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Cours Chimie Organique 2

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Clovis Darrigan Chapitre 2 - Page 1

Chapitre 2 : Entités organiques réactives

Il existe 4 types connus d’espèces organiques dans lesquelles le carbone a une valence de
2 ou 3. Ce sont des entités habituellement de très courte durée de vie (de 10-12 à 10-3 s) et
qui sont très rapidement transformées en molécules stables. On peut distinguer :

• Les carbocations ou ions carboniums (positifs) : C

• Les carbanions (négatifs) : C

• Les radicaux libres (nombre impair d’électrons, neutres) : C•

• Les carbènes (neutres) : C

1. Les carbocations (ou ions carboniums)


1.1. Structure
Le carbone n’a que 3 liaisons, donc une hybridation sp2. Ceci implique une structure
plane avec une orbitale vacante pz qui va pointer de part et d’autre du plan.

C’est par cette orbitale que les carbocations font leur attaque électrophile. Celle-ci
s’effectura donc orthogonalement au plan des 3 liaisons mais de part et d’autre.
1.2. Stabilité
La stabilité d’un carbocation est favorisée par toutes les influences électroniques
permettant de diminuer la charge positive sur le carbone central par apport de charges
négatives (effet inductif) ou bien par dispersion de cette charge sur les atomes voisins
(effet mésomère).
En conséquence, les carbocations tertiaires seront plus stables que les secondaires, eux-
même plus stables que les primaires.
Exemple :
H3C  <  R–CH2  <  R–CH–R  <  R3C

Ou encore, un carbocation allylique sera plus stable que le carbocation saturé


correspondant.
Exemple :
CH3–CH2–CH2  <  CH2=CH–CH2 ↔ CH2–HC=CH2

D’autre part, la stabilité est accrue par la grosseur du substituant : si les substituants sont
gros, le départ d’un d’eux permet une décompression stérique, d’où diminution de
l’énergie potentielle. Règle de Bredt : si le carbocation ne peut pas être plan, il ne peut
pas exister.
Clovis Darrigan Chapitre 2 - Page 2

Exemple :
– Cl
Cl
n’existe pas

1.3. Modes de formation


• Addition d’un acide à une double liaison :

+  H C C H

C O +  H C O H C O H

C N +  H C N H

C N H +  H C NH2

• Action d’un acide sur un dérivé oxygéné de type alcool ou éther :


H
R O H +  H R O R   + H2 O
H

• À partir des dérivés halogénés :


- par ionisation spontannée dans un solvant polaire :
RR Cl R +  Cl

- par action d’un acide de Lewis :


O

R C Cl +   AlCl3 R C O +  AlCl4

- par décomposition des sels de diazonium :

R N N N N +  R

1.4. Évolution :
Le carbocation est donc une structure instable (10-3 à 10-10 s). Il va évoluer très
rapidement selon l’une des 4 façons suivantes :
• Il peut fixer une espèce possédant une paire d’électrons libres chargé
(anion) ou non (base de Lewis).
Exemples :
R⊕ Cl — R—Cl

H H
– H⊕
R⊕ O R O⊕ R OH

H H
Clovis Darrigan Chapitre 2 - Page 3

• Il peut perdre un proton sur le carbone en alpha pour générer une double
liaison p.
⊕ – H⊕

• Il peut s’additionner à une double liaison pour donner un autre carbocation.

R⊕ R C C ⊕

• Il peut se réarranger par migration d’un hydrure d’un alkyle ou d’un


phényle pour donner un nouveau carbocation. C’est une transposition (le squelette σ est
changé).
R R
⊕ ⊕
C C H C C H

H H

2. Les carbanions
2.1. Structure
Le carbone central a 5 électrons périphériques. Il est hybridé sp3, sa structure est donc
pyramidale. Les carbanions sont isoélectriques des amines. De plus, le doublet n’est pas
fixe, la molécule s’inverse plusieurs milliers de fois pas secondes.
Θ a b
C c
c
a b

2.2. Stabilité
La stabilité d’un carbanion est favorisée par toutes les influences électroniques permettant
de diminuer la charge négative sur le carbone central par apport de charges positives
(effet inductif) ou bien par dispersion de cette charge sur les atomes voisins (effet
mésomère).
Exemples :
Θ
C Cl
Cl
est assez stable (effet –I du chlore)
Cl

Θ
Θ
CH2 CH2

Θ CH2 CH2

Θ
Clovis Darrigan Chapitre 2 - Page 4

H
Θ

Anion cyclopentadiényle : système aromatique plan très stable

En conséquence, les carbanions primaires seront plus stables que les secondaires, eux-
même plus stables que les tertiaires.
2.3. Modes de formation
• Les carbanions peuvent résulter de l’ionisation de composés
organométalliques par départ électrofuge du métal :
δ− δ+ Θ ⊕
R—M  R + M
• Arrachement d’un proton sous l’action d’une base
+ B–
H + B—H

La liaison C—H d’un hydrocarbure saturé ne peut pas donner directement de carbanions.
Il faut, pour que cela soit possible, que la liaison C—H soit affaiblie : on dit qu’il faut
que l’hydrogène soit activé. Ceci est réalisé par la présence de groupement attracteur de
polarisation permanente.
Exemples :
O
Carbonyle Nitrile
C C C C N

H H

Ceci est particulièrement vrais lorsque cette activité est exhaltée par la présence de
plusieurs groupements activants.
O H aussi acides que O
l’acide éthanoïque
Et O C Et O C
H
Malonate + H⊕
C C H
d’éthyle H
Et O C Et O C

O O

Une telle réaction marche particulièrement bien dans le cas des b–dicétones, des
b–esters…
2.4. Évolution
Les carbanions réagissent essentiellement pas addition sur des espèces présentant un centre
positif. En particulier :
• Sur le carbone d’un carbonyle :
O
O OH
Θ + H⊕
CH2 O
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• Sur le carbone d’un carboxyle (Réaction de Claisen) :


Θ
O O O O

Et Θ Et Et Et
O CH2 O O O

O O

Et + Et O Θ
O
Acéthylacétate d’éthyle Anion éthanolate

• Sur une double liaison conjuguée avec un carbonyle :


O O

Et O C
O Et-O O-H
Anion malonate + H⊕
C H
d’éthyle
Et-O
Et O C

Énol en équilibre avec la
O O
O Θ cétone correspondante

Réaction de Michaël

3. Les radicaux libres


3.1. Structure
On appelle radicaux libres, les espèces comportant un électron célibataire.
Exemples : Cl• R—O• H—O•
Les radicaux libres carbonés ont un état d’hybridation sp3, donc une structure
pyramidale :

C

3.2. Stabilité
Comme les espèces précedentes, les radicaux libres sont stabilisés par les effets inductifs,
mésomères, et la décompression stérique.
En conséquence, les radicaux libres tertiaires seront plus stables que les secondaires, eux-
mêmes plus stables que les primaires.
Exemples :
R3C• > R2HC• > RH2C• > H3C•

•CH
CH2 2

• CH CH
2 2

Clovis Darrigan Chapitre 2 - Page 6

3.3. Modes de formation


On rompra de façon homolytique d’autant plus facilement une liaison covalante, que cette
liaison est plus faible énergétiquement et qu’elle est plus symétrique.
Quelques valeurs d’énergie de liaison pour quelques composés :
Liaison Énergie Liaison Énergie
H—H 435 kJ/mol H3C—F 451 kJ/mol
F—F 158 kJ/mol H3C—I 234 kJ/mol
Cl—Cl 242 kJ/mol (H3C)2CH—H 357 kJ/mol
Br—Br 192 kJ/mol H3C—CH3 367 kJ/mol
I—I 150 kJ/mol Ar—H 430 kJ/mol
H—F 568 kJ/mol RO—OR 183 kJ/mol
H—Cl 430 kJ/mol HO—OH 213 kJ/mol

On peut rompre ces liaisons par chauffage plus ou moins grand ou bien par irradiation.
Des radicaux libres peuvent donc être formés :
• Par addition d’un radical libre sur une double liaison :

R• R C C•

• Par clivage homolytique de la liaison C—C (ou C—H) :

• •

• Par rupture d’une liaison Z—Z (rupture très facile). En particulier X—X
ou bien R–O—O–R.
• Par coupure d’une liaison C—X par l’action d’un métal qui joue le rôle de
donneur d’électrons :
Exemple : Réaction de Würtz.
2 R—Cl + 2 Na• → 2 R• + 2 Na + + 2 Cl –

3.4. Évolution
• Réaction de couplage : Z• + •Z Æ Z—Z
Exemples : - Réaction de Würtz.
2 R—Cl + Na → 2 R• (+ NaCl) → R—R

- Réaction de Kolbe : électrolyse des carboxylates.


O O
— e– — CO2 *2
R Oxydation anodique
R R• R—R

OΘ O•

• Réaction de Substitution Radicalaire :


Exemples : - Halogénation Radicalaire des alcanes.
Clovis Darrigan Chapitre 2 - Page 7

hν ou Δ
Initiation C l2 2 Cl•
Propagation Cl• + H–CH3 HCl + •CH3
H3 C• + Cl2 CH3 –Cl + Cl•
Terminaison Cl• + •CH3 CH3 –Cl
H3 C• + •CH3 CH3 –CH3
Cl• + Cl• C l2

- Nitrosation au niveau d’un carbone saturé.



Cl N O Cl• •N O
Chlorure de nitrosyle Radical nitroso

• Cl—N=O
+ Cl• HCl + H N O + Cl•

Nitrosocyclohexane

Cette réaction est continue : une fois amorcée, elle ne se termine que lorsque l’un des réactifs est épuisé.
Le nitrosocyclohexane s’isomérise en oxime :
OH
H
N
N O

Cette oxime peut être transposés en milieux acide (Transposition de Beckman) :


OH H H
N N
+ H⊕
N N O⊕

H OH O

On obtient une amide qui, par hydrolyse acide, donne l’acide aminé correspondant. Cet acide aminé peut
polymériser pour donner une polyamide : le nylon-6.
H O O
N – n H2 O
H2 O / H⊕ (CH2 )5 N
H N (CH2 )5

H OH H
O n

• Réaction de Substitution Allylique par NBS ou NCS :


Le NBS (N-bromosuccinimide) à la propriété de substituer un hydrogène par un brome
sur le carbone en alpha d’une double liaison.
Br

N
O O

Le mécanisme est complexe mais passe par des radicaux Br•. Avec le NCS (N-
chlorosuccinimide), on obtient le dérivé chloré.
Exemples :
NBS
CH3 —CH2 —CH2 —CH=CH2 CH3 —CH2 —CHBr—CH=CH2
Clovis Darrigan Chapitre 2 - Page 8

CH3 CH3
NBS Br
S S

H
NBS

Br

• Réaction d’Addition Radicalaire sur les doubles liaisons :


C’est une addition de type Karash (anti-Markovnikov).
Première étape :
O O O

Δ Δ
R O O R 2 R O• 2 R• + CO2

R• + HBr RH + Br•

Le radical Br• est un électrophile et va donc se fixer sur le carbone le plus négatif.
Deuxième étape :
CH3 —CH2 —CH=CH2 + •Br CH3 —CH2 —CH—CH2 B r

CH3 —CH2 —CH—CH2 Br + H—Br CH3 —CH2 —CH2 —CH2 Br + Br•


• Réaction d’Addition Radicalaire sur les cycles aromatiques :


Exemple :
H Cl
Cl H
H Cl
3 Cl2
hν Δ
Cl H
H Cl
Cl H

• Réaction de Réduction des esters, des cétones et des aldéhydes par le


sodium dans l’éthanol (réaction de Bouveault et Blanc) :
O O Θ O Θ
Na Na
R OEt R OEt R OEt

Θ Le dianion
arrache

À partir d’un O O Θ
un H⊕ à
l’éthanol
ester, on arrive
C2 H5 —O—H
à un aldéhyde R H R OEt

H
Clovis Darrigan Chapitre 2 - Page 9

O O Θ O Θ
Na Na
R H R H R H

Θ Le dianion
arrache

À partir d’un O Θ
un H⊕ à
l’éthanol
aldéhyde, on arrive
H⊕ C2 H5 —O—H
à un alcool R—CH2 —OH R H

La réaction peut suivre un cours différent. L’ion-radical formé peut se dupliquer :


Θ Θ Θ Θ
O O O O O O

R • • R R R R R
α-dicétone
OEt OEt OEt OEt

Les a-dicétones en présence de sodium vont subir 2 fois la réaction :


Θ Θ Θ O O Θ
O O O O
+ 2 Na
R R R R R R
• •

HO O
HO OH
Équilibre 2 H⊕
R céto-énolique
R R R
H Acyloïne

• Réaction de Duplication des cétones en présence de Na ou Mg :


O Θ O Θ OH OH
O O Θ
Na ou Mg *2
R R + H⊕ R R
R R’ R R’

R’ R’ R’ R’

On obtient un diol.
• Réaction de Polymérisation Radicalaire :
Ces réactions, industriellement très importantes, sont utilisées dans la fabrication des plus
importantes matières plastiques (polystyrène, polyéthylène, polypropylène, PVC…). Le
monomère doit obligatoirement comporter un complexe p succeptible de s’ouvrir.
H2 C=CH—Ar H2 C=CH—Ar H2 C=CH—Ar
R• R—CH2 —CH—Ar R—CH2 —CHAr—CH2 —CH—Ar etc
• •

4. Les carbènes
Ce sont des entités réactives divalentes non-isolables, que l’on peut considérer comme
ayant à la fois un doublet libre et une lacune électronique. Les carbènes sont globalements
électrophiles. Ils attaquent essentiellement les doublets π.
4.1. Structure et Stabilité
Il y a deux états électroniques possibles pour les carbènes :
• État singulet, dans lequel les spins des deux électrons du doublet sont
antiparallèles. Multiplicité : m = 2*(1/2–1/2)+1 = 1. Le carbone central est hybridé sp2
(structure plane) :
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• État triplet, dans lequel les spins des deux électrons ont le même spin. La
multiplicité est : m = 2*(1/2+1/2)+1 = 3. Le carbène est donc dégénéré, chaque électron
occupe une orbitale p différente. Le carbone central est hybridé sp (structure linéaire) :

On peut penser que l’état singulet est plus réactif que l’état triplet.
Les carbènes les plus courants sont :
H—C—H Cl—C—Cl R—C—H R—CO—C—R’

4.2. Modes de formation


Les carbènes sont obtenus par des réactions d’alpha-élimination résultant d’un départ
électrofuge et d’un départ nucléofuge successif. On peut les former :
• Par deshydrohalogénation par des bases fortes sur des composés halogénés
possédants un hydrogène mobile.
Exemples :
H
Θ
+ Θ O–H – Cl Θ
Cl Cl Cl C Cl
Cl (– H2 O) Cl
Cl Cl

H
+ Θ O–H Θ – Cl Θ
C Cl
Cl Cl
Cl Cl

• Par deshalogénation par le zinc de composés diiodés.


Exemple : Réaction de Simmons-Smith.
I
Zn
H C H + ZnI2
H
I
H

4.3. Évolution
Les carbènes donnent surtout des réactions dites d’insertion.
Exemples :
La réaction avec
CH2 l’éthylène donne le
cyclopropane

CH2

[4,1,0]Bicyclohepta- Toluène
2,4-diène
(Norcaradiène)
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CH2
H CH3

CH2
S S

Réaction de Reiner-Tiemann : il s’agit de la formation d’aldéhyde phénolique à partir de phénol :


HO Θ CCl2
OH O O

Θ H
C
Θ Cl
Cl

– H2 O + H2 O
OH O Θ O Θ
H⊕

O H H
HO Cl
H OH gem-diol Cl gem-dichlorure

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