Bambaradt
Bambaradt
Bambaradt
Kassoum COULIBALY
Novembre 2008
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SERIE La recherche Grenier à mots a débutée en 2005 et permet, en 2008, de comparer et de traiter 17 langues d’extension variée selon le contexte considéré,
notamment :
Cette introduction présente les bases théoriques du grenier à mots et explique la façon dont nous avons conçu les différents greniers à mots par
langue, avec leur logique propre et en comparaison avec les autres greniers. Il synthétise les documents méthodologiques qui ont été produits
depuis le commencement de cette recherche, notamment le document de synthèse 14 (DS 14), les feuilles de route n°1 (fdr1), n°2 (fdr2) et n°3
(fdr3).
Il convient donc d’enrichir l’universalité par cette diversité, en particulier pour comprendre les grands défis – souvent présentés comme des
objections à une conception dite « occidentale » : les limites de l’être humain, la nature de sa dignité, de ses libertés et responsabilités. En retour,
il est important de comprendre la diversité sous la lumière de l’universalité : nos partenaires peuvent ainsi « extraire » de leurs milieux culturels
des sources anthropologiques précieuses, porteuses d’universel, et en même temps critiquer les croyances et pratiques qu’ils jugent contraires aux
droits humains.
1
En plus des documents de travail (DT) comme celui-ci, l’Observatoire publie régulièrement en ligne des documents de synthèse. Cette partie se réfère au document de
synthèse n°14 de l’Observatoire, au chapitre « enjeux » ; si après (DS 14, chapitre ou paragraphe concerné).
2
Se réfère à la feuille de route n°2 au paragraphe 2 ; si après (fdr2, chapitre ou du paragraphe concerné). Les trois feuilles de route produites tout au long de cette recherche
précisent des questions méthodologiques et les diverses étapes du travail.
DT 15 Série Grenier à mots 15.3: Grenier à mots Bamanan Dagné Jiginé 3
Chaque langue constitue aussi un pilier important pour rendre possible la comparaison afin de trouver :
- les valeurs que nous sommes prêts à partager et qui permettent d’argumenter contre les pratiques contraires aux valeurs des droits
humains, qui mettent en danger notre « vivre et agir-en-commun »
- les problèmes transversaux - pratiques contraires aux valeurs des droits humains ou groupes particulièrement vulnérables - qu’il s’agira de
traiter de façon plus approfondie et globale dans nos réflexions portant sur les droits humains.
Hypothèse et méthode
Notre hypothèse : l’universel est dialectique
Les valeurs universelles (les « lieux communs ») ne peuvent être définies par des mots simples, mais plutôt par des couples dialectiques qui
autorisent la diversité des interprétations à l’intérieur de l’opposition. Nous pensons que chaque concept universel se compose d’une dialectique
ou d’un enchaînement dialectique qui délimite un « espace de recueil » : recueil de l’universalité par l’accueil de la diversité, et recueil de la
diversité par l’accueil de l’universalité. (fdr1, §11).
Nous avons travaillé sur trois dialectiques, qui sont apparues fondamentales et qui contribuent à former la singularité de chaque gouvernance
démocratique : l’être humain, la dignité, la liberté. Les espaces dialectiques que ces trois termes ouvrent constituent le « champ de la récolte »
d’universalité et de diversité, de richesse d’interprétation interculturelle. Les trois couples choisis étant intimement liés, il est logique qu’ils se
répondent.
• Du point de vue philosophique, on peut énoncer ce lien entre les trois concepts sous cette forme : la dignité est la qualité inhérente à l’être
humain et la liberté/responsabilité est son exercice. Sous la dignité s’entend immédiatement le droit (le droit d’être un être humain) ; la
liberté ne se décline pas correctement sans la responsabilité qui lui est liée.
DT 15 Série Grenier à mots 15.3: Grenier à mots Bamanan Dagné Jiginé 4
• Du point de vue logique, nous avons une première opposition inné /acquis qui se déploie de multiples façons dans l’acquis, sans cependant
se couper des capacités innées (fdr1 §12).
Afin de faciliter la lisibilité entre les divers greniers, nous avons élaboré un panier à mots qui sert de cadre de comparaison et qui débouche sur un
cadre transversal permettant l’analyse. Le cadre proposé tient suffisamment compte de la particularité de chaque langue et est relativement souple
au niveau des mots choisis. Certains mots sont donnés – choisis au préalable en fonction de notre approche et/ou en discussion avec certains de
nos partenaires. Ils sont supposés être traités dans chaque langue, même si la manière de le faire peut varier d’un grenier à l’autre. D’autres mots
peuvent figurer à part et constituer des entrées spécifiques à une langue donnée. Ils ont été proposés par l’auteur du grenier respectif et sont
importants pour comprendre soit le contexte d’un autre mot donné en préalable, soit pour comprendre les valeurs et la société en question. Pour
chaque grenier, nous avons proposé le cadre de présentation suivant (fdr2, chapitre 3) :
DT 15 Série Grenier à mots 15.3: Grenier à mots Bamanan Dagné Jiginé 5
6. Annexes 6. Annexes
Chapitre 1. Présentation du contexte : Chapitre présentant le contexte de la langue étudiée (appartenance familiale linguistique, historique et
dissémination géographique) ainsi que le contexte d’analyse (lieux et conditions d’enquête, méthodes employées, observateurs et leurs
disciplines)
Chapitre 2. Enjeux anthropologiques : Clarification de certaines particularités anthropologiques de la société et/ou de la langue étudiée en
mettant l’accent sur les enjeux en matière des droits de l’homme. C’est un chapitre qui a pour but de faciliter la compréhension et l’analyse du
panier à mots. Il peut énoncer des difficultés principales d’interprétation.
Chapitre 3. Le « panier à mots » : C’est le principal chapitre du grenier à mots car il contient tous les mots analysés, classés selon un système de
référence. Ce panier est structuré en diverses colonnes (de gauche à droite):
- La première colonne permet de lire le mot dans la langue originale (avec une transcription phonétique du mot selon l’API,
l’alphabet phonétique international).
DT 15 Série Grenier à mots 15.3: Grenier à mots Bamanan Dagné Jiginé 6
- La deuxième colonne tient compte de la provenance du mot (étymologies remarquables), de sa sémantique et de ses utilisations,
etc. Il peut contenir la simple provenance étymologique des mots ou des proverbes, récits, mythes, chants, comptes, dictons etc. Le
panier peut aussi contenir des synonymes, des diverses utilisations ou des changements d’utilisation dans le temps tenant compte
des fractures historiques, par ex. colonialisme, période communiste, mondialisation actuelle (analyse diachronique). Afin de
faciliter la lisibilité de ce cadre, la plupart des documents utilisent pour cette colonne la langue française, soit la traduction des
sentences, proverbes, etc. En ce cas, une liste de proverbes en langue originale avec une traduction et / ou explication en français
peut se trouver en annexe du document (ex. pulaar). Dans certains cas, le proverbe se trouve cependant en langue originale avec
une traduction en français (ex. moore ou bambara).
- Une autre colonne permet de faire des liens internes à chaque document ou externes. Les liens internes renvoient à d’autres mots
ou concepts contenus dans le grenier lui-même. Ils précisent soit le chapitre de référence (p.ex. Chap. 3.1, la communauté humaine
pour le bambara), soit le numéro du mot de référence et le mot lui-même (p.ex. 8. Communauté). Les liens externes renvoient à des
mots dont les utilisations et significations sont identiques ou semblables à celles dans une autre langue (p.ex. une même idée ou un
même contexte qui apparaît dans le grenier bambara est contenu dans le grenier moore. En ce cas, le lien est marqué de façon
suivante : ⇒ moore).
- La dernière colonne contient les problèmes d’interprétation ; les contre-exemples ou des contre-argumentations. Elle décrit les
dysfonctionnements au sein de la société en prenant pour fondement la diversité des enjeux et des intérêts qui s’affrontent dans un
même espace symbolique et dans la définition du lien social. Elle sert à rendre compte du lien entre cette recherche et notre recueil
d’observations contrastées, c’est-à-dire des questions éthiques fondamentales qui peuvent se poser à l’égard des droits humains et /
ou des interprétations difficiles par leur richesse ou par leur ambiguïté à l’égard des droits humains. Elle relève les problèmes
possibles d’interprétation, des faiblesses et confusions culturelles, interprétées peut-être à l’aide des distinctions dialectiques, qui
peuvent aider à mettre au jour les pratiques néfastes et à argumenter l’interprétation de la « contre-argumentation culturelle » (fdr1
§19).
DT 15 Série Grenier à mots 15.3: Grenier à mots Bamanan Dagné Jiginé 7
A noter qu’une « grille d’interprétation » précède la deuxième et la quatrième colonne. Elle se lit de façon suivante :
«!» Les proverbes / étymologies marqués ou interprétations qui portent le signe « ! » sont considérées comme étant des « perles », grains
précieux des greniers, qui donnent à réfléchir.
«+» Les proverbes / étymologies marqués ou interprétations qui portent le signe « + » sont ceux qui expriment le « patrimoine commun »,
les valeurs partagées que l’on retrouve aussi dans d’autres greniers.
«CA» Les deux premiers types de proverbes peuvent être utilisés comme argumentation culturelle pour l’universalité des droits de l’homme
ou dans des cas particuliers comme des contre-argumentations culturels qui démolissent soit les arguments culturels néfastes, soit les
contre-exemples. Ils sont ils sont accompagnés du signe «CA».
«?» Les proverbes / étymologies ou interprétations qui portent le signe « ? » sont ceux qui sont délicats et problématiques parce qu’ils
pourraient être utilisés pour légitimer une valeur ou une pratique contraire à l’universalité des droits de l’homme.
«–» Les « contre-exemples » sont des exemples de pratiques néfastes, violentes ou contraire aux droits de l’homme qui marquent un
décalage net entre le « trésor linguistique » et le vécu quotidien. Contrairement aux problèmes d’interprétation, ils sont accompagnés du
signe « – », tout comme les exemples qui peuvent être de simples exemples de pratiques néfastes.
C’est autour de ces exemples qu’il faut essayer de trouver des contre-argumentations culturelles.
Chapitre 4. Analyse : Les analyses peuvent approfondir une ou plusieurs dialectiques selon l’entrée des trois champs dialectiques (l’être humain,
la dignité, la liberté). Il s’agit de faire une synthèse et de ressortir ce qui est fondamental pour la compréhension et l’étude de cette langue ou pour
la comparaison entre divers greniers.
Chapitre 6. Annexes : Les annexes peuvent contenir une liste des proverbes en langue originale avec des explications / interprétations en français;
des précisions (lexicales, phonétiques, structurelles ou grammaticales) sur la langue, une carte de dissémination linguistique, un glossaire ou
autres.
DT 15 Série Grenier à mots 15.3: Grenier à mots Bamanan Dagné Jiginé 8
1. Présentation du contexte
Traduction :
dji don ka fisa Savoir nager vaut mieux
ni so don ye Que savoir monter à cheval
nga yèrè don ka fisa Mais se connaître soi-même vaut mieux
ni ni bè ye Que tout cela
yèrè don ye ko ba ye : Se connaître soi-même est une grande chose
mogoya damine do (une chose primordiale)
bè tii yèrè don C’est le commencement de la personnalité
wà bè ti mogo ye3 (Car) tout le monde ne se connaît pas soi-même
Et tout le monde n’est pas une personne (par conséquent).
C’est par les vers ci-dessus que débute, chez les Bamanan, l’étude de la personne humaine, « moko ». Dans le système d’initiation et
d’enseignement de ce peuple, la conception de l’être humain, de la personne en soi « moko yèrè yèrè », considérée tant dans ses composantes
corporelles globales que dans l’ensemble de ses principes spirituels, constitue une des pierres angulaires du savoir traditionnel en général, de la
philosophie et de la psychologie en particulier4.
Cette recherche porte sur l’anthropologie des droits humains par la comparaison interculturelle des mots et de leurs usages. Elle vise à mettre à
nue l’analyse sociale basée sur la portée de l’originalité et la valeur de la nouveauté qui, contrairement à toutes les recherches sur le peuple
bamanan, touche particulièrement aux aspects liés à la protection et à la promotion des droits culturels.
Partir d’une traduction des mots caractéristiques des droits de l’homme dans un contexte à forte pratique orale n’a pas été une œuvre simple. Dans
le langage bamanan, on retrouve des mots à connotation culturelle n’ayant pas de répondants directs en français (par exemple : lebelebe(le) : jeu
qui vise à asseoir l’adresse chez l’enfant). A ce niveau, nous avons fait des emprunts à la langue bamanan. Il y a également des expressions en
français qui correspondent à un seul mot bamanan qu’il est bon de connaître parce qu’on ne peut pas faire de la traduction mot à mot (par
exemple : levée du soleil : dugujè (éclaircir le village/la ville). D’autre part, il y a des mots bamanan qui se traduisent par des expressions
3
Textuellement : « Connaître l’eau vaut mieux que connaître le cheval, mais se connaître soi-même vaut mieux que tout cela. Connaître soi-même est une grande chose : c’est
le commencement de la personnalité, tout le monde ne connaît pas soi-même et tout le monde n’est pas une personne. » On explique cela par : Tout le monde n’a pas la
ressource de posséder une monture et il nous arrive, au cours de notre vie, d’avoir des rivières ou des fleuves à traverser pour poursuivre notre route. Mais, vivant souvent en
tête à tête avec elle-même, toute personne se doit de se connaître afin de devenir une vraie personne, une personne consciente de ses devoirs et des ses actes.
4
Voir paragraphes 2.2 « La personne individuelle » et 2.3 « La personne dans la communauté ».
DT 15 Série Grenier à mots 15.3: Grenier à mots Bamanan Dagné Jiginé 9
(explications) et qui ne correspondent pas à une réalité culturelle définie en français (par exemple : sofilawuluni : Colporteur de confidences d’une
maison à une autre).
Quant aux transformations linguistiques, nous pouvons retenir que le monde bamanan n’a pas échappé aux époques coloniales, communistes et
même à la mondialisation actuelle. Les mots utilisés ont subi moins de changements dus à ces facteurs précités. Il faut aussi noter que certains
mots et expressions tirent leur origine de la langue arabe, ce qui est du ressort de la pénétration de l’islam en milieu bamanan. Nous signalerons
ces différents cas dans le document.
L’originalité se trouve, sans doute, dans la sagesse bamanan, composée aussi bien de mythes, de chansons, de récits, de proverbes et de sentences.
Nous avons mis dans notre travail l’accent sur les proverbes, qui sont porteurs d’usages pertinents et explicatifs de la conception bamanan de
l’homme, de ses droits et devoirs et de sa vie entière.
1.1 Méthodologie
La recherche s’inscrit dans un canevas de travail qui a permis de dégager une méthodologie à travers une démarche opératoire, dont le principe,
pour servir de fondement à notre analyse, est structuré en deux phases :
• La recherche bibliographique en vue d’harmoniser la revue littéraire, dans les bibliothèques et au sein d’institutions s’occupant des
questions de droits de l’homme, a permis de mieux asseoir le cadre théorique d’analyse et d’étayer les questionnements suscitant l’étude.
• La phase terrain, soutenue par une visite de reconnaissance pour faire l’état des lieux et approfondir la base de recherche acquise. Cette
seconde étape s’est traduite par des entretiens auprès des personnes ressources des localités choisies et des rencontres en groupes focaux
composés de représentants de chasseurs, de forgerons, de griots, de femmes et de jeunes.
D’autres sondages particuliers ont été menés auprès de populations choisies de façon aléatoire, en tenant compte de la représentation de tous les
statuts sociaux. Ces phases de collecte d’informations ont été couplées par l’observation directe de certains faits et pratiques qui revêtent le
caractère particulier des communautés bamanan dans l’explication socio-anthropologique de certains comportements et stratégies.
L’étude, dans cette première phase, s’est portée sur deux sites bamanan : Sékoro et M’Pèba.
DT 15 Série Grenier à mots 15.3: Grenier à mots Bamanan Dagné Jiginé 10
Le village de Sékoro, ou du pouvoir ancien, se trouve au bord du fleuve Djoliba. Il se situe à quelques neuf kilomètres de Ségou ville, avec une
superficie de 3000 m2. Aujourd’hui, Sékoro est constitué de quatre quartiers : le premier, appelé Bamanan–Djourala, est habité par les Bamanan
et les Dioulas ou commerçants; le second, appelé Somonoso, est habité par les Somonos; les deux autres, Safedala et Damakorola, sont habités
par les Peulhs, Maures, Dogons et Sonrhaï. Le village est limité au nord par Sébougou, au sud par une Bourgade Peulh nommée Mèlèwèrè et par
Dougoukouna, une autre capitale du royaume, à l’est par Togou et Kondièwèrè et à l’ouest par le fleuve et le village de Farako. Historiquement, le
village tient son nom de Cheicko, un marabout venu de la Mecque accompagné de ses disciples, qui s’installèrent au bord du fleuve. Ainsi, pour
désigner le village de celui qui en fut le premier habitant, on a appelé Sékoro : Cheickokoroba ka dugu, ce qui voudrait dire : « le village du vieux
Cheicko ». Selon la légende, le village de Sékoro fut fondé par la coupe des premières herbes devant la mosquée, construite par le marabout
Cheicko.
Le peuple Bozo fut le premier à habiter Sékoro à la suite du marabout. En effet, viendra ensuite le règne de Biton Mamary COULIBALY,
fondateur du royaume bamanan de Ségou. Ce dernier, une fois roi, fit de Sékoro la première capitale d’un vaste royaume décentralisé et
« démocratique », qui comptait neuf villages markas ou soninkés et quatre villages bambara ou ségouni. Ces villages furent dominés par
l’animisme tout en abritant de grands marabouts de renommée qui étaient consultés par les rois païens avant d’entreprendre toute action. Le
village de Sékoro (ou du pouvoir ancien), compte à ce jour nombre de sites touristiques : la tombe de Cheickokoroba, sa mosquée, la tombe de
Biton Mamary COULIBALY et son palais…
Le village de M’Pèba est un village situé dans la commune rurale de Pélengana (Cercle de Ségou), en quatrième région du Mali. Le village de
M’Pèba est distant de 6 km au nord–est de la ville de Ségou sur la route nationale allant à Markala et Niono. Historiquement, le village a joué un
rôle considérable dans la formation du royaume bamanan de Ségou, et fut par la suite la résidence de Tiémoko Monzon DIARRA qui deviendra le
roi de la dynastie des DIARRA de Ségou (de 1792 à 1808). Le roi Monzon consolida le pouvoir de Ségou et porta le royaume à son apogée.
M’Pèba demeura la résidence du roi et accueillit le transfert de nombreux attributs, objets et services rattachés à la cour royale. Des traditionnistes
du village reconstituent encore des scènes de la cour royale et des fonctionnements du royaume sous Monzon avec une vivacité extraordinaire
dans les récits épiques et les chansons qui constituent des supports interprétés dont l’authenticité ne souffre d’aucune altération. Pendant la
période coloniale, juste après la prise de Ségou par Archinard, M’Pèba est érigé dans l’organisation administrative du pays en chef-lieu de canton
de Boloba, à la tête duquel se sont succédés Fadouga MARIKO, Mahamane et Alassé MARIKO jusqu’à la suppression des cantons en 1958.
Leurs descendants se succèdent encore à la chefferie du village5.
5
Source : OMATHO (Office Malien du Tourisme et de l’Hôtellerie).
DT 15 Série Grenier à mots 15.3: Grenier à mots Bamanan Dagné Jiginé 11
La superficie du Mali est d’environ 1.240.000 km² avec une population de plus de 12.000.000 d’habitants. G. Brasseur, dans son ouvrage « Les
établissements humains au Mali »6, repartit les populations maliennes en deux grands groupes : les Sahéliens et les Soudanais. Le premier groupe
englobe les nomades blancs. Ce sont les Maures et les Touaregs, les Songhay (de Tombouctou à Ansongo, d’Ansongo à Labezanga, de
Tombouctou au lac Debo et de l’intérieur de la boucle du Niger) et les Peulhs, dispersés, semi-nomades, semi-sédentaires et du Delta Central. Le
groupe soudanais est formé des Soninké, des Khassonké, des Malinké, des Foula, des Bamanan, des Bozos, des Senoufo, des Minianka, des Bobo
et des Dogon.
La langue bamanan est une langue nationale du Mali et constitue la langue la plus communément comprise dans le pays. Elle est une langue
parlée par plus de 10 millions de personnes, principalement au Mali. De nombreuses autres personnes parlent également cette langue, ou ses
dialectes, dans d’autres pays voisins comme le Burkina Faso, la Côte d'Ivoire et la Gambie. Les différences entre la langue bamanan et le Dioula
sont minimes, cette dernière langue étant parlée ou comprise par une quinzaine de millions de personnes en Afrique de l’Ouest (notamment au
Burkina Faso, Côte d’Ivoire et en Gambie).
La langue bamanan fait partie de la famille des langues mandingues. Elle est aussi comprise, sans effort notable par le bloc malinké. Elle est
encore celle d’un groupe ethnique très particulariste, les Dioula, dont le rayon d’action s’étend jusqu’en Haute-Volta et en Côte d’Ivoire et qui se
livre fondamentalement au commerce et au transport à grande distance. Par eux, le Bamanan est devenu une des grandes langues de
communication de l’Afrique de l’Ouest, utilisée par plusieurs millions d’individus dans leurs rapports journaliers. C’est une langue SVO (sujet,
verbe, objet) avec deux tons. Il y a sept voyelles et vingt consonnes7.
L’écriture a été introduite durant la période où la région était sous la domination coloniale française. Woyo COULIBALY a, en 1930, créé un
alphabet bamanan comportant 123 caractères. L’alphabétisation peine à se diffuser, notamment dans la brousse. La littérature en langue
bamanan se développe lentement, du fait de la prédominance du français comme « langue des élites », mais il existe cependant une tradition
orale vivante, constituée principalement d’histoires et de contes de rois et de héros. Cette tradition orale se transmet par les griots, qui sont à
la fois des conteurs, des chanteurs et des livres humains d'histoire, ayant étudié l'art du chant et du récit pendant de longues années. Beaucoup
de leurs chansons sont très anciennes : la tradition fait remonter certaines aux temps de l’ancien Empire du Mali8.
6
G. Brasseur, Les bamanan, in Etablissements humains au Mali, IFAN, Dakar – 1968.
7
Voir annexes 6.1 « L’alphabet de la langue bamanan ».
8
L'Empire du Mali est un puissant empire africain du Moyen Âge. Il a été créé au XIIIe siècle par Sundjata Keïta et connut son apogée au XIVe siècle. Il est le berceau de la
Charte du Manden. L'empire du Mali s'étendait entre le Sahara et la forêt équatoriale, l'Océan Atlantique et la Boucle du Niger soit sur les actuels Mali, Sénégal, Gambie,
Guinée, Guinée Bissau, Mauritanie et une grande partie de la Côte d'Ivoire. Il était un carrefour important entre les peuples nomades du Sahara et les peuples de l'Afrique noire
équatoriale. Son économie reposait sur l'agriculture, l'artisanat, l'exploitation des mines d'or et le commerce des esclaves noirs avec les peuples arabes.
DT 15 Série Grenier à mots 15.3: Grenier à mots Bamanan Dagné Jiginé 12
Les Bamanan constituent, on le sait, un des grands groupes ethniques du Mali actuel, Malien dans sa presque totalité et situé absolument au cœur
du pays. Ils occupent une tranche méridienne entre les 5° et 8° ouest, mais celle-ci débordent largement vers le nord-ouest et le nord-est. Vers
l’est, leur limite correspond à celle des populations voisines Senoufo, Minianka, Bobo, Dogon. Elle est généralement nette sauf aux abords du
Delta intérieur du Niger où les brassages de populations ont été nombreux. Vers l’ouest, leur limite est celle des Malinké, mais elle est presque
soulignée par le cours des rivières, que ce soit le Ouassoulou Balé ou le Baoulé. Dans le sens des parallèles, vers le sud, les Bamanan empiètent
sur la Côte d’Ivoire où le milieu naturel devient guinéen ; vers le nord, ils sont arrêtés par le Sahel, ou tout au moins par les zones sans eau du
Wagadou et du Mena. Ils ont pu toutefois s’infiltrer vers le nord en suivant le Niger jusqu’auprès de Niafunké, mais en cet endroit, les conditions
naturelles sont très particulières.
Ainsi, les Bamanan sont essentiellement des Soudanais. Contrairement à certains ensembles humains, ils forment un bloc très homogène. Seules
vivent parmi eux de petites colonies de Foula, c’est à dire ces Peulhs pratiquement sédentarisés qui représentent en quelque sorte les chaînons
intermédiaires entre les grands foyers Peulhs du Macina et de Guinée. Toutefois, à la lisière nord, les interférences avec les Soninké ont été
importantes et sur la rive gauche du Niger, à la hauteur de Koulikoro et même sur l’autre rive, subsistent de gros villages se réclamant de cette
tradition, mais le plus souvent ils donnent l’impression d’être en voie d’absorption, quant ils ne sont pas maintenant considérés comme tout à fait
Bamanan.
Les Bamanan, comme les Malinké, font partie d’un groupe plus vaste, les Mandé, avec lesquels ils partagent de nombreux caractères communs,
notamment d’ordre anthropologique. Mais sur le plan psychologique, ils sont nettement différenciés. Leur histoire est assez récente, du moins à ce
que l’on sait par la littérature, et leur nom lui même n’est cité pour la première fois qu’en 1510 par Pacheco PEREIRA10. Ils avaient probablement
déjà acquis une personnalité à cette époque mais leur structure sociale ne leur permettait pas de la révéler efficacement, au point qu’ils aient pu
être connus à l’extérieur. Ils vivaient en effet en village et le pouvoir politique s’arrêtait généralement au niveau du groupe de villages, c’est à dire
du canton. Une véritable anarchie régnait par conséquent et les luttes entre voisins ne manquaient pas. Aucune ligne de force ne pouvait, dans ces
conditions, se dégager.
Il en fut autrement du jour où une autorité supérieure s’instaura, c’est à dire à partir du XVIIième siècle avec le Royaume de Ségou, dont les
principaux faits ont été bien retracés dans une étude substantielle de Ch. MONTEIL (« Les Bamanan de Ségou et du Kaarta »). La figure de
Mamary COULIBALY a fortement marqué la première moitié du XVIIIième siècle dans la vallée du Niger puisque ses armées se sont portées
successivement vers le sud jusqu’au Bani, à l’est vers Djenné et à l’ouest à travers tout le Kaarta dont les occupants, des Bamanan du clan
9
R. Mauny, Tableau géographique de l’ouest africain au moyen âge d’après les sources écrites, la tradition et l’archéologie, 1961, p.447.
10
R. Mauny, op. cit., p.447.
DT 15 Série Grenier à mots 15.3: Grenier à mots Bamanan Dagné Jiginé 13
Massassy, furent une première fois décimés. Un de ses successeurs, N’Golo DIARRA, poursuivit cette œuvre de domination et pénétra encore
plus loin, jusque chez les Mossi du Yatenga, chez les Minianka, guerroya contre les Peulhs du Macina avec des poussées jusqu’à Tombouctou,
enfin vers le nord dans les Sokolo. Ces exploits furent renouvelés par son fils Monzon, qui engagea aussi une lutte serrée dans le Kaarta, le
Fouladougou et le Bélédougou. Mungo PARK11, qui traversa ces pays en 1795, retransmet l’écho de ces luttes cruelles.
Parallèlement aux opérations militaires, les territoires conquis furent organisés et soumis à l’impôt. L’action centralisatrice ne s’exerça que sur
une courte durée, puisque le début du XIXième siècle voit déjà le déclin de Ségou et la montée des empires rivaux, Peulhs ou Toucouleur. Elle n’en
marque pas moins profondément l’ethnie bamanan dans la conscience de son unité culturelle et dans sa relation au monde environnant.
2. Enjeux anthropologiques12
Du point de vue socioculturel, la société bambara est une société de «valeurs», organisée et structurée à telle enseigne que chaque contenant a une
place et un rôle défini. C’est pourquoi, des mesures communes sont appliquées aux faits et gestes des membres pour l’assise de la société et de la
culture bambara.
Chez les Bamanan, l’homme individuel ne se réalise qu’en communauté au sein d’un «nous». L’espèce-homme, dans le temps et dans l’espace,
forme un «nous», le «nous» de l’humanité. Le premier élément constitutif de ce « nous » gigantesque, à savoir les personnes humaines, est
composé de toutes les couleurs, langues, cultures. Ce «nous» global, dont personne au monde ne peut tracer avec exactitude l’itinéraire depuis les
origines jusqu’à ce jour, ni décrire précisément le temps historique de son voyage terrestre, se réfracte et se monnaye en une multitude de «nous»
s’imbriquant les uns dans les autres :
• «nous» de l’âge du voir ;
• «nous» de l’âge du dire ;
11
. R. Mauny, op. cit, p.447. Mungo Park (1771-1806) était un explorateur écossais né à Fowlshiels dans le Selkirkshire le 10 septembre 1771. Après avoir fait des études de
médecine, il devient chirurgien. Passionné de voyages, il se porte volontaire pour trouver les sources du Niger, à la Société Africaine de Londres. À cette époque, comme pour
le Nil en Afrique orientale, la principale énigme géographique de l'Afrique de l’Ouest est le cours du Niger, un fleuve qui, en raison du relief, prend sa source à quelques
centaines de kilomètres de la côte mais fait une boucle de 4 000 km à l'intérieur, avant de regagner le golfe de Guinée.
12
Plusieurs éléments de ce chapitre se trouvent in : Coulibaly, K., Du traitement de la violence chez les Bamanan au Mali, Actes du colloque de Nouakchott sur le traitement
de la violence, novembre 2007, à paraître.
DT 15 Série Grenier à mots 15.3: Grenier à mots Bamanan Dagné Jiginé 14
Chaque «nous» a sa façon d’être, de voir, de dire et de faire les choses de l’humanité. Tout «nous» comporte :
• des personnes, dont la vocation commune est de grandir ;
• des biens à promouvoir, en vue de la croissance, du développement et de l’épanouissement réussis de l’ensemble des membres ;
• un principe d’union, de cohésion et d’unité.
Les rapports harmonieux des différents «nous», plus ou moins proches, sont fonction de la reconnaissance, au niveau du dire et du faire, des
particularités de chacun. C’est le principe du respect de l’unité et la multiplicité diverse, la solidarité devant le monde à maîtriser et à rendre plus
amical et plus habitable pour tous. La fermeture du «nous» sur lui-même, sans ouverture aucune sur autrui, et la volonté de domination à sens
unique constituent les contre-valeurs communautaires dans le monde bambara. Enfin, les «nous» humains, les nationaux comme les
internationaux, ne peuvent subsister qu’interdépendants, dépendants et responsables les uns des autres.
Chez les Bamanan, l’homme individuel est membre d’un « nous » concret. Le processus d’identification définit tout homme comme étant
rigoureusement et ensemble matière, vie, esprit, labeur, outil, conduite, caractère et rite. L’homme est et demeure tout cela à la fois. Amputez-le
d’un de ces organes vitaux, vous aurez tout autre chose qu’un homme. Le respect de toutes ces caractéristiques favorise le respect de la dignité de
l’homme par l’homme. La dignité humaine est en chacun de nous, une responsabilité solitaire et unique : l’épanouissement et le dépérissement de
l’homme sont en ses mains propres. «maa n’ya, i yèrè, maa tignè, i yèrè»13.
Chez les Bamanan, la vie de l’être humain se conçoit par rapport au temps. Ici, la notion des six jours ne doit pas se confondre avec les jours
ordinaires de la semaine. En effet, l’homme porte dramatiquement dans l’être la vie et la mort, le bonheur et le malheur, et nous demeurons
partout et toujours, dépendants et responsables. Vivants, nous sommes promis à la mort. Morts, nous demeurons vivants. Dans ce contexte, G.
13
«La réussite ou l’échec d’une personne dépend de sa façon de se comporter» Proverbe bamanan.
DT 15 Série Grenier à mots 15.3: Grenier à mots Bamanan Dagné Jiginé 15
Martelet écrit :
« Même dans la situation désespérée, désespérante, qui fait que la nature, d’abord son berceau, devient tôt ou tard pour tout homme un tombeau, ne
peut vraiment détruire une grandeur qu’on reconnaît uniquement en refusant sur elle le règne absolu que la mort semble exercer sur lui. Et je dois
affirmer calmement que la mort qui réduit tous les hommes au silence, ne les réduit pas au (néant) »14.
La proximité, sinon la contemporanéité des contraires en nous est source de mouvement, d’équilibre et d’espérance : «Aucune difficulté ne doit
nous abattre ni nous décourager au point de désespérer de tout! Malheur et bonheur vont de pair! Es-tu heureux, saches que le malheur n’est pas
loin! Es-tu malheureux, saches que tu peux de nouveau connaître le bonheur»15.
La vie inadmissible (par opposition à la mort), le bonheur inaltérable (par opposition au malheur) et la souveraineté dépendante (par opposition à
la responsabilité), sont pour l’homme une pure utopie, un rêve absolument irréalisable. Le rêve a quelques fondements dans la condition de
l’homme d’outre-tombe. Mais l’outre-tombe n’est pas un rêve. L’homme est précisément et rigoureusement l’intersection consciente, libre et
responsable de la matière et de la vie. Et la mort ne mange pas la totalité de son être : «dugu na bè dun, nka maa salé té, i banné yé»16. Certes la
terre nous mange tous, mais l’homme ne se dissout pas entièrement avec et dans la mort. Il est donc impératif à tous les «nous» qui l’accueillent
et pourvoient à son devenir, de l’avoir et de l’accepter comme tel. C’est-à-dire que toute la communauté doit accueillir la personne (individu) avec
ses défauts et qualités et contribuer à sa socialisation.
La philosophie de la vie et de la mort chez les Bamanan s’articule autour du respect de la vie, de la dignité de l’autre. Ce fait consécutif au mythe
du vivre ensemble de l’homme et des autres vies telles les herbes et de Dieu et des hommes. C’est par l’action « égoïste » de l’homme que Dieu
s’est éloigné de la terre et s’est introduit le culte de la mort dans la vie des humains. C’est alors, de l’oubli de la loi fondamentale de la vie
ensemble que la mort s’est instaurée et s’est imposée aux hommes. Ce vivre ensemble fait que le bonheur du voisinage dépend du soin et du souci
que l’on prend à s’écouter mutuellement et à tenir compte du sentiment et du bon plaisir les uns des autres. Le vivant et le mort demeurent
solidaires pour le Bamanan, d’où le proverbe : « Vois-tu des charognards autour d’un cadavre humain, ne dis pas : « Laissez-le» ! Dis plutôt :
« Laissez-nous ». Bien que soient différents les états du mort et du vivant, ils restent solidaires, indissociables par le sort.
Chez les Bamanan, tout passage normal sur la terre comporte trois âges principaux :
• «yé tuma», le temps du silence et de l’écoute,
• «fo tuma», le temps de la parole,
14
Martelet. G, in CR. Académie des Sciences Coloniales, 1950.
15
Conseil d’un sage bamanan.
16
« Tout le monde va mourir, mais la mort n’efface pas toute l’œuvre de l’homme » Proverbe bamanan.
DT 15 Série Grenier à mots 15.3: Grenier à mots Bamanan Dagné Jiginé 16
• «kè tuma», le temps de l’action personnelle, le temps d’imprimer sa marque personnelle à la vie et au réel. Puis vient le temps du silence.
Il est important de respecter ces différents temps afin de garantir la paix personnelle et communautaire. Car chaque homme est demeure aussi,
structurellement, rapport dialectique, non dialogique du «je» et du «nous». Ce qui appartient à un membre du «nous», ne lui appartient pas. Le
mien n’est pas mien, il est nôtre, sur le plan de l’être comme celui de l’avoir. L’homme se réalise en prenant appui sur autrui (8. Panier à mots17),
son expérience, sa science et sa sagesse sont accueillies et assimilées sous sa propre responsabilité (64). Le salut comme la perte de l’homme sont,
en définitive, en ses mains propres, en nulles autres ! L’autonomie de la personne individuelle (3) et le sens de sa responsabilité impliquent le
respect strict des autres dans leur «yé tuma», «fo tuma» et «kè tuma». La connaissance de soi-même implique l’adaptation de soi à autrui, quel
qu’il soit.
L’adama-homme18 est normalement motivé dans chacune de ses actions. Chaque valeur de notre éthique constitue une raison valable sinon
raisonnable de notre agir humain. Tel est l’adama-homme : il vient et passe. Ce voyage, il l’effectue, motivé, dans le cadre d’un « nous »
déterminé, branché lui-même sur d’autres « nous » plus ou moins forts. Ainsi, F. Perroux19 écrit :
« La science dégage l’originalité de l’espace-homme ; cette originalité ne réside ni dans le poids relatif du cerveau, ni dans le langage articulé, ni
dans la main préhensive. Elle s’affirme par la complexité des relations dans l’ensemble psychosomatique et aussi par la capacité des relations entre
les êtres individualisés. Les hommes, pour ces raisons, sont capables non point seulement de s’adapter au milieu, mais, ce qui est essentiel,
d’inventer le milieu du développement (épanouissement) de leur espèce et de chacun de ses « membres ».
Dans l’esprit de tout citoyen bambara, le communautarisme reste fortement ancré, ce qui fait que les principes et les mécanismes reposent sur les
«institutions» autrefois matérialisées par les sociétés secrètes d’initiation comme le «Komo20». La communauté (8) en elle-même est une valeur
(37) fondamentale et l’essence de la vie. En somme, tout repose sur la foi qui fait que quand on se reconnaît comme personne dans la société, on a
foi au droit de la communauté, qui détermine fondamentalement le droit de la personne. Le Bamanan accorde une importance capitale à son
environnement communautaire (vitalisme chez les Bamanan). Le savoir-vivre passe par la capacité de réflexion, d’orientation, de socialisation à
travers l’éducation, qui est régie par les règles de politesse et d’hospitalité envers les aînés et les voisins. Ce qui fait que la notion de liberté
individuelle est confondue avec la bonne conduite qui forge le caractère au sein du «nous» (60. Liberté). Par exemple, une personne sans le
17
Ce chiffre fait référence au numéro de ce mot dans le panier à mots, chapitre 4.
18
Le terme adama-homme désigne singulièrement l’être humain dans toute sa représentativité, l’individu, l’Homme tout simplement.
19
Perroux, F, op. cit. Sidibé, S.P.M. La rencontre de Jésus Christ en milieu Bamanan, Paris, Éditions Beauchesnes, 315 p.
20
« Komo » est un fétiche, une divinité, une société initiatique des hommes adultes. Pour être admis au « Komo », il faut auparavant avoir été circoncis. Ne sont jamais admis
dans cette société, les griots et les femmes.
DT 15 Série Grenier à mots 15.3: Grenier à mots Bamanan Dagné Jiginé 17
«nous», c’est-à-dire sans les autres, représente le «fu» ou zéro. En d’autres termes, cela signifie qu’un individu ne représente rien sans la
communauté « + ». Chaque homme bambara sait se reconnaître en l’autre, il est objet des relations sociales. Ceci étant dit, moins une tête unique
qu’un impératif catégorique, nous retenons : « Que chaque être humain ait le minimum et puisse grandir sans être à la charge des autres (dooni ka
kè bèè bolo) ».
Michel COULIBALY21 déclarait : « J’ignore l’homme de ce monde auquel il convient d’habiter et de vivre seul. Au contraire, ce que j’entends
dire, c’est que tout être, sauf la maladie grave, se plait à être augmenté, complété» « + ». Qui que nous soyons, disent nos informateurs, il nous
faut un compagnon, sinon notre humanité reste inachevée.
Selon l’enseignement du monde bambara, toute existence humaine en groupe, tient en quelques affirmations centrales :
• Chaque homme, homme et femme, est trois rivières : l’écoute, l’entente, l’édification mutuelles. Asséchez l’une ou l’autre de ces rivières,
vous mutilez l’homme en lui. Aussi, le lieu privilégié où se réalise et s’épanouit chacun de nous est-il la cohérence, l’entente harmonieuse et
dynamique des rivières que nous sommes.
• Au sein du «nous», dont il est membre, il se construit dans et par la rencontre, la connaissance et la foi mutuelles.
• Dès qu’il est juridiquement capable, il peut à tout moment convoquer et saisir le «nous» dont il est membre, pour lui soumettre en toute
liberté ses doléances.
C’est en ces trois principes que l’on peut, pensons-nous, résumer le sens bamanan des rapports de la personne et de son groupe. Comme l’on s’en
doute, une chose est l’énoncé clair des principes vitaux, autre chose, leur mise effective en pratique.
Au pays bamanan, la communauté n’a pas toujours eu, à l’endroit de l’individu, les égards auxquels celui-ci a droit. De même, l’individu ne s’est
pas toujours ouvert au groupe comme cela se doit. Le « nata », ou « cupidité » dont chacun de nous naît porteur en est la cause. De sorte qu’il
serait pour le moins malhonnête de faire croire que le milieu bamanan ignore ou a ignoré toute contradiction entre le « moi », le « je » et le
« nous ». L’histoire sait les raisons de la place prépondérante du principe d’union, de cohésion et d’unité en tout « nous » bamanan : l’autorité, à
commencer par l’autorité paternelle. Cela dit, quelle société, au monde, n’a jamais complètement et définitivement liquidé toute contradiction des
rapports de l’individu au groupe ? « + »
Au pays bamanan, comme partout où vit l’homme, la contradiction, inscrite au cœur de tout homme, à la fois ouverture sur autrui et fermeture sur
soi, est sans cesse prête à entrer en jeu dans les rapports du « ne » et du « anw » (moi-nous) au sein de chaque « nous » humain. L’huile de
graissage de cet engrenage vital, nécessaire et indispensable est le sens et le respect (33) vécu de la dignité(30), de la responsabilité(64), du
« dogon » ou « goût, plaisir ou choix » et du « gasi » ou « tort, offense ou gêne », les uns des autres. Les membres de nos « nous » restent égaux
21
Michel Coulibaly est l’un des informateurs de Sotigui Penda Mory Sidibé dans « La rencontre de Jésus Christ en milieu bamanan ».
DT 15 Série Grenier à mots 15.3: Grenier à mots Bamanan Dagné Jiginé 18
en dignité humaine. Tous sont et demeurent hommes à moitié, faillibles et capables d’erreur tant sur le plan de la morale (38) que sur celui de la
vérité (35). Le salut de leur vivre ensemble est l’écoute, l’entente et l’édification mutuelles. Nécessairement, vitalement membre d’un « nous »,
chaque homme ne se réalise homme qu’en acceptant ses trois rivières, mais sous sa propre responsabilité : l’épanouissement comme le
dépérissement et la ruine de l’homme sont en ses mains propres. « ! »
Pour les Bamanan, le cadre précis où, naturellement, coulent ses six jours22, est quadruple. L’homme chemine vers le lieu où il va dans ce
quadruple espace vital : les quatre « tons » du monde. Cet espace, il doit le réaménager sans cesse, lui-même, dès qu’il en est capable, épaulé par
son environnement dont il doit se vouloir solidaire. Le déploiement réussi, le développement et l’épanouissement humain sont le but de notre
venue et de notre présence au monde. L’épanouissement du « nous », soi-même et autrui, le plus large possible.
Dinyè tonw ye nani ye : Siginyogonya, Teriya, Furu Dina23. L’énumération de ces quatre « tons » du monde introduit au sens du terme ici :
« siginyongoya, teriya, furu, dina » ce que nous traduisons par communauté de domicile ou lieu, amitié, mariage, relation à l’invisible ou
croyance religieuse.
Le mot « ton » a bien sûr plusieurs sens à ne pas confondre. Une transcription correcte en faciliterait la compréhension. Messieurs Majhemout
Diop et Bokar N’Diaye, dans « Histoire des classes sociales dans l’Afrique de l’Ouest » et les « Les castes au Mali » ne connaissent l’un et
l’autre qu’un sens au terme « ton ». Le tontigi pour l’un et l’autre serait le noble, le horon. Dans la langue bamanan parlée d’aujourd’hui, le
tontigi désigne toujours un fidèle du Do, du Komo, du Nama etc. Le « Bamanan » refus du Maître est celui qui ne connaît d’autre maître que son
« boli » ou « fétiche ».
Il est impératif pour tout homme bamanan de vivre les quatre tons du monde qui régissent toute la philosophie bamanan de la société. A la source,
à la base de tout accord particulier entre humains, on retrouve l’un ou l’autre, sinon les quatre tons primordiaux à la fois. Quatre espaces vitaux
qui ont mission d’alléger le poids des six jours (la vie et la mort, le bonheur et le malheur, la dépendance et la responsabilité) de l’homme.
2.3.2 Le « fen » et le « ko »
22
Voir paragraphe 2.2.1 : Les six jours de l’homme
23
Le monde comprend quatre espaces de vie: voisinage, amitié, mariage, foi.
DT 15 Série Grenier à mots 15.3: Grenier à mots Bamanan Dagné Jiginé 19
Le réel, en sa totalité, se rend en milieu bamanan par deux termes généraux : fen et ko. Le premier désigne les êtres, les choses. Le second, les
évènements, les états, les institutions.
L’homme bambara s’accomplit dans le «ko» à travers le «fen», qui demeurent le passage obligatoire, la phase de transition pour la réalisation de
soi au sein du « nous ». Le «fen» connu du Bamanan est visible et invisible. L’expression «fen» peut s’entendre de l’être en sa totalité, d’où la
difficulté de le déterminer exactement et sans rien oublier. L’être visible, c’est le monde physique, «diyèn» et tout ce qu’il renferme : les êtres
confectionnés de terre et de roche, les vivants qui ne bougent pas ; ceux qui se meuvent, mais ne parlent pas, ceux enfin qui se déplacent, pensent,
parlent et travaillent : nous les bipèdes, «sen flananiw». L’être invisible ne se laisse pas dénombrer facilement ; en sont certainement partie les
êtres mauvais et les êtres bons que les Bamanan prennent à témoin avant toute offrande rituelle. Le «sabu des sabu24» non moins certainement. La
conviction populaire veut qu’il y ait d’autres êtres encore : les jinè et les woflo. Les uns et les autres sont très proches de l’homme, par la taille, la
forme, la couleur. Il reste entendu que les jinè sont toujours blancs. Jusqu’à présent, les Bamanan ignorent les Martiens, les pilotes de soucoupes
volantes. Nul doute que ceux-là aussi viendront bientôt s’ajouter aux fen qui peuplent leur univers depuis fort longtemps!
Cet univers n’est pas le lieu de tout repos : forces maléfiques et forces bénéfiques l’habitent. Rien ne s’y produit sans sabu. Tout mal y a aussi son
antidote. Bien et mal cohabitent l’univers, notre univers. Là commencent les problèmes, et pas des moindres :
• Le monde, son origine, sa marche sans fin, sa constitution intime.
• Le mélange du bien et du mal dans le monde, l’origine de cet état de choses.
• L’hostilité de la nature à l’homme, de l’homme à l’homme.
• L’existence d’un «sabu des sabu», bon et bienveillant pour l’humanité, malgré tout ce qui nous advient de contraire et dont il est informé
exactement.
• L’existence d’êtres spirituels, libres, autres que l’homme.
Ces problèmes sont communs aux citoyens du monde bambara comme au reste de l’adama-homme, du temps et de l’espace. Une réponse
satisfaisante, sans cesse à remettre en question, à tous ces problèmes ne saurait être que le fruit de l’écoute et de l’assimilation critique du dire de
plusieurs «kodonna25» à leur sujet. Pour nous qui sortons de l’école du monde bambara, une certitude préside à l’écoute de tout autre «kodonna»
en matière de science et de sagesse : l’hétérogénéité observable parmi les êtres du monde ne saurait commencer ni se terminer adéquatement et
logiquement à l’homogénéité radicale de l’inorganique. Le mystère de l’homme, jusqu’à preuve du contraire, est et demeure pour nous la clé
d’intelligence des mystères du cosmos. Le citoyen bambara vit dans un monde magique. Il croit viscéralement à l’efficacité des moyens
magiques. C’est donc à une éducation religieuse et civique appropriées et enracinées qu’incombe la tâche d’éclairer, dans le Bambara, le sens de
notre dépendance à la nature, à la matière mais aussi celui de notre commune vocation de dominer et domestiquer la nature en nous et hors de
24 Le « sabu des sabu » est compris ici comme l’Etre supérieur, la divinité suprême.
25
Celui qui sait. En général, on parle du féticheur ou du prêtre.
DT 15 Série Grenier à mots 15.3: Grenier à mots Bamanan Dagné Jiginé 20
nous. Dans cet effet de restauration et de restructuration de la personnalité du Bamanan, des éducateurs mettront l’accent sur l’effort personnel et
communautaire.
Le «ko» désigne les évènements, les états, les institutions dans la cosmogonie Bamanan du sens des valeurs. Cet ensemble représente les faits et
phénomènes associés comme la naissance, le mariage et le décès. Nombre de préoccupations se dessinent au cœur de cet ensemble à travers les
cérémonies rituelles et religieuses telles que la circoncision et l’excision, les cérémonies de couronnement pour occuper des fonctions de chef
dans la communauté bambara... Les Bamanan cohabitent avec le «fen» pour avoir ou atteindre et participer au «ko». Cependant, le «ko» demeure
une quête de finalité aux choses visibles et invisibles. Le terme est spécifique, mais du reste indissociable du «fen», dans la mesure où des
évènements comme la maladie peuvent être aussi dits «fen». Le «ko», alors se présente comme la matérialisation palpable des êtres et des choses
qui surviennent dans le quotidien du Bamanan.
DT 15 Série Grenier à mots 15.3: Grenier à mots Bamanan Dagné Jiginé 21
Proverbes et sentences :
« + » 1.1 Dùnu bènnen, bala bènnen, buru bènnen, mogoninfinya bènnen
ka fisa à bèè ye
« Accord des tambours, accord des balafons, accord des Chapitre 2.1 Termes connexes :
trompes, l’accord des hommes est préférable à tout cela ». 13. Solidarité - Responsabilité
- Rien ne vaut l’entente en société ⇒ 1.Ukrainien - Connaissance
1.2 Ala-koro-dimiya, sitane b’a sàra mogoninfin na
« Satan assouvit sur l’homme l’animosité qu’il a envers
Dieu ».
- Des tiers subissent le contrecoup des conflits dont ils ne sont
pas responsables
1.3 Taayoro si tè mogosèbè la kà mogokuntan dàn 66.2 Honnêteté Ce proverbe pose une facette de l'être humain dans
« Un honnête homme ne dispose d’aucun refuge pour la société. Il y a ceux qui sont honnête et ceux qui
échapper à l’imbécile. » sont imbéciles. Cependant, ils sont condamnés à
- L’imbécile est souvent importun. vivre ensemble, malgré que les uns dérangent les
- Quoi qu’on fasse, même si on ne lui demande rien, même si autres.
on lui interdit rien, il importune les autres.
26
Remarques : Les proverbes et sentences en bamanan sont en italique, entres guillemets pour la traduction en français, et standard pour les significations et explications.
DT 15 Série Grenier à mots 15.3: Grenier à mots Bamanan Dagné Jiginé 22
1.4 Folo, mogoyaminnèn tùn jèngènnnen don, sisàn, 66.2 Honnêteté Dégradation des bonnes mœurs dans la société
mogoyaminnèn dabirila bamanan.
« Autrefois, le récipient des bonnes manières était penché,
maintenant il est renversé. »
- Il n’y a plus d’honnêteté, de vertu, de sagesse
« + » 1.5 Sanu ni wari bè ban, nga mogoya te ban ⇒ 5.1 Pulaar
« L’or et l’argent sont périssables, mais les relations humaines
restent. »
- La richesse peut disparaître, mais la fraternité est plus stable
1.6 Wari te mogoya dafa, jogo de bè mogoya dafa
« L’argent ne rend pas un homme parfait, c’est le bon
comportement qui le rend parfait. »
- Dans la vie, il n’y a pas que l’argent, il y a la noblesse du
comportement qui est au dessus de tout
« ! » 1.7 Dànnifen ye wilita ye, jiriden ye mofen ye , mogoya ye hakili ye
« Le propre de la graine est de lever, celui du fruit est de
mûrir, celui de l’homme est de comprendre. »
- La réflexion, l’intelligence, la sagesse sont le propre de
l’homme
1.8 Ni namakoro tùn kèra gnodùunfen ye, mogokoroba tùn tèna Ce proverbe décrit dans un premier temps les
kono gen sanko denminsen différents états de l'être humain soit enfant, soit
« Si la hyène mangeait le mil, (même) les adultes ne vieux. Dans un deuxième temps, il nous montre
chasseraient pas les oiseaux, à fortiori les enfants ». comment l'état d'être humain fait face à des
- La hyène est redoutable difficultés qu'il faut surmonter afin de mériter cet
- La nature pose des problèmes à l’homme mais ils ne sont état.
jamais insurmontables
Proverbes et sentences :
DT 15 Série Grenier à mots 15.3: Grenier à mots Bamanan Dagné Jiginé 23
Proverbes et sentences :
3.1 Jiridon, Sodon, Jidon, yèrèdon gnogon tè ⇒Kinyarwanda
« Savoir grimper aux arbres, aller à cheval ou nager, c’est Chap 2. H et
bien, mais rien ne vaut la connaissance de soi. » point 3.
- Conseil donné aux prétentieux : connaître ses limites, ses 30 Dignité
possibilités permet de se comporter au mieux
DT 15 Série Grenier à mots 15.3: Grenier à mots Bamanan Dagné Jiginé 24
Proverbes et sentences :
4.1 Cèbàkoro bonyana cogo o cogo, donkelenwalanjan ye i ye
« Si important que soit devenu un homme, il finira un jour par
devenir un long tas de terre. »
- Allusion à la forme de tombe de forme allongée
- Si puissant soit un homme, il mourra
4.2 Cèfarinso dè ye nsàbànlonpon ye, do be tigè, do bè moonobo 13. Solidarité
Une famille d’homme courageux est comme un fourré de
lianes « nsaban », si tu en coupes une, une autre apparaît.
- Si l’un meurt, un autre va surgir
- La bravoure est une vertu familiale ; se dit pour encourager ⇒Kinyarwanda
les jeunes à suivre l’exemple de leurs pères, héros courageux Chap. 2 K
4.3 Cèya ye gundo ye, musoya ye gundo ye 5. femme
« La condition de l’homme est mystérieuse, celle de la femme
aussi. »
- Dans la société bamanan, il y a des coutumes réservées aux
hommes et d’autres réservées aux femmes. Les hommes ont
du mal à comprendre les femmes et réciproquement.
4.4 Ni muso y’i bila cèyajoyoro la, bèè tigèlen denmisennin min na,
«?» o bèna à gosi
« Quand une femme prend la place d’un homme, le plus
méprisable des petits garçons la rossera. »
- La femme ne doit pas se substituer à l’homme
4.5 Ni cè wasora n’a dànbe ye, o ya soro à ma du kè 30. Dignité /
« Si un homme se vente de son honorabilité, c’est que 32. Honneur
probablement, il n’a pas encore fondé de foyer. »
- Le déshonneur rejaillira sur lui en cas de mauvaise conduite
de ses enfants
5. Femme Autres usages : « muso » traduit aussi tout ce qui est femelle.
muso - muso koroba : femme âgée
- muso koroni : femme très âgée
- muso kun : femme très dynamique
- musoya : féminité, condition féminine, sexe féminin, sexe de la
femme
7.1.2 Mùso ka kolo à cè ye, den ka kolo à bangebaga ye, dogo ka Conformisme et traditionalisme
kolo à koro ye, o dè tùn ye folo la du fànga n’a barika n’a
dànbe ye
« La soumission de la femme à son mari, celle de l’enfant à
ses parents, et celle du cadet à son aîné, c’était autrefois la
force, la bénédiction et l’honneur de la famille. »
- Dans la société patriarcale, toute l’autorité est aux mains des
hommes, le patriarche, le mari ou l’aîné.
- C’est en reconnaissant ce principe de base qu’on assure le
bonheur et la prospérité de la société
7.1.3 N’i ye du-duman denw ye gnogon korofo la, o ye du-duman
goyalen ye
« Si tu vois les membres d’une famille en discussion, c’est que
l’esprit de famille s’est dégradé. »
- Lorsque tout va bien, tout le monde est heureux et on s’aime,
mais dans les difficultés.
7.1.4 Ni dudenw ma bèn, mogo wèrè bè i sago kè ù la
« Quand les gens de la famille ne s’entendent pas, d’autres en
feront ce qu’ils veulent ».
7.1.5 Taa yorojan, à tè mogo fili i fàso bùlondàyèrèwolo mà Le manque de solidarité familiale constitue un
« On a beau s’en aller loin, on retrouve toujours sans se risque de survie de la chaîne familiale, clanique,
tromper la porte de la maison paternelle. » etc…
- Si haut placé que vous deveniez dans la société, vous ne
devez pas oublier vos origines.
- Même si vous vous installez loin du bercail, il faut souvent y
revenir et ne pas en oublier les coutumes, les mœurs- dit à qui
ne pense plus à sa parenté, alors qu’il a fait fortune au loin
DT 15 Série Grenier à mots 15.3: Grenier à mots Bamanan Dagné Jiginé 30
27
De la foi commune naît l’amitié, qui entre voisins peut conduire au mariage entre deux familles, voir deux communautés voisines, et qui dépasse la relation simpliste
homme-femme. Cependant, le couple (parenté à plaisanterie) ou gnimogoya tient une place prépondérante dans les relations matrimoniales (mariage) à travers le fait que les
jeunes frères et sœurs du mari puissent plaisanter avec la femme de leur grand frère à volonté sans que celle-ci puisse rechigner et vice-versa. Ce lien est fort considéré que
même celui de consanguinité ou « badenya ». La parenté à plaisanterie « sinakunya », est une relation qui existe entre deux noms, deux groupes ethniques, pour des raisons
historiques très mal connues. Au nom de la relation, les membres de deux groupes ont le droit de s’insulter, de se chahuter, mais aussi de se porter concours mutuellement. Il
se crée un lien assez fort que l’on appelle cousinage. La tradition dit que l’on n’a pas le droit de mentir ou de tricher avec son cousin à plaisanterie au risque de grands et
graves ennuis.
DT 15 Série Grenier à mots 15.3: Grenier à mots Bamanan Dagné Jiginé 31
9.3 Nation 9.3.1 Ici le mot nation est synonyme au mot patrie qui veut dire 9.1 Patrie
manton « Faso » en Bamanan
dunge
DT 15 Série Grenier à mots 15.3: Grenier à mots Bamanan Dagné Jiginé 34
Proverbes et sentences :
9.3.2 Ni dungejo kuma nàna, bèe ka i konota fo
« Quand il y a un débat concernant la construction de la
nation, chacun a le devoir de dire ce qu’il pense »
- En donnant son point de vue, le patriote contribue à la
construction de la nation
9.4 Clan Proverbes et sentences :
bonda 9.4.1 Ni gadaw kèlèla, tomugu to yoro nafo. 39.2 Entente Ce proverbe traite de la nécessité de l'entente dans
gaw « Quand les cuisinières se disputent, on va savoir où se trouve le clan. Car il ne saurait avoir de clan sans secrets
le reste de la farine ». cachés, ce qui est le fondement.
- Les servantes en dispute s’accuseront mutuellement
- S’il y a mésentente, les secrets sont dévoilés
- Se dit à l’occasion de disputes entre coépouses entre
coépouses, amis ou membres d’un parti.
9.4.2 Dunan jugu togo bè ga koro, n’ka jatigijugu togo bè sira kan. 11. Hospitalité
« La réputation qui se conduit mal reste dans la famille, celle
de l’hôte qui se reçoit mal se propage sur les routes ».
- Jouez bien votre rôle d’hôte accueillant, si vous ne voulez
pas gâter votre nom au loin.
9.5 Ethnie Proverbes et sentences :
sya 9.5.1 K’i cè i fasiya la, jon-fà-la don
« Renier sa race, c’est mépriser son père »
- On doit respecter son père et accepter son statut de naissance
- N’ayez pas honte de ce que vous êtes de par votre naissance
9.5.2 Jo-n-siya-la, o tènèfaga ka di 69. Interdit
« Pour qui avoue sa race, il est facile de faire respecter ses
interdits »
- Quand on fait savoir à son hôte quel est son interdit (telle
viande, tel jeudi), il lui sera facile d’en tenir compte
DT 15 Série Grenier à mots 15.3: Grenier à mots Bamanan Dagné Jiginé 35
10. Identité Bamananya koro ye ko « L’identité bamanan se caractérise par »: « Bamananya » signifie « identité bamanan »
tabiya 1. An kan banba : les valeurs Bamanan sont synonymes de
jogoya courage et de labeur, L’aliénation est caractérisée par la déperdition
2. Jogo ani dambe : honorabilité et respect des valeurs sociale, l’homme doit rester dans les normes de sa
ancestrales, culture socialement. Les Bamanan condamnent
3. K’a kè i togo kama : que l’homme soit jaloux de sa ferment l’aliénation, ils pensent qu’on peut
réputation, s’enrichir de l’apport des autres et ne point
4. Ka fatiyen bato : respect des héritages sociaux et avoir abandonner ses valeurs.
horreur du déshonneur. « nul ne doit oublier ses origines », cela n’est pas
Credo du Bamanan28 : permis, nous apprend la sagesse bamanan. Pour
- Ne jamais se trahir, savoir où l’on va, il n’est pas inopportun de savoir
- Ne jamais se mentir, d’où l’on vient. Nous nous devons de garder le sens
- Ne jamais envier nos femmes respectives à fortiori du permanent à travers le transitoire et le
commettre l’adultère, provisoire.
- Ne jamais se médire les uns les autres Savoir s’asseoir, et regarder tant derrière que devant
soi, pour s’identifier correctement et lucidement,
Proverbes et sentences : 35. Vérité apprécier les forces dont on dispose, facilite la
10.1 Bamanan te kalon tigè marche en avant, si pénible doive-t-elle être.
« Un Bamanan ne ment pas »
10.2 Bamanan ye kankelenfo ye
« Le Bamanan n’a qu’une seule parole » 66.2 Honnêteté
10.3 Bamanan t’a tu k’a lanon
« Le Bamanan ne lape pas son crachat »
- le Bamanan ne se dédit pas’
10.4 Bamanan bè sa a kumakan kan
« Le Bamanan meurt pour sa parole donnée »
- Il ne dit pas ‘oui‘ quand il a dit ‘non‘
28
Le credo est tiré du corpus de valeurs positives bamanan ou charte sociale dans laquelle sont consignées les prédispositions de la conduite sociale à tenir et qui est à
enseigner à tout individu bamanan.
29
Charte de Kurukanfuga ou La Charte du Manden ou Manden kalikan, aurait été proclamée en 1222 par Soundjata, fondateur de l'Empire du Mali, et ses pairs. Elle reste la
référence majeure des sinbo, grands maîtres chasseurs du Manden. (Voir annexes)
DT 15 Série Grenier à mots 15.3: Grenier à mots Bamanan Dagné Jiginé 36
18. Âge Proverbes et sentences : ⇒ Moore Art 4 (Charte de Kurukanfuga). La société est
si 18.1 Cèkorobaya si ka ni kamalenya ye divisée en classes d’âge. A la tête de chacune
sihakè « La vie d’un vieux est plus longue que celle d’un jeune d’elles est élu un chef. Sont de la même classe
homme » d’âge les personnes (hommes ou femmes) nées au
- Les vieux ont de l’expérience cours d’une période de trois années consécutives.
30
Dieterlen, G. Essai sur la religion Bamanan, pages 17 et 18.
DT 15 Série Grenier à mots 15.3: Grenier à mots Bamanan Dagné Jiginé 39
18.2 Si soro ko ka gèlèn siyoro ko ye Les Kangbès (classes intermédiaires entre les
«Il est plus difficile de bénéficier d’une longue vie que de jeunes et les vieux) doivent être conviés pour
trouver un endroit pour dormir ». participer à la prise des grandes décisions
- Jeu de mots avec deux homonymes parfaits : si :passer la concernant la société.
nuit et si :longue vie.
- Pour dire qu’il faut accorder une plus grande importance à
telle chose plus qu’à une autre
18.3 Ni ka koro ni ye, nka ni man fisa ni ye
« Il y a des vies plus anciennes que d’autres, mais aucune
n’est meilleure que l’autre »
19. Amitié Proverbes et sentences : 7.1 Famille «!» A la limite une amitié bien partagée peut être à la
tériya 19.1 Mogo ti bagenbagaw sugandi, n’ga i bi se ki teriw latomo. base de mariage interfamiliaux « ni teriya diyara,
« On ne choisit pas ses parents, mais on peut choisir ses furu bèe bo a la ». L’amitié prime sur la parenté.
amis » C’est le résultat d’un choix, un pacte entre deux
«CA» 19.2 N’a fora ko sinin ye jugu-faga ye, do bè tilen ka poli do gni individus.
nofè.
« Quand on décidera que c’est demain la tuerie des ennemis,
certains passeront toute la journée à courir derrière les amis
d’autres ».
19.3 Ntè sogo soro ye tignè ye, n’ka ntè miyètoya taama, o’ye
nkalon ye.
« Tu peux me refuser ta viande, mais tu ne peux pas
m’empêcher d’en être friand ».
- On peut refuser à quelqu’un son service, son amitié, mais
l’on peut l’empêcher d’exprimer son désir, on peut ne pas
vouloir aimer mais on ne peut empêcher qu’on soit aimé.
DT 15 Série Grenier à mots 15.3: Grenier à mots Bamanan Dagné Jiginé 40
31
De prime à bord, il est notoire de spécifier que les horon et les djéli ne sont pas à regrouper comme castes dans la connotation et la classification sociale des Bamanan. Le
premier groupe représente « la noblesse » désignée sous le vocable de Horon désignant les autochtones du milieu. Les Horon sont les décideurs au sein de la société bamanan,
ils sont habilités à diriger et à légiférer le pouvoir local. L’esclavage ne faisant plus le poids, ce faisant les nobles ne sont plus aujourd’hui propriétaires d’esclaves pour
disposer d’eux à leur guise. Le second groupe constitué par les djéli designe chez les Bamanan un ensemble d’hommes de caste inférieure socialement par rapport aux Horon
dont aussi les maabo, garanké, founè, numu…qui regroupés en un grand groupe de griots s’appellent les n’yamakalaw. Cette couche sociale a des fonctions techniques de
fabrication d’objets pour servir les autres groupes ethniques. Hormis les fonctions techniques, elle assume les fonctions sociales de médiation lors des démarches
matrimoniales, de réconciliation en cas de différends ou de conflits. Le cours de l’histoire changeant, les Djéli, assumaient des fonctions de conseillers auprès des rois
bamanan, aujourd’hui auprès des chefs de villages.
DT 15 Série Grenier à mots 15.3: Grenier à mots Bamanan Dagné Jiginé 41
31.2 Humiliation 30.2.1 Foyi tè fàantan ni màloya cè, kùnkosèbàliya ko 36. Pauvreté
lamaloyali « Rien ne sépare la pauvre de l’humiliation en dehors de la
(petite) période qui précède ses problèmes »
- S’il ne trouve pas en emprunter, ce sera l’humiliation
- Le pauvre est dans une sorte de psychose, il s’attend toujours
à des problèmes : impôt à payer, nourriture à trouver
30.2.2 Nà à tà , n’a m’i fàga, à b’i màlo
« Celui qui dit : « viens donc le prendre ! », s’il ne te tue pas, il 69. Interdit
va t’humilier. »
- On doit respecter les interdits, tenir compte des êtres qui ont
un pouvoir maléfique
- Pour avertir celui qui s’entête : « si tu continues, tu auras des
ennuis sérieux
30.2.3 Cê bè cê faga k’a soro i ma a malo 38.3.1
« Un guerrier peut tuer un autre guerrier sans nécessairement
l’humilier ».
Dans la Charte de Kurukanfuga, article 41, il est mentionné : «
Tuez votre ennemi, ne l’humiliez pas »
33. Respect Contraire : Qui peut dire aussi grosseur, abondance, intensité
bonya - bonyabali : irrespectueux
- bonyabaliya : Irrespect
Proverbes et sentences : 3. Individu
33.2 Mogo si tè bbonya i yèrè ko 30. Dignité
« Le respect qui nous est manifesté dépend de nous-mêmes. »
- Pour être respecté, il faut être respectable
33.3 Mogo bonya, i yèrè, i dogoya, i yèrè
« Le respect ou le mépris d’une personne dépend d’elle-
même » 5. Femme
- Pour être honoré, il faut s’honorer soi-même
- Quand on est humilié, c’est qu’on a méconnu sa propre
dignité
« ? » 33.4 Cèbonyamùso den tè to ko
« Le fils d’une femme qui respecte son mari ne sera jamais à la
traîne. »
- Pour encourager les femmes à être soumises
33.5 Ni a fora i ma sama, I kana son à ka fo i ma sonzan 30. Dignité
« Quand on t’appelle Elephant, n’admets plus qu’on t’appelle
petit lièvre »
- Pour que le respect soit durable, il faut se comporter comme
un homme respectable.
34. Mensonge Autres usages : C’est le contraire de vérité
nkàlon - nkalontigèla : le menteur 31. Honte
- nkalontigè : action de mentir Le défaut le plus hai chez les bamanan est le
Proverbes et sentences : mensonge considéré comme le premier vice. Il
34.1 Mogo do bè nkalon tigè I ye, n’a ma kè : a malola I man, a avilie l’homme, le déshonore et détruit la société
siranna I gnè. humaine. Un mensonge peut être à l’origine d’une
« On peut vous mentir, soit par respect, soit par peur » guerre (le mensonge n’a pas de limite). C’est
- Tous les mensonges n’ont pas pour but de tromper pourquoi, les bamanan disent ceci : « si l’on est
34.2 Nkalonkuluba bè tignènin kèlènnajo bin taxé d’un mensonge qui ressemblerait fortement à
“Un faisseau de mensonges renverse la vérité isolée” de la vérité, c’est difficile de s’en départir ».
- Seul, même si on dit vrai, on est impuissant devant un groupe
de menteurs
35. Vérité Autres usages :
tignè - tignèfola : celui qui dit la vérité
DT 15 Série Grenier à mots 15.3: Grenier à mots Bamanan Dagné Jiginé 44
36. Pauvreté Traductions littérales : Souvent [faantanya] peut signifier l’état d’un
Pauvreté simple : - faantanya : être sans force orphelin de père.
faantanya - kannakolonnya : être sans habit
kannakolonny - bolokolonya : avoir les mains vides
a - tègèlakolonya : ne rien posséder entre ses mains
bolokolonya - sègenjuguba : la grande souffrance, misère
Proverbes et sentences :
Pauvreté absolue : 36.1 Badenma cè tan, o bèe kàlàcènin, kongo sen b’o la
tègèlakolonya « Si tu vois que dix frères sont tous maigrichons, c’est
sègenjuguba probablement qu’ils ont faim.
- Il y a des signes extérieurs de la pauvreté
36.2 Sègen bè mogo don ko caman na
« La pauvreté engage les gens dans beaucoup d’histoires
désagréables (ou malhonnêtes) »
« ! » 36.3 Sègen ka fisa jonya ye
« La misère vaut mieux que l’esclavage. »
- ce qu’on dit à un patron qui exploite ses ouvriers)
« ! » 36.5 Ni min kèra horon ye i sinji la, fàantanya tè horonya bo à la
« La pauvreté n’enlève pas la noblesse de celui qui est noble de
naissance. »
- La pauvreté ne déshonore pas quelqu’un, elle ne lui retire pas 30. Dignité
sa dignité.
DT 15 Série Grenier à mots 15.3: Grenier à mots Bamanan Dagné Jiginé 45
37. Valeur Proverbes et sentences : « nafa » pris dans le sens de la mesure, de l’intérêt,
ladamu 37.1 Kalan ni kodon tè kelen ye Chap. 2.2 et 2.4 de l’utilité ou du bénéfice.
« Une personne peut avoir de l’instruction, sans savoir se Dans le sens de bonnes manières de savoir vivre,
comporter dans les relations humaines. » 14. Education on le traduit par « nadamu » : politesse, marques
- L’instruction ne prépare pas nécessairement à la vie en d’honneurs, entraide, ce mot tient du niveau
société ; d’éducation de la personne de sa sociabilité
- L’école et l’école de la vie ne sont pas pareilles ;
- L’école ne suffit pas pour faire un homme complet
«+ » 37.2 Ni y’a mè sigignogongna gnènen ; o koro ye ki ki koloshi fota
ni kèta la.
« Si tu entends dire « le meilleur voisinage »: cela signifie de
bien faire attention (à ce qu’on dit et à ce qu’on fait) »
- Qu’on soit chez son père ou dans un autre village, il faut bien
se comporter ;
- La meilleure assurance en société est d’avoir un bon
comportement, d’être patient
37.3 N’i ye i gnè kè nonokènè ye , do bè basi kè a la
« Si tu fais de tes yeux du lait frais, quelqu’un y mettra du
couscous »
- Quand on perd l’estime de soi, on devient vulnérable face aux
autres. Autrement dit, quelqu’un qui ne se prend pas au sérieux,
est piétiné et perçu pour faible
DT 15 Série Grenier à mots 15.3: Grenier à mots Bamanan Dagné Jiginé 46
38. 1 Morale Proverbes et sentences : 37. Valeur Il est difficile dans nos pays sans écriture de
ladili 38.1.1 Wari tè mogoya dafa, jogo dè bè mogoya dafa différencier la morale de la coutume. A la limite, la
jogodon « L’argent ne rend pas un homme parfait, c’est le bon bonne application de la coutume conduit à la
ladamuni comportement qui le rend parfait » morale. Dans nos sociétés traditionnelles, l’homme
- Dans la vie, il n’y a pas que l’argent, il y a la ‘noblesse du est surtout acte que pensée pure…l’acte soutend et
comportement’ qui est au dessus de tout est au dessus de tout. perpétue la morale. La morale résulte de la bonne
38.2 Moralité 38.2.1 Mogo tè mandiya i jogo ko Comportement conduite.
jogoya Une personne ne peut être aimée de tous, sans avoir un bon
comportement »
- C’est la conduite, la docilité d’une personne qui vous rend
aimable
38.3 Mœurs 38.3.1 Kàli-kà-syèn k’i fàga, à ka fisa jogojugu kà da i la ye 32. Honneur
jogow « Il vaut mieux jurer et se donner la mort que de reconnaître 31. Honte
une mauvaise action qu’on vous impute »
- Mieux vaut la mort que la honte
39.1 Proverbes et sentences : Il peut aussi signifier : se rencontrer, coïncider,
Réconciliation « ! » 39.1.1 Koro tè kun dimi na. réussir, mettre d’accord
fokaben « Le temps apaise les rancœurs ». En milieu bamanan, toute querelle ou mésentente
kèlèban - Les vielles personnes doivent êtres patientes. trouvait sa solution sous l’arbre à palabres où l’on
bèn ko kura - On finit par avoir besoin de la personne avec laquelle on tranchait les litiges. Le verdict prononcé et exécuté
s’était disputé incluait automatiquement la réconciliation. (se
- Se dit quand on voit des gens se réconcilier après une longue donner la main publiquement était symbole
dispute. d’engagement mutuel à l’entente).
39.1.2 Mogo ka kan kà kè dàga ye kà don tàsuma ni ji cè
« On doit accepter de se faire canari en se mettant entre l’eau et
le feu »
- On doit avoir de la patience comme médiateur, conciliateur
39.2 Entente/ Autres usages :
Accord - benbali : non–accord
ben - benbaliya : discorde, mésentente, brouille
Proverbes et sentences :
39.2.1 Bènbaliso bonya o bonya, don-kelen-tomon don
“Si grand que soit le village où règne la discord, sa ruine est
l’affaire d’un seul jour”
- Rien ne vaut l’entente. La mésentente mène à la ruine
DT 15 Série Grenier à mots 15.3: Grenier à mots Bamanan Dagné Jiginé 47
41. Paix 41.1 C’est une notion diversement interprétée en Afrique, la guerre Il ne faut le confondre avec « repos »
lafiya étant toujours un moyen d’élévation sociale et
d’enrichissement d’empires.
Autrefois, elle était basée sur la conquête dans nos sociétés
traditionnelles. La guerre ne conduisait pas à la paix
unilatéralement mais à la destruction presque totale du vaincu
« qui gagnera pas, perdra ; qui perdra, disparaîtra». Il faut
noter que même les puits étaient rendus inserviables : « ka
dugu filenkolonci, ka dakolonci » : anéantir le village comme
une vielle calebasse ou une vielle marmite.
41.2 Mogo tè –n-bolo-mà don tono ye, fo n’i ye bolibagato tèmèto
ye i la
« On ne reconnaît l’intérêt de la tranquillité que lorsqu’on voit
passer un fuyard »
- On n’apprécie la paix que lorsqu’on voit la guerre ailleurs.
42. Non-Violence 42.1 Les Bamanan condamnent la violence gratuite au sein de la Dans la Charte de Kurukanfuga, on peut noter :
gnakatabaliya communauté. Le respect des quatre « tons » de l’homme est la Article 13 : N’offensez jamais les Nyaras32.
source de la non-violence, notamment en ce qui concerne le Article 14 : N’offensez jamais les femmes, nos
voisinage. La non-violence n’est pas seulement importante mères.
dans le rapport entre les hommes seulement, mais aussi entre «?» Article 15 : Ne portez jamais la main sur une
les hommes et les animaux. C’est pour ainsi dire qu’on évitait femme mariée avant d’avoir fait intervenir sans
même de chasser à coups de cailloux le chien du voisin, à succès son mari.
fortiori les membres de sa concession.
32
Les Nyaras sont les paroliers attitrés par la société.
DT 15 Série Grenier à mots 15.3: Grenier à mots Bamanan Dagné Jiginé 49
« ? » Proverbes et sentences :
62.1.1 Mogo bè sariya tigè Ala bonya fè
« On doit juger de façon à faire honneur à Dieu. »
- Le juge et le législateur doivent se conformer aux lois
divines
62.1.2 Mogo tè fili nanbarako mà 66.2 Honnêteté
« On reconnaît quand il y a de la magouille »
- Nul n’est censé ignorer ce qui est normal ou anormal
- Nul n’est censé ignorer la loi
- laada wili se comprend par toute violation de la coutume
DT 15 Série Grenier à mots 15.3: Grenier à mots Bamanan Dagné Jiginé 51
personne
«!» 66.1.4 Ni mogo min ye i ka bonkonotakurun sisima bèe labo, i nà 12. Tolérance
tila kà konogan 72. Diversité
« Celui qui veut enlever de sa case toutes les bûches qui font
de la fumée, sera finalement bien embarrassé. »
- Il n’y a pas de société parfaite, il faut supporter les défauts
d’autrui si l’on ne veut pas se retrouver tout seul ;
- On ne peut chasser de chez soi tous les vicieux sinon, la
famille tombera en ruines.
66.1.5 Ni tila ma kè Nci kunko la, Nsan ta tè gnèbo
« Tant qu’on en aura pas terminé avec le problème de Nci,
celui de Nsan ne sera pas réglé ».
(Nci= fils aîné ; Nsan= 2éme fils)
- Les coutumes concernant les aînés sont réglées avant celles
des cadets
- Ordre hiérarchique ou d’urgence à accepter
- On cherche normalement une épouse pour Nci avant d’en
chercher une pour Nsan
66.1.6 Ko mona ni kan min ye, à jègè kà tila n’o kan ye
« Si on a convenu de faire la pêche de telle manière, il faut
partager le poisson selon cette convention. »
- On doit respecter les termes d’un accord
66.2 Honnêteté «!» Proverbes et sentences :
tilennenya 66.2.1 Ali ni sonzan kèr’i jugu ye, a fo k’a bè boli.
laadiriya « Le lièvre, même s’il est ton ennemi, reconnais qu’il court
bien ».
- Il faut avoir le courage et l’honnêteté et la bonne foi de
reconnaître le mérite de ton prochain
66.2.2 Sogo tè faga nanbara kàn
« On ne peut tuer de gibier en étant malhonnête »
- Le chasseur a beaucoup d’interdits, en particulier, il ne doit
pas commettre l’adultère
- La réussite ne va pas sans l’honnêteté
67. Justice Proverbes et sentences : 66 Equité
kiiri 67.1 Ton bè fen gnè, borè yèrè bè fen gnè 72. Diversité
kiiritigè « La sacoche a un rôle, le grand sac aussi »
- même chose pour les personnes ; il n’ya pas à estimer l’une
plus que l’autre ; elles peuvent avoir les même qualités
DT 15 Série Grenier à mots 15.3: Grenier à mots Bamanan Dagné Jiginé 54
69.2 Fèn bèe bè kamalenya na fo bilàbàlità 66.2 Honnêteté, certaines ethnies, certaines castes ou certaines
« Le jeune homme vigoureux peut tout, sauf prendre ce qui ne 38. Morale familles.
lui appartient pas »
- Pouvoir physique, interdiction morale Dans la société Bamanan, les méfaits étaient et
demeurent sanctionnés selon une échelle de valeur
allant du sermon verbal aux amendes en nature, au
châtiment corporel, à l’exil ou à la mort.
Nos sociétés traditionnelles ne connaissaient pas la
prison qui est d’importation européenne ou arabe.
70. Bien commun Proverbes et sentences : Bien appartenant à la communauté
foroba «!» 70.1 Forobakùma bè fo forobabùlon kono La culture Bamanan cultive le devoir de partager
Un palabre concernant la communauté se fait dans la salle de ses biens et ressources. Pour les Bamanan, les
réunion commune. hommes sont inégalement pourvus car tout travail
- Il faut éviter les apartés quand il s’agit d’une affaire qui n’est pas forcément rentable ; ce qui fait que nous
concerne tout le monde nous devons de partager ce que nous avons. Qui
70.2 Ni ka mogo tè foroba dumini tilayoro la ; n’i ka na ma dèsè, i que tu sois, ton bien profitera à quelqu’un d’autre
niyoro bè dogoya que toi même. Le bien est commun : « an jè do »
« Quand tu n’es pas représenté par l’un des tiers à la s’entend-on répondre, quand l’étranger, après le
répartition du repas collectif, si ta sauce n’est pas insuffisante, repas, l’on dit merci à son hôte. « i ta do » : c’est à
ta part le sera. toi, une manière de répondre à la gratitude de
- Dans toute assemblée, il faut être représenté pour bénéficier l’étranger.
des avantages communs. Un sage dépositaire du savoir autochtone a dit,
70.3 Ni forobàmisi ye forobà tignè, kuma caman t’o ko la nous citons : « si le monde vous parait
« Si la vache appartenant à la collectivité gâche le champ énigmatique, jugez le dans le devenir de l’homme
communautaire, il n’y a pas grand-chose à dire ». généreux, altruiste mais aussi de l’homme
- Quand tout le monde est impliqué, on se tait. diabolique, misanthrope surtout au dernier
moment de leur vie ou à posteriori ».
71. Universalité Etymologie : Nous « ignorons » cette notion. Notre univers
dignèlakow 71.1 Vient de l’arabe « dunya » qui veut dire monde, univers s’arrête à une zone géographique, sociologique et
ethnique. L’univers chez le bamanan est bien
Proverbes et sentences :
différent de chez le sonrhai ou de chez le dogon…
71.2 Dignè kèlen moni ye, sonkala tè soro k’à mùnu
« Le monde est devenu de la bouillie, mais on ne trouve pas de
mouvette pour la remuer »
- Le monde change vite ; il faut s’adapter pour arriver à
quelque chose
- On ne respecte plus les lois
71.3 Dignè t’a dili koro kan tun
« Le monde n’est plus relié à sa vieille racine »
- Il n’est plus régi par les anciennes règles, qui sont bafouées
DT 15 Série Grenier à mots 15.3: Grenier à mots Bamanan Dagné Jiginé 56
- la suffisance, l’enflure, la fermeture sur soi- même, le « nata », la méchanceté, le rapportage, l’isolement : « kelenna sigi ye gwalo ye »,
malheur à qui habite et vit seul.
- « débrouille –toi, je me débrouille »
- la volonté farouche de domination à sens unique ! Valeurs communautaires, personnelles et dialogales résument, pensons-nous, la teneur
de l’éthique bamanan.
5. Conclusion
1 – La langue bamanan contient effectivement tous les mots du panier relatifs aux droits de l’homme en général et aux droits culturels en
particulier. Cependant, la compréhension de ces mots se fait plus facilement lorsque l’entrée se fait dans la langue bamanan. Il est à noter
spécialement la part importante que jouent les proverbes et sentences dans la compréhension des mots et concepts. Du « grenier à mots », nous
avons aussi obtenu un « grenier à proverbes ».
2 – Il y a effectivement des connexions entre les termes de point de vue anthropologique, juridique/éthique et ontologique dans la langue
bamanan ;
3 – Notre objectif pour l’étude se trouve être de répondre aux exigences et spécificités qu’elle peut susciter. En effet, vue les particularités
lexicales sous l’angle : origine et étymologie des mots, stratification chronologique avec des recueils d’emprunts à travers les autres langues du
monde, nous sommes en demeure de souligner que ces aspects restent inexplorés par les institutions de notre pays dont relèvent les questions de
langues. Nous soulignons une intime comparaison de la langue bamanan avec d’autres langues comme l’arabe par exemple.
4 – La détermination de l’origine des lexies se heurte à plusieurs difficultés. Il importe ainsi de distinguer entre la langue source de la lexie et la
langue à laquelle appartient l’étymon. La coexistence et la parenté entre les langues font qu’elles ont en commun des désignations soit par
héritage, soit par emprunt. Il ne faut pas non plus négliger l’aspect des réemprunts, mots dont le sens est distinct de celui de l’étymon, témoigne
qu’ils sont passés par une autre langue.
5 – Au phénomène d’emprunt, il faut ajouter celui de mode consécutif aux évènements ou circonstances de la vie politique, économique,
militaire, sociale fournissant des fois des repères pour situer la période de l’emprunt de certains mots.
6 – À part quelques mots empruntés à l’arabe, nous constatons que tous les termes et concepts développés contribuent à la compréhension et
à la promotion des droits culturels auprès du peuple bamanan.
DT 15 Série Grenier à mots 15.3: Grenier à mots Bamanan Dagné Jiginé 59
6. Annexes
L’alphabet bamanan actuel comporte 27 lettres dont 7 voyelles et 20 consonnes. L’ordre alphabétique est celui qui a été présenté aux « Journées
d’études sur les langues maliennes » organisées à Bamako du 10 au 20 décembre 1979 à savoir :
a , b , c , d , e , ε , f , g , h , i , j , k , l , m , n , ɲ , ŋ , o , ɔ , p , r , s, t , u , w , y , z.
CONSONNES ET SEMI-VOYELLES
labiales dentales palatales vélaires postvélaires
Occlusives
sourdes p t c k
sonores b d j g
Constrictives
sourdes s
f h
sonore (z)
Nasales m n ɲ ŋ
Latérale
Simple i
Vibrante r
Semi-voyelles w y
DT 15 Série Grenier à mots 15.3: Grenier à mots Bamanan Dagné Jiginé 60
VOYELLES
Orales Nasales
i u in un
e o en on
ε ɔ εn ɔn
a an
Publié par Youssouf Tata Cissé dans "Soundjata, la Gloire du Mali", éd. Karthala, ARSAN, 1991.
La Charte du Manden ou Manden kalikan, aurait été proclamée en 1222 par Soundjata, fondateur de l'Empire du Mali, et ses pairs. Elle reste la
référence majeure des sinbo, grands maîtres chasseurs du Manden.
6.3 Bibliographie
Bailleul, C. Sagesse Bamanan (Proverbes et sentences), Bamako, Editions Donnya, 2005, 463 p
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