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Les Cahiers de La Fonderie L’Urbaniste L’Urbaniste Émergence d’une figure, discours d’une élite Geoffrey Grulois Au sortir de la Première Guerre mondiale, Bruxelles voit la constitution d’un cercle intellectuel engagé dans la définition d’une nouvelle élite : l’“urbaniste”. Motivés par leurs convictions sociales et politiques, les membres de la Société des Urbanistes belges (SUB) vont concevoir l’“urbanisme” comme une discipline qui investit de nouveaux horizons professionnels. Cet article cherche à identifier les discours et les outils disciplinaires qui seront mobilisés par cette élite pour tenter de guider le processus d’institutionnalisation de l’urbanisme. Il cherche à comprendre les raisons qui vont contribuer à transformer la figure élitaire de l’architecteurbaniste en relation avec le cadre institutionnel de Bruxelles. 1 Sauf mention contraire, les extraits cités sont tirés d’articles parus dans La Cité. 2 3 “Ce que sera La Cité”, 1919/1,p. 3. Manifeste de la SBU par Bodson F., De Bruyne H., De Ridder A., De Ligne J., Hoste H., Thirion C., Patris Ch., Van Averbeke, Van der Swaelmen L., Van de Voorde O. et Verwilghen R., 1919/3, p. 37-40. 4 “La section belge…”, 1919/4-5, p. 61. La Cité et la SUB1 En Juillet 1919, l’architecte Fernand Bodson, l’architecte-paysagiste Louis Van der Swaelmen et l’ingénieur-architecte Raphaël Verwilghen lancent une revue pour répondre au problème de la reconstruction de la Belgique. Intitulée La Cité, cette revue entend affirmer le rôle et les principes de la nouvelle discipline de l’urbanisme. Certes, l’Art urbain se pratique en Belgique depuis le 19e siècle, mais, pour les rédacteurs de La Cité, l’urbanisme est un art civique qui définit un nouveau but commun : le mieux être démocratique de la société2. Le troisième numéro inaugure la formation de la SUB qui se veut à la fois un cercle d’étude et surtout un groupement militant. Elle entend défendre les compétences des urbanistes : capables d’idées générales, instruits de beaucoup de sciences et de techniques et doués de beaucoup de goût, d’intelligence, de bon ens et de sens pratique3. S’il est un homme de science et de technique, Bodson précise que l’urbaniste est avant tout un artiste qui répond au sens de la vie. Il est convaincu que tous ces archéologues et ces géomètres sont nuisibles, ignares et sans âme. Ils tentent de figer la vie de la rue et de la mécaniser4. Pour les membres de la SUB, ces techniciens du 19e siècle ont réduit la question de l’aménagement urbain à celle de “l’alignement”. Seuls des architectes cultivés à la discipline de l’urbanisme pourront recomposer “l’unité organique” de la cité. Former la conscience collective Premier numéro de La Cité lancée au sortir de la Première Guerre mondiale pour répondre au problème de la reconstruction de la Belgique. 88 Pour sortir du chaos et reconstruire cette unité organique, la cité doit prendre conscience de sa dimension collective. L’éducation des masses aux valeurs civiques constitue un objectif important auquel contribue L’Union des Villes et Communes belges. Cette union fondée par le sénateur Emile Vinck, avant la guerre, veut former des citoyens capables de discerner et défendre les vrais intérêts de la “Cité”, et décidés L’ Institut supérieur des Arts décoratifs, La Cambre, en 1928. Au centre de la photo devant la porte, Louis Van der Swaelmen, Huib Hoste, Oscar Jespers, Victor Bourgeois, Albert Van Huffel, Antoine Pompe, Henri van de Velde et Sander Pierron (Archive d’Architecture moderne). à exiger que les intérêts privés leurs soient subordonnés5. Pour les membres de la SUB, il ne fait aucun doute que quand ces foules auront pris conscience d’elles-mêmes elles confieront aux urbanistes le soin écrasant de veiller sur le berceau de leur enfance, de créer le cadre de leur évolution6. Afin de former l’élite des urbanistes, ces deux institutions vont collaborer à la mise en place d’un premier cours d’urbanisme et de municipalisme dès 19217. En 1927, la fondation de l’Institut supérieur des Arts décoratifs de l’État, La Cambre, institutionnalise la formation artistique des urbanistes en trois ans sous la direction de Louis Van der Swaelmen puis de Raphaël Verwilghen. La légitimité professionnelle et scientifique La SBU cherche à faire valoir sa légitimité professionnelle. Elle met en avant l’expérience internationale que ses membres ont acquis pendant la guerre. Dès les premiers numéros, les rédacteurs de La Cité retracent les activités institutionnelles auxquelles ils ont pris part pendant leur exil : le Belgium Town Planning Commitee à Londres, le Comité néerlando-belge d’Art civique (CNBAC) à Amsterdam et l’École supérieure d’Art public à Paris8. On souligne en particulier la réflexion disciplinaire et méthodologique initiée par le fondateur de la SUB : Louis Van der Swaelmen. 5 6 7 8 VINCK E., “L’Union des Villes et l’Exposition de la Reconstruction”, 1919/4-5, p. 58. BODSON F., op. cit., p. 61. “Cours d’urbanisme et de municipalisme”, 1921/4-5, p. 94-96. “Les urbanistes des pays amis soutiennent nos efforts”, 1919/1, p. 4-5. 89 Les Cahiers de La Fonderie L’Urbaniste Jean Eggericx et Raphaël Verwilghen (droite) en voyage d’étude avec les étudiants de l’Institut supérieur des arts décoratifs, vers 1930 (Université Catholique de Louvain, archive Verwilghen, album 12). 9 DE RIDDER A., “Louis Van der Swaelmen. Les Préliminaires d’Art civique et l’activité du CNBAC”, 1920/9, p. 176-184. 10 Ypres, essai sur sa formation et sa reconstruction, Lausanne - Paris, 1918, p. 44-45. 11 Idem, “L’Harmonie urbanistique”, 1920/7, p. 122. 12 Idem, “Développement des agglomérations urbaines”, 1920/1, p. 2. 13 VAN DER SWAELMEN L., Préliminaires d’Art civique mis en relation avec le cas clinique de la Belgique, 1916, p. 144-163. L’atelier de dessin de La Cambre, vers 1930. À l’avant plan, un étudiant s’exerce au dessin d’un plan d’urbanisme (Photo : Kessel W., Université Catholique de Louvain, archive Verwilghen). Cette dernière consacre ses Préliminaires d’Art civique : la première œuvre d’ensemble originale et en langue française parue sur l’urbanisme. À la différence des études de Camillo Sitte et Joseph Stübben, qui s’astreignent à des considérations esthétiques, l’œuvre de Van der Swaelmen applique les principes scientifiques de la biologie à l’urbanisme. Cette “sociobiologie” des cités permet de légitimer au point de vue de l’urbanisme la subordination de l’individu à des principes généraux et civiques9. La sociobiologie des cités trouve aussi une justification historique dans l’ouvrage que l’architecte Jean De Ligne publie sur Ypres à la fin de la guerre. Le récit de De Ligne met en avant l’évolution naturelle des formes urbaines en fonction des courants humains et du milieu naturel. Au cours de son histoire, l’âme de la cité doit évoluer librement dans son milieu et nous empêche d’en figer l’évolution10. C’est pourquoi les membres de la SUB dénoncent la reconstruction du vieux-neuf dans les régions dévastées. L’harmonie urbanistique ne peut exister que si l’architecture est l’expression de l’évolution sociale et économique d’une époque11. méthode les indications qui se dégagent de l’étude de ces différents courants extérieurs, pour organiser et créer des “touts urbains”12. Pour se faire, il doit disposer de toutes les informations qui concernent le milieu naturel et la vie sociale et économique de la cité. Le survey, hérité du town-planning anglais, apporte une légitimité scientifique au travail de l’urbaniste et l’ancre dans une conception déterministe du milieu. Dans ces Préliminaires, Van der Swaelmen propose une première adaptation du civic development survey applicable aux localités belges13. Mais jusque dans les années ’20, le manque d’information objective sur les régions dévastées va compromettre l’application de ces principes méthodologiques. Il faudra attendre les années ’50 pour que s’institutionnalise en Belgique la technique des surveys régionaux interdisciplinaires14. Aujourd’hui le survey constitue toujours le préalable méthodologique au diagnostic de l’urbaniste. Le plan régulateur, unité organique de la cité 14 PARENT E., Les Cahiers d’urbanisme, 1952/11. Le survey et la conception déterministe du milieu En étudiant le développement des agglomérations urbaines, l’urbaniste doit suivre avec 90 Lorsqu’il dispose de l’ensemble de ces données contextuelles méthodiquement organisées, l’urbaniste peut procéder au travail de synthèse qui est propre à sa discipline. Le plan régulateur est l’outil qui lui permet de concevoir l’unité organique de la cité. Ce plan est l’expression graphique d’une synthèse organique d’éléments fonctionnels dont l’étude fait l’objet de la science urbanistique15. Il prolonge la réflexion initiée pendant la guerre par Verwilghen sur le plan général d’aménagement. Il tient compte de tous les facteurs économiques, hygiéniques et sociaux qui exercent une influence sur la constitution d’une agglomération humaine et en déterminent la physionomie future16. Pour Verwilghen, seule une politique foncière ambitieuse, soutenue par le principe d’expropriation par zone, peut permettre aux communes de se réorganiser rationnellement suivant les principes du zonage fonctionnel. Ainsi, le plan d’urbanisation totale de la cité conditionne favorablement les modalités de son avenir et de son développement17. Il permet de subordonner les intérêts de la propriété privée à ceux de la collectivité. Mais la Société des Urbanistes belges sous-estime le conservatisme des élus locaux et des classes dominantes attachées aux valeurs ancestrales de la propriété individuelle. Le plan d’alignement restera l’outil utilisé par la majorité des communes jusqu’aux années cinquante et très peu de collectivités locales utiliseront le principe de la politique foncière comme un véritable outil de planification18. C’est donc uniquement dans le contexte restreint des cités-jardins que les urbanistes pourront mettre en application leurs principes idéologiques et méthodologiques au début des années ’20. 15 16 17 L’agglomération En 1924, la SUB s’élargit au cercle des architectes modernistes affiliés à la revue 7Arts pour former la Société belge des Urbanistes et Architectes modernistes (SBUAM). 18 Manifeste du SBU, p. 38.* VERWILGHEN R., “Une importante réforme… : l’arrêtéloi du 25 août 1915”, 1919/1, p. 17. VAN DER SWAELMEN L., “Les sections étrangères d’Urbanisme comparé”, 1919/4-5, p. 72. À Bruxelles, Anderlecht constitue une exception. Victor Bourgeois, à gauche, sur le chantier de la Cité Moderne à Berchem-Sainte-Agathe, vers 1922 (Archives d’Architecture Moderne). 91 Les Cahiers de La Fonderie L’Urbaniste Victor Bourgeois, de la ville marchande à la ville marchande - administrative - industrielle et internationale, paru dans “L’urbanisation du Grand-Bruxelles”, dans L’Émulation, année 52, n°6, p. 171. Schéma d’organisation de la Société belge des Urbanistes et Architectes modernistes, paru dans La Cité, 1924/7, p. 131. 19 DE LIGNE J., ”Le ‘Mécanisme urbain’ suite et fin”, dans L’Émulation, 1929/12, p. 103-104. 20 BOURGEOIS V., “L’urbanisation du Grand-Bruxelles” dans L’Émulation, année 52, n° 6, p. 169. 92 Si Van der Swaelmen reste en charge de la section d’urbanisme, les architectes modernistes Jean De Ligne et Victor Bourgeois vont contribuer à faire évoluer significativement les prises de positions par rapport à la ville. Dans l’après-guerre, l’unité organique de la cité s’identifie à la commune dont la structure idéalisée trouve ses racines dans les villes du Moyen Âge. À partir de la deuxième moitié des années ’20, les “grands courants” qui façonnent la ville sont désormais définis par les infrastructures industrielles et les moyens de transport modernes. Dès lors ce sont les villes industrielles qui deviennent les pivots les plus efficients du fonctionnement de la vie économique d’un pays dont les destinées et les aspirations seront liées à leur parfaite structure. La ville perd son caractère communal et s’élève à l’échelle nationale. Elle n’est plus une unité organique simple au contour clairement défini, elle est “par ses voies de communications multipliées et amplifiées, un des plus puissants axes de l’industrie”19. L’élite des urbanistes de la SBUAM tend alors à recentrer ses préoccupations sur le problème du “Grand-Bruxelles” et du corridor industriel national qui s’étend d’Anvers à Charleroi. Si De Ligne contribue à naturaliser la ville industrielle, c’est l’architecte moderniste Victor Bourgeois qui étudie la question de l’urbanisation du Grand-Bruxelles. Son Plan du Grand-Bruxelles utilise le principe radical de séparation des fonctions et des circulations prescrit par les Congrès internationaux d’Architecture moderne (CIAM). En marge de son plan, Bourgeois engage une réflexion pragmatique sur le rôle de l’urbaniste dans l’agglomération bruxelloise. Les vrais problèmes auxquels il est confronté sont ceux de la complexité administrative et technique de la ville moderne. C’est pourquoi le plan du Grand-Bruxelles ne peut être l’œuvre d’un seul homme. Il résultera de la collaboration de nombreux techniciens et de l’unification administrative des communes. L’urbaniste n’est plus seulement un artiste compositeur, il est le chef d’orchestre qui doit mettre chacun à son rang dans un ensemble unique20. Afin d’orchestrer l’action de l’élite bruxelloise autour du problème de l’agglomération, Victor Bourgeois lance avec Marcel Schmitz la revue Bruxelles en 1933. Elle cherche à coordonner la contribution des meilleurs spécialistes issus de tous les bords politiques et de toutes les disciplines. Bruxelles se veut donc un véritable organe autour duquel pourra se former l’équipe des constructeurs du Nouveau Bruxelles. La complexité institutionnelle de la Belgique aura rapidement raison de l’action de Bourgeois en faveur de l’unification administrative du Grand-Bruxelles. Bruxelles a une existence très éphémère et quand l’agglomération bruxelloise verra finalement le jour, près de quarante ans plus tard, la figure élitaire de l’urbaniste aura disparue. L’institutionnalisation de l’urbanisme dans l’après-guerre Le contexte politique de l’occupation, va donner l’opportunité à Verwilghen de créer une administration centrale de l’urbanisme au sein du Commissariat général à la Reconstruction du Pays (CGRP). Elle entend hiérarchiser et systématiser l’ensemble des décisions en matière d’urbanisme, mais le planisme de Verwilghen va également se confronter à la résistance des collectivités locales21. L’institutionnalisation de l’urbanisme se prolonge plus modestement dans l’après-guerre avec la création d’un Conseil supérieur de l’Urbanisme et d’une Administration de l’Urbanisme au sein du ministère des Travaux Publics. Si l’idée d’un Plan national s’avère trop difficile à mettre en pratique, les études régionales sont lancées dès la fin des années ’40. Dans la région liégeoise, les architectes du groupe L’Équerre, membres de la SBUAM et des CIAM, sont fortement impliqués dans la planification régionale. À Bruxelles, les membres fondateurs de la SBUAM ne prennent part ni à l’élaboration du Plan régional “Alpha”, ni à la planification des grandes infrastructures de transport (autoroute, métro). 21 ZAMPA F., “Raphael Verwilghen et l’action urbanistique intégrale du CGRP”, dans Interbellum-Cahier, 1997/9-10. Premier numéro de la très éphémère revue Bruxelles qui réunit l’équipe des constructeurs du Nouveau Bruxelles, 20 janvier 1933. 93 Les Cahiers de La Fonderie L’Urbaniste souvent à tort au phénomène de bruxellisation, disparaît du discours pour faire place à celle de l’habitant23. À ses côtés, on trouve une nouvelle génération d’architectes engagés dans les luttes urbaines pour la Reconstruction de Bruxelles. Ceux-ci tendent à rejeter le modèle de la grande ville moderne pour revenir à l’idéal du quartier et de la ville préindustrielle. Conclusion Au cours du processus d’institutionnalisation de l’urbanisme qui s’étend sur près d’un demi-siècle, la figure de l’urbaniste va considérablement évoluer. La posture artistique des premiers urbanistes disparaît après la seconde guerre mondiale pour faire place à celle des hommes de sciences. Tandis que les ingénieurs et les hommes de droit s’accaparent les hauts postes au sein des administrations en charge de l’urbanisme et de l’aménagement du territoire, la formation des urbanistes s’institutionnalise dans les facultés de sciences appliquées. On comprend donc pourquoi les architectesurbanistes qui occupent pour la plupart des positions marginales dans ce système institutionnel vont être fortement engagés dans sa remise en question après 1968. Les luttes urbaines auxquelles ils prennent part tendent à inverser la posture de l’architecte-urbaniste. Si elle reste ancrée dans un idéal de démocratie, son rapport au social et au temps s’est inversé : elle ne s’identifie plus à une élite qui éclaire les masses, elle se revendique modestement au service des habitants et de la ville ancienne. Le plan de l’agglomération bruxelloise proposé par le groupe Alpha, extrait de Gouvernement belge et Groupe Alpha, Bruxelles, 1958, p. 25. 22 DELIGNE C. et BILLEN C., “La Ville de l’Expo 58”, dans DELIGNE C. et JAUMAIN S. (dirs), L’expo 58, un tournant dans l’histoire de Bruxelles, Bruxelles, 2009, p. 45-68. 94 Exclus du processus d’institutionnalisation de l’aménagement du territoire, ils préfèrent revenir à une conception culturaliste de la ville et cherchent à valoriser son patrimoine urbain contre les premiers effets de la bruxellisation22. À partir de 1960, la Chambre des Urbanistes de Belgique défend les intérêts professionnels des urbanistes indépendamment de ceux des architectes. Si deux ans plus tard, une loi organique institutionnalise l’aménagement du territoire comme une œuvre collective effectuée sous le contrôle de l’État, elle contribue à faire disparaître la posture artistique et l’engagement social de l’urbaniste aux profits de compétences technico-organisationnelles. Au sein de la SBUAM, la seconde génération d’architectes modernistes se désengage de la question de l’urbanisme et dissout définitivement la société en 1971. Après 1968, la figure de l’urbaniste trop compromise avec la question de l’autorité et du système, associée La désignation d’un maître-architecte et d’une agence de développement territoriale était deux revendications du collectif Disturb formé au début des années 2000. Les membres fondateurs sont pour la plupart des architectes de la nouvelle génération. Le Plan de Développement international semble avoir été inspiré par l’exposition A Vision for Brussels organisée au Bozar en 2007 par le Berlage Institute. Cette exposition cherchait à réactualiser les figures démiurgiques de l’architecteurbaniste et des grands projets urbanistiques Affiche du colloque La reconstruction de la ville européenne, en 1978, qui regroupait une nouvelle génération d’architectes engagés dans les “luttes urbaines” pour revenir à l’idéal du “quartier” (Archives d’Architecture moderne). D’abord opposés aux outils institutionnels de la planification d’état, ces principes idéologiques de la rénovation urbaine vont pourtant s’institutionnaliser dans le contexte de la Région de Bruxelles Capitale à partir des années ’9024. Dès lors on pourrait croire que la figure élitaire et progressiste de l’architecte-urbaniste tend à disparaître de la scène bruxelloise. Pourtant, la difficulté de donner une identité architecturale et urbanistique contemporaine à la Région de Bruxelles Capitale tend à remettre en avant les figures ambitieuses du grand projet et de l’architecte-urbaniste. Depuis le début des années 2000, les revendications d’une nouvelle génération d’architectes et d’urbanistes ont conduit à la désignation officielle d’un Plan de Développement international en 2008, d’un maître-architecte et d’une Agence de Développement territorial pour Bruxelles en 2009. Il reste à voir si ces nouveaux outils institutionnels permettront d’aboutir à une synthèse consensuelle entre la volonté d’une action urbanistique ambitieuse et coordonnée et les aspirations des collectivités locales et des habitants.  23 24 C’est le thème de la première école urbaine organisée en 1970 par l’Atelier de Recherche et d’Action urbaine (ARAU). Parmi ses membres fondateurs, deux enseignants de l’Institut d’urbanisme de La Cambre dans les années ’70 : Maurice Culot (architecte-urbaniste) et René Schoonbrodt (sociologue). Les premiers Contrats de quartier sont mis en place à partir de 1994 dans la Région de Bruxelles Capitale. 95