Monceaux. Histoire Littéraire de L'afrique Chrétienne Depuis Les Origines Jusqu'à L'invasion Arabe (1901) - T. VI - VII.
Monceaux. Histoire Littéraire de L'afrique Chrétienne Depuis Les Origines Jusqu'à L'invasion Arabe (1901) - T. VI - VII.
Monceaux. Histoire Littéraire de L'afrique Chrétienne Depuis Les Origines Jusqu'à L'invasion Arabe (1901) - T. VI - VII.
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DESCRIPTION DE L'AFRIQUE DU NORD
ENTREPRISE PAR ORDRE DE
HISTOIRE LITTÉRAIRE
DE
L'AFRIQUE CHRÉTIENNE
DEPUIS LES ORIGINES JlSQl'A L'INVASION ARABE
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HISTOIRE LITTÉRAIRE
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DE I
-
L'AFRIQUE CHRÉTIENNE
DEPUIS LES OltlGllS JUSQU'A l'IXVASIOX ARABE
PAR
PAUL MONCEAUX
MEMBRE DE l'iNSTITUT
PROFESSKUR AU COLLÈGE DE FRANCE
ET A l'École des hautes-études
TOME SIXIEME
LITTÉRATURE DONATISTE
AU TEMPS DE SAINT AUGUSTIN
A/
PARIS \^ y^'S'
ÉDITIONS ERNEST LERO-
28, RUE BONAPARTE (vi«)
1922
LIVRE DIXIÈME
LA LITTERATURE DONATISTE
AU TEMPS DE SAINT AUGUSTIN
CHAPITRE I
PETILIANUS DE CONSTANTIME
nier choc entre les deux Eglises s'il a été vaincu, il ne l'a pas :
1) Voyez plus loin le chapitre sur non ignora\i, ut sccundum ipsum (Pe-
Priiuianiis de (JarUiagc (cliapilrc III). tilianum) loquar, itleu autem non igno-
2) En principe, l'eliliauus n'eiil ja- ra\i (plia et Afer sum et aetate pacne
mais d'autorité que sur son diocèse «le jam senex, salteni pueri... » (Augustin,
(^ouslanliiic. Il avait cifUcicllcinent pour Contra litteras Petiliuni, III, 2(i, 'M. —
cliels, min scideim.'nl le primai <le (.r. 111, 25, 211).
grae (Augustin, Epist. 88 Possidius, ; 208; II, 2-12, etc.; 111, 22; 30; 75; 89, etc.
liulic. opcr. Auguslini, 8 ; Collât. tJar- 6) Augustin, Contra litteras Petiliani, I,
lltay., I, 14 148; 157; 111, 258).
;
1: 11,23, 55; 98. 226 ; 101, 232.
3) n Si ego proplerea reus sum (]uiu 7) Ibid., m, 16, 19.
PETILIANUS DE CONSTANTINE 5
ne t'u donc pas appris qu'on n'est pas admis à revendication sur
les points omis- ? ». Augustin ne s'est pas fait faute de railler,
chez l'évêque schismatique de Gonstantine, cette persistance
des goûts, des habitudes et des procédés du barreau mais, ;
en évèqut! une bourde de copiste rsaris 53, 5!» ; IV, 10, 12.
chercher si loin, on rendrait le texte 2) Conlra lilleras J'etilinni, 1, 1 ; 111,
correct en lisant scrulula au lieu de 1 ; Ad Cdtliolicos Epislula conlra Dona-
scrutalus (conlusioii l'ré(|iicnle de \'u et tisUii, Contra Crei^conium, 1, 1.
1 ;
rinlerligne). En tout cas, le récit d'Au- 20H II, 2-12; III, 22; 30 75 89 U3
; ; ; ;
197 ; Augustin, Contra litteras PelUiani, Augustin, Epist. 43, 6, 17 Conlra Cres- ;
III, 57, 69 ^'Contra Cresconium, III, 27) conium, III, 29, 33 et suiv.
111, ^^S, 44 ;
Collai. Curlhuij., 1, (].">
;
138- 3) Voyez plus liaut, loiiic IV, p. 135
139. et suiv.
PETILIANUS DE CONSTANTINE 9
2) De uiilco Ijaptisnio, 16, 2'J. litteras Peliliani, 1,1 ctsuiw; 11,1 clsiii\.
iO LITTÉRATURE DONATISTE
tiatives, qui imagina les obstructions, para les coups, et, avec
VI 2
14 LITTÉRATURE DONATISTE
II
et, pour chaque passage, j'y ai joint sous mon nom ma réponse » •'.
"^
Ce pamphlet est appelé quelquefois par Augustin littcrae
ou scrij)ta'^ mais presque toujours epistula-'. Il était adressé
,
4) Ibid., H, 1. 21 ;
2.-), 27 ; II, 1, 1-2 ; 92, 207 ; 99, 228;
6) Relract., II, 51. 105, 241 ; 108, 247 ; III, 42, 51 ; 46, 56 ;
6) Voyez notre restitution do l'on- 50, <>].; 52, 04; Hetrart., II, 51.
vragc, tome V, Appendice I. 10) Cnnlrn liltcrus Pctiliaiii, I, 1 ; 11,
conos.
Indiqué déjà par ce titre, le cadre de l'ouvrage se dessine
nettement dans l'en-tête, dont voici la traduction textuelle :
coupable, ces gens obscènes, plus impurs que toutes les ordures,
ces gens qu'une purification à rebours souille dans leur eau pré-
tendue baptismale '. » Cette bordée d'injures n'est qu'une
entrée en matière. Suit un exposé remarquable de la théorie
donatiste du baptême. L'auteur la résume en quelques formules
énergiques, qui devinrent célèbres en Afrique, et qui donnèrent
lieu a d'interminables discussions « On doit considérer, dit-il, :
vective.
La discussion doctrinale ne doit guère nous arrêter ici, parce
que fond n'appartient pas à Petilianus. En ces matières de
le
doctrine, l'évèque ne pouvait que suivre les traditions et déve-
lopper les principes de soii Eglise principes immuables depuis :
eh bien discutons selon la Loi sur la très sainte Loi... Que dit-
!
reux ceux qui sont pauvres en esprit, parce que le royaume des
cieux leur appartient ^ » —
Vous, dans votre ardeur malfai-
sante à persécuter, vous exhalez le fol amour des richesses. —
« Heureux ceux qui sont doux, parce qu'ils posséderont la
terre. » —
Donc, vous qui n'êtes pas doux, vous avez égale-
ment perdu la terre et le ciel. « Heureux ceux qui pleurent, —
parce qu'ils seront consolés. » Vous, nos bourreaux, vous —
faites pleurer, au lieu de pleurer. « Heureux ceux qui ont —
faim et soif de justice, parce qu'ils seront rassasiés. » —
1) Petilianus, Episliila ad presbytères 2) Petilianus, Epistula ad prcshytcros
et diaconos, 3 ot suiv. ; 21 et suiv. ; 28 et diaconos, 37.
et suiv. ;
4-1 et suiv. . 3) Matthieu, Evang., 5, 3 et suiv.
24 LITTÉRATURE DONATISTE
adressez une prière, cela ne vous sert de rien. Vos prières sans
efficacité sont rendues nulles par votre conscience ensanglantée :
ce sont ses reliques, pour ainsi dire, c'est la Loi de Dieu que tu as
livrée aux hommes pour la destruction. Si tu avais brûlé le testa-
. .
X
26 LITTERATURE DONATISTE
Quel sort t'attend donc, toi qui as brûlé la très sainte Loi du
Dieu juge? Judas s'est repenti de son crime, du moins en mou-
rant toi, non seulement tu ne te repens pas, mais encore, toi
;
d'erreur comme
vous, peu importe que les rois de la terre soient
païens (à Dieu ne plaise !) ou désirent être chrétiens car vous :
VI 3
30 LITTÉRATURE DONATISTE
Dieu, où est votre christianisme, si, par vos actes ou vos con-
seils, vous déchaînez le meurtre et la mort ? Si vous désirez
pourquoi nous attirer à vous malgré nous ? Si
notre amitié,
vous croyez à notre inimitié, pounjuoi tuer vos ennemis ? Et
voyez (juelle déraison, quelle inconséquence fiivole \'ous nous !
leur faux baptême plut()t que de naître, non seulement vos péchés
ne vous sont pas remis par eux, mais encore vous chargez vos
âmes du poids de leurs crimes. En effet, si l'eau des coupables
est vide du Saint-Esprit, elle est pleine des crimes des tradi
teurs. Toi donc, malheureux, qui que tu sois, toi qui es baptise
par ces gens-là, si tu veux éviter le mensonge, tu te baignes
dans une eau de mensonge. Si tu voulais rejeter les péchés delà
chair, par la complicité avec les pécheurs, tu gagneras encore
le péché. Si tu voulais éteindre la flamme de la cupidité, tu
prends un bain de fraude, un bain de crime, même un bain de
folie. Enfin, si tu crois que la foi de celui qui reçoit le sacre-
ment est celle de celui qui le confère, par cet homme, qui tue
l'homme, tu es couvert du sang de ton frère. Ainsi, toi qui
t'étais présenté innocent au baptême, du baptême tu reviens
parricide ~. » Les derniers mots sont une exhortation à fuir
les traditeurs, C[ui du reste, en acceptant comme valable le bap-
tême donatiste, en reconnaissent implicitement la valeur:
facer '. »
texte d'un schisme séculaire, thème toujours prêt pour les con-
troverses, riche en malentendus, en accusations réciproques, en
invectives.
Ainsi, dans cet ouvrage de Petilianus, d'un bout à l'autre, à
propos de tout, éclate l'invective. Au milieu des discussions de
doctrine comme autour des citations bibliques, elle- retentit par-
tout, comme un refrain de guerre. Par l'esprit de malice et de
haine qui l'anime tout entière, par la prépondérance continue de
l'élément satirique sur l'élément doctrinal, cette étrange lettre
pastorale déconcerte un peu la logique, mais au profit de l'inté-
rêt littéraire. Là où l'on s'attendait à trouver un sermon, on
trouve un pamphlet l'un des plus violents qu'on ait jamais
:
leurs victimes sans les railler, sans inventer des raisons drôles
ou nîème spirituelles de les frapper. Ce n'est pas en vain ([ue
Petilianus parlait tant du Diable '
: ses sarcasmes ont quelque
chose de diabolique.
Ce qu'on ne peut nier, eu tout cas, c'est l'originalité de l'ou-
vrage. Cette lettre pastorale pourra sans doute agacer certains
lecteurs elle pourra déplaire franchement à d'autres, notam-
;
rature donatiste.
Telle fut l'impression des contemporains. Le succès fut écla-
au moins dans la région. Ce qui le prouve, indépendam-
tant,
ment des témoignages du temps, c'est la série des ouvrages
4| Ihid., III, 1 et suiv.; Dr uiiico bap- semblable et le plus exact, est cerlaine-
//smo, 1 et suiv. ; Contra Gauilenliiim, nient celui-ci : Ad Calholicos Episliila
I, 1 : Collai. Carthag., III. .5(1 et suiv.; contra Donalistas.
PETILIANUS L)E CONSTAXTINE 35
III
4) Ad Catliolicos Epistula contra Du- 41, 4!). — Cf. Possidius, Indic. oper.
natislas, 1. Augustini,'ii.
PETILIANUS DE CONSTANTINE 37
l'eau est brisée, bien qu'intacte ». Après avoir ridiculisé les '
-dos à Carnéade.
Petilianus comparait également son adversaire aux sophistes,
-à « Pilus et Furius, qui défendaient l'injustice contre la jus-
« confirmé ce que nous avons fait? »... Revenons sur les mots
« vous avez cru^. » N'est-ce pas nous dire à nous tous, par
exemple « Qu'est-ce que Donat de Carthage, et Januarius, et
:
« nom. » Mais -rien de tout cela n'a été dit ou n'est dit par nous,
parce que nous suivons la loi de la divine Trinité et toi, qui :
sans imprudence.
Ces controverses sur le baptême ne comj)ortaient pas seule-
ment des discussions théori([ues. Des ([uestions de fait s'y
mêlaient nécessairement, puiscpie le prétexte du schisme avait
été la prétendue indignité des Catholiques, et (pu* cette même
indignité était la i-aison alléguée par les schismatlcpics pour
contester l^dïicacité des sacrennints conférés par llCglise offi-
et exclu par nous, n'en a pas moins été reçu par vous-. » Puis,
c'était l'histoire d'un évêque catholi(|uc, qui, chassé pour ses
mauvaises mœurs, avait ensuite repris ses fonctions sacerdo-
tales: « Exclu par vous pour crime de sodomie, et remplacé par
un autre, il a été réintégré dans votre collège'^ » Soit deux
mauvais bergers dans cette Eglise d'Afi'i([ue qui comptait alors
quatre cents évêchés. De ces deux faits, le Donatiste croyait
pouvoir conclure à un relâchement général de la discipline dans
l'Eglise catholique. Il disait brutalement à Augustin « Per- :
disait-il, que le baptême des pécheurs doit vous être utile, puis-
([ue nous-mêmes, dis-tu, nous tenons pour valable le baptême
de coupables justement condamnés par nous-. » Puis, le Dona-
tiste annonçait qu'il traiterait la question dans un autre ouAa^age ;
sa vie au grand jour sous les yeux de toute l'Afrique, mais une
prétendue histoire secrète, étrange, anecdotique et scandaleuse,
où la malveillance mêlait à d'absurdes racontars une interpréta-
tion tendancieuse de quelques faits exacts. Les attaques person-
nelles contre Augustin tenaient une place considérable dans le
pamphlet de Petilianus. C'était la partie la plus violente de
l'ouvrage; c'est aussi, pour nous, la plus curieuse et la plus
vivante.
A vrai dire, l'attaque personnelle était partout dans le pam-
phlet. Nous l'avons vue se dessiner, dès le début, dans la cri-
tique des méthodes de discussion^. Peu à peu, elle changeait de
VI 4
46 LITTÉRATURE DONATISTE
1) Contra litteras Petiliani, III, 25, 2) Contra litterus Petiliani, 111, 16, IV.
:^0. 3) Ibid., III, 17, 20.
50. LITTÉRATURE DONATISTE
1) Coiilni lillrnis l'rliliiuii. Ml, 10, 11; suiv. ; IC, 1'.» et suiv. ; 25,30; 40, 48.
2.-), 30. 4) Ibid., Wï, 1, 2; Ki, 19; 17, 20.
2) Ihid., III, II, «!». ô) Ihid., III, 10, 11 ; Ilî, 11) cl suiv.;
3) //-/./., III. I .1 vuiv. ; 10, 11 ri 25. 30; 57, «9; .5!!, 71.
PETILIANUS DE CONSTANTINE 51
IV
puis j'y joindrai les miennes mais non comme je l'ai fait, ;
tin où se lisent ces formules Or, nous avons vu que le second '-.
On sait que
Donatistes prétendaient être seuls assez purs
les
pour conférer le baptême, et ([u'ils rebaptisaient les Catholiques
gagnés par eux cependant, leur secte principale, celle des
;
Au moment où il composa
sa réfutation, Augustin avait
«juelques doutes surTorigine de l'ouvrage. Il y désigne l'auteur
j)ar des termes vagues et des périphrases ". Plus tard, il eut
et, comme il disait dans son langage imagé, « de jeter les mys-
tères au vent de la publicité ^ ». Le trait visait probable-
ment Augustin, qui justement avait pour principe de soumettre
au public ces controverses entre Eglises rivales. En ce qui con-
cerne spécialement le malentendu sur le baptême, notons que
l'évêque d'Hippone avait publié, quelques années auparavant,
un gros traité en sept livres, qui nous est parvenu, et qui est
intitulé « Sur le baptême contre les Donatistes De baptismo —
contra Donatistas ». On peut donc supposer avec vraisem-
''
« N'est-c,e pas en ton nom que nous avons chassé les démons Pet
1) De unko haptismo, 16, 28-30;17, 31. 5) Cf. Optât, II, 4; CoUat. Carthag.:,
2) Ihid., 16, 27-28 et 30. I, 149 ;
157-161.
3) Ibid., 14, 23. 6) Augustin, De unico baptismo, 15,26;
4) Ibid., 16, 28. 16, 27-30.
60 LITTÉRATURE DONATISTE
•en eux des Manichéens'. On sait qu'il n'y avait pas pour lui de
pire injure. Aussi prodiguait-il ce traitement de faveur à ses
adversaires les plus gênants par exemple, aux chel's de "~
:
V
Petilianus orateur. —
L'avocat. —
L'orateur de concile. Petiliaiius à la —
Coul'érence de Carthage en 411. —
11 est un des adores ou avocats-man-
VI 5
G2 LITTÉBATUHE DONAÏISÏE
posé des motifs. Dès l'entrée des évéques, le président leur dit:
« A l'audience précédente, je vous ai plusieurs fois offert de
nant encore, dit-il, je déclare que mon premier chef est et a été
Donat, un homme de bienheureuse et sainte mémoire, évéquede
1) Aiif^u^lin, />(• h;i(Vo /«i/)/is/;i(). l(i, 2;t. '>) c.oUitl. l'.iiilhiuj.. III, 22(1-247. —
2/ Collai. Cartiiwj., I, tiô cl Kî'.i. Cf. III, 52-:)ô ; 2(i:5-2(»7 ; 217-222.
A) Ihiil., I, 15S-16.S. f.) Ilnd., 1, 1-2 ; l-ô ;
In ; 14 ; etc.
4i Ilnd., I, ]22-)2.-. ; i:iC-i:{7 ; ISl- 7) /6k/., Il, 10.
185 ; 207-208 ; III, 2.V34.
PETILIANUS DE CONSTANTI.NE G5
« Nous n'avons pas à élire un second juge, nous qui n'avons pas
demandé le premier '. » On n'est pas plus discourtois.
Cette question réglée, l'évéque de Gonstantine prend l'offen-
sive, tout en déclarant qu'il ne veut pas la prendre. Il déclare
que le rôle d'accusateurs incombe aux Catholiques, puistfa'ilsont
sollicité la réunion de 'la conférence. Il a soin, d'ailleurs de
faire à l'avance toutes ses réserves sur les résultats do la con-
troverse Toutes réserves faites pour nos droits, en ce qui
: «
l'évèque est mort, ou qu'il est malade, ou que pour une raison
quelconque « il n'a pu v^enir, il a envoyé une lettre d'excuse- ».
l^irfois, dans cette localité, les Donatistes ont seulement
un prêtre l'orateur l'avoue, mais l'aveu lui coûte ^. Certains
:
gens d'outre-mer. » —
« Oui, répond Aurelius, il est bien éta-
bli que nous l'avons déclaré c'est Innocentius qui est l'évêque
:
tion^. » —
« Cela relève du fond de l'affaire^' », réplique assez
Alype lui-même qui est en cause, pour s'être félicité tout haut
de la déroute du parti de Donat dans sa ville épiscopale de Tha-
gaste, la patrie d'Augustin. A l'appel de son nom, Alype pro-
clame la victoire des Catholiques dans son diocèse « Thagaste :
uât —
episcopi partis Donati », donné aux évêques de son
Eglise dans le procès-verbal de la première séance''; il proteste
encore contre l'article du règlement de la Conférence, qui obli-
geait tout orateur à signer toutes les paroles prononcées par
lui''; au reproche qu'on lui adresse de ne pas observer ce
règlement, il réplique que ses adversaires ont contrevenu à
sont toujours eux qui ont attaqué '-^, et les Donatisles ne peuvent
renoncer à leur rôle de défendeurs '•'. Chemin faisant, Petilianus
malmène à tout propos l'ICglise rivale, héritière de Caîcilianus
1) Collai. Carihuii., II. 18. H) Collai. CurlUit,/., III. '.Il ; '.Ki ; 'Jô.
48-49 ;
5.-.
;
.",8. 125 ; 127 ; 12!» ; LU 183 : ISÔ IHS.; ;
i) Ihid., III, 22; 30; 32; 34. 11) Jbid., III, 149; 1.Ô3 ; l').-) ; 181;
ô) Ibid., III.4r,-47; fi2 ; (•,9;74. 183; 185; 190-191; 195; 209.
Cl) Ibid., m, 75. 12) Ibid., lit, 1(15; 175.
7) /6ùi., III, t*. 13) Ibi'L, III, VXi.
PETILIANUS DE CONSTANTINE 73
Alype, on ne t'a même pns fait peur '^ » « C'est louer notre —
fermeté, réplique Petilianus, la fermeté de notre foi orthodoxe
et de notre discipline vraiment catholique^.» « Eh bien — !
se reporte aux noms de nos pères, je puis leur donner, moi aussi,
un nom analogue oui, je les désigne publiquement, ouverte-
:
6) Ibid., 111,30.
74 LITTEUATUHE DONATISTE
1) Collât. CarlhcKj., Ul, 249 vl sui\. se non posse tostatur )> [Capilula Gcslo-
2) Ibid., m, 256-257. • niin Collai. Cartling., 111,541).
S) Ibid., lïl, 258. 7) « CaUioiici testaiitiir ideo so Peli-
4) Ibid., lU, 261 et suiv. liaiiniu cxciisatiuiii siiblrahere voluisso,
5) Ibid., m, 263 274
;
276. ;
<|m)(l ci Donal.us Cascnsis ex Gestis
<i) (( Petilianus, cpiscopiis parlis Do- evidunlcr osteasus est » {ibid., 111,
nati, impediincuto raucediais agerc 542).
76 LITTÉRATURE DONATISTE
\) h\\\i\\si\n. Ci, nlra lilU-ms Pi'liliani, 7: \:,-l\\: 17-49; III, 89-%; 117-120;
1, 1 ; II, 23, r,.-| ; its, 22(1 ; 101. 2H2. 125-141) ; olc.
2) Cnllnl. <:,irlhii(j.. I, 7 :
'.I; 12, etc. ; 4) l'.ir cxciiiplo, Optalus de Thamu-
11,3-7; 1(1; IC, clc ; I II, 22 ; 25 ; 27 ; -a.li. (lualilic de trihiiii par rôvèqni;
3'l, l'ic. il'Ilippoiio : « Oplali illiiis Iribuni \os-
3) Ibid., I, r,-lt ; 11-12; 28-;!0; II, ii- tri » (Aii-u-.lin, Hpi^l. 51,8).
petihanus de constantine 77
VI (5
78 LITTÉRATURE DONATISTE
canes autour des faits, trop de mots autour des principes, trop
d'injures autour des citations bibliques '. Puis on relève des
exagérations de toute sorte de la déclamation, de l'emphase, :
d'Uzali ^^
?
qui subit la persécution, non celle qui persécute » Avec tous '.
2 ; 158-1G4
MO. 1ICI». ; ; {ibid., III, 15, 17).
4) Apiid nos r>.l eiiiiii xcra ("allio-
<" 6) (( Quia iiiala causa est » (ibid.. Il,
VI
Petilianus écrivain. —
En quoi l'écrivain ressemble à l'orateur. En quoi —
et pourquoi en diffère.
il —
Influence plus marquée de l'école et du
stylisme à la mode. —
L'art de la composition. —La langue. Le style. —
—
Défauts signalés par Augustin. —
Qualités de l'écrivain. Petilianus —
a été un adversaire digne d'Augustin.
cherche qu'ils impliquent, ils sont d'un emploi beaucoup plus fré-
quent chez l'écrivain. Tel est le cas des « traits », des senten-
tiae à la Sénèque. Petilianus en a émaillé ses pamphlets. Ou
plutôt, hérissé : car, chez lui, arguments ont des
tous les
pointes, toutes les fleurs ont des épines. Beaucoup de ces sen-
tentiae contiennent des formules énergiques et concises, où se
concentre une idée, une démonstration, une théorie. Tout cela
forçait l'attention du lecteur. Plusieurs de ces formules sont
devenues célèbres dans l'Afrique de ces temps-là. et ont suscité
des controverses à l'infini ^
Enfin, l'écrivain sait varier l'allure de sa prose et ménager
ses effets, par l'alternance du style périodique et du style
coupé. Tantôt, des périodes solennelles, bien équilibrées, qui
se déroulent en ondulations assez harmonieuses. Tantôt, des
phrases courtes et vives, hachées, incisives, armées de pointes
et d'antithèses menaçantes. Le résultat est souvent assez heu-
reux, et fécond en surprises derrière la période démonstrative,
:
pris au piège dans cette affaire, lance de nouveau sur moi ses
tourbillons de nuages et de vent, pour obscurcir la sérénité lu-
CRESCONIUS LE GRAMMAIRIEN
fession. —
Son talent et son éloquence. —
Caractère et tour d'esprit. —
Comment Cresconius fut amené à intervenir dans la controverse entre
Augustin et Petilianus. —
Sa Lettre à Augustin. —
Date de cet ouvrage.
est, s'écrient les prélats, quel est cet homme de notre parti,
dont tu nous apportes la lettre ? n'est qu'un de nos laïques. O
N'ainrpieur, nous aurions triomphé de sa victoire. Vaincu, sa
défait(^ ne regarde que lui-'. »
Même dans la hiérarciiie mondaine de sa ville, le Douatiste
Cresconius n'était qu'un ])ersonnage de second rang. C'était un
grammairien de métier, graminalicus Sans doute, aA'ec la '"'.
grammairien.
Cependant, de l'aveu de son adversaire lui-même, Cresco-
nius n'était pas le premier venu. Tout en le raillant à l'occasion,
Augustin lui rend justice'-. Il lui reconnaît d'abord les qualités
proTessionnelles la conscience et l'honnêteté, une instruction
:
1) Contra Cresconkun. HT, 73, 85. 4) Conlru Cresconium, 111, 55, Cl; 71,
II
Iradilores. La prrsi'culioii. —
Martyrs donatistcs. Revemlicalion de — —
la liberlôde couscu'Dcc. Primiaabtes et Maximiauistes. Los Dona- — —
tistes constituent la véritablo Eglise. Attaques personnelles contre —
Augustin. —
Conclusion de l'ouvrage.
2] Ciilra Crcsconuim, II, 1, 2: II, } ; .-,) Cmlra Crescuiiiain, IV, Od. 8:$. —
.-.. 7 : III. 1, l ; 12. lôf 11, 17 ; l\, 1, Cf. I\ , 2:^, 30 ; 21, 31.
1 : 2, 2 ; 11, i:{, rie. ijl nflnicL, II..".2 : Cuntra Crcsconium,
:ii //'«/.. I. 1 ; II, s. Kl; :^2, Hl;|||, |\, 1-2.
II, \ô; 77, 8H; 1\ , 12, 11:41, 4s.
CUESCONIUS LE GRAMMAIRIEN 93
V!. 7
94 LITTÉRATURE DONATISTE
nos évêques à discuter avec toi pour établir la A^érlté, Mais nos
évêques ont plus de sagesse et, de patience; ils restent dans
leurs églises, où ils enseignent seulement aux peuples les com-
mandements de la Loi et ne se soucient pas de vous répondre.
Ilssavent bien que, si la Loi divine et tant de textes des saintes
Ecritures ne peuvent vous convaincre du bon droit et de la
vérité, jamais une autorité humaine ne saurait dissiper vos
erreurs, et vous ramener à la règle de la A'érité^. » Gresconius
posait donc comme principe, qu'un évéque n'avait pas à s'occu-
per de ce qui se passait hors de son Eglise. Il alléguait l'exemple
des Prophètes « Quand Ezéchiel lui-même et les autres pro-
:
pas cela une hérésie. En effet, l'hérésie est une secte composée
de gens dont la doctrine est différente le schisme est une rup- ;
ture entre gens qui ont la même doctrine. Tu vois donc dans
quelle erreur tu es tombé, ici encore, pour le plaisir d'incri-
miner ce qui est schisme, tu l'appelles hérésie
: » On remar- =>.
rien de nouveau, rien qui n'eût été déjà dit, et plus fortement,
par Petilianus ou autres dissidents. A la fin de son argumenta-
tion, Cresconius insistait sur ce fait, que son Eglise, en rebap-
tisant hérétiques et schismatiques, suivait la tradition africaine
et l'exemple de saint Cyprien. Il citait le concile de 256 De
haereticis baptizandis, la lettre à Jubaianus, la lettre de Firmi-
lien, et autres documents ^. 11 constatait que, sur ce point, les
Catholiques avaient changé d'opinion, tandis que l'Eglise de
Donat était restée fidèle au principe et à la pratique de Cyprien.
Ce qui était vrai, historiquement.
Fort de l'appui de Cyprien, le Donatiste tournait en ridicule
la nouvelle conception catholique du baptême. L'évêque d'ilip-
pone ayant déclaré que le sacrement était valable, même admi-
nistré par un indigne, le grammairien s'écriait: « Oh la belle !
avant la date fixée, serait tenu pour innocent. C'est ainsi que
bien des Maximianistes, non seulement les deux que tu cites,
mais beaucoup d'autres, ont été absous, déclarés innocents, et
sont rentrés dans l'Eglise. En conséquence, tout baptême con-
féré par eux était valable, puisqu'ils avaient été réintégrés avant
le jour fixé et ne tombaient pas sous le coup de la sentence
définitive. Alors qu'ils baptisaient, ils n'étaient pas hors de
l'Eglise, puisque, le délai n'étant pas écoulé, ils n'en avaient
pas été séparés par la barrière marquant la limite. Au contraire,
ceux qui, après le jour fixé, se sont entêtés à rester dans le
parti de Maximianus, ceux-là ont été atteints par la sentence de
condamnation du môme coup, ils ont perdu et le droit de bap-
:
baux, nous avons des lettres. Poui^ beaucoup, même, nous avons
1) ConU-a C'resconium, III, 26, 29. 3) Contra Cresconiuin, 111, 30, 34.
2) IhicL, IV, 56, 66. — Cf. III, 27, 31. 4) IbicL, IV, 8, 10.
102 LLTTÉKATURE DONATISTE
•
1) Cunlra Crcacunium, 111,38, H7. 4) Contra Cresconium, III. 35, 39.
2) Ihul., III, 34, 38. — Cf. IV, 43, :.l Cf. IV, 45, 53.
«l suiv. .5) Ibld., III, 3!t, 43.
3) Ibid., m. 37, 41. — Cf. I\ , l.', .",4.
CRESCOMUS LE GRAMMAIRIEN 103
l'erreur attire la foule. J'en atteste l'Evangile, oîi il est dit que
peu de gens sont sauvés » Ainsi, malgré leur petit nombre
•^.
1) Coiilra Crescuniuin, 111, .59, 05. — 4) Contra Cresconium, III, 07, 77.
Cf. IV, 46, 55. — Cf. m, 03, 70 et suiv. ; IV, 60, 73 et
2) rbid., IV, 50, 00. — Cf. 1l,22, 27; suiv.
m, 71, 83, 5) Ibid., III, (".:<, 70.
3) Ibid., III, 61, 67; 09, 80; 71, 83; 6) Ibid.. III. 60, 75. — Cf. IV, 53,
IV, 54, 04 ; 50, 67. fi3.
CRESCONIUS LE GRAMMAIRIEN 105
pone, c'est que vous avez été mis à la porte. Quant aux nôtres,
ils sont restés dans l'Eglise universelle et catholique'. » Argu-
1) Contra Cresconium, IV, 58, 70. — 3) Contra Cresconium, III, 78, i*0 ; IV,
Cf. m, «7, 77 et suiv. ; IV, 59, 71 et 64,78.
suiv. 4) Ibid., III, 80, 92.— Cf. 111,79, 91;
III
2) Ibid., 111, 2f., 29 ot suiv. ; 52, ",8 et 111, 78, 90 et suiv.; lV,2etsuiv. ; 64,
suiv. 78 et suiv.
CKESCONIUS LE GRAMMAIRIEN lOD
VI. 8
110 LITTÉRATURE DONATISTE
PRIIVIIANUS DE CARTHAGE
1) Aiii;iislin, Senno II in Psalin. 'M'>. '^] Voyez plus limit, tome IV, p. 54.
20, p. 378-379 Mip:nn. 4) « Scamiala igiliir Priiiiiaiii.... qui
2) Ihid., l!)-2(), 375 cl siiiv.
[). l\f)isl.; rcceiis oriliniilus... » ( Au^nislin, Scrmo
43, 'J, 2() ; Contra Cresconium, IV, 6, 7. // in Psalm. 30,20, p. 378).
PlUMIANUS DE CAKTIIAGE 113
jurgalus sit quod episcopos hospilio Sermo II in Psalm. 36, 18-19, p. 374-375.
suscepisset » [Sermo II in Psalm. 36, 20, 6) Epist. 141, 6 ; 185, 4, 17 ; Sermo H
P- 379). in Psalm. 36, 20, p. 376-382; Contra
3) (( Primianus multitudinem miseril, Cresconium, IV, 6, 7 ; De haeres. ,i)9.
116 LITTÉRATUBE DONATISTE
d'entrer dans les basiliques, dont il nous a fait fermer les portes
par la foule et par la police. Il a repoussé avec des outrages
les députés envoyés par nous. Il a usurpé beaucoup d'immeubles,
d'abord par la force, puis en vertu de décisions judiciaires.
Enfin, il s'est rendu coupable d'autres actes illicites, que, par
bienséance de style, nous avons passés sous silence'. » Pré"-
cieux document sur la mentalité de Primianus, et sur ses mé-
thodes de gouvernement.
A l'unanimité, le concile confirma la condamnation du primai :
1) Sermo II in Psalm. 30, 20, p. 371). cliorn perpcliio esse darnnatuin, ne, eo
2) « Decrevimus oiiiiies sarertlnlcs p;ilp;ilo, l.)ei Kcclesia aiil rdiilagioue
Dei, pracseiile Spirilii saiicto, Imiic aiil ali(piu crirniiie niaciiletiir... »
eumdum l'riiiiianuiii... a sacurdolali {ihid.).
l'RIMlA>US DE GARTHAGE 117
sur les hommes et sur les pierres. L'une après l'autre, on vit
s'écrouler dans les flammes les basiliques de Carthage récem-
ment enlevées aux Donatistes. Incendies trop bien dirigés, pour
que le Diable y fût étranger chaque fois, tout le monde com- :
VI. 9
12G LITTÉRATURE DONATISTE
1) Contra Epislulam Parmeniani, 11, tium, l, 39, 54; Epist. 53, 3,6; 108,
3, 7 Contra litleras Petiliani, I, 10, 11
;
;
2, 5.
13, U; 11, 23, 53; 83, 184; Conlra 2) Sernm II in Psalm. 36, 20, p. 37»
Crescoiiium, III, 60, 66; IV, 25, 32; Migue.
Gesta cura Emerito, 9 ; Contra Gauden- 3) Surtout ii la Conférence de 411.
128 LITTÉRATURE DONATISTE
II
Heureux les pacifiques, car ils seront appelés les fils de Dieu !
à ceux qui déclarent n'être pas nos frères, nous devons dire :
Vous êtes nos frères. Donc, vous ne devez pas mépriser cet
avertissement tout pacifique que nous vous adressons et qui
vient de la charité. Nous vous offrons le moyen de prouver
toutes les vérités que vous croyez tenir. Voici comment. Réu-
nissez votre concile choisissez parmi vous des mandataires
;
1) Codex canon. Errlrx. nfric, can. 92. Drevic. Collai., III, 4 ; 8, \\\ Ad Dona-
2) Augustin, Sermo II in J'salm. '^6, tistas posl Collât., 1 ; 10, 20 ; M, 53.
18 ; Conlra Cresconiiim, IV, 47, ô7 ;
PRIMIANUS DE CARTHAGE 131
de réunir les fils des martyrs et les descendants des traditeurs » ''.
gustin nous renseigne sur cette pièce, dont il parle assez dure-
ment « Tel tu es, dit-il à Primianus, tels sont tous les autres.
:
nous ne devons pas nous irriter contre eux pour cela, supportez-
le patiemment comme nous. Voyant qu'ils n'ont rien à dire
pour leur cause, ils tournent leur langue contre nous; ils se
mettent à dire du mal de nous, bien des choses qu'ils savent,
bien des choses qu'ils ignorent. Ce (ju'ils savent, c'est notre
passé''... » En effet, Primianus incriminait toute la vie passée
d'Augustin, avant la conversion sa vie toute profane d'autre-
:
« Oui, répond Augustin, oui, j'ai été jadis, comme dit l'Apôtre,
un un incrédule, rebelle à toute œuvre bonne. Egaré dans
sot et
une erreur perverse, j'ai été un insensé, un fou; je ne le nie pas.
Mais, moins je songe à nier mon passé, plus je loue Dieu, qui
m'a pardonné. Pourquoi donc, hérétique, pourquoi délaisser la
cause, et t'en prendre à un homme? Que suis-je, moi, que suis-
je? Est-ce que je suis l'Eglise catholique?... Tu vitupères contre
mes maux d'autrefois la belle avance Je suis plus sévère que
: !
Dieu que je n'eusse jamais été ainsi! Pourtant, quoi que j'aie
pu être, c'est le passé maintenant effacé au nom du Christ-. »
:
2) « Ista sunt mala praeterita, quae unde sunt ?... Ubi baptizali sunt ? »
noverunt maxime in ista civitate. Hic (Ibid., 19).
enim mule viximus... » [ibid., 19).
136 LITTÉRATURE DONATISTE
1) Sermo III in l>sulm. :îG, l'J. 3) Sermo JIl in Psalm. 3G, 20.
2) Ibid., 10.
PRIMIÂNUS DE CARTHAGE 137
1) Collai. Cartiuuj., I, 5; Augustin, Cf. Collât. Carthay., II, ;jO ; III, 206.
Brevic. Collât., I, 2. 4) Augustin, Ad Donalistas post C.ol-
2) Collai. Carlhag., I, 4-5 et 30. lat., 24, 41.
3) Augustin, Brevic. Collât., II, 3.
138 LITTÉRATURE DO>ATISTE
:i) Collai. Curlhad., I, 22-3(t; 11, 4S- 5) Collai. Cartluig., Il, ÔD ; III, 200;
i'O; III, 203-2()(; ; Aiifïiislin, Brcvic. Col- Aiif^iisliii, lirt-vic. Collât., Il, 3 ;
Ad Do-
lal., I, S cl 11 ; II, :5 ; 111, ."», 0. nalislas posl Collai., 21, 41.
PRIMIANUS DE CARTHAGE 139
d'autrefois est devenu muet, ou peu s'en faut. Il n'a même plus
ces répliques brèves et hautaines, ces formules tranchantes, ces
clichés à antithèses, ces impertinences burlesques, dont il fou-
droyait jadis quiconque résistait à ses caprices de tyran ou aux
oracles de sa secte. Non, il se tait, tout simplement sans doute, :
parce qu'il n'a rien à dire. Ou, si par hasard il ouvre la bouche,
c'est encorepour ne rien dire ^. On hésiterait à le croire, si Ton
n'en avait la preuve dans le procès-verbal sténographié des
séances. Vraiment, l'on ne vit jamais chef plus distrait ni orateur
plus discret.
Suivons donc le primat à la Conférence. Voici à quoi se ré-
duisent, avec son rôle d'avocat, les manifestations de son élo-
quence. Au cours de la première séance, il prend de loin en loin
la parole, très brièvement, pour notifier ou rectifier un fait, sur-
tout lors de la vérification des signatures '. Aux autres séances,
dans les controverses proprement dites, on ne l'entend pas une
seule fois et l'on ne peut assurer que personne l'ait regretté.
;
rhylos =
Bizerte) etMarinianus d'Oea (Tripoli), nos collègues '. »
Vers la fin de la séance, troisième intervention du primat, pour
le même motif « Nous donnons, dit-il, comme surveillants des
:
Il avait déjà signé '^. » D'un évêque numide, pour qui avait
YI. 10
142 LITTÉRATURE DONATISTE
1) Augustin, Sermo// in Psalm. 36,20. 3) Collât. Carlhag., II, 50; III, 206 ;
EWIERITUS DE CAESAREA
Biographie d'Emeritus. —
11 était citoyen de Ca^sarea en Maurétanie. Son —
éducation. —
Son élection comme évêque schismatique de Caesarea. —
Longue durée de son épiscoiiat. —
Emeritus au concile de Bagaï, en 394.
—Sa réputation en Afrique. —
Lettres que lui adresse Augustin, vers 405.
—Emeritus à la Conférence de Carthage, en 411. Son attitude après —
la Conférence. —
Augustin lui dédie un ouvrage vers 416. Conférences —
d'Emeritus avec Augustin, en 418, à Cfesarea. Son caractère et son —
tour d'esprit.
1) Sermo ad Caesareensis Ecclesiae pic- plus haut, tome I, p. 14 ; lniuc II, p. 125
i^cm, 2. et suiv.
2) Ackt Marcianae, 1 Passio Ai-
; 4) (Jf. tome IV, p. 4.5.
haut, tome 111, p. 122 et suiv.; p. l','^ Contra Gaudenlium, I, 14, 15; Helracl.,
et suiv. II, 77.
riiiivi, lil)i cliam gciicrc socialuin >> 7) Ihid., 87, 6. — Possidins nicn-
{ijiid., 1(1). lionnt', en elTet, deux lelires d'Augiis-
H) Augustin, Kpist. 87, 1 3 !(•.
; ; lin « ad Emeriluni » {Indic. oper. Au-
4) Possidius, \'Ha Autjusiini, 14. ijtistini, 3).
EMERITUS DE C.ESAREA 149
blent, tels qu'on en voit cliez vous, je n'en doute pas, et complè-
tement étrangers aux méfaits d'un Optatus. En effet, notre seul
grief contre vous, c'est le schisme ce schisme dont, par une :
encore. Même
vaincu et proscrit, il ne désarmait pas. Contre
l'Eo-lise officielle, triomphante en Maurétanie comme ailleurs,
il continuait à faire campagne. Campagne d'escarmouches, car
le temps des batailles était passé campagne de sermons. Dans
:
Deux ans
plus tard, un concours singulier de circonstances
mit une dernière fois en présence les deux adversaires. Dans
l'été de 418, Augustin arrivait à C?esarea pour régler des
affaires ecclésiastiques, comme légat du pape '. A cette nou-
velle, Emeritus rentra dans sa ville épiscopale poussé sans :
f,aistin, Epi^l. l'.tii, 1 : l'.tH, 1. i\] lhid.,'A; Retracl., Il, 77; Pussidiiis,
2) \{iffiis\\n, Cunlrn Cdiidcnliiiin, 1,11, \ila Aiifiuatini, 14.
15. 7) Vii;;ustiii, Conlra Gaiidenliuin, I.
Ga?sarea ~.
effort pour l'être. Alors, rien n'avait prise sur lui, ni les objur-
gations, ni les conseils, ni la prudence, ni le bon sens. A tous
les raisonnements, il répondait par des affirmations tranchantes
ou par un silence têtu ^.
Dans cette lutte sans cesse renouvelée entre ses instincts
sociables de galant homme et ses principes insociables de sec-
taire, on trouve l'explication de son caractère, comme de toute
sa conduite. Le premier mouvement était bon, parce qu'il venait
de la conscience ou du cœur; le second était moins bon, parce
qu'il venait du préjugé Cette oscillation entre des forces con-
•''.
II
Emeritus orateur. —
Son rôle dans les asseml)lées donatistes. Il rédige —
en 394 la Sentence du concile de Bagaï. —
Caractère de ce document.
—
Rôle d'Emeri tus à la Conférence de 411. —
11 est l'un des avocats-
tentia rédigée en 394 pour le concile de Bagaï 2" les très nom- ;
2. 49 ; etc.
VI. 11
158 LITTÉRATURE DONATISTE
1) Augustin, Geata cum lùncrilo, V). 18 ; GesUt rum Emerilo, l" ; Contra Gan-
2) Voyez plus h;iut, lomc l\, |i. 'MVI (Icnliuin, I, 3!», 51.
et suiv. 5) Contra Cresconiuiii, III, 1'.», 22 ; IN,
3) Augustin, Contra Cresconiunt, III, I, ',.
53, .5'J ; IV, m. 12. «) lijid.. III. li', 22; :)3, .V.»; IN, 4,
Conira lilteras PelHicuii, 1, lo,
4) Il ; 5.
11,7. lô Contra Cresconium, IV, 2
; ; KJ,
EMERITUS DE C.ESAREA 159
r>i, m ; 32, 39
IV, 4, 5 34, 41 38, 45.
; ; ;
55, 61 ; IV, 2 ; 16, 19; Gesta cum Eme-
2) Ibid., IV, 2; 16, 18; Gesta cum rito, 10-11 ; Episl. 108, 5, 15.
Emerito, 10. 4) Contra Epislulani Parmeniani, II,
à ce que l'on raconte, elle a été rédigée par notre frère lui-
même Dieu fasse de lui un frère en i)aix avec nous! Oui,
:
frère notre Deuterius, qui en outre est ton parent par la nais-
sance'. » Malgré ses pressantes exhortations, Augustin ne put
décider l'évêque schismatique de Gaesarea à embrasser son
collègue catholique. Mais ses plaisanteries sur la Seiilentia de
Bagaï ont dû avoir de l'écho. Si l'on songe qu'Emeritus n'était
pas sourd, on conviendra que la scène ne manquait pas de pi-
quant. Ce jour-là, le Donaliste dut regretter ses déclamations
de 394 sur les vipères et les œufs de serpent.
Pour être juste, on doit ajouter que cette élucubration des-
tinée au concile de Bagaï a été un épisode particulièrement
malheureux dans la carrière oratoire d'Emeritus. L'orateur
valait beaucoup mieux que la Sententia rédigée par lui dans
un accès de fanatisme. Pour juger son éloquence, il faut le suivre
et l'écouter, en 411, à la Conférence de Garthage.
Qu'il eut été choisi coiiime l'un des sept avocats-mandataires
du parti^, c'était déjà un hommage rendu à son talent. Cet hon-
neur, il eut à cœur de montrer qu'il en était digne; et l'on peut
dire qu'il y réussit. Parmi les sept,
des plus actifs, il fut l'un
l'un des plus tenaces, l'un des plus éloquents; et même, sauf
quelques distractions, l'un des plus habiles. Les Catholiques
qui furent ses adversaires en ces journées mémorables, ont
insisté sur l'importance de son rôle-^ Il fut alors l'un des prin-
cipaux champions du Donatisme. A côté de Petilianus, presque
autant que Petilianus, avec une énergie inflexible et une mer-
veilleuse ténacité, il combattit aux premiers rangs pour la
défense de son Eglise, qu'il n'a pu sauver sans doute, mais
dont il a contribué pour sa part à honorer la défaite.
«) Ibid., 1, 143.
164 LITTÉRATURE DONATISTE
1) Collât. Carthan., III, 15. ',) Cnllnt. Caiihcfi., III, 24!» ; 253 ; 255.
2) Ihid., III, H7 ; 3'J ; 43 ; 49 ;56 «O ; ;
ti) Ibid., III, 260.
69; 78; 80-81; 85 ; 87 ; !)7 ; 99 106;
; 7) Ibid., III, 262; 264; 266; 268;
109 ; 114 ; 121 ; 129 ; 157 ; 159. 278.
.3) Ibid., III, 188; 200. 8) Ibid., III, 372 ; Augustin, Ad Do-
4) Ibid., III, 225 ot 249. natislas post Collai., 4, 4-6.
EMERITUS DE C.ESAREA 165
pouvais être patient, toi aussi, jusqu'à ce que j'aie fini mon
exposé » Tranquillement, l'évêque d'Hippone poursuivit son
'^
!
le sermonnaire.
Des sermons, l'évêque de Cœsareaen a certainement prononcé
toute sa vie mais sans doute, et malgré sa réputation d'élo-
;
lat., 4, (i. 56 60
; ; 69 78
; ;
80-81 ; 85; 87 ;
97 ;
3) Piir exemple, quand il réclamait 99; 106; 109; 114; 121; 129; 157;
comniuaicatioii de l:i requête adressée 159J.
par les Callioliques à l'empereur pour
170 LITTÉRATURE DONATISTE
parce qu'il les avait déjà dites. De là vient que son œuvre ora-
toire, malgré toutes les qualités brillantes, laisse une impres-
sion de monotonie.
Ce qui aggrave encore monotonie, c'est, dans
cet effet de
chaque discours pris à part, la lenteur du développement. Tou-
jours des longueurs, la redondance, une prolixité verbeuse".
(iCtte lenteur à évoluer est surprenante chez un homme qui,
dans le détail, savait donner à son idée un tour assez vif. En
cela, sans doute, il subissait encore l'influence de l'école, peut-
être aussi de ses études d'exégèse. Toujours il voulait procé-
der dans les règles, sans rien omettre ni rien laisser dans
l'ombre, comme s'il doutait de l'intelligence de son public, ou
III
VI. 12
174 LITTÉRATURE DONATISTE
du Donatisme à Caîsarea. —
Retentissomont rie ces conférencos en Afrique.
— Comment peut s'expliquer lattitude d'Emeritus. L'orateur devenu —
muet.
pas ne pas vouloir ce que vous voulez, mais je peux A^ouloir ce que
je veux )). Voyez ce qu'il a promis, en déclarant qu'il ne pouvait
pas ne pas vouloir ce que nous voulons. S'il ne peut pas ne pas
vouloir ce que nous voulons, c'est qu'il sait ce que nous vou-
ions. Ce que nous voulons, c'est ce que vous voulez, vous aussi.
Et, tous, nous voulons ce que veut le Seigneur. La volonté du
1) Gesta cum Emeriio, 1 ; Contra Gaii- sed possum velle quod volo » {Serino
dentium, I, 14, 15. ad Caesareensis Ecdesiae plebem, I).
2) « Non possum nolle quod vultis,
176 LITTÉRATURE DONATISTE
pour qu'il fasse ce qu'il a promis, pour qu'il ne puisse pas ne pas
vouloir ce que nous voulons-^. »
A ce moment, l'orateur est interrompu par les bruyantes
manifestations du public, qui commence à s'étonner, à s'impa-
tienter du mutisme obstiné d'Emeritus. De toutes parts, on
crie dans l'église: « Ou ici, ou nulle part Aiit hic aut nus- —
quam^ / »
nous volé aussitôt pour le voir. Nous l'avons trouvé debout sur
la place. Après les salutations réciproques, nous lui avons fait
observer (ju'il était pénible et anormal pour lui de rester sur la
place, et nous l'avons invité à venir avec nous vers l'église. Il
n'a fait aucune difficulté pour y consentir. Nous avons cru alors
qu'il ne repousserait pas la communion catholique, puiscpi'il
par lequel tu crois avoir été vaincu. Que tes concitoyens appren-
nent de toi pourquoi tu te prétends vainqueur. ^lais, si tu re-
connais que la vérité a triomphé contre toi, pourquoi repousses-
tu encore l'unité ? Sur l'entêté schismatique, qu'on aurait
'
^>
Augustin. —
« Pour te dire ce que tu demandes », réplique Eme-
ritus. — « Je te demande, insiste Augustin, pourcjuoi tu es
venu ;
je demanderais pas, si tu n'étais pas venu. »
ne te le
Gomme le greffier, naïvement, se tourne vers Emeritus, atten-
dant sa réponse pour la sténographier, le Donatiste renvoie le
pauvre homme à ses tablettes, d'un mot impérieux, énigmatique
et sec, en trois lettres « Fac «. Et c'est le dernier mot que
:
'^
1) Gesta cuin Emerito, 3. siac causa venisli, iii>i quia istos deci-
2) « Gesta indicant, si vicliis siim peru v(jluisti »(///((/., 4).
uul vici, si verilale victiis siiin aiil pu- 6) x (^uiuquf diu reliccrcl... » (ibid.,
leslalc opi)rcssus siiin » (ibid., 3). 4).
3) Geslu curn Einerilu, 3. (1) Gesta cuin Emerito, 4.
4) « Si ergy sub verilale lacuisti, imu
EMERITUS DE C.ESaREA 183
frère notre Deuterius, qui en outre est ton parent par la nais-
sance 8. » Pendant toute cette conférence, même quand il ne
nouvelle «pii vous est parvenue » Discutant à son tour avec '.
1) Gesla cum Emerilo, 12. — Cl'. /Vo- adliiic pcriinax consislil » {ibid., 12 .
retira sans être inquiété '. » Longtemps après, dans ses Rétrac-
tations, l'évêque d'Hippone rappelait encore sa victoire mémo-
rable sur le schismatique de Ca'sarea, et, parmi ses traités ori-
ginaux, réservait une place aux Gesta cum Emerito -. Au len-
demain de la mort d'Augustin, son biographe, interprète fidèle
de sa pensée, consacrait tout un chapitre aux conférences de
(]œsarea, et recommandait la lecture du procès- verbal -^ Evi-
demment, ces conférences avaient marqué une date, même dans
la vie d'Augustin et dans sa carrière de polémiste, si pleine de
grands événements.
Ce fut une' date aussi, pour d'autres raisons, dans la vie
d'Emeritus la date d'une déroute définitive, qui, pour l'Eglise
:
venu ? »
1) Possidius, ri/a Aitrjuslini, 14 Au- ; » Nullas vinihi modo pars mca partes
guslin, Gesta cuin Emerito, 1-2 Cnnlni ; dcfeusioiiis imposiiil » {Gesta cum l'mi'-
Gaudenlium, 1,14,1.5. /i/o, 2).
2) Aiiu:iistiii, Gfsla ram Emvr'Uo, 1-4; 4) Telli' est rimprcssion que laissoiil
Contra Gau<lcnliuiii, I, 14, 1.5 ; fh'lnict., plusieurs de ses mots {Ssriiin ad C'ncsw-
11, 77. recnsis Ecclesiae plebem, 1 Gesta cum
;
1) « Clinique diu reticeret... » {Gesta 14, 15). — « T;uiquain imiliis audi\il >»
VI. 13
I
CHAPITRE V
GAUDENTIUS DE THAMUGADI
Biographie de Gaudentius. —
Thamugadi donatiste. —
Gaudentius est élu
en 398 évêque schismatique de Thamugadi. —
Son rôle à la Conférence de
Carthage en Mi. —
Son attitude intransigeante après la proscription du
Donatisme. —
Sa résistance désespérée aux édits el au commissaire del'em-
pereur. —Il menace de se brûler dans son église avec ses fidèles. Ses —
lettres au tribun Dulcitius. —
Ses polémiques contre Augustin. Son —
caractère.
; \) Gesla apitil Zenopliituni, <l,iris IMp- 4) Epist. 5H, 3, 6; Coiiliu lillerns Pc-
pendjx d'Oplat, ii. 1, p. 18.")-r.<7 Ziwsa. liUuni, 1, 10, 11; II, 83, IHt ; Contra
Cf. Oplat, 1, 14 ; Augustin, Episl. 43, 6, Crc.'iconiiim, III, GO, 66 ; Gcsla cuin Emc-
17 ; .53, 2, 4; Contra Cresconiuni, III, 28, rito, !».
2) Augustin, (Montra litlenia PclU'utni, it; 11,3, 7; Conlrii <:resconiiini, III, 16,
J, 24, 26 II, 23, Ô3-55.; 37, 88
; 3i), 94 ; ;
18 ; IV, 61
2.-), Contra
32 ;
.'.1,
;
Gau-
p2, 120; 83, 184 1U3, 237,; denlium, 54. I, .S!t,
]) Contra Gaadentluin, 1, 38, 52; 39, 2) Contra litterns Petiliani, 11,^2, 20d;
54. Epbt. 7(5, 3.
194 LITTÉRATURE DONATISTE
2) Codex canon. Fcdei. ufric, cati. 4) Ci, Ihil. Carlha;!., I, l--'8 : III, 102.
12:^-124. .5) Auîj;iislin, Conlrn (hiudanliiuu, I, 11,
* II
Le dossier de Gaudentius. —
Date de l'affaire. Reconstitution du dos- —
sier. —
Premier édit de Dulcitius. Second édit. —
Lettre de Dulci- —
—
•
(CoUiit. Curduig., I, ll(;-14:î ; 14y-21()). s'y rattachent, Paris, l'.lO? (dans la Revue
2) Voyez notre nicnioirc intitulé: Le de pliUohjijie, 1907, p. 111-133).
GAUDENTIUS DE THAMUGADI 199
dentium.
Trois de ces documents (n. 7, 8 et 10) sont conservés dans
l'œuvre d'Augustin. Nous avons pu en reconstituer entièrement
deux autres (n. 4 et 5) et nous avons ; réuni des fragments im-
portants de deux autres encore (n. 3 et 9). Des trois autres
pièces (n. 1, 2 et 6), nous connaissons seulement, et en gros, le
contenu.
Nous passerons successivement en revue les dix pièces du
dossier, pour en indiquer sommairement la nature et la portée.
Nous mentionnerons d'un mot, à leur rang chronologique, les
trois ouvrages de Gaudentius, qui seront étudiés plus loin.
1° Premier édit de Dulcitius'-^.
exaspérer les Donatistes. Il nous est connu seulement par les al-
lusions d'Augustin.
2° Second é dit de Dulcitiuf:^.
Par ce second édit, Dalcitius se proposait de corriger le mau-
^-ais produit en Afrique par le ton menaçant du premier
effet
édit. Tout en restant ferme sur le fond, le tribun se montrait
plus conciliant dans la forme. Il invitait les Donatistes à se
soumettre sans résistance, à fuir au besoin, et laissait voir
qu'il cherchait à éviter l'emploi de la force.
3" Lettre de Didcitiiis à Gaudentiiis'-.
Dulcitius dut être avisé par ses agents, ou par les magis-
trats de Thamugadi, de l'accueil fâcheux fait à ses édits par les
Donatistes de cette ville, un des centres de la secte rebelle. Il
sut que l'évéque schismatique de la cité parlait de se brûler
dans son église plutôt que de la livrer '^ Par humanité ou par
crainte des complications ou du scandale, il essaya de la dou-
ceur. Il écrivit donc à Gaudentius pour tenter de le ramener,
pour l'exhorter à s'incliner devant la loi, pour lui démontrer que
l'Ecriture elle-même lui ordonnait de se soumettre. Nous con-
naissons par Augustin le contenu et bien des fragments de cette
lettre, qu'avait réfutée Gaudentius. Elle était assez modérée de
ton, et se composait de trois parties: exhortation à rentrer dans
l'Eglise catholique exhortation à abandonner le projet de sui-;
tiste-'. En
terminant, il développe son objection favorite, tirée
du schisme maximianiste, et défie Gaudentius de lui répondra^;
9" Lettre de Gaudentius à Augustin'. Voyez plus loin. —
Second livre d' Augustin
10'^ «Contra Gaudentium^ ».
Ce deuxième livre, qui nous est parvenu entier, contient la
réponse d'Augustin à la lettre de Gaudentius. Il a dû être com-
posé quelques mois après le livre I Contra Gaudentiuni, au-
quel il fut joint par Augustin lui-même'-', et auquel il reste joint
, ' . .
o
• "'
;
202 LITTÉH\TUHE DONATISTE
III
.5) Ihid., II, 11, 12. forme d'une lettre. Fins liant, en effet,
6) Ihid., Il, 12, 13. parmi les traités d'Augnstin, Possidius
7) Ihid., II, 18, 14. ne cite qu'un sent li>re Conlra Gauden-
8) Ihid., Il, 1; 13,14. Possidins — liant.
merilionae une lettre d'Augustin à (Jau-
GAUDENTIUS DE THAMUGADI 203
1) CoUat. Carthag., I, 148 et 208 ; II, dentium, 1, .S, 4 ; II, 4 ; Relract., II, 85.
2 et 12 ; 111,2 Augustin, Conlra Gau- 2) Coliat. Carthag., I, 128.
204 LITTÉHATURE DONATISTE
ceux qui sont avec nous, écrivait- il alors, j'atteste Dieu et tous
ses sacrements, que je les ai exhortés, que j'ai fait tous mes
efforts pour les décider à partir. J'ai invité ceux qui voudraient
sortir, à le déclarer publiquement sans rien craindre. Car nous
ne pouvons pas retenir les gens malgré eux, nous qui avons
appris que personne ne doit être contraint à la fidélité
envers Ditîu'\ » On peut supposer que bien des schismatiques
de Thamugadi se laissèrent convaincre, qu'ils profitèrent de la
permission pour aller prier ailleurs. Mais la plupart restaient
groupés autour de leur évêque et du bûcher. Ceux-là, Gauden-
tius les soutenait de sa parole il leur prêchait la vérité dona-
:
pouvait être banal dans ce cadre original, dans cette église parée
pour l'incendie, en face de ces fanatiques du martyre par le feu,
devant ce bûcher de délivrance, prêt à flami)er dès l'apparition
des bourreaux.
nous connaissons mal le sermonnaire et l'orateur de
Si
concile, en revanche, nous pouvons apprécier le polémiste.
Nous possédons aujourd'hui deux ouvrages complets de Gau-
dentius, ses lettres à Dulcitius, et des fragments d'un troisième,
sa lettre à Augustin.
On se rappelle les circonstances la persécution annoncée à:
1) Episl. 204, 3 ;Contra GaudeuLiuin, II, notre restitution des deux lettres.
I, 1 ; BetracL, II, 85. A cette édition se rapportent, dans les
2) Retmct.,Il, 85; Contra Gaudentium, pages suivantes, les numéros des clia-
I, ] et suiv.; y, 10 et suiv. pitres des Epislulae ad Diilciiiam.
B) A'oir plus haut, toine V, Appendice
VI. 14
20G LITTÉHATLKE DONATISTE
lui avais pas répondu, parce que je n'ai point parlé en sa pré-
sence et que j'ai répondu par écrit à ses écrits Que faire avec !
répondit —
Augustinus respondit », mais « A cela, voici :
la réponse —
Ad liaec responsio ». Commençons donc à réfu-
ter ainsi la première lettre de Gaudentius, la plus courte-. »
Conformément aux indications de l'auteur, on voit alterner,
jusqu'au bout du livre, le Verba epistulae et le Ad Juiec re-
sponsio -K Quand la double réfutation est terminée, Augustin
fait encore remarquer à Gaudentius qu'il a reproduit et discuté
le texte entier des deux lettres « J'ai pleinement répondu, dit- :
lettre de Ton Honneur, dit-il, m'a été remise par des gens que
leur caractère et leur vie rendent manifestement chers à tous.
Dans cette lettre. Ta Grandeur a dit bien des choses que je
passe maintenant sous silence. Je relève seulement une contra-
diction qui a échappé à la pénétration de ton esprit tu n'au- :
3) ll>i(t., I, 1, 2 et sui\.
GAUDENTIUS DE THAML'GADI 207
rais pas dû, dans la même lettre, nous déclarer et tout à fait
innocents et franchement coupables. Si tu nous crois criminels,
vous devez fuir la société de gens compromettants. Si tu nous
crois innocents, comme tu l'as dit toi-même, eh bien! nous
devons, nous, fidèles au Christ, résister joyeusement aux per-
sécuteurs '. » L'évêque déclare ensuite qu'il est décidé à mou-
rir dans son église, si l'on veut appliquer l'édit « Dans l'église :
être de Dieu, ceux qui agissent contre Dieu '. » Par cette apo-
logie du martyre volontaire, qui était si fort en honneur dans
son Eglise, l'évêque de Thamugadi justifiait d'avance son
propre suicide.
L'empressement avec lecjuel les victimes accueillent le mar-
tyre n'est pas une excuse pour les persécuteurs. Gaudentius
entreprend de démontrer à Dulcitius ([ue « l'office d'exécuteur
ne convient pas à sa sagesse ^ ». Cett(i intervention d'un repn>
sentant de l'empereur est d'autant moins légitime, qu'elle se
produit en faveur d'une Eglise d'idolàlres les soi-disant Ca- :
;}) Hrtmrl.,\\, H'> ; Contra Gaudenliuin, '>) Aiig\istin, Contra Gaiidentium, II,
propres péchés, et tout chrétien peut l'être par les péchés d'au-
trui, même s'il les ignore. » Avec cette théorie, on se demande
comment il pouvait y avoir encore un seul chrétien. Gaudentius
affirmait, en effet, que « seule dans le monde avait poussé
l'ivraie », et que « dans le monde presque entier avait disparu
le froment*^ ». Ce « presque » avait naturellement pour objet de
réserver, même au prix d'une contradiction, les droits et privi-
lèges du parti de Donat. Partout ailleurs, il n'y avait plus de véri-
tables chrétiens car « former avec les coupables une seule et
;
çant la question.
Sur un autre point, Gaudentius cherchait encore querelle à
l'évêque d'Hippone, qu'il accusait même de mauvaise foi. Il lui
reprochait d'avoir mal interprété un passage de la lettre de
Dalcitius. Dans sa première réponse, le Donatiste avait prétendu
que le tribun lui-même reconnaissait dans son Eglise « l'Eglise
de vérité ». Augustin, commentant ce passage, avait fait
remarquer que le mot « vérité » ne se trouvait pas dans la lettre
du tribun^. Devant cette observation, Gaudentius s'emportait:
« Tu te trompes, s'écriait-il, tu te trompes, ou plutôt, tu trompes.
2) n>i<l., II. 7. 7.
per les malheureux ? C'est à Jouas que Dieu a donné des ordres,
c'est le prophète que le Seigneur a envoyé vers le peuple au ;
28; 34, U. —Cf.Joiia.9, 3,6-9. et suiv. ;13, 14; Retract., II, 85.
2) Augustin, Contra Gaudentium, H, 4) Contra Gaudentium, II, 1.
12, 13.
216 LITTÉRATURE DO^ATISTE
/
FULGENTIUS LE DONATISTE
Le donatisto Fulgentius. —
Ce qu'on sait de lui. —
Il était Africain et
pourtant tout lieu de croire qu'il est l'auteur d'un traité Sur le
baptême^ longtemps oublié, disparu pendant des siècles, et
récemment reconstituée
D'après contenu de l'ouvrage, on voit que l'auteur était
le
Africain, qn'il vivait au temps d'Augustin, et qu'il était pro-
bablement clerc dans l'Eglise schismatique. A ces indications
sommaires se réduisent nos données sur la biographie de ce
Fulgentius donatiste, qui, assurément, ne peut être identifié
avec aucun des évêques homonymes, avec aucun des autres
écrivains du même nom.
Si nous connaissons l'existence du donatiste Fulgentius, si
même nous pouvons restituer son traité Sur le baptême^ c'est
grâce à un dialogue anonyme, où il est nommé, cité, combattu,
réfuté phrase par phrase.
Parmi les ouvrages attribués à saint x\ugustin, figure le dia-
logue intitulé Contra Fulgeiitium donatistam'^. Assurément,
l'attribution est plus que suspecte mais l'opuscule est sûre-
;
VI. If)
222 LITfÉUATURE DONATISTE
1) Patrol. lai. de Migne, lomo 43, ô) Aiigiisliii, £/)(.<<. 204 ; Coiilru Gau-
p. 7G3. denlium, 1,1; llclnicL. II, S").
2) Conlrn Fuljcnliain, 22 ;
24-2,"). ti) Palrol. lai. do Migiic, loiiie 43,
II
chez les traditeurs se trouvent les eaux multiples là, sont les :
«ne touche pas ma tête» [Psalm., 140, 5). Il faut donc examiner
avec soin la personne du pécheur, s'il est vrai que le Seigneur
n'a pas parlé du prêtre sacrilège, comme le prétendent les pro-
fanes-^. » Assurément, ce qui manque le plus dans cette dia-
tribe amphigourique sur Fonction liturgique^ c'est l'onction
oratoire.
Ainsi, le baptême et ses rites, la source de vie et l'onction,
appartiennent exclusivement à la véritable Eglise, celle de
Donat. Les pécheurs, comme tous les profanes, n'y peuvent
toucher sans profaner le sacrement et le rendre nul. D'où la
fureur de Fulgentius contre les Catholiques, qui osent croire à
la vertu de leur baptême. Il les déclare plus impudents que les
pires des bandits « Jamais brigand, s'écrie-t-il, n'a montré au
:
ton baptême, dit-il, et, pour cette raison, j'exorcise tes fidèles.
A Dieu ne plaise que je les laisse libres de partir car Dieu a !
l'àpreté du ton, elles s'étalent ici dans leur banalité naïve 2. Des
trois éléments dont se compose l'opuscule de Fulgentius, on
serait embarrassé de dire lequel était le moins neuf. Et voilà
pour le fond.
Dans ces controverses de sectaires, où les thèmes et les
moyens étaient presque imposés d'avance par la tactique et les
traditions du parti, l'originalité du polémiste pouvait s'affirmer
du moins par la mise on œuvre. Malheureusement, par l'usage
qu'il fait de ses matériaux, Fulgentius traiiit une singulière
maladresse. On ne sait s'il a voulu composer un A'^éritable
traité, ou un simple recueil de textes bibliques, méthodique-
ment classés et commentés. Toujours est-il que les citations
de l'Ecriture ont envahi tous les coins de son opuscule. Maté-
riellement, elles occupent la moitié du livre 3. Logiquement,
elles dominent la pensée de l'auteur, décident du plan, règlent
la marche des discussions. Ordinairement, dans ce genre d'ou-
vrages, les textes bibliques viennent à l'appui des raisonne-
ments ou des théories ici, on dirait qu'ils sont toute la théorie,
;
1) Optai, I, r. ; II, ll-i;5 ; IV, 1 el suiv.; des (Ii;ii)itres , iilicrs. Cf. ihiil., H-4 ;
(1-
i
CHAPITRE VII
ANONYMES DONATISTES.
TRAITÉS, PAMPHLETS, CHRONIQUES
Traités anonymes. —
Ouvrage remis à Augustin par le Donatiste Centurius.
— Recueil de textes bibliques avec commentaire. Traité donatiste, —
dirigé contre Augustin, et réfuté par lui dans le Contra Donatistam
nescio quem. —
Occasion et objet de ce traité. Ouvrage donatiste sur —
Cyprien et le baptême, réfuté par Augustin dans le De baplismo. —
Fragments conservés. Contenu de l'ouvrage. — La question du —
baptême. —
Le schisme et l'unité catholique. Les Donatistes ont pour —
eux l'autorité de Cyprien. Caractère de l'ouvrage. —
2) De baptisino conlru Donalistas, I, 20; 19, 25; 20, 32; 21, aS Epist. 141,
;
VI. 16
238 LITTÉRATURE DONATISTE
II
1) Acia SaUiniini, l(;-20 Haliize ; Pax- 2) Cod. Thcod., I\, 34, M».
sio JjiJiiali, 2 cl siiiv. ; Augustin, Episl. 3) Aiiçfiistiu, Hetnicl., 11, i"Jl-r)2 ; 85.
43, 5, 1.5; 88, 2 ; 93, 4, 13. 4) Cod. Tlieod., 1\, 34, 9.
TRAITÉS ANONYMES, PAMPHLETS, CHUONIQUES 241
I
In lohannis Evanyelium tracialus, VI, 19, 25 ; 23, 39; 34, À7 et suiv. ; fie/nicL,
25. ' II, 66.
3) Epist. 142 ; 144 : 185, 2, 7 ; 185, 8, 6) Ad DonatUkts post Collai., 1 et
32-33 ; 208 209, 2 Contra Gau-
204, 1 ; ; ; suiv. ; Gesla cum Emerilo, 2 ; Episl. 141,
dentium, 1,24, 27 Sernto 360. ; 1 et 12.
242 LITTÉRATURE DOXATISTE
1) Serino lul Caesareensis EccU'siac jile- 3) Hetract., ][, 72; Ad Doiuitislas poAl
hem, 8; Ges<« cum Emerilo, 2. Collai., 19, 25; Gcsla ciim EincrUo,2 ;
préjuge pas pour une cause, ni une personne pour une per-
rable défense !
—O mira defensio ^ .' »
1) C.oUnl. Ciirlltwi., III, :-572 : Aiisn;*- ^) •'' l'onalisUis posl Collai., VJ, 2ô.
2) Conlra Gaudcnliuiii, 1, 6, 7. KU ;
1<S2-183 ; Enarr. in J\-i(ilm. G7 ;
PelxKjianos, III, C ; Orosc, VII, 42. 8) lietract.. 11. <)5 ; Brevic. Collai.. I.
III
«
1) Oiilal, [, 13-27 ; II, 4 cl 15-lî»; lil, !». 27 ; 44, 2, 4 : 44, 3, 6 ; Hrevic. Collât.
H-4. m, 17, 32 ; 18, 34-30 ; 2(1. 38.
2) Voyez plu> liaul, loiiic l\", p. 3^8 4) Gciiiiadiiis, De vir. ///., 18 ; Augiis-
ct sui\. lin, Coiilra Fpisliilam l'annriiioni, \, l ;
3) Optai, I, 22 ; Aii-ii>liii, Hpisi . 43, 11, 22, 42 ; III. 3. 17 [Kpisl. 93, 10, 43-44.
\
TRAITÉS ANONYMES, PAMPllLKTS, CHRONIQUES 249
perdue.
Cette première recension africaine, on en peut déterminer
l'origine, les caractères et les nouveautés, même la date
approximative.
On doit la placer entre405 et 411. En effet, le rédacteur
mentionnait expressément l'édit d'union de 405 et la persécution
qui suivit contre les Donatistes persécution dont il fixait
:
rinensis, mais dont tout l'essentiel est passé dans toutes les
recensions postérieures"^. Nul doute que l'addition soit d'un
schismatique africain. Cet épilogue est consacré presque tout
entier à l'Afrique mention des plus célèbres martyrs de la
:
leur vie, comme maintenant entre les vrais chrétiens et les faux
(Catholiques '
. »
de l'Antéchrist'. A
moment, Carthage était encore romaine
ce ;
1) lÀlivr iieiifulnijn-i, OlCi et (US. (>) Voyez noire iniMimirc >\ir Les cnlo-
plus importantes et les plus curieuses sont celles qui lui lurent
inspirées par les événements dramatiques de l'année même où
il écrivait: assassinat de l'empereur Yalentinien III, anarchie
dans la capitale et dans tout l'Empire, prise et sac de Rome
parGenséric, retour triomphant à Carthage des barbares vain-
queurs, avec les dépouilles de la ^'ille éternelle et des milliers
de captifs, parmi lesquels l'impératrice et ses filles. Sur les
Romains d'Afrique, ces nouvelles et ces spectacles avaient pro-
duit un effet de stupeur. L'écho de leurs lamentations retentit
encore dans cette chronique carthaginoise de 455. L'auteur sai-
sit avec empressement toutes les occasions de parler de Rome^
Il note la fondation de la ville, sa puissance et sa longue durée ~;
sa grandeur au temps des rois, puis des consuls, puis des em-
pereurs'. 11 constate que « depuis C. Julius Ca'sar jusqu'au
dernier naufrage de la vie de Yalentinien, pendant cinq cent
huit ans..., par la volonté de Dieu, l'empire romain est toujours
resté debout, conformément à la prophétie de Daniel sur la sta-
tue que Nabuchodonosor avait vue en songe ^ ». — « Au lecteur,
de comprendre. —
Qui legit, intellegat », ajoute le chroni-
queur. Pour plus de sûreté, il s'explique. Alors, il donne libre
cours à ses réflexions mélancoliques. Il voit les temps accom-
plis pour la puissance romaine pour le « règne de la Roma-
:
2) l'ati-'il. lai. (le Migrie, loine âO, '^} Lilicr (jcncaloiju!;, Cy27.
CHAPITRE Vin
LITTÉRATURE ÉPISTOLAIRE
—
•
1) f)|)l;il, ill, 3 ; Aiijiustin, Coiitni ciles dans l'K^rlise dniialisic. \ oyez plus
Crcaconium, II, 1, 2 ; Enurr. in Psulin. haut, loinc IV, p. 145 et suiv.
.")
(i:), Scnnii 1!)7, 4.
; 3) AbstracUoii faite des ouvrages ou
2) Sur le rôle du luiiiiat et dus cou- ilocuiucuts en forme de lettres, dont
CORRESPONDANCES 261
plusieurs nous sont parvenus ou ont pu 5) Contra Cresconium, III, 53, 59 IV, ;
être restitués. 10, 12; 32, 39; Gesta cum Emerito, 10-
1) Augustin, Contra litleras PelUiani, 11 ; Contra Gaudentium, II, 7.
I, 1 et suiv. ; II, 1 et suiv. ; Retract., Il, 6) Collât. Carthag., 1, 14 Augustin,
— Voyez
;
1) AiifiusLin,Scrmo 11 in Psalm. 36,18. fi) Episl. î)3, 10, 43-45 ; Contrit Epis-
2) Ad Dundlistus po&i Colbil., 24, 41. lulnni l'arnieniuni, I. 1.
II
3) Episl. 33. —
Possidius mentionne 5) Ibid., 33, 2.
quatre lellrcs d'Au^rustiii ad Proridcia- 6) /'</</., 33, 3.
nuin (Possidius, Indic. oper.Awjiistini,'6). 7) Ibid., 33,4.
Une scide nous est parvenue. Sur le 8) Ibid., 33, ô.
reste de la correspondance, nousii'a\ons '.)) Ibid., 33, G.
CORRESPONDANCES 267
réponse qu'on lui prêtait, pas plus que l'évêque n'avait donné
ce genre d'instructions". Augustin demanda donc une nouvelle
enquête, sur le rôle joué par Proculeianus en cette affaire.
Il s'adressa au plus haut fonctionnaire de la région Euse- :
il lui exposa sa requête dans une lettre, qui nous est parvenue :
VI. 18
270 LITTÉRATURE DONATISTE
vu, c'est lui qui fit presque tous les frais. Sortons maintenant
de la ville aventurons-nous dans la banlieue, dans les paroisses
;
'
torales. Il lui envoie le prêtre Optatus, qui lui lira, à ses heures,
l'ouvrage promis sur le schisme^. Augustin ajoute qu'il espère
la conversion prochaine de Geler. En attendant, il lui prêche le
mépris de comparée à la vie éternelle^.
la vie présente,
Quelque temps après, l'évéque d'Hippone reçut la visite de
Cjecilius, fils de Celer. Au cours de la conversation, le jeune
homme que son père avait exprimé le désir de connaître un
dit
autre ouvrage, nous ne savons lequel, relatif encore à la que-
relle des deux Eglises. Augustin s'empressa d'envoyer le livre
souhaité. Il profita de l'occasion pour tenter d'achever la con-
version de Celer et pour en préparer d'autres. Tel est l'objet de
sa seconde lettre.
Il y rappelle d'abord l'envoi du traité dont avait parlé Cœci-
traîné vers leur perte beaucoup des nôtres. Quelle a été notre
intention, sinon de te faire saisir et amener pour te sauver de
la mort ? on t'a offert un che-
Si tu as été blessé, c'est ta faute :
val, tu n'as pas voulu le monter, et, en tombant sur le sol, tu t'es
fait de graves contusions. La preuve, c'est qu'un de tes col-
lègues, amené avec toi, est arrivé sans blessures, vu qu'il ne
s'en est pas fait lui-même -. » Augustin s'efforce ensuite de jus-
tifier la contrainte en matière de religion A propos de l'aven- •^.
nommé Antonius, qui avait été élevé sous ses yeux dans son
monastère, et qui paraissait avoir toutes les vertus -^
Devenu évêque, cet xVntonius se révéla tel qu'il était : un
odieux tyran, préoccupé surtout de pressurer ses fidèles et de
voler son Église pour mener joyeuse vie^. Or ses fidèles, on
s'en souvient, étaient d'anciens Donatistes, dont la patience
n'avait rien d'évangélique. C'est dire que le Diable redevint
maître à Fussala, et dans les deux camps.
iVu bout de quelques mois, tous les convertis du bourg
furent sur le pied de guerre. Ils juraient de se débarrasser de
leur évêque. Dans leur détresse, ils se tournèrent vers Augus-
tin, en attendant le jour où ils se tourneraient contre lui. Ils
lui envoyèrent une lettre de plaintes, où ils énuméraient leurs
griefs contre Antonius « Tyrannie intolérable, rapines, divers
:
copales ^.
troubler si fort par ces scandales ils ont été prédits, pour que
:
4) Ibid., 208, 2.
CORHESPONDANCES 285
VI. -
19
286 LITTÉRATURE DONATISTE
III
1) Episl. 28 ;
33-8r) ;
100-108. 3) Epist. 56-57.
2) Epist. ]():., 1. -i) Epist. 173; 208-209.
CORRKSPONDANCES 287
En dehors du diocèse ou de
région d'Hippone, la littéra- la
ture épistolaire du Donatisme a laissé des traces multiples sur
divers points du pays nurtiide à Calama, à Thubursicum Nu- :
2) Contra
; ;
litteras
;
1) Contra Crcsconium, III, .OS, .59 ; I\', .">) Ejiist. ")!. — Possidius lueritionue
10, 12. ([uatro k-Ures d'.\ugustiii à Crispinus
2) Epist. r>l,l. (Indic. oper. Auyiistini, 3). Nous n'en
.S) lhi<l.,'>l, ]. ii\i)ns que deux [Episl. 51 et û(>).
comme vous les avez persécutés avec l'aide des puissances ju-
diciaires vois comme vous avez admis leur baptême, en les
;
poudre aux yeux des ignorants. Dites pourquoi vous êtes sé-
parés du monde entier par un schisme bien plus criminel que
le schisme condamné par vous-mêmes, vous vous en glorifiez,
Uani, II, 8.3, 184 ; 99, 22S. ista rcspondeas » {ihid., 6(), 2).
CORRESPONDANCES 291
<>5 et suiv. -^ Cf. Possidiiis, Indlc. oper. '^) Aujzuslin, Epist. 8S.
Augiistini, 3 : « Jnnuari (an)o, priniati 4) « laniiari(an)o clerici catholici re-
partis Di)uati ». j^ionis Hip])oncnsiumIlc^iorutn))(£p(S<.
2) Collât. Curtkay., I, 14; 148-149; 88, cii-tèto).
COHUESPONDANCES 295
Cette longue lettre, qui a souvent les allures d'un ti-aité, vi-
sait d'abord à établir la légitimité du recours au pouvoir sécu-
lier. Dès ses premiers mots, l'auteur constatait le fait, brutal
évéques des deux partis, soit un concile donatiste, soit des né-
gociations par l'intermédiaire des évéques de la région d'Hip-
pone, soit une enquête sur les attentats, avec confrontation des
coupables et des plaignants, soit des réprimandes et des ins-
tructions écrites aux clercs compromis dans les brigandages'^.
Bref, on ne prétendait pas imposer au primat donatiste telle ou
telle décision; mais on le sommait d'agir enfin d'une façon ou
d'une autre. S'il continuait à tolérer les excès de tout genre
commis par les gens de sa secte, on l'avertissait qu'il pourrait
le regretter bientôt : « De
moyens, lui disait-on,
tous ces
choisissez ceux que vous voudrez. Mais, si vous méprisez nos
plaintes, nous ne regretterons nullement d'avoir voulu agir
pacifiquement. En ce cas, le Seigneur secourra son Eglise; et
c'est vous qui regretterez d'avoir méprisé notre humble re-
quête^. » Sur cette menace discrète se terminait la lettre de
protestation.
Des clercs d'Hippone avaient été chargés de porter le mes-
sage, et de rapporter la réponse du primat''. On peut craindre
qu'ils ne soient revenus les mains vides. lanuarianus, malgré
son grand âge\ semble n'avoir pas été plus avisé qu'aimable.
Selon toute apparence, il ne fit rien pour arrêter les violences,
il n'envoya pas d'instructions, il n'accepta ni conférence ni
controverse, il ne promit rien, et même il ne répondit rien.
C'était assez dans les traditions de la politi([ue et de la poli-
tesse des Donatistes.
Heureusement, tous les schismatiques de Numidie n'étaient
pas aussi farouches que le primat lanuarianus ou son collègue
Grispinus de Calama. Parmi eux, il se trouva des gens de bon
sens, aimables et polis, assez conciliants, au moins dans la
forme, qui répondaient aux Catholiques et consentaient à dis-
cuter pour chercher sincèrement la vérité. Augustin et ses
amis purent engager des controverses par lettres avec plu-
sieurs d'entre eux : tantôt des évoques ou des clercs, tantôt des
laïques '.
Après avoir fait lire ces pièces, Augustin les avait longue-
ment commentées. Il rappelait à ses corres})ondants les princi-
paux tlièmes de sa démonstration innocence de Ca-cilianus et :
VI. 20
302 LITTÉRATURE DONATISTE
véritable Eg"lise^ ? »
moi, comment peut-il se faire que le Christ ait laissé périr son
Eglise dans le monde entier, et l'ait conservée en vous seule-
ment ? C'est à vous d'expliquer cela. A nous, il suffit pour
notre cause de constater dans le monde entier l'accomplisse-
ment de la prophétie des saintes Ecritures. Cette lettre, je l'ai
dictée, moi Augustin, parce que depuis longtemps je désirais
m'entretenir de cela avec semble, en effet, surtout à
toi. Il me
cause de notre voisinage, que nous pouvons conférer là-dessus
par lettres, en évitant tout tumulte. Dieu aidant, autant que
l'exige la nécessité"'. » Etant donné les avances du Donatiste,
on peut croire qu'il a répondu à moins que, n'ayant rien à:
3) Ihid., 4<>, 1.
CORRESrONDANCES 305
2) Jiid., Ô2, 1 et 4.
CORRESPONDANCKS 309
nymes '.
IV
1) Epist. 69 ;
14-1. 2) Voyez plus haut, t. IV, p.l46etsuiv.
316 LITTÉRATURK DOXATISTE
Eglise, chez tous les Donatistes des autres sectes comme chez
les Catholiques, il ne voyait qu'hérétiques ou schismatiques.
Ce sectaire renforcé n'en était pas moins un excellent
homme, et un homme de mérite très aimé des gens de son en-
:
VI. 21
318 LITTÉRATURE DONATISTE
je ne crois pas inutile que les puissances établies par Dieu les
domptent et les corrigent-, » Ainsi, la responsabilité première
des persécutions retombait sur les persécutés eux-mêmes et ;
être plus longue que tu ne l'aurais voulu. Elle eût été beaucoup
plus courte, si en te répondant je n'avais songé qu'à toi. Dùt-
elle ne te servir de rien, elle ne sera pas inutile, je crois, à
ceux qui auront soin de la lire avec la crainte de Dieu et sans
acception de personnes. Ainsi soit-il '. »
De ces d(;rniers mots d'Augustin, on doit conclure qu'il
omptnit utiliser pour sa propagande sa réfutation de Vincen-
tius. G'étîiit, en effet, dans ses habitudes. Détermina-t-il ainsi
])eaucoup de conversions ? A vrai dire, ses arguments étaient
surtout de nature à confirmer des convertis dans leurs résolu-
tions nouvelles. En tout cas, il ne réussit pas à convaincre le
primat rogatiste, pas plus que le Rogatiste ne l'avait convaincu
lui-même. Selon toute vraisemblance, ils n'échangèrent plus
de lettres. Après comme avant leur controverse, ils rt^stèrent
sm- lem's ])ositions respectives adversaires courtois, mais
:
•1) De anima cl ejus origine, III, 2.- 4) Aii^Misliii, De anima cl ejus origine,
2) Jhid., 111, 2. m, 2.
3) Cod. Theod., XVI, 5, ,V2. 5) Episl. 6(). — Cf. fietract.. Il, 71 cl 82.
CORRESPONDANCES 327
à l'évêque d'Hippone 2.
On voit que la collaboration du disciple avec l'ombre du
maître n'avait pas produit une merveille. De là, pourtant, était
sorti tout un petit dossier de littérature polémique les deux :
tel est un grand orateur, un tel est un grand homme. Quel ora-
teur fut ce fameux Donat! Quel orateur est Maximianus !...
Vous voyez qu'en eux brille une flamme d'éloquence, et que
leur parole embrase lestâmes ^. » Vers le temps où Augustin
devint évêque d'Hippone, trois noms semblaient résumer lliis-
toire de l'éloquence donatiste trois noms de primats, Donat le
:
3) Contra Cresconium, I, 2, 3 De
; 5, 14-ltJ ; Brevic. Collai., III, 12,24.
haeres.,fi9 Sermo 37,3 ,Enarr. in Psalm.
; 5) Passio Donati, 2 et suiv.
124, 5 In lohannis Evangelium Iractatus
;
332 LITTÉRATURE DONATISTE
VI, 22
334 LITTÉRATURE DON.VTISTE
1) Scrmo II in Psalm. 'M't, 19-20; Coii- ('.unira Cresconuun, 111, 59, (lô ; IN', 46,
Ira Cresconiiun, 1\", i>, 7. 55 ; 47, 57.
2) E/jUL 43, ;», 2() ; 1S5, 4, 17 ; Con- 5) Cunlrn Cresominni. 111. 5(1, (;2 ; 1\ ,
1) Voyez plus haut, tome IV, p. 57 3) Epist. 87, 1 et 10; Relracl., II, 72
et suiv. et 77. — Cf. Possidius, Vita Augustini,
2) Augustin, Contra litteras Petiliani, H.
I, 1 ; II, 23, 55
; 98, 226 101, 232.
; 4) Voyez tome IV, p. 165 et suiv.
336 LITTÉRATURE DONATISTE
II
cliapitro 1, p. 32 cl sniv.
LES ORATKUUS 337
nemi qu'il visait, quel que fût le thème de son discours '. Dieu ?
Les Catholiques étaient les suppôts du Diable. Le Christ et la
foi chrétienne? Ils étaient des traîtres, des renégats, de vrais
païens, des persécuteurs. Les saintes Ecritures ? Par lâcheté,
ils avaient brûlé les Evangiles. L'Eglise? En face de la véri-
1) E[;ist. 2iM,
^^. 4) Voyez tome IV, i).
12(» et Mii\. ;
II, l et siii\. ; fieirarl., Il, :,\. Cô ; IV, 4, ô ; 48, .")S ot sni\. ; (Wi, H2 ;
1) Sernw ad Caesareensis Ecdesiae pie- lat., III, 18, 36; Ad Donatistas post Col-
bem, S; Gésta cum Emerito, 2; Retract., lut., 1 ot suiv. 4, 6; 11, 15 et suiv.
; ;
lat., 2 cl siÙA.; 12, lt> et siii\ . ; 17,21 ; et suix.; !), 10 et siii\. ; Jlciracl., Il,
alors, directe et très vive, entre les deux Eglises. Les sermon-
naires donatistes avaient fini par s'apercevoir, sans l'avouer
d'ailleurs, qu'ils perdaient leur temps ils n'étaient pas de :
1) Possidius, \ ila Augustini, 9. 4) Epist. 33-35 ; 88, 6-7 ; 105, 2,3 ; Con-
2) Ihid., 12 Augustin, Episl. 35, 4
;
;
tra Cresconium, III, 48, 53.
Enchiridion, 5, 17. 5) Ad Calliolicos Epistula contra Dona-
3) Augustiu, Ad Catholkos Epistula tistas, 5, 9 ; 9, 23 ; 13, 32-33 ; 15, 37 et
contra Donatistas, 5, 9. suiv. ; 17, 43 ; 19, 52 ; 21, 57 et suiv
348 LITTÉRATURE DONATISTE
tantine.
C'était au plus fort des polémiques entre Petilianus et Au-
gustin. La Lettre pastorale contre les Catholiques, récemment
adressée par leur évêque aux clercs schismatiques du diocèse de
Gonstantine, avait déchaîné enNumidie une véritable tempête '.
A\igustin avait aussitôt dénoncé les erreurs de l'impertinent
Donatiste d'abord dans une lettre aux fidèles d'Hippone, qui
:
\)C<jnlralillerasPcliliiini,\,\\\\^\ \
Ail 4) Conlra Cresconîuiii. 1, 1 et siiiv. ;
VI. 23
350 LITTIÏRATURE DONATISTE
crit ou en rebelle.
Loin de suivre l'exemple de leur évêque et de s'obstiner avec
lui dans la résistance, la plupart des schismatiques du diocèse
se sentaient alors touchés de la grâce, et rentraient en paix
dans l'Eglise catholique. Nous possédons, justement, du même
pays et du même temps, un petit discours fort curieux, qui pré-
sente le plus frappant contraste avec les derniers sermons de
Macrobius c'est la profession de foi d'un Donatiste con-
:
verti'^.
Le discours a été prononcé à Hippone, « aux vigiles de Maxi-.
maintenant. —
Eh bien lui aussi, le fameux docteur des Gen-
!
1) « Ad >ijj;iliiis M;iximi:iiii )> [iliiil., \crli est d'iiillcnrs og-.irr ;iii iiiiliru des
oii-tôtc). sermons de l'é^ècjiic c;illioli((iic.
2) Ce discours d'iiii Domdiste cou- S) Sernio l?('>0.
LKS 0;!.\TEU11S 353
1) Gesta npiid Zenophilum, p. 192-196 Epislula contra Donatistas, 11, 28; 19.
Ziwsa. 49 ; Hpisl. lOô, 2, 9 ; In loluinnis Evan-
2) Ibid , p. 19S. ijeHuni traclatus, XllI. 17.
3) Optât, I, 13-11 et 19 ; Augustin, 7) Epistula concilii romani (ann. 378)
(Jouira Cresconiuni, III, 27, 30. ad Gratianuni el Valentinianum inipera-
[ 1) Optât, II, 18-19. II, 23, 58 ; 28, 6". ; 33, 78 ; 37, 88 ; 103,
2) Augustin, Epist. 44, 4, 9 105, 2, ; 237.
3; 108, 5, 14; 133, 1 134, 2; Contra
; ô) Contra Epistulam Parmeniani, II,
Cresconium, III, 43, 47 IV^ 51, 61 Bre-
; ; 4, 8 15, 34
; Contra litteras Petiliani,
;
vie. Collât., III, 11, 21-22 Ad Donatis- ; 11,103,237 ;Co«ira C'rescortium, III, 13, 16.
tas post Collât., 17, 22. 6) Epist. 87, 5 Contra Epistulam Par-
;
4) Contra litteras Petiliani, I, 9, 10; 35, 82; 44, 104; 103, 237.
356 LITTÉRATURE DOîsATISTE
rappelant ce qu'il avait fait pour l'unité donatiste, et, d'un ton
sans réplique, les invitant à ratifier toutes ses mesures'. De
tous ces discours, par malheur, il ne reste rien. On peut seu-
lement imaginer, d'après les circonstances et quelques traits
épars, la physionomie de cette éloquence du tribun mitre une :
III
Contra litteras PHUiani, II, 92, 203^ 97, PeliUani, II, 15, 35; 20, 45; .58, 132; III.
224. 39, 45; Contra Cresconhim, III, 52, 58;
2) Gesta apud Zenophilum, p. 185 et 56, 62; 60, 66; IV, 3, 3; 47, 57 ; Gestn
suiv. ; Augustin, Contra Cresconhim, III, cam Emerito, 9; Serino II in Psalm. 36,
28, 32 et suiv. 18-20.
3) Augustin, fîpisZ. 93, 3, 11 et suiv.; 108,
360 LITTÉRATURE DONATISTE
semble bien avoir été complice d'un faussaire, qui fut démas-
qué à l'audience suivante par l'avocat de l'^elix. Ce faussaire
lui-même, le triste Ingentius, voulut jouer à l'orateur, pour
cacher la vérité sous de belles paroles. Scribe public et décu-
rion, considéré jusque-là comme un honnête homme, mais fa-
natique intrigant, il était devenu l'agent à tout faire des Dona-
tistes. Il n'aimait pas Félix, son ancien évéque pour le perdre, ;
1) Pos?.idius, Vita Augustini, 12; Au- Contra Cresconium, III, 47, 51; 48,52;
gustin, Epist. 105, 2, i; Contra Cresco- Possidius, llta Augnstini, 12.
iiium, III, 46, 50. 3) Augustin, Contra Cresconium, III,
2) Augustin, Epist. 88, 7 ; 105, 2, 4 ; 43, 47.
364 LITTÉRATURE DONATISTE
VI. 24
366 LITTÉRATURE DONÂTISTE
%
consohi plus tai-d, dans une nouvelle église bâtie aux frais de
ses fidèles, par d'éloquents sermons où il fulminait contre ses
adversaires et ses bourreaux ^.
Au nom de Nummasius est souvent associé celui de son con-
1) Contra Crcscon'niin. III, .">(!, (12; I\', 3) Coiitni Eiiislnlmii Parinriiiani, 111, G,
•1, ,"). 29; Contra Cri'sroniiini, IV, 4H, ,58 cl suiv.
2} IliuL, IV, 48, 58; (iG, 82.
LES ORATEURS 36';
1) Contra Cresconium,
III, 56, 62; IV, 4) « Carthagine, in secretario praeto-
4, 5 et suiv.; 46; 40, 47; 41, 48.
.^.9, rii,Titianus dixit... » {Ibid., III, 56, 62).
2) Contra Cresconium, III, 19, 22; 53, 5) Epist. 108, 5, 14; Contra Cresco-
59; IV, 4, 5; Contra Gaudentium, II, 7. nhim, III, 56, 62; IV, 4, 5; 39, 46 et suiv.
3) Contra Cresconium, III, 56, 62. 6) Contra Cresconium, III, 56,62.
368 LITTÉHATUllE DONATISTE
1) Contra Cresconium, III, "if), 62. 3) Conlni Crcsconiuin, III, ôij, 02. — Cf.
2) Epist. 108, r>. 14. IV, 4, 5; 40, 47.
LES ORATEURS 369
moins que cette pièce eût été lue déjà au début, avec la recfuête
des gens de Musti. En tout cas, Prtietextatus recevait ici sa
]) Contra Cresconium, 111, oG, 62; IV, 2) Contra Cresconiurû, III, 50, 62.
4, 5.
370 LITTÉRATURE DONATISTE
mence, ils ont aussi une raideur fatigante, des violences et des
exagérations de mauvais goût, une à[)reté si constante qu'elle
en devient monotone. Mais, si l'on s'en tient au fond de leurs
discours, on sera surtout frappé de leur habileté prol'ession-
1) Gesta apiid Zenophihim. p. 186 et 3) Enarr. in Psulni. 57, 15; Contra lit-
IV
1) Contra Cresconitim, III, ."«lî, 62; ôD, 4) Gesta apud Zenophilum, p. 185-188;
G5; IV, 4, 5. p. 192-193.
2) Contra liiteras Petiliani, M, 5S, 132; 5) Augustin, Epist. 34-35; 88, 6-7; 105,
Enarr. in Psalm. 57, 15. 2, 4; Contra Cresconium. IH, 46, .50 et
3) Acifi iiurijationis Fclicis, p. 20(1-2(14. siiiv. ; Possidius, Vita Au/iustini, 12.
LES ORATEURS 373
l'on parlait ainsi dans ces débats entre évoques, c'est qu'on
subissait l'influence du milieu et qu'on ne pouvait guère parler
autrement.
On se rappelle, dans
réunion de Girta, en 305, les dis-
la
cours tour à tour trop hautains et trop accommodants du primat
Secundus, les confessions piteuses de ses collègues compromis
lors des persécutions, les menaces et les sorties furibondes du
sanguinaire Pnrpurius '. Puis, en 312, à Garthage, dans l'as-
semblée des dissidents, les âpres réquisitoires contre Ga?cilia-
uus et ses consécrateurs, les propos truculents du même Pur-
purins, ces débats de pure forme aboutissant à la condamnation
prévue des accusés, et tous les assistants, à tour de rôle, venant
motiver leur vote unanime sur un ton tranchant d'inquisiteurs'-.
Enfin, dans les conciles de Rome ou d'Arles, Donat et ses aco-
lytes déclamant comme env\frique, lançant des accusations en
l'air ou des menaces sibyllines, récriminant contre les faits ou
cherchant à se dérober-^. Assurément, ces façons de parler et de
discuter sont de nature à surprendre dans des assemblées d'é-
vêques. Pourtant, telle sera jusqu'au bout, dans l'Eglise de Do-
nat, la physionomie des conciles, et, dans ces conciles, l'atti-
tude ou la méthode des orateurs.
1) Optât, I, 14; Augustin, Conlra Cres- Collai., 22, 38; Contra Fuhjenliuin, 26.
comuin, III, 27, 30. 3) Optât,I, 2-t Appendix d'Optat, n. 4,
;
3) Colhil. C(irthu(i., l, 187. Il,y2, 203 et 205: 97, 224; Einst. 105, 2,
4) Passio Marnili, (i-12, p. 7(i2-7(;5. <), —CI'. Opt.il. 11. H'.; III, 3.
LES ORATEURS 377
Primianistes.
Le plus célèbre des orateurs maximianistes a été l'homme
qui donna son nom au parti. On sait que Maximianus avait une
éclatante réputation d'éloquence pour le talent de la parole, :
1) Optât, II, 18; III, 3; VI, 5; Augus- 5) Epist. 93,1 93, 3, 11 et suiv.
; ; Contra
tin, Contra Epistulam Parmeniani, I, 12, Epistulam Parmeniani, l, 10, 16 et suiv.
19; Contra litteras Petiliani, II, 92, 203. G) Epistula concilii romani {nnn. 378) ad
les rapports sur l'enquête, les discussions sur les faits et sur
les conclusions des rapporteurs, les réquisitoires contre Pri-
mianus, les délibérations sur les mesui-es à prendre, sur les
clauses de la sentence, sur le texte de la circulaire destinée aux
les basiliques, dont il nous a fait fermer les portes par la foule
et par la police. Il a repoussé avec des outrages les députés
envoyés par nous. Il a usurpé beaucoup d'immeubles, d'abord
par la force, puis en vertu de décisions judiciaires. Enfin, il
s'est rendu coupable d'autres actes, que par bienséance nous
avons passés sous silence'-. »
Ailleurs, le même orateur, ou l'un de ses confrères, formu-
lait ses propositions. Dans un exorde assez habile, il avertis-
sait ses collègues quie Dieu lui-même imposait aux évêques les
fonctions de juge « Il n'est personne qui ne le sache, mes très
:
chers frères les évêques du Seigneur, non par leur propre vo-
:
.59; IV, 4, 5 ; 31, 38; Gesta cum Emerito, 9 ; II, 3, 7; Contra Crcsronium, 111. 15, 18;
10. IV, 25, 32; 51, tJl Contra Gaadcntiuni,
;
Epist. 108, 2, 5.
YI. 25
382 LITTÉRATURE DOXATISTE
3; IbiiL, I, 104; 120; 129-133; 157; 103; plus haut, chap. iv, 2. ?•
LES OIIATEUKS 383
2) Ibi(L, III, iVà. 7) Ibid., III. 80; 83; 88. Cf. 111, 168;
.3) llAd., m, (>4-H7. 216,
4) Ibid., III, 68-70. 8) Ibid., m, 239-240.
5) Ibkl., III, 71. 9) Ibid., III, 251; 271.
LES ORATEURS 387
un tel était malade, tel autre « avait mal aux yeux, il n'avait
pu venir- ». Un certain prêtre Puifinus avait signé pour son
évêque Iulianus: c'est que « Iulianus était retenu par sa mau-
vaise santé mais, craignant de paraître manquer à son devoir,
;
passer aux gens d'en face » Mais les anciens Catholiques ral-
=•.
2) Jhiil., m, 7. "
«) Ihid., III, 140.
3) Ibid., m, 8. 7) Ibid., III, 160.
4) Ibid., m, 122. 8) Ibid., III, Kil.
I
LES ORATEURS 393
pas l'être.
Au fond, Adeodatus capable de patience que pen-
n'était
dant les discours de ses amis; il n'admettait le silence que
devant la vérité donatiste. Ne nous en plaignons pas trop, puis-
qu'il s'agit ici, non de vertus évangéliquQS, mais de talent ora-
toire. Et, certes, ce n'était pas le talent qui manquait à l'ora-
teur de Milev. Il avait le tempérament, l'ardeur passionnée, le
verbe sonore, l'action, le geste et l'audace. Sans doute, sa pa-
role agressive et querelleuse, trop bruyante, parfois criarde et
vulgaire, détonnait un peu dans une assemblée d'évêques. Mais
n'oublions pas que, ce jour-là, l'homme n'était plus dans son
milieu. Cette éloquence de tribun, vivante et tapageuse, chaude
et vibrante, âpre et pittoresque, enthousiasmait là-bas, dans
son diocèse, son public sectaire de Numides fanatisés.
Nous venons de voir en scène, dans les orageux débats de
Carthage, les plus actifs et les plus éloquents des porte-parole
du Donatisme. Assurément ces avocats-mandataires, Adeodatus
de Milev, Montanus de Zama, Emeritus de C?esarca, surtout
Petilianus de Constantine, étaient alors les principaux orateurs
du parti mais ce n'étaient pas les seuls. Autour d'eux, dans la
;
mes fidèles sont entrés en communion avec toi avant tes vio-
lences?'- » Un autre schismatique, Donatus de Cillium, préten-
dait établir qu'il avait une communauté dans la ville voisine de
Vegesela, en Byzacène « J'ai là des diacres, disait-il. Les
:
V[. 26
398 LITTÉRATURE DONATISTE
1) Témoin les conciles de Carthage gadi en 397. Voyez t. IV, p. 364 et suiv.
en 312, de Cabarsussa en 393, de Bagaï 3) Sur tous ces thèmes familiers aux
en 894. Voyez plus haut, t. IV, p. 326 orateurs comme aux polémistes de
et suiv. ; p. 356-364. l'Église donatiste, voyez t. IV, p. 155
2) Par exemple, au concile de Thamu- et suiv.; p. 174 et suiv.
400. LITTÉRATURE DONA.TISTE
LIVRE DIXIEME
III. —
— Pamphlet de Petilianus contre Augustin. Comment Petilianus fut
amené à des polémiques directes contre lévêque d'Hippone. Forme —
de l'ouvrage. — Titre. —Nombreux fragments conservés. —
Possibilité
d'une restitution partielle. —
Contenu du pamphlet. —
Critique de la
méthode d'Augustin dans sa réfutation. —
Railleries contre ses prétendus
404 TABLE DES MATIERES
Pages
sophismes et contre — Accusation de déloyauté. — La
sa dialectique.
question du baptême. — Réponse aux oljjections et justification de la
tlièse donatiste. — Questions de — Invectives contre l'évèque d'Hip-
fait.
profession. —
Son talent et son élociuence. —
Caractère et tour d'esprit.
— Comment (Cresconius fut amené à intervenir dans la controverse entre
Augustin et Pelilianns. —
Sa Lettre à Augustin. Date de cet ouvrage. — 87
I. — Biographie- d'Eraeritus. —
11 était citoyen de Caîsarea en Mauré-
tanie. —Son éducation. —
Son élection comme évèque schismatique de
Caîsarea. —
Longue durée de son episcopat. —
Emeritus au concile de
Bagaï, en 394. —
Sa réputation en Afrique. Lettres que lui adresse
.\ugustin, vers 405. —
Emeritus à la Conférence de Carthage en 411. —
Son attitude après la Conférence. —
Augustin lui dédie un ou\rage vers
416. —Coiiférences d'Emeritus|avoc Augustin, en 418, à Ga3sarea. — Son
caractère et son tour d'esprit. 145
Pages,
cats-mandataires de son parti et l'un des principaux champions du Dona-
tisme. —
Son attitude et ses tentatives d'obstruction. Ses fréquentes —
interruptions. —
Ses principaux discours. —
Ses discussions avec Augus-
tin. —
Les sermons d'Emeritus. —
Caractères de son éloquence. . . . 157
I. — Biographie de Gaudentius. —
Thamugadi donatiste. Gaudentius est —
élu en 398 évoque schismatique de Tiiamugadi. —
Son rôle à la Confé-
rence de Carthage en 411. —
Son attitude intransigeante après la pros-
cription du Donatisme. —
Sa résistance désespérée aux édits et au com-
missaire de l'empereur. —
11 menace de se brûler dans son église avec
ses fldèles. —
Ses lettres au tribun Dulcitius. —
Ses polémiques contre
Augustin. —
Son caractère 191
I. — temps d'Augustin.
Activité épistolaire des Donatistes au Lettres pas- —
torales. —
Lettres synodales. —
Lettres circulaires des primats. Lettres —
d'évèques donatistes à Primianus. —
Lettres des seniores de l'Eglistj de
Carthage. — Ouvrages en forme de lettre. —
Correspondances propre-
ment dites. — Numidie. —
Maurétanie. —
Région d'Hippone 259
centius à Augustin. —
Comment on peut la reconstituer. Nombreux —
fragments conservés. —
Objet de la lettre. Protestation contre l'édit —
d'union de 405 et contre les persécutions. Analyse de la lettre de V'in- —
centius. —
Appel aux. communs souvenirs de jeunesse. Contre les lois —
de répression. —
Revendication de la liberté de conscience, Critique —
de la conduite des Catholiques africains. Réfutation de la doctrine ca- —
tholique sur l'Eglise universelle. —
Sens du mot catholique. La véri- —
table Eglise n'existe plus au delà des mers. Témoignage d'Hilaire de —
Poitiers. —
La véritable Eglise est l'Eglise rogatiste. La question du —
baptême. —Tradition de Cyprien et des anciens conciles africains. Ré- —
ponse d'Augustin à Vincentius. —
Intérêt de cette correspondance. —
Ton de la polémique. —
Admiration des Rogatistes pour leur primat. —
L'ombre de l'évêque Vincentius et son chef-d'œuvre posthume. . . . 315
Pages.
ni. — Les avocats donatistcs. —
L'éloquence judiciaire dans l'iiistoire du
Donatism». —
Les premiers avocats de l'Eglise dissidente. —
Maximus et
Nuudinarius. —
Temps d'Augustin. —
Avocats d'occasion» —
Enquêtes
judiciaires et procès. —
Grispinus de Calama et ses plaidoyers de Car-
thago. — Avocats de profession. —
Leur rôle dans les procès donatistcs
de cette période. —
L'avocat de Primianas contre Maximianiis. L'avo- —
cat Numm isius. —
Son plaidoyer pour Restilutus contre Salvius de Mem-
brcssa. —
Analyse et fragments conservés. —
L'avocat Titianus. Son —
plaidoyer pour les Prinii.inistes de Masti et d'Assuras contre les évèques
Felicianus et Prietextatus. —
Analyse et fragments. —
Caractère de cette
éloquence judiciaire 358
<o
DESCRIPTION DE L'AFRIQUE DU NORD
ENTREPRISE PAR ORDRE DE
HISTOIRE LITTÉRAIRE
DE
L'AFRIQUE CHRÉTIENNE
DEPUIS LES ORIGIMS JUSQU'A L'iVASION ARABE
HISTOIRE LITTÉRAIRE
DE
L'AFRIQUE CHRÉTIENNE
DEPUIS LES ORIGINES JUSQU'A L'INVASION ARABE
PAR
PAUL MONCEAUX
MEMBRE DE l'iNSTITUT
PROFESSEUR AU COLLÈGE DE FRANCE
ET A l'École des hautes-études
TOME SEPTIÈME
SAINT AUGUSTIN
ET LE DONATISME
PARIS
ÉDITIONS ERNEST LEROUX
28, RUE BONAPARTE (vi^)
1923
Â,y
LIVRE ONZIEME
SAINT AUGUSTIN
ET LE DONATISME
(
CHAPITRE I
toire.
Pendant les trente-cinq ans qui correspondent à son épis-
copat, le schisme séculaire des Africains a perdu toute sa force
d'expansion, sinon de résistance, et presque tout le terrain
gagné durant trois générations. On se rend compte de ce chan-
gement radical, si l'on compare la situation respective des deux
Eglises rivales au commencement et à la fin de cette période :
gagnait chaque jour par une très active propagande. Elle l'em-
portait par le nombre en Numidie, où des villes entières lui
étaient acquises'^. Partout elle se dressait, audacieuse et me-
naçante, fière de son passé, confiante en son avenir, forte de
l'indifférence ou de la faveur des fonctionnaires romains, qui vi-
siblement la ménageaient, malgré les lois impériales, par
amour de la paix ou par crainte des responsabilités ^. En face
de ce Donatisme si entreprenant ou même agressif, le Catholi-
cisme africain semblait alors découragé, presque résigné au
partage comme étonné de vivre encore, dans son domaine de
:
1) Abstraction faite de tous les docu- Optât, 111, 4; Augustin, Ep'ist. 23, 5;
ments historiques qui ont été étudiés 44, 5, 12;129, 6; 209, 2; Enarr. Il in
précédemment (t. IV). —
Sur le rôle Psalm. 21, 26; Sernu II in Psalni. 36, 19;
des amis et antres auxiliaires d'Augus- Conlra lilteras Pelilinni, II, 83, 184; Pos-
tin dans sa campagne contre le Dona- sidius, Vita Au{iustiiii, 7.
lisrac, voyez plus loin, § II. 3) Augustin, ./?/;i'.s-^ 34-35; 87, 8.
1) Cod. Theod., XVI, 5, 52 et suiv. ; 5, et suiv. ; 209, 2-3 ; Gesla cum Emerito, 1-3
63-65; Codex canon. Eccles. afric, can. et 12; Contra Gaadentium, l, 1; 11, 12 et
117-1 19 et 123-124 C. I. L., VIII, 21570-
; suiv. 29, 38 37, 47-48.
; ;
21574; Augustin, Epist. 185, 9, 3(J; 204, 1 2) PossiJius, Vita Augustini, 13, 15-.
6 POLÉMIQUES ANTIDONATISTES d'aUGUSTIN
1) Augustin, Psa/mus contra partem Do- 6-7 ; 29, 12 ; 35, 2 ; 43, 8, 2i ; 88, 1 ; 108, 5, 14;
nati, 84 137-155"; Contra' Epislulan Panne-
; 133, 1 ; 134, 2 ; 185, 4, 15.
niani, 1, 11, 17-18 Contra litteras Petdlani,
; 2) Epsit. 29, 11.
I, 24, 26 II, 65, 146
; 84, 186 88, 195 96,
; ; ; 3) In Evangelium lohannis, VI, 25.
222;Enarr. inPsalni.Và2,'6ei6;Epist.23,
10 POLÉMIQUES ANTIDONATISTES d'aUGUSTIN
VII.
12 POLÉMIQUES ANTIDONATISTES DAUGUSTIN
3) Episl. 34, .5 ; 3.j, 1 cl 3. ras Pelilinni, I, 24, 26 ; II, 14, 33 ; 65, 14'i ;
4) Possiiiiiis, Vila Awiustini, il, 10. 84, 186; 88, 195; 96, 222; Possidius, Vila
5-) Augu-stiii, Episl. 35, 2 cl 4 ; 43, 8, Aurjustini, 10, U.
24; Enarr. in Psalni. 54, 26; 132, 6 ; Con-
SA CAMPAGNE 15
1) 51. T'"
Retracl., Il, 43-44 ;
Z 139; Serm. 129; 238; 249; 265-266; 268-
Z 2) Serm. IJI in Psalm. 32 Serm. // et
; 269 271 292 295.
; ; ;
III in Psalm. ^6; Enarr.inPsalm. 95;\d2; i) Epis t. 58; 61; 69-70; 76; 78; 83;
245.
18 POLÉMIQUES ANTIDONATISTES d'aUGUSTIN
Au
milieu de toutes ces controverses, l'évêque d'Hippone
observait toujours les schismatiques de son diocèse d'abord :
1) Contra litterax Petiliani, I, en-têle, III, 42,46 et suiv. ; Possidiiis, Vita Au-
et 1, 1; 29, 31. yuslini,10 vl 12.
2) Ad CathoUcos Epislula contra Dona- 5) Augustin, Contra Cresconium, JII,
tistas, en-tète, et 1, 1 ; 25, 72-75. 48, 53; Epist. 88, 6.
S) Petrad., II, 45. 6) Episrl. H8, 7.
4) Epist. 88, 6-7; Contra Cresconium, 7) Epist. 57. 2; 58, 3.
SA CAMPAGNE . lî>
Si bien conçu que fût ce plan, si bien réglée qu'en fût l'appli-
cation, il échoua encore devant l'intransigeance des évèques
dissidents. Augustin voulut du moins porter la question devant
le public d'où la proclamation qu'il adressa vers la fin de 403
:
de croire qu'il s'y est rendu pour toutes les grandes assises
épiscopales de ces temps-là. Il y faisait volontiers d'assez longs
séjours. Par exemple, après le Concile du25 août 403, il y passa
une bonne partie de l'automne à cause des pluies persistantes,
:
1) Codex canon. Eccles. afric, can. 93; 4) Serm. II et /// in Psalm. 36.
Augustin, Epist. 185, 7, 25. 5) Contra Cresconium, III, 46, 50 et
2) Augustin, Serm. II in Psalm. 36, 1. suiv. ; Epist. 88, 7; 105,2, 4; Possidius,
3) Enarr. III in Psalm. 32; Serm. I-III Vita Augustini, 12, 14.
in Psalm. 36.
22 POLÉMIQUES ANT1DONA.TISTES d'aUGUSTIN
à leur poste ^.
des routes, il envoyait ses prêtres dans les bourgs les plus éloi-
gnés delà ville, et lui-même y allait souvent prêchera Pour
décider les colons des grands domaines, qui constituaient en
ces régions une partie très importante de la population rurale,
il sollicitait le concours des propriétaires, leurs maîtres deFes- :
111.
3) liclracl., II, .W-ôi. 8) Serm. 46-47; 202; 285; 296; 325;
4) Ibid., II, 56 et 61. Scrm. II in Psahn. 101 Enarr. in Psalm.
;
8) Cod. Tlieod., X.VI, 5, 51; Codex ca- guslin, Brevic. Collât,, 111,2, 2 et suiv.
non. Ecclc.'^. nfric, can. 107. 7) Augustin, Epist. 88, 10.
Contra Gdudenliam, I, 24, 27. tin, Epist. 88, 10] Brevic. Collai., 111, 4,.
6) Code.v canon. Eccles. afric. , can. loi. 5 cl suiv.
SA CAMPAGNE 29
1) Codex canon. Ecoles, afric, csm. 107. 4) Augustin, Epist. 128 et 129; Col-
2) Cod. Theod., XVI, 11, S; Collât. lat. Carthag.,\,\'o ei 19,.
1) Possidius, Vita Au<iuslini, IS, 15. 3) Retract., II, 6.5; Brevic. Collât., I,
II
tanie. —
Deuterius de Ccesarea. —
Novatus de Sitifi. Adversaires du —
schisme eu Numidie. —
Aurelius de Macomades. Severus de Milev.—
— Fortunatiis de Constanliiie. —
Alypius de Thagaste. Possidius de —
Calama. —
Autres auxiliaires d'Augustin. —
Clercs et laïques d'Hip]ioue.
— L'auteur du Contra Fulgentlum. —
Grands propriétaires de Numidie
qui aidèrent Augustin dans sa propagande. —
Conversion de Celer et de
ses colons. —
Le sénateur Pammachius et ses colons convertis. —
Festus et sa lettre aux Donatistes de ses domaines. Gouverneurs et —
hauts foncliounaires romains, qui furent les alliés d'Augustin contre
le Donatisrae. —
Le ministre' Olyrapius, successeur de Stilichon. Le —
proconsul Donatus. —
Le proconsul Apringius. —
Le vicaire d'Afrique
Macedouius. —
Le comte d'Afrique Bonifatius. ^
Commissaires impé-
riaux. — Marcellinus. —
Gsecilianus. Dulcitius. — Caractères de —
l'appui prêté à Augustin par ses divers auxiliaires.
il était vif et il avait la dent dure, si l'on en juge par ses dis-
1) Possidius, Vita Augustini, 12, 1-t. Possidius, Vita Augastini, 12, 14.
2) Augustin, Epist. 105, 2, 4. — Gf . 3) Augustin, Enarr. in Psalm. 95, 3.
38 POLÉMIQUES ANTIDONATISTES d'aUGUSTIN
loux d'Augustin.
De concert avec son grand ami d'Hippone, qui chaque année
venait à Carthage s'entendre avec lui, il a mené toute la cam-
pagne contre le Donatisme. Dans une collaboration si étroite et
si constante, on ne saurait toujours faire exactement le départ
1) Collai. Carlliag., 1, IC; 18; 38; 41; 41; 55; 80; 98; lUl ; 110; llti; l.w; 160;
43; 46; 55; 57; 60; 72; 74; 76; 84; 99; 162, etc.
102 132 139; ir,2; 154; 156; 158; 100;
; ; 3) « Evodiiim juvenem ex nostro mu-
162-163; 177; 207-208. nicipio » (Augustin, Confess., I\, 8).
2) Ibid., Il, 14; 50; 56; 66; III, 7; 20;
SES ALLIÉS 43
VU, i
44 POr.ÉMIQUES ANTIDONATISTES d' AUGUSTIN
Il fut mêlé aussi, bien que d'une façon indirecte, aux querelles
les canons 106 et 107. 123-124 ; 128 144 208 224 244.
; ; ; ;
5) Epist. 87; Retract., II, 72 et 77. 9) Gesta cum Emerila, 1 et suiv. — Cf..
Il
y joua avec une maîtrise incomparable, avec une voix reten-
tissante et une exactitude impeccable, son rôle de nomenclator
pour la Numidie. A mesure que défilaient les évoques dissidents
pour la vérification des pouvoirs, Aurelius les suivait de l'œil
et les reconnaissait, toisant les suspects, donnant alors sur eux
et sur leurs Eglises des renseignements précis, enlevant au
besoin les masques et dénonçant les ruses, opposant aux erreurs
volontaires ou aux faux-fuyants les noms et les faits, tirés d'un&
mémoire étonnante qui fouctiounait avec la sûreté d'un appareil
enregistreur '. Ce jour-là, par ses révélations de toute sorte
qui établirent la situation vraie du Donatisme en Numidie^
l'évèque curieux et bavard de Macomades fut pour ses confrères
catholiques un très précieux auxiliaire.
Aussi discret qu'Aurelius de Macomades l'était peu, Severus
de Milev fut peut-être le plus cher des amis d'Augustin. Né à
Tliagaste, il n'était pas seulement son compatriote il avait été ;
pone, qui connaissait tout aussi bien le chemin de Milev '. Dans
l'intervalle des visites, on échangeait des lettres 2. Severus pro-
fessait une très vive admiration pour Augustin, dont il célébrait
surtout l'éloquence et le style '^ Augustin, de son côté, estimait
fort le talent oratoire de Severus, qui était aussi un écrivain
délicat, avec des raffinements de styliste et une tendance à la
préciosité ^. Quant à l'amitié qui unissait les deux évêques, elle
restait une amitié de jeunesse, avec la fleur des souvenirs com-
muns et l'intimité familière des camaraderies d'autrefois. Augus-
tin, ordinairement plus réservé dans ses correspondances, par-
lait de cette amitié unique avec une émotion touchante, avec
des mots presque tendres; et son ami n'était pas en reste ^''.
thage, mais qui avait dû retourner aussitôt chez lui pour cause
de maladie'-^. L'évêque catholique de Milev paraît avoir été de
santé délicate il n'avait ni la carrure ni les poumons de son
;
Augustin, qui s'y connaissait, faisait grand cas de ses sermons ^".
de Constantine ^. |
1) De unico baplismo, 16, 29; Eplst. 2) Epist. 53 et 115; Contra litteras Pe-
44, 1, 1; 6, 13. Sur — les épiscopats tiliani, I, 1; II, 99, 228.
successifs de Profuturus et de ForUiiia- 3) Episl. 53.
tus, cf. Epist. 28, 1 ; 32, 1; 38; 53; 71, 4) Contra litleras Petiliani, III, 38,44.
1, 2; 72, 1; 115. - 5) Epist. 53.
SES ALLIÉS 53
liques, où l'on brisa tous les autels 3, Les exploits de ses parti-
sans n'empêchaient pas l'évêque donatiste de se poser en mar-
tyr et d'incriminer son collègue catholique. Les deux prélats se
reprochaient mutuellement leurs violences, et se traitaient réci-
proquement de persécuteur^. Enfin, Petilianus essaya de décon-
sidérer son adversaire en lui î décochant sa grande injure: il
l'accusa d'être un Manichéen honteux^. \
Dès lors, ils ne rêvèrent plus que de retourner dans leur ville
natale de Thagaste, pour y mener la vie d'ascète, sans d'ailleurs
renoncer aux lettres et le long voyage recommença en sens
;
tinua presque de vivre avec lui. Thagaste n'était pas alors plus
tisme.
On dirait qu'il attendit pour naître le jour de sa rencontre
avec Augustin. Jusqu'à ce jour-là, il n'existe pas pour nous on :
1) /spi.s-i. 44, 3, 6; Gesta cum Emerilo, 218; 215; 217; 221 223. ;
3) ColUa. CarlluKj., I, 2 et 55; II, 2 ; 102; 11!) 122; 186; 170; 178; 206; 240;
;
devint le disciple d'Augustin, qui en eut tant, mais qui n'eut pas
d'admirateur plus enthousiaste ni d'auditeur plus attentif. Ces
jours d'Hippone, Possidius s'en souvenait et en parlait avec une
émotion pénétrante et une sorte de dévotion, comme s'il y eût
goûté les joies du Paradis.
Il fallut pourtant s'arracher aux délices d'Hippone. Les monas-
tères fondés par Augustin dans son diocèse étaient alors une
pépinière d'évéques de ce côté-là se tournaient ordinairement
:
VII. ri
60 POLÉMIQUES ANTIDONATISTES d'aUGUSTIN
2) Codex canon. Eccles. afric.,C3in. 9d; 69; 80; 105; 119; 141-142;
146; 148;
Augustin, Epist. 185, 7, 25. 152; 168; 178; 180; 183; 192; 195; 243;
3) Codex canon. Ecoles, afric, can. 245; 256.
107.
62 POLÉMIQUES ANTIDONATISTES d'aUGUSTIN
412 et 420.
Le Contra Fulgentium une réponse à un traité donatiste
est
sur le baptême, que l'auteur avait reçu du schismatique Ful-
gentius\ C'est une réfutation directe de ce traité, dans le cadre
d'un dialogue entre un Donatiste et un Catholique o. L'interlo-
cuteur donatiste est Fulgentius lui-même^; et toutes les paroles
rêt purement historique, est dans le fait même que deux clercs
quelconques des deux Eglises opposées, deux clercs de condi-
tion médiocre, sans autorité ni talent, aient cru devoir interve-
nir dans ces grandes controverses. On saisit double contre-
ici le
votre intérêt, disait-il, que cela se fait. C'est pour vous que
travaillent les évèques, interprètes d'une foi incorruptible; c'est
pour vous que travaille l'empereur lui-même c'est pour vous ;
poussa une armée romaine envoyée contre lui, et finit par ap-
peler à son aide les Vandales d'Espagne. Il ne sut même pas
tirer parti de sa trahison ; car, là encore, il manqua d'esprit de
suite. Quand il en proie aux Vandales,
vit la moitié de l'Afrique
il s'affola, effrayé lui-même des conséquences de sa sottise. Il
1) Sur le rôle de Bonifatius, cf. Pallu 4) Epist. 185, 1, 1-3 : 2, 6 et suiv, ; 11,.
de Lesserl, Fastes des provinces africaines, 51.
t. II, p. 281-290; Martroye,
"
Genséric, 5) Epist. 185. — Cf. lietract., Il, H.
p. 82 et suiv. 6) Epist. 185, 1; 189,7-8.
2) Augustin, Epist. ISô; 189; 220. 7) Epist. 220, 2-3 et 12.
3) Epist. 185, 2, 6; 220, 3 et 7. 8) Epist. 220.
SES ALLIÉS 71
alliés d'Augustin.
Le premier et le plus célèbre de ces commissaires est Mar-
cellinus, le président de la Conférence de Carthage. C'était un
très honnête et galant homme, distingué, fort instruit, bon
juriste et orateur de talent. Il était très lié avec Augustin,
avec qui il entretenait une correspondance régulière corres- :
1) Collai. Carthag., I, 51-52 ; 54 ; 5fi ; 3) Augustin, Epist. 133, 1-3; 134. 12;
144-146; il, 3-7; 57; lil, 51 ei suiv. ;
139,1-2.
250-257 ; etc. 4) Epist. 133 et 139.
2) Augustin, Epist. 151, 4 et suiv. ; Je- 5) Epist. 151, 1.
rome, Dialogus adversus Pelagianos, III, 6) Ibid., 151, 14.
6; Orose, VII, 42.
74 POLEMIQUES ANTIDON.VTISTES D AUGUSTIN
vu. 6
76 POLÉMIQUES ANTIDONATISTES d'aUGUSTIN
III
ferait dans une étude d'ensemble sur Augustin. Nous nous pro-
posons seulement de passer brièvement en revue ceux de ses
traités, de ses lettres^, de ses sermons ou autres discours, qui
se rapportent au Donatisme d'indiquer le contenu, le caractère
;
Les points de repère ne sont pas rares dans le texte des trai-
tés. Allusions formelles ou implicites aux principaux faits de la
vie d'Augustin ou de l'histoire du Donatisme, aux Conciles- des
deux partis, à la mort de Gildon et de son complice Optatus de
Thamugadi, aux lois impériales, aux édits d'union, à la Confé-
rence de 411, même à des événements ou à des personnages
d'autres pays, comme la mention d'un évêque de Rome ou de
Milan, comme la prise de Rome par Alaric en 410 ce sont :
1
1) Acla conlra Felicem, I, 1; Retract., d'Augustin, voyez noire communication
11, Si. à l'Institut: C. li. de l'Acud. des Inscript.,
2)Sur cette correction cl ses consé- 1908,. p. 61 (séance du 81 janvier),
quences pour la chronologicdesœuvres 3) Voyez plus loin, Appendice {.
TRAITÉS 81
sance de tous, même des plus humbles, des gens tout à fait
ignorants et sans instruction j'ai voulu, autant que je le pour-
;
« êtes avec moi, mais vous voyez que c'est faux moi, je m'appelle
:
1) Psalmus contra partem Donati, 261- d'iiui que onze vers, cl la seizième n'en
264; 268-269; 281-288. a que dix, mais par suite de lacunes
2) Relracl., I, 11». évidentes, et faciles à combler, dans les
3) La troisième strophe n'a aujour- manuscrits. Cf. Psa^nus, 2S-3S; 196-205.
TRAITÉS 85
ha&retici. Ce livre est perdu mais on peut s'en faire une idée
;
toujours sur eux qu'il frappait. En toute liberté, avec une cri-
tique pénétrante, il en revue les principes qui
avait passé
étaient la base du Donatisme et sa raison d'être sur presque :
2) Ibid., l, 1. — Cf. Retracl., II, 43. voyez plus haut, tome V, chapitre V.
TRAITÉS 89
renié par ses amis, excommunié par son Eglise, accusé d'incon-
séquence par les Catholiques, mais convaincu qu'il était tou-
jours Donatiste-.
La querelle avait fait grand bruit, et pas seulement dans le
monde des dissidents. L'écho en était arrivé à Hippone, avec
les pièces du procès. C'est ce qui explique la démarche faite par
des Catholiques auprès d'Augustin, et son intervention, surpre-
nante au premier abord, dans ces polémiques déjà anciennes
entre schismatiques disparus. En tout cas, le Contra Epistu-
lam Panneniani tient une place importante dans son œuvre
antidonatiste : premier de ses grands traités contre les
c'est le
dissidents, le premier où il 'ait discuté avec ampleur et préci-
sion le principe même du schisme africain.
C'est ce qu'il marquait bien lui-même, dans le jugement qu'il
portait vingt-sept ans plus tard sur sa réfutation de Parmenia-
nus « Dans les livres contre la Lettre de Parmenianus, évêque
:
1) Pour cet ouvrage de Parmenianus, niani, I, 1 ; Epist. 93, 10, 43-44; 249.
voyez tome V, chapitre VI. 3) RetracL., II. 43.
2) Augustin, Contra Epistalam Parme-
90 POLÉMIQUES ANTIDO>ATISTES d'aUGUSTIN
de l'Eglise.
D'ailleurs, c'est Parmenianus presque forcément, en-
qui,
traînait Augustin sur ce terrain et Parmenianus lui-même y
;
VII. 7
92 POLÉMIQUES AMIDONATISTES d'aUGUSTIN
1) Augustin, De baptismo contra Doua- 5; 7, 10; 44, 87; VII, 1, 1 ; 54, 103.
listas, I. I. 4) Ibid., I, 1-4, 1-5.
2) Ibid., I. 19, 29; VII, TA, 103. — Cf. 5) Ibid., \, 5-6, 6-8.
Belracl.,\\,\\. 6) /ft/d., I, 7-9, 9-12.
en communion avec ceux qui étaient d'un autre avis 5. Qu'il ait
eu tort ou raison sur la question du baptême, son exemple, de
toute façon, condamne les schismatiques ^. S'il s'est trompé,
c'est qu'il a été égaré par la tradition africaine de son temps ;
Donatistes », c'était un
anonyme, dont il paraissait
petit livre
très fier peut-être en était-il l'auteur. C'était un recueil naïf de
:
c'était une série de courtes répliques, sans lien entre elles, des-
tinées seulement à fixer le sens des textes allégués par Centu-
rius ou ses mystérieux amis ^
Après cet intermède, Augustin revint aux choses sérieuses.
Grovant, selon son expression pittoresque, avoir « fermé la
bouche aux Donatistes », il se tourna vers d'autres travaux,
répondant à des questions diverses sur la liturgie et les usages
des différentes Églises-, écrivant de petits traités sur l'ascé-
tisme et la vie monastique s'apprêtant à terminer ses gros
•'',
tantine.
C'est que son ami Fortunatus, l'évêque catholique de cette
ville, avait sonné la cloche d'alarme. Comme Augustin se trou-
vait à Constantine, on lui parla de l'événement du jour le pam- :
litteras Petiliani. A
quelque temps de là, il reçut de Constan-
tinc un exemplaire intégral du pamphlet. Il se remit aussitôt à
la besogne et méthodiquement, phrase par phrase, dans le
;
parce que cette sobriété était de mise dans une instruction pas-
torale, destinée à tous les fidèles. Augustin s'arrêtait surtout
à la théorie du baptême^. Au cours de la polémique, il alléguait
souvent l'histoire récente du Donatisme les exploits d'Optatus :
de Thamugadi, mort en prison deux ans plus tôt et les que- '',
51. 53-55; 28, 65; 32, 73; 33, 78; 36, 88;
2) Contra Gaudentium, I, 1. 39, 93-94; 43, 102; etc.
TRAITÉS 103
1) Contra litteras Petiliani, III, 1. 4) Contra litteras Petiliani, III, 10, 11.
2) Ibid., III, 10, 11 ; ]], 12; U, 15; 5) Ibid., III, 1, 1-2.
15, 17. 6) Ibid., III, 2-10, 3-11.
3) Ibid., III, 2,3.
104 POLÉMIQUES ANTIDONÂTISTES DAUGUSTlN
clure'.
Presque partout, dans ce livre, on voit se succéder ou se
combiner trois éléments très divers. C'est, d'abord, une apologie
personnelle d'Augustin. Puis, c'est une réfutation en règle,
visant à établir l'insuffisance des réponses faites par Petilianus
sur certains points, comme le Muximianisme. Enfin, c'est un
nouvel exposé des objections fondamentales qu'Augustin avait
antérieurement présentées, et auxquelles le Donatiste n'avait
rien répondu notamment sur le baptême et sur les origines
:
manière, le style.
On
s'explique aisément la raison d'être et l'utilité de cette
nouvelle instruction pastorale. Augustin avait eu beau réfuter
rait-il, que cette Lettre de Petilianus est dans les mains de bien
4) Ibid.. 1. 7) Jiid., 1
5) Ibid., 25, 72-7«i.
TRAITÉS 107
question : où est la véritable Eglise, qui est une? Que les deux
partis laissent de côté leurs accusations réciproques, et inter-
rogent les Livres saints ^ Mais, pour trancher la question, on
-doit écarter d'abord les textes obscurs, et s'en tenir à ceux dont
le sens est clair pour tous^. De ces textes, il résulte que la véri-
table Eglise est l'higlise universelle 3, Il est vrai que les Dona-
tistes allèguent en leur faveur d'autres passages de l'Ecriture ;
VII. 8
108 POLÉMIQUES ANTIDONATISTES d'aUGUSTIN
3) Ibid.
52.
1) Contra Cresconium, II, 10-12, 12-15. 8) Contra Cresconium, III, 26-40, 29-44.
2) Ibid., II, 13-16, 16-20. 9) Ibid., III, 41-51, 45-57.
3) Ibid., II, 17-30, 21-38. 10) Ibid., III, 52-60, 58-66.
4) Ibid., II, 31-38, 39-48. 11) Ibid., III, 61-71, 67-83.
5) Ibid., III, 1-3. 12) Ibid., III, 72-78, 84-89.
6) Ibid., III, 4-11, 4-14. 13) Ibid., III, 79-81, 90-93.
7) Ibid., III, 12-25, 15-28.
112 POLÉMIQUES ANTIDONATISTES d'aUGUSTIN
pour enfoncer la vérité dans les têtes les plus dures, autant de
lois qu'il le jugeait nécessaire dans l'intérêt de l'Église. Il
Pavait fait, semble-t-il, dans quatre opuscules qui sont perdus,
et qui sont connus seulement par les Rétractations''.
d'autant mieux, que Petilianus s'était répété, lui aussi. Dans son
préambule, Augustin s'excuse d'être souvent forcé de revenir
sur des choses dont il a tant parlé déjà il explique comment il ;
tême conféré selon les rites est toujours valable, même chez les
hérétiques ou les schismatiques ^.
Dans ce petit traité De unico haptismo, comme dans les
autres opuscules antidonatistes publiés de 406 à 410'-^, on ne
relève rien de nouveau rien qui n'eût été dit, et avec beaucoup
:
cendance pour les égarés, pour les attardés, pour les gens d'es-
prit lent qui n'ont pas encore compris la situation. Mais, tou-
jours, sa préoccupation dominante sera d'expliquer au public cette
situation nouvelle. Il discutera surtout pour démontrer qu'il n'y
a plus à discuter. Par une conséquence naturelle; ses derniers
traités antidonatistes seront tous, plus ou moins, un commentaire
des débats de la Conférence.
La série s'ouvre par l'ouvrage le plus caractéristique en ce
genre un Abrégé des Gesta ou procès-verbaux de 411, le
:
rence, qui avaient été pour lui des jours de triomphe, mais de
triomphe discret. Malgré le soin qu'il prenait d'effacer ici sa
personne, cet ouvrage où il résumait les débats, au lendemain
de la Conférence, avait la netteté, la plénitude, l'éloquence impé-
rieuse et brève, d'un bulletin de victoire.
UAbrégé des Gesta fut bientôt suivi d'une Exhortation aux
Donatistes, qui en est souvent le commentaire : c'est l'ouvrage
intitulé Ad Donatistas post Collationem-, écrit vers le début
1) Augustin, Brème. Collât., I, Prae- rence », mais non qu'il ait été écrit
Jat. — Cf. Retract., II, 65. « après les procès-verbaux », ce qui n'est
2) Le dernier éditeur, sur la foi de ni français ni latin. En outre, le titre
manuscrits plus ou moins autorisés, a traditionnel est justifié par le témoi-
cru devoir modifier le titre de l'ouvrage, gnage d'Augustin lui-même, apparem-
•qu'il a baptisé Contra partem Donatipost ment mieux renseigné que son éditeur.
Gesta. Cf. Corpus scriptor. eccles. lat., On lit dans les Rétractations : « Librum
t. 53, p. VII et 95. On notera d'abord ctiam scripsi... Ad ipsos Donatistas post
que la leçon post Gesta n'est guère Collationem » (Retract., II, 66). — Cf.
vraisemblable on comprend qu'un
: Epist. 139, 3.
livre ait été écrit « après la Confé-
120 POLÉMIQUES ANTIDONATISTES d'aUGUSTIN
teur sur l'application des lois contre les dissidents soumis à son
autorité. D'ailleurs, cet opuscule « Sur la conversion des Dona-
tistes était une lettre autant qu'un traité c'était une réponse,
)) :
VII. 9
124 POLÉMIQUES ANTIDOX\TISTES d'aUGUSTIN
tous les ralliés leur rang et leur dignité -. Pour expier leur
grand péché contre l'Espiit- Saint, les rebelles n'avaient qu'à
faire leur paix ^. En
attendant, ces explications permettraient à
Bonifatius de répondre aux objections contre l'emploi de la con-
trainte, et sans doute stimuleraient son zèle pour la conversion
des Donatistes qui l'entouraient^.
Venant d'Augustin, tout cela n'était pas nouveau. Le De
correctione Donatistarum n'en présente pas moins un réel in-
térêt. On trouve ici comme la synthèse des idées qu'il profes-
sait alors, depuis 405, surtout depuis 411, sur la légitimité des
mesures de répression. Avec plus de netteté que jamais, dans
ce manuel de persécution pour militaires, il admettait l'inter-
vention du pouvoir séculier et approuvait la suppression des
communautés schismatiques, tout en répudiant les violences
contre les personnes.
Les autres ouvrages antidonatistes de cette dernière période
étaient d'un tour presque entièrement personnel. Ils visaient
deux évéques célèbres de la secte, tous deux mandataires du
parti à la Conférence de 411, tous deux restés intraitables
après la défaite Emeritus de Ga'sarea, Gaudentius de Thamu-
:
1) Gfsla cutn Emerito, 1 et suiv. — Cf. et 420, on relève des allusions aux Do-
Relract., Il, 77. natistcs qui se tuaient pour échapper
2) Contra Gaudentiam, I, 1; II, 1.— à lu persécution [De patienlia, 13, 10).
Cf. Reiract., II, 85. 5) Contra luUanum, I, 3, 7; 111, 1. 5;
3) Voyez plus haut, tome
'
VI, p. 173 17, 31.
et 201. 6) Encidridion, 5, 17.
De anima et ejus origine, III, 2.
4) — 7) Reiract.,I, 19-20; II, 31; etc.
IV
1) Epist. 23; 33; 49; 51; 66; 87-88; 133-134; 139; 185; 204.
93: 106; 108. 3) Epist. 23; 33; 61; 66; 87-88; 106;
2) Epist. 53; 58; 89; 97; 100; 112; 108.
130 POLÉMIQUES ÂNTIDONATISTES d'aUGUSTIN
pour se concerter avec eux 3, aux clercs pour les guider ou sti-
muler leur zèle ^, aux laïques pour éclairer leur foi et l'armer
contre les dangers de la propagande ennemie''. Enfin, il écrivait
aux magistrats, aux fonctionnaires impériaux, pour leur notifier
des plaintes, pour les inviter à appliquer la loi, pour louer ou
critiquer discrètement leurs édits, pour les entretenir des procès
en cours, des démarches à faire auprès du gouvernement, de
l'appui à donner aux requêtes et aux légats des conciles*^.
D'où la place considérable que tient le Donatisme dans la
correspondance d'Augustin un cinquième environ de la corres-
:
conclusions.
Du temps de la prêtrise (392r395) datent seulement deux
lettres l'une adressée vers 392 à Maximinus, évêque schisma-
:
que le cadre.
On peut en dire presque autant de deux autres pièces, qui
sans doute étaient des réponses à de véritables lettres, mais qui
par les dimensions, par l'allure même de la controverse, se
rattachent plutôt à la catégorie des traités. C'était d'ailleurs
l'opinion de Possidius, si l'on en juge par la place assignée à
VII. 10
140 POLÉMIQUES ANTIDONATISTES d'aUGUSTIN
•V
138; 357-359; Enarr. 111 in Psalin. 32; 6) Augustin, Serm. 46-47; 252; 357-
Serm. II et /// in Psalm, 36. Cf. Epist. — 3.58; Serm. Il et /// in Psalm. 36.
144, 1-3.
148 POLÉMIQUES AMIDONATISTES d'aUGUSTIN
qui sont pour nous les plus intéressants. Tantôt, on doit se con-
tenter de marquer approximativement l'époque ou de fixer un
terminus aille qiieni. Les principaux discours, dont nous pou-
vons déterminer la date et la succession, permettent de re-
constituer le cadre chronologique; les autres s'y intercalent
aisément à tel ou tel endroit de la série.
Pour le détail et la justification de cette chronologie, nous
renvoyons au Tableau reproduit dans l'Appendice^. Voici, en
quel({ues mots, le résultat de notre enquête.
Trois au moins de ces S(M'mons antidonatistes appartiennent
au temps de la prêtrise d Augustin (;3'J1-3U5) ^; six, aux pre-
mières aimées de lépiscopat iVJG-iUO) ^. Parmi ces derniers
figure une homélie de Carthage''. De la troisième période ^401-
138; 285; 2'M'>; 325; Entirr. in P^ilm. ù) Enurr. in l'.<alin. 10; 21; 57; 124;
10; 21; .32; 36; rA; 57; lUl 112; 145;
; Serm. 62 et 88.
164; 182-183; 357-359. 6) Serm. 62.
SERMONS ET AUTRES DISCOURS 149
183; 357-359; Enarr. in P.^alni. 67 et 38; 39; 49; 69; 75; 85; 88; 119; 138.
147; In Evangeliuni lohannis traclalus 13) Serm. 46-47; 137; 164; 252; 325;
4-13 et 47; In Epislnlam luhannis trac- Enarr. in Psalm. 149; In Evangelium
latiis 1-3; 6; 10. lohannis tractaliis 4-13 et 47; In Epistu-
6) Serm. 357-358. lam lohannis trarlatus 1-3; 6; 10.
7) Serm. 164.
150 POLÉMIQUES ANTIDONATISTES d'aUGUSTIN
6) Serm. 10. —
Cf. Pa8si<liu5, Indie.
SERMONS ET AUTRES DISCOURS 151
ter, parce que nos frères, pour saluer quelqu'un, disent Deo
grattas... Vous riez de notre Deo gratias ; mais A^otre Deo
laudes fait gémir les hommes'. » Gomme les défenseurs du
Donatisme, tout en désavouant plus ou moins les Circoncel-
lions, alléguaient que les violences de leurs partisans étaient la
réplique aux persécutions, révêque d'Hippone touchait souvent
à ce point délicat. Il expliquait à ses auditeurs pourquoi les
schismatiques, même
frappés par les magistrats et sévèrement
châtiés, n'avaient pas le droit de se dire persécutés c'est que :
pierres, des lances. Avec ces armes, ils courent partout où ils
peuvent, pour répandre le sang dont ils ont soif, le sang des
innocents^. » Toute la politique antidonatiste d'Augustin est
dans ce contraste. Partisan de la liberté religieuse, en principe,
il visait à la réconciliation par une entente pacifique mais, en ;
— Je n'y suis pour rien. Comme j'ai vécu hier, ainsi je vis
aujourd'hui. Ce qu'étaient mes parents, je le suis moi-même 3. »
Mieux que les arguments en forme d'une savante dialectique,
ces petites scènes prises sur le vif parlaient à l'âme des audi-
teurs, dont elles évoquaient les souvenirs familiers.
Cinq sermons d'Hippone, prononcés par Augustin durant les
cinq premières années de son épiscopat (396-400), nous le
montrent redoublant d'ardeur dans sa propagande au jour le
jour, et enrichissant de nouveaux thèmes ou d'arguments nou-
veaux la matière de sa prédication contre le Donatisrae^. Met-
tant à profit son expérience de sermonnaire, inaugurait alors il
VII. 11
156 POLÉMIQUES ANTIDONATISTES d'aIMUSTIN
leurs yeux ou leurs oreilles, les textes les plus clairs de l'Ecri-
ture"^.
A cette démonstration par les textes se mêlait partout la
démonstration par les faits, qui tenait beaucoup plus de place
dans ces sermons d'Hippone. L'Eglise de Donat ne pouvait être
l'Église du Christ, l'Eglise catholique ou universelle, puisqu'elle
était purement africaine 4. En vain, les scliismatiques alléguaient
l'importance de leurs communautés numides et s'écriaient fière-
ment « Notre Eglise aussi est grande. Que vous semble de Ba-
:
4) Enarr. Il in Psalnt. 21. 1-2 el 24- 8) Enarr. in Psalm. 57, 15; Enarr. II
28. in Psalm. 21, 31 Serm. Se, 22, 25.
;
SEKMONS ET AL'TKES DISCOURS 157
plus à cœur.
Un aux Mappales, à propos d'un texte de l'Évangile, il
jour,
s'expliqua sur l'événement qui surexcitait alors à Carthage tous
les esprits une persécution, dont on rendait responsables les
:
Catholiques. On
venait d'y appliquer rigoureusement les lois de
399 contre l'idolâtrie on avait fermé les temples, brisé des
;
du même
coup, on avait remis en vigueur les lois portées anté-
rieurement contre les autres dissidents Les persécutés s'agi- '^.
1) Enarr. in Psalin. 10, 5. i)Serm. 62, 6, 10; 11, 17; 12, 18.
2) Enarr. in Psalm. 57, 9; 124, 10. 5) Ibid., 62, 12, 18.
'
3) Serra . 62.
158 POLÉMIQUES ANTIDONATISTES d'aUGUSTIN
La curiosité aidant, on peut être sur que les fidèles furent exacts
au rendez-vous. Malheureusement, nous n'avons pas ce sermon
du lendemain.
A quelque temps de là, Augustin pr("'chait sur un autre
psaume 2. Dans l'intervalle s'était produit un fait nouveau, gros
de déceptions pour les Catholiques convoqué devant les ma-
:
1) Enarr. III in PAulm. 62, 1^9. 5) Serm. II in Paalni., SG, cap. 19.
2) Serm. Il in Psalni. 3(i. 6) Ihid., cap 20.
3) Ibid , CMp. 11. 7) Ibid., cap. 21-23.
4) Ibid., cap. 18.
160 POLÉMIQUES ANTIDONATISTES d'aUGUSTIN
laissez pas émouvoir par les supplices et les peines des coupables,
ces sacrilèges, ces ennemis de la paix, ces adversaires de la
vérité. Ce n'est pas pour la vérité qu'ils meurent, ces gens-là :
avaient même failli être maltraités par les sacristains qui veil-
laient à l'entrée du sanctuaire donatiste"^. Le lendemain, comme
il prêchait, l'évêque catholique ne manqua pas de raconter l'af-
chute de Rome, prise le 24 août par lus Goths d'Alaiic (jt sac-
c;igée par les barbares. Cette nouvelle aA^ait produit en Afrique
une très profonde impression les païens allaient répétant que
:
Rome était punie pour avoir abandonné ses dieux, et bien des
fidèles s'étonnaient que la ville de saint Pierre n'eût pas été
sauvée parles tombeaux des martyrs. Naturellement, l'orateur
parla surtout de la récente catastrophe. Il s'efforçait de calmer
les esprits,en réfutant les païens, en rassurant les chrétiens sur
les desseins de la Providence, en leur ouvrant les perspectives
infinies de la Cité de Dieu''. Puis brusquement, par une singu-
lière association d'idées, il revenait à son idée fixe, au schisme
africain comme si, involontairement, il rendait les Donatistes
:
1) Scnn. V,, 8, IS; u;, 17, 11. ()) Srrm. 2!K>, T), C i^t. 'iiiiv.
2) Serin. 4fi, 7, 1"». 7) Cad. Thfod., XM, T), )1. — Cf.
3) Serin. 4(i, 17. 41; 47. U. 22. Coder canon. Krrirs. ufric, eau. 107;
5) Serin. 29(J.
SERMONS ET AUTRES DISCOURS 165
ténèbres pour les yeux. Non, c'est l'unité (jui vient réjouissez- :
Plus que jamais, dans ces circonstances graves, les fidèles de-
vaient tout sacrifier à la fraternité chrétienne. Eux aussi, ils pou-
,
valent contribuer au succès de la Conférence. Ils devaient aux
évêques le concours de leurs prières, de leurs jeûnes, de leurs
aumônes. Enfin, on leur recommandait de remplir avec empres-
sement tous les devoirs d'hospitalité, d'ouvrir largement leurs
maisons aux évêques et aux clercs venus de toutes les provinces
pour le grand débat 3.
« La paix et la .charité », tel est le titre et tel est le thème du
second sermon, prononcé quelques jours plus tard, probable-
ment le 31 mai. Le lendemain, l'^'' juin, s'ouvrait la Conférence :
mis qui sont les vôtres, pour le salut de tous, pour la tranquil-
lité, pour la paix commune, pour l'unité que le Seigneur a pres-
2) Jbid., S67, 4.
168 POLÉMIQUES .VNl'lDONATlSrKS u'aUGUS IIN
tait l'orateur, c'est par amour delà paix, non par défiance de la
vérité. Nous l'avons déclaré dans notre réponse qui a été affi-
chée, que vous avez lue nous ne fuyons pas la controverse, nous
:
1) Serm. 164, 9, 13. f>) S,-rm. 112, 7. 8; 138, 2-3; 164. 10.
2) Serin. 10, 8. —Cf. Pussiilins. 'ndic. 14-15; 359, 8.
openim Augustini, 3 : .Siuiti li.il)ilus. (>) Serm. 138, 3.
3) Au<ïustin, Serm. 99, 8. 7) Serm. 112. 7. 8.
4} Serm. 359. 4 et 7. 8j Serm. 164, 10, 15.
SERMOiNS ET AUTRES DISCOURS 171
tiques.
C'est que la question du schisme, à Hippo Diarrhytos comme
en bien d'autres cités, était toujours actuelle. Pendant de longues
années, Florentins avait eu à batailler contre les Donatistes de
son diocèse, surtout contre leur évêque Victor, qui se plaignait
amèrement de lui et qui l'accusait de l'avoir fait jeter en pri-
son 2. Instruit par son expérience personnelle, il était devenu
l'un des auxiliaires les plus zélés d'Augustin dans la campagne
pour le rétablissement de l'unité. A deux reprises, en 408 et
en 410, il avait été l'un des ambassadeurs envoyés en Italie
pour y porter à l'empereur les vœux et les requêtes du concile
de Carthage^. A la Conférence de 411, il avait été l'un des con-
seillers adjoints aux mandataires du parti catholique^. Rentré
dans son diocèse, il s'empressa d'y faire exécuter l'édit d'union.
Il fut récompensé de son zèle par de nombreuses conversions^.
tiens soient frères, s'écriait-il; que tous les baptisés soient frères...
Nous avons l'air d'être en procès avec les Donatistes; mais cela
n'est pas. Etre en procès, c'est vouloir du mal à son adversaire,
VII. 12
172 POLÉMIQUES ANTIDONATISTES d'aUGUSTIN
« Je vous parle ici pour mon frère votre évè(|ue, dont vous
racle. —
Donat s'est mis en prière, et, du haut du ciel. Dieu
« lui a répondu^. » Ou encore, l'orateur montrait le schisme
qui avait pour chef Faustinus. » Mais quelle est cette Eglise —
dont Faustinus était évèque ? Qu'est-ce que cette Eglise ? —
« C'est, dit-on, l'Eglise dont Faustinus était le chef. » Mais —
Faustinus n'était pas le chef de l'Eglise, il était le chef d'un
parti... Vous savez, mes
que maintenant ces fermes
frères,
n'appartiennent pas personnellement à Augustin. Si vous ne le
savez pas, si vous croyez que je prends plaisir à la possession
de ces fermes, eh bien Dieu me connaît il sait, lui, ce que je
! :
1) (loili'X cannn. Eci-lr:^. afric, caii. 'Jl- 3) Codex canon. lUccU's. nfric. ,cri\. 107.
92; Auirii-itin, l-:fnst. 88, 7; ijrrm. III in 4) Collât. Curlluig., I. Iti-lS c-t .55;
Psidnt. 32, UU; Conlni Cresconiiim. III, Aiipiisliti, lircvic. 5-7 el 10;
Collai., I,
III, 7; 20; 41; 55; etc. 98 et suiv.; 156 et suiv.; 197 et suiv.;
3) Ibid., III, 7. 261 et suiv. ; Augustin, Brevic. Collai.,
4) Sur les relations d'Augustin avec III, 2 et suiv.
Aurelius de Carthage, et sur leur rôle
180 POLÉMIQUES ANTIDONATISTES d'aUGUSTIN
« Que ceci, dit-il, soit bien établi ce sont nos adversaires qui
:
sommes tous ici cette salle est pleine d'éA'êques, dont les pou-
;
lance tes calomnies^. » Il n'en fallut pas plus pour calmer le fou-
gueux et prudent Petilianus. Mis au défi, il battit en retraite,
ou ironiques, en réponses
tantôt éclatait en questions pressantes
incisives, en reparties heureuses, en boutades, en mots spiri-
tuels et mordants. Si nous possédions les discours prononcés
dans les assemblées d'évêques catholiques, on y observerait
sans doute les mêmes éléments et les mêmes traits. Que l'on
réduise ici la part de la polémique, que l'on atténue aussi les
éclats de certaines ripostes,- que l'on baisse le tout d'un ton et, :
VI
1) C'est surtout dans les quinze pre- pour les sermons et autres discours,
mières années de son épiscopat, entre 3) Cf. Possidius, Vila Augustini, 7;
396 et 411, c'est-à-dire au plus fort de 9-10; 12-14.
la lutte, qu'Augustin a varié le cadre 4) Notamment vers l'année 400, après
de ses controverses antidonatistes. l'éditd'union de 405, après la Confé-
2)On a pu le constater successive- rence de 411.
ment pour les traités, pour les lettres.
190 POLÉMIQUES ANTIDONATISTES d'aUGUSTIN
les mêmes principes. Ce qui atteste ici la suite dans les idées,
c'est la continuité logique dans l'évolution.
Exception faite, néanmoins, pour la période des débuts. Au-
gustin, pas plus qu'un autre, n'a trouvé du premier coup sa
voie. Il la cherchait encore au temps de sa prêtrise, du moins
en ce qui concerne la campagne contre le Donatisme. D'abord,
en ces années là, il ne se préoccupait guère que des dissidents
d'Ilippone ou de la banlieue' ses premières controverses
:
1) Augustin, Epiai. 23; 29, 11-12; 3) Epist. 23, 2 et suiv.; 29, 12.
Possidius, Vila Auyuslini, 7 et 9-10. 4) Epist. 29, 12.
2) Augustin, Serm. 2ô2 Eiiarr. in
; .0) lielract., Il, 31; Epist. 2'd, 1.
Psalin. 3.5 et 54; Psalmus contra parleni (îj Voyez plus haut, | 3.
Uonati, 1 et suiv.
MlirHODE DE CONTHOVERSE 191
plement à être chanté dans l'église par les fidèles. Soit mais :
mière vue, ce contraste s'explique ai- contre les dissidents, on peut dire qu'il
sèment. Augustin connaissait le Mani- venait de découvrir le Donatisme
chéisme depuis sa première jeunesse, (Epist. 23, 2. — Cf. Possidius, Vita Au-
etlui-même avait été affilié à la secte gu^lini, 7).
pendant neuf ans (Confess., 111, (i et 3) Augustin, Epist. 33-35; 43-44; Re-
suiv.; V, 3 et suiv.). Au contraire, il tract., II, 31; 43-45; 51-55. —Cf. Pos-
ne vit les D matistes à l'œuvre et ne sidius, Vila Auguslini, 9 et 12-13.
comprit le danger du schisme, qu'après
192 POLIÎMIQUKS A-NTIDON.VTISTES d'aUGUSTIN
lama, même
à Constaiiliuo '. D'ailleurs, en ces circonstances, il
se gardait avec soin d'eini)iéter sur les attributions de ses col-
lègues. Il écrivait un jour, vers la l'iii de i}96 a Personnelle- :
1) Aiij-n<liii, /'pis/. 43-44 ; r.H ; lOô, 2, Enarr. Ill in Psalin. .32; Serm. //et
4; 144, 1-3: Cjulra (Jrcsœiiium, 111, 4(i, /////( l'salm. 3(i; Epist. 144, 1-3.
50 ol sniv. .5) /.jpisi. 88, 7; 185,. 7, 2"); Contra
2) Episl. 31, .-).
Cresconium, 111, 4',, 49.
3) Possidiu-i, Vila AtKiuxtini, î» cl 12; fi) I'os.mJIus, l'itu Atintiatini, 9 et 13.
.'Vii^'ii-iliii. Epist. :,ii, 1; Cuntra lilteras 7) Au;,'ustiii, lielracl.. II. lil ; 43-45;
l'etiiiani. 1, 1:11, 1. 51-r)5; Conlra hpistulam Parnteniuni, I,
1) Epist. 33-35; 51; 66; Possidius, 5) EpisL 86 88, 7 93, 5, 17 97; 100;
; ; ;
Vila Augustini, 9-10 et 12. 185, 7, 25; Contra Cresconium, III, 47,
2) \ugnsl\n, Retract., Il, 'àl; Epist. 23, 51.
7. 6) De iinico baptismo, 1, 2. — Cf.
1) TlclracL, H, 53; Episl. 33, 4; 43- 49; 51-53; 56-58; 61; 0(5; 69-70; 86-
44; i)iS, 2; 76; 88, 10; 105; Contra liite- 89; olc.
ras Petiliani, I, 1 et suiv. ; Ad ('allioli- 4) Epist. 43-44; 49; 51 ; 66, 2.
cos Episliila contra Donatistas, 1 ol suiv. 5) Kpist. 88, 10; Gesta cum Emerito, I
1) Contra Cresconium, 111, 45, 49; 6) Contra Cresconium, 111, 47, 51;
Epist. 88, 7. Epist. 88, 7; 185, 7, 25.
2) Possidias, Vita Augiistuii, 13 et 7) Epist. 8ii; H8, 7etsuiv. ; 93, 4, 12
21; Augustin, Episl. SS, 7; 128-129; 185, et suiv. ; 97; lOU; 185, 7, 28 et suiv. ;
7, 25; Contra Cresconium, 111, 45, 49; Contra Cresconium, III, 43, 47 et suiv.;
Gesta ciun Enierito, (J. 51, 57.
3) Augustin, Epist. 93, 5, 17. 8) Retract., II, 43-44; 51-52; Contra
4) Epist. 76; 88, 7 et 10; 105. Epistulam Parmeniani, I, 1 et suiv. ; 8,
coniiiiissaiice du cimcilc d'Arles, el IS, 20; II, ly, 43 et stiiv. ; 83. 1.S4 et
qu'il put nUablir m
cousé([ucu(e la suiv. 203 et suiv.
; i(2, (Jouira Cresco- ;
3) Contra Epistulam Parmeniani, I, 2 2<; ;II, 65, 146; 83, 1S4 et suiv.; 88,
et suiv. ; II, 1 et suiv. ; De baplismo. I, r.).") Contra
; Crescnnium. III, *2. 46 et
1 et suiv. ; Ad Ctilholicos Efiixtiila contra suiv. ; 4(), 6J et suiv.
Donatislas, et sui\.; Hclract., il, 43;
MÉTHODE DE CONTUOVKUSE 197
1) Contra Epislulam Parmeniani. I, 10. Doiialislas posl Collai.. 1 et siiiv. ; 17, 21-
16 et siiiv. •2'^, (imia ciiin l-Jmcrito. 2 et siiiv.; (^on-
2) l'Jpist.W,, 1; 88, 7; 1(>5, 2, 4; HÔ. Ira CaiidciUiuin, I, li), 20-21; 24. 27 et
7. 25; Contra Cresconium. Ili, 47. 51. siiiv. ; Hpist. «6 ; lôô, 4, 17; 173. 2-S ;
3) Epist. 88, 10; 93, 5, 17 ; lOU, 1-2 ; 7) Augustin, Retract., I, 19; II, 53;
133-134. Epist. 23, 6 ; 33, 4 ; 44, 1 ; 76 ; 105 ; 141 ;
ne doit pas être utile pour toi, je crois qu'elle pourra être de
quelque utilité pour d'autres pour ceux qui la liront avec la
:
*
d'abord ses propres édits, puis les réponses officielles des deux
partis, puis les procès-verbaux des séances avec sa sentence
d'arbitre '\ En tout cas, dès que la question fut tranchée,
révêque d'Hippone se préoccupa d'assurer aux Gesta de Gar-
1) Rpist. 23. 6; 33, 2 cl 4; 3t, ô. 8) Codex canon. Eccles. af'ic, c;m. f.6-
2) EpUl. 44, 1 ot suiv. 69 .1 8").
finit par se réunir à Garthage, huit ans plus tard, mais sur une
convocation de l'empereur.
Cette fois, Augustin s'était décidé à employer les grands
moyens. Longtemps, il avait espéré aboutir par la propagande,
par la publicité, par une entente directe, à l'amiable, entre
évéques. Même après tant de déceptions, il persistait à es-
compter, contre toute Au^aisemblance, une réconciliation fondée
sur de mutuelles concessions. Mais en même temps, pour plus
de sûreté, il se tournait vers le gouvernement, en qui, de plus
en plus, il entrevoyait l'arbitre souverain de la querelle africaine.
Maintenant, il demandait aux empereurs d'intervenijj pour la
paix, d'assister les Catholiques dans leur campagne pour l'unité,
de mettre en présence les deux partis pour une explication défi-
nitive bref, de convoquer une conférence officielle, où serait
;
il Augustin, Epist. 76, 4; 88, 7; Con- tin, Brevic. Collât., III, 2-4.
ira CrescGiiium, 111, 45, 49 et suiv. 3) Augustin, Contra Iulianum. III, 1,
2) Codex canon. Ecoles, afrie, cru. 107; 5. — Cf. Epist. 185, 7, 25.
rollat. Carthag., I, 4-5; III, 29; Augus-
VII. 14
204 POLÉMIQUES ANTIDONATISTES d'aUGUSTIN
1) Epist. 2H. 6; 4:5-11 ; 4'.l ; 70; 76; 93; 87; 1)3 ; lUS ;
1*3.
105; 141; Ad Doiiritistus posl Collai., 1 ">) Contra Ulteras Peliliani, 11, 1; Sit-
ut suiv. Gesla cuni Emeriln, 2 et suiv.
; mo nd C.i'Sdreensis EcclcsLi' plclifin. 1 ;
2) Efiist. 33; 86; lU(i-108; 173; Re- Contra Gaiidentiiim. I, 1; Episl. 108, 1.
141; 18ô; Contra E/iiitulani Parmeniuni. 77; 8,'> A"/"".<'. 49; 70; 93; 10')-. Serm. III
;
J)e unico huplismo, 1; iirevic. Collai., et suiv.; Retracl., Il, ôlt'l.H5; Serin. Il
m, 2 el suiv.; Gesla cum Emrrilo, 2 et in P.'^alm. 3i), 20.
suiv.; Contra Gaudentium, II, 1; Episl.
MÉTHODE DE CONTIIOVEUSE 205
natistas, III, 3, 4 et suiv.; Contra Cres- 132; Contra Cresconiani, III, 14, 17 et
conium, III, 19, 22 et suiv.; 27, 30; 29, suiv.; 52, 58 et suiv.; IV, 1 et suiv.;
33; 46, 50; 56, 62; 70, 80-81; IV, 4, 5; Epist. 43, 9, 26; 51, 2 et suiv. ; .53, 3, 6 ;
ments, persécution'-.
Le point de départ de toutes les discussions était naturelle-
ment la question du schisme. C'était le fait brutal, celui qui do-
minait tout, ])uisque toute la querelle en était sortie et que tous
les malentendus s'y ramenaient. C'est là-dessus, principalement,
que l'évêque d'Hippone pressait les dissidents de s'expliquer 3.
Parfois, il semblait subordonner à ces explications la contro-
verse entière. II écrivait un jour à Emeritus « On cherche si :
c'est votre Eglise ou la nôtre qui est l'Eglise de Dieu. Par suite,
on doit commencer par chercher pourquoi vous avez fait
schisme... L'origine du schisme, c'est là qu'est tout le débat^. »
Pour plus de précision, il distingunit avec soin la question de
fait et la question de droit. La première, disait-il, était tranchée
par l'histoire. C'étaient Douât çt ses partisans qui avaient
rompu et voulu rompre la preuve en était dans la suite et l'en-
:
1) De bapthmo contra Donathtaa, II, 1; (Montra liUrras l'cliliaiii. Il, 0, i:? ot suiv. ;
tement qu'ils étaient ces saints, ces justes. D'après les Catho-
liques, au contraire, l'Eglise était nécessairement une société
très mêlée dans son développement terrestre, elle compren;>it
:
2) Et cela, dès la début de ses gran- tholiclsme de saint Augustin (Paris, 1920),
des controverses Contra Epistulum
: p. 125 et suiv.
208 POLÉMIQUES ANTIDO.NATISTES d'aUGUSTIN
pour les exj)liquer et les justifier l'un par l'autre. Comme ses
prédécesseurs, il commençait par déterminer d'après les Livi-es
saints les caractères de la véritable Eglise; mais ce qu'il cher-
chait dans les textes, à travers les symboles et les allégories,
c'étaient les caractères vraiment constitutifs. Laissant de côté
6, 11; Ad
Calholicos lipistula contra Do- ra^ Petiliani. II, 108, 247; Ad CatlioUcos
natislas, 3 et suiv. Brevic. Cvllat., III,
; Epistula contra Donnlistus, '^. 6; (Montra
'A; 8, 10; Ad Donatislas fjost. Collât., 2; (Jresconiiim, III, H4, 38; 6H, 70; De uni-
4 et suiv. ; Epist.^'i, 10, 43-44. co baplisnio, 16, 28; Kpist. 53, 1, 2.
MÉTHODE DE CONTROVERSE 211
1) Optât, II, 19-26; III, 11; V, 4-7; VI, licos Epislala contra Donatistas, 21, 57 et
4: Augustin, Co/iira litteras PetUiani, l, suiv. ; Contra Crescoiiium, II, 5, 7 et
1, 2 et suiv. II, 2, 4 et suiv. 32, 72 et
; ; suiv. ; 17, 21 et suiv. De uiiico baptismo,
;
qu'à preuve du contraire, ils tenaient tous leurs clercs pour des
saints. Et même, le cas échéant, ils sacrifiaient leur principe
aux nécessités de leur politique ':
tout récemment, lors de leur
réconciliation avec les Maximianistes, les Primianistes avaient
déclaré valable, malgré leurs anathèmes de Bagai, le baptême
conféré hors de leur Eglise pendant la période d'excommunica-
tion par leurs propres schismatiques. En cette circonstance,
les Donatistes avaient eux-mêmes renié leur doctrine, pour se
rallierinconsciemuient à la doctrine et à l'usage des Catho-
liques. Augustin ne se lassait pas de développer cet argument,
d'ordre historique, qui lui semblait trancher le débat '. C'était
de bonne guerre.
Pourtant, une objection inquiétait un peu les profanes. D'après
la théorie catholique des sacrements, si Ton était baptisé par
lin hérétique ou un schismati({ue, alors on était introduit ilans
l'Eglise par des gens qui étaient eux-mêmes hors de l'Eglise,
par des adversaires ou des transfuges. N'était-ce pas étrange?
disait-on. —
Sans doute, répondait l'évêque d'ilippone, le sa-
crement est valable, s'il a été administré dans les formes par
un schismatique ou un hérétique mais, en ce cas, le sacrement ;
1) Augustin, Ein^i. it3, 10. 35. 2.3 el suiv.; Iir, 3, 4 «.-l .suiv.; IV, 1 et
2j Ibid., 93, lU, M. suiv.: V, 1 .1 suiv.; VI, 6, 9 et suiv.;
3) Ibid., 93, 10, 38. Vil. 2 cl suIn.
4) Ibid., y3, 10, 31). 7) Voyez plus liant, t. II. p. 37 et
.-) Ibid., 93, 10. 40. suiv.; t. IV, p. 153 el sui^.
6) De baptisino contra Doiwtistas, II,
MÉTHODE DE CONTIIOVEKSE 215
d'autre part, il remontait des faits aux causes, pour fixer les
responsabilités de chaque parti. Tout en déclarant qu'il préfé-
rait pour son compte la libre propagande et qu'il espérait pré-
parer le retour à l'unité par des conférences entre évèques", il
s'attachait à justifier l'appui donné aux Catholiques par les em-
pereurs et leurs agents. H établissait, par le témoignage des
Livres saints, la légitimité de l'intervention du pouvoir temporel '^.
1) Collai. Carlhag.. 111,258: AugusUn, Conlra Gaudenlium, I, 19, 20; Epist. 93,
Coiilra litleras Peliliuni, I. IS, 20; II, 2, 5.
92, 202; III, 2.7, 2'^;Conlra Gaiideiitiuin, 3) Augustin, Epist. 23, G; 93, 5, 17;
I, 11, 12 et suiv. — Cf. Optât, 11, 11; Bclract , II, 31.
III, 1. 4) Conlra Epislulnm Parmeniaiii, I, 8,
2) Optât, III, 3-1; Augustin, Contra 13 et suiv.; Contra litleras Peliliani, II,
c'étaient eux qui par leurs violences, par leurs crimes de droit
commun, avaient forcé le gouvernement à les frapper^.
Ces controverses sur la persécution tournaient toujours autour
de cette question, délicate entre toutes les rapports de l'Eglise :
1) Epist. 88, 2; Coitlra Crcscunium, nianl, I, 10, 1(5 et suiv. Contra Crcseo-
;
III, 61, fi7: Brevic. Collât., III. 12, 21. nium, III, 5tj, 62; IV, 3 et sui\.; 66,82;
— Cf. Optât, 1, 22; Collât. Ca<tha,j., Gesia cuin EineiUo, 9; Epiiit. 1U8, 2, 5.
m, 215-22J. 4) Epht. 44, 5, 12: S8, 7; 18:>. 7. 25-
2j Augustin, Contra littcrus l'eliliani, 2S Contra Epistulani Parmcniaiti, I, 13,
;
II, 83, 184; 92, 203 et 205; 07. 224; 20; Contra Cresconium, 111, 43, 47 et
Epi^t. 93, 4, 12; 105, 2, 9.— Cf. Oplat, suiv.
II, lii-19; III, 3. 5) Episl. 93, 5, 17; 185, 7, 25.
3) Augustin, Contra Epislulam Panne-
MÉriiopR D?: CONTJÎOVERSI-; 217
litteras Peliliani, II, 92, 203 et suiv.; lOâ, 2, \t; Contra Epistulam Parmeniani,
Episl.'.ri, 5, 16 et suiv. 1, 10, 16 et suiv. III, 6,
; 29; Contra
2) Optât,IM, 1 ft 3-4; Augustin, lilteras Petiliani, 11,83, 184; 92,203;
Contra Epistulam Parmeniarii, I, 8, 13; 97, 224; Contra Cresconium, Ul, 56,62;
Contra litteras Petiliani, II, 84, 185; 92, IV, 3 et suiv.; Brevic. Collât., III,4,5
202; Contra Cresconium, III, 51, 57; Gesta cam Emerito, 9.
Contra Gaudentium, I, 19, 20.
218 POLÉMIQUES ANTIDONATISTES d'aUGUSTIN
1) Augustin, Paalmns contra partein 3) Episl. [)'S, .5, lC-17; 185, 7, 25;
Donati, 'J5-'.H> ;
141-14."). Contra Cresconiitm, II, 3, 4 et suiv. ; III,
limites ou de méthode.
Les deux questions étaient, d'ailleurs, inséparables. Du mo-
ment qu'Augustin jugeait utile d'accepter ou de solliciter le
<;oncours de la puissance séculière, il devait se demander dans
quel sens il chercherait à orienter l'action du gouvernement.
Autrement dit, il devait commencer par établir avec ses collègues
le programme des revendications catholiques 3. Mais l'élabora-
tion de ce programme impliquait une question préjudicielle les :
1"'
VII.
220 POLÉMIQUES ANTIDON.VTISTES d'aUGUSTIN
en hérésie * ».
C'est Augustin, semble-t-il, qui le premier avait eu l'idée de
poursuivre l'assimilation légale du Donatisme aux hérésies 3.
C'est lui qui, lors du procès de Crispinus, avait engagé son ami
Possidius à invoquer la célèbre loi de Théodose contre les clercs
hérétifjues ^ C'est lui enfin qui, au concile de 404, avait soutenu
et fait prévaloir la politique tendant à obtenir l'assimilation du
schisme africain aux hérésies^. Il ne put donc qu'applaudir à la
décision impériale du 12 février 405. S'il avait évolué sur ce
point, il avait été suivi dans son évolution par la majorité de
ses collègues, par le concile de Carthage, par le gouvernement
lui-même.
Fort de l'assimilation légale, il n'hésita plus désormais à
traiter d'hérétiques les dissidents africains*^. Il s'efforçait seule-
ment d'expliquer comment vieux schisme, tout en restant
le
1)Codex canon Eccles. afric, can. 93. 5) Augustin, Epist. 185, 7, 25.
) Cod. Theod., XVI, 6, 4. 6) Epist. 87, 4; 93, 11, 46; Contra
3) Augustin, Epist. 66, 1. Cresconium, II, 3, 4 et suiv. De haeres.,
;
1) Epht. 93, n. 17; 185, 7, 25-26; 3) Epist. 23, 7 ; 33. 4 ; 34, I ; 43, 1 ;
son cours devant les tribunaux ordinaires K Mais il n'y avait rien
là qui ressemblât à une idée de contrainte il s'agissait d'un :
2) Epist. 35, 1 ; 43, 1; 51, 1 ; 76, 4; 14,33; 65, 146; Si. 186; 88, 195; 96,
87, 6; 88. 7; 105, 4, 13; 107; Contra 222 Contra Cresconium, III, 42, 46 et
;
Augustin, Epist. 35, 2 et 4 43, 8^ 24; ; Contra litteras PetUiani, II, 92, 208 ;
trats des cités, surtout pour faire rédiger dans ces villes un
procès-verbal authentique des querelles locales entre Primia-
nistes et Maximianistes ^ Le concile de 403, qui lança le projet
d'une grande conférence entre les deux Eglises avec notifica-
tion préalable à toutes les communautés donatistes, sollicita de
même le concours des gouverneurs et des magistrats municipaux,
pour obtenir qu'on dressât partout le procès-verbal officiel des
négociations entre les évoques des deux partis 2. On reconnaît
aussitôt l'inspiration et la manière d'Augustin, dans ces dé-
marches si conformes à ses idées comme à ses méthodes de polé-
mique. D'ailleurs, tout cet appareil n'intimida guère les dissi-
dents, qui à toutes les propositions opposèrent un refus catégo-
rique'^.
En
constatant ces échecs, Augustin s'attachait d'autant plus
à la seconde partie de son programme les mesures à solliciter :
gustin reprit cette idée, dont il allait tirer grand parti'. Vers 401,
au cours de ses démêlés avec Grispinus de Galama, qui venait
de rebaptiser près d'Hippone les colons d'un domaine acheté par
1) Codex canon. Ecoles, a/ric, can. 67. 5) Cad. Theod., \VI, .5, 21.
2) Ibid., can. 91-92; Collât. Cartha'j., 6) Augustin, Conlra lilteras Petiliani,
III, 174. II, 83, 184.
3) Augustin, Epist. 76, 4; 88, 7; Contra Epistulam Parmeniani, l, 12.
7)
Contra Cresconium, III, 45, 49 et suiv. 19; Contra litteras Petiliani, 11,83,184;
4) Contra Epistulam Parmeniani, l, 12, Epist. 66, 1; 88, 7; 105, 2, 4; 185, 7,
19. 25.
226 POLÉMIQUES ANTIDONATISTES d'aUGUSTIN
gustiii, Efjist. 8H, 7; 10.">, 2, 4 ; Contra 41, 45 et suiv. ; IV, 46, 5.^ el suiv. ;
Cresconium, III, 47, ni. Epist. 87, 7-8 ; 88, 5-10; 89, 1 ; 93, 1 et
ii) C')dex canon. Ecoles, ufric. , c:m. 'J3 ;
suiv. ; 97, 2-4; lOO, 1-2; 105, 2, 3 et
Aiij^ustiii, Epist. 8S. 7; 185. 7, 25. suiv. ; 108, 5, 14 ; 1S5, 7. 20.
4) Cotl. TlieoJ., \VI, 5, 38; 0, 3-5; G) Codex canon. Eccles. afric, can.
II, 2. — Cf. iJhIcx canon. Eccles. afric. 94 ; 99 ; 100-107.
c.ui. 94 ; <.K>; 117 Au^usliu, Epist. 1^5,
; 7) Augustin, Epist. 97 et 100.
MÉriIOi)R DK GONTUOVKUSK '
227
3) Codex cnnon. Ecoles, afric, can. plebem, 7-8; Contra Gaudentium, I, 19,
107. — Theod., XVI, 5, 51.
Cf. Cod. 20-21; 24, 27 Relract., II, 31 et 74.
;
5) Codex canon. Ecoles, afric, can. suiv. IV, 46, 55 et suiv.; Epist. 93, 1
;
4) Retract., II, 31; Epist. 23, «:-7 ; 33, 184 Contra Cresconium, III, 45, 4».
;
MKTIIODE DE CONTROVERSE 229
conserver leur dignité. aux clercs ralliés-^. Même contre des ad-
versaires irréductibles, il n'avait aucun sentiment de rancune,
aucune idée de vengeance personnelle. Lors de la condamna-
tion de Crispinus, il sollicita lui-même de l'empereur avec Pos-
sidius, et il obtint la remise de l'amende^. Après comme avant
1 et siiiv. ; Gcs/d ciim Emerilo, 1 et 7, 25; Contra Cresconiuin, III. 47, Hl.
suiv. 6) Epist. «7. 7-8; 88, 5-10; 8y. 1; 93,
2) Rpist. H:^-134 ; 1:<9. 1 et suiv. ; 97, 2-4 100, 1-2; 105, 2, 8 ;
134 139, 2
; ; 2 I4, 3 ;Contra Cresconium, 111, 41, 4."> et suiv. ; IV, 46, 55 cl suiv.
ll(, 50, 65 ; Ad Donatistas posl Collât.,
MÉTHODE DE CONTUOVEUSE 231
seigné que personne sur les doctrines, sur les documents et sur
les faits '. iVvant d'engager une controverse, si bien armé qu'il
fût déjà, il ne manquait pas de compléter par tous les moyens
son information; il se constituait alors un dossier spécial, oà
il n'oul)liait aucun des faits récents, lois, procès, querelles,
scandales ou racontars, renseignements biographiques, traités
ou paniplilets donatistes. S'il devait discuter de vive voix avec
un confrère de l'autre Eglise, dans une conférence publique, il
arrivait muni de son dossier, escorté de témoins et de sténo-
graphes, qui devaient noter mot pour mot toutes les paroles
prononcées dans les deux camps- si quelque pièce venait à lui ;
des versets cent fois cités déjà, mais souvent ignorés encore du
vulgaire ou obscurcis par le préjugé. Régulièrement, sans se
lasser, sans craindre de se répéter, Augustin produisait un à un
ces témoignages, et les serrait de près pour en tirer la substance
doctrinale. Il montrait comment ses adversaires en dénaturaient
le sens, en diminuaient ou en exagéraient la portée. Pour les
questions essentielles, comme la théorie de l'Eglise ou des sacre-
meuts, il aimait à faire défiler sous les yeux du lecteur tous les
textes allégués par les schismatiques, afin de prouver que ces
textes, bien interprétés, se retournaient contre eux. Il inaugura
et définit cette tactique dès le début de ses grandes controverses,
dans son traité Contre la Lettre de Parmenianus^^ où il
consacrait deux livres entiers sur trois à cet examen critique,
suiv. ; III, 4 et suiv. ; IV, (U, 78 et suiv. ; rè^çue de .Iuliun, avaient revendiqué
ils
Gesia cnm Emerito, 3 et sui \ . \Contra el s'étaient fait attribuer par les tribu-
Gaudentiuni, I, 1. naux les manuscrits sacrés des églises
3) Sur les eilalions bibliques d'Au- ((5plat, VI, 5).
gustiii, \oyez i)lus haut, lunie I, p. 138 5) (Jonlra Epi^tulain Parnteiiiuni, 11,1.
MÉTHODE DE CONTROVERSE 23 O
vil. ]6
2.'?G POLÉMIQUES ANTIDONATISTES d'aUGUSTIN
quoi l'on n'avait pas tort. La maîtrise dans l'art de discuter est
l'un des traits les plus marcpiês de sa physionomit; intellectuelle,
comme de toute son œuvre. L;i dialectique était l'instrument
Donatistas, dans le Contra Cresconium, Contra litteras Petiliani, II, 92, 203 et
dans le Ad Donatistas post Collationem suiv. ; Ad Catholicos Epistula contra Do-
dans les Gesta cam Emerito. natistas, 2 suiv.; Sermo ad Caesa-
et
2) Epist. 43-44; 51; 70; 87-88; 93; reensis Ecclesiae plebem, 1 et suiv,;
105 108 173; 185 Serm. 357-359 etc.
; ; ; ; Epist. 43 51 87-88; 93 105 ; 185.
; ; ;
1) Ephi. 9:i, 10, 37; 144, 3 ; De bap- VII, 54, im\ Contrn litterasPetiliani,U\.
iismo contra Donatistas, I, 10, 13 ; etc. 57, G\i et suiv. ; Contra Cresconium, IV,
2) Contra Cresconium, IV, 28, 35 et suiv. 66, 83 ;Ad Donalistan post Collât., 35, .58.
3) Contra Epistiilam Parmeniani, III, 4) Ad Cntholicos Epistula contra Dona-
6, 29 ; De baptismo contra Donatistas, tistas, 18, 46.
240 POLÉMIQUES ANTIDONATISTES d'aUGUSTIN
par exemple, dans ses livres Contre les Académiciens, dans ses
traités sur La vie heureuse, ou sur L'ordre, ou sur Le libre
arbitre'^-. Enhardi par le succès, il avait conservé le même cadre
jusque dans des ouvrages où il s'attaquait aux problèmes les
plus ardus de la métaphysique ou de la science dans les livres :
2) Epist. 4 1. 4, 7.
MÉTHODE DE CONTROVERSE 243
on le voit insister sur les faits, sur les documents-. Dans cette
voie, il est allé beaucoup plus loin qu'Optât d'abord, parce :
qu'il s'y était engagé plus résolument, ensuite, parce qu'il dis-
posait de moyens nouveaux. 11 a fait tant de place à l'histoire
dans ses polémiques, qu'il est devenu indirectement, et reste
pour nous, le principal historien du Donatisme.
D'un historien, il avait l'exactitude, la conscience et la pa-
tience, le scrupule, le sens critique. Il n'acceptait que sous
bénéfice d'inventaire les divers récits traditionnels la tradi- :
Rien de plus solide que tous ces récits, rien de plus lumineux
et de plus habile. Sans doute, tandis que l'historien marquait
la liaison des faits, le polémiste en dégageait le sens et la con-
clusion il explicpiait en racontant, il plaidait ou réfutait en ex-
:
avons lu bien des documents, bien des papiers, bien des textes
étrangers au canon des Ecritures. Mais ce sont nos adversaires
qui nous y forcent. Eh bien qu'on nous blâme de vous faire
!
1) Brevic. Collât., III, 15, 27 ; 17, 31- Contra Gaudentium, I, 37, 47.
j3 ;
Ad Donatistas post Collât., U, 18; 2) Serin. 111 /;( Psalm. 3(5, 18.
246 POLÉMIQUES ANTIDONATISTES DAUGUSTIiN
6) P.falinus contra partem Donati, 40 sni\.; Contra Cresconium, 111, 61, 67;
el suiv. ; 72 et suiv. 95 cl suiv.
;
132 ; IV, 7, D ;
etc.
MÉTHODE DE CONTROVERSE 247
1) Brevic. Collât., 111, 13, 2.5 et suiv. ; 4) Possidius, Vita Augustini,9-10 eiV2 ;
17, 32 ;21, 39 et suiv. Ad Donatistas ; Augustin, Ëpisl. 23, 2; 2», 12 35, 1-4; ;
445-448 544-552.
; Contra Epistulam Parmeniani, I, 11, 17
2) Augustin, Heiract., Il, 53, 2 54 ; ;
et suiv. ; Contra litteras Petiliani, 1, 1 ;
&0, 2; Brevic. Collât., m, 24,42. 24, 26; II, 83, 184; 88, 195; Contra
3) Brevic. Collât., 111, 24, 42; Ad Do- Cresconium, III, 42, 46 et suiv.
natistas post Collât., 33, 56.
248 POLÉMIQUES A>TID0NAT1STES d'aUGUSTIN
1) Augustin, Contra Creseonium, III, 86-88; 10.'); 183-134; 139; Contra Cres-
42, 4<; et suiv. Epist.29, 12 34-
; 48, 53 ; ; conium, III, 42. M) ; 48, .')3.
;C); 88, b ; 10.5,2,3 etsuiv.; 133-134; 139. 3) Cofiira Cr«conium, 111,46, .50 suiv.
plus long sur les débats que les canons ou les synodales à :
1) Conlra Episliilam Parmeniani,]], 3, lai., 1 ; 10, 20; .SI, 53; Conlra Gauden-
7; Contra littéral Peliliarti, I, 10, 11; Uum, 1,37, 47-4H.
19, 21 ; 11, 7, It; ; lîpixi. 51, 2. Contra Epislulam Parmeniani, 1, 11,
5)
2) Serm. II in Psalni. 3(), 19. 17-18 Conlra lilteras Petiliani, I, 24.
;
3) Ibid., 3«, 20 et siiiv. 26; II, 23, 53-55; «3, 184 88. 195; 10.3, ;
4) Epist. TC, 4 ; «8, 7 et 10; Serm. Il 237 Conlra Cresconium, III. 42, 4G et
;
1) Epist. 43, 9, 26 ; 51,2 ; 53, 3, 6 ; 76. Contra Cresconium, III, 43, 47 46,
2) ;
17; Serm. II in Psalm. 36, 19-20; Con- lam Parmeniani, III, 6, 29 Epist. 6S, 6- ;
tra Cresconium, III. 52, 58 et suiv. ; IV, 7 ; 105, 2, 3-4 ; 185. 7, 26-27.
3 et suiv. ; 47, 57 et suiv. ; Gesta cum 3) Contra Epistulani Parmeniani, 11,4,
Emerilo, 9-11. 8.
VII. VT
252 POLÉMIQUES AMÏIDONATISTES d'aUGUSTIN
finie, frère Macrobius c'est Dieu qui a fait cela, c'est Dieu qui
:
1) Epist. 108, 2, 6. —
Cf. 108, 4, 13. tituit » {ibid., 108, 4, 13).
2) « In causa Maximiani spéculum » 3) Contra Cresconium, IV, 1 ; 66, 82-
[Epist. 108, 2, 6). —« lilad spéculum 83.
quod ad vos admonendos Deus... cons-
254 POLÉMIQUES ANTIDONATISTES d'aUGUSTIX
gutlini, 9. 97 ; 100
105 ; ; Contra Cresconiuin, lll,
1) Epist. 23 ; 33 ;
43-44 ; 49. 3) EpUt. 44, 3, 6.
2) Epist. 34-3.5; 51 ; Contra lilteras 4) Epist. 87 ;Cunlra lilteras Petiliani,
PetiUani, 1, 1. '# 1 ; H, 1 ; Contra Gaudentium, I, 1.
MKTIIODE DE COÎSTROVERSE 259
nium, l, ] ; H. 1, 2 et suiv. ; III, 73, 8.5 Collât., 111. 7, 9 Contra litteras Peti-
;
et suiv. ;
IV, 6.5, 81 Contra Gaudentium,
; liani, 111, 16, 19 et suiv. Contra Cres-
;
II, 1 et suiv. ; Serm. Jll in Psalm. 36, eonium, 111, 7», 91 et suiv. IV, 64, 7»; ;
3) Conlrii liltera) Petilinni. III. 1»'>, lî» 17, 3(1;Conlra Cretcunium, III, 7'J,'Jl ;
1) Collât. Carthag., III, 238 ; 243-247. 4) Contra liiteras Peliliani, III, 16, 19 :
2) Augustin, Serin. III in Psalin. 36, Contra Cresconium, I, 14, 17; II, 1, 2 et
19-20; In lohannis Evangelium tractatiis, suiv. 6, 8 et suiv.; 111, 46, 50; 73, S.ô
;
3) Contra Cresconium, 111, 80,92.— listas post Collât., 19,25; Gesta cuni
Cf. Contra litteras Petiliani, 111, 16, 19 ;
Einerito, 10; Contra Gaudentiain, 11,1 et
Se.rm. lïl in Psalm. 36, 19-20 Brevic.
;
suiv. ; Serin. II in Psalm. 36, 18-23 ; etc.
Collât., III, 7, 9.
262 POLÉMIQUES AKTIDON.VTISTES d'aUGUSTIN
1)Ce défaut est surtout sensible dans 2) Remarquons d'ailleurs que nul
lesouvrages où Augustin réfutait di- écrivain latin, dès ces temps-là, n'a su
rectement un adversaire, et principa- construire une période harmonieuse
lement dans les pages où il commen- et bien proportionnée, à la mode clas-
tait des textes bibliques. sique.
264 POLKMIQUES ANTIDONATISTES d'aUGLSTIN
1) Il s'agit ici ilii style polémique p;irler du plus original, celui des Con-
propremcnt dit, celui des traités aiili- fessions.
dunalistes ou dos graudes lettr(!s qui 2)Notons d'ailleurs que ces pseudo-
s'y rattachent. Tout autre est l'allure périodes, assez fré<[uentes dans les
des sernmons do controverse, ou des grands ouvrages de réfutation directe,
discours prononcés à l.i (Conférence, ou sont relativement rares dans les livres
des correspondances familières. Augus- plus soignés, comme le Ad Dunalistas
tin a bien des styles différents: sans posl Collationem, o\x dans les lettres.
MKTIIODE DE CONTaOVERSE 2C)7
vu. 18
268 POLÉMIQUES ANTIDONATISÏES d'aUGUSTIN
3) Serm. H in Psalm. 21, 29-30; Enarr. cuin Emerito, 10; Senn. II in Psalm. 36,
in Psalm. 54, 16 et 20-21. 18-23.
4) Contra Cresconium, II, 1, 2 et suiv. ;
270 POLÉMIQUES ANÏIDONATISTES d'aUGUSTIN
•cum Emerito. 12 ; Contra Gaudentium, II, des iineclives, plus varie (|ue celui des
13, 14; lipist. 141, 13. exhorlalious. Cf. Contra Utterus Peli-
2) l'salnius contra partein Donati, 2û9- liant, III, 16, 19 el suiv. ; Contra Cres-
288; Contra Kpistulani Parmeniani, I, 7, coniuin, III, 43, 47; 46. .0(1; 73, 85 et
12 ; Ëi>ist. 7t;, 1. suiv. ; Epist. 8!i, 6 ; ISô, 7, 27.
Hj Le vocabulaire des récits est ordi-
METHODE DE CONTROVERSE 271
vavit... Et totum illud bonum, ut dixi, lui qui, d'accord avec Aurelius de Gar-
per saiictum illum hominem, consen- thage, inspira les conciles et dirigea la
tientibus nostris episcopis et pariter lutte ; c'est lui enfin qui dans la ba-
satagontibus, et cœptum et perfectum taille suprême, à la Conférence de 411,
est ». fut le principal champion des Catho-
2) Gomnrig l'a noté Possidius [ihid., liques africains.
272 POLEMIQUES ANTIDONATISTES d'aUGUSTIN
3) Au^custin, Kpist. 34, (i ; 3."), 1 ; 51, dcrc nos voluil » (C'on/r« Gmutfnliuni, I,
1 ; 66, 2 ; 87, 1 cl 6 ; 88, lU-12 ; Con- 14, lô}. — Cf. Sermo ad Cnsarecnsis
Ira lilleras Peliliani, 1, 1 ; Contra Cres- Ecclesix plebem, 1 ; Gesla cuin Emerilo,
conium, I, 3, 4-5. 1-3.
1
APPENDICE
TABLEAUX CHRONOLOGIQUES
DES
Vers 400. — Contra quod adlulil — Retract., II, 45. — Ouvrage con-
Centurius a Donatistis temporain du De baptismo, qu'il suit
(perdu). immédiatement.
Vers 400. — Contra litteras Peii- — Retract., II, 51. — Livre antérieur,
liani liber I. mais de peu, au livre II, qui date de
401. Sur cette chronologie, voyez plus
haut, t. VI, p. 16 et suiv.
401 — Contra litteras Peti- — Retract., II, 51. — Livre écrit sous
liant liber IL le pontificat du pape Anastase, mort en
401 (II, M, IIH). Sur les raisons pour
lesquelles la publication ne peut être
antérieure à cette année-là, voyez plus
haut, t. VI, p. 16.
401 (fin). — AdCatholicosEpistula —Lettre écrite, d'après le préambule
contra Donatistas (= De (1, 1), au moment oii Augustin venait
unitate Ecdesix). de terminer le livre II Contra litteras
Peliliani, mais où
n'avait pas encore
il
DATE
II
la promulgation ou la notification en
Afrique dos lois d'IIonorius dos 24 et
27 novembre 408 (cap. 2-3 ;
— cf. Cod.
Tlieod., XVI, 5, 44-45).
itOS (après le "21 no- — Epist. 100 (au pro- — Cette lettre a suivi de près la loi
vembre). consul Donalus). du 24 novembre 408. adressée au pro-
consul Donalus lui-mônie (cap. 2; cf. —
Cod. Theod. XVI, 5, 44l.
Vers 408. — Episl. 93 (à Vincen- —
La lettre est postérieure aux lois
lius, évoque rogatisle de de 405, dont elle est une longue justifi-
Cartonna). cation; et postérieure de plusieurs an-
nées, car Augustin s'y prononce sans
restriction pour la Cdutraintc envers
tous les Donatistes. D'autre part, elle est
antérieure à la Conférence de 4H, au
rescrit impérial du début de 410 sur la
liberté du culte, môme aux lois de la fin
TAftLKAlJX GttRONOLOGIQlES 283
mandatiim.
411 (fin). Epist. 133 (à Marcel- — Cette lettre est postérieure de quel-
linus). ques mois à la Conférence de juin 411;
Marcellinus était encore en Afrique pour
surveiller l'application des mesures
contre les Donatistes (cap. 1-3). D'autre
part, la lettre 133 est antérieure à la
lettre 139 (cf. Epist. 139, 2), qui elle-
même est antérieure au 28 février 412,
411 (fin). — Epist. 134 (au pro- — Lettre écrite en même temps que
consul Apringius). la pré'.'édente, et pour la même affaire
(cf. Epist. 133, 3; 134, 2;. Proconsul
d'Afrique en 411, Apringius était déjà
remplacé le 28 février 412 (Cad. Theod.,
VI, 29, 9; Vin, 4, 23; XI, 1, 32; 7, 19-
21; XII, G, 31).
412 (avant le 28 fé- Epist. 139 (à Marcel- — Postérieure aux lettres 133 et 134
vrier;. linus). (cf. Epist. 439, 2), au Breviculus Colla-
iionis et au livre Ad Donatistas post Col-
lalionem {ibid., 139, 3), la lettre 139 est
du début de 412, mais antérieure au
28 février, puisque Apringius était en-
core proconsul au moment où elle fut
écrite {ibid., 139, 2).
412 (14 juin). — Epist. 141 (aux Do- — Avertissement aux Donatistes, sous
nalistes). forme de lettre synodale, rédigé par
Augustin (cf. Retrad., II, 66) au nom
du concile de Numidie document daté
:
413 (fin). — Epist. 151 (à Cseci- — Lettre écrite peu de temps après le
lianus). procès et la mort de Marcellinus et
d'Apringius, qui ont été exécutés à Car-
thage le 13 septembre 413 (cap. 6).
— Epist. 155 (à Macedo-
—
Mention du récent édit de Mace-
»uius, vicaire d'Afrique). douius contre les Donatistes (cap. 4, 17).
Macedouius était alors vicaire d'Afrique
2S6 OUVRAGES AMTIbONATlStES D AUGUSTIN
1-2).
417 (début). — Episl. 183 (à Bonifa- —
Lettre identique au De correctione
cius, tribun militaire;. Donatistarum, mentionné par Augustin
dans ses Rétractations (II, 74) entre le
De Gestis Pelaqi (début de 417) et le De
pra'sentia Dei (été de 417).
Vers 420. — Epist. 204 (au tribun —
Lettre écrite un peu avant le livre I
Dulcitius). Contra Gaudentium, c'est-à-dire égale-
ment vers 420 (cf. Epist. 204, 4 et 9 ;
LIVRE ONZIEME
Pages.
l. — La campagne d'Augustin contre Donalisme.
le —
Comment il fut
amené à combattre le schisme. —
Les étapes de sa campagne. Première—
période (392-395). —
Polémiques contre le Donatisme local. —
Le schisme
à Hippone. — Premiers ouvrages d'Augustin contre les schismatiques. —
Seconde période (396-400). —
Activité d'Augustin. —
Démêlés avec Procu-
leianus.— Injures et violences des Donatistes. —Nouveaux ouvrages
d'Augustin. — Conférences et projets de conférences avec les Donatistes.
— Modifications dans la polémique et dans les idées d'Augustin. Troi- —
sième période (400-405). —
Ambitions nouvelles d'Augustin. —
Il attaque
tions des traités et des lettres. — Discours d'Augustin dans les conciles
relatifs au Donatisme. — Ses nombreux discours à Conférence de 411.
la 146
APPENDICE
Library
DO NOT
REMOVE
THE
GARD
FROM
THIS
POCKET