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L’ÉMERGENCE D’UNE THÉOLOGIE DE LA VOCATION SACERDOTALE : LE RÔLE DU SULPICIEN LOUIS TRONSON (1622-1700) (Article publié dans Charitas, cahier de l’école de théologie de la communauté SaintMartin, n° 8, printemps 2018, pp. 19-31.) L’article que l’on va lire rend compte, de manière partielle et sélective, d’une thèse soutenue le 16 juin 2015 en vue de l’obtention d’un double doctorat en théologie et en histoire. Cette thèse est intitulée : « Le grand secret de la vocation ». Louis Tronson (1622-1700), troisième supérieur de la Compagnie des prêtres de Saint-Sulpice, dans l’histoire théologique de la vocation sacerdotale1. La revue Charitas avait déjà accueilli en 2012 un article sur Louis Tronson, fruit d’un mémoire de licence canonique soutenu à l’Institut catholique de Paris en octobre 20112. La recherche réalisée en vue de la thèse de doctorat a permis de développer ou d’infléchir certaines idées exprimées dans ce premier article préparatoire. Plutôt que de proposer un résumé d’un travail de près de cinq cents pages dont nous espérons la publication prochaine, nous voulons simplement, dans cet article, présenter d’abord les raisons qui nous ont conduit à travailler sur un homme presque totalement oublié hors des milieux érudits : ce sera l’objet d’une première partie. Nous retracerons ensuite, dans une deuxième partie, l’origine et le parcours de Louis Tronson, tels du moins qu’ils nous sont connus par les sources dont nous disposons. Enfin, dans la troisième partie, à partir d’un chapitre de la thèse, nous proposerons un rapprochement original et historiquement fondé entre l’idéal du saint prêtre tel que Tronson l’exprime dans ses différents ouvrages et celui du parfait magistrat tel qu’on peut le trouver chez deux auteurs représentatifs qui, chronologiquement parlant, encadrent Tronson : Bernard de La Roche Flavin (1552-1627) et Henri-François d’Aguesseau (1668-1751). Notre travail étant à la fois une thèse de théologie et d’histoire, nous entendons ainsi montrer comment ces deux disciplines peuvent fructueusement compléter leurs perspectives : l’histoire sociale peut, sans tomber dans l’excès du réductionnisme, donner une portée concrète insoupçonnée à une doctrine théologique et spirituelle qui, sans cela, pourrait sembler abstraite et irréelle ; en retour, une meilleure connaissance de 1 2 Le jury était constitué des membres suivants : Alain Tallon (président, professeur à l’Université de Paris IV Sorbonne), Olivier Chaline (codirecteur de la thèse, professeur à l’Université de Paris IV Sorbonne), Éric Suire (lecteur expert extérieur, maître de conférences habilité à l’Université de Bordeaux III), Laurent Villemin (codirecteur de la thèse, professeur à la faculté de théologie de l’Institut catholique de Paris), Gilles Berceville (lecteur expert, professeur à la faculté de théologie de l’Institut catholique de Paris). L’autre lecteur expert extérieur était Paola Vismara, professeur à l’Università degli Studi de Milan : elle put participer à l’évaluation de ce travail en rendant son rapport d’expertise, mais la maladie qui devait l’emporter six mois plus tard l’empêcha de siéger au jury. GILBERT, David, « Un maître sulpicien, Louis Tronson (1622-1700) : enjeux actuels d’une étude historique et théologique pour la formation des prêtres », Charitas, cahier de l’école théologique de la communauté SaintMartin, n° 2, 2012, pp. 147-158. 1 la théologie permet de mieux cerner la conception religieuse et même cryptosacerdotale que certains acteurs de la vie civile et politique, en l’occurrence les magistrats, avaient de leur rôle. Non seulement les points communs, mais aussi les irréductibles différences apparaissent d’autant mieux dans la lumière de ce rapprochement, que les liens étroits entre noblesse de robe3 et milieux de la réforme pastorale dans l’Église gallicane4 du XVIIe siècle rendent légitime. La notion de représentation, essentielle dans la compréhension du rôle du magistrat comme dans la conception théologique du sacerdoce catholique, nous permettra de saisir à la fois cette affinité et cette différence. POURQUOI UN TRAVAIL SUR LOUIS TRONSON ? Aujourd’hui, Louis Tronson ne jouit d’aucune renommée, même dans le public cultivé. Néanmoins, en tant que troisième supérieur de la Compagnie des prêtres de SaintSulpice de 1676 à sa mort en 17005, il n’est pas un inconnu des historiens de l’Église sous le règne de Louis XIV6. Son rôle à la tête d’une société de prêtres relativement modeste dans ses effectifs, mais capitale par son rôle stratégique au service des évêques diocésains pour la formation de leurs futurs prêtres, fait de lui un acteur important, quoique discret, de la vie ecclésiale française dans le dernier quart du XVIIe siècle. Les historiens de la spiritualité savent également que Louis Tronson est impliqué dans la douloureuse affaire du quiétisme : sa réputation de science et de piété lui vaut d’être choisi comme arbitre théologique des entretiens entre Fénelon et Bossuet qui se tiennent en 1694-1695 dans la maison sulpicienne d’Issy où Tronson, affaibli par de cruelles infirmités, vit en reclus7. Aux tourments physiques s’ajoute, pour Tronson, un difficile conflit intérieur : lié à Fénelon, son ancien dirigé, par une solide amitié spirituelle, il est néanmoins beaucoup plus proche de Bossuet par sa méfiance envers le mysticisme8. D’autres raisons, toutefois, nous ont incité à consacrer une substantielle recherche historique et théologique à Louis Tronson. Artisan de la consolidation institutionnelle et de l’enracinement ecclésial de la Compagnie de Saint-Sulpice, il est l’auteur d’une 3 Sur la notion de noblesse de robe, voir plus loin la note 24. Dans le vocabulaire habituel des historiens de l’époque moderne, l’expression « Église gallicane » désigne, sans connotation ecclésiologique ni juridique particulière, ce que nous appellerions aujourd’hui l’Église catholique en France. 5 Le premier supérieur est naturellement le fondateur lui-même, Jean-Jacques Olier, de 1641 à sa mort en 1657. Lui succède Alexandre Le Ragois de Bretonvilliers, de 1657 à 1676. 6 Tronson apparaît ainsi à de nombreuses reprises dans l’ouvrage de référence sur l’épiscopat français sous le règne de Louis XIV : BERGIN, Joseph, Church, Crown and Episcopate under Louis XIV, New Haven / Londres, Yale University Press, 2004. On peut également citer une étude locale qui fait grand cas de l’influence de Tronson sur l’évêque de Limoges Louis Lascaris d’Urfé, ancien élève du séminaire de Saint-Sulpice et fidèle dirigé de Tronson même après son élévation à l’épiscopat : LAJAUMONT, Stéphane, Un pas de deux. Clercs et paroissiens en Limousin (vers 1660 – 1789), Limoges, Presses universitaires de Limoges, 2014. 7 Outre le futur archevêque de Cambrai et l’évêque de Meaux, Louis-Antoine de Noailles, alors évêque de Châlons et futur archevêque de Paris et cardinal, participe lui aussi à ces entretiens, mais son rôle est moindre que celui des deux autres prélats, qui sont respectivement en position d’accusé et d’accusateur. 8 Sur la querelle du quiétisme et l’opposition théologique et spirituelle entre Bossuet et Fénelon, voir COGNET, Louis, Crépuscule des mystiques, Paris, Desclée, 1991 [1958]. 4 2 œuvre écrite abondante, partiellement publiée9. Une étude très précise des manuscrits de Jean-Jacques Olier conservés aux archives de la Compagnie de Saint-Sulpice, comparés au texte édité par Louis Tronson en 1676 sous le titre de Traité des saints ordres, a permis de mieux mesurer l’intervention significative du disciple dans la mise en ordre de la spiritualité du maître10. Or, une certaine fréquentation de ces textes parfois arides permet de voir émerger un important thème théologique, que Tronson traite de manière originale : la vocation sacerdotale. Qu’il soit traité de manière professorale, comme dans les conférences, les retraites ou les Examens particuliers11, ou bien de manière plus pastorale comme dans la correspondance, ce thème de la vocation est l’objet, chez Tronson, d’analyses soignées, qui peuvent d’ailleurs légèrement varier d’un texte à l’autre, comme si l’auteur avait conscience de ne pas pouvoir enfermer un tel mystère dans une grille qui resterait toujours la même. Esprit méticuleux, amoureux de l’ordre et des distinctions, Tronson cherche en effet à proposer des critères de discernement de la vocation sacerdotale. Cet effort s’inscrit dans une histoire théologique complexe : les violentes controverses ecclésiologiques et sacramentelles liées à la rupture confessionnelle du XVIe siècle au sein de la Chrétienté d’Occident conduisent les auteurs tant catholiques que protestants à s’interroger sur les fondements et la légitimité du ministère pastoral dans l’Église. Ainsi, Jean Calvin qui, à la différence de Martin Luther, de Huldrych Zwingli ou de Martin Bucer, n’est pas prêtre et ne semble avoir jamais reçu aucune imposition des mains de quelque sorte que ce soit, aborde souvent la question de la vocation – et, implicitement ou explicitement, de sa propre vocation – dans plusieurs de ses écrits12. Au-delà de l’inévitable justification d’une vocation pour le moins inhabituelle au regard des pratiques traditionnelles de l’Église romaine, c’est toute une conception de l’Église Par commodité, on peut se reporter à l’édition suivante : Œuvres complètes de M. Tronson, supérieur du séminaire de Saint-Sulpice, Paris, Jacques-Paul Migne éditeur, 1857, deux volumes. Les lettres n’ont fait l’objet que d’une publication sélective : Correspondance de M. Louis Tronson, troisième supérieur de la Compagnie de SaintSulpice, édition de Louis BERTRAND, Paris, librairie Victor Lecoffre, 1904, trois volumes. 10 Traité des saints ordres (1676) comparé aux écrits authentiques de Jean-Jacques Olier († 1657), édition de Gilles CHAILLOT, Paul COCHOIS et Irénée NOYE, Paris, Procure générale de la Compagnie de Saint-Sulpice, 1984. 11 De tous les ouvrages imprimés de Tronson, le livre des Examens particuliers est certainement celui qui lui a assuré, du moins dans les milieux ecclésiastiques, une réputation durable, quoique ambivalente. L’examen particulier est une sorte d’examen de conscience collectif sur un point particulier – d’où son nom – de la vie du séminaire. Cet examen, tel qu’il est vécu dans les séminaires sulpiciens à l’époque de Tronson et après lui, a lieu au début du déjeuner, pris en silence : un séminariste lit alors le texte de l’examen, fondé sur la méthode d’oraison hérité de Jean-Jacques Olier. Il s’agit en effet de contempler d’abord Jésus comme modèle d’une vertu particulière (« Jésus devant les yeux »), d’intérioriser ensuite ce modèle par un certain nombre de questions introspectives qui constituent l’examen de conscience au sens strict (« Jésus dans le cœur »), et enfin de prendre une ou plusieurs résolutions, en forme de prière, pour progresser dans l’exercice de cette vertu à la suite du Christ (« Jésus dans les mains »). Progressivement abandonné dans les séminaires sulpiciens au milieu du XX e siècle, l’examen particulier a marqué, assez négativement à vrai dire, un bon nombre de prêtres aujourd’hui âgés qui, au séminaire, avait l’habitude de railler cet exercice sous le nom de « tronsonade ». 12 Voir notamment la correspondance entre Jean Calvin et le chanoine d’Angoulême Louis du Tillet : Ioannis Calvini opera omnia, série VI, Epistolae, volume I (1530 – septembre 1538), Genève, Droz, 2005, lettres 57, 64, 75, 85, à compléter par Corpus Reformatorum, volume 10/2, lettres 147 et 153 ; CALVIN, Jean, Institution de la religion chrétienne, éditions Kerygma / éditions Farel, Aix-en-Provence / Marne-la-Vallée, 1995 [1978], trois volumes (cette édition propose la dernière version du texte français, celle de 1560, en orthographe modernisée), livre IV, chapitre III ; id., Commentaire sur les psaumes, Paris, Meyrueis, 1859, t. I, préface, pp. VII-VIII. 9 3 et de ses ministères, des moyens ordinaires ou extraordinaires du salut et de la relation entre Dieu qui appelle et l’homme qui répond, qui est en jeu dans la réflexion sur la vocation. Calvin semble être le premier à formuler clairement la distinction entre vocation extérieure, autrement dit la procédure ecclésiale d’appel au ministère pastoral, et vocation intérieure ou plutôt, selon son propre terme, « secrète », qui se joue entre Dieu et l’homme. Calvin développe peu ce qu’il entend par vocation secrète, mais la distinction est promise à un bel avenir dans la théologie catholique grâce au rôle médiateur de Jean Duvergier de Hauranne, abbé de Saint-Cyran. Très intéressé entre autres choses par la controverse antiprotestante durant ses années de jeunesse, en particulier lors de ses années de retraite et d’étude dans le domaine familial de Camp-de-Prats près de Bayonne, entre 1611 et 1616, avec son ami Cornelis Janssen, dit Jansénius, Duvergier poursuit sa formation spirituelle auprès de Pierre de Bérulle, dont il embrasse avec ferveur les thèses théologiques sur l’excellence de l’état de prêtrise, elles-mêmes mûries à la faveur de la dispute interconfessionnelle comme le montre par exemple, en dépit de ses imperfections, le Discours de la mission des pasteurs en l’Église de 160913. Luimême entré dans les ordres par ambition intellectuelle et mondaine plus que par désir de servir les âmes, Duvergier connaît une conversion progressive qui n’est certainement pas étrangère à son intérêt ultérieur pour la théologie de la vocation sacerdotale. Il exprime ses conceptions à ce sujet principalement dans deux très longues lettres adressées à deux ecclésiastiques, M. Guillebert et M. Duhamel14. Sans doute la réflexion de Saint-Cyran est-elle inaboutie et problématique sur certains points, mais elle a le mérite d’envisager, pour la première fois de manière aussi explicite dans l’histoire de la théologie catholique, la résonance subjective de l’appel divin chez le futur prêtre. Il est clair que cette résonance n’équivaut pas à l’appel et qu’un certain nombre de critères objectifs doivent compléter le discernement de cette vocation intime, dans le secret de la conscience. Notre thèse est que c’est précisément Louis Tronson qui propose le premier un ensemble de critères de discernement, parmi lesquels l’inclination – appelée plus volontiers attrait dans la tradition sulpicienne ultérieure – occupe une place nouvelle. Certes, il ne faut pas céder à l’illusion d’optique : si l’inclination retient tant l’attention de Tronson – comme l’attrait, deux siècles plus tard, celle du sulpicien BÉRULLE, Pierre de, Œuvres complètes, t. 6, « Courts traités », Paris, Oratoire de Jésus / éditions du Cerf, 1997, pp. 177-236. 14 Réponse de Jean Duvergier de Hauranne, abbé de Saint-Cyran, à M. l’abbé Guillebert, docteur en Sorbonne, et curé de Rouville ; Lettre de messire Jean Du Verger [sic] de Hauranne, abbé de St-Cyran, à un ecclésiastique de ses amis [Henri du Hamel ou Duhamel, diacre] touchant les dispositions à la prêtrise. Voir Jean-Ambroise Duvergier de Hauranne, abbé de Saint-Cyran (1581-1643). Lettres. Édition critique, par Denis DONETZKOFF, dossier scientifique en vue de l’obtention de l’habilitation à diriger des recherches, université de Paris IV Sorbonne, 2002, cinq volumes, t. IV, pp. 1265-1331 (lettre à Guillebert) et pp. 1332-1371 (lettre à Duhamel). 13 4 Louis Branchereau15 –, c’est parce qu’elle est particulièrement délicate à discerner, et non parce qu’elle serait le critère déterminant parmi tous les autres. Néanmoins, il importe de mesurer ce que signifie l’entrée de l’inclination dans la théologie de la vocation sacerdotale : elle suppose une certaine idée de la volonté de Dieu, de la liberté de l’homme, de la manière dont Dieu appelle et laisse discerner son appel par une intelligence humaine éclairée par la foi et l’amour. Ainsi apparaît, si l’on peut dire, une subjectivité sacerdotale, face à Dieu et dans l’Église ; une subjectivité qui prend conscience d’elle-même par sa communion intime aux sentiments et dispositions du Christ. La dévotion olérienne puis sulpicienne à l’ « intérieur » de Jésus-Christ trouve un prolongement tout à fait naturel dans la manière dont Tronson valorise, au demeurant sans exclusive, l’intériorité du futur prêtre qui doit à la fois découvrir et construire sa propre participation à la vie intérieure du Christ, adorateur parfait du Père et sauveur de tous les hommes. Dès lors, la subjectivité sacerdotale n’est pas subjectivisme : elle dépend toute entière du Christ. Aussi nous a-t-il semblé pertinent de mettre en lumière, dans une double perspective historique et théologique, cet apport de Tronson à la conception catholique de la vocation sacerdotale, au-delà de sa réputation peu flatteuse d’auteur de manuels désuets de spiritualité cléricale16. UNE FAMILLE ET UN HOMME Quant à la propre vocation de Louis Tronson, elle s’enracine dans une histoire familiale complexe. Du côté paternel, l’homme appartient à une vieille lignée de marchands bourgeois de Paris, attestée au début du XVe siècle. En 1504, le trisaïeul de Louis, marchand drapier de son état, bienfaiteur de la paroisse Saint-Germain l’Auxerrois, porte le titre de seigneur du Coudray, dans le Hurepoix, au sud de Paris. Ce fait n’implique pas nécessairement que les Tronson soient devenus nobles, mais il suggère incontestablement une élévation sociale – d’autant qu’en réalité, au XVIe siècle, la frontière entre roture et noblesse n’est ni toujours très nette, ni hermétique17. En 1534, Jean II Tronson, bisaïeul de Louis, accède à la dignité de prévôt des marchands de Paris, c’est-à-dire de chef de la municipalité. Disposant d’importantes 15 BRANCHEREAU, Louis, De la vocation sacerdotale, Paris / Lyon, Vic et Amat / Emmanuel Vitte, 1896. Cette réputation est accréditée par l’un des très rares ouvrages consacrés à Tronson et à son enseignement : GOICHOT, Émile, Les Examens particuliers de M. Tronson. Essai sur la formation du prêtre « classique », Strasbourg, Presses universitaires de Strasbourg, 2005. Bien que l’on puisse certainement contester la méthode et la perspective de l’auteur, cette étude a tout de même le mérite de proposer de stimulantes pistes de réflexion sur l’œuvre de ce prêtre autrefois vénéré, puis raillé et désormais oublié. 17 MOUSNIER, Roland, Les institutions de la France sous la monarchie absolue, Paris, Presses universitaires de France, collection « Quadrige », 2005 [1974], en particulier pp. 105 sqq. Id., La vénalité des offices sous Henri IV et Louis XIII, Paris, Presses universitaires de France, 19712, en particulier pp. 77-82 et 529-578. HUPPERT, George, Bourgeois et gentilshommes. La réussite sociale en France au XVI e siècle, Paris, Flammarion, collection « Nouvelle Bibliothèque scientifique », 1983 (édition originale américaine : Les Bourgeois Gentilshommes. An Essay on Definition of Elites in Renaissance France, Chicago/Londres, University of Chicago Press, 1977. DESCIMON, Robert, HADDAD, Élie (éd.), Épreuves de noblesse. Les expériences nobiliaires de la haute robe parisienne (XVIe – XVIIIe siècles), Paris, Les Belles Lettres, collection Histoire, 2010. 16 5 compétences, le prévôt est habituellement élu parmi les membres des familles marchandes les plus anciennes et les plus réputées de Paris. L’ancrage des Tronson dans ce milieu est ainsi confirmé, mais Jean, en acquérant la charge de conseiller au Parlement de Paris, met aussi un pied dans la magistrature. Il est représentatif de ce « quatrième état » décrié par Montaigne18, intermédiaire entre le tiers état et la noblesse traditionnelle. Nous avons également des traces de l’engagement de Jean Tronson au service de la cause catholique, lors de procès en hérésie intentés contre les premiers adeptes de la Réforme protestante à Paris. Plus tard, deux de ses cousins participent activement à la vie de la Ligue, qui rassemble les ultra-catholiques résolument opposés à l’accession d’Henri de Navarre au trône de France. Le fils de Jean II, Jean III, semble plus conciliant, mais veut maintenir de bonnes relations avec la Ligue qui domine Paris de 1588 à 1594. En somme, la famille Tronson, comme d’autres familles ayant donné à l’Église gallicane, au XVIIe siècle, des réformateurs d’envergure, est historiquement liée à la Ligue19. Le père de Louis Tronson, lui aussi prénommé Louis, semble destiné à porter au sommet les ambitions séculaires de la famille. En 1618, il devient secrétaire de cabinet du roi, charge qui peut servir de tremplin pour de plus hautes fonctions au plus près du souverain. Mais en 1626, Louis Tronson père subit une disgrâce dont les motifs demeurent mal connus. Il se retire alors sur ses terres du Péray, près de Corbeil. Du côté de sa mère Claude de Sève, l’origine de Louis Tronson fils est également prestigieuse. Son oncle maternel, Alexandre de Sève, exerce d’importantes fonctions politiques et administratives sous les règnes de Louis XIII et Louis XIV : il est intendant à quatre reprises dans des provinces difficiles, colonel des milices bourgeoises à Paris durant la Fronde, prévôt des marchands, membre du Conseil des finances créé par Louis XIV après l’arrestation de Nicolas Fouquet en 1661. Claude de Sève est une femme proche de Saint-Sulpice : d’abord dirigée du père Charles de Condren, premier successeur de Pierre de Bérulle à la tête de l’Oratoire de France, elle se tourne à la mort de celui-ci en 1641 vers le curé de sa paroisse, JeanJacques Olier. Le jeune Louis s’adresse lui aussi à ce pasteur plein de zèle. Olier devient vite un ami des familles Tronson et de Sève : il aime se reposer dans la propriété de l’abbé Antoine de Sève, oncle maternel de Louis Tronson, à Issy20. MONTAIGNE, Michel de, Essais, I, XXIII : « Qu’est-il plus farouche que de voir une nation, où par légitime coutume la charge de juger se vende, et les jugements soient payés à purs deniers comptants, et où légitimement la justice soit refusée à qui n’a pas de quoi la payer, et ait cette marchandise si grand crédit qu’il se fasse en une police un quatrième état de gens maniant les procès, pour le joindre aux trois anciens, de l’Église, de la Noblesse et du Peuple ? Lequel état, ayant la charge des lois et souveraine autorité des biens et des vies, fasse un corps à part de celui de la noblesse […] » 19 Sur ce point classiquement souligné par les historiens, voir DAGENS, Jean, Bérulle et les origines de la restauration catholique (1575-1611), Bruges, Desclée de Brouwer, 1952, livre II, chapitre II, « Le Paris dévot au lendemain de la Ligue », pp. 110-132. 20 Ce domaine, acquis ensuite par Alexandre Le Ragois de Bretonvilliers, successeur de Jean-Jacques Olier et prédécesseur de Louis Tronson, est devenu, pour ainsi dire, la maison de campagne de Saint-Sulpice. C’est aujourd’hui le séminaire d’Issy-les-Moulineaux. 18 6 La correspondance d’Olier avec Claude et Louis Tronson est une source précieuse21 grâce à laquelle nous savons qu’en 1650, le jeune prêtre, alors âgé de vingt-huit ans et ordonné seulement trois ans plus tôt, manque d’être nommé évêque de Fréjus. L’année suivante, nous le retrouvons missionnaire sur les terres familiales, en proie à une épreuve intérieure – probable conséquence de l’épiscopat manqué – qu’Olier l’invite à traverser avec confiance. Très proche alors de sa mère veuve, Tronson, devenu plus tard directeur du séminaire de Saint-Sulpice puis supérieur de la Compagnie, pense sans doute à ses propres combats lorsqu’il exhorte les séminaristes à rompre les liens trop étroits avec leur famille. Cette spiritualité de la séparation sacerdotale, qui traverse tout l’enseignement de Tronson22, mérite d’être remise en perspective à partir de la propre histoire familiale de Tronson, ainsi que de la correspondance qu’il entretient, une fois devenu formateur, avec plusieurs familles de séminaristes, dont certaines, tels les Colbert et les Le Peletier, se meuvent dans les plus hautes sphères du pouvoir. Dès ses premières années de sacerdoce, Tronson montre un goût prononcé pour l’étude. Il consacre de longues heures à la lecture des Pères de l’Église, des docteurs médiévaux, des conciles et des synodes, mais aussi d’auteurs plus modernes, comme Saint-Cyran. Le très épais répertoire personnel de Tronson, conservé aux archives de Saint-Sulpice, témoigne du sérieux de son travail23 : de nombreuses citations sont groupées par thème, selon l’ordre alphabétique. Cet austère document rend compte de la variété des lectures de Tronson, de ses centres d’intérêt théologiques et spirituels, et aussi de sa très vaste culture ecclésiastique, enracinée dans les traditions grecque et latine. C’est dans ce répertoire que Tronson, devenu membre de la Compagnie de Saint-Sulpice en 1656, puis directeur du séminaire en 1657 jusqu’à son élection à la charge de supérieur général en 1676, consigne les références patristiques et médiévales dont il émaille ses enseignements et ses ouvrages pour faire entrer auditeurs et lecteurs dans la Tradition de l’Église. Se vouant tout entier à la formation des prêtres, Tronson développe une vision du sacerdoce qui, tout en étant assez novatrice dans la conception de la vocation sacerdotale et de ses critères de discernement, se veut profondément traditionnelle, fondée sur les autorités les plus vénérables et les plus solides de l’Antiquité chrétienne. 21 OLIER, Jean-Jacques, Correspondance. Nouvelle édition des lettres suivies de textes spirituels donnés comme lettres dans les éditions antérieures, édition de Gilles CHAILLOT, Irénée NOYE et Bernard PITAUD, Paris, Honoré Champion, collection « Mystica », n° 3, 2014. 22 Ce thème est évidemment plus large dans l’histoire de la spiritualité catholique. Voir GILBERT, David, « Le prêtre, un homme séparé ? Genèse d’une spiritualité controversée », Charitas, cahier de l’école théologique de la communauté Saint-Martin, n° 3, 2013, pp. 39-50. 23 Archives de la Compagnie des prêtres de Saint-Sulpice (6, rue du Regard 75006 PARIS), manuscrit 97. 7 D’UNE ROBE À L’AUTRE : ÉTHIQUE DE LA PRÊTRISE ET ÉTHIQUE DE LA MAGISTRATURE Par ses fonctions dans la Compagnie de Saint-Sulpice, Tronson est un acteur important du renouveau de la formation sacerdotale en France au XVIIe siècle. Comme souvent dans l’histoire de l’Église, le renouveau se fonde sur un retour aux sources, en l’occurrence sur une relecture et une remise en perspective des auteurs ecclésiastiques. Toutefois, outre cette dynamique théologique et pastorale, bien visible chez un grand liseur comme Tronson, l’idéal éthique de la noblesse de robe24, cette catégorie sociale vers laquelle s’élève progressivement la vieille famille marchande dont il fait partie, offre de nombreux points de contact avec l’idéal sacerdotal qu’il développe. C’est un fait admis que les milieux robins jouent un rôle particulièrement important, quoique non exclusif, dans les mouvements de réforme propres à l’Église gallicane au XVIIe siècle25. Pour mieux comprendre ce phénomène, il convient de mettre en lumière l’affinité qui existe entre l’idéal du parfait magistrat et celui du saint prêtre, tous deux exprimés à cette époque. Il ne s’agit pas de dire, par une sorte de réductionnisme sociologique trop facile, que Tronson aurait projeté l’idéal de son milieu familial sur son idéal sacerdotal. En réalité, il est plus juste de dire que l’éthique judiciaire, dès l’Antiquité, est crypto-sacerdotale : les Institutes du jurisconsulte Ulpien (vers 170 – 223 ou 224 ap. J.-C.), reprises par les premières lignes du Digeste de l’empereur Justinien, affirment sans détour que les spécialistes du droit peuvent avec raison être appelés prêtres (sacerdotes) en ce domaine, dans la mesure où ils ont le culte de la justice (justitiam colimus) et visent à rendre les hommes bons26. Ce thème sacerdotal est repris avec force par deux auteurs issus de la magistrature qui, chacun dans son style, nous ont laissé d’abondants renseignements sur la perception que les magistrats français de l’époque moderne ont de leur rôle social : Bernard de La Roche Flavin (1552 – 1627), auteur des Treze livres des parlemens de France27, et Henri-François d’Aguesseau (1668 – 1751), dont les mercuriales28 sont tout à fait intéressantes pour notre propos29. On distingue classiquement la noblesse de robe, c’est-à-dire celle des magistrats, de la noblesse d’épée, c’est-à-dire celle des hommes de guerre. 25 Voir par exemple TALLON, Alain, La Compagnie du Saint-Sacrement (1629-1667). Spiritualité et société, Paris, éditions du Cerf, collection « Histoire », 1990. 26 Sur le développement médiéval et moderne de ce thème sacerdotal dans la magistrature en France : KRYNEN, Jacques, L’État de justice. France, XIIIe – XXe siècle, t. I, L’idéologie de la magistrature ancienne, Gallimard, bibliothèque des histoires, 2009, ch. 4, « Les parlementaires ‘prêtres de la justice’ », pp. 79-103. 27 LA ROCHE FLAVIN, Bernard de, Treze livres des parlemens de France, Bordeaux, Simon Millanges, 1617. 28 La mercuriale, héritée d’une pratique en vigueur au sénat romain, est un discours prononcé deux fois par an, à la Saint-Martin et à Pâques, devant l’ensemble des magistrats d’une cour de justice donnée, soit par le premier avocat général, soit par le procureur général. En France, dans la seconde moitié du XVIe siècle, marquée par les guerres de Religion, ce genre de discours devient de plus en plus moral et même déontologique : l’orateur entend rappeler aux magistrats la grandeur de leur charge et de leurs devoirs. D’Aguesseau s’inscrit résolument dans ce style. 29 Œuvres complètes du chancelier d’Aguesseau, édition de Jean-Marie Pardessus, Paris, 1819, 16 volumes. Les mercuriales se trouvent dans le volume 1. 24 8 La Roche Flavin n’hésite pas à reprendre des passages des Pères de l’Église, des anciens synodes et même du concile de Trente, où il est à l’origine question des pasteurs du peuple chrétien, évêques et prêtres, pour les appliquer aux magistrats. Juger est un acte proprement divin, et l’auteur aime rappeler que chez les Gaulois, les juges n’étaient autres que les prêtres, ou druides30. D’Aguesseau, quant à lui, ne craint pas d’affirmer que le magistrat est une « image de la Divinité »31. Les deux auteurs désignent volontiers le palais de justice comme le « temple de la justice » : c’est un lieu éminemment sacré, où se trouve d’ailleurs une chapelle que les magistrats sont invités à fréquenter assidument. Là, à la Saint-Martin, l’année judiciaire s’ouvre par une messe solennelle du Saint Esprit32. Naturellement, au prétoire, le crucifix est bien visible. Les séances de ces hautes cours de justice que sont les parlements dans la France moderne sont réglées par un cérémonial dont le caractère quasi liturgique est renforcé par le port de la robe. Hors du cadre très ritualisé du palais, le magistrat ne cesse pas d’être magistrat : d’Aguesseau développe amplement, dans ses mercuriales, les vertus personnelles que doit cultiver le parfait magistrat, conformément à son état. L’auteur suggère même l’existence d’un « caractère » du magistrat qui semble demeurer même lorsque l’homme se comporte de manière indigne33 : comment ne pas penser à l’enseignement du concile de Trente sur le caractère indélébile reçu avec le sacrement de l’ordre34 ? L’exigence éthique propre à l’état de magistrat s’appuie sur la notion polysémique de représentation : comme l’écrit La Roche Flavin, « toute république ne représente qu’un certain corps composé de divers membres, desquels le magistrat est le chef et le plus excellent de tous »35. La tête est ici symboliquement principe de vie et de direction, qui infuse la vertu ou éventuellement le vice dans les autres membres. Représentant la tête de ce corps qu’est la république36, le magistrat représente aussi au corps les vertus que les autres membres doivent cultiver : il rend ces vertus présentes par son propre exemple qui semble doué d’une puissance communicative. La représentation qui caractérise la dignité de magistrat est, si l’on peut dire, active, productrice de vertu dans le corps social. Cette même conception active et productrice de la représentation se retrouve dans l’idéal sacerdotal que Tronson veut transmettre aux séminaristes : « [La fin que Jésus-Christ se propose en fondant l’état ecclésiastique] est d’avoir des personnes affidées sous lesquelles il se cache, afin de se laisser porter 30 LA ROCHE FLAVIN, op. cit., I, V, p. 5. D’AGUESSEAU, Sixième mercuriale, « Les mœurs du magistrat », op. cit., t. I, p. 107. 32 Il va de soi que la messe est célébrée quotidiennement dans la chapelle du palais. 33 D’AGUESSEAU, Première mercuriale, « L’amour de son état », op. cit., t. I, p. 49. 34 Denzinger § 1767. 35 LA ROCHE FLAVIN, op. cit., VIII, XVI, XVI, p. 466. 36 Naturellement, ce mot est à comprendre ici au sens antique de res publica, autrement dit l’État, et non pas au sens d’une forme particulière de régime politique. 31 9 partout pour gagner ainsi tout le monde à Dieu son Père ; en sorte qu’on peut dire de chaque personne engagée dans cet état ce que saint Chrysostome a dit à la louange de l’un des premiers et des plus fervents ecclésiastiques qui aient été dans l’Église : tabernaculum sub quo Christus mundum occupaturus latens ibat37 ; ce sont des tabernacles, disons mieux, ce sont des sacrements qui renferment Jésus-Christ et qui doivent le porter dans les esprits et dans les cœurs de tous les hommes ; dans les esprits, en l’exprimant en eux-mêmes, en le représentant parfaitement comme des images achevées de ce divin original ; dans les cœurs, en le produisant par la vertu toute-puissante des paroles que Dieu leur met en bouche pour cet effet. Et voilà le dessein de Jésus-Christ dans cette institution : premièrement, que les ecclésiastiques le représentent, qu’ils soient ses images, en un mot, qu’ils portent tellement tous ses traits, et qu’ils lui soient si semblables, qu’en les voyant on se représente Jésus-Christ, comme en voyant une copie bien faite on se représente l’original […]. Il veut, en second lieu, que les prêtres, en le représentant, le produisent en même temps dans leur cœur par la puissance et l’autorité qu’il leur donne. » 38 Alors que le magistrat représente la tête du corps social et qu’il représente les vertus aux autres membres de ce corps, le prêtre, quant à lui, représente Quelqu’un : Jésus-Christ. Il le produit dans les âmes, non pas seulement par son exemplarité ou par sa position particulière dans le corps social, comme c’est le cas pour le magistrat, mais par la « puissance » et l’ « autorité » que Jésus-Christ lui donne, par la « vertu toute-puissante que Dieu [lui] met en bouche ». La référence personnelle et transcendante au Christ fonde donc une productivité toute particulière, de type sacramentel, de la représentation sacerdotale. Notion commune à l’éthique du magistrat et à l’éthique du prêtre, y compris dans sa dimension active et productive, la représentation comporte aussi d’intéressantes variations entre l’un et l’autre ministère. Pour être mieux comprise, la spiritualité sacerdotale du XVIIe siècle français gagne à être ainsi mise en rapport avec d’autres discours déontologiques contemporains : les points communs peuvent se révéler nombreux et inattendus, mais ils n’effacent pas l’originalité proprement sacerdotale de cette spiritualité que Tronson, deuxième successeur d’Olier, développe et synthétise à la 37 Cette citation fait plutôt penser à un passage des Moralia in Iob de saint Grégoire le Grand, à propos de saint Paul (Corpus Chistianorum Scriptorum Latinorum, CXLIII B, XXVII, XI, 19, p. 1345) : « Nubes quippe erat hominibus, tentorium Deo, quia quem praedicando, infundebat audientibus, hunc invisibiliter in mente retinebat. Idem rursus dum catenis vinctus Romam peteret Paulus occupaturus mundum, latens in eius pectore quasi sub tentorio ibat Deus, quia et occultus videri non poterat, et per verba praedicationis proditus iter inchoatae gratiae sine cessatione peragebat » (« Car [Paul] était une nuée pour les hommes, mais une tente pour Dieu : celui qu’il communiquait à ses auditeurs par sa prédication, il l’abritait invisiblement en son âme. Et alors que ce même Paul, de nouveau lié de chaînes, arrivait à Rome, lui qui voulait conquérir le monde, Dieu, dissimulé dans son cœur, allait comme sous une tente : caché, il ne pouvait être vu ; progressant par les mots de la prédication, il avançait sans cesse sur le chemin de la grâce à ses débuts »). 38 TRONSON, Louis, IIe entretien ecclésiastique, « De l’excellence de l’état ecclésiastique », in Œuvres complètes, édition Migne, t. I, col. 575-576. La leçon « dans leur cœur » pourrait être avantageusement remplacée par « dans les cœurs », car ce qui est en jeu ici est bien la « production » de Jésus-Christ dans les cœurs des fidèles par le ministère des prêtres, plus que sa « production » dans le cœur du prêtre lui-même . 10 fois pour établir solidement l’idéal du prêtre que la Compagnie de Saint-Sulpice a pour mission de transmettre au clergé des diocèses de France. 11