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Théologie buissonnière: Tome 1
Théologie buissonnière: Tome 1
Théologie buissonnière: Tome 1
Livre électronique442 pages5 heures

Théologie buissonnière: Tome 1

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À propos de ce livre électronique

Extrait de la préface d'André Gounelle :

Michel Théron nous offre une agréable et instructive promenade parmi plusieurs notions fondamentales de culture religieuse. Il a choisi pour les deux tomes de cet ouvrage environ 80 mots, rangés en ordre alphabétique, qu'il commente avec la gourmandise d'un fin lettré et une tendresse amusée pour les étrangetés du religieux mais aussi attentive à ses profondeurs... Malicieux, méditatif, réfléchi, bien informé et non conformiste, ce livre nous sort de nos routines, nous aide à penser sans jamais rien nous imposer... Cette promenade peut très vite déboucher, si on le désire, sur une exploration élargie et approfondie. Ce n'est pas un des moindres mérites de cet ouvrage que d'inciter à aller ailleurs et plus loin ; on sent ici tout l'art pédagogique du professeur incitateur ou éveilleur et non doctrinaire qu'a été Michel Théron.
LangueFrançais
Date de sortie18 juin 2018
ISBN9782322105526
Théologie buissonnière: Tome 1
Auteur

Michel Théron

Michel Théron est agrégé de lettres, docteur en littérature française, professeur honoraire de Première supérieure et de Lettres supérieures au Lycée Joffre de Montpellier, écrivain, chroniqueur, conférencier, photographe et vidéaste. On peut le retrouver sur ses deux blogs personnels : www.michel-theron.fr (généraliste), et www.michel-theron.eu (artistique).

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    Aperçu du livre

    Théologie buissonnière - Michel Théron

    « Au Dieu inconnu »

    (Ac 17/23)

    Table des matières

    Préface

    Avant-propos

    Agneau de Dieu

    Alliance / Religion

    Âme

    Amour

    Chair / Incarnation

    Ciel

    Communauté / Église

    Crainte de Dieu / Sacré

    Création

    Enfant

    Enfer et Enfers

    Épreuve / Tentation

    Esprit

    Eucharistie

    Figure

    Foi / Confiance

    Gloire

    Grâce

    Hérésie

    Jugement

    Kérygme / Credo

    Loi

    Lumière

    Marie

    Martyr / Témoin

    Messie

    Miracle / Signe

    Monde

    Mystère

    Naissance (nouvelle)

    Nom / Noms de Dieu

    Paraclet

    Parole / Parole de Dieu

    Péché

    Pénitence / Conversion

    Prédestination

    Rédemption

    Repos

    Résurrection

    Rétribution

    Royauté / Royaume

    Sacrement

    Sacrifice

    Sagesse

    Salut

    Souffrance

    Transfiguration

    Vérité

    Voir / Vision

    Zèle

    Abréviations et Sigles

    Abréviations des livres bibliques

    Sigles

    Du même auteur

    Et sur le même sujet

    Préface

    Michel Théron nous offre une agréable et instructive promenade parmi plusieurs notions fondamentales de culture religieuse. Il a choisi pour les deux tomes de cet ouvrage environ 80 mots (rangés en ordre alphabétique depuis « Agneau de Dieu » jusqu’à « Zèle ») qu’il commente avec la gourmandise d’un fin lettré et une tendresse amusée pour les étrangetés du religieux mais aussi attentive à ses profondeurs. Il aime les phrases et les mots, il les décortique, les assaisonne, les déguste. Il relie les textes dans des jeux de miroirs et d’échos. Parfois, il va jusqu’à des calembours, mais ces calembours ont du sens (un exemple savoureux : « Ne peut-on préférer le Christ enseignant qui nous sauve au Christ qui nous sauve en saignant ? »). Il ne s’agit nullement d’un vocabulaire théologique et historique, pas plus que le Dictionnaire philosophique de Voltaire (à qui j’ai souvent pensé en lisant ce livre) n’est un dictionnaire technique de philosophie.

    Bien que l’érudition y soit considérable, ce livre ne s’adresse pas à des spécialistes, mais plutôt à un public cultivé, marqué par un christianisme traditionnel qui le satisfait peu, même s’il est sensible à certain de ses thèmes. De très nombreux textes du Nouveau Testament sont commentés et expliqués (avec une insistance sur les mots employés, sur leur étymologie et sur leurs combinaisons grammaticales) ; l’évangile de Thomas est aussi souvent cité. Les références culturelles débordent largement la littérature classique ; elles s’étendent à la peinture, au cinéma, à la chanson, voire à la publicité, etc. Ces références n’éloignent pas du vécu concret, mais l’expriment et l’éclairent. Malicieux, méditatif, réfléchi, bien informé et non conformiste, ce livre nous sort de nos routines, nous aide à penser sans jamais rien nous imposer.

    Un traité et un manuel sont faits pour être lus de bout en bout et leurs développements s’enchaînent méthodiquement. Cette Théologie buissonnière ne suit pas ce modèle : elle a été plutôt conçue pour être consultée notice par notice au gré de nos envies, de nos curiosités, de nos recherches et de nos réflexions. L’auteur n’impose pas au lecteur une progression, mais le lecteur choisit de cheminer, voire de vagabonder ou de flâner, dans ce que lui offre l’auteur. Grâce à un jeu de renvois non seulement d’un article à l’autre, mais aussi à des documents externes ou à des lectures complémentaires, cette promenade peut très vite déboucher, si on le désire, sur une exploration élargie et approfondie. Ce n’est pas un des moindres mérites de cet ouvrage que d’inciter à aller ailleurs et plus loin ; on sent ici tout l’art pédagogique du professeur incitateur ou éveilleur et non doctrinaire qu’a été Michel Théron.

    André Gounelle

    Avant-propos

    Ce livre n’est pas un ouvrage de théologie institutionnelle. Il ne se réclame de l’autorité d’aucune Église, et n’a aucun Imprimatur. Si le mot n’avait le tort, peut-être, de paraître manquer de sérieux, il aurait pu s’appeler Dictionnaire amoureux de théologie. Il est l’œuvre d’un esprit libre, qui n’est inféodé à aucun groupe, quel qu’il soit.

    Buissonnier fait référence à l’école buissonnière, celle qui court les sentiers non balisés, qui évite ceux de grandes randonnées, les G.R. : très souvent il fait du hors sentier. Les routes les mieux aimées, dit René Char, sont celles qui ne promettent pas leur destination. C’est pourquoi on trouvera dans ce livre des exemples et des pistes qu’on ne s’attend pas à trouver dans un livre de théologie : des références à des œuvres littéraires ou artistiques, des films, des tableaux, des chansons, etc. La théologie n’est qu’une partie de l’humain, de l’anthropologie.

    Mais buissonnier fait référence aussi aux buissons au sens métaphorique, ceux des questions et des doutes, que chemin faisant on voit devant soi se lever. Puisse le lecteur faire aussi, en lui-même, buissonner les questions, comme ce livre s’efforce de le faire. Rendu plus sceptique, il sera rendu plus tolérant, et plus ouvert aux autres.

    Ce qui vient au monde pour ne rien troubler, dit encore René Char, ne mérite ni égard ni patience. Ce pourrait être, en somme, la devise du présent livre.

    En tant que dictionnaire, il peut se feuilleter au hasard, d’entrée en entrée. Vu la matière qu’il traite, et aussi les mots se renvoyant souvent les uns aux autres, il n’a pu éviter que tels de ses passages aient une certaine densité. Mais on n’est pas obligé de le lire tout du long d’un seul coup. Bref, il tient plus de l’alcool fort, que du long drink.

    Si maintenant parler de théologie rebute certains, ils n’ont qu’à se dire que ce livre est aussi un livre de culture religieuse, et la culture religieuse, malgré ce que pourraient dire certains intégristes de la laïcité, fait bien partie de la culture générale.

    Mais si à l’inverse ce livre choque les esprits religieux déterminés, qui ne veulent démordre de telle ou telle croyance ou de tel ou tel dogme, ils n’ont qu’à l’exploiter, profiter de l’occasion qu’il leur offre d’en transformer les données pour les tourner dans un sens qui les satisfasse mieux, suivant en cela le conseil de Marc Carrogio, responsable des relations de l’Opus Dei avec les moyens de communication : « Si on te donne un citron amer, fais-en de la bonne limonade. »

    Remarque : La précédente édition de ce livre est parue chez BoD en 2017. Par rapport à elle, la présente édition a été mise à jour.

    Agneau de Dieu

    Lors de l’institution de la Pâque, en Égypte, Dieu ordonna aux juifs d’immoler un agneau ou un chevreau d’un an et de le manger : Ex 12/3-5 ¹. Avec le sang de cet agneau devaient être marqués les linteaux de leurs portes, de façon qu’ils fussent épargnés par l’Ange exterminateur qui devait passer, venant frapper tous les premiers nés des Égyptiens. La Pâque, dont le nom est dérivé d’un verbe hébreu signifiant : passer outre, dans le sens d’épargner, est donc depuis une fête juive annuelle qui commémore l’exode, ou la sortie d’Égypte. Par extension, manger la pâque signifie manger l’agneau pascal.

    Le christianisme reprend évidemment le thème, en parlant de l’Agneau de Dieu. Lors de sa première rencontre avec Jésus, Jean le Baptiste le désigne ainsi : « Le lendemain, il vit Jésus venant à lui, et il dit : ‘Voici l’Agneau de Dieu, qui ôte le péché du monde.’ C’est celui dont j’ai dit : ‘Après moi vient un homme qui m’a précédé, car avant moi il était.’ » (Jn 1/29-30) Le second verset reprend le passage du prologue du même Jn : « Avant moi il était » (1/15).

    Cet Agneau de Dieu ici est sinon déjà Dieu, ou du moins en voie de l’être, puisque le verbe être lui est affecté : « Avant moi, il était ». Ce verbe est en effet la façon dont Dieu, dans la Bible juive, se nomme lui-même : « Je suis » (Ex 3/14) – v. Nom / Noms de Dieu* ². On notera que la traduction, malheureusement fréquente, par « il était avant moi » est absurde. Jean Baptiste et Jésus ne sont pas des compétiteurs, ou des concurrents. Ceci ne vaut bien sûr que si on s’en tient au texte de Jn. Car dans la réalité historique des choses il y a sûrement eu compétition et concurrence entre les deux : certains même, les Mandéens, ou Chrétiens de saint Jean, considèrent Jean le Baptiste comme le vrai Messie, et Jésus comme un imposteur.

    Revenons à nos moutons, ou plutôt à notre agneau. Il est d’abord inspiré évidemment par la tradition juive de l’agneau pascal : « Christ, notre Pâque, a été immolé. » (1 Co 5/7). Certains insistent aussi sur le fait que la chronologie de la mort du Christ en Jn suit tout à fait celle de la Pâque juive. Le fait même qu’une fois mort, on ne lui ait pas brisé les jambes viendrait, comme l’indique l’évangéliste lui-même (Jn 19/36), d’une prescription rituelle concernant l’agneau pascal : « Vous ne briserez aucun os. » (Ex 12/46 ; Nomb 9/12) Cette prescription a été ensuite appliquée au juste (Ps 34/20). On voit qu’on est ici dans la réécriture, le palimpseste, bref le symbolique, plutôt que dans le factuel ou l’historique.

    Mais l’Agneau de Dieu ne renvoie pas qu’à l’agneau pascal des juifs. Il est aussi inspiré par le passage essentiel d’Isaïe, dit du Serviteur souffrant : « Méprisé et abandonné des hommes, homme de douleur et habitué à la souffrance, semblable à celui devant qui l’on se voile la face, il était méprisé, nous ne l’avons pas considéré. Certes, ce sont nos souffrances qu’il a portées, c’est de nos douleurs qu’il s’est chargé. Et nous, nous l’avons considéré comme atteint d’une plaie, comme frappé par Dieu et humilié. Mais il était transpercé à cause de nos crimes, écrasé à cause de nos fautes ; le châtiment qui nous donne la paix est tombé sur lui, et c’est par ses meurtrissures que nous sommes guéris. Nous étions tous errants comme des brebis, chacun suivait sa propre voie ; et Yahvé a fait retomber sur lui la faute de nous tous. Il a été maltraité, il s’est humilié, et n’a pas ouvert la bouche ; semblable à l’agneau qu’on mène à la boucherie, à une brebis muette devant ceux qui la tondent, il n’a pas ouvert la bouche. » (53/7) Pour un juif cependant ce passage ne signifie pas un quelconque Messie souffrant : il n’est qu’une allégorie des épreuves actuelles d’Israël. Mais le christianisme en a fait tout autre chose : l’image du Messie crucifié, au centre par exemple de la christologie paulinienne. Dans ce texte d’Isaïe est essentiellement son résumé archétypal, ou sa matrice : v. Kérygme / Credo*, Messie*.

    La succession chronologique du thème pourrait donc être figurée de la façon suivante : d’abord Is 53 ; puis 1 Co 15/3, où figure le kérygme ou la proclamation de Paul, le premier en date des Credos chrétiens : « Christ est mort pour nos péchés selon les Écritures… » ; ensuite Ac 8/32, où un eunuque éthiopien dialogue avec Philippe : « Le passage de l’Écriture qu’il lisait était le suivant : ‘Comme une brebis il a été conduit à la boucherie ; comme un agneau muet devant celui qui le tond, ainsi il n’ouvre pas la bouche’ » ; et enfin 4/ Jn 1/29 : « Voici l’Agneau de Dieu, qui ôte le péché du monde. » L’Agneau de Dieu n’est donc pas qu’une émouvante image salvatrice, pour le croyant ; ou bien un archétype de l’imaginaire collectif, pour l’agnostique : c’est avant tout une figure textuelle, décontextualisée et recontextualisée.

    On peut penser en effet que beaucoup de récits évangéliques n’ont rien d’historique, mais ne sont que des reprises de passages bibliques antérieurs. Les récits de la Passion par exemple viennent tout droit d’Is 53, ainsi que de tel ou tel des Psaumes. C’est le procédé, bien connu des rabbins, du midrash, paraphrase exégétique et patchwork de textes antécédents. Ainsi le silence de Jésus devant le Grand Prêtre (Mt 26/63 ; Mc 14/61) vient tout simplement du silence de la « brebis muette devant ceux qui la tondent. » (Is 53/7) On sait que pour l’orthodoxie chrétienne, l’A.T. n’est qu’une figure annonciatrice du N.T. Tout s’est produit, dit-on, et lit-on même souvent dans le texte, « pour que l’Écriture s’accomplît ». Mais dire ou penser que cela s’est produit ainsi, je veux dire effectivement, historiquement, est strictement affaire de foi. On peut dire aussi que tout a été raconté ainsi par le narrateur, tout simplement parce qu’ayant la Bible juive sous les yeux, ou présente à sa mémoire, il se contentait de la recopier ou de la remettre en scène : v. Figure*.

    L’Agneau de Dieu qui porte les péchés du monde vient donc du « il a porté les péchés de beaucoup d’hommes », d’Is 53/12. La première catéchèse chrétienne insiste beaucoup sur ce point. Le genre humain est racheté « par le sang précieux de Christ, comme d’un agneau sans défaut et sans tache » (1 Pe 1/19), ou par le « sang de Christ, qui, par un esprit éternel, s’est offert lui-même sans tache à Dieu » (He 9/14). La problématique de l’Agneau de Dieu est donc la même ici que celle de la Rédemption* et du Sacrifice*.

    Est-il, cet Agneau, sacrifié pour ainsi dire malgré lui, comme suggère l’Épître de Pierre, ou bien s’offre-t-il lui-même en sacrifice, comme dit l’Épître aux Hébreux ? Les deux, dit l’enseignement officiel de l’Église. « Au moment d’être livré, et d’entrer volontairement dans sa Passion… », dit la liturgie de la Messe. On maintient donc un Jésus homme livré par un homme (Judas) et à des hommes, comme on le voit lors de la scène de son arrestation dans les évangiles synoptiques (Mt 26/47 sq. ; Mc 14/43 sq. ; LCD 22/47 sq.) ; et un Jésus déjà en voie de divinisation, se livrant lui-même en une sorte de théophanie qui fait tomber les assistants à la renverse, dans la version johannique de cette même scène (Jn 18/6). En vérité, il y a bien deux visages de Jésus, un visage humain et un visage divin. C’est ce que le dogme officiel, depuis le Concile de Chalcédoine, appelle sa double nature.

    C’est donc le Jésus divin qui dit à Judas dans l’Évangile de Judas : « Tu les surpasseras tous, car tu sacrifieras l’homme qui me sert d’enveloppe charnelle. » Il y a donc là une mort volontaire, un suicide divin de Jésus, que les premiers Pères de l’Église d’ailleurs ont remarqué. Comment s’offusquer alors de la place suréminente donnée à Judas lui-même dans ce scénario ? Par sa trahison, il a aidé Jésus à se révéler aux hommes comme Dieu, et par conséquent sans lui pas de christianisme : donc c’est l’apôtre le plus méritant. Voyez là-dessus le cas des hérétiques dits Judaïtes, ou sectateurs de Judas. Ou encore « Trois versions de Judas », dans Fictions de Borges (1944). Certes cet Évangile de Judas donne de Jésus une image particulière, passée par un filtre gnostique. Mais l’hérésie a au moins le mérite de la logique et de la cohérence, en se maintenant dans une seule voie, tandis que le dogme officiel essaie illogiquement d’unir des contraires : v. Mystère*, fin.

    Certains tout de même, comme René Girard, disent qu’un Jésus qui s’offre lui-même en victime expiatoire innocente met fin, en en montrant l’injustice irrémédiable, à tous les autres sacrifices antérieurs, où on mettait à mort une victime désignée, et à qui évidemment on ne demandait pas son avis. Je ne sais trop si cela fait une telle différence, et si le sacrifice volontairement accepté suffit à parasiter en quelque sorte tous les autres, et à mettre fin ainsi au déchaînement de la violence dans l’histoire.

    Certains aussi aujourd’hui essaient de gommer ou d’atténuer l’aspect de sacrifice expiatoire que peut prendre ce thème de l’Agneau de Dieu, avec tout son contexte sanglant. On est bien sûr choqué par le bouc émissaire, que le prêtre, dans la religion hébraïque, le jour de la fête des Expiations, chargeait des péchés d’Israël, expulsait au désert où il devait mourir (Lev 16/21-22). Ce rituel était le plus primitif qui soit, et il avait un but thérapeutique : la destruction du bouc émissaire (gr. : pharmakos) permettait à une collectivité d’expulser le mal en son sein, en en chargeant une victime désignée. Notez qu’une des origines de la tragédie (littéralement en grec : « chant du bouc »), pourrait être le sacrifice de cet animal avant la représentation. Cela fait frémir. Aussi propose-t-on souvent de l’Agneau de Dieu qui porte les péchés du monde une traduction adoucie : qui enlève, ou qui ôte les péchés du monde. Alors on ne considère que le résultat, et non le processus. C’est une variante de métonymie, appelée en rhétorique métalepse, qui dit le conséquent pour l’antécédent, l’effet pour la cause. Ainsi : Nous le pleurons, remplace : Il est mort. Le but évidemment est l’euphémisation, le voilement.

    Le problème est que dans le texte grec initial : ho airôn tèn hamartian toû kosmou, et dans sa traduction latine : qui tollit peccata mundi, les deux verbes, respectivement airein, et tollere, ont les deux sens : porter sur soi (comme dans le cas du bouc émissaire) et enlever. Libre à chacun de préférer le second au premier, un peu comme de préférer manger tranquillement de la viande, que de voir abattre l’animal.

    L’Agneau de Dieu est omniprésent dans l’Apocalypse, où il est moins agneau pascal, rituellement abattu et consommé, ou victime immolée même consentante, qu’agneau céleste, élevé en gloire, partageant le trône de Dieu, et menant le combat eschatologique contre les forces du mal. De là vient par exemple le Retable de l’Agneau mystique, de Van Eyck, dans la cathédrale de Gand. On sait ce que doivent les thèmes les plus problématiques aux prestiges de l’art. Combien d’Agnus Dei en musique font oublier par leur beauté ce que le thème peut avoir par certains côtés de contestable ! On ne dira jamais assez ce que doivent les théologiens (dirai-Dieu lui-même ?) aux artistes.

    On notera que la construction paulinienne ne s’intéresse pas du tout à l’enseignement de Jésus, au contenu de sa prédication par exemple lors de son ministère public, ne serait-ce que parce que précisément cet Agneau de Dieu qu’il réactualise et réécrit d’après Isaïe est muet, et n’ouvre point la bouche. Ce silence singulier sur les paroles mêmes de Jésus existe aussi dans chacun de nos deux Credos (le Symbole des Apôtres et le Symbole de Nicée). Certains le regrettent. Mais d’autres font remarquer qu’un tel scénario sotériologique, via le sacrifice, est plus émotionnellement efficace et touchant, plus frappant par les échos, même irrationnels, qu’il suscite, et plus à même de fonder et cimenter une communauté que des paroles ou un enseignement. Il faut laisser ouvert ce débat, sans doute le plus important qui soit à maintenir en christianisme.

    De toute façon, la construction de l’Agneau de Dieu ne tient que si l’agneau, comme dit Is 53/7, est silencieux devant le couteau. Viendrait-il à se débattre, à crier, que toute la construction s’effondrerait. Pareillement si Isaac, figure ou préfiguration du Christ immolé pour les chrétiens, venait à se débattre devant le glaive d’Abraham (Gn 22/10). Croyons peut-être de toutes nos forces à ce silence. Aussi bien il peut nous faire vivre, parfois... Mais ne soyons pas triomphaliste : ce silence béni, il nous faut le mériter, comme dit Annibal Lecter à Clarice Sterling dans Le silence des agneaux, roman de Richard Harris (1988), et film de Jonathan Demme (1990).

    Il existe un autre agneau, moins connu, mais non dénué d’intérêt. Il appartient à un évangile non canonique, de tendance gnostique, l’Évangile de Thomas. Je cite le logion 60 en entier, car dans sa simplicité il est d’une grande profondeur : « Ils virent un Samaritain emmenant un agneau et entrant en Judée. Il dit à ses disciples : ‘Pourquoi celui-ci tourne-t-il autour de l’agneau ?’ Ils lui dirent : ‘Pour le tuer et le manger.’ Il leur dit : ‘Aussi long-temps qu’il vit, il ne le mangera pas, sauf s’il le tue, et qu’il devienne un cadavre.’ Ils dirent : ‘Autrement, il ne pourra pas le faire.’ Il leur dit : ‘Vous-même cherchez un lieu pour vous dans le repos, de peur que vous ne deveniez cadavre, et que l’on ne vous mange.’ »

    Au lecteur maintenant de choisir, selon sa conviction intime, entre les deux agneaux : celui qui porte ou enlève les péchés du monde, ou celui qui doit tout simplement rester en vie pour ne pas être dévoré : on parle toujours en effet d’une vie après la mort, mais qui s’occupe qu’il y en ait une avant (une véritable) ? Le premier agneau a pour lui toute la tradition et le magistère. Mais le second veut éviter la mort (spirituelle) dès cette-vie ci, et il mène au repos, à ce qu’on nomme à partir du grec un hésychasme, et à partir du latin un quiétisme (v. Repos*). Et il parle sans doute au plus profond du cœur de certains.


    ¹ Les abréviations des livres bibliques cités figurent en fin d’ouvrage.

    ² L’astérisque * qui suit un mot ou un groupe de mots indique une autre entrée du livre.

    Alliance / Religion

    Alliance transcrit l’hébreu berith, le grec diathèkè, et le latin testamentum, d’où notre mot : testament. On voit qu’il s’agit à l’origine d’un contrat, de nature juridique, qui lie les deux parties : contrat basé sur un échange, ou comme on dit en droit synallagmatique. Ce mot est formé du grec allagè, échange, et sun, avec. Un tel contrat comporte obligation réciproque entre les parties. Le peuple choisi ou élu d’abord, le simple croyant ensuite, y échange son obéissance contre une protection. Et s’il n’y a pas ou s’il n’y a plus obéissance, s’il y a infidélité faite au contrat, alors on encourt la punition.

    Voici la parole inaugurale où Dieu, s’adressant à Moïse, choisit et institue, dans la Bible juive, Israël comme son peuple, qui devient désormais le peuple élu de Dieu : « Maintenant, si vous écoutez ma voix, et si vous gardez mon alliance, vous m’appartiendrez entre tous les peuples, car toute la terre est à moi ; vous serez pour moi un royaume de sacrificateurs et une nation consacrée. Voilà les paroles que tu diras aux enfants d’Israël. » (Ex 19/5-6) Le pacte du Sinaï n’engage certes pas les deux parties à égalité, le don de l’alliance étant gratuit, discrétionnaire, comme plus tard en christianisme celui de la Grâce*. Mais enfin celui qui en bénéficie, s’il se conforme aux règles, à la Loi*, peut y trouver profit, bénédictions en tous genres. Si au contraire il se détourne, il encourt malédictions, comme celles que les prophètes ont déversées sur le peuple d’Israël devenu infidèle. Par exemple les jérémiades de Jérémie ne sont que des déplorations ou des plaintes sur cette infidélité.

    Au fil du temps, comme cette infidélité augmentait, on s’est orienté vers la perspective d’une nouvelle alliance, incarnée en un nouveau médiateur. C’est humain : plus le présent s’assombrit, plus l’espoir s’élance et s’exalte. C’est le cas du mystérieux Serviteur de Yahvé, où le futur christianisme, essentiellement paulinien, a trouvé sa matrice : « Moi, Yahvé, je t’ai appelé pour le salut, et je te prendrai par la main, je te garderai, et je t’établirai pour traiter alliance avec le peuple, pour être la lumière des nations… » (Is 42/6) L’Alliance ainsi, associée au Salut*, prend aux yeux du croyant une dimension d’espérance pour les derniers temps, une dimension eschatologique. Et de ce texte d’Isaïe à la nouvelle alliance chrétienne, il n’y a qu’un pas. On sait ce que le christianisme a fait de ce Serviteur souffrant, en qui il a vu, par Figure*, le Messie crucifié : v. Agneau de Dieu*, Kérygme / Credo*, Messie*.

    La nouvelle alliance chrétienne est instituée évidemment dans la dernière Cène de Jésus, d’où le christianisme tire son Eucharistie, à laquelle est consacrée la liturgie de la seconde partie de la messe : « De même, après avoir soupé, il prit la coupe, et dit : ‘Cette coupe est la nouvelle alliance en mon sang ; faites ceci en mémoire de moi toutes les fois que vous en boirez.’ » (1 Co 11/25) On sait que les poètes ensuite ont vu dans cette coupe le Saint Graal, dont la quête en Occident a alimenté les plus beaux récits.

    C’est en tout cas une reprise de l’épisode mosaïque de l’aspersion du sang de la victime immolée, qui est gage, comme cela se passait alors pour tous les contrats de ce genre, de la première alliance : « Moïse prit le sang, et il le répandit sur le peuple, en disant : ‘Voici le sang de l’alliance que Yahvé a faite avec vous selon toutes ces paroles.’ » Seuls deux mots dans le texte paulinien sont ajoutés par rapport à celui de la bible juive, version Septante : « nouvelle » (kainè) avant « alliance » (diathèkè), et « mon » avant « sang » : « l’alliance dans le sang » devient « la nouvelle alliance en mon sang ». Naturellement idée et vocabulaire passent quasiment à l’identique dans le texte reçu de Lc, qui a, on le sait, subi largement l’influence de Paul : Lc 22/20.

    Il est certain en tout cas qu’apparaissent ici ensemble la formule et la notion de Nouveau Testament, expression identique à celle de Nouvelle Alliance (gr. Kainè Diathèkè, lat. Novum Testamentum). Ipso facto, c’est toute la Bible juive qui devient en christianisme Ancien Testament (ou Ancienne alliance, comme on veut). Bien entendu, considérer la Bible juive comme simple annonce préfiguratrice, simple propédeutique ou préparation au Nouveau Testament chrétien, est peu agréable pour un juif. On essaie aujourd’hui d’atténuer la chose en parlant de Premier Testament, en opposition au second. Mais je ne sais si le but ainsi recherché est véritablement atteint, et peut-être l’œcuménisme a-t-il des limites, même si on peut toujours bien sûr se le proposer comme un but ou un horizon.

    Il y a tout de même eu des hésitations à rompre ainsi avec l’héritage juif. Ainsi le texte reçu de Mc 14/24 porte : « Et il leur dit : ‘Ceci est mon sang, le sang de l’alliance, qui est répandu pour plusieurs.’ » Comme si on avait hésité encore, dans le plus ancien en date des évangiles, à ajouter « nouvelle » à « alliance ». Aussi certaines autres versions précisent le sens, la finalité du sang versé, en ajoutant : « pour la rémission des péchés », sans doute pour unifier avec Mt 26/28, qui porte cette mention. En tout cas cet ajout fait le lien avec Is 53, où la Passion du Serviteur souffrant est comprise comme un sacrifice expiatoire : « Il a porté les péchés de beaucoup d’hommes... » (v.12).

    Maintenant, si Jésus lui-même a pu faire cette assimilation, cette identification, s’il a pu même prononcer les paroles qu’on lui attribue pour fonder l’institution eucharistique, ou bien s’il faut voir là seulement une création de Paul, ou d’un autre, une légende construite a posteriori pour justifier une pratique cultuelle préexistante, la question reste en débat : c’est à l’historien spécialiste de se prononcer, s’il le peut ; ou bien c’est au croyant de le dire, selon ses propres convictions : v. Eucharistie*.

    Le terme français d’alliance, qui vient du latin adligatio, nous mène à considérer une des étymologies du mot : religion. Certains, essentiellement les auteurs chrétiens, comme Lactance, Tertullien, rattachent le mot latin religio, dont vient religion, à religare, relier. Effectivement dans le contrat qu’on a passé avec la puissance supérieure, on se lie ou relie à elle, mais aussi par la même occasion on la lie à soi. Le mot d’obligation, aussi, vient de ligare, lier, de même que celui de loi : v. Loi*. Cette puissance est extérieure et transcendante, et vis-à-vis d’elle on est dans la situation du vassal vis-à-vis de son suzerain : il lui doit obéissance, et en échange en attend protection. Telle est ce qu’on pourrait appeler la religion contrat.

    Elle repose sur un Do ut des, je te donne pour que tu me donnes. Dans cette religion du donnant donnant, je ne sais si la prière elle-même peut rester ce qu’elle devrait être, un essentiel lâcher prise, un saut dans l’inconnu ou un Fiat ! totalement désintéressé, comme celui qu’on voit par exemple dans la réponse de Marie à l’Ange : « Qu’il me soit fait selon ta parole ! » (Lc 1/38) ; ou bien dans la première demande du « Notre Père » : « Que ta volonté soit faite ! » (Mt 6/10) Cet abandon même est-il une « demande », au sens où on l’entend habituellement ?

    Les demandes qui n’ont pour cadre que la religion contrat sont en effet très souvent intéressées, finalisées. Combien en connaissons-nous de ces fidèles qui ignorent ou falsifient la vraie prière, celle qui devrait être faite de cet acquiescement foncier, où résident sans doute l’élémentaire de toute piété, et peut-être l’intelligence la plus profonde ! Ils transforment la demande du « Notre Père » en un : « Que ma volonté soit faite ! » De ces demandes parfaitement intéressées un bon modèle est l’hymne national britannique : « Dieu sauve le roi ! » On répondra peut-être que cette attitude quémandeuse est bien humaine. Mais passer ainsi de « Ta volonté » à « Ma (ou Notre) volonté », c’est oublier que Jésus lui-même, selon le texte sacré, est passé de la seconde à la première, à Gethsémani (Mt 26/ 39 et 26/42).

    Heureusement qu’une autre étymologie est possible de ce mot de religio. Certains, et non des moindres, comme le grand Cicéron, le font venir non plus de religare, relier, mais de relegere, accueillir avec respect, recueillir au fond de soi, et aussi par voie de conséquence relire en soi-même, avec une parfaite gratuité, par méditation attentive de tel ou tel texte, les scénarios les plus profonds de sa vie. Alors il ne s’agit plus, animé tout de même d’on ne sait quel secret intérêt, de s’incliner ou de baisser la tête – sinon peut-être pour scruter le fond de son cœur.

    Peut-on garder pour le mot de religion les deux étymologies susmentionnées à la fois ? Dira-t-on, pour faire une synthèse, qu’il s’agit de se relier à soi-même, à ce que l’on a de plus intime et de plus précieux ?

    Bien sûr, la seconde vision est plus individualiste et introvertie. La première au contraire a pour elle de favoriser le lien social. La religion contrat relie aussi en effet les hommes entre eux. Elle est un ciment fédérateur. Elle permet le rassemblement, la coagulation des groupes humains, ou bien la transformation des foules atomisées et tribales du début des temps en peuples structurés et soudés autour d’un idéal commun : voyez là-dessus la Psychologie des foules, de Gustave Le Bon (1895), réutilisée par Freud dans sa Psychologie collective et analyse du moi (1921). Mais tout de même, il ne faut sans doute pas exclure le recueillement, même solitaire. Il est souvent d’ailleurs le préalable nécessaire à une socialisation plus harmonieuse : v. Communauté / Église*.

    De toute façon, pour l’étymologie exacte du mot religio, on ne la saura jamais. « Pas de certitude », disent les dictionnaires spécialisés (Ernout-Meillet, Dictionnaire étymologique de la langue latine). Accueillons ou recueillons avec respect cette obscurité, puisque pour autant il s’agit de défendre ici et en ces matières l’accueil respectueux…

    On commence ordinairement dans sa vie de croyant par la religion contrat, imposée par l’héritage collectif qu’on subit, et puis par réflexion et intériorisation on peut s’en émanciper individuellement, et en venir à la religion relecture respectueuse de soi. Notez bien que ce passage correspond aussi aux deux sens possibles du mot « culture », que l’on voit bien en allemand : Kultur, ou dressage, héritage subi ; et Bildung, ou formation réfléchie (Bilden : donner forme). Pour les Allemands, dans la Bildung, la Kultur est revisitée : tantôt pour sa réhabilitation, tantôt pour son abandon. Voyez aussi chez eux la tradition du Bildungsroman, ou Roman de formation. On pourrait définir la Bildung comme une Kultur à la fin mieux assimilée. De ce point de vue, le mot d’Alain est toujours d’actualité : « Il n’y a plus qu’une chose à faire : se refaire. » Ou encore celui de Gide, dans Les Nourritures terrestres : « Cette désinstruction fut lente et difficile, et véritablement le commencement d’une éducation. »

    Que l’Allemagne, qui a ainsi développé la culture comprise comme formation individuelle face à l’héritage imposé, soit un pays majoritairement protestant, n’est pas pour surprendre. Certains considèrent que s’engager sur cette voie, manifestement plus familière dans le christianisme occidental aux protestants qu’aux catholiques, est dangereux, pourrait mener même à une sorte de reniement, un agnosticisme.

    Mais qui nous dit maintenant que la nouvelle alliance, celle-là même qu’ont appelée de leurs vœux les prophètes juifs, ne serait pas cette religion-là, la religion relecture, inventaire de soi et de ses propres richesses ? « Voici, les jours viennent, dit Yahvé, où je ferai avec la maison d’Israël et la maison de Juda une alliance nouvelle (Septante : diathèkèn kainèn), non comme l’alliance que je traitai avec leurs pères, le jour où je les saisis par la main, pour les faire sortir du pays d’Égypte, alliance qu’ils ont violée, quoique je fusse leur maître, dit Yahvé. Mais voici l’alliance que je ferai avec la maison d’Israël, après ces jours-là, dit Yahvé : ‘Je mettrai ma loi au dedans d’eux, je l’écrirai dans leur cœur ; et je serai leur Dieu, et ils seront mon peuple.’ » (Jr 31/31-33)

    Magnifique passage, où en sa fin la loi n’est plus imposée de l’extérieur, mais trouvée à la fois par réflexion, pensée, et évidence du cœur, à l’intérieur de soi : « Je mettrai ma loi au-dedans d’eux (littéralement, selon la Septante, ‘en direction de leur esprit, ou de leur pensée’, eis tèn dianoian autôn), je l’écrirai dans leur cœur (epi kardias autôn). » Cœur et pensée, et c’est remarquable, ici ne s’excluent pas. On n’abandonne pas l’alliance, on change son lieu et sa nature. C’est le passage de la transcendance à l’immanence, de la Loi extérieure à la Loi intériorisée et recueillie ou accueillie respectueusement en soi, de l’enfant qu’on dirige à l’adulte qui comprend : v. Loi*.

    Il est fort dommage que l’épître aux Hébreux qui recopie ce texte n’en voie pas le sens profond (8/8-13). Elle y voit un blâme de l’attitude d’Israël, alors qu’il s’agit de la part de Dieu d’un encouragement, d’une invitation à intérioriser sa foi : « Car c’est avec l’expression d’un blâme que le Seigneur dit à Israël : ‘Voici, les jours viennent, dit le Seigneur, où je ferai avec la maison d’Israël et la maison de Juda une alliance nouvelle.’ » (v.8) Et elle décrète définitivement caduque l’ancienne alliance, comme si l’encouragement prodigué par Dieu via le prophète avait été nécessairement voué à l’échec : « En disant : ‘une alliance nouvelle’, il a déclaré la première ancienne ; or, ce qui est ancien, ce qui a vieilli, est près de disparaître. » (v.13) Il y a sans doute quelque sophisme dans cette dernière phrase. Ce type de raisonnement et de pensée constituera en tout cas, pour longtemps, le réflexe anti juif banal d’un certain christianisme.

    Mais surtout cette épître oublie la finesse et la subtilité de la prophétie, relatives

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