Bolivie

Les fêtes nationales et les hymnes patriotiques rencontrent en Amérique latine une ferveur remarquable. Pourtant, rien de spontané dans cet enthousiasme. Les dates choisies, les chants retenus et les commémorations mises en place sont les fruits de décisions politiques au service de projets médités de construction citoyenne. En fêtant la nation, le groupe se reconnaît un passé commun qu’il se remémore en même temps qu’il n’a de cesse de le réinterpréter.
C’est une histoire comparée de ces réinterprétations, des façons de célébrer l’État-nation au Mexique et en Bolivie, pendant leur premier siècle de vie indépendante, qui est proposée ici. Les deux républiques naissantes partageaient une même volonté de construction nationale et une même préoccupation face à la forte composante « indigène » de leur population. Mais elles envisagèrent des modalités distinctes pour tisser ou raffermir les liens nationaux, pour intégrer ou exclure, pour mettre en scène ou invisibiliser les populations des territoires concernés.
Au-delà des typologies esquissées, les politiques festives et symboliques cherchèrent à doter d’évidence un sentiment d’appartenance nationale encore embryonnaire, mais dont la généralisation devenait une nécessité politique.

Mouvement féministe et droit de vote en Bolivie (1920-1952) est un travail qui analyse les organisations féministes en Bolivie au cours de la période 1920-1952, depuis leur émergence jusqu’à l’obtention du droit de vote en 1952. Il étudie comment leurs modes d’organisation, leurs stratégies d’action, et la priorité donnée à certains objectifs se sont modifiés en fonction du contexte social et politique dans lequel elles se sont développées.

Il étudie ainsi l’évolution et les transformations du mouvement féministe au cours d’un contexte mouvementé: les années 1920, marquées par l’émergence et le développement des organisations féministes ; les années 1930, celles de la guerre du Chaco contre le Paraguay (1932-1935) qui ont entraîné des bouleversements sociaux, politiques et culturels porteurs de conséquences importantes concernant la condition des femmes et le mouvement féministe; et enfin, les années 1940 à 1952, celles de la première participation des femmes à la vie politique à travers les élections municipales et l’intégration des femmes au parti politique qui mena à bien la révolution qui aboutit, en 1952, au renversement de l’oligarchie en place.

Las primeras imágenes sobre poblaciones indígenas de tierras bajas bolivianas en el siglo XIX no fueron fotografías sino grabados del viajero francés Alcide D’Orbigny. El artículo se propone, luego de recordar el contexto de la producción de estas ilustraciones, explorar los conocimientos de la época en torno a estas poblaciones indígenas.

Pourquoi des politiques de recours au secteur privé apparemment très formatées, intervenues dans un même contexte international de promotion des recettes néolibérales (le fameux consensus de Washington) ont-elles provoqué dans certains cas d’amples mouvements de protestation et pas dans d’autres ?

La comparaison des cas de Carthagène en Colombie et de La Paz-El Alto en Bolivie amène à développer deux arguments. Tout d’abord, le différentiel de mobilisation ne s’explique ni par les variations dans l’impact matériel des privatisations sur les usagers, ni par des prédispositions inégales à la mobilisation des populations concernées. Il dépend plutôt d'un ajustement entre les systèmes de normes et d’attentes qui prévalaient avant la privatisation, et les nouveaux systèmes de normes de type néolibéral promus par les fournisseurs privés et les tenants des réformes.

Le second argument est que la « réussite » ou l’« échec » de ces ajustements normatifs n’ont pas été déterminés par la plus ou moins grande qualité d’un travail politique de légitimation. Ce qui est remarquable, au contraire, est l’absence d’élaboration de réels discours justificateurs de la part des gouvernants. L’accommodement normatif observé à Carthagène, et durant les premières années d’exploitation à La Paz-El Alto, relève davantage d’une cohabitation entre des systèmes de normes qui sont demeuré assez étrangers les uns aux autres . La notion de légitimité des privatisations, en ce qu’elle impliquerait une adhésion minimale à un certain système normatif explicité et revendiqué, par les réformateurs, apparaît dès lors peu opérante. Selon nous, la notion d’acceptabilité permet de mieux rendre compte de l’acceptation sociale constatée.

Résumé

L’accession au pouvoir en Bolivie d’Evo Morales transforme l’institutionnalisation du genre. La lutte contre les discriminations de genre, tout comme celles d’origine ethnique, ne se concentre désormais plus uniquement dans des entités institutionnelles spécifiques. À partir d’une analyse de discours, cet article pose la question de la politisation ambivalente des rapports sociaux de sexe concomitants à ces changements institutionnels. L’association du concept de genre aux principes andins permet une politisation des rapports sociaux de sexe. Cependant, ce processus est affaibli par l’invisibilité du genre aux expériences autochtones et l’assimilation du patriarcat à la colonisation, qui tendent à une dépolitisation du genre.

Abstract

The coming to power in Bolivia of Evo Morales has transformed the institutionalization of gender. The fight against gender discrimination, like that against ethnic discrimination, is no longer concentrated solely in specific institutions. Through discourse analysis, this paper examines the issue of the ambivalent politicization of the social gender relations that have accompanied these institutional changes. Associating the concept of gender with Andean principles has led to this politicization, but the process has been hampered by the invisibility of gender to indigenous experiences and by the assimilation of patriarchy to colonization, two factors that have tended to depoliticize gender.

This chapter analyses the evolution of education policies waged in Bolivia since 1900 to the present day. Three major educative policies are highlighted in the XXth century, along with the political stakes, tensions and debates which accompanied them. First there was the liberal reform of education implemented from 1898 until 1920, then the reform which was aimed at carrying out the National Revolution from 1952 to 1964, and more recently, the one launched in 1995 whose aim has been to respect linguistic, cultural and territorial diversity, pursued by the current Evo Morales government.
During the first two decades of the XXth century, desirous of realizing their project of national reconstruction and regeneration, the liberals believed it necessary to control the educational system to turn Bolivia into the civilized and westernized nation they dreamed of. For the first time, the state government took charge of national education and because the power of peoples appeared to be directly correlated to their level of instruction, their initial ambition was to propagate this education to all sectors of society, which incorporated the masses into a vast national fervor towards positive progress. Quite quickly, however, these same elites preferred to “back-step”, considering that, while it was of course important to train the masses to become the necessary manpower for national progress, this should not go as far as giving them the means to endanger the elites’ political and economic hegemony. The Indians would be instructed enough to partially interiorize the value system of the elites, but not enough to make a claim to active citizenship. They needed to be whitened, but would never be White.
After three decades of relative disinterest for education, with the exception of the experience of the indigenous Warisata school, the MNR leaders brought education back to the front lines of the revolution’s pre-occupations. It was once again question of acting at the state level to remodel the educative system which would incorporate the population as a whole, but this time, with no intention of either whitening or westernizing. The Revolution claimed to diffuse “popular education”, ensuring “national integration” of the mulatto nation. The 1955 Education Code was the pre-eminent XXth century legislative measure in this domain. It also set the priority of turning towards the rural areas which were often lacking public schools and teachers. This meant rallying around a slogan which had made its way across Latin America: going from “cast education to mass education”. But while the project’s quantitative success is undeniable, considering the number of schools created, the qualitative balance sheet must be drawn with greater nuance. Exactly forty years after the Code’s implementation, the principles of linguistic integration, the foundation of the MNR’s educative ambitions of the 1950s, were challenged by MNR representatives in the 1990s, who regretted the existence such a “homogeneous” educative system in a country of such great ethnic diversity. In 1994 they launched the third great educative reform of the XXth century, which adopted the opposite approach to the former policies of homogenization. Until this day there have been working to achieve the recognition of a “pluri-ethnic and multicultural nation.”

Résumé :
Ce chapitre vise à analyser l’évolution des politiques éducatives menées en Bolivie depuis 1900 jusqu’à nos jours. Les trois grandes politiques éducatives du XXe siècle y sont mises en regard, avec les enjeux politiques, les tensions et les débats qui les ont accompagnées. Il s’agit de la réforme éducative libérale menée entre 1898 et 1920, de la réforme qu’eut à cœur de réaliser la Révolution Nationale entre 1952 et 1964, et de celle, plus récente, engagée en 1995 afin de respecter la diversité linguistique et culturelle du territoire et poursuivie par le gouvernement actuel d’Evo Morales.
Dans les deux premières décennies du XXe siècle, désireux de mener à bien leur œuvre de reconstruction et de régénération nationale, les libéraux considérèrent qu’ils devaient contrôler le système éducatif pour faire de la Bolivie la nation civilisée et occidentalisée dont ils rêvaient. Pour la première fois, l’État prit en main l’organisation de l’éducation nationale et puisque le pouvoir des peuples paraissait directement corrélé à son niveau d’instruction, l’ambition fut initialement de propager dans tous les secteurs de la société cette éducation qui incorporerait les masses à un vaste élan national vers le progrès positif. Assez vite pourtant, ces mêmes élites préférèrent « rebrousser chemin », considérant qu’il fallait, certes, former assez les masses pour faire d’elles une main-d’œuvre utile au progrès du pays, mais assez peu pour qu’elles ne mettent jamais en danger l’hégémonie économique et politique des élites. Les Indiens seraient assez instruits pour intérioriser en partie le système de valeurs des élites, mais sans prétendre accéder à une citoyenneté active. Il fallait les blanchir, mais ils ne seraient jamais des Blancs.
Après trois décennies d’un relatif désintérêt pour l’éducation si l’on excepte l’expérience d’école indigène de Warisata, les dirigeants du MNR remirent l’éducation au premier rang de leurs préoccupations révolutionnaires. Il s’agissait toujours d’agir depuis l’État pour remodeler un système éducatif qui intègrerait l’ensemble de la population, mais cette fois, sans plus chercher à la blanchir ni à l’occidentaliser. La Révolution prétendait diffuser une « éducation populaire » assurant « l’intégration nationale » à la nation métisse. Le Code de l’Éducation de 1955 fut la disposition législative phare du XXe siècle dans ce domaine. Il établit de se tourner aussi de façon prioritaire vers le monde rural encore bien souvent dépourvu d’écoles publiques et de maîtres. Il supposait d’appliquer une devise qui avait déjà fait son chemin en Amérique latine : passer « d’une éducation de castes à une éducation de masse ». Mais tandis que la réussite quantitative du projet est indéniable si l’on considère le nombre d’écoles créées, le bilan qualitatif peut être beaucoup plus nuancé.
Or, quarante ans exactement après la promulgation du Code, les principes de l’intégration linguistique à la base de la pensée éducative du MNR des années 1950, furent remis en cause par les représentants du MNR des années 1990, qui s’accordèrent à regretter un système éducatif trop « homogène » dans un pays de grande diversité ethnique. Ils lancèrent en 1994 la troisième grande réforme éducative du XXe siècle, qui prit le contre-pied des politiques homogénéisatrices antérieures pour travailler, jusqu’à aujourd’hui, à la reconnaissance d’une « nation pluriethnique et multiculturelle ».

Este libro es resultado del Primer Encuentro Internacional de Historia sobre "El Siglo XIX en Bolivia y América Latina", organizado por la Coordinadora de Historia y el Instituto Francés de Estudios Andinos (IFEA) el año 1994 en la ciudad de Sucre en homenaje postumo a Gunnar Mendoza. Dedicado al siglo XIX, por ser un período poco abordado en general por la historiografía de los últimos años, tuvo el propósito de analizar, con mayor profundidad y rigor, tanto las continuidades coloniales como las rupturas que lo caracterizaron. En la medida en que participaron bolivianos y bolivianistas de Europa y Estados Unidos, así como investigadores latinoamericanos de Argentina, Perú, Chile, Ecuador y Colombia, esperamos que este volumen que hoy presentamos constituya un aporte y una referencia para el análisis de esta época fundacional de los estados-naciones de América Latina

Cet article avance une contribution d’ordre général et une autre d’ordre plus spécifique à ce numéro collectif sur le process tracing : d’une manière générale, nous soulignons la forte capacité du process
tracing à articuler des moments de raisonnement inductifs et déductifs ; d’une manière plus spécifique, nous montrons comment cette articulation permet d’expliciter les critères de jugement mobilisés par le chercheur pour évaluer la suffisance de son récit causal.

Ces contributions s’appuient sur une comparaison entre une mobilisation sociale contre la privatisation des services d’eau dans une ville bolivienne (Cochabamba, en 2000) et la trajectoire des politiques de transports publics à Santiago du Chili, de 1990 jusqu’à aujourd’hui.

Cet article rend compte d’une mobilisation sociale de grande ampleur contre une concession privée d’eau potable à La Paz-El Alto en Bolivie. Cette concession avait pourtant été érigée durant sa décennie d’activité (1997-2007) en un modèle de participation privée « bonne pour les pauvres » (pro-poor). Assurément, il existe de fortes dispositions
structurelles à la mobilisation à El Alto. Mais le partenariat public-privé a davantage étendu le service que l’opérateur public antérieur, pour des tarifs qui ont augmenté mais qui sont restés les plus bas du pays : comment, alors, expliquer que cette mobilisation se soit déclenchée sur l’eau et contre la concession privée spécifiquement ? Cet article
avance que la privatisation a transformé en profondeur l’interprétation de leur situation sociale par certains publics concernés. La nouvelle politique publique-privée a involontairement secrété sa propre opposition en conférant une identité unifiée à la population, jusque-là très disparate, des non-raccordés (devenue un groupe social homogène de « pauvres » ayant désormais vocation à être rapidement connectés) et en traitant cette population manifestement moins bien que toutes les autres catégories sociales. Ces observations s’inscrivent dans une littérature émergente sur les feedbacks négatifs des politiques publiques.

La Bolivie entre en 2006 dans un profond processus de changement à plusieurs niveaux. Ce processus ouvre sur une crise du lien social qui s’est manifesté en 2008. Deux projets de société se faisaient face et n’ont pas su trouver un espace de dialogue. L’objectif poursuivi dans cette recherche est de comprendre le processus de la crise du lien social bolivienne et la manière dont est gérée sa résolution. Cela en se plaçant dans une perspective qui insiste sur l’importance des relations de pouvoir et de la réaffirmation du conflit — qui est le rejet de la violence — pour trouver une sortie progressive à la crise du lien social. Alors, se placer dans cette perspective pour analyser ce processus prétend à son tour apporter de nouvelles clefs de lecture pour une plus large compréhension de processus similaires ou de crises politiques et sociales de différentes intensités. Ces nouvelles clefs de lecture peuvent par ailleurs contribuer à la gestion de crise en cours et éventuellement à visualiser de sorties progressives de ces situations.

Jusqu’au début du XXe siècle, il n’existait pas en Bolivie à proprement parler de corps enseignant professionnalisé.
A quel moment et sous l’effet de quels impératifs politiques et idéologiques surgirent les premiers efforts pour constituer, organiser et étatiser la profession ? A quels instituts d’enseignement donnèrent-ils lieu ? Avec quelles transformations ultérieures ? Nous réfléchirons ainsi aux prémisses de la formation supérieure d’enseignement, aux évolutions de l’institution, à la multiplication des écoles normales qui compartimentèrent très vite les normaliens initialement conçus comme un corps unitaire homogène. Nous étudierons les espoirs portés par ces « apôtres laïcs » du régime libéral et les transformations ultérieures de la formation et de la profession.

Cet article analyse les signes précurseurs du coup d’état du 4 novembre 1964 en Bolivie afin de mettre en lumière les contradictions qui sous-tendaient le renversement et la restauration de hiérarchies sociales en Amérique Latine au XXéme siècle.

Le développement des énergies renouvelables (ENR), auquel participent des acteurs traditionnels de l'énergie, entraîne des bifurcations. Les matrices se diversifient, consolidant l’offre par une production alternative et le renforcement des réseaux. De nouveaux territoires énergétiques émergent fournissant un service dans des sites isolés et supportant des processus extractifs. Les ENR favorisent aussi l’inclusion et/ou de réappropriation citoyenne des trajectoires des territoires.

Résumé :
Cet article rapporte les résultats d'une étude terrain, réunissant les témoignages de professionnels de l'adoption (nationale et internationale) qui sont concernés par la situation d'enfants abandonnés et placés dans cinq pays d'Amérique du Sud (Colombie, Pérou, Chili, Bolivie et Argentine).Objectif : L'objectif de cette étude visait/vise à permettre une meilleure compréhension des nouvelles réalités de l'adoption, dans un contexte où ces pays, comme d'autres à travers le monde, ont choisi de limiter ou d'arrêter leurs pratiques d'adoption vers l'étranger. Plusieurs transformations sont à l'oeuvre au niveau des lois et pratiques, avec comme enjeu l'encouragement des familles à adopter ces enfants localement — permettant une meilleure protection de leur identité culturelle et un renversement de la tendance aux adoptions massives vers l'étranger des années précédentes. Nous avons souhaité tracer un portrait de ces transformations et de leurs effets du point de vue de ces pays et de leurs acteurs.Méthodologie : Nous avons réalisé 33 entrevues semistructurées avec des acteurs-clé du milieu professionnel de l'adoption et de la protection entre 2014 et 2017, recueillies lors de missions de terrain dans ces cinq pays. Pour analyser ce matériel, nous avons eu recours à une approche de théorisation enracinée afin de refléter la réflexion dans l'action de ces participants. Nous les avons questionnés sur les demandes de leur travail, les changements observés dans les années récentes, leurs collaborations dans le champ de l'adoption, et les enjeux qu’ils dégageaient d'un point de vue pratique : qu’est-ce qui facilite et limite le développement des systèmes de protection et surtout, d'adoption locale, dans leur milieu ?
Résultats : Les thèmes principaux issus de nos analyses ont permis d'identifier plusieurs enjeux et préoccupations, principalement : 1) une confrontation à plusieurs obstacles sur le terrain dans la mise en oeuvre de nouvelles normes de protection de l'enfant, et des problèmes de longue-date qui retardent ou bloquent les procédures d'adoption d'enfants dans le besoin ; 2) la nécessaire révision et consolidation par les acteurs de leur collaboration dans leur champ respectif afin de mieux standardiser leur réponse en meilleure concordance avec les principes de la Convention de la Haye de 1993 ; 3) l'augmentation rapide de problèmes sociaux sévères affectant les familles, puis leurs enfants : amplifiés par la migration, l'urbanisation massive, la perte de réseaux de soutien social et une pauvreté endémique — qui se traduit par des phénomènes tels que l'alcoolisme, l'abus de substances, la violence conjugale et familiale ; les mauvais traitements et la négligence sévère — devenant les causes principales
de placement ; 4) la faible accessibilité des services psychosociaux compétents et préventifs, et leur concentration dans les secteurs caritatifs ou privés (religieux), plutôt qu’assumés par les agences gouvernementales, couplée au manque de politiques préventives pour les familles et les mères célibataires ; 5) une grande division observée entre les secteurs associés aux systèmes de protection de l'enfance : l'adoption et la protection, l'administratif et le judiciaire — affectant la qualité et la diligence des solutions mises en place pour les enfants ;6) un manque flagrant d'investissements publics envers l'enfance et la priorisation des droits des enfants au-delà des principes abordés : ce qui impacte négativement l'application adéquate des nouvelles lois et politiques en matière de prise en charge alternative et d'adoption, malgré leur reflet des recommandations émises par la Conférence de la Haye de droit international privé et le Comité des droits de l'enfant.

Parmi les nombreux problèmes publics d'ordre « fondationnel » inscrits à l'agenda des gouvernants boliviens depuis le tournant du siècle, la question de l'organisation territoriale de l'Etat occupe une place particulière. Elle condense en effet toute une série d'enjeux touchant aux thématiques constituantes qui structurent le débat national : gestion des ressources naturelles, autonomie des communautés indigènes et paysannes « originaires », approfondissement des mécanismes de représentation et de participation démocratiques, voire modalités de rupture vis-à-vis du modèle de développement néolibéral adopté depuis 1985. La redistribution territoriale du pouvoir a ainsi été placée au coeur du processus de recomposition de l'ordre politique national qui a culminé avec l'adoption, par référendum, d'une nouvelle Constitution le 25 janvier 2009.

Dans la mesure où les élections régionales et locales du 4 avril dernier ont marqué l'entrée en vigueur de ce nouveau régime d'autonomie, il est justifié de suivre l'analyse du politiste Fernando Mayorga qui considère que ces élections ont « clôturé le processus de transition vers une nouvelle architecture territoriale de l'Etat ».

Le 3 janvier 2007, le consortium Aguas del Illimani SA (AISA), majoritairement détenu par le groupe Suez- Lyonnaise des Eaux, signait avec le Ministère de l’Eau bolivien et l’organe de régulation du secteur un « accord-cadre de terminaison de disputes », marquant officiellement le retrait de l’opérateur de la concession de La Paz-El Alto et le transfert du service auprès d’une Entreprise « Publico-Sociale » d’Eau et d’Assainissement (EPSAS).

Entrée en vigueur au 1er août 1997, la concession avait pourtant été promue à l’échelle internationale comme un modèle de participation privée favorable aux pauvres (Komives, 1999; Foster, 2002). Selon les chiffres publiés par le régulateur (la Surintendance de l’Assainissement de Base – SISAB), le taux de desserte en eau potable serait passé entre 1997 et 2006 de 84 à 100% à La Paz et de 71 à 99% à El Alto, tandis que la couverture en assainissement aurait grimpé de 66 à 93% à La Paz et de 30 à 63% à El Alto, produit d’un effort d’investissement de plus de 67 millions de dollars (Oporto, 2007). En matière de gestion, avec 1,7 employé pour 1000 connexions d’eau potable en 2005, AISA affichait la productivité la plus élevée du pays. Sur le plan tarifaire, en dépit d’une augmentation des facturations de près de 20% entre 1996 et 2005 (1), les tarifs domestiques offerts par AISA restaient les plus bas parmi les dix principaux opérateurs du pays (2). À ces performances s’ajoute l’absence d’un choc exogène comparable à celui de la crise de change argentine. Comment, dans ces conditions, rendre compte d’un départ forcé intervenu au terme d’intenses mobilisations populaires? Souvent mobilisé de manière quelque peu mécanique, le « basculement à gauche » de la Bolivie, incarné par l’arrivée d’Evo Morales au pouvoir en décembre 2005, suffit-il à expliquer ce retournement? Un retour sur les événements qui ont conduit à la rupture permettra d’apporter des réponses à ces questions.

Les instruments et la démarche puisés dans la « boîte à outils » proposée par Michel Foucault, permettent de réaliser une première étude politique et historique de la constitution de savoirs relatifs à la corruption en Bolivie entre 1982 et 1999. Qui plus est, en s’interrogeant sur les liens entre la discontinuité des connaissances à propos de ce phénomène ainsi que sur les différentes stratégies déployées pour le combattre, une généalogie de la corruption dévoile les profondes transformations de la politique et du politique que ce pays a connues en à peine deux décennies.