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NOUVELLES APPROCHES À L'ÉTUDE DE LA CONSOLIDATION DÉMOCRATIQUE Graciela Ducatenzeiler De Boeck Supérieur | Revue internationale de politique comparée 2001/2 - Vol. 8 pages 191 à 198 ISSN 1370-0731 Article disponible en ligne à l'adresse: -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------http://www.cairn.info/revue-internationale-de-politique-comparee-2001-2-page-191.htm Pour citer cet article : -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------Ducatenzeiler Graciela, « Nouvelles approches à l'étude de la consolidation démocratique », Revue internationale de politique comparée, 2001/2 Vol. 8, p. 191-198. DOI : 10.3917/ripc.082.0191 -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- Distribution électronique Cairn.info pour De Boeck Supérieur. © De Boeck Supérieur. Tous droits réservés pour tous pays. La reproduction ou représentation de cet article, notamment par photocopie, n'est autorisée que dans les limites des conditions générales d'utilisation du site ou, le cas échéant, des conditions générales de la licence souscrite par votre établissement. Toute autre reproduction ou représentation, en tout ou partie, sous quelque forme et de quelque manière que ce soit, est interdite sauf accord préalable et écrit de l'éditeur, en dehors des cas prévus par la législation en vigueur en France. Il est précisé que son stockage dans une base de données est également interdit. Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 41.141.129.216 - 20/01/2013 21h31. © De Boeck Supérieur Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 41.141.129.216 - 20/01/2013 21h31. © De Boeck Supérieur -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- Revue Internationale de Politique Comparée, Vol. 8, n° 2, 2001 191 NOUVELLES APPROCHES À L’ÉTUDE DE LA CONSOLIDATION DÉMOCRATIQUE Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 41.141.129.216 - 20/01/2013 21h31. © De Boeck Supérieur Pendant les années 70 et 80, la déroute des régimes autoritaires en Amérique latine, en Europe du Sud et en Europe de l’Est a été à la source des innombrables travaux qui ont repensé la démocratie et qui se sont intéressés aux processus des transitions. Ces processus, tous issus de la troisième vague de démocratisation, commencée au Portugal en 1974, permettaient de dégager certaines lois pouvant s’appliquer à l’ensemble des pays les ayant traversé. Les transitions démocratiques plus ou moins réussies d’un grand nombre de pays pendant les années 90, ont ouvert la voie à d’autres interrogations désormais centrées sur le processus politique qui commence à partir des premières élections post-autoritaires, celles que O’Donnell et Schmitter1 ont appelé “fondationnelles”. Comme dans les études portant sur la démocratie, celles axées sur la consolidation doivent composer avec de nombreuses difficultés analytiques et méthodologiques, qui ne sont pas étrangères aux différentes conceptions de la démocratie ellemême. En effet, la définition du concept de consolidation démocratique dépendra étroitement de la définition de démocratie qui lui sert de référence. À une définition étroite de la démocratie, en tant que type spécifique de régime politique, correspondra une définition étroite de la consolidation, tandis qu’à une définition large de la démocratie, conçue non seulement comme un régime politique, mais comme un système économique et social spécifique, correspondra une définition large de la consolidation. Mais, même parmi les chercheurs partisans de limiter la démocratie au niveau strictement politique, les conceptions de la démocratie ainsi que celle de la consolidation varient énormément. Dans ce dernier groupe il y a aussi bien des conceptions étroites que larges de la 1. O’DONNELL G. et SCHMITTER P., Transitions from Authoritarian Rule. Tentative Conclusions about Uncertain Democracies, Baltimore, The Johns Hopkins University Press, 1986. Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 41.141.129.216 - 20/01/2013 21h31. © De Boeck Supérieur Graciela DUCATENZEILER 192 Graciela Ducatenzeiler consolidation qui s’étendent du minimalisme méthodologique de Schumpeter, selon lequel la démocratie est le gouvernement des politiciens, à des questions relatives à l’étendue de la citoyenneté de Marshall qui conçoit la démocratie comme une forme d’auto gouvernement collectif. Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 41.141.129.216 - 20/01/2013 21h31. © De Boeck Supérieur Cette approche qui consiste à examiner presque exclusivement les institutions électorales a l’avantage d’être facile à opérationnaliser et permet d’identifier clairement les démocraties consolidées. La consolidation regardée sous cet angle, les anciens régimes bureaucratico-autoritaires de l’Europe du Sud, de l’Amérique latine, de l’Europe de l’Est et de l’Asie de l’Est seraient devenus des démocraties au même titre que les anciennes démocraties libérales. Si l’absence de crise et d’éléments déstabilisants ainsi que la durabilité sont insuffisants pour déterminer le degré de consolidation d’une démocratie, quels autres facteurs doit-on retenir ? Les efforts pour élaborer des conceptualisations alternatives moins étroites, ont privilégié à nouveau les institutions (le système électoral, les partis politiques, le pouvoir judiciaire et les droits de la personne) ; l’émergence d’un “cycle d’institutionnalisation vertueux”4 serait une garantie de la consolidation de la démocratie. En effet, on suppose que l’organisation efficace de la capacité politique des acteurs à faire progresser leurs objectifs, à défendre leurs intérêts et à sécuriser leurs valeurs dans un environnement institutionnel démocratique, renfoncerait l’attachement à cet environnement. Toutefois, cette approche pose problème à deux niveaux. Premièrement, elle tend à évacuer l’importance des acteurs et deuxièmement, elle exige plus des démocraties émergentes que des anciennes démocraties. 2. HUNTINGTON S., The Third Wave. Democratization in the Late Twentieth Century, Norman, OK, University of Oklahoma Press, 1991. 3. MUNCK G., “Democratic Consolidation”, in CLARKE P.B. et FOWERAKER J., (eds), Encyclopedia of Democratic Thought, London, Routlege, 2001. 4. VALENZUELA S. J., “Democratic Consolidation in Post-Transitional Settings : Notion, Process, and Facilitating Conditions”, in MAINWARING S., O’DONNELL G. et al., (eds), Issues in Democratic Consolidation. The New South American Democracies in Comparative Perspective, Notre Dame, University of Notre Dame Press, pp. 57-104, 1992. Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 41.141.129.216 - 20/01/2013 21h31. © De Boeck Supérieur Si on conçoit la démocratie politique comme une méthode, comme un mécanisme pour choisir les dirigeants politiques, comme un arrangement institutionnel pour choisir des leaders qui gouverneront entre deux élections, la consolidation démocratique sera interprétée comme le processus d’institutionnalisation des règles qui permet la répétition des élections2. L’accent est mis sur la durabilité et l’efficacité de la procédure électorale3, sur l’absence de crises ; prise dans ce sens cette conception se rapproche de l’ancienne définition de la stabilité politique. Si on se réfère à cette définition, la majeure partie des pays connaîtrait des démocraties consolidées dans la mesure où il semble y avoir une certaine ritualisation des élections. Nouvelles approches à l’étude de la consolidation démocratique 193 Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 41.141.129.216 - 20/01/2013 21h31. © De Boeck Supérieur D’autres contributions, provenant du champ de l’économie politique et des relations internationales, s’interrogent non pas sur la signification du concept, mais plutôt sur l’influence de variables non-politiques, telles que les politiques économiques néo-libérales, la globalisation, le rôle des organisations internationales et la dissolution des anciens blocks politiques sur le processus de consolidation démocratique. Ces contributions insistent sur les problèmes spécifiques que soulève aujourd’hui la consolidation des nouvelles démocraties. Une des questions soulevées est le dilemme que pose aux nouvelles démocraties la promotion du développement économique et social dans un contexte marqué par la crise des modèles introvertis de développement et les impératifs de l’ajustement économique néo-libéral. Selon Oxhorn et Ducatenzeiler 6, le démantèlement de la protection social, la flexibilisation du travail, l’augmentation de la compétitivité sont à la source de l’augmentation des inégalités, de l’exclusion et de la marginalité sociale. Les conséquences de l’ajustement ont été l’augmentation des inégalités et de la plus pauvreté ainsi que l’accroissement de la concentration du revenu. Les marchés qui émergent dans les nouvelles démocraties se caractérisent par la faiblesse de la régulation, par un État minimal et par l’accentuation de l’individualisme libéral. La sévérité de la dislocation socio-économique produite par la rapide re-introduction des forces du marché s’est traduite par la fragmentation et l’atomisation de la société civile7. Selon plusieurs auteurs8, la solution à ce dilemme 5. LINZ J.J. et STEPAN A., Problems of Democratic Transition and Consolidation : Southern Europe, South America and Post-Communist Europe, Baltimore, The Johns Hopkins University Press, 1996 ; TOURAINE A., Qu’est-ce que la démocratie, Paris, Fayard, 1994 ; O’DONNELL G., “Delegative Democracy”, Journal of Democracy (5), 1994 ; O’DONNELL G., “Illusions about Consolidation”, Journal of Democracy 7 (2), 1996 ; O’DONNELL G., “Horizontal Accountability and New Polyarchies”, Journal of Democracy 9 (3), 1998, pp. 112-126 ; NUN J., Democracia. Gobierno del pueblo o gobierno de los politicos, Buenos Aires, Fondo de Cultura Economica, 2000 ; OXHORN Ph. et DUCATENZEILER G., (eds), What Kind of Democracy ? What Kind of Market ? Latin America in the Age of Neoliberalism, Pennsylvania, Penn State University Press, 1998. 6. OXHORN Ph. et DUCATENZEILER G., op. cit., 1998. 7. KORZENIEWICZ et SMITH, (eds), Latin America in the World-Economy, Greenwood, 1996. 8. BRESSER PEREIRA L.C., MARAVALL J.M. et PRZEWORSKI A., Economic Reforms Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 41.141.129.216 - 20/01/2013 21h31. © De Boeck Supérieur Partant d’une critique des approches institutionnalistes qui mettent l’accent sur des critères tels que l’efficacité, la stabilité ou même, le mandat électoral, d’autres auteurs5, tout en acceptant l’importance de ces dimensions, mais en mettant en garde sur le fait que tout ce qui s’institutionnalise n’est pas nécessairement démocratique, ont privilégié des valeurs normatives telles que l’imputabilité, la participation des citoyens, la société civile et l’État de droit. Ceci obéit à une logique “marshallienne” dans la mesure où ce qui est en jeu est la capacité des citoyens de participer de façon autonome dans le débat politique et que cette capacité est considérée impensable en absence des droits (civiques, politiques et sociales) qui garantissent l’exercice de la citoyenneté. 194 Graciela Ducatenzeiler Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 41.141.129.216 - 20/01/2013 21h31. © De Boeck Supérieur Une autre question est celle de l’importance des déterminants externes de la consolidation démocratique, largement sous-estimés par les analyses traditionnelles de ce processus. Ainsi, certains auteurs, ont évalué l’efficacité des conditions politiques imposées par les programmes d’aide au développement et de la Banque mondiale qui visent à encourager la démocratisation du système politique, le respect des droits de la personne et la bonne gouvernance des administrations publiques au sein des pays receveurs9. Il se dégage de la majorité de ces travaux que la finalité des mesures encouragées par ces organisations (bonne gouvernance des administrations publiques, réforme de l’État, indépendance du pouvoir judiciaire, élimination de la corruption, respect de la liberté de la presse, etc.) n’est pas d’assurer la consolidation des nouvelles démocraties à travers une atténuation des inégalités socio-économiques et un élargissement de la participation des citoyens au système politique, mais d’améliorer l’harmonisation des conditions de concurrence au sein du marché. On assisterait donc à l’émergence d’une nouvelle vision plus libérale et moins sociale-démocrate de la démocratie10. D’autres se sont interrogés sur les impacts de la multiplication des résolutions des Nations Unies en faveur du respect des droits humains11. D’autres, enfin, dans le cas de l’Europe, ont analysé l’influence des stratégies pré-accession de l’Union européenne sur la consolidation des nouvelles démocraties de l’Europe de l’Est12 ou se sont demandés si cette influence s’exerçait par contagion, contrôle, consentement ou conditionnalité13. in New Democracies. A Social-Democratic Approach, Cambridge, Cambridge University Press, 1993 ; ÉTHIER D., Economic Adjustment in New Democracies. Lessons from Southern Europe. London/New York, Macmillan/St-Martin’s Press, 1998 entre autres. 9. NELSON et EGLINTON, Encouraging Democracy, what Role for Conditioned Aid ?, Overseas Development Council, 1992. 10. ÉTHIER D., op. cit., 1998 11. WHEELER R., “The United Nations Commissions on Human Rights”, Canadian Journal of Political Science, 1999, pp. 75-101. 12. HYDE-PRICE, Germany and European Order : Enlarging NATO and The E.U., Manchester Univ. Press, 2000. 13. WHITEHEAD L., The International Dimensions of Democratization, Oxford Univ. Press, Oxford, 1996 ; SCHMITTER P., “The Consolidation of Political Democracies : Process, Rhytms, Sequences ans Tupes”, in PRIDHAM G., (ed.), Transitions to Democracy. Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 41.141.129.216 - 20/01/2013 21h31. © De Boeck Supérieur réside dans l’adoption de programmes d’ajustement hétérodoxes plutôt qu’orthodoxes (ou néo-libéraux), qui impliquent une négociation des mesures de stabilisation et de changement structurel entre l’État et tous les partenaires sociaux ; négociation qui favorise, tant une application plus graduelle et plus ciblée de ces réformes, que l’adoption de mesures de compensation pour les groupes les plus vulnérables de la population. Cependant, la rupture des anciens cadres de médiation des intérêts, l’affaiblissement des acteurs (syndicats et parties de gauche) oblige à se poser la question de qui sont les acteurs qui pourraient se mobiliser contre cet excès de marché. Nouvelles approches à l’étude de la consolidation démocratique 195 Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 41.141.129.216 - 20/01/2013 21h31. © De Boeck Supérieur La confiance, toujours subjective, dans les chances de survie de la démocratie s’appuie sur quatre différentes logiques que Schedler présente comme des règles différentes d’observation de la consolidation démocratique : la logique des symptômes, fondée sur l’absence de crises ; la logique de la crise à l’épreuve, fondée sur la bonne gestion des crises ; la logique préventive, fondée sur la présence de structures solides (socioéconomiques, culturelles, stratégiques, institutions) pour faire face aux menaces invisibles ; la logique de l’auto perception, fondée sur la perspective subjective des citoyens et de la classe politique. Guillermo O’Donnell14, qui avait déjà, dans d’autres travaux, lié l’utilisation du concept de consolidation démocratique à une vision statique de la démocratie, se concentre sur l’État de droit et ses conséquences sur la conceptualisation de la démocratie, de la citoyenneté et de l’État. Selon O’Donnell, il y a un niveau intermédiaire entre le régime politique et les caractéristiques socioéconomiques qui est le degré d’application de l’État de droit, défini comme l’application équitable des lois. L’égalité formelle consacrée par la loi n’est pas suffisante. L’auteur élargit la notion d’État de droit en y incluant trois caractéristiques qui le convertissent en État légal démocratique : 1. il fait respecter les libertés politiques et les garanties de la polyarchie ; 2. il fait respecter les droits civils de toute la population ; 3. il établit des réseaux de responsabilité qui assujettissent tous les agents au contrôle adéquat et légalement établi de la légalité de leurs gestes. O’Donnell soutient alors qu’il ne faut pas penser la démocratie strictement comme attribut du régime mais aussi comme caractéristique de l’État, particulièrement dans sa dimension légale. Il faut donc mesurer à quel degré les trois attributs de l’État de droit sont présents dans un cas donné ; “la démocratie n’est pas seulement un régime politique polyarchique mais également une relation particulière entre l’État et les citoyens, et entre les citoyens eux-mêmes, sous une sorte de gouverne de loi qui garantit la citoyenneté politique, mais aussi la citoyenneté civile et un réseau complet de responsabilité” O’Donnell conclut que la séquence dans l’acquisition des droits et Comparative Perspectives from Southern Europe, Latin America and Eastern Europe, Brookfield, VT, Dartmouth Publishing Co., 1995. 14. O’DONNELL G., op. cit., 1996. Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 41.141.129.216 - 20/01/2013 21h31. © De Boeck Supérieur Dans ce numéro de la Revue Internationale de Politique Comparée Andreas Schedler passe en revue les significations attribuées au concept. Son point de départ est que la définition classique de consolidation en tant que régime démocratique qui semble vouloir durer, n’est pas opérationnelle car elle se fonde sur la nature subjective des anticipations. La consolidation et, donc, les chances de survie d’un régime politique, ne représentent pas des faits empiriques mais des jugements qui prennent la forme de prédictions. D’après l’auteur il n’existe aucune règle précise d’opérationnalisation du concept, mais plutôt différentes approches complémentaires qui semblent “fortement consolidés”. 196 Graciela Ducatenzeiler Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 41.141.129.216 - 20/01/2013 21h31. © De Boeck Supérieur Dans son article, Leonardo Morlino milite contre le défaitisme théorique causé par les ambiguïtés du concept de consolidation démocratique et, comme O’Donnell, propose une définition qui établit des liens entre le régime et la société civile. Face à l’absence d’une théorie universelle de la consolidation démocratique, Morlino propose d’adopter une théorie plus modeste, une théorie empirique qui consiste en un ensemble de propositions inter-reliées, une théorie déterminée dans le temps et dans l’espace. La consolidation est, pour l’auteur, un processus de renforcement de la démocratie qui de prévient d’éventuelles crises ; un processus de construction de relations stables entre les institutions gouvernementales et la société civile. Dans les termes de Schedler il s’agirait d’observer la consolidation à partir d’une logique de gestion des crises. L’hypothèse principale, fondée sur une analyse empirique des démocraties en Italie, en Espagne, en Grèce et au Portugal, est que la consolidation démocratique peut-être expliquée par les liens divers et changeants entre la légitimation et un mélange bien défini des ancrages institutionnels, types d’organisation des intérêts collectifs privilégiés (organisations partisanes, clientélisme, corporatisme). La capacité des partis politiques d’agir comme médiateur entre les groupes d’intérêt et l’État est fondamental dans cette approche. Quatre processus différents résultent de la combinaison de ces deux dimensions en qui créée une typologie des consolidations : 1.la consolidation étatique, caractérisée par la légitimation inclusive, combinée au contrôle de la société à travers le clientélisme ; 2. la consolidation d’élite, légitimation inclusive sans partis capables de contrôler la société ; 3. la consolidation des partis, légitimation limitée ou exclusive avec le contrôle de la société par les partis ; 4. le statu quo, légitimité exclusive ou faible, absence de dominance de partis, dans ce contexte la consolidation n’et pas possible. À partir de ces études de cas, Morlino conclut que la consolidation démocratique repose moins sur la construction ou le maintien d’un système partisan fort, que sur la dose de légitimité et d’ancrages susceptible de mieux accommoder les différents intérêts. Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 41.141.129.216 - 20/01/2013 21h31. © De Boeck Supérieur libertés en Amérique latine est inversée par rapport à celle des pays hautement développés puisque, dans ces premiers, les droits politiques sont en vigueur alors que la composante libérale est faible. Les droits civils et la responsabilité, prémisses implicites communes à la plupart des théories de la démocratie, ne s’appliquent donc pas à plusieurs nouvelles polyarchies. Ainsi l’absence ou la faiblesse marquée de ces composantes devrait être abordée par toute théorie qui se propose d’englober la totalité des polyarchies existantes. Donc, plus l’État légal prend de l’importance comme État de droit démocratique, plus il encourage l’indépendance et la force de la société, plus la démocratie est consolidée dans le sens de sa capacité à durer. La logique préventive voudrait qu’une pleine citoyenneté soit une garantie d’endurance, donc d’une forme de consolidation, même si O’Donnell se garde bien de tomber dans une conception statique de la démocratie. Nouvelles approches à l’étude de la consolidation démocratique 197 Diane Ethier et Laurence Whitehead s’interrogent sur les moyens de promotion de la démocratie et ses conséquences sur la consolidation. Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 41.141.129.216 - 20/01/2013 21h31. © De Boeck Supérieur Laurence Whitehead analyse l’élargissement de l’Union européenne en tant que composante majeure de la consolidation démocratique en Europe de l’Est et du Sud-Est, un sujet très peu étudié jusqu’à maintenant. Contrairement aux prémisses les plus souvent mentionnées dans les études sur la consolidation démocratique, l’auteur soutient que la stratégie de l’Union européenne d’utiliser l’élargissement pour promouvoir la démocratie, place les éléments externes comme déterminants du processus, remet en question l’autorité des institutions internes, telle le parlement, et augmente les risques de conflits entre ceux qui se soumettent aux exigences et ceux qui ne le font pas. La thèse principale est que cet élargissement aura des effets complexes et incertains qui pourraient amener des coûts élevés pour l’ensemble de l’Europe. Whitehead identifie quatre types de risque : 1. la difficulté de satisfaire dans la hâte les conditions politiques (progrès démocratique) imposées par l’Union européenne ; 2. Les risques de rivalités entre les candidats et entre ceux-ci et les exclus ; 3. Les risques inhérents à la qualité de la gestion démocratique des institutions de l’Union européenne ; 4 les risques qu’un échec du projet “porte atteint à la crédibilité du constitutionnalisme libéral et démocratique en tant que philosophie et pratique ayant une valeur globale et durable”. Enfin, Guy Hermet se pose la question de la comparaison des différents processus de démocratisation, notamment de ceux de l’Amérique latine et de l’Europe de l’Est. Après une analyse des différentes méthodologies utilisées, l’auteur conclut qu’il n’y a pas d’approche capable d’ordonner une comparaison des trajectoires de démocratisation latino-américaines et est- européennes. Le but de l’auteur est d’énoncer quelques précautions à prendre pour orienter la recherche sur le sujet et d’identifier quelques seuils critiques pour déterminer le progrès ou la stagnation de la démocratie. Les deux précautions à prendre dès le départ sont, en premier lieu, d’éviter les jugements normatifs et, en deuxième lieu, de comprendre que l’Amérique latine et l’Europe de l’Est ne sont pas Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 41.141.129.216 - 20/01/2013 21h31. © De Boeck Supérieur Diane Ethier s’interroge sur l’influence de la libéralisation économique sur la transition démocratique en Afrique et en Europe du sud et sur la consolidation démocratique en Europe de l’Est. Elle observe qu’en Afrique et en Europe du sud, les transitions démocratiques ont été déterminées, non seulement par la crise des modèles de développement, mais par la volonté des acteurs tant internes qu’externes de créer des conditions politiques favorables au modèle libéral de développement. Elle observe aussi que la consolidation de l’Europe de l’Est ne correspond pas au paradigme adopté par les scientifiques qui se sont penchés sur d’autres processus de consolidation. En effet, Ethier affirme qu’il s’agit d’un processus déterminé par des variables externes plutôt qu’internes dont l’objectif est d’assurer le succès de la libéralisation du marché. La consolidation démocratique serait donc instrumentale, un besoin du nouveau modèle de développement. 198 Graciela Ducatenzeiler isolées du reste du monde et qu’il y a donc des enseignements à tirer des autres régions. Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 41.141.129.216 - 20/01/2013 21h31. © De Boeck Supérieur En ce qui concerne les différences, Guy Hermet met l’accent sur quatre variables : les attitudes face à la démocratie, la distribution de la richesse, l’héritage autoritaire et la place des anciennes idéologies. En ce qui concerne les ressemblances, l’auteur met l’accent sur les contradictions entre la logique de la démocratisation politique et celle de la réforme économique, sur les rivalités entre les leaders démocrates et les leaders populistes, sur le poids exercé par la mémoire du passe et sur les contraintes temporelles qui exigent des nouvelles démocraties, en peu de temps un niveau d’excellence même introuvable parmi les anciennes. Les contributions de ce dossier démontrent l’importance de la problématique de la consolidation démocratique pour le champ de la politique comparée, aussi bien parce qu’il s’agit d’un concept qui concerne un grand nombre de régions que parce qu’il a des implications théoriques pour le développement de l’ensemble du champ. Elles constituent un bilan de l’état de la question et elles témoignent des difficultés soulevées par la construction des systèmes politiques démocratiques et par la conceptualisation de l’état actuel de la démocratie. Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 41.141.129.216 - 20/01/2013 21h31. © De Boeck Supérieur Guy Hermet, comme Guillermo O’Donnell, a des doutes quant à l’utilité du concept de consolidation. En effet, il remarque que la “consolidologie” envisage un ordre politique établi et que la démocratie est considérée consolidée dans la mesure où elle est stable ou elle dure ; qu’à travers le concept de capital social on réintroduit les pré-requis de la théorie de la modernisation ; qu’elle est trop normative et subjective. Pour cette raison il se donne un but plus modeste : celui de retracer les progrès ou les reculs de la démocratie, de mettre en évidence les différences et les ressemblances de la démocratisation en Amérique latine et en Europe de l’Est.