Pour Un Sport Plus Démocratique, Plus Éthique Et Plus Protecteur
Pour Un Sport Plus Démocratique, Plus Éthique Et Plus Protecteur
Pour Un Sport Plus Démocratique, Plus Éthique Et Plus Protecteur
par le
COMITÉ NATIONAL
POUR RENFORCER L’ÉTHIQUE
ET LA VIE DÉMOCRATIQUE DANS LE SPORT
co-présidé par
Marie-George BUFFET
Stéphane DIAGANA
-
Emmanuelle ASSMANN
Isabelle AUTISSIER
Béatrice BARBUSSE
Brigitte DEYDIER
Jacques DONZEL
Bernard FOUCHER
Stéphanie FRAPPART
Jean-François LAMOUR
Franck LATTY
Arsène WENGER
Rapporteurs :
Benjamin BOSCHER, Olivier KERAUDREN, Marie ROGER-VASSELIN
SOMMAIRE
SYNTHÈSE.......................................................................................................................................................................................3
INTRODUCTION........................................................................................................................................................................7
LETTRE DE MISSION.............................................................................................................................................................48
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POUR UN SPORT PLUS DÉMOCRATIQUE, PLUS ÉTHIQUE ET PLUS PROTECTEUR
SYNTHÈSE
Tout au long de son travail d’audition et d’instruction, le Comité a cherché à recueillir les
contributions les plus diverses de l’ensemble des acteurs du sport, en toute impartialité. Les conclusions
de ce rapport sont le fruit d’une large consultation menée entre le début du mois d’avril et la fin du
mois d’octobre 2023. Près de 170 personnes ou structures ont été entendues au cours de près de 70
entretiens. Ont notamment été auditionnés les services du ministère des Sports et des Jeux Olympiques
et Paralympiques (MSJOP) et ses organes déconcentrés, l’Agence nationale du sport (ANS), le Comité
national olympique et sportif français (CNOSF), le Comité paralympique et sportif français (CPSF), des
fédérations sportives, des clubs et des bénévoles, des sportives et des sportifs de toutes disciplines,
des représentants syndicaux, etc. De même, des organismes de contrôle, des parlementaires, des
collectivités territoriales et des experts reconnus ont été consultés et deux déplacements au contact
de structures locales ont été organisés, à Lille et à Pantin.
Les membres du Comité ont souhaité avoir une approche pragmatique, volontariste et
constructive :
– p
ragmatique car il est indéniable que les difficultés récentes et plus anciennes traversées par
de nombreuses fédérations, concernant tant l’éthique que la vie démocratique ou la protection
des pratiquantes et pratiquants, imposent des mesures nouvelles, fortes et rapidement
opérationnelles ;
– v
olontariste car cela nécessite, à bien des égards, un changement de culture profond ainsi
qu’un engagement indispensable de l’ensemble des actrices et des acteurs du sport ;
– c
onstructive enfin, car il ne saurait être question de considérer a priori que les dérives sont
généralisées – même si les « révélations » se sont multipliées, et parce que les évolutions
nécessaires dans le sport ne se feront qu’avec le mouvement sportif et non contre lui.
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À ce titre, les membres du Comité n’ont pu que constater la richesse humaine du sport français et,
très largement, le dévouement de celles et ceux qui le font vivre au quotidien. Le sport n’est cependant
pas déconnecté de la société dans laquelle il s’inscrit et les dérives en tout genre qu’il peut connaître
ne sont, en général, pas spécifiques. Mais compte tenu des vertus et des ambitions, notamment
éducatives et citoyennes, associées au sport, elles sont d’autant plus inacceptables. Par ailleurs, le
sport peut aussi être porteur de certains risques intrinsèques, notamment en matière d’emprise ou
de violence, contre lesquels il faut lutter individuellement et collectivement, sans concession, ni
compromis.
Le rapport et les préconisations ambitieuses qu’il porte souhaitent, avant tout, donner aux
pouvoirs publics et au mouvement sportif un ensemble large et cohérent d’outils afin de répondre
aux défis importants que le secteur du sport affronte aujourd’hui. Il leur appartiendra désormais de
s’en saisir pleinement, avec ambition et courage, pour initier les changements profonds qu’exige la
situation.
rganisé autour des 3 trois axes précités, le rapport du Comité formule les constats et les
O
recommandations suivants :
La première partie du rapport du Comité propose de repenser des principes forts de la gouvernance
générale des fédérations sportives afin d’en renforcer la vie et les jalons démocratiques. Constatant,
au terme des nombreuses auditions, les difficultés récurrentes à faire vivre de façon satisfaisante la
démocratie fédérale dans le monde du sport (faible association des clubs aux décisions nationales,
consultation des adhérents inexistante, lien de confiance distendu, etc.), le Comité propose que
tous les clubs participent aux élections et aux autres assemblées générales de la fédération avec
voix délibérative. Il propose également que leur soit conféré un pouvoir d’initiative en matière de
consultation et que les clubs soient consultés plus régulièrement par les instances exécutives fédérales
sur des sujets d’intérêt général en dehors des assemblées générales. Le Comité souhaite également
renforcer la représentation des différents courants au sein des instances de décision des fédérations.
Le rapport recommande ainsi de prévoir un mode de scrutin proportionnel avec une prime à la
majorité renforcée pour l’élection des comités exécutifs, ainsi que la participation des oppositions
au bureau exécutif. Le Comité souhaite également, à l’instar de ce qui existe dans d’autres secteurs,
la culture notamment, que l’octroi d’aides publiques au CNOSF, au CPSF, ou à une fédération agréée
soit conditionné au suivi d’une formation sur les enjeux de politique publique (incluant la lutte contre
les violences et les discriminations ou les questions de probité) par le président ou la présidente de
la structure. Il souhaite aussi que soit appliqué un principe de parité stricte dans tous les organes
dirigeants du mouvement sportif (fédérations, ligues professionnelles, organes déconcentrés) et que
la transparence financière des fédérations soit renforcée, notamment via l’adoption obligatoire d’un
règlement financier conforme à un règlement type fixé par voie réglementaire. Celui-ci serait rendu
public et comporterait notamment des dispositions relatives à l’obligation de publicité des comptes
et aux procédures de passation des contrats.
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POUR UN SPORT PLUS DÉMOCRATIQUE, PLUS ÉTHIQUE ET PLUS PROTECTEUR
La troisième partie du rapport veut, enfin, renforcer les moyens d’action en faveur d’une plus grande
protection des pratiquantes et des pratiquants. Si la vie des clubs et des fédérations sportives doit
avant tout être synonyme d’épanouissement, ces lieux peuvent aussi constituer des environnements
hostiles où la sécurité et la protection des pratiquantes et des pratiquants n’est pas pleinement assurée :
bizutage, harcèlement, violences sexuelles, maltraitances physique et psychologique, etc. Les cas de
dérives signalés se sont multipliés, et laissent souvent les victimes démunies. Des réponses et des
évolutions fortes sont attendues. Dans le domaine de la lutte contre les violences sexistes et sexuelles,
l’État a témoigné d’un engagement particulièrement soutenu depuis 2019. La mise en place de la
fonction de déléguée ministérielle à la lutte contre les violences dans le sport d’une part, et la création
de la cellule Signal-Sports d’autre part, ont accompagné et facilité le mouvement de libération de la
parole et de signalement, ainsi que le renforcement de la responsabilisation et de l’action des acteurs
sportifs dans ce domaine. Afin de prolonger et de renforcer l’action publique engagée, le Comité
préconise ainsi la mise en place d’une agence spécifique dédiée à la protection des pratiquantes et des
pratiquants, en charge du traitement des violences sexistes et sexuelles, sous la forme d’une autorité
administrative indépendante, seule à même de disposer du niveau d’indépendance et d’expertise
attendu ainsi que des moyens et des outils juridiques permettant le traitement de ces dossiers sur les
plans disciplinaires et administratifs notamment.
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Le Comité suggère, par ailleurs, que chaque fédération établisse des plans nationaux d’éducation
et de lutte contre les discriminations liées aux LGBT-phobies, au genre, au racisme et à l’antisémitisme
et aux situations de handicap. Il préconise que cette obligation constitue l’un des axes obligatoires dans
les subventions accordées par l’ANS dans le cadre des projets sportifs fédéraux (PSF). Les auditions
menées par le Comité ont aussi démontré, de façon récurrente, un besoin très fort en formation aux
enjeux d’éthique, d’intégrité, de sensibilisation à la lutte contre les violences, et de lutte active contre
les discriminations. Le Comité considère que la création d’un nouvel institut dédié aux enjeux de
formation, porté par le mouvement sportif, est une nécessité. Cet institut serait chargé de proposer
des actions de formation transversales, continue et d’intérêt général. Il importe en parallèle de
mener une réflexion d’ensemble s’agissant de la formation initiale et continue de tous les encadrants
(entraîneurs, animateurs, éducateurs) pour y intégrer les enjeux de préservation de santé physique et
mentale des pratiquantes et des pratiquants. Enfin, de nouvelles initiatives doivent être prises afin
d’améliorer la connaissance et la sécurisation des parcours professionnels des sportifs et sportives
professionnels et de haut niveau.
Les membres du Comité remercient la ministre des Sports et des Jeux Olympiques et Paralympiques,
les services du MSJOP ainsi que l’ensemble des acteurs et des actrices auditionnés de leur confiance
tout au long de ce travail. Ils remercient également les rapporteurs de leur disponibilité et de leur
engagement.
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POUR UN SPORT PLUS DÉMOCRATIQUE, PLUS ÉTHIQUE ET PLUS PROTECTEUR
INTRODUCTION
Avec plus de 15 millions de licences délivrées, la France peut se targuer d’un mouvement sportif
actif et d’une organisation opérante tant au niveau national que dans ses territoires. En 2023, 119
fédérations sportives dont 37 fédérations olympiques et paralympiques, 152 000 clubs sportifs, et
11 000 établissements professionnels1 ont été agréés par le ministère des Sports et Jeux Olympiques
et Paralympiques (MSJOP). La pratique du sport de haut niveau fait également l’objet, de longue
date, d’un encadrement exigeant porté notamment par les services du ministère, l’Agence nationale
du sport (ANS) ou l’Institut national du sport, de l’expertise et de la performance (INSEP). Les deux
objectifs de la politique publique du sport en France sont notamment résumés par l’article L. 100-1 du
code du sport : favoriser l’égal accès aux pratiquants et pratiquantes sur l’ensemble du territoire, ainsi
que le sport de haut niveau.
L’activité sportive est désormais reconnue comme un outil de tout premier plan dans le domaine de
l’éducation, du bien-être, de la cohésion sociale, de la santé, de l’animation locale et du développement
de l’activité économique. Ces atouts, nombreux et centraux, justifient toute l’ambition de faire de la
France une nation sportive.
Pourtant, à l’avant-veille d’une compétition olympique et paralympique historique, la place du
sport dans le débat public en France semble faire l’objet d’un traitement politique et médiatique
inégal. Si la couverture relative à l’organisation des Jeux ou aux grandes compétitions sportives fait
généralement l’objet de relais puissants, la place du sport dans notre société, entendue comme une
politique publique de plein exercice, pâtit sans nul doute d’un manque assez général d’appropriation.
Force est de constater que les débats directement liés à l’organisation et au bon développement
du sport dans les fédérations, nos territoires ou notre société, ont été peu nombreux et faiblement
médiatisés ces vingt dernières années.
Trop souvent, le sport reste le sujet de quelques-uns, d’experts, de passionnés ou de personnalités
civiles reconnues, alors même que le secteur sportif soutient un écosystème large et particulièrement
structurant au niveau local. De fait, tout au long de l’année, des millions de bénévoles – dont font
partie la plupart des dirigeants et dirigeantes élues – offrent de leur temps et de leurs compétences
pour transmettre leur passion. Ce caractère associatif constitue d’ailleurs l’ADN du mouvement sportif
français, fondé sur la solidarité, le partage, la transmission, ainsi qu’un engagement désintéressé et
intergénérationnel.
Le mouvement sportif français fait face à de nouveaux et multiples défis à affronter, qui se sont
accrus ces dernières années. Le sport est aujourd’hui un secteur économique et une filière à part
entière, dont le poids économique est évalué à 64 milliards d’euros, soit 2,6 % du PIB en 20222. Il
est aussi un outil de rayonnement sur la scène internationale et porteur d’enjeux géopolitiques. Le
sport fait également montre d’une diversité croissante (pratiques, organisation, etc.), soutenue par
l’évolution à marche rapide des habitudes des pratiquantes et pratiquants, au profit de pratiques
plus individuelles, « à la carte », qui sont parfois éloignées des structures traditionnelles des clubs.
En parallèle, les révélations croissantes de situations de violences ou de dérives internes à quelques
fédérations remettent en cause sa crédibilité, et viennent légitimement questionner la pérennité de
ses modes d’action et d’organisation.
Au cours des cinquante dernières années, un certain nombre de lois d’origine gouvernementale
dans le domaine du sport peuvent être recensées. Il s’agit pour les plus anciennes de la loi du 29
octobre 1975 (dite Mazeaud) relative au développement de l’éducation physique et du sport, de la
loi du 16 juillet 1984 (dite loi Avice) relative à l’organisation et à la promotion des activités physiques
et sportives, ainsi que des deux premières lois relatives à la lutte contre dopage du 28 juin 1989 et
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du 23 mars 1999. Depuis le début des années 2000, il s’agit de celles relatives à l’organisation et à la
promotion des activités physiques et sportives du 6 juillet 2000 (dite loi Buffet) et de celle du 1er août
2003 (dite loi Lamour) lesquelles préfigurent l’actuel code du sport, de la loi relative à la lutte contre le
dopage et à la protection de la santé des sportifs du 6 avril 2006, de celle relative à la lutte contre le
trafic de produits dopants du 3 juillet 2008, ou plus récemment des deux lois relatives à l’organisation
des Jeux Olympiques et Paralympiques de 2024 adoptées en 2018 et 2023.
Les lois du 1er mars 2017, visant à préserver l’éthique du sport, à renforcer la régulation et la
transparence du sport professionnel et à améliorer la compétitivité des clubs, puis du 2 mars 2022,
visant à démocratiser le sport en France, toutes deux d’initiative parlementaire, ont également apporté
un certain nombre de changements importants en matière de régulation et de gouvernance générale
des fédérations et des ligues professionnelles.
Cependant, la quasi-totalité des références législatives adoptées dans la période récente relatives
à l’éthique, la déontologie3 mais également la vie démocratique et la protection des usagers, ont
émané de propositions de loi, c’est-à-dire d’initiatives de parlementaires4 et non du pouvoir exécutif.
Il s’agit là d’une différence essentielle, puisque ces textes de loi ont ainsi été conçus, pour la plupart,
sans étude d’impact préalable, sans concertation ouverte à tous les acteurs et actrices concernés
et parfois même sans l’impulsion politique requise. Cet état de fait explique en partie certaines
difficultés d’application, concernant particulièrement les organisations sportives les plus modestes,
et d’inefficacités fonctionnelles issues des évolutions adoptées.
Parallèlement, au fil du temps, l’activité sportive en France a connu une complexification de
ses dispositifs normatifs dont il résulte aujourd’hui une codification qui à certains égards apparaît
excessive et parfois même illisible.
Dans le droit fil de ce qui précède, les travaux du Comité ne sauraient donc se limiter à envisager
une série de mesures complémentaires et éparses venant s’ajouter à toutes celles qui existent déjà,
ce qui renforcerait le caractère inflationniste des dispositifs d’encadrement. Bien au contraire, les
membres du Comité estiment nécessaire de procéder à une remise à plat permettant une clarification
et une simplification de l’organisation et de l’encadrement juridique des activités physiques et
sportives en France.
La promotion de l’activité physique et sportive a été décrétée Grande cause nationale en 2024
afin d’accompagner l’organisation des Jeux Olympiques et Paralympiques ; ces moments sont autant
d’opportunités de tout premier plan pour aboutir aux objectifs d’un sport plus démocratique, plus
éthique et plus protecteur.
C’est pourquoi le rapport du Comité présente des propositions concrètes dont l’ambition
d’ensemble justifie que certaines d’entre elles soient discutées dans le cadre d’une concertation
aboutissant à un projet de loi-cadre pour le sport, porté par le Gouvernement et fort de la dynamique
d’héritage des Jeux Olympiques et Paralympiques. Cette initiative, qui devrait être partagée et
discutée avec le mouvement sportif dès le début de l’année 2024, est, aux yeux des membres du
Comité, le premier levier qui permettra d’engager un débat politique de fond sur l’organisation du
sport en France, qui a trop souvent fait défaut ces dernières années. Cette initiative est d’autant
plus importante qu’elle s’inscrit également dans un contexte où de nombreux acteurs s’inquiètent,
notamment du fait des trajectoires budgétaires annoncées, de la poursuite de l’engagement public,
une fois les Jeux Olympiques et Paralympiques passés.
3 Tous les « livres » de la partie législative du code du sport (livre I : organisation des APS, livre II : acteurs du sport, livre III : pratique
sportive, livre IV : dispositions diverses) sont (plus ou moins directement) concernés par les thématiques confiées au Comité.
4 Souvent dans le cadre de dépôt d’amendements en séance.
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POUR UN SPORT PLUS DÉMOCRATIQUE, PLUS ÉTHIQUE ET PLUS PROTECTEUR
Proposition n° 1 : Élaborer d’ici l’automne 2024 un projet de loi-cadre relative au sport, à l’issue
d’une large consultation des acteurs et actrices du sport et des élus des collectivités territoriales,
co-organisée entre le MSJOP, le CNOSF et le CPSF.
Par ailleurs, il est indéniable que les sujets relatifs à la vie démocratique, à la transparence, à
l’éthique et à la protection des pratiquantes et pratiquants dépassent très largement le seul cadre
national. L’organisation du sport s’inscrit bien au contraire, le plus souvent, dans une logique
pyramidale et transnationale, en lien étroit avec les fédérations internationales. Le sport recèle des
enjeux de rayonnement, il est un outil de diplomatie, ce qui implique que sa réglementation soit aussi
considérée au niveau supranational.
Dans le prolongement et à l’instar de ce qui a été mis en place pour lutter contre le dopage au
niveau international au début du XXIe siècle, « l’intégrité » du sport, au sens large du terme, suppose
que les acteurs et actrices sportifs défendent de façon plus active au niveau international ces exigences
de transparence, de protection des acteurs et actrices, de démocratie, de bonne gouvernance et de
bon déroulement des compétitions. Au-delà des mesures qui devront être prises au niveau national,
il apparaît donc indispensable au Comité que puisse être engagée une initiative ambitieuse au niveau
international, avec l’appui de l’Union européenne et de ses États-membres, répondant à cet objectif
de préserver à tous les niveaux l’intégrité du sport et de ses acteurs, dans la lignée des travaux sur
l’intégrité dans le sport déjà entrepris au niveau de l’UNESCO et du Conseil de l’Europe.
Proposition n° 2 : Engager, à l’occasion de Paris 2024, une initiative multilatérale forte afin de mettre
en place les outils qui permettront de renforcer au niveau international, l’intégrité du sport, y
compris la protection des pratiquantes et pratiquants.
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I. UNE GOUVERNANCE PLUS DÉMOCRATIQUE
En raison des ambitions qu’il porte et de son fondement associatif, la démocratie, c’est-à-
dire l’implication et la participation directes des acteurs de terrain aux prises de décisions, devrait
être consubstantielle au mouvement sportif. Au cœur des enjeux de transparence, d’éthique et de
protection des pratiquantes et pratiquants, la participation démocratique fait pourtant trop souvent
défaut.
Au niveau national et s’agissant des fédérations sportives, elle est d’un point de vue réglementaire
un prérequis indispensable à l’obtention de l’agrément – qui est le premier stade de reconnaissance
par l’État d’une fédération sportive. Les fédérations qui le sollicitent doivent avoir adopté des statuts
comportant des dispositions qui garantissent, entre autres, « le caractère démocratique de leurs
élections et de leur fonctionnement »5. Cette condition est supposée remplie dès lors que les statuts
fédéraux comportent certaines dispositions obligatoires prévues par l’annexe I-5 aux articles R. 131-1
et R. 131-11 du code du sport. Certaines d’entre elles sont néanmoins rédigées de manière très large,
et relèvent davantage de points à aborder et à préciser dans les statuts que de véritables stipulations
obligatoires à reprendre. Par ailleurs, le contrôle qui doit être opéré par la direction des sports sur
l’ensemble des 119 fédérations agréées se limite de fait assez largement à un contrôle formel du
respect des exigences statutaires fixées par l’annexe susmentionnée, insuffisant pour permettre un
niveau d’exigence démocratique conforme à l’ambition poursuivie.
À rebours de l’ambition portée, les auditions menées par le Comité ont mis en évidence les
difficultés à faire vivre la démocratie dans le monde du sport. Les raisons sont multiples et variables :
faible implication des clubs à la vie fédérale, absence de reconnaissance dans les instances élues,
consultation des adhérents inexistante, lien de confiance distendu. Certaines auditions de représentants
de clubs ont également mis en évidence le fait que, confrontés à leurs propres difficultés pour faire
vivre leur club au quotidien, certains d’entre eux peuvent se sentir peu concernés par la vie fédérale,
pensant ne pas avoir de temps à y consacrer utilement.
Quelques sujets clés concentrent l’essentiel des débats à ce jour : les élections et l’exercice des
fonctions de président ou de présidente de fédération qui cristallisent des tensions excessives en
raison de logiques de pouvoir ou d’opposition exacerbées ; des modes de gouvernance qui ne laissent
que trop peu de place au sein des instances décisionnaires des fédérations aux courants alternatifs,
considérés trop souvent comme des oppositions à exclure ; des difficultés à renouveler les instances
et personnels dirigeants ; ou encore le manque de transparence financière et de contrôle externe.
sous la forme associative, qui leur sont affiliés7. Les statuts fixent aussi la composition de l’assemblée
générale qui peut rassembler tous les membres, sauf disposition contraire8. Or, à cet égard et par
rapport aux autres associations de droit commun, les fédérations sportives se singularisent par la
faible participation directe de leurs membres, c’est-à-dire des clubs, les assemblées générales étant
fréquemment composées majoritairement de délégués, représentants des instances territoriales.
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POUR UN SPORT PLUS DÉMOCRATIQUE, PLUS ÉTHIQUE ET PLUS PROTECTEUR
Ainsi, à partir des dispositions statutaires applicables en 2020/2021 lors de la dernière campagne
de renouvellement des exécutifs fédéraux, seules 36 fédérations, sur les 94 membres du CNOSF
disposaient d’une assemblée générale composée directement par les clubs de ces dernières, les autres
étant organisées sur des schémas basés soit intégralement soit de manière hybride, sur un mode de
participation indirect (grands électeurs régionaux et/ou départementaux).
Source : revue Jurisport (Dalloz), n° 212 – oct. 2020 : « Tous aux urnes »
page 11
Issues d’un compromis, dont l’impact n’a pas été mesuré avant sa formulation législative, entre
les objectifs initiaux des promoteurs de la loi et les réticences portées avec vigueur par le CNOSF, elles
suscitent alors deux types d’observations :
– u
ne approche « optimiste » qui laisserait accroire que cette hétérogénéité respecte la diversité
des instances sportives, de leur culture et de leur fonctionnement ;
– u
ne analyse plus perplexe, voire préoccupante, quant à ses effets sur la vie démocratique
des fédérations et le fossé qui se creuse entre leurs membres et leurs instances dirigeantes.
Pour ne prendre qu’un exemple, certes extrême mais loin d’être exceptionnel au regard des
perspectives envisagées : comment mobiliser un président ou une présidente de club pour
participer à la vie de sa fédération lorsqu’il ne pourra s’exprimer qu’une fois tous les 4 ans dans
un demi-collège électoral ?
En tout état de cause, cette situation doit aussi conduire à une réflexion approfondie sur la
clarification du positionnement des organes déconcentrés.
Proposition n° 3 : Prévoir que tous les clubs membres d’une fédération sportive participent aux
élections et à toutes les autres assemblées générales ; faciliter la mise en œuvre de cette proposition
par la création d’outils numériques mutualisés.
Cette ouverture complète du collège électoral lors de toutes les assemblées générales est
déjà pratiquée dans certaines fédérations y compris chez certaines qui dénombrent plus de 1 500
membres9. Cela montre son caractère réalisable, pourvu que l’on partage l’objectif poursuivi, que l’on
dépasse certaines réticences culturelles et qu’on facilite sa mise en œuvre d’un point de vue matériel.
À cet égard, cette proposition suppose nécessairement de prévoir et de faciliter l’organisation
de systèmes de vote par correspondance ou de participation en visio-conférence pour tout ou partie
des assemblées générales. Les applications et outils numériques nécessaires à cette fin pourraient être
utilement mis à disposition par le CNOSF dans le cadre de sa mission de mutualisation en faveur de ses
membres. Cette proposition s’inscrit aussi dans une perspective de rationalisation tout en permettant
aux clubs les plus éloignés, et notamment ceux d’outre-mer, d’y participer sans induire de contrainte
de coûts, de déplacement ou de disponibilité. La mise en place d’une consultation généralisée et
facilitée grâce aux outils numériques serait indéniablement un facteur d’implication des clubs dans la
vie de leur fédération et donc de dynamisation de la vie démocratique.
Par ailleurs, le Comité estime que pour favoriser l’implication des clubs, il faut que ces derniers
puissent être consultés sur des questions particulières qui intéressent leur sport, sous la forme de
« référendum » fédéral. Ils devraient même disposer d’un pouvoir d’initiative en matière de consultation,
cette possibilité devant être systématiquement introduite et précisée dans les statuts fédéraux.
9 La moyenne du nombre de clubs par fédération est de 1 394 tandis que la médiane basée sur 117 fédérations agréées est de 557.
La fédération française de football est celle qui réunit le plus de clubs (14 073) tandis que la fédération de pentathlon moderne,
également olympique, n’en dénombre que 61. L’Union des clubs de plein air (UCPA loisirs) est la fédération agréée qui comporte le
plus faible nombre de clubs membres (3).
page 12
POUR UN SPORT PLUS DÉMOCRATIQUE, PLUS ÉTHIQUE ET PLUS PROTECTEUR
B. P
ermettre la participation des différents courants à l’administration de la
fédération
Au sein même du mouvement sportif, les fédérations sont parfois perçues comme des structures
où le pouvoir, très concentré, reste l’apanage de quelques-uns. Les courants qui ne sont pas ceux de
l’équipe exécutive en place, dénommés « oppositions », ne participent que peu ou pas du tout à la
gouvernance fédérale. Elles ne disposent d’aucun statut et sont très peu représentées. Bien souvent, il
n’existe par ailleurs dans la gouvernance fédérale, aucun organe de contrôle ou de surveillance. Cette
situation qui donne l’impression d’une captation du pouvoir et d’un entre-soi pour l’exercer, favorise
les climats de tension et de défiance d’une part, et les dérives d’autre part.
Cette critique est renforcée par la difficulté observée à renouveler les instances dirigeantes.
Les résultats des élections qui se sont tenues en 2020/2021, dans un contexte de renouvellement
relativement important comparativement aux précédents, montre ainsi que dans la majorité des cas,
le président sortant est réélu (55 % des scrutins). La non-réélection d’un président sortant, lorsqu’elle
intervient, est principalement due au fait qu’il ne se soit pas représenté (24 % des scrutins). Les
fédérations où le président sortant a été battu ne représentent ainsi que 10 % des scrutins.
Les stipulations obligatoires qui s’imposent aux fédérations agréées et qui sont prévues par la
partie règlementaire du code du sport se limitent, s’agissant des processus électoraux des fédérations,
à prescrire que les statuts fédéraux doivent préciser le mode de scrutin à partir duquel les membres
des organes dirigeants sont élus10. La loi du 2 mars 2022 est certes venue imposer la présence de
licenciés ayant une qualité particulière (sportifs et sportives de haut niveau, arbitre et entraîneur) au
sein de leurs instances dirigeantes, mais elle n’impose pas non plus de modèle électoral précis, de
sorte que les processus électoraux des fédérations sportives agréées se caractérisent par leur diversité.
Source : revue Jurisport (Dalloz), n° 212 – oct. 2020 : « Tous aux urnes »
Une analyse réalisée lors du dernier renouvellement des exécutifs fédéraux en 2020 fait apparaître
que les scrutins plurinominaux sont les plus fréquemment observés (52 % des cas). Le scrutin de liste,
sous diverses formes est présent quant à lui dans 48 % des cas.
10 Les statuts précisent : « 2.2.2.2.4. Le mode de scrutin selon lequel se déroulent les élections » ; annexe I-6 du code du sport.
page 13
Source : revue Jurisport (Dalloz), n° 212 – oct. 2020 : « Tous aux urnes »
Lorsqu’il est pratiqué, il est utilisé soit seul, soit de manière hybride, avec une dose plus ou moins
importante de scrutin uninominal.
Près de la moitié des fédérations élisent leurs organes dirigeants à partir d’un scrutin de liste où
celle qui arrive en tête remporte la totalité des sièges (19 sur 41).
Une majorité d’entre elles (21/41) ont prévu un scrutin de liste proportionnel basé sur le scrutin
municipal qui prévoit un scrutin sur un seul tour où la liste qui arrive en tête remporte la majorité
des sièges ainsi que la proportion restante en fonction de son nombre de voix. Si ce type de scrutin
apparaît a priori comme ouvert et laissant une véritable place aux listes qui ne sont pas arrivées en
tête, une analyse plus précise permet cependant de relativiser ce propos.
De surcroît, lorsque l’opposition est présente au conseil d’administration, le lieu d’échanges et
de prise de décisions tend alors à être transféré au sein de l’organe restreint (bureau exécutif ou
bureau fédéral) dont l’opposition est généralement exclue. Le conseil d’administration tend alors à
devenir une simple chambre d’enregistrement. Par ailleurs, les principales commissions fédérales sont
également pilotées ou présidées par des personnalités proches de l’équipe dirigeante en place. Il y a
donc un manque de participation des oppositions au fonctionnement réel de la fédération.
Force est donc de constater que la liberté offerte aux fédérations pour organiser leur mode de
scrutin depuis 2004 n’a, de manière générale, pas conduit à la mise en place de dispositifs offrant un
résultat satisfaisant en termes d’ouverture et de participation.
Par ailleurs, les conditions d’éligibilité qui peuvent être prévues par les statuts fédéraux pour
permettre à un licencié d’une fédération de se porter candidat à l’élection sont susceptibles de
constituer une barrière à l’accès à l’élection et donc à la participation aux organes de direction
et doivent donc faire l’objet d’une attention particulière afin qu’elles ne soient pas un facteur de
limitation de la vie démocratique.
De plus, l’enjeu de démocratisation et d’ouverture des instances fédérales suppose que les
élections se déroulent dans un cadre transparent et permettant de fixer des principes et règles visant
à assurer l’égalité de traitement pour tous les candidats. Les dispositions statutaires obligatoires
prévoient la mise en place de commissions électorales dont le rôle consiste principalement à veiller
à la recevabilité des candidatures d’une part, au bon déroulement des opérations de vote et à la
proclamation des résultats d’autre part. Au-delà de ces obligations, certaines fédérations ont souhaité
définir des règles pour encadrer et contribuer au bon déroulement des campagnes électorales. Le
Comité considère que cette bonne pratique est à généraliser. À cet effet, le comité d’éthique du
CNOSF (cf. proposition n° 22) pourra se voir confier la mission d’établir un code électoral général,
décliné et mis en œuvre par les commissions électorales ou les comités d’éthiques fédéraux.
page 14
POUR UN SPORT PLUS DÉMOCRATIQUE, PLUS ÉTHIQUE ET PLUS PROTECTEUR
Proposition n° 5 : Confier au comité d’éthique au sein du CNOSF la mission de fixer les principes
généraux d’un code électoral.
La nécessité d’ouvrir et de mieux associer les courants d’opposition, ou minoritaires, dans les
instances dirigeantes doit cependant aller de pair avec celle d’assurer un fonctionnement efficace
de l’équipe en place. L’enjeu est alors de renforcer et de garantir les droits des oppositions, tout en
préservant une pleine capacité d’action de l’équipe élue.
Les comités exécutifs ont eu tendance à s’alourdir ces dernières années (avec la représentation
de catégories obligatoires en leur sein). Cette lourdeur est parfois critiquée et peut être effectivement
pénalisante. Ce phénomène risque de s’accroître du fait des dispositions de la loi du 2 mars 2022 qui
prévoient un renforcement de la présence des catégories obligatoires et que celles-ci ne peuvent au
total représenter plus de 25 % du nombre total de membres de l’instance exécutive, ce qui induit
mathématiquement, une augmentation en proportion du collège « général ».
Proposition n° 6 : Prévoir, pour l’élection des organes exécutifs11, un mode de scrutin proportionnel
avec une prime à la majorité renforcée.
Proposition n° 7 : Renforcer les obligations de publication et de libre accès aux relevés de décisions
et comptes rendus des organes exécutifs et prévoir leur transmission systématique au comité
d’éthique fédéral.
Proposition n° 8 : Limiter les possibilités de cumul simultané entre les fonctions de membre d’un
organe exécutif fédéral et de président d’un organe déconcentré de la fédération.
page 15
D. F
avoriser le renouvellement des instances dirigeantes en renforçant la parité,
et en rendant le bénévolat plus attractif
En France, le secteur du sport repose essentiellement sur le modèle associatif et le bénévolat. Sur
les plus de 360 000 associations sportives en activité (dont 160 000 clubs fédérés), seules 43 700 sont
« employeuses », ce qui signifie que près de 90 % sont sans salarié. Trois millions de personnes œuvrent
ainsi quotidiennement pour proposer une pratique sportive à, entre autres, plus de 15 millions de
licenciés. Or, à l’instar de l’ensemble du monde associatif où le bénévolat occasionnel progresse, le
sport est aujourd’hui confronté à la diminution de ses bénévoles réguliers et exerçant des fonctions
dirigeantes. Il fait également face au repli continu de l’engagement des plus de 65 ans, dans un contexte
où les responsables des associations sportives sont nettement plus âgés que les simples bénévoles.
Ce constat contribue à accroître le risque de non-renouvellement des instances, des tensions étant
d’ores et déjà parfois observées au niveau des fonctions dirigeantes, où les postes de président et de
trésorier ne sont parfois plus pourvus. Les associations sportives représentent de surcroît des réalités
très diverses.
Fortement marqué par la culture bénévole, le monde du sport connaît un processus de
professionnalisation, qui induit des besoins nouveaux en termes de compétences et de disponibilité qui
expliquent la part croissante de professionnels qui interviennent dans le secteur (+ 48 000 entre 1999
et 2019). Les auditions menées par Comité montrent que l’attractivité de l’engagement des bénévoles
et leur montée en compétence font dès lors partie des préoccupations majeures du secteur. Favoriser
le renouvellement des instances dirigeantes va de pair avec un travail spécifique sur le bénévolat, afin
de le rendre plus attractif et de mieux reconnaître les compétences qui y sont acquises. À cet égard,
le Comité considère qu’il est essentiel de poursuivre et de renforcer la démarche engagée dans le
domaine de la parité qui reste encore insuffisante à ce jour.
1. Consacrer le principe de parité réelle au sein de toutes les instances du mouvement sportif
La faible représentation des femmes est criante : le CNOSF a réalisé en 2021 un état des lieux
précis de la place des femmes dans les instances dirigeantes sportives fédérales et territoriales. Il
en ressort que seulement 16 % des postes de président sont occupés par des femmes (26,9 % pour
les postes de trésorier et 36,5 % pour les postes de secrétaire général). À l’heure actuelle, sur 119
fédérations agréées, seules 18 sont présidées par une femme, et seulement 4 d’entre elles président
des fédérations olympiques et paralympiques.
La mixité et la parité ne sont pas que des enjeux symboliques de représentation des femmes dans
les instances. Il faut admettre qu’un certain nombre de sujets ne sont pas nécessairement abordés de
manière analogue par les hommes et les femmes et qu’une approche équilibrée et peut-être même
parfois plus volontariste peut découler d’une plus grande mixité de points de vue.
La loi n° 2014-873 du 4 août 2014 pour l’égalité réelle entre les femmes et les hommes a introduit
dans la partie législative du code du sport le principe selon lequel les statuts « favorisent (…) la parité
dans les instances dirigeantes des fédérations (…) ». Il s’agissait alors d’une première étape visant à
« favoriser la parité » à partir de seuils minimaux de représentation selon le taux de licenciés des deux
sexes (25 % ou 40 %). La loi prévoyait en outre des dispositions transitoires pour permettre une mise
en œuvre progressive de cette parité relative.
La loi du 2 mars 2022 s’inscrit dans cette démarche en renforçant les dispositions antérieures, par
l’imposition d’une parité intégrale progressive dans les instances dirigeantes des fédérations sportives.
Plus précisément, elle impose la parité totale dans les instances dirigeantes sportives des fédérations
au niveau national mais aussi dans les bureaux du CNOSF et du CPSF à partir du 1er janvier 2024. Cette
parité est étendue aux ligues régionales à compter du 1er janvier 2028.
page 16
POUR UN SPORT PLUS DÉMOCRATIQUE, PLUS ÉTHIQUE ET PLUS PROTECTEUR
Il est cependant étonnant de remarquer que les dispositions en vigueur du code du sport
n’imposent pas la parité pour ce qui concerne les conseils d’administration du CNOSF et du CPSF.
Concernant le CNOSF, il est simplement prévu que « les statuts du Comité national olympique et
sportif français comportent des dispositions visant à assurer une représentation équilibrée des femmes
et des hommes et à favoriser la parité au sein de l’ensemble de ses organes. Son bureau est composé à
parité de femmes et d’hommes ». Les stipulations des statuts du CNOSF ne prévoient pas de règles
de parité concernant son conseil d’administration. Sur les 49 membres qui composent son conseil
d’administration, on dénombre ainsi seulement 14 femmes soit 28,5 % du total12. S’agissant du bureau
exécutif, il est uniquement prévu par les statuts en vigueur que « le bureau exécutif doit comprendre
au moins deux femmes et deux hommes »13, sur les douze qui le composent. Dans les faits, le bureau
exécutif comprend 6 hommes et 5 femmes, un poste apparaissant non pourvu. Cependant, le CNOSF
a mis en place en son sein un bureau exécutif élargi composé de 11 membres supplémentaires, dont
seulement 3 femmes ce qui représente (bureau + bureau élargi) un total de 8 femmes pour 17 hommes,
soit 32 %.
Sans obligation législative particulière en la matière, le CPSF dispose pour sa part d’un conseil
d’administration parfaitement paritaire avec 8 femmes et 8 hommes.
Les ligues professionnelles sont quant à elles les grandes oubliées des dispositions relatives à
la parité. En effet, aucune disposition ne les concerne, partant certainement du principe que leur
organisation est basée en premier lieu sur la représentation des clubs professionnels et que ces
derniers sont très généralement présidés par des hommes. Le Comité considère que ce constat, réel,
ne doit pas être considéré comme une fin de non-recevoir d’une part, et qu’il ne saurait constituer un
obstacle insurmontable à l’application du principe de parité dans l’ensemble des instances sportives.
Par ailleurs, au-delà des instances dirigeantes, le code du sport ne prévoit aucune obligation de
parité dans les commissions régaliennes des instances sportives, c’est à dire a minima celles dont
l’existence est prévue par un texte, telles que les commissions de discipline, les commissions chargées
du contrôle de la gestion des clubs, les comités d’éthique, les commissions des agents, les commissions
électorales ou les commissions médicales, malgré l’importance des missions confiées à ces commissions
dans l’activité des fédérations.
En conclusion, si la proportion de femmes élues présidentes de fédérations toutes fédérations
confondues progresse, tout comme celle des femmes membres des comités directeurs fédéraux,
comme le montrent les deux graphiques ci-dessous, la féminisation des fonctions dirigeantes au sein
du mouvement sportif reste très lente.
page 17
Proportion de femmes élues au comité directeur (ou conseil d’administration)
d’une fédération agréée15
À propos des fonctions qu’elles assument, on constate une répartition genrée des responsabilités
associatives17. Ainsi, la fonction où l’on comptabilise le plus de femmes est celle de secrétaire générale
puis celle de trésorière. Beaucoup d’entre elles occupent des fonctions d’adjointe. Pour ces dernières,
il y a même plus de femmes que d’hommes. In fine, « les femmes continuent de s’évaporer au fur et à
mesure que le niveau de responsabilité augmente »16. Le Comité considère que la parité ne pourra être
véritablement assurée qu’à la condition d’en consacrer le principe et de l’appliquer, sans exception, à
tous les niveaux, au-delà des seuls comités directeurs fédéraux ou territoriaux.
Proposition n° 9 : Fixer dans la loi le principe de parité réelle dans tous les organes dirigeants du
mouvement sportif (CNOSF, CPSF, fédérations, ligues professionnelles, organes déconcentrés) ainsi
que dans leurs commissions régaliennes.
15 Source : thèse d’Annabelle Caprais (La place et le rôle des femmes dans la gouvernance des fédérations sportives françaises, Bordeaux,
2020) et pour la mandature actuelle, calcul effectué à partir des résultats publiés par le CNOSF à la date du 12 juillet 2021 in
Béatrice Barbusse, Du sexisme dans le sport, Anamosa, 2022.
16 Caprais, 2020, p. 282.
page 18
POUR UN SPORT PLUS DÉMOCRATIQUE, PLUS ÉTHIQUE ET PLUS PROTECTEUR
3. enforcer la formation des présidents de fédérations sur les enjeux de politique publique
R
et favoriser l’attractivité par un régime d’indemnisation transparent
Les fédérations agréées participent, selon l’expression retenue par l’article L. 131-8 du code du
sport, à l’exécution d’une mission de service public, tandis que les fédérations délégataires se voient
directement confier une mission de service public et des prérogatives de puissance publique attachées
à cette dernière. Les fédérations sportives agréées et délégataires sont à ce titre des opérateurs de l’État
qui peuvent bénéficier dans ce cadre d’un soutien en moyens humains (cadres techniques et sportifs)
ou financiers (subventions). Dès lors, il est indispensable que les présidents et les présidentes de ces
organismes, en leur qualité de représentants légaux, soient responsabilisés et formés aux enjeux des
politiques publiques, au-delà même des compétences requises pour assurer l’administration et la gestion
de leur fédération sportive. Il s’agit actuellement notamment, de la protection de la santé physique
et morale des pratiquantes et pratiquants (lutte contre les violences sexuelles et sexistes, conditions
d’entraînements), des enjeux d’accessibilité ainsi que la lutte contre l’homophobie et le racisme et
toutes formes de discriminations. Il s’agit également des enjeux relatifs au changement climatique, à
la protection de l’environnement, à la probité (questions de prévention et de traitement des conflits
d’intérêts). Sur ces sujets, le Comité considère que le suivi d’une formation périodique fixée par l’État
doit être obligatoire et conditionner la possibilité pour une fédération de bénéficier d’aides publiques.
À titre d’illustration comparative, les aides attribuées par le Centre national du cinéma et de
l’image animée (CNC) – opérateur de l’État en charge de la distribution des aides au secteur du cinéma
et de l’audiovisuel, sont conditionnées au respect par les entreprises qui les demandent d’obligations
précises en matière de prévention et de détection du harcèlement sexuel, ainsi que de mise en œuvre
des mesures propres à y mettre un terme ou à le sanctionner17. Le MSJOP et l’ANS pourraient mettre à
l’étude une approche avec le déploiement d’actions similaires.
En parallèle, il faut cependant souligner que les dirigeants de fédérations font souvent face à
des responsabilités de plus en plus larges, de plus en plus chronophages, et impliquant des enjeux
importants en termes de gestion. Compte tenu de ces éléments, le Comité a acquis la conviction que
l’indemnisation des dirigeants de fédérations est une condition de l’attractivité de ces fonctions, afin
que des personnes en activité ne soient pas dissuadées de les assurer compte tenu de la disponibilité
qu’elles supposent.
La rémunération des dirigeants de fédérations sportives, en tant qu’associations, est déjà possible.
Cependant, elle découle indirectement d’un dispositif fiscal de droit commun d’appréciation du
caractère désintéressé de la gestion d’une association permettant de déduire ou non l’assujettissement
de cette dernière aux impôts commerciaux. Une association fiscalisée pourrait donc tout à fait prévoir
une rémunération pour des montants très supérieurs aux seuils fixés par le code général des impôts et
les instructions fiscales.
Ce dispositif apparaît, dans les faits, peu satisfaisant : il ne prend pas en compte la situation
personnelle des personnes concernées et peut donc s’appliquer indistinctement, quelle que soit leur
situation antérieure. De plus, il est insuffisamment transparent, dès lors qu’il ne fait l’objet que d’un
rapport formel du commissaire aux comptes devant l’assemblée générale annuelle. Le dispositif actuel
est par ailleurs insuffisant et limité car il est supporté directement et individuellement par chaque
fédération et dépend donc des ressources propres de cette dernière.
17 Code du cinéma et de l’image animée : article 122-36-1 du règlement général des aides.
page 19
Le Comité considère qu’un dispositif de soutien financier individuel, en contrepartie de l’exercice
des fonctions de président, de présidente ou de membre d’un bureau exécutif fédéral, est tout à
fait légitime, mais il doit être conçu uniquement comme un régime d’indemnisation et non comme
un système de rémunération. Il ne peut s’agir de permettre un enrichissement personnel du fait de
l’exercice de responsabilités fédérales qui sont et doivent rester, par nature, bénévoles.
Il est essentiel de favoriser l’attractivité de ces postes vers des publics potentiellement plus jeunes,
plus féminin et mieux formés. C’est une condition sine qua non de la professionnalisation des postes.
La diversité des fédérations sportives et des niveaux de responsabilité qu’elles induisent implique
néanmoins qu’une telle indemnisation soit fonction de critères, comme le nombre de licenciés ou
le budget. Il pourrait ainsi être confié au comité d’éthique du CNOSF le soin d’élaborer une grille
d’indemnisation des dirigeants de fédération, dont les montants dépendraient de leur taille. Cette
grille serait publique, permettant alors de garantir la transparence de l’indemnisation des dirigeants
dans le monde sportif. Par ailleurs, il conviendrait de prévoir que le comité d’éthique de chaque
fédération soit appelé à émettre un avis avant toute décision d’indemnisation d’un président ou d’une
présidente de fédération.
page 20
POUR UN SPORT PLUS DÉMOCRATIQUE, PLUS ÉTHIQUE ET PLUS PROTECTEUR
Ces efforts vont dans le bon sens et doivent être poursuivis, mais peuvent être accompagnés
d’autres mesures. En particulier, l’activité bénévole n’est pas prise en compte dans le calcul des droits à
la retraite, alors même que les bénévoles sont indispensables aux activités des associations et prennent
bien souvent sur leur activité professionnelle pour y contribuer. Par ailleurs, certains dispositifs visant à
favoriser l’engagement des salariés ou des agents publics dans les fonctions de responsable bénévole
d’une association existent mais mériteraient d’être mieux diffusés (à l’instar du compte engagement
citoyen ou des congés engagement). À cette fin, il semblerait utile qu’une étude approfondie sur
l’attractivité du bénévolat dans le sport soit lancée afin d’identifier les pistes les plus pertinentes.
Proposition n° 13 : Lancer une évaluation sur l’attractivité du bénévolat sportif et des dispositifs
visant à l’encourager (congés d’engagement, dispositifs de décharge, etc.) et à permettre la
validation de trimestres de retraite.
Les auditions menées par le Comité ont par ailleurs montré que si le sport fait partie des secteurs
en général bien soutenus par le secteur privé (sponsoring), le mécénat de compétences fait encore
partie des angles morts alors qu’il participerait à la montée en compétences des fédérations, à
moindre coût.
page 21
• Harmoniser et renforcer les outils de gestion obligatoires
Il est révélateur de constater que l’adoption d’un règlement financier ne figure pas parmi les trois
conditions préalables à la délivrance de l’agrément du ministère des sports pour les fédérations, prévus
par l’article L. 131-8 du code du sport. L’article R. 131-2 du code du sport prévoit que les fédérations qui
sollicitent l’agrément doivent sur le principe « avoir adopté des statuts comportant des dispositions qui
garantissent le caractère démocratique de leurs élections et leur fonctionnement, la transparence de leur
gestion et l’égal accès des femmes et des hommes à leurs instances dirigeantes, et qui comprennent les
dispositions obligatoires prévues à l’annexe I-5 ». L’obligation d’un règlement financier n’est cependant
expressément prévue ni par l’article L. 131-8 ni par l’article R. 131-2 du code du sport. Elle découle de
manière incidente, d’une stipulation obligatoire des statuts mentionnés à l’annexe I-5 du code du
sport qui détermine les domaines de compétence exclusive d’une assemblée générale fédérale et
précise à cet égard qu’« elle adopte, sur proposition de l’instance dirigeante compétente, le règlement
intérieur et le règlement financier ».
En définitive, si le code du sport se limite à poser un principe de transparence de la gestion et à
renvoyer aux stipulations obligatoires, force est de constater que ces dernières sont, dans le domaine
financier, très limitées et très largement insuffisantes pour permettre d’imposer à elles seules un
niveau de structuration et de transparence financière en adéquation avec les enjeux contemporains.
Le Comité préconise donc qu’un règlement financier type, fixant des dispositions minimales
soit fixé par voie réglementaire, et décliné par toute fédération agréée. Ce règlement financier
type devra notamment permettre la mise en place de règles précises et de pratiques de bonne
gestion et notamment des procédures minimales de mise en concurrence systématique ainsi que
la publication systématique des principaux marchés et contrats de prestations conclus. Élaboré si
besoin en coordination avec le comité d’éthique, le règlement financier fédéral devra comprendre
des dispositions dans le domaine de la prévention des conflits d’intérêts et notamment des règles de
déport.
Enfin, de façon plus générale, un effort d’accompagnement et d’évaluation des structures
dans leur fonction financière et administrative doit pouvoir être porté par l’État : formalisation des
règles d’utilisation des cartes achats et des dépenses de fonctionnement, formalisation des frais de
représentation des dirigeants notamment. De même, la publication des comptes des fédérations
sportives devra faire l’objet d’une transparence et d’une accessibilité renforcée.
Proposition n° 15 : Rendre obligatoire pour les fédérations agréées l’adoption d’un règlement
financier, rendu public, conforme à un règlement type fixé par voie réglementaire et comportant
notamment des dispositions relatives à l’obligation de publicité des comptes et aux procédures de
passation des contrats.
page 22
POUR UN SPORT PLUS DÉMOCRATIQUE, PLUS ÉTHIQUE ET PLUS PROTECTEUR
E. R
enforcer les mécanismes d’alerte et créer un dispositif d’alerte unifié de
signalement anticorruption
Protéger le témoignage de celui ou celle qui a le courage de dénoncer des faits délictueux constatés
ou des faits criminels vécus dont il ou elle est victime, est absolument fondamental. Celui ou celle qui
ose prendre la parole pour s’indigner, dénoncer ne doit pas craindre d’être sanctionné ou persécuté en
raison de son témoignage : tel est le principe clé de la protection des lanceurs d’alerte qui s’engagent
contre le dopage, les violences, le harcèlement sexuel, le trucage de compétitions ou d’actions de
corruption. La loi Sapin II du 9 décembre 201618 comporte, à ce titre, des dispositions relatives à
la protection du lanceur d’alerte et à l’instauration d’un processus de signalement anticorruption.
Sur ce dernier volet, la loi impose aux structures morales publiques ou privés d’au moins 50 salariés
d’instaurer un dispositif permettant à tout employé d’alerter de tout crime ou délit ou violation grave
et manifeste des engagements dont il a eu personnellement connaissance.
Seulement, à ce jour, très peu de fédérations se sont données les moyens de transposer et de
mettre en œuvre ces dispositifs qui ne sont par ailleurs pas suffisamment connus. L’organisation et
la culture du sport ne jouent pourtant pas toujours en la faveur de celui ou celle qui dénonce des
faits délictueux en raison, par exemple, du pouvoir du sélectionneur, des capacités de nuisance de
co-équipiers, du poids de la compétition et des performances, ou encore de la culture du secret bien
connue. Il est donc indispensable que le statut du lanceur d’alerte puisse être pleinement garanti dans
le milieu du sport et que les dispositifs d’alerte soient facilement accessibles.
18 Loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016 modifiée relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la
vie économique.
page 23
Dès lors, l’État doit s’engager en faveur de l’application pleine et entière des dispositifs de la loi
Sapin et adapter l’application de ces textes aux fédérations sportives. Il est nécessaire que soient
levées toutes les barrières qui empêchent les signalements.
À ce jour, un tel dispositif unifié, centralisé et reconnu de signalement anti-corruption permettant
une protection effective du lanceur l’alerte, sur le modèle de la plateforme Signal-Sports pour ce qui
concerne les violences, n’existe pas à au sein du ministère chargé des sports. Sur le fondement du B
de l’article 8 de la loi n°2016-1691 du 9 décembre 2016 susmentionnée, et de l’article 5 du décret du 3
octobre 2022, le collège de déontologie de l’éducation nationale et de la jeunesse et des sports s’est
vu confier la mission de référent mais son champ n’est à ce jour pas étendu aux fédérations sportives
agréées ni même aux fédérations délégataires du ministère chargé des sports.
L’État doit pouvoir garantir ce dispositif, soit au niveau central, soit en permettant l’accès à un
canal sécurisé et anonyme, aux fédérations et à toute personne susceptible de vouloir émettre un
signalement. Il doit également en assurer la promotion pour lui permettre d’être pleinement effectif.
page 24
POUR UN SPORT PLUS DÉMOCRATIQUE, PLUS ÉTHIQUE ET PLUS PROTECTEUR
II. P
OUR UNE RÉVISION GÉNÉRALE DE L’ARCHITECTURE
NATIONALE DE LA PRÉVENTION ET DE LA PROTECTION
DE L’ÉTHIQUE DU SPORT FRANÇAIS
Les auditions menées par le Comité ont mis en évidence un paradoxe entre l’affirmation
toujours plus forte de l’importance de l’éthique dans le sport, d’une part, et les révélations de
dysfonctionnements qui se sont multipliées ces dernières années, d’autre part. Aussi, l’affirmation de
principes éthiques doit s’accompagner de manière indispensable de moyens et dispositifs concrets
permettant d’assurer leur pleine application. Il est dès lors indispensable que le mouvement sportif
soit en capacité d’assurer par lui-même la régulation, la promotion et la défense de l’éthique du sport.
Les membres du Comité ont acquis la conviction que cette ambition nécessite une refonte générale
de l’architecture et du rôle de chacun des acteurs.
Il importe d’abord de garantir l’indépendance des comités d’éthique fédéraux et de renforcer
leurs prérogatives. Pour autant, compte tenu du nombre et de l’hétérogénéité des fédérations,
notamment en termes de moyens, toutes ne sont pas à même de mettre en place individuellement
un dispositif suffisamment indépendant et efficace dans le domaine de l’éthique. Aussi, si le CNOSF
a, jusqu’à présent, limité pour l’essentiel son action dans ce domaine à l’adoption de la charte
mentionnée à l’article L. 141-3 du code du sport19, il est indispensable qu’en tant que représentant
légal du mouvement sportif, il assume pleinement sa position et agisse en la matière de manière ferme
et résolue, avec l’appui et sous le contrôle de l’État. La mise en place d’un comité d’éthique au sein du
CNOSF auquel serait confié une mission de service public en la matière permettrait ainsi de superviser
l’action des comités fédéraux et, en application du principe de subsidiarité, de suppléer le cas échéant
les défaillances et limites des fédérations ou de certaines d’entre elles. Le CNOSF doit aussi être une
structure faîtière et d’appui aux fédérations dans la mise en œuvre des principes éthiques, et doit
jouer un rôle dans la diffusion des pratiques.
A. L
a prise en compte actuelle des sujets d’éthique et de déontologique au sein
du mouvement sportif
1. e la déontologie à l’éthique du sport – description des évolutions législatives de 1984 à
D
nos jours
Dès l’article 19 de la loi n°84-610 du 16 juillet 1984, relative à l’organisation et à la promotion des
activités physiques et sportives, dite « Loi Avice », le CNOSF s’est vu reconnaître un rôle particulier
dans le domaine de la déontologie du sport : « Ce comité définit, conformément aux missions qui
lui sont dévolues par le Comité international olympique, les règles déontologiques du sport et veille
à leur respect. (…) » Cette rédaction est modifiée par la loi n°2000-627 du 6 juillet 2000 qui prévoit
pour sa part que « Le comité national olympique et sportif français veille au respect de la déontologie
du sport définie dans une charte établie par lui après avis de la Commission nationale du sport de
haut niveau. (…) ». Cette disposition reprise sans modification à l’article L. 141-3 du code du sport est
modifiée par le décret n°2013-264 du 28 mars 2013 qui a supprimé les références dans le code du sport
à la Commission nationale du sport de haut niveau à la suite de la suppression de cette dernière. La
modification la plus récente résulte de la loi n°2022-296 du 2 mars 2022 qui a ajouté une référence à
l’éthique à l’article L. 141-3, lequel est désormais rédigé comme suit : « le Comité national olympique
et sportif français veille au respect de l’éthique et de la déontologie du sport définie dans une charte
établie par lui ». Ce n’est donc qu’en 2022 que, concernant le CNOSF, il est fait référence à son rôle
non seulement dans le domaine de la déontologie, c’est-à-dire des règles qui s’appliquent à l’ensemble
de la communauté qu’il représente, mais au-delà, dans le domaine de l’éthique, qui se rattache aux
valeurs et principes qui sous-tendent l’activité sportive.
19 « Le Comité national olympique et sportif français veille au respect de l’éthique et de la déontologie du sport définies dans une
charte établie par lui ».
page 25
En 2012 et sous l’impulsion du législateur, l’éthique a pris une place croissante directement au sein
des fédérations sportives. L’article 1er de la loi n°2012-158 visant à renforcer l’éthique dans le sport et
les droits des sportifs a inséré dans la partie législative du code du sport un article imposant à chaque
fédération agréée d’établir une charte éthique et de veiller à son application. Dans sa rédaction initiale,
cette obligation s’imposait largement à toutes les fédérations reconnues par l’État à une époque où,
comme indiqué ci-dessus, le rôle du CNOSF se limitait quant à lui à la déontologie.
Depuis 2017 et la loi du 1er mars visant à préserver l’éthique du sport, à renforcer la régulation et
la transparence du sport professionnel et à améliorer la compétitivité des clubs, un nouvel article y
est spécifiquement consacré au sein du code du sport (article L. 131-15-1). Les obligations en matière
d’éthique ne concernent cependant plus que les fédérations délégataires. Comme antérieurement,
l’obligation première consiste pour l’essentiel en l’adoption d’une charte d’éthique et en la création
d’un comité chargé de contribuer à son respect. Dès 2017 cependant, les comités d’éthique voient
étendre leur domaine de compétences en étant chargés également de veiller « au respect des règles
(…) de prévention et de traitement des conflits d’intérêts ».
La loi du 2 mars 2022 visant à démocratiser le sport en France a étendu le champ de compétence
des comités d’éthique des fédérations sportives délégataires, qui doivent désormais déterminer la
liste des personnes soumises à une obligation de déclaration d’intérêts20. Elle précise à cet égard
que le comité d’éthique fédéral « saisit la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique de
toute difficulté concernant ces déclarations d’intérêts ». La loi de 2022 a également renforcé l’exigence
d’indépendance de ces comités d’éthique. Si aux termes de la loi de 2017, les comités étaient dotés
d’un « pouvoir d’appréciation indépendant », il appartient désormais à chaque fédération de « garanti[r]
l’indépendance » de son comité d’éthique.
2. Des comités d’éthique fédéraux hétérogènes, le CNOSF en retrait sur ces enjeux
Avant l’obligation prévue par la loi de 2017, certaines fédérations s’étaient déjà dotées d’un comité
d’éthique. Systématiser leur existence était sans doute nécessaire, dans la perspective d’accélérer la
diffusion des enjeux éthiques.
Pour autant, les dispositions actuelles de l’article L. 131-15‑1 ne concernent que les fédérations
délégataires, et non pas l’ensemble des fédérations agréées. En outre, en dépit de cette obligation
législative, certaines fédérations délégataires n’ont toujours pas mis en place de comité. Ainsi en
2022, soit cinq ans après l’entrée en vigueur de l’obligation prévue par la loi, 16 % des fédérations
délégataires membres du CNOSF ne disposaient pas de comité d’éthique21. S’agissant des comités
d’éthique existants, leur composition et leurs modes de fonctionnement sont très hétérogènes, avec
en conséquence des différences sur l’efficacité de leur action. Nombreux sont ceux qui manquent
encore aujourd’hui d’indépendance et de compétences internes. Dès lors, la simple existence d’une
charte n’est pas nécessairement la démonstration de la prise en considération et du traitement
efficace des sujets éthiques au sein d’une fédération.
Enfin, la prise en compte des déclarations d’intérêt prévue par la loi du 2 mars 2022 reste très
embryonnaire (la plupart des comités d’éthique n’ont pas établi la liste des personnes soumises à
déclaration et ne vérifient pas ces déclarations ; la HATVP n’a encore jamais été saisie d’une quelconque
« difficulté »).
Les comités d’éthique des fédérations ne fonctionnent donc pas tous avec efficacité, faute de
moyens, de compétences, et – parfois – de volonté. C’est un constat de large ineffectivité de l’article
20 « Le comité d’éthique est compétent pour déterminer la liste des membres des instances dirigeantes nationales et régionales des
fédérations délégataires ainsi que des commissions mentionnées dans les statuts prévus à l’article L. 131-8, des ligues professionnelles
et des organismes mentionnés à l’ article L. 132-2 qui lui adressent une déclaration faisant apparaître les intérêts détenus à la date
de leur nomination, au cours des cinq années précédant cette date et, au moyen de déclarations rectificatives, jusqu’à la fin de
l’exercice de leur mandat. »
21 Recensement effectué par le CNOSF en mai 2022. Fin 2023, le ministère estime que seules 2 fédérations délégataires n’ont pas
encore mis en place de comité d’éthique.
page 26
POUR UN SPORT PLUS DÉMOCRATIQUE, PLUS ÉTHIQUE ET PLUS PROTECTEUR
L. 131-15-1 du code du sport qui doit être dressé. Or, dans la situation actuelle, aucune structure n’est à
même de prendre le relai si une fédération n’est pas en mesure de traiter les sujets éthiques auxquels
elle fait face, que ce soit parce qu’elle ne possède pas de comité d’éthique ou parce que ce dernier
dysfonctionne. S’agissant du CNOSF, les auditions menées par le Comité ont en effet montré qu’il
n’était pas aujourd’hui perçu par les fédérations comme une structure faîtière dans le domaine de
l’éthique. Jusqu’alors, son comité de déontologie s’est abstenu de jouer un rôle d’appui aux comités
d’éthique fédéraux, ce qui est perçu comme une carence importante. La capacité d’intervention de
ce comité est par ailleurs limitée par ses modalités de saisine (exclusivement à la main du président ou
de la présidente du CNOSF), ses moyens humains contraints (aucune ressource humaine spécialement
dédiée) et par des prérogatives limitées à l’édiction d’avis non systématiquement publiés. Le CNOSF
ne dispose par ailleurs pas à ce jour d’une commission de discipline interne compétente le cas échéant
pour sanctionner, notamment, d’éventuelles atteintes à l’éthique qui seraient commises par un de ses
membres, un ou une de ses administrateurs.
Dès lors, face aux très nombreux scandales qui ont émaillé l’actualité sportive, le CNOSF n’a
presque jamais pris de position susceptible de mettre en cause l’action d’un dirigeant fédéral ou d’une
fédération membre de ce dernier.
Ainsi, contrairement à la conciliation, régulièrement citée comme exemple de mission de service
public que le CNOSF assure de manière indépendante et efficace dans le domaine du traitement
des litiges fédéraux, les attentes des fédérations à l’égard du CNOSF en matière d’éthique et de
déontologie sont faibles ou déçues.
B. R
evoir l’architecture de la prévention et de la lutte contre les atteintes à
l’éthique dans le sport
Le mouvement sportif étant responsable de la gestion du sport, il est indispensable qu’il soit à
même de garantir son intégrité et la diffusion des valeurs qu’il porte. Pour qu’il soit en capacité de le faire
efficacement, c’est une refonte globale de l’architecture visant à préserver l’éthique et à sanctionner
les manquements que le Comité préconise d’adopter. Dans une logique d’efficacité et de proximité,
cela passe d’abord par le fait de permettre aux comités d’éthique fédéraux de disposer de davantage
de compétences et de moyens d’action. Cela nécessite ensuite que la mission du CNOSF en matière
d’éthique soit réaffirmée, et rendue effective, tant dans la perspective d’appuyer les comités d’éthique
fédéraux et de diffuser les bonnes pratiques, que pour superviser l’action des comités d’éthique fédéraux
et agir en cas de carence d’une fédération en matière d’éthique, dans une logique de subsidiarité.
page 27
Proposition n° 17 : Élargir l’obligation de se doter d’un comité d’éthique à l’ensemble des fédérations
agréées et prévoir au sein des dispositions statutaires obligatoires un chapitre consacré aux comités
d’éthique.
S’agissant de la composition des comités d’éthique, la situation actuelle montre que dans la quasi-
totalité des cas, les membres sont désignés par la gouvernance de la fédération, en principe en raison
de leurs compétences sportives, juridiques, en matière de déontologie et de prévention des conflits
d’intérêts. Il résulte de ce mode de désignation un double risque : que l’indépendance des membres
par rapport à la gouvernance ne soit pas (ou ne semble pas être) totale, et la privation pour les comités
d’éthique de membres compétents qui n’auraient pas été identifiés par les instances dirigeantes. À
cet égard, les présidents des fédérations auditionnés par le Comité ont souligné la difficulté qui était
la leur de trouver des personnes à la fois compétentes et volontaires pour intégrer ce type d’instance.
Si le Comité ne partage pas nécessairement ce constat, et souligne que des appels à candidatures
pourraient être faits, force est de constater qu’il n’est pas rare que siègent au sein des comités d’éthique
des personnes dont l’indépendance peut être sujette à caution, qu’il s’agisse d’anciens présidents de
la fédération ou de personnalités proches de la gouvernance fédérale.
Aussi, pour renforcer l’indépendance des comités d’éthique, des règles d’incompatibilité strictes
concernant les membres du comité d’éthique devraient être mises en place22. Le mode de désignation
des membres du comité devrait par ailleurs faire intervenir l’assemblée générale de la fédération, et
leur mandat être découplé de celui des organes dirigeants de la fédération.
Proposition n° 18 : Renforcer l’indépendance des comités d’éthique fédéraux : établir des règles
d’incompatibilité strictes concernant les membres, prévoir leur désignation par l’assemblée générale
de la fédération et découpler leur mandat de celui des organes dirigeants.
En ce qui concerne les prérogatives et les champs d’action des comités d’éthique, il existe des
différences notables selon les fédérations. Ainsi, tous les comités ne disposent pas de la capacité
de s’autosaisir, élément pourtant déterminant pour remplir leurs missions. La plupart du temps,
les comités ne disposent pas de pouvoirs contraignants en cas d’infraction aux règles éthiques. Le
Comité préconise ainsi que l’ensemble des comités d’éthique fédéraux soient dotés d’un pouvoir
d’autosaisine et que le caractère contraignant des mesures qu’ils sont susceptibles de prendre soit
renforcé. Dans certains domaines, les comités d’éthique fédéraux doivent être dotés d’un pouvoir de
décision contraignant en cas d’infraction aux règles éthiques qui vienne s’ajouter au pouvoir de saisine
des instances disciplinaires de la fédération.
Proposition n° 19 : Consolider les prérogatives des comités d’éthiques fédéraux : les doter d’un
pouvoir d’autosaisine et leur octroyer un pouvoir de décision contraignant.
22 Ces règles pourraient être par exemple : absence de responsabilité fédérale et de tout lien économique avec la fédération depuis
au moins cinq ans ; absence de lien personnel ou économique avec les dirigeants de la fédération, etc.
page 28
POUR UN SPORT PLUS DÉMOCRATIQUE, PLUS ÉTHIQUE ET PLUS PROTECTEUR
Cette proposition doit s’accompagner d’un renforcement du rôle préventif des comités d’éthique
(consultation préalable obligatoire par les instances fédérales avant la prise de décisions ayant une
dimension éthique ; consultation par toute personne s’interrogeant sur d’éventuels conflits d’intérêts,
etc., ce qui implique de les doter des ressources humaines et matérielles suffisantes pour remplir leurs
missions en toute indépendance (instruction des dossiers, rédaction des avis, recueil et analyse des
déclarations d’intérêts, etc.).
Enfin, en matière de transparence de leurs travaux, la publication des avis rendus et décisions
prononcées par les comités d’éthique n’est aujourd’hui pas obligatoire ni toujours réalisée. Les
auditions du Comité et ses déplacements sur le terrain ont aussi montré que les comités d’éthique
fédéraux ne sont pas toujours bien identifiés par les sportifs et sportives. Aussi, la publication des avis
rendus et décisions prononcées devrait être systématique, au besoin sous une forme anonymisée.
Pour améliorer la connaissance de leurs activités, chacun des comités d’éthique devrait également
être en mesure de présenter annuellement en assemblée générale un rapport sur son activité.
Pour favoriser la connaissance des comités d’éthique par les pratiquantes et pratiquants, ces
évolutions doivent aussi s’accompagner d’une communication plus active sur l’activité et les modalités
de saisine des comités, sur les sites internet des fédérations, auprès des clubs et des licenciés. Chaque
fédération devrait consacrer sur son site internet une page propre au comité d’éthique et lui laisser la
pleine maîtrise de son contenu.
page 29
Ce comité se verrait en outre confier des missions d’accompagnement des membres du CNOSF
(fédérations et groupements nationaux) en matière de formation des dirigeants notamment sur les
sujets de prévention et de traitement des conflits d’intérêts, de validation de l’indépendance des
candidats aux comités d’éthique fédéraux, de mutualisation des moyens, de conseil juridique et
technique, de mise en réseau des comités d’éthique fédéraux.
Ainsi envisagé, le renforcement des missions dévolues au CNOSF en matière d’éthique doit
lui permettre de jouer, outre son rôle classique de comité de déontologie du CNOSF, une mission
d’appui aux fédérations, notamment celles qui ont des moyens plus limités. En aucun cas, il ne s’agit
de déresponsabiliser les fédérations, dont les comités verront au contraire sans doute leur efficacité
renforcée par leur mise en réseau et à la mutualisation de certains de leurs moyens. Le comité d’éthique
supra fédéral aurait une capacité d’intervention, en cas de carence au sein d’une fédération, qui ne
serait par exemple pas parvenue à mettre en place un comité d’éthique ou dont le comité d’éthique
serait dysfonctionnel. Les décisions prises par les comités d’éthique fédéraux pourront être évoquées
devant le comité d’éthique du CNOSF à l’initiative de celui-ci.
Les membres de ce comité d’éthique supra fédéral devraient être choisis à parité au sein du
mouvement sportif et parmi des représentants qualifiés (Assemblée nationale, Sénat, Conseil
d’État, Cour des comptes, universitaires, etc.) afin de garantir son indépendance. La parité femmes-
hommes devrait également être assurée au sein de ce comité. Les modalités de fonctionnement et
le financement de ces missions de service public affirmées par la loi pourraient être intégrées dans la
convention passée entre l’État et le CNOSF (art. R. 141-4 du code du sport).
C. P
révoir une possibilité de suspension conservatoire en cas de condamnation
pénale incompatible avec l’exercice de fonctions d’administration d’une
fédération agréée
Si elles exercent par ailleurs leur activité en toute indépendance, selon la disposition de l’alinéa 2
de l’article L. 131-1 du code du sport, les fédérations qui sont agréées participent à l’exécution d’une
mission de service public23 et les fédérations délégataires quant à elles, sont directement chargées
de l’exécution de missions de service public et se voient dans ce cadre confier des prérogatives de
puissance publique de manière exclusive et monopolistique.
Dès lors, la nature des missions exercées implique nécessairement des obligations particulières
et renforcées en termes d’exemplarité des personnes chargées de l’administration de fédérations
reconnues par l’État, qui sont de ce fait ses opérateurs et à qui il apporte de surcroît des moyens
humains et financiers. Les règles d’incapacité et d’incompatibilité minimales sont prescrites par les
dispositions statutaires obligatoires applicables aux fédérations agréées et prévues par l’annexe I-5 de
la partie réglementaire du code du sport24 et 25.
page 30
POUR UN SPORT PLUS DÉMOCRATIQUE, PLUS ÉTHIQUE ET PLUS PROTECTEUR
Couplée aux larges possibilités de saisine qui seraient prévues pour le comité d’éthique du
CNOSF (cf. II. B), la mise en œuvre de cette proposition permettrait en particulier au ministre
chargé des sports de pouvoir saisir ce comité aux fins de suspension ou d’enclenchement d’une
procédure de révocation d’un dirigeant fédéral ou d’une dirigeante fédérale en cas de fait grave et
manifestement incompatible avec l’agrément et/ou la délégation accordée à la fédération au sein
de laquelle il exerce.
délégué, de directeur général, directeur général adjoint ou gérant exercées dans les sociétés, entreprises ou établissements, dont
l’activité consiste principalement dans l’exécution de travaux, la prestation de fournitures ou de services pour le compte ou sous le
contrôle de la fédération, de ses organes internes ou des associations qui lui sont affiliées.
Ils précisent que ces dispositions sont applicables à toute personne qui, directement ou par personne interposée, exerce en fait la
direction de l’un des établissements, sociétés ou entreprises ci-dessus mentionnés ».
26 Cf. section IIB sur la révision de l’architecture de prévention et de lutte contre les atteintes à l’éthique dans le sport.
27 Dans le prolongement du principe « pacta sunt servanda » (article 1103 du code civil), les statuts d’une association en général et
d’une fédération sportive en particulier, qui ont une nature contractuelle et privée, peuvent valablement comporter des règles
plus restrictives entre les parties auxquels adhèrent les membres de l’association concernée.
page 31
D. Renforcer le rôle de l’État et clarifier ses compétences
L’architecture visant à renforcer l’éthique dans le sport revue, le mouvement sportif serait ainsi
à même de mieux traiter des problématiques liées à l’éthique. En parallèle, pour assurer l’effectivité
des principes ainsi affirmés, le rôle du ministère chargé des Sports doit être renforcé. Les travaux
ont en effet mis en évidence que la direction des sports, davantage positionnée historiquement
et culturellement en accompagnement du mouvement sportif, jouait à l’inverse peu sa mission de
contrôle, qui est double puisqu’elle implique de contrôler à la fois le cadre prévu par la loi, et le propre
cadre dont les acteurs se dotent.
Ce contrôle est pourtant nécessaire, et devrait s’exercer de manière large, tant à l’égard des
fédérations délégataires, en raison de la délégation de service public qui leur est confiée, qu’à l’égard
des fédérations agréées, puisque l’agrément permet l’accès à certains avantages tels que la possibilité
de bénéficier de financements de l’État ou de l’Agence nationale du sport28, ou encore de conseillers
techniques sportifs rémunérés par l’État29. De plus, dès lors qu’elles ont obtenu l’agrément du ministre
chargé des Sports, les fédérations sportives sont ipso facto reconnues comme établissements d’utilité
publique et bénéficient des avantages associés à la reconnaissance d’utilité publique30. S’agissant des
fédérations délégataires, le Comité souligne la nécessité d’un suivi accru et qualitatif de l’effectivité
des contrats de délégation.
Les effectifs du ministère et des services déconcentrés ont néanmoins été impactés par la création
de l’Agence nationale du sport, dont les emplois provenaient essentiellement de l’administration
centrale et des services déconcentrés. Lors de plusieurs auditions, la création de l’Agence a en outre
donné lieu à des réactions assez critiques sur l’alourdissement du millefeuille administratif qu’elle
a généré et surtout sur l’accroissement des difficultés à identifier les responsabilités des différents
acteurs publics et privés, au niveau de l’instance nationale comme de ses déclinaisons territoriales. S’il
n’est évidemment ni opportun ni souhaitable de modifier cette organisation avant les Jeux olympiques
et paralympiques de Paris 2024, une clarification et, sans doute, une simplification devraient être
envisagées postérieurement. Par ailleurs, la disparition de directions départementales propres au
ministère chargé des Sports qui a eu ensuite lieu a également pu contribuer à fragiliser son autorité et
son efficacité.
Pour qu’ils soient pleinement à même d’exercer leurs missions régaliennes de contrôle, le Comité
souligne donc la nécessité de renforcer les moyens humains de la direction des sports et des services
déconcentrés.
Outre l’enjeu des moyens humains, le Comité relève qu’en cas de carence d’une fédération qui
serait observée, il n’existe pas d’intermédiaire aujourd’hui pour le ministère entre l’inaction d’une
part, ou le retrait de l’agrément ou de la délégation d’autre part. Ce manque de marge de manœuvre
peut conduire à limiter l’application des principes éthiques au sein des fédérations. Ainsi, pour les
fédérations délégataires évoquées précédemment faisant partie des 16 % n’ayant pas mis de comité
d’éthique en place en 2022, aucune sanction n’a été prise. Il importe donc de permettre à la direction
des sports de disposer des modalités d’actions en cas de non-respect des engagements des fédérations
ou de la réglementation, autres que le retrait de l’agrément, à l’image de la mise en demeure ou de
mécanismes de sanction graduées.
Proposition n° 24 : Renforcer les moyens humains du ministère chargé des Sports et des services
déconcentrés, et donner plus de leviers d’action à la direction des sports en cas de non-respect de
leurs obligations par des fédérations agréées et délégataires (sanctions graduées, mise en demeure,
sanctions financières portant sur les conventions et contrats de financement public, etc.).
page 32
POUR UN SPORT PLUS DÉMOCRATIQUE, PLUS ÉTHIQUE ET PLUS PROTECTEUR
Par ailleurs, pour être en capacité de piloter la politique publique du sport, il importe que les
pouvoirs publics et notamment l’État puissent disposer de données précises et robustes. Or, à de
rares exceptions près (et notamment les études proposées par l’INJEP), le Comité a constaté l’absence
de données académiques, statistiques ou expertes concernant la place du sport dans la société,
les responsabilités exercées par les différents acteurs et actrices sportifs, leur organisation et, plus
généralement, l’application et l’impact des dispositions législatives et règlementaires actuelles. Cette
situation devrait être corrigée car il parait difficile de concevoir, d’appliquer et de contrôler des
politiques publiques sans disposer des ressources documentaires en ces matières.
Dans cette perspective, pourraient être envisagés :
– D
e confier une mission à un établissement public (qui pourrait être l’INJEP, dans le cadre de
son observatoire existant) visant à collationner voire à synthétiser les données existantes et à
identifier les zones d’ombre en la matière ;
– D
e créer un dispositif de financement d’études académiques (ou issues d’autres sources)
permettant de lancer des appels d’offre dans une perspective d’aide à la décision.
Proposition n° 26 : Redéfinir les missions des cadres techniques sportifs et prévoir l’interdiction
absolue (et contrôlée) à tous les personnels de l’État « placés auprès des fédérations agréées »
pour exercer « des missions de conseillers techniques sportifs » (art. L. 131-12 du code du sport)
d’assumer explicitement ou implicitement des fonctions (donnant lieu ou pas à des compléments de
rémunération) de direction générale des organismes nationaux ou déconcentrés de leur fédération
d’affectation.
page 33
III. LA PROTECTION DES PRATIQUANTES ET DES PRATIQUANTS
Si la vie des clubs et des fédérations sportives doit avant tout être synonyme d’épanouissement, ils
peuvent aussi constituer des environnements hostiles où la sécurité et la protection des pratiquantes
et des pratiquants n’est pas pleinement assurée : bizutage, harcèlement, violences sexuelles,
maltraitances physique ou psychologique etc. Les cas de dérives signalés se sont multipliés, et laissent
souvent démunies les victimes. Des réponses et des évolutions fortes sont largement attendues en
premier lieu par les pratiquantes et les pratiquants et par leurs parents pour les plus jeunes d’entre
eux, qui cherchent dans le sport un espace d’épanouissement et d’éducation.
A. R
enforcer le rôle et les missions des fédérations dans le domaine de la protection
de la santé des sportifs en affirmant un principe de précaution
La prise en compte des problématiques de violence ou de dérives dans le sport s’est renforcée
ces dernières années. La parole se libère peu à peu, des décisions sont parfois prises et des actions
sont mises en œuvre, par le Gouvernement notamment ou certaines fédérations actives sur le sujet.
Cependant, les auditions ont confirmé que les réponses actuellement déployées ne suffisent pas
à apporter tous les outils concrets, réclamés par les instances ou les pratiquantes et les pratiquants
eux-mêmes, ni à impulser un changement de culture nécessaire.
Sur ce point, en matière de protection des pratiquantes et des pratiquants, les fédérations ont
un rôle prévu par le code du sport, qui concerne la santé de leurs licenciés. L’article L. 231-5 du code
du sport prévoit ainsi que : « Les fédérations sportives veillent à la santé de leurs licenciés et prennent
à cet effet les dispositions nécessaires, notamment en ce qui concerne les programmes d’entraînement
et le calendrier des compétitions et manifestations sportives qu’elles organisent où qu’elles autorisent ».
Afin d’élargir et de faciliter la prise en compte des difficultés rencontrées par les pratiquantes et
pratiquants, de manière simple, le Comité préconise que la mission de prévention et de précaution
qui incombe aux fédérations en la matière soit affirmée de manière plus forte, et qu’il soit énoncé
clairement que la santé des sportifs et des sportives s’entend aussi bien dans ses aspects physiques
que psychologiques31.
En effet, au-delà des seuls aspects de santé physique propres à l’entraînement ou la compétition
(commotions, blessures, opérations, etc.), les enjeux de santé mentale et de bien-être des athlètes
doivent être garantis. La seule logique d’acceptation des risques, principe fondateur de la responsabilité
civile en matière sportive, doit être impérativement complétée d’une logique de précaution, déployée
de façon concrète au sein des clubs et des pratiques d’entraînement.
Proposition n° 27 : Renforcer le rôle et les missions des fédérations dans le domaine de la protection
des sportives et des sportifs (aspects physiques, psychologiques de la santé) et modifier l’article
L. 231-5 du code du sport en précisant que : « Les fédérations sportives veillent à la santé physique et
psychologique de leurs licenciés et prennent à cet effet les dispositions nécessaires, notamment en
ce qui concerne les programmes d’entraînement et le calendrier des compétitions et manifestations
sportives qu’elles organisent ou qu’elles autorisent ».
31 Conformément à la définition de la santé qui figure au sein de la Constitution de l’Organisation mondiale de la santé : « La santé
est un état de complet bien-être physique, mental et social et ne consiste pas seulement en une absence de maladie ou d’infirmité. »
page 34
POUR UN SPORT PLUS DÉMOCRATIQUE, PLUS ÉTHIQUE ET PLUS PROTECTEUR
B. M
ettre en place un réseau territorial d’accompagnement et de soutien physique
et psychologique en faveur des sportives et sportifs
La loi du 23 mars 1999 a mis en place, au niveau régional, un dispositif d’antennes médicales de
lutte contre dopage dont l’action a été recentrée sur la prévention par la loi du 5 avril 2006. Faute
de moyens et de pilotage, le réseau des Agences médicales de prévention du dopage (AMPD) est
aujourd’hui épars et hétérogène. Dans l’objectif de pouvoir mieux accompagner au niveau physique
et psychologique les victimes de violences sexistes et sexuelles et de toute forme de maltraitance, il
apparaîtrait pertinent de pouvoir réactiver ce réseau en élargissant ses compétences à la protection
de la santé physique et psychologique des sportifs et des sportives. Cela supposerait cependant de
pouvoir assurer la présence effective de ces antennes dans chaque région en les dotant de moyens
humains et financiers adaptés et d’assurer le pilotage de ce réseau.
1. ettre en place une agence spécialisée dans la prévention et le traitement des violences
M
sexistes et sexuelles
Le sujet des violences sexistes et sexuelles n’est pas un sujet nouveau et concerne l’ensemble la
société. Il revêt néanmoins une importance particulière et un aspect singulier dans le sport à plusieurs
titres. Les relations entre les entraîneurs, les enseignants, les éducateurs, les dirigeants, les arbitres
et les sportifs peuvent être complexes, avec des situations de dépendance ou, parfois, d’emprise
psychologique. L’importance de l’engagement corporel pour la pratique sportive peut également
contribuer à brouiller les limites dans le rapport au corps et à l’intime. Surtout, au nom de la performance
sportive et du dépassement de soi, il est demandé aux pratiquants et aux pratiquantes, perçus comme
sportifs, sportives ou athlètes avant d’être des individus, de faire preuve d’une abnégation plus forte
qui peut conduire à des violences psychologiques, physiques ou sexuelles.
Pour faciliter la sensibilisation et le traitement des violences sexistes et sexuelles dans le sport,
l’État a lui aussi développé des outils. Des communications axées sur la prévention, le traitement et
la sensibilisation, sont mises en ligne sur le site du MSJOP et à la disposition des différents acteurs,
à l’instar d’un vade-mecum pour mieux repérer et réagir face aux violences à caractère sexuel dans
le champ du sport. En 2020, la désignation au sein du ministère chargé des sports d’une déléguée
ministérielle à la lutte contre les violences dans le sport et la création d’une cellule nationale de
traitement des signalements de violences à caractère sexiste et sexuel dans le sport, « Signal-Sports »,
ont constitué des avancées marquantes qui ont permis d’enclencher, d’accompagner et de recueillir
un large mouvement de libération de la parole. Les violences dans le sport y sont dénoncées à 52 % par
les victimes ou leurs proches, à 31 % par le mouvement sportif (fédérations, ligues, comités, jusqu’au
licencié), et à 5 % par les services déconcentrés (SDJES)32.
32 Le reste des signalements provient de voies diverses : anonyme, cabinet ministre, associations d’aide aux victimes, collectivité,
corps médical, Défenseur des droits, établissement scolaire, justice, presse, etc. (chiffres issus du dossier de presse de la
4ème Convention nationale de prévention des violences dans le sport).
page 35
Pour autant, les auditions menées par le Comité ont mis en évidence que les fédérations et le
mouvement sportif plus largement se sentaient encore le plus souvent désemparés dans le traitement
de ce type violences très spécifiques, dont la prévention, voire l’accompagnement, est déléguée en
partie au secteur associatif via des conventionnements. Malgré cet outillage et l’appui des associations33,
ni les fédérations, ni le CNOSF, ne disposent des compétences et des moyens pour gérer seuls la
complexité de ces sujets. Les traiter efficacement nécessite en effet de prendre en compte d’autres
domaines que le sport tels que la protection de l’enfance, la santé, ou encore la sécurité. De surcroît, les
problématiques concernées impliquent en réalité le plus souvent l’intervention croisée des pouvoirs
publics (garant de l’ordre public) et du mouvement sportif (dans le cadre de ses responsabilités à
l’égard de ses adhérents), avec la coexistence de procédures judiciaires, administratives et fédérales,
difficilement compréhensible pour les victimes appelées à multiplier les témoignages douloureux,
et dont les conclusions peuvent même diverger. La mise en place de la cellule Signal-Sports apparaît
comme une action majeure et essentielle dans l’engagement de tous les acteurs du sport dans une lutte
résolue contre les violences sexuelles et sexistes dans le sport. Malheureusement, cette organisation
interne au ministère chargé des sports, ne peut agir juridiquement au-delà du recueil des signalements,
en particulier dans le domaine répressif. Or, c’est une nécessité impérieuse que de pouvoir aller au-
delà et de confier à la structure publique mise en place pour lutter contre les violences sexuelles et
sexistes des prérogatives exorbitantes de puissance publique permettant de prononcer des sanctions
disciplinaires et administratives.
Une brève comparaison internationale montre que certains pays, face à ces mêmes difficultés, ont
fait le choix de mettre en place une structure spécifique pour traiter les violences sexistes et sexuelles
dans le sport, à l’instar des États-Unis avec la mise en place de l’US Center for Safe Sport à la suite de
plusieurs scandales dont l’affaire Larry Nassar. Le centre dispose d’un réel pouvoir de sanction et peut
suspendre ou déclarer inéligible, temporairement ou définitivement, un ou une athlète, un entraîneur
ou une entraîneuse, un dirigeant ou une dirigeante, ses décisions disciplinaires étant recensées au
sein d’une base de données publique. Tout en faisant le choix de placer le traitement des violences
sexistes et sexuelles en dehors du mouvement sportif, d’autres pays ont privilégié la mise en place
d’une structure ad hoc au champ d’action plus large, sous la forme d’une agence unique de l’intégrité
(l’intégrité comprenant alors l’antidopage, la protection des pratiquantes et pratiquants, la lutte
contre la manipulation des compétitions...). Cette approche est conforme à la définition que retient
l’Unesco de l’intégrité du sport qui comprend : « l’intégrité des personnes, y compris les garanties contre
la violence et les abus, et la sécurité et la sûreté des personnes ; l’intégrité des compétitions, qui renvoie à
la manipulation des compétitions et à la lutte contre le dopage ; l’intégrité des organisations qui englobe
la bonne gouvernance »34. Sans qu’il s’agisse d’une liste exhaustive, peuvent être ainsi cités : l’Australie
(Sport integrity Australia), la Suisse (Swiss Sport integrity), la Finlande (Centre finlandais pour l’intégrité
dans le sport), le Canada (Centre canadien pour l’éthique dans le sport) et l’Estonie (Estonian Center
for Integrity in Sports).
Aussi, à l’issue de ses travaux, et après des échanges nourris, les membres du Comité constatent
que la création d’une instance externe, pour poursuivre et prolonger l’action de Signal-Sports dans le
recueil des signalements et le pilotage de la prévention, mais aussi pour assurer le traitement centralisé
et unifié aux niveaux administratif et disciplinaire des violences à caractère sexiste et sexuel, fait l’objet
d’un large consensus au sein du mouvement sportif et de fortes attentes de la part de nombreux
acteurs, actrices, et usagers.
Pour le Comité, il ne s’agit en aucun cas de remettre en cause les bénéfices apportés par l’action de
Signal-Sports et du MSJOP dans ce domaine, mais de lui conférer de nouveaux moyens pour prolonger
et permettre d’amplifier encore son action. L’enjeu ne réside pas tant dans la création d’une personne
morale nouvelle et indépendante que dans l’octroi de prérogatives de puissance publique nouvelles
sur les plans disciplinaire et administratif notamment. C’est pourquoi, d’un point de vue technique,
33 À ce titre, le travail et les actions d’associations comme Colosse aux pieds d’argile est aujourd’hui très largement reconnu et salué
par le mouvement sportif.
34 Lignes directrices sur l’intégrité du sport d’avril 2023, établies par l’UNESCO dans le cadre du Plan d’action de Kazan.
page 36
POUR UN SPORT PLUS DÉMOCRATIQUE, PLUS ÉTHIQUE ET PLUS PROTECTEUR
le Comité ne préconise pas la création d’une autorité publique indépendante dotée d’une personnalité
morale distincte de celle de l’État dont l’action paraît essentielle et centrale dans ce domaine. Sur le
modèle du Conseil de prévention et de lutte contre le dopage (CPLD) créé par la loi en 1999 pour
renforcer la lutte contre le dopage, le Comité préconise la création d’une autorité administrative
indépendante dédiée à la prévention et la lutte contre les violences sexistes et sexuelles.
À cet égard, si la création d’une structure externe et spécialisée suppose, bien sûr, une impulsion
initiale ambitieuse et l’attribution de moyens, elle reste la seule option crédible et d’ampleur qui
permettra d’apporter des réponses suivies, expertes, indépendantes et efficaces à l’ensemble des
pratiquantes et des pratiquants sur le sujet des violences sexistes et sexuelles, dont les conséquences
pour les victimes sont nombreuses. Cette courroie indispensable au-delà du signalement, dans le
traitement, le suivi et l’accompagnement des sportives et sportifs fait aujourd’hui défaut alors même
que des missions claires et nouvelles pourraient être attribuées à cette nouvelle entité : croisement
des fichiers, agrément de certains intervenants (recueil de la parole des victimes), formation à la prise
en charge de ces problématiques, traitement disciplinaire et administratif, incluant le prononcé de
suspensions à titre conservatoire, amélioration des dispositifs d’alerte au sein des fédérations, etc.
L’État pourrait accompagner cette intervention par des dispositions obligatoires relatives à
l’implication des fédérations en matière de prévention et d’appui aux investigations. Sur le modèle
de ce qui est actuellement fait en matière de lutte contre le dopage, il pourrait également mettre
à disposition de l’autorité administrative indépendante le temps de travail actuellement consacré
à cette mission par les personnels de ses services déconcentrés. Le déploiement des autres leviers
d’action existants est en parallèle à poursuivre : formations, campagne d’information, articulation et
relais des procédures, nouvelles sanctions.
Proposition n° 30 : Mettre en place une commission d’établissement des faits de violences sexuelles
dans le sport dans la perspective d’une démarche de reconnaissance vis-à-vis des victimes.
page 37
3. Renforcement de la lutte contre toutes les formes de discrimination
L’article premier du code du sport fonde le principe même d’un sport inclusif et non discriminant
dans sa pratique : « La loi favorise un égal accès aux activités physiques et sportives, sans discrimination
fondée sur le sexe, l’identité de genre, l’orientation sexuelle, l’âge, le handicap, l’appartenance, vraie ou
supposée, à une nation ou à une ethnie, la religion, la langue, la condition sociale, les opinions politiques
ou philosophiques ou tout autre statut ».
Cet article est notamment complété par les dispositions de la loi du 24 août 2021 instaurant le
contrat d’engagement républicain, les règlements de l’Agence nationale du sport ou encore la Charte
d’éthique et de déontologie du CNOSF. Ces dernières années, de nombreux progrès ont été accomplis
en France en raison d’un engagement collectif partagé en faveur d’un sport plus inclusif. Le ministère
chargé des Sports a par ailleurs lancé en 2022 une campagne « Tous concernés » visant à mieux faire
connaître les dispositifs nationaux à destination des victimes de comportements à caractère raciste,
sexiste, manifestant une haine LGBT+ ou de discriminations.
Cependant les inégalités d’accès et les situations de discrimination restent trop nombreuses, en
matière de handicap tout particulièrement, où elles prennent la plupart du temps la forme d’un refus
ou d’une restriction d’accès à une pratique sportive. Les réclamations relatives aux discriminations en
matière de handicap représentent le premier motif de saisine du Défenseur des droits, représentant
plus de 20 % des saisines35. Dans le domaine du sport, ces discriminations s’exercent à l’égard de tous
types de handicap et concernent une grande variété d’activités36. La méconnaissance du principe de
non-discrimination par certaines structures se manifeste notamment par l’invocation d’arguments
relatifs à la sécurité de la personne ou d’un groupe pour justifier le refus d’accueillir la personne en
situation de handicap, sans réellement apprécier les capacités à exercer une activité sportive et
les aménagements pouvant être mis en place. Dans ces cas, les structures sportives n’agissent pas
forcément dans l’intention de discriminer, mais en raison d’une méconnaissance de leurs obligations
et par manque de repères et de modes opératoires37, et favorisent ainsi de facto l’exclusion de certains
pratiquants et pratiquantes.
L’année 2023 fut aussi marquée par de multiples actes à caractère homophobe, y compris des
actes de violence dans les stades, aux abords des terrains, dans les vestiaires, avec des chants relayés
sur les réseaux sociaux. À ce sujet, les chiffres du MSJOP sont sans appel : 77 % des Français perçoivent
le milieu sportif professionnel comme homophobe (75 % pour le milieu amateur) ; 46 % des Français,
au global, ont déjà été témoins d’un comportement homophobe ou transphobe dans le milieu sportif,
tandis que 73 % des personnes se définissant comme LGBT+ en ont déjà été témoins dans ce cadre38.
S’il est difficile, par ailleurs, de quantifier l’évolution des faits et agressions racistes, des actes
violents sont encore, trop souvent, recensés. Tant du côté du sport professionnel qu’amateur, les
formes d’agression évoluent et se concentrent tant dans les vestiaires que sur le terrain mais aussi
désormais sur les réseaux sociaux où la haine en ligne se diffuse de façon directe, violente et anonyme.
L’État est mobilisé sur ces sujets, pour accompagner tous les acteurs du mouvement sportif à
mieux les traiter. Depuis 2004, le ministère élabore un guide juridique sur la prévention et la lutte
contre les incivilités, les violences et les discriminations dans le sport. La 5ème édition de ce guide
a paru en mars 202339. Son objectif est de sensibiliser et d’outiller les intervenants du champ du
sport (de l’État, des collectivités territoriales, des structures sportives et associatives) pour trouver
les réponses appropriées aux nombreuses questions soulevées par les violences et les discriminations
dans le champ du sport. D’autres initiatives ont par ailleurs été engagées avec la création, dans la loi
du 2 mars 2022, d’un délit spécifique pour les symboles ou signes discriminatoires liés à l’orientation
sexuelle ou à l’identité de genre lors de manifestations sportives, ou encore la publication d’un plan
page 38
POUR UN SPORT PLUS DÉMOCRATIQUE, PLUS ÉTHIQUE ET PLUS PROTECTEUR
d’action pour mieux lutter contre la haine et favoriser l’inclusion des personnes LGBT+ dans le sport,
en mai 2023.
Pour autant, bien que certaines fédérations entreprennent des plans d’action sur ce sujet de la
lutte contre les discriminations, les auditions du Comité ont démontré un décalage croissant entre les
actions annoncées au niveau national et les réalités bien plus violentes qui sont toujours constatées
dans les clubs, sur et autour des terrains en particulier au niveau amateur et localement.
Ce combat doit ainsi faire l’objet d’une attention renforcée de la part de l’ensemble des fédérations
avec le déploiement sans ambigüité d’actions au plus près des terrains, des stades et des centres
de formation. Le Comité souligne l’importance que les clubs, professionnels et amateurs, soient
moteurs pour engager ce travail de fond. Il préconise que des actions renforcées de sensibilisation
et d’éducation soient mises en œuvre dans le cadre de plans nationaux qui seraient obligatoirement
signés et déployés dans chacune des fédérations agréées, en contrepartie des aides et subventions
accordées par l’ANS dans le cadre des projets sportifs fédéraux (PSF).
Proposition n° 31 : Prescrire que chaque fédération établisse un plan national d’éducation et de lutte
contre les discriminations liées à l’homophobie, au genre, au racisme et à l’antisémitisme et toutes
celles relatives aux situations de handicap, et dresse un bilan annuel des discriminations constatées
et des actions mises en œuvre. Prévoir que cette obligation constitue un des axes obligatoires dans
les subventions accordées par l’ANS dans le cadre des projets sportifs fédéraux (PSF).
Dans la perspective d’un déploiement efficace de ces plans au niveau fédéral et territorial, la
mise en place de référents anti-discrimination ou des « Commissions anti-discrimination et égalité
de traitement » devrait être encouragée, pour promouvoir des ateliers et plans de sensibilisation,
fluidifier les réponses aux atteintes apportées, faciliter la saisine des instances compétentes, etc.
Enfin, de nombreuses manifestations sont organisées chaque année, au sein des fédérations et
des ligues, le plus souvent relayées au niveau national, visant à mettre la lumière sur la lutte contre un
combat spécifique ou sur une cause particulière. Sans remettre en cause l’intérêt ou l’impact de ces
initiatives, il serait également pertinent d’initier une journée nationale de lutte contre toute les formes
de discrimination et pour l’inclusion dans le sport, sur le modèle de la journée nationale de lutte
contre le harcèlement, de façon à fédérer, chaque année, l’ensemble des acteurs et des institutions
engagées sur ces sujets, derrière une barrière commune et largement partagée. L’année 2024 peut être
l’occasion d’initier cette initiative pour le MSJOP, dans le cadre de la Grande cause nationale.
Les discriminations sous toutes leurs formes, lorsqu’elles sont constatées, doivent être combattues
de manière volontariste à tous les niveaux, de l’échelon local au secteur professionnel. Pour ce faire, les
instances sportives disposent d’un pouvoir disciplinaire et de la capacité le cas échéant d’enclencher
des procédures disciplinaires ou de s’associer à des procédures judiciaires lorsque les faits constatés
sont susceptibles de constituer une infraction pénale. Ces leviers doivent être systématiquement
utilisés et pouvoir donner lieu à un bilan annuel dressé au niveau de chaque sport. Par ailleurs, les
fédérations disposent également de la possibilité de prononcer à titre complémentaire, des sanctions
consistant en des actions ou missions d’intérêt général dont la vertu éducative apparaît tout à fait
pertinente et auxquelles il peut être judicieux de recourir de manière plus systématique.
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D. Intégrer davantage les enjeux éthiques, d’intégrité et de lutte contre les
violences et les discriminations dans l’ensemble des formations
Les auditions menées par le Comité ont montré, de façon récurrente, un besoin très fort en
formation aux enjeux d’éthique, d’intégrité, de sensibilisation aux violences, et de lutte active contre les
discriminations. La première partie du rapport contient à cet égard une proposition forte en la matière,
en proposant que l’octroi de moyens publics soit conditionné au suivi périodique d’une formation aux
enjeux de politique publique (qui concernent notamment la protection de la santé physique et morale
des pratiquants et pratiquantes, les enjeux d’accessibilité, la lutte contre l’homophobie, le racisme
et toutes les formes de discriminations, la probité) par les présidents et présidentes de fédérations
sportives agréées, d’organes déconcentrés et de ligues professionnelles, en tant que représentants
légaux des structures.
Le besoin de formation sur ces sujets se ressent néanmoins à tous les étages : exécutif fédéral,
entraîneurs, encadrants, bénévoles, sportifs, etc. Aussi, à l’issue de ses travaux, le Comité considère
que l’existence d’un outil dédié aux enjeux de formation des acteurs du sport, porté au niveau des
représentants du mouvement sportif, est une nécessité afin de proposer des actions de formation
transversales et d’intérêt général. À cet égard, en 2006, le CNOSF avait pris l’initiative de créer un
institut de formation du mouvement sportif (IFOMOS) dissout en décembre 2016 après 10 ans d’activité.
Aujourd’hui, la constitution d’un nouvel institut de formation continue, porté par le mouvement
sportif, en lien avec le monde universitaire notamment, est fondamental pour assumer cette mission
de façon cohérente et ambitieuse.
La mise en place d’un tel institut pourrait notamment permettre de constituer un catalogue
de formations adaptées, et de diffuser gratuitement ces formations en ligne, auprès de l’ensemble
des acteurs fédéraux et régionaux. Ces formations pourraient être assorties d’un label attestant leur
suivi qui pourrait ensuite être valorisé. Les contenus déployés par le Comité d’organisation des Jeux
Olympiques et Paralympiques (COJO) au sein de leur plateforme de formation, L’Académie, pourraient,
à cet égard, utilement être réutilisés et alimenter une base permanente de ressources d’intérêt général.
Cet institut pourrait également être l’occasion de proposer plus particulièrement à toutes les
dirigeantes et dirigeants sportifs un plan de formation transversal pour les préparer à leur prise
de responsabilité (plan qui de manière non exhaustive pourrait couvrir les questions d’éthique, de
sensibilisation aux conflits d’intérêts, de gouvernance, de règles de gestion, etc.).
En parallèle, les enjeux relatifs à la santé physique et morale des sportifs doivent être aussi
davantage intégrés dans la formation initiale des animateurs, éducateurs, et entraîneurs sportifs, en
raison de la proximité particulière qu’ils ont avec les pratiquants et les pratiquantes.
page 40
POUR UN SPORT PLUS DÉMOCRATIQUE, PLUS ÉTHIQUE ET PLUS PROTECTEUR
Le MSJOP a d’ores et déjà engagé la révision des dispositions générales et communes au certificat
professionnel, au brevet, au diplôme d’État et au diplôme d’État supérieur de la jeunesse, de l’éducation
populaire et du sport (CPJEPS, BPJEPS, DEJEPS, DESJEPS), et à leurs certificats complémentaires. En
l’état actuel, plusieurs de ces qualifications privilégient excessivement les approches techniques et
pédagogiques des disciplines concernées. Il apparaît donc indispensable de renforcer (voire, en certain
cas d’introduire) dans ces formations des modules significatifs traitant du respect et de la promotion
de la personne humaine et des objectifs de bien être individuel et de bien vivre collectif attachés à la
pratique physique et sportive, à tous les niveaux.
Aussi, le Comité préconise de revoir de manière générale la formation initiale et continue des
entraîneurs, entraîneuses, animateurs, animatrices, éducatrices et éducateurs sportifs, en établissant
la liste des modules obligatoires concernant le respect de la personne humaine et la promotion de
son bien-être, qui doivent y être systématiquement intégrés, de renforcer les moyens de contrôle sur
ces objectifs dans le haut niveau, notamment les centres de performance fédéraux, et de sanctionner
les manquements constatés.
E. A
méliorer la connaissance et la sécurisation des parcours professionnels des
sportifs et sportives professionnels et de haut niveau
Enfin, dans le cas spécifique des sportives et sportifs professionnels et de haut niveau, la protection
renforcée des pratiquantes et des pratiquants comprend nécessairement également la sécurisation
de leurs parcours professionnels et de leur statut juridique.
La France a été un pays précurseur sur le sujet : le suivi socioprofessionnel des sportives et sportifs
de haut niveau (SHN) est apparu dès les années 1960. Le double projet, initié par les pouvoirs publics à
la fin des années 1980 et visant à assurer un juste équilibre entre la préparation à la haute performance
et la formation en vue de l’insertion sociale et professionnelle des jeunes, à l’issue de leur carrière
sportive (quelquefois plus rapide que prévue et souhaitée), est ensuite devenu une orientation
structurante de la politique du sport de haut niveau.
La volonté d’accompagner et de soutenir le sportif ou la sportive pendant sa carrière sportive
et de le préparer à réussir son intégration dans la vie professionnelle s’est concrétisée par la mise en
œuvre de nombreuses mesures, parmi lesquelles la création des premières sections « sport et étude »
en 1974, la création du statut de sportif de haut niveau et de l’Institut national des sports et de
l’éducation physique (INSEP) en 1975, la mise en place de conventions d’insertion professionnelle
(CIP) dans les entreprises privées ou de conventions d’aménagement d’emploi (CAE) dans le secteur
public en 1984, et, en 2012, la mise en place d’un dispositif financé par l’État de validation de droits à
la retraite pour les sportifs de haut niveau.
Plus récemment, la loi n° 2015-1541 du 27 novembre 201540 « visant à protéger les sportifs de haut
niveau et à sécuriser leur situation juridique et sociale » a constitué une nouvelle avancée dans la
protection sociale de la sportive et du sportif de haut niveau, en instaurant notamment une couverture
contre les accidents du travail et les maladies professionnelles, financée par l’État.
page 41
Pour s’adapter à l’évolution de la réglementation européenne et de la jurisprudence, le texte a
aussi prévu la création pour les sportives, sportifs, entraîneuses et entraîneurs professionnels salariés
d’un contrat de travail à durée déterminée spécifique. Cette disposition figure à l’article L. 222-2-3
du code du sport, et l’article L. 222-2-4 prévoit que la durée de ce contrat de travail ne peut être
inférieure à la durée d’une saison sportive, soit douze mois. Pour autant, la portée de cette disposition
est limitée par les possibilités d’y déroger. En effet, l’article L. 222-2-4 précise également que sous
certaines conditions, « un contrat conclu en cours de saison sportive peut avoir une durée inférieure à
douze mois, dans les conditions définies par une convention ou un accord collectif national ou, à défaut,
par le règlement de la fédération sportive ou, le cas échéant, de la ligue professionnelle ». Les fédérations
sportives et les ligues professionnelles conservent ainsi de larges marges de manœuvre.
Enfin, en 2023, la loi n° 2023-270 de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023 a
prévu l’augmentation du nombre maximal de trimestres non cotisés et compensés par le MSJOP et a
également ouvert le droit au rachat de trimestres non cotisés pour les sportives et les sportifs de haut
niveau dans la limite de 12.
En dépit des limites qui subsistent, l’ensemble de ces dispositions a permis de réelles avancées
en matière de protection des SHN et de soutien au double projet et à la reconversion. Elles sont
complétées par une structuration de l’écosystème du suivi socioprofessionnel de la sportive et du
sportif de haut niveau. L’Agence nationale du sport a en effet pour mission l’accompagnement
opérationnel des SHN dans le cadre de la déclinaison de différents dispositifs (comme les contrats
d’insertion professionnelle, les contrats d’aménagement à l’emploi, les emplois SHN, etc.) et s’appuie
pour cela notamment sur l’INSEP et les maisons régionales de la performance positionnées au sein des
centres régionaux de l’expertise et de la performance (CREPS).
Les fédérations délégataires ont également une mission spécifique en la matière, mais qui se
limite à une activité de suivi. L’article L. 221-14 du code du sport prévoit en effet qu’elles assurent,
en lien avec l’État, les entreprises et les collectivités territoriales, « le suivi socioprofessionnel de leurs
licenciés inscrits sur la liste des sportifs de haut niveau » et désignent à cet effet à un référent chargé
de ce suivi. En outre, le suivi post carrière reste à court terme, alors que l’accès à la liste reconversion
peut se faire plusieurs années après l’arrêt de la carrière. Dès lors, il pourrait être envisagé d’élargir le
rôle des fédérations délégataires, mais aussi des fédérations agréées et des clubs professionnels, dans
l’accompagnement des sportives et des sportifs de haut niveau et professionnels, et d’allonger le suivi.
Par ailleurs, si les parcours de performance fédéraux (PPF) abordent bien, aujourd’hui, la question
du suivi socio-professionnel, ils sont souvent structurés sur le plan géographique sans logique
partenariale affichée et établie, avec les principaux acteurs territoriaux de la formation académique
et professionnelle (non sportive), ce qui empêche sans doute de combiner en un même lieu les
ressources techniques sportives, et les ressources de formation extra-sportives aménagées. Ceci
rend complexe voire impossible dans bien des cas la conduite d’un double-projet, tout comme le
manque de visibilité, la faiblesse et les limites de l’offre de formation extra-sportive aménagée. Les
technologies du numérique offrent certes des solutions d’enseignement à distance performantes,
mais il demeure essentiel d’encourager le mouvement sportif dans son ensemble et les fédérations
agréées et délégataires qui le structurent, à formaliser des liens contractuels plus étroits avec les
universités et les écoles.
L’ensemble des dispositifs actuels de soutien au double-projet relevant de l’obligations de moyens,
une prise en compte et une valorisation de cette performance dans l’évaluation des fédérations
sportives au côté de la performance sportive et de la performance en matière de développement du
nombre de licenciés paraissent nécessaires.
page 42
POUR UN SPORT PLUS DÉMOCRATIQUE, PLUS ÉTHIQUE ET PLUS PROTECTEUR
Le Comité préconise ainsi que les fédérations sportives puissent être évaluées aussi sous l’angle
de la performance sociale, entendue comme leur capacité à favoriser l’insertion professionnelle et
sociale des sportifs et des sportives, que le ministère se dote d’indicateurs pertinents en la matière et
de dispositions d’incitations financières, afin qu’à côté des résultats sportifs et du nombre de licenciés,
des indicateurs relatifs à l’insertion professionnelle et à la reconversion soient pris en compte.
Proposition n° 37 : Prendre en compte des critères de performance sociale du sport de haut niveau
et professionnel dans le dialogue stratégique de gestion avec les fédérations, ainsi que dans le
cahier des charges relatif à l’agrément des clubs professionnels, à travers la création d’outils de
mesure et de pilotage pertinents de l’efficacité des politiques fédérales en matière de facilitation
du double-projet et de l’insertion professionnelle.
Enfin, sur ces sujets, une attention particulière doit sans doute être portée aux dysfonctionnements
constatés de certains centres de formation agréés (au titre de l’art. L. 211-4 du code du sport) des clubs
professionnels mais également au niveau des premiers contrats de sponsoring notamment liés à la
marchandisation de plus en plus en plus précoce de l’accès au professionnalisme, liée au développement
de la multipropriété des clubs et à l’intervention croissante des fonds d’investissement. Ces évolutions
conduisent en effet à une dégradation importante de la stratégie publique du double projet.
Une action conjointe et concertée des pouvoirs publics et du mouvement sportif s’impose, aux
niveaux national et international, pour limiter voire corriger ces dérives.
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RÉCAPITULATIF DES RECOMMANDATIONS
Proposition n° 1 : Élaborer d’ici l’automne 2024 un projet de loi-cadre relative au sport, à l’issue
d’une large consultation des acteurs et actrices du sport et des élus des collectivités territoriales, co-
organisée entre le MSJOP, le CNOSF et le CPSF.
Proposition n° 2 : Engager, à l’occasion de Paris 2024, une initiative multilatérale forte afin de mettre
en place les outils qui permettront de renforcer au niveau international, l’intégrité du sport, y compris
la protection des pratiquantes et pratiquants.
Proposition n° 3 : Prévoir que tous les clubs membres d’une fédération sportive participent aux
élections et à toutes les autres assemblées générales ; faciliter la mise en œuvre de cette proposition
par la création d’outils numériques mutualisés.
Proposition n° 5 : Confier au comité d’éthique au sein du CNOSF la mission de fixer les principes
généraux d’un code électoral.
Proposition n° 6 : Prévoir, pour l’élection des organes exécutifs, un mode de scrutin proportionnel
avec une prime à la majorité renforcée.
Proposition n° 7 : Renforcer les obligations de publication et de libre accès aux relevés de décisions et
comptes rendus des organes exécutifs et prévoir leur transmission systématique au comité d’éthique
fédéral.
Proposition n° 8 : Limiter les possibilités de cumul simultané entre les fonctions de membre d’un
organe exécutif fédéral et de président d’un organe déconcentré de la fédération.
Proposition n° 9 : Fixer dans la loi le principe de parité réelle dans tous les organes dirigeants du
mouvement sportif (CNOSF, CPSF, fédérations, ligues professionnelles, organes déconcentrés) ainsi
que dans leurs commissions régaliennes.
page 44
POUR UN SPORT PLUS DÉMOCRATIQUE, PLUS ÉTHIQUE ET PLUS PROTECTEUR
Proposition n° 13 : Lancer une évaluation sur l’attractivité du bénévolat sportif et des dispositifs visant
à l’encourager (congés d’engagement, dispositifs de décharge, etc.) et à permettre la validation de
trimestres de retraite.
Proposition n° 15 : Rendre obligatoire pour les fédérations agréées l’adoption d’un règlement financier,
rendu public, conforme à un règlement type fixé par voie réglementaire et comportant notamment
des dispositions relatives à l’obligation de publicité des comptes et aux procédures de passation des
contrats.
Proposition n° 17 : Élargir l’obligation de se doter d’un comité d’éthique à l’ensemble des fédérations
agréées et prévoir au sein des dispositions statutaires obligatoires un chapitre consacré aux comités
d’éthique.
Proposition n° 18 : Renforcer l’indépendance des comités d’éthique fédéraux : établir des règles
d’incompatibilité strictes concernant les membres, prévoir leur désignation par l’assemblée générale
de la fédération et découpler leur mandat de celui des organes dirigeants.
Proposition n° 19 : Consolider les prérogatives des comités d’éthiques fédéraux : les doter d’un pouvoir
d’autosaisine et leur octroyer un pouvoir de décision contraignant.
Proposition n° 21 : Rendre systématique la publication des avis rendus et décisions prononcées par les
comités d’éthique fédéraux. Prévoir qu’ils présentent annuellement un rapport d’activité à l’assemblée
générale de leur fédération.
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Proposition n° 24 : Renforcer les moyens humains du ministère chargé des Sports et des services
déconcentrés, et donner plus de leviers d’action à la direction des sports en cas de non-respect de
leurs obligations par des fédérations agréées et délégataires (sanctions graduées, mise en demeure,
sanctions financières portant sur les conventions et contrats de financement public, etc.).
Proposition n° 26 : Redéfinir les missions des cadres techniques sportifs et prévoir l’interdiction absolue
(et contrôlée) à tous les personnels de l’État « placés auprès des fédérations agréées » pour exercer « des
missions de conseillers techniques sportifs » (art. L. 131-12 du code du sport) d’assumer explicitement
ou implicitement des fonctions (donnant lieu ou pas à des compléments de rémunération) de direction
générale des organismes nationaux ou déconcentrés de leur fédération d’affectation.
Proposition n° 27 : Renforcer le rôle et les missions des fédérations dans le domaine de la protection des
sportifs et des sportives (aspects physiques, psychologiques de la santé) et modifier l’article L. 231-5
du code du sport en précisant que : « Les fédérations sportives veillent à la santé physique et
psychologique de leurs licenciés et prennent à cet effet les dispositions nécessaires, notamment en
ce qui concerne les programmes d’entraînement et le calendrier des compétitions et manifestations
sportives qu’elles organisent ou qu’elles autorisent ».
Proposition n° 28 : Mettre en place dans chaque région, une structure d’accompagnement et de soutien
dans le domaine de la santé physique et psychologique des sportifs et des sportives en réactivant le
réseau des AMPD.
Proposition n° 30 : Mettre en place une commission d’établissement des faits de violences sexuelles
dans le sport dans la perspective de la conduite d’une démarche de reconnaissance vis-à-vis des
victimes.
Proposition n° 31 : Prescrire que chaque fédération établisse un plan national d’éducation et de lutte
contre les discriminations liées à l’homophobie, au genre, au racisme et à l’antisémitisme et toutes
celles relatives aux situations de handicap, et dresse un bilan annuel des discriminations constatées et
des actions mises en œuvre. Prévoir que cette obligation constitue un des axes obligatoires dans les
subventions accordées par l’ANS dans le cadre des projets sportifs fédéraux (PSF).
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POUR UN SPORT PLUS DÉMOCRATIQUE, PLUS ÉTHIQUE ET PLUS PROTECTEUR
Proposition n° 34 : Prévoir que, dans le cadre de cet institut, soit proposé à tous les membres de
l’exécutif fédéral d’une fédération agréée un plan de formation transversal portant tant sur les
enjeux de gestion de la fédération que sur la sensibilisation aux enjeux éthiques et de protection des
pratiquantes et pratiquants.
Proposition n° 37 : Prendre en compte des critères de performance sociale du sport de haut niveau
et professionnel dans le dialogue stratégique de gestion avec les fédérations, ainsi que dans le cahier
des charges relatif à l’agrément des clubs professionnels, à travers la création d’outils de mesure et de
pilotage pertinents de l’efficacité des politiques fédérales en matière de facilitation du double-projet
et de l’insertion professionnelle.
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