Bulletin de correspondance
hellénique
Apollonia d'Illyrie (Albanie)
Pierre Cabanes, Bashkim Vrekaj, Jean-Luc Lamboley, Philippe Lenhardt, Madame
Claire Balandier, Guillaume Bonnet, Vangjel Dimo, Julien Espagne, Éric Fouache,
Lami Koço, Skender Muçaj, Pellumb Naipi, Patrick Neury, Yann Pépin, Iris Pojani,
François Quantin, Altin Skenderaj
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Cabanes Pierre, Vrekaj Bashkim, Lamboley Jean-Luc, Lenhardt Philippe, Balandier Claire, Bonnet Guillaume, Dimo
Vangjel, Espagne Julien, Fouache Éric, Koço Lami, Muçaj Skender, Naipi Pellumb, Neury Patrick, Pépin Yann, Pojani
Iris, Quantin François, Skenderaj Altin. Apollonia d'Illyrie (Albanie). In: Bulletin de correspondance hellénique. Volume
123, livraison 2, 1999. pp. 569-580.
doi : 10.3406/bch.1999.7250
http://www.persee.fr/doc/bch_0007-4217_1999_num_123_2_7250
Document généré le 15/10/2015
APOLLONIA D'ILLYRIE (ALBANIE)
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Apollonia dlllyrie (Albanie)
parGuillaume
Pierre
Pellumb
Cabanes,
Bonnet,
NAiPi,avec
Bashkim
Patrick
Vangjel
la participation
Neury,
Vrekaj,
DiMO, Yann
Julien
Jean-Luc
d'Olivier
Pépin,
Espagne,
Lamboley,
Iris
Jérôme
Chodkiewicz,
Éric Rambert
Pojani,
Fouache,
Philippe
François
Agnès
et
Lami
lenhardt,
quatre
Quantin,
Martin
Koço,
étudiants
Claire
Van
Altin
Skender
des
Skenderaj,
Balandier,
albanais
Haegen,
Muçaj,
La Mission archéologique et épigraphique française en Albanie a poursuivi ses activités en 1998
suivant les mêmes axes que précédemment, en collaboration étroite avec l'Institut archéologique d'Albanie.
La campagne de fouilles, après accord du ministère français des Affaires étrangères, a pu se
dérouler du 26 août au 1 1 septembre 1998. Elle a réuni au total quatorze membres albanais et treize français.
La réduction à dix-sept jours, au lieu du mois habituel, est due aux conditions de sécurité dans le pays,
qui n'avaient pas rendu possible la campagne de 1997. La reprise des recherches, malgré la situation
difficile en Albanie, a été appréciée par les partenaires albanais qui craignaient, à tort, un désengagement de
la partie française. Les événements survenus au lendemain même de notre départ de Tirana ont
pleinement justifié la décision d'abréger exceptionnellement la durée de la campagne de fouilles. Il faut, enfin,
souligner que tant la maison de fouilles que l'ensemble du site archéologique, intra ou extra muros, ont
été retrouvés en parfait état, grâce à la vigilance des habitants de Pojani, très attachés à leur patrimoine,
et grâce aux forces de sécurité affectées sur le site par l'État albanais. La visite que P. Cabanes a pu
effectuer à Tirana et sur le site, du 20 au 27 octobre 1997, à l'invitation de l'Ambassade de France, et ses
rencontres avec le Président de la République d'Albanie, M. R. Meidani, avec les dirigeants de l'Académie
des Sciences et le Recteur de l'Université de Tirana, ont permis de maintenir et de renforcer les liens déjà
anciens et étroits unissant la Mission archéologique et épigraphique française en Albanie et les
responsables de ce pays.
Avant de présenter la chronique des fouilles sur le site d'Apollonia d'Illyrie, il est bon d'évoquer aussi
les autres activités conduites par des équipes albano-françaises dans des domaines plus spécialisés.
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TRAVAUXMENÉS EN COLLABORATION AVEC L'ÉCOLE FRANÇAISE EN 1998
1. Épigraphie et numismatique
1.1. Épigraphie grecque (responsables : Pierre Cabanes, Faïk Drini)
Le deuxième volume du Corpus des inscriptions grecques d'Illyrie méridionale et d'Épire, consacré aux
inscriptions d'Apollonia, a été publié en fin d'année 1997 dans la même collection que le premier volume,
paru en 1995, Études épigraphiques 2, par l'École française d'Athènes associée à la Fondation D. et E. Botzaris, la diffusion étant assurée par De Boccard à Paris. Il rassemble 393 documents, dont de très nombreux
inédits. Le troisième volume qui rassemble les inscriptions de Bouthrôtos est en voie d'achèvement ; il réunit
surtout de très nombreux actes d'affranchissement. Les séjours de F. Drini à Paris ont permis d'avancer la
préparation du quatrième volume ; l'achèvement de celui-ci suppose encore un large circuit à travers
l'Albanie pour n'oublier aucune inscription et ces déplacements restent peu opportuns actuellement. Durant
l'été 1998, plusieurs textes ont été retrouvés alors qu'ils n'étaient pas connus jusqu'ici : par exemple, dans
l'église Saint-Athanase du village de Karavastaj, une inscription grecque gravée sur l'un des piliers de l'église
provient très probablement du site d'Apollonia et fait connaître un prytane dont le nom n'est pas complet
Λυσα-, qui doit être un Lysanias ou un Lysanôr. Autre exemple extraordinaire, le cas d'une inscription latine
signalée dans l'église de Pish-Poro, église rasée en 1985 ; les villageois ont précisé que les pierres de l'église
avaient servi à la construction d'une étable de la coopérative, elle-même détruite en 1991, lors du rejet de
toute forme d'organisation collective. Alors que l'essentiel des matériaux a été récupéré par les villageois,
nous avons eu la chance, le 10 septembre, de retrouver la moitié droite de l'inscription dans les ruines de
l'étable.
1.2.Épigraphie latine (responsable : É. Deniaux)
La préparation du volume réunissant les inscriptions latines d'Albanie se poursuit, sans l'aide de
collègues albanais depuis les décès de S. Anamali et de H. Céka. Des vérifications sur les différents sites et dans
les réserves des musées sont indispensables, mais n'ont pas été possibles en 1997 et 1998. Dès que la
situation le permettra, des relevés devront être effectués, notamment à Bouthrôtos et à Byllis.
1.3. Numismatique (responsables : Olivier Picard, Shpresa Gjongecaj)
L'étude des monnaies de bronze d'Apollonia se poursuit grâce à des travaux communs menés sur
place, à Paris et à Athènes. Les résultats ont donné lieu à plusieurs publications : « La circulation monétaire
à Apollonia », dans Llllyrie méridionale et l'Épire dans l'Antiquité, Actes du IIIe Colloque international de
Chantilly, 16-19 octobre 1996(1999), p. 91-98 ; « Trésors de monnaies de bronze d'Apollonia » dans Actes du XIIe
Congrès international de numismatique, Berlin, septembre 1997 {sous presse), p. 80-85 ; « Remarques sur la
politique monétaire d'Apollonia au IIIe et au IIe siècles », Iliria 1995 [1998], p. 187-198 ; « Trésor
d'Apollonia 1941 », RN 1998, p. 103-105 ; « Le trésor de Kreshpan (Albanie) », RN 1998, p. 81-102. L'étude des
monnaies d'argent est maintenant entreprise.
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2. Archéohgie du site et du territoire
2.1 Étude géographique et géomorphologique du territoire
(responsables : Éric Fouache, Skender Muçaj)
Les travaux visant à localiser l'emplacement du port d'Apollonia au pied de la colline de Shtyllas ont
été menés à terme en 1996, et les résultats ont été donnés à l'occasion du congrès d'Aquilée sur les ports de
l'Adriatique, organisé par l'Université de Trieste et l'École française de Rome en mai 1998. L'évolution de
la plaine littorale d'Apollonia a fait l'objet d'un compte rendu détaillé dans la chronique du BCH 121 (1997),
p. 861-869. É. Fouache envisage maintenant de poursuivre ces recherches en les orientant vers l'étude de la
dynamique et de l'évolution du littoral adriatique oriental.
Un autre problème important pour l'étude du territoire d'Apollonia est posé par la localisation du
Nymphaion et de ses émissions de gaz susceptible de s'enflammer naturellement. La consultation des
spécialistes de l'Institut du pétrole à Fieri permet de localiser avec certitude la zone, dans laquelle ce gaz
composé de méthane et de sulfure d'hydrogène (H2S) se manifeste toujours, dans la seule région de Selenica.
C'est donc là qu'une future prospection peut permettre de retrouver le site de ce sanctuaire et du concours
qui s'y déroulait régulièrement (les Nymphaia d'Apollonia).
2.2. La nécropole (responsables : Annick Fenet, Vangjel Dimo)
La fouille du tumulus 8 (cf. BCH 121 [1997], p. 854-856) a été terminée par V. Dimo, qui a fait
procéder au dernier nettoyage sur le fond du tumulus ; lorsque l'étude du matériel, essentiellement des Ve
et IVe siècles, sera réalisée, la publication pourra être préparée, en même temps que celle du matériel dégagé
antérieurement dans les tumuli 6 et 7.
2.3. La fouille au Nord du portique (responsables : Jean-Luc Lamboley, Bashkim Vrekaj)
Cette année, la fouille au Nord du portique s'est concentrée dans deux secteurs : celui de l'édifice à
mosaïque découvert en 1996 (carrés Α-α-β/13-16), et le haut de la grande rue (carrés C-D/25-26)1.
La cour de l'édifice a pu être entièrement dégagée et relevée (fig. 1) ; elle présente, avec les murs qui
l'entourent, un plan presque carré de 11,80 χ 11,18 m, soit une surface de 132 m2. Les quatre murs, dont il
ne reste que les assises de fondation qui n'ont pas permis de situer la ou les entrées, sont en blocs de grès local,
le plus souvent en remploi. Tout le sol était recouvert d'une mosaïque de grosses tesselles monochromes
blanches, irrégulières, dont il ne reste que quelques traces çà et là, sauf dans l'angle Sud-Ouest où plus de
1 m2 sont encore en place. Les destructions subies par l'édifice sont importantes ; les unes sont dues aux
affaissements différentiels du terrain, qui ont complètement morcelé et boursouflé le radier ; ainsi la cote actuelle
du sol au centre de l'édifice est inférieure d'au moins 1 5 cm à ce qu elle était à l'origine. Les autres sont dues
à la main de l'homme : les blocs de grès ont été récupérés, et aux angles Nord-Est et Nord-Ouest il ne reste
plus que les dalles de la dernière assise de fondation. À l'angle Sud-Ouest on a retrouvé le bloc angulaire
1 Pour la planimétrie générale du site, se reporter à la fig. i
dans le BCH 121 (1997), p. 849.
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Flg. 1. Plan de la cour de l'édifice à mosaïque.
2cm
ι
redressé sur son champ prêt à être emporté, et l'espace libéré était rempli de déchets de taille et d'un bloc à
moitié débité. L'absence de colonnes ou de pilastres laisse à penser que l'édifice n'était pas couvert ; d'ailleurs
le nombre de tuiles retrouvées dans les couches de destruction tant à l'extérieur qu'à l'intérieur est très réduit.
Par contre, dans la couche de destruction extérieure à l'édifice, sur le côté méridional, on a pu relever la
présence d'un très grand nombre de briques de construction et de quelques fragments de frise architectonique,
ce qui permet de supposer une élévation en brique au-dessus des orthostates en grès, avec sans doute une
corniche de couronnement. Sur le même côté méridional a été dégagée une ruelle pavée de grosses tesselles de
brique (5x5 cm) ; cela permet de mieux situer le bâtiment par rapport au reste du tissu urbain : il est établi
sur les bords Nord-Ouest de la terrasse artificielle où se développe le centre monumental d'époque romaine,
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et la ruelle de direction Est-Ouest, qui longe sur l'autre
côté le canal desservant le portique, semble être le
seul élément de liaison entre cet édifice et la grande
rue longeant le portique. À l'intérieur de l'édifice, à
80 cm du mur oriental, et centrée par rapport aux
deux extrémités, la présence d'une base de pilastre
carré de 40 χ 40 cm, encastrée dans le radier de la
mosaïque, est le seul indice sur la fonction possible
de cet édifice (fig. 2). Il ne peut s'agir d'un pilier à
fonction architectonique vu qu'il est isolé ; il faut donc
y voir un support destiné à supporter un huterion,
ou une sorte d'autel, voire une statuette cultuelle. À
Fig. 2. Base de pilastre dans le sol en mosaïque.
noter que les restes d'une statue colossale en marbre
(deux mains et un avant-bras) ont été récupérés dans
l'angle Sud-Est.
D'autres observations ont permis d'identifier plusieurs phases d'occupation et de construction. Un
niveau inférieur de mosaïque a été découvert à l'arrière du pilastre le long du mur oriental ; les tesselles
blanches beaucoup plus fines et régulières ont dû être protégées par le bloc de l'assise supérieure,
aujourd'hui disparu, mais visiblement plus large que les autres. Ce qui est actuellement la dernière assise de
fondation de l'édifice dans son état final était donc, dans la phase antérieure, la première assise d'élévation en
correspondance avec le premier niveau de mosaïque. Cette mosaïque disparaît sous le radier du niveau
supérieur qui semble l'avoir complètement recouverte en surélevant ainsi le sol. Un sondage ouvert en A 14 sur
le côté septentrional, à l'angle du mur médian transversal déjà identifié en 1996 (en grisé sur le plan), et
sous le radier qui a été déposé, a confirmé l'existence d'au moins deux états ; en effet, le mur transversal est
fondé dans l'argile vierge, mais la tranchée de fondation, peu profonde, n'est visible qu'à l'Est ; à l'Ouest,
en raison du dénivelé, les fondations sont beaucoup plus profondes et l'argile vierge se rencontre donc
beaucoup plus bas, au-dessous d'une épaisse couche de remblai et d'une couche de fréquentation. Or, la section
montre clairement que le hérisson recouvre le mur transversal ; la présence du sol en mosaïque, dès le
premier état, correspond donc à une réfection de l'édifice avec un agrandissement en direction de l'Ouest, qui
porte à 1 1,18 m au lieu de 8 m la largeur du bâtiment. Les tuiles utilisées dans le hérisson sont toutes datables
des IIe-Ier siècles av. J.-C, ce qui donne un bon terminus post quem pour dater cet élargissement et le
premier sol. La réfection du sol, avec le deuxième et dernier niveau de mosaïque, est plus difficile à dater ; une
monnaie de bronze a été retrouvée encastrée à la surface du radier avant la pose des tesselles, mais elle est
malheureusement de lecture très difficile, et il faut attendre son traitement en laboratoire et l'avis des
spécialistes. Une monnaie de Théodose, récupérée dans les niveaux superficiels de l'angle Nord-Est, montre
que l'édifice est toujours en fonction au IVe siècle jusqu'à l'abandon du site. Une donnée nouvelle a été
fournie par la présence de matériel d'époque archaïque dans la fondation du mur transversal, avec notamment
une coupe ionienne de type B, sans doute de production locale, datable dans le dernier quart du VIe siècle
av. J.-C. Cela tendrait à prouver que l'édifice a été construit dans une zone déjà occupée à l'époque archaïque,
voire que son premier état, dont il ne reste que les assises de fondation en blocs de grès local (comme ceux
du rempart archaïque), date de cette époque.
Les travaux réalisés dans le second secteur ont d'abord visé à évacuer l'immense éboulis qui
encombrait la grande rue montant en direction de l'acropole. Malgré l'absence de moyens mécaniques, l'objectif
a été atteint, et près de 30 m ont été dégagés, ce qui crée désormais un paysage urbain proche de ce qu'il
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Fig. 3. La rue principale après le dégagement de l'éboulis.
était dans l'Antiquité (fig. 3). Les résultats les plus importants concernent les différents niveaux de rue
identifiés, avec une particularité remarquable : une dissymétrie entre la situation observée au Sud (le long du
mur 12) et au Nord (le long du mur 18).
En effet, le long du mur 18, plusieurs niveaux de rue sont bien identifiables. Il faut distinguer deux
sols en cailloutis et galets (n° 1 et 2), le premier contemporain de la première construction du mur 12, le
second contemporain de sa réfection avec de la céramique sigillée présente dans les deux cas. Plus à l'Est, à
un niveau supérieur, deux autres sols beaucoup plus irréguliers, avec des briques et des pierres plus grosses,
pénètrent légèrement à l'intérieur de Yemplekton du mur (n° 3 et 4) ; ils correspondent à des sols de
chantier au moment de la destruction du mur et de l'utilisation de la zone comme carrière ; une disposition en
escalier n'est pas impossible. Tous ces niveaux de sol disparaissent vers le centre de la grande rue, emportés
par une immense tranchée remplie de terre noire à laquelle appartiennent les blocs de l'éboulis. Cette fosse
est bien visible sur la section de la berme qui marque la limite orientale de la zone de fouille ; deux fûts de
colonne lisse en marbre gris, avec des marques de travaux de carrière, en occupent le fond (n° 6). L'éboulis
ne serait donc pas simplement le résultat d'une destruction « naturelle » ; on a bien l'impression que tout le
matériel a été jeté par main d'homme dans un grand fossé creusé à cet effet. Ce matériel doit être bien
distingué des éléments architectoniques retrouvés également en position d'éboulis, mais au pied du mur 1 8 et
dans une terre sableuse claire — chéneau kprotomè léonine, fragments de chapiteau corinthien — ,
au-dessus du sol en galets n° 2, et sous les sols de travail 3 et 4. Il s'agit en tout cas de la dernière trace d'activité
avant l'abandon du site, et cette grande fosse a également perturbé la situation le long du mur 12, en
emportant notamment la voie dallée (n° 5) dont on n'a plus que le départ à l'angle du portique. La construction
de cette voie, qui repose sur le sol vierge, a vraisemblablement détruit les sols 1 et 2. Par contre, on n'a pas
pu observer aussi nettement l'existence de sols de chantier, bien que le mur 12 montre aussi des traces très
nettes de réutilisation comme carrière. À noter que ce mur continue en direction de l'Est, mais les blocs de
parement ne sont plus en place. Parmi le matériel intéressant récupéré dans ce secteur de fouille, il faut
relever la découverte d'un sceau métallique portant la mention ΑΓΟΡΑ (fig. 4), ce qui pourrait être un indice
supplémentaire pour situer l'agora sur le plateau séparant les deux collines.
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Rg. 4. Sceau portant la mention ΑΓΟΡΑ.
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Rg. 5. Inscription (acte d'affranchissement).
Enfin, un rapide sondage dans les carrés E-F 23 a permis d'établir que le mur dit « hellénistique »
continue vers l'Ouest en direction des magasins, mais a perdu ses assises supérieures, et qu'il a une largeur
variant entre 1,70 m et 1,80 m. La fonction de ce mur situé à l'arrière du mur 12 reste une énigme ; il ne
s'agit visiblement pas du podium d'un temple, comme on en avait émis l'hypothèse. Un nouveau bloc avec
inscription d'affranchissement a pu être récupéré (fig. 5) :
Πρ(υ)τανεύο[ντος
νός Ψυδρέος [--,
Σωτηρίδα έλ[ευθέραν
, μη]άφηκε]
].
Parallèlement, des travaux de restauration ont été entrepris par l'équipe des Monuments historiques
de Tirana. La moitié de la voûte du premier magasin a pu être remontée, et des blocs récupérés dans le grand
éboulis central ont permis de reconstituer l'architrave d'un petit édifice quadrangulaire.
Bilan
La campagne, bien que réduite à 15 jours, a atteint les deux objectifs fixés. D'abord, le dégagement de
toute la cour de l'édifice à mosaïque et la réalisation d'un sondage stratigraphique sous la mosaïque. La
présence de l'aire de circulation pavée en tesselles de brique permet de situer le bâtiment dans le tissu urbain ;
il restera, lors de la prochaine campagne, à faire la jonction avec le caniveau découvert par L. Rey. Le second
objectif était de dégager entièrement la grande rue de l'éboulis qui l'encombrait, afin de retrouver le
paysage urbain originel et d'identifier les différents niveaux de circulation. Cela a été fait, et l'étude des blocs
récupérés dans l'éboulis a permis de reconstituer l'entablement d'un édifice et de confirmer l'existence à
proximité d'un grand temple corinthien. Le matériel retrouvé a été abondant et varié. Les monnaies ont été
transférées au laboratoire de l'Institut archéologique de Tirana en vue de leur restauration, tandis que le reste
du matériel est conservé dans les dépôts de la maison de fouille pour la céramique et le petit matériel, ou
dans le musée pour les inscriptions, les fragments architectoniques et les sculptures.
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2.4. Le relevé topographique et architectural (responsable : Philippe Lenhardt)
P. Neury et Y. Pépin se sont chargés de réimplanter le carroyage sur le chantier de fouille au NordOuest du portique aux dix-sept niches, avant de poursuivre le relevé topographique et architectural de
l'enceinte urbaine.
2.5. Les fortifications d'Apollonia
(responsables : Claire Balandier, Lami Koço, Philippe Lenhardt)
Claire Balandier et Lami Koço, archéologues, et Philippe Lenhardt, architecte, ont repris leur
collaboration pour l'étude des fortifications d'Apollonia, bénéficiant de l'aide de Patrick Neury, architecte, et de
son assistant Yann Pépin, qui ont poursuivi le relevé topographique de l'enceinte urbaine. En effet, la
campagne 1998 a été consacrée, d'une part, à la poursuite du relevé topographique des structures apparentes de
l'enceinte urbaine et, d'autre part, à la description architecturale des structures relevées les années
précédentes.
Poursuite du relevé des vestiges de l'enceinte urbaine
La campagne étant limitée à dix-sept jours, il n'était plus envisageable d'achever cette année le relevé
topographique des fortifications d'Apollonia, comme prévu à la fin de la dernière campagne. Aussi, plutôt
que de reprendre le relevé général de l'enceinte urbaine au Nord-Ouest du site, là où il avait été arrêté en
1996, Cl. Balandier a préféré que l'activité fut portée sur la zone située depuis la porte Nord-Est jusqu'à la
porte Est (voir le plan d'ensemble du site). En effet, un incendie survenu quelques mois auparavant rendait
plus visibles les vestiges du rempart, particulièrement réduits dans ce secteur. Ainsi, quelques portions
d'assises en place ont pu être distinguées des blocs éboulés (fig. 6 et 7).
Pour faciliter le travail de relevé topographique, deux ouvriers ont dégagé l'ensemble du dispositif
de la porte Nord-Est de l'épaisse couverture végétale de ronces et de fougères qui rendait ses structures
difficilement lisibles.
Flg. 6. Versant Est de la colline 104 : vestiges de
l'enceinte révélés à mi-pente à la suite d'un incendie.
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Flg. 7. Versant Est de la colline 104 :
vestiges de l'enceinte révélés à la suite d'un incendie
au Nord-Est de la porte Est.
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Illustration non autorisée à la diffusion
Fig. 8. Le bastion Ouest au 1/500 (plan : Ph. Lenhardt).
De la même façon, le « bastion » situé au Nord-Ouest du site, devant l'école du village de Pojani, et
qui n'avait pu être l'objet d'un relevé en 1996 en raison de l'ennoiement de ses structures à la suite de
violents orages, a été renettoyé et relevé cette année (fig. 8).
La porte Est, incluse en 1994 dans le relevé global du rempart effectué par Ph. Lenhardt, a
également fait l'objet d'un relevé au 1/200 (pour plus de détails, voir la description donnée dans le rapport du
5C//119[1995],p.775).
L'étude descriptive de l'enceinte : le rempart Ouest
Par ailleurs, Cl. Balandier et Ph. Lenhardt ont procédé à l'étude descriptive des structures du
rempart visibles sur le terrain. Il s'agissait de compléter les informations en plan apportées par le relevé
topographique de l'enceinte urbaine effectué de 1994 à 1996 par des observations et des descriptions de détail
pouvant apporter des informations sur la nature des blocs ainsi que sur les techniques de construction mises
en œuvre. Ce travail a été effectué sur le rempart Est, depuis la poterne jusqu'à la porte Sud (voir BCH 120
[1996], p. 978, fig. 5), puis sur le rempart Ouest dont sont présentés ici les premiers résultats.
L'observation de détail des structures du rempart Est, sur lequel s'appuient les fondations du
portique oriental du monastère Sainte-Marie, a permis de préciser la chronologie relative de ces différents types
de constructions, dont on présentera l'ensemble des résultats l'année prochaine avec le relevé de la porte
Nord-Est.
Les descriptions architecturales effectuées à la porte Sud ont confirmé les hypotheses de
chronologie relative proposées en 1995 (voir ibid., p. 983-984).
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Illustration non autorisée à la diffusion
Fig. 9. Le rempart Ouest au 1/8 000 (plan : Ph. Lenhardt).
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Illustration non autorisée à la diffusion
Fig. 10. Plan de la tour Ouest au 1/500 (plan : Ph. Lenhardt).
Le rempart Ouest (fig. 9) a une morphologie plus régulière que celle qui avait été observée pour le
rempart Est. De la porte Sud jusqu'au décrochement du rempart vers le NNE, on retrouve un tracé en arc
concave déjà noté dans la partie méridionale du rempart Est. Après une lacune dans le repérage des vestiges
de l'enceinte, le tracé se poursuit ensuite vers le Nord de façon rectiligne jusqu'à la tour repérée dans le canal.
À partir de cette tour, le tracé prend une direction Nord-Est et est ponctué d'une série de décrochements
et de tours.
L'observation précise et la comparaison de la tour repérée dans le canal en 1994 et relevée en 1995
avec celle située à quelques mètres de la première maison au Sud du village (fig. 10), a amené à constater
qu'il s'agit du même type de tour semi-circulaire terminant un bastion rectangulaire accroché à l'enceinte.
Ces deux tours peuvent également être rapprochées du dispositif de la tour 1 (Nord) de la porte Sud, que
l'on a supposé appartenir à la deuxième phase d'aménagement de cette entrée de la ville.
Il semble donc que le rempart Ouest a subi une série de réaménagements, notamment l'ajout de
tours et de décrochements dans une zone plane particulièrement vulnérable, qui nécessitait d'autant plus
de renforcement de la défense qu'une porte donnait accès à la cité dans ce secteur (voir le plan et la
description de cette porte dans le rapport sur la campagne de 1996 : BCH 121 [1997], p. 858-860). Toutes
ces tours n'ont cependant pas été ajoutées avec le même soin. Si la tour circulaire C est grossièrement
accolée à un décrochement de l'enceinte, la tour Β a été construite avec la portion de courtine septentrionale
qu'elle termine, pour se raccrocher à la courtine méridionale. Bien que rajoutée à une construction
antérieure, elle est presque harpée.
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Flg. 11. Le bastion Ouest (vue vers le Sud).
Enfin, le nettoyage des structures situées devant l'école de Pojani, au Nord-Ouest du site, a permis
de préciser et de corriger les premières observations effectuées en 1994. Il ne s'agit pas d'un passage,
protégé dans un deuxième temps par une tour ou un bastion, comme on l'avait supposé alors que les vestiges
étaient difficilement lisibles, mais d'un retour du mur renforcé ultérieurement à sa construction par une
construction externe, tour ou bastion (fig. 11). Ainsi, dans un premier temps, le mur M. A. se prolongeait
en M. A', et formait un décrochement du tracé de l'enceinte. Cet angle fut renforcé ultérieurement par la
construction M. B. Le muret m semble être une construction plus tardive, survenue alors que l'enceinte
n'avait plus de fonction défensive.
En 1999, nous envisageons d'achever le relevé topographique des fortifications d'Apollonia en
bouclant le circuit de l'enceinte urbaine entre le bastion Nord-Ouest (devant l'école de Pojani) et la porte NordEst d'une part ; en procédant, d'autre part, au relevé des murs qui apparaissent au pied de la colline 101 et
qui peuvent avoir correspondu aux ouvrages de défense d'une citadelle. Enfin, on effectuera le relevé du diateichisma repéré cette année approximativement entre le gymnase à l'Est et les thermes à l'Ouest.
BCH123 (1999)