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UNDP Africa SSC Report 2019 FR PDF

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Premier rapport sur

la coopération Sud-Sud
en Afrique

Au service
des peuples
et des nations
Au service
des peuples
et des nations
Premier rapport sur la coopération
Sud-Sud en Afrique

FAO/Oliver Asselin

Remerciements
Ce rapport a été élaboré par Amanda Lucey avec l’aide d’Orria Goni, du Centre Régional du Programme des Nations
Unies pour le développement (PNUD) pour l’Afrique, qui a coordonné la préparation de ce rapport tout en définissant
les principales pistes de réflexion, sous la supervision permanente du Directeur du Centre Régional pour l’Afrique,
Lamin M. Manneh. L’équipe tient à exprimer sa profonde gratitude à Florence Nazare et à Bob Kalanzi de l’Agence
de développement de l’Union africaine-NEPAD (AUDA-NEPAD) pour leur coopération pérenne, leurs contributions
écrites et leurs révisions du présent rapport. L’équipe remercie chaleureusement les partenaires techniques
régionaux qui l’ont aidée tout au long du processus, notamment Sameh Hussein de la Banque islamique de
développement (BID), ainsi que Cristina Xalma, Martin Rivero et Silvia Lopez Cabana du Secrétariat général ibéro-
américain (SEGIB). Elle remercie également le Bureau des Nations Unies pour la coopération Sud-Sud (UNOSSC),
et notamment Jorge Chediek, Directeur de l’UNOSSC, ainsi qu’Ahmed Hussein Ahmed Mohammed, Conseiller pour
les États arabes, qui ont apporté leur éclairage et un soutien continu dans la réalisation de cet exercice innovant en
Afrique. L’équipe adresse ses remerciements aux collègues du PNUD, notamment Ayodele Odusola, Laura de Lucca,
Beakal Fasil, Nebyu Mehari, James Wakiaga, Simon Peter Nsereko, Yemesrach Workie, Alessandro Ramella,
Wilmot Reeves, Johnson Maiketso, Mabulara Tsuene, El Allassane Baguia, Ginette Mondongou Camara,
Marc Lalanne, Julius Chokerah et Rogers Dhliwayo pour leur soutien, leur implication et leurs contributions tout
au long du processus mené aux niveaux national et régional. Un grand merci aux institutions suivantes pour leurs
réponses à l’enquête sur la coopération triangulaire menée par le PNUD : l’Agence nationale des services publics
et des innovations sociales auprès du président de la République d’Azerbaïdjan ; l’Agence chilienne de coopération
internationale pour le développement (AGCID) ; l’Ambassade royale du Danemark au Japon ; l’Agence allemande
de coopération internationale (GIZ) ; le Bureau exécutif du président de la République d’Indonésie (KSP) ; l’Agence
japonaise de coopération internationale (JICA) ; l’Agence norvégienne de coopération dans les échanges (NOREC) ;
l’Agence palestinienne de coopération internationale (PICA) ; l’Institut Camões portugais ; le ministère de la Science
et des Technologies de la République d’Afrique du Sud ; et l’Agence tunisienne de coopération technique. Nous
souhaitons également remercier Strategic Agenda qui a révisé, mis en page et traduit ce rapport.

Nous tenons tout particulièrement à exprimer notre gratitude aux personnes qui ont piloté ce processus à l’échelle
nationale, et aux représentants des pays volontaristes qui ont rédigé les avant-propos, fourni des informations
institutionnelles et mené des exercices nationaux pour recueillir des données sur les engagements Sud-Sud. Nous
remercions en particulier les gouvernements du Bénin, du Botswana, de la Côte d’Ivoire, de Djibouti, de l’Éthiopie,
du Kenya, du Lesotho, de Madagascar, de l’Ouganda et du Soudan, ainsi que leurs centres de coordination
respectifs pour la coopération Sud-Sud, pour leur leadership dans le cadre de cette initiative qui, nous l’espérons,
sera la première d’une longue série.

Avis de non-responsabilité
Les opinions exprimées dans le présent document sont celles de ses auteurs. Elles ne reflètent pas nécessairement
la position officielle du PNUD, de l’AUDA-NEPAD, de la BID et du SEGIB.
Sommaire
Liste d’acronymes.......................................................................................................................................................................... 1
Avant-propos.................................................................................................................................................................................. 3
Introduction................................................................................................................................................................................. 20
L’offre renouvelée du Programme des Nations Unies pour le développement en faveur de la coopération
Sud-Sud et triangulaire en Afrique............................................................................................................................................21
I. Introduction....................................................................................................................................................................21
II. Promotion de la coopération Sud-Sud et triangulaire : les atouts du PNUD à l’échelle régionale et
mondiale.........................................................................................................................................................................21
III. L’offre du PNUD en Afrique et au niveau mondial.....................................................................................................22
Chapitre 1 - Analyse des écosystèmes nationaux, régionaux et mondiaux de la coopération Sud-Sud en Afrique....... 26
I. Plan d’action de Buenos Aires : normalisation de la coopération Sud-Sud............................................................26
II. La coopération Sud-Sud au niveau mondial...............................................................................................................26
III. La CSS à l’échelle régionale : pratiques actuelles.......................................................................................................27
IV. Agenda 2063 : les efforts menés au niveau continental et régional.......................................................................28
V. La CSS à l’échelle interrégionale...................................................................................................................................29
VI. La CSS à l’échelle nationale...........................................................................................................................................30
VII. Promouvoir l’Agenda 2063 et les objectifs de développement durable grâce à la CSS
à l’échelle nationale en Afrique....................................................................................................................................31
VIII. Conclusion......................................................................................................................................................................35
Chapitre 2 - Vue d’ensemble des initiatives de coopération Sud-Sud en Afrique................................................................ 37
I. Introduction : mettre en place un système africain de suivi-évaluation régional pour
les partenariats de CSS..................................................................................................................................................37
II. Présentation des données sur la CSS en Afrique.......................................................................................................38
III. Initiatives de CSS pays par pays...................................................................................................................................41
IV. Pays engagés dans des initiatives de CSS de petite et moyenne envergure..........................................................46
V. Conclusion......................................................................................................................................................................47
Chapitre 3 - Promotion de partenariats panafricains : améliorer la coopération Sud-Sud
grâce à la collaboration avec les partenaires régionaux et mondiaux................................................................................. 50
I. Introduction....................................................................................................................................................................50
II. Rapport ibéro-américain sur la coopération Sud-Sud : une source d’inspiration pour l’Afrique.........................52
III. Étendre la CSST : interventions de la Banque islamique de développement........................................................55
IV. Méthodologie : spécificités des partenariats à flux inversés....................................................................................57
V. Renforcement de la CSS grâce à la coopération triangulaire : élargir les partenariats........................................59
VI. Conclusion......................................................................................................................................................................65
1 Premier rapport sur la coopération Sud-Sud en Afrique

Liste d’acronymes
AASROC Conférence des organisations sous-régionales d’Asie et d’Afrique
ACFTA Zone de libre-échange entre la Chine et l’ASEAN
ACP Groupe des États d’Afrique, des Caraïbes et du Pacifique
AGCID Agence chilienne de coopération internationale pour le développement
ALECA Accord de libre-échange continental africain
AMADER Agence malienne pour le développement de l’énergie domestique et l’électrification rurale
APD Aide publique au développement
ARC Centre régional pour l’Afrique
ASA Afrique-Amérique du Sud
AUDA Agence de développement de l’Union africaine
BAD Banque africaine de développement
BAPA Plan d’action de Buenos Aires
BID Banque islamique de développement
BRICS Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud
CAD Comité d’aide au développement
CEA Commission économique des Nations Unies pour l’Afrique
CELAC Communauté des États d’Amérique latine et des Caraïbes
CPLP Communauté des pays de langue portugaise
CSRA Centre de services régional pour l’Afrique
CSS Coopération Sud-Sud
DCF Forum pour la coopération en matière de développement
DFID Ministère du Développement international du Royaume-Uni
DIRCO Ministère des Relations internationales et de la Coopération de l’Afrique du Sud
EAPD Agence égyptienne de partenariat pour le développement
ECOSOC Conseil économique et social
FfD Financement du développement
FOCAC Forum sur la coopération sino-africaine
FPD Forum des partenaires de développement
GPEDC Partenariat mondial pour une coopération efficace au service du développement
HEC Commission de l’enseignement supérieur du Pakistan
IBAS Inde, Brésil et Afrique du Sud
IGAD Autorité intergouvernementale pour le développement
INVENT Entreprises et technologies innovantes pour le développement
JPCC Commission permanente conjointe pour la coopération
MCA Mécanisme de coordination de l’aide
MCPS Stratégie de partenariat des pays membres
MIAC Ministère des Affaires étrangères et de la Coopération internationale du Botswana
NDB Nouvelle banque de développement
NEPAD Nouveau Partenariat pour le développement de l’Afrique
NSC Comité directeur national
OCDE Organisation de coopération et de développement économiques
ODD Objectifs de développement durable
PAAA Programme d’action d’Addis-Abeba
PCA Position commune africaine
PICI Initiative présidentielle en faveur des infrastructures
PIFCSS Programme ibéro-américain visant à renforcer la coopération Sud-Sud
PNUD Programme des Nations Unies pour le développement
RCI Rwanda Cooperation Initiative
RGB Comité de gouvernance du Rwanda
SADC Communauté pour le développement de l’Afrique australe
SADPA Agence sud-africaine de partenariat pour le développement
SEGIB Secrétariat général ibéro-américain
SIDICSS Système intégré de données ibéro-américain sur la coopération Sud-Sud et triangulaire
TrC Coopération triangulaire
UA Union africaine
UNICEF Fonds des Nations Unies pour l’enfance
UNOSSC Bureau des Nations Unies pour la coopération Sud-Sud
Premier rapport sur la coopération Sud-Sud en Afrique 2

AVANT-PROPOS

Marché de Makola, Accra (Ghana), photo d’Erin Johnson, source : Flickr.com


3 Premier rapport sur la coopération Sud-Sud en Afrique

PROGRAMME DES NATIONS UNIES


POUR LE DÉVELOPPEMENT
BUREAU RÉGIONAL POUR L’AFRIQUE
Au service
des peuples
et des nations

Mme Ahunna Eziakonwa


Administratrice assistante et Directrice
Bureau régional pour l’Afrique
Programme des Nations Unies pour le développement

Ce rapport – le premier de ce type en Afrique – marque une étape importante dans la coopération Sud-Sud (CSS) ; il renforcera
la contribution de l’Afrique au Programme mondial de développement durable à l’horizon 2030. Le Programme 2030 accorde
une grande importance à la CSS, qui apparaît comme une composante essentielle de l’objectif 17, « Partenariats pour la
réalisation des objectifs ». Il reconnaît également le rôle que les pays en développement peuvent jouer dans l’échange de
connaissances et de compétences dérivant de leurs propres expériences. En effet, l’essor de la CSS a été si rapide et si
remarquable qu’elle constitue désormais un moyen non seulement efficace, mais aussi innovant et concret d’atteindre ces
objectifs. La deuxième Conférence de haut niveau des Nations Unies sur la CSS s’est tenue à Buenos Aires (Argentine) en
mars 2019, quarante ans après l’adoption du Plan d’action de Buenos Aires (BAPA), un document dans lequel les pays du
Sud ont officiellement défini les principes de la CSS et se sont fixé des objectifs en la matière. Cette conférence BAPA+40
a été l’occasion de faire le point sur les progrès accomplis jusqu’à présent dans le domaine de la CSS, de se réjouir des
avancées obtenues et de trouver d’autres moyens de poursuivre ces efforts à plus grande échelle.

L’Afrique a enregistré de réels progrès en définissant ses priorités et son programme de CSS, notamment grâce à l’adoption
de l’Agenda 2063, à la mise en œuvre d’objectifs de développement par l’intermédiaire du Nouveau Partenariat pour le
développement de l’Afrique (NEPAD), réformé et rebaptisé Agence de développement de l’Union africaine (AUDA). La
signature de l’Accord de libre-échange continental africain (ALECA) marque également le début d’une ère nouvelle pour les
industries et les marchés africains. Les pays d’Afrique essayent de se tailler la part du lion sur la scène mondiale, tout en
s’attelant à promouvoir la solidarité régionale et à assurer leur autonomie. Ils ont prouvé leur capacité à mettre en commun
des solutions endogènes pertinentes à l’échelle régionale et adaptées au contexte. Par ailleurs, les pays institutionnalisent
la CSS de différentes manières. Certains d’entre eux créent leurs propres agences et unités de CSS, développant des
réseaux de coordination centralisés et facilitant l’évaluation des interventions relatives à la CSS. De tels efforts permettront
de déployer les capacités nationales à l’échelle régionale, et de promouvoir ainsi davantage la mise en place de partenariats
intra et interrégionaux. La panoplie de pratiques d’excellence adoptées sur le continent doit être reconnue et renforcée.
Comme le montre ce rapport, la majorité des partenaires impliqués dans des activités de CSS sont africains, soulignant le
caractère de plus en plus intra-africain de la Coopération. Ce document marque un tournant historique dans l’élaboration
de rapports sur la CSS en Afrique. Il permettra de renforcer les échanges de connaissances et de savoirs techniques, et de
mettre en avant les contributions importantes des pays africains en faveur de la CSS.

L’Organisation des Nations Unies (ONU) est honorée de soutenir les efforts de développement de l’Afrique. L’ONU élabore
une stratégie à l’échelle du système afin d’encourager la CSS, laquelle sera généralisée dans toutes ses activités. Le
PNUD, en particulier, continuera de promouvoir, en étroite coordination et collaboration avec l’UNOSSC, la coopération
Sud-Sud et triangulaire en tant que moyen d’atteindre les objectifs du Programme 2030, comme expliqué dans son Plan
stratégique 2018-2021.

Le PNUD considère que les coopérations Sud-Sud et triangulaire sont inscrites dans son ADN ; à ce titre, il propose des
services dans trois domaines fonctionnels, conformément à sa Stratégie coopérative. Tout d’abord, le PNUD joue le rôle
de « courtier du savoir » et propose des services tels que la mise en place d’échanges de solutions de développement
à l’échelle mondiale. Il élabore actuellement des plateformes permettant d’améliorer la gestion des connaissances et le
partage de compétences autour de solutions innovantes et fondées sur des données issues des pays du Sud. Le PNUD
a mis au point les plateformes SSMART et Africa Solutions, qui présentent plus de 50 bonnes pratiques issues d’Afrique,
et continuera de fournir une aide grâce à l’appui ciblé de ses bureaux de pays situés dans le monde entier. Le PNUD
peut également intégrer des solutions nationales et régionales à la plateforme mondiale de l’UNOSSC, dont le champ
d’action est en train de s’élargir sous la forme d’une « Galaxie Sud-Sud ». On envisage d’ailleurs de synchroniser les données
des plateformes SSMART et Africa Solutions avec ce système. Le PNUD entend également utiliser la base de données de
spécialistes de l’UNOSSC – connue sous le nom de liste WIDE – afin de mettre en avant des experts techniques nationaux de
premier plan. Le PNUD est en mesure de recueillir des informations grâce à son vaste réseau d’experts en développement
travaillant dans ses bureaux de pays, notamment dans le cadre de ses Accelerator Labs – des laboratoires nationaux reliés
à ses bureaux régionaux – et de diffuser ces données au niveau mondial.
Premier rapport sur la coopération Sud-Sud en Afrique 4

Le PNUD encourage la création d’un environnement propice à la CSS aux niveaux national et régional en proposant des
services de conseil aux partenaires du Sud, afin de renforcer le développement des capacités institutionnelles en faveur
de la CSS. Cela peut inclure l’amélioration des politiques, des cadres juridiques et des réglementations pour les rendre
plus favorables à la CSS, ou le développement et le renforcement des capacités en matière de CSS. À mesure que l’Afrique
continue de créer des agences, des unités, des stratégies et des systèmes en lien avec la CSS, le PNUD peut fournir une
assistance technique aux pays désireux d’accroître leur leadership à l’échelle internationale. Le PNUD peut évaluer les
capacités des structures de CSS, prodiguer des conseils stratégiques sur la création d’unités et de stratégies en matière de
CSS, appuyer l’élaboration d’un système de coordination centralisé et améliorer les capacités en matière de planification,
de politiques et de suivi de la CSS grâce à des recommandations stratégiques. L’assistance technique pourrait s’étendre à
la création d’une base de données d’experts et prendre la forme d’un partenariat ; le PNUD pourrait servir d’intermédiaire
et de conseiller, tout en favorisant le dialogue, les consultations et la concertation entre les acteurs de la CSS. Au niveau
régional, le PNUD peut faciliter le dialogue politique en vue de renforcer l’intégration et la cohésion régionales, comme
le préconise le BAPA. Pour ce faire, le PNUD pourrait fournir un appui aux forums de politique régionale organisés par
les instances régionales, coordonner les discussions de politique régionale relatives aux dispositions administratives et
juridiques, et soutenir la création de mécanismes de gouvernance régionaux ainsi que l’élaboration de rapports régionaux à
l’instar du présent document, afin de rendre compte des principales tendances et perspectives. Le PNUD entend également
aider les institutions régionales à prendre des engagements formels autour d’axes de développement clés.

Le PNUD propose aussi des services visant à promouvoir le dialogue international ainsi que la coordination et la
collaboration à l’échelle du système. La CSS nécessite la mise en place de partenariats, laquelle peut être facilitée par le
PNUD aux niveaux inter et intrarégionaux, via l’organisation de réunions et de conférences régionales, afin de favoriser des
échanges horizontaux autour des objectifs de développement durable (ODD) à l’horizon 2030. Le PNUD a déjà organisé
deux événements de mise en relation Sud-Sud concernant la mise en œuvre des ODD, facilitant ainsi l’établissement de
partenariats de CSS intra-africains, et planifie ces réunions selon une approche thématique. Le PNUD peut également aider,
grâce à ses bureaux de pays, les responsables Sud-Sud à lancer des projets de coopération triangulaire dans plusieurs
régions. Le PNUD peut faciliter l’alignement des financements en matière de CSS sur les priorités des pays. Il peut également
aider ces derniers à joindre, gérer et superviser des initiatives de coopération Sud-Sud et triangulaire (CSST). Tirant parti de
sa présence internationale et de son Réseau de politiques mondiales, le PNUD se propose d’accroître la visibilité d’activités
clés grâce à la recherche, à l’analyse et à une meilleure représentation dans les forums mondiaux.

Les solutions visant à accélérer le développement de l’Afrique doivent venir en premier lieu des efforts de CSS des pays
africains, car les actions menées à l’échelle nationale produisent des résultats plus durables, à plus long terme. Le continent
africain est en mesure de décider de son avenir, et le PNUD fera tout ce qui est en son pouvoir pour l’accompagner sur cette
voie et l’aider à tirer le meilleur parti de ses réussites.
5 Premier rapport sur la coopération Sud-Sud en Afrique

BANQUE ISLAMIQUE
DE DÉVELOPPEMENT

Dr Mansur Muhtar
Vice-président des programmes de pays
Banque islamique de développement (BID)

La publication de ce rapport ne pouvait être plus opportune, la communauté internationale s’étant réunie en mars 2019
en Argentine pour fêter le 40e anniversaire de l’adoption du Plan d’action de Buenos Aires pour la promotion et la mise
en œuvre de la coopération technique entre pays en développement (BAPA). Le BAPA a constitué une base solide pour la
promotion de la coopération Sud-Sud (CSS). Depuis lors, la CSS a bouleversé le paysage de la coopération internationale au
service du développement, et s’est imposée comme un moyen efficace de relever les défis économiques, politiques, sociaux
et environnementaux à travers le monde.

Au cours de ces quarante dernières années, la Banque islamique de développement (BID) s’est tenue aux avant-postes
en adhérant aux principes de la CSS et en les mettant en œuvre. Ses membres étant tous des pays du Sud, la BID a
naturellement encouragé une approche de développement Sud-Sud dès sa création en 1974. Nous avons renforcé la
coopération et l’échange de connaissances entre nos pays membres grâce à diverses initiatives. Nous croyons fermement
que tous nos membres, indépendamment de leur niveau de développement, disposent de compétences dans un ou
plusieurs domaines, susceptibles de bénéficier à d’autres pays.

L’important travail mené par la BID en Afrique au cours des quatre dernières décennies nous conforte dans l’idée que
le continent, ses gouvernements et ses citoyens sont en mesure de trouver des solutions novatrices et endogènes qui
peuvent être déployées à grande échelle et mises en commun grâce à la CSS. Beaucoup de pays d’Afrique connaissent une
croissance économique soutenue, et l’ensemble du continent a accompli des progrès remarquables en ce qui concerne de
nombreux indicateurs socioéconomiques en un laps de temps relativement court.

C’est pourquoi j’ai accueilli avec un enthousiasme sincère l’initiative du PNUD autour de l’élaboration de ce Premier rapport
sur la coopération Sud-Sud en Afrique. Elle est arrivée à point nommé, et je suis ravi que la BID ait pris part à la préparation
de ce rapport dès le début. La BID est persuadée que cette initiative marquera un tournant pour la CSS en Afrique, facilitant
la mise en place et l’adoption par les pays africains d’un processus unifié pour le suivi de la CSS. La BID est convaincue
que ce rapport favorisera un « apprentissage en double boucle » en Afrique et dans le reste du monde. Dans un premier
temps, la communauté de la CSS en Afrique apprendra à améliorer et à étendre le processus de recueil de données sur la
CSS. Dans un deuxième temps, la BID apprendra à améliorer la CSS en tant que telle afin d’obtenir, plus rapidement, de
meilleurs résultats sur le terrain.

La publication de ce rapport coïncide avec les efforts de repositionnement déployés par la BID pour répondre aux besoins
de ses parties prenantes en devenant une « Banque de développeurs » et contribuer de manière significative à la mise en
œuvre du Programme 2030.

J’aimerais profiter de cette occasion pour renouveler la promesse de la BID de servir de catalyseur d’engagements en
matière de CSS, permettant ainsi aux pays membres, qu’ils soient africains ou non, d’échanger des connaissances, des
compétences, des technologies et des ressources afin de renforcer leurs capacités et de trouver des solutions favorisant
leur propre développement.
Premier rapport sur la coopération Sud-Sud en Afrique 6

BUREAU DES NATIONS UNIES


POUR LA COOPÉRATION SUD-SUD

M. Jorge Chediek
Directeur du Bureau des Nations Unies pour la coopération Sud-Sud
Envoyé du Secrétaire général pour la coopération Sud-Sud

Le Bureau des Nations Unies pour la coopération Sud-Sud (UNOSSC) est fier d’accueillir ce Premier rapport sur la coopération
Sud-Sud en Afrique, et salue les efforts déployés par les pays africains pour documenter et déployer leurs pratiques en
matière de CSS. Espérons que ce rapport ouvrira la voie à une dynamique pérenne qui s’intensifiera à mesure que de
nouveaux pays d’Afrique rejoindront cette initiative menée par l’Agence de développement de l’Union africaine (AUDA-
NEPAD) et le Centre de services régional du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) pour l’Afrique,
en étroite collaboration avec l’UNOSSC.

Ce rapport, qui bénéficie de l’appui d’institutions régionales telles que l’AUDA-NEPAD, le Secrétariat général ibéro-
américain (SEGIB) et la Banque islamique de développement (BID), met en exergue des données issues de plusieurs pays
d’Afrique. Non seulement les pays africains améliorent leurs cadres de CSS nationaux, mais ils encouragent également le
dialogue politique à l’échelle nationale et régionale autour des questions institutionnelles et politiques clés qui favorisent la
CSS en Afrique. Cela renforce à son tour la collaboration, l’intégration et la mise en place de partenariats intra-africains en
vue de la réalisation des objectifs du Programme 2030 et de l’Agenda 2063.

L’UNOSSC considère que le suivi de la CSS et l’établissement de rapports en la matière sont essentiels pour réussir sa mise
en œuvre. En effet, le Rapport de la 19e session du Comité de haut niveau pour la coopération Sud-Sud indique que la
création de mécanismes plus solides pour systématiser la coordination, le suivi et l’établissement de rapports est l’un des
six axes qui permettraient de faire de la CSS un moteur puissant d’innovation, d’efficacité, d’efficience, de viabilité et de
croissance.

L’UNOSSC s’efforce lui-même de mieux documenter la coopération au service du développement au niveau mondial et
prépare, en collaboration avec l’ONU, le Rapport annuel du Secrétaire général des Nations Unies sur l’état de la coopération
Sud-Sud. Notre bureau appuie également l’élaboration du premier rapport indépendant sur la coopération Sud-Sud et
triangulaire. Ce dernier se penchera sur l’historique et la transformation des cadres de collaboration au service d’une telle
coopération et examinera des moyens de les soutenir davantage, ainsi que la manière dont ils peuvent contribuer à la
réalisation des objectifs du Programme 2030.

Outre ces initiatives, l’UNOSSC s’est engagé, dans son cadre stratégique 2018-2021, à améliorer la cohérence et la
coordination de l’appui à la coopération Sud-Sud et triangulaire dans l’ensemble du système. Ce cadre met principalement
l’accent sur le soutien aux États membres pour éclairer les politiques. L’UNOSSC s’est également engagé à renforcer les
capacités des États membres et a déjà organisé plusieurs consultations à cet égard en amont de la conférence BAPA+40.
Nous avons aussi créé un mécanisme de coordination interorganisations qui renforce les efforts de collaboration des
Nations Unies.

Par ailleurs, nous avons conçu un portail en ligne innovant, www.unsouthsouth.org, qui met en avant le travail de nombreux
partenaires sur la coordination Sud-Sud et triangulaire, et qui favorise l’échange de connaissances, la mise en place de
partenariats et le plaidoyer.

En outre, l’UNOSSC recueille, documente et diffuse des solutions de développement dans le cadre de sa série « Sud-Sud en
action » ; plus de vingt numéros supplémentaires sont en préparation. Nous avons également publié deux documents sur
les bonnes pratiques en matière de coopération Sud-Sud et triangulaire, qui présentent plus de cent solutions proposées
par des pays du Sud autour des 17 objectifs de développement durable (ODD). J’espère que les pays d’Afrique qui ont
participé à ce rapport continueront de contribuer au partage de solutions sur le portail et dans d’autres numéros de la série
« Sud-Sud en action ».

La CSS a le pouvoir de transformer notre monde en proposant des solutions uniques appropriées au contexte africain. C’est
la raison pour laquelle ce rapport est si important pour notre continent. L’UNOSSC est prêt à aider l’Afrique à prendre son
avenir en main.
7 Premier rapport sur la coopération Sud-Sud en Afrique

BÉNIN

M. Aurélien A. Agbénonci
Ministre des Affaires étrangères et de la Coopération
République du Bénin

Ce Premier rapport sur la coopération Sud-Sud en Afrique est l’occasion pour les acteurs de la CSS de mesurer les progrès
accomplis par les pays en développement en matière d’entraide vers la réalisation des objectifs de développement
durable (ODD), à la fois de manière individuelle et collective.

La première initiative du Bénin en matière de coopération Sud-Sud et triangulaire remonte à 2007, année où le pays a
conclu un accord de coopération avec le Bhoutan et le Costa Rica, avec l’aide des Pays-Bas. Dans le cadre de cet accord, les
trois pays ont mis en œuvre un programme de développement durable dans les domaines prioritaires de l’agriculture, du
tourisme, de la biodiversité, de la promotion des énergies durables, et de la problématique hommes-femmes.

Depuis lors, le Bénin a saisi la CSS comme une occasion de mettre au point des solutions innovantes, qui sont adaptées au
contexte national et qui répondent aux défis du développement durable.

Des partenariats établis avec le Brésil, Cuba et l’Inde ont contribué à créer des emplois, à renforcer les capacités des petits
agriculteurs au Bénin, à encourager l’échange de connaissances et de compétences et à élaborer des projets communs.

Le gouvernement du Bénin est convaincu que la CSS peut accélérer le développement de pays partageant les mêmes
réalités et, surtout, des contraintes identiques en matière d’accès au capital sur les marchés financiers internationaux, et
d’acquisition de savoir-faire et de technologies avancées.

C’est tout naturellement que le gouvernement du président de la République du Bénin, M. Patrice Talon, a intégré cette
forme de coopération prometteuse dans sa vision et sa stratégie en matière de développement durable. La CSS figure ainsi
au cœur de tous ses programmes de développement, notamment du Programme d’actions du gouvernement 2016-2021
et dans le Plan national de développement.

La Rencontre internationale sur la coopération Sud-Sud et triangulaire en tant qu’outil d’accélération des ODD, qui s’est
tenue à Cotonou du 21 au 23 février 2017, a été l’occasion pour le gouvernement du Bénin de montrer son engagement
en faveur de la CSS. Le gouvernement entend également intégrer la CSS à sa stratégie afin d’atteindre les objectifs de
développement fixés aux niveaux international et régional, à savoir les ODD du Programme 2030 et ceux de l’Agenda 2063
de l’Afrique.

La République du Bénin appelle à l’intensification et au renforcement de la CSS. La deuxième Conférence de haut niveau
des Nations Unies sur la coopération Sud-Sud (BAPA+40), organisée en mars 2019 dans la capitale argentine, a constitué
sans aucun doute une avancée majeure vers la réalisation de cet objectif pour le bien-être du peuple d’Afrique, y compris
le Bénin.

La coopération Sud-Sud peut compter sur mon soutien indéfectible.


Premier rapport sur la coopération Sud-Sud en Afrique 8

BOTSWANA

Dr Unity Dow
Ministre des Affaires étrangères et de la Coopération internationale
République du Botswana

C’est un réel plaisir pour moi de présenter la contribution du Botswana au tout premier rapport sur la coopération Sud-
Sud (CSS) en Afrique.

Ce Rapport fait suite aux promesses formulées par les chefs d’État et de gouvernement lors de l’adoption, en septembre
2015, du Programme de développement durable à l’horizon 2030. La CSS s’impose rapidement comme le meilleur moyen
pour les pays de mobiliser des ressources en vue de mettre en œuvre les objectifs de développement durable (ODD).

Le Botswana reste investi dans tous les aspects de la CSS. Le pays s’engage par ailleurs à coopérer avec les autres pays
en développement en vertu des Principes de Nairobi, qui incluent la solidarité, le respect de la souveraineté nationale,
l’appropriation nationale, l’égalité, la non-conditionnalité, la non-ingérence et les avantages mutuels.

À cette fin, nous avons entrepris d’institutionnaliser les activités de CSS, tout d’abord en définissant une « Stratégie de
coopération Sud-Sud et triangulaire », puis en contribuant au premier Rapport régional africain.

Nous considérons la CSS comme un outil majeur qui nous permettra d’atteindre nos objectifs de développement,
conformément à notre feuille de route, Vision 2036, et à notre onzième Plan national de développement pour la
période 2017-2023. La coopération technique et économique entre le Botswana et les autres pays en développement est
orientée par les objectifs de la stratégie Vision 2036, et notamment la création d’une économie diversifiée, reposant sur
l’exportation et le dynamisme du secteur privé.

En matière de coopération technique, nous souhaitons établir des partenariats visant à développer le capital humain,
pour favoriser une économie fondée sur le savoir. Ces partenariats incluent notamment des possibilités de formation et
des bourses permettant d’améliorer les connaissances et compétences des Botswanais. Nous sommes également prêts à
partager notre savoir-faire avec les pays du Sud dans nos domaines de compétences, notamment la gouvernance politique,
la gestion macroéconomique, la production de viande bovine, la santé animale, le tourisme et l’exploitation minière.

L’économie diversifiée et créatrice d’emplois que nous voulons bâtir nécessite des infrastructures et des ressources
financières. Par conséquent, nos efforts de coopération économique ciblent les infrastructures dans le secteur des
transports, des communications et de l’énergie. Par exemple, le Botswana participe à des projets d’infrastructure majeurs,
qui contribuent également à l’intégration et au développement économiques au niveau régional. Il s’agit notamment de la
construction du pont de Kazungula et de la création d’un poste-frontière unique (projet commun avec la Zambie) et de la
construction du port sec de Walvis Bay (projet commun avec la Namibie).

En ce qui concerne le financement des activités de CSS, le Botswana continuera d’utiliser les lignes de crédit et les
subventions allouées aux pays du Sud. Le pays recourra également à la coopération triangulaire pour financer des
partenariats, conformément aux Principes de Nairobi.

C’est dans ce contexte que nous publions des données récentes relatives aux activités de CSS dans lesquelles le Botswana
est impliqué. Par ailleurs, nous avons l’intime conviction que les mesures concrètes qui découleront du 40e anniversaire
du Plan d’action de Buenos Aires lors de la deuxième Conférence sur la coopération Sud-Sud (BAPA+40) donneront au
Botswana et aux autres pays en développement l’occasion de mettre en commun leurs expériences et de dessiner l’avenir
de la CSS, qui s’avère essentielle à la réalisation des ODD.
9 Premier rapport sur la coopération Sud-Sud en Afrique

CÔTE D’IVOIRE

Ministère des Affaires étrangères


République de Côte d’Ivoire

Fondée sur l’idée de rapports moins restrictifs, la coopération Sud-Sud (CSS) joue depuis quelques années un rôle majeur
dans les partenariats internationaux en faveur du développement. La CSS offre une perspective plus large et des solutions
adaptées aux réalités spécifiques des pays, et constitue l’un des meilleurs moyens de mettre en œuvre le Programme de
développement durable à l’horizon 2030 des Nations Unies ainsi que l’Agenda 2063 de l’Union africaine.

Depuis son indépendance, la Côte d’Ivoire s’est toujours attachée à tirer le plus grand bénéfice de ses relations
diplomatiques. Toutefois, face aux nouveaux défis de développement mis en exergue dans le Programme 2030 mondial
et dans l’Agenda 2063 de l’Union africaine, le pays compte sur la promotion des bonnes pratiques en matière de CSS –
un instrument normatif pour réformer le cadre institutionnel, organisationnel et opérationnel qui guide sa diplomatie
économique.

L’Afrique – la Côte d’Ivoire en particulier – a accompli des progrès indéniables. Ces derniers doivent être soutenus pour
accroître l’efficacité des interventions menées dans le pays, mais aussi des efforts déployés au niveau de la chaîne de
gestion interne et externe, du point de vue du développement économique, social et environnemental.

Des projets de premier plan sont en cours dans le cadre de la CSS, notamment en matière d’infrastructures structurelles, ce
qui améliore de manière durable le bien-être des populations. Les groupes les plus défavorisés – les femmes et les jeunes –
prennent confiance en eux et en leur avenir grâce au transfert de connaissances et aux modèles Sud-Sud.

La CSS représente un vivier d’innovations et de possibilités à même de consolider les pratiques d’excellence en matière de
développement. Je reste persuadé que le continent africain, le mieux placé pour expérimenter durablement les nombreux
partenariats présents dans tous les secteurs, sera en mesure de capitaliser sur ces bonnes pratiques en vue d’atteindre ses
objectifs de développement avec l’aide de la CSS.
Premier rapport sur la coopération Sud-Sud en Afrique 10

DJIBOUTI

Mme Mouna Yonis Hoche


Directrice de la Coopération internationale et de l’Intégration régionale
Ministère des Affaires étrangères et de la Coopération internationale
République de Djibouti

Après son indépendance, la République de Djibouti s’est engagée dans des projets de coopération bilatérale et multilatérale
avec plusieurs partenaires traditionnels, notamment la Banque mondiale, les organismes des Nations Unies – dont le
PNUD –, ainsi que les États-Unis, la France, l’Italie, le Japon et l’Union européenne. Cette coopération a évidemment produit
des résultats sur le terrain en termes de subventions, de prêts, d’aide technique et matérielle et de formation pour les
fonctionnaires.

Toutefois, depuis l’an 2000, le volume de l’aide apportée par ces donateurs traditionnels a considérablement diminué,
ce qui a conduit Djibouti à diversifier ses partenariats avec le reste du monde, en particulier avec un grand nombre de
pays du Sud, tels que l’Inde (2003), Cuba et la Turquie (2014). Sur le continent africain, des accords de coopération ont été
établis avec des pays voisins comme l’Éthiopie et le Soudan, mais aussi avec les pays francophones d’Afrique du Nord et
de l’Ouest : l’Algérie, l’Égypte, le Maroc, le Sénégal et la Tunisie. Au Moyen-Orient et en Asie, Djibouti a notamment conclu
des accords de coopération avec l’Arabie saoudite et la Malaisie. Pour assurer la sécurité alimentaire, le pays a noué des
partenariats de coopération avec l’Éthiopie et le Soudan, qui ont fourni des terres arables.

Djibouti travaille à la mise en œuvre de la Vision Djibouti 2035 et applique, depuis 2014, une Stratégie de croissance
accélérée et de promotion de l’emploi (SCAPE), qui représente le premier plan quinquennal du pays (2015-2019). Avec la
SCAPE, Djibouti vise principalement à moderniser ses infrastructures, à stimuler la croissance économique et à réduire
la pauvreté ainsi que les inégalités sociales et territoriales. Dans cette optique, le gouvernement continue de développer
ses relations diplomatiques et de chercher des projets de coopération internationale plus actifs afin d’intensifier et de
diversifier ses activités de coopération économique, financière et technique en s’appuyant sur ses relations bilatérales et
multilatérales avec les pays du Sud.

Djibouti a ainsi établi des partenariats avec de nombreux pays d’Afrique, d’Amérique, d’Asie, d’Europe et du monde arabe
grâce à ses chancelleries présentes dans le monde entier. Ces accords de partenariats se présentent généralement sous la
forme de traités d’amitié, de comités mixtes et d’accords de coopération, qui ont permis à Djibouti de renforcer ses relations
commerciales avec certains pays voisins (par exemple l’Éthiopie, la Somalie et le Yémen) ainsi qu’avec des pays du Moyen-
Orient (par exemple l’Arabie saoudite, Dubaï et le Koweït). Ce type de coopération a également favorisé la formation de
médecins (avec Cuba, le Maroc, la Tunisie) et permis à des étudiants de fréquenter des universités d’Afrique francophone (en
Algérie, au Maroc et au Sénégal) mais aussi d’Inde, de Malaisie et de Turquie. Par ailleurs, Djibouti encourage l’intégration
et la coopération régionales en participant activement à des forums tels que le Marché commun de l’Afrique de l’Est et de
l’Afrique australe (COMESA) et l’Autorité intergouvernementale pour le développement (IGAD).

Dans les domaines de l’enseignement supérieur et du transfert de connaissances, Djibouti a bénéficié de l’échange de
connaissances et de compétences, en particulier avec les pays du Sud. Par exemple, le pays a mis en place des partenariats
avec l’Université d’Addis-Abeba en 2013 pour les diplômes de géologie, et avec l’université Cheikh-Anta-Diop, à Dakar, dans
le domaine des sciences humaines. De même, depuis 2011, une coopération plus étroite avec l’Agence universitaire de la
francophonie (un réseau mondial d’établissements d’enseignement supérieur francophones) a permis de moderniser et de
transformer l’Université de Djibouti. Afin de mieux gérer le nombre croissant d’étudiants, des partenariats ont été établis
avec des établissements d’enseignement supérieur étrangers pour permettre aux étudiants de poursuivre leurs études en
master et en doctorat.
11 Premier rapport sur la coopération Sud-Sud en Afrique

ÉTHIOPIE

M. Admasu Nebebe
Ministre d’État à la Coopération économique
République fédérale démocratique d’Éthiopie

Le gouvernement éthiopien s’efforce de mettre en œuvre le Plan national de croissance et de transformation (Growth and
Transformation Plan – GTP ll) afin de refléter sa vision à long terme : faire en sorte que l’Éthiopie accède au statut de pays
à revenu intermédiaire d’ici à 2025. Le GTP oriente les priorités de développement à moyen terme du pays et fournit un
cadre pour aligner les efforts des acteurs non étatiques nationaux avec ceux des partenaires de développement extérieurs.

En raison du manque criant d’infrastructures, l’Éthiopie nécessite chaque année d’importants investissements en matière
d’infrastructures et de services économiques et sociaux. La majorité de ces investissements sont financés par des sources
nationales grâce aux recettes fiscales. Toutefois, il est essentiel pour le pays de mobiliser des ressources supplémentaires
provenant de sources extérieures afin de répondre aux besoins de financement nécessaires pour atteindre les cibles du
GTP et des ODD. Pour ce faire, le gouvernement éthiopien noue de nombreux partenariats, y compris avec des économies
émergentes et en développement, dans le cadre desquels un cadre de coopération Sud-Sud (CSS) sera crucial.

Le Programme 2030 et le Programme d’action d’Addis-Abeba (PAAA) de 2015 considèrent la CSS comme un cadre de
coopération internationale efficace. Grâce à la CSS, les pays en développement devraient pouvoir bénéficier de différentes
possibilités et mieux collaborer entre eux, en complément des flux traditionnels et toujours dominants d’échanges
commerciaux, d’investissements, d’aide au développement et de coopération technique Nord-Sud.

Bien que l’élaboration et le déploiement d’un cadre national officiel de CSS aideront l’Éthiopie à mieux orienter ses
partenariats avec les autres pays en développement, plusieurs secteurs bénéficient déjà dans le pays de la croissance
organique et du développement de sa collaboration avec des économies émergentes et en développement. La santé,
l’agro-industrie, l’éducation, le commerce en ligne, les technologies de l’information, la biodiversité, la politique du travail et
la construction routière sont quelques-uns des domaines actuellement ciblés par des partenariats.

Malgré tout, l’élaboration d’un cadre de CSS s’avère nécessaire en Éthiopie, lequel devra éventuellement être appuyé
ultérieurement par des cadres politiques et juridiques. Par la suite, des stratégies et des programmes devront être mis
en place dans chaque secteur pour déterminer l’utilisation des possibilités de CSS ainsi que les modalités de partage
d’expériences et de connaissances dans le domaine concerné.

Pour les raisons citées précédemment, les premières données consolidées sur la CSS en Éthiopie serviront à constituer une
base d’informations plus complète et à élaborer des rapports sur le sujet à l’avenir.

Enfin, je souhaite remercier le Bureau régional du PNUD et toutes les personnes qui ont participé à la collecte de ces
données. Je suis ravi de présenter cet ensemble de données dans le cadre de ce Premier rapport sur la coopération Sud-
Sud en Afrique. Nous attendons avec impatience le 40e anniversaire de la Conférence de Buenos Aires sur la coopération
Sud-Sud (BAPA+40).
Premier rapport sur la coopération Sud-Sud en Afrique 12

KENYA

Dr Julius Muia
Secrétaire principal
Département d’État à la planification
République du Kenya

Le Kenya continue de soutenir la coopération Sud-Sud (CSS) en tant que moyen essentiel pour réaliser les objectifs de
développement durable (ODD) et l’Agenda 2063 de l’Union africaine. Toutes les activités de CSS menées au Kenya sont
coordonnées par le département d’État à la Planification, rattaché au ministère des Finances et de la Planification. En tant
que nation, nous sommes heureux de contribuer au Premier rapport sur la coopération Sud-Sud en Afrique, et de saisir
cette occasion pour mettre en avant l’expérience kényane.

Le Kenya mène des activités de CSS depuis son indépendance, en 1963. Il a été l’un des premiers à promouvoir la
collaboration entre les pays en développement, initialement dans le cadre de la coopération technique entre pays en
développement (CTPD), puis de la coopération Sud-Sud qui l’a remplacée. Nous avons évolué au gré de la dynamique
fluctuante du monde en développement, qui a renforcé la nécessité d’étendre la portée de la collaboration à tous les
aspects du développement, et non plus à la seule coopération technique.

Actuellement, le Kenya collabore avec de nombreux pays en développement à travers le monde sur un vaste éventail
de sujets tels que l’échange de connaissances et de compétences, la promotion des sciences, de la technologie et de
l’innovation, la promotion du commerce et de l’investissement, ainsi que la solidarité autour de diverses questions qui
concernent les pays du Sud. Cependant, le pays ne dispose pas de cadre institutionnel, juridique ou politique approprié pour
gérer la CSS. Par conséquent, la coordination de la coopération Sud-Sud et triangulaire est loin d’être suffisante, puisqu’un
grand nombre d’institutions et d’agences collaborent généralement à leurs niveaux respectifs sans se sentir obligées de
rendre compte de cette coopération à l’Unité Sud-Sud rattachée au ministère responsable de la planification (actuellement,
le ministère des Finances et de la Planification).

Le Kenya a toutefois tenté à plusieurs reprises de centraliser l’établissement de rapports de suivi-évaluation sur la
coopération Sud-Sud et triangulaire. Ces tentatives incluent la création d’un Comité technique permanent Sud-Sud en 2007,
dont les membres étaient issus de 15 ministères ou agences et dont l’objectif était d’améliorer la gestion de la coopération
entre les institutions et agences kényanes et les institutions des autres pays du Sud. Ce Comité permanent a été étendu à
17 membres en 2009. Après avoir organisé avec succès la Conférence de haut niveau des Nations Unies sur la coopération
Sud-Sud du 1er au 3 décembre 2009, le Kenya a de nouveau tenté d’institutionnaliser la gestion de la CSS.

Le Comité permanent a déployé des efforts considérables pour recueillir des données et mettre à jour les profils
institutionnels sur la CSS, ce qui a abouti à l’élaboration d’une étude exploratoire intitulée « Évaluation des options pour
la création d’un centre Sud-Sud par le gouvernement du Kenya ». Cette étude exploratoire recommandait de créer un
centre Sud-Sud afin de coordonner toutes les activités de CSS au Kenya. Cette recommandation a suscité des réactions
enthousiastes et a été suivie d’importantes consultations au sein du gouvernement, à la suite desquelles le président a
publié un décret dans le journal officiel en 2012 pour demander la création d’un centre Sud-Sud. Des bureaux appropriés
ont été repérés, les premiers membres du personnel ont été recrutés et un budget initial a été alloué pour aider à la
création du centre. Pour autant, le Centre Sud-Sud n’était pas entièrement opérationnel.

Depuis, le Kenya a réitéré sa tentative d’institutionnaliser la CSS en réformant le Comité permanent et en augmentant le nombre
de ses membres afin de réunir plus de 40 institutions. Ce nouveau Comité permanent a été mis en place le 25 septembre 2018
et doit soutenir la mise en œuvre d’un projet de feuille de route pour l’élaboration d’une politique puis la création d’un cadre
juridique et institutionnel officiel visant à appuyer la gestion de la coopération Sud-Sud et triangulaire au Kenya.

Depuis 2013, le gouvernement s’est efforcé de renforcer les capacités de ses agents en matière de gestion de la CSS.
Toutefois, d’autres efforts sont nécessaires afin d’améliorer la visibilité de la coopération Sud-Sud et triangulaire au Kenya et
de soutenir la formalisation, l’établissement de rapports de suivi-évaluation et la gestion globale de ce type de coopération.
Le Kenya a besoin d’une aide technique et financière pour élaborer les cadres politiques et juridiques, et pour créer une
institution responsable de la gestion de la CSS. Nous avons également besoin d’aide pour renforcer de manière intensive
les capacités de gestion de la coopération Sud-Sud et triangulaire des membres du Comité technique permanent, ainsi que
pour élaborer une base de données locale sur les centres d’excellence et les bonnes pratiques et solutions.

La CSS a été intégrée au Troisième plan à moyen terme du Kenya (2018-2022) et au Cadre de dépenses à moyen
terme (2019/20-2021/22). À l’avenir, des efforts ciblés seront déployés en vue de centraliser la gestion de toutes les activités
de CSS au Kenya et de veiller à ce que le pays tire le meilleur parti de ses avantages, sans négliger la coopération Nord-Sud.
13 Premier rapport sur la coopération Sud-Sud en Afrique

LESOTHO

Monsieur le Ministre
M. Tlohelang Peter Aumane
Ministère de la Planification du développement
Royaume du Lesotho

De par sa situation géographique, le Lesotho est à la fois bénéficiaire et fournisseur de l’aide au développement dans le
cadre de la coopération Sud-Sud (CSS). Le Lesotho étant un petit pays, tant par sa taille que par son économie, il ne participe
qu’à une poignée de projets relevant de la CSS. Comme beaucoup d’autres pays du Sud en développement, le Lesotho n’a
établi aucun rapport sur ces initiatives. Toutefois, avec la publication de ce premier rapport, le gouvernement du Lesotho
s’engage à rendre compte annuellement des activités de CSS, puisque cette dernière apparaît comme l’un des nombreux
moyens pour le pays de recevoir de l’aide de ses voisins et de leur en offrir, lorsque cela relève du possible. Le fait de
rendre compte des initiatives de CSS aidera le pays à réfléchir aux avantages économiques tirés de cette coopération et à
les évaluer.

La CSS se fonde sur le respect mutuel et un partenariat équitable entre les pays bénéficiaires et donateurs. Elle vise
également à intensifier les efforts nationaux et à favoriser le développement et le renforcement des capacités. Par ailleurs,
la CSS accélère la mise en œuvre des projets, diminue les coûts de transaction et offre un meilleur coût-avantage, entre
autres. Dans ce contexte, l’aide peut prendre la forme d’un savoir-faire technique, de ressources financières (appui
budgétaire, financement de projets), d’une expertise, d’un transfert de compétences et de bien d’autres modalités. La CSS
devrait accélérer les initiatives de développement du Royaume du Lesotho, qui élabore actuellement son deuxième Plan
quinquennal national de développement stratégique (Second National Strategic Development Plan – NSDP II).

Le NSDP II vise principalement à stimuler la création d’emplois et à assurer une croissance inclusive. Il sera possible
d’atteindre ces objectifs grâce à la promotion d’une croissance économique durable et de la création d’emplois dans le
secteur privé, au renforcement du capital humain, au développement d’infrastructures favorables et à la consolidation
des systèmes de gouvernance et de responsabilité. Plusieurs moyens permettront d’atteindre ces cibles prioritaires : le
renforcement de la compétitivité du secteur privé, l’augmentation des niveaux d’emploi dans les secteurs productifs, les
progrès de la technologie – notamment dans la recherche –, l’amélioration de la productivité agricole grâce à une intégration
verticale accrue et à la création de valeur, l’amélioration des services de santé, l’éducation des orphelins et la diversification
des programmes proposés par les établissements d’enseignement supérieur afin de proposer aux apprenants des
compétences adaptées au marché du travail.

Le ministère de la Planification du développement a été chargé de rendre compte des programmes et des initiatives de
développement et continuera d’œuvrer en ce sens, en établissant notamment des rapports de suivi-évaluation de la CSS.
Premier rapport sur la coopération Sud-Sud en Afrique 14

MADAGASCAR

Rédigé par le Secrétariat permanent chargé de la coordination de l’aide


Bureau du Premier ministre
République de Madagascar

L’aide publique au développement (APD) est une source de financement majeure pour Madagascar. Si les donateurs se
montraient réticents à débloquer des fonds après la crise institutionnelle de 2009-2012, le retour de l’ordre constitutionnel
en 2015 a permis au pays de retrouver l’appui de partenaires techniques et financiers, améliorant ainsi progressivement
sa situation économique et sociale. Ces dernières années, les partenaires techniques et financiers ont réintégré les
infrastructures d’aide au développement de Madagascar et l’APD a augmenté de manière constante, atteignant 717 millions
de dollars US en 2017.

La coopération Sud-Sud (CSS) et la coopération triangulaire représentent près de 26 % de l’APD reçue par Madagascar,
principalement de la part d’États d’Asie (la Chine, l’Inde, l’Indonésie et la Thaïlande) et du Maroc. La Chine est le partenaire
majeur de Madagascar ; les relations économiques et diplomatiques entre les deux pays remontent à 1972. Ils coopèrent
dans plusieurs domaines : la santé, l’aide humanitaire, le soutien aux infrastructures, le secteur productif et le commerce.

Madagascar est membre de nombreux groupes régionaux. Le pays est représenté dans ces groupes par la direction de
l’Intégration régionale du ministère des Affaires étrangères. Cette dernière, en tant qu’entité coordinatrice, contribue de
manière cruciale à optimiser la participation de Madagascar à des groupes tels que l’Union africaine, le Marché commun de
l’Afrique de l’Est et de l’Afrique australe (COMESA), l’Association des États riverains de l’océan Indien (IORA), la Commission
de l’océan Indien (COI) et la Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC). Généralement, cette coordination
se fait dans tous les services techniques du gouvernement, au sein de comités nationaux spéciaux qui réunissent des
acteurs du secteur public et du secteur privé.

La capacité de Madagascar à coopérer avec des pays du Nord et du Sud est étayée par un réseau industriel en pleine
expansion dans le secteur textile, un environnement économique en amélioration constante et une agriculture diversifiée.

À la suite des élections présidentielles de 2018, Andry Rajoelina a été investi dans ses fonctions le 19 janvier 2019. La
transition entre deux présidents élus se déroulait de façon pacifique pour la première fois, permettant ainsi de préserver
les progrès accomplis en matière de paix, de stabilité et de développement économique.

Plusieurs documents stratégiques seront rédigés cette année, notamment la Vision 2030 pour Madagascar et le Plan
national de développement. Cette année sera donc particulièrement propice à la finalisation de la politique de coopération
au service du développement, dont l’une des composantes concernera la stratégie de CSS. Cette dernière différera, par
définition, de la stratégie mise en œuvre avec les partenaires « traditionnels ». La politique de coopération au service du
développement formalisera le rôle de chaque personne impliquée dans la chaîne de gestion de la coopération au service
du développement.

La promotion de la CSS à Madagascar vise principalement à mobiliser des soutiens techniques et financiers supplémentaires
pour appuyer la mise en œuvre de la stratégie nationale de développement et atteindre les ODD. Ses objectifs spécifiques
consisteront à diversifier et à multiplier les partenariats techniques et financiers de Madagascar, mais aussi à promouvoir
l’expertise du pays dans certains domaines sur la scène internationale.

De par ses fonctions, le Secrétariat technique permanent chargé de la coordination de l’aide est l’organe principal de
coordination de l’aide du pays et semble être la structure la mieux indiquée pour gérer la CSS.

Bien que la CSS existe déjà à Madagascar, il serait utile de la renforcer au moyen d’un cadre permettant de tirer le meilleur
parti des avantages et du potentiel offerts par le commerce Sud-Sud. En parallèle, il convient de faciliter les partenariats
et les innovations, de mettre en pratique les projets prometteurs à plus grande échelle et d’accroître le transfert de
connaissances autour de solutions de développement adaptables.

Une véritable volonté politique s’affirme pour renforcer la CSS et le potentiel d’amélioration est considérable dans ce
domaine, puisque Madagascar n’a conclu, jusque là, que peu d’accords de coopération avec les États africains. En outre,
le contexte actuel semble particulièrement propice à la promotion et à l’intensification de la CSS. Madagascar s’efforcera
de maintenir la dynamique positive créée par l’enquête BAPA+40 et d’obtenir des résultats notables et probants sur le
court terme.
15 Premier rapport sur la coopération Sud-Sud en Afrique

OUGANDA

Matia Kasaija (membre du Parlement)


Ministère des Finances, de la Planification et du Développement économique
République d’Ouganda

Depuis l’adoption du Plan d’action de Buenos Aires (PABA) en 1978, la coopération Sud-Sud (CSS) a proposé un nombre
croissant de solutions pour répondre aux enjeux de développement communs aux pays du Sud. Le Programme d’action
d’Addis-Abeba sur le financement du développement, le Programme de développement durable à l’horizon 2030 et
l’Agenda 2063 de l’Union africaine reconnaissent l’utilité de la coopération Sud-Sud et triangulaire. Loin de se substituer à
la coopération Nord-Sud, la coopération Sud-Sud s’avère de fait complémentaire.

L’Ouganda a rédigé une déclaration de politique générale actualisée sur la contribution de la coopération Sud-Sud et
triangulaire au développement du pays. Cette déclaration présentait également le programme de l’Ouganda pour appuyer
les moyens de mise en œuvre des objectifs de développement durable (ODD). Elle était destinée à alimenter ce premier
rapport sur la coopération Sud-Sud en Afrique. Ce rapport a apporté un éclairage instructif lors de la deuxième Conférence
de haut niveau des Nations Unies sur la coopération Sud-Sud, organisée en mars 2019.

L’aspiration de l’Ouganda à devenir une nation moderne et prospère d’ici à 2040 et sa volonté de réaliser l’ambitieux
Programme de développement à l’horizon 2030 exigent des alliances mondiales à même d’offrir des solutions concrètes aux
enjeux de développement auxquels le pays est confronté. En vertu de ces aspirations, telles qu’inscrites dans son deuxième
Plan national de développement (2015/16-2019/20), le gouvernement ougandais apprécie pleinement la contribution de la
coopération Sud-Sud et triangulaire à son programme de développement. La coopération Sud-Sud a permis à l’Ouganda
de bénéficier de solutions inédites, sous la forme de partage de connaissances et d’échange de bonnes pratiques entre
partenaires travaillant sur des problématiques de développement communes, mais aussi d’assistance technique, de
transferts de technologies ou encore de soutien financier à la réalisation d’objectifs de développement. L’Ouganda va donc
continuer d’offrir un environnement propice aux partenariats Sud-Sud.

En tant que président du Comité de haut niveau des Nations Unies sur la coopération Sud-Sud, l’Ouganda entend renforcer
la disposition des pays africains à recourir à la coopération Sud-Sud, y compris dans le domaine du commerce, dans le but
de donner naissance à des initiatives telles que la zone de libre-échange africaine. Nous souhaitons par ailleurs renforcer le
partage d’informations, tout en continuant à encourager les activités conformes aux principes de la coopération Sud-Sud, à
savoir l’intérêt mutuel, la souveraineté, l’appropriation, l’égalité, l’absence de conditionnalités et la non-ingérence.

Je suis heureux de présenter une série d’actions de coopération Sud-Sud et triangulaire qui ont été menées en Ouganda
au cours de l’année passée. L’Ouganda a bénéficié de plusieurs partenariats dans divers domaines stratégiques. Dans le
domaine de la santé, le gouvernement a coopéré avec la Zambie, le Rwanda, le Zimbabwe et le Mexique. Le gouvernement
a collaboré avec l’île Maurice en matière de gouvernance. La coopération avec la Chine et l’Éthiopie a été renforcée dans
les domaines de l’industrialisation et de la construction d’infrastructures. La Corée du Sud a joué un rôle crucial dans le
développement des entreprises et la gestion des réfugiés en Ouganda. Nos partenariats avec la République de Corée,
l’Inde, le Nigéria et l’Égypte nous ont permis de renforcer le système éducatif et la formation professionnelle. L’ensemble
de ces partenariats ont contribué à notre programme national de développement.

L’Ouganda a également démontré son engagement et sa capacité à proposer des solutions de développement à d’autres
pays. L’Ouganda participe ainsi au maintien de la paix en Somalie dans le cadre de la Mission régionale de l’Union africaine
en Somalie (AMISOM) et entend poursuivre ce soutien dans un avenir proche. Le pays a également apporté son soutien
dans le domaine des politiques relatives aux réfugiés et à l’immigration. À l’occasion de son Sommet de solidarité sur les
réfugiés organisé en 2017, l’Ouganda a fait montre d’une approche innovante et originale visant à renforcer la résilience
des réfugiés en leur donnant les moyens de « s’aider eux-mêmes ». Le pays a pris par ailleurs des engagements notables
dans le domaine de la santé, en particulier concernant la réponse humanitaire d’urgence aux épidémies telles qu’Ebola en
République démocratique du Congo (RDC), au Libéria et en Sierra Leone. À la suite des récentes découvertes de pétrole en
Afrique de l’Est, l’Ouganda a fourni une assistance technique au Kenya et à la Tanzanie pour la gestion pétrolière et gazière,
en particulier en matière d’élaboration de politiques minières.
Premier rapport sur la coopération Sud-Sud en Afrique 16

Plusieurs enseignements notables ont été tirés en Ouganda au cours de l’année passée ; je souhaiterais en citer quelques-
uns. Premièrement, il faut instaurer un environnement règlementaire et de mise en œuvre sain et de nature à faciliter le
renforcement de la coopération Sud-Sud. Ancrer la coopération Sud-Sud et triangulaire dans les politiques de coopération
et de partenariat existantes est primordial pour favoriser le développement durable et orienter les prises d’engagements
futurs. Deuxièmement, l’institutionnalisation de la coopération Sud-Sud et triangulaire est importante pour assurer une
coordination efficace. Chaque pays devrait désigner un ministère chargé d’encourager ces deux formes de coopération,
garantissant ainsi l’adaptation des actions prévues de coopération Sud-Sud au contexte local. Cela permettra également
d’augmenter la flexibilité de mise en œuvre des actions de l’ensemble des partenaires, afin d’atteindre les résultats de
développement attendus. Troisièmement, le partage de connaissances constitue un aspect essentiel de la coopération Sud-
Sud et triangulaire mais nécessite la mise en place de lignes directrices appropriées pour pouvoir contribuer efficacement
aux solutions de développement. L’appui technique ponctuel sous la forme de transfert de connaissances par le biais de
formations ou de visites d’analyse comparative s’est révélé inefficace. Pour un impact durable, il est nécessaire d’engager
des actions de formation continue et d’impliquer les responsables de mise en œuvre ainsi que les utilisateurs finaux. À cet
égard, le soutien de partenaires de développement est crucial pour faciliter des engagements de long terme, avec les pays
participants, en matière de coopération Sud-Sud et triangulaire.

La présente déclaration portant uniquement sur les activités lancées au cours de l’année passée, le gouvernement
ougandais prépare actuellement un rapport complet sur la coopération Sud-Sud, qui sera rendu public en 2019 et couvrira
l’ensemble des actions menées au cours des cinq dernières années. Le gouvernement s’est engagé à publier des rapports
de cette nature de façon régulière, dans le but d’encourager le débat et le dialogue politique sur la coopération Sud-Sud au
service du développement durable.

Pour finir, je voudrais exprimer ma profonde reconnaissance au Programme des Nations Unies pour le développement
et aux autres parties prenantes impliquées dans la rédaction de ce rapport. J’adresse un appel à nos partenaires pour
soutenir notre pays dans l’atteinte de ses objectifs de développement par le biais de la coopération Sud-Sud et triangulaire,
telle que présentée dans le document final de Nairobi adopté par la Conférence de haut niveau des Nations Unies sur la
coopération Sud-Sud.
17 Premier rapport sur la coopération Sud-Sud en Afrique

RWANDA

M. Louis-Antoine Muhire
Président-directeur général
Rwanda Cooperation Initiative
République du Rwanda

Le Rwanda a accompli des progrès significatifs en matière de développement et est persuadé que la coopération Sud-
Sud (CSS) et la coopération triangulaire offriront de plus en plus de solutions à des problèmes de développement communs,
en particulier dans le cadre de la coopération internationale.

Le Rwanda aimerait profiter de cet avant-propos pour souligner son engagement en faveur de la coopération Sud-Sud et
triangulaire, et de la mise en œuvre des ODD. Cet avant-propos contribue au Premier rapport sur la coopération Sud-Sud
en Afrique, qui étaie la deuxième Conférence de haut niveau des Nations Unies sur la coopération Sud-Sud (BAPA+40)
organisée en mars 2019, quarante ans après l’adoption du BAPA.

L’Agenda 2063 de l’Union africaine et son premier plan décennal de mise en œuvre (2014-2023) visent à construire une
Afrique intégrée, prospère et pacifique, dirigée par ses propres citoyens et représentant une force dynamique sur la scène
internationale.

Dans le cadre de ces efforts de coopération mondiaux, il est nécessaire d’établir un mécanisme panafricain coordonné
afin de mettre en commun des solutions durables aux différents défis de développement auxquels se heurtent les pays en
développement.

Grâce à son approche visionnaire, à sa volonté politique et à son leadership, le gouvernement du Rwanda a approfondi
ses connaissances et son expertise, et adopté de bonnes pratiques dans ces domaines. Ces initiatives clés, connues sous
les noms de « Solutions endogènes » (Home Grown Solutions – HGS) et « Expertise du secteur public » (Public Sector Expertise
– PSE), ont contribué de façon tangible à surmonter certains des obstacles majeurs rencontrés par le Rwanda après le
génocide ; ces initiatives reposent sur des valeurs locales, historiques et culturelles propres au Rwanda, qui se sont révélées
essentielles pour relever les défis sociaux, politiques et économiques.

En conséquence, ces dernières années, on a observé un intérêt croissant de la part de plusieurs pays et organismes
internationaux désireux de tirer parti de l’expérience du Rwanda. De nombreux pays africains sont également disposés à
partager leur propre expérience avec le Rwanda en échange des enseignements tirés de son modèle de développement
socioéconomique.

Afin de promouvoir la coopération Sud-Sud et triangulaire et de garantir un échange efficace des connaissances, le
gouvernement du Rwanda a décidé, lors du conseil des ministres du 14 septembre 2018, de créer la Rwanda Cooperation
Initiative (RCI). Cette entreprise publique, détenue à 100 % par l’État rwandais, doit servir de « guichet unique » aux acteurs
étrangers intéressés par le partage d’enseignements et d’expériences tirés de l’Expertise du secteur public et des Solutions
endogènes du Rwanda, en vue de bénéficier mutuellement de perspectives de développement. Les services de RCI
assureront une gestion efficace et répondront rapidement aux acteurs étrangers intéressés par un partage d’expériences
efficient.

Je tiens par ailleurs à souligner l’engagement du Rwanda à publier un rapport exhaustif en lien avec les visites d’étude sur
la CSS menées dans le pays et à rédiger des rapports réguliers afin de maintenir la dynamique en faveur de la coopération
Sud-Sud et triangulaire, pour garantir un développement efficace grâce à la coopération.

Je tiens à exprimer ma plus haute considération à l’endroit du Programme des Nations Unies pour le Développement (PNUD)
et des divers acteurs de l’écosystème qui contribuent à l’atteinte des objectifs de développement à travers la coopération
Sud-Sud et triangulaire.
Premier rapport sur la coopération Sud-Sud en Afrique 18

SOUDAN

Mirgani Abdalla Glood


Direction générale de la coopération extérieure
Ministère de la Coopération internationale
République du Soudan

Le Soudan continue de soutenir la coopération Sud-Sud (CSS) en tant que moyen essentiel à l’atteinte des objectifs de
développement durable (ODD) et de l’Agenda 2063 de l’Afrique.

Au Soudan, les activités relevant de la coopération Sud-Sud sont coordonnées de façon centralisée par le ministère des
Finances et de la Planification économique. Nous sommes heureux de mettre en avant notre expérience en contribuant à
ce rapport sur la coopération Sud-Sud en Afrique.

Nous préparons actuellement un compte rendu actualisé sur la contribution de la coopération Sud-Sud. Je souhaiterais
enfin adresser mes sincères remerciements à l’UNOSSC ainsi qu’aux autres parties prenantes ayant participé à l’élaboration
de ce rapport.
19 Premier rapport sur la coopération Sud-Sud en Afrique

INTRODUCTION

Un marché en Gambie (topsimages.com)


Premier rapport sur la coopération Sud-Sud en Afrique 20

Introduction

Au cours des dix dernières années, de nombreuses économies Ce chapitre souligne l’augmentation de la coopération
d’Afrique ont été le théâtre d’une croissance si rapide que Sud-Sud dans les programmes mondiaux et africains, tout
certains de ces pays sont devenus des contributeurs de en offrant un aperçu des divers modèles et mécanismes
premier plan en matière de coopération Sud-Sud (CSS). institutionnels utilisés par différents pays pour mettre en
L’apport de la coopération Sud-Sud au Programme mondial œuvre leurs actions de coopération Sud-Sud, de la mise
de développement durable à l’horizon 2030 et à l’Agenda 2063 en place de véritables agences à l’instauration de réseaux
de l’Afrique sont désormais clairement établis et reconnus. de bureaux de coordination et de cadres de coopération
La coopération Sud-Sud peut apporter des solutions de Sud-Sud.
développement innovantes, durables et adaptées aux
contextes locaux, permettant aux pays de renforcer leurs Le chapitre 2 se propose d’évaluer l’ampleur de la coopération
propres capacités nationales et leur autonomie. Sud-Sud sur le continent africain, à partir de données fournies
par neuf pays d’Afrique. Ce chapitre analyse également la
Il y a quarante ans, les pays du Sud se réunissaient à Buenos façon dont cette coopération contribue au Programme 2030
Aires à l’occasion de la première Conférence des Nations Unies et à l’Agenda 2063. Il présente différents types de partenaires
sur la coopération Sud-Sud. Son document final, dénommé impliqués ainsi que des exemples d’actions en cours.
par la suite Plan d’action de Buenos Aires, proposait une
série de recommandations pour renforcer la coopération Le chapitre 3 porte quant à lui sur l’avenir et émet des
Sud-Sud. La deuxième Conférence des Nations Unies sur la propositions pour intensifier la coopération Sud-Sud et en
coopération Sud-Sud, qui s’est tenue en mars dernier, nous étendre la portée. Ce chapitre inclut une contribution du
a offert l’occasion d’évaluer les progrès accomplis. Entre- Secrétariat général ibéro-américain, qui fait part de ses
temps, la conjoncture mondiale a profondément évolué et expériences en matière de suivi et de compte rendu de
la transition de l’Afrique a montré des signes encourageants. la coopération Sud-Sud dans les pays ibéro-américains,
notamment concernant les dix années de publication du
Le présent rapport retrace les réussites de l’Afrique en rapport ibéro-américain sur la coopération Sud-Sud ainsi que
matière de coopération Sud-Sud. Comme le montrent les la plateforme de gestion des données du Secrétariat, connue
avant-propos, les pays africains sont aujourd’hui en train sous le nom de SIDICSS (système de bases de données
de définir leurs priorités et engagements en matière de intégré ibéro-américain sur la coopération Sud-Sud et la
coopération Sud-Sud. Le continent a ainsi l’occasion de coopération triangulaire). Le chapitre 3 intègre également
renforcer sa contribution à son propre développement et des contributions de la Banque islamique de développement
d’accroître la visibilité de ses actions allant dans ce sens. Dans s’agissant de l’élaboration d’approches innovantes pour
l’esprit d’un véritable partenariat de coopération Sud-Sud, ce intensifier la coopération Sud-Sud, telles que son dispositif à
rapport a bénéficié du soutien de l’Agence de développement flux inversés actuellement en cours de développement, ainsi
de l’Union africaine (AUDA-NEPAD), du Programme des que ses modalités de cartographie des centres d’excellence.
Nations Unies pour le développement (PNUD), de la Banque Enfin, ce troisième et dernier chapitre inclut une analyse du
islamique de développement (BID) et du Secrétariat général PNUD sur l’utilisation de la coopération triangulaire pour
ibéro-américain (Secretaría General Iberoamericana – développer des partenariats internationaux plus larges et
SEGIB). inclusifs et pour mobiliser davantage de connaissances et
d’expertise.
Le chapitre 1 commence par une analyse des initiatives
mondiales, régionales, interrégionales et nationales Nous espérons que ce rapport sera le premier d’une longue
menées en vue d’institutionnaliser la coopération Sud- série. Le rôle actif que joue l’Afrique dans le domaine de la
Sud. Il définit le cadre permettant l’instauration d’un CSST mérite d’être reconnu et salué. En traçant clairement sa
écosystème de coopération Sud-Sud en Afrique à partir des propre voie, l’Afrique peut maximiser son potentiel.
recommandations originales du Plan d’action de Buenos
Aires et évalue les progrès atteints.
21 Premier rapport sur la coopération Sud-Sud en Afrique

L’offre renouvelée du Programme des


Nations Unies pour le développement
en faveur de la coopération Sud-Sud
et triangulaire en Afrique
I. Introduction pour favoriser la coopération Sud-Sud et triangulaire ; en
parallèle, l’UNOSSC joue un rôle rassembleur à l’échelle
Depuis sa création, le PNUD s’efforce de coopérer avec les mondiale, permettant à différents organes législatifs
gouvernements des pays du Sud pour optimiser les effets des Nations Unies de prendre des décisions éclairées et
du développement et accélérer l’éradication de la pauvreté. d’atteindre les objectifs politiques en matière de CSS, tout en
Avant l’adoption, en 1978, du Plan d’action de Buenos Aires renforçant la coordination à l’échelle du système des Nations
pour la promotion et la mise en œuvre de la coopération Unies afin d’accélérer, d’accroître et d’approfondir l’appui
technique entre pays en développement (BAPA), le PNUD du système des Nations Unies pour le développement à la
avait réuni un panel d’intellectuels et de planificateurs de coopération Sud-Sud et triangulaire.
haut niveau au Koweït afin d’énoncer les questions majeures
devant être abordées lors de la conférence. Cette dernière II. Promotion de la coopération Sud-Sud
s’annonçait comme un événement décisif dessinant les et triangulaire : les atouts du PNUD à
contours d’un nouvel ordre mondial – une occasion unique
pour la communauté internationale d’aider deux milliards de l’échelle régionale et mondiale
personnes à libérer leur créativité, offrant ainsi de nouvelles
perspectives à l’humanité. Le PNUD prône la coopération Sud-Sud, un instrument
Restant fidèle à l’esprit du BAPA de 1978, le PNUD a acquis indispensable pour aider les pays à atteindre leurs objectifs
une solide expérience en tant que « courtier du savoir » et de développement. Le PNUD tire parti de sa présence
facilitateur de partenariats, en soutenant le développement au niveau national et de sa capacité opérationnelle pour
des capacités dans le cadre de la coopération Sud-Sud (CSS) favoriser la coopération Sud-Sud et triangulaire.
et triangulaire afin d’aider les pays à tirer le meilleur parti
des effets du développement et à accélérer l’éradication L’offre renouvelée du PNUD en faveur de la coopération
de la pauvreté ainsi que la réalisation des objectifs de Sud-Sud et triangulaire repose sur plusieurs avantages
développement définis à l’échelle internationale. Par comparatifs indéniables :
ailleurs, comme le montrent les documents de planification
stratégique – descriptifs de programme de pays – du PNUD, • Une présence significative au niveau national et de
la coopération Sud-Sud et triangulaire est inscrite depuis solides partenariats locaux dans plus de 170 pays,
toujours dans son ADN. favorisant les échanges, partenariats, financements et
Dans le cadre du nouveau programme de développement, transferts d’expertise menés par les pays, à l’intérieur
le PNUD continuera de mener à bien sa mission, de remplir du continent africain et au niveau interrégional. Les
son rôle dans les pays, de tirer parti de son réseau mondial et programmes existants et les capacités actuelles du
d’établir de solides partenariats avec des acteurs nationaux personnel du PNUD ainsi que les initiatives stratégiques
et des institutions régionales. S’appuyant sur les principes récentes/prévues dans le cadre de nos solutions
clés de la stratégie du PNUD en matière de coopération Sud- distinctives et domaines de connaissances spécifiques
Sud et triangulaire élaborée en 2016, le Plan stratégique concernant les objectifs de développement durable (ODD)
2018-2021 du PNUD considère la coopération Sud-Sud permettront de concrétiser et de faciliter la coopération
et triangulaire comme un moteur essentiel à la mise en Sud-Sud et triangulaire de manière effective. Au sein de
œuvre du Programme 2030. La priorité systématiquement son réseau élargi, le PNUD peut s’appuyer sur certains
et dûment accordée par le PNUD à la coopération Sud-Sud bureaux de pays (notamment ceux de l’Éthiopie, de
et triangulaire est solidement ancrée. Elle permet de tirer l’Ouganda et du Rwanda en Afrique). Grâce à l’expérience
pleinement parti de l’offre de développement du PNUD, du qu’ils ont emmagasinée, ces bureaux sont devenus des
modèle d’entreprise et des modalités du programme afin de centres d’excellence ; ils jouent un rôle moteur au
collaborer avec les pays partenaires et selon les directives niveau mondial, font office de facilitateurs et tiennent
des gouvernements nationaux, en vertu de leurs politiques. lieu de pôles de savoir, permettant ainsi d’approfondir
et de renforcer l’engagement du PNUD en faveur de la
Par ailleurs, conformément au BAPA de 1978, le PNUD coopération Sud-Sud et triangulaire.
se félicite de continuer à héberger le Bureau des Nations
Unies pour la coopération Sud-Sud (UNOSSC). L’efficacité • Les six solutions distinctives du PNUD favorisent
de la collaboration entre le PNUD et l’UNOSSC repose sur la la mise en œuvre des ODD selon une approche
complémentarité de leurs forces. Le PNUD tire parti de sa multidisciplinaire ; elles visent à éliminer la pauvreté,
présence au niveau national et de sa capacité opérationnelle à renforcer la gouvernance, à favoriser la prévention
Premier rapport sur la coopération Sud-Sud en Afrique 22

des crises et la reprise, à promouvoir des solutions de PNUD continuera d’encourager la coopération Sud-Sud et
développement fondées sur la nature, à réduire le fossé triangulaire aux niveaux national et régional grâce à son
énergétique et à faire progresser l’égalité des sexes. Ces réseau de centres régionaux et de bureaux de pays, afin
solutions peuvent être adaptées aux différents contextes, d’aider les pays à renforcer leurs capacités institutionnelles et
que l’objectif soit l’élimination de la pauvreté généralisée, politiques à échanger des connaissances, à adopter de bonnes
la transformation structurelle ou la reprise à la suite d’une pratiques à grande échelle et à favoriser des partenariats
crise. Au fil de leur mise en œuvre, elles permettront bilatéraux et régionaux. En Afrique, l’objectif ultime est de
également aux pays du programme d’acquérir de contribuer à la transformation du paysage de la coopération
l’expérience et de développer leurs connaissances. au service du développement et de promouvoir le leadership
Pour chacune des six solutions distinctives, le PNUD des pays du continent dans le domaine du développement à
est en mesure d’apporter une expertise technique afin l’échelle mondiale. Cela inclut notamment les points suivants :
d’aider les pays d’Afrique à renforcer leurs capacités
institutionnelles et politiques en vue d’établir des • favoriser l’amélioration des politiques, des stratégies de
partenariats, d’échanger des connaissances, d’adopter financement et d’investissement, des cadres juridiques,
de bonnes pratiques à grande échelle et de favoriser administratifs et règlementaires afin de stimuler
des partenariats bilatéraux et régionaux en matière de l’engagement en faveur de solutions de développement ;
coopération Sud-Sud et triangulaire.
• aider les économies émergentes à renforcer leurs
• Un réseau émergent de 50 plateformes d’appui aux capacités institutionnelles, afin de mieux gérer les
pays et de 60 Accelerator Labs nationaux constitue investissements et les programmes de coopération au
le fer de lance de l’élaboration, du lancement, de service du développement ;
la reproduction et du déploiement de solutions de
développement pour les pays du Sud, intégrant ainsi • mettre au point des mécanismes de suivi, d’analyse,
délibérément l’apprentissage et l’expertise Sud-Sud aux de surveillance et d’évaluation aux niveaux national et
approches opérationnelles et réseaux de connaissances régional ;
associés. Sur les 60 laboratoires, 27 sont en cours de
création en Afrique et s’accompagnent d’un éventail • faciliter les initiatives et les partenariats Sud-Sud
d’initiatives visant à renforcer les capacités essentielles bilatéraux, intrarégionaux et interrégionaux, afin de
(savoirs techniques, méthodes d’innovation, solutions de traiter les questions de développement prioritaires ;
planification), à réformer les cadres politiques, fiscaux et
règlementaires, à développer les réseaux (partenaires, • développer et/ou renforcer les capacités des parties
mentors, entrepreneurs sociaux, agents du changement), prenantes, y compris des gouvernements, des institutions
à tirer parti de nouvelles sources de financement régionales, du monde universitaire, des organisations de
(financements basés sur les résultats, investissements à la société civile et des groupes de réflexion, entre autres.
impact et fonds propres, entre autres) et à favoriser la
communication et le plaidoyer. Dans le cadre de son programme régional pour l’Afrique,
le PNUD s’est associé aux gouvernements africains pour
• Le rôle du PNUD en tant qu’intégrateur du Programme appuyer l’élaboration du cadre institutionnel de coopération
2030 marque de son empreinte une nouvelle génération Sud-Sud au niveau national. Cet appui a pris plusieurs
d’équipes de pays des Nations Unies ; l’expertise du PNUD formes : supervision de l’élaboration d’une stratégie nationale
est mise à la disposition du système de développement en matière de CSS, alignée sur les priorités du pays (achevée
élargi, en développant notamment la mise en réseau et au Botswana et en cours au Cabo Verde) ; soutien à la
l’apprentissage Sud-Sud transfrontaliers, en partenariat systématisation des bonnes pratiques et suivi des partenariats
avec l’UNOSSC. de CSS (achevé en Côte d’Ivoire et en cours à l’île Maurice, au
Mozambique et au Rwanda) ; création d’un environnement
III. L’offre du PNUD en Afrique et au propice à la mise en place d’agences spécifiques de CSS (en
cours au Cabo Verde, en Éthiopie et au Rwanda) ; appui à
niveau mondial la réalisation d’un état des lieux au niveau national, pour
encourager la tenue de débats politiques autour de la CSS (en
Fort de son expérience et de ces avantages comparatifs Éthiopie et en Ouganda).
programmatiques, et afin d’appuyer la mise en œuvre du
document final du BAPA+40 récemment adopté, le PNUD Au niveau régional, le PNUD a dirigé, avec ses partenaires,
continuera de soutenir les pays d’Afrique autour de deux axes l’élaboration du Rapport sur la coopération Sud-Sud en
majeurs : Afrique présenté ici ; il continuera d’appuyer ce processus
en mobilisant d’autres pays volontaires ainsi que des
i. Mise en place d’un environnement propice à organisations régionales majeures.
la CSS aux niveaux national et régional

À mesure que l’architecture de développement évolue, de


nombreux pays ne se contentent plus d’être les bénéficiaires
de la coopération au service du développement ; ils sont
aussi des partenaires actifs de la coopération Sud-Sud. Le
23 Premier rapport sur la coopération Sud-Sud en Afrique

ii. Mise en place d’une plateforme Le PNUD s’appuiera sur son réseau sans égal pour piloter
d’échanges et d’un réseau de solutions de une plateforme d’échanges et un réseau de solutions de
développement en faveur des pays du Sud, à l’échelle
développement pour les pays du Sud
mondiale. L’établissement de partenariats entre pays en
développement, visant à échanger, à reproduire et à moduler
différentes solutions est une stratégie adaptée aux contextes
des pays du Sud, durable et souvent rentable pour lesdits pays
et leurs communautés. L’approche intégrée du programme
de développement durable et l’engagement de « ne laisser
personne de côté » sont l’occasion d’approfondir de telles
initiatives. Dans cette perspective, le PNUD :

• tirera parti de son réseau d’Accelerator Labs pour


lancer et valoriser rapidement les solutions locales qui
fonctionnent dans différents contextes et pour améliorer
les connaissances collectives sur l’ensemble du réseau ;

• veillera à ce que les plateformes d’appui aux pays, à


mesure de leur mise en œuvre, mettent l’accent sur
des enjeux de développement complexes et offrent un
espace de collaboration favorisant des échanges Sud-Sud
pertinents ;

• continuera d’appuyer la codification systématique


des connaissances en ce qui concerne les solutions de
développement des pays du Sud, et mettra à disposition
les plateformes SSMart et African Solutions Platform – des
espaces dédiés favorisant les échanges et l’accès à ces
solutions et bonnes pratiques ; cette plateforme ouverte,

Mise en relation Sud-Sud pour la réalisation des objectifs de


développement durable

Le Centre de services régional pour l’Afrique du PNUD Côte d’Ivoire, Kenya, Maurice, Ouganda et Rwanda).
favorise l’instauration de partenariats de coopération Un certain nombre de pays d’Afrique se sont montrés
Sud-Sud intra-africains visant à faciliter les transferts de disposés à présenter leurs bonnes pratiques (et à devenir
connaissances, en organisant des événements de mise ainsi des fournisseurs de solutions de développement) ;
en relation en vue de la réalisation des ODD. Les deux plusieurs partenaires traditionnels explorent également
premières éditions ont rencontré un grand succès et la possibilité de participer à ces événements afin de
permis à plusieurs pays d’établir des partenariats Sud- promouvoir des partenariats de coopération triangulaire.
Sud avec leurs pairs (Afrique du Sud, Bénin, Botswana,
Premier rapport sur la coopération Sud-Sud en Afrique 24

qui recense les solutions de développement des pays du La capacité de mise en œuvre de cette offre est assurée par
Sud imaginées en Afrique, sera prochainement associée les bureaux de pays et les centres régionaux du PNUD. Les
à d’autres banques de connaissances Sud-Sud ainsi qu’à résultats mesurables sont documentés intégralement lors du
la « Galaxie Sud-Sud » de l’UNOSSC ; processus de suivi-évaluation de la mise en œuvre du Plan
stratégique du PNUD, comme le montre le graphique ci-
• continuera de créer des espaces dédiés, à l’occasion dessous, lequel fournit un aperçu du travail mené par le PNUD
de manifestations sur le continent africain mettant en Afrique en matière de CSS en 2018 (afin d’aider les pays à
en présence les acteurs de l’offre et de la demande de échanger des connaissances, à renforcer leurs capacités et à
solutions de développement. mettre en place des partenariats).

Coopération Sud-Sud et triangulaire


25 Premier rapport sur la coopération Sud-Sud en Afrique

CHAPITRE 1

Pêcheurs ghanéens (pixabay.com)


Premier rapport sur la coopération Sud-Sud en Afrique 26

Analyse des écosystèmes nationaux,


régionaux et mondiaux de la coopération
Sud-Sud en Afrique
I. Plan d’action de Buenos Aires : L’institutionnalisation de la coopération Sud-Sud est
incarnée dans le Programme mondial de développement
normalisation de la coopération à l’horizon 2030 des Nations Unies, qui a remplacé les
Sud-Sud huit objectifs du millénaire pour le développement (OMD)
fixés pour 2015. Il est intéressant de noter que la Position
L’Afrique a réalisé d’importants progrès dans commune africaine (PCA) de l’Union africaine sur le
l’institutionnalisation de la coopération Sud-Sud (CSS), programme de développement pour l’après-2015, qui a joué
suivant un certain nombre des recommandations un rôle dans la définition du Programme 2030, soulignait
présentées dans le Plan d’action de Buenos Aires. Le Plan l’importance d’encourager les partenariats gagnant-gagnant,
d’action de Buenos Aires était un document fondateur, qui en particulier en vue de renforcer les coopérations Sud-
a posé les jalons des toutes premières dispositions pour le Sud, Nord-Sud, triangulaire et avec les diasporas. La PCA
développement d’un écosystème de coopération Sud-Sud, plaidait en outre pour le renforcement de la coopération
en renforçant notamment les mécanismes et instruments technique et scientifique, y compris la coopération Nord-
de cette coopération. Dans sa forme originale, le Plan Sud, la coopération Sud-Sud et la coopération triangulaire,
d’action de Buenos Aires de 1978 était un plan d’action réaffirmant l’importance du développement des ressources
consensuel signé par 138 États membres, avec pour humaines à travers la formation, le partage d’expériences
objectif ultime de façonner un nouvel ordre mondial plus et d’expertise, le transfert de connaissances ou encore
représentatif, plus démocratique et plus équitable autour l’assistance technique au renforcement des capacités1.
des principes du multilatéralisme et du commerce mondial.
Les États membres signataires s’accordaient à intensifier Dans le cadre de ce nouveau Programme 2030 des Nations
la coopération Sud-Sud aux niveaux national, régional, Unies axé sur l’être humain, qui vise à ne laisser personne
interrégional et mondial. Alors que quarante années se sont de côté, 17 objectifs de développement durable (ODD)
écoulées et que la situation internationale a profondément ont été approuvés au terme de consultations mondiales
évolué, les recommandations émises dans ce plan d’action menées auprès d’un vaste panel de parties prenantes.
restent plus pertinentes que jamais et constituent de Ces objectifs, d’une étendue plus large que celle des OMD,
nouvelles pistes pour intensifier la coopération Sud-Sud. visent à répondre aux causes profondes de la pauvreté et
Ce chapitre étudie l’évolution de la coopération Sud-Sud, à favoriser l’avènement d’une prospérité partagée. Ils se
en particulier dans le contexte africain, en reprenant les
répartissent sur trois grands domaines : économique, social
recommandations du Plan d’action de Buenos Aires comme
et environnemental2. L’une des caractéristiques essentielles
cadre d’analyse de ces évolutions.
de ces objectifs a trait à la mobilisation des ressources.
L’objectif 17 (Renforcer les moyens de mettre en œuvre le
II. La coopération Sud-Sud au niveau Partenariat mondial pour le développement durable et le
mondial revitaliser) reconnaît le rôle complémentaire que peut jouer
la coopération Sud-Sud vis-à-vis des coopérations régionale,
Le Plan d’action de Buenos Aires visait à renforcer les internationale et Nord-Sud en vue d’atteindre les ODD3.
mécanismes pouvant favoriser la coopération Sud-Sud à Il souligne également l’importance du commerce, de la
l’échelle internationale. À cet égard, ce plan d’action proposait technologie, du développement des capacités, de la finance
différents moyens d’encourager les perspectives et les et des dynamiques systémiques/institutionnelles.
solutions endogènes propres aux pays en développement
et de consolider leur influence sur la scène internationale. La troisième Conférence internationale sur le financement
Il définissait également le rôle des Nations Unies en soutien du développement, qui a abouti à la production du
à ces initiatives. Le document du Plan d’action de Buenos Programme d’action d’Addis-Abeba de 2015, a fourni un
Aires affirmait que la coopération Sud-Sud devait imprégner cadre facilitant les flux financiers axés sur la réalisation des
l’ensemble du système des Nations Unies et des programmes ODD, y compris au travers de la coopération Sud-Sud4. Les
mondiaux de coopération au développement dans lesquels documents finaux de la Conférence des Nations Unies sur
seraient engagés des États membres, ce qui se reflète le développement durable ou Conférence Rio+20 (2012),
aujourd’hui dans différents accords de développement et du Sommet des Nations Unies sur le développement
programmes d’action internationaux. durable (2015)5 et du Cadre de Sendai pour la réduction
des risques de catastrophe 2015-2030 font eux aussi

1 Union africaine, Position commune africaine sur le programme de développement pour l’après-2015, 2014
2 https://www.un.org/sustainabledevelopment/development-agenda/
3 Mariella di Ciommo, Approaches to measuring and monitoring South–South cooperation, 2017
4 Assemblée générale des Nations Unies, résolution adoptée par l’Assemblée générale le 27 juillet 2015, 17 août 2015
5 http://www.un.org/ga/search/view_doc.asp?symbol=A/RES/66/288&Lang=E ; Nations Unies, Troisième Conférence internationale sur le financement du
développement, Addis-Abeba, 15/07/2015
27 Premier rapport sur la coopération Sud-Sud en Afrique

explicitement mention de la coopération Sud-Sud6.


L’Accord de Paris signé en 2015 par 174 pays développés La deuxième Conférence de haut niveau des Nations Unies sur
et en développement misait sur des contributions la coopération Sud-Sud (BAPA+40) s’est tenue en Argentine
prévues déterminées au niveau national pour faire face en mars 2019. Cette conférence, dont l’organisation a été
au changement climatique et soulignait l’importance de confiée au Bureau des Nations Unies pour la coopération
transférer ces solutions entre pays et de partager de Sud-Sud, s’articulait autour du thème suivant : « Rôle de
nouvelles technologies7,8. la coopération Sud-Sud et mise en œuvre du Programme
de développement durable à l’horizon 2030 : difficultés et
Pour encourager la coopération Sud-Sud, les Nations Unies perspectives ». Lesdites difficultés et perspectives relatives
ont également commencé à l’intégrer dans l’ensemble de au renforcement du cadre institutionnel de la coopération
leurs structures et institutions. Le Conseil économique Sud-Sud et de la coopération triangulaire faisaient partie
et social (ECOSOC) s’est principalement concentré sur la des quatre principaux sous-thèmes à l’ordre du jour13.
question de la coopération Sud-Sud et triangulaire dans le
cadre de son forum sur le financement du développement. III. La CSS à l’échelle régionale :
Le Forum pour la coopération en matière de développement,
qui propose un dialogue sur les tendances internationales
pratiques actuelles
en matière de coopération, accorde également une place
À l’échelle régionale, le Plan d’action de Buenos Aires
croissante à la coopération Sud-Sud et triangulaire, comme
prévoyait un renforcement des institutions existantes et une
en a témoigné son Quatrième symposium préparatoire de
coopération accrue avec d’autres organisations régionales.
haut niveau organisé en Argentine en 2017, lequel était axé
Cela a, par la suite, été intégré dans des politiques et cadres
principalement sur ladite coopération. En 2018, près de 30
africains, dont le document-cadre de 2001 du Nouveau
entités des Nations Unies avaient intégré la coopération Sud-
Partenariat pour le développement de l'Afrique (NEPAD), qui
Sud au sein de leurs cadres, plans, stratégies et budgets9.
énonce clairement l’engagement de l’Afrique à développer
Le Secrétaire général des Nations Unies publie désormais
et à renforcer des partenariats Sud-Sud destinés à assurer
chaque année un rapport sur l’état de la coopération Sud-Sud, un développement durable14. En 2010, la Deuxième réunion
couvrant des thématiques telles que les progrès accomplis par régionale sur l’efficacité de l’aide, la coopération Sud-
les Nations Unies pour intégrer la coopération Sud-Sud dans Sud et le développement des capacités a mis en exergue
des cadres et stratégies politiques, les approches innovantes l’importance de synthétiser les études de cas africaines pour
de soutien à la coopération Sud-Sud, les actions des Nations encourager le transfert interrégional d’apprentissages et de
Unies pour soutenir les États membres dans leurs efforts connaissances dans le cadre de la coopération Sud-Sud. Les
de coopération Sud-Sud et les moyens de développer cette initiatives du NEPAD en la matière sont exposées plus en
coopération dans l’ensemble du système des Nations Unies10. détail dans la section suivante.

En janvier 2018, la résolution 72/237 de l’Assemblée générale L’Afrique a également contribué à l’élaboration de plusieurs
des Nations Unies a confié au Bureau des Nations Unies pour cadres de partenariat Sud-Sud, en particulier avec le Brésil,
la CSS un rôle dans la promotion et l’encouragement de la la Russie, l’Inde, la Chine et l’Afrique du Sud (les BRICS).
coopération CSST à l’échelle mondiale et à travers l’ensemble Parmi ces accords de partenariat figurent notamment le
du système. Cette résolution soulignait également la Forum sur la coopération sino-africaine, le Cadre Afrique-
nécessité d’un mécanisme interinstitutions coordonné par Amérique du Sud, la Conférence internationale de Tokyo sur
le Bureau des Nations Unies pour la CSS, qui appuierait les le développement de l’Afrique (CITDA) et le Forum Afrique-
initiatives de CSST et renforcerait l’échange d’informations Inde.
entre ces différentes institutions11. Ce mécanisme est
désormais en place. En Amérique latine, le Programme ibéro-américain
visant à renforcer la coopération Sud-Sud (« Programa
Il existe également un consortium de partenaires engagés Iberoamericano para el Fortalecimiento de la Cooperación
dans la coopération triangulaire, parmi lesquels le Sur-Sur - PIFCSS ») a mené des actions en vue de renforcer
Canada, le Japon, le Mexique, le Bureau des Nations Unies la coopération Sud-Sud sur les plans politique, technique et
pour la coopération Sud-Sud, la Banque islamique de conceptuel, en améliorant la perception et la compréhension
développement (BID) et l’Organisation de coopération et de générale de la coopération Sud-Sud. Le PIFCSS contribue
développement économiques (OCDE). Connu sous le nom également aux rapports annuels ibéro-américains sur les
d’« Initiative de partenariat mondial pour une coopération activités de coopération Sud-Sud en Amérique latine ainsi
triangulaire efficace », ce consortium s’inscrit dans le cadre qu’à la formalisation des méthodologies de publication
du Partenariat mondial pour l’efficacité de la coopération d’informations sur la coopération Sud-Sud15. Ne se
pour le développement12. contentant pas de fournir des données sur la coopération
6 http://www.un.org/en/development/desa/population/migration/generalassembly/docs/globalcompact/A_RES_69_283.pdf
7 L’Accord de Paris regroupe aujourd’hui 185 signataires ; CCNUCC, Accord de Paris – État des ratifications, https://unfccc.int/process/the-paris-agreement/status-of-
ratification
8 https://unfccc.int/sites/default/files/english_paris_agreement.pdf
9 Secrétaire général des Nations Unies, état de la coopération Sud-Sud, 13/08/2018
10 Ces rapports sont disponibles sur : https://drive.google.com/drive/folders/0B-buqyoV0jpSXzF6d1k2TzZtS1U
11 Assemblée générale des Nations Unies, résolution adoptée par l’Assemblée générale le 20 décembre 2017, 23/01/2018
12 Secretaría General Iberoamericana, Rapport 2017 sur la coopération Sud-Sud
13 Assemblée générale des Nations Unies, Note du Secrétaire général sur le processus préparatoire de la deuxième Conférence des Nations Unies sur la coopération
Sud-Sud, 29/01/2018
14 http://www.nepad.org/agenda-2063/publication/agenda-2063-framework-document
15 Voir par exemple https://www.segib.org/en/?document=informe-de-cooperacion-sur-sur-en-iberoamerica-2017
Premier rapport sur la coopération Sud-Sud en Afrique 28

Sud-Sud, le processus même de collecte de ces données durable, organisé par la Commission économique des
et de production du rapport a encouragé le renforcement Nations Unies pour l’Afrique en vue de soutenir la mise en
des partenariats de coopération Sud-Sud dans la région, œuvre du Programme 2030 et de l’Agenda 2063 de l’Union
renforçant ainsi l’intégration politique et économique africaine.
régionale. Conscient que l’élaboration d’une politique de
coopération Sud-Sud globale demeure freinée par les enjeux Pour exploiter pleinement son potentiel et atteindre ses
politiques, institutionnels et règlementaires de chaque pays, objectifs de développement, l’Afrique s’est engagée à nouer
le PIFCSS s’efforce de trouver des solutions à ces enjeux constamment de nouveaux partenariats plus efficaces,
afin de renforcer l’institutionnalisation de la coopération stratégiques et dotés de ressources solides. Ces partenariats
Sud-Sud dans la région ibéro-américaine. Une politique devraient se refléter dans la conception d’une stratégie
globale permettrait d’identifier de façon claire les priorités africaine globale qui oriente les relations du continent avec
et solutions de coopération Sud-Sud nationales pouvant ses partenaires du Sud.
ensuite être adoptées à plus grande échelle au moyen
de partenariats régionaux solides, ce qui encouragerait Le contexte régional africain a profondément évolué
l’intégration et la collaboration sur des thématiques depuis le Plan d’action de Buenos Aires. L’Union africaine
transfrontalières clés. L’évaluation et la justification des a élaboré différents cadres et mécanismes pour renforcer
actions de coopération Sud-Sud restent également un enjeu. l’intégration régionale sur le continent, tout en déployant
Le PIFCSS affirme néanmoins qu’il importera à l’avenir non des efforts concertés en vue d’accroître son efficacité et
seulement de mesurer les engagements de coopération son efficience19. Dans le cadre de ces réformes, il a été
Sud-Sud d’un point de vue quantitatif, mais aussi d’évaluer décidé en juillet 2018 de transformer l’Agence du NEPAD
leur incidence vérifiable et d’encourager une utilisation (l’instance de l’Union africaine chargée du développement)
rationnelle des ressources16. en Agence de développement de l'Union africaine, dotée
d’une identité juridique propre. Le mandat de l’Agence
Ce rapport, qui s’inspire en partie de l’expérience ibéro- de développement de l'Union africaine a été approuvé en
américaine pour l’adapter au contexte stratégique actuel novembre 201820. Le NEPAD étant fondé sur l’ambition
de l’Afrique, incarne un renouveau pour renforcer le cadre de contribuer à la construction d’une « Afrique intégrée,
institutionnel régional, promouvoir des partenariats intra et prospère et pacifique, dirigée par ses propres citoyens et
interrégionaux, mais aussi encourager le dialogue à l’échelle représentant une force dynamique dans l'arène mondiale »,
du continent au sujet des politiques à mener en matière de son objectif principal est de favoriser la coopération Sud-
coopération Sud-Sud, tel que le prévoit le Plan d’action de Sud21. Ces efforts permettront au continent de progresser
Buenos Aires. en accord avec sa vision du développement, telle que définie
dans l’Agenda 2063.
En définissant des mécanismes et institutions pour passer à
l’action, l’Afrique peut déterminer clairement ses modalités Le rapport annuel 2017 du NEPAD détaille sa contribution
de renforcement des partenariats (panafricains notamment) à l’Agenda 2063 dans cinq grands domaines de résultats :
et consolider son positionnement vis-à-vis d’autres régions a) Révolution des compétences et entrepreneuriat,
sur la base de priorités communes et d’un respect mutuel. b) Capacité de durabilité et de résilience, c) Amélioration de la
santé et de la nutrition, d) Systèmes agricoles et alimentaires
IV. Agenda 2063 : les efforts menés transformés et e) Couloirs intégrés d’infrastructures,
au niveau continental et régional commerce et marchés22. Dans chacun de ces domaines, le
NEPAD a mené des actions en vue de renforcer la coopération
L’Afrique a clairement établi ses priorités de développement Sud-Sud à de multiples niveaux. À l’échelle du continent, cela
et de transformation à long terme dans son « Agenda 2063 : s’est traduit par des mesures telles que la généralisation des
l’Afrique Que Nous Voulons », adopté à l’occasion du sommet nouvelles technologies pour l’innovation à travers l’Initiative
de l’Union africaine (UA) de janvier 2015. L’Agenda 2063 met pour la science, la technologie et l’innovation de l’Agence de
notamment l’accent sur l’appropriation, la mobilisation du développement de l'Union africaine (héritière du NEPAD),
continent et la promotion de l’autonomie africaine17. De la consolidation de la position africaine sur le changement
plus en plus d’actions visant à aligner l’Agenda 2063 sur le climatique et l’adoption du traité de l’Agence africaine des
Programme 2030 sont aujourd’hui menées. La résolution médicaments23.
72/310 des Nations Unies salue les efforts déployés par le
continent africain dans le cadre de l’Agenda 2063, réaffirme L’AUDA-NEPAD étend la mise en œuvre de cadres et de
le soutien à la déclaration des Nations Unies sur le NEPAD et programmes continentaux, régionaux et nationaux au
souligne l’importance de la coopération Sud-Sud18. Plusieurs travers des communautés économiques régionales et des
actions ont également été engagées en ce sens, à l’instar États membres, la coopération Sud-Sud en constituant un
du Forum régional africain 2017 pour le développement vecteur de plus en plus central. Il convient de noter que les

16 Ibid.
17 https://au.int/sites/default/files/pages/3657-file-agenda2063_popular_version_fr.pdf
18 http://www.un.org/en/ga/search/view_doc.asp?symbol=A/RES/72/310&Lang=F
19 https://au.int/fr/node/34952
20 https://www.tralac.org/news/article/13708-11th-extraordinary-summit-of-the-african-union-summary-of-key-decisions.html
21 http://www.nepad.org/fr/who-we-are/fr-about-us
22 https://www.nepad.org/publication/annual-report-2017
23 Ibid.
29 Premier rapport sur la coopération Sud-Sud en Afrique

communautés économiques régionales constituent des administratifs et juridiques relatifs à l’entrée, à l’emploi, aux
piliers fondateurs de l’Union africaine, tel qu’énoncé dans obligations et aux prérogatives des experts et consultants
sa feuille de route 2016-2020. Il existe huit communautés en coopération Sud-Sud au sein de ces régions. Le Plan
économiques régionales reconnues par l’Union africaine24. d’action de Buenos Aires défendait également l’idée de
créer des mécanismes régionaux de gouvernance au sein
Chacune d’elles ayant connu un développement différent, des institutions régionales, afin de stimuler l’uniformisation
il est impossible d’adopter une approche commune25. des normes techniques relatives aux achats, aux règles
Certaines ont par ailleurs été freinées par des divergences commerciales et aux régimes fiscaux et monétaires en vue
politiques et économiques. Ces organisations commencent de favoriser la CSST. Enfin, le Plan d’action de Buenos Aires
à présent à élaborer des cadres régionaux fondés sur des recommandait de soutenir les institutions régionales dans
intérêts et efforts nationaux identifiés conjointement. Si des l’élaboration de positions communes sur des perspectives de
échanges de coopération Sud-Sud existent bel et bien au développement clés.
sein des différentes communautés économiques régionales,
l’absence de cadres régionaux globaux de coopération L’Afrique a déjà accompli des progrès en ce sens. Fidèle à
Sud-Sud en empêche la généralisation, par manque de son credo en faveur d’une intégration et d’un commerce
systématisation et de disponibilité des informations. En des biens et services intra-africain accrus, l’Union africaine a
l’absence de cadres spécifiques, ces échanges ne peuvent facilité la signature d’un accord de libre-échange continental
s’inscrire dans une perspective de long terme et n’alimentent africain. En février 2019, 49 de ses 55 États membres avaient
pas de cadre régional global fondé sur les priorités nationales signé un accord pour supprimer les droits de douane sur la
de chaque pays en matière de coopération Sud-Sud. La plupart des produits africains (à la faveur de la circulation
répartition du travail entre les communautés économiques des personnes) et libéraliser le marché africain27. Les
régionales et l’Union africaine reste un enjeu auquel s’attache États membres sont également en pourparlers au sujet
encore à répondre la réforme institutionnelle de l’Union des directives encadrant la mise en place d’un passeport
africaine portée par Paul Kagamé, le président du Rwanda. africain, en application du Protocole sur la libre circulation
Ces discussions permettront d’harmoniser les priorités des personnes28. L’Union africaine a par ailleurs adopté un
continentales, régionales et nationales et de garantir une certain nombre de positions communes, telles que la PCA sur
répartition du travail efficace26. le changement climatique et la PCA pour la négociation d’un
nouvel accord de coopération avec l’Union européenne29,30.
Ce rapport vise à encourager la mise en place et l’utilisation L’actuel accord de Cotonou expirera en 2020, offrant
d’un système normalisé régional africain de publication l’occasion de renégocier un nouveau partenariat fondé sur
d’informations, fondé sur des rapports nationaux favorisant
les priorités de développement africaines. Ces initiatives
à terme l’alignement sur des processus et priorités de
doivent être soutenues et encouragées.
planification nationaux, régionaux et mondiaux clés tels que
le Programme 2030 et l’Agenda 2063. Comme proposé dans
Pour accélérer son programme de transformation
le Plan d’action de Buenos Aires, ce rapport présente les
socioéconomique, l’Union africaine est actuellement engagée
principales tendances, difficultés et perspectives découlant
dans de multiples partenariats d’intérêt mutuel avec des
des initiatives de coopération Sud-Sud, tel qu’exposé au
pays du Sud, tels que les partenariats Afrique-Amérique du
chapitre 3.
Sud, Afrique-Inde et Afrique-Turquie, Afrique-Japon (TICAD),
le Forum sur la coopération sino-africaine (FOCCA) ou
Ce rapport peut ouvrir la voie à des discussions sur l’instauration
encore la Conférence des organisations sous-régionales
de forums politiques régionaux sur la coopération Sud-Sud
d’Asie et d’Afrique.
et triangulaire afin de favoriser le dialogue, la consultation
et la concertation autour de ces deux types de coopération,
tel que le recommande le Plan d’action de Buenos Aires. Ces V. La CSS à l’échelle interrégionale
forums seraient coordonnés par des institutions régionales
et accueilleraient des représentants du gouvernement, des Le Plan d’action de Buenos Aires affirmait que les pays en
partenaires de développement, des représentants du secteur développement devaient avoir accès à de nombreuses
privé, des organisations de la société civile (OSC), des groupes expériences de coopération Sud-Sud, y compris avec
de réflexion et d’autres acteurs pouvant produire des données d’autres régions. À ce titre, il est proposé de développer et
sur la coopération Sud-Sud ou triangulaire. Ces données de renforcer la coopération interrégionale. La coopération
permettraient que les priorités essentielles en matière de interrégionale s’est accentuée depuis la mise en place de
coopération Sud-Sud au service du développement durable nouveaux regroupements, tels que celui des BRICS (Brésil,
fassent l’objet de discussions politiques fondées sur des Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud)31 ou encore le Fonds
preuves. Le forum politique proposé pourrait encourager IBAS (Inde, Brésil et Afrique du Sud). Ces groupes ont en partie
des discussions politiques régionales au sujet des accords été portés par la croissance de grands pays impliqués dans
24 La Communauté des États sahélo-sahariens (CEN-SAD), le Marché commun de l'Afrique de l'Est et de l'Afrique australe (COMESA), la Communauté d'Afrique de
l'Est (CAE), la Communauté économique des États de l'Afrique centrale (CEEAC), la Communauté économique des États de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO), l’Autorité
intergouvernementale pour le développement (IAGD), la Communauté de développement de l'Afrique australe (SADC) et l’Union du Maghreb Arabe (UMA).
25 http://www.dfa.gov.za/docs/2003/au0815.htm
26 http://www.ecowas.int/ecowas-commission-restates-commitment-to-deepening-cooperation-with-the-au/
27 Union africaine, Accord portant création de la zone de libre-échange continentale africaine, 21 mars 2018
28 Ibid. Les experts des États membres se réunissent au sujet des directives encadrant la conception, la production et la délivrance d’un passeport africain, 9 juillet 2018
29 https://au.int/sites/default/files/documents/30876-doc-executive_council_decision_500_-_july_2009_french.pdf
30 https://au.int/en/pressreleases/20180327/african-union-executive-council-adopts-african-common-position-negotiations
31 Le groupe des BRICS, par exemple, représente environ 40 % de la population mondiale et affiche un produit intérieur brut cumulé d’environ 16 milliards de dollars US,
soit une part significative de la richesse mondiale ; voir https://www.statista.com/statistics/254281/gdp-of-the-bric-countries/
Premier rapport sur la coopération Sud-Sud en Afrique 30

la coopération Sud-Sud32, qui ont créé de nouvelles voies La BID encourage la coopération Sud-Sud à travers
commerciales favorisant l’ouverture des infrastructures son dispositif à flux inversés, lancé en 201039, dont les
mondiales. La Chine élabore actuellement l’initiative membres sont différents pays du Sud. La BID a identifié
« La Ceinture et la Route », qui l’engage à développer des des connaissances, expertises, technologies et ressources
infrastructures visant à renforcer les échanges commerciaux existantes à travers le monde dans le but de les transférer à
de l’Est vers l’Ouest et à transformer l’économie mondiale33. d’autres pays en ayant besoin, afin d’atteindre des résultats
Comme indiqué plus haut, plusieurs pays africains autres de développement durable. La BID est présente dans de
que l’Afrique du Sud ont déjà instauré des relations avec le nombreuses parties du monde et peut donc participer de
Brésil, la Russie, l’Inde et la Chine et entendent poursuivre façon significative au transfert de connaissances entre
sur cette voie. différentes régions, par exemple de l’Asie vers l’Afrique ou
entre pays arabes. Elle figure en outre parmi les partenaires
D’autres institutions interrégionales incluent notamment le techniques ayant soutenu l’élaboration de ce rapport,
Groupe des États d'Afrique, des Caraïbes et du Pacifique (ACP), comme nous le détaillerons plus loin.
qui a signé un accord avec les Nations Unies en 2016 en vue
de resserrer la coopération Sud-Sud et triangulaire34. En Parmi les autres institutions financières internationales
octobre 2018, l’ACP a ouvert un pôle de connaissances en soutenant la coopération Sud-Sud en Afrique figure la
Guinée équatoriale afin de promouvoir le commerce Sud- Banque africaine de développement (BAD), dont la création
Sud entre pays ACP35. Le Secrétariat général ibéro-américain remonte à 1964. La BAD, qui intègre aujourd’hui 54 pays
a présenté ses expériences interrégionales avec l’Afrique africains et 26 pays non africains, entend promouvoir une
dans une optique de partage de ces expériences. Par croissance économique durable en Afrique. Elle dispose
ailleurs, des pays tels que le Brésil ont apporté un soutien d’un Fonds d’affectation spéciale pour la coopération Sud-
au travers de projets de CSST en Afrique subsaharienne et Sud destiné à favoriser les partenariats et le partage de
se sont associés à des pays du Commonwealth, tels que connaissances entre pays à revenu intermédiaire et pays les
le Royaume-Uni, en vue de promouvoir la coopération moins avancés. La création de ce fonds a été signée en 2011
trilatérale36. Le Commonwealth a également soutenu des par le gouvernement brésilien et le conseil d’administration
initiatives de CSST telles que le Fonds Inde-ONU pour le de la BAD40.
partenariat au développement37.
Des gouvernements et investisseurs privés et institutionnels
La coopération interrégionale se reflète également à africains ainsi que des institutions financières et des
travers l’essor des institutions financières internationales investisseurs privés non africains ont par ailleurs créé
soutenant la coopération Sud-Sud. À titre d’exemple, la en octobre 1993 à Abuja, au Nigéria, la Banque africaine
Nouvelle banque de développement (NDB) a été créée en d'import-export (« la Banque »), dans le but de financer,
tant qu’alternative aux institutions de Bretton Woods (la de promouvoir et de renforcer le commerce intérieur et
Banque mondiale et le Fonds monétaire international – extérieur de l’Afrique. La Banque a été créée en vertu de
FMI), dont les quotas de droits de vote étaient perçus deux actes constitutifs conjoints d’un accord signé par les
comme inéquitables. En 2017, la NDB a officiellement lancé États et organisations multilatérales membres, accord qui lui
son centre régional africain à Johannesburg. La banque confère le statut d’organisation internationale multilatérale
octroie des prêts à ses États membres, tout en défendant et la dote d’une charte encadrant sa structure juridique et
des valeurs fortes de souveraineté et de non-ingérence. Elle ses opérations, signée par l’ensemble des parties prenantes.
étudie actuellement la possibilité d’intégrer de nouveaux Le capital social autorisé de la Banque s’établit à 5 milliards
États membres, qui deviendraient à leur tour éligibles à ce de dollars US. Basée au Caire, en Égypte, la Banque a
type de prêts. La NDB se concentre sur des initiatives de commencé son activité le 30 septembre 1994, après la
développement d’infrastructures durables ayant reçu le signature d’un accord de siège avec le gouvernement hôte
soutien de pays comme l’Afrique du Sud, qui développe et en août 1994. Elle dispose également de bureaux à Harare,
dirige l’initiative présidentielle en faveur des infrastructures, Abuja, Abidjan et Nairobi.
une initiative de l’AUDA-NEPAD38. Malgré le besoin urgent
d’infrastructures sur le continent, il est important de VI. La CSS à l’échelle nationale
noter que la coopération Sud-Sud ne doit pas se limiter
à des projets d’infrastructures, mais peut aussi aider les Comme indiqué précédemment, l’Agenda 2063 encourage
pays en développement dans les multiples modalités et les États membres à adopter leurs propres stratégies
domaines d’intervention de coopération technique pouvant et cibles nationales connexes. Les pays sont en phase
être partagés. d’appropriation de l’Agenda 2063 comme des ODD et

32 Avec 1,42 milliard d’habitants, la Chine est aujourd’hui le pays le plus peuplé au monde, suivi de l’Inde (1,28 milliard d’habitants). Ces deux pays connaissent une
croissance rapide. Voir World Population Review, 2018, http://worldpopulationreview.com/countries/china-population/
33 https://www.worldbank.org/en/topic/regional-integration/brief/belt-and-road-initiative
34 http://www.acp.int/fr/node/3680
35 http://www.acp.int/fr/node/4499
36 Le Brésil privilégie le terme de « coopération trilatérale », qui renvoie à l’idée d’un échange horizontal plutôt que d’une répartition inéquitable du pouvoir. Voir https://
www.wiltonpark. org.uk/wp-content/uploads/WP1492-Report.pdf
37 https://www.unsouthsouth.org/2018/04/19/india-intensifies-development-cooperation-with-commonwealth-countries-through-a-us50-million-dedicated-
commonwealth-window-to-the-india-un-development-partnership-fund/
38 http://www.au-pida.org/presidential-infrastructure-champion-initiative-pici/
39 https://www.somosiberoamerica.org/wp-content/uploads/2018/05/IsDB_Reverse-Linkage_2018.pdf
40 https://www.afdb.org/fr/topics-and-sectors/initiatives-partnerships/south-south-cooperation-trust-fund/
31 Premier rapport sur la coopération Sud-Sud en Afrique

travaillent à l’élaboration de feuilles de route et de bureaux Dans de nombreux cas, des progrès ont été réalisés en
de coordination à cet égard. Dans le même esprit, les pays matière de développement de cadres règlementaires
africains ont pris conscience de l’importance de se doter de de coopération Sud-Sud, de nomination de personnel
stratégies de coopération Sud-Sud ciblées et de la nécessité spécialisé et d'affectation de ressources financières. Des
de soutenir ce programme à travers la mise en place progrès ont également été accomplis dans l'élaboration de
d’institutions, de mécanismes et de cadres spécifiques. Des systèmes de suivi et d'évaluation reflétant l’interprétation
initiatives de plus haut niveau ont également été déployées de la coopération Sud-Sud propre à chaque pays.
en vue de promouvoir la coopération Sud-Sud. Le Kenya Néanmoins, des disparités persistent : tandis que certains
a ainsi accueilli en 2009 la Conférence de haut niveau des pays abordent la coopération Sud-Sud avec une approche
Nations Unies sur la coopération Sud-Sud. L’Ouganda technique, d’autres entendent prendre en compte des
assume actuellement la présidence du Comité de haut aspects plus larges du développement. La partie suivante
niveau sur la coopération Sud-Sud et s’est porté volontaire porte spécifiquement sur les efforts déployés en Afrique au
pour remettre un rapport à ce sujet à l’occasion de la niveau national.
conférence BAPA+40.

Le renforcement des capacités nationales était l’une des VII. Promouvoir l’Agenda 2063 et
priorités inscrites dans le Plan d’action de Buenos Aires, qui les objectifs de développement
répondait au besoin de développer des mécanismes, accords
juridiques et institutions essentiels à l’instauration d’un
durable grâce à la CSS à l’échelle
écosystème de coopération Sud-Sud. Les États membres nationale en Afrique
s’engageaient à définir leurs propres priorités, à renforcer
leurs propres capacités, à partager des technologies et à D’un point de vue technique, plutôt que de réinventer la roue,
assurer leur autonomie, améliorant leur visibilité ainsi que il s’agit avant tout d’instaurer des unités au sein de structures
leur capacité à traiter les problèmes de façon conjointe. existantes et de s’assurer qu’elles travaillent en lien avec des
Ces efforts devaient s’accompagner d’une communication systèmes de suivi de la mise en œuvre de l’Agenda 2063
renforcée sur les activités menées. En institutionnalisant des et des ODD. Le Plan d’action de Buenos Aires intègre des
mécanismes de coopération Sud-Sud, les États membres dispositions prévoyant de renforcer le cadre institutionnel
pourraient finalement commencer à remettre en cause de la coopération Sud-Sud ainsi qu’un environnement
l’ordre mondial dominant41. Le Plan d’action de Buenos propice à une telle démarche. Il est désormais admis
Aires énonçait des engagements en vue de l’élaboration de que l’institutionnalisation de la coopération Sud-Sud est
programmes, de mécanismes, d’institutions et de systèmes conditionnée par la création d’un écosystème. Prenant en
d’information nationaux, ainsi que l’adoption de politiques compte, d’une part, la nécessité de passer outre les schémas
favorables à la coopération Sud-Sud. Il soulignait par ailleurs de pensée linéaires, et d’autre part, la nature protéiforme de
le rôle pouvant être joué par la science, la technologie et les la coopération Sud-Sud, l’écosystème se compose de cycles
centres de recherche pour faire avancer les initiatives de interdépendants et se renforçant mutuellement, sans ordre
coopération Sud-Sud. hiérarchique établi.

Depuis lors, on a constaté une augmentation du nombre Il est proposé que ces structures s’inspirent des travaux
de pays ayant formalisé et institutionnalisé la coopération
existants de l’Union africaine pour suivre les résultats de
Sud-Sud, parmi lesquels beaucoup de pays africains.
développement dans l’ensemble des pays africains, en
Proactifs, certains pays ont intégré la coopération Sud-
collaboration avec la Commission de l’Union africaine, la
Sud dans leurs pratiques des affaires, tandis que d’autres
Commission économique des Nations Unies pour l’Afrique, le
continuent de faire face à des contraintes humaines et
PNUD, la BAD et les communautés économiques régionales.
financières. Ces contraintes limitent la pleine réalisation
Notons en particulier que le flux de travail relatif au suivi des
et affaiblissent la coordination des engagements de
résultats de l’Agenda 2063 et du Programme 2030 émane
coopération Sud-Sud, compromettant ainsi leur efficacité.
des ministères des Finances et de la Planification. Ces
Ces disparités en termes de capacités ont conduit au
développement de différents modèles institutionnels afin agences nationales sont chargées de la planification, de la
de refléter les besoins et capacités des différents pays. budgétisation, du suivi et de l'évaluation du développement
Ces modèles ont des structures diverses, allant d’agences au niveau national, ainsi que des liens et de la collaboration
spécialisées dans la coopération Sud-Sud à des plateformes intersectoriels.
nationales de coordination de la coopération Sud-Sud, en
passant par des regroupements au sein du ministère des Plusieurs pays commencent à évoluer du statut de
Affaires étrangères ou du ministère de la Planification et de bénéficiaire à celui de partenaire actif de la coopération Sud-
l’Économie42. La compréhension de ces différents modèles Sud, partageant leurs connaissances et leurs expériences
permet d’adopter une approche plus systématique avec d’autres pays. Un certain nombre d’aspects méritent
en matière de conception, de coordination et de mise d’être approfondis en vue de développer encore les cadres
en œuvre des approches africaines de la coopération institutionnel et juridique de la CSST.
Sud-Sud.

41 https://www.unsouthsouth.org/bapa40/documents/buenos-aires-plan-of-action/
42 http://www.un.org/ga/search/view_doc.asp?symbol=A/73/383&Lang=F
Premier rapport sur la coopération Sud-Sud en Afrique 32

Au niveau national, les aspects essentiels du cadre a été ajoutée en tant que domaine à part entière de données
institutionnel de la coopération Sud-Sud concernent à collecter. Le STP-CA coordonne le Mécanisme conjoint de
l’élaboration d’une stratégie nationale43. Les agences/entités coordination du développement et assure le secrétariat du
de coopération Sud-Sud doivent renforcer leurs capacités Groupe de dialogue stratégique (GDS). Cette plateforme
en matière de gestion des connaissances et des données, ce opère en partenariat avec des plateformes sectorielles et
qui permettrait aux États de garantir un accès à l’information thématiques, oriente les décisions de la Présidence, est
au sujet de solutions de développement pouvant intéresser en lien avec la plateforme nationale de coordination des
d’autres pays. Le PNUD, en partenariat avec le Bureau actions du gouvernement et alimente les engagements
des Nations Unies pour la coopération Sud-Sud, aide les nationaux vis-à-vis des Nations Unies47. Madagascar
pays à identifier ces bonnes pratiques et à centraliser ces produit également des rapports annuels. Le Lesotho, pour
informations sur des plateformes mondiales et régionales sa part, travaille actuellement à l'instauration d’une cellule
telles que SSMart et Africa Solutions (southsouthworld. dédiée à la coopération Sud-Sud au sein de son Secrétariat
org, une initiative du Bureau des Nations Unies pour la de coordination de l’aide rattaché au ministère de la
coopération Sud-Sud). Ce partenariat vise à aider les pays à Planification du développement. Djibouti a également mis
créer leurs propres bases de données nationales d'experts en place un mécanisme de coordination de l'aide au sein de
via la plateforme WIDE Roster Centre. Le PNUD mène son ministère des Affaires étrangères et de la Coopération
également un important travail aux côtés de l'AUDA-NEPAD internationale, en étroite coordination avec le ministère de
pour promouvoir une vision panafricaine de la coopération l’Économie et des Finances.
Sud-Sud et encourager l’intégration régionale.
ii. Les agences de coopération Sud-Sud
La section suivante offre un aperçu de la diversité des
approches employées par les pays africains en matière Certains pays ont des agences indépendantes dédiées à la
d’institutionnalisation de la coopération Sud-Sud. coopération Sud-Sud, en lieu et place d'entités rattachées à
des ministères. Ces agences, que l’on retrouve généralement
i. La CSS en tant qu’extension dans des pays ayant davantage de ressources à affecter à
de l’efficacité de l’aide la coopération Sud-Sud, travaillent en collaboration avec
différents ministères d’État. L’Afrique du Sud a envisagé la
Si certains pays ont élargi le champ de leurs actions relatives mise en place d’une agence sud-africaine de partenariat au
à l’efficacité de l’aide pour y inclure la coopération Sud- développement (South African Development Partnership
Sud, d’autres persistent à affirmer que la coopération Agency) qui concentrerait l’ensemble des connaissances
Sud-Sud diffère radicalement de la coopération Nord- et de l’expertise nationales relatives à ses engagements de
Sud et ne saurait donc y être rattachée. Le Comité d’aide coopération Sud-Sud. Néanmoins, cette agence n’a, à ce
au développement (CAD) de l’OCDE a été créé comme jour, pas encore été mise en place et les engagements du
un outil d’évaluation de l’efficacité de la coopération au pays en matière de coopération Sud-Sud sont actuellement
développement, mais il est essentiellement utilisé par les mis en œuvre par l’African Renaissance Fund, sous la
gouvernements des pays du Nord, qui s’en servent pour houlette du ministère des Finances48. Le ministère des
évaluer leurs engagements44. Cet outil est fondé sur l’aide Finances continue d'assurer la gestion des fonds reçus par
publique au développement (APD), dont certains États l’Afrique du Sud de la part de bailleurs, tout en considérant
du Sud considèrent qu’elle ne saurait s’apparenter à la ces engagements comme différents de la coopération Sud-
coopération Sud-Sud, cette dernière englobant un champ Sud, cette dernière privilégiant les échanges et l’assistance
plus vaste. L’APD est exclusivement d’ordre financier et ne techniques plutôt que les transactions financières. En
porte, par exemple, pas sur les échanges, prêts et transferts raison de la nécessité de coordonner l’éventail des activités
de technologie d’individu à individu45. Les membres du CAD de coopération Sud-Sud de l’Afrique du Sud menées par
de l’OCDE sont principalement des fournisseurs d’aide, alors différents ministères, l’objectif a été d’instaurer une agence
que des pays comme le Kenya, le Rwanda ou l’Afrique du Sud au sein du ministère des Relations internationales et de la
se considèrent comme des partenaires de développement, Coopération afin de promouvoir les intérêts nationaux de
c’est-à-dire à la fois des bénéficiaires et des fournisseurs l’Afrique du Sud.
de l'aide.
Il est intéressant de noter qu’en Afrique du Nord,
Madagascar est un pays qui a intégré son système de l’institutionnalisation de la CSST a connu une progression
coopération Sud-Sud dans ses principes d'efficacité de l’aide. rapide dans plusieurs pays grâce à la création d’agences
Son Secrétariat Technique Permanent pour la Coordination telles que l’Agence égyptienne de partenariat pour le
de l’Aide (STP-CA) assure la gestion d’une base de données développement (EAPD), l’Agence marocaine de coopération
nationale unique centralisant l’ensemble des données internationale (AMCI) et l’Agence Tunisienne de Coopération
nationales sur l’APD. Cette base de données baptisée AMP- Technique (ATCT). Ces expériences pourraient être partagées
Madagascar (Aid Management Platform) est accessible en avec des pays d’Afrique subsaharienne souhaitant mettre
ligne et ouverte au grand public46. La coopération Sud-Sud y en place des agences dédiées.

43 BID, Présentation sur la construction d’écosystèmes nationaux de coopération Sud-Sud, 24 octobre 2018, Addis-Abeba
44 http://journals.sfu.ca/jmde/index.php/jmde_1/article/view/167
45 http://www.oecd.org/pcd/46188961.pdf
46 http://www.stpca-primature.gov.mg/#about-1
47 http://www.stpca-primature.gov.mg/wp-content/uploads/2018/01/Mecanisme_coordination_aide_NOTE-CONCEPTUELLE.pdf
48 http://collections.unu.edu/eserv/UNU:3326/unu_cpr_s_africa_dev.pdf
33 Premier rapport sur la coopération Sud-Sud en Afrique

Le Rwanda fonctionne selon un modèle légèrement d’État du pays. Cependant, le Kenya vise à créer une agence
différent. La Rwanda Cooperation Initiative (RCI) est une de coopération Sud-Sud d’ici à 2020.
entreprise publique assurant la coordination de différents
échanges de coopération Sud-Sud. Elle est rattachée au iv. Développer une stratégie
ministère des Affaires étrangères, mais son actionnaire est de coopération Sud-Sud
le ministère des Finances49. La RCI collabore également de
façon étroite avec le Rwanda Governance Board (RGB), le Certains pays africains finalisent actuellement l’élaboration
ministère de la Défense et le ministère des Finances et de de stratégies nationales destinées à servir de base à la
la Planification économique. Son équipe a été recrutée en création d’agences/entités de coopération Sud-Sud, de
septembre 201850. mécanismes de coordination, de systèmes de suivi et
de plateformes de gestion des connaissances au niveau
iii. Les entités de coopération Sud-Sud national. L’élaboration de ces cadres et mécanismes permet
aux pays d’identifier des moyens d’élargir leur coopération
Des pays comme le Botswana, Djibouti et la Côte d’Ivoire Sud-Sud, par exemple en dispensant des formations sur la
ont choisi d'intégrer leurs entités de coopération Sud- coopération Sud-Sud au sein des institutions concernées,
Sud au sein du ministère des Affaires étrangères. En Côte en identifiant des spécialistes pour coordonner les activités
d’Ivoire, le ministère des Affaires étrangères joue un rôle menées à l’étranger, en dépêchant à l’étranger du personnel
de premier plan dans la coopération Sud-Sud, quoiqu'en technique, en renforçant la coopération entre différentes
collaboration avec le ministère de l'Intégration africaine, organisations et en accordant des bourses et des stages à
le ministère de la Planification et du Développement et le des étudiants internationaux en provenance d’autres pays.
ministère de l'Économie et des Finances. Le gouvernement
souhaite créer une entité dédiée à la coopération Sud-Sud De nombreux pays africains travaillent à l’élaboration de
destinée à assurer le suivi et l’évaluation de l’ensemble stratégies de coopération Sud-Sud alignées sur leurs plans
des engagements de coopération Sud-Sud. Cette entité nationaux de développement, à l’instar du Botswana, de la
serait rattachée au cabinet du ministre. Si le pays ne Côte d’Ivoire, de l’Éthiopie, du Lesotho et de l’Ouganda. Le
dispose actuellement d’aucune stratégie nationale pour la gouvernement éthiopien, par exemple, entend s’appuyer
coopération Sud-Sud, une étude des meilleures pratiques sur la coopération Sud-Sud pour réaliser son objectif à
de coopération Sud-Sud a été réalisée en 2016-2017 et est long terme de devenir un pays à revenu intermédiaire
en attente de validation par le ministère. Le gouvernement d’ici à 2025, conformément à son Plan de croissance et de
a également organisé un voyage d’étude au Rwanda et en transformation (Growth and Transformation Plan – GTP II).
Espagne pour tirer des enseignements de leurs modèles Le Kenya a intégré la coopération Sud-Sud à son Plan à
de coopération Sud-Sud, coordonné un atelier sur la moyen terme (2018-2020) et à son Cadre de dépenses
coopération Sud-Sud et animé des réunions d’information à moyen terme (2019-2020/2021-2022). Le pays prévoit
sur la coopération Sud-Sud auprès de ses ambassadeurs et d’établir un projet de feuille de route en vue d’instaurer une
chefs de missions diplomatiques. Le gouvernement ivoirien politique ainsi qu’un cadre institutionnel et règlementaire
entend à présent mettre en place une plateforme inclusive de promotion de la CSST. Djibouti a finalisé l’élaboration de
de consultation sur les questions de coopération Sud- documents stratégiques tels que sa Vision 2035, son Cadre
Sud. Le ministère de l’Économie et des Finances comporte national pour le Programme de développement durable à
également une direction appelée Comité de mobilisation l’horizon 2030, ainsi qu’un document relatif à l’instauration
des ressources extérieures (COMOREX), qui prévoit de de l’ACM. En Somalie, la communauté internationale travaille
centraliser sur sa plateforme numérique les informations avec le gouvernement fédéral pour créer des partenariats
relatives à la coopération Sud-Sud. qui soutiennent le plan national de développement, le
gouvernement somalien collaborant parallèlement avec le
D’autres pays ont choisi d'intégrer leurs entités de PNUD en vue de l’élaboration d’un plan d’action Sud-Sud.
coopération Sud-Sud au sein du ministère des Finances.
L’Ouganda a par exemple mis en place une direction de v. Développer un système
la coopération au développement et de la coopération de coordination centralisée
régionale au sein de son ministère des Finances, de la
Planification et du Développement économique. Le pays Pour passer de la phase stratégique à la mise en œuvre, il
prépare actuellement un rapport national sur la coopération est nécessaire de créer un réseau national de bureaux de
Sud-Sud et travaille à la formation d’une équipe spéciale coordination de la coopération Sud-Sud. Multisectorielle, la
nationale sur la coopération Sud-Sud. coopération Sud-Sud nécessite une coordination spécifique
au niveau national et doit être intégrée de façon effective au
Au Kenya, l’entité dédiée à la coopération Sud-Sud relève du sein des différents ministères et secteurs publics.
ministère des Finances et de la Planification (département
d’État à la Planification), qui dépend de la direction Aujourd’hui, nombreux sont les pays du continent à
économique macroéconomique et régionale. Cette entité relever ce pari avec succès. L’Éthiopie a mis en place au
coordonne tous les aspects ayant trait à la coopération Sud- sein de son ministère des Finances et de la Coopération
Sud et triangulaire de tous les ministères et secrétariats économique un comité ad hoc de quatre membres qui se

49 Enquête en ligne du PNUD sur la coopération Sud-Sud : Progrès nationaux, octobre 2018
50 http://primature.gov.rw/news-detail/article/1735.html
Premier rapport sur la coopération Sud-Sud en Afrique 34

réunit régulièrement pour échanger au sujet de la collecte national de la stratégie (National Strategy Office) veille à la
de données. Celui-ci assure une liaison avec 27 cabinets réalisation des priorités nationales et à la coordination des
ministériels ainsi qu’avec la chambre de commerce (qui plans de développement. Certains ministères ont en outre
chapeaute plus de 500 organisations du secteur privé) afin signé des mémorandums d’entente avec d’autres pays et
d’attribuer les tâches de collecte des données, mais n’a pas mènent des activités de CSST centrées sur divers secteurs.
encore été en mesure de collaborer avec la société civile51. L’institut national de la statistique (Statistics Botswana) a
L’engagement de l’Éthiopie reflète également le caractère développé des indicateurs pour les priorités nationales et les
multisectoriel de la CSS – un aspect auquel d’autres pays a alignés sur l’Agenda 2063 et les ODD. La stratégie prévoit
se sont aussi trouvés confrontés. Le Soudan est par de plus une collaboration avec le ministère des Finances
exemple occupé à mettre sur pied un conseil national de et du Développement économique, qui gère également
coordination, sur la base d’un plan d’action, d’un rapport un comité de pilotage national (NSC, National Steering
complet et d’une lettre de mission également en cours Committee) pour les ODD ainsi qu’un forum des partenaires
d’élaboration. Le Kenya a quant à lui réalisé d’importants de développement (DPF, Development Partners Forum).
progrès dans le développement d’un système de bureaux de L’IMCOTCP assure par ailleurs un suivi des informations
coordination. En 2007, un comité technique permanent Sud- diffusées par les commissions permanentes conjointes
Sud a été formé par 15 ministères et agences (il comptait pour la coopération (JPCC, Joint Permanent Commissions
17 membres en 2009). Ce comité permanent a mené for Cooperation) de la Communauté de développement
une étude de cadrage dans le but d’identifier les lacunes d’Afrique australe (CDAA), l’UA, l’ONU, le groupe ACP et le
en matière de CSS ainsi que les grandes organisations/ Commonwealth. La figure 1 montre la diversité des acteurs
institutions kényanes potentiellement capables d’assumer pouvant intervenir dans la CSS en vertu de la stratégie du
le rôle de coordonnateurs Sud-Sud. En septembre 2018, ce Botswana52.
comité permanent a de nouveau été mis sur pied, réunissant
cette fois 40 institutions membres. Des fonctionnaires
Figure 1 – Collaboration du responsable de la CSST au sein
du ministère de la Planification ont été formés à la CSS et
du ministère des Affaires étrangères et de la Coopération
d’autres actions de développement des capacités sont
avec d’autres structures gouvernementales et régionales
prévues pour les membres du comité technique, de même
que la création d’une base de données locale reprenant les
meilleures méthodes et solutions. FPD

JPCC
La stratégie du Botswana, actuellement examinée par le
Parlement, prévoit que le ministère des Affaires étrangères
et de la Coopération (MIAC, Ministry of International Affairs
and Cooperation) soit l’agence chef de file pour la CSST. Afin
de conférer un certain poids politique aux engagements du ACP &
Botswana en matière de CSST, le secrétaire permanent du Common IMCOTCP NSC GTT**

Wealth
MIAC sera le coordonnateur de référence.

La stratégie prévoit toutefois un secrétariat composé


de membres du comité interministériel sur les traités,
conventions et protocoles (IMCOTCP, Interministerial UA CCHN*

Committee on Treaties, Conventions and Protocols) et SADC

chargé d’une mission de conseil en matière de CSS. Afin de


refléter le caractère transversal et toute l’étendue de la CSS, * Conseil de coopération de haut niveau
l’IMCOTCP regroupe tous les ministères et départements ** Groupe de travail thématique

indépendants du gouvernement. La stratégie propose


également de nommer trois représentants supplémentaires Il convient également de relever que le PNUD travaille
à l’IMCOTCP, issus respectivement de la société civile, du actuellement à la mise sur pied d’un mécanisme de
monde de l’entreprise et de la sphère universitaire. Elle coordination interministériel ancré dans les plateformes
se propose par ailleurs de nommer un secrétaire au sein adéquates de réalisation des ODD. Ce mécanisme vise à
du département des relations publiques, de la recherche promouvoir l’alignement de la CSS sur les priorités et besoins
et de l’information du MIAC afin d’appuyer les fonctions techniques à l’échelon national, tout en généralisant la CSS à
administratives. La stratégie permet la collaboration avec travers l’ensemble de ces collaborations.
d’autres structures existantes. Par exemple, le bureau

51 Premier rapport sur la coopération Sud-Sud – Le processus de collecte des données en Éthiopie (exposé du 24 octobre 2018, Addis-Abeba)
52 République du Botswana, avant-projet de stratégie de CSST (South-South and Triangular Cooperation Strategy)
35 Premier rapport sur la coopération Sud-Sud en Afrique

vi. Suivi-évaluation et redevabilité VIII. Conclusion


Afin de contrôler l’efficacité de la CSS et sa contribution à Depuis le document final du BAPA, de nombreuses évolutions
la réalisation des plans de développement nationaux et des sont intervenues en matière de CSS, et les pays africains ont
ODD, il est nécessaire de mettre en place des systèmes de notamment développé et promu leurs propres stratégies et
suivi-évaluation guidés par les principes de la CSS, et qui référentiels. Le développement de l’AUDA-NEPAD en est un
examinent en détail les processus des partenariats de CSS. bon exemple. À l’échelon mondial, l’ONU a généralisé la prise
Les efforts décrits plus haut montrent d’importants progrès en compte de la CSS dans ses programmes et celle-ci figure
des pays africains dans le développement de leurs propres parmi les priorités du Programme de développement durable
systèmes nationaux de planification de la CSS. Il s’agit à l’horizon 2030. La multiplication de nouveaux regroupements
cependant d’une tâche au long cours, sachant que des entités et de nouvelles institutions financières internationales ainsi
pleinement autonomes et opérationnelles nécessiteront que leur collaboration avec les pays africains ont en outre
l’allocation d’un budget annuel. Il est par ailleurs trop tôt modifié le paysage de la CSS, en remettant l’ordre mondial
pour un suivi-évaluation des indicateurs de performance ; il en question et en proposant des sources de financement
faudra attendre que les processus de collecte nationale de alternatives aux pays en développement.
données se développent davantage.
Le BAPA a principalement mis l’accent sur l’autonomie
vii. Inventaire des centres de ressources nationale et la durabilité. À cet égard, l’Afrique est en bonne
voie dans l’établissement de son propre écosystème de CSS.
Comme le souligne le BAPA, il est nécessaire de créer des À l’aune des sections précédentes, il ne fait aucun doute que
centres nationaux de recherche et de formation dotés plusieurs pays ont su définir leur stratégie en matière de CSS,
d’un champ d’action international, de façon à créer un identifier leurs bureaux de coordination et même mettre sur
écosystème de CSS. De tels centres permettraient et auraient pied leurs propres entités et agences. Plutôt que d’établir
pour mission de partager l’expertise, et disposeraient des de nouveaux mécanismes, ces structures s’appuient sur des
capacités pour ce faire. À cet égard, la BID est occupée à mécanismes existants centrés sur les priorités nationales et
inventorier les centres de ressources afin d’identifier des la réalisation des ODD. Des efforts ont aussi été consentis
solutions concrètes et transférables. Elle a déjà finalisé cet afin de mettre en place des systèmes de suivi-évaluation
exercice en Indonésie, au Maroc, au Pakistan et en Turquie. régionaux, en liaison avec les agendas panafricains et
Elle a aussi initié un tel inventaire en Tunisie et en Malaisie, régionaux, par exemple, l’Agenda 2063. Ce rapport résulte
et prévoit d’étendre ses efforts, plus particulièrement en d’une telle initiative.
Afrique subsaharienne.
Le renforcement de la CSS exige toutefois d’identifier les
points de blocage qui en entravent la progression. Le
chapitre suivant présente les données fournies par les
gouvernements africains concernant leurs collaborations en
matière de CSS et détaille différentes solutions permettant
d’étendre potentiellement la CSS. Grâce à l’exposé de ces
nouveaux moyens innovants permettant de réaliser les
objectifs prioritaires de développement, d’autres pays
connaissant des transformations similaires peuvent eux
aussi appliquer ces solutions. Ce faisant, le dialogue inter- et
intrarégional peut être renforcé et conduire à une réflexion
en profondeur concernant les moyens et les pôles d’action
dont dispose l’Afrique pour devenir maître de sa propre
destinée.

Sameer Halai via USAID


Premier rapport sur la coopération Sud-Sud en Afrique 36

CHAPITRE 2

Clay Knight (unsplash.com)


37 Premier rapport sur la coopération Sud-Sud en Afrique

Vue d’ensemble des initiatives


de coopération Sud-Sud en Afrique
I. Introduction : mettre en place Un système de suivi-évaluation de la CSS peut améliorer les
moyens et les modalités de mise en œuvre de la coopération
un système africain de suivi- technique et financière horizontale. Le suivi-évaluation de la
évaluation régional pour les CSS a également été perçu comme un outil pouvant faciliter
partenariats de CSS les partenariats stratégiques, en les alignant sur les priorités
nationales grâce au processus de dialogue national requis
Comme exposé au chapitre 1, les pays africains ont réalisé pour la collecte de telles données. En ce qui concerne la
d’importants progrès dans l’institutionnalisation de la CSS. définition de la CSS, les différents pays la voient comme
Tout en élaborant des systèmes et stratégies nationaux de l’exploitation de relations mutuellement positives plutôt
CSS, ces pays ont aussi pris conscience des avantages que que comme la prise d’engagements plus ou moins imposés.
présenterait un système de suivi-évaluation régional sur la À cet égard, la CSS se prête à divers modèles, politiques et
CSS. C’est ainsi qu’en novembre 2016, une initiative menée dispositifs politiques et institutionnels plus appropriés au
en ce sens a été lancée par des pays africains en collaboration contexte local, et va au-delà de simples transferts « vers la
avec l’Agence de planification et de coordination du NEPAD base » pour privilégier une véritable collaboration d’égal à
et le Centre de services régional pour l’Afrique du PNUD, égal, de laquelle chacun sort gagnant. Les pays participant
avec l’appui technique du SEGIB. L’objectif était de nourrir le à la rédaction du rapport sur la CSS ont déclaré que celle-ci
débat autour des thématiques clés à couvrir par la BAPA+40, crée aussi un sentiment d’appropriation, structuré autour
notamment le renforcement du cadre institutionnel de de la recherche du consensus, et développe une identité
promotion de la CSST, aux échelons national et régional. infrarégionale et régionale à travers la définition d’objectifs
Les pays africains participants ont donc défini d’un commun communs. La CSS pourrait de plus donner naissance à des
accord différents critères permettant d’identifier les activités initiatives innovantes. Il convient également de relever
de CSS, ainsi qu’un formulaire type destiné à la collecte des que la CSS est souvent moins coûteuse parce que les pays
données de départ. concernés conçoivent des solutions locales, qu’ils peuvent
ensuite faire connaître à d’autres pays en développement
Les délégués se sont à nouveau réunis en avril 2018 afin aux caractéristiques similaires.
de formaliser le processus de suivi-évaluation de la CSS et
lancer les discussions à ce sujet, avec l’appui de l’Agence de En préalable à la dernière réunion, les principaux
planification et de coordination du NEPAD, de la Commission partenaires ont soumis le questionnaire susvisé du PNUD
de l’UA, du Centre de services régional pour l’Afrique du aux pays participants afin de faire le point sur les difficultés
PNUD, du SEGIB et de la BID. Les pays participants ont rencontrées et identifier les moteurs de l’agenda du suivi-
adopté un formulaire mis à jour et simplifié pour la collecte évaluation en Afrique. En octobre 2018, huit pays avaient
des données, ont convenu de la publication de ce premier répondu au questionnaire, à savoir l’Afrique du Sud, le
rapport sur la CSS en Afrique et ont établi le calendrier Botswana, Djibouti, le Kenya, le Lesotho, Madagascar,
du processus. En octobre 2018, les pays participants se l’Ouganda et le Soudan. Le Rwanda viendrait s’ajouter à la
sont à nouveau réunis pour faire le point à mi-parcours liste par la suite. Les résultats de cette enquête en ligne
et échanger leurs expériences eu égard à la collecte des montrent la nécessité d’une sensibilisation permanente à
données sur la CSS, et se sont mis d’accord sur des solutions la CSS et d’un renforcement des réseaux multisectoriels
communes ainsi que sur les moyens d’avancer en vue de la de la CSS. Malgré les nombreuses difficultés rencontrées,
deuxième Conférence de haut niveau des Nations Unies sur un nombre significatif de pays ont communiqué des
la coopération Sud-Sud (BAPA+40). données afin de contribuer à ce rapport, le premier en
son genre. Nous appelons de nos vœux la poursuite de
Dans la perspective de la BAPA+40, le PNUD a créé un ces efforts, à mesure que les différents pays commencent
questionnaire destiné à évaluer les défis clés rencontrés à produire leurs propres rapports nationaux, qui
dans la collecte des données relatives à la CSS. Dans plusieurs pourront venir alimenter des rapports régionaux annuels
pays, les deux principales difficultés observées étaient le ou biennaux.
manque d’informations et le manque de structures de
coordination, suivies par une entente insuffisante quant aux La section suivante analyse les données relatives à la CSS
activités qu’il convient de considérer comme relevant d’une qui ont été transmises via le formulaire convenu par neuf
coopération Sud-Sud. Le manque de temps et d’implication a pays du continent africain, à savoir le Bénin, le Botswana,
également entravé ces efforts, sans oublier la fragmentation la Côte d’Ivoire, Djibouti, l’Éthiopie, le Lesotho, Madagascar,
des données. l’Ouganda et le Soudan. L’exercice se limitait uniquement
aux initiatives menées en 2017 et les données ont par
Lors des différentes réunions tenues en préparation de conséquent été nettoyées pour ne prendre en compte que
ce rapport sur la CSS en Afrique, les différents pays ont cette année. Il convient de relever que ces pays ne sont pas
confirmé percevoir les nombreux avantages d’un système de les seuls du continent à entreprendre des initiatives de CSS
suivi-évaluation de la CSS aux échelons national et régional. mais sont les seuls à avoir pris part à cet exercice de suivi-
Premier rapport sur la coopération Sud-Sud en Afrique 38

évaluation régional. Nous espérons que le nombre de pays participants augmentera à l’avenir. Ce premier rapport constitue
d’ores et déjà un modèle de référence pour un exercice de suivi-évaluation53.

II. Présentation des données sur la CSS en Afrique


i. Définition

Comme évoqué plus haut, les pays participants ont été invités à compléter un formulaire sur les initiatives de CSS. La définition
de la CSS préconisée par l’UNOSSC a été utilisée : « échange de connaissances et de ressources dans les domaines politique,
économique, social, culturel, environnemental ou technique entre pays en développement. Elle peut avoir lieu sur une base
bilatérale, régionale, sous-régionale ou interrégionale et impliquer deux ou plusieurs pays en développement54 ». Le formulaire
comportait également des listes déroulantes pour les ODD, ainsi que la liste validée des pays dans l’un des onglets55. Le
formulaire utilisé figure à l’annexe 1.

ii. Situation globale

Les données ont montré que les pays participants ont mené 300 initiatives techniques et économiques en 2017, ventilées
comme suit :

Tableau 1 – Nombre total d’initiatives techniques et économiques (pour l’ensemble des pays participants)

Nombre d’initiatives
Techniques 203
Économiques 97
Total 300

Pour chacune de ces deux catégories (économique et technique), les différents pays ont également été invités à préciser la
nature de la coopération menée. La figure 2 montre la ventilation des différents types de coopération pour l’ensemble des
pays participants.

Figure 2 – Type de coopération (nombre d’initiatives pour l’ensemble des pays participants)56

2 4 6
7
5

Dispense de formations Visite évaluative


10

Appui polyvalent Aide financière


95
51
Appui global Conseil politique

Détachement
Transfert de technologies
de spécialistes
57
50
Bourses Financement de projets

Comme le montre la figure, les trois premiers types de coopération visent la formation, le financement des projets et le
transfert de technologies. Ils sont suivis de près par l’appui polyvalent. Ces données montrent combien il importe de partager
l’expertise et les compétences en matière de CSS, au-delà de l’apport d’un soutien financier.

53 Il convient également de relever que le suivi-évaluation de la CSS n’est pas une entreprise simple. Compte tenu de sa nature transversale ainsi que des différences
de compréhension de sa définition et d’interprétation du formulaire, il est possible que certaines initiatives n’aient pas été prises en compte. Cela est en particulier le
cas pour les initiatives de CSS menées par la société civile et le secteur privé. Dans certains cas, les données sont par ailleurs incomplètes et ont été nettoyées pour
refléter les informations fournies. Le contenu de ce rapport doit par conséquent être considéré comme une indication de la situation en matière de CSS pour les seuls
pays ayant participé à ce premier exercice de suivi-évaluation, et non pour l’ensemble du continent.
54 https://www.unsouthsouth.org/notre-travail/coordination-sud-sud-et-triangulaire/?lang=fr
55 Des versions différentes du formulaire ont été utilisées par les pays participants mais tout a été mis en œuvre afin de standardiser les données.
56 Le Soudan n’a pas fourni de données sur la CSS visant la réalisation des ODD.
39 Premier rapport sur la coopération Sud-Sud en Afrique

Les pays participants ont également été invités à préciser quels étaient leurs partenaires en matière de CSS. Le tableau 2
montre l’étendue des collaborations de ces pays à travers le continent et illustre le caractère de plus en plus intra-africain de
la CSS.

Tableau 2 – Partenaires africains et non africains en matière de CSS

Pays hôte Partenaires africains Partenaires non africains


Bénin Burkina Faso, Maroc, Rwanda, Togo Brésil, Chine, Colombie, Corée (République
démocratique populaire de), Inde, Turquie

Botswana Kenya, Madagascar, Mozambique, Nigéria, Chine, Corée (République de), Inde
Sierra Leone, Somalie, Zimbabwe

Côte d’Ivoire Maroc Chine, Corée (République de), Inde


Djibouti - Chine, Turquie

Éthiopie Afrique du Sud, Algérie, Burkina Faso, Djibouti, Chine, Corée (République démocratique
Égypte, Ghana, Kenya, Madagascar, Maroc, populaire de), Émirats arabes unis, Inde,
Ouganda, RDC, Soudan, Soudan du Sud, Pakistan, Qatar, Taïwan, Turquie, Vietnam
Tanzanie, Togo, Zimbabwe
Lesotho Afrique du Sud, Malawi Chine, Émirats arabes unis

Madagascar Comores, Maroc Chine, Inde, Indonésie, Thaïlande

Ouganda Afrique du Sud, Botswana, Éthiopie, Kenya, Arabie saoudite, Chine, Corée (République de),
Malawi, Maurice, Mozambique, Namibie, Corée (République démocratique populaire
Rwanda, Tanzanie, Tunisie, Zambie, Zimbabwe de), Inde, Koweït, Malaisie, Mexique, Pérou,
Singapour, Sri Lanka, Thaïlande, Venezuela

Soudan Afrique du Sud, Éthiopie, Madagascar, Bangladesh, Brésil, Inde, Pakistan, Turquie
Ouganda, Soudan du Sud, Tunisie, Zambie

La figure 3 présente le nombre cumulé d’initiatives par partenaire africain, c’est-à-dire le nombre de fois où chaque pays a été
mentionné dans le cadre d’une initiative par les pays ayant transmis des données.

Figure 3 – Nombre cumulé d’initiatives par pays partenaire mentionné

Afrique du Sud
Ouganda
Kenya
Zimbabwe
Rwanda
Maroc
Madagascar
Zambie
Tunisie
Soudan
Somalie
Maurice
Malawi
Éthiopie
Burkina Faso
Togo
Tanzanie
Soudan du Sud
Mozambique
Égypte
Botswana Nombre total d’initiatives (par pays)
Sierra Leone
Nigéria
Namibie
Ghana
Djibouti
République démocratique du Congo
Comores
Algérie

0 2 4 6 8 10 12
Premier rapport sur la coopération Sud-Sud en Afrique 40

Les initiatives de CSS africaines se traduisent également par d’importants progrès dans la réalisation des ODD. La figure 4
présente le nombre d’initiatives contribuant aux ODD.

Figure 4 – Contribution des initiatives de CSS aux ODD57

80 Nombre total d’initiatives


Total number (tous(all
of initiatives pays confondus)
countries)

70

60

50

40

30

20

10

0
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Comme le montre la figure 4, les initiatives de CSS ont principalement contribué à l’ODD 9 (Industrie, innovation et
infrastructures) avec 61 initiatives, l’ODD 8 (Travail décent et croissance économique) avec 40 initiatives et l’ODD 3 (Bonne
santé et bien-être) avec 28 initiatives.

La contribution aux ODD a été la plus modeste pour l’ODD 14 (Vie aquatique) avec 2 initiatives, l’ODD 5 (Égalité entre les sexes)
avec 2 initiatives et l’ODD 10 (Réduction des inégalités) avec 4 initiatives.

La section suivante examine certaines données plus en détail, pays par pays.

57 Il convient de relever que l’un des pays participants n’a pas complété ces données dans le formulaire, de sorte que le nombre total des initiatives contribuant aux ODD
est inférieur au total des initiatives de tous les pays participants. Par ailleurs, certains pays ont sélectionné plusieurs ODD tandis que d’autres n’en ont sélectionné
qu’un seul. Les données ont par conséquent été nettoyées pour sélectionner l’ODD le plus approprié pour chaque initiative, bien que nous reconnaissions qu’un projet
puisse contribuer à plusieurs ODD.
41 Premier rapport sur la coopération Sud-Sud en Afrique

III. Initiatives de CSS pays par pays


Cette section présente les avancées obtenues par les pays africains ayant participé. La figure 5 présente le nombre d’initiatives
de CSS entreprises dans chaque pays.

Figure 5 – Nombre d’initiatives techniques et économiques, par pays

Ouganda

Soudan

Madagascar

Lesotho

Éthiopie

Djibouti

Côte d’Ivoire

Botswana

Bénin

0 20 40 60 80 100 120

Nombre d’initiatives techniques Nombre d’initiatives économiques Nombre total d’initiatives

Les trois pays participants ayant mené le plus d’initiatives de CSS en 2017 sont l’Éthiopie (102 initiatives), l’Ouganda (71 initiatives)
et le Botswana (31 initiatives). C’est également dans ces pays que les initiatives de coopération technique ont été les plus
nombreuses.

La contribution de chaque pays à chacun des ODD est également détaillée à la figure 6.

Photo de groupe PNUD – Malawi, 2016


Premier rapport sur la coopération Sud-Sud en Afrique 42

Figure 6 – Contribution de la CSS aux ODD, par pays58


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Bénin Botswana Côte d’Ivoire Djibouti Éthiopie

Lesotho Madagascar Rwanda Ouganda Kenya

i. La CSS en Éthiopie : principaux chiffres

Selon les données reçues, l’Éthiopie a été la plus active en matière de CSS en 2017, à la fois en tant que bénéficiaire et
contributrice. La majorité de ses collaborations sont intervenues avec la Chine (47 initiatives), l’Inde (13 initiatives) et
l’Ouganda (7 initiatives). Compte tenu de la croissance rapide et de l’industrialisation de l’Éthiopie, il n’est guère surprenant
que 34 de ces initiatives soient en lien avec l’ODD 8 (Travail décent et croissance économique), 28 avec l’ODD 9 (Industrie,
innovation et infrastructures) et 12 avec l’ODD 1 (Éradiquer la pauvreté).

Ses partenaires africains sont présentés à la figure 7.

58 Le Soudan n’a pas fourni de données sur la CSS visant la réalisation des ODD.
43 Premier rapport sur la coopération Sud-Sud en Afrique

Figure 7 – Carte des partenaires africains de l’Éthiopie

Tunisie

Maroc

Algérie Libye
Égypte
Sahara
occidental

Érythrée
Mauritanie
Mali Niger
Cabo Djibouti
Tchad Soudan
Verde Sénégal
Burkina
Faso
Gambie Nigéria Éthiopie
Soudan
République
du Sud
centrafricaine Somalie
Guinée-Bissau Cameroun
Sao
Congo Ouganda
Tomé-et-Principe Kenya
Guinée République
Côte Gabon
démocratique Rwanda
d’Ivoire du Congo
Sierra Bénin
Leone Ghana Tanzanie
Burundi

Seychelles
Libéria Togo Guinée
équatoriale Angola Comores
Malawi
Zambie

Mozambique
Zimbabwe Madagascar
Maurice
Namibie Botswana

Eswatini

Lesotho

Afrique du Sud

La figure 8 montre les différents axes de collaboration de l’Éthiopie dans le cadre de la CSS. Son principal type de coopération
porte sur la dispense de formations.

Figure 8 – Principaux types de coopération de l’Éthiopie (nombre d’initiatives)

Détachement de spécialistes
5
9
Visite évaluative

11
Appui polyvalent

11 Financement de projets
66

Transfert de technologies

Dispense de formations
Premier rapport sur la coopération Sud-Sud en Afrique 44

ii. La CSS en Ouganda : principaux chiffres

Selon les données reçues, l’Ouganda est le deuxième pays participant le plus actif en matière de CSS. Il est généralement le
bénéficiaire des initiatives mais s’est également trouvé en position de contributeur. Il a par exemple apporté sa collaboration
dans les domaines de la paix et de la sécurité sous les auspices de la Mission de l’Union africaine en Somalie ainsi que
dans le cadre d’interventions urgentes de santé publique dans la région. L’Ouganda a collaboré avec plusieurs pays d’Afrique
subsaharienne, et plus particulièrement avec ses voisins, le Kenya, la Tanzanie et le Rwanda. L’Ouganda a aussi collaboré avec
le Kenya afin d’améliorer les services médicaux destinés aux adolescents. Selon les données reçues, les principaux partenaires
de l’Ouganda sont la République de Corée (20 initiatives), la Chine (13 initiatives), l’Inde (3 initiatives) et le Sri Lanka (3 initiatives).

Les partenaires africains de l’Ouganda sont présentés à la figure 9.

Figure 9 – Carte des partenaires africains de l’Ouganda

Tunisie

Maroc

Algérie Libye
Égypte
Sahara
occidental

Érythrée
Mauritanie
Mali Niger
Cabo Djibouti
Tchad Soudan
Verde Sénégal
Burkina
Faso
Gambie Nigéria Éthiopie
Soudan
République
du Sud
centrafricaine Somalie
Guinée-Bissau Cameroun
Sao
Congo Ouganda
Tomé-et-Principe
Kenya
Guinée République
Côte Gabon
démocratique Rwanda
d’Ivoire du Congo
Bénin
Sierra
Leone Ghana Tanzanie
Burundi

Seychelles
Libéria Togo Guinée
équatoriale Angola Comores
Malawi
Zambie

Mozambique
Zimbabwe Madagascar
Maurice
Namibie Botswana

Eswatini

Lesotho

Afrique du Sud
45 Premier rapport sur la coopération Sud-Sud en Afrique

Figure 10 – Principaux types de coopération de l’Ouganda (nombre d’initiatives)

2 Visite évaluative
3
10

Conseil politique

23 Transfert de technologies

20

Financement de projets

Appui polyvalent
13

Dispense de formations

iii. La CSS au Botswana : principaux chiffres

Selon les données reçues, le Botswana est le troisième pays participant le plus actif en matière de CSS. Ses principaux
partenaires sont la Chine (9 initiatives), l’Inde (8 initiatives) et l’Afrique du Sud (3 initiatives). Il est intéressant de relever que
la majorité des collaborations du Botswana se sont concentrées sur l’ODD 16 (Paix, justice et institutions efficaces), suivi de
près par l’ODD 4 (Éducation de qualité pour tous), l’ODD 9 (Industrie, innovation et infrastructures) et l’ODD 15 (Vie terrestre).
Ses trois collaborations avec l’Afrique du Sud visaient toutes le domaine militaire mais le pays a aussi mené des initiatives
telles que des exercices de parangonnage entre les conseils municipaux de Gaborone et Maputo. Le Botswana se félicite de
sa bonne gouvernance, de son intégrité en matière de redevabilité et de sa transparence. Il n’est donc guère surprenant que
ses activités de CSS visent fréquemment la paix et le développement. Les chiffres suggèrent également l’importance de la
proximité géographique en matière de CSS.

Les principaux types de coopération du Botswana sont présentés à la figure 11.

Figure 11 – Principaux types de coopération du Botswana (nombre d’initiatives)

1 Appui polyvalent Aide financière


1
2

2 Financement de projets Bourses

13
3 Transfert de technologies Dispense de formations

4 Conseil politique

5
Détachement de spécialistes
Premier rapport sur la coopération Sud-Sud en Afrique 46

IV. Pays engagés dans des initiatives Des collaborations entre pays voisins ou proches sont
intervenues à maintes reprises. Le Soudan a par exemple
de CSS de petite et moyenne travaillé avec l’Éthiopie afin d’échanger leurs expériences
envergure en matière d’agriculture ainsi que de sécurité alimentaire et
hydrique. Le Lesotho et l’Afrique du Sud ont uni leurs forces
Selon les données reçues, ce sont Djibouti, le Soudan dans le cadre du Lesotho Highlands Water Project et ont
et le Lesotho qui ont entrepris le moins d’actions, avec échangé leurs expériences en matière de tourisme favorable
respectivement 9, 11 et 13 initiatives. Viennent ensuite aux pauvres. Le Bénin compte quant à lui neuf accords avec
le Bénin et Madagascar avec chacun 19 initiatives, puis le Burkina Faso, dans les domaines de la médiation, des
la Côte d’Ivoire avec 22 initiatives. Les données reçues échanges militaires, de la santé, du transport, des permis
montrent également que chacun de ces pays a collaboré de conduire, de l’aide internationale, du tourisme, de
avec des économies émergentes de plus grande envergure, l’information et de la sécurité.
telles que la Chine et l’Inde (le plus souvent dans le cadre
de financements mais aussi dans certains domaines
techniques) ainsi qu’avec d’autres économies émergentes.
La Turquie a par exemple été mentionnée pour huit Encadré 1 – Exemple à suivre :
initiatives, allant du soutien de la construction de voies
les villages verts du Rwanda59
ferroviaires en Éthiopie à la construction de logements
sociaux au Bénin en passant par le partage d’expériences
Le Rwanda travaille en partenariat avec le PNUD
agricoles avec le Soudan et la collaboration avec Djibouti
et le PNUE (Programme des Nations Unies pour
dans divers domaines, notamment la santé, l’éducation et
l’environnement) afin de mettre en pratique et
la sécurité.
d’étendre son concept de villages verts, dans le
cadre de l’Initiative Pauvreté-Environnement (IPE).
Il convient également de souligner que des pays se sont
Il s’agit de s’attaquer aux défis croissants posés
engagés dans la coopération partout sur le continent
par les ressources naturelles dans le pays, tout en
africain. Après sa réadmission au sein de l’UA en 2017, le
apportant un soutien social et des infrastructures
Maroc a collaboré avec différents pays – Bénin, Côte d’Ivoire
à certaines des communautés les plus pauvres
et Éthiopie notamment – au profit de nombreux secteurs.
du Rwanda. Cette initiative démontre comment la
Le Bénin a par exemple initié un projet avec le Maroc, lequel
résolution de problématiques environnementales
a partagé son expérience en matière d’administration
liées à la pauvreté peut aussi permettre la réalisation
publique. Ceci incluait une formation professionnelle, le
d’objectifs nationaux prioritaires en matière de
partage de pratiques d’excellence, et le développement
développement.
des capacités pour la réforme et la modernisation de
l’administration. Le Maroc a par ailleurs assisté le Bénin
Les composantes clés d’un village vert comprennent
dans cette réforme de l’administration. Il a également fourni
1) des réservoirs d’eau qui contrôlent le ruissellement
des ressources à la Côte d’Ivoire pour la construction d’un
et garantissent la disponibilité de l’eau tout au long
débarcadère à Grand-Lahou et a initié une collaboration
de l’année, 2) un assainissement amélioré, 3) de
avec l’Éthiopie concernant l’eau et les ressources
nouvelles méthodes agricoles telles que les terrasses
énergétiques.
et les techniques de contrôle de l’érosion des sols,
notamment l’agroforesterie, 4) une vache par famille
afin d’améliorer la santé publique et la sécurité
alimentaire, et générer des revenus, 5) des unités de
méthanisation-compostage, 6) des toitures en tôle
ondulée, 7) la collecte des eaux de pluie et 8) des
écoles construites à proximité des villages.

En 2018, des donateurs appuyaient déjà ce modèle


et avaient investi dans quelque 44 villages verts
à travers le pays. Le Rwanda a aussi organisé des
réunions régionales afin de présenter ces villages
verts et inspirer d’autres pays, ce type de village
pouvant jouer un grand rôle dans la lutte contre le
changement climatique. Ceci est particulièrement
important puisque selon les données recueillies
pour ce rapport, seules sept initiatives visaient
principalement l’ODD 13 (Lutte contre le changement
Port de Mombasa (edge.ug) climatique) et six l’ODD 15 (Vie terrestre).

59 Le Kenya est connu pour être un important contributeur en matière de CSS et de nombreux pays l’ont mentionné parmi leurs partenaires. Malheureusement, le Kenya
n’a pas été en mesure de fournir des données pour l’intégralité de ses initiatives de CSS. Il a néanmoins fourni des informations concernant certains exemples à
suivre. https://reliefweb.int/report/rwanda/green-villages-rwanda
47 Premier rapport sur la coopération Sud-Sud en Afrique

V. Conclusion
Encadré 2 – Des pistes
Ce chapitre donne un premier aperçu de l’ampleur de la
prometteuses : la CSS au Kenya60 CSS sur le continent africain. Il montre que les dix pays
ayant complété le formulaire sont tous fermement engagés
En 2017, Cuba a détaché 100 professionnels de la
dans la CSS et que cette dernière intervient non seulement
santé cubains dans des établissements médicaux
entre pays africains mais aussi avec d’autres régions et
du Kenya, afin de doter 50 médecins kényans de
continents. Bien que bon nombre de pays se soient engagés
moyens renforcés. Dans le cadre d’un programme
dans des initiatives de CSS avec de grandes économies
visant les équipements médicaux, ces spécialistes
telles que la Chine et l’Inde, il convient de relever qu’il existe
cubains ont contribué à rendre des équipements
également des échanges importants entre différents pays
opérationnels dans 98 hôpitaux, en particulier dans
africains indépendamment de leur taille, ainsi qu’avec des
les départements où une expertise locale n’était pas
contributeurs d’envergure moyenne tels que la Turquie. De
disponible. Le système de formation cubain a été
ce point de vue, la CSS présente des avantages indéniables,
adapté pour répondre aux besoins du système de
comme la création d’un sentiment d’appropriation,
santé, en se concentrant sur les corrélations entre
structuré autour de la recherche du consensus, et le
formation universitaire, pratique clinique et action
développement d’une identité infrarégionale et régionale à
communautaire. Le projet a permis une distribution
travers la définition d’objectifs communs. Il est clair que la
plus équitable des services parmi la population,
proximité géographique et la langue jouent un rôle dans le
l’accès universel reposant sur les principes clés de
sentiment de solidarité partagé par les pays engagés dans
l’équité, de la solidarité et du droit à la santé.
la CSS.

60 Le Kenya est connu pour être un important contributeur en matière de CSS et de nombreux pays l’ont mentionné parmi leurs partenaires. Malheureusement, le Kenya
n’a pas été en mesure de fournir des données pour l’intégralité de ses initiatives de CSS. Il a néanmoins fourni des informations concernant certains exemples à suivre.
Lina Loos (unsplash.com)
Premier rapport sur la coopération Sud-Sud en Afrique 48

Il est également intéressant de relever que de manière les avancées permises par la CSS. Nous espérons donc qu’à
générale, les initiatives des pays participants visent mesure de l’institutionnalisation de la CSS en Afrique, i) les
principalement l’ODD 9 (Industrie, innovation et pays du continent mettront sur pied des systèmes nationaux
infrastructures), l’ODD 8 (Travail décent et croissance de suivi-évaluation de la CSS ou poursuivront leurs efforts
économique) et l’ODD 3 (Bonne santé et bien-être). Ces en ce sens, et ii) les exemples à suivre seront toujours mieux
ODD cadrent avec l’Agenda 2063 et la priorité qu’il donne documentés et reproduits à grande échelle sur le continent.
à l’innovation. Les données suggèrent toutefois qu’une Grâce à la collecte de telles données, il deviendra plus aisé
attention insuffisante est accordée aux initiatives de d’établir des prévisions concernant le coût et l’ampleur de la
réduction des inégalités, de promotion de l’égalité entre CSS, et son efficacité pourra être évaluée.
les sexes et de capitalisation de l’économie bleue. À retenir
également, 23 initiatives visaient la paix et le développement, Ce rapport aspire à être le premier d’une longue série,
un domaine relativement nouveau dans la CSS. afin de démontrer les nombreuses avancées réalisées par
l’Afrique en matière de CSS. Au cours des prochaines années,
Il convient de relever que les données, bien qu’établissant nous espérons également que les initiatives de coopération
un premier bilan de la situation en matière de CSS sur triangulaire seront documentées, afin de pouvoir être
le continent, ne reflètent pas toute l’ampleur de cette reproduites partout sur le continent. Dans la poursuite
dernière sachant i) qu’il existe encore des différences de de cet exercice de suivi-évaluation, il pourra être judicieux
compréhension et de perception quant à la définition de la de consulter – outre les pays participants – les autres
CSS, et ii) que les données sont incomplètes. De plus, il est acteurs de la CSST, afin de valider certaines des données
possible que certaines initiatives n’aient pas été prises en communiquées et élaborer des stratégies de renforcement
compte étant donné la nature transversale de la CSS et le de la CSST. Le chapitre suivant examine différents moyens
manque de coordination. Les données montrent néanmoins et mécanismes innovants permettant un tel renforcement.
49 Premier rapport sur la coopération Sud-Sud en Afrique

CHAPITRE 3

Jeanvdmeulen (pixabay.com)
Premier rapport sur la coopération Sud-Sud en Afrique 50

Promotion de partenariats panafricains :


améliorer la coopération Sud-Sud grâce
à la collaboration avec les partenaires
régionaux et mondiaux
I. Introduction
Le Programme de développement durable à l’horizon 2030 En présentant les progrès réalisés jusqu’ici en matière de
offre un moyen concret de promouvoir un plan mondial de développement, ce rapport – qui est le premier en son
développement visant à éradiquer la pauvreté sous toutes genre sur le continent – souligne l’importante avancée qu’a
ses formes et à garantir une viabilité environnementale. connue l’Afrique. Comme le montre le chapitre 1, les pays
Dans ce cadre, la CSS a un rôle important à jouer. C’est africains ont défini leurs priorités en matière de CSS : les
pourquoi la conférence BAPA+40 qui s’est tenue en mars collaborations peuvent donc désormais être plus ciblées
2019 s’est penchée sur les avancées obtenues dans la CSS et rationalisées. Ceci a non seulement trait à la façon dont
ces 40 dernières années, avec une attention particulière les pays formulent leurs propres politiques mais aussi
portée à l’échange d’expériences et l’expansion de la CSS en aux moyens d’intégrer ces dernières dans les agendas
appui aux ODD. infrarégionaux, régionaux, interrégionaux et panafricains.
Le chapitre 1 montre aussi une institutionnalisation
Malgré les progrès importants réalisés, certaines lacunes croissante de la CSS à travers des référentiels, stratégies
subsistent en termes de connaissances, de même que et mécanismes nationaux, de même qu’à travers la
des obstacles administratifs et financiers : tout ceci limite mise sur pied d’entités/agences de CSS et de bureaux
l’impact de la CSS sur le développement. Par exemple, de coordination chargés de la CSS au sein des gouvernements.
en l’absence d’une définition claire des stratégies de CSS À mesure que les différents pays progressent dans leurs
et des exercices programmatiques et budgétaires, il est efforts, il devient possible d’échanger les expériences et
malaisé d’estimer les ressources et budgets requis pour la de déterminer les modèles les plus appropriés à chaque
CSS61. Par conséquent, des agences des Nations Unies et contexte. Le chapitre 2 présente les chiffres concernant
des organisations panafricaines et régionales soutiennent les initiatives de CSS entreprises en 2017 par les pays
leurs États membres dans le renforcement des capacités participants. Ayant fait le bilan de ces collaborations,
humaines et institutionnelles, afin de permettre la définition l’Afrique peut à présent approfondir ses partenariats, sur le
de politiques et stratégies nationales de développement. continent et au-delà. Dans cet esprit, renforcer les capacités
Les Nations Unies ont également amorcé l’adoption d’une des mécanismes de coordination nationaux peut améliorer
approche conjointement planifiée de la CSS et la création la coordination des politiques Sud-Sud et la diffusion des
d’une stratégie de CSS pour l’ensemble du système de l’ONU62. informations, et permettre de généraliser le partage des
Renforcer la CSS passe par plusieurs voies, parmi lesquelles enseignements et des pratiques d’excellence.
la promotion du dialogue politique et du développement,
le renforcement du partage des connaissances afin de À terme, la CSS peut être renforcée de différentes manières.
développer les capacités, la construction de partenariats Ce rapport s’inscrit dans la mise en place, avec l’appui de
et les modes de financement innovants, la promotion des l’AUDA-NEPAD, du PNUD et du SEGIB, d’un système et
initiatives Sud-Sud régionales et interrégionales, et le suivi- d’une culture de suivi-évaluation à l’échelon régional,
évaluation. conformément au Rapport 2018 du Secrétaire général des
Nations Unies sur la CSS63. Une telle discipline de suivi-
De manière plus générale, la CSS est un moyen de s’attaquer évaluation, fondée sur la collecte des données nationales,
aux inégalités systémiques mondiales qui pénalisent le Sud, permettra notamment d’aligner la CSS sur les priorités à
et l’UA et les CER ont reconnu l’importance d’un dialogue cet échelon. Ce rapport souligne par ailleurs l’importance
politique régional et mondial autour de la CSS afin de du dialogue Sud-Sud. L’UA a déjà réalisé d’importants
mettre à mal le statu quo. À cet égard, la CSS a poussé les progrès dans la promotion d’un débat stratégique régional
gouvernements à venir à bout de ces inégalités, qui sont concernant des enjeux tels que l’Accord de libre-échange
associées à des régimes fiscaux injustes, à l’évasion fiscale, entre la Chine et l’ASEAN, qui peuvent transformer la
au trafic d’êtres humains, à des opérations illicites et à la configuration des échanges commerciaux sur le continent.
corruption, et alimentent des flux financiers illicites dans Des efforts ont aussi été consentis pour aboutir à des
le Sud.

61 https://www.unjiu.org/sites/www.unjiu.org/files/jiu_rep_2018_2_french.pdf
62 http://www.un.org/ga/search/view_doc.asp?symbol=A/73/383&Lang=F
63 http://www.un.org/ga/search/view_doc.asp?symbol=A/73/383&Lang=F
51 Premier rapport sur la coopération Sud-Sud en Afrique

positions communes africaines concernant différentes CSS (qui a en partie inspiré ce rapport) ainsi que la plateforme
thématiques. Nous espérons que ce rapport suscitera de de gestion des données sur laquelle il s’appuie, à savoir le
nouveaux débats stratégiques régionaux sur la CSS, plus SIDICSS. L’exposé de ces réalisations et la reconnaissance
spécifiquement concernant les dispositifs administratifs des avancées de l’Afrique en matière de CSS suggèrent la
et juridiques relatifs à la sélection, aux attributions, aux possibilité de collaborations infrarégionales plus alignées et
obligations et aux prérogatives des spécialistes de la CSS, synergiques à l’avenir.
ainsi que les mécanismes régionaux de gouvernance qui
permettraient d’uniformiser les normes techniques en Le chapitre se penche ensuite sur la BID, qui a également
matière de marchés publics, de règlements commerciaux et renforcé la CSS de façon innovante, par exemple avec son
de régimes fiscaux et monétaires, de façon à promouvoir la mécanisme de partenariat à flux inversés. La BID est connue
CSS et à poursuivre le développement des PCA. pour sa large portée d’action mondiale, qui lui permet de
renforcer les échanges d’expériences à travers différentes
Ce chapitre examine par conséquent de nouveaux efforts régions et continents. Elle a travaillé sans relâche au
entrepris pour renforcer la CSS, plus particulièrement les renforcement de la CSST, qui constitue l’une de ses priorités
partenariats64. Il convient de souligner d’emblée que l’AUDA- clés. Il convient de relever que le rapport 2018 du Secrétaire
NEPAD a défini une vision stratégique pour la CSS et entend général de l’ONU sur la CSS souligne l’importance d’approches
par conséquent jouer un rôle dans sa généralisation à innovantes mettant les initiatives de CSS en évidence. Il
l’échelon régional. Pour l’AUDA-NEPAD, la CSS est avant tout fournit aussi la liste des centres d’excellence et des fonds
une collaboration d’égal à égal, débarrassée des hiérarchies d’affectation spéciale que plusieurs pays ont conjointement
implicitement présentes dans le cadre de l’aide technique mis sur pied avec différentes agences de l’ONU afin de
classique. Ceci implique de construire des réseaux de faciliter les échanges Sud-Sud dans des domaines divers65.
formation plus solides à travers l’Afrique en échangeant À cet effet, la BID est essentiellement une organisation
les idées et connaissances en matière de développement, orientée sur les échanges Sud-Sud. Ce chapitre examine en
entre pays africains de même qu’avec les autres pays en détail le mécanisme de partenariat à flux inversés de la BID
développement dans le monde. L’AUDA-NEPAD souligne ainsi que son programme complémentaire d’inventaire des
l’intérêt croissant des partenariats Sud-Sud pour l’Afrique et centres de ressources.
les pays émergents, contrairement aux relations de l’Afrique
avec les donateurs classiques. Pour terminer, le chapitre se penche sur la coopération
triangulaire, qui continue à capter l’attention de
L’approche de l’AUDA-NEPAD part du principe divers partenaires mondiaux pour la réalisation du
qu’historiquement, les économies africaines ont été Programme 203066. Il est désormais reconnu que la
étroitement intégrées aux anciens pouvoirs coloniaux de coopération triangulaire est étroitement liée à la CSS et
l’Europe et de l’Amérique du Nord. Ces dernières décennies, appuie cette dernière. Grâce à des partenariats inclusifs et
la CSS a acquis une place de premier plan dans les relations horizontaux, elle contribue à tisser des relations de confiance
entre l’Afrique et les pays du Sud. La CSS est une forme de et à exploiter de nouvelles solutions innovantes avec un large
coopération au développement multidimensionnelle et éventail de parties prenantes. La coopération triangulaire
riche d’une longue histoire, et dont la promotion est assurée peut aussi permettre de mobiliser des connaissances et une
via différentes plateformes multilatérales au sein des pays expertise supplémentaires.
en développement. Dans la pratique, deux dynamiques
de coopération tout aussi importantes l’une que l’autre Cet intérêt croissant a par ailleurs conduit à des efforts visant
et qui se renforcent mutuellement se dégagent, à savoir une meilleure définition de la coopération triangulaire67.
la CSS intracontinentale et intercontinentale. L’Afrique Le PNUD a réalisé d’importants progrès à cet égard. Cette
comprend parfaitement que la CSS constitue un catalyseur section définit donc la coopération triangulaire, en détaille
supplémentaire du développement et vient compléter la le développement, fournit les statistiques disponibles
coopération au développement classique entre le Nord et concernant sa prévalence et se penche sur les tendances qui
le Sud. Une institutionnalisation adéquate de la CSS est se dégagent en Afrique.
vitale afin de correctement établir une saine architecture
de coopération entre les pays du Sud. Il est impératif que L’AUDA-NEPAD vise à promouvoir la coopération intra-
l’Afrique formalise et accélère la CSS afin d’influencer la africaine et à redessiner les contours de l’intégration
conception des politiques publiques, ce qui contribuera régionale. La section suivante examine comment la CSS peut
à terme à réaliser les priorités de développement être renforcée entre l’Afrique et l’Amérique latine.
du continent.

Sachant combien il importe de renforcer la vision de l’Afrique


en matière de CSS, ce chapitre commence par examiner les
réussites présentées dans le rapport ibéro-américain sur la

64 Il convient de relever que les sous-sections reposent sur les contributions du NEPAD, de la BID, de Martin Rivero et Cristina Xalma (du SEGIB), et du PNUD.
65 https://www.un.org/ga/search/view_doc.asp?symbol=A/73/383&Lang=F, page 2.
66 https://www.unsouthsouth.org/2017/09/11/2017-report-of-the-secretary-general-on-the-state-of-south-south-cooperation/
67 Rapport sur l’état d’avancement des suites données aux recommandations figurant dans l’examen de la coopération Sud-Sud et de la coopération triangulaire dans
le système des Nations Unies (JIU/REP/2011/3) JIU/REP/2018/2
Premier rapport sur la coopération Sud-Sud en Afrique 52

II. Rapport ibéro-américain la CSS, permettant ainsi d’identifier les tendances clés de la
CSS dans la région au cours de la période décennale.
sur la coopération Sud-Sud :
une source d’inspiration Les chiffres montrent qu’entre 2006 et 2015, les pays ibéro-
pour l’Afrique américains ont pris part à quelque 7 375 programmes,
projets et actions de CSS. En ce qui concerne les modalités de
collaboration identifiées dans le cadre du processus de suivi-
En 2017, le SEGIB a publié la dixième édition de son rapport évaluation, huit initiatives sur dix (soit 6 071) ont consisté
sur la coopération Sud-Sud dans les pays ibéro-américains. en une CSS bilatérale, tandis qu’un millier environ (969) ont
Un an plus tard, le SEGIB a publié un ouvrage commémoratif pris la forme d’une coopération triangulaire, les initiatives
intitulé « Une décennie de coopération Sud-Sud dans les restantes (333) visant la CSS à l’échelon régional. À l’avenir,
pays ibéro-américains » (« Una década de Cooperación Sur- nous espérons que les systèmes de suivi-évaluation de
Sur en Iberoamérica »). l’Afrique vont également commencer à faire de telles
distinctions.
Durant plus d’une décennie, le SEGIB a accumulé des
expériences et des connaissances fondées sur des preuves, Le pouvoir d’analyse et de clarification d’un exercice
pour aboutir à des ressources et une perspective uniques annuel de collecte des données ne peut être séparé d’une
concernant la CSS dans les pays ibéro-américains. Durant autre avancée majeure obtenue au fil des années, à savoir
tout ce temps, le SEGIB a caractérisé, systématisé et analysé la conception, le développement et le lancement de la

Pop Zebra (unsplash.com)


53 Premier rapport sur la coopération Sud-Sud en Afrique

plateforme en ligne SIDICSS, qui est dotée de caractéristiques l’Afrique, à savoir environ 125 initiatives de CSS à travers
uniques et reprend les données régionales sur la CSS. Ce le continent, en particulier au Mozambique (37 actions,
travail a également eu d’importantes répercussions sur les projets et programmes), en Angola (25), au Cabo Verde (20),
efforts d’amélioration de la quantité et de la qualité des à Sao Tomé-et-Principe (17), au Ghana et au Kenya (environ
informations et données collectées sur la CSS. 10 chacun), ainsi qu’en Algérie.

Pour la production des rapports proprement dits, la Le dernier rapport publié sur la CSS dans les pays ibéro-
conception et l’utilisation productive de la plateforme américains (2018) reprend de nouvelles données qui
SIDICSS ont nécessité un solide engagement de tous les attestent de l’importance croissante de l’Afrique dans la
pays ibéro-américains, une contribution exceptionnelle CSS ibéro-américaine. En 2016, l’Afrique a par exemple été
des fonctionnaires chargés des services de statistique et de visée par 30 % de la CSS ibéro-américaine avec d’autres
leurs responsables à la coopération, ainsi que le programme régions en développement – une proportion pour le
PIFCSS. Comme n’importe quelle autre plateforme de moins significative. La plupart de ces collaborations (88
données, le SIDICSS permet d’introduire, enregistrer et sur 91) étaient bilatérales et dans la majorité des cas,
analyser des données. Sa valeur ajoutée réside toutefois l’Afrique en était la bénéficiaire. En outre, et comme le
dans sa capacité de validation croisée des données entre montre la carte, six pays ibéro-américains ont échangé
pays, un processus qui permet aux informations reprises leurs expériences avec des partenaires africains en 2016, à
dans le système SIDICSS d’offrir une cohérence technique et savoir principalement Cuba et l’Argentine (respectivement
une légitimité politique maximales. 68 % et 23 % de la CSS bilatérale avec la région), suivis du
Brésil, de la Colombie, du Mexique et du Venezuela. Ces
Depuis son lancement en septembre 2015, les pays de la 77 projets bilatéraux de CSS ont été largement répartis
région utilisent cette plateforme pour enregistrer chaque entre 37 pays africains bénéficiaires. En 2016, les cinq
programme, activité ou projet de CSS auquel ils ont participé principaux bénéficiaires (40 % des 77 projets mis en œuvre)
pour l’année de suivi-évaluation concernée. Ces activités ont été l’Angola, le Mozambique, l’Afrique du Sud, le Ghana
de CSS ont été incluses dans les éditions ultérieures du et la Guinée-Bissau. Les 60 % restants se sont répartis entre
rapport publiées depuis 2016. De plus, toutes les données 26 pays africains.
relatives aux initiatives de CSS reprises dans les huit éditions
précédentes du rapport ont également été introduites par Pour conclure, soulignons que comme le montrent l’histoire
l’équipe de spécialistes du SEGIB dans le système au cas par récente ainsi que les données, les liens entre les pays ibéro-
cas. C’est ainsi que parmi les régions en développement, américains et l’Afrique en matière de CSS sont encore
le SEGIB, le PIFCSS et les pays ibéro-américains disposent plus riches et solides que nous ne le pensions. Hormis les
actuellement du système d’information le plus complet et à solutions spécifiques aux défis du développement que
jour concernant la CSS. les pays ibéro-américains sont disposés à partager avec
leurs homologues africains, des organisations régionales
L’utilisation conjuguée du système SIDICSS et des rapports multilatérales telles que le SEGIB ont également manifesté
permet d’établir avec grande précision l’ampleur des activités leur ouverture et leur capacité de partager les politiques
de CSS qui ont été déployées par les pays ibéro-américains formulées ainsi que des instruments techniques efficaces
dans d’autres régions. En dix années de suivi-évaluation, les avec des organisations africaines afin d’améliorer le suivi-
pays ibéro-américains ont pris part à quelque 1 100 actions, évaluation de la CSS et ainsi la renforcer. Le contexte actuel
projets et programmes dans 109 pays, dans des régions des débats internationaux de la BAPA+40 offre un espace
aussi éloignées que les Caraïbes, l’Afrique subsaharienne et idéal pour stimuler les synergies entre les deux régions, et
l’Afrique du Nord, l’Asie centrale et du Sud, l’Est asiatique et l’Afrique est aujourd’hui prête à relever le défi.
le Pacifique, ainsi que l’Océanie. De ce point de vue, et bien
que la zone partenaire la plus importante ait été celle des La sous-section suivante examine comment la BID renforce
Caraïbes (hors espace ibéro-américain), les données révèlent aussi les partenariats interrégionaux, grâce aux nouveaux
aussi la collaboration active des pays ibéro-américains avec systèmes qu’elle a définis.
Premier rapport sur la coopération Sud-Sud en Afrique 54

Figure 12 – Projets bilatéraux de CSS entre les pays ibéro-américains (contributeurs) et l’Afrique (bénéficiaire) (2016)68

Maroc

Algérie
Égypte

Niger Tchad Soudan Érythrée

Gambie Djibouti
Guinée-Bissau Nigéria
Éthiopie
Guinée
Burkina Faso
Côte d’Ivoire Sao
Ouganda
Ghana Tomé-et-Principe République
démocratique Kenya
Bénin Cameroun du Congo
Guinée équatoriale Tanzanie
Gabon Mozambique
Congo

Zambie
Angola
Rapport 2018 sur la coopération Sud-Sud dans les pays ibéro-américains

Zimbabwe Madagascar
Namibie

Botswana
Eswatini
Lesotho
Afrique du Sud

Nombre de projets pour lesquels les pays ont été bénéficiaires :


1-2 projet(s) 3 projets 5 projets 6-7 projets

Nombre de projets pour lesquels les pays ont été contributeurs :

Mexique Venezuela
Cuba Argentine
SEGIB

Colombie Brésil
160

Source : SEGIB, sur la base des rapports d’agences de coopération et/ou de bureaux

68 https://www.segib.org/en/ibero-american-cooperation/south-south-cooperation/, p. 160.
55 Premier rapport sur la coopération Sud-Sud en Afrique

III. Étendre la CSST : interventions outre les approches de développement Nord-Sud classiques,
la CSS va gagner en importance, à mesure que de nombreux
de la Banque islamique de pays du Sud se trouvent en meilleure position pour échanger
développement leurs expériences, leur expertise et leurs ressources avec
leurs homologues. C’est dans ce contexte que la BID a conçu
i. Mission de la Banque islamique de des moyens de renforcer la CSS, notamment le mécanisme
développement en matière de CSST de partenariat à flux inversés détaillé ci-dessous et
l’inventaire des centres de ressources que nous aborderons
Depuis sa création en 1975, la BID a eu pour objectif de ensuite.
favoriser le développement humain et économique au
sein de ses pays membres, à travers pléthore d’approches, ii. Argumentaire en faveur du mécanisme
modalités et mécanismes, notamment le financement de de partenariat à flux inversés de la Banque
projets de développement économique et la promotion de islamique de développement
la coopération entre ses pays membres.
En tant qu’institution multilatérale de développement
À cet égard, le cadre stratégique décennal de la BID adopté réunissant exclusivement des pays du Sud, la BID continue
en 2015 a reconnu la nécessité de renforcer son rôle en tant à dédier des ressources à la promotion de la CSS, et ce,
que partenaire de choix pour le développement de ses pays alors qu’elle s’engage sur une nouvelle voie afin de devenir
membres et la facilitation de la coopération entre ces derniers « une banque pour les acteurs du développement ». Ceci
et les communautés musulmanes des pays non membres. permettra à la BID d’assumer un rôle de facilitatrice de
l’échange de solutions de développement innovantes et
En 2016, la BID a initié le Programme quinquennal de son durables entre les pays membres. Depuis 1983, la BID a
président (P5P), qui plaide pour le renforcement du rôle mis en œuvre le Programme de coopération technique,
facilitateur de la BID. Le P5P a pour objectif de transformer qui organise de courtes sessions de coopération entre les
la BID en une banque de connaissances pour les acteurs pays membres, avec pour objectif général de transférer les
du développement, en accordant une plus grande place à capacités d’un pays à l’autre.
la diffusion de solutions de développement complètes et
innovantes entre les pays membres. Parmi les nombreux enseignements tirés de cette longue
expérience de mise en œuvre d’opérations de coopération
En tant qu’institution tirant ses principes de fonctionnement technique, les deux plus notables sont les suivants :
des riches traditions héritées de ses pays membres – parmi
lesquels 27 pays africains –, la BID est tout indiquée pour 1. Les pays membres d’Afrique et d’ailleurs possèdent une
porter la CSS afin d’aider ses pays membres à progresser sur mine de connaissances et de domaines d’expertise qui
le plan économique. C’est pourquoi dès sa création il y a plus peut être exploitée pour renforcer le développement
de quatre décennies, la BID a fait de la promotion de la CSS économique.
l’un de ses chevaux de bataille. 2. Des collaborations à long terme entre les pays membres
peuvent produire des résultats plus durables de même
Près de 40 années se sont écoulées depuis l’adoption du que des partenariats pérennes.
Plan d’action de Buenos Aires, qui a placé la CSS au cœur
du développement socioéconomique. La BID considère la La quête interne de la BID pour un mécanisme de CSS
CSS comme une approche complémentaire à la fourniture renforcé a coïncidé avec la définition, en 2010, de la
de l’expertise et des ressources dont certains pays ont stratégie de partenariat de la Turquie avec les pays
tant besoin. Il s’agit d’une nouvelle voie de développement membres, qui a démontré un enthousiasme avéré de la
économique, qui privilégie la recherche de solutions aux part du gouvernement pour le partage des connaissances,
défis économiques plutôt que le simple financement. En de l’expertise, des technologies et des ressources nationales
faisant apparaître que la coopération entre pays constitue avec d’autres pays en développement. La BID est en outre
un moyen de surmonter les obstacles au développement, parfaitement au fait des succès remportés par bon nombre
la CSS a démontré que des approches non conditionnelles de ses autres pays membres en matière de développement.
fondées sur la solidarité peuvent aussi apporter une Ces réussites ont permis d’accumuler d’importantes
importante contribution au développement économique. capacités dans de nombreux domaines qui, à condition
d’être correctement employées, peuvent être transférées
La BID ainsi que toutes les autres institutions de à des pays membres moins avancés afin de les aider à
développement entrent dans une nouvelle ère dont les ODD progresser.
sont le paradigme. Définis après maintes consultations, les
ODD exigeront des efforts conjoints afin de relever les défis Ces circonstances ont fini par conduire à la création du
persistants rencontrés sur le terrain par les pays membres, à mécanisme de partenariat à flux inversés, qui est défini
savoir la pauvreté, l’accès à la santé et l’éducation, la sécurité comme « un mécanisme de coopération technique
alimentaire, la résilience face au changement climatique, la facilité par la BID et grâce auquel les pays membres et
sécurité et une kyrielle d’autres problématiques. les communautés musulmanes des pays non membres
échangent leurs connaissances, leur expertise et leurs
La formation de partenariats efficaces jouera un rôle ressources technologiques pour développer leurs capacités
substantiel dans la réalisation des ODD. Par conséquent, et concevoir des solutions permettant leur développement
Premier rapport sur la coopération Sud-Sud en Afrique 56

autonome69 ». En tant qu’approche améliorée de coopération demande croît. Ces projets de partenariats à flux inversés ont
technique, le mécanisme de partenariat à flux inversés fait couvert un large éventail de thématiques, parmi lesquelles la
l’objet d’une mise en place pilote depuis 2012. À cette date, santé, l’éducation, l’agriculture et la sécurité alimentaire, les
de nombreux projets autonomes répondant aux besoins énergies renouvelables, ou encore la gestion des risques de
de développement des capacités des pays membres ont catastrophe.
été formulés, dont certains sont terminés et d’autres en
cours d’adoption. Forte des enseignements tirés de cette Des projets de partenariats à flux inversés ont par exemple
phase pilote, la BID a formulé sa politique de partenariat été menés :
à flux inversés de façon à renforcer les liens entre les pays
membres. Elle est actuellement occupée à généraliser le • entre le Niger et la Turquie, pour la prévention de la cécité ;
recours aux partenariats à flux inversés dans le cadre de • entre le Tchad et la Tunisie, pour l’éducation bilingue ;
ses projets courants, en tant qu’outils contemporains de • entre la Gambie et la Turquie, pour le renforcement des
développement promouvant la CSS. capacités de la faculté de médecine de l’université de
Gambie (School of Medicine and Allied Health Sciences) ;
Grâce au mécanisme à flux inversés, de nombreux partenariats • entre le Mali et le Maroc, pour le développement des
ont été mis sur pied avec les institutions des pays membres. capacités dans le domaine de l’énergie solaire afin
Ceci inclut des centres de ressources (institutions dotées d’une de permettre l’électrification de zones rurales (voir
expertise dans des domaines spécifiques et positionnées encadré 3) ; et
pour partager leur expertise et leurs technologies dans • entre la Côte d’Ivoire et le Maroc, pour la cartographie
le cadre d’interventions structurées de développement) des sols selon leur fertilité.
ainsi que diverses agences de coopération bilatérale,
notamment en Azerbaïdjan (AADI, Agence azerbaïdjanaise
pour le développement international), en Égypte (AEPD, Encadré 3 – Développement
Agence égyptienne de partenariat pour le développement),
des capacités en matière
au Maroc (AMCI, Agence marocaine de coopération
internationale), en Indonésie (BAPPENAS, ministère de la d’énergie solaire pour permettre
Planification au développement), en Tunisie (ATCT, Agence l’électrification des zones rurales
tunisienne de coopération technique) et en Turquie (TIKA,
au Mali
Agence turque de coopération et de coordination). Des
partenariats avec le secteur privé, notamment dans le
En 2016, la BID a renforcé son partenariat avec le Maroc
tertiaire, ont également été établis. L’inventaire des centres
en vue de promouvoir des énergies renouvelables et
de ressources réalisé par la BID est détaillé plus loin.
plus particulièrement l’électrification des zones rurales.
La BID a signé un mémorandum d’entente avec le Maroc
Ces cinq dernières années, la BID et ses partenaires ont
afin de promouvoir le transfert de l’expertise marocaine
appuyé 20 projets de partenariats à flux inversés visant
vers des pays membres d’Afrique subsaharienne,
le développement durable, à hauteur de 123 millions
dans différentes sphères, à commencer par le secteur
de dollars US. Jusqu’ici, un total de 21 pays membres
énergétique. Dans ce contexte, la BID mène un projet
contributeurs et bénéficiaires ont participé à ces projets
pilote d’électrification des zones rurales au Mali, dans le
– une liste qui ne cesse de s’étendre à mesure que la
cadre duquel elle a facilité la collaboration entre l’ONEE
et l’AMADER (Agence malienne pour le développement
de l’énergie domestique et l’électrification rurale) dans
la perspective d’un projet conjoint d’évaluation et de
conception d’une électrification solaire innovante pour
les zones rurales maliennes.

Le coût de ce projet au Mali s’élève à 17 millions de


dollars américains, la BID fournissant un prêt de
15 millions et l’ONEE apportant une contribution de
460 000 dollars US. Un projet pilote similaire visant
lui aussi l’électrification des zones rurales a été mené
au Tchad, pour un coût de 22,9 millions de dollars US.
Ce projet mettra à profit l’expertise de l’ONEE pour
développer les capacités de l’opérateur local, la
SNE (Société nationale d’électricité du Tchad), dans
le cadre d’un partenariat à flux inversés. Ces projets
pilotes seront progressivement reproduits dans
d’autres pays membres de l’Afrique subsaharienne,
pour le même secteur (énergie renouvelable en zones
rurales).
Projet énergétique mis en œuvre par le Mali et le Maroc

69 https://www.isdb.org/sites/default/files/media/documents/2019-01/Reverse%20Linkage%20-%20Development%20Through%20SSC.pdf
57 Premier rapport sur la coopération Sud-Sud en Afrique

Par ailleurs, grâce à un projet d’électrification de zones Le mécanisme de partenariat à flux inversés a permis à la
rurales de 30 millions de dollars US mené au Niger, l’Office BID de mettre sur pied des collaborations très diverses,
national de l’électricité et de l’eau potable (ONEE) du Maroc notamment avec des centres de ressources.
va contribuer à augmenter de 20 % l’accès à l’électricité
dans les zones rurales reculées du Niger, d’ici à 2021. Ceci i. Inventaire des centres de ressources
passera par le raccordement i) de 17 500 ménages, soit une des pays membres de la Banque islamique
population de 122 500 personnes, et ii) de 1 500 sites de
de développement : argumentaire
services publics (écoles et hôpitaux) et petites entreprises.
Collecter, valider et partager des informations concernant
IV. Méthodologie : spécificités des les fournisseurs de solutions de développement (que la BID
partenariats à flux inversés appelle des « centres de ressources ») présents au sein de
chaque pays membre revêt une importance capitale. Ces
Il convient d’aborder brièvement les principaux éléments centres de ressources sont des institutions qui ont accumulé
des projets de partenariats à flux inversés, ainsi que les des connaissances et une expertise, et ont élaboré des
spécificités qui les distinguent des autres modalités de solutions et technologies adaptables et fiables pouvant
coopération technique et des projets ordinaires. être partagées avec d’autres pays. Ces centres peuvent
appartenir au secteur public, privé ou non gouvernemental.
L’une des caractéristiques les plus importantes des Ils œuvrent dans un ou plusieurs secteurs prioritaires pour la
partenariats à flux inversés est qu’en tant que mécanismes BID, notamment la santé, l’agriculture, l’énergie, l’éducation,
de coopération technique améliorés, leur objectif premier le transport et les technologies de l’information et de la
est de réunir au moins deux pays afin qu’ils s’apportent communication. Une large diffusion de leurs profils peut
une aide mutuelle dans la résolution de leurs problèmes leur permettre de jouer un rôle vital dans la promotion de
de développement, dans le cadre d’une collaboration à long mécanismes de partenariat à flux inversés.
terme. Cette collaboration vise des résultats spécifiques
en termes de développement, plutôt que de s’en tenir à Grâce à son réseau et ses partenariats, la BID a coopéré
envisager l’activité seule. avec bon nombre de centres de ressources dans ses pays
membres. Elle a pu bénéficier des connaissances précieuses
Une deuxième spécificité notable des partenariats à flux et de l’expertise approfondie que lesdits centres ont
inversés tient au fait que la solution de développement acquises dans leurs secteurs respectifs. Les caractéristiques
visée par chaque projet est conçue à travers une approche de ces centres varient d’un pays à l’autre, notamment leur
d’égal à égal. Cela signifie que le pays contributeur et le taille, leur nombre d’années d’expérience, l’éventail de
pays bénéficiaire sont tous deux pleinement impliqués leurs activités, leurs collaborations internationales, leur
dans l’évaluation des besoins ainsi que dans les phases de exposition, etc.
conception et de mise en œuvre. L’approche permet ainsi
de créer la solution la mieux adaptée, plutôt qu’une solution Bien que cette diversité puisse constituer un avantage, elle
universelle imposée. Dans cette approche d’égal à égal, la pose également certains défis en matière de classification.
BID joue un rôle de facilitatrice et de catalyseur du processus C’est ainsi que jusqu’à l’introduction d’une méthodologie
d’échange des savoir-faire, de l’expertise, des technologies d’inventaire par la BID, il n’existait aucun processus
et des ressources entre les pays membres. Cette approche standardisé et pérenne d’identification de ces centres de
d’égal à égal adoptée durant la conception du projet renforce ressources. Une base de données complète reprenant leurs
le sentiment d’appropriation, tant pour le pays contributeur profils n’existait donc pas. Les connaissances et l’expertise
que pour le pays bénéficiaire. L’approche veille en outre à de la majorité de ces centres de ressources n’étant
impliquer toutes les parties prenantes dans la conception de répertoriées nulle part, elles n’étaient par conséquent pas
la solution, ce qui en garantit la durabilité sur le long terme. accessibles et s’en trouvaient sous-utilisées, en particulier
en dehors de leur pays. De plus, les initiatives d’inventaire
Le sentiment d’appropriation est également renforcé géographique en ligne des organisations de développement
lorsque tous les partenaires, y compris le pays contributeur se concentraient habituellement sur l’échange de données
et le pays bénéficiaire, échangent leur savoir-faire et leur concernant les projets menés et ne collectaient pas
expertise mais contribuent aussi au projet sur le plan nécessairement de données approfondies concernant les
financier, sachant que la BID ne fournit qu’une partie du institutions de développement elles-mêmes, c’est-à-dire les
financement nécessaire. centres de ressources potentiels.

Ces spécificités fondamentales créent un environnement qui ii. Méthodologie d’inventaire des centres
bénéficie à toutes les parties : i) le bénéficiaire acquiert de de ressources
nouvelles connaissances et une expertise qu’il peut intégrer
dans son processus de développement socioéconomique, ii) le Dans le cadre de son mécanisme de partenariat à flux
contributeur assied sa position grâce à une exposition inversés, la BID a compris tout l’intérêt que présentait un
internationale, étend son réseau de partenaires et acteurs du inventaire des centres de ressources, afin de pouvoir mettre
développement, et accède à de nouveaux marchés, et iii) la en relation les détenteurs de connaissances avec ceux qui
BID et ses partenaires de développement peuvent réaliser leur peuvent en bénéficier au sein des pays membres, à travers
objectif global d’appui du développement des pays membres un processus solide appuyé par des données fiables. La
grâce à un modèle de partenariat innovant et moins coûteux. BID a donc lancé un programme intégré d’inventaire des
Premier rapport sur la coopération Sud-Sud en Afrique 58

centres de ressources, et a défini une méthodologie afin de d’étendre ce programme, plus particulièrement en Afrique
sélectionner ces derniers de façon cohérente. subsaharienne. Il est crucial de souligner que les centres de
ressources répertoriés opèrent dans des circonstances très
La BID et le SESRIC (Centre de recherches statistiques, diverses, comme le montrent les profils recueillis. Certains
économiques et sociales et de formation pour les pays facteurs de réussite communs se dégagent toutefois, à
islamiques) ont conjointement défini la méthodologie savoir l’esprit d’engagement et le dévouement des équipes
d’inventaire suivante, à appliquer pour chaque pays : de ces centres pour leurs domaines de travail, et leur
désir d’apporter une contribution digne de sens à leurs
• Déterminer les secteurs dans lesquels le pays possède communautés respectives ainsi qu’à la culture des talents.
des avantages comparatifs à l’échelle internationale et
peut donc servir d’exemple à suivre. Les informations recueillies concernant les produits et
• Établir une première liste de centres de ressources services des centres de ressources en facilitent l’intégration
potentiels grâce à une recherche documentaire et en dans de nouveaux projets. Mais, avant tout, impliquer un
contactant les autorités compétentes. centre de ressources dans la mise en œuvre d’un projet
• Collecter des informations détaillées auprès des centres garantit au pays bénéficiaire l’acquisition de connaissances
de ressources potentiels identifiés, via un questionnaire poussées et de technologies dernière génération. Il convient
complet couvrant notamment les domaines de de relever que le programme d’inventaire des centres de
spécialité du centre, ses ressources humaines, sa ressources a déjà porté ses premiers fruits, puisque certains
structure organisationnelle, ses installations, ses des centres ainsi répertoriés sont à présent impliqués dans
accomplissements (et leurs indicateurs, par exemple, la conception ou la mise en œuvre de projets de coopération
l’obtention de récompenses) et ses initiatives de technique en dehors de leur pays.
collaboration internationale.
• Conduire une évaluation indépendante des profils ainsi Afin de maintenir la qualité des services fournis par les
recueillis en s’appuyant sur un système de notation centres de ressources, la BID assurera la mise à jour régulière
spécifique afin de sélectionner les centres les plus des données relatives à ces derniers et veillera à ce que les
efficaces. institutions de qualité continuent d’être répertoriées. Ceci
• Préparer des profils concis pour les centres de passera par une approche en trois axes :
ressources sélectionnés.
• Publier ces profils, en indiquant pour chacun les domaines/ La mise à jour continue des informations relatives aux centres
secteurs d’intervention du centre, ses ressources de ressources répertoriés grâce à des moyens appropriés.
humaines, ses principales activités, ses domaines
d’expertise, ses accomplissements, ses initiatives de La révision quinquennale des domaines thématiques
coopération internationale, sans oublier ses coordonnées. pour chaque pays répertorié, à la lumière des indicateurs
économiques et d’une évaluation visant à déterminer si les
Chaque pays membre est étroitement impliqué dans cette secteurs précédemment identifiés comme les plus porteurs
méthodologie d’inventaire, afin d’en garantir l’appropriation d’avantages comparatifs le sont toujours.
ainsi que l’utilisation des connaissances locales. La BID
assure uniquement la supervision du processus, qui est La réévaluation des centres de ressources répertoriés
mené par une institution nationale désignée en collaboration afin de s’assurer qu’ils remplissent toujours les conditions
avec l’autorité gouvernementale compétente. L’évaluation requises pour être repris dans cette base de données.
et la notation sont en outre assurées par une institution
indépendante, afin de garantir une sélection finale aussi iii. Vision d’avenir : les objectifs de
rigoureuse que possible des centres de ressources. la Banque islamique de développement
pour le renforcement de la CSS
Toutes les informations recueillies sur les centres de
ressources sont publiées dans un rapport national et mises La BID est convaincue que, quel que soit leur degré de
à disposition sur une plateforme d’inventaire géographique. développement, ses 57 pays membres possèdent tous une
Cette plateforme tire parti de l’efficacité et de la flexibilité expertise dans certains domaines, qui peut être exploitée
des systèmes d’information géographiques, en présentant à par les autres pays membres. Son objectif est donc de
la fois des informations spatiales et des données textuelles. procéder à l’inventaire des centres de ressources dans
Les fonctionnalités clés du système sont l’affichage des chaque pays membre. Cet exercice va donc être étendu,
localisations des centres de ressources, la sélection des horizontalement dans chaque pays, verticalement dans
centres de ressources pour une région, un pays ou un chaque secteur, thématiquement à travers chaque région,
secteur donné, l’affichage du profil simplifié ou complet d’un etc. Nous disposerons ainsi à terme d’une base de données
centre de ressources, l’envoi de commentaires concernant très complète sur la CSS.
un centre de ressources et la proposition de nouveaux
centres de ressources à ajouter à la plateforme. Les pays membres peuvent par ailleurs appliquer la
méthodologie de la BID pour inventorier leurs centres de
À ce jour, la BID a répertorié plus de 129 centres de ressources et communiquer les informations recueillies sur
ressources en Indonésie, au Maroc, au Pakistan, en Turquie la plateforme d’inventaire géographique de la BID. Cette
et dans d’autres pays membres (voir encadré 4). Elle a aussi plateforme peut enregistrer d’autres informations, comme
initié un tel inventaire en Tunisie et en Malaisie, et prévoit les demandes d’assistance d’un centre de ressources donné,
59 Premier rapport sur la coopération Sud-Sud en Afrique

les projets conjoints, les acteurs de la CSS, les mécanismes internes et externes, il sera pour elle crucial de tirer parti
de CSS, etc. L’inventaire de ces données à la fois sous forme du vaste réseau que constituent ses pays membres et leurs
textuelle et géospatiale conduira à des bases de données institutions. Cette nécessité a déjà été clairement exprimée
mondiales, lesquelles constitueront de véritables moteurs dans la Stratégie décennale de la BID ainsi que dans le
de CSS et contribueront à l’ODD 17. P5P, dont l’ambition est de faire de la BID une banque au
service des acteurs du développement. Le partenariat à flux
inversés est un nouveau mécanisme qui permet à la BID de
Encadré 4 – Inventaire des centres jouer un rôle de facilitatrice, en utilisant sa connaissance
des pays membres pour identifier les besoins ainsi que les
de ressources en Indonésie,
contributeurs potentiels aux solutions de développement,
au Pakistan et en Turquie et en établissant et entretenant des relations permettant un
changement transformateur et durable du développement
Le premier exercice d’inventaire des centres de économique.
ressources a été lancé en Turquie en partenariat
avec le SESRIC, la TIKA et l’UNOSSC. Cet inventaire a Les relations nouées par la BID parmi les pays membres
couvert les secteurs de l’agriculture, de l’élevage et de contribueront certainement à réaliser l’ODD 17 mais aussi
la sécurité alimentaire, de la santé et de la nutrition, tous les autres.
de l’éducation et de la formation techniques et
professionnelles, du transport et des communications, La section suivante examine comment étendre la CSS grâce
ainsi que de la gestion des catastrophes et situations à un autre type de partenariats : la coopération triangulaire.
de crise. Au total, 27 centres de ressources turcs ont
été inventoriés.
V. Renforcement de la CSS grâce
En Indonésie, la BID et le BAPPENAS ont procédé à à la coopération triangulaire :
l’inventaire des centres de ressources du pays, et élargir les partenariats
ont présenté les informations recueillies dans un
rapport. Celui-ci présente les profils de 22 centres
de ressources dans les secteurs de l’agriculture, de i. La coopération triangulaire :
la mer et de la pêche, de la santé et de la population, définition et cadre de référence
des produits pharmaceutiques, de l’éducation et de
la formation techniques et professionnelles, de la La coopération triangulaire n’est pas toujours définie comme
planification et de la budgétisation, de la microfinance, telle. Les documents existants emploient fréquemment les
du transport, de l’industrie, du commerce, et de la formules « coopération trilatérale », « assistance trilatérale »,
réduction des risques de catastrophes. « coopération tripartite » ou encore « accord tripartite »
pour désigner le même concept. Aux fins du présent
Au Pakistan, la BID et la commission de l’enseignement rapport et afin de permettre un suivi-évaluation cohérent
supérieur (HEC, Higher Education Commission) de cette thématique, la présente section utilise la définition
ont collaboré à la préparation d’un rapport sur de la Conférence de haut niveau des Nations Unies sur
l’inventaire des centres de ressources du pays. Ce la coopération Sud-Sud organisée à Nairobi en 2009. Le
rapport présente les profils de 16 institutions des document final de Nairobi définit la coopération triangulaire
secteurs de l’agriculture, de l’agroalimentaire, des comme suit : « appui apporté par les pays développés, les
produits pharmaceutiques, et des technologies de organisations internationales et la société civile aux pays
l’information et de la communication. en développement, à la demande de ces derniers, en vue
d’améliorer les compétences spécialisées et les capacités
nationales dans le cadre de mécanismes de coopération
Hormis l’extension de l’inventaire des centres de ressources, triangulaire, y compris d’accords d’appui direct ou de partage
et plus généralement du mécanisme de partenariat à flux de coûts, de projets communs de recherche-développement,
inversés, la BID va rechercher de nouveaux partenariats, de programmes de formation de pays tiers et d’appui aux
en particulier avec le secteur privé et le secteur non centres Sud-Sud, ainsi que par l’apport des connaissances,
gouvernemental, qui n’ont pas aussi largement été exploités de l’expérience et des ressources nécessaires pour aider
que le secteur public. d’autres pays en développement, compte tenu de leurs
priorités et stratégies nationales de développement70 ». Il est
Ceci présentera de nouveaux défis, par exemple, la garantie essentiel de souligner que la coopération triangulaire, telle
de l’équilibre entre les objectifs de développement et les que définie ici, implique des partenariats visant des objectifs
objectifs du secteur privé, le maintien de critères de qualité de développement. Plusieurs réunions de haut niveau sur la
élevés pour la sélection des partenaires, la découverte de coopération au développement, notamment la conférence
nouvelles formes de financement (donateurs potentiels de Nairobi susvisée et le quatrième Forum de haut niveau
actuellement non sollicités) et surtout, l’intégration sur l’efficacité de l’aide tenu en 2011 à Busan en Corée,
systématique des ODD dans tous les projets. Alors que la BID ont reconnu l’importance de la coopération triangulaire
se repositionne au sein de la communauté des institutions de comme mécanisme d’appui au développement durable, et
développement en s’adaptant à l’évolution des circonstances ce dans ses trois dimensions, à savoir économique, sociale

70 Document final de Nairobi, Conférence de haut niveau des Nations Unies sur la coopération Sud-Sud (A/RES/64/222).
Premier rapport sur la coopération Sud-Sud en Afrique 60

et environnementale. À travers la mise en œuvre de ses Les initiatives de coopération triangulaire se sont
principes71, la coopération triangulaire peut appuyer la globalement développées ces dernières années, faisant
réalisation des ODD72, en particulier l’ODD 17 (Renforcer les apparaître toute une série d’approches, de perspectives
moyens de mettre en œuvre le Partenariat mondial pour le et de dispositifs institutionnels complexes. Conjuguée à la
développement durable et le revitaliser). Plus précisément, CSS, la coopération triangulaire peut appuyer la coopération
le Programme 2030 cite la coopération triangulaire comme et l’intégration économiques régionales, et permettre
l’un des moyens d’« améliorer le partage des savoirs selon une participation active des économies africaines dans
des modalités arrêtées d’un commun accord, notamment l’économie mondiale. Cependant, bien que leurs objectifs
en coordonnant mieux les mécanismes existants, en puissent coïncider, les initiatives de CSS et de coopération
particulier au niveau des organismes des Nations Unies, triangulaire possèdent leurs propres spécificités : elles
et dans le cadre d’un mécanisme mondial de facilitation doivent donc faire l’objet de processus séparés de suivi-
des technologies » (17.6). Il reconnaît la coopération évaluation.
triangulaire comme l’un des moyens d’« apporter, à l’échelon
international, un soutien accru pour assurer le renforcement Réaliser les objectifs du Programme 2030 exige plus que
efficace et ciblé des capacités des pays en développement et jamais de généraliser la coopération triangulaire entre toutes
appuyer ainsi les plans nationaux visant à atteindre tous les les parties prenantes et de renforcer la collecte des données,
objectifs de développement durable » (17.9). le partage de l’information et le suivi-évaluation concernant
ce type de coopération. Les spécificités respectives de la CSS
La coopération triangulaire est par ailleurs considérée et de la coopération triangulaire sont détaillées à la section
comme un mécanisme important de financement suivante, de façon à démontrer les avantages comparatifs
du développement. À titre d’exemple, le Programme de la coopération triangulaire.
d’action d’Addis-Abeba (PAAA) de la troisième Conférence
internationale sur le financement du développement ii. Avantages comparatifs de
souligne combien il importe de s’engager à « renforcer la la coopération triangulaire
coopération triangulaire en tant que moyen de mettre les
expériences et les compétences pertinentes au service de la Le document final de Nairobi évoqué plus haut donne une
coopération pour le développement73 ». Quant aux travaux définition générale de la coopération triangulaire, qui peut
du Partenariat mondial pour une coopération efficace donc recouvrir un large éventail d’acteurs et de mécanismes.
au service du développement (GPEDC), ils ont identifié la Pour parvenir à une définition plus pointue, cette section
coopération triangulaire comme un moyen essentiel de analyse les différents rôles joués et les principales
renforcer l’efficacité du développement. Ceci a conduit formes adoptées par cette modalité de coopération au
le GPEDC à lancer l’Initiative de partenariat mondial pour développement en constante évolution.
l’efficacité de la coopération triangulaire lors de sa réunion
de haut niveau de 201674. Différents partenaires, dont le Il importe néanmoins de souligner que la coopération
Canada, le Japon, le Mexique, l’UNOSSC, la BID et l’OCDE triangulaire est multipartite, horizontale et en constante
prennent part à cette initiative multipartite. évolution, et qu’elle recherche l’innovation et la co-
création : le rôle de chaque coopérant n’est donc pas
La coopération triangulaire constitue un moteur politique nécessairement fixe et ce type de partenariat peut évoluer
et opérationnel important pour la réalisation des objectifs avec le temps. De plus, la coopération triangulaire ne se
régionaux. En ce qui concerne l’Afrique, la coopération limite pas à de simples événements ponctuels tels que des
triangulaire joue un rôle croissant dans la concrétisation de réunions ou des ateliers : elle implique une collaboration
la vision de développement du continent telle que définie à moyen ou long terme, structurée autour d’un cycle
par l’Agenda 2063, qui s’appuie sur la coopération entre les de projet.
pays du Sud pour faire progresser le travail de l’UA ainsi que
sa capacité à adopter différentes approches multilatérales75. La coopération triangulaire se distingue de la CSS stricto
sensu en ce sens qu’elle intervient entre au moins
Il importe de comprendre que l’Afrique, bien que deux économies du Sud76, auxquelles il faut ajouter un
traditionnellement et principalement engagée dans la troisième partenaire issu d’un pays développé, à savoir
coopération Nord-Sud, tire de plus en plus parti de la un gouvernement, une agence gouvernementale, ou une
CSS (de façon bilatérale et avec divers partenaires) et de la organisation internationale ou de la société civile. Ce type
coopération triangulaire, à mesure que les pays africains de partenariat tripartite peut appuyer la collaboration
deviennent non plus des bénéficiaires mais bien des régionale, en particulier lorsque des agences de l’ONU ou
contributeurs. La collaboration de l’Afrique avec les économies des institutions multilatérales du Sud telles que l’AUDA-
émergentes demande une approche inclusive et durable du NEPAD, la BAD ou les CER interviennent pour favoriser
développement, spécialement eu égard à la réalisation des les collaborations entre l’Afrique et le reste du monde.
agendas de développement mondiaux et continentaux. Les documents existants emploient différents termes

71 Principes de la CSS et de la coopération triangulaire selon la définition de Nairobi : partage des expériences et des connaissances, respect de la souveraineté et des
priorités nationales, et approche multipartite, tout en veillant à la redevabilité mutuelle, la transparence et l’absence de conditions préalables.
72 https://www.un.org/ga/search/view_doc.asp?symbol=A/RES/70/1&Lang=F
73 https://www.uneca.org/sites/default/files/uploaded-documents/FFD3-2015/document-final.pdf
74 http://www.expo.unsouthsouth.org/2017-antalya/programme/side events/29-nov-d/
75 https://www.un.org/fr/africa/osaa/pdf/au/agenda2063f.pdf
76 Aux fins du présent rapport, « pays du Sud » désigne les pays membres du Groupe des 77 plus la Chine (http://www.g77.org/doc/members.html)
61 Premier rapport sur la coopération Sud-Sud en Afrique

pour désigner les trois principaux rôles à remplir dans un employés sont « Facilitateur », « Partenaire contributeur »
partenariat de coopération triangulaire. Aux fins du présent et « Partenaire bénéficiaire ». Ces différents rôles sont
rapport et dans le cadre des futurs travaux, les termes comparés dans le tableau 3.

Tableau 3 – Comparaison des rôles dans le cadre des partenariats de coopération triangulaire
Facilitateur Partenaire contributeur Partenaire bénéficiaire
Type d’activité Apporte un appui financier et/ou Assistance technique, développement Bénéficie de la coopération
technique, et met à profit son pouvoir des capacités et formation
fédérateur
Avantage • Plus centré sur les résultats • Exploite les ressources et l’expertise • Possibilité de bénéficier d’un soutien
comparatif • Garant du respect des principes pour multiplier les initiatives de CSS international plus horizontal que dans
du partenaire de la CSS en partageant les coûts77 le cadre de la coopération Nord-Sud
• Aide les pays à participer à • Étend la portée et la durée des • Développe ses capacités en
des initiatives Sud-Sud initiatives de coopération gérant ses propres projets de
• Partage les coûts et les • Tire parti de l’expérience de pays développement
responsabilités du Nord possédant l’expertise, les • Accède à des solutions de
• Permet aux partenaires technologies et le savoir-faire requis financement qui ne seraient pas
bénéficiaires de collaborer avec dans les domaines concernés disponibles autrement, et peut
des partenaires contributeurs • Exerce une influence sur la façon donc s’engager dans un projet
qui présentent des similarités dont les pays du Nord gèrent la grâce à différentes catégories de
sociales, linguistiques et coopération au développement fonds (publics, privés, emprunts
culturelles • Renforce les relations globales avec et subventions)
• Capitalise les différents types les donateurs classiques • Pour les pays récemment classés
de compétences techniques • Obtient un soutien externe afin de à revenu intermédiaire, permet
qui existent au sein des pays en favoriser l’intégration régionale de continuer à bénéficier de la
développement coopération au développement avec
• Réduit les besoins futurs d’APD des pays développés lorsqu’ils ne
en développant les capacités sont plus autorisés à recevoir une
des pays du Sud APD de la part des pays membres
du CAD

iii. Tendances mondiales en matière Zusammenarbeit) afin d’établir un rapport80 d’analyse


de coopération triangulaire des différents mécanismes employés par les agences de
coopération japonaises, allemandes et britanniques pour
De par sa nature même, la coopération triangulaire est la mise en œuvre de projets de coopération triangulaire.
un mode de coopération au développement en constante Selon l’enquête du Centre de services régional pour
évolution. C’est pourquoi différents acteurs travaillent à l’Afrique (RSCA) du PNUD, l’Allemagne s’implique également
analyser le cadre de référence de ce secteur qui sans cesse – via les spécialistes de la GIZ – dans la promotion du dialogue
se renouvelle. Pour sa part, l’OCDE procède principalement politique concernant la coopération triangulaire, tandis que le
par voie d’enquêtes et d’analyses des documents existants, Portugal s’attelle à encourager le débat international autour
en particulier pour les pays du CAD, afin de déterminer de la question81. Depuis 2013, l’Instituto Camões82, qui est
comment ces acteurs traditionnels de l’APD interviennent responsable de la coopération internationale du Portugal,
dans la coopération triangulaire78. a organisé quatre réunions internationales sur la question
avec l’OCDE. Le pays est également membre de la Conférence
À l’ONU, c’est l’UNOSSC qui dirige le travail sur ce sujet en ibéro-américaine et de la Communauté des pays de langue
coordination avec le PNUD, les autres agences et les États portugaise (CPLP), où il joue un rôle prépondérant dans
membres, et qui mobilise les efforts de recherche79. À titre les relations Europe-Afrique-Amérique latine. Par ailleurs,
d’exemple, la série de publications « Sud-Sud en action » des partenariats multilatéraux et des groupes de travail
offre une plateforme de diffusion des meilleures méthodes consacrés à la coopération triangulaire mènent actuellement
en matière de CSST auprès des partenaires de l’UNOSSC. d’importants travaux.

Les agences de développement des principaux acteurs L’Initiative de partenariat mondial pour l’efficacité de la
de la coopération triangulaire travaillent elles aussi coopération triangulaire évoquée plus haut a par exemple
au renforcement des connaissances. La JICA a par été créée pour analyser et systématiser les meilleures
exemple collaboré avec le ministère du Développement méthodes ainsi que pour définir les principes permettant
international du Royaume-Uni (DFID, Department de garantir l’efficacité de la programmation et de la mise en
for International Development) de même qu’avec la œuvre de la coopération triangulaire. Néanmoins, malgré
coopération allemande (GIZ, Gesellschaft für Internationale tous les travaux en cours visant à définir les concepts et

77 http://www.un.org/ga/search/view_doc.asp?symbol=A/73/383&Lang=F
78 http://www.oecd.org/fr/cad/relations-mondiales-cad/la-cooperation-triangulaire.htm
79 Pour en savoir plus, consultez le rapport de l’UNOSSC intitulé « Bonnes pratiques en matière de CSST pour le développement durable », vol. 1 et 2 (https://www.
unsouthsouth.org/bibliotheque/publications/?lang=fr).
80 https://www.jica.go.jp/jica-ri/publication/booksandreports/jrft3q00000029ts-att/Triangular_Cooperation_Mechanisms_1_for_web.pdf
81 Enquête du Centre de services régional pour l’Afrique (RSCA) du PNUD sur la coopération triangulaire (2018)
82 https://www.instituto-camoes.pt/
Premier rapport sur la coopération Sud-Sud en Afrique 62

analyser les avantages comparatifs, une compréhension des cas, les partenaires contributeurs et bénéficiaire
globale de l’ensemble des activités de coopération appartiennent à la même région.
triangulaire fait encore défaut.
Cette proximité géographique est toujours d’actualité,
Par exemple, des chiffres précis concernant la distribution essentiellement en raison des similarités culturelles et
géographique, les acteurs impliqués et les budgets alloués linguistiques qui existent entre pays voisins, et de la
sont encore insuffisamment communiqués. Cette section réduction des coûts ainsi permise. De rapides évolutions
s’appuie donc sur les quelques données disponibles sont toutefois survenues ces dernières années, notamment
pour tenter d’identifier les tendances de la coopération une augmentation des projets de coopération triangulaire
triangulaire dans le monde. impliquant des partenaires en développement de
différents continents. Ceci se vérifie tout particulièrement
Tout d’abord, il convient de relever que les pays en pour les pays émergents. Les pays du groupe BRICS
développement ont participé à une enquête du Forum pour établissent actuellement des partenariats avec des pays
la coopération en matière de développement des Nations en développement partout dans le monde, et la Chine et
Unies en 2018, qui donne une idée approximative de la place le Brésil sont des contributeurs notables dans le cadre des
occupée par la coopération triangulaire dans les activités projets de coopération triangulaire en Afrique et Amérique
de coopération au développement83. Parmi les pays ayant latine.
participé à l’enquête, 64 % avaient mis des dispositions
en place concernant la CSST. Quant à l’architecture de Une enquête de l’OCDE couvrant l’année 201585 donne une
la coopération triangulaire, une analyse des documents idée des types d’acteurs impliqués dans la coopération
disponibles menée par l’OCDE84 indique que dans la plupart triangulaire (voir figure 13).

Figure 13 – Types d’acteurs impliqués dans la coopération triangulaire86

Gouvernements et organisations internationales


6%
5%

Société civile, médias et fondations


14 %

Autres (hôpitaux, autorités chargées de la vie sauvage, municipalités)


61 %
14 %

Monde universitaire et recherche

Secteur privé

Sur le plan géographique, 55 % des projets ont été déployés Au niveau mondial, le budget alloué à la coopération
en Amérique latine et dans les Caraïbes, 22 % en Afrique et triangulaire a augmenté, tout comme la durée des projets.
20 % dans la région Asie-Pacifique. Le pays le plus impliqué Les résultats de l’enquête de l’OCDE visée plus haut montrent
dans la coopération triangulaire était le Japon (plus de que la grande majorité des projets durent d’un à quatre ans,
100 projets), suivi du Brésil et du Chili (plus de 50 projets avec 38 % de projets durant d’un à deux ans et 33 % de trois
chacun). La Norvège, l’Espagne, le Guatemala, l’Allemagne, à quatre ans88. Il apparaît également que 14 % des projets
l’Afrique du Sud et le Mexique avaient un portefeuille de plus de coopération triangulaire comportaient plusieurs phases
de 20 projets. Il importe toutefois de souligner que la majorité et duraient plus de quatre ans, révélant que ce mode de
des facilitateurs et partenaires contributeurs ne disposaient coopération devient moins anecdotique et se mue en un
pas d’une stratégie régionale ou nationale en matière de véritable instrument de développement des relations de
coopération triangulaire. Pour certains pays, dont le Japon, longue durée entre les pays. Le budget total moyen des
la Norvège, l’Afrique du Sud, le Portugal et la Tunisie, les projets communiqués était de 1,7 million de dollars US, mais
activités de coopération triangulaire s’inscrivent dans leur 71 % des projets affichaient un budget inférieur à un million
stratégie globale de coopération au développement87. et les coûts étaient partagés entre les partenaires dans 48 %

83 https://www.un.org/ga/search/view_doc.asp?symbol=E/2018/55&Lang=F
84 Coopération triangulaire : que nous disent les documents disponibles ? Direction de la coopération pour le développement, OCDE, 2013.
85 Cette enquête a couvert 62 organisations nationales et identifié plus de 450 projets de coopération triangulaire. Pour en savoir plus, voir http://www.oecd.org/dac/
dac-global-relations/Interim%20Report%20Triangular%20Co-operation%202015%20Survey%20-%20May%202016.pdf
86 https://www.oecd.org/fr/cad/relations-mondiales-cad/Dissiper les mythes de la coopération triangulaire_2015 questionnaire.pdf
87 Enquête du Centre de services régional pour l’Afrique (RSCA) du PNUD sur la coopération triangulaire (2018)
88 http://www.oecd.org/dac/dac-global-relations/Interim%20Report%20Triangular%20Co-operation%202015%20Survey%20-%20May%202016.pdf
63 Premier rapport sur la coopération Sud-Sud en Afrique

des cas89. Enfin, les principaux secteurs de mise en œuvre iv. Situation actuelle de la coopération
étaient le gouvernement et la société civile (30 % des projets), triangulaire en Afrique
suivis de la santé et de l’agriculture (13 % chacun) et de la
protection de l’environnement (7 %). Selon l’enquête du RSCA, Tout comme l’Amérique du Sud, l’Afrique est un terrain fertile
les secteurs visés reflètent dans certains cas les demandes pour la coopération triangulaire. Depuis le BAPA, la CSST
des pays bénéficiaires (par exemple, pour l’Allemagne et a fait son chemin et est plus largement employée dans la
l’Afrique du Sud) et ne sont pas spécifiquement liés à une région. L’UA a par exemple « mis sur pied un certain nombre
politique précise du pays contributeur ou du facilitateur90. d’institutions techniques panafricaines, conformément
aux recommandations relatives à la mise en commun des
Des efforts ont été consentis afin de créer un cadre institutionnel ressources pour l’autonomie collective formulées dans le
de promotion du Programme 2030 aux échelles nationale, Plan d’action de Buenos Aires95 ».
régionale et mondiale. Les États ont systématiquement
travaillé à la création de structures institutionnelles pour la Comme observé précédemment, l’une des évolutions clés sur
coordination, la mise en œuvre et le suivi-évaluation en lien le continent est la transformation du NEPAD, pour donner
avec les ODD, et s’efforcent de relier ces systèmes à la CSST. naissance à l’AUDA-NEPAD. Cette agence entend poursuivre
Par ailleurs, de plus en plus de pays ont soit créé des agences et développer la mission qui incombait au NEPAD, afin de
de CSS, soit renforcé leurs capacités en matière de CSST au sein relever les défis qui se posent actuellement au continent
des institutions chargées de la coopération internationale. africain, notamment l’éradication de la pauvreté grâce à
En ce qui concerne les organisations internationales et les une croissance et un développement durables, ainsi que
banques de développement, elles ont travaillé à l’intégration la réduction des inégalités. La vision de l’AUDA-NEPAD met
de la coopération triangulaire dans les politiques et cadres l’accent sur la réforme des politiques et sur un investissement
stratégiques de leurs fonds91. Le PNUD et d’autres agences accru dans les secteurs clés, notamment l’industrialisation,
spécialisées travaillent aussi à développer leurs capacités clés l’agriculture, le développement du capital humain, les
pour le soutien aux États membres. Le PNUD œuvre ainsi à capacités des institutions (avec une attention particulière
renforcer les politiques actuelles, le cadre institutionnel et la portée à la science, aux technologies et à l’innovation), les
gestion des données relatives à la coopération triangulaire infrastructures et la résilience de l’environnement. Cette vision
afin de créer un écosystème propice aux échelles nationale, a pour but de garantir une participation efficace de l’Afrique
régionale et mondiale. dans l’économie mondiale, en privilégiant la diversification
de sa production et de ses exportations (en particulier
Au niveau panafricain, des organisations régionales et dans l’agroalimentaire, la production manufacturière,
infrarégionales commencent à endosser un rôle de leaders l’exploitation minière, la transformation du minerai et le
dans la promotion de la coopération triangulaire, avec des tourisme), en accélérant les échanges commerciaux entre
initiatives telles que le présent rapport, dont l’objectif est les pays africains et en améliorant l’accès aux marchés plus
de diffuser des informations sur la coopération triangulaire. développés pour ses exportations. En qualité d’agence de
Différents pays, dont le Japon, ont souligné la nécessité développement de l’UA, l’AUDA-NEPAD est une structure
d’organisations régionales plus solides afin de coordonner panafricaine qui œuvrera à étendre la CSST et à renforcer
les initiatives régionales et créer un environnement propice les dialogues régionaux ainsi que les positions communes
capable de convaincre de nouveaux partenaires d’investir concernant les thématiques clés.
dans la coopération triangulaire sur le continent africain92.
D’autre part, l’Afrique souhaite promouvoir l’autosuffisance, Il n’en demeure pas moins que le suivi-évaluation des
notamment en privilégiant plus largement les investissements projets de coopération triangulaire reste peu développé
directs étrangers, en élargissant l’assistance financière et sur le continent, freinant ainsi l’accès à une vue d’ensemble
technique, en libéralisant le commerce, en multipliant les précise de ce type de coopération en Afrique. En dépit de ce
programmes de crédit garanti et en aidant les PME. manque d’informations, cette section s’efforce de dégager
certaines tendances quant aux collaborations actuelles en
Le travail des organisations régionales latino-américaines matière de coopération triangulaire sur le continent.
demeure néanmoins un exemple à suivre pour les autres
régions. En ce qui concerne la gestion des données, La proximité linguistique est l’un des éléments clés favorisant
le Programme ibéro-américain du SEGIB a appuyé le les projets de coopération triangulaire en Afrique. Comme
renforcement des méthodologies de gestion des données sur indiqué plus haut, le Brésil occupe une place de premier
la CSST dans la région93. Au niveau politique, la Communauté plan parmi les pays contributeurs, principalement en raison
des États d’Amérique latine et des Caraïbes (CELAC), qui de ses collaborations avec les pays lusophones africains. Un
constitue un forum de dialogue et d’entente politiques pour exemple simple d’activité de coopération triangulaire est le
les 33 pays d’Amérique latine et des Caraïbes, est occupée à projet Quality Education for All mené entre une université
élaborer une politique de coopération régionale qui définit brésilienne (PUC-Rio) et Sao Tomé-et-Principe, avec le soutien
les priorités des projets pour la CSST94. du Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF) ainsi

89 Projets pour lesquels les participants à l’enquête ont communiqué des données de budget (345 cas).
90 Enquête du Centre de services régional pour l’Afrique (RSCA) du PNUD sur la coopération triangulaire (2018)
91 https://www.un.org/ga/search/view_doc.asp?symbol=A/72/425/Add.2&Lang=F
92 Enquête du Centre de services régional pour l’Afrique (RSCA) du PNUD sur la coopération triangulaire (2018)
93 https://www.segib.org/en/ibero-american-cooperation/south-south-cooperation/
94 Rôle de la coopération Sud-Sud et mise en œuvre du Programme de développement durable à l’horizon 2030 : difficultés et perspectives – Rapport du Secrétaire général
95 Ibid.
Premier rapport sur la coopération Sud-Sud en Afrique 64

qu’un financement émanant du Commonwealth. Ce projet de triangulaire en Afrique. Un exemple intéressant est celui de
quatre ans repose sur l’échange d’une expertise technique et la Palestine, qui doit encore elle-même surmonter plusieurs
sur la formation au renforcement de l’accès à un enseignement défis en matière de développement. Elle a néanmoins
préscolaire de qualité, afin de concevoir et déployer un créé sa propre agence de coopération (PICA, Palestinian
programme de développement de la petite enfance destiné International Cooperation Agency) en 2016, qui privilégie
aux enfants de 4 et 5 ans vivant à Sao Tomé-et-Principe. La l’action en Afrique en ce qui concerne les programmes
France possède elle aussi une longue histoire de contributrice de lutte contre la pauvreté, le programme 2018-2022 de
à l’aide au développement dans ses anciennes colonies ; ce l’alliance pour la prévention de la cécité et les opportunités
lien linguistique entre les pays ouvre la voie à différentes dans le secteur privé. En collaboration avec des organisations
possibilités de partenariats. Les pays francophones internationales telles que le PNUD, la BID et la Banque arabe
interviennent ainsi non seulement en tant que bénéficiaires pour le développement économique en Afrique (BADEA),
mais aussi en tant que facilitateurs et partenaires de premier elle a mis en œuvre des projets de coopération triangulaire
plan. La nouvelle initiative de coopération tripartite co- dans plusieurs pays d’Afrique subsaharienne (Mauritanie,
organisée par le Maroc et l’Organisation internationale de la Sénégal, Rwanda, Soudan et Botswana)99. L’exemple de la
francophonie lancée en 2018 en est un exemple révélateur. Palestine démontre que chaque pays possède des points
forts et peut endosser le rôle de contributeur en plus de
L’évolution de la coopération triangulaire favorise également celui de bénéficiaire dans le cadre de différentes activités de
l’intégration entre les pays africains et la résolution de coopération triangulaire.
problèmes communs à l’ensemble du continent, tels que
ceux liés à la sécurité. Un exemple remarquable est l’Initiative Enfin, des pays africains prennent part à des projets
régionale pour le renforcement des capacités (Regional interrégionaux plus ambitieux de coopération triangulaire,
Initiative for Capacity Enhancement) menée au Soudan du dotés d’un budget plus généreux et de plus longue durée.
Sud, qui vise à apporter une aide au maintien de la paix. Par exemple, le projet INVENT (Innovative ventures and
Ce projet a été mené en deux phases, de 2010 à 2013 et de technologies for development) a pour but d’appuyer les
2013 à 2018. Les partenaires contributeurs étaient l’Autorité innovations technologiques et commerciales au bénéfice
intergouvernementale pour le développement (IGAD), qui des populations pauvres des États à faible revenu de l’Inde,
avait pour responsabilité de mettre le projet en place avec le ainsi que dans d’autres pays. Les partenaires de ce projet
gouvernement du Soudan du Sud (partenaire bénéficiaire), sont le gouvernement indien, le Royaume-Uni, l’Afghanistan,
et trois pays voisins (Éthiopie, Kenya et Ouganda) qui ont le Bangladesh, l’Éthiopie, le Kenya, le Népal et l’Ouganda,
détaché 200 fonctionnaires. Les facilitateurs étaient la avec plusieurs organisations nationales appuyant la mise en
Norvège (responsable du financement du projet) et le œuvre, à savoir Millennium Alliance, la fédération indienne
PNUD, qui a apporté un soutien technique, administratif des chambres de commerce et d’industrie, Sankalp,
et d’encadrement. Ce modèle d’accompagnement et de Intellectual Capital Advisory Services Pvt Ltd, Innovations
mentorat est un type de coopération triangulaire qui se Knowledge Exchange Facility et IMC Worldwide. Le projet
multiplie afin de développer les capacités des fonctionnaires. INVENT est un exemple de coopération triangulaire sur des
Ceci montre qu’impliquer des pays voisins dans le solutions conjointes en matière d’innovation commerciale,
développement des capacités comporte des avantages, tels doté d’un budget élevé (plus de 10 millions de dollars US)
que l’affinité culturelle et linguistique, la connaissance des et s’inscrivant dans la durée (2013-2023). Ce type de projet
conditions locales et régionales, et un détachement moins interrégional possède différentes répercussions positives
coûteux96. L’agence de développement norvégienne (NOREC) qui vont au-delà de la coopération triangulaire stricto sensu :
est également un acteur important de la coopération il peut favoriser une coopération à long terme entre des
triangulaire en Afrique. Ce type de coopération fait en effet pays de régions différentes, en vue de coopérations futures
partie de sa stratégie générale de développement depuis dans d’autres domaines.
maintenant 18 ans, principalement à travers l’échange de
personnel dans le cadre de la coopération institutionnelle97.
v. La voie du progrès pour
Selon les résultats de l’enquête du RSCA, le nombre de la coopération triangulaire
nouveaux partenaires impliqués dans la coopération
triangulaire en Afrique est en augmentation, et ceci inclut Comme l’a montré ce rapport, la coopération triangulaire est
plusieurs pays sans relations historiques avec le continent. un mode de coopération au développement qui présente
Ainsi en est-il du Chili, qui a initié des projets de coopération plusieurs avantages pour les pays en développement africains
triangulaire avec des pays comme le Mozambique et s’étend rapidement sur le continent. L’intensification et
et l’Angola, par le biais de mémorandums d’entente la transformation de cette coopération triangulaire ont
avec le Portugal et le Brésil. Ces activités tendront à se nourri le souhait d’améliorer la coordination, la cohérence
développer, sachant que la stratégie actuelle de l’agence et le suivi-évaluation de ces activités. Le processus de suivi-
de développement chilienne (AGCID) souligne l’élaboration évaluation dont ce rapport africain sur la CSS constitue la
d’un agenda de référence commun pour l’Afrique98. Par première étape a offert l’occasion de réfléchir à ce que les
ailleurs, les petits pays en développement deviennent eux pays africains ont déjà accompli en matière de coopération
aussi des partenaires contributeurs actifs de la coopération triangulaire, et de promouvoir

96 Pour en savoir plus, voir http://www.undp.org/content/dam/southsudan/library/Reports/southsudanotherdocuments/IGAD-Mid-Term-Review-FINAL-13.pdf


97 Enquête du Centre de services régional pour l’Afrique (RSCA) du PNUD sur la coopération triangulaire (2018)
98 https://www.agci.cl/images/centro_documentacion/RESUMEN_EJEC_POLITICA_Y_ESTRATEGIA_COOP_26nov15.pdf
99 Palestinian International Development Cooperation Strategy, 2018-2022
65 Premier rapport sur la coopération Sud-Sud en Afrique

les priorités panafricaines dans le cadre des dialogues de coopération internationale. L’AUDA-NEPAD a par ailleurs
stratégiques mondiaux. Pour améliorer et élargir le cadre de identifié la possibilité de faire progresser des domaines
la coopération au développement en Afrique, le processus de clés pour l’Afrique grâce à la CSST : la mise à contribution
suivi-évaluation qui donnera lieu aux futures éditions de ce de la science, des technologies et de l’innovation avec la
rapport devra également couvrir la coopération triangulaire réduction de la pauvreté, la création d’emplois, la durabilité
– et non plus uniquement la CSS. Afin de permettre cette des moyens de subsistance et l’amélioration du bien-être
collecte de données et d’encourager les différents acteurs des citoyens.
à participer, il sera néanmoins nécessaire de clarifier le
concept de coopération triangulaire. Il sera alors possible
d’y sensibiliser tous les acteurs, notamment les acteurs non
VI. Conclusion
gouvernementaux tels que les universités, les ONG et le
secteur privé. Ce chapitre s’est penché sur les moyens de renforcer la
CSS grâce à la mise sur pied de partenariats régionaux
Dans le souci d’améliorer la compréhension générale de ce et mondiaux. Promouvoir la CSS exige non seulement
sujet, le RSCA du PNUD travaille à la rédaction d’un nouveau d’encourager la concertation et le développement mais
rapport sur la coopération triangulaire. En s’appuyant sur aussi de renforcer l’échange des savoirs, la construction de
les documents disponibles ainsi que sur l’enquête du RSCA partenariats et les modes de financement innovants.
menée auprès de pays développés et en développement, Ce chapitre a également souligné l’engagement crucial
de facilitateurs et de partenaires contributeurs, ce pris par l’Afrique par le biais de l’AUDA-NEPAD, à savoir
rapport s’efforcera de fournir des informations clés aux développer et renforcer les partenariats Sud-Sud, et plus
décisionnaires politiques africains concernant les possibilités particulièrement les partenariats au sein de l’Afrique.
de coopération triangulaire, notamment les secteurs
potentiels, les zones géographiques, les partenaires et les Le SEGIB a démontré l’importance du suivi-évaluation,
différentes modalités de mise en œuvre de ce type innovant non seulement dans les pays ibéro-américains mais aussi

Montagnes du Lesotho, viechfisch (pixabay.com)


Premier rapport sur la coopération Sud-Sud en Afrique 66

en Afrique. Bien que la collecte de données soit encore La coopération triangulaire constitue également un moyen
balbutiante en Afrique, nous espérons qu’avec le temps, déterminant d’étendre la CSS, en mettant sur pied des
des systèmes de gestion des données pourront également y partenariats tripartites où les pays développés peuvent
être mis en place, permettant ainsi des validations croisées intervenir de manière plus horizontale et où les pays en
des données. Le suivi-évaluation de ces données permettra développement peuvent accéder à de nouvelles compétences
en outre d’établir plus aisément les priorités et stratégies. et ressources. Des organisations internationales ont aussi
facilité ces évolutions. Nous en savons actuellement peu sur
En se projetant au-delà des pays ibéro-américains, la l’ampleur de la coopération triangulaire en Afrique mais le
BID s’est attelée au renforcement de la CSST grâce à prochain rapport sur la CSS africaine s’efforcera d’apporter
son mécanisme de partenariat à flux inversés, qui lui a plus d’informations en sollicitant les pays intéressés. Les
permis de construire bon nombre de partenariats avec priorités et partenariats futurs pourront alors être identifiés
des institutions de ses pays membres. Ce mécanisme est de façon plus précise.
remarquable en ce qu’il vise des résultats spécifiques en
matière de développement plutôt que de se concentrer sur La CSST poursuit sa dynamique, sur le continent africain et
la programmation, et adopte une approche d’égal à égal qui dans le monde. Alors que l’Afrique songe à renforcer ses
permet un sentiment d’appropriation de la démarche ainsi propres collaborations régionales, la conférence BAPA+40
que la co-création des solutions les mieux adaptées. La BID a offert une occasion aux pays du Sud de préciser leurs
a aussi défini une excellente méthodologie d’inventaire des priorités de développement dans un contexte mondialisé
centres de ressources les mieux positionnés pour partager et de proposer des moyens concrets pour la réalisation
leur expertise et leurs technologies de façon structurée. La des ODD. Les ODD nous engagent à ne laisser personne de
BID va poursuivre son travail d’inventaire afin d’étendre ce côté : une promesse qui doit se traduire par des actes.
réseau de centres de ressources, et va également rechercher
de nouveaux partenariats, notamment avec le secteur
privé et les ONG. Les stratégies et programmes de la BID la
positionnent par conséquent comme une entité facilitatrice
capable de contribuer à la réalisation des objectifs de
développement Sud-Sud.

Bâtiment de l’Union africaine (Flickr.com)


67 Premier rapport sur la coopération Sud-Sud en Afrique

Parc industriel de Bole Lemi (PNUD Éthiopie)


Au service
des peuples
et des nations

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