La Resolution Politique de La Crise Malienne de 2012 Par La Communaute Economique Des Etats de Lafrique de Louest (Cedeao)
La Resolution Politique de La Crise Malienne de 2012 Par La Communaute Economique Des Etats de Lafrique de Louest (Cedeao)
La Resolution Politique de La Crise Malienne de 2012 Par La Communaute Economique Des Etats de Lafrique de Louest (Cedeao)
12(09), 395-403
Article DOI:10.21474/IJAR01/19468
DOI URL: http://dx.doi.org/10.21474/IJAR01/19468
RESEARCH ARTICLE
LA RESOLUTION POLITIQUE DE LA CRISE MALIENNE DE 2012 PAR LA COMMUNAUTE ECONOMIQUE DES
ETATS DE L’AFRIQUE DE L’OUEST (CEDEAO)
Créée au départ dans le but de favoriser l‟intégration économique de ses Etats membres, la CEDEAO s‟est
rapidement penchée sur la question sécuritaire avec le protocole additionnel relatif au mécanisme de prévention, de
gestion et de règlement des conflits, de maintien de la paix et de la sécurité. Selon J. Bercovitch, (1996, p.82)
Les parties à tout différend dont la prolongation est susceptible de menacer le maintien de la paix et de la sécurité
internationales se trouvent ainsi dans l‟obligation de rechercher la solution, avant tout, par voie de négociation,
d‟enquête, de médiation, de conciliation, d‟arbitrage, de règlement judiciaire, de recours aux organismes ou accords
régionaux, ou par d‟autres moyens pacifiques de leur choix.
Du début de la guerre civile au Libéria en 1989 à la crise malienne en 2012, plusieurs médiations se sont succédées
en vue de préserver la paix dans la sous-région ouest-africaine. S‟il est vrai que la plupart des médiations de la
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Corresponding Author:-Dr. Essossinam Adjeta
Address:-Université de Kara (Togo).
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CEDEAO ont souvent abouti à des résultats plus ou moins encourageants, il n‟en demeure pas moins que la
communauté internationale s‟interroge encore sur l‟efficacité de celle qu‟elle a menée dans la crise malienne,
notamment après l‟intervention militaire française du 17 janvier 2013, dénommée opération « serval ».
Au lendemain de l‟attaque des rebelles touaregs au nord du Mali, la CEDEAO a annoncé une possible mission au
Mali, en vue de promouvoir le dialogue entre le gouvernement et les rebelles combattant dans le nord du pays. Elle a
aussi appelé les rebelles à déposer les armes et a déclaré qu‟elle prendrait « toutes les mesures nécessaires » pour
soutenir les autorités de Bamako, selon un communiqué publié par la présidence de la Commission de la CEDEAO,
(K. D. Ouédraogo : 2012 voaafrique.com/a/mali).
Mais après plusieurs missions et médiations, notamment celles de M. Bictogo, venu à Bamako avec l‟ancien
ministre burkinabè des Affaires étrangères Djibril Bassolé, puis de l‟ex-président burkinabè Blaise Campaoré, la
crise n‟a pas trouvé de dénouement. Quels sont les facteurs qui justifient l‟échec des médiations de la CEDEAO au
Mali pour que l'on assiste à l‟intervention militaire « serval » de l‟armée française ?
Méthodologie de Recherche:-
La méthodologie de recherche, dans le cadre de cet article, a été essentiellement basée sur la recherche
documentaire. Elle a consisté en la mobilisation des informations relatives au maintien de la paix de la CEDEAO. Il
s‟agit, en dehors des travaux de recherche, des rapports sur la médiation en général et sur celles de la CEDEAO en
particulier à travers les crises qui ont secoué et qui continuent de secouer l‟espace ouest-africain. Nous avons cité
entre autres des communiqués finaux et des rapports des conférences des chefs d‟Etats et de gouvernements de la
CEDEAO touchant aux conflits de la zone. D‟autres ouvrages, études, rapports ont permis de mieux spécifier le
thème de recherche afin de cerner l‟ensemble des notions auxquelles il se rapporte.
1
Léopold Sédar Senghor, Mamadou Dia, Modibo Keita et d'autres dirigeants avaient eu l'idée de reprendre
l'ensemble constitué par l'administration coloniale, l'Afrique Occidentale Française (AOF), en le portant vers
l'indépendance sous la forme d'une fédération.
2
Cf. La loi-cadre Defferre du 23 juin 1956.
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arrière-plan, l‟engagement du Mali aux côtés des partisans algériens, lors de leur guerre de libération nationale
(guerre d‟indépendance) de 1954 à 1962.
Selon A. Bourgeot (2000), si les communautés touaregs ont toujours vécu selon leurs propres règles et construit leur
identité culturelle, elles furent cependant, parfois, instrumentalisées. A cela s‟ajoutera, plus tard, après les
découvertes de richesses minières et d‟énergies fossiles, la tentation de faire du Sahara un espace « autonome » sous
l‟administration française, avec l‟organisation commune des régions sahariennes (J-M., De Lattre, 1957 p.345-389)
à la fin des années 1950. L‟un des arguments politiques avancés pour cette entreprise économique, à savoir «
l‟homogénéité ethnique » des populations indigènes, fera florès, comme le rappelle A. Bourgeot et A. Houston
(2000, p.179):
Une barrière ethnico-politique pouvait se dresser en jouant sur une série d‟oppositions classiques telles que nomades
et sédentaires, Touaregs/Arabes, Touaregs/populations noires et bien sûr Blancs/Noirs. À l'évidence, cette
conception ethnico-territoriale, voire cette « arme ethnique » utilisée par les services français, ne pouvait
qu‟exacerber les relations inter-ethniques déjà tendues [...].
Le projet sera vite abandonné face à la volonté des Etats, en cours de constitution, de préserver leur intégrité
territoriale comme leur potentiel économique. L‟héritage de l‟essentialisation d‟une identité touarègue « blanche » et
non-arabe, associée aux convoitises d‟un espace saharien prometteur en ressources naturelles, ne sera pas sans
effets, à tort ou à raison, à l‟intérieur, dans les cœurs et les esprits des acteurs de la crise malienne et, à l‟extérieur,
sur les représentations qui en sont proposées. Il faut également rappeler que ces populations n‟ont pas été mobilisées
lors des deux guerres mondiales, creuset commun des consciences politiques qui s‟exprimeront lors des luttes pour
la décolonisation, au nord comme au sud de l‟espace saharien, au Maghreb comme en Afrique sub-saharienne.
En conséquence, ces communautés, déjà marginalisées avec d‟autres, par le découpage des frontières, auront peu ou
non de représentants habiles pour défendre des intérêts structurés dans le jeu politique des Etats nouvellement
constitués. Cet héritage colonial a causé, par extension, des confrontations entre l‟Etat et le peuple malien, en
particulier les Touaregs, après l'indépendance. Il s‟en suivra des problèmes politico-socio-économiques.
Aussi, les difficiles conditions de vie au nord ont créé, chez les peuples de la région, le sentiment d'être abandonnés
par d‟autres maliens, développant chez eux un communautarisme devenu belliqueux vis-à-vis des autres
composantes de la société malienne. Suite à la mauvaise organisation du pouvoir de l‟Etat et à la mauvaise
gouvernance, dix ans plus tard, le conflit ressurgit avec, cette fois, de nouvelles organisations Touaregs menées par
des anciens chefs intégrés dans l‟armée ayant fait défection.
A côté de ces premières origines politiques, figure aussi l‟effondrement de l‟élite malienne, qui constitue un point
moins négligeable mais important. Par effondrement, nous entendons ici l‟ensemble des facteurs ayant conduit au
discrédit d‟une grande partie de l‟élite politique et administrative malienne auprès de sa population et,
singulièrement, les déchirements au sein de ces groupes dans leur compétition pour le pouvoir, même au plus fort de
la crise malienne. Comment comprendre cet effondrement général au sein de l‟élite malienne qui constitue l‟une des
origines lointaines de ladite crise ? L‟explication est à rechercher du côté du système éducatif malien. Après les
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indépendances, le choix qui a été fait au Mali était de démanteler l‟héritage colonial et de favoriser l'éducation de
base pour tous. De ce fait, même s‟il y avait des écoles supérieures dans le pays, ce n‟est qu‟en 1993 que
l‟université de Bamako sera créée. Selon un rapport de 2006 de la banque mondiale, seuls 26% des adultes maliens
étaient effectivement alphabétisés en 2004 et « le taux brut de scolarisation dans l'enseignement secondaire [...] est
de 17,1%. » pour la même période. Selon J. Simeant (2012), la raison supplémentaire pour expliquer l‟état et
l‟effondrement de l'élite malienne réside dans la difficulté, pour les plus brillants, à obtenir un visa pour aller se
former à l‟étranger :
La situation de l‟enseignement est catastrophique et cette situation est aggravée par la difficulté d‟aller étudier à
l'étranger, en particulier en France. Donc les jeunes ne sont pas bien formés et les anciens qui ont entre 50 et 60 ans
sont parfois atterrés par le niveau de leurs cadets. (J. Simeant, id., p.35).
Il n‟en demeure pas moins vrai, qu‟en dernier ressort, les origines immédiates de la crise malienne sont à rechercher
dans le printemps arabe qui a commencé en Tunisie puis la chute du guide libyen, le colonel Mouammar Kaddhafi)
et le coup d‟État du 22 mars 2012.
L‟ouverture d‟un front d‟instabilité au Maghreb, particulièrement en Libye, va encourager la criminalité et permettre
à des acteurs non étatiques locaux de renforcer leurs capacités et leurs connexions : trafiquants locaux, contrebande,
milices, crimes organisés et mise en place de la galaxie terroriste arabo-africaine. Les armes se sont déplacées et,
avec elles, les hommes, ce qui a mis en évidence les enjeux stratégiques et une extension du domaine d‟insécurité
des rives de la méditerranée à celles du Golfe de guinée. C‟est ainsi que le Sahel s‟est transformé en zone
« afghanisée »3, tant l'ambition militaro-idéologique était de mener à l‟effondrement de l‟État malien et de créer une
nouvelle géopolitique.
Quoi qu‟il en soit, c‟est bien à la suite de l‟intervention militaire de l‟Organisation du Traité de l‟Atlantique Nord
(OTAN) de 2011 en Libye, qu‟un potentiel militaire touareg de poids va se déplacer au nord Mali avant
l‟embrasement de la région. Si l‟on tient compte de la séquence des événements ayant mené à la crise malienne, il
est difficile de faire du printemps arabe la seule cause immédiate, car il faut tenir compte du coup d‟État du 22 mars
2012.
Dans une interview accordée au quotidien ouagalais, le président du Burkina Faso dit avoir accueilli cette désignation
« avec émotion » : « Je vais à cette mission avec beaucoup de réconfort car je sens que le peuple malien aujourd‟hui
ne veut pas de cette aventure. (…) La région est entièrement mobilisée avec moi pour ce dossier…»4
L‟organisation ouest-africaine semble avoir privilégié l‟option diplomatique dans le règlement de la double crise
politique et militaire au Mali. « Le plus important aujourd‟hui, c‟est de commencer par le dialogue, de traiter cette
question sur des bases civilisées. Ce n‟est pas le premier choix des chefs d‟État. Il s‟agit d‟abord pour nous de
3
En comparaison de la guerre en Afghanistan
4
Interview donné par le médiateur au journal le “faso” n° 27 du 30 mars 2012
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discuter »5, explique encore Blaise Compaoré qui, par ailleurs, a souligné, par anticipation, les difficultés qui pavent
le chemin de la médiation : « Je crois que ce ne sera pas si simple »6.
Tout en analysant la médiation de la CEDEAO au Mali, l‟étude relève quelques causes de l‟échec de celle-ci.
Mais lorsqu‟on sait que, parmi les organisateurs de ces manifestations, figurent la Coordination des Organisations
Patriotiques du Mali (COPAM) et le Mouvement Patriotique du 22 mars (MP 22), deux organisations pro-
putschistes, il est clair qu‟il ne s‟agit là que d‟une politique de reconquête du pouvoir par le capitaine Sanogo. Par
ailleurs, il convient de souligner que Sanogo n‟a jamais voulu d‟une force étrangère et, moins encore, de la force en
attente de la CEDEAO sur le territoire malien afin que le Mali recouvre son intégrité territoriale. Car il voyait, par la
présence de ces forces, une menace à ses velléités de reconquérir le pouvoir. Les trois régions du nord (Tombouctou,
Gao et Kidal) sont entre les mains des rebelles touaregs du MNLA, des terroristes du groupe Ansar-dine et Al-
Qu‟aida au Maghreb Islamique (AQMI). Ainsi, le pays est divisé en deux et l‟État a perdu complètement le contrôle
de la partie nord de son territoire.
Dans un tel contexte, la situation politique délétère à Bamako qui, du reste, a fragilisé l‟État, a contribué à endurcir
les rebelles et les a rendus réfractaires à la renonciation à leurs revendications territoriales pour le MNLA et
religieuses pour Ansar Dine, le MUJAO et AQMI au cours des négociations menées par le médiateur. Ce fut un
obstacle majeur pour l‟aboutissement des pourparlers. Conscients donc de la situation politique chaotique à Bamako
et convaincus de leur supériorité militaire face à une armée loyaliste en déconfitures, les rebelles n‟ont eu d‟autres
choix que de faire monter les enchères créant ainsi des blocages à la médiation.
Alors même que les chefs d‟État, membres de la Communauté ouest-africaine, planchaient sur la mise en place du
dispositif final d‟intervention militaire pour libérer le nord-Mali, une autre situation s‟est créée : la désignation d‟un
nouveau médiateur sur le dossier du Mali pour remplacer le président burkinabé, Blaise Compaoré.
De plus en plus, de voix se sont élevées à Bamako pour contester le médiateur. Doit-on continuer à faire confiance
au Président Compaoré, désigné par ses pairs de la CEDEAO pour mener la médiation entre le gouvernement de
Bamako et les groupes terroristes et autres islamistes du Mali ? S‟interrogeait-t-on déjà depuis le mois d‟août 2012.
Depuis lors, les suspicions et les doutes se sont accumulés sur la neutralité de la médiation conduite par le président
burkinabé Blaise Compaoré.
L‟arrivée à Bamako, le 19 octobre 2012, du Président nigérian Goodluck Jonathan, en marge des travaux du comité
de suivi de la résolution de la crise malienne, a, sans doute, relancé la question. Dans un éditorial du journal « 22
septembre » paru le 22 octobre 2012, son directeur de publication Chahan Takiou pouvait écrire ceci :
5
idem
6
idem
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Blaise Compaoré n‟ayant pas bonne presse à Bamako, en raison de sa proximité et, surtout de sa complaisance
envers le mouvement indépendantiste qui parle aujourd‟hui d‟autodétermination, Goodluck pourrait bien le
remplacer dans la médiation pour calmer les esprits surchauffés çà et là.
Si le Président burkinabè a bénéficié du soutien de la communauté internationale qui lui a confié plusieurs missions
de bons offices sur les crises dans les pays de la sous-région ouest africaine, il est, cette fois-ci, fortement décrié du
fait des relations qu‟il entretient avec le mouvement séparatiste MNLA de M. Ag Chérif, un des groupes armés
sévissant dans le nord malien. Sa proximité avec certains réseaux rebelles ou terroristes et, surtout sa complaisance
envers le mouvement indépendantiste MNLA qui parle d‟autodétermination, ne constituent point une garantie pour
une gestion très propre de la crise malienne, estime-t-on à Bamako. Le Mali marquera-t-il la fin d‟une série de
médiations réussies par le Président burkinabé ?
Certes, à l‟actif du Président Blaise Compaoré, on peut retenir les accords inter-togolais, les accords inter-ivoiriens.
Blaise Compaoré s‟est aussi impliqué dans le dossier guinéen consécutif au coup d‟Etat du capitaine Dadis Camara
ainsi qu‟en Guinée Bissau. Mais il y a aussi le revers de la médaille : le Président burkinabé Blaise Compaoré est
assez souvent accusé de collusion avec les mouvements armés pour déstabiliser les pays de la sous-région avant
d‟offrir sa médiation. En mai 2000, un rapport d‟enquête des Nations Unies met en cause le Burkina Faso et certaines
personnalités proches de la présidence dans le trafic de diamant et de matériels militaires avec les rebelles angolais
de l‟ancien UNITA (Mangin R., 2001).
Un autre rapport va, par la suite, accuser Blaise Compaoré d‟être la principale source d‟approvisionnement en armes
des rebelles du RUF, en Sierra Leone, en relation avec Charles Taylor. En septembre 2002, Blaise Compaoré est
encore présenté comme le principal parrain de la rébellion ivoirienne. Malgré ses protestations et ses démentis
officiels, un autre rapport de 2009 des Nations Unies va confirmer que du matériel militaire destiné à la rébellion
ivoirienne a effectivement transité par le Burkina Faso. L‟ancien Président ivoirien, Laurent Gbagbo, a toujours
pointé du doigt l‟ex président burkinabé Blaise Compaoré comme le parrain de la rébellion qui tentait de le
renverser, à partir du nord de la Côte d‟Ivoire (Kongo times 2014).
Sur le plan intérieur, le président Blaise Compaoré tenait à se donner une image de démocrate, mais cette image a été
écornée avec l‟assassinat, le 13 décembre 2005 du journaliste Norbert Zongo et de Thomas Sankara son
prédécesseur.
Certes, le MNLA revendique l‟autonomie, voire l‟indépendance de l‟Azawad alors que les autres mouvements
d‟obédience religieuse, Ansar dine et MUJAO, n‟ont pour objectif que de créer un autre État islamique avec
l‟application stricte de la charia.
Au-delà de ces revendications, que l‟on peut qualifier de revendication de façade, le Médiateur devrait remonter la
pente de l‟histoire afin de découvrir les intérêts fondamentaux, réels et objectifs des parties en conflit pour créer de
la valeur en se servant des différences. Aussi l‟histoire nous renseigne-t-elle que l‟insurrection du 17 janvier 2012,
avec l‟attaque des camps militaires maliens dans le nord du pays, s‟inscrit dans une série de conflits généralement
appelés "conflits touareg".
Bien que le MNLA démente tout caractère ethnique de ces conflits, il y est fait le constat que c‟est la partie nord du
Mali, majoritairement peuplée de touareg, qui se retrouve en marge du développement du pays ; le sud étant une
zone de concentration d‟activités de développement tandis que le nord est demeuré économiquement pauvre. A titre
d‟exemples, les insurrections touarègues de 1916-1917, appelées la révolte de Kaocen au Niger et la rébellion
touaregs de 1962-1963 au Mali, généralement appelée "première rébellion touareg", fut très durement réprimée par
l'armée malienne. Il convient de rappeler aussi la rébellion touarègue de 1990-1995 au Mali et au Niger. Celle-ci
débuta en 1990, deux ans après la création du Mouvement Populaire de Libération de l'Azawad. Au Mali, une
première période de conflit (octobre-décembre 1990) aboutit à la signature des Accords de Tamanrasset en 1991 et
du Pacte national en 1992, mais qui ne marqua pas la fin définitive des hostilités. Des conflits réapparurent en 1994-
1995 et la paix fut finalement scellée le 27 mars 1996, à Tombouctou lors de la cérémonie de la flamme de la paix,
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durant laquelle les rebelles touareg brûlèrent 3 000 armes utilisées durant la rébellion. De même, le soulèvement
touareg du 23 mai 2006 au Mali a abouti aux accords d'Alger signés le 4 juillet 2006. Ces différents accords avaient
mis en relief la pauvreté endémique qui sévit dans la partie nord du Mali et avaient plaidé pour une attention plus
accentuée de la part du gouvernement central pour son développement.
Aussi la médiation devrait-elle prioriser et faire ressortir la situation économique des régions du nord Mali pour créer
de la valeur et rendre son discours empathique. Mais, les troubles politiques à Bamako ont semblé prendre le pas sur
la question du nord et relégué dans la subsidiarité la question du développement de cette région en vidant le discours
de son aspect économique.
Ils se sont entendus sur plusieurs principes majeurs notamment : le „„respect de l‟unité nationale et de l‟intégrité
territoriale du Mali‟‟, le „„rejet de toute forme d'extrémisme et de terrorisme‟‟ et le „„respect des droits de l‟Homme,
de la dignité humaine, des libertés fondamentales et religieuses‟‟. Mais le sujet très sensible de la charia (loi
islamique), qu‟Ansar dine applique de façon très stricte, n‟avait pas été évoqué explicitement dans la déclaration
finale. Elle indique seulement que les envoyés de Bamako ont réitéré que „„la laïcité est un préalable à l‟ouverture
du dialogue‟‟ (Agence France Presse, 2012).
Or, si Ansar Dine a fortement évolué récemment, en prenant ses distances avec les groupes "terroristes" et en
annonçant renoncer à imposer la charia dans tout le Mali, il a exigé tout de même de pouvoir le faire appliquer dans
les zones sous son contrôle. Quant au MNLA, il a cessé officiellement de réclamer l‟indépendance pour ne plus
plaider pour le droit à "l'autodétermination". Mais la question semble diviser le mouvement. L'autodétermination est
quelque chose qui sera discuté autour de la table de négociations, a expliqué le chef des émissaires du MNLA,
Mahamadou Djeri Maiga, après la rencontre. Son porte parole, Mohamed Ag Assarid, a aussitôt rectifié en estimant
que "la question de l'indépendance et de l'intégrité territoriale" devra être sur la table. Il est opportun de rappeler que
l‟arrivée du capitaine Sanogo et de ses complices au pouvoir a compliqué davantage la tâche du médiateur de la
CEDEAO, en l'occurrence, le Président Blaise Compaoré qui devrait agir simultanément sur deux fronts :
- à Bamako, pour la stabilisation et la consolidation des institutions de la transition,
- et, en ce qui concerne les rébellions touaregs et islamistes, la sauvegarde de l'intégrité territoriale.
Dans le même temps, Alassane Ouattara, chef de l'État ivoirien et président en exercice de la CEDEAO, a appelé,
depuis Paris, à déployer dans les meilleurs délais, une force africaine pour chasser les islamistes armés qui dominent
le nord du Mali, depuis juin 2012. « Il faut bien sûr le dialogue politique mais une intervention militaire me paraît
indispensable et dans les meilleurs délais », a-t-il lancé à l'issue d'un entretien avec le président français François
Hollande7.
Tandis que l‟ancien chef de l'Etat béninois, Thomas Boni Yayi, l‟ex Président en exercice de l'Union africaine, et le
Président tchadien, Idriss Deby, ont lancé un appel à l‟ONU pour qu'elle autorise "d‟urgence" le déploiement de ses
forces, le Secrétaire Général des Nations Unies, Ban Ki-Moon, quant à lui attirait l‟attention de la communauté
internationale des risques humanitaires et politiques d'une intervention militaire. Dans son rapport déposé fin
novembre 2012, Ban Ki-Moon avertit qu‟un recours à la force risquerait de mettre en péril toute chance d‟une
solution politique négociée (Le Monde, 2012). A l‟instar du Secrétaire Général des Nations Unies, le représentant
mandaté de la CEDEAO qui a fini par personnaliser la médiation plaidait pour une solution négociée alors que les
populations du nord-Mali se faisaient couper les mains et les jambes et se faisaient fouetter en vertu de la loi
islamique (charia). Il convient alors de s‟interroger sur la sincérité de la communauté internationale dans la
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www.jeuneafrique.com
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résolution de cette crise ; car, malgré les discours d‟alerte des Nations Unies et de la CEDEAO sur le mode de
résolution de la crise, force est de constater le manque d‟initiative de médiation efficace et efficiente sur le terrain.
L‟Union Européenne (UE) a souhaité, de son côté, „„un cadre crédible pour des négociations nord-sud‟‟ en vue
d‟une solution durable au mali. L‟UE a donné son accord de principe pour dépêcher au Mali une mission de 250
formateurs chargés d'entrainer quatre bataillons de 650 soldats maliens, en vue d‟une intervention dans le nord.
(Fiche d‟information, L‟Union européenne et le Sahel, 2013, p.4). Aussi, la réponse internationale au conflit malien,
de par sa nature multiforme, ne pouvait que donner les espoirs d‟une bataille gagnée au bout du fusil chez des
rebelles surarmés qui n‟hésiteraient pas à faire monter davantage les enchères pour saper la médiation.
Selon Zartman I. W. (1990), lorsque le rapport de force est symétrique entre les protagonistes présentant les
potentialités de pouvoir quasi identiques, la médiation se fraye facilement un chemin pour solutionner les
divergences les opposant. Mais l‟équation est d‟autant plus difficile quand l‟un des protagonistes bénéficie d‟un
avantage certain sur l‟autre.
S‟agissant du conflit malien, il y a lieu de rappeler que les rebelles touaregs maliens, recrutés pour servir dans
l‟armée de Kadhafi, après les échecs consécutifs qu‟ils ont subis de la part de l‟armée malienne dans le passé, sont
revenus avec un arsenal de guerre impressionnant suite à la mort du Président libyen. Leur supériorité militaire était
évidente face à une armée nationale mal équipée et peu motivée et, n‟eût été l‟intervention française du 16 janvier
2013, il était fort probable que Bamako fut déjà tombé dans les mains des rebelles. Qui finance ces rebelles qui
disposent d‟une logistique militaire de dernière génération pour faire reculer une armée nationale ?
Par ailleurs, on ne saurait passer sous silence la solidarité transnationale islamique dont jouissent les rebelles de la part
de certains Etats du Golfe et des « fous de Dieu » musulmans pour qui, mourir dans une guerre du Jihad leur ferait
gagner le paradis de Dieu. Egalement, l‟arrivée au pouvoir en Egypte et en Tunisie de dirigeants islamistes est un
atout supplémentaire pour leurs mouvements. Notons que l‟Egypte a condamné l‟intervention militaire française
dans le nord Mali.
Les tergiversations de l‟Algérie et de la Mauritanie qui ont toujours opté pour les négociations, dans la résolution de
la crise malienne, n‟ont pas été de nature à amener les rebelles à accepter des concessions proposées par la médiation.
Conclusion:-
La crise malienne a soulevé plusieurs questions qui relèvent de la criminalisation de l‟État et de son incapacité à
contrôler les différents flux à ses frontières. En ayant sous-estimé le mécontentement de sa population et la
déconfiture de l‟armée, le Président Amani Toumani Touré a mal apprécié la menace. Il pensait pouvoir sortir de
l‟imbroglio dans lequel le pays était plongé, mais la rébellion, le coup d‟État et l‟occupation du nord-Mali, ont
discrédité son action à la tête de l‟État et plongé le pays dans une ère d‟instabilité aux conséquences incalculables.
L‟équation est certes difficile, cependant, comme le dit un proverbe africain "il n‟y a pas deux personnes qui ne
s‟entendent pas, il y a deux personnes qui n'ont pas discuté". Toutefois, ce qui rend l‟équation encore plus difficile,
ce sont les incapacités financières et matérielles de l‟Organisation sous-régionale (CEDEAO) à faire face
correctement à ses engagements sur les théâtres de guerres afin d‟opposer aux mouvements rebelles, une force
dissuasive dans le meilleur des cas, ou une force offensive dans le pire des cas, pour rendre le rapport de force
acceptable et symétrique entre les belligérants ; ce qui aurait contraint les antagonismes à s‟asseoir à la table de
négociations pour une médiation laborieuse.
Au regard de ce qui précède, nous pouvons retenir que l‟échec de la CEDDEAO dans la résolution politique de la
crise malienne de 2012 s‟explique par plusieurs facteurs liés en partie au manque de souveraineté de cette
organisation sous-régionale vis-à-vis de l‟occident. Le manque de sincérité de la communauté internationale à
combattre efficacement le terrorisme au nord-Mali a laissé entrevoir le caractère impérialiste de la crise en raison de
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la convoitise du sous-sol malien qui regorge d‟immenses ressources naturelles. L‟actualité politique mouvementée
de la sous-région par la propagation du terrorisme dans les autres pays du sahel (Niger, Burkina Faso et Tchad) et au
nord-Togo, les coups d‟Etat à répétition (Mali, Gunée, Burkina Faso, Niger) et le développement du sentiment
« anti-français » par les populations n‟est qu‟une conséquence de l‟échec de résolution de la crise malienne de 2012.
Références Bibliographiques:-
BERCOVITCH Jacob, 1996, Résolution des conflits Internationaux : théorie et pratique de la Médiation, Boulder and
London : Lynne Rienner Publishers.
BERCOVITCH Jacob, et HOUSTON Allison, 2000, Pourquoi le font-ils de cette manière ? Analyse sur les facteurs
influençant la conduite des médiations dans les conflits internationaux, le journal de la résolution des conflits, Vol.
44, No. 2, p. 170-202.
BOURGEOT André, 1989, Le lion et la gazelle : États et touaregs. Politique Africaine no. 34, Karthala, Paris. Etats
et Sociétés Nomades, p. 19-29.
BOURGEOT André, 2000, Sahara : espace géostratégique et enjeux politiques (Niger), Afrique noire et monde
arabe, Les Editions de l'Aube (Institut de Recherche pour le Développement).
GAGNEPAIN Jean, 1994, Leçons d'introduction à la théorie de la médiation, Louvain, Peeters. Une édition
numérique revue et corrigée est disponible en téléchargement, sous un nouveau titre, sur le site de l'Institut Jean
Gagnepain : Huit leçons d‟introduction à la théorie de la médiation (Cette édition numérique est désormais l'édition
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