Location via proxy:   [ UP ]  
[Report a bug]   [Manage cookies]                
588 COMPTES RENDUS présence moins fréquente autant dans les sanctuaires que dans le monde funéraire ou domestique. L’on pourrait également imaginer des recherches qui insisteraient plus encore sur l’interdisciplinarité, notamment par le biais de l’ethnologie. L’ouvrage livre toutefois une profonde remise en question des théories dominantes et offre des perspectives d’intéressantes études qui pourraient être étendues à d’autres catégories d’objets ; il constitue donc une contribution majeure à notre compréhension de ces objets négligés et souvent incompris, rendant ainsi ces présences muettes beaucoup plus éloquentes. Maria NOUSSIS Trésors hellénistiques de Mariemont. Morlanwelz, Musée royal de Mariemont, 2016. 1 vol., 200 p., nombr. ill. coul. (CAHIERS DE MARIEMONT, 40). Prix : 18 €. ISBN 9782-930469-57-7. C’est avec un plaisir certain que l’on a vu paraître ce nouveau numéro des Cahiers de Mariemont comprenant un intéressant dossier thématique intitulé Trésors hellénistiques de Mariemont coordonné par Annie Verbanck-Piérard ; il fait honneur à la richesse et à la qualité de la collection d’antiques du Musée royal de Mariemont (Morlanwelz, Belgique) par le biais d’une présentation générale des arts de cette période mais surtout par plusieurs études approfondies de pièces emblématiques de la collection, étayées par de minutieuses analyses technologiques et de matériaux. Le dossier complète ainsi avec beaucoup de pertinence la récente publication des fresques de la villa du Boscoreale, pour certaines conservées dans ce musée (A. Barbet & A. Verbanck-Piérard, La villa romaine du Boscoreale et ses fresques, Arles – Mariemont, 2013 ; voir AC 84 [2015] p. 561-563), et les études plus anciennes de portraits hellénistiques sculptés, celui attribué à Arsinoé II Philadelphe (R. Tefnin, AC 36 [1967] p. 87-98) et celui assuré de Ptolémée X (C. Evers, Cahiers de Mariemont 27 [1996], p. 6-25), pour nous limiter à quelques exemples parlants. – Agnès Rouveret ouvre le bal par une belle préface qui revient sur les premières présentations muséales de la collection de Raoul Warocqué et met en perspective les dossiers présentés (p. 7-13). Suit une présentation didactique des contextes politique, artistique et religieux du monde hellénistique par A. Verbanck-Piérard (p. 14-44), en introduction aux études ponctuelles du dossier. D. Damaskos voit dans la petite tête dite « d’Alexandre » inv. B.10 datée de la fin du IVe s. av. n.è. le visage d’une déesse, peut-être une Tychè en raison de la présence d’une coiffe rapportée, rapprochée de l’un des derniers naiskoi funéraires athéniens du Cimetière du Céramique (p. 51-61), l’origine pentélique du marbre étant de son côté confirmée par les analyses pétrographiques de Patrick Degryse (p. 62-63). Brigitte Bourgeois présente ensuite une étude archéométrique approfondie du portrait dit de « Bérénice II » d’Hermoupolis Magna (inv. B. 264 ; R. Tefnin, AC 38 [1969] p. 89-100), en particulier une stratigraphie des peintures, dorures et enduits de cire conservés sur la surface de la sculpture, qui conduit à reconnaître sur la surface de cette sculpture les états préparatoires, les couleurs originales, les retouches et repeints, savoir-faire picturaux proprement grecs, ainsi que la ganôsis, enduction de surface à la cire d’abeille signalée par Vitruve, Pline et Plutarque (p. 65-81). De son côté, Natacha Massar reprend à nouveaux frais l’étude de trois dédicaces religieuses grecques conservées à Mariemont (inv. B.181, COMPTES RENDUS 589 OGIS 64, Memphis ?, à Sarapis et Isis, sous Ptolémée III et Bérénice II) et aux Musées royaux d’Art et d’Histoire de Bruxelles (inv. A.1484, SEG 1964, n° 641, Fayoum ou delta ?, à Boubastis/Bastet, sous Ptolémée VI et Cléopâtre II ; inv. E.493, Archiv für papyrusforschung 2 [1903], delta ?, à Isis et d’autres divinités, sous Cléopâtre III, Ptolémée IX et Cléopâtre Sélénè ; p. 86-103). Suit une présentation collective d’un ensemble de bijoux en or des époques hellénistique et romaine conservé au Musée royal de Mariemont comprenant un catalogue remarquablement illustré de dix numéros – deux pièces étant écartées comme remontage moderne et pièce douteuse –, et une étude stylistique et matérielle (analyses physico-chimiques et technologiques ; p. 105-147). A. Verbanck-Piérard livre ensuite une très belle étude stylistique et iconographique (remise des armes à Achille par Thétis et les Néréides, représentation du défunt héroïsé entouré de porteurs et porteuses d’offrandes) d’un cratère à volutes apulien monumental attribué au peintre de Baltimore (inv. Ac.85/14, dernier tiers du IVe s. av. n.è. ; p. 148-171). Paul Fontaine referme le dossier par le réexamen d’un miroir étrusque connu depuis le XVIIe s. (inv. B.206, fin du IVe s. av. n.è.) ; il résout subtilement un problème qui avait laissé les premiers commentateurs interdits, supposant une erreur (par interversion de termes) du graveur chargé de nommer les personnages représentés et restitue ainsi un groupe associant Menrva, Herlce et Thetis face à une Eris (la Discorde) ailée (p. 174-180). Assurément un très beau dossier. Laurent THOLBECQ Mary C. STURGEON (Ed.), Ancient Mediterranean Art in the Ackland Art Museum. Chapel Hill, The University of North Carolina Press, 2015. 1 vol., 344 p., 727 ill. Prix : 100 $. ISBN 978-1-4696-2551-5. L’Ackland Art Museum est le musée universitaire de l’Université de Caroline du Nord située à Chapel Hill. Il y a là un foyer très vivant pour la recherche universitaire en général (surnommé « the triangle » et qui comprend aussi Duke University) et les études classiques en particulier (c’est à Chapel Hill qu’est logé le secrétariat américain de L’Année philologique). L’histoire de ce musée universitaire est emblématique de ce que les États-Unis ont de meilleur : des réussites privées éprises de culture et soucieuses du progrès commun par l’éducation, le tout sur fond d’évergétisme collectif. Qu’une femme, Katherine Pendleton Arrington of Warrenton (18761955), ait été à la base de l’entreprise ne fait qu’ajouter au tableau. Quant au généreux mécène dont le musée porte à présent le nom, William Hayes Ackland (1855-1940), il est enterré dans le musée même comme stipulé dans son testament. Par sa libéralité, il entendait que « the people of his native South to know and love the fine arts ». Le musée, qui dispose d’un budget important d’acquisition (les plus belles pièces sont le plus souvent entrées de cette manière), s’est progressivement enrichi, beaucoup grâce aux généreux dons faits par les alumni, au premier rang desquels figurent souvent des membres du corps académique. Parmi ses pièces de prestige, on trouve notamment « Cléopâtre et le paysan », un tableau peint par Eugène Delacroix en 1838 (Inv. 59.15.1). L’ouvrage ici recensé fait connaître un florilège de ce que le musée possède en termes d’art ancien méditerranéen. Il a été dirigé par Mary Sturgeon, spécialiste de sculpture grecque à qui l’on doit la publication de tout ce que les fouilles américaines