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Que cachent les calendriers

La date d'acceptation par une communauté de croyants d'un mythe fondateur peut être connue grâce à des artefacts porteurs de leur date et lieu de mise en circulation. Le "certificat de naissance" du mythe de Mahomet-Messager d'Allah, est une monnaie frappée en Perse, en l'an calendaire 67 AH (Anno Hegirae). Cette ère commémore la mémoire de la migration d'une tribu musulmane de La Mecque à Médine. La greffe tardive du mythe du Prophète Mahomet fermant la marche de l'Hégire permit l'étonnante pérennité de cette ère. Quant au mythe de l'Incarnation du Seigneur, son "certificat de naissance" est un diplôme, émis à Ismere en Angleterre, en l'an calendaire 736 AD (Anno Domini), alors que cette ère commémore l'Incarnation de la Divinité Chrétienne. Une mise en relation de l'invention du Calendrier AD avec la diffusion fulgurante du Calendrier AH est proposée.

Que cachent les calendriers ? Léo Dubal dubal@archaeometry.org Résumé La date d’acceptation par une communauté de croyants d’un mythe fondateur peut être connue par un artefact porteur d’une sorte de colophon donnant sa date et lieu de mise en circulation. Le "certificat de naissance” du mythe de Mahomet - Messager d'Allah, est une monnaie frappée en Perse, en l’an calendaire 67 AH (Anno Hegiræ). Cette ère commémore la migration de La Mecque à Médine d’une tribu musulmane. La greffe tardive du mythe du Prophète Mahomet fermant la marche de l'Hégire permit l’étonnante pérennité de cette ère. Quant au mythe de l'Incarnation du Seigneur, son "certificat de naissance” est un diplôme, émis à Ismere en Angleterre, en l’an calendaire 736 AD (Anno Domini), ère qui commémore l’Incarnation de la Divinité Chrétienne. Une mise en relation de l’invention du Calendrier AD avec la diffusion fulgurante du Calendrier AH est proposée. Si un mythe fondateur raconte l’évènement originel d’une ère calendaire, en contraste, l’artefact porteur de sa date et lieu de mise en circulation demeure. Ce “certificat de naissance” atteste de la reconnaissance, par la communauté des croyants, de la vertu identitaire du mythe et historicise l’évènement. Entre lui et la date inscrite sur le “certificat de naissance” s’installe de facto un “vide historique” que les annalistes combleront en rétro-datant l'imaginaire collectif. Exprimée en termes d’une ère calendaire, la date d’une éclipse de soleil figurant dans un éventuel compte-rendu (voir http://www.archaeometry.org/chronist.html) permet, elle seule, l’ancrage chronologique de cette ère, qui hélas manque à l'ère maya ! En préambule, nous proposons l’hypothèse suivante: Marcus Terentius Varro, imaginant que la fondation de Rome ait eu lieu exactement 7 siècles auparavant, aurait décidé que l’année calendaire en cours était 700 AUC (Ab Urbe Condita). Précisons qu’aucun artefact n’a été trouvé à ce jour confirmant la date de cette invention! Ce qui est certain est l’organisation par l’empereur romain Claudius de la célébration fastueuse de l’an 800 AUC. Cet évènement historique est rapporté par Dio Cassius dans son Histoire de Rome (Livre 60, Chapitre 29 Source: http://remacle.org/bloodwolf/historiens/Dion/livre60.htm ): Ἐν δὲ τῷ ἑξῆς ἔτει ὅ τε Κλαύδιος ὀκτακοσιοστοῦ τῇ Ῥώμῃ ἔτους ὄντος (…dans la 800ème année de la fondation de Rome) Il existe une histoire très similaire à celle aboutissant à la célébration du 800 anniversaire de la fondation de Rome par Claudius. Cette histoire s’est, elle aussi, déroulée à Rome. Il s’agit de la Re-naissance de l’Empire Romain. ème 1 La date choisie pour le couronnement de l'empereur du Saint Empire Romaingermanique a été le 800ème anniversaire de l’Incarnation du Seigneur (date en retard d’une semaine sur le solstice d’hiver). Par précaution eschatologique, l’an calendaire 800 AD (Anno Domini) n’est pas mentionné. La date de la célébration est enregistrée comme nouvel an 801 AD par l'Annaliste de Laurensheim, Dccci en latin, voir Fig.1. Fig. 1 Extrait des Annales de Laurensheim pour l’année 801 AD Source: https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b9078401h/f89.image.r=laurensheim De fait, afin d’accéder au plus haut rang, l'ambitieux Charlemagne et son complice Alcuin, ont patiemment peaufiné leur complot: ils ont tout d'abord introduit l'École, puis, en 789 AD, à Aix-la-Chapelle, laissé le Concile confirmer le commandement royal à ladite École d’enseigner le comput. La minutieuse mise en scène de la Renaissance de l'Empire Romain se devait d'inclure l’éducation des futurs sujets: ils vont devoir connaître les dates exprimées en termes du calendrier AD élaboré par Bède le Vénérable ! La dyade Varro-Claudius a donc sa contrepartie avec la dyade BèdeCharlemagne. Le brouillard entourant la date de l’invention du calendrier AUC par Varro, se retrouve dans celle de l’invention du calendrier AD par Bède : le manuscrit original du De Temporum Ratione a disparu! Une certitude: 4 ans après le coup d’arrêt porté à l’invasion islamique à Poitiers, l’année 736 de l’Incarnation du Seigneur sur le colophon du Diplôme d’Ismere est la toute première date exprimée en termes du calendrier Chrétien, voir Fig. 2. Fig. 2 Colophon du Diplome d’Ismere daté 736 AD Source: https://en.wikipedia.org/wiki/Anglo-Saxon_charters#/media/File:Aethelbald_charter_Cyneberht_736.jpg Dans le Codice Electronici Sangallenses, la rétro-datation des évènements historiques, en termes du calendrier AD, ne comble qu’une décennie du « vide historique » généré par l’invention par Bède de ce calendrier, voir Fig. 3. 2 Fig. 3 Annales de Saint-Gall: premières dates AD (numérotation milésienne: ψ=700) Source: http://www.e-codices.unifr.ch/de/csg/0915/196/0/Sequence-714 Pour compléter cette discussion sur la genèse des ères calendaires AUC et AD, tournons nous maintenant vers l’ère calendaire AH (Anno Hegiræ ou Hijri). Des dates AH apparaissent sur les monnaies peu d’années après la migration de La Mecque à Médine de la tribu musulmane. Pérennisant sa mémoire, s’y est greffé le mythe selon lequel cette Longue Marche aurait été fermée par “le Prophète Mahomet, le Messager d’Allah", le +622.07.16 EC (Ère Commune, le vocable laïc de Kepler, pour remplacer AD). Or, la première référence à ce Messager d’Allah, son “certificat de naissance” est daté de l’an 67 AH sur l’avers d’une monnaie frappée par le Gouverneur de Bishapur. Le nom de celui-ci, Abd al-Malik b. Abdallah, fait face à l’effigie du Shah Khosrô II. Le texte est bilingue, en Pahlavi & Arabe, et se lit de droite à gauche, voir Fig.4. hlla * lwsr Allah * Messager dmḥm * hlla msb * Mahomet * au nom d’Allah * / // / n “lwdp’ / y kylmldp’ // twz p’ / HDG Ibn Abdullah / Abdalmalik y // augmentée / gloire t s š tph soixante + sept š yb• Bishapur Fig. 4 Dirham arabo-sassanide daté 67 AH Source: https://www.3quarksdaily.com/3quarksdaily/2016/06/viewing-the-early-islamic-state-through-its-coinage.html Clavier virtuel: https://www.lexilogos.com/keyboard/arabic.htm Au revers, se trouve l’autel du feu Zoroastrien flanqué de ses deux gardiens. En Pahlavi, sont indiquées la date de la frappe 67 AH (écrite de droite à gauche: sept soixante) et la marque de l’atelier •BYŠ pour Bishapur. 3 Notons que cette pièce de monnaie bilingue présente un degré extrêmement élevé de tolérance religieuse. En contraste, dès l’année calendaire 93 AH, les textes sur les dirhams apparaissent sans effigie, hautement prosélytes et seulement en Arabe. En 98 AH, des textes bilingues en Arabe et Latin apparaissent sur les monnaies frappées en Andalousie. À cette époque, les dates étaient exprimées en termes de l'ère calendaire EG (Era Gótica o Era de César, puis même Tarij asSafar voir http://www.archaeometry.org/era.pdf). L’ancrage chrono-écliptique d’EG est mcxvii kls julii, soit l'éclipse du +1079.07.01 EC. Bien que ce soit le -44.1.1 EC que César & Sosigène aient imposé le calendrier julien, l’éclipse fixe l’an 1 EG au -37.01.01 EC. L’usage d’EG fut confirmé par le Concile provincial de Tarragone le +516.11.06 EC, puis aboli en +1351 EC. 98 AH correspond à DCCLV EG, soit +717 EC, cependant, sur un dinar frappé cette année là, le millésime n'est pas spécifié dans le texte latin, reflétant la confusion ainsi créée pour les sujets wisigoths, voir Fig. 5. Fig. 5 x Dinar bilingue arabo-adalou à l’étoile, daté 98 AH Source: https://www.islamic-awareness.org/history/islam/coins/latin7.html La translittération suit la DIN 31635. La date islamique est inscrite au revers de ce dinar : ny’st w nmt øns sldnālāb rānydlā āḏh b r ḍ A été frappé ce dinar à Al-Andalus an 8 et 90 (=98 AH, soit +717 EC) Et cette fois c’est bien au centre, et non plus en marge, que trône Mahomet, Messager d’Allah. La calligraphie voile la face de l’effigie sassanide. Joue-t-on à pile ou face? Le Mythe se substitue-t-il à l’Histoire? Conclusion L’introduction fulgurante du calendrier islamique AH dans le Sud-ouest de l’Europe a probablement été l’étincelle déclenchant l’invention par Bède le Vénérable du calendrier chrétien AD. révision : +2019.09.10 4