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Par
Halima BAKALA
Résumé :
Les investissements directs étrangers (IDE) constituent l'un des attributs les plus marquants de la
mondialisation. Ils occupent une place de choix dans la plupart des pays du monde du fait de la
convergence de deux préoccupations : celle des entreprises cherchant à s’internationaliser et celle
des gouvernements qui cherchent à attirer de plus en plus les capitaux étrangers. Les firmes
multinationales s’implantent là où elles espèrent trouver les meilleurs ressources et avantages ; leur
décision d’investir dans un pays peut être motivée par plusieurs déterminants : taille du marché,
coût des facteurs de production, disponibilités en ressources humaines qualifiées, le nombre
d’entreprises locales performantes, etc. Tandis que leur apport est essentiel pour la croissance
économique, l’emploi, la balance des paiements et les transferts de technologie, les IDE sont
devenus un enjeu des politiques économiques nationales. En concordance avec ce constat, le
Maroc, qui aspire à attirer les IDE, doit faire de sa politique d’attractivité un élément fondamental
pour améliorer et renforcer la compétitivité de son économie.
Abstract :
Foreign direct investments are concidered (FDI) as the most important attribute of globalization.
They hold an envinable position in many countries around the world as a result of the convergence
of two preoccupations: the one which concerns companies seeking the internationalisme and that of
governements seeking to attract more foreign capital. The multinational firms are established where
it is more likely to find the best resources and benefits . Their decision to invest in a country which
can be motivated by several determinants: size of market, cost of factors of production, availability
of qualified human resources, the number of successful local businesses while their contribution is
essential for economic growth, employment,balance of payments and technology transfer. The FDI
has become an issue of national economic policies in line with this observation, Morocco which
aspires to attracts FDI, must make this attractiveness policy a fundamental element to improve and
strengthen the competitiveness of its economy.
Introduction
Cette décennie peut paraître une période difficile à appréhender du fait de l’accélération de la
mondialisation « des mutations sociales, culturelles, économiques, scientifiques, technologiques,
géopolitiques, ou environnementales». Ces mutations favorisent un développement croissant des
investissements directs à l’étranger qui sont bénéfiques pour les pays d’origine et d’accueil et font
partie intégrante d’un système économique international ouvert et efficace.
En théorie, les IDE permettent, en effet, aux pays hôtes l’augmentation des capitaux et des recettes
fiscales, la création d'emplois, les transferts de technologie et de compétences, les impacts positifs
sur la balance des paiements et l'industrie locale, la hausse de la productivité, la formation de
capital humain, l’ouverture aux marchés internationaux. Puisqu'ils se concentrent sur des
rendements à plus long terme, les IDE représenteraient une source de capitaux plus intéressante
pour favoriser le développement, en comparaison avec la plupart des autres formes d'apports privés
étrangers (Culpeper, 2004).
Cependant, les avantages que les IDE procurent ne se manifestent pas de manière automatique et ne
se répartissent pas équitablement entre les pays, les régions et les secteurs. On assiste à une rude
concurrence entre les pays qui cherchent à mettre en valeur les déterminants susceptibles d’attirer le
plus d’investisseurs étrangers et bénéficier, ainsi, de tous les avantages que véhicule les IDE. La
nouvelle course pour attirer les entreprises, les capitaux et les compétences, passe par la mise en
œuvre de politiques économiques axées sur l’encouragement des investissements et sur
l’implantation d’entreprises étrangères.
Le Maroc, à l'instar d'autres pays en développement, s’est lancé dans des programmes de
libéralisation de son économie en faveur de la promotion de l'investissement et de l’attractivité des
fonds étrangers. Depuis les années 80, le Maroc à travers des mesures incitatives et des réformes
institutionnelles (des politiques d’exonération fiscale, la signature d’accords de partenariat avec
l’Europe, la création de zones franches, …), essaye, en effet, d'offrir un environnement plus propice
aux investissements étrangers. Même si ces mesures attractives ont entraîné l'entrée des capitaux
étrangers dans le pays, force est de constater que le niveau des investissements étrangers reste
faible. Dès lors, l’on peut s’interroger sur le pourquoi de cette situation et sur la façon dont le
Maroc peut exercer des effets attractifs pour attirer les investissements.
Le présent article essaye d’analyser les tendances actuelles des IDE dans le monde, puis à l’échelle
nationale. Ensuite, on explicitera les facteurs de localisation des investissements directs étrangers
au Maroc, à travers une revue de littérature sur la question, en vue de contribuer à la définition de
politique nationale plus attractive des IDE.
L'économie mondiale s'est complètement métamorphosée ces dernières années. Elle évolue dans un
environnement de plus en plus enchevêtré où le libre-échange, la libre circulation des capitaux et
des biens deviennent des maîtres mots et où les investissements directs étrangers sont de plus en
plus qualifiés comme une nouvelle voie de financement de la croissance économique.
Les flux des IDE à travers le monde n’ont pas cessé d’augmenter depuis plusieurs années. Ceux-ci
s’accroissent très rapidement et beaucoup plus que la production mondiale et le commerce
international. Cet accroissement des IDE qui provient essentiellement des pays industrialisés,
constitue une composante majeure de la mondialisation.
D’après le rapport 2016 de la CNUCED (Conférence des Nations Unis sur le Commerce et le
Développement), les flux mondiaux d’investissements directs étrangers, ont augmenté de 38 % en
2105, pour s’établir à environ 1.760 milliards de dollars, enregistrant ainsi leur plus haut niveau
depuis la crise économique et financière de 2008-2009.
Cette reprise mondiale est caractérisée par une polarisation de ces investissements dans les
économies développées (plus de 90%). selon la CNUCED, les flux à destination des pays
développés ont presque doublé pour atteindre 962 milliards de dollars, passant de 41 % en 2014 à
55 % en 2015. L’augmentation marquée des IDE ces dernières années s’est accompagnée par une
concentration géographique des pays investisseurs autour de deux pôles : l’Europe et les Etats-Unis.
Aux Etats-Unis, les IDE ont quadruplé, même s'ils étaient à un niveau historiquement bas en 2014.
L’Europe est devenue la région du monde qui a investi le plus à l’étranger, avec 576 milliards de
dollars de sorties d’IED en 2015.
Cette croissance était en grande partie attribuable aux fusions et acquisitions transfrontalières, avec
seulement une contribution limitée des projets d'investissement dans des actifs productifs. En outre,
une partie des flux d'IDE a été liée à des reconfigurations d'entreprises impliquant de grosses
sommes mais peu de mouvements en termes de ressources réelles.
Concernant le même rapport, les PED ont gagné en importance, ont vu leurs IDE atteindre un
nouveau sommet de 765 milliards de dollars, en hausse de 9% par rapport à 2014. Avec des entrées
de plus de 500 milliards de dollars, l’Asie en développement est restée la première région
bénéficiaire de l’IDE dans le monde, représentant un tiers des flux mondiaux d'IDE.
Les flux à destination de l’Afrique ainsi que de l’Amérique latine et des Caraïbes ont chuté,
reflétant la chute des prix de leurs principales exportations de produits de base. La moitié des 10
premiers pays d’accueil étaient toujours des pays en développement.
Les flux vers les pays en transition ont continué de baisser (-54%) alors que la chute des prix
internationaux des matières premières et les conflits régionaux ont pesé sur les IDE. Les
investissements en Russie et au Kazakhstan ont fortement chuté.
Après cette étude globale retraçant l’ampleur de l’évolution des IDE dans le monde, nous nous
limiterons dans, ce qui suit, à présenter les déterminants de ces investissements.
Les déterminants des IDE ont fait l’objet de plusieurs études. Il existe un nombre important des
travaux qui essayent d’expliquer des IDE et leurs déterminants en s’inspirant des différents
courants de l’analyse économique. Alors que les courants traditionnels (théorie traditionnelle du
commerce international, théorie de la localisation de l’industrie) fondés sur l’hypothèse de la
concurrence parfaite ont contribué de manière très significative à l’explication des mouvements de
capitaux vers l’étranger, les analyses les plus récentes mettent en évidence le comportement
oligopolistique des firmes. Hymer (1960) a donné une explication de la multinationalisation des
firmes reposant sur les imperfections du marché du savoir-faire (know-how). Vernon (1966), dans
sa théorie du cycle de vie du produit, a permis de clarifier les raisons de la production internationale
de tel ou tel produit dans des pays à niveaux de développement distincts. Kindleberger (1969)
établit un parallèle entre les raisons expliquant l’investissement direct étranger et la théorie des
barrières à l’entrée. Enfin dans une approche plus globalisante, la théorie d’Internalisation et la
théorie Eclectique ont fait l’objet d’analyses pertinentes. La première théorie met l’accent sur
l’importance des coûts de transaction et son rapport avec l’imperfection du marché et
l’investissement direct étranger. La théorie Eclectique également appelée paradigme O.L.I
(Organisation-Localisation-Internalisation) synthétisée par Dunning (1981) a pour but final de
promouvoir une approche systémique de l’entreprise investissant directement à l’étranger.
D’autres travaux issus de la nouvelle économie géographique (Fujita et Thisse (1996); Brainard
(1993) ; Head et Ries (1996) ont mis en lumière les forces endogènes poussant les firmes
internationales à choisir de concentrer leurs investissements sur des territoires restreints. Enfin, la
contribution de Wilhelms (1998) vise à étudier les déterminants de l’investissement direct étranger
dans les économies naissantes. Il développe sa théorie d’adaptation institutionnelle qui affirme que
l’investissement direct étranger est « déterminé par des variables institutionnelles qui se présentent
plus au changement, à savoir les politiques, les lois et leur application ». Il ressort de ces études que
les investissements directs étrangers tendent à se concentrer sur un ensemble restreint de pays,
souvent développés (Chesnais, 1994).
Il n’existe donc pas de théorie unifiée de l’investissement direct étranger. Cependant, le cadre
théorique pertinent et largement utilisé est le «paradigme éclectique». L’approche éclectique met
l’accent sur trois conditions qui doivent être satisfaites pour expliquer la production étrangère (IED)
par une entreprise. Ces trois facteurs se rapportent à la propriété (P), à l’internalisation (I) et à la
localisation (L) (paradigme OLI, pour «ownership, internalization and location»).
Premièrement, une entreprise doit posséder certains avantages liés à la propriété, qui prennent
souvent la forme d’actifs intangibles propres à l’entreprise, comme la technologie ou l’expertise en
gestion, et qui lui permettent de faire concurrence à d’autres sociétés étrangères.
Deuxièmement, il doit être plus profitable pour l’entreprise d’internaliser ces avantages que de les
vendre ou de les louer à d’autres sociétés. Troisièmement, il doit être plus profitable pour la société
d’utiliser au moins un facteur de production (comme la main-d’oeuvre) localisé à l’étranger, sinon
le marché sera approvisionné au moyen d’exportations. À noter que les avantages liés à la
propriété, à l’internalisation et à la localisation interagissent les uns avec les autres, varient selon les
pays, les industries et les sociétés, et peuvent évoluer avec le temps.
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L’analyse des déterminants de l’attractivité exercée par les pays sur les capitaux internationaux ne
peut se réduire à une approche uni-causale. La croissance des investissements directs étrangers est
en fait la résultante d’une combinaison de facteurs dont le poids relatif varie d’un pays à l’autre
selon leurs structures productives et leur niveau de développement. De manière générale, les
facteurs qu’on peut souligner sont les suivants :
- La situation géographique ;
- La disponibilité de ressources naturelles et créées;
- Le prix, la qualité et la productivité des intrants tels que la main-d’oeuvre, l’énergie, les
matières premières/matériaux et les produits semi-finis;
- La disponibilité et la qualité des infrastructures (commerciale, juridique, éducative, de transport
et de communications);
- La répartition géographique des marchés (y compris la taille et le potentiel de croissance);
- Les coûts de transport et de communications;
- Les mesures d’incitation et de désincitation à l’investissement (par ex. : remboursements de
taxes et exigences de rendement/prescription de résultats);
- Le système économique et les politiques des pouvoirs publics (par ex. : taux d’imposition).
Cependant, des changements s’opèrent dans les considérations sur lesquelles se base le choix de
localisation de l’investisseur étranger. Les facteurs traditionnels tels que l’existence d’un régime
favorable à l’investissement direct étranger, la disponibilité des ressources naturelles, les
perspectives de croissance des marchés et leur taille, ainsi que les conditions du marché du travail
demeurent certes importantes, mais, de plus en plus les firmes cherchent à investir là où elles
trouvent des avantages créés par l’Homme, ce qu’on appelle les «actifs créés», et qui vont des
atouts technologiques aux compétences particulières de la main d’œuvre. La possession de ces
actifs est déterminante pour la compétitivité des entreprises. Les pays qui développent ce genre
d’actifs deviennent plus attractifs pour les firmes multinationales (CNUCED communiqué de
Presse, 10 novembre 1998)
D’autres facteurs sont jugés importants pour expliquer la localisation de l’investissement direct
étranger à l’intérieur des pays. En effet, les nouvelles analyses géographiques ont fait évoluer le
processus de localisation, celui-ci, en passant d'une approche macro- économique à une approche
micro- économique : choix du continent puis du pays, de la région puis de la ville…, a intégré
désormais les phénomènes d'agglomération (région, etc.) et il a mis l’accent sur la proximité
d’établissements de recherche de premier plan et les regroupements industriels en tant que
déterminants clés de la localisation.
En effet, la volonté de bénéficier d’agglomération guide les choix de localisation (prise en compte
des externalités intrasectorielles et intersectorielles dans l’implantation des firmes). Les firmes
souhaitent s’installer dans les régions les plus industrialisées mais aussi où des activités similaires y
sont déjà concentrées. Elles sont sensibles à la présence d’industries diversifiées et recherchent de
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surcroît les régions où d’autres firmes du même secteur ont déjà choisi de s’implanter. Ce
comportement est le signe de l’importance accordée aux relations interfirmes et à la possibilité de
bénéficier de services spécialisés. Il peut également s’interpréter comme le reflet d’une stratégie de
minimisation des risques encourus par une implantation dans une région nouvelle. Le niveau
régional est donc prédominant. On peut ajouter que les attributs régionaux des pays ne restent pas
sans influence sur le choix de localisation des firmes à l’étranger.
L’analyse des facteurs de localisation des firmes constitue un champ vaste d’observation et d’étude,
pour terminer cette section, on retiendra les quatre grands principes avancés par B. Mérenne –
Schoumaker (1996) et qui sont les suivants :
- Un facteur ne peut à lui seul expliquer une localisation ; même la présence d’une matière
première ne peut être la seule cause d’une implantation ;
- Un même facteur peut exercer des influences diverses ; ainsi la présence d’une main-d’œuvre
qualifiée peut attirer certaines entreprises et en repousser d’autres ;
- Le choix d’une localisation est la résultante d’un nombre plus ou moins grand de facteurs dont
le poids et la diversité varient fortement d’une situation à l’autre ;
- La sélection finale d’une localisation est toujours une question de compromis et d’options car, il
est difficile de trouver un lieu parfait, favorisant une localisation parfaite pour un prix parfait.
Les dirigeants choisissent donc «ce qui convient le mieux» à partir de «ce qu’ils veulent» et en
fonction de «ce qui est disponible».
Malgré plusieurs tentatives de généralisation relative aux facteurs d’attraction, il faut constater que
chaque cas est unique et nécessite un inventaire spécifique des besoins et des souhaits.
Selon le rapport annule 2015 sur les investissements de la CNUCED, le Maroc, derrière l’Egypte,
conserve une place de choix dans le classement des volumes de flux des IDE sur l’année 2015 au
sein des pays d’Afrique du Nord (voir tableau ci - dessous). Mais, à l’inverse des investissements à
l’échelle du globe qui sont en nette hausse (38%), le flux entrant au Maroc recule de 12,6%. Une
tendance baissière qui s’étend à l’ensemble du continent africain.
Le continent africain, prisé des investisseurs ces dernières années, enregistre une baisse nette de 7%
de ses flux entrants (54 milliards de dollars). Cela s'explique notamment par la baisse du nombre de
projets, en raison de leur chute des prix dans les matières premières, desquelles dépendent encore
beaucoup d'économies africaines.
Tableau n°1 : Les flux entrants des IDE sur la période 2011-2015
Investissements directs étrangers entrants (millions de dollars)
Années 2011 2012 2013 2014 2015
Egypte -483 6031 4256 4612 6885
Maroc 2568 2728 3298 3561 3162
Tunisie 1148 1603 1117 1063 1002
Algérie 2580 1499 1693 1507 -587
Afrique du nord 7548 15759 11961 11625 12647
Afrique 47786 55156 52154 58300 54079
Source : Rapport des investissements de la CNUCED en 2016.
La comparaison entre les performances du Maroc et de ses voisins en termes d'attraction d'IDE
démontre l'important potentiel que recèle le pays. Néanmoins, le niveau absolu du capital étranger
au Maroc, reste insatisfaisant pour supporter la croissance et la diversification nécessaire de
l'économie.
La répartition géographique d’attrait des investisseurs étrangers au Maroc révèle un trio de tête de
ces investisseurs. En effet, les IDE émanant des Emirats Arabes Unis occupent le premier rang sont
en hausse de 53,6% par rapport à 2014, suivies des Etats-Unis qui ont enregistré par contre une
hausse de 44,4%. Cependant, une tendance à la baisse est constatée dans les IDE provenant de la
France avec une part en baisse de 38,7% par rapport à 2014. Le Maroc est la deuxième destination
des IDE français après la chine. L’implantation des sociétés françaises au Maroc est, en effet, une
réalité historique qui s’est vivifiée sur la période récente, notamment dans les secteurs identifiés par
la stratégie industrielle du pays (plan Azur, plans Emergence, plan Maroc Numeric, etc…). La
plupart des grands groupes français orientent leurs activités dans une multitude de secteurs, tels que
le secteur de l'agroalimentaire, le secteur bancaire, le secteur pharmaceutique, les assurances,
l'environnement et l'énergie, les postes et télécommunications et le BTP.
Les évolutions sectorielles des IDE révèlent cinq secteurs importants qui accaparent l'essentiel des
flux des IDE au Maroc : l'industrie, l’immobilier, le tourisme, le secteur bancaire et l'assurance. Le
secteur de l’industrie arrive en première place, il a attiré la part la plus importante des IDE. Sur la
période 2009-2013, les IDE vers l’industrie ont été multipliés par près de six. En 2015, malgré le
repli de 25% des IDE dans l’industrie par rapport à 2014, le secteur continue à capter une part
importante d’IDE (18%). La montée en puissance de certaines activités industrielles telles que
l’agroalimentaire, l’automobile, l’aéronautique ou l’électronique, a favorisé la réalisation
d’opérations de grande ampleur et ont déclenché une forte dynamique socio-économique au niveau
de certaines régions (notamment le Grand casa et Tanger Tanger-Tétouan-Al Hoceima),qui
accueillent un nombre très important des entreprises étrangères.
Les investisseurs étrangers choisissent les régions les plus industrialisées mais aussi où des activités
similaires y sont déjà concentrées. Ils sont sensibles à la présence d’industries diversifiées et
recherchent de surcroît les régions où d’autres firmes du même secteur ont déjà choisi de
s’implanter.
Ce sont donc à la fois les effets d’agglomération intra et intersectoriels qui guident l’implantation
des firmes. Ce comportement est l’importance accordée aux relations inter-firmes et à la possibilité
de bénéficier de services spécialisés. Il peut également s’interpréter comme le reflet d’une stratégie
de minimisation des risques encourus par une implantation dans une région nouvelle.
Le fait que d’autres firmes aient déjà choisi une région pour y développer une activité industrielle
est porteur d’information. Dans un univers incertain où l’information est coûteuse, les choix de
localisation ont un caractère cumulatif puisque les centres industriels déjà formés sont également
ceux qui attirent le plus d’investisseurs.
Les grands changements qui ont affecté le contexte économique mondial, l’incertitude croissante
chez les investisseurs ont exercé un impact négatif sur le volume des investissements étrangers
attirés par le Maroc. Ce dernier en dépit des efforts consentis par lui, il demeure toujours peu
attractif pour ces investisseurs. Cette situation nécessite la mise en place d’une politique
d’attractivité permettant d’améliorer l’environnement économique et social et de modifier la
structure des avantages comparatifs du pays. Le Maroc est, donc, appelé à agir pour accroître la
contribution que les IDE que peuvent apporter au développement de son économie en termes
d’emplois, de croissance et de technologie.
Les investissements directs étrangers sont maintenant de plus en plus sollicités par les pays en
développement et ne sont plus considérés comme un facteur de dominance, mais plutôt comme une
source de capitaux et de création d’emplois et un canal majeur de transfert de technologie.
Les effets bénéfiques des IDE sur les économies ont éveillé l’intérêt des pouvoirs publics pour les
questions afférentes. Ces dernières années, la politique des pouvoirs publics en matière
d’investissement tendait d’une manière générale vers l’ouverture et la libéralisation. Soucieux
d’offrir le meilleur cadre économique possible, de nombreux pays ont ouvert leurs marchés aux
investisseurs étrangers en s’engageant dans un processus de réformes visant la mise en place d’une
politique d’attractivité. Tout espace géographique désireux d’attirer des IDE se doit d’abord de
mettre en place une politique économique multidimensionnelle, comme le précise C.A Michalet
(1999) : " ils (les investisseurs) privilégient les pays qui suivent une politique économique libérale,
favorable à l’économie de marché, ouverte sur l’extérieur car ils craignent les décisions
discrétionnaires des gouvernements et de leurs administrations ". La question de l’attractivité vis-à-
vis des investisseurs étrangers devient une préoccupation d’une grande ampleur : il ne s’agit pas
tant à chercher à soutenir le développement de l’industrie locale, mais de permettre la constitution
d’un environnement propice à attirer l’investisseur étranger.
Tous les pays et surtout les pays en voie de développement, font de " l’attraction des implantations
des firmes étrangères une priorité de leur politique industrielle. Si les territoires ont besoin des
firmes multinationales, les entreprises à leur tour ont besoin des territoires " (Sofiane Toumi 2009).
Seulement chaque territoire possède ses propres spécificités qui peuvent constituer un avantage
comparatif permettant d’attirer les investisseurs étrangers.
Ces mesures incitatives, dès 1960, ont été regroupés dans des codes d'encouragement aux
investissements, souvent généreux, qui visent à promouvoir les investissements dans les secteurs
vitaux (agriculture, industrie, tourisme, produits de la mer …), en accordant des exonérations
fiscales relatives aux différents impôts et des diverses garanties de transfert de capital
d’investissements réalisés.
La charte d’investissement mise en application depuis 1996, qui s’est substituée aux codes
d’investissements sectoriels, n’a exercé aucun impact décisif sur l’attraction des investissements
étrangers. Les déterminants sont à rechercher en dehors des avantages fiscaux et financiers octroyée
par cette charte. L'évolution des flux d'IDE entrant au Maroc semble donc être expliquée en grande
partie par les opérations de privatisation. Sur les 10,7 milliards de dollars d'IDE pour la période
1993-2003, 6,4 milliards de dollars proviennent des opérations de privatisation (Direction des
Etudes et des Prévisions financières ; Promotion des investissements au Maroc, 2006).
Le Maroc s’est engagé dans d’autres réformes qui se sont concrétisées à travers plusieurs mesures :
D'autres réformes d’ordre institutionnel ont été adoptées visant l'amélioration du climat
d'investissement marocain : la réforme du secteur financier et monétaire, la réglementation fiscale,
la mise en place d'organismes de promotion des IDE, constitution d’un comité interministériel
auprès du premier ministre, chargé de mettre en place les mécanismes nécessaires au
développement de l’investissement à l’échelon national et régional des investissements, la mise en
place de Centres Régionaux d’Investissement, la création de l’Agence nationale de la conservation
foncière, du cadastre et de la cartographie.
Si le rôle que peut jouer l’investissement direct pour stimuler la croissance et le développement
économiques est de mieux en mieux appréhendé, les approches pour favoriser l’investissement direct
étranger demeurent extrêmement variées. Le Maroc, en tant que pays en développement, n’a pas cessé
de prendre les mesures nécessaires pour essayer de bénéficier des capitaux qui circulent chaque année
à travers le monde. Malgré les efforts entrepris par les pouvoirs publics pour attirer les IDE, ces
derniers demeurent faibles. La question qu’on se pose est de savoir pourquoi le Maroc n’est pas si
attrayant pour les investisseurs.
D’après les travaux réalisés par la Direction de la Politique Economique Générale (DPEG), les
contraintes entravant l’investissement au Maroc sont multiples et diversifiées. En effet, l’attraction
de l’investissement direct étranger est d’abord tributaire du degré d’insertion du pays à l’économie
internationale, du niveau de qualification de la main d’œuvre ainsi que du niveau de souplesse des
procédures administratives. Les incitations fiscales ou financières à l’investissement viennent
ensuite appuyer la décision d’investir. Le foncier demeure un facteur important pour
l’investissement national et étranger.
Le niveau de l’insertion internationale a une grande influence sur le degré d’attraction des I’DE.
L’appartenance à l’OCDE sécurise les investisseurs étrangers. Les accords avec l’Union
Européenne (Union douanière ou accords d’association) accroissent, dans une certaine mesure les
IDE d’origine européenne.
Les insuffisances relatives aux rapports avec les administrations et le système judiciaire conduisent
en effet à une faible sécurité des affaires. La lenteur des délais, la complexité des formalités
administratives, la non transparence d’information, le développement insuffisant des juridictions
spécialisée (tribunaux commerciaux) sont de nature à limiter les incitations à investir. D’autres
carences en matière de la législation du travail (code du travail) et du droit de faillite, découragent
l’investisseur étranger de s’installer au pays.
La complexité du statut foncier des terrains, la diversité des règles de gestion et d’aliénation des
domaines comme les terres guich, habous et collectives, l’amenuisement de la réserve des terrains
de l’Etat situés dans les zones urbaines et sur urbaines, et la nom couverture du territoire national
par les documents de l’urbanisme définissant l’orientation sont autant d’éléments entravant
l’investissement au Maroc.
Préparer le cadre macro-économique favorable pour attirer les investisseurs notamment étrangers est
impérativement indispensable, mais insuffisant, il est nécessaire de mettre en place une stratégie
volontariste pour assurer une attractivité permanente du territoire national.
Le Maroc est sur la bonne voie en ce qui concerne la réalisation des conditions préalables, il doit
faire davantage pour rejoindre les pays les plus performants. Néanmoins, l’attractivité est en
progression mais, demeure encore timide. De ce fait, il reste encore des progrès à faire pour assurer
une attractivité permanente du territoire national vis-à-vis des investisseurs étrangers.
Dans ce sens, plusieurs actions doivent être élaborées pour permettre la dynamisation de
l’investissement étranger au Maroc :
Le Maroc doit profiter de la nouvelle donne de la régionalisation dans le cadre des accords
qui le lient avec l’Union Européenne et les Etats-Unis pour rendre ses régions pus
attractives ;
Mettre en œuvre une politique d’aménagement du territoire qui doit susciter un processus
d’adaptation aux perspectives de l’économie globale. Cette politique doit envisager de
construire et de promouvoir des avantages spécifiques pour les territoires, en créant un
environnement doté de règles incitatives et favorables, pour les rendre compétitifs. A ce
propos, les articulations entre les dynamiques sectorielles et les organisations territoriales
jouent désormais, dans un contexte de globalisation marquée, un rôle décisif dans le
développement de la compétitivité nationale. L’exemple des districts industriels de la
Silicon Valley en est l’exemple emblématique.
Conclusion
Bien que d’un niveau réduit, les investissements directs étrangers occupent une place centrale dans
la restructuration de l’économie nationale en grand manque de capital. Ils constituent l’un des
catalyseurs de développement économique du pays. La promotion des IDE est désormais une action
déterminante pour faire face à la mondialisation de l’économie, à la compétitivité internationale et
au redéploiement sans précédent d’activités industrielles.
Le Maroc, comprenant que l’IDE peut contribuer au développement de son économie, cherche à
l’attirer. Le marché mondial des IDE est extrêmement concurrentiel, et le Maroc se doit d’être
attractif et compétitif. Les pouvoirs publics ont mis en place une série de réformes visant à favoriser
son ouverture sur le marché international, il s’agit particulièrement de l’institution du comité
interministériel des Investissements, l’instauration des tribunaux de commerce, la révision du code
du travail, la promulgation de la charte de l’investissement, la loi 6/99 sur la liberté des prix et de la
concurrence et plus récemment la création des centres régionaux d’investissement, création des
zones franches, …qui sont nécessaires et viennent lever d’importants obstacles à l’investissement.
La panoplie des mesures incitatives est aujourd’hui longue et au-delà de leurs effets sur les flux
effectifs d’IDE, il est sans doute pertinent de s’interroger sur la pertinence et l’efficacité de ces
mesures. Le Maroc déploie des efforts marquants depuis quelques années pour attirer les firmes
étrangères. Mais notre constat révèle que, malgré leur évolution positive, le pays n’attire que peu
d’IDE par rapport aux potentiels de son climat d’affaires
Les pouvoirs publics ont intérêt à mettre en place une stratégie de promotion d’investissements
volontariste et permanente et qui doit être adaptée aux spécificités et au contexte du pays.
Les déterminants économiques n’en demeurent pas moins cruciaux. Tout espace désireux d'attirer
les IDE se doit d'ajuster les avantages de localisation. Plus fondamentalement, les avantages
d’implantation offerts par un pays ne seront validés que dans la mesure où ils peuvent contribuer au
renforcement de la compétitivité des firmes.
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