contrats d'assurances pour ses clients à savoir : l'assurance en cas
de décès, l'assurance Incendie, l'assurance perte d'emploi. Selon le premier alinéa de l’article
43 du Code CIMA, « les indemnités dues par suite d'Assurances crédit sont attribuées sans
qu'il y ait délégation expresse aux créanciers privilégiés ou hypothécaires suivant leur rang
».

329. Pour faire face à la multitude de dommage pouvant provenir des faits humains, et
surtout pour faire face à leur conséquence : principe de la responsabilité civile, un type

380
J. CHAHOUD, L’assurance-crédit interne, thèse, Université Montpellier 1, 2010 p. 37

176
d’assurance permet la couverture des réparations potentiellement à la charge de leurs auteurs.

Section II : Les assurances de responsabilité

330. La responsabilité civile évoque l’idée du dommage et de sa réparation, ou encore


l’indemnisation des victimes. Elle se définit comme l’obligation mise à la charge d’un
responsable de réparer les dommages causés à autrui. Le droit de la responsabilité ne suffit
pas cependant à atteindre le but d’indemnisation qu’il s’est fixé, car les patrimoines
individuels se montrent bien trop souvent inférieurs au montant de la réparation de tous les
dommages à indemniser. La responsabilité de plein droit de l’auteur du dommage s’est donc
vue complétée par l’aptitude particulière à l’assurance, qui est devenue aujourd’hui un des
fondements essentiels de la désignation du responsable, les tribunaux n’hésitant plus à
condamner quelqu’un à réparation sachant, qu’en définitive il n’en supportera pas le poids.
Par conséquent, on peut dire que l’assurance a été, et est, à la fois cause et effet de l’extension
de la responsabilité. En effet, lorsque le responsable est assuré, ce n’est pas lui le vrai débiteur
de l’indemnité, mais son assureur. Rappelons toutefois que : « Dans les assurances de
responsabilité, l'assureur n'est tenu que si, à la suite du fait dommageable prévu au contrat,
une réclamation amiable ou judiciaire est faite à l'assuré par le tiers lésé. »381

331. Nous allons d’abord nous intéresser aux assurances de responsabilité civile
(paragraphe I). Le transport étant une éminente source de dommage nous amène à traiter
ensuite les dommages en résultant (Paragraphe II)

381
Art 69 du CAM.

177
Paragraphe I : Les assurances de responsabilité civile

332 L’étude de deux types d’assurances responsabilité civile mérite d’être faite : d’abord
celle des particuliers (A), interviendra ensuite celle des entreprises (B)

A- L’assurance responsabilité civile des particuliers

333 Les types d'assurances responsabilité civile les plus courants sont essentiellement :
l’assurance multirisque habitation (1) et la responsabilité civile circulation (2)

1) L’assurance multirisque habitation

334. Le contrat d’assurance multirisque habitation a pour vocation de garantir à l’assuré


une couverture lui permettant de protéger son patrimoine familial contre les conséquences
d’événements affectant son domicile ou mettant en cause sa responsabilité ou celle d’un
membre de sa famille.

Ce type d’assurance couvre essentiellement les dommages aux biens, et les responsabilités
civiles.

335. En outre, le contrat multirisque habitation inclut généralement une assurance de


protection juridique et des garanties d’assistance.

On recourt très peu à ce type d’assurance en Afrique. Selon J. YEATMAN « la plus grande
partie des africains sont trop pauvres pour pouvoir payer des cotisations d’assurance et les
autres trop riches pour en avoir besoin ! » 382

382
Revue risque op. cit., p.87.

178
2) La responsabilité civile circulation

336. Comme nous aurons à l’évoquer383, les engins motorisés présentent un danger d'ordre
public pour l'ensemble des usagers de la route. Aussi, n'est-il pas étonnant de constater que
l'assurance automobile soit rendue obligatoire dans la totalité des pays francophones en ce qui
concerne la responsabilité civile du conducteur vis-à-vis des tiers. L'assurance automobile
responsabilité civile est une manne financière pour les compagnies d’assurances. En Afrique,
la branche automobile est un des piliers de l’activité des assureurs, représentant selon les pays
entre un quart et plus de la moitié des primes émises.

La responsabilité civile, seule assurance de cette catégorie à être obligatoire dans tous
les pays, génère à elle seule un tiers des revenus des assureurs IARD (incendie, accidents et
risques divers) du Bénin384 .

C'est d’ailleurs à travers ce produit que les clients découvrent d'autres types
d'assurances.

337. Cette réglementation trouve ses origines dans les lois post coloniales en matière
d’obligation d’assurance385. Ces obligations d’assurances seront reprises trente ans plus tard
par le livre II du Code CIMA qui dispose en son article 200 que cette obligation incombe à
« toute personne physique ou morale autre que l’Etat, au sens du droit interne, dont la
responsabilité civile peut être engagée en raison de dommages subis par des tiers résultant
d’atteintes aux personnes ou aux biens et causés par un véhicule terrestre à moteur, ainsi que
ses remorques ou semi-remorques »386.

Il en résulte, que les personnes principalement concernées sont, le propriétaire du


véhicule ou son utilisateur à titre courant, et que les objets soumis à l’obligation sont le

383
V. infra, n° 500 et s.
384
V.http://www.jeuneafrique.com/225153/economie/assurances-obligatoires-les-tats-africains-h-sitent/, consulté
le 20 aout 2017.
385
« Toute personne physique ou morale dont la responsabilité peut être engagée en raison des dommages
corporels ou matériels causés à autrui par un véhicule terrestre à moteur avec ou sans remorque ou semi-
remorque quel que soit le pays ou la série d’immatriculation du véhicule, doit pour faire circuler ledit véhicule
sur le territoire du Dahomey, être couverte par une assurance garantissant cette responsabilité dans les
conditions fixées par la présente loi et les textes pris pour son application. Sont assujettis à l’assurance
obligatoire les véhicules ci-dessus définis dont la puissance en cylindrée part de 125 cm3. La présomption qu’il
a été satisfait à l’obligation d’assurance est établie par la présentation d’un document justificatif. »
386
Article 200 alinéas premiers du Code CIMA.

179
véhicule en tant qu’engin automoteur mis en circulation sur la voie publique ou la voie privée,
et les remorques et semi-remorques. Il faut signaler que les véhicules circulant sur les rails ne
sont pas astreints à cette obligation. De même l’Etat, en tant que puissance publique, n’est pas
soumis à cette obligation, sauf s’il en décide autrement387.

338. L’assurance automobile comporte de nombreuses garanties que pourrait fournir


l’assureur. La seule rendue obligatoire par la loi est la garantie de la responsabilité civile vis-
à-vis des tiers, à l’occasion de la circulation routière. En effet, le législateur n’a édicté
l’obligation d’assurance que pour la responsabilité civile encourue par le responsable d’un
accident à l’égard des tiers. Ainsi définie, la loi a donné un contenu étendu à cette
responsabilité dans son quantum. Mais dans la pratique, les assureurs garantissent une
responsabilité illimitée pour les dommages corporels, et une responsabilité limitée
généralement à 500 millions pour les dégâts matériels causés aux tiers.

339. Les personnes morales dans la mesure où, leur responsabilité peut être couvertes ont la
faculté voire l’obligation d’assuré leur responsabilité.

B- L’assurance responsabilité civile entreprise

340. Pour faire l’étude de l'assurance responsabilité civile entreprise nous allons dans un
premier temps essayer de définir l’assurance de la responsabilité civile professionnelle (1).
Ensuite, les assurances construction (2) et les assurances des professionnels de l’automobile
nous aideront à mieux comprendre l’aspect pratique de l’assurance responsabilité civile
entreprise.

1) La responsabilité civile professionnelle

341. L'assurance responsabilité civile professionnelle (RCP) est obligatoire selon les
systèmes de droit et selon les professions, appartenant principalement aux secteurs des
activités libérales et à celui du bâtiment. Elle concerne tout d’abord les membres des
professions médicales (médecin, infirmier, sage-femme, etc…) qui se doivent de souscrire
une assurance responsabilité civile obligatoire : ces activités pouvant s’avérer hautement

387
Le dispositif légal n’affranchit pas l’Etat de l’obligation d’assurance automobile mais offre une alternative à
l’Administration Publique, entre s’assurer auprès de compagnies privées ou mettre en place une auto assurance.

180
risqués sont très exposées à la faute professionnelle qui peut être reconnue au niveau
pécuniaire, pénal ou disciplinaire en fonction de l’ampleur du préjudice causé. De même,
l’obligation d’assurance est censée être prévue pour les professionnels du droit (avocats,
juristes, notaires, huissiers de justice, etc.) qui sont également concernés par une
Responsabilité Civile Professionnelle Obligatoires : ces professions sont dans l’obligation des
respecter le devoir de conseil, celui de loyauté, de prudence et de diligence ainsi que
l’obligation d’assurer l’efficacité des actes. En cas de manquement à ces devoirs, la faute
professionnelle est invoquée. Par ailleurs, les experts-comptables dans certains pays doivent
justifier d'une couverture d'assurance responsabilité civile professionnelle à raison de toutes
leurs missions et activités. Les métiers du conseil suivant sont obligés de souscrire une
assurance Responsabilité Civile Professionnelle : les agents immobiliers, les agents
d’assurance, les agents de voyage…

342. En somme, la souscription d’une police d’assurance responsabilité civile


professionnelle est liée au caractère obligatoire de celui-ci, au domaine d’activité, à la taille de
l’entreprise, à sa situation financière et surtout à la sensibilité des dirigeants à la protection
des personnes et du patrimoine. Il y est des domaines où le défaut d’assurance peut être lourd
de conséquences. C’est notamment le cas de la construction.

2) Les assurances construction

343. Les assurances dans le domaine de la construction sont composées de deux assurances
qui sont obligatoires en France, et de multiples assurances facultatives. L’assurance
construction obligatoire repose d’une part sur l’assurance dommage ouvrage souscrite par le
maître d’ouvrage, et, d’autre part, sur l’assurance décennale souscrite par les constructeurs.

Au Bénin, L’assurance construction a été récemment rendue obligatoire par un Décret 388. Il
est à noter que ces assurances obligatoires doivent impérativement être souscrites
préalablement à l’ouverture du chantier. L’assurance dommages ouvrage est une assurance de
dommages qui couvre un bâtiment. Elle est souscrite par le maître d’ouvrage propriétaire.
L’assurance décennale est une assurance de responsabilité des intervenants à l’acte de

388
Décret n° 2016-054 du 10 mars 2016, portant obligation d'assurance des risques de la construction en
République du Bénin.

181
construire. C’est l’assurance des constructeurs au sens de l’article 1792-1 du Code civil
français, il s’agit des maîtres d’œuvre, entrepreneurs, et contrôleur technique dans la limite
des missions qui lui sont confiées.

344. L’assurance décennale intéresse particulièrement deux types d'assurances. Il s'agit de


l'assurance responsabilité civile décennale et de l'assurance dommage ouvrage décennale. Ces
deux types d'assurances ont une assiette commune, ne pouvant être mise en œuvre qu'en cas
de dommage ayant leur origine dans un vice de la construction ou du sol. Des vices qui
compromettent la solidité de l'ouvrage ou qui, l'affectant dans l'un des éléments constitutifs ou
l'un des éléments d'équipement le rendent impropre à sa destination. De tels vices sont des
vices propres à la chose assurée389, mais que la loi considère comme des risques dès lors qu'ils
affectent la solidité de l'ouvrage. Le créancier de l'indemnité de réparation dans ces types
d'assurance est le bénéficiaire, c'est-à-dire le propriétaire de l'ouvrage au moment de la
survenance du sinistre.

345. L'assurance dommage ouvrage décennale vise l'octroi d'une indemnisation en dehors
de toute recherche des responsabilités, le paiement des travaux de réparation des dommages
de la nature de ceux dont sont responsables les constructeurs au sens de l'article 1792-1 du
Code civil, les fabricants et importateurs ou le contrôleur technique sur le fondement de
l'article 1792 du même Code. L'assurance responsabilité civile décennale subordonne l'octroi
de la réparation de l'assureur à l'établissement de la faute du constructeur, ce constructeur390.

346. Les assurances construction sont obligatoires en France depuis la réforme du droit de
la construction de 1978. La Mauritanie les a rendues obligatoire en 1993 391. Le Code CIMA

389
Le professeur SAYEGH J.I considère pour sa part que les vices propres à la chose assurée ne constituent pas
des risques. SAYEGH J.I op. ci., p. 281.
390
V.Y. NIANG, L’assurance construction Mémoire maitrise, Université Cheikh Anta DIOP. Voir.
http://www.memoireonline.com/07/07/530/m_assurance-construction-uemoa1.html, consulté le 12 septembre
2017.
391
« Toute personne physique ou morale qui agissant en qualité de propriétaire de l'ouvrage, de vendeur ou de
mandataire du propriétaire de l'ouvrage, fait réaliser des travaux de bâtiment doit souscrire avant l'ouverture
du chantier, pour son compte ou pour le compte des propriétaires successifs, une assurance garantissant en
dehors de toute recherche des responsabilités, le paiement des travaux de réparation des dommages de nature
de ceux dont sont responsables les constructeurs les fabricants et importateurs ou le contrôleur technique. Cette
assurance prend effet après l'expiration du délai de garantie de parfait achèvement. Toutefois, elle garantit le
paiement des réparations nécessaires lorsque :
- Avant la réception, après la mise en demeure restée infructueuse, le contrat de louage d'ouvrage conclu
avec l'entrepreneur est résilié pour inexécution, par celui-ci, de ses obligations ;
- Après la réception, après mise en demeure restée infructueuse, l'entrepreneur n'a pas exécuté ses
obligations Tout entreprise d'assurance agréée dans les conditions fixées par l'article 201 ou dispensée de

182
n’a pas rendu obligatoire l’assurance construction. Ainsi, dans la majorité des pays membres
de la CIMA, l'absence de souscription de telles assurances n'est pas véritablement
sanctionnée. On a pu remarquer cependant que des dispositions d’ordre professionnel ont été
aménagés pour rendre obligatoire les assurances dans certaines activités.

347. En ce qui concerne la réparation, le Code CIMA institue une obligation pour l'assureur
de faire une offre à l'assuré ou au bénéficiaire de l'indemnité sans préciser le contenu de
l'offre. Le domaine de l'obligation de proposer une indemnité amène à voir les bénéficiaires
de l'indemnité et l'étendue de la réparation du sinistre. Dans l'assurance construction la notion
de sinistré varie selon le contrat évoqué. Dans l'assurance responsabilité civile décennale, les
bénéficiaires de la réparation sont le maître d'œuvre ou les propriétaires successifs de
l'ouvrage. Pour l'assurance dommage ouvrage, le bénéficiaire est soit le maître d'œuvre assuré
ou les propriétaires successifs de l'ouvrage, soit les tiers-victimes du fait de la ruine de
l'ouvrage392.

348. Quel que soit le domaine d’activité d’une entreprise, du simple fait de son existence
elle crée un risque auquel sont exposés ses clients, ses salariés ou encore des tiers.
L’assurance responsabilité civile d’exploitation dite « responsabilité chef d’entreprise, a pour
objectif principal de couvrir l’entreprise par une garantie contre les conséquences financières
de leur responsabilité civile, pour les dommages corporels, matériels ou immatériels causés
aux tiers, du fait de l’exploitation de l’entreprise, dans le cadre de l’activité formelle. Cette
assurance concerne entre autres les professionnels de l’automobile.

3) L’assurance des professionnels de l’automobile.

349. Dans le domaine automobile on peut affirmer que dans la recherche d’une meilleure
protection des populations, les articles 201 du Code CIMA et 161 du CAM vont spécifier le
cas des professionnels des véhicules automobiles. Il s’agit plus précisément des garagistes et
des professionnels pratiquant habituellement le courtage, la vente, la réparation, le dépannage
ou le contrôle du bon fonctionnement des véhicules.

cet agrément par application des dispositions du même article est habilité à prendre en charge les risques
prévus au présent article. » (Art 182, CAM)
392
V. Y. NIANG op.cit.,

183
Ces personnes sont tenues à une obligation d’assurance de responsabilité civile au
terme de laquelle, la garantie de l’assurance couvre leur responsabilité, celle des personnes
travaillant dans leur exploitation et celle des personnes ayant la garde ou la conduite autorisée
du véhicule. Cette garantie est accordée dans les mêmes conditions d’étendue que pour les
passagers. Cependant, son coût est fonction du nombre de véhicules que le professionnel
entend mettre en circulation simultanément.

« A défaut de présentation du document justificatif prévu à l’article 1er, la justification de


l’assurance devra être fournie aux autorités judiciaires par tous les moyens. Quiconque aura
sciemment contrevenu aux dispositions de l’article 1er de la présente loi, sera puni d’un
emprisonnement de 1 à 3 mois et d’une amende de 15.000 à 1.000.000 francs C.F.A. ou de
l’une de ces peines seulement. En cas d’accident, la peine sera de 4 à 6 mois
d’emprisonnement et d’une amende de 30.000 à 2.000.000 de francs C.F.A. ou de l’une de ces
peines seulement. »393

350. Pour un respect de l’obligation d’assurance, la loi et la réglementation ont organisé un


système de contrôle, essentiellement à travers le contrôle de l’attestation d’assurance394 et
subsidiairement à partir d’autres documents. Toutefois, aucune disposition du Code CIMA ne
se prononce sur le quantum des peines, notamment en raison de son champ supranational,
renvoyant de fait la sanction du défaut de présentation de document justificatif ainsi que celle
du défaut d’assurance aux législations nationales des Etats membres de la CIMA. Nonobstant
les contraintes pécuniaires et pénales, le non-respect de l’obligation d’assurance est une réalité
en Afrique qui peut s’expliquer par des considérations diverses.

351. Les avancées technologiques ont permis le développement de moyens de locomotion


plus rapide. Le transport posait déjà un problème d’insécurité avant l’arrivée des moyens de
locomotions modernes. Aujourd’hui, il constitue pour la Mauritanie ou encore le Bénin la
première catégorie d’assurance. Il est indéniable que bon nombre de dommages sont liés aux
divers types de transports existant.

393
Article 5 de l’acte du gouvernement de la République du Dahomey Loi n° 65-1 rendant obligatoire la
souscription d’assurance par tout utilisateur d’un véhicule à moteur terrestre.
394
L’attestation d’assurance est le document obligatoirement délivré dont la forme, la couleur et les mentions
sont définies par les textes et qui permet aux autorités chargées du contrôle de vérifier le respect de l’obligation
d’assurance. Il est observé que le contrôle de l’obligation d’assurance à partir de l’attestation d’assurance est une
disposition permanente de tous les textes successifs qui ont régi la matière, depuis la loi de 1965, ses textes
modificatifs, jusqu’au Code CIMA.

184
Paragraphe II : Les dommages résultant d’un transport

352 Les transports constituent l’un des éléments indispensables à la croissance et au


développement socioéconomique. Considéré comme principal vecteur d’intégration
économique, l’infrastructure de transport et les services sont le préalable à la facilitation des
échanges et à la circulation des biens et des personnes. Longtemps perçue comme un outil
d’accessibilité pour les échanges commerciaux et mondiaux dans un environnement
international en pleine mutation, l’infrastructure de transport reste l’un des piliers du
développement en vue de l’accélération de la croissance et de la réduction de la pauvreté.
Compte tenu des défis liés à la mondialisation, l’Afrique accuse un retard considérable dans
le développement de ses échanges régionaux, en raison notamment du manque de transports
fiables et adéquats. En effet, les voies et moyens de transports existants, étaient orientés vers
un commerce totalement extraverti, d’où le faible développement des infrastructures et des
services de transport et l’intégration physique limitée du réseau.

353. Nous allons tour à tour nous intéresser à l’assurance relative aux divers types de
transport qui sont : le transport maritime (A), le transport terrestre (B), le transport aérien (C)
et le transport fluvial (D).

A- Le transport maritime

354. L’assurance Maritime a été pendant longtemps la seule forme d'assurance connue, en
effet, le premier contrat d’assurance maritime, a été retrouvé à Gênes et date de 1347 395.
Toutes les opérations commerciales d'envergure étaient réalisées par mer et les premières
polices françaises apparurent au XIVème siècle, dans les ports de la Méditerranée396.
Aujourd’hui, les marchandises transportées par voie maritime bien qu’avantageux 397 sont

395
V. C. BELLENGER, op.cit., p. 15.
396
« La mer était alors la route presque exclusive du grand commerce, et elle était semée de tant de périls que
l’esprit toujours inventif des commerçants devait chercher et trouver le moyen de s’en garantir dans une
certaine mesure. ». V. A. CHAUFTON, Les Assurances, leur passé, leur présent, leur avenir... en France et à
l'étranger, études théoriques et pratiques..., Paris, A. Chevalier-Marescq, 1886, p. 349.
397
Six fois moins d’émissions de gaz à effet de serre par rapport à un camion, une capacité de transport
équivalente à celle de trois trains ou de cent camions, peu de risques d’accidents, pas de nuisances sonores, les

185
devenues exposées à des risques de guerre, de piraterie398, de terrorisme… Ces risques qui
sont devenus très fréquents, peuvent entraîner des conséquences financières lourdes pour les
propriétaires de marchandises de navire et même pour les économies399. Le risque de guerre
ainsi que ceux liés à la piraterie ne sont pas garantis sauf stipulation contraires selon le
CAM400. « L'assureur ne répond pas, sauf convention contraire, des pertes et dommages
occasionnés, soit par la guerre étrangère, soit par la guerre civile, soit par des émeutes ou
par des mouvements populaires. Lorsque ces risques ne sont pas couverts par le contrat,
l'assuré doit prouver que le sinistre résulte d'un fait autre que le fait de guerre étrangère ; il
appartient à l'assureur de prouver que le sinistre résulte de la guerre civile, d'émeutes ou de
mouvements populaires. »401.

355. Les assureurs offrent plusieurs types de garanties sur le marché africain de l’assurance
maritime. Ils peuvent également offrir aux assurés d’autres garanties plus personnalisées au
moyen de clauses additionnelles. Dans sa première forme, la police maritime peut garantir le
navire en entier ; c’est l’assurance corps qui permet de garantir le navire indivisiblement, le
navire ses accessoires et sa cargaison. L’assurance maritime "Tous Risques" couvre tous les
dommages et pertes matériels causés aux biens assurés pendant le voyage (y compris les
pertes) sous réserve des exclusions et limitations du contrat. Cette garantie, bien qu’étant la
plus complète pour les importateurs, devrait à ce titre être la plus vendue. Malheureusement
elle n’est pas pourtant très demandée sur les marchés africains du fait de son coût, mais aussi
parce que mal connu. Sa souscription par les assurés est rare et exceptionnelle. L’assureur est
garant des dommages que pourrait subir le navire, qu’il soit lest ou chargé. La garanti peut

statistiques du transport par barge parlent d’elles-mêmes. https://www.cma-cgm.fr/media/article-magazine/21/le-


transport-fluvial-un-veritable-enjeu-economique-et-environnemental, consulté le 8 septembre 2017.
398
La piraterie maritime est devenue un véritable problème dans le golfe de Guinée. Selon un rapport du Bureau
maritime international, 966 marins ont été attaqués en 2012 par des pirates dans les eaux qui bordent le golfe de
guinée région. RFI Publication du 24-06-2013. Consulté le 27 /08/2015
399
La recrudescence du phénomène de la piraterie dans le Golf de Guinée constitue sans doute une menace pour
les économies des pays limitrophes, qui dépendent des activités portuaires pour leurs exportations ou leurs
approvisionnements extérieurs. Dans un pays comme le Bénin, le port de Cotonou représente 90% des échanges
avec l'étranger. L’insécurité croissante, qui s’accompagne déjà d’une hausse des primes d’assurance, pourrait se
traduire par la désertion d’un grand nombre de navires vers les ports les plus sécurisés. Aussi, la lutte contre la
piraterie maritime s’affirme comme un enjeu primordial dans la sous-région.
400
Article 123, CAM.
401
Le Code CIMA en son article 38 exclut aussi les risques de guerre.

186
porter sur une ou plusieurs expédition assurances voyage. S’il est conclu pour une durée
déterminée c’est une assurance à temps.402

356. L’autre aspect des assurances maritimes concerne la garantie des biens ; c’est
l’assurance sur faculté. Au cas précis, la garantie commence au moment où les facultés
assurées quittent les magasins de départ et finissent au moment de la livraison (magasin du
destinataire). C’est la clause de magasin à magasin403. Il existe aussi une assurance nommée
« FAP »404 qui couvre toutes les marchandises transportées.

357. Dans les assurances corps, l’indemnisation peut constituer un règlement d’avaries
où « Dans le règlement d'avaries, l'assureur ne rembourse que le coût des remboursements et
réparations reconnus nécessaires pour remettre le navire en bon état de navigabilité, à
l'exclusion de toute autre indemnité pour dépréciation ou chômage ou quelque autre cause
que ce soit. » selon l’article 146 du CAM.

358. En cas de perte totale, de réparations devant atteindre les trois quarts de la valeur
agréée ou d’impossibilité de réparer, et de défaut de nouvelles depuis trois mois c’est le
délaissement qui doit être envisagé en droit mauritanien voir à ce titre l’article 48 du CAM.
Jadis, le transport maritime était incontournable.

359. l’assurance terrestre qui se développera plus tardivement que l’assurance maritime
occupe aujourd’hui grâce au transport une position importante dans le domaine des assurances
en Afrique.

B- Le transport terrestre

360. La route reste le mode de transport dominant en Afrique, elle représente entre 80 à
plus de 90% du trafic interurbain et inter-états de marchandises. Elle représente, en général,
le seul moyen d’accès aux zones rurales et constitue le mode le plus flexible et approprié
dans la vie économique et sociale des pays ou des régions. Les systèmes de transport terrestre

402
« L'assurance des navires est contractée, soit pour un voyage, soit pour plusieurs voyages consécutifs, soit
pour une durée déterminée ». Article 139 CAM.
403
La présente assurance prend cours depuis le moment où les marchandises quittent le magasin à l'endroit
mentionné dans la police pour le commencement du transport et continue jusqu'au moment où [elles] sont
délivrées au magasin du consignataire ou dans un autre magasin final à la destination mentionnée dans la police.
404
Franc d’avaries particulières.

187
rassemblent deux modes principaux : la route (1) et le rail (2). Il va sans dire que les routes
apparurent avant le chemin de fer puisque la technologie du rail n'a fait son entrée en scène
qu'au 18e siècle. Les premières routes terrestres se sont dessinées à partir de sentiers qui
étaient empruntés pour se déplacer d'un territoire de chasse à un autre. Graduellement, les
sentiers servirent à des fins commerciales et quelques-uns devaient se transformer en routes.

1) Le transport routier

361. Les transports routiers sont le premier mode de transport de la région et occupent une
place de plus en plus importante dans le transport en transit. Près des neuf dixièmes des
marchandises transportées en transit sont acheminées par la route. Cependant, l’état des routes
empêche souvent d’acheminer les marchandises dans des conditions de sécurité et de rapidité.

Le transport routier béninois occupe une place importante dans le système national des
transports mais reste encore peu performant en raison de l'état de dégradation avancée des
infrastructures. En effet, la position géographique du Bénin en fait, un pays de transit par
excellence offrant aux pays de l'hinterland (Niger, Burkina Faso, Mali…) une voie d'accès à la
mer ; cette position privilégiée qu'occupe le pays révèle une très forte demande de transport
surtout en ce qui concerne le transport urbain. Le réseau routier du Bénin est d'environ
16000Km répartis comme suit : les routes nationales inter-états : près de 3600 Km dont 40%
sont bitumées. Les routes de desserte rurale : environ 10500 Km ; Les voies municipales : 1
800 Km. Plus de 80.000 véhicules toutes catégories confondues sont utilisés pour les
transports urbain et interurbain de personnes et de marchandises. A cela il faut ajouter plus de
160 000 taxi-motos uniquement pour la ville de Cotonou qui en concentre les ¾
communément appelés « zémidjan » 405

Sur un réseau de routes de 10 300 km en 2003, 2424 km sont goudronnés 872 km sont en
terre améliorée et 7001 km sont des pistes.

362. La Mauritanie se dote progressivement, d'un réseau de routes nationales goudronnées


reliant la capitale Nouakchott aux principales villes du pays. Terminée en novembre 2005, la

405
V. supra, n° 858 et s.

188
route nationale RN3 longue de 470 km, relie désormais Nouakchott à Nouadhibou, centre
économique près de la frontière avec le Sahara occidental.

Territoire désertique par nature, le désensablement des voies est assuré par l'ENER
(Etablissement National d'Entretien Routier), créé en 1996. Une réforme de l'organisation des
transports est en cours depuis plusieurs années. Elle a consisté au démantèlement du Bureau
National des Transports qui a exercé un monopole pendant plus de 20 ans. Actuellement en
période de transition, la réforme peine à se mettre en place et certains problèmes persistent.
Les taxis brousse relient la plupart des villes. Pour se déplacer le moins onéreux reste le
transport par minibus, suivis par les véhicules légers essentiellement les Mercedes 190 les
Peugeot 504 et enfin les voitures particulières qui ne sont toujours pas à la portée de toutes les
bourses.

Le parc roulant pour le transport des passagers est essentiellement constitué de


véhicules d'occasion importés d'Europe. Leur âge moyen est de 12 ans et ils étaient souvent en
très mauvais état. Cependant depuis 2014, Le gouvernement mauritanien a examiné et adopté
un projet d’ordonnance portant modifications de certaines dispositions d’un texte de loi relatif
aux règles d’importations des véhicules et limitant respectivement leur âge à cinq et huit ans,
suivant les catégories, à l’occasion d’une réunion406

363. En matière de transport routier de marchandises, il existe plusieurs textes juridiques et


règlementations élaborés après différentes études évidemment effectués par des experts
internationaux avertis, de personnes ressources et autre personnes habilitées à produire des
propositions concrètes car ces textes sont mis en œuvre pour venir en palliatif aux problèmes
et anomalies constatées sur le terrain.

364. D'une part, la CMR407, Convention de Genève sur le Contrat de Marchandises par
route apparaît comme la plus utilisée car s'imposant à la communauté internationale. Elle sert
de référence aux différents actes et convention régionales portant sur le contrat inter-états de
transport de marchandise par route.

406
Entrée en vigueur le 23 aout 2014, ladite loi prévoit en substance que désormais pour les véhicules
touristiques, l’âge légal d’importation est de moins de cinq ans. La limite est fixée à moins de huit ans pour les
autres véhicules. La décision gouvernementale « vise à limiter les conséquences négatives de l’usage de
véhicules en mauvais état pour réduire les accidents de circulation » Voir Cridem, le 20-07-2014.
407
Signée le 19 mai 1956, et mise en vigueur le 2 juillet 1961 la convention CMR est un ensemble de
règlementations établies entre plusieurs pays (la quasi-totalité des pays européens et certains du Maghreb) en vue
de déterminer les droits et obligations de chacun des acteurs impliqués dans la réalisation d'un contrat de
transport routier

189
365. Il existe les conventions et accords régionaux puis l'acte uniforme de l'OHADA408
pour le Bénin. Le traité OHADA a donné une liste non limitative des secteurs concernés par
l'unification qui traitent de différents aspects du droit des affaires en son article 2. Selon cet
article,« pour l'application du présent traité, entrant dans le domaine des Droits des Affaires
l'ensemble des règles relatives aux droits des sociétés et au statut juridique du commerçant,
au recouvrement des créances, aux sûretés et au voies d'exécution, au régime du
redressement et de la liquidation judiciaire des entreprises, au droit de l'arbitrage, au droit
du travail, au droit comptable, au droit de la vente et des transports et toute autre matière
pour laquelle le conseil des ministres déciderait à l'unanimité y inclure conformément à
l'objet du présent traité et aux dispositions de l'article 8 »409. La CMR concerne les acteurs
que sont :

- l’expéditeur c’est à dire le chargeur ;

- le transporteur ou les transporteurs successifs ;

- le destinataire.

366. La lettre de voiture où se trouve consigné le contrat de transport est établi en quatre
exemplaires. Il s’agit de trois originaux destinés aux trois acteurs précédemment énumérés et
d’un dernier destiné à des fins d’ordre administratives.

L’acte uniforme de l’OHADA adopté le 22 mars 2003, s’applique à tout contrat de


marchandise par route dans les mêmes conditions que celles prévues par la CMR. Cet acte
régit spécifiquement les contrats ayant cours dans les Etats membre de l’OHADA. On
remarque le droit de disposition de marchandises en cours de route, définie par l’article 12 de
la convention est la même que celui de l’article 11 de l’acte uniforme. Il en est aussi de même
pour les dispositions relatives aux responsabilités du transporteur, aux conditions de livraison
aux avaries …410.

S'inspirant toujours des dispositions de la CMR, l'acte uniforme de l’OHADA ne


s'applique pas aux transports de marchandises dangereuses, aux transports funéraires, aux

408
L'acte uniforme de l'OHADA (Organisation pour l’harmonisation en Afrique du droit des affaires) est un
texte adopté le 22 mars 2003 et entré en vigueur dès le 1er janvier 2004, il s'applique à tout contrat de
marchandise par route dans les mêmes conditions que celles prévues par la CMR. Il régit également et de
manière spécifique les contrats s'effectuant entre des Etats membres de l'OHADA.
409
B. MARTOR, N. PILKINGTON, D. SELLERS, S. THOUVENOT, Le droit uniforme Africain des affaires
issu de l'OHADA, collection Affaires Finances ed. Litec, 1 juillet 2004, p.4.
410
Cf articles 13,14 et suivants.

190
transports de déménagement ou aux transports effectués en vertu de conventions postales
internationales.

367. L’assurance CMR peut jouer, en cas d'avarie totale ou partielle imputable au
transporteur, la convention prévoit à ce titre une indemnité dont le plafond est fixé à 8.33 DTS
par kg de marchandise brute. Le DTS est égal au Droit de Tirage Spécial du Fonds Monétaire
International (FMI). Cette unité de compte est sujette à fluctuations, sa valeur exacte varie
journellement. On peut d’ores et déjà considérer que 8.33 DTS équivalent à peu près à une
dizaine d'euros aujourd’hui. Néanmoins, en aucun cas l'assurance CMR ne remplace
l'assurance marchandise "tous risques". En effet, les clauses d'exemption et de limitation de
responsabilité du transporteur en CMR peuvent être nombreuses.

2) Le transport ferroviaire

368. Les transports ferroviaires viennent au deuxième rang parmi les modes de transport en
Afrique de l’ouest. Le rail relie deux capitales, Ouagadougou (Burkina Faso) et Bamako
(Mali), deux ports maritimes régionaux, Abidjan (Côte d’Ivoire) et Dakar (Sénégal),
respectivement. Niamey (Niger) n’est pas accessible et les marchandises qui entrent dans le
pays ou qui en sortent doivent emprunter le couloir ferroviaire et routier Cotonou-Niamey.
Le réseau ferroviaire africain est estimé à 89 380 km pour une superficie de 30,19 millions de
km² soit une densité de 2,96 km pour 1000 km². Ce réseau est très peu interconnecté, surtout
en Afrique occidentale et centrale. Pour l’essentiel sauf pour les Sud-Africains et peut être
Gabonais, le rail est resté dans l’état où les autorités coloniales les avaient laissées au moment
des indépendances. La fin de l’administration de ce moyen de transport par le colon va sonner
la fin ou le début d’une crise sectorielle pour bons nombre de pays411. De grandes ambitions
avaient été affichées pourtant. Ainsi, aux termes du « plan Roume », entamé a partir 1904,
dans l’AOF, « Chacune des colonies du Sénégal, de la Guinée de la Côte d’Ivoire du
Dahomey aurait sont chemin de fer qui serait poussé jusqu’au Niger, une transversale devant

411
Les gouvernements et les entreprises nationales de chemins de fer d’Afrique subsaharienne ont négligé
d’investir dans la réhabilitation ou le renouvellement des infrastructures. Une grande part des installations et des
voies ont plus de 100 ans Source : www.ssatp.org

191
relier les quatre lignes »412Malheureusement, la réalisation du plan ne sera que partielle. Le
bilan en question est décrit ainsi : « Deux des réseaux de l’AOF on atteint le Niger à Bamako
et à Kouroussa. Le troisième (Abidjan-Niger), après une longue période de stagnation à
Bobo-Dioulasso, atteindra Ouagadougou en 1954. La mise en valeur de la région d’Ansongo
permettra peut-être de prolonger la ligne jusqu’à Niamey. Le quatrième réseau (Bénin-Niger)
s’est arrêté à Parakou, bien que la réalisation du tronçon Parakou-Malanville ait été prévue
dans le programme initial de l’emprunt de1.570millions que l’AOF avait autorisé à
contracter par la loi du 22 février 1931. »413

369. Le transport ferroviaire béninois est assuré par une entreprise bi-étatique : l'OCBN
(Organisation Commune Bénin-Niger des Chemins de Fer et des Transports), qui dispose
aujourd'hui en exploitation d'une seule ligne à écartement métrique d'une longueur de 438 km
entre Cotonou et Parakou. Les lignes ferroviaires Cotonou-Pobé et Pahou-Sègbohoué sont
actuellement mises hors exploitation. Depuis les années 80, les chemins de fer béninois
africains sont en crise.

370. Le chemin de fer de Mauritanie est constitué d'une ligne à voie unique, longue de 704
km qui relie les mines de fer de Zouerate au port minéralier de Nouadhibou. Cette ligne, à
écartement standard et mise en service en 1963, est exploitée par une société étatique, la
SNIM (Société nationale industrielle et minière). Les trains, dont la longueur peut atteindre
2,5 km414, sont constitués de trois ou quatre locomotives diesel-électrique Général Motors de
3300 CV, de 200 à 210 wagons-trémies pour le minerai de fer, d'une charge utile de 84
tonnes, et d'un nombre variable de wagons de service. Le trafic annuel s'élève à environ 16,6
milliards de tonnes-km. À certains trains sont attelés des voitures à voyageurs (ainsi que des
wagons plats pour le transport des automobiles). Ces services quotidiens sont gérés par une
filiale de la SNIM, la société ATTM (Société d'assainissement, de travaux, de transport et de
maintenance). Ils desservent notamment la localité de Choum, à 460 km de Nouadhibou. Une
ou deux rames appelées "Train du désert" sont régulièrement mises en service entre Choum et
Zouerate dans un but touristique. Elles sont en général constituées d'une ou deux voitures

412
J-R de BENOIST, La balkanisation, Dakar, Les Nouvelles Editions Africaines, 1979, p.33, cité par V-E.
BOKALLI, D-C. SOSSA In, Droit des contrats de transport de marchandises par la route, BRUYLANT 2007,
p. 5.
413
Ibid., p. 52.
414
Le train transportant le minerai de fer entre les mines de Zouerate et le port de Nouadhibou. C’est paraît-il, le
train le plus long et le plus lourd du monde. 3 machines tirent ces 2 km de wagons. Rappelons que le minerai de
fer est la principale richesse de la Mauritanie.

192
voyageurs remorquées par une des anciennes locomotives diesel CC Alsthom du parc de la
SNIM.

371. Les transports ferroviaires restent peu réglementés dans ces deux pays. En Mauritanie,
du fait de l’unicité de la voie ferrée (Zouerate-Nouadhibou) et au Bénin du fait de la faiblesse
de ses activités. Le rail pourrait se révéler plus économique et plus sécurisé pour le transport
en vrac de produits de consommation de première importance, mais le peu de régularité des
services ferroviaires et l’engorgement des terminaux ferroviaires ainsi que les problèmes dus
au mauvais état d’une grande partie des lignes de chemin de fer régionales, jouent en faveur
des transports routiers, plus chers mais plus fiables.

C- Le transport aérien.

372. Le transport aérien occupe une place assez importante dans le domaine du transport en
général. Il reste essentiel à de nombreuses activités allant du tourisme aux affaires en passant
par les marchandises. Il représente environ 1% du PIB de l’Union Européenne et des Etats-
Unis415. Il joue un rôle capital dans le transport de chargements peu volumineux à forte valeur
ajoutée. L’aviation internationale achemine environ 40% des biens échangés dans le monde
en valeur marchande, mais nettement moins en termes physiques.

373. En Afrique, le secteur aérien reste largement sous-développé au point d’être


préoccupant. Représentant à peine 2% du trafic mondial416, l’assurance des transports aériens
n’est pas très développée dans la zone FANAF. Cette mauvaise performance s’explique
d’abord par le fait que le parc de l’aviation n’est pas très étendu (Compagnies aériennes
nationales, flottes présidentielles, quelques avions privés). D’autre part, les transporteurs
étrangers qui utilisent les territoires subsahariens préfèrent s’assurer en Europe et de
préférence auprès des plus grandes sociétés d’assurances au monde. Par ailleurs, la disparition

415
K. BUTTON, E PELS, Impact de la mondialisation sur le niveau d’activité du transport aérien international,
Chapitre 4, OCDE 2011, Mondialisation, transport et environnement, Editions OCDE, pp. 93-118. Voir
http://www.institut-numerique.org/section-1-les-differents-modes-de-transport-de-marchandises-529426a655b77
416
La faible part de l’Afrique dans le transport aérien mondial s’explique en partie par le manque
d’infrastructures aériennes sur le continent : selon l’ACI (2003), le nombre de passagers transportés, en
domestique et en international, en Afrique en 2002 n’était que de 83,2 M, soit moitié moins qu’en Amérique
Latine et Caraïbes et environ sept fois moins qu’en Asie Pacifique sur la même période.

193
de plusieurs compagnies de transport aériennes qui desservait la zone a porté un sacré coup au
secteur417 et ne fait pas bonne figure dans le domaine.

374. Quand on parle d’assurance aviation, Il s’agit en général de fronting: en effet, compte
tenu de l’importance des capitaux qui sont en jeu, les sociétés d’assurances membres de la
CIMA cède en réassurance la quasi-totalité des affaires corps qu’elles souscrivent. La quote-
part conservée est le plus souvent co-assurée assurée avec les autres compagnies d’assurances
du marché de l’opérateur. Il convient de signaler l’existence d’un pool de co-réassurance
aviation, géré par la société africaine de réassurance AFRICA-RE. Ce pool offre des capacités
aux cédantes africaines de souscrire et de conserver davantage les corps aériens.

375. En définitive, il s’agit plus pour les assureurs africains d’un rôle d’apporteur d’affaires
que d’assureurs au vrai sens du terme.

Nous pouvons citer l’ASENA418 quant à son rôle dans le développement du transport
aérien béninois et mauritanien. L’une de ses principales missions reste l’organisation et la
sécurité de la navigation aérienne. Elle assure le contrôle de la circulation aérienne, le guidage
des avions, la transmission des messages techniques, et le trafic aérien.

En matière d’assurance ou de couverture l’obligation d’assurance est de mise dans le


domaine aérien. C’est une assurance qui généralement est inclus dans le titre de transport. Le
transport aérien est un transport essentiellement international419, il est donc inadmissible que
ce transport soit soumis à autant de lois qu’il n’y a d’Etats survolés, le Bénin comme la
Mauritanie ont dans cette logique ratifié420 la convention de Varsovie du 12 Octobre 1929421.

417
A titre d’illustration, on citera Air Afrique, Cam Air, Air Mauritanie…
418
Créée à Saint Louis (Sénégal) le 12 décembre 1959, l'Agence pour la Sécurité de la Navigation Aérienne en
Afrique et à Madagascar (ASECNA) est un établissement public international régie par la Convention de Dakar
révisée en 2010, disposant d'une personnalité juridique et jouissant de l'autonomie financière.
419
Au sens de la convention de Montréal : « l’expression transport international s’entend de tout transport dans
lequel, d’après les stipulations des parties, le point de départ et le point de destination, qu’il y ait ou non
interruption de transport ou transbordement, sont situés soit sur le territoire de deux Etats parties, soit sur le
territoire d’un seul Etat partie si une escale est prévue sur le territoire d’un autre Etat, même si cet Etat n’est
pas un Etat partie. Le transport sans une telle escale entre deux points du territoire d’un seul Etat partie n’est
pas considéré comme international au sens de la présente convention ». Voir alinéa 2 article 1 de la Convention
pour l’unification de certaines règles relatives au transport aérien international. Signée le 28 mai 1999 à
Montréal.
420
Bénin (27 janvier 1962) Mauritanie (08 juin 1962)
421
C’est la Convention visant l'unification de certaines règles relatives au Transport aérien international, signée
le 12 octobre 1929. Elle définit et décrit les mentions à porter sur les documents de transport aérien ou titres de
transport ; apporte des précisions sur la nature des documents qui doivent toujours accompagner la LTA (Lettre
de Transport Aérien) ; définie les responsabilités des parties au contrat en cas de dommages corporels ou

194
Cette convention a été complétée et amendée par de nombreux textes parmi lesquels : le
protocole de La Haye de 1955422, qui a notamment relevé les plafonds d'indemnisation
applicables en matière d'accidents corporels, la convention de Guadalajara de 1961 423… Tous
les amendements n'ont cependant pas été ratifiés par tous les Etats signataires de la
Convention de Varsovie424.

376. Pour ce qui concerne l’indemnisation, c’est le transporteur qui de par sa responsabilité
prend en charge les réparations. En effet selon la convention de Montréal : « Le transporteur
est responsable du préjudice survenu en cas de mort ou de lésion corporelle subie par un
passager, par cela seul que l'accident qui a causé la mort ou la lésion s'est produit à bord de
l'aéronef ou au cours de toutes opérations d'embarquement ou de débarquement. »425.

En cas de décès ou de blessure, aucune limite financière n’est fixée. Cependant, un


premier niveau instaurant un régime de responsabilité objective de plein droit du transporteur
est défini jusqu'à hauteur de 100 000 DTS (droits de tirage spéciaux définis par le fonds
monétaire international, soit une somme avoisinant les 135 000 euros). Le transporteur aérien
ne peut contester les demandes d’indemnisations. Au-delà de ce montant, un second niveau de
responsabilité est basé sur la faute présumée du transporteur dont ce dernier ne peux se
soustraire qu’en prouvant qu’il n’a commis aucune faute. La preuve reste donc à sa charge.

La Convention de Montréal, Convention pour l’unification de certaines règles relatives


au transport aérien international a été mise en place dans le but de la moderniser426,et surtout

matériels ; définit en cas de litige les tribunaux compétent ; délimite les délais de déclaration du dommage subit
et celui de l’action en responsabilité ; précise les limitations de son champ d’application dans le cas d’un
transport combiné qui implique outre d’autres modes de transport, une opération de transport aérien.
422
Ce protocole redéfinit la notion de transport international ; et inclus le fait des transports successifs lors d’une
même opération de transport. Ce protocole limite le champ d’application de la convention de Varsovie en
excluant le transport de courriers et de colis postaux ; elle modifie certaines mentions sur les titres de transport ;
révise les responsabilités du transporteur et modifie le délai de déclaration des dommages.
423
Cette convention intègre la notion de sous-transport en apportant une distinction claire entre le transporteur de
fait et le transporteur contractuel. Elle précise les responsabilités des intervenants dans ce type d’opération de
transport aérien. Elle est ratifiée par la Mauritanie le 29 Mars 1979, le Bénin n’adhère pas.
424
Certains de ces protocoles ne sont cependant jamais entrés en vigueur faute d’un nombre suffisant de
ratifications. Tel est le cas du Protocole de Guatemala City du 8 mars 1971 qui visait notamment à remplacer,
pour le transport de passagers, le principe de la responsabilité pour faute présumée, par celui d’une responsabilité
absolue ou objective.
425
Art 17 alinéa 1 de la Convention de Montréal.
426
L’adoption d’une nouvelle convention en transport aérien international a été motivée par la nécessité de
moderniser et de refondre la Convention de Varsovie et ses instruments connexes. Celle-ci ayant été élaborée au
début du développement de l’industrie du transport aérien, elle a fait l’objet au fil du 20 e siècle de plusieurs

195
comme le précise Mr Phillipe DELEBECQUE « d’assurer la protection des intérêts des
consommateurs dans le transport aérien international »427 et sur la nécessité d’accorder, en
cas de sinistre « une indemnisation équitable fondée sur le principe de réparation ».
Toutefois, de nombreux états n'ont pas signé la Convention de Montréal et restent soumis au
système varsovien.

377. La Mauritanie et le Bénin font partie des pays ayant ratifié la convention qui est entrée
en vigueur le 04 novembre 2003. Elle a été ratifiée par le Bénin le 30 avril 2004. En
Mauritanie c’est la loi n° 2011 du 27 2011 qui va en autoriser la ratification. La Convention
de Montréal a vocation à s'appliquer à tout transport international de personnes, bagages ou
marchandises, effectué par aéronef contre rémunération. Elle s'applique également aux
transports gratuits effectués par aéronef par une entreprise de transports aériens428.

D- Le transport fluvial

378. Le transport fluvial à l’image des autres modes de transports est un puissant facteur
d’intégration en ce sens qu’il permet d’assurer la libre de circulation des personnes et des
biens surtout. Les risques du transport fluvial apparaissent moins importants que pour les
autres modes de transport du fait de l’utilisation de ce mode de transport pour les matériaux
pauvres (gravier sable déchet). Le risque principal pour ce mode de transport concerne surtout
la navigation du fait des éventualités de naufrage, collision et échouements429 .

Ce mode de transport reste utilisé dans plusieurs pays d’Afrique de l’Ouest et


d’Afrique centrale. Mais la période de navigabilité des fleuves et des lacs est souvent limitée à
la saison des pluies. L’allongement de la saison sèche liée aux changements climatiques risque
de raccourcir encore les périodes de navigation sur les voies fluviales de ces pays. De plus, les

protocoles modificatifs visant notamment à renforcer la responsabilité des transporteurs aériens et à rehausser les
plafonds d’indemnisation.
427
P. DELEBECQUE, La Convention de Montréal du 28 mai 1999 pour l’unification de certaines règles
relatives au transport aérien international ou le nouveau droit du transport aérien, J.D.I. avril-mai-juin 2005, p.
263.
428
Convention pour l'unification de certaines règles relatives au Transport aérien international, signé à Varsovie,
le 12 Octobre 1929 (Convention de Varsovie) article 1, Reprise par la convention de Montréal toujours en son
premier article.
429
V. J-P MARCQ, Risques et assurances transports maritime, routier aérien ferroviaire, fluviaux, L’argus de
l’assurance, 2003, p.37.

196
voies fluviales servent généralement pour les transports intérieurs, et non comme moyen de
connexion pour le transport en transit international.

Le transport fluvial et lagunaire ne s’est pas développé au Bénin, bien que des
potentialités existent pour désenclaver des zones, pour la promotion du tourisme, et même
peut-être aussi pour développer un système de transport public près de Cotonou.

La navigation fluviale en Mauritanie pour ne pas dire en Afrique a trop souvent été
marginalisée par les pouvoirs publics, contrairement aux Etats d’Europe. La conséquence de
cette atonie, qui se traduit par un manque d’intérêt du fleuve Sénégal, et l'indifférence que
portent le système juridique à la voie fluviale. L'essentiel du trafic fluvial a lieu sur le fleuve
Sénégal.

379. Les études juridiques en la matière sont rares, et le plus souvent anciennes. Si l'on
considère que le droit est le plus souvent la conséquence d'une réalité préexistante, ou la
traduction d'un besoin social ou économique, la carence d'études récentes sur ce sujet pourrait
laisser penser que les besoins dans ce domaine n'existent pas. Mais un tel jugement serait
certainement entaché d'erreur, car si les professionnels considèrent que la réglementation du
transport est satisfaisante, il n'en demeure pas moins qu'ils dénoncent un manque de lignes
directrices dans la politique étatique concernant le fleuve. La ville frontalière de Rosso est
comme une porte d'entrée et de sortie, une zone où des flux convergent. Ici la frontière offre
des opportunités qui recoupent directement les exigences de leur travail. En effet la présence
d'un bac fait de Rosso un point de passage incontournable pour les véhicules qui sont en
provenance de la Mauritanie et voulant continuer de circuler au Sénégal une aubaine pour les
assureurs Rosso est comme une porte d'entrée et de sortie, une zone où des flux convergent.
Ici la frontière offre des opportunités qui recoupent directement les exigences de leur travail.
En effet, la présence d'un bac fait de Rosso un point de passage incontournable pour les
véhicules qui sont en provenance de la Mauritanie et voulant continuer à circuler au Sénégal.

197
Conclusion chapitre III

380. Compartimenter les assurances de personnes et les assurances de dommages est


fondamental. Cette distinction sert de fondement au principe indemnitaire430 caractérisant les
assurances de dommages et au principe forfaitaire431 caractérisant les assurances de
personnes.

Il existe un autre intérêt dans la typologie des assurances qui se trouve dans l’exigence d’un
intérêt assurable ou d’intérêt d’assurance (Code CIMA) qui ne joue qu’en matière d’assurance
de dommage. On trouve la définition de l’intérêt assurable dans les Code des assurances
françaises qui dispose en ce sens que : « Toute personne ayant intérêt à la conservation d’une
chose peut la faire assurer. Tout intérêt direct ou indirect à la non-réalisation d’un risque
peut faire l’objet d’une assurance »432 .

En Afrique, les assurances de personnes pour être efficace et jouir d’une bonne opinion auprès
des populations doivent s’adapter à l’environnement et au contexte socio-économique et
politique. C’est un travail de longue haleine qui demande la réflexion des assureurs d’une part
et un effort d’adhésion des assurables d’autre part.

381. En somme, il faudra du temps et de l’expérience pour que les assurances de personnes
puissent se développer de manière efficiente afin de réduire la sinistralité et participer à la
prospérité du marché de l’assurance en Afrique.

Si le Code CIMA et le CAM prévoient une classification des assurances, la question sur le
respect par les assureurs des dispositions en la matière par les assureurs demeure.

430
Voir infra, n° 550.
431
Voir infra, n° 486.
432
Article L 121-6 du Code des assurances françaises. L’article 36 du Code reprend les mêmes termes mais
parle d’intérêt d’assurance.

198
Conclusion titre II

382. Durant la période coloniale, la sécurisation des intérêts des puissances coloniales a
rendu nécessaire la création de compagnies d’assurances. On ne pouvait pas à cette période
parler de marchés d'assurances. Il s’en est suivi des vagues de nationalisation qui se seront
révélées somme toute infructueuses. La libéralisation du secteur des assurances annonce le
point de début de l’existence d’un véritable marché d’assurance. Toujours est-il que le secteur
est encore très vulnérable du fait de la prolifération incontrôlée des compagnies dans des
marchés qui commence à être jugés exigus.

383. Aujourd’hui, la majorité des pays sous influence française sont regroupés au sein d'une
organisation régionale d'assurances appelé Conférence Interafricaine des Marchés
d'Assurances (CIMA). Le Code CIMA a été créé et, évolue dans le sens d'une meilleure
protection des droits des assureurs. Un effort d'harmonisation des divers systèmes juridiques
d’Afrique francophone suit son cours via la Conférence. Dans l’évolution du marché des
assurances, il existe des pays plus avancés que d'autres. La Mauritanie qui a choisi un système
assuranciel qui lui est propre, gagnerais t’elle en réintégrant la CIMA ?

199
Conclusion de la première partie

384. Il ressort de notre première partie que, l'assurance telle que nous la concevons
aujourd’hui est une discipline qui remonte à très loin. Cependant, le concept est arrivé à
s'imposer dans les sociétés occidentales. En effet, basée sur l'entraide et de la solidarité,
l’assurance a connu une transformation efficiente en occident compte tenu de la création de
techniques de gestion des risques et le respect des engagements réciproques par le biais de
réglementations. Aujourd’hui dans le monde, le secteur des assurances s'est doté de systèmes
juridiques, mettant en relief un peu partout un objectif d’assainissement du secteur ainsi
qu'une amélioration des relations entre assureurs et assurés. Le Bénin comme la Mauritanie
ont pu avec le temps mettre en place leurs propres structures réglementaires et législatives qui
vues sous un certain angle offrent un cadre de juridique qui constitue une avancée par rapport
aux années post coloniales. Evidemment, les difficultés sont nombreuses et les progrès sont
lents. Les difficultés économiques des pays africains à elles seules n'expliquent pas tout. En
effet on a pu établir que des sujets d’ordre culturel, sociologique, religieux, ou l’existence de
mécanismes de solidarité propres aux africains, font que l’assurance, ou les principes
modernes de prévoyance ont du mal à réellement s’intégrer dans les habitudes de nos
populations locales. Il se révèle que c'est avant tout aux professionnels africains de
l’assurance (compagnie d’assurances, cabinets de courtages…) de trouver les réponses aux
questions relatives aux problèmes fondamentaux de l’assurance.

385. On a pu à un moment donné aboutir à la conclusion selon laquelle, une industrie


d’assurance solide est un élément nécessaire à l’essor économique et social d’un pays en voie
de développement. C’est pour cette raison que la citation : « Si cela était possible, j'écrirais le
mot assurance dans chaque foyer et sur le front de chaque homme ; tant, je suis convaincu
que l'assurance peut, à un prix modéré, libérer les familles des catastrophes
irréparables » dixit Winston CHURCHILL ne peut être « qu’utile » à l’Afrique.

386. Le Bénin appartient à la zone CIMA qui est un exemple d’intégration sectorielle en
matière d’assurance. Créée en 1992, la CIMA regroupe les quinze pays de l’UEMOA et de la
CEMAC avec un Code des assurances unique et une autorité de contrôle commune basée à
Libreville. La CRCA, qui exerce un contrôle auprès des 163 compagnies d’assurances est le
bras armé de l’organisation. Malgré les avancées observées en matière juridique, ainsi que les
efforts des assureurs, la consommation des produits d’assurance demeure faible. En effet,
l’idée de recourir à l’assurance pour la population béninoise se heurte encore à des blocages

200
culturels et socio-économiques. Le manque de produits adaptés à la population rurale
béninoise et au secteur informel mérite par ailleurs une réflexion.

387. L’ambivalence du droit mauritanien des assurances même si elle est originale ou
révèle une ouverture pour un pays musulman cache un certain duel. D’abord la pratique de
l’assurance quelque peu moderne se heurte à une forte demande interne d’une application
pure et simple de la charia. L’autre réalité est liée aux exigences de la mondialisation qui ne
riment pas forcément avec des principes d’indemnisation fixés par la diya.

201
DEUXIEME PARTIE :

LE FONCTIONNEMENT DES ASSURANCES


EN AFRIQUE

202
388. De son apparition, jusqu’aux années quatre-vingt-dix, l’assurance en Afrique
francophone a évolué avec le même cadre juridique. Il s’agit de la loi régissant les assurances
françaises dans les années trente. Ces dernières années dans la zone CIMA et singulièrement
au Bénin, le Code unique on l’a vu a grandement œuvré pour une certaine modernisation du
secteur de l’assurance en visant une l’adaptation du secteur à certaines réalités
socioéconomiques. Le Code CIMA qui regroupe l’ensemble des réglementations mises au
point par les cosignataires s’appliquent depuis février 1995 à tous les pays membres
(notamment ceux de la zone Franc). Cette réforme tant attendue, est aujourd'hui saluée dans la
mesure où elle était fondamentale pour sortir d’un système assuranciel dépassé.

En Mauritanie, grâce à la réglementation, fixée par la loi n° 93-40 du 20 juillet 1993


portant Code des assurances aujourd’hui, les autorités de contrôle du secteur de l’assurance
sont dans une optique d’assainissement de la pratique en question. Par ailleurs, on observe une
réponse favorable des assureurs à certaines revendications locales. Au cours de la seconde
partie de cette thèse, l’étude portera sur le droit des assurances tel qu’il est pratiqué. Cette
étude se fera à travers le régime juridique des assurances et la pratique de l’indemnisation
(Titre I).

389. Ces dernières années, bien qu’il y’ait eu des avancées significatives dans le domaine
des assurances, on peut néanmoins soutenir, et sans risque de se voir contredire, que dans bon
nombre de pays d’Afrique francophone (Mauritanie Bénin, Mali, Togo, Niger…), le secteur de
l’assurance à l’heure actuelle n’occupe pas une position des plus reluisantes comparée à
d’autres (Maroc, Tunisie Algérie…)

En effet, après les années de disette où les sociétés d’assurance évoluaient avec un cadre
juridique archaïque. Aujourd’hui avec de nouvelles législations, la performance du secteur
n’est pas au rendez-vous dans la majorité des pays membres de la CIMA et en Mauritanie. En
d’autres termes, nos législations de même que leurs mises en application suscitent des
interrogations relatives à leurs efficacités.

390. Pour mieux étayer notre affirmation quant à l’immobilisme du secteur de l’assurance au
Bénin ou encore en Mauritanie, faire un état des lieux s’impose. Des modèles de réussite
existent pourtant en matière d’assurances en Afrique. Doit-on s’en inspirer ? Ou alors devrons
nous réfléchir à des alternatives pour remédier au blocage structurel qui caractérise le secteur
des assurances au Bénin en Mauritanie. Il conviendra d’étudier pour cela : les modèles, l’état
des lieux, et les perspectives ou remèdes (Titre II)

203
Titre I

Le régime juridique des assurances et la pratique de


l’indemnisation

391. Plutôt que de revenir sur les nombreuses acceptions de la notion d’assurance, nous
allons à ce stade de l’étude examiner le contrat d’assurance. Pour ce faire, nous allons nous
attarder sur quelques particularités essentielles de celui-ci. En effet, Le contrat d'assurance
recèle des spécificités qui le distinguent des autres types de contrats. En effet, il fait intervenir
dans le processus de sa réalisation, des principes fondamentaux sans lesquels il ne pourrait être
efficient. On peut dégager les caractères fondamentaux suivants pour le contrat d’assurance :

1) Un contrat d'assurance est un contrat nommé du fait de son caractère assez usuel et
surtout du fait qu’il est régi par des textes de lois433 (Code des assurances)

2) Un contrat de bonne foi : l'assureur fait confiance à l'assuré ; du fait qu’il accepte
d'établir le contrat sur la base des déclarations de celui-ci. Par contre, en acceptant de payer
régulièrement la prime en contre partie d'une promesse d'assistance en cas de sinistre, l'assuré
exprime à sa manière sa confiance en son assureur. L’exigence synallagmatique de bonne foi
quant aux informations vise par ailleurs une garantie de l'égalité des parties au contrat
d'assurance. Bien informée dans son rapport contractuel, chaque partie pourra ainsi défendre
ses intérêts. Il s'agit dès lors pour ce qui concerne l'assureur, de prendre en charge un risque
tout en assurant la rentabilité de son entreprise434. L'obligation de bonne foi incombe aux
parties pendant les négociations, durant le contrat et lors de la survenance du sinistre.

3) Le contrat d'assurance est un contrat consensuel. Les contrats consensuels sont ceux
qui forment par le seul accord des parties. Cependant, il faut, évidemment, que l'accord
s'extériorise dans une déclaration quelconque : un écrit, des paroles, des gestes et parfois le
silence.

Un contrat est consensuel dans la mesure où l'accord résulte de la satisfaction


réciproque des parties. Par ailleurs, le paiement de la prime rend parfait le contrat. L'écrit en

433
Voir art 1105 du Code civil français.
434
K.-A. ALLA, L'escroquerie à l'assurance et ses implications, quelles solutions, mémoire I.I.A, 2000, p. 28. Il
affirme que « l'assureur n'est pas un philanthrope », cité par H-E. KAMENI KEMADJOU, La bonne foi dans le
contrat d'assurance.

204
tant que telle, ne sert que de moyens de preuves à l'occasion d'un éventuel contentieux noté soit
au niveau de sa formation, soit au niveau de son exécution.

4) Un contrat synallagmatique : le contrat, une fois valablement signé produit des


obligations aussi bien à la charge de l'assureur que de l'assuré. A cet effet, l'assuré est tenu de
payer la cotisation qui lui est attribuée et l'assureur, de régler le sinistre en cas de sa réalisation
dans les conditions prévues au contrat.

5) Un contrat d'adhésion car les parties ne définissent pas à armes égales les clauses du
contrat. Généralement, elles sont unilatéralement édifiées par l'assureur. L'assuré se contente
seulement d'y adhérer, à moins qu'il ne s'agisse d'une assurance de personnes pour laquelle
l'assuré a la latitude de décliner ses prétentions.435

6) Un contrat aléatoire : ce caractère aléatoire est d'une importance capitale. En effet, si


la survenance de tous les sinistres était certaine, l'assureur aurait du mal à prévoir une
indemnisation pour toutes les polices contenues dans son portefeuille. Ainsi, pas d'aléas, pas
d'assurances.

7) Un contrat à titre onéreux : l'assuré paie la prime qui lui est assignée. De son côté,
l'assureur qui a reçu la cotisation de l'assuré, s'engage à prendre en charge les éventuels
dommages directement subis par ce dernier (assurance de biens) ou même, les préjudices subis
par les tierces personnes par sa faute (Responsabilité Civile).

8) Le contrat d'assurance est un contrat successif, ce dernier est un genre spécifique de


contrat dans lequel l'exécution des obligations engendrées s'échelonne dans le temps. La
garantie de l'assureur dure dans le temps après la conclusion du contrat. La particularité du
contrat successif est de mise dans le contrat d'assurance, elle sous-entend que ce contrat ne peut
être rompu avec effet rétroactif. Ce caractère successif est beaucoup plus notable dans les
assurances vies, lesquelles sont généralement placées sur le long terme.

9) Un contrat intuiti personae : signifiant que le contrat est attaché à une personne. Le
choix de la personne est très important pour la prise en compte éventuelle d’un état de santé ou
d’un malus436 .

435
Un contrat d’adhésion est « un contrat dont le contenu contractuel a été fixé, totalement ou partiellement, de
façon abstraite et générale avant la période contractuelle », V. G. BERLIOZ., Le contrat d’adhésion, 2e éd.
LGDJ, 1976, p. 27.
436
Le principe de Bonus-malus qui est appliqué dans les compagnies d’assurances en France est un principe de
réduction ou de majoration de de la prime d’assurance en fonction du nombre de sinistres déclarés.

205
392. Nous pouvons constater que, dans les sociétés africaines, et surtout en milieu rural, les
différents principes que nous venons d’énumérer et, qui caractérisent le contrat d'assurance
sont difficiles d’application réelle du fait de l’analphabétisme, et de l’absence de culture de
l’engagement écrit.

393. Les caractères du contrat d’assurance sont certes précieux, mais, ils ne nous permettent
pas d’en appréhender les spécificités. C’est pourquoi, une étude portant sur le contrat
d’assurance nous aidera à mieux comprendre les textes en vigueur et leur applicabilité
(Chapitre I). Après avoir analysé le contrat d’assurance ainsi que les obligations des parties,
nous aurons pour tâche de décrire la procédure de l’indemnisation et le règlement des litiges
(Chapitre II)

206
Chapitre I : Le contrat d’assurance et les obligations des
parties

394. Le contentieux entre assureurs et assurés trouve son fondement dans le lien juridique
qui les lie c’est à dire le contrat d'assurance. En effet, cet acte est censé comporter la typologie
des risques couverts, les clauses de garantie, d'exclusion de responsabilité… Une meilleure
compréhension du contrat d’assurance par les parties437 permettrait sans doute d’éviter les
différents conflits et litiges pouvant survenir lors de l’exécution de ce dernier. Cette situation
est d'autant plus flagrante dans notre espace d’étude du fait du nombre sans cesse croissant de
litiges liés aux contrats d'assurance portés à la connaissance des tribunaux nationaux ou alors
des instances arbitrales sous-régionales s’il s’agit de la zone CIMA. Dans des pays avec des
taux d'analphabètes très élevés, on peut être amené à se demander si la protection des assurés
passe nécessairement et exclusivement par une réglementation trop excessive et contraignante
du contrat d'assurance ?

395. Les contrats d'assurance au Bénin et en Mauritanie ont toujours été inspirés des
dispositions de la loi du 13 juillet 1930 et de ses textes subséquents. Toutefois, il faudra
souligner les précisions fondamentales qui seront apportées par les nouvelles lois (loi n°92-029
du 26 août 1992 pour le Bénin et la loi n° 93 – 40 du 20 juillet 1993 pour la Mauritanie).

396. Nous allons successivement aborder la formation du contrat d’assurance (Section I)


puis les modes d’exécution du contrat d’assurance en cas de préjudices corporels ou matériels
(Section II).

Section I : La formation du contrat d’assurance.

397. Le livre 1 du Code CIMA est axé sur le contrat d’assurances. Il constitue en quelque
sorte un toilettage, une actualisation et une modernisation de la loi française du 13 Juillet 1930
qui régissait jusque là les contrats d'assurances au Bénin et dans les Etats de la Zone Franc. Le
but recherché dans la rédaction de ce livre est la simplification des textes, la clarté et la

437
A l'analyse des faits, on se rend compte qu'il existe une réelle incompréhension des termes du contrat par
l'assuré au moment de sa formation, mais parfois une volonté manifeste de l'assureur de dissimuler certaines
clauses exclusives de garanties en faisant signer les contrats à l'assuré de façon hâtive.

207
transparence dans la rédaction des contrats. Les titres I, II et III du présent livre ne concernent
que les assurances terrestres. Ils ne sont applicables ni aux assurances maritimes, ni aux
assurances fluviales, ni aux réassurances conclues entre assureurs et réassureurs. Du reste, les
opérations d'assurance-crédit ne sont pas régies par les titres mentionnés au premier alinéa438.
En Mauritanie la loi n° 93-40 du 20 juillet 1993 portant Code des Assurances In JO
n°812 du 15 août 1993 régit les assurances. Ce Code qui comprend 378 articles traitant des
opérations d'assurances en Livre 1 et des opérateurs en matière d'assurances, c’est-à-dire les
entreprises mauritaniennes et étrangères dans son Livre II. Après avoir indiqué le champ
d'application des opérations d'assurances, ce texte définit le contrat d'assurance, ses conditions
de fond et de forme, les différentes catégories d'assurances et le régime juridique applicable
aux entreprises mauritaniennes et étrangères qui opèrent dans ce domaine.

398. L’étape qui suit va porter sur les conditions préalables à la signature du contrat
d’assurance (Paragraphe I). Il s’agira, en outre, d’analyser des situations pouvant se produire
dans la vie d’un contrat d’assurance, il s’agit de la modification et de la résiliation du contrat
d’assurance (Paragraphe II).

Paragraphe I : Des conditions préalables la signature du contrat.

399. Deux étapes successives contribuent à l’élaboration « définitive » d’un contrat


d’assurance. Il s’agit dans un premier temps de la phase précontractuelle qui prépare l’acte
juridique suivie de la phase contractuelle qui finalise la formation du contrat d’assurance. Le
caractère d’adhésion du contrat d’assurance a été développé, on peut considérer par ailleurs
que les stipulations sont définies par l'assureur, avec habituellement des conditions générales et
des conditions particulières. Toutefois, le contrat d’assurance est réglementé puisque soumis
au Code qui régit la profession.

400. En raison des spécificités que nous avons évoquées en début de deuxième partie, le
défaut d'information est le risque auquel les parties sont particulièrement exposées. Ce défaut
d’information peut se révéler d’autant plus grave dans la phase précontractuelle. Dès lors, les
règles de droit concernant l'information précontractuelle se doivent d’être étudiées à travers :

438
Code CIMA et règlement n° 0002 /CIMA/ PCMA/CE/SG/2007 modifiant et complétant les dispositions de
l’article 335-1 du Code CIMA relatives à la réglementation des placements et autres éléments actifs.

208
l’information préalable réciproque, et le consentement des parties (A). Nous pourrons ensuite
nous attarder sur la signature du contrat d’assurance (B).

A- L’information préalable réciproque et le consentement des parties.

401. La phase d’information préalable et de pourparlers sont indispensables pour la signature


d’un contrat répondant aux normes. En effet, l’assureur a besoin de s’informer pour apprécier
exactement le risque ; cette appréciation détermine la prime en particulier que l’assuré est en
droit de connaitre pour décider s’il donne suite à son projet de contracter avec tel ou tel
assureur. La proposition peut se définir comme étant l’acte par lequel le futur assuré fait
connaitre à l’assureur, soit spontanément, soit, le plus souvent, sur la sollicitation de l’agent ou
du courtier, les renseignements nécessaires à l’établissement du contrat qu’il lui propose de
souscrire439.

Les renseignements donnés par l’assuré440 sont recueillis par l’assureur dans un
formulaire pré-rédigé par l’assureur441. Cette fiche précise l’identité du futur assuré la nature de
la demande de garantie la valeur des biens assurés …

402. L'information donnée à l'assureur par le preneur d'assurance sur le risque qu'il lui
propose de couvrir est un élément essentiel du contrat. En effet, le risque demeure la pierre
angulaire du contrat d’assurances. Il est toutefois admis selon Mr Luc MAYAUX que « la
connaissance complète du risque est illusoire »442. L’appréciation du risque est l’opération
fondamentale dont le but reste la conclusion ou non du contrat d’assurance. Cette appréciation
ne peut intervenir qu’au moment de la proposition d’assurance, opération par laquelle l’assuré
soumet le risque dont il souhaite la garantie par un acte juridique. L’information sur le risque
permet, en effet, à l'assureur d'apprécier dans quelle mesure il peut accepter de l’assurer. Cette

439
Voir C. GAYMARD, La formation du contrat d’assurance terrestre, Thèse Université de Lyon III, 1979. p.
36.
Ces informations sont capitales car elles détermineront le choix de garantie par l’assureur et par conséquent le
440

montant de la prime. Voy. en ce sens. Civ,26 janvier 1948, Grands arrêts du droit des assurances, Sirey, Paris,
1978, p.93.
441
En droit français, une jurisprudence récente a considéré que la fausse déclaration intentionnelle s’apprécie
uniquement par rapport au questionnaire rempli par l’assuré lors de la souscription. Cass. Civ.2, 5 février 2015,
n°13-28538. Le CAM estime que Le caractère intentionnel de la fausse déclaration doit être prouvé par
l’assureur. Art 27, al.1.
442
C. HABOUBI, Le secret en droit des assurances. Thèse de Droit Université de Lyon III 2009, p.27.

209
dépendance de l'assureur à l'égard du preneur justifie, certes, le niveau de loyauté imposé à ce
dernier : l'obligation d'information mise à sa charge dépasse l'exigence normale de bonne foi,
bonne foi qui généralement n’est que présumée443. La bonne foi est une notion que l’on utilise
abondamment dans la phase précontractuelle du contrat d’assurance. Il y occupe une place de
choix. Selon de doyen RIPERT : la bonne foi est l'un des moyens utilisés par le législateur et
les tribunaux pour faire pénétrer la règle morale dans le droit positif 444.

Allant dans ce sens, le Code mauritanien des assurances de même que le Code CIMA
imposent avant la signature du contrat la mise à disposition par l’assureur d’une fiche
d’information à l’assureur445. La fiche de renseignement permettra au futur assuré d’apprécier à
tête reposée les conditions posées par l’assureur446. L’assuré est dans l’obligation durant cette
phase de « répondre exactement aux questions posées par l’assureur, notamment dans le
formulaire de déclaration du risque par lequel l’assureur l’interroge lors de la conclusion du
contrat sur les circonstances qui sont de nature à faire apprécier par l’assureur les risques
qu’il prend en charge… »447.

403. La phase précontractuelle pour le Bénin est régie par le Code CIMA. Elle est
caractérisée par les pourparlers, période durant laquelle, les parties sont soumis à une
obligation d’information réciproque. Avant la conclusion du contrat d’assurance, l’assureur est
tenu de fournir au souscripteur une fiche d’information sur le prix, les garanties et les
exclusions. L’obligation d’information à la charge de l’assureur doit revêtir une forme écrite.
Les informations relatives au prix concernent le montant des différentes primes ou cotisations
correspondant au contrat proposé. Les informations relatives aux garanties doivent permettre
au souscripteur de choisir une couverture appropriée à son risque. Les informations portant sur
les exclusions doivent permettre au souscripteur de ne pas avoir de mauvaises surprises dans la
mise en œuvre de la garantie choisie. Bon nombre d’assurés sont étonnés de voir dans certaines
circonstances, leur demande d’indemnisation refusée. Ils estiment qu’à partir du moment où ils
versent une prime, il est inconcevable que leur préjudice ne soit pas réparé.

443
Cette présomption exige que ce soit à la partie alléguant la mauvaise foi de son contractant de la prouver, V.
Y. AUGUET, Concurrence et clientèle, Paris ; LGDJ 2000, p. 306.
444
G. RIPERT, La règle morale dans les obligations civiles, 4e ed., Paris, L.G.D.J., 1949, n 157,
445
Cette fiche doit contenir les garanties ainsi que le montant de la prime, V. art 6 du CAM, articles 6 al 2 Code
CIMA
446
Il est à préciser que la fiche de renseignement ne lie nullement les parties.
447
Article 9 al 1, CAM.

210
404. Le caractère d’ordre public de l’obligation d’information préalable est certain.
L’assureur qui manquerait à son obligation préalable d’information pourrait voir sa
responsabilité civile et professionnelle engagée. L’obligation d’information de l’assureur par le
souscripteur, avant la conclusion du contrat, concerne essentiellement la déclaration du risque.
Aussi, le Code CIMA, oblige-t-il le souscripteur à répondre exactement aux questions posées
par l’assureur, notamment dans le formulaire de déclaration du risque. Il existe des sanctions
en cas d’omission ou d’inexactitude de la déclaration du risque. La réticence non intentionnelle
est celle commise de bonne foi (ex : lorsque le souscripteur peut se prévaloir de ce qu’aucune
question ne lui a été posée sur le point litigieux, ou que les questions sont imprécises ou
équivoques…). La fausse déclaration non intentionnelle consiste dans la réponse inexacte
donnée par le souscripteur et qui est fondée sur son ignorance (ex : concernant une assurance
santé, le souscripteur ignorait son cancer ou sa séropositivité…). Sanctions correspondantes :
puisque le souscripteur était de bonne foi, il n’y a pas nullité du contrat d’assurance.
Cependant, dans un souci de rétablir l’équilibre entre la prime versée et la prestation due par
l’assureur, la sanction diffère selon que la réticence ou la fausse déclaration non intentionnelle
a été découverte avant ou après tout sinistre.

Lorsque la réticence ou la fausse déclaration est découverte avant le sinistre, l’assureur


peut alors choisir entre maintenir le contrat moyennant une surprime (le souscripteur devra
accepter ou refuser) ou résilier le contrat.

Les pourparlers précédant la conclusion du contrat d’assurance peuvent se prolonger par une
offre ou proposition de contracter émanant du souscripteur et non de l’assureur. Elle consiste
de fait pour le souscripteur de remplir et de renvoyer à l’assureur le questionnaire ou le
formulaire de déclaration du risque remis par l’assureur au cours des pourparlers. Cette
proposition d’assurance doit être faite par écrit. Quant au sort de la proposition d’assurance,
Trois hypothèses sont envisageables :

- le souscripteur retire sa proposition, tant que la proposition d’assurance n’a pas été
acceptée, par l’assureur, elle peut toujours être librement retirée par le souscripteur ;
- l’assureur refuse la proposition faite par le souscripteur ;
l’assureur accepte la proposition: si le souscripteur et l’assureur sont d’accord sur les
points essentiels du contrat d’assurance, le contrat d’assurance est réputé conclu. Mais si, sans
son acceptation l’assureur suggère des modifications de la proposition d’assurance, notamment
le montant de la prime, le contrat d’assurance ne peut être réputé conclu. L’acceptation de
l’assureur doit être en principe expresse, elle se manifeste par la signature de la police

211
d’assurance.

405. La phase contractuelle peut s’avérer être la phase la plus importante, et aussi la plus
délicate. Comme nous l’avons évoqué, c’est durant cette phase que l’assureur prend
connaissance du risque de l’assuré et essaye en conséquence de lui proposer une police
d’assurance conforme à ses besoins. Pour cela, il est nécessaire que l’assuré déclare de manière
exhaustive son risque (ses biens, son activité, son entreprise, et ses besoins en matière de
couverture) afin que l’assureur en prenne connaissance et lui propose un tarif en qui
correspond avec les risques. Le but recherché par la phase précontractuelle en matière
d’assurance est aussi une protection des parties, en l’occurrence le souscripteur, puisqu’une
phase précontractuelle floue ne fera ressentir son manque de qualité qu’au moment du sinistre,
moment où il sera alors trop tard pour agir.

Nous allons aborder le parachèvement de la phase pré contractuelle qui se matérialise par la
signature du contrat en cas d’acceptation par l’assuré de la proposition d’assurance.

B- La signature du contrat d’assurance.

406. Bien qu’étant un contrat consensuel, le Code CIMA ainsi que le CAM exigent un écrit
comme mode de preuve du contrat d’assurance et précise les formes que doit revêtir l’écrit, à
savoir celle d’une attestation d’assurance (1), celle d’une note de couverture (2) celle police
d’assurance (3)

1) L’attestation d’assurance

407. L’attestation d’assurance est un document généralement d’une seule page, voire plus
succincte encore, par lequel l’assureur déclare qu’une personne a la qualité d’assuré. Ce
document est une présomption d'assurance448 qui peut être demandée par les autorités lors d'un
contrôle routier par exemple. L'attestation d'assurance comporte notamment l'adresse de
l'assurance ainsi que l’identité et l’adresse du souscripteur. La valeur de l’attestation
d’assurance ne se limite qu’à une justification. Son caractère sommaire ne renseigne pas sur le

448
Cass. 1er civ., 18 octobre 1989, RGTA 1990, n° 1, p.76.

212
contenu des garanties.

408. Par ailleurs l’attestation d’assurance ne donne pas d’information sur le payement de la
prime par le souscripteur449 surtout, si le payement de celle-ci élément déterminant du contrat
d’assurance. Il peut arriver qu’avant la conclusion de l’accord définitif entre les parties, une
note de couverture soit établie.

2) La note de couverture

409. La note de couverture désigne un document, en principe, plus exhaustif que l’attestation
d’assurance. Il permet de constater soit la formation du contrat d’assurance soit une
modification de ce dernier450. Elle s’entend d’un écrit réunissant les informations relatives à
l’objet, la durée de la garantie et son étendue. Il doit de ce fait être assez explicite. Emise par
l’assureur ou son représentant, la note de couverture engage les parties ayant échangé leur
consentement, avant que celles-ci aient signé la police d’assurance ou l’avenant au contrat.
Dans la pratique un temps est nécessaire pour la rédaction du contrat en l’occurrence, les
conditions particulières ou spéciales.

410. En règle générale, l’assuré est animé par un désir d’assurance rapide. Une telle attente
de rapidité du souscripteur est compréhensible notamment dans le cadre de la vie des
affaires451. Bien souvent, une confusion est susceptible de se produire entre la note de
couverture et la police d’assurance en ce sens que la police d’assurance présente des
similitudes dans sa présentation (plusieurs pages) et son contenu (détails relatifs au contrat
d’assurance). Toujours est-il qu’une note de couverture est moins détaillée qu’un contrat
d’assurance. On pourrait ajouter que la note de couverture à un caractère éphémère dans la
mesure où elle vise à suppléer la police d’assurance en attendant sa rédaction.452

449
Cass.1er civ., 23 octobre 1984, n ° 83-12856, Bull civ. I , n° 271.
450
Cass. 1er civ., 25 octobre 1994, RGAT 1994, p. 1098, note. J. BIGOT.
451
V. NICOLAS, op. cit., p.173.
452
Cass. 1er civ., 14 janvier 1992, RGAT 1992, p. 276.

213
3) La police d’assurance

411. La « police » d’assurance est l’expression utilisée pour désigner le contrat d’assurance.
Ce document signé par les deux parties, constate l’existence et le contenu du contrat
d’assurance. Le terme ne fait pas référence aux forces de l’ordre. En réalité, il proviendrait du
mot italien « polizza » (certificat) ou du provençal « pollissaa », dérivé du grec « apodeixis »
(preuve), ou, selon certains, du grec « poluptukhos » (tablette)453. Le document décrit les
termes utilisés dans le contrat, ainsi que les garanties d’assurance et les exclusions de risque, la
durée du contrat ainsi que les conditions de résiliation454, les conditions de tacite reconduction,
la prime les franchises et les plafonds, les règles relatives à l’évaluation des biens, celles
concernant la prescription, pour chacune des parties et autres clauses souhaitées par les parties
dans la mesure où le principe de la liberté contractuelle s’applique 455. Peuvent s’y ajouter les
conditions d’exécution, par l’assureur, de la prestation à laquelle il s’est engagé, tel le délai de
versement des sommes dues456. Le contrat d’assurance doit être rédigé dans une langue
officielle, d’usage ou de travail457. L’assureur qui en est le concepteur assume les conséquences
de la mauvaise rédaction de celui-ci458.

412. La police d’assurance est la preuve irrévocable de l’existence du contrat d’assurance


qui lie l’assureur au souscripteur. Il s’avère indispensable de préciser que la police d’assurance
peut être constituée de deux voire trois documents qui sont censés se compléter les uns les
autres. Donc pour décortiquer les renseignements contenus dans la police d’assurance, notre
réflexion nous oriente vers les conditions générales (a) et les conditions particulières (b).

453
C. GAYMARD, op. cit., p.249.
454
Art.11, CAM. Art 8, Code CIMA.
455
Pour les éléments à mentionner dans la police, voy. les art.8 du CAM ou du Code CIMA.
456
V. NICOLAS, op. cit. p., 175.
457
En Mauritanie le contrat doit être rédigé en français et en arabe V. art 8 al.1 CAM. « Le contrat d’assurance
est rédigé par écrit dans la ou les langues officielles de l’État membre de la CIMA » art.7. Code CIMA.
458
En effet, « …les clauses ambigües s’interprètent en faveur de l’assuré… ». V. art. 8, Code CIMA.

214
a) Les conditions générales

413. Les conditions générales du contrat se présentent sous la forme d’une brochure
imprimée contenant toute une série de clauses communes à tous les contrats passés par une
entreprise d’assurance. En pratique, les toutes premières pages des conditions générales de la
police d’assurance sont consacrées à une longue description du sens à donner aux divers termes
juridiques utilises, dans ce contrat. En effet, il faut garder à l’esprit que les termes peuvent
avoir des sens différents en fonction du type de contrat459. Les conditions générales constituent
d’une certaine manière le langage universel adopté par tel ou tel assureur avec tous ses assurés
ayant conclu telle catégorie de contrat. Il s’agit de la base commune qui sert de socle d’accord
entre les parties, à défaut d’indications plus détaillée dans la condition particulière.

b) Les conditions particulières

414. Les conditions particulières d’une police d’assurance tout comme les conditions
générales sont importantes en ce sens qu’elles recèlent des mentions qui doivent
obligatoirement d’après la législation figurer dans le contrat d’assurance. Toutefois d’autres
mentions facultatives sont parfois insérées par l’assureur. On pourrait les assimiler à une
individualisation des conditions générales car on passe du général au particulier ; de la souche
commune et uniforme, on passe au détail et au contrat spécifique tenant compte des de tel
souhait du souscripteur ou de telle circonstance propre ayant donné lieu, le plus souvent à une
tarification complémentaire460. Les conditions particulières indiquent principalement selon les
articles 8 du CAM ou du Code CIMA

- le nom et la domiciliation des parties contractantes ;


- la chose ou la personne assurée ;
- la nature des risques garantis ;
- le moment à partir duquel le risque est garanti, et la durée de la garantie ;
- le montant de la garantie ;

459
L’acception du terme accident a donné lieu à divers contentieux et ce pendant des années. V. NICOLAS, op.
cit., p.,177.
460
V. NICOLAS, op. cit., p.177.

215
- la prime ou la cotisation ainsi que les modalités de payement ;
- les cas et conditions de prorogation ou de résiliation et les effets.
415. Selon l’article 7 du CAM, toute addition ou modification du contrat d’assurance
primitif doit être constatée par un avenant signé des parties461. En cas de contradiction entre
l’avenant et la police d’assurance, c’est l’avenant qui l’emporte puisqu’il est la manifestation
de la volonté la plus récente des parties. Il existe une exception au principe de la nécessité de
rédiger un avenant pour modifier le contrat d’assurance initial : lorsque face à une proposition
de modification du contrat initial faite par lettre recommandée (ou par tout autre moyen
laissant trace écrite), l’assureur garde le silence pendant 15 jours. Le silence de l’assureur
pendant 15 jours vaut acceptation de la proposition de modifier le contrat d’assurance
(exception : cette règle ne s’applique pas aux contrats d’assurances sur la vie
La plupart des décisions de justice est accueillie en règle générale par une contestation des
parties, ce qui révèle une certaine méconnaissance des droits et devoirs de la part des assurés
en l’occurrence. En matière d’assurance, c’est d’ailleurs l’assuré qui lors de la signature du
contrat ne maitrisant pas le domaine s’engage sans pour autant mesurer les effets ou
conséquences de son acte. Le désaccord entre les parties n’éclate généralement qu’au moment
des règlements de sinistre, mais, les origines du désaccorde remonte indubitablement à la
souscription du contrat.
416. Pour tenter de limiter les litiges et accorder aux parties la possibilité de corriger
certaines lacunes, des aménagements du contrat d’assurance sont possibles. En effet, la
signature de la police n’est pas l’ultime étape de la vie d’un contrat d’assurance, puisque, la
police d’assurance initiale peut normalement être modifiée ou tout simplement résiliée.

Paragraphe II : La modification et la résiliation du contrat d’assurance

417. Les modalités de modification ou de résiliation d’un contrat d'assurance sont


encadrées par la loi. En tout état de cause, en cours de contrat, les modifications peuvent être
proposées par le souscripteur ou l'assureur qui souhaite changer les termes de leur
engagement initial. Par ailleurs, la modification peut aussi provenir de circonstances nouvelles
qui affectent le risque déclaré à l'origine. Ceci est aussi valable pour les cas de modification
évidemment imposées par les lois en présence. Nous allons dans un premier temps étudier la
modification du contrat d’assurance (A). Ensuite, une attention sera portée sur le fait que si le

461
L’alinéa 2 de l’article 7 du Code CIMA en est l’équivalent.

216
problème de la résiliation est résolu en France par la loi HAMON462, dans la zone CIMA et en
Mauritanie, cet aspect du contrat d’assurance demeure une source de litiges. En effet, pour
mettre fin à un contrat d’assurance les parties se doivent de respecter certaines règles, parfois
procédurières, du droit des assurances.
418. C’est à travers la résiliation du contrat d’assurance (B) que nous allons présenter les
conditions et surtout la procédure de résiliation de ce contrat.

A- Modification du contrat d’assurance

419. Il faudra faire une distinction entre la proposition de modification du contrat et une
déclaration d’aggravation du risque. En effet, il existe le cas de la modification du contrat sans
aggravation du risque, et inversement le cas d’aggravation du risque sans modification du
contrat si l’assureur accepte de couvrir un risque aggravé aux conditions initiales de signature
du contrat463.
Le risque qui est un facteur déterminant du contrat d’assurance justifie le fait que
lorsque celui-ci varie, les parties soient souvent portées vers une modification de leur contrat
d’assurance initial. Les deux hypothèses où peuvent survenir la modification du risque sont
soit une diminution de ce facteur ou alors une aggravation du risque initialement garanti par le
contrat.
420. Nous étudierons deux types de modification du risque. D’abord les modifications
pouvant être invoquées par les parties notamment les assurés, entendons par là les cas de
modification du risque suggérées par les parties (1). Le cas de la modification imposée par la
loi sera par la suite traité (2). Il convient de préciser que, le contrat d’assurance doit être en

462
Voir. Décret n° 2014-1685 du 29 décembre 2014 relatif à la résiliation à tout moment de contrats d'assurance
et portant application de l'article L. 113-15-2 du Code des assurances. Cette réforme a instauré de nouvelles
règles qui assouplissent la procédure de résiliation d'un contrat d'assurance. L'objectif : permettre à l'assuré de
mieux faire jouer la concurrence en vue de faire baisser les prix du marché. L113-15-2 du CAF dispose que :
« Pour les contrats d'assurance couvrant les personnes physiques en dehors de leurs activités professionnelles et
relevant des branches définies par décret en Conseil d'Etat, l'assuré peut, à l'expiration d'un délai d'un an à
compter de la première souscription, résilier sans frais ni pénalités les contrats et adhésions tacitement
reconductibles. La résiliation prend effet un mois après que l'assureur en a reçu notification par l'assuré, par lettre
ou tout autre support durable »
463
On suppose que la déclaration d’aggravation du risque pourrait se combiner avec une demande de poursuite
du contrat aux mêmes conditions tarifaires. Une demande qui serait considérée comme acceptée par l’assureur
faute de refus dans les 10 jours. Voir en ce sens J-C. BERR et H. GROUTEL, RGAT 1980, p.523.

217
vigueur au moment où la demande de modification est formulée. En effet, un contrat expiré,
résilié ou suspendus ne peut pas faire l’objet d’une modification464.

1) Les modifications suggérées par les parties

421. Lorsque de nouvelles circonstances conduisent une diminution ou une aggravation du


risque, le contrat d’assurance est susceptible d’être modifié, sur proposition de l’assuré ou de
l’assureur465. En effet, la modification du contrat d’assurance est proposée par la partie qui la
souhaite. Cependant, l’autre partie peut l’accepter ou la refuser466. En cas d’acceptation, la
modification prend immédiatement effet, sauf convention contraire, entre les parties,
lorsqu’elles veulent en reporter la prise d’effet à une autre date. Lorsqu’elle est refusée par
contre, la modification proposée ne peut prendre effet. Il en est de même, si l’acceptation de
l’assureur est assortie de conditions, par exemple l’application d’une surprime. Dans de tels
cas, la condition posée par l’assureur doit être acceptée par l’assuré pour que la modification
puisse prendre effet. Il convient de préciser que l’accord exprès de l’assureur ne peut conduire
qu’à une dispense de l’assuré du recours à la lettre recommandée.

En revanche, lorsque l’assuré a recours à ce type de lettre, le silence de l’assureur


pendant une période de quinze jours à compter du lendemain à 0 heure du jour de sa réception
rend la modification effective dans la mesure où elle est alors réputée acceptée par lui de telle
sorte qu’il ne peut plus s’y opposer. (Article 6, alinéa 3 du Code CIMA). L’article 7, alinéa 2
de la Loi du 13 juillet 1930 fixait ce délai à dix jours.

422. La modification du contrat d’assurance suppose en règle générale deux possibilités :


on sera en présence d’une diminution du risque (a) ou à l’inverse à une aggravation du risque
(b) un troisième cas particulier sera abordé il s’agit du risque nouveau (c). Avant d’aborder la
diminution du risque, il convient de rappeler que la modification des contrats d’assurance se
fait au moyen d’un avenant. Ce document aura pour vocation de constater toutes les
modifications survenues dans les termes de la police d’origine ou dans ceux d’avenants

464
Voir : J. BIGOT, V. HEUZE, J. KULLMANN, L. MAYAUX, R. SCHULZ, K. SONTAG, Traité de doit des
assurances, le contrat d’assurance, 2e édition, tome 3, LGDJ, 2014 p. 455.
465
Les modifications intervenant sous l’initiative de l’assuré sont cependant plus fréquentes.
466
Eu égard au caractère consensuel du contrat d’assurance, l’accord des parties demeure nécessaire. Z.
YIGBEDEK, L’assurance automobile, théorie et pratique (en Afrique), Presse Universitaire de Yaoundé, 2015,
p.115.

218
antérieurs relatifs à la même police. En d’autres termes, les modifications constatées par
l’avenant se situent par rapport aux termes du contrat tels qu’elles découlent à un moment
donné de la police d’origine et des différents avenants qui y sont survenus. L’avenant fait
corps avec la police. Il en résulte que le contrat d’assurance reste applicable sur tous ses
points que les différents avenants successifs laissent inchangés. Il est établi en autant
d’exemplaires que la police d’origine et signé par les parties467.

a) Diminution de risque

423. Il peut arriver, que la déclaration des circonstances nouvelles soit avantageuse pour
l'assuré ; l’exemple de la diminution du risque le démontre clairement. En l’espèce, le
changement se traduit par une réduction du risque. Cette situation peut se produire par
exemple, lorsque l'assuré utilisait son véhicule à titre professionnel et qu’il se retrouve au
chômage ou part à la retraite, l'assuré doit donc faire la déclaration dans un délai de mois468.

Aussi, la diminution du risque constitue un type de modification des circonstances du


risque. En principe, la loi n'oblige pas l'assuré à déclarer la diminution du risque. Mais suite à
une aggravation de risque ayant entraîné une surprime, l'assuré doit dans son intérêt faire la
déclaration d'une diminution éventuelle du risque antérieurement aggravé afin de bénéficier
d'une révision à la baisse de la prime. Il lui est possible de demander une diminution du
montant de sa cotisation. Cela peut se produire lorsque les garanties prévues initialement ne
sont plus nécessaires. Dans ce cas, un refus de l’assureur de réduire le montant de la cotisation
proportionnellement à la diminution du risque donne la possibilité à l’assuré de résilier le
contrat. La résiliation prendra effet trente jours après la demande469.

424. En tout état de cause, le contrat d’assurance peut être résilié par chacune des parties
lorsqu’il a pour objet la garantie de risque en relation direct avec la situation antérieure et qui
ne se retrouve pas dans une situation nouvelle. Il faudra cependant préciser que les

467
Z. YIGBEDEK, op. cit., p. 122.
468
La résiliation ne peut intervenir que dans un délai de trois mois art 12 CAM.
469
En France l'art. L.113-4 du Code des assurances qui organise cette situation, dispose que « l'assuré a le droit
en cas de diminution du risque en cours de contrat, à une diminution du montant de la prime. Si l'assureur n'y
consent pas, l'assuré peut dénoncer le contrat. La résiliation prend alors effet trente jours après la dénonciation.
L'assureur doit alors rembourser à l'assuré la portion de prime ou cotisation afférente à la période pendant
laquelle le risque n'est pas couru » Une disposition reprise par l’article 12 alinéa 4ème du CAM

219
dispositions relatives à la diminution ou à l’augmentation du risque connaissent quelques
exceptions.

Le Code CIMA en reproduisant les dispositions en vigueur dans l’hexagone ajoute à


l’exception : le non applicabilité de la modification de l’assurance à l’assurance vie. Ainsi, les
dispositions de l’article 15 alinéa 1er « ne sont applicables ni aux assurances sur la vie, ni à
l’assurance maladie lorsque l’état de santé de l’assuré se trouve modifié »470.
425. De la même façon qu’un risque est susceptible de diminuer, l’assuré peut se trouver
dans une situation d’aggravation du risque.

b) Aggravation du risque

426. La notion d’aggravation est clairement énoncée par l'article 15 du Code CIMA qui
dispose : « En cas d'aggravation du risque en cours de contrat, telle que, si les circonstances
nouvelles avaient été déclarées lors de la conclusion ou du renouvellement du contrat,
l'assureur n'aurait pas contracté ou ne l'aurait fait que moyennant une prime plus élevée,
l'assureur a la faculté, soit de dénoncer le contrat en remboursant la fraction de prime non
courue, soit de proposer un nouveau montant de prime »471.
L'aggravation de risque se traduit par un accroissement soit de la probabilité de sa
réalisation, soit de son intensité de telle sorte que si l'assureur l'avait connue à l'origine, il
n'aurait pas contracté ou ne l'aurait fait que moyennant une prime plus élevée eu égard à
l'importance des dommages éventuels472. Par exemple, une nouvelle affectation de l’assuré
qui suppose un détour du trajet initial par une zone réputée très dangereuse pourrait constituer
une aggravation de risque. La notion du risque aggravé doit être distinguée d'autres notions
voisines. Ainsi, l'on a souvent tendance à confondre l'aggravation de risque à la création d'un
risque nouveau. Ce dernier se traduit par l'exclusion dudit risque, créant ainsi une situation de
non-assurance. Autrement dit le risque nouveau sort des prévisions des parties, soit en
devenant étranger à la définition du risque, soit en tombant dans le champ des exclusions
contractuelles. C’est le cas notamment lorsque le fils de l’assuré n’étant pas déclaré emprunte
la voiture de ce dernier.
427. Par ailleurs, on dénote qu’en droit français l'adjonction d'une remorque à un véhicule

470
Article 15 alinéa 2 du Code CIMA, voir article L 113-4 du CAF.
471
Art 15 alinéa 1 du Code CIMA. L’article 12 alinéa 1 du CAM reprend textuellement la même disposition
472
C’est ce que dit en substance l’alinéa 1 de l’article 12 du CAM.

220
modifie l'instrument du risque et est qualifiée de non-assurance plutôt que d'aggravation de
risque473. En conséquence, si le risque nouveau est opposable aux victimes en assurance de
responsabilité, l'aggravation du risque ne l'est pas, sauf en cas de fausse déclaration ou de
réticence intentionnelle474. Inversement, Le Code CIMA considère le remorquage comme
étant une aggravation du risque couvert par l’assurance du véhicule remorqueur475. La
déclaration du risque aggravé est prévue par l'article 12 alinéa 1-3 de du Code CIMA qui
dispose que : « L’assuré doit déclarer en cours de contrat, les circonstances nouvelles qui ont
pour conséquence soit d'aggraver le risque, soit d'en créer de nouveaux et rendant de ce fait
inexactes ou caduques les réponses faites à l'assureur notamment dans le formulaire
mentionné à l'alinéa 2. »476.
Cependant, une circonstance nouvelle qui n’entraîne aucune aggravation du risque
n’est pas soumise à une obligation de déclaration à l’assureur477. La déclaration est faite à
l'assureur par lettre recommandée ou contresignée dans un délai de quinze jours à partir du
moment où il en a eu connaissance. En cas de lettre contresignée, un récépissé servant de
preuve doit être délivré à l'assuré. Qu'elle soit recommandée ou contresignée, la lettre est
adressée au domicile de l'assureur. La jurisprudence associe à la formalité de la lettre
recommandée un caractère non substantiel en estimant qu’une simple lettre peut être
suffisante. Il faudrait donc, que l’assureur ne conteste pas le fait qu’il l’ait reçue 478.
428. En présence d'aggravation de risque, l'assureur a plusieurs options. Il peut tout
simplement procéder à la résiliation du contrat dont le risque est aggravé479 ; l’assureur aura
donc, dans ce cas, à rembourser la portion de la prime afférente à la période pendant laquelle
le risque reste à courir. La volonté de résiliation notifiée à l'assuré ne prend effet qu'après dix
jours suivant la notification. L'assureur peut également décider de maintenir le contrat pourvu
que l'assuré consente à payer la surprime correspondant au risque aggravé. Inversement, c'est-
à-dire si l'assuré n'accepte pas la nouvelle proposition de l'assureur, le contrat est résilié avec
ou sans payement d'indemnité. Au cas où l'aggravation aura diminué ou disparu, l'assuré peut

473
Voir en ce sens : Cour de cassation, Assemblée plénière du 13 décembre 1974, 73-10.831, Publié au bulletin.
474
A. BLONDEAU, Jurisprudence française 1968-1976, AB - CO, Paris, éd. Techniques, 1978, p.140.
475
Voir, art 202 du Code CIMA.
476
Il s'agit du formulaire de déclaration de risque sur lequel l'assureur interroge l'assuré lors de la conclusion du
contrat, Voir article 9 alinéa 2 du CAM.
477
V. Cass.civ.,5 mai 1943 : RGAT 1943, p.283, note A. BESSON.
478
Z. YIGBEDEK, op. cit,. p.115
479
Chambres réunies, 8 juill. 1953, Grands arrêts du droit des assurances.

221
demander une nouvelle révision de la prime à la baisse480 En effet, elle se tient, pour la
doctrine, soit dans les chances de réalisation du risque qui se trouvent augmentées en raison
de circonstances nouvelles, soit dans l'étendue des conséquences d'un sinistre. Dans le premier
cas, c'est la probabilité qui est en cause, et dans le second, c'est on attribue l'intensité. Pour ce
qui est de la probabilité, il faut d'abord tenir compte des éléments mécaniques de
multiplication possible de sinistre, ou de leur fréquence. En ce sens, il peut s'agir des sujets
qui créent le risque, comme les salariés dont l'activité peut entraîner la mise en jeu de la
responsabilité de leur commettant. A titre d'exemple, le nouveau recrutement pour un assuré
contre la responsabilité des préposés, doit être déclaré. Dans la mesure où ce risque est
mentionné au formulaire de la déclaration, il s'aggrave en raison de ce nouveau
recrutement481. En ce qui concerne l’intensité, elle peut être observée, lorsqu’après la
conclusion du contrat d'assurance, l'assureur supportera seul le poids de l'indemnisation, mais
il faut observer qu'il dispose alors d'une arme toute différente, celle de l'exception de
subrogation telle définie par l'art. L.121-12 du Code des assurances482. Il faut préciser que
cette exception n’existe pas encore dans le Code CIMA ni dans le CAM. Une multitude de
décision seront toutefois fondées sur les deux critères précédemment énumérés. En guise
d’exemple : un éleveur qui opte pour une reconversion professionnelle et devient transporteur
de marchandise peut être considéré comme créant plus de risques que lors de l’exercice de sa
profession antérieure. Les nombreuses contraintes existantes dans le domaine du transport
routier de marchandises en font un secteur à forte sinistralité. En effet, tout au long du
processus d’acheminement, les marchandises transportées peuvent se trouver exposées à
divers risques tels que les accidents, la dégradation, la perte, le vol, ou encore l’avarie.
Il faut rajouter que d’après le Code CIMA, l'assureur, ne peut plus se prévaloir de
l'aggravation des risques quand, après en avoir été informé de quelque manière que ce soit, il
a consenti au maintien de l'assurance483. Cette acceptation précise le droit mauritanien peut se
manifester par un encaissement de la prime ou alors une indemnisation à la suite d’un
sinistre484.

480
Voy. article 15 al 3 Code CIMA
481
Y. LAMBERT-FAIVRE, Droit des assurances, Dalloz, 12ème édition, paris, 2005 p.259
482
Sur la question V. J. KULLMANN, Traité de droit des assurances, Tome3, Le contrat d’assurance,
L.G.D.J,2002, p.708, cité par M. OULD MOUFTAH EL KHEIR OULD EBA in , La déclaration des risques
dommages dans les assurances de dommage de l’entreprise, 2007.
483
Art 15 du Code CIMA
484
Article 12du CAM.

222
429. On peut d’ores et déjà regretter le manque de dispositions en ce qui concerne les
risques nouveaux pouvant survenir dans la vie d’un contrat. En effet, le concept du risque
nouveau recouvre en droit français deux situations : les circonstances résultat de l'évolution
des éléments qui ont déjà fait l'objet des questions de l'assureur et celles étrangères aux
déclarations déjà réalisées et qui n'ont pas donné lieu à aucune question dans le formulaire
initial. C'est-à-dire, la distinction entre la notion des circonstances nouvelles et les actes
juridiques qui correspondent à des assurances nouvelles, étrangers à l'article L. 113-2 du Code
des assurances485. En guise d’exemple, on pourrait considérer l'ajout d'un nouveau bien,
étranger par sa nature à ceux initialement déclarés, répond à la notion légale de risque
nouveau. Le risque étranger à l'objet initial du contrat ne peut être couvert que par un avenant
explicite au contrat ou par un autre contrat486. Il n'est pas dit que des réformes législatives en
la matière suffiront à arrêter les contentieux relatifs aux modifications ou à l’apparition de
risques nouveaux non déclarés.
Une fois de plus, c’est la bonne foi qui est au centre de la faculté de résiliation de
l’assurance par les parties. En d’autres termes, la connaissance du devoir d’information ne
suffit pas. Un accomplissement de celui ci est indispensable au bon fonctionnement du
contrat.
430. Certains risques de par leurs caractères nouveaux ou du fait du contexte socio
économique nécessitent leur prise en compte par le secteur de l’assurance. Pour ce faire, leur
mise en garantie par les assureurs exige leur prise en compte via des dispositions nouvelles
dans les lois régissant les assurances.

2) Les modifications imposées par la loi

431. Des garanties nouvelles sont parfois imposées par la loi. Dans cette hypothèse, les
parties sont obligées de les prendre en compte. Tel a été notamment le cas lorsque le législateur
a rendu obligatoire la garantie contre les catastrophes naturelles en 1982 en France : les assurés
ont dû accepter l’adjonction de cette garantie et l’augmentation de cotisation. Ainsi, en assurant
ses biens, contre l’incendie, les inondations…L’assuré est automatiquement couvert contre les
dégâts dus aux catastrophes naturelles. Aux termes de la loi, sont considérés comme effets des
catastrophes naturelles : « les dommages matériels directs non assurables ayant eu pour cause

485
Voir H. GROUTEL, Le contrat d'assurance, paris. Dalloz, 1995, p.76.
486
Voir H. GROUTEL ibid., p. 76 et s.

223
déterminante l'intensité anormale d'un agent naturel lorsque les mesures habituelles à prendre
pour prévenir ces dommages n'ont pu empêcher leur survenance ou n'ont pu être prises »487.
On peut aussi faire référence à la loi n° 90-506 du 25 juin 1990 rendant obligatoire la garantie
du risque tempête ; de la loi n° 2003-706 du 1er avril 2003 modifiant le régime des assurances
de responsabilité civile générale.

En France, grâce la loi du 9 septembre 1986488, tous les contrats de biens comportent
automatiquement la garantie des dommages matériels résultant d’actes de terrorisme et
d’attentats. La recrudescence des attentats terroristes dans depuis janvier 2015 en France489 se
caractérise par une série d’attentats d’une ampleur sans précédent. Cette situation amène l’Etat,
les assureurs et les victimes à s’interroger sur les capacités du fonds à indemniser tous les
sinistres résultant des actes terroristes qui n’ont jamais été aussi éminents qu’imminents490.

Au niveau mondial, les attentats du 11 septembre 2001 contre les Tours Jumelles du
World Trade Centrer et le Pentagone constituent l’événement le plus mémorable de ces
dernières années en matière de terrorisme491. Le montant des sinistres assurés résultant de ces
attaques terroristes est compris entre 35 et 70 milliards de dollars pour les seuls risques
assurés492. Les principales sources de sinistres ont été classées dans les catégories suivantes :
l’interruption des activités économiques, les dommages matériels ; par ces conséquences, le
terrorisme ne pourra que soulever une question relative à son assurabilité. En effet les
conséquences dévastatrices des actes terroristes sont parfois dans une certaine mesure
similaires à celles causés par les actes de guerre entre Nations, sans pour autant correspondre à
la définition classique de l’état de guerre. Au lendemain des attentats du 11 septembre 2001, la
plupart des gouvernements des marchés d’assurances des pays développés ont imposé la
couverture des risques politiques et des risques liés au terrorisme493.

487
Article L 125-1 alinéa 3 du CAF.
488
Loi n° 86-1020 du 9 septembre 1986 relative à la lutte contre le terrorisme.
489
https://fr.wikipedia.org/wiki/Attentats_de_janvier_2015_en_France, consulté le 17 septembre 2017.
490
http://www.liberation.fr/france/2016/07/15/retour-sur-35-ans-d-attentats-en-france_1466276, consulté le 18
aout 2017.
491
« Le terrorisme, qui peut se définir comme « un acte de violence illicite soigneusement préparé, et dirigé
contre l’ordre politique et sociétal établi et qui engendre un effet de choc auprès du public ». Voir. L’assurabilité
des risques terroristes dans l’assurance dommages après le 11 septembre 2001, Collection Risk Perception,
Swiss Re, 2003, p.7.
492
J. BOURTHOUMIEUX, Les événements du 11 septembre 2001 : coût, conséquences et perspectives, RGDA,
n° 2002-01, 01 janvier 2002, p. 15.
493
Le régime d’assurance de la majorité des Pays de l’OCDE date du lendemain du 11 septembre.

224
432. Dès le 1er janvier 2002, un partenariat privé/public entre les sociétés d’assurance, les
familles professionnelles FFSA (Fédération Française des Sociétés d’Assurance) et GEMA
(Groupement des Entreprises Mutuelles d’Assurances), les Réassureurs internationaux et
l’État français créaient GAREAT (Gestion de l’Assurance et de la Réassurance des Risques
Attentats et Actes de Terroriste) qui réassurait en terrorisme les Grands Risques définis
comme étant des risques avec des capitaux assurés de six millions d’euros et plus494.

En 2005 après la modification de l’Article L 126-2 du Code des Assurances rendant


obligatoire la couverture des risques terroristes dans toutes les polices dommage, la seconde
section de GAREAT pour accueillir les risques inférieurs à six millions d’euros.

En 2010 le seuil de cession des risques à la section des Grands Risques passe à 20 millions
d’euros, et de ce fait, pour fournir aux adhérents qui le souhaitent une couverture de
réassurance GAREAT, la Section des Risques Petits et Moyens s’est élargie accueillant des
risques avec des capitaux assurés inférieurs à vingt millions d’euros495.

En Afrique, même si les risques de conflits interétatiques se sont fortement affaiblis, il


devient indéniable que le terrorisme fait désormais partie du quotidien de certaines contrées.
A ce titre, il existe une nécessité évidente de la mise en place de lois garantissant les
préjudices liés au risque terroriste. Avec comme objectif une réparation raisonnable des
préjudices corporels ou matériels qu’ils provoquent. Nos législateurs, à l’instar de ce qui se
fait en France, devraient dans ce cas prévoir des extensions systématiques de garantie dans les
assurances de biens contre l’incendie (assurance multirisque habitation, assurance automobile,
assurances, entreprise) aux dégâts causés par des attentats ou actes de terrorismes.

De telles reformes pourraient certainement inciter les assurés locaux à recourir


davantage à la réassurance internationale des risques terroristes. En effet, on ne peut pas
encore envisager dans certains pays du continent, la prise en charge des réparations de
sinistres provoqués par des actes de terrorisme par les gouvernements uniquement. Par
ailleurs, la création d’un Fonds de Garantie pour la réparation des préjudices corporels liés à
des actes de terrorismes est plus qu’éminent aujourd’hui.

494
http://www.gareat.com/content/historique, visité le 3 octobre 2017.
495
https://www.news-assurances.com/fiche-pratique/assurance-terrorisme-quest-ce-que-le-gareat/01678004,
Site visité le 12 septembre 2017.

225
433. La durée du contrat est variable, l’échéance est en principe prévue par le contrat.
Toutefois, les parties ont la possibilité d’y mettre un terme via la faculté de résiliation. Encore
faut il que certaines conditions soient réunies.

B- Résiliation du contrat d’assurance

434. La durée du contrat d’assurance et les conditions de résiliation sont fixées par la
police496 d’assurance. En effet, indépendamment des cas de retrait d’agrément497 et de
dissolution d’une compagnie d’assurance498, certaines circonstances dépendant des parties
font prendre fin au contrat d’assurance.

Contrairement à la caducité499 qui produit ses effets de plein droit, sans initiative du
souscripteur ou de l’assuré, la résiliation, qui met fin pour l’avenir à un contrat en cours, ne
peut résulter que d’une initiative des parties. Ainsi, la faculté de résiliation du contrat
d’assurance est ouverte à l’une ou l’autre des parties à la survenance de certaines
circonstances prévues par la loi des parties.

435. Ces circonstances sont diverses et variées. En règle générale, un changement de


situation (1) est susceptible d’entraîner une résiliation du contrat d’assurance. De même,
comme on a eu à l’étudier500, l’évolution du risque peut sous certaines conditions justifier une
résiliation du contrat501

Par ailleurs, l’inexécution d’une obligation contractuelle ou une faute (2) peuvent constituer
des motifs valables de la résiliation d’un contrat d’assurance. La résiliation après sinistre (3)
quant à elle est le droit discrétionnaire reconnu à l’assureur pour résilier le contrat à l’issue
d’un sinistre.

496
Civ., 1re, 2 mars 1994, RCA 1994, n° 225, RGAT 1994.458, note. Maurice, cité par Y. LAMBERT- FAIVRE,
L. LEVENEUR, op cit., p. 221. V. art. 8 du CAM et du Code CIMA.
497
V. infra, n° 732 et s.
498
V. infra, n° 732 et s.
499
« L'assurance est nulle si, au moment du contrat la chose assurée a déjà péri ou ne peut plus être exposée,
aux risques ». V. article 15 al 1 du CAM.
500
V. supra, n° 422.
501
V. supra, n° 436.

226
1) Résiliation suite à un changement de situation de l’assuré

436. Comme on pourra le constater plus tard pour l’assureur, le législateur reconnaît à
l’assuré le droit de résilier unilatéralement le contrat d’assurance dans des circonstances
particulières. La loi autorise l’assuré dont la vie personnelle vient à connaître des
modifications à résilier un contrat qui deviendrait inadapté à ses nouveaux besoins. Cette
situation se produit, lorsqu’il a pour objet. Il s’agit pour la Mauritanie des situations
suivantes :

- changement de domicile ;

- changement de profession502 ;

- retraite professionnelle ou cessation définitive d’activité professionnelle.503

Le Code CIMA rajoute aux dispositions précitées : le changement de situation ou de régime


matrimonial504.

La faculté de résiliation ne concerne pas les assurances sur la vie en ce qui concerne le droit
applicable dans la zone CIMA505.

On notera que le changement de situation offre aussi à l’assureur la faculté de prendre


la décision de résiliation du contrat. Toutefois, on peut constater que cette faculté a été
concrètement conçue dans l’intérêt de l’assuré506 .

En matière de délai, la résiliation ne peut intervenir que dans les trois mois suivant la
date de l’événement. La résiliation prend effet un mois après que l’autre partie au contrat en a
reçu notification. Cette faculté de résiliation constitue une grande avancée. En effet, sous
l’empire de la loi de 1930, cette faculté n’était ouverte que tous les dix ans, avec un préavis de

502
Loi n° 93 – 40 du 20 juillet 1993 Portant Code des Assurances In JO n°812 du 15 août 1993, article 12 alinéa
4.
503
« Le contrat d’assurance peut être résilié par chacune des parties lorsqu’il a pour objet la garantie de risque
en relation directe avec la situation antérieure et qui ne se retrouve pas dans la situation nouvelle. La résiliation
ne peut intervenir que dans les trois mois suivant la date de l’événement. » Alinéa 7 de l’article 12 du CAM,
article 25 al 2 et 3 du CAM.
504
Voir article 25 du Code CIMA : résiliation pour modification ou cessation du risque.
505
Les dispositions de l’article 25 du Code CIMA ne sont pas applicables aux assurances sur la vie.
506
V. S. A JOLLY, Le contrat d’assurance, Ellipses Marketing, 2013, p. 290.

227
six mois. Ce délai excessif rendait prisonnier le souscripteur en faisant évidemment obstacle à
la libre concurrence507.

Hormis lorsqu’ils sont souscrits pour une durée précise, les contrats d'assurance sont
automatiquement reconduits avec, pour l’assuré et pour l’assureur, la possibilité de les résilier
à l’échéance sans être obligés de motiver cette décision. L’assureur doit prévenir l’assuré par
lettre recommandée avec accusé de réception et respecter un délai de préavis qui peut être
différent en fonction du type de contrat ou du système juridique508.

437. Il convient de préciser que l’assuré est soumis à certains devoirs dans l’exécution son
contrat. Le non-respect de certaines de ses obligations que l’on pourrait qualifier de
manquements peut entrainer une résiliation de celui-ci par son assureur

2) Les résiliations suite à des manquements de l’assuré

438. L'assureur peut constater de la part du preneur d'assurance certains manquements


quant au respect des obligations de ce dernier. Son moyen d’action le plus redoutable est la
résiliation du contrat. Parmi les manquements on peut d’ores et déjà mentionner : le défaut de
payement de la prime (a) et la déclaration frauduleuse de l’assuré lors de la signature du
contrat ou durant la vie de celui-ci (b)

a) La résiliation pour défaut de payement ou pour fausse déclaration de l’assuré

439. Le défaut de paiement de la prime constitue un motif légitime de résiliation du contrat


d'assurance dans la mesure où l'assureur ne pourrait continuer à garantir sa couverture. Le non
payement de la prime au demeurant porterait impunément atteinte à la base même du contrat
synallagmatique qui veut que l'engagement d'une partie trouve sa cause dans l'engagement de
l'autre.

507
V. Traité de doit des assurances, le contrat d’assurance op. cit., p. 504.
508
Art.21.al 2 (Décision du 20 avril 1995, règlement n°12-05) Résiliation. L’article 11 du CAM reconnait cette
possibilité de résiliation annuelle mais, impose un délai de prévenance d’un mois.

228
Nos Codes des assurances reconnaissent en cas d'inexécution par le preneur
d'assurance de son obligation de payer, le droit pour l'assureur de mettre fin à sa garantie en
résiliant le contrat de plein droit. Le droit mauritanien fixe les conditions de la résiliation du
contrat pour défaut de payement. Le CAM exige en ce sens l’envoie par l’assureur d’une
lettre recommandée à l’adresse de la personne en charge de payer la prime509. Par ailleurs, la
garantie ne peut être suspendant que trente jours après cette mise en demeure510. Dans la zone
CIMA, cette résiliation est d’ordre public car, des sanctions sont même prévues à l’encontre
de l’assureur qui ne résilie pas un contrat d’assurance en cas de non payement de la prime511.

Par dérogation au principe qui vient d’être énoncé et qui est aussi applicable en zone
CIMA, un délai maximum de paiement de soixante jours à compter de la date de prise d’effet
ou de renouvellement du contrat peut être accordé au souscripteur, pour les risques dont la
prime du contrat excède quatre-vingt fois le SMIG annuel du pays de localisation à
l’exception des contrats des branches automobile, maladie et marchandises transportées512.

Par ailleurs, dans le Code CIMA les dispositions des alinéas 2 à 6 de l’article relatifs au
payement de la prime ne s’appliquent pas aux risques de l’État et de ses démembrements pour
lesquels des délais de paiement de primes pourraient être accordés dans les conditions définies
par la CRCA513.

440. La sanction de l’omission ou de certains comportements délictueux non intentionnels


par l’assuré peut aller jusqu’à une résiliation du contrat d’assurance par l’assureur

b) Résiliation pour omission ou déclaration inexacte non intentionnelle de l’assuré

509
Art 9 CAM
510
Art 9 alinéa 9 du CAM.
511
L’alinéa 2 de l’article 13 du Code CIMA dispose : « Il est interdit aux entreprises d’assurance, sous peine
des sanctions prévues à l’article 312 du Code CIMA, de souscrire un contrat d’assurance dont la prime n’est
pas payée ou de renouveler un contrat d’assurance dont la prime n’a pas été payée ».
512
Voy. al 4 de l’article 13 du Code CIMA.
513
Voy. article 13 al 7 du Code CIMA.

229
441. La bonne foi en matière de déclaration de l’assuré lors de la signature du contrat est de
mise514. Cependant, lorsqu'une fausse déclaration non intentionnelle de l'assuré est constatée
avant tout sinistre, « l'assureur a le droit de maintenir le contrat... soit de résilier le contrat
dix jours après notification adressée à l'assuré par lettre recommandée ou contresignée, en
restituant la portion de prime payée pour le temps où l'assurance ne court plus »515. De cette
disposition, il apparaît clairement que la résiliation est la seconde option de l'assureur face à
un cocontractant ayant commis une faute de bonne foi découverte avant toute survenance du
sinistre.

Inversement, la sanction de la mauvaise foi de l'assuré dans ses déclarations est la


nullité du contrat d'assurance. En effet, l’article 18 alinéa 1 du Code CIMA qui dispose qu'
« indépendamment des causes ordinaires de nullité, et sous réserve de l'article 80, le contrat
d'assurance est nul en cas de réticence ou fausse déclaration intentionnelle de la part de
l'assuré, quand cette réticence ou cette fausse déclaration change l'objet du risque ou en
diminue l'opinion pour l'assureur, alors même que le risque omis ou dénaturé par l'assuré a
été sans influence sur le sinistre », la nullité est la sanction de la mauvaise foi de l'assuré dans
ses déclarations. La charge de la preuve de cette mauvaise foi repose cependant sur
l'assureur516. Les primes payées par l’assuré demeurent alors acquises à l’assureur, qui a droit
au paiement de toutes les primes échues à titre de dommages et intérêts517.

442. La survenance du sinistre entraîne l’exécution du contrat par l’assureur et non sa


résiliation. Ce qui signifie que : le contrat se poursuit en principe jusqu’à son échéance. Il
existe des cas où à l’issue d’un sinistre, l’assureur souhaite mettre un terme au contrat
d’assurance. Il s’agit du cas de résiliation après sinistre.

514
Voir supra, n° 391.
515
Voir l'art. 19 al. 2 du Code CIMA.
516
Voir art. 11 al. 3 du Code CIMA.
517
Voy art.18 al.2 du Code CIMA.

230
3) La résiliation après sinistre

443. Dans la vie d’un contrat, certaines circonstances affectant l’assureur sont susceptibles
de lui ouvrir une faculté de résiliation518. Toujours est-il que pour être valable la résiliation
après sinistre nécessite une stipulation expresse dans la police. Par ailleurs, n’étant pas
automatique, une formalité, à savoir l’envoi d’une lettre recommandée par l’assureur est
obligatoire. Ainsi le Code CIMA dispose que : « Dans le cas où une police prévoit pour
l’assureur la faculté de résilier le contrat après sinistre, la résiliation ne peut être faite que
dans un délai de trois mois après qu’il en ait eu connaissance et moyennant un préavis d’un
mois à dater de la notification à l’assuré par lettre recommandée, par acte extrajudiciaire ou
par tout autre moyen ». Il est à préciser que le CAM ne fixe pas de délai pour le recours à
cette résiliation après sinistre. La faculté de résiliation offerte à l’assureur s’ouvre à l’assuré
s’il a souscrit d’autres contrats d’assurances auprès de la même compagnie ayant résilié un de
ces contrats. En effet, l’assuré a le droit de demander en respectant un délai de préavis d’un
mois à partir de la notification par l’assureur de la résiliation d’un contrat, une résiliation des
autres contrats qui le lie à l’assureur519. Une fois qu’elle est stipulée par le contrat, la
résiliation après sinistre devient un droit discrétionnaire que possède l’assureur. Libre à lui de
l’exercer ou non. Toutefois, l’assuré est forclos si un mois après sa connaissance du sinistre, il
a accepté le payement d’une nouvelle prime ; un tel agissement valant à une renonciation au
droit de résiliation après sinistre520.

De la faculté discrétionnaire, il résulte que l’assureur peut décider de l’exercer sans avoir à
donner de motifs autres que la survenance du sinistre521. Cette situation ne manque pas de
soulever des questions relatives aux sanctions prévues en cas d’abus. Des auteurs estiment
dans ce sens que la législation sur les clauses abusives pourrait s’appliquer522.

518
Globalement, la résiliation après sinistre est exercée par l’assureur lorsqu’il lui est impossible de prouver une
fraude dont il suspecte l’assuré. Sur la question voir : La lutte contre la fraude à l’assurance, Acte du Colloque de
Niort, 28 et 29 juin 1990.
519
Article 16 al 2, art 23 al 2 Code CIMA.
520
Article 23 Code CIMA al 1, article 16 al 1 Code CIMA.
521
Cass. 1re civ., 5 juin 1985, n°84-11.395, RGAT 1985, p.542, note F. CHAPUISAT.
522
En effet, le nouvel article R. 132-1 du Code de la consommation dispose que : « Dans les contrats conclus
entre des professionnels et des non-professionnels ou des consommateurs, sont de manières irréfragables
présumées abusives […] et dès lors interdites, les clauses ou pour objet ou pour effet de :

231
444. A compter de sa prise d’effet, la résiliation pour défaut de paiement des primes met un
terme au contrat d’assurance523. Par ailleurs, n’étant pas rétroactive, la résiliation du contrat
d’assurance ne remet nullement en cause le passé. Outre la résiliation, l’assureur peut
parfaitement agir en justice pour demander le payement de la prime qui lui ait due. Il en
résulte que l’assuré défaillant reste toujours débiteur de la portion de prime correspondant à la
période allant de la dernière échéance de prime jusqu’à la date de résiliation. En effet,
l’assureur qui, après la résiliation du contrat se trouve face à un débiteur insolvable, peut
intenter contre ce dernier une action en payement dans un délai de deux ans 524. Délai prenant
effet à partir de la date de départ du défaut de payement. L’assureur devra assigner le débiteur
de la prime au tribunal de première instance du domicile de celui-ci. Sauf en matière
d’immeubles ou de meubles par nature où le tribunal compétent est celui où se situe l’objet
assuré525.

Dans le cas de résiliation après sinistre, ou de résiliation sanction (défaut de


payement), l'assureur a l'obligation de restituer les portions de prime afférentes à la période
pour laquelle les risques ne sont plus garantis526.

Dans les cas de résiliation pour omission ou déclaration inexacte non intentionnelle de
l’assuré, l'assureur restitue la fraction de la prime afférente au temps pour lequel il n'assurera
plus le risque. Si dans l'entretemps un sinistre se produit, l'assuré n'a droit à la garantie que
dans la proportion du taux de prime payée par rapport à celui qui aurait dû être payé si les
risques avaient été complètement et exactement déclarés527.

445. La conclusion d'un contrat d'assurance fait naître dans le chef des parties des droits et
des obligations. Ces deux notions sont intimement liées dans la mesure où les droits d'une

[…] 8°) Reconnaitre au professionnel le droit de résilier discrétionnairement le contrat, sans connaitre le même
droit au non-professionnel ou au consommateur » V. F. LEDUC, La clause de résiliation après sinistre en péril,
Resp.civ. et assur. 2010, étude 1, cité par H. GROUTEL, Droit des assurances, Dalloz 2015 p. 155.
523
La jurisprudence française admet que l’auteur unilatéral de la résiliation puisse renoncer à la résiliation. Il
s’agit d’une neutralisation volontaire de la résiliation. V. Cass.civ.,25 oct. 1937 : DH 1937, I, 565. Cass. Civ.
1re, 4 nov. 1992, RGAT 1992, p.377, note. J. BEAUCHARD.
Ce délai peut être interrompu par l’une des causes ordinaires d’interruption de la prescription. V Y.
524

LAMBERT-FAIVRE op. cit., p.25.


525
Article 30 Code CIMA.
526
Article 16 al 3 du CAM. Article 23 al 3 du Code CIMA.
527
Voy. Y. LAMBERT-FAIVRE, L. LEVENEUR, Droit des assurances 13e édition Dalloz, 2011, p. 282.

232
partie correspondent aux obligations de l'autre et vice-versa. L’assuré est la personne
physique ou morale sur la tête ou sur les intérêts de laquelle repose un contrat d’assurance528.

Section II : Les obligations des parties

446. Pour la bonne exécution du contrat d’assurance, une connaissance et un respect de


leurs obligations est nécessaire aux contractants. Pour qu'un contrat d'assurance demeure
valable dans le temps, l'assuré est tenu de se soumettre à certaines exigences. Ce sont les
obligations de l’assuré (Paragraphe I). Dans la même logique que l’assuré, durant la vie du
contrat, l'assureur lui aussi est soumis à des obligations. Nous nous attèlerons ensuite à
analyser l’examen des obligations qui pèsent sur l’assureur (Paragraphe II)

Paragraphe I : Les obligations de l’assuré

447. Signer un contrat d'assurance représente pour l'assuré un engagement non négligeable
voire sérieux. En effet la validité et de son contrat est conditionnée par une obligation
pécuniaire portant sur le payement de la couverture du risque : c’est le versement de la prime
(A). Il a été vu que la prime d’assurance constitue la contrepartie due à l'assureur en raison de
la garantie et que, le non-paiement de cette prime peut entraîner plusieurs sanctions à
l'encontre de son débiteur529. Une autre obligation du preneur d’assurance est relative à
l’exécution du contrat même.

En effet, l’assuré est tenu d’informer son assureur de la survenance des sinistres ou
événements dommageables susceptibles de faire jouer la garantie du contrat d’assurance. Il
s’agit de l’obligation de déclaration du sinistre (B)

L’assuré peut être souscripteur lui-même ou un tiers. V. A-M. ASSI-ESSO, J. ISSA-SAYEGH et J.


528

LOHOUES-OBLE, op. cit., p.166.


529
Voir supra, n° 439.

233
A- L’obligation de versement de la prime

448. Prenant le nom de cotisation dans les entreprises à caractère mutuel, la prime
d’assurance désigne la contrepartie de l'obligation d'indemnisation de l'assureur en cas de
sinistre. L’ensemble des primes collectées par l'assureur constitue le "pot commun" qui
permet de couvrir le montant des sinistres subis par ses assurés. Le prix de la garantie
accordée par l’assureur à l’assuré comporte deux éléments à savoir : la prime pure et la prime
commerciale530. La citation selon laquelle : « S’il n’y a pas d’assurance sans risque, il n’y a
pas d’avantage sans risque »531 illustre bien le caractère fondamental de la prime dans le
contrat d’assurance. Généralement déterminée et fixée par les actuaires en assurance, la prime
d’assurance est établie en fonction de la fréquence et du coût moyen des sinistres elle est
composée de plusieurs parties :

- la prime pure ou technique : c'est le montant du coût moyen du sinistre auquel devra
faire face l'assureur pour le risque. Mathématiquement, la prime pure est égale à l'espérance
des pertes532 ;

- le chargement de sécurité : Venant s’ajouter à la prime pure ce montant permet à


l'assureur de pouvoir résister à la volatilité naturelle des sinistres533 ;

- Le chargement pour frais de gestion534 ;

530
Voy. E. LISASHBERG, Les différentes sortes de primes et de taxes en vigueur, Argus. 1988, p.248, cité par
A-M. ASSI-ESSO, J. ISSA-SAYEGH et J. LOHOUES-OBLE, op. cit., p.172.
531
M. PICARD et BESSON, Les assurances terrestres en droit français Tome1, op.cit., p. 28.
532
Le calcul de la prime pure a pour objectif l’évaluation de chaque assuré, le montant attendu des sinistres pour
la période d’assurance étudiée. L’évaluation est faite par des méthodes basées sur la statistique. La sinistralité est
divisée en plusieurs composantes, chacune étant évaluée indépendamment on distingue :
- la probabilité du sinistre normal ;
- le coût du sinistre normal ;
- la probabilité du sinistre grave ;
- le coût du sinistre grave.
533
Au sein d’une mutualité de risques, il existe une volatilité résiduelle de la sinistralité. L’assureur ne connait
cependant pas forcément le montant des sinistres à venir. En facturant les contrats au niveau de prime pure (et en
supposant une distribution des pertes symétriques), l’assureur essuie des pertes d’argent une année sur deux. Une
situation qui en cas d’absence de réserves, conduit inéluctablement à une faillite de la société d’assurance.
C’est pour se protéger de cette situation que, l’assureur ajoute donc à sa prime un chargement de sécurité.

234
- Les taxes535 ;

En tant qu’indicateur, la prime d’assurance par habitant permet de mesurer la densité


de l’assurance dans un pays. Par exemple, au Bénin, même si la densité de prime est en
progression d’année en année, son niveau reste de loin insuffisant pour le potentiel estimé
pour l’assurance béninoise. En 2013, la densité de l’assurance au Bénin se situe à quatre mille
trois cent quarante (4 340 FCFA) ce qui signifie qu’au Bénin, une personne affecte en
moyenne, annuellement, moins de quatre mille cinq cents (4 500 FCFA) pour couvrir à
travers l’assurance, la protection de sa personne et de ses biens536.

449. Le paiement de la prime peut se faire par tout moyen. Il peut s'agir des paiements au
comptant. Dans ce cas, la monnaie, instrument du paiement doit avoir cours légal 537. Le
règlement peut aussi se faire par chèque postal ou bancaire. La remise d'un tel chèque à
l'assureur vaut en principe paiement de la prime538. En France, la jurisprudence a réglé le
problème puisque la Cour de cassation a jugé que « la remise d’un chèque ne vaut payement
que sous la condition de son encaissement »539.

Par ailleurs, le paiement peut être réalisé au moyen de traite, de virement postal ou de
prélèvement sur le compte bancaire du débiteur. Outre ces modes de règlement, le paiement
peut se faire par compensation540. En effet, l'assureur dont la prime n'est pas payée peut
prélever le montant sur l'indemnité due à l'assuré au titre du règlement d'un sinistre
quelconque. La compensation ne peut s'opérer que lorsque la créance de l'assureur et celle de
l'assuré sont certaines, liquides et exigibles. Ce mode de paiement est opposable à l'assuré, à
ses créanciers, aux bénéficiaires de l'assurance et même à certaines victimes. Il est encore rare

534
Ces frais comportent aussi bien les frais de gestion des sinistres que la rémunération des apporteurs (courtiers
et agents généraux)
535
D’un pourcentage variable que les assureurs reversent au trésor public, elles serviront entre autres au
financement des Fonds de garanties.
536
Voir. Les déterminants de la souscription d’une garantie d’assurance au Bénin. Rapport de la direction des
assurances du Bénin août 2015. p. 36.
537
Excepté pour les Iles Comores où le Franc comorien est la monnaie nationale, les pays membres de la zone
CIMA ont en commun le Franc CFA.
538
Précisons que le chèque sans provision reste sans effet sur le paiement et reconduit donc la dette
539
Cass. 1ère civ., 4 avril 2001, n° 99-14.925.
540
P. CHEDEVILLE, La compensation et l'assurance, 1ère édition, Paris, PUF, 1975, p.56, cité par F-Y.
MONTCHO-AGBASSA Les obligations de l'assuré en matière d'assurances dommages. 2003.

235
malheureusement de voir au Bénin et en Mauritanie un autre moyen de payement de la prime
qu’au comptant541.

Le principe selon lequel : « pas de prime, pas de garantie » a été difficile d’application
pendant un bon moment. En effet, ce concept n'était pas véritablement ou entièrement
respecté par toutes les compagnies de la zone marché542. Aujourd’hui, l’article 13 du Code
constitue un véritable rempart contre le laisser aller des compagnies d’assurance en matière de
collecte de prime543.

L’assuré est obligé « de payer la prime ou la cotisation aux époques convenues. La


prime est payable au domicile de l’assureur ou du mandataire désigné par lui à cet effet »544.
Jadis, en vertu de l'article 16 alinéa 1 de la loi du 13 juillet 1930, la prime était payable au
domicile de l'assuré ou à tout endroit convenu. Mais suite aux inconvénients liés à
l'application de cette disposition pour les compagnies, notamment, la masse importante des
débiteurs545 et, le taux croissant des impayés, la disposition a été supprimée rendant ainsi la
prime portable.

450. Récemment, l’article 13 du Code CIMA qui dispose en son troisième alinéa qu’« Il est
interdit aux entreprise d’assurance, sous peine des sanctions prévues à l’article 312 du Code
CIMA, de souscrire un contrat d’assurance dont la prime n’est pas payée ou de renouveler un
contrat d’assurance dont la prime n’a pas été payée ». 546
A ce titre, le payement de la prime
étant la condition sine qua none de la validité du contrat d’assurance, on pourrait considérer
qu’en zone CIMA le contrat d’assurance a cessé d’être un contrat consensuel pour plus se

541
Le taux de bancarisation est relativement faible dans les pays sous-développés.
542
Le Pape JACQUES, Y. DE MESTIER. L'assurance dans la zone franc. In: Revue d'économie financière, n°
28, 1994. L'avenir de l’industrie bancaire, pp.209-210.
543
Le secrétaire général de la CIMA a précisé durant le séminaire CIMA- FANAF sur la modification de l’article
13 du Code CIMA que : « La vente de l’assurance à crédit est pour une part essentielle à l’origine des
difficultés rencontrées par les entreprises d’assurance sur le marché » http://www.cima-
afrique.org/hc.php?hcl_id=1873
544
Art 9 al 4 du CAM. Ce texte établit ainsi le principe de la portabilité des primes ou cotisations. Voy : Z.
YIGBEDEK, L'interprétation des dispositions du Code CIMA sur le contrat d'assurance, op. cit., p. 44.
545
V. B. BEIGNIER, S. B-H. YAHIA, Droit des assurances 2ème édition, LGDJ, 2015. p.482.
546
Le Conseil des Ministres des Assurances des pays membres de la CIMA a adopté lors d’une réunion tenue à
N’Djamena en avril 2011, le Règlement n° 001/CIMA/PCMA/PCE/2011 du 11 avril 2011 modifiant et
complétant les dispositions du Code des assurances relatives à la souscription et au paiement de la prime et les
articles y relatifs.

236
rapprocher à un contrat réel. On estime que l’accord de consentement des parties n’est plus
suffisant pour sa validité qui est subordonnée à la remise de la prime par l’assuré à l’assureur.

Pour des raisons d’abus547, une exception importante a été supprimée concernant
l’article 13. En effet, cette exception prévoyait que : « … l’assureur qui aura donné sa
garantie, en fixant une date de prise d’effet dans les documents contractuels sans pour autant
que la prime ait été payée, ne pourra en aucun cas se prévaloir… »548 du principe énoncé de
l’alinéa 2 pour refuser la prise en charge d’un sinistre qui surviendrait alors qu’il n’a pas
suspendu sa garantie conformément aux dispositions de l’alinéa 3 de l’article 13 du Code des
assurances. Cette exception a été essentiellement prévue pour la protection des assurés contre
les assureurs qui ayant accordé leur garantie essaieraient en cas de sinistre de dégager leur
responsabilité avant le paiement de la prime en s’appuyant sur la brèche laissée par l’énoncé
de l’alinéa 2 de l’article 13 du Code des assurances549. Désormais, En cas de non-paiement de
la prime, les assureurs se doivent d’opposer la non garanti sans qu’il soit nécessaire
d’accomplir la formalité de mise en demeure comme ce fut le cas avant la réforme.

451. Pour les conditions de payement de la prime d’assurance, l’article 13 du Code CIMA
renvoi à l’article 541 du même Code relatif aux encaissements de la prime. Ainsi : « Il est
interdit aux intermédiaires, sous peine des sanctions prévues aux articles 534-2 et 545,
d’encaisser des primes, des fractions de primes, de faire libeller ou de recevoir des chèques
libellés à leur ordre. Cette interdiction ne s’applique pas aux paiements effectués en espèces
n’excédant pas la somme d’un million de FCFA par police et aux paiements par chèques
libellés à l’ordre de l’assureur. Il est interdit aux intermédiaires de retenir le montant de leurs
commissions sur la prime encaissée. »550. Précisons que les sanctions évoquées peuvent aller
d’un avertissement à une amende pouvant atteindre un million cinq cents mille FCFA.

452. En somme le payement de la prime est l’obligation principale de l’assuré. Cependant,


il ne lui garantit pas une indemnisation en cas de sinistre. Il est soumis à une autre obligation

547
Dans la pratique, l’exception prévue à l’alinéa 7 de l’article 13 s’est généralisée pour s’ériger en principe avec
des conséquences néfastes sur le niveau des arriérés des compagnies d’assurances. Avant l’adoption de cette
réforme, les arriérés de paiement représentaient en moyenne 55% du chiffre d’affaires du secteur. A la fin de
l’année 2014, ils devraient représenter moins de 3% » Voir : http://www.agenceecofin.com/assurance/0204-
18893-la-fanaf-va-reglementer-l-activite-de-reassurance-dans-l-espace-cima-d-ici-fin-2014, consulté le 8 octobre
2017.
548
Voir l'art. 13 al. 7 du Code CIMA de l’ancien Code CIMA.
549
« La prise d’effet du contrat est subordonnée au paiement de la prime par le souscripteur ».
550
Art 541 al Code CIMA.

237
qui consiste à déclarer le sinistre à son assureur car, la méconnaissance et le non respect des
conditions de celle-ci peut lui valoir la perte des ses droit à l’indemnisation.

B- L’obligation de déclaration du sinistre

453. La déclaration est une affirmation par laquelle une personne assure la réalité d'un fait
ou d'un acte. Grâce aux informations qu'elle permet de collecter, la déclaration du sinistre
reste d'une importance capitale car elle constitue le point de départ de l'instruction du dossier
d’indemnisation. Contrairement à l’obligation d’information qui est préalable à la conclusion
du contrat551, la forme552 et le contenu553 de la déclaration du sinistre ne sont réglementés ni
par le Code CIMA, encore moins par le CAM. En revanche, les lois en présence ont pris soin
de préciser les sanctions de la déclaration tardive554 en omettant celle concernant le défaut de
déclaration555. En effet, en cas de sinistre, le Code CAM précise à l’instar de Code CIMA et
de manière laconique qu’il faut déclarer un sinistre dans les cinq jours ouvrés sauf exception.
Ainsi, ce délai se trouve réduit à deux jours s’il s’agit d’un vol et la mortalité du bétail556.

Le point de départ du délai est la date du sinistre ou le jour où l’assuré en a eu

551
Voy. supra, n° 404.
552
La forme de la déclaration du sinistre n'étant pas prévue par la loi, toute personne ayant intérêt à déclarer le
sinistre peut le faire par tous les moyens, notamment, par déclaration verbale, par lettre missive ou
recommandée, par, par téléphone, e-mail… Cependant, la nécessité pour l'assuré de détenir la preuve de sa
déclaration est indispensable, compte tenu des conséquences de l’exécution tardive de de la déclaration de
sinistre.
553
Dans la pratique, l’avis de déclaration du sinistre mentionne les circonstances essentielles du sinistre,
notamment le lieu et la date de celui-ci.
554
La sanction de la déclaration tardive, contrairement à celle du défaut de déclaration a été réglementée par
l’article 20 du Code CIMA et les alinéas 5 et 6 de l’article 9 du CAM. La sanction consiste en principe en la
déchéance des droits de l’assuré, sauf si ce dernier prouve que son retard dans la déclaration provient d’un cas
fortuit ou d’une force majeure. En outre, la mise en œuvre de cette déchéance par l’assureur est conditionnée par
la preuve d’un préjudice subi par celui-ci en raison du retard dans la déclaration du sinistre.
555
Le CAM et le Code CIMA n’ont pas prévu de sanctions en cas de défaut de déclaration du sinistre par le
souscripteur. Dans la pratique, le défaut de déclaration est sanctionné par la déchéance des droits de l’assuré.
Encore faut-il que cette déchéance soit prévue par une clause du contrat d’assurance sans quoi la déchéance ne
saurait être reconnue. A-M. ASSI-ESSO, J. ISSA-SAYEGH et J. LOHOUES-OBLE, op. cit., p. 217.
556
En matière de mortalité du bétail, le délai est plus court en droit mauritanien, il est de à 24h. V Article 9
alinéa 3 CAM

238
connaissance557.

454. Le Code CIMA fait une distinction entre la déclaration du sinistre aux autorités et la
déclaration du sinistre à l’assureur. A ce titre, seules les clauses édictant la déchéance comme
sanction au retard du souscripteur dans la déclaration du sinistre aux autorités558 sont
sanctionnées par la nullité. Quant au retard dans la production de pièces, deuxième hypothèse
visée par l’article 20, 3°, l’on ne fait pas de distinction selon que la production se fasse devant
les autorités ou devants l’assureur. Aussi est nulle toute clause frappant de déchéance l’assuré
en raison du simple retard apporté par lui dans la simple production des pièces. Les délais
légaux peuvent être prolongés d’un commun accord entre les parties contractantes559.

455. Le respect de cette obligation permet à l’assureur de préparer la mise en application de


sa garantie par la constitution de sa provision en vue du déclenchement de la procédure de
l’indemnisation. Il est à noter qu’elle soit conventionnelle ou légale, l’obligation de
déclaration n’est pas opposable aux tiers qui agissent contre l’assureur en vertu d’un mandat
direct qu’ils tiennent de la loi. Cette solution qui ne concerne que les tiers penitus extranei 560
n’est pas applicable au tiers bénéficiaire, lequel subissant le sort du souscripteur sera aussi
frappé par la déchéance. La déchéance lui est donc opposable selon l’article 10 du Code
CIMA.

456. Le Code CIMA atténue aussi la prohibition des clauses de déchéances en


reconnaissant à l’assureur le droit de réclamer une indemnité qui sera proportionnelle au
dommage que lui aura causé la déclaration tardive de l’assuré561.

Dans la pratique, la déclaration n’est cependant pas suffisante pour apprécier les circonstances
du sinistre ;certains éléments indispensables sont utilisés par l’assureur à cette fin ; il peut
s’agir d’un constat amiable, d’un constat d’huissier, d’un constat de police ou de gendarmerie.
Il est d’usage de recourir au constat amiable qui est un formulaire conçu par les assureurs
pour faciliter le recueil d'informations destinées à l'instruction du dossier-sinistre. Le constat
amiable n'est généralement valable que pour des sinistres peu importants généralement ceux

557
V. Article 9 al 3 CAM pour une situation analogue voy. Article 12 alinéa 4 du Code CIMA.
558
Le terme autorité fait allusion aux autorités administratives ou judiciaires.
559
Art 9 al 4 du Code CAM, art 12 al 6 du Code CIMA.
560
Dans le cas de la garantie responsabilité civile, que l’assuré ait déclaré ou pas, l’assureur est tenu de prendre
en charge les dommages causés aux tiers.
561
V. article 20, 3° du Code CIMA.

239
qui n'entraînent que des dommages matériels, le constat de police et de gendarmerie restant
obligatoires en cas de préjudices corporels562.

Pour contrecarrer la latitude donnée aux souscripteurs, certains assureurs afin de réunir
rapidement toutes les informations dont ils ont besoin pour traiter les dossiers, les amènent à
délaisser le principe de la liberté de forme en mettant à leur disposition, soit des constats
amiables, soit des formulaires de déclaration de sinistre pré-imprimées pour recueillir leurs
déclarations. Cette déclaration est censée contenir un certain nombre d’indications de la part
de l’assuré. Ainsi une simple déclaration manuscrite envoyée à l’assureur contenant « une
allusion à un accident sans indiquer la date ou le lieu »563 de l’évènement ne saurait suffire à
caractériser le respect de l’obligation de sinistre.

457. En Mauritanie, une pratique assez répandue, pour ne pas dire courante, a été
institutionnalisée par les assureurs. Cette innovation vise en réalité les fausses déclarations.
En effet, les compagnies d’assurances de la place disposent de services spéciaux composés
d’agents qui travaillent de concert avec les forces de l’ordre. Ces équipes dites de prévention
sont joignables les jours ouvrables et pendant les heures de services une fois contactés
équipées de véhicules tous terrains et d’appareils photos se rendent le plus tôt possible sur les
lieux des accidents ou sinistres pour procéder aux constatations.564

458. En s’acquittant de ses obligations que nous venons d’énumérer, l’assuré peut
valablement prétendre à son droit à l’indemnisation auprès de son assureur, encore faut-il que
celui-ci respecte ses obligations.

Paragraphe II : Les obligations de l’assureur

459. Une fois le contrat formé, et bien que restant contraint de continuer à respecter
les obligations précontractuelles d’information et de conseil, l’assureur est néanmoins tenu
par la loi d’être attentif au respect de certaines obligations. En effet, la prise en charge du
dommage demeure la justification principale de la perception de la prime. Par ailleurs, la
raison essentielle de l’existence des sociétés d’assurances est la fourniture des prestations par

562
Z. YIGBEDEK, op.cit., p.153
563
Cass. civ., 1ère, 25 mai 1976, n°75-10186.
564
http://www.mar-assur.mr/declarers.php, consulté le 2 octobre 2017.

240
le règlement des sinistres survenus ou à l’échéance du contrat. C’est ce qui justifie
aujourd’hui que les politiques africaines en matière d’assurance mettent un accent particulier
sur le paiement effectif, suffisant et diligent des sinistres. Il est évident que, plus le délai de
règlement des sinistres est long au niveau d’une compagnie d’assurance, moins nombreux
sont les ménages et les entreprises qui renouvellent leur contrat au niveau de cette compagnie.

460. La loi a pris le soin de préciser de manière claire l’étendue des obligations de
l’assureur. Une fois le sinistre intervenu, l’assureur une double obligation : il est soumis à une
obligation de garantie (A). Dont la mise en œuvre consistera à l’évaluation du dommage et à
l’offre d’indemnité pour la réparation du préjudice (B).

A- L’obligation de garantie

461. Lorsque survient le sinistre, l’assuré qui jusqu’alors était tenu à une obligation de
couverture, devient astreint à une obligation de garantie565. L’assureur se trouve confronté à
son engagement en se confrontant aux conséquences du sinistre. La prise en charge des
conséquences du sinistre se présente différemment en fonction du contrat souscrit.
L’obligation de garantie de l’assureur est strictement encadrée par des dispositifs législatifs et
des stipulations conventionnelles. Le fait générateur ayant causé le dommage entraine
naturellement la mise en jeu de la garantie de l’assureur. Ce fait générateur diffère, varie
d’une assurance à l’autre. Ce dernier est selon Luc MAYAUX « le garant naturel au profit de
l’assuré »566. Il sera nécessaire de préciser que tout dommage subi par l’assuré n’est pas
susceptible d’être indemnisé. L’assureur est tenu d’indemniser exclusivement ce qui est
textuellement prescrit. Sa garantie s’arrête en principe au sinistre567, sauf dispositions légales
ou stipulations conventionnelles.

Toutefois, le législateur peut de manière exceptionnelle étendre la garantie de


l’assureur aux suites naturelles du sinistre. C’est le cas notamment en cas d’incendie où
l’assureur est de droit tenu de garantir les mesures de sauvegardes, prises par l’assuré, pour
éviter l’extension du sinistre. En ce sens, Les CAM, et le Code CIMA reprennent les

565
V. B. BEIGNIER, op. cit., p.547.
566
L. MAYAUX, L’assureur est-il un garant ? in Mélanges Lambert, Dalloz, 2002, p.293.
567
L’art 10 du CAM dispose : « lors de la réalisation du sinistre ou l’échéance du contrat, l’assureur doit
exécuter dans le délai convenu la prestation déterminée par le contrat et ne peux être tenu au-delà. »

241
dispositions de l’article L 122- 3 du CAF et précisent : « sont assimilés aux dommages
matériels et directs les dommages matériels occasionnés aux objets compris dans l’assurance
par les secours et par les mesures de sauvetage »568. Les articles 66 du CAM et 49 du Code
CIMA disposent par ailleurs : que l’assureur « garantit les dommages d’incendie qui en sont
la suite ».

462. Il serait utopique d’affirmer que les assureurs garantissent ou prennent en charge tous
les sinistres. En d’autres termes, il existe deux catégories de risques : les risques garantis (1)
et les risques exclus (2).

1) Les risques garantis

463. Selon les dispositions des articles 11 alinéa 1er du Code CIMA et 26 alinéa 1er du
CAM, les pertes et les dommages occasionnés par des cas fortuits (a) ou causés par la faute de
l’assuré (b) sont à la charge de l’assureur, sauf exclusion formelle et limitée contenue dans la
police.

a) Le cas fortuit

464. La preuve de l'obligation de l'assureur suppose que l'assuré établisse, par tout moyen,
que le contrat d'assurance garantit le risque qui s'est réalisé, et que les conditions de garantie
sont réunies. L’assureur ne répond que des sinistres qui entrent dans les garanties accordées
et définies contractuellement sous réserve des obligations imposées par la loi. L'assureur est
tenu d'indemniser le bénéficiaire en cas de réalisation du sinistre, dans les conditions prévues
au contrat.

L’assureur est en principe responsable des dommages provenant des cas fortuits. A
notre niveau, le cas fortuit vise les évènements imprévisibles et insurmontables569. Le cas

568
art. 47 du Code CIMA, art. 64. CAM.
569
Voir : V. ANTOMATTEI, Contribution à l'étude de la force majeure, L.G.D.J.1992, cité par V.-E,
BOKALLI, D-C SOSSA, I, OHADA droit des contrats de transport de marchandises par route, Bruxelles,
Bruylant, coll. « Droit Uniforme Africain », juriscope, 2006, p.91.

242
fortuit se rapproche de la force majeure570 qui se caractérise par son irrésistibilité 571
;
l’irrésistibilité étant entendue dans son sens absolu tandis que l’imprévisibilité qui caractérise
le cas fortuit s’apprécie par rapport à l’individu concerné. Les articles 11 du Code CIMA et
26 du CAM ne prennent en compte que le cas fortuit. Il n’est aucunement fait mention de la
force majeure dans les deux textes. Il semblerait qu’il s’agisse d’une omission volontaire des
rédacteurs. La volonté délibérée des rédacteurs est fondée sur l’idée selon laquelle,
l’assurance est d’une certaine manière exclusive de l’idée d’imprévisibilité absolue qui
caractérise la force majeure par opposition à l’imprévisibilité relative constitutive du cas
fortuit572.

Dans l’hypothèse d’une exclusion conventionnelle de garantie, « il incombe à l’assureur qui


invoque une exclusion de garantie de démontrer la réunion des conditions de fait de cette
exclusion »573.

465. Sous certaines conditions, les dommages provenant de l’assuré peuvent être pris en
charge par l’assureur.

b) la garantie des fautes de l’assuré

466. Les pertes et dommages occasionnés par la faute de l’assuré sont dans une certaine
mesure à sa charge. La notion de faute reste relativement vaste. Compte tenu des dispositions
du Code CIMA et du CAM, il est incontestable que l’assureur réponde des fautes
personnelles de l’assuré. En effet, en l’absence d’une distinction dans les textes entre faute
légère, faute lourde et faute grave, l’assureur doit répondre des fautes de manière générale à
l’exclusion de la faute intentionnelle ou dolosive de l’assuré574.

570
Certains auteurs assimilent la force majeure au cas fortuit comme B-M. EMERIGON, dans son Traité des
Assurances et des contrats à la grosse, tome Ier, p. 358, pour cet auteur on entend par cas fortuit, une force
majeure qu’on ne peut pas prévoir et à laquelle on ne peut pas résister (fortuitos casus nullum humanum
consilium praevidere potest)
571
Traditionnellement trois éléments caractérisent la force majeure : c’est un fait imprévisible, irrésistible et
extérieur. La force majeure permet une exonération de la responsabilité.
572
A-M. ASSI-ESSO, J. ISSA-SAYEGH et J. LOHOUES-OBLE, op. cit., p. 219.
573
Cass. civ., 1ère, 26 novembre 1996, n°94-16058. Bull. civ. I, n° 413.
574
Article 26 alinéa 2 du CAM, l’équivalent de cette disposition se situe au niveau de l’article 11 alinéa 2 du
Code CIMA qui rajoute que « La charge de la preuve du caractère intentionnel de la faute appartient à
l’assureur » V. alinéa 3 du même article.

243
Les dispositions concernant la garantie des fautes de l’assuré permettent d’admettre
implicitement la garantie de la faute lourde dans la mesure où ne sont exclus que les fautes
intentionnelles575. Les négligences ou imprudences de l’assuré constituent la faute légère alors
que la faute lourde et la faute inexcusable se caractérise par leur gravité et leur caractère non
intentionnel. Ainsi, lorsque l'assuré lui-même ou le préposé choisi par lui n'a pas de permis de
conduire, il y a exclusion de la garantie, car il s’agit d’une faute lourde.

Mais, lorsque le véhicule a été conduit à l'insu de l'assuré, dans des circonstances de nature à
engager la responsabilité de ce dernier, la garantie reste acquise par application de la clause de
conduite à l'insu qui couvre l'assuré576.

467. Quant à la faute intentionnelle ou dolosive, elle suppose toujours la volonté de son
auteur dans la réalisation du dommage. C’est ce qui se produit en cas d’incendie volontaire
ou de suicide.

La garantie implicite de la faute lourde dans les deux Codes des assurances ne permet
pas à l’assureur de s’exonérer de ses obligations. Pour les cas de faute lourde, une inspiration
du droit belge mériterait sans doute une réflexion. En effet, l’article 8 de la loi belge de 1992
ajoute à l’article précité que : « …, l’assureur peut s’exonérer de ses obligations pour les cas
de faute lourde déterminés expressément et limitativement dans le contrat ».

L’inassurabilité des conséquences de la faute intentionnelle ou dolosive a pour fondement


l’absence de caractère aléatoire du fait dommageable. Il n’y plus de risque On peut donc
affirmer que l’exclusion a pour fondement le souci des rédacteurs des Codes des assurances
de prévenir le sinistre.

Il faut préciser que la faute intentionnelle du tiers dont l’assuré doit répondre est assurable.
Cette solution qui s’applique particulièrement dans les assurances de responsabilité
s’explique aisément. En effet, les fautes intentionnelles des personnes dont l'assuré doit
répondre revêtent un caractère aléatoire à son égard577.

468. La réalisation du sinistre occupe une position particulière en droit des assurances. En

575
On observe une situation analogue en droit belge. La loi belge du 25 juin 1992 dispose en son article 8 alinéa
2 que « L’assureur répond des sinistres causés par la faute, même lourde, du preneur d’assurance, de l’assuré
ou du bénéficiaire ».
576
Cour d’Appel de Dakar n° 17 du 15 janvier 1971 , CAG DE FRANCE / Ousmane SOW c / Héritiers Bambi
CAMARA - Code CIMA, Les textes annotés / EDJA/ 2007, p. 127 , Ohadata J-10-150.
577
A-M. ASSI-ESSO, J. ISSA-SAYEGH et J. LOHOUES-OBLE, op. cit., p.221.

244
effet, il fait ressortir l’obligation de couverture de l’assureur578ainsi que les conditions à
remplir par l’assuré pour prétendre à l’indemnisation. Pour éviter un certain désordre dans le
domaine des assurances, il est nécessaire de délimiter de manière formelle les risques
susceptibles d’être assurés. En somme, il s’agit de la détermination des risques exclus.

2) les risques exclus

469. Des dispositions législatives ont été mises en place pour limiter les risques que
l’assureur peut garantir. A propos de ces limitations, une distinction doit être faite entre les
risques exclus par la loi (a) et les risques conventionnellement exclus (b).

a) Les risques exclus par la loi

470. En plus de la faute intentionnelle ou dolosive de l’assuré prévu par la loi, il existe
d’autres risques légalement exclus, sauf convention contraire, il s’agit : d’une part des
dommages résultant des risques causés par la guerre et, des dommages résultant du vice
propre de la chose assurée d’autre part.

- L’exclusion du risque de guerre

Techniquement, l’assurance ne peut couvrir le risque de guerre. En effet, « les faits de guerre
entrainent des destructions massives de biens matériels et des pertes en vies humaines que
l’assurance ne saurait prendre en charge »579

471. Le Code CIMA dans son article 38 prévoit que « l'assureur ne répond pas, sauf
convention contraire, des pertes et dommages occasionnés soit par la guerre étrangère, soit
par la guerre civile, soit par des émeutes ou par des mouvements populaires »580. La guerre

578
V. MAZEAUD, L’obligation de couverture, Institut de Recherche Juridique de la Sorbonne éd, 2010. Pour P.
MIGNOT, « l’obligation de couverture de l’assureur aurait pour objet premier de déterminer l’intérêt assuré et
pour objet second d’assurer la garantie du risque ». V. M. MIGNOT, De la garantie comme modèle. Analyse
comparée du contrat d’assurance et du contrat de cautionnement de dettes futures, RRJ, 2013, p.1241, cité par
B. BEIGNIER, S. B-H. YAHIA, op. cit., p. 547.
579
Voir Y. LAMBERT-FAIVRE, L. LEVENEUR, Droit des assurances 12e édition, Dalloz, 2005, p.277-278.
580
Voir article 23 al 1 du CAM.

245
étrangère implique l'existence d’affrontement et hostilités entre différents Etats souverains.
Contrairement à la guerre étrangère, la guerre civile, les émeutes et les mouvements
populaires résultent d'un conflit interne au sein d’un Etat. L'appréciation de ces notions
relèvera du pouvoir souverain des juridictions. Quant au fondement de l'exclusion, il n'est pas
contesté que la guerre, les émeutes ou les mouvements populaires provoquent une
aggravation exceptionnelle des risques de dommage pour les personnes et pour les choses et
créent ainsi des risques financiers élevés pour les compagnies d'assurance.

On peut par conséquent estimer que l'exclusion de principe des risques liés à la
guerre, aux émeutes et aux mouvements populaires par le Code CIMA est fondée eu égard à
l'instabilité politique qui caractérise certains Etats de la sous-région. Pour que l'exclusion de
principe joue, il faut que le sinistre soit survenu pendant une période de guerre, étrangère ou
civile ou au cours d'émeutes ou de mouvements populaires. Les articles 38, alinéa second du
Code CIMA et 23 alinéa 2 du CAM reprennent la distinction du CAF entre la guerre
étrangère et guerre civile quant à la charge de la preuve.

En cas de guerre étrangère, la charge de la preuve incombe à l'assuré. L'assuré doit


prouver que le sinistre ne résulte pas d'un fait de guerre étrangère pour que l'assureur doive sa
garantie581. Cette solution est très utile en cas de guerre étrangère eu égard à la généralisation
des risques de dommages. En cas de guerre civile, d'émeutes ou de mouvements populaires la
charge de la preuve incombe cette fois-ci à l'assureur. Celui-ci doit prouver que le sinistre
résulte de la guerre civile, des émeutes ou de mouvements populaires pour exclure sa
garantie en l'absence de convention contraire582.

- L’exclusion du vice propre de la chose assurée.

Aux termes de l’article 22 du CAM, les déchets, diminutions et pertes subies par la chose
assurée et qui proviennent de son vice propre ne sont pas à la charge de l’assureur, sauf
convention contraire583. Ainsi, le dommage causé par le vice propre de la chose assurée se
trouve exclu du contrat d’assurance sauf si la police d’assurance le prévoit expressément584.
Même si ce contrat ne prévoit aucune restriction, on verrait mal l'assureur garantir à titre
gratuit le dommage causé par un vice caché. Pour garantir un tel risque, la prime est

581
Voir art L.172-16 du Code des assurances
582
Voir. Article 23alinéa 2 du CAM.
583
Pour une disposition analogue dans le Code CIMA, voy. Article 37.
584
Voir. Civ. 1ère, 4 mars 1986, n° 84-16.966.

246
nécessairement indiquée au risque en question à travers une clause particulière. La notion de
vice propre de la chose assurée désigne la défectuosité particulière et inattendue de la chose
que ne présentent pas les objets du même type. Le vice propre de la chose n’ayant pas en
principe un caractère imprévu et incompatible avec l’aléa propre au contrat d’assurance.
Telle est la raison de l’exclure du contrat d’assurance. Pour mettre en application l’exclusion
pour vice propre, la charge de la preuve ne peut incomber qu’à l’assureur.

472. Il est nécessaire de rappeler que l’exclusion légale du vice propre ne concerne en
principe que la garantie des « déchets, diminutions et pertes subies par la chose assurée » qui
résultent du vice propre. Néanmoins, l’exclusion légale ne peut jouer que pour les dommages
occasionnés à la chose elle-même et non pour les conséquences dommageables qui en sont la
suite nécessaire585. De manière conventionnelle, les risques peuvent être exclus.

b) Les risques conventionnellement exclus

473. Il est capital pour les parties de décider dans leur contrat d’assurance de l’étendue de
la garantie. En outre, elles ont cette faculté de décider des risques qui ne peuvent pas faire
l'objet d’une garantie586. Dans le droit applicable dans l’espace de la CIMA et ce, pour éviter
toute atteinte à l'ordre public et permettre la bonne marche de l'assurance, les exclusions
conventionnelles doivent être formelles et limitées587. Ce caractère limité de l’exclusion a
pour objet de prohiber les clauses d’exclusion générales qui vident la garantie de son
contenu. Par ailleurs, cette exigence participe selon le CAM au devoir d'information auquel
est tenu l'assureur588. En effet, l'assuré doit donc pouvoir distinguer sans équivoque, les
risques assurés et ceux exclus.

585
« L’exclusion ne concerne que la chose assurée et les dommages subis par elle-même ; elle ne porte pas sur
ceux qu’elle est susceptible d’occasionner » G. COURTIEUX, A. FAVRE ROCHEX, Le droit du contrat
d’assurance terrestre, LGDJ, 1998 n° 282.
586
Cette faculté trouve son fondement dans le principe de l’autonomie de volonté du contrat.
587
EN ce sens, l’article 8 avant-dernier alinéa du Code CIMA dispose que : « Les clauses des polices édictant
des nullités, des déchéances, des résiliations de plein droit ou des exclusions ne sont valables que si elles sont
mentionnées en caractères très apparents ».
588
V. article 6 alinéa du CAM.

247
Le fait que les exclusions de risque soient formelles, suppose une précision, une
exactitude et une netteté dans la rédaction de la police. En conséquence, toute ambiguïté dans
la rédaction des exclusions, engagerait la responsabilité de l'assureur, rédacteur de la police.

La limitation des exclusions, a pour but de protéger l'assuré contre toute confusion de nature
à prévoir les exclusions de risque par des clauses trop générales telles que l'inobservation des
lois et règlements.

Ainsi par exemple, les exclusions de risque ne peuvent pas porter sur les dommages résultant
de façon normalement prévisible et inévitable de la nature même de l'activité de l'assuré589 ou
encore sur la faute lourde590.

Il est nécessaire de retenir que contrairement à la déchéance des droits à


l’indemnisation, l’exclusion du risque entraine une absence de couverture du sinistre tandis
qu’avec la déchéance l’assureur pourrait être tenu de fournir sa prestation à l’égard des autres
bénéficiaires en procédant au paiement de l’indemnité591.

474. Lorsque la garantie est acquise, et que les conditions de l’indemnisation sont réunies
par l’assuré, l’assureur se trouve dans l’obligation de faire une offre d’indemnisation pour
réparer le sinistre.

B- L’offre d’indemnité pour la réparation du préjudice

475. L’offre d’indemnité de l’assureur doit couvrir tous les éléments du préjudice corporel
et du préjudice matériel annexe (vêtements, prothèses). En cas de décès : les capitaux décès
versés par les organismes sociaux quels qu’ils soient ; les rentes et pensions servies par ces
organismes ou par les débiteurs divers au profit du ou des conjoints survivants ainsi que des
enfants de la victime. En cas de blessure : les prestations versées par les organismes sociaux
au titre : des frais de traitement médical et de rééducation ; des prestations en espèces pour
incapacité temporaire ou permanente ; les salaires et les accessoires du salaire maintenus par
l’employeur ; les prestations versées par les groupements mutualistes ; les prestations servies
par l’assureur qui a indemnisé l’assuré dans le cadre d’un contrat d’avance sur recours.

589
Cass. 1er civ. 4 janv. 1979 : RGAT 1979, 490
590
Cass. 1re civ. 29 Nov. 1988 : RGAT 1989,114.
591
A-M. ASSI-ESSO, J. ISSA-SAYEGH et J. LOHOUES-OBLE, op. cit,. p.222.

248
Dans tous les cas, il appartient à l'assuré de rapporter la preuve de l'existence de son
dommage592. En matière d’offre d’indemnité, le droit mauritanien dispose que : « L'assureur
doit présenter à l'assuré une offre d'indemnisation détaillée par chefs de préjudices dans un
délai de trois mois à compter de la réception de la déclaration de sinistre ».593

Le Code CIMA estime qu’indépendamment de la réclamation que peut faire la


victime, l’assureur qui garantit la responsabilité civile du fait d’un véhicule terrestre à moteur
est tenu de présenter à la victime qui a subi une atteinte à sa personne une offre d’indemnité
motivée dans un délai de douze mois à compter de l’accident.

En cas de décès de la victime, l’offre est faite à ses ayants droit dans les huit mois du décès594.

S’il n’est pas en mesure de le faire, il doit en exposer les motifs : la responsabilité est
rejetée ou n’est pas clairement établie, le dommage n’est pas entièrement quantifié (mais dans
ce cas, elle peut avoir un caractère provisionnel). Cette offre peut être provisionnelle lorsque
l’assureur n’a pas, dans les six mois suivant la date à laquelle l’assureur a été informé de la
consolidation de l’état de la victime.

476. L’offre définitive d’indemnisation ne sera faite que dans un délai de six mois suivant
la date à laquelle l’assureur aura été informé de la consolidation. Si l’assureur ne respecte
pas ces délais, les sommes non versées produisent de plein droit intérêt au taux d’escompte
majoré de moitié durant deux mois, puis, à l’expiration de ces deux mois, au double du taux
d’escompte595. Il faut préciser qu’une offre d'indemnisation intervenue après assignation
devant le tribunal ne peut bénéficier des dispositions favorables de l'article 233 du Code
CIMA pour une réduction ou une annulation de la pénalité de retard596.

Ces délais se trouvent prolongés dans certains cas contenus dans les articles 247 à 253
du Code CIMA :

- un retard dans la déclaration de l’accident à l’assureur ;


- décès postérieur à l’accident ;

592
« En droit commun celui qui réclame l’exécution d’une obligation doit le prouver » article 1315, al.1 du Code
civil français.
593
Article 30 du Code des assurances mauritaniennes.
594
Articles 265 et 266 du Code CIMA
595
Article 233 du Code CIMA
596
COUR D'APPEL DE OUAGADOUGOU (BURKINA FASO), Chambre civile et commerciale, Arrêt n° 66
du 21 juin 2002, Héritiers YONABA Hamidou c/ KONDOMBO Marcel et la SONAR, Ohadata J-04-20.

249
- retard dans la communication des documents justificatifs ;
- réponse incomplète ou absence de réponse de la victime ;
- nouvelle demande de l’assureur : délai d’offre en cas de réponse incomplète ;
- refus d’examen médical ou contestation du choix du médecin ;
- divergence sur les conclusions de l’expertise ;
- résidence à l’étranger.
Il est possible de porter l’affaire devant les tribunaux sans attendre l’offre d’indemnité
amiable. Les droits et obligations des parties au contrat d’assurances sont multiples et variées.
En Afrique, l’ignorance de l’existence de certains droits par la majorité des assurés pose un
problème majeur qui limite l’usage de l’assurance. En effet l’incompréhension des
mécanismes de l’assurance et de son droit ne contribue qu’à ternir l’image des assureurs.
Si la variété des contrats d’assurance et des risques couverts ne permet pas d’apporter une
définition unique et exhaustive de l’assurance, il est cependant possible de considérer qu’il
s’agit d’une convention qui nécessite des formalités qui débutent bien avant la naissance du
contrat. L’aspect procédurier du contrat d’assurance a un but précis qui est celui de limiter les
fraudes qui au demeurant, on a pu le constater597 nuit gravement à l’activité d’assurance.
L’offre d’indemnité pour sa part n’est qu’une étape dans le processus de l’indemnisation qui
peut se révéler litigieux.
477. L’offre d’indemnité est la manifestation tacite d’un début de prise en charge du sinistre
par l’assureur. Il ne met pour autant pas un terme à la procédure d’indemnisation car,
plusieurs situations peuvent en découler.

597
V. supra, n° 221.

250
Conclusion du chapitre I

478. Le contrat d’assurance est, en principe, formé sur la base de la théorie de l’autonomie
de volonté des parties598. En pratique, dans la majorité des cas, l’assureur est économiquement
plus fort que l’assuré. En effet, l’assuré est le plus souvent un profane non averti des
opérations d’assurance qui deviennent de plus en plus compliquées avec le progrès des
techniques mathématiques et financières et notamment du calcul des probabilités. Il n’a ni
l’expertise technique, ni la compétence juridique, ni la puissance économique qui lui
permettent de négocier les termes du contrat. Il ne pourra bien souvent qu’adhérer à
l’ensemble des clauses contractuelles qui lui sont proposées ! Par suite, les atteintes à
l’équilibre contractuel en matière de l’assurance se concentrent dans les clauses faisant
atteinte à la liberté contractuelle599
479. En tout état de cause, ce qu’il faut avant tout retenir c’est que le contrat d’assurance
met à la charge des cocontractants des obligations diverses : alors que l’assuré est obligé de
payer la prime, de déclarer les risques de son aggravation, et surtout de faire preuve de bonne
foi, l'assureur doit exécuter dans le délai convenu la prestation déterminée par le contrat.
480. pour la suite de notre développement nous étudierons la procédure de l’indemnisation
et le règlement des litiges afin de mieux nous éclairer sur le respect effectif des obligations
des parties.

598
La théorie de l’autonomie de la volonté est l’œuvre d’une partie de la doctrine de la fin du XIXe et du début
du XXe siècle. Voir V. RANOUIL, L’autonomie de la volonté : naissance et évolution d’un concept, Trav. Univ.
Paris II, 1980; rappr. G. Rouchette, « La force obligatoire du contrat », in Le contrat aujourd’hui, comparaison
franco-anglaise, LGDJ, 1987. Toutefois, une exception sera faite des assurances obligatoires ou des
réglementations impératives.
599
V. MAI HAMMOUD, La protection du consommateur des services bancaires et des services d’assurance
Thèse, université Lyon III, 2012 p. 67 et suivants.

251
Chapitre II : La procédure de l’indemnisation et le règlement des
litiges

481. Le contrat d’assurance est un contrat qui exige une certaine rigueur dans le domaine de
l’indemnisation en l’occurrence. A cet effet, le législateur encadre fermement les modalités de
l’indemnisation due par l’assureur. Autrement dit, l’assureur n’a pas une totale liberté
d’action quand il s’agit du mode de règlement du sinistre. En effet, il doit se soumettre aux
différents principes directeurs qui gouvernent l’indemnisation. Il s’agit des principes de
l’indemnisation (Section I). Les modes de règlement des litiges et les voies de recours
(Section II) que nous traiterons ensuite nous aideront à appréhender les voies et moyens de
recours en cas de litiges opposant les parties en matière d’indemnisation.

Section I : Les principes de l’indemnisation

482. Lorsque survient le sinistre, la principale obligation de l’assureur est la mise en œuvre
de la garantie. En tout état de cause, l’indemnisation n’est possible que lorsque certaines
conditions sont réunies. En effet, une correspondance entre sinistre et les risques garantis en
plus de l’obligation de déclaration du sinistre par l’assuré à l’assureur est nécessaire600.
483. Judicieusement en matière d’assurance on opère généralement deux catégories de
réparation du préjudice : d’une part il y a la réparation des préjudices corporels (Paragraphe
I). D’autre part, il existe la réparation du préjudice matériel (Paragraphe II).

Paragraphe I : La réparation du préjudice corporel

484. Afin de procéder à l’indemnisation du dommage corporel, il est indispensable pour


l’assureur de se référer à des principes législatifs servant de base à la détermination de
l’indemnité. Nous allons aborder les principes qui régissent la réparation du préjudice
corporel (A). La partie relative à la pratique de l’indemnisation du dommage corporel en cas
d’accident de circulation (B) nous semble nécessaire pour appréhender l’aspect pratique la
réparation du dommage corporel.

600
V. supra, n° 453.

252
A- Les principes de réparation du dommage corporel

485. On peut d’ores et déjà préciser tant au niveau doctrinal que jurisprudentiel que,
l’indemnisation doit respecter un certain nombre de principes. Dans le droit français, lors de
la survenance du risque, le montant de l’indemnisation n’a pas forcément pour référence le
préjudice réel subi mais, un montant préétabli par le contrat d’assurance. C’est le principe du
caractère forfaitaire de certaines assurances (1). Le principe de réparation intégrale se présente
a priori comme un principe d’application générale. Il est néanmoins assorti de quelques
dérogations que nous nous proposons d’étudier à travers la barémisation et le plafonnement
(2).

1) Le principe du caractère forfaitaire de l’assurance de personnes

486. Les assurances de personnes se caractérisent par une détermination forfaitaire des
montants garantis qui sont fixés par le contrat601, en fonction d’éléments préétablis : barèmes
conventionnels, garanties en capitaux…sans tenir en compte le montant réel du préjudice. Les
prestations forfaitaires les plus courantes concernent les garanties décès, incapacité602 ainsi
que les invalidités.
Les assurances à caractère forfaitaire auront en outre pour particularité la possibilité
d’être cumulable avec les prestations versées par les régimes de couverture sociales
obligatoires. Le principe forfaitaire oblige l’assureur à s’engager sur le montant des
prestations prévues contractuellement en cas de réalisation du risque.
Il faut préciser que les assurances de personnes n’ont aucun caractère indemnitaire, et ne sont
par conséquent pas limitées par la mesure d’un dommage qui leur demeure totalement
indifférent : les notions d’assurances excessives n’ont ici aucune application, et le cumul
d’assurances de personnes est possible. Du reste, l’assurance de personne peut se cumuler
avec une indemnité de réparation603. Ensuite, le caractère forfaitaire implique l’interdiction

601
L’article 56 al. 1 du Code CIMA et l’article 73 du CAM expriment le principe de manière claire en disposant
que « en matière d’assurance sur la vie et d’assurance contre les accidents atteignant les personnes, les sommes
assurées sont fixées par le contrat ».
602
Incapacités pouvant être temporaires ou permanentes.
603
V. Y LAMBERT-FAIVRE et L. LEVENEUR, Droit des assurances, Dalloz 2005, p.738 et s

253
d’exercer un recours subrogatoire604. A titre exceptionnel, l’article 57 du Code CIMA admet
qu’une clause de police puisse prévoir le recours subrogatoire de l’assureur contre le tiers
responsable du dommage comme en matière d’assurance de dommage605.
487. Contrairement au principe forfaitaire de l’assurance, un autre principe de réparation
s’appuie sur la réalité du préjudice. En d’autres termes, le montant de la réparation n’est pas
prédéterminé par le contrat. Ce principe de réparation intégrale est l’un des principes
fondamentaux de la réparation en droit français. Il a aussi pendant un certain temps été
appliqué dans les pays membres de la CIMA ou en Mauritanie.

2) Le principe de la réparation intégrale

488. La réparation intégrale s’entend de la réparation de tout le préjudice et uniquement le


préjudice606. En droit français, le principe de la réparation intégrale trouve sa source dans le
Code civil à travers principalement son article 1240607. Il s’agit d’un principe de stricte
équivalence entre la réparation et le dommage, que la Cour de cassation exprime de la façon
la manière suivante : « le propre de la responsabilité civile est de rétablir aussi exactement que
possible l'équilibre détruit par le dommage et de replacer la victime dans la situation où elle se
serait trouvée si l'acte dommageable n'avait pas eu lieu »608 .

Le principe de la réparation intégrale est aussi applicable en matière d’assurance dans


le droit français. Une partie de la doctrine estime que le mérite le plus important du principe
de la réparation intégrale est d'être souple. Les tribunaux s'y appuient pour adapter facilement
les méthodes d'évaluation des dommages-intérêts à la complexité des situations individuelles
et à la possibilité de soulagement des victimes offerte par l'évolution des sciences, des

604
Article 57 Code CIMA, Art74 CAM.
605
Voir supra, n° 309.
606
Voir sur la question, P. DELEBECQUE, F-J. PANSIER, Droit des obligations, Responsabilité civile, Paris
Litec, 2001, p. 153. P. MALINVAUD, Droit des obligations- Les mécanismes juridiques des relations
économiques, Paris, Litec, 6ème éd., 1992, p. 333 ; A. LADRET, Etude critique des méthodes d’évaluation du
dommage corporel, Paris, LGDJ, 1969 ; A. SERIAUX, Droit des obligations, Paris, PUF, 2nde éd., 1998, p.550.
607
« Tout fait quelconque de l’homme qui cause à autrui un dommage oblige celui par la faute duquel il est
arrivé à le réparer. »
608
Cass. civ. 2e, 28 octobre 1954, J.C.P. 1955, II, 8765. V aussi G. VINEY, Traité de droit civil, les obligations :
la responsabilité : effets, Paris, L.G.D.J., 1988, p. 81

254
techniques et des conditions sociales609. Il est même parfois considéré comme une réponse
appropriée à l'exigence fondamentale de justice610. Contrairement aux méthodes de réparation
basée sur un barème ou plafonnée qui laissent une partie du dommage aux personnes lésées,
le principe garantit une indemnisation complète611.

Le principe de la réparation intégrale s'applique certes aisément aux dommages


matériels, facilement évaluables en argent mais sa mise en œuvre se révèle plus complexe
dans la réparation des dommages corporels voire impossible pour l'indemnisation des
dommages moraux612. Dans ce sens, M. J. L. FAGNART a soutenu que «la réparation
intégrale est un idéal mais l'honnêteté intellectuelle ne permet pas de la considérer comme une
règle effective en droit positif »613. On reproche aussi au principe de la réparation intégrale
« son manque de souplesse »614 du fait de sa carence en équité. Le principe de la réparation
intégrale présente divers avantages pour les victimes, néanmoins il présente quelques
inconvénients. En effet, Il sanctionne inconsidérément l'auteur du dommage car il ne prend
pas en compte plusieurs facteurs tels que la gravité de la faute commise, et surtout les
ressources de ce dernier. Enfin, il ne prend pas en considération le profit que pourrait tirer la
victime de son préjudice615. Mme G. VINEY a écrit déjà que le principe de la réparation
intégrale recèle en lui-même une force d'expansion qui permet de craindre que le prix de la
sécurité des victimes ne devienne extrêmement élevé pour l'ensemble du corps social616.

609
G. VINEY, Traité de droit civil, les obligations, La responsabilité : les conditions, Paris, L.G.D.J.,
1982, p. 82.
610
F. MEYER, La problématique de la réparation intégrale, Droit social, 1990, p.718.
611
V. G. VINEY, Ibidem.
612
G. VINEY, op. cit., p. 83.
613
J. L. FAGNART, Responsabilités, traité théorique et pratique, introduction générale au droit de la
responsabilité, vol.2, livre 1bis, E. Story-scientia, 2004, p.52
614
Voir en ce sens J. CARBONNIER, Droit civil, tome IV : Obligations, Paris, PUF, 22ème éd., 2000, p. 598.
615
G. VINEY, P. JOURDAIN, Traité de droit civil les effets de la responsabilité, Paris, L.G.D.J.,
2001, p. 117.
616
G. VINEY propose d'instaurer une distinction entre les diverses catégories de dommages. En ce qui concerne
les dommages corporels, elle estime qu'il est plus important de compenser les dépenses liées aux soins de santé,
les pertes de salaires et l'incapacité de gains que les dommages moraux. Dans ce cas, elle juge qu'il serait tout à
fait concevable, dans le souci de bien utiliser les disponibilités limitées que la collectivité est en mesure de
consacrer à la réparation des dommages, de privilégier les dommages économiques par rapport aux dommages
non économiques. Quant aux dommages matériels et aux pertes de profit, elle suggère de ne les réparer que
lorsqu'ils sont graves de manière à mettre en péril les moyens d'existence de l'individu ou de l'équilibre financier
de l'entreprise qui les subit. G. VINEY & P. JOURDAIN, op. cit., p.118 et s.

255
489. Pour corroborer cette thèse, on peut mentionner le fait qu’avant l'avènement du Code
CIMA ou encore du CAM, le système de la réparation en vigueur dans les pays africains sous
influence française était inspiré du système français et reposait sur deux notions essentielles :
la faute et l'indemnisation intégrale. Le système de la réparation intégrale avait pour ambition
d’indemniser tout chef de préjudice corporel causé par l’accident de circulation par exemple.

490. A l’évidence, le responsable devait être désigné en application, suivant les cas des
articles 1240 et suivants, ou encore de l’alinéa 1 de l'article 1131 du Code civil français. La
responsabilité supposait, en conséquence, un fait, fautif ou non selon le régime mis en jeu, un
dommage, un lien de causalité entre le fait et le dommage. L'existence d'un lien de causalité
entre l'activité d'une personne et le dommage subi par une autre est de l'essence de la
responsabilité. Dans la zone CIMA, le système de la réparation intégrale laissait une latitude
assez importante au juge du fond qui pouvait fixer le montant de l’indemnité sans tenir
compte de l’évaluation effectuée sous les auspices d’un avis médical. Aussi, la situation dans
laquelle évoluaient les compagnies d’assurance était caractérisée par de graves déficits
budgétaires. En effet, les tribunaux avaient la fâcheuse tendance de condamner lourdement
les assureurs en interprétant de manière fort généreuse et extensible la notion d’ayants droit,
ce qui pouvait aboutir à des sommes astronomiques, atteignant parfois le chiffre d’affaire de
certaines sociétés, sans compter le manque de professionnalisme de certaines compagnies,
davantage chasseurs de primes d’ailleurs qu’assureurs et qui en guise d’assurance faisaient de
la vente à perte, préoccupées par les recettes plus que par les résultats.

491. La mauvaise interprétation du principe de la réparation intégrale a conduit les pays


membres de l’espace CIMA à une remise en question du principe. Au fil de l’eau, le Code
CIMA va opter pour la responsabilité automatique. Dès lors, on assiste à la suppression de la
cause étrangère617 et de la faute de la victime618 d’une part, et surtout à l’instauration de
barèmes et de plafonds d’autre part619.

617
Selon l’article 226 du Code CIMA : « Les victimes, y compris les conducteurs ne peuvent se voir opposer la
force majeure ou le fait d’un tiers par le conducteur ou le gardien d’un véhicule mentionné à l’article 225 ».
618
L’article 228 alinéa 1 du Code CIMA prescrit en ce sens que : Les victimes, hormis les conducteurs de
véhicules terrestres à moteur, sont indemnisées des dommages résultant des atteintes à leur personne qu’elles
ont subis, sans que puisse leur être opposée leur propre faute à l’exception du cas où elles ont volontairement
recherché les dommages subis ».
619
Voir les réformes opérées par la FANAF.

256
3) Le principe de la barémisation ou du plafonnement

492. On peut définir la barémisation comme étant la technique qui attribue une valeur
monétaire déterminée par barème, à un étalonnage médical des préjudices620. C’est donc le
baromètre qui sert à évaluer les chefs d'indemnisation dans la réparation du dommage
corporel.

Quant au plafonnement, on pourrait le définir comme le seuil par lequel, l'assureur est
tenu de ne pas dépasser. Ces barèmes et plafonds sous-entendent tout simplement que la
réparation du dommage subi ne sera pas intégrale. C'est ce qui constitue l’une des
particularités des systèmes d’indemnisations en Afrique subsaharienne.

493. Les dispositions relatives à l’indemnisation des atteintes aux personnes se trouvent
dans les articles 257 à 266 du Code CIMA et dans les articles 42 à 49 du CAM relatifs aux
modalités d'indemnisation ainsi, on voit que les deux premiers alinéas de l’article 258 du
Code CIMA précise que : « Les frais de toute nature peuvent être, soit remboursés à la
victime sur présentation des pièces justificatives, soit pris en charge directement par
l'assureur du véhicule ayant causé l'accident. Toutefois, leurs coûts ne sauraient excéder deux
fois le tarif le plus élevé des hôpitaux publics du pays de l’accident et en cas d’évacuation
sanitaire justifiée par expertise, une fois le tarif le plus élevé des hôpitaux publics du pays
d’accueil. » De même le CAM recourt à des barèmes et établit des plafonds. C’est ainsi que
les frais de traitement médical ou de rééducation sont remboursés sur la base des tarifs des
hôpitaux publics621. Par ailleurs, on constate que seuls sont indemnisés les préjudices
directement liés à l’accident, présents, ou futurs s’ils présentent un caractère certain.

494. Dans la pratique, dans l’espace CIMA les assureurs se fondent soit sur des barèmes
établis à partir de la jurisprudence de la cour d’appel du lieu de l’accident, lorsqu’il y en à
une, soit sur les sommes généralement allouées dans des cas similaires. En Mauritanie,
l’évaluation du préjudice pour les personnes non salariées ne pouvant produire des
déclarations fiscales, se réfère à la fraction du salaire minimum mensuel ou montent fixe
mensuel prédéfini par décret622.

620
Y. LAMBERT- FAIVRE, S. PORCHY-SIMON, op.cit., p.27.
621
Article 42 alinéa 2. du CAM.
622
Voy article 43 CAM.

257
495. Avec le système de la barémisation, quel que soit l'ampleur des dommages corporels,
qu'il s'agisse des frais de traitement ou de n’importe quel autre chef de préjudices
indemnisables chez la victime directe ou les victimes par ricochet, ils sont selon les cas,
évalués suivant un barème et arrêtés par des plafonds. Ces deux critères qui servent de repères
dans l'indemnisation des accidentés des préjudices corporels peuvent paraitre attentatoires aux
droits des victimes dans la mesure où ils ne peuvent obtenir réparation intégrale des
dommages qu'ils ont subis.

496. Tout porte à croire que le plafonnement ne contribue qu’à léser les blessés graves au
détriment des blessés légers. En effet, dans la mise en œuvre du plafonnement, la victime
immédiate peut obtenir une indemnisation intégrale tant que la valeur du dommage n'atteint
pas la limite prévue par la loi, c'est-à-dire deux fois le tarif le plus élevé des hôpitaux publics
s'agissant des frais de traitement. Si son préjudice est plus important, elle doit se contenter du
plafond légal. La portée du plafonnement telle qu'énoncée oblige la victime qui se fait soigner
ailleurs que dans un hôpital à supporter sur son propre patrimoine la différence entre deux fois
le tarif des hôpitaux publics et le tarif pratiqué par l'établissement choisi, notamment si c'est
une clinique privée. Ainsi, la victime qui tient à recevoir les traitements d'une clinique, devra
s'attendre au remboursement partiel des frais engagés pour ses soins.

497. Si la barémisation semble à l’heure actuelle exclue du système d’indemnisation


français, la publication d’un référentiel indicatif du montant des sommes allouées par poste de
préjudice a en revanche pu être proposée par le rapport LAMBERT-FAIVRE datant du 22
juillet 2003623, de même que le rapport GUINCHARD du 30 juin 2008624.

498. Dans la zone CIMA les grands perdants dans le plafonnement des indemnités sont les
victimes ayant des revenus assez importants. A côté de la victime qui reçoit une réparation
intégrale parce que disposant de revenus mensuels modestes, la victime qui a des revenus
élevés devra s'attendre au remboursement partiel du montant dont il était en droit d'attendre
avant la survenance de l'accident.

Le rétablissement de la technique de réparation intégrale du droit commun de la


responsabilité n’est certes pas d’actualité dans la zone CIMA pour ne pas dire les pays où son
application a été désastreuse. On a estimé qu’il constituait un risque pour les compagnies

623
V. http://www.justice.gouv.fr/art_pix/syntheseindemcorp.pdf, consulté le 10 novembre 2017.
624
V. http://www.ladocumentationfrancaise.fr/var/storage/rapports-publics/084000392.pdf, visité le 10
septembre 2017

258
d’assurances en les exposant au risque de déficit financier et à terme à une faillite. En effet, le
principe de la réparation intégrale ne prend pas en compte les impératifs budgétaires des
compagnies d’assurances. « la nécessité d’établir un budget grâce à la prévision des dépenses
et l’obligation d’établir un équilibre entre ces dépenses… seraient les seuls obstacles à
l’application du principe de la réparation intégrale »625. On reproche aussi au principe, de ne
pas assez protéger toutes les victimes dont bon nombre pouvaient être laissé à leur propre sort
lorsque le conducteur invoquait par exemple les causes d'exonération admises par les
dispositions de cette loi626.

499. Une étude de l’indemnisation du dommage en cas d’accident de la circulation peut


donner une idée de la procédure d’indemnisation.

B- La pratique de l’indemnisation du dommage corporel en cas d’accident de la


circulation

500. Depuis la prolifération des engins à deux roues et la multiplication des automobiles
dans nos villes et villages, avec la vétusté de nos routes et des véhicules, l’explosion de
l’usage d’alcool et de stupéfiant, les accidents sont devenus monnaie courante car chaque jour
ils font leurs lots de victimes et les statistiques sont particulièrement alarmantes. On observe
une moyenne (depuis 2007) de près 1,24 million de décès annuels liés aux accidents de la
circulation soit plus trois mille personnes tuées par jour627. Rajoutons le nombre de blessés est
estimé en 2004 à 140.000, dont 15.000 resteront handicapées à vie628. Cette hécatombe et
cette somme de souffrances, qui frappent tout particulièrement les jeunes n'épargnent aucun
pays.

501. Un patrimoine humain considérable se trouve ainsi anéanti, entraînant avec lui de très
lourdes conséquences sociales et économiques. La grande majorité des utilisateurs de la route
tués en Afrique sont des utilisateurs vulnérables (piétons, cyclistes et passagers des transports

625
A. TUNC, L’évaluation du préjudice corporel dans les pays de la C.E.E., in Jalon Dits et écrits d’André
TUNC, Paris, Société de législation comparée, 1991, p .276 : « On ne peut décider de l’indemnisation des
victimes de dommages corporels sans tenir compte des coûts ». Exemple cité par C. COUTANT-LAPALUS, Les
principes de la réparation intégrale en droit privé, Presse Universitaire d’Aix Marseille., 2002, p. 49 et s.
626
Pour rappel, la loi CIMA est inspirée de la loi BADINTER du 05 Juillet 1985.
627
Rapport OMS de situation sur la sécurité routière dans le monde 2013.
628
OMS avril 2004 Rapport mondial sur la prévention des traumatismes dus aux accidents de la circulation

259
publics)629. Si les statistiques actuelles sont déjà alarmantes, les tendances le seront encore
plus. Si elles se confirment, on assistera selon l'OMS d'ici à l'an 2020 à une augmentation
de 60% du nombre des personnes tuées. Les accidents de la circulation seront alors l'une des
principales causes de morbidité dans le monde. Ce fardeau pèse plus lourdement sur les pays
à faible revenu et les pays à revenu intermédiaire où nous recensons aujourd'hui 90% des
décès et des incapacités résultant d'accidents de la route. Cette tendance devrait bientôt passer

à 95%, c'est dire combien les accidents de la route constituent aujourd'hui un enjeu majeur de
santé publique à l'échelle mondiale. Quoiqu’il en soit, une fois que le sinistre est survenu,
inévitablement se pose la question de l’indemnisation, ce qui est tout à fait normal parce que
dans la majorité des cas, l’accident crée un déséquilibre financier dans le patrimoine des
accidentés et ce n’est qu’à bon droit que ce déficit doit être comblé.

502. Est défini comme accident corporel de la circulation tout accident impliquant au moins
un véhicule routier en mouvement, survenant sur une voie ouverte à la circulation publique, et
dans lequel au moins une personne est blessée ou tuée. Sont exclus les actes volontaires
(homicides volontaires, suicides) et les catastrophes naturelles630. En effet, la Cour de
cassation française a jugé que, dans le cadre de la loi du 5 juillet 1985, les heurts ou les
collisions délibérément causés excluent l'existence d'un accident631. La circulation s'entend
aussi bien dans le cas des véhicules en mouvement comme dans celui des véhicules à
l’arrêt632. En effet, selon Jean CARBONNIER : « l'accident de circulation ne signifie pas
forcément que le mouvement doit en être la cause ; même le stationnement fait partie des
conditions de la circulation routière »633.

503. Ici, l’indemnisation intervient essentiellement pour réparer les dommages corporels
subis par les victimes. Nous étudierons la réparation des dommages corporels issus d’un
accident de la circulation en observant la distinction classique entre les préjudices

629
Des délégués de 37 pays africains se réuniront à Accra (Ghana) se sont réunis le 05 février 2007 pour discuter
de la sécurité routière sur le continent et de ce qui pourrait être fait pour réduire le nombre croissant des
accidents mortels de la route.
630
http://www.insee.fr/fr/methodes/default.asp?page=definitions/accidents-circulation.htm, consulté le 13 juillet
2017.
631
Cass. crim. 23 mai 1991, Bull crim, n°220 ; Resp. civ.et assur.., 1991, comm., 358 ; Cass.2è civ., 6 décembre
1991, Bull civ., II, n°382 ; Resp civ. et assur., 1992, comm.90 ; Cass. crim., 6 février 1992, Resp. civ. et assur..,
cormm.207 ; RT.D.C., 1992, obs . P. JOURDAIN ; Cass. civ. 2è, 23janvier 2003, D., 2003, p.605.
632
Cass. 1ère civ., 31 janvier 1989, Gazette du palais 1990. 116.
633
J. CARBONNIER, Droit civil, Les obligations, Paris, PUF, 14è édition, 1990, p. 481.

260
patrimoniaux (1) et les préjudices extrapatrimoniaux (2). L’assurance peut aussi prendre en
compte les préjudices indemnisables aux ayants droit de la victime décédée (3).

1) Les préjudices patrimoniaux

504. S’il est souvent reconnu que la réparation du dommage corporel n’a pas de prix,
l’existence du coût de celui-ci est en revanche évidente. L’étude de la pratique en matière de
réparation du dommage pécuniaire ou patrimonial sert à déterminer les divers dépenses et
pertes que peuvent occasionner un dommage corporel. En effet, le dommage corporel est
susceptible d’engendrer des frais liés aux soins ou traitement (a). Il peut aussi alors provoquer
des incapacités b).

a) Les dépenses liées aux frais de traitement

505. Ces frais sont les frais de toute nature qui peuvent être soit remboursés à la victime sur
présentation des pièces justificatives, soit pris en charge directement par l'assureur du
véhicule ayant causé l'accident634 . Le CAM se sert du tarif de base applicable par les
hôpitaux publics comme référence pour le remboursement de ces frais635. Dans le Code
CIMA, « le coût de ces traitements ne saurait excéder deux fois le tarif le plus élevé des
hôpitaux publics du pays de l'accident et en cas d'évacuation sanitaire justifiée par expertise,
une fois le tarif le plus élevé des hôpitaux publics du pays d'accueil »636. On peut se réjouir de
l’effort du législateur CIMA qui prévoit en matière de remboursement le double du tarif des
hôpitaux publics comme plafond. Il va d’ailleurs plus loin en prévoyant les cas où un
rapatriement est envisageable. Néanmoins si l’on se réfère à la réputation des services et
équipements des hôpitaux publics de la sous-région, de même que leur cout comparé à
certains hôpitaux privés, le débat reste entier.

634
Art 42 al 1 CAM, art 258 al 1 Code CIMA
635
art.42 al. 2.
636
C’est ce qui ressort de l’alinéa 2 de l’article 258 du Code CIMA.

261
506. On constate qu’aucune liste des frais remboursés n’est établie par les deux Codes, se
pose alors le problème de leur détermination. Les textes nous parlent de « frais de toute
nature » doit on y inclure outre les dépenses liées aux soins médicaux, paramédicaux,
chirurgicaux, pharmaceutiques ou accessoires le recours aux tradipraticiens qui est assez
courant ? Qu’en est-il des justificatifs de payement dans ce cas ?

Par les dispositions de l’article 258 du Code CIMA, il est admis contrairement au CAM ou les
dépenses futures ne sont pas prévues que les frais médicaux futurs et ceux entrainés par
l’infirmité doivent être pris en compte. Il en va ainsi lorsque le traitement doit être poursuivi
soit pour éviter l’aggravation de l’état de la victime soit pour améliorer les séquelles de ses
blessures ou lorsqu’on peu envisager la pose d’une prothèse ou son renouvellement. Ces
dépenses ont la particularité d’intervenir lorsque l’état du blessé s’est stabilisé, moment que
l’on désigne dans le jargon médical légal de « consolidation »637.

507. Les conditions de la prise en compte des frais futurs sont prévues par le dernier alinéa
de l’article 258 du Code CIMA. Ainsi, s'agissant, des frais raisonnables et indispensables au
maintien de l'état de santé de la victime postérieurement à la consolidation, ils font l'objet
d'une évaluation forfaitaire après avoir recueilli l'avis d'un expert. Qu’il s’agisse de dépenses
actuelles ou futures, il est indispensable de souligner que l’indemnité correspondant à ces
dépenses est, soit plafonnée638, soit forfaitaire639.

b) Les dépenses résultant des incapacités

508. L’incapacité peut s’entendre de la diminution des aptitudes physiques. Elle est
évaluable en pourcentage, le recours à une expertise s’avère indispensable pour sa
détermination640. L’incapacité est classifiée en deux catégories : on parle d’incapacité
temporaire ou d’incapacité permanente. Les incapacités de l’assuré peuvent nécessiter des
frais liés à l’assistance d’une tierce personne.

637
A-M. ASSI-ESSO, J. ISSA-SAYEGH et J. LOHOUES-OBLE, op. cit., p. 397.
638
Cf. supra, n°510
639
V. supra, n° 486.
640
« L’incapacité temporaire de travail est fixée par expertise médical ». art.43, CAM.

262
➢ L’incapacité temporaire
509. Elle couvre la période allant de l'événement dommageable à la consolidation des
blessures. La consolidation implique souvent mais pas nécessairement la reprise de l’activité
professionnelle. Il est évident que durant la période d’incapacité temporaire, du fait de l’arrêt
de travail, partiel ou total, la victime un manque à gagner qu’il faut indemniser.

La durée de l'incapacité temporaire est fixée par expertise médicale. En cas de perte de
revenus, l'évaluation du préjudice prend en compte :

- pour les personnes salariées, sur le revenu net (salaires, avantages ou primes de nature
statutaire) perçu au cours des six mois précédent l'accident ;
- pour les personnes non salariées disposant de revenus, sur les déclarations fiscales des
deux dernières années précédant l'accident ;
- pour les personnes majeures ne pouvant justifier de revenus, sur le SMIG 641 mensuel.
Ici le CAM parle de fraction du salaire minimum mensuel ou montent fixe mensuel
prédéfini par décret642.

510. Dans les deux premiers cas, l'indemnité mensuelle à verser est plafonnée à trois fois le
SMIG annuel quand il s’agit de l’espace CIMA. Le SMIG s'entend pour le pays sur le
territoire duquel s'est produit l'accident643. Contrairement au Code CIMA, Le CAM n’a pas
prévu de plafonnement concernant l’indemnité. Les victimes exerçant une activité
professionnelle formelle avec justificatif présente une certaine facilité en matière de
d’évaluation ou de chiffrage de leur indemnité644. En cas d’absence d’activité, ou d’activité
informelle (agriculture commerce artisanat), la preuve de la perte de revenue est plus difficile
à établir. Pour résoudre le problème, le Code CIMA estime que, l’évaluation du préjudice est
basée sur les déclarations fiscales des deux dernières années précédant l’accident pour les
personnes salariées disposant de revenu. Dans les pays membres de la CIMA, la déclaration
de revenus n’est pas obligatoire et encore moins une pratique courante. Donc, chez les

641
Ce SMIG est de quarante mille francs au bénin soit 60 Euros. Voir Décret n° 2014-292 du 24 avril
2014 portant relèvement du Salaire au Bénin
642
Art. 43 CAM.
643
Il faut envisager des écarts d’indemnisation compte tenue de la différence de SMIG entre certains pays de la
zone CIMA.
644
En effet, l’article 259 al .2 du Code CIMA ou l’article 43 al.2 du CAM précisent que l’évaluation du
préjudice est basée sur le revenu net (salaires, primes traitement, avantages) perçus au cours des six derniers
mois précédents l’accident.

263
particuliers la probabilité de rencontrer des personnes travaillant dans le secteur informel
possédant leurs déclarations fiscales est faible. Dans l’hypothèse où la victime serait sans
activité professionnelle, son incapacité à participer aux taches domestiques par exemple peut
obliger sa famille à faire appel à une tierce personne qui elle devra être rémunérée. Cette
dépense entre aussi dans le calcul de l’indemnité due par le responsable ou son assureur645.

➢ L’incapacité permanente

511. Cette incapacité peut être considérée comme la réduction du potentiel physique ou
intellectuel dont reste atteinte une victime après consolidation de son état. Ce préjudice
comprend une composante physiologique ou fonctionnelle et une composante économique ou
professionnelle. Certaines incapacités permanentes peuvent avoir des répercussions
professionnelles contrairement à d’autres. Tout dépend de la profession exercée par la victime
avant l’accident. C’est ainsi par exemple qu’une perte de l’acuité visuelle de l’ordre de 25 à
30 % oblige un chirurgien à changer de profession, cependant qu’elle peut ne pas constituer
une entrave à la poursuite de l’exercice du métier de brancardier. De la même manière la perte
du majeur gauche sera sans influence professionnelle importante pour le terrassier, cependant
qu’elle constituera une incapacité professionnelle importante pour un guitariste professionnel.
Pour les personnes n’exerçant pas une activité professionnelle, le préjudice économique peut
être évalué par exemple pour les femmes au foyer sur la base de l’aide-ménagère rendue
nécessaire du fait de leur maladie, ou pour les enfants par le retard scolaire qu’ils ont subi du
fait de l’accident646. Les médecins évaluent généralement le degré de l’invalidité permanente
en se servant de barèmes d’incapacité647. L’un des barèmes les plus souvent utilisés est le
barème MAYET qui présente l’avantage d’avoir codifié les décisions des tribunaux, en
d’autres termes certains taux d’incapacités retenus par ces tribunaux pour les mêmes lésions.
Le Barème français du 24 mai 1939 confectionné pour les accidents de travail peut également
constituer une importante référence648. Selon le CAM, « L’indemnisation se fait sur la base

645
Cette distinction inspirée du droit social des accidents de travail est souvent reprise par la plupart des
législations africaines. A-M. ASSI-ESSO, J. ISSA-SAYEGH et J. LOHOUES-OBLE, op. cit,. p.400
646
Z. YIGBEDEK, L'assurance automobile, théorie et pratique, Presse Universitaire de Yaoundé, 2015, p.195.
647
Il ressort de l’art 44 al. 2 du CAM que « Le taux d'incapacité varie de 0à 100% par référence à un barème
médical, les différentes causes d’incapacité sont cumulées sans pouvoir excéder 100% ». Le Code CIMA
prescrit « Le taux d'incapacité est fixé par expertise médicale en tenant compte de la réduction de capacité
physique. Ce taux varie de 0 à 100 % par référence au barème médical adopté par la CIMA, figurant en annexe
au présent livre »
648
Cf. Z. YIGBEDEK, op.cit., p.195.

264
d'un montant fixé périodiquement par décret, l'indemnité versée en capital ne variant qu'en
fonction du taux d'incapacité »649.

➢ L’assistance d’une tierce personne


512. Elle fait partie des frais occasionnés par l'incapacité. Elle est indemnisée lorsque l'état
de la victime nécessite l'assistance d'une aide-soignante par exemple. La victime n’a droit à
une indemnité pour assistance d'une tierce personne qu'à la condition que le taux d'incapacité
permanente soit au moins égal à 80 % selon le barème indiqué à l'article 260 pour le Code
CIMA. L'indemnité allouée à ce titre est plafonnée à 25 % de l'indemnité fixée pour
l'incapacité permanente pour la zone CIMA. Elle est plafonnée à 75% de l'indemnité
d’incapacité dans le CAM selon l’art 45 du même Code.

3) Les préjudices extrapatrimoniaux

513. Le préjudice extrapatrimonial fait référence aux atteintes à l’intégrité physique,


physiologique ou psychique. Tel que le prévoit le droit des assurances, la victime
doit être indemnisée de ses préjudices extrapatrimoniaux qui peuvent être à l’instar des
incapacités : temporaires ou permanents.

Il s’agit pour nous essentiellement d’étudier les chefs de préjudices que sont : le pretium
doloris (a), le préjudice esthétique (b) le préjudice moral (c) le préjudice de carrière (d).

a) Le pretium doloris

514. Aussi appelée souffrance physique le pretium doloris, peut être défini comme étant le
préjudice subi par la victime, en raison des souffrances corporelles ressenties par elles lors de
l'accident et postérieurement à celui-ci, jusqu'à la date de consolidation de son état. Il est
évalué par le médecin traitant qui lui affecte alors l’un des qualificatifs ci-après. L’indemnité
à allouer au titre de ce préjudice en application de l’article 262 du Code CIMA est alors égale
à un pourcentage du SMIG annuel, variable en fonction de la qualification du préjudice selon
le barème suivant :

649
Art. 44, al.3, CAM.

265
515. Dans le CAM, cette qualification se fait selon une échelle (1 à 5) où chaque point
correspond à 5% de l’indemnité d’incapacité650.

b) Le préjudice esthétique

516. Comme son nom l'indique, elle se caractérise par des cicatrices, déformations,
marques et séquelles d'un accident. Il s'apprécie de la même manière que le pretium doloris. Il
résulte de la persistance de séquelles disgracieuses et visibles, consécutives à l’accident subi
par la victime. Quand bien même, l’appréciation du préjudice esthétique de même que le
calcul de l’indemnité correspondante se font de la même manière et selon le même barème
que pour le pretium doloris. Des facteurs tels que l’âge de la victime, son sexe la localisation
ou des séquelles disgracieuses peuvent avoir un effet l’évaluation du préjudice esthétique651.

650
Art. 46, al 2 du CAM.
651
Z. YIGBEDEK op. cit., p.206.

266
c) Le préjudice moral

517. L’assurance peut aussi prendre en compte les préjudices indemnisables aux ayants
droit de la victime décédée. En Mauritanie ce montant est fixé par voie réglementaire et peut
être périodiquement révisé652. A part les différents cas que nous avons étudiés pour la
Mauritanie, le Code des assurances en son article 49 exclut tout autre préjudice.

518. Henry LALOU pour une définition du dommage part d’une notion fondamentale, la
notion de droit et oppose le dommage moral au dommage matériel en basant cette opposition
sur la grande division des droits : les droits patrimoniaux et les droits extrapatrimoniaux. Un
dommage, écrit-il : « est une atteinte à un droit, or il existe deux variétés de droits »653 : le
dommage moral peut donc s’entendre comme étant la douleur subie par une personne en
raison des liens qui l'unissaient à la victime.

519. Le Code des obligations et des contrats mauritaniens le définit ainsi : « Le préjudice
moral est celui que subit l'homme en dehors de son patrimoine : il vise à réparer les douleurs
morales. Les chagrins et tristesses consécutifs à une déformation due à des blessures ou des
infirmités, à une diffamation ou une atteinte à l'honneur, et tous autres faits entraînant une
douleur morale ».654 Il en résulte qu’il ne porte pas forcément de manière directe atteinte aux
intérêts financiers de la victime. Par exemple, la souffrance liée à la perte ou à l’infirmité d’un
être cher, l’atteinte portée à son honneur sont des dommages psychologiques bien réels que le
juge tentera d’évaluer tantôt de manière symbolique, tantôt par une indemnité substantielle.

520. Le caractère extrapatrimonial du préjudice moral a suscité de nombreuses controverses


doctrinales quant à sa réparation. Les négateurs du principe de la réparation ont estimé que
l’évaluation en argent d’un préjudice moral était impossible. C’est pourquoi il pose le
problème que l’on évoque sous forme d’interrogation avec Jean CARBONNIER « comment

652
Voir sur la question, Loi N 67 – 039 du 3 Février 1967 instituant un régime de sécurité sociale modifiée par
la loi n° 72-145 du 18 juillet 1972 et l’ordonnance n°87-296 du 24 novembre 1967. Art 48. 2.
653
H. LALOU, Traité pratique de la responsabilité civile, Paris, Dalloz, 1955, p. 105.
654
Article 97 alinéa 2 de la loi n°89- 126 du 14 septembre 1989 portant COC en Mauritanie

267
peut-on réparer en argent, une perte qui par définition n’est pas d’argent ».655 MAZEAU et
TUNC vont plus loin en écrivant en ce sens que « le préjudice moral ne peut être réparé »656

d) Le préjudice de carrière

521. Ce type de préjudice se subdivise en deux catégories selon l'article 263 du de CIMA, il
s’agit soit de la perte de chance certaine, d’une carrière à laquelle peut raisonnablement
espérer un élève ou un étudiant de l’enseignement primaire, supérieur ou leur équivalent, soit
de la perte de carrière subie par une personne déjà engagée dans la vie active.

Dans le premier cas, l'indemnité à accorder à la victime de la perte de chance ne saurait


dépasser pour un étudiant douze mois de bourse officielle de la catégorie correspondante
(art.263, al. 2, art 47 al 2 CAM). On remarque le plafonnement ainsi fixé ne prend pas en
compte les préjudices de carrière allant au-delà d’une année. Dans la zone CIMA, pour les
victimes d'une perte de carrière, l'indemnité est fixée à six mois de revenus calculés et
plafonnés dans les conditions de l'article 259 du Code CIMA. En Mauritanie, la perte de
carrière pour un actif donne droit à une indemnité correspondant à un an de revenu évalué
suivant les critères définis à l’article 43 du même Code.

522. Les ayants droits de la victime suite à son décès peuvent prétendre à l’indemnisation de
certains préjudices que leur aurait fait subir la perte de leur proche.

3) Les préjudices indemnisables aux ayants droit de la victime décédée

523. Avant sa mort, la victime d'un accident peut subir des préjudices patrimoniaux et extra
patrimoniaux. Dès l'instant où elle décède, il n'y a que ses ayants-droit qui peuvent subir des
préjudices par répercussion. Ces derniers sont à la fois d’ordre économiques et non
économiques.

655
J. CARBONNIER, Droit civil, les obligations tome 4, p.308.
656
MAZEAUD ET TUNC, Traité théorique et pratique de la responsabilité civile délictuelle, T.I, 5e éd. Paris
Montchrestien, 1957, p. 387 et suivants.

268
En Mauritanie le montant de cette indemnisation est fixé par voie réglementaire et peut
être périodiquement révisé657. Avant d’aborder les préjudices indemnisables, il faut préciser
que cette indemnisation concerne exclusivement les ayants droit étant entendu que toute
victime directe a droit à une indemnisation dans les limites fixées par le Code des assurances.
Nous devrons déterminer parmi parfois les nombreux ayants droit, qui a réellement droit à une
indemnisation. Le Code CIMA précise en ce sens que : « Le préjudice subi par les personnes
physiques qui établissent être en communauté de vie avec la victime directe de l'accident peut
ouvrir droit à réparation ». Il se trouve que cette disposition laisse le champ libre à toute
personne étrangère à la famille, ce qui inclus les concubines et autres personnes pouvant vivre
dans le domicile ou susceptible de justifier une communauté de vie avec du de cujus.

En tout état de cause, les préjudices indemnisables à ces victimes sont le préjudice
économique (a), les frais funéraires (b) et le préjudice moral658.

a) Le préjudice économique

524. Il désigne le préjudice dont peuvent se prévaloir les personnes privées des subsides
fournis par la victime. L'article 265 du Code CIMA dispose que « Chaque enfant à charge,
conjoint(e) et ascendant en ligne directe de la victime recevra un capital égal au produit d'un
pourcentage des revenus annuels, dûment prouvés, du décédé par la valeur du prix d’un franc
de rente correspondant à son âge, selon la table de conversion figurant en fin du Code
CIMA ». A défaut de revenus justifiés, le calcul du préjudice économique subi par les
personnes précitées est effectué, dans les mêmes conditions, sur la base d'un revenu fictif
correspondant à un SMIG annuel. La capitalisation est limitée à vingt et un an pour les enfants
sauf s'ils justifient la poursuite d'études supérieures, auquel cas la limite est reportée à vingt-
cinq ans. L'indemnité globale revenant aux ayants-droits au titre du préjudice économique est
plafonnée à soixante-cinq fois le montant du SMIG annuel de l'Etat membre sur le territoire
duquel l'accident est survenu.

657
Voy. Art 48. CAM.
658
V. supra, n° 517.

269
La détermination précise de la qualité d’ayant droit, basée sur la preuve d’un lien alimentaire
ou d’un lien de parenté assez proche est assez délicate. L’objectif reste la limitation dans
certaines affaires du nombre d’ayants droits qui peut souvent atteindre des dizaines659.

525. Le décès de la victime peut selon le cas entrainer des dépenses assez conséquentes
pour ses proches lors de ses funérailles. Les modalités et les conditions de leur
remboursement sont fixées par le Code CIMA.

b) Les frais funéraires

526. Les frais funéraires sont les frais occasionnés à l'occasion des obsèques de la victime
décédée. Ils sont remboursés sur présentation des pièces justificatives et dans la limite du
SMIG660. Sur ce point un séminaire sur l’indemnisation du préjudice corporel s’est déroulé à
Abidjan du 08 au 12 Septembre 2014 pour prendre en compte les disparités culturelles entre
les pays membres de la CIMA. 661

Le préjudice peut atteindre plusieurs personnes à la fois. En effet, les conséquences


d’un accident mortel par exemple peuvent porter préjudice à plusieurs individus proche du de
cujus. Un décès cause presque toujours de véritables désarrois bouleversant la situation de
tous ceux qui croyaient pouvoir compter pécuniairement sur le disparu et semant la douleur
chez tous ceux qui avaient pour lui une affection véritable. Dès lors comment limiter des
actions en réparation intentées à la suite d’un décès accidentel ?

Le préjudice moral indemnisable aux ayants droit de la victime n’est indemnisable


qu’aux conjoints662, enfants, ascendants, frères et sœurs de la victime.

659
En 1982, un tribunal camerounais a accordé à Bafoussam des indemnités aux ayants droits d’un chef de
village ayant laissé 37 veuves et 49 enfants voy en ce sens, G. LEVIE, Revue Afrique Assurance, n° 8 p.12-13.
660
Art. 264 du Code CIMA.
661
Prenant en compte certaines spécificités des traditions africaines dans lesquelles les funérailles peuvent avoir
lieu plusieurs semaines voire mois après l’enterrement et dans un pays différent de celui de l’enterrement, le
séminaire a recommandé comme quatrième recommandation de remplacer à l’article 264 la notion de « pays où
les funérailles ont lieu » par la notion de « pays où l’enterrement a lieu ». Ceci contribuerait à une meilleure
maîtrise et prévisibilité de la charge de sinistres qui peut atteindre des sommes colossales.
662
En cas de pluralité d’épouses survivantes, le montant total des indemnités qui leur sont allouées au titre de
leur préjudice moral ne peut excéder 300% du SMIG annuel. Toutefois, les indemnités de l’ensemble des
bénéficiaires donnent lieu à réduction proportionnelle lorsque leur cumul dépasse quinze fois le SMIG annuel. V.
art. 266 du Code CIMA.

270
527. Hormis la personne, le sinistre peut porter atteinte aux biens. Il est prévu que les
dommages qu’ils subissent puisse être réparés.

Paragraphe II : La réparation des dommages matériels

528. Théoriquement, dans le cadre du règlement d’un sinistre, l’assureur est tenu de prendre
en compte d’une part les textes légaux qui s’imposent à lui et d’autre part les dispositions
prévues dans le contrat souscrit par son assuré. Dans la pratique, les assurances de dommages
ont pour objectif la réparation d’un éventuel dommage matériel. Ainsi, en cas de réalisation
du sinistre, les indemnités versées par l’assureur compensent les pertes financières dues à la
destruction ou à la détérioration des biens.

529. On peut d’ores et déjà annoncer que l'application scrupuleuse du principe indemnitaire
(A) est d’une importance capitale en matière de dommage matériel. Ce principe nous aide à
comprendre le système d’indemnisation du dommage matériel (B)

A- Le principe indemnitaire

530. Le consensualisme juridique qui gouverne le contrat d’assurance permet aux parties en
présence de limiter la portée de leur engagement. En effet, l’assuré se doit de limiter à ne
déclarer que la valeur du bien assuré. Surévaluer la valeur de la chose assurée correspond à
une surassurance663. L’inverse, la sous-assurance produit aussi des effets664. Dans le même
ordre d’idée, un principe du droit des assurances dommages est repris par le Code CIMA et le
CAM ainsi « l’indemnité ne peut dépasser le montant de la valeur de la chose assurée au
moment du sinistre »665. Cette règle d’ordre public est plus connue sous le nom de « principe

663
« Lorsqu’un contrat d’assurance a été consenti pour une somme supérieure à la valeur de la chose assurée,
s’il y a eu dol ou fraude de l’une des parties, l’autre partie peut en demander la nullité et réclamer, en outre, des
dommages et intérêts. », Alinéa 1 des articles 19 du CAM et 33 du Code CIMA.
664
« S'il résulte des estimations que la valeur de la chose assurée excède au jour du sinistre la somme garantie,
l'assuré est considéré comme restant son propre assureur pour l'excédent, et supporte, en conséquence, une part
proportionnelle du dommage sauf convention contraire », V. art 21 CAM sont équivalent dans le Code CIMA est
l’article 35 du Code CIMA.
665
Article 31 al.1 du Code CIMA, Art 18 al.1 du CAM.

271
indemnitaire » 666
Cette disposition signifie que l’assuré ne doit en aucun cas tirer profit de
l’accident, le sinistre ne doit pas être une opération spéculative, source d’un enrichissement
pour l’assuré667.

531. En application de ce principe légal, le rôle de l’assureur consiste à replacer l’assuré


dans la situation qui était la sienne avant l’accident et par conséquent, l’indemnisation versée
par l’assureur ne peut jamais être supérieure au montant des dommages. L'application du
principe impose l'évaluation exacte du dommage subi non seulement le dammun
emergens c’est à dire toute perte subie, mais aussi le lacrum cessans (tout le gain manqué).
L’assuré qui contracte auprès de plusieurs assureurs par plusieurs polices, pour un même
intérêt, contre un même risque, doit donner immédiatement à chaque assureur connaissance
des autres assureurs668.

532. De son côté, l’assureur est tenu par une limitation de garantie sous forme de
découverts ou de franchises. En théorie, une distinction doit être faite entre les deux notions.
Le découvert obligatoire a pour finalité de laisser une partie du dommage subi à la charge de
l’assuré pour ne pas complétement éteindre chez lui le sens de la responsabilité par un effet
anesthésiant de l’assurance. Or le meilleur moyen pour l’assureur de réduire la fréquence des
sinistres est d’inciter ses clients à la vigilance et à la prudence le principe interdit à l'assuré de
se faire garantir par un tiers et notamment par un autre assureur pour la part de risque laissée à
sa charge. La portée de la franchise contrairement au découvert n’est pas morale. Elle a un
objectif purement gestionnaire car, les coûts gestion de la multitude des petits sinistres peut
rapidement constituer un gouffre financier pour les compagnies d’assurance dans la mesure
où, les petits sinistres coûtent plus cher en frais de gestion qu'en indemnisation669. L’assuré a
la possibilité de faire garantir, pour la part de la franchise, auprès d'un autre assureur.

533. On pourrait observer, que le défaut du principe indemnitaire serait sans doute une
porte ouverte aux sinistres volontaires qui ne sont pas facile à établir par l’assureur vu que la
charge de la preuve lui revient. En effet, les assurés seraient tentés de provoquer eux même

666
La loi du 13 juillet 1930 et reconduit dans le Code des assurances, en matière d’assurance de dommages
“l’indemnité ne peut dépasser le montant de la valeur de la chose assurée au moment du sinistre” article L121-1
du Code des assurances françaises.
667
Principe indemnitaire et assurance de dommage : Civ., 12 février. 1913 ; DP1914.137, note DUPUICH.
668
Totalement légale, si elle n’est pas faite de manière frauduleuse ou dolosive, cette faculté de cumul laisse le
libre choix à l’assuré de se faire indemniser par l’assureur de son choix en cas de sinistre.
669
V. B. BEIGNIER, S. B-H. YAHIA, op. cit., p.576.

272
leur sinistre.

D’autre part le législateur mauritanien pourrait voir en ce principe une application de


la prohibition d’un enrichissement sans cause dans certains cas de sinistre inéluctables 670. Ne
pas admettre ce principe assimilerait le contrat d’assurance à un jeu de hasard ou de pari. Bien
que pouvant être d’une grande utilité, Il est à noter que la clause de découvert est rarement
utilisée dans les systèmes juridiques des pays d’Afrique subsaharienne671. Les rédacteurs du
Code ont bien règlementé les modalités suivant lesquelles les victimes et les assurés peuvent
obtenir la réparation de leurs dommages corporels. Le texte oblige ainsi l'assureur à jouer un
rôle actif dans la procédure dont il est d'ailleurs le maillon incontournable, situé à mi-chemin
entre le responsable et la victime.

534. Les assurances prennent en compte les dégradation et pertes que peuvent subir certains
biens. En effet, le système d’indemnisation des dommages matériels est particulier pour ce qui
concerne la détermination du montant de l’indemnisation.

B- Le système d’indemnisation du dommage matériel

535. Il y a lieu de rappeler au préalable le principe général selon lequel la réparation


intégrale d’un dommage causé à une chose n’est assurée que par le remboursement des frais
de remise en état de la chose, ou par le paiement d’une somme d’argent représentant la valeur
de remplacement672. L’indemnité due suite aux dommages éprouvés par le véhicule assuré
comprend généralement :

- les frais de garage exposés pour mettre le véhicule à l’abri avant son acheminement
vers le lieu des réparations ;

- les frais de transport du véhicule vers le lieu des réparations, si ces dernières ne
peuvent pas être exécutées à proximité du lieu de l’accident et si le véhicule accidenté ne peut
se déplacer par ses propres moyens ;

- les frais de dépannage si cette opération s’avère nécessaire au lieu de l’accident.

670
En effet, la législation mauritanienne prohibe le pari et le jeu de hasard et l’usure Voir supra, n°23, infra, et
n° 673.
671
Z. YIGBEDECK, L'assurance automobile, théorie et pratique, 1ère édition, 1997, p. 202.
672
Civ. 2e, 17 déc. 1959 : JCP 60, II, 11493, note P. ESMEIN.

273
536. Outre les dommages qu’il est susceptible de causer à d’autres véhicules automobiles,
le véhicule assuré peut, causer des dommages à d’autres objets (poteau électriques, stations
d’essence, bicyclettes, immeubles etc..). Ces dommages d’une manière générale entraînent au
même titre que ceux éprouvés par les véhicules automobiles, une indemnisation des tiers lésés
sur la base d’un rapport d’expertise confectionné par un expert choisi en fonction de la nature
des dommages à évaluer.

537. L’assureur peut être confronté à divers formes de sinistres à réparer. Il peut avoir à
gérer un sinistre total (1) d’une part et un sinistre partiel ou des sinistres successifs (2) d’autre
part.

1) L’indemnisation en cas de sinistre total de la chose assurée

538. Le principe de base de l'indemnisation du dommage matériel dans le domaine


automobile est simple : le véhicule endommagé est réparé si le coût des réparations ne
dépasse pas la valeur de ce véhicule au jour de l'accident. Dans le cas contraire, l'assuré
percevra une indemnité égale à cette valeur vénale et les réparations ne seront pas effectuées.
C’est l’hypothèse du délaissement qui ne peut être ni partiel ni conditionnel, que l’on peut
observer en droit maritime673. En effet, lorsque le véhicule est irréparable, l’idée de réparation
disparaît et avec elle, celle du coût des réparations. Il résulte de cette situation que lorsque le
véhicule est irremplaçable, le tiers lésé qui est indemnisé dans le cadre de la réparation du
préjudice qui lui est causé par l’assuré peut bénéficier outre de la valeur de remplacement
diminuée ou non du sauvetage selon le cas, d’une indemnité :

- d’éviction du fait de la privation subite de son véhicule à laquelle il a été astreint674.

- en raison du temps et des démarches nécessaires à l’acquisition d’un nouveau


véhicule675.

673
En droit maritime selon le CAM, délaissement du navire peut être effectué dans les cas suivants :
- perte totale ;
- réparation devant atteindre les trois quarts de la valeur agréée ;
- impossibilité de réparer ;
- défaut de nouvelles depuis plus de trois mois ; la perte est réputée s'être produite à la date des
dernières nouvelles. Art. 148 du CAM.
674
Poitiers 17 décembre 1934 (G.P. 1935 - 1 - 409). Tr. Com. Nantes 28 novembre 1935 (G.P. 1936 - 1 – 415
sous note b). Trib. Corr. Compiègne 15 février 1956 (G.P. 1956 - 1 - 422) in J. BEDOUR, Précis des Accidents
d’Automobile, op. cit. p. 379. Cité par Z. YIGBEDECK, op.cit., p.172.

274
- du fait de l’incertitude relative à la qualité du véhicule de remplacement qui sera
acheté676.

En tout état de cause, il convient donc d’abord de déterminer le montant des dommages avant
de définir le montant de l’indemnisation. Au cas précis c’est à dire, si le bien est totalement
détruit, on parle alors de sinistre total, le montant des dommages correspondra à la valeur
d’usage du bien détruit. Cette valeur d’usage représente la somme que devrait dépenser
l’assuré pour retrouver sur le marché un bien équivalent, c’est à dire se trouvant dans le même
état et ayant le même usage que le bien endommagé.

539. Le sinistre partiel ou successif est envisagé en matière d’assurance. Dans ce cas
l’évaluation est différente.

2) Cas de sinistres partiels ou successifs de la chose assurée.

540. L'évaluation de l'indemnité pose parfois un problème lorsque la chose assurée n'a été
que partiellement détruite, tel est le cas lorsqu’une maison n’est que partiellement détruite par
un incendie, ou un véhicule automobile endommagé à l'occasion d'un accident de la
circulation. Il s’agit de ceux dont le coût des réparations ne dépasse pas leur valeur de
remplacement avant le sinistre.

541. Dans ce cas, le montant de l’indemnité se détermine sur la base du montant des
dommages à dire d’expert, tel qu’il est consigné sur le rapport d’expertise. Si le sinistre n’est
pas total, il peut être partiel (a) ou successif (b)

a) Le sinistre partiel

542. Le sinistre partiel entraîne la question du coût de restauration permettant de remettre la


chose dans l’état où elle se trouvait avant l’évènement dommageable. L’indemnisation se base
logiquement sur les frais engagés pour la réparation du bien. Si le bien n’est pas
complètement détruit, on évoque alors un sinistre partiel, le montant des dommages

675
Idem.
676
Idem.

275
correspondra au montant des réparations. Cependant dans cette hypothèse, la police peut
prévoir que le montant de l’indemnisation sera plafonné à la valeur d’usage si le cout de la
réparation s’avère plus onéreux que le remplacement du bien à l’identique. Par ailleurs
toujours en cas de sinistre partiel, et cas d’impossibilité de réparation, la détermination du
montant des dommages se fait dans les mêmes conditions que sinistre total. Dans le même
temps, une déduction possible de la valeur de sauvetage est opérable pour l’assureur.

543. Les dommages peuvent être multiples et entrainer un sinistre successif.

b) Sinistre successif

544. On parle de sinistres successifs lorsque, plusieurs dommages atteignent le même bien.
Deux questions se posent dans cette situation : l’évaluation du dommage au jour du nouveau
sinistre et celle de la garantie du sinistre successif par l’assureur. La survenance du premier
sinistre n’a pas d’incidence sur l’évaluation du nouveau sinistre. Ce dernier est évalué
comme s’il était initial. Il n’y a pas non plus enrichissement sans cause comme on pourrait le
penser car, chaque sinistre équivaut à un dommage subi.

545. La survenance de sinistre successif ne fausse pas aussi le calcul de probabilité sur
lequel repose les opérations d’assurances. En effet, la prime est calculée en considération de
la probabilité des sinistres survenant pendant une période donnée. Le fait que les sinistres
touchent ou non plusieurs fois le même assuré n’a aucune importance. La garantie intégrale
de l’assureur est due pour chaque sinistre.677

546. Le principe en droit des assurances veut que : « lorsque des sinistres se produisent
successivement dans la même année d’assurance, chacun doit être considéré et évalué
individuellement »678 L’impact est important pour l’assureur puisque pour une seule et même
cause, il sera tenu à garantir une multitude de sinistre, ce qu’il n’avait certainement pas prévu
lors du calcul de ses provisions.

547. Les assureurs sont à ce titre assez réticents face à la charge de la répétition de sinistres
liés au même fait générateur au cours d’une même période679.

677
N. JACOB, Les assurance Dalloz, 1979, p.189
678
J. KULLMANN, Lamy Assurances, Editions Lamy, n°749, 2010
679
J. KULLMANN, Lamy Assurance, Ibidem.

276
Certains éléments ne sont pas pris en compte dans l’indemnisation des préjudices matériel
par le CAM, et le Code CIMA680. En effet, la détérioration ou la destruction d’un bien
meuble ou immeuble peut entrainer des préjudices accessoires681 non négligeables. Il s’agit
du préjudice résultant de la privation temporaire ou définitive du bien endommagé et qui peut
s’analyser en une perte de profit ou de jouissance.

548. Pour le mode d’évaluation des préjudices matériels, plusieurs cas de figures peuvent
se présenter :

- Pour les choses destinées à être vendues, c’est la valeur vénale qui est retenue ;

- Pour les producteurs, c’est la valeur de vente de la récolte au jour du sinistre ;

- Pour les fabricants, c’est le prix de revient calculé sur la base du prix courant des ;
matières premières et des coûts de fabrications ;

- Pour les commerçant, c’est la valeur d’achat calculée au jour du sinistre ;

- Pour les choses hors du commerce, c’est la valeur d’usage qui sera retenue.

La demande de réparation du préjudice corporel exige de procéder à une triple opération :

- La description par la victime, des dommages causés aux biens ;

- L’appréciation de l’importance du dommage invoqué qui incombe en principe à


l’expert ;

- L’évaluation de la somme d’argent adéquate qui relève de la compétence du juriste


à savoir : l’assureur ou le juge682.

549. Le principe indemnitaire pour son application stricte mérite sans aucun doute une
évaluation des biens endommagé au jour du sinistre. En droit français À l'exception des
contrats les plus avantageux garantissant un rééquipement à neuf, les assureurs dans leur

680
Aucune disposition n’indique expressément la prise en charge par les assureurs de la zone CIMA et ceux
exerçant en Mauritanie des préjudices accessoires. La seule allusion du préjudice accessoire est contenue dans
l’alinéa 2 de l’article 31 du Code CIMA qui prévoit que : « l’offre comprend tous les éléments indemnisables du
préjudice, y compris les éléments relatifs aux dommages aux biens lorsqu’il n’ont pas fait l’objet d’un règlement
préalable ».
681
Par préjudice accessoire, il faut comprendre essentiellement les pertes occasionnées par l’immobilisation du
bien pendant le temps nécessaire aux réparations ou la reconstruction. V. A-M. ASSI-ESSO, J. ISSA-SAYEGH
et J. LOHOUES-OBLE, op. cit., p.390.
682
A-M. ASSI-ESSO, J. ISSA-SAYEGH et J. LOHOUES-OBLE, op. cit., p. 391.

277
majorité appliquent le principe du coefficient de vétusté683 à la valeur des biens à indemniser,
de manière à prendre en compte leur valeur réelle au moment de la déclaration du sinistre.
L’article 51 du CAM dispose qu’en cas de sinistre automobile, « l’indemnisation des
dommages causés aux véhicules terrestres à moteur se fait par référence à la valeur de
remplacement du véhicule ». Le défaut de précision quant à l’état du véhicule de
remplacement (neuf ou d’occasion) peut être problématique pour le juge ou l’expert ayant le
pouvoir souverain d’appréciation du préjudice.

550. Dans la zone CIMA la réparation du préjudice matériel se fait par voie
transactionnelle684.

551. Si la majorité des contrats d’assurances se règle sans incident, des contentieux
peuvent intervenir dans diverses étapes du contrat et aussi pour diverses raisons. Pour y faire
face et organiser les confrontations, des démarches et actions sont prévues par la loi avec
pour objectif principal le règlement des litiges avec des voies de recours.

Section II : Les modes de règlement des litiges et les voies de recours.

552. Autant qu’en matière commerciale, les litiges sont nombreux en matière d’assurance.
En effet, le litige peut bien naître du simple malentendu et aller jusqu’à un désaccord complet
entre l’assureur et l’assuré. Toujours est-il que dans la majorité des cas, le motif du litige en
matière d’assurance reste financier : non-paiement de cotisations, refus d’indemnisation,
indemnisation partielle de la part de l’assureur…Fort heureusement, tout litige ne conduit pas
automatiquement à un procès. Cependant bien souvent le litige en matière d’assurance
caractérisé par aspect inextricable, requiert l’intervention d’un tiers.

553. En tout état de cause, en cas de différend entre les parties, des solutions sont prévues
par la loi. Il s’agit des modes de règlement des litiges en matière d’assurances (Paragraphe I).

Dans la vie du contrat d’assurance et de surcroit quand un sinistre se produit, des mécanismes
d’actions sont prévues pour la protection des droits des parties. Ces mécanismes propres à

683
Cass. 1re civ., 26 avr. 2000, Resp. civ. et assur. 2000, comm. 248; RGDA 2000, p. 825, note J. KULLMANN.
684
L’article 231 du Code CIMA qui dispose en son alinéa 2 que : « L’offre comprend tous les éléments
indemnisables du préjudice, y compris les éléments relatifs aux dommages aux biens lorsqu’ils n’ont pas fait
l’objet d’un règlement préalable ». Ce principe transactionnel n’est pas une innovation du Code CIMA car il a
existé bien avant son avènement.

278
chacune d’elles constituent des moyens de recours ou options que nous étudierons à travers les
moyens de recours des parties (Paragraphe II).

Paragraphe I : Modes de règlement des litiges en matière d’assurances

554. Comme évoqué en début de section pour aboutir une phase judiciaire, des moyens de
règlement des différends plus simples sont mis en place par les systèmes juridiques. Il s’agit
des modes conventionnels de règlement des litiges (A). Les parties en litige ont parfois recours
aux modes juridictionnels de résolution de conflit que soit par les juridictions arbitrales ou les
juridictions de droit commun plus complexe et obéissant à des règles particulières. C’est la
procédure judiciaire (B)

A- Les modes conventionnels de règlement des litiges

555. Ayant l’avantage d’être moins onéreuses et plus discrètes, bon nombre de litiges en
droit des assurances sont résolus par la voix de la conventionnelle. Cependant, tel n'est pas
toujours le cas de tous les litiges. Nous allons appréhender la voie conventionnelle de
règlement des litiges à travers le règlement amiable (1) et le recours à l’arbitre (2).

1) Le règlement à l’amiable

556. La voie amiable peut se définir comme étant une convention par laquelle, la victime
(assurée ou non) et la compagnie d’assurance s’accordent sur l’indemnisation pour éviter la
phase judiciaire. Cet accord est soumis à certaines conditions : il faut dans un premier temps
que la victime fournisse toutes les informations concernant sa personne (état civil activité
professionnelle …) et le dommage subi (description des lieux procès verbaux etc.…), cela
dans un délai de quinze jours. Le défaut de ces informations entraîne une prolongation de la
date de l’offre d’indemnisation. Les informations sont importantes et permettent à l’assureur
d’avoir d’abord une vue précise sur la situation de l’assuré.

279
Ensuite, la description des dommages et leurs justificatifs lui faciliteront la tache pour
estimer l’ampleur des préjudices. Cette estimation lui permettra de faire une offre
d’indemnisation qui est une obligation de l’assureur.

Dans le cas où le dommage subi est important, l’accord amiable nécessite le recours à certains
intermédiaires (médecin, avocat…). Une fois la transaction effectuée, la victime en signant la
quittance transactionnelle, renonce à tout recours « le droit de se rétracter après acceptation
de l’offre dans un délai de 7 jours »685.

557. Les avantages d'un règlement amiable de l'indemnisation sont certains. En évitant le
procès, les intéressés s'épargnent en effet, non seulement des frais importants, mais le plus
souvent des préoccupations et des inquiétudes liées au caractère pénalisant et incertain des
règles de la responsabilité civile ainsi qu'aux aléas de l'évaluation judiciaire des dommages et
intérêts. En outre, il est avéré que la durée moyenne d'une action en justice est nettement
supérieure à celle d'une négociation permettant d'aboutir à une transaction : souci de sécurité,
impératif d'économie, goût de la tranquillité semblent donc se rejoindre pour inciter les parties
à rechercher un terrain d'entente afin de parvenir à un règlement amiable.

558. Pourtant, il serait excessif de prétendre que la transaction ne présente aucun danger et
qu'elle ne suscite aucune réticence chez ceux dont les intérêts sont engagés dans le litige sur la
responsabilité.

Du côté de la victime d'abord, le risque provient du fait qu'elle aborde souvent la


négociation en position de faiblesse. Face à un assureur qui connaît généralement les règles de
droit applicables et qui disposent d'une documentation importante, elle se sent en effet isolée
et mal armée, au moins si elle n'est pas elle-même assistée d'un conseil.

De plus, lorsque le dommage est important, le besoin qu'elle a le plus souvent de l'indemnité
la rend d'autant moins combative qu'elle constate que l'assureur a, contrairement à lui, tout son
temps. En outre, le danger le plus grave que court la victime, même si elle n'en est pas
toujours consciente c'est d'accepter une indemnisation qui lui parait correcte sur le moment,
mais qui se révélera par la suite insuffisante en comparaison du dommage réel. En effet, le
principe de la transaction est de fermer la voie à l'action judiciaire, ce qui empêche de rectifier
une évaluation erronée et cet effet peut être encore renforcé par la clause dite « de forfait » qui
comporte renonciation implicite à toute demande ultérieure de réparation, non seulement pour

685
Article 35 du Code des assurances mauritaniennes.

280
le dommage déjà apparu au moment de la signature, mais aussi pour toutes les aggravations et
manifestations nouvelles du fait dommageable initial. On mesure ici les risques auxquels une
transaction rédigée dans des termes insuffisamment pesés expose les victimes de préjudice.

559. D'ailleurs du côté des débiteurs d'indemnités, la question est également complexe.
Sans doute, pour l'auteur du dommage lui-même, la transaction présente l'inestimable
avantage d'éviter l'affirmation officielle par un tribunal de sa responsabilité. Mais il est
essentiel de souligner ici que la généralisation de l'assurance de responsabilité a eu pour
conséquence celle des clauses dites « de transaction » qui figurent dans tous les contrats
d'assurance de responsabilité et dont l'objet consiste à empêcher l'assuré de transiger avec la
victime hors de la présence de l'assureur, soit de transférer à l'assureur lui-même le droit de
transiger au nom du responsable. Cette pratique contractuelle a donc permis aux assureurs de
supplanter leurs assurés et de devenir les interlocuteurs des victimes au cours des pourparlers
engagés en vue des règlements amiables. Or l'attitude des compagnies d'assurance vis-à-vis de
la transaction n'a pas toujours été favorable, quelques-unes ayant même pratiqué et prôné, à
une certaine époque une réticence systématique aux prétentions des victimes qui les
conduisait à se laisser assigner et à épuiser toutes les voies de droit avant de se résigner au
paiement. Toutefois cette politique, probablement rentable à court terme, mais désastreuse
pour l'image de marque de l'assurance a été heureusement abandonnée par l'immense majorité
des assureurs. Bien plus, l'attitude de ceux-ci à l'égard des arrangements amiables s’est même
radicalement transformée à partir des années 1960, au moins en ce qui concerne le règlement
des dommages matériels légers ou moyens résultant des accidents de la circulation.

560. Il semble désormais de plus en plus évident que l'entente directe entre les parties est
préférable aux procédures judiciaires aussi bien pour les parties elles-mêmes, auxquelles elles
peuvent éviter beaucoup de soucis et de frustrations (à condition bien entendu que les intérêts
des victimes soient efficacement protégés), que pour l'intérêt général qui a tout à gagner à
l'allégement du contentieux de la responsabilité civile. D'ailleurs ce besoin de favoriser les
règlements non contentieux est ressenti non seulement en France, mais aussi dans beaucoup
d'autres pays et il a suscité, notamment en Europe, des initiatives diverses en faveur de la mise
en place des procédés, tels que la médiation, l'arbitrage et les accords amiables sur
l'indemnisation, en particulier, la transaction.

561. L'article 54 du Code des assurances, applicable à toutes les assurances de


responsabilité, prévoit que « l'assureur ne peut payer à une autre que le tiers lésé tout ou
partie de la somme due par lui tant que ce tiers n'a pas été désintéressé, jusqu'à concurrence

281
de ladite somme, des conséquences pécuniaires du fait dommageable ayant entraîné la
responsabilité de l'assuré ». A ce titre le règlement effectué par l'assureur entre les mains de
son assuré n'est pas libératoire, sauf si l'assuré justifie avoir déjà indemnisé la victime.
Néanmoins, il appartient à l'assureur qui règle son assuré de toujours vérifier si la victime a
été indemnisée, sans quoi il reste exposé au recours de celle-ci. Aussi il a été jugé que la
résistance injustifiée de l'assureur à accorder à son assuré transporteur ou à la victime du
dommage la garantie résultant de la police, peut lui valoir une condamnation à des dommages
- intérêts. En effet l'assureur est tenu d'une obligation de loyauté dans la mise en œuvre du
processus d'indemnisation.

562. L'article 225, alinéa 2, précise que « les dépositions du présent Code s'appliquent, soit
lors de la transaction soit lors de la procédure judiciaire », il ne fait donc que consacrer les
règles préexistantes.

563. A défaut de trouver une solution amiable, les parties en litige peuvent recourir à
l’arbitrage.

2) Le recours à l’arbitrage

564. Pendant de longues années, les législations nationales africaines étaient, en général,
peu favorables ou incomplètes en matière d’arbitrage686. Mais, depuis l’avènement et
l’adoption de nouveaux textes, en la matière, les législateurs Africains en font un instrument
privilégié de règlement des différends contractuels et de la lutte contre l’insécurité judiciaire
qui caractérisait l’Afrique.

565. Dans la zone OHADA (CIMA) et singulièrement au Bénin687, la volonté de


promouvoir l’arbitrage s’est manifestée par l’adoption de deux textes majeurs qui fixent le
cadre et les principes généraux de l’arbitrage. Il s’agit du Traité, de l’Acte uniforme relatif à

686
Par exemple, Le Code de procédure du Bénin du 23 mars 1981 ne prévoyait aucune disposition sur
l’arbitrage. Voy. R. AMOUSSOU-GUENOU, Droit de l'arbitrage en Afrique avant l'OHADA, in l'OHADA et
les perspectives de l'arbitrage en Afrique, Travaux du Centre René Jean Dupuy, Bruxelles, Bruylant, 2000, p.17.
687
Ce texte qui constitue le droit matériel de l’arbitrage s’applique à tout arbitrage se déroulant au sein de
l’espace OHADA. Ainsi, l’Acte uniforme relatif à l’arbitrage s’applique indistinctement tant à l’arbitrage interne
qu’international, ad hoc et institutionnel. V. Séminaire CCI/UIA/OAS sur l’exécution des sentences arbitrales en
Afrique Dakar le 25 avril 2015.

282
l’arbitrage adopté le 11 mars 1999688 et du Règlement d’arbitrage de la Cour Commune de
Justice et d’Arbitrage (CCJA).

Le système d'arbitrage de I'OHADA opère une distinction entre l'arbitrage de droit commun
régi par l'Acte Uniforme et l'arbitrage institutionnel de la Cour Commune de Justice et
d'Arbitrage (CCJA) organisé par le Traité et le règlement d'arbitrage689

Il résulte de l'article 21 du Traité OHADA que « les différends d'ordre contractuel » peuvent
faire l'objet d'un arbitrage sous l'égide de la CCJA690. Dans le cadre de l'arbitrage de droit
commun, l'Acte Uniforme considère comme arbitrables, les litiges portant sur « des droits
dont on a la libre disposition ».

566. La notion d’arbitrage n’a pas de définition légale. La doctrine offre cependant un
certain nombre de définitions ainsi, pour les auteurs ROBERT et MOREAU l’arbitrage est
« l’institution d’une justice privée grâce à laquelle les litiges sont soustraits aux juridictions
de droit commun, pour être rendus par des individus, revêtus pour la circonstance, de la
mission de les juger »691. René DAVID le considère comme « l’institution par laquelle, les
parties confient à des particuliers appelés arbitres et librement désignés par elles, la mission
de trancher leur litige »692. L’arbitrage est aussi défini comme : « un mode de solutions des
conflits qui trouve son origine dans une convention privée et qui aboutit à une décision
revêtue de l’autorité de la chose jugée. Cette décision est acquise grâce à l’intervention d’un
ou plusieurs particuliers auxquels la volonté commune des parties donne pouvoirs de
trancher le litige »693

688
L’Acte Uniforme n’opère aucune distinction entre l’arbitrage civil et l’arbitrage commercial, et autorise
l’arbitrage sur tous les droits dont les personnes physiques ou morales ont la libre disposition
689
Voy. P. LEBOULANGER, in l'arbitrage et l'harmonisation du droit des affaires en Afrique, rev. Arb. 1999 p.
551et suivant, cité par N. AKA, Le système d’arbitrage de la CCJA, 2008. p. 1
690
L'interprétation a contrario de l'article 21 du Traité permet d'exclure de l'arbitrage CCJA tous les litiges
résultant de rapports extra contractuels. Seront cependant inclus dans ce mode d’arbitrage, le contrat d’assurance.
Il suffit en effet que l'on se trouve en matière contractuelle pour que l'arbitrage soit possible. Le caractère civil ou
commercial du contrat n’est donc pas déterminant.
691
J. ROBERT B. MOREAU L'arbitrage : droit interne, droit international privé, 5e éd. Dalloz, 1983, n°1
692
Voir notamment R. DAVID, L’arbitrage dans le commerce international, Paris, Economica, 1982, p. 9
693
H. KEUTGEN, Droit comparé de l’arbitrage international, Bruxelles, Bruylant, 2002, cité Par A. DIALLO,
Réflexion sur l’arbitrage dans l’espace OHADA. Thèse université de Perpignan, 2016. p. 8.

283
567. A l’image de la France694, et contrairement à la Mauritanie les pays membres de la
CIMA ont intégré l’arbitrage à leur Code des assurances. En effet, le Code CIMA dans sa
partie relative à la conciliation et à l’arbitrage, a créé une commission nationale d’arbitrage où
sont obligatoirement traités les litiges nés de l’exercice de recours695.

568. En Mauritanie, c’est la loi n° 2000-016 portant Code de l'Arbitrage du 18 janvier 2000
qui a vocation à s’appliquer.

Bien qu’elle vise en principe le droit international, le droit public, la loi sur l’arbitrage
s’applique aussi au droit privé et par voie de conséquence au droit des assurances. En effet le
Code arbitral mauritanien dispose en son article 3 que : « La convention d'arbitrage est
l'engagement des parties de régler par l'arbitrage toutes ou certaines contestations nées ou
pouvant naître entre elles concernant un rapport de droit déterminé, contractuel ou non
contractuel ». L'adoption de ce Code a permis toutefois à la Mauritanie de se doter d'une
nouvelle législation en matière d’arbitrage, qui vient combler un vide juridique puisque ce
pays ne disposait jusqu'alors d'aucun texte interne régissant l'arbitrage.

569. En droit mauritanien comme en droit OHADA, en matière d’assurance, la convention


d'arbitrage peut revêtir la forme d'une clause compromissoire ou celle d'un compromis696. La
sentence arbitrale est rédigée comme un jugement et est revêtue, dès son prononcé, de
l’autorité de la chose jugée. Cependant, elle n’a pas la même portée qu’une décision
judiciaire697. En règle générale, les parties à une procédure d'arbitrage, s'engagent à exécuter

694
V. art. 127-4 du Code des assurances françaises qui stipe : « … en cas de désaccord entre l'assureur et l'assuré
au sujet de mesures à prendre pour régler un différend, cette difficulté peut être soumise à l'appréciation d'une
tierce personne désignée d'un commun accord par les parties ou, à défaut, par le président du tribunal de grande
instance statuant en la forme des référés ».
695
Art 276 du Code CIMA.
696
Pour la Mauritanie, l’art 8 du Code de l’arbitrage après avoir énoncé que l’on ne peut compromettre : « dans
les matières touchant à l'ordre public ; dans les contestations relatives à la nationalité ;ans les contestations
relatives au statut personnel qui ne sont pas soumises à l'arbitrage prévu par le présent Code, à l'exception des
contestations d'ordre pécuniaire en découlant ; dans les matières ne où on ne peut transiger ; dans les
contestations concernant l'Etat, les établissements publics et les collectivités locales, à l'exception des
contestations découlant des rapports internationaux d'ordre économique, commerciales ou financier », dispose in
fine : « Toutefois les personnes peuvent compromettre sur les droits dont elles ont la libre disposition ».
Dans l’espace CIMA, aux termes de l’article 21 du Traité OHADA : « En application d’une clause
compromissoire ou d’un compromis d’arbitrage, toute partie à un contrat, soit que l’une des parties ait son
domicile ou sa résidence habituelle dans un des Etats parties, soit que le contrat soit exécuté ou à exécuter en tout
ou partie sur le territoire d’un ou de plusieurs Etats parties, peut soumettre le différend d’ordre contractuel à la
procédure d’arbitrage prévue par le présent titre. »
697
La sentence arbitrale n’acquiert force exécutoire que par une ordonnance : exequatur du juge de l’exécution

284
volontairement et de bonne foi la sentence rendue par le tribunal arbitral. Toutefois, face à la
résistance de certains, plaideurs, il s'avère parfois nécessaire d'enclencher un processus
d'exécution forcée à travers l’exéquatur.

570. Dans la zone CIMA, La sentence arbitrale n’est susceptible d’exécution forcée qu’en
vertu d’une décision d’exéquatur rendue par la juridiction étatique.

571. En Mauritanie, c’est le président du tribunal de Wilaya dans le ressort du quel la


sentence est rendue qui a le pouvoir de rendre exécutoire la décision arbitrale. Si l’arbitrage
concerne un litige pendant devant une cour d’appel devant la conclusion du compromis, seul
le président de cette cour est compétent pour rendre l’ordonnance d’exequatur698. La décision
d’exéquatur n’est susceptible que d’un pourvoi en cassation devant la CCJA ; la décision qui
accorde l’exéquatur n’est susceptible d’aucun recours.

Si la cour confirme la sentence arbitrale attaquée, elle en donne l’exequatur, si elle


l’infirme, elle statue au fond et rend une nouvelle décision699.

Les avantages de la procédure d’arbitrage résident dans sa rapidité, la liberté de choix quant à
l’arbitre, la discrétion car, il n’y a pas de publicité de procédure700.

En guise d’arbitre, les parties choisissent généralement une personne qui par sa profession ou
sa technicité, leur inspire confiance comme un avocat présentant de nombreuses années de
pratique du droit, un ancien magistrat, un médecin ou un expert réputé.

572. Deux qualités essentielles sont par ailleurs requises : l’indépendance et l’impartialité
de l’arbitre Article 6 Acte uniforme OHADA sur le droit de l’arbitrage. Le Tribunal arbitral
doit être composé en nombre impair, soit d’un seul arbitre soit de trois arbitres. (Article 8 de
l’acte uniforme OHADA sur le droit de l’arbitrage701. Cette règle est impérative. Les arbitres
sont égaux même si l’un d’entre eux préside le tribunal et dirige les débats. Les parties
peuvent être représentées ou assistées par un conseil de leur choix. Il a vocation à s’appliquer
à tout arbitrage tant interne que de droit international ; qu’il s’agisse d’un arbitrage ad hoc ou
d’un arbitrage institutionnel. La CCJA établit chaque année une liste d'arbitres de réputation

698
Article 31 du Code de l’arbitrage en Mauritanie.
699
Article 37 du Code de l’arbitrage mauritanien.
700
Article 29, Loi n° 2000-016 portant Code de l'Arbitrage en Mauritanie.
701
Pour une équivalence de cette disposition en droit mauritanien voir : article 18 relatif à la nomination des
arbitres.

285
internationale qu'elle met à la disposition des parties et des plaideurs. Cette liste est purement
indicative d'autant qu'elle ne s1mpose ni aux parties ni à la Cour

573. La sentence arbitrale est susceptible d’appel702 à moins que les parties n’aient renoncé
à l’appel dans la convention d’arbitrage. Toutefois, elle n’est pas susceptible d’appel lorsque
l’arbitre a reçu mission de statuer comme amiable compositeur, à moins que les parties n’aient
expressément réservé cette faculté dans la convention d’arbitrage. L’appel de la sentence
arbitrale est instruit et jugé selon les règles relatives à la procédure par les dispositions du
Code de procédure civile, commerciale et administrative concernant les jugements judiciaires.

Si la cour confirme la sentence arbitrale attaquée, elle en donne l’exequatur, si elle l’infirme,
elle statue au fond et rend une nouvelle décision.

574. Nonobstant le caractère définitif de la sentence, des voies de recours ont aussi été
prévues par le CCJA. Trois voies de recours sont ouvertes contre les sentences arbitrales
rendues sous l'égide de la CCJA : le recours en contestation de validité703, le recours en
révision704 et la tierce opposition705.

En droit OHADA, le recours en annulation n’est recevable que dans les cas énumérés
par l’article 26 de l’acte uniforme relatif à l’arbitrage ces cas sont les suivants :

- si le Tribunal Arbitral a statué sans convention d’arbitrage ou sur une convention nulle
ou expirée,

- si le Tribunal Arbitral a été irrégulièrement composé ou l’arbitre unique


irrégulièrement désigné,

702
En effet : « lorsque, suivant les distinctions faites à l’article 37, les parties ont renoncé à l’appel ou qu’elles ne
se sont pas expressément réservées cette faculté dans la convention d’arbitrage, un recours en annulation de
l’acte qualifié sentence arbitrale peut néanmoins être formé malgré toute stipulation contraire ». C’est ce qui
ressort de l’article 38 Code d’arbitrage en Mauritanie.
703
Le règlement d’arbitrage de la CCJA, dans son article 29 alinéa 1, prévoit le recours en contestation de
validité de la sentence.
704
Selon l’Acte Uniforme, la sentence arbitrale peut faire l’objet d’un recours en révision devant le tribunal
arbitral « en raison de la découverte d’un fait de nature à exercer une influence décisive et qui, avant le prononcé
de la sentence, était inconnu du tribunal arbitral et de la partie qui demande la révision ». V. Art. 25, al. 5 de
l’A.U./D.A.
705
Cf. Art. 25 de l’acte Uniforme. Elle désigne, « la faculté, pour toute personne physique et morale qui n’a pas
été appelée dans la procédure d’arbitrage, et lorsque la sentence lui porte préjudice, de faire opposition devant
le tribunal arbitral »

286
- si le Tribunal Arbitral a statué sans se conformer à la mission qui lui a été confiée,

- si le principe du contradictoire n’a pas été respecté,

- si le Tribunal Arbitral a violé une règle d’ordre public international des Etats
signataires du Traité,

- si la sentence arbitrale n’est pas motivée.

575. En Mauritanie Le recours en annulation n’est ouvert que dans les cas suivants :

- si la sentence arbitrale a été rendue sans convention d’arbitrage ou sur convention


nulle ou expirée ;

- si le tribunal arbitral a été irrégulièrement composé ou l’arbitre unique irrégulièrement


désigné ;

- si l’arbitre a statué sans se conformer à la mission qui lui avait été conférée ;

- si l’arbitre a violé une règle d’ordre public ;

- si les règles fondamentales de procédure relatives aux droits de la défense et au


principe de la contradiction ne sont pas respectées706.

B- La voie judiciaire

576. La procédure judiciaire en matière d’assurance révèle en règle générale une discorde
sérieuse entre les parties. Il convient de rappeler que le barème d’indemnité fixé par le Code
CIMA s’applique aussi bien lors de la transaction qu’en cas de règlement judiciaire. Si le
règlement amiable à travers une transaction a été privilégié, quelques dispositions viendront
réglementer la procédure judiciaire de règlement des sinistres. Comparé au Code CIMA, le
Code mauritanien des assurances est peu prolixe en matière de procédure judiciaire.

577. La procédure judiciaire obéit à une règle de compétence (1). Par ailleurs, il s’agira de
déterminer les délais du droit d’action qui s’éteint par la prescription (2)

706
V. Article 38 du Code de l’arbitrage mauritanien.

287
1) Les règles de compétences

578. La compétence est le pouvoir légal donné à une juridiction de connaître d’une action
en justice, et des moyens de défense qui lui sont opposés cette compétence peut être
d’attribution (a) ou territoriale (b)

a) La compétence d’attribution

579. La détermination de la compétence d’attribution nous amène à chercher la nature de la


juridiction devant laquelle les litiges relatifs au contrat d’assurance en l’occurrence ceux
concernant les accidents de la circulation doivent être portés. Le Code CIMA, de même que le
CAM n’édictent aucune règle concernant la compétence d’attribution. Cependant, en nous
référant au droit commun, la juridiction compétence est en principe la juridiction civile, ou la
juridiction commerciale. En effet, c’est en fonction de la nature civile ou commerciale du
contrat d’assurance au regard du défendeur que la question de compétence d’attribution doit
être résolue.

580. Ainsi, si le défendeur est un assureur, une distinction mérite d’être faite suivant le type
de société.

- S’il s’agit d’une société anonyme, à son égard le contrat est commercial et, le tribunal
de commerce doit être normalement être saisi par l’assuré. Toutefois, si le contrat à un
caractère civil, à l’égard de l’assuré, celui-ci a le choix d’assigner l’assureur devant la
juridiction civil ou la juridiction commerciale707.

- S’il s’agit d’une société mutuelle, à but non lucratif, l’assurance a, à son égard un
caractère civil et l’assuré doit l’assigné devant la juridiction civile.

581. Si le défendeur est une victime, on met en avant le fait que le contrat d’assurance
terrestre est, en principe, un acte civil, ou commercial et l’assuré doit être assigné par
l’assureur devant les juridictions civiles ou commerciales selon bien entendu la qualité ou non
de commerçant de l’assuré.

707
Voy en ce sens, J. LOHOUES-OBLE, L'indemnisation des victimes d'accidents de la circulation dans le
Code CIMA, in l'Assureur Africain n°24, p. 20, décembre 1996 ; CIMA, droit des assurances, op.cit., p. 466.

288
582. En Mauritanie sous réserve de la compétence du tribunal de Wilaya, et des tribunaux
de commerce, les tribunaux de Moughataa ont une compétence d’attribution en matière civile
et commercial.

- « En premier et dernier ressort des actions dont la valeur peut être évaluée en argent et
ne dépassant pas 500 000 Um en capital et 50 000 en revenu »708.

- « En premier ressort seulement pour les actions civiles dont la valeur égale ou excède
500 000 UM et 50 000 UM en revenu… »709

Il existe un tribunal de Moughatâa au niveau de chaque chef-lieu de Moughatâa


(département) excepté les Moughataas centrales des Wilayas

583. Le tribunal de la Wilaya est aussi compétant pour les affaires relatives aux assurances.
Il existe un tribunal de Wilaya dans chaque chef-lieu de Wilaya (région)710. Aux termes de
l'article 41 de l’ordonnance n° 2007-012 du 8 février 2007 portant organisation judiciaire en
Mauritanie : « Le tribunal de Wilaya statue en toutes matières et sous réserve des compétences
que la loi reconnaît à d'autres juridictions, sur les affaires prévues par le Code de procédure
civile, commerciale et administrative ».

584. Les tribunaux répressifs peuvent être compétant dans une certaine mesure. Le
problème qui se pose est celui de savoir si par le principe d'une responsabilité automatique de
l'assureur laisse aussi la possibilité au ministère public ou même à la victime conductrice de
mettre en mouvement l'action publique par une plainte avec constitution de partie civile. Il y a
lieu de croire que cela est possible dès lors que la victime n'a pu être indemnisée à la suite de
la procédure amiable. Nombreuses sont les juridictions qui accèdent à cette action sous
réserve des conditions d'exercice des actions civiles, l'intérêt, la qualité et la capacité de la
victime ou de ses ayants droit étant requis notamment711.

708
Article 20 (nouveau) alinéa 1 du Code mauritanien de procédure civil commercial et administratif.
V. Alinéa 2 de l’article précité.
710
Le tribunal de la wilaya comprend les formations de jugement suivantes :
- une ou plusieurs chambres civiles ;
- une chambre commerciale, sous réserve des dispositions de l'article 46 ci-dessous ;
- une chambre administrative ;
- plusieurs chambres pénales dont une pour mineurs
711
Voir : TPI de Bafia, jugement n°945/cor du 21 mai 1996, Aff Min Pub et ONANA Jean Marie c/ KAMGA
Pierre, inédit : « Attendu qu'à la suite de l'accident ainsi déploré, le Capitaine ONANA Jean Marie a été victime
d'un polytraumatisme du membre supérieur gauche accompagné de multiples fractures et blessures profondes et

289
585. Madame LOHOUES OBLE distingue selon que le véhicule impliqué est assuré ou
non712

Si le véhicule impliqué n'est pas assuré, le conducteur ne peut exercer son action que contre
l'auteur responsable de l'accident. Le juge peut donc avant l'octroi des dommages et intérêts à
la victime, procéder d'abord à une qualification délictuelle du comportement du responsable713
Le juge répressif, s'il établit la responsabilité de l'auteur de l'accident, il devra en déduire les
conséquences de l'accident et le condamner à indemniser son adversaire sur la base de l'article
1384 alinéa 1er du Code civil (désormais 1242 alinéa 1er) 714

586. A contrario, si le véhicule était assuré, l'action de la victime reste recevable soit devant
la juridiction civile, soit devant la juridiction commerciale. Si le conducteur peut saisir un tel
juge, son action ne peut cependant pas être admise sans limitation de date, autrement dit, doit
il doit l'exercer dans un certain temps.

a) La compétence territoriale

587. En matière de compétence territoriale, le CAM, qui dispose que : « dans toutes les
instances relatives à la fixation et au règlement des indemnités dues, le défendeur (assureur ou
assuré) est assigné devant le tribunal compétent en matière d’assurance conformément aux
règles de compétence générales ou spéciales en vigueur en Mauritanie »715. Il peut s’agir en

superficielles ; qu'il s'est constitué partie civile et a demandé qu'il lui soit allouée la somme de 14 379 780 francs
en réparation des préjudices subis ;(...) Que les conditions posées par l'article 5 de l'ordonnance n°89/005 du 13
décembre 1989 en ce qui concerne l'exercice du droit à l'indemnisation de la victime se trouvant parfaitement
réunies, il convient de dire sa demande fondée et de l'évaluer, en application du décret n°90/1197 du 3 août
1990 » Hubert DIE KOUENEYE, Le conducteur victime dans le droit des accidents de la circulation mémoire de
DEA 2006 Université de Dschang Cameroun.
712
V. J. LOHOUES OBLE, L'indemnisation des victimes d'accidents de la circulation dans le Code CIMA. p.20.
713
V. TPI de Dschang, jugement n°369/cor du18 janvier 2005, Aff Min Pub et OKONG SANGON Philippe c/
DONGMO Maurice, inédit : « attendu que pour que l'homicide et les blessures involontaires soient réprimés,
l'article 289 alinéa 1 du Code pénal exige qu'il y'ait à l'origine une faute de la part de l'auteur, notamment une
maladresse, une négligence, une imprudence ou une inobservation des règlements (...), qu'il s'en suit à l'analyse
qu'aucune faute au sens de cet article n'est à retenir à l'encontre du prévenu ; qu'il échet par conséquent de le
déclarer non coupable et de le relaxer pour délits non caractérisés». V. H. DIE KOUENEYE, op. cit.,
714
En France, la loi du 31 décembre 1957 reconnaît aux tribunaux judiciaires le droit de connaître des
conséquences des accidents causés par des véhicules de l'administration avec application des règles de droit civil
pour l'indemnisation des victimes, même, agents de l'état.
715
Voir art 39 du CAM relatif aux juridictions compétentes en matière d’assurance en Mauritanie.

290
Mauritanie d’un tribunal de Moughatâa qui est compétent en matière civile et commerciale
dans la mesure où le tribunal de Wilaya ne le serait pas.

Retenir la compétence du lieu du fait dommageable s’explique pour la Mauritanie comme


pour la majorité des législations s’explique par la facilité des constatations et des expertises
éventuelles716.

588. L'article 30 du Code CIMA règle les compétences de manière plus explicite en
indiquant que : « dans toutes les instances relatives à la fixation et au règlement des
indemnités dues, le défendeur (assureur ou assuré) est assigné devant le tribunal du domicile
de l'assuré, de quelque espèce d'assurance qu'il s'agisse, sauf en matière d'immeubles, ou de
meubles par nature, auquel cas le défendeur est assigné devant le tribunal de la situation des
objets assurés.

589. L’article 39 du CAM est la seule disposition consacrée à la compétence ce qui nous
oblige à nous demander quid des sinistres survenus hors de la Mauritanie ?

Le Code CIMA a quelque peu tranché sur le sujet. En effet, des cas de figures peuvent
essentiellement se produire au vu des dispositions relatives à la compétence territoriale.

- Si un sinistre se produit dans un état membre de la CIMA, tel peut être le cas Si un
automobiliste Béninois résident au Togo assuré par une compagnie ivoirienne voit ses
passagers blessés au cour d’un accident survenu au Bénin, en application du principe énoncé,
ce sont les juridictions béninoises qui seront compétentes pour connaître actions qui
pourraient être intentées. Se pose après la question de la loi applicable. Si le principe était que
la loi applicable est la loi interne de l’état sur le territoire duquel l’accident est survenu, c’est
la loi béninoise qui aurait été compétente pour en connaître717. Cependant depuis le 15 février
1995, en l’occurrence depuis l’avènement de la CIMA, c’est cette même loi qui s’applique
dans tout l’espace.

- Un sinistre peut aussi se produire dans un pays non membre de la CIMA. Tel est le cas
d’un sinistre survenu en Mauritanie de deux véhicules assurés aux Sénégal. Les victimes

716
A-M. ASSI-ESSO, J. ISSA-SAYEGH et J. LOHOUES-OBLE, op. cit,. p. 463.
717
La plupart des législations africaines ayant pour modèle le droit français admettent que les obligations
extracontractuelles relèvent de la loi du lieu où est survenu le fait juridique qui leur donne naissance à savoir la
loi interne de l’Etat sur le territoire duquel l’accident est survenu. V. Cass. Civ., 25 mai1948, J.C.P, 1948,
II,4542, note M. VASSEUR.

291
sénégalaises de l’accident survenu en Mauritanie vont elles agir devant les tribunaux d’une
Moughattaa ou Wilaya mauritanienne ?

Sans doute oui puisqu’il s’agit d’une juridiction du lieu de l’accident. La loi applicable sera
aussi la loi mauritanienne avec les inconvénients ou avantages que cela pourrait comporter
pour les victimes. En effet, lorsque l’accident se produit à l’étranger et de surcroît dans un
pays non membre de la CIMA, à supposer que la victime connaisse l’applicabilité de la loi
étrangère, elle est contrainte de rechercher le régime et la durée de la prescription relevant de
cette loi dont elle ignore tout. Cette méconnaissance de la loi étrangère peut aussi concerner
l’assureur, situation qui ne facilitera pas et n’accélérera pas le règlement des sinistres.

590. Par ailleurs, les victimes Béninoises, Sénégalaises, Ivoiriennes ou Camerounaises


peuvent être confrontées à des problèmes liée à la méconnaissance du montant de l’indemnité
auquel elles pourront s’attendre. C’est pourquoi, comme l’a rappelé Madame LOHOUES
OBLES, et que l’a préconisé la Convention de la Haye718, il serait intéressant que
l’application systématique de la lex loci delicti ou de la loi locale soit assouplie pour faciliter
les procédures d’indemnisation et éviter les conflits de juridictions qui ne concourent qu’à
léser les victimes d’accidents.

591. Le temps peut être déterminant dans l’exercice de certains droits dans en matière
d’assurance. En effet, l’exercice des droits des parties doivent respecter un certain délai au-
delà duquel, intervient la prescription.

2) La prescription en matière d’assurances

592. La question de la prescription719 est en droit des assurances l’une des principales
sources de contentieux720, dans la mesure où l’existence de cette prescription est bien souvent

718
En vertu de la Convention de la Hayes, lorsqu’un véhicule est en cause, la responsabilité du conducteur à
l’égard de ses passagers, même étrangers, sera appréciée en fonction de la loi en vigueur au lieu
d’immatriculation du véhicule. Voy. H. BATTIFOL, La 11e session de la Conférence de la Haye sur le droit
international privé, Revue critique de droit international privé, 1969, p. 226.
719
Mode d’acquisition ou d’extinction d’un droit, par l’écoulement d’un laps de temps et sous les conditions
déterminées par la loi. V. G CORNU, Vocabulaire juridique, PUF, 2014.
720
J. KULLMANN, Lamy Assurances, Lamy, 2015 n°1075.

292
ignorée des assurés, qui se voient donc opposer, un refus de garantie de la part de leur
assureur.

593. Si l'on s'en tient aux dispositions de l’article 28 du Code des assurances CIMA et de
l’article 40 du CAM, toutes actions dérivant d’un contrat d’assurance sont prescrites par deux
ans à partir de l’événement qui y donne naissance. Ces dispositions fixent de cette manière le
principe de la prescription biennale721.

594. Nous allons dans un premier temps aborder le domaine de la prescription biennale (a)
puis les autres délais de prescription (b)

a) La prescription biennale

595. La prescription biennale sous-entend qu’au bout de deux ans, le droit de l’assuré se
trouve définitivement éteint. Elle présente l’avantage de ne pas laisser aux parties une trop
longue période pour une quelconque réclamation. Cette règle est en réalité fondée sur des
raisons d’ordre public et de paix sociale. Les rédacteurs des Codes sont quasi unanimes sur le
souhait de clôturer au plus vite les litiges relatifs aux assurances.

596. Les dérogations au principe énoncées en matière de prescription biennale sont au


nombre de trois. Dans le Code CIMA. Nous en avons relevé deux dans le CAM.

La première dérogation concerne les cas de réticence, omission, déclaration fausse ou


inexacte sur le risque couru. Le délai de prescription dans ces cas court du jour où l’assureur a
eu connaissance de l’irrégularité. On peut estimer à juste raison que cette dérogation est
conforme à l’équité722.

La deuxième dérogation concerne la prescription de l’action en règlement du sinistre.


Dans ce cas aussi, le point de départ du délai de prescription est reculé. Il court du jour où les
intéressés ont eu connaissance du sinistre, s’il prouve qu’ils l’on ignoré jusque-là. Par le terme
« intéressés », la loi vise l’assuré qui réclame l’indemnité mais aussi l’assuré qui souhaiterait
mettre en œuvre une déchéance723.

721
L’équivalent de ces articles se trouve dans l’article L.114-1 du Code des Assurances françaises.
722
Art.28, al.2,1° Code CIMA. Pour disposition analogue, voy. en droit mauritanien art.40, al.3.
723
Art.28, al.2, 2° du Code. Voy art.40, al.4. du CAM.

293
La troisième dérogation que l’on ne retrouve pas dans le CAM est relative à l’action de
l’assuré contre l’assureur. Elle a pour cause, le recours d’un tiers, notamment en cas
d’assurance de responsabilité. La prescription court alors du jour où ce tiers a exercé son
action en justice ou a été indemnisé par l’assuré724.

597. Aussi bien dans le Code CIMA où l'interruption de la prescription de l'action peut,
résulter soit de l'envoi d'une lettre recommandée avec accusé de réception adressée par
l'assureur à l'assuré en ce qui concerne l'action en paiement de la prime et par l'assuré à
l'assureur en ce qui concerne le règlement de l'indemnité, dans le Code des assurances
Mauritanienne, « la prescription est interrompue par une des causes ordinaires d’interruption
de la prescription et par la désignation d’experts à la suite d'un sinistre » 725.

L’interruption de la prescription en matière d’assurance résulte des causes de droit commun


mais aussi de causes spécifiques qui sont au nombre de deux.

Conformément au droit commun, la prescription s’est interrompue par les modes ordinaires
quoi sont : la citation en justice, le commandement ou saisie ou encore par la reconnaissance
du droit du créancier par le débiteur726.

Aux causes ordinaires que nous venons de citer, le droit Mauritanien et le droit CIMA
à travers son article 29 727 ajoute deux causes spécifiques.

La première est relative à la désignation d’expert à la suite d’un sinistre dans le but
d’une évaluation de l’indemnité. En droit commun, la désignation d’experts en référé
n’interrompt pas en principe le délai de prescription car n’étant pas une assignation au fond.
Cette solution différente adoptée en droit des s’explique par la nécessité d’assurer la
protection des assurés qui seraient éventuellement inactifs du fait de cette désignation728.

La seconde cause spécifique d’interruption concerne l’envoi d’une lettre recommandée


avec accusé de réception adressée par l’assureur à l’assuré en ce qui concerne l’action en
payement de la prime et à l’assuré à l’assureur en ce qui concerne le payement de l’indemnité.

724
Art.28, al.2, 3° du Code CIMA. Il résulte des dispositions de ce texte que la date de l’assignation est le point
de départ du délai. Une réclamation amiable sera sans effet.
725
Art.40, al. 5 CAM
726
Voy art.2248 du Code civil français.
727
Les dispositions analogues sont contenues dans l’alinéa 6 de l’article 40 du CAM.
728
A-M. ASSI-ESSO, J. ISSA-SAYEGH et J. LOHOUES-OBLE, op. cit,. p.229

294
L’objectif de l’interruption de la prescription est de faire courir un nouveau délai notamment
en matière de prescription biennale.

598. En droit français, l’assureur à l’obligation de mentionner dans le contrat les


dispositions relatives à la prescription. En effet, l'article R.112-1 du Code des assurances
dispose que "les polices d'assurance ... doivent rappeler les dispositions des titres Ier et II du
Livre Ier de la partie législative concernant ... la prescription des actions dérivant du contrat
d'assurance". Il se trouve qu’aucune sanction n’a été prévue à l’encontre d’un manquement à
cette obligation. Ainsi, la Cour de cassation a pendant longtemps adopté une position
favorable aux assureurs quant à l’application de l’article R.112-1 du Code des assurances, en
déduisant que la prescription biennale avait commencé à courir, quand bien même l’assureur
n’avait pas rempli son obligation d’information729. Depuis 2011, un revirement complet a été
fait en faveur des assurés par la cours de cassation française.

En effet, aux termes de deux décisions de principe en date du 28 avril 2011730, la Cour de
cassation a notamment sanctionné un assureur dommages-ouvrage s’étant borné, comme l’y
autorisait la jurisprudence antérieure, à indiquer dans les conditions générales de la police que
« toutes actions dérivant du présent contrat sont prescrites par deux ans à compter de
l'événement qui y a donné naissance dans les termes des articles L 114-1 e L. 114-2 du Code
des assurances »

599. En Mauritanie, La prescription biennale a été tranchée de manière stricte voire sévère.
On peut observer une disposition en matière de prescription qui précise que « la prescription
court même contre les mineurs, les majeurs en tutelle et tous incapables »731. On peut
constater que dans le COC mauritanien une disposition accorder au CAM la possibilité de
réduire le délai de prescription ainsi : « Toutes les actions naissant d'une obligation sont
prescrites par quinze ans, … et celles qui sont déterminées par la loi dans les cas

729
Cass. 1ère civ. 22 janvier 2002, pourvoi n°98-18.892.
730
Cass. 3e civ., pourvoi n° 10-16.269, RGDA 2011 ; ; voir également Cass. 2ème civ. 28 avril 2011 pourvoi
n°10-16403.
731
Cette disposition de l’alinéa 5 de l’article 40 n’est pas compatible avec l’article 376 du Code des obligations
et des contrats mauritanien qui dispose que : « La prescription ne court point contre les mineurs non émancipés
et autres incapables, s'ils n'ont pas de tuteur, de conseil judiciaire ou de curateur, jusqu'à leur majorité, leur
émancipation ou la nomination d'un représentant légal ».

295
particuliers »732. Le délai de deux ans en matière de prescription dans le domaine des
assurances ne connaît pas d’exceptions dans le CAM.

600. A n’en point douter, la solution adoptée par le CAM en matière de prescription ne peut
être que favorable aux assureurs. Il appartient dans ce système aux assurés et surtout aux
victimes d’exercer dans les plus brefs délais leur action en réparation. Contrairement à la
législation mauritanienne, nous verrons que le code CIMA a admis des exceptions que nous
allons étudier et qui constituent les autres délais de prescription.

b) Les autres délais de prescription

601. La prescription extinctive constitue un moyen de se libérer de ses obligations et


d’éteindre une dette par l’écoulement d’un certain laps de temps, sous les conditions
déterminées par la loi. Avant la réglementation apportée par le Code CIMA, le délai de
prescription applicable aux actions en responsabilité du tiers victime contre l’assuré
responsable du dommage était propre à chaque législation733.

Le Code CIMA a uniformisé la prescription au point où l’on passe en matière d’assurance de


personne ou encore d’assurance de responsabilité civile d’un délai variable de la prescription
au principe de la prescription quinquennale. A ce titre, l’article 256 alinéa premier du Code
CIMA dispose à ce sujet que : « les actions en responsabilité civile extra contractuelle,
auxquelles le présent Code est applicable, se prescrivent par un délai maximum de cinq ans à
compter de l’accident ».

En droit français, la loi n° 89-1014 du 31 décembre 1989, a porté la prescription à dix


ans. Cette disposition figure dans le Code des assurances françaises en ces termes : « la
prescription est portée à dix ans dans les contrats d'assurance sur la vie lorsque le
bénéficiaire est une personne distincte du souscripteur et, dans les contrats d'assurance
contre les accidents atteignant les personnes, lorsque les bénéficiaires sont les ayants droit de

732
V. art.384, COC mauritanien.
733
Elle était de 30 ans en Côte d’Ivoire (art.4 de la loi 89-1291 du 18 décembre 1989) un délai considéré excessif
; 3 ans au Cameroun (art.41 ordonnance du 123 décembre 1989) ; au Togo 5 ans ( art. 21 loi du 5 juin 1989).

296
l'assuré décédé »734. On peut à partir des dispositions précitées préciser que le délai de deux
ans concerne essentiellement les actions contractuelles entre assureur et assuré. Toutefois,
cela n’explique pas pourquoi les assureurs de la zone CIMA s’attèlent à faire trainer
davantage les accidentés de la route en se fondant régulièrement sur la prescription biennale
de l’article 28 pour opposer une fin de non-recevoir aux diverses réclamations des victimes.
Par ailleurs, il faut noter que la consolidation de certaines victimes peut nécessiter plusieurs
années. Celles-ci peuvent avoir été évacuées par leurs familles après le sinistre et reviendront
plusieurs années après. Le sort réservé à ces cas n’a pas été traité par le Code CIMA.

602. Les actions en responsabilité n’ayant pas été prévu par le CAM, la solution sera une
orientation vers le Code des obligations et des contrats mauritaniens qui dispose que « l'action
en indemnité du chef d'un délit ou quasi-délit se prescrit par cinq ans, à partir du moment où
la partie lésée a eu connaissance du dommage et de celui qui est tenu d'en répondre. Elle se
prescrit dans tous les cas par vingt ans, à partir du moment où le dommage a eu lieu »735.

603. Le risque de discorde entre l’assureur et l’assuré est présent dès la signature d’un
contrat d’assurance. En matière d’assurance, les modes de règlement des litiges allant de
l’amiable au judiciaire ont été élaborés en vue de résoudre ces litiges. Il peut arriver que
l’assuré soit dans une situation inconfortable de nature à le priver d’une indemnisation. Aussi,
l’assureur qui souhaite exercer une action envers certaines personnes peut se retrouver lié.
C’est l’existence de ces situations qui motive l’élaboration des moyens de recours des parties.

Paragraphe II : Les moyens de recours des parties

604. Le législateur a offert à l’assureur et la victime un mécanisme d’action que l’on


pourrait considérer comme des moyens de recours dans la mesure où ils permettent à ces
derniers de se retourner contre certaines personnes. En ce sens, la loi autorise la victime d’un
préjudice de poursuivre l’assureur du responsable de son dommage il s’agit de l’action directe
(A). Du côté de l’assureur, il est possible après que ce dernier se soit acquitté de son
obligation de réparation (payement de l’indemnité), de se retourner contre le responsable du

734
Article L.114-1 alinéa 4. La loi n° 89-1014 du 31 décembre 1989, a porté la prescription à dix ans lorsque
dans les contrats d'assurance vie et les contrats d'assurance accidents lorsque le bénéficiaire est une personne
différente du souscripteur
735
Voy. art. 126, du COC mauritanien.

297
dommage qu’il a eu à réparer. Ce mécanisme non négligeable dont l’assureur peut recourir est
la subrogation (B).

A- L’action directe

605. Plutôt que d’intenter une action en responsabilité contre l’auteur du préjudice qu’elle a
subi, la victime peut préférer agir directement contre l’assureur du responsable, dont la
solvabilité est probablement la plus garantie.

L’action directe est le fait pour un créancier d’agir en justice en son nom et pour son
propre compte contre le débiteur de son débiteur, appelé le « sous débiteur «. Il pourra ainsi
récupérer ce que lui doit son débiteur, qui dans le cadre de ce mécanisme portera le nom de «
débiteur intermédiaire », mais seulement à concurrence de ce que doit le sous débiteur à ce
dernier.

606. Avant les codifications de 1913 et de 1930, la victime n’avait pas la possibilité d’agir
directement contre l’assureur du responsable de son, préjudice pour en obtenir réparation. En
effet, étant tiers au contrat d’assurance, elle ne pouvait eu égard à ce statut agir contre les
assureurs que par l’action oblique prévue par l’article 1166 du Code civil, en exerçant les
droits de leur débiteur refuse néglige. Cette action avait pour inconvénient de faire passer la
créance d’indemnité dans le patrimoine de l’assuré avant de bénéficier aux divers créanciers.
L'action directe évite précisément ce passage de la créance d'indemnité dans le patrimoine de
l'assuré, elle permet en effet son acquisition directe par la victime736.

607. Suivant les dispositions de l’article 53 de la loi du 13 juillet 1930 le Code CIMA737 et
le CAM738 disposent : « L'assureur ne peut payer à un autre que le tiers lésé tout ou partie de
la somme due par lui, tant que ce tiers n'a pas été désintéressé, jusqu'à concurrence de ladite
somme, des conséquences pécuniaires du fait dommageable ayant entraîné la responsabilité
de l'assuré ». La conséquence de ce texte est de bloquer l'indemnité d'assurance entre les

736
- la loi du 28 mai 1913 sera la première à obliger l’assureur à verser l’indemnité d’assurance à la
victime.
- Voir Loi du 13 juillet 1930 relative au contrat d'assurance.
737
Ar.54, al.1. du Code CIMA.
738
Art.72, CAM.

298
mains de l'assureur et seulement au profit de la victime. Bien que ce texte ne reconnaisse pas
expressément une action directe à la victime, la doctrine et la jurisprudence y voient sa
reconnaissance implicite739. En France, c’est au bout d’un long processus jurisprudentiel et
législatif que l’action directe contre l’assureur a été pleinement reconnu aux victimes740.

608. L’action directe est d’abord soumise à des conditions (1). Il est nécessaire par ailleurs
que l’on s’attarde sur les effets de l’action directe (2)

1) Les conditions de l’action directe

609. Par son fondement, l’action directe est une action en réparation du dommage subi par
le tiers victimes, ce qui explique son régime quant aux personnes qui peuvent agir, et envers
qui l’action est menée. Le défendeur à l’action directe ne peut être que l’assureur de l’assuré
responsable du fait dommageable. Le demandeur à l’action directe est le tiers lésé, à savoir la
victime du dommage causé par l’assuré. Il est important d’assimiler à la victime toutes les
personnes qui lui sont subrogées741.

610. Pour exercer l’action directe, la victime doit être créancière d’une indemnité de
réparation : cette condition absolument fondamentale suppose qu’il soit établi que l’assuré est
personnellement responsable du dommage subi par la victime et qu’il n’ait pas préalablement
indemnisé la victime. Le succès de l’action directe de la victime contre l’assureur nécessite en
outre que la victime rapporte en plus de la preuve de son droit à réparation contre l’assuré, la
preuve de l’obligation de garantie de l’assureur, en autrement dit, l’existence d’une dette

739
L’arrêt du 28 mars 1939 la Cour de cassation en question affirmait : « si l'action de la victime d'un accident
contre l'assureur est subordonnée à l'existence d'une convention passée entre ce dernier et l'auteur de l'accident,
et ne peut s'exercer que dans ces limites, elle trouve, en vertu de la loi son fondement dans le droit à la
réparation du préjudice causé par l'accident dont l'assuré est reconnu responsable »
740
L’article L.123’3 du Code des assurances françaises dispose que : « Le tiers lésé dispose d'un droit d'action
directe à l'encontre de l'assureur garantissant la responsabilité civile de la personne responsable ». Cette
disposition est un alinéa inséré au Code à travers la Loi n°2007-1774 du 17 décembre 2007 portant diverses
dispositions d’adaptation au droit communautaire dans les domaines économiques et financiers.
741
Il peut s’agir de victimes par ricochet, invoquant un préjudice corporel mais aussi leurs ayants droits qui
trouvent en cas de décès l’action de la victime dans la succession. Il peut aussi s’agir d’organismes subrogés aux
victimes ou de leurs ayant droit, notamment les tiers payeurs de la victime d’un dommage corporel dont la loi
Badinter a déterminé les conditions et les limites du recours subrogatoire. Voy. Y. LAMBERT-FAIVRE, S.
PORCHY-SIMON, op. cit., p.603.

299
d’indemnité à la charge de l’assureur742. En effet, ces éléments sont les supports
indispensables de l'action directe, dans lesquels elle puise sa source et trouve son fondement.

Ainsi trois arrêts de la chambre civile du 13 décembre 1938 précisaient ces éléments en ces
termes : « L’exercice de l’action directe exige nécessairement, en l’absence d’un texte
contraire, la présence de l’assuré aux débats lorsque, dehors de toute reconnaissance de la
responsabilité par l’assureur, aucune condamnation n’est préalablement intervenue contre
lui, à effet de fixer contradictoirement entre les parties d’abord l’existence de la créance de
réparation et son montant, en second lieu l’indemnité due par l’assureur et que ce dernier
sera tenu de verser jusqu’à due concurrence entre les mains de la victime »743

611. De ce qui précède la mise en cause de l’assurée pouvait avoir lieu soit que la victime
n’ait pas préalablement intenté une action contre lui, soit qu’ayant agi uniquement au pénal,
les tribunaux répressifs n’aient pas statué sur les intérêts civils qui restent à déterminer. Dans
cette hypothèse, l’autorité de la chose jugée au pénal s’impose au civil mais avec des
nuances : le fait que la victime ait été reconnue coupable d’une faute au pénal n’exclut des
responsabilités partagées au civil ; en revanche si la décision pénale établit que l’assuré n’a
commis aucune faute, il peut néanmoins être condamné au civil744.

612. En droit français, la Cour de cassation a abandonné cette exigence de la mise en cause
préalable de l'assuré par deux arrêts. Dans un important arrêt rendu par la première Chambre
civile, le 7 novembre 2000, au visa de l'article L.124-3 du Code des assurances, la Haute
juridiction est revenue sur sa jurisprudence traditionnelle en énonçant que « la recevabilité de
l'action directe n'est pas subordonnée à l'appel en la cause de l'assuré par la victime »745
complétant l’évolution amorcée par l’arrêt du 29 février 2000 où il était précisé que l’assuré
responsable pouvait être mis en cause soit par la victime, comme il était de tradition, soit par
lui-même ce qui constitue en effet un fait nouveau746.

742
Voy. Civ., 2e, 18 décembre 2008, n° 08-12041 ; Civ. , 2e, 19 juin 2008, n° 07-19185 : « l’assureur de
responsabilité ne peut être tenu à garantie envers la victime que lorsque la responsabilité de son assuré est établie
et que le risque est garanti par la police ».
743
Civ., 13 décembre 1938, D.P., 1939, I, p. 33, note M. PICARD
744
Voy. art 1242 du Code civil.
745
Voy. Civ., 1e, 7 novembre 2000, n° 97-22582, Bull. Civ., I, n° 274. Voy aussi Civ., 1ère, 18 décembre 2001,
n° 99-10298 ; Civ., 1ère, 27 janvier 2004, n° 02-12972.
746
Y. LAMBERT- FAIVRE, S. PORCHY-SIMON, op. cit., n°642

300
613. Il faudra préciser que l’assureur ne peut être que débiteur d’une obligation de garantie
il ne peut en aucun cas être responsable personnellement du préjudice. L'action directe est
soumise à la prescription de droit commun. En effet, la prescription de l’action en
responsabilité du tiers contre l’assuré responsable empêche à la victime d’exercer son action
directe contre l’assureur de celui-ci. Autrement dit l’action directe est calquée sur le délai de
prescription applicable à l'action en responsabilité de la victime contre l'auteur du dommage.
L'action directe est donc en principe soumise à la prescription décennale en France,
quinquennale au Bénin et en Mauritanie. En conséquence, dès que l'action en responsabilité
est prescrite, l'action directe l'est-elle aussi.

Ce phénomène peut se produire en cas de payement direct de la créance de réparation


par l’assuré. Par cette compensation, la victime ne peut que perdre son droit à l’action directe
contre l’assureur. La victime n’a de toute évidence pas le droit de cumuler l’indemnisation de
l’assuré responsable et celle de l’assureur. La Cour de cassation considère qu’assureur et
assuré sont tenus in solidum, car si leurs dettes ont des causes différentes, c’est-à-dire le
dommage ou le contrat d’assurance, toutes deux tendent à l’extinction d’une seule et même
créance qui est la réparation du préjudice de la victime747. Toutefois, il existe un cas où
l’action directe de la victime pourra subsister malgré l’extinction de l’action en responsabilité.
Tel est le cas lors d’une indemnisation partielle du tiers victime par l’assuré responsable. Par
le jeu de l’action directe, le tiers victime est en droit de réclamer le restant de l’indemnisation
par le mécanisme de la mise en œuvre de la garantie due par l’assureur.

614. Lorsque les conditions de l’action directe sont réunies, l’action directe peut produire
des effets.

2) Les effets de l’action directe

615. L'action directe a pour objectif fondamental l'attribution de l'indemnité d'assurance à la


victime elle-même, avec pour conséquence le passage direct l'indemnisation entre les mains
de la victime sans transiter par le patrimoine du responsable, ce qui élimine évidemment le
risque de souci des autres créanciers de celui-ci. Ainsi la victime (comme d'ailleurs les autres

747
Y. LAMBERT- FAIVRE, S. PORCHY-SIMON, op. cit., n°674.

301
bénéficiaires de l'action directe) n'a pas seulement droit de préférence sur l'indemnité. Elle a
sur celle-ci un véritable droit d'exclusivité. Ce droit se trouve garanti par le système du
blocage organisé par l’article 53 précité. Par conséquent, tant que la victime n'a pas été
indemnisée, l'indemnité d'assurance est bloquée, immobilisée, entre les mains de l'assureur
qui ne peut s'en dessaisir qu'au profit du tiers lésé. La Cour de cassation française avait déjà
eu l’occasion de juger que la victime d'un dommage a un droit exclusif sur l'indemnité due par
l'assureur de l'auteur responsable du dommage748.

616. En accordant à la victime la possibilité d’agir directement contre lui, si les conditions
de l’action directe sont remplies, l’assureur sera obligé de réparer son préjudice. Mais
contrairement à l’assuré responsable, qui doit réparation intégrale à la victime, l’assureur ne
sera débiteur que dans la mesure de l’indemnité née du contrat d’assurance. A ce titre on
estime que la victime n’invoque que la garantie dont l’assuré lui-même dispose. C’est ainsi
que l’assureur béninois, conformément aux dispositions de l’article 10 du Code CIMA peut
opposer au porteur de la police et au tiers qui en invoque le bénéfice, les exceptions qu’il
pourrait opposer à l’assuré. Le CAM a opté pour la solution inverse dans la mesure où seul le
défaut de payement de la prime par l’assuré est opposable à la victime749.

On peut rajouter à cette exception celles dont les causes sont postérieures à la
réalisation du sinistre, comme par exemple, la résiliation, la suspension ou encore la réduction
de l'indemnité dont les conditions ne sont réunies qu'après le fait dommageable 750. Ce sont
aussi, des déchéances frappant l'assuré pour inexécution postérieure à l'accident, d'une
obligation lui incombant, comme le défaut de déclaration du sinistre à l'assureur, comme le
défaut total de transmission des pièces des évaluations dolosives… En revanche, seront
inopposable à la victime les exceptions nées postérieurement à la survenance du dommage.
L’article 52 du Code CIMA consacre l’exception en énonçant expressément : « Les polices
d’assurance garantissant des risques de responsabilité civile doivent prévoir qu’en ce qui
concerne cette garantie aucune déchéance motivée par un manquement de l’assuré à ses
obligations commis postérieurement au sinistre ne sera opposable aux personnes lésées ou à

748
Voir. cass., civ. 2°, 15 mai 2008, pourvoi n° 06-19.737, F-D, commenté au JAC n° 85, juin 2008 et
Procédures 2008, comm. 213.
749
« Ne sont pas opposables aux victimes ou à leurs ayant droits les limitations et les exclusions de garanties,
les réductions d'indemnité, ainsi que les déchéances à l'exception de la suspension régulière de la garantie pour
non-paiement de prime » art.166, CAM.
750
Art.166, CAM.

302
leurs ayants droit. Elles ne doivent contenir aucune clause interdisant à l’assuré de mettre en
cause son assureur ni de l’appeler en garantie à l’occasion d’un règlement de sinistre ».

617. Le droit à l’indemnité ne peut être affecté par une cause de déchéance encourue
personnellement par l’assurée pour l’inobservation des clauses de la police faite
postérieurement au dommage. Bien qu’il ne doive plus sa garantie à l’assuré, l’assureur doit
néanmoins réparation à la victime tout en disposant d’un recours contre l’assuré échu.

Il est indéniable que le mécanisme de l’action directe est d’une très grande importance pour la
protection des victimes. Toutefois, même s’il offre aux victimes une garantie de la solvabilité
des responsables à travers les assureurs, le problème n’est pas totalement résolu pour diverses
raisons : défaut d’assurance même si elle est obligatoire, exclusion de risque pour le droit
CIMA

618. A l’issue de l’indemnisation, l’assureur sous certaines conditions peut subroger


l’assuré dans ses droits. Ce droit d’action de l’assureur envers l’auteur du dommage qu’il a
indemnisé porte le nom subrogation de l’assureur.

B- La subrogation de l’assureur

619. Dans son sens le plus général, le mot subrogation exprime l'idée de remplacement. Il y
a subrogation réelle quand une chose en remplace une autre dans un patrimoine ; subrogation
personnelle quand, une personne en remplace une autre comme créancière dans le rapport
d'obligation. La subrogation personnelle se présente dans le Code civil comme une modalité
de paiement. L’article 42 du Code CIMA ainsi que l’article 24 du CAM donnent de la même
manière à l’assureur un droit de subrogation légale de l’assuré contre le tiers responsable.
Pour ce faire, des conditions doivent être réunie (1). Une fois les conditions de la subrogation
traitées, on peut analyser les effets de celle-ci (2).

303
1) Les conditions de la subrogation

620. En droit mauritanien de même qu’en droit CIMA, la subrogation trouve son
fondement dans la loi. L’article 24, alinéa 1 du CAM et l’article 42 al.1 du Code CIMA
dispose que : « L'assureur qui a payé l'indemnité d’assurance est subrogé jusqu'à
concurrence de cette indemnité, dans les droits et actions de l'assuré contre les tiers qui, par
leur fait, ont causé le dommage ayant donné lieu à la responsabilité de l’assureur ». Il en
ressort que la subrogation légale dans les droits de l'assuré intervient de plein droit à l’issue du
règlement de l'indemnité. Ainsi, c’est le paiement de l'indemnité qui donne naissance à la
subrogation légale dans les droits de l'assuré751. Le recours exercé par l’assureur contre le tiers
responsable sera donc limité à la somme qu’il aura lui-même versée à son assuré752.

621. Les limites de l’obligation de payement de l’indemnité d’assurance se situent dans


l’alinéa 2 de l’article 42 du Code CIMA. Le texte prévoit que l’assureur peut être déchargé, en
tout ou partie de sa responsabilité envers l’assuré, quand la subrogation ne peut plus, par le
fait de l’assuré, s’opérer faveur de l’assureur753. Cette hypothèse est destinée au cas où
l’assuré disposait d’une action en responsabilité contre le tiers responsable et que cette action
a disparu par son fait. Puisque cette perte de recours provient de l’assuré, l’assureur pourra
alors être libéré en tout ou partie de son obligation de paiement de l’indemnité d’assurance à
l’assuré. L’article 42 du Code CIMA comme cela a toujours cours légal en Mauritanie754,
avait prévu que l’assureur n’avait pas en principe d’action subrogatoire lorsque le tiers
responsable du dommage était un proche de l’assuré. Le fondement de l’exclusion peut
résider dans le fait que, dans la pratique, l’assuré agit rarement en responsabilité lorsque le
tiers auteur du dommage est un même de famille. Si le fondement se révèle exact pour les
parents et alliés de l’assuré, la solution contraire existe en ce sens que lorsque le tiers

751
Une jurisprudence à cet effet rappelle qu’il ne peut y avoir de subrogation légale que si l’assureur a payé en
vertu d’une obligation de garantie Voy. notamment, Civ. 2ème, 5 juillet 2006, n° 05-11729,
752
Ne sutor super crepidam ! (que le cordonnier ne juge pas au-delà de la chaussure). V. N. LAURENT, Ombres
et lumières sur la règle nemo contra se… en droit des assurances, RGDA 2003, p.23 et s, cité par B. BEIGNIER,
S. B-H. YAHIA, op. cit., p.620.
753
V. article. 24, al.2. CAM.
754
V. art.24, al.3 « Par dérogations aux dispositions, précédentes, l'assureur n'a aucun recours contre les
enfants, descendants, ascendants en ligne directe, préposés, employés ou domestiques, et généralement toute
personne vivant au foyer de l'assuré, sauf le cas de malveillance commis par une de ces personnes ».

304
responsable du dommage est un préposé notamment lorsqu’il s’agit d’une faute,
intentionnelle, commise par un employé ou un domestique. C’est pour quoi une exception a
été apportée à la disposition en question. Il s’agit de la malveillance.

622. Dans sa nouvelle version, l’article 42 ne tient plus compte de la qualité de défendeur à
l’action subrogatoire. La suppression du dernier alinéa de l’article 42 signifie que désormais,
le recours subrogatoire de l’assureur peut s’exercer contre tout tiers, qu’il soit proche ou non
de l’assuré ; peu importe que ce dernier ait causé le dommage par malveillance ou par simple
négligence.

En second lieu, le procédé de la subrogation suppose un tiers débiteur du fait du préjudice


dont il est l’auteur au détriment de l’assuré. Il suffit donc que la responsabilité du tiers soit
engagée, peu importe le fondement juridique : sa responsabilité peut être civile ou
contractuelle.

623. Le recours subrogatoire est exercé par l’assureur contre toute personne qui, par son
fait, a causé le dommage ayant entrainé la responsabilité de l’assuré. Les dispositions des
alinéas premiers de l’article 42 du Code CIMA et 24 du CAM visent indistinctement le fait
fautif ou non du tiers responsable. Toutefois le CAM accorde à certaines personnes une
immunité sous certaines conditions. En effet, l’art 24 alinéa 3 dispose que : « … l'assureur n'a
aucun recours contre les enfants, descendants, ascendants en ligne directe, préposés,
employés ou domestiques, et généralement toute personne vivant au foyer de l'assuré, sauf le
cas de malveillance commis par une de ces personnes ». La même disposition ayant été
appliquée par le Code CIMA a été abrogée depuis. La nouvelle rédaction du Code CIMA755 a
mis fin à cette situation par la suppression de la référence au fait du tiers. Désormais en droit
CIMA, le recours subrogatoire peut être exercé contre toute personne responsable, que ce soit
de son seul fait, ou du fait du fait des choses dont elle a la garde. Il suffit donc à l'assureur de
prouver son paiement par tout moyen : accusé de réception de l'assuré, quittance, voire même
débits bancaires756...

624. Les assureurs ne sont pas les seuls dotés de ce droit de subrogation, car la sécurité
sociale ou les Fonds de Garanties757 peuvent aussi poursuivre le responsable du dommage ou

755
V. Les modifications des 22 avril et du 15 décembre 1999.
756
Il n’est pas nécessaire que le payement ai été fait entre les mains de l’assuré lui-même pour que l’assureur
puisse jouir de son droit de subrogation. V. Cass.civ.1 ère, 6 janv.1981, RGAT, p.509, note A. BESSON.
757
En France, l’action subrogatoire est aussi ouverte aux :

305
son assureur pour le remboursement frais lié à des soins pour son assuré. A ce titre, Après
avoir versé des prestations à la victime d’un accident, la Sécurité sociale réclame au
responsable des dommages (ou à son assureur) le remboursement des sommes qu’elle a
payées. Cette procédure s’applique en particulier aux accidents de la circulation.

Il faut préciser que toutes les personnes ne bénéficient pas de l’action subrogatoire. En effet,
l’exception majeure au principe de la subrogation figure dans les articles 57 du Code CIMA et
74 du CAM qui disposent tous les deux que : « Dans l'assurance de personnes, l'assureur,
après paiement de la somme assurée, ne peut être subrogé aux droits du contractant ou du
bénéficiaire contre des tiers à raison du sinistre ». Ainsi, l’assurance de personnes échappe à
la subrogation758.

2) Effet de la subrogation

625. L’effet naturel de la subrogation est la transmission comme le dispose la loi des droits
et actions dont dispose l’assuré. Ainsi, l’assureur étant subrogé dans les droits de l’assuré
contre le tiers responsable, son recours se trouvera soumis aux règles qui étaient applicables à
son assuré. Il en est de même pour les règles de compétence. Certes les règles applicables sont
ceux du droit commun dans la mesure où il s’agit d’une action en responsabilité qui concerne
les rapports de l’assuré et du tiers responsable du dommage. L'action de l'assureur contre le
tiers responsable doit se prescrire de la même manière et dans le même délai que celle de
l'assuré.

626. Outre la subrogation légale, la subrogation peut être conventionnelle. Elle doit juste
être stipulée dans le contrat et son application doit être précédée du payement de l’indemnité.
En France la jurisprudence a admis en matière d’assurance de choses la cumulation la

- Fonds de de Garantie des Assurances Obligatoires ;


- Fonds de de Garantie des Victimes des Actes de Terrorisme et d’Autres Infractions ;
- Fonds de de Garantie des Assurés Contre la Défaillance des Sociétés d’Assurance des Personnes ;
- fonds d’indemnisation des victimes de l’amiante. V. B. BEIGNIER, S. B-H. YAHIA, op.cit., 609.

758
Cass. civ. 1ère,17 mars 1993, n°91-13438, Bull.civ.I, n°113 ; Cass.civ.1ère ,16 mai 1995, n°93-17193,
bull.civ.I, n°205, RGAT, 1995.p.645 note J MAURY.

306
subrogation légale et conventionnelle759. Par ailleurs, l’assureur peut de manière expresse
dans la police d’assurance renoncer à cette faculté et ce, moyennant une prime. Cette
renonciation peut concerner une personne en particulier ou tout simplement ou tout tiers
responsable. S’abstenir de poursuivre le tiers responsable peut être assimilé à une renonciation
tacite par l’assureur de son action subrogatoire.

627. Une distinction doit être faite entre la subrogation partielle et la subrogation totale.
L’indemnisation totale de l’assuré, par l’assureur fait perdre à l’assuré son droit de recours
contre le tiers responsable. Cette perte de droit est fondée sur le fait que l’assuré ayant été
indemnisé par l’assureur n’a plus qualité pour agir en raison de la subrogation.

En cas indemnisation partielle, le recours de l’assureur contre le tiers responsable est limité au
montant de l’indemnité qu’il a versé à l’assuré. L’assuré dispose toujours de ses droits contre
le tiers responsable pour la part du dommage qui n’a pas été indemnisée760.

Il y’aura dans ce cas une possibilité de concours entre l’assuré et l’assureur sur le patrimoine
du tiers responsable, chacun pour la part du dommage non indemnisé.

En l’absence de solution dans nos législations, il faut préconiser qu’un droit de préférence soit
accordé à l’assuré car il demeure celui qui a subi un dommage761

628. Les modes alternatifs de règlement des conflits sont divers et variés et n'ont pas tous la
même portée ou la même procédure. L’adage selon lequel « un mauvais arrangement vaut
mieux qu’un bon procès » en dit long sur les atouts des modes conventionnels de règlement
des litiges en matière d’assurance. Le temps et le coût des procédures sont perçus comme des
éléments déterminants. Parmi les divers modes de règlement des litiges que nous avons vus,
seul l’arbitrage constitue une solution comparable aux procédures judiciaires en ce qu’il
permet que, pour tout type de litige, une décision soit rendue avec force exécutoire pour les
parties. La procédure judiciaire étant dans certaines circonstances incontournable expose les
parties aux réalités de la justice en Afrique : lenteur, manque de moyens et d’hommes
compétents…

629. Il est à retenir que la subrogation et l’action directe sont rigoureusement encadrées par
la loi qui fixe leurs champs d’application et leurs domaines d’exercice. La subrogation légale

759
Cass., 1re civ., 9 déc. 1997, n° 95-19.003.
760
Cette situation découle généralement d’une sous assurances.
761
A-M. ASSI-ESSO, J. ISSA-SAYEGH et J. LOHOUES-OBLE, op. cit,. p. 277.

307
et l’action directe ne s’impose pas à l’assureur ou à l’assuré. Il s’agit d’une simple faculté que
les législateurs offrent aux parties.

308
Conclusion chapitre II

630. A propos de la procédure d’indemnisation existant dans l’espace CIMA ou encore en


Mauritanie, on peut dire que ce sont les conséquences désastreuses des accidents sur les
victimes qui ont poussé les législateurs à l’amélioration des conditions de l’indemnisation.

En contrepartie, pour garantir la situation financière, la réparation, la réparation est devenue


standardisée.

631. Il est à noter la présence de certaines imperfections concernant la procédure. On peut à


ce titre citer le cas des victimes exclus du domaine d’application de l’indemnisation.

Si la procédure de l’indemnisation ainsi que le règlement des litiges de manière amiable, sont
est bien assimilés par les protagonistes, cela permettrait à coup sûr de désengorger les
tribunaux.

Conclusion titre I

632 Il a été question tout au long de ce titre d’étudier le régime juridique des assurances et
la pratique de l’indemnisation. Pour y parvenir, nous avons d’abord analysé le contrat
d’assurance qui a été difficile à appréhender en ce sens qu’il est un contrat très spécial762. Cela
tient notamment en ce qu’il est le support juridique d’une opération technique à savoir le
contrat d’assurance. Le but des législateurs est celui de rendre l’acte le plus clair possible pour
éviter que celui-ci ne soit biaisé.

633. Ensuite, il a fallu aborder les obligations des parties dont le non-respect peut dans
certains cas se révéler lourd de conséquence pour l’une ou l’autre des parties. Autrement dit,
l’inexécution de certaines obligations par les parties peut aboutir à des difficultés opposant
l’assureur et le souscripteur d’où le recours à des modes de règlements ou en dernier ressort le
recours aux tribunaux.

762
V. L. MAYAUX, « Qu’est-ce qu’un contrat d’assurances ? », in Les grandes questions du droit des
assurances, n°1 et s.

309
Si le législateur a veillé à ce que toute la vie socio-économique soit légiférée en
matière d'assurance, il reste que les acteurs eux-mêmes (courtiers, assureurs…) doivent
contribuer par des politiques d’assimilation, et de vulgarisation de certains aspects de ce droit.

Pour ce qui est de l’indemnisation, les dispositifs légaux de la CIMA et du CAM sont
à quelques exceptions près des reproductions de la loi BADINTER.

634. A l’heure actuelle, on ne constate pas un mimétisme en matière de sécurité soutière,


puisque celle-ci occupe une place fondamentale dans les politiques gouvernementales
françaises, ce qui est loin d’être le cas au Bénin et en Mauritanie.

Aussi, si le Fonds de Garanties Automobiles n’est plus une utopie comme en Mauritanie, des
efforts considérables sont à faire pour sa viabilité dans la zone CIMA.

635. L’examen de la deuxième partie portant sur l’organisation, la pratique, et le


fonctionnement des assurances ne serait pas complet si après avoir étudié le régime juridique
et la pratique de l’indemnisation, les modèles, l’état des lieux, les perspectives et les
alternatives n’étaient pas pris en considération.

310
Titre II :

Etat des lieux et potentialités du marché africain de l’assurance

636. En plus de ses richesses abondantes, c’est sa grande diversité humaine, linguistique,
culturelle, juridique, ou encore monétaire qui font de l’Afrique un continent particulier. Le
lien qui unit ce continent à l’occident date de plusieurs siècles. En effet, l’Afrique aura été
traversée par toutes les grandes mutations et évolutions observées en occident sur le plan
politique, juridique ou économique. C’est compte tenu de l’effet d’entrainement que le
marché de l’assurance se veut totalement connecté au marché mondial via le modèle
occidental. En somme, l’Afrique est en quête de nouvelles opportunités de croissance en
matière d’assurance et souhaite profiter d'un marché en plein développement.

637. Nous allons aborder cette étape de l’étude à travers deux axes. Primo, nous allons
étudier en guise de modèle de réussite, les deux pays les plus remarquables en matière
d’assurance afin de dresser un état des lieux du secteur (Chapitre I). Nous allons ensuite,
mener une réflexion sur des alternatives au développement de l'assurance (Chapitre II). Cette
ultime étape de la thèse nous permettra d’envisager des alternatives ou alors une réorientation
des politiques et objectifs en matière d’assurance.

311
Chapitre I : Des modèles de réussite et l'état des lieux du marché.

638. Malgré le besoin de sécurité des biens et des personnes, le secteur des assurances en
Afrique est sans conteste l’un des moins développés au monde. Le secteur demeure encore
dans certains pays africains à l’état embryonnaire. Au sein du contient, sur divers plans,
l’Afrique du Sud et le Maroc font partie des pays les plus dynamiques. Cependant c’est dans
le secteur de l’assurance que ces deux pays tirent leur épingle du jeu. Ils nous serviront de
modèles de réussite (Section I).

639. Au courant de l’année 2013, la somme des cotisations collectées sur l’ensemble du
continent dans le cadre de contrats d’assurances s’élevaient à 72 milliards USD, soit à peine
1.55% des cotisations d’assurances collectées dans le monde763. Le total des cotisations
mondial s’élevait à 4 110 milliards de dollars US. Pire encore, la répartition par pays est très
différenciée, dans la mesure où ce ne sont pratiquement que quatre pays : l’Afrique du Sud,
qui cumule 80%, puis l’Algérie, ensuite le Maroc et la Tunisie qui concentrent 10%, qui le
réalisent, tandis que les 10 % restants s’éparpillent sur le reste des pays africains. Au regard
d’une telle configuration, il s’agit d’un marché où tout reste à faire et que par conséquent les
potentialités sont immenses. Pour expliquer ce déséquilibre, nord sud, un état des lieux du
secteur s’impose (Section II)

Section I : Deux modèles de réussite en Afrique

640. Le développement exceptionnel du secteur de l’assurance dans deux pays africains


mérite une attention particulière. Ils représentent à eux seuls 80% de part de marché dont 75%
pour l’Afrique du Sud et 5% pour le Maroc avec une population de 32 millions d’habitants764
Nous allons nous intéresser au géant Sud-africain pour sa position de leader du marché de
l’assurance (Paragraphe I) et à l’exemple marocain par son dynamisme et sa fiabilité
(Paragraphe II).

763
Ce chiffre provient des statistiques de 2013, fournies par l’Organisation des assurances africaines (OAA)
764
Hebdomadaire, Les Afriques.com, n° 276 Edition du 30 mai 2014. Dossier : Le secteur des assurances
africain Entre potentiel et contraintes des risques. V. http://www.lesafriques.com/dossier/le-secteur-des-
assurances-africain-entre-potentiel-et-contraintes-des-ri-4.html?Itemid=308?articleid=41013, consulté le
07/09/2017.

312
Paragraphe I : Le géant Sud-africain

641. L’Afrique du Sud dispose d’une infrastructure économique, juridique et matérielle


bien développée, qui constitue la base même et d’une croissance économique stable et d’un
système assuranciel solide. Partie intégrante des moteurs de l’économie africaine, c’est dans
le domaine de l’assurance que l’Afrique du Sud occupe sans conteste la position de leader.
Son volume de cotisations représente 90 % des cotisations vie et 50 % des cotisations non-vie
du continent765. L’influence anglo-saxonne à travers la commun-law comme source de droit
(A) et l’organisation de son marché de l’assurance (B) sont essentiellement à l’origine de sa
position dominante en matière d’assurance dans le continent.

A- Le bi juridisme sud-africain

642. Le premier navigateur européen à franchir concrètement le cap de Bonne-Espérance


est le portugais, Vasco DE GAMA, en 1497. Pour autant, les autorités portugaises n’ont pas
décidé de coloniser l’Afrique du Sud. L’Afrique du Sud a connu deux phases de colonisation :
d’abord occupée par les Hollandais766, l’arrivée des britanniques en 1795 va bouleverser le
système mis en place

643. Avant d’aborder la Commun law, il est important de rappeler qu’elle est née en
Grande-Bretagne. C’est plus tard, lorsque cette puissance deviendra colonisatrice qu’elle va
exporter l’exporter hors de ses frontières, en l’occurrence en Afrique. C’est donc à travers
deux évènements importants historiques que la Grande-Bretagne va introduire son droit dans
ses colonies africaines il s’agit : de la colonisation puis des échanges commerciaux.

644. L’arrivée des Anglais au Cap et surtout le passage de cette colonie sous sa domination
culturelle, sera suivi de vives tensions Anglo-Hollandais vu la position stratégique et les
atouts économiques de l’Afrique du Sud. Petit à petit, les anglais occupent les territoires. On
assiste à une anglicisation dans la mesure où l’élite sud-africaine est fascinée par ce système

765
http://revue-risques.fr/revue/risques/html/Risques_71_0021.html, consulté le 17 septembre 2017.
766
En 1652, les Hollandais sont les premiers colons en Afrique du Sud.14 Ils occupent le Cap de Bonne
Espérance et y introduisent leur droit d’origine, sous forme de coutumes, de lois, de décisions judiciaires et de
doctrine.

313
au point d’aller étudier le droit anglais. En fin de compte, les anglais l’emportent sur les
hollandais au XXIe siècle, le Cap passe sous la domination totale de l’Angleterre. Cependant
l’Acte de Capitulation prévoit la continuation de l’application du système juridique hollandais
déjà en place. Le droit romano-hollandais s’enracina donc dans tout le pays jusqu’à la
formation par les anglais de l’Union de l’Afrique du Sud en 1910, sous le contrôle du South
Africa Act767. Ils s’appuient sur un arrêt de la chambre des Lords de 1774 « Les lois d’un pays
conquis restent en vigueur jusqu’au moment où elles sont modifiées par le conquérant »768.

645. Le système juridique sud-africain est mixte en ce sens qu’il est basé sur le droit des
deux pays l’ayant successivement colonisé. Du coup, son droit est influencé par le droit
romano-néerlandais769 et la Commun Law770. L'influence britannique est apparente dans les
aspects procéduraux du jugement, et l'influence romano-germanique est présente en droit des
contrats, en droit délictuel, en droit de la personne, des choses, de la famille,
etc. Contrairement à la plupart des autres systèmes de Common Law, le droit des affaires sud-
africain n’a quasiment subi aucune codification771. Il repose principalement, voire
exclusivement sur le principe du respect des précédents c’est-à-dire stare decisis et sur la
doctrine. Cette doctrine est très proche du modèle des principes de la Common Law anglaise
du droit des affaires772. La règle de stare decisis (règle du précédent) est omniprésence dans le
droit Sud-africain, ce qui caractérise en d’autres termes l’influence du système de la Common
law dans le régime juridique de ce pays. Cette règle représente la première grande distinction

767
Loi adoptée par le parlement britannique en 1909 et qui établissait la formation du dominion appelé Union
sud-africaine entre les colonies britanniques du Transvaal, du Cap, de la rivière Orange et du Natal. Cette loi,
servira de Constitution sud-africaine jusqu'en 1961.
768
Arret Campbell-Hell. V. http://www.cours-de-droit.net/cours-de-grands-systemes-contemporains-c27646998,
consulté le 20 aout 2017.
769
Le droit romano-hollandais, en néerlandais Rooms-Hollands recht et en afrikaans Romeins-Hollandse reg, est
un système juridique de la tradition romano-civiliste basé sur le ius commune tel qu'il était appliqué
aux Provinces-Unies des Pays-Bas durant les XVIIe et XVIIIe siècles. Alors que le droit romano-hollandais fut
remplacé par le Code napoléonien aux Pays-Bas au début du XIXe siècle, il est toujours d'application dans les
juridictions sud-africaines (et chez ses voisins dont le Lesotho, le Swaziland, la Namibie, le Botswana et
le Zimbabwe), au Guyana, en Indonésie, au Timor oriental et au Sri Lanka. Le droit écossais s’est aussi inspiré
du droit romano-hollandais. Voir : https://fr.wikipedia.org/wiki/Droit_romano-n%C3%A9erlandais
770
Jacques E. Du Plessis, South Africa, Elgar Encyclopedia of Comparative Law, Great Britain: Edward Elgar
Publishing (2006), p. 668.
771
Jacques E. Du Plessis, South Africa, Elgar Encyclopedia of Comparative Law, Great Britain: Edward Elgar
Publishing (2006), p. 669; Les Codes adoptés à ce jour n’ont aucun lien avec le sujet de cette étude. IL s’agit du
Bills of Exchange (Bills of Exchange Act 66 of 1955), le droit des sociétés (Company Law Act 61of 1973).
B. WUNSCH, C.L. WULFSOHN, South Africa, Remedies for International Sellers of Goods [2008] – II,
772

Dennis Campbell (ed), Johannesburg: Yorkhill Law Publisher (2008), p. III/227.

314
élaborée par les décisions judicaires entre les systèmes de la Common Law et les systèmes de
droit civil fondés sur un Code ou sur des écrits

646. Dans le système de la Common Law anglaise et sud-africaine, deux aspects


fondamentaux constituent la stare decisis :

- La décision du juge résout le litige entre les parties et cette décision peut
éventuellement créer une règle générale de droit773,

- les décisions des juridictions supérieures lient les juridictions inférieures.

En ce qui concerne le premier aspect de la règle du précédent, les décisions judiciaires


ont force de loi. Les textes juridiques et les jugements sont des pratiques communes dans
toute décision judiciaire. Cependant, cette pratique n’est pas identique dans le cas de décisions
judiciaires sud-africaines ne se référant qu’à la doctrine774. L’absence de législation ainsi que
le rôle très mineur que joue la législation qui existe, expliquent cette particularité dans les
décisions sud-africaines. Dans certaines branches du droit, telles le droit public, le droit social,
ou encore le droit commercial, il n’existe quasiment aucune législation. Par contre, dans
certaines branches du droit privé, malgré leur rôle très limité, les législations ont été adoptées
dans les domaines du droit de la famille et de la personne, du droit des biens et des
successions775.

En règle générale, en cas d’absence de législation dans un domaine du droit, il est


conclu que le législateur ne voulait changer la Common Law 776. Cette prise de position du
système de la Common Law romano-hollandais freine l’évolution et le développement de sa
jurisprudence. Néanmoins, on peut considérer que l’évolution du droit des affaires en pratique
est très évolutive777.

647. Concernant le second aspect de la stare decisis, son application est absolue. Les

773
Dans le système de Common Law, système fondé sur la doctrine du précédent judicaire, la règle de droit est
créée par les jugements rendus par le juge. Ce système est basé sur la jurisprudence qui définit et interprète les
règles de droit. Par opposition au droit civil qui est fondé sur la définition de la règle de droit par le parlement à
travers des lois, le règlement ou la codification des règles.
774
Les juridictions de Common Law romano-hollandais se référent aux principes de droit du droit dans romain
comme l’institut de Justinian et de digest and les auteurs, juristes du 15 e siècle tels que Grotius et Voet. Voir :
http://www.institut-idef.org/IMG/pdf/JA_PENDA_Common_Law_Afrique.pdf p.11.
775
Schalk van der Merwe, LF van. Huyssteen, MFB Reinecke & GF Lubbe op.cit.p.24.
776
Schalk van der Merwe, LF van. Huyssteen, MFB Reinecke & GF Lubbe op.cit.p.26
777
GRAVESON, R. H. De l'influence de la Common Law sur les systèmes de droit civil existant dans le
Commonwealth britannique. Revue internationale de droit comparé 5.4 (1953) : 658-671, p. 666.

315
décisions de juridictions supérieures s’imposent non seulement aux juridictions inférieures
mais ces dernières ne peuvent non plus les contredire ; seule la législation a le pouvoir de
contredire des décisions des juridictions. La constitution de l’Afrique du Sud reconnaît
d’ailleurs explicitement une certaine liberté judiciaire en accordant au juge le « pouvoir
inhérent (…) de développer la Common Law »778

648. Le droit coutumier est non négligeable en dans le système juridique sud-africain. En
effet à l’instar de la Common Law elle est constitutionnellement reconnue comme étant source
du droit, au même titre que la Common Law, notamment dans les rapports interpersonnels
(droit civil, droit commercial et certaines infractions mineures).

Le recours à la pratique de l’arbitrage est assez répandu, en particulier dans les litiges relatifs
à l’assurance ou à l’immobilier. Le droit coutumier est constitutionnellement reconnu comme
source du droit, au même titre que la Common Law, notamment dans les rapports
interpersonnels (droit civil, droit commercial, certaines infractions pénales mineures) 779.

649. Le système sud-africain présente donc une réelle originalité du point de vue des
sources du droit. La présence du droit coutumier ajoute une touche supplémentaire
d’originalité à ce système de droit.

Dans son aspect actuel, le marché sud-africain devenu mieux structuré, avec
l'introduction de nouvelles législations. En effet, une classification opérée par le droit sud-
africain de l’assurance nous amène à distinguer principalement deux types d’assurances qui
sont régies par des lois différentes.

D’une part, il existe les assurances dites à court terme Cette assurance à court terme, concerne
de manière générale, les assurances de dommages. Elles sont régies par la loi 53 du 23
septembre 1998 relative aux assurances temporaires.
D’autre part, nous avons l'assurance à long terme régie par la loi 52 du 23 septembre 1998. Ce
type d’assurance est relatif à l’assurance vie et à ses différentes composantes.
La distinction des deux types d’assurances est consacrée par l’interdiction de l’une ou l’autre
type de société d’assurance (court terme, long terme) de procéder à une quelconque opération
d’assurance pour laquelle elle n’a pas été enregistrée780. L'inscription doit être faite auprès du
registraire des assurances.

778
Voy, Art. 173 Constitution Sud-Africaine.
779
Voir : http://legiglobe.rf2d.org/afrique-du-sud/2013/08/09/, consulté le 28 aout 2016.
780
Voir, Partie II, Section 7 de la loi n ° 53,du 23septembre 1998 sur les assurances à court en Afrique du Sud.

316
Il existe par ailleurs d’autres textes spécifiques à des branches ce sont :
- La Medical Schemes Act 1967 (MSA), qui réglemente certains accidents et des affaires
de la santé concernant la fourniture d'argent pour payer les frais médicaux.
- Loi sur les fonds de pension 1956, qui régit les pensions.
- Loi sur l'assurance-chômage de 2001781, qui régit l'assurance-chômage782.Elle fournit
une assurance chômage à court terme aux travailleurs éligibles. Elle verse des
prestations aux cotisants ou à leurs ayants droit en cas de chômage, maladie,
maternité, adoption ou décès.
- Compensation pour les blessures et les maladies professionnelles loi de 1993, qui
réglemente l'indemnisation des maladies et des blessures survenant dans le cadre de
l'emploi
- Loi sur le Fonds Accident de la route 1996, qui couvre les victimes d'accidents de la
route (dans certaines limites). Le Fonds Accident de la route en Afrique du Sud,
communément appelé RAF, est une assurance légale gouvernementale. Il fournit une
couverture en cas de sinistre survenu sur le territoire sud-africain à toutes les victimes
d’accident de la circulation impliquant un véhicule à moteur. Le fonds est financé par
les primes d'assurance par le biais d’une taxe comprise dans le prix du
carburant. Avant sa mise en place, en 1996, plusieurs tentatives d’introduction de
l’obligation d’assurance dans le domaine automobile (en 1942, en 1972 et en 1986)
sont restées sans succès.
650. Les organismes de réglementation que sont la STIA et LTIA établissent les bureaux
d'enregistrement de court terme et l'assurance à long terme. Le directeur général de la
Commission des services financiers (CSF) nomme chacun des registraires. Les bureaux
d'enregistrement, par le FSB, sont chargés de réglementer l'industrie de l'assurance.

Le FSB ne réglemente ni ne supervise le groupe d'assurance entière qui a en tant que


membre d'une filiale d'assurance autorisée en Afrique du Sud, mais la réglementation de la
filiale implique certaines obligations d'information et de responsabilisation pour les activités,
la solvabilité et le soutien financier par le groupe783.

781
Ce sont : la Unemployment Insurance Act, 63 de 2001 et la Unemployment Insurance Contributions Act, 4 de
2002.
Le taux de chômage en Afrique du Sud est l’un des plus élevés au monde, comparé à celui des pays à revenu
782

moyen Voy. H. BHORAT, Unemployment in South Africa: Descriptors and Determinants , Development Policy
Research Unit, University of Cape Town, 2009, p. 23
783
Reference: The executive officer of the Financial Services Board (FSB) appoints each of the registrars

317
651. En Afrique du Sud, il y a une liberté de contractuelle manifeste. En effet, les
stipulations contractuelles ne peuvent être considérées comme inapplicables que lorsqu’ elles
sont contraires à l'ordre public ou contreviennent à une disposition légale. C’est pour cette
raison que la loi sur l'assurance à long terme et loi sur l'assurance à court terme contiennent
des dispositions qui invalident certaines clauses dans les accords. Ces clauses peuvent être
relatives à une stipulation qui prévoit que l'assureur soit exonéré de toute responsabilité pour
les dommages, liés à une omission de l’assuré par exemple.
652. Les textes qui règlementent le secteur des assurances sont bien classifiés. En effet,
chaque domaine de l’assurance est régi par un texte spécifique. La classification des textes par
domaine n’influence nullement la liberté contractuelle. Une étude du marché sud-africain de
l’assurance s’impose après la présentation de son système juridique.

B- Le marché sud-africain de l'assurance

653. En Afrique du Sud, l’assurance a commencé avec la création de deux bureaux en


1826, il s’agit de United Empire and Continental Life Assurance Association et de l’Alliance
British and Foreign Fire and Life Insurance Company. Plus tard une entité locale, l'Afrique
du Sud, compagnie d'assurance, sera créée en 1831. La Société d'assurance-vie mutuelle du
Cap de Bonne-Espérance qui existe toujours verra le jour en 1845. La Lloyds a eu son
premier agent au Cap en 1850. A l’issue de ces diverses créations de compagnies, un marché
international et en plein essor sera développé, et à la fin du 19ème siècle, la colonie du Cap
avait déjà une cinquantaine d’assureurs étrangers offrant une couverture sur tout son
territoire.

En 1991, suite aux recommandations du comité Van der Horst, le Financial Service
Board sera créé. Elle aura pour mission d’encadrer et de réguler le secteur financier non
bancaire en Afrique du Sud.

L’organisme est essentiellement composé des services suivants :

- un département actuariat qui s’assure de la pertinence des valorisations financières


dans le secteur financier non bancaire domestique,

- un département en charge de développer et mettre en place un nouveau régime de


solvabilité aligné avec les standards internationaux,

- un département dédié à l’assurance.

318
Le département assurance se subdivise en sept services qui couvrent un large spectre de
domaines : il veille aussi bien au respect des assurés qu’à la bonne gouvernance des groupes
d’assurance. Il dispose en outre d’un service spécifique à la micro assurance, le MISD (Micro
Insurance Supervision Department), chargé de développer cette activité. En outre, la
supervision revêt un caractère crucial, face à un marché de l’assurance où les acteurs
régionaux et internationaux ont des positions très distinctes784.

654. La distribution de l’assurance se fait par tous les canaux possibles et l’Afrique du Sud
n’est pas en reste d’imagination en la matière, avec certains groupes à la pointe de
l’innovation. Parmi les particularités du marché sud africain, on peut noter la présence de très
nombreuses agences de souscription. Elles appartiennent le plus souvent à des sociétés
d’assurances qui préfèrent ainsi exterminer certaines de leurs souscriptions auprès de
spécialistes. En dommages, l’assurance des « risques politiques » (SRCC) est couverte dans le
cadre d’une société spécialisée (Sasria) bénéficiant en dernier ressort de la garantie de l’État.
En dehors de l’assurance crédit (avec la Coface), on note l’absence d’assureurs français sur ce
marché à fort potentiel mais, il est vrai, d’une autre culture. Les plus grands réassureurs
mondiaux ont implanté des filiales sur place, d’autres y ont de simples bureaux de
représentation.

655. De par sa puissance et son rayonnement, l’Afrique du Sud exerce une influence
économique majeure sur les pays anglophones et lusophones de la région. Il en est de même
en matière d’assurance, en raison notamment de la présence à Johannesburg des plus grands
courtiers d’assurances et de réassurance internationaux. C’est un marché développé et
libéralisé qui, en termes d’assurance, n’a rien à envier aux marchés européens.

Le marché de l’assurance de l’Afrique du Sud est d’un niveau mondial puisqu’il était en
2012 le 17ème marché mondial avec une part de marché de 1,2%. Le secteur de l’assurance,
au même titre que le secteur bancaire, est extrêmement développé, le pays affichant le 2 ème
taux de pénétration du marché le plus élevé au monde avec des produits très sophistiqués et
profitant de l’importance des échanges commerciaux entre l’Afrique du Sud et le reste du
monde qui sont générateurs de primes d’assurance. Si le marché dispose de plus de 100
opérateurs, il reste largement dominé par quelques conglomérats dont les plus importants

784
https://www.insurancespeaker-wavestone.com/2014/03/lafrique-du-sud-un-marche-assurantiel-florissant/,
consulté le 15septembre 2017.

319
comptent parmi les plus grands groupes mondiaux785.

656. Pourtant, il est en quelque sorte pas un marché mature ; une grande partie du pays est
pauvre, non bancarisées et non assurés ou insuffisamment assurés. L’inclusion financière est
limitée, et même ces politiques de base comme l’assurance automobile propriété de
responsabilité sont en option, ce qui est rare, même dans les pays en développement, en
Afrique et dans le monde.

En outre, le pays est encore marqué par des inégalités fortes : 2ème pays d’Afrique par le
nombre de milliardaires786 avec 63% des revenus détenus par les 20% les plus élevés, il souffre
en parallèle d’un taux de pauvreté non négligeable avec 47% de la population qui vit sous le
seuil de pauvreté avec un taux de chômage qui dépasse les 30%787.

657. Le marché sud-africain de l’assurance a la particularité d’être toujours ouverts aux


opportunités de développement. Ce marché ne se focalise pas uniquement sur les assurances
automobiles ou encore les assurances de dommages. Les assurances de personnes y occupent
une place de choix. Cette ouverture du marché et la diversité des assurances semble révéler les
avantages d’un marché réellement libéralisé. Pour la suite, l’exemple marocain et l’émergence
de la takaful nous seront d’une grande utilité dans notre quête du modèle adéquat.

Paragraphe II : L'exemple marocain et l’émergence de la Takaful ou assurance


islamique

658. Grâce à son fort potentiel, le Maroc occupe aujourd’hui la deuxième place du marché
africain de l’assurance, derrière l’Afrique du Sud, mais surtout devant le Nigeria et l’Égypte
qui disposent d’une économie plus développée et de plus comptent une population plus élevée

Nous allons étudier l’exemple marocain en abordant les assurances au Maroc (A), puis,
l'émergence de l'assurance islamique ou takaful (B).

785
V. Les Afriques.com, n° 276 Edition du 30 mai 2014.
786
V. Le figaro.fr, Afrique : déjà 55 milliardaires en dollars, édition du 8 octobre 2013.
787
V. en ce sens, lesechos.fr Edition du 13 février 2014, L’Afrique du Sud cherche à retrouver de la croissance
pour endiguer son chômage.

320
A- Les assurances au Maroc.

659. Il serait utile pour mieux comprendre la position actuelle du marché marocain de
l’assurance d’en rappeler les grandes lignes ou encore l’évolution historique (1).

Aujourd’hui le secteur de l’assurance au Maroc est caractérisé par un fort dynamisme entamé
durant les deux dernières décennies. Nous allons aborder l’importance de la banque assurance
au Maroc (2) afin de comprendre les modifications profondes opérées pour faire face à une
concurrence de plus en plus forte.

1) Evolution historique

660. L'assurance n'a pas toujours été une culture dans les pays de tradition musulmane. Le
Maroc n’échappe donc pas à cette règle788

En outre, au Maroc, le pouvoir d'achat limité de certaines couches de la population qui


considéraient l'assurance comme un luxe, réservé aux marocains de haut rang, constituait en
partie un véritable handicap au développement naturel du secteur789.

Cependant, la richesse du pays, la position géographique du Maroc suscitait l’intérêt de


nombreux états à vocation maritime de même que les assureurs790.

Les premières sociétés d'assurances maritimes (la Espagnola en 1879, la Centrale et la


Réparation en 1883, The Calpean maritime Insurance Ltd en 1887, la Manheim en 1886 et le
Lloyd Alleman en 1893) ayant couvert des risques au Maroc remontent à la seconde moitié du
19ème siècle et sont le fruit du régime des concessions étrangères en vertu du traité du 9
décembre 1856791 .

Une des conséquences de la seconde guerre mondiale a été la naissance de 23

788
Voir supra, n°26.
789
J. CHARBONNIER, Origine et développement des pratiques d’assurance en Afrique du nord, Thèse
Université de Lyon III juin 2004, p. 24.
790
J. CHARBONNIER, op. cit., p. 49
791
Voir, Traité de Tanger du 9 décembre 1856 conclu entre l'Angleterre et le Maroc, cité par H. ELHABBOULI
in, Le contrat d’assurance vie en droit comparé franco-marocain, Thèse, Université de Rennes mars 2015, p.11.

321
compagnies d'assurances entre 1941792 et 1951 dont le capital était en majorité étranger,
exception faite de la Royale Marocaine d'Assurances, créée en 1950 avec la participation de
capitaux marocains et la création en 1960 de deux compagnies "C.N.I.A." (la Compagnie
Nord-africaine et Intercontinentale d'Assurances) et "S.C.R." (Société Centrale de
Réassurance) avec la participation de l'Etat par l'intermédiaire de la Caisse de Dépôt et de
Gestion En 1958, 315 compagnies dont 25 de nationalité marocaine se partageaient un
montant global de primes de l'ordre de 150 millions de Dirhams793. Dès 1962, on ne comptait
plus que 219 unités. Ce mouvement s'est trouvé renforcé par l'institution en 1965 d'un
plancher d'encaissement d'un million de dirhams, que les compagnies devaient atteindre, au
plus tard en 1968, sous peine de retrait d'agrément. De ce fait, le nombre de compagnies est
passé de 130 à la veille de cette décision à 54 en 1970, 32 sociétés vers la fin de 1973 et à 27
sociétés vers la fin de 1975.

661. Le dernier fait marquant de l'histoire du secteur reste sans doute la liquidation de cinq
sociétés d'assurances (Arabia Insurance Company Morocco S.A., la Compagnie Atlantique
d'Assurances, la Réunion Marocaine d'Assurances et de Réassurances, la Renaissance et la
Victoire) en vertu des arrêtés du Ministre des Finances et des Investissements Extérieurs du
12 septembre 1995. La liquidation de ces sociétés, fait suite aux mesures de redressement
appliquées par les autorités dans le cadre de la politique d'ajustement structurel entamée
depuis 1982, et à la promulgation de certaines règles de gestion et des indicateurs
d'appréciation de la solvabilité globale des entreprises d'assurances. Parmi ces mesures on
peut citer :

- L'instauration d'un ratio de solvabilité assez sévère, destiné à faire face aux risques de
l'exploitation propres aux caractères aléatoires des sociétés d’assurances ;

792
Il est à savoir que jusqu'en 1941, la présentation des opérations d’assurance était essentiellement pratiquée par
des agences, des cabinets de courtage et quelques succursales d’origine étrangère. Suite à la promulgation de
l’arrêté viziriel de 1941 qui a notamment organisé le contrôle de l’État sur toutes les opérations d’assurance
pratiquées au Maroc – « […] ne peuvent gérer les contrats et en général pratiquer l’assurance que les
organismes agréés à cet effet […] » –, les assureurs se sont conformés à la réglementation en constituant des
sociétés de droit marocain ou en ouvrant des succursales (délégations) lorsqu’il s’agissait de sociétés étrangères.
Fortement inspiré de la réglementation française, cet arrêté traite également des aspects techniques et financiers
des entreprises d’assurances (réserves techniques et leur représentation, placement des entreprises
d’assurances…) V. en ce sens, A. BOUGHALEB, Le secteur marocain des assurances : tendances et
perspectives.
793
H. EL HABBOULI, ibid.

322
- En matière de politique de crédit, les autorités monétaires ont décidé d'exclure à partir
du 1er juillet 1992 les entreprises d'assurances et les organismes de prévoyance sociale
d'opérer sur le marché des billets de trésorerie en émettant des titres négociables à l'ordre de
personnes physiques ou morales d'une courte durée ou d'un montant au moins égal à un
million de dirhams. Cette décision a été prise pour orienter les entreprises d'assurances vers le
marché des adjudications des bons de Trésor. En plus de ces mesures, on a assisté dans le
cadre de la politique d'assainissement du secteur des assurances, à la fusion par absorption de
la société "l'Entente" par "Al Amane" en 1993, avec l'obligation d'augmenter le capital social à
hauteur de 10% au moins de son chiffre d'affaires. Plus tard, la société "Al Amane" a été
autorisée à continuer son activité sous la nouvelle dénomination sociale "Axa Al Amane".

2) La bancassurance et la distribution de l’assurance au Maroc

662. La bancassurance n'est pas encore clairement définie dans les grands dictionnaires
français. Au sens lato sensu, il désigne les différents modes de rapprochement entre les
établissements de crédit et les sociétés d'assurances. Pour les compagnies d'assurances, c'est
un nouveau canal de distribution. En revanche, les banques l'abordent généralement comme
un moyen permettant d'élargir leur activité de base à la vente des produits d'assurance. Les
deux partenaires partagent l'objectif principal qui consiste à vendre des produits d'assurance à
travers le réseau des agences bancaires. Or chacune des deux activités est soumise à un
régime juridique propre qui lui accorde une exclusivité de principe. La bancassurance doit
donc se mettre en oeuvre dans le respect des règles du droit bancaire et sans enfreindre les
prescriptions du droit des assurances794.

La bancassurance peut se présenter sous diverses formes, selon les choix stratégiques des
partenaires :

- soit un assureur et un banquier passent un accord aux termes duquel ce dernier propose
à ses guichets les produits, généralement d’assurance vie, de l’assureur ;

- soit l’assureur et le banquier constituent une entreprise commune (joint venture),


juridiquement propriété de chacune à parts égales ;

794
V. La bancassurance au Maroc entre droit bancaire et le Code des assurances L’économiste, Edition
N°:1452 Le 05/02/2003 N. DENOUN. http://www.leconomiste.com/article/la-bancassurance-au-maroc-entre-
la-loi-bancaire-et-le-code-des-assurancespar-nourredine-deno, consulté le 2 octobre 2017.

323
- soit une banque crée une filiale d’assurance chargée de concevoir et de commercialiser
des produits d’assurance de personne à partir de fichier de sa maison-mère et en s’appuyant
sur ses réseaux. On peut aussi concevoir le scénario inverse, l’assureur créant une filiale
bancaire.

663. La première trace de la bancassurance au Maroc remonte à l’année 1978 avec l’offre
d’un produit d’assurance hospitalisation, une somme de 100 à 500 DH par jour étant
comprise « pour une prime de 50 à 200 DH par an et par membre de famille » par le crédit du
Maroc795.

Aujourd’hui, la possession d’une clientèle bancarisée au Maroc est révélatrice d’une culture
financière. En plus, cette clientèle est captive dans la mesure où les banquiers marocains
peuvent conditionner la souscription de certaines assurances telles : l’assurance temporaire
décès, à l’attribution d’un prêt ou d’une autorisation de découvert796.

De ce qui précède on comprend la rapide extension du phénomène de bancassurance


en effet, en mai 2002, onze banques sur vingt pratiquent une activité de bancassurance au
Maroc. Le succès commercial de l’activité est incontestable près de 1350 points de vente797.
La bancassurance constitue le premier canal pour la distribution des produits d’assurance vie
et capitalisation.

664. Le marché marocain est caractérisé par une forte concentration. En effet, les groupes
bancaires ATTIJARIWAFA BANK et BMCE BANK sont les leaders de la bancassurance
réalisant un chiffre d’affaires respectivement 1,7 milliards de DH et 1,58 milliards de DH. Ces
deux banques en plus de la banque populaire (0,9 milliards de DH) ont réalisé à elles seules
80% du volume des primes et encaissé 70 % des commissions798.

665. On peut toutefois remarquer qu’une interprétation restrictive des dispositions du dahir
de 1977799 qui réservaient la présentation des opérations d’assurance à certaines catégories de

795
Publicité « Assurance hospitalisation toutes causes », La vie Economique, 16 juin 1978, cité par J.
CHARBONNIER, op. cit .p. 349.
796
V. les assurances -la bancassurance, Conjoncture, n° 781, mai 1998, cité par J. CHARBONNIER op cit., p.
349.
797
Bancassurance, Les à peu près du projet de loi, l’Economiste, 4 mai 2000, p.14.
Note de la direction des assurances et de la prévoyance sociale, Ministère de l’économie et des finances
798

Royaume du Maroc, Au sujet de l’activité de bancassurance- exercice 2013.


799
Le Dahir du 9 octobre 1977 régissant la distribution des produits d'assurance au Maroc ne prévoit aucune
autorisation pour les banques. Mais celles-ci contournent cette contrainte réglementaire en agissant en tant que
souscripteurs d'un contrat de groupe ouvert pour le compte de leurs clients. Ainsi, au cours de l'année 1999, 10%

324
professions limitativement énumérés à pendant longtemps suscité une controverse sur la
légitimité de la bancassurance.

C’est la promulgation du Dahir n° 1-02-238 du 25 rejeb 1423 (3 octobre 2002) portant


promulgation de la loi n° 17-99 portant Code des assurances qui mit vraiment fin à toute
ambiguïté concernant la réglementation de la bancassurance au Maroc. En effet, l’article 306
de la loi de 2002 autorise les banques à présenter au public des opérations d’assurances de
personnes, d’assistance et à l’assurance-crédit, moyennant agrément délivré par
l’administration800.

666. Après avoir enregistré une croissance continue pendant les dix dernières années 801 et
particulièrement entre 2009 et 2012, le chiffre d’affaires de la bancassurance a régressé de
9%, en 2013 en passant de 5,8 milliards de DH à 5,3 milliards de DH. Cette dégringolade au
niveau de la production des banques a touché, particulièrement Attijariwafa Bank, la SGMB
et CDG Capital avec une chute respective de -23,87%, 18,56% et 39,18%802. Cette régression
de l’activité de la bancassurance, particulièrement présente dans la catégorie d’assurance vie
et capitalisation qui représente plus de 90% du CA, est intimement liée à la crise économique
avec ses conséquences, dont notamment le resserrement des liquidités qui touchent les
secteurs de l’économie.

667. On remarque en règle générale que depuis les années 1990, le marché marocain vit au
rythme d’opérations de rapprochement entre sociétés d’assurances. Le nombre des entreprises
est passé de vingt-trois à treize et le chiffre d’affaires a franchi la barre du milliard d’Euro.
L’instauration d’un contrôle plus strict de l’autorité de tutelle sur le secteur avec la remise
annuelle d’un dossier financier et statistique.

La loi de 2002 a eu le mérite d’avoir regroupé toute la réglementation en apportant par


ailleurs plusieurs innovations :

- en matière de contrôle sur les entreprises d’assurances : commissariat aux comptes,

des produits d'assurance étaient écoulés par la bancassurance contre 80% par le réseau des intermédiaires, 6,8%
par les mutuelles et 3,2% par les bureaux de gestion directe. Voir http://www.leconomiste.com/article/la-
bancassurance-inquiete-les-intermediaires, consulté le 12 décembre 2016.
800
Voir les alinéas 1, 2 et 3 de l’article 306 de dahir n° 1-02-238 du 25 rejeb 1423 (3 octobre 2002) portant
promulgation de la loi n° 17-99 portant Code des assurances.
801
M. CADOUX, Banques et assureurs : l’harmonie le 21 mars 2014, l’Argus de l’Assurance.
802
La bancassurance en 2013, succès ou déclin d’un modèle, CHALLENGE 18 décembre 2014.
http://www.challenge.ma/la-bancassurance-en-2013-succes-ou-declin-dun-modele-39905, consulté 12 septembre
2017.

325
audit externe, constitution de la marge de solvabilité réglementation stricte des
réserves et des placements financiers…

- en matière de distribution : régulation de la bancassurance, principe d’exclusivité des


agents d’assurance, règlementation stricte de l’accès à l’intermédiation ;

- en matière de produit : contrat en unité compte ;

- pour les mutuelles : introduction de la notion de groupement de mutuelles.

668. Depuis quelques années, le Maroc fait montre d’un engouement clair pour la finance
islamique. Les assureurs s’accordent à dire que l’assurance islamique ( takaful) recèle un
potentiel jusque-là inexploité. Cette étape de l’étude nous amène à nous intéresser à
l’émergence de l’assurance islamique.

B- L'émergence de l'assurance islamique

669. L’assurance est un sujet controversé dans les pays à majorité musulmane. On peut
dans une certaine mesure considérer qu’il contribue aussi à son faible taux de pénétration.
Encore aujourd’hui, bon nombre de musulmans estiment que la prévention de certains risques
entre en contradiction avec la sharia803. Comme nous le fait remarquer Jacques
CHARBONNIER, les intellectuels musulmans « opposés au concept et aux pratiques à
l’assurance moderne sont légion »804

Le recours à une technique d’assurance compatible avec la doctrine de l’islam va conduire à


la création de la takaful. En somme, le takaful est l’alternative islamique à l’assurance
conventionnelle. Le concept est en forte croissance depuis quelques temps, les produits
d’assurances spécifiques qu’est le takaful ne finit pas de diversifier et de s’adapter aux

803
Les concepts de riba, gharar et maysir évoqués en introduction constituent les motifs pour le musulman du
rejet de l’assurance conventionnelle. Voy A. MAKHLOUF, L’émergence d’un droit international de la finance
islamique : origines, formation et intégration en droit français, IRJS, 2015, p. 220.
804
J. CHARBONNIER dans son ouvrage, Islam : droit finance et assurance, Larcier, 2011, p.155, énumère des
passages d’études faisant référence à des oppositions entre musulmans partisans de l’assurance conventionnelle
et musulmans opposants à cette assurance. Voy. S. A. ALDEEB ABU- SALIEH, Les musulmans face au droit
de l’homme, Winkler, BOCHOM, 1994, pp232-235 ; A KETTANI, L’assurance au Maroc (Réalités et
perspectives), Imprimerie Najah el Jadida, 1983, pp 25-28 ; A. KORSHID, Islamic insurance. A modern
approach to islamic banking, London and New York, Routledghe,2004, pp.47-83; M. SIMIULLAH,
“Prohibition of Riba interest & insurance in the light of islam”, islamic studies, Summer 1982, vol.21, n°2, pp.
216-218.

326
exigences particulières de la religion musulmane. Né au Soudan en 1979, ce système connaît
un véritable essor depuis 1984, en particulier en Malaisie. Cet essor a connu une véritable
accélération depuis l’émission en 1985 d'une fatwa de l’Académie du fiqh déclarant les
assurances conventionnelles haram (prohibées)805.

670. Pour mieux saisir le takaful, nous allons d’abord nous intéresser à son fondement (1).
Incompatible avec l’assurance conventionnel, la communauté musulmane l’a considéré
comme étant en parfaite conformité à la charia. Nous allons à ce titre étudier son mode de
fonctionnement (2)

1) Fondement du takaful

671. La manifestation d’une nécessité de mise en place d’une assurance fondée sur les
préceptes de l’islam date de 1976. En effet, c’est lors de la première conférence de l’économie
islamique qu’il a été décidé, qu’une commission d’experts composée d’oulémas en charia
islamique, et de spécialiste en finance islamique, devait concevoir une forme d’assurance
dépourvue de tous les motifs du rejet par l’Islam des assurances conventionnelles, et surtout
destinée à favoriser l’entraide souhaité par la charia en se substituant à l’assurance
conventionnelle806.

672. Le takaful a des origines lointaines807. Mais sous sa forme actuelle, il est issu des
besoins d’une banque islamique soudanaise désireuse d’assurer ses opérations, conformément
aux principes de la charia. Les deux premières compagnies d’assurance takaful ont alors vu le
jour en 1979. Il s’agit de la Sudanese Islamic Insurance Company808, au Soudan, et l’Arabic
Islamic Insurance Company, à Dubaï.

Bientôt, en 1984, la Malaisie prend le relai en créant la Syarikat takaful malaysia Bhd 809 sur
leur territoire où il va connaître immédiatement un certain succès.

805
Voir, A. MAKHLOUF, op. cit., p. 221.
806
Voy en ce sens, A. NEHME, L’assurance entre
loi islamique et droit positif : l’exemple des
droits français et libanais, Thèse université Lyon III, 2013. p.9.
807
Les origines du takaful remontent à différentes pratiques de la loi coutumière arabe ancienne. Voir n° 45 et s.
808
P. AZEEM, takaful ; Mohammad Ali Jinnah University; Kirachi; Pakistan; 13th July 2007; p 8.
809
A. NEHME ibid.

327
Enfin, en 1985, l’académie du Fiqh officialise la naissance de Takaful en l’approuvant en tant
que forme d’assurance conventionnelle respectant les exigences de la Sharia. Toutefois, la
résolution de l’Académie du Fiqh à Jeddad concernant Takaful ne précise pas le type de
contrat le plus adapté pour les opérations de takaful. A la suite de cette résolution, en 1986, la
Société Nationale de l’Assurance est créée par l’Etat saoudien qui en est propriétaire à 100 %.

673. Le terme takaful ne correspond pas littéralement à assurance en français. Le mot


équivalent à assurance en arabe et qui est reconnu par la charia est taamin810qui signifie
rassurer sauvegarder garantir en indemnisant les pertes.

Toutefois, l’expression qui aura fait l’unanimité auprès de la plupart des écoles de la charia
est le takaful qui suppose que le contrat soit transformé en une organisation contributive dans
laquelle, les pertes des membres peuvent être couvertes par le groupement takaful sur le
fondement de l’aide et du sacrifice mutuel811.

Takaful est un dérivé du mot arabe kafalah qui signifie, se garantir, « l’un l’autre »,
c’est une sorte de garantie solidaire, en ce sens que le takaful est basée sur le concept de
solidarité social, de la coopération et de l’indemnisation mutuelle des pertes. Vu sous cet
angle le takaful a de nombreuses similitudes avec la tontine. Il est fondé sur les principes
islamiques du taawun (confrérie ou aide mutuelle) et du tabarru (donation, offrande ou
contribution). Vu sous cet angle, le risque de perte est partagé collectivement et
volontairement entre les participants qui se garantissent contre des risques bien définis812.

Même si les modes de fonctionnement varient, il faut préciser que fondement de l’assurance
takaful demeure l’interdiction part tous les modèles existants d’opérations basées sur le
gharar, le maysir et le riba ; par ailleurs, les fonds déposés ne doivent aucunement faire objet
de financement à des investissements illicites du point de vue de la sharia (alcool, viande de
porc, pornographie, …)813

674. A l’instar des institutions financières musulmanes, chaque entreprise d’assurance


islamique pour contrôler la conformité des produits et des pratiques à la charia doit être
constituée d’un conseil religieux. Ce groupe indépendant de juristes spécialisés en droit

810
Voir supra, n°236.
811
Voir M. AYUB, Undestanding Islamic finance, éd John WILEY & sons Ltd., England, 2007, p. 420, cité par
A. NEHME op. cit., p. 58.
812
V. A NEHME, ibid.
813
Voir I. MUHAIM, General takaful practice; Gema Insani Press, Jakarta, Indonésie, 2005, p.2.

328
religieux et en fiqh almuamalat (jurisprudence commerciale islamique), est généralement
composé de trois à six personnes, dont le rôle essentiel consiste à orienter et à surveiller les
activités de l’institution en vue de s’assurer de la conformité de sa gestion aux règles et aux
principes de la loi musulmane.

675. En fin de compte, c’est ce qui donne à l’assurance Takaful sa légitimité juridique ou sa
conformité à la Charia. L’étape suivante consiste à dégager les particularités du takaful, ce
type d’assurance a un mode de fonctionnement qui lui est particulier.

2) Le mode de fonctionnement de l’assurance takaful

676. La différence entre le takaful et l’assurance conventionnelle réside dans l’évaluation


du risque d’une part, et la gestion fonds déposés par les compagnies d’autre part. Par ailleurs,
on peut noter la présence d’une différence dans la relation existante entre les participants (les
assurés, dans l’assurance conventionnelle) et les opérateurs d’assurance (assureurs, dans
l’assurance conventionnelle).

677. En matière de contrat takaful, le critère de distinction majeur des différents modèles
d’assurance Takaful est la manière dont se répartissent les bénéfices techniques entre la
société et ses assurés814. Il existe plusieurs modèles de gestion de takaful car, chaque pays
peut opter pour le modèle qui correspond le mieux à son système. Quoi qu’il en soit la plupart
des sociétés d'assurance Takaful s'organisent selon une typologie (a). La consécration de
l’assurance Takaful par le droit au Maroc

ain des assurances (b) est peut-être susceptible de produire un effet d’entrainement sur les
autres systèmes juridiques africains.

a) Typologie de l’assurance takaful

678. Quatre modèles de takaful existent : le modèle wakala le modèle moudaraba , le


modèle waqf et le modèle hybride.

814
M.H. DOUCERET, Le takaful en France demain : fiction ou réalité ? Thèse ENASS, 2010. p.24.

329
➢ Modèle wakala (Moyen Orient)

679. La wakala est le modèle le plus répandu au moyen orient, dans ce modèle, la relation
mandant-mandataire est utilisée pour la souscription et pour le placement. Dans la
souscription, l’opérateur takaful agit comme mandataire des participants pour gérer le fonds
takaful. Tous les risques sont supportés par le fonds et tout excédent d’exploitation appartient
aux participants. L’opérateur takaful ne participe pas directement au risque supporté par le
fonds ni à aucun excédent / déficit du fonds. En revanche, l’opérateur reçoit une commission
fixe dite wakala, qui rémunère sa gestion de l’opération pour le compte des participants, et
représente généralement un pourcentage des cotisations payées815.

➢ Modèle Moudaraba (Malaisie)

680. Dans un modèle moudaraba, l’opérateur takaful agit en tant qu’entrepreneur


(moudarib) et les participants comme rab ul mal apporteurs de capitaux. Le contrat précise
comment les gains générés par le placement et/ou les excédents de l’opération takaful seront
répartis entre l’opérateur takaful et les participants. Les pertes sont à la charge des seuls
participants sauf en cas de faute professionnelle ou de négligence du moudarib, auquel cas il
n'aura pas droit à sa rémunération professionnelle816. La rémunération de l’opérateur peut
aussi inclure une commission de performance, déduite de l’excédent éventuel, comme
incitation à une gestion efficace du fonds takaful. Le placement du fonds takaful s’appuie
également sur un contrat wakala où l’opérateur facture aux participants une commission pour
services rendus.

➢ Le modèle waqf (Pakistan)

681. Il désigne le contrat takaful qui souligne l’accord ou le consentement du participant


que la contribution versée en contrepartie de la participation dans le produit takaful à créditer
par l’opérateur dans le fonds takaful est en conformité avec le principe de « Waqf » ou de «
dotation ». Pour commencer, un compte Waqf doit être établi par l’exploitant dans le fonds
takaful. A cet effet, l’exploitant est tenu de renoncer à une sorte de « semence » d’argent en
tant que Waqf (don) pour générer le dit « compte Waqf ». Toutes les dépenses liées aux coûts
de souscription et opérationnelles de takaful sont à la charge du fonds Waqf. En tant que
gestionnaire, l’opérateur takaful va exécuter toutes les fonctions nécessaires pour les

815
Voy A. MAKHLOUF, op. cit., p.232.
816
Voy, A. MAKHLOUF, ibidem.

330
opérations du waqf contre une taxe wakalah à déduire de la contribution versée par les
participants. Les retours sur investissement seront répartis selon un ratio convenu similaire à
la structure de participation en vertu du contrat moudaraba

➢ Modèle de combinaison entre wakala et moudaraba

682. Dans ce modèle, le contrat wakala est adopté pour la souscription, et le contrat
moudaraba est utilisé pour les placements du fonds takaful. Cette approche semble être
favorisée par certaines organisations internationales et est en pratique largement adoptée par
les sociétés takaful. Dans tous les modèles, l’opérateur takaful fournira généralement un prêt
sans intérêts pour couvrir toute défaillance du fonds takaful817. Le prêt est remboursé à l’aide
des excédents futurs du fonds takaful.

683. Le takaful, à n’en plus douter occupe une place de choix dans les systèmes
d’inspiration islamique. D’ailleurs des pays comme le Maroc consacre le takaful part la
création d’un cadre juridique qui lui est propice.

b) La consécration de l’assurance takaful par le droit marocain des assurances

684. Depuis septembre 2016, le Maroc s’est doté, d’un cadre juridique régissant
exclusivement l’assurance takaful. En effet, suite à son adoption par le parlement, la loi N°
59.13 modifiant et complétant la loi N° 17.99 portant Code des Assurances a été publiée au
Bulletin Officiel : N° 6501 du 19 septembre 2016 (17 Dhou Al Hijja 1437) pour la version
arabe et N° 6506 du 6 octobre 2016 (4 Moharrem 1438) pour la version française. Le texte
avait été adopté par la Chambre des Représentants le 7 juin 2016 et par la Chambre des
Conseillers le 2 août 2016.

685. Le texte de la réforme définit l’assurance takaful comme étant une « Opération
d’assurances fonctionnant conformément aux préceptes de la Charia, basée sur le don
(tabarru) et sur l’entraide entre un groupe de personnes physiques ou morales appelées
participants qui contribuent mutuellement dans l’objectif de couvrir les risques prévus au
contrat d’assurance takaful. »

Ainsi, le texte établit notamment les dispositions réglementaires relatives à l’assurance


Takaful, assurance dont la conformité à la Charia est attestée par le Conseil Supérieur des

817
A. MAHLOUF, op. cit., p.235

331
Oulémas, et dont les opérations sont notamment exemptes de tout versement ou perception
d’intérêts818.

686. La loi prévoit aussi, l’introduction de certains principes de base concernant l’assurance
Takaful. Cette disposition concerne le fonctionnement de l’opération d’assurance Takaful
conformément aux avis du Conseil supérieur des Ouléma, de la participation dans cette
opération sur la base du don et sur l’entraide entre les participants et de la couverture du
risque par la collectivité des participants. Ainsi, la présente loi précise qu’en assurance
Takaful, le risque est supporté par la collectivité des participants à hauteur de leurs
contributions. L’entreprise d’assurances et de réassurance, quant à elle perçoit une
rémunération au titre de la gestion de l’assurance Takaful819.

Hormis l’assurance Takaful, la loi 59-13 a instauré, le principe de solvabilité basée sur les
risques. Elle vise aussi l’amélioration de la gouvernance des entreprises d’assurances et de
réassurance et le renforcement de leur transparence

En outre, le contrat d’assurance Takaful doit indiquer plusieurs trois points essentiels :

- les modes de rémunération de l’entreprise d’assurances et de réassurance au titre de la


gestion de l’assurance Takaful et le montant de cette rémunération ;

- les modalités de répartition des excédents entre les participants ;

- les conditions relatives aux placements de l’entreprise d’assurances et de réassurance.

L’administration se réserve enfin la prérogative de :

- fixer les modes de rémunération de l’entreprise d’assurances et de réassurance au titre


de la gestion de l’assurance Takaful ainsi que les critères de détermination de cette
rémunération ;

- fixer les modalités de répartition des excédents techniques et financiers entre les
participants dans les opérations d’assurances Takaful

687. Pour rester en conformité avec la Charia, Les entreprises d’assurances et de


réassurance agréées pour exercer l’assurance Takaful au Maroc, doivent mettre en place un
système de contrôle interne destiné à prévenir le risque de non-conformité à la Charia,

818
V. art.1er du Dahir n°1-16-129 du 25 août 2016 portant promulgation de la loi n°59-13 modifiant et
complétant la loi n° 17-99 portant Code des assurances au Maroc.
819
Art.12 de loi précitée.

332
notamment par la mise en place des procédures et des manuels afférents au respect des
préceptes de la Charia.

« Pour les entreprises d’assurances et de réassurance agréées pour exercer l’assurance


Takaful, la structure d’audit interne doit, en outre, établir au moins une fois par an un
rapport spécifique sur la conformité aux préceptes de la Charia. A cet effet, elle doit disposer
des moyens humains ayant les compétences requises. Ce rapport est établi et communiqué à
l’administration dans les conditions fixées par circulaire de celle-ci. »820

688. Le marché du Takaful est un marché en perpétuelle progression. L’intérêt porté au


Takaful, qui avant se limitait à certain pays musulman, est désormais en expansion mondial et
atteint régulièrement de nouveaux marchés.

Conçus dans une optique islamique, les produits Takaful il est vrai sont d’abord destinés à une
clientèle musulmane, mais ils peuvent aussi intéresser les clients professant une autre religion
voire des athées, compte tenu des mouvements vers une économie et des produits
« socialement responsables » qui ont tendance à prévaloir dans certains segments821.

Environ un quart de la population mondiale est de confession musulmane, ce qui


représente 1.57 milliard d’individus. Bien que l’Islam soit répandu partout dans le monde, bon
nombre de musulmans vivent dans les pays émergents : 60% se trouvent en Asie, 20% au
Moyen-Orient, 15% en Afrique noire. 317 millions de musulmans vivent dans des pays où ils
ne sont pas majoritaires, notamment en Inde, en Ethiopie, en Chine et aux Etats Unis.
L’Europe abrite 38 millions de musulmans (2,5%), dont plus de 4 millions en France, 4 en
Allemagne et 2.4 en Grande-Bretagne822.

689. Pour le continent africain, l’industrie de l’assurance Takaful est peu développée le
chiffre d’affaires de cette industrie est passé de 295.3 millions USD en 2008 à 377.3 Millions
USD estimé en 2009, le Soudan reste le marché le plus développé et le plus le plus attractif
avec un chiffre d’affaires de 339,6 Millions USD contre 280.7 Millions USD en 2008 suivi
par l’Egypte avec un montant de primes émises de 29,3 Millions USD en 2009.

690. L’Afrique du Sud et le Maroc montrent la réelle possibilité de développement du


marché de l’assurance en Afrique. Il est vrai que la situation économique contribue

820
V art 239-2 Dahir précité.
821
Voir. J. CHARBONNIER, op.cit., p.205.
822
M-H. DOUCERET, op.cit., p.31.

333
grandement à l’émergence du secteur de l’assurance dans ces deux pays. Par ailleurs, la
diversité des offres, le recours aux nouvelles technologies de l’information et de la
communication et le recours aux dernières techniques commerciales y ont beaucoup
contribué. Le cadre juridique propice à la concurrence et la réassurance a permis une certaine
attractivité du marché pour les investisseurs étrangers. Pour essayer de trouver une solution au
problème de l’assurance dans la plupart des pays africains, une étude sur l’activité
d’assurance est incontournable.

Section II : L’activité d’assurance.

691. Alors que le marché de l’assurance dans certains pays d’Afrique se développe, en
Afrique francophone, il semble inefficace, inadapté et stagnant. C’est pourquoi, Il parait
nécessaire de s’intéresser dans un premier temps à la pratique de l’assurance (Paragraphe I).
Ensuite, pour compléter l’étude sur les sociétés d’assurances. la liquidation des entreprises
d’assurance (Paragraphe II) sera abordée

Paragraphe I : L'assurance dans la pratique.

692. En raison du caractère technique particulièrement complexe des opérations


d’assurance, celles-ci ne peuvent être réalisées que par des entreprises spécifiques qui sont
conçue et organisées à cet effet.

Par ailleurs, étant destinées à couvrir d’innombrables personnes et des biens de très
grande valeur parfois, ces entreprises accomplissent une mission sociale certaine ; et par
l’importance des fonds qu’elles collectent et gèrent elles jouent un rôle économique éminent.

C’est aussi pour ces diverses raisons que l’Etat se doit de jouer un rôle actif dans la maitrise
de ce secteur. Ainsi, Du point de vue de la réglementation, l'exercice de la profession
d'assureur est placé sous la tutelle du Ministère des finances et est régi par un Code des
assurances.

693. L’exercice de la profession d’assureur (A) nécessite un contrôle strict par les pouvoirs
publics. Une autre catégorie de professionnels d’assurance mérite une attention particulière, il

334
s’agit des intermédiaires d’assurances. C’est une étude relative à la distribution de l’assurance
(B) qui nous permettra de les cerner.

A- L’exercice de la profession d'assureur

694. Pour le Bénin et la Mauritanie, on peut d’emblée déplorer le nombre élevé d'assureurs
qui opèrent dans leurs marchés qui sont de taille relativement modeste. En principe, l’exercice
de l’activité d’assurance est subordonné à l’obtention préalable d’un agrément pour les
entreprises d’assurance (1). Outre les règles générales régissant la création d’une entreprise
commerciale ou industrielle en générale, celle qui se destine à l’assurance est soumise à des
règles propres quant à la forme, nous nous intéresseront aux diverses formes d’une compagnie
d’assurance (2).

1) L’agrément des entreprises d’assurance

695. Il faut entendre par entreprise d’assurance, toute entreprise qui est habilitée à offrir et
qui conclut directement des opérations d’assurance avec les assurés. Cependant, il ressort de
l’article 326 du Code CIMA, qu’aucune entreprise d’assurance ne peut commencer son
activité d’assureur avant d’avoir obtenu un agrément sauf s’il s’agit d’opérations
d’acceptation en réassurance823. Dans l’espace CIMA, L’agrément est accordé par le ministre
compétent de chaque Etat membre sur demande de l’entreprise, pour les opérations d’une ou
plusieurs branches d’assurance824.

696. En outres, le Code CIMA et le CAM consacrent respectivement en leurs articles 326 et
200, un principe de spécialisation selon lequel une entreprise d’assurance ne peut pratiquer à
la fois les opérations d’assurance vie et les opérations d’assurance dommage. L'octroi de
l'agrément est soumis à des conditions de fond (a) et de forme commune à toutes les
entreprises d'assurance, certaines conditions spéciales pouvant être imposées aux entreprises
étrangères.

823
Voir alinéa 2 article 200 du CAM.
824
Ces branches figurent dans la liste de de l’article 328 du Code CIMA et, de l’article 201 du CAM.

335
a) Les conditions de fond

697. Ces conditions de fond concernent essentiellement deux points qui sont : l’objet de
l’agrément et des garanties techniques professionnelles offertes par l’entreprise requérante.

Concernant l’objet, l’agrément est accordé branche par branche. A cet effet, les
opérations d’assurance sont classées en deux grandes branches principales : branche IARD, et
les branches vie.

Le risque accessoire est un risque lié au risque principal par un lien de connexité. Ainsi, une
entreprise garantissant un des risques des branches IARD peut également garantir un autre
risque de ces mêmes branches825.

698. Le CAM et le Code CIMA reconnaissent toutefois, que les risques crédit826 et caution
ne peuvent être considérés comme accessoires à d’autres branches. Les entreprises agrées
pour pratiquer les branches vie-décès et les assurances liées à des fonds d’investissement ont
la faculté de réaliser directement , à titre d’assurance accessoire faisant partie d’un contrat
d’assurance sur la vie et moyennant le payement d’une prime ou d’une cotisation distincte,
des assurances complémentaires entre les risques d’atteintes corporelles incluant l’incapacité
professionnelle de travail , le décès accidentel ou l’invalidité à la suite d’accident ou
maladie827. Les communications à la commission de contrôle des tarifs d'assurance sur la vie
comportant des assurances complémentaires contre les risques mentionnés au premier alinéa
doivent être accompagnées des justifications techniques à ces garanties accessoires. Dans ce
cas, le contrat doit préciser que ces garanties complémentaires prennent fin, au plus tard, en
même temps que la garantie principale.

Pour les garanties techniques financière, l’autorité compétente prend en compte plusieurs
éléments relatifs aux moyens techniques et financier à l’honorabilité à et à la compétence

699. En matière de sanction, on peut considérer selon les deux Codes que : « Sont nuls les
contrats souscrits en infraction à l’article précédent. Toutefois, cette nullité n’est pas
opposable, lorsqu’ils sont de bonne foi, aux assurés, aux souscripteurs et aux

825
Voir. Article 202 CAM. L’article 328 du Code CIMA reprend les mêmes dispositions.
826
A-M. ASSI-ESSO, J. ISSA-SAYEGH et J. LOHOUES-OBLE, op. cit. p. 140.
827
V. article 203 CAM, son équivalent en droit CIMA est l’article 328-2

336
bénéficiaires »828.

b) les conditions de forme

700. Toute demande d’agrément ainsi que tous les documents l’accompagnant doivent être
rédigés dans la ou les langues officielles829. Si dans le CAM, deux exemplaires de la demande
d’agrément sont requis830, le Code CIMA en exige cinq831.

701. Dans la zone CIMA, la demande d’agrément doit comporter essentiellement le


domaine de spécialisation les statuts les pièces d’identités en cours de validités des dirigeants
ainsi que les casiers judiciaires. Par ailleurs du fait d’une certaine expérience ou de l’obtention
de certains diplômes, les dirigeants doivent prouver la capacité de gestion d’une compagnie
d’assurance

702. Dans les pays membres de l’espace CIMA, toute demande d’agrément présentée par
une société dont le siège social est situé hors du territoire de l’État membre où elle souhaite
opérer doit être produite en double exemplaire et comporter, outre les documents prévus aux
a), e), f) et h) de l’article 328-4

703. L'agrément administratif accordé est publié au Journal Officiel de l’Etat où l’entreprise
doit exercer son activité832. Toute décision de refus d'agrément doit être motivée et notifiée ;
l'agrément ne peut être refusé, totalement ou partiellement, que si l'entreprise a été
préalablement mise en demeure par lettre recommandée avec accusé de réception de présenter
par écrit ses observations dans un délai de 15 jours à compter de cette réception833.

704. Contrairement au CAM, le Code CIMA a prévu des moyens de recours qui laisse
perplexe à divers points de vue. L’entreprise a la possibilité de se pourvoir contre l’avis
défavorable de la Commission devant le Conseil des ministres. Il est par ailleurs précisé que

828
Alinéa 4 de l’article 200 du CAM. Art.327 du Code CIMA.
829
Le droit mauritanien exige des documents rédigés en arabe et en français.
830
Art.205 du CAM.
831
Art.328-4 du Code CIMA.
832
Article 326-9 du Code CIMA, article 209 du CAM.
833
Voir, Art.328-3 Code CIMA, art.204, al.6.CAM

337
ce recours doit être exercé dans les deux mois de la notification du refus d’agrément total ou
partiel et, ce conformément à l’article 317, alinéa 1er.

705. Mais, l’article 328-3 en son dernier alinéa précise que : « L’entreprise peut se pourvoir
devant le Conseil des Ministres dans les deux mois de la notification du refus d’agrément,
total ou partiel, ou, en l’absence de notification, à l’expiration d’un délai de six mois à
compter du dépôt d’un dossier régulièrement constitué de demande d’agrément ». On peut
remarquer que la disposition que nous venons de citer est en contradiction flagrante avec
l’article 315-2, al.2 qui précise que la Commission dispose d’un délai maximum de deux mois
pour se prononcer ; par ailleurs, l’absence de réponse à l’expiration de ce délai vaut
acceptation. En effet dès lors qu’il y’a acceptation implicite par une absence de notification, le
recours ne peut se concevoir.

706. En matière de coopération, le texte pose un problème car en disposant que le recours
de l’entreprise est ouvert à l’expiration d’un délai de six mois après le dépôt d’un dossier de
demande d’agrément. On se demande si le Code CIMA interdit tout recours formé avant
l’expiration de ce délai de CIMA mais après l’expiration d’un délai de deux mois accordé à la
Commission pour se prononcer ?

Enfin on peut se demander pendant combien de temps ce recours est susceptible d’être
exercé ? Le Code CIMA n’a visiblement pas repris les dispositions du Code des assurances
françaises qui en matière de procédure de demande d’agrément à assimilé l’absence de
notification à un refus d’agrément834.

2) Formes des sociétés d’assurances

707. Le législateur a limité les formes juridiques des sociétés d’assurance avec pour
objectif, d’offrir aux créanciers les garanties suffisantes.

Dans la zone CIMA, l’article 301 du Code des assurances réglemente la forme des sociétés
d’assurance. En Mauritanie, c’est le l’article 197 qui en régit la forme de ces types
d’entreprise. Il ressort des deux dispositions en la matière la reconnaissance de deux formes

834
« L'entreprise peut se pourvoir devant le Conseil d'Etat dans les deux mois de la notification du refus
d'agrément, total ou partiel, ou de la décision implicite de rejet résultant de l'absence de notification à
l'expiration d'un délai de six mois à compter de la réception d'un dossier régulièrement constitué de demande
d'agrément ». Art. 321-4 du CAF

338
de sociétés d’assurances.

708. Que ce soit au Bénin ou en Mauritanie, une société d’assurance ne peut être constituée
que sous forme de société anonyme (a) ou sous la forme de société d’assurance mutuelle (b).
La première est certainement une société commerciale en raison de sa forme et de son objet
puisqu’elle fait expressément partie des sociétés commerciales par la forme835et qu’elle
poursuit un but commercial. S’agissant de la seconde, elle est considérée comme civile pour
les raisons inverses.

a) La société anonyme d’assurances

709. Le peu de dispositions consacrés à la société anonyme par les deux Codes nous révèle
la nécessité d’un recours au droit commun des sociétés commerciales pour compléter la
législation en matière d’assurance. Quelle que soit la forme en laquelle elle est constituée,
l’entreprise d’assurance est soumise au même régime juridique sur plusieurs points836. La
société anonyme d’assurances obéît au même principe que toutes les autres, elle cherche la
réalisation de bénéfices qu’elle distribue à ses actionnaires. A cet égard la société anonyme
demeure une technique capitalistique et l’assurance apparaît dès lors comme une activité
comme les autres, où l’on verse un capital pour le faire fructifier. Les actionnaires de la
société se distinguent donc des assurés qui ne sont que des clients de la société. Entre autres
caractéristique, la société anonyme a le droit de rémunérer des intermédiaires et apporteurs
d’affaires, elle le fera sous forme de commissions.

710. Pour le Bénin qui est membre de l’OHADA et de la CIMA, on peut formuler le
principe selon lequel : toute entreprise d’assurance constituée sous forme d’une société
anonyme doit obéir aux règles de l’acte uniforme de l’OHADA sur les sociétés commerciales.
En cas de contradiction, entre les deux, celui de l’OHADA l’emporte sûrement. L’acte
uniforme OHADA dispose en ce sens que : « Toute société commerciale, y compris celle dans
laquelle un État ou une personne morale de droit public est associé, dont le siège social est
situé sur le territoire de l'un des États parties au Traité relatif à l'harmonisation du droit des

835
V. article 6 de l’Acte uniforme OHADA sur les sociétés commerciales, qui est entré en vigueur le 5 mai 2014.
836
L’entreprise d’assurance partage avec les autres types d’entreprise les éléments suivants : la création, le
fonctionnement, le régime financier, les régimes de sauvegarde, la liquidation et la garantie des créanciers.
Voir à ce propos A-M. ASSI-ESSO, J. ISSA-SAYEGH et J. LOHOUES-OBLE, op. cit., p.45.

339
affaires en Afrique (ci-après désignés « les États parties ») est soumise aux dispositions du
présent Acte uniforme. Tout groupement d'intérêt économique est également soumis aux
dispositions du présent Acte uniforme. En outre, les sociétés commerciales et les groupements
d'intérêt économique demeurent soumis aux lois non contraires au présent Acte uniforme qui
sont applicables dans l'État partie où se situe leur siège social ». Parmi les lois applicables
figure certainement le Code CIMA. Nous pouvons ajouter en outre que, parmi les dispositions
finales de l’acte uniforme OHADA figure l’article 916 selon lequel « Le présent Acte
uniforme n'abroge pas les dispositions législatives auxquelles sont assujetties les sociétés
soumises à un régime particulier ».

711. Dans le système mauritanien, le vide laissé par le CAM en matière de société anonyme
est à combler par la Loi N° 2000-05 portant Code du commerce. Jusqu’en 2007837, les
sociétés anonymes d'assurance devaient avoir un capital social, non compris les apports en
nature, au moins égal quatre-vingts millions d'Ouguiyas. La nouvelle loi a introduit un seuil
minimum pour le capital des sociétés opérant dans le domaine des assurances désormais fixé à
trois cents millions d'ouguiya (soit sept cent mille Euros)838. Une hausse qui vise quelque peu
une certaine conformité avec la pratique en cours dans la sous-région et dans le but de
renforcer la capacité des sociétés d'assurance dans le pays.

712. Dans la zone CIMA, le capital minimum pour constituer une compagnie d’assurance
est passé désormais d’un à cinq milliards de FCFA839. A compter de la publication du texte
en question les compagnies déjà en activité ont un délai de cinq ans pour se conformer avec
une étape intermédiaire à trois ans pour porter leur capital minimum à trois milliards de
FCFA840. L’augmentation du capital minimum pour la constitution d’une société anonyme
dans la zone CIMA vise par ailleurs une limitation de la prolifération des petites compagnies
d’assurances dans des marchés qui commence par se caractériser par leur exiguïté.

837
Une modification du CAM est intervenue depuis l’Ordonnance 026-2007 du 09 avril 2007, abrogeant,
remplaçant et modifiant certaine disposition de la loi 93/040 du 20 juillet 1993, portant Code des assurances.
838
V. art 216 nouveau CAM.
839
Voir en ce sens, Règlement n° 007/CIMA/ PCMA/ CE/ 2016/ modifiant et complétant les articles 329-3 et
330-2 du Code des assurances relatif au capital social des sociétés anonymes d’assurances et au fonds
d’établissement des sociétés d’assurances mutuelles.
840
Article 329-3 nouveau de Code CIMA.

340
b) La société d’assurances mutuelle

713. On retrouve une définition assez claire de la société mutuelle d’assurances dans le
CAM et le Code CIMA : « Les sociétés d'assurance mutuelles ont un objet non commercial.
Elles sont constituées pour assurer les risques apportés par leurs sociétaires. Moyennant le
paiement d'une cotisation fixe ou variable, elles garantissent à ces derniers le règlement
intégral des engagements qu'elles contractent. Toutefois, les sociétés d'assurance mutuelles
pratiquant les opérations d'assurance sur la vie ou de capitalisation ne peuvent recevoir de
cotisations variables »841 . De la définition précédente il ressort que les sociétés d’assurance
mutuelle ne sont commerciales ni par leur forme ni par leur objet puisqu’elles ne poursuivent
aucun but lucratif842.

714. La société mutuelle s’oppose à la société anonyme sur divers points. Elle est par
l’esprit et non par la technique assez proche de la mutualité en ce sens que cette dernière
implique une solidarité entre ses membres. Ses caractéristiques sont :

- la société mutuelle à des primes variables sauf exceptions précédemment énumérées.

- l’étendue de la dette de l’assuré sera donc fonction des résultats technique de cet
exercice. Autrement dit, si les résultats techniques se présentent comme déficitaires, la
société pourra réclamer à ses sociétaires des rappels de primes843 et dans le cas
contraire, elle est amenée à distribuer des ristournes provenant du trop-perçu.

- Contrairement à la société anonyme, la société mutuelle ne peut distribuer les


excédents de recettes que sous certaines conditions844. La société d’assurance mutuelle
est assimilable à une entraide mutuelle. Les sociétaires jouent un double rôle d’assuré
et d’assureur.

841
Art.330 Code CIMA, V. art. 219. CAM
842
Art.330. Code CIMA. Art ; art.219.CAM. Voir aussi article 219 al 2 du CAM.
843
Il est à préciser que ces rappels ne sauraient excéder un maximum de cotisation indiqué par la police, ce qui
constitue une garantie pour le sociétaire.
844
« Il ne peut être procédé à des répartitions d’excédents de recettes qu’après constitution des réserves et
provisions prescrites par les lois et règlements en vigueur, après amortissement intégral des dépenses
d’établissement et après que les dispositions réglementaires concernant la marge de solvabilité aient été
satisfaites ». V. art .330-36. Du Code CIMA - Excédents de recettes, répartition. Sur ce point, le CAM n’a prévu
qu’une disposition que l’on retrouve aussi dans le Code CIMA et selon laquelle : « Les excédents de recettes
distribuables des sociétés d'assurances mutuelles pratiquant une ou plusieurs des branches 1 à 18 sont répartis
entre les sociétaires dans les conditions fixées par les statuts ». Art. 221. CAM, art.330-1 du Code CIMA.

341
715. Les sociétés d’assurance mutuelles de la zone CIMA doivent désormais disposer d’un
fonds d’établissement de 800 millions de F CFA (1,143 millions d’Euros) entièrement versé
contre 300 millions de F CFA (457.347 euros) avant 2007. L’augmentation du niveau
minimum du capital social et du fonds d’établissement participe du souci du législateur de
renforcer les fonds propres des sociétés d’assurances afin qu’elle soit à même de participer à
la souscription des grands risques par l’augmentation subséquente de leur capacité de
rétention.

716. Les sociétés d'assurances mutuelles doivent faire figurer dans tous les documents
destinés au public l'une des mentions « Société d'Assurances Mutuelles à Cotisations
Variables » « ou Société d'Assurances Mutuelles à Cotisations fixes »845.

Les projets de statuts846 ou les statuts847 des sociétés d’assurances mutuelles doivent faire
mention de plusieurs éléments, ils doivent :

1) indiquer l'objet, la durée, le siège, la dénomination de la société et la circonscription


territoriale de ses opérations, déterminer le mode et les conditions générales suivant lesquels
sont contractés les engagements entre la société et les sociétaires, et préciser les branches
d'assurance garanties directement ou acceptées en réassurance ;

2) fixer le nombre minimal d'adhérents, qui ne peut être inférieur à cinq cents en droit
CIMA ;

3) fixer le montant minimal des cotisations versées par les adhérents au titre de la
première période annuelle et préciser que ces cotisations doivent être intégralement versées à
la constitution

4) indiquer le mode de rémunération des directeurs, administrateurs et président ;

5) prévoir la constitution d'un fonds d'établissement destiné à faire face, dans les
limites fixées par le programme d'activités ;

6) prévoir le mode de répartition des excédents de recettes distribuables ;

7) prévoir le caractère fixe ou variable des cotisations selon le cas.

717. Une forme de société mutuelle d’assurance est la société tontinière qui n’est pas

845
V. art. 222. CAM, Article 330-3 du Code CIMA.
846
Selon le Code CIMA.
847
Selon le CAM

342
prévue par le CAM. Le Code CIMA la définit comme étant une société d'assurance mutuelle
qui réunit ses adhérents en groupes distincts dénommés associations et qui répartit, à
l'expiration de chacune de ces associations, les fonds provenant de la capitalisation en
commun de leurs cotisations, déduction faite de la partie affectée aux frais de gestion, entre
les survivants des associations en cas de vie ou entre les ayants droit des décédés des
associations en cas de décès, en tenant compte de l'âge des adhérents et de leurs
versements848. En aucun cas, les sociétés tontinières ne peuvent avoir pour objet de garantir à
leurs adhérents que la liquidation d'une association leur procurera une somme déterminée à
l'avance849. Il en découle que les sociétés tontinières ne pratiquent pas l’assurance dans la
mesure où il n’y a pas garantie mais gestion par les sociétés tontinières des fonds capitalisés
pendant un certain temps et répartis, à l’échéance entre les ayants droits. L’opération relève
davantage d’un pari sur la survie que d’une véritable assurance850. C’est d’ailleurs ce qui
semble conforter le choix du législateur mauritanien à ne pas réglementer les sociétés
tontinières851.

718. En se référant au Code des assurances françaises, le Code CIMA a introduit la faculté
de « constitution de sociétés de groupe d’assurance mutuelle »852. En effet, les sociétés
d’assurance mutuelles pratiquant des assurances de même nature peuvent se regrouper et
former des unions de mutuelles853 qui ont pour mission essentielle de réassurer intégralement
les contrats souscrits par ces sociétés d'assurance mutuelles et de donner à celles-ci leur
caution solidaire854.

719. Les sociétés de groupe d’assurance mutuelle855 peuvent dans nos systèmes d’assurance

848
Art. 331 alinéa 1 du Code CIMA.
849
Art. 331-11 du Code CIMA.
850
M. PICARD et A. BESSON, Les assurances terrestres, Le contrat d’assurance, Tome 1, 5ème édition,
L.G.D.J., 1982, p. 695.
851
V. supra, n° 23 et s.
852
Article 330-50 du Code CIMA.
853
Expression consacrée par le CAF.
854
Article L322-26-3. CAF.
855
Selon le Code CIMA, au sens du 8°) de l’article 301-1 : l’expression « société de groupe d’assurance »
désigne les entreprises dont l’activité principale consiste : - à prendre et à gérer des participations dans des
entreprises soumises au contrôle de la Commission Régionale de Contrôle en application des articles 300 et 309
ou dans des entreprises de réassurance situées dans l’espace CIMA ou dans des entreprises d’assurance ou de
réassurance dont le siège social est hors de l’espace CIMA, - et/ou à nouer et à gérer des liens de solidarité
financière importants et durables avec des sociétés d’assurance mutuelle régies par le Code des assurances ou
des entreprises de réassurance mutuelle situées dans l’espace CIMA ou des entreprises d’assurance ou de

343
avoir l’avantage de faciliter la création et le développement de petites sociétés d’assurance
mutuelles dont les primes sont faibles et les risques insuffisamment compensés.

B- La distribution de l’assurance.

720. La distribution joue un rôle assez important voire majeur dans l’activité d’assurance.
Elle constitue l’élément clé de la stratégie de vente des compagnies d’assurance. Du fait de la
complexité de l’assurance, la distribution de celle-ci nécessite une démarche dans laquelle la
confiance et la crédibilité doivent être au centre de la perception de l’offre par les potentiels
assurés. On peut d’ores et déjà comprendre l’importance de ces canaux dans le
développement de l’assurance dans la sous-région856.

Malgré une diversification accrue de la distribution marquée par l’apparition de nouveaux


canaux, le réseau traditionnel reste à ce jour, incontestablement dominants. Ainsi, les canaux
prépondérants de distribution sont de trois ordres en Afrique :

- la souscription directe auprès d’une compagnie d’assurance,

- la souscription par l’entremise d’un courtier ou d’un agent général,

- celle par le biais des agents commerciaux.

721. Au Bénin et en Mauritanie, il a été noté la prédominance de la souscription directe,


suivie de celle par l’intermédiaire des courtiers d’assurance (1) et des agents généraux (2). En
effet, Plus de 50 % de la production des compagnies d’assurances provient de ce réseau
d’intermédiaires, animé par les courtiers et les agents généraux

Aujourd’hui dans le droit applicable dans l’espace CIMA, une liste des courtiers agréés est
régulièrement établie par la Direction Nationale des Assurances et communiquée aux
entreprises d’assurance agréées sur le territoire de l’Etat membre. En plus d’être soumis à
l’agrément préalable à travers l’octroi d’une carte professionnelle par le Ministre en charge du
secteur des assurances de l’Etat dans lequel l’autorisation est demandée857. Des conditions

réassurance mutuelle ayant leur siège social hors de l’espace CIMA. L’un au moins de ces organismes est une
entreprise soumise au contrôle de la Commission Régionale de Contrôle en application des articles 300 et 309. »
856
http://www.enass.fr/PDF/travaux_recherche/MBA_ENASS_2013_DIARRA_Assurance-zone-Cima.pdf
857
Articles 509-510 du Code CIMA.

344
d’honorabilité858, de capacités859 sont requises pour les professions aussi bien de courtiers que
d’agents généraux.

1) Les courtiers

722. Les entreprises d'assurances ont accès au marché via des intermédiaires. Il s'agit de
professions réglementées par le titre V du CAM et le livre V du Code CIMA, dont les
membres doivent en l’occurrence présenter des conditions de capacité professionnelle ainsi
que des modalités prévues par la loi.

723. Le courtier d'assurance est qualifié de professionnel qui exerce ses activités sous forme
de commerçant indépendant ou de société commerciale. Les courtiers sont soumis aux
dispositions des articles 371 à 376 du CAM. Les règles spécifiques relatives aux courtiers
d’assurance et sociétés de courtage d’assurance sont contenues dans les articles du 530 à 547
du Code CIMA. Ils sont propriétaires d'un portefeuille de clients qu'ils peuvent céder à un
successeur. Le courtier est, en principe, le mandataire de l'assuré qu'il représente à l'égard de
l'assureur. Il effectue des actes d'entremise en plaçant les risques de leurs clients auprès des
compagnies qui lui semblent les mieux placées pour les garantir, au niveau de la couverture
d'assurance, des conditions de garantie, ou de la tarification. Il est rémunéré par un
commissionnement sur les primes de polices souscrites par son intermédiaire, lequel lui reste
dû tant que la police est en vigueur, même en cas de changement de courtier.

724. Dans la pratique, le courtier peut parfois exercer un véritable rôle de prestation de
services, dans la souscription et la gestion des polices d'assurances de certaines entreprises,
allant jusqu'à la gestion des sinistres, pour lequel ils sont rémunérés par des honoraires,
lesquels se substituent généralement au commissionnement sur les primes. Pour les risques

858
Art 506 du Code CIMA « Ne peuvent exercer la profession d’agent général ou de courtier d’assurances : • 1°
les personnes ayant fait l’objet d’une condamnation pour crime ou délit ; • 2° Les personnes ayant fait l’objet
d’une mesure de faillite personnelle ou autre mesure d’interdiction relative au redressement et à la liquidation
judiciaire des entreprises ; • 3° Les personnes ayant fait l’objet d’une mesure de destitution de fonction
d’officier ministériel en vertu d’une décision de justice. Les condamnations et mesures visées au précédent
alinéa entraînent pour les mandataires et employés des entreprises, les agents généraux, les courtiers et
entreprises de courtage, l’interdiction de présenter des opérations d’assurance. Ces interdictions peuvent
également être prononcées par les tribunaux à l’encontre de toute personne condamnée pour infraction à la
législation ou à la réglementation des assurances ».
859
V. articles 508 et 509 du Code CIMA.

345
importants, les courtiers négocient les conditions des contrats d'assurance avec l'assureur, et
peuvent établir les polices. Ainsi, celui-ci peut apparaître aux yeux des tiers, comme ayant lui-
même la qualité d'assureur et court le risque de se trouver assigné. Il peut arriver que
l'assureur confie à un courtier le mandat de délivrer des notes de couverture et de recouvrer
des primes, voire de gérer certains sinistres, et devenir ainsi également le mandataire, au
moins apparent, de l'assureur. Malgré cela, et sauf abus de droit, l'assuré mandant peut
révoquer discrétionnairement son courtier mandataire, sous réserve du caractère de mandat
d'intérêt commun. Bien que le courtier qui n’engage pas la responsabilité de l’assureur ne soit
pas l’assureur, et bien que ce soit un entremetteur, mandataire de l’assuré non de l’assureur
encore que dans la pratique, certains courtiers profitent de mandats de l’assureur, il exerce une
profession libérale et indépendante dans le domaine de l’assurance. Ainsi le Code CIMA
dispose : « Les courtiers d’assurances sont des commerçants sans qu’il y ait lieu de
distinguer, suivant que les actes qu’ils accomplissent sont civils ou commerciaux. Ils sont
soumis comme tels à toutes les obligations imposées aux commerçants »860.

725. Dans l’espace CIMA, l’agent général et le courtier doivent justifier d’une garantie
financière qui doit être au moins égale à 10 millions de F CFA (environ 15.245 euros). Cette
garantie doit croître en fonction des primes perçues par ces intermédiaires en vue d’être
reversées aux entreprises d’assurance861. Le non versement d’une prime d’assurance versée
par l’assuré peut avoir de grave conséquence en cas de sinistre pour l’assuré. C’est pourquoi,
le courtier doit justifier d’un contrat d’assurance couvrant les conséquences pécuniaires de sa
responsabilité civile professionnelles. Au Sénégal par exemple, comme le rapporte Pierre
DIOUF : « suite à un accident survenu le 16 avril 1999, l’attestation d'assurance indiquée
dans le P,V. ne correspondait pas à la numérotation de la société d'assurance, ce qui veut
dire qu'elle a été délivrée par un courtier qui n'avait pas reversé la prime, Pour cette raison
la compagnie d'assurance a refusé la prise en charge des victimes; au nombre de 28 à
l'Hôpital Général de Grand-Yoff. La facture provisoire pour 4 jours d'hospitalisation est
estimée à 4 086 300 F CFA. » Pour remédier à cette pratique, le Code CIMA a procédé à une
innovation, énoncée au nouvel article 541, proclamant l’interdiction aux intermédiaires, sous
peine des sanctions prévues aux articles 534-2 et 545 du Code des assurances, d'encaisser des
primes, des fractions de primes, de faire libeller ou de recevoir des chèques libellés à leur
ordre. Toutefois, cette interdiction ne s’applique pas aux paiements effectués en espèces

860
Art.531. Code CIMA.
861
Art 524 et 525 du Code CIMA.

346
n’excédant pas la somme d’un million de FCFA par police, ni aux paiements par chèques
libellés à l’ordre de l’assureur. Il convient de souligner que dans la nouvelle rédaction de
l’article 541 du Code des assurances, la faculté laissée à l’assureur de donner un mandat
d’encaissement aux intermédiaires, a été supprimée. L’optique est de privilégier le transfert
direct de la prime de l’assuré à l’entreprise d’assurance. Afin d’éviter toute fraude.
Cependant, les intermédiaires disposent d’un mandat général d’encaissement des primes dont
les paiements effectués en espèces n’excédent pas la somme d’un million de FCFA par police.
Par conséquent, le mandat d’encaissement n’a pas été totalement supprimé. L’institution de ce
mandat, pour des raisons pratiques liées au faible niveau de bancarisation des pays en voie de
développement, est une dérogation au principe de l’exercice de la profession de courtier
consacrée par l’Acte uniforme de l’OHADA relatif au droit commercial général notamment
en ses articles 176 et suivants. En pratique, la remise de fonds à l’intermédiaire ne vaudra
encaissement de la prime que si l’assureur lui a délégué l’émission du contrat.

S’agissant particulièrement du courtier, il doit justifier d’un contrat d’assurance le


couvrant contre les conséquences pécuniaires de sa responsabilité civile professionnelle (art
537 du Code CIMA). L’exercice de la profession de courtier est soumis à l’agrément
préalable du Ministre en charge du secteur des assurances de l’Etat dans lequel l’autorisation
est demandée862. Une liste des courtiers agréés est régulièrement établie par la Direction
Nationale des Assurances et communiquée aux entreprises d’assurance agréées sur le
territoire de l’Etat membre.

2) Les agents généraux

726. Que ce soit, à l’échelle nationale ou internationale, une entreprise d’assurance ne peut
être en contact direct et permanent avec toute la clientèle susceptible d’être intéressée par ses
opérations d’assurance. Aussi a t-elle besoin d’un réseau d’agents généraux, constitués par
des personnes physiques ou morales chargées, en vertu d’un mandat, de proposer leurs
opérations et surtout de souscrire des opérations d’assurance en son nom. Contrairement au
courtier, l’agent général est le représentant exclusif d’une entreprise d’assurance. Lorsque la
présentation d’une opération d’assurance est effectuée par une personne habilitée,

862
Article 201 du Code CIMA.

347
l’employeur ou le mandant est civilement responsable du dommage causé par la faute,
l’imprudence ou la négligence de ses employés ou mandataires agissant en cette qualité,
lesquels sont considérés comme des préposés nonobstant toute convention863.

Il existe plusieurs types d'agents généraux :

- les agents de réseau limités à la distribution des produits d'une seule compagnie
d'assurances dans une zone géographique déterminée,

- les souscripteurs spécialisés dans une ou plusieurs branches spécifiques au service de


compagnies d'assurances ou de réassurances, agissant pour le compte de celles-ci dans
leur ensemble (pool) ou individuellement,

- les souscripteurs au service d'une compagnie d'assurances ou de réassurances étrangère


autorisée à exercer dans un pays.

727. En France, les agents généraux sont soumis à des décrets portant leur statut864. Le
Code CIMA et le CAM ne reprennent pas les textes français. D’ailleurs très peu de
dispositions seront consacrées par le Code CIMA et le CAM aux rapports entre les agents
généraux et leurs mandants, d’une part et les assurés, d’autre part.

Les quelques dispositions du CAM concernant le l’agent général permettent de les


considérer comme étant les mandataires des sociétés d'assurance865. Les articles 368 à 370
seront quant à eux relatifs aux justificatifs et conditions d’exercice du métier.

728. Dans la zone CIMA, les personnes quoi exercent la profession d’agent général
d’assurance le font en vertu d’un mandat d’une durée de deux ans non renouvelable 866. Cette
disposition qui limite la durée du mandat de manière irrévocable est assez étonnante car, elle
rentre en contradiction avec l’alinéa 1 de l’article 529 du même Code qui prévoit : « Le
contrat passé entre les entreprises d’assurance et leurs agents généraux, sans détermination
de durée, peut toujours cesser par la volonté d’une des parties contractantes ». La seule
manière acceptable de concilier ces dispositions est de considérer que lorsque le mandat est

863
Voir art.505, Code CIMA.
864
Voir. Décret n°96-902 du 15 octobre 1996 portant approbation du statut des agents généraux d'assurances en
France.
865
Art 367.CAM.
866
art.501-2° du Code CIMA.

348
conclu pour une durée déterminée, il ne peut aller au delà de deux ans et n’est tacitement pas
reconductible, s’il est conclu pour une durée indéterminée, il peut être résilié unilatéralement.

Toutefois le Code CIMA prévoit des dommages et intérêt en cas de résiliation unilatéral et les
parties ne peuvent renoncer d’avance à les demander867.

729. La grande majorité des potentiels assurables du continent africain n’arrive toujours pas
à faire la distinction entre assureurs et intermédiaires. Cela traduit la méconnaissance des
mécanismes fondamentaux de l’assurance par le grand public et en particulier l’ignorance des
réseaux utilisés par les sociétés d’assurances pour promouvoir leurs produits. Cette situation
nous oblige à nous demander si le modèle de distribution pratiqué en Afrique est adéquat dans
des marchés immatures.

Paragraphe II : La liquidation des sociétés d’assurances

730. Toute activité commerciale comprend un risque certain, qui est celui de l’échec de
l’activité en elle même. Une étude de la liquidation des sociétés d'assurance reviendrait à
chercher non seulement les différentes hypothèses de liquidation de ces sociétés mais aussi de
réfléchir au régime juridique leur étant applicable. Les procédures collectives sont considérées
comme l'ensemble « des procédures faisant intervenir la justice lorsque le commerçant n'est
plus en mesure de payer ses dettes ». Si l'entreprise est en cessation des paiements mais qu'il
existe des chances réelles de la redresser, elle pourra bénéficier d'un redressement judiciaire.
Par contre lorsque les difficultés financières deviennent irrémédiables, le sauvetage n'est plus
possible. La procédure collective sera destinée à l'apurement du passif. L'hypothèse est celle
d'une liquidation des biens.

731. Le CAM et le Code CIMA prévoient essentiellement deux cas de motifs de liquidation
d’une compagnie d’assurance il s’agit de la faillite de l’entreprise d’assurance (A) et de la
perte totale d’agrément (B). La dissolution volontaire de l’entreprise par l’assemblée générale
des actionnaires (société d’assurance à forme anonyme) ou des assurés (société d’assurance à
forme mutuelle) peut être envisagée s’il s’agit du Code CIMA. En effet, Il peut arriver qu'une
entreprise d'assurance demande que son agrément lui soit retiré. Il s'agit là d'une hypothèse
assez particulière et rare en pratique. Cette demande de retrait d'agrément faite par la société

867
V. art.529, al 2 et 3 du Code CIMA.

349
d'assurance peut s'envisager à la suite d'une dissolution volontaire ou lorsque la société ne
désire plus exercer une activité d'assurance868. L’absence d’activité de la société d’assurance
comme motif de retrait d’agrément en droit mauritanien peut être une option même si la
faculté de demander un retrait d’agrément n’est pas prévue par le CAM.

A- Le retrait total d’agrément d’une société d’assurances

732. Les autorités de contrôle du secteur de l’assurance peuvent retirer en guise de


sanction869 l’agrément d’une société chaque fois que celle-ci enfreint la réglementation en
vigueur dans le domaine de l’assurance870. Aussi, le retrait d’agrément peut ainsi se définir
comme la mise à néant de l’accord aux fins d’exercer en assurance, obtenu de l’administration
par elle. Il s’agit à proprement parler de l’abrogation de l’agrément en ce sens que ses effets
ne produisent que du jour de son intervention. Suivant que l’agrément s’obtient par branche
d’activité exercée, son retrait peut être total ou partiel. Lorsqu’il est total, il entraîne de plein
droit dissolution de l’entreprise concernée et par conséquence liquidation des biens de celle-
ci871 . En zone CIMA, si le retrait total d’agrément concerne une société étrangère, ou une
succursale de société étrangère lorsqu’il, s’agit du droit mauritanien, le retrait d’agrément
n’entraîne pas dissolution de celle ci872 mais la liquidation de l’actif et du passif du bilan
spécial des opérations sur le territoire national de l’Etat membre ou le retrait doit produire
effet873.

733. Dans un souci d’assainissement du marché d’assurances en général, le retrait


d’agrément revêt un intérêt capital. Il a pour objectif de produire un effet dissuasif sur les
compagnies d’assurances en ce sens qu’il les incite à un respect de la réglementation. Il

868
V. art. 328-12 Code CIMA.
869
L’article 312 du Code CIMA prévoit plusieurs sanctions en fonction de la gravité d’infraction il s’agit de :
l’avertissement, le blâme, la limitation ou l’interdiction de tout ou partie des opérations, de toutes autres
limitations dans l’exercice de la profession, la suspension ou la démission d’office des dirigeants responsables et
le retrait d’agrément.
870
V. Art.312 du Code CIMA,
871
art.325-1, Code CIMA, article. Art.237 du CAM.
En effet, la dissolution d’une telle entreprise relève d’une loi et d’une juridiction étrangère droit national ou
872

communautaire s’il s’agit de la CIMA.


873
art.325-1, Code CIMA.

350
s’avère donc être un instrument d’assainissement redoutable du secteur des assurances de la
zone CIMA. Le retrait d’agrément est l'hypothèse la plus fréquente dans la zone CIMA. En
effet les liquidations des entreprises d'assurance sont dues en majeure partie à un retrait
d'agrément décidé par la CRCA. Les décisions de retrait d'agrément sont assez nombreuses
dans certains pays membres de la communauté CIMA. En effet, Jusqu'en 2008 le bilan de la
CRCA en matière de retrait d’agréments se dressait comme suit : pas moins de dix-neuf
sociétés se sont vu retirer la totalité de leurs agréments par la CRCA874, et ont dû cesser toutes
leurs opérations. Au Cameroun, 7 sociétés ont subi ce sort : les « Assurances Mutuelles
Agricoles du Cameroun » (AMACAM), les Provinces Réunies (PR), la Transafricaine
d'Assurances (TAA), la Médiatrice, la société camerounaise d'assurance et de réassurance
(SOCAR), Assurama et Satellite Insurance Limited. Au Gabon, ce fut le cas de trois sociétés :
la société nationale gabonaise d'assurance et de réassurance (SONAGAR), Gabon Vie, et le
groupement gabonais d'assurance et de réassurance (GGAR). Au Sénégal, il s'agit de : la
Nationale d'Assurance IARDT, la Nationale d'Assurance Vie, « Les Mutuelles Sénégalaises
d'Assurance Transporteurs, MSAT », et la société « ALLIANCE d'Assurances du Sénégal
(AAS). En Côte d'Ivoire : la société « La protection Ivoirienne » et « Africa International
Assurances » (AIA). Au Mali ce fut le cas de la SOUTRA. Au Tchad : la société mutuelle
d'assurance de cadres(SMAC). Au Togo : la garantie mutuelle des cadres(GMC). Enfin au
Congo Brazzaville : « La congolaise société d'assurance et de réassurance » (CSAR)875.

Plus récemment, En 2013, la compagnie camerounaise « Alpha Assurance » a perdu son


agrément. En 2012, c’était le cas pour « SAMIRIS ». Le retrait d’agrément a également été
prononcé contre la compagnie ivoirienne « SIAC » en 2010. En 2009, « SADES » du Bénin,
« SOMAT » de la Côte d’ivoire et ont subi cette sanction suprême876.

734. En somme, les causes du retrait d’agrément d’une société ou plus précisément d’une
société d’assurances sont multiples. En effet, une entreprise d'assurance s'expose à un retrait
d'agrément lorsqu'elle enfreint la réglementation des assurances ou se livre « à des pratiques

874
Le retrait total de l’agrément d’une entreprise d’un état membre décidé par la CRCA, emporte, de plein droit,
la dissolution de cette entreprise à dater de la publication de cette décision au journal officiel et/ou dans un
journal d’annonce légale ; cette dissolution entraine la liquidation des biens de l’entreprise. Voir dance ce sens,
A-M. ASSI-ESSO, J. ISSA-SAYEGH et J. LOHOUES-OBLE, op. cit., pp 75-76.
875
Voir note, Martin Ziguélé, Comment renforcer les compagnies d'assurances africaines de la zone CIMA,
CAP Afrique, juillet 2008.
876
Voir : http://www.financialafrik.com/2014/03/18/assurances-en-afrique-cima-la-liste-des-compagnies-
sanctionnees-en-2013/#.V4Q3wdKLTcs, consulté le 14 septembre 2017.

351
qui mettent en péril sa marge de solvabilité ou l'exécution des engagements qu'elle a
contracté envers les assurés877. La CAM ne retient que les cas d’absence prolongée d’activité,
de rupture grave d’équilibre financier ou de modification substantielle des conditions
présentées par l’entreprise en vertu desquelles l’agrément a pu être délivré878.

Cependant pour le Code CIMA, les raisons de retrait d’un agrément sont plus
nombreuses :

- insuffisance du chiffre d’affaires ou absence prolongée d’activité, la non pratique


d'une activité d'assurance traduit en quelque sorte la volonté de la société d'assurance
de ne plus exercer la profession d'assureur. Une société d'assurance est celle qui offre
et conclue directement les opérations d'assurance avec les assurés. Donc il est normal
que son agrément lui soit retiré lorsqu'aucune activité n'est exercée pendant une
certaine durée ;

- frais généraux anormalement élevés et/ou non maîtrisés ;

- survenance d’un sinistre exceptionnel par son montant en dehors de toute couverture
de réassurance ;

- problèmes de gouvernance peuvent affecter profondément et/ou durablement les


activités d’une société d’assurance et par suite compromettre sa solidité financière.
Ces problèmes peuvent concerner la Direction Générale, le conseil d’Administration et
même les actionnaires (sociétés anonymes) ou les sociétaires (mutuelles). A ce propos,
il y a lieu de noter l’adoption en 2009 du règlement n°
0005/CIMA/PCMA/CE/SG/2009 fixant entre autres les responsabilités du Conseil
d’Administration et prévoyant le dispositif de contrôle interne ;

- succession de plan de financement

- refus de déférer à une injonction de la CRCA

- transfert de la totalité du portefeuille d’une compagnie.

877
H. GROUTEL, J-C. BERR, Droit des assurances, Paris, Dalloz, 11e éd., 2008.
878
Article 236 du CAM.

352
Suite au retrait d'agrément d'une entreprise d'assurance relevant des branches IARD, les
contrats souscrits par elle cessent de plein droit d'avoir effet le « 40e jour à midi 879» à
compter de la publication de la décision de retrait. Les contrats d'assurance continueront donc
à produire leurs effets pendant ce délai. Cela se comprend, car, est avant tout primordial de
garantir les intérêts des souscripteurs et bénéficiaires des contrats. Le but recherché est de
laisser du temps aux assurés pour retrouver un nouvel assureur. En effet, en cas de retrait
d'agrément d'une société d'assurance vie ou de capitalisation, les contrats « demeurent régis
par leurs conditions générales et particulières »880. Les contrats en cours sont maintenus
provisoirement en attendant la décision de l’autorité administrative des assurances. Ce
maintien des contrats en cours s’explique par le fait qu'en assurance-vie le passif reste
incertain et futur. C'est-à-dire que l'assureur ne sait pas s'il sera redevable ou non envers
l'assuré. Car ce passif va dépendre de la l’espérance de vie des assurés, jusqu'aux termes de
leurs contrats.

735. Dans la pratique, le sort des contrats en cours peut ainsi se résumer en trois situations.
Soit les contrats seront résiliés à une date déterminée, soit leur échéance sera prorogée en
prononçant la réduction des capitaux assurés, soit enfin ils seront transférés totalement ou
partiellement à une autre entreprise d'assurance.

A- La faillite comme cause de liquidation d’une société d’assurance

736. Même si le droit OHADA des procédures collectives est considéré comme le droit
commun des entreprises en difficulté, il n'en demeure pas moins que pour les sociétés
d'assurance, ce droit ne peut s'appliquer pleinement et ce, en raison de la particularité du droit
des assurances. C'est donc pour cette raison que le Code CIMA a prévu un certain nombre de
dispositions spéciales devant s'appliquer à la liquidation des sociétés d'assurance consécutive
à leur faillite. Le terme faillite renvoie ici une liquidation des biens. Le Code CIMA étant
antérieur à l’Acte uniforme OHADA sur les procédures collectives, (dont l'adoption, par le
Conseil des ministres de cette organisation date du 10 avril 1998 et l'entrée en vigueur du

879
Voir Art. 325-11 du Code CIMA ; Art. L.326.12 Code des assurances français ; art. 243.al.1 CAM.
880
V. art 325-12 du Code CIMA ; art. 244, al.1 CAM.

353
1er janvier 1999) le mot faillite doit être entendu comme la procédure collective ouverte après
cessation des paiements pour liquider les biens du débiteur (liquidation des biens) et non
comme la procédure des déchéances civiles et professionnelles.

La faillite demeure selon le Code CIMA, la première cause de liquidation d’une


entreprise d'assurance881. Bien que l'article 325 cite explicitement la faillite, il faut
comprendre par là toute procédure collective ouverte pour cause de cessation des paiements et
devant conduire à la liquidation des biens de l'entreprise. Une fois la faillite prononcée, elle
produit tous ses effets.

737. Dans l’espace CIMA, c’est la CRCA qui détient le pouvoir d'ouverture de la procédure
collective de faillite. En effet, il a prévu trois formes de saisine de la juridiction compétente
pour ouvrir la procédure collective : la requête de la commission de contrôle des assurances,
la saisine d'office du tribunal ou la saisine par le ministère public après avis conforme de la
commission. Le pouvoir de la CRCA ne laisse manifestement aucune place à l'assignation en
faillite par les créanciers882, les assurés et les bénéficiaires des contrats d’assurance. Cette
situation révèle le caractère dérogatoire au droit commun des procédures collectives en
matière d’assurance, car l'acte uniforme portant organisation des procédures collectives
d'apurement du passif prévoit la saisine par les créanciers de la juridiction compétente aux
fins d'ouverture d'une procédure collective en établissant de manière certaine leurs créances et
le défaut de paiement883.

738. Cette forme de saisine s’applique en Mauritanie, pays où une procédure collective à
l'égard d'une entreprise d’assurance ne peut être ouverte que sur saisine du Ministre
responsable du contrôle des assurances après avis conforme de la commission de contrôle; la
saisine ne peut être requise que par la juridiction compétente, le Ministère public et tout
créancier justifiant d'une créance faisant décision rendue exécutoire, auprès de la commission
du contrôle qui transmet la demande avec son avis au Ministre884.

739. Dans l’hypothèse où ce n'est pas la commission qui prend l'initiative de déclencher la

881
V. article 325 du Code CIMA.
882
V. Cour d'Appel de Lomé, arrêt n°150/2009 du 20 octobre 2009, Sieur Jean SAMVI K. de SOUZA C/ La
Compagnie GTA-A IARDT. Cité par Dali TANKOANO, op cit.,
883
Voir. Article 28 de l'acte uniforme portant organisation des procédures collectives d'apurement du passif
OHADA
884
V. art 238 al.3 du CAM.

354
procédure, l’avis conforme de l'autorité administrative préalablement à l'ouverture de la
faillite reste incontournable. C’est dans ce sens que, relativement aux formes de saisine de la
juridiction compétente pour ouvrir la procédure de faillite, que l'article 325 alinéa 1er du Code
CIMA précise que : « le tribunal peut également se saisir d'office ou être saisi par le
ministère public d'une demande d'ouverture de cette procédure après avis conforme de la
commission de contrôle des assurances ». En somme, que ce soit le juge ou le ministère
public qui en a l'initiative, l'avis conforme demeure une condition sine qua none du
déclenchement de la procédure de faillite.

740. Toujours en zone CIMA, la liquidation est effectuée par un mandataire de justice
désigné sur requête de la Commission par ordonnance rendue par le président du tribunal
compétent. Ce magistrat choisit un liquidateur parmi ceux qui sont agréés par le tribunal et
figurant sur la liste communiquée par la Commission Régionale de Contrôle des Assurances
dans sa requête.

741. Dans le système Mauritanie, la liquidation est effectuée par un liquidateur désigné par
la juridiction compétente sur proposition de la commission de contrôle; la ou les personnes
proposées bénéficient d'une expérience reconnue en matière de direction ou contrôle des
entreprises d’assurance et ne font pas l’objet des interdictions et incompatibilité applicables
aux dirigeants des entreprises d'assurance telles que visées à l’article 212.

En outre, toute procédure collective concernant une entreprise d'assurance relève de la


juridiction spécialisée en matière d'assurance dans le ressort de laquelle se trouve le siège de
ladite entreprise885.

742. Il peut arriver, qu’au lieu d’un retrait d’agrément, la CRCA, toujours dans une logique
de sauvegarde de la société, préconise le transfert des portes feuilles de la branche affectée à
la société qui le désire, pourvu que celle-ci soit elle-même en bon état financier886.

743. L’effet majeur de la liquidation sur la compagnie est le dessaisissement de ses


dirigeants. Le jugement d’ouverture de la procédure met fin aux pouvoirs des dirigeants. La
compagnie est désormais représentée par le liquidateur qui seul peut agir en son nom. C’est
lui qui conduit les opérations liquidatives avec les pouvoirs les plus étendus. Le

885
art.art.238, al.2 du CAM. Le législateur CIMA laisse le soin à chaque Etat membre de déterminer le tribunal
compétent au Bénin, il s’agit des tribunaux de première instance.
V. Convention du 03 avril 2001 et son avenant sur le transfert de l’intégralité du portefeuille vie de la
886

SOCAR à la société BENEFICIAL LIFE INSURANCE COMPANY S.A, cité par E. TCHOMTE, Op. cit.,

355
dessaisissement qui se circonscrit dans un domaine précis ne doit pas se confondre avec ses
notions voisines.

A l’égard des créanciers, le jugement de redressement judiciaire ou de liquidation des


biens produit par lui-même certains effets. Notamment, il suspend les poursuites
individuelles, entraîne la déchéance du terme, arrête le cours des intérêts, entraîne
l’inopposabilité de la période suspecte, confère une hypothèque légale au profit de la
masse887.Lorsque la procédure de liquidation est ouverte, les créanciers sont regroupés de
manière collective dans un groupement, appelée masse, représenté par le syndic.

744. De façon générale, la liquidation des sociétés d'assurance s'exécute suivant un régime
juridique différent selon qu'il s'agit d'une liquidation faisant suite à la faillite de l'entreprise ou
d'une liquidation consécutive à un retrait d'agrément. Dans tous les cas il se pose un problème
conformité entre droit commun et droit spécial. Et la coexistence entre l'autorité judiciaire et
l'autorité administrative serait de nature à rendre difficile la mise en oeuvre de la liquidation ;
Les autorités administratives ont tendance à s'immiscer dans des domaines traditionnellement
reconnus au juge.

887
Elle suspend les poursuites individuelles, l’art 325-8 al 2 du Code CIMA le déclare expressément. C’est
d’ailleurs le corollaire de l’existence d’une procédure collective. Cette suspension a un caractère général en ce
sens qu’elle s’applique à tous les créanciers hypothécaires ou privilégiés, puisque la loi ne fait aucune
distinction.

356
Conclusion du chapitre I

745. On aura de cesse de dire que le secteur des assurances en Afrique est sans aucun doute
l’un des moins performant au monde, et ce, malgré le besoin de sécurité des patrimoines et
des revenus de sa population. Une lueur d’espoir subsiste cependant avec l’évolution
exceptionnelle de deux pays africains (Afrique du Sud et Maroc), qui ont vu ce secteur
évoluer d’une manière similaire à leur secteur bancaire. En effet, la croissance observée dans
ces deux pays peut inspirer ou encourager le développement de ce secteur en Afrique.

746. En se fondant sur l’Afrique du Sud et sur le Maroc, on pourrait dans une certaine
mesure en déduire que c’est la politique sectorielle de l’assurance des pays d’Afrique
subsaharienne qui est à revoir. Des réformes sont nécessaires en matière d’agrément puisque
c’est sur les acteurs de l’activité d’assurance, leur fiabilité et leur viabilité que repose le
développement du secteur des assurances.

747. Le secteur des assurances en Afrique regorge d’opportunités sous-exploitées ou encore


méconnues. Si toutes les stratégies de développement proposées jusque-là n’ont pas permis
une croissance soutenue de l’assurance, il faudrait certainement réfléchir aux alternatives de
développement du secteur des assurances.

357
Chapitre II : Réflexion sur des alternatives de développement de
l'assurance en Afrique

748. L’assurance dans sa forme moderne et, ce malgré toutes les stratégies et énergies
déployés n’a toujours pas pu réussir son intégration complète dans les mœurs et habitudes des
populations africaines. Dans ce sens, Philippe TRAINAR note avec justesse : « (…) ce que la
micro-assurance fait ressortir c’est l’incapacité des couvertures conçues pour les pays
développés ou pour la frange fortunée des pays en développement à fournir une solution pour
la frange pauvre de ces pays »888 Nous avons tout au long de cette thèse analysé les raisons
d’une telle situation. A ce stade de notre étude, il ne s’agit pas de déclarer l’inapplicabilité de
l’assurance au Bénin ou en Mauritanie. Notre réflexion va plutôt s’orienter vers des
alternatives. On comprend d’après Philipe TRAINAR qui se fonde sur les chiffres que
l’assurance est un bien de luxe dont la consommation augmente avec l’enrichissement : « le
ratio prime d’assurance sir PIB augmente continûment avec le développement économique,
passant d’un minimum de 1,7% au Moyen-Orient à un maximum de 10,5% au Japon »889.

Les personnes à faible revenu vivent généralement dans un environnement plus risqué que celui
des autres couches de la population. Elles sont tout aussi exposées aux risques d’accident, de
maladie, de décès, d'invalidité d’incendie ou de toute autre forme de perte de biens. Cette
réalité renforce la nécessite d’un recours évident à une forme de protection : c’est la micro-
assurance dont l’objectif est de vaincre la vulnérabilité des populations africaines non éligibles
aux assurances classiques890. En somme, le continent africain est particulièrement mal loti
quant aux possibilités offertes aux populations leur permettant d'accéder aux soins de santé et
de garantir la sécurité de leurs biens et leur personne.

749. Fort de ce constat, nous mènerons deux études : la première sera consacrée à la micro
assurance en Afrique (Section I) ; la seconde portera sur le cadre juridique de la micro
assurance et ses canaux de distribution (Section II).

Voir préface de M. NABETH, Les Fondamentaux de l’assurance. Micro-assurance, Défis, mise en place et
888

commercialisation, L’Argus de L’Assurance, 2006.


889
Voy. M. NABETH, op. cit., p. 17. C. CHURCHIL, What is insurance for the poor, In Protecting the poor: A
microinsurance compendium. BIT/Fondation Munich-Re, Genève, 2006 p. 15.
890
« La micro assurance serait donc cet outil économique et social adapté à ce segment immense d’une
population dépourvue d’assurance formelle (90% des individus environ) V. M. NABETH op. cit., p.37.

358
Section I : La micro assurance

750. Excepté en Afrique du Sud, contracter une assurance n’est pas une pratique aisée dans
les pays africains et de surcroit dans les pays d’Afrique subsaharienne. En effet, cette pratique
demeure particulièrement rare chez les populations à faibles revenus891. En matière de
couverture sociale, il est avéré que le système public de sécurité sociale censé apporter une
protection sociale à la population, a toujours été basé sur la couverture des fonctionnaires et
autres salariés du secteur public comme privé892. Il en résulte qu’environ 90% de la population
des pays de la zone CIMA ne bénéficie pas de garanties sociales leur permettant de faire face
aux risques professionnels et sociaux893.

751. Pour y remédier, un nombre croissant de gouvernements essaient de promouvoir la


micro assurance en tant qu’instrument incontournable pour se prémunir des risques liés en
partie à la pauvreté et à la précarité. Nous allons exposer le principe de la micro assurance
(Paragraphe I) ; ensuite nous nous intéresserons au domaine de la micro-assurance santé ainsi
qu’au régime d’assurance maladie universel (RAMU) (Paragraphe II).

891
Une étude réalisée en octobre 2009 par le Fonds pour l’innovation en micro-assurance de l’Organisation
Internationale du Travail (OIT) et le Micro Insurance Centre, a révélé que sur le continent seuls 2,6 % de la
population vivant avec moins de 2 dollars US par jour étaient couverts par des produits de micro-assurance.
Pourtant, ces derniers pourraient protéger cette population contre les risques qu’elle encoure.
892
Il faut dire qu’en réalité peu d’Etat dans le monde dispose d’un véritable système public de sécurité sociale. Il
s’agit plus d’un système dit de prévoyance sociale lié à la qualité de travailleurs, que d’un système de sécurité
sociale. Il couvre les fonctionnaires de l’Etat et les salariés du secteur privé (secteur formel). Les principales
catégories d’institutions que l’on retrouve au Bénin sont les suivantes : la CNSS (Caisse Nationale de Sécurité
Sociale au Bénin), qui met en œuvre les prestations aux familles, les prestations de maternité et les prestations en
cas d’accident du travail et de maladie professionnelle, le FNRB ( Fonds National de Retraite du Bénin) la
MSSB (Mutuelle de Sécurité Sociale du Bénin) qui a été créée en 1999 par l’Etat et dont le but est d’étendre
l’assurance sociale (assurance maladie et pension de vieillesse) aux populations de l’économie informelle. Pour
la Mauritanie, l’unique institution de couverture sociale se révèle être la Caisse Nationale de Sécurité Sociale, un
établissement public à caractère industriel et commercial, doté de la personnalité morale et jouissant de
l’autonomie financière. L’organisme a été institué par la loi 67039 du 03 Février 1967 et ses textes subséquents
pour gérer un régime de sécurité sociale en Mauritanie. Le régime couvre trois branches (Prestations familiales,
Risques professionnels et Pensions de vieillesse, d’invalidité et de décès). En plus des trois branches précitées, la
CNSS gère un Fonds d’action sanitaire et sociale (FASS) qui dispense une protection maternelle et infantile à
l’endroit de la femme et de l’enfant et sert des subventions aux organismes nationaux dont l’activité est en
adéquation avec sa mission sociale.
893
Voir en ce sens Rapport relatif à l’Etude sur la micro-assurance dans la zone CIMA, Etat des lieux et
recommandations, Dossier :4410-36-34 (0052), juin 2011, p.42.

359
Paragraphe I : Exposé du principe de la micro assurance

752. La micro-assurance étant une activité récente dans les systèmes, notre objectif est
d’abord en expliquer les fondements (A). Ensuite, pour mieux comprendre la notion, nous
devrons en présenter quelques produits(B)

A- Fondements de la micro assurance

753. Le concept de micro-assurance à l’image de l’assurance classique n’est pas phénomène


nouveau. D'ailleurs, la micro assurance est fondée sur certains principes que l’on retrouve dans
l'assurance 894 dont les prémices remontent à l’Antiquité895.

Cependant, les origines des services de micro-assurance sont associées à ceux de la


microfinance dans un souci d’efficacité et de pérennité des activités des Institutions de
Microfinance. La micro-finance serait donc le précurseur de la micro assurance. Sur le sujet,
contrairement à nombres d’auteurs qui font correspondre les débuts de la micro-finance aux
initiatives du prix Nobel de la paix 2006, Muhammad YUNUS 896. C’est en 1849, qu’un

894
Les principes sont les mêmes que ceux de l’assurance:
- les risques doivent apposer une limite à la perte maximale découlant d'un sinistre;
- l'étendue, la gravité et la probabilité d'occurrence doivent être mesurables, afin de permettre la
détermination juste et équitable des primes de base;
- les risques moraux, subjectifs, d'anti sélection doivent être analysés et limités dans la mesure du
possible;
- le cadre légal doit être favorable à l'élaboration et la commercialisation des produits de micro
assurance;
- les primes et les montants de garantie doivent être compatibles avec la viabilité de l'activité assurée
et la capacité de souscription. Une prime inférieure à l'avantage offert par la police rend l'achat
attractif;
- les risques assurables se limitent strictement, aux risques futurs, fortuits, aléatoires;
- la loi des grands nombres joue un rôle très important, car c'est en mutualisant le plus grand nombre
de risques dans une catégorie donnée qu'on est en mesure de proposer une couverture intéressante.
V, en ce sens Josiane Lise MABOPDA FOKA, La microassurance outil de lutte contre la
pauvreté : quelle performance sociale ?,M.B.A Recherche, Gestion Internationale, Université du
Québec, Montréal, 2010, p.31.
895
V. chapitre préliminaire.
896
Lancé en 1976, c’est précisément en 1983, que Muhammad YUNUS formalisa le concept en créant la
Grameen Bank au Bangladesh. Comme toute institution financière, les crédits proposés sont destinés aux
populations pauvres. Ces « micro-crédits » ont connu un succès impressionnant lors de leur création. Néanmoins,

360
bourgmestre prussien dénommé Friedrich Wilhelm RAIFFEISEN, fonde en Rhénanie la
première société coopératives d'épargne et de crédit. Il s’agissait d’une institution offrant des
services d'épargne aux populations ouvrières pauvres et exclues des banques classiques897.
L'épargne collectée permettait ainsi de consentir des crédits à d'autres clients. II s'agissait à
l'époque d'organisations de type mutualistes. Le mouvement s'est par la suite propagé en
Amérique du Nord et en Europe898. Le développement de la micro-assurance dans le sillage de
la microfinance explique pourquoi la micro-assurance a été aussi analysée par certains comme
un simple complément du microcrédit.

754. En Afrique, les populations n'ayant pas accès au système bancaire ont comblé tant bien
que mal l'absence d'un système bancaire par le système informel. Les pauvres ont souvent eu
recours à ce secteur pour subvenir à leur besoin et pour faire face aux risques. En cas
d’imprévu, il s'agit d’un recours à une combinaison de solutions provenant de sources diverses,
en l’occurrence épargne familiale, tontines, de banquiers ambulants (usuriers)... Il se trouve que
dans le contexte actuel de la modernisation l’épargne familiale s’avère insuffisante étant donné
l'avalanche de risques auxquels les pauvres doivent faire face. Le système de tontines comporte
pour sa part beaucoup de rigidités. Quant aux autres systèmes, on note par exemple des taux
usuraires souvent très élevés qui paradoxalement font des charges financières un facteur
important de pauvreté.

755. L’absence de recours aux assurances formelles procéderaient non pas d’une fatalité,
mais de justifications facilement explicitées par ces populations comme la méfiance à l’égard
des assureurs, l’ignorance même de leur existence, l’incapacité de payer des primes dont les
montants correspondent à la moitié d’un revenu annuel, ou le sentiment que l’assurance est
décidément « une province des riches » à mille lieues de leurs préoccupations899.

756. Selon le BIT, «, la micro assurance est mécanisme de protection des personnes à faibles
revenus contre les risques (accident, maladie, décès, catastrophe naturelle...) en échange du

le risque de non remboursement du crédit est particulièrement élevé. En particulier en raison des maladies et
risques multiples. C’est pour se prémunir ces risques et pour sécuriser le processus de micro-crédit, que sera
développée une autre branche de service à destination des plus pauvres : la micro-assurance. Voy, micro
assurance, origines et évolutions en cours sur, http://www.galea-associes.eu/2013/11/micro-assurance-origines-
et-evolutions-en-cours/, consulté le 22 septembre 17
897
S. BOYE, J. HAJDENBERG et C. POURSAT, Guide de microfinance, Eyrolles 2009, p.17-19.
898
S. BOYE, op. cit. ,p.,19.
M. NABETH, La micro-assurance en Afrique, ou la construction d’assurances modernes au-delà des
899

apparences juillet 2009.

361
paiement de primes d'assurance adaptées à leur besoin et niveau de risque. Elle cible
principalement les travailleurs à faibles revenus des pays en voie de développement,
particulièrement ceux travaillant dans le secteur informel qui sont souvent mal desservis par les
assureurs commerciaux et les systèmes d'assurance sociale »900. Cette conception de la micro-
assurance a reprise par Caroline PHILY, du Fonds pour l'innovation en micro assurance, à la
32ème assemblée générale de la FANAF en Côte d'Ivoire en février 2009.

757. Pour Craig CHURCHILL, « La micro-assurance consiste à protéger les personnes à


faible revenu contre des dangers spécifiques, ce en échange du paiement régulier de primes
dont le montant est proportionnel à la probabilité et au coût du risque encouru »901. Craig
Churchill soutient qu'il existe deux grandes catégories de micro-assurance. L'une tournée vers
la protection sociale qui vient pallier l'absence de programmes gouvernementaux appropriés ;
l'autre se propose d'offrir un service financier vital aux ménages à faible revenu en développant
un modèle de couverture pouvant leur permettre de devenir un marché rentable pour les
assureurs commerciaux. Comme Janus, dieu romain gardien des portes et divinité des
commencements, la micro-assurance a donc deux visages902. Ces deux aspects de la micro-
assurance ont cependant beaucoup de similitudes si bien que tout travail sur la micro-assurance
qui se veut complet doit tenir compte des deux variantes903. La micro-assurance à travers ses
diverses cibles et ses formes multiple est plurielle dans ma mesure où elle s'incarne aussi bien
dans les mutuelles de santé soutenues par des bailleurs de fonds et des ONG que dans des
programmes développés par de grands assureurs capitalistiques.

758. D'après Caroline PHILY, les caractéristiques de la population cible sont les suivantes :

- les personnes à faibles revenus assurables;

- les personnes vulnérables aux risques (décès, maladie, perte de biens, catastrophes
naturelles ... );

- les personnes travaillant généralement dans le secteur informel;

900
http://fanaf.org/article_ressources/file/20090212-Micro-assurance_Caroline-Phily.pdf , consulté le 15
septembre 2017
901
C. CHURCHILL, Guide de la micro-assurance, Protéger les plus démunis, BIT/ Munich-Re Foundation, ILO,
2009., p.12.
902
http://revue-risques.fr/revue/risques/html/Risques_81-82_0020.htm/$file/Risques_81-82_0020.html.
903
Voir, H. DADEM GNIAMBE, L'essor de la micro-assurance en Afrique : enjeux et perspectives mémoire
cycle III, 2010, voir http://www.memoireonline.com/12/13/8333/L-essor-de-la-micro-assurance-en-Afrique--
enjeux-et-perspectives.html, consulté le 20 aout 2017.

362
- les personnes ayant des revenus irréguliers;

- les personnes peu familiarisées avec l’assurance formelle

- les personnes ayant recours à une multitude d'instruments comme mécanismes de


gestion des risques;

- les personnes qui font généralement peu confiance aux compagnies d’assurance904.

759. Très peu de chiffres concernant la micro-assurance existent. Néanmoins, d’après le


BIT, 500 millions de personnes dans le monde bénéficiaient d’une micro-assurance en 2011,
contre seulement 135 millions en 2009. Aujourd’hui, plus de 260 millions de personnes à
faible revenu dans les pays en développement bénéficient d’une police d’assurance.
Néanmoins, il reste actuellement un grand nombre de personnes sans couverture905. Environ
90% de la population des pays d’Afrique francophone est sans couverture sociale permettant
de se prémunir contre les aléas de la vie. En ce qui concerne l’assurance santé, moins de 3%
de la population est couverte par un régime proposé par les assureurs906.

A- Présentation des produits de la micro-assurance

760. La micro-assurance peut couvrir une multitude de risques autant divers que variées :
maladies, blessures, traumatismes, décès et perte de biens brefs, quasiment tout risque de
l’assurance classique. Etant conçue pour être accessible aux populations à faible revenu les
produits peuvent porter sur la personne (1) ou sur les biens (2).

904
http://fanaf.org/article_ressources/file/20090212-Micro-assurance_Caroline-Phily.pdf, visité le 02 octobre
2017.
905
11è Conférence Internationale sur la Micro-assurance 3 – 5 novembre 2015, Casablanca, Maroc,
http://www.munichre-foundation.org/dms/MRS/Documents/Microinsurance/2015_IMC/11thIMC_Info_Fr.pdf,
consulté le 12 septembre 2017
906
Ce constat provient d’une étude sur la micro-assurance dans la zone CIMA qui a été publiée 2011 par DID.
Voir https://www.microfinancegateway.org/fr/library/les-nouveaux-contours-de-la-micro-assurance-quelle-
place-pour-les-imf, consulté le 12 septembre 17.

363
1) La micro assurance de personnes

761. Dans cette catégorie nous classerons la micro assurance santé que nous évoquerons dans
un paragraphe particulier907, la micro assurance accident corporel (a), la micro-prévoyance vie
(b), la micro- vie épargne (c).

a) la micro assurance accident corporel

762. Les personnes à faible revenus ne sont malheureusement pas épargnées par les
conséquences des accidents corporels n’épargnent malheureusement pas. D’ailleurs, les
conséquences peuvent être d’autant plus néfastes que généralement aucune somme d’argent
n’est prévue dans le budget des ménages des plus pauvres pour y faire face. Dans la pratique,
la micro-assurance couvrant le décès ou l’invalidité est de loin le produit le plus plébiscité par
les assureurs et les Institutions de Micro-finance en raison de sa simplicité et de sa
rentabilité908. Cependant le succès de l’assurance invalidité vient du fait qu’elle est le plus
souvent associée à l’assurance emprunteur. En dehors de cette hypothèse, les micro-assureurs
se limitent souvent à couvrir les conséquences les plus facilement observables : incapacité
permanente, décès accidentel etc.909.

b) La micro-prévoyance vie

763. La pratique révèle que les produits prévoyance sont responsables du développement de
la micro-assurance dans les pays émergents. La micro assurance vie devance de loin les
produits de micro épargne et de micro capitalisation910. Cette situation est liée à son
accessibilité et surtout l’importance qui lui est accordée par les Institutions de Micro Finances

907
V. infra, 781 et s.
908
M. NABETH, op cit., p. 227.
909
Voir en ce sens Etude sur la micro-assurance dans la zone CIMA op., cit
910
Voir en ce sens Etude sur la micro-assurance dans la zone CIMA. op.cit., p.1.

364
(IMF) en matière de distribution. Cette catégorie de micro assurance connaît des subdivisions
qu’il importe de préciser, il s’agit essentiellement : la micro crédit vie, la micro funérailles,

- la micro crédit vie

764. L'assurance liée au crédit : est très souvent le premier produit présenté par les micros
assureurs. Prenant un caractère souvent obligatoire911, de l’avis des assureurs, il a la
particularité de protéger aussi bien le prêteur que l’emprunteur. Le développement de
l’assurance en cas de décès est dû au fait qu’il constitue un moyen pour les IMF de se
prémunir contre les éventuels impayés de leurs emprunteurs en cas de décès. Dans la pratique
cette micro assurance est destinée à garantir le remboursement de l’organisme préteur
(bénéficiaire), de l’encours restant dû du crédit de chaque emprunteur, en cas de décès ou
d’invalidité partielle ou totale, temporaire ou définitive avant l’échéance du prêt. En dépit de
son énorme succès, les produits crédit- vie font l’objet de vives critiques et ne sont pas
analysés par tous comme des produits de micro-assurance puisqu’ils avantagent le prêteur si
l’emprunteur décède ou est atteint d’une incapacité ou d’une invalidité. De plus l’assurance
prend fin en même temps que le crédit et elle ne vise que les emprunteurs qui apparaissent
bien souvent mieux lotis912.

- la micro funérailles

765. L’objectif de ce contrat obsèques est de permettre à une personne de régler, de son
vivant, le coût, et, éventuellement, le déroulement de ses funérailles. Dans plusieurs pays en
développement, les obsèques constituent des évènements très importants occasionnant des
dépenses exorbitantes pour les familles, qui se trouvent déjà dans des situations très
précaires913.

766. Une étude approfondie de Jim ROTH réalisée sur la ville de Graham stone, située dans
une des régions les plus pauvres de l’Afrique du Sud, permet de comprendre comment sont
organisées les obsèques. En effet : « des rafraichissements sont proposés par la famille du
défunt aux visiteurs, qui lorsqu’ils sont trop nombreux sont alors conviés à s’installer dans
une tente à l’extérieur. (…) les gens arrivent de tout le pays et sont logés dans le quartier du
défunt jusqu’au jour de l’inhumation. La famille est néanmoins responsable du couvert. Puis

911
La souscription d’un tel contrat n’est pas laissée à la libre discrétion du client. Elle constitue une condition de
l’octroi du prêt pour les institutions de micro-finance.
912
Rapport relatif à l’Etude sur la micro-assurance dans la zone CIMA annexe A.p.8/22
913
Voir supra, n° 66.

365
après l’inhumation, tous les participants rejoignent le foyer du défunt. La fête peut
commencer après le rituel des ablutions (…), quatre à six moutons ainsi qu’une vache sont
alors sacrifiés par la famille et servis aux invités avec des légumes, du riz et des pommes de
terre. Les chaises et les tables sont généralement louées (…) »914.. Ces besoins énormes dans
le domaine des obsèques ont permis le développement de la micro-assurance obsèques en
Afrique du Sud, où les garanties obsèques constituent l’un des marchés les plus importants
d’Afrique du Sud. Dix millions d’adultes (soit 37% des adultes sud-africains)915. Ces
opportunités de développement des assurances funérailles se retrouvent dans la plupart des
pays de la zone CIMA916. Au Bénin, un contrat obsèques familiales garantit le payement
d’une indemnité forfaitaire, en cas de décès avant le terme du contrat de l’un des membres de
la famille assurée (assuré principal, conjoint, enfants). Cette indemnité est principalement
destinée à couvrir tout ou partie des frais exposés lors des obsèques de l’assuré décédé917.

767. Les produits de micro- funérailles ne permettent pas que la couverture des frais
suscités par l’organisation des obsèques de l’assuré, mais quelques produits offrent une
somme forfaitaire additionnelle pour permettre aux bénéficiaires de pallier le déficit de revenu
qui résulte du décès du principal pourvoyeur de fonds. Ces fonds pourront être utilisés par les
bénéficiaires de la manière qui leur convient918.

c) La micro- vie épargne

768. Les avantages fiscaux sont à l’origine de l’expansion de l’assurance vie dans les pays
développés919. Cependant, en Afrique, la volonté d’épargner à travers une assurance vie est
plutôt une stratégie de survie ou une réalité existentielle. Cela n’empêche pas que les produits

914
Voir M. NABETH op. cit., pp.229-230.
915
Voir M. NABETH op. cit.p.231.
916
Les étapes que nous venons de décrire sont présentes dans l’organisation des obsèques dans bon nombre de
pays de la zone CIMA, et essentiellement au Bénin. Cela démontre qu’il y’a donc un besoin énorme de
couverture dans le domaine des funérailles dans la zone CIMA.
917
Voir. http://www.alafianetwork.org/index.php/actualites-sur-la-microfinance/323-cif-vie-benin-une-
compagnie-de-micro-assurance-creee-pour-les-sfd.
918
A-J-A SAMY KOUAME, Article sur la consécration de la micro assurance par le Code CIMA. p.15. Voir
pour plus de détail youscribe, http://www.youscribe.com/catalogue/documents/autres/la-consecration-de-la-
micro-assurance-par-le-code-cima-2476703 , consulté le 15 septembre 2017.
919
V. Y LAMBERT-FAIVRE et L. LEVENEUR, Droit des assurances, Dalloz 2011, p.751.

366
d’épargne pure soient moins développés que les produits de prévoyance. Plusieurs facteurs
expliquent cet état de fait : d’abord les banques et les IMF ont souvent peu tendance à
partager l’épargne limitée collectée auprès des marchés les plus démunis et ils constituent le
principal canal de distribution pour la micro-assurance, ensuite les difficultés pour les
ménages à faible revenu de constituer une épargne à long terme etc920. En réalité les produits
en cas de vie qu’on l’on retrouve sont de deux types : la micro- pension et les produits de
dotation

- La micro pension

769. Ce produit permet aux populations pauvres de constituer une épargne. A terme, il
pourrait être une solution en l’absence de couverture sociale pour les travailleurs du secteur
informel en cas de retraite. Ce type de contrat est proposé par CIF-VIE au Bénin vise à
garantir à l’assuré, au terme du contrat, le paiement d’un capital retraite égal au cumul des
cotisations versées, nettes de frais, capitalisées au taux de 3,5 %, et augmentées des
participations aux bénéfices techniques et financiers distribués. Assez structuré en Afrique de
l’est, par exemple, au Kenya, la compagnie CIC offre un produit de Micro-pension qui permet
aux plus démunis d’épargner en vue de la retraite de façon flexible. Afin de simplifier la
collecte de prime, Les contributions peuvent être faites de manière quotidienne à travers des
prélèvements automatiques des téléphones portables921 .

- Les produits de dotation.

770. Ce sont des contrats d’assurance vie qui garantissent un paiement soit lors du décès de
l’assuré ou à la fin du terme spécifié au contrat. Ils permettent donc la constitution d’une
épargne qui sera versée soit en cas de décès922, soit au terme spécifié dans le contrat. Mais le
taux de pénétration de ces produits demeure encore très marginal923

En dehors de la personne, la micro-assurance peut aussi garantir les biens, c’est la micro-
assurance de dommage

920
Rapport relatif à la micro assurance op.cit., annexe A, p.17/22.
921
Ibidem.
922
Le contrat temporaire décès garantit un capital ou une rente au bénéficiaire, en cas de décès de la personne
assurée avant le terme du contrat. Voir, branche 13 proposée par la CIF-VIE.
http://www.alafianetwork.org/index.php/actualites-sur-la-microfinance/323-cif-vie-benin-une-compagnie-de-
micro-assurance-creee-pour-les-sfd, consulté le 28 septembre 2017.
923
Voir idem.

367
2) la micro assurance de dommage

771. Contrairement à l’assurance classique, La micro-assurance de dommage ne couvre pas


la responsabilité civile du micro-assuré. En effet l’article 701, alinéa 1 du Code CIMA relatif
au contrat de micro-assurance, exclut les dispositions de l’article 41 relatif à l’aliénation des
véhicules terrestres à moteur et celles des articles 51, 52, 53,54 et 74 relatifs aux assurances
de responsabilités. Cette exclusion est motivée selon certains auteurs par la complexité des
assurances de responsabilité924.

772. Bien que dénommée micro-assurance de dommage, ce type de contrat ne garantit que
les choses. La micro-assurance de dommage se subdivise en deux sous-groupes d’une part, il
existe les contrats de micro-assurance dommages (a) et celles qui sont régis par une base
indicielle (b)

a) La micro-assurance dommage classique

773. Dans ce type de contrat, on peut classer la micro IARD, et la micro agricole et risques
associés.

- La micro IARD (incendie, accident et risques divers)

774. Selon une étude réalisée en 2006 par Microinsurance centre925, près de 99,3% des
populations considérées comme vulnérables ou à faible revenu n’ont pas d’assurance
habitation. Cette situation s’explique en partie par le fait que très peu de personnes à faible
revenu disposent d’une habitation adéquate. Toutefois la perte d’une maison ou même
d’autres biens à cause d’une inondation, d’un incendie ou toutes autres catastrophes peut
entraîner une grosse perte pour toute une famille. A ce titre, la micro IARD peut se révéler
d’une grande utilité pour les micro assurés. Il se trouve cependant que comme les assurances

924
Voir, J-C NGBWA, Nouvelle règlementation sur la micro-assurance en zone CIMA, communication faite le
30 octobre 2012 à Abidjan, Côte d’Ivoire. cité par A. J. A SAMY- KOUAME, op. cit., p.16.
925
J. ROTH, M-J McCORD et D. LIBERT, The Landscape of Micoinsurance in the world’s 100 poorest
Country, sondage réalisé pour le compte de la Fondation Bill-and-Melinda Gates, 2006. Voir pour plus de
précision rapport relatif à la micro assurance en zone CIMA annexe A, p.12 /22.

368
agricoles classiques ces assurances comportent des frais administratifs importants926, ce qui
pourrait justifier en autre sont manque son faible développement.

En Asie, ce problème ne décourage pas certains micro-assureurs qui offrent des


garanties permettant de couvrir les plus démunis contre les IARD. C’est le cas du «
Prevention Consortium » ou encore du « Regional Risk Transfer Institute » (RRTI) qui
proposent des produits de micro-assurance contre les catastrophes pour les pauvres en Inde.
Ces assurances couvrent le feu, les émeutes, les tornades, les glissements de terrains, les
inondations etc... Ces garanties dommages peuvent être adossées à un crédit pour l’achat d’un
outil de travail927. Bien que potentiellement d’une grande utilité, en Afrique, il semble que ces
produits ne sont pas encore en mesure de se développer dans le domaine de la micro-
assurance.

- La micro agricole et risques associés

775. Cette assurance couvre les pertes de récoltes, la mortalité du bétail, les engins
agricoles et plusieurs dommages liés à l’exploitation agricole contre des risques spécifiques
affectant ces industries. Certains de ces risques tels que les maladies, les invasions
acridiennes, la mortalité du bétail sont susceptibles d’être contrôlés et réduits par l’action
humaine. Ce qui n’est pas le cas d’autres risques structurels tels que les aléas climatiques. En
effet la difficulté principale de l’assurance agricole réside dans son exposition directe aux
catastrophes naturelles d’ordre météorologiques ou climatiques : sécheresse et ses
conséquences telles que les incendies, excès de pluviosité ou inondations, tempête et. Outre
cette difficulté, il se pose le problème de l’évaluation. L’incidence de ces difficultés est que
d’abord, « l’assurance agricole exige une expertise que peu d’acteurs de la micro assurance et
même de l’assurance possèdent ou souhaitent posséder »928, ensuite le coût élevé des primes
pour les agriculteurs. Le caractère onéreux de l’assurance agricole a poussé des Etats
développés tels que la Chine, le Canada, la France ou l’Espagne à mettre en place des
systèmes d’assurance agricoles personnalisés dont les primes sont largement subventionnées
par les pouvoirs publics929.

926
Ces difficultés sont liées à l’évaluation des dommages qui peut nécessiter la présente de plusieurs agents.
L’existence d’un nombre important de de fraude a aussi une répercussion sur les couts administratifs. V. rapport
relatif à la micro assurance en zone CIMA annexe A, p.12 /22.
927
V. Ibidem.
928
V. M. NABETH, op. cit., p.162.
929
V. M. NABETH ibidem.

369
776. Dans les pays en voie de développement, et notamment en Afrique, on estime que plus
de la moitié de la population est localisée en zone rurale et dépend directement des activités
agricoles et d’élevage930.

b) La micro assurance indicielle.

777. Il ressort de l’article 705 du Code CIMA que les risques agricoles sont susceptibles
d’être souscrits sur une base indicielle. Les assurances indicielles tiennent compte de périls ou
d’évènements spécifiques, à une échelle régionale, facilement mesurables par un organisme
habilité. En cas de survenance d’un sinistre, l’indemnisation des assurés est effectuée sur la
base du niveau de l’indice et des capitaux assurés ».

778. L’assurance agricole ou météorologique indexée est basée sur une liste spécifique de
périls ou d’évènements notamment perte de rendement, sécheresse, inondation, définis et
mesurés à l’échelle régionale : au niveau du pays ou d’un district dans le cas du rendement ou
au niveau d’une station météorologique locale dans le cas des indices météorologiques »931.
L’assurance indexée doit être basée sur un indice bien précis qui est en corrélation avec le
rendement agricole ou la perte de récolte d’une région bien donnée. Cet indice permet de fixer
un taux de primes uniforme pour les agriculteurs d’une même région et permet de les
indemniser sur une base uniforme quand les déclencheurs sont atteints. L’assurance indexée
permet une réduction considérable du risque moral, du risque d’anti-sélection et de la fraude,
ainsi que la réduction des coûts administratifs liés à l’évaluation des pertes puisque l’assureur
n’a pas besoin de cet élément pour l’indemnisation.

779. L’indemnisation se fait sur la base de l’indice et non sur la base de la perte réelle subie
par chaque agriculteur. Elle se présente donc comme un dérivé climatique puisque les assurés
sont indemnisés selon les barèmes préétablis dès que les déclencheurs sont atteints et sans
faire de réclamation. Cette situation qui se présente comme un avantage pour l’assureur
constitue un inconvénient pour l’assuré qui peut avoir subi une perte réelle plus élevée que
celle calculée à partir de l’indice. Cependant l’assurance indexée est présentée aujourd’hui
comme un système qui pourrait permettre d’apporter des solutions au monde agricole en lui

930
Selon le Rapport 2011 du FIDA sur la pauvreté rurale (FIDA, Rome, 2010, p. 16), 3,1 milliards de personnes
vivent en zone rurale, soit 55 % de la population mondiale ou 70 % de la population africaine.
931
V. Rapport relatif à l’Etude sur la Micro-assurance dans la zone CIMA précité, Annexe A, p.13.

370
offrant une couverture contre les risques spécifiques auxquels il est exposé. Ce modèle est
expérimenté depuis plusieurs années dans plusieurs pays industrialisés932. N’empêche que le
succès de ce modèle exige la détermination d’un bon indice c’est-à-dire un indice tenant
compte du rendement réel de l’agriculteur. En pratique, tous les agriculteurs visés doivent
présenter le même impact. De plus il faut la mise en place et le fonctionnement d’organismes
météorologiques en mesure de suivre et fournir des données fiables. Il faut admettre que les
exigences matérielles, logistiques et financières nécessaires la mise en place d’un tel système
sont énormes et difficilement réalisables pour les pays africains. Du reste, l’accès des
populations à faible revenu à l’assurance nécessite l’assouplissement des modalités de
souscriptions.

780. Dans les pays à faibles revenus, la dégradation observée ces dernières années en
matière de système de santé est flagrante. Cette dégradation influe négativement le processus
de développement de certains pays africains par exemple. Aujourd’hui, la micro assurance
santé et le régime d’assurance maladie universelle apparaissent comme des techniques
susceptibles de favoriser l’atteinte de nombreux objectifs de développement.

Paragraphe II : Micro assurance santé et régime d’assurance


maladie universelle (RAMU)

781. Dans les pays d’Afrique Subsaharienne, la gratuité des soins s’est appliquée au
lendemain des indépendances. La période était marquée par une prise en charge étatique
complète des prestations de santé. L’objectif visé était de lutter contre les grandes endémies.
La viabilité des structures de santé n’était pas la priorité et le système était assez dirigiste et
les actions uniquement liées à faire face à la situation épidémiologique (lutte anti-vectorielle,
malnutrition, vaccination, etc.) afin de corriger la tendance à la baisse de l’espérance de vie
liée à ces fléaux933. Aussi de nombreux groupes de populations se sont-ils organisés pour
mettre en place des formes de protection sociale adaptées à leurs besoins de santé par la
constitution des mutuelles de santé, et autres groupes d’entraide communautaires.

782. Nous entendons par ces diverses formes de couverture sociale, micro assurance santé

932
Voy. M. NABETH, op.cit., p. 162 et suivants.
933
V. P. NDIAYE, Développement des mutuelles de santé en Afrique : une analyse comparative des approches
et de leurs impacts. 2006. p.4.

371
(A). Garantir à nouveau l’accès aux soins à de leurs populations, et ce quel que soit leur
condition sociale commence à devenir l’objectif de beaucoup de pays sous-développés. Pour
le Bénin, le moyen d’y parvenir reste la mise en place d’un régime d’assurance universelle
(B)

A- La micro assurance santé

783. A l’origine, la micro-assurance était destinée à la couverture du risque santé. En effet,


dans sa conception originelle, la micro-assurance avait pour objectif de couvrir les personnes
exclues des régimes classiques d’assurance maladie, en leur offrant des couvertures maladie
adaptées à leurs conditions de vie. Selon les deux concepteurs de la notion de micro-assurance
à savoir : David DROR et Christian JACQUIER, « le mot micro ferait référence à des régimes
plus petits que les régimes nationaux, tandis que le mot assurance ferait référence à
l’instrument économique. Le terme « micro-assurance » mettrait ainsi l’accent sur deux
éléments : premièrement, la solution passe par des organes basés sur le groupe, deuxièmement,
la solution est l’assurance maladie adaptée aux conditions spécifiques présentées par de petits
groupes de personnes »934.

784. Pour le BIT, « il s’agit d’une association de personnes, à adhésion facultative, à but non
lucratif, dont la base de fonctionnement est la solidarité entre tous les membres. Au moyen des
cotisations des membres, et sur la base de leurs décisions, elle mène des actions de prévoyance,
d’entraide et de solidarité dans le domaine de la prise en charge des risques de maladie »935. Il
existe une énorme diversité d'initiatives désignées par la notion de « micro-assurance santé ».
Cette diversité tient notamment à la variété des acteurs, aux choix organisationnels et aux
mécanismes opérationnels.

Les mutuelles de santé constituent l'une des formes les plus avancées et les plus développées en
Afrique subsaharienne, parmi la diversité de ces initiatives. Nous allons en étudier les
fondements. En effet, une mutuelle est un groupe de personnes qui s’organisent pour faire face,
au moyen de leurs seules cotisations, aux conséquences d’un risque social qui les menace ainsi
que leurs familles. C’est une notion qui ne s’applique pas uniquement à un organisme visant la

934
Voy. M. NABETH, op. cit., p. 32.
BIT/STEP, « la micro assurance santé en Afrique : Guide d’introduction à la mutuelle de santé »,
935

ANCM/WSM, 2000, p.20

372
protection contre la maladie. Les mutuelles se définissent comme des sociétés de personnes, par
opposition aux sociétés de capitaux936.

785. Les mutuelles de santé contribuent à l’amélioration de la qualité des soins et favorisent
la transparence dans la gestion des structures de santé937.Une mutuelle de santé met en jeu un
élément financier, et repose sur un certain nombre de principes de base que nous étudieront tour
à tour, il s’agit de : la solidarité 1), la participation démocratique 2), l’épanouissement 3), le but
non lucratif 4), l’autonomie et la liberté dans les respects de la loi 5) et la responsabilité 6).

1) La solidarité

786. Le principe de solidarité est le premier fondement de la mutualité. Les implications de


ce principe sont doubles :

- chaque adhérent paie une cotisation qui est indépendante de son risque personnel de
tomber malade. Cette cotisation est donc la même quels que soient l’âge, le sexe et
l’état de santé des adhérents ;

- chaque adhérent bénéficie des mêmes services pour un même montant de cotisation.
Une mutuelle de santé instaure donc une solidarité entre les malades et les bien-
portants, les jeunes et les vieux, les différentes catégories professionnelles et sociales,
etc. La solidarité ne s’exprime pas seulement d’une manière financière. Elle peut aussi
se concrétiser par un engagement bénévole en faveur des malades et des handicapés, des
personnes âgées, autrement dit en faveur de groupes à risque. La solidarité est un
concept dynamique. Sa concrétisation, les moyens et les mécanismes pour la réaliser
doivent évoluer avec la société dans laquelle la mutualité se développe938.

936
A. LETOURMY, A. PAVY-LETOURMY, La micro-assurance de santé dans les pays à faible revenu,
agence française de développement, 2005, p. 32.
937
B. FONTENEAU, Les défis des systèmes de micro-assurance santé en Afrique de l’Ouest, Cadre politique,
environnement institutionnel, fonctionnement et viabilité, HIVA/KU Leuven, Leuven, Mars 2004, p.9.
938
Guide de gestion des mutuelles de santé en Afrique Genève, Bureau international du Travail, Programme
Stratégies et Techniques contre l’Exclusion sociale et la Pauvreté (STEP), 2003, p.8.

373
2) La participation démocratique

787. La mutualité est le fruit de la liberté d’association. L’adhésion à une mutuelle est libre,
elle doit s’effectuer sans discrimination raciale, ethnique, sexuelle, confessionnelle, ou
sociopolitique939. Tous les adhérents ont les mêmes droits et devoirs. Ils ont, entre autres, le
droit de participer directement ou indirectement aux instances de décision et de contrôler le
fonctionnement de leur organisation. Cette démocratie participative repose sur la
responsabilisation des adhérents qui, pour exercer pleinement leurs droits, doivent disposer
d’une formation adéquate ainsi que d’informations claires, complètes et compréhensibles.

3) L’épanouissement de la personne

788. Le respect de la dignité de la personne dans toutes ses dimensions, quels que soient son
sexe, sa race, son ethnie, son origine sociale, est un autre principe de base de la mutualité.
Reconnaissant l’originalité de chacun, la recherche de l’épanouissement de la personne doit
aboutir à une plus grande autonomie et responsabilité vis-à-vis de sa propre santé et de celle des
autres. C’est dans cet esprit que les mutuelles offrent à leurs membres non seulement des
formations mais aussi des programmes d’éducation à la santé et qu’elles les encouragent à un
engagement social en vue de l’intégration des malades et des plus démunis

4) Le but non lucratif

789. De par sa vocation, une mutuelle a pour but de consacrer son action au service exclusif
de ses membres. A ce titre, elle ne peut nullement pas poursuivre un but lucratif contrairement
aux sociétés d'assurances, qui sont des sociétés de capitaux à but commercial. La recherche de
profit demeure alors incompatible avec la nature d’une mutuelle de santé. Cependant, cela ne
veut pas dire que les considérations économiques et les principes de bonne gestion puisse être
négligés, car ils contribuent à la réalisation du bien- être collectif. Un surplus de recettes peut,

939
En l’absence d’un cadre juridique et réglementaire spécifique aux mutuelles, la majorité des structures
d’appui et des mutuelles sont régies par la loi du 1er juillet 1901 relative aux associations.

374
une fois qu’une réserve raisonnable a été constituée, permettre d’améliorer les services
existants, répondre à d’autres besoins des membres ou éventuellement réduire le montant des
cotisations940.

5) L’autonomie et la liberté dans le respect des lois

790. Une mutuelle est une organisation libre qui doit pouvoir prendre des décisions sans
demander l’aval des autorités publiques ou de groupes d’intérêt. Cette souplesse dans l’action
est bénéfique aux adhérents dans la mesure où elle permet, entre autres, d’adapter les services
offerts aux besoins, lesquels évoluent. Si une mutuelle est libre et autonome, elle n’en demeure
pas moins soumise aux lois et règlements comme ceux régissant l’enregistrement, la
comptabilité, l’audit, le contrôle, etc. …941.

6) La responsabilité

791. En somme, la solidarité, la participation démocratique, l’épanouissement de la


personne… supposent toujours que la mutuelle et ses membres prennent leurs responsabilités
souvent indiquées dans les statuts ainsi que le règlement intérieur. Les autres principes resteront
lettre morte si la gestion de la mutuelle n’est pas saine, si les membres ne se comportent pas de
manière responsable vis-à-vis de leur santé, de celle des autres, dans l’utilisation des ressources
de la mutuelle, dans les décisions qu’ils prennent dans les différentes assemblées942 etc …

792. L'assurance santé figure parmi les priorités dans les pays en développement. Or 0,3 %
seulement des populations en Afrique subsaharienne en bénéficient943. Les partenaires au
développement misent beaucoup sur la micro assurance dans la mesure c'est un facteur
d'amélioration de l'accès aux soins et du financement de la santé, mais aussi d'extension de la

940
V. dans ce sens, M. KAGAMBEGA, L’assurance maladie au Burkina Faso, De la logique thérapeutique des
acteurs sociaux, à l’appropriation des systèmes de mutualisation des risques sanitaires, thèse, Université de
Bordeaux 2, 2001, p.318.
941
Guide de gestion des mutuelles de santé en Afrique, ibidem.
942
Voir, M. KAGAMBEGA, ibidem.
943
http://www.lesechos.fr/10/12/2013/LesEchos/21581-040-ECH_microassurance---pour-une-sante-plus-
equitable.htm, consulté 20 aout 2017.

375
protection sociale et de lutte contre la pauvreté. La viabilité des systèmes de micro assurance
santé doit aussi passer par une amélioration de la qualité de l'offre de soins. A titre d’exemple,
au Bénin, une étude anthropologique et épidémiologique commanditée par PlaNet Finance et
Sanofi, et conduite par l'IRD (Institut de recherche pour le développement), souligne
l'importance d'adapter l'offre de soins aux besoins des bénéficiaires, en fonction de leurs
caractéristiques économiques et culturelles. Elle pointe aussi la nécessité de sensibiliser les
populations comme les agents de santé aux notions d'assurance et de prévoyance944.

793. Portée initialement par la France, la notion régime d’assurance maladie universelle
promue par l'OMS vise à offrir à toutes les populations un accès à des soins de qualité et une
protection contre les risques financiers liés à la maladie.

B- Le Régime d’Assurance Maladie Universelle (RAMU)

794. Dans la mesure où la santé est incontournable pour le bien-être individuel et collectif
et qu’elle assure par ailleurs à tout système de production, la plus précieuse des ressources à
savoir le capital humain, elle ne peut constituer que la pierre angulaire de tout processus de
développement. Ainsi, son rôle économique et social est indéniable. Proclamé formellement
sur le plan international dès 1946, date de signature à NEW YORK de la constitution de
l'organisation mondiale de la santé, le droit à la santé était défini dans son préambule comme :
« un état de complet bien-être physique, mental et social et ne consiste pas seulement en une
absence de maladie ou d’infirmité ». L'article premier de ladite constitution ajoute que : « le
but de l'organisation mondiale de la santé est d'amener tous les peuples au niveau de santé le
plus élevé possible ».

795. La couverture universelle trouve son fondement dans la Constitution de l’OMS,


adoptée en 1946945, qui fait de la santé l’un des droits fondamentaux de tout être humain, et
dans la stratégie mondiale de la santé pour tous lancé en 1979. Il s’agit de la déclaration
d'Alma-Ata946 qui sera établie à l'issue de la Conférence internationale sur les soins de santé

944
http://www.lesechos.fr/10/12/2013/LesEchos/21581-040-ECH_microassurance---pour-une-sante-plus-
equitable.htm, consulté le 20 aout 2017.
945
L’OMS est Créée à la sortie de la guerre, le 22 Juillet 1946, elle a son siège 20 avenue Appia à Genève
(Suisse).
946
Ville principale de la république du Kazakhstan.

376
primaire, du 6 au 12 septembre 1978. Elle souligne la nécessité d'une action urgente de tous
les gouvernements, de tous les personnels des secteurs de la santé et du développement ainsi
que de la communauté internationale pour protéger et promouvoir la santé de tous les peuples
du monde. Par ailleurs, les textes de l’Organisation Internationale du Travail947 (OIT) vont
instituer un environnement international qui favorise dans une large mesure la consécration du
droit à la santé partout dans le monde.

Dans les années 1980, en Afrique, l’initiative de Bamako948, va mettre un terme au


principe de la gratuité des soins de santé en vigueur dans la plupart des pays après leur
indépendance, et instaura le principe de la participation financière des usagers aux soins de
santé. Cette politique impacte plus les populations à faibles revenu car, les élites locales « se
soignent toutes dans le privé et souvent à l’étranger ; elles n’accordent aucune priorité réelle à
la santé publique »949.

796. Selon l’OMS, la couverture sanitaire universelle consiste à veiller à ce que


l’ensemble de la population ait accès aux services préventifs, curatifs, palliatifs, de
réadaptation et de promotion de la santé dont elle a besoin et à ce que ces services soient de
qualité suffisante pour être efficaces, sans que leur coût n’entraine des difficultés pour les
usagers des difficultés financières950. Cette définition englobe trois objectifs de la couverture
universelle

- l’accès équitable aux services de santé qui suppose que tous ceux qui ont besoin
des services de santé, quels que soient leurs moyens financiers, doivent pouvoir y
accéder ;

947
Conventions OIT n°24 et 25 de 1927 sur l’assurance maladie ; Déclaration de Philadelphie du 10/05/1944
relatives aux buts et objectifs de l’OIT et annexée à sa constitution ; convention n°102 de 1952 relative à la
norme minimum de sécurité sociale, convention n°130 de 1969 sur les soins médicaux et les indemnités de
maladie. V S. G. NAGEL et C. THALAMY, Le droit international de la sécurité sociale , Paris, PUF, Collection
que sais-je, 1994.
948
Lancée en 1987 par les Ministres africains de la santé réunis à Bamako au Mali sous l'égide de l'Organisation
Mondiale de la Santé (OMS) et de l'UNICEF l’initiative de Bamako est un ensemble de réformes politiques
élaborées en réponse à la dégradation rapide des systèmes de santé dans les pays en développement pendant les
années 70 et 80. Son objectif ultime est « l'accessibilité universelle aux soins de santé primaires » et elle se
caractérise par des éléments minimaux qui sont le financement communautaire, l'approche participative et
l'étendue ou la portée nationale. V. M. NABETH, op. cit. p. 30
949
Y. JAFFRE, J-P-O DE SERDAN, Une médecine inhospitalière. Les difficiles relations entre soignants et
soignés dans cinq capitales d’Afrique de l’Ouest, Karthala, Paris, 2003, p. 449.
950
Voir OMS, Qu’est-ce que la couverture universelle,
http://www.who.int/health_financing/universal_coverage_definition/fr/, visité le 22 aout 2017.

377
- la qualité qui implique que les services de santé doivent être d’une qualité
suffisante pour améliorer la santé de ceux qui en bénéficient ;

- la protection financière signifie que le coût des soins ne doit pas exposer les
usagers à des difficultés financières.

797. La mise en place de la couverture sanitaire universelle ne saurait suivre un modèle


unique puisque les systèmes de santé sont subordonnés aux situations sociales, économiques
et politiques de chaque pays, et procèdent des décisions prises par le passé pour appréhender
les priorités nationales. Il faut reconnaître qu’atteindre une couverture universelle est un long
processus. Plusieurs pays bénéficiant actuellement d’un système de couverture universelle ont
souvent mis des dizaines d’années à le mettre en œuvre. En effet, une période de transition est
nécessaire entre le vote de la première loi sur l’assurance maladie et la dernière loi pour
relative à sa mise en œuvre951. A l’échelle nationale, la consécration d’un droit à la santé,
inscrit dans la loi fondamentale d’un pays, constitue désormais un standard constitutionnel952.
La santé est de fait un besoin vital incontournable et une mission que les Etats contemporains
ne peuvent nullement ignorer.

798. C’est suite aux recommandations des Etats Généraux de la Santé tenus en 2007, que le
gouvernement béninois a pris la décision d’initier la réflexion et une concertation élargie en
vue d’instaurer progressivement un Régime d’Assurance Maladie Universel (RAMU) au
Bénin. Entamée en 2008, « le RAMU est une initiative du Gouvernement du Bénin, visant à
améliorer l’accessibilité financière des populations aux soins de santé de qualité. C’est un
dispositif assurantiel, un système de couverture sociale maladie destiné à protéger l’ensemble
des populations béninoises contre les conséquences financières du risque maladie »953. Le

951
Les périodes de transition ont été de : 79 ans (Autriche), 118 ans (Belgique), 20 ans (Costa Rica), 127 ans
(Allemagne), 84 ans (Israël), 36 ans (Japon), 26 ans (RdC) et 72 ans (Luxembourg). Par conséquent, la période
moyenne de transition a été de 70 années, V, étude réalisée par G. CARRIN et C, JAMES, Atteindre la
couverture universelle par l’assurance maladie obligatoire : problématiques conceptuelles-clé durant la période
de transition, OMS, Genève 2004, p.05.
952
La loi 90-032 du 11 décembre 1990 portant Constitution de la République du Bénin reconnaît expressément
le droit à la santé en son article 8, elle dispose « la personne humaine est inviolable. L’Etat a l’obligation de la
respecter et de la protéger. Il lui garantit un plein épanouissement. A cet effet, il assure à ses citoyens l’égal
accès à la santé, l’éducation, à la culture, à l’information, à la formation professionnelle et à l’emploi ».
953
Note technique succincte sur le RAMU, AFTHE (HSS Hub, Dakar) Driss ZINE-EDDINE E. banque
mondiale, p.2.

378
RAMU est d’une certaine manière cet instrument pour atteindre la Couverture universelle de
santé. Consacrée par une loi954, il est caractérisé par neuf orientations stratégiques955.

Les comptes annuels du RAMU sont soumis au contrôle et les litiges sont soumis à des
transactions préalables avant d’être portés devant les juridictions en cas d’échecs. De même,
l’affiliation au RAMU ne fait pas obstacle à la souscription à une police d’assurance. C’est un
dispositif destiné à assurer une meilleure coordination et un fonctionnement harmonieux et
efficient des mécanismes déjà disponibles, à créer un mécanisme d’insertion des travailleurs
des secteurs informel et agricole ainsi que des couches sociales démunies dans le dispositif de
prise en charge, tout en veillant au respect des principes de base que sont la couverture
universelle, l’approche contributive, la solidarité nationale, la responsabilité générale de
l’Etat, la gestion participative et l’efficience956.

799. Le RAMU béninois doit respecter sept principes de base :

- Une couverture universelle

800. Une couverture efficace pour toutes les couches de la population béninoise, sans
distinction aucune. L’universalité est ici appréciée en termes de prise en compte de
l’ensemble de la population béninoise pour un paquet de base le plus large possible au
moindre coût.

- L’approche contributive

801. Bâtir principalement le RAMU sur la contribution des bénéficiaires. Il s’agit de


concevoir des fourchettes de primes en rapport avec les capacités contributives des diverses
couches sociales et d’asseoir un dispositif pour subventionner les primes des couches sociales
les plus démunies (gage de pérennisation du système).

- La solidarité nationale

954
Voir loi n°2015-42 portant Institution du Régime d'Assurance Maladie Universelle (RAMU)
en République du Bénin (adoptée le 28 décembre 2015). Cette loi est articulée en 5 titres décomposés en 91
articles. Les différents titres portent respectivement sur les dispositions générales (4 chapitres), la prise en charge
(2 chapitres), la coordination et la gestion (4 chapitres), le contrôle, le contentieux et l’extension (3 chapitres) et
les dispositions transitoires et finales.
955
Art.10, loi relative au RAMU au Bénin.
956
V. Processus de mise en place d’un Régime d’Assurance Maladie Universelle (RAMU), Rapport d’étape au
30 novembre 2011 p.8.

379
802. Mise en commun des risques, large partage des coûts : Solidarité entre « riches » et «
pauvres », vieux et jeunes, travailleurs et sans emploi, citadins et ruraux, bien portants et
moins bien portants

- La responsabilité générale de l’Etat

803. La santé est un bien public, un droit humain consacré par la constitution et garanti par
l’Etat, d’où le rôle régulateur du dispositif RAMU par les pouvoirs publics.

- L’équité

804. Dans le cadre de la mise en place du RAMU, l’équité est appréciée sous deux aspects :
l’équité d’accès qui consiste à faciliter l’accès de tous à un paquet de prestations de base,
selon les besoins de chacun et l’équité contributive qui vise à faire participer chaque couche
sociale en fonction de sa capacité contributive.

- La gestion participative

805. Elle recouvre deux dimensions dans le cadre du RAMU, à savoir : la participation des
bénéficiaires à la gouvernance du système et le contrôle social.

- L’efficience

806. Il s’agit de maximiser les résultats tout en minimisant les coûts. Ainsi, les dispositions
seront prises pour : éliminer les lourdeurs et lenteurs administratives, sécuriser au maximum
le système en vue d’une minimisation des fraudes et abus, veiller à obtenir de meilleurs
résultats au moindre coût.

807. Au Bénin, selon le ministère de la santé, les garanties offertes par le RAMU sont :

- la consultation, les soins et l’hospitalisation;

- les médicaments, les consommables médicaux et les produits sanguins labiles ;

- les examens de laboratoire, de radiologie et d’imagerie médicale ;

- les vaccins obligatoires, à l’exception de ceux couverts par les programmes de


gratuité ;

- l’appareillage assuré par les appareils légers, indispensables pour le maintien de la


santé du patient et de fabrication locale ;

- le transport des malades, vers la formation sanitaire ou d’une formation sanitaire à une
autre, avec les moyens fournis ou homologués par le système de santé (ambulance…) ;

380
- les prestations liées à l’état de grossesse et à l’accouchement, à l’exception de celles
prises en charge par les programmes de gratuité.

808. Le Bénin comme certains gouvernements africains à l’instar du Sénégal semblent


acquis à une réorientation des politiques de santé. C’est ce qui d’ailleurs a conduit les
autorités à instaurer Le RAMU, une initiative qui est fort louable. Néanmoins, encore
quelques années seront nécessaires pour en évaluer le degré de réussite.

On a pu constater que depuis les années 1980, les systèmes de soins africains reposent
sur le paiement direct des prestations par les malades et non plus sur la gratuité, comme dans
les années post indépendances

809. L’expérience nous aura montré que le paiement direct ne permettait pas d’entretenir
les systèmes de santé en Afrique. Il pourrait même constituer une barrière empêchant les plus
pauvres de se soigner. Selon la Banque mondiale, il ne couvrirait que 5 à 10 % des besoins957.
Les populations les plus malades qui sont aussi les plus pauvres financent ainsi, en partie, le
système de santé. Or les principes de solidarité et d’équité voudraient que l’on tienne compte
de la « capacité à payer » des populations.

810. Dans les pays qui ont instauré un système de santé majoritairement financé par le
public à travers des taxes ou impôts, il demeure relativement aisé de se faire soigner lorsque
l’on ne dispose pas d’argent. Mais en Afrique où les revenus fiscaux sont faibles et le
financement de la santé majoritairement d’origine privée, la collectivité laisse les patients
seuls et toujours livrés à leur propre sort. La reconnaissance de l’importance de la micro
assurance et surtout l’engouement envers cette forme d’assurance par les pays africains nous
amène à nous intéresser à son cadre règlementaire et aux canaux permettant sa distribution.
En effet, un cadre réglementaire bien conçu et une bonne vulgarisation est un facteur essentiel
de l’efficacité et de l’efficience de la micro-assurance.

957
V. RIDDE, Équité et mise en œuvre des politiques de santé au Burkina Faso, L’Harmattan, 2007, p. 536.

381
Section II : Le cadre réglementaire et les canaux de distribution de la micro
assurance

811. Les tontines et autres structures ou organismes d’entraides destinées aux populations
pauvres sont pour leur majorité informelle. Elles ont donc la particularité de ne pas être
encadrées par une réglementation. Ce défaut de réglementation a aussi caractérisé la micro
assurance pendant une longue période. Depuis 2012, une nouvelle loi régissant la micro
assurance a fait son apparition dans l’espace CIMA. Elle a pour objectif la réglementation de
la micro assurance (Paragraphe I). La mise en place d’un cadre juridique régissant la micro
assurance aura sans doute pour effet la préparation du terrain pour une démocratisation de la
micro assurance à travers divers canaux de distribution (Paragraphe II)

Paragraphe I : La règlementation de la micro-assurance

812. L’un des objectifs majeurs assignés à la CIMA par le Traité est la mise à la disposition
de ses populations de couvertures adaptées à leurs besoins y compris dans les milieux ruraux. Il
s’en suivra par la suite que le Conseil des Ministres de la zone CIMA, va réclamer «la
réalisation d’une étude diagnostique portant sur la situation du secteur de la micro-assurance
dans ses pays membres et sur les meilleures pratiques en vigueur dans certains pays présentant
des paramètres socio-économiques similaires et dotés de mécanismes de micro-assurance plus
performant »958.

813. Le résultat de cette étude conduira à une modification du Code CIMA, avec la
consécration de la micro-assurance par le nouveau Code (A). De toute évidence, la nouvelle
réglementation applicable à la micro assurance ne devrait pas être identique à celle régissant les
assurances en général. En effet, les rédacteurs de la nouvelle loi prendront en compte les
difficultés liées à la pratique de l’assurance conventionnelle pour mettre en place le cadre
réglementaire de la micro-assurance (B)

958
Voir en ce sens Etude sur la micro-assurance dans la zone CIMA, op cit., p. 8.

382
A- La consécration de la micro assurance par le Code CIMA

814. Avant l’intégration de micro-assurance dans le Code CIMA, une multitude d’acteurs
opéraient dans le domaine (assureurs traditionnels, institutions de micro finances, mutuelles,
tontines et associations en tout genre) avec pour conséquence une absence de réglementation ou
une diversité de textes applicables somme toute incompatibles avec le Code CIMA. L’objectif
visé est une prise en compte unanime et de manière formelle de la micro-assurance à travers
une seule et même législation.

La solution ne serait certainement pas l’application à la micro-assurance des mêmes


dispositions que ceux du Code CIMA. En fait, certains aspects de la micro-assurance dérogent
du droit des assurances, notamment au niveau des caractéristiques des produits, des conditions
de souscription, des réseaux de distribution, des conditions d’exercice de l’activité, du calcul
des primes etc… En somme, l’exercice de la micro-assurance exige une réglementation
spécifique, car le Code des assurances ne leur est pas applicable en l’état959.

815. Les nouvelles dispositions réglementaires découlent des particularités de la micro-


assurance, des recommandations du cabinet Desjardins International960 et des travaux d’un
comité de réflexion. En effet, le secrétariat général de la CIMA ayant reçu mandat de son
conseil des ministres avait pour mission d’étudier dans quelle mesure une modification du
Code CIMA pouvait rendre celle-ci accessible aux pauvres. Un état des lieux de la situation du
secteur de la micro assurance dans les pays membre de la CIMA devait précéder cette étude
qui, consistait en l’occurrence à faire l’inventaire des meilleurs pratiques assimilables à la
micro assurance961. La construction de la réglementation relatives à la micro-assurance a
maintenu la structure initiale du Code des assurances : le contrat d’assurance, les entreprises,
les règles comptables applicables, les intermédiaires…. Conformément aux directives du
Comité des Experts, tous ces points sont contenus dans un nouveau livre du Code des
assurances dédié à la micro-assurance. C’est le livre VII du Code CIMA qui est consacré à la

959
V. L. LHERIAU, La micro-assurance dans la Conférence Interafricaine des marchés d’assurance (CIMA),
un secteur à réglementer ? Techniques Financières et Développement, n° 73, décembre 2003.
960
Crée en 1970, Développement international Desjardins (DID) a comme objectif de rendre accessibles aux
populations défavorisées de la planète des services financiers diversifiés, sécuritaires et répondant à leurs
besoins. L’agence, qui est le plus grand groupe financier de nature coopérative du Canada s’est donné pour
mission de partager avec les pays en développement et en émergence son expérience et son expertise. Voir,
http://www.did.qc.ca/a-propos-de-nous/
961
Voir Etude sur la micro assurance, op. cit., p.1.

383
Micro-assurance. Il se subdivise en six titres qui sont :

- le contrat de micro-assurance ;

- les entreprises de micro-assurance ;

- les règles comptables applicables aux organismes de micro-assurance ;

- les intermédiaires pour les opérations de micro-assurance ;

- la fiscalité ;

- les dispositions transitoires.

816. En réalité, depuis le 05 avril 2012962, on assiste dans la zone CIMA à une consécration
de la micro-assurance à travers l’introduction d’un livre VII dans le Code CIMA. En se référant
à l’article 700, al.1 et 2 : « La micro-assurance est un mécanisme d’assurance caractérisé
principalement par la faiblesse des primes et/ou des capitaux assurés, par la simplicité des
couvertures, des formalités de souscription, de gestion des contrats, de déclaration de sinistres
et d’indemnisation des victimes. La micro-assurance vise à protéger les personnes à faible
revenu963 contre des risques spécifiques en contrepartie du paiement de primes ou de
cotisations ».

L’objectif visé par la CIMA à travers la consécration de la micro-assurance dans son


Code est une formalisation de celle-ci. La nouvelle réglementation de l’activité a permis de
définir le contrat d’assurance et de déterminer les cibles de l’activité. Contrairement à
l’assurance les conditions d’accès à l’activité ont été relativement assouplies.

L’encadrement de l’activité suppose l’introduction d’un certain nombre de mesures de


protection tenant compte de la situation socio-culturelle des assurés et bénéficiaires de la
micro-assurance. La souplesse de la réglementation présente une double opportunité. D’abord,
elle permet aux organismes de micro-assurance de régulariser leur situation vis-à-vis de la
nouvelle réglementation. Ensuite, elle donne une ouverture une ouverture aux assurances
classique pour la pratique d’une nouvelle activité964.

962
Règlement n° 0003/CIMA/PCMA/PCE/2012 portant règlementation des opérations de micro-assurance dans
les Etats membres de la CIMA.
963
La notion de « faible revenu » varie d’une juridiction à l’autre et dépend par ailleurs du niveau de
développement de la juridiction.
964
Les assureurs classiques doivent se soumettre à des conditions pour exercer dans le secteur. Il s’agit :

384
817. La nouvelle réglementation du secteur de la micro assurance a eu l’avantage de
bénéficier de l’expérience résultant de la rédaction du Code CIMA. A ce titre, cette
réglementation ne reproduira pas certaines erreurs du Code CIMA. La réglementation de la
micro assurance peut promouvoir l’activité en question d’où l’importance d’un cadre
réglementaire idoine.

B- Le cadre règlementaire de l’activité

818. Afin d’harmoniser le secteur de la micro assurance en en protégeant les consommateurs,


le législateur CIMA va mettre en place un cadre juridique spécifique destiné à l’ensemble de
l’activité. Cette législation aura la particularité d’assouplir ou de faciliter plusieurs aspects de la
micro- assurance. Le premier concerne des facilités quant à l’accès à la profession (1) car une
réglementation contraignante ne pourrait être qu’un frein à l’activité. L’autre objectif du livre
VII du Code CIMA vise un simple accès de la micro-assurance pour les populations cibles, tout
cela à travers un formalisme simplifié en matière de micro-assurance (2)

1) Des facilités quant à l’accès à la profession.

819. Contrairement à l’assurance classique ou une certaine compétence est de mise965, les
conditions d’accès à la profession de micro assureur sont assez souples. Le but recherché à
travers cette facilité d’accès à l’exercice de micro-assurance par le législateur CIMA est la mise
en avant de la proximité et des relations de confiance entre micro-assureur et clients qui ont
permis le succès de certaines sociétés de micro assurance. En effet, certaines compagnies de

- du respect des exigences comptables prévues au livre IV du Code CIMA et des articles 727 et 729
du Code CIMA obligeant les assureurs traditionnels agréés à tenir une comptabilité distincte pour le
secteur de la micro-assurance
- du respect des exigences réglementaires de couverture des engagements réglementés et de marge de
solvabilité. A ce titre, la marge de solvabilité des sociétés de micro-assurance est plus importante
que celle des assureurs traditionnels : 150% au lieu de 100%. Cf art.724. Code CIMA.
965
V. Art. 500, Code CIMA, « Est considérée comme présentation d’une opération pratiquée par les entreprises
mentionnées à l’article 300 le fait, pour toute personne physique ou morale, de solliciter ou de recueillir la
souscription d’un contrat d’assurance ou l’adhésion à un tel contrat ou d’exposer oralement ou par écrit à un
souscripteur ou adhérent éventuel, en vue de cette souscription ou adhésion, les conditions de garantie d’un tel
contrat. »

385
micro-assurance ont choisi comme responsables de distribution des produits des membres des
communautés cibles. Ces intermédiaires sont de toute évidence mieux informés des besoins de
leurs communautés et susceptibles d’être des interlocuteurs fiables966.

820. Les articles 506 et suivants du Code CIMA sont relatifs aux conditions de capacité
professionnelle et d’honorabilité requis pour l’exercice de la profession d’assureur. Il semble
que ces conditions assez sélectives ne soient pas applicables aux intermédiaires des opérations
de micro-assurance puisque les articles 731 et 732 relatifs à ces derniers ne renvoient pas
expressément aux dites dispositions. Cependant les courtiers et agents généraux doivent
satisfaire aux conditions contenues dans le livre V pour être agrées d’abord comme courtiers
ou agents généraux. Quant aux autres intermédiaires des opérations de micro-assurance,
l’article 732 du Code CIMA leur exige une formation en assurance d’au moins 48 heures ou
d’une expérience dans le domaine des assurances, pour obtenir la carte professionnelle.

821. Conscient du risque que la réduction des exigences professionnelles et de formation


comporte pour les assurés, l’alinéa 2 de l’article 732 du Code CIMA dispose : L’entreprise
d’assurance ou de micro-assurance répond des fautes commises par les personnes habilitées à
présenter ou administrer des opérations de micro-assurance dans l’exécution de leur mandat ».
En d’autres termes, le Code CIMA assimile les intermédiaires des opérations de micro-
assurance à des mandataires des assureurs ou micro-assureurs pour lesquels ils présentent des
opérations de micro-assurance. Pour l’heure, l’objectif est au développement de la micro-
assurance.

822. Selon l’article 731 du Code CIMA, une fois leur carte professionnelle obtenue auprès du
Ministre en charge des assurances certaines personnes peuvent présenter des opérations de
micro assurance auprès du public. Elles sont au nombre de seize selon le Code CIMA967. On
compte en plus des distributeurs classiques, (courtiers agents généraux...), les établissement
financiers (banque, instituts de micro finance, poste..), les acteurs associatifs ( ONG,
association de tontines…) et certaine sorciété ( opérateurs de téléphonie, chaines de distribution
alimentaire et sociétés à fort potentiel d’affiliation)

On voit à travers cette énumération le panel de personnes susceptible de présenter des offres.

A long terme, le législateur CIMA aura sans doute pour mission l’introduire de réformes en

966
Voir dans ce sens les compagnies Groupama Chine, Delta Life, Card-MBA, énumérés par M. NABETH,
op.cit., p.293.
967
V. article 731 du Code CIMA.

386
matière de d’honorabilité et de compétence dans le secteur968.

2) Un formalisme simplifié pour la micro-assurance

823. La micro-assurance est destinée à une population dont l’un des caractères déterminants
est le très faible niveau d’instruction ou l’analphabétisme. Fort de ce constat, le législateur
exige la simplicité de la police de micro-assurance ainsi que de ses modes d’exécution. Cette
simplicité passe par la simplicité du langage utilisé pour les micro-assurés (a) et par
l’assouplissement ou l’absence de formalités à la charge de l’assuré (b)

a) Simplicité du langage

824. Tous les acteurs s’accordent sur le fait que la simplicité du langage de la micro-
assurance est déterminante pour la démocratisation de celle-ci. On comprendra dès lors que la
première forme d’innovation qu’un assureur puisse apporter à la « démocratisation » ou
massification de l’assurance consiste déjà à instaurer de la confiance, à éviter les termes
techniques, expliquer simplement les produits d’assurances, les droits et obligations, les
procédures, et faire preuve du même professionnalisme en traitant le client avec les mêmes
égards que ceux existant dans le domaine bancaire969.

Dans la mesure où l’illettrisme est un handicap certain, il serait utile pour les micro assureurs
de s’inspirer du modèle FALC970 qui existe en Europe depuis 2009.

825. Le Code CIMA prescrit en son article 701 alinéas 3 que « Le contrat de micro-assurance
doit être rédigé dans un langage simple, clair et facilement compréhensible par la population
cible ». La police de la micro-assurance doit être le plus clair possible.

Pour une bonne application de ce droit, et eu égard au fort taux d’analphabétisme au


sein de cette frange de la population, l’alinéa 4 de l’article 701 du Code CIMA, accorde la

968
M. NABETH, op. cit., p. 293 et suivts.
969
M. NABETH, De la micro assurance à l’assurance : les conditions du développement. V. http://revue-
risques.fr/revue/risques/html/Risques_86_0021.htm/$file/Risques_86_0021.html, consulté le 23 aout 2017.
970
L'Europe s'est engagée dans le FALC (facile à lire et à comprendre) dès 2009 avec la mission de réduire la
fracture sociale liée au langage.

387
possibilité aux micro-assureurs de traduire et de commercialiser le contrat de micro-assurance
dans la langue locale de la population cible. Dans la pratique l’usage d’une telle option est
impossible dans la mesure où plusieurs langues locales n’ont pas été transcrites. En outre, se
pose les litiges pour les quelques langues locales écrites. Quoi qu’il en soit, en cas de litige, la
version en langue officielle fait foi sauf si la traduction en langue locale est plus favorable à
l’assuré. Cette solution légale est conforme aux règles d’interprétation qui voudraient qu’en cas
d’ambigüités dans un contrat d’adhésion, le contrat soit interprété en faveur de la partie la plus
faible en l’occurrence l’assuré.

b) Assouplissement de formalisme pour le micro assuré.

826. Il ressort de l’article701, alinéa 5 du Code CIMA : « les clauses relatives à l’envoi d’une
lettre recommandée par l’assuré avec demande d’avis de réception prescrites aux articles 12,
21,26, 40, 65, 91 et 97 sont facultatives dans le cadre des opérations de micro-assurance.
L’envoi d’une simple lettre suffit pour attester de l’exécution de l’obligation du souscripteur ou
de l’assuré. »

Les articles contenus dans la disposition précitée concernent un formalisme de rigueur


en matière d’assurance, où la loi impose l’utilisation de la lettre recommandée par l’assuré ou le
souscripteur avec demande d’avis de réception. Il est prévu en matière de micro-assurance, que
la lettre recommandée est susceptible d’être remplacée par une simple lettre. La conséquence
de cette simplification réside dans la difficulté pour l’assureur à rapporter la preuve d’un envoie
en cas de litiges relatif à un délai de prescription par exemple.

827. En matière de micro-assurance, le délai pour le versement de la valeur de rachat pour un


contrat est fixé à dix jours contrairement aux deux mois applicables en matière d’assurance
classique. Ce délai prend de manière évidente en compte, la précarité dans laquelle peuvent se
trouver les populations cibles. Les assurés des contrats classiques ne peuvent profiter de ce doit
que lorsqu’une prime annuelle a été payée au lieu de deux primes. Et cette valeur de rachat ne
peut être inférieure à la somme des cotisations versées par l’assuré971.

Il y a lieu de souligner que des difficultés liées au développement de la micro assurance


existent réellement ; elles tiennent, en grande partie, à la conception des produits, à la

971
Voir : article 703 Code CIMA.

388
détermination, puis à collecte des cotisations et primes générées, à la gestion du service après-
vente, mais aussi et surtout à la distribution.

Paragraphe II : La distribution de la micro assurance

828. La difficulté fondamentale de la micro-assurance réside dans son objectif de simplicité.


Cette situation nous amène à nous demander : comment promouvoir à moindre coût la micro
assurance et la faire adopter par sa population cible ?

En somme, l’un des défis majeurs à relever par les micro-assureurs africains est de parvenir à
concevoir des produits à faible marge à une échelle de masse.

829. Pour répondre à cette question, nous allons nous intéresser aux différents canaux de
distribution de la micro assurance (A). Dans la quasi-totalité des pays en développement, ni
les pouvoirs publics ni les compagnies d'assurances ne sont réellement parvenus à faire
bénéficier d'une assurance fiable les personnes relevant du secteur informel. En effet, la
plupart des systèmes de distribution des assureurs ne sont pas adaptés à ce segment du
marché. Bien que l'engouement à sauter sur cette niche ne soit pas encore très fort à ce jour,
les assureurs africains ne sont pas sans savoir que le secteur informel constitue
incontestablement un « marché d’avenir ». En effet, c’est le potentiel micro assuranciel du
secteur informel (B) qui nous montrera que ce secteur devrait être considéré comme un
maillon très important du secteur de l’assurance en Afrique.

A- Les canaux de distribution de la micro, assurance

830. L’assurance traditionnelle constitue l’un des produits financiers les plus coûteux en
termes de frais de distribution. En effet, les frais associés à la vente d’une police d’assurance
peuvent représenter environ un quart des primes émises (commission de l’agent, mise en
marché, etc.) lorsque les produits sont vendus et distribués sur une base individuelle972.

831. Le défi majeur à relever pour populariser grande échelle la micro-assurance concerne

972
http://www.did.qc.ca/media/documents/fr/positionnements/DID-Microassurance-Septembre2010.pdf,
consulté le 24aout 2017.

389
son accessibilité. Il faut d’abord s’intéresser aux fondements de la distribution (1) avant
d’évoquer les canaux de distribution (2).

1) Les fondements de la distribution de la micro assurance

832. La micro-assurance passe par une connaissance des réalités sociales, c'est-à-dire
l’histoire, l’économie, la culture, les mœurs, et surtout le quotidien des membres d’une société.

Construire une relation de confiance entre clients et prestataires constitue en règle générale le
point essentiel pour déclencher à court terme la demande en micro-assurance. Pour ce faire, il
faut investir dans l’éducation financière973 des consommateurs, ce qui aidera les clients
potentiels à développer une compréhension plus claire des concepts et des avantages de
l’assurance et à choisir des produits en toute connaissance de cause. L’éducation financière
permet tout d’abord d’instruire le client sur le produit et notamment de lui enseigner les
démarches en cas de sinistre et les processus de réclamation afin d’éviter des abus qu’un faible
niveau d’éducation pourraient engendrer.

L’éducation financière la particularité d’être essentiellement orientée sur les populations


auxquelles elle s’adresse. Elle s’appuie sur des critères comme l’âge, le sexe, l’emploi et
répond à des problématiques locales qui peuvent être radicalement différentes selon l’endroit
où l’on se trouve. A titre d’exemple, le produit de micro-assurance obsèques appelé « N’Tula »
qui signifie « se décharger d’un fardeau » rencontra un certain succès au nord de la Zambie,
tandis que l’absence de signification du mot « N’Tula » conduisit à son échec dans le sud du
même pays974.

Selon M NABETH : « Expliquer correctement l’assurance via des théâtres ambulants,


des vidéos, des témoignages, des peintures murales, des bandes dessinées, lors des phases de

973 973
L’OCDE définit l’éducation financière comme « le processus par lequel les consommateurs de services
financiers/investisseurs améliorent leur compréhension des produits et concepts financiers et, à travers
l'information, de l'instruction et/ou des conseils objectifs, développent leurs compétences et leur confiance de
sorte qu’ils prennent conscience des risques et des opportunités (financiers), qu’ils fassent des choix informés,
qu’ils sachent où aller pour obtenir de l'aide, et qu’ils prennent d'autres mesures efficaces afin d’améliorer leur
bien-être et leur sécurité financière. ». Voir, Les Principes et les Bonnes Pratiques Relatifs à la Sensibilisation et
l’Education Financières, OCDE, 2005
974
Marc NABETH, « Assurance et micro-assurance en Afrique », www.lamicrofinance.org.

390
souscription comme d’indemnisation, est également essentiel »975. En l’absence d’éducation
financière, les populations cibles de la micro-assurance auront des difficultés à adopter
spontanément certains produits de micro-assurance.

833. Des confusions entre assurance et mécanismes d’épargne existent très souvent dans la
mesure où les assurés s’attendent à récupérer leurs primes si aucun sinistre n’a eu lieu976.

Plus globalement, il s’agit finalement de tenir compte du contexte socioculturel, des rapports
entre l’individu et la collectivité, des représentations liées à la pauvreté. Ainsi, au Mali, le mot
pauvreté se définit par l’impuissance fangantan en langue bamanan en opposition à la
puissance fangama qui permet certes d’accéder à la richesse mais oblige en contrepartie « le
puissant » à redistribuer ses ressources considérées comme un bien public, cela afin de gagner
le prestige qui est attaché à la détention nécessairement temporaire du pouvoir et de la
richesse977. Au Nigeria, être riche en pays Haoussa (Nigeria-Bénin), c’est avoir eu souvent de
la chance le mot arziki désigne à la fois la richesse et la chance. Mais cela peut également
signifier faire circuler de l’argent ou le redistribuer. La conséquence en termes de mutualisation
des risques et d’inclusion des plus pauvres dans ce système sera en revanche bien différente des
mutualisations pratiquées en pays Bamiléké (Cameroun) où le pauvre est un « non-chanceux »,
un « balock » soupçonné par ailleurs de ne pas être sérieux et donc à éviter978.

Les premiers produits de micro-assurance généralement proposés sont des assurances


vie. Dans des pays où la mort bien qu’ayant des conséquences très importantes, demeure un
sujet tabou, il est difficile de demander à ces populations de prévoir un tel risque.

975
V. M. NABETH, assurance et microassurance en afrique, In Risque les Cahiers de l’assurance, voir pour
plus de détails, http://revue-risques.fr/revue/risques/html/Risques_71_0024.html, consulté le 25 juillet 2017.
976
V. C. CHURCHILL, article relatif aux défis de la micro assurance en Afrique, voir
http://www.afrik.com/article19619.html, consulté le 23 aout 2017.
977
V. H. MAGASSA, Ethique et pauvreté : l’exemple du Mali , in collectif, La pauvreté, une fatalité ?, coll.
Tropiques, Paris, Karthala, 2002, pp. 129-176..
978
Voy. H. MAGASSA, op.cit., D. Gentil, « Comment réduire pauvreté et inégalités » in. Lévy M. (dir), éd.
IRD-Karthala, 2002 ; J.-P. WARNIER, L’esprit d’entreprise au Cameroun, Paris, Karthala, 1993. Cité par M.
NABETH in Revue risque op. cit.,

391
2) Les divers canaux de distribution

834. Le développement de la micro assurance est basé sur une bonne politique de
démocratisation de celle-ci. Les canaux de distribution constituent par ailleurs le passage
inéluctable pour une meilleure appréhension de celle-ci par les populations cibles.

835. Même si une multitude de canaux de distribution restes légaux, seulement quelques-
unes sont essentiellement aujourd'hui exploitées : il s’agis des assureurs commerciaux (a), du
canal mobile (b), et des institutions de micro-finance (c).

a) Les assureurs commerciaux

836. Aujourd’hui, plus de 260 millions de personnes à faible revenu dans les pays en
développement bénéficient d’une police d’assurance. Néanmoins, il reste actuellement un grand
nombre de personnes sans couverture979. Pendant que la micro-assurance concerne les créateurs
d'entreprise en France, force est de constater qu'en Afrique ces personnes seraient
automatiquement du ressort de l'assurance classique. Le marché potentiel de la micro-assurance
représente une opportunité non négligeable pour l’émergence du marché de l’assurance dans le
continent africain. Pour ce faire, les assureurs par leur vocation, se doivent d’être valablement
impliqués dans le développement de la micro assurance.

837. Le système de courtage, le recours aux agents et la vente directes utilisé par les
assureurs commerciaux est généralement approprié pour les clients d’entreprise et les clients de
grande valeur individuelle, mais ces pratiques peuvent aussi atteindre les populations des villes
où sont établies les compagnies d’assurance.

Les assureurs conventionnels ont pour mission fondamentale : la conception ou la


création des produits, la gestion des contrats et risques assurantiels ainsi que des sinistres. Pour
ces assureurs, la micro assurance présente plusieurs avantages en ce sens qu’il peut servir
d’outil pour démocratiser des produits auprès des exclus. Par ailleurs, il peut aussi servir de
moyen pour les assureurs de se faire du capital de réputation, à travers une politique de la

979
Voy dans ce sens, http://www.challenge.ma/la-micro-assurance-un-potentiel-a-developper-en-faveur-des-
populations-vulnerables-61061, consulté le 6 septembre 2017.

392
responsabilité sociale des entreprises (RSE)980par exemple. Il faut remarquer que toutes les
raisons ne doivent conduire en fin de compte qu’au développement du secteur de l’assurance
dans sa globalité, mais avec une certaine prise en compte des disparités sociales. Entre les pays
africains eux-mêmes, des disparités peuvent exister quant à la façon de ressentir le besoin de
couverture sociale selon les régions, les pays ou même les villes. Il faut tout simplement retenir
que la micro-assurance s'adresse à toute personne qui se sent oubliée par l'assurance classique
soit parce qu'elle la trouve trop chère soit parce qu'elle n'est pas adaptée à ses besoins
spécifiques.

838. La distribution des produits de micro-assurance via les assureurs conventionnels


s’effectue normalement à travers les structures déjà existantes. Pour atteindre toutes les couches
sociales, certains courtiers pouvant être des grossistes auprès des courtiers de taille moindre,
mais implantés dans des zones reculées981.

Les mutuelles d’assurance étant relativement variées, permettent de jouer le même rôle que les
assureurs commerciaux. Toutefois, en matière de distribution de micro assurance, elles peuvent
même aller plus loin dans la mesure où leur proximité avec leurs membres est un atout
incontestable.

c) Une expérience réussie : le canal mobile

839. Durant ces dernières années, le nombre de produits de micro-assurance mobiles a


connu un développement fulgurant982. Selon cette étude, l’essentiel de l’activité a été enregistré
en Afrique subsaharienne. Cinquante-quatre pour cent du nombre total de produits recensés se
trouvaient dans cette région, comparé à 23 % en Asie du Sud et 20 % en Asie de l’Est et dans le
Pacifique. Cette croissance rapide peut s’expliquer par la volonté des différents acteurs de la
micro-assurance de construire leur développement sur les innovations technologiques touche

980
La responsabilité sociale de l’entreprise (RSE) se définit comme « l’ensemble des obligations, légales ou
volontaires, qu’une entreprise doit assumer afin de passer pour un modèle imitable de bonne citoyenneté dans un
milieu donné. » Voir en ce sens, J. PASQUERO, Responsabilité sociale comme objet des sciences de gestion :
un regard historique. In Responsabilité sociale et environnementale de l’entreprise, sous la direction de M-F
TURCOTTE, et A. SALMON, Presses de l’université du Québec, 2005.p. 80
981
Voir intervention de Madame EKOBE NSEKE, L'implication du Courtier dans la distribution de la micro
assurance : conception, commercialisation et collecte des primes à moindre cout FANAF, octobre 2009, p.5.
982
Paru en janvier 2014, le rapport du Groupe Consultatif d’Assistance aux plus Pauvres (CGAP) recense 84
produits sur le marché de la micro-assurance mobile, ce qui équivaut au triple de l’offre disponible en 2013.

393
aussi les zones reculées et les populations pauvres. La croissance de ce marché témoigne
des synergies stratégiques mises en place dans les secteurs de la téléphonie mobile et de
l’assurance ces dernières années. Des études révèlent que 46 % des 1,17 milliard d’Africains
avaient souscrit à des offres de téléphonie mobile à la fin de l’année 2015, soit 557 millions
d’abonnés uniques, selon des chiffres présentés par le réseau mondial des opérateurs de
téléphonie mobile983. Dans certaines contrées, le taux d’équipement atteint les 100%, alors que
le taux d’équipement en électricité est de 40 %, on comprend mieux pourquoi les assurances
donnent tant d’importance à ce canal de distribution.

840. La téléphonie mobile contribue énormément au développement de la micro assurance


dans la mesure où elle donne une nouvelle impulsion dynamique et novatrice à l’activité. A
titre d’exemple, au Cameroun, l’assureur ACTIVA s’est engagé dans la micro-assurance
mobile en lançant Activa Makala, une offre destinée à une prise en charge des incapacités
temporaires ou permanentes des populations à faible généralement exclues par les assureurs
conventionnels. Les versements de primes et règlements de sinistres se font via Orange
Money, le porte-monnaie électronique de l’opérateur Orange.

Dans la même optique, l’opérateur de téléphonie mobile Tigo au Ghana s’est associé
avec la compagnie d’assurance Vanguard Life en 2011 autour d’un concept simple : au-delà
d’un certain seuil de crédit utilisé, les abonnés du réseau Tigo bénéficiaient d’une couverture
d’assurance gratuite, dont ils pouvaient améliorer les services à des coûts préférentiels. Un an
après, un million de personnes ont souscrit à cette offre, ce qui équivaut au double du nombre
total d’assurés dans le pays avant cette date. Grâce à ces types partenariats assureurs,
opérateurs téléphoniques et clients trouvent leur compte :

- les assureurs augmentent leurs volumes de vente et atteignent une part plus importante
de la population ;

- les opérateurs fidélisent leurs abonnés et gagnent des revenus additionnels ;

- les clients bénéficient d’un meilleur accès à des produits d’assurance bon marché,
faciles à comprendre et à régler.

983
V. dans ce sens, http://www.jeuneafrique.com/345544/economie/etat-de-leconomie-mobile-afrique-rapport-
gsma-2016/, consulté le 25 aout 2016.

394
Les technologies mobiles représentent sans nul doute, un levier de développement de
la micro-assurance en Afrique en démocratisant son accès et en s’adaptant aux besoins
particuliers de la population friande de ce type de ce produit qu’est le mobile984.

841. L’utilisation du téléphone mobile a permis aux assureurs de rendre le processus de


l’ensemble de la chaine de valeur de l’assurance plus efficients. Elle a pour avantage de
réduire les délais d’adhésion, d’automatiser la collecte de la prime et de faciliter la gestion des
sinistres. Elle aussi cet avantage de réduire les coûts en limitant l’usage des moyens de
transport. Néanmoins, un tel succès est de nature à susciter des interrogations importantes
relatives au risque associé aux produits ainsi que sur l’incertitude de l’avenir de la relation-
client, en particulier pour la clientèle faiblement alphabétisée et qui a peu d’expérience dans
les produits d’assurance mobile.

842. Il est évident que Le coût des agents distributeurs représente un pourcentage important
du coût global de distribution ; un modèle sans agents peut en effet se traduire par des
économies substantielles. Toutefois, un agent qui décrit le produit et facilite le processus
d’adhésion peut fournir des informations et améliorer la compréhension de la clientèle.
Lorsque les assureurs utilisent un modèle sans agents, il est important qu’ils maitrisent la
connaissance qu’ont les clients du produit et des prestations et remédient aux lacunes de
compréhension985.

984
V. A. HADDAD, article relatif à la micro assurance en Afrique : des perspectives de croissance soutenues par
le canal mobil voir, https://www.insurancespeaker-wavestone.com/2016/02/la-micro-assurance-en-afrique-des-
perspectives-de-croissance-soutenues-par-le-canal-mobile, article consulté le 26 aout 2017.
985
« La compagnie Yu Mobile contacte ses clients régulièrement pour tester leur compréhension de son produit
et de ses processus d’assurance. L’organisation s’est rendue compte que 46 pour cent des clients n’avaient pas
réussi à effectuer correctement leur souscription parce qu’ils n’avaient pas compris le processus, et 35 pour cent
avaient échoué en raison de difficultés techniques. Près de 87 pour cent ne comprenaient pas complètement le
produit, notamment les prestations d’invalidité. Les clients voulaient pouvoir être indemnisés pour de petites
blessures et des incapacités à court terme, alors que le produit ne couvrait que l’invalidité permanente. Ce
malentendu a généré de l’insatisfaction, car les clients avaient le sentiment que leurs demandes étaient
injustement rejetées ». Voir P. PRASHAD, P. SAUDERS, A. DALAL, Téléphonie mobile et micro-assurance,
Etude de cas, ILO’s Impact Insurance Facility, décembre 2013, p. 4-5.

395
d) Les institutions de micro finance

843. En Afrique, les institutions de microfinance sont assez répandues. Elles opèrent sous
diverses formes : ONG, coopératives de crédit, institutions financières non bancaire, tontines
etc. La clientèle qui compose les institutions de microfinance est essentiellement constituée de
populations de zones urbaines (petits commerçants, ouvriers, chauffeurs artisans…) et celles
des zones rurales (agriculteurs, éleveurs, ou personnes exerçant de petites activités de
commerces).

En plus de son activité de collecte d’épargne et de crédit, les IMF peuvent offrir une large
gamme de services et de produits (transfert d’argent, carte électronique avec Possibilité de
retrait dans des guichets automatiques. L’utilisation des IMF comme canal de distribution de
la micro assurance présente beaucoup d’avantages pour la micro-assurance qui investit un
secteur qu’il connaît très peu et dont il n’a pas forcément la maîtrise. Les ventes confiées aux
IMF (les risques de masse), surtout ceux destinés au secteur informel sont de faible
rendement. Les IMF peuvent utiliser leurs propres bases de données pour fidéliser leur
clientèle et assurer une commercialisation à grande échelle avec un taux de recouvrement à
100% (règlement de la prime par prélèvement automatique)986.

844. La distribution de produits de micro assurance par les IMF se fait de manière assez
simple. Puisque la prime peut être intégrée directement dans les frais d’adhésion chargé aux
membres initialement ou encore prélevé directement dans le compte des clients. Aussi
l’utilisation des IMF permet une adhésion obligatoire à certains produits de micro assurance
comme la micro assurance-crédit. Les systèmes plus complets, permettant de prendre en
charge les risques qui préoccupent réellement les plus démunis, telles que les dépenses de
santé, sécheresse ou autres catastrophes naturelles, sont très difficiles à mettre en place par
des IMF. Encore faut-il que ces types de garanties existent par ailleurs. Ces produits plus
complexes nécessitent des subventions, dans la mesure où les populations pauvres ne sont pas
les moyens d’en supporter le cout global.

845. Tous les professionnels de la micro-assurance s’accordent à dire que le meilleur outil
pour développer tant la compréhension des mécanismes de l’assurance que la confiance

986
V. M. DIARRA, op. cit., p.71.

396
consiste en une diligente gestion du sinistre987. En effet, En raison de la vulnérabilité des
micros assurés le traitement des sinistres doit être encore plus efficace pour la micro-
assurance que pour les assurés conventionnels. Il est nécessaire que les indemnisations
arrivent très rapidement, les pièces justificatives à fournir doivent être simplifiées car les
démarches s’avèrent parfois difficile de se procurer certaines attestations. Aussi, les
vérifications doivent être rationalisées par les polices les plus petites afin qu’elles soient le
plus rentables988 que ce soit à travers la téléphonie (mobile) les tontines ou même les lieux de
cultes989, les assureurs délaissent graduellement leurs canaux traditionnels (agents
d'assurance, courtiers…) pour se rapprocher toujours au plus près de leurs futurs clients. Ces
nouveaux circuits de distribution de la micro-assurance peuvent permettre aux assureurs
d'atteindre une certaine taille et de fournir à leur clientèle un accès simple à leurs produits.
Néanmoins, ils ne sont pas exempts de critique : on peut faire confiance aux églises ou aux
mosquées mais ces dernières ne disposent souvent pas des compétences requises pour se livrer
à des transactions financières ; les réseaux de téléphonie inspirent confiance et sont prisées,
mais il est possible que les clients ne comprennent pas le Produit d’assurance sans relation
directe avec le vendeur990.

846. En somme, la commercialisation des produits de la micro assurance peut être la clé du
succès de la micro assurance. Il est cependant primordial que leur cout reste modeste à
l’image du produit lui-même. Il s’agit de plus faciliter les circuits de distribution adaptés à
l’activité. La micro assurance a le mérite de répondre aux besoins des plus pauvres certes,
mais à l’heure actuelle, elle n’est pas vraiment rentable pour les assureurs. En effet, Pour
prétendre à une rentabilité, il faut nécessairement que la micro assurance touche un maximum
d’adhérents.

847. Pour élargir son champ d’application, il serait opportun pour la micro assurance de
prendre en compte le secteur informel qui est un potentiel marché assuranciel.

987
C. CHURCHILL, op.cit.,
988
« L’objectif vise à trouver un équilibre entre la garantie que l’événement assuré s’est bien produit et
l’acceptation d’une documentation moins complexe ». V. C. CHURCHILL, Protecting the poor: a
microinsurance compendium, 2006, Part 3, p. 255.
989
L’utilisation des communauté religieuses peut constituer dans une certaine mesure constituer une stratégie de
choix puisqu’elle permet de toucher un grand nombre de personne. Voir, 989 J. ROTH, M-J Mc CORD et D.
LIBERT op. cit.,p. 107.
990
http://www.impactinsurance.org/fr/about/celebrating-five-years-innovation/distribution consulté le 6 aout
2017.

397
B- Le potentiel assuranciel du secteur informel

848. Contrairement aux idées reçues, le secteur informel n’est pas l’apanage des économies
africaines. Il existe aussi bien dans les pays sous-développés que dans les pays développés.
Toutefois, selon le BIT, le secteur informel représente soixante-douze pour cent des emplois en
Afrique subsaharienne. L'incapacité des économies à créer le nombre d'emplois nécessaires
pour absorber la main-d'œuvre, constitue l'une des causes de l'expansion de l'économie non-
formelle. Quoiqu’il en soit, l’informel dans le contexte aussi bien mauritanien que béninois
regroupe plusieurs types d’activité. « En règle générale, le secteur informel est défini comme
l'ensemble des activités économiques qui se réalisent en marge de la règlementation juridique,
sociale et fiscale, échappant ainsi à toute régulation de l'Etat »991. Cette définition ne peut
s’appliquer au Bénin puisque, certaines branches de l’activité informelle sont réglementées. Il
s’agit notamment de l’artisanat et de l’agriculture992. Une définition plus complète de la notion
par le BIT considère que c’est : « un ensemble d’unités produisant des biens et des services en
vue principalement de créer des emplois et des revenus pour les personnes concernées. Ces
unités, ayant un faible niveau d’organisation, opèrent à petite échelle et de manière spécifique,
avec peu ou pas de division entre le travail et le capital en tant que facteurs de production. Les
relations de travail, lorsqu’elles existent, sont surtout fondées sur l’emploi occasionnel, les
relations de parenté ou les relations personnelles et sociales plutôt que sur des accords
contractuels comportant des garanties en bonne et due forme »993.

849. Aujourd’hui, l’activité informelle est devenue incontournable à cause de deux raisons :

Rapport de la commission de l’économie et des finances de la république du Bénin, Le secteur informel au


991

Bénin : problématique et perspectives de contribution de l’économie nationale,2011. p.8.


992
Voir dans ce sens les lois suivantes :
- la loi n°98-037 du 22 novembre 2001 portant Code de l’artisanat en République du Bénin ;
- le décret n°2003-569 du 29 décembre 2003 portant approbation de la nomenclature des métiers de
l’artisanat au Bénin ;
- le décret n°2005-788 du 29 décembre 2005 portant approbation de la Politique Nationale de
Développement de l’Artisanat (PNDA au Bénin) ;
- la loi n°2001-097 du 20 février 2001 portant création de la Chambre d’Agriculture.
993
BIT, 1993.

398
l’importance de la population994 qui s’y adonne à cœur joie d’une part mais, aussi en raison de
la crise économique très profonde que traversent actuellement le monde en général. Pour une
étude du potentiel micro assuranciel de l’informel, notre réflexion sera axée sur les structures
de ce secteur (1) et, sur l’expérimentation d’une micro-assurance de l’informel (2)

1) Les structures du secteur informel

850. Au Bénin, selon une étude réalisée par l’Institut National de la Statistique et de
l’Analyse économique (INSAE), le secteur informel a joué un rôle de premier plan dans
l’économie béninoise durant ces 20 dernières années. « Le secteur informel béninois procure
près de 67,3% du Produit intérieur brut contre 32,7% pour le secteur formel et fait vivre la
majorité de la population, surtout les diplômés sans emploi », indique la même source995.

Les petits métiers sont régis par le Décret n°2003-569 du 29 décembre 2003 portant
approbation de la nomenclature des métiers de l’artisanat au Bénin. On y dénombre onze
principales branches d’activité à savoir : le bâtiment, l’alimentation, les métaux et la
construction métallique, les pierres, les fibres végétales, les textiles, l’habillement, le cuir et les
peaux, l’art et la décoration, la poterie et la céramique, l’installation et maintenance électrique,
la réparation et la photographie, l’électronique, l’électricité et le froid, l’hygiène et les soins
corporels996. Ces petits métiers sont structurés autour de quatre principales catégories selon la
nature des activités procurées : la production, les services, la distribution et l’artisanat.

851. C’est dans le secteur de l’agriculture (a), dans la pêche (b) dans le commerce (c) et dans
le transport (d) que le secteur informel est plus marqué. Ce qui nous amène à nous intéresser à
ces structures.

994
Le secteur informel représente jusqu’au 98% de la population active au Mali. V. Etude sur la micro-assurance
dans la zone CIMA, Etat des lieux et recommandations, Dossier :4410-36-34 (0052), juin 2011, p.08
995
Voir en ce sens : Etude sur la micro-assurance, op. cit., p. 08.
996
Voir, Rapport de la commission de l’économie et des finances de la république du Bénin, op. cit., p.15.

399
a) Le secteur agricole

852. Au Bénin, le secteur agricole est en grande partie constitué par l’informel. Le pays tire
majoritairement sa richesse du secteur primaire à raison de 38% du PIB dont l’agriculture est
une composante principale (75%), surtout de la culture du coton qui représente plus de 85% des
exportations béninoises, contribuant ainsi fortement à la création de richesse. Selon les
estimations des autorités béninoises, l’égrenage de 50000 tonnes de coton augmente le taux de
croissance de 1%997.

853. Le secteur agricole mauritanien représente environ 20% du Produit Intérieur Brut (PIB)
998
du pays et il occupe directement plus de 50% de la population. Ce secteur est le premier
pourvoyeur d’emplois. Sur la base de ces différents éléments, on constate que les acteurs du
secteur sont de potentiels micro assurables qu’il faut nécessairement amener à adhérer à la
micro assurance.

b) La pêche

854. La Mauritanie est une des régions les plus poissonneuses du monde grâce à un
écosystème littoral exceptionnel. La pêche y joue un rôle primordial dans l’économie. Elle
représente 10 % du PIB et entre 35 et 50 % des exportations du pays. Les recettes budgétaires
de l’État proviennent de la pêche à hauteur de 29 %. La pêche crée 45000 emplois directs et
indirects, soit 36 % de l’emploi. On estime que la pêche artisanale crée 31 % des emplois,
contre 12% pour la pêche industrielle999.

855. Au Bénin, le secteur de la pèche génère plus de 600 000 emplois directs et indirects et
contribue à la réduction du taux de chômage et à la satisfaction des besoins en protéines
animales de la population. Trois types d’activités de pêches y sont pratiqués : la pêche

997
V. Indicateurs macroéconomiques sur le Bénin de 2005 à 2099.
998
S. O-MOHAMED LEMINE, L’analyse du développement de l’agriculture en Mauritanie. Thèse, Université
du Maine, 2011, p.
Voir. Note d’information sur le secteur de la pêche et l’aquaculture en Mauritanie pour la délégation de la
999

commission de la pêche du 3/11/2010 au 5/11/2010, p. 9.

400
maritime, continentale et l’aquaculture1000. Le domaine pouvant intéresser les micro assureurs
demeure la pêche artisanale continentale qui constitue l’activité de pêche la plus productive ; sa
production est estimée à environ 30 500 tonnes par an (sur un total estimé de 40 000 tonnes).
Environs 56 880 pêcheurs travaillent dans ce sous-secteur et le nombre d’embarcations est
estimé à 42 200. Les activités connexes (telles que mareyeurs, vendeurs…) emploient 300 000
personnes supplémentaires1001.

c) Le commerce

856. Les commerçants informels n’ont en aucun cas recours au système bancaire et très
rarement aux services de la microfinance dans les éléments constituant leurs capitaux. C’est
dire que beaucoup d’entre eux ne pensent pas domicilier leurs revenus dans des structures
financières officielles. Ils gardent toujours leurs revenus dans leurs maisons, évitant
certainement l’administration fiscale. Cette attitude, très générale, est liée à la crise bancaire
qu’a vécue le Bénin pendant la période révolutionnaire1002.

Les enquêtes réalisées sur le marché de Dantokpa en Janvier 1992 font état de 18599 vendeurs
dont 13953 principaux et 4866 auxiliaires. Le chiffre d’affaires du marché Dantokpa était
estimé à l’époque à plus de 91 milliards de F CFA par an. Selon des études réalisées par le
Professeur John IGUE, la vente de l’essence frelaté « kpayo » se fait à chaque coin de rue de la
quasi-totalité des localités du Bénin, du nord au sud du pays. Des petits stands en bois
permettent aux clients d’acheter du carburant venu du Nigéria à un prix inférieur de 30 %.
C’est une activité qui occupe plus de 50 000 trafiquants qui distribuent près de 244 000 tonnes
de produits pétroliers, soit près de 70 % du besoin national. Leur chiffre d’affaires annuel est
supérieur à cent milliards de FCFA et génère un bénéfice de trente-quatre milliards de
FCFA1003.

Les acteurs informels empruntent auprès des structures tontinières pour leurs

1000
http://statpeche-uemoa.org/index.php/Structure_de_la_p%C3%AAche_au_B%C3%A9nin, consulté le 22
aout 2017..
1001
http://statpeche-uemoa.org/index.php/Structure_de_la_p%C3%AAche_au_B%C3%A9nin, consulté le 22
aout 2017.
1002
Voy. supra, n°17.
1003
Agence Française de Développement : Dantokpa, étude préliminaire sur le marché central de Cotonou. Juin
1992. Cité dans le rapport de la commission de l’économie et des finances de la république du Bénin, op cit.p.15.

401
investissements. Ces entreprises tontinières exercent dans des domaines réservés le plus
souvent aux banques et aux sociétés d’assurances.

857. En Mauritanie, les importations sont monopolisées par des grossistes généralement
proches des cercles de pouvoir. La redistribution des produits est ensuite effectuée dans des
petites échoppes ou par des vendeurs installés dans les marchés de la capitale et des autres
grandes villes Ainsi, le secteur informel demeure incontournable et se trouve impliqué dans la
vente de la plupart des produits, du bétail aux pièces automobiles. Enfin, les magasins de taille
moyenne et les petites superettes sont très répandus, tout particulièrement à Nouakchott et à
Nouadhibou.

d) Le domaine du transport

858. Le transport en commun reste le secteur le moins développé et le moins performant du


territoire béninois. Cette situation le pays dû essentiellement au fait qu’il n’existe pas
d’incitations gouvernementales en vue d’améliorer les infrastructures et les services de
transport. Ainsi, on note très peu de bus dans les grandes villes, surtout depuis la
dégénérescence des sociétés de transport urbain collectif. Ils sont de plus en plus remplacés par
minibus depuis 1999. Quelques habitants des principales villes restent captifs de ce mode de
déplacement. Le secteur de transport, notamment celui de taxis-moto zémidjan qui constitue
1004
devient un fléau permanent pour ses usagers offre à lui seul plus de 185 000 emplois aux
jeunes béninois, soit plus de la moitié des activités informelles.

Au Bénin, le taxi-moto est, selon la légende, le résultat de l'initiative d'un homme, Jules
AHOTIN qui décida à la fin des années 1970 d'utiliser sa moto pour transporter les vendeuses
d'akassa1005 entre les champs et la ville, dans la région de Porto-Novo, la capitale administrative
du Bénin. De là est née l'expression " zémidjan ", qui signifie « emmène-moi vite » ou encore
« prends-moi brusquement » en langue fon (sud du Bénin). Le phénomène s'est étendu peu à
peu à toute la région de Porto-Novo, mais il existait déjà au Nigeria depuis les années 1970, où

1004
Cette activité constitue une source de pollution immense pour les grandes villes en général et en particulier
pour Cotonou la ville la plus polluée du monde. Outre les risques d’affection ORL et de cancers, il y a le risque
de vieillissement précoce qui plane sur les populations locales . Elles ont en effet perdu, avec l’introduction de
ce mode de transport, l’habitude de la marche, car longer à pied une artère routière pour rentrer à la maison est
devenu aujourd’hui une entreprise pénible la plus polluée du monde
1005
Purée à base de maïs.

402
les taxis-motos avaient servi de complément aux moyens de transport classiques, notamment à
Lagos. Le taxi-moto est également apparu spontanément dans d'autres régions, dans les
périodes de pénurie de modes de transport classiques, comme lors des conflits et fermetures de
frontières : à la frontière du Niger et du Nigeria, par exemple, ou entre le Kenya et l'Ouganda
sous le régime d'Idi Amin DADA. Cependant, les taxis-motos posent un problème majeur en
termes d'écologie, Cotonou étant désormais une des villes les plus polluées d'Afrique. Pour les
autorités béninoises, un contrôle gouvernemental est particulièrement difficile à mettre en place
dans la mesure où cette activité est la source de revenu d'une immense partie de la
population1006.

859. En Mauritanie, le secteur informel emploie 80% de la main d'œuvre active1007. Il s’agit
là de travailleurs sans contrats de travail, sans protection sociale, et dépourvus de droit à la
retraite

2) L’expérimentation d’une micro-assurance de l’informel

860. Le zémidjan est devenu incontournable voir vital non seulement pour la création de
d’emplois en milieu urbain, mais aussi dans la facilitation des fonctions essentielles comme
celles du déplacement et de l’approvisionnement en denrées alimentaires de premières
nécessités. Il permet aujourd’hui à la majeure partie de la population d’exercer une activité. De
ce fait, il est primordial pour ce secteur de voir se développer une forme de micro assurance
susceptible de couvrir les risques auxquels ses usagers sont exposés.

861. Depuis le 6 décembre 2014 MTN1008 et NSIA, deux sociétés respectivement dans la
communication mobile et l’assurance, se sont accordées pour mettre en place une d’assurance
destinée aux conducteurs de zémidjan. En effet, il s’agit de la création d’un produit « Zém
Assur » dont le but principal est la couverture des risques auxquels sont généralement
confrontés les conducteurs d’engins à deux roues en l’occurrence. En somme, « Le produit
dénommé Zém Assur est un produit qui couvre le conducteur de taxi moto contre les risques de

1006
https://www.cairn.info/revue-l-economie-politique-2009-1-page-59.htm#no1, consulté le 13 aout 2017.
1007
Voir, Rapport sur l’application en Mauritanie de la Convention internationale sur la protection des droits de
tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille, Nouakchott, mars 2016.
1008
Mobile Télécommunication Networks est une multinationale sud-africaine qui exerce dans les domaines des
télécommunications au Bénin en Afrique dans plus de 16 pays

403
décès, d’invalidité ainsi que les frais de traitement en cas d’accident ». En ce qui concerne son
mode de fonctionnement en cas de sinistre : « les capitaux garantis par ce produit sont : En cas
de décès, 500 000 FCFa. En cas de d’invalidité, 500 000 FCfa. Les frais de traitement s’élèvent
à 30 000 FCfa pour une prime par personne et par an de 5000 FCfa, soit 400 F par mois et 15 F
par jour »1009. On peut remarquer que les garanties offertes par zem assur en cas de sinistre sont
bien en deçà de celles offertes par les assurances locales béninoises. En effet, la micro
assurances ne garantit pas une réparation intégrale du préjudice visée par l’assurance. L’offre
Zem assur constitue donc l’exemple strico sensu de la notion de micro-assurance. Par ailleurs,
on peut constater que ni la responsabilité civile du conducteur, ni la couverture de la personne
transportée ne sont garanties par Zem assur. Le montant de la prime mensuel peut être un début
de réponse à ce problème.

1009
Précision de Mr Edmond BOSSOU: représentant de Nsia Bénin, V.
http://www.matinlibre.com/index.php/societe/item/1060-mtn-et-nsia-lancent-zem-assur, visité le 19 aout 2017.

404
Conclusion du chapitre II

862. Que ce soit au Bénin ou en Mauritanie, Le marché de l'assurance classique n'a toujours
pas pu procurer aux couches sociales relevant du secteur informel une protection nécessaire
pour leur permettre de faire face aux aléas de la vie. Il est impératif de mettre en place des
alternatives, tant pour des préoccupations sociales que pour garantir au marché de l'assurance
de la crédibilité. De par sa nature double, la micro-assurance représente aujourd'hui l'une des
meilleures chances de réaliser cet objectif de protection des biens et des personnes à faible
revenu.

863. En matière de règlementation, il est impératif pour le système juridique mauritanien


de créer et de développer des règles et réglementations relatives à la micro-assurance et à son
contrôle, tout en gardant à l’esprit leurs exigences spécifiques. Il va s’en dire que créer un
cadre réglementaire adapté est une tâche complexe car elle implique de multiples acteurs et
requiert de nombreuses innovations stratégiques et opérationnelles. Le Bénin a une petite
expérience en micro-assurance certes, néanmoins de nombreuses questions restent sans
réponse sur les mesures appropriées pour surmonter les difficultés et parvenir à une plus
grande ouverture se pose dans ce pays et dans l’ensemble des pays membres de la CIMA.

Il serait peut-être nécessaire d’adapter certains aspects de la réglementation aux exigences de


l’informel pour répondre aux besoins de la micro assurance.

Il faut reconnaitre que la commercialisation de la micro assurance à des populations


fragiles reste une activité noble même si celle-ci n'est pas le produit le plus lucratif en matière
d’assurance. Il ne faudrait surtout que qu’assureur et micro assureurs la délaissent ou
l’abandonne, car il leurs permet notamment d'être bien implantées localement dans des pays
africains et surtout d’endiguer la pauvreté.

864. Le secteur des assurances est en crise en Afrique. La réflexion sur des alternatives au
développement de l'assurance ne constitue pas un échec de l’assurance en général, mais plutôt
un retard dans son développement. Une réflexion qui s’est orienté autour de la micro
assurance était nécessaire car, c’est à travers cette pratique que le secteur peut se
démocratiser.

865. À la lumière de ce qui précède, nous constatons que l’Afrique de par son
développement démographique, son image de continent d’avenir, l'Afrique est une terre
particulièrement propice à l'essor de la micro-assurance. Au-delà de sa dimension sociale qui

405
a trop souvent retenu l'attention au risque de constituer un élément dissuasif du point de vue
des assureurs commerciaux en quête de rentabilité, la micro-assurance présente un aspect
économique incontestable. L'essor de la micro-assurance en Afrique suppose cependant de
venir à bout de bon nombre de difficultés. Il s'agit en l’occurrence de l'image peu reluisante de
l'assureur auprès des populations africaines avec pour conséquence une culture de l'assurance
qui tarde à se mettre en place, de l'instauration d'un cadre réglementaire approprié, de la
détection des besoins réels des populations africaines en matière d'assurance, de la recherche
des canaux appropriés de distribution ou encore de l'épineuse question de la réduction des
couts ou encore de la célérité en matière d’indemnisation.

Conclusion titre II

866. Il nous a été utile pour trouver une solution aux problèmes structurels du secteur de
l’assurance en Afrique Subsaharienne de rechercher des modèles de réussite dans le continent.
Durant cette quête nous auront été séduits par les modèles sud-africain et marocain de
l’assurance. Il est vrai que l’Afrique du Sud et le Maroc sur le plan économique sont de loin
plus prospères que le Bénin ou la Mauritanie. Les marchés marocains et sud-africains sont
caractérisés par leur ouverture, leur diversité et leur caractère concurrentiel. C’est fort de leurs
positions que les compagnies d’assurances marocaines et sud-africaines visent une
internationalisation en essayant de conquérir les marchés d’Afrique Subsaharienne où tout est
à bâtir. La distribution occupe une position centrale dans les politiques de développement de
l’activité. Le Maroc mise sur la bancassurance et se veut au diapason des stratégies de
commercialisation quant à l’Afrique du Sud, elle utilise tous les canaux possibles et a
définitivement résolu le problème de l’obligation d’assurance. Le marché Sud-africain
libéralisé et surtout dynamique s’apparente aux marchés européens (surtout Anglais). Il se
présente comme la locomotive à n’en point douter du continent africain avec plus de 90% du
volume global des primes Vie en 2010 selon les chiffres de Swiss Re.

867. L’émergence de l’assurance takaful offre une nouvelle opportunité de croissance à


l’activité qui jusque-là était freiné apparemment par des raisons d’ordres moraux ou religieux.

Nous avons par ailleurs procédé à un état des lieux de l’activité d’assurance, une étude qui
était centrée sur les conditions, les exigences de la pratique et surtout sur la vie d’une

406
compagnie d’assurance. Il en ressort que la rigueur doit être de mise de la constitution à la
disparition d’une société d’assurance. En ce sens, les pays membres de la CIMA espèrent
beaucoup de l’assainissement du marché. Les organes de contrôle auront la particularité d’être
autonome et indépendante. L’intérêt des compagnies d’assurances étrangères pour les
marchés d’Afrique subsaharienne dénote des avancées sur le plan règlementaire et de la
fiabilité des organismes de contrôle.

868. La micro assurance reste une alternative pour dynamiser le secteur de l’assurance la
démocratiser et la rendre accessible. L’essor de la micro assurance exige l’effort conjugué de
plusieurs parties, les Etats en tête. Il faudrait par ailleurs beaucoup de patience car, il faudra
attendre plusieurs années pour commencer à en voir les retombées.

Enfin, le succès de la micro assurance dépend en grande partie des assureurs eux même. Ils
doivent faire preuve d’innovation en se référant à des exemples de réussite en les adaptant aux
potentiels assurés.

407
Conclusion de la deuxième partie

869. L’étude de l’organisation des assurances au Bénin et en Mauritanie nous a amenée à


nous intéresser à sa pratique et à son fonctionnement. Pour ce faire, il a été nécessaire de
s’intéresser tout d’abord au régime juridique du droit des assurances pour en définir le cadre
juridique et les objectifs. Le contrat d’assurance, étant la base juridique des liens unissant
l’assureur et l’assuré occupe une position capitale dans le droit mauritanien et dans les pays
membres de la CIMA. L’étude de la formation de celui durant cette deuxième partie nous l’a
confirmé.

Pour en arriver au cadre juridique actuel qui n’est pas exempt de critique, un dépoussiérage
des textes régissant le secteur des assurances en France pendant les années trente a été
nécessaire.

870. Le régime juridique actuel des droits africains applicables en matière d’assurance
accordent une importance capitale à l’indemnisation qui est l’objectif même de l’assurance.
Evidemment pour prétendre à une indemnisation, il faut que les prétentions soient existantes
d’où la nécessite d’un contrat d’assurance qui définit les droits et obligations de chaque partie.

871 En matière de réparation, le Code CIMA a franchi un pas en avant dans le sens de
l'amélioration de l'indemnisation des victimes d'accidents de la route en particulier. Il a écarté
les causes d'exonération qui constituaient les obstacles les plus courants à l'indemnisation.
Mieux que la loi mauritanienne, il a organisé la procédure d'indemnisation en instituant et en
réglementant plus en détails et plus rigoureusement la procédure de transaction obligatoire.

Aussi, l'analyse des réformes réalisées en matière de plafonnement des indemnisations montre
que celles-ci cherchaient surtout à maîtriser le coût de l'indemnisation par la barémisation et le
plafonnement des indemnités bénéfiques aux assureurs essentiellement.

En somme, les pays africains se rendent enfin compte que l’assurance moderne doit être
dynamique, concurrentielle et que ses acteurs se doivent de projeter une image positive. Le
Bénin et la Mauritanie ont opté pour la libéralisation de leurs secteurs des assurances.
L’efficacité et l’efficience du secteur des assurances dépendent beaucoup des organismes de
contrôles dont la particularité réside dans leur autonomie et la compétence de leurs membres.

872. Enfin, la seconde partie de la thèse aura mis en évidence la nécessité de recourir à la

408
micro assurance. Il a été démontré que les avantages de la micro assurance ne sont plus à nier
aussi bien en matière d’assurance qu’en matière de lutte contre la pauvreté. Les assureurs
africains s’efforcent de relever les défis de la micro assurance en utilisant une variété de
canaux de distribution en essayant dans une certaine mesure de prendre en compte les besoins
réels des populations en matière de couverture.

409
CONCLUSION GENERALE

873. Pour appréhender le droit des assurances au Bénin et en Mauritanie, il a été nécessaire
de commencer cette thèse par une étude sur l’évolution de la notion d’assurance en Afrique.
De ce fait, notre recherche s’est d’abord intéressée à la solidarité en tant que pratique
assimilable à l’assurance. Ce qui nous a permis de poser le postulat de l’existence d’un
concept d’assurance chez les Africains. En effet, il s’agissait de voir dans quelle mesure les
mécanismes de la solidarité africaine pouvaient être conciliables avec l’assurance ou du moins
constituer un levier pour le développement de celle-ci.

Dans la société africaine traditionnelle, la solidarité sous ses diverses formes a


toujours permis de faire face aux aléas de la vie. Aujourd’hui, ces formes d’entraide
commencent à s’estomper dans les grandes villes africaines et au demeurant ne suffiront plus
à faire réparer les divers fléaux et catastrophes auxquels sont exposés les africains.
Aujourd’hui, l’assurance ne devrait plus être considérée comme un produit inaccessible. On
remarque malheureusement que, le modèle occidental de l’assurance peine à s’appliquer en
l’état dans la plupart des pays africains. En fait, le système actuel des assurances des pays
occidentaux s’est construit selon une logique socio-historique fortement marquée par
l’industrialisation et l’individualisme alors qu’en Afrique, même si, l'urbanisation est en
marche1010, et que l’industrialisation et la modernisation des modes de vie sont réels, on
recourt encore beaucoup à la famille, à la communauté au relations humaines en tant que
moyens de réparation des dommages.

874. En somme, une frange non négligeable des populations africaines malgré toutes les
stratégies adoptées jusque-là n’adhère pas aux assurances mêmes obligatoires. Plusieurs
raisons ont été évoquées pour expliquer cet état de fait.

Par ailleurs, pendant que L’Afrique du Sud est le leader du secteur de l’assurance en Afrique
et se bat pour conserver sa place, l’Afrique du Nord se structure et représente un fort
potentiel. L’Afrique subsaharienne demeure encore un marché embryonnaire et peine à se
développer.

875. Cette thèse nous a permis de démontrer que les systèmes de protection informels et la

1010
D'ici à 2050, 60% de la population vivra en ville

410
solidarité ne constituent pas de véritables remparts face aux risques modernes. Aux côtés des
avancées positives, les marchés africains de l’assurance connaissent de nombreuses faiblesses,
qui expliquent en partie les problèmes de développement de celui-ci.

Tout d’abord, le revenu faible des africains pour ne pas dire la pauvreté est un frein. En effet,
avant de payer une prime d’assurance, des dépenses prioritaires d’alimentation, de logement
sont vitaux et relèguent l’assurance dans la catégorie des dépenses de luxe et donnent à
beaucoup l’impression que les assurances obligatoires sont des impôts. A cela, il faut rajouter
un développement moindre de la bancarisation, levier majeur pour le développement de
l’assurance vie. La faiblesse des revenus moyens des particuliers est le problème le plus
difficile à maitriser car il concerne l’économie globale.

876. A un certain moment, l’existence d’un cadre règlementaire inadapté a aussi été avancé
pour expliquer les difficultés du secteur. Il est vrai que le problème de la réglementation jugée
obsolète a été en partie résolu avec l’adoption des nouvelles lois qui méritent toutefois de
nouvelles réformes surtout le CAM. Le fait culturel ou religieux, on l’a assez soulevé était
incompatible avec certains aspects de l’assurance. Le rapport assureur et assuré est biaisé car
la majorité des assurables restent sceptiques quant à la promesse de remboursement en cas de
sinistre par les assureurs. Inversement, certaines assurances facultatives ne sont pas proposées
par les assureurs par crainte d’explosion de demande d’indemnisation frauduleuses1011.Face à
cette réalité, il est urgent de prendre les mesures adéquates pour informer et sensibiliser les
populations, pour la plupart analphabètes, afin de lui faire prendre conscience de l’importance
de l’assurance et surtout du caractère impératif de la loi, car force doit demeurer, malgré tout
à la loi.

D’autres raisons existent puisqu’au tout début, on expliquait le retard du secteur de


l’assurance par la délocalisation des assurances des grands risques. Pour y remédier, les
pouvoirs publics ont essayé d’entreprendre des réformes, sous l’impulsion des associations
professionnelles, visant à renforcer la place des compagnies locales. À cet effet, trois types de
leviers ont été actionnés. Le premier est le réaménagement de l’environnement juridique et
institutionnel, pour instaurer dans la quasi-totalité des pays touchés par le phénomène,
l’obligation de domicilier localement l’assurance de toutes les personnes physiques ou
morales, de tous les biens et de toutes les responsabilités qui s’y rattachent. Le deuxième est
le renforcement de la formation des cadres, pour offrir des services comparables en termes de

1011
Risque n° 71, p. 76.

411
coût et de qualité aux standards internationaux1012. Enfin, le troisième levier est le
renforcement du contrôle pour donner plus de crédibilité aux acteurs locaux. Il s’avère que les
réformes seront sans effet notoire puisque les États semblent toujours impuissants devant les
pratiques délibérées de délocalisation de l’assurance des grands risques industriels et
commerciaux. En effet, des groupes d’intérêt divers et bien connus ont élaboré et affiné au
cours des années des stratégies variées ayant abouti à une situation unique en son genre :
l’assurance d’une grande partie des grands risques industriels et commerciaux est placée en
dehors de la zone des pays d’Afrique subsaharienne, privant ainsi nos marchés d’une valeur
ajoutée très importante. Il n’existe malheureusement aucune statistique sur ces opérations
confidentielles, mais dès l’instant où elles concernent principalement les risques industriels,
pétroliers et miniers, réputés très capitalistiques, on est en droit d’estimer que les primes
d’assurances en jeu sont importantes. Sur de nombreux marchés également, les sociétés
d’assurances se contentent de faire du fronting sur les grands risques1013.

877. Singulièrement pour la Mauritanie, on peut remarquer une autre difficulté qui
découle « de l’absence d’une compagnie nationale de réassurance, toutes les opérations du
genre étant laissées à l’étranger. L’existence d’une compagnie de réassurances sur le
territoire nationale aurait pu créer les conditions d’une répartition verticale. Elle aurait
permis à chaque société opération sur le marché mauritanien de lui céder une quote-part des
risques. Cette entité pourrait avoir un statut de société publique ou semi publique ».1014 Il
faut ajouter à la faiblesse liée à la taille et à la structure du marché une absence de contrôle et
de régulation de la part des pouvoirs publics mauritaniens.

La solution serait de mettre en place de nouvelles assurances pour les risques non encore
couverts et qui justifient les assurances à l’extérieur et surtout, procéder à une application
stricte des dispositions du Code des assurances relatives à l’interdiction de l’assurance directe
des risques à l’étranger1015.

878. La CIMA est reconnue comme un modèle d’intégration africaine, elle a pour objectif

1012
Les pays membres de la CIMA ont pu mettre en place l’Institut International des Assurances (IIA) dont le
siège est à Yaoundé (République du Cameroun)
1013
Note de Martin ZIGUELE pour CAP Afrique, juillet 2008 : Comment renforcer les compagnies d’assurances
africaines de la zone CIMA, p.6.
1014
http://www.financialafrik.com/2015/10/23/mauritanieassurances-les-goulots-qui-etranglent-le-
secteur/#.WWsaehXyjcs , consulté le 3 septembre 2017.
1015
V. article 199 du Code des assurances mauritanien portant « interdiction d’assurance directe à l’étranger des
risques situés en Mauritanie sauf pour certaines dérogations temporaires ».

412
notamment d’œuvrer pour le renforcement et la consolidation d’une coopération étroite dans
le domaine de l’assurance et de permettre l’investissement local. Elle travaille également à la
constitution sur l’ensemble des états membres, d’un marché élargi et intégré réunissant les
conditions d’un équilibre satisfaisant sur les plans technique, économique et financier. La
législation CIMA est en pleine mutation, en guise d’illustration plus de quatre-vingts articles
ont subi des modifications depuis le 15 février 1995. Initialement Elaborée dans des
conditions particulières des marchés africains de la zone Franc FCFA, elle s’adapte
progressivement aux réalités locales de chaque pays composant la zone. Cependant, la CIMA
elle-même, en dépit de sa belle architecture et des résultats obtenus, n’est pas encore une
construction achevée. Elle est en cours d’évolution, ainsi la législation actuelle ne consacre ni
l’agrément unique, ni la libre souscription des contrats, ni une totale liberté des placements à
travers les quatorze états membres. L’étape supplémentaire et indispensable à franchir est sans
aucun doute la réalisation d’un marché unique au vrai sens du terme. Toutefois il faut saluer la
fameuse réforme de 2011 de l’article 13 du Code CIMA concernant les primes, réforme qui a
eu pour objectif de mettre fin à ces pratiques nuisibles pour l’activité. En effet, la mobilisation
de capital par les compagnies d'assurance est possible en raison du laps de temps qui s'écoule
entre la collecte des primes et le règlement des sinistres, ce qui permet en effet aux
compagnies de placer leurs fonds

En 2005, les arriérés de primes des marchés de la CIMA représentaient 51 % du chiffre


d’affaires, taux qui varient de 23 % à 87 % selon les pays 1016. Grace à cette loi et à une
certaine rigueur, le niveau des arriérés de primes tend à la baisse, il s’est établi à 69,20
milliards de F CFA en 2014, il se situait à 142,12 milliards de F CFA en 2013. Entre les
exercices 2014 et 2013, les arriérés de primes ont baissé de 51,3%.1017. Par ailleurs, on
remarque Le contrôle du secteur de l’assurance est important et assez sérieux dans l’espace
CIMA, dans la mesure où la supervision du secteur des assurances est assurée à deux niveaux
: d’une part, les Etats ont concédé l’essentiel de leurs pouvoirs de régulation à une
organisation communautaire unique de supervision dénommée CIMA. D’autre part, certains
aspects du contrôle relèvent de la compétence du ministre en charge des questions d’assurance
dans chaque pays membre. Au niveau communautaire, la supervision des marchés incombe à
la Commission Régionale de Contrôle des Assurances (CRCA).

1016
La réalité entre les sociétés est plus contrastée. Certaines sociétés dépassent les 100 %. V. note ZIGUELE
op.cit.,
1017
Source rapport CIMA 2014.p. 21.

413
879. Beaucoup a été dit et écrit sur les mesures à mettre en place pour lever les obstacles au
développement des assurances en En Afrique francophone. Mais pour promouvoir
l’expansion de services d’assurance de qualité, il est nécessaire de développer une
connaissance réelle des besoins en assurance en Afrique.

Dans le domaine automobile, il faut à coup sûr envisager, la mise en place du fichier
automobile en portefeuille au niveau de l’ensemble des sociétés d’assurance concernées, pour
une meilleure analyse du comportement du risque et par voie de conséquence, procéder aux
ajustements sur la prime qui s’imposent1018.

880. Pour la Mauritanie, il serait temps que la micro-assurance et l’assurance takaful soient
réglementés par les pouvoirs publics à travers une réforme du CAM. La réforme en question
devrait outre la consécration de la micro assurance et de l’assurance takaful avoir pour
objectif de promouvoir et de faciliter et de pérenniser ces activités.

Ensuite, puisque beaucoup d’africains musulmans sont réticents à toute forme d’assurance par
crainte de tout ce qui est non conforme à leur religion l’assurance islamique peut constituer
une solution à la non assurance chez les assurables. En effet, l’assurance takaful correspond
plus aux aspirations, de la république islamique de Mauritanie et peut contribuer à lever toutes
les barrières psychologiques qui se dressent encore devant l’acte même de s’assurer. Ce qui
constitue déjà un argument commercial très solide.

En matière de formation, l’Etat mauritanien doit réfléchir à l’ouverture d’une Ecole ou de


centre de formation spécialisé en matière d’assurance afin de contribuer à la propagation du
savoir et des connaissances requises et participer à la formation de compétences nationales de
moyen et haut niveaux, nécessaires au secteur des assurances.

Il est reconnu que le Fonds de Garantie Automobile vient renforcer le dispositif


d’indemnisation des accidentés de la circulation et contribue à l’amélioration de nos systèmes
de réparation. Donc, Il est inconcevable aujourd’hui de concevoir un système d’assurances
sans Fonds de Garanties Automobile, c’est pourquoi, la Mauritanie doit rendre opérationnel le
Fonds de Garantie Automobile (FGA) qui est prévu par son Code des assurances et ce dans
les plus brefs délais.

Il faut aussi procéder à une mise systématique en fourrières des véhicules non assurées afin de
garantir une meilleure immobilisation des véhicules arrêtés pour défaut d’assurance, cette

1018
Système de bonus ou malus.

414
politique doit être accompagnée d’une lutte anticorruption.

881. La non-assurance est véritablement un fléau en Afrique pour lutter contre ce


phénomène ou le limiter, il est nécessaire de renforcer les contrôles routiers et instituer un
système de partenariat avec les forces de l’ordre. Ce système consisterait en ceci : « dès que
les policiers ou gendarmes arrêtent un usager non assuré, ils lui retirent ses pièces et le
renvoient vers une compagnie d’assurance de son choix pour souscrire l’assurance à charge
pour l’assureur de laisser à cet usager une copie du reçu. Les forces de l’ordre récupèrent ce
reçu, contrôlent l’attestation d’assurance avant de restituer le véhicule au propriétaire. Ces
reçus seront centralisés puis renvoyés avec un bordereau aux différentes compagnies
mensuellement. Il reviendrait à ces compagnies d’assurance de payer au profit des forces de
l’ordre, une commission symbolique dont le montant ne dépasserait pas ce qu’a prévu le
législateur pour les apporteurs simples »1019.

Le plus grand défi auquel fait présentement face l’assurance africaine, est sa démocratisation
et surtout son accessibilité au plus grand nombre. L’assurance africaine est en effet encore
trop élitiste, sa clientèle recoupant des agents économiques qui ne constituent pas loin de là la
majorité de la population africaine. Il est évident que le meilleur outil pour le développement
et l’amélioration des activités d’assurance reste la communication et l’application active et
ingénieuse des méthodes modernes de marketing.

882. Concernant l’assurance sociale, actuellement, les gouvernements de nombreux États


africains accordent un minimum de protection dans les domaines jugés prioritaires comme la
santé (maladie et accident de travail), la vieillesse (pension de retraite) ou la maternité
(allocations familiales).

La promotion des nouveaux produits destinés principalement au secteur informel et au monde


rural nous autorise à dire que le réseau de distribution de l’avenir dans la zone CIMA se
trouve dans les modèles de la téléphonie mobile, de la micro-finance et de la bancassurance

Depuis l’indépendance à nos jours, que ce soit au Bénin ou dans une certaine mesure en
Mauritanie, le droit des assurances a dû s’adapter, à travers les différents choix économiques,
en optant d’abord pour l’option socialiste et enfin l’ouverture sur l’économie de marché.

Certains seraient tentés de prôner un rapprochement ou tout simplement une adhésion de la


Mauritanie au Code CIMA. Diverses raisons d’ordres politiques ou institutionnels cette fois

1019
Voir Etude du phénomène de non assurance en responsabilité civile automobile au Bénin, p 52 et s.

415
ci ne permettent pas d’envisager dans l’immédiat un tel rapprochement qui pourrait être très
bénéfique pour la Mauritanie.

416
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Rapport sur l’application en Mauritanie de la Convention internationale sur la protection des
droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille, Nouakchott, mars 2016
Rapport National sur le Développement Humain au Bénin, édition 2003
Rapport de situation sur la sécurité routière dans le monde, OMS 2013.
Rapport sur l’application en Mauritanie de la Convention internationale sur la protection des
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Conditions d'Exercice d'une Activité Commerciale ou Industrielle au Bénin.

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capitalisation, aux opérations d’assurances et à la profession d’assurance (Bénin).

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Traité du 17 Octobre 1993 relatif à l’harmonisation du droit des affaires en Afrique.

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Acte Uniforme sur l’arbitrage et du règlement CCJA.

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administrative en Mauritanie.

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Loi n° 2000-016 portant Code de l'Arbitrage en Mauritanie.

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Garantie Automobile du Bénin.

Décret n° 2007-617 du 31 décembre 2007 fixant le régime financier du Fonds de Garantie


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Décret n° 2014-292 du 24 avril 2014 portant relèvement du Salaire au Bénin.

Loi n° 2015-42 portant institution du Régime d'Assurance Maladie Universelle (RAMU) en


République du Bénin.

Décret n° 2016-054 du 10 mars 2016, portant obligation d'assurance des risques de la


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Code CIMA.

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NOTES, AVIS, DECISIONS ET COMMENTAIRES DE JURISPRUDENCE

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2e Civ., 1er juillet 2010, pourvoi n° 09-10.590, Bull. 2010, II, n° 129 ;

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Cass. Civ.24 juin 2004. (Bull. n° 308)

Cass. Civ. 28 février 1990,

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Cass. 1re civ., 5 juin 1985, n°84-11.395, RGAT 1985, p.542, note F. CHAPUISAT.

Cass.civ.,25 oct. 1937: DH 1937, I, 565.

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Cass. civ. 2e, 28 octobre 1954, J.C.P. 1955, II, 8765

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JOURDAIN ;

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Cass., civ. 2e, 15 mai 2008, pourvoi n° 06-19.737, F-D, commenté au JAC n° 85.

Civ. 2e, 5 juillet 2006, n° 05-11729.

Cass.civ.1re, 6 janv.1981, RGAT, note A. BESSON.

Cass. civ. 1re,17 mars 1993, n°91-13438, Bull. civ. I, n°113 ;

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Cass., 1re civ., 9 déc. 1997, n° 95-19.003.

Jugement n° 945/cor du 21 mai 1996 (TPI de Bafia), affaire Ministère Public et ONANA Jean
Marie c/KAMGA Pierre.

TPI de Dschang, jugement n°369/cor du18 janvier 2005

431
Cour d’appel de Ouagadougou Chambre civile et commerciale, Arrêt n° 66 du 21 juin 2002,
Héritiers YONABA Hamidou c/ KONDOMBO Marcel et la SONAR, Ohadata J-04-20.

Cour d’Appel de Dakar n° 17 du 15 janvier 1971 , CAG DE FRANCE / Ousmane SOW c /


Héritiers Bambi CAMARA - Code CIMA, Les textes annotés / EDJA/ 2007, p. 127 , Ohadata
J-10-150.

INDEX ALPHABETIQUE GENERAL


(Les chiffres renvoient aux numéros de paragraphes)
A
Accident : 2, 21, 88, 90, 136, 158, 159, 161, 162 163 202 248 250 251 253 261 263 268
270, 271, 272, 275, 277, 278, 294, 296, 298, 301, 302, 303, 304 , 309, 313, 314, 316, 336,

432
338, 349, 375, 376, 428, 456, 457, 475, 476, 484, 489, 493, 494, 495, 496, 499, 500, 501, 502,
505, 509, 510, 511, 514, 516, 523, 524, 526, 530 , 531, 535, 538, 540, 559, 579, 585, 589,
590, 601, 616, 624, 630, 649, 698, 725, 748, 756, 761, 762, 773, 861, 871, 880, 882.
Action directe : 604, 605, 606, 607, 608, 609, 610, 611, 612, 613, 614, 615, 616 617, 629.
Afrique du Sud : 12, 20 27, 138, 169, 206, 307, 638, 639, 640, 641, 642, 644, 647, 649, 650,
651, 653, 654, 655, 658, 690, 745, 746, 750, 766, 866, 874.
Agrément : 78, 169, 178, 180, 183, 184, 221, 239, 249, 434, 660, 665, 694, 695, 696, 697,
700, 701, 702, 703, 704, 705, 706, 721, 725, 731, 732, 733, 742, 744, 746, 878.
Aléa : 1, 23, 24, 46, 53, 62, 256, 310, 313, 316, 391, 471, 557, 759, 775, 862, 873.
Assabiya : 41, 42, 43, 44, 45, 47, 48.
Assurances
- contrat d’assurance : 2, 3, 11, 16, 23, 24, 59, 104, 154, 155, 282, 289, 292, 334, 354,
391, 392, 393, 394, 395, 396, 397, 398, 399, 400, 401, 402, 403, 404, 406, 408, 409,
410, 411, 412, 414, 415, 416, 417, 418, 419, 420, 421, 422, 424, 428, 434, 435, 436,
439, 440, 441, 442, 444, 445, 446, 447, 448, 450, 464, 471, 473, 476, 478, 479, 480,
481, 485, 530, 533, 553, 579, 581, 593, 598, 603, 606, 613, 616, 632, 685, 686, 698,
725, 815, 816, 869, 870.
- assurance maladie : 243, 253, 259, 295, 297, 298, 423, 426, 751, 780, 783, 793, 797,
798.
- assurances de personnes : 391, 624.
- assurances de responsabilités : 343, 349, 427, 559, 596, 601.
- assurance vie : 127, 143, 203, 243, 247, 249, 250, 280, 281, 282, 286, 292, 425, 649,
662, 663, 666, 696, 733, 734, 763, 768, 770, 875.

Arbitrage : 365, 560, 563, 564, 565, 566, 567, 568, 569, 571, 572, 573, 574, 575, 576, 628,
648.
B
Barémisation : 136, 200, 485, 492, 495, 497, 871.
Bénin : 12, 16, 17, 21, 26, 27, 30, 32, 42 57, 58, 65, 66, 70, 76, 78, 91, 94, 106, 107, 114, 122,
133, 146, 148, 153, 154, 176, 189, 207, 208, 216, 219, 220, 226, 228, 229, 230, 231, 232, 234,
243, 244, 245, 246, 247, 248, 249, 250, 251, 252, 254, 255, 268, 272, 274, 275, 276, 292, 293,
297, 299, 301, 317, 323, 336, 343, 351, 361, 365, 368, 369, 371, 376, 377, 378, 384, 386,388,
389, 390, 395, 397, 403, 448, 449, 565, 589, 613, 634, 694, 708, 710, 721,733, 748, 766, 769,
782, 792, 798, 807, 808, 833, 848, 850, 852, 855, 856, 858, 862, 863, 866, 869, 871, 773, 882.

C
CCJA : 565, 571, 572, 574.
CIMA : 12, 21, 65, 1141,115, 125, 134, 140, 146, 148, 149, 157, 161, 163, 170, 175, 176,
177, 179, 181, 187, 188, 189, 190, 191, 192, 193, 194 195, 197, 198, 200, 201, 202, 204, 205,
244, 264, 265, 268, 271, 272, 273, 274, 275, 276, 282, 283, 286, 287, 289, 290, 292, 314, 323,

433
328, 337, 346, 347, 349, 350, 374, 380, 381, 383, 386, 388, 389, 394, 397, 402, 403, 404, 406,
417, 421, 453, 454, 455, 456, 461, 463, 466, 471, 473, 475, 476, 486, 487, 489, 490, 491, 493,
494, 498, 505, 506, 507, 510, 512, 514, 521, 523, 524, 525, 526, 530, 547, 550, 556, 567, 570,
576, 579, 788, 789, 596, 597, 600, 601, 607, 616, 617, 619, 620, 621, 623, 630, 633, 634, 695,
696, 698, 700, 701, 702, 704, 706, 707, 710, 712, 713, 715, 716, 717, 718, 721, 722, 723, 724,
725, 727, 728, 731, 732, 733, 734, 736, 737, 739,740, 750, 766, 771, 777, 811, 812, 813, 814,
815, 816, 817, 818, 819, 820, 821, 822, 825, 826, 865, 867, 869, 871, 878, 879 , 882.
Charia : 24, 26, 77, 387, 670, 671, 672, 673, 674, 675, 685, 687.
D
Diya :45, 48, 77, 79, 80, 81, 82, 83, 84, 149, 387.
Déclaration : 162, 298, 306, 315, 391, 402, 404, 419, 423, 427, 428, 429, 438, 441, 444, 447,
453, 454, 455, 456, 457, 475, 476, 482, 494, 509, 510, 549, 596, 616, 795, 816.
Dommage : 45, 83, 141, 156, 159, 160, 161, 162, 163, 202, 209, 258, 260, 263, 264, 266, 270,
271, 274, 275, 317, 318, 319, 320, 329, 330, 331, 334, 337, 338, 343, 344, 345, 347, 348, 351,
354, 355, 380, 391, 427, 431, 441, 447, 456, 459, 460, 461, 463, 465, 466, 467, 470, 471, 473,
475, 484, 486, 488, 489, 490 492, 495, 496, 499,503, 504, 509, 518, 519, 527, 528, 529, 530,
531, 532, 533, 534 535, 536, 538, 541, 544, 548, 549, 556, 557, 558, 559, 561, 585, 587, 598,
601, 602, 604, 607, 609, 610, 613, 615, 616, 617, 618, 620, 621, 622, 623, 624, 625, 627, 628,
649, 873.
F
FANAF : 128, 129, 130, 132, 133, 134, 135, 136, 138, 139, 141, 144, 178, 198, 203, 205,
373, 756.
Fonds de Garantie : 242, 263, 267, 268, 269, 270, 271, 272, 274, 275, 277, 432, 624, 634,
880.
I
IARD : 113, 229, 248, 250, 251, 252, 312, 313, 336, 697, 734, 773, 774.
Islam : 23, 26, 44, 83, 224, 669, 671, 688.
Indemnité : 48, 62, 82, 158, 202, 266, 271, 275, 298, 299, 304, 314, 327, 328, 330, 344, 347,
357, 367, 428, 449, 456, 460, 473, 475, 476, 477, 484, 486, 490, 498, 507, 510, 511, 514, 515,
516, 520, 521, 524, 528, 530, 535, 538, 540, 541, 558, 559, 576, 587, 588, 590, 597, 602, 604,
606, 607, 610, 615, 616, 617, 620, 621, 626, 627, 766, 871.
Indemnisation : 21, 45, 84, 127, 136, 138, 139,158, 160, 161, 162, 163, 190, 200, 202, 253,
258, 267, 272, 275, 276, 277, 306, 312, 317, 318, 328, 330, 347, 357, 375, 376, 387, 388, 391,
393, 403428, 448, 452, 453, 455, 458, 468, 473, 474, 475, 476, 477, 480, 481, 482, 484, 485,
488, 489, 492, 493, 495, 496, 497, 499, 501, 503, 511, 522, 523, 526, 529, 531, 532, 534, 536,
538, 542, 543, 547, 549, 552, 556, 557, 558, 560, 561, 590, 603, 613, 615, 618, 627, 630, 631,
632, 633, 635, 649, 673, 777, 778, 779, 816, 832, 845, 865, 870, 871, 880.
L
Lahwa : 43, 46, 47, 48, 49, 50, 54.

434
Libéralisation : 212, 225, 231, 232, 233, 235, 236238, 241, 244, 245, 246, 247, 250, 251,
252, 254, 255, 292, 382, 871.
M
Maroc : 12, 20, 27, 389, 638, 639, 640, 658, 659, 660, 663, 665, 668, 677, 683, 684, 687, 690,
745, 746, 866.
Mauritanie : 12, 22, 23, 24, 26, 29, 32, 42, 47, 50, 77, 78, 94, 106, 111, 117, 146, 148, 149,
154, 157, 161, 170, 174, 182, 185, 186, 207, 208, 217, 219, 220, 221, 224, 225, 235, 236, 237,
238, 239, 240, 214, 242, 243, 255, 277, 298, 301, 316, 317, 320, 324, 336, 346, 351, 362, 370,
371, 375, 377, 378, 379, 383, 384, 388, 389, 390, 395, 397, 418, 436, 449, 457, 487, 494, 517,
521, 523, 567, 568, 571, 575, 582, 583, 587, 589, 599, 613, 621, 630, 634, 694, 707, 708, 721,
738, 741, 748, 854, 857, 859, 862, 866, 869, 871, 873, 877, 880, 882.
Micro assurance : 28, 316, 653, 749, 751, 753, 761, 763, 764, 775, 780, 782, 792, 810, 811,
813, 817, 818, 819, 822, 827, 828, 829, 834, 836, 837, 839, 840, 843, 844, 846, 847, 853, 860,
861, 863, 864, 868, 872, 880.
N
Nationalisation : 226, 227, 228, 232, 244, 247, 255, 307, 387, 866.
O
Obligation
- De l’assuré : 446.
- De l’assureur : 464, 482, 556.
OHADA : 21, 172, 365, 366, 565, 569, 572, 574, 710, 725, 736.
P
Préjudice : 22, 33, 45, 48, 77, 79, 80, 83, 136, 138, 139, 158, 161, 162, 258, 259, 260, 263,
264, 272, 275, 312, 314, 318, 341, 376, 391, 396, 403, 432, 456, 460, 475, 483, 484, 485, 486,
487,488, 489, 492, 493, 494, 495, 496, 497, 503, 509, 510, 511, 513, 514, 516, 517, 519, 520,
521, 522, 523, 524, 526, 538, 547, 548, 549, 550, 556, 558, 604, 605, 606, 613, 616, 622, 861.
Prescription : 155, 411, 577, 589, 591, 592, 593, 594, 595, 596, 597, 598, 599, 600, 601, 613,
662, 826.
R
RAMU : 751, 798, 799, 801, 803, 804, 805, 807, 808.
Réparation : 1, 21, 33, 41, 45, 48, 49, 77, 78, 79, 83, 85, 92, 136, 155, 161, 163, 200, 201,
202, 259, 263, 271, 274, 275, 302, 309, 311, 329, 330, 344, 345, 347, 349, 357, 358, 376, 432,
460, 483, 485, 486,487, 488, 489, 490, 491, 492, 495, 498, 503, 504, 520, 523, 526, 528, 533,
535, 538, 613, 616, 617, 630, 660, 811, 850, 861, 871, 873, 880.
S
Solidarité :13, 23, 26, 33, 36, 37, 38, 39, 40, 41, 42, 44, 45, 46, 47, 50, 51, 53, 55, 59, 69, 76,
92, 114, 317, 318, 384, 675, 714, 784, 785, 786, 791, 798, 801, 802, 809, 873, 875.
Subrogation : 282, 604, 618, 619, 620, 621, 622, 624, 625, 626, 627, 629.

435
T
Touiza : 41, 42, 51, 52, 53, 54.
Takaful : 657, 658, 668, 669, 670, 672, 673, 675, 676, 677, 678, 679, 680, 681, 682, 683, 684,
685, 686, 687, 688, 689, 867, 880.
Tontine : 41, 42, 56, 57, 58, 59, 60 61, 62, 63, 64, 65, 66, 67, 68, 69, 70, 71, 72, 73, 74, 75,
76, 754, 811, 814, 822, 843, 845.
Transport :
- transport aérien : 2, 353, 358.
- transport maritime : 353, 360.
- transport terrestre : 33, 241, 353, 372, 373, 375, 376.
V
Victime directe : 495, 523.

436
TABLE DES MATIERES
LISTE DES ABREVIATIONS, SIGLES ET ACRONYMES………………………………...5
SOMMAIRES………………………………………………………………………………….9
RESUME……………………………………………………………………………………..10
ABSTRACT……………………………………………………………………………………11
INTROCUCTION GENEGRALE……………………………………………………………12
PREMIERE PARTIE L’EVOLUTION DU CONCEPT D’ASSURANCE EN AFRIQUE
FRANCOPHONE…………………………………………………………………………….30

TITRE I : Du concept traditionnel de l’assurance aux réalités d’une industrie


d’assurance……………………………………………………………………………………32

Chapitre I : Solidarité traditionnelle ou pratiques assimilables à une assurance……………..33


Section I : Les principes de l’assabiya (les lahwas, la touiza) et la tontine………………….36
Paragraphe I : L’assabiya source d’inspiration de la lahwa……………………………….…36
A. Les différentes acceptions du concept d’assabiya et sa pratique…………………37
B. La lahwa…………………………………………………………………………..39
C. La touiza…………………………………………………………………………..43
Paragraphe II : La tontine……………………………………………………………………..45
A. Définition et origines du concept…………………………………………………46
B. Particularités des tontines ouest-africaines……………………………………….49
Section II Les formes traditionnelles de la réparation………………………………………..55

Paragraphe I : La diya et l’arch……………………………………………………………….55

Paragraphe II : L’organisation de la réparation au Dahomey………………………………...60

Conclusion du Chapitre I……………………………………………………………………..64

Chapitre II : L’impact de la colonisation……………………………………………………..65

Section I : L’époque des pionniers……………………………………………………………65

Paragraphe I : Les premiers jalons d’une assurance moderne………………………………..66

A. Les assureurs Britanniques………………………………………………………...66

B. Les assureurs Français……………………………………………………………..67

Paragraphe II : Les intermédiaires coloniaux…………………………………………………68

A. Les agents généraux et les courtiers………………………………………………69

437
B. Les réassureurs……………………………………………………………………71
Section II L’effort d’assimilation de l’assurance classique par les systèmes juridiques
africains……………………………………………………………………………………….76

Paragraphe I Les moyens d’intégration et les obstacles………………………………………77

A. La Conférence Internationale des Contrôles d’Assurances (CICA)……………...77


B. Bilan ou leçons tirées de l’expérience de l’échec de la CICA……………………79
Paragraphe II Les organismes de coopération………………………………………………..80

A. La fédération des sociétés d’assurances de droit national africaine FANAF……...80

1) L’origine de la FANAF……….……………………………………………80

2) L’évolution de la FANAF………………………………………………….82

3) Les reformes opérée par la FANAF………………………………………..84

B. L’Organisation des Assurances Africaines (OAA) ……………………………….87

Conclusion du chapitre II……………………………………………………………………..90

Chapitre III : Un système juridique d’inspiration française…………………………………..91

Section I La mise en application des lois coloniales………………………………………….92

Paragraphe I : Les lois postcoloniales en matière d’assurance………………………………93

A. La loi du 13 juillet 1930 relative aux assurances terrestres……………………….93


B. La loi n°85-677 du 5 juillet 1985, dite loi Badinter………………………………96
Paragraphe II Mode et stratégie d’intégration des lois françaises…………………………...100

A. L’influence des lois coloniales sur le système juridique africain en général…….100

B. Les effets du mimétisme juridique en matière d’assurance………………………102

Section II : L’assainissement du secteur et l’uniformisation du droit des assurances………104

Paragraphe I : Les organes de régulation et de contrôle…………………………………….105

A. Le contrôle des assurances dans la zone CIMA…………………………………106


1) La direction des assurances du Bénin……….………………………………106
2) La commission régionale de contrôle des assurances (CRCA)……………...107
a) Les membres constituant la commission…………………………………….107
b) Le fonctionnement de la CRCA……………………………………………..109
B. La direction de contrôle des assurances en Mauritanie………………………….110

438
Paragraphe II La Conférence interafricaine des marchés d’assurances (CIMA)……………115

A. Présentation de la CIMA………………………………………………………...115
1) Le conseil des ministres……………………………………………………..117
2) Le secrétariat général de la CIMA………………………………………..…118
3) Le comité d’expert…………………………………………………………..118
B. Bilan d’un système d’indemnisation uniforme……………………………….…119
Conclusion de Chapitre III…………………………………………………………………..122

Conclusion du titre II………………………………………………………………………..122

TITRE II : L’évolution et les caractéristiques de l’industrie d’assurance au Bénin et en


Mauritanie…………………………………………………………………………………...123

Chapitre I : La naissance et l’évolution du secteur………………………………………....125

Section I : Les premières compagnies d’assurance………………………………………….125

Paragraphe I : Les compagnies d’assurance de l’époque coloniale………………………....126

Paragraphe II : Le temps des nationalisations……………………………………………….127

A. La Société Mauritanienne d’Assurance et de Réassurance (SMAR)…………...129


B. La Société Nationale d’Assurances et de Réassurances du Bénin (SONAR)…..132
Section II : Les politiques de dénationalisation……………………………………………..135

Paragraphe I : La libéralisation de l’économie mauritanienne………………………………135

A. La libéralisation du secteur des assurances en Mauritanie………………………136


B. L’état actuel du marché mauritanien des assurances……………………………137
Paragraphe II : Le processus de libéralisation de l’économie béninoise……………………139

A. La libéralisation du marché béninois de l’assurance…………………………….139


B. L’aspect du marché des assurances au Bénin……………………………………141
Conclusion du chapitre I…………………………………………………………………….143

Chapitre II : Les assurances de personnes…………………………………………………...144

Section I : Les préjudices corporels indemnisables…………………………………………145

Paragraphe I : La mission d’expertise médicale pour l’évaluation du préjudice……………146

Paragraphe I : L’indemnisation par le Fonds de Garantie Automobile…………………….147

A. Origine du concept de Fonds de Garantie……………………………..………...148

439
B. Organisation juridique et financière du fonds de garantie automobile…….....…151
Section II : Les assurances sur la vie, les assurances sociales et les risques
professionnels……………………………………….……………………………………….154

Paragraphe I : L’assurance vie………………………………………………………………154

A. Les principes et les dispositions en matière d’assurance vie…………………….155


B. Le contrat de capitalisation et les assurances de groupes………………………. 157
1) Le contrat de capitalisation………………………………………………..…157
2) Les assurances de groupes…………………………………………………...158
C. Quelques obstacles au développement de l’assurance-vie………………………160
Paragraphe II : Les assurances sociales……………………………………………………..162

A. L’assurance maladie et les prestations sociales………………………………….162


B. Les risques professionnels……………………………………………………….164
1) L’accident de travail…………………………………………………………165
2) La maladie professionnelle…………………………………………………..166
Conclusion du chapitre II……………………………………………………………………168

Chapitre III : Les assurances de dommages…………………………………………………169

Section I : Les assurances de choses………………………………………………………...169

Paragraphe : Les sources potentielles du dommage : Incendie Accident et Risques divers


(IARD) ……………………………………………………………………………………...170

A. L’assurance incendie………………………………………………………….…170
B. Des risques divers assurables……………………………………………………171
Paragraphe II : Les facultés à l’importation et l’assurance-crédit………………………..…174

A. L’assurance des facultés à l’importation ……………………………………..…174


B. L’émergence de l’assurance-crédit en Afrique………………………………….175
Section II : Les assurances de responsabilité…………………………………………….…177

Paragraphe I : Les assurances de responsabilité civile………………………………………178

A. L’assurance responsabilité civile des particuliers……………………………….178


1) L’assurance multirisque habitation……………………………………….…178
2) La responsabilité civile circulation……………………………………….…179
B. L’assurance responsabilité civile entreprise ……………………………….……180
1) La responsabilité civile professionnelle…………………………………..…180

440
2) Les assurances construction ……………………………………………...…181
3) L’assurance des professionnels de l’automobile……………………….……183
Paragraphe II : Les dommages résultant d’un transport………………………………..……185

A. Le transport maritime……………………………………………………………185
B. Le transport terrestre…………………………………………………….............187
1) Le transport routier…………………………………………………………..188
2) Le transport ferroviaire………………………………………………………191
C. Le transport aérien……………………………………………………………….193
D. Le transport fluvial………………………………………………………………196
Conclusion du chapitre III…………………………………………………………………..198

Conclusion du titre II………………………………………………………………………..199

Conclusion de la première partie……………………………………………………………200

DEUXIEME PARTIE : LE FONCTIONNEMENT DES ASSURANCES EN


AFRIQUE…………………………………………………………………………………...202

TITRE I : le régime juridique des assurances et la pratique de l’indemnisation……………204

Chapitre I : Le contrat d’assurance et les obligations des parties…………………………...207

Section I : La formation du contrat d’assurance…………………………………………….207

Paragraphe I : Des conditions préalables à la signature du contrat………………………….208

A. L’information préalable réciproque et le consentement des parties……………..209


B. La signature du contrat…………………………………………………………..212
1) L’attestation d’assurance…………………………………………………….212
2) La note de couverture…………………………………………………..........213
3) La police d’assurance………………………………………………………..214
a) Les conditions générales………………………………………………...215
b) Les conditions particulières……………………………………………...215
Paragraphe II : La modification et la résiliation du contrat d’assurance……………………216

A. Modification du contrat d’assurance…………………………………………….217


1) Les modifications suggérées par les parties…………………………………218
a) Diminution du risque…………………………………………………….219
b) Aggravation du risque…………………………………………………...220
2) Les modifications imposées par la loi…………………………………….…223

441
B. Résiliation du contrat d’assurance……………………………………………….226
1) Résiliation suite à un changement de situation de l’assuré………………….227
2) Résiliation suite à un manquement de l’assuré……………………………....228
a) Résiliation pour défaut de payement ou pour fausse déclaration de
l’assuré…………………………………………………………………….....228
b) Résiliation pour omission ou déclarations inexacte non intentionnelle de
l’assuré……………………………………………………………….……....230
3) La résiliation après sinistre…………………………………………………..231
Section II : les obligations des parties…………………………………………………….…233

Paragraphe I : Les obligations de l’assuré……………………………………………..……233

A. L’obligation de versement de la prime…………………………………….……234


B. L’obligation de déclaration du sinistre……………………………………….…238
Paragraphe II : Les obligations de l’assureur…………………………………………..……240

A. L’obligation de garantie…………………………………………………………241
1) Les risques garantis……………………………………………………….…242
a) Le cas fortuit………………………………………………….…………242
b) La garantie des fautes de l’assuré………………………..………………243
2) Les risques exclus……………………………………………………………245
a) Les risques exclus par la loi……………………………..………………245
b) Les risques conventionnellement exclus…………………...……………247
B. L’offre d’indemnité pour la réparation du préjudice………………….…………248
Conclusion du chapitre I……………………………………………………………..251

Chapitre II : La procédure de l’indemnisation et le règlement des litiges………………..…252

Section I : Les principes de l’indemnisation………………………………………………...252

Paragraphe I : La réparation du préjudice corporel…………………………………………252

A. Les principes de la réparation du préjudice corporel……………………………253


1) Le principe du caractère forfaitaire de l’assurance de personnes……………253
2) Le principe de la réparation intégrale…………………………………..……254
3) Le principe de barémisation ou de plafonnement………………………...…257
B. La pratique de d’indemnisation du dommage corporel en cas d’accident de la
circulation………………………………………………………………..………259
1) Les préjudices patrimoniaux…………………………………………...……261

442
a) Les dépenses liées au frais de traitement…………………………..……261
b) Les dépenses résultant des incapacités……………………………….…262
2) Les préjudices extrapatrimoniaux………………………………………...…265
a) Le pressium doloris……………………………………………………...265
b) Le préjudice esthétique………………………………………………….266
c) Le préjudice moral………………………………………………………266
d) Le préjudice de carrière………………………………………………….268
3) Les préjudices indemnisables aux ayant droit de la victime décédée……….268
a) Le préjudice économique………………………………………………..269
b) Les frais funéraires………………………………………………………270
Paragraphe II : La réparation des dommages matériels………………………………..……270

A. Le principe indemnitaire……………………………………………………...…271
B. Le système d’indemnisation du dommage matériel…………………………..…273
1) L’indemnisation en cas de sinistre total de la chose assurée……………...…274
2) Cas de sinistres partiels ou successifs de la chose assurée…………………..275
a) Le sinistre partiel……………………………………………………..….275
b) Le sinistre successif……………………………………………………...276
Section II : Les modes de règlement des litiges et les voies de recours……………………..278

Paragraphe I : Mode de règlement des litiges en matière d’assurance……………………...278

A. Les modes conventionnels de règlement des litiges……………………………..279


1) Le règlement amiable………………………………………………………..279
2) Le recours à l’arbitrage………………………………………………………282
B. La voie judiciaire………………………………………………………………...287
1) Les règles de compétence……………………………………………………287
a) La compétence d’attribution……………………………………………..288
b) La compétence territoriale……………………………………………….290
2) La prescription en matière d’assurance……………………………………...292
a) La prescription biennale…………………………………………………293
b) Les autres délais de prescription……………………………………...…296
Paragraphe II : Les moyens de recours des parties………………………………………….297

A. L’action directe………………………………………………………………….298
1) Les conditions de l’action directe……………………………………………299
2) Les effets de l’action directe………………………………………………...301

443
B. La subrogation de l’assureur……………………………………………………303
1) Les conditions de la subrogation…………………………………………….304
2) Les effets de la subrogation………………………………………………….306
Conclusion du chapitre II……………………………………………………………………309

Conclusion du titre I…………………………………………………………………………309

Titre II : Etat des lieux et potentialités du marché africain de l’assurance………………….311

Chapitre I : Des modèles de réussite et l’état des lieux du marché…………………………312

Section I : Deux modèles de réussite en Afrique……………………………………………312

Paragraphe I : Le géant Sud-africain………………………………………………………...313

A. Le bi juridisme sud-africain ………………………………………………………...313


B. Marché sud-africain de l’assurance………………………………………………….318
Paragraphe II : L’exemple marocain et l’émergence de la takaful ou assurance
islamique………………………………………………………………………………….…321

A. Les assurances au Maroc…………………………………………………………….321


1) Evolution historique………………………………………………………….…321
2) La bancassurance et la distribution de l’assurance au Maroc…………………...323
B. L’émergence de l’assurance islamique……………………………………..…….…326
1) Fondement du takaful……………………………………………………………327
2) Le mode de fonctionnement de l’assurance takaful……………………….……329
a) Typologie de l’assurance takaful……………………………………….……330
b) La consécration de l’assurance takaful par le droit marocain des
assurances……………………………………………………………………332
Section II : L’activité d’assurance……………………………………………………...……334

Paragraphe : L’assurance dans la pratique………………………………………………..…335

A. L’exercice de la profession d’assureur………………………………………………335


1) L’agrément des entreprises d’assurance…………………………………………336
a) Les conditions de fond………………………………………………………336
b) Les conditions de forme……………………………………………………..337
2) Forme des sociétés d’assurance…………………………………………………339
a) Les sociétés anonymes d’assurance…………………………………………340
b) La société mutuelle d’assurance…………………………………………..…341

444
B. La distribution de l’assurance……………………………………………………….345
1) Les courtiers……………………………………………………………………..346
2) Les agents généraux……………………………………………………………..348
Paragraphe II : La liquidation des sociétés d’assurances……………………………………350

A. Le retrait total d’agrément d’une société d’assurances………………………….351


B. La faillite comme cause de liquidation d’une société d’assurances……………..354
Conclusion du chapitre I………………………………………………………………...358

Chapitre II : Réflexion sur des alternatives de développement de l’assurance en


Afrique…………………………………………………………………………………..359

Section I : La micro assurance…………………………………………………………..360

Paragraphe I : Exposé du principe de micro assurance………………………………….361

A. Fondement de la micro assurance…………………………………………….…361


B. Présentation des produits de micro assurance…………………………………...364
1) Les micro assurances de personnes………………………………………….365
a) La micro assurance accident corporel…………………………………...365
b) La micro prévoyance vie………………………………………………...365
c) La micro vie épargne…………………………………………………….367
2) La micro assurance de dommages…………………………………………...369
a) La micro assurance dommage classique………………………………...369
b) La micro assurance indicielle……………………………………………371
Paragraphe II : Micro assurance santé et régime d’assurance maladie universelle (RAMU)
……………………………………………………………………………………………….372

A. Micro assurance santé…………………………………………………………...373


1) La solidarité…………………………………………………………………374
2) La participation démocratique………………………………………………375
3) Epanouissement de la personne………………………………………….….375
4) Le but non lucratif…………………………………………………………..375
5) L’autonomie et la liberté dans le respect de la loi…………………………...376
6) La responsabilité……………………………………………………………..376
B. Le régime d’assurance maladie universelle……………………………………...377
Section II : Le cadre réglementaire et canaux de distribution de la micro assurance……….383

Paragraphe I : La réglementation de la micro assurance…………………………………….383

445
A. La consécration de la micro assurance par le Code CIMA……………………...384
B. Cadre règlementaire de l’activité………………………………………………..386
1) Des facilités quant à l’accès à la profession…………………………………386
2) Un formalisme simplifié pour la micro assurance…………………………...388
a) Simplicité du langage……………………………………………………388
b) Assouplissement du formalisme pour le micro assuré………………..…389
Paragraphe II : La distribution de la micro assurance……………………………………….390

A. Canaux de distribution de la micro assurance…………………………………...390


1) Les fondements de la distribution de la micro assurance……………………391
2) Les divers canaux de distribution……………………………………………392
a) Les assureurs commerciaux……………………………………………...393
b) Une expérience réussie : le canal mobile………………………………..394
c) Les institutions de micro finance……………………………………...…397
B. Potentiel micro assuranciel du secteur informel…………………………………399
1) Les structures du secteur informel…………………………………………...400
a) Le secteur agricole…………………………………………………….…401
b) La pêche…………………………………………………………………401
c) Le commerce…………………………………………………………….402
d) Le domaine du transport…………………………………………………403
2) L’expérimentation d’une micro assurance dans le secteur informel………...404
Conclusion chapitre II………………………………………………………….....................406

Conclusion du Titre II………………………………………………………….....................407

Conclusion de la deuxième partie…………………………………………….……………..409

Conclusion générale…………………………………………………………………………411

Bibliographie………………………………………………………………….……………..418

Index alphabétique………………………………………………………………………..…434

Table des matières…………………………………………………………………………...438

446

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