Contraception par progestatifs
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Gynécologie 1
700-A-10 ¶ Contraception par progestatifs
2 Gynécologie
Contraception par progestatifs ¶ 700-A-10
O O O
Progestérone 17-Hydroxyprogestérone 19- Norprogestérone
O O O
CH3
Médrogestone Hydroxyprogestérone caproate Démégestone
OCOCH3 CH3
O O O
CH3
Dydrogestérone Médroxygestérone ac. Promégestone
OH
COCH3 COCHCH3
OCOCH3 CH3
O O
CH3 CH3
Mégestrol ac. Trimégestone
COCH3 COCH3
OCOCH3
OCO(CH2)4CH3
O O
CI CH3
Chlormadinone ac. Gestonorone caproate
COCH3 COCH3
CH2
OCOCH3 OCOCH3
O O
CI CH3
Cyprotérone ac. Nomégestrol ac.
A
Figure 1.
A. Structure des progestatifs dérivés de progestérone, de 17-hydroxyprogestérone et 19-norprogestérone.
Gynécologie 3
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OH OH
O O
Testostérone 19 - Nortestostérone
C2H5
CH OH OH
H2C4
C ≡ CH C ≡ CH C ≡ CH
O O
Éthistérone Noréthistérone Désogestrel
(noréthindrone)
C2H5 OCOCH
Prodrogues OH 3
OCOCH3
C ≡ CH C ≡ CH C ≡ CH
O O HON
Noréthistérone ac. Noréthynodrel Norgestimate
OCOCH3 OH OH
C ≡ CH CCH CH2CN
CH3OCO O CH3 O
Éthynodiol diacétate Tibolone Diénogest
SOH OH
OCOCH3
C ≡ CH
C ≡ CH C ≡ CH
Lynestrénol O O
Quingestanol ac. Norgestriénone
C2H5 C2H5
OH OH
C ≡ CH C ≡ CH
O O
Lévonorgestrel Gestrinone
C2H5 OH
C ≡ CH
O
Gestodène
B
Figure 1. (Suite)
B. Structure des progestatifs dérivés de testostérone et de 19-nortestostérone (d’après Schindler et al. [4]).
permettant un développement folliculaire. En conséquence, développement folliculaire et la dysovulation, mais aussi avec
sous l’effet de ce type de contraception, on peut observer au les effets du progestatif sur l’endomètre (atrophie, hyperplasie
niveau ovarien : ou dysmaturation). Ces troubles menstruels représentent le
• une suppression du développement folliculaire avec absence principal inconvénient de cette contraception et compromettent
d’ovulation ; son acceptabilité [16]. Aucun élément clinique ne permet de
• un développement folliculaire suivi d’une insuffisance lutéale prédire le risque de survenue de ces saignements.
(dysovulation) ; D’autre part, la persistance d’une activité folliculaire non
• un développement folliculaire partiel ; cyclique peut être à l’origine de dystrophie ovarienne avec
• un développement folliculaire normal avec ovulation. possibilité de kystes et d’un climat d’hyperestrogénie, pouvant
Cette inhibition incomplète du développement folliculaire favoriser les mastopathies et l’hyperplasie endométriale. Il
peut provoquer la formation de kystes ovariens (environ 20 % n’existe néanmoins aucune donnée épidémiologique sur ces
des cas) qui doivent se résoudre spontanément. effets.
4 Gynécologie
Contraception par progestatifs ¶ 700-A-10
Tableau 2.
Différents progestatifs indiqués en contraception en France.
Type de contraceptif/ Nom commercial Type de progestatif Dose IP (mentionné dans l’AMM)
Dose/mode d’administration (France) (mg)
À faible dose
Par voie orale Cérazette® Désogestrel 0,075 0,52 %
Exluton® Lynestrénol 0,5 0,56 %
Microval ® Lévonorgestrel 0,03 1%
Milligynon® Noréthistérone 0,6 0,85 %
Ogyline ® Norgestriénone 0,35 ND
Implant Implanon® Étonogestrel** 68 0 %* à 3 ans
Dispositif intra-utérin Mirena® Levonorgestrel 20 0,5 -.1 %
À forte dose
Par voie orale Orgamétril® Lynestrénol 5 ND
Primolut-Nor® Noréthistérone 10 ND
Depo-Provera® Médroxyprogestérone 150 0,3 (WHO) [5]
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Tableau 3.
Contre-indications de la contraception progestative.
Type de contraception progestative Contre-indications
Microdosée per os Accidents tromboemboliques veineux évolutifs
Présence ou antécédents de pathologie hépatique sévère, tant que les paramètres de la fonction hépatique
ne sont pas normalisés
Tumeurs sensibles aux progestatifs ; cancer du sein et cancer de l’endomètre
L’AMM indique par ailleurs que compte tenu des profils hormonaux spécifiques ou anormaux qu’ils
entraînent, les progestatifs « microdosés » ne doivent pas être prescrits en cas d’affection mammaire et/ou
utérine, de dysfonctionnement ovarien. Ils ne sont pas indiqués en cas d’antécédent ou de risque de
grossesse extra-utérine (GEU).
Implants (désogestrel) Accidents thromboemboliques veineux évolutifs
Tumeur progestagène-dépendante
Hémorragies génitales non diagnostiquées
Présence ou antécédent d’affection hépatique sévère tant que les paramètres de la fonction hépatique ne
sont pas normalisés
Dispositif intra-utérin (DIU) au lévonorgestrel Grossesse suspectée ou avérée
Infection pelvienne, même basse, en cours ou récente (pelvipéritonite, endométrite, salpingite, cervicite,
vaginite, etc.) ; salpingite récidivante ; antécédent d’avortement septique au cours des 3 derniers mois
Déficit immunitaire avéré (patientes immunodéprimées et traitement immunosuppresseur)
Hémorragie génitale anormale sans diagnostic
Anomalies congénitales ou acquises de l’utérus
Affection maligne du col ou du corps utérin
Affections hépatiques aiguës ou tumeur hépatique
Hypersensibilité à l’un des composants du dispositif
Contre-indication relative : thrombophlébite évolutive ou thromboembolie
Injectable (médroxyprogestérone) Insuffisance hépatique ; hépatite ou antécédents récents d’hépatite
Cancer du sein et de l’endomètre
Obésité ; diabète ; hypertension artérielle
Maladies thromboemboliques, artérielles et veineuses
Ménométrorragies non explorées ; fibrome utérin
À forte dose orale (dérivés norstéroïdes) Accidents ou antécédents d’accidents thromboemboliques veineux (phlébite, embolie pulmonaire)
Accidents ou antécédents thromboemboliques artériels (en particulier infarctus du myocarde, accident
vasculaire cérébral)
Altérations graves de la fonction hépatique
Hémorragies génitales non diagnostiquées
Millepertuis (cf. Interactions)
ANN : autorisation de mise sur le marché.
B
2
3
C
4
E
4 cm
6 Gynécologie
Contraception par progestatifs ¶ 700-A-10
méthode. Lorsqu’elle est particulièrement adaptée (contre- deuxième intention chez les femmes présentant une contre-
indication aux estroprogestatifs, nécessité ou choix d’une indication à la contraception estroprogestative. En raison de
contraception efficace prolongée), cette contraception doit être leurs effets androgéniques, ces contraceptifs sont toutefois
proposée en informant les femmes de tous les effets indésirables contre-indiqués dans certaines situations à haut risque vascu-
qui peuvent survenir, en particulier aménorrhée ou saignements laire comme le diabète, l’hypertension artérielle, les antécédents
fréquents, qui diminueront le plus souvent après la première de thrombose.
année. Les dérivés de la 17-hydroxyprogestérone et de la 19-norpro-
gestérone à forte dose ont un effet antigonadotrope bien
démontré pour certains mais n’ont pas d’indication en contra-
■ Contraception progestative ception dans le cadre d’une autorisation de mise sur le marché.
Ils sont utilisés dans des situations ou pathologies particulières
injectable sur la base de données cliniques publiées [29-31].
Il s’agit d’une méthode de contraception utilisée essentielle-
ment dans les pays en voie de développement. Elle consiste en Mécanisme d’action et efficacité
une injection intramusculaire faite entre le 1er et le 5e jour du contraceptive
cycle :
• d’une solution de 150 mg d’acétate de médroxyprogestérone Le mécanisme d’action est l’inhibition de l’ovulation. Les
(DMPA) (Depo-Provera®) tous les 90 jours ; dérivés de la 19-nortestostérone ont un pouvoir antigonado-
• de 200 mg d’énanthate de noréthistérone (Noristérat®) tous trope à la dose de 10 mg/j. Ils ont une puissante activité
les 60 jours. antiestrogène qui permet de les utiliser lorsqu’il existe une
L’effet contraceptif s’exerce essentiellement par un blocage de pathologie utérine estrogénodépendante (endométriose, hyper-
l’ovulation d’où leur grande efficacité. Les effets sur la glaire et plasie de l’endomètre ou fibrome) et dans les mastopathies
l’endomètre participent à l’action contraceptive. Les taux bénignes. Leur efficacité contraceptive n’a pas été mesurée.
moyens d’estradiol observés sont néanmoins ceux d’un début Les progestatifs dérivés de la 19-norprogestérone en adminis-
de phase folliculaire [26]. L’efficacité est de 0,3 % [5]. L’absence tration continue induisent également une inhibition gonado-
d’absorption gastro-intestinale et de premier passage hépatique trope. Les dérivés de la 17-hydroxyprogestérone et de la
confère à cette méthode certains avantages, comme l’absence 19-norprogestérone ont une action antigonadotrope variable
d’interférences médicamenteuses. selon le produit et la dose utilisés : l’acétate de chlormadinone
Les effets indésirables associés à l’utilisation de cette contra- est contraceptif à la dose de 10 mg/j [29], l’acétate de cyproté-
ception sont : rone à 50 mg/j [30] et l’acétate de nomégestrol est antigonado-
• les saignements intercurrents et troubles menstruels dont trope à la dose de 5 mg/j [31].
l’incidence est fréquente en début de traitement (au moins
un tiers des femmes). Puis, l’aménorrhée survient dans la Tolérance
moitié des cas au bout de 1 an de traitement, et chez près des
La tolérance peut être bonne mais la survenue de troubles des
deux tiers des femmes à 2 ans [26] . Une substitution en
règles, de métrorragies, ou d’aménorrhée par atrophie de
estrogènes est souvent proposée en pratique [23] . Elle se
l’endomètre liés à l’effet antigonadotrope, est fréquente ; la
justifie essentiellement en cas d’hypoestrogénie objectivée
présence de signes cliniques d’hypoestrogénie est parfois
cliniquement ou par des dosages d’estradiol. Cette hypoestro-
objective : sécheresse vaginale, diminution de la libido, troubles
génie fait craindre une diminution délétère à long terme de
de l’humeur, dépression. Ces signes cliniques d’insuffisance
la masse osseuse, en particulier chez les jeunes filles, mise en
estrogénique peuvent conduire à administrer une substitution
évidence dans certaines études [10] ;
par estrogènes. D’autres effets indésirables comme une prise de
• la prise de poids chez environ 70 % des femmes, en général poids, une hypertension artérielle et des signes d’hirsutisme
jusqu’à 2 kg [26] ; peuvent s’observer notamment avec les dérivés de la
• céphalées, dépression et diminution de la libido également nortestostérone.
fréquemment rapportées. Elles s’associent parfois à d’autres Au total, les produits qui ont l’AMM sont rarement utilisés en
signes d’hypoestrogénie (sécheresse vaginale) et peuvent contraception en raison de leurs effets indésirables androgéni-
justifier une substitution estrogénique pour améliorer l’accep- ques gênants. En France, les dérivés pregnanes et norpregnanes
tabilité de la méthode. sont utilisés comme contraceptifs dans des situations particuliè-
Le retour à un cycle menstruel normal et ovulatoire est res, comme le haut risque vasculaire et en cas d’association de
différé après l’arrêt du traitement en raison de la décroissance pathologies mammaires et utérines ou en préménopause ; mais
lente des concentrations plasmatiques du progestatif. Une ces produits ne bénéficient malheureusement pas d’une AMM
grossesse est envisageable entre 9 et 12 mois après l’arrêt du en contraception.
DMPA [26].
Ces effets indésirables ainsi que le retour différé à une fertilité
normale sont souvent sources de mauvaise acceptabilité et ■ Dispositif intra-utérin (DIU)
d’arrêt de la méthode (plus de 50 % à 1 an) [12]. Une meilleure
information pourrait améliorer l’acceptabilité de la méthode au lévonorgestrel
mais cette hypothèse n’a pas été démontrée.
Dans les années 1980, un dispositif intra-utérin à la proge-
Certaines études ont rapporté une incidence plus élevée
stérone était déjà disponible (Progestasert®). Actuellement, un
(jusqu’à 2 fois plus) d’infections sexuellement transmissibles,
seul DIU de ce type est commercialisé en France. Mirena® est
dont les infections à virus de l’immunodéficience humaine
un dispositif en T en polyéthylène contenant du sulfate de
(VIH), chez les femmes traitées par le DMPA [27, 28].
baryum, recouvert d’un manchon au niveau du corps en
polydiméthyl-siloxane contenant le lévonorgestrel (Fig. 3). Le
■ Contraception progestative orale réservoir contient 52 mg de lévonorgestrel ; la libération de
lévonorgestrel est estimée à 20 µg/l/j ; elle ne serait que
à forte dose d’environ 10 µg/l par jour après 5 ans. L’expérience clinique du
Mirena ® est large puisqu’il a été approuvé en Europe en
Les progestatifs ont un fort pouvoir antigonadotrope et sont 1990 puis dans plus de 100 pays et utilisé par plus de 3 millions
donc utilisables seuls en contraception. Les dérivés de la de femmes dans le monde.
19-nortestostérone, les dérivés de la 17-hydroxyprogestérone et
de la 19-norprogestérone sont les progestatifs utilisés dans cette
indication.
Mécanisme d’action et efficacité
Le lynestrénol et la noréthistérone composent les progestatifs Des concentrations plasmatiques de lévonorgestrel sont
officiellement indiqués en contraception progestative orale de détectables rapidement après l’insertion : les taux moyens
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700-A-10 ¶ Contraception par progestatifs
8 Gynécologie
Contraception par progestatifs ¶ 700-A-10
En ce qui concerne l’hypertension artérielle, seules des • au-delà de 35-40 ans en raison du risque vasculaire, en
données liées à la contraception microprogestative montrent particulier veineux et d’accident vasculaire cérébral qui
que son utilisation ne s’accompagne pas d’hypertension arté- augmente avec l’âge ;
rielle [44] ; il n’existe pas de données chez des femmes ayant une • de surpoids ou d’obésité en raison du risque veineux ;
hypertension artérielle chez qui cependant cette contraception • d’antécédent de cancer du sein : les progestatifs seraient
est utilisée. possibles en théorie mais trop peu de données confortent
En résumé, les données sur le risque cardiovasculaire sont cette hypothèse ;
limitées mais ne mettent pas en évidence d’augmentation du • de pathologie gynécologique estrogénodépendante ;
risque vasculaire lors de l’utilisation de la contraception • de pathologie hépatique aiguë ou chronique ;
progestative orale ou injectable. Par mesure de précaution, ces • en post-partum et au cours de l’allaitement ;
contraceptifs sont néanmoins contre-indiqués en cas d’accidents • enfin, lorsqu’une contraception à long terme est préférable ou
vasculaires récents ou évolutifs. désirée.
En pratique, on recommande plus particulièrement une
Effets carcinologiques méthode en fonction de l’âge.
Il existe des arguments expérimentaux pour penser que les Chez la jeune nullipare : une micropilule ou l’implant si une
progestatifs, notamment l’acétate de médroxyprogestérone, ont contraception de longue durée est désirée ou souhaitable en
un potentiel carcinogène. Néanmoins, peu de données épidé- raison de problèmes d’observance à long terme. Une informa-
miologiques sont disponibles sur le risque de cancer associé à tion des effets indésirables potentiels et en particulier de la
l’utilisation à long terme de la contraception progestative en survenue de saignements irréguliers ou d’aménorrhée sans
raison de son utilisation limitée en tant que méthode contra- gravité et un suivi rapproché dans les premiers mois de la
ceptive. Les principales données disponibles sont présentées ici. contraception peuvent favoriser une bonne acceptabilité.
La méta-analyse de 1996 qui avait évalué le risque de cancer Chez la femme après 35 ans ou multipare : le DIU au lévo-
du sein lors de l’utilisation de la contraception orale établit pour norgestrel est un choix surtout en cas de ménorragies sous DIU
tous les contraceptifs progestatifs un risque un peu augmenté à non hormonal ; l’implant représente également une solu-
5 ans (risque relatif de 1,2) mais non significatif [45]. Selon les tion mais le risque de dysovulation fait craindre les conséquen-
conclusions de l’Agence internationale de recherche sur le ces d’une hyperestrogénie relative associée. La contraception
cancer, les données disponibles sur l’utilisation des contraceptifs orale par les dérivés de la progestérone est prescrite (hors AMM)
injectables (2 études cas-contrôle et une méta-analyse) ayant
chez les femmes préférant une contraception orale, ayant mal
analysé 350 cas de cancer du sein, ainsi que celles concernant
toléré les autres alternatives ou nécessitant une freination du
les 725 cas chez les utilisatrices de contraception progestative
cycle en raison d’une pathologie estrogénodépendante, de
orale, ne montrent pas d’augmentation de risque [46] . Les
mastodynies, ou en préménopause. Dans ce dernier cas, il s’agit
données d’études plus récentes sont concordantes et ne mettent
d’un traitement qui en administration cyclique (21 à 25 jours
pas en évidence d’augmentation de risque de cancer du sein
par mois) est contraceptif. Ceci relève de consensus
chez les utilisatrices de contraceptifs progestatifs injectables,
professionnel.
implantables ou par système intra-utérin au lévonorgestrel après
2 à 5 années d’utilisation [47, 48]. La contraception injectable trouve peu d’indications si les
Concernant le cancer de l’endomètre, les données sont autres méthodes sont acceptées.
extrêmement limitées. Selon les résultats d’études cas-contrôle
pour les contraceptifs oraux et injectables, il existe un effet
protecteur ; celui-ci n’est pas retrouvé dans une étude de ■ Développements
cohorte avec les progestatifs injectables [46].
Les données pour le cancer du col sont limitées à la contra- en contraception progestative
ception injectable et ne montrent pas d’augmentation de
risque [46] . Une fréquence accrue de dysplasie cervicale est
observée chez les femmes utilisant la contraception progestative, Antiprogestérones
sans qu’il soit constaté d’augmentation de lésions malignes du Les données expérimentales et cliniques confirment le rôle
col utérin [28]. La prévalence des facteurs de risque de dysplasie potentiel des antiprogestérones dans le contrôle de la fertilité.
cervicale pourrait être plus élevée chez les femmes qui utilisent Les antiprogestérones agissent en liant le récepteur à la
ce type de contraception. progestérone, mais aussi d’autres récepteurs stéroïdiens comme
Pour l’ensemble des contraceptifs oraux, l’effet protecteur du le récepteur aux glucocorticoïdes ou aux androgènes. Ils peuvent
cancer de l’ovaire est largement démontré [49]. Les quelques
aussi avoir des effets agonistes et antiestrogènes. C’est pourquoi
données disponibles (une étude cas-contrôle pour les progesta-
on les regroupe sous le terme plus général de modulateurs des
tifs oraux, et une pour les injectables) ne montrent pas de
récepteurs à la progestérone (selective progesterone recepteur
réduction du risque [46] ; de même, pour le cancer du foie ou le
modulators [SPRM]). Le pouvoir antigestationnel de la mifépris-
mélanome pour lesquels les données sont rares [46].
tone a permis de valider son utilisation dans l’interruption
Au total, les données cliniques sont limitées mais ne mettent
médicamenteuse de grossesse en association aux prostaglandi-
pas en évidence de risque de cancer augmenté lié à la contra-
nes. La mifépristone a été largement aussi évaluée pour la
ception progestative [46]. Cependant des données épidémiologi-
contraception.
ques prospectives, en particulier avec les nouveaux contraceptifs
L’utilisation des antiprogestérones en contraception repose sur
progestatifs sont nécessaires pour conclure à l’absence de risque.
les effets anti-ovulatoire et anti-implantatoire :
• l’inhibition de l’ovulation : par inhibition gonadotrope.
■ Indications de la contraception Contrairement à la progestérone, la mifépristone n’agit pas
sur la sécrétion du GnRH mais au niveau hypophysaire ;
progestative • l’effet anti-implantatoire résulte d’un effet direct sur l’endo-
Il existe un consensus pour dire que la contraception proges- mètre ou de l’effet indirect lié à la suppression du cycle, et
tative est indiquée en cas de contre-indications à la contracep- par conséquent de la progestérone nécessaire à la transforma-
tion estroprogestative ou de situations particulières où la tion sécrétoire de l’endomètre.
prescription d’estrogènes n’est pas recommandée [6, 15] , en Le développement des antiprogestérones en contraception
particulier en cas : consiste donc à explorer, pour chaque type d’antiprogestérone
• d’antécédent de maladie vasculaire (pathologie cardiaque, pour lequel le niveau d’effets agoniste et antagoniste est
infarctus du myocarde, accident vasculaire cérébral) ou pour variable, la dose et le mode d’administration qui permettent
les femmes à risque vasculaire, dont le tabagisme, l’hyperten- d’obtenir une efficacité contraceptive satisfaisante avec un profil
sion artérielle et le diabète compliqué ; de saignements acceptable et l’absence de risque d’hyperplasie
Gynécologie 9
700-A-10 ¶ Contraception par progestatifs
de l’endomètre. L’effet antiglucocorticoïde potentiel doit être afin de réduire les effets indésirables et interactions métaboli-
également pris en considération en cas d’administration ques ; la commodité du mode d’administration avec un bénéfice
continue. sur l’observance.
En ce qui concerne la mifépristone, de nombreuses études
ont évalué l’effet contraceptif à des doses variables et selon
plusieurs modes d’administration [50] :
• en administration mensuelle : ■ Conclusion
C aux doses de 50 à 600 mg en période ovulatoire ou posto-
Bien que la contraception estroprogestative soit efficace et
vulatoire (LH à LH +3), la transformation sécrétoire de
extrêmement bien tolérée, il est reconnu la nécessité de déve-
l’endomètre est retardée sans perturbation du cycle mens-
lopper des contraceptions sans estrogènes, ainsi que des voies
truel ; mais en raison d’une part de la difficulté de déter- d’administration non orale pour réduire les effets indésirables,
miner la fenêtre de prise, et d’autre part du risque que en particulier vasculaires et métaboliques. D’autre part, un effet
l’effet anti-implantatoire soit insuffisant pour prévenir contraceptif de longue durée est de plus en plus souhaité pour
efficacement les grossesses, ce mode d’utilisation n’a pas diminuer les échecs liés à la mauvaise observance de la contra-
été plus largement évalué [51] ; ception, ce qui justifie le développement de nouvelles formula-
C à la dose de 50 mg, la mifépristone est efficace en contra- tions. En termes de produits, les antagonistes de la progestérone
ception d’urgence [37] ; représentent la voie de recherche privilégiée. La possibilité d’une
C en fin de cycle pour « déclencher » les règles : cette protection complémentaire contre les infections sexuellement
approche ne serait pas suffisamment efficace et probable- transmissibles serait un bénéfice important. Enfin, la contracep-
ment mal acceptée comme méthode régulière de contra- tion progestative est aussi la voie de recherche de la contracep-
ception ; tion masculine [4].
• en administration hebdomadaire :
C à la dose de 50 mg : l’inhibition de l’ovulation serait
inconstante ;
C à des doses de 2,5 à 10 mg : l’ovulation n’est pas suppri-
mée, mais l’endomètre est dysmature, et le taux de gros-
sesses est élevé ;
“ Points forts
• en administration continue : un effet contraceptif semble La contraception progestative est principalement
pouvoir être obtenu avec une administration quotidienne indiquée en cas de contre-indication aux estrogènes ou de
d’une dose faible entre 2 et 5 mg de mifépristone. Le taux de situation particulière où il est préférable d’éviter les
succès serait acceptable (0 grossesse pour 200 cycles) ; dans estrogènes (post-partum, allaitement, tabagisme).
90 % des cas, l’ovulation est supprimée avec dysmaturation La contraception progestative n’a pas de contre-
de l’endomètre ; les femmes sont en majorité en aménor- indication vasculaire ou métabolique (en dehors des
rhée [52]. À une dose inférieure (0,5 mg), l’efficacité contra- progestatifs norstéroïdes à forte dose par voie orale).
ceptive n’est pas suffisante [50].
Les troubles menstruels irréguliers ou l’aménorrhée
D’autres antiprogestérones sont évalués dans le cadre de la
représentent le principal inconvénient des contraceptifs
contraception régulière [53]. Les effets à long terme des antipro-
progestatifs. Une bonne information préalable devrait
gestérones, notamment sur l’endomètre et le sein, ne sont pas
connus. améliorer l’acceptabilité de ce type de contraception.
Le risque carcinologique à long terme associé à cette
contraception n’est pas plus élevé qu’en l’absence de
Nouveaux progestatifs et nouvelles contraception ; néanmoins les données dans la littérature
formulations sont limitées en raison de la plus faible utilisation des
progestatifs seuls comparée à la contraception
Nouveaux progestatifs estroprogestative et du recul insuffisant pour les méthodes
les plus récentes.
Peu de nouveaux progestatifs sont développés. Un dérivé de
la 19 norprogestérone, la Nestorone®, est en fin de développe- Le développement favorise les formulations non orales de
ment clinique pour la contraception à long terme en implant .
nouveaux progestatifs ainsi que celui des anti-
ou en anneau. L’efficacité serait satisfaisante sur une durée de progestérones et des SPRM dans la contraception
2 ans pour l’implant (indice de Pearl à 0,6 %) [1]. En anneau, il régulière.
est développé seul ou en association avec l’éthinylestradiol et
serait mis en place pour une durée de 1 an. La Nestorone® est .
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