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Cas pratique

Besoin en puissance d’une chaufferie


Le surdimensionnement fréquent des anciennes chaufferies trouve son origine dans le fait que
les chauffagistes ou les bureaux d’étude avaient pour habitude de prendre des « marges » pour
« être sûrs ». Les anciennes chaufferies sont pour cette raison souvent plus puissantes que le
besoin réel. Ainsi, personne n’appelle jamais son chauffagiste pour se plaindre du froid et les
logements sont trop souvent en surchauffe alors que la loi « interdit » en principe de se chauffer
à plus de 19 °C ! Pour cette raison, les chaudières fonctionnent trop souvent à charge partielle
avec un rendement et une régulation dégradée. Il n’est pas rare que la chaufferie soit en fait
composée de deux chaudières de même puissance, une seule d’entre elle étant suffisante pour
assurer le besoin et la deuxième étant, en pratique, une chaudière de secours. Par habitude,
lorsque le chauffage thermodynamique a fait son apparition, les bureaux d’étude ont continué à
surdimensionner les équipements avec les conséquences désastreuses qui en ont résulté pour la
régulation des pompes à chaleur et la progression de cette filière. Il faut dire que déterminer les
besoins en énergie thermique d’un immeuble, en effectuant un bilan énergétique préliminaire
avant de procéder à sa rénovation thermique, n’est pas simple. Pour éviter les dépenses inutiles
et améliorer les performances de la chaufferie, il est important de savoir quel est le « besoin
thermique réel » avant d’effectuer la rénovation. L’approche décrite ci-après aide à faire le bilan
thermique préliminaire d’un immeuble équipé d’une ancienne chaufferie. Ce bilan préliminaire
peut éventuellement être effectué par le conseil syndical d’une copropriété en fonction des
consommations communiquées par le syndic. Cette pré-étude n’a pas vocation à se substituer à
l’audit réalisé par un BE spécialisé. Il peut inciter une copropriété à s’orienter vers un projet de
rénovation global plutôt que vers une somme d’actions ponctuelles. Les demandes
d’informations au syndic telles que les consommations d’eau et de combustible servent de base
à cette pré-étude. Elle peut ensuite servir de base de réflexion à un BE extérieur qui pourra alors
s’engager sur un résultat plus précis en établissant un « audit » thermique officiel basé sur des
mesures complémentaires faites sur site. Il n’est pas toujours facile de définir la répartition des
énergies entre le sanitaire et le chauffage lorsque la chaufferie assure ces deux fonctions.
Lorsque l’on est dans ce cas, quelques relevés et hypothèses peuvent aider à établir cette
répartition, par exemple :
- la connaissance de la consommation annuelle totale de fioul (FOD) ou de gaz naturel (GN)
par la copropriété ainsi qu’une évaluation de cette consommation en dehors de la
période de chauffe ;
- l’équivalent thermique d’un litre de FOD ou de 1 m3 de gaz naturel (environ 10 kWh) ;
- la consommation annuelle d’eau chaude en m3.

Pour fixer les idées et comprendre le raisonnement qui conduit à une première évaluation des
besoins thermiques, prenons l’exemple d’un immeuble de 60 appartements consommant
annuellement 120 m3 de fioul. Cette consommation correspond à une énergie thermique de
1 200 000 kWh compte tenu de l’équivalent thermique lors de la combustion du fioul de
10 kWh/litre (ce que l’on appelle le PCI ou pouvoir calorifique inférieur pour des chaudières
anciennes sans condensation). Sur cette base, c’est au rendement près de la chaudière, l’énergie
que cette dernière envoie annuellement sur le réseau hydraulique.

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Cas pratique

Dimensionnement de la future génération


Les pertes thermiques dans les tuyauteries peuvent constituer une partie importante du besoin
dans un réseau chauffage et sanitaire. Ces pertes expliquent en partie pourquoi l’énergie
thermique utile pour l’ECS peut être, dans les cas extrêmes, aussi importante que celle du
chauffage. Dans un immeuble comme celui faisant l’objet de ce bilan simplifié, c’est environ 2 km
de tuyauteries qui sont mis en place pour envoyer l’énergie thermique vers les radiateurs ou le
sanitaire. Ces tuyauteries concernent celles du réseau de chauffage (les plus grosses) et celles du
réseau sanitaire (les plus petites). La partie du circuit d’eau chaude sanitaire logée à l’intérieur du
bâti participe heureusement au chauffage d’un immeuble pendant la période de chauffe mais,
pour l’essentiel, l’énergie est souvent perdue en raison des déperditions thermiques par défaut
de calorifugeage de ces tuyauteries. Pour assurer un dimensionnement correct de la nouvelle
génération, il faut tenir compte du fait que cette dernière aura des performances supérieures à
l’ancienne en raison d’un dispositif de condensation ou mieux d’un chauffage thermodynamique
pouvant être trois à quatre fois plus performant que la combustion. En raison de son rendement,
la chaudière envoie annuellement sur le réseau hydraulique une quantité d’énergie inférieure
aux 1 200 000 kWh déterminés à partir de la consommation de fioul et de l’équivalent thermique
d’un litre de FOD. Le bilan énergétique préliminaire doit en effet tenir compte du rendement des
vieilles chaudières en fin de vie ainsi que des pertes thermiques dans les tuyauteries. On peut
avoir intérêt à s’informer chez le constructeur de l’ancienne chaudière de son rendement en
communiquant la date d’achat et sa référence. La débauche d’énergie actuelle dans les
immeubles anciens a donc deux causes principales : le rendement modeste des chaudières
anciennes qui peut être proche de 75 % voire inférieur en mi-saison, leur mode de marche ou le
sérieux apporté à leur entretien et à leur réglage. Elle est aussi due au fait qu’une partie
importante de l’énergie thermique produite au départ de la chaufferie est perdue dans les
réseaux de tuyauteries horizontales hors bâti, ceci particulièrement pendant l’hiver, période
pendant laquelle ces tuyauteries, pouvant être d’un diamètre important pour le chauffage, sont
dans un environnement plus froid que les tuyauteries verticales. Pour affiner la répartition des
déperditions thermiques entre les tuyauteries verticales situées à l’intérieur du bâti et les
tuyauteries horizontales hors bâti, on a tout intérêt à faire valider ces pertes par un BE spécialisé
qui établira avec plus de précision comment se répartit la dégradation des performances entre le
rendement des anciennes chaudières et les pertes tuyauteries en liaison avec le calorifugeage.
Certaines tuyauteries ECS sont de plus difficiles à isoler après coup. Particulièrement celles
circulants dans les gaines verticales difficilement accessibles.
Tuyauteries verticales Tuyauteries horizontales
Intérieures au bâti Extérieures au bâti
Énergie perdue Énergie perdue
Eau chaude sanitaire
en dehors de la période de chauffe en cave
Énergie récupérée Énergie perdue
Chauffage
pendant la période de chauffe en parking
Nota :
L’énergie dissipée par défaut de calorifugeage dans les tuyauteries horizontales est totalement perdue
alors qu’elle est récupérée pendant l’hiver pour le chauffage avec les tuyauteries verticales.
On peut estimer les pertes thermiques d’une tuyauterie en acier non calorifugée à 10 watts/m² et °C.
Une consommation de voisine de 5 m3 de fioul par mois hors période de chauffe permet
d’évaluer l’énergie annuelle totale consommée pour assurer la fonction eau chaude sanitaire !
Elle est dans le cas présent de 600 000 kWh, soit la moitié de l’énergie totale consommée !
Les surfaces étant proportionnelles à l’énergie on peut écrire :

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Cas pratique

600 000 = 0,5 x 220 x 24 x Pc = 365 x 24 x Pecs


Soit Pc = 227 kW et
Pecs = 68,5 kW et P = Pc + Pecs = 296 kW.
Cette puissance pourrait être sensiblement la puissance utile de la nouvelle chaufferie, si l’on
passe sous silence la distorsion de la courbe monotone vers le haut lorsqu’il fait très froid.

Courbes de répartition énergétique 50-50 % entre l’ECS et le chauffage. La boucle d’eau


chaude, les pertes par défaut de calorifugeage et le mauvais rendement des chaudières sont
souvent la cause d’une dépense anormale pour l’ECS.

La satisfaction du besoin en puissance


- Avec le débit de combustible Qc et le PCI
La puissance P émise par une chaudière lors de la combustion est égale à P = Qc x PC x Rc
Qc étant le débit de combustible, PC son pouvoir calorifique, et Rc le rendement de la chaudière.
Par exemple, le débit de fioul circulant dans le gicleur d’un brûleur ancien est l’image de la
puissance délivrée par la chaufferie. Ceci en raison du pouvoir calorifique inférieur72 (PCI) du fioul
lors de la combustion voisin de 12 kWh par kg (ou de 0,84 x 12 = 10 kWh/litre) compte tenu de la
densité du fioul (0,84). Pour trouver la puissance P (exprimée en kW) délivrée par une chaufferie
fioul, il suffit de multiplier le débit de fioul Qf circulant dans le brûleur (exprimé en litres/heure)
par le pouvoir calorifique inférieur PCI du fioul :

On a P = Qf x PCI

Si par exemple la consommation de fioul est de 6 litres/heure en été, lorsque la chaufferie ne


sert qu’à assurer la fourniture de l’ECS, cela signifie qu’au rendement près des chaudières c’est
une puissance de 60 kW qui est utilisée pour assurer cette fonction, puissance très importante
comparativement au besoin thermique réel pour chauffer l’eau froide. Cette méthode de calcul
pour évaluer la puissance est une alternative intéressante à la méthode de calcul par les DJU

72
On parle de PCI (pouvoir calorifique inférieur) ou de PCS (pouvoir calorifique supérieur). Le rendement de la
combustion étant sensiblement amélioré avec la récupération de la chaleur latente de l’eau contenue dans les gaz
brûlés réalisée avec les chaudières à condensation.
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Cas pratique

décrite précédemment. Le fait que la température entre le jour et la nuit se modifie dans le
temps en compliquant les relevés des DJU journaliers et que le débit de fluide n’est pas toujours
facile à évaluer avec précision explique les différences. À titre d’information, les consommations
ci-dessus concernent une chaufferie équipée de deux anciennes chaudières fioul de 400 kW qui
consommaient en moyenne 10 m3 de fioul/mois (120 m3 par an).

- Avec le débit Qf du fluide caloporteur et son enthalpie E


On a P = Qf x E En multipliant des kg/s par des kilojoules/kg, on
Si Qf en kg/s et E kJ/kg on a P kW obtient des kilojoules par seconde ou des kW

Si par exemple on souhaite développer une puissance P de 240 kW au condenseur d’une pompe
à chaleur utilisant un fluide caloporteur ayant une enthalpie E de 192 kJ/kg
(Voir pages 377 et 455), le débit du fluide caloporteur devra être égal à :
Qf = P / E = 240 / 192 = 1,25 kg/s
La connaissance de ce débit massique, ainsi que le choix d’un temps de cycle compatible avec un
bon fonctionnement de la pompe à chaleur, sont des éléments importants qui permettent au
constructeur de définir le volume de fluide caloporteur contenu dans le circuit fermé et la taille
des composants constituant le circuit.

Calcul du surdimensionnement avec les DJU et le facteur de marche


Les deux approches précédentes donnent une bonne idée du besoin thermique réel. D’autres
méthodes sont parfois utilisées pour estimer l’importance de ce besoin. Elles conduisent
généralement à majorer sensiblement la puissance par rapport au besoin réel.

Cette première méthode recommandée par la Suisse consiste à vérifier le facteur de


marche – arrêt du brûleur de l’ancienne chaufferie qui fonctionne le plus souvent en mode tout
ou rien et ceci pour deux, voire trois températures extérieures assez basses. Si la chaudière ne
fonctionne que 30 % du temps alors que la température extérieure est de -5 °C, cela signifie que
la puissance utile dans ces conditions n’est que le tiers de la puissance installée à charge du BE
en charge du dossier de tenir compte de l’amélioration des performances du nouveau
générateur de chaleur pour établir la puissance nominale requise de la nouvelle génération. La
deuxième méthode utilise les notions de degrés jour unifié (DJU). Elle a été évoquée
précédemment à l’occasion de l’estimation du prix de l’eau chaude. La connaissance des DJU de
la région dans laquelle se trouve le bâtiment, ainsi que sa consommation annuelle en
combustible, permet de se faire une bonne idée de la puissance utile moyenne nécessaire pour
le chauffage. Supposons par exemple que l’immeuble soit situé en région parisienne avec un DJU
de 2 200 °C. Compte tenu de la période de chauffe voisine de 220 jours (7 mois de mi-octobre à
mi-mai), la différence moyenne de température entre l’intérieur de l’habitation et l’extérieur est
de 10 °C pendant la période de chauffe. Puisque la chaufferie consomme pendant cette période
60 m3 (pour le chauffage) + 5 m3 x 7 (mois) = 95 m3 de fioul correspondant à 950 000 kWh, la
puissance moyenne utile est voisine de 950 000 kWh/5 110 h = 185 kW. En supposant que la
chaufferie doive être dimensionnée pour assurer le besoin thermique lorsqu’il fait -5 °C, il faudra
donc une puissance 2,4 fois supérieure à celle correspondant la puissance moyenne pour
maintenir +19 °C à l’intérieur de l’habitation en plein hiver ∆T = 19 + 5 = 24 °C au lieu de 10. On
arrive donc à un besoin en puissance de 185 x 2,4 = 450 kW par -5 °C extérieur. La mise en place
d’un nouveau coefficient G exprimé en watt/m3 et °C faisant intervenir la température et le

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Cas pratique

volume du bâtiment plutôt que les surfaces habitables permettrait de faciliter le calcul des
puissances à prévoir lors d’une rénovation comparativement au coefficient actuel exprimé en
kWh/m². Il est malheureusement encore peu utilisé.

Note concernant l’eau chaude sanitaire


Bien que cela ne soit pas recommandé, certains immeubles ne sont pas équipés de compteurs
d’eau chaude. Si tel est le cas et en l’absence d’un compteur d’eau collectif totalisant le volume
d’eau froide injecté dans le circuit ECS, on peut estimer, statistiquement parlant, que la
consommation d’eau chaude représente sensiblement le tiers de la consommation d’eau froide.
La consommation journalière moyenne d’eau froide en milieu urbain étant voisine de 150 litres
par occupant et le coefficient d’occupation moyen en zone urbaine étant de 1,5 personne par
appartement, on peut estimer la consommation annuelle en eau froide de cet immeuble de
60 appartements type F3 à près de 5 000 m3 (hors arrosage d’un jardin éventuel) et celle d’eau
chaude, si l’on fait confiance aux statistiques, à environ 1 500 m3, soit quotidiennement environ
4 m3. Compte tenu de la chaleur spécifique de l’eau, on sait qu’il faut une énergie proche de
1,16 kWh pour élever un m3 d’eau froide de 1 °C (voir chaleur spécifique de l’eau). Soit une
énergie annuelle nécessaire de 87 000 kWh pour produire 1 500 m3 d’eau chaude à 60 °C à partir
d’une eau froide à 10 °C. Il faut, à cette phase de cette pré-étude, tenir compte de la
consommation de combustible en dehors de la période de chauffe qui englobe, en plus du besoin
ci-dessus, les pertes dues au rendement de la chaudière et les déperditions dans les tuyauteries
qui sont loin d’être négligeables !

Isolation ou pas ?
L’énergie la moins chère étant celle que l’on ne consomme pas, la solution consistant à estimer la
nouvelle chaufferie sans améliorer l’isolation ne semble pas très logique. Elle peut pourtant se
justifier dans l’ancien par le coût élevé de l’isolation au regard des économies d’énergie réalisées.
La copropriété peut souhaiter échelonner les dépenses et différer le poste isolation de cinq ans.
Le fait que la chaufferie va se trouver sensiblement surdimensionnée pendant environ deux
décennies une fois l’isolation effectuée ne présente pas d’inconvénient majeur vu la capacité des
nouvelles chaudières de s’adapter au besoin en puissance avec les brûleurs modulants. Il faudra
probablement être plus prudent à ce niveau avec le chauffage thermodynamique et le
dimensionnement des compresseurs de la pompe à chaleur.
Nota :
Si l’on décide d’assurer la totalité du besoin avec une seule chaudière, on est conduit à prévoir une
puissance installée égale au double de la puissance utile pour assurer la pérennité du chauffage en cas
d’incident sur une chaudière.
Par contre, si l’on décide de prévoir quatre petites chaudières fonctionnant en cascade, il suffit de
majorer la puissance utile de 25 % pour assurer la pérennité en cas d’incident sur une chaudière. Exemple
pour un besoin de 400 kW :
- puissance installée Pi = 2 x 400 = 800 kW lorsqu’une seule chaudière de 400 kW assure le besoin ;
- puissance installée Pi = 4 x 100 + 100 = 500 kW lorsqu’un le besoin est assuré par 4 petites chaudières de
100 kW fonctionnant en cascade.
Le lecteur fera facilement le calcul avec deux chaudières, solution la plus souvent utilisée pour les besoins
compris entre 200 et 500 kW.

Comme on le constate, se faire une idée précise de l’importance du


surdimensionnement des anciennes chaufferies n’est pas simple.

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