Rapport Définitif - Audit CMU - Mutuelles de Santé VF 2
Rapport Définitif - Audit CMU - Mutuelles de Santé VF 2
Rapport Définitif - Audit CMU - Mutuelles de Santé VF 2
AUDIT DE PERFORMANCE
VOLET DEVELOPPEMENT DES MUTUELLES DE SANTE/
PROGRAMME DE LA COUVERTURE MALADIE UNIVERSELLE
RAPPORT D’ETUDE PRELIMINAIRE
GESTIONS 2015-2019
RAPPORT DEFINITIF
Equipe d’audit :
Mme Zeynab MBENGUE WADE, Conseiller, Rapporteur
Mme Aïta NDOYE, Assistante de vérification
M. Malick DIENG, Assistant de vérification
Octobre 2021
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DELIBERE
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6.2. Des subventions de plus en plus détournées de leurs objectifs .................................. 105
6.3. Des subventions encore peu efficaces et dont l’utilisation est faiblement contrôlée 110
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INTRODUCTION
Le présent rapport portant sur l’audit de performance du volet « développement des mutuelles
de santé » du programme de Couverture Maladie universelle (CMU) du Sénégal, gestions 2015-
2019, entre dans le cadre de l’exécution du programme de contrôle de la Cour des Comptes
pour l’année 2020 adopté par arrêté n°002 du Premier Président de la Cour en date du 14 janvier
2020. Il contribue à la mise en œuvre de l’entente de coopération entre la Cour et la Fondation
Canadienne pour l’Audit et la Responsabilisation (FCAR) concernant la réalisation d’un projet
spécial d’audit par un boursier du Programme international de formation en audit de
performance.
Il participe également à la concrétisation des engagements de la Cour de réaliser des audits sur
la mise en œuvre des Objectifs de Développement durable (ODD) dans les différents domaines
concernés particulièrement au regard de l’atteinte des objectifs en matière de santé et d’égalité
et d’équité de genre après avoir réalisé en 2019 un audit de performance sur l’état de préparation
du Sénégal à la mise en œuvre de ces ODD. Dans la même lancée, il se situe dans la série des
audits réalisés sur les dépenses de santé de l’Etat afin d’en évaluer l’efficacité.
En conformité avec ces engagements, le présent mandat a permis d’évaluer, à l’aide de critères
appropriés, l’efficacité et l’efficience du programme tout en vérifiant le niveau de prise en
compte des enjeux de développement durable et d’intégration du genre pour la formulation des
recommandations idoines.
Rappel des compétences de la Cour des Comptes du Sénégal
L’audit de performance du volet développement des mutuelles de santé du programme de la
CMU entre dans le cadre des missions dévolues à la Cour des Comptes, ainsi qu’il ressort des
dispositions de l’article 3 de la loi organique n°2012-23 du 27 décembre 2012 sur la Cour des
Comptes aux termes desquelles : « La Cour des Comptes contribue, par son action permanente
de vérification, d'information et de conseil, à :
la sauvegarde du patrimoine public ;
la transparence et la sincérité de la gestion des finances publiques ;
l’amélioration des méthodes et techniques de gestion des organismes publics et des
entreprises du secteur public ;
l’évaluation des politiques et programmes publics ;
la rationalisation de l'action administrative (...).
(…) Elle peut, en outre, dans le cadre de ses contrôles, établir des rapports publics sur des
entités, des thèmes particuliers ou des secteurs déterminés ».
Enfin, l’article 4 de la même loi organique prévoit que « Les contrôles dévolus à la Cour des
Comptes visent à (…) mesurer les performances réalisées dans la gestion des services et
organismes publics ».
Les travaux dont traite ce rapport ont été menés conformément aux procédures définies en vertu
de la loi organique relative à la Cour de la Cour des Comptes du Sénégal et aux Normes
internationales d’audit (ISSAI) définies par l’Organisation internationale des Institutions
supérieures de contrôle (INTOSAI).
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MISE EN CONTEXTE
1
Banque mondiale, Revue des dépenses de protection sociale du Sénégal 2010-2015, 2017, p.7
2 Ministère de la Santé et de l’Action sociale, Stratégie nationale de financement de la santé, 2017, p.22
3
Ce portrait contient des données de 2003 actualisées selon le taux de croissance de l’année 2007. En l’absence de
données plus récentes, il a servi de situation de référence au diagnostic du Plan stratégique de développement de la CMU
2013-2017. L’estimation de couverture de 20% de la population n’a jamais été corroborée par une enquête nationale.
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La couverture offerte par les différents régimes est partielle et n’est pas uniforme. En effet,
selon le type de régime, généralement entre 50% et 80% des coûts de soins de santé et de
médicaments sont pris en charge par la structure d’assurance maladie ; le reste, appelé « ticket
modérateur » est payé par le bénéficiaire directement à l’établissement de santé ou à la
pharmacie. De plus, les médicaments ne sont pas pris en charge dans certains régimes (ex :
imputations budgétaires et IPRES).
Depuis 2012, le régime non contributif a pris une place très importante grâce à l’assistance
médicale à travers des initiatives de gratuité de soins de santé qui ont démarré en 2005 avec le
Plan Sésame pour les personnes âgées de plus de 60 ans. En effet, ces dernières ont été étendues
à la prise en charge des soins pour les enfants de 0 à 5 ans, de la césarienne pour toutes les
femmes accouchant dans les structures publiques et de la dialyse pour les insuffisants rénaux.
L’Agence de la CMU
L’exécution du programme a d’abord été confiée à la Cellule d’Appui à la CMU (CACMU),
structure créée en 2012 et rattachée au cabinet du Ministre de la Santé et de l’Action sociale.
Celle-ci ne disposait toutefois, ni des capacités juridiques et techniques, ni des ressources
financières et humaines adéquates pour mener à bien la mission.
Pour pallier ces lacunes, l’Agence de la CMU (ACMU) a été mise en place par décret no 2015-
21 du 07 janvier 2015 portant création et fixant les règles d’organisation et de fonctionnement
4
OMS, 58ème Assemblée, WHA64.9 Structures durables de financement de la santé et couverture sanitaire universelle – 2011
5
NU, 67ème session des NU sur la santé mondiale et la politique étrangère - Résolution 67/81 du 12 décembre 2012
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Pour lui permettre d’assurer la mise en œuvre du PSD-CMU, l’Agence a été dotée de ressources
importantes : plus de 100 milliards de FCFA cumulativement octroyés de 2015 à 2019,
provenant principalement de l’État du Sénégal (près de 90%) et de plusieurs autres Partenaires
techniques et financiers (PTF) : Banque mondiale, Agence française de Développement (AFD),
Coopération belge, USAID, Coopération luxembourgeoise, Fonds des Nations Unies pour
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TOTAL 17 135 363 729 100% 21 511 853 436 100% 19 851 501 453 100% 15 753 470 278 100% 22 006 906 807 100%
Source : Budgets initiaux approuvés de l’ACMU
Il est à souligner que ces montants ne comprennent pas les ressources de certains PTF dont la
gestion n’a pas été confiée à l’Agence telles que celles de la Banque mondiale.
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PRESENTATION DE L’AUDIT
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Missions de terrain dans les régions de Fatick, Louga, Matam, Sédhiou et Thiès choisies
selon la méthode d’échantillonnage à choix raisonné ;
Analyse qualitative et quantitative des informations et données recueillies ;
Analyse de dossiers concernant les agréments, le contrôle des mutuelles, les octrois de
subventions, les conventions de partenariat, les registres des mutuelles, etc. ;
Etudes de cas concernant la Côte d’Ivoire, le Ghana, le Rwanda et le Maroc pour
comparer les facteurs de performance qui caractérisent ces pays par rapport à
l’expérience du Sénégal.
Dans le cadre des audits de performance, la responsabilité des auditeurs de la Cour des Comptes
consiste à fournir une conclusion sur les objectifs de vérification retenus. Pour ce faire, des
éléments probants suffisants et appropriés sont recueillis pour fonder les conclusions et obtenir
un niveau d’assurance raisonnable conformément aux normes ISSAI 300 et 3000. Dans cet
audit, notre évaluation est basée sur les critères jugés valables dans les circonstances actuelles
et qui sont exposés dans le tableau suivant.
Ces critères ont été identifiés à partir des exigences des règlements de l’UEMOA, du décret
portant création de l’Agence de la CMU et des autres textes réglementaires nationaux, du Plan
stratégique de développement de la couverture maladie universelle, des autres plans nationaux
de développement de la santé, de la Stratégie nationale d’Equité et d’Egalité de Genre (SNEEG)
ainsi que des bonnes pratiques de gestion.
Tableau 4 : Objectifs et critères de vérification de l’audit
1. S’assurer que l’Agence de la 1.1. Les actions adéquates et conformes aux orientations de la stratégie nationale
CMU a pris les mesures de développement de la CMU sont planifiées et mises en œuvre en temps
appropriées pour le opportun en vue de l’atteinte des objectifs fixés d’extension de la couverture
maladie par les mutuelles de santé.
développement efficace des
mutuelles de santé en vue de 1.2. Des mécanismes de coordination des partenaires du système mutualiste et
l’atteinte des objectifs fixés de de communication à l’endroit des cibles sont mis en place pour assurer des
couverture du risque maladie. actions concertées efficaces ainsi qu’une bonne adhésion aux mutuelles.
1.3. Des directives et procédures appropriées sont mises en place pour encadrer
et contrôler adéquatement les activités des mutuelles conformément aux
règles et orientations définies.
1.5. Un cadre de suivi et d’évaluation des interventions est en place et permet une
reddition des comptes transparente à l’aide d’indicateurs pertinents tenant
compte notamment de l’équité et de la dimension genre.
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2. S’assurer que l’Agence de 2.1. Des procédures transparentes pour l’accès aux subventions existent et sont
la CMU octroie les communiquées à toutes les mutuelles de santé.
subventions de façon 2.2. La programmation des ressources budgétaires et les paiements des
transparente et efficiente et subventions sont fondés sur des informations fiables et s’effectuent au
contrôle les prestations moment adéquat.
des mutuelles de santé en 2.3. Un dispositif de gestion des risques financiers est mis en place.
vue de garantir leur accès
2.4. Les contrôles des prestations des mutuelles sont planifiés, appliqués et
équitable et leur effectivité évalués.
pour tous les bénéficiaires.
2.5. Des actions efficaces sont menées pour obliger les mutuelles de santé à
appliquer les mesures correctives de manière diligente lorsque des
irrégularités sont constatées.
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La stratégie d’extension de la couverture maladie par les mutuelles dans le Plan stratégique de
Développement de la CMU (PSD-CMU) est basée sur le « Projet de Décentralisation de
l’Assurance Maladie » (DECAM), conçu en vue d’opérationnaliser une des orientations de la
stratégie d’extension de la prise en charge du risque maladie des Sénégalais (2008) qui l’a
précédé.
A partir des orientations du DECAM, la stratégie vise l’enrôlement massif des personnes non
bénéficiaires des régimes obligatoires, particulièrement celles du milieu rural et du secteur
informel, dans les mutuelles de santé à base communautaire (MS) à implanter dans toutes les
collectivités territoriales du Sénégal. Pour ce faire, elle postule une meilleure implication et
collaboration des différents partenaires pour assurer le succès grâce à un partenariat tripartite
Etat, Collectivités territoriales (à qui l’Etat a transféré des compétences en matière de santé et
d’action sociale depuis 1996) et Partenaires techniques et financiers (PTF).
La stratégie prévoit également : (i) la mise en place de mécanismes de financement à travers la
création d’une Caisse Autonome de Protection Sociale Universelle (CAPSU), d’un Fonds
National de Solidarité Santé (FNSS) et d’un Fonds National de Garantie des mutuelles de santé,
(ii) la détermination d’un Paquet minimum de services que doit offrir toute mutuelle et (iii) le
renforcement de la viabilité institutionnelle des mutuelles de santé notamment le renforcement
de la réglementation, du suivi et des capacités administratives de gestion technique et
financière. En outre, il est envisagé la mise en place d’un système d’informations intégré sur la
CMU ainsi que la mise en œuvre d’une stratégie de communication.
Conformément aux critères de l’audit, nous avons examiné, dans cette partie, les orientations
de la stratégie ainsi que les actions menées par l’ACMU en vue d’une mise en œuvre efficace
et optimale de même que les mécanismes de coordination des acteurs et de communication
envers les populations. Par ailleurs, nous avons examiné le cadre mis en place pour le suivi et
l’évaluation de la mise en œuvre ainsi que la reddition des comptes.
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Pour s’assurer que la politique d’extension de l’assurance maladie à travers les mutuelles de
santé était menée adéquatement et efficacement, l’audit a cherché à répondre à la question de
savoir si l’Agence de la CMU avait évalué, considéré et mis en œuvre les meilleures options
relevant des orientations du PSD-CMU concernant le développement de la couverture maladie
par les mutuelles de santé.
Il ressort des travaux de la Cour que, malgré la fin du PSD-CMU en 2017, l’ACMU n’a pas
procédé à son évaluation ni à l’élaboration d’une nouvelle stratégie capable de pallier les
nombreuses lacunes relevées.
Par conséquent, elle poursuit la mise en œuvre d’une stratégie largement inefficace à cause des
faiblesses intrinsèques aux MS communautaires et au défaut d’intégration des différents
segments de l’assurance maladie et de l’assistance médicale. De même, les changements
introduits durant la mise en œuvre ont fortement altéré le potentiel d’extension de l’assurance
maladie ; ceux-ci sont liés au défaut de mise en place des mécanismes de financement et à
l’introduction de nouvelles options sans maitrise de leurs conséquences et fondées sur des
paramètres assurantiels peu réalistes, particulièrement en ce qui concerne la prise en charge de
l’intégralité des bénéficiaires de BSF totalement subventionnés et dont le nombre croit de façon
exponentielle.
Dans l’état actuel des choses, le système mutualiste n’est viable ni économiquement, ni
financièrement.
1.1. La stratégie d’extension de l’assurance maladie par les mutuelles de santé à base
communautaire, une efficacité limitée
La stratégie d’extension de l’assurance maladie dans le PSD-CMU est fondée sur le
développement des MS à base communautaire sans prise en compte des autres types
d’assurance.
Tableau 5 : Types de mutuelles de santé
Mutuelles financières avec des offres Sociétaires des institutions de micro finance (ex : PAMECAS)
d’assurance maladie6
Source : Equipe d’audit à partir des plans stratégiques sur l’assurance maladie
6
Ces types de mutuelles ne sont pas concernées par l’audit puisqu’elles sont régies par les règlements bancaires.
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L’option d’extension de l’assurance maladie à travers les MS communautaires n’est pas une
nouveauté apportée par le PSD-CMU ; plusieurs plans stratégiques ont été adoptés
antérieurement avec cette même orientation. Toutefois, aucune évaluation basée sur des
données vérifiables n’a jamais été effectuée pour supporter ce choix, qui n’a d’ailleurs jamais
permis d’atteindre les résultats escomptés.
Les travaux réalisés ont permis à la Cour de relever que la faiblesse des résultats obtenus avec
les mutuelles communautaires, largement en deçà des objectifs, s’explique, en grande partie,
par ce manque d’évaluation et de remise en cause de leur efficacité et par le fait qu’elles
comportent, par leur nature même, plusieurs faiblesses structurelles.
1.1.1. A la base, un manque d’évaluation et de remise en cause
1.1.1.1. L’absence de bilan des différentes stratégies d’extension de l’assurance
maladie
Malgré la faiblesse des performances des MS communautaires dans la contribution à
l’extension de l’assurance maladie, nous avons relevé que la stratégie actuelle a été adoptée
sans évaluation préalable pour s’assurer de son bien-fondé. D’ailleurs, aucun bilan n’a jamais
été établi pour aucun des plans précédents. Selon le DG de l’Agence, quelques programmes
issus de ces plans ont fait l’objet d’évaluations distinctes qui ont été capitalisées lors de
l’élaboration du PSD-CMU et complétées par les résultats des concertations nationales sur
la santé en 2012. Mais, il n’en demeure pas moins que l’efficacité globale des MS n’a pas été
évaluée.
Tableau 6 : Récapitulatif des résultats des différentes stratégies d’extension de l’assurance maladie
Intitulé Plan Période couverte Objectifs Cibles Résultats enregistrés
Plan Stratégique de 2004- ND Améliorer l’accessibilité financière aux Pas de cibles Pas de bilan.
Développement des soins de santé et la protection sociale Quelques retombées :
Mutuelles de Santé des ménages à travers l’extension des
mutuelles de santé. Mise en place de la
Mutuelle des Agents de
l’Etat (MSAE)
Stratégie nationale 2008-2015 Couverture de 50 % de la population 2007 : 20% Pas de bilan.
d’extension de la couverture d’ici à 2015 2008 : 21% Taux estimé de couverture
du risque maladie des Augmenter le taux de couverture des par les mutuelles en 2013 :
Sénégalais (SNECRMS) 2009 : 41%
mutuelles de santé à 25% de la 3,8%
population à l’horizon 2015 2010 : 44%
Quelques retombées :
2011 : 51%
- Création de la Mutuelle
2012 : 51,5% pour les travailleurs du
secteur routier (Transvie)
- Elaboration du DECAM
Plan stratégique de 2013-2017 Améliorer l’accessibilité financière aux 100% des populations Pas de bilan.
développement de la soins de santé de qualité parmi les du secteur informel et du Taux de couverture par les
Couverture maladie populations des secteurs informels et monde rural à travers les mutuelles en 2017 : 19%
universelle ruraux mutuelles de santé à
l’horizon 2017 Nombre de MS : 676 mises
Etendre la couverture maladie à 65% en place dans les 552
des populations employées dans les 2013 : 27,70% communes du pays (96%
secteurs informels et ruraux à l’horizon 2014 : 46,32% fonctionnelles) et 45 Unions
2017 départementales des MS
2015 : 50,50%
(UDMS)
2016 : 60,30%
2017 : 65,5%
Source : Equipe d’audit à partir des plans stratégiques mentionnés dans le tableau et des rapports de l’ACMU
Ainsi, il apparait qu’à la fin de la mise en œuvre du PSD-CMU en 2017, alors qu’un nouveau
cycle de planification devait être engagé, il n’y a pas eu de bilan, ni d’évaluation pour s’assurer
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de l’atteinte des résultats, identifier les lacunes et formuler des recommandations pour
l’amélioration de la stratégie.
La Cour considère que cette démarche devait être menée pour enrichir l’élaboration d’une
nouvelle stratégie plus susceptible de mener efficacement vers l’extension de l’assurance
maladie pour la majorité des Sénégalais. Ceci était d’autant plus justifié que sur la même
période, le Gouvernement a adopté de nouveaux référentiels qui nécessitaient une adaptation,
notamment la deuxième Stratégie nationale pour l’Equité et l’Egalité de Genre (SNEEG 2016-
2026) et la Stratégie nationale de Financement de la Santé pour tendre vers la couverture
sanitaire universelle (SNFS 2017).
En effet, s’agissant de la SNEEG, elle poursuit des objectifs d’égalité entre les femmes et les
hommes qui doivent être atteints par une prise en compte du genre de manière transversale
durant la formulation et l’exécution des politiques sectorielles et des programmes et projets y
relatifs. A cet égard, elle préconise que chaque secteur réalise des analyses de risques tout au
long de l’exécution des activités et des séquences de revue de l’exécution et d’évaluation des
progrès attendus7. Cette démarche aurait pu contribuer à mieux cerner et prendre en
considération les enjeux liés au genre qui n’étaient pas pris en compte dans la stratégie
d’extension de l’assurance maladie du PSD-CMU.
Quant à la SNFS, après avoir diagnostiqué la fragmentation des régimes d’assurance maladie
et d’assistance médicale comme une faiblesse majeure, elle préconise une mise en commun des
risques. Celle-ci doit passer par le relèvement des défis communs aux différents régimes
notamment, l’extension de la couverture du risque maladie et la réduction de la fragmentation
des régimes de financement, la pérennisation du financement de la CMU, la définition d’un
paquet de services essentiels garantis, le développement de mécanismes d’adhésion obligatoire,
le renforcement du ciblage des bénéficiaires des régimes d’assistance médicale et le
renforcement du pilotage et de la coordination des différents régimes ; toutes choses qui sont
actuellement absentes de la stratégie opérationnalisée. Il en est de même de la prise en compte
des autres orientations de la SNFS que sont l’amélioration de la disponibilité des services de
santé de qualité et le renforcement des interventions multisectorielles à haut impact sur la santé.
En lieu et place d’une nouvelle stratégie, les responsables de la CMU se sont contentés
d’élaborer un plan stratégique de développement de l’agence pour la période 2017-2021 en
maintenant le statu quo tout en élargissant l’horizon de réalisation des objectifs à 2021. Le
Ministère de la Santé et de l’Action sociale (MSAS), chargée de la tutelle à cette période, n’a
pas remis en cause cette démarche puisqu’il a entériné le contrat de performance liant l’ACMU
à l’Etat et qui est basé sur ce plan stratégique.
Selon la Direction de la Planification, de la Recherche, des Etudes et du Suivi-Evaluation
(DPRESE) de l’Agence, des termes de référence ont été préparés en 2017 pour un état des lieux
sur la CMU en vue d’établir une base de références ; toutefois, la validation n’a pas été aisée
avec les PTF qui étaient plus sur une logique d’évaluation.
1.1.1.2. Les effets d’une « coalition de cause » pour la pérennisation des MS
communautaires au détriment d’une assurance maladie professionnalisée
Selon plusieurs spécialistes rencontrés tant du côté de l’ACMU, des PTF que des acteurs
mutualistes, l’approche d’extension de l’assurance maladie par les mutuelles de santé
7
SNEEG 2, p. 122
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8
Céline Deville et al., Les mutuelles de santé subventionnées comme instruments de la CMU au Sénégal, 2018, p.3
9
Etudes citées (Appiah, 2012, De Allegri et al, 2009, Ndiaye et al, 2007, Odeyemi, 2014, Soors et al, 2010) Article Chemouni
B. The political path to universal health coverage : power, ideas and community-based health insurance in Rwanda. World
Dev 2018; 106:87–98
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79%
65%
58%
46% 45%
33% 36%
31%
20%
NIVEAU DE PÉNÉTRATION DE LA POPULATION NOMBRE DE BÉNÉFICIAIRES CLASSIQUES NIVEAU DE RECOUVREMENT DES COTISATIONS
10
Paul Bossyns et al., Une assurance maladie à grande échelle pour le secteur informel en Afrique subsaharienne, p.51
11
Présentation PPT à Fatick de l’analyse situationnelle des organisations mutualistes de 2017 à sept 2019
12
Paul Bossyns et al., Ibidem, p.142
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ce projet vise à étendre le modèle des UDAM dans les autres départements du Sénégal avec
l’appui de la coopération luxembourgeoise, qui s’est substituée à la coopération belge.
Cependant, dans la nouvelle structuration prévue, la mutuelle de base, renforcée par un gérant
professionnel, est maintenue telle quelle dans le dispositif en lieu et place des annexes des
UDAM ; l’UDMS doit également être dotée d’une direction technique de l’assurance maladie
avec plusieurs postes. Ce nouveau dispositif alourdit significativement le système sans raison
explicite et augmente les coûts financiers de l’assurance maladie à base communautaire sans
proposer un nouveau modèle de financement.
La Cour a constaté que le projet était déjà en cours d’implantation dans les régions de Fatick et
Matam avec l’assentiment des présidents d’UDMS même si certains gestionnaires de MS ont
manifesté quelques inquiétudes quant à leur avenir. Toutefois, les PCA de plusieurs UDMS
rencontrés par la Cour à Dakar, Thiès, Tivaouane, Louga, Lingère Sédhiou, Bounkiling et
Goudomp ont exprimé leur avis divergent par rapport au projet de départementalisation. De
plus, lors d’une réunion nationale de concertation des présidents de MS et d’UDMS tenue à
Kaolack le 30 mars 2019, ces derniers ont émis beaucoup de réserves sur le projet de
départementalisation et ont proposé les recommandations suivantes : une évaluation exhaustive
du système en cours ; une étude de faisabilité du nouveau système ; un démarrage par une phase
test.
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La Cour a relevé que la mise en œuvre du DECAM n’a fait qu’aggraver ces faiblesses en
l’absence de mesures d’atténuation. Celles-ci ont trait essentiellement aux capacités de
massification des adhérents, de mise en commun des risques, de fidélisation des adhérents, à la
portabilité du risque maladie ainsi qu’au bénévolat qui entrave leur professionnalisation.
1.1.2.1. La faible capacité de massification des adhérents
A cause de leur ancrage communautaire, les MS n’ont jamais été capables d’avoir une large
base d’adhésion. Les premières à être mises en place ont été souvent constituées par un seul
groupe homogène (village, groupe ethnique ou professionnel) et les tentatives d’élargissement
ont été souvent vouées à l’échec ou ont fait l’objet de plusieurs réticences.
Pour rappel, la mutuelle de Fandène, première MS à base communautaire créée au Sénégal dans
la région de Thiès en 1988 et qui a été une réussite14, a connu une scission dès lors que les
premiers adhérents ont refusé d’accepter les autres communautés qui avaient souhaité la
rejoindre. Une autre MS a été créée pour accueillir les autres catégories sociales de la localité.
Cette expérience est loin d’être isolée.
Cette incapacité à s’élargir au-delà de leurs bassins naturels fait que les MS ne peuvent
constituer une véritable panacée pour la popularisation de l’assurance maladie. Ainsi, même si
l’ancrage communautaire facilite l’appropriation de la population et son implication dans la
gestion des MS, il est devenu un véritable frein.
Par conséquent, même s’il est constaté une progression continue du nombre des MS à base
communautaire, qui passent de 19 en 1997 à 129 en 2007, le taux de pénétration quant à lui
13
OMS, l’assurance maladie à base communautaire : comment peut-elle contribuer au progrès vers la
couverture universelle en santé ?2017, p.1
14
Plan stratégique de développement des mutuelles de santé, MSAS/CAMICS, 2004, p.11
RAPPORT DEFINITIF - AUDIT DE PERFORMANCE VOLET DEVELOPPEMENT DES MUTUELLES DE SANTE PROGRAMME CMU COUR DES COMPTES /CAA
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demeure très faible, reflet de leurs capacités médiocres à faire adhérer massivement les
populations. En 2008, parmi les 20% de Sénégalais qui disposent d’une assurance maladie,
seule une frange estimée à 3,8% est enrôlée dans les MS (cf. tableau 1). En 2013, ce taux n’avait
guère évolué.
La stratégie nationale, à travers l’approche DECAM, a accentué cette faiblesse à travers
l’éclatement des organisations mutualistes. Faisant suite à la politique de communalisation
intégrale de l’Acte III de la décentralisation, elle a adopté le slogan « Une collectivité locale,
au moins une MS ». A cet effet, et tenant compte de la grande variabilité de la taille de la
population des communes (de 5.000 habitants dans les petites communautés rurales à plus de
200.000 habitants dans les chefs-lieux des départements), elle préconise même la création de
MS subdivisées en sections dans les communes de petite taille et la création de plusieurs MS
dans les zones à créer dans les communes très peuplées15.
Dans la pratique, on constate la multiplication de très faibles MS dont la viabilité est
compromise dès leur naissance parce que ne reposant sur aucun paramètre économique
(proportion de la population en capacité de cotiser, offre de soins disponible, etc.).
Evolution du nombre de MS
800
671 676
700
600
500
400 306
300 200
200 129
100 19
0
1995 2000 2005 2010 2015 2020
Source : ACMU
Pourtant, c’est l’Agence, elle-même, allant au-delà de son rôle d’encadrement, qui s’est
fortement impliquée pour leur mise en place. De 2015 à 2016, elle a incité les populations à
participer au mouvement en octroyant 500 000 FCFA par commune pour la mise en œuvre de
leur plan d’actions, soit près de 400 millions en 2015 pour organiser 295 comités d’initiative
mutualiste (CIM) en vue de la création de nouvelles MS et 93 comités de restructuration
(CREM)16 consacrés à la redynamisation des anciennes MS non fonctionnelles. Selon certains
anciens mutualistes, cette manne financière a fait venir dans la mutualité des « chasseurs de
primes » ayant favorisé l’émiettement des MS.
15
Etude de faisabilité du DECAM, p.26
16Les CIM et CREM débutent le processus d’implantation des MS. Les membres viennent des structures communautaires,
des collectivités locales et des représentants de la santé. Après leur formation, ils conduisent le processus de sensibilisation
de la population de la localité puis de recrutement des adhérents et bénéficiaires. La tenue de l’assemblée générale
constitutive, durant laquelle est mise en place le bureau, représente l’étape ultime de création de la MS.
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Par ailleurs, dans certaines communes, il a été relevé que des réalités sociologiques ont été
mises en avant pour créer plusieurs MS dans le seul but de ne pas remettre en question la
structuration sociale et politique ou pour ne pas obliger des MS existantes à s’élargir comme
nous l’ont indiqué certains responsables mutualistes.
Ainsi, la fragmentation est particulièrement remarquable actuellement dans les régions avec
une tradition mutualiste où les nouvelles MS mises en place par l’ACMU se sont ajoutées à
celles existantes comme à Dakar (86 MS pour 52 communes), Diourbel (70 MS pour 40
communes), Thiès (90 MS pour 49 communes) et Saint-Louis (48 MS pour 38 communes)17.
Dans la commune de Grand-Yoff, trois (3) MS épousant la stratification sociale ont été
installées (Grand-Yoff traditionnel, Khar Yallah et Cités nouvelles), 4 MS à la Médina et 13
MS à Touba.
Cette fragmentation pose des défis en termes de coordination et de contrôle des MS surtout dans
un contexte de subvention des bénéficiaires. Des possibilités d’en faire des outils de fraude pour
la captation des subventions existent clairement comme le souligne un expert rencontré.
L’approche DECAM révèle ainsi des limites qu’il faudra corriger avec l’adoption de critères
de mise en place d’organisations mutualistes plus conformes aux paramètres économiques de
l’assurance maladie.
1.1.2.2. La faible capacité de mise en commun des risques
Le risque correspond à l’éventualité qu’un événement futur, bon ou mauvais, se produise. Par
extension, le terme « risque » désigne un événement indésirable contre la survenue duquel une
assurance est souscrite. L’assurance est un instrument qui permet à plusieurs personnes de
partager des risques. Les contributions des assurés sont mises en commun et servent à couvrir
les dépenses des seules personnes affectées par la survenue de ces risques ou sinistres.
La mutualisation des risques est définie comme le fait d’avoir, à travers une large base
d’adhérents et de bénéficiaires, une absence ou une faible présence des sinistres de certains
assurés (bons risques) qui compense la présence fréquente ou intense des sinistres des autres
assurés (mauvais risques). Ainsi, la structure d’assurance doit diversifier le plus largement ses
risques afin d’avoir un équilibre entre les bons et les mauvais. Selon les estimations effectuées
lors du démarrage de la CMU, une MS devrait compter au moins 4000 adhérents et bénéficiaires
(pool)18afin d’assurer une bonne mutualisation des risques pour sa viabilité financière.
Or, la majeure partie des MS ont de petites tailles de pools qui atteignent difficilement 1000
personnes ; 70% compte moins de 400 personnes. En 2003, 5 MS seulement sur 81, soit 6%,
ont un pool de plus de 1000 personnes. En 2019, si les bénéficiaires issus des programmes
sociaux directement enrôlés par l’Etat sont retranchés, il apparait que 49% des MS n’ont
toujours pas atteint un pool de 1000 adhérents et bénéficiaires classiques et 90% n’ont pas
atteint les 4000 requis pour être viables19.
17
Liste 676 MS au niveau national
18
Entretien avec MM. Daff, DG/ACMU, Ly, DAJP/ACMU et Diagne, DG Transvie
19
Analyses Equipe d’audit selon données ACMU
RAPPORT DEFINITIF - AUDIT DE PERFORMANCE VOLET DEVELOPPEMENT DES MUTUELLES DE SANTE PROGRAMME CMU COUR DES COMPTES /CAA
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49%
41%
10%
Moins de 1000 adhérents & bénéficiaires Entre 1000 et 4000 adhérents & Plus de 4000 adhérents & bénéficiaires
classiques bénéficiaires classiques classiques
Source : ACMU, Rapport d’analyses des organisations mutualistes de 2017 à sept.2019, p.62
Par ailleurs, cette situation induit une faible capacité de négociation pour une contractualisation
avantageuse avec les prestataires de soins. En effet, avec leurs moyens financiers limités, les
MS n’arrivent pas à obtenir les meilleurs tarifs auprès des prestataires de soins vis-à-vis de qui
également, elles contractent souvent des dettes les exposant à des ruptures unilatérales de
20
Rapport sur l’analyse situationnelle des organisations mutualistes
RAPPORT DEFINITIF - AUDIT DE PERFORMANCE VOLET DEVELOPPEMENT DES MUTUELLES DE SANTE PROGRAMME CMU COUR DES COMPTES /CAA
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services et donc des arrêts de prestations à leurs niveaux, particulièrement en cas de retard des
subventions.
Pour pallier ces faiblesses, il faudrait envisager la mise en place d’organisations mutualistes
plus fortes soutenues par des mécanismes financiers appropriés tels que Fonds national de
garantie et le Fonds national de Solidarité Santé.
1.1.2.3. La faible capacité de fidélisation des adhérents
La fidélisation des adhérents peut s’apprécier à travers la régularité de paiement des cotisations
qui donnent droit aux prestations de santé. Avant la mise en œuvre du PSD-CMU, 58% des
mutuelles ont des taux de cotisation qui n’excèdent pas 200 FCFA par personne et par mois,
soit 2400 FCFA par an. Malgré la faiblesse de ces montants, les taux de recouvrement ne
dépassaient pas souvent 60% sauf pour les MS associées à des systèmes de microfinance21.
Avec une cotisation fixée à 3500F par personne et par an par le PSD-CMU, la situation du
recouvrement des cotisations s’est dégradée durant la période sous revue.
De 2017 à 2019, les bénéficiaires classiques à jour de leurs cotisations22 ne dépassent guère 10
à 12% sauf à Fatick, Kaffrine et Thiès où des taux de 14 à 18% ont été atteints. Dans les régions
de Matam et Saint-Louis, les taux ne dépassent pas 5% alors qu’à Kédougou, Kolda, Sédhiou,
Tambacounda et Ziguinchor, ils varient de 1 à 3%.
Figure 6 : Répartition par année et par région du nombre de bénéficiaires à jour dans les MS par région
Source : ACMU, Rapport d’analyses des organisations mutualistes de 2017 à sept.2019, p.39
Cette faiblesse dans le recouvrement des cotisations démontre l’absence de capacités pour
fidéliser les adhérents. Pourtant, l’augmentation régulière de la consommation de soins de santé
des ménages illustre le grand besoin de couverture contre le risque maladie.
En effet, les dépenses de santé par tête d’habitant sont estimées à 58.000 FCFA en 201423 et les
dépenses courantes de santé des ménages ont, quant à elles, régulièrement augmenté jusqu’à
représenter 53,8% de leurs dépenses courantes en 2016.
21
Plan stratégique de développement des mutuelles de santé, MSAS/CAMICS, 2004, p.15
22
Il s’agit des bénéficiaires à jour de leurs cotisations de l’année par rapport à l’ensemble des bénéficiaires enregistrés
depuis le début dans la mutuelle
23
https://www.who.int/countries/sen/fr/
RAPPORT DEFINITIF - AUDIT DE PERFORMANCE VOLET DEVELOPPEMENT DES MUTUELLES DE SANTE PROGRAMME CMU COUR DES COMPTES /CAA
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Elles sont constituées à 95% de paiements directs aux structures sanitaires et pharmaceutiques.
En volume, elles sont passées de 226,8 milliards en 2014 à 246 milliards et 258,6 milliards
respectivement en 2015 et 2016 induisant une croissance annuelle de 19,2 milliards en 2015,
soit 7,2% et 12,6 milliards en 2016, soit 4,4%. En comparaison, elles représentent 146% en
2014 et 161% des dépenses courantes du ministère de la santé qui s’établissent à 155,6 milliards
en 2014 et 160,4 milliards en 2016 soit une progression de 4,8 milliards en valeur absolue et
3,08% en valeur relative24.
L’obligation d’adhésion avec des modalités d’application appropriées pour les populations
ciblées serait l’une des solutions pour rediriger ces montants importants dans l’assurance
maladie.
1.1.2.4. La faible portabilité de la couverture du risque maladie
La portabilité fait référence à la possibilité de bénéficier de prestations de santé en dehors du
territoire d’implantation de la MS d’appartenance. Malgré les efforts consentis par l’ACMU
pour rendre attractives les prestations offertes par les MS, la faible portabilité du risque maladie
est restée un des freins à l’adhésion massive des populations.
En effet, avec l’avènement de l’Agence, un paquet minimum de services de base garantis, prévu
par le PSD-CMU, est mis en place et améliore largement l’offre de services des MS. Désormais,
celles-ci prennent en charge un paquet de base constitué par les soins de santé au niveau des
postes et centres de santé à un taux de 80% au lieu de 50 à 75% auparavant. S’y ajoute, la prise
en charge des soins et hospitalisations au niveau des hôpitaux à travers le paquet
complémentaire géré par les UDMS ainsi que les médicaments dans les officines privées à
hauteur de 50%. Toutefois, conformément au système de référencement adossé à la pyramide
sanitaire, les prestations ne peuvent être reçues que dans les structures du district sanitaire pour
le paquet de base et dans les hôpitaux de la région d’implantation de la MS concernant le paquet
complémentaire.
Ainsi, à cause des inégalités dans la répartition des structures sanitaires et de leur qualité de
service, l’absence d’élargissement de la portabilité est un motif de non adhésion aux MS.
En effet, quand il n’y a pas de structure sanitaire à proximité ou quand la qualité des soins
offerts par les structures sanitaires de proximité est jugée non satisfaisante, les populations ont
des réticences pour adhérer à la MS ou y rester et préfèrent garder leur libre choix. De ce fait,
dans plusieurs MS et UDMS visitées, notamment à Fatick, Louga et Sédhiou, les
administrateurs ont dû signer avec des centres de santé considérés plus performants mais situés
en dehors de leur ressort territorial afin de fidéliser leurs adhérents.
Sur un autre plan, la portabilité limitée renforce l’iniquité entre bénéficiaires de l’assurance
maladie communautaire au regard de leur accès inégal aux structures de santé comme il ressort
de la situation présentée par le tableau suivant.
24
Rapport des comptes de la santé (2014-2016), p.38
RAPPORT DEFINITIF - AUDIT DE PERFORMANCE VOLET DEVELOPPEMENT DES MUTUELLES DE SANTE PROGRAMME CMU COUR DES COMPTES /CAA
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Ainsi, avec la même cotisation, un adhérent d’une MS à Yoff, dans le département de Dakar a
accès à presque dix (10) établissements publics de santé (EPS) de niveau 3, deux (2) centres de
santé avec un plateau relevé à savoir Philippe Maguilène Senghor et Nabil Choucair et plusieurs
postes de santé alors que celui de Bounkiling n’a accès qu’à un EPS de niveau 1, un centre de
santé avec un plateau médiocre et souvent un poste de santé.
Par ailleurs, l’absence de portabilité peut inhiber les efforts de développement des MS
professionnelles dans la mesure où les membres d’une profession dispersés sur le plan territorial
ne peuvent dépendre d’une même MS. C’est ainsi que les MS des « Jakartamen » dans les
régions de Thiès et Louga ou celle des acteurs culturels n’ont jamais pu fonctionner.
Tenant compte de cette réalité, l’élargissement de la portabilité de la couverture du risque
maladie doit être envisagée, de même qu’une certaine modulation des cotisations en fonction
de l’offre de santé disponible afin de garantir l’équité entre les adhérents. Plus largement,
l’objectif d’extension de l’assurance maladie doit être intégrée à une politique globale de santé
visant l’amélioration de l’accessibilité de l’offre de santé.
1.1.2.5. Le bénévolat et le manque de professionnalisation des gestionnaires de
MS
Afin de permettre la participation et le contrôle de la communauté dont elles sont issues, les
MS à base communautaire fonctionnent suivant le modèle des associations avec des organes
élus tels que le conseil d’administration et le bureau exécutif dont les membres sont bénévoles.
Ce bénévolat est à la base du manque d’engagement et d’assiduité des gestionnaires pour le bon
fonctionnement de la mutuelle. Mais plus encore, ces derniers ont, le plus souvent, très peu de
compétences dans le domaine de la gestion administrative et financière et de l’assurance
maladie qui nécessite le recours à des techniques et outils de gestion rigoureux et spécifiques.
Par ailleurs, bien que 87 % des MS au niveau national disposent de gérants permanents, les
faibles niveaux de rémunération pratiqués, entre 25 000 et 50 000 FCFA, ne favorisent ni la
venue de réelles compétences dans la mutualité ni la pleine implication des recrues. À Fatick,
la Cour a constaté que dans certaines MS, les gérants ne venaient au siège qu’en cas de besoin
de lettres de garantie exprimé par les bénéficiaires et après avoir vaqué à d’autres occupations.
A Kanel, des présidents de MS nous ont fait part des changements fréquents de gérants.
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Pour pallier cette difficulté, l’ACMU a mis en place, depuis 2017, des Unités techniques de
Gestion (UTG) au niveau des UDMS, tel que prévu dans le PSD-CMU, pour appuyer les
organisations mutualistes dans leur fonctionnement. L’UTG est composée d’un Responsable
administratif et financier (RAF) et d’un chargé de suivi/évaluation dont les salaires sont pris en
charge par l’Agence à travers des subventions aux UDMS ; ce qui pèse lourdement sur son
budget. De plus, pendant six (6) mois (juillet-décembre 2019), les salaires des gérants de MS
ont été pris en charge par l’ACMU à raison de 75 000 FCFA par mois. Toutefois, cette mesure
a beaucoup chamboulé les MS qui ont dû, à son arrêt, se séparer de leurs gérants qu’ils ne
pouvaient payer à la même hauteur ou augmenter leurs émoluments malgré leurs moyens
limités.
Par conséquent, malgré le soutien apporté par l’UTG, qui, elle-même, souffre de plusieurs
contraintes (équipe réduite, difficultés de déplacement, etc.), il est constaté des problèmes dans
la gouvernance des MS (irrégularité dans la tenue des instances) et la gestion administrative et
financière (gestion des prestations, des adhésions et des cotisations, tenue des outils de gestion).
Toutefois, au lieu de mettre en place un programme continu de formation tenant compte du
renouvellement des administrateurs et gérants, l’ACMU n’a organisé que deux sessions de
formation en 2016 et 2017 en gestion administrative, financière et comptable (GAFC). En
l’absence de renouvellement de ces sessions, les administrateurs élus et gérants recrutés après
cette période n’ont reçu aucune formation et ont été le plus souvent initiés par leurs collègues
ou prédécesseurs.
Face à cette situation, la mise en place d’un système professionnalisé de gestion d’une assurance
maladie universelle devient la solution la plus indiquée.
1.2. Le défaut d’intégration des différents segments de l’assurance maladie et de
l’assistance médicale
L’assurance maladie au Sénégal est marquée par son caractère extrêmement fragmenté avec
différents mécanismes qui se superposent et ne communiquent pas. Cette situation ne favorise
pas l’instauration de mécanismes intégrés de solidarité pour le bénéfice des différentes
populations cibles.
Avec le pari exclusif fait sur les MS communautaires, la stratégie du DECAM a ignoré les
possibilités de renforcer ces dernières par une mutualisation avec les autres segments de
l’assurance maladie. Il en est ainsi des mutuelles d’envergure nationale (mutuelles
complémentaires et professionnelles), des institutions de prévoyance maladie (IPM) et des
institutions de microfinance offrant des produits de micro-assurance santé. Par ailleurs, la
stratégie d’adhésion par famille ou par groupe est mise à risque par les initiatives de gratuité
qui ciblent séparément les enfants, les femmes et les personnes âgées.
Avec la CMU, cette fragmentation pèse lourdement sur les finances publiques puisque l’Etat a
supporté de 2015 à 2018 plus de 85 milliards de FCFA au titre de la prise en charge du régime
des imputations budgétaires, des évacuations sanitaires, des médicaments pour les forces
armées ainsi que des régimes d’assurance médicale de base et d’assistance médicale gérés par
l’ACMU. Ce montant ne concerne que les dépenses de soins de santé et de subventions et
n’inclut pas les dépenses de fonctionnement et d’investissement des services concernés par la
gestion des différents régimes.
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Cliniques privées agréées 855 615 020 1 035 702 445 1 037 412 429 2 026 602 660 4 955 332 554
Evacuations sanitaires 522 907 612 405 764 283 247 626 385 201 971 774 1 378 270 054
Dépenses pharmaceutiques (pour les 6 568 491 188 2 560 604 229 2 561 376 388 1 528 442 331 13 218 914 136
militaires)
Assurance maladie Subventions générales MS 236 324 502 328 008 008 621 819 300 2 225 297 302 3 411 449 112
Subventions ciblées MS 371 237 000 1 650 846 475 653 820 375 1 326 871 700 4 002 775 550
Assistance médicale (Gratuités) 6 784 408 715 7 190 819 645 8 202 163 410 8 202 163 410 30 379 555 180
TOTAL PAR ANNEE 21 561 642 493 20 728 618 696 20 524 295 563 22 830 074 479 85 644 623 165
Source : Equipe d’audit à partir des données de la direction de la Solde, du centre médico-social de la fonction
publique, du ministère des forces armées et de l’ACMU
1.2.1. Le potentiel ignoré des mutuelles de santé d’envergure nationale, des IPM
et du partenariat avec les institutions de microfinance
Les mutuelles de santé d’envergure nationale, qui sont environ une trentaine agréée, comptent
316 210 bénéficiaires en 2017 selon les chiffres de l’ACMU qui ne sont toutefois pas à jour.
Elles sont pour la plupart des mutuelles complémentaires, destinées aux agents des
administrations publiques en activité ou retraités, ou bien des mutuelles professionnelles.
Elles ont été complètement ignorées par le PSD-CMU alors que, dans les stratégies qui l’ont
précédé, une attention particulière leur était accordée car elles ont un potentiel de
développement très important par leur offre ciblant les besoins et les capacités de groupes
spécifiques contrairement aux MS communautaires.
C’est ainsi que sont nées en 2003, la Mutuelle de Santé des Agents de l’Etat (MSAE) prévue
dans le PSDMS et en 2008, la mutuelle des travailleurs du secteur routier (Transvie) prévue
dans la SNERCMS. Elles sont toutes les deux aujourd’hui, des structures d’assurance
professionnalisées, bien implantées sur le territoire national grâce à leurs antennes
déconcentrées, économiquement indépendantes et fortes avec une large base d’adhésion en
progression continue.
Toutefois, les entrevues avec les responsables de la Mutuelle de Santé des Agents de l’Etat
(MSAE) et de la mutuelle Transvie ont permis à la Cour de constater que l’ACMU n’avait
construit aucun mécanisme de collaboration avec elles afin de pouvoir apprendre de leurs
succès et les intégrer dans la stratégie d’extension de l’assurance maladie de la CMU. Du reste,
elles auraient pu contribuer à la mise en commun des risques avec leurs moyens financiers
importants ; à elles deux, elles injectent près de deux (2) milliards de francs FCFA par an dans
le système sanitaire très loin du demi-million des 676 MS communautaires (voir Tableau 25).
L’engouement pour les MS complémentaires s’explique en grande partie, par le fait que le
paquet de soins est beaucoup plus attractif que les imputations budgétaires car contrairement à
celles-ci, il permet une prise en charge de proximité dans les postes et centres de santé, l’accès
à un réseau large de prestataires privés et inclut également les médicaments même dans les
officines privées.
Parmi les mutuelles complémentaires, la MSAE est la plus emblématique et la plus importante
mais on compte également d’autres fortes mutuelles comme celles des Forces armées et des
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coordination et de mise en commun des risques, la faiblesse des capacités techniques, l’évasion
sociale des employeurs (non-respect de l’inscription et des cotisations de leurs employés), la
faiblesse de la tutelle et de la régulation, etc.
Ces difficultés nous amènent à considérer que l’assurance maladie obligatoire des travailleurs
du privé pourrait être intégrée dans un système plus global pour une meilleure efficacité.
S’agissant de la microfinance, le partenariat des MS avec des institutions de microfinance (IMF)
a montré, lors d’expériences antérieures que celles-ci étaient plus performantes dans la
fidélisation et le recouvrement des cotisations avec la corrélation de celui-ci aux remboursement
des prêts accordés à leurs sociétaires. Dans le PSDMS, il est indiqué que la capacité de
recouvrement des cotisations des MS ne dépassait pas 60% sauf avec la combinaison de la
microfinance ou des activités génératrices de revenus (AGR).
Dans le département de Gossas, les responsables de la MS de Patar Lia, rencontrés par la
mission, ont fait part de l’expérience concluante vécue grâce au partenariat noué avec un
Groupement d’Epargne et de Crédit (GEC). Alors que la MS peinait à avoir 150 bénéficiaires
classiques par an, le GEC lui a permis d’enrôler près de 900 femmes affiliées à des groupements
féminins. La cotisation est collectée par semaine (125 FCFA pendant 7 mois) en même temps
que celle du GEC par un de ses agents de recouvrement contre une rémunération 10% sur les
sommes collectées. Face à ce succès, des relais communautaires sont en train d’être formés
pour permettre à cinq autres MS d’aller à l’assaut des groupements féminins de leur ressort
territorial.
Ces expériences devraient être capitalisées et mises à l’échelle pour permettre aux MS de mieux
assurer leur attractivité et leur viabilité financière.
1.2.2. Le chevauchement des cibles des initiatives de gratuité et des MS
communautaires
Dans le cadre du volet assistance médicale, l’ACMU assume la gestion des initiatives de
gratuité des soins de santé de certaines catégories sociales jugées vulnérables. En 2019,
2 026 149 cas ont bénéficié de ces initiatives comme suit :
- Enfants de 0-5 ans : 1 965 881 cas
- Femmes ayant subi une césarienne : 18 996 cas
- Hommes et femmes souffrant d’insuffisance rénale : 688 cas
- Personnes âgées de plus de 60 ans : 40 584 cas.
Le graphique suivant montre les montants versés au profit des structures de santé en 2019 qui
s’élèvent globalement à 7 748 742 369 FCFA.
Figure 7: Répartition des montants des factures des initiatives de gratuité réglés en 2019 par l’ACMU
Hormis la prise en charge de la dialyse, qui est un traitement spécifique pour les personnes
souffrant d’insuffisance rénale, les autres cibles visées par les gratuités découragent l’adhésion
par famille préconisée par le DECAM car meilleur gage de cotisations significatives pour les
MS.
En effet, les personnes ont tendance à adhérer ou à renouveler leurs cotisations à une mutuelle
quand elles encourent des risques sanitaires sérieux ou pressants (grossesse, période hivernale,
maladies chroniques diagnostiquées, etc.) ; ce qui est d’ailleurs à l’origine de la sélection
adverse25. Cependant, selon les mutualistes interrogés, le fait pour les familles d’avoir, à travers
l’assistance médicale, une possibilité de couverture maladie pour les personnes les plus à risque
comme les enfants, les femmes enceintes et les personnes âgées, constitue un facteur de non
engagement ou de désengagement de la MS.
Or, une intégration de ces gratuités dans les MS permettrait d’alléger le lourd et couteux circuit
de traitement des factures et de rediriger la manne financière considérable que leur consacre
l’ACMU au développement d’organisations mutualistes plus fortes.
A cet effet, l’Agence a conçu un projet qui est en cours d’expérimentation à Kaffrine. Toutefois,
nous avons noté dans le document de projet une reconduction des lourdeurs procédurales et
administratives décriées dans le traitement actuel des factures découlant de la prise en charge
des initiatives de gratuités. Ces lourdeurs ont trait à la superposition des opérations liées au
ciblage des différents bénéficiaires, la gestion de l’affiliation ou de l’enrôlement, les paramètres
de prise en charge ainsi que les mécanismes d’achat26.
La Cour estime que l’intégration des initiatives de gratuité doit être un facteur incitatif à
l’adhésion familiale et de promotion des MS. A cet effet, un régime déclaratif des personnes
concernées par les gratuités avec les pièces justificatives pourrait être institué au profit des
membres des familles déjà enrôlées dans les MS.
25
La sélection adverse ou antisélection désigne les dysfonctionnements des marchés d'assurance qui résultent de l’asymétrie
d’informations entre l’assuré et l’assureur (l'information cachée dont les assurés peuvent disposer sur leurs propres risques
et qui n'est pas accessible aux assureurs). Encyclopédie Universalis
26
Voir le document de l’ACMU sur l’intégration des initiatives de gratuité
RAPPORT DEFINITIF - AUDIT DE PERFORMANCE VOLET DEVELOPPEMENT DES MUTUELLES DE SANTE PROGRAMME CMU COUR DES COMPTES /CAA
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Or, ces instruments étaient absolument nécessaires pour réaliser pleinement la stratégie
d’extension de l’assurance maladie communautaire. En effet, l’innovation majeure du PSD-
CMU se trouve dans la conception d’un système de financement cohérent destiné à créer une
synergie entre les mécanismes de financement public et la contribution des ménages afin de
mitiger les faiblesses structurelles des MS précédemment exposées ainsi que les risques
financiers afférents à leur activité.
Le système repose sur la mise en place du Fonds national de Garantie des MS (FNGMS) et du
Fonds national de Solidarité Santé (FNSS) ainsi que de la Caisse autonome de protection sociale
universelle (CAPSU) qui devait recevoir et gérer toutes les ressources des programmes de
protection sociale.
Figure 8 : Mécanismes de financement dans l’architecture du DECAM
Il a pour objet de prévenir autant que possible les défaillances éventuelles des mutuelles et de
garantir leurs engagements contractuels vis-à-vis de leurs membres participants. Le Fonds de
garantie intervient sous forme de prêt aux mutuelles qui le sollicitent. Il s’agit d’avances de
trésorerie mises en jeu uniquement lorsque la mutuelle est en état de cessation de paiement et
ne peut plus maintenir ses prestations en faveur de ses bénéficiaires.
Selon la réglementation de l’UEMOA, ce mécanisme doit être alimenté par les mutuelles, les
unions et fédérations de mutuelles adhérentes dont les contributions sont fixées par arrêté du
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Ministre en charge de la mutualité sociale, les sommes versées par les autorités étatiques et
communautaires et les produits financiers de ses placements.27
Seul le Mali a déjà créé un tel organe à travers une loi, les autres pays invoquant des difficultés
d’opérationnalisation pour justifier leur carence en la matière. Un projet de décret de création
de cet organe avait été élaboré en 2012 avant la création de l’Agence de la CMU mais n’a jamais
été adopté.
Au regard des difficultés financières que traversent la plupart des mutuelles de santé, la mise
en place d’un tel dispositif se présente comme une nécessité. Par ailleurs, il constituerait
également un mécanisme permettant de garantir aux adhérents des MS une continuité des
prestations à travers un suivi régulier de la situation financières des mutuelles de santé. En ce
sens, il sera un moyen de prévention des situations financières critiques car les mutuelles
membres du Fonds de garantie devront toutes se doter d’un système de gestion rigoureux et
normalisé pour pouvoir avoir accès à ses prêts. Elles devront également fournir toutes les
informations nécessaires au suivi.28
En l’absence d’un tel dispositif et pour pallier les difficultés financières entrainant souvent des
arrêts de prestations, des initiatives ont été prises dans certaines localités par les organisations
mutualistes consistant à instituer un système de solidarité sous forme de prêt entres elles. Elles
se sont, donc, en quelque sorte, substituées au Fonds de garantie.
Sur le terrain, la Cour a constaté que ce sont les UDMS dans des départements comme Thiès,
Goudomp, Louga, Matam, Gossas qui essayent de jouer son rôle à travers divers mécanismes
de solidarité : substitution aux MS défaillantes pour le paiement des prestataires, prêts aux MS
en difficultés de trésorerie, garantie pour les prêts entre MS, etc. Les remboursements s’opèrent
à la réception des subventions accordées par l’ACMU aux organismes mutualistes.
Toutefois, ce système n’est pas formalisé et se fait selon le bon vouloir des responsables
mutualistes. Ainsi la mise en place du Fonds de garantie comporterait moins de risques pour
les organisations mutualistes et leurs adhérents.
S’agissant du FNSS, il constitue un instrument de mise en commun des ressources provenant
de l’Etat destinées aux subventions générales au profit des bénéficiaires classiques des MS et
aux subventions ciblées pour les indigents. Pour ceux-ci particulièrement, des Fonds
départementaux de Solidarité Santé (FDSS) sont prévus dans le but de recueillir les
contributions des collectivités territoriales. Le FNSS devait être associé à la CAPSU.
S’agissant de cette dernière, un début de concrétisation a été constaté avec la prise de l’arrêté
primatoral n°18408 du 25 novembre 2013 portant création, organisation et fonctionnement du
Comité technique d’Appui à la mise en place de la CAPSU. Cet arrêté confie le secrétariat
technique du comité au directeur de la CMU et des mutuelles sociales de la Délégation générale
à la Protection sociale et à la Solidarité nationale (DGPSSN). Ce faisant, il a créé un conflit de
compétence entre la DGPSSN et la Cellule d’Appui à la Mise en œuvre de la CMU (CACMU)
du MSAS, qui avait déjà dans son budget de 2013 une inscription de 10 milliards en transferts
en capital au titre de la CAPSU29. Pourtant le décret ayant créé la DGPSSN30 indique que celle-
27
Article 22 du Règlement n° 03/2011/COM/UEMOA relatif aux règles prudentielles portant sur les risques courts, aux
mécanismes de garantie et au contrôle du fonctionnement des mutuelles sociales et de leurs structures faîtières
28
Guide de gestion des mutuelles de santé en Afrique, p 214
29
Voir budget MSAS 2014
30
Décret no 2012-1311 du 16 novembre 2012
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ci coordonne la mise en place d’un dispositif fonctionnel de la CAPSU et tous les projets et
programmes en matière de protection sociale et de solidarité nationale.
Le blocage né de ce conflit s’est poursuivi jusqu’à l’arbitrage des autorités matérialisé par la
création de l’ACMU en 2015 et son rattachement au MSAS. Toutefois, les crédits destinés à la
mise en place de la CAPSU n’ont plus été reconduits alors qu’ils auraient permis d’assurer une
meilleure cohérence dans le schéma de financement de la protection sociale.
Depuis sa création, l’ACMU n’a mené aucune démarche concrète pour l’érection des différents
fonds de financement et s’est complètement détourné de cet objectif. Alors qu’il était prévu
dans le PSD-CMU que l’organisme administratif à mettre en place gère de façon transitoire les
subventions de l’Etat en attendant l’effectivité des mécanismes financiers, l’ACMU considère
désormais cette fonction de gestion des subventions comme étant une de ses missions
essentielles. Or, aux termes de l’article 5 de son décret de création, elle doit promouvoir le
financement de la santé […] par le développement de mécanismes de financement pour l’appui
aux MS.
Ses responsables arguent qu’elle est en mesure de remplacer les fonds prévus puisqu’elle reçoit
et redistribue les subventions de l’Etat. Pour eux, il faudrait la création d’une Caisse nationale
d’assurance maladie dans une phase transitoire avant la mise en place de la CAPSU pour régler
le problème du financement de l’assurance maladie de façon globale, mais aucune proposition
concrète n’a été faite à cet effet.
Les arguments avancés par l’ACMU ne sont pas recevables au regard des nombreuses
irrégularités et incohérences constatées dans la gestion des subventions (voir chapitre 6) ; sans
oublier l’absence de réceptacle à l’heure actuelle des contributions attendues des collectivités
territoriales à qui on devrait exiger d’inscrire parmi leurs dépenses obligatoires la contribution
à la CMU. Cette exigence est une forte attente des MS rencontrées qui ont toutes déploré le
soutien faible ou inexistant des collectivités territoriales (voir chapitre 2).
Concernant le FNGMS, l’ACMU assure avoir organisé, du 18 au 20 septembre 2019, un atelier
de réflexion sur les paramètres et modalités de mise en place de ce fonds au Sénégal avec la
participation de la Commission de l’UEMOA. Les paramètres et modalités de mise en place
seraient stabilisés et les projets de textes en cours de validation.
En tout état de cause, cette dynamique devrait être poursuivie surtout dans le cadre d’une
démarche de mise en place d’une politique d’assurance maladie universelle.
1.3.2. La primauté accordée à la prise en charge des couches vulnérables dans les
MS
L’assurance maladie est une composante majeure de la protection sociale, notamment des
couches les plus vulnérables de la société. Toutefois, elle doit être conçue dans une dynamique
inclusive et holistique permettant la participation et le bénéfice équitables des différentes
catégories sociales.
Dans la pratique actuelle, la politique d’assurance maladie communautaire a été travestie en
politique d’assistance médicale pour les groupes vulnérables.
En effet, même si l’intégration des bénéficiaires de BSF et des titulaires de CEC constitue une
avancée vers plus d’équité dans l’assurance maladie, la situation actuelle démontre le caractère
insoutenable d’une telle politique, particulièrement à cause des ménages BSF qui ont un taux
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de dépendance élevé faisant augmenter continuellement les effectifs31. Elle accentue également
les risques liés au modèle d’assurance communautaire dominé par les plus pauvres32 et expose
le système à une dépendance totale aux subventions étatiques.
Il convient de souligner que dans la synthèse des études de faisabilité pour la mise en œuvre du
DECAM, les hypothèses ne considéraient que 65 000 indigents provenant des quatre (4) régions
d’expérimentation à prendre en charge avec l’appui des collectivités territoriales. Le modèle
d’intégration des indigents dans les organisations mutualistes prévoyait une proportion ne
dépassant pas 10% des effectifs des MS33 afin de pallier la faiblesse de l’assistance sanitaire
accordée aux indigents à travers la loi n°62-29 du 26 mars 1962 portant sur les certificats
d’indigence.
Toutefois, en l’absence d’encadrement adéquat, on constate aujourd’hui une augmentation
continue des effectifs de populations vulnérables causant une charge financière devenue
intenable. Aujourd’hui, les acteurs parlent de mutuelles BSF puisque les bénéficiaires de la
bourse constituent 51% des bénéficiaires des MS.
De 2015 à 2019, les cohortes sont passées de 100 000 ménages BSF, soit près de 800 000
personnes, 9000 CEC à 1 301 394 BSF représentant les trois premières générations (la
quatrième constituée de 866.668 est en phase d’enrôlement) et 23 123 CEC.
Ainsi, malgré 5 417 638 707 FCFA de subventions ciblées versées aux MS en fin 2019,
l’ACMU n’a pas encore fini de payer les cotisations de l’année 2017 et reste devoir des reliquats
à certaines UDMS sans compter les montants dus au titre de 2018, 2019 et 2020. Il faut
souligner que dans le Plan stratégique de l’ACMU, plus de 40 milliards étaient prévus pour les
subventions et selon le Directeur de l’Administration et des Finances de l’Agence, il faudrait
7 milliards FCFA par an pour prendre en charge les BSF et CEC alors que l’Agence n’est en
mesure actuellement que d’en décaisser trois (3) par an, ce qui n’est d’ailleurs même pas effectif
(voir chapitre 6).
Figure 9 : Répartition des bénéficiaires des MS par catégorie en 2019
Source : ACMU, Rapport d’analyse des organisations mutualistes de 2017 à sept. 2019
31
Quand il y a beaucoup de personnes à charge (enfants et personnes âgées) qui coûtent plus qu’elles ne contribuent, par
rapport à la population d’âge actif qui, généralement, contribue plus qu’elle ne coûte
32
Manuel d’assurance maladie de l’USAID, 2010, p.18 : Risques de protection sociale limitée pour les membres, taille
réduite de la mise en commun des risques réduisant la viabilité du modèle (faillites courantes), exclusion des plus pauvres
s’il n’y a pas de subventions, effets limités sur les prestations de santé ;
33
Stratégie d’extension de l’assurance maladie, p.5
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Par ailleurs, la présence grandissante des personnes vulnérables dans les MS est à l’origine d’un
effet d’éviction que plusieurs acteurs mutualistes ont mentionné. Plus il y a de catégories
vulnérables, particulièrement les BSF, plus les bénéficiaires classiques ont tendance à quitter la
mutuelle.
La première raison évoquée par les mutualistes est le fait que les classiques considèrent que les
BSF bénéficient d’un régime de prise en charge estimé beaucoup plus avantageux selon les
paramètres du tableau suivant qui permet de constater qu’avec 0 FCFA de contribution, les BSF
profitent de 100% de prise en charge pour les soins médicaux.
Ce sentiment d’injustice est renforcé par les problèmes notés dans le ciblage des BSF jugé non
objectif selon certaines populations et ne répondant pas toujours aux critères d’extrême
pauvreté. En conséquence, les classiques ne renouvellent pas leur adhésion parce qu’ils se
considèrent lésés ou bien parce qu’ils espèrent être enrôlés et profiter du régime des BSF.
Tableau 9 : Paramètres assurantiels des MS communautaires
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La deuxième raison tient au fait que les retards de subventions par l’ACMU causant des tensions
de trésorerie et des ruptures de prestations, les classiques ont le sentiment que leurs cotisations
servent à couvrir les frais de santé des groupes vulnérables ou que les BSF les empêchent de
jouir d’une correcte prise en charge. Pour y remédier, plusieurs mutualistes rencontrés sur le
terrain déclarent avoir arrêté les prestations des BSF pour préserver leurs adhérents classiques.
Le graphique ci-dessous illustre la tendance constatée qui pourrait se poursuivre en l’absence
de mesures de correction notamment le paiement régulier des subventions qui doit être le
corollaire d’une telle politique pour permettre une prise en charge équitable de tous les
bénéficiaires de l’assurance maladie à base communautaire.
Figure 10 : Evolution des bénéficiaires classiques à jour de leurs cotisations vs BSF et CEC
485 940
414 495
353 778
En définitive, la politique mise en œuvre actuellement par l’ACMU, basée sur les MS, a montré
ses nombreuses limites et appelle à un changement de trajectoire pour relever le défi de
construction d’un système de santé performant, accessible, équitable et viable financièrement.
Il convient de relever, en effet, que les principales études sur l’assurance maladie
communautaire ont conclu qu’une approche strictement basée sur la participation
communautaire et le volontariat ne peut pas réussir34. L’OMS, dans une note sur la politique de
financement de la santé publiée en 2017, indique : « en termes de protection financière et
d’accès aux soins de santé pour leurs membres, les résultats et l’impact obtenus par l’assurance
maladie communautaire restent modestes ». A ce titre, elle conclue que « bien que les MS
communautaires soient une voie pour organiser les initiatives communautaires, tant la théorie
que la pratique suggèrent qu’un modèle d’assurance maladie à base communautaire construit
sur des petits fonds à petite échelle autour du principe d’adhésion volontaire, et avec peu ou
sans subventionnement pour faciliter l’adhésion des populations pauvres et/ou vulnérables, ne
peut jouer qu’un rôle marginal dans les progrès que souhaite réaliser un pays vers la CMU ».
Aussi, considère-t-elle comme plus prometteurs « les mécanismes de protection financière
34
Chemouni B. The political path to universal health coverage: power, ideas and community-based health insurance in
Rwanda. World Dev 2018; 106:87–98
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construits sur une base de mutualisation élargie, avec adhésion obligatoire ou automatique,
financée par l’impôt, quel que soit sa forme, pour ceux qui ne sont pas en mesure de cotiser ».35
D’ailleurs, les leçons apprises des autres pays africains comparables (Côte d’Ivoire, Maroc,
Rwanda, Ghana) et dont les performances ont été significativement améliorées ces dernières
années montrent que le modèle des MS communautaires tel que mis en œuvre au Sénégal est
devenu dépassé compte tenu de ses limites et des résultats faibles en matière d’extension de
l’assurance maladie. Ci-dessous, un aperçu des réformes profondes que ces pays ont réalisées
afin d’arriver aux performances souhaitées en matière d’assurance maladie (voir Encadré n°2).
35
OMS, l’assurance maladie à base communautaire : comment peut-elle contribuer au progrès vers la couverture
universelle en santé ? 2017, p.6
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Les pays examinés ont la particularité d’être passés d’un système d’assurance maladie communautaire avec ses nombreuses limites comme au Sénégal à un
système national d’assurance maladie permettant une mise en commun des risques plus élevée, la participation de tous notamment les agents de l’Etat et les
indigents grâce aux subventions publiques, une gestion professionnelle et une régulation par des autorités de l’assurance maladie, un financement par des
subventions croisées, des économies d’échelle, une couverture des risques plus large (accès aux soins partout dans le pays) et des mécanismes d’achat plus variés
favorisant un meilleur financement du système de santé.
- Mutuelles sociales : assurance maladie Institution par la loi n° 2014-131 de la CMU, - Pilotage et Régulation par l’Institution Prévoyance Sociale-Caisse nationale de
des travailleurs du secteur privé formel système national obligatoire de couverture l’Assurance Maladie (IPS-CNAM) créée par la loi sur la CMU : délégation d’une partie
dont la plus importante la MUGEF-CI mise contre le risque maladie au profit des de ses fonctions aux Organismes de Gestion Déléguée (OGD) pour la gestion des
en place en 1973 suite à la suppression du populations résidant en Côte d’Ivoire avec 2 adhérents, cotisations et des prestations (organismes de sécurité sociale, mutuelles,
régime de prise en charge gratuite des régimes : assurances commerciales, établissements de santé, etc.)
fonctionnaires et agents de l’Etat Régime contributif, dénommé Régime - Enrôlement dans des centres disséminés sur le territoire national
(consultations, soins médicaux et général de base (RGB) financé par les - Financement par les cotisations (1000F CFA /mois/personne) payables par mobile
dentaires dans les formations sanitaires money ou via banques partenaires pour étudiants et secteur informel, prélèvements
cotisations des assurés, incluant les MS
publiques et médicaments) via Caisse nationale de Prévoyance sociale pour les travailleurs et retraités du privé
Régime non contributif,
- Pas de régime pour le secteur informel (moitié payée par les employeurs), prélèvements à la source pour les agents de l’Etat
dénommé Régime d'assistance
- Assurances privées en activité (moitié payée par l’Etat) et retraités, subventions publiques pour le
médicale (RAM), qui vise les personnes
paiement des cotisations et du ticket modérateur des indigents
démunies et dans lequel l'Etat se
substitue aux assurés. - Panier de prestations (consultations, examens médicaux, actes chirurgicaux,
hospitalisations et médicaments) pris en charge à 70%
Autres assurances devenues toutes des
complémentaires avec la CMU
- Mutuelles sociales : assurance Adoption de la loi 650 de 2003 sur l’assurance - Régulation par l’Autorité nationale de l’assurance maladie, créée par la loi sur la
communautaire avec différents types santé (National Health Insurance Scheme) CMU et chargée de l’accréditation des prestataires et de la gestion du Fonds
(Mutuelles de districts, de villages, des révisée en 2012 avec 3 régimes : national de l’assurance maladie (National Health Insurance Fund/NHIF)
syndicats, des femmes, des étudiants, Mutuelles de district (DMHIS) - Enrôlement par les mutuelles
etc.) - Financement par le NHIF, fonds unique et intégré, par les cotisations des adhérents
Mutuelles privées (MHO non
- Assistance médicale pour les femmes, les du secteur informel (environ 2500 à 15 000 FCFA/personne/an selon la taille et les
subventionnées)
enfants < 5 ans, les personnes âgées et les revenus de la famille) ; 2.5% des revenus de la sécurité sociale affectés au
Assurances privées commerciales
indigents NHIF (travailleurs) ; 2.5% de la TVA majorée pour le NHIF (personnes exemptées
- Assurances privées Enfant de < 18 ans, Retraités, personnes âgées de > 70 ans ; Femmes enceintes et
indigents) ; Part sur des taxes diverses (véhicules, alcool, etc.) ; Dons et Bailleurs
- Panier de prestations concernant 95% des maladies répertoriées (consultations
générales et spécialistes, soins ambulatoires, examens médicaux, hospitalisation,
chirurgie) pris en charge à 100%
- Sociétés mutualistes professionnelles Adoption de la loi n°65-00 de 2002 portant - Régulation par l’Agence nationale de l’Assurance (ANAM) créée par le Code et
regroupées au sein de la Caisse nationale Code de la couverture médicale de base, chargée de la gestion du RAMED ; Gestion de l’AMO du secteur privé par la Caisse
des Organismes de Prévoyance sociale système obligatoire pour l’extension de nationale de sécurité sociale (CNSS) et de la CNOPS chargée de l’AMO du secteur
(CNOPS) l’assurance à toutes les catégories sociales public et des étudiants ; en 2018, transfert de la gestion des régimes public et
- Assurances privées avec 2 régimes : privé de l’AMO à la Caisse nationale de l’Assurance maladie (CNAM)
Assurance maladie obligatoire de - Enrôlement par les différentes caisses
base (AMO) : personnes exerçant une - Financement par des contributions patronales et salariales (cotisation de 2,26 % sur
activité lucrative, titulaires de pension, l'ensemble des salaires à la charge des employeurs, y compris ceux qui assurent une
anciens résistants et membres de couverture médicale à titre facultatif à leurs employés avec une minoration d’un point
l’armée de libération et étudiants des charges patronales), cotisations des membres du secteur informel sur la base du
revenu forfaitaire applicable à la catégorie (fixée par décret), subventions étatiques
Régime d’assistance médicale
pour les étudiants et au titre du RAMED
(RAMED) : population démunie
- Panier de prestations (couverture des risques et frais de soins de santé inhérents à
Assurances privées la maladie ou l’accident, à la maternité et à la réhabilitation physique et fonctionnelle)
pris en charge par paiement direct ou remboursement selon des taux fixés par
voie réglementaire
- Mutuelles communautaires de district Adoption de la loi n°04/2015 modifiant et - Régulation par le Conseil Rwandais de l’Assurance maladie et gestion des différents
(mise en place par les municipalités et complétant la loi n°45/2010 du 14/10/2010 régimes par le RSSB
gestion par des fonctionnaires ; obligation ayant créé l’Office rwandais de sécurité - Enrôlement uniquement familial par le RSSB selon les régimes
d’affiliation adoptée en 2006) sociale (RSSB) ; 6 régimes créés : - Financement diversifié par les cotisations des travailleurs du public (15% du salaire
- Assurances privées Régime de pensions de base dont 50% payés par l’employeur), des militaires (20,5% du salaire de base
dont 17,5% payés par l’employeur), des travailleurs des compagnies privées (selon
Régime des risques professionnels
les plans choisis : or, argent, bronze), des ménages (environ 1500 FCFA pour les
Régime de prestations de congé de
indigents (catégorie I) à 3500 FCFA (catégorie IV)/personne/an ; Subventions des
maternité
donateurs et du gouvernement pour les indigents + des crédits du gouvernement
Régime d’assurance médicale
d’environ 3,3 milliards/an + engagement à combler le déficit ; subvention de la
(communément appelé «RAMA»)
branche RAMA (10%) et des assurances privées (5%) ; Parts de diverses
Régime d'assurance maladie à base contributions, taxes et amendes (télécoms, frais d’enregistrement, sécurité routière,
communautaire (mutuelles jeux de hasard, etc.)
communautaires) - Panier de prestations (prestations médicales et médicaments au niveau des postes,
EjoHeza (Régime de retraite pour les centres de santé et hôpitaux ; respect d’un système de référencement strict) avec
salariés et non-salariés) paiement d’un ticket modérateur d’environ 50 FCFA au niveau poste et centre
Assurances privées de santé et 10% de la totalité de la facture en hôpital.
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PSD-CMU, p.56
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ACMU, Présentation sur les orientations stratégiques, réalisations et perspectives (mars 2019)
38
PSD-ACMU, p.17
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AFD Améliorer l'accès aux soins de -Contribution à la prise en charge de la gratuité; National
santé des enfants au Sénégal à -Renforcement des capacités de gestion de la gratuité;
travers la CMU -Appui aux études;
-Assistance technique;
-Appui à la mise en œuvre du plan de communication sur la
CMU;
-Appui à la gestion du projet.
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LUX-DEV PIC-III Contribution à la mise en Renforcement de la couverture du risque maladie. Niveau central
œuvre du Programme CMU Régions de :
Louga, Matam et Saint-Louis
LUX-DEV PIC-IV Contribution à la réduction de la Contribution à la professionnalisation de la gestion des Niveau central
pauvreté par le renforcement organisations mutualistes et à la protection sociale Régions de :
du système de santé et de globalement. Diourbel, Fatick, Kaffrine,
protection sociale Kaolack, Louga, Matam et
Saint-Louis
JICA Contribution au financement du Prise en charge des soins des personnes démunies, des National
Programme CMU enfants âgés de moins de 5 ans et de la césarienne à
travers les mutuelles de santé
JICA/DOOLEEL Renforcer les capacités du -Promotion de l'adhésion aux mutuelles de santé; Niveau central
CMU système d'assurance maladie -Renforcement des capacités opérationnelles et Régions de :
communautaire et des institutionnelles; Diourbel, Tambacounda et
initiatives de gratuité -Renforcement des initiatives de gratuité des soins des Thiès
enfants âgés de moins de 5 ans et des femmes enceintes
en particulier.
UEMOA Appui à l'extension de la Coordination et pilotage Niveau central
Couverture du Risque Maladie
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Dans ses réponses à la Cour, le MDCEST informe qu’un tel mécanisme (avec un comité de
pilotage présidé par le ministre et un comité technique par le DG de l’ACMU) sera créé par
arrêté au plus tard en décembre 2021 pour l’élaboration de la nouvelle stratégie ainsi que
pour le plaidoyer en vue de l’adoption de mesures durables de financement de la stratégie.
La Cour prend acte de cette information.
1.1.2. La non fonctionnalité des instances de coordination au plan local
Des cadres de coordination au plan local et opérationnel ont été prévus pour assurer le suivi et
la supervision des interventions des différents acteurs sur le terrain notamment les Comités
régionaux de Suivi (CRS) et les Comités départementaux de Suivi (CDS) placés sous la
direction des gouverneurs et des préfets.
Ces instances de coordination doivent se réunir une fois tous les trimestres. Toutefois, il a été
constaté l’absence de mise en place ou leur tenue irrégulière alors que, de manière générale,
leur fonctionnalité aurait permis une meilleure efficacité dans la gestion des opérations et
l’évaluation de la mise en œuvre du programme
En effet, au niveau des régions, les arrêtés devant mettre en place les CRS ne sont pas pris.
Ainsi, dans les régions visitées par l’équipe d’audit, les acteurs que nous avons interrogés ont
affirmé que les CRS ne se sont jamais tenus.
S’agissant des CDS, les acteurs mutualistes rencontrés sur le terrain ont fait part de l’absence
de leur formalisation et de leur tenue irrégulière, une ou deux fois ces dernières années. La
plupart du temps, ils se sont tenus lors de la mise en place des Comités d’Initiative mutualiste
(CIM) pour la création ou la restructuration des MS, dans le cadre du lancement de la CMU
Elèves ou encore pour des questions ponctuelles. Le manque de moyens dédiés à l’organisation
de ces CDS a été également largement évoqué comme un facteur bloquant dans la mesure où
au niveau local les acteurs ne se mobilisent pas en l’absence de remboursements des frais de
transport ou autres dépenses liées à leur participation.
Au demeurant, la mise en œuvre de la CMU Elèves constitue un cas d’école s’agissant du
manque de coordination des acteurs. Alors que ce produit présente un grand potentiel de
massification des adhérents du système mutualiste à travers les 3 500 000 élèves que compte le
Sénégal, le déficit de mécanismes de coordination constitue son principal frein. En effet, malgré
l’existence de l’arrêté interministériel n°1448 du 26 janvier 2017 portant création et fixant les
règles d’organisation et de fonctionnement d’un régime d’assurance maladie pour élèves, les
modalités de mise en œuvre de cette composante ne sont pas bien précisées.
En effet, ces dernières devaient être déterminées par le comité de coordination, prévu à l’article
14 de l’arrêté précité et placé sous la présidence du Ministre de l’Education nationale secondé
par le Directeur de cabinet du ministre de la santé. Cependant, il ne s’est jamais réuni créant
ainsi en amont un problème de compréhension même du fonctionnement de la CMU Elèves.
Au niveau local également, les comités de suivi prévus dans les régions sous la présidence des
gouverneurs de région n’ont pas été réunis. Compte tenu de ce fait, les acteurs de l’éducation
(Inspecteur de l’éducation et de la formation, proviseurs et censeurs de lycées, principaux de
collèges et directeurs d’école) et les acteurs mutualistes ont beaucoup de mal à s’accorder sur
la manière de procéder pour l’inscription des élèves dans les MS. Il faut souligner que l’arrêté
interministériel précité s’est contenté d’indiquer que l’affiliation de l’élève devait se faire au
niveau de la MS la plus proche à la diligence de l’établissement scolaire sans prévoir les
différentes procédures y afférentes.
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Dans les différents départements visités, malgré l’implication des préfets qui avait permis de
lancer et de trouver des terrains d’entente pour le démarrage de la mise en œuvre de la CMU-
Elèves, les acteurs mutualistes rencontrés ont relevé des difficultés résumées comme suit :
- Refus des chefs d’établissement scolaire d’inclure les droits d’adhésion à une MS
dans les droits d’inscription sous prétexte d’augmentation illégale des montants fixés
(Départements de Goudomp, Louga, Linguère, Matam) ;
- Refus de reversement aux MS des montants collectés par les chefs d’établissement
scolaire durant les inscriptions malgré l’entente passée avec les acteurs mutualistes
(Départements de Goudomp et Sédhiou)39 ;
- Demande de contrepartie financière pour les opérations d’enrôlement des élèves dans
les MS jugées chronophages (Départements de Tivaouane et Matam) ;
- Non implication des chefs d’établissement scolaire pour le renouvellement des
adhésions favorisées par des mécènes (Sos Village, World Vision, Premier Ministre
du Sénégal, Directeur des opérations de l’ACMU) malgré le fait d’avoir accepté
précédemment d’inclure la contrepartie demandée dans les droits d’inscription des
élèves (Région de Fatick).
Le cas de la CMU-Elèves nous permet de relever que les instances de coordination auraient pu
constituer des cadres de médiation en vue d’apporter des solutions aux relations souvent
heurtées entre les acteurs du système mutualiste et d’autres acteurs impliqués notamment les
structures de santé. En effet, dans certaines localités visitées, les MS ont déploré les cas de
surfacturations et les arrêts de prestation souvent décidés de manière unilatérale par les
prestataires sans possibilité de négociation. Pour pallier ces difficultés à Foundiougne, le Préfet
a pris un arrêté en date du 1er septembre 2020 portant création d’un comité départemental de
régulation de la tarification forfaitaire et de la mutualité. Cette initiative devrait être reprise dans
les autres départements.
En l’absence de mécanisme institutionnel de coordination au niveau local, le Service régional
de l’ACMU tente de coordonner les activités avec les unions départementales au cours de
réunions trimestrielles comme relevé à Thiès, Fatick et Matam. Cependant, la complexité de
l’assurance maladie à base communautaire commande une coordination plus large des acteurs
sur le terrain qui proviennent d’horizons divers.
A ce propos, le MDCEST informe de la mise en place de cadres de concertations avec le
ministère de l’éducation pour l’intégration de frais d’adhésion CMU-élèves dans les droits
d’inscription durant l’année scolaire 2021-2022 ainsi qu’avec le ministère de la santé pour
divers sujets concernant une meilleure harmonisation de l’offre et de la demande de soins.
La Cour prend acte de ces développements et encourage le renforcement des cadres de
collaboration interministérielle.
1.1.3. La faible implication des collectivités territoriales
39
A Médina Wandifa, après recouvrement des droits d'adhésion, le proviseur a décidé de construire une case de santé au
sein du lycée avec l'argent collecté au lieu de le verser à la MS. D'autres établissements scolaires ont préféré contracter
directement avec les Infirmiers Chefs de Poste (ICP) pour la prise en charge sanitaire de leurs élèves.
RAPPORT DEFINITIF - AUDIT DE PERFORMANCE VOLET DEVELOPPEMENT DES MUTUELLES DE SANTE PROGRAMME CMU COUR DES COMPTES /CAA
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vulnérables. C’est pourquoi, la stratégie DECAM a prévu l’élaboration d’une convention cadre
entre elles et les MS pour la prise en charge de ces catégories de population.
De plus, le processus de mise en place des mutuelles de santé a suivi celui de la
communalisation intégrale à travers l’implantation d’au moins une MS dans chaque commune.
Ceci, afin de permettre leur contribution au financement des MS à travers les Fonds
départementaux de Solidarité Santé (FDSS) qui étaient prévus en tant que démembrements
locaux du FNSS, chargés de recueillir les contributions financières au niveau local.
L’implication des collectivités territoriales dans le développement des mutuelles est
extrêmement importante car la santé est un domaine de compétence qui leur a été transférée
depuis 1996. Par ailleurs, aux termes des dispositions des articles 306 et 307 de la loi n° 2013-
10 du 28 décembre 2013 portant Code général des collectivités territoriales, les départements
et communes doivent participer à la CMU. A travers elles, la participation des populations
locales est facilitée. Plus encore, elles permettent d’apporter des ressources financières
supplémentaires, indispensables au bon fonctionnement des MS.
Toutefois, jusqu’à présent, il n’existe aucun mécanisme de collaboration mis en place pour
favoriser leur pleine implication dans le développement de l’assurance maladie communautaire
et aucune convention-cadre avec les élus locaux n’a été signée comme prévu. De ce fait, il est
noté un faible engagement de leur part à accompagner les MS par la mise à disposition de
soutiens techniques, financiers et matériels ainsi que par l’identification et la prise en charge
des indigents.
En effet, la contribution des collectivités territoriales au financement des MS n’a guère dépassé
4% par an40 De 2017 à 2019.
Dans les départements visités, seule l’UDMS de Linguère a informé la Cour d’un appui régulier
du Conseil départemental à hauteur de 500 000 FCFA par an. Les autres appuis financiers
relevés sont circonstanciels et concernent la prise en charge d’indigents (2 millions de FCFA
reçus par la MS La Linguère de la commune éponyme en 2018 mais non renouvelés) ou
l’inscription d’élèves (MS de Sinthiou Bamambé).
Figure 11 : Part du financement des MS par les Collectivités territoriales
40
Rapport d’analyse situationnelle des organisations mutualistes de 2017 à sept. 2019, p.44
RAPPORT DEFINITIF - AUDIT DE PERFORMANCE VOLET DEVELOPPEMENT DES MUTUELLES DE SANTE PROGRAMME CMU COUR DES COMPTES /CAA
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Pour justifier la faiblesse de leur contribution financière, les mutualistes affirment que plusieurs
CT avancent l’absence de ligne dédiée à la CMU dans leur nomenclature budgétaire ainsi que
la faiblesse des transferts de l’Etat qui ne leur permettent pas de prendre en charge
adéquatement toutes les compétences transférées ; d’autres considèrent que les appuis aux
structures sanitaires contribuent à la CMU puisqu’ils permettent de garantir l’accès à des soins
de santé de proximité. Ces arguments ne tiennent pas compte, cependant, des possibilités
offertes par la réorientation des ressources dédiées à l’action sociale souvent dépensées en
subventions directes aux personnes inscrites comme indigentes.
En termes d’appuis techniques et matériels, seuls 3% des gérants de MS sont mis à disposition
ou motivés par les CT41 ; néanmoins, elles mettent souvent à disposition des locaux pour les
MS. En effet, 76% des sièges des mutuelles de santé sont prêtés pour la plupart, soit par les
collectivités territoriales, soit par les structures de santé42.
La Cour a constaté effectivement que dans les départements de Fatick, Gossas, Louga,
Linguère, Kanel et Tivaouane, les MS ou leurs unions ont des locaux prêtés ou pris en charge
par les CT (commune ou département).
S’agissant de l’identification des indigents, la mise en place des comités locaux prévus n’est
pas effective compte tenu des attributions de la DGPSSN chargée de cette tâche. Or, les CT
auraient dû jouer un rôle de premier plan dans l’identification des cibles d’indigents des MS
puisque chargées de délivrer des certificats d’indigence aux potentiels adhérents aux MS.
Selon le Directeur des opérations, l’ACMU avait prévu de tenir en 2017, un forum national
avec les élus locaux et les partenaires en vue de favoriser leur meilleur engagement au
développement et au financement de la CMU. Mais, en raison du décès brusque du DG de
l’Agence, très impliqué dans la préparation de l’activité, celle-ci a été reportée sine die.
Ainsi, il est préconisé qu’une telle activité soit menée afin de fixer les paramètres de
contribution des CT à une assurance maladie universelle.
Le MDCEST informe qu’un forum national avec les élus locaux est prévu en 2022 et qu’un
atelier de préparation s’est déjà tenu en 2021 à Thiès avec leur participation. De plus, une
note est en cours d’élaboration pour la responsabilisation des élus locaux dans la CMU en
application des articles 306 et suivants du Code général des collectivités territoriales.
La Cour prend acte et invite à la tenue diligente de cette rencontre.
2.2. Une communication inadaptée aux cibles de la stratégie
Comme le souligne le PSD-CMU, parmi les plus importants freins à l’adhésion des populations
aux MS, figure le déficit de connaissances, d’information et de sensibilisation des populations
sur l’assurance maladie en général et les mutuelles de santé en particulier.
Pour redresser cette situation, la stratégie prévoit la réalisation d’importantes actions de
sensibilisation en vue de faire porter l’initiative mutualiste aux acteurs et leaders
communautaires, mais aussi pour promouvoir l’acceptabilité du projet de MS par les
populations ainsi que leur adhésion.
41
Idem, p.20
42
Ibidem, p.19
RAPPORT DEFINITIF - AUDIT DE PERFORMANCE VOLET DEVELOPPEMENT DES MUTUELLES DE SANTE PROGRAMME CMU COUR DES COMPTES /CAA
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43
P.26 du document cité
44
Plan national de communication sur la CMU 2014, p.15-16
RAPPORT DEFINITIF - AUDIT DE PERFORMANCE VOLET DEVELOPPEMENT DES MUTUELLES DE SANTE PROGRAMME CMU COUR DES COMPTES /CAA
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interrogées affirment avoir adhéré à une MS ; cependant, le mode de gestion et la qualité des
prestations des mutuelles ne les rassurent pas.
En 2017, le diagnostic dressé par le plan de communication de l’ACMU montre que la situation
n’a guère évolué sur le plan de la connaissance des avantages et des modalités d’adhésion aux
MS. Et en 2020, la nouvelle stratégie de marketing social souligne les insuffisances persistantes
de la communication de l’ACMU pour la bonne promotion des MS.
Tableau 11 : Limites de la communication sur l’assurance maladie communautaire
La difficile perception des produits et des avantages des Faible impact des campagnes de communication sur la
mutuelles communautaires par les bénéficiaires potentiels ; connaissance de la CMU et ses avantages ;
Le fort taux d'abandons des adhérents du fait de facteurs liés Equipe de promotion insuffisamment encadrée ;
au manque de culture en ce qui concerne l'assurance maladie, La faible implication des agents de la DCMS et des autres
la non portabilité des soins ; acteurs de la communauté éducative dans la mise en œuvre
La forte demande exprimée par les acteurs des mutuelles en des activités de sensibilisation pour une forte adhésion des
services de communication de masse et de proximité, mais élèves dans le dispositif prévu pour eux ;
également de promotion de leurs produits auprès des Les agents des structures sont faiblement formés et impliqués
bénéficiaires potentiels. dans le dispositif de la CMU ;
Fort taux d'abandon des adhérents d'une année à une autre,
notamment auprès de personnes ayant bénéficié d'enrôlement
de masse.
Source : Equipe d’audit à partir de la stratégie de marketing social pour la CMU, 2020, pp.14-15
Cette situation s’explique par le fait que les actions menées ont plus ciblé, à travers des sessions
de formations et des ateliers d’informations, les acteurs du système sanitaire quoique de façon
insuffisante (ces derniers sont largement réfractaires à la CMU à cause des dettes et retards de
paiement), les mutualistes et des journalistes organisés dans le réseau santé et population. De
plus, les informations destinées au grand public ont plus été transmises via la couverture
médiatique des activités de l’agence (installation des comités d’initiative mutualiste,
séminaires, ateliers, etc.) ou des spots télévisés.
Par ailleurs, selon beaucoup d’acteurs mutualistes rencontrés, les messages délivrés ont un
caractère trop général et ne mettent pas suffisamment l’accent sur les informations précises
attendues par les populations liées aux avantages des MS et aux modalités d’adhésion. En outre,
ces messages s’appesantissent sur le bénéfice individuel lié à la réduction des coûts des soins
de santé au lieu de faire écho aux valeurs et pratiques nationales de solidarité en mettant en
exergue le système solidaire de prévoyance maladie ou la tontine de prise en charge maladie
que constitue l’assurance maladie à base communautaire. Par exemple, le spot le plus diffusé
de l’ACMU, tourné avec des comédiens reconnus, montre une personne déjà malade que le
personnel médical incite à s’inscrire dans une MS pour bénéficier immédiatement de soins
moins onéreux. Cependant, une telle situation ne peut se poser dans la réalité, sauf exception, à
cause du délai de carence d’un mois obligeant les adhérents à patienter avant de pouvoir
bénéficier des prestations.
Tout compte fait, ces manquements auraient pu être évités si l’ACMU avait davantage mené
une communication de proximité et des actions de marketing social au lieu de s’investir autant
dans la communication institutionnelle.
Le tableau ci-dessous permet de relever le financement important dédié à cette forme de
communication avec des sommes importantes engagées dans la prise en charge des conventions
RAPPORT DEFINITIF - AUDIT DE PERFORMANCE VOLET DEVELOPPEMENT DES MUTUELLES DE SANTE PROGRAMME CMU COUR DES COMPTES /CAA
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et contrats de diffusion avec des médias de grande audience au détriment de l’appui aux MS
pour une véritable communication de proximité.
Compte tenu des besoins de communication élevés au niveau local, nous estimons qu’une
réorientation des ressources devrait être effectuée pour permettre aux acteurs locaux d’assurer
une véritable communication de proximité qui bénéficie pour le moment d’un faible appui.
Tableau 12 : Financement des activités de communication
Activités institutionnelles (séminaires, couverture médiatique 19 511 318 240 591 702 116 416 756 130 793 802 180 675 344
activités de l’ACMU, participation à des foires, événements
religieux, supports de communication)
Charges de publicité et relations publiques /radio et TV 42 903 466 78 110 036 55 437 670 193 798 980 196 542 200
TOTAL 62 414 784 318 701 738 171 854 426 324 592 782 377 217 544
Source : Equipe d’audit à partir des rapports annuels d’exécution budgétaire de l’ACMU
Néanmoins, il faut souligner que des efforts ont été faits pour élargir les modes de
communication et mieux associer le niveau local à travers l’augmentation des visites à domicile
(VAD), causeries, activités de plaidoyer auprès de personnes influentes et caravanes. De plus,
la communication digitale à travers les réseaux sociaux a été renforcée tandis que le site Internet
de l’ACMU (www.agencecmu.sn) est devenu fonctionnel, le 31 octobre 2016. En 2017, le
Centre d’appels de l’Agence est créé avec un numéro opérationnel, le 1222.
Normalement, la mise en œuvre de ces activités de marketing social devrait induire un
changement de comportement chez les populations cibles des MS. Cependant, les rapports
d’activités sur la communication de l’agence ne font état que du nombre d’activités tenues mais
ne renseignent pas sur l’impact de ces activités sur le développement des MS en termes
d’adhésion, de fidélisation et de maintien des populations cibles dans les MS.
Cette situation peut être mise en lien avec l’absence d’indicateurs clairs permettant de suivre et
d’évaluer les effets des activités de communication sur le comportement des cibles dans le plan
de communication de l’Agence qui n’a prévu que des indicateurs d’activités. Pourtant, le plan
de communication de l’ACMU avait retenu des indicateurs de résultats tels que : « la croissance
exponentielle du taux d’adhésion aux mutuelles de santé pendant les campagnes d’information
et de communication » ou « le niveau du rapport information/résultats par rapport à la
campagne d’information et de communication ».
Le suivi de tels indicateurs aurait permis de mesurer l’efficacité des actions menées, d’évaluer
l’adéquation des contenus des campagnes de communication et de les réajuster au besoin ou
d’identifier des canaux de diffusion plus appropriés.
2.2.2. L’appui à la communication de proximité, entre faiblesse et incohérence
Compte tenu du fait que le premier motif de non adhésion des populations aux MS est le manque
d’informations, une bonne décentralisation des activités de communication aurait dû être opérée
afin de mieux répondre aux préoccupations des populations cibles sur les avantages et modalités
d’adhésion à une MS.
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Au niveau des UDMS, des plans de communication trimestriels sont élaborés en tant que
synthèse des activités prévues par les MS. En cela, elles sont aidées par le Responsable de
l’Unité Assurance Maladie (RUAMA) du service régional. Mais, aucune aide financière n’est
donnée aux MS. De plus, l’Agence a supprimé le poste de chargé de communication, qui avec
une bonne organisation et des moyens dédiés auraient apporter un appui conséquent aux MS
pour l’organisation de leurs activités. Cette suppression fait suite à des propositions de réforme
du BOM qui a diagnostiqué un doublon de cette fonction avec celle du RUAMA.
Au niveau des régions visitées par la mission d’audit, les acteurs mutualistes interrogés ont
déploré la faible disponibilité de moyens pour la communication hormis les appuis de quelques
bailleurs (projet RSS+ financé par l’USAID à Louga et Matam, Save the Children et Lux-Dev
à Fatick). Les appuis très modiques de l’ordre de 75 000 à 150 000 FCFA par MS permettent
d’organiser des VAD, des causeries et autres caravanes.
L’Agence, quant à elle, apporte un appui matériel mais assez limité pour la réalisation des
activités de communication des MS. En effet, chaque année elle remet à chaque service régional
un lot de supports de communication (T-shirts, flyers, casquettes, banderoles, etc.) qui est
ensuite mis à la disposition des MS sur demande et en fonction des stocks disponibles. Il en est
de même du véhicule du service régional et du matériel de sonorisation acquis en 2018 ; ils
peuvent être prêtés sur requête adressée au chef de service régional. Toutefois, il semble que
les UDMS en profitent plus généralement que les MS puisqu’au niveau de celles-ci, les
gestionnaires rencontrés ont informé n’avoir jamais ou rarement fait appel aux moyens du
service régional. En cause, l’absence de personnels qualifiés ou leur indisponibilité due au
bénévolat pour l’animation de campagnes de communication ainsi que l’absence de budget
dédié à la prise en charge de ces activités.
En plus de la situation ci-dessus décrite, nous avons constaté des incohérences dans l’action de
l’ACMU au niveau local qui relèvent d’un manque de maitrise des objectifs poursuivis :
L’absence de partenariats avec les médias locaux : dans toutes les régions visitées,
aucun partenariat n’a été mis en place par l’ACMU avec les radios communautaires
durant la période sous revue alors qu’ils sont des vecteurs importants d’information
et de changement de comportement au niveau des localités. A Foundiougne et
Gossas où les radios communautaires ont été sollicités ces dernières années avec
l’appui de bailleurs, une très bonne appréciation a été faite de leur apport.
Sur les moyens limités dédiés à la communication de proximité ainsi que la faiblesse du
recours aux médias locaux pour l’information et la sensibilisation des populations, le
Directeur général signale dans ses réponses que l’Agence a revu son approche de la
communication de proximité avec la création d’une division du marketing social.
La communication de proximité étant du ressort des mutuelles, l’ACMU ne fait qu’appuyer
le processus de mise en œuvre opérationnel avec la mise à disposition des APM dont la
mission diffère de celle des acteurs communautaires, plus centrée sur la promotion de la
santé de la reproduction. Toutefois, ceux-ci sont mis à contribution dans le cadre des activités
de communication de proximité. Il rappelle, pour finir, que 10% des subventions sont
destinés aux frais de fonctionnement des organisations mutualistes y compris la
communication de proximité.
La Cour prend acte de ces explications et invite à un renforcement et à une optimisation des
moyens dédiés à la communication de proximité dans le respect des attributions de chaque
entité.
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A travers la Direction des Systèmes d’Information (DSI), l’Agence a mis en place un système
intégré d’information de gestion sur la CMU dénommé SIGICMU qui permet une gestion
défragmentée des différents régimes d’assurance maladie et d’assistance médicale : imputations
budgétaires, assurance maladie par les assurances privées comme par les MS communautaires,
IPM, gratuités. Le périmètre fonctionnel de SIGICMU comprend six modules répondant aux
besoins de gestion et d’information de ces différents régimes :
financement sont la JICA (416 000 000 FCFA), le Groupe de Recherche Action sur les
Initiatives Mutualistes/GRAIM (1 739 500 FCFA), l’AFD (90 000 000 FCFA), le Lux-Dev (30
000 000 FCFA), l’USAID (12 500 000 FCFA), le BTC (38 000 000 FCFA) et le FDSUT (67
000 000 FCFA).
Figure 12 : Périmètre fonctionnel du système d’information de gestion intégré de la CMU (SIGICMU)
Source : DSI/ACMU
Après deux ans de développement, toutes les applications sont aujourd’hui fonctionnelles et un
plan de déploiement est en cours d’exécution, commençant par l’installation des équipements
acquis (1250 tablettes et 550 kits destinés à 1250 postes de santé, 200 centres de santé et 37
établissements publics qui peuvent compter plusieurs points de facturation).
Malgré les capacités technologiques impressionnantes de traitement de l’information et de
gestion intégrée du SIGICMU, son utilisation optimale pourrait être compromise par des
difficultés d’ordre réglementaire, technique et sociologique.
3.1.1. L’absence d’un cadre réglementaire adéquat pour le déploiement et
l’utilisation du SIGICMU
De l’avis de la plupart des PTF et acteurs mutualistes interrogés, le SIGICMU est en avance sur
le système actuel et préfigure les réformes à mener pour une assurance maladie universelle
performante. En effet, il est prévu son utilisation aussi bien par les acteurs du système
assuranciel que par les prestataires de santé : 2000 PS, 200 CS, 37 hôpitaux, plus de 2000
pharmacies, plus de 2000 structures privées (cliniques et cabinets).
Toutefois, au stade actuel de son développement, aucun texte réglementaire ne régit son
fonctionnement et son utilisation. Cette situation pourrait compromettre son déploiement
efficace, son appropriation par les acteurs concernés et son utilisation en tant que guichet unique
de l’assurance maladie. Car, il faut noter que les différents régimes d’assurance maladie et
d’assistance médicale, très fragmentés, sont chacun régis par des textes spécifiques et des
centres de responsabilités distincts dont la collaboration n’est pas des meilleures. Il s’y ajoute
la réglementation financière à considérer puisque la plateforme est en mesure de collecter des
cotisations.
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membres des UTG et gérants de deux MS choisies par département lors de sessions groupées
tenues au niveau des chefs lieu de région. Quelques rares UDMS dont celles de Sédhiou ont
reçu du matériel informatique mais qui n’était toujours pas déballé lors du passage de l’équipe
d’audit de la Cour.
Ainsi, il a été constaté qu’aucune organisation mutualiste n’utilise encore le module GESTAM
ni aucune autre application de gestion hormis l’UDAM de Foundiougne qui utilise son propre
logiciel « Magestion » depuis 2014. En effet, la majorité des MS, même si elles disposent
d’ordinateurs souvent obsolètes d’ailleurs, n’ont pas d’accès à Internet et n’ont pas reçu de
formation dans ce domaine.
L’ACMU devrait ainsi, prévoir dans le plan financement du SIGICMU le renforcement de la
prise en charge de la mise à niveau technique des organisations mutualistes, qui pour le moment
est effectuée de façon sommaire.
3.1.3. Les fortes résistances au changement des acteurs
3.1.3.1. Les résistances au sein de l’Agence
Malgré de nombreux avantages, les résistances à l’utilisation du système sont très fortes au sein
même de l’Agence et au niveau des autres acteurs de la CMU. En cause, le risque de suppression
d’emplois qui dorénavant ne seront plus très utiles, mais surtout la transparence des données
qui ne permettra plus de fraude ni sur les résultats atteints, ni sur le calcul des montants dus au
titre de subventions ou de paiements de facture.
S’exprimant en juillet 2019 sur l’encours de la dette de l’ACMU estimée à 19 milliards FCFA,
le Ministre de tutelle déclare que celle-ci s’explique par plusieurs facteurs "surtout la
surfacturation dans les hôpitaux, l’insuffisance du contrôle dans les officines de santé mais aussi
auprès des 676 mutuelles de santé existant sur toute l’étendue du territoire national"45.
En effet, le SIGICMU, bien utilisé, garantit :
- un bon ciblage des bénéficiaires ;
- une identification des zones de risques de fraude dans l’effectivité des prestations ;
- une facilitation du contrôle médical avec un traitement à temps réel des opérations ;
- une optimisation du processus de traitement des factures des points de prestation et
permettre par conséquent une économie non négligeable sur les ressources financières
dédiées à l’assistance médicale ;
- un contrôle de toute la procédure de gestion des subventions qui devient plus
transparente.
En cogestion avec le MSAS, le déploiement du système sera aussi une occasion d’apporter des
solutions à d’autres difficultés identifiées dans le fonctionnement du système sanitaire à travers
l’installation d’autres applications du MSAS sur les tablettes utilisées. Il en est ainsi du
problème de la traçabilité des médicaments de la Pharmacie nationale d’Approvisionnement
(PNA). Le dispositif une fois déployé, permettra d’avoir une situation en temps réel des stocks
au niveau national. Il permettra également de vérifier la complétude du paquet de services offert
aux enfants bénéficiant des gratuités de 0 à 5 ans notamment l’offre de médicaments. De même,
45
http://www.aps.sn/actualites/societe/social/article/mansour-faye-pour-une-evaluation-des-programmes-de-gratuite-de-
la-cmu article actuellement disponible sur le site de l’ACMU (.www.agencecmu.sn)
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il facilitera l’obtention des données routinières quotidiennes pour le MSAS, ce qui constituerait
une avancée majeure.
En outre, contrairement à la situation que nous décrivons au point suivant montrant le manque
de fiabilité et de sincérité des données de l’ACMU, le module GESTAM permet d’avoir une
information exhaustive et transparente sur les nombres d’adhérents, les cotisations collectées,
les montants de subventions ou autres appuis reçus, les dépenses de fonctionnement et de
prestations des MS, etc. Ces informations sont utiles pour s’assurer du bon fonctionnement et
du respect des ratios et critères établis par ces dernières.
Une phase intermédiaire de déploiement du système a montré des cas de fraudes sur les
montants dus par l’Agence et des biais dans le calcul de la performance (voir point suivant). En
effet, l’utilisation démarrée en 2017 du Système d’Immatriculation et de Suivi des Mutuelles
de Santé (SISMUT), application de collecte et de traitement de données des MS intégrée
désormais dans le module GESTAM, n’a pas pu prospérer. Malgré des efforts considérables
déployés pour la saisie des données des années précédentes par une équipe dédiée au sein de
l’Agence et par les membres des UTG, les différentes directions de l’Agence, particulièrement
la Direction des Opérations, n’ont pas voulu l’utiliser et continuent encore la collecte et le
traitement des données à travers des fichiers Excel.
3.1.3.2. Les résistances de la DGPSSN et les risques sur la protection des données
à caractère personnel
A l’extérieur de l’Agence, une forte résistance a été notée du côté de la DGPSSN pour favoriser
l’utilisation et l’intégration dans le SIGICMU de la base de données du Registre national unifié
(RNU) où sont enregistrés les BSF. Pourtant, en juin 2016, un protocole de communication des
données à caractère personnel des ménages vulnérables a été signé entre la DGPSSN et
l’ACMU en vue de déterminer les conditions d’utilisation de ces données en conformité avec
les dispositions de la loi 2008-12 du 25 janvier 2008 sur la protection des données à caractère
personnel.
Toutefois, ce sont des fichiers Excel sans codage et sans code d’identification des personnes
qui sont transmises par la DGPSSN et ventilées ensuite par l’ACMU aux différentes UDAM,
UDMS et MS via des mails ou transmission par clé USB. Ces fichiers contiennent des
informations extrêmement sensibles (identité des chefs de ménage et de toutes les personnes à
charge, numéros d’identification nationale, localisation, etc.) qui pourraient être utilisées à
d’autres fins malintentionnées.
Aucune mesure de protection et d’information des concernés sur l’utilisation de leurs
informations personnelles n’est cependant prise au niveau de l’Agence et de ses
démembrements. Cette situation constitue une violation des dispositions de la loi précitée sur
la protection des données à caractère personnel.
3.1.3.3. La problématique de la promotion du SIGICMU
Hormis la grande médiatisation de la cérémonie de lancement de la plateforme qui a eu lieu en
avril 2019 sous la présidence du Premier Ministre d’alors, la communication sur la plateforme
n’est pas encore bien visible. De plus, la stratégie de communication de l’Agence en cours de
validation n’a pas bien intégré le système et ses différents modules parmi les produits à
promouvoir.
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PSD-ACMU, p.17
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47
Guide de gestion des mutuelles de santé en Afrique BIT/STEP, 2003, p.76
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Par ailleurs, l’écart entre les chiffres de l’Agence et le nombre réel de personnes couvertes peut
également être relevé dans différentes études menées sur le sujet de la CMU. Dans un article
paru en 2018, le Centre Population et Développement48 soulignait qu’une étude universitaire
avait conclu que la couverture effective globale de la CMU était d’environ 19% en 2017
(assurance maladie et assistance médicale) au lieu de 47% en considérant la qualité et la
disponibilité des services de santé au profit des enfants et des femmes. Dans le rapport de
l’Enquête démographique et de santé de 2017, l’ANSD indique que les mutuelles de santé
communautaires constituent le type d’assurance maladie le plus utilisé avec 3% de la population
couverte49.
En réponse, le DG de l’ACMU indique que les BSF et CEC n’ont pas été considérés par la
Cour et que le nombre de personnes à jour des cotisations est plus important que ce les
travaux de la Cour révèle tenant des montants effectivement versés pour les personnes
vulnérables qui s’élèvent à 653 820 375 FCFA en 2017, 1 326 871 709 FCFA en 2018 et 3
086 518 657 FCFA en 2019.
La Cour constate que ces montants divisés par la cotisation de 7000 FCFA pour les BSF et CEC
donnent un nombre de personnes couvertes parmi cette catégorie de respectivement 93 403 en
2017, 189 553 en 2018 et 440 931 en 2019, ce qui est encore loin des nombres communiqués.
Par ailleurs, elle maintient ses constats au regard des dysfonctionnements relevés au niveau du
chapitre 6 infra qui induisent des décalages entre l’année de versement de la subvention et
l’année de prise en charge.
S’agissant de l’indicateur sur le taux de pénétration, il est calculé avec la formule suivante :
Taux de pénétration = Nombre de bénéficiaires des mutuelles de santé / Population cible des
mutuelles de santé
Cet indicateur pose un double problème au niveau du numérateur comme évoqué plus haut et
du dénominateur utilisé à savoir la population cible des MS. En effet, la taille approximative de
cette population est calculée en faisant intervenir plusieurs variables elles-mêmes estimées ainsi
qu’il suit :
Population cible des mutuelles de santé = Population générale (projection ANSD) - Nombre
de personnes couvertes par les régimes obligatoires (11% de la population estimée à partir
des données de 200350 multipliées par le taux de croissance démographique) - Nombre
d’enfants de 0-5 ans et Nombre de personnes de +60 ans (auxquels sont retranchés les 11%
couverts par des régimes obligatoires)51
Sachant que le nombre de personnes couvertes par des régimes d’assurance et d’assistance
maladie (20% de la population générale) provient d’estimations faites à partir d’études
sommaires qui n’ont jamais été confirmées par une enquête, il est aisé de souligner le manque
de fiabilité de la population cible retenue par l’Agence.
L’approximation devient encore plus problématique avec l’application des formules au niveau
régional en ajustant les variables avec le poids démographique alors qu’initialement celles-ci
n’avaient pas été désagrégées (exemple des personnes couvertes par un régime obligatoire).
48
Centre Population et Développement (CEPED), la couverture universelle en santé au Sahel : la situation au Mali et au
Sénégal en 2018, working paper n°40, octobre 2018, p.29
49
ANSD, EDS 2017, p.18
50
Voir Données du tableau n°1 supra
51
Cadre de performance ACMU 2017
RAPPORT DEFINITIF - AUDIT DE PERFORMANCE VOLET DEVELOPPEMENT DES MUTUELLES DE SANTE PROGRAMME CMU COUR DES COMPTES /CAA
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De plus, ces indicateurs ne donnent aucune information sur le niveau de prise en charge des
populations du monde rural et informel, cibles principales de l’assurance maladie
communautaire puisque l’indicateur du PSD-CMU était libellé ainsi : Etendre la couverture
maladie à 65% des populations employées dans les secteurs informels et ruraux à l’horizon
2017.
Pourtant, l’ACMU avait prévu, dans son plan stratégique, un indicateur de satisfaction des
bénéficiaires des MS à travers le taux de fidélisation qui aurait pu donner une idée plus précise
de la couverture réelle et de la performance des MS. Il est calculé comme suit :
Taux de fidélisation = Nombre de bénéficiaires à l'année N -1 ayant renouvelé leur cotisation
à l'année N / Nombre total de bénéficiaires à l'année N-1
Malgré l’existence des données de base, l’ACMU ne renseigne pas cet indicateur qui ne figure
dans aucun de ses rapports de performance. Seule une mention est faite dans le rapport de
performance de 2019 concernant le nombre de classiques à jour (503 428 sur 1 175 681
bénéficiaires soit 43% des classiques et 20% rapporté à l’ensemble des bénéficiaires des MS).
Par ailleurs, plusieurs indicateurs de résultats prévus par le PSD-CMU tels que le taux
d’utilisation des services de santé et l’évolution des dépenses directes de santé n’ont pas été
suivis par l’Agence afin de déterminer les effets du programme sur l’amélioration de la
protection financière des Sénégalais contre les dépenses catastrophiques de santé ainsi que le
renforcement du système de santé.
La Cour considère que cette façon de procéder découle d’une volonté de ne pas rendre compte
des performances réelles du programme.
Le MDCEST indique que l’évaluation externe a également mis en exergue la nécessité de
revoir la méthode de calcul des indicateurs de performance et d’impact du programme et
qu’au surplus, il a déjà procédé à des discussions sur ce sujet avec l’Agence. A ce titre, il
veillera à la définition de nouveaux indicateurs de performance tout comme le Directeur
général de l’Agence ; il s’engage, en outre, à l’adoption d’indicateurs pertinents et fiables
dans le cadre de la nouvelle stratégie.
La Cour prend acte et invite à l’adoption dans les meilleurs délais d’indicateurs de performance
appropriés pour une reddition des comptes transparente.
3.2.1.2. Le défaut d’utilisation d’indicateurs sexospécifiques
Alors qu’au niveau des MS, tous les registres (adhésions, cotisations et prestations) sont remplis
en respectant les indications de genre et transmis comme tels aux UDMS et services régionaux,
aucun rapport de performance de l’Agence ne donne des informations sur les résultats
différenciés entre les hommes et les femmes.
Or, même si la stratégie n’a pas pris en compte les spécificités de genre dans ses orientations,
un bon suivi à l’aide d’indicateurs sexospécifiques auraient permis d’orienter le programme
vers une meilleure prise en charge de ces questions, notamment celles liées à la santé de la
reproduction. En effet, dans ce domaine, plusieurs défis doivent encore être relevés : fécondité
élevée (5 enfants par femme), maternité des jeunes femmes de moins de 19 ans (67,8% des
naissances vivantes), faible accès aux méthodes de contraception (22% des femmes en union)
pour espacer les naissances ou les limiter au besoin (EDSC, 2014). Une telle situation montre
que les filles en âge d’être scolarisées et les femmes ont un plus grand besoin de prise en charge
sanitaire pour éviter les complications découlant de leur maternité si une assistance adéquate
RAPPORT DEFINITIF - AUDIT DE PERFORMANCE VOLET DEVELOPPEMENT DES MUTUELLES DE SANTE PROGRAMME CMU COUR DES COMPTES /CAA
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ne leur est pas offerte. Par ailleurs, de par leur rôle sociologique au sein des familles, les femmes
sont plus appelées à prendre en charge les besoins sanitaires des membres de la famille.
Ces particularités sont très remarquables à l’examen des registres des MS qui montrent que le
nombre de femmes est toujours largement supérieur s’agissant des adhérents, des cotisants et
plus particulièrement des bénéficiaires des prestations. De fait, les femmes, même si elles sont
minoritaires dans la gouvernance des MS, sont plus impliquées dans leur fonctionnement avec
une consommation de soins bien plus importante, tournée principalement vers les soins de santé
de la reproduction comme on peut le constater dans les extraits de registre ci-dessous.
Tableau 13 : Extraits de registres de prestations de soins avec indications selon le genre
MS Aar sa djaboot Fatick MS de Djibanar
RAPPORT DEFINITIF - AUDIT DE PERFORMANCE VOLET DEVELOPPEMENT DES MUTUELLES DE SANTE PROGRAMME CMU COUR DES COMPTES /CAA
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La collecte des données est effectuée tous les trimestres auprès des MS à base communautaire,
de leurs unions et des UDAM concernant les adhésions, les cotisations, la tenue des réunions
d’instance, les charges de prestations pour les classiques et les indigents (BSF, CEC, etc.), de
fonctionnement, les dettes de prestations, les montants de subvention, les montants en caisse et
en banque, etc.
Elle fait intervenir les gérants des MS qui renseignent les outils (Fiches en papier à remplir ou
simples tableaux sur Excel sans masque de saisie) et les transmettent aux UTG. Il peut arriver
que ce soit le responsable du suivi évaluation de l’UTG qui fasse le tour des MS pour renseigner
les outils de collecte avec les informations consignées dans les registres. Après agrégation au
niveau départemental, les informations sont transmises au service régional, qui à son tour les
agrège au niveau régional avant transmission au siège de l’Agence, précisément à la Direction
des opérations (DO) alors que c’est la Direction de Planification, de la Recherche, des Etudes
et du Suivi-évaluation qui a la prérogative du suivi et du traitement des données.
Plusieurs lacunes ont été notées dans ces pratiques :
- Le système de collecte est trop réducteur pour permettre un suivi de tout le système
mutualiste dans la mesure où l’Agence ne collecte pas d’informations auprès des autres
types de mutuelles, complémentaires comme professionnelles, qui sont complètement
ignorées. Ainsi, elle ne détient aucune information à jour sur les adhérents,
bénéficiaires, cotisants de ces mutuelles, encore moins sur des éléments concernant leur
fonctionnement et finances. Le chiffre de 316 210 adhérents de ces mutuelles date d’un
recensement de 2017 et n’a pas fait l’objet de mise à jour. En outre, le système n’inclut
pas les structures sanitaires afin de recueillir des informations permettant d’apprécier
les effets réels du programme sur celles-ci et sur les bénéficiaires des MS en termes de
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Le Directeur général informe que le GESTAM n’a été réceptionné qu’en 2020, c’est-à-
dire après la période auditée. Déjà, des activités de formation des formateurs et des
gestionnaires des MS ont été tenues permettant ainsi la mise à niveau de 372 MS sur les
633 ciblées. Le déploiement du GESTAM a été retardée par la pandémie Covid 19 et les
mesures restrictives y afférentes.
52
Rapport d’analyse situationnelle des organisations mutualistes
RAPPORT DEFINITIF - AUDIT DE PERFORMANCE VOLET DEVELOPPEMENT DES MUTUELLES DE SANTE PROGRAMME CMU COUR DES COMPTES /CAA
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La Cour prend acte de ces explications mais rappelle que le module SISMUT intégré au
GESTAM était déjà tout à fait programmé pour assurer un recueil et un traitement fiables
des données de gestion issues des MS.
RAPPORT DEFINITIF - AUDIT DE PERFORMANCE VOLET DEVELOPPEMENT DES MUTUELLES DE SANTE PROGRAMME CMU COUR DES COMPTES /CAA
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Face au développement du mouvement mutualiste dans les années 90, le Sénégal a très tôt
adopté une réglementation en vue de mieux l’encadrer. C’est ainsi que la loi n° 2003-14 du 04
juin 2003 relative aux mutuelles de santé a été adoptée et complétée plus tard par le décret
d’application n° 2009-423 du 27 avril 2009.
Ce dispositif juridique a été remplacé par les règlements communautaires de l’UEMOA sur la
mutualité sociale qui ont une portée générale et sont obligatoires dans tous leurs éléments et
directement applicables dans tout État membre53. Il s’agit du :
- Règlement n°007/2009/CM/UEMOA du 26 juin 2009 portant réglementation de la
mutualité sociale au sein de l’UEMOA, en vigueur depuis le 1er juillet 2011 ;
- Règlement d’Exécution n°002/2011/COM/UEMOA du 31 août 2011précisant les
modalités et procédures de constitution, d’agrément et d’immatriculation des mutuelles
sociales et de leurs structures faîtières en application de certaines dispositions du
Règlement n°07/2009/CM/UEMOA, en vigueur depuis le 1er septembre 2011 ;
- Règlement d’Exécution n°003/2011/COM/UEMOA du 31 août 2011 définissant les
règles prudentielles, mécanismes de garantie et le contrôle devant encadrer la gestion
des ressources financières des mutuelles sociales et de leurs structures faîtières, en
vigueur depuis le 1er septembre 2011 ; et
- Règlement n°03/2012/CM/UEMOA du 10 mai 2012 adoptant le Plan Comptable des
Mutuelles Sociales (PCMS), en vigueur depuis sa date de signature54.
Ces textes régissent désormais tous les aspects liés au statut, à la constitution, à l’agrément, au
fonctionnement, au financement, à la viabilité financière, au contrôle et aux sanctions des
organisations mutualistes.
La Cour a ainsi vérifié si l’ACMU avait mis en place des règles et procédures appropriées pour
encadrer et contrôler adéquatement les activités des mutuelles conformément aux principes et
orientations définis. De même, il a été vérifié si les contrôles des prestations des mutuelles sont
planifiés, appliqués et évalués et si des actions efficaces sont menées pour obliger les mutuelles
de santé à appliquer les mesures correctives de manière diligente lorsque des irrégularités sont
constatées.
Nous avons constaté que le cadre réglementaire est marqué par une application insuffisante des
textes communautaires renforcée par un léger contrôle des organisations mutualistes par
l’ACMU ne donnant pas lieu à des sanctions ou mesures correctrices. Du reste, l’ACMU
n’accorde pas la même attention aux différents types de mutuelles, ne favorisant pas ainsi un
développement harmonisé du système mutualiste.
4.1. L’application insuffisante de la réglementation communautaire
Alors que les règlements de l’UEMOA doivent s’appliquer dans toutes leurs dispositions au
Sénégal, certaines d’entre elles, parmi les plus importantes n’ont pas été respectées au motif
souvent de l’exigence de célérité dans la mise en œuvre de la stratégie de l’assurance maladie
55
Décret n°2014-395 du 25 juin 2014 portant création de l’IPS CNAM / Réglementation et régulation : exemple de l’agence
ivoirienne de régulation de la mutualité sociale en Côte d’Ivoire, Revue de la société francophone de médecine tropicale et
santé internationale, DOI : 10.48327/mtsimagazine.n1.2021.95 -
56
Mise en œuvre de la CMU dans le contexte du règlement communautaire de la mutualité de l’UEMOA, mémoire de
master 2 professionnel présenté par Monsieur SORO Mamadou, Université de Versailles ST-Quentin-En-Yvelines, 2014-2015
RAPPORT DEFINITIF - AUDIT DE PERFORMANCE VOLET DEVELOPPEMENT DES MUTUELLES DE SANTE PROGRAMME CMU COUR DES COMPTES /CAA
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MUTUELLES SITUATION
Mutuelle de santé des Impôts et Domaines Non agréée
Mutuelle de santé du Trésor Non agréée
Mutuelle de santé des Forces armées Non agréée
Mutuelle de santé de la PAMECAS Non agréée
Mutuelle de santé des enseignants du SUDES (créée en 2002) En cours d’agrément
Source : Liste des MS d’envergure nationale
Dans la forme, la liste présentée ne répond pas aux exigences fixées en termes de codification
par le Règlement d'exécution n°002/2011/COM/UEMOA. Les MS sont identifiées avec le
numéro de l’arrêté ministériel qui leur accorde l’agrément et non pas avec le code constituant
le numéro national d’immatriculation. Celui-ci, conformément aux dispositions du règlement
57
Dernier alinéa, article 22 du Règlement n°07/2009/CM/UEMOA
RAPPORT DEFINITIF - AUDIT DE PERFORMANCE VOLET DEVELOPPEMENT DES MUTUELLES DE SANTE PROGRAMME CMU COUR DES COMPTES /CAA
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précité, rappelées dans le manuel de procédure de l’ACMU, doit être composé de six (6)
rubriques comme il suit :
- Chiffre d’identification de type d’organisation (mutuelle 1, union de mutuelle 2,
fédération 3)
- Domaine d’activité : Domaine Sociale (DS)
- Numéro d’ordre (numéro chronologique d’inscription)
- Initiales de la région du siège (DK, DL, FK, KL, KD, KG, ZG, LG, SL, TH…)
- Numéro du département du siège (1, 2, 3, 4) 6. Code pays (SN)
- Code du pays (SN)58
En outre, les informations concernant les responsables et instances de gestion sont consignées
dans d’autres fichiers d’où sont absentes encore les mutuelles d’envergure nationale.
Pourtant, les fonctionnalités du SIGICMU auraient dû permettre de mettre en place et de
renseigner le RNI de façon fiable. Selon le DG de l’Agence, le RNI est contenu dans le
SISMUT intégré désormais dans le GESTAM et toutes les informations relatives aux MS y
ont été versées.
Si tel est le cas, la Cour souligne la nécessité de mettre à jour les données du SISMUT et de
partager l’information avec tous les agents devant contribuer à la bonne tenue du RNI.
4.1.2. La non-conformité des MS aux règlements communautaires
Les différents règlements de l’UEMOA fixent les conditions d’exercice des MS depuis la
délivrance de l’agrément aux mutuelles sociales dans le respect des formes prescrites jusqu’au
retrait de celui-ci particulièrement quand les règles prudentielles visant la viabilité financière
ne sont pas respectées.
Le constat est que les MS à base communautaires ne se conforment pas à cette réglementation
en ce qui concerne le respect des conditions d’agrément et de leurs obligations réglementaires.
4.1.2.1. Le non-respect des conditions de délivrance de l’agrément
L’article 22 du règlement n° 07/2009/CM/UEMOA dispose qu’aucune mutuelle sociale ne peut
fonctionner avant d’avoir été préalablement agréée par le ministère chargé de la mutualité
sociale. Alors que leur création ainsi que celle des unions et fédérations peut s’effectuer
librement, c’est l’agrément qui leur confère la personnalité juridique et la qualité de mutuelles
sociales.
L’agrément est subordonné à la production d’une étude de faisabilité permettant d’apprécier la
pertinence, la cohérence, la viabilité et la pérennité des mutuelles sociales à agréer. Cette
disposition a été reprise dans le manuel de procédure de l’ANACMU qui indique la procédure
de la demande d’agrément et fixe la composition du dossier qui doit comporter les pièces
suivantes :
- La demande contenant les renseignements suivants : la dénomination, l'objet et le
siège de la mutuelle sociale, ainsi que les noms et adresses des premiers membres
du Conseil d'administration et de l'organe de contrôle ;
- Un exemplaire du procès-verbal de l'Assemblée générale constitutive comportant
les signatures ou les empreintes digitales des membres du bureau de séance ;
58
Voir Manuel de procédure de procédures de l’ACMU
RAPPORT DEFINITIF - AUDIT DE PERFORMANCE VOLET DEVELOPPEMENT DES MUTUELLES DE SANTE PROGRAMME CMU COUR DES COMPTES /CAA
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- Un extrait du casier judiciaire datant de moins de trois mois de chacun des membres
dirigeants et des membres de l'organe de contrôle de la mutuelle sociale ;
- Un rapport d'étude de faisabilité sur la base du modèle fourni par l’Agence de la
CMU pour les mutuelles de santé communautaires ;
- Un original et deux copies certifiées conformes des statuts ;
- Un original et deux copies certifiées conformes du règlement intérieur
- La nature, l'objet et le montant annuel prévisible des prestations fournies par la
mutuelle au titre de ses autres activités.59
L’examen d’un échantillon de dossiers d’agrément au niveau de la Direction des opérations de
l’ACMU a permis de déceler plusieurs manquements au respect de ces dispositions :
Toutes les MS n’ont pas déposé de dossiers de demande : sur un échantillon de 71
dossiers demandés, 40 seulement ont été remis à la Cour ;
Les agréments ont été délivrés alors que toutes les pièces requises n’étaient pas
déposées : tous les dossiers examinés sont incomplets et la plupart ne comportaient
qu’une simple lettre de demande sans les mentions obligatoires et non accompagnée
des exemplaires de procès-verbal de l’assemblée générale constitutive, de statut et de
règlement intérieur qui sont des documents-types proposés par l’ACMU. Les casiers
judiciaires des membres dirigeants sont rarement ajoutés au dossier ou bien de façon
incomplète causant ainsi le risque de laisser les MS aux mains de personnes dont la
bonne moralité n’est pas attestée ;
Aucune étude de faisabilité n’a été réalisée pour les MS dont les dossiers ont été
examinés : même le budget prévisionnel, quand il est joint, se résume à un simple
tableau de prévisions des rubriques de dépenses et de recettes sans explication des
hypothèses et paramètres considérés.
Sur ce dernier point, le Directeur des opérations déclare que l’Agence était dans l’impossibilité
de réaliser une telle étude pour l’ensemble des mutuelles de santé qui ont été mises en place par
l’ACMU au Sénégal. La mise en œuvre diligente de la politique commandait que toutes les MS
mises en place reçoivent l’agrément leur permettant d’exercer légalement. A la fin de l’année
2019, seules 6% de MS ne disposent toujours pas d’agrément, particulièrement dans les régions
de Dakar, Fatick, Matam et Thiès qui compte le plus grand nombre de MS non agréées soit 14
au total60.
Le résultat de ce manque de rigueur se mesure au fait que le Sénégal compte une pléthore de
MS : pour une population de 16 millions d’individus, on dénombre 677 MS contre une
quarantaine en Côte d’ivoire où la population est supérieure à 26 millions. Ces MS, non viables,
ne parviennent ni à exercer correctement ni à satisfaire les besoins des populations malgré leur
agrément (voir supra chapitre 1). Dans tous les départements visités par la mission de
vérification, des MS non fonctionnelles nous ont été signalées particulièrement dans les
départements de Bounkiling, Kanel et Tivaouane.
4.1.2.2. Le non-respect des obligations réglementaires
L’article 28 du Règlement n°07/2009/CM/UEMOA fixe les obligations des organisations
mutualistes qui se déclinent comme suit :
- Avoir leur siège social sur le territoire de l’Etat où elles sont immatriculées ;
59
Manuel de procédures de l’ACMU
60
Rapport d’analyse situationnelle des organisations mutualistes, p.18
RAPPORT DEFINITIF - AUDIT DE PERFORMANCE VOLET DEVELOPPEMENT DES MUTUELLES DE SANTE PROGRAMME CMU COUR DES COMPTES /CAA
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61
Rapport d’analyse situationnelle des organisations mutualistes, p.18
RAPPORT DEFINITIF - AUDIT DE PERFORMANCE VOLET DEVELOPPEMENT DES MUTUELLES DE SANTE PROGRAMME CMU COUR DES COMPTES /CAA
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Commission de 2 et + par an 76% 11% 13% 76% 13% 12% 79% 14% 6%
contrôle
Source : Equipe d’audit à partir des données du rapport d’analyse situationnelle des organisations mutualistes,
pp 21-25
Il convient de souligner que la commission de contrôle n’est presque jamais fonctionnelle alors
qu’elle doit garantir la transparence vis-à-vis des adhérents par le contrôle de la gestion
technique, administrative et financière de la mutuelle sociale selon les règles prudentielles, la
vérification de la régularité des opérations comptables et la tenue régulière des livres
comptables de la mutuelle sociale ainsi que l’élaboration d’un rapport de contrôle directement
transmis à l’assemblée générale62.
Non-respect des normes de gestion
La faible connaissance de la réglementation applicable est également à l’origine de la non
application des règles de gestion qui n’étaient pas définies dans la loi de 2003 telles que le
respect des normes prudentielles, la tenue de comptabilité et la production des états financiers
selon le plan comptable des MS de l’UEMOA, etc.
Par conséquent, en matière de gestion financière dans les MS, ce sont de simples relevés de
dépenses et de recettes qui sont tenus dans des registres ou cahiers et les bilans se présentent
sous forme d’opérations arithmétiques à la place de la tenue d’une comptabilité régulière. Dans
les UDMS, malgré l’existence d’une équipe technique avec l’UTG, des tableaux de bilan annuel
sont produits à la place des états financiers requis. Le tout est complété par des journaux de
banques et de caisse, quand ils sont tenus, et des pièces justificatives d’encaissement et de
décaissement (pièces de caisse, factures, factures de prestations, de fonctionnement) souvent
non exhaustifs63.
Non effectivité du contrôle des prestations
Le contrôle des prestations constitue l’une des obligations les plus importantes des
organisations mutualistes car devant garantir l’effectivité et la qualité des soins prodigués à
leurs bénéficiaires. Toutefois, les mutualistes soulignent les limites objectives qui ne leur
permettent pas d’y procéder : manque de personnel et de qualifications dans ce domaine,
particulièrement en l’absence de médecins-conseils pouvant assurer le contrôle médical.
Ainsi, plusieurs d’entre eux ont déploré leur faible maitrise des éléments de facturation des
structures de prestations qui fait qu’ils ne sont pas en capacité de remettre en question les
montants des factures même s’il arrive qu’ils suspectent ou décèlent des cas de fraudes comme
cela s’est produit dans certaines localités. Il en est ainsi d’un cas signalé à Matam où l’Infirmier
Chef de Poste (ICP) de la zone a réussi à soutirer à la MS plus de deux (2) millions avant
62
Alinéa 1 de l’article 54 du Règlement n° 7 de l’UEMOA sur la mutualité sociale
63
Voir rapports de missions de vérification de la cellule d’audit et du contrôle interne de l’ACMU
RAPPORT DEFINITIF - AUDIT DE PERFORMANCE VOLET DEVELOPPEMENT DES MUTUELLES DE SANTE PROGRAMME CMU COUR DES COMPTES /CAA
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l’intervention d’une mission de contrôle médical diligentée par le SR qui a découvert les fraudes
effectuées. Dans le tableau suivant, l’analyse des rapports des quelques missions de contrôle
médical sur site, effectuées par les services de l’Agence au profit de quelques structures
mutualistes, fait ressortir les principaux cas de prestations illégalement facturées par les
prestataires.
Tableau 16 : Cas de prestations illégalement facturées aux organisations mutualistes
Toutefois, de manière générale, l’intervention du SR est assez rare alors qu’il serait souhaitable
d’étendre ses missions à l’appui des MS pour le contrôle médical. La création de la Direction
du contrôle médical et les nouvelles orientations déclinées dans le projet de note d’orientation
RAPPORT DEFINITIF - AUDIT DE PERFORMANCE VOLET DEVELOPPEMENT DES MUTUELLES DE SANTE PROGRAMME CMU COUR DES COMPTES /CAA
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sur le contrôle médical semblent aller dans ce sens64. Par ailleurs, le redéploiement des
médecins-conseils de l’Agence dans les services régionaux devraient permettre de matérialiser
cette option si leurs prérogatives sont élargies au-delà de l’assistance médicale.
Absence de transmission des rapports annuels à l’ACMU
S’agissant du rapportage de leurs activités, la transmission obligatoire des rapports annuels
(technique, moral et financier) à l’ACMU n’est pas effective. Les organisations mutualistes
communautaires ne transmettent que les outils de collecte de données trimestriels remplis ainsi
que la liste de leurs bénéficiaires et des prestations lors des demandes de subventions. Elles ne
produisent pas de rapports détaillés avec des analyses sur leur situation et l’ACMU ne le leur
réclame pas.
Quant aux mutuelles d’envergure nationale, elles n’effectuent aucune reddition des comptes
auprès de l’Agence.
Cette situation associée à la faiblesse du contrôle et des sanctions de l’Agence (point suivant)
est à l’origine du laisser-aller dans le secteur mutualiste préjudiciable à sa professionnalisation
et à sa capacité de contribuer massivement à la réalisation de la CMU.
4.2. Les faiblesses du contrôle exercé sur les organisations mutualistes et l’absence de
sanctions
Aux termes du dernier alinéa de l’article 3 du décret 2015-21 du 07 janvier 2015 portant création
et fixant les règles d’organisation et de fonctionnement de l’ACMU, cette dernière est chargée
de contrôler le fonctionnement, la situation financière et la solvabilité des mutuelles sociales.
Cet audit a porté sur la vérification des contrôles des prestations des mutuelles pour s’assurer
qu’ils sont planifiés, appliqués et évalués. Il a été également vérifié si des actions efficaces sont
menées pour obliger les MS à appliquer les mesures correctives de manière diligente lorsque
des irrégularités sont constatées.
A l’examen, le contrôle exercé sur les MS se révèle être assez faible et ne donne pas lieu à des
sanctions ou mesures correctrices malgré les nombreuses irrégularités constatées. Ainsi, les
intérêts des adhérents continuent de ne pas être assez protégés.
La faiblesse des contrôles exercés sur les MS par l’ACMU s’explique par une mauvaise
organisation due à l’éclatement de la fonction de contrôle entre plusieurs services (voir infra
chapitre 5) et à une gestion des risques insuffisante.
En l’absence d’un service responsable bien identifié, les missions de contrôle sont jusqu’ici
menées de façon conjointe par l’auditeur interne, la direction du contrôle médical qui a
remplacé la cellule qui était en place et la direction des opérations. Sont également associés aux
missions de contrôle : les autres directions, les SR, les UDMS ainsi que les agents de la région
médicale visitée.
64
Note d’orientation issue des travaux de l’atelier d’orientation sur le contrôle médical et d’élaboration du cadre de mise
en œuvre et des outils de la vérification sur site de l’effectivité des prestations, tenu du 07 au 10 mai 2019
RAPPORT DEFINITIF - AUDIT DE PERFORMANCE VOLET DEVELOPPEMENT DES MUTUELLES DE SANTE PROGRAMME CMU COUR DES COMPTES /CAA
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Cette façon de procéder engendre des coûts élevés pour une mission en termes de prise en
charge des frais de déplacement et de perdiems. De ce fait, elle ne permet pas de multiplier les
missions sur tout le territoire national afin de couvrir le plus grand nombre de MS.
De 2016 à 2019, seules quelques missions de contrôles des organisations mutualistes ont été
organisées. Celles-ci ont porté sur la vérification de la répartition et de l’utilisation des
subventions (URMS Dakar, 2016), de l’application des paramètres de la CMU (MS
Département de Saint-Louis, 2016), de la gestion administrative, financière et comptable
(UDMS, Région de Thiès, 2018/MS Département de Salémata, 2019/UDMS de Fatick, 2019).
Pour éviter cette dispersion, réduire les coûts et couvrir le plus grand nombre d’organisations
mutualistes, des innovations sont en train d’être apportées, selon la direction du contrôle
médical, à travers l’organisation de missions de longue durée (10 jours par exemple), par pôle
géographique et en mettant à contribution les ressources humaines trouvées au niveau local.
Mais, qu’il s’agisse des contrôles ou des supervisions, il reste constant que les mutuelles
couvertes sont encore peu nombreuses et celles d’envergure nationale ne sont jamais
concernées.
La cartographie et la gestion des risques sont des exercices essentiels dans le management d’une
organisation et de ses activités. Elle permet d’identifier les domaines vulnérables mais à fort
impact sur le fonctionnement de l’entité ou l’atteinte des résultats attendus afin de pouvoir
toujours mettre en œuvre des mesures de mitigation. Elle doit guider la planification de toute
mission de contrôle.
Au niveau de l’ACMU, la préparation des missions de contrôle n’est pas assujettie à
l’identification des risques et il n’existe pas de cartographie des risques selon les responsables
interrogés. Cette situation ajoute à l’inefficacité des contrôles effectués.
Cependant, selon l’auditeur interne, pour la programmation des missions, ils se basent très
souvent sur les feedbacks des services régionaux lorsque ces derniers suspectent des pratiques
irrégulières au niveau des organisations mutualistes. La planification des missions et
l’identification des foyers de risques se fait sur la base d’un échantillonnage effectué par leurs
soins. De plus, selon le Directeur général, il est tenu compte du volume financier global des
subventions attribuées durant une période déterminée par l’audit.
Par ailleurs, même si des termes de référence sont préparés pour orienter l’équipe de la mission,
ceux-ci ne comportent pas un tableau d’analyse des risques. Ainsi, les contrôles sont souvent
fastidieux puisque tous les aspects sont examinés (gouvernance, gestion des adhérents et des
prestations, gestion administrative, comptable et financière).
Il s’y ajoute que lors de l’exécution des contrôles, des outils tels que des guides de contrôle ne
sont pas utilisés. Ainsi, les pratiques ne sont pas harmonisées afin de pouvoir déceler les
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Le retrait de l’agrément emporte en plein droit la dissolution de la mutuelle ou de l’organisation faitière (cf. article 84 du
Règlement n° 7/2009/CM/UEMOA)
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deux exercices ; non production pendant deux années consécutives des états financiers ;
faillite constatée.
Compte tenu des irrégularités relevées lors des missions effectuées précédemment et notées
dans le tableau suivant, les sanctions prévues auraient dû être appliquées en guise
d’avertissement aux autres MS puisque lesdites irrégularités ont tendance à se généraliser.
Tableau 17 : Irrégularités dans les MS relevées par les missions de contrôles de l’ACMU
Gestion financière Non remplissage des registres de gestion Plaidoyer pour le recrutement de gérants
financière Formation des gestionnaires pour l’utilisation des
Non mise à jour des journaux de caisse et journaux de caisse et de banque
de banque Elaboration de tickets de reçu pour chaque
Absence de pièces justificatives de produit (adhésion, cotisation, etc.)
dépenses Conservation, classement par ordre
Non reversement de sommes collectées chronologique et archivage des pièces
Dépenses non justifiées justificatives
Détournement de fonds Mise en place d’un dispositif d’assistance
Dépassement du ratio de dépenses de technique
fonctionnement (20% des ressources)
RAPPORT DEFINITIF - AUDIT DE PERFORMANCE VOLET DEVELOPPEMENT DES MUTUELLES DE SANTE PROGRAMME CMU COUR DES COMPTES /CAA
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Auditeur interne
Chargés de Mission
Archives et documentation
Direction des opérations Direction du contrôle Direction des affaires DAF DPERSE DSI Agence comptable
- Contrôle AF des org. mut. médical juridiques et des partenariats - Budget et finances - Planification - Etudes et
- Appui aux mutuelles - Médecine - Réglementation et - Administration - Etudes - Dépenses
développement
- Groupes vulnérables et PI - Pharmacie et analyses contentieux - Ressources - Suivi-évaluation - Réseaux et - Comptabilité
- Marketing social - Qualité des soins - Contractualisation et humaines support
- Traitement des factures partenariats
Source : ACMU
Toutefois, cette réforme organisationnelle n’a pas été accompagnée d’une clarification des
missions dévolues aux nouvelles structures dans la mesure où seul le schéma de
l’organigramme a été adopté. Aucun acte réglementaire n’a été expressément pris pour fixer les
attributions et aucune lettre de mission n’a été délivrée. De plus, le manuel d’organisation et
celui relatif aux procédures administratives, financières et comptables adoptés en 2018 n’ont
pas été mis à jour.
De la sorte, la mise en place de ces nouvelles entités laisse apparaître des cas de chevauchements
dans les attributions qui affectent particulièrement l’exercice des fonctions de contrôle et de
communication. Du reste, il a été déjà souligné le manque de clarification par rapport à la
responsabilité de la gestion des partenaires de l’Agence toujours sous la responsabilité de la
DPRESE alors que revendiquée par la Direction des Affaires juridiques et du Partenariat (voir
supra chapitre 2).
RAPPORT DEFINITIF - AUDIT DE PERFORMANCE VOLET DEVELOPPEMENT DES MUTUELLES DE SANTE PROGRAMME CMU COUR DES COMPTES /CAA
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S’agissant de la fonction de contrôle, elle est éclatée entre trois services ainsi qu’il suit :
La Cour a constaté que chaque service avait élaboré une note interne pour déterminer son
mandat rendant ainsi urgent l’adoption de mesures adéquates pour la définition des missions
des structures par la direction de l’Agence.
5.1.2. Les SR, une belle vitrine de la CMU avec de faibles capacités d’intervention
et d’encadrement
Les services régionaux constituent les structures opérationnelles chargées de la mise en œuvre,
de l’accompagnement et du suivi des politiques et stratégies définies pour la CMU.
A ce titre, ils sont chargés :
- d’appuyer le développement et la promotion des mutuelles, en collaboration avec les
autorités locales au niveau de chaque collectivité locale ;
- d’appuyer les mutuelles dans la constitution des demandes d’agrément ;
- de former les acteurs, rendre professionnelles les mutuelles et mettre en œuvre un
programme d'actions de communication et de sensibilisation en direction des
populations cibles ;
66
Voir les Normes internationales pour la pratique professionnelle de l’audit interne, Edition 2017, Institute of Internal
Auditors (Association mondiale des professionnels de l’audit interne)
RAPPORT DEFINITIF - AUDIT DE PERFORMANCE VOLET DEVELOPPEMENT DES MUTUELLES DE SANTE PROGRAMME CMU COUR DES COMPTES /CAA
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Ainsi, alors qu’en tant qu’agence d’exécution, l’ACMU devait renforcer ses unités
opérationnelles, il est constaté qu’elle concentre au niveau central 114 agents sur 203 soit 56%
de l’effectif alors que les 14 SR se partagent 89 agents, soit 44% de l’effectif.
Tableau 18 : Répartition du personnel de l’ACMU entre le siège et les services régionaux en 2019
Lieux d’affectation Effectifs
CMU siège 114
Dakar 16
Thiès 6
Saint Louis 8
Diourbel 6
Kaolack 5
Ziguinchor 5
Kédougou 6
Kaffrine 4
Matam 6
Tambacounda 7
Louga 5
Kolda 5
Fatick 5
Sédhiou 5
Total 203
Source : Direction de l’Administration et des Finances – ACMU
Pourtant, l’analyse de la structure du personnel montre une forte présence d’agents d’appui et
de service au niveau du siège dont l’utilisation aurait pu être beaucoup plus efficiente au niveau
opérationnel des SR. Il est également noté l’emploi de plusieurs stagiaires rémunérés par une
ligne budgétaire dotée de près de 20 millions.
A ce sujet, le DG de l’Agence signale que les moyens humains ainsi que leur répartition entre
le siège et les SR sont prévus par l’organigramme et le plan de recrutement adoptés en 2016
par le Conseil de surveillance.
Cependant, la Cour relève que ces instruments de gestion n’excluent pas adaptation au contexte.
Par ailleurs, la faiblesse des ressources humaines dans les SR ne s’apprécie pas seulement au
regard du nombre d’agents mais également au regard des limites de leurs qualifications dans le
domaine de l’assurance maladie en particulier.
Le cas des RUAMA est plus préoccupant car l’exigence qui est faite dans le manuel
d’organisation d’avoir une expérience d’au moins 3 ans dans le domaine de la santé
communautaire et des connaissances de l’environnement et de la réglementation sur les
mutuelles sociales n’est souvent pas respectée alors que ces agents sont chargés dans la pratique
d’assurer toutes les taches concernant l’encadrement et le contrôle des organisations
mutualistes.
5.1.2.2. La faiblesse des ressources financières des SR
La gestion des ressources financières est centralisée au niveau de la Direction de
l’Administration et des Finances qui met à la disposition des SR les fournitures et matériels
nécessaires à leur fonctionnement. Les quelques activités menées, souvent avec une mission
venant du siège (formation, supervision formative, etc.), sont financées directement par la DAF
à travers un montant libéré par chèque remis aux responsables administratifs et financiers
(RAF), chargés de l’exécution des dépenses.
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Pour le fonctionnement au quotidien, les SR ne disposent que d’une caisse d’avance d’un
plafond de 500 000 FCFA destinée à prendre en charge de menues dépenses (eau, électricité,
menus travaux, réparations, restauration, etc.) et dont les montants unitaires ne peuvent excéder
50 000 F CFA.
Les RAF, gestionnaires des caisses, peuvent demander leur réapprovisionnement lorsqu’ils
atteignent le seuil de 50 000 francs et après justification des dépenses effectuées. Selon le
niveau du réapprovisionnement, les SR disposent durant l’année entre 800 000 et 1 000 000
FCFA.
Ils ne peuvent donc compter sur aucun moyen financier, hormis les quelques appuis des PTF,
pour mener à bien les activités inscrites dans leurs PTA ni apporter un soutien conséquent aux
organisations mutualistes. Le seul appui qu’ils peuvent apporter à ces dernières est d’ordre
matériel à travers la mise à disposition occasionnelle du véhicule pick up du service et un
matériel de sonorisation pour des activités de communication de proximité supra (voir supra
chapitre 2). Il faut noter que le véhicule sert au chef de service et aux agents pour toutes leurs
activités, ce qui constitue déjà une limite dans son utilisation.
Devant ce manque de moyens surtout dans les régions couvrant une grande superficie et avec
des difficultés d’accès comme Louga (24 889 km2) et Matam (29 445 km2), le personnel des
SR est désœuvré et démotivé et ressent beaucoup de frustrations, particulièrement les RUAMA
et les chargés de communication, pour ceux qui sont encore en poste.
En définitive, comme souligné par le BOM dans son rapport d’audit, « l’option de couvrir le
territoire national au moyen de services régionaux… exige en contrepartie une claire définition
des rôles et responsabilités entre la périphérie et le centre, et la mise à disposition de moyens
adéquats à tous les niveaux ».
Au regard de cette situation et de la nécessité de renforcer les interventions sur le terrain, nous
considérons que cette recommandation du BOM devrait être mise en œuvre. Par ailleurs, en
conformité avec les orientations de la Charte de la déconcentration67, notamment la
rationalisation et la mutualisation des services déconcentrés une meilleure collaboration
pourrait être établie avec les services déconcentrés des ministères chargés de la santé et du
développement communautaire, particulièrement, de la Direction générale de l’Action sociale
(DGAS) et de la DGPSSN, en vue d’optimiser les moyens avec ces services qui poursuivent
des missions voisines à celles de l’ACMU.
A ce sujet, le MDCEST informe de la mise en place d’un comité conjoint avec le ministère
de la santé et de l’action sociale présidé par les deux secrétaires généraux des ministères.
Plusieurs discussions ont déjà eu lieu portant sur différents sujets. Les concertations seront
renforcées et un arrêté interministériel sera pris au plus vite pour formaliser le partenariat
entre l’offre de soins (MSAS) et la demande de soins des populations (MDCEST). Il en est
de même avec la DGPSSN.
Par ailleurs, dans le cadre du décret portant organisation du ministère, il a été mis en place
des directions régionales qui assurent, entre autres, la coordination entre les services relevant
de sa tutelle. Il est également envisagé la mise en place de plateformes sur la protection
sociale qui seront élargies aux autres acteurs.
La Cour prend acte.
67
Décret n° 2020-1784 portant Charte de la déconcentration
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A titre d’illustration, dans une des régions visitées, une tutelle excessive est exercée sur les
organisations mutualistes par le chef de service. Il considère, par exemple, qu’il lui faut assister
à la tenue des AG des organisations mutualistes pour éviter des irrégularités comme l’élection
des élus locaux dans les bureaux exécutifs. Cette attitude n’est en rien conforme à la
règlementation qui confère la personnalité juridique et l’autonomie de gestion aux MS et
n’interdit pas aux élus locaux d’en être membres ni d’y exercer des responsabilités.
Dans d’autres SR, ce sont des injonctions non justifiées qui sont faites aux mutualistes sur
différentes questions comme les modalités d’enrôlement des BSF, de perception des cotisations
ou de prise en charge des bénéficiaires.
5.3. Une efficience limitée dans la gestion des ressources humaines
L’ACMU a démarré ses activités au milieu de l’année 2015 avec la mise en place de son budget.
Dès lors, la Direction générale s’est attelée à se doter de ressources humaines qualifiées compte
tenu de la complexité de la mission et du délai court fixé en 2017 pour atteindre la cible de 75%
de la population couverte contre le risque maladie.
Dans un premier temps, c’est une équipe restreinte de fonctionnaires provenant en grande partie
de l’ancienne CACMU qui a été mise en place. Avec l’adoption des plans de recrutement en
2016 et 2017 par le Conseil de surveillance, la majeure partie du personnel était en place à la
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fin de l’année 2017, mais celui-ci n’a pas cessé d’augmenter depuis lors. Cependant, il n’a
jamais été procédé à un appel à candidatures pour recruter les membres du personnel. Comme
le relève le BOM dans son rapport et confirmé par nos travaux, « le personnel de l’Agence n’a
pas été recruté sur la base de procédures formalisées »68.
Ainsi, bien qu’on note un grand nombre de spécialistes de la santé (médecins et diplômés en
management de la santé), du développement communautaire, de la communication, de la
planification etc., l’Agence ne compte pas de spécialistes dans certains domaines de l’assurance
maladie, qui requièrent des compétences particulières tels que les finances et l’actuariat. Aussi,
ces domaines devraient-ils être mieux pris en charge à travers la formation des agents.
Pourtant, les niveaux de rémunération élevés auraient pu lui permettre de se doter de ces
spécialistes. En effet, avec une moyenne des salaires de 1 038 000 F CFA, elle consacre des
ressources conséquentes et en constante progression à ses ressources humaines, ce qui a amené
les membres du conseil de surveillance à demander à plusieurs reprises une rationalisation des
charges de personnel.
Tableau 19 : Evolution des dépenses de personnel de 2015 à 2019 en FCFA
Par ailleurs, l’Agence ne s’est pas dotée d’une grille salariale détaillée. Les salaires sont basés
sur les fonctions et non les emplois et sont formulés en salaire global ; cela ne permet pas de
distinguer le salaire de base selon la catégorie professionnelle des autres éléments de
rémunération (indemnité, primes, etc.) et de prévoir une évolution des carrières au sein de
l’agence69, excepté les promotions à des fonctions supérieures. Ainsi, le conseil de surveillance
a demandé à la direction générale de préparer une grille salariale selon les normes lors de
l’approbation de l’accord d’établissement.
Il conviendrait, cependant, de l’associer à une politique plus globale de gestion des ressources
humaines (RH) incluant plan de gestion des carrières et renforcement des capacités.
Le DG de l’Agence, tout en soulignant que l’accord d’établissement contient déjà des
dispositions importantes sur la politique RH notamment la mobilité, le traitement des
indemnités, l’évaluation du personnel, le traitement des départs à la retraite, le traitement
des agents de la fonction publique, le recrutement, la formation, les départs négociés, etc.,
abonde dans le même sens que la Cour.
A ce titre, la Cour encourage l’ACMU à poursuivre les réformes en vue de l’adoption d’une
politique efficiente de gestion des ressources humaines.
68
BOM, Ibidem, p.26
69
Ibidem, p.31
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Chapitre 6 : Une gestion des subventions mal encadrée, peu efficace et efficiente
Les ressources budgétaires de l’Agence de la CMU s’élèvent à près de vingt (20) milliards
FCFA par an et représentent plus de 10% du budget de l’Etat alloué au secteur de la santé,
traduisant un effort important du gouvernement pour une mise en œuvre effective de la CMU.
En effet, pour la même mission, la CACMU avait bénéficié d’un budget de fonctionnement de
87 551 000 FCFA en 2013 et 2014.
Les montants dédiés aux initiatives de gratuité et aux subventions représentent plus de 85% des
ressources ; les subventions seules représentent plus de 35% des ressources comme indiqué ci-
dessous :
Tableau 20 : Budgétisation des subventions de 2015 à 2019 en FCFA
Rubriques 2015 2016 2017 2018 2019 Total période
Budget général (hors PTF) 15 922 123 055 19 241 514 211 17 562 842 076 13 818 964 078 20 863 088 586 87 408 532 006
Ratio Subventions sur budget total 22,62% 41,83% 35,17% 37,52% 31,45% 34%
Subventions aux MS 3 601 000 000 8 048 083 160 6 177 280 787 5 184 280 787 6 562 470 933 29 573 115 667
Dont :
Subventions des cotisations des bénéficiaires 1 500 000 000 3 255 007 666 3 057 556 088 2 514 876 256 2 800 000 000
des MS (à hauteur de 50%) 13 127 440 010
Subventions aux MS pour la prise en charge 2 050 000 000 4 081 822 494 1 354 904 531 1 391 904 531 2 500 000 000 11 378 631 556
des ménages bénéficiaires du PNBSF (à
hauteur de 100%)
Subventions aux MS pour la prise en charge 51 000 000 51 000 000 70 000 000 70 000 000 70 000 000 312 000 000
des indigents autres que les bénéficiaires du
PNBSF (à hauteur de 100%)
Subventions aux MS (Unité technique de 0 264 000 000 817 500 000 1 017 500 000 1 012 470 933 3 111 470 933
gestion et AG) ou subventions de
fonctionnement
Subventions aux autres institutions 0 364 253 000 100 000 000 120 000 000 110 000 000 694 253 000
Autres subventions 0 50 000 000 70 000 000 70 000 000 70 000 000
260 000 000
La Cour s’est intéressé aux subventions versées aux organisations mutualistes en excluant les
subventions aux autres institutions (accordées en particulier au Ministère du Travail, du
Dialogue social, des Organisations professionnelles et des Relations avec les Institutions) et les
autres types de subvention (Bénéficiaires divers autres que les MS). Ainsi, il a été vérifié si
l’Agence de la CMU octroie les subventions de façon transparente et efficiente et contrôle les
prestations des mutuelles de santé en vue de garantir leur accès équitable et leur effectivité pour
tous les bénéficiaires.
L’examen de la gestion des subventions durant la période sous revue laisse apparaitre plusieurs
dysfonctionnements de nature à entraver leur efficacité et leur efficience.
Le constat est que l’octroi des subventions aux mutuelles n’est ni transparent, ni équitable en
raison du manque de critères clairement établis et communiqués aux acteurs et que le processus
hasardeux de gestion des subventions à titre de cotisations a pour conséquence une mise à
disposition tardive entravant la viabilité des MS ainsi que les prestations de santé au profit des
bénéficiaires. De surcroît, au niveau des MS, il est constaté une utilisation abusive des
subventions pour le fonctionnement et des irrégularités dans la gestion qui rendent souvent ces
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prestations ineffectives ; une telle situation étant favorisée par le peu de contrôle exercé par
l’Agence pour s’assurer de la bonne utilisation de ces montants.
6.1. Une gestion hasardeuse des subventions
Dans le PSD-CMU, il est indiqué que « l’Etat impulse l’extension de la couverture du risque
maladie dans le secteur informel et rural à travers des interventions dans le financement de la
couverture maladie universelle de base à travers la CAPSU : subvention partielle des cotisations
pour les rendre abordables à la majorité de la population évoluant dans le secteur informel et le
monde rural ; subvention totale de la prise en charge des indigents et des groupes vulnérables
pour garantir l’inclusion des populations les plus démunies70.
A ce titre et en l’absence de la CAPSU, l’ACMU verse aux MS, pour chaque bénéficiaire, les
montants de cotisation retenue qui sont répartis entre les UDMS et les MS selon les modalités
décrites par le tableau suivant.
Tableau 21 : Subventions à titre de cotisation et répartition entre les UDMS et les MS
Ces subventions constituent donc, en réalité, des cotisations dues et doivent être calculées et
versées avant le début des prestations conformément aux pratiques assurantielles en vue de
permettre aux MS d’assurer une prise en charge financière adéquate de celles-ci.
Par ailleurs, des subventions dites de fonctionnement sont prévues en vue d’appuyer les unions
faitières dans l’organisation de leurs assemblées générales et d’assurer la professionnalisation
des MS au niveau départemental à travers la prise en charge des UTG.
Toutefois, bien que les subventions constituent des engagements au regard de ce qui précède et
des ressources publiques conséquentes inscrites dans le budget de l’ACMU, leur gestion est
entachée de plusieurs dysfonctionnements qui ont un effet négatif sur leur efficacité ; ceux-ci
sont liés à l’insuffisance du cadre réglementaire et à l’absence de rigueur dans l’exécution
budgétaire.
6.1.1. Un cadre réglementaire limité pour l’attribution des subventions
L’ACMU attribue les différentes catégories de subventions sans des critères et règles bien
définis indiquant les modalités d’attribution approuvées dans les normes et bien communiquées
aux acteurs mutualistes.
70
PSD-CMU, p.29
RAPPORT DEFINITIF - AUDIT DE PERFORMANCE VOLET DEVELOPPEMENT DES MUTUELLES DE SANTE PROGRAMME CMU COUR DES COMPTES /CAA
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Cette insuffisance du cadre réglementaire ouvre la voie à plusieurs risques de mauvaise gestion
et d’iniquité dans le traitement et la satisfaction des demandes de subventions.
En effet, les subventions n’ont jamais fait l’objet d’un acte réglementaire tel qu’un arrêté des
ministres de tutelle ou une résolution du Conseil de surveillance visant à indiquer les conditions
d’octroi et de contrôle. Cette situation rend difficile une approbation et un suivi en toute
connaissance de cause par les autorités de tutelle.
Selon les ministres qui ont successivement assuré la tutelle de l’Agence, les conventions
prévues entre cette dernière et les organisations mutualistes ainsi que le manuel de
procédures devait permettre d’encadrer la gestion des subventions. Cependant, la Cour a
relevé que ces conventions ne régissaient que les modalités de transfert et d’utilisation des
subventions ciblées et qu’elles n’avaient pas été signées plusieurs UDMS. Ainsi, les seules
règles existantes sont contenues dans le manuel de procédures administratives, financières et
comptables et ont trait aux procédures de dépôt et d’instruction des demandes des organisations
mutualistes. Il s’y ajoute quelques circulaires du DG de l’ACMU, prises à différents moments
pour préciser certaines modalités, notamment l’application de la clé de répartition des
subventions entre les UDMS et les MS, membres de leur union.
Certes, lors du vote du budget de l’Agence qui est ensuite transmis aux ministres de tutelle,
pour approbation, les grandes masses de montants sont présentées au Conseil de surveillance.
Toutefois, le format de présentation du budget ne permet pas de s’assurer de leur allocation
selon des critères de sélection approuvés particulièrement en ce qui concerne les subventions
de fonctionnement. C’est pourquoi, à plusieurs reprises, certains membres du Conseil ont eu à
demander des informations et précisions sur les modalités d’attribution.
Par ailleurs, en plus d’être insuffisantes, les règles d’attribution sont méconnues par la majeure
partie des gestionnaires de MS rencontrées et mal maitrisées par les responsables d’unions.
Plusieurs d’entre eux ont fait part du peu d’informations qu’ils ont concernant les critères
guidant l’instruction des dossiers de demandes surtout devant le constat des différences de
traitement aussi bien pour le versement des subventions à titre de cotisations que pour l’octroi
des subventions dites de fonctionnement. Les gestionnaires des MS, quant à eux, n’ont aucun
moyen de s’assurer de la conformité des montants reçus avec ceux attendus.
Dans ses réponses, le MDCEST s’engage à remédier à cette situation dans le cadre global de
la mise en œuvre des réformes à venir. En attendant, il indique que les conventions de
partenariat entre l’ACMU et les organisations mutualistes doivent être revues en vue de
permettre une application stricte des règlements de l’UEMOA ainsi que pour lui permettre,
en tant que ministère de tutelle, de veiller à l’attribution équitable des subventions de
cotisations pour les bénéficiaires du programme de la CMU.
La Cour salue cette démarche et exhorte à la révision diligente des conventions en attendant
l’adoption d’un cadre réglementaire approprié.
6.1.2. Une absence de rigueur dans la programmation et l’exécution budgétaire
des subventions à titre de cotisations induisant des retards de mise à
disposition
Depuis la mise en place de l’Agence, les subventions dues au titre de cotisations n’ont jamais
été versées à temps causant beaucoup de préjudices aux organisations mutualistes dont la
majeure partie a été confrontée à des ruptures de prestations.
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Cette situation est due à un manque de rigueur dans la programmation et l’exécution budgétaires
des subventions et aux lenteurs dans l’instruction des demandes de subventions qui sont traitées
en réalité comme des demandes de remboursement à cause de l’option prise par l’Agence de
payer les subventions après service fait, donc en année N+1, en contradiction totale avec les
principes assurantiels.
6.1.2.1. Une programmation et une exécution budgétaires non rigoureuse
des subventions à titre de cotisations
Des retards de plus de deux ans sont constatés entre la période de cotisation concernée et la
période de versement par l’Agence des subventions à titre de cotisations.
Pour illustration, ce n’est qu’en 2016 que plusieurs UDMS dont Goudomp, Matam et Saint-
Louis ont reçu les premières subventions partielles au titre des gestions 2014 et 2015. S’agissant
des subventions pour les BSF, leur versement a commencé timidement en 2015 mais beaucoup
parmi les MS déjà fonctionnelles tel qu’à Dakar, Kédougou, Matam, Saint-Louis, Sédhiou et
Tambacounda ont reçu leurs premiers versements en 2016 au titre de 2015. En 2019, la plupart
des UDMS particulièrement dans les régions de Fatick, Thiès, Kaffrine, Louga, Matam,
Sédhiou et Ziguinchor attendaient encore le reliquat de l’année 2017.
Pourtant, chaque année, l’Agence programme dans son budget des montants conséquents mais
ces derniers sont presque systématiquement réaménagés à la baisse pour, souvent, abonder les
comptes dédiés à la prise en charge des gratuités comme cela apparait au tableau suivant. Ces
pratiques sont contradictoires avec l’option annoncée de développer l’assurance maladie à base
communautaire pour limiter les gratuités.
Tableau 22 : Réaménagement budgétaires des subventions à titre de cotisations par rapport aux
gratuités en FCFA
Rubriques Budget 2015 Budget 2016 Budget 2017 Budget 2018 Budget 2019
Initial Réaménagé Initial Réaménagé Initial Réaménagé Initial Réaménagé Initial Réaménagé
Prise en 1 463 426 197 3 541 995 776 3 159 227 448 3 159 227 448 1 444 766 573 3 379 766 573 1 871 753 300 2 271 753 300 2 991 168 750 -
charge 0 - 5
ans
Prise en 1 156 448 565 1 156 448 565 1 121 000 000 1 121 000 000 1 250 000 000 1 488 000 000 650 000 000 750 000 000 1 500 000 000 -
charge
Césariennes
Prise en 3 845 124 490 3 845 124 490 1 650 000 000 1 650 000 000 2 500 000 2 445 000 000 966 639 756 1 216 639 756 2 000 000 -
charge Plan 000 000
Sésame
Prise en 3 324 480 000 2524480000 1 704 000 000 2 229 000 000 2 123 656 474 2 573 656 474 1 198 179 548 1 198 179 548 4 000 000 -
charge 000
Dialyse
Ecart + 1 278 569 579 + 525 000 000 + 2 568 000 000 + 750 000 000 -
Gratuités
Subventions 1 500 000 000 - 3 255 007 666 1 430 007 666 3 057 556 088 707 320 168 3 764 876 256 2 514 876 256 2 800 000 1 800 000 000
partielles des 000
cotisants
(50%)
Subventions 2 050 000 000 - 4 081 822 494 2 681 822 494 1 354 904 531 932 589 341 1 354 904 531 1 391 904 531 2 500 000 4 450 000 000
totales des 000
BSF (100%)
Ecart - 821 322 602 - 3 225 000 000 - 2 772 551 110 - 1 213 000 000 + 950 000 000
Subventions
Par ailleurs, non seulement, les comptes de subventions sont réaménagés mais en plus, ils
enregistrent une faible mobilisation, comme en atteste le tableau suivant qui fait état des taux
RAPPORT DEFINITIF - AUDIT DE PERFORMANCE VOLET DEVELOPPEMENT DES MUTUELLES DE SANTE PROGRAMME CMU COUR DES COMPTES /CAA
Page 102 sur 116
d’exécution budgétaire et comptable selon les chiffres publiés dans les rapports annuels
d’exécution et selon la totalisation des montants mandatés71. En 2018, un effort particulier a été
fait pour la résorption des dettes particulièrement celles relatives aux cotisations des BSF allant
jusqu’à utiliser les comptes dédiés aux subventions générales (50%) pour payer les subventions
ciblées (100%) en violation des règles comptables, notamment le respect de l’imputation de la
dépense.
En effet, un montant global de 828 358 313 FCFA a été payé au profit des BSF sur le compte
65825 consacré aux cotisations des classiques.
Tableau 23 : Exécution des comptes dédiés aux subventions à titre de cotisations en FCFA72
Rubriques Taux Taux Taux Taux Taux Taux Taux Taux Taux
Budget d'exécution d'exécution Budget d'exécution d'exécution Budget d'exécution d'exécution Budget d'exécution d'exécution Budget d'exécution
initial (Rapport) (Mandat) réaménagé (Rapport) (Mandat) réaménagé (Rapport) (Mandat) réaménagé (Rapport) (Mandat) réaménagé (Mandat)
Subventions des
cotisations des 1 500 000 1 430 007 707 320 2 514 876 1 800 000
classiques (à 000 15,75% - 666 22,94% 22,94% 168 88% 65% 256 99% 88% 000 17%
hauteur de 50%)
Subventions aux 2 050 000 2 681 822 932 589 1 391 904 4 450 000
MS pour les BSF 000 18,11% - 494 67,40% 74,22% 341 70% 0% 531 100% 95% 000 32%
(à hauteur de
100%)
Source : Budgets approuvés, rapports annuels d’exécution budgétaire et mandats de paiements
Pourtant, si les importants montants budgétisés depuis 2015 étaient bien employés à travers le
paiement régulier des cotisations au fur et à mesure des adhésions des classiques et de
l’enrôlement des BSF dont le nombre était encore raisonnable, la constitution des arriérés de
cotisation aurait pu être évitée. Mais en retardant les paiements, l’Agence a jeté les jalons d’un
cycle de retards renforcés par le manque de ressources, notamment pour la prise en charge des
BSF qui augmentent de manière exponentielle.
Par ailleurs, il convient de signaler que l’Agence a dû faire face à plusieurs aléas du point de
vue de la programmation et de l’exécution budgétaires qui ont également contribué à aggraver
les retards de paiement. Il en est ainsi :
du transfert d’un montant de 2,2 milliards de FCFA au MSAS en 2017 en guise de
« prêt » au titre du paiement des salaires des agents de santé nouvellement recrutés
(2 milliards) et la prise en charge de la radiothérapie des malades du cancer (200
millions) ; bien qu’effectué à la demande du Ministère des Finances et du Budget
(MFB) selon les responsables de l’ACMU, ce transfert contrevient aux règles de
gestion des finances publiques et doit être régularisé au plan budgétaire par une loi
de finances ainsi qu’au plan comptable et financier.
Toutefois, le DG de l’ACMU informe dans ses réponses à la Cour que le Conseil
de surveillance a autorisé la direction générale à passer ce montant en pertes et
profits lors de sa session du 14 avril 2021 ; ce qui sera constaté dans les états
financiers de 2021.
La Cour prend acte.
71
Compte tenu des différences significatives entre ces montants, auxquelles nous n’avons pas trouvé d’explications, nous
avons préféré présenter les différents taux ensemble.
72
Le rapport d’exécution budgétaire de 2019 n’ayant pas été reçu, seules des informations partielles ont été traitées.
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des difficultés de mobilisation des ressources promises par l’Etat dans le contrat de
performance le liant à l’Agence pour la période 2017-2019 :
Défaut de budgétisation du montant annuel de 31 992 468 000 FCFA prévu
dans le contrat ; l’ACMU n’a reçu sur la période qu’environ la moitié de ce
montant par année ;
Défaut de versement des montants attendus de l’appui budgétaire du
gouvernement japonais à travers la JICA ; lors de sa session du 18 mai 2016,
le DG annonce au conseil de surveillance la négociation en cours avec la
JICA d’un prêt concessionnel de 42 milliards qui permettrait de résorber le
gap de financement de 2016 et 2017 ainsi que de payer les dettes dues aux
structures hospitalières et aux MS. Malgré la signature de la convention entre
le MFB et la JICA, l’appui budgétaire n’a pas été spécifiquement dirigé vers
l’ACMU mais a plutôt servi au financement global de la santé. En raison de
la seconde phase en cours de négociation, il pourrait être procéder à une
allocation de ressources plus importantes à la CMU ;
des difficultés de mobilisation des crédits inscrits au budget du ministère de tutelle
et une ponction de 7 milliards de FCFA du MFB en 2019 dans le cadre de la
régulation budgétaire. Cependant, ce dernier avait autorisé l’Agence, en fin 2018, à
contracter un prêt de 7 milliards de FCFA auprès de la Diamond Bank pour résorber
ses dettes.
Ainsi, si l’Agence a manqué d’efficacité dans la mobilisation des ressources dédiées aux
subventions, les promesses non tenues du MFB n’ont pas contribué à lui faciliter la tâche.
6.1.2.2. Un processus d’instruction des demandes long et sans plus-value
L’attribution des subventions s’effectue à la suite des demandes des MS transmises par les
UDMS, après centralisation. Le processus d’instruction s’effectue à travers différentes phases
de contrôle a priori. Elles sont schématisées ainsi qu’il suit :
RAPPORT DEFINITIF - AUDIT DE PERFORMANCE VOLET DEVELOPPEMENT DES MUTUELLES DE SANTE PROGRAMME CMU COUR DES COMPTES /CAA
Page 104 sur 116
Lors de ces différentes phases, les vérifications sont effectuées sans le recours à un outil dédié
et portent plus sur des contrôles arithmétiques. Ce sont donc, souvent, des erreurs minimales de
calcul qui sont décelées mais qui donnent lieu à des retours auprès des UDMS et MS.
Par conséquent, malgré la longueur du parcours et les moyens humains importants dédiés, le
processus d’instruction des demandes de subvention ne fait qu’allonger inutilement les délais
de mise à disposition des subventions à cause des redondances constatées. Il s’y ajoute un autre
long processus de mise à disposition au niveau local qui passe par des réunions « de
répartition » sous la supervision des SR démontrant encore le peu de rigueur dans l’instruction
puisque des calculs simples au niveau de l’Agence auraient permis de déterminer les montants
à transférer à chaque UDMS et MS.
De plus, contrairement au contrôle minutieux effectué sur les chiffres, il a été constaté que le
contrôle administratif des pièces afin de s’assurer que les MS sont en règle pour recevoir les
subventions n’est pas aussi strict ; ainsi, des MS non agréées ou non fonctionnelles ainsi que
des unions qui n’ont pas signé de conventions avec l’Agence, comme le prévoit le manuel de
procédures, ont pu recevoir des subventions sur la période ; ces faits ont été également relevés
dans les rapports de l’auditeur interne sans suite73.
Nous considérons qu’une meilleure utilisation du SIGICMU (voir supra chapitre 3) aurait
permis d’éviter ces lenteurs et erreurs, de même qu’un contrôle régulier du fonctionnement des
organisations mutualistes.
6.1.2.3. Des retards de mise à disposition des subventions, à la base des
arrêts de prestations
La situation ci-dessus décrite est fortement préjudiciable au bon fonctionnement des
organisations mutualistes, obligées de fonctionner toute l’année avec seulement la moitié des
cotisations des classiques (38% des ressources) et de préfinancer le paiement des prestations.
Pour ne rien arranger, les prestataires, structures de santé publiques comme pharmacies privées
exigent de plus en plus des paiements en avance à travers un système de cautions d’où la
nécessité de recevoir en amont les cotisations.
En 2018, face à leurs difficultés financières résultant des retards de subventions, les mutualistes
ont unanimement décrété l’arrêt des prestations pour les BSF compte tenu de l’obligation qui
leur était faite d’assurer la prise en charge de cette catégorie jugée trop couteuse et qui leur a
occasionné à plusieurs reprises des arrêts de prestations. Ceux-ci remettent en cause la fidélité
des adhérents classiques, donc la viabilité financière des MS. Ainsi, si le mot d’ordre a été plus
tard suspendu, plusieurs MS ont continué à ne plus assurer la prise en charge des BSF.
Tableau 24 : Arrêts de prestations dans les organisations mutualistes visitées par la mission d’audit
73
Rapports de vérification à Saint-Louis, Fatick, Salémata et Thiès
RAPPORT DEFINITIF - AUDIT DE PERFORMANCE VOLET DEVELOPPEMENT DES MUTUELLES DE SANTE PROGRAMME CMU COUR DES COMPTES /CAA
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Selon le DG de l’Agence, les retards de paiement des subventions sont dus au fait que celles-
ci sont assujetties au versement effectif de la cotisation équivalente de 3500 FCFA par les
bénéficiaires et que le temps de collecte peut être assez long et dépend souvent des résultats
des récoltes. Il s’y ajoute que les mutualistes tardent à transmettre les informations y
afférentes pour permettre à l’Agence d’instruire les demandes selon les effectifs à jour de
leurs cotisations. Par ailleurs, il souligne que les subventions sont payées en fonction de la
disponibilité des ressources budgétaires. Mais en dernier lieu, il reconnait que l’Agence
devrait créer les conditions pour que le versement des subventions soit dès le début de l’année
et que la prochaine stratégie devrait prendre en charge cette question.
La Cour salue cette attitude et invite l’ACMU à procéder à une programmation prévisionnelle
plus rigoureuse des subventions ainsi qu’à l’amélioration du processus d’instruction en vue de
remédier aux aléas constatés, particulièrement pour la cotisation des BSF et CEC qui est
totalement due.
6.2. Des subventions de plus en plus détournées de leurs objectifs
L’examen de la gestion des subventions durant la période sous revue fait apparaitre plusieurs
irrégularités qui sont révélatrices d’une tendance à détourner les subventions de leur destination
d’origine dans un contexte où les ressources financières sont jugées insuffisantes.
La Cour a relevé principalement l’attribution irrégulière de subventions massives à l’Union
nationale des Mutuelles de Santé communautaires (UNAMUSC) dans le cadre du Projet
d’Appui à la Professionnalisation des Mutuelles de Santé communautaires (PAPMUT) ainsi
qu’une attribution discriminatoire et inéquitable des subventions.
6.2.1. Le PAPMUT, un projet irrégulier, budgétivore et inefficace
L’examen de ce projet, réalisé en partenariat avec l’Union nationale des Mutuelles de Santé
communautaires (UNAMUSC), révèle plusieurs irrégularités au plan réglementaire et des
incohérences au plan de l’exécution technique qui démontrent le caractère budgétivore et
inefficace du projet.
En effet, à compter du 1er avril 2018, l’ACMU a commencé à financer l’UNAMUSC pour la
mise en œuvre du PAPMUT. Cependant, la convention de partenariat entre l’Agence et
l’UNAMUSC a été signée le 11 avril 2018 et le document de projet décrivant les objectifs et
les modalités d’intervention n’a été établi qu’en mars 2019 soit après un an d’exécution. Donc,
aucune évaluation préalable n’a été réalisée avant le démarrage pour estimer la valeur ajoutée
attendue du projet.
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Le projet devait être exécuté en deux phases allant du 1er avril 2018 au 31 mars 2019 et du 1er
avril 2019 au 31 mars 2020 mais plusieurs avenants ont été signés pour étendre la durée si bien
que le projet est toujours en cours. Le DG évoque la pandémie Covid 19 qui a empêché une
évaluation et un arrêt du projet compte tenu de la demande des autorités de préserver les
emplois durant cette période. La Cour rappelle que les objectifs déclarés du projet et le
dispositif mis en place développés ci-dessous ne font pas de l’Agence un employeur soumis
aux dispositions exceptionnelles prises par les autorités pour la préservation des emplois au
sens du Code du travail.
S’agissant du coût financier, l’ACMU avait versé à la fin de l’année 2019, un montant de
748 767 500 FCFA à l’UNAMUSC et continue les versements avec la poursuite du projet en
2021 dans un contexte de déficit de ressources pour la prise en charge des subventions à titre
de cotisations. Fin 2020, les dépenses s’élevaient à 63 309 740 FCFA mensuels en salaires
(61 454 740 FCFA) et indemnités (1 855 000 FCFA) soit 759 716 880 FCFA.
L’objectif général déclaré du projet est de « renforcer intensivement la contribution des
mutuelles de santé communautaires dans la mise en place effective et rapide du programme de
CMU au Sénégal ». Malgré trois domaines d’action identifiés (communication, gestion et
partenariat), le projet n’a consisté en réalité qu’à recruter des Agents de Promotion des
Mutuelles (APM) mis à la disposition des organisations mutualistes et à prendre en charge des
campagnes de communication non justifiées.
Au plan réglementaire, il a été constaté que malgré l’importance des fonds engagés, le
PAPMUT n’a pas été adopté et approuvé dans les règles ni par l’Agence ni par l’UNAMUSC.
D’abord, le DG de l’Agence n’a pas demandé une autorisation expresse au Conseil de
surveillance comme l’exigeait la réglementation en vigueur74 concernant les dépenses des
agences d’exécution et comme il en a été pour la prise en charge des salaires des gérants des
MS en 201875. Il a profité d’une demande de réaménagement budgétaire lors de la session du
conseil tenue le 02 novembre 2018 pour informer sommairement les membres sur l’appui qu’il
comptait apporter aux MS avec le recrutement d’agents de terrain chargés de mener des activités
de sensibilisation. Par la suite, malgré des demandes d’informations récurrentes des membres
du conseil au regard des montants engagés et des salaires payés, il n’a pas été présenté. Le DG
fait valoir qu’en votant la ligne 65828 « Autres subventions aux mutuelles » dotée d’un
montant de 817 500 000 FCFA, le Conseil a donné son autorisation.
Nous soulignons à ce propos que cette ligne est destinée à la prise en charge des UTG, prévue
par le PSD-CMU, et des autres appuis aux MS comme la prise en charge des gérants durant
cette année 2018 respectivement dotée de 180 000 000 FCFA et de 303 750 000 FCFA ; le
montant de 243 000 000 FCFA destiné à l’appui de la mise en œuvre des activités des MS n’est
pas explicitement dédié au PAPMUT. D’ailleurs, les premiers virements à l’UNAMUSC pour
le projet ont été effectués à partir du compte dédié aux indigents autres que les BSF, ce qui
constitue une irrégularité puisque dans le projet de budget, cette inscription est destinée à la
prise en charge des 17 192 indigents détenteurs de la carte d’égalité des chances autres que les
BSF. Ainsi, l’imputation budgétaire et la disponibilité des crédits n’ont pas été respectés.
Par ailleurs, le projet n’émane pas d’un besoin exprimé par les mutualistes mais procède de la
seule volonté du DG de l’Agence. Dans le PV du conseil d’administration extraordinaire tenu
74
Article 84 du Décret n°2011-1880 du 24 novembre 2011 relatif au Règlement général sur la comptabilité publique et
article ; article 9 du décret 2015-07 du 21 janvier portant création de l’ACMU.
75 Résolution du CS en janvier 2018
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le 14 avril 2018 par l’UNAMUSC, le Président fait le compte rendu d’un entretien avec ce
dernier en ces termes : « le DG, qui se préoccupe de la nécessité de la professionnalisation des
mutuelles mais aussi d’une meilleure implication des mutualistes dans la gestion de la CMU,
[a] réaménagé son budget pour la mise en place d’un projet cogéré avec l’UNAMUSC ». Un
projet de convention de partenariat est également présenté mais sans détails par rapport aux
préoccupations soulignées par les membres concernant la place et le rôle des mutualistes, le
budget, les modalités de fonctionnement et le recrutement des agents de promotion. Toutefois,
les membres présents du CA ont autorisé le PCA à signer la convention tout en lui demandant
de préserver les intérêts des mutualistes.
Sur le plan de l’exécution technique, plusieurs aspects sur l’incohérence du projet sont à
relever :
Les coûts engendrés par le projet sont extrêmement élevés par rapport aux résultats
atteints causant un préjudice aux dépenses régulières et démontrant l’inefficience du
projet. En 2019, c’est au moins 520 824 220 FCFA dépensés pour 258 131
personnes touchées, 15 370 adhésions avec 28 534 bénéficiaires, 12 000 élèves
enrôlés et 92 662 503 F CFA collectés qui s’ajoutent à 54 321 750 F CFA collectés
précédemment. Selon le DG de l’Agence, les résultats des APM s’apprécient mieux
sur la période subséquente en raison du fait que les personnes touchées ne sont
pas toujours en mesure d’adhérer ou de cotiser dans l’immédiat. Cependant, aucun
chiffre n’est avancé pour soutenir ce postulat.
L’Agence a profité du projet pour recruter du personnel en contournant les
procédures habituelles. Elle a directement recruté les 146 premiers APM, sans appel
à candidature comme ce fut le cas avec les UTG. Mais elle a fait signer les contrats
de prestation de service à l’UNAMUSC. Face au tollé des mutualistes, elle a
demandé à ces derniers de proposer des candidatures pour le recrutement d’une
deuxième vague de deux (2) APM supplémentaires par UDMS. Par la suite, elle a
poursuivi ses propres recrutements qui ont porté le nombre d’APM à 365 en fin 2019
soit 265 agents supplémentaires. Mais à présent, informe le DG, les contrats de
prestation des APM sont signés par les UDMS. La Cour souligne que cette pratique
ajoute à la confusion et aux irrégularités du projet puisque la convention est signée
avec l’UNAMUSC et les subventions versées à celle-ci.
Les APM ont un statut problématique au regard de leur manque de spécialisation et
de l’éclatement des responsabilités dans leur gestion. Aucun profil n’a été dégagé
avant leur recrutement et aucune formation n’a été organisée. Ainsi, les APM n’ont
aucune compétence particulière en matière de marketing social. Par ailleurs, la
responsabilité de leur gestion n’est pas bien identifiée puisqu’ils sont mis à la
disposition des UDMS qui doivent les affecter aux MS mais certains sont aussi
préposés à diverses autres tâches (contrôle médical dans les SR, saisie informatique
au siège, etc.). A cet égard, beaucoup de présidents d’UDMS ont avoué la difficulté
de suivre leurs interventions. Les chefs de SR, censés contrôler l’effectivité de leur
travail en visant leur rapport mensuel, n’ont pas été impliqués en amont et n’ont
souvent aucune information sur leurs activités. Quant aux gestionnaires des MS
auxquels ils sont affectés, certains ne les connaissent pas du tout ou s’ils les
connaissent, n’en disposent pas ; d’autres les reçoivent un ou deux jours dans la
semaine.
Une administration parallèle a été mise en place pour la gestion du projet donnant
lieu à des procédures ad hoc et un déficit notoire de suivi. Une unité de gestion est
RAPPORT DEFINITIF - AUDIT DE PERFORMANCE VOLET DEVELOPPEMENT DES MUTUELLES DE SANTE PROGRAMME CMU COUR DES COMPTES /CAA
Page 108 sur 116
6.3. Des subventions encore peu efficaces et dont l’utilisation est faiblement contrôlée
Malgré l’importance des ressources consacrées aux subventions durant la période sous revue,
nous avons constaté que les montants consacrés aux prestations de santé par les MS sont
largement inférieurs, particulièrement pour les BSF. Cela indique une utilisation peu efficiente
des subventions pour la couverture effective des bénéficiaires contre le risque maladie
accentuée par un contrôle insuffisant de l’ACMU malgré les irrégularités déjà notées au niveau
des organisations mutualistes.
6.3.1. Une faible utilisation des subventions pour la prise en charge des
prestations de santé
Le rapport d’analyse situationnelle des organisations mutualistes fait ressortir que de 2017 à
2019, les prestations de santé prises en charge par ces dernières ne sont que de 1 631 337 625
FCFA, bien en deçà des 6 856 312 459 FCFA versés par l’Agence sur la période pour les
subventions à titre de cotisations. De 2015 à 2019, le total des subventions versées s’élève à
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12 603 936 159 FCFA76. Cet écart important appelle à un audit financier approfondi pour
s’assurer de la réception et de la bonne utilisation des montants versés.
Tableau 26 : Dépenses des prestations de soins des bénéficiaires classiques et des bénéficiaires du
PNBSF de 2017 à 2019 en FCFA
76
Ces montants comprennent uniquement les subventions accordées aux MS au titre de cotisations et pour le
fonctionnement.
77
ANSD, Comptes de la santé 2014 - 2016
RAPPORT DEFINITIF - AUDIT DE PERFORMANCE VOLET DEVELOPPEMENT DES MUTUELLES DE SANTE PROGRAMME CMU COUR DES COMPTES /CAA
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Figure 17 : Evolution de la structure des dépenses courantes selon les agents de financement
Ainsi, la mission de vérification a pu constater, en examinant des registres, que les organisations
mutualistes payent des montants dérisoires pour la prise en charge des prestations de santé, la
majeure partie de leurs ressources étant consacrée aux dépenses de fonctionnement.
En effet, très peu d’organisations mutualistes respectent le ratio des dépenses de
fonctionnement sur les dépenses de prestations de santé qui doit être inférieur ou égal à 15%.
Le rapport d’analyse situationnelle des organisations mutualistes relève qu’en 2017, c’est
seulement dans 16 départements sur 45 où l’on retrouve des mutuelles de santé qui ont respecté
la norme. En 2018, cette proportion est passée à 18 départements avant de redescendre à 16 en
2019. Dans les régions de Dakar, Sédhiou et Kolda, aucune MS n’a respecté le ratio,
contrairement à la région de Thiès où on retrouve des MS aux normes dans tous les
départements.
Par ailleurs, il est constaté une rétention des montants versés au lieu de les consacrer à la prise
en charge des prestations. Ainsi, paradoxalement, les avoirs en banque des organisations
mutualistes sont largement supérieurs à leurs dettes de prestation comme le démontre le
graphique ci-dessous qui présente la situation au niveau national.
Figure 18 : Dettes de prestation de santé et avoirs en banque
RAPPORT DEFINITIF - AUDIT DE PERFORMANCE VOLET DEVELOPPEMENT DES MUTUELLES DE SANTE PROGRAMME CMU COUR DES COMPTES /CAA
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La situation de la région de Fatick au 4ème trimestre 2019, ci-dessous, illustre davantage cette
pratique.
Tableau 27 : Situation financière des MS à Fatick en FCFA
DÉPARTE Dépenses de santé Dépenses de santé Charges de Dettes de Montant en Total en Banque
MENTS des bénéficiaires des bénéficiaires fonctionnement prestations caisse
classiques indigents
Fatick 8 763 261 2 208 969 3 300 961 2 571 851 951 685 32 082 081
Gossas 30 747 654 10 202 632 1 751 425 13 452 881 1 030 178 12 517 225
Foundiougne 1 578 100 817 500 16 450 395 0 240 224 84 712 918
TOTAL 41 089 015 13 229 101 21 502 781 16 024 732 2 222 087 129 312 224
ème
Source : Rapport SR-ACMU Fatick, 4 trimestre 2019
Source : Rapport d’analyse situationnelle des organisations mutualistes de 2017- Sept 2019, p.45
Toutefois, seules quelques missions de vérification ayant porté sur l’utilisation des subventions
ont été effectuées à Dakar (2016), Thiès (2018), Fatick) et Salémata (2019). Les constats font
ressortir des irrégularités qui ont trait souvent à l’utilisation de montants importants sans
justification par des pièces comptables régulières, des pratiques de fraudes sur le calcul des
subventions réclamées ou des problèmes de respect de la clé de répartition. Ainsi, outre
l’utilisation abusive des subventions pour le fonctionnement, les pratiques de certaines
78
Voir Céline Deville et al., Les mutuelles de santé subventionnées comme instruments de la CMU au Sénégal, 2018, p.8
RAPPORT DEFINITIF - AUDIT DE PERFORMANCE VOLET DEVELOPPEMENT DES MUTUELLES DE SANTE PROGRAMME CMU COUR DES COMPTES /CAA
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Source : Rapport d’analyse situationnelle des organisations mutualistes de 2017- Sept 2019, p.47
Au demeurant, le système de paiement après service fait des subventions aggrave toute cette
situation. En année N, certains bénéficiaires, particulièrement les BSF, CEC et élèves ne sont
pas pris en charge faute de subventions et en année N+1, alors que les subventions sont
réclamées et payées en leur nom, ils ne sont plus ou ne se considèrent plus comme des adhérents.
De manière générale, il conviendrait, pour plus d’efficacité, d’assurer un versement en amont
des subventions qui devraient être conséquemment budgétisées ainsi que de renforcer le
contrôle a posteriori des prestations.
RAPPORT DEFINITIF - AUDIT DE PERFORMANCE VOLET DEVELOPPEMENT DES MUTUELLES DE SANTE PROGRAMME CMU COUR DES COMPTES /CAA
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RAPPORT DEFINITIF - AUDIT DE PERFORMANCE VOLET DEVELOPPEMENT DES MUTUELLES DE SANTE PROGRAMME CMU COUR DES COMPTES /CAA