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Chapitre Ii

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Chapitre II :Les expériences internationales

INTRODUCTION
Dans le chapitre qui va suivre, nous allons traiter des exemples de réhabilitation de
fondouks dans le monde et surtout chez nos voisins au Maroc et en Tunisie. La
protection du patrimoine a toujours eu une grande importance au sein de ces deux
pays, qui en ont fait un enjeu économique et touristique important et un moyen de
développement au niveau national. La ville historique au Maghreb, constitue une
réalité extrêmement variée sinon composite, les « ksour » de l’Atlas ou du désert,
les anciennes « médinas » des villes grandes et petites des plaines agricoles ou de
la bande côtière, et encore, pourquoi pas ? , les « quartiers européens » ou les «
nouvelles médinas » de la « ville coloniale », sont le témoignage d’une civilisation
urbaine aux stratifications culturelles multiples. Ils représentent, dans la ville
contemporaine, une entité sociale, économique et fonctionnelle, dont le poids dans
les processus de développement urbain n’est certainement pas le même à Alger ou
à Marrakech, à Tunis ou à Fès.

Dans le cas d’anciens pays coloniaux tel qu’au Maghreb, le patrimoine y constitue
une catégorie importée et les idéologies nationalistes ont plutôt orienté leur choix
patrimoniaux en effaçant notamment la phase coloniale et en réduisant le réfèrent
pré colonial aux seules dimensions arabo-musulmane. L’idée de la protection du
patrimoine dans les sociétés non européennes s’est faite grâce aussi aux
organismes internationaux tels que l’UNESCO, qui contribuent à exporter la notion
européenne du patrimoine dans le monde, et qui imposent des modèles
internationaux dominants à la faveur et dans le cadre des processus de
mondialisation. 1 Par sa situation géographique, il appartient au continent africain, ce
qui lui a permis au cours de l’histoire, de servir de lien entre les pays africains,
l’Europe et le monde arabo-musulman, et d’être un centre de rayonnement de la
civilisation vers lequel les pays voisins ont été attirés. Cette influence se manifeste
encore aujourd’hui dans ces pays, où elle a laissé des traces bien visibles. 2

Les grands objectifs de la politique culturelle et patrimoniale au Maroc et en Tunisie


se sont manifestés de la manière suivante :

1
GRAVARI-BARBAS M. ET GUICHARD-ANGUIS S, Ibid, p2.
2
BEN BACHIR M ET MOULAY MOHAMMED N, La politique culturelle au Maroc, Imprimerie
des Presses Universitaires de France, Publié en 1981 par l’organisation des Nations Unies pour
l’éducation la science et la culture, 50p.

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- Préserver de la disparition et de la dégradation le vaste patrimoine culturelle


par des travaux de restauration, de mise en valeur et s’attacher à son
développement.

- Assurer une large diffusion de la culture, afin que chacun puisse bénéficier de
ce droit, et faire prendre conscience aux habitants de l’existence de leur
patrimoine et de la nécessité de le préserver.

- Accueillir des activités culturelles tant arabes qu’internationales, afin d’enrichir


la culture nationale et de fournir aux citoyens une occasion de se familiariser
avec les différents aspects des cultures étrangères.

1. L’EXPERIENCE MAROCAINE :
INTRODUCTION :

Le Maroc est un vieux pays où plusieurs civilisations ont prospéré et de nombreuses


races se sont mélangées. Carrefour des grandes voies commerçantes entre
l’Europe, l’Afrique et le Moyen Orient, il abrite un patrimoine riche et varié héritage de
cette diversité. Tour à tour les berbères, les vandales, les romains et les musulmans
ont étendu leur pouvoir sur le nord de l’Afrique et sur l’Andalousie laissant derrière
eux des témoignages ineffaçables du raffinement de leur civilisation et de leurs
modes de vie.3

Aujourd’hui, le Maroc est l’une des destinations phares de la Méditerranée. Le


tourisme y est en très forte augmentation depuis quelques années, passant d’environ
3 millions de touristes en 1996 à 6,5 millions en 2006. 4 Ainsi, et conscient de tout les
atouts dont dispose le royaume (proximité de l’Europe, richesses naturelles,
culturelles et historiques, art culinaire, hospitalité de la population…) le
gouvernement et le secteur privé ont mis en place en 2001 une nouvelle politique
touristique ambitieuse et volontariste, dénommée « vision 2010 » dont l’un de ses
objectifs est d’atteindre le chiffre de 10 millions de touristes en 2010.

3
TANOUTI B, La politique culturelle – Maroc, étude TRAINMONHER. Le projet
TRAINMONHER (TRAINing in MONumental HERitage) est un projet de recherche &
développement de l'UE, de coopération internationale et de développement durable.
4
TREILLARD F, Le tourisme culturel au Maroc et le cas de Rabat, master 1 géographie, université
de Limoges, 2006.

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Le tourisme culturel semble être l’une des formes en vogue de la pratique touristique
au pays. Ce dernier en effet s’appuierait sur le patrimoine qui fut laissé tour à tour
par des influences phéniciennes, romaines, arabes et européennes ; ce patrimoine
englobe outre les monuments historiques, les sites, le mobilier archéologique et les
collections muséographiques, un patrimoine oral, culinaire et ethnographique varié.
Le Maroc compte de nos jours pas moins de 40 médinas, de 150 sites
archéologiques majeurs découverts, 406 sites historiques et naturels classés, des
milliers de richesses patrimoniales inventoriées et huit sites classés sur la liste du
patrimoine mondial.5

La gestion et la sauvegarde du patrimoine culturel marocain reviennent, au ministère


de la culture qui comprend : la direction du patrimoine culturel, 10 inspections des
monuments historiques, 8 centres d’études et de recherches spécialisées, 11
conservations de monuments, sites et médinas et 16 musées.

Et sur le plan juridique la loi 22-80 relative à la conservation des monuments


historique et des sites, des inscriptions, des objets d’art et d’antiquité, est le texte
actuellement en vigueur, elle prévoit outre la procédure classique de classement,
une procédure plus simplifiée qu’est l’inscription. 6 Par ailleurs les villes marocaines
sont soumises à une réglementation de protection à l’intérieur et à l’extérieur des
remparts visant la sauvegarde des tissus anciens dans leur intégrité par
l’instauration de servitudes et de zones de protection.

Comme exemple à étudier et à considérer dans notre recherche en ce qui concerne


le domaine de la réhabilitation des fondouks au sein du Maroc, on a prit comme
modèle la ville de Fès, et de Marrakech. Notre choix pour ces deux villes a été dicté
par les différentes études, inventaires et réhabilitations faites sur les fondouks de
chacune d’elles. En effet, pour le cas de la ville de Fès, sa médina a été classée
comme patrimoine mondial de l’UNESCO en 1981 ce qui a suscité un intérêt aux
monuments historiques de la ville dont les fondouks. Et pour le cas de Marrakech, un
bon nombre de fondouks ont été réhabilités dans le cadre d’un programme, celui de
l’INDH, « l’Initiative Nationale pour le Développement Humain », un programme de
mise à niveau des fondouks de l’ancienne médina classés patrimoine mondial en
1985, destinés à l’artisanat lancé par le roi Mohamed VI en 2007.

5
GAULTIER - KURHAN C, Patrimoine culturel marocain, Publié par Maisonneuve & Larose, 2003,
429 p.
6
Voir la loi n° 22-80, relative à la conservation des monuments historiques et des sites, des
inscriptions, des objets d’art et d’antiquité, ministère de la culture, royaume du Maroc.

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1.1. LA REHABILITATION DES FONDOUKS A FES

En arabe, fas voulait dire « pioche » ; la légende veut que l’on ait offert à Idris 1er une
petite pioche avec laquelle il a tracé les limites de la ville. En réalité, dés la fin du
VIIIe siècle, une petite ville berbère s’élevait sur la rive droite de l’oued qui s’appelait
Madinat Fas. Doyenne des villes impériales, Fès fut fondée en 789 après JC par
Idris 1er, un descendant du prophète. Son fils, le sultan Idris II, décide en 809 d’y
établir le siège de la dynastie et elle servit de base militaire pour le fondateur de la
dynastie Idrisside en campagne contre Taza et Tlemcen. 7 Dés 818, le sultan
accueille dans sa cité 8000 familles de musulmans andalous, et sept ans plus tard
cette nouvelle population est renforcée par l’arrivée de juifs et kairaouanais. Riche
de ces multiples patrimoines religieux, culturels et architecturaux, Fès devient
rapidement le centre religieux et culturel du Maroc.

Dés lors, malgré les guerres dynastiques et les périodes où elle ne fut pas la capitale
officielle du pays, la cité impériale n’a jamais cessé de s’agrandir et d’embellir. De
nos jours, Fès est sans doute la ville la plus authentique d’Afrique du Nord, et la
seule unique au monde par sa beauté, la splendeur de ses palais, de ses medersas,
de ses minarets, de ses fontaines, de ses trésors de l’art arabo – andalous, sans
oublier sa médina médiévale de Fès el Bali et son rayonnement intellectuel due à
l’université Karaouiyne (photo 11) la plus ancienne au monde ; c’est ce qui fait de
cette ville aujourd’hui la gardienne des traditions de l’islam.8

Photo 11 : La mosquée Karaouiyne de Fès,


Source Pickens S., Peuriot F., Ploquin P, Maroc: les cités impériales : Fès, Marrakech, Meknès, Rabat-
Salé
7
LOIZILLON S, Maroc, Editions Marcus, 2000, 96 p.
8
GAUDIO A, Fès, joyau de la civilisation islamique, Publié par Nouvelles Editions Latines, 1982,
312 p.

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Fès compte comme toutes les autres médinas du Maghreb un certain nombre de
fondouks qui remplissait autrefois leurs rôles initiaux. On les trouve en général
reparties le long des principales voies de circulation allant des portes Boudjloud, al
Guissa et Ftouh vers le centre, où se groupent les principaux dépôts de
marchandises ; les écuries et les hôtelleries quand à eux sont plutôt prés des portes.
Vu l’importance de ces édifices au sein de la médina, ils ont retenu très tôt l’attention
des spécialistes chargés d’étudier les problèmes de cette dernière, et c’est ainsi
qu’une liste recensant quelques 150 fondouks et notant leurs emplacements ainsi
que leur caractéristiques essentielles avait été dressée au cours des travaux menés
par « l’atelier du schéma directeur d’urbanisme de la ville de Fès » (ASDUF) dans les
années 75-78. Parmi ces fondouks on cite : fondouk Sagha, fondouk El Berka,
fondouk Kettanine, fondouk Nejjarine, fondouk Tettaouine…

De ce pré inventaire ils ont pu faire ressortir l’état des fondouks, ceux qui
fonctionnent toujours, et ceux qui sont partiellement ou totalement en ruine ; pour les
fondouks en activité ils ont remarqué qu’ils sont menacés par une sur occupation ou
par des usages qui surmènent leurs structures. Et à la fin de ce minutieux travail,
l’ASDUF a établi une liste d’interventions et chaque intervention concerné des
fondouks bien précis ; en effet, tout programme et tout projet de réhabilitation doivent
tenir compte à la fois des vocations anciennes de tel fondouk particulier, de ses
utilisations actuelles, des propositions de restructuration des activités économiques –
et tout particulièrement artisanales- qui se dégagent des études faites, et enfin des
conditions dans lesquelles un réaménagement physique des bâtiments répondrait le
mieux à ces propositions, 9 comme nous l’avons souligné dans le chapitre précèdent.

Un inventaire fait aussi par le « schéma directeur d’urbanisme de la ville de Fès » 10 a


permis de distinguer des catégories de fondouks au sein de la médina, il en ressort
trois catégories :

1. Le fondouk hôtellerie : (FH)

C’est l’équivalent du khan ou caravansérail oriental, bâtiment recevant des


voyageurs de passage, protégeant les marchandises amenées par caravanes à Fès
et prévoyant une écurie pour les montures. Ce genre d’édifices se trouvaient surtout
prés des trois portes les plus fréquentées, mais il y en avait aussi quelques uns dans
le centre de la ville ancienne, comme le très beau fondouk Chemmaine
malheureusement entièrement détruit par un incendie en 1974.

9
MICHON J L, Rapport sur la contribution à l'étude de la réhabilitation des Fondouks, Paris, Publié
par l’UNESCO en 1982.
10
SDUF, Ibid, p 37.

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Ces hôtelleries appartiennent à des particuliers et sont presque toujours loués à des
concessionnaires. En général, chaque fondouk avait à l’origine sa clientèle
particulière qui se recrutait parmi les compatriotes du concessionnaire : par exemple,
le fondouk de Derb El Lemti, sur la rive droite, était fréquenté de préférence par des
gens de Tafilalet, région d’origine du concessionnaire.

2. Le fondouk entrepôt : (FE) appelé à Fès fondouk et-tojjat (« des


commerçants »

Ce sont des entrepôts comprenant aussi, dés l’origine, des logements, des boutiques
ouvrant sur l’extérieur. Ils sont destinés à entreposer des marchandises et à
différents usages industriels et commerciaux. La cour elle, peut servir à des ventes à
l’enchère, mais à l’origine elle servait d’entrepôt provisoire pour les marchandises
non encore déballées.

En général les pièces sont loués par des artisans ou des commerçants, ces derniers
y déposent leurs marchandises avant de les vendre en ville ou de les exporter, il est
rare toutefois que artisans et commerçants cohabitent dans un même fondouk, ainsi
fondouk el Nejjarine, sans doute l’édifice commercial le plus magnifique de la ville,
était tout entier loué à des commerçants.

Bien évidemment on ne trouvait ce genre d’édifice que dans la zone où la vie


économique est active : un plan de situation des fondouks est la meilleure révélation
pour la répartition du commerce et de l’industrie dans la médina. Comme témoins
irremplaçables de l’architecture commerciale « classique » de Fès, on cite : fondouk
Sagha, fondouk El Berka… Souvent, ces fondouks sont des biens habous, mais les
droits des habous sont restreints par des droits adventices qui appartiennent à des
particuliers, ils ne sont pas loués en un seul bloc, mais pièce par pièce aux différents
occupants.

3. La maison de marchandises (Dar es Salaa) :

Il s’agit d’un local commercial occupé par un seul commerçant et non par plusieurs,
un grossiste important qui a, dans le même local, son bureau et ses magasins. Un
Dar es Salaa est souvent une demeure ordinaire transformé en local commercial, le
plus souvent c’est un local sombre et sans intérêt architectural. Il n’est pas habité par
son utilisateur : la garde de nuit et l’entretien sont assurés à l’origine par un
« zerzay » (porteur). Ce sont aussi les portefaix qui garderaient les autres types de
fondouks et les ateliers « draz » ; dés qu’un locataire arrivait le matin, le gardien lui
remettait la clé du fondouk et s’en allait à son travail de portefaix. Presque toutes les
maisons de marchandises sont situées dans les quartiers d’affaires – Sagha, Derb
Touil et Kettanin, Ras – Cherratin.

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4. L’architecture des fondouks :

Toujours d’après le dossier technique sur l’inventaire des fondouks établi pas l’atelier
du schéma directeur d’urbanisme de la ville de Fès, la forme générale la plus
courante consiste en un bâtiment à une entrée principale qui s’organise autour d’une
cour entourée de portiques, ces galeries couvertes reposent sur des piliers
quadrangulaires en maçonnerie de briques, lambrissés de cèdre sur 1.50m de
hauteur ; quand aux galeries de l’étage, elles reposent sur de grands linteaux en bois
de cèdre, posés en porte - à - faux et découpés en baies à degrés par les piliers.
Les piliers supportant des linteaux en bois de cèdre peuvent être remplacés par des
arcades en maçonnerie de briques (fondouk el Labbata), comme on trouve aussi la
combinaison des deux systèmes (fondouk Sagha, photo 12).

Photo 12 : Fondouk Sagha,


Source Pickens S., Peuriot F., Ploquin P.
Ibid, p 52

L’architecture des fondouks entrepôts est la même que celle des fondouks
hôtelleries sauf que :

- Dans les fondouks entrepôts la cour est plus petite, vu qu’elle n’abritait pas de
bêtes en permanence.

- La cour des fondouks hôtelleries peut être entourée de plusieurs niveaux,


alors que dans la première catégorie on dépasse rarement les deux niveaux.

Les « maisons de marchandises » elles, ne se différencient en rien des maisons


particulières, si ce n’est la couverture permanente du patio pour protéger les
marchandises. 11

Pourquoi cet intérêt de réhabilitation des fondouks ?

11
SDUF. Ibid, p 37.

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1. Parce que, dans le tissu urbain de la médina, ils représentent des structures à
relativement grande consommation d’espace et dont on peut bénéficier.

2. Parce qu’ils ont eu une fonction traditionnelle importante liée à l’histoire de la


ville et qu’ils présentent souvent un caractère d’ancienneté réelle.

3. Parce qu’ils sont menacés de multiples façons par la perte relative de leur
fonction traditionnelle, par la croissance démographique et la demande
d’espace croissante de la part de l’artisanat et du commerce.

Et en partant de ce diagnostic, et du rapport sur la sauvegarde de la médina de Fès,


il leur a été possible de dégager un certains nombres d’interventions touchant à la
réhabilitation des fondouks et consistaient :

- A restaurer soigneusement les plus beaux fondouks.

- A opérer une réhabilitation fonctionnelle de nombreux fondouks pour mieux


les insérer dans le réseau des activités économiques de la médina.

- A reconstruire deux fondouks pour créer un comptoir artisanal au centre de la


médina (ces deux fondouks on été entièrement détruit par un incendie).

- A intégrer un fondouk dans un projet d’école des arts et métiers. 12

« Le patrimoine culturel de l'ancienne Médina de Fès est "très dynamique" puisqu'il


contribue au développement socio-économique de la ville », a dit Mohamed
Rharrabi, wali de la région Fès-Boulemane et gouverneur de la préfecture de Fès.
S'exprimant lors d’un colloque international sur "La Médina de Fès, patrimoine
culturel pour un développement urbain" qui s’est tenu à Fès sous le haut patronage
de S.M. le Roi Mohammed VI en 2008, le wali a indiqué que les différentes études
sur Fès ont axé leurs préoccupations sur l'homme et son environnement, l'habitat,
l'activité et la préservation du patrimoine historique de la ville, amenant ainsi les
décideurs à épouser une vision intégrée sur les plans économique, infra structurel,
social et culturel.

Il a, de même, évoqué l'appel international lancé en 1981 par l'Unesco pour la


réhabilitation, la réanimation et la sauvegarde de la médina et les projets de
restauration financés par le gouvernement et des institutions internationales dont la
Banque mondiale ou par des particuliers citant à titre d'exemple la restauration du
Fondouk Nejjarine, les medersas Bouanania et Cherratine et de nombreux autres
monuments historiques.

M. Rharrabi a, à cet égard, fait état de la mise en œuvre d'une politique de


développement de Fès axée sur la valorisation de la médina en tant que patrimoine
12
MICHON J L, Ibid, p 52.

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universel, soulignant l'élaboration du Plan Régional pour le Développement du


Tourisme (PRDT) et du Plan régional pour le développement de l'artisanat (PRDA) et
les multiples actions entreprises ou programmées pour renforcer les capacités
économiques de la cite historique. 13

Et parmi les fondouks dont dispose la médina de Fès fondouk el Nejjarine, fait partie
de ses plus beaux monuments, il a subit une réhabilitation conformément avec le
programme de réhabilitation de la médina.

 Fondouk el Nejjarine : (fondouk des menuisiers)


Situé sur la place du même nom, fondouk el Nejjarine est un ancien entrepôt de
marchandises et un lieu de négoce, il fut bâti en 1711 sous le règne de Sultan
Alaouite Moulay Ismail. Le fondouk fut construit par l’amin Adyil, et on peut penser
qu’un groupe de commerçants riches ont participé aux frais de son édification. Il
servait d’entrepôt de marchandises précieuses (les tissus), et on y pesait aussi des
marchandises lourdes sur ces grandes balances qu’on peut encore voir sur certains
fondouks de la médina, certains auteurs ont même signalé qu’autrefois de
magnifiques balances en bois, d’un travail très raffiné s’y trouvait mais il n’en reste
pas trace de nos jours. Le fondouk était fréquenté uniquement par les grossistes de
la médina et du Mellah (des juifs y possédaient des boutiques). Cette institution
privée fonctionnait, dit-on, admirablement (compte tenu des conditions de sécurité
qui existaient sur les routes au 18e et au 19e siècle). 14

Le fondouk doit son nom au souk couvert qui ouvre d’un coté sur la place et où des
nejjara fabriquent aujourd’hui des auges en bois pour la lessive, ces armatures de
divans qu’on appelle « banquettes », des étagères peintes, des tables rondes et
basses, de petites armoires…

Photo 13 : Entrée de Fondouk el Nejjarine,


Source Pickens S., Peuriot F., Ploquin P. Ibid, p 52

13
Agence Maghreb Arabe Presse (MAP), Le patrimoine culturel de Fès, titrait Le matin Maroc, article
publié le 29/11/2008.
14
SDUF, Ibid, p 37.

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L’emplacement du fondouk lui confère une importance primordiale, il se trouve en


effet au cœur du noyau historique de la médina, à la croisée de ses principales
artères. Il s’ouvre sur la grande place nejjarine, animée de boutiques et de magasins
d’antiquaires, on ne peut ne pas remarquer l’édifice, il se signale tout de suite de
l’extérieur par la qualité de son mur lambrissé de planches de cèdre sur 1,60m de
hauteur environ et son enduit de chaux grasse et de sable lissé à la truelle et incisé
au couteau, comme indiqué dans la photo 13.15

Le fondouk el-Nejjârîne épouse un plan rectangulaire d'orientation nord-est/sud-


ouest, et est constitué d’un rez de chaussée et de deux niveaux, sa surface au sol
est de 500m², et la notion de verticalité et de profondeur selon laquelle le bâtiment
est conçu reflète les proportions d’une œuvre fort harmonieuse et équilibrée.
L’édifice comporte 55 petites pièces presque toutes identiques (3,15×2,50m)
agencées autour de la cour à ciel ouvert (photo 14). Cette dernière est pavée de
galets beiges et noirs, les fondations sont épaisses et très profondes et atteignent
jusqu’à 3m par endroit, dù à la nappe phréatique qui traverse le bâtiment.

Photo 14 : Intérieur du Fondouk el Nejjarine,


Source François-Xavier Prévot, photo personnelle.

L’architecture du fondouk est d’une remarquable sobriété. Le décor sur bois, zellige,
et plâtre dénote d’une grande finesse et d’un souci de précision et de détail. Le bois
totalement en cèdre, est utilisé abondamment dans le fondouk, on le trouve aussi
bien comme élément de structures -voliges, solives, poutres, poteaux, linteaux…- ou
comme matériaux de menuiseries –portes, fenêtres, et balustrades- ce sont en effet
les balustrades qui procurent aux façades intérieurs du fondouk toute leur beauté, et
leur charme. 16
15
GAULTIER-KURHAN C, Ibid, p 50.
16
GAULTIER-KURHAN C, Ibid p 50.

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On ne peut parler du fondouk el-Nejjârîne sans évoquer la fontaine qui garnit la


façade du monument depuis la première moitié du XIXe siècle. Elle s'inscrit en
parfaite harmonie avec la porte du fondouk, reprenant sa structure élancée et sa
décoration reposant successivement sur la céramique et le plâtre sculpté et l'auvent
en bois de cèdre sculpté et peint. 17

Le fondouk fut classé monument historique en 1916, et restauré en 1996 ; mais les
travaux de restauration - réhabilitation comme nous le montre la photo 15, ont porté
sur le fondouk dans son ensemble, la place, la fontaine et le souk des menuisiers,
tout cela est devenu possible grâce à la générosité d’un homme qui a assuré le
financement. La structure générale du Fondouk Nejjarine a été substantiellement
modifiée pendant les soixante-dix dernières années. La restauration a restitué sa
forme originelle et remis en état l'ensemble des structures (canalisations, fondations,
toitures, sols, etc.) ainsi que l'appareil décoratif. Elle s'est étendue à la place
Nejjarine et au souk des menuisiers et a comporté comme interventions :

.Réfection des canalisations traditionnelles,

.Assèchement des murs et des sols,

.Restauration des revêtements des sols,

.Restauration des revêtements en zellige,

.Restauration des revêtements en plâtre


sculpté,

.Restauration des revêtements en bois,

.Consolidation des fondations et des murs,

.Restauration des structures en bois,

.Restauration de la menuiserie,

.Réfection des toitures,

.Réfection de l'étanchéité,

.Restauration des planchers,

.Restauration des portes monumentales,

.Réfection des revêtements extérieurs,

Photo 15 : restauration du fondouk el Nejjarine


Source Aderfes Maroc
17
PICKENS S, PEURIOT F, PLOQUIN P, Maroc: les cités impériales : Fès, Marrakech, Meknès,
Rabat-Salé, aux éditions ACR, 1995, 311 p.

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.Travaux d'électricité et de plomberie,

.Eclairage de mise en valeur, 18

Le fondouk est devenu aujourd’hui un musée du bois où sont exposés les bois
ouvragés de l'architecture traditionnelle et les outils de cet art, avec une galerie
d'exposition climatisée, une salle d'exposition permanente, une bibliothèque
spécialisée et un laboratoire de restauration du bois. Et après un minutieux travail de
prospection, de collecte d’objets, d’identification, d’élaboration de fiches techniques,
et à la suite de la définition des moyens et supports d’exposition, l’installation du
musée a commencé. Elle s’est articulée autour des thèmes suivants relatant les
principales utilisations du bois au Maroc :

- Les métiers.

- Le bois utilitaire.

- Le bois domestique.

- Le bois d’architecture et de décoration.

- Le bois liturgique.

- Le bois comme support d’expression artistique. 19

Cependant, et quoique la réhabilitation du fondouk a donné lieu à des locaux


relativement spacieux et équilibrés, l’installation du musée au sein d’eux a imposé un
effort d’adaptation des collections fort variées à ces locaux totalement uniformes.
Ainsi trois techniques muséographiques furent utilisées, à savoir les vitrines, les
espaces muraux et le sol. Par ailleurs, la simplicité de l’exposition lui a permis d’être
saisissable à la fois par l’initié, par le visiteur moyen et même par les enfants et a
permis à chacun de ces trois « groupes d’intelligence » d’en tirer profit. La gestion du
musée Nejjarine, assuré par la fondation Mohamed Karim Lamrani à l’aide de 8
personnes, dirigée par le conservateur, se fait selon les mêmes règles régissant les
musées nationaux que se soit en matière de conservation, d’acquisition d’objets de
collections ou d’établissements d’inventaires.

La création du musée Nejjarine vient renforcer la mission de sauvegarde et de mise


en valeur de la médina et du patrimoine marocain, après quatre années de
fonctionnement il a pu enregistrer une fréquentation annuelle de 33 000 visiteurs

18
ADERFES Maroc, Agence pour la Dédensification et la Réhabilitation de la médina de
Fès, Le fondouk El Nejjarine.
19
GAULTIER-KURHAN C, Ibid, p 50.

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dont les nationaux représentent 8%, pourcentage encourageant et reflétant une sorte
de réconciliation du public marocain avec l’institution muséale, les groupes scolaires
et d’étudiants témoignent d’un intérêt croissant pour le musée, tout en sachant que
l’accès au musée leur est gratuit. 20 Aujourd’hui le fondouk bénéficie d’un grand
respect de la part de la population du quartier, vu qu’il constitue une source de
revenus permanents. Sur le plan touristique, le quartier est désormais devenu un
passage obligé pour les touristes en visite à Fès, le chiffre d’affaires des menuisiers
travaillant dans le souk Nejjarine ainsi que celui des artisans du quartier a augmenté
et leur production s’est diversifiée.

Sur le plan de la politique de sauvegarde de Fès, la restauration du fondouk a prouvé


qu’un édifice réhabilité et mis en valeur est capable de répondre aux besoins
sociaux et de la vie moderne tout en demeurant authentique. Enfin, le projet
Nejjarine aura sans doute pour conséquence la prise de conscience de la population,
des décideurs politiques, des élus et des mécènes surtout, de l’importance du
patrimoine comme important enjeu économique, social et civilisationnel à prendre en
compte dans toute stratégie de développement.

1.2. LA REHABILITATION DES FONDOUKS A MARRAKECH

D’après Gaston Deverdun, « On imagine aussi difficilement une ville musulmane


sans fondouk que sans mosquée », Marrakech fait partie de ces villes du monde
musulman qui dispose de fondouks au sein de leur médinas, la plus ancienne
mention de ce type d’édifices remonte au règne de Tachefine Ben Ali, troisième
souverain almoravide qui selon les historiens son secrétaire mourut assassiné dans
le fondouk Naranja (de l’orange) en 1141. L’âge d’or des fondouks correspond aux
époques de splendeur de la ville tout entière : sous les almoravides (11e et 12e
siècle) et les almohades (12e et 13e siècle) d’abord, sous les Saadiens (14e siècle) et
certains souverains alaouites ensuite, en raison du statut de capitale politique de
Marrakech. 21

Les fondouks étaient généralement établis à l’intérieur des murailles et de préférence


à proximité des portes principalement Bab el Khemis, Bab Doukkala et Bab Debagh,
ainsi le voyageur n’avait pas à traverser toute la ville pour trouver le gîte et le couvert
nécessaires. 22

20
GAULTIER-KURHAN C, Ibid, p 50.
21
RHARIB S, Les fondouks, de l’age d’or à la décadence, In le magazine de l’art de vivre
marocain, Couleurs Marrakech, numero9.
22
Agence Maghreb Arabe Presse (MAP), Les Fondouks de Marrakech : un patrimoine en voie de
restauration après des décennies de négligence, titrait Le matin Maroc, article publié le 04/03/2009.

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……………………………………………………..…..Chapitre II :Les expériences internationales

Leurs fonctions étaient fort variées ; selon Deverdun, dés l’époque almoravide,
certains d’entre eux étaient spécialisés dans les produits de consommation courante
ou de luxe : fondouk el Melha, fondouk es Sukkar, fondouk Lhenna, fondouk al
Atriya, et d’autres abritaient des corporations : fondouk Ennaqqala (des coursiers),
fondouk Ellabbadin (des feutriers) ou encore à des confréries religieuses (fondouk
Derqaoua), à des saints (fondouk Sidi Yaacoub) ou à des communautés étrangères
à la ville, comme le fondouk Ouarzaza, certains faisaient même office de maison de
bienfaisances comme le fondouk el Khiriyya bâti pour héberger les étudiants
étrangers. 23

Jusqu’au protectorat, les fondouks ont maintenu leurs fonctions socio économiques
d’origine : hôtellerie, entrepôt, écurie mais avec la création de nouvelles structures
d’hébergement, l’exode rural, la densification de la médina et les changements
culturels induits par la modernité ils ont progressivement perdu de leur importance et
ont commencé a dépérir.

Situés pour la plupart près de la place Jamaa El Fna, les fondouks sont considérés
comme des centres commerciaux, ils accueillent plusieurs artisans et connaissent
une affluence massive des touristes. Marrakech dispose de 98 Fondouks qui
s’étendent sur une superficie globale de 42.000 m², dont 45 Fondouks destinés aux
activités artisanales. Les activités exercées dans ces centres commerciaux se
répartissent entre le commerce, le textile, les produits de maroquinerie, la dinanderie,
la menuiserie, l’alliage, la teinturerie et la restauration. 24

En 2005, le roi du Maroc lance un nouveau programme intitulé « l’Initiative National


pour le Développement Humain » (INDH), qui vise l’instauration d’une dynamique en
faveur du développement humain en s’appuyant sur une démarche déconcentrée
qui respecte les principes de participation, de partenariat, de convergence des
actions et de planification stratégique, 25 " Nous entendons par là la problématique
sociale, qui constitue, pensons-nous, le défi majeur à relever pour la concrétisation
de notre projet de société et de développement. " voila ce qu’a affirmait le roi dans un
discours adressé à la nation au sujet du programme en 2005.

 INDH : des valeurs au fondement de l'action

• une action centrée sur l'Homme, au service de la dignité de tous et de


chacun.

23
BELKYAL K, Réhabilitation et développement local Cas des fondouks (caravansérails), Poster
présenté à Barcelone en juillet 2007.
24
RHARIB S, Ibid, p 60.
25
INITIATIVE NATIONALE POUR LE DEVELOPPEMENT HUMAIN, Programme 2006-2010
Rappel des fondements et du financement de l’ INDH.

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……………………………………………………..…..Chapitre II :Les expériences internationales

• une action élaborée dans un esprit d'écoute et de confiance en l'avenir.

• une action fondée sur la participation des bénéficiaires et des acteurs de


développement local, en synergie et en partenariat.

• une action ciblée, efficace, contractualisée, transparente, évaluée, appelée à


devenir une référence de bonne gouvernance.

• une action de longue haleine inscrite dans la durée et la pérennité.

Ce programme offre une capacité de financement additionnelle pour soutenir 4


types d'actions correspondant aux actions de développement humain :

 activités génératrices de revenus.

 soutien à l'accès aux équipements et services sociaux de base.

 soutien aux actions d'animation sociale, culturelle et sportive, etc.

 soutien au renforcement de la gouvernance et des capacités locales.

Les fondouks de Marrakech ont bénéficié de ce programme d’INDH, et leur mise à


niveau qui cible 4.000 artisans, vise à améliorer le revenu mensuel de l’artisan. Il
sera question de passer de la commercialisation indirecte à la commercialisation
directe. Le projet ambitionne d’augmenter de 30 % au moins le nombre de visiteurs
de ces fondouks.

Photo 16 : Entrée du fondouk Elmelha (sel) (Photo prise en 2007),


Actuellement transformé en habitat (rue Asouel-Quartier Bab Taghzoute – Médina de Marrakech).
Source Belkyal K, Réhabilitation et développement local Cas des fondouks (caravansérails).

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……………………………………………………..…..Chapitre II :Les expériences internationales

Au niveau architectural, les plans reproduisent la disposition classique des bâtiments


connus par ailleurs dans la plupart des pays d’islam : construit autour d'une grande
cour rectangulaire, une galerie borde la cour sur ses trois côtés. Des salles servaient
d'entrepôts, d'autres d'hôtellerie pour les marchands itinérants, les animaux porteurs
pouvaient être accueillis dans la cour.

SM le Roi a effectué lors de cette occasion une tournée dans les différentes
dépendances des Fondouk « Al Amri » et « Al Mizane », qui font l’objet de travaux de
restauration pour des coûts respectifs de l’ordre de 1,88 million DH et de 788.800
DH, financés dans le cadre d’un partenariat entre les bénéficiaires et l’Initiative
National pour le Développement Humain (INDH).

Les travaux dans ces deux fondouks, qui abritent plus de 200 artisans, portent sur la
réfection des murs, la reconstruction des toits menaçant ruine, le renforcement des
terrasses et la restauration de la façade, ainsi que le revêtement des sols. Ce
programme d’INDH est estimé à 249,7 millions DH, dont 5 millions DH consacrés à
la lutte contre la pauvreté en milieu rural (commune rurale Mnabha), 160 millions DH
au programme de lutte contre l’exclusion sociale en milieu urbain (20 quartiers de la
ville de Marrakech), 44,7 millions DH au programme de lutte contre la précarité
(10.375 personnes) et 40 millions DH au programme horizontal. Ce dernier bénéficie
à l’ensemble du territoire de la préfecture.26

Dans cette première phase, au bilan, 11 fondouks historiques sont réhabilités,


d’autres sont en cours. Sur le plan de l’artisan (l’usager) : une nouvelle dynamique
est mise en place. Le nouveau visage des édifices a rendu aux artisans leur dignité
puisqu’ils se sentent moins marginalisés, et le sentiment d’appartenance aux
corporations artisanales est retrouvé ou renforcé. Leur pas vers l’organisation en
association leur a permis de mieux s’organiser dans l’espace réhabilité, et de
soulever les questions communes à la préservation de leurs activités et l’amélioration
de leur situations sociale et professionnelle (formation continue, œuvres sociales,
loisirs, assurance maladie…etc.)

Photo 17 : Artisans travaillant sur des ustensiles en bois et sur du zellige


Source Belkyal K, Ibid, p 62.

26
INITIATIVE NATIONALE POUR LE DEVELOPPEMENT HUMAIN, Ibid, p 61.

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……………………………………………………..…..Chapitre II :Les expériences internationales

Sur le plan de l’édifice : le patrimoine est renforcé. Le bâtiment réhabilité, en


respectant le cadre général et en évitant la folklorisation souvent pratiquée par
l’introduction d’objets anachroniques, a permis l’intégration immédiate de l’édifice
dans son environnement. Il constitue non seulement un objet de curiosités multiples,
mais il est modèle d’une démonstration de valorisation d’un héritage presque
enterré.27

Impact social et environnemental de la réhabilitation des fondouks :

 Environnement plus propre, accueillant et valorisant;

 Patrimoine sauvegardé;

 Éléments architecturaux mis en valeur;

 Augmentation de la fréquentation touristique;

 Accès direct à la clientèle.

 Amélioration sensible des revenus des artisans.

 Fondouk el Amri :
Aujourd’hui, et en considération de leur importance historique et de leur valeur
architecturale, les fondouks qui menaçaient ruine, font l’objet d’une opération de
restauration. Le plus ancien est le célèbre fondouk "El Amri", occupé aujourd’hui
principalement par des ébénistes, avait en premier fait l’objet de travaux de
restauration (photo 18), lancés en 2007 par SM le Roi Mohammed VI en accord avec
le programme de l’Initiative National pour le Développement Humain (INDH).

Photo 18 : Fondouk al Amri avant sa restauration en 2006


Source Association al Amri
27
BELKYAL K, Ibid, p 61.

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……………………………………………………..…..Chapitre II :Les expériences internationales

Fondouk el Amri a été fondé dans une époque où Marrakech a connu une grande et
importante activité commerciale durant la dynastie des almoravides et des
Almohades vers la fin du 11e et début du 12e siècle, il se trouve au sein d’un quartier
très connu de la médina appelé Dar el Bacha vers la ruelle qui mène à l’un des sept
saints de la ville « Sidi Abdelaziz », on y trouve aussi dans le quartier une trentaine
d’autres fondouks (comme fondouk el Mizane, Tadlaoui, Kharbouch, Al khiriya…).

A présent et après sa restauration le fondouk rassemble des artisans exerçant dans


différents métiers, artisans de zellig, de cuir, fabricants de babouches, de sacs, de
pouffes, de moucharabiehs, des bijoutiers…on trouve même un atelier pour femmes
qui travaillent dans le vestimentaire et les fournitures pour les couturiers et
couturières (vêtements marocains traditionnels, djellaba, caftan, seroual…).

Photo 19 : Fondouk al Amri pendant sa restauration,


Source Associations al amri

Au sein du fondouk les artisans travaillent soit sur commande pour des
commerçants, décorateurs, designer, soit en vendant leurs produits directement
pour les touristes puisque le fondouk se situe dans le circuit touristique de la médina,
et c’était la le but de la restauration de l’édifice, faire en sorte que les artisans ne se
sentent pas marginalisés et bénéficient ainsi d’une amélioration de leur niveaux de
vie et une augmentation de revenus.

Quand aux matériaux de construction de l’édifice, son infra structure est faite à base
de guéliz, une pierre très solide extraite des carrières situées sur les collines de la
banlieue nord-ouest de Marrakech, et le reste est fait avec de la brique en terre cuite.
Les murs extérieurs et intérieurs du fondouk sont couverts d’un enduit, il s’agit du

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……………………………………………………..…..Chapitre II :Les expériences internationales

« tadelakt », un enduit à eau, brillant et imperméable ; en effet, avant de recouvrir


somptueusement les palais, hammams, salles de bain et fontaines de Marrakech
était utilisé pour imperméabiliser les réservoirs d’eau potable. 28 Il a la particularité
d'être « ferré » avec un galet de rivière et d'être traité au savon noir pour acquérir
son aspect définitif. Le tadelakt a un aspect doux et fin avec des ondulations dues au
travail du galet ce qui lui confère de grandes capacités décoratives. Son
imperméabilité permet de l'utiliser éventuellement pour faire des baignoires et des
lavabos.29
Les artisans marocains sont passés d’une technique utilitaire à une technique
décorative. Ils ont su exploiter les qualités uniques de leur chaux pour révéler sa
dimension esthétique intemporelle.

Pour la menuiserie au sein du fondouk, le bois de cèdre est utilisé en abondance,


c’est d’ailleurs le seul bois qui résiste à l’humidité et la chaleur qui règne durant toute
l’année à Marrakech. On trouve aussi quelques décorations de style géométrique ou
floral sur le tadelakt.

Photo 20 : Fondouk al Amri après sa restauration,


Source Associations al amri

28
ASSOCIATION AL AMRI DES ARTISANS.
29
TERRASSE H, Marrakech, Encyclopaedia Universalis 2009

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……………………………………………………..…..Chapitre II :Les expériences internationales

1.3. CONCLUSION

Le Maroc dispose d'un patrimoine culturel et civilisationnel riche et diversifié. Chaque


région possède ses particularités, contribuant ainsi à la culture nationale et à
l'héritage civilisationnel. Parmi les obligations prioritaires, figurent la protection du
patrimoine sous toutes ses formes et la préservation des monuments historiques
dont les fondouks. Ces édifices, en dehors de leur importance économique évidente
pendant une certaine période, sont de remarquables témoins de l’architecture du
pays. En les restaurant et en les réhabilitant, ils participent de nouveau à la
revalorisation de la médina, comme nous l’avons vu avec l’exemple du fondouk à
Fès et celui de Marrakech.

2. L’EXPERIENCE TUNISIENNE :
INTRODUCTION :

La Tunisie fait partie de ces pays, qui enferment un patrimoine archéologique,


architectural, historique, et ethnographique diversifié et très riche, témoignage de la
profondeur, la variété et la richesse des civilisations qui se sont succédé sur son
sol. Chacune d’elles a laissée des traces qui ont contribué à façonner d’une manière
ou d’une autre cet héritage qui fait la richesse du pays. Le patrimoine culturel,
mémoire et support identitaire essentiel des Tunisiens est aussi le reflet de la solidité
et la permanence de leurs attaches avec leur environnement civilisationnel particulier
et au-delà, avec les autres peuples et cultures du monde. De nos jours, ce
patrimoine est reconnu soutien pour le développement social et économique,
pourvoyeur d'emplois, de ressources et de qualifications, facteur de promotion et
d'amélioration du cadre de vie et support essentiel pour le tourisme dans un pays
qui oeuvre à développer ce secteur. 30

En effet, le patrimoine en Tunisie bénéficie d’investissements importants consacrés à


sa préservation et sa mise en valeur à des fins touristiques. Plusieurs de ses sites
sont inscrits à la liste du patrimoine mondial de l’UNESCO, comme « la médina de
Tunis » en 1979, celle de « Sousse » en 1988, site archéologique de Carthage en
1979…31 Mais comme tout les pays en voie de développement, la Tunisie fait face à
quelques problèmes en matière de préservation, de gestion et de restauration de
son patrimoine, l’état tunisien, conscient du potentiel que représente ce patrimoine
en terme de développement national et local ainsi que des menaces qui pèsent sur
30
MINISTERE DE LA CULTURE ET DE LA SAUVEGARDE DU PATRIMOINE EN TUNISIE.
31
Voir liste du patrimoine mondial en Tunisie, UNESCO.

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……………………………………………………..…..Chapitre II :Les expériences internationales

celui-ci, a manifesté son intérêt dans une série d’initiatives telles que : la création de
parcs archéologiques parmi lesquels le site de Carthage et celui d’Oudhna. 32

La stratégie du pays en matière de protection du patrimoine s’est basée sur des


choix qui sont l’aboutissement d’une analyse de l’état des lieux ; cet état des lieux à
en effet servit a enregistré des acquis et identifié une série d’insuffisances et de
lacunes liées pour l’essentiel à :

1. Un dispositif juridique et réglementaire fiable mais non encore pleinement


opérationnel.

2. Des moyens humains, techniques et financiers limités en comparaison avec


les besoins et les attentes.

3. Insuffisance de coordination et de planification :

_ Public/ public,

_ Public / privé,

_ national/local

4. Insuffisance des programmes de valorisation dans les sites qu’ils soient déjà
ouverts au public ou non ouverts.

5. Information et sensibilisation insuffisantes du public.

6. Impact limité du patrimoine culturel sur le tourisme tunisien.

7. Participation limitée du patrimoine culturel dans le développement local.

Et en partant de ce diagnostic, ils ont pu faire découler les objectifs suivants :

8. Consolidation juridique, institutionnelle et organisationnelle.

9. Mise en valeur et aménagements de sites.

10. Médiatisation.

32
SOW D, Contribution à l’étude de la valorisation du patrimoine culturel tunisien : les parcs
archéologiques de Carthage et d’Oudhna, in la revue de l’Institut National de l’Histoire de l’Art à
Paris.

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……………………………………………………..…..Chapitre II :Les expériences internationales

2.1 LA REHABILITATION D’UN FONDOUK A SFAX

Edifié sur le site de l’antique cité romaine de Taparura, Sfax (Sfaqus) et sa banlieue
représentent l’agglomération urbaine la plus dynamique de Tunisie. Riche de ses
industries et de son port, la ville joue un rôle économique de premier plan avec
l'exportation de l'huile d'olive et du poisson frais ou congelé. Le noyau central de
l'agglomération est formé d'une médina cernée de remparts (fig.10) et d'une ville
moderne, née sous le protectorat français en Tunisie, malheureusement la médina
est devenue aujourd’hui un espace où l'on habite de moins en moins et qui se
spécialise dans la production économique. Longue de 600 m et large de 400 m, la
médina est entourée de remparts édifiés au IXe siècle que rythment des tours
polygonales, on y accède par deux portes celle de Bab el Jebli au nord et Bab ed-
Diwan au Sud, en plus d’autres entrées bien plus récentes.

Fig.10 : La médina de Sfax,


Source Mohamed FENDRI, ICOMOS

La ville de Sfax accorde un intérêt particulier à son patrimoine et ses monuments,


cette attention se traduit par des programmes d’actions étudiés et mis en chantier.
Les programmes retenus pour la mise en valeur de la médina ont touché les
remparts, l’amélioration des rues et ruelles qui consisté en la réfection du parterre,
l’entretien et l’amélioration des habitations en les restaurant…En plus de cette
attention particulière portée à la médina, naît pour la renforcer l’ « Agenda 21 »
spécial et local pour cette dernière, un programme qui vise une stratégie de

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……………………………………………………..…..Chapitre II :Les expériences internationales

développement durable de ce grand site qui n’a cessé de connaître une dynamique
culturelle, sociale et commerciale, et relatif à la sauvegarde des spécificités
architecturales et civilisationnelles de la médina, à la protection de l’environnement et
à l’animation culturelle et touristique. 33

De son coté fondouk el haddadine a rendu à une bonne partie de la médina son
prestige historique d’antan.

 Fondouk el haddadine : (des ferronniers)


Situé à Bab el jebli, au pied des remparts centenaires, le fondouk ancien relais
d’étape pour les caravanes, doit son appellation au souk des forgerons dans lequel il
est situé. En effet, autour de la porte se concentrée aussi bien les artisans, les
forgerons, les rétameurs, les ébénistes, les fabricants de tous les ustensiles
traditionnels, les vendeurs de céréales, des teinturiers, des selliers, et des
marchands de laine. Le fondouk a été un entrepôt et un lieu d’artisanat du métal, où
au rez de chaussée les magasins étaient occupés par des forgerons, des
chaudronniers et des soudeurs, quelques salles de l’étage étaient utilisées pour des
dépôts et l’hébergement. 34

Le projet de réhabilitation du fondouk a été cofinancé par le ministère du tourisme,


l’Association de Sauvegarde du Patrimoine et l’Association International des Maires
Francophones (AIMF), et les travaux de réhabilitation et de restauration de l’édifice
ont transformé ce site en un nouvel espace culturel et de loisirs sur environ 1300m²,
ces travaux ont porté sur :

- Reprendre les murs en maçonnerie et en renforcer les soubassements.

- Consolider les voûtes et reprendre les couvertures.

- Reprendre les terrasses.

- Refaire le revêtement du sol.

- Replacer la menuiserie dans sa totalité.

- Renouveler l’installation électrique pour la mettre en conformité avec les


normes de sécurité.

- Renouveler la plomberie et les sanitaires.

33
ZBARA S, Urbanisme, Grand travaux de réhabilitation de la « médina » de Sfax,
In LeRenouveau, janvier 2009.
34
ASSOCIATION INTERNATIONALE DES MAIRES FRANCOPHONES (AIMF), Création
d'un centre culturel - Culture et éducation à Sfax.

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……………………………………………………..…..Chapitre II :Les expériences internationales

Photo 21: Fondouk el Haddadine


Source UNESCO

Aujourd’hui et vu l’importance de l’espace, la municipalité de la ville de Sfax a décidé


d’introduire le fondouk des haddadine (photo 21) dans le circuit touristique, tout
comme il a abrité une bonne partie du programme du 14e festival de la médina en le
mois de ramadan et à déjà servi pour la clôture du 30e festival d’été de Sfax.

2.2 LA REHABILITATION D’UN FONDOUK A SOUSSE :

La ville de Sousse a connu depuis la plus haute antiquité une grande prospérité, ville
punique puis romaine, capitale de Byzacium au III e siècle, elle est grande
exportatrice d’huile et de céréales. Port de Kairouan, devenue capitale de l’Ifriqyya
pendant trois siècles, Sousse connaît un nouvel essor sous le protectorat français. 35

La médina de Sousse a été classée patrimoine mondial par l’Unesco en 1988, elle a
été bâtie à flanc de colline et s’étage en un vaste amphithéâtre face à la mer, ses
souks et ses rues commerçantes, quotidiennement arpentés par une foule
cosmopolite, et où règne une animation fébrile du matin au soir, débordent d’odeurs
et de couleurs. La médina renferme une quarantaine de monuments historiques, et
est divisée en deux parties, la partie basse elle, abrite toutes les activités
commerciales et ceux de service, quand à la partie haute est depuis toujours
presque exclusivement résidentielle. 36

35
UNIVERSALIS, Ibid, p 29.
36
COQUE R, Sousse, Encyclopaedia Universalis 2009.

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……………………………………………………..…..Chapitre II :Les expériences internationales

 Fondouk à Sousse :
Situé à 16 rue souk al kaid à Sousse, le fondouk se situe au sein de la médina,
l’édifice n’est pas classé comme monument historique, et se trouve au milieu d’un
environnement bâti d’une densité importante. Les objectifs de sa réhabilitation et
restauration sont sa transformation en un lieu où on exerce une activité commerciale
tout en conservant la typologie et les caractéristiques architecturales du monument.

C’est l’un des rares fondouks de la médina de Sousse, il est constitué d’un rez de
chaussée et d’un étage abritant de petites pièces couvertes de voûtes et recevant le
jour par des portes donnant sur quatre galeries (photo 22). Avant sa réhabilitation en
2004, l’état de conservation du bâtiment été moyen ; ses murs sont construits avec
des moellons, son plancher en solives de bois de cyprès avec voûtes en berceau et
voûtes d’arêtes, et ses revêtements extérieurs en enduit de chaux et de sable,
comme il comprend aussi des ouvertures simples aménagées dans les murs et
dépourvues de pavement.

Il s’agit d’un projet qui consiste à effectuer des travaux de restauration dans un
monument qui assumait une fonction de fondouk afin de le transformer en un lieu à
activité commerciale. L’intervention s’est limitée à la consolidation des structures
portantes et des couvertures ainsi que le renouvellement de l’enduit et du parement.
La conversion de ce monument en lieu commercial a nécessité de rendre certaines
pièces communicantes afin de créer un circuit commercial.

Photo 22 : A l’intérieur du fondouk à Sousse,


Source Rehabimed

Travaux de réhabilitation :

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……………………………………………………..…..Chapitre II :Les expériences internationales

- Usage actuel : Commercial.

- Murs : En moellons (grès coquillé).

- Plancher : Toiture terrasse en solives et voliges/ voûtes d’arête sur doubleau en


pierre.

- Toitures : Toiture terrasse.

- Revêtements : Enduit en chaux et en sable.

- Pavage : Carrelage.

- Equipements : Réfection de la boiserie et de la canalisation.

Pour l’Intégration de l’immeuble dans l’environnement urbain ou paysager, ses


travaux de restauration ont conservé la typologie et les caractéristiques
architecturales du monument. Quant à la fonction attribuée à cet édifice, elle permet
son intégration dans le réseau urbain dont il fait partie connu par son activité
commerciale. 37

2.3 LA REHABILITATION D’UN FONDOUK A HOUMT SOUK A


DJERBA :

Houmt Souk, qui veut dire « quartiers du marché » est la capitale de l’île de Djerba
en Tunisie et compte 40 000 habitants. Cette ville tranquille et très différente des
villes tunisiennes, attire les touristes pour son style simple et authentique.

L’une des particularités de la ville, c’est l’existence de fondouks, en effet sur 24


fondouks au niveau de l’île 18 se trouvent dans la ville d’Houmt Souk. La
construction de la plupart de ces édifices date entre le 16éme et le 19éme siècle dés que
la ville a commencée à connaître une activité commerciale importante. Ces
bâtiments tout comme les autres étaient adaptés pour accueillir les négociants
étrangers et leurs marchandises.

L’architecture de ces fondouks est facilement identifiable, tout d’abord ces bâtiments
sont toujours fortifiés, construit en pierre de schiste, et les murs sont massifs
d’environ 80 cm d’épaisseur. On accède au fondouk après avoir traversé la sqifa qui
donne accès à la cour centrale, de forme carré ou rectangulaire à ciel ouvert, et où
au centre se trouve un puit ou une citerne.
37
RAMMAH M, Réhabilitation d’un fondouk, Sousse, fiche sommaire de réhabilitation bâti : tnfb22,
RehabiMed.

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……………………………………………………..…..Chapitre II :Les expériences internationales

Autour de la cour centrale, s’agencent des pièces souvent avec des arcades
reposant sur des colonnes robustes. Le rez de chaussée été destiné à l’entrepôt des
marchandises et aux bêtes de sommes, et l’étage servait à l’hébergement des
commerçants ou des voyageurs de passage. Les chambres sont plus profondes que
larges, aérées et éclairées par des trous percés à la hauteur du plafond semi
cylindrique.

Aujourd’hui la plupart de ces édifices ont été restaurés et réhabilités, et se sont vus
attribués une nouvelle fonction. Certains ont été transformés en hôtels comme nous
allons le voir avec l’hôtel El Aricha, d’autres sont devenus des restaurants
typiquement tunisiens ou des galeries marchandes (photo 23). Ces fondouks sont
classés par métiers et portent parfois le nom d’une activité artisanale, comme le
fondouk de la laine ou le fondouk de nattage, ou bien ils portent le nom de leurs
propriétaires comme fondouk Barkallah ou Bouchdakh, ou encore d’autres noms
comme fondouk el knissa (de l’église), fondouk des maltais. 38

La photo 24 nous illustre une image d’une cour centrale et d’une chambre d’un
fondouk transformé en hôtel (hôtel Marhala).

Photo 23 : Fondouk transformé en galerie,


Source ASSIDJE

38
KHANCHOUCH N, Les fondouks à Houmt Souk, L’association de sauvegarde de l’île de Djerba.
(ASSIDJE).

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……………………………………………………..…..Chapitre II :Les expériences internationales

Photo 24 : Fondouk transformé en hôtel


Source ASSIDJE

 Hôtel El Aricha :
Cet ancien fondouk transformé en hôtel, se situe à la place Aricha en plein centre de
la ville de Houmt Souk. L’entrée est constituée d’une sqifa (photo 25), qui mène à la
cour centrale, où se trouve une piscine et autour de laquelle sont disposée au rez de
chaussée et à l’étage des chambres desservies par une galerie en arcades. On
trouve également au niveau d rez de chaussée un restaurant.

La photo 26 nous donne une vue sur la piscine avec les différents niveaux.

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……………………………………………………..…..Chapitre II :Les expériences internationales

Photo 25 : Entrée du fondouk El Aricha


Source ASSIDJE

Photo 26 : Intérieur du fondouk El Aricha


Source ASSIDJE

La construction est bien entretenue par son jeune propriétaire, ainsi que les fleurs et
ses bougainvillées qui bordent la piscine et qui lui donne un charme unique. Le
nouvel hôtel est très prisé par les touristes à la recherche d’endroits authentiques,
calmes et chaleureux au sein de la ville.

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……………………………………………………..…..Chapitre II :Les expériences internationales

On peut lire ci-dessus quelques commentaires de touristes au sujet de cet hôtel :

« Lorsque J’ai franchi le porche de l’hôtel, à ma grande stupéfaction, j’ai trouvé un


lieu magnifique et magique donnant sur un patio bordée par une piscine où règnent
l’authenticité et la beauté. Un doux parfum estival grâce à ses fleurs, une délicieuse
cuisine, des gens pleins de gentillesses et de cœur, des amies, la famille. Un endroit
où il fait bon se retrouver et où l’atmosphère est paisible merci ! » 20 septembre 2009.

« lorsque vous passez le porche de cet hôtel, vous entrez dans un rêve, calme,
sérénité, beauté, ambiance louange et cosy, magnifique caravansérail , entièrement
rénové , patio avec restaurant où la cuisine est délicieuse ( le poisson et la cuisine
de tradition est à l'honneur), chambre typique, magique d'une rare beauté.
Le patron et le personnel vous accueil avec toute la gentillesse qu'ils ont dans leur
cœur.Vous y retrouvé le soir une ambiance hors du commun ou vous partagez leurs
traditions et les vôtres autour d'un bon repas. Vous vous sentez la- bas comme chez
vous, où vous y découvrez de nouveaux amis pour toujours, un seul mot : le vrai
bonheur. » 24 août 2009.

Les chambres quand à elles, ont gardé leurs formes initiales (photo 27) et les
nouvelles commodités ont pu s’adapter à l’édifice.

Photo 27 : Chambre à l’intérieur du fondouk El Aricha


Source ASSIDJE

2.4 CONCLUSION:

La réhabilitation des fondouks en Tunisie, a pu faire réintégrer ces édifices au sein


de la médina, en leur attribuant de nouvelles fonctions qui se sont adaptés à l’édifice
et à la vie moderne.

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……………………………………………………..…..Chapitre II :Les expériences internationales

3. LA REHABILITATION D’UN FONDOUK


AU LIBAN :

 Khan El-Tamathili :
Comme la plupart des khans des villes côtières du Liban, El-Tamathili comme illustré
dans la photo 28, se trouve à proximité des grands ports d’échanges que sont Tripoli,
Jbeil, Beyrouth et Saïda. Ce khan « portuaire » a donc été le centre d’une activité
commerciale et administrative intense et un lieu d’hébergement très fréquenté par les
marchands. Ce sont là des fonctions traditionnelles qu’il a assumées, sous les ères
Mamelouk et Ottomane puis sous mandat français au XXe siècle, il se compose d’un
rez de chaussée avec 30 chambres, et l’étage en compte 44. Le khan El-Tamathili
conserve de ce passé des éléments architecturaux, archéologiques et historiques
inestimables qui font de sa restauration une priorité. Au terme de cet effort, de
nouvelles utilisations peuvent être proposés pour ce khan.

Photo 28 : khan el Tamathili,


Source UMAR

- Au rez de chaussée : des cafés, des restaurants et autres commerces de ce


type.

- Au premier étage : une bibliothèque municipale, un musée sur l’histoire de la


ville d’El Mina et des espaces de vente d’artisanat qui développent une forme
de tourisme authentique.

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Ces nouvelles attributions du khan El-Tamathili sont susceptibles de créer au cœur


de la ville d’El Mina, un centre non seulement économique et touristique mais
également social et culturel, favorisant ainsi l’éducation du plus grand nombre. Par
ailleurs, son accessibilité et sa situation tournée vers la mer en font un lieu de
promenade et de détente agréable. Soulignons enfin que ce projet de réhabilitation
se veut avant tout maîtriser et respectueux de l’identité des lieux.

C’est pourquoi il prévoit une implication forte de la municipalité, tant au niveau de la


gestion financière du khan que des différents partenariats qu’elle est a même de
mettre en place pour le fonctionnement harmonieux et intelligent de celui-ci.

Restauration du khan :

Parmi les nombreux travaux que nécessite la restauration d’El-Tamathili, on peut


noter principalement les suivants :

- Suppression des ajouts afin de retrouver l’état et la typologie initiale du khan


initial.

- Réfection des façades suivant des procédés adaptés et non agressifs


(utilisation d’eau potable sous pression).

- Réparation des murs, des joints, des parties endommagées et de l’étanchéité


des toits.

- Restauration des escaliers et aménagements supplémentaires afin d’assurer


la sécurité des usagers.

- Renforcement des fondations et des voûtes fissurées à certains endroits,


notamment au niveau des coins du khan.

- Remplacement des boiseries, des portes et des menuiseries.

- Réfection des carrelages en pierre calcaire.

- Recherche d’une unité des façades et de leurs fenêtres.

- Reconstruction de la porte d’entrée principale et installation de celle-ci dans


le respect des éléments de fermeture encore préservés.

- Restauration des ornements.

- Remise en état des réseaux, des branchements et mise en conformité de


l’électricité sans altération de l’aspect du khan.

- Enlèvement des pierres actuelles dans la cour et restauration du paysage


d’origine.

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- Remise en fonction de la fontaine.

- Création de sanitaires et de locaux techniques.

- Aménagement et restauration des chambres en fonction de l’usage qui leur


est réservé (bibliothèque, musée, restaurants, artisanat, hôtellerie…).39

4. LA REHABILITATION D’UN
FONDOUK A CHYPRE :

 Büyük Han:
Büyük han qui signifie « la grande auberge » est un édifice architectural majeur de
Chypre. Il a été construit en 1572 par le premier gouverneur Muzzaffer Pacha, dans
le sud, un peu à l’ouest de Nicosie. 40

Ce khan était destiné à loger les voyageurs d’Anatolie et des autres contrées
chypriotes. Au XVIIe siècle, lorsque fut créé non loin le « Kumarcilar han », les
bâtisseurs s’inspirèrent fortement de « Büyük han » pour donner forme à ce nouveau
lieu d’hébergement.

Ces deux auberges sont donc tout à fait typiques du khan d’Anatolie ; ils offrent de
nombreux points communs et sont souvent comparés. Le plan carré du bâtiment se
décompose en 68 chambres qui entourent une cour intérieure et 10 magasins
donnant sur la rue Asmaatli.

Au milieu de cette cour, se tient une petite mosquée aux colonnes en marbre
contenant une fontaine pour les ablutions rituelles. « Büyük han » possède deux
ouvertures sur les cotés est et ouest, mais l’entrée principale est celle que l’on
aperçoit depuis la rue Asmaatli. Si les chambres du premier étage s’ouvrent sur une
galerie à voûtes croisées, celles du rez de chaussée ont des fenêtres tournées vers
l’extérieur du khan. Toutes en revanche possèdent un foyer qui diffuse la chaleur
vers les différentes niches (photo 29).

Les premiers travaux de restauration significatifs ont commencé en 1963. Le


département des antiquités de la république de Chypre a tout d’abord entrepris de
reconstruire la galerie sud à arcades. Cette reconstruction a été menée sans la
volonté de rester fidèle à la forme d’origine. Pendant les travaux, trois colonnes et
quatre arches ont été remplacées dans un style nouveau et non ottoman.

39
BARMAKI M, études préliminaires pour la réhabilitation du khan, UMAR.
40
Nicosie est la capitale de Chypre, c'est la seule au monde à être divisée en deux, chacune étant le
chef-lieu de deux entités politiques différentes : la partie nord, pour la République turque de
Chypre du Nord (état turcophone autoproclamé) et la partie sud, pour la République de
Chypre (majoritairement grecque).

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La restauration du Büyük han a été interrompue lors des événements de 1963 qui
ont opposés les turcs aux grecs. Elle a ensuite repris en 1982 dans le cadre d’un
partenariat entre le conseil d’administration d’Evkaf et le département des antiquités
et musées.

Photo 29: Büyük han,


Source UMAR

Entre 1988 et 1990, les travaux continuent grâce à l’aide financière apportée par le
gouvernement allemand. Ils visent à restaurer la charpente en suivant le plan
directeur. Entre 1991 et 1995, les travaux sont interrompus à cause du manque de
financements mais en 1995, le gouvernement turc apporte son soutien et Büyük han
sera finalement totalement restauré en 2001.

Actuellement, le khan accueille plusieurs petits antiquaires, ainsi que des artisans et
des magasins qui font la joie des visiteurs en quête d’objets traditionnels chypriotes.
Un bar à vin et un restaurant proposant une cuisine locale y ont également élu
domicile. L’endroit est réputé pour ses soirées musicales et Büyük han est
aujourd’hui identifié comme un haut lieu de la vie culturelle et sociale dans le nord de
Chypre. 41

41
TURKER AKTAC, UMAR.

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CONCLUSION

Les fondouks restent des témoins irremplaçables de la spécificité culturelle et


architecturale commune à l’ensemble des pays du pourtour méditerranéen, leurs
réhabilitations et mise en valeur à pu redonner à ces espaces toute l’importance
qu’ils avaient avant, en leur injectant de nouvelles fonctions qui ont pu s’adapter à la
typologie de l’édifice sans nuire ni à son histoire, ni à sa mémoire, et ni à son
architecture.

Aujourd’hui, les fondouks ne s’inscrivent plus dans le système de commerce et


d’échange qui fut à l’origine de leur création, mais plutôt en tant que repères vivants
des villes.

Par la réhabilitation des fondouks, les marocains, et les tunisiens… ont implanté des
fonctions compatibles avec le caractère historique de la ville et ont réussis à
sensibiliser les habitants envers leur patrimoine, et ainsi ont réussis aussi à maintenir
la mémoire et la préservation de la société.

Au chapitre qui suivra, il sera question de la politique patrimoniale en Algérie, et au


devenir des fondouks au niveau du pays.

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