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Document de travail

de l'IIEDH N° 15.3 Grenier à mots


BAMANAN
Série : Grenier à mots
Ed. Caroline Bieger-Merkli, Johanne Bouchard Dagné Jiginé

Kassoum COULIBALY

Novembre 2008

Observatoire de la diversité et des droits culturels


A propos de l’auteur : Kassoum Coulibaly est cofondateur de l’Institut Africain des Droits de l’homme (IADH) de Bamako, Mali.
E-mail : c.kassoum@gmail.com - BP : E 155 Bamako (Mali) – Tél : +223 76 46 51 77
En couverture L’image d’un grenier de la région de Mopti, en pays Dogon, centre du Mali.Dans le titre, dagné signifie « mot » et jiginé signifie « Grenier ».
Ensemble, ils signifient « Grenier à mots ». On aurait aussi pu traduire le sens en utilisant l’expression : « Dagné Gafé », qui signifie précisément « Dictionnaire ».
« Gafé » signifie « Livre ».

© IIEDH Droits d'auteur. La reproduction totale ou partielle, sur support numérique ou sur papier, de cet ouvrage pour usage personnel ou pédagogique est
autorisée par la présente, sans frais ou sans qu'il soit nécessaire d'en faire une demande officielle, à condition que ces reproductions ne soient pas faites
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expresse et/ou du paiement de certains frais.

DT Les Documents de travail de l'IIEDH, disponibles sur le site WEB, sont présentés pour susciter et recueillir toutes les critiques utiles, sous condition du
respect du ©. En fonction des avis reçus et de l'avancée de la recherche, ils sont susceptibles d'être modifiés. La dernière version fait foi.

SERIE La recherche Grenier à mots a débutée en 2005 et permet, en 2008, de comparer et de traiter 17 langues d’extension variée selon le contexte considéré,
notamment :

Déjà parus dans cette série :


- le pulaar, dans le contexte de la Mauritanie (DT 15.1) ;
- le moore, dans le contexte du Burkina Faso (DT 15.2) ;
- le bamanan dans le contexte du Mali (DT 15.3) ; - le kinyarwanda, dans le contexte du Rwanda ;
- le lingala, dans le contexte du Congo Brazzaville
- le mina / fon, dans le contexte du Bénin
A paraître :
- le roumain dans le contexte de la Roumanie
- l’albanais, dans le contexte de l’Albanie ;
- le russe, dans le contexte de la Russie ;
- l’allemand, dans le contexte de la Suisse alémanique ;
- le tamasheq, dans le contexte du Mali ;
- l’arabe littéral;
- l’ukrainien, dans le contexte de l’Ukraine ;
- l’emakhuwa, dans le contexte du Mozambique ;
- le vietnamien, dans le contexte du Vietnam ;
- le français, dans le contexte du Canada ;
- le wolof, dans le contexte du Sénégal.

Institut interdisciplinaire d’éthique et des droits de l’homme


Chaire UNESCO pour les droits de l'homme et la démocratie
Rue St- Michel 6, CH-1700 Fribourg. Tél. 41 26 300 73 44,
Fax : 41 26 300 97 07 www.unifr.ch/iiedh; iiedh@unifr.ch DDC
2
DT 15 Série Grenier à mots 15.3: Grenier à mots Bamanan Dagné Jiginé 1

Table des matières :


Introduction aux greniers à mots : le recueil de l’universalité.................................................................................................................... 2

1. Présentation du contexte ...................................................................................................................................................................... 8


1.1 Méthodologie .................................................................................................................................................................................... 9
1.2 Lieux d’enquête................................................................................................................................................................................. 9
1.3 Présentation de la langue bamanan ................................................................................................................................................. 10
1.4 Le Bamanan, son insertion sociale et ses particularités .................................................................................................................. 12
2. Enjeux anthropologiques.................................................................................................................................................................... 13
2.1 La communauté humaine ................................................................................................................................................................ 13
2.2 La personne individuelle ................................................................................................................................................................. 14
2.2.1 Les six jours de l’homme ......................................................................................................................................................... 14
2.2.2 Les trois âges de l’homme........................................................................................................................................................ 15
2.3 La personne dans la communauté ................................................................................................................................................... 16
2.3.1 Les quatre « ton » du monde .................................................................................................................................................... 18
2.3.2 Le « fen » et le « ko » ............................................................................................................................................................... 18
3. Le panier à mots – cadre de comparaison ........................................................................................................................................ 21
3.1 L’ÊTRE HUMAIN.......................................................................................................................................................................... 21
3.1.1 Entrées spécifiques à cette langue ............................................................................................................................................ 37
3.2 LA DIGNITE / LA HONTE ........................................................................................................................................................... 40
3.2.1 Entrées spécifiques à cette langue ............................................................................................................................................ 48
3.3 LA LIBERTE / LA RESPONSABILITE ....................................................................................................................................... 49
4. Analyse : Valeurs et contre valeurs en résumé ................................................................................................................................ 57
5. Conclusion ........................................................................................................................................................................................... 58
6. Annexes ................................................................................................................................................................................................ 59
6.1 L’alphabet de la langue bamanan.................................................................................................................................................... 59
6.2 La charte du Manden....................................................................................................................................................................... 60
6.3 Bibliographie................................................................................................................................................................................... 62
DT 15 Série Grenier à mots 15.3: Grenier à mots Bamanan Dagné Jiginé 2

Introduction aux greniers à mots : le recueil de l’universalité


Le « grenier à mots » est une recherche qui porte sur les sens et les significations des mots utilisés en droits de l’homme. Elle part du principe que
la richesse anthropologique contenue dans la diversité des langues est un patrimoine culturel commun trop peu exploité, notamment dans le
domaine des droits humains1, et que l’universalité des droits humains est, en conséquence, loin d’être comprise. Nous pensons que la valorisation
de la diversité des mots et expressions qui constituent l’expérience des droits humains, recueillant l’histoire (diachronie) et affrontant les défis
contemporains (synchronie) est une étape essentielle du recueil de l’universel et de l’approfondissement de notre patrimoine commun.2 (fdr2 §2).

Cette introduction présente les bases théoriques du grenier à mots et explique la façon dont nous avons conçu les différents greniers à mots par
langue, avec leur logique propre et en comparaison avec les autres greniers. Il synthétise les documents méthodologiques qui ont été produits
depuis le commencement de cette recherche, notamment le document de synthèse 14 (DS 14), les feuilles de route n°1 (fdr1), n°2 (fdr2) et n°3
(fdr3).

But et questions de bases


Le grenier à mots a pour but de recueillir les mots principalement utilisés en droits humains et de comparer leurs usages afin d’approfondir
l’universalité de notre patrimoine commun. Il s’agit de trouver dans chaque langue des « portes » qui nous permettent à la fois :
- une lecture et une compréhension interculturelle des droits humains et
- l’appropriation des droits humains par différentes populations, à partir de leurs ressources culturelles.

Il convient donc d’enrichir l’universalité par cette diversité, en particulier pour comprendre les grands défis – souvent présentés comme des
objections à une conception dite « occidentale » : les limites de l’être humain, la nature de sa dignité, de ses libertés et responsabilités. En retour,
il est important de comprendre la diversité sous la lumière de l’universalité : nos partenaires peuvent ainsi « extraire » de leurs milieux culturels
des sources anthropologiques précieuses, porteuses d’universel, et en même temps critiquer les croyances et pratiques qu’ils jugent contraires aux
droits humains.

1
En plus des documents de travail (DT) comme celui-ci, l’Observatoire publie régulièrement en ligne des documents de synthèse. Cette partie se réfère au document de
synthèse n°14 de l’Observatoire, au chapitre « enjeux » ; si après (DS 14, chapitre ou paragraphe concerné).
2
Se réfère à la feuille de route n°2 au paragraphe 2 ; si après (fdr2, chapitre ou du paragraphe concerné). Les trois feuilles de route produites tout au long de cette recherche
précisent des questions méthodologiques et les diverses étapes du travail.
DT 15 Série Grenier à mots 15.3: Grenier à mots Bamanan Dagné Jiginé 3

Les questions de bases sont :


1. Quelles sont les valeurs, exprimées par la langue et leurs usages, qui nous permettent d’affirmer que la logique des droits humains est
étroitement imbriquée dans les constructions sociales de chaque culture ?
2. Quels sont les enjeux que certains mots et expressions portent, du point de vue de leurs significations et de leurs usages, en termes des
valeurs communes et/ou de droits de l’homme ?

Chaque langue constitue un domaine d’analyse en lui-même en ce qu’elle permet :


- de découvrir son « potentiel de réconciliation interne » face à une situation de non respect des valeurs des droits humains ;
- d’identifier les « risques de justification » d’un acte ou d’une pratique (traditionnelle) contraire aux valeurs des droits humains.

Chaque langue constitue aussi un pilier important pour rendre possible la comparaison afin de trouver :
- les valeurs que nous sommes prêts à partager et qui permettent d’argumenter contre les pratiques contraires aux valeurs des droits
humains, qui mettent en danger notre « vivre et agir-en-commun »
- les problèmes transversaux - pratiques contraires aux valeurs des droits humains ou groupes particulièrement vulnérables - qu’il s’agira de
traiter de façon plus approfondie et globale dans nos réflexions portant sur les droits humains.

Hypothèse et méthode
Notre hypothèse : l’universel est dialectique
Les valeurs universelles (les « lieux communs ») ne peuvent être définies par des mots simples, mais plutôt par des couples dialectiques qui
autorisent la diversité des interprétations à l’intérieur de l’opposition. Nous pensons que chaque concept universel se compose d’une dialectique
ou d’un enchaînement dialectique qui délimite un « espace de recueil » : recueil de l’universalité par l’accueil de la diversité, et recueil de la
diversité par l’accueil de l’universalité. (fdr1, §11).

Nous avons travaillé sur trois dialectiques, qui sont apparues fondamentales et qui contribuent à former la singularité de chaque gouvernance
démocratique : l’être humain, la dignité, la liberté. Les espaces dialectiques que ces trois termes ouvrent constituent le « champ de la récolte »
d’universalité et de diversité, de richesse d’interprétation interculturelle. Les trois couples choisis étant intimement liés, il est logique qu’ils se
répondent.
• Du point de vue philosophique, on peut énoncer ce lien entre les trois concepts sous cette forme : la dignité est la qualité inhérente à l’être
humain et la liberté/responsabilité est son exercice. Sous la dignité s’entend immédiatement le droit (le droit d’être un être humain) ; la
liberté ne se décline pas correctement sans la responsabilité qui lui est liée.
DT 15 Série Grenier à mots 15.3: Grenier à mots Bamanan Dagné Jiginé 4

• Du point de vue logique, nous avons une première opposition inné /acquis qui se déploie de multiples façons dans l’acquis, sans cependant
se couper des capacités innées (fdr1 §12).

Inné ontologique relation avec le cosmique et l’humain dans son


inhérent universalité et sa diversité. Potentiel (capacité) de tout
inconditionnel développement

Homme / femme (genre)


Être humain anthropologique
Dignité Jeune / âgé
Liberté/Responsabilité
Individu / famille et communauté
acquis social, politique
(volontairement ou non) juridique Fonction, métier, statut social

Présentation des greniers


Les divers « greniers à mots » changent de forme représentative selon l’entrée lexicologique, terminologique et contextuelle que nous offrent les
langues étudiées, (fdr1 §2), selon les enjeux anthropologiques du pays étudié et selon la diversité des chercheurs engagés. Une diversité
importante se présente aussi au niveau de la « nature de la langue » : certaines ont une tradition écrite alors que d’autres ont une tradition plutôt
orale. Les langues « écrites » favorisent une entrée étymologique, tandis que les langues de tradition plutôt orale favorisent une entrée par les
sentences et les proverbes.

Afin de faciliter la lisibilité entre les divers greniers, nous avons élaboré un panier à mots qui sert de cadre de comparaison et qui débouche sur un
cadre transversal permettant l’analyse. Le cadre proposé tient suffisamment compte de la particularité de chaque langue et est relativement souple
au niveau des mots choisis. Certains mots sont donnés – choisis au préalable en fonction de notre approche et/ou en discussion avec certains de
nos partenaires. Ils sont supposés être traités dans chaque langue, même si la manière de le faire peut varier d’un grenier à l’autre. D’autres mots
peuvent figurer à part et constituer des entrées spécifiques à une langue donnée. Ils ont été proposés par l’auteur du grenier respectif et sont
importants pour comprendre soit le contexte d’un autre mot donné en préalable, soit pour comprendre les valeurs et la société en question. Pour
chaque grenier, nous avons proposé le cadre de présentation suivant (fdr2, chapitre 3) :
DT 15 Série Grenier à mots 15.3: Grenier à mots Bamanan Dagné Jiginé 5

GM 15.1 GM 15.2 GM 15.3


pulaar moore bambara
1. Présentation du 1. Présentation du 1. Présentation du
contexte contexte contexte

2. Enjeux 2. Enjeux 2. Enjeux


anthropologiques anthropologiques anthropologiques
3. Le panier à mots 3. Le panier à mots 3. Le panier à mots
(Cadre de (Cadre de (Cadre de Cadre transversal
Comparaison) Comparaison) Comparaison)
4. Analyse 4. Analyse 4. Analyse

5. Annexes 5. Conclusion 5. Conclusion

6. Annexes 6. Annexes

Chapitre 1. Présentation du contexte : Chapitre présentant le contexte de la langue étudiée (appartenance familiale linguistique, historique et
dissémination géographique) ainsi que le contexte d’analyse (lieux et conditions d’enquête, méthodes employées, observateurs et leurs
disciplines)

Chapitre 2. Enjeux anthropologiques : Clarification de certaines particularités anthropologiques de la société et/ou de la langue étudiée en
mettant l’accent sur les enjeux en matière des droits de l’homme. C’est un chapitre qui a pour but de faciliter la compréhension et l’analyse du
panier à mots. Il peut énoncer des difficultés principales d’interprétation.

Chapitre 3. Le « panier à mots » : C’est le principal chapitre du grenier à mots car il contient tous les mots analysés, classés selon un système de
référence. Ce panier est structuré en diverses colonnes (de gauche à droite):

- La première colonne permet de lire le mot dans la langue originale (avec une transcription phonétique du mot selon l’API,
l’alphabet phonétique international).
DT 15 Série Grenier à mots 15.3: Grenier à mots Bamanan Dagné Jiginé 6

- La deuxième colonne tient compte de la provenance du mot (étymologies remarquables), de sa sémantique et de ses utilisations,
etc. Il peut contenir la simple provenance étymologique des mots ou des proverbes, récits, mythes, chants, comptes, dictons etc. Le
panier peut aussi contenir des synonymes, des diverses utilisations ou des changements d’utilisation dans le temps tenant compte
des fractures historiques, par ex. colonialisme, période communiste, mondialisation actuelle (analyse diachronique). Afin de
faciliter la lisibilité de ce cadre, la plupart des documents utilisent pour cette colonne la langue française, soit la traduction des
sentences, proverbes, etc. En ce cas, une liste de proverbes en langue originale avec une traduction et / ou explication en français
peut se trouver en annexe du document (ex. pulaar). Dans certains cas, le proverbe se trouve cependant en langue originale avec
une traduction en français (ex. moore ou bambara).

- Une autre colonne permet de faire des liens internes à chaque document ou externes. Les liens internes renvoient à d’autres mots
ou concepts contenus dans le grenier lui-même. Ils précisent soit le chapitre de référence (p.ex. Chap. 3.1, la communauté humaine
pour le bambara), soit le numéro du mot de référence et le mot lui-même (p.ex. 8. Communauté). Les liens externes renvoient à des
mots dont les utilisations et significations sont identiques ou semblables à celles dans une autre langue (p.ex. une même idée ou un
même contexte qui apparaît dans le grenier bambara est contenu dans le grenier moore. En ce cas, le lien est marqué de façon
suivante : ⇒ moore).

- La dernière colonne contient les problèmes d’interprétation ; les contre-exemples ou des contre-argumentations. Elle décrit les
dysfonctionnements au sein de la société en prenant pour fondement la diversité des enjeux et des intérêts qui s’affrontent dans un
même espace symbolique et dans la définition du lien social. Elle sert à rendre compte du lien entre cette recherche et notre recueil
d’observations contrastées, c’est-à-dire des questions éthiques fondamentales qui peuvent se poser à l’égard des droits humains et /
ou des interprétations difficiles par leur richesse ou par leur ambiguïté à l’égard des droits humains. Elle relève les problèmes
possibles d’interprétation, des faiblesses et confusions culturelles, interprétées peut-être à l’aide des distinctions dialectiques, qui
peuvent aider à mettre au jour les pratiques néfastes et à argumenter l’interprétation de la « contre-argumentation culturelle » (fdr1
§19).
DT 15 Série Grenier à mots 15.3: Grenier à mots Bamanan Dagné Jiginé 7

A noter qu’une « grille d’interprétation » précède la deuxième et la quatrième colonne. Elle se lit de façon suivante :

«!» Les proverbes / étymologies marqués ou interprétations qui portent le signe « ! » sont considérées comme étant des « perles », grains
précieux des greniers, qui donnent à réfléchir.

«+» Les proverbes / étymologies marqués ou interprétations qui portent le signe « + » sont ceux qui expriment le « patrimoine commun »,
les valeurs partagées que l’on retrouve aussi dans d’autres greniers.

«CA» Les deux premiers types de proverbes peuvent être utilisés comme argumentation culturelle pour l’universalité des droits de l’homme
ou dans des cas particuliers comme des contre-argumentations culturels qui démolissent soit les arguments culturels néfastes, soit les
contre-exemples. Ils sont ils sont accompagnés du signe «CA».

«?» Les proverbes / étymologies ou interprétations qui portent le signe « ? » sont ceux qui sont délicats et problématiques parce qu’ils
pourraient être utilisés pour légitimer une valeur ou une pratique contraire à l’universalité des droits de l’homme.

«–» Les « contre-exemples » sont des exemples de pratiques néfastes, violentes ou contraire aux droits de l’homme qui marquent un
décalage net entre le « trésor linguistique » et le vécu quotidien. Contrairement aux problèmes d’interprétation, ils sont accompagnés du
signe « – », tout comme les exemples qui peuvent être de simples exemples de pratiques néfastes.

C’est autour de ces exemples qu’il faut essayer de trouver des contre-argumentations culturelles.

Chapitre 4. Analyse : Les analyses peuvent approfondir une ou plusieurs dialectiques selon l’entrée des trois champs dialectiques (l’être humain,
la dignité, la liberté). Il s’agit de faire une synthèse et de ressortir ce qui est fondamental pour la compréhension et l’étude de cette langue ou pour
la comparaison entre divers greniers.

Chapitre 5. Conclusion : Ce chapitre synthétise brièvement les principaux acquis du grenier.

Chapitre 6. Annexes : Les annexes peuvent contenir une liste des proverbes en langue originale avec des explications / interprétations en français;
des précisions (lexicales, phonétiques, structurelles ou grammaticales) sur la langue, une carte de dissémination linguistique, un glossaire ou
autres.
DT 15 Série Grenier à mots 15.3: Grenier à mots Bamanan Dagné Jiginé 8

1. Présentation du contexte
Traduction :
dji don ka fisa Savoir nager vaut mieux
ni so don ye Que savoir monter à cheval
nga yèrè don ka fisa Mais se connaître soi-même vaut mieux
ni ni bè ye Que tout cela
yèrè don ye ko ba ye : Se connaître soi-même est une grande chose
mogoya damine do (une chose primordiale)
bè tii yèrè don C’est le commencement de la personnalité
wà bè ti mogo ye3 (Car) tout le monde ne se connaît pas soi-même
Et tout le monde n’est pas une personne (par conséquent).

C’est par les vers ci-dessus que débute, chez les Bamanan, l’étude de la personne humaine, « moko ». Dans le système d’initiation et
d’enseignement de ce peuple, la conception de l’être humain, de la personne en soi « moko yèrè yèrè », considérée tant dans ses composantes
corporelles globales que dans l’ensemble de ses principes spirituels, constitue une des pierres angulaires du savoir traditionnel en général, de la
philosophie et de la psychologie en particulier4.

Cette recherche porte sur l’anthropologie des droits humains par la comparaison interculturelle des mots et de leurs usages. Elle vise à mettre à
nue l’analyse sociale basée sur la portée de l’originalité et la valeur de la nouveauté qui, contrairement à toutes les recherches sur le peuple
bamanan, touche particulièrement aux aspects liés à la protection et à la promotion des droits culturels.

Partir d’une traduction des mots caractéristiques des droits de l’homme dans un contexte à forte pratique orale n’a pas été une œuvre simple. Dans
le langage bamanan, on retrouve des mots à connotation culturelle n’ayant pas de répondants directs en français (par exemple : lebelebe(le) : jeu
qui vise à asseoir l’adresse chez l’enfant). A ce niveau, nous avons fait des emprunts à la langue bamanan. Il y a également des expressions en
français qui correspondent à un seul mot bamanan qu’il est bon de connaître parce qu’on ne peut pas faire de la traduction mot à mot (par
exemple : levée du soleil : dugujè (éclaircir le village/la ville). D’autre part, il y a des mots bamanan qui se traduisent par des expressions

3
Textuellement : « Connaître l’eau vaut mieux que connaître le cheval, mais se connaître soi-même vaut mieux que tout cela. Connaître soi-même est une grande chose : c’est
le commencement de la personnalité, tout le monde ne connaît pas soi-même et tout le monde n’est pas une personne. » On explique cela par : Tout le monde n’a pas la
ressource de posséder une monture et il nous arrive, au cours de notre vie, d’avoir des rivières ou des fleuves à traverser pour poursuivre notre route. Mais, vivant souvent en
tête à tête avec elle-même, toute personne se doit de se connaître afin de devenir une vraie personne, une personne consciente de ses devoirs et des ses actes.
4
Voir paragraphes 2.2 « La personne individuelle » et 2.3 « La personne dans la communauté ».
DT 15 Série Grenier à mots 15.3: Grenier à mots Bamanan Dagné Jiginé 9

(explications) et qui ne correspondent pas à une réalité culturelle définie en français (par exemple : sofilawuluni : Colporteur de confidences d’une
maison à une autre).

Quant aux transformations linguistiques, nous pouvons retenir que le monde bamanan n’a pas échappé aux époques coloniales, communistes et
même à la mondialisation actuelle. Les mots utilisés ont subi moins de changements dus à ces facteurs précités. Il faut aussi noter que certains
mots et expressions tirent leur origine de la langue arabe, ce qui est du ressort de la pénétration de l’islam en milieu bamanan. Nous signalerons
ces différents cas dans le document.

L’originalité se trouve, sans doute, dans la sagesse bamanan, composée aussi bien de mythes, de chansons, de récits, de proverbes et de sentences.
Nous avons mis dans notre travail l’accent sur les proverbes, qui sont porteurs d’usages pertinents et explicatifs de la conception bamanan de
l’homme, de ses droits et devoirs et de sa vie entière.

1.1 Méthodologie

La recherche s’inscrit dans un canevas de travail qui a permis de dégager une méthodologie à travers une démarche opératoire, dont le principe,
pour servir de fondement à notre analyse, est structuré en deux phases :

• La recherche bibliographique en vue d’harmoniser la revue littéraire, dans les bibliothèques et au sein d’institutions s’occupant des
questions de droits de l’homme, a permis de mieux asseoir le cadre théorique d’analyse et d’étayer les questionnements suscitant l’étude.

• La phase terrain, soutenue par une visite de reconnaissance pour faire l’état des lieux et approfondir la base de recherche acquise. Cette
seconde étape s’est traduite par des entretiens auprès des personnes ressources des localités choisies et des rencontres en groupes focaux
composés de représentants de chasseurs, de forgerons, de griots, de femmes et de jeunes.

D’autres sondages particuliers ont été menés auprès de populations choisies de façon aléatoire, en tenant compte de la représentation de tous les
statuts sociaux. Ces phases de collecte d’informations ont été couplées par l’observation directe de certains faits et pratiques qui revêtent le
caractère particulier des communautés bamanan dans l’explication socio-anthropologique de certains comportements et stratégies.

1.2 Lieux d’enquête

L’étude, dans cette première phase, s’est portée sur deux sites bamanan : Sékoro et M’Pèba.
DT 15 Série Grenier à mots 15.3: Grenier à mots Bamanan Dagné Jiginé 10

Le village de Sékoro, ou du pouvoir ancien, se trouve au bord du fleuve Djoliba. Il se situe à quelques neuf kilomètres de Ségou ville, avec une
superficie de 3000 m2. Aujourd’hui, Sékoro est constitué de quatre quartiers : le premier, appelé Bamanan–Djourala, est habité par les Bamanan
et les Dioulas ou commerçants; le second, appelé Somonoso, est habité par les Somonos; les deux autres, Safedala et Damakorola, sont habités
par les Peulhs, Maures, Dogons et Sonrhaï. Le village est limité au nord par Sébougou, au sud par une Bourgade Peulh nommée Mèlèwèrè et par
Dougoukouna, une autre capitale du royaume, à l’est par Togou et Kondièwèrè et à l’ouest par le fleuve et le village de Farako. Historiquement, le
village tient son nom de Cheicko, un marabout venu de la Mecque accompagné de ses disciples, qui s’installèrent au bord du fleuve. Ainsi, pour
désigner le village de celui qui en fut le premier habitant, on a appelé Sékoro : Cheickokoroba ka dugu, ce qui voudrait dire : « le village du vieux
Cheicko ». Selon la légende, le village de Sékoro fut fondé par la coupe des premières herbes devant la mosquée, construite par le marabout
Cheicko.

Le peuple Bozo fut le premier à habiter Sékoro à la suite du marabout. En effet, viendra ensuite le règne de Biton Mamary COULIBALY,
fondateur du royaume bamanan de Ségou. Ce dernier, une fois roi, fit de Sékoro la première capitale d’un vaste royaume décentralisé et
« démocratique », qui comptait neuf villages markas ou soninkés et quatre villages bambara ou ségouni. Ces villages furent dominés par
l’animisme tout en abritant de grands marabouts de renommée qui étaient consultés par les rois païens avant d’entreprendre toute action. Le
village de Sékoro (ou du pouvoir ancien), compte à ce jour nombre de sites touristiques : la tombe de Cheickokoroba, sa mosquée, la tombe de
Biton Mamary COULIBALY et son palais…

Le village de M’Pèba est un village situé dans la commune rurale de Pélengana (Cercle de Ségou), en quatrième région du Mali. Le village de
M’Pèba est distant de 6 km au nord–est de la ville de Ségou sur la route nationale allant à Markala et Niono. Historiquement, le village a joué un
rôle considérable dans la formation du royaume bamanan de Ségou, et fut par la suite la résidence de Tiémoko Monzon DIARRA qui deviendra le
roi de la dynastie des DIARRA de Ségou (de 1792 à 1808). Le roi Monzon consolida le pouvoir de Ségou et porta le royaume à son apogée.
M’Pèba demeura la résidence du roi et accueillit le transfert de nombreux attributs, objets et services rattachés à la cour royale. Des traditionnistes
du village reconstituent encore des scènes de la cour royale et des fonctionnements du royaume sous Monzon avec une vivacité extraordinaire
dans les récits épiques et les chansons qui constituent des supports interprétés dont l’authenticité ne souffre d’aucune altération. Pendant la
période coloniale, juste après la prise de Ségou par Archinard, M’Pèba est érigé dans l’organisation administrative du pays en chef-lieu de canton
de Boloba, à la tête duquel se sont succédés Fadouga MARIKO, Mahamane et Alassé MARIKO jusqu’à la suppression des cantons en 1958.
Leurs descendants se succèdent encore à la chefferie du village5.

1.3 Présentation de la langue bamanan

5
Source : OMATHO (Office Malien du Tourisme et de l’Hôtellerie).
DT 15 Série Grenier à mots 15.3: Grenier à mots Bamanan Dagné Jiginé 11

La superficie du Mali est d’environ 1.240.000 km² avec une population de plus de 12.000.000 d’habitants. G. Brasseur, dans son ouvrage « Les
établissements humains au Mali »6, repartit les populations maliennes en deux grands groupes : les Sahéliens et les Soudanais. Le premier groupe
englobe les nomades blancs. Ce sont les Maures et les Touaregs, les Songhay (de Tombouctou à Ansongo, d’Ansongo à Labezanga, de
Tombouctou au lac Debo et de l’intérieur de la boucle du Niger) et les Peulhs, dispersés, semi-nomades, semi-sédentaires et du Delta Central. Le
groupe soudanais est formé des Soninké, des Khassonké, des Malinké, des Foula, des Bamanan, des Bozos, des Senoufo, des Minianka, des Bobo
et des Dogon.

La langue bamanan est une langue nationale du Mali et constitue la langue la plus communément comprise dans le pays. Elle est une langue
parlée par plus de 10 millions de personnes, principalement au Mali. De nombreuses autres personnes parlent également cette langue, ou ses
dialectes, dans d’autres pays voisins comme le Burkina Faso, la Côte d'Ivoire et la Gambie. Les différences entre la langue bamanan et le Dioula
sont minimes, cette dernière langue étant parlée ou comprise par une quinzaine de millions de personnes en Afrique de l’Ouest (notamment au
Burkina Faso, Côte d’Ivoire et en Gambie).

La langue bamanan fait partie de la famille des langues mandingues. Elle est aussi comprise, sans effort notable par le bloc malinké. Elle est
encore celle d’un groupe ethnique très particulariste, les Dioula, dont le rayon d’action s’étend jusqu’en Haute-Volta et en Côte d’Ivoire et qui se
livre fondamentalement au commerce et au transport à grande distance. Par eux, le Bamanan est devenu une des grandes langues de
communication de l’Afrique de l’Ouest, utilisée par plusieurs millions d’individus dans leurs rapports journaliers. C’est une langue SVO (sujet,
verbe, objet) avec deux tons. Il y a sept voyelles et vingt consonnes7.

L’écriture a été introduite durant la période où la région était sous la domination coloniale française. Woyo COULIBALY a, en 1930, créé un
alphabet bamanan comportant 123 caractères. L’alphabétisation peine à se diffuser, notamment dans la brousse. La littérature en langue
bamanan se développe lentement, du fait de la prédominance du français comme « langue des élites », mais il existe cependant une tradition
orale vivante, constituée principalement d’histoires et de contes de rois et de héros. Cette tradition orale se transmet par les griots, qui sont à
la fois des conteurs, des chanteurs et des livres humains d'histoire, ayant étudié l'art du chant et du récit pendant de longues années. Beaucoup
de leurs chansons sont très anciennes : la tradition fait remonter certaines aux temps de l’ancien Empire du Mali8.

6
G. Brasseur, Les bamanan, in Etablissements humains au Mali, IFAN, Dakar – 1968.
7
Voir annexes 6.1 « L’alphabet de la langue bamanan ».
8
L'Empire du Mali est un puissant empire africain du Moyen Âge. Il a été créé au XIIIe siècle par Sundjata Keïta et connut son apogée au XIVe siècle. Il est le berceau de la
Charte du Manden. L'empire du Mali s'étendait entre le Sahara et la forêt équatoriale, l'Océan Atlantique et la Boucle du Niger soit sur les actuels Mali, Sénégal, Gambie,
Guinée, Guinée Bissau, Mauritanie et une grande partie de la Côte d'Ivoire. Il était un carrefour important entre les peuples nomades du Sahara et les peuples de l'Afrique noire
équatoriale. Son économie reposait sur l'agriculture, l'artisanat, l'exploitation des mines d'or et le commerce des esclaves noirs avec les peuples arabes.
DT 15 Série Grenier à mots 15.3: Grenier à mots Bamanan Dagné Jiginé 12

1.4 Le Bamanan, son insertion sociale et ses particularités9

Les Bamanan constituent, on le sait, un des grands groupes ethniques du Mali actuel, Malien dans sa presque totalité et situé absolument au cœur
du pays. Ils occupent une tranche méridienne entre les 5° et 8° ouest, mais celle-ci débordent largement vers le nord-ouest et le nord-est. Vers
l’est, leur limite correspond à celle des populations voisines Senoufo, Minianka, Bobo, Dogon. Elle est généralement nette sauf aux abords du
Delta intérieur du Niger où les brassages de populations ont été nombreux. Vers l’ouest, leur limite est celle des Malinké, mais elle est presque
soulignée par le cours des rivières, que ce soit le Ouassoulou Balé ou le Baoulé. Dans le sens des parallèles, vers le sud, les Bamanan empiètent
sur la Côte d’Ivoire où le milieu naturel devient guinéen ; vers le nord, ils sont arrêtés par le Sahel, ou tout au moins par les zones sans eau du
Wagadou et du Mena. Ils ont pu toutefois s’infiltrer vers le nord en suivant le Niger jusqu’auprès de Niafunké, mais en cet endroit, les conditions
naturelles sont très particulières.

Ainsi, les Bamanan sont essentiellement des Soudanais. Contrairement à certains ensembles humains, ils forment un bloc très homogène. Seules
vivent parmi eux de petites colonies de Foula, c’est à dire ces Peulhs pratiquement sédentarisés qui représentent en quelque sorte les chaînons
intermédiaires entre les grands foyers Peulhs du Macina et de Guinée. Toutefois, à la lisière nord, les interférences avec les Soninké ont été
importantes et sur la rive gauche du Niger, à la hauteur de Koulikoro et même sur l’autre rive, subsistent de gros villages se réclamant de cette
tradition, mais le plus souvent ils donnent l’impression d’être en voie d’absorption, quant ils ne sont pas maintenant considérés comme tout à fait
Bamanan.

Les Bamanan, comme les Malinké, font partie d’un groupe plus vaste, les Mandé, avec lesquels ils partagent de nombreux caractères communs,
notamment d’ordre anthropologique. Mais sur le plan psychologique, ils sont nettement différenciés. Leur histoire est assez récente, du moins à ce
que l’on sait par la littérature, et leur nom lui même n’est cité pour la première fois qu’en 1510 par Pacheco PEREIRA10. Ils avaient probablement
déjà acquis une personnalité à cette époque mais leur structure sociale ne leur permettait pas de la révéler efficacement, au point qu’ils aient pu
être connus à l’extérieur. Ils vivaient en effet en village et le pouvoir politique s’arrêtait généralement au niveau du groupe de villages, c’est à dire
du canton. Une véritable anarchie régnait par conséquent et les luttes entre voisins ne manquaient pas. Aucune ligne de force ne pouvait, dans ces
conditions, se dégager.

Il en fut autrement du jour où une autorité supérieure s’instaura, c’est à dire à partir du XVIIième siècle avec le Royaume de Ségou, dont les
principaux faits ont été bien retracés dans une étude substantielle de Ch. MONTEIL (« Les Bamanan de Ségou et du Kaarta »). La figure de
Mamary COULIBALY a fortement marqué la première moitié du XVIIIième siècle dans la vallée du Niger puisque ses armées se sont portées
successivement vers le sud jusqu’au Bani, à l’est vers Djenné et à l’ouest à travers tout le Kaarta dont les occupants, des Bamanan du clan

9
R. Mauny, Tableau géographique de l’ouest africain au moyen âge d’après les sources écrites, la tradition et l’archéologie, 1961, p.447.
10
R. Mauny, op. cit., p.447.
DT 15 Série Grenier à mots 15.3: Grenier à mots Bamanan Dagné Jiginé 13

Massassy, furent une première fois décimés. Un de ses successeurs, N’Golo DIARRA, poursuivit cette œuvre de domination et pénétra encore
plus loin, jusque chez les Mossi du Yatenga, chez les Minianka, guerroya contre les Peulhs du Macina avec des poussées jusqu’à Tombouctou,
enfin vers le nord dans les Sokolo. Ces exploits furent renouvelés par son fils Monzon, qui engagea aussi une lutte serrée dans le Kaarta, le
Fouladougou et le Bélédougou. Mungo PARK11, qui traversa ces pays en 1795, retransmet l’écho de ces luttes cruelles.

Parallèlement aux opérations militaires, les territoires conquis furent organisés et soumis à l’impôt. L’action centralisatrice ne s’exerça que sur
une courte durée, puisque le début du XIXième siècle voit déjà le déclin de Ségou et la montée des empires rivaux, Peulhs ou Toucouleur. Elle n’en
marque pas moins profondément l’ethnie bamanan dans la conscience de son unité culturelle et dans sa relation au monde environnant.

2. Enjeux anthropologiques12

2.1 La communauté humaine

Du point de vue socioculturel, la société bambara est une société de «valeurs», organisée et structurée à telle enseigne que chaque contenant a une
place et un rôle défini. C’est pourquoi, des mesures communes sont appliquées aux faits et gestes des membres pour l’assise de la société et de la
culture bambara.

Chez les Bamanan, l’homme individuel ne se réalise qu’en communauté au sein d’un «nous». L’espèce-homme, dans le temps et dans l’espace,
forme un «nous», le «nous» de l’humanité. Le premier élément constitutif de ce « nous » gigantesque, à savoir les personnes humaines, est
composé de toutes les couleurs, langues, cultures. Ce «nous» global, dont personne au monde ne peut tracer avec exactitude l’itinéraire depuis les
origines jusqu’à ce jour, ni décrire précisément le temps historique de son voyage terrestre, se réfracte et se monnaye en une multitude de «nous»
s’imbriquant les uns dans les autres :
• «nous» de l’âge du voir ;
• «nous» de l’âge du dire ;

11
. R. Mauny, op. cit, p.447. Mungo Park (1771-1806) était un explorateur écossais né à Fowlshiels dans le Selkirkshire le 10 septembre 1771. Après avoir fait des études de
médecine, il devient chirurgien. Passionné de voyages, il se porte volontaire pour trouver les sources du Niger, à la Société Africaine de Londres. À cette époque, comme pour
le Nil en Afrique orientale, la principale énigme géographique de l'Afrique de l’Ouest est le cours du Niger, un fleuve qui, en raison du relief, prend sa source à quelques
centaines de kilomètres de la côte mais fait une boucle de 4 000 km à l'intérieur, avant de regagner le golfe de Guinée.
12
Plusieurs éléments de ce chapitre se trouvent in : Coulibaly, K., Du traitement de la violence chez les Bamanan au Mali, Actes du colloque de Nouakchott sur le traitement
de la violence, novembre 2007, à paraître.
DT 15 Série Grenier à mots 15.3: Grenier à mots Bamanan Dagné Jiginé 14

• «nous» de l’âge du faire ;


• «nous» des nations, «nous» de chaque nation ;
• «nous» des groupements de toutes sortes : famille, métier, etc. ;
• «nous» des idéologies, «nous» des religions.

Chaque «nous» a sa façon d’être, de voir, de dire et de faire les choses de l’humanité. Tout «nous» comporte :
• des personnes, dont la vocation commune est de grandir ;
• des biens à promouvoir, en vue de la croissance, du développement et de l’épanouissement réussis de l’ensemble des membres ;
• un principe d’union, de cohésion et d’unité.

Les rapports harmonieux des différents «nous», plus ou moins proches, sont fonction de la reconnaissance, au niveau du dire et du faire, des
particularités de chacun. C’est le principe du respect de l’unité et la multiplicité diverse, la solidarité devant le monde à maîtriser et à rendre plus
amical et plus habitable pour tous. La fermeture du «nous» sur lui-même, sans ouverture aucune sur autrui, et la volonté de domination à sens
unique constituent les contre-valeurs communautaires dans le monde bambara. Enfin, les «nous» humains, les nationaux comme les
internationaux, ne peuvent subsister qu’interdépendants, dépendants et responsables les uns des autres.

2.2 La personne individuelle

Chez les Bamanan, l’homme individuel est membre d’un « nous » concret. Le processus d’identification définit tout homme comme étant
rigoureusement et ensemble matière, vie, esprit, labeur, outil, conduite, caractère et rite. L’homme est et demeure tout cela à la fois. Amputez-le
d’un de ces organes vitaux, vous aurez tout autre chose qu’un homme. Le respect de toutes ces caractéristiques favorise le respect de la dignité de
l’homme par l’homme. La dignité humaine est en chacun de nous, une responsabilité solitaire et unique : l’épanouissement et le dépérissement de
l’homme sont en ses mains propres. «maa n’ya, i yèrè, maa tignè, i yèrè»13.

2.2.1 Les six jours de l’homme

Chez les Bamanan, la vie de l’être humain se conçoit par rapport au temps. Ici, la notion des six jours ne doit pas se confondre avec les jours
ordinaires de la semaine. En effet, l’homme porte dramatiquement dans l’être la vie et la mort, le bonheur et le malheur, et nous demeurons
partout et toujours, dépendants et responsables. Vivants, nous sommes promis à la mort. Morts, nous demeurons vivants. Dans ce contexte, G.

13
«La réussite ou l’échec d’une personne dépend de sa façon de se comporter» Proverbe bamanan.
DT 15 Série Grenier à mots 15.3: Grenier à mots Bamanan Dagné Jiginé 15

Martelet écrit :
« Même dans la situation désespérée, désespérante, qui fait que la nature, d’abord son berceau, devient tôt ou tard pour tout homme un tombeau, ne
peut vraiment détruire une grandeur qu’on reconnaît uniquement en refusant sur elle le règne absolu que la mort semble exercer sur lui. Et je dois
affirmer calmement que la mort qui réduit tous les hommes au silence, ne les réduit pas au (néant) »14.
La proximité, sinon la contemporanéité des contraires en nous est source de mouvement, d’équilibre et d’espérance : «Aucune difficulté ne doit
nous abattre ni nous décourager au point de désespérer de tout! Malheur et bonheur vont de pair! Es-tu heureux, saches que le malheur n’est pas
loin! Es-tu malheureux, saches que tu peux de nouveau connaître le bonheur»15.

La vie inadmissible (par opposition à la mort), le bonheur inaltérable (par opposition au malheur) et la souveraineté dépendante (par opposition à
la responsabilité), sont pour l’homme une pure utopie, un rêve absolument irréalisable. Le rêve a quelques fondements dans la condition de
l’homme d’outre-tombe. Mais l’outre-tombe n’est pas un rêve. L’homme est précisément et rigoureusement l’intersection consciente, libre et
responsable de la matière et de la vie. Et la mort ne mange pas la totalité de son être : «dugu na bè dun, nka maa salé té, i banné yé»16. Certes la
terre nous mange tous, mais l’homme ne se dissout pas entièrement avec et dans la mort. Il est donc impératif à tous les «nous» qui l’accueillent
et pourvoient à son devenir, de l’avoir et de l’accepter comme tel. C’est-à-dire que toute la communauté doit accueillir la personne (individu) avec
ses défauts et qualités et contribuer à sa socialisation.

La philosophie de la vie et de la mort chez les Bamanan s’articule autour du respect de la vie, de la dignité de l’autre. Ce fait consécutif au mythe
du vivre ensemble de l’homme et des autres vies telles les herbes et de Dieu et des hommes. C’est par l’action « égoïste » de l’homme que Dieu
s’est éloigné de la terre et s’est introduit le culte de la mort dans la vie des humains. C’est alors, de l’oubli de la loi fondamentale de la vie
ensemble que la mort s’est instaurée et s’est imposée aux hommes. Ce vivre ensemble fait que le bonheur du voisinage dépend du soin et du souci
que l’on prend à s’écouter mutuellement et à tenir compte du sentiment et du bon plaisir les uns des autres. Le vivant et le mort demeurent
solidaires pour le Bamanan, d’où le proverbe : « Vois-tu des charognards autour d’un cadavre humain, ne dis pas : « Laissez-le» ! Dis plutôt :
« Laissez-nous ». Bien que soient différents les états du mort et du vivant, ils restent solidaires, indissociables par le sort.

2.2.2 Les trois âges de l’homme

Chez les Bamanan, tout passage normal sur la terre comporte trois âges principaux :
• «yé tuma», le temps du silence et de l’écoute,
• «fo tuma», le temps de la parole,

14
Martelet. G, in CR. Académie des Sciences Coloniales, 1950.
15
Conseil d’un sage bamanan.
16
« Tout le monde va mourir, mais la mort n’efface pas toute l’œuvre de l’homme » Proverbe bamanan.
DT 15 Série Grenier à mots 15.3: Grenier à mots Bamanan Dagné Jiginé 16

• «kè tuma», le temps de l’action personnelle, le temps d’imprimer sa marque personnelle à la vie et au réel. Puis vient le temps du silence.

Il est important de respecter ces différents temps afin de garantir la paix personnelle et communautaire. Car chaque homme est demeure aussi,
structurellement, rapport dialectique, non dialogique du «je» et du «nous». Ce qui appartient à un membre du «nous», ne lui appartient pas. Le
mien n’est pas mien, il est nôtre, sur le plan de l’être comme celui de l’avoir. L’homme se réalise en prenant appui sur autrui (8. Panier à mots17),
son expérience, sa science et sa sagesse sont accueillies et assimilées sous sa propre responsabilité (64). Le salut comme la perte de l’homme sont,
en définitive, en ses mains propres, en nulles autres ! L’autonomie de la personne individuelle (3) et le sens de sa responsabilité impliquent le
respect strict des autres dans leur «yé tuma», «fo tuma» et «kè tuma». La connaissance de soi-même implique l’adaptation de soi à autrui, quel
qu’il soit.

L’adama-homme18 est normalement motivé dans chacune de ses actions. Chaque valeur de notre éthique constitue une raison valable sinon
raisonnable de notre agir humain. Tel est l’adama-homme : il vient et passe. Ce voyage, il l’effectue, motivé, dans le cadre d’un « nous »
déterminé, branché lui-même sur d’autres « nous » plus ou moins forts. Ainsi, F. Perroux19 écrit :
« La science dégage l’originalité de l’espace-homme ; cette originalité ne réside ni dans le poids relatif du cerveau, ni dans le langage articulé, ni
dans la main préhensive. Elle s’affirme par la complexité des relations dans l’ensemble psychosomatique et aussi par la capacité des relations entre
les êtres individualisés. Les hommes, pour ces raisons, sont capables non point seulement de s’adapter au milieu, mais, ce qui est essentiel,
d’inventer le milieu du développement (épanouissement) de leur espèce et de chacun de ses « membres ».

2.3 La personne dans la communauté

Dans l’esprit de tout citoyen bambara, le communautarisme reste fortement ancré, ce qui fait que les principes et les mécanismes reposent sur les
«institutions» autrefois matérialisées par les sociétés secrètes d’initiation comme le «Komo20». La communauté (8) en elle-même est une valeur
(37) fondamentale et l’essence de la vie. En somme, tout repose sur la foi qui fait que quand on se reconnaît comme personne dans la société, on a
foi au droit de la communauté, qui détermine fondamentalement le droit de la personne. Le Bamanan accorde une importance capitale à son
environnement communautaire (vitalisme chez les Bamanan). Le savoir-vivre passe par la capacité de réflexion, d’orientation, de socialisation à
travers l’éducation, qui est régie par les règles de politesse et d’hospitalité envers les aînés et les voisins. Ce qui fait que la notion de liberté
individuelle est confondue avec la bonne conduite qui forge le caractère au sein du «nous» (60. Liberté). Par exemple, une personne sans le

17
Ce chiffre fait référence au numéro de ce mot dans le panier à mots, chapitre 4.
18
Le terme adama-homme désigne singulièrement l’être humain dans toute sa représentativité, l’individu, l’Homme tout simplement.
19
Perroux, F, op. cit. Sidibé, S.P.M. La rencontre de Jésus Christ en milieu Bamanan, Paris, Éditions Beauchesnes, 315 p.
20
« Komo » est un fétiche, une divinité, une société initiatique des hommes adultes. Pour être admis au « Komo », il faut auparavant avoir été circoncis. Ne sont jamais admis
dans cette société, les griots et les femmes.
DT 15 Série Grenier à mots 15.3: Grenier à mots Bamanan Dagné Jiginé 17

«nous», c’est-à-dire sans les autres, représente le «fu» ou zéro. En d’autres termes, cela signifie qu’un individu ne représente rien sans la
communauté « + ». Chaque homme bambara sait se reconnaître en l’autre, il est objet des relations sociales. Ceci étant dit, moins une tête unique
qu’un impératif catégorique, nous retenons : « Que chaque être humain ait le minimum et puisse grandir sans être à la charge des autres (dooni ka
kè bèè bolo) ».

Michel COULIBALY21 déclarait : « J’ignore l’homme de ce monde auquel il convient d’habiter et de vivre seul. Au contraire, ce que j’entends
dire, c’est que tout être, sauf la maladie grave, se plait à être augmenté, complété» « + ». Qui que nous soyons, disent nos informateurs, il nous
faut un compagnon, sinon notre humanité reste inachevée.

Selon l’enseignement du monde bambara, toute existence humaine en groupe, tient en quelques affirmations centrales :
• Chaque homme, homme et femme, est trois rivières : l’écoute, l’entente, l’édification mutuelles. Asséchez l’une ou l’autre de ces rivières,
vous mutilez l’homme en lui. Aussi, le lieu privilégié où se réalise et s’épanouit chacun de nous est-il la cohérence, l’entente harmonieuse et
dynamique des rivières que nous sommes.
• Au sein du «nous», dont il est membre, il se construit dans et par la rencontre, la connaissance et la foi mutuelles.
• Dès qu’il est juridiquement capable, il peut à tout moment convoquer et saisir le «nous» dont il est membre, pour lui soumettre en toute
liberté ses doléances.
C’est en ces trois principes que l’on peut, pensons-nous, résumer le sens bamanan des rapports de la personne et de son groupe. Comme l’on s’en
doute, une chose est l’énoncé clair des principes vitaux, autre chose, leur mise effective en pratique.

Au pays bamanan, la communauté n’a pas toujours eu, à l’endroit de l’individu, les égards auxquels celui-ci a droit. De même, l’individu ne s’est
pas toujours ouvert au groupe comme cela se doit. Le « nata », ou « cupidité » dont chacun de nous naît porteur en est la cause. De sorte qu’il
serait pour le moins malhonnête de faire croire que le milieu bamanan ignore ou a ignoré toute contradiction entre le « moi », le « je » et le
« nous ». L’histoire sait les raisons de la place prépondérante du principe d’union, de cohésion et d’unité en tout « nous » bamanan : l’autorité, à
commencer par l’autorité paternelle. Cela dit, quelle société, au monde, n’a jamais complètement et définitivement liquidé toute contradiction des
rapports de l’individu au groupe ? « + »

Au pays bamanan, comme partout où vit l’homme, la contradiction, inscrite au cœur de tout homme, à la fois ouverture sur autrui et fermeture sur
soi, est sans cesse prête à entrer en jeu dans les rapports du « ne » et du « anw » (moi-nous) au sein de chaque « nous » humain. L’huile de
graissage de cet engrenage vital, nécessaire et indispensable est le sens et le respect (33) vécu de la dignité(30), de la responsabilité(64), du
« dogon » ou « goût, plaisir ou choix » et du « gasi » ou « tort, offense ou gêne », les uns des autres. Les membres de nos « nous » restent égaux

21
Michel Coulibaly est l’un des informateurs de Sotigui Penda Mory Sidibé dans « La rencontre de Jésus Christ en milieu bamanan ».
DT 15 Série Grenier à mots 15.3: Grenier à mots Bamanan Dagné Jiginé 18

en dignité humaine. Tous sont et demeurent hommes à moitié, faillibles et capables d’erreur tant sur le plan de la morale (38) que sur celui de la
vérité (35). Le salut de leur vivre ensemble est l’écoute, l’entente et l’édification mutuelles. Nécessairement, vitalement membre d’un « nous »,
chaque homme ne se réalise homme qu’en acceptant ses trois rivières, mais sous sa propre responsabilité : l’épanouissement comme le
dépérissement et la ruine de l’homme sont en ses mains propres. « ! »

2.3.1 Les quatre « tons » du monde

Pour les Bamanan, le cadre précis où, naturellement, coulent ses six jours22, est quadruple. L’homme chemine vers le lieu où il va dans ce
quadruple espace vital : les quatre « tons » du monde. Cet espace, il doit le réaménager sans cesse, lui-même, dès qu’il en est capable, épaulé par
son environnement dont il doit se vouloir solidaire. Le déploiement réussi, le développement et l’épanouissement humain sont le but de notre
venue et de notre présence au monde. L’épanouissement du « nous », soi-même et autrui, le plus large possible.

Dinyè tonw ye nani ye : Siginyogonya, Teriya, Furu Dina23. L’énumération de ces quatre « tons » du monde introduit au sens du terme ici :
« siginyongoya, teriya, furu, dina » ce que nous traduisons par communauté de domicile ou lieu, amitié, mariage, relation à l’invisible ou
croyance religieuse.

Le mot « ton » a bien sûr plusieurs sens à ne pas confondre. Une transcription correcte en faciliterait la compréhension. Messieurs Majhemout
Diop et Bokar N’Diaye, dans « Histoire des classes sociales dans l’Afrique de l’Ouest » et les « Les castes au Mali » ne connaissent l’un et
l’autre qu’un sens au terme « ton ». Le tontigi pour l’un et l’autre serait le noble, le horon. Dans la langue bamanan parlée d’aujourd’hui, le
tontigi désigne toujours un fidèle du Do, du Komo, du Nama etc. Le « Bamanan » refus du Maître est celui qui ne connaît d’autre maître que son
« boli » ou « fétiche ».

Il est impératif pour tout homme bamanan de vivre les quatre tons du monde qui régissent toute la philosophie bamanan de la société. A la source,
à la base de tout accord particulier entre humains, on retrouve l’un ou l’autre, sinon les quatre tons primordiaux à la fois. Quatre espaces vitaux
qui ont mission d’alléger le poids des six jours (la vie et la mort, le bonheur et le malheur, la dépendance et la responsabilité) de l’homme.

2.3.2 Le « fen » et le « ko »

22
Voir paragraphe 2.2.1 : Les six jours de l’homme
23
Le monde comprend quatre espaces de vie: voisinage, amitié, mariage, foi.
DT 15 Série Grenier à mots 15.3: Grenier à mots Bamanan Dagné Jiginé 19

Le réel, en sa totalité, se rend en milieu bamanan par deux termes généraux : fen et ko. Le premier désigne les êtres, les choses. Le second, les
évènements, les états, les institutions.

L’homme bambara s’accomplit dans le «ko» à travers le «fen», qui demeurent le passage obligatoire, la phase de transition pour la réalisation de
soi au sein du « nous ». Le «fen» connu du Bamanan est visible et invisible. L’expression «fen» peut s’entendre de l’être en sa totalité, d’où la
difficulté de le déterminer exactement et sans rien oublier. L’être visible, c’est le monde physique, «diyèn» et tout ce qu’il renferme : les êtres
confectionnés de terre et de roche, les vivants qui ne bougent pas ; ceux qui se meuvent, mais ne parlent pas, ceux enfin qui se déplacent, pensent,
parlent et travaillent : nous les bipèdes, «sen flananiw». L’être invisible ne se laisse pas dénombrer facilement ; en sont certainement partie les
êtres mauvais et les êtres bons que les Bamanan prennent à témoin avant toute offrande rituelle. Le «sabu des sabu24» non moins certainement. La
conviction populaire veut qu’il y ait d’autres êtres encore : les jinè et les woflo. Les uns et les autres sont très proches de l’homme, par la taille, la
forme, la couleur. Il reste entendu que les jinè sont toujours blancs. Jusqu’à présent, les Bamanan ignorent les Martiens, les pilotes de soucoupes
volantes. Nul doute que ceux-là aussi viendront bientôt s’ajouter aux fen qui peuplent leur univers depuis fort longtemps!

Cet univers n’est pas le lieu de tout repos : forces maléfiques et forces bénéfiques l’habitent. Rien ne s’y produit sans sabu. Tout mal y a aussi son
antidote. Bien et mal cohabitent l’univers, notre univers. Là commencent les problèmes, et pas des moindres :
• Le monde, son origine, sa marche sans fin, sa constitution intime.
• Le mélange du bien et du mal dans le monde, l’origine de cet état de choses.
• L’hostilité de la nature à l’homme, de l’homme à l’homme.
• L’existence d’un «sabu des sabu», bon et bienveillant pour l’humanité, malgré tout ce qui nous advient de contraire et dont il est informé
exactement.
• L’existence d’êtres spirituels, libres, autres que l’homme.

Ces problèmes sont communs aux citoyens du monde bambara comme au reste de l’adama-homme, du temps et de l’espace. Une réponse
satisfaisante, sans cesse à remettre en question, à tous ces problèmes ne saurait être que le fruit de l’écoute et de l’assimilation critique du dire de
plusieurs «kodonna25» à leur sujet. Pour nous qui sortons de l’école du monde bambara, une certitude préside à l’écoute de tout autre «kodonna»
en matière de science et de sagesse : l’hétérogénéité observable parmi les êtres du monde ne saurait commencer ni se terminer adéquatement et
logiquement à l’homogénéité radicale de l’inorganique. Le mystère de l’homme, jusqu’à preuve du contraire, est et demeure pour nous la clé
d’intelligence des mystères du cosmos. Le citoyen bambara vit dans un monde magique. Il croit viscéralement à l’efficacité des moyens
magiques. C’est donc à une éducation religieuse et civique appropriées et enracinées qu’incombe la tâche d’éclairer, dans le Bambara, le sens de
notre dépendance à la nature, à la matière mais aussi celui de notre commune vocation de dominer et domestiquer la nature en nous et hors de

24 Le « sabu des sabu » est compris ici comme l’Etre supérieur, la divinité suprême.
25
Celui qui sait. En général, on parle du féticheur ou du prêtre.
DT 15 Série Grenier à mots 15.3: Grenier à mots Bamanan Dagné Jiginé 20

nous. Dans cet effet de restauration et de restructuration de la personnalité du Bamanan, des éducateurs mettront l’accent sur l’effort personnel et
communautaire.

Le «ko» désigne les évènements, les états, les institutions dans la cosmogonie Bamanan du sens des valeurs. Cet ensemble représente les faits et
phénomènes associés comme la naissance, le mariage et le décès. Nombre de préoccupations se dessinent au cœur de cet ensemble à travers les
cérémonies rituelles et religieuses telles que la circoncision et l’excision, les cérémonies de couronnement pour occuper des fonctions de chef
dans la communauté bambara... Les Bamanan cohabitent avec le «fen» pour avoir ou atteindre et participer au «ko». Cependant, le «ko» demeure
une quête de finalité aux choses visibles et invisibles. Le terme est spécifique, mais du reste indissociable du «fen», dans la mesure où des
évènements comme la maladie peuvent être aussi dits «fen». Le «ko», alors se présente comme la matérialisation palpable des êtres et des choses
qui surviennent dans le quotidien du Bamanan.
DT 15 Série Grenier à mots 15.3: Grenier à mots Bamanan Dagné Jiginé 21

3. Le panier à mots – cadre de comparaison26


3.1 L’ÊTRE HUMAIN

Mots Etymologies remarquables, sentences, interprétations Liens Problèmes d’interprétation / Contre-exemples


/ Contre-argumentations
1. Etre humain Synonyme : On utilise ce mot aussi pour faire la différence entre
mogonifin - hadamaden = création divine, personnalité, sagesse l’homme et les animaux
màanifin
Autres utilisations :
- hadamadenya : humanisme
- mogow et mogoya : humanité, personnalité, civilité
- mogoba : homme important

Proverbes et sentences :
« + » 1.1 Dùnu bènnen, bala bènnen, buru bènnen, mogoninfinya bènnen
ka fisa à bèè ye
« Accord des tambours, accord des balafons, accord des Chapitre 2.1 Termes connexes :
trompes, l’accord des hommes est préférable à tout cela ». 13. Solidarité - Responsabilité
- Rien ne vaut l’entente en société ⇒ 1.Ukrainien - Connaissance
1.2 Ala-koro-dimiya, sitane b’a sàra mogoninfin na
« Satan assouvit sur l’homme l’animosité qu’il a envers
Dieu ».
- Des tiers subissent le contrecoup des conflits dont ils ne sont
pas responsables
1.3 Taayoro si tè mogosèbè la kà mogokuntan dàn 66.2 Honnêteté Ce proverbe pose une facette de l'être humain dans
« Un honnête homme ne dispose d’aucun refuge pour la société. Il y a ceux qui sont honnête et ceux qui
échapper à l’imbécile. » sont imbéciles. Cependant, ils sont condamnés à
- L’imbécile est souvent importun. vivre ensemble, malgré que les uns dérangent les
- Quoi qu’on fasse, même si on ne lui demande rien, même si autres.
on lui interdit rien, il importune les autres.

26
Remarques : Les proverbes et sentences en bamanan sont en italique, entres guillemets pour la traduction en français, et standard pour les significations et explications.
DT 15 Série Grenier à mots 15.3: Grenier à mots Bamanan Dagné Jiginé 22

1.4 Folo, mogoyaminnèn tùn jèngènnnen don, sisàn, 66.2 Honnêteté Dégradation des bonnes mœurs dans la société
mogoyaminnèn dabirila bamanan.
« Autrefois, le récipient des bonnes manières était penché,
maintenant il est renversé. »
- Il n’y a plus d’honnêteté, de vertu, de sagesse
« + » 1.5 Sanu ni wari bè ban, nga mogoya te ban ⇒ 5.1 Pulaar
« L’or et l’argent sont périssables, mais les relations humaines
restent. »
- La richesse peut disparaître, mais la fraternité est plus stable
1.6 Wari te mogoya dafa, jogo de bè mogoya dafa
« L’argent ne rend pas un homme parfait, c’est le bon
comportement qui le rend parfait. »
- Dans la vie, il n’y a pas que l’argent, il y a la noblesse du
comportement qui est au dessus de tout
« ! » 1.7 Dànnifen ye wilita ye, jiriden ye mofen ye , mogoya ye hakili ye
« Le propre de la graine est de lever, celui du fruit est de
mûrir, celui de l’homme est de comprendre. »
- La réflexion, l’intelligence, la sagesse sont le propre de
l’homme
1.8 Ni namakoro tùn kèra gnodùunfen ye, mogokoroba tùn tèna Ce proverbe décrit dans un premier temps les
kono gen sanko denminsen différents états de l'être humain soit enfant, soit
« Si la hyène mangeait le mil, (même) les adultes ne vieux. Dans un deuxième temps, il nous montre
chasseraient pas les oiseaux, à fortiori les enfants ». comment l'état d'être humain fait face à des
- La hyène est redoutable difficultés qu'il faut surmonter afin de mériter cet
- La nature pose des problèmes à l’homme mais ils ne sont état.
jamais insurmontables

2. Personne Être capable de trouver la vérité, la raison, composantes corporelles


maa et principes spirituels
mogo Autres usages :
- mogoba : personne importante
- dannanmogo : personne de confiance
- mogonin : personne méprisable

Proverbes et sentences :
DT 15 Série Grenier à mots 15.3: Grenier à mots Bamanan Dagné Jiginé 23

2.1 Karisa ye mogojugu dan ye , a b’a fè ka syè faga finijè la , a no


kana ye.
«Un tel est le comble de la méchanceté : il veut tuer une poule
sur un tissu blanc, sans qu’on en voit la trace ».
- Jamais ; il ne veut reconnaitre ses torts
- Se dit d’une personne qui fait du mal, sans qu’on le sache.
2.2 Mogo tè i jugu don, nga i kunko ka gèlèn min ma, i tè fili o ma.
« On peut ignorer qui est son ennemi, mais la personne à qui
l’on est antipathique, on la connait ».
- On ne peut ignorer une antipathie manifestée en paroles et en
actes.
2.3 Jugu tè mogo la bànàjugu ko
« La personne n’a pas d’ennemi en dehors des maladies
graves »
- Tant qu’une personne est saine et sauve, elle peut toujours
se défendre
2.4 Nafolo bè mogo min bolo, nàfolo tè mogo min bolo,
mogonafolo gnogon tè
« Que l’on soit riche ou non, c’est la richesse en personnel
qui est la meilleure »
- Le capital humain est le plus important des biens

3. Individu Liens étymologiques Chapitre 2.3


yèrè yèrè (individu) – yèrèdonya (dignité) yèrèmahoronya (liberté)
yèrèbakun Autres usages :
- yèrèbonya : se donner trop de considération
- yèrèko : affaire personnelle
- yèrèdon : dignité bien comprise
- yèrèdonbaliya : indignité
- yèrmajigin : humilité
- yèrèmahoronya : indépendance
- yèrèminè : maîtrise de soi

Proverbes et sentences :
3.1 Jiridon, Sodon, Jidon, yèrèdon gnogon tè ⇒Kinyarwanda
« Savoir grimper aux arbres, aller à cheval ou nager, c’est Chap 2. H et
bien, mais rien ne vaut la connaissance de soi. » point 3.
- Conseil donné aux prétentieux : connaître ses limites, ses 30 Dignité
possibilités permet de se comporter au mieux
DT 15 Série Grenier à mots 15.3: Grenier à mots Bamanan Dagné Jiginé 24

3.2 Yèrèdonbali togo ye ko : Yèrèfàgànci


« Celui qui ne se connaît pas a pour nom « suicidaire ».
- Celui qui ne se borne pas à être ce qu’il est, va au devant
d’échecs et conflits
3.3 N’i ye yèrèlàbila kuluni yèlèn, i be se yèrèlàadifuganin ma 13. Solidarité
« Si tu montes sur la petite colline appelée « je fais ce qui me
plait », tu arriveras sur le plateau aride appelé « Conseille-toi
toi-même »
3.4 Yèrègnini-boli ni kononajuguya te ben
« Quand on fuit pour sauver sa tête, on n’y met pas de
mauvaise volonté. »
- On engage tous ses efforts pour sauver sa vie
3.5 Soro o soro, i yèrèkùn soro, o gnogon tè 36. Pauvreté
« Quels que soient les gains, rien ne vaut la vie sauve. »
- Rien ne vaut une bonne santé : s’il faut se soigner, il faut
mettre le prix
- Même si on est pauvre, si on a la paix et la liberté, on est
heureux.
3.6 Yèrèkùn soro gnogon te sorow là
«CA» « Parmi les biens précieux, rien ne vaut la vie. »
- La vie n’a pas de prix.
3.7 Jo-n-son-na ye cèfarinya ye
« Reconnaître ses défauts est une marque de courage. »
- Cela dénote une vraie force de caractère, une volonté de
progresser.
4. Homme Adolescent ou un homme ayant subi la circoncision (un initié)
cè Autres usages :
- cèba : grand homme
- cèbaden : adolescent ou un homme ayant subi la circoncision
(un initié)
- cèdencè : homme supérieur
- cèjè : association d’hommes
- cèganaya : célibat
- cègana : célibataire
DT 15 Série Grenier à mots 15.3: Grenier à mots Bamanan Dagné Jiginé 25

Proverbes et sentences :
4.1 Cèbàkoro bonyana cogo o cogo, donkelenwalanjan ye i ye
« Si important que soit devenu un homme, il finira un jour par
devenir un long tas de terre. »
- Allusion à la forme de tombe de forme allongée
- Si puissant soit un homme, il mourra
4.2 Cèfarinso dè ye nsàbànlonpon ye, do be tigè, do bè moonobo 13. Solidarité
Une famille d’homme courageux est comme un fourré de
lianes « nsaban », si tu en coupes une, une autre apparaît.
- Si l’un meurt, un autre va surgir
- La bravoure est une vertu familiale ; se dit pour encourager ⇒Kinyarwanda
les jeunes à suivre l’exemple de leurs pères, héros courageux Chap. 2 K
4.3 Cèya ye gundo ye, musoya ye gundo ye 5. femme
« La condition de l’homme est mystérieuse, celle de la femme
aussi. »
- Dans la société bamanan, il y a des coutumes réservées aux
hommes et d’autres réservées aux femmes. Les hommes ont
du mal à comprendre les femmes et réciproquement.
4.4 Ni muso y’i bila cèyajoyoro la, bèè tigèlen denmisennin min na,
«?» o bèna à gosi
« Quand une femme prend la place d’un homme, le plus
méprisable des petits garçons la rossera. »
- La femme ne doit pas se substituer à l’homme
4.5 Ni cè wasora n’a dànbe ye, o ya soro à ma du kè 30. Dignité /
« Si un homme se vente de son honorabilité, c’est que 32. Honneur
probablement, il n’a pas encore fondé de foyer. »
- Le déshonneur rejaillira sur lui en cas de mauvaise conduite
de ses enfants
5. Femme Autres usages : « muso » traduit aussi tout ce qui est femelle.
muso - muso koroba : femme âgée
- muso koroni : femme très âgée
- muso kun : femme très dynamique
- musoya : féminité, condition féminine, sexe féminin, sexe de la
femme

Proverbes et sentences : 4. Homme


5.1 Cè hakili bè fen bèe san fè fo musoko
DT 15 Série Grenier à mots 15.3: Grenier à mots Bamanan Dagné Jiginé 26

« L’intelligence d’un homme est supérieure en tout, sauf s’il


s’agit d’une affaire de femme. »
- La passion est plus forte que la raison
- L’homme sous l’emprise de la passion est un véritable fou
- Le cœur a ses raisons que la raison ne connaît pas
5.2 Mogo b’a fo ko : i bo’n bè muso ko la, o bèe n’a ta, i jo’n bè da
kèrè fè ⇒ Moore :
« Tel déclare qu’il ne s’intéresse plus aux femmes, pourtant il Chap. 2 N
est là à attendre à la porte. »
- Certains signes montrent clairement qu’on n’a pas renoncé
complètement à quelque chose
« ? » 5.3 Ni mùsokoroba ma den wolo, bokèkognuman, i ka kan ka se o Poids des attentes envers les rôles sociaux fixes
la
« Même si une vielle femme n’a jamais accouché, elle doit
tout de même savoir aller à la selle. »
- Une femme doit savoir bien éduquer les enfants, même si
elle n’en a pas eu elle-même
«–» 5.4 Cèkoroba ye miséli ye kà mogo kala gnogon na, nka
mùsokoroba ye sùrùfe ye min be mogow tigè ka bo gnogon na
« Le vieux est une aiguille qui coud les gens, la vielle est un
rasoir qui les divise. »
- Les vielles sont réputées avoir la langue bien pendue
- L’un est facteur de paix, l’autre de brouille
5.5 Mùsokoronin konoko bè dogo goya a la
« La petite vieille cupide échoue dans son marché. »
- Quand la vieille va au marché, elle ne trouve pas ce dont elle
a envie
- Il faut modérer ses désirs, ses passions, ils sont la source de
tous nos problèmes
5.6 Mùsoninkolon de bè mùsoya kèmonè ye. Mùso de be fàama
bànge . Mùso de be bàana bange. Mùso de be waliju bange.
« C’est la petite femme vaurienne qui rend la condition de la
femme regrettable, (alors) qu’il y a des femmes qui
engendrent de grands personnages, des hommes riches ou des
saints. »
- Ce sont les femmes vauriennes qui bafouent la dignité des
autres femmes. (mùsoya)
DT 15 Série Grenier à mots 15.3: Grenier à mots Bamanan Dagné Jiginé 27

5.7 Mùsoya koro, nka à ma jè


«?» « La condition féminine a bien été lavée, mais elle n’est pas
«!» tout à fait propre. »
- La femme joue un grand rôle, elle donne la vie aux puissants
comme aux pauvres. Il lui manque de pouvoir gouverner.
«CA» 5.8 Mùsoya man jugu, cèya man jugu, hakilitanya dé ka jugu
« La condition féminine n’est pas mauvaise, celle de l’homme
non plus, c’est le manque de sagesse qui est mauvais.
- Etre homme ou une femme, ce n’est pas un vrai problème.
Manquer de sagesse, oui
5.9 N’i ya men : Ne gnogon cikèla tè, i bà soro mùso waraba dè bi
kùn du kono
« Si tu entends quelqu’un dire : « je n’ai pas de pareil comme
cultivateur », c’est qu’il a une lionne comme épouse au
foyer. »
- Avec une bonne épouse, active, on a l’esprit tranquille et on
peut travailler

6. Enfant Proverbes et sentences : ⇒ Moore


den 6.1 Bi denmisenw ye sini mogokorobaw ye 18. âge
« Les enfants d’aujourd’hui sont les vieux de demain ».
- Les jeunes assurent la relève des vieux (mogokoro)
6.2 Mogokorokunkolo tè bo san fè kà cun, ni
denmisenkunkolomenna fignè na, à bè kè mogokorokunkolo ye
« Les têtes des vieux ne tombent pas du ciel, quand les têtes
des enfants auront respiré l’air un bon bout de temps, elles
deviennent des têtes de vieux ».
- Valeur des jeunes, espoir de l’avenir
«CA» 6.3 Kuma ye fèlèfen ye, mogokoro bè tèmè do la, denmisen b’a
lawuli
« La parole est comme un gibier de chasse commune, un vieux
peut passer à côté, alors qu’un enfant le lèvera ».
- Façon polie pour les jeunes de prendre la parole dans la
palabre et donner son point de vue
- il n’y a pas que les vieux qui sont sages, tout le monde peut
trouver la vérité
DT 15 Série Grenier à mots 15.3: Grenier à mots Bamanan Dagné Jiginé 28

«CA» 6.4 Mogo bè to mogokorobàya la ka denmisenya lakodon, nka


mogo tè se k’i to denmisenya na kà mogokorobaya lakodon
« L’adulte connaît ce qui est dans la jeunesse, mais le jeune
ignore ce qui est dans l’âge mûr ».
- Expérience des vieux, supériorité des vieux
«CA» 6.5 Dùgu mogokorobaw ye jiribaw ye, n’u binna u gnogon soro
man di
« Les vieux d’un village en sont les grands arbres. Quand ils
tombent, on a du mal en a trouver d’autres ».
- Un vieux, c’est une bibliothèque qui disparaît. Il est le
gardien des traditions…
- la présence des vieux plein d’expériences est rassurante pour
les gens d’un village
6.6 Bilakoro man kan ni cèbakorokèlè ye
« Un garçon incirconcis n’a pas sa place dans une bataille
d’adultes. »
- On ne doit pas manquer de respect à ses supérieurs se dit
d’une personne qui ne fait pas le poids dans un rapport de
force, une querelle entre grands.
«CA» 6.7 Cèkoroba san kèmè à ka bùlon kono, denmisen bùlon kèmè, ù 18 Age
bè se kà bàro kè Savoir /
« Un vieillard centenaire dans son vestibule et un jeune qui est connaissance
passé par cent vestibules peuvent dialoguer. »
- Les voyages forment la jeunesse, ils donnent de l’expérience,
tout comme l’âge.
- Aux âmes bien nées, la valeur n’attend point le nombre des
années (Corneille).
7. 1 Famille Synonyme : Denbaya signifie la famille au sens européen : père,
dù - kolè mère et enfants.
gwa Autres usages :
denbaya - dùden : membre de la famille (personne résidant dans la ⇒ Russe « Dù » est pris au sens d’une concession qui
concession) comprend la maison + la cour.
Proverbes et sentences : L’appartenance dépasse les questions de race. Cette
7.1.1 Ni tasuma bè i kèrèfèmogo ka du la, i kà à dèmè kà à sà, n’o 13. Solidarité appartenance clanique ou ethnique détermine les
«+» tè, ni fignè wulila, à bè se i ka so ⇒ 8. liens entre les africains de la vie à la mort. On est
«?» « Si le feu prend à la maison de ton voisin, aide-le à l’éteindre, Vietnamien géré par ces liens familiaux.
sinon, si le vent se lève, le feu arrivera à la tienne. »
- Il faut aider les voisins à régler leurs querelles
DT 15 Série Grenier à mots 15.3: Grenier à mots Bamanan Dagné Jiginé 29

7.1.2 Mùso ka kolo à cè ye, den ka kolo à bangebaga ye, dogo ka Conformisme et traditionalisme
kolo à koro ye, o dè tùn ye folo la du fànga n’a barika n’a
dànbe ye
« La soumission de la femme à son mari, celle de l’enfant à
ses parents, et celle du cadet à son aîné, c’était autrefois la
force, la bénédiction et l’honneur de la famille. »
- Dans la société patriarcale, toute l’autorité est aux mains des
hommes, le patriarche, le mari ou l’aîné.
- C’est en reconnaissant ce principe de base qu’on assure le
bonheur et la prospérité de la société
7.1.3 N’i ye du-duman denw ye gnogon korofo la, o ye du-duman
goyalen ye
« Si tu vois les membres d’une famille en discussion, c’est que
l’esprit de famille s’est dégradé. »
- Lorsque tout va bien, tout le monde est heureux et on s’aime,
mais dans les difficultés.
7.1.4 Ni dudenw ma bèn, mogo wèrè bè i sago kè ù la
« Quand les gens de la famille ne s’entendent pas, d’autres en
feront ce qu’ils veulent ».
7.1.5 Taa yorojan, à tè mogo fili i fàso bùlondàyèrèwolo mà Le manque de solidarité familiale constitue un
« On a beau s’en aller loin, on retrouve toujours sans se risque de survie de la chaîne familiale, clanique,
tromper la porte de la maison paternelle. » etc…
- Si haut placé que vous deveniez dans la société, vous ne
devez pas oublier vos origines.
- Même si vous vous installez loin du bercail, il faut souvent y
revenir et ne pas en oublier les coutumes, les mœurs- dit à qui
ne pense plus à sa parenté, alors qu’il a fait fortune au loin
DT 15 Série Grenier à mots 15.3: Grenier à mots Bamanan Dagné Jiginé 30

7.2 Parenté 27 Proverbes et sentences :


somogoya 7.2.1 Sebe mogo tè maa somogo ye
balimaya «L’homme rônier n’est pas un parent».
- En raison de son tronc élancé et de son bouquet de feuilles
palmées l’on ne peut profiter à celui qui est assis la dessous
« l’homme rônier » est celui qui manque au devoir de
solidarité familiale, profiter de son avoir, de son influence
d’autres personnes et non les gens de son entourage.
7.2.2 Ni ko tè maa min na ; nyè tè mal’o ma
« Celui qui n’a pas d’appui ne fait l’objet d’aucun égard ».
- Ko : le dos. Dans le proverbe, c’est l’ensemble des parents,
des relations et appuis sociaux.
Nyè : l’œil, c’est l’image de tous ceux qui viendraient à
manquer d’égard à l’homme sans appui ou à l’appui fragile.
7.2.3 Bamananjuru bè kèlèkele, nka à tè tigè
« La corde qui lie les Bamanan s’effiloche, mais elle ne se
coupe pas »
- Les liens de parenté ne se rompent jamais complètement en
dépit des querelles

7.3 Appartenance Proverbes et sentences :


tigiya 7.3.1 Ni mogo kelen y’a fo : N’buran Ala’ i na tow fa jira u la.
bognogona « Si une seule personne se met à appeler Dieu : mon beau
père, il montrera aux autres leur père »
- Dieu est le père de tous les hommes.
- Le soleil luit pour tout le monde
7.3.2 Warabilen te se ka kungo tonomada, kungo yèrè te se ka
warabilen tonomada.
« Le singe rouge ne peut hypothéquer la brousse, la brousse
elle-même ne peut mettre en gage le singe rouge ».
- Quand on est solidaires on doit reconnaitre les droits de ses
associés (mariage…)

27
De la foi commune naît l’amitié, qui entre voisins peut conduire au mariage entre deux familles, voir deux communautés voisines, et qui dépasse la relation simpliste
homme-femme. Cependant, le couple (parenté à plaisanterie) ou gnimogoya tient une place prépondérante dans les relations matrimoniales (mariage) à travers le fait que les
jeunes frères et sœurs du mari puissent plaisanter avec la femme de leur grand frère à volonté sans que celle-ci puisse rechigner et vice-versa. Ce lien est fort considéré que
même celui de consanguinité ou « badenya ». La parenté à plaisanterie « sinakunya », est une relation qui existe entre deux noms, deux groupes ethniques, pour des raisons
historiques très mal connues. Au nom de la relation, les membres de deux groupes ont le droit de s’insulter, de se chahuter, mais aussi de se porter concours mutuellement. Il
se crée un lien assez fort que l’on appelle cousinage. La tradition dit que l’on n’a pas le droit de mentir ou de tricher avec son cousin à plaisanterie au risque de grands et
graves ennuis.
DT 15 Série Grenier à mots 15.3: Grenier à mots Bamanan Dagné Jiginé 31

- Peut s’appliquer au respect dû à la création.


7.3.3 N’Filan tè dugu min na, n tè sigi ye
« Je n’élirai pas domicile dans un village où il n’y a pas de
gens de mon âge »
- On plaisante mieux entre les gens de la même classe d’âge,
on peut même s’insulter, ça s’arrête là sans conséquences
- Il est difficile d’intégrer une société où il n’y a personne qui
partage les mêmes idées
7.3.4 Togo bora togo la, nka jàma ma bo jàmu na
« Un prénom se distingue d’un autre, mais un nom de famille
peut ne pas se distinguer d’un autre »
- Les individus sont reconnus appartenant à la même famille à
partir de leur nom, mais pas de leur prénom
- Une affaire qui concerne quelqu’un de ta famille te
concerne aussi
7.4 Alliance Proverbes et sentences :
benkan 7.4.1 Gnogonbadun bè suya diya
« Se manger les mères réciproquement rend prospère
l’association des sorciers ».
- Le but de toute association est de servir les intérêts de
chaque membre.
- Une société ne peut être basée et durer, que sur l’équité, le
partage
- Pour dire que les bienfaits doivent êtres réciproques, les
marques d’honneur…
7.4.2 Jè o jè, faradon bè à la
« Toute association finit par se dissoudre un jour »
- Aucune alliance n’est éternelle et cela pour différentes
raisons : voyages, changement de domicile, querelle, mort
7.5 Lignage Proverbes et sentences :
bokolo 7.5.1 Woloyoro moyoro bè danbé dafa
buruju « Le lieu de naissance où l’on a été élevé parachève la
noblesse »
- Le statut dépend des parents et de la famille
- On jouit de sa réputation dans son propre milieu
DT 15 Série Grenier à mots 15.3: Grenier à mots Bamanan Dagné Jiginé 32

7.5.2 Fa-den-na ko : moden


« Etre comblé d’enfants, signifie avoir des petits-enfants »
- La famille nombreuse est un idéal, de même que la
succession des générations
7.5.3 Bala sara, bala wèrè sara, ni jugunin tè gnamogoden ye ,
ciyèn ka kan ka di a ma
« Quand un porc-épic meurt, puis un autre, si le hérisson
n’est pas un bâtard, on doit lui remettre l’héritage »
8. Communauté Synonymes : Chap. 2.2 et 2.4
jamà - dunge Compris dans le sens de foule, assemblée
jamana - manton
- fasojama
- jamana konomogow
Proverbes et sentences : ⇒Kinyarwanda « ? » Peut poser des problèmes au niveau de la « force
8.1 Jàma bèe n’a sùdonbagaw don , Chap. 2.L négative de la masse ».
« Chaque communauté a ses gens chargés des cérémonies de
funérailles. »
- Chaque religion a ses rites d’inhumation. (La responsabilité
de certains rites revient à des spécialistes
« ? » 8.2 Ni jàmà jèra ka dùga ta mogo min ye, mogo kelen ka danga tè
foyi kè o la
« Quand une foule s’unit pour faire des bénédictions à 13. Solidarité
quelqu’un, la malédiction d’une seule personne ne lui fera
rien ».
- Quand tout le monde approuve quelqu’un, la mauvaise
appréciation d’un seul est sans valeur
« + » 8.3 Jàmàba bè sègèji min
« Une grande foule est capable de boire l’eau de potasse.
- L’eau de potasse n’est guère buvable ;
- Supporter ensemble une épreuve est plus facile
8.4 Ni jàmà jèra ko min na, o tignè man di
« Si une foule s’unit pour une entreprise, elle échouera
difficilement. »
- L’accord d’une assemblée est difficile à rompre
8.5 Mogo kelen tè se kà kè kogo ye kà bo dignè mogow bè ka na na 13. Solidarité Il faut compter sur la communauté pour faire de
« Une seule personne ne peut pas se faire sel pour saler la ⇒Ukrainien grandes actions
sauce de tout le monde ». /Russe
DT 15 Série Grenier à mots 15.3: Grenier à mots Bamanan Dagné Jiginé 33

9.1 Patrie Proverbes et sentences :


faso « + » 9.1.1 Jàmàna bèe ni à ka làada don 72. Diversité
« A chaque pays ses coutumes ».
9.1.2 Jàmàna fila bè ben ni sodansow tè. Màsàkè fila bè ben ni
sodansow tè
« Deux pays peuvent s’entendre sans confrontation de
guerriers à cheval ; de même deux rois. »
- L’entente vaut mieux que la guerre
9.1.3 Kono dugu te san ye
« Le ciel n’est pas le village des oiseaux »
- Quoi qu’on fasse, on reste fidèle à son village natal, à sa
patrie
9.1.4 Taama diya ye ségin-n-ko ye
« Le meilleur moment du voyage est le moment du retour. »
- Quand on part à l’aventure, il faut songer au retour à la
maison
9.1.5 Bèè ka gni i faso la
« Chacun est bien dans sa patrie »
- On n’est bien que chez soi
9.1.6 Faso bè tonomada, nka à tè féere 7.5Lignage
« On a beau faire, on est de telle famille, de telle race, on ne
peut s’en désolidariser, s’en désintéresser
- L’attachement à la patrie est profond
9.2 Peuple Proverbes et sentences :
jàma 9.2.1 Sama tè bogna kungo ma
fasodenw « L’éléphant n’est pas trop grand pour la brousse »
- Si dangereuse que soit une personne ; celles dont elle dépend
ne la craignent pas : père ; mère ; femme ; amis
9.2.2 Jama bèe na sudonbagaw do
« Chaque communauté a ses chargés des cérémonies de
funérailles »
- Chaque religion a ses rites d’inhumation
- La responsabilité de certains rites revient à des spécialistes

9.3 Nation 9.3.1 Ici le mot nation est synonyme au mot patrie qui veut dire 9.1 Patrie
manton « Faso » en Bamanan
dunge
DT 15 Série Grenier à mots 15.3: Grenier à mots Bamanan Dagné Jiginé 34

Proverbes et sentences :
9.3.2 Ni dungejo kuma nàna, bèe ka i konota fo
« Quand il y a un débat concernant la construction de la
nation, chacun a le devoir de dire ce qu’il pense »
- En donnant son point de vue, le patriote contribue à la
construction de la nation
9.4 Clan Proverbes et sentences :
bonda 9.4.1 Ni gadaw kèlèla, tomugu to yoro nafo. 39.2 Entente Ce proverbe traite de la nécessité de l'entente dans
gaw « Quand les cuisinières se disputent, on va savoir où se trouve le clan. Car il ne saurait avoir de clan sans secrets
le reste de la farine ». cachés, ce qui est le fondement.
- Les servantes en dispute s’accuseront mutuellement
- S’il y a mésentente, les secrets sont dévoilés
- Se dit à l’occasion de disputes entre coépouses entre
coépouses, amis ou membres d’un parti.
9.4.2 Dunan jugu togo bè ga koro, n’ka jatigijugu togo bè sira kan. 11. Hospitalité
« La réputation qui se conduit mal reste dans la famille, celle
de l’hôte qui se reçoit mal se propage sur les routes ».
- Jouez bien votre rôle d’hôte accueillant, si vous ne voulez
pas gâter votre nom au loin.
9.5 Ethnie Proverbes et sentences :
sya 9.5.1 K’i cè i fasiya la, jon-fà-la don
« Renier sa race, c’est mépriser son père »
- On doit respecter son père et accepter son statut de naissance
- N’ayez pas honte de ce que vous êtes de par votre naissance
9.5.2 Jo-n-siya-la, o tènèfaga ka di 69. Interdit
« Pour qui avoue sa race, il est facile de faire respecter ses
interdits »
- Quand on fait savoir à son hôte quel est son interdit (telle
viande, tel jeudi), il lui sera facile d’en tenir compte
DT 15 Série Grenier à mots 15.3: Grenier à mots Bamanan Dagné Jiginé 35

10. Identité Bamananya koro ye ko « L’identité bamanan se caractérise par »: « Bamananya » signifie « identité bamanan »
tabiya 1. An kan banba : les valeurs Bamanan sont synonymes de
jogoya courage et de labeur, L’aliénation est caractérisée par la déperdition
2. Jogo ani dambe : honorabilité et respect des valeurs sociale, l’homme doit rester dans les normes de sa
ancestrales, culture socialement. Les Bamanan condamnent
3. K’a kè i togo kama : que l’homme soit jaloux de sa ferment l’aliénation, ils pensent qu’on peut
réputation, s’enrichir de l’apport des autres et ne point
4. Ka fatiyen bato : respect des héritages sociaux et avoir abandonner ses valeurs.
horreur du déshonneur. « nul ne doit oublier ses origines », cela n’est pas
Credo du Bamanan28 : permis, nous apprend la sagesse bamanan. Pour
- Ne jamais se trahir, savoir où l’on va, il n’est pas inopportun de savoir
- Ne jamais se mentir, d’où l’on vient. Nous nous devons de garder le sens
- Ne jamais envier nos femmes respectives à fortiori du permanent à travers le transitoire et le
commettre l’adultère, provisoire.
- Ne jamais se médire les uns les autres Savoir s’asseoir, et regarder tant derrière que devant
soi, pour s’identifier correctement et lucidement,
Proverbes et sentences : 35. Vérité apprécier les forces dont on dispose, facilite la
10.1 Bamanan te kalon tigè marche en avant, si pénible doive-t-elle être.
« Un Bamanan ne ment pas »
10.2 Bamanan ye kankelenfo ye
« Le Bamanan n’a qu’une seule parole » 66.2 Honnêteté
10.3 Bamanan t’a tu k’a lanon
« Le Bamanan ne lape pas son crachat »
- le Bamanan ne se dédit pas’
10.4 Bamanan bè sa a kumakan kan
« Le Bamanan meurt pour sa parole donnée »
- Il ne dit pas ‘oui‘ quand il a dit ‘non‘

11. Hospitalité/ Etymologie : Jatigila signifie aussi le lieu d’hébergement de


Hébergement - jatigi : le logeur quelqu’un
jatigiya Autres usages :
- jatigila : Chez le logeur Article 24 (Charte de Kurukanfuga 29) : Ne faites
jamais du tort aux étrangers

28
Le credo est tiré du corpus de valeurs positives bamanan ou charte sociale dans laquelle sont consignées les prédispositions de la conduite sociale à tenir et qui est à
enseigner à tout individu bamanan.
29
Charte de Kurukanfuga ou La Charte du Manden ou Manden kalikan, aurait été proclamée en 1222 par Soundjata, fondateur de l'Empire du Mali, et ses pairs. Elle reste la
référence majeure des sinbo, grands maîtres chasseurs du Manden. (Voir annexes)
DT 15 Série Grenier à mots 15.3: Grenier à mots Bamanan Dagné Jiginé 36

Proverbes et sentences : 12. Tolérance


« + » 11.1 Jàtigignininka ka fisa dunanya la 33. Respect
« Il est préférable pour un étranger d’interroger son logeur. »
- Dans une société ou une culture différente de la vôtre, mieux
vaut poser des questions pour ne pas faire d’impair
« ! » 11.2 Dunan falen bè kilisi fo à jatigi ye
« L’étranger repu révèle ses formules magiques à son hôte »
- L’étranger bien reçu ouvre son cœur à son hôte
- Un bien fait n’est jamais perdu
« ! » 11.3 I bora i ka so, i sera i ka so
L’hospitalité repose sur une valeur intégratrice dans la société,
qui fait qu’on quitte chez soi et qu’on se retrouve chez soi
12. Tolérance Proverbes et sentences :
sabali 12.1 Kotonyogontala de bè karatabugu mèn si la
« C’est en obéissant les uns aux autres dans une paillote que
celle-ci peut résister longtemps »
- Conseil aux enfants d’une famille pour les inviter à la bonne
compréhension, un esprit de concessions réciproques pour la
pérénité du groupe. Ce qui est vrai pour la famille, l’est aussi
pour tout groupe social : village, fraction, hameau.
12.2 Se bè mogo ye don min, o de sabali kagni Pouvoir
« C’est quand on a le pouvoir qu’il est beau d’être patient »
- C’est aussi de la prudence, car du jour au lendemain, on peut
perdre son pouvoir et risquer l’humiliation.
- Il faut être doux avec les autres, même si on détient le
pouvoir.
12.3 Fen bèe bè taa ka segin sabalibaga ma.
« Tout part de celui qui est patient et tout lui revient ».
- Même ce qu’il avait prêté, ce à quoi il avait renoncé, le
patient le retrouvera.
12.4 Mogo min b’a fo i diminen ye : sabali !, ni o ma kè i gnin do
ye, i jugu tè
« Quand tu es en colère, si quelqu’un te dit : calme toi !, si ce
n’est pas un de tes amis, ce n’est pas ton ennemi »
- Si quelqu’un te demande d’être tolérant, c’est que c’est ton
ami
DT 15 Série Grenier à mots 15.3: Grenier à mots Bamanan Dagné Jiginé 37

13. Solidarité Proverbes et sentences :


gnogondèmè 13.1 Bamananjuru bè kèlèkele, nka à tè tigè Communauté
« La corde qui lie les Bamanans s’effiloche, mais elle ne se 8.3 / 8.4
coupe pas. »
- Les liens de parenté ne se rompent jamais complètement, en
dépit des querelles ;
- Il peut diminuer ses dettes, mais il y en a toujours
13.2 Mogo tè misi tigèli tèmè koro
« On ne dit pas de mal des bovins devant un bœuf. »
- La solidarité de race existe
13.3 Juru tè ban mogo là, fo kà taa i sà
« On est toujours redevable à quelqu’un, jusqu’à la mort. »
- Dans le cadre des relations humaines, on doit toujours à
quelqu’un ;
- Le pauvre paie d’un côté et s’endette de l’autre.
« + » 13.4 Mogo, i bè mogow dè bolo, i bè taa mogow dè bolo
« On vient au monde dans les mains de quelqu’un, on le quitte
dans les mains de quelqu’un
- Aux grands évènements de la vie, on a besoin des autres
13.5 Koto gnontala de bê karatabugu mèn sila
« Les chaumières doivent leur conservation à la discipline des
cohabitants ».
- C’est dans l’entente et la solidarité que la vie en société
devient paisible.

3.1.1 Entrées spécifiques à cette langue

14. Education/ Proverbes et sentences :


Comportement «CA» 14.1 Mogo tè koro kalan mà
ladamuni « On est jamais trop vieux pour apprendre »
kalan - On apprend à tout âge
14.2 Kalan ni kodon tè kelen ye
« Etre instruit et avoir de l’expérience dans la vie sociale, ce
n’est pas la même chose
- Des gens qui ont fait de hautes études ne sont pas toujours
aptes à se diriger dans la vie, il leur manque d’autres
acquisitions
DT 15 Série Grenier à mots 15.3: Grenier à mots Bamanan Dagné Jiginé 38

16. Connaissance/ Proverbes et sentences : Le savoir était l’apanage des « connaisseurs » ou


Savoir « ! » 16.1 Maa kodon bè, nka-i-ko-bè don-tè 35. Vérité « kodonna ». Chaque pan de la société est un
donnya « On peut savoir, mais on ne peut tout savoir » apprentissage auprès d’un être. Le savoir pour nous
donta 16.2 Donni ye mininyan foroko de ye, bolo tè se ka donka s’a dan n’est pas anodin (mystique) qu’un novice ne peut
somaya na appréhender sans être guidé. Comme au moyen âge,
« Le savoir ressemble à une peau de boa au fond de laquelle le tous les corps de métier avaient des maîtres et des
bras ne peut accéder ». apprentis qui se transmettaient le savoir dans les
- Le savoir, les sciences, les connaissances n’ont pas de loges mystiques ; Exemple : les francs-maçons
sommité absolue. constructeurs de cathédrales…
16.3 Kamiw ye min don, wolow tèmè n’o kan Le savoir représente le cinquième fils du monde
« Les perdrix ont dépassé la connaissance des pintades » pour les Bamanan, qui avait pour mission principale
l’émancipation du genre humain, son mieux être
16.4 Denminsènin kegun ye cèkoroba naloma sora dignè na social, économique, culturel voire confessionnel.
« Lorsque l’enfant intelligent naissait, le vieil homme naïf En dépit des bienfaits du savoir, beaucoup de
expérimentait. » connaissances nuisent à l’humanité au lieu de la
servir telles : l’apocalypse des armements
nucléaires.

« Les Bamanans font eux mêmes une distinction


entre deux sortes de connaissances. La première
dite doni fyèma « connaissance (qui a) du vent» est
superficielle et considérée comme « l’entrée en
matière des croyances et des coutumes ». Elle
appartient aux adultes peu versés dans la
cosmologie. En revanche, la seconde, dite
« connaissance profonde » (doniya duna ou kuru
doniya), est réservée aux prêtres, aux chefs de
famille, aux vieillards des deux sexes versés dans
« la science des choses de la création ». Elle ne
s’acquiert que lentement au cours d’initiations
successives et par un véritable enseignement qui se
diffuse parfois au cours des rites. »30

18. Âge Proverbes et sentences : ⇒ Moore Art 4 (Charte de Kurukanfuga). La société est
si 18.1 Cèkorobaya si ka ni kamalenya ye divisée en classes d’âge. A la tête de chacune
sihakè « La vie d’un vieux est plus longue que celle d’un jeune d’elles est élu un chef. Sont de la même classe
homme » d’âge les personnes (hommes ou femmes) nées au
- Les vieux ont de l’expérience cours d’une période de trois années consécutives.

30
Dieterlen, G. Essai sur la religion Bamanan, pages 17 et 18.
DT 15 Série Grenier à mots 15.3: Grenier à mots Bamanan Dagné Jiginé 39

18.2 Si soro ko ka gèlèn siyoro ko ye Les Kangbès (classes intermédiaires entre les
«Il est plus difficile de bénéficier d’une longue vie que de jeunes et les vieux) doivent être conviés pour
trouver un endroit pour dormir ». participer à la prise des grandes décisions
- Jeu de mots avec deux homonymes parfaits : si :passer la concernant la société.
nuit et si :longue vie.
- Pour dire qu’il faut accorder une plus grande importance à
telle chose plus qu’à une autre
18.3 Ni ka koro ni ye, nka ni man fisa ni ye
« Il y a des vies plus anciennes que d’autres, mais aucune
n’est meilleure que l’autre »
19. Amitié Proverbes et sentences : 7.1 Famille «!» A la limite une amitié bien partagée peut être à la
tériya 19.1 Mogo ti bagenbagaw sugandi, n’ga i bi se ki teriw latomo. base de mariage interfamiliaux « ni teriya diyara,
« On ne choisit pas ses parents, mais on peut choisir ses furu bèe bo a la ». L’amitié prime sur la parenté.
amis » C’est le résultat d’un choix, un pacte entre deux
«CA» 19.2 N’a fora ko sinin ye jugu-faga ye, do bè tilen ka poli do gni individus.
nofè.
« Quand on décidera que c’est demain la tuerie des ennemis,
certains passeront toute la journée à courir derrière les amis
d’autres ».
19.3 Ntè sogo soro ye tignè ye, n’ka ntè miyètoya taama, o’ye
nkalon ye.
« Tu peux me refuser ta viande, mais tu ne peux pas
m’empêcher d’en être friand ».
- On peut refuser à quelqu’un son service, son amitié, mais
l’on peut l’empêcher d’exprimer son désir, on peut ne pas
vouloir aimer mais on ne peut empêcher qu’on soit aimé.
DT 15 Série Grenier à mots 15.3: Grenier à mots Bamanan Dagné Jiginé 40

3.2 LA DIGNITE / LA HONTE

Mots Etymologies remarquables, sentences, interprétations Liens Problèmes d’interprétation / Contre-exemples


/ Contre-argumentations
30. Dignité Contraire : Liens «?» Dans le milieu bamanan, la dignité est innée. Selon
yèrèdonya - yèrèdonbaliya étymologiques la société, à la naissance, on est soit « Horon »31,
dànbe Proverbes et sentences : 3. Individu soit « Djéli », etc…
horonya 30.1 Sà te mogo to k’i b’i diya, sà te mogo to k’i b’i goya, sà te 30 Dignité Chaque classe sociale est digne de ce qu’elle est et
horon to dè ! cèba cègni bèe waarila, mùsognuman bè wàra 32. Honneur a droit au soutien des autres, mais on ne peut
min ? 60 Liberté passer d’une classe à une autre
« La mort n’épargne pas les gens sous prétexte qu’ils sont 65. Egalité
heureux ou malheureux, elle n’épargne pas les nobles. Tous les devant la mort
grands et beaux guerriers se sont écroulés. Où sont toutes les
belles femmes ? »
- La mort n’épargne personne
30.2 Sàya ye horonkè kèrèlamuru ye ⇒ courage
« La mort est le couteau du noble, celui qu’il porte à son côté »
- L’homme libre n’est jamais surpris par la mort
- C’est sa compagne, il est même prêt à mourir si c’est
nécessaire
« + » 30.3 Sanu bè mogo do fè, dànbe tè i la, wari bè mogo do fè, dànbe tè
i la
« Un tel a de l’or mais il ne jouit pas de l’estime (d’autrui), tel
autre a de l’argent, mais il n’a pas de renom. »
- Il ne s’agit pas d’avoir beaucoup de bien, l’honneur et la
dignité sont plus précieux

31
De prime à bord, il est notoire de spécifier que les horon et les djéli ne sont pas à regrouper comme castes dans la connotation et la classification sociale des Bamanan. Le
premier groupe représente « la noblesse » désignée sous le vocable de Horon désignant les autochtones du milieu. Les Horon sont les décideurs au sein de la société bamanan,
ils sont habilités à diriger et à légiférer le pouvoir local. L’esclavage ne faisant plus le poids, ce faisant les nobles ne sont plus aujourd’hui propriétaires d’esclaves pour
disposer d’eux à leur guise. Le second groupe constitué par les djéli designe chez les Bamanan un ensemble d’hommes de caste inférieure socialement par rapport aux Horon
dont aussi les maabo, garanké, founè, numu…qui regroupés en un grand groupe de griots s’appellent les n’yamakalaw. Cette couche sociale a des fonctions techniques de
fabrication d’objets pour servir les autres groupes ethniques. Hormis les fonctions techniques, elle assume les fonctions sociales de médiation lors des démarches
matrimoniales, de réconciliation en cas de différends ou de conflits. Le cours de l’histoire changeant, les Djéli, assumaient des fonctions de conseillers auprès des rois
bamanan, aujourd’hui auprès des chefs de villages.
DT 15 Série Grenier à mots 15.3: Grenier à mots Bamanan Dagné Jiginé 41

« ! » 30.4 Fula dànbe ye nono ye ⇒ Moore


« La noblesse du Peul, c’est de posséder du lait ». 15. Travail
- Tout comme celle du Bamanan est de cultiver ;
- La dignité d’un homme vient du fruit de son labeur
30.5 Nùgu lankolon tè horonya don 36. Pauvreté
« Celui qui a le ventre vide, oublie toute dignité. »
- L’affamé n’a plus qu’une chose en tête, se rassasier. Il devient
agressif.
- Ventre affamé, point d’oreilles ; la faim étouffe l’orgueil
30.6 Ni ka koro ni ye, nka ni man fisa ni ye
« Il y a des vies plus anciennes que d’autres, mais aucune n’est
meilleure que l’autre »
31.1 Honte Proverbes et sentences : [màlo] peut aussi signifier le riz
màloya 30.1.1 Fàantan fàamàkokè : e ko i kàna màlo, sà joona ye o fura ye 34. Mensonge
« Si un pauvre joue au riche, mieux vaut qu’il meure tôt pour Cela peut renvoyer à la pudeur, dans ce cas on
lui éviter d’être humilié. » utilise : malobaliya (pour une personne effrontée
- Un jour ou l’autre, il devra régler ses dettes ou sa de caractère)
malhonnêteté
- Il faut se comporter selon son rang, sinon on prend des risques
30.1.2 Tasuma cinna, sogo tè n bolo, ne màlola, n samèna ⇒ Ukrainien
« Le feu est allumé, je n’ai pas de viande, je suis embarrassé, je
suis tout confus ».
- Les autres ont fait ce qu’ils pouvaient, mais pas moi ;
- Pour exprimer son embarras de n’avoir pu satisfaire à ses
obligations sociales, de n’avoir pu tenir une promesse
30.1.3 Màlo r fùgàri la ⇒ Moore :
« Le vaurien n’a aucune honte ». 15. Travail
- Faute de travailler, il sera obligé de tendre la main sans
aucune dignité.
30.1.4 Sàya ka fisa màlo ye
« La mort est préférable à la honte ».
- La tradition enseigne qu’un homme libre doit préférer la mort
à l’humiliation.
30.1.5 Boli man jugu, nèri de ka jugu. Nèri man jugu, bana de ka
jugu. Bana man juku, saya dé ka jugu. Saya man jugu, malo de
ka jugu.
«La fuite n’est pas redoutable, la malchance l’est. La
malchance n’est pas redoutable, la maladie l’est. La maladie
n’est pas redoutable, la mort l’est. La mort n’est pas
redoutable, la honte l’est ».
DT 15 Série Grenier à mots 15.3: Grenier à mots Bamanan Dagné Jiginé 42

31.2 Humiliation 30.2.1 Foyi tè fàantan ni màloya cè, kùnkosèbàliya ko 36. Pauvreté
lamaloyali « Rien ne sépare la pauvre de l’humiliation en dehors de la
(petite) période qui précède ses problèmes »
- S’il ne trouve pas en emprunter, ce sera l’humiliation
- Le pauvre est dans une sorte de psychose, il s’attend toujours
à des problèmes : impôt à payer, nourriture à trouver
30.2.2 Nà à tà , n’a m’i fàga, à b’i màlo
« Celui qui dit : « viens donc le prendre ! », s’il ne te tue pas, il 69. Interdit
va t’humilier. »
- On doit respecter les interdits, tenir compte des êtres qui ont
un pouvoir maléfique
- Pour avertir celui qui s’entête : « si tu continues, tu auras des
ennuis sérieux
30.2.3 Cê bè cê faga k’a soro i ma a malo 38.3.1
« Un guerrier peut tuer un autre guerrier sans nécessairement
l’humilier ».
Dans la Charte de Kurukanfuga, article 41, il est mentionné : «
Tuez votre ennemi, ne l’humiliez pas »

32. Honneur 32.1 Ka bonya da mogo kan 30. Dignité ;


bonya « Donner à quelqu’un des marques d’honneur » 31. Honte
Proverbes et sentences
32.2 Ni bonya tùn bè fen gnè mogo ye , sàma tùn bè sà yoro min,
suruku tùn bè tilèma kè yèn
« Si être gros rendait (vraiment) service, la hyène passerait la
saison sèche là où meurt l’éléphant. »
- Quand on vous honore beaucoup, vous avez honte
32.3 Màa ye cogo, o bè batigèsara bonya
« L’allure d’une personne augmente le prix de passage de la
rivière »
32.4 A diyara sabagaw la baloko jugu
« La condition des morts est meilleure que celle de ceux qui
vivent d’une manière déshonorante »
32.5 Ni bogna tu bè fèn gnè mogo ye, sama tun bè sa yoro min,
suruku tun bè tilema kè yen
« Si être gros rendait (vraiment service) la hyène passerait la
saison sèche là où meurt l’éléphant »
- Ici, on veut dire que le respect et l’honneur ne sont pas dus à
la grosseur de l’individu, mais plutôt à la grandeur de sa
personnalité
DT 15 Série Grenier à mots 15.3: Grenier à mots Bamanan Dagné Jiginé 43

33. Respect Contraire : Qui peut dire aussi grosseur, abondance, intensité
bonya - bonyabali : irrespectueux
- bonyabaliya : Irrespect
Proverbes et sentences : 3. Individu
33.2 Mogo si tè bbonya i yèrè ko 30. Dignité
« Le respect qui nous est manifesté dépend de nous-mêmes. »
- Pour être respecté, il faut être respectable
33.3 Mogo bonya, i yèrè, i dogoya, i yèrè
« Le respect ou le mépris d’une personne dépend d’elle-
même » 5. Femme
- Pour être honoré, il faut s’honorer soi-même
- Quand on est humilié, c’est qu’on a méconnu sa propre
dignité
« ? » 33.4 Cèbonyamùso den tè to ko
« Le fils d’une femme qui respecte son mari ne sera jamais à la
traîne. »
- Pour encourager les femmes à être soumises
33.5 Ni a fora i ma sama, I kana son à ka fo i ma sonzan 30. Dignité
« Quand on t’appelle Elephant, n’admets plus qu’on t’appelle
petit lièvre »
- Pour que le respect soit durable, il faut se comporter comme
un homme respectable.
34. Mensonge Autres usages : C’est le contraire de vérité
nkàlon - nkalontigèla : le menteur 31. Honte
- nkalontigè : action de mentir Le défaut le plus hai chez les bamanan est le
Proverbes et sentences : mensonge considéré comme le premier vice. Il
34.1 Mogo do bè nkalon tigè I ye, n’a ma kè : a malola I man, a avilie l’homme, le déshonore et détruit la société
siranna I gnè. humaine. Un mensonge peut être à l’origine d’une
« On peut vous mentir, soit par respect, soit par peur » guerre (le mensonge n’a pas de limite). C’est
- Tous les mensonges n’ont pas pour but de tromper pourquoi, les bamanan disent ceci : « si l’on est
34.2 Nkalonkuluba bè tignènin kèlènnajo bin taxé d’un mensonge qui ressemblerait fortement à
“Un faisseau de mensonges renverse la vérité isolée” de la vérité, c’est difficile de s’en départir ».
- Seul, même si on dit vrai, on est impuissant devant un groupe
de menteurs
35. Vérité Autres usages :
tignè - tignèfola : celui qui dit la vérité
DT 15 Série Grenier à mots 15.3: Grenier à mots Bamanan Dagné Jiginé 44

Proverbes et sentences : ⇒ Pulaar :


35.1 Tignèfola sigiyoro tè màsàkè ka bùlonda ye 34.1 Mensonge
« Le palais du roi n’est pas un endroit où peut s’installer celui
qui dit la vérité »
- Les puissants n’aiment pas qu’on leur dise leurs quatre vérités
en face ;
- La prudence demande de ne pas proclamer partout la vérité
«CA» 35.2 Tignèfo-buran ye, à tè buranya tignè, nka à bè bàbo se mogo 18. Âge Il peut aussi signifier « gâter »

« Dire la vérité en face à son beau-père ne gâte pas les
relations, mais on devra payer une chèvre. »
- C’est la coutume de payer une chèvre à titre de réparation ;
- il faut savoir dire la vérité, même à des gens à qui on doit le
respect

36. Pauvreté Traductions littérales : Souvent [faantanya] peut signifier l’état d’un
Pauvreté simple : - faantanya : être sans force orphelin de père.
faantanya - kannakolonnya : être sans habit
kannakolonny - bolokolonya : avoir les mains vides
a - tègèlakolonya : ne rien posséder entre ses mains
bolokolonya - sègenjuguba : la grande souffrance, misère
Proverbes et sentences :
Pauvreté absolue : 36.1 Badenma cè tan, o bèe kàlàcènin, kongo sen b’o la
tègèlakolonya « Si tu vois que dix frères sont tous maigrichons, c’est
sègenjuguba probablement qu’ils ont faim.
- Il y a des signes extérieurs de la pauvreté
36.2 Sègen bè mogo don ko caman na
« La pauvreté engage les gens dans beaucoup d’histoires
désagréables (ou malhonnêtes) »
« ! » 36.3 Sègen ka fisa jonya ye
« La misère vaut mieux que l’esclavage. »
- ce qu’on dit à un patron qui exploite ses ouvriers)
« ! » 36.5 Ni min kèra horon ye i sinji la, fàantanya tè horonya bo à la
« La pauvreté n’enlève pas la noblesse de celui qui est noble de
naissance. »
- La pauvreté ne déshonore pas quelqu’un, elle ne lui retire pas 30. Dignité
sa dignité.
DT 15 Série Grenier à mots 15.3: Grenier à mots Bamanan Dagné Jiginé 45

« + » 36.6 Bololankolon tè se kà mogosèbèya kè


«CA» « Un pauvre ne peut pas faire de largesse. »
- Le pauvre voudrait faire du bien, dire de la vérité, il ne le
peut pas
36.7 Yèrèwolokè bè jingijanga, nka àtè bin 30. Dignité
« Le fils légitime peut tanguer, mais il ne tombe pas. » 7. Famille
- Même dans la plus grande pauvreté on garde la fierté d’être
fils légitime, on reste toujours un homme débout.
36.8 kuma bè kagni denmisennin da, fo baba ka jgininèkonogno
bannen don
« Toutes les paroles sont bonnes dans la bouche de l’enfant,
sauf de dire : « Il n’y a plus de mil dans le grenier de papa ».

37. Valeur Proverbes et sentences : « nafa » pris dans le sens de la mesure, de l’intérêt,
ladamu 37.1 Kalan ni kodon tè kelen ye Chap. 2.2 et 2.4 de l’utilité ou du bénéfice.
« Une personne peut avoir de l’instruction, sans savoir se Dans le sens de bonnes manières de savoir vivre,
comporter dans les relations humaines. » 14. Education on le traduit par « nadamu » : politesse, marques
- L’instruction ne prépare pas nécessairement à la vie en d’honneurs, entraide, ce mot tient du niveau
société ; d’éducation de la personne de sa sociabilité
- L’école et l’école de la vie ne sont pas pareilles ;
- L’école ne suffit pas pour faire un homme complet
«+ » 37.2 Ni y’a mè sigignogongna gnènen ; o koro ye ki ki koloshi fota
ni kèta la.
« Si tu entends dire « le meilleur voisinage »: cela signifie de
bien faire attention (à ce qu’on dit et à ce qu’on fait) »
- Qu’on soit chez son père ou dans un autre village, il faut bien
se comporter ;
- La meilleure assurance en société est d’avoir un bon
comportement, d’être patient
37.3 N’i ye i gnè kè nonokènè ye , do bè basi kè a la
« Si tu fais de tes yeux du lait frais, quelqu’un y mettra du
couscous »
- Quand on perd l’estime de soi, on devient vulnérable face aux
autres. Autrement dit, quelqu’un qui ne se prend pas au sérieux,
est piétiné et perçu pour faible
DT 15 Série Grenier à mots 15.3: Grenier à mots Bamanan Dagné Jiginé 46

38. 1 Morale Proverbes et sentences : 37. Valeur Il est difficile dans nos pays sans écriture de
ladili 38.1.1 Wari tè mogoya dafa, jogo dè bè mogoya dafa différencier la morale de la coutume. A la limite, la
jogodon « L’argent ne rend pas un homme parfait, c’est le bon bonne application de la coutume conduit à la
ladamuni comportement qui le rend parfait » morale. Dans nos sociétés traditionnelles, l’homme
- Dans la vie, il n’y a pas que l’argent, il y a la ‘noblesse du est surtout acte que pensée pure…l’acte soutend et
comportement’ qui est au dessus de tout est au dessus de tout. perpétue la morale. La morale résulte de la bonne
38.2 Moralité 38.2.1 Mogo tè mandiya i jogo ko Comportement conduite.
jogoya Une personne ne peut être aimée de tous, sans avoir un bon
comportement »
- C’est la conduite, la docilité d’une personne qui vous rend
aimable
38.3 Mœurs 38.3.1 Kàli-kà-syèn k’i fàga, à ka fisa jogojugu kà da i la ye 32. Honneur
jogow « Il vaut mieux jurer et se donner la mort que de reconnaître 31. Honte
une mauvaise action qu’on vous impute »
- Mieux vaut la mort que la honte
39.1 Proverbes et sentences : Il peut aussi signifier : se rencontrer, coïncider,
Réconciliation « ! » 39.1.1 Koro tè kun dimi na. réussir, mettre d’accord
fokaben « Le temps apaise les rancœurs ». En milieu bamanan, toute querelle ou mésentente
kèlèban - Les vielles personnes doivent êtres patientes. trouvait sa solution sous l’arbre à palabres où l’on
bèn ko kura - On finit par avoir besoin de la personne avec laquelle on tranchait les litiges. Le verdict prononcé et exécuté
s’était disputé incluait automatiquement la réconciliation. (se
- Se dit quand on voit des gens se réconcilier après une longue donner la main publiquement était symbole
dispute. d’engagement mutuel à l’entente).
39.1.2 Mogo ka kan kà kè dàga ye kà don tàsuma ni ji cè
« On doit accepter de se faire canari en se mettant entre l’eau et
le feu »
- On doit avoir de la patience comme médiateur, conciliateur
39.2 Entente/ Autres usages :
Accord - benbali : non–accord
ben - benbaliya : discorde, mésentente, brouille
Proverbes et sentences :
39.2.1 Bènbaliso bonya o bonya, don-kelen-tomon don
“Si grand que soit le village où règne la discord, sa ruine est
l’affaire d’un seul jour”
- Rien ne vaut l’entente. La mésentente mène à la ruine
DT 15 Série Grenier à mots 15.3: Grenier à mots Bamanan Dagné Jiginé 47

39.2.2 Ni dègnè pèrènna, basaw bè don à fè 13. Solidarité


« Quand le mur se lézarde, les margouillards y pénètrent
- Quand les gens restent fermement unis contre l’adversaire, il
ne peut entrer
- Les divisions rendent les sociétés vulnérables et en font la
proie des ennemis
39.2.3 Jeli bè suma nin kan 40. Pardon
« La plaie peut être guérie sur l’abcès »
- Cela suppose qu’on peut avoir des aspirations, visions et
perceptions contraires par rapport à une tierce personne, mais il
faut toujours trouver un terrain d’entente : arriver à un
consensus.
- On doit pouvoir faire un compromis, « passer le savon »,
(pardonner et arranger le motif du désaccord dans un tiroir)
comme le diraient d’autres
40. Pardon Interprétations : Chap. 2.2 Peut aussi signifier pardonner à quelqu’un,
yafa - yafa vient du mot arabe [afa] qui signifie aussi pardon ⇒ Arabe pardonner une faute, donner l’autorisation,
Autres usages :
- yafabaga : le clément
Proverbes et sentences : Pouvoir
40.1 Se bè mogo ye don min, o dè sabali ka gni
« C’est quand on a le pouvoir qu’il est beau d’être patient. »
- C’est aussi de la prudence, car du jour au lendemain, on peut
perdre son pouvoir et risquer l’humiliation ;
- Il faut être doux avec les autres, même si on détient le pouvoir
40.2 Dàn tè dignè nasabali ko 69. Interdit
« Le monde n’a pas de limites en dehors de la patience. » 3. Individu
- La patience fait tout supporter et nous maîtriser
nous-mêmes
40.3 Jeli te suma nèn kan
« La plaie ne peut guérir, tant qu’il y a du pus »
DT 15 Série Grenier à mots 15.3: Grenier à mots Bamanan Dagné Jiginé 48

3.2.1 Entrées spécifiques à cette langue

41. Paix 41.1 C’est une notion diversement interprétée en Afrique, la guerre Il ne faut le confondre avec « repos »
lafiya étant toujours un moyen d’élévation sociale et
d’enrichissement d’empires.
Autrefois, elle était basée sur la conquête dans nos sociétés
traditionnelles. La guerre ne conduisait pas à la paix
unilatéralement mais à la destruction presque totale du vaincu
« qui gagnera pas, perdra ; qui perdra, disparaîtra». Il faut
noter que même les puits étaient rendus inserviables : « ka
dugu filenkolonci, ka dakolonci » : anéantir le village comme
une vielle calebasse ou une vielle marmite.
41.2 Mogo tè –n-bolo-mà don tono ye, fo n’i ye bolibagato tèmèto
ye i la
« On ne reconnaît l’intérêt de la tranquillité que lorsqu’on voit
passer un fuyard »
- On n’apprécie la paix que lorsqu’on voit la guerre ailleurs.
42. Non-Violence 42.1 Les Bamanan condamnent la violence gratuite au sein de la Dans la Charte de Kurukanfuga, on peut noter :
gnakatabaliya communauté. Le respect des quatre « tons » de l’homme est la Article 13 : N’offensez jamais les Nyaras32.
source de la non-violence, notamment en ce qui concerne le Article 14 : N’offensez jamais les femmes, nos
voisinage. La non-violence n’est pas seulement importante mères.
dans le rapport entre les hommes seulement, mais aussi entre «?» Article 15 : Ne portez jamais la main sur une
les hommes et les animaux. C’est pour ainsi dire qu’on évitait femme mariée avant d’avoir fait intervenir sans
même de chasser à coups de cailloux le chien du voisin, à succès son mari.
fortiori les membres de sa concession.

32
Les Nyaras sont les paroliers attitrés par la société.
DT 15 Série Grenier à mots 15.3: Grenier à mots Bamanan Dagné Jiginé 49

3.3 LA LIBERTE / LA RESPONSABILITE

Mots Etymologies remarquables, sentences, interprétations Liens Problèmes d’interprétation / Contre-


exemples / Contre-argumentations
60. Liberté Etymologies et autres usages : Liens Vu dans le sens d’indépendance aussi, c’est aussi
yèrèmahorony - horon : libre étymologiques la noblesse,
a - yèrèmabilalen : libre 3. Individu
horonya - yèrèmahoronyali : libération 30 Dignité De valeur négative, on peut avoir : bajanbilali,
yèrèmabila - yèrèmahoronyaton : mouvement de libération comme liberté sans limites, libertinage.
- yèrèmahoronyakèle : lutte de libération Chapitre 2.3 Et aussi : marabali ou kakala pour : libertin.
Nos sociétés sont reparties en classes sociales : les
Proverbes et sentences : hommes libres et les esclaves. Les hommes libres :
60.1 Ni hon ye mogo min kè jon ye, n’i y’i bolo lakùru, i nà kè horon ou nobles et les hommes de caste. A la
horon ye différence de l’esclave, qui par son statut
« Quand un « tiens » fait de quelqu’un un esclave, s’il retire sa d’homme inférieur se trouve en dehors de tout ce
main, il sera un homme libre. » qui fait la bienséance et l’honneur des hommes
- Savoir refuser un cadeau qui risque de vous faire perdre libres, sont tenus à un comportement de tous les
votre liberté. jours compatible avec l’honneur. C’est pourquoi,
60.2 Mogoo do ye horon ye, à jogo man gni Comportement ils sont côtés dix et les esclaves neuf.
« Une personne peut être « noble de naissance » et avoir de La liberté vue de la conception européenne
mauvais comportements ». n’existe pas dans la conception bamanan en
- Tous les hommes libres n’ont pas un comportement de noble Afrique : « on naît dans la main des gens, on y
60.3 Ban be horonya diya meurt également ». l’individu en tant qu’entité
« C’est une qualité pour un homme libre de savoir refuser. » libre ( homme comme un électron libre en Europe
- Un homme libre doit être capable de refuser, surtout ce qui n’existe pas en Afrique) ; « no ko i kelen, ala bè
peut le déshonorer kelena ko di ma » : si tu demandes à être seul dans
- Il faut une certaine indépendance, une certaine liberté pour la vie, Dieu comme réponse te mettra sur ta tête un
être capable de décider soi-même. fardeau dur à supporter par un seul individu.
«+ » 60.4 Horonyanasigi ka fisa ni jonyanasigi ye
« Vivre en homme libre vaut mieux que vivre en esclavage. »
- Rien ne vaut la liberté
60.5 Saya ka fisa mogolasiri ye
« La mort vaut mieux que la dépendance d’autrui »
- La mort vaut mieux que l’être dépendant d’autres personnes.
Mieux vaut mourir que de ne pas se suffire à soi-même.
S’applique à une situation où on n’a pas eu ce qu’on attendait
de quelqu’un
DT 15 Série Grenier à mots 15.3: Grenier à mots Bamanan Dagné Jiginé 50

61. Droit Synonymes : ⇒ Arabe


josira - dàma qui se comprend directement par la violation du droit, par ⇒ Tamasheq
hakè rapport à un devoir mal accompli
- hakè vient du mot arabe « hake » qui signifie péché
Proverbes et sentences :
61.1 N’i ye hàkè mennen ye, à bè cèlajè la
« Si tu vois que le péché tarde (à être puni), c’est qu’il est en
train de recruter du monde. »
- Tôt ou tard le péché est puni
61.2 Hàkè bè se fànga la 62. Loi /
« Le pouvoir a raison de tout sauf du péché. » Coutume
- Les puissants seront punis d’avoir opprimé les pauvres.
61.3 Jo sàmà-kojugu bè jàlàki lase mogo mà
« A force de réclamer ses droits, on finit soi-même par avoir
tort »
- Dès que notre droit est reconnu, mieux vaut ne pas insister
61.4 N’i ye jo bin, i kàna à kono fara, n’o tè, I bè jàlàki soro à kono
« Si tu terrasses le droit (de quelqu’un), il ne faut pas
l’éventrer, sinon tu y trouveras ton tort »
- Pour bien jouir de ses droits, il ne faut pas avoir de torts
envers celui qui vous en a fait
62. 1 Loi Etymologie et autres usages :
sariya - sariya vient de « sari’a »: mot arabe qui signifie loi musulmane
- sariyatigi : législateur
- sariyatigèla : juge

« ? » Proverbes et sentences :
62.1.1 Mogo bè sariya tigè Ala bonya fè
« On doit juger de façon à faire honneur à Dieu. »
- Le juge et le législateur doivent se conformer aux lois
divines
62.1.2 Mogo tè fili nanbarako mà 66.2 Honnêteté
« On reconnaît quand il y a de la magouille »
- Nul n’est censé ignorer ce qui est normal ou anormal
- Nul n’est censé ignorer la loi
- laada wili se comprend par toute violation de la coutume
DT 15 Série Grenier à mots 15.3: Grenier à mots Bamanan Dagné Jiginé 51

62.2 Coutume/ « ? » Proverbes et sentences :


Règlement/ 62.2.1 Jàmana bè ni à ka làada don
Code/ « A chaque pays ses coutumes » (làada)
Convention 62.2.2 Dùgùbila ka fisa làadawili ye
làada « Mieux vaut quitter le village qu’enfreindre la coutume. »
- Les coutumes sont le fondement de chaque société

63. Devoir/ Proverbes et sentences :


joyoro 63.1 Tonsonin ko ‘ne bè merunyoro gnini. Ne tè kotigiya gnini
« La roussette dit : « je cherche un endroit pour me blottir, je
ne cherche pas le pouvoir ».
- Les petites gens ne cherchent pas les grandes responsabilités
63.2 Mori bèe n’a joyoro don misiri la Dans le sens de « rôle » ou de « participation » on
« Chaque musulman a une place bien déterminée dans la peut dire « joyoro »
Mosquée. »
- Dans la vie, chacun a une mission à remplir
63.3 Ntomo bokùn ye don ye
« Quand les initiés au « N’tomo » sortent, c’est pour danser. »
- Chacun a son rôle, une mission, il faut l’accomplir avec
détermination.

64. Etymologie et autres usages : « Kotigiya » renvoi aussi au pouvoir


Responsabilité/ - kotigi ou tigi : responsable
kotigiya - wale kèbaga : responsable d’un acte
- kolètigi : responsable d’une grande famille
Proverbes et sentences : ⇒Moore 15
64.1 Kotigi ye bojankè ye Travail
« Celui qui est son propre maître fait de belles selles. » 60. Liberté
- Disposer de son temps, de son travail, ne dépendre de
personnes est un bien précieux ;
- C’est agréable, mais on dépend toujours d’un maître à qui il
faut bien obéir

65. Egalité Traductions littérales :


kènyeli - kènyeli : faire part égale
kelenyali - kelenyali : faire de deux choses une seule
tilali vuman - tilali vuman : meilleure partage
DT 15 Série Grenier à mots 15.3: Grenier à mots Bamanan Dagné Jiginé 52

Proverbes et sentences : 72. Diversité


« ? » 65.1 Ala ma bolokoniw da kà ù kènyè
« Dieu n’a pas créé les doigts de même longueur. »
- Comme les doigts de la main, Dieu n’a pas créé les hommes
égaux
- Pour chacun, la sagesse est de connaître ce qu’il a reçu
65.2 Mogo kàna i ni mogo kènyè n’aw man kan
« On ne doit pas s’égaler à quelqu’un, quand on ne le vaut
pas ».
- C’est inutile et risqué.
65.3 Mogo kçna kè ntoolen ye k’i si bo, k’i n’i denw kènyè 64.
« On ne doit pas imiter le petit calao qui se déplume et se Responsabilité
réduit à la taille de ses petits. »
- Une grande personne ne doit pas se comporter comme des
enfants ou des personnes plus jeunes
65.4 Jala ka bon jala ye, jala man kuna jala ye 30 Dignité
« Un caïlcédrat peut être plus gros qu’un autre, mais il n’est
pas plus amer »
- Ce proverbe prône l’égalité des êtres : un individu peut être
différent physiquement ou moralement d’un autre, mais
demeurent égaux en droit et en dignité
66. 1 Equité Contraire : Vu dans le sens de la droiture, de la justice, et de
tilenya - tilenbaliya : manque de rectitude, injustice, iniquité la rectitude
66.1.1 Ka tilenya kè kow la 67. Justice
« Mettre la mesure dans les choses »
Proverbes et sentences :
66.1.2 N’i ko dunan mà : à kà foroba misisogo tila, à bè fulafuru di 35. Vérité
dùgùtigi mç Mœurs
« Si tu demandes à un étranger de partager la viande du repas
communautaire, il va donner le feuillet au chef de village. »
- Un étranger ne peut assumer correctement une mission, il ne
faut pas la lui confier
«?» 66.1.3 Kèlè kelen jo tè tila fila ye, gnèdimito ni nènèdimito ko tè
« Il est impossible de donner raison à deux personnes dans une
même querelle, sauf s’il s’agit d’une dispute entre quelqu’un
qui a mal aux yeux et quelqu’un qui a froid. »
- L’un veut du feu et l’autre non. Le feu est pénible à l’un et
rend service à l’autre ;
- Il y a des situations où on ne peut donner tous les torts à une
DT 15 Série Grenier à mots 15.3: Grenier à mots Bamanan Dagné Jiginé 53

personne
«!» 66.1.4 Ni mogo min ye i ka bonkonotakurun sisima bèe labo, i nà 12. Tolérance
tila kà konogan 72. Diversité
« Celui qui veut enlever de sa case toutes les bûches qui font
de la fumée, sera finalement bien embarrassé. »
- Il n’y a pas de société parfaite, il faut supporter les défauts
d’autrui si l’on ne veut pas se retrouver tout seul ;
- On ne peut chasser de chez soi tous les vicieux sinon, la
famille tombera en ruines.
66.1.5 Ni tila ma kè Nci kunko la, Nsan ta tè gnèbo
« Tant qu’on en aura pas terminé avec le problème de Nci,
celui de Nsan ne sera pas réglé ».
(Nci= fils aîné ; Nsan= 2éme fils)
- Les coutumes concernant les aînés sont réglées avant celles
des cadets
- Ordre hiérarchique ou d’urgence à accepter
- On cherche normalement une épouse pour Nci avant d’en
chercher une pour Nsan
66.1.6 Ko mona ni kan min ye, à jègè kà tila n’o kan ye
« Si on a convenu de faire la pêche de telle manière, il faut
partager le poisson selon cette convention. »
- On doit respecter les termes d’un accord
66.2 Honnêteté «!» Proverbes et sentences :
tilennenya 66.2.1 Ali ni sonzan kèr’i jugu ye, a fo k’a bè boli.
laadiriya « Le lièvre, même s’il est ton ennemi, reconnais qu’il court
bien ».
- Il faut avoir le courage et l’honnêteté et la bonne foi de
reconnaître le mérite de ton prochain
66.2.2 Sogo tè faga nanbara kàn
« On ne peut tuer de gibier en étant malhonnête »
- Le chasseur a beaucoup d’interdits, en particulier, il ne doit
pas commettre l’adultère
- La réussite ne va pas sans l’honnêteté
67. Justice Proverbes et sentences : 66 Equité
kiiri 67.1 Ton bè fen gnè, borè yèrè bè fen gnè 72. Diversité
kiiritigè « La sacoche a un rôle, le grand sac aussi »
- même chose pour les personnes ; il n’ya pas à estimer l’une
plus que l’autre ; elles peuvent avoir les même qualités
DT 15 Série Grenier à mots 15.3: Grenier à mots Bamanan Dagné Jiginé 54

67.2 Kiribulon fa o fa, kiri tigi sigiyoro bè yèn


« Le vestibule où a lieu le palabre peut bien être plein à
craquer, il y aura toujours une place assise pour l’intéressé à
charge »
- L’accusé a toujours sa place au procès, c’est lui qui est à
l’origine du procès
67.3 A’ y’a minè ! A b’a da la , o bè kè, n’ka A’ y’a minè ! A b’a
kono’dalilu t’o la
« Crier « Attrapez-le. Il l’a dit », c’est bien, mais crier «
Attrapez- le ! Il le pense » c’est illégal »
- La justice ne peut être appliquée que sur les actes posés en
paroles et en actions, et non par rapport à la pensée. Toute
personne qui viole la dignité de son prochain soit par la parole
ou une action contraire aux valeurs, elle doit être punie
68. Etymologie : Compris dans le sens de ségrégation
Discrimination - wolo veut dire : naître, peau.
wolomali
gnèmawoloma Proverbes et sentences : La discrimination peut être d’origine de la
gnèmatomo «CA 68.1 Min ko à bè sùn, min ko à bè sali, jàma jodon, à bèe nà naissance (jéliya ou horonya) ou de la couleur de
». woloma la peau (farafin, homme noir ; tubabu, homme
« Celui qui dit qu’il jeûne et celui qui dit qu’il prie, au jour du blanc)
jugement, leur tri va se faire.
- Il ne faut pas se fier aux apparences.
68.2 Mogolabola, i gnè bè waliden na
“ Le raciste a les yeux sur l’enfant d’autrui”
- Tous les hommes sont égaux, rien n’est plus méprisable que
de faire des distinctions de race, de couleur de peau, de
religion…
69. Interdit Explication : ⇒ Arabe hàràmu comme défendu, illicite, nuisible c’est une
kètabali - hàràmu vient du mot arabe haram qui signifie interdit violation
hàràmu
Proverbes et sentences : ⇒Tamasheq Les interdits ou « tinè, tana » en bamanan,
69.1 Nà à tà , n’a m’i fàga, à b’i màlo schématisent ou peuvent êtres de vrais panneaux
« Celui qui dit : « viens donc le prendre ! », s’il ne te tue pas, de signalisation rendant la société fluide tout en
il va t’humilier. » assurant sa survie. Les interdits assurent la police
- On doit respecter les interdits, tenir compte des êtres qui ont dans la cité, chaque individu s’y soumet parfois
un pouvoir maléfique. sans essayer de les comprendre. Ils sont de vraies
- Pour avertir celui qui s’entête : « si tu continues, tu auras des forces morales. Les interdits peuvent concernés
ennuis sérieux » toute une ethnie ou un peuple ou propres à
DT 15 Série Grenier à mots 15.3: Grenier à mots Bamanan Dagné Jiginé 55

69.2 Fèn bèe bè kamalenya na fo bilàbàlità 66.2 Honnêteté, certaines ethnies, certaines castes ou certaines
« Le jeune homme vigoureux peut tout, sauf prendre ce qui ne 38. Morale familles.
lui appartient pas »
- Pouvoir physique, interdiction morale Dans la société Bamanan, les méfaits étaient et
demeurent sanctionnés selon une échelle de valeur
allant du sermon verbal aux amendes en nature, au
châtiment corporel, à l’exil ou à la mort.
Nos sociétés traditionnelles ne connaissaient pas la
prison qui est d’importation européenne ou arabe.
70. Bien commun Proverbes et sentences : Bien appartenant à la communauté
foroba «!» 70.1 Forobakùma bè fo forobabùlon kono La culture Bamanan cultive le devoir de partager
Un palabre concernant la communauté se fait dans la salle de ses biens et ressources. Pour les Bamanan, les
réunion commune. hommes sont inégalement pourvus car tout travail
- Il faut éviter les apartés quand il s’agit d’une affaire qui n’est pas forcément rentable ; ce qui fait que nous
concerne tout le monde nous devons de partager ce que nous avons. Qui
70.2 Ni ka mogo tè foroba dumini tilayoro la ; n’i ka na ma dèsè, i que tu sois, ton bien profitera à quelqu’un d’autre
niyoro bè dogoya que toi même. Le bien est commun : « an jè do »
« Quand tu n’es pas représenté par l’un des tiers à la s’entend-on répondre, quand l’étranger, après le
répartition du repas collectif, si ta sauce n’est pas insuffisante, repas, l’on dit merci à son hôte. « i ta do » : c’est à
ta part le sera. toi, une manière de répondre à la gratitude de
- Dans toute assemblée, il faut être représenté pour bénéficier l’étranger.
des avantages communs. Un sage dépositaire du savoir autochtone a dit,
70.3 Ni forobàmisi ye forobà tignè, kuma caman t’o ko la nous citons : « si le monde vous parait
« Si la vache appartenant à la collectivité gâche le champ énigmatique, jugez le dans le devenir de l’homme
communautaire, il n’y a pas grand-chose à dire ». généreux, altruiste mais aussi de l’homme
- Quand tout le monde est impliqué, on se tait. diabolique, misanthrope surtout au dernier
moment de leur vie ou à posteriori ».
71. Universalité Etymologie : Nous « ignorons » cette notion. Notre univers
dignèlakow 71.1 Vient de l’arabe « dunya » qui veut dire monde, univers s’arrête à une zone géographique, sociologique et
ethnique. L’univers chez le bamanan est bien
Proverbes et sentences :
différent de chez le sonrhai ou de chez le dogon…
71.2 Dignè kèlen moni ye, sonkala tè soro k’à mùnu
« Le monde est devenu de la bouillie, mais on ne trouve pas de
mouvette pour la remuer »
- Le monde change vite ; il faut s’adapter pour arriver à
quelque chose
- On ne respecte plus les lois
71.3 Dignè t’a dili koro kan tun
« Le monde n’est plus relié à sa vieille racine »
- Il n’est plus régi par les anciennes règles, qui sont bafouées
DT 15 Série Grenier à mots 15.3: Grenier à mots Bamanan Dagné Jiginé 56

72. Diversité Proverbes et sentences : 12. Tolérance


caman 72.1 Seli bafaga t’a wulufaga sa ; sogo bè na dunbaga don
caya « Tuer une chèvre à l’occasion d’une fête n’empêche pas de
tuer un chien, chaque viande a ses amateurs »
- Il faut être tolérant pour ce qui ont d’autres goûts, pour les
autres religions
- Chacun selon sa fortune, chacun agit selon ses goûts, ses
moyens
- Il faut que celui qui organise la fête pense à varier les plats
72.2 Ni bakoronin donbaga cayara, a bè si kènèma.
« Quand il y a trop de chevriers pour faire entrer le petit bétail,
le bouc dort dehors ».
- A vouloir suivre les conseils de tous, on ne fait rien.
DT 15 Série Grenier à mots 15.3: Grenier à mots Bamanan Dagné Jiginé 57

4. Analyse : Valeurs et contre valeurs en résumé


Au pays bamanan, à tort ou à raison, épanouissement et dépérissement humains déterminent les valeurs et les contre- valeurs. Les uns et les autres
trahissent ou traduisent le voir, le dire et le faire bamanan des choses de l’homme en rapport avec autrui individuel ou collectif. Une valeur ou
contre-valeur fondamentale, l’attitude religieuse ou areligieuse du « nous » singulier ou pluriel. Voici les valeurs et contre valeurs en résumé

Les valeurs sont :


- la bipolarité même, en ce qu’elle constitue un appel constant au mouvement, au dépassement, à l’effort, à la sagesse. Vivre dans la
dynamique du provisoire, telle est son invitation constante.
- les Trois Enfants du monde : la rencontre, la connaissance et la foi mutuelle, dans le respect de la dignité et de la liberté les uns des autres
- les quatre espaces vitaux de l’homme (communauté de domicile ou lieu, amitié, mariage, relation à l’invisible ou croyance religieuse).
- « ! » l’ouverture des « Nous » les uns sur les autres. De même, la communication amicale, à double sens, entre eux, sur tous les plans :
« deux mains se lavent proprement, l’une l’autre ».
- la dignité humaine en chacun de nous, une responsabilité solitaire et unique : l’épanouissement et le dépérissement de l’homme sont en ses
mains propres.
- « ! » / « CA » la responsabilité solitaire et unique : l’épanouissement et le dépérissement de l’homme sont en ses mains propres.
- la libre disposition de soi même, le pouvoir et le choix de l’initiative : « + » « rien de contraint n’est agréable, pas même manger sous la
contrainte. »
- Les déterminations fondamentales de l’homme constituent le noyau central des valeurs personnelles : la matière, la vie, l’esprit, la liberté,
la responsabilité, le labeur, la conduite, le caractère, le rite.
- l’égalité personnelle : aucune vie n’est plus qu’une autre
- le service du « nous » : « ! » ne venons nous pas au monde, tous et chacun, en vue de travailler à l’épanouissement les uns des autres ?
- la connaissance de soi même, l’adaptation de soi à autrui, quel qu’il soit
- la patience de la vie, devant les hommes : sabali est le gouvernail du monde
- s’accueillir et s’accepter, dépendance et responsabilité dans la vie, au sein du « nous », dont on est membre.

Les contre-valeurs sont :


- la fermeture du « nous » sur lui-même sans ouverture aucune sur autrui
- la volonté de domination à sens unique : les « nous » humains, les nationaux, comme les internationaux ne peuvent subsister
qu’interdépendants, dépendants et responsables les uns des autres. Ne cheminons- nous pas les uns par les autres ? Ne demeurons- nous
pas savon, les uns à l’usage des autres ?
DT 15 Série Grenier à mots 15.3: Grenier à mots Bamanan Dagné Jiginé 58

- la suffisance, l’enflure, la fermeture sur soi- même, le « nata », la méchanceté, le rapportage, l’isolement : « kelenna sigi ye gwalo ye »,
malheur à qui habite et vit seul.
- « débrouille –toi, je me débrouille »
- la volonté farouche de domination à sens unique ! Valeurs communautaires, personnelles et dialogales résument, pensons-nous, la teneur
de l’éthique bamanan.

5. Conclusion
1 – La langue bamanan contient effectivement tous les mots du panier relatifs aux droits de l’homme en général et aux droits culturels en
particulier. Cependant, la compréhension de ces mots se fait plus facilement lorsque l’entrée se fait dans la langue bamanan. Il est à noter
spécialement la part importante que jouent les proverbes et sentences dans la compréhension des mots et concepts. Du « grenier à mots », nous
avons aussi obtenu un « grenier à proverbes ».

2 – Il y a effectivement des connexions entre les termes de point de vue anthropologique, juridique/éthique et ontologique dans la langue
bamanan ;

3 – Notre objectif pour l’étude se trouve être de répondre aux exigences et spécificités qu’elle peut susciter. En effet, vue les particularités
lexicales sous l’angle : origine et étymologie des mots, stratification chronologique avec des recueils d’emprunts à travers les autres langues du
monde, nous sommes en demeure de souligner que ces aspects restent inexplorés par les institutions de notre pays dont relèvent les questions de
langues. Nous soulignons une intime comparaison de la langue bamanan avec d’autres langues comme l’arabe par exemple.

4 – La détermination de l’origine des lexies se heurte à plusieurs difficultés. Il importe ainsi de distinguer entre la langue source de la lexie et la
langue à laquelle appartient l’étymon. La coexistence et la parenté entre les langues font qu’elles ont en commun des désignations soit par
héritage, soit par emprunt. Il ne faut pas non plus négliger l’aspect des réemprunts, mots dont le sens est distinct de celui de l’étymon, témoigne
qu’ils sont passés par une autre langue.

5 – Au phénomène d’emprunt, il faut ajouter celui de mode consécutif aux évènements ou circonstances de la vie politique, économique,
militaire, sociale fournissant des fois des repères pour situer la période de l’emprunt de certains mots.

6 – À part quelques mots empruntés à l’arabe, nous constatons que tous les termes et concepts développés contribuent à la compréhension et
à la promotion des droits culturels auprès du peuple bamanan.
DT 15 Série Grenier à mots 15.3: Grenier à mots Bamanan Dagné Jiginé 59

6. Annexes

6.1 L’alphabet de la langue bamanan

L’alphabet bamanan actuel comporte 27 lettres dont 7 voyelles et 20 consonnes. L’ordre alphabétique est celui qui a été présenté aux « Journées
d’études sur les langues maliennes » organisées à Bamako du 10 au 20 décembre 1979 à savoir :

a , b , c , d , e , ε , f , g , h , i , j , k , l , m , n , ɲ , ŋ , o , ɔ , p , r , s, t , u , w , y , z.

Les voyelles sont : a , e, ε, i , o , ù , u. Les consonnes sont : b , c , d , f , g , h , j , k , l , m , n , x , v , p , r , s , t , w , y , z. Les voyelles fermées y


sont écrites avant les voyelles ouvertes. Les voyelles orales longues s’écrivent redoublées : aa ee εε ii oo ɔɔ uu. Les voyelles nasales transmises
par les voyelles orales suivies de la lettre « n », soit : an en εn in on ɔ n un. La valeur phonétique des lettres est indiquée dans les tableaux
suivants :

CONSONNES ET SEMI-VOYELLES
labiales dentales palatales vélaires postvélaires
Occlusives
sourdes p t c k
sonores b d j g
Constrictives
sourdes s
f h
sonore (z)
Nasales m n ɲ ŋ
Latérale
Simple i
Vibrante r

Semi-voyelles w y
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VOYELLES

Orales Nasales
i u in un
e o en on
ε ɔ εn ɔn
a an

6.2 La charte du Manden

Publié par Youssouf Tata Cissé dans "Soundjata, la Gloire du Mali", éd. Karthala, ARSAN, 1991.

La Charte du Manden ou Manden kalikan, aurait été proclamée en 1222 par Soundjata, fondateur de l'Empire du Mali, et ses pairs. Elle reste la
référence majeure des sinbo, grands maîtres chasseurs du Manden.

1. Les chasseurs déclarent : 3. Les chasseurs déclarent :


Toute vie (humaine) est une vie. Que chacun veille sur son prochain,
Il est vrai qu'une vie apparaît à l'existence avant une autre vie, Que chacun vénère ses géniteurs,
Mais une vie n'est pas plus "ancienne", plus respectable qu'une autre vie, Que chacun éduque comme il se doit ses enfants,
De même qu'une vie n'est pas supérieure à une autre vie. Que chacun "entretienne", pourvoie aux besoins des membres de sa famille.

2. Les chasseurs déclarent : 4. Les chasseurs déclarent :


Toute vie étant une vie, Que chacun veille sur le pays de ses pères.
Tout tort causé à une vie exige réparation. Par pays ou patrie, faso,
Par conséquent, Il faut entendre aussi et surtout les hommes ;
Que nul ne s'en prenne gratuitement à son voisin, Car "tout pays, toute terre qui verrait les hommes disparaître de sa surface
Que nul ne cause du tort à son prochain, Deviendrait aussitôt nostalgique."
Que nul ne martyrise son semblable.
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5. Les chasseurs déclarent : 7. Les gens d'autrefois nous disent :

La faim n'est pas une bonne chose, "L'homme en tant qu'individu


L'esclavage n'est pas non plus une bonne chose ; Fait d'os et de chair,
Il n'y a pas pire calamité que ces choses-là, De moelle et de nerfs,
Dans ce bas monde. De peau recouverte de poils et de cheveux,
Tant que nous détiendrons le carquois et l'arc, Se nourrit d'aliments et de boissons ;
La faim ne tuera plus personne au Manden, Mais son "âme", son esprit vit de trois choses :
Si d'aventure la famine venait à sévir ; Voir qui il a envie de voir,
La guerre ne détruira plus jamais de village Dire ce qu'il a envie de dire
Pour y prélever des esclaves ; Et faire ce qu'il a envie de faire ;
C'est dire que nul ne placera désormais le mors dans la bouche de son semblable Si une seule de ces choses venait à manquer à l'âme humaine,
Pour allez le vendre ; Elle en souffrirait
Personne ne sera non plus battu, Et s'étiolerait sûrement."
A fortiori mis à mort, En conséquence, les chasseurs déclarent :
Parce qu'il est fils d'esclave. Chacun dispose désormais de sa personne,
Chacun est libre de ses actes,
6. Les chasseurs déclarent :
Chacun dispose désormais des fruits de son travail.
L'essence de l'esclavage est éteinte ce jour,
"D'un mur à l'autre", d'une frontière à l'autre du Manden ;
La razzia est bannie à compter de ce jour au Manden ;
Les tourments nés de ces horreurs sont finis à partir de ce jour au Manden.
Quelle épreuve que le tourment ! Tel est le serment du Manden
Surtout lorsque l'opprimé ne dispose d'aucun recours. A l'adresse des oreilles du monde tout entier.
L'esclave ne jouit d'aucune considération,
Nulle part dans le monde.
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6.3 Bibliographie

ƒ Bailleul, C. Sagesse Bamanan (Proverbes et sentences), Bamako, Editions Donnya, 2005, 463 p
ƒ Bazin, Mgr M. Dictionnaire Bamanan–Français, Paris, Imprimerie nationale, 1906, 693 p.
ƒ Brasseur, G. Les établissements humains au Mali, IFAN, Dakar – 1968
ƒ Cissé, Y.T. Signes graphiques, La notion de personne de personne en Afrique noire, Paris, l’Harmattan, colloques internationaux du CNRS
n.544, 179 p.
ƒ Condé, M. Ségou, Les murailles de terre, Paris, Éditions Robert Laffont SA, 343 p.
ƒ Coulibaly, K. Du traitement de la violence chez les Bambara au Mali in « Droits culturels et traitement des violences », S. Gandolfi, A. Sow, C.
Bieger-Merkli, P. Meyer-Bisch, V. (ss.la dir. de), Paris, L’Harmattan (à paraître)- Actes du colloque de Nouakchott –Novembre 2007.
ƒ Coulibaly, P.B. La Gwandusu, une forme de sculpture chez les Bamanan du Mali, (bilingue), Éditions Jamana, 2001, 86 P.
ƒ Coulibaly, P.B. L’enfance Bamanan : Approche psycho- culturelle de trois phases précirconcisionnelles en pays Bamanan, Dakar, IFAN,
1989, 185 p.
ƒ Delafosse, M. Haut Sénégal Niger, Tiii Les civilisations, Paris, G-P Maisonneuve et Larose, 307 p.
ƒ Dictionnaire Bamanan-Français, Editions Donniya, 2000, 494 p.
ƒ Dictionnaire Marabout, « L’anthropologie », Paris, 1972, 690 p.
ƒ Dieterlen, G. Essai sur la religion Bamanan, Paris, PUF, 1951, 240 p.
ƒ Elias, N. La société des individus. Paris : Fayard, 1991.
ƒ Henry, Ab. J. L’âme d’un peuple africain, les Bamanan, Paris, Picard, 1910, 238 p.
ƒ Heritier, J. Le sang du guerrier et le sang des femmes. Notes anthropologiques sur les rapports sociaux des sexes.
ƒ Intervida, numéro 1 juin 2004, www.associationintervida.org, « Les irréductibles Bamanans, rencontre au Mali avec ce peuple de la terre »,
18 p.
ƒ Les cahiers du GRIF, No 29, 1985, pp.7-21.
DT 15 Série Grenier à mots 15.3: Grenier à mots Bamanan Dagné Jiginé 63

ƒ Ligue des Etats arabes, Charte arabe des droits de l’homme, septembre 1996, 16 p
ƒ Mauny, R. Tableau géographique de l’ouest africain au moyen âge d’après les sources écrites, la tradition et l’archéologie, Dakar, Ed. Thèse,
1961.
ƒ Monteil, C. Les Bamanan de Ségou et du Kaarta, Paris, Larousse, 1924, 404 p.
ƒ Moscovici, S. Psychologie des minorités actives. Paris : Quadride/PUF, 1996.
ƒ Murdock, G.P. De la structure sociale. Paris : Payot, 1972.
ƒ N’Diaye, B. Les castes au Mali, Présence Africaine.25 bis, rue des écoles, 75005 Paris 64, rue lanot-Dakar, 108 p.
ƒ Organisation des Nations Unies, Déclaration universelle des droits de l’homme, D.N.A.F.L.A (version Bamanan), 1998, 22 p.
ƒ Organisation internationale de la Francophonie, Déclaration de Bamako sur la démocratie, les droits et libertés, novembre 2000, 6 p
ƒ Ossebi, H et Diagne, S B. La question culturelle en Afrique : contextes, enjeux et perspectives de recherche. Dakar : Codesria, 1996.
ƒ Rapport mondial sur le développement humain, « La liberté culturelle dans un monde diversifié », 2004, 282 p.
ƒ Saussaure, De F. Cours de linguistique générale, Éditions Payot, 1994, 520 p.
ƒ Sidibé, S.P.M. La rencontre de Jésus Christ en milieu Bamanan, Paris, Éditions Beauchesnes, 315 p.
ƒ Tauxier, L. La religion Bamanan, Paris, Librairie orientaliste Paul Geuthner, 1927, 240 p.
ƒ UNESCO, Déclaration universelle sur la diversité culturelle, décembre 2000, 7 p.
ƒ Vuillet, J. Essai d’interprétation de traditions légendaires sur les origines des vieux empires. In: C.R. Académie Sc. Col., 1950.
ƒ Wieviorka, M. Nationalisme, religion et populisme dans les sociétés post-communistes. In : Les deux sources de l’exclusion (dir.Sophia
Mappa). Paris : Karthala, 1993.
ƒ Zahan, D. La dialectique du verbe chez les Bamanan, Paris, Mouton et Co La Haye, 1963, 207 p.

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