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Roujan-Medilianum (?) de l’Antiquité au Moyen Âge
De la fouille du quartier des sanctuaires à l’identification
d’une nouvelle agglomération de la cité de Béziers
Marie-Geneviève COLIN, Laurent SCHNEIDER, Laurent VIDAL
avec la participation de Martine SCHWALLER
À la mémoire de Pierre-Yves Genty
Résumé : une fouille de sauvetage réalisée dans le quartier Saint-Jean à Roujan (Hérault) a permis de mettre au jour un ensemble de trois
temples gréco-romains assis sur podium et inscrits dans un péribole, lui-même ouvert sur une place de 33 m de large. Ce quartier monumental
du Ier s. de n. è., qu’il faut associer à une nouvelle agglomération antique (Medilianum ?) de l’espace biterrois, connaît de profondes modifications à
partir du Ve s. Le grand temple central est arasé, le sanctuaire septentrional est transformé en bâtiment funéraire bientôt doté d’une abside tandis
qu’un édifice baptismal est construit sur l’emplacement du sanctuaire méridional. Jusqu’au seuil du XIe s., des sépultures sont installées auprès des
deux édifices. Durant ce siècle, l’habitat se réorganise désormais autour d’un château neuf tandis qu’est fondé un prieuré canonial dans son voisinage.
Émerge alors dans le biterrois une forte polémique autour de la possession des reliques de saint Majan que se disputent différents établissements
monastiques locaux (Villemagne, Saint-Thibéry, Aniane) aux dépens des roujanais. Ce dossier permet d’appréhender selon un angle anthropologique
la complexité des manifestations religieuses ici indissociables de la construction médiévale d’une mémoire des origines du christianisme local. Il
relaie également les questionnements que pose la reconnaissance du statut de la localité antique, comme son rôle dans l’organisation du territoire de
la cité de Béziers entre Antiquité et Moyen Âge. Le processus de christianisation est associé au développement d’une fonction funéraire à l’intérieur
de l’ancien péribole mais aussi à l’édification d’un baptistère. Un tel équipement évoque immanquablement le rôle de l’action épiscopale face à
l’exigence d’une certaine décentralisation ordonnée au service des communautés de la cité. Il interroge à rebours sur la vigueur d’un centre civique
et religieux qui aurait pu se développer durant le haut Empire autour d’un hypothétique forum.
Mots clefs : Roujan, Cassan, Saint-Majan, agglomération secondaire, forum, villa, temples, église, baptistère, territoire, espace rural, christianisme.
Abstract : An emergency excavation carried out in the Saint-Jean district of Roujan (Hérault) uncovered a set of three Greco-roman temples built
on a podium, incorporated within a peribolos, itself opening onto a 33 meter wide square to be uncovered. This 1st century AD monumental quarter,
which must be associated with another ancient town (Medilianum ?) in the Béziers area, goes through some important alterations as from the 5th
century AD. The large central temple is pulled down; the northern sanctuary is transformed into a funeral building which is soon equipped with an apse,
whilst a baptismal building is built on the site of the southern sanctuary. Up until the beginning of the 11th century, many graves are dug near both
buildings. Throughout this century, settlements are henceforth reorganised around a new castle whilst a canonical priory is founded in its vicinity.
Around this time, a heated debate emerges about the processions of the relics of Saint Majan relics which are fought over by several local monasteries
(Villemagne, Saint-Thibéry, Aniane) at the expense of the Roujan inhabitants. This topic allows us to grasp through an anthropological angle
the complexity of religious displays which are here indissociable from the medieval constitution of a memory of origins in local Christianity. It also
brings forward questions about the recognition of the status of the ancient locality, as well as the part played by this locality in the organisation of
the suburbs of Béziers between the Antiquity and the Middle Ages. The Christianisation process is associated with the development of a funeral function
inside the ancient peribolos as well as the building of a baptistery. Such an equipment unmistakeably evokes the part played by Episcopal action
faced with an organised decentralization which favoured the city’s communities. The other way round, this theme also questions the vigour of a civic
and religious centre which may have developed during the Early Roman Empire around a hypothetical forum.
Key words : Roujan, Cassan, Saint Majan, secondary town, forum, villa, temples, church, baptistery, territory, rural space, Christianity.
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En 1982, des travaux liés à la réalisation d’un lotissement
dans la périphérie du village de Roujan (Hérault) attirent
l’attention de la Direction des Antiquités Historiques dans
un secteur de l’ancienne cité antique de Béziers alors
quasiment inconnu des chercheurs (fig. 1). Une campagne
de fouille de sauvetage urgent et trois campagnes de
fouilles de « sauvetage programmé » permettent de mettre
au jour le quartier monumental d’une agglomération
antique jusqu’alors insoupçonnée (fig. 2). Le plan de trois
sanctuaires gréco-romains, associés à un péribole et s’ouvrant
à l’Est sur une place bordée d’un portique, est rapidement
reconnu. Ce noyau du premier siècle de notre ère, qu’il
faut peut-être associer au culte impérial et/ou capitolin,
est investi vers le milieu du Ve s. par des tombes qui
annoncent le développement progressif d’un cimetière
autour d’un bâtiment funéraire paléochrétien et plus
particulièrement la christianisation des populations de la
localité par l’édification d’un baptistère. Le nouvel équipement ecclésial du quartier permet ainsi d’envisager des
questionnements sur l’évolution de l’agglomération entre
Antiquité et Moyen Âge, soit jusqu’à la charnière du
XIe s. Ce siècle de rupture voit désormais la vie locale se
restructurer autour d’un château (le castrum de Roujan),
d’un prieuré de rayonnement régional (Sainte-Marie de
Cassan) et d’une nouvelle hiérarchisation des lieux de
culte chrétien.
Fig. 1 : Localisation de Roujan, Hérault
(DAO L. Schneider).
En 1986, aux termes d’une longue négociation, l’assiette
du lotissement communal fut finalement décalée, préservant ainsi d’une destruction totale cet ensemble original.
Tandis que les fouilles étaient arrêtées et que les premières
données étaient publiées sous la forme de notices de synthèse, un programme de prospections se mettait en place
dans le cadre de la carte archéologique. Poursuivi jusqu’au
milieu des années 1990, ce programme permettait de
mieux caractériser l’agglomération antique de Roujan et
surtout de commencer à l’insérer dans l’espace rural de la
cité de Béziers et dans la trame locale des établissements
antiques et médiévaux. De la découverte des temples à
l’identification des sanctuaires chrétiens, de la mise en
évidence d’une nouvelle agglomération antique aux questions qui touchent à son insertion dans les systèmes de
peuplement antique et médiéval du piémont de Béziers,
près de vingt-cinq ans auront passé. En ce sens, le dossier
constitué autour des sanctuaires de Roujan est aussi un
témoignage de l’évolution de la pratique archéologique
régionale et de l’évolution des problématiques scientifiques. Évolution technique et structurelle qui conduit des
premiers balbutiements de l’archéologie de sauvetage à
l’archéologie préventive actuelle, évolution des questionnements qui conduit de l’étude d’un quartier monumental
à son insertion dans la localité qui l’a vu naître et dans les
systèmes de peuplement qui l’ont portée, mais aussi
décloisonnement chronologique entre Antiquité et Moyen
Âge ou disciplinaire entre archéologie descriptive et histoire
des mentalités. Cette contribution monographique à visée
de synthèse se présente donc comme le reflet d’un dossier
demeuré constamment ouvert depuis plus de vingt ans
avec ses aléas et ses enrichissements. Depuis le début des
années 1980, ce secteur du piémont biterrois n’a d’ailleurs
curieusement pas bénéficié de nouvelles fouilles de
quelque ampleur, ce qui en dit long finalement sur le
modeste état de nos connaissances de ce territoire de
confins, situé entre vallée de l’Hérault à l’Est et monts
d’Orb à l’Ouest entre cité de Béziers au Sud et cité de
Lodève au Nord, ou plus largement encore entre pays
Rutène, capitale narbonnaise et pays Nîmois.
Le plan de la contribution s’organise en deux grandes
parties. En premier lieu sont présentées les données de
fouilles du quartier Saint-Jean, par phase chronologique
et par monuments. Dans un second temps sont envisagés,
là encore selon une perspective chronologique, les problèmes du statut de la localité, ceux de ses relations de
voisinage avec les autres établissements du secteur, les
villae notamment, et avec les chefs-lieux de cité. Ce changement d’échelle, qui nous conduit à envisager un espace
de quelque 32 km² sis entre Libron et Peyne, doit permettre
de discuter des chaînes de transmission et des différentes
formes de piété qui se sont manifestées dans ce secteur entre
Antiquité et Moyen Âge, entre paganisme et christianisme.
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fragments de céramique sigillée et de tegulae (Gondard
1948, 14). En 1974, une statuette en bronze représentant
Hercule est recueillie dans le même secteur (Barruol 1975).
Cependant ce sont des travaux de voirie liés à la création
d’un lotissement communal, en mai 1982, qui sont à
l’origine de la découverte de l’ensemble cultuel proprement dit. Les premières trouvailles relatées alors sont celles
d’une fosse préhistorique, découverte par J.-P. Mailhé,
puis d’une « couche archéologique d’époque romaine » et
d’une « tombe à inhumation » signalées par A. Cornejo.
Le témoignage oral parallèlement recueilli auprès du
conducteur de la pelle mécanique fait également état
de « l’enlèvement de 4 ou 5 soubassements de colonne,
alignés selon un axe Est-Ouest et situés dans la parcelle
116 » (Cornejo 1983, 2).
Au cours du mois de septembre suivant, le creusement
de tranchées de canalisation sur les parcelles cadastrées
AB 412 et AB 413 fit apparaître de nouveaux vestiges
parmi lesquels les fondations maçonnées - faiblement
enfouies - de plusieurs bâtiments, ce qui déclencha la réalisation d’un sauvetage urgent confiée à A. Cornejo, en
collaboration avec P.-Y. Genty (Direction des Antiquités
historiques du Languedoc-Roussillon) et Chr. Olive
(Association pour le développement de l’archéologie en
Languedoc-Roussillon).
Fig. 2 : Localisation sur fond cadastral du quartier Saint-Jean
à Roujan (DAO I. Bermond).
Aux données archéologiques s’ajoute en fin de parcours
l’apport de la documentation textuelle, qui fournit un fil
conducteur autour du souvenir de saint Majan dont la
dispute des reliques - au seuil du XIe s. - ouvre des questionnements sur la construction d’une mémoire populaire
des piétés locales qui à son tour peut aider à l’interprétation
des données matérielles.
LES FOUILLES DU QUARTIER SAINT-JEAN
1. HISTORIQUE DES RECHERCHES,
CONDITIONS D’EXPLORATION ET DE CONSERVATION
1.1 Les premières découvertes
Outre la présence de monnaies antiques signalée dès le
milieu du XIXe s. (Crouzat 1859), l’existence de vestiges
gallo-romains sur le site de Saint-Jean à Roujan est
connue depuis 1948 grâce à la mise au jour, suite au
défoncement d’une parcelle, d’une statue mutilée représentant un personnage drapé ainsi que de très nombreux
Cette première opération permit le nettoyage et le relevé
de l’emprise des différentes structures, dès lors identifiées
comme appartenant à un ensemble cultuel antique et
médiéval (fig. 3). En outre, trois sondages furent exécutés,
non pas à l’intérieur du temple 1 dont le plan était dorénavant
connu dans son intégralité, mais aux abords immédiats de
celui-ci, pour permettre le dégagement et la compréhension
de maçonneries affleurantes sur ses flancs est et ouest.
Côté est, les sondages I et II ont ainsi été respectivement
implantés sur les murs latéraux nord et sud de l’édifice
accolé au temple, dont l’abside orientale n’a été explorée
que l’année suivante. À l’ouest du temple 1, le sondage III
a permis de localiser plusieurs murs dont deux, parfaitement
chaînés dans l’angle nord-ouest, constituent les vestiges
d’une pièce accolée au sanctuaire antérieur (Colin et al.
1982 ; Cornejo 1983).
1.2 Du sauvetage programmé à la conservation
des vestiges
En dépit du très mauvais état de conservation des
vestiges, dont une large part avait été malmenée et
fortement arasée par les travaux de voirie mais aussi par
les mises en culture modernes, l’importance de ces
découvertes fortuites justifia la mise en place pour trois
ans d’une fouille de sauvetage programmé, dont la responsabilité fut assumée par M.-G. Colin et par
M. Schwaller. La compréhension et l’esprit de coopération
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Fig. 3 : Localisation des vestiges et des secteurs de fouille
(DAO L. Vidal).
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dont firent alors preuve aussi bien la mairie de Roujan que
la Direction départementale de l’Équipement furent
déterminants, en ces temps désormais révolus où l’arsenal
législatif et réglementaire qui a donné depuis toute sa légitimité à l’archéologie préventive n’existait pas. Dans un
second temps, le projet de lotissement a été sensiblement
modifié afin de permettre le bon déroulement des
recherches, les secteurs riches en vestiges archéologiques
étant destinés à devenir un espace vert à tonalité archéologique, au sein duquel seuls les vestiges des temples
antiques et de l’édifice du bas Moyen Âge ont finalement
été présentés (fig. 4).
Fig. 4 : Vue du temple septentrional après restauration
(cl. L. Schneider).
Une fois l’hypothèque de la destruction du site levée,
les fouilles ont été suspendues dans la mesure où la nécessité du sauvetage ne s’imposait plus. La Direction des
Antiquités de l’époque décida de reporter ses efforts sur
d’autres urgences, en cette année 1986 où venait de
paraître au Journal officiel le premier décret relatif à la
prise en compte de la protection du patrimoine archéologique dans certaines procédures d’urbanisme.
Dans l’intervalle, les fouilles ont été menées de 1983 à
1985 au rythme moyen de six semaines de campagne
annuelles, par une équipe d’une vingtaine de personnes,
constituée à 80 % de jeunes bénévoles et d’étudiants
(Colin et al. 1983, 1984, 1985). Les soucis pédagogiques
et de formation ont de ce fait été continûment au cœur des
préoccupations de l’équipe, comme en témoigne chacun
des rapports annuels de fouille. Pour accessoires qu’elles
puissent paraître, ces précisions en termes d’organisation
et de moyens humains ont une grande importance dans ce
dossier. En effet, elles n’ont pas été sans conséquences sur
les choix méthodologiques opérés sur le terrain et sont en
grande partie responsables d’une relative lenteur dans la
collecte des données.
Si le décapage extensif, dès le printemps 1983, d’une
superficie d’environ 2000 m² a permis d’obtenir rapidement
une bonne vision de l’ensemble de l’aire cultuelle et
funéraire conservée, les restrictions de surfaces opérées
progressivement pour tenir compte des moyens disponibles et effectivement fouillées dans leur intégralité (par
sondages et tranchées de reconnaissance) ont limité la
quantité de données stratigraphiques et mobilières
recueillies. Ces campagnes successives ont néanmoins
permis de mettre au jour les vestiges des différents édifices
cultuels (temples antiques, édifices paléochrétiens, bâtiment
médiéval), une cinquantaine de sépultures et, quelques
dizaines de mètres plus loin vers l’Est, diverses
constructions, caniveaux, fossés (Nickels 1985 ; Nickels
et al. 1988) (fig. 5).
Plus précisément, la campagne 1983 a eu pour objectifs
d’explorer l’intérieur (zone 1, secteurs 1 et 2) et le flanc
méridional du temple 1 (zone 1, secteur 3) ainsi que l’espace
situé au sud de l’édifice à abside et à l’est du temple 2
(zone 5), et d’achever la mise en évidence de l’avancée
orientale avec le dégagement de l’abside (zone 2). Enfin,
un sondage de 16 m² (zone 1, secteur 4) a été réalisé au
nord-ouest du temple 1 pour compléter les données
recueillies au contact du mur occidental de celui-ci dès
1982 (fig. 3).
En 1984, trois sondages ont été menés à bien. Le
premier d’entre eux - limité à 4 m² - a permis d’achever
l’exploration de la zone 1 dans l’angle nord-ouest du
temple 1. Les deux autres sondages, de 25 m² chacun, ont
concerné le temple 2 de manière à englober ses angles
nord-ouest d’une part (zone 4, secteur 3) et sud-est d’autre
part (zone 4, secteur 2). Les stratigraphies intérieure et
extérieure de ce sanctuaire ont ainsi été mieux appréhendées et la datation de la phase de construction du complexe
cultuel gallo-romain a pu être précisée. Dans le secteur 2,
un lambeau de maçonnerie est apparu ; son orientation et
les modes de construction laissaient suggérer qu’il puisse
appartenir aux vestiges d’un troisième temple implanté au
sud des précédents. En complément de ces fouilles d’emprise limitée, des tranchées de reconnaissance ont été
entreprises dans des secteurs non encore explorés du site,
afin de localiser un possible mur de clôture délimitant la
zone cultuelle ainsi que d’autres structures éventuelles.
Cette démarche se révéla payante puisqu’elle permit
effectivement de mettre au jour, non seulement les vestiges
du mur d’enceinte entourant les sanctuaires, mais aussi
- au sud des temples - ceux de l’angle contreforté d’un
édifice postérieur à l’ensemble antique et enfin, à l’extrémité est des terrains accessibles à la fouille, un bâtiment
gallo-romain.
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Fig. 5 : Plan général schématique des vestiges
(DAO L. Vidal).
Mr = mur ; Cn = caniveau ; Bs = base
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Ces nouvelles découvertes nous ont logiquement amenés
à privilégier ces deux zones l’année suivante (fig. 3). Côté
sud (zone 4), la dernière campagne a confirmé l’existence
d’un troisième temple et montré que deux autres édifices
successifs - un baptistère paléochrétien et une construction
du bas Moyen Âge - avaient été implantés sur les vestiges
de ce sanctuaire primitif. Côté est (zone 3), à près de 40 m
de distance des temples, la fouille a notamment mis au
jour différents vestiges qui attestent la présence, contemporaine des sanctuaires, d’une agglomération (réseau de
caniveaux, vestiges d’habitat).
Pour compléter cette approche essentiellement centrée
sur l’ensemble cultuel et son environnement immédiat,
des campagnes de prospection systématique - coordonnées
par J.-P. Besombes-Vailhé puis par J.-L. Espérou - ont été
conduites de 1989 à 1994 afin de délimiter le plus précisément possible, en dépit de l’urbanisation récente, l’étendue
et les limites de l’agglomération antique (BesombesVailhé 1989 ; Espérou et al. 1990, 1991, 1992, 1993, 1994).
Enfin, lors d’une courte intervention de sauvetage en 2000,
L. Vidal a réalisé le nettoyage et le relevé des structures
archéologiques (caniveau, dolium et grand dé de calcaire
coquillier) ponctuellement mises au jour lors du rafraîchissement du talus bordant la rue Saint-Jean qui jouxte
les temples au sud (Vidal, Guerre 2000).
Roujan sur la liste de projets de publications jugés prioritaires. Sur cette incitation, le mérite est alors revenu à
L. Vidal d’avoir relancé le dossier et présenté en 1998 à la
CIRA Sud-Est une demande d’aide à la publication qui a
été acceptée et financée. Pour des raisons de disponibilité
et d’éloignement géographique des membres de l’équipe,
c’est finalement à l’orée de l’année 2006 qu’est achevé ce
manuscrit. Cette longue gestation aura en tous cas permis
d’associer ce travail au volume que consacre cette année
la Revue Archéologique de Narbonnaise, sous la coordination de M. Christol, J.-L. Fiches et J. Scheid, aux
« Sanctuaires et lieux de culte. Topographie religieuse et
faits de culte ».
La réouverture - une quinzaine d’années après l’achèvement des fouilles - d’un dossier de cette ampleur, qui a
vu se succéder plusieurs responsables scientifiques, ne va
pas sans un certain nombre d’aléas : conservation inégale
des archives de fouilles, déménagements successifs et
dispersion des mobiliers et des ossements. Toutefois, la
qualité des rapports de fouilles et l’abondance de la documentation graphique et photographique réunie au cours
des années d’exploration du site nous ont permis de réaliser
dans de bonnes conditions la préparation de la présente
publication.
2. DE L’OCCUPATION DU IER S. AV. N.È. AUX TEMPLES
DE LA PREMIÈRE MOITIÉ DU IER S. AP. J.-C.
1.3 Les aléas d’un projet de publication
1982-2006 : il aura fallu près d’un quart de siècle pour
aller de la découverte des premiers sanctuaires à la publication !
Fort heureusement, dans l’intervalle, l’intérêt majeur
des découvertes faites à Roujan a été rapidement - mais
sommairement - porté à la connaissance de la communauté
archéologique, par le biais de différents résumés parus
dans les Informations de Gallia déjà citées (Nickels 1985 ;
Nickels et al. 1988), dans la Chronique des fouilles médiévales en France d’Archéologie Médiévale (Colin,
Schwaller 1986a) et dans le catalogue d’exposition
Premiers temps chrétiens en Gaule méridionale, paru en
1986 à l’occasion de la tenue à Lyon du XIe Congrès international d’Archéologie chrétienne (Colin, Schwaller
1986b). Une autre notice, concernant plus spécifiquement
l’édifice à abside d’époque paléochrétienne, a ensuite été
publiée dans le tome I de l’atlas des Premiers monuments
chrétiens de la France (Colin, Schwaller 1995). Enfin, la
partie antique du site de Saint-Jean a fait récemment
l’objet d’une présentation monographique dans l’un des
deux volumes consacrés, sous la direction de J.-L. Fiches,
aux Agglomérations gallo-romaines en LanguedocRoussillon (Vidal et al. 2002).
Entre temps, en 1997, le Conseil national de la
recherche archéologique et le Service régional de
l’Archéologie de Languedoc-Roussillon ont fait figurer
2.1 Genèse d’une agglomération antique
2.1.1 Une occupation du Ier s. avant n. è. assez discrète
En dehors des quatre fosses datées du « Néolithique
récent final » (Cornejo 1982), l’occupation la plus ancienne
paraît remonter au plus tôt au début de la seconde moitié du
Ier s. av. n. è. (fig. 6). D’une façon générale, elle est attestée
par la présence de mobilier « résiduel » caractéristique
(fragments d’amphore italique, de céramique campanienne)
mis au jour dans des unités stratigraphiques liées à des
occupations plus récentes, notamment dans le secteur
cultuel (fig. 7).
Cependant, cette phase est marquée par quelques faits
archéologiques, principalement dans la zone 3 (fig. 6).
Ainsi, au nord-ouest et à proximité de cette dernière (fig. 6),
A. Cornejo a pu fouiller - sur 3,50 m de long - un fossé
(F1), dont le comblement constitué par un sédiment argileux
souvent « très humique » recelait « de nombreux vestiges
osseux et de la céramique. Parmi celle-ci, on peut citer un
grand nombre de céramique campanienne C, des urnes
indigènes peignées, des petits gobelets à paroi fine »
(Cornejo 1983, 8). Ce fossé possédait une largeur allant de
0,80 à 1,05 m et une profondeur oscillant entre 0,35 et
0,40 m. Compte tenu de l’échelle du plan adjoint au rapport
de fouille et de la faible longueur de fossé dégagée, il est
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Fig. 6 : Localisation des vestiges de l’occupation du Ier siècle av. n. è. (DAO L. Vidal).
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3024
3027
A-Tar Pa1
A-Ital Dr1c
3032
3030
Pré-Sig 10
Der C indet
Pré-Sig 230
Pré-Sig 200
3057
Pré-Sig 200
Der C36
Camp A2943
Pré-Sig 10
Pré-Sig 170
Camp A36
0
Fig. 7 : Planche présentant le mobilier céramique de la fin du Ier siècle av. n. è. et de l’époque augustéenne
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5 cm
(J. Guerre).
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difficile de savoir s’il s’agit d’un tronçon linéaire ou
légèrement courbe. Son orientation reste de toute façon
discordante par rapport à celles des murs des
bâtiments romains et médiévaux, même si elle est proche
de celle de l’édifice le plus tardif.
Toujours dans la zone 3, des sondages stratigraphiques
d’ampleur modeste mais qui ont atteint le terrain géologique ont livré dans les unités stratigraphiques les plus
anciennes de petits lots de mobiliers datables de la fin de
la république ou d’une large époque augustéenne (fig. 7).
Ils ont surtout permis de rattacher à cette phase ancienne
de l’occupation les murs 41 et 47 (fig. 5). Ces derniers
sont perpendiculaires entre eux et construits en tranchéecoffrage, sans usage de mortier de chaux. Le mur 41,
d’une largeur moyenne de 0,60 m, est conservé - au
mieux - sur une longueur de 7,50 m et, en fondation, sur
trois assises. Les deux assises inférieures sont bâties avec
des gros galets, de 0,35 m de dimension maximale.
L’assise supérieure est formée d’éléments de plus petit
module (autour de 0,1 m), noyés dans un cailloutis
argileux brun sombre limité par endroit par des fragments
de tuile disposés de chant. Il s’agit soit d’une assise de
réglage destinée à recevoir une structure en matériaux
périssables, soit de la partie inférieure d’une élévation en
terre. Quant au mur 47, seule une assise de gros blocs est
conservée sur une longueur de 1,50 m.
Un petit sondage réalisé à la jonction des murs 41 et
47 et du fond résiduel du caniveau 84 a livré - sur 1 m² un lambeau de sol lié aux murs qui précèdent. Il est formé
par un discret cailloutis tassé dans lequel le mobilier se
trouve à plat (Colin et al. 1985, 15). Cette modeste surface
de fouille a livré quinze fragments de poterie comprenant
comme éléments datants deux tessons de campanienne A
et deux autres de campanienne B. Compte tenu de la
faiblesse numérique du lot, on ne peut proposer comme
intervalle de datation qu’une large deuxième moitié du
Ier s. av. n. è.
Plus au Nord, le sondage mené entre le mur 41 et la
fosse de mise en place du dé 100 a permis de fouiller, à
l’ouest du mur, un remblai hétérogène (U.s. 3057) d’une
vingtaine de centimètres d’épaisseur qui est limité par le
dit mur . Ce niveau recèle un mobilier dont les bornes de
datation les plus larges se situent entre le milieu du Ier s.
av. et le milieu du Ier s. ap. J.-C. (fig. 7).
À l’Est, autour du mur 40, plus récent, une unité stratigraphique reposant sur le substrat livre un mobilier qui
fournit un intervalle de datation allant de la fin du Ier s. av.
jusqu’au milieu du Ier s. ap n. è. En outre, et même s’il
s’agit d’un objet erratique, on notera que la tranchée de
fondation de ce mur a livré une monnaie en bronze, comportant à l’avers la légende VOLCAE et au revers la légende
AREC (type Lt 2677), datable du milieu du Ier s. avant n. è.
(La Tour, Fischer 1802-1992, pl. VI).
Pour finir, c’est en dehors de la zone 3, dans le temple 1
et autour de l’abside, que se trouvent les derniers vestiges
recensés de l’occupation la plus ancienne. Il s’agit de
petites excavations, approximativement parallèles et assez
régulièrement espacées, mises au jour dès les sondages de
la première campagne de fouille autour de l’abside (Colin
et al. 1982, 3) et dans le temple 1 en 1983 (fig. 8). Elles
avaient la forme de « petites tranchées, aménagées dans le
terrain géologique jaune, de nature argileuse et crayeuse,
et creusées à travers une couche de 0,15 m d’épaisseur de
colluvion caillouteuse » (Colin et al. 1982). Les fondations du temple 1 et de l’abside coupent ces fosses. Leur
remplissage brunâtre contenait de rares fragments de
céramique campanienne.
Fig. 8 : Vue des traces agraires dans le pronaos du temple 1
(cl. M. Olive).
Leur comparaison avec d’autres découvertes plus
récentes permet désormais de les interpréter comme des
fosses de plantation viticole de type alvei (Monteil et al.
1999 ; Vidal 2000). Dans le pronaos, la disparition de leur
relevé ne permet pas d’en donner les mesures véritables
mais on peut constater, d’après la photographie, qu’il
s’agit d’une implantation en rectangle. Les fosses ont une
longueur d’environ 1 m. Leurs rangs sont espacés de plus
d’une longueur de fosse (environ 1,3 m), alors que sur le
rang, elles semblent seulement à une longueur de distance.
Au centre de la photographie, on remarque une fosse de
provignage réunissant la fosse centrale et celle située la
plus à l’ouest. Témoigne-t-elle d’un simple remplacement
ponctuel d’un cep quelques années après la plantation ?
Ou bien est-elle la marque d’un vieillissement de la pièce
de vigne ? En l’absence d’une vue plus vaste, il n’est pas
possible de connaître l’importance des provignages et
donc de la longévité de la plantation.
À partir des quelques observations réalisées, dont la
totale homogénéité chronologique n’est d’ailleurs pas
parfaitement assurée, il reste impossible de connaître
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l’étendue de l’occupation qui précède la mise en place des
sanctuaires. En outre, les prospections n’ont pas permis
de mettre en évidence cette dernière dans les parcelles
encore accessibles. Elle peut y être masquée comme elle
l’est dans le secteur des temples. L’absence de donnée ne
permet donc pas de comparer avec la taille des sites
d’époque républicaine reconnus en prospection pédestre,
dont la moitié possède une emprise inférieure ou égale à
0,1 ha et les deux tiers entre 0,1 et 0,2 ha (Vidal et al.
1995, 129).
Quant à la fonction de cette occupation, les vestiges
sont trop lacunaires pour avoir des certitudes, mais il a
déjà été remarqué que le site se distinguait des autres sites
républicains du nord du Biterrois, presque exclusivement
connus quant à eux - à l’exception du site de Montfau à
Magalas - par prospection de surface (Vidal et al. 1995,
130). En effet, alors qu’ici les fragments d’amphores
représentent 14,5 % du mobilier, pour les autres, les
amphores constituent pratiquement le seul mobilier. Sans
écarter totalement la possibilité d’une meilleure conservation
des fragments d’amphore italique, la question était posée
d’une différence due à la chronologie - masquée par l’imprécision de la datation des séries des autres sites -, ou
bien à la fonction et au statut. L’aspect chronologique
n’est certes pas à négliger dans la mesure où, dans les lots
de mobilier de Saint-Jean à Roujan, les dérivés de campanienne et les pré-sigillées ont la part belle. Qui plus est, il
est tentant de mettre le fléchissement des importations
d’amphores en rapport avec le développement d’un
vignoble d’importance locale. Du point de vue de la fonction
et du statut, les quelques faits archéologiques observés ne
sont pas déterminants. Seule la présence de murs distingue
Saint-Jean, car celle d’un fossé est très courante : il constitue
souvent tout ce qui reste de l’occupation (Vidal 2000).
Cependant, on voit mal l’installation des sanctuaires respecter un petit établissement agricole et reprendre l’orientation
de ses murs. En revanche, il semble plus plausible d’inscrire
l’implantation des temples dans le cadre du développement d’une agglomération préexistante. L’accroissement
reste en périphérie du noyau ancien et n’oblitère qu’une
petite partie du premier cercle des cultures.
2.1.2 Densification et complexité du bâti :
une agglomération affirmée
Les découvertes en cours de travaux, les fouilles de
sauvetage, les tranchées de repérage et les prospections
pédestres, montrent que les sanctuaires s’insèrent dans
une occupation plus vaste. Des vestiges de cette dernière,
plus ou moins endommagés par les travaux agricoles et
l’urbanisation, ont pu être observés. Parfois ils ont été
fouillés de façon partielle.
Au Sud-Ouest, près des sanctuaires, dans un secteur
très perturbé par les travaux récents, à proximité de la
grande fosse néolithique fouillée en 1982, la petite zone 6
a livré, sur 9 m², quelques éléments de construction. Ainsi
vers l’Est était conservé un lambeau de sol de tuileau lié à
l’argile (U.s. 6013, z = 97,39 NGF), posé sur un hérisson
de pierre. Il était à la même altitude qu’un vestige de sol
de cailloutis (U.s. 6009) se développant à l’Ouest. Sur ce
dernier subsistait la première assise d’un mur (Mur 5),
bâti sans mortier avec des moellons. Au sud du sol de
cailloutis, et sans qu’un lien avec lui ait pu être mis en
évidence par la fouille, le décapage a mis au jour une unité
stratigraphique constituée par de nombreux et gros fragments de tegula, qui présentaient tous un même pendage
vers le Sud. Le décapage superficiel de cette zone a livré
de nombreux fragments d’enduit peint sur un mortier de
couleur rouge. Par la suite, la fouille s’étant recentrée sur la
zone des temples, l’étude de ces aménagements n’a pas été
poursuivie. C’est à peu près à cet endroit, selon des informations recueillies en 2000, que les travaux de construction
ont permis à un adhérent du foyer rural de Roujan de
recueillir d’assez nombreux fragments d’enduit peint.
À l’Est, en zone 3, les éléments structurants mis au jour
sont des murs s’articulant avec des caniveaux (fig. 9). Il
s’agit du mur 32, de direction est-ouest, conservé sur
12,85 m de long et détruit à l’Est ; du mur 40, qui s’appuie
sur le parement sud du précédent et n’est conservé que sur
2,10 m de long car au Sud il est coupé par l’ancien tracé
du chemin ; du mur 39 enfin, de direction Nord-Sud,
conservé sur 10,50 m de long et comportant peut-être une
interruption fonctionnelle au Sud alors qu’il est détruit au
Nord. Ce mur laisse le passage à un caniveau.
Au sud de la zone 3 et de l’autre du chemin actuel de
Saint-Jean, le nettoyage rapide du talus incliné nouvellement
rafraîchi par l’enlèvement d’une bande de terre de plus de
2 m de large (Vidal, Guerre 2000) a permis d’observer,
presque à l’extrémité est du caniveau 1004, l’arrachement
d’un probable mur perpendiculaire à l’axe du talus,
constitué d’au moins six assises qui mêlent blocs de calcaire et gros fragments de tegulae. D’autres observations
donnent à penser qu’il existe un autre mur dissimulé par la
butte qui borde la voie actuelle. En effet, à côté et à l’est
du troisième dé de calcaire, sur 5 m de long, se trouvent
des blocs de calcaire qui pourraient appartenir à un
mur lié à la terre dont la direction paraît proche de celle
du talus.
Les trois murs principaux sont construits en appareil
de petits moellons de calcaire équarris, avec fourrure de
cailloux liés au mortier de chaux pour le premier et blocage
de pierres liées à la terre pour le second et le troisième. La
construction de ces deux derniers met en œuvre en arase
discontinue des fragments de tegulae, mais seuls ceux du
mur 40 sont liés au mortier de chaux. En outre, le parement ouest de ce dernier est recouvert sur une soixantaine
de centimètres de long d’un enduit de mortier de chaux.
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Fig. 9 : Plan de détail de la zone 3
Ces différences dans le mode de construction ne
paraissent pas dues à une disparité de conservation. Elles
indiquent probablement qu’ils ne sont pas strictement
contemporains même s’ils ont été utilisés ensemble à un
moment donné. Les sondages réalisés n’ont pas permis
d’expliciter la plupart des rapports chronologiques.
Cependant, le sondage 4, réalisé au seul endroit où il était
visible que des niveaux de fonctionnement étaient conservés, à la jonction du mur 32 et du mur 40, a apporté
(DAO L. Vidal).
quelques données. Ainsi s’il était manifeste que le mur 40
était accolé au mur 32, la fouille a montré que plusieurs
niveaux stratifiés viennent buter contre leurs parements.
Parmi ces strates, il convient de noter que le démontage
du sol empierré 3019 a livré un mobilier datable au plus
tôt des années 30 de n. è. (fig. 15). Quant à l’articulation
entre les murs 39 et 32, elle se fait par l’intermédiaire d’un
« aménagement de seuil » endommagé par les labours,
mais dont il reste le lit de mortier (Colin et al. 1985, 17).
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En dehors des murs, trois autres éléments nous renseignent sur l’architecture des constructions : il s’agit des dés
de calcaire coquillier. Deux d’entre eux (BS 99 et 100),
constituant probablement le début d’un alignement, ont
été découverts en limite nord de la zone 3. Le seul qui ait
fait l’objet d’une fouille était installé sur une chape
débordante de mortier de chaux. De forme rectangulaire,
il mesurait 0,55 m de large sur 0,65 m de long pour une
épaisseur 0,55 m. Les dimensions en plan du deuxième dé
sont proches du carré avec une longueur de 0,64 m sur
0,60 m de large pour au moins 0,30 m d’épaisseur. Leurs
faces sud sont parfaitement alignées et leurs centres sont
distants de 3,64 m - soit 12 pieds -, alors que le fait 99 est
à 2,44 m - soit environ 8 pieds - du mur 39. En outre, l’axe
des deux dès ne forme pas une perpendiculaire avec ce
dernier mur : il dessine un angle de 97 °. La fosse d’installation quadrangulaire du fait 99 a été fouillée, mais elle
n’a livré qu’un rare mobilier datable au plus tôt des IerIIe s. Le troisième dé est apparu au sud, au bas du talus
créé en 2000 (fig. 10). Il s’agit d’un parallélépipède de
0,57 sur 0,59 m pour une hauteur dégagée minimale de
0,35 m. Il participe d’un autre alignement qui se trouvait
au sud du chemin de Saint-Jean. En effet, A. Cornejo
signale en 1982 que le conducteur de la pelle mécanique
et des ouvriers qui créent le nouveau tracé du chemin lui
ont affirmé que l’élargissement du côté sud avait entraîné
« l’enlèvement de 4 ou 5 soubassements de colonne, alignés
selon un axe est-ouest » (Cornejo 1983, 2).
Dans cette partie du site, les autres éléments de
construction qui témoignent d’une gestion et des étapes
d’une évolution sont constitués par les caniveaux. Dans la
zone 3, un canal a subi un changement radical de tracé
dans sa partie amont. Bien que la mauvaise conservation
des vestiges permette seulement un raccordement hypothétique, il est possible de reconstituer ce bouleversement.
Dans un premier état, un caniveau est implanté suivant
une direction parallèle au mur 32 en recoupant le mur 39
(fait 88/89, fig. 9 et 11). Il a été dégagé en tout sur une
longueur de 11,10 m. Le canal mesure 0,20 m de large et
les parois sont constituées par des assises de blocs grossièrement équarris et de tegulæ liés par un épais mortier
de chaux. Ces murs peuvent mesurer jusqu’à 0,30 m de
large. Le fond est formé de tegulæ mises bout à bout.
Aucun élément de couverture n’a été observé.
L’écoulement se fait vers l’Est avec une pente qui est
très irrégulière : ainsi depuis l’Ouest, des tronçons sont
respectivement à 8,7 %, 6,4 %, et même jusqu’à 12 %
juste après le mur 39 pour revenir enfin à 4 %. Vers
l’Ouest, le caniveau est détruit, mais compte tenu du pendage du fond, il est probable qu’il se rattachait au petit
vestige de caniveau 84, formé de gros fragments de tegula
mis à plat sur une longueur de 1,10 m et une largeur de
0,40 m, qui recouvrait l’arase du mur 41. Ce fond de canal
Fig. 10 : Dé et mur mis au jour en 2000
Fig. 11 : Vue du caniveau
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(cl. L. Vidal).
(cl. M. Schwaller).
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n’est pas dans le prolongement du tronçon est-ouest, mais
il est cohérent avec l’orientation donnée au nouveau tracé
après l’abandon du caniveau en amont du passage à travers
le mur 39. Il peut donc être un reste de l’ancien parcours
qui aurait subi un déplacement latéral.
Le nouveau caniveau, conservé sur une longueur de
8 m, mesure 0,30 m de large et ses parois ont une largeur
moyenne de 0,35 m. Elles sont constituées de blocs parementés et de fragments de tuile. L’ensemble est assemblé
au mortier de chaux. Le fond est bâti avec des dalles de
schistes liées de façon généreuse par un mortier qui
remonte fréquemment le long des parois. À l’extrémité
nord, le fond du canal très endommagé est formé par des
grands fragments de tegula. À partir du nord, la pente
du fond est très faible (0,5 %), puis elle devient plus
importante (2 %) en se rapprochant de l’articulation avec
l’ancien tronçon, juste en amont du passage élargi dans le
mur. Ce dernier est renforcé par l’installation, de part et
d’autre du conduit, de dalles de schiste mises de chant.
Après ce passage, le conduit est plus large (0,40 m) puis il
se rétrécit graduellement pour se raccorder avec le canal
plus ancien.
Plus au Sud, dans le talus rafraîchi, un second caniveau
a fait l’objet d’une fouille partielle et d’un nettoyage rapide
en 2000. Le caniveau (2000, U.s. 1004) étant d’une orientation très proche de l’axe du talus, sa destruction partielle
et graduelle constitue un véritable écorché stratigraphique
qui montre que, là aussi, il existe plusieurs étapes dans sa
mise en place. D’après le lambeau conservé, le canal est
construit dans un premier temps en disposant de grandes
dalles assez irrégulières contre les parois d’un fossé,
d’une largeur de 0,33 m, entamant largement le terrain
géologique. La seule dalle encore en place montre qu’elle
devait constituer le type de couverture, peut-être s’alliant
localement avec des tuiles comme le suggère la présence
de gros fragments de ces dernières. Sans multiplier les
comparaisons sur ce genre d’aménagement, il convient de
remarquer qu’il se rencontre à Nîmes, à la ZAC des
Halles, dans les aménagements latéraux de la via Domitia
réalisés à une date haute (Monteil dir. 1993). Le colmatage
du canal semble graduel et naturel. C’est au-dessus, et
légèrement décalé vers le Nord, qu’un nouveau caniveau
est installé par la suite. Le canal, conservé sur 3,4 m de
long, mesure 0,21 m de large. Le fond est constitué par
des tegulæ qui se chevauchent légèrement dans la partie
ouest, accentuant une pente qui reste très faible. Les tuiles
du fond reposent sur un radier de galets de quartz, de fragments de tuile et de blocs de calcaire de 0,20 m de côté.
Les parois, seules à être liées au mortier de chaux, sont
construites en assises de fragments de tegula et mesurent
en moyenne 0,20 m de large. La hauteur de conservation
des parois augmente très légèrement en allant vers l’Est
mais elle n’est en moyenne que de 0,15 m, même sous le
seul reliquat de couverture en place. En effet, c’est au
centre du tronçon dégagé que quelques fines dalles de
schiste constituent les restes d’un dispositif de couverture
très lacunaire. Le sédiment piégé sur les dalles est graveleux
et ressemble à un vestige d’une surface de circulation
(2000, U.s. 1013).
La fouille des remplissages des caniveaux a permis
d’obtenir quelques éléments de chronologie absolue
même si le nombre de tessons recueilli est parfois très
faible. Ainsi, dans le tronçon abandonné le premier (fait
89), le mobilier (U.s. 3011) indique que l’abandon peut
être placé vers la fin du troisième quart du Ier s. de n. è.
Dans l’autre partie, la fin d’utilisation du canal est marquée
par l’enlèvement de la couverture et son remplissage,
certainement volontaire, à l’aide d’un remblai compact
(U.s. 3008 et 3010). Ce dernier est de nature hétérogène et
renferme notamment des tessons de céramique, de fragments de tuile et de cailloutis. Le mobilier recelé est assez
disparate, mais il permet de dater ce comblement des
alentours du milieu du IIe s. ap. J.-C. Le mobilier trouvé
sur le lambeau de couverture (2000, U.s. 1013), ou encore
sur le canal là où la couverture n’est pas conservée (2000,
U.s. 1011), date d’une période allant du milieu du Ier au
milieu du IIe s
Pour mémoire et compte tenu de l’absence d’une datation
bien assurée, on peut ajouter aux précédents éléments
ceux qui ont été découverts au nord-ouest de la zone 3,
lors des fouilles réalisées en 1982 à la suite des terrassements liés à la création de la rue (fig. 5). Alberto Cornejo
a alors dégagé et relevé la plus grande partie de deux
bâtiments ou de deux pièces. Ainsi, l’ensemble H1 est
délimité par quatre murs perpendiculaires et adjacents
conservés en fondation sur plusieurs assises. La largeur
de ces murs varie entre 0,55 et 0,64 m et ils sont bâtis en
« hérisson de pierres alluvionnaires, englobant par
endroits des tegulæ » (Cornejo 1983, 7). Dans la partie
supérieure des assises dégagées, quelques tessons ont été
recueillis, parmi lesquels on compte de la céramique sigillée.
Au nord-est de H1, dans un secteur très perturbé par les
travaux, un mur et un peu plus au Sud deux murs adjacents
formant un angle ont également été dégagés (H2). Ils sont
constitués « par des pierres granitiques ou calcaires équarries,
disposées à plat, par des pierres alluvionnaires ainsi que
par des fragments de tegulæ et des panses d’amphores »
(Cornejo 1983). Alberto Cornejo note à ce propos que,
dans l’angle mis au jour, « trois pierres posées de chant
dégagent un vide constituant probablement un trou de
poteau » (Cornejo 1983, 8). Quelques tessons de céramique
campanienne ont été découverts au cours du dégagement,
mais l’auteur de la fouille ne les met pas clairement en
rapport avec les constructions.
En dehors des éléments d’organisation de l’espace et
de gestion des écoulements, les fouilles ont révélé en zone 3
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quelques fosses de fonction indéterminée (l’une d’entre
elles - U.s. 3034, datable du milieu du IIe s. - est postérieure au caniveau 88/89), mais surtout un four et un
dolium enterré (fig. 13).
Le four se trouve dans la partie est de la zone 3 au nord
du mur 32 (fig. 9), dont la tranchée de fondation le coupe,
et au sud du caniveau 88. En surface il se présente comme
une auréole d’argile rubéfiée par ignition (U.s. 3047), de
0,04 m d’épaisseur, mesurant 0,92 m de long pour une
largeur de 0,81 m (fig. 12). Le four possède à sa base des
parois verticales et son fond entame légèrement le substrat.
Ce dernier, assez régulier, est recouvert par un fin lit
d’argile rubéfiée. Dans le remplissage argileux, et particulièrement en partie inférieure où il est très charbonneux,
se trouve un effondrement de morceaux de paroi parmi
lesquels on note la présence de quelques éléments d’une
embouchure de section arrondie. Ces fragments permettent
de savoir que le four avait au moins une hauteur de
0,35 m. Le remplissage supérieur a livré des os de faune
brûlés et quelques rares fragments de tuile. Le rare mobilier
trouvé dans le remplissage (U.s. 3053) date son abandon
au plus tôt du début du dernier quart du Ier s. de n. è. Ce
four, de type tanour du Moyen-Orient, est une variante
fixe des fours domestiques mobiles augustéens connue en
Languedoc oriental. La paroi, une fois chauffée, sert à
cuire des galettes. Une batterie de fours de ce type a été
notamment mise au jour dans la phase ancienne de la villa
de La Ramière à Roquemaure dans le Gard (Barberan et
al. 2002).
Le dolium (2000, U.s. 1009, fig. 13) a été mis au jour
dans le talus, au sud du caniveau 1004. Conservé sur
0,60 m de hauteur, il est en pâte sableuse ocre jaune très
friable. Sa paroi mesure en moyenne 0,04 m d’épaisseur.
Compte tenu du profil de sa section, il s’agit d’un petit
module dont la capacité devait être autour de 345 l.
L’intérieur est rempli par un sédiment argilo-sableux brun
recelant de nombreux charbons, des tessons notamment
de tuiles, de dolium et d’amphore (2000, U.s. 1009). Le
fond de la fosse de mise en place est comblé par un sédiment sableux jaunâtre (2000, U.s. 1010). La destruction
produite par le terrassement n’a pas permis d’observer les
liens stratigraphiques mais, compte tenu du volume de ce
vaisseau (diamètre maximal de 1,06 m), il doit être plus
récent que la phase ancienne du caniveau. Le mobilier
archéologique qui le comble, peu abondant, est au plus tôt
du dernier quart du Ier s. ap. J.-C. (fig. 16). Toutefois, son
usage peut être contemporain du deuxième état du caniveau.
La nature de la pâte qui constitue le dolium permet de
penser qu’il devait servir à stocker des graines car il ne
pouvait contenir des liquides sans de graves inconvénients.
Au total, l’emprise des constructions observées aux
cours des fouilles s’étend sur environ 6 600 m². Elle ne
constitue qu’une partie d’une occupation plus vaste. Cette
Fig. 12 : Vue du four
(cl. M. Schwaller).
Fig. 13 : Vue du dolium
(cl. L. Vidal).
dernière a été cernée du côté est par des prospections
pédestres (Besombes-Vailhé et al. 1989 ; Espérou et al.
1990, 1991, 1992, 1993, 1994). Celles-ci ont été menées
dans les parcelles ayant gardé une vocation agricole qui se
développent de ce côté. Deux toponymes cadastraux sont
particulièrement concernés de part et d’autre du ruisseau
de Ligno : Médéyo et Valat de Ligno. Autour du ruisseau,
sur environ 3 ha, les artefacts sont très nombreux et
notamment sur Médéyo. Vers le Sud, une limite forte est
constituée par la voie communale n° 1, dont on peut se
demander si elle ne reprend pas le tracé d’une voie
antique. En effet, si au sud de cette dernière il existe deux
concentrations remarquables de mobiliers archéologiques
antiques - aux superficies respectives d’environ 1125 m²
et 1400 m² -, les artefacts sont d’une façon générale
inexistants ou très dispersés. Au Nord, la limite de l’agglomération doit correspondre peu ou prou à la rue Jean
Moulin, dont la création aurait permis la découverte d’une
tombe ayant livré un gobelet décoré de céramique sigillée
sud-gauloise. Vers l’Ouest, rien ne permet de déterminer
la limite de l’agglomération qui s’étend donc au minimum
sur 7 ha, pendant le haut Empire du moins (fig. 17).
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Fig. 14 : Planche du mobilier haut Empire le plus significatif (J. Guerre).
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Fig. 15 : Planche du mobilier haut Empire le plus significatif (J. Guerre).
2.2 Le groupe des trois temples
2.2.1 Analyse architecturale
Le complexe architectural, conçu et réalisé de manière
très homogène et cohérente, est constitué de trois sanctuaires entourés sur les côtés sud, ouest et nord d’un mur
d’enceinte ou d’une galerie, l’accès aux sanctuaires par
l’Est restant ouvert (fig. 18). À deux très modestes
exceptions près, seuls les massifs de fondations de ces
différents éléments sont parvenus jusqu’à nous.
Les édifices sont orientés à 18 NL selon un axe EstOuest et sont approximativement alignés en façade.
D’autres constructions, mises au jour à une quarantaine
de mètres au sud-est de l’ensemble cultuel, présentent une
orientation identique laissant supposer que ces différents
éléments relèvent d’un plan d’urbanisme concerté.
Les trois temples, de plan rectangulaire, présentent une
structure identique composée d’un pronaos et d’une cella
(tabl. 1). De toute évidence, un rapport de proportion lie
intimement les sanctuaires, le bâtiment central - nommé
temple 2 - donnant très vraisemblablement le module à
partir duquel ont été déclinées les dimensions des deux
édifices qui le bordent sur ses flancs septentrional et méridional, à une même distance de 1,80 m. Compte tenu de
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Fig. 16 : Mobilier du remplissage du
dolium (J. Guerre).
Fig. 17 : Extension
de l’agglomération sur
fond cadastral
(I. Bermond, L. Schneider)
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ROUJAN-MEDILIANUM (?) DE L’ANTIQUITÉ AU MOYEN ÂGE…
révèlent en outre que le rapport de proportion mis en
évidence pour la taille des édifices vaut également pour la
puissance de leurs fondations, ce qui suggère des différences également proportionnelles dans les hauteurs des
élévations. On constate d’autre part que l’organisation
interne de chacun des trois édifices privilégie des dimensions presque parfaitement carrées pour les trois cellae,
alors que les trois vestibules se présentent sous la forme
de rectangles plus ou moins profonds. Dans leur
ensemble, ces vestiges témoignent donc de réalisations
parfaitement proportionnées qui résultent de l’utilisation
comme unité de mesure d’un pied romain d’une valeur
déduite de 29,8 cm. Cette valeur, déduite des dimensions
relevées sur le terrain, diffère donc d’un peu plus de 2 mm
de la valeur théorique de 29,57 cm, souvent arrondie à
29,6 cm. Ce type d’écart est tout à fait plausible, les variations révélées par les instruments de mesure antiques
retrouvés pouvant aller jusqu’à 4 mm (Chouquer, Favory
2001, 71-72).
Le bâtiment central (temple 2), qui est aussi le plus
grand, mesure 14,45 m de longueur hors œuvre (soit 48,5
pieds) sur 9,08 m de large (équivalant à 30,5 pieds). Sa
longueur est donc égale à un peu plus d’une fois et demi
sa largeur, formant ainsi un rectangle très équilibré. Les
fondations des murs sont larges de 0,90 m, ce qui confère
respectivement au pronaos et à la cella une superficie
intérieure approximative de 35 et 54 m². Le sanctuaire
septentrional mesure quant à lui 8,94 m de long (soit 30
pieds) sur 6,02 m de large (correspondant à un peu plus de
20 pieds) hors tout ; la surface utile du porche atteint donc
ici près de 10 m² et celle de l’intérieur du temple proprement
l’extrême rareté des assises conservées en élévation, nos
observations métriques reposent essentiellement sur l’analyse et le relevé des puissantes fondations maçonnées des
trois temples. Les substructions des sanctuaires central et
septentrional ont été intégralement reconnues lors de la
fouille ; en revanche, celles du temple méridional étaient
détruites sur un large tiers nord-ouest mais ont cependant
pu être restituées avec un bon degré de certitude. Le
tableau qui suit montre ainsi que le temple 1, côté nord,
est la parfaite réplique, réduite environ aux deux tiers, du
sanctuaire principal alors que, côté sud, les dimensions du
temple 3 sont approximativement égales à la moitié de
celles du temple 2. Les deux dernières lignes du tableau
Fig. 18 : Plan général de l’ensemble cultuel
Temple 1
(en cm )
Temple 1
(en pieds *)
Temple 2
(en cm )
Temple 2
(en pieds *)
(DAO L. Vidal).
Rapport
T.1/T.2
(en % )
Temple 3
Temple 3
Temple 3
Dime nsions
cons ervé es
(en cm )
Dime nsions
restituée s
(en cm )
(en pieds *)
Rapport
T.2/T.3
(en % )
Longeur
horsœuvre
894
30
1445
48,5
61,9 %
env. 700
env. 740
env. 25
51,2 %
Longeur
intérieure
totale
745
25
1288
43,5
58 %
env. 600
-
env. 20
46,7 %
Longeur
intérieure
pronaos
218
7,3
477
16
45,7 %
185
-
6,2
38,54 %
Longeur
intérieure
cella
454
15,23
730
24,5
62,1 %
340
-
11,4
46,57 %
Largeur
horsœuvre
602
20,2
908
30,5
65,4 %
470
470
15,77
52 %
Largeur
intérieure
totale
454
15,2
740
24,8
63,5 %
env. 337
-
11,3
45,8 %
Longeur
des
fondations
75
2,51
90
3
83,3 %
env. 65
-
2,2
72,2 %
Hauteur
des
fondations
100
3,3
148
5
68,5 %
-
-
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Tab. 1 : Tableau des dimensions des
trois temples en centimètres et en
pieds romains.
Toutes les mesures énoncées sont des
dimensions moyennes, prises et relevées
sur des massifs de fondations présentant
un certain nombre d’irrégularités. Cela
justifie les approximations qui en découlent
et n’altère en rien l’analyse globale des
proportions qui sont ainsi mises en
évidence (* : pour un pied romain de
29,8 cm.)
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dit un peu plus de 20 m² (fig. 19). Les parties conservées
du temple méridional (temple 3) concernent presque
l’intégralité des massifs de fondation de ses murs ouest,
sud, est ainsi que du mur de refend entre les deux pièces ;
en revanche, son mur nord n’est visible que sur une longueur d’environ 2 m. Cela permet de restituer au temple 3
des dimensions hors œuvre de 7,40 m sur 4,70 m, pour des
superficies respectives du pronaos et de la cella - celle-ci
étant parfaitement carrée - de 6,20 et de 11,40 m².
Fig. 19 : Vue générale d’est en ouest de T. 1 avec angle nordouest de T. 2 (cl. Chr. Olive).
L’ensemble cultuel formé par les trois sanctuaires est
bordé sur ses flancs nord, ouest et sud par un mur d’enceinte.
Les recherches par tranchées conduites sur le terrain, à
l’aide d’une pelle mécanique, pour repérer les limites de
l’espace sacré, ont été gênées par les ruptures topographiques dues aux aménagements modernes des chemins
ou des terrasses de culture et par le manque d’espace
disponible, certaines parcelles n’étant pas accessibles à
l’exploration archéologique. Ces investigations ont permis
de retrouver (fig. 5), à 1,70 m de profondeur sous le sol
actuel, le niveau d’arasement d’un mur d’orientation nordsud (mur 21) situé 4,50 m à l’ouest de la limite occidentale
du temple central, ainsi que ses retours en angle droit vers
l’Est côté nord et sud (mur 22). Le prolongement du mur
22 a été retrouvé une quinzaine de mètres plus loin vers
l’Est, à 4,80 m au sud du temple 3. Ces maçonneries, de
0,60 à 0,65 m de large, sont construites au mortier de
chaux liant des blocs de calcaire et des galets. Les matériaux
mis en œuvre ont une dimension maximale de 0,10 à 0,15 m.
La similitude des modes et des matériaux de construction
ainsi que la concordance de leurs orientations associent
sans conteste cet ensemble de murs aux trois temples.
Le fait qu’aucune structure parallèle à ces murs n’ait
alors été repérée nous a conduit à privilégier la restitution
d’une clôture des temples assurée par un mur simple.
Nous ne pouvons cependant pas exclure l’éventuelle
présence d’un péristyle ou d’une galerie, à l’instar de celle
qui entoure par exemple le temple principal du forum
d’Ampurias (Sanmartí-Grego 1987). La découverte en
diverses circonstances, sur le site de Saint-Jean à Roujan,
de plusieurs dés de calcaire coquillier plaiderait d’ailleurs
plutôt pour cette seconde hypothèse. Il faut en premier
lieu rappeler à cet égard le témoignage oral du conducteur
de la pelle mécanique chargé en 1982 des travaux d’élargissement du chemin bordant la parcelle AB 116, selon
lequel « quatre ou cinq soubassements de colonnes alignés
selon un axe est-ouest » avaient été mis au jour et évacués
(Cornejo 1983, 2). D’autre part, la fouille en 1985 de la
zone 3, à l’est du site, a livré deux bases quadrangulaires
de calcaire coquillier parfaitement alignées côté sud,
mesurant 0,60 m sur 0,55 m, fondées sur une chape de
mortier débordant et orientées également selon un axe
Est-Ouest (Colin et al. 1985, 15-16). Enfin, en 2000, un
dé de calcaire de même type est apparu lors du rafraîchissement du talus sud de la rue Saint-Jean (Vidal 2000, 3). Ces
différents soubassements de colonnes attestent très certainement l’existence, à environ 35 m à l’est des temples, d’une
probable galerie ou d’un portique ; l’espace intermédiaire
paraît vierge de toute construction, dessinant sur une emprise
de plus de 1 200 m² une sorte d’esplanade ou de place destinée à séparer les sanctuaires de la zone d’habitat.
Les fondations des trois édifices ont été bâties au
moyen de « tranchées-coffrages » ne laissant aucune
empreinte oblique de creusement dans les sédiments
recoupés. Elles reposent sur le substratum argileux aménagé
en plan horizontal. Ces fondations sont très puissantes :
dans le cas par exemple du temple 2, elles atteignent
0,90 m de large et s’étendent, assise de réglage comprise,
sur 1,46 m de profondeur soit près de 5 pieds. Elles sont
composées de galets provenant sans doute de la couche
alluvionnaire qui recouvre le substrat dans certaines parties
du site, de fragments de blocs de grès, de quelques éléments de blocs de calcaire coquillier et d’un abondant
mortier de teinte gris-rosée, très dur et très fin (fig. 20).
Dans le cas particulier du mur ouest du temple central,
notons que la fondation est interrompue par un lit de mortier,
ce qui témoigne vraisemblablement d’une étape dans cette
construction en tranchée-coffrage. Les fondations des
murs de clôture, larges d’environ 0,60 m, sont en tous
points comparables.
Le bâtiment central (temple 2), et dans une certaine
mesure le temple 1, présentent en façade un radier maçonné
que l’on peut interpréter comme des fondations d’escaliers.
S’agissant du temple 2, le radier maçonné s’étend sur
toute la largeur du mur oriental du sanctuaire et forme une
avancée d’environ 2,50 m. Il est constitué par une chape
de mortier coulée sur un hérisson de pierres alluvionnaires,
lui-même implanté sur un lit de petits graviers mélangés à
des sédiments sableux légèrement argileux de coloration
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jaunâtre. Entre le temple 1 et son extension orientale, un
radier d’escalier maçonné a également été observé :
recouvert lui aussi d’une chape de mortier, le hérisson
était installé sur un lit de gâchis de mortier et de graviers
disposé dans une dépression creusée dans les niveaux
préromains (fig. 21). En revanche, les aménagements
successifs réalisés à l’est du temple 3 postérieurement à sa
phase d’occupation antique n’ont pas permis de mettre en
évidence d’agencement du même type.
Outre les massifs de fondations, de rares vestiges
permettent d’observer les premières assises appareillées
des temples 1 et 2. Ils sont limités à deux secteurs très
localisés : dans l’angle nord-ouest du temple 1 d’une part,
où deux assises régulières de moellons montées en petit
appareil sont conservées sur un peu plus de 2 m de long
côté nord, 1,50 m côté ouest et 0,25 m de hauteur à une
altitude NGF située entre 97,22 et 97,47 m (fig. 22) ; dans
l’angle sud-ouest du temple 2 d’autre part, avec le mur
ouest dont l’élévation est conservée également sur deux
assises et le mur sud, dont seule la première assise est
présente. Les blocs simplement épannelés mis en œuvre
pour ces élévations sont tous en calcaire coquillier à grain
demi-fin. Les dimensions approximatives des blocs vont
de 0,20 à 0,47 m de long pour une largeur maximale de
0,30 m et une hauteur de 0,10 à 0,12 m. Ils reposent sur
une assise de réglage elle-même appareillée mais légèrement
noyée dans le mortier.
Le mode d’aménagement intérieur du temple 2 a été
observé en détail dans le cadre d’un sondage réalisé dans
son angle sud-ouest (fig. 3). Il est ainsi apparu que, dans
un premier temps, le substratum avait été nivelé, préalablement à la mise en place d’un remblai composé de
graviers et d’un cailloutis mêlés à une terre compacte de
couleur noire et à quelques fragments de mobilier céramique
datant (U.s. 4112). Au contact des parements internes des
deux murs sud et ouest, des coulures de mortier de chaux
témoignent d’un probable niveau de travail marquant une
étape dans la construction du podium sur lequel s’élevait
la cella.
Fig. 20 : Vue en coupe des fondations de T. 1
(cl. Chr. Olive).
Fig. 21 : Vestiges de l’escalier permettant d’accéder au T. 1
(cl. Chr. Olive).
2.2.2 Éléments de datation
Le fort degré d’arasement du site est responsable de la
destruction des niveaux d’occupation des sanctuaires et
donc de la disparition de la plupart des indices chronologiques attribuables aux premières phases de fonctionnement
des édifices. La réalisation en tranchées pleines des fondations des temples et l’absence de tranchées de fondation
obliques qui en découle ne permettent pas davantage de
bien documenter la construction de cet ensemble. Son
homogénéité stylistique et le caractère similaire des
matériaux utilisés comme leur mise en œuvre plaident
toutefois pour la restitution d’une phase unique de
conception et de réalisation.
Fig. 22 : Vue du T. 1 depuis l’Ouest, avec reliquat de l’appareil
assisé de l’angle nord-ouest (cl. Chr. Olive).
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Un premier terminus post quem est fourni, rappelonsle, par le fait que les tranchées de fondation du temple 1
coupent les fosses de plantation datables du début de la
seconde moitié du Ier s. av. n. è. Par ailleurs, un indice ténu
de datation de la construction du temple central a été
découvert dans le remblai du podium, sous la forme de
très rares fragments de céramique sigillée arétine et sudgauloise. Leur présence et surtout leur association au sein
d’une même unité stratigraphique (U.s. 4112) permettent
de placer au plus tôt la construction du temple 2 dans la
première moitié du Ier s. ap. J.-C. Des fragments de sigillée
sud-gauloise précoce, découverts dans les niveaux liés à la
construction du temple 3, confirment cette datation. Enfin,
on note que c’est au cours de ce même demi-siècle qu’un
réseau de canalisations est mis en place pour drainer une
vaste aire ouverte située à une quarantaine de mètres à
l’est des sanctuaires, comme si l’ensemble de cette zone
avait bénéficié d’un processus homogène et global d’aménagement. Force est de constater l’indigence des données
en notre possession pour étayer cette tentative de datation
de la phase de construction de l’ensemble cultuel, que l’on
ne peut donc qu’approximativement et au plus tôt situer
dans la première moitié du Ier s. de n. è.
En l’absence de tout niveau d’occupation conservé, les
données fiables concernant la durée d’utilisation du
complexe cultuel font également figure d’exception. Un
premier élément d’analyse concerne le réaménagement
dont fait l’objet le mur nord du temple 3, sous la forme
d’un enduit rouge de 2 à 3 cm d’épaisseur qui vient recouvrir
sa face externe après que la base du mur ait été déchaussée
(fig. 23). Cette réutilisation peut être mise en liaison avec
un niveau d’occupation datable - de façon toute relative
grâce à la présence d’un unique fragment de céramique
sigillée claire B - au plus tôt du IIIe s. (U.s. 4143), niveau
qui s’étend vers le nord au-delà des limites du sondage en
direction du temple central. Il semble en outre, mais la
surface fouillée a été ici très restreinte, que quelque chose
de semblable ait été repéré au sud du temple 3, entre le
mur 46 et le mur tardif 31 : même enduit rouge à l’extérieur du temple, niveau d’enduits fins très fragmentés de
couleur coquille d’œuf disposés grossièrement à plat
comme c’était le cas au contact nord du mur 16, niveau
d’occupation très fin recouvrant un remblai d’aménagement du substrat d’argile et de cailloutis. Une couche
grise (U.s. 4142, z = 97,19 NGF) contenant de nombreux
matériaux de destruction tels que des fragments de mortier, de tuiles et d’enduits de plafond beiges à bordure
verte, est en outre postérieure au niveau d’occupation
4143. Cette séquence marque donc vraisemblablement
une nouvelle étape architecturale, sous la forme de l’aménagement sans doute au IIIe ou IVe s. - dans l’espace qui
séparait à l’origine les temples 2 et 3 préalablement
décaissé - d’une pièce couverte à demi enterrée, venue
Fig. 23 : Vue de l’enduit recouvrant l’extérieur du mur nord
de T. 3 (cl. M. Schwaller).
Fig. 24 : Vue de l’enduit recouvrant l’extérieur du mur nord
de T. 3 (cl. M. Schwaller).
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compléter le dispositif antérieur. D’autre part, un sondage
réalisé au sud du temple 3 entre le mur méridional de ce
dernier (M. 46) et le mur tardif 31, a révélé -sur une surface
très exiguë compte tenu de l’enchevêtrement de nombreuses
structures- un dispositif apparemment très comparable
(fig. 24 et 44). Un enduit rouge de même type que le précédent a ainsi été observé, de même qu’un niveau d’effondrement (U.s. 4176) composé de tuiles, de mortier et de
nombreux petits fragments d’enduits de couleur coquille
d’œuf disposés grossièrement à plat - comme c’était déjà
le cas sur le flanc nord du mur 16. Ce niveau recouvrait un
sol argileux (U.s. 4190) contenant des charbons de bois,
des nodules de mortier et un peu de sable et reposant sur
un remblai constitué d’argile et de cailloutis. En dépit de
leur caractère ponctuel, il ressort de ces observations que
deux petites constructions, aux murs et plafonds recouverts d’enduits intérieurs, ont pris place au contact des
temples central et méridional, dans une phase qu’il
convient sans doute de situer aux IIIe-IVe s. Ces modestes
édicules pourraient témoigner du maintien à Roujan, jusqu’au
Bas Empire, de l’activité cultuelle des lieux, à l’instar des
petits sanctuaires venus progressivement occuper l’espace
séparant le temple du portique qui le borde sur le site du
forum d’Ampurias (Sanmartí-Grego 1987, 59).
Divers éléments permettent en outre de rendre compte
de la phase de destruction du temple central (T. 2). Du
point de vue de l’analyse des sédiments, celle-ci se matérialise
à l’intérieur du bâtiment par une couche argileuse homogène contenant du gravier (U.s. 4069), alors qu’elle est
caractérisée à l’extérieur de l’édifice par un niveau de
terre beaucoup plus hétérogène, de couleur brun-clair,
comptant des inclusions d’enduit, de tuile, de mortier, de
cailloutis et de blocs mais dépourvu de tout mobilier
datant (U.s. 4113). Les tranchées d’épierrement des murs
nord et sud de ce sanctuaire ont également été en partie
repérées et fouillées. Leur comblement se présentait sous
la forme d’une terre meuble contenant de nombreuses
inclusions de cailloutis, de fragments de marbre, d’enduit
et de mortier ; le rare mobilier céramique découvert permet
de dater cette récupération de matériaux de la seconde
moitié du Ve s. au plus tôt (fig. 40) (U.s. 4140/4147).
Un dernier jalon chronologique est à signaler, même si
le terminus ante quem qu’il fournit est encore plus tardif
que les précédents. La présence d’une tombe (fait 42,
fig.25), dont la fosse a été creusée dans le comblement de
la tranchée d’épierrement du mur nord du temple 2 (mur 13),
a en effet permis la réalisation d’une analyse d’ossements par
la méthode du radiocarbone. L’époque d’inhumation du
défunt a ainsi pu être située dans un intervalle chronologique
allant de 563 à 659, avec des probabilités maximales
décroissantes allant de 639 à 605 (LY-10707, cf. annexe 1).
L’abandon et la ruine du sanctuaire central sont donc au plus
tard chose faite dans les premières décennies du VIIe s.
Fig. 25 : Photo de la tombe 42 recoupant le mur nord de T. 2
(cl. M. Olive)
2.2.3 Le culte
Sur l’axe de symétrie longitudinal du temple central,
presque au fond de la cella, un imposant bloc rectangulaire
de calcaire coquillier simplement équarri pourrait correspondre à la fondation du socle d’une statue (fig. 18). Le
centre du bloc est situé à 1,85 m du mur ouest du temple
qui marque le fond de la cella. Il mesure 1,40 m dans le
sens nord-sud et 1,15 m d’Est en Ouest ; sa profondeur
n’est pas connue car seule sa face supérieure a été dégagée.
La ou les divinités qui étaient honorées dans le sanctuaire
nous restent malheureusement inconnues, aucune découverte
de fragment d’autel votif ou d’inscription dédicatoire
n’étant venue nous éclairer à ce sujet.
Au titre des découvertes mobilières les plus significatives,
il convient toutefois de mentionner ici les découvertes fortuites, dans les parcelles environnantes, de deux statues.
La première, mise au jour en 1948 lors d’un défoncement
agricole au tènement Saint-Jean, est aujourd’hui conservée
au musée de la Société archéologique de Béziers (fig. 26
a, b et c). En pierre et d’une hauteur d’1,20 m, elle figure
une femme dont la tête, le cou, les avant-bras et les pieds
ont disparu (Ros 1949, 14 et pl. XI). En appui sur la jambe
gauche dans un déhanchement gracieux, le corps est
drapé dans une palla portée par-dessus la tunique ; le bras
droit est replié sur la poitrine alors que le bras gauche est
maintenu le long de la cuisse, la main gauche fermée sur
un pan du manteau. L’excavation existant à la place du
cou conduit R. Ros à s’interroger sur la possibilité de voir
dans cette figure celle d’une impératrice - selon le procédé
bien attesté des têtes amovibles et interchangeables - mais
les arguments manquent pour valider ou réfuter cette
hypothèse. En outre, dans le cas de la statue de Roujan,
l’orifice permettant le logement de la tête paraît assez mal
fait et est légèrement désaxé par rapport au point médian
entre les deux épaules, comme si ce creusement avait été
fait a posteriori. Quoi qu’il en soit, la facture de cette
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c
a
b
Fig. 27 : Vue de la statue
féminine de NîmesBénédictins (cl. F. Pervenchon).
Fig. 26 : Vues de la statue découverte en 1948
de face, de profil, du cou (cl. L. Vidal).
œuvre est très comparable à la statue féminine acéphale
mise au jour fortuitement à Nîmes en 1969, au 11 de la rue
des Bénédictins. Cette dernière a pu être attribuée à
Antonia Minor, mère de Claude, après que la tête correspondante ait été retrouvée à proximité (fig. 27) (Garmy,
Monteil 2000, 181-183). Par analogie, et bien que toute
tentative d’identification soit ici impossible en l’absence
de la tête, il est donc très vraisemblable que la statue de
Roujan corresponde aussi à une œuvre du Ier s. de n. è.
La seconde découverte, due à M. Balmisa en 1974, est
une statuette en bronze de 9,9 cm de haut pour un poids de
90 g, elle aussi incomplète. L’objet représente un Hercule
tournant la tête à droite (fig. 28), portant barbe et moustache, le front ceint d’un bandeau attaché sur la nuque
sous un chignon tombant, brandissant sa massue d’une
main et portant la peau du lion de Némée dans l’autre
(Mailhé 1974 ; Barruol 1975).
Hercule est par ailleurs représenté sur une plaque de
bronze découverte sur le site Saint-Jean - hors stratigraphie au cours du décapage en 1984. Cette fine plaque de bronze est finement gravée et travaillée au repoussé (fig. 29).
Un nettoyage prudent et une analyse minutieuse des incisions permettent de restituer le dessin d’une scène à deux
personnages. À gauche, un homme nu musclé, vu de dos
de trois quarts vers la droite et ayant la jambe droite
fléchie, tient ou attrape une large bande de tissu au niveau
de la taille d’un autre personnage très incomplet. Ce dernier est vêtu d’un long vêtement dont le liseré festonné
court depuis son pied droit jusqu’en dessous du bras droit,
qui est appuyé sur l’épaule droite du premier personnage.
Sa main gauche semble tenir ou retenir un pan de tissu en
opposition avec la main de ce dernier. Une probable proue
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Fig. 28 : Hercule de bronze vu de face et de dos
(cl. extrait de Gallia 1975, 509).
de navire se trouve derrière et aux pieds de l’homme nu,
alors que le second personnage est face à un élément
d’architecture (colonne ? ante ?). À titre d’hypothèse, il
paraît possible d’identifier cette scène avec l’un des douze
travaux d’Hercule : celui où il doit rapporter pour Admètè,
fille d’Eurysthée, la ceinture qu’Arès donna à la reine des
Amazones Hyppolité.
Ces deux éléments en bronze permettent de présenter
l’hypothèse de l’existence d’un culte à Hercule dans les
sanctuaires de Roujan, ce qui n’est pas sans intérêt si l’on
met cela en rapport avec des monnayages probablement
frappés dans la région sise entre Béziers et Narbonne. Il
s’agit de monnaies de bronze gallo-grecques à la tête
d’Héraclès, l’une avec une massue en exergue, l’autre
avec une main levée. Cette dernière porte la légende
Bêtarratis. Certains revers comportent un lion (ClavelLévêque 1989, 95 ; Carrière 1995, 79).
Signalons en outre la mise au jour, dans un remblai
localisé sur les temples (U.s. 4078), d’un fragment de
plaque de marbre blanc - épaisse de 1,7 cm - portant une
inscription fragmentaire ; on peut être tenté de lire, à la
première ligne conservée (fig. 30), les restes du gentilice
[D]omi[tius] (Vidal et al. 2002, 254).
3. DE
LA MUTATION PALÉOCHRÉTIENNE AU DEVENIR
MÉDIÉVAL : L’ENSEMBLE FUNÉRAIRE ET CULTUEL DU
HAUT MOYEN ÂGE ET SON ÉVOLUTION
3.1 L’apparition des premières tombes
Fig. 29 : Plaque de bronze figurant Hercule
(cl. et dessin S. Lancelot).
Fig. 30 : Fragment de plaque de marbre épigraphe
(cl. et dessin L. Vidal).
Sur le site de Saint-Jean, la zone funéraire s’étend sur
toute la superficie couverte par les trois temples antiques
et leurs abords immédiats, soit environ 750 m². La nécropole s’étendait très certainement au-delà, côté nord d’abord
où les tombes sont présentes jusqu’en limite de l’emprise
de fouille, côtés est et sud ensuite où des creusements
importants liés soit à l’aménagement de terrasses de mise
en culture soit à l’élargissement de la route communale
ont profondément affecté la topographie d’origine, entraînant vraisemblablement la disparition ancienne d’assez
nombreuses tombes.
Les sépultures qui nous sont parvenues étaient en
général très endommagées par les travaux agricoles et
l’aménagement du lotissement. Ces perturbations ont presque
toujours concerné la structure de la tombe, voire également
dans un certain nombre de cas le ou les sujets inhumés.
Sur la parcelle la mieux préservée, cinquante et une
tombes au total ont été repérées et quarante-trois d’entre
elles ont été fouillées. Ce total ne tient toutefois pas compte
de plusieurs tombes (estimées à une dizaine) détruites par
les engins mécaniques lors des premiers travaux d’aménagement du lotissement, avant la découverte des substructions
des temples ayant motivé l’interruption du chantier.
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L’utilisation de la zone cultuelle antique à des fins
funéraires débute à une époque indéterminée mais, en tous
cas, antérieure à la construction - à l’est du temple 1 - de
l’abside, puisque les fondations de celle-ci sont réalisées au
détriment de deux inhumations orientées nord-sud (fig. 31).
Deux autres tombes (ens. 5 et 10 mis au jour en 1982) ont
vraisemblablement été bouleversées par la construction du
pilier et du mur sud de la travée qui précède l’abside, donnant
lieu dans un cas au dépôt d’un amas d’ossements en
réduction dans une petite fosse rectangulaire et dans le
second au maintien in situ de la partie de la sépulture non
touchée. A contrario, aucune maçonnerie constitutive des
trois temples n’ayant perturbé de sépulture, on peut raisonnablement exclure l’hypothèse de l’existence d’une zone
funéraire sur le site avant la construction des sanctuaires
dans les premières décennies du Ier s. de n. è. De surcroît,
l’absence de tout vestige d’urne cinéraire ou de stèle
semble indiquer que les pratiques funéraires se sont développées assez tardivement, à une époque où l’inhumation
s’est déjà généralisée aux dépens de l’incinération, soit au
plus tôt la seconde moitié du IIe ou le IIIe s. ap. J.-C.
De fait, il semblerait que les premières tombes soient
apparues après que la fonction cultuelle attachée aux sanctuaires antiques eut déjà largement perdu de sa vigueur.
Sans accorder d’importance déterminante à la question de
l’orientation des sujets, dont on sait qu’elle peut varier
dans le contexte d’un cimetière chrétien en fonction de la
place disponible ou de la proximité du lieu saint, on peut
retenir dans le cas du site Saint-Jean à Roujan que plusieurs
inhumations respectant grossièrement un axe Nord-Sud,
situées au nord-est de l’ancienne zone cultuelle, font partie
du groupe de sépultures chronologiquement le plus
ancien. Ce premier ensemble compte quatre tombes (10, 28,
30) ainsi qu’une sépulture seulement repérée en limite de
l’emprise de fouille lors du creusement d’une tranchée de
reconnaissance Est-Ouest, environ 1 m au nord de l’édifice
à abside.
Ces diverses sépultures sont toutes situées à une altimétrie
très comparable, à peu près sur le même axe approximativement Nord-Sud, à 10 m à l’est des escaliers d’accès aux
temples comme si elles respectaient un axe de circulation.
Très largement détruits par la construction - puis beaucoup
plus tard par l’épierrement du mur semi-circulaire -, seuls le
tiers inférieur de la sépulture enregistrée sous le numéro 30
(fig. 31) et le tiers supérieur du fait 28 ont été en partie préservés. En dépit de ces importantes spoliations, le creusement
des deux fosses dans l’argile naturelle a bien été reconnu
lors de la fouille. Quelques pierres alignées attestent clairement d’un coffrage sur la paroi latérale sud du fait 28,
alors que deux pierres bordant la limite ouest de la fosse
30 pourraient relever du calage de planches de bois. Les
deux fragments de tuile inclinés retrouvés à proximité de
la jambe gauche du sujet immature pourraient être soit les
vestiges d’un couvercle en tuiles soit ceux d’un élément
Fig. 31 : Tombe nord-sud coupée par l’abside construite à
l’est du temple 1 (cl. M. Olive).
Fig. 32 : Vue de la tombe 10
(cl. M. Olive).
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de signalisation. Les deux sujets étaient inhumés en decubitus
dorsal, à même le gravier du paléosol, la tête au sud. Le
sujet adulte de la tombe 28 avait l’avant-bras droit replié
sur le bas-ventre. La troisième tombe (fait 10), implantée
à moins de 1 m au sud de l’abside cette fois, est une tombe
en tuiles dont le calage des parois dans la fosse est assuré
par un alignement de pierres. Sa partie supérieure est très
altérée mais les fragments de tegulae subsistants présentent
une nette inclinaison vers l’intérieur, suggérant la restitution d’une bâtière plutôt que d’un coffre ; la tuile qui
constituait la limite sud de la tombe était quant à elle
fichée verticalement, afin peut-être de servir d’élément de
signalisation (fig. 32). Aucune trace du sujet inhumé n’a
été retrouvée dans cette tombe très arasée.
À défaut d’une datation absolue rendue impossible par
la disparition des ossements correspondants, divers
éléments de chronologie relative peuvent être rappelés
pour situer dans le temps ces premières inhumations.
Outre qu’elles sont sans nul doute postérieures aux
temples, rappelons que deux d’entre elles au moins sont
antérieures à l’abside, elle-même construite avant le
VIIIe s. Au plan typologique, bien qu’étant toutes différentes,
ces tombes se rattachent soit aux bâtières et coffres de
tuiles soit aux coffrages mixtes de planches calées par des
pierres que l’on trouve couramment en usage, notamment
en Languedoc, entre le IVe et le VIIe s. (Colardelle et al.
1996, 274 et 284-285). Par ailleurs, nous savons - grâce
aux datations 14C - que des inhumations sont pratiquées à
l’intérieur du temple 1 dès le courant du Ve ou le début du
VIe s. Sans anticiper sur l’évocation à venir du développement de cette nécropole, indiquons ici que pour ces
tombes, comme pour celles qui s’implantent peu après
aux abords de l’édifice, l’orientation est-ouest des sujets,
avec tête à l’Ouest, est systématique. L’orientation nordsud, quant à elle, n’apparaîtra plus qu’exceptionnellement
sur le site, dans un contexte bien différent sous la forme
d’une tombe d’enfant implantée dans le baptistère entre la
fin du VIIe et le IXe s. (fait 65). À l’exception de ce dernier
cas, le premier groupe de sépultures, attesté par quatre
tombes, marque donc un changement de destination de
cette partie du site, la fonction cultuelle des sanctuaires
antiques étant abandonnée au profit d’une utilisation funéraire
des lieux.
3.2 Réutilisation et agrandissements
du temple septentrional
3.2.1 L’utilisation du temple septentrional
à des fins funéraires
De premières tombes à inhumation prennent donc
place à l’intérieur du temple septentrional (temple 1), dans
les espaces précédemment formés par le pronaos et la
cella, ce dès le Ve ou le début du VIe s. (fig. 33). En l’ab-
sence de tout mobilier datant, cette datation est fournie par
les résultats d’une analyse radiocarbone d’ossements du
sujet inhumé dans le fait 37 (LY-10711, cf. annexe 1), dont
la tombe a endommagé une sépulture antérieure enregistrée sous le numéro 36. L’ordonnancement des trois
tombes qui occupent notamment l’angle sud-est de la
cella n’a visiblement rien de fortuit : deux d’entre elles
(fig. 34) sont venues se plaquer contre le mur méridional
du sanctuaire, la troisième (fait 47) est implantée au
contact de la sépulture 37, immédiatement sur son flanc
nord. Malgré les importants dégâts causés aux niveaux
archéologiques par les terrassements et les travaux de
construction du lotissement, il apparaît bien ici que l’intérieur du sanctuaire du haut Empire est réutilisé dès cette
époque à des fins funéraires, de manière visiblement
dense, sa destination cultuelle païenne primitive n’étant
alors de toute évidence plus en usage. Le fait que les
tombes s’inscrivent parfaitement dans les limites de l’édifice montre bien, cependant, que le bâtiment est alors toujours en élévation. Sa destinée est en cela bien différente
de celle de ses deux voisins méridionaux, dont on sait par
ailleurs que la ruine est clairement établie au plus tard
dans les premières décennies du VIIe s. Seule la destination de l’ancien temple change, soit qu’il s’agisse simplement d’un mausolée - dans un contexte topographique où
d’autres inhumations sont pratiquées à proximité -, soit
que ce nouvel usage soit dès l’origine associé à la présence en ce lieu d’une tombe sainte ou de reliques faisant de
ce bâtiment une memoria des premiers temps chrétiens.
La datation, entre 416 et 538, d’une des tombes les
plus anciennes pourrait amener à privilégier la seconde
hypothèse. Celle-ci devient indéniable en tous cas dès la
seconde moitié du VIe ou le premier tiers du VIIe s. au vu
des autres indices chronologiques fournis par les sépultures venues s’implanter aux abords immédiats du flanc
sud de l’édifice, selon le classique schéma de l’inhumation ad sanctos. Parmi elles, la seule inhumation habillée
découverte sur le site a livré une plaque-boucle en bronze
rectangulaire non articulée du milieu ou de la seconde
moitié du VIe s. (Stutz 2003, 61-63), portée par un sujet
daté par analyse radiocarbone dans un intervalle situé
entre 564 et 659 (LY-10708, cf. annexe 1). Les inhumations se poursuivent au contact de l’édifice jusqu’à la fin
du IXe ou le courant du Xe s., donnant parfois lieu à plusieurs réductions de corps successives. Un caveau maçonné portant le numéro de fait 43, bâti contre le mur sud du
temple 1, renfermait ainsi cinq sujets, l’âge 14C BP du dernier inhumé (U.S. 1019) étant de -1150 ± 40, soit un âge
calibré couvrant la période 779-983 (analyse LY-10716,
cf. annexe 1).
Quoi qu’il en soit, la transformation du sanctuaire
antique en basilique funéraire chrétienne est assez tôt
confirmée par les agrandissements réalisés sur ses flancs
occidental et oriental. La complexité de ces aménage-
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Fig. 33 : Plan d’ensemble du temple 1 et de ses extensions successives
(M.-G. Colin, L. Schneider, L. Vidal 2006).
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ments justifie que l’on procède dans un premier temps,
sans a priori fonctionnel et chronologique, à une présentation séparée des différents ensembles, avant d’aborder
les questions de datation et les hypothèses d’interprétation
qui leur sont liées.
Fig. 34 : Vue de la tombe 37 à l’intérieur de la cella
du temple 1 (cl. M. Olive).
Fig. 35 : En arrière plan l’abside vue depuis l’Ouest
(cl. M. Olive).
3.2.2 L’extension orientale
Une abside, dont aucun vestige de l’élévation n’est
conservé, est ainsi construite immédiatement à l’est du
temple 1 (fig. 33, 35). Cette extension se présente sous la
forme d’une travée droite encadrée par deux murs latéraux longs de près de 6 m (M.14 côté nord, M.3 côté sud),
prolongée par une courte abside semi-circulaire profonde
d’à peine 1,50 m (M.6). Seules visibles, les fondations
atteignent une puissance de 1,20 m et pénètrent dans le
sol géologique sur plus de 0,80 m de profondeur (base z =
95,87 NGF). Comme dans le cas des sanctuaires antiques,
elles ont été bâties au moyen de tranchées pleines ; leur
comblement est constitué par un blocage de pierres liées
par une puissante masse de mortier orangé incluant de
nombreux petits galets et graviers de schiste gris-noir
(fig. 36). On remarque que les fondations de cette extension
orientale sont beaucoup plus larges que celles du temple
sur lesquelles elles viennent prendre appui (1,50 m en
moyenne pour 0,76 m, soit près du double). Elles débordent
par conséquent de plusieurs dizaines de centimètres
l’emprise des murs antiques, tant à l’intérieur de l’édifice
qu’à l’extérieur, tout particulièrement sur le flanc externe
méridional. La largeur utile ainsi obtenue à l’intérieur du
chœur n’est donc que de 3,80 m environ, 4 m tout au plus si
l’on admet que les élévations bâties sur ces soubassements
ont pu l’être en léger retrait. La longueur et l’étroitesse de
la travée droite contrastent fortement avec l’absence de
profondeur de l’abside orientale.
La naissance du tracé semi-circulaire de cette dernière
est bien matérialisée par des décrochements symétriques,
en saillie à l’intérieur du chœur, en retrait à l’extérieur
côté chevet. La mise en œuvre des fondations de l’abside
est différente de celle utilisée pour les murs latéraux :
décrochements et abside présentent ainsi à la cote 97,01
NGF une semelle horizontale non observée dans les
murs latéraux. On ne saurait cependant déduire de cette
différence somme toute mineure dans les procédés de
Fig. 36 : Vue des puissantes fondations de l’abside (cl. Chr. Olive).
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construction que cette extension orientale aurait initialement
pu être terminée par un chevet plat, dans la mesure où les
techniques et les matériaux utilisés sont globalement très
homogènes. D’autre part, si un mur de direction nord-sud,
perpendiculaire aux murs 3 et 14 avait un temps constitué
l’extrémité est de cet édifice, aucun vestige des deux
sépultures antérieures d’orientation nord-sud - situées sur
son tracé éventuel - ne nous serait parvenu.
À l’opposé de l’abside, côté ouest, précisément à
1,45 m du mur est du temple 1, chacun des murs nord et
sud formant les murs latéraux de la travée droite est épaulé
par une base de pilier de plan rectangulaire large d’1 m
(fig. 36), venue renforcer l’édifice et susceptible de marquer
l’emplacement d’un arc triomphal. La présence, observée
dans le sondage réalisé au contact du pilier méridional,
d’une chape de mortier formant lit d’attente a montré que
la construction du chœur avait débuté par le pilier, le mur
3 venant s’appuyer contre et le recouvrir en partie. Nous
n’avons pas vérifié la présence probable d’un dispositif
symétrique au niveau du pilier septentrional. En dépit de
l’arasement extrême des vestiges, la puissance des fondations, associée à l’Ouest à la présence de bases de piliers
suggérant la présence d’un arc triomphal et à l’Est aux
décrochements symétriques marquant la naissance de
l’abside, plaident pour la restitution d’un chœur voûté.
Un dispositif original a été mis en œuvre pour assurer
la liaison entre le temple antique et son extension orientale.
En effet, sur 0,30 à 0,50 m de large, l’espace qui sépare le
mur est du pronaos et les murs latéraux de l’avancée est
comblé, en fondation, par un amas de blocs installés à sec
puis recouverts d’une chape de mortier blanchâtre
(fig. 21). Cet élément est postérieur aux autres maçonneries
et repose sur le substrat de galets. Il faut donc imaginer
que la construction de l’avancée orientale a débuté par la
fondation des deux piliers rectangulaires, la chape de mortier
observée à leur base pouvant être interprétée comme un
vestige du radier d’escalier donnant antérieurement accès
au temple, ainsi que cela a été mis en évidence pour le
temple central. Les fondations des murs latéraux auraient
ensuite été bâties contre ces deux piliers ; enfin, l’espace
laissé libre entre le temple 1 et l’avancée orientale aurait
été comblé par un puissant remblai, sur lequel devait très
probablement prendre place un emmarchement de plusieurs degrés destiné à rattraper les différences de niveaux
et créant de ce fait un chœur surélevé. Si la complexité de
ce procédé de construction peut surprendre au premier
abord, sa justification est sans doute à rechercher dans les
conditions assez particulières de sa réalisation. De telles
précautions pourraient en effet avoir été prises par souci
de ne pas déstabiliser le bâtiment que l’on souhaitait
agrandir, ce qui confirmerait son bon état de conservation
au moment choisi pour réaliser un nouveau projet architectural en lui adjoignant un appendice oriental. Il ne se serait
donc pas agi là de bâtir une église sur les ruines d’un
temple mais bien d’ajouter à l’élévation de ce dernier - qui
était alors sans doute déjà réutilisé à des fins funéraires le chœur nécessaire à l’aménagement d’un lieu de culte
chrétien. L’absence totale d’inhumations dans l’abside
(dont seules des fondations très arasées ont certes été
mises au jour nous privant peut-être d’informations
contradictoires à ce sujet) plaide en effet pour donner à
cet espace oriental une fonction liturgique, la basilique
funéraire des premiers temps chrétiens devenant dès lors
également édifice du culte. Ce processus n’est pas inconnu
et peut être rapproché d’un autre cas méridional, le sanctuaire de Château-Bas à Vernègues (Bouches-du-Rhône),
où une chapelle du XIe s. - peut-être précédée d’une église
antérieure - est venue prendre appui contre le mur latéral
est du temple antique (Fournier, Gazenbeek 1999).
Les dimensions hors œuvre de cette avancée orientale
sont de 8,70 m de long pour 6,80 m de large, ce qui correspond presque exactement à un doublement de la surface
occupée par le seul temple 1. Compte tenu de l’épaisseur
des fondations des murs latéraux, la superficie utile ainsi
ajoutée atteint toutefois à peine une trentaine de mètres
carrés. Cela n’est cependant pas négligeable et confère à
l’édifice une superficie intérieure d’environ 62 m², sans
compter les extensions occidentales qui seront évoquées
infra. Le plan de cette église surprend et n’est guère comparable à ce que l’on connaît de l’architecture cultuelle de
l’Antiquité tardive et du haut Moyen Âge ; sans doute le
fait d’avoir voulu adapter une extension à un édifice préexistant est-il en partie responsable de ce caractère atypique.
Reste - et ce n’est pas la moindre des difficultés dans la
mesure où les critères objectifs de datation font très largement défaut - à situer chronologiquement cette réalisation
architecturale. Seuls des facteurs de chronologie relative
peuvent être pris en considération. À ce titre, il convient
de souligner en premier lieu l’antériorité certaine du
temple auquel l’édifice à abside est accolé. Les techniques
de construction utilisées pour relier les deux édifices entre
eux ont cependant montré que le temple subsistait très
largement en élévation lors de la construction de l’édifice
à abside, ce qui exclut vraisemblablement une datation
trop basse de ce dernier. Rappelons d’autre part que les
fondations de l’abside ont très largement détruit deux
tombes d’orientation nord-sud que les comparaisons typologiques permettent de rattacher à une période inscrite
entre le IVe et le VIIe s.
Parallèlement, les inhumations se poursuivent, tant à
l’intérieur du temple antique devenu édifice funéraire que
sur le flanc sud des bâtiments, alors même qu’aucune
tombe n’est venue se loger à l’intérieur du chœur. Il en va
tout autrement à l’extérieur où plusieurs tombes respectent
l’extension orientale et cherchent même à se placer à son
immédiate proximité. C’est notamment le cas de la tombe 9,
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implantée parallèlement au mur latéral sud de l’édifice à
abside, à une soixantaine de centimètres au sud de celui-ci
(fig. 33). Cette sépulture se présente sous la forme d’une
bâtière de tegulae, attribuable aux IVe-VIIe s. Cette recherche
d’une inhumation ad sanctos est également certaine pour
la tombe 1, inhumation en pleine terre implantée à cinquante centimètres à peine du flanc externe du mur nord
du chevet. Plus précisément datée grâce aux analyses 14C,
l’inhumation en pleine terre du fait 12, dans l’immédiat
prolongement sud-est de l’abside, remonte au dernier
quart du VIIe ou au VIIIe s. (âge calibré situé entre 678 et
795, analyse LY-10712, cf. annexe 1). Cette datation nous
livre un terminus ante quem pour la construction de l’abside,
qui est donc achevée au plus tard dans le courant du
VIIIe s. Voyons à présent en quoi les extensions réalisées
à l’ouest de l’ancien temple peuvent nous aider à affiner
cette chronologie.
3.2.3 Les extensions occidentales
À l’opposé de l’abside, plusieurs murs viennent se
greffer immédiatement à l’ouest du temple 1 et témoignent
d’au moins deux phases d’aménagements successifs de ce
secteur (fig. 33). Une première étape est constituée d’un
mur de direction Est-Ouest (mur 28), large de 0,55 m, qui
prend appui sur l’angle nord-ouest du sanctuaire antique
et prolonge son mur nord sur une longueur de 3,40 m
(fig. 37). Cette construction à double parement - dont
l’élévation est conservée sur deux assises entre les cotes
NGF 97,28 et 96,97 - est bâtie à l’aide de galets de module
moyen, posés de chant et inclinés, disposés selon un
maillage très serré et liés à la terre sans ajout de mortier.
Les matériaux et techniques utilisés pour la mise en œuvre
du mur 28 sont parfaitement comparables à celles d’un
autre mur de même largeur (mur 52, z = 97,28 NGF), de
direction Nord-Sud, situé 3 m à l’ouest du mur occidental
du temple 1 et conservé sur une longueur de près de 2 m.
Fig. 37 : Détail des extensions occidentales successives
construites au contact de l’ancien temple 1 (cl. M. Olive).
Tout porte à croire que ces deux murs fonctionnaient
ensemble et formaient l’angle nord-ouest d’une première
extension occidentale du sanctuaire antique, dont nous ne
connaissons malheureusement pas la limite méridionale.
À supposer que celle-ci se situait dans le prolongement du
mur sud du temple, l’agrandissement ainsi obtenu s’étendrait
sur une largeur intérieure de 4,50 m, soit une superficie
utile d’environ 14 m². Il est en outre important de noter la
grande similitude des techniques de construction mises en
œuvre pour ces murs 28 et 52 avec celles utilisées pour
l’édification d’un bâtiment construit quelques mètres plus
au sud aux dépens du temple 3, bâtiment sur la nature
duquel nous reviendrons infra. Ces analogies techniques
permettent très vraisemblablement d’associer ces différents
aménagements à une même phase chronologique.
Dans un second temps, le secteur à l’ouest du temple 1
fait l’objet d’un réaménagement complet (fig. 33, 37). Le
mur 27, de direction Est-Ouest, est ainsi construit sur les
vestiges du mur 28, sur l’arase duquel a été préalablement
répandue une couche de terre malheureusement dépourvue
de tout mobilier (U.s. 1068). Cette nouvelle maçonnerie
s’inscrit parfaitement dans l’alignement du parement
interne du mur septentrional du temple 1, qu’il vient de
toute évidence prolonger. En revanche, les parements
externes des deux murs ne sont pas parfaitement alignés,
l’unique assise de gros moellons du mur 27 mesurant près
de 1 m de large alors que les fondations du mur antérieur
ne sont épaisses que de 0,76 m. Ce léger décalage des
parements est à rapprocher de l’extension orientale, elle
aussi légèrement débordante par rapport au mur nord de
T.1 : ce nouvel alignement, réunissant la travée terminée
par une abside et le mur 27, permet selon toute vraisemblance d’associer ces deux appendices opposés à une même
phase d’extension de l’édifice cultuel.
Le mur 27 est parfaitement chaîné avec le mur 53, de
direction nord-sud, avec lequel il forme un angle droit.
Les techniques de construction utilisées pour bâtir ces
structures contemporaines sont identiques : elles associent
deux parements de blocs équarris bien agencés à un blocage interne constitué de petites pierres et de mortier.
L’ensemble est arasé à la cote NGF moyenne de 97,48 m.
On ignore tout des limites méridionales de la pièce
ainsi esquissée, pour laquelle deux hypothèses sont
plausibles. Par pure logique, une première possibilité
serait de restituer une limite dans le prolongement du mur
sud de l’ancien temple 1, conférant à cette extension occidentale une longueur hors œuvre de 5,40 m pour une largeur
de 6,30 m, soit une surface intérieure utile d’environ
21 m² une fois déduites les largeurs de murs. La seconde
solution pourrait être que le mur 53 ait rejoint l’angle
nord-ouest du temple central, dans le prolongement
duquel il se situe globalement - malgré un léger décalage
vers le sud-ouest -, dessinant ainsi avec le mur nord du
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temple 2 une sorte d’enclos funéraire au sud de l’édifice.
La présence notamment de deux caveaux maçonnés juxtaposés (faits 11 et 43), ayant fait l’objet d’inhumations et
de réductions successives, parfaitement inscrits dans
l’espace bien délimité par le mur sud du temple 1 et le
mur nord du temple 2, plaide en ce sens. Si un tel dispositif
d’annexe méridionale a existé, il n’est vraisemblablement
pas resté très longtemps en usage dans sa forme initiale
puisque l’épierrement du mur nord du temple central (M. 13)
est confirmé dès les années 560-660 avec l’implantation
de la tombe 42.
Un dernier ensemble bâti est accolé immédiatement au
nord-ouest de T.1 (fig. 5) et paraît avoir fonctionné avec
les murs 27 et 53. Deux murs parallèles de direction nord-sud
(murs 25 et 26) dessinent en effet l’amorce d’une nouvelle
pièce située au nord du temple 1 et de son extension occidentale, dont le mur 27 constitue la limite méridionale mais
dont l’extension vers le nord débordait l’emprise de la
fouille, limitée ici par la présence de parcelles loties. Côté
est, le mur 25 prend appui sur la face externe du mur nord
de T.1 (mur 8) ; il se présente sous la forme d’un alignement
de pierres assez mal parementées et non liées au mortier,
fondé dans le sol géologique argileux creusé à cet effet. À
une distance de 3,50 m en direction de l’Ouest, le mur 26
est constitué d’une semelle de fondation surmontée d’une
assise associant pierres et galets. En dépit du caractère très
lacunaire de ces informations, il apparaît donc que la
deuxième phase d’extension greffée sur l’ancien temple était
constituée d’au moins deux pièces, l’une dans son exact
prolongement occidental, l’autre immédiatement au Nord.
Dans la partie nord du sondage, la présence d’un
ensemble de galets grossièrement alignés et liés par du
mortier a pu être interprétée comme le radier d’un probable
niveau de circulation associé au mur 27 (fig. 38). Sous ce
niveau de galets, le comblement d’une fosse peu profonde
(U.s. 1065/1066), opération qui pourrait se justifier par
une volonté de nivellement du secteur, a livré plusieurs
fragments de céramiques datables du dernier quart du Ve
et du VIe s. ; on recense ainsi quatre bords de céramique
sigillée claire D type 87c situés entre 480 et 550, un bord
de céramique kaolinitique du type A 18 en usage entre 360
et 500 et, pris dans les parois de cette même fosse, un
autre bord de céramique commune à pâte kaolinitique du
type A 29a datable des années 500-600 (fig. 39). Compte
tenu du manque récurrent d’éléments de datation permettant
de situer clairement dans le temps l’évolution du site, cet
indice stratigraphique - même ponctuel - revêt une importance particulière. L’aménagement et les premiers temps
de fonctionnement de la seconde extension occidentale,
dessinée au Sud par les murs 27 et 53 et au Nord par les
murs 25, 26 et 27, pourraient donc correspondre au courant
voire à la deuxième moitié du VIe s. Cette précision
chronologique donne du même coup un terminus ante
quem à l’arasement de la première extension matérialisée
par les murs 28 et 52.
Le caractère incomplet de l’exploration de ces différents
vestiges ne nous permet pas d’avoir une vision d’ensemble
satisfaisante du plan de l’édifice ainsi constitué, dont
apparaît néanmoins clairement la complexité (fig. 33).
Dans son dernier état - datable rappelons-le au plus tôt de
la deuxième moitié du VIe s. et au plus tard du VIIe ou du
VIIIe s. - qui comprend les trois modules alignés que sont
le temple primitif, la travée terminée par une abside et la
seconde extension occidentale, la superficie intérieure
totale de l’édifice atteint désormais plus de 80 m². Si les
techniques de construction mises en œuvre pour réaliser
l’extension orientale d’une part, la deuxième phase d’extension occidentale d’autre part, peuvent paraître assez
différentes au premier abord, elles ont en commun de faire
toutes deux appel au mortier comme liant et d’être alignées côté nord. Le plan général ainsi obtenu frappe
par son caractère très allongé et composite qui témoigne
Fig. 38 : Coupe stratigraphique Est-Ouest de la
zone 1, secteur 4 (L. Vidal).
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Fig. 39 : Planche de céramiques des phases tardives
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(J. Guerre).
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Fig. 40 : Planches de céramiques des phases tardives
vraisemblablement d’une adaptation progressive de l’édifice
aux besoins de la communauté de chrétiens qui en dépend.
La recherche d’un éventuel rythme de travée est intéressante.
En effet, si l’on restitue une limite orientale de la nef
marquée par l’emplacement de l’arc triomphal - le mur
est de l’ancien temple ayant disparu sous l’emmarchement
du chœur -, une succession de trois travées pourrait être
déduite des dimensions visibles en plan d’Est en Ouest :
environ 4 m entre l’arc triomphal et le mur 10 séparant à
l’origine pronaos et cella, 4,40 m pour la longueur de
l’ancienne cella et près de 4,50 m pour celle de l’appendice
occidental.
Nulle trace de seuil n’a été retrouvée mais, alors que
l’accès aux états précédents de l’édifice pouvait s’être
maintenu à l’Est depuis l’Antiquité, la création d’un chevet
vient condamner définitivement l’escalier primitif. Le net
débordement du mur méridional de l’abside au contact de
l’angle sud-est de l’ancien pronaos pourrait, mais ce n’est
que pure hypothèse en l’état de notre documentation,
témoigner de l’emplacement d’une porte.
Aucun niveau d’occupation de cet édifice ne nous étant
davantage parvenu, la poursuite de l’activité funéraire
dans ses abords immédiats constitue le seul indice susceptible de nous aider à connaître la durée de son utilisation
comme église, bien que nos informations soient également
incomplètes concernant la nécropole. Rappelons à ce
propos que les premières inhumations sont attestées dès le
Ve ou le début du VIe s. à l’intérieur de l’ancien temple 1
(J. Guerre).
transformé en mausolée ou memoria ; les sépultures qui le
bordent sur son flanc méridional et au sud de l’abside
s’échelonnent entre la seconde moitié du VIe et le Xe s., ce
qui permet parallèlement d’imaginer que l’édifice reste
utilisé tout au long du haut Moyen Âge. Enfin, la sépulture
la plus tardive qu’il nous ait été donné de fouiller est une
tombe en coffre de pierres située à proximité de l’angle
nord-ouest de l’ancien temple 1 ; le sujet qu’elle contenait
a été inhumé entre 896 et 1147, les pics de probabilité
maximale étant situés par ordre décroissant en 999, 1015
et 905 (LY-10709, cf. annexe 1). L’aménagement de cette
tombe a été réalisé aux dépens du mur nord de la seconde
extension occidentale de l’édifice (mur 27), témoignant
par là même de la ruine de cette dernière aux alentours de
l’an Mil ou au plus tard dans le courant du XIe s. Même si
cet élément ne permet pas de déduire à lui seul que
l’édifice cultuel correspondant est dès lors totalement
désaffecté, force est de constater qu’aucun autre argument
ne plaide à l’inverse pour nous permettre de penser qu’il
reste au moins partiellement en usage. Un épierrement
systématique des murs de l’édifice à abside (murs 3, 6 et
14) a par ailleurs été clairement mis en évidence.
Plusieurs tranchées d’épierrement ont ainsi été reconnues,
des traces d’outils et l’empreinte des pierres prélevées
étant encore nettement visibles sur les fondations en
place. Leur comblement était constitué d’une terre meuble
contenant de nombreuses inclusions de cailloutis, de fragments d’enduit et de mortier mais malheureusement pas
de mobilier datant.
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3.3 Identification d’une salle baptismale
Les sondages réalisés en 1985 à l’emplacement du plus
petit des sanctuaires antiques ont permis d’identifier les
lambeaux d’un bâtiment que l’on propose désormais
d’interpréter comme une salle baptismale. Cette attribution
se fonde d’abord sur la découverte d’une cuve circulaire
localisée à proximité mais à l’extérieur de l’angle nordouest du temple n° 3 (fig. 41, 42). D’un diamètre conservé
de 0,67 m, celle-ci est dotée d’une évacuation centrale
(0,11 m de diamètre) qui a été explorée sur 0,30 m de profondeur. Cette cuve portant le numéro d’enregistrement
90, associée à un massif bâti de mortier et de pierre, est
recouverte d’un d’enduit d’étanchéité très lisse. Un débordement de l’enduit, partiellement conservé au Sud, et
l’amorce d’un départ vertical, forment une petite margelle
qui signale l’existence d’au moins une marche. À ce
niveau, la cuve devait atteindre 0,91 m de diamètre, ce qui
correspond au module de l’ordre de 1 m de diamètre généralement observé dans le monde rural (Guyon 2000, 44).
Le degré d’arasement des vestiges mais aussi l’implantation
d’une tombe (fait 92) et surtout la construction postérieure
d’un bâtiment en grand appareil n’ont pas permis de rattacher la cuve et le massif de maçonnerie qui la porte à une
séquence stratigraphique précise.
Il est possible cependant d’associer cet aménagement à
un édifice qui succède au temple 3. Bien que son plan soit
assez lacunaire, l’originalité de la mise en œuvre ainsi que
les matériaux utilisés dans sa construction contrastent
avec les maçonneries de l’Antiquité. Les lambeaux de
murs de ce nouveau bâtiment sont en effet liés à la terre et
présentent un aspect homogène caractérisé par des parements soignés de galets maintenant un remplissage de
cailloux, de petites dalles de calcaire et galets de plus petit
calibre (fig. 43).
Cet édifice, dont on connaît seulement l’angle nordouest et une section d’environ 4 m de son mur méridional,
n’est superposé que bien imparfaitement au temple 3. Il le
déborde largement vers l’est et il n’en respecte plus tout à
fait l’orientation (fig. 44). À vrai dire, le débordement est
tel que l’angle nord-ouest de l’édifice repose également
en partie sur l’arase du mur méridional du grand temple
central. L’aménagement de cette construction a donc
nécessité un arasement complet du temple 3 et au moins
en partie du temple central ou laisse entendre que celui-ci
était déjà réalisé lorsque que l’on a entrepris d’édifier ce
nouveau bâtiment (fig. 45).
Le lien entre cet édifice qui, d’un point de vue stratigraphique est le premier à succéder au temple 3, et la cuve
est déduit principalement de la localisation de cette dernière.
Comme l’on est assuré au moins de la largeur du nouvel
édifice qui atteint 5 m dans l’œuvre, on remarque en premier
lieu que la piscine prend place à l’intérieur de celui-ci
alors qu’elle est à l’extérieur du temple 3. De ce point de
vue, il est clairement établi que les deux aménagements
sont postérieurs au temple. Par ailleurs, la cuve est centrée
par rapport à la largeur du nouvel édifice. Le trou central
de vidange est exactement à 2,50 m de distance des murs
nord et sud. Par ce jeu de symétrie qui est au moins pertinent
dans la largeur, on peut proposer au final de restituer un
édifice rectangulaire qui atteindrait hors œuvre 6,20 m de
large et 9,50 m de long, en admettant que la cuve ait eu
Fig. 41 : Vue de la piscine baptismale
Fig. 42 : Coupe du baptistère
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(cl. M. Schwaller).
(DAO C. Bioul).
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Fig. 43 : Plan d’ensemble du temple 3, du baptistère et de l’édifice du
bas Moyen Âge (doc. M.-G. Colin, L. Schneider, L. Vidal 2006).
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Fig. 44 : Vue de détail du mur 42 (baptistère) au centre du
cliché, mur sud de T3 au premier plan et du mur 35 médiéval
en arrière plan (cl. M. Schwaller).
Fig. 45 : Vue générale de la cuve, du baptistère et du temple
(cl. M. Schwaller.)
une position parfaitement centrale. Dans l’œuvre la
superficie de la pièce serait d’environ 47 m2. Une telle
restitution n’est pas invraisemblable, si on la compare aux
rares baptistères ruraux mis au jour en Gaule méditerranéenne (fig. 46). Dans l’Hérault, le baptistère récemment
mis en évidence dans une petite agglomération du VIe s.,
celle du Roc de Pampelune à Argelliers, atteint pour sa
part 6,40 m de large pour 8,70 m de long hors œuvre, ce
qui correspond à une superficie intérieure d’environ
35 m². On demeure là dans des proportions très proches. Il
convient cependant de remarquer dans ce dernier cas que
la cuve - qui est centrée par rapport à la largeur de la
pièce - est néanmoins sensiblement repoussée dans la
moitié ouest de l’édifice (Pellecuer, Schneider 2005, 106).
La comparaison avec le Roc de Pampelune soulève aussi
la question de l’association ou non du baptistère de
Roujan à un lieu de culte au sein d’un même édifice.
L’aménagement du Roc de Pampelune appartient en effet à
cette famille de baptistères de Gaule méditerranéenne établis
dans le prolongement occidental de la nef d’une église
(Guyon 2001 ; Codou 2005, 83). Le degré d’arasement du site
de Saint-Jean ne permet pas de répondre à cette question,
d’autant qu’au-delà de la cuve baptismale en direction de
l’Est, l’aménagement d’une terrasse de culture moderne a
provoqué un décaissement qui a accentué la spoliation des
vestiges. L’hypothèse qu’un lieu de culte chrétien soit
associé à ce baptistère n’en demeure pas moins ouverte.
Quoi qu’il en soit, l’aménagement du baptistère s’intègre
dans un programme de construction plus ambitieux également
marqué par la réalisation de travaux destinés à agrandir
l’ancien temple 1, maintenu en élévation et réutilisé à des
fins funéraires depuis le courant du Ve s. ou les premières
années du VIe s. La parfaite similitude des modes de
construction (opus spicatum, liant de terre…) et des
matériaux mis en œuvre (essentiellement des galets) nous
ont en effet conduit à rattacher à une même phase chronologique la salle baptismale et la première extension greffée
à l’Ouest de l’ancien temple 1 (murs 28 et 52).
Assez rapidement, la fonction baptismale de l’édifice
méridional cohabite avec une utilisation sépulcrale des
lieux, puisqu’un groupe de tombes se développe dans et
autour du bâtiment dès le second tiers du VIe ou au plus
tard le premier tiers du VIIe s. La tombe maçonnée 92,
soigneusement bâtie en dalles de calcaire solidement liées
au mortier vient ainsi dès cette époque se loger entre le
mur méridional du baptistère (M. 42) et la piscine ; le
sujet immature qu’il contenait est daté de -1433 ± 45 BP,
soit un âge calibré allant de 547 à 663 (ERL-6547, cf.
annexe 1). L’utilisation du baptistère et de ses abords
comme enclos funéraire se confirme par la suite, comme
l’indiquent les datations radiocarbone très proches obtenues
par l’analyse des ossements de deux autres sépultures
d’enfants, les faits 65 et 76, situées entre 670 et 886
(ERL-6545 et 6546, cf. annexe 1). Par la suite, les inhumations se poursuivent ; la datation 14C de deux autres
sépultures ne va cependant pas au delà de l’horizon de
l’an Mil (LY-10713 et 10714, cf. annexe 1), selon un schéma décidément très proche de ce qui a déjà été constaté
pour l’édifice septentrional. En revanche, nous sommes
dépourvus d’arguments objectifs concernant la durée de
vie de cet édifice. La construction, à la fin du Moyen Âge,
d’un nouvel édifice qui recouvre l’ancien baptistère pourrait
certes être interprétée comme le signe du maintien jusqu’à
cette époque tardive d’un édifice chrétien en ce point précis
du site, mais l’important décalage chronologique qui existe
entre ces deux états architecturaux évoque davantage une
interruption suivie d’une réoccupation qu’une continuité.
3.4 Organisation de la zone funéraire et description
des sépultures (annexe 2)
L’ensemble funéraire mis en évidence par les fouilles
du site Saint-Jean à Roujan (annexe 2) se révèle d’une
ampleur relativement modeste au regard en tous cas de la
population inhumée. Outre les « tombeaux » signalés sans
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Fig. 46 : Planche comparative des baptistères ruraux de Gaule méditerranéenne
plus de précision au milieu du XIXe s. (Crouzat 1859), la
cinquantaine de tombes mise au jour témoigne de pratiques
d’inhumation assez régulièrement réparties sur six à sept
siècles, selon un rythme finalement assez peu soutenu. Si
l’on tient compte à la fois des sépultures des niveaux
supérieurs détruites par les travaux modernes de toute
nature et des tombes que le caractère non extensif de la
fouille a laissé enfouies, on peut vraisemblablement tout
au plus doubler voire tripler ce nombre. Il faut donc imaginer que d’autres cimetières ont été parallèlement en
usage sur le territoire roujanais pour répondre aux besoins
d’une communauté d’habitants vivant sur plusieurs hectares.
Pour ce qui concerne le site de Saint-Jean, les tombes ont
été découvertes sur une superficie d’environ 750 m², les
plus fortes densités de sépultures étant concentrées en
deux pôles principaux, dans et aux abords de l’église septentrionale d’une part, de l’édifice baptismal d’autre part ;
le fait que l’intérieur du temple central n’ait pas été fouillé
extensivement ne saurait modifier radicalement cette
observation concernant le développement topographique
de la nécropole (fig. 47).
On compte ainsi cinq tombes implantées dans le
temple transformé en édifice funéraire - dont quatre dans
l’ancienne cella -, cinq autres contre le flanc sud du bâtiment,
(DAO L. Schneider 2006).
deux sépultures à l’intérieur de l’extension occidentale et
dix inhumations aux abords de l’extension orientale avec
abside. Il semble a contrario que l’on ait très peu inhumé
dans le chœur lui-même puisque seuls deux groupes d’ossements humains ont été mis en évidence, l’un sans aucune
connexion anatomique - attestant peut-être d’une réduction
ou d’un simple dépôt -, l’autre sous la forme d’une sépulture
excessivement endommagée où subsistaient quelques
fragments d’os longs témoignant d’une inhumation en
decubitus dorsal. Dans l’état très arasé du site tel qu’il
nous est parvenu, on atteint donc dans cette zone de la
nécropole un total de vingt-quatre tombes pour trente
sujets inhumés.
Le baptistère et ses abords immédiats ont également
attiré les inhumations : quatre tombes ont pris place à l’intérieur même de l’édifice, cinq autres ont été aménagées
contre les flancs nord et sud du bâtiment. Parmi ces neuf
sépultures, cinq - dont quatre regroupées au nord de la
pièce baptismale et une à l’intérieur, côté nord également
(fig. 48) - concernaient des enfants.
Réalité de l’évolution topographique de l’aire sépulcrale
ou artifice dû à l’arasement plus marqué du terrain dans sa
partie orientale, l’implantation des tombes semble par la
suite privilégier l’ouest du site cultuel, comme en
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Fig. 47 : Plan de l’ensemble cultuel et funéraire du haut Moyen Âge
témoigne la dizaine de coffres de dalles et de pierres non
maçonnées recensées dans ce secteur (fig. 49).
D’un point de vue chronologique, à l’exception de
quatre sépultures d’orientation Nord-Sud dont deux sont à
coup sûr antérieures à la construction de l’abside, les
tombes les plus anciennes sont regroupées à l’intérieur et
auprès de l’ancien temple 1 devenu basilique funéraire.
Presque tous les éléments de datation absolue dont nous
disposons sont issus des mesures de la teneur résiduelle en
radiocarbone faites sur un échantillon représentatif
d’ossements provenant de tombes sélectionnées selon
leur emplacement topographique et stratigraphique. Ainsi
le fait 37, postérieur au fait 36, est-il daté dans une fourchette
allant de 416 à 538. Dans l’espace situé entre les anciens
(doc. M.-G. Colin, L. Schneider, L. Vidal 2006).
temples 1 et 2, qui constitue visiblement une sorte d’enclos
funéraire privilégié, l’inhumation du fait 49 a été mise en
place entre 564 et 659. Les inhumations à proximité du
sanctuaire se poursuivent par la suite pendant plusieurs
siècles : 678-795 pour le fait 12 situé immédiatement au
Sud-Est de l’abside, 782-984 pour le fait 42 aménagé dans
le comblement de la tranchée d’épierrement du temple
central, 779-983 pour le dernier sujet inhumé du caveau
portant le numéro de fait 43, enfin 896-1147 pour la
tombe 50 aménagée aux dépens du mur nord de l’extension occidentale de la nef.
Si les premières tombes apparaissent donc dans la partie
nord du site, la répartition bipolaire des sépultures semble
néanmoins s’imposer précocement. Une tombe maçonnée
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est ainsi soigneusement aménagée dans le baptistère entre
538 et 638 (fait 92), alors que deux sépultures d’enfant
prennent place à l’intérieur et aux abords du mur nord de
la salle baptismale entre la fin du VIIe et la fin du IXe s.
(faits 65 et 76). Un peu plus loin à l’Ouest du baptistère,
deux tombes (faits 1 et 2) attestent que les inhumations se
poursuivent aux IXe et Xe s.
Fig. 48 : Tombe d’enfant (fait 65) à l’intérieur du baptistère
(murs 23 et 24, en bas et à gauche du cliché) ; à droite le mur
nord du temple 3 (cl. M. Olive).
La typologie des tombes, assez variée, est bien représentative de la longue durée d’utilisation de la nécropole
(fig. 50). On distingue ainsi huit groupes : six tombes sous
tuiles - dont trois en bâtière, deux en coffre, une représentée
par le fond seul ; quatre tombes sous lauzes, dont trois
coffres et une en bâtière ; trois coffres de bois calés par
des pierres ou tuiles mais aucun cercueil à proprement
parler, deux alignements de clous sur le côté gauche et aux
pieds du sujet inhumé dans la tombe 42, structure mixte
aménagée dans le comblement de la tranchée d’épierrement
du mur nord du temple 2 ne pouvant être considérés
comme tel ; quatre coffres mixtes associant pierres et
tuiles ; un unique sarcophage in situ, une seconde cuve
monolithe quadrangulaire (fait 31) ayant été réemployée
dans la construction d’un bâtiment médiéval ; six coffres
et caveaux maçonnés ; huit coffres de dalles ou de
pierres et deux sépultures en fosse recouvertes de dalles ;
quinze inhumations en fosse.
Dans leur majorité, les tombes n’ont accueilli qu’une
inhumation (fig. 49). Des réductions ont cependant été
pratiquées dans trois tombes collectives, principalement
dans deux caveaux maçonnés parallèles bâtis dans l’espace
séparant les anciens temples 1 et 2. L’un des caveaux - le
fait 43 - renfermait cinq sujets dont quatre adultes (un
homme, une femme, deux adultes de sexe indéterminé) et
un enfant de moins de cinq ans. La structure voisine (fait
11) abritait les restes de trois sujets dont deux adultes et
un immature (fig. 51). Enfin, une réduction a été bien
individualisée dans le fait 9, le dernier inhumé étant d’âge
adulte.
Du point de vue des rites funéraires, l’inhumation en
decubitus dorsal, jambes allongées, est systématique à
l’exception d’un individu dont les jambes étaient légèrement
fléchies sur le côté gauche (fait 36). L’orientation des
sujets respecte approximativement un axe Est-Ouest, la
tête en direction du levant. Lorsque les membres supérieurs étaient conservés, le positionnement des mains était
varié : souvent repliées sur le bassin (les deux mains dans
quatre cas, une seule main dans quatre autres), disposées
le long du corps à deux reprises, ramenées sur le thorax ou
les épaules pour trois sujets.
Fig. 49 : Coffre de dalles (fait 2) et sujet inhumé adulte en
decubitus dorsal (cl. M. Olive).
En dépit de l’absence d’épingles, la présence d’un linceul
est certaine pour le fait 42 au moins, la décomposition des
chairs ayant eu lieu dans une atmosphère visiblement
comprimée. L’inhumation habillée est exceptionnelle, une
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Fig. 50 : Planche présentant les différents types de sépultures
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seule plaque-boucle de ceinture non articulée en bronze
ayant été retrouvée portée par le sujet inhumé dans le fait
49 (fig. 52). Dans un premier temps attribué au milieu ou
à la seconde moitié du VIIe s. (Colin, Schwaller 1986b,
144-145), cet objet a récemment été classé dans un petit
groupe de plaques ajourées à boucles rectangulaires
d’inspiration méditerranéenne du milieu ou de la seconde
moitié du VIe s. (Stutz 2003, 61-63 et 715).
3.5
L’étape médiévale :
déclin et réinvestissement du quartier
Les vestiges clairement rattachés au second millénaire
de notre ère ne sont guère nombreux et éloquents. La
sépulture la plus tardive (fait 50), datée par radiocarbone,
est - rappelons-le - antérieure à 1147, avec des pics de
probabilité situés en 999, 1015 et 905. Comme elle recoupe la dernière extension occidentale greffée sur l’ancien
temple 1, on peut en déduire que le sanctuaire à abside,
Fig. 51 : Caveau maçonné (fait 11) en cours de fouille
(cl. M. Olive).
Fig. 52 : Plaque-boucle de ceinture en bronze portée par le
sujet inhumé du fait 49 (cl. P. Plattier, F. Leyge).
considérablement remanié depuis la fin de l’Antiquité, a
dû être plus ou moins délaissé à partir des X-XIe s., sinon
qu’il était déjà en grande partie ruiné à cette date. On doit
relever également que l’abandon ou le déclassement de
l’édifice s’est produit avant qu’un cimetière véritable ne
se soit constitué auprès de son abside ou plus largement à
ses abords.
C’est en fait dans la partie méridionale de la fouille,
sur l’emplacement de l’ancien temple 3 et du baptistère,
que les vestiges les plus tardifs ont été mis en évidence
(fig. 43). Ici, un troisième bâtiment se superpose nettement aux constructions antiques et paléochrétiennes. Ne
respectant plus l’orientation de l’édifice baptismal, il se
présente comme un grand vaisseau rectangulaire d’une
largeur hors œuvre de 7,90 à 8 m. Bien que l’aménagement
d’une terrasse de culture ait provoqué la destruction de la
majeure partie de l’ouvrage, des lambeaux de murs (murs
49 et 50), repérés au moyen de tranchées de reconnaissance en 1985, appartiennent selon toute vraisemblance à
la terminaison orientale du bâtiment qui devait atteindre
19,40 m de longueur hors tout. Outre son orientation, ledit
bâtiment se distingue des constructions antérieures (baptistère et temple) par le matériau utilisé. Il s’agit d’un calcaire
coquillé jaune mis en œuvre sous la forme de blocs parallélépipédiques (0,65 x 0,80 m) occupant toute la largeur
des murs. Des blocs plus étroits (0,7 x 0,25 m) sont parfois
disposés en boutisse ou en carreau dans les parements.
L’ensemble est lié au mortier. La façade occidentale
comprend deux contreforts d’angle et l’on peut noter à la
base de la façade méridionale le remploi d’une cuve de
sarcophage (fait 31) disposée perpendiculairement au mur.
Ce dispositif a pu servir lui aussi d’ancrage à un autre
contrefort.
La mise en culture du site a provoqué la disparition
presque complète des niveaux de sols. Ne subsistent que
des éléments d’un possible radier de sol (U.s. 4157)
constitué de galets et de petites plaquettes de schiste.
Celui-ci recouvre toutes les fosses des sépultures et
contient quelques fragments de céramiques vernissées des
XIV-XVe s. qui fournissent le principal repère chronologique utile à la datation de l’édifice.
En revanche, les critères objectifs manquent pour en
déterminer la fonction exacte. L’orientation du bâtiment et
son implantation sur les vestiges du baptistère du haut
Moyen Âge font songer de prime abord à une église. La
perspective n’est en effet pas improbable même si l’on
reste étonné de l’absence de tombes médiévales tardives
tant à l’intérieur qu’aux abords du nouvel édifice.
Toutefois, on ne peut exclure que les lambeaux de murs
nos 49 et 50 - qui forment angle - puissent appartenir à un
hypothétique chevet plat sensiblement plus étroit que la
nef. En admettant une telle hypothèse, deux grands scénarios
d’interprétation doivent dès lors être envisagés. La
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ROUJAN-MEDILIANUM (?) DE L’ANTIQUITÉ AU MOYEN ÂGE…
construction d’un nouveau lieu de culte à la fin du Moyen
Âge constituerait un acte de remplacement du vieil édifice
à abside, dont on a vu qu’il pouvait être déjà partiellement
ruiné au seuil du second millénaire. Inversement, du fait
de sa localisation sur l’ancien baptistère, l’édification d’un
nouveau sanctuaire peut aussi s’inscrire dans la tradition
d’un second lieu de culte dans le quartier Saint-Jean.
Quoi qu’il en soit et qu’il s’agisse ou non d’une église,
ce bâtiment témoigne d’abord d’un temps de réinvestissement dans un quartier désormais situé non plus au cœur de
la vie locale mais à l’écart d’un village restructuré auprès
d’un château sur une colline dominant l’ancienne agglomération. La rareté voire l’inexistence des tombes postérieures au Xe s. pourrait indiquer un déclin du quartier et
un changement de statut du ou des sanctuaires dès l’approche
de l’an Mil. De fait, la nouvelle phase de construction que
l’on détecte dans ce quartier à la fin du Moyen Âge peut
être liée à une toute autre dynamique (équipement du
castrum ?) que celle associée jusqu’à présent à la mémoire
cultuelle du lieu.
Dans cet ordre d’idée, il n’est sans doute pas anodin de
noter qu’aucune église dédiée à Saint-Jean n’est mentionnée
dans la documentation écrite locale tout au long des XIXIIIe s. Cela est d’autant plus surprenant que l’émergence,
dans le courant du XIe s., du proche prieuré de Cassan,
sanctuaire de rayonnement régional, lève par l’intermédiaire de ses archives un opportun coin de voile sur cette
zone de la campagne biterroise. À la charnière des XI et
XIIe s., c’est une église jusqu’alors inconnue, dédiée à
Saint-Laurent et située à environ 400 m au nord-ouest du
quartier fouillé qui s’impose comme le sanctuaire paroissial
de terroirs maintenant associés à la dynamique du castrum
de Roujan. La nouvelle hiérarchie de l’habitat qui se
construit au cours des XI-XIIe s., de même que l’irruption
de la communauté religieuse de Cassan, ont bouleversé la
vieille organisation ecclésiale locale. Privé(s) d’une intégration au sein d’un réseau dynamique (chapitre de
Béziers, mense épiscopale, abbayes ou prieurés locaux), le
ou les sanctuaire(s) du quartier Saint-Jean n’ont plus
guère été entretenus. Après le Xe s., l’attraction funéraire
du lieu paraît elle-même très nettement s’essouffler. Cette
perspective générale expliquerait du moins qu’aucun
sanctuaire dédié à Saint-Jean ne soit mentionné dans les
bulles de confirmations qu’obtiennent les évêques de
Béziers ou les grands sanctuaires locaux et que l’on n’en
trouve pas plus de traces dans les listes d’églises dressées
lors des règlements de conflits qui purent opposer ces
différents établissements tout au long des XIe-XIIIe s.
Aussi le silence des textes n’est-il pas seulement un effet
des sources et trouve-t-il une correspondance possible
avec les données archéologiques.
Il faut en fait attendre le milieu du XVe s. pour disposer
d’une première mention ayant trait au quartier Saint-Jean.
L’érudition locale a rapporté en effet la mention extraite
d’un compoix de 1455, aujourd’hui perdu, d’une église
St-Johan et d’une infirmerie liée au prieuré de Cassan
(Crouzat 1859, 98). En 1621, dans les registres paroissiaux, il est question de transférer la cloche de SaintLaurent de Roujan à « la chapelle Saint-Jean » (Crouzat
1859, 99). Quinze ans plus tard, l’évêque de Béziers,
Clément de Bonsi, en visite à Roujan, recommande
d’entourer le cimetière de la paroisse de murailles en utilisant les pierres provenant de « la démolition de la vieille
église Saint-Jean de la Mathe » (Segondy 1972, 98,
d’après le manuscrit 22 f° 388 des anciennes AM de
Béziers). Si le projet fut bien mis à exécution c’est donc
seulement à partir du second tiers du XVIIe s. que les
vestiges d’un ancien lieu de culte au quartier Saint-Jean
disparurent du paysage bâti.
De quelle église s’agit-il ? Si l’on se fie à l’analyse des
dernières données archéologiques, l’existence d’une tombe
datée par radiocarbone des années 896-1147, recoupant
l’extrémité occidentale du mur nord de la nef, tend à prouver
que l’édifice à abside d’origine paléochrétienne était
sinon détruit à cette date du moins considérablement
réduit.
Reste, dès lors, le bâtiment rectangulaire construit au
bas Moyen Âge sur l’ancien édifice baptismal, même s’il
peut aussi bien s’agir de cette église Saint-Johan que de
cette infirmerie du prieuré de Cassan mentionnées en
1455. Nœud gordien ! D’après le chanoine J. Segondy
(1972, 461), qui paraît se fonder sur les travaux de l’abbé
Soupairac, archiviste de l’évêché de Montpellier à qui
Mgr de Cabrières avait commandé avant 1884 un mémoire
pour servir à la vie de saint Guiraud, prieur de Cassan,
l’église Saint-Jean de la Matte aurait eu « vingt-deux pas
de long sur huit de large ». Ces dimensions sont en définitive assez proches de celles du bâtiment partiellement
dégagé en 1985 puisque celui-ci atteignait 8 m de large et
au moins 19 m de long. L’argument est à manier avec
prudence car il faut sans doute accepter ici les limites de
la documentation et d’une fouille en définitive peu étendue
qui a porté de surcroît sur un quartier assez arasé. À moins
d’admettre qu’une autre église située hors de l’emprise de
fouille a pu exister, l’hypothèse la plus plausible demeure
que l’église Saint-Jean encore visible au XVIIe s. corresponde finalement à l’édifice bâti au bas Moyen Âge sur
l’emplacement de l’ancien baptistère. La dédicace à SaintJean est d’ailleurs un ultime argument susceptible d’étayer
ce scénario. On retiendra encore que le déterminant
« La Mathe” associé à l’hagiotoponyme a non seulement
éclipsé le souvenir du nom d’une ancienne agglomération
mais renvoie aussi à un quartier rural peu cultivé, indice
possible de la marginalisation de cet espace dans la vie
locale à l’époque moderne, sinon dès la seconde partie du
Moyen Âge.
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3.6
De la memoria au groupe ecclésial :
propositions chronologiques
À l’issue de cette présentation des différentes composantes d’un ensemble cultuel, baptismal et funéraire
bipolaire complexe, où les incertitudes chronologiques
sont nombreuses, il convient de résumer en quelques
lignes les principales phases de sa genèse et de son évolution
(fig. 53).
La première mutation qui affecte le secteur cultuel du
haut Empire, on l’a vu, est d’ordre funéraire. Quelques
tombes à inhumation, sous tuiles ou en coffrages mixtes,
viennent en effet s’inscrire à l’est du sanctuaire septentrional, selon une orientation Nord-Sud, dans un espace
jusqu’alors laissé libre à la circulation et à l’accès - via un
escalier - au temple à podium (fig. 53, phase 2a). Si ces
sépultures n’ont pu faire l’objet d’une datation radiocarbone,
leur typologie permet de les situer chronologiquement
entre le IVe et le VIIe s.
D’autres tombes prennent place dès le courant du Ve
ou au plus tard au début du VIe s. dans l’ancien temple 1
réutilisé comme mausolée, voire transformé en memoria
des premiers temps chrétiens s’il s’agit d’honorer le souvenir d’un personnage saint ou martyr, ainsi que le suggèrent
les développements que va connaître par la suite cet édifice.
Les seules données archéologiques ne nous permettent en
effet pas de savoir si les premières inhumations précèdent
ou succèdent à la christianisation du site ; elles n’éclairent
pas non plus la relation antériorité/ contemporanéité/
postériorité qui a existé entre la série d’inhumations précédemment évoquée, implantée à l’est du temple 1, et
celles qui se logent dans son enceinte. Quoi qu’il en soit,
cette étape marque la désaffection du culte antique au profit
d’une destination funéraire des lieux.
La zone d’inhumations gagne assez rapidement les
abords immédiats de l’édifice, notamment sur son flanc
méridional. L’espace relativement contraint de l’ancien
temple 1 bénéficie d’une première extension occidentale,
alors même qu’est construit, une dizaine de mètres au sud
du bâtiment funéraire et aux dépens de l’ancien temple 3
totalement dérasé, un baptistère (fig. 53, phase 2b). Cette
phase de construction, que des techniques de mise en
œuvre identiques dans les deux secteurs permettent de
croire synchrone, intervient au plus tard dans le courant
du premier tiers du VIe s. La présence d’une piscine baptismale suppose à tout le moins celle d’une église mais, et
ce n’est pas là le moindre des paradoxes de ce dossier, la
localisation de l’espace réservé à la liturgie reste incertaine
pour cette époque. L’édifice funéraire faisait-il déjà également office de lieu de culte ou celui-ci était-il situé dans le
prolongement oriental du baptistère, selon le dispositif le
plus fréquemment rencontré en Gaule méditerranéenne ?
L’arasement du site ne nous permet malheureusement
d’étayer ni l’une ni l’autre de ces deux hypothèses.
La création d’un chœur liturgique est en revanche
attestée au cours de la phase suivante avec la construction,
plaquée à l’est de l’édifice funéraire primitif, d’une travée
droite et d’une courte abside semi-circulaire (fig. 53,
phase 3). La présence de ce chevet orienté interdit du
même coup l’accès à l’édifice par l’Est, tel qu’il pouvait
s’être maintenu depuis l’Antiquité. À cette extension
orientale correspond un second agrandissement du bâtiment
sur son flanc ouest, l’église correspondante atteignant
ainsi une superficie utile supérieure à 80 m². Les rares
éléments de datation disponibles situent cette double
réalisation dans la seconde moitié du VIe s. au plus tôt et
avant la fin du VIIIe s. au plus tard.
Parallèlement, des tombes prennent place avec une
densité certaine à l’intérieur et aux abords du baptistère,
ce qui ne va pas sans renforcer le constat de bipolarisation
de la vie religieuse autour de deux édifices distincts.
L’existence éventuelle d’une nef et d’un chevet, prolongeant à l’est le baptistère qui aurait pris place dans la
salle occidentale d’un édifice plus complexe, ne peut
certes être vérifiée ; il convient toutefois d’indiquer que,
dans cette hypothèse, le pôle religieux du quartier SaintJean s’articulerait autour de ce qu’il est convenu d’appeler
un groupe ecclésial.
Le précieux fil d’Ariane chronologique que constitue
l’étude de la nécropole - grâce notamment au recours aux
datations 14C des sujets inhumés - témoigne par ailleurs
d’une interruption radicale de l’activité funéraire sur le
site autour de l’an Mil (fig. 53, phase 4). Qu’advient-il
alors de cet ensemble cultuel créé dès la fin de l’Antiquité,
objet de remaniements divers au cours du haut Moyen
Âge ?
Le sanctuaire à abside semble ruiné, au moins en partie,
dès le courant du XIe s. ; quelques constructions légères
postérieures attestent d’une poursuite de l’activité sur les
lieux mais le caractère très lacunaire et ponctuel des
vestiges interdit toute interprétation à leur égard. Le
déclin du quartier et/ou le changement de statut des
édifices cultuels antérieurs paraît en tous cas indéniable. Il
faut ensuite attendre la fin du Moyen Âge pour que se
manifeste un renouveau dans l’occupation du secteur,
avec la construction d’un grand bâtiment rectangulaire
venu se superposer au baptistère sans en respecter l’orientation (fig. 53, phase 5).
L’explication de ce hiatus - au moins apparent - de plus
de trois siècles est à chercher ailleurs, non plus dans
l’analyse monographique de données matérielles dont on
atteint ici les limites mais dans leur mise en perspective au
sein d’un contexte local et régional aussi bien archéologique qu’historique. C’est ce à quoi nous invitons à présent
le lecteur dans une deuxième partie qui, à l’instar de l’ensemble cultuel et funéraire chrétien mis en évidence ici,
puise ses sources dans l’Antiquité.
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Fig. 53 : De l’Antiquité au Moyen Âge : évolution du noyau monumental du quartier Saint-Jean à Roujan
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L’AGGLOMÉRATION DE ROUJAN ET SA PLACE DANS LA
CITÉ DE BÉZIERS
4. L’AGGLOMÉRATION DU HAUT EMPIRE
4.1 Du péribole au forum
La question s’est rapidement posée de l’existence ou
non d’un péribole englobant les temples. On a vu supra
que les recherches entreprises à ce sujet avaient permis la
mise au jour partielle de trois murs formant angle droit, ce
qui nous avait conduit à proposer une clôture de l’espace
des sanctuaires, à l’Ouest, au Nord et au Sud, matérialisée
au moins par un simple mur. L’étroitesse des tranchées
ouvertes à la recherche de ce dispositif de fermeture de
l’espace sacré ne permet toutefois pas d’exclure la présence
d’un aménagement plus complexe tel qu’une galerie
comme à Ampurias par exemple (Aquilué 1984 ;
Sanmartí-Grego 1987, 55-57). Le mur pourrait en effet
être doublé soit par une colonnade soit par un autre mur,
si celui qui a été dégagé est un stylobate. Cependant, les
tranchées ouvertes de part et d’autre du mur 21 ont mis en
évidence des remblais jusqu’à un 1,50 m de profondeur,
cote à laquelle le substrat apparaît. Ces remblais sont
constitués par des dépotoirs - l’un d’entre eux étant uniquement constitué de coquilles d’huîtres - recelant un lot
homogène de mobilier céramique des Ier et IIe s. de n. e.
Leur présence indique que l’on se trouve, à l’arrière des
temples, dans un espace particulier ayant fait probablement
l’objet d’un aménagement en creux assez important, sans
que l’on puisse déterminer ni son étendue ni sa fonction.
Cet argument va donc dans le sens de l’existence à cet
endroit d’un dispositif plus complexe que le simple mur
de clôture.
Entre la façade des temples et la zone 3, les tranchées
et les travaux n’ont rencontré aucun vestige, ce qui plaide
pour la restitution d’un espace ouvert. Ce dernier mesure
au maximum 38 m de long, d’Est en Ouest, et il est fermé
par un mur (de bâtiment ?). Si, sur les côtés, on restitue
des portiques à partir des alignements de dés de calcaire
coquillé, une place de 33 m de large se dessine (fig. 54).
Le rectangle ainsi obtenu n’est pas géométriquement parfait, dans la mesure où les directions des différentes
constructions qui entourent la place sont parfois assez
divergentes. Ainsi, compte tenu à la fois des résultats des
relevés opérés à l’alidade lors de la fouille, du levé partiel
réalisé en 2000 au tachéomètre à distance-mètre électromagnétique et des longueurs de vestiges, cinq groupes
d’orientation apparaissent. Les temples, le « péribole » et
la partie sud de la construction H2 sont orientés à 18 °
ENL ; l’alignement des deux bases est à 20 ° ENL ; le mur
41 et le bâtiment H1 sont orientés à 13 ° ENL ; le mur 32 et
le mur 39 sont orientés autour de 11 ° ENL ; enfin le mur 40
et la partie nord du bâtiment H2 sont autour de 8 ° ENL.
Des recherches menées sur les parcellaires protohistoriques
et romains dans la plaine de Nîmes montrent que seul un
écart d’au moins 5° peut être considéré comme significatif
(Séjalon et al. à paraître). De ce fait, on ne retiendra ici
que la formation de deux faisceaux, l’un à 18-20 °, l’autre
entre 8 et 13 °. En tout état de cause, la place devait avoir
la forme d’un trapèze irrégulier avec un redent à l’Est
comme paraît l’indiquer le dé de calcaire isolé décalé dans
cette direction (s’il ne s’agit pas d’un élément de bâtiment).
Aucun accès évident à cette place n’a été observé.
Cependant, l’empierrement 3019 - limité par les murs 32
et 40 - a toutes les caractéristiques d’un aménagement
destiné à supporter une circulation de véhicule. Il est en
outre bien placé pour former l’extrémité d’une voie qui
s’interromprait à l’entrée de la place pour ne permettre
qu’une circulation piétonnière. Cette ouverture potentielle
débouche dans l’axe du grand temple même si elle n’est
pas parfaitement alignée.
Dans le cadre d’une première notice consacrée à
l’agglomération gallo-romaine de Roujan (Vidal et al.
2002), une fois établi que les trois temples étaient précédés
d’un espace ouvert limité en partie par de probables
portiques (fig. 55), une rapide recherche avait permis de
mettre en évidence de fortes similitudes avec les forums
de Belo (Pelletier et al. 1987) et de Sufetula (Balty 1991,
113) (fig. 56). Cette observation nous avait amenés à
poser l’hypothèse de l’appartenance des sanctuaires de
Roujan à un centre civique. Par là même, cela pouvait
reposer la question rebattue de l’emplacement des deux
oppida latina de la liste de Pline, dont la localisation
régionale occupe une partie de l’histoire locale : Piscinae
et Lutevani qui et Foroneronienses, mais peut-être
aussi du chef-lieu des Rutènes provinciaux (Christol
1998 ; Garmy, Schneider 1998 ; Vidal et al. 2002 ; Mauné
2003). En outre, l’hypothèse d’une agglomération
secondaire dotée d’un forum amenait à s’interroger sur
l’extension des territoires de Béziers et de Lodève au haut
Empire. Le récent article d’Alain Bouet, consacré au
problème du « forum » dans les agglomérations secondaires, montre bien la fragilité d’une identification
reposant seulement sur une interprétation de vestiges
archéologiques très lacunaires (Bouet 2005). Cependant,
parmi tous les cas étudiés, celui d’Alésia semble atypique
et paraît finalement assez proche de celui de Roujan,
même si pour ce dernier rien ne permet d’identifier avec
quelque vraisemblance une basilique ou une curie. En
effet, A. Bouet note que pour Alésia, le « forum » est
l’aboutissement d’aménagements successifs, allant du
remplacement à la dotation en bâtiments publics (temple à
péribole, puis basilique et curie) ; à noter que l’ensemble
est disposé autour d’un espace ouvert se développant
de part et d’autre d’une voie. La condamnation de la
voie ainsi que la création d’une porte monumentale et de
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Fig. 54 : Plan général du « forum »
portiques régularisent un peu, en dernier lieu, le cadre
architectural. En l’état du dossier de Roujan, cela peut
aussi s’appliquer aux probables portiques et au seul accès
(DAO L. Vidal).
identifié. On le voit, finalement, poser l’hypothèse de
l’appartenance des sanctuaires de Roujan à un forum n’est
pas si improbable.
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Fig. 55 : Environnement des temples de Roujan dans leur environnement
(DAO L. Vidal).
Fig. 56 : Plans comparés
des secteurs cultuels des
fora d’Ampurias, Belo,
Sufetula, Alésia et Roujan
(DAO L. Vidal).
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4.2 L’agglomération et sa périphérie
durant le haut Empire
Depuis le XIXe s., les découvertes fortuites effectuées
au gré des travaux agricoles dans les quartiers de SaintJean, du Valat de Ligno et de Médéyo ont été associées à
la présence d’une grande villa. Ce n’est qu’à partir des
années 1990, grâce au développement des prospections de
surface et à la révision systématique d’une documentation
abondante conjuguée au niveau national à une réévaluation
du phénomène des agglomérations dites secondaires, que
l’image d’un habitat groupé a fini par s’imposer à Roujan
(Vidal et al. 2002). Le nouveau bilan dressé à l’échelle
régionale du Languedoc-Roussillon (Fiches dir. 2002) de
même que les récentes réflexions engagées autour de la
notion de « villa » (Leveau 2002) et des relations entre
villae et vici (Pellecuer 2005) permettent aujourd’hui une
meilleure évaluation de la documentation roujanaise.
4.2.1 L’insertion de l’agglomération dans la trame locale
des établissements ruraux
Les prospections conduites dans la périphérie de
l’agglomération laissent entrevoir une partie des rapports
de voisinage entretenus avec les différents établissements
ruraux du secteur, plus précisément avec les centres
domaniaux. Située à une vingtaine de kilomètres de
Béziers, sur les marges septentrionales de la cité dans un
espace de transition entre les monts d’Orb et la vallée de
l’Hérault, l’agglomération de Roujan se développe
d’abord non loin du point de captage de l’aqueduc de
Gabian qui assurait une partie de l’alimentation en eau de
la capitale. Elle se trouve également à proximité de la
zone cuprifère dite de Cabrières (Gourdiole, Landes 1998)
dont les gisements de minerai pouvaient également
s’étendre dans les environs même de Roujan, à Neffiès et
Vailhan notamment.
Le secteur de Roujan était déjà bien occupé depuis la
fin du IIe âge du Fer. Aux établissements ruraux du Ier s.
av. n. è., abandonnés avant la première moitié du Ier s. ap.
J.-C. (Canobols : 0,4 ha ; La Vigne du Figuier : 0,06 ha ;
Padoulette 2 et Peilhan 2, tous situés sur la commune de
Roujan), s’ajoutent ceux qui perdurent durant le haut
Empire (à Roujan toujours, La Colombe, Montels I, Notre
Dame 2) ou plus tard encore (Saint-Nazaire à Roujan, La
Vérune à Neffiès). Cette trame ancienne se densifie durant
les Ier et IIe s. de notre ère et l’on commence à pouvoir
envisager des notions de hiérarchisation en prenant en
compte la superficie des établissements (fig. 57). Au bas
de l’échelle se trouvent de petits établissements inférieurs
à 2 000 m² dont on ne sait s’ils correspondent tous à des
habitats (Montels 2 et 3 : 0,2 ha ; La Grange haute : 0,06 ha ;
Champ de l’Aire : 0,1 ha ; Lestacarède : 0,09 ha), mais à
l’autre extrémité émergent maintenant des établissements
qui dépassent un hectare de superficie. Dans un rayon
d’environ 3 km autour de Roujan, au moins six établissements majeurs qui ont tous livré des éléments de confort
et d’apparat (statuaire, marbre, enduits peints,
mosaïque…), sont à retenir parce qu’ils peuvent désigner
les principaux centres domaniaux du secteur. Cela concerne,
d’Ouest en Est, les sites de La Prade à Alignan-du-Vent
(1 ha), Saint-Nazaire à Roujan (2 ha), La Perrière à
Margon (1,2 ha), Peilhan 1 (1,4 ha) et Les Embals (2,5 ha)
à Roujan, La Vérune à Neffiès (1,5 ha). Le plus proche
(Peilhan I) est à seulement 1 km à vol d’oiseau du cœur de
l’agglomération antique, autrement dit à moins d’une
demi-heure de marche des temples. Il est d’ailleurs lui
même à proximité d’un autre établissement majeur (Les
Embals : 2,5 ha), situé à 2 km à l’ouest du quartier SaintJean. À leurs abords gravite tout un chapelet d’établissements
qui peuvent correspondre à des fermes autonomes ou
dépendantes de ces deux centres principaux. On ne peut
entrer ici dans les détails de ces rapports de domination
mais l’on doit souligner le poids de cette zone située à
l’ouest de l’agglomération dans la production agricole
locale. Ce versant méridional du relief de Sainte-Marthe,
densément occupé pendant toute l’Antiquité, laisse entrevoir non seulement la complexité des rapports sociaux qui
se sont noués entre fermes, centre domanial et agglomération,
mais aussi l’occupation permanente de ce secteur jusqu’au
cœur du haut Moyen Âge en dépit des modifications qu’a
pu connaître la trame des établissements ruraux. Au cours
des VII-VIIIe s., l’Église de Béziers paraît elle-même
disposer de biens sur ce versant, s’il est permis d’identifier
la villa Piliano avec le site antique et haut médiéval de
Peilhan 2 (C. Béz., 64).
La périphérie sud de l’agglomération se présente
différemment. Le premier centre domanial majeur (SaintNazaire, à 1,7 km du quartier Saint-Jean) dépasse 2 ha de
superficie mais ne comporte aucun autre établissement
dans un rayon d’au moins 1 km autour de lui. Ici le système
d’exploitation paraît plus centralisé et la propriété du sol
peut être plus homogène. Entre cette possible grande villa
et l’agglomération de Roujan, s’intercalent cependant
deux localités intermédiaires. Coudouloux (0,15 ha) est un
modeste établissement du haut Empire mais le site dit de
La Plaine est plus important (0,5 ha), plus proche du quartier Saint-Jean (situé à 800 m) et surtout plus stable car sa
durée d’occupation se prolonge au moins jusqu’au seuil
du Ve s. Ce dernier établissement implanté non loin du
rivage de la Peyne permet d’évoquer le cas plus original
de différents noyaux d’occupation très proches les uns des
autres, répartis de part et d’autre du cours d’eau mais qui
pouvaient relever d’une même localité. À environ 2 km du
quartier Saint-Jean et à 1,5 km du centre domanial de
Saint-Nazaire, dans un méandre de la Peyne, se trouve
d’abord un point d’occupation d’environ 0,6 ha occupé
durant toute l’Antiquité. Cet établissement (Notre-Dame 1)
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Trignan
Grange de Cassou
Le Malpas
La Grange haute
St-Saturnin
La Tuilerie
C. de l’Aire
C. Nègre
Le Cimetière
V. du Figuier 2
Lestacarède
V. du Figuier 1
Peilhan 2
Pecheraud
Padoulette 2
La Colombe
Padoulette
St-Jean
Paudelettes
C. de Pons
Les Grèzes
Fig. 57 : La périphérie de Roujan durant le haut Empire
(L. Schneider).
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ROUJAN-MEDILIANUM (?) DE L’ANTIQUITÉ AU MOYEN ÂGE…
émerge à quelques centaines de mètres d’un noyau plus
ancien et bien plus modeste (Notre-Dame 2, 0,05 ha) qui a
livré des fragments d’amphore italique et de la céramique
campanienne. Il est surtout disposé en vis-à-vis d’un
second quartier des Ier et IIe s. de n. è., déployé sur 0,7 ha
sur l’autre rive de la Peyne (Caux, Mougères). Ces deux
noyaux ont livré des éléments de production de terres
cuites et doivent être associés à une officine de tuiliers et
peut-être d’amphores gauloises 4 (Mauné 1998, 207 et 339).
Le secteur nord de l’agglomération contraste avec les
zones que l’on vient de décrire. Ici, au contact de la toile
de fond montagnarde, aucun centre domanial ne peut être
identifié à coup sûr. Des observations ponctuelles effectuées lors de travaux dans le bas du cimetière neuf font
certes état de la présence de tuiles, doliums, amphores et
meule à 1,80 m de profondeur mais ne permettent pas de
préciser la nature exacte d’un point d’occupation antique
dont l’assiette est de surcroît masquée par des colluvions
et le cimetière actuel (Esperou et al. 1989/1991, 211). Les
seuls sites repérés sont modestes. Celui de La Tuilerie ne
dépasse pas 0,16 ha et celui de la Grange Haute atteint à
peine 0,06 ha si bien que l’on hésite à les identifier comme
des habitats. Seule autour de la colline de Montels, en rive
gauche de la Peyne, la multiplication de petites implantations
(Montels 2 et 3) des Ier et IIe s. de n. è. suggère une occupation
permanente de ce secteur dans la mouvance de la mutation
d’un établissement du Ier s. av. n. è. (Montels 1). On doit
souligner ici le rôle qu’a pu jouer dans la vie de ce terroir
l’existence d’une source d’eau minérale froide.
Enfin, les périphéries orientale et nord-orientale de
l’agglomération paraissent avoir été les moins densément
occupées. Du point de vue des modes de peuplement, le
contraste est net avec ce qui s’est produit à l’ouest du
quartier Saint-Jean. En rive gauche de la Peyne, les petits
établissements des Ier-IIe s. sont rares, tandis que le premier
centre domanial important se trouve à presque 3 km de
l’agglomération. Entre cette grande villa de La Vérune et
Roujan aucun établissement de classe intermédiaire n’est
actuellement repéré. On ne peut que signaler vers l’ouest
(à 2,5 km du quartier Saint-Jean et à 1,5 km de La Vérune)
le site de Saint-Saturnin (0,45 ha), qui fut occupé pendant
la première moitié du Ier millénaire.
Cette approche préliminaire de la répartition des établissements ruraux dans la périphérie de l’agglomération
antique de Roujan peut aider à amorcer une analyse des
interactions spatiales entre les sites. Malgré les lacunes
d’une documentation fondée pour l’essentiel sur des
prospections de surface, l’exercice doit être tenté afin de
multiplier les études de cas susceptibles d’enrichir notre
perception des logiques territoriales qui ont présidé à
l’organisation des campagnes des Ier et IIe s. de n. è.
S’agissant de la cité de Béziers, les modèles emblématiques
fournis par les rythmes de développement et de récession
des grandes places indigènes d’Ensérune, Monfau et dans
une moindre mesure Cessero/Saint-Thibery ont peut-être
trop vite conduit à penser que l’évolution des localités
secondaires de la cité durant le haut Empire se posait
essentiellement en terme de déclassement. À ce titre,
Roujan, du fait de l’ampleur de son centre monumental
du Ier s., fournit désormais un premier contre-exemple.
Cette originalité invite dès lors à s’interroger sur les relations
de voisinage, les interactions et les rapports territoriaux
qui ont pu se produire entre agglomération secondaire et
centres domaniaux (Pellecuer 2005).
Aux confins septentrionaux de la cité, Roujan occupe
de fait une place bien individualisée dans le maillage de
l’habitat rural. Un modèle radial élémentaire ne suffit pas
à rendre compte de la situation. Dans la moitié nord d’un
cercle théorique qui atteint au moins 2 km depuis le cœur
de l’agglomération, aucun établissement majeur n’est
actuellement repéré et aucun établissement isolé n’a
connu une stabilité d’occupation qui dépasse trois siècles
d’existence. Il faut dépasser un rayon de 2,5 km pour trouver
un centre rural qui présente une superficie supérieure à 1 ha,
mais aussi des éléments de confort, de la statuaire et une
longue occupation (Terrer et al. 1999). L’établissement de
La Vérune pourrait dès lors s’inscrire dans une position
territoriale indépendante par rapport à l’agglomération.
D’un point de vue spatial, les deux centres étaient susceptibles de bénéficier d’un territoire de production autonome
de plusieurs centaines d’hectares et d’engendrer à partir
d’un réseau annexe la mise en valeur de nouvelles terres.
La situation est en revanche beaucoup plus complexe dans
la moitié sud de ce cercle théorique centré sur Roujan. Au
Sud-Est, un premier maillage de sites de moyenne importance mais à occupation stable semble avoir été déterminé
par l’axe de la Peyne. Au Sud et au Sud-Ouest ce sont en
revanche de grands ensembles domaniaux qui sont désormais
inclus dans ce cercle de 2 km. Le plus proche est à environ
1 km de l’agglomération, un autre est à 1,7 km et le dernier
à 2,2 km. Qui plus est, dans le cône ouest-sud-ouest, on l’a
vu, la multiplication de l’habitat dispersé apparaît comme
une originalité qui rend compte d’une distribution interstitielle des établissements ruraux derrière laquelle se profile,
dans le temps long, toute la complexité des stratégies
d’appropriation des terres et des recompositions domaniales.
La proximité de ces centres domaniaux peut découler ici
d’un effet de polarisation induit par la présence de l’agglomération. Dans le même sens, la continuité d’occupation
de ces espaces entre Antiquité et Moyen Âge, malgré les
modifications qu’a connues ici la trame des établissements
ruraux (émergence du site de Peilhan 2 à la fin de
l’Antiquité), ne semble pouvoir se comprendre qu’en
association avec le devenir de Roujan. Au final, l’agglomération qui disposait d’un quartier monumental susceptible
d’organiser la vie locale pouvait également jouir d’un
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espace nourricier autonome, ce qui invite à considérer
qu’elle n’était pas exclusivement vouée à fournir un réservoir
de main d’œuvre pour augmenter la rentabilité des
domaines du voisinage. Bien au contraire, l’agglomération
de Roujan semble bien avoir constitué la tête d’un réseau
local d’établissements ruraux et son centre monumental
témoignerait de la capacité de ses habitants à investir dans
des constructions collectives.
4.2.2 La question du nom de l’agglomération
et de son statut
En l’absence de découverte épigraphique, le nom et le
statut exact de l’agglomération nous échappent. La longue
occupation du site, sa superficie, et surtout son quartier
monumental que l’on ne peut dissocier de son devenir
paléochrétien constituent néanmoins des éléments fondamentaux d’appréciation et de discrimination qui font
s’interroger sur l’éventuelle dignité urbaine de l’établissement. On l’a vu, même si l’hypothèse de l’existence d’un
forum à Roujan n’est pas improbable, le risque de surinterprétation est réel et il serait périlleux de déduire, sur la
seule base des données archéologiques lacunaires en notre
possession, que l’agglomération ait été détentrice à coup
sûr du statut municipal. Aux confins des cités de Béziers
et de Lodève, le dossier de Roujan permet néanmoins de
s’interroger sur le rôle que cette place à portique bordée
de sanctuaires a pu jouer dans le renouvellement des
valeurs civiques. Si rien ne permet avec évidence d’attribuer
à Roujan une fonction politique, les temples eux-mêmes
et le rôle possible de tête de réseau qu’a pu tenir l’agglomération au sein du maillage de l’habitat rural font au
moins entrevoir des fonctions économiques, administratives
et religieuses locales.
Une récente hypothèse suggère de régler le problème
du statut de l’agglomération du quartier Saint-Jean en
l’identifiant avec l’oppidum latinum de Piscinae mentionné
dans la liste de Pline (Mauné 1998, 26 ; Mauné 2003,
288). Cette identification ne paraît guère convaincante
pour plusieurs raisons. Elle se fonde pour l’essentiel sur le
constat de l’absence de découvertes archéologiques
significatives à Pézenas même et sur des suggestions
toponymiques rapprochant la forme latine de Piscinae
avec la forme médiévale Pedina dont est issue la Peyne,
ce cours d’eau affluent de l’Hérault sur la rive duquel se
trouvent le bourg médiéval de Pézenas, l’agglomération
antique de Roujan mais aussi la localité de Pézénes (lesMines). Outre le fait que ce rapprochement toponymique
déjà ancien ne fait pas l’unanimité (Hébrard 1937 ;
Hamlin 1983, 285), G. Barruol (Barruol 2002, 23, 29 et
31) considère que la liste de Pline mentionnant Piscinae
est une liste alphabétique. En conséquence Piscinae pourrait être recherchée n’importe où en Narbonnaise. Quand
bien même on accepterait l’hypothèse d’une proximité
toponymique entre Piscinae et Pedina/Peyne et quand
bien même aussi on donnerait une autre interprétation à
l’organisation de la liste de Pline (Christol 2004, 103), il
faudrait encore expliquer pourquoi le souvenir de ce nom
aurait disparu dans la proximité de l’agglomération de
Roujan pour passer à la localité de Pézenas qui est à une
distance de plus de 10 km. Enfin, compte tenu de la faiblesse de la documentation, l’hypothèse de l’existence
d’un oppidum indigène sous le village médiéval de
Roujan paraît elle aussi incertaine et ne fait qu’ajouter à
l’opacité du dossier. N’ayant pas pu obtenir accès à des
collections de mobiliers des Ier et IIe âge du Fer brièvement
signalées qui proviendraient de Roujan (Mauné 1998, 26
et 2003, 288), nous ne pouvons à ce propos que nous
baser sur les vestiges du Ier s. av. n. è. - très discrets - mis
en évidence dans l’emprise limitée des fouilles du quartier
Saint-Jean. Pour toutes ces raisons, il convient sans doute
de faire un plus large écho à la proposition de G. Barruol
pour tenter de localiser Piscinae en dehors de la vallée de
l’Hérault et peut-être même du Languedoc.
Du reste concernant le nom de l’agglomération antique
découverte à Roujan, il est possible de formuler une
hypothèse alternative beaucoup plus simple. Les artefacts
archéologiques sont aujourd’hui dispersés sur une assiette
d’environ 7 ha, soit sur trois quartiers cadastraux différents. Celui de Saint-Jean est devenu le vocable éponyme
et conventionnel de l’agglomération du fait des découvertes
réalisées dans les années 1980. Il existe cependant deux
autres toponymes à prendre en considération. Le « Valat
de Ligno » fait allusion à un petit ruisseau qui naît au
contact de l’agglomération tandis que le nom du troisième
quartier « Médéyo » fait explicitement référence à un
toponyme ancien connu dans une charte de la fin du Xe s.
(C. An., n° 240). À cette date, alors que le castrum de
Roujan n’est sans doute pas encore élevé, les terroirs
situés dans le voisinage de la Peyne sont associés au cadre
d’une villa dénommée Plevigios/Plevegius. Ce toponyme
peut dériver du latin plebs au sens médiéval de communauté paroissiale. Cela suggère qu’avant la fin du Xe s., le
nom antique de l’agglomération était déjà perdu au profit
d’une appellation pouvant faire plus explicitement référence
au passé chrétien de la localité. Nous reviendrons plus en
avant dans le texte sur cette question. Pour l’heure, on
voudrait surtout retenir qu’un champ de cette villa est
curieusement dénommé vers 988 par le double vocable de
Redario sive Mediliano. Le premier terme s’est maintenu
jusqu’au XIXe s. sous la forme « Campredier », qui désigne
un quartier cadastral (1833, section B2) délimité par deux
petits ruisseaux affluant de La Peyne à environ 500 m au
nord-est de l’église Saint-Laurent, dans le secteur du
cimetière actuel dont on vient de voir qu’il masque en
partie un établissement antique de nature indéterminé
(quartier périphérique de l’agglomération {?}, centre
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ROUJAN-MEDILIANUM (?) DE L’ANTIQUITÉ AU MOYEN ÂGE…
domanial {?} ou simple annexe {?}…). Le second
vocable Mediliano/Medilianum peut être rapproché en
revanche du quartier cadastral actuel de Médéyo où se
trouve une partie de l’assiette de l’ancienne localité
antique et médiévale. On peut dès lors y voir le souvenir
du nom primitif de l’agglomération antique découverte à
Roujan, d’autant plus qu’il s’agit là d’un nom forgé autour
d’un toponyme (medio-lanum) fréquemment attesté
(Delamarre 2003, 221-222). Cela introduit du moins une
nouvelle perspective qui montrerait que la question de
l’émiettement de la vie civique ou que le développement
de petits centres politiques n’était pas forcement préjudiciable au développement de la capitale biterroise. Bien au
contraire, dans ce secteur de piémont, situé aux confins
d’un espace montagnard rendu attractif par ses ressources
métallifères, Roujan/Medilianum pouvait dès lors apparaître
comme un pôle de développement et d’organisation du
territoire colonial biterrois au contact des Lutevani et
des Ruteni Provinciales selon la récente proposition de
M. Christol (Christol 1998, 213).
L’équipement de l’agglomération à la fin de
l’Antiquité (baptistère), le lien possible que cela suggère
avec l’Église biterroise, le rôle de « ville relais » qu’a pu
jouer la localité jusqu’au seuil du haut Moyen Âge dans la
vie locale sont d’autres indices qui montrent que l’entité
administrative constituée autour de Roujan n’avait pas
connu de déclassement. C’est à l’évocation de cette phase
chronologique, entre Antiquité et Moyen Âge, qu’il nous
faut maintenant conduire le lecteur.
5. L’AGGLOMÉRATION DANS SON CONTEXTE À LA FIN
DE L’ANTIQUITÉ ET DANS LE HAUT MOYEN ÂGE
Roujan/Medilianum, on vient de le voir, fait partie des
rares agglomérations d’origine antique à être identifiées
dans le territoire de la cité de Béziers où la recherche
ancienne s’est surtout focalisée sur les plus grands oppida
de la périphérie de Béziers (Ensérune, Magalas/Monfo)
mais aussi autour des questions de localisation et de statut
des rares localités antiques mentionnées dans les textes
comme ces oppida latina de Cessero/St-Thibery et
Piscinae/Pézenas (?), ou plus symptomatiquement encore
autour du comptoir massaliote d’Agatha.
On le voit, c’est donc surtout à la question des origines
de ces agglomérations et aux problèmes de la romanisation
que s’est intéressée l’historiographie récente. Le dossier
roujanais apparaît dès lors comme relativement original,
en ce sens qu’il permet d’une part d’identifier une agglomération gallo-romaine inédite de la cité de Béziers et
qu’il offre d’autre part pour cette catégorie d’établissement
une documentation finalement assez rare pour la fin de
l’Antiquité.
5.1 Entre Biterrois, Agadés et Lodévois :
l’agglomération de Roujan dans l’espace régional
à la fin de l’Antiquité
S’il n’est pas dans notre propos de traiter en détail de
l’état des réseaux ruraux de la cité de Béziers à la fin de
l’Antiquité, il n’est sans doute pas inutile d’en rappeler
les lignes de force pour tenter, par ce jeu d’échelle, de
resituer au mieux la position occupée par Roujan au sein
de la cité qui l’a vu naître. On connaît mieux aujourd’hui
la profondeur des mutations qui ont affecté le tissu de
l’habitat rural au cours de la seconde moitié du IIe et du
IIIe s. Le phénomène a été mesuré en différents points de
la Narbonnaise (Fiches dir. 1996) et plus précisément en
biterrois au cœur de la vallée de l’Hérault. Ce sont presque
deux tiers des établissements ruraux qui disparaissent à
cette date (Mauné 1998,117 et 287). Le mouvement est tel
qu’il peut aussi affecter des habitats groupés. Dans la vallée
de l’Hérault en Lodévois, l’agglomération de PeyrePlantade se dissout (Bermond, Pomarèdes 2002) et celle
des Aulas à Saint-Saturnin connaît des signes de récession
(Rascalou, Schneider 2002). Ces abandons modifient
considérablement le réseau des « places centrales » de la
cité et de ses marges tout en amplifiant et prolongeant le
mouvement de récession de plusieurs places indigènes,
déjà bien engagé au cours du Ier s. de n. è. comme dans le
cas des vieux oppida d’Ensérune ou de Monfau (Fiches
2002b ; Olive 2002). Même des agglomérations anciennes
comme Agde paraissent connaître des difficultés durant le
haut Empire (Ugolini 2002). En l’état de la documentation,
le semis des principaux pôles de peuplement de la cité
biterroise et de ses marges paraît donc être, du fait de son
amaigrissement, radicalement différent au seuil du VIe s.
de ce qu’il fut quatre à cinq siècles plus tôt. Derrière cette
vérité d’évidence, on insistera sur la signification que
prennent dès lors les trajectoires propres à l’Antiquité
tardive, non plus dans la perspective du paradigme,
désormais éculé, d’un déclin mais bien dans celle d’une
période de restructuration et de dynamisme. Agde tout
d’abord, dont la situation ne paraissait guère brillante
durant le haut Empire, accueille un siège épiscopal avant
le seuil du VIe s., siège rehaussé en 506 du prestige que lui
confère la tenue d’un concile où les prélats ont pu, en ces
terres encore associées au pouvoir de la royauté toulousaine,
redonner de la vigueur au gouvernement épiscopal des
communautés catholiques. Du point de vue de l’organisation
ecclésiastique, Agde est désormais l’égale de la capitale
biterroise et cette indépendance gagnée ou retrouvée se
double peut-être d’une organisation politique et militaire
autonome si l’on se fie à la présence d’un comte (GT-GM,
M.G.H. S.R.M., I, 2, 1885, 540-541). Cela suggère une
nouvelle organisation administrative du territoire qui trouve
des échos possibles dans l’émergence de nouvelles places
rurales. C’est le cas en particulier des habitats perchés et
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parfois fortifiés créés sur de nouveaux sites ou qui
réinvestissent de vieux oppida abandonnés (Schneider
2001a et 2004). Leur inventaire exhaustif reste à faire en
Languedoc occidental mais l’on peut déjà signaler, sur les
contreforts du biterrois, le cas du castrum de Cabrières à
une dizaine de kilomètres au nord de Roujan, castrum
mentionné par Grégoire de Tours en 532 et partiellement
fouillé dans les années 1980 (Colin et al., 1996 ;
Schneider 2002). Dans le même secteur, mais plus proche
encore de Roujan, se trouve un établissement comparable,
à Montesquieu, créé pour sa part sur un site neuf. On peut
également signaler, cette fois-ci en rive gauche de
l’Hérault, le cas de Leco-Castel à Aumes aux confins des
pays d’Agde et de Béziers (Mauné 1998, 328 et 2002).
Outre leur perchement et leur chronologie de fondation,
ces sites ont également en commun d’avoir été des
chefs-lieux territoriaux dans le haut Moyen Âge, indices
possibles de leur fonction administrative dès la fin de
l’Antiquité.
Les progrès de la mission chrétienne et des nouveaux
cultes des morts contribuent à ce nouveau marquage de
l’espace. On associe d’abord au dynamisme retrouvé du
port d’Agde des influences orientales autour du personnage
de saint Sever, fondateur d’un monastère suburbain. Plus
proche de Roujan, le développement d’un culte de martyr
dans la vieille agglomération de Cessero est, lui aussi, à
l’origine d’une fondation monastique qui accompagne la
revitalisation de la localité à tel point que son nom antique
finit par être supplanté par celui du personnage honoré :
saint Thibéry (Schneider 2001b ; Durand 2004). Il y a là
des points de convergence possibles avec la situation roujanaise, nous le verrons, et ce d’autant plus que des liens
forts ont uni le secteur de Roujan à celui de Saint-Thibery
au cours des IXe-Xe s. De même, dans le cas des établissements de hauteur nouvellement créés, il convient de
s’interroger sur l’existence possible dans l’équipement de
ces sites d’un sanctuaire chrétien dès la fin de l’Antiquité.
Certes les localités évoquées dans la périphérie de Roujan
n’ont pas été suffisamment fouillées pour dépasser le
stade de l’hypothèse, mais l’exemple régional du Roc de
Pampelune - dans les garrigues montpelliéraines - est là
désormais pour illustrer ces situations et s’ajoute à
d’autres cas de figure de Gaule méditerranéenne comme
dans les contextes provençaux des sites de Saint-Blaise,
Constantine et peut-être aussi de Sainte-Propice.
Localement, des églises (non fouillées et non datées) existent
à Aumes et Cabrières et sont associées à des contextes
funéraires tardo-antiques et/ou du haut Moyen Âge
(Soutou 1985 ; Ginouvez, Schneider 1987 ; Mauné 1998,
148).
Reste le fil conducteur des centres ruraux traditionnels
que l’on a pris coutume de nommer villae, entendons par
là les principaux établissements ruraux de la campagne
biterroise, dont la taille est généralement comprise entre
0,5 et 2 ha, qui ont livré des éléments luxueux susceptibles
d’attester l’existence d’une pars urbana et surtout dont la
durée d’occupation atteint déjà au seuil du VIe s. près du
demi-millénaire. Par ce biais, on mesure mieux la spécificité
du secteur de Roujan et plus largement du piémont biterrois
septentrional car ces gros établissements y paraissent plus
fréquents que dans la vallée de l’Hérault (secteur littoral et
d’Agde exceptés) et surtout dans la cité voisine de
Lodève. Avant de décrire plus en détail cette situation,
revenons à l’échelle de l’agglomération roujanaise.
5.2 Du quartier Saint-Jean au quartier Saint-Laurent
à Roujan : des églises multiples ?
L’évolution du quartier Saint-Jean nous montre désormais
comment le secteur des anciens temples a accueilli, après
une première phase funéraire, un nouvel équipement
« officiel » en l’espèce du baptistère, programme qui s’est
accompagné d’un agrandissement contemporain du monument funéraire installé dans le temple 1. Les dimensions
du baptistère (dans l’œuvre 35 m² pour l’hypothèse la plus
basse mais 47 m² si on restitue une salle où la cuve occuperait une place centrale) le placent au dessus du cas de la
salle baptismale d’une église fondée dans la proximité
d’un grand centre domanial comme la villa des Prés bas à
Loupian (Pellecuer, Schneider 2005, 101-102). Elles le
rapprochent en revanche de l’équipement d’une agglomération comme celle du Roc de Pampelune où l’espace bâti,
clairement délimité par une enceinte, dépassait une assiette
de 2 ha. Voilà une première évaluation possible de la vitalité
de l’agglomération de Roujan au cours des Ve-VIIe s. Il
nous faut procéder par ce biais pour l’estimer car, depuis
les années 1980, le développement des lotissements ne
permet plus de procéder à de nouvelles prospections pour
tenter de définir avec précision quelle fut l’emprise exacte
de l’établissement tardif par rapport à l’assiette globale de
l’agglomération du haut Empire, estimée à environ 7 ha il
y a une quinzaine d’années. Il est possible cependant que
des glissements aient pu s’opérer et que de nouveaux
quartiers aient pu émerger. Le cas du quartier de l’église
Saint-Laurent en fournit des indices, sinon une véritable
illustration. Le sanctuaire, que les textes nous montrent de
statut paroissial à la fin du XIe s., est situé non seulement
à l’écart de l’assiette principale de l’agglomération
antique (à 350 m à l’ouest des temples), mais aussi à distance du village médiéval. Cette bipolarisation de l’espace
médiéval est déjà un indice possible de l’antériorité de
cette nouvelle église par rapport au castrum, symptôme
d’une genèse qu’il faudrait donc placer avant le début du
second millénaire. De fait, différents travaux édilitaires
effectués depuis les années 1960 autour du sanctuaire
(voirie, aménagement d’un parc et drainage au pied de
l’édifice), ont occasionné la découverte fortuite de plusieurs
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ROUJAN-MEDILIANUM (?) DE L’ANTIQUITÉ AU MOYEN ÂGE…
tombes en tuiles ou en dalles mais aussi de béton de
tuileau et de céramiques de l’Antiquité tardive (sigillées
claires et DSP notamment). Il se pourrait bien finalement
que l’église Saint-Laurent ait émergé dans un contexte
funéraire de l’Antiquité tardive, peut-être même dans le
secteur où se trouvai(en)t la nécropole principale ou les
nécropoles de l’agglomération des IIIe-VIIIe s. ? Ce quartier
nord-ouest de l’agglomération antique a d’ailleurs livré,
le long de l’actuelle D125, une zone funéraire à incinération
du Ier s. de n. è., tandis que l’aménagement du cimetière
neuf a occasionné lui aussi la découverte de différents
artefacts antiques.
Ces informations, même lacunaires, nous montrent du
moins la complexité du dossier. Les champs du possible
sont nombreux et si l’on hésitait à restituer une ou deux
églises au quartier Saint-Jean, le cas de Saint-Laurent
suggère qu’il faut peut-être encore compter une église
supplémentaire à Roujan dès la fin de l’Antiquité. Cette
multiplication des lieux de culte et des monuments funéraires chrétiens n’est en soi guère surprenante si on la
compare à des situations urbaines. C’est un indice possible
du statut « d’agglomération » de la localité et cela nous
renvoie à la présence du baptistère et à l’interprétation que
l’on peut en faire.
Un tel équipement évoque selon toute vraisemblance le
rôle de l’action épiscopale face à l’exigence d’une certaine décentralisation ordonnée au service des communautés
de la cité. Roujan constituerait dès lors l’un des tous premiers marqueurs des progrès du christianisme en terre
biterroise mais aussi de l’action des évêques dans ce territoire. Les hasards de la recherche placent ce premier marqueur aux marges de la cité, dans le cadre d’une agglomération antique et non pas dans l’un de ces grands établissements aristocratiques que l’on sait être aujourd’hui
nombreux dans un rayon de dix kilomètres autour du cheflieu de cité (Pellecuer 2005). Faut-il s’en étonner pour
autant ? Différentes pistes sont susceptibles de faire apparaître les conflits d’intérêt qui ont pu se nouer sur les
marges septentrionales de la cité autour de Roujan. Un
premier document, le bref d’Ansefred - que l’on doit dater
des VIIe-VIIIe s. et non pas après 1010 comme l’a fait
l’éditeur du Livre Noir (C. Béz., n° 56, 63-65) - nous
apprend d’abord que l’Église épiscopale biterroise était
bien présente dans le secteur, à date haute. À proximité du
vieux captage qui alimentait la capitale, Gabian tout entier
appartenait à son domaine et il en était de même, 5 km
plus au Sud, de l’église Saint-Pierre à Abeilhan édifiée sur
le sommet d’un coteau dominant la grande villa de l’Étang.
Plus curieuse est la possible présence de l’Église lodévoise
dès le VIe s. sur ces terres réputées biterroises. Au lendemain de l’intégration de la Septimanie au royaume franc,
des diplômes impériaux confirment à l’évêque de Lodève
des biens situés immédiatement au nord de Roujan dans le
secteur de Fontès et de Nizas (C. Lod., n° 5 ; Schneider,
Garcia 1998, 97-98). L’enjeu réside sans doute dans la
possession de relais le long de la voie de piémont qui
conduisait de Béziers et du littoral à Lodève et au delà au
Massif central. L’origine de ces biens peut relever des
luttes territoriales et de l’opposition entre francs et wisigoths
qui se sont déroulées en 532 autour du castrum de
Cabrières (Schneider, Garcia 1998, 93-96).
La juxtaposition de ces différentes possessions épiscopales
- que l’on croit pouvoir restituer à partir de ces épaves
documentaires - est peut-être symptomatique de la
concurrence qu’ont pu se livrer les Églises locales. Le
canon 9 du concile d’Orange de 441 évoque en effet explicitement le cas d’églises construites par un évêque « dans
le territoire d’une autre cité que la sienne » (Munier 1963,
80-81). Au delà des simples progrès de la cura animarum,
la présence d’un baptistère à Roujan relève peut-être aussi
d’une stratégie de contrôle des places secondaires de la
cité, autrement dit d’un processus de marquage de l’espace
rural aux marges de deux cités antiques. N’attendons pas
cependant de ce dossier plus qu’il ne peut apporter. La
faiblesse de la documentation archéologique est réelle
face à ces questions d’ordre institutionnel. Elle ne doit pas
toutefois nous faire renoncer à bâtir cette géographie locale
de l’histoire ecclésiastique, comme nous invite à le faire le
récent colloque de Toulouse (Guyon 2005, 255). Il est
possible en effet de progresser en tentant de replacer les
monuments de Roujan dans leur contexte micro-régional,
c’est à dire autant que faire se peut en les insérant dans les
réseaux du peuplement local.
5.3 Entre Libron et Boyne :
les réseaux locaux du peuplement dans le piémont
nord biterrois à la fin de l’Antiquité
La révision de la carte archéologique et les prospections
de vérification effectuées dans le piémont biterrois au
début des années 1990 permettent aujourd’hui de disposer
d’un corpus important de sites susceptibles d’aider à resituer
plus clairement la localité de Roujan dans les réseaux de
peuplement qui l’ont portée (Besombes-Vailhé coord.,
1989 ; Esperou et al., 1990 à 1994). Dans une zone d’environ 34 km² entre Libron au Sud et Boyne au Nord, on
dispose aujourd’hui d’un corpus d’une cinquantaine
d’établissements dont les vestiges sont dispersés en surface sur une superficie de plus de 0,5 ha, c’est à dire d’établissement majeurs dont la durée d’occupation est déjà
pluriséculaire au seuil du Ve s. En l’absence de fouilles
nombreuses, le critère de la taille de ces établissements
demeure l’un des plus objectifs pour tenter d’en établir
une hiérarchisation préliminaire, comme ont pu le
déterminer les récentes expériences conduites en terres
lodévoises (Garmy et al., 2005a et b).
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5.3.1 Les réseaux locaux : approche préliminaire de la
hiérarchisation des établissements ruraux
à une dizaine de kilomètres au sud-ouest de Roujan - ressort
du même type d’interrogation, bien que l’occupation
poursuivie jusqu’au cœur du Moyen Âge soit un facteur à
prendre en compte dans l’évaluation archéologique de
l’assiette occupée. Du reste la répartition de ces trois
centres majeurs, agglomérations putatives, laisse voir une
certaine ordonnance logique : équidistance moyenne relative
de 9 km entre les trois pôles et surtout implantation dans
les bassins moyens des principaux cours d’eau de l’espace
examiné (La Peyne pour Roujan, La Thongue pour
Bétignan, le Libron pour Saint-Nazaire). Les sites de la
classe immédiatement inférieure (1,75 à 3 ha) ne sont guère
plus nombreux (5 cas). Leur répartition est sensiblement
différente cependant et fait ressortir une certaine spécificité
du secteur roujanais. Les sites des Embals et de SaintNazaire sont en effet relativement proches de Roujan
(moins de 2 km) et implantés sur la même rive de la
La figure n° 58 montre la répartition spatiale de ces
établissements ordonnés selon 4 classes : de 0,5 à 1 ha, de
1 à 1,75 ha, de 1,75 à 3 ha et au delà. Sans surprise Roujan
avec son assiette globale de 7 ha domine le corpus.
Cependant la localité n’est pas seule à dépasser le seuil de
3 ha dans cette zone du piémont biterrois. À 6 km au Sud
émerge le cas de Bétignan (Abeilhan). Ici, les vestiges
sont dispersés sur une superficie maximale de 7 ha et sont
plus nettement concentrés sur une assiette de 3,5 ha qui
doit correspondre au noyau central de l’établissement. Il
n’est dès lors pas exclu que ce centre rural occupé au
moins jusqu’au Ve s. corresponde à une agglomération
inédite de la cité biterroise et non pas à une grande villa.
Le troisième cas, celui de Saint-Nazaire (Magalas) - situé
Castrum de Cabrières
(532, Hist. Fr. III, 20-22)
A. St-Georges
de Boussac
P. Maidergues
F. Les Pradesses
Montesquieu. R.A.
F. Carlencas
N. Trignan
F. Le Plos sud
N. Lavérune
P. Vareilles
ROUJAN
F. Combe del Veyre II
N. St-Jean
de Roca
V. du Figuier
G. Prat Bidal III
Peilhan II
Peilhan
M. St-Martin d’Agel
La Plaine
Les Embals
P. St-Jean
M. St-Jean
M. Octavian
P. St-Martin
M.
Les Affaniès
P. St-Jean
de Bébian
St-Nazaire
Bosoul
A. La Prade
M. La Perrière
M. Le Pendut III
P. St-Pierre
P. Jurières b.
S.G. St-Celse
A. La Mathe
P. Mirabel
P. Las Grangettos
P. La Roustanienque
A. St-Jean
P. Lauribelle
A. Camp Nègre
P. St-Martin
de Chichery
Ab.
St-Jean
M. ST-Nazaire/Granios
P. La Prade
P. La Condoumine
A. Le Clap
Lico-Castel
A. L’Etang
P. La Perrière
PISCINAE ?
P. Les Rodettes
P. Peyre Segade
Ab. Bétignan
P. L’Amandier
T. La Crouste ouest
E. La Croix du Py
T. St-Jean de Buade
E. Cap de l’Homme
S. Ste-Rose
T. Les Demoiselles Ouest
N. St-Alban
V. Les Combes
S. St-Adrien
BEZIERS (6 km)
CESSERO
Fig. 58 : Les établissements ruraux entre Boyne et Libron aux Ve-VIe s. (L. Schneider).
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ROUJAN-MEDILIANUM (?) DE L’ANTIQUITÉ AU MOYEN ÂGE…
Peyne. Les autres cas répondent à des situations différentes.
L’établissement de l’Étang à Abeilhan reste proche de
Bétignan (à 3 km en rive gauche de la Thongue) mais son
implantation en bordure d’un plan d’eau entre Lène et
Thongue répond à une autre logique. La situation est du
reste identique pour la Croix du Py, situé grossièrement à
mi-distance de Bétignan (6 km) et Saint-Nazaire (5 km), à
l’interfluve Libron/Lène. Reste le cas isolé des Pradesses
à Fontès dans la moyenne vallée de Boyne qui paraît désigner une situation intermédiaire entre les deux classes
d’établissements. Rien n’exclut là encore que l’on ait
affaire à une petite agglomération plutôt qu’à une villa.
L’établissement des Pradesses est distant de près de 10 km
de Roujan et peut répondre à une nouvelle tête de réseau
déployé autour de la Boyne. Les sites de la classe 3 (entre
1 et 1,75 ha) sont plus nombreux (13 cas). Marbres,
mosaiques, enduits, tubulures - mais parfois aussi statues
comme à La Vérune (Neffiès) - sont des marqueurs de
confort habituellement associés à l’existence d’une pars
urbana, interprétation qui fonde par ricochet la reconnaissance de villae authentiques. Le corpus est ici nettement
plus hétérogène. Alors que les sites de classe 1 et 2 comportaient tous des occupations de l’Antiquité tardive, à
l’exception du site des Demoiselles à Tourbes pour lequel
la présence d’ateliers de potiers gonfle artificiellement
l’assiette de l’habitat proprement dit, ceux de la classe 3
intègrent désormais des établissements abandonnés avant
le IVe s. et d’autres pour lesquels l’occupation tardive est
mal documentée ou incertaine (réduction de l’assiette des
vestiges, faiblesse de l’échantillonnage des céramiques,
réoccupations ponctuelles dont la nature exacte échappe à
l’enquête du fait de l’absence de fouille…). L’inégalité de
la documentation et ses incertitudes pose donc plus
clairement le problème de l’état réel de ces localités à un
instant T lorsque qu’on veut tenter d’aborder pour euxmêmes les réseaux d’habitat de l’Antiquité tardive.
Du point de vue de l’organisation spatiale on peut
néanmoins relever trois tendances principales :
- 1. la distance entre les établissements de rang 3 encore
clairement occupés au Ve s. n’est jamais inférieure à 5 km ;
- 2. la répartition de ces établissements accentue l’effet de
polarisation déjà constaté autour de Roujan ;
- 3. elle renforce également la densité de l’occupation du
piémont, notamment au nord de Béziers dans les bassins
moyens du Libron, de la Lène et de la Peyne.
Désormais, l’opposition devient manifeste entre ce
secteur et ceux de la vallée de l’Hérault. La voie de piémont
reliant Béziers au Lodévois dessine d’ailleurs une ligne de
clivage assez nette entre ces différents réseaux locaux du
peuplement. La distribution des établissements de rang 4
(entre 0,5 et 1 ha) ne fait d’ailleurs qu’accentuer ces
observations. Émerge alors une organisation territoriale
inégale : une zone de peuplement dense et complexe qui
concentre des établissements à occupation stable appartenant aux quatre rangs dans les bassins moyens du Libron,
de la Lène et de la Thongue, zone à la périphérie de
laquelle se démarque plus au nord le secteur de Roujan où
semble s’organiser un nouveau réseau local. Ces deux
secteurs s’opposent dès lors à la partie basse des bassins
qui s’ouvrent sur la vallée de l’Hérault, où la trame des
établissements devient plus clairsemée, moins stable et
suggère des réseaux nettement moins hiérarchisés, notamment entre Boyne et Dourbie au contact du Lodévois. Il
sera nécessaire toutefois de confronter ces premières
remarques à de nouvelles analyses qui intègrent les progrès
méthodologiques et technologiques des systèmes de
modélisation en archéologie du peuplement, notamment
celui « du système de ville » (Garmy et al. 2005b ;
Nuninger et al. 2006). Pour l’heure, elles doivent permettre
d’inscrire le dossier de la christianisation en biterrois
- ouvert avec le cas de Roujan - dans une perspective qui
ne se satisfait plus d’un simple inventaire du mobilier
liturgique ou d’une liste des « plus vieux lieux de culte »
établie par méthode régressive à partir des textes du
Moyen Âge, ou plus simplement encore à partir d’une
chronologie fondée sur le seul examen des vocables. Sur
la figure 59 nous avons donc replacé l’ensemble des
indices archéologiques et historiques qui concernent la
christianisation en relation avec le tissu de l’habitat rural
du piémont nord-biterrois, afin de tenter de cerner la position de Roujan d’abord au niveau local, puis au niveau
micro-régional selon le jeu d’échelle adopté dans cette
contribution.
5.3.2 Églises et établissements ruraux
dans le piémont nord du biterrois
Roujan, on vient de le voir, a pu constituer la tête d’un
réseau local d’habitat. Au moins trois établissements de
rang 2 et 3, c’est-à-dire de possibles villae, existaient dans
son proche périmètre, à 3 km pour le plus lointain (La
Vérune) mais à seulement 1,5 km pour le plus proche
(Saint-Nazaire). On doit remarquer que le plus éloigné,
bien qu’occupé jusqu’aux Ve-VIe s., n’a livré aucun indice
de l’existence d’un sanctuaire chrétien ni par l’archéologie,
ni par les textes, ni par un hagiotoponyme. On connaît en
revanche la qualité de cet établissement où l’on a découvert
des éléments de statues, notamment une tête de personnage
imitant le portrait impérial d’Hadrien. Une inscription
révèle aussi la présence d’une grande famille, les Coelii,
également attestée dans un autre domaine de la vallée de
la Peyne (Camp-Nègre à Alignan) situé à 5 km au sudouest de Roujan (Terrer et al. 1999 ; Mauné 1998, 297298). Voilà une situation qui, dans ce secteur, commence
à nuancer le schéma peut-être trop rigide que l’on assigne
au rôle de l’aristocratie dans l’édification d’églises rurales
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Marie-Geneviève COLIN, Laurent SCHNEIDER, Laurent VIDAL avec la participation de Martine SCHWALLER
Gouvernement relativement coercitif dans la mesure où il
paraît contenir les initiatives locales de l’aristocratie sur
ses propres domaines, à moins qu’il nous faille encore
envisager le problème différemment en soulignant la
lenteur de la diffusion des équipements ecclésiaux, sinon
la faiblesse de l’encadrement des populations rurales au
cours des Ve-VIe s. ? Face à ces questions d’ordre institutionnel, la prudence reste évidemment de rigueur. Last but
not least, le troisième établissement de rang 2 situé à
proximité de Roujan témoigne de cette complexité du
paysage chrétien par rapport à l’espace rural et aux
réseaux d’habitat. Ici, le site antique conserve sur sa lisière
orientale un sanctuaire en élévation (fig. 60) dont le
périmètre est associé à un contexte funéraire et à des
céramiques du haut Moyen Âge (VIe-VIIIe s.). L’église
elle-même, dédiée à Saint-Nazaire comme la cathédrale
de la cité, n’apparaît dans la documentation écrite qu’au
milieu du XIIe s. et ne semble jamais avoir été associée
aux réseaux des grands établissements ecclésiastiques du
à partir de la lecture traditionnellement faite du canon 24
du concile d’Agde de 506. Dans ce texte est en effet
évoquée une tentative de hiérarchisation entre les églises
officielles des cités et les « oratoires » construits par les
élites sur leur domaine, d’où la restitution peut-être trop
systématique d’une campagne déjà couverte et homogénéisée par « un blanc manteau d’églises ». Le cas du groupe
d’établissements de rang 2 et 3 (Peilhan 1 et 2, Les
Embals), établis à moins de 2 km à l’est de Roujan, ressort
d’ailleurs du même type d’interrogation. Ici aussi, malgré
la taille des établissements et leur forte concentration,
aucun indice d’église n’est détectable dans l’assiette
même des sites ou dans leur proche périmètre. Cela tend à
valider l’hypothèse du caractère officiel de l’équipement
du quartier Saint-Jean à Roujan, ou autrement dit à souligner
le rôle de l’action épiscopale dans le choix de l’implantation
du baptistère au sein d’une agglomération. L’idée d’un
gouvernement central des communautés chrétiennes
locales mis en œuvre depuis la cité en sort renforcée.
Castrum de Cabrières
(523, Hist. Fr. III, 20-22)
St-Georges (1123)
St-Rome ?
F. Les Pradesses
Ste-Marie (1154)
Montesquieu R.A.
St-Martin ?
MONASTERIUM S. STEPHANI
que vocant Trignano
(990)
St-Jean ?
P. Vareilles
St-Laurent ?
St-Jean
in ecclesia pagi
nomine Octovianis
(fin Xe s. ?)
ROUJAN
St-Jean ?
de Roca
St-Jean ?
St-Nazaire
St-Jean ?
M.
Les Affaniès
St-Jean ?
St-Pierre ?
St. Martini
de Grazano
(1088)
Lico-Castel
St-Martin ?
St-Jean ?
St-Celse ?
St-Nazaire ?
St-Nazaire ?
L’Etang
E. La Croix du Py
ecclesiam
S. Johannis (990)
Villa Nasiniano
(V. 848)
E. Cap de l’Homme
S. Ste-Rose
V. La Tour
S. St-Adrien
BÉZIERS (6 km)
CESSERO/St-Thibéry
Fig. 59 : Essai de géographie locale de la christianisation dans le piémont biterrois entre Antiquité et Moyen Âge
(L. Schneider).
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ROUJAN-MEDILIANUM (?) DE L’ANTIQUITÉ AU MOYEN ÂGE…
secteur, monastiques ou épiscopaux. S’agit-il d’une église
privée, d’un oratoire dont la genèse remonterait à
l’Antiquité tardive mais qui fut dépourvu de ressort fiscal
propre au cours du Moyen Âge ? En l’état du dossier la
question reste posée. On doit noter cependant que le type
d’architecture de l’édifice, composé d’une nef unique
(7,45 x 5,45 m hors œuvre) terminée par un chevet rectangulaire plus étroit (3,6 x 4,18 m), voûté en plein cintre et
désaxé, renvoie à des plans connus dès la fin de
l’Antiquité (Roc de Pampelune) et largement diffusés
dans le secteur pendant tout le haut Moyen Âge
(Schneider, Paya 1995).
Fig. 60 : L’église Saint-Nazaire de Roujan
(cl. L. Schneider).
Le cas de Saint-Nazaire pose plus précisément la question
de la densité des édifices à fonction essentiellement funéraire dans le paysage de l’Antiquité tardive. Sur ce point
les données archéologiques locales apportent quelques
précisions. À moins de cinq kilomètres de Roujan à SaintÉtienne-de-Trignan (Neffiès), des fouilles anciennes ont
mis au jour un ensemble de sarcophages et de tombes
diverses qui paraît associé à un bâtiment orienté, établi lui
aussi en lisière d’un établissement antique - rang 5, inférieur
à 0,5 ha - (Gondard 1966 ; Ginouvez, Schneider 1987 ;
Mauné 1998, 407). Une charte de 990 identifie cet
ensemble comme un monasterium dépendant de SaintThibéry, lui-même associé à deux églises : Saint-Eusèbe et
Sainte-Marie (C. Béz., n° 46, 48). On aurait donc là
l’exemple d’un oratoire funéraire situé à la périphérie
d’un modeste habitat antique qui finit par échoir à une
communauté monastique durant le haut Moyen Âge. Un
exemple sensiblement comparable est donné 8 km au
nord-est de Roujan par l’établissement de rang 2 dit des
Pradesses à Fontès. Là encore, des fouilles partielles
réalisées dans les années 1960 ont mis au jour un groupe
de sept sarcophages au sein du vaste établissement
antique. La qualité de la documentation ne permet pas de
les associer clairement à un édifice particulier mais l’on
sait néanmoins qu’une église dédiée à saint Martin,
possession des moines d’Aniane, existait dans le secteur
au XIIe s. Différentes alternatives existent quant à la localisation précise de cette dernière, soit sur le site même des
Pradesses comme l’affirme l’érudition locale du XIXe s. et
comme le contexte funéraire découvert dans les années
1960 paraît le confirmer, soit à 1,5 km au Sud-Est où se
trouve un tènement Saint-Martin et où l’on a mis au jour
des tombes du haut Moyen Âge (Mauné 1998, 359). Du
reste, les deux hypothèses ne s’excluent pas. La récession
et l’effacement de l’établissement des Pradesses après le
VIe s., comme l’arrivée des moines de Saint-Benoit
d’Aniane au plus tôt au seuil du IXe s., ont pu être des
facteurs qui ont conduit au déplacement et au changement
de statut d’un oratoire à fonction funéraire.
On pourrait presque à loisir multiplier ces dossiers
locaux. Entre Saint-Étienne de Trignan et Saint-Martin de
Seilhès/Célessou se trouve également le cas de SainteMarie de Carlencas, édifiée là encore en lisière d’un site
antique. Le contexte funéraire n’est suggéré que par la
présence d’ossements épars, mais comme à Saint-Nazaire,
un lot de céramiques antérieures au IXe s. évoque une
origine possible dans l’Antiquité tardive. Dans le corpus
micro-régional des établissements antiques du piémont
biterrois que nous avons pu dresser, établissements de tous
rangs qui furent occupés au moins jusqu’aux Ve-VIe s., près
de 68 % des quarante cas inventoriés ont ainsi porté à un
moment donné de leur histoire une église dans leur proche
périmètre ou au sein même de l’assiette occupée. Il faut
par conséquent accepter les limites de la documentation et
se contenter pour l’heure de présomptions d’indices, en
construisant ces inventaires préliminaires qui manquent
pour tenter d’aborder l’espace rural dans toute sa complexité. On insistera en revanche sur la prégnance de ces
sanctuaires funéraires agrégés à des centres domaniaux
dans le paysage des Ve-VIIe s.
Hormis un édifice à fonction probablement funéraire,
les grands centres domaniaux situés dans le proche voisinage de Roujan ne semblent donc pas avoir comporté de
lieux de culte, ce qui renforce le statut de tête de réseau de
l’agglomération et témoigne peut-être aussi de la vigueur
de l’action épiscopale dans ce secteur. Le modèle que l’on
croit pouvoir restituer à Roujan peut dès lors être confronté à
ce qui s’est passé dans le reste du piémont nord biterrois,
notamment entre Libron et Peyne. Ici l’apparition des
premières églises dans leur rapport aux réseaux d’habitat
répond à trois grands scénarios :
- 1. dans le premier cas de figure, le souvenir d’une église
n’est évoqué que par l’intermédiaire d’un hagiotoponyme
associé au tènement qui porte les vestiges d’un établissement
tardo-antique de rang 1 à 4, indice toponymique parfois
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corrélé à un texte médiéval ou à une tradition érudite qui
attestent à un moment donné de l’existence d’une église.
La pauvreté de la documentation s’ajoute ici à l’impossibilité d’établir une chronologie et n’autorise finalement
qu’une cartographie d’attente même si, ça et là, le hasard
des découvertes de sarcophages permet parfois d’identifier
une fonction funéraire ancienne dans l’assiette même des
sites ou à leurs proches abords ;
- 2. le deuxième cas de figure renvoie plus clairement à un
schéma topographique homogène. Ici l’église n’est pas
implantée au cœur ou à proximité immédiate de l’établissement tardo-antique mais à une distance qui peut aller
jusqu’à 1 km. C’est une situation que l’on retrouve au
moins trois fois au sein des six établissements majeurs du
piémont (rang 1 et 2, Roujan excepté). À Bétignan,
l’église Saint-André est établie en vis à vis du pôle
antique sur un coteau voisin. Dans le même secteur, celle
de Saint-Pierre d’Abeilhan, connue par les textes dès les
VIIe-VIIIe s., est perchée sur le sommet d’un coteau et
domine la villa de l’Étang située en contrebas. Dans le
bassin du Libron enfin, l’église Notre-Dame-des-Pins est
implantée à près de 1 km de l’établissement de la Croix du
Py, autre grande villa possible. Le phénomène évoque le
cas du sanctuaire paléochrétien de Saint-Cécile à Loupian
dans ses rapports avec la villa des Prés-Bas située à 800 m,
deux sites qui ont heureusement bénéficié de fouilles
récentes (Pellecuer, Schneider 2005). L’ampleur du
sanctuaire ainsi que la présence d’un baptistère et d’annexes liées au culte évoquent une église de statut public
mais la distance qui la sépare du centre domanial fait
hésiter sur l’homogénéité de la population qu’elle est
censée desservir, comme sur les promoteurs qui sont à
l’origine de sa construction. Grand laïc soucieux d’ajouter
aux dominations sociales et économiques qu’il exerce sur
les populations de son domaine le pouvoir nouveau d’un
encadrement spirituel ou, au contraire, pasteur d’une Église
locale introduisant aux marges du domaine l’équipement
nécessaire à ces nouvelles luttes d’influence ? Est-il
possible de trancher en l’absence de dossier épigraphique ? Le cas de Saint-Pierre/L’Estang à Abeilhan,
sanctuaire tenu par l’Église de Béziers aux VIIe-VIIIe s.,
pourrait néanmoins servir à défendre le second scénario.
On insistera également sur le rôle de pivot joué dans le
temps long par ce type d’édifice dans l’organisation de la
vie des campagnes, notamment parce qu’ils ont pu coaguler
un habitat à leur abords durant le haut Moyen Âge lorsque
les centres domaniaux traditionnels se sont effacés. Au
cœur du Moyen Âge, les trois cas évoqués du piémont
biterrois avaient d’ailleurs des fonctions paroissiales et
dans un cas au moins (Notre-Dame-des-Pins à
Espondeilhan) la fixité du centre paroissial n’a pas été
remise en cause par le mouvement d’incastellamento
durant le Moyen Âge central ;
-3. le troisième cas de figure, beaucoup plus rare (ou
moins documenté), fait apparaître, à date haute, des
églises dans des terroirs éloignés des grands établissements tardo-antiques (plus de 1 km). C’est le cas par
exemple de l’église Saint-Saturnin à Servian, dont l’emplacement est révélé par des découvertes anciennes de sarcophages, de fragments de béton de tuileau, d’ossements
et de céramique de l’Antiquité tardive et du haut Moyen
Âge. Cette église isolée de la rive droite de la Thongue est
à près de 2 km de Bétignan (villa ou agglomération), qui
plus est située en rive gauche. Faut-il l’associer au
démembrement d’un ancien territoire domanial, à une tête
de pont organisant la colonisation de nouveaux espaces
agraires ? Là encore, les réponses sont multiples et font
entrevoir toute la diversité des dynamiques en jeu.
Au total le tableau que nous avons tenté de dresser du
piémont nord biterrois au cours des V-VII/VIIIe s. paraît
faire ressortir la spécificité de la situation roujanaise. Ici
de gros établissements, sans doute des villae, se distribuent en hémicycle dans le proche voisinage de l’agglomération, soit dans un rayon maximum de 2 à 2,5 km. Le
critère de la distribution spatiale suggère l’existence de
liens de dépendances avec un habitat groupé occupant un
rang supérieur dans le territoire de la cité tardive mais
n’exclut pas des rapports économiques de complémentarité
et de partage dans la mise en valeur de l’espace considéré.
Le cas de Roujan montre en définitive, au delà d’une
opposition duale trop rigide, la complexité des relations de
voisinage entre agglomération et exploitation domaniale
dans une cité que l’on avait peut-être trop vite associée au
règne de la villa. L’impact de la christianisation permet
d’envisager d’autres fonctions (religieuses et administratives)
dans ces relations de voisinage. Là encore les relations
spatiales peuvent constituer un critère de classement. Elles
nous ont fait remarquer la faiblesse, sinon l’inexistence, d’un
équipement ecclésial dans les grands établissements
domaniaux situés dans un rayon qui atteint largement 3 km
autour de Roujan, ce qui ajoute au statut de la place qui
comptait pour sa part une ou deux églises en sus de son
baptistère.
Le changement d’échelle que constitue l’évaluation de
la position de la localité entre Libron et Hérault à la fin de
l’Antiquité fait apparaître un « effet piémont » où se
concentrent de très gros établissements (près de dix établissements dépassent 1,75 ha), des centres domaniaux
pour la plupart mais peut-être aussi d’autres agglomérations
jusqu’alors insoupçonnées, comme Bétignan à Abeilhan
et Saint-Nazaire à Magalas, voire aux Pradesses à Fontès.
La cartographie que nous avons proposée suggère une
organisation territoriale axée dans les bassins moyens des
cours d’eau, chaque réseau se déployant de part et d’autre
des rives. Cependant cette carte, par son biais statique, ne
doit pas masquer les dynamiques de long terme qui
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ROUJAN-MEDILIANUM (?) DE L’ANTIQUITÉ AU MOYEN ÂGE…
procèdent d’héritages différenciés du fait d’un substrat
d’occupation inégal dans chacun de ses bassins. Aussi les
proximités observées entre établissements domaniaux et
agglomération à Roujan, qui peuvent traduire une hiérarchie
de peuplement favorable à cette agglomération, ne se
déclinent plus avec la même aisance dans l’ensemble du
piémont biterrois. Le déclassement rapide de l’agglomération protohistorique de Monfau à Magalas durant le haut
Empire en constitue la meilleure illustration. Les symptômes
que l’on croit pouvoir détecter des progrès de la cura
animarum y sont aussi beaucoup plus diversifiés. Les
premières églises ne sont que rarement implantées au sein
même des plus gros établissements (rang 1 et 2) mais
situées plus volontiers dans un voisinage qui atteint 0,3 à
1 km, selon le modèle que fournit le cas de Loupian sur le
littoral. Cette remarque interroge finalement sur les fonctions primitives, funéraires plutôt que « paroissiales », des
églises implantées dans les établissements tardo-antiques
encore actifs. C’est à ce schéma que renvoie le dossier de
la transformation du temple septentrional de Roujan en
possible memoria et c’est l’évocation du souvenir du
personnage honoré durant le haut Moyen Âge qu’il nous
faut maintenant tenter de débrouiller.
6. VERS LE MOYEN ÂGE :
LES SOUVENIRS DU CHRISTIANISME PRIMITIF
6.1 Autour du souvenir de saint Majan : un fil rouge ?
Roujan n’apparaît dans les textes qu’à la fin du IXe s. à
la faveur de circonstances très particulières. Celles-ci
méritent d’être exposées parce qu’elles peuvent être
analysées comme un témoignage indirect d’une certaine
conscience de l’Antiquité des lieux, à un moment où le
paysage bâti se transforme tandis que les populations
locales sont confrontées à de nouvelles tensions économiques et sociales.
Par son plan radioconcentrique, Roujan se rattache
sans difficulté au mouvement qui, un peu partout en biterrois,
a vu se constituer entre les XIe et XIIIe s. des villages
auprès des nouvelles forteresses, tels dans la région
proche Abeilhan, Alignan, Caux ou Servian pour ne citer
que les exemples les plus remarquables (Bourin 1987). Ici
le village médiéval, abrité derrière une enceinte, s’est
développé à quelque 300 m au sud-ouest du groupe cultuel
antique et paléochrétien. En rebord de coteau, il profite
d’une implantation dominante dans le paysage et sans
doute aussi du contrôle d’un axe de communication grossièrement orienté Nord-Sud qui permettait de rejoindre la
voie domitienne par Alignan et Saint-Thibery.
Roujan entre donc dans l’histoire vers 893, du moins si
l’on en croit le récit de la translation des reliques et des
miracles de saint Majan (H.G.L. 1872-1879, V, n° 2, col.
5-8 d’après BN, ms. Lat. 12699). La translatio raconte
que deux moines du monastère biterrois de Colognac
s’étaient rendus en Gascogne auprès du tombeau de
Majanus, dont ils s’emparèrent du corps afin de le rapporter
auprès de leur monastère. L’accueil de ces reliques fut tel
que le nom du saint se propagea dans tout le biterrois et
que le monastère changea finalement de nom en son honneur
pour s’appeler Vallemagnae. Cependant selon ce récit toujours, la popularité de Majan devint si grande que d’autres
établissements revendiquèrent le saint. Ainsi en était-il des
moines de Saint-Thibéry mais aussi de la population du
château de Roujan qui considérait quant à elle que les
reliques provenaient en fait de leur propre localité : « Ad
cujus praesidium innumerus fiebat concursus populorum,
non solum ex vicinis confinibus urbium, sed etiam ex
ultimis partibus Galliarum : in tantum ut sacrum satis et
pulchrum basilicae construeretur aedificium, ubi reconditum
ejus corpus sacratissimus usque hodie ab omnibus veneratur in unum, licet Royani, a quodam castro Biterrensis
dioecesis sic dicti, falso se habere asserant dictum corpus,
quorum insania atque falsitas per hoc veraciter reprobari
potest, cum ante dicti sancti adventum Cognense monasterium diceretur, nunc autem monasterium Vallismagnae,
post villae Majani ab omnibus nominetur » (H.G.L. 18721879, V, n° 2).
Patrick-J. Geary a montré que ce texte était un faux
correspondant à une composition de l’aube du XI e s.,
produite par les moines de Villemagne afin d’ancrer le vol
des reliques dans des temps anciens, quasi-mythiques,
pour faire taire à la fois les revendications du castrum de
Roujan et celles des moines de Saint-Thibéry, qui prétendaient de leur côté posséder le corps en vertu d’une donation
par le comte d’Aquitaine de l’oratoire de Lombez où reposait
Maianus (Geary 1993, 123). Aux arguments déjà évoqués
qui plaident en faveur d’un faux, on ajoutera l’invraisemblance de la référence à un castrum pour désigner, dès la
fin du IXe s., le village de Roujan. Outre que la première
mention certaine du castellum de Royano n’est pas
antérieure au milieu du XIe s. (H.G.L. 1840-1993, t. 3,
n° 167), la topographie du site renvoie plus volontiers à
une forteresse commune aux XIe-XIIe s. qu’à ces vastes
éperons rocheux qui abritent encore les fortifications du
haut Moyen Âge dans la tradition tardo-antique
(Schneider 2003).
Patrick J. Geary (1978-1993) a révélé comment, à la
fin du Xe s., ce saint était déjà populaire en biterrois et
comment les moines de Saint-Thibéry se sont appuyés sur
lui dans le conflit qui les opposait au vicomte Guilhem de
Béziers, qui s’était semble-t-il emparé d’une grande partie
du domaine des religieux. Une guérison miraculeuse de
l’un des proches du vicomte, mis publiquement en contact
avec la sainte relique, fut peut-être à l’origine de la restitution
qu’il opéra en 990 en faveur de Saint-Thibéry, avant de
partir en pèlerinage à Rome (H.G.L. 1872-1879, V, n° 149).
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Dans le courant du Xe s., le culte de Maianus n’était
semble-t-il pas encore localisé à Villemagne mais plutôt
autour du monastère de Saint-Thibéry et de Roujan
comme le laisse entendre indirectement le récit de translation. La première mention qui associe le patronage de
saint Majan à la titulature du monastère Saint-Martin de
Villemagne n’est pas antérieure à 1005 (Alzieu 1986). En
revanche, en 990, le vicomte Guilhem (C. Béz., n° 49)
offre à Saint-Pierre de la cité d’Agde un manse dans la
villa Majanus, villa que le dictionnaire topographique de
l’Hérault (Hamlin 1983, 220) place au voisinage de SaintThibéry à Florensac, domaine de Saint-Apolis ou se
trouverait également une église Sancti Yppoliti de Majano
mentionnée en 1173 (C.C. d’Agde n° 351). En revanche,
peu d’auteurs se sont attachés à commenter les liens tissés
entre Majan et Roujan. Pourtant le récit de la translation
en dit long sur l’état de crispation et la polémique entre les
moines de Valmagne et les habitants du castrum de
Roujan car le rédacteur précise qu’une fois la construction
de la « belle basilique » achevée pour accueillir le corps
du saint à Villemagne, tous venaient le vénérer en ce lieu
« à l’exception des Roujanais » (H.G.L. 1872-1879, V, n° 2,
col. 7). C’est dire qu’au début du XIe s. le souvenir d’une
origine roujanaise des reliques de saint Majan était encore
vivace et que la population locale ne désarmait pas dans
ses revendications. Certes, on ne peut établir aucun lien
formel entre cette tradition et les vestiges paléochrétiens
identifiés par l’archéologie au quartier Saint-Jean, mais la
présence d’un ou de deux lieux de culte d’architecture
ancienne à cet endroit pouvait servir les intérêts roujanais,
dans la mesure où ils inscrivaient l’histoire du christianisme
local dans des temps immémoriaux dont le paysage bâti
portait encore les traces. S’il ne nous est pas permis de
préciser dans quel état exact se trouvaient les bâtiments
tardo antiques au cours des Xe et XIe s., on retiendra que
les lieux accueillaient encore quelques sépultures vers l’an
mil. Cependant l’examen d’autres chartes locales permet
encore de progresser dans ce dossier complexe.
6.2 Une église dédiée à Saint-Majan à Roujan
Il nous faut maintenant assembler différentes pièces de
ce puzzle pour avancer dans l’interprétation.
6.2.1 Premier acte : la présence des moines
de Saint-Thibéry à proximité de Roujan
On vient de le voir, le récit de la translation des
reliques de saint Majan suggère un certain rapprochement
avec les moines de Saint-Thibéry, monastère constitué
dans la vieille agglomération protohistorique et antique de
Cessero autour de la tombe d’un martyr local (Schneider
2001b ; Durand 2004). L’établissement, réformé par
Benoit d’Aniane à la fin du VIIIe s., bénéficie en fait
d’implantations anciennes dans la vallée de la Peyne. On
a déjà évoqué le cas du monastère de Saint-Étienne-deTrignan, implanté autour d’un édifice funéraire de
l’Antiquité tardive à 4 km environ au nord de Roujan.
Celui-ci faisait partie de son domaine avant 990. On peut
encore signaler la possession de fiscs et de biens divers
vers Fontès, ce qui renforce son implantation (Schneider
2001b, 110-112). Cependant l’on doit surtout insister sur
la notice d’un plaid tenu à Narbonne en 870 (HGL, II, c.
355) en présence du marquis Bernard, missus du roi
Charles, au cours duquel l’abbé Bonesinde du monastère
de Saint-Thibéry (que l’on nomme aussi Cesarion) retrouve
la jouissance d’un fisc dénommé Homegianus. Comme
celui-ci est placé en territoire biterrois dans le suburbium
de Cabrières, on doit pouvoir le localiser approximativement
non loin de Cabrières, vers Fontès ou Neffiès, localités
situées elles-mêmes dans la vicaria de Cabrières en 990
où l’on sait que Saint-Thibéry était alors implanté. En
absence d’original, on doit surtout s’interroger sur la
transcription du nom du fisc « homegianus », qui pourrait
ressortir d’une mauvaise lecture et/ou d’une mauvaise
copie d’un « Maianus ». Restons en là cependant à ce
stade du discours.
6.2.2 Deuxième acte : identification d’une église
Saint-Majan dans la villa Pleuvigos
Une copie partielle du cartulaire perdu du prieuré de
Cassan fondé vers 1080, 2 km au nord-ouest de Roujan,
permet de placer une nouvelle pièce sur ce puzzle. En
1139, Sibille et son époux Isarn de Corneilhan, associés à
leur fils, vendent un manse localisé dans une villa nommée
Plivigium qui confronte le manse et le solarium - bâtiment
à étage - de l’église Saint-Majan (C. Cassan, ms 519, acte
n° 34, f° 55-58). Comme, dans le même acte, des pièces de
terres vendues sont localisées dans le terminium de SaintLaurent de Roujan et qu’il est question des rives de la
Peyne, on peut en conclure sans grand risque d’erreur que
cette église et que cette villa ne devaient guère être éloignées
de Roujan. La juxtaposition de deux manses et surtout la
mention d’un solarium associé à l’église Saint-Majan
désignent aussi un noyau monumental respectable dans le
paysage local du XIIe s.
Une autre pièce extraite du cartulaire de Cassan fait
état, en 1108, de la vente du manse de Plivegio et signale
d’ailleurs l’existence d’un autre solarium cette fois-ci
accolé à l’église Saint-Laurent de Roujan (C. Cassan, ms
519, acte n° 32, f° 53-54).
6.2.3 Troisième acte : localisation de la villa Plivigium
Les pièces du cartulaire de Cassan sont précieuses à
plus d’un titre. Elles attestent formellement la présence
d’une église dédiée à Saint-Majan à proximité de Roujan
mais permettent surtout de remettre en contexte deux
chartes du cartulaire d’Aniane que l’on ne savait comprendre
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ROUJAN-MEDILIANUM (?) DE L’ANTIQUITÉ AU MOYEN ÂGE…
du fait de l’absence d’identification des toponymes
évoqués. Voilà des pièces qui nous font revenir à la fin du
Xe s., au moment où les moines de Villemagne ont pu
forger leur récit de translation des reliques de saint Majan.
Voilà aussi des pièces qui après Saint-Thibéry et
Villemagne font intervenir un troisième établissement
monastique dans le secteur de Roujan.
Vers 987-988, un homme nommé Aldo Baroncello
donne en effet à Saint-Sauveur d’Aniane une église située
dans le comté de Béziers dans la vicaria Kadiniase, dans
la villa Plevigos mais sans en préciser la dédicace, ce qui
est pour le moins curieux (C. An., n° 240, 367). Il associe
à cette donation tout ce qu’il possède dans les limites de
cette villa ainsi qu’un champ à Redario et Mediliano. Or
nous avons vu que Mediliano est un nom porté aujourd’hui
encore par un tènement où s’étendait l’agglomération
antique de Roujan, le quartier de Médéyo prolongeant au
nord le quartier Saint-Jean. Cela nous assure désormais
que cette villa s’étendait bien dans la périphérie nordoccidentale de Roujan.
Une seconde charte du cartulaire, datée vers 1000
(C. An., n° 252, 377), correspond à une nouvelle donation
du même personnage de l’ensemble de son alleu situé une
nouvelle fois dans le comté de Béziers, dans la vicaria
Chatunianense, dans la villa Plevegius et dans ses terminia.
L’alleu en question n’est pas décrit, l’église n’est plus
citée mais l’origine de la possession est en revanche
précisée. Aldo le « petit baron » tenait ces biens d’un
seigneur nommé Trustrando. La donation qu’il en fait est
adressée à Dieu, au locus fondé en l’honneur de SaintSauveur, Sainte-Marie (d’Aniane) « (…) et aliorum
sanctorum », et aux habitants qui en desservent les
reliques. La formule plutôt inhabituelle prend peut-être du
sens dans le contexte de crispation qui se nouait autour de
l’affaire de la translation des reliques de Saint-Majan. Ces
chartes ne suffisent certes pas à restituer un épisode complet de l’histoire mais témoignent en tout cas de la percée
d’Aniane dans le secteur de Roujan durant les dernières
décennies du Xe s., et d’une concurrence monastique qui
dépassait le conflit entre Villemagne et Saint-Thibéry.
Depuis le début du IXe s., Aniane disposait déjà de villae
entières dans le secteur, à Nizas notamment et l’on a vu
que ses moines tenaient aussi des églises autour du grand
établissement tardo-antique des Pradesses et sur la lisière
de Carlencas à Fontès.
La donation de l’église Saint-Majan de la villa
Plevigos à ce grand établissement au passé prestigieux
mais en réforme dans le dernier tiers du Xe s. (Schneider
1996, 2006), constitue indéniablement un acte fort même
si l’on ne sait en évaluer la portée réelle. Peut-on
d’ailleurs espérer plus d’un dossier aussi fragmentaire,
dont les rares pièces utilisables ne peuvent être assemblées
qu’avec difficulté ?
6.3 Délocalisation du sacré.
De Saint-Majan et Saint-Jean au prieuré canonial
de Cassan, un dénouement possible
Résumons-nous. Le récit de la translation de saint
Majan, par une allusion furtive à Roujan, nous a conduit à
identifier une église dédiée à saint Majan, personnage
probablement d’origine locale, mort avant les décennies
qui encadrent l’an Mil, c’est à dire au moment où s’ouvrent
de fortes concurrences monastiques dans la dispute de ses
reliques. Cette église est associée dans les années 980 à
une villa nommée Plevegios dont on a la certitude qu’elle
s’étendait jusqu’aux abords du quartier Saint-Jean sans
exclure qu’elle ait pu l’intégrer. À la fin du premier tiers
du XIIe s., au moment où le castrum de Roujan est déjà
bien constitué, le souvenir de cette villa ne s’est pas effacé.
Elle demeure toujours un cadre de référence qui intègre
différents terminia. L’église elle-même est non seulement
en élévation mais des manses se coagulent à ses abords et
il se trouve encore un solarium à son contact comme il en
existait un autre auprès de Saint-Laurent, la paroisse du
castrum. C’est dire qu’il s’agit là d’un noyau de peuplement structuré. Le culte local de saint Majan est d’ailleurs
à cette époque encore assez vivace car une relique du saint
est encastrée dans l’autel de saint Michel et saint Augustin
de Cassan lors de la consécration de l’église prieurale le 6
octobre 1115 (H.G.L. 1840-1993, t. 4, n° 31, 364). D’autre
part, le souvenir d’une église Saint-Majan est marqué à
Roujan par l’existence d’une chapelle placée sous ce
vocable dans l’église paroissiale Saint-Laurent (Fabre
1874, 81). En 1636, l’évêque Clément de Bonsi signale
dans le procès verbal de sa visite à Roujan l’existence
d’un « autel saint Majan au costé Eppitre ». Celui-ci devra
être « pourvu de linge et autres ornements » et l’on y
« exposera ses reliques » (un « os du bras et de la machoire »)
lorsque sera « célébrée messe le jour et la fête du dict
sainct » (Alzieu 1986, 135). En outre, il existe aujourd’hui
encore à Roujan un calvaire dédié à Saint-Majan (la croix
de Saint-Majan). Situé à près de 2 km du quartier SaintJean, à proximité d’une source minérale qui constituait un
point d’attraction notable dans ce secteur, il remploie dans
son socle deux blocs antiques ornés de triglyphes et de
métopes, dont la provenance est incertaine (fig. 61). Fautil y voir les vestiges d’un mausolée de bord de voie
implanté à proximité de la source et d’un gué sur la Peyne
ou considérer qu’il s’agit de blocs provenant des anciens
temples du quartier Saint-Jean ? On ne connaît pas la date
d’édification de ce calvaire. D’après A. Crouzat (Crouzat
1859, 101), les processions à la Croix de Saint-Majan
avaient cessé peu avant 1859, mais le calvaire ne figure
pas sur le cadastre de 1833. Le monument actuel qui
remploie les blocs antiques a peut-être été édifié vers
1874 (lorsque l’on réalisa des fouilles sur le hameau
présumé de Saint-Majan ?), en remplaçant un aménagement
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plus ancien. La localisation de l’église Saint-Majan doitelle pour autant être placée à proximité de ce calvaire,
comme pourrait y inciter aussi l’existence d’un tènement
Saint-Majan ? C’est la piste que semble suivre l’érudition
du XIXe s. qui signale sans trop de précision que des
fouilles réalisées en 1874 auraient mis au jour « des
tombeaux construits avec des briques à rebord » (Fabre
1894, 79). Ces vestiges peuvent cependant se rapporter
aux petits habitats antiques du proche secteur de Montels
tandis que nos prospections sont demeurées vaines à
proximité du calvaire. On peut néanmoins construire une
hypothèse alternative, sachant désormais l’existence
d’une agglomération antique à Roujan et le contexte
archéologique précis du quartier Saint-Jean, mais aussi
cette curieuse absence de mention médiévale d’une église
Saint-Jean alors que la documentation écrite n’est finalement
pas si pauvre. Faut-il dès lors évoquer une confusion, un
oubli ou un transfert entre Jean et Majan au fil du temps
en cédant au risque de la surinterprétation ? Il est vrai
néanmoins que le contexte archéologique du temple 1,
transformé dès le Ve s. en mausolée ou en memoria, peut
aller dans ce sens. L’une des hypothèses d’interprétation
identifiant un groupe ecclésial dans ce quartier règlerait
aussi le problème de l’identification de la deuxième
dédicace. Saint-Jean pourrait évidemment désigner le
baptistère et Majan le premier sanctuaire funéraire. C’est
par un autre biais cependant que l’on peut construire cette
hypothèse alternative.
Il nous faut à ce propos revenir sur le nom de cette
villa Plevegios et de sa variante Plivigium. Si l’exercice
toponymique est particulièrement difficile, notamment
lorsqu’il s’agit de le croiser avec des contextes archéologiques, on ne peut ici en faire l’économie. Assez rare en
Fig. 61 : Le calvaire de Saint-Majan à Roujan, avec un socle
constitué d’un remploi antique (cl. L. Schneider).
France romane, Plevegios/Plivigium évoque une formation
autour de plebs. Dans l’Hérault, le seul cas s’en rapprochant est celui de la villa Pleuis (Saint-Jean de la
Blaquières) en Lodévois, villa associée en 988 à une église qui est la première à être clairement désignée comme
une paroisse dans ce diocèse (Pellecuer, Schneider 2005,
114). Il n’est donc pas impossible que le nom de la villa
Plevegios/Plivigium désigne une communauté au sens de
paroisse, selon l’exemple des Pieve italiennes, et que cette
appellation se soit substituée durant le haut Moyen Âge au
nom de l’ancienne agglomération antique (Medilianum ?).
Si l’on ne peut rien affirmer, l’hypothèse demeure
séduisante parce qu’elle intègre d’une part une référence
explicite au baptistère du quartier Saint-Jean et permettrait,
d’autre part, de replacer plus clairement l’église SaintMajan dans le noyau de l’agglomération antique. L’auteur
du dictionnaire toponymique de l’Héraut - qui ignorait
l’existence de la copie partielle du cartulaire de Cassan n’est pas parvenu à localiser la villa Plevigios des chartes
du cartulaire d’Aniane (Hamlin 1983, 296) mais il a proposé un rapprochement de ces formes avec la mention
d’un villare Plenigias issu du fameux bref d’Ansefred qui
peut remonter aux VIIe-VIIIe s. (C. Béz., n° 56, 64). Outre
que la datation fasse remonter plus haut la perte possible
ou le glissement du nom de l’agglomération antique, cette
mention apporte un témoignage supplémentaire de l’implantation de l’Église biterroise dans le périmètre de
Roujan. Cette présence s’ajoute à la possession, déjà
signalée dans le même document, de Gabian en intégralité
et peut-être aussi à Peilhan/Piliano (C. Béz., n° 56, 64) où
l’on a vu que se concentraient de gros établissements
tardo-antiques.
Le contexte institutionnel que soulève la présence d’un
baptistère, le nouveau nom médiéval si particulier - formé
autour du terme latin plebs - que prend avant le Xe s. la
villa la plus proche de l’ancienne localité antique, l’ancrage
local d’un culte populaire voué à saint Majan et surtout les
indices d’une présence ancienne de l’Église biterroise
dans la périphérie de Roujan, au moins depuis les VIIeVIIIe s., sont autant d’éléments discriminants qui amènent
à s’interroger sur la construction d’une mémoire collective
des origines du christianisme local. C’est là sans doute le
point focal sur lequel nous voudrions insister. Si aucun
lien formel ne peut être établi en toute certitude avec les
vestiges découverts au quartier Saint-Jean, il nous a paru
utile de tenter de reconstituer ce dossier complexe car
éclairé par des sources bien différentes, textuelles et
archéologiques. Jusqu’à présent, les archéologues se sont
surtout intéressés au statut de l’agglomération antique et
au rôle de ses temples bâtis selon un canon classique
gréco-romain. Les historiens médiévistes, de leur côté, ont
surtout envisagé l’histoire de cette localité par le biais de
la fondation du prieuré de Cassan en 1080, dans un vallon
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ROUJAN-MEDILIANUM (?) DE L’ANTIQUITÉ AU MOYEN ÂGE…
situé à 2 km au nord-ouest de Roujan (Sotos 1990).
Entre ces deux termes, il faut désormais tenir compte des
trajectoires spécifiques de l’Antiquité tardive et du haut
Moyen Âge qui se nouent toujours autour d’un quartier
monumental comportant baptistère et église funéraire. En
cherchant à lier entre elles des épaves textuelles, en
tentant de les confronter à une nouvelle documentation
archéologique, le risque de surinterprétation est constant
mais ce serait aussi un piètre argument de paresse que de
renoncer à aborder ces questions de culte et de piété à
l’échelle d’une localité sans se confronter aux difficultés
d’analyse des chaînes de transmission. Aussi voudrionsnous clore ce dossier en envisageant une dernière perspective
qui nous conduit au terme de la chronologie envisagée,
dans ce XIe s. où émergent le castrum de Roujan et le
prieuré de Cassan, tandis que se forge la tradition du vol
des reliques de Saint-Majan. La fondation du prieuré de
Cassan, mal connue, se heurte à la question de l’origine
du groupe de chanoines bénéficiaires de la donation de
1080 qui institue un établissement canonial rural autour
d’une église dédiée à Sainte-Marie, à partir d’un fonds
patrimonial originellement tenu par le lignage des
« Roujan » (Robiano) (Sotos 1990, 21). Serge Sotos a
proposé d’expliquer la curieuse présence de ces chanoines
gyrovagues en zone rurale par la situation de décadence et
d’incurie du chapitre cathédral Saint-Nazaire de Béziers et
notamment du relâchement moral de l’épiscopat en la personne de l’évêque Bérenger autour des années 1050-1053.
Dans le troisième quart du XIe s., au cœur de la réforme
grégorienne, un groupe de chanoines aurait quitté le
chapitre cathédral de Béziers où la vie canoniale n’existait
plus pour mener ailleurs leur idéal de vie apostolique
(Sotos 1990, 27-33). L’hypothèse est à bien des égards
séduisante bien qu’elle repose sur une notion de temps
court, celui des seules décennies qui précèdent la fondation. Compte tenu du contexte local que l’on connaît
mieux aujourd’hui, on peut désormais se demander si une
communauté de clercs liée à l’Église de Béziers ne s’était
pas constituée dans le haut Moyen Âge autour des vieux
édifices chrétiens des quartiers Saint-Jean et Saint-Laurent
à Roujan, et plus particulièrement autour des reliques que
pouvaient détenir ces églises. On connaît l’existence de
telles communautés dans les périphéries urbaines, à
Nîmes notamment dès le VIIe s. autour du tombeau de
saint Baudile ou, plus proche de Roujan, à Saint-Étiennede-Trignan (Neffiès), où se trouvait un établissement
qualifié de monasterium en 990 (C. Béz., 48). La fondation
de Cassan pourrait dès lors prendre une nouvelle signification pour relever d’une dynamique plus spécifiquement
locale, d’une phase de restructuration qui n’exclut pas des
effets de résilience. Elle se place en effet à un moment
clef dans la vie de ces terroirs. Celui d’un temps qui
consacre l’abandon progressif mais irréversible du quartier
Saint-Jean, un lieu où s’étaient manifestées plusieurs
siècles durant les piétés locales. Celui d’un temps
également marqué par la restructuration de l’habitat
autour du nouveau pôle que constitue le château de
Roujan, dispositif qui marque un changement de nature
des pouvoirs et l’émergence de nouvelles légitimités
aristocratiques. Enfin et surtout un temps où se produit
une nouvelle hiérarchisation du réseau ecclésial local, les
fonctions paroissiales passant désormais à l’église SaintLaurent d’ailleurs cédée dès 1080 à la communauté de
Cassan (Sotos 1990, 110). Quoiqu’il en soit, il convient de
noter que les chanoines de Cassan ont relayé très vite le
culte local de saint Majan. En 1115, lors de la consécration
de l’église prieurale, une relique du saint fut encastrée
dans l’autel de saint Michel et saint Augustin (H.G.L.
1840-1993, t. 4, n° 31, 364). Le coutumier nous apprend
par ailleurs que dans la hiérarchie des fêtes religieuses,
celle de Saint-Majan avait droit au duplexe (Sotos 1990,
73) tandis que des unions de prières avec les moines de
Villemagne ont été réalisées pour la même fête (Barthès
1988, 86).
En abordant le problème de l’organisation ecclésiastique
à l’échelle d’une localité, qui plus est dans le temps long,
le contre effet est de perdre de vue la dimension humaine
du temps et de nombreux éléments de complexité du
dossier qui demanderaient de faire des pauses dans la
chronologie. Cependant lorsqu’il s’agit d’établir des ponts
au dessus des temps de vide documentaire, ou de tenter de
rendre connexes des sources hétérogènes et toujours fragmentaires qui ont - de fait - chacune leur propre logique,
peut-il en être autrement ? L’originalité et la nouveauté
des données archéologiques apportées par les fouilles du
quartier Saint-Jean nous ont convaincus de la nécessité de
reprendre l’ensemble de la documentation disponible pour
ouvrir une lecture dynamique de l’histoire de ces terroirs
du piémont biterrois jusqu’ici peu étudiés. Le dossier - c’est
une évidence - appelle désormais de nouvelles recherches
de terrain.
L’archéologie de la transition entre Antiquité et haut
Moyen Âge n’est guère aisée on le sait. Nous avons fait
feu de tout bois pour contextualiser et ouvrir des perspectives
autour du dossier introduit par les fouilles du quartier
Saint-Jean. Entre données archéologiques et fragments de
texte, le souvenir de Saint-Majan - jusqu’au cœur du
Moyen Âge - nous a paru fournir un fil rouge pour aider à
comprendre une partie des chaînes de transmission et guider
l’interprétation d’un passé toujours plus riche et plus
complexe qu’on est tenté de l’imaginer.
CONCLUSION
Une église et un baptistère installés sur d’anciens
temples antiques au sein d’une agglomération « secondaire »
de l’ancienne narbonnaise. Voilà une situation qui pourrait
relever d’un cas d’école tant elle parait en adéquation avec
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l’historiographie la plus classique. Derrière cette image se
profileraient le rôle de l’action épiscopale et la diffusion
de la mission chrétienne aboutissant à la constitution d’un
premier réseau de sanctuaires dans les centres les plus
peuplés du territoire rural, ces vici dont la mention est
presque devenue une figure rhétorique dans les chapitres
des manuels qui ont à traiter de la christianisation des
campagnes. Pourtant, à y regarder de plus près, les choses
ne sont peut-être pas si limpides que cela. Les cas où de
telles superpositions de sanctuaires ont été notées, dont la
chronologie et l’interprétation soient un minimum
étayées, ne sont finalement pas si nombreux. À vrai dire,
à l’échelle de l’ancienne Narbonnaise, en l’état actuel des
connaissances, Roujan constitue d’ailleurs un cas unique.
Faut-il s’en étonner ? Localement, à l’échelle du département
de l’Hérault, dans un territoire partagé par les anciennes
cités de Nîmes et de Béziers, Roujan fournit le troisième
exemple d’un baptistère, et un troisième cas de figure du
contexte dans lequel émerge cette composante essentielle
de la liturgie communautaire. Le baptistère de Loupian est
associé à une vaste église construite en périphérie d’une
villa elle-même en phase d’embellissement au début du
Ve s. (Pellecuer, Schneider 2005, 101-102). Celui du Roc
de Pampelune à Argelliers prend place au plus tôt à la fin
du Ve s. au sein d’une église qui domine en bout d’éperon
une nouvelle agglomération perchée et fortifiée, un probable
castrum (Pellecuer, Schneider 2005, 106-107). Celui de
Roujan enfin est implanté au cœur d’un ancien quartier
monumental du Ier s. Cette diversité des catégories de
centres ruraux, au sein desquels sont construits les baptistères, s’élargit encore d’une diversité des contextes
d’implantation. Parmi ces trois cas héraultais, Roujan est
en effet le seul baptistère à être édifié dans un environnement
funéraire. C’est là sans doute l’un des faits notables de ce
dossier. Il nous a dès lors semblé que l’identification de ce
contexte était susceptible de modifier sensiblement l’idée
d’une trajectoire trop linéaire entre les cultes antiques officiels
liés aux temples du Ier s. et un culte chrétien officiel induit
par la présence du baptistère. L’effet de résilience qui
vient immédiatement à l’esprit est peut-être trompeur. Si
l’état d’arasement du site nous prive d’une stratigraphie
continue et laisse quasiment orpheline la phase des II-IVe
s., le recours à des datations radiocarbone nous assure du
développement d’une fonction funéraire au cours du Ve s.
dans et autour de l’ancien temple 1, transformé en mausolée
ou en memoria puis agrandi avant d’être doté d’une abside.
La structure du sanctuaire antique a constamment guidé
les aménagements postérieurs ce qui paraît témoigner
d’une utilisation continue de l’édifice. Cette continuité
d’occupation du bâtiment est liée à une utilisation funéraire
primitive dont on ne peut exclure qu’elle soit d’initiative
privée. D’un point de vue chronologique, la transformation de ce bâtiment en église ou en oratoire doté d’une
abside est postérieure à la construction du baptistère.
L’aménagement de ce nouvel équipement, au plus tard
dans le courant du premier tiers du VIe s. répond à un tout
autre processus. Le choix de son emplacement montre
d’abord que l’on a privilégié le sol occupé par le petit
temple méridional pour l’établir à une certaine distance de
l’édifice funéraire primitif. La construction du baptistère a
cependant entraîné l’arasement complet du sanctuaire
antique, ce qui relève non seulement d’un programme
architectural plus ambitieux mais peut-être aussi d’une
réelle volonté de rupture. Si ce nouveau bâtiment a connu
lui aussi une utilisation funéraire, celle-ci ne devient généralisée qu’à partir du dernier tiers du VIIe s. À cette date il
nous faut dès lors envisager une certaine bipolarisation de
la vie religieuse autour de deux édifices distincts, sans
doute deux églises. Cette question constamment demeurée
en suspens ne peut être tranchée en toute certitude. Si
l’état d’arasement des vestiges ne permet pas d’associer
de manière probante la pièce baptismale à l’occident
d’une hypothétique église, selon un plan que l’on sait être
maintenant bien diffusé en Gaule méditerranéenne, on
doit néanmoins s’interroger sur la fonction de l’édifice
reconstruit au Moyen Âge sur l’emplacement même du
baptistère. Ses dimensions suggèrent en effet que l’on
puisse l’identifier à cette église Saint-Jean détruite pendant
les guerres de religion et dont les pierres auraient servi au
début du XVII e s. à l’aménagement de la clôture du
cimetière Saint-Laurent.
D’un point de vue institutionnel et politique, on ne
s’étonnera pas de l’aporie de la documentation archéologique qui laisse grand ouvert le champ des possibles. La
faiblesse des équipements ecclésiaux des principaux
centres domaniaux établis dans le grand voisinage de
Roujan, de même qu’une présence précoce de l’Église
biterroise implantée dès les VIIe-VIIIe s. à proximité de
Roujan (Gabian et Peilhan) suggèrent l’idée d’un gouvernement central des communautés chrétiennes locales
conduit depuis la cité, autrement dit d’une certaine
vigueur de l’action épiscopale à qui reviendrait l’initiative
de l’équipement roujanais. Faut-il pour autant l’attribuer à
un évêque biterrois ? Tête d’un réseau local de peuplement,
on doit observer que la localité roujanaise est quasiment à
mi-distance entre deux chefs lieux de cité. Béziers au Sud,
église ancienne où se tint en 356 l’un des premiers
conciles de Narbonnaise première et Lodève au Nord qui
comporta un siège épiscopal avant 421. L’émergence de
ce dernier siège se produit à un moment où les relations
entre les différentes Églises étaient devenues de plus en
plus difficiles. Patrocle d’Arles, dans une ambitieuse tentative d’organisation supraprovinciale, n’avait pas craint
d’ordonner un évêque dans cette cité au mépris des droits
du métropolitain de Narbonne. On a déjà insisté ailleurs
sur l’influence qu’a pu jouer l’Église arlésienne autour de
la cathédrale Saint-Geniès de Lodève (Garmy et al. 2004, 29).
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ROUJAN-MEDILIANUM (?) DE L’ANTIQUITÉ AU MOYEN ÂGE…
La prise du castrum biterrois de Cabrières - situé à une
dizaine de kilomètres seulement de Roujan - en 532 par le
franc Théodebert, dont l’une des conséquences fut de
soustraire un temps le territoire Lodévois et les marges
septentrionales du biterrois du royaume wisigoth, constitue un autre événement politique majeur dont la lecture
fait s’interroger sur la situation roujanaise. Incertitude des
cadres administratifs, lutte d’influence entre les Églises
mais aussi divisions politiques et remaniements territoriaux font peut-être mieux ressortir la spécificité de la
place roujanaise dont la localisation aux marges de deux
cités pouvait permettre de consolider une position politicoreligieuse à l’heure où les cadres administratifs de
l’Empire se désagrégeaient (Schneider sous presse).
L’émergence de deux nouveaux castra (Cabrières et
Montesquieu) dans les massifs montagnards situés immédiatement au nord de Roujan est un autre témoignage de
l’accélération des mutations qui s’opèrent. De même, il
n’est sans doute pas anodin de noter que la commune de
Roujan a été récemment le lieu d’une découverte spectaculaire, un ensemble rare de vingt-cinq monnaies d’or des
années 491-519 contenu dans une boite en bronze, soit
plusieurs tremissis ostrogothiques, francs, burgondes et
wisigothiques ainsi qu’un solidus byzantin du début du
règne de Justin (Dhénin, Landes 1994). Eu égard à la
faiblesse de la documentation textuelle et à l’éventail des
hypothèses possibles, il peut paraître bien dérisoire de
vouloir tenter de réinsérer ces nouvelles données archéologiques dans une perspective générale d’histoire politique et
institutionnelle. Il nous a semblé néanmoins que la qualité
de ce dossier, qui apporte une documentation inédite sur
une localité et un territoire presque ignorés de l’historiographie régionale, méritait que l’on commence à ouvrir la
discussion. En ce sens, le dossier final rassemblé autour
du souvenir de saint Majan apporte un autre éclairage,
distinct des faits institutionnels. Derrière les disputes qui
font s’affronter différents monastères locaux autour des
reliques du saint, émerge en effet avec plus de consistance
un autre aspect des ferveurs et des piétés locales. Les
revendications roujanaises pouvaient s’appuyer, au seuil
du XIe s., non seulement sur une mémoire collective locale,
réelle ou reconstruite, mais aussi et surtout sur une tradition
autochtone puisant dans la mémoire d’un lieu dont les
monuments marquaient encore dans le paysage l’histoire
d’un passé inaccessible. Au delà d’une idée simplificatrice
qui mettrait peut-être trop vite en correspondance les données archéologiques révélant l’existence d’une tradition
funéraire paléochrétienne autour de l’ancien temple 1 et
un récit qui suggère l’existence d’un culte roujanais
autour d’un saint local, mais qui mélange les temporalités,
il nous a paru possible d’avancer une lecture anthropologique. Celle d’un récit et d’une mémoire qui participent
bien plus à construire le présent qu’ils ne donnent à voir le
passé. Dans l’espace roujanais du XIe s. l’histoire changeait
en effet de lieux et d’acteurs. L’enracinement millénaire
des piétés manifestées autour des sanctuaires successifs
du quartier Saint-Jean cédait le pas à une nouvelle géographie locale du sacré autour de l’émergence d’un prieuré canonial. L’un de ses premiers prieurs, Guiraud, bientôt
évêque de Béziers, allait d’ailleurs cristalliser les ferveurs
régionales pour être finalement sanctifié à son tour…
M.-G. COLIN - Docteur en Histoire et Archéologie,
Toulouse, mgcolinfau@aol.com
UMR
5608
UTAH
L. SCHNEIDER - Chargé de recherche CNRS, Université Aix-Marseille I,
UMR 6572 LAMM, Aix-en-Provence, lauschne@club-internet.fr
L. VIDAL - Chargé d’opération et de recherche INRAP Méditerranée,
UMR 5140 Lattes-Montpellier, laurent.vidal@inrap.fr
M. SCHWALLER - Conservateur en chef du patrimoine, SRA LanguedocRoussillon, UMR 5140 Lattes-Montpellier, martine.schwaller@
culture.gouv.fr
REMERCIEMENTS
Que tous les participant(e)s aux différentes campagnes, qu’il
s’agisse des équipes d’encadrement ou des bénévoles, trouvent ici le
témoignage de notre vive reconnaissance pour le travail qu’ils ont
généreusement fourni. Leurs noms sont ici donnés par ordre alphabétique, en espérant n’oublier personne en dépit des années écoulées :
Ph. Affre, F. André, J. Artaux, X. Bailly, A. Balmisa, J. Benoit,
N. Bessières, C. Bioul, N. Boudou, O. Boudry, M.-O. Boyer, J.-P. Brulé,
J.-Fr. Calmard, Ch. Calmès, Fr. de Cazenove, M.-C. Clerc,
M.-G. Colin, St. Colin, S. Cordier, A. Cornejo, G. Couaillac,
St. Couaillac, Chr. Courret, Y. Crouzet, M. Crouzilles, Fr. Daudé,
M.-P. Debray, R. Debreuil, L. Dejean, S. Delagnes, P. Delon,
M. Dodinet, A. Durand, G. Escalon, C. Esson, O. Fages, C. Feybesse,
J. Fraisse, D. Garcia, V. Garcia, Fl. Gayraud, N. Gence, P.-Y. Genty,
O. Ginouvez, A. Gomez, M. Gomez, R. Guiraud, R. Gourdiole,
J. Guerre, M. Hernandez, M. Hopwood, N. Houlès, F. Housset,
Th. Jacquet, I. Klein, J. Kotarba, J. Kurka, St. Lancelot, É. Laon,
Fl. Larigauderie, Bl. Layet, M. Le Nézet, Chr. Le Noheh,
Fr. Lombardi, D. Macia, J.-P. Mailhé, S. Maillé, Y. Manniez,
G. Marchand, M. Marco, G. Mareau, Ph. Merichelli, Fl. Meyer,
L. Micola, Ch. Mourgues, V. Moutou, A. Moya, A. Olafsdottir,
Chr. Olive, M. Olive, Ph. Palau, B. Parret, J.-M. Pène, Fl. Pérez,
D. Perier, A. Peyre, A. Pezin, M.-N. Polino, M. Pons, O. Pringiel,
V. Raingo-Pelouse, Ph. Raynaud, L. Rémy, S. Réveillon, P. Rouanet,
M.-Fr. Rudloff, L. Schneider, A. Schwaller, M. Schwaller, J. Serrano,
F. Sitri, K. Sivasoubramanien, S. Soriano, M. Stéphan, L. Tassart,
R. Ucheda, C. Vallet, J. Varela, J.-Fr. Vedel, L. Vidal, Cl. Vigouroux,
B. Wassler, J.-P. Wiégant, D. Wittmaïer, Ph. Yedra.
Nous tenons par ailleurs à remercier M. J.-D. Bergasse, président
de la Société Archéologique de Béziers, qui nous a permis de photographier la statue provenant du tènement Saint-Jean à Roujan et désormais
conservée au musée de la Société Archéologique de Béziers.
Enfin, nous remercions très chaleureusement plusieurs de nos
collègues archéologues dont le concours, à des titres divers, a
contribué à l’aboutissement de ce travail : J.-P. Besombes-Vailhé et
J.-L. Espérou, responsables et animateurs entre 1989 et 1994 du projet
« Prospection inventaire Plaine du Biterrois » du S.R.A. LanguedocRoussillon et du C.G. Hérault ; J. Guerre, à qui l’on doit la détermination des céramiques et la réalisation des planches de mobilier ;
G. Marchand, qui nous a apportés une aide précieuse en 2000 lors de
la réalisation sur le terrain de relevés complémentaires.
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ANNEXE 1 - DATATIONS 14C D’UN ÉCHANTILLON DE SÉPULTURES
* : Une première dizaine d’analyses a été confiée au centre de datation par le radiocarbone de l’Université Claude Bernard Lyon 1
(codes LY-n°), trois autres ont été réalisées par le Laboratoire de physique de l’Université d’Erlangen, Allemagne (codes ERL-n°).
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ANNEXE 2 - TABLEAU DE PRÉSENTATION DES SÉPULTURES
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N.B. : colonne datation 14C, initiales p.m. = probabilités maximales.
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