Baby Lone
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L'établissement d'un royaume centré sur une seule et même capitale pendant un
millénaire et demi marque une rupture dans l'histoire de la Mésopotamie,
et Babylone devint le centre de la partie méridionale de cette région, alors que le
nord est centré à partir de la seconde moitié du IIe millénaire par l'Assyrie, qui devient
le principal adversaire des Babyloniens. Le destin du sud mésopotamien, ancien
pays de Sumer et d'Akkad, se confond donc avec celui du royaume babylonien à
partir du milieu du IIe millénaire.
Babylone devint donc le centre politique, mais aussi culturel et religieux de l'antique
civilisation mésopotamienne, et par là l'une des principales villes du Proche-Orient
ancien et de tout le monde antique. Son prestige fut immense pendant la période
antique, et s'est transmis jusqu'à nos jours par la tradition biblique et celle des
auteurs de la Grèce classique.
Babylone est mentionnée pour la première fois au XXIVe siècle av. J.-C., dans un
texte cunéiforme datant du règne de Shar-kali-sharri, roi de l'Empire d'Akkad dont
elle fait alors partie. Elle est ensuite un centre administratif de l'Empire d'Ur III. La cité
n'a pas le prestige de ses voisines du Sud, comme Nippur. Elle ne devient un centre
politique important qu'avec l'installation d'une dynastie d'origine amorrite, la Première
dynastie de Babylone, au début du IIe millénaire, après la chute du d'Ur qui laisse
place à une période de fragmentation politique de la Basse Mésopotamie. Cette
époque est appelée « période paléo-babylonienne ».
Les grandes cités du royaume avaient un gouverneur (šāpirum), dont la fonction est
mal connue. Le découpage provincial nous échappe. Au niveau inférieur, les localités
étaient dirigées par un « maire » (rabiānum) et un conseil d'Anciens qui jouaient un
rôle judiciaire, et policier. Une autre institution locale ayant une fonction similaire est
le quartier (babtum) dans les villes. Un dernier personnage avait une fonction
judiciaire, le juge royal (dayyānum) qui pouvait rendre des sentences. Les sujets
doivent effectuer plusieurs services (ilkum) pour leur roi et son administration : des
corvées pour des travaux publics (restauration ou construction de canaux, de
murailles, de temples), la participation aux campagnes militaires.
Libres et non-libres
Les esclaves sont désignés par le terme masculin wardum et féminin amtum, qui
signifient au sens large « serviteur », ou « inférieur ». L'esclave mésopotamien est
une personne dépendant d'un maître qui peut faire l'objet d'une vente. On peut
devenir esclave suite à une capture lors d'une guerre, ou en naissant d'une femme
esclave, ou encore suite à des difficultés économiques extrêmes ayant conduit à la
mise en vente de la personne. Le Code de Hammurabi prenait des dispositions
contre leur fuite : ceux qui aident un esclave fugitif sont mis à mort, tandis que ceux
qui les dénoncent sont récompensés. Le rôle des esclaves est d'accomplir les tâches
les plus ingrates, notamment moudre les grains ou tisser des étoffes, souvent dans
le cadre domestique, mais ils ne sont pas une force de travail majeure dans la
société, qui ne peut donc être qualifiée d'esclavagiste.
La famille
La famille est une institution-clé de toute société, bien connue par les sources
juridiques de la période paléo-babylonienne. La famille est en général nucléaire et
monogame, formée par un mariage qui voit une femme passer de l'autorité paternelle
à l'autorité conjugale, en rejoignant la résidence de son époux. Le mariage donnait
lieu à l'échange d'une dot (šeriktum, nudunnum) donnée à l'époux par la famille de
l'épouse, alors que l'époux offrait en retour un « cadeau d'épousailles » (terhatum),
parfois accompagné d'un présent de l'époux à l'épouse (biblum). Dans les familles
riches, ces échanges pouvaient être importants, et parfois impliquer des propriétés
foncières ou des esclaves. Le mari peut prendre une seconde femme si la première
ne lui donne pas d'héritier, la nouvelle épouse étant subordonnée à la première.
Dans le cadre familial, l'autorité patriarcale est claire : il peut avoir des concubines, il
est le seul à pouvoir répudier l'autre, en cas d'adultère de sa femme, c'est lui qui
décide si celle-ci doit être mise à mort avec son amant. La loi s'assure également du
respect inflexible du fils envers son père. Si le père n'avait pas d'enfant pour assurer
sa subsistance une fois âgé, il pouvait en adopter un, qui dispose des mêmes droits
que les éventuels enfants qui viendraient à naître. Les transmissions d'héritage se
font suivant différentes coutumes selon les lieux : de façon égalitaire entre les fils
à Sippar, avantage à l'aîné à Larsa ou Isin. On peut ajouter qu'en plus d'être bien
souvent une unité économique pratiquant la même activité de père en fils, la famille
était aussi une unité religieuse, pratiquant un culte domestique avec des dieux-
patrons spécifiques, et rendant un culte à ses ancêtres qui sont souvent enterrés
sous le sol de la résidence familiale.
Les activités économiques dans la Mésopotamie ancienne sont prises en charge par
des acteurs relevant de deux secteurs : celui des institutions que l'on qualifie souvent
de « grands organismes » suite à A. L. Oppenheim, qui sont les palais (royaux et
provinciaux) et les temples ici compris en tant qu'institutions et acteurs économiques,
et qui sont gérés de façon similaire ; et un secteur privé en dehors du cadre des
grands organismes. Concrètement, il y a des imbrications entre les deux puisqu'une
personne peut participer à la vie économique d'un grand organisme et mener des
activités économiques privées. L'importance respective de l'activité économique des
deux secteurs est impossible à établir, car même si notre documentation mentionne
en priorité les grands organismes qui sont les plus grands producteurs de textes de
la vie courante, rien n'indique clairement qu'ils dominent toute la vie économique.
Quoi qu'il en soit, ils ont un impact considérable sur la société de plusieurs manières.
Le temple de la divinité principale de la ville contribue à l'identité de celle-ci, puisque
sa divinité est souvent invoquée dans les serments prêtés lors des contrats et se
trouve au centre des principales fêtes de la ville dirigées par son clergé. En tant
qu'institution économique, il possède de nombreuses propriétés foncières, et un
certain nombre de notables de la cité travaillent pour son compte. Le palais est quant
à lui au sommet de la société, possède de vastes domaines et draine vers lui de
nombreuses ressources, notamment les biens de prestige qu'il redistribue en partie
au personnel de l'administration et de l'armée. Ces institutions contribuent donc à
former les élites de la société.
Le secteur privé, bien que peu documenté ou parfois difficile à séparer du secteur
des grands organismes avec lequel il peut interagir, occupe manifestement une
place dans l'économie mésopotamienne de l'époque. Plusieurs exemples montrent
qu'il existait des transactions de biens fonciers, notamment de terres agricoles
(champs, jardins-palmeraies), ce qui indique bien l'existence d'une propriété privée,
qui chez les plus riches pouvait s'apparenter à un grand organisme en miniature. On
a déjà vu qu'il y a également des arguments plaidant en faveur de l'existence
d'artisans et de marchands effectuant au moins une partie de leurs activités pour leur
propre compte. Les acteurs privés pouvaient également se livrer à des activités
financières en faisant des prêts à intérêt. Il ne semble pas qu'il y ait eu un monopole
du palais sur certains produits, ou même une fixation rigide des salaires et prix par le
pouvoir, ce dernier se contentant plutôt d'indiquer la somme la plus juste ou le
minimum acceptable.
Le paysage rural de la Basse Mésopotamie est donc constitué d'une zone de culture
irriguée où les champs et jardins-palmeraies, généralement de forme allongée,
bordent par leur petit côté les canaux nécessaires à leur mise en culture. Les villages
sont établis sur des levées de terre proches des canaux, mais au début
du IIe millénaire ils sont encore largement minoritaires face aux espaces urbains qui
groupent la majorité de la population, agriculteurs compris. Au-delà des zones en
culture, on trouve les espaces incultes de steppe et de nombreux marécages qui
fournissent diverses ressources (pêche, roseaux).
Productions agricoles
L'autre grande culture de la région était celle du palmier-dattier, qui supporte lui aussi
les sols salins, et dont la croissance nécessite un fort ensoleillement et un apport
important en eau, raison pour laquelle les palmeraies sont placées au bord des
canaux. Le palmier ne produisant des dattes comestibles qu'après cinq ans, les
personnes louant un champ pour y mettre une palmeraie ont droit à ne pas verser de
redevance avant ces cinq années, et encore celle-ci est allégée (la moitié de la
récolte contre les deux tiers en temps normal selon leCode de Hammurabi articles 60
à 64). Le palmier fournit d'autres produits en plus des dattes : son bois peut servir
pour des outils et des constructions, les bouts de l'arbre et certaines de ses fibres
servent à tresser des paniers, et le rejets poussant à la base de l'arbre sont utilisés
pour produire du vin de palme. En plus de cela, les palmeraies sont de véritables
jardins, puisqu'on profitait de l'ombre fournie par les palmiers - qui pouvaient
atteindre jusqu'à 20 mètres de haut - pour faire pousser divers légumes et fruits à
leurs pieds : salade, pois chiche,lentille, fève, oignon, ail, figues, pommes, grenades,
etc..
À côté des cultures, les paysans mésopotamiens entretenaient quelques têtes de
bétail, avant tout des moutons fournissant de la laine et des chèvres fournissant
du lait, mais aussi des bovins, plus onéreux, et des cochons, des ânes ainsi que de
la volaille. L'accès régulier à la viande était limité pour la majorité de la population,
réservé aux tables des élites et des dieux. Les plus grands troupeaux d'animaux sont
ceux des grands organismes, qui pouvaient les confier à des pasteurs
professionnels. Les bêtes vont paître à la limite des zones cultivées ou sur des
champs en jachère. Les troupeaux institutionnels pouvaient être envoyés en été vers
des régions fraîches situées au nord de la Babylonie en été, une sorte
de transhumance.
Ruines du centre cultuel de la ville d'Ur, dominées par la ziggurat dont le premier
étage a été restauré.
La Basse Mésopotamie est depuis la fin du IVe millénaire une région très urbanisée :
si on ne retient que la taille qui est le principal critère visible pour les prospections,
plus de la moitié de l'espace habité est alors concentré sur des sites de plus de 100
hectares. On est donc en présence d'une véritable civilisation urbaine, même si de
plus en plus de villes déclinent après le règne de Samsu-iluna, surtout dans le sud
où la plupart des anciennes cités sumériennes sont progressivement désertées
(Nippur, Uruk, Eridu, Ur, Isin, Larsa, Girsu, Umma, etc.).
Les villes mésopotamiennes sont situées sur un ou plusieurs cours d'eau naturels ou
artificiels qui les traversent parfois, et disposent de quais (karūm) pour la circulation
fluviale. Elles sont entourées d'une muraille, percées par des portes plus ou moins
larges où les taxes pouvaient être perçues. Les rues et les canaux délimitent des
îlots de constructions. Une grande voie menait au quartier principal où se trouvait le
palais du roi ou du gouverneur et le grand temple de la ville, parfois accompagné
d'une ziggurat (tour à étages). Une partie de l'espace urbain était occupée par des
champs ou des jardins-palmeraies, ce qui indique qu'il y avait des activités agricoles
intra-urbaines, en plus du fait que des agriculteurs pouvaient vivre dans des villes et
travailler les champs situés autour de celles-ci. Les quartiers (babtum) de la ville sont
une réalité sociale forte : ils ont des « chefs », peuvent intervenir dans des litiges sur
des propriétés, informer les autorités de la réputation de certains individus dans des
cas de vol ou d'adultère, ce qui leur confère un rôle de contrôle social formel. On a
pu repérer dans les espaces urbains fouillés ou des textes plusieurs quartiers
spécialisés : certains où résidaient beaucoup de marchands, des membres du
clergé, et des quartiers artisanaux. Il n'y a pas, sauf exception, de quartiers riches ou
pauvres, les maisons vastes côtoyant les plus petites ; le regroupement s'effectue
peut-être selon un modèle qui voit une maisonnée riche regroupant autour de sa
vaste résidence les petites habitations de ses dépendants.
Des résidences ont pu être fouillées sur plusieurs sites, et de véritables quartiers ont
été dégagés dans deux villes majeures de la période, Uret NippurIl s'agit de quartiers
tassés, où les rues sont souvent étroites et rarement droites. Les résidences sont
plus ou moins vastes, mais généralement exigües. La circulation y est souvent
organisée autour d'une cour ou espace central dont on ne sait pas s'il était couvert
ou non. Il existe aussi des petites maisons à organisation linéaire. Les fonctions des
pièces, nombreuses dans les grandes résidences, sont souvent difficiles à
déterminer, d'autant plus que certaines ont pu être plurifonctionnelles. Il y avait des
espaces de stockage, des salles de réception, quelques pièces d'eau parfois, et des
espaces pour le culte domestique, peut-être dans de petites chapelles. Plusieurs de
ces résidences avaient probablement un étage, mais cela reste souvent difficile à
déterminer. Des tombes familiales étaient creusées sous certaines maisons,
maintenant le lien entre les vivants et les morts de la famille. Plusieurs résidences
ont livré des tablettes privées, de nature juridique, économique ou scolaire.
Artisans et marchands
Artisan travaillant un objet en bois (araire, partie d'un char ?), terre cuite du début
du IIemillénaire retrouvée à Tell Asmar(Eshnunna).
Les activités artisanales sont mal documentées pour la période de la Première
dynastie de Babylone, les dossiers paléo-babyloniens relatifs à ce secteur étant
extérieurs ou antérieurs à ce royaume. Certains quartiers à spécialisation artisanale
ont pu être repérés sur certains sites urbains, mais peu d'installations d'artisans ont
été mis au jour. L'article 274 du Code de Hammurabi indiquant les salaires
d'embauche de plusieurs artisans nous donne une liste de métiers artisanaux, mais il
est fragmentaire et donc de lecture malaisée. Ce même texte mentionne également
les activités de maîtres d'œuvres dans le bâtiment (articles 228-231), qui devaient
être très importants en milieu urbain en tant qu'architectes ou experts en maçonnerie
guidant les travaux de construction. Les prébendes de temples nous montrent
différentes activités artisanales en relation avec le culte, comme la transformation de
produits alimentaires (brasseur, boulanger).
Les villes comportaient également des espaces destinés aux échanges, et il semble
avoir existé des marchés situés notamment près des portes, ainsi que des boutiques.
Mais le grand lieu du commerce était le quai (karūm) de la ville, qui est le quartier
marchand, et formait également une institution regroupant les marchands d'une ville,
donc une sorte de « guilde », dirigée par un chef des marchands (wakil tamkarim) qui
agit pour le compte du roi. Les marchands pouvaient s'organiser en associations de
courte durée pour financer des opérations commerciales, comme l'association-
tappūtu figurant dans le Code de Hammurabi, qui voit un bailleur de fonds remettre
une somme à un agent commercial, les partenaires devant ensuite partager le profit
à parts égales. Les produits commercialisés au niveau local sont surtout des denrées
alimentaires diverses, ou encore des matières premières textiles comme la laine,
vendues en partie par le palais comme vu plus haut. Les métaux devaient en
revanche être cherchés hors de Mésopotamie, mais on est peu renseignés sur leur
commerce pour cette période en Babylonie. Le commerce dans le Golfe persique,
qui servait à importer du cuivre de Dilmun (Bahrein), décline sous la période de
domination babylonienne alors qu'il avait contribué au développement de villes
méridionales comme Larsa ou Ur durant les périodes précédentes. Au nord, la ville
de Sippar devient une place de première importance pour l'importation de produits
étrangers en Babylonie, et exporte également des produits textiles vers l'Assyrie, tout
comme Babylone. Certains Babyloniens se livrent aussi à des activités financières
privées. Le Code de Hammurabi légifère sur les activités de prêts (en cas de
problème de remboursement, ou sur les garanties du prêt). Les taux d'intérêt
pouvaient s'élever à 20 % pour les prêts d'argent et 33 % 1/3 pour les denrées
alimentaires .
Culture et religion
Croyances religieuses et divinités
Plaque en terre cuite représentant une déesse, sans doute Ishtar, tenant une arme,
début du IIe millénaire, Tell Asmar (Eshnunna).
Les Anciens mésopotamiens croyaient que l'être humain avait été créé par les dieux
pour le servir. Les principales divinités mésopotamiennes sont le produit d'une
longue évolution. On peut les désigner par leur nom sumérien ou leur
nom akkadien si ceux-ci diffèrent, et leurs lieux de cultes principaux sont situés dans
la ville dont elles sont les patronnes. Le grand dieu Enlil est vu comme le roi des
dieux, maître de l'Air, pourvoyeur de la royauté terrestre, détenteur des tablettes de
la destinée qui décident du sort des hommes. Son grand temple se trouve dans la
cité sainte deNippur. Il constitue une « triade » avec son père Anu, dieu du Ciel dont
le lieu de culte principal est àUruk, et son frère Enki/Ea, dieu de l'Abîme, divinité de
la sagesse et de la magie, vénéré à Eridu. On trouve ensuite les grandes divinités
célestes : Nanna/Sîn, le dieu-lune dont le temple principal est àUr, et ses
enfants Utu/Shamash le dieu-soleil, dieu de la justice, divinité tutélaire
de Larsa et Sippar, et la déesse Inanna/Ishtar, la planète Vénus, déesse de l'amour
et de la guerre dont le grand temple est à Uruk. On peut y ajouter Ishkur/Adad, dieu
de l'orage et donc de la fertilité. Viennent ensuite des divinités guerrières comme le
dieu Ninurta originaire de Nippur ou Zababa vénéré à Kish. Les divinités principales
du monde infernal sont Ereshkigal, reine des Enfers, et son parèdre Nergal. La
divinité tutélaire de Babylone, Marduk, de statut mineur avant l'affirmation de ce
royaume, prend de l'importance au fur et à mesure que la puissance babylonienne
augmente et que son temple, l'Esagil, fait l'objet de nombreuses donationsÀ côté de
cela, les Mésopotamiens croyaient que le monde était habité par un ensemble
d'êtres surnaturels, démons protecteurs ou néfastes, qui pouvaient agir pour le
compte des dieux, notamment pour punir une personne qui n'aurait pas respecté
l'ordre divin.
Le culte
L'« adorant de Larsa », statuette encuivre d'un homme en position de prière offerte
au dieu Amurru, règne deHammurabi, Musée du Louvre.
Le lieu principal d'exercice du culte est le temple, résidence terrestre de la divinité,
qui y est présente sous la forme de sa statue qu'elle passe pour habiter réellement.
Cette dernière se trouve dans la pièce principale du sanctuaire, le « saint des
saints » ou cella. À la période paléo-babylonienne, c'est de plus en plus une salle de
disposition barlongue dans laquelle l'autel ou la niche où se trouve la statue fait face
à l'entrée, qui ouvre sur une cour intérieure organisant la circulation dans le bâtiment.
Cette disposition reste dominante jusqu'à la fin de la civilisation babylonienne. C'est
là qu'ont lieu la majorité des rituels du culte des divinités qui « résident » dans le
temple. Dans ce dernier où à sa proximité, on trouve un ensemble de pièces et de
bâtiments servant à l'exercice du culte : des bureaux, des magasins, des cuisines,
plus loin des ateliers, les résidences du personnel cultuel qui peut être regroupé
dans un même quartier. Les principaux complexes sacrés sont dominés par
une ziggurat, monument à degrés dont la symbolique et la fonction exactes restent
obscures.
L'entretien quotidien des dieux dans le sanctuaire prend différentes formes : un
entretien alimentaire (boissons et nourriture) et vestimentaire, la purification du lieu
saint du temple et de la statue, et une célébration par divers rituels accompagnés à
l'occasion de chants et de musique. Les offrandes faites aux dieux proviennent de
particuliers, et en priorité du roi. Il peut s'agir d'aliments, de vêtements, de mobilier,
d'objets d'art, de propriétés foncières, etc. Le souverain a de plus pour rôle de
construire et restaurer les temples. Le calendrier liturgique des différentes villes de
Basse Mésopotamie était également marqué par des rituels et fêtes religieuses plus
ou moins grandioses, certains associant le souverain à leur déroulement.
Le personnel des temples est généralement divisé entre le personnel chargé du culte
et le personnel chargé de l'administration du patrimoine du temple, qui peut être très
important comme vu plus haut. Mais la séparation entre les deux n'est pas forcément
rigide, d'autant plus que les richesses du temple sont destinées en grande partie à
son culte. Les prêtres chargés du culte ordinaire sont désignés sous le
terme SANGA/šangûm, et sont dirigés par un chef. Ils peuvent être assistés par des
prêtres spécialisés : les pašišum qui semblent s'occuper de l'entretien de la statue de
la divinité, ou encore les lamentateurs (kalûm) et chantres (nârum) qui participent
aux rituels, avant tout par leurs chants. Il existait également un personnel religieux
féminin. Les mieux connues pour cette période sont les naditum, religieuses
attachées à un dieu et vivant recluses dans une sorte de « cloître » (gagum),
attestées notamment à Sippar etNippur. Enfin, certains prêtres non rattachés à des
temples étaient spécialisés dans des rituels différents, à savoir les exorcismes ou la
divination, généralement par hépatoscopie (lecture des messages des dieux dans les
entrailles de moutons). Un cas de prophétismeinspiré par le dieu Marduk est
également connu à Babylone sous le règne de Hammurabi. Ces activités
intéressaient de très près le roi, qui devait garder un contact régulier avec le monde
divin.
Ce personnel peut être rémunéré par des rations d'entretien fournies par le temple,
ou bien en recevant une partie des offrandes faites au dieu, ou encore par la
concession de terres agricoles appartenant au sanctuaire, dont ils tirent leurs
revenus. Une partie des charges cultuelles pouvait être segmentée et concédée à
plusieurs personnes qui s'en répartissaient l'exercice chacun à leur « tour » (BALA)
pour une durée variable : c'est le système désigné sous le terme de « prébende ». Il
peut s'agir de personnes chargées de la préparation des aliments offerts à la divinité,
ou bien de celles chargées de l'entretien de la statue ou des lieux sacrés du temple.
Les charges de prébendes étaient rémunérées, et pouvaient même être louées.
Tête sculptée d'un roi inconnu (Hammurabi ?), le reste du corps ayant
disparu, diorite, Musée du Louvre.
Si l'art mésopotamien du début du IIe millénaire est plutôt bien documenté, les
œuvres provenant du royaume babylonien sont peu nombreuses. L'une des formes
d'art les mieux connues est la sculpture sur terre cuite. Elles représentent souvent
des divinités, avec leurs symboles, ainsi que des scènes mythologiques et parfois
des scènes profanes ou érotiques. Ces objets étaient sans doute les plus
accessibles au peuple babylonien. Ils ont pu être offerts à des temples, ou ont eu
une fonction protectrice dans des maisons, ou ont pu servir d'images cultuelles dans
de petits sanctuaires.
Des statuettes en métal ont également été réalisées par les artisans de l'époque, la
plus remarquable étant l'« adorant de Larsa », en cuivre partiellement plaqué d'or.
Elle représente un personnage genou à terre levant la main, geste d'hommage au
dieu Amurru auquel elle a été vouée par un certain Lu-Nanna « pour la vie de
Hammurabi ». D'autres statuettes en métal, représentant des orants ou des animaux,
témoignent également du grand niveau de maîtrise atteint par les fondeurs et
orfèvres de la Basse Mésopotamie à cette période. On connaît également quelques
bijoux en or, notamment des pendentifs et pendeloques représentant des symboles
divins (croissant de lune, disque solaire, foudre) ou des déesses-protectrices.
En 1595, le souverain babylonien Samsu-ditana est vaincu par Mursili Ier, roi des
Hittites, qui s'empare de la statue de Marduk située dans l'Esagil, le grand temple de
Babylone, et l'emporte dans son pays. Cette défaite signifie la fin d'une dynastie déjà
très affaiblie par plusieurs rivaux dont les Kassites. Selon la liste royale
babylonienne, c'est Agum II, qui serait le dixième souverain de la dynastie des rois
kassites (fondée par un certain Gandash, qui aurait régné on ne sait où dans la
seconde moitié du XVIIIe siècle), qui s'empare de Babylone après le sac de la cité
par les Hittites. Le premier souverain kassite attesté assurément comme roi de
Babylone est Burna-Buriash IerCette dynastie a pour rivale celle du du Pays de la
Mer, située au sud de la Babylonie, qui est vaincue sous le règne d'Ulam-Buriash au
début du XVe siècle. À partir de ce moment, la prépondérance de Babylone en
Mésopotamie méridionale n'est plus contestée, et les souverains kassites sont
maîtres de tout le pays de Sumer et d'Akkad, qui devient le pays de Karduniaš (ce
qui équivaut à « pays des Kassites »), ce qui fait d'eux une des grandes puissances
du Moyen-Orient. Le seul gain territorial notable effectué par des souverains kassites
après cela est l'île de Bahreïn, appelée alors Dilmun, où on a retrouvé un sceau au
nom d'un gouverneur babylonien de l'île même si on ne sait rien sur la durée de cette
domination.
Des mariages dynastiques s'effectuent les cours de cette période, et les rois kassites
y participent activement. Burna-Buriash II marie ainsi une de ses filles à
l'égyptien Amenhotep IV/Akhenaton et une autre au hittite Suppiluliuma II, tandis qu'il
épouse la fille du roi assyrien Assur-uballit Ier. Des princesses babyloniennes sont
également mariées à des souverains élamites. Cela a pour but de renforcer les liens
entre les différentes cours, et dans les deux derniers cas d'apaiser les tensions
politiques.
Le roi
Le roi kassite est désigné par plusieurs titres : le nouveau « roi de Karduniash » (šar
māt karduniaš), à côté des plus traditionnels « roi des quatre régions » (šar kiššati),
« roi de Sumer et d'Akkad », ou encore de l'original « šakkanakku (titre administratif)
d'Enlil » dont se pare un des deux rois nommés Kurigalzu. Le premier titre indique
que désormais le roi se considère comme le maître d'un territoire comprenant toute
la Babylonie. Il reprend les attributs traditionnels de la monarchie mésopotamienne :
il est un roi-guerrier, le juge suprême du royaume et un bâtisseur prenant notamment
soin des temples des divinités traditionnelles de la Mésopotamie81. Les apports
kassites semblent donc limités. Les noms des souverains sont kassites au début de
la dynastie, faisant référence à des dieux de ce peuple comme Buriash, Harbe ou
Maruttash, puis par la suite ils mélangent des termes kassites et akkadiens. La
dynastie royale se place sous la protection d'un couple de divinités proprement
kassites, Shuqamuna et Shumaliya, qui disposent d'un temple à Babylone dans
lequel les rois sont peut-être couronnés.
Ces transactions sont marquées sur des kudurru, dont une quarantaine ont été
retrouvées pour la dynastie kassite. Il s'agit de stèles divisées en plusieurs sections :
la description de la donation, avec les droits et devoirs du bénéficiaire de la donation
(taxes, corvées, exemptions), les malédictions, et souvent des bas-reliefs sculptés.
Les kudurru étaient sans doute placés à l'origine dans des temples, sous la
protection divine. Généralement la donation concerne un domaine très vaste, de 80 à
1 000 hectares (avec une moyenne de 250 ha). Les bénéficiaires étaient des hauts
dignitaires évoluant dans l'entourage du roi : hauts fonctionnaires, membres de la
cour voire de la famille royale, des généraux, des prêtres. La donation était sans
doute faite en récompense de la loyauté de la personne, ou d'un acte l'ayant
distinguée. Les grands temples de Babylonie recevaient aussi d'importants
domaines : l'Esagil, le temple de Marduk à Babylone, a ainsi reçu près de 5 000 ha à
cette période. Quelquefois les donations s'accompagnaient d'exemptions de taxes ou
de corvées. Dans les meilleurs cas, le bénéficiaire disposait même d'un pouvoir sur
la population locale, qui se substituait à celui de l'administration provinciale, contre
laquelle il était protégé par des clauses spéciales.
Ceci a été rapproché d'une pratique de type féodal. C'est sans doute faux, puisque
les kudurru ne concerneraient que des terres situées en marge de l'espace agricole,
sans doute en friche au moment de la donation. Ceci peut aussi témoigner d'une
volonté d'extension de l'espace agricole par la mise en culture de nouvelles terres
(sans doute accompagnée d'une amélioration du réseau d'irrigation). Les donations
étaient pour le souverain un moyen d'augmenter son autorité en renforçant ses liens
avec les élites de son royaume. Il ne s'agit pas d'une rétribution, puisque les services
accomplis pour le compte du palais semblent surtout avoir été payés par des rations
d'entretien pour cette période. Ce système ne paraît donc pas s'étendre à tous les
terrains agricoles, qui restent pour une grande partie soumis au système prévalant à
la période précédente. Le roi n'avait pas le pouvoir d'aliéner des champs comme il le
désirait. À côté des institutions et des élites subsiste sans doute un ensemble de
propriétaires agricoles privés, qui reste impossible à appréhender.
La situation économique
L'évolution des campagnes
Artisanat et échanges
Les différents travaux patronnés dans les temples par les souverains kassites sont
mal connus au niveau architectural, même s'il semble qu'ils aient vu certaines
innovations s'accomplir. On connaît ainsi un petit temple de 14 x 18 mètres au décor
original fait dans l'Eanna d'Uruk sous le règne de Kara-indash, et des travaux
effectués sous Burna-Buriash II dans l'Ebabbar, temple du dieu Shamash à Larsa.
Mais c'est surtout un des deux rois nommés Kurigalzu (plutôt le Ier) qui s'est illustré
par la construction ou la restauration de plusieurs temples des grandes villes de
la Babylonie, notamment les grands centres
religieux : Babylone,Nippur, Akkad, Kish, Sippar, Ur, Uruk, et dans sa ville-
nouvelle Dur-Kurigalzu, où une ziggurat dédiée à Enlilest bâtie, entre autres. Cela
s'accompagne du patronage du culte des divinités vénérées dans ces différents
temples. En reprenant le rôle traditionnel du roi babylonien protecteur et pourvoyeur
du culte des dieux, les rois kassites jouent en fait un rôle crucial puisqu'ils
rétablissent le fonctionnement normal de plusieurs de ces sanctuaires qui avaient
cessé de fonctionner suite à l'abandon de plusieurs sites majeurs du sud de la
Babylonie à la fin de la période paléo-babylonienne (Nippur, Ur, Uruk, Eridu).
Les textes scolaires d'époque kassite retrouvés à Nippur nous montrent que les
structures de l'apprentissage des scribes et des lettrés restent similaires à celles de
la période paléo-babylonienne. Mais un changement de taille apparaît : désormais
les textes en akkadiensont inclus dans le cursus scolaire, ce qui accompagne
l'évolution de la littérature mésopotamienne qui devient de plus en plus écrite dans
cette langue, même si le sumérien reste employé. La période kassite voit d'ailleurs la
mise au point du « babylonien standard », forme littéraire de l'akkadien qui reste
fixée pour les siècles suivants dans les œuvres littéraires, et qu'on peut donc
considérer comme une forme « classique » de cette langue. Désormais, les
nouvelles œuvres littéraires mésopotamiennes sont écrites exclusivement dans ce
dialecte.
Un redressement inachevé
Le renouveau babylonien face à l'expansion assyrienne
Quand c'est le babylonien Nabonassar qui prend le pouvoir en 747, il fait appel à
l'assyrien Teglath-Phalasar III pour l'aider à à vaincre les Chaldéens et les
Araméens. Ce dernier accepte, et déporte les adversaires de Nabonassar vers le
nord. Il en profite pour établir un contrôle étroit sur Babylone, qui devient un
protectorat de l'Assyrie. Mais le fils de Nabonassar, Nabû-zadin-zeri, est renversé
par un dénommé Nabû-shuma-ukin II, qui est à son tour vaincu par le
chaldéen Nabû-mukin-zeri, issu du Bīt Ammukāni, le tout en l'espace de deux
années, de 733 à 731. Teglath-Phalasar III, qui perd alors le contrôle qu'il exerçait
sur Babylone, décide d'intervenir dans le Sud et renverse Nabû-mukin-zeri tout en
pillant Shapiya la capitale du Bīt Ammukāni. Il choisit alors de monter lui-même sur le
trône de Babylone, sous le nom de Pulû. À partir de 728, l'Assyrie est maîtresse de
la Babylonie.
Les archives provenant de Nippur datant de cette période nous montrent que les
activités économiques de la cité connaissent une reprise, alors qu'elle a été
quasiment abandonnée pendant la crise du Xe siècle. Les autorités de la ville, en
premier lieu son gouverneur Kudurru, ont une autonomie large par rapport au roi
de Babylone d'alors, Nabonassar, disposent d'un domaine tout comme les temples,
font des échanges parfois jusque dans le Zagros, et les tribus araméennes et
chaldéennes voisines viennent commercer dans la ville. Les témoignages et les
prospections de la région d'Uruk donnent une impression identique de reprise
démographique et économique repérable durant la période de domination
assyrienne, notamment dans les régions où se trouvent les tribus chaldéennes, qui
vivent en grande partie dans des villages agricoles. On peut donc dresser pour cette
période le tableau d'un pays qui connaît une augmentation progressive de la
population dans les sites urbains et ruraux, sans doute accompagnée d'une
croissance économique, amorçant un mouvement qui se poursuit tout au long
du Ier millénaire. Cette périodisation doit cependant être établie avec plus de
certitudes, notamment en raison des imprécisions des prospections archéologiques.
Assarhaddon, qui prend le pouvoir en Assyrie après une guerre civile, ordonne la
reconstruction des grands monuments détruits par son père, ainsi que la restitution
des terres perdues par les habitants de la région au cours de cette période troublée.
Cela lui sert sans doute à concilier les habitants de la région et témoigne peut-être
d'une déférence envers la ville sainte outragée. La région reste d'ailleurs calme tout
le long de son règne. À sa mort, alors que le trône d'Assyrie revient à son
fils Assurbanipal, c'est son autre fils Shamash-shum-ukin qui devient roi de
Babylone, tout en étant soumis à son frère malgré une certaine autonomie. Il ramène
en 668 la statue de Marduk à Babylone, et la reconstruction de la ville se poursuit
sous son patronage et celui de son frère aîné.
À côté des rapports conflictuels avec l'Assyrie, Babylone exerce une influence
religieuse et culturelle sur sa voisine septentrionale. Les cultes de divinités
babyloniennes, Marduk et surtout Nabû, sont répandus en Assyrie.
Sous Sennachérib, le dieu Assur, considéré comme le véritable souverain de
l'Assyrie et le roi des dieux dans ce pays, reprend de nombreux aspects de Marduk
dont il est en quelque sorte le pendant assyrien : on rédige ainsi une version
assyrienne de l'Épopée de la Création avec le dieu assyrien pour héros en lieu et
place du babylonien. Dans le même ordre d'idée, la bibliothèque royale
de Ninive s'enrichit à l'époque d'Assurbanipal de tablettes confisquées dans des
centres intellectuels de Babylonie suite à la répression de la révolte de cette région,
ou par la copie de tablettes babyloniennes. Ces éléments plaident en faveur d'une
fascination pour la culture babylonienne chez les élites et les lettrés assyriens, qui il
est vrai avaient déjà une culture très similaire à celle de la Babylonie.
En 589, les Égyptiens s'emparent de Gaza, et assiègent Tyr et Sidon. Puis ils
forment une coalition avec les Phéniciens, à laquelle se rallieSédécias, le nouveau
roi de Juda, pourtant à ce poste grâce à Nabuchodonosor II. Celui-ci revient donc à
Riblah, d'où il prépare sa contre-attaque. Il assiège Jérusalem en 588, et après
environ deux ans de siège, la ville tombe. Les fils de Sédécias sont tués, alors que
lui est mutilé et déporté à Babylone avec la majorité des élites de son royaume.
Jérusalem est ensuite brûlée. Parallèlement, Tyr est aussi assiégée. La situation met
plus de temps à se résoudre, et ce n'est qu'au bout de treize années que
Nabuchodonosor II peut faire entrer ses troupes dans la ville. En 585, le Babylonien
arbitre un conflit opposant son allié le Mède Cyaxare au roi Alyatte de Lydie, et en
profite pour s'emparer de quelques villes en Cilicie. Peu après, la Palestine se révolte
en 582, ce qui oblige les Babyloniens à y retourner. La situation au Proche-Orient ne
s'arrange qu'en 568, lorsque Nabuchodonosor II met en déroute les Égyptiens près
de Gaza.
Les rois babyloniens jouent un autre rôle dans l'essor agricole en remettant en état le
réseau de canaux, qui avait été laissé pour compte du fait des troubles politiques des
siècles précédents, et avait subi plusieurs changements du cours de l'Euphrate. Le
système d'irrigation était géré par une administration liée à la gestion des terres
royales, auxquelles sont intégrées les voies d'eau, et à la tête duquel se trouve
lemašennu, intendant du domaine royal. Au niveau local elle était gérée par
le gugallu qui contrôle l'état des canaux, la gestion de la distribution de l'eau, et plus
largement la mise en culture de zones agricoles.
En ce qui concerne l'élevage, la gestion des troupeaux était menée de manière très
rigoureuse, selon un système hiérarchique précis. On gardait les bêtes réservées
pour le culte dans les étables du temple, tandis que des moutons étaient confiées à
des bergers qui pouvaient les amener paître très loin, jusque dans la région du cours
moyen du Tigre.
Les couches populaires des villes babyloniennes sont peut-être pour un bon nombre
des dépendants du pouvoir royal, plutôt que des temples. On constate en tout cas
qu'il y a beaucoup de personnes louant leurs bras pour des travaux urbains ou
ruraux, par exemple les constructions royales, et qui sont de plus en plus payées en
argent et plus en ration. Ce « prolétariat » reste impossible à bien connaître, et la
proportion de dépendants des institutions est toujours impossible à établir, le degré
de dépendance pouvant varier, et on ne peut pas dire dans quelle mesure le travail
salarié compte pour leur subsistance.
Structures familiales
Les notables de cette période se distinguent de ceux des précédentes par le fait
qu'ils sont souvent désignés d'après un ancêtre commun, comme par exemple les
descendants du « Forgeron » (Nappahu) à Babylone. Dans les faits, on constate que
ce groupe est peu homogène par les activités qu'il exerce, qui sont très variées
(exploitation de domaines pour le compte d'institutions, constitution de patrimoines
fonciers, prise en fermage de taxe, commerce, prêts, etc.). Ce qui les caractérise
avant tout est la présence d'archives familiales gardées souvent durant plusieurs
générations, et le rôle du chef de famille qui dirige les affaires de tout le groupe, gère
les mariages avec les autres grandes familles, dont il espère tirer des ressources par
les dots ainsi que des liens sociaux plus forts. Ces familles sont souvent impliqués
dans l'administration du royaume ou des temples qui est la base de leur fortune. Ils
ne sont pas pour autant la catégorie supérieure des élites du royaume, qui est
constituée par une sorte de « noblesse » babylonienne disposant des plus hautes
charges et dignités, mais reste très mal connue.
La famille des descendants d'Egibi, installée à Babylone est l'exemple le mieux
connu du groupe des entrepreneurs de la période néo-babylonienne. L'origine de
leur fortune semble venir des activités de Nabû-ahhe-iddin, chef de la deuxième
génération de la famille, juge royal sous Nabonide. Leurs activités sont diverses :
commerce de denrées alimentaires autour de la capitale, prêts, prise à ferme de
taxes, achats de propriétés foncières urbaines et rurales qui sont ensuite louées,
achats d'esclaves, etc.
L'organisation du commerce
Religion et culture
Les divinités
À certains moments, le personnel cultuel était aussi mobilisé pour des rituels
particuliers revenant à des intervalles réguliers ou pas. Les premiers sont les fêtes
religieuses, dont la plus importante à l'époque néo-babylonienne est la fête-akītu de
la capitale qui avait lieu lors du Nouvel An, dominée par la figure du grand dieu
Marduk, que rejoignaient pour le célébrer les statues des autres grandes divinités de
Babylonie. Le roi était l'autre acteur principal de cette fête, durant laquelle il
confessait ses fautes avant de se voir remettre les insignes de la royauté par le dieu,
sous la supervision du clergé de l'Esagil. Il s'agit donc d'un rituel essentiel de
l'idéologie royale néo-babylonienne. De nombreuses autres fêtes remplissaient le
calendrier cultuel des grandes villes de Babylonie.
Les scribes continuent à être formés selon les méthodes des périodes précédentes,
et l'écriture cunéiforme paraît encore dominer à la période néo-babylonienne malgré
le fait que l'usage de l'araméen alphabétique écrit sur parchemin se développe. Au
niveau supérieur, les lettrés sont les « spécialistes » (ummānu) d'une discipline dont
ils ont acquis les arcanes après une formation longue, impliquant la maîtrise de
l'akkadien mais aussi du sumérien. Ils ont toujours une fonction religieuse : il s'agit
donc d'exorcistes (ašipu), de devins (barū), de lamentateurs (kalû), et aussi
d'astronomes/astrologues (ṭupšar Enūma Anu Enlil). Ils travaillent généralement
dans les grands sanctuaires de la Babylonie, dans la capitale ou bien
à Uruk, Nippur et Sippar. C'est dans ces endroits que la tradition savante
mésopotamienne survit, alors qu'elle n'exerce plus hors des limites du Pays des deux
fleuves le rayonnement qu'elle avait à la fin du IIe millénaire.
On retrouve donc là les principaux types de littérature savante attestés pour cette
période, qui sont souvent l'aboutissement d'une évolution de plusieurs siècles de
tradition ayant vu la fixation de séries « canoniques », donc une unification et une
standardisation des classiques de la littérature mésopotamienne. Cela concerne en
premier lieu les grandes séries de listes lexicales, notamment la plus
importante, HA.RA= hubullu, composée de 24 tablettes compilant différents éléments
de la réalité (objets en bois, métal, argile, textile, animaux, pierres, plantes,
toponymes, etc.). On trouve également les grandes
séries divinatoires comme Enūma Anu Enlil qui contient la base du
savoirastrologique ou encore Barûtu pour l'hépatoscopie. Il s'agit de textes
techniques servant aux prêtres spécialistes des temples, mais aussi d'œuvres
regroupant un savoir à finalité encyclopédique. À partir de cette période, les grandes
séries canoniques font de plus en plus l'objet de commentaires et d'explications,
parfois pour chercher le sens caché des mots ou des signes qu'on y trouve : un
savoir ésotérique se développe. Pour les besoins du culte, les spécialistes avaient
également accès à des hymnes, des prières, et des textes décrivant des cérémonies
religieuses précises se déroulant dans des temples, avec les procédures à suivre,
les chants à entonner. À côté de cela, les mythes (Épopée de Gilgamesh, Épopée de
la Création, Descente d'Ishtar aux Enfers, etc.) et textes de littérature sapientale ne
constituent qu'une faible part des œuvres qui nous sont parvenues, et on ne sait pas
dans quel contexte exact elles pouvaient être utilisées, hormis pour le cas de
l'Épopée de la Création récitée lors de la fête du Nouvel An de Babylone.
Réalisations artistiques
L'art de la terre cuite est répandu : de nombreuses figurines et reliefs sont réalisés à
l'aide de moules. Les figurines les plus courantes représentent des divinités, des
démons protecteurs comme Pazuzu, mais aussi femmes nues, des hommes portant
des vases, des cavaliers, des barques, des lits, des tables et d'autres meubles211. Il
peut s'agir d'objets votifs offerts à des temples, ou bien d'objets à fonction sacrée
conservés au domicile pour assurer une protection magique. On connaît également
des amulettes protectrices en pierre ou en métal.
Après 539, Babylone n'est plus jamais le centre d'un royaume, et l'histoire millénaire
des grands royaumes mésopotamiens s'achève. La Babylonie n'est plus qu'une
province parmi d'autres, même si sa prospérité en fait un enjeu important. Pour
autant, cette rupture politique ne s'accompagne pas d'une rupture dans le domaine
économique et social, dans lequel les changements se font lentement. Mais la
disparition progressive des institutions traditionnelles de la civilisation
mésopotamienne entraîne la disparition de sa culture, qui est achevée dans les
premiers siècles de notre ère.
La période hellénistique
Les royaumes des Diadoques vers 300.
En 331, les troupes macédoniennes d'Alexandre le Grand soumettent l'empire Perse
de Darius III et s'emparent de la Mésopotamie, après les victoires d'Issos et
deGaugamèles. Une fois les campagnes d'Inde achevées en 324, Alexandre, qui se
présente comme le successeur des rois perses, retourne à Babylone, avec des
projets pour cette illustre cité et sa région (restauration de monuments, de canaux),
où il s'établit avant d'y mourir en 323.
C'est donc à Babylone que les Diadoques, les généraux d'Alexandre, décidèrent du
partage de l'Empire. La bonne entente fut de courte durée et ils entrèrent dans une
longue période de conflits armés qui aboutirent à la division de l'héritage du
conquérant. C'est finalement Séleucos Ier qui devient maître de Babylone en 311,
fondant la dynastie séleucide et déplaçant sa capitale à Séleucie du Tigre qu'il fonde
vers 301. Le royaume séleucide connaît son apogée sous son fils Antiochos Ier (280-
261). La Babylonie reste une région importante pour la prospérité de cet État, même
si son centre de gravité bascule progressivement vers la Syrie. C'est également une
période d'hellénisation de plusieurs cités mésopotamiennes. Les guerres opposant
en Syrie les Séleucides aux Lagides, qui dominent l'Égypte, puis la présence
croissante des Romains dans cette même région, ainsi que les défections de
plusieurs provinces orientales du royaume et des troubles successoraux eurent pour
effet d'affaiblir progressivement la position séleucide en Babylonie au milieu
du IIe siècle av. J.-C.
C'est dans ce contexte que les rois Parthes de la dynastie des Arsacides réussissent
à se rendre indépendants du pouvoir séleucide à partir de leur territoire situé sur les
rebords de la Mer Caspienne. Ceci aggrave la situation intérieure du royaume
séleucide, et Babylone tombe entre les mains des Parthes en 141,
lorsque Démétrios II Nicator est vaincu par Mithridate Ier. Le roi séleucide contre-
attaque, mais est fait prisonnier, ce qui permet à son frère Antiochos VII de prendre
le pouvoir. Il s'ensuit une série de conflits durant une bonne dizaine d'années. Au
centre de la zone des combats, ravagée par des pillards, la Babylonie est une zone
sinistrée quasiment en situation d'anarchie, le pouvoir étant exercé par des petits
responsables locaux. Le vice-roi de Phraatès II (130-129), Himéros, organise la
réduction en esclavage et la déportation de Babyloniens envoyés en Médie. Au
début du Ier siècle, alors que le roi Mithridate II (123-88) a rétabli la stabilité du
royaume parthe et réalisé de nombreuses conquêtes, il voit son royaume se diviser
suite à la révolte de Gotarzès Ier (91-80), qui s'empare de la Babylonie. Le royaume
parthe s'enfonce alors dans une période d'instabilité forte, alors que les Romains qui
ont supplanté les Séleucides en Syrie ont des visées sur la Mésopotamie du nord.
Le Ier siècle ap. J.-C. les troubles successoraux s'aggravent ce qui permet aux
pouvoirs locaux de prendre une autonomie plus importante. La Babylonie est donc
secouée par une série de conflits, une très grande instabilité institutionnelle, et
généralement le pouvoir central exerce une emprise moins forte qu'aux périodes
précédentes, ce qui n'entrave pas forcément sa prospérité. C'est dans la seconde
moitié du siècle, tandis que le pouvoir parthe est raffermi par Vologèse Ier, que
Babylone devient une cité-fantôme, désertée par ses habitants, tandis que la culture
millénaire dont elle était le symbole s'éteint progressivement.
Le fait que la Babylonie soit réduite au statut de province et ne soit plus le centre
d'un royaume puissant n'empêche pas qu'elle soit une province cruciale pour les
États qui la dominent du fait de sa richesse. Durant toute la seconde moitié
du Ier millénaire, elle poursuit son développement démographique et économique, qui
culmine à la période parthe malgré les troubles politiques qui s'y produisent et qui
contrastent avec les périodes de paix durable de la domination des Achéménides et
aussi de celle des Séleucide, qui ont largement contribué à cette prospérité. Les rois,
bien qu'étrangers à la Babylonie, y sont actifs. Les Perses poursuivent ainsi
l'aménagement et l'extension du réseau de canaux entrepris par leurs prédécesseurs
néo-babyloniens, pour développer la surface en culture.
Au service des Empires : domaines royaux, terres de service et taxation
La mise en valeur de la Babylonie a donc un intérêt certain pour les empires qui la
dominent, qui cherchent à en tirer des revenus importants. Une certaine
réorganisation des terres est effectuée par les Perses dans ce but. Des domaines
sont attribués à des membres de la famille royale ou des hauts dignitaires, prises sur
l'ancien domaine royal babylonien. Au Ve siècle se met en place un nouveau système
de gestion des terres, reposant autour de circonscriptions nommées hatru,
comprenant une population résidente, et désignées d'après le métier, l'origine
ethnique ou la nature militaire des dépendants qui s'y trouvent. Il s'agit là aussi d'une
forme de réorganisation des terres royales babyloniennes et des dépendants
travaillant pour le palais à la période néo-babylonienne. Le domaine du roi, le plus
vaste, était exploité par des dépendants appelés gardu et rétribués par des rations
d'entretien.
Les archives de Nippur nous informent sur le fonctionnement des terres militaires,
qui s'effectue dans le cadre des hatru sous la direction d'un administrateur
appelé šaknu, autre titre babylonien repris. Les terres militaires sont divisées selon le
type d'unité que leur détenteur devait contribuer à équiper : les plus petits domaines
étaient les « domaines d'arc » (bīt qašti), pour un archer, puis on trouvait des
« domaines de cheval » (bīt sisî) et des « domaines de char » (bīt narkabti). La
question est de savoir si ce « service » (ilku) consistait uniquement en un versement
d'argent pour l'armée ou bien s'il comprenait également un service militaire effectif.
On est en tout cas là aussi en présence d'un système qui correspond aux terres de
services qui pouvaient être utilisées pour équiper des troupes à l'époque du royaume
babylonien. Riche région de l'Empire, la Babylonie fournissait donc des contributions
importantes pour la puissance perse, provenant de ses terres de façon directe mais
aussi indirectement par des taxes, pesant notamment sur des biens fonciers ou
certaines transactions, ainsi que par des prélèvements forcés de denrées agricoles
ou des corvées.
Durant la domination séleucide, une partie du territoire rural devait disposer du statut
de terre royale (chôra), sur laquelle pouvaient notamment être constitués des
domaines attribués à des membres de la famille royale ou des dignitaires. Le
fonctionnement de taxation pour cette période est mal connu.
Les lots d'archives privées des notables urbains qui se développent à la période néo-
babylonienne sont nombreux à la période achéménide, même si plusieurs d'entre
eux s'arrêtent au début du règne de Xerxès Ier comme évoqué ci-dessus. Leurs
activités sont aussi diverses qu'à la période précédente. Le cas le mieux connu est
celui de la famille des descendants de Murashu, établie à Nippur, qui fait fortune non
pas par des acquisitions de propriétés foncières mais par la prise en location de
domaines militaires qu'ils mettent en valeur grâce à leur important capital
d'exploitation (outillage, animaux, travailleurs dépendants), activité complétée par la
prise en charge de la perception de taxes, et des prêts. Beaucoup de ces familles
évoluent en lien avec l'administration royale comme dans ce cas, mais aussi avec
celle des temples, comme la famille des descendants du Barbier (Gallubu) à Ur.
Moins riche, elle détient une prébende de barbier du grand temple de cette ville qui
leur permet d'avoir des terres liées à cette fonction, source de revenue complétée
par la prise en charge de domaines militaires, ou l'achat de propriétés foncières
mises en location.
Ces archives privées sont encore attestées pour la période séleucide et le tout début
de la période parthe, par des lots provenant de deux villes, Babylone et Uruk, et
documentant plusieurs familles de notables. Elles évoluent dans l'administration des
deux grands temples de ces villes, chaque famille se spécialisant dans la détention
de charges d'administration du temple ou de la cité, ou de prébendes, ainsi que dans
des opérations privées. Le dernier lot connu, celui d'un dénommé Rahimesu,
provient de Babylone et date de la fin de la période des Séleucides et du début de
celle des Parthes. Ses activités documentées sont entièrement liées au temple
de Marduk, dont il est une sorte de comptable, gérant une caisse dans laquelle il
encaisse des offrandes et utilise l'argent pour faire des achats pour le culte.
Les prix et leurs fluctuations sont bien documentées pour la seconde moitié
du Ier millénaire, grâce à des actes de la pratique (contrats), et surtout des
rapports astronomiques mentionnant aux côtés des mouvements d'astres l'évolution
mensuelle des prix de produits de consommation courante : grains d'orge,
de sésame, de moutarde (ou de cuscute ?) et de cresson (ou
de cardamone ?), dattes, et laine. Ils s'étalent sur quatre siècles des
périodes achéménide, séleucide et parthe (460-61). Ces documents précisent quelle
quantité de ces produits on pouvait se procurer pour 1 sicle d'argent, ce métal restant
le moyen de paiement de base, divisé entre argent de bonne et de moyenne qualité,
marqué officiellement par un sceau de l'État. Il est toujours pesé durant cette
période, jamais compté, et quand les premières pièces de monnaie séleucides sont
introduites en Babylonie on leur donne uniquement une valeur pondérale.
Seizième tablette de la liste lexicale HA.RA = hubullu sur les pierres et objets en
pierre,Uruk, Ier siècle av. J.-C.,Musée du Louvre.
Le culte religieux dans la Babylonie de la seconde moitié du Ier millénaire
La présence d'une administration dans les temples et de personnes y exerçant des
charges, dont des prébendiers, produisant des textes rédigés en cunéiforme, nous
indique que les temples babyloniens continuent à fonctionner suivant les principes
posés durant les siècles « classiques » de la civilisation mésopotamienne. Cela
concerne au moins les deux grands temples qui nous ont livré des tablettes rituelles
pour la période hellénistique : l'Esagil de Babylone et le Bīt Resh d'Uruk. À côté de
l'entretien quotidien du dieu qui se déroule toujours dans ces sanctuaires, on trouve
des mentions de plusieurs grandes fêtes qui rythment l'année liturgique dans ces
endroits : la fête-akītu est toujours un événement majeur, aux côtés de rituels non
périodiques comme une fête se déroulant lors d'une éclipse de lune. Tout cela
suppose la rédaction et la transmission de ces rituels selon les traditions anciennes
qui sont conservées dans ces lieux. Le Bīt Resh est le dernier grand complexe sacré
bâti en Basse Mésopotamie suivant la tradition babylonienne, s'étendant sur un
espace de 160 x 210 mètres centré sur une cour carrée de 40 mètres de côté, dont
le temple principal, situé au sud, reprend le plan pluriséculaire organisé autour
d'une cellabarlongue axée desservie par une cour intérieure entourée de plusieurs
salles.
Le principal domaine dans lequel les savants babyloniens sont renommés chez leurs
voisins est celui de l'astronomie/astrologie, plus développé dans cette région
qu'ailleurs dans le monde ancien. Des observations régulières et très précises des
mouvements des astres sur une très longue durée (au moins de 661 à 61 av. J.-C.)
étaient compilées sur des séries tablettes de rapports astronomiques. Ces données,
combinées avec les connaissances mathématiques développées durant les périodes
précédentes, permettaient à certains savants de prédire de façon assez précise
les éclipses lunaires puis solaires, ou de calculer très précisément la durée
des années lunaires etsolaires ainsi que les correspondances entre les deux.
L'astrologie/astronomie est en fin de compte l'aspect de la culture et de la science
babylonienne qui s'est le plus diffusé hors de Mésopotamie, souvent réduit à son
aspect divinatoire, certains spécialistes « chaldéens » étant renommés chez les
Grecs ou les Romains, comme Kidinnu/Kidenas.
Le document cunéiforme le plus récent qui soit connu est une tablette astrologique
datée de 61 ap. J.-C., donc de la période parthe, retrouvée dans
l'Esagil de Babylone. Même s'il ne s'agit vraisemblablement pas du dernier document
à avoir été écrit en cunéiforme, tout laisse à penser que cette écriture et la culture
plusieurs fois millénaire qu'elle servait à noter ont disparu dans le milieu des temples,
qui est le dernier dans lequel la culture mésopotamienne survivait. Le grand
sanctuaire de Marduk à dû arrêter de fonctionner vers la fin de la période parthe,
même si on trouve encore des traces de prêtres et de culte rendu aux anciennes
divinités babyloniennes aux débuts de la périodesassanide, au IIIe voire au IVe siècle
de notre ère. Il est plausible que le « dernier coin » ait été écrit sur une tablette au
plus tard au IIIesiècle. À cette période, l'ancienne culture mésopotamienne ne devait
plus avoir d'ancrage social, alors que l'akkadien avait cessé d'être une langue
vernaculaire depuis longtemps (sans doute à la période achéménide). Le nouvel
Empire avait pour religion officielle lezoroastrisme, profondément différent de
l'ancienne religion babylonienne tout comme le christianisme qui se développait en
différents courants dans la région, alors que
l'écriture alphabétique araméenne ou grecque avait depuis bien longtemps pris le
pas sur le cunéiforme.
Souverains de Babylone
Souverains légendaires de Babylone
Ninos
Sémiramis
Ninyas
Ire dynastie ( ? /-1595)
Aram-Madara
Tubti-Yamuta
Yamquzzu-Halama
Heana
Namzu
Didãnu
Amnãnum
Yakrurum
Ipti-Yamuta
Buhazuni
Su-Malika
Asmadu
Abi-Yamuta
Abi-Ditan
Mam
Su-Mi
Agum Ier
Kaštiliaš Ier
Kaštiliaš II
? /-1895 : Dadu-Banaya
-1895/-1881 : Sumu-Abum
-1881/-1845 : Sumu-la-El
-1845/-1831 : Zabium
-1831/-1813 : Apil-Sin
-1813/-1793 : Sim-Muballit
-1793/-1750 : Hammourabi
-1750/-1712 : Samsu-Iluna
-1712/-1684 : Abi-Eshuh
-1684/-1647 : Ammi-Ditana
-1647/-1626 : Ammi-Saduqa
-1626/-1595 : Samsu-Ditana
Gandaš
Agum Ier
Kaštiliaš Ier
Ušši
Abirattaš
Kaštiliaš II
Urzigurumaš
Harbašihu
Tiptakzi
Agum II
Burna-Buriaš Ier
Kaštiliaš III
Ulamburiash
Agum III
Kadashman-Harbe Ier
Kara-indaš
Kurigalzu Ier
? /-1375 : Kadashman-Enlil Ier
Vers -1359/-1333 : Burna-Buriaš II
Vers -1333 : Kara-hardaš
Vers -1333 : Nazi-Bugaš
-1345/-1324 : Kurigalzu II
-1324/-1298 : Nazimarrutash
-1298/-1280 : Kadashman-Turgu
-1280/-1265 : Kadashman-Enlil II
-1265/-1256 : Kudur-Enlil
-1256/-1243 : Shagarakti-Shuriash
Vers -1232/-1225 : Kaštiliaš IV
-1235/-1228 : Tukulti-Ninurta Ier d'Assyrie
-1228/-1228 : Enlil-Nadin-Shumi
-1228/-1225 : Kadashman-Harbe II
-1225/-1224 : Enlil-Nadin-Apla
-1224/-1219 : Adad-Suma-Iddina
-1219/-1189 : Adad-Suma-Usur
-1189/-1174 : Mélisipah
-1174/-1161 : Mérodash-Baladan Ier
-1161/-1160 : Zabuba-Suma-Iddina
-1160/-1157 : Enlil-Nadin-Ahhe
-1154/-1141 : Marduk-kabit-ahheshu
-1140/-1133 : Itti-Marduk-balatu
-1132/-1127 : Ninurta-nãdin-sumi
-1126/-1105 : Nabuchodonosor Ier
-1104/-1101 : Enlil-nadin-apli Ier
-1100/-1083 : Marduk-nãdin-ahhê
-1082/-1070 : Marduk-sãpik-zêri
-1069/-1048 : Adad-apla-iddina
-1047 : Marduk-ahhê-erîba
-1046/-1035 : Marduk-zêr
-1034/-1027 : Nabû-sum-libur
-1025/-1007 : Simbar-Shipak
-1007/-1007 : Ea-Mukin-Zari
-1007/-1004 : Kassu-Nãdin-Ahhe
-1004/-987 : Eulma-Sãkin-Sumi
-987/-984 : Ninurta-Kudurri-Usur Ier
-984/-984 : Sirikti-Suqmuna
-984/-978 : Mãr-Biti-Apla-Usur
-978/-943 : Nabu-Mukin-Apli
-943/-943 : Ninurta-Kudurri-Usur II
-943/-942 : Mãr-Hiti-Ahhe-Iddina
-942/-900 : Samas-Mudammiq
-900/-888 : Nabu-Suma-Ukin Ier
-888/-855 : Nabû-apla-iddina
-855/-819 : Marduk-Zakir-Sumi Ier
-819/-813 : Marduk-Balatsu-Iqbi
-813/-812 : Bab-Aha-Iddina
-812/-811 : Shamshi-Adad V d'Assyrie
-811/-810 : Marduk-Sadin-Sumi
-810/-783 : Adad-Nirari III d'Assyrie
-783/-779 : Marduk-Bal-Zari
-779/-770 : Marduk-Apla-Usur
-770/-761 : Eriba-Marduk
-761/-748 : Nabu-Suma-Iskum
-747/-734 : Nabonassar
-734/-732 : Nabu-Nãdin-Zari
-732/-732 : Nabu-Suma-Ukin II
-732/-729 : Nabu-Mukin-Zari
-729/-727 : Teglath-Phalasar III d'Assyrie
-727/-722 : Salmanazar V d'Assyrie
-722/-710 : Mérodash-Baladan II
-710/-705 : Sargon II d'Assyrie
-705/-703 : Sennacherib d'Assyrie
-703/-703 : Marduk-Zãhir-Sumi II
-703/-703 : Mérodash-Baladan II
-703/-700 : Bel-Ibni
-699/-694 : Assur-Nãdin-Sumi
-693/-692 : Nergal-Usazib
-692/-688 : Musezib-Marduk
-688/-681 : Sennacherib d'Assyrie
-681/-669 : Assarhaddon d'Assyrie
-669/-650 : Shamash-shum-ukin d'Assyrie
-650/-648 : Assurbanipal d'Assyrie
-648/-627 : Kandalãnu
-627/-627 : Assuretililâni d'Assyrie
-627/-626 : Sin-Sar-Lishir
-626/-626 : Sin-shar-ishkun d'Assyrie
-626/-605 : Nabopolassar
-605/-562 : Nabuchodonosor II
-562/-560 : Amel-Marduk
-560/-556 : Neriglissar
-556/-555 : Labasi-Marduk
-555/-539 : Nabonide
-539/-522 : Cambyse II
Babylonien (langue)
Le babylonien est la dénomination par laquelle on désigne un dialecte de l'akkadien,
parlé en Babylonie à partir du début du IIe millénaire av. J.-C., et qui est pendant
longtemps la langue littéraire et diplomatique par excellence du Proche-Orient.
Paléo-babylonien
Médio-babylonien
Néo-babylonien
Le néo-babylonien est écrit en Babylonie dans la première moitié du Ier millénaire av.
J.-C. Par rapport aux périodes précédentes, le néo-babylonien a plusieurs
particularités linguistiques (sans parler des évolutions ayant lieu au cours de la très
longue période qu’il couvre). Du point de vue phonétique : le w est couramment
noté m quand il se trouve à l’intérieur d’un mot ; št devient lt ; mt devient nd. Du point
de vue grammatical, les cas des noms et des adjectifs sont moins marqués. D’une
manière générale, le babylonien est alors très influencé par l’araméen, qui devient
alors la langue principale du Proche-Orient.
Babylonien tardif
C’est le dernier état de la langue akkadienne attesté, à une époque où cette langue
n‘est plus beaucoup parlée, s‘étant faite supplanter par l‘araméen. La chute de
l’empire néo-babylonien en 539 marque la fin de la domination d’un royaume de
culture akkadienne en Mésopotamie. Désormais dominée par des dynasties
étrangères (Perses, Grecs, Parthes), alors que sa population devient aramophone, la
Mésopotamie voit sa culture ancestrale péricliter, et de moins en moins de textes
sont écrits en akkadien. Les derniers documents de cette langue sont des textes
littéraires ou scientifiques, et de ce fait leur langue est plutôt du babylonien standard.
Les derniers documents cunéiformesconnus datent du début de notre ère. Alors
meurt la culture akkadienne, et le langage qu’elle avait maintenu en vie disparaît
alors.
Hammurabi
Hammurabi, parfois également transcrit Hammourabi, ou Hammu-rapi, nom qui
signifie « l'aïeul est grand » ou « l'aïeul est un guérisseur », est le sixième roi de la
première dynastie de Babylone, dynastie d'origine amorrite, comme celles des autres
grands souverains mésopotamiens de son temps. Il a régné de 1792 av. J.-C.,
jusqu’à sa mort, vers 1750 av. J.-C. Son règne est l’un des plus longs de l’antiquité
du Proche-Orient et l'un des plus prestigieux par l'ampleur de son oeuvre politique et
législative. Il a achevé la conquête de Sumeret d’Akkad. Il a été le premier roi à
établir la domination du royaume babylonien sur la Mésopotamie, et peut à ce titre
être considéré comme l'un des grands artisans du prestige et de la puissance à venir
de cette cité.
Le roi Hammurabi de Babylone face au dieu Shamash, détail de la stèle du Code
d'Hammourabi, XVIIIe siècle
Un règne marqué par de grandes conquêtes
Hammurabi succède à son père Sîn-Muballit et hérite donc de son modeste royaume
qui s’étend le long de l’Euphrate sur les cités entourant sa capitale. Il domine
quelques villes importantes de la partie nord de la basse
Mésopotamie : Kish, Sippar, Borsippa et Dilbat. Son père avait achevé quelques
conquêtes dans le sud mésopotamien, mais elles furent vite reprises par le roi le plus
puissant de la région, Rîm-Sîn de Larsa. Babylone est alors une puissance
montante, qui ne s'est néanmoins pas encore imposée dans le concert international.
Au nord, la Mésopotamie est dominée par Samsi-Addu (aussi appelé Shamshi-
Adad), roi originaire d'Ekallatum, qui dirige ce que les historiens contemporains
appellent Royaume de Haute-Mésopotamie. Ce dernier est un allié de Hammurabi.
La première décennie du règne de Hammurabi est mal connue. On sait par ses
noms d'années qu'il remporte quelques victoires militaires. Il poursuit les entreprises
de son prédécesseur vers le sud, et prend temporairement Isin et Uruk, que le roi de
Larsa reprend ensuite. Durant la neuvième et la dixième année de son règne, il
s'empare des cités de Malgium et Râpiqum, ce qui lui permet de renforcer son
emprise sur le nord de la basse Mésopotamie.
En 1775, Samsi-Addu meurt, et son royaume s'effondre alors, ouvrant des années
de conflit pour la domination de la haute Mésopotamie. Le premier roi à tenter
d'affirmer sa domination sur la région est celui d'Eshnunna, Ibal-pi-El II. Ce dernier
attaque le royaume de Mari, dirigé par le roi Zimri-Lim, que Hammurabi choisit de
soutenir, sans doute pour éviter de subir les suites de l'expansion du roi d'Eshnunna,
qui est son voisin sur sa frontière nord-est. L'offensive d'Eshnunna échoue face aux
alliés. Ces deux derniers entrent alors en négociation sur la domination de leur
région frontalière sur l'Euphrate, et finissent par se partager la suzeraineté sur la
principale ville de cette région, Hît, faute de meilleure solution.
Après quelques années de paix, avant que le roi d'Élam Siwepalarhuhpak ne décide
de s'attaquer à Eshnunna, et demande l'aide des rois de Babylone et de Mari, qui
sont en théorie ses vassaux. Ces derniers acceptent, car cela les débarrasse de leur
grand rival, qui est vaincu. Mais le roi élamite poursuit son offensive, et cherche à
son tour à prendre le contrôle de la haute Mésopotamie, demandant à Babylone et à
Mari de se soumettre. Les deux rois montent alors une coalition avec d'autres
souverains mésopotamiens, et réussissent à repousser difficilement les Élamites,
dont les troupes évacuent finalement la Mésopotamie.
La conquête de la Mésopotamie
Héritage politique
Hammurabi a dû mettre en place son autorité sur des provinces nouvellement créées
suite à ses conquêtes. Cela concerne surtout le sud mésopotamien pris sur le
royaume de Larsa, qui est la région la plus riche qu'il soumet et celle sur laquelle
l'emprise babylonienne est la plus forte et la plus durable. Une fois le royaume
conquis sur Rîm-Sîn, Hammurabi ne choisit pas de l'incorporer dans son royaume
dans un premier temps. Il se fait roi de Larsa, et proclame un édit de mîšarum qui
abolit les dettes contractées dans le royaume auparavant, comme on le faisait à
chaque début de règne. Puis il annexe finalement ce royaume au sien, le divise en
deux provinces et y impose sa législation.
Le roi législateur
Nabuchodonosor II
Le règne
La capitale
L’essentiel de la vie économique est fondé sur l’agriculture. Les terres sont affectées
selon leurs qualités et les possibilités d’irrigation à l’élevage, aux palmeraies et aux
céréales. Elles sont concédées contre redevance à ceux qui les exploitent. Certains
exploitants sont propriétaires, mais ils restent soumis au temple pour leurs
redevances.
Une activité de type capitaliste fondée sur le commerce de l’argent et des biens
matériels se développe dans les villes. Elle connaît une certaine expansion avec
l’apparition de la monnaie qui commence à circuler.
Code d'Hammurabi
Code d'Hammurabi
Le Code d'Hammurabi (vers 1750 av. J.-C.) est l'un des plus anciens textes
de loi qui nous soit parvenu, le premier quasiment complet. Texte babylonien non
religieux mais d'inspiration divine, réalisé sous l'autorité d'Hammurabi, il prolonge en
matière juridique l'œuvre militaire et politique du fondateur de l'empire.
Ce texte, s'il contient une certaine organisation n'est pas à proprement parler
juridique mais plutôt légal. Il est catégorisé comme « préjuridique » car même si
certaines catégories existent déjà (comme la notion de voleur), d'autres notions qui
nous sont fondamentales aujourd'hui ne sont pas développées (comme levol). Des
règles juridiques existent mais il n'existe pas encore de théorie juridique ou
de doctrine. Il faudra attendre la Rome antique pour voir apparaître les
premières théories du droit et de la justice.
Le Code est actuellement au Musée du Louvre à Paris. Une copie est exposée
au musée archéologiquede Téhéran.
Histoire
La stèle du Code d'Hammurabi dont on dispose fut gravée dans un bloc de basalte et
fut placée dans le temple de Sippar. Plusieurs autres exemplaires similaires furent
vraisemblablement placés à travers tout le royaume. Cela avait pour but de faire
connaître l'autorité et la sagesse d'Hammurabi sur l'ensemble du territoire qu'il
dirigeait.
Le Code fut emporté vers 1150 av. J.-C. dans la ville de Suse, en Iran, quand les
rois élamites s'emparèrent de la Babylonie et emmenèrent différentes œuvres d'art
mésopotamiennes dans leur pays. C'est dans cette ville qu'il fut découvert par
l'égyptologue Gustave Jéquier membre de l'expédition dirigée par Jacques de
Morgan, en décembre 1901. Le père Jean-Vincent Scheil traduisit l'intégralité du
Code, de retour àParis, en France. Depuis, le Code est exposé au Musée du Louvre,
à Paris. Une copie est également exposée au musée archéologique deTéhéran.
Ce code est longtemps resté le plus ancien connu dans le monde. Le plus ancien
texte de loi que l'on connaisse (actuellement)2 est le code d'Ur-Nammu rédigé vers
2 100 av J-C mais il ne nous est parvenu que de manière parcellaire.
Aspect
Cette division est en réalité arbitraire, dans la mesure où le texte n'est pas découpé
en différents articles. Les articles 66 à 100, illisibles sur la stèle, ont été restitués
grâce à des copies effectuées sur des tablettes d'argile.
Contenu
Fonction
Le Code d'Hammurabi n'est pas un ensemble ordonné de règles édictées par voie
d'autorité, analogue à un code pénal ou civil au sens moderne, à partir duquel les
juges doivent viser un texte précis pour motiver une décision. Il s'agit plutôt d'une
compilation de décisions de justice, issue de la pratique jurisprudentielle et
contentieuse, rendues par le roi Hammurabi et réunies en un grand texte. Il s'agissait
de fournir des exemples de la sagesse du roi, conservés à l'usage des générations à
venir. On l'a ainsi comparé à une sorte de traité de la justice. Le Code d'Hammurabi
était encore en usage à l'époque néo-assyrienne (911-609), certaines de ses
dispositions faisant encore jurisprudence.