8 I DOSSIER
© M.studio – fotolia.com
Prévenir la
radicalisation violente :
nouveaux habits d’une
action publique
à la française ?
Benjamin DUCOL
L
ongtemps considéré comme un
facteur explicatif du faible nombre
d’attentats terroristes en France au
cours des deux dernières décennies,
le dispositif antiterroriste français apparaît
sous pression au lendemain des attentats de
janvier 2015. Restées jusqu’ici relativement
hermétiques à une approche dite « douce » en
matière de lutte contre l’extrémisme violent,
les autorités françaises vont opérer à partir de
cette période une inflexion avec l’émergence
progressive d’une action publique de prévention
de la radicalisation 1. Face aux limites d’un
paradigme antiterroriste qui peine à saisir les
nouveaux avatars de la menace jihadiste et une
demande sociale qui requiert la mise en œuvre
de solutions par les pouvoirs publics, se met en
place, non sans une série de tâtonnements et de
débats, un champ d’action publique inédit.
L’ambivalente mise à l’agenda
de la « radicalisation »
en France
Malgré une longue histoire du terrorisme en
France, les attentats de janvier 2015 illustrent une
rupture, tant par leur dimension symbolique que
par la séquence meurtrière qu’ils introduisent.
Les attentats de Charlie Hebdo et de l’Hyper
Casher marquent les actions terroristes les plus
meurtrières en France depuis 1961 2. Avec les
attentats du 13 novembre 2015 (130 morts et
plus de 400 blessés), la France doit faire face à une
menace terroriste plus manifeste que jamais. Entre
janvier 2015 (attentats de Charlie Hebdo) et mars
2018 (attentat de Trèbes), ce ne sont pas moins de
14 attaques terroristes qui ont lieu en France (17
tentatives d’attentats échoués) causant 246 morts
et au moins 2 305 blessés 3. Des chiffres qui
(1) Pour une vue extensive de l’action publique des autorités françaises en matière de prévention de la radicalisation
violente, lire Sèze (R.), 2019, Prévenir la violence djihadiste. Les paradoxes d’un modèle sécuritaire, Paris, Le Seuil.
(2) Le 18 juin 1961, l’attentat perpétré sur la ligne de train Paris-Strasbourg par l’Organisation de l’armée secrète (OAS)
fait 28 morts et 170 blessés.
(3) Statistiques tirées de Seelow. (S.), Dahyot. (A.) et Baruch. (J.), 2018, « De 2013 à 2018, la France au rythme des attentats »,
Le Monde, 30 Mars. À consulter sur le site web Le Monde : https://www.lemonde.fr/societe/article/2018/03/30/de2013-a-2018-la-france-au-rythme-des-attentats_5278453_3224.html (consulté le 21 mars 2019).
Benjamin DUCOL
Benjamin
Ducol, PhD, est
responsable
de l’équipe
de recherche
du Centre de
prévention de
la radicalisation menant à la
violence (CPRMV) à Montréal,
professeur associé à l’École
de criminologie de l’Université
de Montréal et chercheur
associé au Centre international
de criminologie comparée
(CICC) de l’Université de
Montréal. Il est membre du
réseau pancanadien Canadian
Network for Research on
Terrorism, Security & Society
(TSAS).
Prévenir la radicalisation violente : nouveaux habits d’une action publique à la française ? – Benjamin DUCOL
benjamin.ducol@icloud.com - E16-00865838
DOSSIER I 9
témoignent d’une vague terroriste sans précédent, et ce y
compris au regard des épisodes terroristes qui s’exercent
sur le territoire hexagonal au cours des années 1970-1980
ou au tournant de l’année 1995.
Au lendemain des attentats de janvier 2015, c’est un
cadrage de la menace terroriste comme une attaque
aux valeurs nationales qui prévaut tant du point de
vue gouvernemental qu’au sein de la société française
[Faucher et Boussaguet, 2017]. L’interprétation est aussi
celle d’une menace issue des « marges de la République »
cœur du recrutement du jihadisme, à l’image des parcours
de déshérence des frères Kouachi ou d’Amedy Coulibaly
marqués par la marginalité, la criminalité et la prison
[Packer, 2015]. Ce cadrage de la menace de radicalisation
violente en provenance des « marges 4 » va initialement
limiter le spectre des réponses par les autorités publiques,
ces dernières prolongeant les grandes lignes du paradigme
antiterroriste traditionnel. Cette logique va toutefois
rapidement se heurter à une série de questionnements
portant sur l’efficacité du modèle antiterroriste français
face aux mutations contemporaines de la menace jihadiste
et à la diversification croissante des profils sociologiques
associés à cette mouvance. Parallèlement émerge dans la
sphère publique une demande d’action gouvernementale
vis-à-vis de la radicalisation, en provenance des familles
touchées par la réalité des départs (ou des tentatives de
départ) de proches vers la Syrie [Sèze, 2019].
Un paradigme antiterrorisme
sous pression
Construit autour de la loi 1986 5, le dispositif antiterroriste
français s’est constitué autour d’une doctrine de
« neutralisation préventive » [Bonelli, 2008, p. 168]
fondée sur des acteurs spécialisés 6 d’un champ de
l’action antiterroriste et des procédures 7 dérogatoires
au droit commun [Foley, 2013]. Cette tendance est
accentuée par les actualisations législatives successives,
en particulier avec la loi de 1996 et l’introduction de
l’incrimination de « délit d’association de malfaiteurs en
relation avec une entreprise terroriste 8 » qui élargit le spectre
d’action de l’antiterrorisme français et renforce du
même coup sa capacité de neutralisation en amont
même de la commission de potentiels actes terroristes
[Hellmuth, 2015a, p. 980]. Au lendemain des attentats
du 11 septembre 2001, la France ne connaît pas de
transformation majeure en ce qui a trait à son paradigme
de lutte antiterroriste considérée comme efficace pour
lutter contre la menace jihadiste en développement,
et ce même si plusieurs lois majeures se succèdent à
partir de 2006 [Bartolucci, 2017] en vue d’ajuster celuici aux nouvelles réalités de la menace terroriste. Ces
lois viennent renforcer tour à tour différents aspects
du dispositif antiterroriste français, qu’il s’agisse des
moyens d’enquête et de surveillance, des procédures de
détention préventive, des motifs de judiciarisation ou
encore des moyens de coordination et de partage du
renseignement.
Au lendemain des attentats de Charlie Hebdo, on
assiste avant tout à un renforcement de l’ancrage
sécuritaire, marqueur de l’antiterrorisme hexagonal,
avec notamment le déclenchement de l’opération
Sentinelle et le déploiement de plus de 10 000 soldats
de l’armée de Terre (ayant pour mission d’assurer la
protection des sites considérés à risque : aéroports,
gares, musées, artères commerciales, édifices
religieux, etc.) [Tenenbaum, 2016], mais aussi avec le
renforcement des moyens financiers et humains dédiés
à la lutte contre le terrorisme ; en particulier en ce qui
(4) À titre d’exemple, on pourra considérer que le rapport du député de l’Essonne Malek Bouthi intitulé « Génération radicale » remis au Premier
ministre en juillet 2015 participe d’un renforcement de cette grille de lecture. Consulter : Bouthi (M.), 2015, Génération Radicale, rapport remis
au Premier ministre.
(5) Loi n°86-1020 du 9 septembre 1986 relative à la lutte contre le terrorisme et aux atteintes à la sûreté de l’État. La loi de 1986 fait suite à
l’abolition de la Cour de sûreté de l’État en 1981 et au besoin de l’État français de se redonner un cadre juridique pour le traitement des faits
de violence politique. Sur cette thématique, lire Codaccioni, (V.), 2015, Justice d’exception. La cour de sûreté de l’État sous la Ve République :
l’État face aux crimes politiques et terroristes, Paris, Éditions CNRS.
(6) À l’instar de nombreux pays, le dispositif antiterroriste français mobilise des acteurs spécialisés de police judiciaire, des services de renseignement
et de gendarmerie. Une spécificité tient toutefois à la centralisation des affaires terroristes au niveau national dans les mains d’acteurs judiciaires
spécialisés dont la 14e section du Parquet de Paris (14 magistrats spécialisés en 2017) et des juges d’instruction spécialisés du tribunal de
grande instance de Paris (11 juges d’instruction spécialisés en 2017).
(7) Parmi ces procédures dérogatoires au droit commun, on pourra citer l’extension de la durée normale de garde à vue de 24 heures jusqu’à 96
heures, le retardement de la présence d’un avocat jusqu’à la 72e heure de garde à vue, la possibilité de perquisitions de nuit ou encore les
procédures de saisies et d’analyse informatiques facilitées. Ajoutons à cela que contrairement aux procès pour des crimes de droit commun, les
procès pour terrorisme sont jugés par des cours d’assises spéciales composées de magistrats professionnels en lieu et place de jurés populaires.
(8) Loi n° 96-647 du 22 juillet 1996 tendant à renforcer la répression du terrorisme et des atteintes aux personnes dépositaires de l’autorité
publique ou chargées d’une mission de service public et comportant des dispositions relatives à la police judiciaire. Cette « infraction-obstacle »
permet de sanctionner la préparation d’actes de terrorisme avant même que ces derniers soient commis. Elle permet donc une incrimination plus
versatile pouvant couvrir une vaste catégorie d’actions et de contextes (financement, logistique, recrutement) associés au fait terroriste.
Cahiers de la sécurité et de la justice – n°46
benjamin.ducol@icloud.com - E16-00865838
10 I DOSSIER
a trait au renseignement et aux enquêtes policières 9.
Ce renforcement des moyens d’action s’accompagne
d’un décloisonnement des services de renseignements 10
et d’une réorientation des missions des forces de
sécurité intérieure au niveau territorial [Gauthier, 2016].
Au-delà des moyens pratiques de l’antiterrorisme, le
cadre législatif bascule également dans une « fièvre
législative » [Chalkiadaki, 2015]. À partir de janvier 2015,
plusieurs lois visant à renforcer les moyens d’action en
matière d’antiterrorisme 11 sont votées et donnent lieu
à l’introduction de plusieurs « infractions-obstacles 12 »
permettant une judiciarisation plus préemptive que jamais
des potentiels acteurs terroristes.
Jusqu’ici loué pour son efficacité et sa supposée
adaptabilité à la menace terroriste [Perelman, 2006], le
dispositif antiterroriste français apparaît néanmoins
affaibli au lendemain des attentats de Charlie Hebdo, puis
ceux de novembre 2015, et ce pour trois grandes raisons.
En premier lieu, l’évolution de la menace ne semble pas
avoir été totalement prise en compte par les services
concernés. Considérée avant tout comme de nature
exogène, la montée en puissance d’une scène jihadiste
sur le territoire national [Caillet et Pruchot, 2017] semble
avoir été mal appréhendée par les autorités publiques.
En second lieu, la réforme du renseignement opérée
en 2008 avec la fusion des Renseignements généraux
(RG) et de la direction de la Surveillance du territoire
(DST), donnant lieu à la création de la direction centrale
du Renseignement intérieur (DCRI), devenue en 2014
direction générale de la Sécurité intérieure (DGSI),
semble avoir produit une désorganisation du travail de
renseignement rendant difficile l’évaluation de la menace
alors même que les profils devenaient plus diversifiés et
complexes. Finalement, considérées avant tout comme
une problématique sécuritaire et non sociale, les autorités
françaises sont demeurées dans une perspective très
largement attentiste et réactive face à la menace jihadiste
[Sèze, 2019, p. 19-22].
De la mise en visibilité
de la radicalisation violente
comme « problème social »
C’est donc face au constat des limites de l’action sécuritaire
de l’antiterrorisme français à prévenir efficacement la
menace jihadiste que va en premier lieu s’opérer la mise à
l’agenda progressive de la prévention de la radicalisation
violente. Comme le note Marret [2016, p. 11] : « Après
un immobilisme très français d’une décennie, la France a décidé de
se lancer dans la prévention [de la radicalisation]. Elle ne l’a
fait non pas par opposition à la sécurité répressive, mais parce que
rationnellement, il était nécessaire de le faire compte tenu des tensions
capacitaires de la police et du nombre croissant de djihadistes français
Cette mise à l’agenda est, par ailleurs, confortée par une
mise en visibilité opérée par une série d’acteurs dans
l’espace public. La publication au cours de l’année 2014
du rapport « Quelle politique de contre-radicalisation
en France ? » par la Fondation d’aide aux victimes du
terrorisme [Seelow, 2015], de l’ouvrage de Dounia
Bouzar : Désamorcer l’islam radical : ces dérives sectaires qui
(9) Fin janvier 2015, le Premier ministre Manuel Valls annonçait le déblocage d’un montant de 246 millions d’euros et la création de 2 680 postes au
sein du ministère de l’Intérieur. Revault d’Allonnes (D.) et Bonnefous (D.), 2015, « Manuel Valls annonce la création de 2 680 postes pour lutter
contre le terrorisme », Le Monde, 21 décembre. Sur la période 2015-2017, les ressources financières allouées aux acteurs de l’antiterrorisme
ont été considérablement augmentées. Selon les données disponibles, entre 2015 et 2017 ce sont 824 millions supplémentaires qui ont été
consacrés aux forces de police et de gendarmerie, alors que 479 millions supplémentaires ont été accordés à la justice et à l’administration
pénitentiaire. Parallèlement, le budget consacré au financement des services de la communauté du renseignement a augmenté de 11,3 % entre
2013 et 2016. Cazeau (B.) et Goy-Chavet (S.), 2018, Rapport n˚ 639 fait au nom de la commission d’enquête sur l’organisation et les moyens
de l’État pour faire face à l’évolution de la menace terroriste après la chute de l’État islamique [Rapport], Paris, Le Sénat, p. 101.
(10) À titre d’exemple, en 2016 la direction générale de la Sécurité intérieure (DGSI) a été désignée comme étant désormais le pôle référent en
matière d’antiterrorisme pour tous les services de l’État sur l’ensemble du territoire. La DGSI se voit ainsi transmettre par l’ensemble des acteurs
de la communauté du renseignement et des forces de sécurité toutes les informations pertinentes en ce qui concerne la sécurité du territoire et
le terrorisme.
(11) Entre 2015 et 2018, ce sont pas moins de sept lois en lien avec la lutte antiterroriste qui sont adoptées en France : loi n° 2015-912 du 24
juillet 2015 relative au renseignement ; loi n° 2015-1556 du 30 novembre 2015 relative aux mesures de surveillance des communications
électroniques internationales ; loi n° 2016-339 du 22 mars 2016 relative à la prévention et à la lutte contre les incivilités, contre les atteintes
à la sécurité publique et contre les actes terroristes dans les transports collectifs de voyageurs ; loi n° 2016-731 du 3 juin 2016 renforçant la
lutte contre le crime organisé, le terrorisme et leur financement, et améliorant l’efficacité et les garanties de la procédure pénale ; loi n° 2016987 du 21 juillet 2016 prorogeant l’application de la loi n° 55-385 du 3 avril 1955 relative à l’état d’urgence et portant sur les mesures de
renforcement de la lutte antiterroriste ; loi n° 2017-258 du 28 février 2017 relative à la sécurité publique ; loi n° 2017-1510 du 30 octobre
2017 renforçant la sécurité intérieure et la lutte contre le terrorisme.
(12) Parmi ces nouvelles infractions-obstacles, on retiendra l’infraction de provocation à des actes de terrorisme ou d’apologie du terrorisme (article
421-2-5 du Code pénal), l’infraction d’entrave aux mesures de blocage des sites faisant l’apologie du terrorisme (article 421-2-5-1 du Code
pénal), l’infraction d’entreprise individuelle terroriste (article 421-2-6 du Code pénal).
Prévenir la radicalisation violente : nouveaux habits d’une action publique à la française ? – Benjamin DUCOL
benjamin.ducol@icloud.com - E16-00865838
DOSSIER I 11
défigurent l’islam et d’un premier rapport par son Centre
de prévention des dérives sectaires liées à l’islam (CDSI 13)
marque une mise en visibilité de la radicalisation violente
comme problème social. Parallèlement les familles
touchées par un départ ou une tentative de départ d’un
proche (le plus souvent un enfant) vers la Syrie vont
amorcer une mobilisation auprès des pouvoirs publics
[Hamaïde, 2014].
LOIN DE NE SE LIMITER QU’À UNE FRANGE
MARGINALISÉE DE LA POPULATION,
LA RADICALISATION TOUCHE DÉSORMAIS
DES FRANGES JUSQU’ICI INVISIBLES
DE LA SOCIÉTÉ. LA SOCIOLOGIE DU
Cette visibilisation de la radicalisation comme
problématique dans l’espace public hexagonal
s’accompagne d’une prise de conscience de la diversité
des profils d’adhésion au jihadisme et des candidats au
départ vers la Syrie. Loin de ne se limiter qu’à une frange
marginalisée de la population, la radicalisation touche
désormais des franges jusqu’ici invisibles de la société. La
sociologie du jihadisme n’est donc plus exclusivement celle
des marges ou des banlieues, mais aussi celle des classes
moyennes et d’une France périurbaine [Khosrokhavar,
2015/16]. Les témoignages de familles qui essaiment
dans les médias contribuent à donner un visage à la
problématique de la radicalisation en France [Sèze, 2019].
Face à ce contexte, les pouvoirs publics français ne vont
avoir d’autre choix que de mettre à l’agenda la prévention
de la radicalisation, alors même que la France avait
jusqu’ici résisté à ce paradigme d’action publique.
Une exception française ?
L’émergence tardive
d’une action publique de
prévention de la radicalisation
Alors que des États comme la Grande-Bretagne, les PaysBas, l’Allemagne ou encore le Danemark furent prompts
à établir et mettre en œuvre des actions publiques de
lutte contre la radicalisation et l’extrémisme violent au
lendemain des attentats de Madrid (2004) et de Londres
(2005), la France s’est longtemps montrée peu encline à
s’engager dans une logique préventive [Hellmuth 2015a ;
Sèze 2019]. Cette émergence tardive d’une politique
publique de lutte contre la radicalisation et l’extrémisme
violent en France peut être expliquée par plusieurs
hypothèses, incluant une méfiance pour un paradigme
porté par le voisin britannique, perçu depuis l’Hexagone
comme trop « soft » en comparaison du modèle français
[Ragazzi, 2014, p. 10].
JIHADISME N’EST DONC PLUS EXCLUSIVEMENT
CELLE DES MARGES OU DES BANLIEUES,
MAIS AUSSI CELLE DES CLASSES MOYENNES
ET D’UNE FRANCE PÉRIURBAINE
En effet, la croyance des autorités publiques françaises
dans l’efficacité du dispositif et des moyens antiterroristes
mis en œuvre, et ce jusqu’aux attentats de Mohamed
Merah [Sèze, 2019, p. 22-23], limite en premier lieu toute
inflexion vers une logique préventive. Chaque attentat
plutôt que de conduire à une réflexion sur les orientations
gouvernementales conduit en réalité au renforcement
de l’arsenal antiterroriste tant du point de vue légal
que dans ses moyens d’action. En second lieu, il existe
dans le contexte français la perception que le terrorisme
constitue avant tout une violation de la loi avant d’être
un enjeu de prévention sociétal [Hellmuth 2015a ; Samaan
et Jacobs 2018]. En d’autres termes, la lutte contre le
terrorisme et les manifestations violentes de l’extrémisme
doit être ancrée dans une perspective juridique fondée
sur l’application stricte des incriminations du Code pénal
[Shapiro et Suzan, 2003, p. 85] et non sur une série de
mesures sociétales douces visant à opérer une prévention
en amont [Ragazzi, 2014, p. 10]. Ainsi, sur la période pré2015 les départs vers des théâtres de conflit étrangers
(Afghanistan, Yémen, ou Syrie) sont appréhendés
comme un phénomène devant être traité par les moyens
de surveillance ou répressifs traditionnels plutôt que par
des mesures douces de prévention. L’identification et la
surveillance des voyages auprès de cellules terroristes
à l’étranger de Mohammed Merah comme des frères
Kouachi témoignent de cette inclinaison des autorités
françaises [Hellmuth, 2015b, p. 5]. La nature relativement
extensive du cadre légal dans lequel opère l’antiterrorisme
français permet en effet de judiciariser très en amont les
individus engagés dans une trajectoire de radicalisation
violente au-delà même de leur participation effective à un
groupe ou une action terroriste [Shapiro et Suzan 2003],
conduisant les autorités à privilégier une logique
(13) Bouzar, (D.), Caupenne, (C.) et Valsan, (S.), 2014, La métamorphose opérée chez le jeune par les nouveaux discours terroristes. Rechercheaction sur la mutation du processus d’endoctrinement et d’embrigadement dans l’islam radical, Paris, Centre de prévention des dérives sectaires
liées à l’islam.
Cahiers de la sécurité et de la justice – n°46
benjamin.ducol@icloud.com - E16-00865838
12 I DOSSIER
préemptive par le droit. Comme le souligne Hellmuth
[2015b, p. 21] : «As it is comparatively easy to arrest people
preventively on terrorism-related charges and put them behind
bars, radicalization until recently was not considered an issue that
required separate attention, ideological debate or the introduction
of soft measures». Finalement, cet exceptionnalisme français
dans le domaine de la prévention de la radicalisation
[Hellmuth 2015b] est attribuable à la conception
française de la liberté de conscience [Ragazzi, 2017b,
p. 3], l’universalisme républicain reposant sur l’absence de
reconnaissance des communautés ethniques ou religieuses
au sein de la société française [Ragazzi, 2014, p. 35] et
les principes stricts de laïcité [Hellmuth, 2015b, p. 4-5 ;
Wittendorp et al., 2017, p. 77-78]. Par conséquent, là où
le Royaume-Uni ou les Pays-Bas fondent leurs stratégies
de prévention de la radicalisation sur les relations
communautaires (notamment dans une extension du
community policing) ou l’inclusion de figures et d’associations
religieuses comme des partenaires de prévention de la
radicalisation, cette perspective s’avère inimaginable dans
le contexte français [Ragazzi, 2014, p. 10]. L’ensemble de
ces éléments explique dès lors l’émergence tardive d’une
politique de prévention de la radicalisation violente en
France. Si le « rapport Jounot 14 » d’octobre 2013, qui fait
suite aux attentats de Mohamed Merah, introduit une
première rupture dans le contexte hexagonal et initie une
réflexion sur la prévention de la radicalisation en France
[Ragazzi, 2014, p. 10], il faut néanmoins attendre le plan
de lutte antiterroriste (PLAT) du 23 avril 2014 pour
que les autorités françaises entreprennent une véritable
action publique de « prévention de la radicalisation ».
Influencée par les expériences européennes – notamment
le Royaume-Uni, les Pays-Bas ou encore le Danemark – et
les réseaux d’échanges d’expertise internationaux comme
le PPN 15 ou le RAN 16 – [Ragazzi, 2014, p. 11], la France
déploie pour la première fois une action publique de
prévention et de prise en charge de la radicalisation qui
demeure toutefois limitée dans ses ambitions et encore
indécise dans son cadrage.
Construire la prévention
de la radicalisation : entre
balbutiements et cadrage
incertain
Comportant 24 mesures, le plan d’action du 23 avril
2014 17 constitue une première étape pour les autorités
françaises en matière de prévention de la radicalisation.
Les actions engagées demeurent toutefois très largement
assujetties à une double logique : d’un côté l’identification,
la prise en charge précoce des individus considérés
comme radicalisés ou à risque de radicalisation, ainsi que
l’accompagnement des familles et des proches confrontés
à ces situations, de l’autre la mise en œuvre d’une politique
de prévention de la radicalisation autour du diptyque
« réaffirmation des valeurs républicaines » et « promotion
de la laïcité ».
S’inspirant des autres dispositifs européens déjà en place,
la France va construire un dispositif de prévention
de la radicalisation à sa mesure, tenant compte d’une
réalité sociale, historique et institutionnelle particulière.
Fortement centralisé et sous la tutelle du ministère de
l’Intérieur, ce dispositif de prévention se déploie à tâtons
dans les mois qui précèdent la vague d’attentats de 2015.
En avril 2014 est créé le Centre national d’assistance et
de prévention de la radicalisation (CNAPR) afin d’assurer
la gestion du numéro national d’appel téléphonique
d’assistance et d’orientation à travers lequel peuvent
se faire les signalements en lien avec la radicalisation.
Rattaché à l’Unité de coordination de la lutte
antiterroriste (UCLAT), le CNAPR permet de centraliser
les signalements d’individus présentant des signes de
radicalisation 18. Opéré par des policiers réservistes
assistés par une psychologue, ce « numéro vert » offre
aux familles et aux professionnels concernés par une
situation potentielle de radicalisation une écoute et une
(14) Jounot (Y.), 2013, Prévention de la radicalisation, Paris, Secrétariat général de la défense et de la sécurité nationale.
(15) PPN ou Policy Planners Network est un réseau intergouvernemental réunissant les représentants d’agences gouvernementales de douze pays :
Royaume-Uni, Canada, France, Allemagne, Pays-Bas, Danemark, Suède, Belgique, Espagne, Finlande, Norvège et la province de Victoria
en Australie. Il vise à permettre un échange de connaissances et de bonnes pratiques en matière de prévention de la radicalisation et de
l’extrémisme violent.
(16) RAN ou Radicalization Awareness Network est un réseau pan-européen mis en place par la Commission européenne visant à mettre en contact
les praticiens travaillant dans le domaine de la prévention de la radicalisation en Europe. Le RAN est structuré autour d’un centre d’excellence
qui assure une diffusion des connaissances et des bonnes pratiques, ainsi que de groupes de travail sectoriels (communication et discours, EXIT,
éducation, etc.) permettant de réunir des praticiens sur des thématiques précises afin d’échanger sur les enjeux, les défis et les bonnes pratiques
en matière de prévention de la radicalisation. Le RAN vise ainsi à créer une synergie entre les divers expériences et modes d’actions des acteurs
de terrain et diffuser les bonnes pratiques entre États membres européens.
(17) La circulaire du 29 avril 2014 INTK1405276C du ministre de l’Intérieur relative à la prévention de la radicalisation et l’accompagnement des
familles est complétée par des mesures au niveau interministériel.
(18) Créé en mars 2015, le Fichier de traitement des signalés pour la prévention de la radicalisation à caractère terroriste (FSPRT) vise à recenser
l’ensemble des signalements de la plate-forme du CNAPR, ainsi que les signalements en lien avec la radicalisation par les autres acteurs
territoriaux.
Prévenir la radicalisation violente : nouveaux habits d’une action publique à la française ? – Benjamin DUCOL
benjamin.ducol@icloud.com - E16-00865838
DOSSIER I 13
orientation vers des démarches de soutien 19. Par cette
centralisation des signalements liés à la radicalisation,
l’UCLAT assure aussi un suivi statistique et administratif
des personnes radicalisées pour l’ensemble du territoire 20.
La coordination de l’ensemble du dispositif national de
prévention de la radicalisation est confiée au Comité
interministériel de prévention de la délinquance, renommé
en avril 2014 Comité interministériel de prévention de la
délinquance et de la radicalisation (CIPDR 21). Le CIPDR a
pour mandat la mise en œuvre des mesures de prévention
de la radicalisation, la gestion d’un fonds interministériel
destiné à financer les actions de prévention sur l’ensemble
du territoire, ainsi que la formation des professionnels et
des intervenants de première ligne 22.
À ce dispositif national centralisateur s’ajoute ainsi un
maillage territorial opéré par les préfectures au niveau
départemental à l’aide de deux pôles : les groupements
d’évaluation départementaux (GED) et les cellules
d’écoute et d’accompagnement des familles 23 (CEPRAF).
D’un côté, les groupements d’évolution départementaux
(GED) regroupent les acteurs sécuritaires (renseignement,
police, justice) au niveau local ayant pour mission d’évaluer
les signalements susceptibles de porter sur des individus
« radicalisés » et d’envisager des mesures judiciaires,
administratives ou de prise en charge à mettre en œuvre.
De l’autre, les cellules d’écoute et d’accompagnement des
familles (CEPRAF) assurent un travail de détection
des « signaux faibles » et de remontée des situations
potentielles de radicalisation vers le CNAPR à travers
la participation de plusieurs acteurs locaux (services
pénitentiaires, d’insertion et de probation (SPIP), services
sociaux, éducation nationale, protection judiciaire de
la jeunesse, aide sociale à l’enfance, agence régionale de
santé, etc.). En parallèle, les CEPRAF assurent la prise en
charge et l’accompagnement individualisé des personnes
concernées par une situation de radicalisation et de leurs
proches avec l’appui des acteurs locaux 24 mobilisables.
Sur le terrain, la mise en œuvre d’une action publique
de prévention n’est pas toujours fluide. Le caractère
extrêmement large du plan d’action et de la circulaire du
29 avril 2014 produit sur le terrain une disparité entre
les territoires. Alors que certains s’approprient l’action
de prévention de la radicalisation et mettent en œuvre
les mesures locales appropriées, d’autres demeurent
dans une logique attentiste [Benbassa et Troendlé, 2017,
p. 19]. Malgré une volonté affichée par les autorités
publiques d’expérimenter une logique préventive, les
actions entreprises demeurent, à ce stade, encore limitées.
Comme le note Ragazzi [2014, p. 35] : «The timid measures
of the “mechanisms for countering jihadist networks”, limited for
the time being to a toll-free number for alerting the police about
potential candidates for jihad, is more a case of a symbolic response
than any real policy on the ground which has remained focused on
legal and administrative aspects ».
Alors qu’un dispositif de prévention de la radicalisation
s’implante timidement en France à partir d’avril 2014, les
attentats de janvier 2015 vont venir en accélérer son ancrage.
Interprétés comme le résultat d’un délitement du corps
social et d’un affaiblissement des valeurs républicaines, les
attentats de Charlie Hebdo et de l’Hyper Casher conduisent
à un recadrage de l’action publique de prévention de la
radicalisation. La radicalisation n’est plus juste un enjeu
sécuritaire, mais devient un enjeu de cohésion sociale [Sèze,
(19) Comparativement à d’autres dispositifs similaires pouvant exister au niveau international, la ligne d’assistance française demeure dans un cadre
sécuritaire, puisque opéré par le ministère de l’Intérieur et non par des associations ou des organismes indépendants. Sur l’exemple canadien,
lire notamment Ducol (B.) et Chevrier-Pelletier (A.), 2018, « Radicalisation(s) et extrémisme(s) violent(s) : regard sur l’émergence d’initiatives de
prévention au Canada », Cahiers de la sécurité et de la justice, n° 43, Paris, Institut national des hautes études de la sécurité et de la justice,
p. 100-109.
(20) Sur les 19 744 individus inscrits dans le ficher FSPRT, ce sont 13 370 qui avaient été signalés via le CNAPR et les états-majors de sécurité
et institutionnels au niveau préfectoral, témoignant d’une capacité importante de remontée du renseignement de ce dispositif. Cazeau (B.) et
Goy-Chavet (S.), 2018, Rapport n˚ 639 fait au nom de la commission d’enquête sur l’organisation et les moyens de l’État pour faire face à
l’évolution de la menace terroriste après la chute de l’État islamique [Rapport], Paris, Le Sénat, p. 87.
(21) Le Comité interministériel de prévention de la délinquance et de la radicalisation est rattaché au ministère de l’Intérieur. Initialement créé en
2006 pour fixer les orientations gouvernementales et coordonner les politiques de prévention de la délinquance au niveau interministériel, le
CIPD devient le CIPDR en avril 2014 avec pour mandat d’inscrire la prévention de la radicalisation menant à la violence dans une perspective
transversale.
(22) Pour un aperçu des contenus de formation, consulter le kit de formation de prévention de la radicalisation du CIPDR : secrétariat général du
Comité interministériel de prévention de la délinquance (2015), Prévention de la radicalisation - Kit de formation (Paris, ministère de l’Intérieur)
disponible en ligne : https://www.interieur.gouv.fr/content/download/92091/717461/file/kit-formation%20version2.pdf (consulté le 2
janvier 2019).
(23) Il est à noter que les noms de ces deux pôles ont pu évoluer dans le temps au fur et à mesure de la mise en œuvre du dispositif. Nous gardons
néanmoins ces deux appellations, les plus récentes, pour rendre compte de la division du travail dans le dispositif local de prévention de la
radicalisation.
(24) Au mois de février 2018, les CEPRAF déclaraient avoir pris en charge plus de 6 000 personnes déclarées pour des faits de radicalisation et
accompagnés plus de 2 000 familles sur l’ensemble du territoire français. Cazeau (B.) et Goy-Chavet (S.), 2018, Rapport n˚ 639 fait au nom
de la commission d’enquête sur l’organisation et les moyens de l’État pour faire face à l’évolution de la menace terroriste après la chute de l’État
islamique [Rapport], Paris, Le Sénat, p. 209
Cahiers de la sécurité et de la justice – n°46
benjamin.ducol@icloud.com - E16-00865838
14 I DOSSIER
2019]. L’État engage dès lors des mesures de prévention
qui visent à répondre à ce constat. Sur le terrain de l’action
publique, le déploiement des dispositifs de prévention de
la radicalisation va ainsi largement s’opérer à travers une
réaffirmation du cadre républicain.
Au lendemain des attentats de janvier 2015, la mise
en œuvre de l’action publique de prévention de la
radicalisation s’opère en premier lieu au niveau symbolique
avec le Service d’information du gouvernement (SIG) et
la campagne de « contre-discours » « Stop Djihadisme ».
Composante communicationnelle du dispositif de
prévention de la radicalisation du gouvernement français,
la campagne « Stop Djihadisme 25 » institutionnalise
pour la première fois une stratégie de communication
publique dans le domaine [Fragnon, 2018]. Porteuse
d’une perspective informative (la publicisation des
indicateurs de radicalisation), cette campagne se veut
avant tout persuasive puisqu’elle vise à proposer un
contre-narratif à celui de l’EI en dévoilant les exactions
et le double discours de l’organisation jihadiste. Cette
campagne illustre, par ailleurs, un cadrage du phénomène
de radicalisation comme « dérive sectaire », résultat d’un
processus de manipulation mentale. Ce cadrage trouve une
écoute particulière en France en raison d’une expérience
historique de lutte contre les sectes [Ollion, 2017] et de la
mobilisation de cette grille de lecture explicative par un
certain nombre d’acteurs publics 26.
la « mission intégratrice de l’école et [insiste sur] la pédagogie des
valeurs centrales de la République autour du thème de la laïcité ».
Alors que les attentats de Charlie Hebdo ont pu donner lieu
à des tensions dans certains établissements scolaires avec
la perturbation de la minute de silence ou la contestation
du slogan « Je suis Charlie » par certains élèves, l’Éducation
nationale va ainsi mettre en œuvre une large mobilisation
institutionnelle (notamment autour d’un site web, de
formations et de guides) qui ne rencontre toutefois pas
toujours une traduction réelle au niveau du terrain [Lorcerie
et Moignard, 2017]. La volonté de revivifier le sentiment
d’appartenance à la communauté nationale s’exerce au-delà
des milieux jeunesse par une stratégie de rappel des valeurs
républicaines et d’interpellation de différents acteurs
publics. En contradiction avec le discours républicain laïc
traditionnellement affiché par les autorités françaises, les
acteurs du culte musulman sont ainsi interpellés autour de
la nécessité d’une réflexion sur la formation des imams et le
besoin d’un contre-discours à l’égard d’un courant salafiste
appréhendé par les pouvoirs publics comme l’antichambre
du jihadisme [Sèze, 2019, p. 143-206].
Jusqu’ici absente du contexte hexagonal, la lutte
contre l’extrémisme violent ne devient plus la seule
affaire des « professionnels de l’antiterrorisme », mais
progressivement un champ de pratique élargi faisant
intervenir une variété d’acteurs [Ragazzi, 2017b]. Un
basculement qui ne s’exerce toutefois que partiellement
puisque le volet répressif demeure dominant dans le
dispositif français de lutte contre la radicalisation violente.
Face au nombre croissant de signalements post-attentats,
les autorités publiques vont venir renforcer le dispositif
de prise en charge et d’accompagnement déjà opérant
sur l’ensemble du territoire. Afin d’appuyer l’action
des préfectures au niveau local, une équipe mobile
d’intervention est mise en place, un mandat confié
au Centre de prévention des dérives sectaires liées à
l’islam (CPDSI) de Dounia Bouzar. Ce dernier va dès
lors intervenir sur l’ensemble du territoire pour assurer
un appui logistique aux structures de prise en charge
au niveau local ou une prise en charge directe là où les
structures de prise en charge s’avèrent absentes.
Une logique de prévention
de la radicalisation incomplète ?
Expérimentations et écueils
d’une action publique
(2015-2018)
Au-delà des mesures de détection et de prise en charge
s’amorce un début d’action de prévention globale.
L’Éducation nationale est ainsi mobilisée au travers d’un
plan d’action intitulé « Grande mobilisation de l’école
pour les valeurs de la République 27 » qui met en avant
Les attentats du 13 novembre 2015 marquent un nouveau
traumatisme pour la société française. Face à un contexte
exceptionnel, la réaction des autorités françaises va
dès lors s’opérer en deux temps. Alors qu’émane une
demande sociétale de sécurisation [Brouard, Vasilopoulos
(25) Ancrée dans une perspective de contre-discours, la campagne Stop-Djihadisme s’inspire très largement de la campagne de contre-narratif
américaine «Welcome to the Islamic Land».
(26) À cet égard, on pourra souligner l’implication des représentants de la Mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives
sectaires (MIVILUDES) ou du Centre de prévention des dérives sectaires liées à l’islam (CPDSI) dans cette période initiale de cadrage et de
mise en œuvre du dispositif de prévention de la radicalisation en France.
(27) Pour retrouver les mesures de la « Grande mobilisation de l’école pour les valeurs de la République », consulter la page web : http://eduscol.
education.fr/cdi/actualites/archives/1er-semestre-2015/mesures-valeurs-rep (consulté le 10 juillet 2018).
Prévenir la radicalisation violente : nouveaux habits d’une action publique à la française ? – Benjamin DUCOL
benjamin.ducol@icloud.com - E16-00865838
DOSSIER I 15
et Foucault, 2018], l’État français s’ancre tout d’abord
dans une logique réactive avec le déclenchement de
l’état d’urgence 28 et l’accroissement des « mesures
administratives anticipatoires » pour lutter contre la
menace immédiate [Ragazzi, 2017b]. Les attentats de
novembre 2015 et les épisodes terroristes qui s’ensuivent
(Nice, Saint-Étienne-du-Rouvray, Orly, gare de Marseille,
etc.) conduisent néanmoins les autorités françaises à une
réinterprétation de la nature de la menace jihadiste sur le
territoire français. Une réinterprétation qui nécessite du
même coup l’accélération d’un déploiement des mesures
de prévention de la radicalisation. Suite aux attentats
de novembre 2015, le paradigme de prévention de la
radicalisation s’entend un peu plus en France, et ce en
dépit d’une action publique encore largement envisagée à
travers un prisme sécuritaire [Marret, 2016 ; Sèze, 2019].
Au lendemain des attentats de novembre 2015, la mise en
œuvre des dispositifs de prévention de la radicalisation
demeure incomplète en France. En effet, les mesures mises
en œuvre depuis avril 2014, puis renforcées au lendemain
de l’attentat de Charlie Hebdo demeurent très largement
orientées vers le diptyque « détection-prise en charge »
laissant de côté toute action de prévention plus holistique.
Il faut attendre mai 2016 pour que le gouvernement
annonce une amplification des mesures de prévention
avec l’annonce d’un nouveau plan d’action contre la
radicalisation et le terrorisme (PART 29) comprenant 80
mesures dont 50 complémentaires à celles déjà mises en
œuvre depuis le PART 2014. De nouveaux secteurs sont
visés et la palette d’acteurs engagés dans le champ d’action
publique de la prévention de la radicalisation s’élargit :
caisses d’allocations familiales, protection de la jeunesse
(PJJ), etc. [Pellon, 2017, p. 12]. Bien que presque tous
les pans de l’action publique s’avèrent mobilisés dans les
actions de prévention de la radicalisation, plusieurs axes
prioritaires sont privilégiés : recherche (avec la remise en
mars 2016 par l’alliance Athéna d’un rapport permettant
d’établir une cartographie des pôles de recherche pouvant
être mobilisés en France dans le cadre d’une logique
de recherche-action sur les enjeux de radicalisation),
éducation (considérée dans le PART 2016 comme un
domaine prioritaire 30 avec la formation du personnel
de l’Éducation nationale à la détection et au suivi des
situations de radicalisation de même que la lutte contre
les théories du complot jusqu’à l’éducation aux médias,
en passant par la promotion des enjeux de citoyenneté
et de laïcité) ou encore la prison (avec la mise en avant
d’un ensemble de mesures allant du renforcement du
renseignement pénitencier à la formation des aumôniers
musulmans en passant par l’expérimentation d’unités
dédiées pour les détenus considérés comme radicalisés 31).
Si fin 2016 la plate-forme de signalements du CNAPR
assure une relative fluidité dans l’identification des
situations potentielles de radicalisation sur l’ensemble
du territoire, la mise en place des dispositifs de suivi et
d’accompagnement au niveau local se révèle encore
inégale [Pellon, 2017, p. 13]. Face au besoin de trouver
des modèles de prise en charge des individus radicalisés,
le gouvernement procède en septembre 2016 à la création
du « Centre de prévention, d’insertion et de citoyenneté »
(CPIC) de Pontourny aussi plus communément qualifié
de « centre de déradicalisation ». Projet pilote destiné à
expérimenter un modèle de désengagement potentiellement
reproduisible à l’échelle du territoire français, le Centre
de Pontourny accueille un public volontaire d’individus
considérés comme « radicalisés », mais ne présentant pas
un risque avéré de passage à l’acte au sein d’un centre de
réinsertion fermé. Après dix mois d’existence, le CPIC de
Pontourny qui connaît un résultat mitigé tant par le faible
nombre de personnes prises en charge (seulement neuf)
que par l’absence de succès démontré (aucun pensionnaire
ayant suivi le programme jusqu’à son terme) se voit fermé
par le gouvernement [Benbassa et Troendlé, 2017, p. 3944]. Face à l’échec du Centre de Pontourny, les pouvoirs
publics français semblent s’orienter à partir de 2017 vers
des dispositifs de prise en charge plus localisés.
Cette orientation se traduit par une volonté plus grande
de décentralisation (encore imparfaite) de la prévention
de la radicalisation par l’État français. Ainsi, les services
(28) Mesure exceptionnelle, l’état d’urgence avait été utilisé à trois reprises en France depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale : en 1955, puis
en 1961 lors des événements de la guerre d’Algérie, en 1984-1985 lors des affrontements violents autour de l’indépendance de la NouvelleCalédonie et temporairement (2 semaines) à l’automne 2005 lors des émeutes urbaines.
(29) Plan d’action contre la radicalisation et le terrorisme (2016) : https://www.interieur.gouv.fr/Media/SGCIPD/Files/plan-d-action-contre-laradicalisation-et-le-terrorisme-PART2 (consulté le 12 avril 2019).
(30) Consulter le site web Canopé : https://www.reseau-canope.fr/prevenir-la-radicalisation (consulté le 12 avril 2019).
(31) Cinq unités dédiées, dénommées unités de prévention de la radicalisation (UPRA), sont créées en 2016 dans les établissements de FleuryMerogis, Fresnes, Osny et Lille-Annoeullin. Dotée d’une vingtaine de places, chaque unité possède une équipe pluridisciplinaire en charge
d’assurer la mise en oeuvre d’un programme personnalisé pour les détenus. Il est à noter que l’option de séparer les détenus les plus dangereux
sur le fondement d’une évaluation sécuritaire, qualifiés de « détenus particulièrement surveillés » était possible auparavant sur une base
individuelle et non de manière institutionnalisée comme dans le cas des UPRA. À la suite des critiques de la contrôleure des prisons Adeline
Hazan et de l’agression au couteau par un détenu de deux surveillants de l’UPRA de la prison d’Osny, les UPRA sont remplacées par six
quartiers d’évaluation de la radicalisation (QER) qui permettent une évaluation préliminaire des détenus, ensuite placés dans un des 27
établissements pénitentiaires en France au sein duquel est structuré un dispositif de prise en charge personnalisé.
Cahiers de la sécurité et de la justice – n°46
benjamin.ducol@icloud.com - E16-00865838
16 I DOSSIER
municipaux et les comités locaux sont mobilisés au travers
d’une série de mesures allant d’actions de prévention
primaire jusqu’à la prise en charge et l’accompagnement
des individus en situation de radicalisation et de leurs
proches. Cette territorialisation de la prévention de
la radicalisation est encouragée par le gouvernement
qui crée, en décembre 2016, une cellule nationale
de coordination et d’appui de l’action territoriale de
prévention de la radicalisation. Au niveau local, plusieurs
initiatives de prise en charge et d’accompagnement voient
le jour. Si certaines connaissent des déboires, d’autres
apparaissent plus innovantes. Ainsi, la cour d’appel de
Colmar et le tribunal de grande instance de Mulhouse
mettent en place à partir d’octobre 2015 un programme
qui vise à proposer aux individus judiciarisés et considérés
comme « radicalisés » un soutien individualisé. Sur un
modèle convergent et expérimenté en région parisienne
depuis 2016 par l’administration pénitentiaire, le
programme « Recherches et intervention sur les violences
extrémistes » (RIVE) vise à la prise en charge des
personnes placées sous main de justice, suivies en milieu
ouvert pour des actes de terrorisme ou identifiées comme
radicalisées [voir Herzog-Evans et al., ce dossier]. Conçu
comme pluridisciplinaire, le dispositif vise à assurer un
suivi individuel et un mentorat permettant d’assurer un
désengagement progressif des individus concernés de
l’extrémisme violent. La création du Centre d’action et de
prévention contre la radicalisation des individus (CAPRI)
à Bordeaux en 2016, fondé sur le modèle associatif
indépendant représente un autre exemple de ces modèles
d’expérimentation de la prévention de la radicalisation
violente qui se développent au niveau local depuis 2016.
Conclusion. Vers une
professionnalisation de l’action
publique en matière de
prévention de la radicalisation
et après ?
Fruit d’une adoption plus tardive que beaucoup de
ses voisins européens, le dispositif de prévention de la
radicalisation français demeure marqué par des hésitations,
tant dans son cadrage que dans ses développements. Le
plan national de prévention de la radicalisation (PNPR 32)
« Prévenir pour protéger » annoncé en février 2018 (et
actualisé au mois d’avril 2019 33) illustre néanmoins
l’enracinement d’un paradigme de prévention de la
radicalisation comme logique d’action publique en France.
Marquant une rupture avec la tonalité prioritairement
sécuritaire des plans d’action antérieurs, le PNPR met
davantage l’accent sur une logique de prévention primaire.
Cet aspect se traduit notamment au niveau de l’école,
avec la mise en avant des mesures visant l’éducation aux
médias, le développement de l’esprit critique ou encore
une « pédagogie de la laïcité ». Parallèlement, des secteurs
jusqu’ici peu visés par la prévention de la radicalisation
(entreprises, universités, milieux sportifs) sont interpellés
à leur tour. Tributaire d’une trajectoire historique et d’un
contexte propre (modèle républicain, prégnance de la
laïcité, mise en œuvre post-attentats 2015, etc.), l’action
publique en matière de prévention de la radicalisation
apparaît toutefois encore largement en développement
en France, alors même que la menace terroriste n’a cessé
d’évoluer dans le contexte post-attentats 2015.
Depuis ses premiers balbutiements d’avril 2014, le
dispositif de prévention de la radicalisation en France a fait
l’objet de plusieurs rapports parlementaires venus dresser
un bilan (souvent critique) de l’action publique. Parmi les
récriminations les plus récurrentes, celle d’une trop faible
professionnalisation, en particulier de certaines structures
ou acteurs de terrain, comme en témoignent plusieurs
« couacs » médiatisés [Guéguen, 2016]. On assiste
néanmoins depuis la fin de l’année 2017 à une montée
en compétences et une professionnalisation croissante
des acteurs sur le terrain opérant dans ce champ d’action,
comme en témoigne notamment la fin du dispositif des
équipes mobiles en juin 2017. L’État est, par ailleurs, venu
resserrer le cadre d’action des structures de prévention de
la radicalisation, conditionnant l’octroi de subventions à
un cahier des charges et une série de critères plus stricts 34.
Ce resserrement s’est accompagné par une volonté de
procéder à l’évaluation des conditions de réussite ou
d’échec des initiatives de prévention en vigueur [Cazeau
et Goy-Chavet, 2018, p. 265] et de favoriser un meilleur
échange de bonnes pratiques entre acteurs de terrain.
Plusieurs enjeux demeurent néanmoins, à commencer par
la nature fortement centralisée du dispositif de prévention
de la radicalisation français qui ne permet souvent qu’une
prise en compte partielle des réalités locales. Les enjeux de
(32) Comité interministériel de prévention de la délinquance et de la radicalisation (2018), Prévenir pour protéger : plan national de prévention de
la radicalisation. Consultable à l’adresse suivante : https://www.gouvernement.fr/sites/default/files/contenu/piece-jointe/2018/02/201802-23-cipdr-radicalisation.pdf (consulté le 12 avril 2019).
(33) Comité interministériel de prévention de la délinquance et de la radicalisation (2019), Bilan et perspectives du Plan national de prévention de
la radicalisation, 11 avril. Consultable à l’adresse suivante : https://www.cipdr.gouv.fr/bilan-et-perspectives-du-plan-national-de-prevention-dela-radicalisation-cipdr-11-avril-2019/ (consulté le 12 avril 2019).
Prévenir la radicalisation violente : nouveaux habits d’une action publique à la française ? – Benjamin DUCOL
benjamin.ducol@icloud.com - E16-00865838
DOSSIER I 17
LES ENJEUX DE COORDINATION ENTRE ACTEURS,
PARFOIS CONCURRENTS OU REFUSANT DE
TRAVAILLER ENSEMBLE, CONSTITUENT UNE
AUTRE PROBLÉMATIQUE OÙ LES AUTORITÉS
PUBLIQUES S’AVÈRENT ENCORE DÉFICIENTES
MALGRÉ TOUT, LA PROFESSIONNALISATION
CROISSANTE DE CE CHAMP D’ACTION PUBLIQUE
DE LA PRÉVENTION DE LA RADICALISATION
EN PARTICULIER AU TRAVERS D’INITIATIVES
LOCALES, PARTICIPE À L’ÉMERGENCE,
L’INVENTION ET LA MISE
EN COMMUN DE SAVOIRS D’UN NOUVEAU
CHAMP DE PRÉVENTION SPÉCIALISÉ
coordination entre acteurs, parfois concurrents ou
refusant de travailler ensemble, constituent une autre
problématique où les autorités publiques s’avèrent
encore déficientes. Malgré tout, la professionnalisation
croissante de ce champ d’action publique de la prévention
de la radicalisation, en particulier au travers d’initiatives
locales, participe à l’émergence, l’invention et la mise en
commun de savoirs d’un nouveau champ de prévention
spécialisé [Guzniczak, 2017, p. 74]. Finalement, l’extrême
focalisation du dispositif de prévention français sur le
jihadisme et l’islam radical, occultant au passage les autres
formes de menaces extrémistes (ultra-droite, nationaliste,
etc.), constitue une dernière limite importante du
paradigme actuel.
À l’instar d’autres expériences internationales, l’action
publique de prévention de la radicalisation violente
demeure, dans le contexte hexagonal, marqué par une
défiance et une série de défis. En premier lieu, c’est
bien une opposition de la part d’un certain nombre
d’acteurs qui semble questionner la viabilité même d’une
politique publique de prévention de la radicalisation. Par
méfiance théorique, par incompréhension empirique ou
tout simplement refus idéologique, certains chercheurs
s’avèrent hautement critiques à l’égard même de la notion
de radicalisation et de sa transposition comme problème
social nécessitant une action publique [Brie et Rambourg,
2017]. À cela s’ajoute une défiance plus populaire vis-àvis de ce que certains ont pu appeler un « marché de la
déradicalisation » structuré autour de figures médiatisées
et d’initiatives parfois peu fondées. Les scandales multiples
entourant certaines figures du champ de la prévention de
la radicalisation, de même que certains échecs fortement
médiatisés, à l’instar du Centre de Pontourny fermé en
juillet 2017, participent à une dégradation dans l’opinion
publique de la légitimité des mesures de prévention de la
radicalisation dans leur ensemble. Face à cette défiance
demeure l’enjeu de constituer ce domaine en un champ
d’action reconnu et légitime. Parallèlement, le déploiement
des logiques de prévention dans une tonalité fortement
sécuritaire participe à enraciner dans le contexte français la
perception d’une « sécuritisation des politiques sociales »
[Ragazzi, 2014, 2017a] et l’entérinement d’une logique
de suspicion [Ragazzi, 2017b, p. 4] à l’ensemble du corps
social. La croissance exponentielle du fichier FSPRT 35,
nourri entre autres par les signalements soumis par le
biais de la plate-forme CNAPR, soulève ainsi une série
d’enjeux en termes de fichage administratif et de dérives
sur les droits individuels [Gautron et Monniaux, 2016 ;
Leboucq, 2017 ; CNCDH, 2017]. Finalement, c’est bien
la « lenteur à produire des effets face à l’urgence de la situation »
[Cazeau et Goy-Chavet, 2018, p. 264] qui constitue
peut-être le dernier et le plus important des défis pour
le dispositif de prévention de la radicalisation en France.
Dans un pays encore marqué par la vague d’attentats qui
se succèdent depuis 2015, les dividendes de la prévention
s’avèrent plus attendus que jamais n
(34) Loi n˚2017-1510 du 30 octobre 2017 renforçant la sécurité intérieure et la lutte contre le terrorisme ; arrêté du 3 avril 2018 fixant le cahier
des charges relatif aux actions initiées, définies et mises en œuvre par les structures impliquées dans la prévention et la prise en charge de la
radicalisation.
(35) En date de mars 2018, ce sont 19 744 individus considérés comme « radicalisés » qui étaient inscrits sur le FSPRT, dont 4 000 relevant du
« haut du spectre », autrement dit des profils particulièrement dangereux présentant un risque élevé de dangerosité. Cazeau (B.) et Goy-Chavet
(S.), 2018, Rapport n˚ 639 fait au nom de la commission d’enquête sur l’organisation et les moyens de l’État pour faire face à l’évolution de
la menace terroriste après la chute de l’État islamique [Rapport], Paris, Le Sénat, p. 59 et 87.
Cahiers de la sécurité et de la justice – n°46
benjamin.ducol@icloud.com - E16-00865838
18 I DOSSIER
Bibliographie
BARTOLUCCI (V.), 2017, «The Perils and Prospects of the
French Approach to Counterterrorism» in ROMANIUK,
(S. N.), GRICE, (F.), IRRERA, (D.), WEBB, (S.) (eds.), The
Palgrave Handbook of Global Counterterrorism Policy, Londres,
Palgrave Macmillan, p. 437-458.
2017, Rapport
d’information n˚ 633 fait au nom de la commission des lois
constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du
Règlement et d’administration générale sur le désendoctrinement, le
désembrigadement et la réinsertion des djihadistes en France et en
Europe [Rapport], Paris, Sénat.
BENBASSA
(E.),
TROENDLÉ
(C.),
FOLEY (J.), 2013, Countering Terrorism in Britain and France :
Institutions, Norms and the Shadow of the Past, Cambridge,
Cambridge University Press.
FRAGNON (J.), 2018, « La radicalisation sous emprise ?
Le processus de radicalisation au prisme de Stop
Djihadisme », Quaderni : Communication, Technologies, Pouvoir,
n° 95, vol. 1, p. 13-38.
GAUTHIER (L.), 2016, « Les voies et les moyens de la lutte
antiterroriste », Pouvoirs, n° 3, vol. 158, p. 39-50.
GAUTRON (V.), MONNIAUX (D.), 2016, « De la
2008, « Les caractéristiques de
l’antiterrorisme français : parer les coups plutôt que penser
les plaies », in BIGO (D.), BONELLI (L.), DELTOMBE (T.)
(eds.), Au nom du 11 septembre… Les démocraties à l’épreuve de
l’antiterrorisme, Paris, La Découverte, p. 168-187.
BONELLI
(L.),
BRIE (G.) ET RAMBOURG (C.), 2017, « Radicalisation et
mystifications », Laurent Mucchielli - Délinquance, Justice et
Autres Questions de Société. Disponible en ligne : https://
www.laurent-mucchielli.org/public/Radicalisation_et_
mystifications.pdf (consulté le 12 mars 2019).
surveillance secrète à la prédiction des risques : les dérives
du fichage dans le champ de la lutte contre le terrorisme »,
Archives de politique criminelle, n° 1, vol. 38, p. 123-135.
GUEGUEN (E.), 2016, « Déradicalisation : un business pas
très sérieux », France Inter. Disponible en ligne : https://
www.franceinter.fr/societe/deradicalisation-un-businesspas-tres-serieux (consulté le 8 février 2019).
GUZNICZAK (B.), 2017, « Du côté de la prévention. De
Valence à Marseille », Les cahiers dynamiques, n° 72, vol. 2,
p. 67-75.
BROUARD (S.), VASILOPOULOS (P.), FOUCAULT (M.),
2018, «The Impact of Terrorist Threat on Political
Attitudes: The Case of France in the Aftermath of the
2015-2016 Attacks», West European Politics, n˚41, vol. 5, p.
1073-99.
HAMAÏDE (J.), 2014, « Comment les familles des Français
partis en Syrie et en Irak ont formé un réseau d’entraide »,
Slate. Disponible en ligne : http://www.slate.fr/
story/94455/reseau-familles-francais-irak-syrie (consulté
le 8 février 2019).
CAILLET (R.), PUCHOT (P.), 2017, Le Combat vous a été
prescrit. Une histoire du jihad en France, Paris, Stock.
HELLMUTH (D.) 2015a, «Countering Jihadi Terrorists and
CAZEAU (B.), GOY-CHAVET (S.), 2018, Rapport n˚ 639 fait
Radicals the French Way», Studies in Conflict & Terrorism,
n° 38, vol. 12, p. 979-997.
au nom de la commission d’enquête sur l’organisation et les moyens
de l’État pour faire face à l’évolution de le menace terroriste après la
chute de l’État islamique [Rapport], Paris, Le Sénat.
HELLMUTH (D.), 2015b, «Countering Jihadi Radicals and
Foreign Fighters in the United States and France : Très
Similaire», Journal for Deradicalization, n° 4, Fall, p. 1-43.
CHALKIADAKI (V.), 2015, «The French «War on Terror»
in the post-Charlie Hebdo Era», The European criminal law
associations’forum (Eucrime), n° 1, p. 26-32. Disponible en
ligne : https://eucrim.mpicc.de/archiv/eucrim_15-01.
pdf (consulté le 12 mars 2019).
CNCDH, 2017, Avis du 18 mai 2017 sur la prévention de
la radicalisation [Rapport], Paris, Commission nationale
consultative des droits de l’Homme.
FAUCHER (F.), BOUSSAGUET (L.), 2018, «The Politics
of Symbols: Reflections on the French Government’s
Framing of the 2015 Terrorist Attacks», Parliamentary
Affairs, n° 7, vol. 1, p. 169-195.
JOUNOT (Y.), 2013, Prévention de la radicalisation [Rapport],
Paris, Secrétariat général de la défense et de la sécurité
nationale.
KHOSROKHAVAR (F.), 2016, Radicalisation, Paris, Maison
des Sciences de l’Homme.
LEBOUCQ (F.), 2017, « Radicalisation terroriste : le FSPRT,
beaucoup de chiffres pour quelques lettres », Libération.
Disponible en ligne : https://www.liberation.fr/
desintox/2017/11/08/radicalisation-terroriste-le-fsprtbeaucoup-de-chiffres-pour-quelques-lettres_1607805
(consulté le 8 janvier 2019).
Prévenir la radicalisation violente : nouveaux habits d’une action publique à la française ? – Benjamin DUCOL
benjamin.ducol@icloud.com - E16-00865838
DOSSIER I 19
LORCERIE (F.), MOIGNARD (B.), 2017, « L’école, la
laïcité et le virage sécuritaire post-attentats : un tableau
contrasté », Sociologie, n° 4, vol. 8, p. 1-10.
MARRET (J-L), 2016, « Action-réaction : le terrorisme et
l’État », Pouvoirs, revue française d’études constitutionnelles
et politiques, n°158, p. 5-14 .
OLLION (É.), 2017, Raison d’État : histoire de la lutte contre les
sectes en France, Paris, La Découverte.
PACKER (G.), 2015, «The Other France. Are Suburbs
of Paris incubators of terrorism?», The New Yorker.
Disponible en ligne : https://www.newyorker.com/
magazine/2015/08/31/the-other-france (consulté le 24
mars 2019).
RAGAZZI (F.), 2014, « Towards ‘‘policed multiculturalism’’?
Counter-radicalization in France, the Netherlands and
the United Kingdom », Les Études du CERI, n° 10, Paris,
Centre de recherches internationales SciencesPo.
SAMAAN (J. L.), JACOBS (A.), 2018, «Countering Jihadist
Terrorism: A Comparative Analysis of French and
German Experiences», Terrorism and Political Violence,
Ahead of Publication, p. 1-15.
SEELOW (S.), 2015, « Quelle politique de lutte contre la
radicalisation ? », Le Monde. Disponible en ligne : https://
www.lemonde.fr/police-justice/article/2015/01/19/quellepolitique-de-lutte-contre-la-radicalisation_4558895_1653578.
html (consulté le 11 janvier 2019).
PERELMAN (M.), 2006, «How the French Fight Terror»,
SÈZE (R.), 2019, Prévenir la violence djihadiste. Les paradoxes
d’un modèle sécuritaire, Paris, Le Seuil.
Foreign Policy. Disponible en ligne : https://foreignpolicy.
com/2006/01/19/how-the-french-fight-ter ror/
(consulté le 24 mars 2019)
SHAPIRO (J.), SUZAN (B.), 2003, «The French Experience
of Counter-Terrorism», Survival, n° 41, vol. 1, p. 67-98.
PELLON (E.), 2017, Politiques publiques de prévention de la
radicalisation. Articulation entre les politiques nationales, les
collectivités territoriales et le tissu associatif [Rapport], Paris,
Institut d’aménagement et d’urbanisme de l’Ile-de-France.
RAGAZZI (F.), 2017a, «Countering Terrorism and
Radicalization : Securitising Social Policy?», Critical Social
Policy, n˚37, vol.2, pp. 163-179.
RAGAZZI (F.), 2017b, L’évolution de la politique anti-terroriste
TENENBAUM (E.), 2016, « La sentinelle égarée ? L’armée
de Terre face au terrorisme », Focus Stratégique, n˚ 68, Paris,
Institut français des relations internationales (IFRI).
WITTENDORP (S.), DE BONT (R.), DE ROY VAN
ZUIJDEWIJN (J.), BAKKER (E.), 2017, Dealing with
Jihadism : A Policy Comparison Between the Netherlands,
Belgium, Denmark, Germany, France, the UK and the US (20102017), Leiden, Institute of Security and Global Affairs,
Leiden University.
en France depuis les attentats de 2015 : anticipation et mise au pas
du corps social, Paris, Centre de recherches internationales
SciencesPo. Disponible en ligne : http://www.sciencespo.
fr/ceri/fr/content/l-evolution-de-la-politique-antiterroriste-en-france-depuis-les-attentats-de-2015anticipat (consulté le 2 avril 2019).
Cahiers de la sécurité et de la justice – n°46
benjamin.ducol@icloud.com - E16-00865838