Florian Forestier, Le Réel et le Transcendantal, Paris, Éditions Jérôme Millon, 2015.
Lu par Pierre Souq, le 05 novembre 2017 à Clermont-Ferrand (63).
Mots-clés : phénoménologie, réel, transcendantal, monde, signification, Husserl, Heidegger, Richir,
English, Nancy, Marion, Derrida.
Le Réel et le Transcendantal de Flo ia Fo estie , pu li e
, s’i s e da s la t aditio de
la collection KRISIS, fondée par Marc Richir, aux Éditions Jérôme Million. Compte-rendu de sa thèse,
soutenue en 2011 sous la direction de Alexander Schnell, qui portait le titre « Le réel et le
transcendantal : enquête sur les fondements spéculatifs de la phénoménologie et le statut du
"phénoménologique" », ’est ve s u
alis e t a s e da tal que tend cet ouvrage, ’est-à-dire la
volo t d’app o he le el de façon réflexive, en se protégeant à la fois de la naïveté qui consisterait
à croire à sa saisie totale, mais aussi de la tentation d’u t a s e da talis e pu pouva t entraîner sa
disparition concrète. Conçu de façon logique, les quatre chapitres i i p se t s s’ loig e t
p og essive e t de l’id alis e husse lie , qui constitue cependant sa fondation historique, tout en
dynamisant son contenu afin de le rendre plus concret et élargir sa portée réelle.
Si le projet husserlien consiste à revenir aux choses elleses, il s’est souve t dissip da s la
recherche de structures transcendantales ayant voilé l’accès au réel, ue l’a al se de ce livre essaye
de clarifier. Il s’agit donc de eve i à l’o igi e de la discipline phénoménologique, afin de questionner
son fondement transcendantal, et de voir si les conditions de son application ne méritent pas un
dépassement, dont le mouvement permettrait de saisir tout le donné, ou plus de donné, non plus
seulement dans son aspect subjectiviste, mais aussi celui réaliste. L’e jeu est alors à la saisie du réel
ui, s’il peut t e o p is à pa ti d’u e fle ivit , reste ambivalent. À la fois, ce réel apparaît comme
la o ditio d’u e ph o
alit o p ise de faço
fle ive, ais aussi o
e l’o jet
e de
cette réflexion, ce qui questionne non seulement la forme du réel mais aussi son sens dans le cadre
d’u e ph o
ologie do t l’o jet est la des iptio et l’a al se du ph o
e. Alors, ’est u e
réflexion du décalage e t e la pe s e et le el ue l’ouv age de Flo ia Fo estie apporte, décalage
do t le fo d p o l ati ue pa t d’u a priori transcendantal qui est repris dans le champ de
l’e p ie e afi de lui do e plus d’objectivité. Pour autant cette objectivité, si elle a vertu à donner
plus de sens au réel et à sa saisie dans un rapport transcendantal, s’i stalle da s u egist e critique et
épistémologique, l’e jeu o sista t ici à définir finalement les limites et les conditions d’ o iatio
qui permette t d’analyser au mieux le rapport phénoménologique du transcendantal au réel. Partant
donc de la philosophie t a s e da tale, l’auteu postule que si son projet est à la recherche des
structures a priori de la o aissa e, elle s’i s e d’a o d dans une expérience indubitable qui est
elle de la pe s e. Cette pe s e, si elle est souve t duite à so fo d id aliste, ’e de eu e pas
moins une volonté de décrire le monde et de donner sens aux phénomènes qui constituent
l’e p ie e du sujet, les uels so t inscrits dans un rapport au réel. Dans ce sens, la phénoménologie
pourrait suivre cette philosophie en y ajoutant un sens critique, celui de la lucidité du penseur qui,
devant ses objets, constatent leur apparition tout en admettant leurs limites de leurs définitions. Alors,
elle serait prise dans un double mouvement où le réel pourrait engendrer le phénomène tout en
d pe da t de la su je tivit , ’est-à-dire à la fois de conditions formelles et a priori qui permettent
son apparition, mais aussi celles a posteriori amenant son explicitation. Ainsi :
L’opti ue t a s e da tale ue ous adopto s disti gue les faço s do t la di e sio du el st u tu e
l’e p ie e et les façons dont la concrétude est mise en jeu au sein même de cette expérience. Nous
distinguons ainsi le transcendantal pur, qui, pose le réel comme question et le transcendantalphénoménologique ui o e e e u’o peut appele les o figu atio s de l’expérience. (p. 18.)
De cet entre-deux émerge le problème du sens qui, non seulement se trouve dans la question du réel,
mais configure aussi sa description étant l’e p essio de so la o atio su je tive. Si ’est o
e
condition première que le réel questionne le transcendantal, il demeure problématique car, non
seule e t il est l’ho izo du uel tout ph o
e se a ifeste, mais aussi l’o jet do t le fo d
demeure insaisissable, toujours lointain, bien que toujours recherché et rattaché à une structure de
sens subjective. Alors, si le réel est la dimension fondamentale du phénoménologique, peut-être, est-
e pa e u’il est d’a o d o s u et ue, ie u’i possi le à o aît e, il peut toujours être décrit.
Cette des iptio , ie u’e d alage pa appo t au el, o po te u sens do t l’esse e est d’ t e
en défaut vis-à-vis de e u’il e p i e, tout en disant toujours uel ue hose de lui. C’est do la
recherche du sens du réel que Florian Forestier entreprend dans son travail à partir d’u e fle io de
fait transcendantale, bien que jamais dogmatique et en perpétuel devenir.
Le p e ie ouve e t de et ouv age s’i s e da s la pe s e husse lie e afi d’e eti e e
u’il a de plus transcendantal mais aussi les li ites. Da s e se s, e pli ue l’auteu e s’appu a t su
Jacques English, il faut peut-être déplacer le regard phénoménologique des structures
transcendantales elles-mêmes (les catégories) vers le geste de leur compréhension qui est propre et
expérientiel. Si o
e l’e pli ue Edmund Husse l, l’i te tio alit
a ifeste l’a tivit de la
conscience qui est conscience de quelque chose, non seulement il existe des structures a priori
orienta t l’a tivit du sujet, ais l’a tivit de sa saisie est elle-même orientée sans que le rapport entre
les deux soit nécessairement explicite chez le sujet. Ce serait alors précisément le but de la perspective
t a s e da tale ue de saisi l’a ti ulatio e t e les dive ses vis es et de fai e su gi de es différences
une signification.
D s lo s, la ph o
ologie t a s e da tale a aussi pou p o l e le " … e veloppe e t, e se s
inverse, dans les modes fondateurs, de ces modes fondés", ou encore les effets en retour sur la perception
de l’i agi atio et de la sig ifi atio , ou e o e de la sig ifi atio su l’i agi atio . p. .)
Il s’agit de comprendre ce que Husserl entend vraiment par phénomène. Dans les Recherches Logiques,
ous dit l’auteu , Husse l e te d d’a o d la ph o
ologie o
e « psychologie descriptive » où
les vécus intentionnels ne sont pas clairs en rapport à leurs objets, ces derniers pouvant apparaître
o pl te e t e t ieu s au sujet et eleve d’u e o tologi ue indépendante. Da s e ad e, ’est la
plasticité des vécus intentionnels qui permet une certaine transcendance du réel en tant que la
conscience peut établir des significations à son égard qui sont en fait des généralisations ne se
confondant ni avec les intuitions immédiates, ni avec les objets eux-mêmes. Pourtant, Husserl précise
ue la sig ifi atio
’est pas ta t u o te u u’u e odalit i te tio elle pe ettant à la
conscience de se détacher du réel, ouvrant la porte à une eidétique, ou encore, à la recherche des
essences (les catégories transcendantales conditionnant la perception du réel). Mais cette idéalité est
p o l ati ue puis u’elle appa aît toujou s après, impliquant une réflexivité ouvrant le champ des
sig ifi atio s. C’est alo s ie la uestio de l’esse e ui va la gi le p o l e de la sig ifi atio et
faire de la ph o
ologie u e s ie e des esse es, ’est-à-di e l’ tude, o plus des o jets els
mais de leurs fondements au préalable. Aussi, se pose i i le p o l e de l’a ivale e et du statut de
l’o jet ph o
ologi ue ui appa aît da s sa s pa atio ave l’o jet el tout e de eu a t u o jet
possi le d’a al se.
Si l’esse e se laisse d i e à so tou o
e u o jet, ’est ie u’elle est a essi le à
e
l’e p ie e, u’elle ’est pas seule e t u e st u tu e p o l ati ue, ais ue les a tes se laissent isoler
et décomposer dans leur singularité. (p. 48.)
Alo s, si l’esse e appa aît o
e l’o jet même de la phénoménologie, elle e peut t e saisie u’à
pa ti de l’a te lui-même de la description qui permet une distanciation du sujet vis-à-vis de l’o jet, ce
qui déplace non seulement le transcendantal du do ai e de l’o je tivit id ale ve s celui de son
effectivité réelle, ais aussi de elui de l’o jet el vers celui de son objectivation transcendantale. De
cet arrachement de la conscience à ses objets immédiats, émerge aussi le problème du sens qui
marque la transitivité de la donation au donné, alors que la signification serait plus générique et en
appo t à l’o jet vis de faço transcendantale. À la suite, bien que remarquée dans les Leçons de 1908,
l’auteu et e ava t la di e sio factice de la vis e sig ifia te ui est le p op e d’u e pe so e à u
certain moment. Si la signification est indexée à une personne et à un geste, se pose le problème du
saisissement de sa signification qui, déjà en décalage par rapport à la visée des objets réels, possède
sa d a i ue p op e et u flu ui ’est pas a ta le. Alo s, le ph o
e selo l’auteu est cette
« totalité articulée » p. 8. ui o p e d l’appa itio da s so e se le, non seulement par rapport
au v us i te tio els de l’o jet i
diat, ais aussi da s so appo t fle if et t a s e da tal, e
qui questionne son origine réelle, éventuellement pulsionnelle ou liée à un « instinct originellement
po t à l’o je tivatio , po t à la révélation du dehors » p. . . Sa s s’atta he pa ti uli e e t à e
dernier point qui aurait pu questionner la phénoménologie dans ses fondements empiriques et
ve tuelle e t d te i istes, l’auteu te i e so p e ie ouve e t e p isa t ie la teneur
de so t avail ui ’est pas o tologi ue ais pist ologi ue, tudia t les o ditio s et les
fondements de la description analytique, offrant finalement une méthodologie et plus de lucidité afin,
non pas de révolutionner ou de transformer la phénoménologie, mais d’y apporter plus de scientificité
à pa ti d’u e la ifi atio de ses outils qui paraissent de fait transcendantaux.
C’est alo s à la o stitutio du se s ue l’auteu s’att le da s la deu i e pa tie, avec la volonté
de démêler les dive ses vis es i te tio elles da s u sou i d’o je tivit , t s p o he de la pe spe tive
de Richir. Le ut est alo s d’élargir le transcendantal à partir de la compréhension de son effectivité
ui ’est pas seulement idéale mais d’a o d pratique. Dès les premières lignes, l’auteu
it :
Si le terrain originel de la phénoménologie est celui du sens, parce que celui-ci est le lieu de la concrétude
u’elle he he à saisi et du geste de so espa e e t, le se s ’est ie d’aut e ue e e uoi le
phénomène se d passe, s’a a he de lui-même à lui-même. Le sens caractérise la phénoménalité comme
st u tu e d a i ue d’ouve tu e. (p. 93.)
C’est la uestio des st u tu es d’e se le ue pose e se o d hapit e, d’où le e ou s au concept
d’existence permettant non seule e t de asse le les at go ies sous le te e de l’u it ais aussi
d’e glo e leu s appo ts au el. Rappela t d’a o d l’app o he e ta ie e puis ep e a t le
p o l e du juge e t d’e iste e hez Ka t, il e iste u e diff e e i o
e su a le entre la
signification et la perception, ou encore la raison et la sensibilité. C’est da s leu appo t diale ti ue
ue l’auteu he he u d passe e t et aspire do à plus de t a s e da e et d’o je tivit . Et, en
effet, si selon Husserl, il existe une téléologie normée par une idéalité qui permet de saisir le noème
dans un souci de totalité (comme au chapitre I de la section IV des Ideens), sa forme pure empêche de
le saisir en fait da s sa alit ui est ouva te et d a i ue. C’est alo s le o ept de « sens-sefaisant » en référence aux Méditations phénoménologiques de Ri hi ue l’auteu utilise, où le se s
apparaît et peut rythmer la phénoménalisation, mais aussi le problème de l’ho izo et de la h l hez
Husse l, e vue d’ouv i le p o l e de so e t io it , seule à
e de uestio e so o igi e et
son avènement réels. Alors, il doit bien exister une structure transcendantale chez le sujet permettant
de comprendre son être-au- o de ie ue Flo ia Fo estie efuse l’e ploi di e t du o ept
heideggérien) selon une réflexion liée à la fois à l’affe tivit du sujet et à l’événementialité (p. 109.).
Le « monde », s’il pa aît e t ieu , p e d sa fo e da s la pe s e de Husse l e ta t u’il el ve d’u e
intentionnalité dont les modalités (qui ne sont pas les catégories) appartiennent aux structures de
l’a te su je tif. Appa aît alo s le o ept d’Urdoxa qui permet de rendre compte à la fois de ces
st u tu es ais aussi de l’i te tio st u tu a te ui est o igi elle e t o a e, i a atio d’u e
pulsion originaire et primitive qui inscrit la subjectivité dans la réalité afin de vivre et se projeter. Si ce
fond pulsionnel est intentionnellement (intuitivement ?) converti en monde, le monde demeure
immodélisable bien que préalable à toute pratique. Alors, se pose le problème de savoir si ce monde
est v ai ou ie
el a , s’il est d te i pa u e o a e ui lui do e fo e, il est aussi i possi le
de démontrer son existence, la seule v it te da t à d
son fond réel et originel.
i e ses odalit s d’appa itio sa s o
aît e
S’il e iste u e oappa te a e o igi elle de l’intentio et de l’intentum chez Husserl, cette distinction
demeure formelle et est en cela originellement un problème. Ainsi :
La phénoménologie, pour être complète et rigoureuse, se doit de partir de la dou le ig e d’u e
t a s e da e o igi ai e et "d a i ue", et d’u e e positio à la ise e jeu de l’Êt e
e e les ta ts
e o t s sous l’ho izo de leur étantité. (p. 124.)
Dans ce sens, il faut déplacer le problème de la transcendance de la significativité du phénomène à
so ta tit , ’est-à-di e so se s d’ t e ou e ui le et e
ouve e t et sa mise en jeu. En effet,
selo Heidegge , da s l’e p ience, est déjà inscrite la possibilité de son ouve tu e et d’u e possi le
mise à dista e do t la fle ivit est le s ptô e, ais où l’affe tivit est p -déterminante en tant
ue ode d’a s p ivil gi au o jets du o de. I i, si la disti tio ue fait Heidegger, entre le
o de et les o jets, ’est pas utilis e par l’auteu , il retient que la significativité doit être comprise
depuis le o de, et o l’i ve se Patočka et Fi k so t alo s it s . Pourtant, si le transcendant se
retrouve dans une interrogation du lieu même d’où il semble surgir, l’auteu soulig e u e tai
réductionnisme de la part de Heidegger qui met de côté par exemple la question du corps, plus
généralement le problème du pré-rapport du sujet au monde qui est a priori sensible. Le concept de
monde semble donc conserver une ambiguïté analogue à la pensée de Husserl qui réside dans la
confusion des vécus, e ta t u’il po te su le o de et le o de e ta t u’il o ie te leu effe tivit ,
comme si sa fondation ’était pas pensable ou restait i fo d . Plutôt ue d’opte alors pour une
optique sartrienne, qui verrait le néant en son fond, le deuxième mouvement de cet ouvrage se
termine avec le concept heideggérien de « terre » qui, repos du monde, est aussi ce qui fleurit, ’està-di e e ui pe et l’ lai ie et l’ouve tu e du o de da s l’appa aît e de l’événement. Le
transcendantal se trouve alors o
e di e sio alit de l’Ereignis, à la fois fini dans son rapport au
sujet et infini dans son rapport au monde, mais où la réflexivité se maintient et réside pour maintenir
le phénoménologique, ’est-à-di e la possi ilit d’u e des iptio atio elle et iti ue dans une
structure de « Pli » (Zwielfalt u’il va alors falloir démêler.
Dans le troisième mouvement de cet ouv age, il est uestio de edo e de l’ paisseu au
concepts fondamentaux de la phénoménologie qui ont pu, soit se perdre, soit disparaître derrière les
t ave s de l’id alis e ou d’u e o tologie t op fo elle. Si la question posée est bien celle de
l’i s iptio du o et au sei du ph o
e, ’est ve s u e app o he plus libérée ue l’auteu
s’i s it ai te a t. Pa ta t d’u loig e e t des st u tu es de la su je tivit , ’est pa u d tou
fausse e t o tologi ue ue l’auteu s’e ploie, afin de savoir s’il est possi le de pe se l’e p ie e
du transcendantal au sein même du ouve e t de l’èt e. Aussi, il e s’agit pas de faire disparaître le
chemin phénoménologique parcouru jusque-là mais de comprendre comment il nous y a amené,
o fo
e t à l’attitude pist ologi ue i itiale. Tout d’a o d, ie ue Jea -Luc Nancy refuse
d’appli ue le te e de ph o
ologie au o
tudes u’il d ploie, l’auteu e plo e le o ept de
« l’il a » qui, appliqué au monde, a ue so dessaisisse e t et do la possi ilit de l’èt e dans le
saisissement du sujet qui le vit de façon intelligible. I i do , ’est la st u tu e du Pli e tant que
phénomène que la concrétude du « là » amène à penser. Et :
Si le pli p e d le pa ti de l’Êt e e ta t u’il est pli et plia ilit , la fo alit
fle ive au o t ai e e pose la
topologie de cette pliabilité ; elle expose le pli comme exigence, comme nécessité transcendantale
préalable. (p. 159.)
Alo s, il s’agit de d passe l’e te te ph o
ologi ue du ph o
e afi de saisi sa d a i ue et
so
ouve e t où l’èt e peut fai e figu e d’i fo d imaginé. La pensée de Richir semble suivre alors
logiquement ce mouvement puisque le « flottement » du se s s’exprime librement comme phantasia.
C’est alo s sous la fo e du foiso e e t ue les p o essus ph o
au appa aisse t do t
l’i telligi ilit est plu ielle, d’u ha p ph o
ologi ue plus la ge et se-faisant, où le phénomène
est libéré de son caractère trop réaliste ou dogmatique. Le transcendantal prend alors la forme de
l’illusio , appela t elle de l’id al t a s e da tal ka tie , où le sens du schématisme qui vise sa
description réside dans son « clignotement » et dans la non-coïncidence du phénomène pris dans son
idéalité ui est d’a o d o
te. Le sens ici se fait donc comme concrétion, e ta t u’il essa e de
faire coïncider le phénomène avec lui-même, et où il se fait de façon plus ou moins anonyme et
asubjective, en proposant une architectonique imaginative ouvrant le champ des rapports à soi (p.
172.). En outre, si la pensée richirienne d passe la pe s e u ivo ue du ph o
e, l’i agi ai e ou le
s
oli ue ’e de eu e t pas oi s els e ta t ue st u tu es t a s e da tales a e a t le
phénomène processuel et effectif. Alors, faut-il y voir une phénoménologie-fiction comme Forestier
sem le le di e ou si ple e t les dive ses odalit s d’u ph o
e ui reste loin et se tient à
distance ?
C’est le p o l e de l’e t io it ue le uat i e et de ie ouve e t du liv e e plo e. Si la
uestio de l’e t io it est e ve s uoi te d inévitablement le phénoménologique, et que le réel est
à la fois la limite et la ressource de sa pensée, quel statut donc lui donner ? C’est Jea -Luc Marion qui
est ici i vo u afi de pe se l’i pe sa le ui est e o e u donné en montrant la positivité du
phénomène. Si le réel se trouve toujours en excès, il semble que ce trop soit justement la condition du
phénomène et donc du sens se faisant qui est le fond de la description phénoménologique. Alors très
justement, il ne faut plus parler de saturation du ph o
e ais le o p e d e e ta t u’il se
donne en trop, ce « trop » étant constitutif de la saisie elle-même qui est par nature imparfaite et
mouvante, exprimant tout de même ce qui apparaît comme transcendantal. Mais, la phénoménologie
de Marion, nous dit l’auteu , tend à un certain relativisme, manquant de réfléchir son propre langage
(métaphorique), afin de dépasser la réflexion du donné saturé, au moins dans la formalisation de ses
limites et de ses conditions descriptives. Ainsi :
La déconstruction derridienne accomplit pour nous une première assomption de cette nouvelle
" o ditio de la pe s e". Il s’agit ie pou elle de ep e d e et de d a atise l’i pulsio de la
phénoménologie pour mettre celle- i e ta t ue dispositio et p ati ue à l’ p euve de son dehors. (p.
195.)
Faisant référence notamment à Violence et Métaphysique, le p o l e de l’ o iatio
ph o
ologi ue i ui te la pe s e e e u’elle pa aît i possi le et pourtant nécessaire. Alors, la
philosophie serait (peut- t e a e e à se d plo e sous la fo e d’u e ouvelle la gue et de
ouvelles at go ies d’ o iatio phénoménologiques. Dans ce sens, la déconstruction apparaît
comme un effort de la pensée soucieuse de mesurer la valeur, les limites et les conditions du
ph o
e, o pas da s u sou i de o fo it ave le el, ais plutôt d’e p i e le plus
justement possible sa description qui repose sur des catégories de pensée à déconstruire. Cette
déconstruction alors, plutôt que de chercher désespérément à recouvrir le phénomène de sa pensée,
assu e hu le e t ais de faço
iti ue l’ a t, tout e he ha t, o pas à le o le , ais à le
e pli d’u aut e se s do la o pli atio à u e valeu fondamentale et épistémologique. La
phénoménologie ici établie, reformule ses fondements en les énonçant sous la forme du déconstruit
mais où le transcendantal demeure à pa ti de e ue l’auteu appelle, influencé par Richir, un « zigzag
phénoménologique » (p. 205.). Alors, pour conclure ce dernier mouvement, le transcendantal est
questionné dans sa pureté ui, si elle t ouve ses li a e ts hez Ka t, sig ifie tout d’a o d l’écart. Le
el, s’il de eu e l’i pe sa le et le fo d de l’e t io it du uel s’ happe le ph o
e, appa aît
toujours co
e u a solu ui, ie
u’i saisissa le totale e t, est ai te u da s u e saisie
i o pl te ais plu ielle. L’e p ie e t a s e da tale est alo s elle de sa o aissa e ui, loi
d’ t e d fi itive et fig e, appa aît o
e pa tielle et d a i ue. C’est alors dans la spéculation et la
réflexivité du phénomène que réside la tentative de son élucidation qui dans un « retour sur soi »
pou ait pe ett e u savoi a solu, ’est-à-dire imaginaire ou i fi i. Cette fle ivit , pa e u’elle
est toujours agie, permet la révélation du donné qui émerge de la plasticité i te e tout e s’appu a t
su l’e t ieu . C’est do da s u
gi e de « co-implication comme paradigme naissant » (p. 222.),
en référence au champ scientifique, u’u e ouvelle ph o
ologie t a scendantale pourrait
s’affi e . La f e e pa e e ple à Mi hel Bit ol pa aît o lusive da s le se s où il doit s’agi de
situer la des iptio du ph o
e, ’est-à-dire de décrire au mieux ses limites et le contexte dans
le uel il s’i s it, aussi ien en fonction du réel que des conditions a priori de sa connaissance. C’est
alors comme « problématologie » (p. 230.) que l’auteu te i e so ouv age où il s’agit toujou s de
pose des uestio s e appo t au ph o
e do t l’e t io it doit toujou s tre comprise à la fois
comme illusion et v it possi le, où l’ a t ave le la gage et les p o du es d’ lu idatio doit
toujours être saisi au mieux et clairement formulé.
L’ouv age de Flo ia Fo estie est do u ouv age ui ouv e la ph o
ologie à une
épistémologie déconstructionniste, renouant étonnamment avec le Husserl des origines tout en
assi ila t les e eu s d’u id alis e t a s e da tal aïf et dog ati ue, afin de les repositionner dans
un champ expérientiel, et pourquoi pas expérimental, où le sujet conçoit par nature le réel comme
extérieur, tout en tâ ha t de s’ approcher. Peut-être, pouvons-nous regretter une lecture insuffisante
de Heidegger, bien que le projet affiché soit clairement husserlien, notamment dans le rapport du sujet
au o de, le uel, ie u’o tologi ue, au ait pu pe ett e u e disti tio plus précise entre le
transcendant et le transcendantal. De plus, le p o l e de fo d ’est-il pas encore celui du
dépassement de soi qui, au-delà d’u e perspective critique ou épistémologique, demeure celui de la
vie, elui de l’e iste e hu ai e ui, dans son projet de vivre, désire apprendre là où le « souci »
(epimeleia) s’exprime, tout en ouvrant le domaine de l’apparaître ? Cet apparaître, ne manifeste-t-il
pas seulement, le rapport de l’être-au-monde qui dans son questionnement, ne vise pas tant le réel
ou le transcendantal, mais ce qui est à portée de main et doit être dévoilé ?