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La Corse proto-médiévale est mal connue, peu de sources la traitant entre le Ve et le XIe siècle. Une approche synthétique de ces références permet cependant de dégager une évolution chronologique. À la fin de l’Antiquité, c’est un espace... more
La Corse proto-médiévale est mal connue, peu de sources la traitant entre le Ve et le XIe siècle. Une approche synthétique de ces références permet cependant de dégager une évolution chronologique. À la fin de l’Antiquité, c’est un espace dont les liens avec l’Italie paraissent distendus du fait des bouleversements méditerranéens. Vers le VIe et le VIIe siècle, elle fait l’objet de nouvelles préoccupations continentales, notamment au travers de l’entreprise réformatrice de Grégoire le Grand. Il faut attendre le VIIIe siècle et l’expansion carolingienne pour qu’elle soit revendiquée par la papauté aux dépens du royaume lombard. La menace maure et sarrasine sur les rivages italiens entraîne au IXe siècle le placement de la Corse sous la protection des Francs qui l’érigent bientôt en frontière défensive face au Sud, avant qu’elle ne devienne à la fin du XIe siècle un enjeu entre cités maritimes rivales.
Il est generalement admis que les sources carolingiennes, issues en majorite de l'Europe septentrionale, ne s'interessent guere a la Mediterranee. A la suite d'Henri Pirenne, certains ont meme voulu justifier a l'aide de... more
Il est generalement admis que les sources carolingiennes, issues en majorite de l'Europe septentrionale, ne s'interessent guere a la Mediterranee. A la suite d'Henri Pirenne, certains ont meme voulu justifier a l'aide de l'expansion de l'Islam la desertion de l'ancien Mare Nostrum par les Occidentaux, qui aurait ete a l’origine du developpement de l'Europe rhenane. Il est pourtant frappant de constater que les premiers siecles de la dynastie carolingienne correspondent a un mouvement de conquetes franques sans precedent en direction du sud. A la mort de Charlemagne, l'Empire controle meme plus de 1500 km de cotes meridionales, de Barcelone jusqu'a Rome, et tente d’etendre son influence sur les iles proches, comme la Corse et l'archipel des Baleares. Des lors, les formes de la presence franque au Sud suscitent autant de questionnements que le relatif desinteret dont celle-ci a fait l'objet jusqu'a ce jour. L'etude de ces marges revele pourtant leur importance dans la construction imperiale ainsi que leur singularite dans l'Occident franc. Elle montre aussi le caractere decisif bien que longtemps sous-evalue de l'expansion carolingienne pour l'histoire medievale du bassin mediterraneen
Just a century ago, the eminent Belgian historian Henri Pirenne offered his interpretation of the transition between Antiquity and the Middle Ages in "Mahomet et Charlemagne", an article which immediately met with great success: the... more
Just a century ago, the eminent Belgian historian Henri Pirenne offered his interpretation of the transition between Antiquity and the Middle Ages in "Mahomet et Charlemagne", an article which immediately met with great success: the responsibles for the end of the classical world were not the German tribes, but the Arab-Muslim invaders who seized the southern Mediterranean. This vision was founded on the idea that Islam is fundamentally violent and on the historical significance of antagonisms between civilizational blocks. Pirenne's thesis, however, continues to have an impact on many media and political figures today, despite its scientific flaws and the disapproval of later historians. This is perhaps because its elaboration was widely influenced by the intellectual climate of the 1920s and 1930s, marked by colonial prejudices and the traumas of the Great War, which finds a singular echo in the anxieties of the current era. Pirenne's depiction of the early Middle Ages serves therefore as an example to show that as long as the representations of the past stay strongly tied to the public's restless quest for the meaning of its present, scientific truth is probably going to stay largely unheard.
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La Corse proto-médiévale est mal connue, peu de sources la traitant entre le Ve et le XIe siècle. Une approche synthétique de ces références permet cependant de dégager une évolution chronologique. À la fin de l’Antiquité, c’est un espace... more
La Corse proto-médiévale est mal connue, peu de sources la traitant entre le Ve et le XIe siècle. Une approche synthétique de ces références permet cependant de dégager une évolution chronologique. À la fin de l’Antiquité, c’est un espace dont les liens avec l’Italie paraissent distendus du fait des bouleversements méditerranéens. Vers le VIe et le VIIe siècle, elle fait l’objet de nouvelles préoccupations continentales, notamment au travers de l’entreprise réformatrice de Grégoire le Grand. Il faut attendre le VIIIe siècle et l’expansion carolingienne pour qu’elle soit revendiquée par la papauté aux dépens du royaume lombard. La menace maure et sarrasine sur les rivages italiens entraîne au IXe  siècle le placement de la Corse sous la protection des Francs qui l’érigent bientôt en frontière défensive face au Sud, avant qu’elle ne devienne à la fin du XIe  siècle un enjeu entre cités maritimes rivales.
Mahomet et Charlemagne, paru en 1937, reste une référence dans les médias lorsqu’il est question des rapports entre Chrétienté et Islam au Moyen Âge. Cela peut sembler étonnant au vu des progrès de l’historiographie depuis près d’un... more
Mahomet et Charlemagne, paru en 1937, reste une référence dans les médias lorsqu’il est question des rapports entre Chrétienté et Islam au Moyen Âge. Cela peut sembler étonnant au vu des progrès de l’historiographie depuis près d’un siècle. Ce paradoxe s’explique par le contexte de l’élaboration de cette œuvre dans l’entre-deux-guerres, à une époque de profond renouvellement épistémologique. Mahomet et Charlemagne proposait une lecture nouvelle du basculement entre Antiquité et Moyen Âge et connut d’abord un accueil favorable. Il suscita par la suite un débat fécond qui prit parfois des accents de controverse. Mais si cet ouvrage demeure emblématique aujourd’hui, c’est moins par ses thèses scientifiques stimulantes, qu’en raison de son apport épistémologique. Historiquement daté, mais incontournable d’un point de vue historiographique, cette œuvre reste donc une source d’inspiration majeure pour tout historien, bien au-delà des enjeux politiques auxquels elle a parfois été artificiellement reliée.
En quelques formules définitives, concluant sa remarquable synthèse sur la fin de l'Antiquité, Henri Pirenne (m. 1935) s'est imposé comme la référence historiographique contemporaine majeure du monde méditerranéen proto-médiéval. L'Islâm,... more
En quelques formules définitives, concluant sa remarquable synthèse sur la fin de l'Antiquité, Henri Pirenne (m. 1935) s'est imposé comme la référence historiographique contemporaine majeure du monde méditerranéen proto-médiéval. L'Islâm, en faisant irruption sur ces rivages du VIIe au VIIIe s. aurait d’après lui si profondément bouleversé les échanges entre l'Ouest et l'Est qu'il aurait provoqué une véritable « fermeture » économique et circulatoire de la Méditerranée occidentale. L'Europe de l'Ouest, amputée de son accès à l’ancien Mare Nostrum, aurait été obligée de se réinventer pour donner naissance à l'Occident chrétien, sous l’égide de la dynastie carolingienne, issue d’ailleurs de Francie septentrionale. En somme, « Charlemagne sans Mahomet serait inconcevable » . Or cette thèse, en dépit de ses qualités, a très vite été contestée, notamment par les spécialistes du monde arabe, dès les années 1940.  A la fin du XXe s., avec la prise en compte de nouvelles sources en particulier archéologiques, elle a perdu un peu de son éclat.
L’Occident méditerranéen du haut Moyen Âge doit-il donc encore être considéré comme un lac musulman ou comme une frontière de l'Islâm ?
Sans prétendre trancher cet épineux problème en quelques pages, il nous a paru intéressant d’analyser  la controverse en elle-même pour tenter d’y voir un peu plus clair. Confronté aux assertions contradictoires d’historiens qui délaissent parfois l’habit du chercheur pour endosser celui du polémiste, on verra qu’un retour aux sources au sens littéral de l’expression s’impose, avant de proposer quelques nouvelles pistes d’analyse
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Les origines septentrionales des Pippinides ne les prédisposaient apparemment pas à devenir les artisans de l'alliance entre Rome et la monarchie franque. Pourtant, la convergence d'intérêts entre les premiers maires du palais... more
Les origines septentrionales des Pippinides ne les prédisposaient apparemment pas à devenir les artisans  de l'alliance entre Rome et la monarchie franque. Pourtant, la convergence d'intérêts entre les premiers maires du palais austrasiens et les papes les poussa à développer une collaboration suivie, en particulier pour l'évangélisation de la Frise. Pépin le Bref, en position de force aux frontières de l'Italie mais en recherche de légitimité, fut le véritable artisan du rapprochement, qui conduisit à une récupération d'un certain nombre de symboles politiques romains antiques par les Carolingiens. Charlemagne, avec la proclamation impériale, paracheva cette évolution. Pourtant, la fusion entre l'Eglise romaine et l'Empire franc ne fut pas complète et ne dura pas. Les difficultés dynastiques débouchèrent sur des querelles de primauté. Dans les années 840, les évolutions méditerranéennes et le sac de Saint-Pierre par les Sarrasins montrèrent l'inefficacité du protectorat franc. Face à cet effacement, au tournant des années 850, les papes Léon IV et Jean VIII donnèrent de nouveaux contours spirituels à la chrétienté désormais orpheline de l'Empire, en élaborant progressivement la théorie du pardon des pêchés dans la lutte contre l'Islâm...
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Dans la plupart des annales et des chroniques en langue latine des VIII e et IX e s., on est laconique au sujet du sud du regnum Francorum. D'autant plus quand il s'agit des îles méditerranéennes. On le présente souvent comme des terres... more
Dans la plupart des annales et des chroniques en langue latine des VIII e et IX e s., on est laconique au sujet du sud du regnum Francorum. D'autant plus quand il s'agit des îles méditerranéennes. On le présente souvent comme des terres chrétiennes abandonnées à la prédation des marins d'Afrique ou d'al-Andalus. Il est d'ailleurs frappant de constater que sur une période aussi peu documentée que le haut Moyen Âge méditerranéen, les certitudes paraissent fermement établies. Dès le XIV e s. l'érudit africain Ibn Khaldûn écrivait qu'après l'irruption de l'Islâm en Méditerranée, « les chrétiens n'y pouvaient même plus faire flotter des planches ». En 1937, l'historien belge Henri Pirenne affirmait dans son Mahomet et Charlemagne : « De plus en plus Charlemagne, incapable de résister aux flottes musulmanes, se résigna à la défensive, parant difficilement les coups qu'il recevait ». Il ajoute un peu plus loin : « On peut donc dire que, dès la conquête de l'Espagne, et surtout de l'Afrique, la Méditerranée occidentale devient un lac musulman ».  A la lumière des progrès épistémologiques et archéologiques actuels, il est sans doute temps d'interroger ces idées reçues, qui continuent pourtant à irriguer une grande partie des mémoires insulaires méditerranéennes.
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Les Carolingiens ont très souvent été étudiés en fonction de leur origine austrasienne, ou en raison de leur tentative de refondation impériale, dirigée cependant d'Aix-la-Chapelle, c'est-à-dire à partir d'une capitale aux confins de la... more
Les Carolingiens ont très souvent été étudiés en fonction de leur origine austrasienne, ou en raison de leur tentative de refondation impériale, dirigée cependant d'Aix-la-Chapelle, c'est-à-dire à partir d'une capitale aux confins de la Francie et de la Germanie. Il est inédit de les considérer dans une perspective spécifiquement méditerranéenne. Pourtant, le récit de leur ascension est celui d'une descente vers le Sud. En effet, une des raisons principales du succès de Charles Martel (717-741) est sa domination des territoires gaulois au sud de l'Austrasie; non seulement de la Neustrie, après la bataille de Vinchy (717), mais aussi de la Provence, soumise malgré la présence musulmane, après la victoire sur la Berre (737) et enfin de l'Aquitaine dont la conquête est achevée par Pépin le Bref et le jeune Charlemagne. Dès Pépin, les Carolingiens renforcent leurs liens avec l'Italie, car celui-ci cherche auprès des papes Zacharie (741-752) puis Etienne II (752-757) le surcroît de légitimité qui lui fait défaut afin d'usurper le titre de roi des Francs à partir de 751. Charlemagne (768-814) est très clairement le continuateur de cette politique de rapprochement avec Rome avec la soumission du royaume Lombard en 774. Il tente en outre d'imposer son autorité aux frontières de l'Espagne musulmane (prise de Barcelone en 801), afin de consolider son emprise sur le riche espace aquitain, toujours enclin à la révolte. Enfin, la perte de contrôle des descendants de Louis le Pieux (814-840) sur ces espaces constitue un des symptômes les plus visibles de leur incapacité à maintenir l'unité et l'autorité impériale. La Méditerranée occidentale est un objet d'étude complexe, à la fois fragmenté et cohérent: fragmenté d'un point de vue politique et religieux depuis la chute de l'empire d'Occident (476) et plus encore depuis l'irruption des Arabes sur sa rive sud (prise définitive de Carthage en 698). Mais aussi cohérent car la Méditerranée occidentale reste un espace de circulations, d'échanges économiques et culturels, même au cours de cette période, dans des proportions évidemment moindres que sous le haut Empire romain. En débouchant sur les rives septentrionales de la Méditerranée dès la première moitié du VIII e s., c'est dans un territoire nouveau par sa nature maritime, ses acteurs et ses enjeux que les souverains carolingiens font leur entrée.
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