LE FACE--FACE CITADINS/NATURE
Nathalie Blanc
Assoc. Multitudes | Multitudes
2013/3 - n° 54
pages 129 139
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Pour citer cet article :
-------------------------------------------------------------------------------------------------------------------Blanc Nathalie, Le face-à-face citadins/nature,
Multitudes, 2013/3 n° 54, p. 129-139. DOI : 10.3917/mult.054.0129
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ISSN 0292-0107
Nathalie Blanc
Que signifie protéger l’environnement, sur les
plans éthique et esthétique ? Au nom de quoi
agissons-nous ? Quelle sorte de protection
pouvons-nous imaginer de l’environnement ?
Quelle place ont les tensions esthétiques dans
la formulation d’une obligation à l’égard de
l’environnement ?
Esthétique et éthique :
un face-à-face
Depuis quelques années, les réflexions sur le
thème de l’esthétique environnementale en
France et à l’étranger se font nombreuses1.
Elles impliquent un raisonnement éthique. La
Ces questionnements obligent, premièrement, à interroger l’autonomie du champ de
l’esthétique, vécue aussi comme une force critique (Adorno, 2013), voire une promesse de
liberté au regard des volontés de contrôle et de
normativité sociale (Berleant, 2010). Ce travail
a été ébauché par ailleurs (Blanc, 2008 ; 2012).
Ces interrogations nous conduisent, deuxièmement, à vouloir comprendre les rapports d’une
éthique environnementale et de soins donnés
aux éléments de notre environnement au nom
de leur beauté, ou du plaisir qu’on peut avoir
à les pratiquer, de loin, par le biais des médias,
ou de près, dans la proximité et la familiarité,
manifestant le souci d’une vie persévérante.
129
1 Rappelons que l’esthétique environnementale, courant essentiellement anglophone inspiré des philosophies
de la nature, insiste sur l’expérience esthétique pour les
environnements naturels. Les travaux de l’esthétique environnementale, initiée par la tradition analytique anglosaxonne et désormais développée en France, sont utiles
pour aborder cette question du rapport sensible à la ville
et permettent d’exploiter et d’articuler les éléments collectés. S’intéressant depuis plus de trois décennies à des objets
tels que la nature, le paysage, l’espace urbain ou encore le
quotidien, l’esthétique environnementale déploie diverses
stratégies de compréhension des valeurs que la communauté humaine construit par rapport à son environnement,
mais s’intéresse peu à l’art. Ces stratégies peuvent servir de
référents dans l’exercice d’analyse des valeurs mises en jeu
par les habitants-acteurs rencontrés. Ainsi, on prendra en
compte aussi bien les appréciations dites « cognitives » intégrant les développements scientifiques que « non cognitives », celles axées sur le rôle de l’imagination que celles
incluant le rôle de la narrativité. À cela s’ajoutent encore
les évolutions les plus récentes en esthétique, concernant
l’intervention de l’éthique au sein même de l’esthétique, ou
encore le rapport entre esthétique et politique.
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Le face-à-face
citadins/nature
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dégradation de l’environnement lato sensu nous
concerne tous, et solidairement. Cet intérêt ne
relève pas du seul choix ; être touché par l’environnement, sa dégradation qui nous met en
péril, s’impose. Ainsi, la vision d’un environnement dégradé, parfois sans réversibilité possible,
transforme la relation éthique à la nature. Il est
possible de distinguer plusieurs polarités. Il y a,
tout d’abord, la relation éthique à la nature et à
l’environnement proche, ces environnements du
quotidien dont dépend la qualité du cadre de vie.
Il y a la relation à une nature lointaine, rendue
proche, parfois, par le jeu des médias. Un sentiment de honte ou de culpabilité à ne pas s’en
occuper, à ne pas la prendre en considération,
joue un rôle dans l’idée de notre responsabilité vis-à-vis des générations futures. Il invite à
prendre en considération les êtres vivants et les
environnements présents considérés fragiles.
Cette fragilité donne un caractère d’obligation
à la préservation écologique. La Terre étant un
écosystème, nous sommes liés. Les êtres fragiles
peuvent être nécessaires aux êtres moins fragiles.
Une telle mise en scène rend visible une chaîne
d’être vivants, d’éléments naturels, de fonctionnements écosystémiques, bien difficile à modéliser. Les entités naturelles sont concernées dans
leurs rapports historiques aux êtres humains.
Cette invisible chaîne au caractère d’obligation
ne peut donner lieu à un contrat êtres humainséléments naturels. En effet, avec qui contracter,
et s’agit-il vraiment d’un contrat qu’une des parties pourrait briser ? Ce n’est pas, non plus, une
obligation morale au sens strict. La cohabitation
planétaire avec toutes sortes d’entités suppose
de redéfinir ce qui nous lie. L’éthique du « care »,
courant de réflexion qui promeut le soin donné
aux « fragiles » notamment, associée à l’éthique
de l’environnement, permet de penser cette nouvelle relation. L’éthique du « care » facilite la mise
au point d’une éthique de la solidarité des corps,
proches ou lointains. Elle nous fait voir que ce
soin donné aux vivants est obligatoire du fait
d’être(s) vivant(s). Les éléments sont nombreux
dans cette direction. Par exemple, êtres humains
et biodiversité doivent trouver la bonne distance,
via la mise en place d’aménagements. C’est le cas
des « trames vertes » ou réseau d’espaces verts
connectés écologiquement. Cette cohabitation
devrait associer toutes sortes de natures vivantes.
Aussi, les formes de l’environnement sont associées à des valeurs. On ne peut juger la beauté de
l’éléphant sans avoir à imaginer sa préservation
et non sans mettre en évidence les arguments
éthiques qui justifient une modification des
comportements à son égard. Cependant, cette
obligation justifiée par la beauté de l’éléphant
ne paraît plus si vraie pour d’autres espèces
animales, par exemple, le cafard. Comment
s’opèrent ces sélections, ces choix environnementaux, plus ou moins conscients, et profondément enracinés dans des cultures données ? C’est
ainsi que la mise en forme des environnements
traduit des valeurs et, notamment, des rapports
nature/culture (Descola, 2005). Comment se
tisse ce rapport des formes et des valeurs ?
Les différentes conceptions de l’éthique
environnementale2 veulent mettre en cause la
neutralité axiologique de la nature, qualifiée de
130
2 Parmi les plus connus, citons notamment Holmes
Rolston : Rolston III, H., 1988. Environmental Ethics.
Duties to and Values in the Natural World, Temple University Press, Philadelphia ; Rolston III, H., 1993. « Value in
Nature and the Nature of Value », in Philosophy and Natural Environment, R. Attfield et A. Blesey (éds.), Cambridge
University Press, Cambridge, pp. 13-30 – tr. fr. en 2007 par
H.-S. Afeissa dans H.-S. Afeissa (éd.), Éthique de l’environnement. Nature, valeur, respect, Vrin, Paris, pp. 153186 ; et, également Baird Callicott, Callicott, J. B., 1989. In
Defense of the Land Ethic : Essays in Environmental Philosophy, SUNY Press, Albany ; Callicott, J. B., 1999. Beyond
the Land Ethic : More Essays in Environmental Philosophy,
SUNY Press, Albany ; Callicott, J. B., et Palmer, C. (éds.),
2004. Environmental Philosophy. Critical Concepts in the
Environment, 5 volumes, Routledge, Londres-New York.
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ressource, et définie sur le mode instrumental, et l’exceptionnalité de l’espèce humaine
(Schaeffer, 2007) : la nature, les êtres vivants
n’auraient pas de valeur en eux-mêmes, sinon
en rapport avec les besoins humains. Les philosophes de l’éthique environnementale souhaitent reformuler l’anthropocentrisme moral,
plus ou moins radicalement, suivant le décentrement opéré. Une question déterminante est
le type d’entités susceptible de porter la valeur,
des organismes biologiques à l’écosystème. Des
positions variées du biocentrisme à l’écocentrisme structurent le débat. Philippe Descola,
auteur, en 2005, de Par-delà nature et culture,
critique l’éthique environnementale en ces
termes : selon lui, ces philosophies environnementales reproduisent la coupure nature/
culture propre à l’ontologie naturaliste qu’il
distingue parmi d’autres ontologies3. Si les
propositions en matière d’éthique environnementale qui accordent une valeur intrinsèque à
la nature ont tendance à renforcer la différence
ontologique de la nature et des êtres humains,
c’est que les travaux dont elles s’inspirent qui
font de l’homme un pur organe, le cerveau, le
privent d’esprit ; ceux qui donnent langage et
culture aux animaux concernent uniquement
quelques espèces animales. Et que deviennent
les autres éléments de nature qu’ils soient bio3 L’auteur met en avant quatre types d’ontologie de
par le monde à partir d’une double catégorisation : la
« physicalité », c’est-à-dire la place attribuée au corps, et
l’intériorité, c’est-à-dire la place attribuée à l’esprit. Face
à un autrui quelconque, humain ou non humain, je peux
supposer soit qu’il possède des éléments de physicalité et
d’intériorité identiques aux miens, soit que son intériorité
et sa physicalité sont distinctes des miennes, soit encore
que nous avons des intériorités similaires et des physicalités hétérogènes, soit enfin que nos intériorités sont
différentes et nos physicalités analogues. Ces formules
définissent quatre grands types d’ontologies, c’est-à-dire
de systèmes de propriétés des existants que l’on appellera,
par convention, le totémisme, l’analogisme, l’animisme et
le naturalisme (la posture occidentale).
tiques et/ou abiotiques ? Du côté des droits de
la nature, « les éthiques holistes paraissent plus
proches de l’animisme car elles mettent l’accent non pas sur des individus ou des espèces
dotées de propriétés particulières, mais sur
la nécessité de préserver le bien commun en
ne bouleversant pas de manière inconsidérée
les relations d’interdépendance qui unissent
toutes les composantes organiques et inorganiques de l’environnement. » (p. 273) Cependant, l’intelligence des interactions nature/
société, homme/animal exige un bon gestionnaire ou un scientifique avisé (essentiellement
pensé comme masculin). Pour P. Descola, ces
développements théoriques prennent le parti
d’un naturalisme sans intériorité, soit que
l’éthique se cale sur la science pour justifier
de principes de protection, soit qu’elle attribue une conscience, mais somme toute limitée, à certaines espèces animales ; cette philosophie étend le champ de l’humain plutôt
que de départiculariser celui de la nature. De
manière générale, l’éthique environnementale
qui s’est développée aux États-Unis, en Australie, en Allemagne et dans les pays scandinaves
a reçu un accueil mitigé en France, où l’on
assimile ces courants académiques à une tentative « libérale » ou « réactionnaire » de saper
les universaux issus des Lumières et les droits
imprescriptibles de la personne humaine (alors
que certains courants de l’éthique environnementale accordent des droits à la nature la
dotant de valeur intrinsèque). Ce rejet n’est pas
définitif d’autant plus que les travaux issus de
ces traditions sont désormais mieux connus et
accessibles en français4.
131
4 On trouvera une synthèse du courant d’éthique environnementale dans le livre de C. Larrère, Les philosophies
de l’environnement, PUF, Paris, 1997. Voir aussi l’anthologie commentée publiée par Hicham-Stéphane Afeissa,
Éthique de l’environnement, Nature, valeur, respect, Vrin,
Paris, 2007 ; et plus récemment le petit ouvrage, La com-
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Depuis, l’éthique environnementale a croisé
la route de l’éthique du care (Laugier (Ed.), 2011).
Une éthique du « care » promeut l’engagement
envers le proche. Elle n’est pas une éthique de
justice telle qu’elle est couramment admise. Par
exemple, Carol Gilligan citée par B. Ambroise
(in Paperman, Laugier, 2005, p. 264) identifie
« trois caractéristiques fondamentales différenciant l’éthique du care de l’éthique de la justice.
Premièrement l’éthique du care s’articule autour
de concepts moraux différents de l’éthique de la
justice universaliste, à savoir : la responsabilité et
les liens humains plutôt que le droit et les règles.
Deuxièmement, cette forme de morale est liée à
des circonstances concrètes et n’est pas formelle et
abstraite. Troisièmement, cette forme de morale
est mieux exprimée, non pas comme un ensemble
de principes et de règles, mais comme une activité
et une pratique, “l’activité de soin”. Ainsi, selon
la “voix différente” de C. Gilligan, la morale n’est
pas fondée sur des principes abstraits et universels, mais dans les expériences quotidiennes et les
problèmes moraux que les gens ordinaires rencontrent dans la vie de tous les jours. »
comportements). L’éthique du « care » requiert
des pratiques contextualisées, dessinant des
façons d’être, des styles de vie. L’éthique s’apprécie de façon circonstanciée, et non en surplomb,
abstraitement. Le mode d’examen de ces éthiques
pratiques passe par l’observation critique et pragmatiste du rapport à l’environnement. Il conduit
à valoriser les situations elles-mêmes plutôt que
leur résultat. La transformation d’une rivière par
des opérations collectives d’entretien apprend
aux gens à se soucier de l’environnement et à
coordonner les gestes mis en œuvre pour le sauvegarder etc. Évaluer une action à sa seule finalité
présumée, par exemple le nettoyage d’une rivière,
revient à la réduire à l’objectif affiché. L’action a
forcément sa dynamique, sa valeur propre.
Cependant, le rapport à l’environnement
ne se limite pas en une politique du « care ». La
Terre n’est pas sans puissance propre. Les termes
de nature et de phusis renvoient au caractère
imprévisible du vivant. Les modes de résiliences
et les cycles naturels sont aujourd’hui encore
largement inconnus. Enfin, il ne s’agit pas d’un
soin accordé librement ; le soin accordé aux
Critique de l’éthique environnementale environnements naturels et construits possède
(selon C. Larrère, cette dernière est essentielle- un caractère d’obligation lié d’être conjoinment masculine et une éthique écoféministe privi- tement le produit d’une longue histoire entre
légierait un rapport ordinaire à l’environnement, êtres humains et autres êtres vivants. La solidaaxé sur les fonctions de reproduction) l’éthique rité des êtres vivants est, à l’heure actuelle, un
du « care » concerne l’environnement, en particu- patrimoine commun à l’ensemble des nations
lier les activités réservées à la prise en charge des (Schaeffer, 2007). Ainsi l’animal domestique
environnements ordinaires. L’éthique du « care » nous produit-il aussi bien que nous le produine s’apprécie pas de manière conséquentialiste (à sons. De nombreuses espèces sont compagnes
partir des conséquences), ou de manière déonto- (Haraway, 2003). La force de ces arguments est
logique (à partir d’une norme surplombante de de mettre en scène des solidarités et des interdépendances donnant valeur de nécessités aux
munauté des êtres de nature, Éditions MF, Paris, 2010. Voir comportements éthiques à l’égard des environaussi l’article Afeissa, Hicham-Stéphane (2008), « Éthique nements naturels et construits. Nous apprécieenvironnementale », in V. Bourdeau et R. Merrill (dir.),
DicoPo, Dictionnaire de théorie politique : www.dicopo.fr/ rons ainsi plus facilement l’intérêt d’un renouspip.php (article 112).
veau des éthiques à l’égard du vivant.
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S’inspirant donc d’une éthique du « care »
et d’une éthique environnementale, ma
réflexion propose les prémisses d’une éthique
et d’une esthétique des interdépendances, des
solidarités. Elle accorde une place particulière
au soin accordé à la nature5, mais valorise surtout la reconnaissance d’une co-appartenance
des êtres vivants, notamment géographique.
Il s’agit de mettre en valeur les relations avec
les environnements naturels et construits qui
participent des éléments d’une co-habitation
et d’une co-adaptation réussie (Larrère, 2011 ;
Ostrom, 2010). Une telle réflexion s’appuie
notamment sur une vision écosystémique de
l’environnement. Cette éthique en situation
fait sienne la reconnaissance de soi et des
autres dans et par l’environnement. Les êtres
humains cohabitent et se co-construisent avec
les éléments de leur environnement qu’ils
qualifient à ce titre et qui les qualifient en
retour. Ce mécanisme passe notamment par
des aspects esthétiques, paysagers et narratifs
(Honneth, 2007). Cette dynamique de cohabitation engage les individus dans des situations, les oblige même à des réponses « vives »
empathiques (Rifkin, 2009). En ce sens,
quelle place ont les rapports des habitants à
l’environnement ? Quelle importance ont les
formes paysagères, narratives, ambiantales ?
Quelles valeurs ont les formes de l’engagement ? Notre hypothèse est donc bien que les
valeurs (définies) sont perceptibles, concrètes.
Il s’agit de donner forme à l’environnement,
de le mettre en adéquation avec une sensibilité et de représenter l’environnement concerné par ces valeurs. La formule pourrait être
alors : « prends en considération les attache5 Cela conduit à valoriser le « care » même si la protection de la nature, qui consiste à faire barrage à toute violence plutôt qu’à prendre en charge les environnements,
n’y est pas explicitement reliée.
ments », reconnaissant ainsi les continuités
du « vivant » présentes dans le temps et dans
l’espace, comme des principes nécessaires et
préalables à l’énonciation d’une justice.
Des terrains variés
Nos premiers exemples s’appuient sur les rapports des citadins aux animaux et aux plantes,
et sur la manière dont ces éléments du vivant
prennent place dans nos vies. Ils concernent,
ensuite, des travaux d’artistes inspirés par
l’environnement aussi bien que des environnements bâtis selon des principes esthétiques
permettant d’imaginer un monde différent.
Ce qui semble important ici est de montrer
les rapports entre la contrainte que représente
l’environnement et la liberté d’imaginer et de
représenter. Des polarités éthico-esthétiques se
dessinent à partir de ces exemples : le rapport
à l’animal de compagnie met en évidence un
anthropomorphisme (ce qu’on me fait à moi
est égal à ce qu’on fait à l’animal). Deuxièmement, il est pris soin de l’environnement (pratiques de remédiation, de restauration, de renaturation, etc.) au titre de notre nature d’êtres
vivants (reliés à l’environnement). Troisièmement, l’environnement est représenté comme
un grand « autre », un mécanisme à observer
dont il convient de préserver l’altérité.
L’attachement
Un premier exemple sera l’attachement à
l’animal de compagnie. Il existe un sentiment d’identification qui conduit à privilégier
un mode de prise en charge de l’animal. Les
valeurs défendues, alors, celle d’une nature de
l’animal, d’un respect à l’égard de ses qualités
propres d’être vivant actent son autonomie. De
nombreuses personnes prêtent aux animaux
des intentions, une intériorité. Cette remarque
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concerne particulièrement les chats et dépend
des fictions narratives construites autour de
l’animal, comme le montre ce propos d’une
habitante du Ve arrondissement de Paris : « Les
chats, j’en ai toujours eu dans ma famille : ma
mère qui devait être une dame assez rigolote –
ça remonte à la guerre de 1914, ma mère était
née en 1908 – avait fait des cartes de visite
pour son chat. C’était en ville, elle habitait une
petite villa dans le XVIe arrondissement où il
y avait des maisons individuelles à l’époque,
près du Trocadéro. Elle avait un chat et j’ai été
élevée avec les chats. Quand je me suis mariée,
je n’en ai pas eu tout de suite, je travaillais et
mon mari n’était jamais là, il voyageait beaucoup, beaucoup, et puis j’ai une tante qui adorait les chats qui en avait douze et des perroquets dans une immense pièce […] Alors, j’ai
été chercher une petite compagne à la SPA.
Ils m’ont dit : “Prenez celle-ci, elle a déjà eu le
typhus, elle a survécu, ne prenez pas les autres,
il y a une espèce de typhus rampant, donc il
y a un risque pour vos chats si vous en avez
d’autres.” Elle n’était pas en très bon état, elle
était un peu misérable : mais à la limite, plus
c’est moche, plus je les aime… »
ce monde, la nature n’est pas entachée par le
mal. Les animaux deviennent doués de bonté :
F. (Paris, quartiers centraux, non-environnementaliste) : « un chien, ce n’est qu’amour ; ça
te regarde, tu fonds […]. Un animal, ce n’est
que de l’amour ; il n’y a pas de conflits. » L’être
humain lui se voit souillé par le mal : F. (Paris,
quartiers centraux, non-environnementaliste) : « J’ai pas mal de copines, mais je préfère
voir leurs animaux. »
C’est ainsi que se construit un attachement sur le mode de la reconnaissance d’une
sensibilité commune aux êtres humains et
aux êtres vivants, même dotés de corps différents. Cette identification donne les clés d’une
reconnaissance éthique de ce qui est proche,
familier. Cet engagement peut être qualifié de
communautaire. Il met en valeur la protection
d’une « famille » lato sensu.
La reconnaissance
de la mutualité du soin
Un deuxième exemple, très différent, concerne
la valeur « sensible » accordée à la nature qui
permet de prendre soin de personnes atteintes
de maladies. Il ne s’agit pas de s’identifier,
De nombreux citadins se relient éga- mais de prêter à la nature des vertus imagilement aux éléments vivants non domesti- nées, ou réelles, qui rendent sa fréquentation,
qués sur le mode anthropomorphique. La et la relation établie avec elle, nécessaire, voire
nature éprouve des sensations : « les abeilles providentielle, comme le montre l’exemple.
se sentent mieux en ville, en ce moment. » À ce titre, l’expérience du Centre Hospitalier
(F., Strasbourg, quartiers centraux, environ- Universitaire de Nancy est extrêmement inténementaliste). Les animaux deviennent rusés ressante. Créés en 2008 par le Centre Hospiet stratèges ; un Parisien, évoquant le pigeon- talier universitaire de Nancy à l’intention des
nier contraceptif, dit qu’à « Notre-Dame il malades d’Alzheimer, les « jardins thérapeun’y en a pas besoin puisqu’il y a les faucons, tiques » procèdent dans une logique d’horils [les pigeons] font moins les malins ». Une tithérapie6. Le jardin, appelé « art, mémoire
Parisienne aimant les animaux est déçue par
6 L’hortithérapie est la réhabilitation pratique et glol’île de la Réunion, « parce qu’en fait les anibale de la personne par la pratique du jardinage adapté
selon les différents types de handicaps (physique, sensomaux là-bas sont très très mal traités ». Dans
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et vie », réunit dans un espace tout ce qui
stimule et sollicite les mécanismes cognitifs
des patients atteints de la maladie d’Alzheimer à travers quatre thématiques fortes : l’air,
la terre, l’eau et le feu. Les sens des patients
sont ainsi mobilisés : la vue par les coloris,
les paysages créés ; l’ouïe par le son des fontaines et de mobiles sonores ; le toucher par
les végétaux ; l’odorat, par les parfums et senteurs des plantations. Mémoire, langage et
émotion puiseront dans la succession des saisons et les échanges avec les accompagnants.
La circulation dans le jardin offre également
un cadre spatial et temporel, et c’est un lieu
d’ouverture puisqu’il est dehors et ouvert aux
visiteurs. Le jardin se constitue comme un lieu
de médiation.
Le dernier exemple est tiré du travail
de Mel Chin, artiste américain qui met en
exergue un rapport de remédiation environnementale (Blanc, Ramos, 2010). Élaboré
entre 1990 et 1993 en collaboration avec le
scientifique Rufus Chaney sur le site pollué de
St. Paul, Minnesota, le premier Revival Field
de Mel Chin, Revival Field I. Pig’s Eye Landfill,
est un champ de phytoremédiation formellement circonscrit en un cercle inscrit dans un
carré traversé par deux diagonales, planté
pour trois saisons, évoquant l’idée que la terre
est une cible de régénération. Étant donné
que la phytoremédiation est supposée devenir
une entreprise hautement rentable, les différents Revival Fields ont été des succès ; ils ont
permis de récolter des données et d’éveiller
les consciences à l’intérêt des plantes hyperaccumulatrices. Cependant, dès l’origine, s’est
posée la question du statut d’une telle prariel, mental ou polyhandicaps) et qui peut-être considéré
comme un dispositif de prévention ou faire l’objet d’un
projet d’éducation thérapeutique.
tique : le National Endowment for the Arts
n’a pas poursuivi son financement au-delà
de la première proposition de Chin, estimant
qu’il ne s’agissait pas d’art. L’artiste a plaidé
en comparant le processus d’absorption de
métaux lourds par les plantes à celui de la
gravure où l’acide creuse la plaque de métal.
Pour Chin, ce projet peut aussi s’apparenter
à une sculpture avec des matériaux qui n’ont
jusqu’ici jamais été expérimentés (biochimie
et agriculture).
Ces exemples mettent en évidence une
relation forte avec des éléments du vivant,
relation qui s’apparente à du soin pour soi.
Reconnaître l’élément du vivant tel qu’il est
équivaut à se reconnaître soi. Cette reconnaissance accompagne aussi un mécanisme de
prise en charge ; d’un animal, d’une mère et
de patients. Identifier la part souffrante d’éléments du vivant, humains ou non-humains,
peut conduire à vouloir les prendre en charge,
et à vouloir les guérir.
Une nature indépendante
Une dernière version des liens aux environnements naturels et construits naît de la représentation d’une nature qui n’a rien à voir avec
les êtres humains. Elle est autosuffisante. Elle
s’impose par son caractère lointain au destin
qui se déroule en parallèle de celui de l’être
humain. Peut-être les climato-sceptiques
rendent-ils compte par leurs comportements
d’une semblable vision de la nature. Pour
les trames vertes, des individus évoquent la
nature dans des termes également plus distanciés. Dans ces discours, les plantes et les animaux sont des éléments ayant une matérialité
et un destin différencié. Ils se développent
sans l’être humain. C’est alors le « grand
Autre » : H. (Strasbourg, quartiers péri-cen-
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traux, environnementaliste), la nature, « c’est
quand même des arbres spontanés qui s’installent tout seuls. » F. (Strasbourg, quartiers
péri-centraux, environnementaliste) : la
nature renvoie à « une petite fleur qui ne doit
pas son existence à l’homme ». La faune et la
flore ont leur biologie propre qu’il s’agit de
comprendre et de décrire. Lors de promenade
un Marseillais décrit à ses enfants les espèces
qu’il voit, « il y a le pin, la garrigue, toutes les
espèces qu’il y a dans la garrigue, le thym, le
romarin ». F. (Strasbourg, quartiers centraux,
environnementaliste) à propos des continuités naturelles : « ce sont des espaces dont
l’homme n’a pas besoin de s’occuper ». Dans
ces échanges, la survie de ces entités repose
sur une cause éthique détachée dans un premier temps du destin de l’humanité. Il faut
sauver la faune et la flore pour elle-même.
L’esthétique de la nature est gratuite, et c’est
cette gratuité qui fait sa grandeur. La nature
n’est pas présente pour l’humanité, elle est
consubstantielle au monde. H. (Marseille,
quartiers péri-centraux, environnementaliste) : « pour Marseille, c’est justement le fait
que tous ces massifs qu’il y a autour soient
reliés, et ils devraient fractionner ce nouveau système […] Par exemple, l’autoroute,
ça bloque… c’est bon, mais pour l’aménagement ultérieur, il faut réfléchir à ne pas morceler justement ces écosystèmes et à garder
des continuités de manière à ce que les populations puissent… d’oiseaux, d’animaux…
elles aient un espace assez grand pour vivre,
plutôt que de se retrouver sur des îlots… »
cycles fermés comme des fictions totalitaires.
Cela est notamment le cas des propositions de
structures urbaines en circuit fermé de Slave
City (2005-) ou de The Technocrat (2003-).
Le projet Technocrate insiste par exemple sur
la question du recyclage, rendu absurde par
sa réduction aux déchets corporels. « Dans
ce système, l’humain citoyen est le rouage
biologique qui produit assez de matière première pour produire le biogaz non seulement
utilisé pour faire cuire l’alimentation, mais
pour obtenir l’alcool capable d’assurer le bon
fonctionnement des gens ». La Total Faecal
Solution (Solution fécale totale) prévoit une
surveillance vidéo contrôlant l’usage distinct
des toilettes à merde ou à pisse destinées à être
recyclées. Ce faisant, précise AVL, « la sympathique écologie frise le voyeurisme ». L’Alcoholator permet en contrepartie la production
de 1 800 litres d’alcool à 40 degrés distribué
trois fois par jour aux habitants pour leur
bien-être.
Ces environnements témoignent d’une
autonomie écosystémique, par le recyclage, et
tendent un miroir au monde qui a abandonné
« tout concept moral » au profit d’un rationalisme pur et d’un calcul utilitaire, explique
l’artiste. Cette vision d’une régulation de la
« maison commune » peut virer au cauchemar
éthique ; la justification de l’obligation provoquant une tyrannie sociale et politique.
Ces exemples montrent la force des attachements et des environnements ordinaires,
la valeur de l’utopie artistique, du modèle
Cette vision de la nature accompagne symbolique, en termes d’éco-invention. Peutun esprit de système. L’être humain serait on maintenant, essayer de généraliser ou d’apen quelque sorte l’horloger, voire le tyran, préhender ces observations sur un mode plus
de cette délicate mécanique. Les œuvres de théorique ? Faisons-le en réfléchissant aux
l’Atelier Van Lieshout montrent ainsi des éco- modes de valorisation de l’environnement.
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Multitudes 54
Efforts de généralisation
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Il apparaît que formes et valeurs opèrent d’un
même élan solidaire. Les artistes racontent la
manière dont leur travail formel se justifie en
rapport avec l’environnement social et écologique. Les formes constituent une action et une
réaction à l’égard de l’environnement vécu.
En ce sens, la mise en forme de ces environnements artistiques7 peut aider à comprendre ce
que, par ailleurs, les créativités environnementales ordinaires mettent en œuvre.
rel ou construit. C’est l’humanité et la dignité
que vous leur reconnaissez. Pour être reconnue
en tant que telle, cette valeur doit être explicitement et publiquement valorisée.
Quelles sont, dès lors, les valeurs, qui justifient que vous preniez soin de cette chose, élément du vivant ou personne ? Ce peut être aussi
des valeurs qui se dégagent dans le cours de
l’action ou qui s’inscrivent dans le cadre d’une
culture donnée qui renvoie éventuellement à
des aspects esthétiques, de qualité environnePrenons un peu de distance. Qu’est-ce une mentale, de co-appartenance, de survie, etc.
valeur ? Dans la littérature, le terme de valeur a Il existe également une valeur financière, qui
des acceptions variées et est souvent contesté. consiste à apposer un prix sur une personne ou
Kumar and Kumar (2008, p. 809) propose une une chose qui reflète la valeur accordée sur un
compilation des sens donnés au mot valeur, marché basé sur une relation entre la demande
adapté de Gilipin (2000) (cité dans Spangen- et l’offre (Sagoff, 2008). L’idée de valeur va bien
berg et Settele, 2010, p. 328). Les valeurs décrites plus loin, cependant, que la question de l’utili(valeurs marchandes, valeurs intrinsèques, sation pour le bénéfice ou l’utilité d’une chose,
valeurs d’existence, valeurs d’échanges, valeurs d’une personne, ou d’éléments du vivant. L’arécosystémiques ou écologiques, etc.) sont gent est l’expression d’une valeur, mais toutes
essentiellement des valeurs environnementales. les valeurs ne peuvent s’exprimer en termes
monétaires ou financiers, loin de là.
Les exemples présentés ci-dessus à titre
d’illustrations permettent d’adopter une persReconnaître ces valeurs, et leur donner
pective plus générale et voir quels sont les prin- une importance suffisante pour en faire des
cipes et, éventuellement, les soucis qui guident leviers de transformation riche de l’environles gens dans leurs attachements (solidarité, nement, peut être un objectif. Listons d’abord
justice ou justesse, beauté) et les valeurs qu’ils les différents modes identifiés d’attachement à
reconnaissent aux éléments de l’environne- l’environnement. Il y a une valorisation posment auxquels ils s’attachent.
sible de l’environnement en termes d’identité,
qui passe par une reconnaissance de soi dans
On peut dire que l’utilisation du mot l’environnement, et un plaisir manifeste assovaleur renvoie au caractère d’un élément natu- cié à la vision de ces éléments de l’environnement. Il y a, deuxièmement, la question du
7 Il faut rappeler ici que l’édition de 1968 de l’Ency- soin, de l’attention portée à l’environnement,
clopaedia Universalis (Encyclopedia Universalis, vol. 6,
1968, pp. 311-313) donne un sens artistique au terme qui prend en considération le sentiment de
« d’environnement », au moment où les héritiers du compassion à l’égard d’organismes vivants par
dadaïsme et du Pop Art, en premier lieu américains, se
lancent dans la création de ce qu’ils appellent précisément exemple, et comporte une prise en charge de
des « environnements ».
ces éléments de l’environnement. Enfin, il y a
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ronnementale ») ; prendre soin des environnements est donc prendre soin des êtres qui s’y
trouvent, humains et non-humains, biotiques
et abiotiques, dans leurs interdépendances.
La prise en considération de l’environnement, en tant que source de valeurs, revient
à inclure l’ensemble des liens (« meaningful
links », Holland, 2011) qui rattachent à l’environnement au-delà de la qualification de la
nature comme ressource.
Ces liens rendent capables les gens ; ce
sont les « capabilities » (Sen, 2010 ; Nussbaum,
En somme, les exemples ci-dessus, qui 201110) ; la richesse de ces liens augmente les
montrent que les personnes accordent un pou- choix de vie possibles.
Dans une situation d’incertitude, notamvoir d’agir (une « agentivité » Gell, 1998 ; Blanc,
20128) à l’environnement, valorisent égale- ment en termes écologiques (et écosystément le fait que les environnements naturels miques), préserver ces attachements peut être
et construits, les éléments du vivant qui y considéré comme relevant d’un principe de
concourent, ont une dimension constitutive justice et oblige à prendre en charge milieux et
pour les individus et les collectifs concernés. Il personnes dans leurs imbrications.
s’agit alors d’interagentivité9. Dès lors, quelques
remarques s’imposent.
L’idée d’un environnement, d’une resLa pauvreté environnementale des êtres source gérée en bien commun, est que l’enviest source d’amoindrissement à tous niveaux ronnement contribue à la reconnaissance de
et de privation de droits fondamentaux (cf. les chacun et à la constitution du collectif ; c’est
mobilisations en faveur d’une « justice envi- un principe de co-construction d’autant plus
important que nos rapports aux éléments
8 Il importe, premièrement, de remarquer que « l’agentivité distribuée » (Gell, 1998) joue un rôle dans les représen- vivants, on le verra, ne sont pas tant affaire de
tations et pratiques développées à l’égard de l’environne- distinctions biologiques, ordonnées suivant
la reconnaissance du « grand Autre » que représente la nature, qui va de pair avec une prise en
considération de ses formes, et s’accompagne,
le plus souvent, d’une observation, admiration
ou contemplation. Ces éléments de réflexion
ont pour objectif de donner les bases d’une
conception originale de la valorisation environnementale dans la perspective d’un nouveau dialogue nature/culture. La perspective
esthétique repose sur les rapports entre formes
et valeurs, entre objectivité et subjectivité.
ment. En d’autres termes, souscrire à une vision du monde,
se représenter l’environnement en donnant à ces mots le
poids de l’expérience, mais aussi se doter d’une opinion à
son égard, participe, de manière plus générale, d’une activité qui consiste à doter l’environnement d’un effet sur soi ;
ainsi, dire de l’herbe qu’elle est sale (papiers, mégots, boue,
etc.) ou propre (naturelle, verte, etc.), c’est inscrire dans
l’herbe la possibilité de s’y asseoir ou non. Cette « agentivité
distribuée » participe du développement des possibilités
qui sont inscrites dans les éléments de l’environnement.
9 L’analyse que Karen Barad fait de la théorie quantique
de Niels Bohr, dans Meeting the universe halfway : Quantum Physics and the Entanglement of Matter and Meaning
(2007), met en évidence que rien n’existe hors de l’intraaction. Ceci définit un objet fluctuant symboliquement
et matériellement, aux possibilités contingentes. C’est un
réalisme agentif.
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10 C’est en ce sens, d’ailleurs, que l’environnement importe dans la réflexion sur le développement des capacités
humaines. Remarquons juste – car cela mériterait de plus
amples développements – et notons que l’environnement
importe comme source de créativité (Sen, 2010) : « Development is fundamentally an empowering process and this
power can be used to preserve and enrich the environment,
and not only to decimate it. We must not, therefore, think of
the environemnt exclusively in terms of conserving pre-existing natural conditions, since the environnement can also include the results of human creation. For example, purification
of water is part of improving the environment in which we
live. The elimation of epidemics contributes both to development and to environmental enhancement. » Nombreux sont
les liens qui rendent capables les gens, et augmentent les
« capabilities » et les évolutions de ces dernières.
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Conclusion
Prendre en charge la problématique environnementale en tant que source de valeurs est
prendre en considération l’ensemble des liens
qui y rattachent au-delà de la qualification de la
nature comme ressource. De quelle manière les
liens identifiés dans le cadre de nos débats parviennent-ils à justifier d’une augmentation des
richesses possibles pour les personnes concernées ? Cependant, que ce soit de récents travaux
sur les trames vertes ou des installations artistiques telles celles de l’Atelier Van Lieshout, ces
récents développements montrent de sérieuses
ambiguïtés. L’une d’elles, et non des moindres,
est que faire corps avec la nature, c’est aussi se
faire violence, c’est-à-dire que tout geste actif à
son encontre suppose un dommage symbolique.
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des catégories, mais de pratiques participant de
l’apprentissage de ce que signifie être humain
ou animal et les valeurs qui leur sont prêtées.