"Au tournant du XIXe siècle, la concurrence entre l’anthropologie physique et l’anthropologie culturelle s’exprime notamment à travers la polémique sur la décadence de la « race méditerranéenne ». Débat qui participe d’une crise... more
"Au tournant du XIXe siècle, la concurrence entre l’anthropologie physique et l’anthropologie culturelle s’exprime notamment à travers la polémique sur la décadence de la « race méditerranéenne ». Débat qui participe d’une crise internationale : la légitimité des nations d’Europe méridionale à assurer la direction de l’Occident mondialisé est fortement remise en cause. Voilà qui incite l’écrivain français Paul Adam (1862-1920) à consacrer un cycle de romans et d’essais à la défense du « génie méditerranéen ». Cette entreprise stratégique témoigne de la manière dont s’interpénètrent la science, la politique et la littérature, puisque la
rhétorique méditerranéiste développée par Adam s’aligne sur les postulats de l’anthropologue Giuseppe Sergi, contre l’aryaniste Vacher de Lapouge. Le projet adamesque accompagne donc l’avènement d’une anthropologie culturelle apte à soutenir les ambitions coloniales des
sociétés du Sud. Parce qu’elle s’inscrit dans la « politique de civilisation » mise en place par la IIIe République, la rhétorique de l’unité méditerranéenne favorise en effet les doctrines assimilationnistes qui séduisent alors une part des élites hexagonales. Le « roman de synthèse » adopté par l’ancien symboliste Adam offre à cet assimilationnisme un formidable moyen de diffusion : en promouvant une vision synthétique du creuset méditerranéen, il sert l’idéologie de la « plus grande France ».
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