LES TEMPLIERS ET LA MER
La Flotte et les ports d’attache de la marine templière
Il existe un domaine souvent oublié dans lequel les Templiers se sont illustrés c’est la navigation
fluviale d’une part pour le transport du fret et le commerce en Occident, mais aussi la navigation
maritime sur la mer Méditerranée, la Manche et sur l’océan Atlantique.
Contrairement à d'autres secteurs, l'ordre du Temple n'était pas leader en la matière et à cette
époque des 12ème et 13ème siècles l'ordre de l'Hôpital tenait le premier rôle dans cette discipline,
grâce à sa flotte impressionnante administrée par 22 "commandeurs de la mer".
C’est d’ailleurs une flotte de 17 navires templiers, aux ordres du Commandeur de la mer de la
commanderie de la Rochelle, qui quitteront rapidement au petit matin de 1307 le port vers une
destination Nord/Nord Est, soit vers la seule commanderie anglaise donnant sur la manche
directement.
Les ports d’attache principaux :
En 1118 lorsque l'Ordre du Temple voit le jour, soit au début du 12ème siècle, le trafic maritime
chrétien a repris depuis peu surtout en méditerranée.
Il fut longtemps ralenti, voire interrompu par la présence des Maures au Sud de l'Europe, malgré
la présence des colonies normandes en Méditerranée et devant des traversées trop aventureuses,
voire très dangereuses, beaucoup d'armateurs avaient abandonné l'idée de mouiller et de naviguer
dans cette zone maritime.
Mais avec la reconquête chrétienne (Reconquista Espagnole) et les croisades débutants en 1096,
de nouvelles perspectives et liaisons maritimes voient le jour, avec des perspectives de transports
de troupes, de fret et de pèlerins.
En France, au gré des années et plus précisément entre 1129 et 1132 les Templiers s'installent
dans plusieurs ports, dont surtout Marseille, puis Boulogne, Aigues-Mortes, Barfleur, Collioure,
Arles, et d’autres).
Et les deux principaux ports restent incontestablement celui de La Rochelle et de Marseille,
depuis ces villes, on organise des expéditions vers la Terre Sainte.
Au départ de Marseille, celles-ci sont directes, contrairement à la Rochelle, où il faut contourner
la péninsule ibérique. Toutefois, ce port donnant sur l'Atlantique a l'avantage de permettre une
double communication aisée avec l'Angleterre dont une seule commanderie possède l’accès
directe en Manche et avec la Bretagne.
De l'autre côté de la méditerranée, les chevaliers du Temple accostent dans les villes de Tyr, Jaffa,
et Sidon.
L’arsenal principal templier est quant à lui basé à Saint Jean d’Acre, qui représente la principale
base arrière des Royaumes chrétiens d’Orient.
Nous pouvons retenir les ports suivants ayant eu une présence templière maritime avérée :
En France :
En Picardie les ports du Wissant, de Berck sur mer
En Normandie le Tréport, Saint Valéry en Caux, Bérnerville sur mer, Lion sur mer, Langrune sur
mer, Barfleur, Boulogne sur mer.
En Bretagne les ports de Vildé la marine, de Saint Cast le Guildo, de Perros-Guirec, de Loctudy,
de l’Ile aux moines.
En Charentes maritime le port de La Rochelle avec sa commanderie.
En Roussillon-Catalogne les ports de Barcarès, de Collioure.
En Languedoc le port de Marseillan.
En Provence les ports de Fos sur mer, de Martigues, de Marseille avec sa commanderie, de
Toulon avec sa commanderie maritime, de Hyères, se Saint Tropez, de Saint Raphaël, d’Antibes,
de Villefranche sur mer, de Beaulieu, de Monaco et de Menton, Saint Gilles, Aigues-Mortes et
Arles.
A Majorque qui est une commanderie maritime.
Concernant la commanderie du port de Toulon, Toulon est une commanderie maritime dont
l'enceinte fortifiée s'étend sur moins de 200 mètres de large, elle a dans son ensemble la forme
d'un fer à cheval très allongé vers le nord.
Les remparts sont constitués d'une muraille continue de dix mètres de haut, sur laquelle
s'appuient souvent des maisons, elle mesure 3 mètres d'épaisseur à la base et 50 cm à sa crête, elle
est crénelée et percée de meurtrières, certaines "maisons" y ont pratiqué des ouvertures, comme
c'est le cas des deux maisons acquises par le Temple sur la murailles Ouest.
Ainsi, l'Ordre du Temple qui a établi une commanderie maritime à Toulon, peut échapper aux
droits d'embarquement et de déchargement de leurs navires en franchise, les navires remontent
jusqu'aux maisons par le fossé faisant le tour des fortifications, des tours renforcent les angles, ce
sont de robustes constructions rectangulaires avec de solides assises évasives, coiffées d'un toit
avec pignon à deux égouts, et que remplacera plus tard une plate-forme crénelée, et au beau
milieu de cette façade maritime "le portal Del Mar" ouvre sur un étroit rivage avec sa haute porte
surmontée d'une tour qui est précédée par un embarcadère en bois.
Concernant le port de Marseille et sa commanderie dès le 13ème siècle une forte activité
commerciale et de transit templière s’y effectua, la position de la ville se trouvant entre le Nord de
la France et la Méditerranée, relié par le couloir rhodanien.
Dès la 3ème croisade Marseille devint un port principal d’embarquement des pèlerins pour la Terre
Sainte, via Saint Jean d’Acre pour Jérusalem, le port de saint Gilles commençant à s’ensabler
comme celui d’Aigues Mortes.
Les templiers s’étaient implantés judicieusement en bordure du Barri vieux qui donne sur la place
« Platea Templi » et qui était le lieu de débarquement des marchandises, de façon à surveiller et
administrer toutes les activités.
Il y avait un Maître du Passage, (Magister passagii Templi) et son rôle était de veiller surtout sur les
comptes lors des transbordements des marchandises et des hommes.
On trouve comme Maîtres du passage notamment en 1255 :
De 1260 à 1274 : Guillaume de Gonesse
En 1280 : Henri de Dôle,
En 1303 : Simon de Quincy
En 1306 : Jean de Villamer.
Au cours du 13ème siècle l’Ordre du Temple se dotera de plus de vingt commanderies côtières
comportant toutes un port.
En Italie :
Les ports de Gênes, de Pise, de Venise, et de Brindisi pour l’hivernage des navires ; Sans oublier
la Corse, la Sicile, Chypre et la Sardaigne.
Dans le Sud les ports de Brindisi et de Trani, mouillage des nefs templières pour y être radoubées.
En Petite Arménie :
Le port d’Ayas
Au Moyen-Orient :
Les ports de Saint Jean d’Acre, de Sidon (le château de la mer), de Tyr au Sud-Liban actuel, de
Jaffa, de Beyrouth, d’Ascalon (Ashkelon) et bien d’autres comme Gaza, port Bonnel, et
Alexandrette en Cilicie.
Au Liban :
Le port de Tripoli, de Tortose et de Lattaquié qui sera créé en 1154 et qui fonctionnera jusqu’en
1287.
Les expéditions variées sous-entendent des navires variés
Selon les missions, qu’elles soient d’approvisionnements en hommes ou en fret, ou que ce soit
des passages de pèlerins, dans les premiers temps les Templiers font appel à des navires
marchands pour organiser des communications directes vers la Terre Sainte à partir de Marseille,
et indirectes au départ du port de La Rochelle.
En bon gestionnaires, ils comprennent vite que la rentabilité sera supérieure s'ils fondent et
organisent leur propre flotte, au lieu de sous-traiter avec les Hospitalier de Saint Jean.
Il apparaît évident aux premiers Grands-Maîtres de l’Ordre que pour faciliter le support financier
des croisades niveau templier il est plus que nécessaire d’être autonome, ce qui est une règle de
l’Ordre soit se suffire à soi-même sans dépendre de qui que ce soit.
Aussi construisent-ils leurs propres bateaux dès que les apports financiers des exploitations
templières le permettent, les frères Sergents charpentiers, couturiers, ferronniers et autres
donnent de tous leurs talents pour satisfaire aux besoins de l’Ordre selon leur règle et devise.
A cette époque l’Ordre du Temple devient ce que nous appellerions aujourd’hui une start-up se
métamorphosant en multinationale, et toutes les commanderies tendent dans ce sens comme « un
seul homme » avec un but seul et unique, soit, financer la présence templière en Terre Sainte pour
renforcer les Royaumes d’Orient chrétiens.
Les utilisations des bateaux sont multiples
Bien évidemment l’utilisation principale en est l'envoi des biens (fret maritime) et des templiers
dans les commanderies d'Orient (transport de troupes et de chevaux).
La seconde est le transport des pèlerins vers la Terre Sainte, ce qui n’est pas gratuite pour les dits
pèlerins et cette manne financière représente une source de revenus non négligeable pour l’Ordre,
mais ces transports templiers sont militaires et armés ce qui assure aussi la sécurité des
transportés, ce qui n’est pas le cas des bateaux civils qui souvent vendent leur cargaison de
pèlerins aux Maures comme esclaves, sans parler des naufrages car la Méditerranée est très
dangereuse avec ses tempêtes violentes soudaines.
Donc pour les passagers en pèlerinage vers Jérusalem, voyager par les vaisseaux templiers a
l'avantage d'être plus économique que la moyenne, plus sécurisant grâce au templiers présents à
bord qui peuvent parer les attaques pirates, et plus confortable grâce à des navires mieux
entretenus, ainsi les Frères Templiers perpétuent leur vocation fondatrice de défense des pèlerins
engagés sur les routes vers les lieux saints de la chrétienté (ici routes maritimes).
Très vite, les chevaliers du Temple vont trouver une troisième utilité à ces voyages maritimes vers
la Terre Sainte, en effet c’est le transport aller et retour de marchandises diverses, autant pour les
Royaumes d’Occident et d’Orient, que pour des particuliers, marchands et autres.
Ce qui fait que charger les cales de biens permet d'optimiser les trajets retours et ainsi ne jamais
voyager à vide, puis récupérer une trésorerie supplémentaire qui va s’ajouter au commerce
occidental traditionnel, et tout cela pour financer la Terre Sainte et l’Ordre.
Là aussi, ils pratiquent des tarifs défiant toute concurrence, ce qui va engendrer de nombreuses
tensions avec des armateurs privés et ceux d’autres Ordres.
Ce sera le cas à Marseille en 1234, avec une plainte des armateurs locaux à l'encontre des
Templiers pour concurrence déloyale en quelques sortes, plainte qui n’aura aucuns effets. (Sources
archives maritimes de la capitainerie du port de Marseille/Archives de la ville de Marseille).
Une activité très méconnue des templiers est le transport d’esclaves blancs, des adultes et des
enfants après leur rachat par l’Ordre du Temple en Orient auprès des familles les détenant, et
aussi des prisonniers de guerre capturés, qui seront tous dirigés vers les commanderies
d’Occident principalement en Italie et en Aragon pour faire fonctionner les Maisons du Temple
et donner une autre vie à ces malheureux victimes de la traite arabo-musulmane le plus souvent.
Concernant ce commerce, car c’en est un, il se pratiquait à partir des ports d’Ayas en petite
Arménie ou du Royaume Arménien de Cilicie où les templiers y ouvrirent un comptoir en 1270,
et y firent le commerce d’esclaves turcs, grecs, russes et circassiens ; Il est bon de savoir que
pendant cette l’époque le trafic d’êtres humains était un commerce comme un autre, pratiqué par
tous les peuples du Moyen-âge et depuis l’antiquité que ce soit autour du bassin méditerranéen ou
dans toute l’Europe, ce qui serait impensable et inacceptable au 21ème siècle bien entendu et siècle
où il est plus que difficile d’en parler d’ailleurs.
Les différents bateaux
L’Ordre du Temple a utilisé et fait construire pratiquement tous les types de navires existants
dans ces 12ème et 13ème siècles. Ils ont amélioré certains bateaux transformés aux besoins du
moment, de bateau de transport de fret en navire de guerre par exemple, mais la plupart du temps
l’Ordre affrétait ses bateaux au lieu de les construire ou les acheter.
Ils utilisèrent au moins trois types de bateaux différents, avec la spécificité du fait de naviguer en
Atlantique ou en Méditerranée :
-
Les bateaux de transports d'hommes et de marchandises
Les bateaux de guerre
Les navires "huissiers" destinés au transport des chevaux
Pour information, un texte fait état notamment que tous les navires de guerre basés à Saint Jean
d’Acre sont aux ordres exclusifs du Commandeur de la Terre de Jérusalem, ainsi que le
Commandeur de la Voûte (le port d’Acre) et tous les frères qui lui sont soumis.
Pour la construction le marché du bois que l’Ordre a développé dans ses possessions
européennes a représenté une matière première de qualité, ce qui a donné des navires d’excellente
tenue en mer.
Dans l’Ordre il y avait tous les corps de métier existant au moyen âge, que ce soit dans la
construction sur terre ou maritime.
L’Ordre du Temple recrute à cette époque les meilleurs ingénieurs et les meilleurs ouvriers du
bois dans le domaine maritime, qui viendront grossir l’effectif des sergents de métier de l’Ordre,
et leurs savoirs vont traverser les siècles jusqu’à nous.
C’est un heritage qui va notamment s’épanouir dans certaines confréries et métiers de
compagnonage actuels dans la charpente navale et dans la menuiserie de construction d’habitats
et de grands édifices.
LA GALÈRE
C’est un bateau qui va traverser le temps de l’antiquité jusqu’au 18ème siècle du Roi Soleil.
Au 12ème siècle c’est un Vaisseau de guerre à rames qui succède au dromon et qui apparaît vers
l'an mil dans les flottes marchandes italiennes. Il doit son nom à un poisson en forme d'épée, le
galéos.
Cette galère possède deux rangées d'avirons superposées passant par des apostis, sur chacun de
ses bord elle compte 21 avirons.
Au 13ème siècle ce type de galère cesse d'exister. Les rameurs ne sont plus assis en étage mais en
rang et leur aviron traverse une grande poutre appelée aposti sans passer par des dames de nage.
Dans la moyenne une galère mesure en longueur 131, 234 pieds soit 40 mètres, sur 19,685 pieds
soit 6 mètres de large, l’équipage était de 25 hommes, le plus souvent les capitaines étaient des
Frères Sergents, la totalité des effectifs embarqués sont variables selon les missions, plus
importants pour un débarquement que pour une bataille navale comme à Damiette.
La galère
Archives internet libre de droits
La galère à groupe de trois rameurs compte de 40 à 44 avirons pour chaque bordée. Au début, la
galère n'a qu'un mat mais au 13ème siècle un second mat fait son apparition, les deux portent un
immense gréement latin qui ne s'utilise que comme complément de la propulsion à rames.
Lors d’affrontement en mer au large de Saint Jean d’Acre et plus au Sud on sait de sources sûres
que l’Ordre du Temple avait aligné des flottes d’une dizaine de galères minimum, et du côté des
chroniqueurs arabes on nous rapporte que lors de l’attaque d’une citadelle de bord de mer avec
port sur deux galères engagées, une avait été coulée par les défenseurs sarrasins.
Pendant les combats, les voiles sont ferlées et la vergue fixée par une chaîne au pont.
Le rapport longueur/largeur est de 6 pour 1, c'est-à-dire que pour une longueur de 40m, la
largeur au maître bau est de 6,50m et le tirant d'eau est de plus de 2m, le gouvernail d'étambot ne
faisant son apparition sur les galères qu'au 15ème siècle.
LA BARBOTTE
C’est un navire à très faible tirant d’eau, presque à fond plat utilisé pour l’attaque des murs
d’enceintes défensives sur les côtes, et dont les pavois étaient renforcés par des plaques de fer
forgé.
LE NAVAS
Ce vaisseau de construction italienne, construit essentiellement à Venise et à Gênes est souvent
nommé NAVA ou NAU.
Le Navas (Archives internet libre de droits)
Ce sont de larges navires ventrus à fort tirant d'eau de près de 19 pieds soit environ 6 mètres,
munis d'un haut franc bord, le creux était à 4 mètres soit 13,12 pieds au-dessus de la ligne de
flottaison, et les Navas peuvent avoir 3 ponts.
Ce sont des navires qui mesurent 98, 42 pieds soit 30 mètres de long pour 39, 40 pieds soit 12
mètres de large, il jaugent environ en général 500 tonneaux.
Les Navas sont maladroites, massives, encombrantes, il arrive souvent que lors d'un brassage des
voiles ou lors d'un changement d'allure, les passagers doivent se masser d'un côté du bateau pour
l'empêcher de chavirer en faisant contre-poids.
Les premières Navas naviguaient au timon, il sera remplacé par un gouvernail arrière emprunté
aux cogges de l'Europe du Nord plus tard.
LE SAÉTIS
C’est un bateau petit et léger qui pourrait entrer dans la catégorie actuelle des vedettes ou des
avisos, rapides et légers par rapport aux autres navires templiers, ils servaient surtout aux
transmissions maritimes, reconnaissances en infiltrations et renseignements militaires, et dans une
escadre templière les ordres étaient transmis avec ces saetis rapides et maniables.
LE GAMELS
C’est un navire dont le nom vient du vaisseau du désert le chameau, (Camel), parfois nommé aussi
GANGUEMELS, ce navire avait comme mission essentielle d’escorter la flotte, ses équipages
étaient très bien armés et parfois dotés de siphons incendiaires à la manière des feux grégeois ou
de systèmes de catapultes comme les galères romaines.
LA NEF souvent appelée BUZE-NEF
Elle était quant à elle essentiellement un bateau de transport de troupe, longue de 118, 11 pieds
soit 36 mètres, large de 45, 90 pieds soit 14 mètres, avec un tirant d’eau conséquent et une
hauteur hors d’eau impressionnante.
C’était un navire de transport de marchandises ou de troupes, qui pouvait se transformer en
navire de guerre selon les besoins du moment.
La Nef (archives internet libre de droits)
Ces nefs transportent, en plus de leur équipage, jusqu’à 1400 hommes en armes, quelques
dizaines de chevaux compris au niveau des cavaleries embarquées avec l’infanterie comme lors de
l’attaque de Constantinople, où il y aura 5 de ces nefs affrétées de la sorte.
En règle générale les troupes embarquées sont le plus souvent d’un contingent de 500 à 700
hommes, les chevaux étaient sanglés dans les cales pour d’une part les protéger et d’autre part
limiter leurs déplacements, qui auraient pu mettre en péril la flottabilité de la nef par gros temps
surtout.
Ce navire de charge et de combat se répand jusqu'en Angleterre, sa largeur vaut le tiers de sa
longueur, le meilleur rapport pour une stabilité parfaite.
Elle possède un haut franc bord, la forme de la proue et de la poupe du bateau viking, un mat
planté au milieu porte une voile carrée avec au sommet une bretèche utilisée dans les combats
navals, bretèche que l’on retrouve dans certains bateaux en Méditerranée croisant entre la Terre
Sainte et l’Occident.
LA NEF HUISSIÈRE
C’est un navire très particulier pour l’Ordre du Temple, et son existence est une préfiguration des
transports de troupes de notre siècle comme les navires de type chalands de débarquement.
Ces navires sont construits pour le transport des chevaux, ils comportent des portes (les Huis) sur
chaque bord suffisamment grandes pour permettre aux chevaux d'embarquer directement et
d'être placés de suite dans leurs boxes respectifs de façon à être sanglés pour la traversée, pour la
cavalerie embarquée c’était dix escadrons templiers soit 100 chevaux maximum.
Ces bâtiments sont de dimension similaire aux nefs du Nord et aux Navas, la plupart de ces nefs
étaient mouillées au port de La Rochelle qui représentait déjà à l’époque un abri sûr, et qui sera
utilisé des siècles plus tard par un certain Cardinal de Richelieu.
Le principe stratégique en lien direct avec les croisades en cours à l’époque était d’avoir ce type de
navire à mi-chemin entre le Nord et le Sud de l’Occident vers l’Orient.
Entre autres choses, la ville de Marseille dans ses archives maritimes possède encore les textes des
autorisations données à l’Ordre du Temple pour les constructions, les carénages et réparations de
la flotte templière.
Le COGGE
Au début du 13ème siècle, un autre type de voilier apparaît au Nord de l'Europe, c’est le cogge
appelé aussi Koggen, tout comme la nef, le Cogge est un bateau de transport et de guerre en
même temps, qui tire son origine du roundship britannique et du hogg frison.
Le cogge possède d'excellentes qualités nautiques grâce à son type de construction, c'est un
bateau court, large, haut de bord et surtout profond et à fond plat.
Le rapport longueur - largeur est de 3/1 comme pour la nef et son tirant d'eau atteint 9,84 pieds
soit 3 mètres et sa charpente est composée de couples en bois de frêne, renforcée par des barrots
ou baux en saillie comme pour la nef, avec un bordé en chêne ou en épicéa.
Au 13ème siècle, le gréement du cogge ne subit pas de modifications, muni d’une seule voile carrée
pouvant avoir une surface très grande, car le gouvernail permet de tenir le cap avec la grand-voile,
le mât est plus élevé et aussi mieux haubané, le beaupré, prolongement de l'étrave, sert à fixer les
étais.
Le cogge, c’est un navire qui ne dépasse que très rarement les 200 tonneaux.
Le Cogge (archives internet libre de droits)
Au moyen-âge d’autres types de navires sont utilisés par les croisés et les templiers.
La Paranzella ou Balancelle
Est un bateau qui entre dans la catégorie des petits esquifs comme le Saetis et le Gamels
(Ganguemels).
Édward William Cooke Vesuvius, Catalan and paranzella.jpg – Domaine public - Création : avant 1847 date QS: P, +1847-0000T00:00:00Z/7, P1326, +1847-00-00T00:00:00Z/9 Archives internet libre de droits
Les polémiques de l’époque sur le plan maritime
Les archives de différents ports méditerranéens font ressortir que l’Ordre du Temple a attisé les
envies et les jalousies dans le monde des armateurs.
Il y a eu des plaints venant de Pise, Gêne ou Venise contre les armateurs templiers, mais ces
procédures n’ont jamais abouti.
La concurrence déloyale n’a jamais été retenue contre eux, même si les tarifs de traversée
pratiquée par les templiers étaient les plus bas de l’époque.
La réputation de la flotte templière faisait ressortir la sureté des traversées pour tous, et la sureté
de leur navigation due à la qualité des bateaux renforçait cela.
De plus il faut savoir que les instances commerciales templières avaient mis en place un système
régulier de navettes entre le continent et la Terre Sainte, les traversées duraient en moyenne 8 à
10 jours selon la mer, plus de 80 navires marchands sur une quarantaine de ports fonctionnaient
sans interruption.
Les traces de la flotte templière vont se retrouver bien après 1314, certains peuples vont en avoir
les bénéfices comme les Ecossais d’Angus Macdonald et ceux des ports du Lothian comme
Edinbourg, Dundee, Glasgow, Aberdeen, sans oublier Belfast en Irlande, d’ailleurs aucunes
arrestations n’auront lieu rapidement outre-Manche ou restent très courte en durée
d’enfermement comme en Angleterre en 1309.
À ce propos il est à noter que le 24 juin 1314 les Ecossais se battant contre les Anglais en étant en
infériorité numérique voit arriver des renforts fraichement débarqués aux ordres d’Angus
Macdonald composés en partie de Chevaliers d’horizons divers et dont certains portaient une
cape blanche frappée de la croix rouge sur l’épaule gauche, ce qui va leur donner la victoire sur les
Anglais, et qui débouchera sur leur indépendance.
Les archives Ecossaises de l’époque mentionnent une cavalerie importante d’obédience
apparemment templière de par leur tenue et leur composition en escadrons d’attaque constitués
de 10 cavaliers, lors de cet affrontement une famille est liée à l’Ordre du Temple, la famille
Sinclair, qui était alliée de Robert le Bruce à la bataille de Bannockburn. (Sources : de familles
descendantes des clans présents à cette bataille).
A ce titre on retrouve une trace orale et picturale templière dans une légende amérindienne d’une
tribu, celle des MicMacs de la côte Est de l’Amérique qui sont la seule tribu amerindienne à
posséder légalement un drapeau blanc à croix rouge rectangulaire frappé de quatre croix rouges
aux quatre points cardinaux, certaine correspondances seront vérifiée après la construction de la
chapelle de Rosslyn qui eut lieu en 1440, cependant aucune preuves formelles n’ont été apportée
selon leur volonté par la famille Sinclair et leurs descendants sur la véracité de tout cela qui reste
encore à prouver aujourd’hui.
La seule certitude est une épidémie de peste qui a décimé cette tribu amérindienne autour de 1398
et qui correspond à l’épidémie de peste noire de 1347 et qui avait envahi l’Europe notamment
avec comme vecteur les navires de commerce, en 5 nascette peste fera 25 millions de morts sur
une population d’environ 75 millions à l’époque, et en 1398 la peste est dans la ville d’Arles
(chroniques de Bertrand Boysset), elle durera jusqu’en 1399, cela coïncide avec les voyages de la
famille Sinclair en 1397 et 1398, mais rien ne le prouve avec certitude.
Pour en terminer, aucun nom de capitaine de navire templier n’est connu à ce jour, et la raison en
est très simple, les capitaines des vaisseaux templiers étaient tous des Sergents d’armes de mer,
donc non nobles et non retenus.
Dans la marine templière on ne connaît qu’une petite partie des noms des navires.
« Le Templère », « le Buscart », « le Buszarde » en 1230, navires navettes entre les
commanderies d’Angleterre et le continent.
« La Bonne Aventure » et « La Rose du temple » qui naviguent pour le premier en 1248 en
Méditerranée et pour le second de 1288 à 1290 à partir du port de Marseille entre la Terre Sainte
et le continent.
La plupart des bateaux sont nolisés (affrétés) et au départ de Marseille le Commandeur du
passage était chargé d’écouler en Orient les hommes et le fret de l’Ordre du Temple.
« La Bénite » dont le nom Latin est « Sanctus » navigue au cours de l’année 1248 et est affrétée
officiellement par Jean 1er de Dreux.
« L’Angélica est un bateau qui navigue de l’Italie du Sud en Méditerranée.
« La Santa Anna » est un navire affrété à des marchands occidentaux par l’Ordre, mouillé en
1302 à Chypre au port de Famagouste.
« Le Faucon » aussi appelé « Le falcon Templum », et pour la petite histoire ayant son frère
jumeau comme navire au sein de l’Ordre des Hospitaliers, il était le deuxième navire en
importance après La Mestre Galie de la flotte templière d’Orient et était basé à Saint Jean d’Acre
lors de la chute de la ville.
Il servit en 1291 à l’évacuation de la population civile de Saint Jean d’Acre sous le
commandement de Roger de Flor, puis il fut désarmé à Marseille après la fuite de Roger de Flor
accusé par Jacques de Molay d’avoir détourné à son profit personnel une grande partie des trésors
embarqués avec les civils au départ de Saint Jean d’Acre, mais ni à cette époque et ni maintenant
quoi que ce soit a été prouvé contre Roger de Flor.
« L’Olivette » est un bateau acheté par Roger de Flor en 1301, toujours templier et conseiller
personnel de Frédéric II de Sicile, Roger de Flor avait été à nouveau accusé, mais n’a jamais été
inquiété par manque de preuves tangibles contre lui.
« La Mestre Galie » était quant à lui le vaisseau amiral de l’Ordre du Temple dès 1248 au
moment de la 7ème croisade, il servait avec ses cales de coffre-fort pour les valeurs déposées
régulièrement par les participants aux croisades, son pont était blindé et ignifugé.
L’Ordre des Hospitaliers récupèrera le navire après 1307, et ensuite ce navire avec d’autres sera
vendu aux Augustins, ce que l’on sait est que Jean de Joinville s’y trouvait en 1250 en visite
officielle.
« L’Allégresse » et la nave ou « l’Angélique » sont des bâtiments de guerre qui s’illustreront lors
de la 8ème croisade en 1270.
En 1279 Guillaume de Beaujeu, Maître de l’Ordre du Temple, entra dans la querelle féodale dans
le Comté de Tripoli, algarade qui voyait s’opposer Guy de Gibelet et Bohémond VII d’Antioche.
À cette occasion l’Ordre du Temple affréta et arma 13 galères templières de guerre pour
constituer le corps expéditionnaire sur Tripoli, mais la traversée se fit par gros temps et 5 de ces
galères sombrèrent dans la tempête et furent donc perdues corps et âme, et le port de Sidon vit
arriver le reste des templiers rescapés sur (et dans) leurs galères.
Le Maître de l’Ordre du Temple Guillaume de Beaujeu pris la décision d’annuler le corps
expéditionnaire et de rentrer sur Saint Jean d’Acre ce qui permit à Bohémond VII d’Antioche de
prendre possession de l’ile d’Al-Hlaliyé au large de Sidon.
« La Sainte Trinité » voguera avec d’autres navires de l’Ordre entre les Pouilles de la
commanderie de Barletta et Marseille jusqu’en septembre 1306, après ses trois contrats de
traversée ce navire rejoindra la flotte de La Rochelle, son fret maritime sera essentiellement
alimentaire.
Certains capitaines des navires de l’Ordre du Temple sont connus sur cette route maritime :
Le saint Nicolas commandé par les templiers Benvenuto et de Martino de
Dragundo
Le Saint Albano commandé par les templiers de Mani et Omibani
Le san Cristoforo commandé par d’Andréa de Lavada
Le Saint Nicola commandé par Nicola Stramatia de Bari.
Avec l’Angleterre, Jean Sans Terre le frère de Richard Cœur de Lyon et Henri III avaient confié
l’administration de leur marine à l’Ordre du Temple anglais, et dont Roger du Temple, l’aumônier
du Roi Jean sans Terre, avait la responsabilité administrative de cette flotte royale.
Le Frère Thomas, qui était capitaine d’un bateau templier, fut placé au service d’Henri III
d’Angleterre de 1224 à 1226, Robert IV de Sablé commanda l’escadre de Richard Cœur de Lion
en 1190 pour la 3ème croisade.
Durant l’année 1293 l’Ordre du temple fera l’acquisition de six galères auprès de Venise, elles
rejoindront ensuite deux autres navires de guerre déjà mouillés à Chypre pour assurer la
protection de l’ile.
Bien d’autres navires ont existés, environ plus de 80 environ, la plupart soit coulés ou pris
disparaitrons de l’Ordre, une partie sera donnée aux Hospitaliers ou finira chez les Augustins,
seulement 18 réussiront à appareiller de La Rochelle pour le Nord en 1307, vers la mer d’Irlande
et la mer du Nord.
D’autres navires mouillés sur la Bretagne ou la Normandie réussiront à s’échapper vers la seule
commanderie de la mer en Angleterre, la commanderie de Faxfleet mais très peu, les équipages
feront donc partie des 70% de rescapés templiers de la folie meurtrière de Philippe le Bel.
Cependant il est fort probable qu’une petite partie de la flotte du temple ait traversé l’océan
Atlantique vers l’Ouest/Nord-Ouest, mais rien n’est sûr par manque de preuves, mais en
considérant que l’Ordre du Temple connaissait vraisemblablement déjà les terres du continent
américain comme les vikings et bien avant Christophe Colomb, les Portugais et les Espagnols,
cependant aucune mention n’en fait part dans les interrogatoires entre 1309 et 1311.
Une autre partie, enfin selon une légende colportée mais qui est non prouvée, serait devenue une
force navale clandestine, cherchant vengeance en s'attaquant presque exclusivement aux navires
de l’Église Romaine, ou à ceux des pays ayant soutenu l'arrestation des templiers, et à ce jour
toutes cette hypothèse ne peut ni être infirmer par qui que ce soit ou affirmée en tant que réelle,
cela reste juste une belle légende pour le moment du moins.
Ces navires portant le pavillon pirate auraient ainsi considérablement fait augmenter la piraterie à
cette époque, en Atlantique, Manche, Mer du Nord et Méditerranée, peut-être mais il est très
difficile de considérer cela comme une réalité, mais plutôt comme l’une des fantastiques légendes
entourant cet ordre, cependant il est prouvé que la piraterie n’a pas attendu l’ordre du temple et
existait depuis fort longtemps surtout chez les peuples maritimes de tous les océans de la planète
depuis que l’homme sait naviguer.
L’origine de ce pavillon d’après une tradition orale méditerranéenne aurait pour origine Roger II
de Sicile (1095 - 1154), lui-même surnommé "Jolly Roger", celui-ci l'aurait hissé lors du schisme
entre Anaclet II (l’Antipape) et Innocent II (le Pape) lors de son combat contre les forces papales.
Il aurait ensuite été désigné patron de La flotte de l'Ordre du Temple par les capitaines des
navires templiers qui seraient parvenus à échapper à la dissolution de l'Ordre, en signe de révolte
contre Rome, ne pouvant plus porter le pavillon templier, ceux-ci auraient alors hissé le Jolly
Roger à chaque fois qu'ils croisaient les navires français, anglais ou de la papauté avant de les
aborder pour les piller.
Note de l’auteur
« Légende ou pas, preuves ou pas, être pirate fait rêver tous les enfants de toutes les époques n’est-ce pas!
De la partie connue, reste la partie inconnue entrant dans la légende que Dieu seul connaît au niveau de la vérité,
et le fantastique de la légende touche le rêve de chacun selon son aptitude à approcher la poésie de l’épique historique
de l’Ordre du Temple et de sa marine.
La tradition orale autour de la Méditerranée est vivace depuis l’époque des Hellènes (Grecs), et il n’est pas
improbable que la légende reflète une partie de la vérité historique, et qu’en toute bonne foi, les histoires de marins
de tous les âges aient des racines véridiques, enjolivées ou exagérées par les conteurs et autres ménestrels du soleil
méditerranéen.
Loin du roman, le tracé historique ne doit s’attacher qu’aux preuves écrites et existantes dans les œuvres des
contemporains de l’histoire, en tenant compte des héritages oraux, ce qui permet comme dans cet ouvrage, d’avancer
des probabilités et des convictions pour permettre les réflexions ouvertes et un travail continu chez tous les
passionnés de l’Ordre du Temple, mais avec objectivité et réalisme tant historique qu’humain, loin des influences
religieuses ou politiques qui sont souvent dérangées par l’exacte vérité.
L’Ordre du temple fait partie totalement de notre histoire, son parcours a été flamboyant et dramatique à la fois,
au même titre que les deux autres ordres frères que sont l’Ordre des Chevaliers Hospitaliers de Saint Jean de
Jérusalem et l’Ordre des Chevaliers Teutoniques, rappelons-nous que si écrivains et historiens rapportent l’histoire,
les religions et la politique la transforme à leur avantage ».
Préfiguration des croisades
An 1000 à 1095
Copyright © 2023 Vinson Patrick FISHER
Tous droits réservés.
ISBN: 9798388955333