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MÉMOIRE
PRÉSENTÉ
DE LA MAITRISE EN LINGUISTIQUE
PAR
KATHY WILKINSON
DÉCEMBRE 2009
Avertissement
La diffusion de ce mémoire se fait dans le respect des droits de son auteur, qui a
signé le formulaire Autorisation de reproduire et de diffuser un travail de recherche
de cycles supérieurs (SDU-522 - Rév.01-2006). Cette autorisation stipule que
«conformément à l'article 11 du Règlement noa des études de cycles supérieurs,
[l'auteur] concède à l'Université du Québec à Montréal une licence non exclusive
d'utilisation et de publication de la totalité ou d'une partie importante de [son] travail
de recherche pour des fins pédagogiques et non commerciales. Plus précisément,
[l'auteur] autorise l'Université du Québec à Montréal à reproduire, diffuser, prêter,
distribuer ou vendre des copies de [son] travail de recherche à des fins non
commerciales sur quelque support que ce soit, y compris l'Internet. Cette licence et
cette autorisation n'entraînent pas une renonciation de [la] part [de l'auteur] à [ses]
droits moraux ni à [ses] droits de propriété intellectuelle. Sauf entente contraire,
[l'auteur] conserve la liberté de diffuser et de commercialiser ou non ce travail dont [il]
possède un exemplaire.»
REMERCIEMENTS
J'ai pu constater à quel point il est important d'être bien entourée quand on
décide de s'investir dans un projet qui nous colle à la peau. Pour cela, je remercie du
fond du cœur mes parents de m'avoir transmis la persévérance et d'avoir été là à
chaque petit pas. Merci à mon amoureux pour son optimisme contagieux, à mes amis,
particulièrement à Stéphanie Brouillette d'avoir été si généreuse de son temps. Merci
à mes collègues de travail pour leurs encouragements.
RÉSUMÉ xiii
INTRODUCTION 1
CHAPITRE 1
PROBLÉMATIQUE 3
CHAPITRE II
CADRE THÉORIQUE 20
IV
CHAPITRE III
CADRE MÉTHODOLOGIQUE 63
3.3.1 La déontologie 73
et au post-test 74
l'intervention 77
sujet-verbe 89
vocabulaire 92
3.7.2 Les données traitées en lien avec le deuxième objectif: les dictées 0
faute 98
CHAPITRE IV
post-test 110
écrits 116
sujet-verbe 120
4.2.1 La comparaison entre les résultats obtenus par les élèves du groupe
4.3 Les taux de formes correctes en ce qui concerne l'accord sujet-verbe. 133
VI
naturelles 143
4.6 Coup d'œil sur les résultats des classes naturelles témoin en ce qui
4.8 Les verbalisations: une fenêtre ouverte sur les procédures des élèves 161
CHAPITRE V
5.2.4 Le rapport entre les mots discutés et les erreurs des élèves: un
vu
élèves 202
CONCLUSION 217
RÉFÉRENCES 225
ANNEXE A
ANNEXE B
ANNEXEC
ANNEXED
ANNEXEE
ANNEXEF
ANNEXEG
Vlll
ANNEXEH
Figure 5.1 Nombre d'erreurs en moyenne par élève dans les dictées 0 faute 181
LISTE DES TABLEAUX
Tableau 3.1 Variables analysées pour la constitution d'un groupe témoin qui ne présente
pas de différences significatives avec le groupe expérimental. 69
Tableau 3.2 Langue première des élèves du groupe expérimental et du groupe témoin 71
Tableau 3.3 Variables analysées pour les groupes définitifs dont les résultats ont fait l'objet
d'une analyse 72
Tableau 3.4 Critères pour assurer la variété sémantique, syntaxique et morphologique dans
l'élaboration des dictées 0 faute en ce qui concerne l'accord en genre et en
nombre des déterminants, noms et adjectifs 87
Tableau 3.5 Critères pour assurer la variété sémantique, syntaxique et morphologique dans
['élaboration des dictées 0 faute en ce qui concerne l'accord sujet-verbe 90
Tableau 3.6 Résultats aux tests Satocalibrage et Vocab profil pour le texte de Fénelon
(prétest et post-test) ainsi que pour le corpus des neuf dictées 0 faute de
l'intervention 94
Tableau 3.7 Liste des termes grammaticaux employés dans les discussions des dictées 1, 5
et 9 104
Tableau 4.2 Comparaison des résultats dans l'accord en genre et en nombre des
déterminants, noms et adjectifs 118
Tableau 4.4 Comparaison des résultats (nombre d'erreurs) dans l'accord sujet-verbe pour
les groupes expérimental et témoin 120
Tableau 4.6 Évolution par classe du nombre moyen d'erreurs des types 5 et 6 (orthographe
grammaticale) par élève selon le milieu (ZEP) pour les élèves de l'enquête de
2005 et ceux de notre intervention 125
Tableau 4.7 Évolution par classe du nombre moyen d'erreurs des types 5 et 6 (orthographe
grammaticale) par élève pour les élèves de l'enquête de 2005 Non-ZEP et ceux
de notre intervention '" 126
Tableau 4.8 Comparaison des taux de formes correctes pour les mots variables: enquête de
Manesse et Cogis (2007) et ceux de notre intervention au prétest et au post-test 128
Tableau 4.9 Classement des unités appartenant au groupe nominal par taux de formes
grammaticalement correctes après neutralisation lexicale 132
Tableau 4.10 Classement des unités verbales par taux de formes grammaticalement correctes
(neutralisation lexicale) pour toutes les tranches d'âges confondus 134
Tableau 4.11 Classement des participes passés par taux de formes grammaticalement
correctes après neutra lisation lexicale 139
Tableau 4.13 Résultats au prétest et au post-test pour les classes naturelles Tl et T2 146
Tableau 5.2 Nombre de questions initiées par les élèves ou par l'enseignante et objets des
questions pour les dictées l, 5 et 9 176
Tableau 5.3 Nombre total d'erreurs (tous types confondus) en moyenne par élève dans les
dictées 0 faute 180
Tableau 5.4 Distribution du nombre d'erreurs dans les dictées 0 faute 182
Tableau 5.5 Distribution des élèves en fonction du nombre d'erreurs d'accord en genre et
en nombre des déterminants, noms et adjectifs pour les dictées 1,5 et 9 184
Xll
Tableau 5.7 Distribution des élèves en fonction du nombre d'erreurs dans l'accord sujet-
verbe pour les dictées l, 5 et 9 187
Tableau 5.8 Distribution des élèves en fonction du nombre d'erreurs commises sur les mots
discutés pour les dictées l, 5 et 9 191
Tableau 5.9 Proportion d'élèves qui prennent la parole pour les dictées l, 5 et 9 194
Tableau 5.10 Distribution des élèves selon le nombre de questions posées sur les mots pour
les dictées 1,5 et 9 195
Le cadre théorique présente les bases théoriques sur lesquelles est fondée la
pratique de la dictée 0 faute qui se situe dans un cadre socioconstructiviste. L'élève
est appelé à verbaliser ses doutes et son raisonnement en interaction avec ses pairs et
son enseignant. Une telle approche modifie également le statut de l'erreur qui
devient un outil pour l'apprentissage.
Nos résultats montrent que les élèves qui participent à la dictée 0 faute sur une
base régulière améliorent leur compétence en orthographe. Les élèves du groupe
expérimental écrivent correctement en moyenne six mots de plus que les élèves du
groupe témoin au post-test dans une dictée de 83 mots. Ils améliorent de façon
significative leur maîtrise de l'accord en genre et en nombre des déterminants, noms
XIV
et adjectifs: ils ont en moyenne 1,23 erreurs au post-test alors que ceux du groupe
témoin en ont 4,37. Leur compétence à effectuer les accords sujet-verbe est
également améliorée au post-test (0,4 erreur pour le groupe expérimental et 0,8 pour
°
le groupe témoin). La dictée faute semble donc une approche efficace surtout pour
l'enseignement de l'orthographe grammaticale.
Nous nous situons parmi les enseignants-chercheurs qui croient qu'il est pertinent
tant pour l'enseignement - apprentissage que pour l'avancement de la recherche de se
pencher sur l'évolution des discussions au fil de la pratique de la dictée 0 faute. Il
nous apparaissait donc impératif de vérifier et de quantifier les effets de cette pratique
pour laquelle les enseignants qui l'expérimentent ne tarissent pas d'éloges.
2
PROBLÉMATIQUE
Dans ce chapitre, nous nous pencherons sur les difficultés qu'éprouvent les
élèves en orthographe, lacunes qui se traduisent notamment par de piètres résultats à
l'épreuve unique d'écriture en français de cinquième secondaire. D'abord, ces
constats nous amènent à questionner l'efficacité des pratiques préconisées dans les
classes, surtout pour l'enseignement de l'orthographe grammaticale, et justifient le
besoin de modifier nos pratiques. La première partie de ce chapitre présente les
constats liés à l'orthographe qui ont motivé le choix de notre intervention. La
deuxième partie est consacrée à des recherches en didactique du français qUI
proposent des pratiques innovantes que nous avons déjà expérimentées en classe,
mais dont l'efficacité n'a pas encore été démontrée de manière empirique. Enfin,
comme nous souhaitons, dans le cadre de ce mémoire, documenter de façon
rigoureuse une de ces pratiques innovantes en particulier, la dictée 0 faute, nous
exposerons nos deux objectifs de recherche.
4
2 http://www.mels.gouv.qc.ca/sections/res2007/pdfi'eprv_2007_129510. pdf
5
la clarté de l'argumentation (critère 1), les élèves ont une moyelU1e de 95,47%. Pour
l'organisation stratégique (critère 2), la moyelU1e est de 98,77%. Pour la continuité et
la progression (critère 3) ainsi que le vocabulaire (critère 4), les moyelU1es sont
respectivement de 98,73% et de 94,47%. Comme nous pouvons le constater, la
moyelU1e est supérieure ou frôle les 95% pour ces quatre critères.
Tableau 1.1
Répartition en pourcentage des cotes attribuées au critère 6 : orthographe
A B C 0 E
Critère 6
4 erreurs 5à9 10 à 14 15 à 18 19 erreurs
Orthographe
ou mOins erreurs erreurs erreurs et plus
2004 12,3 % 20,7 % 19,2 % 12,6 % 35,2 %
2005 13,9 % 23,9 % 20,5 % 12,0% 29,8 %
2006 10,8 % 19,3 % 18,3 % 11,9 % 39,6 %
ce qui est le cas de 39,6% des élèves est un élève «qui orthographie son texte, mais
fait plusieurs erreurs récurrentes liées à la conjugaison et à des accords de base ou
portant sur la graphie des mots», selon la grille d'évaluation. Cet élève commet 19
erreurs et plus. Le critère orthographe constitue donc le critère d'évaluation le plus
problématique pour les élèves québécois de la cinquième secondaire à l'épreuve
unique d'écriture.
Manesse et Cogis (2007) ont fait un constat semblable en France, dans une
enquête menée auprès d'environ 3 000 élèves de la à 16 ans qui comparait leurs
résultats à ceux d'élèves d'une étude effectuée par Chervel et Manesse, en 1987.
Dans le but avoué que leur travail s'inscrive dans le débat qui agite l'opinion
publique autour d'une supposée baisse en orthographe chez les jeunes, ces
chercheuses souhaitaient non seulement prendre part au débat, mais l'alimenter en y
apportant des preuves scientifiques. En 2005, les deux universitaires ont refait passer
la même dictée que celle de l'enquête menée en 1986-1987 en suivant un protocole
identique. Elles ont constaté qu'en 1987, 50% des 3 000 élèves (âgés entre 10 et 16
ans) de l'enquête écrivaient le texte dicté (comportant 83 mots) avec moins de six
erreurs, contre 22% des 2 767 élèves, en 2005. Cette étude met donc en évidence un
retard de deux ans dans l'acquisition de l'orthographe. En 2005, les chercheuses ont
identifié 19 000 fautes de type «grammatical» contre 8 500 en 1987 alors que les
élèves étaient moins nombreux de 10% environ. À la lumière de cette enquête, nous
constatons que les principales lacunes des élèves se situent donc du côté de
l'orthographe grammaticale.
pour soutenir l'élève dans son acquisition de l'orthographe. Manesse et Cogis (2007)
soutiennent que l'orthographe lexicale relève, en partie, de la mémorisation visuelle,
puisque souvent aucune règle ne régit l'orthographe de certains mots comme «pouls»
avant que l'élève ne l'ait errregistré et intégré dans son lexique mental. Il en est
autrement pour l'orthographe grammaticale qui est constituée de marques
morphosyntaxiques, autrement dit de marques qui se transmettent au moyen de règles
qui exigent, pour être comprises et mises en œuvre, une analyse de la langue. De
cette prise de conscience naît un constat: l'enseignement de l'orthographe a besoin
de réajustements centrés sur une analyse réflexive de l'orthographe.
C'est également le constat qu'ont fait Bessonnat, Cordary et Ducard (2002). Ils
ont identifié quatre zones à risque à l'écrit: les correspondances phonographiques, les
chaînes d'accord (soit la gestion des variations qui s'explique en partie par la
morphologie silencieuse), les finales en -é ainsi que les homophones, grammaticaux
en particulier. L'orthographe grammaticale est, selon ces auteurs, source de conflits
chez les apprenants et c'est au collège (ce qui correspond à notre secondaire
québécois) que ces tensions deviennent de plus en plus importantes et qu'il y a la
prise de conscience suivante: un enseignement déclaratif est insuffisant et cela
s'explique par le nombre d'erreurs qui perdurent dans les textes. Ce changement
dans les pratiques est défini comme suit par Bessonnat, Cordary et Ducard (2002, p.
103) :
C'est pourquoi il est pertinent de regarder de plus près des pratiques prometteuses
en enseignement de l'orthographe et, particulièrement, de l'orthographe grammaticale.
Les ateliers de négociation graphique, mis au point par une équipe de chercheurs
de Dijon, constituent le dispositif didactique qui est le plus documenté (Haas et
Maurel, 2006). En petits groupes, les élèves sont invités à réfléchir sur la langue à
partir de la confrontation de leurs graphies produites dans une courte dictée. Cette
confrontation se déroule sous la supervision de l'enseignant qui soutient les élèves,
mais dont le rôle se limite à l'étayage. Les ANG proposent donc un défi aux élèves,
en autant que ce dernier soit réalisable avec le soutien de leurs pairs (Baas, 2002).
Tels que présentés par Nadeau et Fisher (2006, p. 211), les ANG sont pertinents dans
9
Les ANG constituent une pratique stimulante puisqu'elle fait émerger les
conceptions des élèves et permet une construction du savoir orthographique au moyen
des interactions entre les pairs. Aussi, selon Haas (2002), il s'agit d'une pratique qui
a fait ses preuves en salle de classe. Elle constate que certains élèves deviennent
capables de formuler des arguments valides et manifestent un développement de leurs
capacités métacognitives, une plus grande efficacité des procédures de relecture et
une amélioration du traitement des accords.
Une autre approche, mise au point par le groupe de recherche LEA (Linguistique
de l'Écrit et Acquisition), serait à préconiser en enseignement de l'orthographe, selon
Brissaud et Bessonnat (2001). Dans le même esprit que les ANG, il s'agit d'amener
les élèves à objectiver la façon dont ils résolvent des problèmes orthographiques sous
la forme d'entretiens au cours desquels deux ou trois élèves interagissent entre eux.
Cependant, au lieu d'une dictée, comme dans les ANG, leurs productions
personnelles sont utilisées.
Malgré les avantages que présente cette approche, il reste qu'elle nécessite
beaucoup de temps et, pour être fructueuse, selon Brissaud et Bessonnat (2001), cette
10
démarche doit s'inscrire dans une continuité et dans un dispositif de travail finalisé
(production de texte avec réécriture) afin de débloquer la parole de l'élève et de lui
donner sens. Par exemple, il importe que l'enseignant mise sur l'analogie en
questionnant l'élève. Brissaud et Bessonnat (2001) suggèrent des questions telles:
«À quoi ce mot te fait-il penser? De quel mot te rapproches-tu? Pourrais-tu le
remplacer?». L'enseignant doit également poser des questions autant du type
Pourquoi que du type Comment puisque le but n'est pas de connaître l'orthographe
exacte du mot, mais plutôt de mettre le doigt sur les chemins par lesquels passe
l'élève pour y arriver.
apprenants et d'en cerner les causes dans le but de mettre de l'avant des moyens pour
y remédier. Simard (1996, p. 379) est conscient des limites de la dictée qui est
souvent davantage un outil d'évaluation que d'apprentissage:
C'est une ineptie relevant de la pensée magique de croire que faire transcrire tant
bien que mal des textes tout-venant sans travail préalable et ne proposer pour
toute aide que d'illusoires notes accompagnées de marques rouges suffisent pour
faire apprendre l'orthographe.
La dictée a emprunté différentes formes au fil des siècles. Nous nous intéressons
ICI à la dictée dans une perspective d'aide à l'apprentissage. Parallèlement aux
pratiques iImovantes mentionnées précédemment, les auteurs font souvent mention de
la dictée 0 faute (Angoujard, 1994; Delprat et Moirot 2001; Cogis 2003; Brissaud et
Bessonnat 2001; Nadeau et Fisher 2006). Selon les auteurs, elle prend le nom de
dictée dialoguée, de dictée-consultation, de dictée assistée ou de dictée sans faute.
Nous préconisons cette dernière vu ses avantages qui seront présentés
subséquemment. Penchons-nous d'abord sur le déroulement d'une dictée 0 faute.
Un court texte est dicté aux élèves. Selon la présentation qu'en fait Cogis (2005),
les élèves écrivent d'abord individuellement et sont invités à souligner ce dont ils ne
sont pas certains. Ils ont la possibilité de poser toutes les questions qu'ils désirent
pendant la dictée même, ce qui les amène à exprimer le moindre doute le plus
clairement possible. Il s'agit d'une occasion pour montrer aux apprenants à articuler
toutes les connaissances nécessaires à la résolution d'un problème en leur donnant
droit à l'erreur (Nadeau et Fisher, 2006, p.215-216).
Selon Cogis (2005), l'enjeu est d'accompagner les élèves dans leur appropriation
de l'orthographe. Elle parle de la dictée sans faute comme d'une tâche problème,
proposée de façon régulière aux élèves, dont le but consiste à réfléchir sur les choix
12
Malgré l'aspect positif qui émane de ces pratiques innovantes, nous constatons le
manque de données quantitatives qui démontrent leur efficacité. Par exemple, Ros
Dupont (2006), après avoir mené des recherches auprès de différentes cohortes à
l'école élémentaire, observe que les commentaires des élèves aident l'enseignant à
identifier les procédures des apprenants (savoirs et savoir-faire) et à mesurer leurs
difficultés. Par contre, nous ne savons pas exactement sur quels types de données elle
base ses observations. Plusieurs chercheurs, notamment Nadeau et Fisher (2006),
Cogis (2005) et Simard (1996), soulignent que par les discussions grammaticales
entourant la dictée 0 faute, l'élève construit progressivement une conscience
métalinguistique utile à la maîtrise du code puisqu'il a droit à l'erreur et doit tenter
d'exprimer le plus clairement possible ses doutes quant à la graphie d'un mot. Au
delà des graphies erronées, la dictée 0 faute fournit à l'enseignant des indications sur
les modes d'analyse des élèves qui lui permettent de construire des activités de
remédiation plus ciblées.
14
Les recherches qui portent sur ce qui se passe dans la classe sont assez rares,
même en ce qui concerne les choix des enseignants et leur efficacité. Par ailleurs,
les recherches de type psycholinguistique et sociolinguistique fournissent des
points de repère. D'abord, il est nécessaire de tenir compte des représentations
des élèves et de celles des enseignants.
En ce qui concerne la dictée, Simard (1996) a fait le point. Il constate que les
recherches sur la rentabilité pédagogique de la dictée manquent. Une étude ancienne
sur l'efficacité de cet exercice, effectuée en 1948, a été dirigée avec un groupe
expérimental et un groupe contrôle. Au total, 23 classes faisaient la dictée et un
nombre équivalent de classes ne subissaient pas l'exercice, mais une même consigne
était donnée aux deux groupes: être vigilant à l'égard de l'orthographe en situation
d'écriture. L'analyse des courbes des résultats en orthographe conclut que la dictée,
préparée ou non, n'a aucune influence sur les progrès en orthographe (Simard, 1996).
Cependant, ce dernier insiste sur le fait que cette étude ne suffit évidemment pas pour
trancher la question. Il considère que plusieurs autres recherches expérimentales
devraient être menées pour vérifier si la dictée contribue ou non à l'apprentissage de
l'orthographe. Malgré moult critiques faites à l'égard des bienfaits de la dictée,
Simard (1996) demeure convaincu que la dictée constitue un exercice orthographique
complet qui, contrairement aux exercices à trous par exemple, al' avantage de
présenter les difficultés non plus de façon isolée et décontextualisée, mais en vrac,
comme c'est le cas dans une situation authentique d'écriture. En réaction aux
chercheurs qui doutent des effets de la dictée, Simard (1996, p. 389) répond:
Même si les chercheurs s'entendent pour dire que la dictée 0 faute est
prometteuse, aucune donnée n'appuie leurs propos, à l'exception d'un mémoire
professionnel non publié sur l'orthographe (Aubert, 2004-2005). Dans le cadre de ce
mémoire, Aubert (2004-2005, pA) s'intéresse à la notion de doute orthographique
«afin de développer une attitude réflexive des élèves face à la langue». Elle effectue
une synthèse des eneurs des élèves, traite de l'importance de développer le doute
orthographique chez les sujets apprenant l'orthographe et, enfin, décrit brièvement
quelques situations qui permettent, à son avis, de développer le doute orthographique.
Parmi ces dernières, elle présente les ateliers de négociation graphique, l'élaboration
d'une typologie d'erreurs avec les élèves et la dictée dialoguée telle que décrite par
Arabyan (1990), une variante de la dictée 0 faute.
utilisé le même texte plus tard (le moment n'est pas précisé), donné de façon
traditionnelle, afin d'évaluer ce que les élèves avaient retenu. Elle souhaitait vérifier
s'ils s'étaient amélioré par rapport au choix de certaines graphies. Le bilan des
résultats de Aubert (2004-2005, p. 25) est le suivant:
[... ] il apparaît que tous les élèves ont progressé. En effet, tous ont fait moins
d'erreurs que dans la dictée précédente, à savoir la dictée «dialoguée». Par
exemple, une «assez bonne élève», c'est-à-dire ayant déjà intégré une grande
partie du système orthographique, qui avait fait treize erreurs avant les échanges
verbaux entre élèves dans la «dictée dialoguée», n'a fait que cinq erreurs dans la
dictée «classique».
Les résultats se limitent donc à quelques cas d'élèves qui sont cités. Aussi, elle
relativise ses résultats étant donné la courte durée de son stage et le fait que
l'acquisition de l'orthographe est un long processus. La portée de ses résultats est
donc limitée.
Premièrement, étant donné que l'impact positif de ces pratiques est souvent
constaté par les chercheurs, mais que les interventions en classe sont rares et les
données empiriques inexistantes, le premier objectif consiste à vérifier l'effet sur les
compétences en orthographe des élèves avant et après l'intervention qui exploite la
dictée 0 faute.
Deuxièmement, compte tenu que les articles qui traitent de la dictée 0 faute se
limitent souvent à une description très brève, nous avons jugé pertinent de
documenter cette approche. Le deuxième objectif est de décrire l'évolution des
discussions dans le cadre des dictées 0 faute.
Dans ce chapitre, nous avons montré que l'orthographe est une lacune importante
des élèves québécois et français notamment par une brève présentation des résultats à
l'évaluation en écriture de cinquième secondaire du MELS et par les résultats de
l'enquête française de Manesse et Cogis (2007) sur l'orthographe. Nous avons
présenté différentes pratiques innovantes qui permettent de travailler l'orthographe en
rendant l'élève actif et en l'amenant à verbaliser son raisonnement grammatical.
Parmi ces pratiques, l'une d'entre elles, la dictée 0 faute, a été retenue, car elle nous
19
apparaît être celle qui permet le mieux de faire travailler l'ensemble du groupe sur
des problèmes orthographiques. C'est ce qui nous a amenée à formuler nos deux
objectifs de recherche. Dans le prochain chapitre, nous verrons, à l'aide de différents
auteurs, les bases théoriques sur lesquelles repose la dictée 0 faute et sur lesquelles se
fondent les hypothèses de recherche.
CHAPITRE II
CADRE THÉORIQUE
Enfin, l'enfant poursuit son acquisition de l'écriture par une troisième phase (la
phase orthographique) durant laquelle l'apprenti scripteur décrypte le fonctionnement
spécifique de l'orthographe française. L'acquisition de l'orthographe nécessite des
années puisque tous les problèmes ne peuvent être ni envisagés ni traités au même
âge. Par exemple, en français, les accords morphosyntaxiques dans la sphère verbale,
nécessitent un temps d'apprentissage très long et coûteux (Brissaud et Sandon, 1999).
les classes syntaxiques des mots et leurs relations dans une phrase et d'être habile à
reconnaître, 'sans les confondre, les marques souvent «muettes» qui proviennent des
morphogrammes, notamment le s du pluriel dans l'accord en genre et en nombre des
déterminants, noms et adjectifs, même si certains noms au pluriel ne nécessitent pas
un s malS un x.
Lors de la dictée 0 faute, pour éviter les censures, Sautot (2002) suggère
d'interroger les élèves sur ce qu'il convient de faire: s'interroger sur la graphie à
donner au mot. Il cite l'exemple d'un élève qui s'interroge sur la pertinence de
mettre une marque du pluriel au verbe dans la phrase * Je les trouves. La formulation
de sa question montre que le questionneur a déjà conscience de la problématique de
l'accord. Cette même question soulève également le problème de l'identification du
sujet et de sa confusion possible avec le complément direct placé devant le verbe. À
la suite de cette question, il est clair que le doute s'installe et le débat qui suit ce type
de question sera fructueux, car il engendre des justifications grammaticales sur la
graphie qu'il convient de retenir conformément à la norme. Cette question
témoignera d'un doute chez le scripteur, soit dans le cadre d'une stratégie
d'anticipation s'il questionne en écrivant, soit dans une stratégie de relecture s'il
doute une fois son texte complété.
réflexion s'exprime par l'entremise des verbalisations qui donnent accès aux
représentations et aux procédures des apprenants. Il est important de définir ce que
nous entendons par «verbalisation» puisque les verbalisations sont au cœur de notre
intervention.
Durant la dictée 0 faute, les élèves sont appelés à participer en verbalisant leurs
doutes et à exposer les raisonnements qu'ils déploient pour arriver à choisir ce qui
leur apparaît être la bonne graphie. Les verbalisations des élèves ont d'abord été
utilisées en recherche. Boyer (1997, p.20S) définit la verbalisation ainsi: « [... ]
ensemble des méthodes qui s'appuient sur le témoignage verbal de sujets pour obtenir
des informations sur les processus mentaux associés à des tâches déterminées ».
C'est en se donnant accès aux procédures des élèves que les enseignants peuvent
intervenir sur les obstacles qui nuisent à la construction des procédures grammaticales
des élèves. Ros-Dupont (2006, p. 231) définit ainsi les procédures des élèves:
Comme l'affirme Cogis (2005), si nous cessons d'être obsédés par «les fautes»,
nous devenons plus sensibles aux processus. L'objectif pédagogique est que les
procédures graphiques des élèves évoluent, même si cette évolution engendre de
nouvelles eneurs que nous devons toutefois relativiser. Il importe de définir
clairement ce que nous entendons par «procédure» et de distinguer les différents
types de procédures mises en œuvre lorsqu'un élève doit réaliser une chaîne d'accord,
par exemple.
Selon Cogis (2005), le but n'est pas d'amener l'élève à connaître toutes les
variétés de formation du pluriel, mais de construire le concept de pluriel en ce qui a
28
trait à la grammaire, qui n'est pas le calque exact de celui de pluralité en termes de
réalités physiques.
Compte tenu de cette différence, nous considérons qu'il faut être vigilant quant
aux procédures morphosémantiques auxquelles les élèves ont recours. Elles
deviennent en quelque sorte un mur invisible sur lequel les apprenants butent s'ils
n'arrivent pas à effectuer des traitements morphosyntaxiques. C'est pourquoi nous
considérons qu'il est important d'enseigner les manipulations syntaxiques dès le
primaire afin que les élèves puissent mener à bien, graduellement au fil de leur
scolarité, une observation réfléchie sur la langue. Autrement dit, le problème n'est
pas qu'un enfant de huit ou neuf ans effectue des accords par rapprochement
sémantique, le problème apparaît lorsqu'un collégien n'a pas réglé ce problème et que
les mêmes erreurs demeurent. Ces constats nous rappellent qu'il est important de
veiller à ce que les procédures des élèves ne s'immobilisent pas d'où l'importance de
traiter les représentations des apprenants pour les faire évoluer.
La difficulté que pose l'acquisition de ces procédures chez les élèves explique
notre choix de nous concentrer sur l'orthographe grammaticale dans le cadre de la
dictée 0 faute. Nous verrons de façon plus précise, dans la section suivante, les
procédures liées à l'acquisition du pluriel afin de voir que l'enfant réfléchit sur la
langue et que certaines erreurs s'expliquent par une difficulté à construire
successivement différentes conceptions.
Comme nous avons choisi de mettre l'accent sur les accords, entre autres sur
l'accord en geme et en nombre des déterminants, noms et adjectifs, il importe de se
pencher sur l'acquisition du pluriel chez les enfants. À cet effet, Guyon (2003) a
réalisé une recherche, dans une perspective psycholinguistique, sur l'évolution des
29
Si l'accord nominal pluriel progresse rapidement et semble acquis chez les élèves
du CE 2 (huit ou neuf ans), les erreurs liées à la finale verbale sont nombreuses.
Guyon (2003) reco1U1aît ainsi un statut particulier à l'erreur en affirmant que celle-ci
est non seulement incontournable, mais qu'elle fait partie intégrante du processus
d'acquisition puisqu'elle est riche en renseignements sur les procédures utilisées par
les apprenants et sur leurs représentations conceptuelles. Guyon (2003) conclut sa
recherche en insistant sur le fait que les procédures plus ou moins abouties qui sont
mobilisées par les apprenants au moment d'écrire un verbe, par exemple, sont
susceptibles d'interférer avec divers savoirs et savoir-faire, liés à d'autres secteurs du
système graphique, eux aussi en construction. Notamment les désinences muettes de
la conjugaison traduisant nombre, perS01U1e, temps et modes peuvent être assimilées à
d'autres lettres finales muettes conune les morphogrammes lexicaux, par exemple,
qui relèvent d'une logique pourtant différente.
Pour devenir un scripteur «expert», l'élève doit en effet développer une vigilance
orthographique: il doit être en mesure d'analyser chaque cas orthographique, ce qui
constitue une charge cognitive importante. Nadeau et Fisher (2009, p. 215) ont
effectué une recherche auprès de deux classes de sixième année du Québec sur
l'apprentissage de l'orthographe; elles soulignent que:
que nous appelons les lettres muettes constitue un obstacle dans le processus
d'acquisition de l'orthographe. Très tôt, les enfants découvrent la présence de lettres
muettes qui ajoute une difficulté au choix judicieux des unités phonogrammiques. Le
scripteur débutant (comme le scripteur expert) se heurtera aux écarts à la norme que
génèrent les lettres muettes à un point tel, selon Angoujard (1994), que leur oubli ou
leur distribution aléatoire sera considéré comme une fatalité.
Ensuite, les lettres muettes ne constituent pas le seul mode (spécifique à l'écrit)
de notation des informations morphologiques. Plusieurs exemples peuvent illustrer
ce constat, notamment l'observation des différences graphiques du verbe «aimer» :
aimer, aimé, aimez où le même phonème lei est transcrit de trois façons distinctes et
renvoie aux catégories morphologiques auxquelles appartiennent ces différentes
formes verbales: infinitif du verbe, participe passé, deuxième personne du pluriel de
33
Ces composantes sont donc directement liées aux principes qui sous-tendent les
pratiques innovantes en orthographe, que nous avons brièvement décrites dans la
problématique. Dans la section suivante, nous approfondirons le statut de l'erreur qui
constitue la base du raisonnement verbalisé par les élèves sous forme d'interactions
entre les pairs, guidées par l'enseignant.
Astolfi (1997) s'est penché sur le statut de l'erreur. Ses observations l'ont
conduit à un constat principal: dès qu'une erreur est perçue, le réflexe quasi
pavlovien est de souligner, de biffer, de matérialiser la faute sur la copie de l'élève.
Les maîtres se sentent souvent incapables d'agir autrement. Même s'ils ne se font pas
d'illusion sur leur efficacité, leurs corrections sont astreignantes puisque nombreux
sont ceux qui se sentent moralement obligés au nom de <<J'identité professionnelle»
de passer au peigne fin les copies des élèves et se sentent pris de vertige à l'idée
qu'une «faute» leur ait échappé. Souvent un statut négatif colle à l'erreur. C'est le
cas dans les modèles pédagogiques transmissifs corrune le modèle
comportementaliste (emprunté au béhaviorisme) qui consiste à faire apprendre
quelque chose à l'élève en décomposant la difficulté en étapes élémentaires et en
renforçant positivement chaque acquisition partielle. Le béhaviorisme permet
d'éviter certaines erreurs, mais dans le cadre d'un parcours étroitement guidé.
L'erreur conserve alors son statut négatif.
Notre expérience et les recherches dont nous avons parlé précédemment nous
amènent à croire en la nécessité de développer la compétence orthographique en
laissant plus de place au raisonnement des élèves. Cogis (2006, p. 21) insiste sur
l'idée qu'il manquait un chaînon, celui que de très nombreuses recherches mettent en
évidence aujourd'hui. Ce chaînon manquant, c'est l'élève: «En orthographe aussi, il
pense, et ce qu'il pense compte». Les recherches de Cogis (2006) démontrent que
l'apprentissage de l'orthographe est un processus essentiellement conceptuel qui
mobilise l'intelligence de l'apprenant avec ses connaissances et ses capacités
cognitives du moment, et ce, depuis ses balbutiements dans le monde de l'écrit.
L'exemple suivant, tiré de notre pratique de la dictée 0 faute, illustre ce que dit
Cogis (2006). Un élève de 15 ans, en troisième secondaire, participe à une discussion
grammaticale après qu'une phrase lui eut été dictée. Il prend donc la parole au cours
d'une séance de confrontation des points de vue. Il a écrit *Tous le monde et se
justifie ainsi: «J'ai écrit tout avec un s parce qu'il y a plusieurs persolU1es ... mais je
ne suis pas sûr.» Cette réflexion montre une cOlU1aissance des marques
morphologiques, mais cette dernière se confond avec une interprétation sémantique
du référent (ici, le fait que le terme générique monde englobe plusieurs persolU1es).
Cette procédure qui combine la cOlU1aissance des marques morphologiques et
l'interprétation sémantique du référent est présente chez bon nombre d'élèves du
secondaire et engendre un nombre important d'erreurs. Pourtant, il y a bel et bien une
réflexion derrière cette erreur. Astolfi (1997) cite également le cas d'un sujet qui
écrit * Le plafond s'effritent en justifiant que «ça fait plein de petites miettes» et * Le
chien aboies en soutenant que l'animal le fait habituellement plusieurs fois. Le fait
37
Il ne s'agit donc pas d'éviter l'erreur à tout prix et, pour ce faire, d'enchaîner le
maximum de notions dans une année; ni de rectifier tous les manquements à la
norme en effaçant la faute parce qu'elle ferait tache ou qu'elle risquerait de
prendre racine [... ] Mais au contraire, il faut donner à l'élève la possibilité de se
38
Simard (1996) partageait déjà ce point de vue: l'erreur doit être traitée davantage
comme la trace d'un savoir en train de s'élaborer qu'un écart à la norme. Selon lui,
l'analyse de l'erreur constitue une source précieuse de renseignements sur la
grammaire interne de l'élève en plus de constituer un moyen irremplaçable pour
mieux adapter son enseignement au besoin de l'élève. Simard (1996, p. 392) apporte
également une nuance fort importante:
Cette conception plus ouverte de l'erreur n'équivaut pas au laxisme: elle suppose
toujours que l'élève, dans ses textes, s'efforce de respecter le code
orthographique et de corriger toutes les erreurs relevant de son niveau d'études.
En s'appuyant sur les travaux de Vygotsky, Reuter (1996, p. 80) définit la zone
proximale de développement comme
Autrement dit, cette zone est définie comme un écart entre les deux niveaux de
développement: le niveau actuel (ce que l'enfant peut réaliser seul) et le niveau
proximal (ce qu'il est capable de réaliser avec le support d'un adulte ou d'un pair plus
expérimenté que lui). Cette zone varie évidemment d'un apprenant à un autre et
permet à l'enseignant de préciser les zones sur lesquelles il doit cerner ses activités.
Selon Reuter, la zone proximale est plus qu'une fin; elle constitue un espace
enseignement-apprentissage à affiner et à cerner dans sa dynamique, car elle est
constamment transformée. La dictée 0 faute consiste donc à vérifier de façon très
ngoureuse l'état des savoirs et des savoir-faire des apprenants et de les faire
progresser tout en respectant la zone proximale de développement, sous forme
d'interactions avec le groupe.
Divers auteurs ont développé des théories qui s'inscrivent en cohérence avec le
courant socioconstructiviste développé dans les années 1980. Parmi ceux-ci,
mentionnons notamment Vygotsky, théoricien russe de l'apprentissage social, au
début du vingtième siècle et Astolfi (1997), professeur en Sciences de l'éducation à
l'université de Rouen qui considère que l'école doit tenir compte des représentations
et des raisonnements des élèves afin d'être en mesure de les transformer en leur
proposant des tâches qui représentent un obstacle franchissable. De leur conception
de l'apprentissage se dégagent des principes à mettre en œuvre dans les pratiques
d'enseignement tels le statut de l'erreur et la zone proximale de développement dont
il a été question dans les deux sections précédentes et l'importance des interactions
dans l'apprentissage. Ce rôle prépondérant des interactions sera développé dans la
section suivante étant donné que les discussions collectives constituent un des aspects
principaux de la dictée 0 faute.
celles-ci, des recherches sur l'apprentissage en situation scolaire montrent que des
régulations cognitives et métacognitives interviennent dans la construction des
connaissances et dans leur exploitation face à des tâches nouvelles:
(1997) appelle des buts d'apprentissage, ce vers quoi tend la dictée 0 faute. En effet,
selon Tardif (l 997, p. 102-103) :
Dans la section suivante, nous nous pencherons sur les pratiques qUI nous
apparaissent prometteuses en regard des fondements théoriques du cadre
socioconstructiviste dont nous avons parlé. Nous commencerons par nous intéresser
à l'évolution de la dictée au fil du temps pour montrer qu'il est possible de faire de
cet outil, utilisé souvent à des fins d'évaluation, un outil d'apprentissage. Nous
ferons un bref survol des différents types de dictée. Nous aborderons également les
ateliers de négociation graphique, pratique innovante pour amener l'élève à apprendre
l'orthographe et, enfin, nous présenterons plus explicitement la dictée 0 faute.
42
Si nous nous penchons sérieusement sur l'exercice de la dictée au fil des siècles,
nous constatons aisément que la dictée s'est diversifiée, empruntant différents visages,
différentes formes selon ses fonctions. Tantôt aide à l'apprentissage, tantôt sanction
de fin d'études, la dictée en salle de classe varie selon le matériau dicté (parfois des
phrases aucunement liées par le sens, parfois un texte suivi littéraire, etc.) et le mode
de correction. Simard (1996) a retenu deux grands classements fondés sur deux
critères: la nature de l'écrit dicté et le but visé. Les catégories qu'il présente ne sont
pas toutes exclusives et peuvent se rencontrer en combinaison.
En ce qui concerne les formes de dictée, trois formules ont été privilégiées par les
maîtres au fil du temps: la dictée de mots (aussi appelée couramment la dictée
trouée), la dictée de phrases (qui consiste en la transcription de phrases détachées) et
la dictée de texte (composée par l'enseignant ou par un auteur). De façon générale,
lorsque les gens parlent de dictée, c'est à cette dernière forme qu'ils se réfèrent, car il
s'agit de la forme la plus répandue et la plus appréciée des différentes sphères de la
société (Simard, 1996).
Parmi les types de dictées proposées, la dictée préparée a été inventée dans le but
d'éviter les devinettes lorsque l'élève se trouve confronté devant une page jonglant
avec les graphies. Elle consiste à étudier préalablement le texte qui sera dicté par
l'enseignant. Il arrive que ce dernier note au tableau les mots ou les expressions plus
difficiles qu'il explique ensuite aux élèves en les invitant, par exemple, à observer
certaines graphies particulières, à rapprocher des mots d'une même famille, à saisir
certaines règles d'accord, etc. La dictée succède ainsi à une phase d'étude dont le
délai peut être plus ou moins long.
Dans la même veine, la dictée mutuelle, qui vise à vérifier l'orthographe d'usage
des élèves de façon hebdomadaire, invite les élèves à jouer le rôle de professeur.
Ainsi, en dyade, un élève est invité à préparer une dictée et à la donner à un pair. Ce
type est peu répandu, selon Simard (1996), du fait que son fonctionnement coopératif
ne s'accorde pas toujours avec le modèle pédagogique de transmission du savoir.
aux chercheurs de fonnuler des hypothèses pour les recherches ultérieures. Ces
hypothèses allaient dans le sens suivant: les élèves sont capables très tôt, dans leur
scolarité, d'une réflexion métalinguistique avancée qu'ils sont en mesure de
développer dans des situations appropriées avec l'aide de l'adulte (sous fonne
d'étayage) et dans le cadre d'interactions avec les pairs. Les chercheurs soutiennent
également que cette réflexion métalinguistique fait évoluer plus rapidement leurs
représentations de la langue écrite et de l'orthographe et leur procure des stratégies
qu'ils pourront ensuite réutiliser consciemment dans des situations d'écriture
autonome.
Inspirés par les travaux de Ferreiro à la fin des années 1980, les ANG ont été mis
au point par une équipe de chercheurs de Dijon. Les ANG consistent en des
interactions entre les élèves dans une perspective constructiviste et interactionniste;
ils ont été influencés fortement par les conceptions de Piaget et de Vygotsky. Ce
dispositif vise notamment à appréhender l'orthographe française non comme une
juxtaposition de règles hétéroclites ponctuées d'exceptions, mais plutôt comme un
plurisystème cohérent. Haas (1999) considère les ANG comme une nouvelle
situation d'apprentissage en didactique de l'orthographe. Ce dispositif foumit un
cadre dans lequel l'élève peut fonnuler et faire évoluer ses conceptions relatives au
système écrit et développer, par le fait même, des compétences métalinguistiques qui
lui pennettent d'apprivoiser les raisonnements orthographiques. Haas (2002, p. 127)
utilise le tenne «métalinguistique» en reprenant la définition formulée par Gombert
(1991) : «activité de réflexion sur le langage impliquant la conscience que le sujet a
de ses connaissances sur le langage [... ]» .
Un court texte est dicté à un petit groupe de cinq ou six élèves pendant que les
autres s'adonnent à une autre tâche en autonomie. Les productions des élèves sont
affichées afin que tous prennent èonnaissance des graphies proposées par leurs pairs.
47
De là, naît un débat, une confrontation, une argumentation autour des différentes
graphies. Chaque élève est appelé à exposer son raisonnement. À la fin, l'enseignant
effectue une synthèse des problèmes résolus et de ceux demeurés en suspens et
affiche le texte exact.
Haas et Maurel (2006, p. 27), définissent les ANG comme un: «dispositif qui
permet à l'enseignant de prendre en compte très finement l'état des savoirs et savoir
faire de l'élève et donc de le faire progresser dans sa propre zone proximale de
développement.». Isidore-Prigent (2002), pour sa part, définit les ANG comme un
lieu ouvert de réflexion pour dialoguer sur l'orthographe. Elle y apporte une
dimension nouvelle, celle de l'argumentation. Par ses recherches, elle montre
l'activité argumentative des élèves qui s'appuie sur certaines opérations logico
discursives à l'œuvre durant les séances de négociation. Comme le souligne Isidore-
Prigent (2002, p. 75) :
également que les échanges transforment plus radicalement les positions des
interlocuteurs au fil d'un cheminement réflexif. Le raisonnement évolue vers ce que
Piaget appelle la pensée formelle. Aussi, Isidore-Prigent (2002, p. 78) insiste sur le
fait que le besoin de vérifier n'émerge pas spontanément chez les élèves. Il naît du
«choc de notre pensée avec celle des autres participants qui produit en nous le doute
et le besoin de prouver». Enfin, elle conclut ses recherches en constatant que le fait
de débattre permet d'avancer collectivement vers l'appropriation du système
graphique.
la situation, soit analyser cette situation en temps réel pour garantir un étayage
efficace.
À la suite de plusieurs observations, Haas (1999) fait ressortir que les élèves du
groupe fort sont ceux qui manifestent le plus d'aisance dans les comportements
métalinguistiques. Ils ont une grande capacité à généraliser, à manipuler le langage
comme objet. Donc, elle conclut que le lien entre le rapport au langage et la réussite
scolaire est évident. Par ailleurs, les élèves du groupe faible ont, eux aussi, fait
preuve de capacités métalinguistiques. Cependant, la confiance qu'ils ont à l'égard de
leurs habiletés à raisormer demeure à consolider. L'effet des ANG sur les élèves ont
donc été documentés, dans une certaine mesure, principalement sur le plan qualitatif.
Une autre activité qui développe aussi les compétences métalinguistiques sera définie:
la dictée a faute. Cette dernière repose sur les mêmes principes, mais les recherches
sur cette pratique sont presque inexistantes.
51
Étant placés en situation de recherches de solutions, les élèves sont les acteurs de
leurs apprentissages. Même si nous ne nous situons plus dans un paradigme de
transmission des connaissances, nous pouvons affirmer que l'enseignant joue tout de
même un rôle fondamental, qui exige beaucoup de doigté, comme nous pourrons le
constater dans la section suivante.
52
Tel que le soulignent Cogis et Ros-Dupont (2003) à propos des ANG et des
autres activités qui préconisent le raisonnement grammatical, le rôle de l'enseignant
est redéfini: il donne la parole, récapitule, relance. Il saisit tout ce qui se dit afin de
soutenir l'activité mentale et repérer les directions à prendre pour se situer dans la
zone proximale de développement des élèves.
La dictée 0 faute est une pratique comparable aux ANG, décrits précédemment.
D'abord, leur point de départ est le même (un texte dicté par l'enseignant). Ces deux
pratiques suscitent une réflexion sur la langue, guidée par l'enseignant. Selon
plusieurs chercheurs notamment Cogis (2006), Ros-Dupont (2006), Nadeau et Fisher
(2006), Brissaud et Bessonnat (2001), Campana et Castincaud (1999), se tourner vers
les raisonnements révèle à l'enseignant les procédures de gestion des jeunes
scripteurs au moyen de leurs choix graphiques et, surtout, par les savoirs et les
procédures qu'ils mettent de l'avant. L'attention est donc tournée vers les processus.
Il s'agit là de l'objectif principal de notre intervention.
Les ANG, tels que décrits par Ros-Dupont (2006), se déroulent sous forme d'un
petit groupe relativement homogène (de trois à six élèves) qui discute et réfléchit
autour d'une question identifiée par le maître à partir des besoins des élèves.
groupe. Les phrases sont lues par l'enseignant à l'ensemble de la classe, qui participe
simultanément, de façon individuelle dans un premier temps pour l'écriture, et, dans
un deuxième temps, de façon collective pour ce qui est de la discussion. La relecture
constitue un moment important au cours duquel les élèves sont invités à entourer les
passages qui suscitent des doutes et sur lesquels ils souhaiteraient amorcer une
discussion. Les verbalisations sont entendues par tous les élèves, les doutes sont
partagés à partir de leurs connaissances personnelles et de celles issues des
interactions. Ce type de dictée fait donc participer l'ensemble du groupe. En plus de
nous apparaître plus facile pour la gestion de classe que les ANG sur le plan
organisationnel, la dictée 0 faute peut s'effectuer sur une base plus régulière que les
ANG et sa durée peut être modulée selon la longueur du texte choisi par l'enseignant
et les difficultés qu'il contient.
Durant ces deux activités, Ros-Dupont (2006), qui privilégie une démarche
d'observation réfléchie de la langue, constate que les élèves sont appelés à découvrir
et à utiliser un métalangage grammatical pour exprimer leurs doutes lorsqu'ils relisent
le texte dicté. Étant donné que lors des ANG et de la dictée 0 faute, l'objet de travail
de l'enseignant est le produit de l'activité mentale et langagière des apprenants, selon
Cogis et Ros-Dupont (2003), nous verrons de quelle façon le métalangage
grammatical est souvent utilisé dans les leçons de grammaire par les élèves et par les
enseignants. Nous présenterons également brièvement son importance pour rendre
l'étayage du raisonnement plus efficace.
Selon Bain (2004), les enseignants hésitent souvent à utiliser des désinences
grammaticales spécifiques. Il explique ce constat par le fait que les enseignants
estiment que ces dernières sont peu voire mal maîtrisées par une majorité d'élèves,
plus particulièrement lorsqu'il s'agit de termes sortant du vocabulaire courant. À titre
d'exemple, Bain (2004) illustre cette situation par la séquence suivante. Un élève
54
Or, pour développer la maîtrise de la langue chez les élèves, Bain (2004) abonde
dans le même sens que Grossman (1998), qui suggère trois outils pour
55
De façon globale, les résultats aux épreuves du MELS ont baissé entre 1987 et
2005. Par ailleurs, les résultats de l'enquête démontrent que l'orthographe
grammaticale est la zone à haut risque, que ce soit l'accord entre le verbe et le sujet
au sein du groupe nominal, la conjugaison, l'infinitif en - er, le pluriel de certains
56
noms ou le participe passé employé avec l'auxiliaire avoir (Manesse et Cogis, 2007,
p. 97). Ces résultats corroborent les constats de plusieurs chercheurs notamment
Cogis (2005), Guyon (2003), Brissaud et Bessonnat (2001), Jaffré (1998), Rieben,
Fayol et Perfetti (1997) qui considèrent que la morphologie du nombre joue un rôle
essentiel en français écrit et qu'elle s'avère complexe pour les apprentis scripteurs
pour deux raisons comme nous l'avons expliqué dans ce chapitre.
Parallèlement à cette difficulté identifiée par les chercheurs, ces constats viennent
corroborer des recherches en psychologie cognitive qui montrent que l'erreur entre la
marque s et nt (écrire s au lieu de nt ou l'inverse) était facilitée par l'appartenance
d'une unité à deux classes syntaxiques, par exemple: des timbres / ils timbrent.
Selon les chercheurs, cette confusion concerne surtout les verbes. Fayol (2000) a
montré que les élèves au CE2 et au CM1 effectuaient fréquemment des
surgénéralisations du nt sur les noms qui ont un homophone verbal, comme c'est le
cas pour le mot lance. Selon lui, ce type d'erreurs s'explique par une confusion en
mémoire. Fayol (2000, p. 4) souligne:
appliquent la règle. Puis, une fois qu'ils ont suffisamment souvent appliqué la
règle, ils passent sans que l'on s'en aperçoive d'une application procédurale à une
remémoration. À un certain moment, leurs connaissances orthographiques
n'utilisent plus les règles mais passent par la récupération directe de la graphie
des mots. Les règles ne sont sans doute alors qu'exceptionnellement appliquées.
Elles sont toujours disponibles mais n'interviennent qu'à titre de contrôle.
Les mots qui étaient orthographiés erronément avec un «s» étaient ceux qui ont
un homophone nominal et dont l'homophone nominal est plus fréquent que
l'homophone verbal. En conséquence, du point de vue des processus mentaux,
les adultes ne font pas référence à une règle. Ils récupèrent directement dans leur
mémoire la forme pluralisée la plus fréquente.
À l'inverse, certaines formes sont plus facilement mobilisées par les élèves, car
elles ne pourraient s'écrire autrement. C'est le cas du verbe venir au présent de
l'indicatif: ils vont. À cet effet, les auteures Manesse et Cogis (2007, p. 125) sont
catégoriques: «La compréhension du sens de la phrase, l'appréhension de sa classe
syntaxique sont déterminantes, le contrôle est crucial. »
Les erreurs identifiées dans les dictées montrent une grande incertitude chez les
élèves quant à la reconnaissance du verbe conjugué, autrement dit, du verbe dans son
rôle syntaxique de «noyau» auquel sont attribuées des marques spécifiques. Les
chercheurs insistent donc sur le fait que toute classe de mots n'est pas équivalente à
une autre et que non seulement le pluriel du nom est maîtrisé plus rapidement par les
58
élèves que celui de l'adjectif, mais que ce dernier l'est aussi plus rapidement que
celui du verbe. La différence de traitement entre les classes de mots exige de l'élève
qu'il se réfère au sens, au contexte, mais aussi à la structure syntaxique des phrases.
Outre la difficulté que posent les accords en genre et en nombre des déterminants,
noms et adjectifs dont nous avons parlé précédemment, Manesse et Cogis (2007)
rappellent que la capacité ou l'incapacité des élèves à effectuer un accord sujet-verbe
est souvent considérée comme la «pierre de touche» de la maîtrise de l'orthographe
grammaticale.
Par ailleurs, comme nous l'avons montré dans ce chapitre, les élèves ont un
savoir orthographique: ils effectuent de nombreux accords, produisent de
nombreuses marques morphologiques, parfois même quand la reconnaissance du mot
59
semble inexistante (Guyon, 2002). Comme la dictée 0 faute met l'accent sur les
processus d'apprentissage plutôt que sur le produit, l'élève est appelé à mettre à profit
ses connaissances orthographiques, à les rectifier et à les approfondir grâce aux
échanges qui se déroulent collectivement. Comme le souligne Cogis (2005, p. 304)
en faisant allusion à la dictée du jour et aux autres dispositifs similaires, l'élève
apprend l'orthographe et «s'entraîne à mobiliser savoir et savoir-faire» puisque «[ ... ]
les élèves vont de l'avant: ils comprennent peu à peu ce qu'ils n'avaient pas encore
compris et découvrent des aspects qu'ils n'avaient pas encore découverts.»
Comme nous avons présenté les bases théoriques sur lesquelles repose la dictée 0
faute, nous présenterons dans la section suivante les objectifs, les questions ainsi que
l'hypothèse de recherche qui ont guidé notre intervention.
D'abord, nos lectures nous ont amenée à nous poser la question suivante: est-ce
que les élèves s'améliorent en orthographe (lexicale et grammaticale) après avoir
vécu la dictée 0 faute sur une base régulière? Nous avons vu, dans ce chapitre, plus
particulièrement avec les résultats de l'enquête de Manesse et Cogis (2007), que
l'orthographe grammaticale constitue le défi à relever. Nous avons montré que
l'enseignement de l'orthographe implique des savoirs complexes dont l'acquisition
du pluriel et le caractère silencieux des marques de geme, de nombre et de personne.
Afin de remédier au problème que pose l'application des règles d'accord, nous avons
brossé un portrait des pratiques prometteuses en orthographe telles les ANG, la dictée
o faute ou la dictée du jour qui peuvent être implantées dans les classes, mais qui le
sont difficilement étant donné le manque de recherches sur leur efficacité. En effet,
60
Haas (2002, p. 58) observe des effets positifs des ANG qui mettent en application des
principes semblables à ceux préconisés par la dictée 0 faute.
Nous menons des ANG depuis 10 ans. Nous avons enregistré, analysé de
nombreux cycles d'ANG. Nous constatons des progrès certains au fil des ANG :
les plus faibles prennent de l'assurance, sont capables, en fin d'année de formuler
des raisonnements valides, argumentent avec les autres, font preuve d'un
développement manifeste de leurs capacités métacognitives. Cela se traduit dans
les productions d'écrit par une plus grande efficacité des procédures de relecture,
et de façon générale, par l'amélioration du traitement des accords.
Ces constats ne sont pas basés sur des données quantifiées, mais plutôt sur des
observations d'enseignants et de chercheurs. Il en est de même pour la dictée 0 faute.
Comme nous l'avons déjà mentionné, Nadeau et Fisher (2006) ont noté que les
enseignants qui expérimentent la dictée 0 faute l'insèrent dans leur pratique régulière
car ils constatent des changements positifs chez leurs élèves en ce qui concerne la
maîtrise de l'orthographe, leur motivation et leur attitude positive par rapport à la
grammaire en général. Cogis et Ros-Dupont (2003) soulignent que les enseignants
qui expérimentent la dictée du jour, une variante de la dictée 0 faute, l'adoptent
également dans leur pratique.
Compte tenu des bases théoriques solides sur lesquelles repose la dictée 0 faute
que nous avons présentée dans ce chapitre, nous émettons l'hypothèse suivante: les
élèves qui pratiquent la dictée 0 faute sur une base régulière améliorent leur
compétence en orthographe.
CADRE MÉTHODOLOGIQUE
Dans ce chapitre, nous expliquerons les choix méthodologiques que nous avons
retenus afin de mener à bien notre intervention. Il sera question, entre autres, du type
de recherche choisi en fonction de nos deux objectifs, des sujets et de la formation
des groupes témoin et expérimental. Nous décrirons le contexte de l'intervention en
traitant de l'aspect déontologique, du déroulement de la cueillette de données pour le
prétest et le post-test ainsi que du déroulement de l'intervention, soit la séquence de
neuf dictées 0 faute. Nous décrirons les instruments utilisés pour chacun de nos deux
objectifs de recherche, soit le texte de Fénelon et le corpus de dictées que nous avons
élaboré aux fins de notre intervention. Nous terminerons ce chapitre en présentant les
données traitées en lien avec nos deux objectifs et les limites de l'intervention.
D'entrée de jeu, mentionnons que dans le cadre d'un mémoire de maîtrise, il était
difficile que notre expérience en didactique du français (qui fait partie des recherches
en éducation), soit menée par d'autres que la chercheuse en raison notamment du rôle
de catalyseur que nous avons joué dans notre milieu scolaire en expérimentant une
nouvelle approche pour enseigner l'orthographe. Boyer et Savoie-Zajc (1997, p.19)
définissent ainsi la recherche en éducation.
64
Nous avons voulu, en tant que chercheuse, agir dans notre milieu et documenter
rigoureusement les impressions positives de bon nombre d'enseignants qui, après voir
essayé la dictée 0 faute, la phrase du jour ou la dictée dialoguée l'adoptent dans leur
pratique (Cogis et Ros-Dupont, 2003). En plus d'observer une diminution du nombre
d'erreurs, après plusieurs séances, Nadeau et Fisher (2006, p. 218), notent également
des changements positifs chez les apprenants
[... ] ils apprennent à douter de leurs graphies et à exprimer plus précisément ces
doutes; ils deviennent plus habiles à résoudre eux-mêmes les problèmes
orthographiques, que ce soit en consultant des ressources ou en utilisant les
manipulations dans leur raisonnement grammatical.
D'abord, notre premier objectif qui visait à vérifier les compétences individuelles
en orthographe grammaticale à l'aide d'une dictée évaluative nous a amenée à
recueillir des données quantitatives. Pour cet aspect de la recherche, nous pouvons
affirmer avoir fait une recherche-action de type «contrôlée» et non de type
«structurée» au sens qu'adopte Gagné (1997, p. 97).
5 Cette expression est utilisée dans ce mémoire pour éviter trop de lourdeur. Certains adjectifs
peuvent être dans un groupe nominal et d'autres utilisés comme attributs.
66
Ainsi, tel que décrit par Gagné (1997), nous avons administré un prétest et un
post-test, utilisé un groupe témoin et soumis nos données à des tests statistiques de
significativité, techniques utilisées dans les démarches de type expérimental. Nous
avons fait appel au SCAD, le Service de consultation en analyse de données de
l'UQÀM afin de vérifier si les résultats obtenus étaient significatifs.
Nous avons opté pour ce que Gagné (1997, p.98) nomme le «décloisonnement
des modes d'investigation» afin de poursuivre notre deuxième objectif comme nous
le décrirons dans la section suivante.
Pour cet aspect de la recherche, nous avons opté pour un type de recherche
principalement descriptif. Gagné (1997) traite des recherches dans la banque DAF
(didactique et acquisition du français) en les définissant. Notre recherche correspond
à la recherche descriptive selon la définition de Gagné (1997, p.l 00).
J'ai rangé parmi les premières [les recherches de type qualitatif] toutes les
recherches théoriques, les recherches-action structurées ainsi que les démarches
suivantes de la recherche descriptive: analyse de contenu, étude de cas, étude
historique et observation externe.
67
Pour des raisons d'ordre pratique, le groupe expérimental a été sélectionné parmi
les deux groupes réguliers à notre charge durant l'année scolaire 2007-2008. Le
groupe témoin, quant à lui, a été créé à partir d'un bassin de deux classes naturelles
d'une collègue enseignant au même niveau et à la même école. Au total, tous
groupes confondus, 116 élèves ont complété la dictée évaluative au prétest et au post
test. Pour la sélection et la formation des groupes témoin et expérimental, nous avons
examiné principalement les variables suivantes: le sexe, l'âge, la langue première, le
nombre total de mots bien écrits et le nombre d'erreurs dans les accords en genre et
en nombre des déterminants, noms et adjectifs ainsi que le nombre d'erreurs dans les
accords sujet-verbe lors du prétest. Ainsi, autant que possible, nous nous sommes
assurée de comparer des groupes avec des caractéristiques semblables avant
l'intervention, comme nous le verrons plus loin dans le tableau 3.1.
2. groupes définitifs: avec les élèves dont les résultats ont servI à la
recherche, soit ceux ayant fait le prétest et le post-test.
Le tableau 3.1 montre que les deux groupes ne présentent pas de différences
significatives en ce qui concerne les variables considérées, issues de la dictée
évaluative qui a servi de prétest : sexe, âge, nombre de mots bien écrits et nombre
d'erreurs d'accord. Le groupe témoin a donc été apparié dans le but d'être le plus
comparable possible au groupe expérimental.
Tableau 3.1
Variables analysées pour la constitution d'un groupe témoin qui ne présente pas de
Nombre de mots bien Moyenne: 70,1 mots Moyenne: 70,5 mots Non
écrits (prétest) Écart-type: 5,7 Écart-type: 5,2 significative
Nombre d'erreurs
d'accord en genre et en Moyenne: 4,35 Moyenne :4,65 Non
nombre des déterminants, Écart-type: 1,76 Écart-type: 2,26 significative
noms et adjectifs
CP = 0,80). Les différences ne sont pas non plus significatives en ce qui concerne les
différences d'âge selon le test bilatéral de Student CP = 0,4136). Enfin, les résultats
obtenus au prétest en ce qui concerne le nombre de mots bien écrits ne présentent pas
non plus de différences significatives selon le test bilatéral de Student CP = 0,7631).
Nous avons également pris en considération les performances des élèves en ce qui
concerne les accords en genre et en nombre des déterminants, noms et adjectifs ainsi
que le nombre d'erreurs dans les accords sujet-verbe. Les résultats des élèves pour
ces deux variables ne présentaient pas non plus de différences significatives selon le
test bilatéral de Wilcoxon CP = 0,9204 pour l'accord en genre et en nombre des
déterminants, noms et adjectifs CP = 0,6679 pour l'accord sujet-verbe).
Nous nous sommes de plus intéressée à la langue première des élèves afin de
tenir également compte de cette variable dans la constitution de notre groupe témoin.
Toutefois, nous n'avons pas été en mesure d'effectuer de test statistique, puisqu'il
aurait fallu regrouper les langues en catégories, mais le tableau 3.2 montre que les
deux groupes ont un portrait linguistique similaire en ce qui concerne la langue
première des sujets.
71
Tableau 3.2
Comme dans les deux groupes, expérimental et témoin, ce11ains élèves étaient
absents au moment du post-test, les données analysées, au chapitre IV, ne tiennent
72
compte que des élèves pour lesquels les données sont complètes (résultats disponibles
pour le prétest et le post-test). Ceci a donc affecté la composition des groupes
expérimental et témoin. L'exclusion de certains élèves nous a conduit à vérifier de
nouveau si les groupes demeuraient sans différences significatives au prétest pour les
variables considérées. Le tableau 3.3 présente les variables analysées en tenant
compte de la constitution des groupes définitifs.
Tableau 3.3
Variables analysées pour les groupes définitifs dont les résultats ont fait l'objet d'une
analyse
La perte de quelques élèves entre le prétest et le post-test a très peu affecté les
variables du sexe et de l'âge. Toutefois, nous avons refait les tests pour les variables
liées à l'orthographe. Le test bilatéral de Student montre qu'il n'y a pas de
différences significatives en ce qui concerne la moyenne du nombre de mots bien
écrits (p=O,5992). Le test bilatéral non paramétrique de Wilcoxon, quant à lui,
73
montre que le nombre moyen d'erreurs dans les accords en genre et en nombre des
déterminants, noms et adjectifs ne présente pas non plus de différences significatives
(p=O,8839). Enfin, les deux groupes demeurent comparables en ce qui concerne la
moyenne du nombre d'erreurs dans les accords sujet-verbe, selon le test de Wilcoxon
(p=O,7595).
Donc, malgré l'attrition entre le prétest et le post, nous pouvons conclure que les
deux groupes sont demeurés équivalents. Maintenant que nous avons décrit la
composition des groupes qui ont participé à la recherche, nous présenterons le
contexte dans lequel s'est déroulée cette dernière.
3.3. J La déontologie
mentionnant que des séquences de dictées 0 faute seraient filmées. Nous avons
également précisé que cette recherche s'inscrivait dans le cadre des objectifs du cours
de français et expliqué sommairement les procédures tout en spécifiant que la
confidentialité serait respectée. Nous avons pris soin de mentionner que nous
souhaitions documenter une approche que nous utilisions déjà depuis trois ans dans
nos classes afin de développer le raisonnement des élèves en grammaire. Le
deuxième consentement, pour le groupe témoin, se limitait à demander l'autorisation
afin que les élèves participent à deux dictées évaluatives en septembre 2007 et en
février 2008. Tous les parents ont donné leur accord.
Pour donner leur dictée, Manesse et Cogis (2007) se présentaient, explicitaient les
objectifs de la recherche, apportaient des précisions en ce qui a trait à l'absence de
notation, à l'anonymat assuré et à l'importance de participer avec sérieux à la
recherche. Aucune explication n'était permise durant la dictée. Toutes les questions
étaient reconduites à la discussion qui suivait l'exercice.
Nous avons adopté le même protocole que celui de Manesse et Cogis lors du
prétest, qui a eu lieu dans la semaine du 14 septembre 2007, à une différence près.
Aucune discussion n'a été prévue à la suite de la dictée pour éclaircir les points
litigieux, car le même texte allait servir lors du post-test environ cinq mois plus tard,
soit dans la semaine du Il février 2008. Lors du prétest, nous avisions les élèves que
75
Par la suite, les dictées ont été corrigées afin de dresser le bilan de chaque élève:
variables personnelles (sexe, âge, langue première) ainsi que les variables liées à la
réussite au prétest (voir annexe E). Une fois les données du prétest recueillies, nous
étions en mesure d'amorcer l'intervention. Cette dernière sera décrite dans la section
suivante.
Les dictées étaient toutes filmées par deux caméras même s'il était prévu que
seulement trois dictées fassent l'objet d'une analyse. Afin d'éviter de bouleverser
l'équilibre au sein de la classe, nous n'avons pas fait appel à un cameraman de
l'extérieur. Pour des raisons pédagogiques, un élève de la classe était responsable de
capter les images afin de développer son sens des responsabilités 6.
Étant donné que nous avons choisi de concentrer notre analyse sur l'orthographe
grammaticale, les difficultés des dictées étaient axées sur les accords en genre et en
nombre des déterminants, noms et adjectifs, les accords sujet-verbe et les accords des
Les séances de dictée 0 faute se déroulaient comme suit: l'enseignante lisait une
première fois un court texte aux élèves (entre 111 et 13 8 mots). Ensuite, la lecture
était découpée, phrase par phrase. Les élèves écrivaient une phrase à la fois. Ceux
qui avaient des interrogations sur une graphie étaient invités à l'indiquer sur leur
copie à l'aide d'un astérisque, à exprimer leurs doutes ou à soumettre leur problème
au reste du groupe à la fin de chaque phrase. Une période était prévue pour les
questions et pour laisser place au raisonnement. L'enseignante incitait donc les élèves
à exprimer, le plus clairement possible, le moindre doute à la fin de chacune des
phrases de la dictée.
une classe de mots ou effectuer un accord, par exemple. Cette étape est importante
car comme le souligne Viau (1999), la modélisation a un impact positif sur la
motivation des élèves étant d01U1é qu'elle leur permet de devenir plus compétents.
Une fois la séance complétée, l'enseignante revenait sur les problèmes laissés en
suspens. Pendant la dictée, il pouvait arriver que certains doutes soulevés par les
élèves ne trouvent aucune explication claire de la part du groupe. Dans une telle
situation, l'enseignante notait au tableau les problèmes non résolus et choisissait de
revenir sur les problèmes ciblés à la fin de la période ou ultérieurement. Par exemple,
il arrive qu'en début d'aooée, en troisième secondaire, les élèves éprouvent des
difficultés quant à l'accord d'un participe passé avec l'auxiliaire avoir ou par rapport
au cas du leur. Ces interrogations peuvent alors servir de pistes didactiques à
exploiter avec le groupe.
dans le groupe témoin afin de rendre la comparaison avec ce dernier la plus valide
possible. Pour ce faire, la planification globale de l'année scolaire a été élaborée de
concert avec l'enseignante du groupe témoin et des rencontres informelles sur une
base hebdomadaire nous ont permis de nous assurer que les mêmes notions étaient
travaillées pour tous les élèves et à peu près au même rythme. Nous pourrons voir
que les mêmes notions grammaticales ont été abordées dans les deux groupes, mais
de façon différente. Ces interventions seront décrites dans les deux sections suivantes.
Nous avons choisi le texte de Fénelon, un texte de 83 mots, parce qu'il a déjà
servi dans deux grandes études en France. En effet, ce texte avait été donné en dictée
dans les années 1870 par l'inspecteur Beuvain lors de ses tournées dans de
nombreuses écoles. Cette même dictée a été reprise en 1986-1987 par Chervel et
Manesse (1989), afin de comparer les résultats en ce qui concerne l'orthographe des
81
élèves à plus d'un siècle d'intervalle (annexe F). Ce texte a ensuite servi à Manesse
et Cogis (2007) qui l'ont utilisé lors de leur enquête, en 2005, afin de comparer les
résultats des élèves 20 ans plus tard.
Pour ces chercheurs, un autre motif qui justifie le choix de la dictée «Les arbres»
était l'aspect intemporel de cette dictée, mais ce choix s'explique surtout par le
nombre élevé de copies conservées en 1870 (plus de 3000). Soulignons que ce texte
avait fait l'objet d'une étude comparative à différentes époques. Par ailleurs, nous
nous devons de constater que notre comparaison n'a pas pu être aussi «parfaite» que
souhaitée étant donné que les auteures ne donnent pas les taux de réussite pour
chaque mot selon l'âge et le milieu. Donc, la comparaison de nos élèves avec les
élèves français n'a porté que sur certains points en fonction des données disponibles.
- texte assez bref pour être présenté à des élèves de différents âges et de capacités
à écrire assez différentes;
- texte dont la majorité des mots sont supposés être connus des élèves de 10 à 15
ans. Sur 52 mots de ce texte recensés dans l'échelle Dubois-Buyse, 34
appartiennent à des échelons de difficulté inférieurs à 19, c'est-à-dire qu'ils sont
normalement acquis à 10 ans; 12 appartiennent à des échelons compris entre 20 et
23 et sont, en principe, acquis à Il ans; quatre présentent des difficultés
présumées maîtrisées à 12 ans. Deux seulement (abri et souterrains) sont du
niveau des élèves de 13 ans. Donc, si l'on se fie à ces barèmes, la dictée «Les
arbres» est difficile pour les élèves de 10-11 ans, elle est du niveau des élèves de
12-13 ans et elle est facile pour les élèves de 14-15 ans;
- texte dont les mots peu compris ou peu réussis sont les mêmes dans les trois
enquêtes.
Cette analyse plus approfondie nous a permis d'observer que le texte de Fénelon
présentait une certaine variété de groupes nominaux comprenant des déterminants
avec liaison orale (par exemple: les arbres) et sans liaison orale (leurs racines). Ce
texte comprend également une variété de noms animés (9) et inanimés (18) ainsi que
des groupes nominaux simples (par exemple: les arbres, leurs racines, leurs
branches constitués uniquement d'un noyau) ou comprenant des expansions (par
exemple: de petits tuyaux souterrains, tous les sucs, le bois tendre). À cet égard
aussi, le texte est riche puisqu'il présente des adjectifs avec une marque muette (par
exemple, une dure écorce, de petits tuyaux souterrains).
Une variété s'observe également en ce qui concerne les huit verbes conjugués de
la dictée. En ce qui concerne la personne et le nombre: met et revêt sont à la
troisième personne du singulier et les autres verbes sont à la troisième personne du
pluriel. La forme des verbes diffère: cinq sont à la forme active et deux à la forme
pronominale (s'enfoncent et s'élèvent), ce qui contraint les élèves à traiter
l'orthographe du pronom réfléchi, comme le font remarquer Manesse et Cogis (2007),
et alourdit la charge en mémoire de travail.
Cinq d'entre eux présentent une marque muette (enfoncent, élèvent, défendent)
distribuent et avaient), ce qui augmente de niveau de difficulté pour les élèves. En ce
qui concerne l'accord avec le sujet, le texte contient une majorité d'accord de
proximité (six) et deux accords plus complexes: leurs racines les défendent (présence
d'un mot écran) et vont (le sujet est éloigné mais la forme du pluriel s'entend). Bref,
les verbes de la dictée offrent une palette de difficultés variées, comme l'observent
Manesse et Cogis (2007).
Les participes passés sont peu représentés dans la dictée. Cette dernière
comprend un participe passé employé seul (destinés) dont l'accord est en paIiie facile
puisqu'il suit immédiatement le nom avec lequel il s'accorde en autant qu'il soit
identifié comme participe passé et non comme infinitif. Le deuxième participe passé
est employé avec l'auxiliaire avoir. Replaçons-le dans le contexte de la phrase: Les
84
branches distribuent en divers canaux la sève que les racines avaient réunie dans le
tronc. Sa difficulté s'explique du fait que le complément direct est éloigné et que
plusieurs élèves effectuent l'accord avec le groupe nominal sujet (les racines, féminin,
pluriel) plutôt qu'avec le complément direct (la sève, féminin, singulier). Une
analyse détaillée de la dictée «Les arbres» se trouve à l'annexe F. La dictée
présentait donc des difficultés relativement variées notamment en ce qui concerne les
marques grammaticales.
Sans nous attarder ici aux résultats des enquêtes de Manesse et Cogis (2007),
notons que le fait que l'orthographe grammaticale a été identifiée comme «zone à
risque» a influencé les critères sur lesquels nous souhaitions travailler dans le cadre
de la dictée 0 faute. Comme nous avons pu le voir, la variété des accords en geme et
en nombre des déterminants, noms et adjectifs, qui figurent dans le texte de Fénelon,
et les accords sujet-verbe présents nous ont amenée à choisir de focaliser l'attention
sur ces notions lors de l'intervention. Les critères plus précis qui ont circonscrit le
choix des dictées 0 faute seront présentés dans la section suivante.
accords muets, et de diversifier les structures de phrases. Ainsi, nous avons composé
un corpus de neufs textes cohérents, tous inspirés d'une thématique liée à un record
« Guinness» ou à un fait cocasse, thèmes qui intéressent toujours les élèves.
ces derniers reviennent dans les dictées que nous allions proposer aux élèves,
notanunent des verbes avec des accords muets, avec un sujet éloigné, le cas du leur
(déterminant et pronom), le cas du tout (déterminant et pronom surtout). Nous
voulions que ces difficultés reviennent dans le corpus plus particulièrement lors des
trois dictées fllmées.
Rappelons ici que le fait de placer certaines difficultés plus ciblées dans le corpus
(par exemple la présence du déterminant tout ou encore la présence de marques
d'accord parfois audibles, parfois non, etc.) ne pénalise pas le groupe témoin qui a
fait les mêmes dictées, mais sous forme traditionnelle. L'enseignante du groupe
témoin a aussi traité de la majorité des difficultés présentes. Par exemple, elle a
enseigné le cas du tout en proposant à ses élèves une série d'exercices portant sur
cette notion. Les deux groupes ont donc été soumis au même corpus de dictées, mais
ces dernières ont été travaillées de façon différente.
Le tableau 3.4 présente les critères retenus pour assurer une variété linguistique
dans les neuf dictées 0 faute en ce qui concerne l'accord en genre et en nombre des
déterminants, noms et adjectifs.
87
Tableau 3.4
Critères pour assurer la variété sémantique, syntaxique et morphologique dans
l'élaboration des dictées 0 faute en ce qui concerne l'accord en genre et en nombre
des déterminants, noms et adjectifs
NOMS
ADJECTIFS
DÉTERMINANTS
1. Accords variés (avec appui à l'oral, sans appui à l'oral ou marques inaudibles)
nausées (dictée 1), compagnie, malheurs, ennuis (dictée 5), poursuites, entreprise,
loterie (dictée 9).
Il Y a également des groupes nominaux avec une expansion au singulier tels des
porteurs de la flamme olympique, des frontières de son pays (dictée 1), une
compagnie aérienne nationale, au Népal, région hindoue (dictée 5), une entreprise de
jeux de hasard (dictée 9).
Nous retrouvons des groupes nominaux au pluriel avec une expansion au pluriel
tels d 'horribles nausées, les jeux olympiques (dictée 1), des ennuis techniques graves
qui ont entraîné l'annulation de plusieurs vols, les sacrifices animaliers (dictée 5), les
joueurs dont les coordonnées postales sont choisies, les poursuites qu'elle a engagées
(dictée 9).
retrouvons des accords avec appui à l'oral en gerne tels un chanteur d'origine
chinois~ cette particularité (dictée 1), une compagnie aérienne (dictée 9).
Les dictées comprennent également des marques avec appui à l'oral en nombre
comme par exemple le~reilles, le~rganisateurs (dictée 1), des travaux, deunnuis
(dictée 5), des codes postaux (dictée 9).
Le tableau 3.5 présente les critères retenus pour assurer une variété linguistique
dans les dictées 0 faute en ce qui concerne l'accord sujet-verbe.
90
Tableau 3.5
Critères pour assurer la variété sémantique, syntaxique et morphologique dans
l'élaboration des dictées 0 faute en ce qui concerne l'accord sujet-verbe
2. Structures des groupes sujets variées: groupe sujet simple, groupe sujet avec
expansion
3. Participes passés
a) Employés seuls
Premièrement, comme nous pouvons l'observer dans le tableau 3.5, nous avons
fait en sorte que les dictées présentent une variété sémantique dans les accords sujet
verbe. Comme nous l'avons montré précédemment dans le choix des noms, les
groupes nominaux sujets présentent parfois des noms animés tels cet homme (dictée
1), les journalistes (dictée 5), les individus (dictée 9), parfois des noms inanimés tels
les jeux olympiques (dictée 1), les malheurs (dictée 5), ses arguments (dictée 9).
91
Nous avons également inséré des groupes sujets éloignés du verbe ou postposés
comme dans les exemples suivants: [... J les JO réunissent tous les gens de la planète
et appartiennent à tout le monde [... J (dictée 1), Des photos explicites sur lesquelles
apparaissent les deux chèvres ont été publiées (dictée 5) et Les joueurs dont les codes
postaux sont choisis peuvent [... J (dictée 9).
Outre la variété des accords sujet-verbes, les dictées présentent également une
variété de participes passés dont le nombre augmente au fil des dictées. Ainsi, la
première dictée en compte seulement trois (un employé seul, un avec l'auxiliaire être
et un avec l'auxiliaire avoir), la cinquième en compte sept (deux employés seuls,
deux avec l'auxiliaire être et trois avec l'auxiliaire avoir) et la neuvième en compte
neuf (deux employés seuls, deux avec l'auxiliaire être et cinq avec l'auxiliaire avoir).
Afin de s'assurer que les textes soient adaptés au niveau des élèves, ni trop faciles,
ni trop difficiles, nous avons soumis les dictées à deux tests: Satocalibrage7 et Vocab
7 http://www.ling.uqam.ca/sato/index.htmU
93
profil 8 . Dans un premier temps, nous avons soumis le texte de Fénelon à ces deux
tests. Les résultats de cette dictée, comprenant quatre phrases ayant en moyenne 21
mots chacune, nous ont servi de barème afin de proposer des dictées de calibre
similaire en ce qui concerne la lisibilité et le vocabulaire.
En ce qui concerne nos dictées, nous avons veillé à ce que l'indice Gunning se
situe entre 12 et 15. Nous avons déterminé cet intervalle, car le texte de Fénelon
présentait un indice de 10,8. Cependant, comme ce dernier s'adressait à des élèves
plus jeunes que ceux de notre intervention, nous souhaitions que l'indice de lisibilité
soit légèrement supérieur pour nos élèves. Satocalibrage nous a donc permis de
proposer des textes qui présentaient un défi tout en respectant un certain niveau de
8 http://www.er.uqam.calnobellr21270/8225
94
difficulté d'une dictée à une autre. Le test Vocab profil nous fournissait un indicateur
du niveau de difficulté du vocabulaire utilisé dans les textes.
Le tableau 3.6 présente une synthèse des résultats aux tests Satocalibrage et
Vocab profil pour le texte de Fénelon ainsi que pour les neuf dictées de l'intervention.
Tableau 3.6
Résultats aux tests Satocalibrage et Vocab profil pour le texte de Fénelon (prétest et
post-test) ainsi que pour le corpus des neuf dictées 0 faute de l'intervention
Ki K2 K3
Indice de 1 000 mots / 1001 à 2 000 2001 à 3000
lisibilité famille les plus «Mots hors
Dictée fréq uents dans la mots / famille les mots / famille les
Gunning plus fréquents plus fréquents listes»
langue française
Fog dans la langue dans la langue
française française
Texte de
10,8 71,08% 9,64% 7,23% 12,05%
1
Fénelon
Mentionnons que les mots «hors liste» sont encore plus fréquents dans la neuvième
dictée.
L'analyse des données a pour but de produire une synthèse explicative des
informations recueillies au fil de l'intervention. Nous présenterons ici les modalités
d'analyse des données d'abord celles en lien avec notre premier objectif de recherche,
soit les résultats obtenus au prétest et au post-test et, ensuite, les données traitées en
lien avec notre deuxième objectif, soit la description de l'évolution des discussions en
fonction des quatre axes ciblés: l'évolution du doute orthographique, de l'attention,
de la participation et du métalangage grammatical chez l'enseignante et chez les
élèves.
Étant donné que nous avions comme premier objectif de vérifier l'évolution des
compétences individuelles en orthographe grammaticale avant et après l'intervention,
96
Toutes les notes seront des scores additiormant des fautes [... ] Quant au
calcul des scores, il met toutes les fautes sur le même plan, à l'exception des
fautes de type 9, qui ont toujours été considérées comme moins graves que les
autres. Pour éviter les chiffres fractiormaires, il a été convenu que les fautes
de type 9 coûtaient un point et que chacune des autres en valait deux.
(Manesse et Cogis 2007, p. 78)
Manesse et Cogis, (2007, p. 73-77) ont ainsi catégorisé les erreurs en neuf types.
Les erreurs de types 1 à 3 correspondent aux erreurs de langue. Les erreurs de type 4
combinent une erreur de lexique et une de grammaire. Les erreurs des types 5 et 6
correspondent exclusivement aux erreurs de grammaire de l'enquête de Chervel et
Manesse (1987), mais pour l'enquête de 2005, les erreurs des types 5 et 6 ont été
regroupées dans la catégorie 5. Les erreurs des types 7 et 8 correspondent à
l'orthographe lexicale, selon sa gravité. Enfin, les erreurs de type 9 sont liées aux
signes orthographiques (signes de ponctuation et majuscules).
Un autre facteur viendra limiter la comparaison de nos résultats avec ceux des
élèves français: Manesse et Cogis (2007) dorment assez souvent le pourcentage de
réussite par «mot», ce qui est comparable avec nos résultats, mais sans les répartir
selon l'âge. La comparaison avec les résultats de l'enquête de Manesse et Cogis
(2007) est donc demeurée possible, mais cette dernière s'est limitée aux dormées
présentant les taux de formes correctes de certains mots de la dictée, principalement
les mots variables chez les 10 à 16 ans considérés ensemble alors que nos élèves ont
autour de 15 ans.
98
Toutefois, mentionnons que nos résultats ont pu être comparés plus finement
avec ceux de l'enquête française pour les élèves issus des ZEP et des Non-ZEP, selon
l'âge, en ce qui concerne les erreurs liées à la grammaire. Nous avons, pour ce faire,
effectué certains calculs à la manière des chercheurs français. En fait, nous avons
calculé le nombre d'erreurs des élèves de notre intervention pour les types 4, 5 et 6,
tels que présentés précédemment en procédant à la neutralisation lexicale. Les
erreurs ainsi comptabilisées se limitent donc aux mots qui ont été écrits correctement
du point de vue de l'orthographe grammaticale avec ou sans erreur lexicale. Ainsi, le
groupe nominal * les rassines serait considéré sans erreur après neutralisation lexicale.
Dans la section suivante, nous présenterons les données traitées en lien avec notre
deuxième objectif.
3.7.2 Les données traitées en lien avec le deuxième objectif: les dictées 0faute
D'abord, nous avons pris soin de transcrire textuellement les verbalisations des
séances de dictées 0 faute l, 5 et 9, et ce dans un court délai afin d'avoir en mémoire
le déroulement. Comme les séances de dictée 0 faute étaient filmées, il nous était
possible de transcrire les interventions de l'enseignante ainsi que celles des élèves.
Par la suite, nous avons produit des versions «préparées» des verbatims qui ne
tenaient pas compte des commentaires ou de questions hors propos des élèves afin
d'être en mesure de décrire les doutes des élèves, leur participation par la
verbalisation de leurs raisonnements et de leurs procédures, l'utilisation du
métalangage grammatical par l'enseignante et par les élèves. Par exemple, nous
avons enlevé les commentaires qui portaient sur 1'homme le plus poilu dans la
première dictée du corpus qui a fait beaucoup réagir les élèves du type «li peut avoir
des poux partout! ». Nous avons aussi supprimé les questions de régulation qui
concernaient la gestion de classe telles «Je vais répéter encore une fois ... » ou encore,
lors de la première dictée, «Vous dites qu'on peut poser des questions, quel genre de
questions?» Puisque tous les signes de ponctuation étaient dictés, nous avons
99
également retranché les questions de la part des élèves concernant la ponctuation, par
exemple, «Est-ce que ça prend une virgule à tel endroit?» qui étaient davantage des
questions de clarification.
Une fois les verbatims ainsi «préparés», nous avions en main les données que
nous allions traiter en lien avec notre deuxième objectif de recherche. Ce dernier
consistait à décrire l'évolution des discussions dans le cadre des dictées 0 faute afin
de documenter l'évolution des élèves au fil de ce type d'intervention. Cette partie de
notre recherche est en fait une première tentative pour documenter, par des variables
structurées, les constats positifs de plusieurs chercheurs et enseignants à propos de la
pratique de la dictée 0 faute ou des ANG, deux activités semblables pour discuter
grammaire avec les élèves. Il ne s'agit donc pas d'une analyse exhaustive des
raisonnements élaborés par les élèves, ni d'un répertoire complet des doutes qu'ils ont
émis. Il s'agit d'une description de quelques aspects de l'évolution des discussions
au fil des dictées 0 faute, description qui permet d'éclairer les liens entre cette
pratique et les résultats obtenus au prétest et au post-test. Autrement dit, nous
souhaitions vérifier si la réussite des élèves en orthographe était bien une
conséquence des séances de dictées 0 faute.
Notre analyse s'est concentrée autour de quatre axes. Ces derniers correspondent
aux quatre questions spécifiques en lien avec notre deuxième objectif de recherche.
Comment évoluent le doute orthographique, l'attention, la participation et le
métalangage grammatical au fil des dictées 0 faute? Le premier axe concerne le doute
orthographique en raison de l'importance de développer une attitude réflexive de la
langue en amenant les élèves à s'interroger sur le choix des graphies (Sautot, 2002).
Le deuxième axe concerne l'attention des élèves qui est essentielle à la réflexion
métalinguistique. Cette dernière se fait en interaction avec les pairs et l'enseignant;
elle permet de faire évoluer plus rapidement leurs représentations de l'orthographe et
100
propose aux élèves des stratégies qu'ils peuvent utiliser ensuite en situation d'écriture
et être ainsi en mesure de progresser (Campana et Castincaud, 1999). Le troisième
axe, très lié à l'axe précédent, concerne la participation. À cet effet, la verbalisation
prend tout son sens: il s'agit d'une façon efficace pour l'enseignant d'amener l'élève
à construire son savoir en se penchant sur ses représentations grammaticales (Nadeau
et Fisher, 2006; Cogis, 2005; Brissaud et Bessonnat, 2001; Boyer et Savoie-Zajc,
1997). Le quatrième axe est celui de l'utilisation du métalangage grammatical. Afin
que la classe de français soit un lieu de réflexion sur la langue, il est fondamental de
multiplier les occasions où les élèves ont à définir, nommer, rapprocher des mots
pour construire leur raisonnement (Cogis, 2005). Nous présenterons maintenant la
façon dont s'orchestrent ces quatre axes.
les questions portant sur des sujets qui ne sont pas traitées de façon approfondie dans
le cadre de ce mémoire telles les majuscules ou la présence d'un mot écran. Les
homophones entrent dans la catégorie orthographe ~ammaticale et ont été classés en
fonction de la classe de mots à laquelle ils appartiennent. Prenons l'exemple d'un
élève qui s'interrogeait sur le déterminant tous les dans le groupe nominal Tous les
habitants. Sa question était classée dans la catégorie orthographe grammaticale, plus
précisément l'accord des déterminants, noms et adjectifs. La question d'un autre
élève qui s'interrogeait sur ont aurait été classée dans la catégorie orthographe
grammaticale, accord sujet-verbe.
Pour ce troisième axe, les données traitées sont en lien avec la participation des
élèves aux dictées 1, 5 et 9. Nous avons voulu examiner l'évolution du nombre
d'élèves qui initient le questionnement ou qui prennent la parole au fil du
raisonnement grammatical. À partir de ces données, nous souhaitions établir la
distribution des élèves en fonction du rapport entre le nombre de prises de parole et le
nombre d'erreurs commises dans les dictées. Nous voulions également examiner la
progression des élèves « muets », autrement dit ceux qui ne posent pas de questions
ni ne prennent part aux discussions initiées par l'enseignante ou par leurs pairs.
La liste des termes trouvés dans notre corpus, présentée dans le tableau 3.7,
rendra plus claire pour le lecteur le type d'unités que nous avons répertorié dans notre
section traitant du métalangage grammatical.
104
Tableau 3.7
Liste des termes grammaticaux employés dans les discussions des dictées 1, 5 et 9
Une fois les données recueillies, nous avons pris conscience que les verbatims
étaient très riches en information, ce qui nous a contrainte à circonscrire notre analyse
puisque les pistes se multipliaient. Par exemple, en ce qui concerne le métalangage
grammatical, nous aurions aimé pouvoir analyser «les occasions manquées», c'est-à
dire les moments où l'enseignante et les élèves n'ont pas utilisé un terme grammatical
ou une manipulation syntaxique alors qu'il aurait été pertinent de le faire. Aussi, il
aurait été pertinent de se pencher sur l'utilisation erronée de termes liés au
métalangage grammatical dans certains contextes.
Dans les deux chapitres suivants, nous traiterons des résultats liés à nos deux
objectifs de recherche. Dans le quatrième chapitre, nous présenterons les résultats
liés à l'évolution de la compétence orthographique en dressant un portrait des
résultats obtenus au prétest et au post-test à la dictée de Fénelon pour chacun des
groupes. Les ré.sultats liés à l'évolution du doute orthographique, à l'attention, à la
participation et à l'utilisation du métalangage grammatical chez l'enseignante et chez
107
les élèves au fil des dictées 0 faute feront l'objet d'une description et d'une analyse
dans le cinquième chapitre.
CHAPITRE IV
En poursuivant cet objectif, nous avons tenté de répondre à trois questions plus
spécifiques: quel est l'impact de l'intervention sur les accords en genre et en nombre
des déterminants, noms et adjectifs? Quel est l'impact sur les accords sujet-verbe?
Comment les élèves de notre intervention se comparent-ils à ceux de l'enquête de
Manesse et Cogis (2007) en ce qui concerne le nombre de mots bien écrits, le nombre
d'erreurs d'accord des déterminants, noms et adjectifs, le nombre d'erreurs d'accord
sujet-verbe et le nombre d'erreurs d'accord dans les participes passés? Nous
formulons l'hypothèse que la dictée 0 faute, pratiquée sur une base régulière, a un
impact positif sur la compétence orthographique des élèves.
109
Dans cette section, nous présenterons les résultats concernant le nombre de mots
bien écrits, ce qui nous permettra de répondre à notre question centrale et de vérifier
notre hypothèse de recherche à savoir si les élèves s'améliorent en orthographe
grammaticale à la suite des séances de dictée ° faute. Pour ce faire, nous
examinerons d'abord le nombre de mots bien écrits. Par la suite, nous nous
pencherons sur nos questions plus spécifiques concernant l'orthographe grammaticale
en examinant si les élèves progressent dans les accords en genre et en nombre des
déterminants, noms et adjectifs.
D'entrée de jeu, un simple coup d' œil au tableau 4.1 nous permet de constater
que les élèves du groupe expérimental ont beaucoup mieux réussi la dictée évaluative
au post-test que ceux du groupe témoin pour le nombre total de mots bien écrits. Au
post-test, une vue d'ensemble nous permet d'observer que les élèves du groupe
expérimental, qui ont participé aux séances de dictée ° faute, entre septembre 2007 et
février 2008, ont bien écrit en moyenne 70, 2 mots au prétest et 78,27 mots au post
test, soit un gain de 8,07 mots bien écrits ou huit erreurs de moins (toutes catégories
confondues) dans un texte de 83 mots. Le test bilatéral de Student ainsi que le test
non paramétrique de Wilcoxon montrent que la progression du prétest au post-test est
très hautement significative pour le nombre de mots bien écrits dans le groupe
expérimental (p< 0,0001 dans les deux cas).
111
Dans le groupe témoin, une progression était aussi attendue puisque même si les
élèves n'ont pas participé à des séances de dictée ° faute, leur enseignante leur a
proposé les mêmes dictées, mais dormées sous forme traditiormelle, sur une base
régulière, et ils ont reçu le même enseignement grammatical que le groupe
expérimental. En guise de retour sur les dictées, elle leur demandait de corriger leurs
erreurs en recopiant trois fois la graphie correcte. La dictée traditiormelle servait
également à mettre en application les notions qu'elle leur enseignait dans le cadre des
leçons de grammaire. Ces dernières se déroulaient selon la formule suivante:
explication de la théorie sur une notion ou un concept ciblé suivie d'une série
d'exercices (habituellement des phrases trouées) pour mettre en pratique les
cormaissances des élèves. Rappelons que les mêmes notions grammaticales que celles
ciblées dans le groupe expérimental ont été travaillées puisque la planification globale
de l'armée scolaire a été élaborée en équipe. Dans ce groupe témoin, la moyerme de
70, 96 mots bien écrits au prétest est passée à 72,67 mots au post-test. Cette légère
amélioration s'avère aussi significative (p=0,0038 au test de Student et p=0,0026 au
test de Wilcoxon).
112
Tableau 4.1
Nombre de mots bien écrits au prétest et au post-test
Prétest Post-test
Nbre de mots bien écrits (sur 83)
Moyenne Moyenne
70,2 78,27
Groupe expérimental
N= 30 élèves
Écart-type Écart-type
5,8 3,98
Moyenne Moyenne
70,96 72,67
Groupe Témoin
N = 27 élèves
Écart-type Écart-type
5,01 5,04
Si nous comparons les écarts-type pour le nombre de mots bien écrits au post-test,
nous constatons que les élèves du groupe expérimental ont des résultats en
orthographe plus homogènes après l'intervention. En effet, l'écart-type dans ce
groupe, qui était de 5,8 au prétest, s'est réduit à 3,98 au post-test alors que dans le
groupe témoin, l'écart-type est demeuré aussi élevé qu'au prétest, soit autour de 5
(5,01 au prétest et 5,04 au post-test).
~ 20
>
~ 15
'0 10
<Il
.0 5
E O.
o
c: 79 mots et 75-78 mots 71-74 mots 67-70 mots 63-66 mots 62-59 mots 58 mots et
plus moins
Figure 4.1 Distribution des résultats du groupe expérimental au prétest et au post-test en fonction du
nombre de mots bien écrits (sur 83 mots)
Le nombre d'élèves qui se situent au post-test dans l'échelon le plus fort, soit 79
mots bien écrits et plus, est très important. Au prétest, aucun élève n'atteignait ce
niveau alors qu'au post-test, 19 élèves sur 30 se trouvent dans cette catégorie, soit
près des deux tiers des élèves du groupe expérimental. Par conséquent, le nombre
d'élèves qui se situaient dans la catégorie suivante 75-78 mots bien écrits a quelque
peu diminué au post-test puisque la plupart des élèves ont amélioré leur résultat et ont
joint le rang supérieur (de 9 à 7 élèves).
élèves dans ces scores moyens. Comme la moyenne a augmenté, le noyau qui était
concentré autour de cette moyenne a joint les rangs supérieurs, soit les catégories 75
78 mots bien écrits ou encore 79 mots bien écrits et plus.
Un peu plus de 25% des élèves (soit 8 élèves sur 30) se situaient dans les
catégories inférieures 66 mots bien écrits ou moins au prétest. Il ne reste plus qu'un
élève dans cette catégorie au post-test.
La figure 4.2 présente ces mêmes distributions concernant les élèves du groupe
témoin. Au prétest, le groupe témoin présente 7 élèves sur 27 (25,93%) dans les deux
catégories les plus fortes, soit un peu plus du quart des élèves du groupe. Un peu plus
de la moitié des élèves du groupe obtiennent des scores moyens (soit 15 élèves sur 27
ou 55,56%) et cinq élèves des scores faibles (ou 18,5% des élèves).
115
1/1
QI
>
~':J
E
g 79 mots et
~75·78 mots 71·74 mots 67·70 mots 63-66 mots 62-59 mots
DJ
58 mots et
plus moins
Figure 4.2 Distribution des résultats du groupe témoin au prétest et au post-test en fonction du nombre
de mots bien écrits (sur 83 mots)
Au post-test, les élèves du groupe témoin ont progressé aussi: il y a presque deux
fois plus d'élèves dans les catégories les plus fortes (de 7 à 12 élèves) et dans les
autres catégories, moyennes et faibles, le nombre d'élèves a un peu diminué (de 15 à
12 élèves «moyens »; de 5 à 3 élèves «faibles »). Les progrès sont donc moins
marqués que dans le groupe expérimental et, comme le montrent les figures 4.1 et 4.2,
le groupe témoin demeure plus hétérogène que le groupe expérimental dont 86,7%
des élèves se situent, au post-test, dans les scores «forts» ou «très forts» (26 élèves
sur 30) contre 44% dans le groupe témoin (12 élèves sur 27).
116
4.1.3 Les résultats individuels en ce qui concerne le nombre de mots bien écrits
Dans cette section, nous voulons vérifier si les progrès décrits pour le groupe
s'observent également pour les individus. Dans les sections précédentes, nous avons
pu observer que la moyenne du nombre de mots bien écrits augmentait de manière
significative dans les deux groupes, mais de façon beaucoup plus marquée dans le
groupe expérimental que dans le groupe témoin. La distribution des élèves selon le
nombre d'erreurs montrait bien que presque tous les élèves du groupe expérimental se
situaient dans les scores les plus forts à la suite de l'intervention. Nous allons
maintenant constater que les progrès se réalisent aussi sur le plan individuel dans le
groupe expérimental.
Dans le groupe expérimental, tous les élèves se sont améliorés et sept élèves ont
amélioré leur résultat de dix mots ou plus. Aucun élève n'a obtenu le même résultat
ni n'a régressé entre le prétest et le post-test. Il est possible de retrouver à l'annexe H
les résultats individuels pour les deux groupes.
Dans le groupe témoin, trois élèves ont obtenu exactement le même résultat au
prétest et au post-test, donc ne se sont pas améliorés. Par ailleurs, trois élèves ont
régressé entre le prétest et le post-test passant respectivement de 71 à 68, de 73 à 69
et de 74 à 69 mots bien écrits. Autrement dit, six élèves sur 27 n'ont enregistré aucun
progrès. Le progrès maximal en ce qui concerne le nombre de mots bien écrits a été
obtenu respectivement par l'élève T19 (7 mots), T27 (6 mots), T24 et T12 (5 mots).
Donc, nous observons une progression plus faible chez les élèves du groupe témoin
ainsi que quelques régressions.
Au cours de notre intervention, par les dictées 0 faute, nous avons travaillé
diverses règles d'accord. Rappelons également que lors de l'élaboration des dictées,
nous avons voulu assurer une variété linguistique en prenant soin d'inclure des cas
d'accords diversifiés qui allaient susciter des discussions durant les dictées 0 faute.
Dans cette section, nous présenterons de façon plus spécifique les résultats des deux
groupes en ce qui concerne l'accord en geme et en nombre des déterminants, noms et
adjectifs afin de dégager l'effet de l'intervention sur la maîtrise de cette règle.
Le tableau 4.2 présente les résultats dans l'accord en geme et en nombre des
déterminants, noms et adjectifs pour les deux groupes au prétest et au post-test. Le
groupe expérimental a obtenu une moyenne de 1,23 erreurs au post-test, ce qui
constitue une amélioration de 3 erreurs par rapport au prétest. Le groupe témoin,
quant à lui, a eu une moyenne de 4,37 erreurs, ce qui constitue une amélioration de
0,15 erreur. La baisse de l'écart-type dans le groupe expérimental montre que les
résultats sont plus homogènes au post-test alors que dans le groupe témoin l'écart
type demeure semblable. La progression dans l'accord en genre et en nombre des
déterminants, noms et adjectifs est très hautement significative chez les élèves du
groupe expérimental (p<0,0001 dans les tests de Student et de Wilcoxon). Pour cette
même variable, dans le groupe témoin, la très faible progression n'est pas
118
Tableau 4.2
Comparaison des résultats dans l'accord en genre et en nombre des déterminants,
noms et adjectifs
Nous avons vu, dans la section précédente, qu'au post-test, les élèves du groupe
expérimental ont en moyenne près de quatre fois moins d'erreurs dans l'accord en
genre et en nombre des déterminants, noms et adjectifs qu'au prétest. Le tableau 4.3
présente la distribution des élèves regroupés selon le nombre de mots dans lesquels
ils se sont améliorés ou ont régressé en ce qui concerne l'accord en genre et en
nombre des déterminants, noms et adjectifs. Nous pouvons constater que 27 élèves
parmi les 30 élèves du groupe expérimental (90% des élèves) ont amélioré leur
119
résultat alors que seulement trois élèves ont conservé le même résultat entre le prétest
et le post-test et qu'aucun n'a régressé. La progression de cette variable est donc
marquée pour presque tous les individus.
Le portrait du groupe témoin est différent. On peut voir que 12 élèves sur 27 du
groupe témoin (soit 44,44% des élèves) ont amélioré leur résultat en ce qui concerne
l'accord en genre et en nombre des détenninants, noms et adjectifs. En revanche, huit
élèves ont conservé le même résultat au post-test et sept ont même régressé en
commettant plus d'erreurs au post-test qu'au prétest. Les résultats individuels se
trouvent à l'annexe H.
Tableau 4.3
Comparaison du degré d'amélioration ou de régression dans l'accord en genre et en
nombre des détenninants, noms et adjectifs pour les élèves des groupes expérimental
et témoin
Au coms de notre intervention, nous avons également mis l'accent sur l'accord
sujet-verbe. Dans cette section, nous répondrons à notre autre question de recherche
plus spécifique: est-ce que les élèves maîtrisent davantage l'accord sujet-verbe après
avoir vécu la dictée 0 faute? Nous présentons ici les résultats en lien avec cette
variable.
Le tableau 4.4 présente les résultats obtenus par les groupes expérimental et
témoin au prétest et au post-test.
Tableau 4.4
Comparaison des résultats (nombre d'erreurs) dans l'accord sujet-verbe pour les
groupes expérimental et témoin
Examinons de plus près le nombre d'erreurs obtenu pour chaque élève au prétest
et au post-test dans les deux groupes. Voyons si cette amélioration se retrouve aussi
en ce qui concerne les individus. Le tableau 4.5 présente la distribution des élèves des
groupes expérimental et témoin en fonction de leur degré d'amélioration ou de
régression concernant l'accord sujet-verbe.
122
Tableau 4.5
Comparaison de la distribution des élèves en fonction du degré d'amélioration ou de
régression dans l'accord sujet-verbe chez les élèves des groupes expérimental et
témoin
4 erreurs en moins 0 0% 2 0%
6 erreurs en moins 0 0% 0 0%
Régression: plus d'erreurs 0% 2 7,4%
0
au post-test qu'au prétest
Au post-test, les élèves du groupe expérimental font en moyenne trois fois moins
d'erreurs qu'au prétest. En fait, 63,33% des élèves du groupe expérimental (soit 19
élèves sur 30) ont amélioré leur résultat en ce qui concerne l'accord sujet-verbe et Il
élèves ont conservé le même résultat entre le prétest et le post-test dont neuf élèves
qui n'avaient eu aucune erreur au prétest. Aucun élève de ce groupe n'a régressé. En
moyenne, les élèves du groupe expérimental améliorent leur résultat en commettant
une erreur de moins au post-test par rapport au prétest. Par ailleurs, certains
progressent de façon plus soutenue en diminuant considérablement leur nombre
d'erreurs d'accord sujet-verbe. La progression de cette variable est donc marquée au
sein du groupe expérimental.
123
Du côté du groupe témoin, on constate que 55,56% des élèves du groupe témoin
(soit 15 élèves sur 27 ) ont amélioré leur résultat en ce qui concerne l'accord sujet
verbe et dix élèves ont conservé le même résultat entre le prétest et le post-test dont
huit élèves qui n'avaient eu aucune erreur au prétest. Deux élèves ont régressé en
commettant une erreur de plus au post-test. La progression de cette variable est donc
intéressante également au sein du groupe témoin. Les résultats individuels de chaque
élève se trouvent à l'annexe H.
Nous pouvons conclure que les élèves qui ont vécu l'intervention améliorent leur
compétence à effectuer des accords entre le sujet et le verbe de façon marquée. Ces
progrès sont observables aussi chez les élèves du groupe témoin, mais dans une
proportion moindre.
Tel que nous l'avons mentioIIDé dans la problématique et dans le cadre théorique,
Manesse et Cogis (2007) ont tenté de faire le point sur un débat de société actuel: le
niveau orthographique des élèves d'aujourd'hui comparativement à celui des élèves
de 20 ans leurs aînés. Dans une étude comparative sur deux périodes différentes
(1987 et 2005), elles ont voulu dresser un bilan de cet enjeu crucial qui fait couler de
l'encre dans les journaux en France comme au Québec.
mots) pour les élèves des ZEP et des Non-ZEP. Pour affiner l'analyse, nous
comparerons les résultats en utilisant les taux de formes correctes pour 37 mots de la
dictée. Toutefois, nous sommes consciente de la limite d'une telle comparaison: les
résultats par mot ne sont pas fournis selon l'âge des élèves. Il faut garder en tête que
nos élèves sont plus âgés que ceux de l'expérimentation de 2007 dont l'âge variait
entre 10 et 16 ans.
4.2.1 La comparaison entre les résultats obtenus par les élèves du groupe
expérimental et ceux de l'enquête de 2005
Les 2 767 élèves de l'enquête française de 2005 sont issus de 123 classes de 25
collèges publics de la France métropolitaine tirés au hasard. L'échantillon est
constitué d'élèves de différents niveaux, du CM2 à la 3e, soit de la 5e à la ge année de
scolarité. La population de cette enquête était comparable à celle de 1987 à une
distinction près: Manesse et Cogis (2007) souhaitaient qu'une distinction qui n'avait
pas été prise en compte en 1987 apparaisse. Il s'agit du système ZEP (ou REP), soit
le réseau d'éducation prioritaire mis en place depuis 1981. Manesse et Cogis (2007, p.
67) soulignent que ces zones existaient lors de l'enquête de 1987 (dont les données
avaient été recueillies en 1985), mais apportent une nuance:
Elles n'étaient pas installées dans le paysage social comme elles le sont à
présent: le marché scolaire n'était pas segmenté comme de nos jours, avec des
zones de pauvreté et des zones prospères, la ghettoÏsation des populations
pauvres du pays était moindre puisqu'elle s'est accélérée précisément dans les
années qui séparent les deux enquêtes. Mais il n'y a aucun regret à avoir: les
zones d'éducation prioritaire concernaient en 1987 des populations différentes de
celles qu'elles concernent en 2005 et nous n'aurions par conséquent pas pu
comparer terme à terme les ZEP de 1987 et celle de 2005.
En ce qui concerne notre intervention, rappelons que l'âge moyen de nos élèves
était de 15 ans, un âge comparable à celui des classes de 3e de l'enquête de Manesse
et Cogis (2007). Les élèves de notre intervention provenaient d'un milieu
comparable à celui des ZEP comme nous l'avons présenté dans le chapitre
méthodologique (voir chap. 3, section 3.2).
125
4.2.1.1 La comparaison des erreurs de grammaire avec les élèves des ZEP et des
Non-ZEP
Certes, il est intéressant de comparer les résultats par niveau scolaire, mais la
comparaison avec un bassin d'élèves dont les caractéristiques s'apparentent à celles
de l'intervention est d'autant plus pertinente. Dans cette section, nous nous
intéresserons aux erreurs de types 5 et 6 puisque ces dernières sont en lien avec notre
intérêt de recherche, soit les accords grammaticaux. Pour ce faire, nous mettrons en
parallèle le nombre d'erreurs purement grammaticales obtenu par les élèves des ZEP
et, à titre indicatif, des Non-ZEP, et ceux de notre intervention à La dictée «Les
arbres». Les erreurs comptabilisées dans cette catégorie se limitent aux mots qui ont
été écrits correctement du point de vue de l'orthographe lexicale, mais où l'on peut
retrouver des erreurs liées à l'orthographe grammaticale.
Pour être en mesure d'effectuer cette comparaison, nous avons utilisé la façon de
comptabiliser les erreurs adoptée par Manesse et Cogis (2007). Comme nous nous
sommes concentrée sur l'orthographe grammaticale, le calcul a été effectué seulement
pour les erreurs de types 5 et 6, les erreurs d'accord des déterminants, noms et
adjectifs par exemple. Le tableau 4.6 permet de situer nos élèves par rapport à ceux
de l'enquête française issus des ZEP. Il a été élaboré en fonction des résultats
disponibles pour l'enquête de 2005
Tableau 4.6
Évolution par classe du nombre moyen d'erreurs des types 5 et 6 (orthographe
grammaticale) par élève selon le milieu (ZEP) pour les élèves de l'enquête de 2005 et
ceux de notre intervention
Le tableau 4.6 nous montre que le groupe expérimental, au prétest, est plus faible
en orthographe grammaticale que les élèves issus des ZEP de 3e qui ont le même âge
que les élèves de notre intervention. En fait, au prétest, les élèves du groupe
expérimental sont du niveau des élèves de 6e en France, soit l'équivalent de la
première secondaire dans le système scolaire québécois, mais dont les élèves sont
plus jeunes d'un an. Par ailleurs, lors du post-test, non seulement ils rattrapent leur
retard (passant de 7,6 erreurs des types 5 et 6 à 2,7 erreurs de ces deux types), mais ils
réussissent à dépasser les élèves des ZEP de leur âge de façon importante (4,77
erreurs des types 5 et 6) en parvenant à obtenir de meilleurs résultats que les élèves
issus des non-ZEP du même âge (3,37 erreurs) comme nous pouvons le constater
dans le tableau 4.7.
Tableau 4.7
Évolution par classe du nombre moyen d'erreurs des types 5 et 6 (orthographe
grammaticale) par élève pour les élèves de l'enquête de 2005 Non-ZEP et ceux de
notre intervention
En proposant une comparaison entre les élèves issus des ZEP et des Non-ZEP,
Manesse et Cogis (2007) ont voulu vérifier si les élèves issus des ZEP avaient des
comportements orthographiques différents étant donné que, comme le soulignent les
127
chercheuses: «Leurs résultats moyens accusent une année de retard sur ceux des
élèves du réseau hors ZEP.» (Manesse et Cogis, 2007, p. 94). En ce qui concerne les
erreurs grammaticales seulement, les élèves des ZEP ont un handicap lourd de 2,S
erreurs de plus que ceux du collège ordinaire: «Entre le CM2 et la Se, ils progressent
plus que ceux du collège, avec, en classe de Se, plus qu'une stagnation, un léger
recul.» (Manesse et Cogis, 2007, p. 94). Par ailleurs, les auteures ont constaté que le
boulet de l'orthographe grammaticale est traîné par tous les élèves, ZEP ou non, mais
de façon plus accentuée chez les élèves qui proviennent des milieux défavorisés.
Compte tenu de cette problématique, dans la section suivante, nous nous pencherons
sur les taux de formes correctes pour les mots variables. La comparaison se fera entre
les élèves de notre enquête et ceux de l'enquête de Manesse et Cogis (2007) tous âges
confondus puisque les données plus précises ont été présentées comme telles par les
auteures.
4.2.1.2 La comparaison des taux de formes correctes pour les mots variables:
accord en geme et en nombre des déterminants, noms et adjectifs et
autres cas d'orthographe grammaticale
Dans leur ouvrage, Manesse et Cogis (2007) ont répertorié les taux de réussite
(tous les élèves de tous âges confondus) pour les 37 mots variables de la dictée «Les
arbres». Dans le tableau 4.8, nous reproduisons ces résultats en ajoutant ceux de la
présente intervention pour le prétest et le post-test ainsi que la différence entre les
résultats obtenus par les élèves de Manesse et Cogis (2007) et ceux obtenus par les
élèves de notre intervention au post-test.
128
Tableau 4.8
Comparaison des taux de formes correctes pour les mots variables: enquête de
Manesse et Cogis (2007) et ceux de notre intervention au prétest et au post-test
Ce tableau nous permet de constater qu'au prétest, malgré une certaine disparité
de pourcentage pour certains mots, la moyenne obtenue par les élèves de notre
intervention est comparable à ceBe de l'enquête de Manesse et Cogis (2007).
Comme nos élèves sont plus âgés que ceux de l'enquête française, il est possible de
constater un retard. Cependant, au post-test, la comparaison pour l'ensemble des
mots variables est à l'avantage des élèves de notre intervention. En effet, la moyenne
obtenue est de 88,02% pour les mots variables alors que cel1e de l'enquête française
est de 70,14%. Les élèves de notre intervention auraient donc largement rattrapé le
retard qu'ils accusaient en orthographe grammaticale.
Par ailleurs, au prétest pour la grande majorité des mots, les taux de formes
correctes étaient sensiblement les mêmes. Au départ, les élèves de notre intervention
130
ont obtenu des résultats comparables en moyenne à ceux des élèves français alors
qu'au post-test ils se démarquent en faisant grimper de façon marquée leur score en
ce qui concerne les mots variables. L'écart se creuse particulièrement en ce qui
concerne la marque de pluriel de certains noms, celle des verbes conjugués et des
participes passés. La participation aux dictées 0 faute et les échanges sur la langue
ont permis au groupe expérimental de progresser surtout en orthographe
grammaticale. Les sections suivantes seront consacrées à la comparaison entre nos
élèves et les élèves français en ce qui concerne trois notions travaillées plus
spécifiquement dans le cadre des dictées 0 faute: l'accord en genre et en nombre des
déterminants, noms et adjectifs, l'accord sujet-verbe et l'accord des participes passés.
Même si toute comparaison comporte ses limites, tentons de situer les élèves de
notre intervention par rapport à ceux de 2005 dans leur maîtrise des accords en genre
et en nombre des déterminants, noms et adjectifs. Au post-test, pour 94,6% des mots
(35 sur les 37 mots variables de la dictée, incluant les accords en genre et en nombre
des déterminants, noms et adjectifs et les accords sujet-verbe), les élèves de la
présente intervention ont obtenu un pourcentage de formes correctes supérieur à celui
obtenu par les élèves de l'enquête de Manesse et Cogis (2007). Seulement deux mots
sont moins réussis: le mot abri (40% pour les deux populations d'élèves) et le groupe
nominal leur tige (82,8% pour l'enquête de 2005 et 53,33% pour notre intervention,
ce qui s'explique par le sens vieilli du mot dans la dictée). En fait, les élèves se
questionnaient sur le sens de ce mot qui désignait le tronc en 1694, selon le
Dictionnaire de l'Académie. Les auteures avaient d'ailleurs catégorisé ce mot parmi
les difficultés orthographiques que présentait le texte classique de Fénelon.
Manesse et Cogis (2007) ont fait une synthèse des unités examinées du point de
vue strictement grammatical. Par exemple, pour les mots tuyaux et canaux, les
131
fOlmes en s ont été acceptées, étant donné que le choix de la marque a priori erronée s
semble dépendre en grande partie des lettres qui précèdent (*tuios, *canots). Nous
avons fait le même exercice pour les résultats des élèves du groupe expérimental au
prétest et au post-test afin d'effectuer une comparaison sur la base de l'orthographe
grammaticale puisque c'est cet aspect plutôt que le lexique qui a fait l'objet d'un
travail approfondi au cours de notre intervention.
Pour ce faire, Manesse et Cogis (2007) ont choisi de classer par ordre décroissant
les taux de réussite des fonnes grammaticalement correctes après avoir neutralisé les
erreurs lexicales peu importe leur gravité. Évidemment, comme le soulignent les
auteures, ce taux de «réussite grammaticale» est approximatif: il ne garantit pas que
l'élève qui a opté pour la graphie adéquate ait nécessairement eu recours au
raisonnement adéquat. Elles rappellent que ce taux fixe la «borne haute», optimiste,
la «borne basse» étant celle du taux de fonnes normées. Elles précisent que le taux
de maîtrise de l'orthographe grammaticale se situe quelque part entre les deux.
Nous avons choisi de présenter, dans un premier temps, seulement les unités
appartenant à l'accord en genre et en nombre des détenninants, noms et adjectifs dans
le tableau 4.9. Pour les élèves de l'enquête de 2005, les résultats sont donnés pour
tous âges et milieux confondus puisque ce sont les données auxquelles nous avons
accès.
132
Tableau 4.9
Classement des unités appartenant au groupe nominal par taux de fOlmes
grammaticalement correctes après neutralisation lexicale
L'observation du tableau 4.9 montre que le pluriel des noms est relativement bien
maîtrisé par les élèves de l'enquête de Manesse et Cogis (2007) et par ceux de la
présente intervention au post-test. Mis à part l'adjectif souterrains qui a un taux de
réussite de 73,3% après neutralisation lexicale, tous les autres mots qui nécessitent
une marque granunaticale sont réussis à 100% par les élèves du groupe expérimental
au post-test.
Nous allons maintenant examiner conunent évoluent les résultats des élèves en
lien avec une notion essentielle en orthographe grammaticale: l'accord sujet-verbe.
Les deux participes passés présents dans la dictée seront traités dans la section
suivante.
Tel que présenté dans le cadre méthodologique, les auteures Manesse et Cogis
(2007) ont insisté sur l'idée que les verbes de la dictée offraient une palette de
difficultés variées et devaient être traités différemment. Par exemple, selon ces
auteures, il ne faut pas se surprendre que vont soit un candidat à un taux de réussite
élevé étant donné ses caractéristiques linguistiques: un mot de très haute fréquence,
lu souvent par les apprenants et dont la graphie est totalement prévisible. Tout laisse
donc à penser que vont est appris et intégré comme une «forme-mot» en relation avec
l'idée de pluriel. D'ailleurs, les élèves de l'intervention ont obtenu un taux de
réussite parfait (tant au prétest qu'au post-test) pour ce verbe. Par contre, le scénario
est différent pour ceux dont la marque du pluriel ne s'entend pas, ce qui a été observé
notanunent par Nadeau et Fisher (2006) et Brissaud et Bessonnat (2001).
Tout conune elles l'ont fait pour les noms, Manesse et Cogis (2007) ont classé les
unités verbales par taux de formes granunaticalement correctes, en ordre décroissant,
en utilisant la neutralisation lexicale afin de se concentrer uniquement sur les marques
134
grammaticales. Dans ce calcul, * defJendent par exemple sera calculé dans les
accords maîtrisés. Nous avons fait le même exercice pour les résultats du groupe
expérimental. Les résultats sont présentés dans le tableau 4.10.
Tableau 4.10
Classement des unités verbales par taux de formes grammaticalement correctes
(neutralisation lexicale) pour toutes les tranches d'âges confondus
L'amélioration de nos élèves du prétest au post-test n'est pas aussi marquée dans
le cas de l'accord en genre et en nombre des déterminants, noms et adjectifs toutefois.
Le tableau 4.10 montre que les élèves de notre intervention ont des résultats
légèrement au-dessus de ceux obtenus par les élèves de l'enquête de Manesse et
Cogis (2007) pour ce qui est de l'accord sujet-verbe, dès le prétest. Ils s'améliorent
de façon importante entre le prétest et le post-test. En fait, ils progressent en
moyenne de 12,92% en ce qui concerne l'accord sujet-verbe, creusant ainsi l'écart
avec les résultats obtenus dans l'enquête de 2005. La progression entre le prétest et le
post-test est particulièrement marquée pour le verbe revêt (le taux de réussite des
135
élèves passe de 43,3% à 66,7% du prétest au post-test) et pour le verbe défendent (le
taux de réussite grimpe de 76,7% à 100%). Pour ces deux verbes, la hausse du taux
de réussite est d'environ 23,3%, soit sept élèves de plus qui accordent COlTectement le
verbe après l'intervention.
Nous nous attarderons, dans la section suivante, à ces deux verbes en tentant
d'émettre quelques hypothèses pour expliquer le choix de certaines graphies elTonées.
En plus de présenter les deux hausses les plus fortes, le verbe revêt est intéressant
parce qu'il n'a tout simplement pas été compris par les élèves au prétest. Le verbe
défendent est aussi intéressant parce qu'il s'agit d'un des quatre verbes avec la finale
en -nt qui représentent la moitié des verbes du texte de Fénelon.
Manesse et Cogis (2007) ont constaté que les élèves de l'enquête de 2005 sont
nombreux à ne pas avoir compris le sens du verbe revêt et ont tenté d'en trouver une
forme possible telles *revet, * revèt ou ont proposé des OCCUlTences plus éloignées
comme *fet, *revert.
Leur analyse des résultats a permis de constater que, en 2005, 40% des élèves
optaient pour une forme construite avec une marque qu'ils connaissaient bien et qui
semblait cOlTespondre à ce qu'ils entendaient, soit la marque de l'imparfait ait. La
forme la plus populaire a donc été * revait. Quelques autres ont opté pour une autre
finale connue, soit aît. Au total, selon les chercheuses, les trois quarts des élèves
auraient perçu le caractère verbal du mot puisqu'ils suggéraient une forme se
terminant par un t.
été répertoriée parmi les erreurs liées à l'orthographe grammaticale, même si, comme
elles le précisent, il s'agit plus vraisemblablement d'une erreur lexicale.
Nos résultats montrent que ce cas était également peu maîtrisé au prétest : 20%
des élèves du groupe expérimental avaient écrit correctement revêt et le taux de
réussite a grimpé à 60% lors du post-test. Dans le tableau 4.12, nous avons pu
observer l'effet de la neutralisation lexicale. Au prétest, le taux de forme correçte
pour le verbe revêt était de 43,3% et de 66,7% au post-test. Plusieurs élèves ont donc
perçu le caractère verbal du mot et proposé une forme se terminant par t. Par ailleurs,
l'aspect lexical a constitué une difficulté.
Comme le soulignaient Manesse et Cogis (2007), le fait que les élèves soient
moins entraînés au travail systématique sur les familles de mots pourrait expliquer, en
partie du moins, que nombreux ont été les élèves qui ont proposé des graphies qui
diffèrent de la forme normée soit par l'accent, soit par des formes plus éloignées de
cette dernière. Nous avons essayé de travailler dans ce sens durant la dictée 0 faute
avec plusieurs mots. Par exemple, lors de la première dictée 0 faute, nous avons
utilisé cette stratégie pour le mot souffre, ce qui a amené les élèves à le lier aux
termes souffrance et souffrant de la même famille. Lors de la cinquième dictée, les
élèves ont effectué des liens avec les familles de mots pour les termes suivants:
technique en faisant référence au mot technicien et annulation en faisant référence au
verbe annuler à l'infinitif. Enfin, lors de la neuvième dictée, pour trouver
l'orthographe du mot traumatisée, les élèves ont évoqué le terme traumatisme et pour
le participe désespérée, ils ont fait une association avec des mots qu'ils connaissaient
tels désespérant et désespoir. Nous croyons que certains élèves ont peut-être fait le
rapprochement, pour des mots de même famille, ce qui expliquerait, en partie,
l'amélioration lors du post-test, bien que nous ne puissions pas vérifier directement
l'impact de ce rapprochement.
En ce qui concerne le choix des graphies, nous avons noté sensiblement le même
scénario que chez les apprenants de l'enquête française. Parmi les graphies les plus
137
prisées chez les élèves, au prétest, 19,35% du groupe expérimental a opté pour la
graphie *revet. Les autres élèves ont choisi des variantes telles * revait (35,48%), *
revé (3,23%), *revée (3,23%), *revèt (3,23%), * revais (3,23%), * revaient (3,23%),
*rever (3,23%) et * rebêt (3,23%).. Au post-test, un seul élève opte pour la graphie
*revet et l'erreur principale est * revait, commise par 22,6% des élèves. En ce sens,
nos observations rejoignent celles effectuées par Manesse et Cogis (2007, p. 121).
[... ] ils sont déjà 32%, c'est-à-dire deux fois plus, à proposer une forme qui ne
diffère de la forme normée que par l'accent (* revet, * revét, * revèt) ; on relève
16 occurences plus éloignées (* met, * fet, * revert, et même *revit). Mais la
forme que les élèves connaissent bien et qui a semblé pouvoir correspondre à ce
qu'ils entendaient, à savoir la marque de l'imparfait ait : ils retombaient ainsi sur
une forme attestée, à l'accent près, ait (40%) [... ] Au total, ce sont les trois
quarts des élèves qui pourraient avoir perçu le caractère verbal du mot, puisqu'ils
ont proposé une fonne se terminant par t. L'essentiel se situe donc du côté du
lexique [... ]
Examinons maintenant un cas parmi les verbes dont la tenninaison est en -nt, soit
le verbe défendent qui s'avère un autre problème pour les élèves soumis au texte de
Fénelon.
Le cas qui retient notre attention de façon plus soutenue est celui du verbe
défendent. À titre indicatif, dans la première enquête de 1987, menée par Chervel et
Manesse, le taux de formes correctes était de 73%. Par contre, il s'agit du verbe qui
totalise le plus de finales en s, phénomène grammatical que les auteures relient à la
présence du pronom les antéposé. D'ailleurs, plusieurs auteurs (Cogis, 2005;
Brissaud et Bessonnat, 2001; Jaffré, 1998) rappellent que pour saisir le
fonctionnement du nombre linguistique, les jeunes enfants doivent, de prime abord,
comprendre l'opposition singulier et pluriel et, qu'à l'oral, les marques du nombre
sont détenninées par l'organisation des mots en classes. Les problèmes majeurs
rencontrés par les apprenants se résument, selon ces auteurs, aux trois suivants:
l'identification de la classe d'appartenance d'un mot (principalement la confusion
138
4.4 Les taux de formes correctes en ce qui concerne l'accord des participes
passés
Étant donné que la dictée de Fénelon ne comprend que deux participes passés
(destinés et réunie), il est difficile de vérifier le degré de maîtrise et de
compréhension de cette notion de façon exhaustive, mais il est intéressant d'examiner
les taux de réussite.
Tableau 4.11
Classement des participes passés par taux de formes grammaticalement correctes
après neutralisation lexicale
La neutralisation lexicale influence donc très peu les taux de réussite pour les
deux participes passés, ce qui signifie que les erreurs des élèves dans les participes
passés sont majoritairement d'ordre grammatical plutôt que lexical.
140
Encore une fois, nous observons qu'au prétest, les résultats des élèves de notre
intervention sont très près ou inférieurs à ceux de l'enquête de Manesse et Cogis
(2007). Soulignons cependant qu'au post-test, nos élèves dépassent ceux de
l'enquête française. L'écart se creuse pmiiculièrement pour le participe passé réunie
qui est environ cinq fois mieux réussi dans le groupe expérimental qui obtient un taux
de réussite de 66,67% comparativement à un taux de 13,1% pour les élèves de
l'enquête de Manesse et Cogis (2007).
Examinons de plus près les deux participes passés de la dictée pour tenter
d'expliquer ce qui a causé tant de difficultés d'accord.
morphologiques et 20% (six élèves) ont confondu le participe passé avec la fonne
conjuguée réunit. Les autres ont plutôt fait une erreur d'ordre lexical.
Dans le groupe expérimental, 3,33% (un seul élève) a proposé une forme de
pluriel verbal nt au prétest et a produit la bonne graphie au post-test. Au post-test,
cette erreur est apparue chez un autre élève alors que cette proposition est plus
récurrente chez les élèves de 2005. Voici ce qu'observent Manesse et Cogis (2007, p.
118) :
[... ] ce sont encore 24% des élèves qui proposent la marque de pluriel verbal -nt
(* réunient, * reunnient, * reuinient) [... ] L'intention d'accorder le participe
passé au pluriel, c'est-à-dire autant qu'on puisse le supposer, avec le sujet,
semble donc vive.
Cependant, les résultats des élèves de notre groupe expérimental sont très
encourageants. Après avoir travaillé le participe passé au moyen de la dictée 0 faute,
le taux de réussite grimpe à 66,7% (alors qu'à titre indicatif celui du groupe témoin
stagne à 25,9%.)
La dictée 0 faute a eu un impact positif sur le taux de réussite, étant donné que
la reconnaissance d'un participe passé, les règles d'accord et l'identification d'un
complément direct ont fait l'objet d'un entraînement régulier sur une période de plus
de cinq mois. La section suivante portera sur le deuxième participe passé de la dictée,
soit destinés.
Alors que le participe passé réunie prenait les marques en genre et en nombre
comme les unités du système nominal, destinés, quant à lui, peut avoir le même statut
qu'un adjectif aux yeux des élèves. Si nous observons les taux de fonnes correctes en
tenant compte de la neutralisation lexicale, au prétest, les élèves du groupe
expérimental, 20% des élèves de plus réussissent l'accord. La comparaison avec les
élèves de 2005 (Manesse et Cogis, 2007) montre qu'au prétest, le taux de réussite des
142
élèves de notre intervention (56,7%) était très comparable à celui obtenu par les
élèves de l'enquête française (59,1%). Au post-test, l'écart s'est creusé au profit des
élèves de notre intervention puisqu'ils ont obtenu un taux de fonne correcte de 76,7%
pour le participe passé destinés. Nous devons cependant tenir compte que dans
l'enquête de Manesse et Cogis (2007) tous les âges sont confondus.
Manesse et Cogis (2007) ont relevé que les formes en é dominent au pluriel
(55%) comme au singulier (18%) et 12% des élèves de l'enquête de 2005 ont opté
pour une graphie en er, confondant ainsi avec la fonne infinitive du verbe. Les
chercheuses se sont questionnées à savoir si les élèves qui optaient pour des graphies
en aient (4%) et en ait (1 %) effectuaient un rapprochement à la classe des verbes.
L'analyse que Manesse et Cogis (2007) ont effectuée demeure inachevée puisqu'elle
est seulement morphologique et non pas syntaxique. Comme le soulignent les
auteures, les élèves qui choisissent des graphies telles * ait, * aient ou * ers semblent
s'arrêter à la fonne verbale sans pour autant considérer que ces tenninaisons sont «la
contrepartie d'une fonction dans la phrase» (Manesse et Cogis, 2007, p. 116).
Nos résultats abondent dans le même sens que les observations de Manesse et
Cogis (2007). Dans le groupe expérimental, au prétest, les graphies les plus
répandues sont la forme au singulier du participe passé * destiné, retenue par 29% des
élèves, la fonne au masculin pluriel * destinés, écrite par 9,68% des élèves et la
fonne au féminin pluriel * destinées, choisie également par 9,68% du groupe. Au
prétest, seulement 6,45% des élèves optent pour la forme infinitive * destiner et un
seul élève préfère la forme * destinaient. Au post-test, le participe passé est maîtrisé
par plus des trois quarts des élèves du groupe expérimental. Le même type d'erreurs
demeure. Panni les sept élèves qui ne maîtrisent pas l'accord, deux optent pour la
graphie * destiné, un élève écrit * destinées, deux autres écrivent * destinaient et,
enfin, deux élèves adoptent des graphies qui s'éloignent de la fonne correcte telles *
déstinent, * destigmés.
143
naturelles. Par ailleurs, comme nous enseignions aux élèves de ce groupe, ils ont vécu
les mêmes interventions que le groupe expérimental.
Le tableau 4.12 montre que leurs progrès, à la suite de l'intervention, sont très
importants. Leur moyenne de nombre de mots bien écrits était de 67,37 au prétest et
a augmenté à 77,14 au post-test. Le tableau suivant montre également que leur
nombre d'erreurs d'accord en genre et en nombre des déterminants, noms et adjectifs
et des accords sujet-verbe a diminué de façon importante. Soulignons qu'au prétest,
aucun élève ne se situait dans la catégorie supérieure de 79 mots bien écrits et plus
alors qu'au post-test, 13 élèves se situent dans cette catégorie, ce qui est
particulièrement impressionnant compte tenu que la moyenne du groupe expérimental
2 était la plus faible, tous groupes confondus.
Tableau 4.12
Résultats au prétest et au post-test pour le groupe expérimental 2
Prétest Post-test
Nbre Nbre
Nbre de d'erreurs Nbre Nbre de d'erreurs Nbre
mots bien d'accord en d'erreurs mots bien d'accord en d'erreurs
écrits genre et en d'accord écrits genre et en d'accord
nombre nombre
(sur 83) Dét-Nom- S-V (sur 83) Dét-Nom- S-V
Adj Adj
Classe Moyenne Moyenne Moyenne Moyenne Moyenne Moyenne
expérimentale
2 67,71 5,54 2,57 77,14 1,21 0,61
Pour l'accord sujet-verbe également, le groupe expérimental 2 est celui qui s'est
le plus amélioré passant d'une moyenne de 2,57 erreurs à 0,61 erreur au post-test, soit
environ quatre fois moins d'erreurs. Soulignons la différence majeure entre l'écart
type de ce groupe au prétest 2,12 comparativement à 0,92 au post-test. Cela montre
qu'au départ, ce groupe était très hétérogène en ce qui concerne l'accord sujet-verbe:
l'écart entre les meilleurs et les plus faibles était marqué. Au post-test, la distribution
est davantage regroupée autour de la moyenne, ce qui rend le groupe beaucoup plus
146
4.6 Coup d'œil sur les résultats des classes naturelles témoin en ce qui
concerne le nombre de mots bien écrits
Examinons maintenant les résultats des deux classes naturelles à partir desquelles
le groupe témoin a été formé. Nous allons observer de façon globale les résultats de
ces deux classes naturelles au post-test en ce qui concerne le nombre de mots bien
écrits, l'accord en genre et en nombre des déterminants, noms et adjectifs et l'accord
sujet-verbe. Les résultats sont synthétisés dans le tableau 4.13.
Tableau 4.13
Résultats au prétest et au post-test pour les classes naturelles Tl et T2
Prétest Post-test
Nbre Nbre
d'erreurs d'erreurs
Nbre de d'accord Nbre Nbre de d'accord Nbre
mots bien en genre d'erreurs mots bien en genre d'erreurs
écrits et en d'accord écrits et en d'accord
(sur 83) nombre S-v (sur 83) nombre S-v
Dét-Nom- Dét-Nom-
Adj Adj
Classe Moyenne Moyenne Moyenne Moyenne Moyenne Moyenne
naturelle
71,07 4,83 1,93 72,60 4,60 1,07
Tl
Ecart-type Ecart-type Ecart-type Ecart-type Ecart-type Ecart-type
N= 30
élèves 4,56 3,00 2,16 5,86 2,31 1,80
Classe Moyenne Moyenne Moyenne Moyenne Moyenne Moyenne
naturelle
68,59 5,86 2,34 70,93 4,86 1,28
T2
Écart-type Écart-type Ecart-type Ecart-type Écart-type Ecart-type
N= 29
élèves 6,55 2,75 1,86 5,82 2,37 1,75
147
D'emblée, nous pouvons observer que les résultats des deux classes naturelles
sont comparables à ceux du groupe témoin formé à partir de celles-ci en ce qUI
concerne le nombre de mots bien écrits et ce, tant au prétest qu'au post-test. Nous
avons vu à la section 4.1 qu'au prétest, la moyenne de mots bien écrits pour le groupe
témoin était de 70,96 (voir tableau 4.1). Nous voyons ici que les deux classes
naturelles Tl et T2, qui avaient servi de bassin pour la formation du groupe témoin,
ont obtenu respectivement 71,07 et 68,59. Au post-test, la classe naturelle Tl a très
peu progressé : nous observons une hausse de 0,93 mots bien écrits. La classe
naturelle T2, quant à elle, progresse un peu plus, haussant le nombre de mots bien
écrits de 2,34. Dans la classe naturelle Tl, l'écart-type a augmenté concernant le
nombre de mots bien écrits. Les deux figures 4.3 et 4.4 présentent les résultats des
classes naturelles en ce qui concerne le nombre de mots bien écrits.
/J)
~ 12 -,---,.-
~ 10
'<Il 8
'c
(1)
6
..c 4
E 2
o 0
l:
79 mots et 75-78 mots 71-74 mots 67-70 mots 63-66 mots 62-59 mots 58 mots et
plus moins
Figure 4.3 Résultats de la classe témoin naturelle Tl au prétest et au post-test en fonction du nombre
de mots bien écrits (sur 83 mots)
148
If)
~ 15 ,--.----r--...-~-....__~r____r-__._--I--_,_-.____r-___,_-___,
-Q)
:Qi 10
'c
~ 5
..c
§ 0 +-----'-~...........
c:
79 mots et 75-78 71-74 67-70 63-66 62-59 58 mots et
plus mots mots mots mots mots moins
Figure 4.4 Résultats de la classe témoin naturelle T2 au prétest et au post-test en fonction du nombre
de mots bien écrits (sur 83 mots)
Comme le montrent les deux figures 4.3 et 4.4, la progression des deux classes
naturelles, particulièrement la classe Tl, est minime en ce qui concerne le nombre de
mots bien écrits et elle l'est également en ce qui concerne les deux autres variables
travaillées: l'accord en genre et en nombre des déterminants, noms et adjectifs et
l'accord sujet-verbe. Il s'agit de quelques élèves plus faibles qui ont effectué des
progrès et ont ainsi fait augmenter la moyenne, réduisant, du coup, 1'écart-type.
Comme 1?ous avons pu l'observer dans le tableau 4.13, les élèves de la classe
témoin Tl font en moyenne 0,23 erreurs de moins au post-test dans l'accord en genre
et en nombres des déterminants, noms et adjectifs et 0,86 erreurs de moins dans
l'accord sujet-verbe. La progression des élèves de la classe T2 est légèrement
supérieure. Ces derniers améliorent leur résultat avec 1,26 erreurs en moins dans
l'accord en genre et en nombre des déterminants, noms et adjectifs et de 1,06 erreurs
dans l'accord sujet-verbe. Soulignons que le nombre d'erreurs d'accord dans les
participes passés diminue aussi.
Dans les deux cas, les progrès observés sont de loin inférieurs à ceux des classes
expérimentales. Cependant, les tests statistiques n'ont pas été faits pour les deux
classes naturelles-témoins et la classe expérimentale 2 qui ne font pas partie de la
recherche proprement dite. Nous constatons que les élèves des deux classes Tl et T2
149
ont très peu progressé à la suite des dictées traditionnelles, des cours et des exercices
traditionnels de grammaire. Nous pouvons donc affirmer que ces résultats recueillis
auprès d'un plus grand bassin d'élèves confirment ceux obtenus avec les groupes
expérimental et témoin de la recherche.
Jusqu'à présent, dans ce chapitre, nous avons principalement décrit les résultats
obtenus au prétest et au post-test en comparant les performances du groupe
expérimental à celles du groupe témoin pour le nombre de mots bien écrits, le nombre
d'erreurs d'accord en geme et en nombre des déterminants, noms et adjectifs et le
nombre d'erreurs d'accord sujet-verbe.
Nous avons également effectué une comparaison avec les élèves de l'enquête
française de Manesse et Cogis (2007) afin de situer nos élèves québécois par rapport
aux élèves français avant et après notre intervention, et ce, tout en étant consciente
des limites d'une telle comparaison. Dans la section suivante, les résultats au prétest
et au post-test seront interprétés et discutés tout en étant mis en parallèle avec notre
intervention.
La dictée 0 faute est donc une source d'information précieuse pour l'enseignant
qui peut vérifier l'habileté des élèves à reconnaître les classes d'appartenance des
mots et à effectuer les chaînes d'accord appropriées. Cet accès aux processus
cognitifs permet à l'enseignant de prendre conscience des représentations des élèves
et d'intervenir de façon adéquate, au besoin, sur une conception erronée. Ainsi,
l'utilisation d'une dictée métalinguistique nous a amenée à travailler dans une
perspective de construction du savoir. Le rôle de l'enseignante consistait à se
pencher sur les représentations grammaticales et sur les procédures que les élèves
utilisent réellement lorsqu'ils écrivent. Il nous apparaissait important de questionner
les élèves sur les procédures auxquelles ils ont recours en grammaire, de leur faire
justifier leur analyse et, conséquemment, de développer leur raisonnement
grammatical, pratiques à préconiser selon Barth (2002), qui met en garde contre des
modalités d'enseignement faisant travailler à un niveau de stimulus-réponse ou
d'association verbale, sans entraînement à un raisonnement argumenté. Elle soutient
qu'il est important d'amener l'élève à réfléchir, à expliciter, à tenter de clarifier, car si
l'enseignant ne tente pas d'amener l'élève à un niveau d'abstraction plus élevé (en
étant capable de justifier la reconnaissance d'un concept et en nommer ses attributs
essentiels par exemple), il risque de stagner à ce niveau de réflexion.
Dans les sections suivantes, nous discuterons des résultats pour les deux variables
ciblées: l'accord en genre et en nombre des déterminants, noms et adjectifs et
l'accord sujet-verbe. Aussi, nous tenterons de voir en quoi la dictée 0 faute a pu avoir
un impact positif sur la réussite des élèves au post-test.
151
Nous avions ciblé, dans un premier temps, une des difficultés récurrentes que
rencontrent les enseignants, soit l'appropriation par les élèves des mécanismes de
l'accord en geme et en nombre. Comme le soulignent Rieben, Fayol et Perfetti
(1997), étant donné que la morphologie du français est le plus souvent silencieuse,
elle ne peut être apprise qu'à partir d'un simple «transfert» de l'oral vers l'écrit. Une
fois que le pédagogue a enseigné qu'avec le pluriel on met un s et avec le féminin un
e, ce n'est pas le concept de geme ou de nombre qui pose problème, mais sa mise en
œuvre dans des situations variées. Rieben, Fayol et Perfetti (1997) rappellent que les
utilisations de la morphologie par les élèves dépendent de l'activité au cours de
laquelle les accords doivent être mobilisés. Il souligne que les meilleures
performances sont observables au cours d'exercices dits d'application où le même
problème d'accord est présenté dans des contextes différents. Il défend l'idée que,
pour maximiser l'efficacité de l'enseignement, les enseignants doivent se situer dans
une progression qui ne porte pas sur le concept en lui-même, mais sur l'apprentissage
de sa mise en œuvre dans des situations de plus en plus complexes dans l'optique
d'en assurer l'installation et l'automatisation chez les apprenants. En ce sens, nous
considérons que la dictée 0 faute permet de travailler des problèmes d'accord de
façon spécifique et explicite. Il s'agit d'une excellente porte d'entrée pour installer la
maîtrise de l'accord chez les élèves afin que ces derniers puissent progressivement
effectuer un transfert lorsqu'ils se retrouvent en situation authentique d'écriture.
C'est ce postulat de base qui a guidé notre démarche dans le cadre des dictées 0
9
faute, essayant le plus possible de ramener les élèves aux huit classes de mots , car
comme le mentionnent aussi Rieben, Fayol et Perfetti (1997), les principaux
problèmes portent sur l'identification de la classe d'appartenance des mots, sur le
repérage des chaînes d'accord et sur la polyvalence de la lettre s. Soulignons que
pour travailler ces difficultés avec les élèves et leur permettre de développer des
automatismes, il est fondamental de les amener à développer un raisonnement
complet. Comme l'affirment Nadeau et Fisher (2006, p. 204) :
Pour garder les élèves en alerte sur le plan cognitif, il convient de toujours les
faire travailler sur des phrases, et non sur des groupes de mots isolés. De plus,
afin de confronter les connaissances et les représentations des élèves, et de rendre
incontournable un raisonnement complet (et éviter ainsi que l'élèye réussisse la
tâche sans réfléchir), les exercices devraient présenter une grande variété
linguistique.
La dictée 0 faute agit dans ce sens: elle est construite à partir de phrases
complètes et signifiantes et pennet aux élèves d'articuler l'ensemble de leurs
connaissances grammaticales et orthographiques par les problèmes de divers ordres
qu'elle soulève. Dans le cadre de notre intervention, nous avons amené les élèves à
expliciter leur raisonnement notamment sur la reconnaissance des constituants du
groupe nominal et les procédures d'accord. Haas (2002) soutient que cette réflexion
métalinguistique fait évoluer plus rapidement les représentations de la langue écrite et
9Avec les élèves, nous partons du principe que les mots sont divisés en classes de mots variables
(déterminant, nom, adjectif, verbe, pronom) et invariables (conjonction, adverbe, préposition).
153
Élève 3 : P-r-o-c-h-a-i-n-s
Enseignante: Oui, c'est un adjectif qui vient préciser jeux donc il est au pluriel.
Et «jeux»?
Élève 12 : J-e-u-x.
Même si le raisonnement n'est pas très développé lors de cette première dictée,
cet extrait montre de quelle façon nous avons tenté d'habituer les élèves à identifier la
classe de mots afin de pouvoir ensuite effectuer un raisonnement adéquat et marquer
correctement la chaîne d'accord. Malgré le fait que, dès l'école primaire, les élèves
possèdent les connaissances nécessaires pour résoudre les chaînes d'accord, comme
154
Enseignante: Et «celte»?
Élève 12 : Un déterminant!
Élève 26 : C-e-t-t-e
Élève 3: Démonstratif!
Élève 26 : Parce que le nom, c'est une (en insistant sur la marque du féminin)
dame donc ça (il cherche ses mots pour tenter de l'expliquer en faisant un signe
155
Élève 3 : Du nom!
Enseignante: Il reçoit l'accord du nom donc c'est pour ça que «cette», on a mis
«c-e-t-t-e». [. ..}
Un autre extrait, tiré de cette même dictée, illustre la façon dont les élèves
explicitent leur raisonnement dans l'accord en genre et en nombre des déterminants,
noms et adjectifs, ici avec le GN «codes postaux». Il est possible d'observer une
utilisation plus précise du métalangage grammatical. Les élèves nomment eux
mêmes les classes de mots, comme nous pouvons le voir avec la première question de
la séquence suivante, et font référence aux attributs essentiels (les caractéristiques
propres à une classe de mots) que nous avons travaillés par une série d'activités,
parallèlement aux dictées 0 faute.
Enseignante: [. ..} Les codes postaux ... [. ..} Ici, «postaux», c'est quelle sorte de
mot?
Élève 26 : Adjectif!
Enseignante: Ça décrit le nom. Une élève me dit que c'est facultatif .. (En
s'adressant à cette dernière). Tu as tout à fait raison. Et l'adjectif, est-ce qu'il
est donneur ou receveur d'accord?
Enseignante: Oui, receveur d'accord. Donc, qu'est-ce que je fais avec l'adjectif
«postaux» ?
Élève 3 et 10 : Codes!
[... ] d'objectiver les mécanismes de l'accord avec les élèves, de leur faire
verbaliser les raisonnements qui les conduisent à adopter telle ou telle solution
morphologique. Il ne s'agit pas tant d'accumuler les exercices d'application que
de mettre en place des activités propres à faire réfléchir sur la grammaire des
accords.
Quand les morphogrammes ont acquis une valeur, les élèves tendent à les utiliser
dans des situations qui leur paraissent appropriées.
Ainsi, comme nous avons pu le constater sur plusieurs copies d'élèves, tant dans
la dictée de Fénelon qu'au fil des dictées 0 faute, l'élève connaît ce que nous
appelons respectivement les marques de personne, de temps, de genre et de nombre,
mais il n'en a souvent pas la clé, car ces graphies n'ont pas encore pris tout leur sens :
elles ne sont pas organisées en système (Cogis, 2005). Lorsque l'élève a huit ou neuf
ans, les suites de lettres -ent, - el' et -ait apparaissent comme spécifiques au verbe.
158
Pour illustrer ce constat, Cogis (2005, p. 117) utilise une image: «Les graphies
semblent flotter en apesanteur, sans relations entre elles, uniquement rattachées à
l'idée du verbe.» C'est pour cette raison que l'auteure affirme qu'il est difficile de
tracer une ligne claire du développement des graphies verbales puisque les formes
verbales complexes posent problème même au collège.
Dans ce chapitre, nous avons également fait ce constat en observant les taux de
formes correctes des verbes présents dans la dictée «Les arbres». En guise d'exemple,
les taux de formes correctes du verbe revêt, tous âges confondus, sont bas dans les
enquêtes de 1987 (29,6%) et davantage encore en 2005 (14,5%). Dans le cadre de
notre intervention, au prétest, dans le groupe expérimental, le taux de réussite était de
20% et a grimpé à 60% au post-test. Tant dans le groupe témoin que dans le groupe
expérimental, le taux de réussite a augmenté entre le prétest et le post-test. La
difficulté que présente le cas du verbe revêt s'explique du fait que les élèves sont
relativement peu conscients des différentes valeurs de la catégorisation du temps et de
ses différentes graphies (Cogis, 2005). Il semble que l'imparfait, avec son
morphogramme en ai a été confondu étant donné la fréquence de ait. Mentionnons
que la problématique de l'imparfait n'est pas du tout la même au Québec, étant donné
l'opposition é 1è.
Dans les groupes témoin et expérimental, le groupe verbal et, plus spécifiquement
la conjugaison, ont été travaillés, mais dans le groupe expérimental, les questions des
élèves et leurs doutes constituaient le point de départ de l'intervention et nous
permettaient d'agir, au besoin, sur leurs conceptions erronées, ce qui n'était pas le cas
dans le groupe témoin. Le fait d'accéder aux pensées des élèves lors des discussions
grammaticales pelmettait, par exemple, de comprendre le raisonnement de ceux qui
hésitaient entre é, er, ai et ait : l'erreur se trouvait alors expliquée plutôt que pénalisée
(Astolfi, 1997).
Élève 7: «S'acharnent»?
Élève 7 : a-c-h-a-r-n-e.
Élève 1 : e-n-t!
160
par «ne ...pas» : «ne s'acharnent pas ... » Est-ce que je peux le conjuguer: Je
m'acharne, tu t'acharnes?
truc pour trouver le sujet on peut encadrer par ... (laissant la phrase en suspens)
Enseignante: Faites-le!
Nous pouvons observer dans cette séquence ce que Reuter (1996, p. 83) présente
comme des «interactions cognitives entre pairs». Selon lui, ces dernières peuvent
161
favoriser les progrès en créant des questionnements chez l'apprenant sur ses
représentations et ses pratiques et l'obligent à se décentrer. Ici, l'élève 3 intervient
pour corriger le raisonnement de l'élève 1 qui demande, en hésitant, si s'acharnent
est un adjectif. L'élève 3 répond spontanément que la classe d'appartenance est celle
du verbe. Dans ce contexte, le rôle de l'enseignante se limite à étayer, questionner,
demander des précisions, reformuler en se servant des réponses et des raisonnements
des élèves du groupe. C'est ainsi que nous avons mis l'accent au fil de l'intervention
sur la relation sujet/verbe en rappelant aux élèves d'utiliser les manipulations
syntaxiques telles l'encadrement par ne pas pour identifier le verbe et l'encadrement
par c'est qui ... et la pronominalisation pour identifier le sujet. Étant donné que,
même en troisième secondaire, ils ne parviennent souvent pas seuls à mener au bout
les manipulations syntaxiques, la dictée 0 faute est un prétexte pour apprendre à les
maîtriser et à construire les notions de sujet et de verbe sur des bases solides et les
articuler dans un raisonnement grammatical complet (Nadeau et Fisher, 2006).
4.8 Les verbalisations: une fenêtre ouverte sur les procédures des élèves
Des photos explicites sur lesquelles figurent les deux chèvres sacrifiées ont été
publiées dans une Joule de quotidiens.
L'élève 3 notamment.
Enseignante: Si vous avez mis votre e-n-t, vous êtes bons, je vous félicite, mais
pourquoi?
Élève 3 : Parce que c'est des photos explicites qui ... (Elle s'arrête et hésite.)
L'élève 9 lève la main et fait un «non, non» pour exprimer très clairement sa
désapprobation.
Élève 26: Parce que c'est les chèvres qui figurent sur les photos ...
Enseignante: Oui, parce que c'est les chèvres qui figurent sur les photos.
Élève 26 : En retard!
Enseignante (en riant): Un sujet en retard, c'est bien essayé! Vous vous
Élèves 9 et 19 : Inversé!
Enseignante: Le sujet inversé. Parce que cette fois-ci le sujet est après le verbe
Même s'il est faux de prétendre que les activités de type métalinguistique règlent
instantanément tous les problèmes de type morphographique, elles offrent la
possibilité d'effectuer un « voyage dans la tête et les mots des élèves et d'avoir accès
à leurs savoirs linguistiques» (Cogis, 2005). L'amélioration impressionnante des
élèves du groupe expérimental entre le prétest et le post et les commentaires des
élèves nous pennettent de dire qu'ils ont probablement utilisé les compétences
développées au fil de l'intervention pour effectuer les accords appropriés lors du post
test.
Comme nous l'avons vu dans ce chapitre, tous les élèves ont progressé.
Cependant, le groupe expérimental est beaucoup plus homogène à la suite de
l'intervention alors que ce n'est pas le cas dans le groupe témoin au sein duquel les
écarts dans les résultats sont demeurés quasi intacts au post-test. Comment expliquer
cet écart entre le groupe expérimental et le groupe témoin?
Les résultats présentés dans ce chapitre ont montré que l'intervention a permis de
rendre le groupe expérimental plus homogène puisque tous les élèves ont été invités à
raisonner, guidés par l'enseignante dont le rôle consistait à favoriser l'émergence de
système d'explications. Nous avons pu prendre conscience des notions sur lesquelles
les élèves doutent ou encore des préoccupations qu'ils ont lorsqu'ils écrivent.
164
Cogis (2003) insiste sur l'importance des verbalisations des élèves pour rendre
l'élève actif dans son apprentissage de l'orthographe. La verbalisation nous apparaît
jouer un rôle primordial surtout pour avoir accès à la pensée des élèves plus faibles
qui ont souvent construit des connaissances erronées sur la langue. Comme le
mentionne Cogis (2003, p. 120) :
[... ] c'est bien le fait d'expliquer, c'est-à-dire de mettre en mots pour les autres,
qui oblige à déplier en même temps pour soi-même un contenu de pensée: la
représentation à l'origine de l'erreur devient alors manipulable et peut évoluer. Il
s'agit donc de faire de ces moments de verbalisations et de confrontation avec
autrui des situations d'apprentissage.
Comme nous traitons ici du fait que le groupe devient plus homogène, il est
intéressant de souligner qu'au départ, ce sont des élèves forts qui amorcent le
raisolU1ement. Cependant, l'élève 26 est un élève qui a de sérieuses difficultés en
orthographe, mais il prend part au raisolU1ement. Les élèves plus faibles ont donc pu
apprendre progressivement à construire leur raisolU1ement et, dans plusieurs cas, à
développer suffisamment de confiance pour le verbaliser. Rares sont les élèves qui
ont profité «gratuitement» du raisolU1ement des autres sans s'impliquer dans les
dictées 0 faute. Cela a eu un impact lors du post-test et a permis à une majorité
d'élèves d'améliorer de façon importante leur compétence en orthographe.
Nous avons voulu situer nos élèves par rapport à ceux de l'enquête de Manesse et
Cogis. De cette comparaison, nous avons présenté les résultats, nous tenterons
maintenant de les interpréter. Au post-test, non seulement les élèves qui ont vécu
l'intervention ont rattrapé leur retard, mais ils ont réussi à obtenir des résultats
supérieurs à ceux des élèves issus des Non-ZEP du même âge. Ce constat signifie
qu'il est possible de rattraper le retard en orthographe grammaticale si un travail sur
166
la langue est vécu sur une base régulière en classe. Dans le cadre de notre
intervention, les élèves ont participé à des dictées 0 faute environ une fois par deux
semaines. Ils étaient appelés à discuter fréquemment des procédures d'accord des
déterminants, noms et adjectifs, des questions et des manipulations syntaxiques à
privilégier pour identifier correctement un sujet, de l'identification d'un participe
passé et de l'application de ses règles d'accord. Nous insistions également sur
l'importance d'identifier la classe d'appartenance d'un mot et de nommer les
caractéristiques de cette dernière. Parallèlement aux dictées 0 faute, des capsules sur
certaines notions identifiées comme problématiques ont été réalisées afin de remédier
aux problèmes d'ordre grammatical qui survenaient. L'intervention a donc contribué
à outiller les élèves dans la maîtrise de leur compétence en orthographe grammaticale
et leur a permis de progresser, tout particulièrement en ce qui concerne les accords.
4.11 La conclusion
les écoles du Québec». Selon le gouvernement, «on a un peu délaissé la dictée dans
les dernières années (... ] alors qu'à son avis, ça demeure un des meilleurs moyens
pour apprendre à écrire sans faute 10». Notre intervention nous a amenée à constater
que la pratique régulière de la dictée évaluative a eu peu d'impact, chez les élèves du
groupe témoin alors que tous les élèves qui ont vécu l'expérience de la dictée a faute
ont progressé de façon impressiormante. Les dormées présentées dans ce chapitre en
témoignent.
Les deux tiers des élèves du groupe expérimental ont réussi à écrire correctement
79 mots et plus au post-test alors qu'aucun élève n'atteignait ce niveau au prétest.
Les performances des élèves sont donc beaucoup plus homogènes à la suite de
l'intervention. Le groupe témoin, quant à lui, demeure plus hétérogène. Ce dernier a
aussi progressé, mais de façon moins marquée que le groupe expérimental: au post
test, 86,7% des élèves se situaient dans les scores forts alors que seulement 44% des
élèves du groupe témoin ont réussi à obtenir de tels résultats. Leur progression est
particulièrement marquée en ce qui concerne les taux de réussite de l'accord en
genre et en nombre des déterminants, noms et adjectifs: les élèves ont en moyerme
quatre fois moins d'erreurs dans ce type d'accord après l'intervention. Le portrait du
groupe témoin est différent: seulement 44,4% des élèves ont amélioré leur résultat
pour cette variable, mais les autres élèves ont conservé le même résultat ou ont
régressé.
donc intéressante dans les deux groupes, mais, encore une fois, plus marquée dans le
groupe expérimental.
Au-delà des commentaires positifs des enseignants' et des élèves qui s'adonnaient
à diverses activités métalinguistiques telles la dictée 0 faute, la phrase du jour ou les
ateliers de négociation graphique, nous avons voulu valider la pertinence d'une de ces
approches socioconstructivistes dans une perspective de développement de
l'enseignement de l'orthographe grammaticale chez les élèves du secondaire. Les
résultats quantitatifs que nous avons recueillis confirment notre hypothèse à l'effet
que la dictée 0 faute a un impact très positif sur la compétence en orthographe des
élèves, en particulier sur la maîtrise des accords.
Grâce aux verbalisations et aux confrontations, tous les élèves, peu importe leur
niveau en orthographe, ont pu tirer profit de l'intervention. Par ailleurs, les élèves les
plus faibles sont ceux qui ont progressé davantage puisqu'ils ont pu bénéficier du
raisonnement et des explications de leurs pairs, ce qui leur a permis de comprendre
certaines notions et, parfois, de déconstruire des connaissances erronées au profit de
connaissances adéquates sur la langue, plus particulièrement sur les accords. Le fait
que nous ayons travaillé sur une base régulière l'identification des classes de mots et
les procédures d'accord a permis aux élèves plus faibles de progresser de façon
marquée et de rendre le groupe expérimental plus homogène.
169
La comparaison comporte des limites étant donné que les élèves de troisième
e
secondaire du Québec se comparent à ceux de la 3 du système français en ce qui
concerne l'âge, mais pas en ce qui concerne le niveau (la 3e correspondant à la 4 e
secondaire dans le système scolaire québécois).
dictée 0 faute sur une base régulière. Par ailleurs, outre ces progrès marqués sur le
plan quantitatif en ce qui concerne le nombre de mots bien écrits et les accords en
genre et en nombre des déterminants, noms et adjectifs et les accords sujet-verbe,
nous avons pu observer des progrès importants au fil des discussions en ce qui
concerne le doute 0l1hographique, l'(j.ttention et la participation des élèves et
l'utilisation de plus en plus marquée du métalangage grammatical. C'est d'ailleurs
une description de cette évolution qui sera présentée dans le chapitre suivant,
consacré à l'analyse des résultats en lien avec la dictée 0 faute.
CHAPITRE V
Rappelons que les écrits sur la dictée 0 faute sont rares et, pourtant, cette façon
d'aborder la dictée et les pratiques qui s'en approchent gagnent la sympathie des
enseignants qui l'essaient en classe. Étant donné que les progrès qu'observent les
enseignants qui expérimentent la dictée 0 faute (ou une variante de cette activité) ne
reposent sur aucune recherche quantitative, nous avons décidé d'innover en
documentant de façon plus rigoureuse cette approche.
Pour mieux cerner le développement des élèves, nous présenterons l'analyse des
aspects suivants: pour le premier axe, l'évolution du doute orthographique, nous
examinerons le nombre total de mots discutés pour chacune des dictées ainsi que les
mots qui font l'objet de questionnement. Sur quoi porte le doute?
Avant de conclure, nous nous pencherons également sur l'évolution des pratiques
de l'enseignante afin de dégager des pistes pédagogiques à privilégier pour optimiser
le déroulement des séances de dictée 0 faute.
Présentons d'abord le nombre de mots qui ont été discutés durant les trois dictées
qui retiennent notre attention. Nous examinerons le nombre de mots sur lesquels il y
a eu discussion et les instigateurs: les élèves ou l'enseignante. Le tableau 5.1 en fait
la synthèse.
174
Tableau 5.1
Nombre de mots discutés aux dictées 1, 5 et 9
Nombre de mots
42 mots 48 mots 55 mots
discutés
Nombre total de
138 mots 127 mots 127 mots
mots de la dictée
Pourcentage des
discutés
les élèves
l'enseignante
Nous pouvons observer que le nombre de mots discutés augmente au fil des
séances de dictée 0 faute, mais que dès la première dictée, une proportion importante
des mots, soit 30%, est déjà discutée. Toutefois, ces pourcentages contiennent des
mots pour lesquels l'enseignante a initié le questionnement. Les mots discutés par les
élèves seront analysés de façon plus détaillée dans la section suivante.
Dans le tableau 5.2, nous présentons une répartition des questions posées selon le
problème soulevé.
176
Tableau 5.2
Nombre de questions initiées par les élèves ou par l'enseignante et objets des
questions pour les dictées l, 5 et 9
Orthographe lexicale Il 13 17
Accord Dét-Nom-Adj 10 13 8
Accord S-V 5 4 2
Participe passé 1 8 9
Orthographe autre 5 8 6
Total 32 46 42
1 Questions sur des mots initiées par l'enseignante
1
Orthographe lexicale 3 0 1
Accord Dét-Nom-Adj 5 4 8
Accord S-V 1 0 3
Participe passé 1 1 0
Orthographe autre 3 1 0
Total 13 6 12
Pour les trois dictées, nous constatons que les élèves ont posé beaucoup de
questions sur l'orthographe lexicale et les accords en général, plus précisément les
accords en genre et en nombre des déterminants, noms et adjectifs qui sont plus
nombreux que les accords sujet-verbe. Les participes passés ont fait également
l'objet de plusieurs questions de la part des élèves dans les dictées 5 et 9. Rappelons
que la première dictée comprenait seulement trois participes passés, la cinquième
dictée en comptait sept et il y en avait neuf dans la dernière dictée.
Le tableau 5.2 nous permet d'observer que les accords, surtout ceux en genre et
en nombre des détenninants, noms et adjectifs, et les participes passés, préoccupent
les élèves lorsqu'ils écrivent. Par contre, les accords sujet-verbe, qui ont fait l'objet
177
de cinq questions de la part des élèves lors de la première dictée, tendent à susciter
moins de questions au fil des dictées. Nous pouvons expliquer le peu de questions
posées par les élèves par le fait que la majorité doute surtout en ce qui concerne les
verbes dont la marque finale est inaudible, surtout les verbes en ent, par exemple les
verbes appartiennent et réunissent de la première dictée, les verbes acharnent,
figurent et soulignent de la cinquième dictée et les verbes risquent et gagnent de la
neuvième dictée sur lesquels les élèves expriment un doute. Les verbes avec une
finale en t, ait ou aient ont fait également l'objet de discussions. Parmi ces verbes
ayant suscité des doutes, notons les verbes souhaiterait (première dictée), connaît
(cinquième dictée), croit et pourraient (neuvième dictée). Aucun verbe avec une
marque qui s'entend n'a fait l'objet de question ni même les homophones ont et sont.
Ces constats ne sont pas surprenants puisque, comme nous l'avons présenté dans le
cadre théorique, les lettres muettes constituent un obstacle majeur dans l'acquisition
de l'orthographe: le caractère silencieux des marques de genre, de nombre et de
personne pose un problème aux scripteurs dans le développement de leur compétence
orthographique (Jaffré, 1995) d'où le nombre important de questions en lien avec les
marques muettes.
Dans cette section, à la lumière du tableau 5.1, nous pouvons conclure que le
pourcentage de mots discutés par les élèves a augmenté de façon impo11ante entre la
première et la cinquième dictée et se stabilise par la suite. Les élèves ont exprimé
leurs doutes en posant davantage de questions. Dans le tableau 5.2, nous pouvons
observer que la présence de participes passés a également été un facteur à considérer
dans le nombre de mots discutés. En effet, les élèves ont posé presque
systématiquement des questions lorsqu'ils reconnaissaient un participe passé dans un
texte dicté. Le nombre de questions concernant l'orthographe lexicale augmente
également au fil des dictées. Nous attribuons cette augmentation au fait que les
élèves, très motivés par les dictées 0 faute, souhaitaient améliorer leur résultat d'une
dictée à l'autre et doutaient davantage à la neuvième dictée qu'à la première en ce qui
concerne les accords et le lexique. Ils s'interrogeaient sur les graphies ou
ressentaient le besoin de les valider avec leurs pairs.
Nous avons abordé dans cette section le nombre de mots ayant suscité des
questions ainsi que les mots sur lesquels doutaient les élèves pendant les dictées 0
faute. Dans la section suivante, nous nous pencherons sur le deuxième axe,
l'évolution de l'attention au fil des dictées 0 faute. Nous pourrons d'ailleurs observer
que le doute orthographique et l'attention sont deux axes très liés.
Dans cette pm1ie, nous présenterons le portrait global de J'évolution des élèves en
examinant le nombre moyen d'erreurs commises pour chacune des neuf dictées.
Dans un premier temps, en lien avec le premier axe, afin de vérifier si le doute
011hographique et l'attention évoluent, nous observerons seulement le nombre total
d'erreurs sans tenir compte du fait que les mots aient fait l'objet d'un questiülmement
ou non. En fait, le nombre d'erreurs fournit un premier indice général du niveau de
l'attention et du niveau de doute orthographique du groupe. Si le nombre d'erreurs
diminue au cours des séances, nous pouvons supposer que c'est parce que les élèves
179
verbalisent leurs doutes davantage, qu'ils doutent aux bons endroits et qu'ils
demeurent attentifs aux discussions puisque la réponse à propos d'une graphie
n'arrive pas instantanément mais après discussions, stratégies verbalisées, etc. Le
premier et le deuxième axes sont donc étroitement liés. Nous présenterons le nombre
d'erreurs en ce qui concerne les règles d'accord sur lesquelles nous avons travaillé:
l'accord en genre et en nombre des déterminants, noms et adjectifs et l'accord sujet
verbe. Ensuite, comme deuxième indice plus précis du niveau de l'attention, nous
examinerons le rapport entre les mots discutés et les erreurs des élèves.
5.2. J Le nombre d'erreurs en moyenne pour chaque élève aux neufdictées 0 faute
Mentionnons que le nombre d'élèves présents à chacune des dictées est demeuré
assez stable variant entre 27 et 30 élèves. Nous pouvons compter un total de Il
absences dans l'ensemble des dictées avec un maximum de trois élèves absents pour
une même dictée. Au total, sept élèves se sont absentés à une seule dictée et deux
élèves ont été absents à deux reprises. Les absences n'ont donc pas été assez
nombreuses pour justifier d'enlever un élève de l'échantillon ni pour supprimer une
dictée puisque tous ont expérimenté la dictée 0 faute sur une base assez régulière au
cours de l'intervention qui s'échelonnait sur presque une demi-année scolaire.
Le tableau 5.3 présente le nombre total moyen d'erreurs (tous types confondus)
aux neuf dictées 0 faute. Il permet de dégager un portrait global du groupe et
d'apprécier, de façon générale, la progression des élèves tout en étant un indice de
l'attention des élèves et du doute orthographique de ces derniers.
180
Tableau 5.3
Nombre total d'erreurs (tous types confondus) en moyenne par élève dans les dictées
o faute
Dictée 0 faute Nombre d'erreurs Écart-type Nombre d'élèves
(en moyenne) par présents
élève
1 5,76 5,7 29
2 3,24 4,52 29
3 3,55 4,99 29
4 3,73 5,45 30
5 2,73 2,86 30
6 2 4,64 27
7 1,93 3,63 30
8 1,89 1,95 28
9 2,22 2,58 27
À la première dictée, près de six erreurs subsistent, ce qui montre que, d'une part,
les élèves étaient plus ou moins attentifs et, d'autre part, qu'ils ne doutaient pas
suffisamment. Entre la deuxième et la cinquième dictée, le nombre moyen d'erreurs
oscille entre 3 et 3,5 erreurs alors que dans les quatre dernières dictées, le nombre
moyen d'erreurs se situe autour de 2. La figure 5.1 illustre bien cette évolution par
paliers.
181
7 ~
1
6
5 - l
4
- r
3 - - ,- f----- -
--
HH H~n=
2 - - 1--- 1-
1 - - 1--- f--
0
Dictée Dictée Dictée Dictée Dictée Dictée Dictée Dictée Dictée
1 2 3 4 5 6 7 8 9
Figure 5.1 Nombre d'erreurs en moyenne par élève dans les dictées 0 faute
Tableau 5.4
Distribution du nombre d'erreurs dans les dictées ° faute
Nous pouvons aisément constater que des paliers se dessinent: la dictée 1 est
vraiment à part, ce qui nous apparaît normal, étant donné qu'il s'agit de l'initiation
des élèves à la dictée °faute: seulement trois élèves ne font pas d'erreurs. Aucun
élève n'avait vécu cette façon d'aborder la dictée précédemment. Ensuite, dans les
dictées 2 à 5, un peu plus de 50% des élèves ont un résultat qui oscille entre 0 el 2
erreur(s). Les autres élèves demeurent assez répartis dans les autres catégories, de 3
4 erreurs et 9 erreurs el plus, sauf lors de la cinquième, où les élèves qui font
beaucoup d'erreurs (7-8 erreurs ou 9 erreurs el plus) sont peu nombreux.
Dans les dictées 6 à 9, environ 75% des élèves ont entre 0 el 2 erreur(s); très
peu d'élèves se trouvent dans les autres catégories. Ainsi, il semble que pour
plusieurs, les résultats de la première dictée conduisent à une prise de conscience qui
se manifeste dès la deuxième dictée par l'expression du doute et par la hausse du
niveau d'attention. En effet, pour plusieurs c'est à partir de cette deuxième dictée
qu'ils commencent à exprimer davantage leurs doutes et font preuve d'une attention
183
soutenue. D'autres cependant ont besoin de quatre ou cinq pratiques pour s'améliorer
autant.
Il reste quelques élèves récalcitrants qui sont très faibles, par exemple l'élève 2I.
Ce dernier est celui qui obtient le résultat le plus faible lors de la première dictée (26
erreurs). Par la suite, ses résultats ne s'améliorent guère: il obtient un résultat de 22,
20 et 24 erreurs aux dictées suivantes. À la cinquième dictée, il commet seulement
trois erreurs. Par contre, lors de la dictée suivante, son résultat se rapproche de ceux
obtenus ultérieurement: il obtient un résultat de 24 erreurs à la dictée 6, 18 erreurs à
la dictée 7, sept erreurs à dictée 8 (en oubliant toutefois quatre mots) et dix erreurs à
la dictée 9. La motivation inconstante par rapport aux tâches scolaires de cet élève
faisant varier son degré d'écoute est un facteur à considérer pour expliquer
l'inconstance de ses résultats. Sautot (2002) rappelle l'importance de la dimension
sociale de l'apprentissage et soutient que l'argumentation et le dialogue sont des
activités très formatives pour acquérir l'orthographe. Cependant, pour que les
interactions soient fructueuses, il est nécessaire que l'élève s'engage dans le
processus d'apprentissage et qu'il poursuive des buts d'apprentissage (Tardif, 1997).
Dans cette section, nous observerons, sur le plan quantitatif, la réussite des
accords en genre et en nombre des déterminants, noms et adjectifs pour les trois
dictées 0 faute qui ont fait l'objet d'une analyse plus approfondie. Nous pourrons
ainsi voir si les élèves ont été attentifs lors des discussions par rapport aux règles
d'accord.
Tel que présenté dans le cadre méthodologique, nous avons également pris soin
d'inclure dans les dictées des accords audibles et d'autres inaudibles afin de
confronter les élèves à des accords variés. Comme nous avons pu le constater dans le
cadre théorique, alors qu'il y a quelques siècles, la plupart des marques
184
Tableau s.s
Distribution des élèves en fonction du nombre d'erreurs d'accord en genre et en
nombre des déterminants, noms et adjectifs pour les dictées l,Set 9
Le tableau 5.5 nous permet de constater que les élèves ont progressé en faisant de
moins en moins d'erreurs d'accord en genre et en nombre des déterminants, noms et
adjectifs. Lors de la première dictée, seulement 37,93% des élèves ont réussi tous les
àccords malgré la possibilité qu'ils avaient de questionner. Lors de la cinquième
dictée, la moitié du groupe (50%) maîtrise les accords lorsque les questions sont
permises et ce pourcentage grimpe à 77,78% lors de la dernière dictée. Nous
observons donc que le nombre d'élèves qui réussissent tous les accords en genre et en
nombre des déterminants, noms et adjectifs double, passant de 38% à 78%, en
l'espace de quelques mois, lorsqu'ils ont l'occasion d'exprimer leurs doutes.
185
Il ne s'agit pas tant d'insister sur les accords réussis, mais de relever le fait que
les élèves ont effectué des raisonnements afin de bien identifier les classes de mots et
d'appliquer les procédures d'accord adéquates, ce qui leur a permis de voir leur
nombre d'erreurs d'accord diminuer de façon importante au fil de l'intervention.
Nous avons vu, au chapitre IV, que cette amélioration s'est maintenue au post-test
alors que les élèves devaient écrire seuls, sans l'aide de leurs pairs ni de l'enseignante.
Nous pouvons ici constater que l'axe de l'évolution de l'attention est lié à celui
du doute orthographique. Dans plusieurs cas, les verbatims nous ont permis de
constater que les doutes des élèves se précisent en ce qui concerne l'accord en genre
et en nombre des déterminants, noms et adjectifs, notamment dans la formulation de
leurs questions. Lors de la première dictée, par exemple, les questions de plusieurs
élèves se limitaient à un seul mot: «Migraines?» ou encore «Nausées?» lorsque les
élèves hésitaient quant au choix d'une graphie: ils ne précisaient pas l'objet précis de
leur doute, c'est-à-dire qu'ils ne mentionnaient pas si c'était l'orthographe lexicale du
mot qui leur posait problème ou encore si c'était l'accord de ce mot. Le
questionnement évolue pour plusieurs élèves qui arrivent à formuler des questions
comme celles-ci lors de la cinquième dictée: «Est-ce que quelque ce serait un adjectif
numéral?» ou encore qui expriment plus clairement leur doute: «Je doute sur
l'adjectif courants». Notons dans ce dernier cas que l'élève se réfère à la classe de
mots pour exprimer son doute. Cette évolution se poursuit lors de la neuvième dictée:
«Une entreprise de jeux de hasard, est-ce que les noms sont au pluriel?» ou encore
«Est-ce que codes postaux est au pluriel: le nom et l'adjectif?». Dans ces deux
exemples, extraits du verbatim de la dernière dictée, les élèves se sont référés aux
classes de mots pour poser des questions, ce qui constitue une différence importante
par rapport aux nombreuses questions qui se limitaient à un seul mot lors des
premières dictées surtout. Certes, des questions composées d'un seul mot sont posées
également lors des dictées 5 et 9, mais dans une proportion moins importante que lors
de la première dictée.
186
Observons maintenant si les questionnements des élèves au fil des dictées les
amènent à douter davantage et à effectuer le raisonnement adéquat afin d'effectuer
conectement les accords sujet-verbe dans les dictées.
D'abord, le tableau 5.6 rappelle les verbes conjugués présents dans chacune des
dictées. Il présente donc les mots sur lesquels les élèves pouvaient se questionner et
raisonner en ce qui concerne l'accord sujet-verbe dans le but de choisir la terminaison
appropriée. Les participes passés ne seront pas traités dans ce tableau: ils sont
indiqués entre parenthèses lorsqu'ils sont accompagnés d'un auxiliaire.
Tableau 5.6
Verbes conjugués présents pour les dictées 1, 5 et 9
La lecture du tableau 5.6 nous permet de relever une certaine variété dans les
verbes conjugués surtout en ce qui concerne les verbes en ent dont la finale est
soulignée dans le tableau. La première dictée en comptait quatre, la cinquième trois
et la dernière cinq. Par contre, les dictées ne sont pas toutes du même calibre en ce
qui a trait aux verbes conjugués. La cinquième dictée présentait un cas
particulièrement difficile pour les élèves. Il s'agit d'un sujet inversé dans la phrase:
Des photos explicites sur lesquelles figurent les deux chèvres sacrifiées ont été
publiées dans une foule de quotidiens. La dernière dictée était plus difficile que les
autres en raison notamment de la présence de deux verbes avec une finale en t (croit
et recourt) et du verbe justifie qui est une marque plus difficile pour les élèves parce
qu'une confusion est possible avec la terminaison en - if si ce verbe n'est pas rattaché
à son infinitif en -er.
Tableau 5.7
Distribution des élèves en fonction du nombre d'erreurs dans l'accord sujet-verbe
pour les dictées l, 5 et 9
Nous constatons la proportion importante des élèves qui obtiennent 0 erreur dès
la première dictée 0 faute. Nous observons un progrès pour cette variable, toutefois
moins spectaculaire que pour la variable précédente. Alors que quelques élèves
commettent 3 ou 4 erreurs dans les accords sujet-verbe à la première dictée, tous se
188
situent uniquement dans les catégories 0 erreur et 1 à 2 erreurs lors des dictées 1 et 5.
Il faut considérer que la réussite à la dictée 5 peut s'expliquer par sa plus grande
facilité en ce qui concerne les accords sujet-verbe. La cinquième dictée comprenait
seulement trois verbes avec la finale en - ent alors que la première en comportait
quatre et la cinquième en comptait six. Les marques muettes sont problématiques
pour les élèves. Comme le soulignent Brissaud et Bessonnat (2001), les verbes en er
suscitent beaucoup d'erreurs et méritent une vigilance didactique.
Lors de la première dictée 0 faute, les verbes conjugués ont fait l'objet de cinq
questions de la part des élèves dont deux questions qui concernaient le verbe
appartiennent. Les élèves doutaient très peu en ce qui concerne la conjugaison des
verbes, mais le taux de réussite montre qu'ils n'en sentaient pas le besoin. Leurs
questions sur les verbes concernaient les verbes souffre (question d'ordre lexical),
souffrent, souhaiterait et appartiennent. Ce sont donc les quatre verbes qui
présentaient une marque inaudible qui suscitaient des questions. Les verbes cause et
recouvre n'ont pas suscité de question puisqu'ils ne sont pas problématiques. Les
élèves ont donc douté aux endroits pertinents en ce qui concerne les verbes dès la
première dictée.
Lors de la cinquième dictée, le niveau de difficulté des accords fait en sorte que
les élèves ont exprimé davantage leurs doutes et que les verbes conjugués ont fait
l'objet de cinq questions. À ces dernières s'ajoutent sept questions sur les participes
passés. Leurs questions concernaient les verbes acharnent, connaît, figurent et
soulignent. Encore une fois, ce sont les verbes qui présentaient une marque inaudible
189
qui ont fait l'objet de questions. Il est surtout intéressant de constater que le
questionnement s'est raffiné en ce qui concerne les accords sujet-verbe: le
raisonnement grammatical des élèves s'est développé, guidés par l'enseignante qui
leur demandait d'identifier le sujet en utilisant des manipulations syntaxiques. Les
questions se précisaient. Ainsi, une élève a demandé :«Est-ce que figure va prendre
ent?» Une autre: «Est-ce que soulignent, ça va être ent à la fin?» Ils sont davantage
conscients des problèmes d'accord et leur capacité à raisonner s'accroît. Lorsque
l'enseignante les questionnait à savoir pourquoi ils avaient opté pour la tenninaison
ent, ils intervenaient rapidement: «Il s'accorde avec le sujet!» Une autre ajoutait:
«C'est les chèvres qui figurent sur les photos ... »; elle utilisait donc une manipulation
syntaxique, soit l'encadrement par c'est... qui pour justifier l'identification du sujet.
Avec un peu d'aide, ils arrivaient même à reconnaître qu'il s'agissait d'un «sujet
inversé».
l'accord sujet-verbe. Les dictées 0 faute semblent aVOlr aidé les élèves qm
effectuaient beaucoup d'erreurs d'accord sujet-verbe au départ.
Dans cette section, nous avons considéré le nombre d'erreurs liées aux accords
que nous avions ciblés comme un indice de l'évolution de l'attention (et du doute
orthographique également) au cours de l'intervention. Dans la section suivante,
l'analyse du rapport entre les mots discutés et les mots bien écrits nous permettra de
raffiner l'analyse des liens entre l'attention des élèves et la réussite des accords.
Nous examinerons le rapport entre les mots discutés lors des séances de dictées 0
faute et les erreurs commises par les élèves, comme un indice plus précis de
l'attention.
5.2.4 Le rapport entre les mots discutés et les erreurs des élèves: un indice plus
précis du niveau de l'attention
Dans cette section, nous nous pencherons sur le rapport qUl existe entre le
nombre de mots discutés et les erreurs qui persistent sur les copies des élèves. Afin
de mieux mesurer le niveau d'attention et, conséquemment, l'efficacité de cette
approche chez les élèves au cours des dictées 0 faute, le moyen qui nous apparaissait
le plus pertinent était de vérifier si des erreurs demeurent sur les mots qui ont fait
l'objet d'une discussion durant le cours.
Il est possible de déduire qu'un élève dont l'attention a été soutenue à chacune
des dictées commet peu d'erreurs sur les mots qui ont été discutés. S'il avait fait une
erreur, initialement, en écrivant la phrase dictée par l'enseignante, il l'aurait corrigée
en s'appuyant sur les échanges du groupe dont le but ultime est de statuer sur la
graphie à retenir après avoir expliqué le plus clairement possible ses procédures.
Inversement, un élève dont le niveau d'attention ou de concentration est faible ou nul
durant les séances de raisonnement grammatical laissera plusieurs erreurs sur sa copie
malgré le fait que les graphies aient été validées en grand groupe.
191
Nous souhaitions vérifier d'une part, SI, de façon générale, les élèves
commettaient des erreurs sur les mots qui avaient fait l'objet d'une discussion,
autrement dit si leur attention était soutenue durant les séances de dictées 0 faute.
D'autre part, nous voulions vérifier si le niveau d'attention augmentait au fil des
séances, autrement dit si le nombre d'erreurs sur les mots discutés diminuait lors des
trois dictées 0 faute analysées.
Tableau 5.8
Distribution des élèves en fonction du nombre d'erreurs commises sur les mots
discutés pour les dictées l, 5 et 9
Dictée 100%
17,24% 58,62% 10,34% 6,90% 0% 6,90% 42
1 29 élèves
Dictée 100%
13,33% 50% 23,33% 6,67% 0% 6,67% 48
5 30 élèves
Dictée 100%
40,74% 37,04% 11,11% 7,41% 3,70% 0% 55
9 27 élèves
Nous pouvons constater que les élèves font relativement peu d'erreurs sur les
mots discutés, et ce, dès la première dictée. Si nous regroupons les catégories 0
erreur et 1 à 2 erreurs, nous constatons que 76% des élèves se trouvent dans cette
distribution lors de la première dictée. L'inattention et les erreurs nombreuses sur les
copies sont donc le lot de quelques élèves du groupe seulement. Nous observons
également une nette amélioration du nombre d'élèves qui ne font aucune erreur
(17,24% à la dictée 1 et 40,74% à la dictée 9). Soulignons que lors de la dernière
dictée, aucun élève ne se situait dans la catégorie 9 erreurs et plus.
192
grande majorité des élèves sont attentifs durant la dictée et leurs résultats à cet effet
sont très évocateurs comme nous pouvons le constater.
Dans cette partie, nous brosserons un portrait de la participation des élèves aux
dictées 0 faute afin d'examiner dans quelle proportion les élèves participent et de
vérifier s'il y a un lien entre cette participation (pour initier un questionnement ou
194
pour participer à une discussion sur la graphie d'un mot par exemple) et le nombre
d'erreurs dans les dictées. Pour ce faire, nous examinerons, dans un premier temps,
les élèves qui prennent la parole et, dans un deuxième temps, ceux qui demeurent
«muets» durant les séances de dictées 0 faute.
D'abord, le tableau 5.9 nous permet de nous pencher sur les élèves qui prennent
la parole que ce soit pour questionner ou encore pour participer au raisonnement pour
les trois dictées qui ont fait l'objet d'une analyse.
Tableau 5.9
Proportion d'élèves qui prennent la parole pour les dictées 1,5 et 9
Pourcentage
d'élèves qui o fois 10 à 14 15 à 19 20 fois et
1 à 5 fois 6 à 9 fois
prennent la «muets» fois fois +
parole
Dictée 1 48,28% 20,69% 10,34% 10,34% 6,90% 3,45%
Dictée 5 26,67% 33,33% 6,67% 10% 6,67% 16,67%
Dictée 9 14,81% 51,85% 7,41% 7,41% 3,70% 14,81%
Cette vue d'ensemble nous permet aisément de souligner que la participation des
élèves croît d'une dictée à l'autre, ce qui nous amène à constater que les élèves
195
Il est important également d'insister sur le fait que, lors de la neuvième dictée,
plus de la moitié du groupe, soit 51,85%, prend la parole au moins à une reprise au
cours de la dictée. En ce qui concerne les élèves qui participent activement tout au
long de la dictée, soit ceux qui figurent dans la catégorie 20 prises de parole et plus,
leur nombre croît de façon importante entre la première et la cinquième dictée
(passant de 3,45% à 16,67%) et se stabilise par la suite (14,81 % à la dernière dictée).
Tableau 5.10
Distribution des élèves selon le nombre de questions posées sur les mots pour les
dictées 1, 5 et 9
Nbre de
questions 0 5
1 2 3 4
posées questions
question question questions questions questions
sur les et +
mots
Dictée 1 58,62% 17,24% 13,79% 3,45% 3,45% 3,45%
Dictée 5 40% 33,33% 10% 3,33% 3,33% 10%
Dictée 9 33,33% 29,63% 7,41% 7,41% 11,11% 11,11%
Le pourcentage d'élèves qui posent des questions sur une base plus régulière, soit
trois questions ou plus au courant d'une dictée, augmente également. Lors de la
première dictée, 10,35% questionnent trois fois ou plus et ce pourcentage augmente à
16,66% à la cinquième dictée et à 29,65% à la neuvième dictée. Comme nous l'avons
vu précédemment, non seulement le nombre de mots questionnés augmente, mais le
nombre d'élèves qui initient un questionnement progresse également au fil de
l'intervention. Cela montre que les élèves se sentent en confiance et verbalisent
davantage leurs doutes. Ils sont engagés dans une démarche d'observation réfléchie
de la langue, moment qui permet à l'élève d'exprimer ses procédures et ses
représentations (Ros-Dupont, 2006; Haas, 2006; Cogis, 2005). Dans la section
suivante, nous examinerons l'évolution des élèves «muets», soit ceux qUI ne
participent pas, ni par leur questionnement, ni par leur prise de parole pendant
l'élaboration du raisonnement grammatical.
Tableau 5.11
Distribution du nombre d'élèves «muets» en fonction du nombre d'erreurs dans les
dictées l,Set 9
Le tableau 5.11 nous permet de constater que les élèves «muets» sont répartis à
travers les élèves forts, moyens et faibles de la classe. Lors de la première dictée, sur
les 14 élèves «muets», deux ont respectivement 0 erreur et une erreur: ce sont deux
élèves qui ont une excellente maîtrise du français écrit et une écoute active durant les
raisonnements grammaticaux. Il faut mentionner que certains des élèves plus forts de
la classe ressentent peut-être moins le besoin de poser des questions ou sont
simplement timides et n'osent pas prendre la parole. Huit élèves ont entre 4 et 6
erreurs et quatre élèves ont 7 erreurs et plus. Lors de la cinquième dictée, nous
pouvons noter une diminution importante du nombre d'erreurs chez les élèves
«muets» qui ont tous entre 0 et 3 erreur(s) et une seule élève a cinq erreurs. Ces
progrès s'observent également pour la dernière dictée: les élèves «muets» qui se
situent dans la catégorie 0 à 3 erreur(s) et un seul élève a dix erreurs. Ces résultats
montrent que les élèves, même ceux qui ne participent pas aux discussions,
s'améliorent de la même manière que l'ensemble du groupe.
198
Mentionnons qu'au total, dans le groupe, 14 élèves sont «muets» au moins une
fois lors des trois dictées filmées. Parmi ces 14, six ne prennent pas la parole lors
d'une seule dictée, six élèves sont «muets» lors de deux dictées et seulement deux
élèves du groupe ne prennent jamais la parole ni ne questionnent lors des trois dictées
filmées.
Pour le troisième axe sur la participation lors des dictées 0 faute, nous pouvons
affirmer que la participation a augmenté de façon importante entre la première et la
cinquième dictée et se stabilise entre la cinquième et la neuvième dictée, même si
nous pouvons observer tout de même une amélioration entre la cinquième et la
neuvième dictée. En ce qui concerne les élèves «muets», à la lumière des résultats
présentés, nous avons constaté, en examinant leur nombre d'erreurs, qu'ils sont
répartis parmi les faibles, les moyens et les forts. Certains plus forts n'ont peut-être
pas senti le besoin de poser des questions et, à l'opposé, d'autres plus faibles n'ont
peut-être pas osé le faire. Toutefois, nous pouvons supposer que les élèves ont une
attention de plus en plus soutenue durant les raisonnements grammaticaux même s'ils
ne participent pas directement aux échanges en posant des questions ou en
intervenant lors de ces derniers. Dans la lignée de ce troisième axe sur la
participation, nous nous pencherons maintenant sur l'évolution de l'utilisation du
métalangage grammatical au fil des dictées 0 faute.
La dictée 0 faute est une occasion d'amener les élèves à verbaliser leurs
raisonnements et, par le fait même, à utiliser une terminologie adéquate pour parler de
la langue. Dans cette partie, nous tenterons de répondre à notre dernière question
spécifique de recherche: comment évolue l'utilisation du métalangage grammatical
au fil des dictées 0 faute? Pour ce faire, nous nous pencherons d'abord sur
l'évolution du métalangage grammatical chez l'enseignante et, ensuite, chez les
199
Dans cette section, nous nous pencherons sur l'utilisation du métalangage par
l'enseignante au cours des séances de dictée 0 faute. Le tableau 5.12 présente les
mots appartenant au métalangage grammatical que l'enseignante a utilisé au cours des
dictées 0 faute qui ont fait l'objet d'une analyse. Dans le cadre méthodologique, il est
possible de trouver de façon plus détaillée des exemples de termes pour chacune des
catégories qui sont présentées ici. Un premier coup d'œil nous permet de constater
qu'entre la première et la cinquième dictée, l'enseignante a effectué des ajustements
importants et utilise davantage de mots appartenant au métalangage grammatical.
L'utilisation de la caméra et la lecture des verbatims ont permis de faire des
ajustements. Nous avons ainsi pu poser un regard critique sur notre pratique et la
modifier au cours de notre intervention.
200
Tableau 5.12
Évolution du nombre d'occurrences des termes du métalangage grammatical utilisé
par l'enseignante durant les dictées 0 faute
angulaire de la bonne maîtrise des accords, car les élèves doivent être en mesure
d'identifier la classe d'appartenance des mots pour être capables de réaliser les
accords appropriés (Guyon, 2003).
pour répondre à des questions d'élèves, valider une manipulation proposée par un
élève ou amener une piste de réflexion nouvelle dans le but de solutionner un
problème.
Il Le métalangage grammatical regroupe les classes de mots, les groupes de mots, les termes liés
aux verbes, les termes liés aux accords, les fonctions et les termes que nous avons regroupés dans une
catégorie «autres». Ils sont présentés dans le cadre méthodologique (voir chap. 3).
12 Les manipulations syntaxiques utilisées par les élèves sont les suivantes: l'encadrement par
souvent à un seul mot et leurs raisonnements étaient peu, voire pas étoffés. Par
exemple, lorsque l'élève 10 demande: «Cet homme, on écrit c-e-t, hein?», un élève
répond: «C'est». L'enseignante reformule et place les élèves devant les deux options
graphiques: «Cet homme cet et c'est, ce sont les deux réponses que j'ai entendues ... »
Des élèves tranchent en réitérant: «C-e-t». L'enseignante reprend: «On choisit cet,
parce que c'est, c'est... ». Les élèves nomment le verbe être. L'enseignante fait alors
appel à un remplacement qui a été travaillé en classe: «Je ne peux pas dire cela est
homme». L'enseignante fait avancer le raisonnement en questionnant encore les
élèves: «Homme, c'est quelle classe de mots?». Les élèves identifient aisément qu'il
s'agit d'un nom. Elle poursuit: «Et qu'est-ce qu'il y a devant?». L'enseignante doit
orienter le questionnement ou modéliser la façon de se rapporter aux classes de mots
pour être en mesure d'effectuer les accords appropriés. Les élèves doivent donc être
guidés pour utiliser des termes liés au métalangage grammatical. Le nombre
d'occurrences pour les catégories mentionnées est présenté dans le tableau 5.13.
Tableau 5.13
Nombre d'occurrences de termes liés au métalangage grammatical et aux
manipulations syntaxiques par les élèves durant les dictées 0 faute 1, 5 et 9
Un coup d'œil au tableau 5.13 nous permet de voir que les élèves s'approprient le
métalangage grammatical et l'utilisent de plus en plus au fil des dictées 0 faute. Ils
semblent devenir de plus en plus à l'aise avec les manipulations syntaxiques, surtout
l'encadrement par c'est ... qui pour identifier le sujet. Nous pouvons d'ailleurs
constater que leur emploi a presque triplé entre la première et la neuvième dictée. En
ce qui concerne le métalangage grammatical, nous avons répertorié un emploi du
«complément d'objet direct», de la part d'un élève des classes d'accueil qui n'a pas
vécu un enseignement renouvelé de la grammaire. En ce qui concerne les
manipulations syntaxiques, nous avons relevé deux emplois inappropriés d'une
manipulation syntaxique dans la première et dans la cinquième dictée.
de «problèmes techniques)).
Élève 13 : Un nom.
quel type de problème il s'agit, ce serait un adjectif L'élève 3 a dit tout à l'heure
qu'il s'accordait au masculin, pluriel, donc en genre et en nombre. Mais auriez
vous une autre preuve qu'il s'agit d'un adjectif?
205
Élève 3 : Du nom!
l'effacer?
Enseignante: Il est conjugué, comme vous le savez. L'élève 9 ajoute que je peux
l'encadrer par «ne ...pas». Ici, «ne risquent pas». Donc, c'est un verbe. Une
autre preuve?
Élève 10: Ils (en insistant sur le pronom) risquent d'améliorer ...
Enseignante: Oui, on peut mettre un pronom devant. Ils (en insistant sur le
Élève 24 : Le temps.
Dans cet extrait, l'enseignante invite les élèves à utiliser les caractéristiques des
verbes que nous appelons les «attributs essentiels» afin de prouver que la classe
d'appartenance de risquent ici est bel et bien un verbe. Par la suite, plusieurs élèves
interviennent à tour de rôle pour prouver, à l'aide des «attributs essentiels», que
risquent possède les caractéristiques d'un verbe.
Un autre exemple, tiré du verbatim de la dictée 9, dans lequel une élève verbalise
clairement son doute sur la préposition à montre l'assurance que prennent les élèves
dans l'utilisation du métalangage grammatical et des manipulations syntaxiques.
Enseignante: C'est vrai, j 'peux pas dire «avait conditiom). Donc, ce n'est pas le
Enseignante: Une préposition. Et là, tu m'as demandé s'il prenait un accent ...
Élève 24 : Grave!
207
langue première de cette élève n'est pas le français et qu'elle confond les accents. La
dictée 0 faute est l'occasion non seulement d'apprendre à utiliser un métalangage
grammatical adéquat, mais aussi de travailler certains problèmes plus spécifiques à
certains élèves, conune nous l'avons fait dans cette situation précise.
Cela confirme les observations de Bain (2004), effectuées dans une étude menée
auprès de 17 classes romandes de la première secondaire à la troisième secondaire
(degrés 7 à 9 en Suisse). Il était demandé aux enseignants de préparer et de réaliser
des leçons sur le texte d'opinion. Les leçons ont été retranscrites afin de recenser les
occurrences des termes grammaticaux ou métalangagiers et de vérifier leur
contribution à la construction d'une compétence textuelle et discursive. L'analyse
des différentes séquences a permis à Bain (2004) de constater que les enseignants
recourent rarement ou exceptionnellement à la terminologie enseignée dans les leçons
de grammaire. Les observations de Bain (2004, p.7) l'ont amené à un deuxième
constat.
[... ] l'utilisation spontanée de ces mêmes termes par les élèves est rarissime: les
emplois recensés (en moyenne 18% du total des occurrences) sont en majorité de
reprises à l'identique de suggestions faites par l'enseignant ou par le texte d'un
exercice. Les quelques interventions grammaticales attribuables directement aux
élèves concernent des unités telles qu'adjectifs, verbes, virgules, parenthèses,
synonymes qu'on peut estimer faire partie d'un vocabulaire courant.
concernant la gestion de classe. Les élèves ont bien saisi les consignes relatives à la
dictée 0 faute. Par ailleurs, il a été impératif d'ajuster le rythme de la dictée, car
certains étaient très rapides et d'autres écrivaient beaucoup plus lentement. Comme
le rythme varie d'un élève à un autre, cela a engendré certains problèmes de gestion
de classe. Lors des premières dictées, durant les périodes de questionnement et les
discussions grammaticales, la qualité de l'écoute n'était pas toujours adéquate. Nous
avons eu à intervenir à quelques reprises pour rappeler aux élèves l'importance de se
placer en mode d'écoute active afin de progresser. Cette difficulté s'est toutefois
résorbée au fil des séances le temps que le rythme du groupe et de l'enseignante se
stabilisent.
Après avoir vécu l'intervention, nous avons ciblé certaines pratiques qui nous
apparaissent gagnantes afin de créer un contexte le plus favorable possible au bon
déroulement de la dictée 0 faute. De prime abord, la préparation est une étape
cruciale. Il est important de choisir une dictée adaptée au niveau des élèves et de
cibler les cas qui seront susceptibles d'être travaillés plus systématiquement,
autrement dit ce sur quoi nous souhaitons que portent les discussions grammaticales.
Il est important d'avoir ainsi anticipé les questions des élèves afin d'être le mieux
outillée possible pour y répondre. Bien que nous ayons eu l'habitude de le faire avant
d'amorcer notre recherche, la préparation de notre intervention nous a
particulièrement permis d'approfondir cet aspect.
Le fait d'inviter les élèves à poser des questions phrase par phrase est aussi une
pratique gagnante pour deux raisons: il est plus facile pour les apprenants de se
rappeler des mots sur lesquels ils doutent et de maintenir un degré soutenu d'attention.
Pour maintenir la motivation des élèves à relever le défi «0 faute», nous jugeons
qu'une correction dans des délais rapides s'impose. Le niveau d'intérêt des élèves est
alors maintenu. Mentionnons aussi que la façon de corriger les dictées peut avoir un
impact sur l'efficacité de cette approche. Nous avons opté pour une correction qui se
limitait à des notes dans les marges seulement plutôt que de souligner ou d'encercler
les erreurs sur les copies des élèves. Par exemple, l'élève pouvait retrouver sur sa
copie, dans la marge, ON pour signifier qu'il avait commis une erreur dans l'accord
du groupe nominal, mais cette dernière n'était pas directement soulignée sur sa copie.
Les élèves devaient se corriger ensuite, ce qui impliquait qu'ils devaient identifier
l'erreur: donc le raisonnement se poursuivait. Parfois, ils «ajoutaient» une erreur
plutôt que de corriger l'erreur relevée. C'était donc l'occasion de revoir deux cas
plutôt qu'un, et donc de poursuivre le travail sur l'orthographe.
D'ailleurs, nous avons constaté à quel point il était efficace d'effectuer des liens
régulièrement entre notre enseignement et les dictées 0 faute. Cela nous apparaît une
façon de favoriser le transfert entre les dictées 0 faute et les situations authentiques
d'écriture. Nous n'avons pas pu développer cet aspect dans le mémoire, mais il s'agit
d'une perspective de prolongement de recherche intéressant.
longueur des dictées (bien qu'elles soient déjà courtes) pour éviter d'être pressée par
le temps, car plus les élèves vivent l'exercice régulièrement, plus ils posent de
questions et ce questionnement nécessite du temps. Nous croyons donc qu'il est
préférable de miser sur des dictées plus courtes comportant des difficultés d'ordre
grammatical ciblées plutôt que des dictées plus longues à la fin desquelles les élèves
sont moins attentifs. Outre la longueur des textes choisis, comme nous l'avons
mentionné précédemment, l'utilisation du métalangage grammatical au quotidien,
sans sous-estimer les capacités des élèves, consiste à créer un contexte propice à
l'intégration de ce métalangage chez les apprenants.
5.6 La conclusion
Notre deuxième objectif était de décrire l'évolution des discussions dans le cadre
des dictées 0 faute. Pour ce faire, nous avions ciblé quatre questions spécifiques:
comment évolue le doute orthographique, l'attention, la participation et l'utilisation
du métalangage grammatical au fil des séances de dictées 0 faute? Notre analyse
s'est donc articulée autour de ces quatre axes.
Ensuite, comme indice plus précis du niveau de l'attention, nous avons considéré
le rapport entre les mots discutés et les erreurs des élèves. Nous avons constaté qu'ils
font de moins en moins d'erreurs sur les mots discutés: lors de la première dictée,
17,24% des élèves ne font aucune erreur sur les mots discutés et c'est le cas de
40,74% lors de la del11ière dictée, ce qui démontre le développement d'un plus grand
niveau d'attention au fil de l'intervention.
Nous avons également présenté en lien avec notre intervention des pratiques
gagnantes et des pratiques à développer. Le choix d'une dictée relativement courte
qui respecte ce que l'on souhaite travailler avec les élèves et pour laquelle
l'enseignant s'est préparé en anticipant les questions nous apparaît comme une
pratique à préconiser pour maximiser l'efficacité de la dictée 0 faute.
Pour conclure ce chapitre qui présentait les résultats liés à la dictée 0 faute, nous
avons jugé pertinent d'ajouter les commentaires des élèves qui ont vécu l'intervention.
Dans la problématique, nous avons montré que les élèves québécois et français
éprouvaient des difficultés à maîtriser l'orthographe. Dans l'optique de rendre l'élève
actif dans le développement de sa compétence orthographique, nous avons présenté
des pratiques innovantes afin de travailler l'orthographe en salle de classe dont les
ateliers de négociation graphique (ANG), les commentaires métagraphiques, la dictée
du jour et la dictée 0 faute. Cette dernière a retenu notre attention puisqu'elle permet
de faire travailler l'ensemble du groupe sur des problèmes orthographiques. L'élève
218
est appelé à verbaliser son raisonnement grammatical et à interagir avec ses paIrs
ainsi qu'avec l'enseignant afin de trouver la graphie adéquate. Les constats des
chercheurs et des enseignants qui l'expérimentent sont positifs, mais nous déplorions
le fait qu'il n'existe aucune donnée sur l'effet de ces pratiques sur la compétence
orthographique des élèves. L'évolution du doute dans le raisonnement n'est pas
documentée rigoureusement non plus. C'est pourquoi nous avons décidé de vérifier si
les observations qui émanent de l'expérience des enseignants, dont la nôtre,
s'avéraient justes.
Nos lectures nous ont amenée à nous poser la question suivante: est-ce que les
élèves s'améliorent en orthographe après avoir vécu la dictée 0 faute sur une base
régulière? L'enquête de Manesse et Cogis (2007) a mis en lumière que l'orthographe
grammaticale constituait le défi à relever. Nous avons montré que l'enseignement de
l'orthographe impliquait bon nombre de savoirs complexes dont l'acquisition du
pluriel et des marques silencieuses de geme, de nombre et de personnes. Aussi, nous
219
avons brossé un portrait des pratiques qui nous paraissaient prometteuses, mais qui
sont difficilement implantées en classe en raison du manque de recherches sur leur
efficacité. Ces constats nous ont amenée à formuler nos deux objectifs de recherche.
Le premier objectif consistait à vérifier les compétences individuelles en orthographe
avant et après l'intervention en orthographe grammaticale. Le deuxième objectif était
de décrire l'évolution des discussions dans le cadre de la dictée 0 faute.
Nous avons ensuite présenté le cadre méthodologique que nous avons mis en
place. Notre recherche a été menée auprès d'un groupe expérimental et d'un groupe
témoin de troisième secondaire. Ce dernier a été constitué à partir d'un bassin de
deux classes naturelles et a été apparié au groupe expérimental. Les élèves du groupe
expérimental ont vécu la dictée 0 faute sur une base régulière alors que le groupe
témoin a eu un enseignement traditionnel des mêmes contenus grammaticaux et a fait
les mêmes dictées, mais de façon traditionnelle (c'est-à-dire sans questions permises
ni raisonnements). Nous avons voulu ainsi vérifier l'effet de la dictée 0 faute sur la
compétence en orthographe des élèves avant et après l'intervention.
Pour notre premier objectif, nous nous sommes servie d'une dictée évaluative, le
texte «Les arbres», de Fénelon (en guise de prétest et de post-test) qui nous a permis
de recueillir des données quantitatives: le nombre de mots bien écrits (sur 83), le
nombre d'erreurs d'accord des déterminants, noms et adjectifs et le nombre d'erreurs
d'accord sujet-verbe. Nous avons également utilisé les données disponibles pour
effectuer une comparaison entre nos élèves et ceux des élèves français de l'enquête de
Manesse et Cogis (2007). En ce qui concerne le deuxième objectif, nous nous
sommes tournée vers un type de recherche principalement descriptif. Les données
recueillies sont les verbatims de trois dictées 0 faute qui ont été filmées. Ces
dernières ont été analysées en fonction de nos quatre questions spécifiques en lien
avec notre deuxième objectif: comment évoluent le doute orthographique, le niveau
d'attention et la participation des élèves? Corrunent évolue l'utilisation du
220
Les résultats sont encourageants et nous amènent à croire que la dictée 0 faute est
une approche efficace à adopter en classe de français pour travailler l'orthographe.
Les résultats obtenus au post-test en ce qui concerne le nombre total de mots bien
écrits (sur 83 mots) nous ont permis de confirmer notre hypothèse de départ à l'effet
que la dictée 0 faute permettait d'améliorer la compétence en orthographe et, de
surcroît, de façon significative.
Au post-test, les élèves ont commis quatre fois moins d'erreurs environ qu'au
prétest dans l'accord en genre et en nombre des déterminants, noms et adjectifs. La
progression était marquée pour presque tous les individus du groupe expérimental. À
la suite de l'intervention, le nombre d'erreurs d'accord sujet-verbe était trois fois
moins élevé qu'au prétest dans le groupe expérimental. Du côté du groupe témoin,
les résultats au prétest et au post-test sont demeurés sensiblement les mêmes en ce qui
concerne la maîtrise des accords en genre et en nombre des déterminants, noms et
adjectifs. En ce qui concerne les accords sujet-verbe, les élèves du groupe témoin ont
réussi à faire deux fois moins d'erreurs au post-test. Notons cependant que quelques
élèves ont régressé au post-test alors qu'aucun élève n'a régressé dans le groupe
expérimental. Nous pouvons affirmer que les progrès ont été importants dans les
221
deux groupes pour cette variable, mais une fois encore, ils sont plus marqués dans le
groupe expérimental qui devient plus homogène après l'intervention.
Dans un deuxième temps, nous souhaitions mettre les résultats de nos élèves en
parallèle avec ceux obtenus dans le cadre de l'enquête française. La comparaison
avec cette dernière a été possible tantôt avec les élèves français issus des ZEP, soit
dans un milieu défavorisé comparable à celui dont sont issus nos élèves, tantôt avec
les élèves des Non-ZEP, selon les données disponibles. Nous avons pu constater
qu'au prétest, nos élèves étaient plus faibles que ceux de l'enquête française, même
les plus jeunes (CMl) et qu'au post-test, leurs résultats étaient supérieurs à ceux du
même âge, ce qui nous amène à penser qu'ils ont en quelque sorte rejoint les élèves
«hors ZEP». Cette comparaison nous a également confirmé que le défi de taille à
relever était celui que présente l'enseignement de l'orthographe grammaticale.
Pour affiner l'analyse, nous avons examiné comme deuxième indice l'évolution
du niveau de l'attention en rapport avec les mots discutés et le choix de la graphie
adéquate. Le nombre d'erreurs sur les mots discutés diminuait, preuve que le niveau
d'attention augmentait au fil de l'intervention même si la majorité des élèves faisaient
peu d'erreurs sur les mots discutés dès la première dictée 0 faute.
«les moments où les enseignants - éventuellement les élèves - n'ont pas utilisé tel
tenne de métalangage alors qu'il était disponible et pertinent pour l'objectif
didactique visé». Certes, nous avons examiné la fréquence d'utilisation des tennes du
métalangage grammatical, mais la portée de ces données demeure limitée: il serait
intéressant de se pencher sur les contextes dans lesquels ces termes sont utilisés. Les
verbatims constituent une mine d'or d'infonnations sur l'état des connaissances des
élèves et il serait intéressant d'approfondir l'analyse de leur contenu.
Nous souhaitions avoir une incidence sur notre milieu scolaire et montrer,
résultats à l'appui, que la dictée 0 faute est une approche efficace pour travailler
l'orthographe en classe surtout si un climat propice à l'apprentissage est créé. Nous
avons montré que la dictée 0 faute pennettait de développer la compétence
orthographique, car les élèves sont capables d'articuler des raisonnements en utilisant
le métalangage grammatical, mais la grande majorité d'entre eux ne le font pas
spontanément. Les pratiques prometteuses en enseignement de l'orthographe que
nous avons présentées, plus particulièrement la dictée 0 faute, peuvent permettre de
développer chez les élèves leur habileté à raisonner et, surtout, le réflexe de se
questionner.
Enfin, nous espérons que d'autres recherches sur une population plus grande
permettront de généraliser l'effet positif de ce type d'intervention et, éventuellement,
de vérifier le transfert des connaissances acquises dans le cadre des dictées 0 faute
dans un contexte authentique de production de textes. Les élèves eux-mêmes ont pris
conscience de leurs progrès. Le commentaire de cette élève lorsqu'elle a vécu une
dictée évaluative traditionnelle en fait foi: «ça sert à rien une dictée comme ça, on
apprend même pas. C'est pas comme quand on avait le droit de poser des questions,
là au moins on apprend quelque chose!})
RÉFÉRENCES
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pédagogiques» (dirigée par Michel Develay). France: ESF éditeur, 117 p.
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état d'une discipline. Coll. «Perspectives didactiques». Paris: Nathan pédagogie, 276 p.
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Poitou-Charentes, site des Deux-Sèvres à Niort, le 10/05/2000 dans le cadre des
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enseignement de la grammaire, Chartrand, Suzanne (dir. publ.). Montréal: Les
Éditions Logiques, p 359-393.
Q",
d'arguments la soutiennent ou l'un de la plupart des arguments soutiennent défend a l'aide d'arguments qui défend al'aide d'arguments qui ('t),
1. Pertinence, clarté
ceux-ci est contradictoire celle position, mais aucun n'est soutiennent tous celle position soutiennent tous cette position <
~
=
contradictoire
et précision
ET ET ET
(20%)
Fonde au moins une partie de son Fonde ses arguments sur une
Fonde la plupart de ses arguments sur
ET
Fonde ses arguments sur une
....
~
.....
argumentation sur une information une information juste, mais les information traitée généralement avec information tra~ée avec rigueur et les
o
:::::1
juste, mais le fa~ sans la développer développe sommairement rigueur et les développe de façon développe de façon approfondie et Q",
approfondie personnalisée ('t)
=: ------------------ ----_ ........ -------_. __ ._---_ ... _- ---------- .... _-------------------- -----------_._--_ .. ------------_ ... _. - _. - - -- -- - ----- - - - --- - - - - - - -----
0
;'
:p Cll Présente des arguments sans Construit son argumentation'! selon une Conslru~ son argumentation2 selon une Construit son argumentation'! selon une
.:s
=:
ë
ro organisation stratégique et divise son stratégie évidente et structure son texle stratégie efficace et structure stratégie particuliérement efficace et r'>
o
cv iË texle sans faire de liens ou en de façon généralement cohérente adéquatement son texte malgré de structure son texte de façon cohérente
E ~.~
c::: ro établissant des liens inappropriés rares maladresses qui n'affectent pas la 8
"'0
...='
. - -0
ë g
Cl
'"
::...
2. Organisation
stratégique
Cll u
E Cll
ET ET
cohérence
ET ET
....
('t),
('t)
Cll '"
cv "Cll-o
" :j :::::1
(20 %) c::: c::: Adopte un point de vue3 , mais tient peu Adopte et maintient un point de vue3 et Adopte et maintient un point de vue 3 et
Adopte et maintient un point de vue3, r'>
"cv
u
Cll""
~~
compte du destinataire tient compte du destinataire al'aide de donne un ton caractéristique a son texte
utilise divers moyens pour susciter
('t)
~.
c: moyens limités et utilise divers moyens pour susciter
l'intérêt du destinataire
...cv
·cv
-Cll
c.
E l'intérêt du destinataire et pour le
('t),
..,.....
r'>
~
0
U
-------_ .. --------
0
u maintenir tout au long de son texte
---_._._._.------------------------ -----------_ .. -- .. --.-------------- --------------_ ... ----------------- -----------------------_ ... - .. _--- ..,
('t)
Reprend l'information en utilisant Reprend l'information en s'appuyant Reprend l'information au moyen de Reprend l'information au moyen d'une
surtout la répétition ou des substituts essentiellement sur l'utilisalion de substituts variés et généralement grande variété de substituts elle fait de
souvent imprécis et inappropriés pronoms et le fait la plupart du temps appropriés façon appropriée
de façon appropriée
3.. Conlinu~é et
progression
ET ET ET ET
Ajoute de l'information, mais établit peu Fa~ généralement progresser Fait progresser l'argumentation 2 en Fa~ progresser efficacement
(10%)
de liens appropriés l'argumentation 2 en ajoutant de ajoutant de Ilnformation et en l'argumentation 2 en ajoutant de
l'information et en établissant des liens établissant des liens appropriés à l'information el en établissant des liens
généralement appropriés, malgré la l'intérieur des phrases et entre elles appropriés, étroils et variés à l'intérieur
présence de quelques ruptures des phrases et entre elles
1. Position renvoie à thèse lelle que définie dans le progriOTlme (p. 49) : « 1...) l'énoncé qui expose ce vers quoi lend le texte, la conclusion vers laquelle le lexie méne le destinataire. »
2. kgumen/a/ion désigne plus que l'ensemble des arguments, c'est-a-dire qu'elle cOlMe le texle entier. delïntroduction à la conclusion. N
3. Poinl de we n'a pas ici le sens couraonmenl attribué à opinion, mais correspond plutôl à la façon qu'a l'auteur de se présenter, d'indiquer comment il se situe par rapport il ses propos, de marquer le rapport quïl veut établir W
avec son destinataire et de préciser l'mage qu'il veut donner de ce dernier.
+>.
;>
GRILLE D'ÉVALDATION DE LA CO~IPÉTENCE À ÉCRIRE - TEXTE ARGUMENTATIF (Su iJe) =
=
~
FRANÇAIS, LANGUE D'ENSEIGNEMENT - 5" SECONDAIRE (2003 à 2007) ~
~
~
NIVEAU DE COMPÉTENCE C"1
:!.
E D C B A ~
Compélence insuffisante Compétence acceplable Compétence assurée Compétence marquée Q..
~,
à la fin du secondaire à la fin du secondaire à la fin du secondaire à la fin du secondaire -<
~
Utilise des mots ou des expressions Utilise des mots ainsi que des Ulilise des mols ainsi que des Utilise des mots ainsi que des
....=
~
4. Utilisation des dont plusieurs sont imprécis, incorrects expressions généralement précis, expressions précis, corrects et expressions précis, corrects et
o·
mots ou appartiennent il un registre de
langue familier
corrects et appartenant à un registre
de langue standard et parfois fa milier
appartenant à un registre de langue
standard, il l'exception de rares
appartenant à un registre de langue
standard, à l'exception de rares =
Q..
(5%) erreurs dans les termes courants erreurs principalement dans les termes ~
(1)
::l peu courants ~
c- .............. --- ë
Q)
.... _.... -_ .. _.... - -_ .. - --_ .. --- -- -- -- -- -----_._ .. --_ .. --- -- --- ---- -- -.- -_ .... .. ---_ .. -_ .. -_ ....... -_ ...... -- --_ .. -- ----- _._---------- .. -..... _--_._-------- f")
t; o
'"
V>
lE Construit et ponctue ses phrases dont Construit et ponctue ses phrases de Construit et ponctue ses phrases de Construit et pondue correctement ses S
::l ::J
Cl 5. Construction (/) .= Q)
plusieurs sont boiteuses ou façon généralement correcte, mais façon généralement correcle, plusieurs phrases, plusieurs présentant une "0
s:::: des phrases et .c- '0
-c c0
'"
comportent des erreurs majeures certaines sont boiteuses ou présentant une certaine complexité, et certaine complexité, et ses erreurs ....
~,
~
ponctuation
(1)
"'C
0
Co) (25%)
Q) U
E
Q)
""::J
~'O
Q)
V>
comportent des erreurs majeures ses erreurs sont surtout mineures sonl rares el mineures
=
f")
~
~.
::l ~~ (15 à 18 erreurs 4) (10 à 14 erreurs 4) (5 à 9 erreursl) (0 à 4 erreurs 4)
~,
"'C
..... ._---------- .... - c '"
2:; --------------------------------- _._-_ .. --.----.------------------- -------------------------------- . .... ------------------------------ f")
Co)
(1)
C.
.Q)
CI.
E
Orthographie son texte, mais fait Orthographie son texte de façon Orthographie son texte de façon Orthographie correctement son texte .,:!.
~
CIl
0 plusieurs erreurs récurrentes liées à la généralement correcte, mais fait généralement correcte, mais fait sans faire d'erreurs ou en en faisant
ü
(1)
conjugaison el à des accords de base certaines erreurs ponctuelles ou quelques erreurs donl peu portent sur trés peu
0::: 6. Orthographe ou portant sur la graphie des mots récurrentes portant sur la conjugaison la conjugaison et des accords de base
(20 %) et des accords de base ou sur la ou sur la graphie des mots
graphie des mots
4. Ces nombres d'erreurs sont présentés corrrne des points de repère pour l'évauation formelle d'un texte d'environ 500 mots, rédigé en un temps limité et avec des ressources restreintes. L'évaluation de ces critères devra~ faire
appel, carme celle des autres critères, au jugement professionnel. Elle ne devra~ pas se réduire au seul comptage des erreurs, mais prendre en compte leur nature, leur récurrence, la complexité des phrases, la longueur du texte, etc.
IV
W
VI
ANNEXEB
Chers parents,
Durant l'année, entre septembre et janvier, les élèves seront appelés à rédiger neuf
dictées et j'aimerais savoir si vous acceptiez que quatre séances soient filmées afin que je
puisse noter les interventions faites par les élèves du groupe. Prenez note que les bandes
vidéo ne serviront qu'à des fins de recherche et qu'elles seront détruites à la fin de mon projet
de mémoire. Je vous demande de compléter le coupon ci-joint et de le signer. Votre enfant
devra me le rapporter au plus tard à la fin de la semaine.
Merci de votre collaboration. Si vous avez des questions, n'hésitez surtout pas à
communiquer avec moi soit par téléphone ou par courriel Il me fera plaisir de m'entretenir
avec vous. Vous pouvez également contacter Madame Marie Nadeau, professeure au
département de linguistique et de didactique des langues et directrice du mémoire par
courriel: *****
Kathy Wilkinson Monsieur Luc Noël
J'accepte que
(nom de l'élève) participe à cette intervention dans le cadre du cours de français afin
de documenter une approche en enseignement de l'orthographe et que quatre séances
d'emegistrement soient filmées pour l'usage exclusif de ce projet de recherche.
Date:
Commentaire (s) :
CONSENTEMENT DE L'ÉLÈVE
Ton nom:
- - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - -
Groupe: _
Signature:
Date:
Merci de ta collaboration.
ANNEXEe
Chers parents,
La participation des élèves consiste à passer deux dictées, dans le cadre de leur
cours de français, une première en septembre et une deuxième en janvier. Prenez
note que cet exercice fait partie du cours de français et respecte les objectifs du
programme, donc que tous les élèves devront faire l'exercice. Votre consentement est
cependant nécessaire pour que les dictées écrites par les jeunes puissent servir de
données dans ma recherche.
Merci de votre collaboration. Si vous avez des questions, n'hésitez surtout pas à
communiquer avec moi soit par téléphone (514) ***-**** ou encore par courriel à
l'adresse suivante: **** * Il me fera plaisir de m'entretenir avec vous. Vous pouvez
également contacter Madame Marie Nadeau, professeure au département de
linguistique et de didactique des langues et directrice du mémoire au numéro suivant:
(514) ** *-****et par courriel : **** *.
Date:
Commentaire (s) :
CONSENTEMENT DE L'ÉLÈVE
Ton nom:
- - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - -
Groupe: _
Signature:
Date:
Merci de ta collaboration.
ANNEXED
· Lire avec les élèves la fiche d'identification en apportant les précisions nécessaires,
notamment par rapport à la date de naissance et à la langue parlée à la maison. Il est
important d'insister sur l'écriture de l'année de naissance adéquate (ils ne sont pas
nés en 2007!) et de mentionner aux élèves d'écrire «Aucune» à la question sur les
autres langues parlées à la maison s'ils ne parlent qu'une seule langue en milieu
fan1ilial.
· Lire avec les élèves les consignes sur la feuille et répondre à leurs questions s'il y a
lieu.
· Mentionner aux élèves qu'ils peuvent écrire à la mine ou à l'encre, mais que leur
calligraphie doit être lisible.
· Lire le texte de la dictée en prenant des pauses afin de donner le temps aux élèves
d'écrire chacune des phrases.
· Une fois que les élèves ont terminé d'écrire la dictée, la relire une dernière fois.
246
· Mentionner aux élèves qu'il n'est pas possible de répondre aux questions sur la
dictée, mais qu'un retour sera fait au moment opportun (soit au moment du post-test)
sur la dictée.
ANNEXEE
PRÉTEST ET POST-TEST
248
Prétest
IDENTIFICATION
Ton prénom: _
Ta date de naissance:
Ta langue maternelle: _
o oui o non
est très appréciée. © Note: Ces informations sont utiles pour analyser les résultats.
Sois assuré (e) qu'ils demeurent confidentiels et que ton nom n'apparaîtra nulle part.
249
Consignes
• Un court texte te sera lu une première fois pour que tu prennes connaissance
de la dictée.
Titre: - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - -
ANNEXEF
TEXTE DE FÉNELON
Les arbres
Les arbres s'enfoncent dans la terre par leurs racmes comme leurs branches
s'élèvent vers le ciel. Leurs racines les défendent contre les vents et vont chercher,
comme par de petits tuyaux souterrains, tous les sucs destinés à la nourriture de leur
tige. La tige elle-même se revêt d'une dure écorce qui met le bois tendre à l'abri des
injures de l'air. Les branches distribuent en divers canaux la sève que les racines
avaient réunie dans le tronc. 13
/ Calman / Lévy.
252
Difficultés
d'ordre grammatical
(tous les)
3- leurs racines X 2
3 déterminants indéfinis
4- leurs branches
odéterminant numéral
5- leur tige
4 déterminants
6- la tige
possessifs (leur)
7- les branches
odéterminant
8- les racines
démonstratif
Total: 9
1 nom sans déterminant
(canaux)
Total: 22
253
2- les vents
Total: 2
3- de (petits) tuyaux
5- la noulTiture
7- le bois (tendre)
8- l'abri
9- des injures
10-I'air
12-la sève
13-le tronc
Total: 13
Total d'adjectifs: 5
2- (tuyaux) soutelTains
254
3- divers (canaux)
Aucun
Verbes conjugués
1- (s') enfoncent
Total: 8
2- (s') élèvent
3- (les) défendent
Verbes au pluriel:
4- vont (chercher)
Total: 6
5- (se) revêt
6- met
8- avaient (réunie)
DICTÉES 0 FAUTE
G.7 Dictée 7 : Des parents veulent appeler leur bébé «@» 263
257
Sa perfonnance devrait être validée par la société des records d'ici trois semaines.
Épuisé, cet horrune, grand sportif, a livré des explications aux journalistes attentifs.
Il leur a confié qu'en plus de la méditation, il courait plusieurs kilomètres par jour,
soulevait 250 kilos de fonte et se réveillait tôt tous les matins.
Source: Adaptation libre de Kathy Wilkinson à partir d'un article publié sur le site:
http://info.branchez-vous.comJlnso1ite
260
Un jour, les amis du marié devaient s'assurer que les deux familles n'apparaissent
pas sur les mêmes photos, car elles étaient ennemies! Il s'agissait d'un joueur de
poker qui avait eu l'idée saugrenue de proposer sa jolie épouse à son adversaire alors
qu'il perdait la partie. Comme elle a trouvé le gagnant à son goût, une nouvelle union
a été annoncée. Leurs parents, étonnés, ne les comprenaient pas et refusaient cette
situation. Le mariage serait-il un jeu de hasard?
Source: Adaptation libre de Kathy Wilkinson à partir de certaines informations contenues sur le
site http://feminin.over-blog.com
261
Des photos explicites sur lesquelles figurent les deux chèvres sacrifiées ont été
publiées dans une foule de quotidiens. Les journalistes de la presse locale soulignent
que les sacrifices animaliers sont courants au Népal, région hindoue, où ils sont
pratiqués dans le but d'attirer la chance aux croyants.
Un vieux souvenir
Il Y a dix ans, un incident bizarre est arrivé dans notre rue habituellement
tranquille. C'était l'été, toute notre famille a été ébranlée. Les branches des arbres
demeuraient immobiles, le soleil brûlant et les oiseaux chantaient.
Soudain, j'ai entendu une violente explosion, suivie d'un bruit de verre brisé. Ma
mère, angoissée, est sottie de la maison pour voir ce qui se passait, puis elle est
revenue quelques minutes plus tard, ébahie, et les péripéties qu'elle nous a racontées
nous semblaient totalement invraisemblables!
C'était un accident de voiture, mais quand les policiers sont arrivés, les deux
véhicules accidentés étaient vides. Sur le siège avant d'une des voitures, se trouvait
ce billet qui disait: «Ce n'est pas un véritable accident, c'est juste pour rire.»
Source: Adaptation de Kathy Wilkinson de la dictée «Un vieux souvenir», parue dans:
Elia, Maurice. 1997. Points à la ligne 200 dictées inédites CCOMO (Centre de développement
de matériel didactique Collège de Maisonneuve), Montréal, p. 93.
263
Source: Adaptation libre de Kathy Wilkinson à partir d'un article publié sur le site:
http://www.chine-informations.com
264
Je suis nerveuse. Le ronronnement de l'avion m'a fait fenner les yeux quelques
minutes, mais je les ai ouverts rapidement. Une annonce faite par le pilote m'a
réveillée. Depuis les émotions liées au départ, Marco demeure attentif à mes
préoccupations. Je me sentais mal au décollage, mais plus nous approchons de notre
destination, moins je suis troublée par mes petits problèmes. Calmement, mon copain
me répète que ses parents sont toujours très accueillants envers leurs visiteurs et qu'ils
m'adopteront: «Ils ont reçu les photos: tu leur plais déjà. Es-tu inquiète? » Quelle
question! Je les rencontre pour la première fois. Mes mains sont glaciales et
tellement humides! Doucement, je décide de refermer mes yeux afin que mon
amoureux ne connaisse pas l'objet de mes sombres pensées.
Source: Adaptation libre de la dictée «Malaise dans l'avion» parue dans: Elia, Maurice. ]997.
Points à la ligne 200 dictées inédites CCDMD (Centre de développement de matériel didactique
Collège de Maisonneuve, Montréal, 412 p.
265
Quelle malchance!
Anéantie, elle justifie les poursuites qu'elle a engagées comme une violation à sa
vie privée. Elle croit que cette loterie recourt à des publicités mensongères qui
constituent un «chantage émotiormel». Ces dernières soulignent les regrets infinis que
certains pourraient éprouver si leurs voisins gagnent. Ses arguments n'ont cependant
pas convaincu les juges, sceptiques!
Source: Adaptation libre de Kathy Wilkinson à partir des informations contenues sur le
site :http://riigolax.over-blog.net
ANNEXEH
RÉSULTATS INDIVIDUELS
267
Nbre d'erreurs
d'accord
GROUPE Nbre de mots bien Nbre d'erreurs
EXPÉRIMENTAL écrits (sur 83) Dét-nom-adj d'accord S-V
22 72 77 3 3 2 0
23 60 82 4 0 1 0
24 70 80 2 0 1 0
25 75 78 2 2 0 0
26 59 73 7 2 2 0
27 56 65 6 2 6 1
28 66 75 5 2 2 0
29 73 78 5 2 0 0
30 75 81 6 1 0 0
Moyenne 70,2 78,27 4,17 1,23 1,57 0,4
Écart-type 5,80 3,98 1,76 1,01 1,92 1,22
269
Nbre d'erreurs
GROUPE d'accord
Nbre de mots bien Nbre d'erreurs
TÉMOIN écrits (sur 83) Dét-nom-adj d'accord S-V
Élève Prétest Post-test Prétest Post-test Prétest Post-test
Tl 79 79 3 3 1 0
T2 76 77 2 3 1 0
T3 67 68 4 8 0 0
T4 74 77 3 3 2 0
T5 70 72 6 5 4 2
T6 71 68 6 6 4 4
T7 65 66 3 4 6 5
T8 66 67 9 7 2 3
T9 65 65 3 7 2 1
TI0 67 68 3 3 3 0
TIl 73 77 3 1 0 1
T12 71 76 5 5 0 0
T13 73 69 4 5 2 1
T14 73 74 7 4 0 0
Il5 58 62 10 9 5 1
T16 76 78 2 4 0 0
T17 76 76 4 3 1 0
T18 71 74 5 3 0 0
T19 70 77 4 4 4 0
T20 77 78 4 3 4 0
T21 64 68 6 7 3 2
T22 68 70 4 4 4 1
T23 74 69 3 7 1 0
270
T24 71 76 6 3 1 1
T25 76 79 4 1 0 0
T26 78 79 2 2 0 0
T27 67 73 7 4 1 0
Moyenne 70,96 72,67 4,52 4,37 1,87 0,81
Écart-type 5,01 5,04 2,05 2,06 1,82 1,33