Mai 2011 CPC
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Mai 2011 CPC
SEMESTRE 4 – Session 1
Examen
(Vendredi 13 mai 2011 – 13 h 30 - 16 h 30)
Nota bene :
Le candidat choisit librement l’ordre de ses réponses.
Total des points : 20. La répartition est la suivante :
o question n° 1 : 7 points
o question n° 2 : 7 points
o question n° 3 : 6 points
Aucun document n’est autorisé.
***
ANNEXES
Code de l'environnement
[Résumé des dispositions pertinentes]
Article L.581-3
[…] Constitue une enseigne publicitaire toute inscription, forme ou image apposée sur un im-
meuble et relative à une activité qui s'y exerce.
Article R.581-62
L'autorisation d'installer une enseigne publicitaire est délivrée par le maire.
Cette autorisation est délivrée :
1° Après avis conforme de l'architecte des Bâtiments de France lorsqu'elle concerne l'installa-
tion d'une enseigne sur un immeuble classé parmi les monuments historiques ;
2° Après avis de l'architecte des Bâtiments de France lorsqu'elle concerne l'installation d'une
enseigne sur un immeuble situé dans un parc naturel régional.
***/***
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Réponses effectives aux questions posées : elles doivent conclure une démons-
tration conformément aux directives du bréviaire.
Sommaire
(interactif à l’écran)
Notée
1 – Réponse à la question n°1 du cas pratique
sur 7
Le fauconnier et la nageuse ont saisi séparément le tribunal administratif d’une
action en responsabilité. Le fauconnier a été totalement débouté (au fond) de son action
dirigée contre ERDF, tandis que la nageuse a obtenu la condamnation de la commune
à réparer l’intégralité du préjudice corporel et du préjudice moral qu’elle avait subis.
Quels sont les motifs de ces deux jugements ?
Réponses synthétiques
À y réfléchir un peu, force est de concéder que cette question n°1 du cas pratique comporte en fait
deux interrogations notées chacune sur 3,5 :
1.1 Interrogation n°1 : Quels sont les motifs du jugement par lequel le fauconnier a été to-
talement débouté (au fond) de son action dirigée contre ERDF ?
1.2 Interrogation n°2 : Quels sont les motifs du jugement par lequel la commune a été con-
damnée à réparer l’intégralité du préjudice corporel et du préju-
dice moral que la nageuse a subis ?
Voici les réponses synthétiques à ces deux interrogations :
A l’instar des dispositifs qu’ils commandent, les motifs de ces deux jugements sont substantiel-
lement différents même s’ils procèdent tous de l’application aux faits pertinents des règles régis-
sant l’engagement de la responsabilité de l’administration.
1.1 Interrogation n°1 : Quels sont les motifs du jugement par lequel le fauconnier a été tota-
lement débouté (au fond) de son action dirigée contre ERDF ?
1.2 Interrogation n°2 : Quels sont les motifs du jugement par lequel la commune a été con-
damnée à réparer l’intégralité du préjudice corporel et du préjudice
moral que la nageuse a subis ?
► Exposé des règles qui régissent de manière spécifique les faits pertinents de
l’interrogation n° 2 de la question n° 1 du cas pratique.
L’étang artificiel dans lequel se baignait la victime est un ouvrage public.
Données pertinentes du cas pratique : « A Trantor-sur-Ciel, un ou-
vrage public laid et utile avoisine un ouvrage public inutile et beau. Le pre-
mier […] Le second, un étang artificiel, est la propriété de la commune de
Trantor. »
Le dommage subi par la nageuse est dû aux rebords anormalement acérés de
l’étang.
Etant donné que l’étang est un ouvrage public, le dommage subi par la na-
geuse est un dommage de travaux publics.
Pour l’exposé des règles applicables en cas de dommages de travaux pu-
blics, voir, page 8, la réponse à l’interrogation n° 1 de la question n° 1 du
cas pratique.
*
1.2.2.4 Application des règles pertinentes aux faits pertinents.
► Application des règles générales du droit de la responsabilité administrative.
Il ne fait aucun doute que sont réunies les conditions prescrites par les règles
générales du droit de la responsabilité administrative :
La nageuse a subi au un préjudice corporel et un préjudice moral
donnés pour
o directs - ils ont eu pour cause directe les rebords anormalement acérés
de l’étang appartenant à la commune,
o certains – blessures, etc.
o et réparables – les préjudices subis par la nageuse ne font pas partie
des préjudices dont la réparation est exclue.
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un fait imputable à la commune – les rebords anormalement acérés de
l’étang appartenant à la commune ;
une relation de causalité entre le fait imputé à la commune et les préju-
dices corporel et moral.
► Application des règles relatives à la responsabilité pour dommages de tra-
vaux publics.
Au moment où elle a subi les préjudices dont elle a par la suite demandé ré-
paration, la nageuse utilisait l’étang.
Données pertinentes du cas pratique : « La femme, une nageuse répu-
tée, s’applique à améliorer sa technique de la brasse papillon dans l’étang
[…] En essayant de sortir de l’eau, la nageuse se blesse grièvement sur les
rebords anormalement acérés de l’étang […] »
Elle avait ainsi la qualité d’usager de l’ouvrage public à l’origine de ses préju-
dices.
Plutôt que de de renvoyer le lecteur à l’exposé présenté dans notre réponse à
l’interrogation n° 1, nous choisissons, dans le souci d’être compris sans dé-
lai, de rappeler ici qu’en cas de dommage de travaux publics subi par
l’usager d’un ouvrage public, le juge fait application soit du principe, soit
de l’exception.
Le principe est que la responsabilité encourue par le défendeur (propriétaire ou
simplement responsable de l’état de l’ouvrage), est une responsabilité pour
faute présumée. Autrement dit, le juge renverse la charge de la preuve ; il pré-
sume que l’accident résulte d’une faute de l’administration, d’un défaut
d’entretien normal de l’ouvrage public. Le demandeur n’a pas à établir
l’existence de la faute, c’est-à-dire du défaut d’entretien normal ; au contraire,
il incombe au défendeur de démontrer qu’il a entretenu normalement l’ouvrage
public.
Pour exclure ou atténuer sa responsabilité, le défendeur peut invoquer
comme causes exonératoires la force majeure, la faute de la victime ou le
cas fortuit, mais non, en principe, le fait d’un tiers.
Par exception, lorsque l’ouvrage public est exceptionnellement dangereux, la
responsabilité encourue par le défendeur est une responsabilité sans faute.
Les seules causes exonératoires invocables par le défendeur sont alors la
force majeure et la faute de la victime.
► En l’espèce, c’est le régime de la responsabilité pour faute présumée qui
s’applique.
Données pertinentes du cas pratique : « En essayant de sortir de l’eau,
la nageuse se blesse grièvement sur les rebords anormalement acérés de
l’étang qui n’est cependant pas d’une dangerosité exceptionnelle. »
*
1.2.2.5 Conclusion et réponse effective à l’interrogation n° 2 de la question n° 1
du cas pratique.
► Si la nageuse a obtenu la condamnation de la commune, c’est nécessairement parce
que les conditions de l’engagement de la responsabilité de cette dernière étaient réu-
nies. L’examen de ces conditions fait apparaître les motifs du jugement :
La nageuse a subi un préjudice corporel et un préjudice moral certains et ré-
parables ;
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Ces préjudices ont pour cause directe un ouvrage public (l’étang artificiel)
appartenant à la commune ; ils revêtent donc un caractère direct ;
La nageuse avait la qualité d’usager de cet ouvrage public municipal ;
La commune n’a pas démontré qu’elle avait entretenu normalement son
étang artificiel dont les rebords acérés ne révélaient cependant pas une dan-
gerosité exceptionnelle ;
La commune n’a pas réussi ou n’a pas cherché (rien ne nous permet de
choisir entre les deux verbes) à invoquer valablement une des causes exoné-
ratoires pertinentes en l’espèce. Au demeurant, s’il a été sollicité en ce sens,
le tribunal administratif a certainement consacré un considérant à la cause
exonératoire la plus plausible que la commune pouvait invoquer : le fait
d’un tiers. Il a dû rappeler que le fait d’un tiers n’était pas invocable lorsque
la responsabilité encourue était fondée sur une présomption de faute. Ainsi,
en l’espèce, la commune ne pouvait pas se prévaloir du comportement du
fauconnier et de la chute des fils à moyenne tension pour atténuer ou exclure
sa propre responsabilité. De surcroît, les faits pertinents ne révélaient pas
l’existence d’une force majeure ou d’une faute de la victime.
*
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Notée
2 – Réponse à la question n°2 du cas pratique sur 7
Quelle illégalité externe l’association d’écologistes militants a-t-elle invoquée à
l’appui de son recours pour excès de pouvoir dirigé contre la décision du maire en date
du 20 avril 2010 ? Le tribunal administratif annulera-t-il cette décision du 20 avril
2010 ?
*
Nous exposerons une réponse synthétique à deux variantes :
1. la conclusion précise et concise à laquelle le candidat devait parvenir : va-
riante destinée aux lecteurs extrêmement pressés ;
2. la démonstration précise de la conclusion à laquelle le candidat devait
parvenir dans le respect de la méthodologie : variante destinée aux « happy
few ».
Pour dire les choses différemment et éviter toute ambiguïté, le candidat devait démontrer sa
réponse ; la première variante dont il est question ici n’a qu’un seul but : faire gagner du temps
aux lecteurs qui pensent ne pas en disposer suffisamment.
Les numéros (1.1, 1.2, 2.1, 2.1.1, etc.) qui précèdent les différents paragraphes qui suivent
dénotent un plan dit hiérarchique (« moderne », universel et… très prisé).
Réponses synthétiques
Deux interrogations (notées chacune sur 3,5) dans cette question n°2 du cas pratique :
2.1 Interrogation n°1 : Quelle illégalité externe l’association d’écologistes militants a-t-elle
invoquée à l’appui de son recours pour excès de pouvoir dirigé
contre la décision du maire en date du 20 avril 2010 ?
2.2 Interrogation n°2 : Le tribunal administratif annulera-t-il cette décision du 20 avril
2010 ?
Voici les réponses synthétiques à ces deux interrogations :
2.1 Interrogation n°1 : Quelle illégalité externe l’association d’écologistes militants a-t-elle
invoquée à l’appui de son recours pour excès de pouvoir dirigé contre
la décision du maire en date du 20 avril 2010 ?
***
*
2.2.2.4 Application des règles pertinentes aux faits pertinents.
► La lecture des faits pertinents révèle-t-elle l’existence de l’un quelconque des
facteurs ci-dessus exposés, à savoir
Le caractère non substantiel de la consultation de l’architecte des bâti-
ments de France,
L’impossibilité de consulter l’architecte des bâtiments de France ou
l’inutilité de cette consultation,
Le fait que l’octroi de l’autorisation relève de l’exercice d’une compé-
tence liée,
L’existence d’une situation d’urgence ou de circonstances exception-
nelles ?
► En l’espèce, aucun de ces facteurs ne peut être retenu.
Le caractère non substantiel de la consultation de l’architecte des bâtiments de
France.
Cours, Légalité 1/2, p. 26 : « Une consultation obligatoire a toujours le carac-
tère d’une formalité substantielle. Toute irrégularité commise dans une consulta-
tion obligatoire - comme du reste dans une consultation facultative – est suscep-
tible d’entacher d’illégalité la décision prise. »
La consultation de l’architecte des bâtiments de France est imposée par
l’article R.581-26 du code de l’environnement ; ayant ainsi un caractère
obligatoire, elle doit être considérée comme une formalité substantielle.
L’impossibilité de consulter l’architecte des bâtiments de France ou
l’inutilité de cette consultation.
Le maire a bien consulté l’architecte des bâtiments de France, et rien n’incite
à douter de l’utilité de l’avis qu’il a recueilli.
Le fait que l’octroi de l’autorisation relève de l’exercice d’une compé-
tence liée.
Aucune donnée pertinente du cas pratique n’autorise une telle qualification.
Qui plus est, il serait paradoxal que les textes enferment le maire dans les
limites étroites de la compétence liée tout en l’obligeant à solliciter l’avis
conforme de l’architecte des bâtiments de France.
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L’existence d’une situation d’urgence ou de circonstances exception-
nelles.
Les données du cas pratique ne révèlent aucun indice dans ce sens. Bien au
contraire.
Données pertinentes du cas pratique : « Méthode politiquement
éprouvée certes, mais argumentaire juridiquement inopérant devant un tri-
bunal administratif déterminé à ne pas s’écarter de la légalité normale dans
des circonstances somme toute ordinaires.»
*
2.2.2.5 Conclusion et réponse effective à l’interrogation n° 2 de la ques-
tion n° 2 du cas pratique.
► Au vu des données pertinentes du cas pratique, le tribunal administratif annu-
lera cette décision du 20 avril 2010.
En effet,
d’une part, le maire a méconnu l’obligation qu’il avait de se confor-
mer à l’avis défavorable de l’architecte des bâtiments de France ;
d’autre part, rien ne permet de retenir l’un des facteurs qui sont habi-
tuellement propres à couvrir le vice de procédure qu’il a ainsi com-
mis : caractère non substantiel de la formalité, exercice d’une compé-
tence liée, l’impossibilité d’accomplir la formalité ou l’inutilité de
son accomplissement, situation d’urgence ou circonstances excep-
tionnelles.
*****
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Réponse synthétique
Une seule interrogation dans cette question n°3 du cas pratique :
3.0 Interrogation unique : Au regard des données du cas pratique, l’arrêté du maire en
date du 16 décembre 2010 vous paraît-il légal ?
Voici la réponse synthétique à cette interrogation :
3.0 Interrogation unique : Au regard des données du cas pratique, l’arrêté du maire en
date du 16 décembre 2010 vous paraît-il légal ?
Définition :
Détournement de pouvoir : il y a détournement de pouvoir
lorsqu’une autorité administrative use de sa compétence - de ses
pouvoirs - en vue d’un but autre que celui que pour lequel cette
compétence lui a été attribuée.
► L’autorité administrative doit respecter deux principes :
1. Elle ne doit agir qu’en vue d’un but d’intérêt général. Seul le service de
l’intérêt général justifie les prérogatives exorbitantes dont bénéficient les
autorités administratives ;
2. Une autorité administrative ne peut agir en vue de n’importe quel but
d’intérêt général. En effet, à chaque domaine de compétence est assigné un
but d’intérêt général spécifique.
En somme, une autorité administrative ne doit pas seulement viser un but
d’intérêt général, elle doit également viser le bon but d’intérêt général sinon elle
pourrait commettre un détournement de pouvoir.
► Il est deux manières de méconnaître les deux principes précités, donc deux mo-
dalités du détournement de pouvoir :
1. L’édiction d’un acte dans un but étranger à l’intérêt général
Dans cette hypothèse, le détournement de pouvoir résulte du fait que
l’administration a usé de ses pouvoirs en vue d’un but d’intérêt particulier
ou, en tout cas, non général. L’acte administratif litigieux peut avoir été
inspiré par des mobiles privés, personnels ou politiques (Cf. C.E., 13 janvier
1995, Syndicat autonome des inspecteurs de l’administration ; 8 janvier 1971,
Association des magistrats et anciens magistrats de la Cour des Comptes Ass.,
13 juillet 1962, Sieur Bréart de Boisanger).
2. L’édiction d’un acte dans un but d’intérêt général différent du but
légalement prévu
Dans cette hypothèse, le détournement de pouvoir résulte du fait que
l’administration a usé de ses pouvoirs en vue d’un but d’intérêt général
autre que celui pour lequel ces pouvoirs lui ont été conférés.
L’illustration la plus parlante en est fournie par l’exercice du pouvoir de
police en vue d’un but financier – Cf. C.E., C.E., 26 novembre 1875, Pariset
(Rec. p.934) ; 26 novembre 1875, Laumonnier-Carriol (Rec. p.936) ; 3 juillet
1998, Commune de la Bruguière (RFDA 1998, pp.1062-1063).
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N° 98BX00080
2e CHAMBRE
Inédit au recueil Lebon
Mlle ROCA, rapporteur
M. REY, commissaire du gouvernement