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UIllES E]I GUERBE ilu'-ltu. slÈGlts q ( a \ .(a \iJ -\ À a -JlJ { ô .F d l. \ a) *J ù §) q sous ta d.reolion dc GhlistianG [nVlnUU ".,, f./,..t.ior. ln- tn,n.yo. ,Lu U frÀloinn llilles en gaerre ÂGtGs du G0ll0[re tGnu à l'Uniuercité üe E0rGnGe üix-on'Prouence, 8-9 iuin 20061 ouwage nuHié auec le conG0u$ üG luniuercilé üe PtouG[Ge, dll lab0Ht0ilG SIGüû ctüu Gonseil généml ües Bouches-du-[h0ne musladircction dG Ghristiane [aynauü 2008 PugLrcarroNs og l'UNIvrnsrrÉ pr Pnovr,Ncn Table des matières Avant-propos ..... 5 Introduction j Peter F. AINSWORTH, Les représentations de villes dans les manuscrits de Froissart : d'un codex à l3 Manuel SÂNCHEZ MARTiNEZ, Les villes de Catalogne et les Grandes Compagnies (1365-1366) 43 I'autre ......... Philippe JANSEN, Citadins er hommes de guerre dans les Marches aux xrv'et xv' siècles : une difficile cohabitation ... . 63 Colette GROS-COLLOMP, Florence en gueffe au xrv' siècle : « la gueme de Pise >) . . . . g5 Germain BUTAUD, Les deux sièges du palais apostolique d'Avignon (1398-1411) .. .. 103 Louis STOUFF, Arleset laguerre(milieu xn" siècle - milieu xv. siècle) .......|?j Christiane RAYNAUD, Les villes flamandes er la guerre ( l37g-13g5) danslaChronique dite des Cordeliers ....... ......,13], Pere VERDÉS I PIJUAN, Les villes guerrecivile(1462-1472) catalanes pendant la Pierre MONNET, La ville et la guerre dans quelques cités de l,Empire ......... auxxrv'etxv'siècles:de I'urgence imnrédiateàlamémoire identitaire Conclusion Index des noms de personnes et de auteurs Tabledes plansetfigures Liste des ....... 16l lg5 .....22s lieux ..... . z3l .......245 ......216 Les deux sièges du palais apostolique d'Avignon ( I 398- 1411 ) Germain BUTAUD Université de Nice - Sophia Antipolis UMR 6130 CEPAM T I-r es deux sièges du Palais des Papes du temps de Benoît XIII sont les événements militaires concernant Avignon les mieux documentés du Moyen Âge. Les sources nous renseigneît sur les deux camps et sont très variées. En plus des chroniques, dont celle de Martin d'Alpartil,, un fidèle du pape, nous disposons de la correspondance adiessée au marchand de Prato Francesco di Marco Datini par ses agents d'Avignon', de divers traités polémiques3, ainsi que de nombreux documents d' archiveso. t M, D'Alpextl-, Chronica actitatorum temporibus dornini Benedicti F. Euru-e, Paderborn, 1906 [désorrnais XIil, éd. Alrnnrrr-]. à 1410, exffaites des archives de Datini », Mémoires de l'lnstitut Historique de Provencc, 12, 1935,p. l7-142;13, R. BnuN, « Annales avignonnaises de 1382 936, p. 58- 105 ; 14, 193'7 , p. 5-57 ; I 5, I 938, p. 2l-52, 154-192 [désormais BnuN, 1937 ou 1938, avec I'indication de l'auteur de la lettrel. I F. Euru-s, "Aus den Acten des Afterconcils von Perpignan 1408", Archiv fiir Literatur- und Kirchengeschichte des lvliuelsalters, 5, 1889, p.387-481; 7, 1900, p. 576-696 [désormais Enru,e, Actenf; F. Euru-r, "Neue Materialen zur Geschichte Peters von Luna (Benedicts XIII.)", Arclziv fiir Literarur- ttnd Kirchengeschichte des Mittelsalters,6, 1892, p. 139-308; 7, 19W, p. l-310 [EHnre, Neue Materialen). Signalons en particulier le registre contenant la copie des mandats de paiements adressés par les élus de la guerre au trésorier d'Avignon entre mai 1410 et juillet 1411: Archives communales [AC] d'Avignon: EE 8, 303 folios. Villes en guerre Ce faisceau de sources permet une approche fine des réalités militaires et humaines de ces sièges intéressants à plusieurs titres. En effet, ils illustrent une phase inédite du schisme' et scellent la fin du séjour des papes à Avignon. Du point de vue de I'art de la guere, ces conflits méritent d'être connùs car ils cbncernent une forteresse Àajeure de la fin du Moyen Âge et se situent à une période déterminante de I'histoire de I'artillerie. Ils mobilisèrent fortement les Avignonnais qui vécurent sur le pied de gueme pendant de longs mois et durent engager des sommes considérables dans la bataille. Toutes ces raisons nous invitent à reprendre l'analyse de ces épisodes gueniers même s'ils ont déjà bénéficié d'une étude majeured. « On pourrait en tirer un livre comme celui [de la guerre] de Troie >>'. Le premier siège du Palais des Papes (1398-1403) la soustraction d'obédience décidée par Charles VI 1398) et sa proclamation par des commissaires royaux à Villeneuve-lès-Avignon (l'' septembre), le choix des prélats ne se fit pas attendre. Confonnément aux somtnations françaises, dix-neuf cardinaux quittèrent la ville pontificale pour s'installer à Vlleneuve. Seuls cinq cardinaux restèrent aux côtés de Benoît XIII8. Après (27 juillet Avignon se retourne contre le pape Pour être son bras armé, le Sacré Collège choisit Geoffroy Boucicaut, frère cadet du maréchal de France, et seigneur de Boulbon en Provence et d'Aramon en Languedoc'. Il put regrouper derrière lui Sur le schisme, l'ouvrage fondamental est toujours celui de N. Varots l,a France et le grand schisme d'Occidettt, Paris. 1896-1902, 4 vol [cité désormais Valots]. P. PaNstpn, « Les sièges du palais d'Avignon sous le pontificat de Benoît XIII », Annales d'At'igttort et du Comtat Venaissirt,9, 1923, p. 5-186 [désormais PeNstnn]. BnuN, 1937, p.52 (26 octobre 1398, Tieri di Benci). Ar-pARru-, p. 34-35, 37,42-43; BnuN. 1937, p. 43 (Tomaso di Ser Giovanni), p.47-48 (Tieri di Bienci); EHRI-n, A('Ie,r, 1889, p. 424; Euru.u, Neue Materialen, 1900, p. 179; Chronographia reg.um Francontm (1270'1405), éd. H. Monerwu;.É, Paris, l89l-l897,r. lll, p. 153-155; N. Ver-ors, t. IlI, p. l9l-194. Pour les noms des cardinaux, cf. PaNsrrn, p. 7-9. Jean Froissart fait erreur en attribuant à Jean Boucicaut les faits de son frère, Chroniques, éd. J.-M. Kr.nvvN oE LrrrrNnove, Bruxelles, 1867-1879, t. XVL p. l2O. 121,125-131 [citédésormaisFnolssenr].OndoitàF.Ermlrlarectification sur le rôle de Geoffroy Boucicaut, Euxtz. Acten,1889, p. 465-487. I*s deux sièges du palais apostolique d'Avignon (1398-1411) plusieurs capitaines et s'illustra immédiatement en tuant le régent du tomtat (4 'septembre 1398)'0. Ensuite, sa troupe d'une--centaine d'hommei d'^armes se répandit dans le territoire t6 septembre) pour faire pressi,on sur les sujets de Benoît d'Avignon XIII". De fait, bs Àvignonnàis n'obéirent plus au viguier Gonzalvo Forcen et du petit Palais, avec I'accord de son occupant,-l'éyê-que ,'.*p*E "rt Le 11 septembre, le cardinal Jean de Neuchâtel, Bellemèrei.. Gilles nommé par le Sacré Collège gourerneur d'Avignon, s'y installa et en fit *n q,rrtti"t gén&al. DanJl'àuffe camp, le palaf-apo-stgJiqug fut fermé et seivit de iefuge aux quelques cardinaux fidèles à Benoît X_trf Wi durent quitter leùs livréei. En outre, les partisans du pape incendièrent la section en bois du pont du Rhône (nuit du l3 au 14 septembre)l3' Finalement, le 1-6 septembre, les Avignonnais, réunis dans l'église saint-Didier, choisirent à'obéir au sacré collège. Le soir même, le cardinal de Neuchâtel, vêtu comme un séculier, une épée au côté et un bâton à la main, chevaucha à travers les rues, avec SeS hommes, sous les acclamations du peuple qui criait .< Vive le saint collège ! >1 « Vive le collège et Monseignèur àe Neuchâtel ! » À cet instant. Avignon et le Comiat Venaissiri avaient rejoint définitivement le parti de la soustraction d'obédience'0. Les Avignonnais firent main basse sur les écuries et les greniers du pape, récupérant ainsi les engins de gu3ry9 Wi y étaient entreiposés. Ils pillérent au§si les livrées des cardinaux fidèles à benoît XIII et agressèrent les Espagnols qu'ils trouvèrentrs' Geoffroy B;ucicaut et ses hômmes furent autorisés à entrer en ville le 22 septembre. lls se rendirent aussitôt aux abords du_ palais. Mais les tirs ennèmis les forcèrent à battre en retraite et ceux du palais « commencèrent à tirer sur la ville avec des bombardes et des balistes et cinq iours durant ils ne firent rien d'autre, blessant ou tuant plus de 40 per- Arpenru-, p. 37-38, 49,57 ;AC Carpentras: BB-25, f.56; Ernrs, Neue Materialen, 1900, p. 6i,lt,tlg;E]H[{LE,Acten,1889, p.426; VeI-oIs' t. Ill, p. 194' BnuN, 1937, p.43-44 (Tomaso di ser Giovanni); AC Carpejtras: BB 25,f '12v.-13r, gtt11t'g,, Neue Materialen, f.SO.;'errorio-, p. :a-:e. Fnolssanr, t. XVI, p. 126, 128 1900, p. 67, 78. Bnrx, 1937, p. M-45 (T. di ser Giovanni), 49 (Tieri di B-enci);.Ar-panru-,.9' 39-40; 12 ff . ôri*r, ,. La vie et lès æuvres de Gilles Bellemère >,, Bibliothèque de I'Ecole des chartes, 124, t966, p. I I 1-112. p' 48-49 t3 Arpanru, p.40,42,45, 46. Bnur.r, 1937, p. 45-(Tomaso di Ser Giovanni)' (Tieri di Éènci); Ertrtt-e, Neue Materialen, 1900, p. 19; Var-ots, t' III, p' 197' l1 Bnrnr, 1937, p. 45 (T. di ser Giovanni), 48 (Tieri di Benci); Arpaarn. p' 43,45; Èrw-i, tt""i Materialen,1900, p. 179; Ver-ors, t' III, p. 195-196' 15 Areatrlr, p.45-46,48. 105 Villes en guerre Boucicaut fenonça donc à attaquer le palais apostolique et concentra ses attaques sur lâ tour du pont, qui était isolée et.sous la menace du petit pàtais et de I'hôpital SainçBénezet. Une partie de la tour s'écrouia rapidement grâce à un travail de sape-. Le 27 septembre, sa giunison n'ouàit plus qu;à se rendreri. Tous les efforts purent donc se focaliser sur le palais apostolique. sonnesl6 >>. Le rapport de forces au début du siège Le Palais des Papes constituait le principal atout de Benoît XIII (carte 1). selon Froisiart, il s'agissait de « la plus belle et la plus fone àaison du monde et la plus aisiè à tenir'' >>. Cet élément est important car la garnison était rèduite. Martin d'Alpartil donne les .noms de 277 perônnes à l'intérieur du palais: 74 de Catalogne, 68.d'Aragon, 64 dà Castille,2T de royaume de Valence, 23 du royaume de-Navarre, 7 de France, 6 d'Anglelerre et d'Aquitaine, 5 d'Allemagne,-! d'Italie enfin''. Panni eux, il y avait peu de véritables hommes d'armes et arbalétriers, mais chacün participait à la défense. Les cardinaux et les prélats supérvisaient la garde à toïtes les heures de la nuit- Le pape avait ies qualitès d'un chef d-e g,rerre. Il était connu pour la fermeté de son caraôtère et son sang-froid: .. de sa personne estoit assés hauster et trop cruel, et ne s'esbahiTsoit point pour petit de chose'o >>. En outre, le palais avait été depuis longtemps garni d'armes, de pièces d'artillerie et disposait de grosses réserves de vivres2r. ^ Les assÉgeants pouvaient compter de leur côté sur un capitaine expérimenté, éeoffroy Boucicaut, avec cependant relativement peu de ,ridut. professionnets (ZOO hommes d'annes) payés. par le Sacré Collège Lt Avignonrr. Mais les Avignonnais étaient partie prenante du BnuN, 1937, p.45 (T. di ser Giovanni); Al-penrIl, p. 46-41 ; PeNsrrn, p' 14' r,7 Arpenil. p. 45, 48; BnuN, 1937, p. 45 (l di Ser Giovanni), 49 (Tieri di Benci); ennri, À.ien, fttS, p. 42i: Chrotiographia regum Francorum' t' lll, p' 155-156; Perstun, p. 14-15. ts Fnotsserr, t. XVI, P. 129. rg Ar.penrn, p. 58-65. Les estimations des correspondants de Datini sont de 300, 400, 500 voire 600 hommes, Bnuu, 1937, p.42,46,49. Une source parle de 350 hommes, Ch rct no g rap hia re g um F r a nc o runt, t - lll' p - I 55 . zo Ar-penrn-, p. 47; Ftorssanr, t. XVI, p. 127 (citation)' p. 54; BnuN, 1937,p.48 (Tieri di Benci); EtüU-t:-, Neue Materialel, 1900, -zr Arpe*rn, p. tS. B. Êbvsser, Die'Chronik des Garoscus de Ulmttisca Veteri fsic) und_BerÛand Eoyisrr ( 1365-14't 5), éd. F. Esnr-e, A rchir,fiir Literatur- und Kirchengeschichte des Mittelsalters, T, 1900, p. 353 [désonnais Bovssrr]. zz BnuN, 1931 , p.46 (Tomaso di ser Giovanni), p. 51 (Tieri di Benci)' to Les deux sièges du palai.s apostolique d'Avignon (l39B-14ll ) siège et avaient désigné des élus de la guerre. « Voilà cent ans qu'il ne s'est rien passé de tel ici: de grands tumultes, tous les jours sôus les armes, et pas une boutique ouverte pendant trois semainesr, >>. Les assiégeants enserraient étroitement le palais de leurs positions puisqu'ils occupaient à sa proximité irnmédiate le clocher de Notre-Dame-desDoms2', et que tout autour, ils s'étaient fortifiés à l'est, dans les livrées cardinalices de Viviers, de Saluces et de Saint-Martial, au sud, dans Ia demeure du maréchal de la cour romaine, et à I'ouest, dans la livrée du cardinal de Murol où résidait Boucicaut. Toutes les rues menant au palais avaient été fermées par des grilles de fer, gardées jour et nuit. par des barrières « à la façon de Sienne >> ou encore par des chaînes:s. Le dael d'artillerie et les épisodes marquants du siège Le 29 septembre, les deux bombardes du petit Palais et tous les archers et arbalétriers avignonnais tirèrent sur le palais apostolique. Benoît XIII, qui se trouvait près d'une fenêtre, fut atteint légèrement à l'épaule par des éclats d'un boulet de pierre. Par révérence pour saint Michel, il défendit à son artillerie de répliqueÉ6. Mais en temps normal, la garnison du palais tirait à coups de bombardes et d'arbalètes, de jour et de nuit, faisant plusieurs victimes2T. Redoutable était la grande bombarde installée dans I'actuelle cour d'honneur du palais. Ses projectiles faisantjusqu'à trois quintaux (120 kilos) pouvaient atteindre les Changes et la rue de l'Epicerie. En tombant à pic, ils fracassaient les toits et traversaient un à deux étages'8... Mais pour y répliquer les Avignonnais avaient à leur disposition deux puissants engins à trébuchet. Celui qui se trouvait près de l'église Saint-Symphorien projetait des pierres de trois quintaux environ (120 kilos). Le 15 octobre, cet engin détruisit dans la grande chapelle le trône pontifical. L engin situé vers la livrée de Murol lançait des pierres Z1 21 25 26 27 28 Bnuu, 1937, p.47 (12 octobre 1398, Tieri di Benci). Les soldats de Boucicaut en profitèrent pour piller les richesses des cardinaux des deux bords qui se trouvaient dans l'église, EHRr-r, Neue Materialen, l9OO, p. 69-iO: Y Gneva, « Un épisode du grand schisme d'Occident à Avignon : lè sac de Notre-Dame des Doms (septernbre 1398) vu par une victime du pillage dans Avignorr au Moyen Age. Textes et documents, Avignon, 1988, p. 189-192. " Esw-n,Neue Materialen, 1900,p. 180;BnuN, 1937,p.46(Tomasodi serGiovanni), 49,50 (Tieri di Benci); PaNsmn, p. 15. Erlru,ç., Acten, 1889, p. 428 ; Ar-panru-, p. 49;' Velors, t. III, p. 199. BnuN, 1937, p.42,43,46-47 (T. di ser Giovanni), 49, 5 I (Tieri di Benci). BnuN, 1937, p. 55 (Tomaso di ser Giovanni). Cette bombarde érair dirigée par un prêtre de Catalogne, Arnaldo Vich, Areenrn-, p. 61. to7 Wlles en guene de sept quintaux (280 kilos). Le rythrne de tir allait jusqu'à quarante pierres par jour2e. De plus, les Avignonnais avaient aussi placé des bombardes et des couleuvrines sur plusieurs tours: le clocher de Notre-Dame des Doms, la tour de la livrée d'Albane, la tour de la livrée de Florence. Le l"'octobre, un jour de trêve, une troupe venant du palais réussit, par escalade, à prendre contrôle de la tour-clocher de Notre-Dame-desDoms. Mais immédiatement, ils en furent chassés par les fumées d'un feu de soufre que les Avignonnais déclenchèrent à la base du clocher. L incendie fut ensuite mis aux provisions de bois du pape qui se trouvaient au pied de la tour de Trouillas. Malgré les efforts de la garnison, le feu dura trois jours et quatre nuits et le palais perdit ainsi I'essentiel de ses réserues de bois3o. Mais, la vengeance divine, selon Alpartil, vint frapper les assiégeants. Le 4 octobre, le cardinal de Neuchâtel mourait de la peste3t. Peu après s'ouvrirent de difficiles pourparlers entre les deux camps. Certains avignonnais étaient si hostiles au pape qu'ils le considéraient comme un hérétique qui méritait d'être brûlé,. Au cours des négociations, un grave incident eut lieu. Le 24 octobre, alors qu'une trêve d'un jour avait été conclue, les cardinaux Martin de Zalva, Bonifacio degli Ammanati et Gofredo Boyl sortirent du palais pour parlementer avec Boucicaut. Un arbalétrier du palais, ignorant la trêve, tira sur des habitants. Aussitôt, Boucicaut profita du bris de trêve pour arrêter les prélats. Il ernprisonna deux cardinaux dans son château de Boulbon et utilisa Gofredo Boyl comme intermédiaire entre les deux camps, mais celui-ci en profita pour rester dans le Palais des Papes33. L action de Boucicaut fut rapidement désapprouvée par les cardinaux, mais pendant des années cet épisode fut utilisé par les partisans de Benoît XIII comme preuve de I'iniquité des cardinaux3a. zs BnuN, 1937,p.47 (Tomaso di ser Giovanni), Materialen, 1900, p. 69, 88. :o Arperru-, p. 50; BnuN, 1931 , p. 46,49,50; Bovsser, p.354; Em.r_e, Nere Materialen, 1900, p. 68; Chrunographia regum Francorunt, t. III, p. 156; Chronique du religieux de Saint-Denys, éd. et trad. L. Bellacusr, Paris, 1839-1852, t. ll, 3r 32 :: :+ p.5l (Tieri di Benci); Ewxrr, Neue p. 654-657; Fnorssanr, t. XVI, p. 131. Arpen:rr, p.49; BxuN, 1937, p.45-46 (Tomaso di ser Giovanni),49 (Tieri di Benci); Var-ors, t. III, p. 205. BRUN, 1931,p.50 (21 octobre 1398, Tomaso di ser Giovanni). BnuN, 1937, p.51-52 (Tieri di Benci), p. 53 (Tomaso di Ser Giovanni); Arpenru-, p. 54-56; Boysser, p.3541'F,uxtp., Acten,1889, p. 428-4291' Chronographia regum Francorum, t. III, p. 157-158; Var-ols, t. III, p. 2AO-2O|; PeNsnn, p. l8-19. Ar-panru- (documents), p.522-525;Eunre, Neue Mareialen, l9U), p.70; Varors, t. IIl, p. 200 n.4,201-202 Les deux sièges du palais apostolique d'Avignon (1398-14ll) Un autre épisode du siège attira plus encore I'attention des chroniqueurs. Dans la nuit du 25 au 26 octobre, l'élite des hommes d'armes qui assiégeaient le palais tenta de s'en emparer en passant par le conduit de l'égout de la grande cuisine. L expédition devait comprendre au total de quatre-vingts à cent personnes. Mais la première vague de l'assaut ne concernait qu'une soixantaine d'homrnes d'armes qui parvinrent à s'introduire jusque dans la cuisine. Un garde les remarqua. Aussitôt, la cloche d'alarme retentit et le palais entier se mobilisa pour les repousser. Après un vif combat, un assaillant fut tué et surtout cinquante-six d'entre eux furent faits prisonniers et enfermés, les chefs dans la trésorerie, les autres dans la tour de Trouillas3s. Pour les partisans XIII, un miracle avait eu lieu qui leur donnait des moyens d'échange pour libérer les deux cardinaux captifs. Pour ses adversaires, c'était l'échec d'une entreprise audacieuse qui devait assurer au roi de France le contrôle du palais, car les assaillants avaient pris soin d'amener avec eux des pennons fleurdelisés pour en prendre possession. de Benoît Ils avaient même emporté des sacs pour faire main basse sur ses richesses... Uétat d'esprit des Avignonnais était alors si hostile à Benoît X[I, perçu comme un Antéchrist, que I'on disait que, si un jour le palais était pris de force, le pape et les siens risquaient d'être mis en pièce par la population36. Pour faire oublier son échec, Boucicaut accentua le travail de sape contre le palais grâce à quatre mines: deux contre la tour Notre-Dame (alias Carnpane), une contre la tour de la Gâche et une contre la tour de la Peyrolerie. Mais les assiégés à nouveau déjouèrent ces tentatives en lançant eux-mêmes des contre-mines et en livrant victorieusement plusieurs combats sous terre37. Ces revers favorisèrent la reprise des négociations dans la première quinzaine de novembre où I'on fit trêve38. Après plusieurs jours occupés par une violente reprise des hostilités, une nouvelle trêve, durable cette fois, fut conclue le 24 novembre. Dès le lendemain, le pape put recevoir des ambassadeurs du roi d'Aragon, Martin I"', qui lui firent accepter que Ar.pARrIL, p. 56-58, 66; Bnuu, 1931 , p.52-53 (Tieri di Benci), 53-54 (Tomaso di ser Giovanni); Chronographia regum Francorum, t.1ll, p. 160-161; Bovssrr, p. 354; Ertnte, Neue Materialen, 1900, p. 70, 180; Ettr.r.e, Acten, 1889, p. 429; Chronique du religieux de Saint-Denys, t. II, p. 656-657; J. JwrNar Drs UnstNs, Histoire de Charles Vl, rolt de France, éd. J. Mrcnup et J. PouJouLAr, Paris, 1836, p.414; 36 37 38 Ver.ors, t. III, p. 202-203; PaNsrrn, p. 19-20. BnuN, 1937, p.54 (27 octobre 1398, Tomaso di ser Giovanni). Ar.penrtl, p. 66-67 ; BnuN, 1937, p.54 (Tomaso di ser Giovanni). BnuN, 1937, p. 55 (Tieri di Benci; Tomaso di ser Giovanni). Vlles en guerre les rois de France et d'Aragon règlent son sort et décident de l'union de l'Église". Les tractations sur le sort de Benoît XIII (déc. 1398-mai 1399) Dès lors, une nouvelle phase s'ouvrit pour le siège du palais. Il ne s'agit plus que de maintenir le blocus, sans entreprendre d'actions offensives. Pour ce faire, Geoffroy Boucicaut fut remplacé (vers le 16 novembre) corlme capitaine par Georges de Marlioz, sénéchal de Provence, tandis que Pierre de Balleyson, un ancien fidèle de Clément VII comme Marlioz, devint viguier d'Avignons. L'essentiel se jouait sur le terrain diplomatique, à Paris, où s'étaient rendus des cardinaux, des ambassadeurs d'Avignon et des émissaires du roi d'Aragon''. Toutefois, pendant ces pourparlers, les partisans de Benoît XIII ne restèrent pas inactifs. Une grande expédition navale fut en effet montée en Catalogne avec l'appui du roi d'Aragon". La flotte, dirigée par Pedro de Luna, parent du pape, partit de Collioure et arriva à l'embouchure du Rhône. Au total, elle comprenait une trentaine de navires de toutes les tailles qui arboraient I'image du Christ en croix et celle de la Vierge Marie pour signifier qu'il s'agissait d'une croisade". Le l0 janvier 1399, la flotte atteignit Arles et Trinquetaille où elle stationna en bons termes avec les habitants*. Puis, les 24 et 25 janvier, elle essaya de remonter vers Avignon mais elle ne put guère avancer cil, de façon exceptionnelle, le niveau du fleuve était très bas. Seuls quelques petits 39 40 41 Areanru-, p.68-70,73; Bunv, 1931,p.55-56 (Nicolaio di Bonaccorso). Enru-e, Neue Materialen, 1900, p. 69; Arpanrn, p.68. La solde de Georges de Marlioz commence le 9 décembre selon le registre des dépenses du Sacré Collège: Archives secrètes du Vatican [désormais ASV] : (Cam. Ap.) Collect. 43, f .72v. BnuN, 1937, p. 57 lNicolaio di Bonaccorso); Alpenrr, p.72-14; F. Ch. CanxExt, "Chronicon parvum Avinionense de Schismate et bello (139'7-1416)", Annales d'Avignon et du Comtat Venaissin, 1916, p. 162 [désormais cité Cannnnt] ; Et*le, Neue Materialen, 1892, p. 288-300 ; Bovssrr. p. 354. G. Moller, « Épisodes du siège du palais des papes au temps de Benoît XIII 1398- 1399) >>, Revue d'Histoire ecclésiastique, 23, 1927 , p. 489-50 ; M. Sousslt-e, « Expédition des Catalans à Avignon en 1398 >,, Anntnire de la société des Amis du palais des papes,2l, 1932, p.3l-44; S. Puc v Purc, Pedro de Luna. Ultimo papa de Avifiôn, Barcelone, 1920, p. 455-457 . ( Chrunographia regun Francorum, t.lll,p. 162;' BnuN, 1937, p. 57; 1938, p.21,22, 23 ; Bovssrr, p. 355 ; G. Monat, « Episodes du siège... », p. 494-495. E,rlr:-p., Neue Materialen, 1900, p. 24-28; BnuN, 1938, p. 22,24 (Tomaso di ser Giovanni); VALols, t. III, p. 213 n.3. Les deux sièges du palais apostolique d'Avignon (1398-1411) navires purent se rendre jusqu'à Tarascon et Vallabrègues4s. Toute l'expedition était donc par la force des choses bloquée et les navires n'eurent plus qu'à rebrousser chemin par petits groupes et à rentrer chez eux. Le 4 rnars, l'évacuation était terminée. L échec de l'expédition était donc complet6. Mais elle avait mobilisé le Sacré Collège qui, enjanvier 1399, soldait 148 arbalétriers venus de Provence et 129 hommes d'armesa7. Pendant ce temps, un compromis fut atteint à Paris. Le pape devait reconnaître la voie de cession, faire évacuer ses troupes et se placer dans son palais sous la protection du roi de France. Avec un entourage réduit à une centaine de serviteurs, il serait sous le contrôle de plusieurs gardiens désignés par Charles VI. Mettre en application ces conventions à Avignon fut cependant l'affaire de plusieurs semaines, plusieurs mois même. Le prernier résultat des tractations fut la libération des deux cardinaux prisonniers de Geoffroy Boucicaut, Martin de Zalva et Bonifacio degli Amrnanati'8. Puis le pape conclut un accord de principe sur sa situation future et reçut des garanties des cardinaux et de la ville d'Avignonoe. Dès lors, l'évacuation du palais put se faire du 29 avril au 20 rnai. Les arbalétriers, les hommes d'armes et les serviteurs en surnombre prirent congé de leur maître, qui n'eut plus à son service que cents clercs et familiersso. En conséquence, Avignon et le Sacré Collège licencièrent certains hommes d'armes qui assuraient la garde du palais depuis le départ de Boucicauts'. Bovssrr, p.35,5;Alpanrn-, p.70;BnuN, 1938, p.24 (Tomaso di ser Giovanni); G. Moller, « Episodes du siège... », p. 498. 46 Bttux, 1938, p.22-25; Bovssnr, p. 355-356; Chronographia regum Francorum, t. III, p. 162;Anarru. p.70. 47 ASY : Collect. 43, f .75r-83r. BnuN, 1938, p.26-21 (Tomaso di ser Giovanni); Arpenrr, p.75-77,92; EHnr-r, Acten,1889, p. 431. E. Manrrue, U. Duneno, veterum scriptorum et monumenlorwn historicorum, dogmaticorum, moraLium Amplissima collectio, t. VII, Paris, 1733, col. 6M-649. Pour les serments des personnes qui quittèrent le palais, cf. lbid., t. Yll, col.650-653. Pour la liste du dernier carré des fidèles qui prêtèrent serment les 4et5 mai, cf . Ibid., col.653-656. Les gens d'armes détenus dans le palais furentégalement libérés, cf. BnuN, 1938, p.28 (T. di ser Giovanni);ASV: Co1lecr. 48 49 50 43, f.l00r. 5l Ainsi, la troupe de 44 homrnes d'armes de Pierre de Balleyson fut licenciée le 22 tnu, et onze hommes d'armes le furent ensuite le 5 iuin 1399, ASY : Collect. 43, f.99r. 104r. Vlles en guerue an pape prisonnier, une ville sous tension (juin 1399-mars 1403) Le contrôle exercé sur la ceinture de palissades qui entourait le palais restait cependant tÈs étroit. Les cancels étaient gardés par une troupe forte de 122 piétons en juin 7399 et de 65 hommes en octobre suivant52. Par endroit, il y avait trois barrières successives à franchir pour accéder au palais. Benoît XIII et ses fidèles vivaient dans des conditions sévères, ne recevant des vivres qu'au jour le jout'3. Ils recevaient aussi souvent des insultes de leurs gardiens. Malgré cela, Benoît XIII restait sur la même ligne de conduite. Se laissant pousser une barbe de patriarche en signe de deuil et de détention'4, il se considérait comme irrévocablement pape et était donc << de mauvaise volonté » à l'égard de toutes les tractations faites au nom du Sacré Collège, avec qui il ne voulait avoir aucun contactss. Sa résistance et son intransigeance marquaient même ses adversaires. (< Il fait sentir que c'est lui qui gouverne et qu'il tient les clés. Assurément il a enduré bien des épreuvest6 ». Benoît XIII accumulait en secret, mais devant notaire, des réserves sur l'accord qu'on lui imposaits'. Après de longs mois d'échanges diplornatiques, il accepta de se mettre sous la protection du duc d'Orléans (25 mai 1400). Mais ce ne fut que le 17 août 1401 que les gardiens désignés par le duc entrèrent en fonctionss. La ténacité du pape mettait à l'épreuve les partisans de la soustraction d'obédience. Une subtile guerre psychologique se jouait, nourrie par les rumeurs et les actions de propagande. En 1400, les métiers et les dirigeants municipaux organisèrent ainsi deux grands jeux théâtrauxse. En mars, ce fut une représentation du siège de Troie. Le thème choisi était clairement politique dans une ville qui avait été le théâtre, si l'on peut dire, d'un siège retentissant. Troie servait de sz s: s+ ss s6 sz ss ASV : Collect. 43, f. 106r-106v, 723v -124r ; Alrenrn-, p. 79-80. BnuN, 1938, p. 29 (Fabri Tolosini), p. 33 (Nicolaio di Bonaccorso). Arpanru-, p. 106, 120. BnuN, 1938, p. 29,31,32,33,35... BRUN, 1938, p. 32 (23 octobre 1399, Tomaso di ser Giovanni). Cf. Ennrp, Neue Materialen, 1892, p. 302-308. Ces gardiens étaient Robin de Bracquemont et Guillaume de Mévouillon, Amanru-, p. 108, 120, 121; Varors, t. III, p.231. 5e BRUN, 1938, p. 35-36 (16 juin 1400, Tieri di Benci). Pour l'édition de cette lettre en italien, cf. G. Couex, « Mystères reügieux et profane en Avignon à la fin du xrrr siècle », Bulletin philologique et historique (jusqu'en 17I5) du CmS, D38-1939, p. 89-94. t12 l,es deux sièges du palais apostolique d'Avignott (1398-14ll) métaphore du palais apostolique, et par le théâtre, les Avignonnais réalisaient de façon symbolique ce qu'ils n'avaient pu accomplir pour la forteresse de Benoît XIII. A la Pentecôte, le thème était plus courant: un jeu de la Passion du Christ. Mais la représentation fut imposante, impliquant deux cents acteurs en costume qui se produisaient devant une énorme foule de dix à douze milles personnes selon un témoin. Assurer I'ordre durant la représentation fut I'occasion d'une véritable parade à cheval des trois cents rneilleurs bourgeois de la ville, annés de pied en cap. Cependant, les lendernains de cette manifestation civique furent marqués par des divisions sérieuses. Le blocus interminable du palais créait des tensions au sein des élites avignonnaises d'autant plus que les Provençaux avaient restitué leur obédience à Benoît X[I. En août 1401, une faction se constitua contre l'assesseur et les nouveaux syndics de la ville, accusés d'être favorables au pape. Elle comptait notalxment dans ses rangs Marco Quelli, un Lucquois qui avait été longtemps à la tête d'une troupe de gardiens des cancels6o. Ces hommes imposèrent qu'une commission de huit membres assistent, et en réalité contrôlent, les syndics6'. Puis à I'automne, occupant la rue en armes, faisant pression sur les syndics et le maréchal de la cour romaine, ils procédèrent à plusieurs arrestations, sous le prétexte d'un complot (imaginaire) visant au saccage de la ville. Parmi Ieurs victimes se trouvaient le juriste piémontais Augustino de Valgueria et François de Cario, docteur en droit et assesseur de la ville; tous deux furent condamnés à mort. Ces violences, qui débordèrent les intentions des cardinaux, marquèrent l'apogée du contrôle de la ville par les ennemis du pape. Mais ceux-ci ne purent maintenir longtemps leur position et l'année suivante, le calme revint dans la cité6'. Le retournement de situation et les leçons du siège Benoît XIII força le destin en s'évadant du palais dans la nuit du I I au l2 mars 1403. Attendant I'ouverture des portes, il put sortir de Ia ville avec quelques fidèles, monter dans une barque qui l'attentait, descendre Il fut connétable de vingt puis de douze hommes de juin à décembre 1399, ASV: Collect. 43, f. l 03v, 106v, 109v, 1 1 3v, l l 8r, l2lr, l24r, l 32v. Un jour, il fit venir des prostituées aux barrières qu'il fit se dénuder devant les gens du pape, Ar-eenrrl, p.80. 6l Alpanrn-, p. l19-123. 62 Bnut, 1938, p. 38-39 (Tieri di Benci), p. 39 (Tomaso di ser Giovanni); Arpemn-, p. 124-130; Canrunr, p. 163-164; Bovssnr, p. 364. 113 Vlles en guerre le Rhône et joindre Châteaurenard, village qui lui était acquis6'.Le 14,il reçut la visite du comte de Provence Louis II d'Anjou. Ensuite, il eut la satisfaction de voir défiler tous ses anciens adveisaires qui lui firent amende honorable: les cardinaux, les Avignonnais et lei Comtadins Ç8 qars 1403). Dans la nuit du 30 au 3l mars, les Avignonnais détruisirent les palissades qui entouraient le palais aux cris de vive le " avait papg ! ,f*. Mais Benoît XIII n'oublia pas la pénible épreuve qu,il subie: il ne retourna plus jamais à Avignon.-Dans ses déplacements en Comtat, en Provence puis en Ligurie, il ne cessa de s'entourer d,une forte escorte militaire ou plutôt d'une petite armée6s. par ailleurs, il chercha à accroître le potentiel militaire du palais d'Avignon, auquel il devait tant. Dès décembre 1403, les maisons situéàs aux abords immédiats du palais, à l'ouest, furent détruites. De grands travaux commencèrent en février 1404, avec la construction d'une nouvelle muraille reliant Notre-Dame-des-Doms au petit Palais; ils étaient bien avancés en juillet66. Le projet était d'édifier un vaste ensemble fortifié composé du palais apostolique, du petit palais, du rocher des Doms et de la tour du Pont. La mise en défense fut complétée en janvier 1405 par ra destruction du clocher de Notre-Dame-des-Doms et l'édification â'une puissante tour sur le Rocher, la tour Quiquengro gne61 . Le palais apostolique fut ainsi incorporé dans un système de fortifièation cohérent, qui l'isolait de la ville, symbole s'il en est des nouveaux rapports entre le souverain et ses sujets. signe aussi que I'on envisageait des troubles futurs. y purc, pedro de Luna, p.492; Al-rARrtr-, p. ,139; Bovssnr, p.367; S. Purc Cax.ranr,.p. 164; Chronique du religieux de Saint-Denys, r. III, p. '10-75;p. ÉaNsrsn, « L'évasion de Benoît XIII du palais d'Avignon'(11 marô t+O3y >>, Annales d' Avignon et du Comtat Venaissin, 18, 1932, p. 41 -49. Arranrn-, p.140-142; Boyssar, p. 368; Caxnsnr, p. 164; Chronique du religieux de Saint-D-enys, t. lII, p. 84-85; Erm,m, Acten, 1889, p. M9-452; VALors-, t. III, p.325-333; S. Purc Y Purc, Pedro de Luna,p.493. Ainsi l'effectif de I'escorte du pape était de l0l hommes d'armes et 44 arbalétriers à Nice le 26 janvier 1405, et de 137 hommes d'armes et 43 arbatétriers à Gênes en juin 1405, ASV:.Reg. Avin. 321,f.|&r,'243v. 67 BovssBr, p.369-370; Cennenr, p. 165; Bntx, 1938, p. 50 (Tieri di Benci), p.5l (Tomaso di ser Giovanni). (Tomaso di ser Giovanni); Cennonr, p. 165; Bovsser, p.373; BnuN, 1938, p. J5-6 P. PaNsmn, p.27-28. ks deux sièges du palais apostolique d'Avigrutn (1395-14ll) Le second siège du Palais des Papes (1410-1411) Après l'échec d'années de négociation entre Benoît XIII et les pontifes romains successifs, Boniface IX, Innocent VII (1404-1406) et Grégoire XII (1406-1415), la cour de France déclara le pape d'Avignon hérétique et schismatique et adopta le parti de la neutralité (25-mai juin 1409,le concile de Pise déposait Benoît XIII ainsi que 1408). Le 5 Grégoire XII. Ces décisions n'eurent toutefois pas de conséquences immédiates pour Avignon et le Comtat Venaissin qui restèrent dans l'obédience de Benoît XIII rnêrne si beaucoup étaiènt favorables au nouveau pape élu par le concile, Alexandre V68. Par précauticn, en décembre 1409, le capitaine d'Avignon (et recteur du Comtat Venaissin) Rodrigo de Luna paracheva la défense du palais en chassant les chanoines de la cathédrale Notre-Dame-des-Doms. Le 26 janvier 1410, il fit publier à travers les églises d'Avignon, une bulle clui excommuniait les cardinaux et I'université de Paris comme hérétiques et schismatiques6'. L'invasion des terres pontificales était alors imminente. Le basculement d'Avignon dans le camp d'Alexandre V Le cardinal Pierre de Thury, vicaire d'Alexandre V, choisit cle s'ernparer d'abord du Comtat Venaissin avant s'occuper du sort d'Avignon. Son capitaine Randon de Joyeuse envahit le pays entre le l0 et le 12 févier l4l0 et logea à Sarrians puis dans d'autres localités(Malemort, La Roque-sur-Pernes, SainçJean-de-Vassols, Sainte-Cécile). L'effectif de ses troupes était de I'ordre de 500 à 600 cavaliers et de 200 fantassins?,. Les négociations avec les corntadins s'avérèrent particulièrement longues car il fallait passer outre I'autorité des officiers de Benoît XI[. Finalement, après plusieurs contretemps, [e parlement public de Carpentras, approuva,le 17 mars, la réunion des Etats qui reconnurent l'autorité d'Alexandre V, seul vrai vicaire du Christ sur tene (9 avril). Le 2l avril, Philippe de Thury, archevêque de Lyon, et frère du cardinal, entra dans la capitale du Comtat Venaissin avec I'année de conquête. Il fut reçu pratiquement ot BnuN, 1938, p. 176-177 (Tomaso di ser Giovanni); Areanru_, p. 194. os Cannrnr, p. 166-167 ;ALpenrn, p. 199; Valors, t. IV p. 160 n. 4. zo BnuN, 1938, p. 183, 189 (11 mars et 16 mai 1410, T. di ser Giovanni); ADV: C 7, f.69v;3E 4511359,5 mars 1410; 3 E 4511364,f.29r-29v;AC Carpenrras: BB 35, f.33r, 57r-58r;AC Pernes: CC 22, 1409-1410, f.20r; Par.rsmn, p. 35. Villes en guerre comrre un souverain pontife puisque les enfants, des roseaux à la main, l'accueillirellt aux cris de << Vive notre seigneurAlexandre ! >> et que l'on fit le soir des feux de joie sur le clocher au son des trompettes et des cornemusesTr. Plusieurs localités, dont Oppède, Sorgues et Malaucène, restaient cependant dans l'obédience de Benoît XI[. Les circonstances étaient des plus favorables pour obtenir le ralliement d'Avignon d'autant plus que les officiers-de Benoît XIII étaient divisés depuis des mois7,. Deux carnps sensiblement égaux s'opposaient: d'un côté, Bernard de So, vicomte d'Evol, capitainé du palais apostolique avec son.contingent de catalans, de l'autre ies soldats aragonais, navarrais et castillans et les Catalans de la troupe de Rodrigo de Luna, capitaine de la cité7'. Les événements se précipitèrent le 19 avril 1410'a. Ce jour, Rodrigo de Luna voulut -que les notables d'Avignon s'accordent avec lui pour rester unis tani que cela serait possible. Mais pour cet accord, il n'eût à sa table que onze personnes qui -de avaient accepté son invitation. comme il en attendait unê ffentaine plus, il les fit convoquer vers le milieu de la journée. Aucun ne vint car ils craignaient un piège. De fait, les hôtes de Rodrigo devinrent aussitôt ses otages qu'il emprisonna dans le palais apostolique. Voyant cela, la population prit les armes et Ies Catalans, après avoii mis lè feu à deux livrées cardinalices proches du palais, se retranchèrent et tirèrent les premiers coups d'arbalètes et de bornbardes. La guerre était ouverte. Le lendemain rnatin, les Avignonnais fîrent entrer dans la ville les premiers arbalétriers et hommes d'annes, rejoints Ie soir par Philippe de Thury accompagné de plusieurs capitainesr'. Il avait donc suffi d'une seule journée pour qu'Avignon abandonnât l'obédience de Benoît XI[, idée qui couvait depuis le concile de Pise. Le rapport de forces était tout à l'avantage des partisans de la nouvelle obédience. Ils pouvaient compter sur la granàe majorité du Comtat Venaissin, sur la population avignonnaise ei sur une année de I'ordre de mille hornmes, dont quelques soldats du Venaissin. 71 AC 72 !ès juin 73 Carpentras : BB 35; ADV: C 7, f .33r-37r,42r-52r,1Or-7Ov; peNsmn, p. 35-38. le pape avait envoyé le chroniqueur Martin d'Alparril et l,abbé solsone pour résoudre les tensions. ces émissaires avaient fait une inspection règle du palais et de la ville, cf. Ar.perru., p. 192,221-222,226-239. Arrexru.. p. 198. 1409, de en 7t Les so^urces dont disposaient N.vAr-ors et P. PaNsrun ne leur permettaient pas de bien connaître ces événements, qu'ils datent à tort du 26 avril. Les lettres de-Tomaso di ser Giovanni permettent de faire un récit nettement plus complet, Bnun, 1938, p. 185-189; CannEpu p.167; Boysspr, p. 388; Ar_penrn., p. 199. ts citons Randon de Joyeuse, L'Hermite de la Faye, sénéchal de Beaucaire et Régnier Pot, gouverneur du Dauphiné. 116 Les deux sièges du palais apostolique d'Avignon (l3gS-l4ll) De I'autre côté, les effectifs étaient aussi plus importants qu,en Alors que pour le premier siège,les serviteurs et lei clercs éàient majoritaires, en 1410, environ quatre à cinq cents combattants défendaient le nouveaü compleie fortifié ôonstitué du palais 1398. apostolique, du petit palais, du rocher des Doms et du pont76 (carte 2). De façon étonnante, alors qu'ils s'étaient entredéchirés pendant des mois, les membres de la garnison firent d'emblée preüve d,une grandé combativité: ils multiplièrent les softies et l'une d'entre elles eut des conséquences durables puisque la portion en bois du pont sur le Rhône fut incendiée7'. Leur situation semblait cependant sans'issue car le palais était encerclé de palissades et étroitement surveillé par les contingents qui ne cessaient de se renforcer. Bref, quand le cardinal de Thury fi-t son entrée en Avignon en grande pompé, le 14 mai, la fin du conflit paraissait proche aux contemporâinsrl L'artillerie des deux camps Le 20 mai, le conseil municipal d'Avignon désigna des élus de la guerre chargés de très forts pouvoirs financiers,î. ces dirigeants mettaient beaucoup d'espoir dans I'artillerie et notamment dàns la grossa bombarda arrivée d'Aix-en-Provence le l9 mai, conduite par un attelage de trente-six chevaux. Mais elle écrata peu après sa mise en action et la ville d'Avignon dut la refondre entièremènt, à partir du 2l juillet,_ pen{ant qu'elle finança la fabrication d,unè pièce comparable8.. De fait, les bombardes furent particulièrement nombre_uses à servir pendant le siège. Elles furent placéès dans la livrée SainrMartial, devant l'église sainrPierre, la livréé vieille de viviers, la place du Puits des Bæufs... Pour les servir, on recruta des spécialistes venus parfois de loin comme << maître Jean de Hollande, bônrbardier, maître de mines_, engins et bombardes du très illustre prince le duc de Bourgognesr. >>. Les comptes nous révèlent les problèmes d'intendance insoupçonnés que posait l'ernploi durable de plusieurs pièces d'artillerie à '17 18 poudre. Tout d'abord, I'approvisionnerrent en pbudre justement Tomaso di ser Giovanni évalue la garnison de 350 à 500 hommes, BnuN, 193g, p. 183, 187, 190 n.19. selon un ancièn membre de la garnison, ils étaient 50ô, avec de très grandes réserves de vivres, ASV : .Insrr lZisc. S153, f. t ôv. BnuN, I 938, p. I 87, I 89 (Tomaso di Ser Giovanni) ; peNsrrn, p. 40-41, 164. BnuN, 1938, p. 189, 190 (Tomaso di ser Giovanni). 79 Pnusmn, p. 60. 80 PaNsrcn, p. 42-44, 124- 128. PaNsmn, p.42. 81 tt7 Wlles en guerre n'allait p.as de soi. Des marchands durent s'approvisionner en salpêtre à Paris et à Marseilles'. De plus, les pierres dé bombarde devaient être produites dans des carrières spécifiques. Elles furent extraites de plusieurs endroits : villenewe-lèi-Avignon, Termes, Beaucaire, BourgSaint-Andéol, Barbentane, Tarascon, Èoquemartine et un carrièie située pt"_. d" la chartreuse de Bonpas en comtatr,. pierre Morel, un habitant de Lyon, descendit le Rhône dans un bateau chargé oe quaÉ-vingt-trois pierres pour la bombarde d'Aixst. .cependant les en_gins à trébuchet n'étaient pas démodés. Les deux engins utilisés en 1398 furenr redéployés au niveàu de la livrée de Murol et de,I'église.saint-symphorien pour iépondre à l'artillerie pontificale et la ville pnt l-lnitiative de construire deux nouvelles pièces*t. comme les catalans essayaient de les incendier, il y avait toujours à proximité des tonneaux d'eau, qui étaient remplis par ies juifs djla villes'6. engin devait servir-à infeèter les ennemis en projetant . Le premierremplis d'ordures. À la fin de la guerre, t" ;.rii I_eonet lorl"1"x *::, l'alhler tut arnsi payé pour avoir fourni 250 barils rernplis "d,ordure et o excrements qur furent projetés sur le palais... on fif venir aussi un baril d'eau fétide de villenèuve-lès-Avignon. une autre tentative de « guerre chimique » fut essayée l'année sùvante: une bombarde projeta une mixture composée d'arsenic*7. Le deuxième engin construit, placé dans la livrée de Thurv. était un . engin rec.ord puisqu_'il devait lancér des projectiles de dix qririàu*, .oit environ 400 kilos. Les comptes nous apprénnent qu'il fut'construit en huit jours seulement, du 1"' au g jüin, grâce â ur" -àùiiisation exceptionnelle d'arlisans: 184 rnaîtres fuitiers, 64 manceuvres, 9 scieurs, un bourrelier et son valet pendant cinqiouis pour la fronde et un cordier pendant trois jours. prix fotal de la rnîn d'æuvre: 94 florins 6 soust*. [,es engins étaient donc peu coûteux relativement à une solde mensuelle d'homme d'armes quiétait de 20 florins. Mais cet engenium seu trabuncula ne remqlit pai les attentes puisque dès le 21 iuin, il était en réfection. Les lirniies techniques àe t"artitterio-a-trduuctret avaient été atteintes. tz AC Avignon: EE 8, f.l66v-167r,225r. a: AC Avignon: EE 8, f.6r,9r-11r,31r,33v,50v, 8't AC.Avignon: EE 8, f.46r. Il était 51r, l43r_143v, 14gv... sans doute apparenté à pierre originaire de Lyon et archirecte des Célestins d,Aiignon. 8s Bnuu, 1938, p. 191 (3 juin 1410, Tomaso di ser Giovanni); so PaNsmn, p.69. az Par,rsER, p. 45 n.3, 68, 88-89. 8s PaNsrEn, p.44-45 n.3. ll8 Morel (f1402), peNsmn, p. 45. Les deu-r sièges du palais apostolique d'Atignon ( 1398-1411) Du côté des Catalans, I'arsenal est bien connu: 8 engins à trébuchet, dont trois neufs, 6 bombardes, 9 canons plus petits, 75 balistes, sans compter les arbalètes ordinaires8e. Le bombardement venu du palais fut particulièrement intense au début du siège à tel point qu'une vigie fut payée par la ville pour rester sur le clocher de Saint-Agricol et actionner les cloches dès que les machines du palais étaient en service'o. Le trébuchet qui avait été dressé dans la grande cour envoyait des pierres de six quintaux (240 kilos)jusqu'aux Changes, capables de traverser quatre ou cinq étages. Par chance, fin mai, il n'était plus en service, l'ingénieur étant partie'. Par ailleurs, pour empêcher les tirs de viretons dans la rue de la Grande Fusterie depuis le petit Palais, les Avignonnais firent tendre une toile pour que les passants ne soient plus pris en enfiladee2. L' encerc leme nt de la fortere ss e pontific ale (mai-déc. I 4 I 0) Les abords du palais furent rationnellement occupés par les assiégeants. Les principaux capitaines logeaient dans les livrées: le gouverneur du Dauphiné dans la livrée vieille de Viviers, le sénéchal de Beaucaire dans la livrée Saint-Martial, le bailli du Vivarais dans la maréchalerie. Des barricades de bois bloquaient les rues accédant au palaise3. L objectif des assiégeants était de s'emparer en priorité de la zone du pont du Rhône. Pour empêcher les possibilités de sortie par le Rhône, un château de bois avait été construit sur l'île d'Argenton et pourvu des trois bombardes et de soldatsn*. La tour du pont focalisa l'effort des Avignonnais. On chercha vainement à l'incendier, puis on y concentra les tirs d'artillerie tout en entamant les travaux de sape avec une minees. Début juin, on pensait que la tour, démolie en partie, était prête à s'effondrere6. Mais elle tint debout encore plus de trois mois et c'est un siège de longue haleine qui s'installa des deux côtés. L'initiative n'était pas que dans le camp de la ville. Les Catalans parvinrent à incendier la livrée vieille de Viviers. Au début de juin 1410, 89 Ar.ranru., p.226-229 so PeNsn:r, p.46. (inventaire de juin 1409). qt Bnuu, 1938, p. 191. lz PaNsrrn, p.40. s: PeNsrsn, p.40-42. e+ PeNsrsn, p. 40, 49, 123-124. qs La mine contre la tour du pont fut commencée au mois de so Bnux, l9l-192 (3 et I0 juin 1938, p. 1410, Tomaso di juin, PaNsmn, p. 49. ser Giovanni). Wlles en guerre ils réussirent à obtenir l'alliance d'une compagnie savoyarde qui était sur.place et qui devait piller la ville. Le complôt nrt oelôue de justesse mais cela ne mit pas fin, par la suite, à de nornbreu.". âé**"1i", por. monter des expéditions de secourse?. Durant l'été, à plusieurs ."prir"., des commandos menèrent des actions de représaillei sur le Rhône et firent des prisonnierseE. surtout, le l* août,'Rodrigo de Luna fit une sortie avec deux cents soldats, incendia la grue quimenaçait la tour et infligea de lourdes pertes aux assiégeantseq. Les Avignonnais, à la rni-août I4 I 0, répliquèrent par un assaut de la touret du pont. Ils y perdirentle chat monté sur une barge, perforé par la bombarde des catalans installée dans la chapelle saini-Nicolas, sur le pont,.mais ils purent prendre possession d'une arche de pierreioo. Dès lors, les catalans durent se replier: le 6 septembre, ils défruisirent une arche depierre d^u pontlo'. jours plus tard, le travail de sape Qyelques porta enfin ses fruits. Le.lz (ou lr 13) ieptembre, la tour du pont s_'écroula et les Avignonnais eurent ainsi la maîtrise duRhôner'2. Du côté du palais, quelques avancées avaient également été faites. Grâce à une mine commencée depuis juillet, le murà'enceinte extérieur du jardin fut percé et.les Avignonnais prirent le contrôle du jardin,o3. _ A l'automne, les assiégeants continuèreni à resserrer les positions des catalans. Deux bombardes installées sur le pont leur perinettaient de tir.er sur le petit Palais tandis que deux fortins sur barge, arnarrés entre les piles de l'arche détruite, rendaient possible un" rriréillance accrue 9r-9g}9 Autour du palais, à des endroits stratégiques, des murs avaient été édifiés pour renforcer le blocusr*. Du côté dés'catalans, on essayait d'activer.les projets de secours grâce à des émissaires qui parvenaient à sorlir nuitamment par une poteme au bas du Rocher... ez qt CerREru, p. 168; BruN, 1938, p. 192 (10 juin); peNsrnn, p.46_47. PaNsmn, p.165-167. sq S. Purc YPurc, Pedro de Luna, p. 225 n. l. too PaNsren, p. 50;AC Carpentras : BB 36, f.l3r. tot Bovssnr, p. 388; PaNsmn, p. 167. toz Boysssr, p. 388; Canx.pnr, p. 168;paNsmn, p.51. to: PaNsmn, p.54. 52-53,54,56. ro+ PeNsrnn, p. 120 lzs deux sièges du palais apostolique d'Avignon ( I 398-1411 ) ÿIenaces extérieures et assauts généraux (janvier-juillet 1411) À la date de la mort du cardinal de Thury, le 9 décembre 1410, la guerre des Catalans >> ne donnait pas de signes d'affaiblissement. C'était désormais au nouveau vicaire général, François de Conzié, de superviser la lutte. Le siège entra alors dans une nouvelle phase du fait << surtout des dirigeants de la ville d'Avignon. Le 28 janvier en effet, ils décidèrent de lancer un assaut général contre la forteresse. Cet assaut fut présenté comme une véritable croisade contre les ennemis de foi grâce à une bulle qui fut diffusée aux villes voisines, comme Carpentras, et proclamée le 12 février dans l'église Saint-Didier d'Avignonr0'. Pour I'attaque, on construisit spécialement un château flottant qui fut amarré devant la poterne du Rocher et une sorte d'engin servant d'échelle pour escalader la muraille neuve édifiée par Benoît XIII. L assaut se déroula le l5 février, sur tous les fronts, ce qui était nouveau, tant contre le grand palays que contre la rocca de Dons,le castel devant la posterlla de la Rocca (soit le château Saint-Martin) etle petit palavs. Mais cet assaut fut un échec payé au prix de lourdes pertesr6. Pourtant, deux nouvelles attaques, plus limitées, furent tentées par Ia suite, le 9 mars et le 5 avril, mais toujours sans succèsro?. Entre ces assauts, la ville d'Avignon soldait des troupes réparties tout autour du palais. Leur effectif s'élevait, en mars l4ll, à 152 hommes d'armes, dont 143 disposaient d'un valet, et 182 arbalétriers'o8. Il s'agissait de mercenaires même s'il y avaient quelques Comtadins. Deux montres nous les décrivent physiquement, fréquemment couverts de cicatrices sur les mains, les oreilles et le visage'æ... Ces assauts répétés s'expliquaient sans doute par la volonté de s'emparer au plus vite de la forteresse alors que l'on craignait les expéditions de secours. En effet, le capitaine d'Oppède avait profité de sa marge de manæuvre pour coordonner, grâce à des messagers, la descente de compagnies savoyardes et françaises. Contre cette armée, le Comtat fut un temps en alerte, mais grâce à l'action efficace des officiers tos Parsron, p. 60-61 I J. FonNrny, Histoire du Comté Venaissin et de la ville d'Avignon, Avignon, I 909, t. ll, p. 474-477 ; AC Carpentras : BB 36, f. l6v, 49v-50v. t06 CennnRt, p. 169 (mais le chiffre de 4000 morts est naturellement à rejeter). IV p. I 65-1 66 ; PaNsrcn, p. 61. Fonxeny, t. l, p. 425-426; Valors, t. to7 Pexsm,n, p. 62-63, 66. tos AC Avignon: EE 6, f.lr-12r,30r-33r; PaNsrcn, p.65-66,134-136. Cf. AC Avignon: EE 5, cahier inséré, f.1v-2r,4r-7r. 109 Wlles en guerre du roi de France, ces capitaines abandonnèrent leur projet. un autre danger se précisa imrnédiatement à l'horizon: celui^d'üne flotte de secours, commandée, comme en 1399, par pedro de Luna. Début mai 141 l, la flotte forte de vingt-deux navirei était entrée sur le Rhône. cela rnotiva un nouvel assaut du palais"o. Mais les Avignonnais prirent aussi les devants pour contrer la flotte catalane. Irs firenitendre une chaîne au niveau Oler§s pour barrer le fleuve et envoyèrent des troupes en Provence'rr. De leur côté, une partie des Catalans, 120 à 140 hommes environ, descendit à terre et se dirigea à cheval vers le comtat. Mais le 29 mai, ils furent déconfits par le sénéchal de provence au niveau de Mallemort, et devinrent ainsi les prisonniers du comte de provencer2. Quant aux navires catalans qui éiaient sur le Rhône, ils remontèrent 1u-sculà Arles où la chaîne les empêcha d'avancer plus et ils durent faire derni tour. Leur équipage ravagea alors la région et s'empara de La Ciotat'13. Infrn du conflit L'échec de la flotte catalane permit une sortie du conflit. La cour de France intervint plus directernent sur les événements en désignant comme ca.pitaine général du siège le chevalier philippe de poi-tiers, seigneur d'Arcis et de Dormans"'. Les Avignonnais tontinuèrent à assurer un siège étroit du palais apostolique, mais avec des troupes moins nombreuses à mesure que lés tractations s'intensifiaient,,r. iJn accord put .enfin être conclu le 29 septembre entre d,une part, le camérier et le nonce du pape Jean XXII èt d'autre part, Bernard de so, vicomte d'Evol et Rodrigo de Luna. Cet accord èoncemait le palais apostolique et oppède. Il assurait la cessation des hostilités et un ravitaillement des assiégés pendant une période de cinquante jours à partir du l"'octobre. ce délai pouvait être rnis à profit p#tes capitaines pour demander à Benoît xm une année de -secours officiellement mandatée. En l'absence de secours, le palais apostolique et Oppède devaient être rendus au sénéchal de pràvence qui les relnettràit au tto Cf.AC Carpenrras: BB 37, f.llr; peusmn, p. 67 n.l. ur PANSTER, p.70-12. tt2 Leur sort fut immédiatement.l'objet de beaucoup d'attention de Ia part d,Avignon, du roi de France er même de l'Unlversité de paris, paNsrnR, p. B_7a, 14O_14r. u3 BoyssEr, p. 388 ; PaNsrpn, p.74, 143-l4y'. tt+ Philippe de Poitiers arriva sur place le 29 juillet 141 l, paNsrnn, p. g6_g7. us PeNsrrR, p.93-94. t22 I*s deux sièges du palais apostolique d'Avignon (1398-1411) camérier. Les assiégés auraient alors des sauf-conduits pour rentrer dans leur pays"6. Benoît XIII eut beau, de son château de Peniscola, désapprouver I'accord et espérer dans I'arrivée du duc de Bourbon, avec qui il avait traité, cela ne changea rien. L'évacuation de la forteresse pontificale eut bien lieu le 23 novembre l4ll. Les Catalans voulaient sortir avec les honneurs, bannières déployées. Les Avignonnais les forcèrent à quitter précipitamment le palais. Et ils se jetèrent contre les fortifications du rocher et ruinèrent de fond en comble la muraille reliant le petit Palais au palais apostolique, en dépit de l'excomlnunication prononcée contre eux117. Les quatorze mois de résistance des Catalans témoignent des grandes capacités défensives du Palais des Papes, qui somait de l'épreuve sérieusement endommagé, surtout dans ses pârties sommitales. Le principal acte de gouvernement de Jean XXIII fut d'en ordonner la réparation'r8. D'autres bâtirnents étaient en ruine: le petit Palais (l'évêque mit des années avant de s'y réinstallert'e), I'hôpital Saint-Bénezet, la livrée vieille de Viviers, la livrée Saint-Martial... Le pont était impraticable. La « guerre des Catalans >> avait mobilisé les Avignonnais comme aucun autre conflit. Ils payèrent de leur personne lors des assauts. Pendant des mois, l'activité économique de la ville avait été fort ralentie. On peut I'apprécier à travers les recettes de la gabelle des marchandises: pendant Ia première année du siège, il y eut deux fois moins de marchandises qui entrèrent en ville que pendant une année de paixr2',. Si l'on examine le coût de la guerre, le bilan est plus catastrophique encore. Les trésoriers des guerres de la ville dépensèrent près de 66000 florins"'. Mais il faut y ajouter un lot de dépenses,., qui tto Persmn, p.97-98, ttz PaNsmn, t t t rtl l5l-161; Alpenrn- (documents). p.559-571; Var.ors, t. IV, p. p. 100-101, 175-180;Ver.ors, t. IY p. 169-170 169. C. Feune, « Les réparations du palais pontifical d'Avignon au temps de Jean XXIII (1413-1415) >>, Mélanges d'Arcltéologie et d'Histoirc,28, 1908, p. 185-206. PeNsren, p. 113. avril 1410, 10 010 florins furent perçus, soit 834 florins par mois en moyenne; en l4ll-1412, ce fut une recette de 14798 f1. (1 233 fl. en moyenne par mois) et pour huit mois seulement de mai à décembre 1412, une recette de 13762fl., soit 1716 florins par mois, AC Avignon: EE 9, t20 Pour une année comptée à partir du 24 f .2Or-22r. tzt Les trésoriers des guerres dépensèrent 79043 livres entre le 21 mai 1410 et 16 décembre 1411, AC Avignon: EE 9, f.76r, 134v, 165v. rzz Cf.la supplique au pape du ll décembre l4ll, PaNsren, p. 17l-174. t23 le Vlles en guerre augmentèrent probablement jusqu'aux environs de 100000 florins le coût de la Guerre des Catalans, soit grosso modo 800O0 florins pour le siège et 20000 florins pour la guere en Provence menée contre l'expédition de secours. Pour faire face de telles dépenses, Avignon ne disposa que d'une aide d^'un peu plus de 10000 florins de la papautér23. Comme lei gabelles ne suffisaient pas, on leva en 14l0 un lourd emprunt forcé Qtreitancia) sur les habitants, puis la ville s'endetta comme jamais auparavant auprès des marchands, mais aussi auprès de tous les particuliers qui étaient invités-à prêter pour lutter contre les schismatiquèsr2a. À partir de janvier l4ll, les confréries et une partie du clergé se dépossèdèrent àe leur croix, tabernacles, encensoirs et retables et les confièrent aux officiers municipauxt2s. La ville s'endetta donc très lourdement. Elle rnit des décennies pour apurer ses comptes. Vers 1481, les héritiers des prêteurs-de 1410 n'étaient toujours pas entièrement dédomrnagés: il restait 2993 florins à rembourserr26. Quant à la restitution du tréior de Notre-Dame-des-Doms, elle fut aussi très tardive: la ville ne fut définitivement quitte de sa dette envers le chapitre qu'en 1519,27. tu: Cf. PeNsrrn, p.9l-93, 174. tz+ AC Avignon: EE 9, f .2Or-22r,43r-48v, 53v-14v; peNsr,n, p. 59, 173-114. t25 PaNsrr,n, p. 173-114. tzr AC Avignon: EE 9, cahier séparé, f.2v. r27 PANsTER « Le trésor de l'Église de N.-D. des Doms et la guerre des catalans » Arumles d'Avignon et du Comtat Venaissin, 1912, p. 105-128. l, 124 Les deux sièges du palais apostolique d'Avignon Carte I (1398-l4ll ) : Le Palais des Papes d'Avignon et son environnement en 1398 @ G. Butaud 2006. 125 Vlles en guerre Carte 2 :La forteresse pontificale d'Avignon en O G. Butaud 2m6. t26 1410