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Nouvelles pratiques sociales
Anciennes et nouvelles pratiques
Michel Parazelli
Les enjeux de l’intervention sociale territoriale
Volume 26, numéro 1, automne 2013
URI : https://id.erudit.org/iderudit/1024975ar
DOI : https://doi.org/10.7202/1024975ar
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Éditeur(s)
Université du Québec à Montréal
ISSN
0843-4468 (imprimé)
1703-9312 (numérique)
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Parazelli, M. (2013). Anciennes et nouvelles pratiques. Nouvelles pratiques
sociales, 26(1), 1–6. https://doi.org/10.7202/1024975ar
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Anciennes et
nouvelles pratiques
Dans le présent numéro, notre lectorat ne sera pas en
reste avec un dossier thématique substantiel sur l’intervention sociale territoriale ainsi que deux articles dans
les rubriques Perspectives. Cette fois-ci, l’entrevue est
menée par Sylvie Jochems (UQÀM) avec Geneviève
Bouchard et concerne sa pratique d’intervention sur
les problèmes d’intimidation dans les médias sociaux
chez les jeunes. Et finalement, dans la rubrique Écho
de pratique, des intervenantes de l’organisme communautaire Action Autonomie, Pilar Barbal i Rodoreda
et Denise Blais, nous livrent leurs réflexions dans un
article décrivant une expérience d’intervention originale auprès des personnes vivant avec des problèmes
de santé mentale, en collaboration avec le Musée
des Beaux-Arts. Dans ce numéro, l’ancienneté et la
nouveauté des pratiques se retrouvent confondues en
raison des contextes différents dans lesquels elles se
manifestent et le moment où elles apparaissent.
A V A N T - P R O P O S
Michel PARAZELLI
École de travail social
Université du Québec à Montréal
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Avant-propos
DOSSIER THÉMATIQUE
Le dossier thématique que nous vous offrons dans le présent numéro traite
des questions entourant Les enjeux de l’intervention sociale territoriale. Il
a été coordonné par Jacques Caillouette (Université de Sherbrooke), JeanFrançois Roos (Réseau québécois des intervenantes et intervenants en action
communautaire) et Jean-François Aubin (Réseau québécois de revitalisation
intégrée). Il comporte 11 articles dont le contenu est mis en perspective dans
un texte de présentation rédigé par les responsables de ce dossier thématique. Cette thématique met en discussion certains enjeux démocratiques de
l’intervention sociale, et ce de façon ambivalente quant aux orientations idéologiques des promoteurs de la territorialisation de l’intervention publique.
Rappelons-nous l’expérience marquante du Bureau d’aménagement de l’Est
du Québec (BAEQ) du début des années 1960, alors que la planification
scientifique des technocrates de l’État avait pour but de corriger les inégalités
socioéconomiques en mobilisant la participation des populations concernées
à l’aménagement du territoire (Mayer, 1994). Il en résulta la fermeture de
96 communautés et la relocalisation de 64 400 personnes. Ceci donna lieu au
regroupement de citoyens de 65 villages pour organiser ce que les citoyens
mobilisés ont appelé les « Opérations Dignité », au début des années 1970,
en opposition à ce type de planification autoritaire, réussissant ainsi à faire
reculer le gouvernement quant à son plan de relocalisation1.
Dans ce sens, l’intervention sociale territoriale n’est pas une nouvelle
pratique, mais un enjeu politique dans l’établissement d’un certain type de
relations de pouvoir médiatisé par une structuration géographique. L’espace
territorial étant utilisé ici comme un contenant de représentations sociales
idéologiques. Au-delà des promesses associées aux modèles idéalisés circulant dans ce type d’approche, l’enjeu global qui semblerait se dessiner
ici aussi est la possibilité de définir ou de redéfinir les règles normatives
de la socialisation à la vie collective. Chacun à leur manière, plusieurs des
auteurs d’articles de ce dossier tentent d’examiner comment et en quoi les
destinataires de l’intervention sociale, ainsi que les intervenants sociaux
eux-mêmes, sont partie prenante de la définition des logiques territoriales
de l’intervention sociale étudiées. De quel(s) territoire(s) s’agit-il? Celui vécu
et pratiqué par les destinataires de l’intervention, celui contrôlé administrativement par les institutions, la municipalité, ou celui régulé par le marché?
Mais, empiriquement, la vie sociale est inégalement traversée par toutes
ces représentations différentielles des pratiques territoriales. Il devient
donc nécessaire de voir comment les processus de désignation sociale, de
responsabilisation et d’activation sociale résultant d’une certaine pratique
1. Pour en savoir plus, consulter le site web suivant : http://operationdignite.com/-Historique,48-.html.
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d’intervention territoriale, peuvent être en tension avec des pratiques spatiales
d’appropriation collective d’actes sociaux et d’appartenance impliquant au
premier chef les destinataires.
L’ENTREVUE
L’entrevue de ce numéro a été réalisée par Sylvie Jochems, professeure à
l’École de travail social de l’UQÀM. Intitulée PraTIC d’une Maison de
Jeunes. L’Escalier et la cyberintimidation chez les jeunes, cette entrevue a
été réalisée avec madame Geneviève Bouchard, travailleuse de milieu à cette
maison de jeunes de Lachine. Celle-ci nous décrit le contexte d’un projet
de formation de 25 semaines sur l’intimidation qu’elle a réalisé auprès des
jeunes de sixième année, entre 2009 et 2010. Par la médiation du théâtre et
de la vidéo, les élèves étaient appelés à concevoir une activité de sensibilisation, l’objectif étant de faciliter la prise de parole sur ce sujet et de favoriser
l’entraide chez les jeunes. De plus, madame Bouchard nous explique que
cette première formation a rapidement conduit les formatrices à s’ouvrir
aux pratiques d’intimidation sur les réseaux sociaux comme Facebook et à
aider les écoles à se doter d’un code d’éthique à ce sujet. Ici aussi, d’anciennes
pratiques adoptent de nouveaux visages…
ARTICLES EN PERSPECTIVES
Dans ce numéro, nous présentons un article dans la rubrique Perspectives
étatiques et un autre dans la rubrique Perspectives communautaires.
PERSPECTIVES ÉTATIQUES
Le premier article de cette rubrique s’intitule L’écologie politique de la ville.
Vers un revenu suffisant garanti. Il est signé par Jonathan Durand-Folco, doctorant en philosophie de l’Université Laval. Aussi appelé « revenu minimum
garanti » (Groulx, 2005), « revenu de base » (November et Standing, 2003),
« revenu de citoyenneté » (Massot, 2002) ou « allocation universelle inconditionnelle » (Guibet Lafaye, 2006), le « revenu suffisant garanti » nous est
présenté par l’auteur comme une autre manière d’envisager collectivement
les rapports économiques des sociétés capitalistes actuelles. Selon lui, il
ne faudrait pas confondre le sens et les implications de toutes ces appellations, certaines pouvant même renforcer les inégalités socioéconomiques par
l’établissement d’un montant de subsistance insuffisant. Ce type d’orientation politique s’inscrit justement dans une critique de la tendance étatique
actuelle visant à responsabiliser les individus sans emploi. Pour l’auteur, le
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Avant-propos
revenu suffisant garanti s’inscrirait dans une perspective de justice distributive non seulement sur le plan matériel, mais aussi du temps disponible
à consacrer à ce qu’il appelle la « sphère autonome ». La sphère autonome
serait composée d’activités auto-organisées en dehors du marché et de l’État
et encouragerait les pratiques démocratiques de proximité en renforçant la
participation démocratique des personnes dans plusieurs sphères sociales
de la vie quotidienne.
S’inspirant de l’écologie politique proposée par l’écosocialiste André
Gorz (1991), l’auteur propose une sortie progressive du capitalisme et de la
société du travail salarié vers une « société de multiactivité ». Il s’agit de sortir
du « précariat » qui se développerait actuellement en augmentant l’hétéronomie des individus. En assurant à la base les capacités d’actions des personnes,
d’autres valeurs et priorités sociales pour la réalisation de soi que celles de l’hyper-productivité économique pourraient émerger, et ainsi réduire les situations
actuelles de marginalisation et de stigmatisation sociale résultant notamment
de la responsabilisation individuelle néolibérale. Loin de constituer un idéal
impossible à expérimenter, plusieurs pays en Amérique latine, en Europe, en
Afrique et en Amérique du Nord ont déjà manifesté leur intérêt à ce sujet et
engagé des discussions sur cette option politique afin d’en évaluer la faisabilité. Depuis la crise financière de 2008, ce type de politique sociale suscite un
regain d’intérêt dans ces pays, dont le Québec, où le parti politique Québec
solidaire a intégré à son programme une version du revenu minimum garanti
(Laplante et Côté, 2012 : 99).
PERSPECTIVES COMMUNAUTAIRES
Le deuxième article a été rédigé par Anne Plourde, doctorante en science
politique de l’UQÀM. Son article s’intitule Démocratisation des institutions
et des pratiques en santé. L’exemple historique des cliniques populaires.
L’auteure nous présente une analyse documentaire entourant le modèle de
gestion démocratique de la clinique communautaire de Pointe-St-Charles,
modèle qui a inspiré le projet des CLSC sans toutefois en respecter les pratiques et les principes. Par cet article, l’auteure s’est donné comme objectif
de mettre en perspectives les conceptions de la santé, le type de pratiques
et de modèle de gestion qui avaient cours à la fin des années 1960 avec le
contexte actuel du système de soins. Par sa description du fonctionnement
interne de la Clinique, elle montre que la plus grande force de celle-ci fut
la démocratisation non seulement de son mode d’organisation, mais aussi
de ses pratiques médicales, dont le souci était de lier la santé et la maladie
aux rapports sociaux et aux conditions de vie des personnes du quartier.
Démédicaliser les problèmes sociaux, déprofessionnaliser la médecine en
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développant une médecine communautaire, là était le défi politique de ce
type de pratiques qui rencontra plusieurs oppositions de la part de la médecine libérale traditionnelle de l’époque, dont le monopole du savoir médical se voyait menacé. D’autant plus que les médecins de la clinique étaient
payés sous la forme d’un salaire et non à l’acte, la qualité de la relation avec
les personnes pouvant s’en trouver grandement améliorée. L’auteure rend
compte aussi de la vie associative prise en charge par les citoyens selon
des modalités démocratiques et participatives bien vivantes. La recherche
documentaire montre aussi comment la clinique Pointe-St-Charles a été
confrontée à quatre reprises aux pressions d’intégration au réseau des CLSC.
L’intérêt de cette analyse est d’attirer notre attention non pas sur les excès
bureaucratiques des services sociaux d’aujourd’hui comme cause des problèmes, mais sur leur déficit démocratique.
ÉCHO DE PRATIQUE
Par cet écho de pratique, Pilar Barbal i Rodoreda (conseillère en défense
des droits) et Denise Blais (artiste), deux intervenantes impliquées dans la
défense des droits en santé mentale, rendent compte d’une démarche collective avec 15 personnes membres de l’organisme communautaire Action
Autonomie, en partenariat avec le Musée des Beaux-Arts de Montréal.
Afin d’accompagner des personnes ayant subi des mesures de contrôle et
de contention en milieu psychiatrique, l’organisme communautaire s’est
engagé dans une démarche de conscientisation à travers l’expression et la
création artistique en impliquant étroitement ces personnes à la démarche.
Préférant le principe d’appropriation du pouvoir individuel et collectif à
celui de rétablissement, les auteures nous expliquent comment les personnes
impliquées dans le projet ont participé à chacune des sept étapes du projet.
Le but de ce projet était de sensibiliser toutes les personnes touchées par la
santé mentale à l’importance du respect des personnes vivant des problèmes
de santé mentale.
Partant de l’expérience de ces 15 personnes, des thèmes ont été retenus
en fonction de cinq droits (droit à la dignité, au respect, à la liberté, à la sécurité et au consentement libre et éclairé). Concrètement, l’une des activités a
consisté en une visite guidée organisée par l’animatrice du Musée des BeauxArts, qui a alors choisi certaines œuvres pour en discuter en fonction des droits
retenus et à explorer. On a par la suite invité les 15 personnes du groupe à
créer une œuvre collective pour l’utiliser comme un outil de sensibilisation
à transporter auprès de publics divers. Ce médium a permis aux participants
de mettre en discussion plusieurs problèmes entourant la santé mentale tels
que les préjugés, la stigmatisation, la marginalisation, la pauvreté, les enjeux
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autour des médicaments, etc. Ce type de projet favorise la reconnaissance
des situations difficiles avec lesquelles les personnes vivant des problèmes de
santé mentale sont aux prises; une étape importante pouvant mener vers des
actions collectives de défense de droits, selon les auteures.
Bonne lecture!
BIBLIOGRAPHIE
GORZ, A. (1991). Capitalisme, socialisme, écologie, Paris, Galilée.
GROULX, L.-H. (2005). Revenu minimum garanti. Comparaison internationale,
analyses et débats, Québec, Presses de l’Université du Québec.
GUIBET LAFAYE, C. (2006). Justice sociale et éthique individuelle. Québec, Presses
de l’Université Laval.
LAPLANTE, N. et L. CÔTÉ. (2012). Transformations du monde du travail : regards
interdisciplinaires en relations industrielles, Québec, Presses de l’Université
du Québec.
MASSOT, A. (2002). Une justification du revenu de citoyenneté inconditionnel et
universel au-dessus du seuil de pauvreté, Québec, Université Laval.
NOVEMBER, A. et G. STANDING (dir.). (2003). Un revenu de base pour chacun(e),
Genève, Bureau international du travail.
MAYER, R. (1994). « Évolution des pratiques communautaires au Québec (19601990) », Revue canadienne de service social, vol. 11, no 2, 238-260.
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