Conférence présentée à Coimbra en février 2014 dans le cadre de la journée d'étude autour du thème « Philosophie et sciences humaines ». Même si l'herméneutique philosophique ne se limite pas à son rapport aux sciences humaines, il...
moreConférence présentée à Coimbra en février 2014 dans le cadre de la journée d'étude autour du thème « Philosophie et sciences humaines ». Même si l'herméneutique philosophique ne se limite pas à son rapport aux sciences humaines, il demeure indubitable qu'elle connaît, dans son actualité tout autant que dans ses développements, une accointance particulière avec celles-ci. Actuellement, l'herméneutique dite " critique " par exemple, telle qu'elle fut développée par Paul Ricoeur, J.C. Alexander, ou encore H.H. Kögler, se présente comme une prolongation du projet de recherche de l'Ecole de Francfort. Il vise à comprendre pourquoi la révolution ne s'est pas réalisée et recherche les conditions sociales de sa possibilité actuelle. Dans cette mesure, l'herméneutique critique se propose déjà de penser les faits sociaux eux-mêmes, et montre par celà une tension particulière par rapport aux sciences qui s'attachent à leur compréhension. Historiquement, si nous considérons seulement l'herméneutique philosophique il apparaît que cette tension est bien présente dans son développement. Car si l'on détermine la tâche de l'herméneutique philosophique à partir de son histoire, il est admis qu'elle-même ne peut " échapper " à son historicité. Il est en effet impossible de périodiser son histoire à partir de sa tâche, à l'instar de la périodisation proposée par Paul Ricoeur (Schleiermacher-Dilthey-Gadamer-Heidegger). Suivant cette affirmation, la structure qui se dégage du développement de l'herméneutique, révèle qu'elle a procédé par englobements successifs de disciplines relatives aux sciences humaines (philologie, histoire, psychologie, anthropologie, etc...) au travers du concept de compréhension. Ce développement historique correspond plus particulièrement à celui de l'herméneutique anthropologique, c'est-à-dire, à celle qui cherche à savoir ce qu'il y a d'humain en l'homme. Elle comporte donc la caractéristique de procéder par régionalisations de problématiques et d'espaces conceptuels, suivant un modèle englobant. Ainsi, il apparaît que ces théories herméneutiques auraient un même " centre " , comprendre, se déplaceraient dans le même " domaine " , l'expérience humaine, et poursuivraient toutes le même " effort " , celui de la recherche des conditions de possibilité des sciences de l'homme ou de la culture. Dans le cadre d'une réflexion sur les rapports qu'entretiennent herméneutique philosophique et sciences humaines, nous ne sommes pas en mesure de faire l'économie du rôle qui leur fut assigné respectivement dans l'élargissement effectué par Wilhelm Dilthey. Nous sommes conscients que cette question pourrait être le sujet d'une intervention à part entière. Selon cette autre perspective, Dilthey situe au fondement des sciences humaines deux « sciences » qu'il considère premières: la psychologie et l'anthropologie. Nous verrons pour cela le rapport qu'il entretient avec ces disciplines naissantes, et auxquelles Dilthey assigne l'étrange tâche de décrire le vécu. C'est donc selon ces deux perspectives que je me propose d'aborder la question du rapport entre herméneutique philosophique et sciences humaines. Tout d'abord par la nature anthropologique du questionnement herméneutique lui-même, depuis son origine et suivant son développement ultérieur, puis par anthropo(logo)phagie, l'appropriation réitérée de disciplines et problématiques relatives aux sciences humaines en son sein. Il s'agit, en dernière instance, de déterminer dans quelle mesure ce modèle s'applique également à l'herméneutique en dehors de son rapport aux sciences humaines et de la nature anthropologique de son questionnement.