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FUNERA ACERBA DANS LES CAMPAGNES DE LA CITÉ DES MEDIOMATRICI ? LE CAS DE LAQUENEXY « LA NOISERAIE » (MOSELLE) Gaël BRKOJEWITSCH*, Sandrine MARQUIÉ* avec la coll. de Stephan NAJI* et Frédéric ADAM** « Du reste, tu en entendras d’autres répéter, et faire croire à bien des gens, qu’après la dissolution du corps il n’y a plus de mal et d’affliction. » PLUTARQUE, Consolation à sa femme, 10. Mots-clés Mediomatrici, mortalité infantile, ensemble funéraire, rural, périnatals, pratiques funéraires, céramique, Gallo-romain. Keywords Mediomatrici, infant mortality, funerary complex, rural, perinatal, burial practices, ceramic, Gallo-Roman. Schlagwörter Mediomatriker, Kindersterblichkeit, Bestattungsplatz, perinatal, ländlich, Keramik, Bestattungssitten, gallo-römisch. Résumé À l’est de Metz-Divodurum, de nombreuses villae et établissements ruraux témoignent de l’intense occupation des sols à l’époque gallo-romaine. Le maillage est parfois très resserré comme sur l’actuel village de Laquenexy qui compte au moins deux établissements actifs entre le Ier et le IVe s. Entre les deux secteurs d’habitat, un ensemble funéraire comptant huit sépultures au minimum et des structures excavées a été étudié en 2012 dans le cadre d’une opération de fouille préventive. L’espace sépulcral présente la particularité d’être entièrement dévolu à de très jeunes individus, morts avant terme ou au tout début de leur existence. Contrairement à une idée répandue dans l’historiographie, les sujets de cette tranche d’âge font l’objet d’un soin particulier et bénéficient d’une sépulture en bonne et due forme. Nous proposons de faire la synthèse des résultats en nous appuyant sur les sources antiques et sur les découvertes modernes. Forcément interdisciplinaire, cette synthèse intègre les données archéologiques, anthropologiques et céramologiques de la fouille. Abstract To the east of Metz-Divodurum, many rural establishments and villae show intense land use during the GalloRoman period. The network was sometimes very tight, such as in the current village of Laquenexy, which had at least two active settlements between the 1st and 4th centuries. Between the two inhabited areas, a funerary complex with at least eight graves and other excavated structures was studied in 2012 as part of a rescue excavation programme. The characteristic of the burial space is that it was entirely devoted to the extremely young, who either died before term or soon after birth. Contrary to a common idea in historiography, individuals in this age category were treated with great care and given a proper burial. Here we try to summarize the results of the excavation, combining information from ancient sources and modern discoveries. This synthesis is inevitably interdisciplinary and integrates archaeological, anthropological and ceramic data from the excavation. (trad. S. Marquié) Zusammenfassung Im Gebiet östlich von Metz / Divodurum zeugen zahlreiche ländliche Einzelsiedlungen von einer intensiven Landnutzung in römischer Zeit. Die Besiedlung ist bisweilen recht engmaschig, so auch auf der Gemarkung der Gemeinde Laquenexy, wo zwei Gutshöfe des 1. bis mindestens 4. Jahrhunderts n. Chr. nachgewiesen wurden. 2012 * Pôle archéologie préventive Metz Métropole ; responsable de l’opération de fouille : gbrkojewitsch@metzmetropole.fr ; céramologue : smarquie19@gmail.com ; anthropologue : stephan.naji@gmail.com ** Inrap Grand-Est nord-UMR7044, anthropologue : frederic.adam@inrap.fr Revue Archéologique de l’Est, t. 63-2014, p. 213-236 © SAE 2014 214 Gaël BRKOJEWITSCH, Sandrine MARQUIÉ avec la coll. de Stephan NAJI et Frédéric ADAM wurde im Rahmen einer Präventivgrabung ein zwischen den beiden Siedlungsstellen gelegener und aus mindestens 8 Gräbern und grubenartigen Strukturen bestehender Bestattungsplatz untersucht. Die Besonderheit des Platzes liegt darin, dass hier ausschließlich Föten oder Säuglinge beerdigt wurden. Im Gegensatz zu den in der Historiographie verbreiteten Vorstellungen wurde diesen Individuen eine durchaus aufmerksame Behandlung in Form einer ordentlichen Grablege zuteil. Der interdisziplinär angelegte Artikel gibt einen Überblick über die archäologischen, anthropologischen und keramikkundlichen Resultate der Grabung und bringt diese in Verbindung mit den antiken Quellen und neueren Befunden dieser Art. (trad. C. Dreier) La commune de Laquenexy se situe à quinze kilomètres au sud-est de Metz, dans le Pays de la Nied. Le site est implanté sur une faible éminence délimitée par deux cours d’eau : la Nied française au sud et le ruisseau de la Fontaine au nord. Le substrat est constitué d’argile à Promicroceras Planicosta qui recouvre des couches de calcaires à Nannobelus. Ces dernières années, le village a été le théâtre de plusieurs opérations d’archéologie préventive préalablement à la construction de lotissements. Ces recherches ont mis en évidence de nombreux vestiges qui témoignent d’une occupation discontinue du territoire, depuis la fin du Néolithique (MAIRE et alii, 2013) jusqu’au Moyen Âge classique (JEANDEMANGE et alii, 2011). Fort de sa situation, à quelques milles de Divodurum et le long d’une voie facilitant la communication du limes vers la capitale de la cité, le terroir de Laquenexy s’est épanoui durant toute l’Antiquité. La qualité de ses terres et son relief peu accidenté, irrigué par deux cours d’eau, étaient propices à l’édification de villae (fig. 1). Les terres agricoles furent exploitées intensivement car deux établissements cohabitèrent, au moins durant le Haut-Empire, à moins de 500 m de distance l’un de l’autre. Qui étaient les occupants ? On ne le sait pas, faute de documents épigraphiques ou de sources explicites. Quel était leur mode vie ? Il semble difficile de trancher car les deux exploitations n’ont été fouillées que partiellement, ce qui laisse planer de nombreuses incertitudes, principalement sur le raffinement des habitations domaniales qui sont encore inexplorées. Quelles étaient leurs ressources ? Le système agraire est basé sur le blé nu et l’épeautre1 qui sont séchés, transformés et stockés dans des annexes agricoles ; quelques indices recueillis lors de l’étude du mobilier métallique montrent que l’élevage y était pratiqué. L’archéologie préventive et le hasard de ses découvertes nous ont laissé un témoignage peu banal qui permet d’appréhender des pratiques que l’on situe dans la sphère intime des enterrements des tout-petits. Les funera acerba, ou morts âpres qui surviennent prématurément (BOYANCÉ, 1972 ; SCHEID, 1984), demeurent méconnus car aucun ensemble funéraire dédié spécifiquement à des sujets décédés en phase périnatale n’était à ce jour documenté dans le nord-est de la Gaule. Bien que des travaux et des fouilles adaptées à ce genre de contexte (DUDAY et alii, 1995) aient été engagés ces dernières années, les sépultures d’individus de cette classe d’âge sont largement sous-représentées dans les corpus. Et pour cause, ces espaces sont volontairement localisés à l’écart des lieux funéraires communautaires et le manque d’intérêt et de méthode dont ces témoignages font l’objet est parfois fatal à leur pleine exploitation2. Après avoir évoqué le contexte archéologique pour la période gallo-romaine (§ 1.), nous nous attacherons, dans les lignes qui vont suivre, à présenter le contexte funéraire (§ 2.). Dans une brève introduction (2.1.), la topographie sera définie et la stratigraphie décrite. Après avoir fixé les limites chronologiques du contexte dans un argumentaire prenant en considération l’étude du mobilier en céramique et les analyses radiométriques (2.2.), nous présenterons les structures (2.3.) en commençant par les fosses situées en périphérie des tombes (2.3.1.) puis, en nous intéressant aux huit sépultures découvertes (2.3.2.). Nous nous pencherons, dans une synthèse (3.), sur des questions plus larges (3.1.) en tentant de cerner la nature des pratiques funéraires documentées avant la conquête puis en revenant sur la définition de l’enfance et de la très petite enfance dans le monde gallo-romain (3.1.1.). Ensuite, nous mettrons l’accent sur la vulnérabilité de cette classe d’âge en nous appuyant sur des études récentes de démographie historique (3.1.2.). Nous nous tournerons brièvement vers Rome afin d’examiner les sources textuelles (3.1.3.). La deuxième partie de la synthèse (3.2.) reviendra sur le contexte du nord-est de la Gaule et plus précisément sur celui de Laquenexy. Nous détaillerons les spécificités du contexte en termes de recrutement (3.2.1.) puis nous aborderons la définition de l’espace funéraire (3.2.2.) et de son organisation (3.2.3.). Nous décrirons le dispositif funéraire (3.2.4.) et nous nous attarderons sur l’étape de la mise en terre (3.2.5.). Au début du XXe siècle, quelques traces d’occupations gallo-romaines furent repérées par le biais d’observations de surface (F LOTTÉ , F UCHS , 2004, p. 547). Parmi les vestiges anciennement inventoriés, on peut citer la voie antique Metz-Keskastel, dont le tracé pourrait correspondre à l’actuel route départementale 70 (ibid., p. 547). Deux 1. C’est ce que démontrent les études carpologiques de J. Wiethold (Inrap – étude des graines carbonisées dans JEANDEMANGE, 2010), de L. Herveux (Metz Métropole - étude des graines carbonisées dans BRKOJEWITSCH et alii, 2010) et de G. Daoulas (Metz Métropole étude des graines carbonisées dans BRKOJEWITSCH et alii, 2013). 2. Par exemple le très bel ensemble funéraire de plusieurs dizaines de sépultures d’individus décédés en phase infantile découvert le long du mur d’orchestra du théâtre antique de Samarobriva (dir. É. Binet) en 2007 où les sépultures ne firent l’objet ni d’observation anthropologique sur le terrain ni de relevé systématique. 1. CONTEXTE ARCHÉOLOGIQUE (FIG. 2) Revue Archéologique de l’Est, t. 63-2014, p. 213-236 © SAE 2014 215 Vers Trèves Vers Trèves FUNERA ACERBA DANS LES CAMPAGNES DE LA CITÉ DES MEDIOMATRICI ? LE CAS DE LAQUENEXY « LA NOISERAIE » (MOSELLE) Ennery Guirbaum Zone industrielle Argancy Côte de Moselle Moselle Metz Ban-Saint-Martin Rue des Bénédictins s Metz Charles le Payen Marsilly Fonds de Saulcy Metz ZAC du Parc du Technopole Maizeroy Renaucru Laquenexy Augny Petites Raies Jury Pâtural des Vignes Entre deux Cours La Noiseraie Créhange Lotissement de l’Europe Courcelles-sur-Nied Les Jardins de Chaillot Sorbey La Censuire Ni e d Orny Herbaucourt S Varize Courcelles-Chaussy Près du Presbytère Canton de la Vignotte N ied Alle Metz Borny Metz ZAC des Hauts de Queuleu Peltre RD 955 Les Rouaux Mo s ell e Vers Mayence Saint-Julien-lès-Metz Grimont (IIIe siècle) e nd ma m Vers Rei Norroy-le-Veneur Fr le eil an ça i se Ver s Remilly Marr de Guinvaux La Grande Haye Sillegny Rue du Stade Liéhon Sur le Gué de Larry Lorry Mardigny La Corvée Solgne Saint-Pierre Fontaine Saint Pierre Louvigny TGV Kes ka stel Luppy La Moussière Bois du Haut de Chèvre Les Grandes Parriè Parrières Moncheux Grands Champs Villae fouillées Voies principales rs Ve Vers Langres Établissements ruraux fouillés ve Sa 0 - 250 m 250 m et plus rne 0 10 km Éch. 1/250000 Fig. 1. Carte géographique avec la localisation de Laquenexy ainsi que les grands sites à l’est de Divodurum (DAO : Y. Daune, Metz Métropole). prospections pédestres menées en 1995 à l’ouest du ban communal de Laquenexy ont abouti à la découverte de matériaux de démolition (moellons, tegulae) et de mobilier céramique (ibid., p. 547). La première est située entre les lieux dits « Les Fourches et Chaberdine », la seconde se trouve au lieu-dit « Vert Taillis ». Ces découvertes en position secondaire témoignent de la présence d’établissements ruraux. Tous ces indices ont été avérés grâce aux recherches préventives (fig. 2), lors d’une évaluation archéologique (MANGIN, 2006, p. 41), puis à l’occasion des fouilles proprement dites. Les structures étudiées durant ces deux opérations complémentaires ont permis d’appréhender les vestiges d’une villa constituée de plusieurs bâtiments Revue Archéologique de l’Est, t. 63-2014, p. 213-236 © SAE 2014 maçonnés organisés autour d’une cour centrale de la pars rustica ainsi qu’une porterie assurant la séparation avec la pars urbana. Un séchoir à céréales, plusieurs structures en creux, dont des fours rectangulaires organisés par groupes de trois ou de quatre, ainsi que des bâtiments sur poteaux porteurs étaient associés à cet établissement daté du IVe au Ve s. ap. J.-C. (BRKOJEWITSCH et alii, 2010 ; JEANDEMANGE, 2010). Les données issues de la fouille de la tranche 5 (BRKOJEWITSCH et alii, 2013a) complétaient celles collectées en 2007 et 2008 grâce à la découverte de fours rectangulaires organisés en batterie, de quelques trous de poteau et de l’extension en direction du sud du fossé qui marque la limite cadastrale ouest de la cour de la pars rustica. Des traces d’occupation antique sont également présentes sur 216 Gaël BRKOJEWITSCH, Sandrine MARQUIÉ avec la coll. de Stephan NAJI et Frédéric ADAM Colligny Ars-Laquenexy Marsilly Entre les lieux-dits « Les Fourches et Chaberdine » rui « Départementale 70 » Metz-Keskastel sse au de la F on Laquenexy « Entre Deux Cours » tranche 4 tai ne Laquenexy « Entre Deux Cours » tranche 3 Laquenexy « Rue du Noyer » La Noiseraie Laquenexy « Entre Deux Cours » tranche 5 ça Fr an Pange Ni ed Mécleuves Courcelles-sur-Nied 0 Éch. 1/20 000 1 km BD TOPO Pays 2010 © IGN - 2010/10 438 - Reproduction interdite ise Verts Taillis PCI vecteur, source Direction générale des Finances publiques - Cadastre. Droits réservés. Mise à jour 2010 Fig. 2. Plan de la commune de Laquenexy avec les principales découvertes archéologiques (DAO : Y. Daune, Metz Métropole). la frange ouest du noyau ancien de Villers-Laquenexy, au lieu-dit « La Noiseraie ». La parcelle contiguë située à l’est au lieu-dit « rue du Noyer » a fait l’objet en 2012 d’une évaluation archéologique qui a révélé la présence d’une seconde occupation antique composée d’au moins un bâtiment sur fondation en pierre dont l’abandon est daté des IIe et IIIe s. (SEDLBAUER et alii, 2012). C’est en contrebas de ce bâtiment que l’ensemble funéraire a été mis au jour. 2. PRÉSENTATION DU CONTEXTE FUNÉRAIRE 2.1. INTRODUCTION Dans le petit ensemble funéraire mis au jour en 2012, les sujets ont été inhumés à 80 m environ au sud-est des constructions gallo-romaines et à moins de 200 m au sud du petit ruisseau de la Fontaine (fig. 2). Les tombes situées en bas de vallon (cote moyenne : 235,5 m NGF) étaient dominées par les bâtiments d’habitation (cote moyenne : 239,5 m NGF). L’ensemble funéraire comportait un nombre minimum de huit sépultures (fig. 3, 2) dont deux avaient été mises en lumière lors du diagnostic archéologique (ANTOINE, 2006). Ces dernières (SP2, SP3) ont bénéficié d’une étude anthropologique menée par F. Adam (ibid., p. 50-56), anthropologue à l’Inrap. Les six sépultures découvertes lors de la fouille de 2012 (SP1, SP4, SP5, SP6, SP7, SP8) ont été étudiées par S. Naji (BRKOJEWITSCH et alii, 2013a, p. 71-91). Une dernière structure (SP9) possédait des caractéristiques analogues aux sépultures (plan, cote d’apparition, marquage de la fosse) mais aucun ossement n’avait subsisté. Les tombes s’organisaient selon un axe ouest-est en deux groupes. Le premier groupe situé à l’est se composait de trois sépultures (SP1, SP2, SP3) qui pourraient avoir été volontairement alignées. Le second noyau est composé de cinq sépultures avérées (SP5, SP5, SP6, SP7, SP8) et d’une sépulture supposée (SP9) autour desquelles gravi- Revue Archéologique de l’Est, t. 63-2014, p. 213-236 © SAE 2014 FUNERA ACERBA DANS LES CAMPAGNES DE LA CITÉ DES MEDIOMATRICI ? LE CAS DE LAQUENEXY « LA NOISERAIE » (MOSELLE) 217 Secteur 1 1 Secteur 2 Secteur 3 0 50 m Éch. 1/1000 2 Secteur 1 : espace funéraire SP9 SP5 SP7 FS709 SP8 FS297 SP6 SP4 FS295 SP2 FS115 SP1 SP3 0 10 m Éch. 1/200 3 e o 4 01 02 236,00 12 235,00 300 0 1m 2 Fig. 3. Plan de masse des vestiges découverts lors des fouilles et plan de détail de l’ensemble funéraire (DAO : Y. Daune, Metz Métropole). taient quatre fosses peu profondes renfermant des tessons de céramique et de la faune (FS115, FS295, FS297, FS709). Toutes les tombes et les fosses ont été excavées dans un niveau de limon argileux jaunâtre, interprété comme le paléosol gallo-romain (us300). La localisation en fond Revue Archéologique de l’Est, t. 63-2014, p. 213-236 © SAE 2014 de vallée a entraîné un colluvionnement assez important qui explique d’une part la présence de deux niveaux de limon (us12, us02) dont les épaisseurs cumulées atteignent 120 cm (fig. 3, 3-4) et d’autre part, la bonne conservation des vestiges archéologiques qui ont échappé aux labours. 218 Gaël BRKOJEWITSCH, Sandrine MARQUIÉ avec la coll. de Stephan NAJI et Frédéric ADAM Dans ce contexte, il reste difficile de se prononcer sur la circonscription partielle ou totale de l’ensemble funéraire. L’orientation sur un axe parallèle au fond de la vallée pourrait indiquer que les tombes se situaient en bordure d’une voie ou d’un sentier, non repéré lors de la fouille. À l’ouest et à l’est, le décapage des terres de surface a été élargi à dix mètres au minimum des sépultures les plus excentrées. Au sud, le décapage de fouille a été étendu à une distance s’échelonnant entre cinq mètres, à l’ouest, et quinze mètres, à l’est, des structures. Ces extensions de décapage n’ayant pas porté de nouveaux vestiges à notre connaissance sur ce terrain qui avait préalablement fait l’objet d’un diagnostic assez resserré sur la zone funéraire (à environ 7 % de la surface totale), nous avançons l’hypothèse que l’intégralité du contexte pourrait avoir été appréhendée. 2.2. CHRONOLOGIE DE L’ENSEMBLE Compte tenu de la nature des vestiges, de l’absence de chevauchement des structures et de la rareté - voire de l’absence dans les fosses sépulcrales - de mobilier, il était vain de tenter un phasage ou une chronologie relative des dépôts. Dans la couche la plus basse stratigraphiquement (us300), qui correspond au niveau d’apparition des tuiles de couverture et des fosses voisines, nous avons collecté trenteneuf tessons (152 g) dont neuf appartenant au même pot que celui de la FS709 (fig. 4, n° 6), un bord de pot tourné à fin dégraissant de quartz et un autre riche en dégraissant coquillier, tous trois de tradition laténienne (fig. 4, nos 7-8), ainsi que plusieurs fragments de cruches à pâte siliceuse et un dolium à pâte kaolinitique de type Goeblange-Nospelt (METZLER et alii, 2009, p. 395-397). Ce mobilier date de la fin du Ier s. av. ou de la première moitié du Ier s. ap. J.-C. d’après les contextes messins (DERU, FELLER, 1996). Deux fosses (FS297 et FS709) remontent vraisemblablement au milieu du Ier s. ap. J.-C., voire jusqu’au milieu du IIe s. ap. J.-C. L’unité stratigraphique qui remplissait la FS297 (us298) comportait ainsi vingt-deux tessons (181 g) appartenant à deux cruches. La première à bord en gradin est recouverte d’un engobe blanc (DERU, 1996, p. 190-192, type CRU 103 ; BRULET et alii, 2003, p. 405, fig. 73.6, type 3) (fig. 4, n° 5). Seul un fragment d’anse en ruban de la deuxième cruche est conservé. La FS709 était recouverte d’un amas de céramiques (us710) composé de trente-six tessons (217 g) appartenant à un fond plat de pot à dégraissant coquillier (cf. us300) (fig. 4, n° 6). La couche sus-jacente (us12), dans laquelle les sépultures ont probablement été creusées, comporte une faible quantité de céramiques qui orientent la datation vers le IIIe s. de n. è. La couche renfermait ainsi dix tessons (140 g) dont un mortier en sigillée de Gaule de l’Est (type Nied.20) (fig. 4, n° 10), un bord de bol en « dérivé de terra nigra » (fig. 4, n° 9) (BRULET et alii, 2003, p. 401, fig. 71.31-37, type 3.1) et plusieurs panses de céramique commune claire (pâte siliceuse et kaolinitique). Ce matériel est abondant à Metz dans les dépôts du IIIe s. ap. J.-C. et le mortier Nied.20 devient fréquent à partir du milieu de ce siècle (BRKOJEWITSCH et alii, 2013b, p. 285-288). Le mobilier de la fosse FS115 semble corroborer cet ancrage chronologique. En effet, son comblement (us116) contenait 55 tessons (1,5 kg). On compte ainsi trois fragments de céramique grossière non tournée de tradition laténienne, un pot en terra nigra du groupe lorrain (DERU, 1996, type P1/12) (fig. 4, n° 2), une jatte poissée en céramique rugueuse claire (type Nied.104) (fig. 4, n° 3) ainsi qu’une panse de gobelet engobé de Cologne à pâte kaolinitique et plusieurs fragments de panse d’amphores à huile de Bétique (type Dressel 20). Si ce lot n’est pas homogène d’un point de vue chronologique, les éléments les plus récents indiquent que le comblement de la fosse 115 s’est mis en place au plus tôt à la fin du IIe s. ou plus vraisemblablement dans le courant du IIIe s. ap. J.-C. (horizon Niederbieber). Trois sépultures ont fait l’objet d’une datation radiométrique. Deux d’entre elles (SP6, SP8) se sont révélées indatables en raison de la conservation des os et de l’absence de collagène. Les résultats obtenus pour la sépulture SP1 donnent un âge de 1755 +/- 35 BP (code laboratoire attribué : Lyon-8940 – GrA) calibré entre 140 et 389 ap. J.-C. avec un maximum de probabilité entre 210 et 389 ap. J.-C. Si l’on confronte les résultats de l’analyse 14C et la typochronologie des vases, on peut émettre l’hypothèse que ce noyau de sépultures date du Haut-Empire. En acceptant le postulat que les sépultures et les fosses participent d’un même contexte, on pourrait resserrer cette datation aux IIe IIIe s. ap. J.-C. 2.3. PRÉSENTATION DES STRUCTURES 2.3.1. Les fosses Quatre fosses sont associées au noyau le plus occidental de sépultures. Elles sont principalement situées au nord (FS115, FS295, FS297) et à l’ouest (FS709) des tombes. La fosse FS709 (fig. 5, nos 7-8) est située à l’ouest du noyau de tombes. Il s’agit d’un creusement (us709) circulaire et régulier de 42 cm de diamètre. La fosse accuse un profil en cuvette aux parois très évasées. Elle a été observée sur une hauteur totale de 0,12 m. Son comblement de limon argileux brun clair (us711) contenait quelques inclusions de terres cuites architecturales et de particules charbonneuses et des fragments d’un pot en céramique. La structure FS115 (fig. 5, nos 1-2) est la plus volumineuse de ce contexte et son creusement (us115) de plan ovalaire atteint près de 110 cm de longueur. Les parois et le fond étaient irréguliers. Le comblement d’argile limoneuse (us116) renfermait quelques éclats de calcaire, de la terre cuite indéterminable, un métatarse d’ovicapridé (identification G. Asselin, Metz Métropole) ainsi que de la céramique (un pot, une jatte, un gobelet et des tessons d’amphore) (fig. 4, nos 2-3). La FS295 (fig. 5, nos 3-4) se situait à 5 cm au nord de la fosse FS115. Le creusement (us295) au tracé irrégulier (L. 45 cm ; l. 41 cm) est conservé sur une dizaine de centimètres de hauteur. Les parois sont évasées et le fond est plat. Le comblement (us296) d’argile limoneuse est brunâtre. Il comporte quelques charbons de bois et des tessons de céramique appartenant à une cruche du Haut-Empire (fig. 4, n° 4). Revue Archéologique de l’Est, t. 63-2014, p. 213-236 © SAE 2014 FUNERA ACERBA DANS LES CAMPAGNES DE LA CITÉ DES MEDIOMATRICI ? LE CAS DE LAQUENEXY « LA NOISERAIE » (MOSELLE) 219 9193.116.20.2 clou de la SP3 2 9193.116.20.1 2 cm 1 3 9193.298.20.1 9193.296.20.1 4 5 9193.710.20.1 9193.300.20.1 7 9193.300.20.2 8 6 9193.12.20.2 9193.12.20.1 9 0 10 cm Éch. 1/3 10 Fig. 4. Mobilier métallique et céramique (DAO : G. Brkojewitsch, S. Marquié, Metz Métropole ; photographie : F. Adam, Inrap). La FS297 (fig. 5, nos 5-6) était implantée à 40 cm au nord-est de la fosse FS295. Le creusement (us297) était de forme ovalaire avec une longueur maximale de 34 cm. La fosse, conservée sur 120 cm environ de profondeur, était comblée (us298) d’argile limoneuse renfermant des esquilles d’ossements de bovidé (identification G. Asselin, Metz Métropole) et de deux cruches en céramique (fig. 4, n° 5). L’interprétation de ces fosses est délicate. On peut toutefois mettre l’accent sur trois éléments. D’un point de vue Revue Archéologique de l’Est, t. 63-2014, p. 213-236 © SAE 2014 chronologique d’abord, ces dépôts semblent échelonnés dans le temps. Cependant, à l’exception de la fosse FS709, trois structures contenaient du mobilier attribuable aux IIe et IIIe s. ap. J.-C. Au niveau du contenu des fosses, nous avons relevé la présence de tessons de céramiques qui se rapportaient à des services à boire. Des fragments de cruches et de gobelets ont été découverts dans les FS115, FS295, FS297. Deux de ces fosses (FS115, FS297) comptaient également des ossements de faune – des restes d’ovicapridés 220 Gaël BRKOJEWITSCH, Sandrine MARQUIÉ avec la coll. de Stephan NAJI et Frédéric ADAM 1 2 116 115 253,54 s 4 n 116 115 3 296 235,30 n s 296 295 295 6 5 298 235,22 s n 298 297 297 7 8 234,88 n-o s-e 711 711 709 710 709 0 1m Éch. 1/20 Fig. 5. Relevés et photographies des fosses situées à proximité des sépultures (DAO : Y. Daune, Metz Métropole ; photographies : B. Chevaux, Metz Métropole). et bovidés – dans leur comblement. L’absence de charbons et de rubéfaction indiquerait qu’il ne s’agit pas de fosses à vocation culinaire. L’association de services à boire à de la faune était, par ailleurs, assez courante en contexte funéraire. La proximité des fosses et des sépultures est un dernier élément à relever. La vocation originelle de ces creusements ne sera probablement jamais établie mais une volonté d’associer les structures aux tombes semble constituer une hypothèse recevable. Le chapelet de trois fosses entoure – à une distance inférieure à un mètre – les sépultures au sudest tandis qu’une fosse est implantée à l’ouest. Soulignons enfin, qu’ailleurs dans le secteur, aucune fosse de ce type n’a été mise en lumière. Revue Archéologique de l’Est, t. 63-2014, p. 213-236 © SAE 2014 FUNERA ACERBA DANS LES CAMPAGNES DE LA CITÉ DES MEDIOMATRICI ? LE CAS DE LAQUENEXY « LA NOISERAIE » (MOSELLE) 2.3.2. Les sépultures 2.3.2.1. Caractéristiques de l’ensemble Les structures funéraires présentaient des caractéristiques générales communes. Un creusement, d’une profondeur relativement faible, était réalisé. D’après les observations de terrain, les fosses avaient une profondeur oscillant entre 5 et 15 cm sous le marquage. Les limites des creusements, effectués dans les sédiments argilo-limoneux, étaient diffuses et il semblerait que le plan rectangulaire ait prédominé. À l’exception d’une sépulture (SP3), aucun dépôt de mobilier n’est documenté dans les fosses. Les sujets étaient inhumés dans des sépultures individuelles vraisemblablement primaires. Pour les restes observables, la logique anatomique semble conservée. Après la mise en terre de l’individu dans la fosse, une tuile était disposée au-dessus de celle-ci de manière à fermer la sépulture. Ce type de fosse, en pleine terre et sans partie maçonnée, ne favorise pas la formation d’espace vide et implique donc probablement un colmatage relativement rapide, voire immédiat pour les sédiments les plus fluides. Concernant l’état de conservation, une variabilité assez forte est à noter. Les ossements de la SP1 étaient dans un très bon état de conservation, comme – dans une moindre mesure – les deux structures étudiées au diagnostic (SP2, SP3). En revanche, les os déposés dans le sédiment argileux environnant étaient dans un piètre état. Les restes osseux se désagrégeaient à la fouille et leur prélèvement s’est avéré très compliqué. Les observations sur la position des corps et la taphonomie ont pu être réalisées lors de la fouille mais les mesures n’ont pas été prises sur le terrain. Durant l’étude en laboratoire, les ossements réduits en poudre étaient impossible à manipuler. Dans les deux cas, il n’a pas été possible d’isoler et de préserver les restes osseux de cinq sépultures sur six, mis à part de rares fragments inexploitables. 2.3.2.2. L’identification individuelle des sujets Avant la puberté, il est impossible de déterminer le sexe d’un squelette. L’estimation de l’âge au moment du décès a pu être émise dans trois cas (SP1, SP2, SP3). Elle se fonde sur la taille des grands os longs et sur l’observation du développement des germes dentaires. La première estimation (SP1) nous permet de proposer un âge au décès de l’individu entre 36 et 42 semaines aménorrhées (ADALIAN et alii, 2002), c’est-à-dire autour de la naissance à 40 semaines d’aménorrhée. Le reste d’un germe dentaire d’une incisive centrale supérieure dont la couronne est formée aux trois-quarts conforte cette estimation (UBELAKER, 1989). Ce sujet est mort en période périnatale et il n’est pas possible de dire si la cause du décès relève d’une anomalie du fœtus lui-même, des conséquences de la grossesse ou de l’accouchement. Trois germes dentaires ont pu être récupérés dans une deuxième sépulture (SP2) et comparés au même schéma d’éruption et d’attrition dentaire. Leur préservation indique que le sujet est décédé vers l’âge fœtal de 7-8 mois. Le sujet est probablement né avant terme et n’était pas viable. La Revue Archéologique de l’Est, t. 63-2014, p. 213-236 © SAE 2014 221 stature n’a pas pu être estimée en raison de la mauvaise conservation des extrémités des os longs. Enfin, huit germes ou fragments de germes dentaires ont pu être récupérés dans une dernière structure (SP3). Leur préservation permet de situer la date du décès entre 0 et 3 mois. La stature de ce sujet est estimée, sur base de deux mesures, à 51,2 cm. Pour les cinq autres structures ayant livré des restes osseux humain, il n’a pas été possible d’estimer l’âge et la stature, pour les raisons de conservation des ossements évoquées plus haut. 2.3.2.3. Catalogue Sépulture 1 (fig. 6, nos 1-2-3) La structure a été repérée à la cote de 235,57 m NGF. La lecture des limites n’est pas aisée. La fosse d’implantation (us9) est rectangulaire (24 x 38 cm). La profondeur de la fosse sous la tuile est de 0,05 m environ. Un sujet immature (us23) est déposé au fond de la fosse sur le calcaire naturel. La fosse est refermée par une tegula de 40 x 35 cm, posée à plat et à l’envers, qui scelle la sépulture. L’espace est rempli de sédiment argileux (us10). L’individu se présentait en position contractée, posé sur le flanc droit, selon une orientation sud-ouest/nord-est, tête au sud-ouest. Le sujet est relativement bien conservé et bien représenté. La tête apparaissait en face latérale gauche, les côtes étaient regroupées contre la tête, à plat. Les membres supérieurs étaient fléchis, le coude gauche en connexion stricte, les mains au niveau du visage. Les membres inférieurs étaient en hyper-flexion avec le genou droit ramené contre l’abdomen et le membre supérieur gauche perpendiculaire au droit. La logique anatomique de l’ensemble du squelette et les connexions strictes ou lâches des coudes, genoux et hanches indiquent une sépulture primaire. Les faibles déplacements observés (fibulas) semblent tous contenus dans le volume initial du corps, suggérant un colmatage relativement rapide. Aucune pathologie osseuse n’a été observée sur les restes de la sépulture. Sépulture 2 (fig. 6, n° 4) La sépulture était située à l’est de l’ensemble. La fosse d’implantation de forme rectangulaire (45 x 39 cm) était orientée nord-ouest/sud-est. La profondeur de la fosse sous la tuile atteignait 7 cm environ. Le sujet était déposé au fond de la fosse sur le calcaire naturel. Un clou en fer (fig. 4, n° 1) se trouvait dans l’angle nord-est de la fosse, à l’arrière du crâne du sujet. La pointe de l’objet était tournée vers l’extérieur de la fosse en direction du nord-est. La position du clou sur le même plan que le sujet inhumé plaide en faveur de la contemporanéité des deux dépôts. La fosse était refermée par une tegula, posée à plat et à l’envers, de 0,45 x 0,40 cm qui scellait la sépulture. Le rebord était posé de part et d’autre du corps. L’espace libre ménagé dans la sépulture se comble de sédiment argileux compact et homogène. 222 Gaël BRKOJEWITSCH, Sandrine MARQUIÉ avec la coll. de Stephan NAJI et Frédéric ADAM SP1 235,54 1 2 235,42 SP1 235,44 235,45 235,45 235,46 235,44 235,48 235,47 235,46 09 235,48 235,49 3 235,57 s-o 235,57 n-e 11 10 Éch. 1/5 09 4 SP2 SP3 5 Fig. 6. Relevés et photographies des sépultures 1, 2 et 3 (DAO : Y. Daune, Metz Métropole ; photographies : Y. Daune, Metz Métropole, F. Adam, Inrap). L’individu était placé sur le flanc droit en position hyper contractée, selon une orientation nord-est/sud-ouest, la tête au nord-est. Le squelette était en mauvais état de conservation et les os nous sont parvenus très fragmentés. Le crâne apparaissait en face latérale gauche, face antérieure tournée vers l’ouest. La mandibule était fermée et le thorax était à plat, refermé, visible en face latérale gauche. La ceinture scapulaire était également à plat en face latérale gauche. Elle présentait des connexions scapulo-humérales étroites. Le membre supérieur droit était en flexion, le coude déconnecté et l’avant-bras posé devant le visage. Le membre supérieur gauche était en semi-flexion. L’humérus était posé contre la face postérieure du thorax et apparaissait en face postéro-latérale (équilibre instable). L’avant-bras se situait au-devant du thorax. La ceinture pelvienne était ouverte, l’ilion gauche était en face antérieure et en rotation. Les membres inférieurs étaient en flexion, genoux en avant du thorax. Toutes les connexions étaient déplacées sans que les diverses pièces osseuses aient migré hors du volume du corps. La faible amplitude des quelques migrations osseuses et la position contractée du squelette plaident en faveur Revue Archéologique de l’Est, t. 63-2014, p. 213-236 © SAE 2014 FUNERA ACERBA DANS LES CAMPAGNES DE LA CITÉ DES MEDIOMATRICI ? LE CAS DE LAQUENEXY « LA NOISERAIE » (MOSELLE) d’une décomposition du corps en espace vide, probablement à l’intérieur d’un contenant en matière périssable de type sac ou linceul. Sépulture 3 (fig. 6, n° 5) La fosse d’implantation de forme rectangulaire (45 x 34 cm) était orientée ouest/est. La profondeur de la fosse sous la tuile est de 8 cm environ. Un sujet immature était déposé au fond de la fosse sur le calcaire naturel. La fosse était refermée par une tegula, posée à plat et à l’envers, de 40 x 35 cm, qui scellait la sépulture. Le rebord était posé de part et d’autre du défunt. L’espace libre ménagé dans la sépulture s’est comblé de sédiment argileux compact et homogène. Le squelette était en mauvais état de conservation, extrêmement fragmenté. Le sujet se présentait sur le côté gauche en position hyper contractée selon une orientation sud/nord, la tête en direction du sud. Le crâne au sud apparaissait en face latérale droite, face antérieure tournée vers l’est. Les membres supérieurs étaient fléchis en avant du thorax. La ceinture pelvienne était à plat, disloquée dans son espace initial. Le membre inférieur droit était en flexion, le genou en connexion lâche et en contact avec la portion inférieure de l’abdomen. Le membre inférieur gauche était en flexion avec le genou en connexion lâche en avant du corps. La faible amplitude des quelques migrations osseuses et la position contractée du squelette plaident en faveur d’un colmatage différé partiel, à l’intérieur, peut-être, d’un contenant en matière périssable de type sac ou linceul. Sépulture 4 (fig. 7, nos 1, 2, 3) La sépulture était située au centre de l’emprise de fouille et à l’est d’un noyau de sépultures constitué des SP5, SP6, SP7, SP8, SP9. La structure a été repérée à la cote de 235,19 m NGF. Le creusement (us18) rectangulaire (25 x 38 cm) possédait des contours assez nets. Le profil de la fosse dessinait une cuvette dont le fond n’était pas tout à fait plat. La profondeur de la fosse sous la tuile est de 12 cm environ. Le sujet (us84) était déposé au fond de la fosse sur l’argile naturelle. La fosse était refermée par une imbrex incomplète, posée à l’endroit, de 35 x 17 cm, qui scellait la sépulture. L’espace est comblé de sédiment argileux (us39). Le sujet était probablement orienté sud-nord, tête au sud, comme semblait l’indiquer l’amas d’ossements provenant du crâne situé au centre de la tombe. Une partie des côtes a conservé sa cohérence anatomique et un os long d’un membre inférieur se situait au nord-est de la fosse. Les vestiges de la colonne vertébrale sont disséminés à l’ouest de la cage thoracique, ce qui pourrait indiquer que l’individu était déposé sur le côté droit, comme celui de la sépulture SP1. La décomposition s’est opérée dans un espace étroit et contraint d’environ 10 à 12 cm de largeur conditionné par la largeur de la tuile. L’écrasement du crâne, déformé par la concavité de la tuile, semble aller dans ce sens. À la différence des autres sépultures, la tuile creuse recouvrait presque complètement les ossements et il est envisageable qu’elle ait été posée à même le corps (et non en couverture d’un creusement), à l’intérieur d’une fosse plus large. Revue Archéologique de l’Est, t. 63-2014, p. 213-236 © SAE 2014 223 L’analyse biologique a pu établir que le fragment de crâne conservé ne présentait pas d’anomalie d’épaisseur. La stature n’a pas pu être estimée en raison de la mauvaise conservation des extrémités des os longs. Sépulture 5 (fig. 7, nos 4, 5, 6) La fosse d’implantation (us103) apparaissait à la cote de 234,87 m NGF. Elle était plus ou moins rectangulaire (18 x 32 cm) si les limites repérées sont exactes. Les parois étaient verticales et le fond plat. La profondeur observée sous la tuile était de 4 cm environ. Le sujet (us106) était déposé au fond de la fosse sur l’argile naturelle. En raison de l’état des ossements, nous ne pouvons décrire la position du sujet au moment de l’inhumation. La fosse était refermée par une tegula incomplète et irrégulière (L. max. 40 cm ; l. max. 25 cm), posée à plat et à l’envers, qui fermait la tombe. L’espace est rempli par du sédiment argileux (us104). On note au centre de la fosse un amas d’ossements qui semblait composé de quatre pièces osseuses différentes. Leurs tailles suggèrent des grands os longs. Leur mauvaise conservation ne permet pas une étude taphonomique plus poussée. La fragilité des restes osseux de la SP5 n’a pas permis d’étude ostéologique. Sépulture 6 (fig. 8, nos 1, 2, 3) La structure a été repérée à la cote de 235,29 m NGF dans un creusement (us111) rectangulaire (27 x 37 cm) dont les limites étaient assez nettes. Les parois étaient subverticales et le fond plat. La profondeur de la fosse sous la tuile était de 11 cm environ. Le sujet (us114) reposait au fond de l’excavation sur l’argile naturelle. Il semble que le sujet ait été déposé avec la tête au nord-ouest et les membres inférieurs au sud. La fosse était refermée par une tegula (L. 41 cm ; l. 30 cm), posée à plat et à l’envers. Une couche de sédiment d’infiltration obstrue ensuite l’espace (us112). Les observations lors de la fouille ont permis d’identifier le sujet comme étant allongé sur le côté droit avec la tête au nord-ouest dont la face antérieure était tournée vers le sud-ouest. On ne peut pas décrire la position des membres inférieurs avec plus de détail, faute d’éléments. Les quelques fragments du crâne subsistant, en particulier la partie pétreuse de l’occipital, ne présentaient pas d’anomalie. Sépulture 7 (fig. 8, nos 4, 5, 6) Le creusement (us287) rectangulaire (23 x 42 cm) a été reconnu à la cote de 235,07 m NGF. Les parois étaient verticales et le fond plat. La profondeur de la fosse sous la tuile oscillait entre 15 cm, au sud-est, et 8 cm, au nordouest. Le sujet (us290) était déposé au fond de la structure, dans un niveau d’argile. Le sujet a été placé dans la fosse sur le flanc gauche avec la tête au nord-ouest. Les membres inférieurs sont fléchis, les genoux devant le visage. La fosse était refermée par une tegula posée à l’envers et incomplète (L. 40 cm ; l. 31 cm) qui marquait l’emplacement du creusement. L’espace est comblé de sédiment argileux (us288). Le crâne apparaissait en face latérale droite, face antérieure. Le thorax était à plat et se présentait en face latérale droite. L’avant-bras droit était en flexion. Les membres 224 Gaël BRKOJEWITSCH, Sandrine MARQUIÉ avec la coll. de Stephan NAJI et Frédéric ADAM 235,14 SP4 1 3 235,09 SP4 235,08 235,10 235,08 235,13 235,12 235,09 235,08 235,07 235,10 235,08 235,14 235,09 18 235,19 2 235,19 s n 40 39 18 Éch. 1/5 SP5 4 6 234,87 SP5 234,81 234,80 103 5 234,87 n-e s-o 105 104 103 Éch. 1/5 Fig. 7. Relevés et photographies des sépultures 4 et 5 (DAO : Y. Daune, Metz Métropole ; photographies : G. Asselin, K. Lemoine, Metz Métropole). Revue Archéologique de l’Est, t. 63-2014, p. 213-236 © SAE 2014 FUNERA ACERBA DANS LES CAMPAGNES DE LA CITÉ DES MEDIOMATRICI ? LE CAS DE LAQUENEXY « LA NOISERAIE » (MOSELLE) 235,28 SP6 1 3 235,19 235,16 235,20 235,20 235,17 235,17 235,20 235,18 235,17 235,16 111 235,18 2 235,29 235,20 235,28 s 113 n 112 Éch. 1/5 111 SP7 4 6 235,07 234,90 234,93 234,92 234,91 234,91 234,91 234,91 234,90 234,92 234,93 234,92 235,07 287 SP7 234,92 234,93 234,94 5 n-o s-e 235,07 289 288 Éch. 1/5 287 Fig. 8. Relevés et photographies des sépultures 6 et 7 (DAO : Y. Daune, Metz Métropole ; photographies : G. Asselin, K. Lemoine, Metz Métropole). Revue Archéologique de l’Est, t. 63-2014, p. 213-236 © SAE 2014 225 226 Gaël BRKOJEWITSCH, Sandrine MARQUIÉ avec la coll. de Stephan NAJI et Frédéric ADAM SP8 3 1 234,95 234,96 235,00 235,06 235,06 234,95 234,94 234,96 235,00 234,94 234,99 234,99 235,00 234,99 234,95 234,95 234,99 291 2 235,06 293 e o 292 Éch. 1/5 291 5 SP9 4 s 234,85 109 n 108 107 0 20 cm Éch. 1/10 Fig. 9. Relevés et photographies des sépultures 8 et 9 (DAO : Y. Daune, Metz Métropole ; photographies : G. Asselin, K. Lemoine, Metz Métropole). inférieurs étaient fléchis, genoux contre le thorax. Seules les diaphyses d’os long et la partie pétreuse de l’occipital ont pu être observées après la fouille. Elles ne présentaient pas d’anomalie notable. Sépulture 8 (fig. 9, nos 1, 2, 3) Les limites de cette fosse (us291) étaient assez difficilement lisibles mais le plan est globalement rectangulaire (40 x 30 cm). Le fond, qui constituait le lit de dépôt, est plat. La profondeur de la fosse avoisine 10 cm. La fosse était refermée par une tegula incomplète, posée à plat et à l’endroit (L. 41 cm ; l. 31 cm), qui recouvrait la fosse et fermait la sépulture. Le sujet (us294) était déposé dans la fosse sur le flanc droit avec la tête à l’ouest. La cage thoracique, située au nord de la fosse, était aplatie et apparaissait probablement en face latérale gauche. Les membres inférieurs semblaient occuper l’angle sud-est de la fosse. Le comblement est composé de sédiment argileux (us292). Les restes pulvérulents de SP 8 se sont complètement désagrégés au moment de la fouille en laboratoire et n’ont donc pas pu être étudiés. Revue Archéologique de l’Est, t. 63-2014, p. 213-236 © SAE 2014 FUNERA ACERBA DANS LES CAMPAGNES DE LA CITÉ DES MEDIOMATRICI ? LE CAS DE LAQUENEXY « LA NOISERAIE » (MOSELLE) Sépulture 9 (fig. 9, nos 4, 5) Une dernière structure se situait également dans le noyau occidental, composé de sépultures et de fosses. Elle a été observée à la cote de 234,85 m NGF dans un creusement (us107) rectangulaire (L. 0,40 m ; l. 0,30 m). Les limites étaient diffuses. Les parois de la fosse étaient apparemment verticales et le fond plat. La profondeur de la fosse oscillait entre de 0,20 et 0,05 m environ, selon que l’on se situait au sud ou au nord. Lors de sa mise au jour, cette excavation n’abritait aucun reste osseux. Pourtant, la plan général et surtout le recours à une tegula posée à plat et à l’envers (environ L. 0,40 m ; l. 0,30 m), pour son scellement, suggéraient qu’il s’agissait d’une sépulture dont les ossements auraient été encore plus fortement dégradés, à l’instar de la SP5. Le sédiment argileux (us108) infiltré sous la tuile n’a livré aucun élément de mobilier permettant de statuer. 3. SYNTHÈSE 3.1. APPORT DES DONNÉES TEXTUELLES ANTIQUES ET DE LA DÉMOGRAPHIE HISTORIQUE Pour aborder la synthèse, nous observerons les pratiques funéraires en Gaule préromaine puis nous nous tournerons momentanément vers l’Italie car plusieurs auteurs ont évoqué les grandes périodes de l’enfance dans des œuvres littéraires ou philosophiques tandis que d’autres ont fait état des consignes ou des usages lorsque la famille est frappée par la perte d’un enfant. Des témoignages similaires provenant de Gaule seraient les bienvenus pour traiter notre propos mais, malgré le corpus de sépultures qui s’agrandit considérablement, ils font encore défaut. Nous devrons donc examiner, d’un œil critique, les pratiques dans un petit hameau de Gaule Belgique à la lumière de textes anachroniques rédigés à Rome. Dans le troisième point de cette première partie, nous reviendrons sur les principales raisons qui expliquent la rareté de ce type de témoignage en contexte archéologique alors que les sources littéraires suggèrent que la perte d’enfants en période périnatale était un évènement banal. 3.1.1. Les pratiques funéraires préromaines à l’égard des périnatals La discussion sur le statut des sujets décédés dans la période périnatale demande une analyse comparée des découvertes aux rites funéraires préromains de la région. Cette démarche devrait offrir un contrepoint idéal permettant de vérifier ou d’infirmer l’influence des pratiques romaines. Cette question a été abordée et au final, la battée reste presque vide et les indices sont contradictoires (MARION, 2004, p. 164-166). Une première difficulté réside dans la prédominance de la crémation à cette période qui entrave peut-être l’identification de ces individus. L’inhumation des très jeunes enfants se révèle être une pratique courante dans les sociétés protohistoriques du Midi (DEDET, SCHWALLER, 1990 ; PY, 1990 ; DEDET et alii, 1991), des Alpes (FABRE, 2000), d’Italie et d’Espagne Revue Archéologique de l’Est, t. 63-2014, p. 213-236 © SAE 2014 227 (DEDET et alii, 1991). Les tout-petits sont généralement absents des nécropoles mais il existe de rares sites, du Hallstatt final, de France (KRAUSZ, 2000 ; VILLES, 1987) et de Suisse (FABRE, 2000) où ils étaient inhumés dans l’habitat. Les quelques occurrences provenaient de sites où les niveaux d’occupation étaient conservés, ce qui amène à relativiser car la pratique était possiblement plus courante qu’attestée. Plusieurs dépôts d’enfants très petits sont attestés dans des silos en France (DELATTRE, 2000) et en Angleterre (RALSTON, 2000). Quelques sujets sont répertoriés dans les nécropoles notamment à Bobigny (MARION et alii, 2006). Dans l’ensemble funéraire de la fouille « Hôpital Avicenne-Bâtiment hospitalier », les fœtus et les sujets décédés en phase périnatale représentent 2 % des 540 sépultures, datant de La Tène B2 et C1, mises au jour, alors que les autres classes d’âge d’immatures étaient mieux représentées. On peut penser que leurs lieux de sépulture sont à chercher ailleurs. Il est difficile de trancher car on ne peut réellement savoir si le site de Bobigny reflète des pratiques funéraires généralisées à cette période ou si les indices sont faussés par l’implantation préférentielle des sondages de fouille et la conservation de cet échantillon. Les comportements de rupture ou les signes d’une continuité à la période romaine sont, en l’état, impossibles à définir et seules de nouvelles découvertes permettront de formuler d’autres hypothèses. On retiendra toutefois la volonté de garder les plus jeunes à l’extérieur des ensembles funéraires consacrés au reste du groupe, une tendance à les inhumer dans les habitations ou les cours attenantes à la maison et que ces tombes ne sont jamais dotées de marquage topographique (MARION, 2003, p. 166). 3.1.2. Les temps de l’enfance chez les Romains La vie de l’homme n’est pas considérée de manière monolithique durant l’Antiquité. Selon les âges et les auteurs, la biologie humaine a été scandée en périodes qui jouissent chacune de caractéristiques. Ainsi, Varron (SERVIUS, Ad. Aen., V, 295) décrit une vie en cinq temps où se succèdent l’infantia (petite enfance), la pueritia (enfance), l’adulescentia (adolescence), l’iuuentia (jeunesse) et la senectus (la vieillesse). Ausone, au Ve s. ap. J.-C., divise également la vie en cinq âges dont il dépeint les typicités (Idylles, XV). Si l’on se place dans le domaine social cette fois, on considère que les filles achèvent leur vie d’enfant lors de leur mariage, qui intervient à partir de 12 ans, et que les garçons doivent attendre de revêtir la toge virile entre 14 et 16 ans. 3.1.3. La mort de l’enfant chez les auteurs antiques Le texte le plus souvent cité en la matière est celui de Pline l’Ancien. Il indique que l’inhumation de l’enfant qui n’a pas encore de dents est, en effet, préconisée à une époque où la crémation est largement dominante (PLINE, Naturalis historia, VII, 15). Le second texte célèbre est écrit par Fulgence (FULGENCE, Expositio sermonum antiquorum, 7) qui fait état de pratiques particulières aux jeunes 228 Gaël BRKOJEWITSCH, Sandrine MARQUIÉ avec la coll. de Stephan NAJI et Frédéric ADAM enfants décédés ante suum diem. Les bébés peuvent être inhumés sous l’auvent de la maison et les funérailles ont lieu nuitamment. Dans les « Vies parallèles », Plutarque relate la position que Numa Pompilius adopta pour le deuil. Il en proportionna la durée à l’âge où étaient morts ceux que l’on pleurait, mais il établit de ne point porter le deuil pour un enfant en dessous de trois ans. Depuis cet âge jusqu’à dix, il prescrivait autant de mois de deuil que l’enfant avait vécu d’année (PLUTARQUE, Numa, 12). Telle était l’idée que le moraliste rapporta des recommandations à l’époque du roi Numa (VIIIe s. av. J.-C.). La mort de l’enfant était un événement tellement ordinaire que, selon Cicéron, sa disparition ne méritait ni plainte, ni chagrin. « Quand un petit enfant meurt, les hommes le supportent paisiblement et s’il meurt au berceau, ils n’y pensent même pas » (CICÉRON, Tusculanae disputationes, I, 39, 93). La réaction détachée que Cicéron décrit s’explique par la nature de son livre qui est consacré à la consolation philosophique contre la mort. Un texte de Juvénal témoigne cependant d’une profonde tendresse à l’égard de l’enfant trop jeune pour être porté sur le bûcher (« Ou lorsque dans la terre, il regarde coucher l’enfant, trop jeune encore pour les feux du bûcher… ») (JUVÉNAL, Saturae, XV, 131-140). L’attention affectueuse des parents pour leur enfant apparaît clairement à la fin de la consolatio de Plutarque. Après avoir énuméré à sa femme les pratiques à l’égard des enfants morts en bas âge, qui instaurent une distance, voire une forme d’indifférence, il conclut en lui disant qu’il est plus dangereux de se refuser à de semblables croyances que de les admettre et il lui demande de s’y conformer. Il ajoute que concernant leurs sentiments intimes, ils devront s’attacher à les conserver encore plus exempts de toute souillure, encore plus purs et plus sages (PLUTARQUE, Œuvres morales, consolation à sa femme, VIII). Deux sources plus explicites (HORACE, Épîtres, 1, 7, 2-4 ; SÉNÈQUE, Consolatio à Marcia, 9, 2) rapportent que la mort des enfants est ressentie douloureusement. Dans le premier passage de Plutarque ou dans le texte de l’orateur, le sentiment d’indifférence prédomine. Cette posture marmoréenne relève probablement d’une nécessité de se prémunir face à ces malheurs très fréquents. Wieslaw Suder (SUDER, 2001, p. 73) synthétise le propos de spécialistes du monde antique (M.I. Finley, R. Garland, K. Bradley, K. Hopkins, T. Wiedermann, S. Dixon3) qui sont en accord avec le déterminisme démographique popularisé par P. Ariès (ARIÈS, 1960). Pour conserver leur équilibre psychologique et moral, les parents étaient obligés de limiter leur degré d’engagement à l’égard de leurs enfants. Ce qui transparaît, en revanche, dans les lignes du second passage de Plutarque et dans une moindre mesure dans celui d’Horace, c’est le profond chagrin d’un père qui endure avec sérénité et stoïcisme la mort de son enfant. 3. FINLEY, 1981, p. 159 ; GARLAND, 1985, p. 80-86 ; BRADLEY, 1986, p. 216-220 ; HOPKINS, 1983, p. 222-226 ; WIEDERMANN, 1989, p. 14-17 ; DIXON, 1992, p. 99. Ce nécessaire détour par les sources antiques nous amène à formuler une réserve. La connaissance des textes, fréquemment évoqués lors des travaux sur la mort des enfants, permet de cerner l’attitude de l’aristocratie romaine à l’égard des tout-petits principalement à la fin de la République et au début du Haut-Empire. Bien que l’on puisse supposer une forme d’universalisme en la matière, il convient de manipuler les sources avec prudence. En l’absence de règles émises par le clergé ou par l’État, ces questions devaient varier selon les régions, les périodes et les familles (SCHEID, 2008). Sur la foi de cet universalisme, on pourra tout de même pointer deux éléments notables. D’une part, il apparaît que, face à la mort de leurs enfants, deux sentiments contrastés animaient les familles : le souci et l’indifférence. L’indifférence car face à un tel taux de mortalité, un trop grand attachement aurait rendu le quotidien insupportable, mais également le souci d’éviter la souillure et de respecter certains usages. D’autre part, cette préoccupation particulière à l’égard des morts prématurées remonte haut. Plutarque, au début du Haut-Empire, considérait que les premières dispositions et prescriptions émanaient de Numa Pompilius, le successeur de Romulus. Même si ces instructions ne sont, en fait, qu’une construction tardive, Plutarque a pu les observer à son époque. Il n’est pas impensable que ces dispositions fussent toujours respectées au IIIe s. de n. è. dans les provinces du nord-est de la Gaule, dans une forme de logique partagée. 3.1.4. Explication d’un paradoxe On estime, si l’on se base sur les travaux de démographie antique des chercheurs anglo-saxons (PARKIN, 1992 ; HIN, 2013), que la mortalité infantile était fréquente puisqu’elle frappait 25 à 30 % des enfants. Elle est encore plus forte chez les enfants en bas âge où presque 40 % du groupe était emporté avant son premier anniversaire. Avant l’âge de 5 ans, près de la moitié des individus, soit 49 %, disparaissait et l’on considère que le taux brut de reproduction par couple de 5,84 enfants est plausible pour que la population demeure stationnaire (FRIER, 1982, p. 248-249). Ces chiffres renvoient l’image d’une société assez vulnérable et ils expliquent en partie les tentatives d’optimisation de la fertilité par des lois à visée nataliste4. Cette société confrontée à la mortalité infantile - dans des proportions bien plus importantes que la nôtre - devait forcément gérer ces disparitions et octroyer des espaces communautaires pour l’ensevelissement des petits et ce, dans les villes comme dans les campagnes. Pourtant, malgré l’accroissement des fouilles préventives et l’intérêt particulier dont jouissent ces questions à l’heure actuelle, très peu de contextes sont documentés. N’est-ce pas là une aporie que cette kyrielle de trépassés dont on ne retrouve pas ou peu de trace lors des recherches archéologiques ? Nous l’avons constaté, les vestiges sont fragiles et seuls les squelettes déposés à même 4. On connaît plusieurs lois du Ier s. av. et Ier s. ap. J.-C. : la Lex Julia de maritandis ordinibus, Lex Julia de adulteriis et de pudicitia en 18 av. J.-C. et la Lex Papia Poppaea en 9 ap. J.-C. (GAIUS, Institutes, III, 42-53). Revue Archéologique de l’Est, t. 63-2014, p. 213-236 © SAE 2014 FUNERA ACERBA DANS LES CAMPAGNES DE LA CITÉ DES MEDIOMATRICI ? LE CAS DE LAQUENEXY « LA NOISERAIE » (MOSELLE) le calcaire nous sont parvenus dans un état de conservation satisfaisant pour réaliser une étude ostéologique et une datation radiométrique. Les autres sépultures implantées dans l’argile n’ont résisté ni à l’acidité du sol ni aux différents agents taphonomiques qui ont entouré leur dégradation. Cette forte différence entre la conservation des os de nourrissons et ceux des adultes est bien connue (BELLO et alii, 2002). Ces problèmes taphonomiques apportent probablement une partie des réponses. 3.2. LE CAS DE LAQUENEXY « LA NOISERAIE » La disparition de l’enfant est un sujet aujourd’hui assez fréquemment abordé. La question du traitement spécifique des enfants décédés en phase infantile, évoquée par plusieurs auteurs antiques, bénéficie par ailleurs de travaux de synthèses récents (BLAIZOT et alii, 2003 ; BLAIZOT, 2009, p. 69-99) et nombreux sont les contextes funéraires antiques en périphérie des villes et dans les campagnes qui ont fait l’objet de publications quasiment exhaustives. Dans cette deuxième partie de la synthèse, nous définirons la spécificité – en termes de recrutement – de l’espace funéraire, l’organisation de l’espace et les dispositifs de marquage, l’architecture ainsi que les principaux gestes qui sont posés lors de la mise en terre ou d’éventuelles cérémonies de commémoration. 3.2.1. Spécificité de l’ensemble funéraire de Laquenexy L’étude anthropologique a montré à Laquenexy que dans trois cas au moins, les sujets étaient décédés avant le terme ou dans les trois premiers mois de la vie. Bien que l’on ne puisse établir l’âge exact au moment du décès des six autres sujets, les dimensions des vestiges osseux semblent confirmer les observations réalisées par les anthropologues. Ce contexte renvoie à une réalité très particulière : les enfants morts en couche ou en période périnatale. Sous ce terme les anthropologues désignent les sujets décédés entre le septième mois lunaire de gestation et les vingt-huit jours suivant la naissance (BRUZEK et alii, 2005). Un des sujets a survécu peut-être jusqu’à ses trois mois. On parle alors d’un individu décédé en phase infantile, avant l’âge d’un an (BLAIZOT et alii, 2009, p. 69). 3.2.2. Définition de l’espace funéraire à Laquenexy Des recensements de sépultures ont eu lieu en Suisse occidentale. Ils indiquent que les tombes de bébés sont présentes dans toutes les formes d’habitats avec une prédominance pour les vici et la pars rustica des villae (BERGER, 1993). De manière synthétique, deux types d’ensembles se dégagent en milieu rural : les sépultures sensiblement isolées de l’habitat et les sépultures de jeunes enfants groupées dans des espaces artisanaux ou domestiques. À Laquenexy, les fouilles récentes ont permis de mettre en évidence deux établissements gallo-romains. Le premier se situe à 500 m à l’ouest, au lieu-dit « Entre deux Cours », Revue Archéologique de l’Est, t. 63-2014, p. 213-236 © SAE 2014 229 et le second à une centaine de mètres à l’est, au lieu-dit « Rue du Noyer ». Dans le premier cas, il s’agit d’une villa en activité entre le Ier s. ap. J.-C. et le Ve s. ap. J.-C. dont la pars rustica a été entièrement fouillée. À la « Rue du Noyer », deux bâtiments ont été mis en évidence en 2012 mais l’identification n’est pas encore établie. Le noyau de sépultures est donc installé entre deux domaines en activité au IIIe s. ap. J.-C. en contrebas (cote 235 m NGF) par rapport au bâti (cote 250 m NGF). L’appariement de l’ensemble funéraire avec un de ces lieux d’habitat semble probable. Une partie des recherches de M.-J. Ancel était consacrée à la définition des espaces funéraires en Moselle à l’époque romaine. Elle a pu montrer que la distance entre les tombes et l’habitat est très faible et généralement inférieure à 500 m (ANCEL, 2012, p. 147). En cela, les contextes du nord-est pourraient se distinguer de nombreux ensembles du centre ou du sud de la Gaule où les sépultures d’enfants sont généralement documentées à l’intérieur ou en bordure extérieure des murs des bâtiments (DOLLFUS, GUYOT, 1968 ; VERTET, 1974 ; DUDAY, 1995 ; GUIOT et alii, 2003). 3.2.3. Organisation de l’espace funéraire Aucune trace de fossé ou de muret qui aurait délimité le secteur voué aux inhumations d’enfants n’a été mise au jour. Tout au plus remarque-t-on deux groupements qui impliquent peut-être que les sépultures étaient marquées en surface par un amas de terre ou un marquage en bois. L’examen du plan de répartition des vestiges révèle un alignement plus ou moins net, notamment dans le noyau oriental, qui pourrait indiquer que les fosses s’organisaient le long d’un axe longitudinal orienté ouest-est. L’existence d’un sentier ou d’une voie n’est pas exclue. L’intention de grouper les tombes pourrait également indiquer une gestion familiale de cet espace. L’absence de recoupement est un argument supplémentaire en faveur d’une gestion raisonnée, bien que l’on puisse opposer à cet argument le nombre réduit de dépositions. 3.2.4. L’architecture funéraire 3.2.4.1. Différences entre villes et campagnes L’étude de plusieurs séries de sépultures a montré l’existence de différents modes de traitement et/ou de traditions. Sur deux sites ayant livré des sépultures de sujets morts en phase périnatale fouillés par F. Blaizot à Beaumont « Champ Madame » et à Roquemaure « la Ramière » (BLAIZOT et alii, 2003, p. 66) dans le sud et le centre de la Gaule, les sujets sont inhumés dans un vase-cercueil ou une tombe à fosse à couvercle. La fouille du site des « Béziaux » à Langeais (Indre-et-Loire) a permis de mettre au jour un contexte de dix-huit sépultures de sujets décédés autour de la naissance (GUIOT et alii, 2003). Près de la moitié d’entre elles était associées à des fragments d’amphores, de dolia ou de cruches. Ceux de Sallèles-d’Aude (DUDAY et alii, 1995, p. 97) sont disposés dans une tombe à fosse tandis que les coffrages divers s’adressent au post-néonatals. 230 Gaël BRKOJEWITSCH, Sandrine MARQUIÉ avec la coll. de Stephan NAJI et Frédéric ADAM À proximité des grands centres urbains, les architectures funéraires se complexifient. En Narbonnaise, à Nîmes-Nemausus, les post-néonatals sont déposés dans des coffrages (rue Jean-Jaurès) ou dans des coffrages de dalles (au 59 Avenue Jean-Jaurès). Les sujets périnatals reposent dans des amphores, des coffrages mixtes ou des fosses (BLAIZOT et alii, 2009). Les nécropoles de Saint-Marcel-Argentomagus, principalement celle du « Champ de l’Image » (IIe s. ap. J.-C.), en Gaule Aquitaine (ALLAIN et alii, 1992), ont livré un grand nombre de tombes d’immatures dont onze appartenaient à des fœtus ou des nouveau-nés. La typologie des sépultures était très variable, allant de la fosse en pleine terre (tombes 38-F19, 164-A5) à des compositions de marquages plus complexes. Des tuiles (tombes 26-E17, 26-E17) ou une dalle (tombe 28-E17) marquaient parfois les tombes quand d’autres structures recevaient des marquages plus hétérogènes faits de tuiles, de pierre et de fragments d’amphores (tombe 44-E18/19). Enfin, une sépulture se distinguait par le recours à un marquage singulier composé de six statuettes, en terre blanche de l’Allier, dressées autour d’un clou planté au centre de la tombe (tombe 74-H20). La fouille récente d’un ensemble funéraire du Ier s. ap. J.-C. au lieu-dit « Les Palais » (COUVIN et alii, 2007) témoigne de la richesse de ce versant de la vallée de la Creuse. À 150 m au sud-est du « Champ de l’Image », la fouille a révélé l’existence de deux nouvelles sépultures de périnatals inhumés, associés à une inhumation d’immature de 7 ans (plus ou moins 24 mois) et à deux sépultures secondaires à crémation appartenant à des adultes. Les deux sépultures de bébés (F.60, F.97) sont toutes deux accompagnées de plusieurs anneaux à langer et la première renferme deux vases disposés le long de la paroi de la fosse. Une particularité du gisement réside dans la présence de nombreux enclos excavés renfermant des tessons, du métal, de la faune ainsi que des ossements humains crémés. Ces structures n’ont apparemment pas de relation avec les inhumations de tout-petits. Elles sont interprétées comme résultant de cérémonie funéraire (funérailles ou commémoration). La fouille préventive d’un important quartier funéraire des Ier et IIe s. ap. J.-C. dans les faubourgs de SoissonsAugusta Suessionum (Aisne) marque une étape importante puisqu’elle enrichit la documentation d’un grand nombre de nouvelles structures et qu’elle permet de mieux comprendre la gestion des espaces funéraires aux abords des villes, où coexistaient des inhumations de très jeunes enfants avec des crémations (GISSINGER et alii, 2012). Sur les 186 sépultures à inhumation mises au jour, 64 sujets étaient décédés en phase périnatale (trois fœtus, vingt-neuf enfants prématurés et trente-deux nouveau-nés morts moins d’un mois après la naissance). Les fosses sépulcrales étaient généralement de plan ovalaire, en pleine terre et sans marquage de surface. Cinq sépultures étaient recouvertes de panses d’amphores et la présence de clous en place évoquait parfois l’existence de coffre en bois. On ne peut pas, semble-t-il, dégager de particularité géographique et chronologique. Il apparaît assez clairement, en revanche, que le contexte – urbain ou rural – a une influence sur l’architecture des tombes. Dans les nécropoles urbaines les dispositifs funéraires sont apparemment plus variés mais l’usage de matériaux de construction (tuiles, moellons) et d’objets déclassés (panse d’amphores, fragment de stèle à Argentomagus) est une constante. 3.2.4.2. Des contextes de comparaison dans l’est de la Gaule En territoire séquane, le site de Tavaux (Jura) offre matière à comparaisons (B ARBET , 2012, p. 217-223). L’ensemble funéraire se situe le long de la voie StrasbourgArgentorate / Lyon-Lugdunum en milieu rural dans la Bresse jurassienne. Parmi les 84 structures funéraires mises au jour, 62 abritent des sujets morts en période périnatale qui sont déposés sur une imbrex. Si le mobilier est rare – et très singulier comme c’est souvent le cas dans les tombes d’enfants – dans ces dépôts, il faut toutefois pointer quelques différences importantes. À Tavaux, l’enclos n’est pas exclusivement dévolu aux nourrissons. Ils côtoient vingt-deux sépultures secondaires à crémation et une tombe interprétée comme la sépulture d’un guerrier. Deux lectures du site sont envisagées par l’auteur : dans la première, les sujets sur une imbrex entreraient dans une forme de culte à un ancêtre tandis que dans la seconde hypothèse, la portée apotropaïque de la tombe de chef aurait garanti la protection des nourrissons. Faute de chronologie relative entre ces dépôts et de nouveaux éléments, il semble difficile de se prononcer. Il ne faut peut-être pas mettre en relation directe toutes ces sépultures qui recouvrent apparemment des réalités archéologiques différentes dont la synchronie n’est pas assurée (deux enclos maçonnés, deux enclos fossoyés, trois bases de monuments, vingt-deux sépultures secondaires à crémations, soixante-deux inhumations primaires de nourrissons). À Nuits-Saint-Georges (Côte-d’Or ; COULON, 2004, p. 146), la nécropole des Bolards présente des similitudes avec l’ensemble de Tavaux. Plusieurs noyaux de sépultures d’enfants sur des imbrices sont documentés. Des stèles et des sépultures d’adultes semblent agir comme point de fixation. Toutes les sépultures de Laquenexy étaient assez simples. Il s’agit de fosses rectangulaires dont la profondeur ne devait pas excéder une cinquantaine de centimètres. À l’exception de la sépulture SP4 fermée par une imbrex, les fosses étaient scellées par une tuile plate. Les fragments de terre cuite ne jouaient pas le rôle de cippe ou de stèles. Ils signalaient l’emplacement du corps en fond de fosse, peut-être pour éviter un recoupement malencontreux, plus qu’ils ne marquaient la sépulture. La tuile de couverture est dans sept cas sur huit posée à l’envers (rebords en bas). On notera la relative homogénéité dans le dispositif funéraire choisi dans les campagnes de la cité des Mediomatrici, qui est confirmée par la découverte, en milieu rural, de Mécleuves, à la « Haie aux Angles ». Un ensemble de tombes lié à un petit habitat familial a livré une tombe d’un très jeune enfant mort en période périnatale. Si l’architecture funéraire est comparable à celle des sépultures de Laquenexy – nous y reviendrons – notons que la sépulture est « isolée » aux côtés de sépultures secondaires à crémation d’adultes principalement. Les auteurs de la fouille émettent l’hypo- Revue Archéologique de l’Est, t. 63-2014, p. 213-236 © SAE 2014 FUNERA ACERBA DANS LES CAMPAGNES DE LA CITÉ DES MEDIOMATRICI ? LE CAS DE LAQUENEXY « LA NOISERAIE » (MOSELLE) 231 thèse que la structure avait une place et un statut privilégié (ANCEL, 2012b, p. 84-86). Dans les sites évoqués, on ne peut pas pointer de grande disparité en termes d’architecture où l’usage des tuiles est une constante presque absolue. Ce qui différencie, en revanche, le contexte funéraire de Laquenexy et les gisements de Tavaux et de Nuits-Saint-Georges, c’est la vocation exclusive de l’espace à une seule classe d’âge sans sépulture d’adulte. 3.2.5. La mise en terre L’inhumation est toujours choisie pour cette classe d’âge. Une exception notable est recensée dans la nécropole de Saint-Lambert, à Fréjus, où deux nouveau-nés étaient incinérés (GÉBARA, BÉRAUD, 1993, p. 332). À Laquenexy, dans sept cas sur neuf, il a été possible de documenter la position du sujet. Les individus sont déposés en décubitus latéral droit (cinq cas) ou gauche (deux cas). La position assez fléchie est assez proche de la position hyper contractée. Dans certains cas (SP2 et SP3) l’aspect très contracté du sujet et des effets de parois longitudinaux (SP8) pourraient indiquer l’emploi de sac en toile ou en une autre matière périssable. Cette hypothèse semble possible d’autant que les nourrissons figurent emmaillotés sur la majorité des stèles conservées au Musée de la Cour d’Or de Metz (AYACHE, KAZEK, 2012, p. 16) (fig. 10) même s’il faut probablement privilégier le traitement du corps dans un linceul. L’orientation des dépouilles ne semble pas avoir été codifiée (trois sujets avec la tête au sud ; trois sujets avec la tête au nord ; un sujet avec la tête à l’ouest). Les sépultures sont toutes des inhumations primaires avec une décomposition en espace vide (SP4, SP6 et SP8) rapidement colmaté par les sédiments les plus fluides. 3.2.6. La question du mobilier archéologique associé aux sépultures L’abondance de mobilier dans les tombes des très petits enfants signale une différence entre les contextes urbains et ruraux. Pour vérifier cette hypothèse, il nous faudrait examiner les pratiques dans les nécropoles péri-urbaines mais la documentation manque pour la cité des Médiomatriques. La fouille sur l’Avenue André Malraux à la sortie de Metz, le long de la voie de la Meurthe, a mis en évidence 283 dépositions (ANCEL et alii, 2009, p. 96) parmi lesquelles on ne dénombre aucun individu mort en période périnatale. Dans la grande nécropole de Soissons (GISSINGER et alii, 2012), la majorité des dépôts accompagnant les toutpetits était constituée de contenants en céramique (urnes, assiettes, pots, écuelles, fragments d’amphores) ou de lampe à huile (sép. 742). Le dépôt d’une, voire deux monnaies était une pratique courante même pour les enfants mort-nés (sép. 704). Les recherches préventives autour de Marseille, d’Aix-en-Provence et de Nîmes ont permis d’appréhender les questions relatives au mobilier en Gaule Narbonnaise (BEL, 2012, p. 196-198). Généralement, les dépôts d’offrandes sont moins fréquents que dans les tombes des autres immatures ou des adultes, mais présents (17 sur 62 tombes). Revue Archéologique de l’Est, t. 63-2014, p. 213-236 © SAE 2014 Fig. 10. Stèle d’Aeliola – iie-iiie s. ap. J.-C. (Musée de la Cour d’Or, Metz Métropole). À Laquenexy « la Noiseraie », les sépultures étaient privées de mobilier ou d’offrande funéraire. La présence d’un clou dans la SP3 pose question. Précisons que l’objet accompagnait un individu né un ou deux mois avant terme. Les clous dans la sphère funéraire étaient généralement interprétés comme une référence à la valeur sacrée et magique de l’objet et il en existe plusieurs lectures. Ce dernier préservait et protégeait quelqu’un ou quelque chose en la fixant de manière irrévocable5. Le clou pouvait avoir un double rôle, celui de défendre le défunt et celui de punir l’éventuel profanateur. Enfin, sa fonction pourrait être de fixer le défunt dans sa tombe, pour ne pas qu’il vienne hanter le monde des vivants. Les pratiques mettant en scène 5. Voir à ce sujet la notice consacrée dans le Dictionnaire des Antiquités Grecques et Romaines (DAGR I, 2 (1887), s.v. Clavus (E. Saglio), p. 1240-1242). À propos de la valeur fixatrice des clous : ANNEQUIN, 1973, p. 21. 232 Gaël BRKOJEWITSCH, Sandrine MARQUIÉ avec la coll. de Stephan NAJI et Frédéric ADAM un clou dans la tombe sont légion et le mode d’expression multiple. Par exemple, à Pompéi, Vesonius Phileros, qui accuse son ancien ami Marcus Orfellius Faustus, adresse aux passants un message indiquant que son ami est exclu de la tombe et prend soin de clouer l’inscription en son centre (VAN ANDRINGA, LEPETZ, 2008, p. 1142). La présence de tablettes de defixio volontairement percées rappelle l’emploi d’une formule courante : « Je lie, je fais disparaître, j’enterre et je cloue » (MARTIN, 2010, p. 25-29 ; GRAF, 1994, p. 151). Des vases ou un crâne troué par un clou ont parfois été retrouvés dans les nécropoles de Narbonnaise (BÉRARD, 1963, p. 295-306). Des textes très explicites sont peints dans les columbariums tels que « Quicumque hinc clavos ex emerit in oculos sibi figat » (CIL VI, 7191, « celui qui enlève ces clous, qu’il se les plante dans les yeux »). Dans ce cas précis, il s’agit en fait d’éloigner d’éventuels profanateurs. On aura en mémoire le cas de la tombe 74-H20 d’un nouveau-né de la nécropole du « Champ de l’Image » à Argentomagus où un clou était planté verticalement audessus de l’urne (ALLAIN et alii, 1992, p. 128-130). Parmi les cinq exemples mentionnés, ce dernier paraît plus proche, par son mode d’expression, de la tombe de Laquenexy. La question est souvent discutée car il demeure difficile de faire la part des choses entre les objets intrusifs, la quincaillerie d’assemblage et les dépôts volontaires. Cependant, un article récent a mis en évidence que dans une aire déterminée (nécropole de Via Fracchia à Rome), le dépôt de clous est très fréquent puisqu’il est attesté dans 15 % des cas étudiés (CECI, 2001, p. 88-89). L’association de clous avec la sépulture a été abordée succinctement dans des travaux plus ou moins récents : pour l’Isola Sacra et Ostie (TAGLIETTI, 2001 ; PELLEGRINO, 2001) ; pour les tombes de Gaule (VAN DOORSELAER, 1967, p. 122 ; BERTHON, 2009). Les modalités de dépôt sont nombreuses, comme en témoignent ces quelques exemples, mais la présence d’un clou aux côtés des ossements est hautement signifiante et peut difficilement être interprétée comme intrusive dans une structure, comme celle de Laquenexy, qui est privée d’offrandes et dont le comblement de la fosse ne renfermait aucun tesson de terre cuite ou fragment de mobilier métallique. Sa vocation serait d’éloigner le mauvais œil, à la manière des amulettes phalliques en ambre (MOLINER, 2003, p. 55-57 : nécropole Sainte-Barbe à Marseille – tombe 169) ou en métal (BARBET, 2012, p. 220-221 : nécropole de Tavaux – tombe 22). CONCLUSIONS À Laquenexy, comme presque partout dans le monde gréco-romain, les tout-petits sont inhumés comme le décrivent les sources. Le choix du lieu de sépulture ne se porte pas sur un espace domestique, un secteur artisanal ou un ensemble funéraire familial. Cette pratique les distingue des contextes préromains – dans lesquels l’habitat est parfois préféré – et des suggrundaria (suggrunda = auvent) discutés par Fulgence (FULGENCE, Expositio sermonum antiquorum, 7) et fréquemment attestés par l’archéologie. Loin d’être reléguées à l’extérieur, ces tombes, particulièrement funestes pour les vivants, semblaient volontairement implantées à proximité de la famille. La tegula pourrait évoquer le toit de la maison, et la mise en terre à proximité des vivants pourrait être interprétée comme une restitution de l’enfant à la terre-mère (GUSI, MURIEL, 2008), visant à rendre propices de nouvelles naissances ou une symbolisation du retour à la mère (ALAPONT, BOUNEAU, 2010). La relation avec l’habitat n’est pas aussi évidente à Laquenexy que dans d’autres sites évoqués ailleurs en Gaule. La gestion de sépultures de tout-petits à une distance respectable des espaces domestiques pourrait constituer une caractéristique de cet ensemble funéraire. Les données recueillies à l’occasion de la fouille de cet ensemble funéraire témoignent d’un soin particulier et signalent des pratiques spécifiques à l’égard des tout-petits. Le soin est visible dans le dispositif employé. Le sujet est déposé dans une simple fosse qui était peut-être coffrée de bois, à l’image de la sépulture de Mécleuves (ANCEL, 2012, p. 44). Dans certains cas, il a été émis l’hypothèse que les enfants étaient entourés d’un linceul. Malgré la simplicité dont les structures font preuve, on note que les bébés sont déposés dignement en position contractée. L’usage systématique de tuiles de couverture renvoie l’image d’une gestuelle codifiée. Cette préoccupation se traduit également par le recours à des tuiles qui ne devaient pas être visibles au sol mais qui permettaient probablement de ne pas bouleverser la tombe à l’occasion d’un nouvel ensevelissement. Ce lieu a fait l’objet d’une gestion et a été organisé car aucun recoupement n’est attesté. La présence de quatre fosses autour des sépultures constituerait un indice supplémentaire de cette attention portée aux sépultures. Trois structures renfermaient des vases en céramique (un gobelet à boire, un pot, une jatte, des cruches et des fragments d’amphores). Le service à liquide pourrait constituer un indice du statut funéraire de ces structures et les autres récipients contenaient peutêtre des denrées consommées au moment des funérailles ou à la mémoire des défunts. Pour autant, l’association de ces dépôts avec les inhumations est discutable mais on ne peut occulter leur existence qui constituerait une preuve du culte rendu, à l’occasion des funérailles ou de cérémonies commémoratives. Les offrandes, qui intervenaient lors des funérailles pour définir la tombe, purifier les vivants et changer le statut du défunt pour qu’il puisse faire l’objet d’un culte funéraire (SCHEID, 1984), ne sont pas présentes dans ce contexte. L’absence de mobilier marque une différence importante avec tous les autres ensembles évoqués. La spécificité de ce contexte réside dans sa simplicité, sa rusticité et dans son exclusive vocation à honorer la mémoire de sujets morts en période périnatale. Il nous faut donc souligner la rareté de ce type de document archéologique consacré à cette catégorie très ténue de la population, peu traitée dans nos régions (BAILLS-TALBI, 2009). Le contexte étudié dans le hameau de Laquenexy est conforme à certains égards (plan, marquage, etc.) aux autres ensembles Revue Archéologique de l’Est, t. 63-2014, p. 213-236 © SAE 2014 FUNERA ACERBA DANS LES CAMPAGNES DE LA CITÉ DES MEDIOMATRICI ? LE CAS DE LAQUENEXY « LA NOISERAIE » (MOSELLE) funéraires accueillant des sujets de cette tranche d’âge au nord-est de la Gaule mais il présente quelques particularités (implantation, absence totale de mobilier d’accompagnement, absence de sujet d’une autre tranche d’âge). Il éclaire notre vision de ces questions en milieu rural dans la cité des Mediomatrici et permet de discuter des pratiques face à la mort des tout-petits, de cette population située socialement aux antipodes de l’aristocratie urbaine. La découverte d’individus décédés en phase périnatale demeure rare malgré l’activité archéologique préventive. En Lorraine, il s’agit du premier ensemble funéraire, a priori appréhendé dans sa totalité, consacré exclusivement à des sujets de cette tranche d’âge. 233 Remerciements Nous tenons à saluer Yvain Daune pour la réalisation des illustrations ainsi que Nicolas Laubry pour sa relecture et les améliorations apportées à ce texte. Stéphane Marion nous a orientés sur les questions protohistoriques et Sandrine Thiol nous a facilité l’accès à certains rapports de fouille. Nous remercions également l’équipe de fouille de Metz Métropole qui a œuvré sur le chantier (Guillaume Asselin, Brice Chevaux, Yvain Daune, Camille Glardon, Kristell Lemoine, Johann Maujean, Lucie Pruneyrolles, Simon Sedlbauer, Francis Vorreux) ainsi que Kévin Kazek, du Musée de la Cour d’Or, qui nous a transmis un document photographique. BIBLIOGRAPHIE Sources AUSONE, Œuvres complètes, Traduction nouvelle E.-F. 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