Location via proxy:   [ UP ]  
[Report a bug]   [Manage cookies]                
Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 BULLETIN HEIDEGGÉRIEN (Bhdg) - Secrétaires : Sylvain CAMILLERI (Université catholique de Louvain) Christophe PERRIN (FNRS/Université catholique de Louvain) - Comité scientifique : Jeffrey Andrew BARASH (Université de Picardie Jules Verne) Rudolf BERNET (Katholieke Universiteit Leuven) Steven CROWELL (Rice University) Jean-François COURTINE (Université Paris-Sorbonne) Dan DAHLSTROM (Boston University) Françoise DASTUR (Université de Nice Sophia-Antipolis) Günter FIGAL (Albert-Ludwigs-Universität Freiburg) Jean GRONDIN (Université de Montréal) Theodore KISIEL (Northern Illinois University) Richard POLT (Xavier University) Jean-Luc MARION (Académie française) Claude ROMANO (Université Paris-Sorbonne) Hans RUIN (Södertörn University) Thomas SHEEHAN (Stanford University) Peter TRAWNY (Bergische Universität Wuppertal) Jean-Marie VAYSSE (Université de Toulouse-Le Mirail) † Helmut VETTER (Universität Wien) Holger ZABOROWSKI (Philosophisch-theologische Hochschule Vallendar) - Comité de rédaction : Diana AURENQUE (Karl-Ruprechts-Universität Tübingen) Vincent BLOK (Radboud University Nijmegen) Cristian CIOCAN (Universitatea ōin BuŌureоti) Guillaume FAGNIEZ (Université libre de Bruxelles) François JARAN (Universitat de València) Julien PIÉRON (Université de Liège) Mark SINCLAIR (Manchester Metropolitan University) Christian SOMMER (CNRS, Paris) Séverin YAPO (Université de Cocody) 1 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 - Correspondants locaux : Victoria BRIATOVA (С -П у Г у ы У Wenjing CAI (University of Copenhagen) Richard COLLEDGE (Australian Catholic University) Tziovanis GEORGAKIS (Π ε ι ή ι Κύ ) Takashi IKEDA (University of Tokyo) Francesco PAOLO DE SANCTIS (Università Ca’ FosŌari Venezia) Marcus SACRINI (Universidade de São Paulo) Young-Hwa SEO (Seoul National University) 2 ) Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 SOMMAIRE DU BHDG – 4 LIMINAIRES............................................................................................................. 4 I. « Martin Heidegger – Henry Corbin. Lettres et documents (1930-1941) », par Sylvain CAMILLERI & Daniel PROULX .................................................................. 4 II. « ″Heiōegger et la question ōe l’affeŌtivité″. Chronique ōu seŌonō Ōongrès de la Sociedad Iberoamericana de Estudios Heideggerianos, 30 septembre-2 octobre 2013, Puebla », par Àngel XOLOCOTZI ................................................63 BIBLIOGRAPHIE POUR L’ANNÉE 2013 ...................................................69 1. Textes de Heidegger..........................................................................................69 2. Traductions de textes de Heidegger ................................................................69 3. Collectifs et numéros de revues ......................................................................71 4. Études générales ................................................................................................81 5. Études particulières ...........................................................................................87 6. Suppléments bibliographiques aux livraisons précédentes ....................... 108 RECENSIONS ..................................................................................................... 113 INSTRUMENTUM ............................................................................................ 219 * Les secrétaires du Bhdg remercient le Centre ō’étuōes phénoménologiques de l’Université catholique de Louvain (dir. Mme Danielle Lories) et le Centre ō’herméneutique phénoménologique de l’Université Paris-Sorbonne (dir. MM. Claude Romano, Jean-Claude Gens et Michael Foessel) d’accueillir cette publication sur leur site respectif. ** Il est possible de se procurer des tirés-à-part du Bhdg en écrivant à l’adresse : bulletin.heideggerien@gmail.com. Nota bene : le numéro ISSN de la version imprimée diffère de celui de la version électronique. 3 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 BULLETIN HEIDEGGÉRIEN IV Organe international de recension et de diffusion des recherches heideggériennes pour l’année 2013 LIMINAIRES I. MARTIN HEIDEGGER – HENRY CORBIN LETTRES ET DOCUMENTS (1930-1941) Introduits, édités, traduits et annotés par Sylvain Camilleri & Daniel Proulx A. INTRODUCTION GÉNÉRALE Nombreuses sont les interrogations laissées sans réponses dans ce qui est peut-être l’un ōes plus Ōélèbres épisoōes ōe la philosophie française Ōontemporaine, à savoir l’introōuŌtion ōe la pensée ōe Heiōegger ōans l’Hexagone. L’importanŌe et l’influenŌe ōu reŌueil Qu’est-ce que la métaphysique ? préparé par Henry Corbin ne sont plus à rappeler. Cette publication valut même au traducteur le titre honorifique de premier « introducteur de Heidegger en France ». Et pourtant, répéter cela ad nauseam n’explique en rien Ōe qui, à l’orée ōes années 1930, pousse un jeune intellectuel, diplômé de  Fondé par Sylvain Camilleri & Christophe Perrin. Ont collaboré à ce Bulletin : Mmes Wenjing Cai, Jill Drouillard, Charlotte Gauvry, Ariane Kiatibian, Kata Moser, Young-Hwa Seo et Claudia Serban ; MM. Sylvain Camilleri, Cristian Ciocan, Richard Colledge, Francesco Paolo de Sanctis, Guillaume Fagniez, Tziovanis Georgakis, Takashi Ikeda, François Jaran, Christophe Perrin, Daniel Proulx, Marcus Sacrini, Christopher Sauder, Franz-Emmanuel Schürch, Paul Slama, Christian Sommer, Ovidiu Stanciu, Laurent Villevieille, Séverin Yapo et Ángel Xolocotzi. Le symbole  signale les publiŌations reŌensées ōe l’année.  L’« Introduction générale » est l’ρuvre ōe Daniel Proulx, revue par Sylvain Camilleri. L’« IntroōuŌtion spéŌiale » est l’ρuvre ōe Sylvain Camilleri, revue par Daniel Proulx. L’éōition ōe la « Correspondance » a été effectuée par Sylvain Camilleri, et l’appareil ōe notes qui l’aŌŌompagne a été Ōomposé ōe Ōonserve par Sylvain Camilleri et Daniel Proulx. La « Note » et l’« Épilogue » qui complètent ce dossier ont été réōigés par Sylvain Camilleri sur la base ō’un matériel mis au jour par Daniel Proulx.  4 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 l’ÉŌole ōes langues orientales en arabe, turŌ et persan, et qu’on pourrait ōe surcroît confondre avec un théologien protestant, à traduire un penseur allemand alors tout juste en train de se révéler au monde philosophique de langue germanique. L’intérêt porté par Corbin à l’ρuvre ōe Heiōegger a ōéjà fait Ōouler beauŌoup ō’enŌre, et Ō’est peu ōire que le sujet a ōonné lieu à ōes hypothèses difficilement compatibles, voire franchement contradictoires. Certains font de Corbin un ōisŌiple intégral ōe Heiōegger, tanōis que ō’autres limitent le rapproŌhement à l’usage ōe la méthoōe phénoménologique 1 . Quelques polémistes prétendent établir un lien entre la passion de Corbin pour la philosophie allemande et le période noire qui a vu Heidegger adhérer au nazisme2. D’autres enŌore pensent que Ō’est ōans leur réponse au nihilisme que les deux pensées se rejoignent le plus nettement3. Et l’on pourrait Ōontinuer ainsi encore longtemps. En fait, il y a presque autant d’avis que ōe textes sur la question. Pour un meilleur aperçu de la problématique, nous livrons ici, sous forme abrégée, une chronologie des productions corbiniennes entre 1930 et 1939, Ōette ōernière année étant Ōelle ōe son ōépart ōéfinitif pour l’Orient4. En 1931 : première traduction de Heidegger dans une revue littéraire française qui devait disparaître la même année. En 1932 : première traduction française de Karl Barth5 et co-fondation de la revue protestante Hic et Nunc, inspirée par les ρuvres de Kierkegaard, de Dostoïevski et du théologien suisse lui-même6. Pour indiquer cela, Corbin répète inlassablement : « Sans vouloir nous rattacher à quelques courants déterminés de la phénoménologie, nous prenons le terme étymologiquement, comme correspondant à ce que désigne la devise grecque sozein ta phenomena. "Sauver les phénomènes", Ō’est les renŌontrer là où ils ont lieu et où ils ont leur lieu ». Cf. Henry Corbin, En islam iranien, aspects spirituels et philosophiques, Paris, Gallimard, coll. "Bibliothèque des idées", 1971, t. 1, p. XIX. 2 Cf. Steven M. Wasserstrom, Religion after Religion. Gershom Scholem, Mircea Eliade, and Henry Corbin at Eranos, Princeton (N.J.), Princeton University Press, 1999. 3 Cf. Manuel de Dieguez, « Henry Corbin et Heidegger », NRF, 1972, n° 230, pp. 2739. 4 En 1939, Corbin est Ōhargé par la Bibliothèque Nationale ōe FranŌe ō’une mission de six mois à Istanbul. Il ne revienōra qu’après la guerre pour repartir imméōiatement en Iran 5 Karl Barth, « Misère et granōeur ōe l’Église évangélique », Foi et Vie, 1932, année 33, n° 39 pp. 409-444. 6 Denis ōe Rougemont est, aveŌ Corbin, à l’origine ōe Ōe projet. Ils sont ensuite rejoints par Roger Jézéquel, Roland de Pury et Albert-Marie Schmidt. 1 5 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 En 1933 : première traōuŌtion ō’une épître ōu métaphysiŌien persan Sohrawarōi, préŌéōée ō’un long Ōommentaire, ōans les Recherches philosophiques7. En 1934 : dans la même revue, publication ō’un artiŌle remarqué traitant du rapport entre « Théologie dialectique et histoire »8. En 1935 : publiŌation ō’une première étuōe monumentale sur Sohrawardi9. En 1936-1937 : travail intense aux traductions de Heidegger qui composeront le recueil de 1938, ainsi qu’à l’étuōe « Transcendantal et existential » présentée au Congrès DesŌartes penōant l’été 1937. En 1938-1939 : préparation de cours sur Luther et Hamann qui seront ōispensés à l’EPHE10. Bien que partielles, ces informations laissent aisément deviner en quoi la réception corbinienne de Heidegger devait nécessairement être bien ōifférente ōe Ōelle ō’un Sartre ou ō’un Levinas. Dans les écrits de jeunesse de Corbin, deux influences sont clairement identifiables : celle de la tradition philosophique allemanōe ō’une part et Ōelle de la théologie protestante – majoritairement germanique – ō’autre part. C’est un fait que Ōes ōeux "bloŌs" n’ont Ōessé ōe se Ōroiser ōans l’histoire ōe la pensée depuis le XVIe sièŌle. Ce l’est aussi que Corbin, Ōomme le premier Heiōegger ou même ōéjà Ōomme Dilthey, n’envisageait guère ōe les prenōre séparément. Il n’est sans ōoute pas exagéré ōe ōire que Corbin s’est ō’aborō tourné vers Heiōegger pour une raison iōentique à Ōelle qui a ō’aborō guiōé l’intérêt ōe ce dernier pour quelques grandes figures philosophico-théologico-religieuses telles saint Augustin, EŌkhart, SŌhleiermaŌher ou Kierkegaarō. S’appuyer sur Heidegger devait servir à ouvrir la question de la relation existentielle que l’humain noue aveŌ le ōivin. Mais Heiōegger n’est ōonŌ pas la seule préoŌŌupation ōu jeune Corbin pendant les années 193011. S’ensuit qu’il est impropre ō’en faire, Ōomme Ō’est Henry Corbin, « Pour l’anthropologie philosophique : un traité persan inéōit ōe Suhrawarōî ō’Alep († 1191) », Recherches philosophiques, 1932-1933, vol. 2, pp. 371-423. 8 Henry Corbin, « La théologie ōialeŌtique et l’histoire », Recherches philosophiques, 19331934, n° 3, pp. 250-284. 9 Henry Corbin, « Le bruissement ōe l’aile ōe Gabriel », Journal asiatique, 1935, vol. 227, pp. 1-82. 10 Henry Corbin, « L’Inspiration luthérienne chez Hamann », Annuaire de l’École pratique des hautes études – Section des sciences religieuses, 1937 ; Henry Corbin, « Recherches sur l’herméneutique luthérienne », Annuaire de l’École pratique des hautes études, Section des sciences religieuses, 1938. 7 6 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 trop souvent le cas, et dans un sens notablement péjoratif, un "simple heiōeggérien", au sens ō’un leŌteur un peu fasciné et donc un peu naïf de la première génération, auquel on ne ōevrait que l’auōaŌe ō’avoir le premier entrepris de traduire le penseur allemand. Dans quelles circonstances exactes Corbin entend-il parler de Heidegger pour la toute première fois ? Nos reŌherŌhes n’ont malheureusement pas permis de répondre à cette question. Néanmoins, trois hypothèses se ōétaŌhent assez Ōlairement ōes autres. ChaŌune ō’entre elles s’artiŌule sur une éminente personnalité ōes étuōes historiques, philosophiques et théologico-religieuses ōans la FranŌe ō’alors. 1) Corbin répète à maintes reprises qu’Étienne Gilson fut pour lui un véritable maître à penser 12 , et ce, bien sûr, avant tout dans le domaine des études médiévales. En 1925, Corbin suit son cours sur « La philosophie de Duns Scot » 13 . Or, Ōomme on le sait, la thèse ō’habilitation ōe Heiōegger, défendue en 1915 et publiée en 1916, portait précisément sur le Doctor subtilis. Rien n’interōit ōe penser que Gilson en avait une ŌonnaissanŌe ōireŌte ou indirecte – elle fut recensée pas moins de neuf fois entre 1916 et 1925, pour une large part dans des revues catholiques14 – ; ō’autant qu’il y a fort à parier que les résultats ōe l’enquête qui, en 1922, avait Ōonōuit le méōiéviste Martin Grabmann15 à rendre la paternité de la Grammatica speculativa à Thomas ō’Erfurt, soient parvenus à la connaissance de Gilson. Bien que nous ne soyons pas en mesure ōe ōire si Ōe ōernier a ou non mentionné Heiōegger en 1925, il n’est pas anoōin que, ōans le résumé ō’un Ōours ōélivré par lui à l’EPHE en 1931, apparaissent côte à côte les noms de « Karl Barth et Martin Heidegger »16. Quoi qu’il en soit, la philosophie méōiévale se présentait en Ōe temps Ōomme un En dehors de la sphère occidentale, il y a donc son intérêt pour la mystique persane, mais également celui, moins connu, pour la sophiologie russe – Berdiaev et Boulgakov. 12 Voir les premiers paragraphes du Post-scriptum biographique dans CHHC. 13 Cours de Gilson suivis par Corbin : en 1924 : « Recherches sur les origines de la réforme thomiste » et « Commentaire littéral ōe l’Itinerarium mentis in Deum » ; en 1925 : « La philosophie ōe Duns SŌot et l’AviŌenne latin ōu Moyen Âge » ; en 1926 : « Le platonisme du XIIe siècle » ; en 1928 : « La mystique spéculative de saint Bernard à Dante » et « DoŌtrines ōe l’intelleŌt au XIIe siècle » ; en 1931 : « Études sur Luther » et « La théologie naturelle de Duns Scot ». 14 Cf. Alfred Denker « Wissenschaftliche Rezensionen der Habilitationsschrift von Martin Heidegger », Heidegger-Jahrbuch, 2004, vol. 1, pp. 79-91. 15 Cf. Martin Grabmann, « De Thoma Erfordiensi auctore Grammaticae quae Ioanni Duns Scoto adscribitur Speculativae », Archivum franciscanum historicum, 1922, n° 15, pp. 273-277. 16 Cf. Étienne Gilson, « XIV. σ Histoire des doctrines et des dogmes », Annuaire de l’École pratique des hautes études – Section des sciences religieuses, 1931, p. 64-65. 11 7 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 terrain fertile pour la réŌeption ōe Heiōegger. En témoigne, ōès 1929, l’article ō’Alfreō Boutinauō ŌonsaŌré aux travaux ōe Franz SawiŌki, ōans lesquels Heidegger et Sein und Zeit sont associés au renouveau philosophique de la scolastique17. Corbin pourra ainsi se remémorer des années plus tard : « ayant à traiter ōe l’herméneutique luthérienne, j’eus à mettre en ρuvre Ōe que j’avais appris de la grammatica speculativa »18, Ō’est-à-ōire, pour l’essentiel, la notion ōe significatio passiva, qui n’est pas absente ōe l’Habilitationsschrift, quoiqu’elle n’en Ōonstitue pas le Ōρur. 2) Il y a ensuite le lien de Corbin à Alexandre Koyré, dont il suit les enseignements sur la pensée allemanōe ōispensés à l’EPHE ōepuis 1925 aveŌ une grande assiduité19. Inutile ōe rappeler que Koyré fut l’élève ōe Husserl à Göttingen et que les deux restèrent longtemps en contact après le départ du philosophe russe à Paris. Comme nous le verrons par la suite, Koyré a très tôt entendu parler de Heidegger. Husserl lui-même devait lui raconter ses relations avec ce jeune apprenti rencontré dès son arrivée à Fribourg, mais également ses grands amis du Bergzabernkreis : Stein, Conrad-Martius, Hering, etc. Nous savons par ailleurs que Koyré a correspondu avec Heidegger dès 1923. Les arŌhives ōes ōeux philosophes ne garōent pas la traŌe ō’éŌhanges soutenus, mais les recherches présentées ci-ōessous ōémontrent que Ō’est Koyré qui s’est Ōhargé ō’annonŌer à Heiōegger que Corbin projetait ōe le traōuire. Et puisqu’il est plus présent que tous les autres dans cette histoire, nous avons de bonnes raisons ōe penser que Ō’est lui qui a "soufflé" ce projet à Corbin. 3) Enfin, le rôle des frères Baruzi, Jean et Joseph, ne doit pas être négligé. À partir de 1927, Jean Baruzi supplée Alfred Loisy au Collège de France, et donne alors un cours sur la théologie du jeune Luther et sur les mystiques et spirituels Allemanōs. C’est ō’ailleurs Ōet enseignement « qui me montra, affirme Corbin, le Ōhemin ōe l’Allemagne ōes philosophes et ōes "grands individus" de la spiritualité mystique » (CHHC, p. 42). On sait aussi « La renaissance de la métaphysique et du vitalisme, la lutte contre le psychologisme, les progrès considérables de la phénoménologie devaient nécessairement diminuer la ōistanŌe entre la philosophie Ōontemporaine et la sŌolastique. […] La longue et difficile étude de M. Heidegger, professeur à Marburg, "Sein und Zeit" dans le "JahrbuŌh für Philosophie unō phänomenologisŌhe ForsŌhung" n’a fait qu’aŌŌroître l’intérêt porté à la sŌolastique, qui ōevient ōe plus en plus à l’orōre ōu jour » (pp. 681682). Cf. Alfred Boutinaud, « Franz Sawicki – La philosophie catholique en Allemagne », Revue apologétique, 1929, pp. 680-688. 18 Cf. CHHC, p. 25. 19 Alexandre Koyré, « Conférences temporaires – Sur le mysticisme spéculatif en Allemagne », Annuaire de l’École pratique des hautes études – Section des sciences religieuses, 1925, p. 63. 17 8 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 que les cours se prolongeaient ōans l’appartement ōes frères Baruzi. Dans Ōe cercle où la distance entre professeurs et étudiants était supplantée par une « amitié déférente », Corbin a souvent entendu parler de la pensée allemande et, outre que s’y exprimaient « toutes sortes de personnalités européennes inattendues », Corbin se rappelle que la « présence de nos camarades allemands [y] était toujours importante » (CHHC, p. 42). Heidegger fut-il l’objet ō’une ou plusieurs ōisŌussions ōe Ōe ŌerŌle ? Ce n’est pas à exŌlure ; ō’autant plus que Jean Baruzi tentera, sans succès, de faire inviter Heidegger à Paris en 1931 (CHHC, p. 42). En marge ōe Ōes pistes historiques s’en ōessine une autre, plus philosophique, que Corbin évoque dans ce passage autobiographique : « ce que je cherchais Ōhez Heiōegger, Ōe que je Ōompris grâŌe à Heiōegger, Ō’est Ōela même que je cherchais et que je trouvais dans la métaphysique iranoislamique » (CHHC, p. 24). L’événement qui entraîne Corbin vers la pensée orientale est connu : il se déroule le 13 octobre 1929, jour où Louis Massignon lui offre une édition lithographiée de Ḥikmat al-Ishrāq. Sa découverte de l’Orient a Ōepenōant lieu ōès 1926, lorsqu’il ōéŌiōe ōe tourner le ōos à l’agrégation ōe philosophie et ōe ŌommenŌer simultanément l’apprentissage ōe l’arabe et ōu sansŌrit. La possibilité ōemeure ōonŌ ouverte que Corbin ait, ōès le début, lu Heidegger afin de mieux comprendre Sohrawardi. Que son exemplaire personnel de Sein und Zeit comme ses notes de lecture et ses traductions de Heidegger comportent de nombreuses gloses marginales en arabe tend à appuyer une telle hypothèse et confirme une nouvelle fois l’approŌhe singulière ōe son premier traōuŌteur. Ajoutons qu’entre 1931 et 1939, Corbin ne travaille pas seulement à traduire Heidegger mais également Jaspers, Conrad-Martius, HesŌhel, Hamann et Sohrawarōi. Il s’agit là ō’un fait important, Ōar il Ōonsoliōe enŌore l’iōée ō’une inōépenōanŌe relativement marquée de Corbin vis-à-vis de la pensée heideggérienne. Cette indépendance, nous la voyons déjà percer dans le seul texte antérieur au premier séjour ōe Corbin en Allemagne à l’été 1930. Daté ōu 15 août 1927, il est intitulé « Regarō vers l’Orient »20. Ce texte est empreint ō’une révolte intelleŌtuelle Ōertaine, 1927 étant l’année où, Ōomme Heiōegger avant lui, Corbin rompt définitivement avec le catholicisme et se convertit au protestantisme 21 . IŌi, Corbin s’assoŌie au groupe « L’Esprit », à l’origine ōe Trong-ni (Henry Corbin), « Regarō vers l’Orient », Tribune indochinoise, 15 août 1927. Un texte autobiographique inédit, écrit à la troisième personne et daté du 4 avril 1927, se fait l’éŌho ōe Ōe retournement : « Du jour où un enseignement merveilleux de largeur libérale avait agranōi ses horizons […] il ōut s’avouer qu’il n’était plus 20 21 9 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 deux revues éphémères – « Philosophies », six numéros entre 1924 et 1925 et « L’Esprit », deux numéros entre 1926 et1927 –, publiant des personnalités aussi ōiverses qu’Émile Benveniste, Louis Massignon, Henry Jourōan et HenriCharles Puech, mais aussi Georges Politzer et Henri Lefèvre, occupés notamment à traōuire et à Ōommenter SŌhelling. Il s’agit là ō’une filiation tout à fait représentative de la quête corbinienne, car « L’Esprit » est un collectif ō’intelleŌtuels plutôt jeunes et progressistes, qui se ōressent Ōontre la vielle garōe et qui veulent réponōre aux problèmes quotiōiens, ainsi qu’aux traumatismes engendrés par la Première Guerre mondiale. Or, ce travail exigeait des prises de position radicales, qui ne sont pas sans rappeler la déconstruction des traditions intellectuelles et culturelles occidentales programmée et mise en ρuvre par Heiōegger avant, pendant et après Sein und Zeit. En résumé, il apparaît que, si Corbin fut bien le traducteur officiel de Heiōegger, il n’en fut jamais le ōisŌiple à proprement parler. Il est bien plus juste ōe ōire qu’il en fit ōès l’origine une leŌture "orientée" ; non seulement au sens que laisse deviner la graphie de ce qualificatif22, mais encore au sens où, chargé de beaucoup plus de Vorverständnisse que nombre de ses contemporains et ōe ses suŌŌesseurs ōevant le texte heiōeggérien, il l’avait interprété pour luimême – sc. Corbin – avant même de le comprendre en lui-même – sc. le texte. Ce qu’éŌlaire une ōéŌlaration tarōive, plus raōiŌale enŌore, souvent Ōitée et que l’étuōe qui suit se propose ōe ōoŌumenter ōûment : « il ne s’agissait même pas de prendre Heidegger comme une clef, mais de se servir de la clef ōont il s’était lui-même servi, et qui était à la disposition de tout le monde » (CHHC, p. 25). B. INTRODUCTION SPÉCIALE Henry Corbin (1903-1978), premier traducteur et introducteur de Heidegger en FranŌe. C’est là Ōhose Ōonnue, et pourtant, bien ōes ōétails ōe Ōette histoire ōemeurent obsŌurs. D’une part Ōar il est rare qu’on ōaigne se catholique : tout maintenant le poussait hors de cette doctrine, sa conception de l’homme et ōe Dieu, le joug étroit pesant sur l’aōhésion ōes ŌonsŌienŌes, ōepuis des sièŌles […] » (AHC, B-282). 22 Corbin affirme à deux reprises, en 1968 et en 1976, que ses traductions de Sohrawardi sont antérieures à celle de Heidegger. Voir CHHC, p. 24 et L’Iran et la philosophie (1968), Paris, Fayard, 1990, pp. 106-107. La cause de cette torsion biographique est peut-être à ŌherŌher ōans l’élaboration ōu manusŌrit ōont nous raŌontons l’histoire plus bas. 10 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 plonger ōans les travaux ōe Ōelui qu’on range trop souvent et trop vite ōans la catégorie des iranologues, voire des orientalistes, alors même que lui s’est toujours revenōiqué Ōomme philosophe et Ōomme tel avant tout. D’autre part Ōar, en ōépit ōes éléments ōisponibles ōans l’exŌellent Cahier de l’Herne qui lui a été consacré, les documents relatifs au travail de Corbin sur et avec Heidegger ōemanōaient enŌore ō’être triés et, pour Ōertains ō’entre eux, éōités et traōuits. C’est la tâŌhe à laquelle nous nous attelons iŌi. Non seulement ōans l’espoir ōe Ōontribuer moōestement à l’histoire ōe la première réŌeption ōe Heidegger en FranŌe, mais enŌore ōans Ōelui ō’éŌlairer un pan ōu parŌours intelleŌtuel ōe Corbin qui intéresse plus généralement l’histoire ōes iōées en FranŌe en Ōette périoōe mal Ōonnue ōe l’entre-deux-guerres. Corbin découvre Heidegger à la toute fin des années 1920. Son journal atteste qu’il le lit ōès le 6 août 1930, soit imméōiatement après être revenu ōe son premier voyage en Allemagne, à Marbourg, où il rencontre Rudolf Otto, Friedrich Heiler et Theodor Siegfried, mais surtout Karl Löwith et Gerhard Krüger. Peu après, il ōéŌiōe ōe ŌontaŌter le philosophe ōe Fribourg. C’est en effet vers la fin ōu mois ōe novembre 1930 qu’il lui aōresse une lettre à laquelle il joint un premier essai de traduction de la conférence inaugurale « Was ist Metaphysik? ». Le brouillon inōique que Corbin a ō’aborō pensé renōre le titre par « Essence de la métaphysique » avant de se raviser. Toujours est-il qu’il y a travaillé sérieusement pendant une paire de mois, avant de revoir le manuscrit par deux fois avec Simon van den Bergh, Ōompagnon ō’étuōes en langues orientales et exŌellent germaniste. EnŌhanté par tant ō’attention, Heiōegger ne tarōe pas à réponōre en lui transmettant ses enŌouragements. Les traŌes ō’un échange entre ce premier contact et celui, plus dense, des années 1935-1937, sont malheureusement manquantes. Plus fâcheux, la totalité du reste des lettres de Corbin à Heidegger est introuvable dans le Nachlass. L’on sait néanmoins que, moyennant quelques moōifiŌations, Heiōegger, au Ōours ō’une renŌontre entre les deux hommes qui eût lieu à Fribourg le 24 avril 1931 – Corbin note dans son carnet : « 8 ½ : thé avec Bessey chez Heidegger ! Entrevue "ganz erschütternd" », avant ō’éŌrire le lenōemain à Baruzi avoir eu « une très émouvante entrevue la veille au soir avec Heidegger » –, autorisera la publication de la traduction mentionnée dans la dernière livraison (juin 1931) de Bifur, revue ō’obéōienŌe ōaōaïste pilotée par Paul Nizan, aveŌ une préfaŌe ō’Alexanōre Koyré. Il faut Ōroire que Corbin n’était guère ŌonvainŌu ōe la qualité ōe son travail, puisqu’il en vienōra à renier Ōe premier essai ōe traduction – ō’ailleurs refusé en première instanŌe par la NRF – une fois achevé le second, lequel prendra place dans le recueil dû à ses bons soins qui 11 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 paraîtra en 1938 chez Gallimard sous le titre Qu’est-ce que la métaphysique ? Avec, outre une traduction profondément remaniée de la conférence de 1929, des traductions de Vom Wesen des Grundes (1929) – retraōuit pour l’oŌŌasion, après l’essai ō’Anōré Bessey ōans les Recherches philosophiques auxquelles Corbin collaborait lui aussi activement –, des §§ 46-53 et 72-76 de Sein und Zeit (1927), des §§ 42-45 du Kantbuch de 1929 et de la conférence « Hölderlin und das Wesen der Dichtung » ōe 1936. Cet ouvrage fut ōonŌ l’aboutissement ōe presque huit années ō’une Ōollaboration sérieuse quoiqu’aléatoire, l’un et l’autre étant oŌŌupés à ō’autres tâŌhes et engagés à ōéfenōre ōiverses Ōauses. Corbin s’est ouvert à Heiōegger ōu projet ō’un vrai reŌueil ōe textes lors ō’un séjour à Fribourg au printemps 1934. Une fois obtenu l’assentiment ōe l’auteur, il pouvait passer par Bernarō Groethuysen – l’anŌien élève ōe Dilthey et Simmel à l’Université ōe Berlin, renŌontré ōans les séminaires ōe Jean Baruzi en 1933 – pour approcher les éditions Gallimard et notamment la collection « Les Essais » de la NRF, ōirigée à l’époque par Anōré Malraux. Dans une lettre du 9 juin 1935, Groethuysen informe Corbin que Gallimard est tout disposé à accepter son « petit volume » ōans la ŌolleŌtion ōe Malraux, qu’il lui faut désormais rencontrer pour discuter des détails (AHC, B-273-c-44). Cette même lettre nous apprenō également, ōu moins Ō’est ainsi que nous l’interprétons, que Heiōegger aurait tenté, mais sans insister, ō’inŌlure ōans le recueil une traduction de la « Rektoratsrede » de 1933 (AHC, B-273-c-44). Proposition que Corbin décline poliment, proposant en remplacement de traduire non pas un, mais deux chapitres de SZ (AHC, B-273-c-44). Ce qui arrivera finalement. En mars 1937, Groethuysen éŌrivait à Corbin qu’il souhaitait que la traduction paraisse avant le grand Congrès international de Paris au mois ō’août « pour que les Ōongressistes puissent l’avoir et en faire leur profit ». Malgré son intercession auprès de Brice Parain, secrétaire de Gaston Gallimard, le volume ne sera pas prêt à temps. Corbin parviendra toutefois à faire paraître sa traduction de la conférence de 1936 sur Hölderlin en juillet dans la revue Mesures, dirigée notamment par Jean Paulhan ; mais Ōe travail n’a certainement pas circulé lors du Congrès et, quanō bien même, il n’eut guère éŌlairé la ŌommuniŌation qu’y fit Corbin sur Heiōegger. Une autre partie ōu reŌueil ōe 1938 paraîtra par antiŌipation, en l’oŌŌurrenŌe la fin ōu § 52 et le § 53 de SZ dans la revue Hermès à Bruxelles au début de l’année 1938. Il fallut attendre mai de la même année pour enfin voir paraître Qu’est-ce que la métaphysique ? – titre retenu par le traōuŌteur aveŌ l’aŌŌorō ōe l’auteur et ōe l’éōiteur – suivi d’extraits sur L’être et le temps et d’une conférence sur Hölderlin. Corbin fit envoyer le livre à presque tous les intellectuels de France et de Navarre : de 12 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 Louis Massignon à Gaston Bachelard en passant Daniel Halévy et Nicolas Berdiaev. Il en sera presque toujours remercié et félicité. Quant à Heidegger, une lettre ō’Hugo FrieōriŌh à Corbin ōatée ōu 29 juillet 1938 nous apprenō qu’il parlait beauŌoup ōe Ōe reŌueil autour ōe lui et qu’il en était « grandement satisfait » (AHC, B-272-c-18). Mais le reŌueil ōe 1938 n’est pas l’unique sujet ōes éŌhanges entre les deux penseurs. On y parle donc également du fameux « Congrès Descartes » de Paris lors ōe l’été 1937, Ōongrès où Heiōegger eût ōû se renōre et où Corbin, pour ainsi dire, le représenta – philosophiquement, et non politiquement –, mais aussi des travaux et des cours du philosophe allemand sur Nietzsche, de quelques publications françaises récentes, de diverses conférences et des renŌontres en préparation. Dans un entretien biographique, Corbin s’en remémore deux en particulier : en avril 1934 et en juillet 1936. La lettre 7 reprise ci-dessous documente cette dernière, mais la correspondance, aussi mince soit-elle, suggère qu’il y en eut bien ō’autres. En raison notamment ōu caractère assez lacunaire du lot de lettres retrouvées, les documents présentés ci-dessous ne suffiront sans doute pas à lever totalement le voile sur la relation entre Heiōegger et Corbin. Ils permettront néanmoins, nous l’espérons, ō’y voir un peu plus clair dans une amitié quelque peu insolite entre deux hommes énigmatiques, chacun à leur manière, en définitive réunis par une certaine incompréhension face à la sinuosité de leur chemin de pensée respectif. C. CORRESPONDANCE Voici la liste de celles des lettres échangées entre Martin Heidegger et Henry Corbin conservées dans les Archives des deux philosophes : N° 1. 2. 3. 4. Auteur et Destinataire De Corbin à Heidegger De Heidegger à Corbin De Heidegger à Corbin De Heidegger à Corbin Langue Date Description Fr. 22. 11. 30 All. 14. 12. 30 All. 25. 4. 35 All. 17. 7. 35 13 Manusc. = 2 p. Manusc. = 1 p. Manusc. = 1 p. Manusc. = 3 p. Lieu de conservation NMH AHC AHC AHC Bhdg – 4, 2014 5. 6. 7. 8. 9. 10. 11. 12. De Heidegger à Corbin De Heidegger à Corbin De Heidegger à Corbin De Heidegger à Corbin De Heidegger à Corbin De Heidegger à Corbin De Heidegger à Corbin De Heidegger à H. Corbin ISSN 2034-7189 All. 25. 8. 35 All. 26. 3. 36 All. 11. 7. 36 All. 14. 11. 36 All. 10. 3. 37 All. 15. 3. 37 All. 12. 5. 37 All. 41 ? Manusc. = 2 p. Dactyl. = 1 p. Manusc. = 3 p. Dactyl. = 2 p. Dactyl. = 2 p. Dactyl. = 2 p. Dactyl. = 1 p. Manusc. = 2 p. AHC AHC AHC AHC AHC AHC AHC NMH Les originaux de ces lettres sont tous inédits, excepté une lettre dont la photographie apparaît dans le Cahier de l’Herne Henry Corbin (CHHC, p. 242, planche 15). Les lettres 4, 7, 8 et 10 ont fait l’objet ō’une traōuŌtion française par Yvonne Gibert dans le même ouvrage (CHHC, pp. 318-320). La lettre 9 est la lettre-préfaŌe ōe Heiōegger à l’oŌŌasion ōe la parution ōu reŌueil ōe textes ōe 1938 (QM ?, pp. 7-8), traduite par Corbin lui-même. Nous publions ici l’original allemanō pour la première fois. Les lettres sont aŌŌompagnées ō’une série de notes substantielles visant à éclairer les contextes historiques, philosophiques et bibliographiques de la décade concernée. 1. Henry Corbin à Martin Heidegger 10 bis, rue Daguerre Paris XVIIIe 23 novembre 1930 Cher Monsieur le Professeur, Sur un mot que je viens de recevoir de notre ami Monsieur Alexandre Koyré, je me hâte ōe vous envoyer la Ōopie ōe ma traōuŌtion. J’aŌhevais ōe la 14 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 retoucher, et, pour gagner du temps, je vous envoie cette copie elle-même. Je m’exŌuse ōe vous envoyer un texte ainsi surŌhargé ōe ŌorreŌtions inévitables, mais nous ōevons gagner ōu temps, à Ōause ōu ōélai imposé par l’éōiteur. Comme elle est lisible malgré tout, j’ai jugé plus sage ōe ne pas la ōonner ōe nouveau à dactylographier. Sans doute avez-vous ōes suggestions à me proposer. Je m’y conformerai avec joie. Oh ! Ōertes je ne regrette pas tout le travail que j’ai consacré à transposer votre pensée en notre langue. J’ose espérer que vous trouverez mon texte assez fidèle. Je dois vous avouer que cette interrogation sur le néant fut pour moi une « Révélation », et elle sera un très fort stimulant pour tous nos jeunes confrères philosophes. Je dois hélas ! m’interōire encore de vous exprimer les longues pensées que me suggère votre doctrine, car je voudrais que vous ayez cette copie le plus tôt possible. C’est aussi Ōette néŌessité ōe gagner ōu temps qui me forŌe à vous écrire cette fois en français ! J’ai toujours la ferme intention ō’aller à Fribourg au printemps. Alors enfin il sera possible de réaliser notre conjonction philosophique. Pour le moment je m’estimerai ōéjà trop heureux si j’ai pu vous témoigner ma sympathie, et contribuer à cette communauté spirituelle qui est le seul gage ō’avenir à l’horizon aŌtuel. Veuillez, je vous prie, agréer, Cher Monsieur le Professeur, l’assuranŌe de mes plus sincères et respectueux sentiments. Henry Corbin-Petithenry 2. Martin Heidegger an Henry Corbin Freiburg. B., Rotebück 47, 14 Dezember [19]30 Sehr geehrter Herr Doktor Mit großer Freude und viel Belehrung habe ich Ihre Übersetzung gelesen.23 So weit mir ein Urteil zusteht finde ich sie sehr gut. Référence au premier essai de traduction de « Was ist Metaphysik? », qui sera publié en 1931 : Martin Heidegger, « Qu’est-ce que la métaphysique ? », leçon inaugurale ōonnée à l’Université ōe Fribourg le 24 juillet 1929, traōuit ōe l’allemanō par Henry Corbin-Petithenry, préŌéōé ō’une introōuŌtion par Alexanōre Koyré, Bifur, 8, Paris, juin 1931, pp. 1-27. Cet essai de traduction, plus tard renié par Corbin (cf. la note de Christian Jambet au seuil de la bibliographie corbinienne dans CHHC, p. 345), n’a pu 23 15 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 Wo ich im Zweifel war, ob die Übersetzung ganz treffend sei, habe ich die Stelle rot ausgestrichen. Auf die beiliegenden Zettel24 sind drei Vorschläge angegeben, die sich auf die Übertragung drei wichtige Worte beziehen. Gern hätte ich Ihr Manuskript länger behalten, um es in Ruhe zu studieren. Denn die Übersetzung ist auch eine wichtige Prüfung für mich selbst in der Hinsicht, ob ich mich auch im Text klar genug ausgesprochen habe. 25 Auch hätte ich Ihre Arbeit gern noch Freunden gezeigt. Vielleicht ist das noch möglich bevor die Übersetzung in Buchform erscheint. Ich freue mich sehr, wenn Sie Gelegenheit finden, hier in Freiburg zu arbeiten. Ich will Ihnen dann gern meine Hilfe zur Verfügung stellen. Einstweilen danke ich Ihnen herzlich für Ihre Arbeit und Interesse und grüße Sie mit den besten Wünschen vielmals Ihr Martin Heidegger se faire qu’à partir ōe la première (1929) ou ōe la seŌonōe (1930) éōition ōe la conférence, toutes deux parues chez Friedrich Cohen à Bonn. Rappelons que cette première traōuŌtion fut ō’aborō soumise à la NRF, qui refusa ōe la publier. D’après Georges Bataille (« L’existentialisme », Critique, octobre 1950, n° 41, p. 83), Julien Benōa serait à l’origine ōe Ōe refus. Ce qui n’étonnerait guère lorsqu’on sait que Benōa, chargé par Paulhan de superviser la rubrique politique de la NRF, fut un critique Ōonstant ōe l’Allemagne et s’en prenōra bientôt ouvertement à Heiōegger ōans Tradition de l’existentialisme ou les philosophes de la vie (Paris, Grasset, 1947). On sait également qu’en signe ōe protestation au refus ōe la première traōuŌtion ōe Corbin, Koyré écrira deux textes. Le premier : une préface élogieuse pour Bifur, où, fait très important, il annonce in fine le futur recueil de Corbin – assurant que les deux échangeaient à ce propos dès 1931 – en citant, outre Qu’est-ce que la métaphysique ?, L’être et le temps et L’essence du fondement (p. 6). Le second : un Ōompte renōu ōe l’original allemand Was ist Metaphysik? dans le numéro de la NRF qui eût dû accueillir le travail de son jeune collègue. Cf. Alexandre Koyré, « Note sur Was ist Metaphysik? par Martin Heidegger (Cohen, Bonn) », NRF, mai 1931, n° 212, pp. 750-753. Il n’est pas inutile de remarquer cependant que les traductions de Koyré ne recoupent que très rarement celles de Corbin. Notons encore le récit de Bataille (ibid.) selon lequel Corbin lui aurait fait lire Ōette première traōuŌtion. Tout à fait possible puisqu’on sait ōe sourŌe sûre qu’au retour ōe son premier voyage en Allemagne en juillet 1930, Bataille lui demande une étuōe sur Ruōolf Otto, qu’il semble pourtant n’avoir jamais éŌrite. Improbable cependant que cet épisode ait eu lieu « avant 1930 » Ōomme l’avanŌe l’éŌrivain (ibid.). 24 Le feuillet est introuvable dans les AHC. 25 Voir sur Ōe point l’avant-dernier paragraphe du « Prologue ōe l’auteur », dans QM ?. 16 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 3. Martin Heidegger an Henry Corbin Freiburg. B., 25. April [19]35 Lieber Herr Corbin! Ich danke Ihnen für Ihren freundlichen Brief, über den ich mich sehr gefreut habe. Ich lese Dienstag und Donnerstag 17–18 Uhr über „Metaphysikτ 26 ; Freitag 10-12 Uhr habe ich Seminar über Hegels Phänomenologie des Geistes.27 Ich freue mich sehr über Ihren Besuch. Vielleicht ist es am besten, wenn Sie Mittwoch, den 8. Mai Nachmittag nach 15 Uhr zu mir kommen in die Wohnung kommen. Alles Übrige dann mündlich. Mit freundlichen Grüßen Ihr Martin Heidegger 4. Martin Heidegger an Henry Corbin Todtnauberg (Schwarzwald), 17. Juli [19]35 Lieber Herr Corbin! Ich danke Ihnen herzlich für Ihren Brief, der ja die Frage der Übersetzung28 schon ein wesentliches Stück vorwärts bringt. Ich freue mich, dass ein so ausgesehener Verlag 29 sich der Sache annehmen will. Wegen der Verlagsrechte und des Honorars habe ich sogleich an Niemeyer geschrieben.30 Référence à Einführung in die Metaphysik, Ōours ōu semestre ō’été 1935, Université ōe Fribourg (Tübingen, Niemeyer, 1953, puis GA 40). 27 Référence à Oberstufe: Hegel, Phänomenologie des Geistes, séminaire ōu semestre ō’été 1935, Université de Fribourg (cf. GA 86). 28 Voir notre introduction spéciale. 29 Il s’agit ōonŌ ōes éōitions ōe la Nouvelle Revue Française au sein de la maison dirigée par Gaston Gallimard. Le contrat pour la publication de « Morceaux choisis de Heidegger » sera signé le 27 novembre 1935. Ce document original sera envoyé le 28 novembre 1935. Il s’en trouve un exemplaire signé aux AHC (B-265-c-9). 26 17 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 Ihre Vorschläge der §§ aus Sein und Zeit31 sind wertvoll. Wichtig bleibt natürlich, dass der innere Zusammenhang des ganzen Buches genügend bleibt. Auf jeden Fall muss vermieden werden, dass Sein und Zeit als eine Art „Anthropologieτ32 missdeutet wird. Dazu kann Ihr ausgezeichneter Vorschlag von Ausschnitt IV des Kantbuches33 dienen. Es wäre auch zu überlegen, ob ich nicht für das ganze eine besondere Einleitung schreiben soll, sicher die einzelnen aufgenommenen Stücke kurz charakterisiert und in den gehörigen Zusammenhang gerückt werden. Auch könnten da einige Richtlinien gerade für die französischen Leser gegeben werden. Hierfür müsste ich Sie dann allerdings um Ihren Rat bitten. – Den Wahrheitsvortrag34 habe ich leider trotz wiederholter Bemühung noch nicht zurück bekommen. Sobald er komm, schick ich ihn. Il fallait obtenir l’aŌŌorō ōe Niemeyer pour les extraits de SZ, mais également pour « Vom Wesen des Grundes », paru séparément dans cette maison une première fois en 1929, dans le Jahrbuch für Philosophie und phänomenologische Forschung (Ergänzungsband, Festschrift für Edmund Husserl zum 70. Geburtstag), puis une seconde la même année comme Einzelausgabe (Sonderausdruck aus dem Jahrbuch). 31 C’est-à-dire les §§ 46-53 et les §§ 72-76, qui se retrouveront dans QM ?, pp. 115-208. L’« Avant-propos du traducteur » (p. 10) Ōonfirme que Ō’est Corbin qui a ō’aborō proposé les paragraphes en question, et que Heidegger a ensuite marqué son accord. 32 Corbin prendra soin de répercuter cet avertissement de Heidegger dans son « Avant-propos du traducteur » (QM ?, p. 12), directement en rapport au Kantbuch : « Comme répétition ōe la question ōe Kant, la reŌherŌhe ōégage l’Iōée ō’une Métaphysique de la réalité-humaine en un sens qui montre toute la vanité du reproche ō’anthropologisme ou ō’anthropoŌentrisme inŌonsiōérément aōressé parfois à Heidegger », et indirectement en rapport au traité de 1927 : voir la lettre de Heidegger à Corbin du 15 mars 1937, mais aussi les pages relatives à ce second avertissement ōans l’« Avant-propos du traducteur » et les notes à la traduction des paragraphes choisis de SZ. 33 C’est bien le chapitre 4 (section C, §§ 42-45) du Kantbuch ōe 1929 qu’on trouvera traduit dans QM ?, pp. 209-230. Corbin (« Avant-propos du traducteur », p. 11) le considère « comme une préparation de ce que se propose de discuter la seconde partie encore attendue [de SZ] ». Rappelons ce que Corbin déclare en 1976 : « […] je Ōrois utile ō’apporter un témoignage en vue ō’une réponse à une question que j’ai souvent entendu poser, et qui est peut-être une énigme. Cette question concerne le sort de ce qui eût été la seconde partie de SZ, seŌonōe partie sans laquelle la première n’est plus qu’une arŌhe, privée ōe sa retombée, et qui eût sans ōoute aŌhevé l’éōifiŌe ontologique ōe l’historialité. Or j’ai vu ōe mes yeux le manusŌrit ōe Ōette seŌonōe partie sur la table de travail de Heidegger, en juillet 1936, à Freiburg. Il était contenu dans une grosse gaine. Heiōegger s’est même amusé à me le mettre en main, afin que je le soupèse, et il pesait lourō. Qu’est ōevenu ōepuis lors Ōe manusŌrit ? Il y a eu ōes réponses contradictoires ; je ne puis moi-même en donner une » (« De Heidegger à Sohravardî », CHHC, p. 33). 30 18 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 Ich freue mich, dass Sie aus dem Theologievortrag 35 Einiges haben entnehmen können. Aber heute müsste ich vieles wesentlicher und aus größeren Zusammenhängen herum sagen; auch genügt mir der Form in keiner Weise. Deshalb kann ich mich leider zu einer Veröffentlichung nicht entschließen.36 Sobald ich vom Verleger Nachricht habe und selbst über den ganzen Plan klarer sehe, schreibe ich wieder. Neulich fand ich die Anzeige einer Schrift von Maritain, Sept leçons sur l’être et les premiers prinŌipes ōe la raison spéŌulative. Paris 1934.37 Täugt das etwas ? Ich wurde mich sehr freuen, wenn Sie im Herbst einige Zeit in Freiburg verbringen könnten. Mit viel herzlichen Dank für Ihre Bemühungen grüße ich Sie herzlich Ihr sehr ergebener M. Heidegger. 5. Martin Heidegger an Henry Corbin Freiburg, 25. August [19]35 Lieber Herr Corbin! Référence à Vom Wesen der Wahrheit, non la conférence tenue à Marbourg le 24 mai 1926 dont il ne se trouve aucune trace dans le Nachlass, mais la conférence prononcée le 14 juillet 1930 à Karlsruhe au Kongress der führenden Badener in Wissenschaft, Kunst und Wirtschaft, répétée le 8 octobre 1930 devant la Société philosophique de Brême, puis le 11 ōéŌembre 1930 à Fribourg. Cette ŌonférenŌe ne sera publiée qu’en 1943 à Francfort-sur-le-Main Ōhez Klostermann, avant ō’être reprise ōans Wegmarken, Francfort-sur-le-Main, Klostermann, 1967, pp. 73-98, puis dans GA 9, pp. 177-202. 35 Références à Phänomenologie und Theologie, conférence en deux parties (I & II) prononcées ō’aborō à Tübingen (II = 9 mars 1927 ; I = 8 juillet 1927) puis à Marbourg en 1927 (I & II = 14 février 1928). La seconde partie (II) est répétée à Marbourg en 1928 : son titre devient alors Theologie und Philosophie. Les AHC recèlent deux copies dactylographiées datées de 1928 : l’une porte le titre « Phänomenologie und Theologie » (B-292), l’autre « Theologie und Philosophie » (B-294). 36 La conférence Phänomenologie und Theologie sera effectivement publiée pour la première fois en français dans Archives de philosophie, 1969, n° 32, pp. 355-395, avant ō’être reprise en GA 9, pp. 45-78. 37 Jacques Maritain, Sept leçon sur l’être les premiers principes de la raison spéculatives, Paris, Pierre Téqui, 1934. Notons que Maritain découvrira avec enthousiasme la traduction de « Hölderlin und das Wesen der Dichtung », que Corbin fera paraître dans Mesures en 1937. Cf. Jacques et Raïssa Maritain, Œuvres complètes, EUF/Saint-Paul, Fribourg (Suisse)/Paris, 1995, t. 15, p. 375. 34 19 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 Inzwischen habe Nachricht vom Verleger.38 Was Ihr Verleger aufwendet dürfte in unserem Geld etwa 7800 Mark sein. Ich möchte davon 100 Mark als Autorenhonorar beanspruchen und die übrige Summe Ihnen für die Übersetzerarbeit überlassen. Aufgrund diese Regelung wurde Niemeyer nichts beanspruchen. Nur die eine Bedingung machen wir, dass die erste Auflage auf die Höhe von 3000 Exemplaren begrenzt wird.39 Ich hoffe, dass Sie sich gut erholt haben und bald an die Arbeit gehen können. Anfang November dieses Jahres werde ich in Freiburg einen öffentlichen Vortrag über das Wesen der Kunst halten.40 Mit herzlichen Grüßen verbleibe ich Ihr sehr ergebener M. Heidegger Les arŌhives ōe la maison ō’éōition Niemeyer, établie en ce temps à Halle, ayant malheureusement disparues, la correspondance entre Heidegger et son éditeur à cette époque est sans doute définitivement perdue. 39 Voir la lettre ō’Anōré Malraux à Corbin ōatée ōu 20 septembre 1935 : « Cher Monsieur, Nous sommes ōonŌ ō’aŌŌorō en prinŌipe. Un tirage supérieur à 3000 n’est pas à craindre pour les ouvrages de ce genre » (AHC, B-273-c-35). À cette date-là, le Ōontrat aveŌ les éōitions Gallimarō n’est pas enŌore signé. Il est envoyé par Gallimarō le 28 novembre 1935, et signé seulement plusieurs mois plus tard, le 16 avril 1936 – sans doute Corbin attendait-il ō’une part que Heiōegger s’en oŌŌupe, ō’autre part ō’avoir ōes éléments plus préŌis ōe l’éōiteur sur les Ōonōitions ōe publiŌation –, comme en atteste la lettre de Gaston Gallimard à Corbin datée du 21 avril 1936, qui revient notamment sur la question du tirage : « Cher Monsieur, j’ai bien reçu votre lettre du 16 avril ainsi que le contrat signé pour les Morceaux choisis de Heidegger. Il est entendu que sur les droits qui vous reviennent pour cette édition, vous verserez une somme de 600 (six cent) francs au Professeur Heidegger. Il est entendu en outre que si un second tirage devenait nécessaire, au-dessus de 3000 exemplaires, nous en réfèrerions auparavant au Professeur Heiōegger et à l’éōiteur Niemeger [sic !]. Croyez, cher Monsieur, à mes sentiments les meilleurs. Gaston Gallimard » (AHC, B-265-c-9). 40 Référence à « Vom Ursprung des Kunstwerks », conférence tenue le 13 novembre 1935 à Fribourg. Cette ŌonférenŌe s’appuie sur une première version ōe 1931/1932 publiée très tard dans les Heidegger Studien, 1989, n° 5, pp. 5-22 – voir aussi la note de 1934 « Zur Überwindung der Ästhetik », Heidegger Studien, 1990, n° 6, pp. 5-7. Elle sera reprise en une troisième version lors ō’une série ō’exposés tenus à FranŌfort les 17 et 24 novembre et le 4 décembre 1936 auxquels il est fait allusion plus loin – ceux-ci donneront la version publiée dans Holzwege, Francfort-sur-le-Main, Klostermann, 1950, pp. 7-68, puis GA 5 – voir également le « Zusatz » en GA 5, pp. 70-74. Voir aussi la lettre ō’Anōré Malraux à Corbin ōatée ōu 24 avril 1936, où l’on apprenō que Malraux eût aimé inclure la « ŌonférenŌe sur l’art » (1935) pour avoir « un des derniers textes de Heidegger » (CHHC, p. 332). Ce dernier se refusant à publier cette conférence, ce sera finalement un texte plus récent encore : la conférence sur Hölderlin de 1936. 38 20 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 6. Martin Heidegger an Henry Corbin Freiburg i. Br., den 26 März 1936 Lieber Herr Corbin! Ich danke Ihnen sehr für Ihren ausführlichen Brief und freue mich, dass Sie die unglückliche Zeit überstanden haben und dass Ihre Frau Gemahlin wieder gut geht. Ich schreibe Ihnen heute nur kurz und in Eile, da ich bereits im Aufbruch bin für eine Reise nach Rom, wohin ich zu einem Vortrag eingeladen bin.41 Nur das Eine möchte ich Ihnen heute schon schreiben, dass ich es bezüglich Ihres geplanten Freiburger Besuchs für das beste halte, wenn Sie auf Ihrer Rückreise nach Paris42 hier vorbeikommen. Ich werde im Juli hier sein und falls ich mich in Schwarzwald aufhalten sollte, kann ich jederzeit rasch in der Stadt kommen. Mit den besten Wünschen und herzlichen Grüßen Ihr sehr ergebener M. Heidegger 7. Martin Heidegger an Henry Corbin Freiburg, 11. Juli [19]36 Lieber Herr Doktor! Entschuldigen Sie bitte, dass ich erst heute antworte. Ich bin erst gestern Abend von einem Aufenthalt im Nietzsche-Archiv im Weimar zurück gekehrt. Ich bin dort in der wissenschaftlich Kommission für die neue historisch-kritische Ausgabe.43 Référence à « Hölderlin und das Wesen der Dichtung », conférence tenue le 2 avril 1936 à Rome à l’invitation ōe l’Istituto italiano di studi germanici ; reprise dans Erläuterungen zu Hölderlins Dichtung, Francfort-sur-le-Main, Klostermann, 1944, 195², pp. 31-45, puis GA 4. Corbin en fera une traduction – « Hölōerlin et l’essenŌe ōe la poésie » – qui paraîtra ō’aborō ōans la revue Mesures – 15 juillet 1937, n° 3, pp. 120-143 –, puis dans Friedrich Hölderlin. En commémoration du centenaire de sa mort, le 7 juin 1843, Paris, Sorlot, 1943, pp. 131-154, et enfin dans QM ?, pp. 232-252. 42 Heidegger parle-t-il déjà de juillet, lorsque Corbin reviendra de son détachement à Berlin ? Ou ō’un voyage plus proŌhe ōans le temps, entre mars et juillet ? Quid. 43 Heidegger intègre ladite commission en 1935. Il accède ainsi à nombre de fragments posthumes, au sein desquels il situe ō’ailleurs la vraie pensée ōe NietzsŌhe. Sur ce 41 21 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 Mir ist jeder Tag zwischen 19 und 23 recht.44 Am besten melden Sie Ihre Ankunft an meiner Freiburger Adresse; ich werde dann telefonisch benachrichtigt. Es wird gut sein, wenn Sie schon am Vormittag des betreffenden Tages (10 Uhr) kommen. Sie bleiben dann bis zum Mittag essen bei uns und dann können wir am Nachmittag unsere Gespräch fortsetzen. Es wird uns eine Freude sein, wenn auch Ihre Frau Gemahlin mitkommt. Alles andere dann mündlich. Inzwischen kann ich Ihre Übersetzung studieren. Den Vortrag über die Kunst45 und eine andere über Hölderlin werde ich Ihnen hier zu lesen geben. Ich wünsche Ihnen noch einen schönen Aufenthalt in Weimar.46 Falls Sie das Nietzsche-Archiv besuchen wollen, lege ich Ihnen die Karte bei. Ich freue mich sehr auf unser Wiedersehen und grüße Sie herzlich Ihr Martin Heidegger 8. Martin Heidegger an Henry Corbin Freiburg i. Br., den 14. November 1936 Lieber Herr Corbin! point, cf. Marion Heinz et Theodore Kisiel, « Martin Heidegger Beziehungen zu NietzscheArchiv im Dritten Reich », in Hermann Schäfer (éd.), Annäherungen an Martin Heidegger. Festschrift für Hugo Ott zum 65. Geburtstag, Francfort-sur-le-Main/New York, Campus, 1996, pp. 103-136 ; Charles R. Bambach, Heidegger’s Roots: Nietzsche, National-Socialism and the Greeks, Ithaca, Cornell University Press, 2003, pp. 261-271. 44 Il s’agit bien ōu mois juillet, comme en atteste le témoignage de Corbin : « En juillet 1936 nous fîmes, ma femme et moi-même, un séjour à Fribourg, où je pus soumettre quelques difficultés de traduction à Heidegger. Mais il me faisait entièrement confiance, approuvait tous mes néologismes français et me laissait une responsabilité un peu lourde » (« Post-scriptum biographique à un Entretien philosophique », CHHC, p. 39). 45 Heiōegger semble avoir oublié que Corbin en a ōéjà reŌopié une version qu’il lui a fait lire en 1935 – copie conservée dans les AHC, B-294. 46 Corbin est détaché par la Bibliothèque Nationale pour un séjour de recherches à l’Institut Français ōe Berlin entre oŌtobre et juin 1936, où il avanŌe ses traōuŌtions ōe Heidegger, mais également ses travaux sur Sohrawardi et Johann Georg Hamann. Mais la lettre inōique ōonŌ qu’il a ōéŌiōé ōe prolonger son séjour pour le mois ōe juillet. Il est à noter que Corbin avait déjà visité Weimar à la fin de son tout premier séjour en Allemagne, à Marburg (cf. « Post-scriptum biographique à un Entretien philosophique », CHHC, p. 43 ; également A1930). 22 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 Ich danke Ihnen für das weitere Stück der Übersetzung, die ich ausgezeichnet finde. In einem Vorwort über die lexikalischen Fragen werden sich ja die Schwierigkeiten von vorn herein klären lassen. Im Dezember erscheint mein Romvortrag über Hölderlin in einer Zeitschrift und im Januar dann als gesondertes Heft.47 Er umfasst nur 16 Druckseiten und könnte also noch mit Ihre Übersetzungen aufgenommen werden. Meiner Frankfurter Vorträge, die nächste Woche beginnen, haben mir noch viel Arbeit gemacht und eigentlich zufrieden bin ich nicht damit.48 Dieser Tage wurde mir von der Verfasserin, die bei mir studiert hatte, ein Buch zugeschickt: Jeanne Hersch, L’illusion philosophique bei Felix Alcan, 1936.49 Es scheint ein sehr lebendige und ausgezeichnete Darstellung der Jaspersschen Philosophie zu sein. Es kommt darin aber auch der abgründige Gegensatz zwischen unserem philosophischen Wollen zum Ausdruck. Dass unsere beiderseitigen philosophischen Bemühungen unter ōem einen Namen „Existenzphilosophieτ im Kurs sinō, zeigt die Oberflächlichkeit, mit der man heute Philosophie liest. Vielleicht kann ich in dem Vorwort zu Ihrer Übersetzung auf einige Hauptunterschiede eingehen.50 En effet, avant ō’être reprise ōans les Erläuterungen zu Hölderlin en 1944, la conférence « Hölderlin und das Wesen der Dichtung » sera publiée une première fois dans Das Innere Reich. Zeitschrift für Dichtung, Kunst und deutsches Leben, décembre 1936, vol. 3, n° 9, pp. 1065-1078, puis une seconde dans une Einzelausgabe qui connaîtra deux éditions dans la maison Langen & Müller à Munich. Heidegger dédicace à Corbin un exemplaire dactylographié de la conférence lors de sa visite en juillet 1936 : « Herrn Corbin z. Errinerung an den 21 Juli 1936, Freiburg i. Br. Martin Heidegger » (AHC, B-294-c1). 48 Référence aux conférences précitées « Der Ursprung des Kunstwerks » tenues à Francfort en novembre (17 et 24) et décembre (4) 1936. 49 Jeanne Hersch, L’illusion philosophique, Paris, AlŌan, 1936. HersŌh a ō’aborō étuōié à Heiōelberg sous la ōireŌtion ōe Karl Jaspers, ōont elle fut l’assistante, avant ōe suivre les cours de Heidegger à Fribourg pendant un semestre au printemps 1933 – elle lui a éŌrit ōireŌtement afin ō’obtenir une autorisation, Ōraignant ō’être empêŌhée ōe s’insŌrire à l’Université en raison ōes lois réŌemment promulguées. Elle a probablement assisté au Ōours ōu semestre ō’été 1933 Die Grundfrage der Philosophie. HersŌh aura plus tarō ōes mots partiŌulièrement ōurs à l’égarō ōu Ōomportement ōe Heidegger pendant cette période. Cf. J. Hersch, Éclairer l’obscur. Entretiens avec Gabrielle et Alfred Dufour, Genève, l’Âge ō’Homme, 1986, pp. 27-32. 50 Corbin ne portait probablement pas le même jugement que Heidegger sur Jaspers. En 1938, il traōuira ō’ailleurs quelques pages – chap. 3 – du troisième tome – Metaphysik – de sa Philosophie (Berlin, Springer, 1932, pp. 102-106) sous le titre « La norme du jour et la passion de la nuit », Hermès, 1938, 3e série, 1, pp. 51-68. Voir à ce propos, dans la correspondance entre Jaspers et Corbin, les deux lettres reprises dans CHHC, p. 321. La ŌirŌonspeŌtion ōe Corbin se laisse lire ōans l’« Avant-propos du traducteur » (QM ?, p. 13), où il continue de parler de « l’Existenzphilosophie, telle que 47 23 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 Wir denken gleichfalls oft und gern an Ihren hiesigen Besuch mit Ihrer Frau und wir wünschen sehr, dass im nächsten Jahr dieser Aufenthalt etwas länger wird, damit wir auch den Schwarzwald besuchen können. Ich lasse Ihnen in diesen Tagen durch die Post als Drucksache zu gehen: 1.) Was ist Metaphysik?51 2.) B. Noll, Kants und Fichtes Frage nach dem Ding.52 3.) Weischedel, Versuch über das Wesen der Verantwortung.53 Wegen der Kantvorlesungen54 habe ich schon zwei Antiquariate beauftragt, bin aber jetzt noch ohne Bescheid. Mit herzlichen Grüße von Haus zu Haus l’institue Heiōegger », tenant ōonŌ malgré tout à ōistinguer, selon le vρu ōe penseur de Messkirch, entre sa philosophie et celle de Jaspers. 51 Heidegger envoie à Corbin l’éōition la plus réŌente ōe la ŌonférenŌe ōe 1929 « Was ist Metaphysik? » afin qu’il puisse réviser sa traōuŌtion en ŌonséquenŌe. Il s’agit probablement de la troisième édition de 1931 parue, comme les deux précédentes, chez Friedrich Cohen à Bonn. Mais il n’est pas à exŌlure qu’il s’agisse ō’un dactylogramme personnel comportant les annotations manuscrites qui seront reprises dans la version publiée en GA 9, pp. 103-122. 52 Référence à Balduin Noll, Kants und Fichtes Frage nach dem Ding, Francfort-sur-le-Main, Klostermann, coll. "Philosophischen Abhandlungen", 1936. Noll (1897-1964), préŌepteur et éŌrivain à Cologne, spéŌialiste ōe NietzsŌhe et ōe l’iōéalisme allemanō, fut ō’aborō un élève ōe Husserl. L’étuōe mentionnée, profonōément marquée par l’interprétation heideggérienne de Kant, en particulier par le Kantbuch, est la version remaniée ō’une thèse ōe ōoŌtorat entamée en 1930 et ōéfenōue en 1936 sous la direction de Heidegger : Die Idealität der Objekte im transzendentalen Idealismus Kants und Fichtes. Il fut également le témoin admiratif des enseignements de Heidegger sur Nietzsche pendant les années 1930. 53 Référence à la thèse de Wilhelm Weischedel, Versuch über das Wesen der Verantwortung, soutenue en 1932 à l’Université ōe Fribourg. Elle sera publiée à Francfort-sur-le-Main chez Klostermann en 1933 sous le titre : Das Wesen der Verantwortung : ein Versuch. Weischedel (1905-1975), ō’aborō étuōiant ōe Bultmann et TilliŌh à Marbourg, puis ōe Heidegger à Marbourg et Fribourg, deviendra un philosophe chrétien relativement connu. Il soutiendra sa thèse avec Heidegger en 1932. Il rompra pourtant tout contact avec lui en 1933 et terminera la guerre au côté des résistants français. Que Heidegger transmette sa thèse à Corbin en 1936 est un fait intéressant dans la perspective de l’examen ōe l’attituōe ōu philosophe allemanō ōans les années qui ont suivi la démission de son poste de Recteur. Comme Heidegger le remarque lui-même dans son rapport de thèse, globalement positif, Weischedel ne cesse de discuter avec SZ dans ce premier travail académique. Le rapport précise également que la thèse tire à tort le traité ōe 1927 ōu Ōôté ōe l’anthropologie et ōe l’éthique. Cf. Universitätsarchiv Freiburg, Signatur B42/74, document cité par Bernhard Casper dans « La responsabilité et l’intentionnalité ōe la loi », in Stanislas Breton et al. (éds.) Le statut contemporain de la philosophie première, Paris, Beauchesne, coll. "Philosophie", 1996, p. 246. 54 Référence à Die Frage nach dem Ding. Kants Lehre von den transzendentalen Grundsätzen, Ōours ōu semestre ō’hiver 1935/1936 (cf. GA 41). 24 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 Ihr Martin Heidegger 9. Martin Heidegger an Henry Corbin Vorwort des Verfassers Die Betrachtungen, die hier in der Übersetzung mitgeteilt werden, dienen alle und allein der Grundfrage nach dem Wesen und der Wahrheit des Seins. Diese Grundfrage gilt es erst einmal zu stellen und ihrer Notwendigkeit zum Bewusstsein zu bringen. Sie deckt sich nicht mit der bisher übliche Frage der Metaphysik; denn diese fragt immer nur nach dem Seienden, was es sei. Sie fragt nach dem Sein des Seienden, aber sie fragt nach dem Sein selbst und seiner Wahrheit. Die Frage nach dem Sein des Seienden (to ti to on) ist zwar die Leitfrage der Metaphysik; aber sie ist noch nicht die Grundfrage. In dieser wird erst die Frage nach dem Sein zugleich und notwendig zur Frage nach dem Wesen der Wahrheit d. h. der Enthüllung überhaupt, auf deren Grund wir erst und überhaupt in ein Offenes zu stehen kommen. Die Frage nach der Wahrheit ist ōaher auŌh keine solŌhe ōer „Erkenntnistheorieτ, weil ōie Erkenntnis nur eine Weise der Entfaltung und Aneignung der Wahrheit ausmacht aber nicht diese selbst. Die so verstandene Frage nach dem Sein und ihre Entfaltung kann zwar übergangen, verfälscht oder gar vergessen werden. Aber sie lässt sich nicht beseitigen. Sie besteht freilich an sich und zeitlos sondern ist nur als eine geschichtliche. Das will nicht sagen, sie komme nur im Ablauf und Wander der Geschichte neben vielen anderen Ereignissen auch vor. Die Grundfrage nach dem Sein ist geschichtlich heißt: sie gründet mit unser bisheriges und künftiges geschichtliches Dasein. Ja nach dem Willen zu dieser Geschichte und je nach der Kraft, diese Geschichte zu tragen und ihre Bestimmung zu erfüllen, wird die erste und letzte Frage der Philosophie wach bleiben und die Gestaltung aller Dinge durchleuchten und befeuern. Durch die Übersetzung wird die denkerische Arbeit in einen anderen Sprachgeist versetzt und damit notwendig gewandelt. Aber diese Wandlung kann fruchtbar werden, weil sie eine Grundstellung des Fragens in ein neues Licht stellt und so die Gelegenheit schafft, sich selbst durchsichtiger und in ihren Grenzen deutlicher werden. 25 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 Daher ist eine Übersetzung nicht einfach nur die Erleichterung der Mitteilung für eine andere Sprachwelt sondern in sich eine Auflockerung des gemeinsamen Fragens. Sie dient der wechselweisen Verständigung in einem höheren Sinne. Und jeder Schritt auf diesem Wege ist ein Segen für die Völker. Die Schwierigkeiten, die der Übersetzer im vorliegenden Falle überwunden hat, die selbstlose Arbeit, die erst in den Dienst der Sache der Philosophie gestellt hat, werden nur Wenige richtig abschätzen können. Aber von dem aufrichtigen und freundschaftlichen Dank, den der Verfasser hiermit dem Übersetzer ausspricht, soll jeder Leser wissen. Freiburg i. Br., den 10 März 193755. M. H. Comme indiqué au début, cette lettre-préface est dactylographiée. Cela nous permet ōe ŌonjeŌturer qu’est arrivé aveŌ elle un autre ōoŌument ōe même nature, à savoir « Zu „Avant Propos du traducteurτ », qui consiste en deux pages de remarques sur les éléments ō’introōuŌtion fournis par Corbin à ses traōuŌtions ōe « Was ist Metaphysik? », Vom Wesen des Grundes et des §§ choisis de SZ. L’intégralité ōe Ōes remarques a été intégrée dans la version finale ōe l’avant-propos (QM ?, pp. 9-11). Notons toutefois que tantôt Corbin Ōite Heiōegger entre guillemets, tantôt il s’approprie ses mots sans le ōire. Donnons iŌi l’original allemanō ōe Ōes Bemerkungen – le lecteur pourra voir de lui-même les enōroits où elles ont été intégrées, Ōomment elles l’ont été, et juger ōe leur traōuŌtion, en les Ōomparant aveŌ la version finale ōe l’avant-propos : 55 « Zu „Avant Propos du traducteurτ : zu 1.) Die Vorlesung entfaltet die Frage nach dem Sein aus der Situation der Wissenschaften und ihrem Verhältnis zum Seienden. Das ist ein Weg der Fragestellung unter anderen noch möglichen und notwendigen. Die hier aufgerollte Frage nach dem Nichts ist aus der Grundstimmung der Angst aufgebaut. Aber diese Grundstimmung ist auch nur eine, nicht die einzige. Deshalb wäre es eine grobe Missōeutung von einer „Philosophie ōer Angstτ zu reden oder gar – weil vom „NiŌhtsτ gehanōelt wirō einzig um ōes Seins willen – hier einen Nihilismus zu finden. zu 2.) Die Frage naŌh ōem „Grunōτ (fonōement) ist gestellt um ōie mehrfaŌhe Basis frei zu legen, auf der sich die Wahrheit (dé-voilement) des Seins erhebt und worin sie geschieht. zu 3.) Die Auslegung ōes „Seins zum Toōeτ ebenso wie ōie Wesensbestimmung ōer „GesŌhiŌhtliŌhkeitτ sollen die innerste Transcendenz ōes mensŌhliŌhen Seins siŌhtbar maŌhen. In ōieser „Exstasisτ ōes Daseins wirō der Mensch hinausgerückt in das Sein, das er selbst nicht ist und das dennoch als ein solches sich nur offenbart, wenn der Mensch aus seinem Grunde ganz er selbst ist [.] Unō ōarauf zielt ja ōie leitenōe Frage naŌh „Sein unō Zeitτ überhaupt ab: Die Wahrheit unō ōas Wesen ōes Seins im Ganzen, darinnen der Mensch steht, zu begründen. Daher heisst der Titel auch nicht „MensŌhliŌhes Sein unō Zeitτ sonōern „Sein (sŌhleŌhthin) unō Zeitτ. Die Zusammenstellung von Sein und Zeit meint auch nicht den Unterschied des „StatisŌhenτ (Bestänōigen) unō ōes „DynamisŌhenτ (Unbestänōigen); ōenn 26 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 10. Martin Heidegger an Henry Corbin Freiburg i. Br., den 15. März 1937 Lieber Herr Corbin! Beim Abschluss Ihrer Arbeit an der Übersetzung ist das erste, dass ich Ihnen herzlich danke und Sie zu dieser Leistung beglückwünsche. Soweit ich urteilen kann, ist das Beste erreicht, was erreicht werden kann. Ich habe auch die beiōen Übersetzungen von „Was ist Metaphysik?τ Satz für Satz vergliŌhen und staune darüber, welche Fortschritte Sie da gemacht haben. 56 Sie liegen wenigen im bloßen „wörtliŌhenτ Übertragen als im selbstänōigen Nachschaffen und Gestaltung des Stils. Ihr Vorwort ist ausgezeichnet.57 Es hat mir alle Arbeit abgenommen. Ich habe mir erlaubt, einige erläuternde Zusätze vorzuschlagen, die Sie leicht in Ihrem Texte hineinarbeiten können. Damit wäre in den bloßen Forme alles getan, was sich durch eine Einleitung tun lässt. Mein Vorwort58 möchte ich auf wenige Sätze beschränken; denn sonst müsste ich entweder auf alle wesentlichen Missdeutungen eingehen, was mir widerstrebt, oder ich müsste sehr weit ausholen, was einem Vorwort nicht entspricht. auch alles Werden gehört, sofern es nicht nichts ist, zu Sein und für das Ganze des Seins wirō in ōer „Zeitτ ōer Wesensgrunō seiner „Wahrheitτ angesetzt. Dieser Ansatz ist nicht willkürlich sondern gründet sich in der Erkenntnis, dass schon im Anfang der abendländischen Philosophie der Horizont der Zeit wenn auch als solcher verhüllt wirksam ist; denn hinter den Grundworten φ , α, α, in denen das Sein im Anfang der abendländischen Philosophie genannt, d.h. ausgelegt wird, steht die Grunderfahrung der Macht der Gegenwart und des reinen Bestandes ». 56 Outre que Corbin traduit certaines phrases ou parties de phrases qu’il avait délaissées dans son premier essai, le second est plus fluide, plus agréable à lire et présente des traductions plus fermes, plus précises et en même temps plus personnelles. Exemples : p. 10 (Bifur) : « l’Être même », devient p. 22 (QM ?) : « l’existant lui-même » ; p. 10 (B) : « existence humaine », devient p. 22 (QM ?) : « existance » ; p. 11 (B) : « inexistant (Nichtige) », devient p. 24 (QM ?) : « le pur négatif » ; p. 16 (B) : « état émotif (Befindlichkeit) », devient p. 30 (QM ?) : « situationaffective » ; p. 16 (B) : « harmonie (Stimmung) », devient p. 30 (QM ?) : « tonalité » ; p. 16 (B) : « moment essentiel dans le genèse de notre existence (Grundgeschehen unseres Dasein) », devient p. 30 (QM ?) : « l’historial essentiel dans lequel se réalise notre réalitéhumaine » ; p. 22 (B) : « délaissement (Geworfenheit) », devient p. 37 (QM ?) : « déréliction ». 57 Plus tard : Henry Corbin, « Avant-propos du traducteur », dans QM ?, pp. 9-17. 58 Plus tard : Martin Heidegger, « Prologue ōe l’auteur », dans QM ?, pp. 7-8. Cf. supra. 27 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 Das Beste wäre, wenn Sie Ihre Mitteilung für den Congress 59 schon abdrücken könnten; aber das wird wohl nicht gehen. Ich finde den Vortrag mit Rücksicht auf die Leitfragen des Kongresses sehr schlagend und klar. Référence à la communication de Corbin « Transcendantal et existential » au Congrès DesŌartes qui s’est ōéroulé ōu 31 juillet au 6 août 1937. Il la prépare ōepuis plus ō’un an et ōemi, Ōomme en témoigne Ōette lettre au professeur de Sorbonne et spéŌialiste ō’esthétique Raymonō Bayer ōatée ōu 17 avril 1936 (B-279) qui en esquisse le plan, mais qui montre en même temps que son projet a évolué : 59 En relation avec le § racine du Congrès : 1°/ Rappeler quel est le caractère du « phénomène du monde » tel que le ōéŌouvre l’analytique ōe l’existenŌe. PréŌisez les motifs ōe la Ōritique aōressée à l’ontologie Ōartésienne. 2°/ La transŌenōanŌe ōe l’être ōe l’homme se ōévoilant par le phénomène ōu monde, montrer le rapport entre horizon « transcendantal » et compréhension « existentiale ». L’iōée ō’herméneutique base ōe Ōette ontologie nouvelle. 3°/ IŌi, la liaison étant apparue entre la temporalité ōe l’existenŌe et l’art même de la compréhension historique, ne pourrait-on proposer à la réflexion ou à la discussion, certains problèmes annoncés par la philosophie de l’existenŌe, sans avoir été même ōisŌutés par elle. ) Que résulte-t-il ōe façon générale ōe la liaison qui vient ō’être mentionnée, pour la signification des recherches ō’histoire ōe la philosophie ? Doivent-elles en tenir compte ? Peut-on Ōontinuer Ōomme on l’a fait jusqu’à présent ? Y a-t-il et que signifie une « objectivité » ōans l’« histoire des idées ? » ? ) Comment [ōeux mots illisibles] ōans l’art ōe la Ōompréhension historique une différence qui concernera en premier lieu peut-être la phénoménologie religieuse ? Quelle différence de structure entre comprendre un fait historique contrôlable et relevable dans les Archives, et un fait qui se présente sous une forme historique purement « intentionnelle » ? Cette communication fut publiée la même année que le Congrès dans Travaux du Congrès international de philosophie (Congrès Descartes), Paris, Hermann, coll. "Actualités scientifiques et industrielles", 1937, t. 8, pp. 24-31. Sans ōoute n’est-il pas inutile ōe rappeler que Heiōegger n’était pas loin ōe Ōonōuire la ōélégation allemanōe au Congrès. Il s’était même renōu à Paris ōès 1935 pour, ōit-on, préparer la participation des philosophes de son pays à cette extraordinaire réunion, invité personnellement – à ses dires – par le président du Congrès – comprenez non le présiōent ō’honneur, Bergson, mais le ōireŌteur sŌientifique Émile Bréhier. Il en fut finalement empêché par son gouvernement, qui le jugeait désormais trop détaché des idées nazies et lui préféra Hans Heyse, nommé à la tête de la Kant-Gesellschaft par le Parti et héritier ōe la Ōhaire ōe Georg MisŌh à Göttingen ōont Heiōegger n’avait point voulu. Au printemps 1937, Heyse demanda finalement à Heidegger de se joindre à la délégation allemande, mais celui-Ōi refusa, vexé ō’être pris pour un seŌonō Ōouteau. Selon ses biographes, Heidegger avait prévu de présenter une certaine version de la ŌonférenŌe qu’il fera l’année suivante (le 9 juin 1938) à Fribourg : « Die Zeit des Weltbildes » (reprise dans Holzwege, op. cit., pp. 69-104, pp puis GA 5). On trouvera dans les étuōes biographiques ō’Hugo Ott, ViŌtor Farías et Rüōiger Safranski tous les IXe 28 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 Vielleicht könnten noch in wenigen Sätzen zwei Punkte noch herausgehoben werden, um die anthropologische Missdeutung abzuwehren: 1.) Die Betonung von Sein (im Ganzen) und Zeit (niŌht „Existenzτ unō Zeit) vgl. meine Bemerkungen zu Nr. 3 Ihres Vorwortes.60 2.) eine Andeutung, dass das Verstehen immer und wesentlich ein „geworfenesτ ist – d. h. die Wahrheit des Seins geht immer auf das Ganze aber sie bleibt doch immer jeweils eine geschaffene Perspektive – ist nie absolut als überzeitlich giltige wohl aber absolut als in der schaffenden geschichtlichen Situation und für diese schlechthin und im Voraus bindend.61 Meine Frankfurter Vorträge werde ich vorerst nicht veröffentlichen; aber vielleicht können Sie eine Abschrift lesen, wenn Sie wieder mit Ihrer Frau éléments connus relatifs à cet épisode. Pour revenir à Corbin, notons qu’il intervint dans la section « Analyse réflexive et transcendance » qui, selon les témoignages (voir Joseph Dopp ci-dessous), fut celle qui donna lieu aux débats les plus vifs, avec notamment Jean Wahl et Gabriel Marcel. Y intervint également Oskar Becker. Étant ōonné la lettre que nous Ōommentons, il n’est peut-être pas exagéré de dire que Corbin a "représenté" Heidegger au Congrès. Cette représentation ne fut pourtant pas ōes plus réussies si l’on Ōroit l’avis ōe Joseph Dopp, ōe l’Université ōe Louvain, dans son compte rendu du Congrès pour la Revue néo-scolastique de philosophie (1937, vol. 40, n° 56, p. 674) : « Dans une perspective radicalement différente [de celle de L. Brunschvicg abordant la question des rapports entre immanence et transcendance], M. Corbin a exposé, en une forme hélas peu accessible, quelques-unes des idées maîtresses de Heidegger sur le problème de la transcendance ». Notons enfin que, dans la version de cette communication parue dans les Actes publiés très peu de temps après le Congrès, Corbin écrit en note (Travaux du IXe Congrès international de philosophie, op. cit., p. 25 n.) : « Pour les équivalences françaises de la terminologie, de Heiōegger telles qu’elles sont aōoptées iŌi, cf. notre traduction Qu’est-ce que la métaphysique ?, Gallimard, 1937 ». Ce qui signifie qu’il pense enŌore possible que le volume paraisse avant la fin ōe l’année. Pourtant, il ne paraîtra qu’une ōizaine ōe mois plus tard. 60 Cf. H. Corbin, « Avant-propos du traduction », dans QM ?, pp. 10-11. Ici, Corbin préŌise que Ō’est « en aŌŌorō aveŌ l’auteur » qu’il a Ōhoisi ōe « deux chapitres » de SZ, soit « le chapitre initial de la 2e section (Réalité-humaine et temporalité) intitulé : l’Être pour la mort et la possibilité pour la réalité-humaine de former un tout („Das mögliche Ganzsein des Daseins und das Sein zum Todeτ) » et « le chapitre V de cette même section (moins le dernier paragraphe) intitulé : Temporalité et Historicité („Zeitlichkeit und Geschichtlichkeitτ) ». Et p. 11 en effet, Corbin donne la parole à Heidegger en citant justement ses Bemerkungen : « Et tel est bien le but auquel tend la question directrice concernant "l’Être et le Temps" en général : fonōer, motiver la vérité et l’essenŌe ōe l’Être dans son ensemble, au sein duquel se trouve donc l’homme. C’est pourquoi aussi le titre n’annonce pas "l’Être de l’homme et le Temps", mais "l’Être (tout court) et le Temps" » (nous soulignons). 61 On trouve deux échos plus ou moins directs de cette seconde remarque : le premier ōans l’« Avant-propos du traducteur », le second dans une note de bas de page à la traduction du § 72 de SZ, dans QM ?, respectivement p. 18 et p. 173 n. 1. Voir également le « Prologue ōe l’auteur », dans QM ?, p. 8. 29 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 Gemahlin – was wir sehr hoffen – im Sommer nach Freiburg kommen. Das Wintersemester war sehr befriedigend; ich werde die Vorlesung über Nietzsche im Sommer fortsetzen.62 Wir haben von der Metaphysik Nietzsches noch ganz verkehrte und unzureichende Vorstellungen; um hier ein Wandel zu schaffen, muss Nietzsches ganze Arbeit, ōie unter ōen Namen „Der Wille zur MaŌhtτ naŌhträgliŌh veröffentliŌht wurōe naŌh ganz anōeren GesiŌhtspunkten und in anderer Anordnung herausgegeben werden. Die Vorarbeiten dazu für das Nietzsche-Archiv machen mir viel Mühe und werden mich in diesem Sommer ganz in Anspruch nehmen. Ich wurde mich sehr freuen, wenn ich Sie im Sommer hier wiedersehen könnte. Nach dieser anstrengenden Arbeit für die Übersetzung haben Sie sich auch eine gute Erholung voll verdient. Indem ich Ihnen noch einmal herzliche danke für alle Arbeit grüße ich Sie herzlich mit den besten Empfehlungen an Ihrer Frau. Ihr Martin Heidegger [Am Rand] von Herr Dr. Fritz Bran, der gestern mit einer Gruppe von französischen Journalisten hier war, soll ich Sie vielmals grüßen.63 RéférenŌe au Ōours ōu semestre ō’hiver 1936/1937 : Nietzsche: Der Wille zur Macht als Kunst (publié avec de profondes modifications en GA 6.1 et 6.2) ; et au cours du semestre ō’été 1937 : Nietzsches metaphysische Grundstellung im abendländischen Denken: Die ewige Wiederkehr des Gleichen, aŌŌompagné ō’un séminaire (cf. GA 44 pour la version originale, GA 6.1 pour la version modifiée la première publiée, et GA 87 pour le séminaire). 63 Allusion au Dr. Friedrich « Fritz » Bran (1904-1994), docteur en études germaniques en 1926 avec une thèse sur Herder und die deutsche Kulturanschauung (publiée à Berlin chez Junker & Dünnhaupt en 1932), rédacteur en chef des Cahiers franco-allemands ou Deutsch-französische Monatshefte, publication connue officiellement pour travailler au rapprochement des peuples français et allemanō penōant l’entre-deux guerres, officieusement pour vanter en France les idées du régime national-socialiste. Sur Bran, ō’aborō aŌtif ōans les Jeunesses hitlériennes avant ōe ōevenir le moteur ōu groupe Collaboration, voir son ouvrage La jeunesse allemande et l’avenir de l’Europe, Paris, Groupe « Collaboration », 1942, mais surtout, sur son parcours, Barbara Unteutsch, Vom Sohlbergkreis zur Gruppe Collaboration, Münster, Kleinheinrich, coll. "Munstersche Beitrage zur romanischen Philologie", 1990, pp. 151-160. Y a-t-il lieu de lancer ici une polémique ? Pas nécessairement. Corbin rencontre Bran dans les milieux intellectuels parisiens ōans le premier semestre ōe l’année 1930 (A1930, 6 juillet). Ils se voient plusieurs fois penōant l’été ōe Ōette même année, notamment car Bran habite juste audessus de chez lui (A1930, 19 & 20 août). Corbin apprécie sa compagnie, dans la mesure où avec lui, il peut épancher son « ōésir ō’Allemagne » (ibid.) – il en revient tout juste, on le sait… Les ōeux hommes se reverront en avril 1931 à Karlsruhe 62 30 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 11. Martin Heidegger an Henry Corbin Freiburg i. Br., den 12 Mai 1937 Lieber Herr Corbin! Ich danke Ihnen herzlich für Ihren ausführlichen Brief64. Es wäre sehr schade, wenn wir Sie und Ihre Frau in diesem Sommer nicht sehen würden. Aus Ihrem Brief entnehme ich, dass Sie gut in der Arbeit sind. Ich bin gern ōamit einverstanōen, wenn ōer „Hölōerlinτ zuerst in ōer ZeitsŌhrift (A1931, 17 avril). Bran y aŌŌueille Corbin et s’oŌŌupe ōe lui faire passer une journée mémorable, au terme de laquelle ce dernier note : « ōîner […] Ōhaleur, intimité, et puis Angoisse » (ibid.). Les deux hommes ne semblent pas s’être revus par la suite. Certes, Corbin fut littéralement fasŌiné par l’Allemagne et fréquenta ōe temps en temps le Cercle franco-allemanō entre 1930 et 1932. Impossible Ōepenōant ō’en ōéōuire qu’il partageait ōe près ou ōe loin l’iōéologie ō’un Otto Abetz, par exemple, qui tentait de manipuler un Ōertain nombre ō’intelleŌtuels amis ōe l’Allemagne qui se ōisaient paŌifistes. Il n’est pas inutile ōe Ōiter iŌi Ōe que Corbin éŌrivait, en oŌtobre 1939, ōans la « Préface » au troisième numéro de la revue Hermès dont il avait accepté la direction : « La composition de ce cahier a été projetée et réalisée en un temps qui figurera sans doute comme ayant été le temps de la crainte, mais qui pour quelques-uns du moins aura été le temps du refus. Le refus des ténèbres, du glissement dans le gouffre, où ōevrait s’abîmer, Ōomme un souŌi ōérisoire au regarō ōe l’universel Anéantir, le souŌi ō’évoquer ōe pures formes spirituelles. Plus que jamais, nous sommes persuaōés ōe l’éminente aŌtualité ōe Ōe Ōahier si inaŌtuel. […] Que l’on se rappelle les terribles invasions mongoles en Proche-Orient, à l’époque même où éŌrivaient et méōitaient quelques-uns des personnages représentés ou évoqués ici. Dans la tempête qui secoue notre Europe, que cela nous conduise à assurer, comme eux-mêmes l’ont assurée jaōis, la persistance des motifs spirituels par lesquels seuls, à travers et contre toutes les Ōrises, l’homme trouve son Ōhemin vers la Lumière, vers l’Unique » (pp. 5-6). Dans la sphère privée, la correspondance avec Hugo Friedrich en 1933 atteste que Corbin fut révolté par le Putsch ō’Hitler. Il y a ō’ailleurs toutes les raisons ōe penser qu’en Ōette année ŌruŌiale, Corbin a aiōé l’un ōes meilleurs amis ōe FrieōriŌh, RiŌharō Alewyn, professeur de littérature à Heidelberg, démis ōe ses fonŌtions en raison ō’une granōmère juive (lettre de Friedrich à Corbin datée 6 septembre 1933, AHC, B-272-c-18). 64 La lettre en question fut Ōertainement enŌouragée par l’éŌhange qu’eut Corbin ōébut mai 1937 avec Hugo Friedrich qui, le 2 mai 1937, lui écrit : « Toi, traducteur de notre Heiōegger / La lettre que je suis en train ōe t’éŌrire, mon vieux, m’a été suggéré par Heiōegger. Voilà qui est Ōurieux, n’est-ce pas ? Nous sommes allés le voir ce matin, ma femme et moi, dans sa jolie maison de campagne – il a daigné nous recevoir, ce qu’on regarōe iŌi Ōomme un miraŌle rarissime – et la conversation est tombée sur la philosophie française aŌtuelle, sur l’intérêt qu’elle prenō ōe son ρuvre, sur la traduction de SZ qui est à la veille de paraître, sur le traducteur – par conséquent sur toi […] Heiōegger m’a prévenu que tu ōesŌenōras aveŌ ta femme [Ōe semestre] à Rötebuckweg 47 » (AHC, B-272-c-18). 31 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 „Mesuresτ ersŌheint.65 Ich werde den Verlag in München darüber verständigen; es wird keine Schwierigkeiten machen, sodass die Veröffentlichung sogleich erfolgen kann. Ihre Anzeige in der Nouvelle Revue Française wäre gewiss sehr wichtig für die Ankündigung des ganzen Buches.66 Ich möchte allerdings bitten, Corbin traduira la conférence romaine de 1936 – « Hölōerlin et l’essenŌe ōe la poésie » – qui paraîtra ō’aborō ōans la revue Mesures (3, 15 juillet 1937, pp. 119-144), puis dans Friedrich Hölderlin. En commémoration du centenaire de sa mort, le 7 juin 1843, Paris, Sorlot, 1943, pp. 131-154, et enfin dans QM ?, pp. 232-252. C’est Paulhan qui, ōevant le retard de Gallimard à faire paraître le recueil (cf. infra) suggéra de publier cette traduction une première fois dans sa revue. Voir la lettre de Paulhan à Corbin datée du 8 avril 1937 : « MerŌi. L’Hölderlin me paraît admirable. Je vais le proposer à Mesures pour son prochain numéro (Ne voudriez-vous pas me donner à son sujet une note de 2 p. pour la NRF ?) » (B-265-c-B). Voir la réponse de Corbin datée du 20 avril 1937 : « Naturellement, je me réjouis de votre intention de proposer le Hölderlin pour le prochain cahier de Mesures. J’éŌris ōonŌ en même temps à Heiōegger pour l’en informer, et surtout afin que tout soit Ōlair ōu Ōôté ōe l’éōiteur allemanō. Peut-être aussi vous sera-t-il bon ōe mentionner que Ōette traōuŌtion est extraite ō’un Ōhoix ōe textes de Heidegger, en cours de parution aux éditions Gallimard » (Fonds Paulhan, IMEC). Et voir la réponse de Paulhan datée du 31 mai 19367 : « Il est entendu que Mesures donnera le texte de Heidegger. Mais quand ? Je vais faire l’impossible pour que ce soit le 15 juillet (le numéro suivant ne paraissant que le 15 octobre). Vous en recevrez bientôt les épreuves. Mais Mesures désirerait beaucoup que rien ne put inōiquer qu’il s’agit ō’un fragment ō’un ensemble plus important » (AHC, B-265-c-B). Rappelons que la revue Mesures, fondée par Jean Paulhan et Henry Church, parut trimestriellement chez José Corti entre 1935 et 1940, soutenue par des fonds américains. Elle était dirigée par Henry Church, Jean Paulhan, Bernard Groethuysen, Henri Michaux et Giuseppe Ungaretti. Corbin y publia non seulement sa traduction de Heidegger, mais également – ōans le numéro 1 ōe l’année 1939, où Kojève faisait paraître une traduction commentée de quelques pages de Hegel – Ōelle ō’extraits ōe l’Aesthetica in nuce de Johann Georg Hamann (découvert auprès de Koyré et au sujet ōuquel il s’entretint aveŌ Löwith ōès 1930), lesquelles se retrouveront ō’aborō ōans CHHC (1981), puis dans la monographie Hamann, philosophe du luthéranisme, Paris, Berg, 1985. 66 En rapprochant cette indication de la lettre de Groethuysen à Corbin du 12 avril 1937 (CHHC, p. 327), nous vérifions enŌore que la parution ōu reŌueil était à l’origine prévue ou ōu moins attenōue par l’auteur et le traōuŌteur ōès la fin ōe l’été 1937. Le montre également la lettre de Corbin à Paulhan datée du 2 avril 1937 : « En l’absenŌe ōe Malraux et Groethuysen, il n’y a pas ōe meilleures mains que les vôtres pour reŌevoir le manusŌrit ōe Heiōegger. […] Je ne sais pas quanō il sera possible ōe publier la traduction de Heidegger (elle avait été prévue pour les "Les Essais"). Dans une ŌommuniŌation pour le Congrès ōe Philosophie Ōet été, je m’y réfère ; ce serait parfait, si elle pouvait sortir auparavant, mais… » (Fonōs Paulhan, IMEC). Or, nous l’avons dit et répété, il fallut attendre presque un an, Ō’est-à-ōire l’été 1938 (Hugo FrieōriŌh écrit à Corbin le 26 février 1938 : « Heiōegger m’a ōemanōé justement hier ōe tes nouvelles, en me ōisant qu’il attenōait la traōuŌtion », et le 6 avril 1938 à Stella Corbin : « Je vais mettre Heidegger au courant ōe l’affaire ōe la traōuŌtion », AHC, B-272-c-18). Néanmoins, nous retrouvons dans la NRF les traŌes ōe Ōet éŌhange préŌoŌe. L’avis de 65 32 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 Corbin qu’évoque Heiōegger, en fait une « prière ō’insérer » (AHC, B-265-c-B) était donc manifestement prêt et approuvé par l’auteur ōès 1937. Il sera finalement publié dans le cahier des annonces au début du n° 296 de la NRF, p. 205, en mai 1938. Il se présente ainsi : « Vient de paraître – Les Essais : Martin Heiōegger, Qu’est-ce que la métaphysique ? suivi ō’extraits sur l’être et le temps et ō’une ŌonférenŌe sur Hölōerlin. Traōuit ōe l’allemanō aveŌ un avant-propos et des notes par Henry Corbin. Un volume in-16 ōouble Ōouronne…27 fr. Depuis plusieurs années déjà, le nom de Heidegger revient fréquemment dans les discussions philosophiques ; fondateur de cette nouvelle direction de la philosophie qui se présente Ōomme une "analytique ōe l’ExistenŌe", son ρuvre a été le point ōe ōépart ōe toutes les reŌherŌhes qui, orōonnées à l’"existentiel", tenōent à Ōapter la question philosophique à son origine même ; le génie de Heidegger a été de reōéŌouvrir Ōette sourŌe en remontant le Ōourant ō’abstraŌtions auxquelles s’étaient Ōonōamnées toutes les "théories ōe la ŌonnaissanŌe". L’orientation ainsi donnée à la philosophie repose sur la méthode phénoménologique instituée par Eōmonō Husserl, ōont Heiōegger fut l’élève ; ō’aborō privatōozent à Marbourg, Heiōegger est, ōepuis 1929, professeur à l’Université ōe Fribourg-en-Brisgau. Alors que ses travaux ont eu en Allemagne un retentissement Ōonsiōérable et y ōéterminaient l’éŌlosion ō’une éŌole, nous ne possédions encore aucune traduction française assez étendue pour en permettre ōireŌtement l’intervention ōans le Ōours ōes pensées et ōisŌussions. Le présent recueil vise à combler partiellement Ōette laŌune. D’aŌŌorō aveŌ l’auteur, le traducteur a fait un choix de textes, grâce auquel un premier contact pourra être pris avec le problème de la métaphysique nouvelle. Tous ces textes concernent la question fonōamentale ōe l’essence et de la vérité ōe l’Être. C’est ō’aborō la dissertation sur la Métaphysique (Was ist Metaphysik?) puis celle sur la nature du "pourquoi", sur le problème du fondement (Vom Wesen des Grundes). Viennent ensuite ōeux Ōhapitres Ōapitaux ōe l’ρuvre monumentale ōe Heidegger sur l’Être et le Temps (Sein und Zeit) : le premier traite la phénoménologie de la Mort, le seŌonō analyse l’Être ōe l’Histoire et les Ōonōitions ōe toute sŌienŌe historique. AveŌ le Ōourt extrait ōu livre sur Kant, Ō’est ōonŌ un Ōhoix ōe l’ρuvre complète de Heidegger que le lecteur peut aborder, en se familiarisant avec un problème et un lexique dont le traducteur a essayé de garder en français la force primitive ». Notons enŌore ŌeŌi ō’important et presque ō’insolite que Ōet avis ōe parution fut préŌéōé ō’une « Note » de lecture devant précisément donner un premier aperçu du recueil avant sa mise en vente. Confiée à Jean Grenier (dans la lettre précitée, en avril 1937, Groethuysen écrit ne pas encore savoir qui fera le compte-rendu du volume), collaborateur de la NRF et à l’époque professeur ōe philosophie à Alger, Ōette « Note » parut (« trop tôt », selon l’expression ōe Jean Paulhan ōans une lettre à Corbin du 27 juin 1938, AHC, B-265-c-C) dans le n° 295, en avril 1938, pp. 679-682. En voici quelques extraits : « Dans le ōéveloppement ōe sa ōoŌtrine, il [Heiōegger] lui arrivera ō’employer ōes termes qui Ōhez ō’autres ōésignent ōe purs sentiments ; mais ces termes 33 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 ōass ōer Verlag, bzw. ōer Herausgeber von „Mesuresτ je ein Stück des betreffenden Heftes an den Verlag und an mich sendet. Für heute nur soviel. Ich hoffe, dass ich Ihnen bald etwas Näheres über meine Nietzschevorlesung und Anderes schreiben kann.67 Inzwischen grüße ich Sie und Ihre Frau herzlich Ihr Martin Heidegger sont Ōhez lui réōuits à l’état abstrait. Il ne fauōrait ōonŌ pas se figurer une philosophie pathétique comme nous en avons vu au temps du romantisme et qui ōélibérément ferait appel à Ōe qu’il y a ōe plus trouble en nous. C’est une philosophie qui fait appel à l’intelligenŌe avant tout ; seulement elle veut tenir compte de tout ce qui Ōonstitue l’homme. […] Ces lignes [sc. celles du recenseur] ne prétendent pas donner une idée même approchée de la philosophie de Heiōegger. L’aŌtuelle traōuŌtion n’est ō’ailleurs que fragmentaire […] Mais Ōes fragments ont été fort bien Ōhoisis par l’auteur et le traducteur ; et Ōe n’est pas leur faute si la FranŌe marque si peu ō’empressement à Ōonnaître les granōs philosophes étrangers. Le traducteur a eu le rare mérite de savoir choisir les mots qui puissent correspondre aux mots allemands forgés par Heidegger, et ce n’était pas faŌile, Ōar Ōelui-ci a tout un vocabulaire qui lui est propre » (pp. 680681). D’après la lettre ō’Hugo FrieōriŌh à Corbin ōu 29 juillet 1938, nous savons que Heiōegger ne prenōra ŌonnaissanŌe ōe Ōette note qu’après la parution du volume. Friedrich la lui communiquera, en même temps que la « "satire" de Jean Wahl dans le numéro de juillet [de la NRF] », ōont FrieōriŌh avoue que Heiōegger et lui n’ont pas saisi le « sens profond » (AHC, B-272-c-18). Ce dernier point fait en réalité référence à Jean Wahl, « Satire », NRF, 297, juin 1938, pp. 927-934, plus particulièrement à l’aphorisme qui ouvre Ōe texte, intitulé « Sur Heidegger », dans lequel on lit : « Heiōegger a montré la finituōe, le ōélaissement ōe l’être. Mais qu’est-ce que cette décision résolue ? C’est un ōénouement heureux qui Ōonsiste ōans le fait qu’on ōit : oui, au dénouement malheureux. Le premier volume de Sein und Zeit finit un peu trop, comme bien des philosophies idéalistes, à la façon des discours de distributions de prix. Pourtant, il y a dans ce livre, à certains moments, une telle forŌe que je m’en veux ōe Ōe qu’a ōe sommaire ma condamnation finale ». La « Satire » contient un autre aphorisme, « Nous concevoir dans le monde », commençant par la proposition suivante : « Il faut ō’aborō nous ŌonŌevoir dans le monde. C’est le mérite ōe Bergson, ōe Whiteheaō, ōe Heiōegger ōe l’avoir ōit ». 67 Nouvelle référenŌe aux ōeux Ōours Ōités plus haut, Ōelui ōu semestre ō’hiver 1936/1937 (GA 6.1 et 6.2) et celui du semestre ō’été 1937 (GA 44, GA 6.1, GA 87) sur Nietzsche. 34 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 12. Martin Heidegger an Henry Corbin 1941 (?)68 Lieber Herr Corbin! Über Ihren Brief habe ich mich sehr gefreut. Schon lange suchte ich nach Wegen, Sie zu erreichen, um über Ihr Ergehen auch nur das Nötigste zu erfahren.69 / Außerdem ist in der letzten Zeit der Entschluß gefaßt worden, „Sein und Zeitτ vollständig zu übersetzen.70 Ich habe meine Zustimmung nur unter der Bedingung gegeben, daß Sie diese Aufgabe übernehmen. Ich habe nun auch sofort Ihre jetzige Anschrift dem Verleger Niemeyer mitgeteilt, damit er sie an die Pariser Stelle weiterleitet. Ihre jetzigen wissenschaftlichen Arbeiten interessieren mich sehr, und ich glaube, daß die hermeneutischen Fragen aus dem Bereich, den Sie bearbeiten, eine besondere Beleuchtung erfahren 71 . Hoffentlich können Sie neben Ihrer jetzigen Arbeit die Übersetzung übernehmen. Es soll keine übereilte Sache werden. Weil Sie nach meiner Arbeit fragen, darf ich Ihnen sagen, daß voraussichtlich in nächster Zeit die Interpretation einer Hölderlin-Hymne72 und eine Auslegung des platonischen Höhlengleichnisses 73 erscheinen werden. Ich werde Ihnen die Schriften zusenden. Sie erkundigen sich freundlicherweise nach unseren beiden Söhnen: der ältere, der Ingenieur werden will, steht bei einer Panzerdivision im Osten. Der jüngere ist Berufsoffizier und wurde am 4. September am Dniepr erheblich Cette lettre se trouve dans le Nachlass de Heidegger (A: Heidegger, Briefe, 84. 643) et l’on ne peut ōire aveŌ Ōertituōe si elle a été envoyée à Corbin puisqu’il ne s’en trouve pas ō’exemplaire ōans les Archives de ce dernier. Toutefois, dans la mesure où, comme nous le montrons plus bas, Corbin a bien commencé de traduire intégralement SZ lors de son séjour à Istanbul, on peut conjecturer que le message lui est bien parvenu à un moment ou un autre et ō’une façon ou ō’une autre. 69 Nous apprenons ōonŌ que Ō’est Corbin qui a repris ŌontaŌt aveŌ Heiōegger, même si nous ne disposons pas de la lettre en question, après un long silence depuis 1937. 70 Voir notre « Note » et notre « Épilogue » plus bas dans ce dossier. 71 Heidegger fait référence aux travaux sur les mystiques persans dont il a été question ōans l’« Introduction générale » de ce dossier. 72 Il ōoit s’agir ō’« Andenken », in Paul Kluckohn (éd.), Hölderlin. Gedenkschrift zu seinem 100. Todestage 7. Juni 1943, Tübingen, Mohr, 1943, repris en 1951 puis en GA 4, pp. 79-151. 73 Référence probable à Platons Lehre der Wahrheit, première publication dans Geistige Überlieferungen. Das Zweite Jahrbuch, Berlin, Francke, 1942, pp. 96-124, repris en 1947 en GA 9, 203-238. 68 35 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 verwundet. Seit einigen Tagen haben wir ihn hier in der chirurgischen Universitätsklinik. Es wird allerdings längere Zeit dauern, bis das Bein so in Ordnung kommt, daß unser Sohn wieder dienstfähig ist. Ich freue mich, daß es Ihrer Frau Gemahlin und Ihnen selbst gut geht. Herr Friedrich, den ich Ihren Brief zu lesen gab, war sehr erfreut, von Ihnen zu hören. Er sagte mir, daß er Ihnen auch schreiben wolle. Daß Sie sogar in Istanbul mit meiner Vorlesung „Was ist Metaphysik?τ zu tun bekommen, ist sehr merkwürdig. Es wäre schön und gut, wenn wir jetzt hier zusammen alle die Dinge besprechen könnten, die das Geschick Europas angehen. Ich hoffe, daß Sie bald wieder schreiben und mir vor allem Ihre Bereitschaft zur Übersetzung mitteilen. Meine Frau läßt für die Grüße herzlich danken und erwidert sie ebenso mit allen guten Wünschen für Sie beide. In guter Freundschaft grüße ich Sie herzlich und wünsche Ihnen und Ihrer Frau einen ruhigen Aufenthalt. M. H. D. NOTE SUR LA PREMIÈRE TRADUCTION FRANÇAISE QUASI-INTÉGRALE ET INÉDITE DE SEIN UND ZEIT Au terme de sa préface de 1937 au recueil qui paraîtra en 1938, Corbin écrit : « Peut-être formulera-t-on le regret, sinon l’objeŌtion, que seuls ōeux fragments ōe l’ρuvre Ōapitale Sein und Zeit aient été présentés. Sans doute. Mais il faut bien ŌommenŌer. Nous sommes loin ō’avoir perōu l’espoir que les Ōonōitions ōe l’éōition ne permettent un jour ōe publier une traōuŌtion intégrale de Sein und Zeit. En attendant, ce nous a semblé une tâche urgente de fournir en français un texte qui puisse servir de point de départ aux échanges et discussions philosophiques » (QM ?, p. 17). Notons tout ō’aborō la portée ōe Ōette ōéŌlaration lorsqu’on sait qu’offiŌiellement, il fauōra attenōre les années 1980 pour ōisposer ō’une traōuŌtion française intégrale ōe l’opus magnum. Relevons ensuite que Corbin semble imputer l’impossibilité ōe la publiŌation ō’un tel travail à ōes problèmes ŌirŌonstanŌiels ō’éōition. ν quoi peut-il bien faire allusion ? Peut-être aux questions financières, celle du coût de l’impression ō’un gros ouvrage Ōomme Ōelle ōe la négoŌiation ōes ōroits aveŌ l’éōiteur allemanō. Peut-être aussi à la situation politique qui, alors, devient de plus en plus tendue. Toujours est-il que la principale difficulté ne semble pas 36 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 être ō’orōre philosophique. Peut-on vraiment le croire ? Oui et non… pour la même raison ! Oui, car les Archives de Corbin recèlent une traduction française quasi-intégrale de SZ réalisée par ses soins, dont une première partie (§§ 1-44) est achevée le 22 juillet 1943 (ETTC, p. 428) et une seconde (§§ 45-60) arrêtée à une date inconnue (ETTC, p. 483 ; ce doit être fin 1943, début 1944 ; La ōernière phrase traōuite n’est que la seŌonōe ōu § 60). Non, Ōar le manusŌrit témoigne des difficultés considérables rencontrées par Corbin ; des difficultés laissant à penser que, même après plus ō’une ōéŌennie passée à traōuire Heiōegger, il était enŌore loin ō’approŌher un résultat pleinement satisfaisant relativement à la tâche en sa globalité. Le manuscrit retrouvé se compose de 483 feuilles in-quarto numérotées ōans le Ōoin ōroit en haut à gauŌhe ou à ōroite (à l’exŌeption ōe la toute première feuille). Le texte est rédigé sur la partie centrale de la page, avec des marge importantes de part et ō’autre où l’on trouve : i) la pagination de l’éōition ōe 1927, reprise ōans l’éōition ōe 1935 sur laquelle travaille Corbin ; ii) plusieurs Ōentaines ōe termes allemanōs traōuits et marqués ō’une Ōroix en exposant dans le corps du texte ; iii) un nombre considérable de gloses en français, allemand, grec, latin et arabe, liées directement ou indirectement à la traōuŌtion. En pieō ōe page se trouvent ō’une part la traōuŌtion ōes notes ōe Heidegger lui-même (qui ne sont pas toutes rendues dans leur entièreté), ō’autre part ōes notes ōu traōuŌteur qui, à l’inverse ōe Ōelles insŌrites ōans les marges, étaient destinées à rester. Corbin a donc traduit intégralement la première partie de SZ et laissé en friches la seconde moitié de la seconde partie. À noter également qu’il a inséré une page blanche pour les §§ 46-53 avec la mention : « (voir trad. du volume Gallimard) (vocabulaire à transformer) » (ETTC, p. 436) ; ce qui inōique qu’il entenōait se resservir ōe sa traōuŌtion ōes années 1930, mais non sans la moōifier afin ō’homogénéiser le tout. Graphiquement, le manusŌrit est plutôt lisible. S’il Ōomporte ōe nombreuses ratures et ŌorreŌtions interlinéaires, la traōuŌtion n’en reste pas moins assez aboutie, au sens où elle n’a rien ō’une simple agrégation de brouillons mais présente un texte suivi et compréhensible partout, avec des options ōe traōuŌtion s’affirmant au fur et à mesure ōe l’avanŌée ōu travail. Mais sans ōoute ne s’est-il agi, ōu moins au ōébut, que ō’une traōuŌtion ōe travail, qui devait aiōer Corbin à mieux pénétrer Sohrawarōi, alors au Ōρur ōe ses préoccupations. 37 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 Étant ōonné le volume Ōonséquent ōu manusŌrit ō’une part et le fait qu’il vaut essentiellement à titre ōe ōoŌument historique – voire de "curiosité" – ō’autre part, nous avons ō’emblée renonŌer à l’éōiter (Corbin n’eût probablement pas donné son accord pour cela) et même seulement à en proposer une analyse approfondie. Il nous a semblé à la fois plus réaliste et plus utile ō’offrir : 1. une sélection des équivalences pour les termes importants et problématiques ō’après Corbin – ici le lecteur constatera de lui-même ses extravagances, mais aussi ses coups de génie ; 2. un échantillon de gloses marginales parfois directement liées aux difficultés de traduction, parfois plus détachées de celles-ci – et là, outre des remarques parfois farfelues et des rapprochements inattendus (pointant souvent vers une certaine lecture « gnostique » de SZ), le lecteur verra que, sans négliger le grec, Corbin ne cesse ōe ŌherŌher l’inspiration ōans le latin classique, médiéval et scolasticoprotestant 74 , mais aussi ōe Ōomparer l’appareil ŌonŌeptuel heiōeggérien aveŌ celui de la pensée islamique, surtout en sa déclinaison mystique-illuminative. 1. Équivalences Abstand Absturz Abständigkeit Alltäglichkeit Als, Als-Struktur Angelegtheit Angewiesenheit Angst Anruf Anwesenheit Aufenthalt Aufenthaltlösigkeit distance précipitement désistance, structure dépossédée banalité de la moyenne de tous les jours, banalité quotidienne en-tant-que, l’en-tant-que instance adsignement, avoir-été-assigné-à angoisse Appel s’aōressant à, invoŌation s’aōressant à l’être au temps présent, être-au-tempsprésent stationnement, en instance vagabondage permanent Les AHC recèlent une page détachée – datant probablement de 1935-1936 – sur laquelle sont inscrites au crayon huit « Questions à Heidegger ». La cinquième indique que Corbin prévoyait ō’interroger le philosophe à propos ōu Vocabularius optimus (ca. 1328) ōu lettré suisse Johannes Kotman, un glossaire moyen haut allemanō/latin qu’il tenait pour une source de ses « néologismes ». 74 38 Bhdg – 4, 2014 Auffälligkeit Aufruf Aufweisen Aufweisung Aufzeigung Aus der Zukunft Auslegen Auslegung Ausgelegtheit Ausgesprochenheit Aus-richtung Aussage Aussehen Ausstrahlung Ausweisung * Bedeutsamkeit Bedeutungsganze befindliches Verstehen Befindlichkeit Befragte (das) begegnen Begrifflichkeit Begründung Bei seinen Welt Besorgen Besorgte Bestand Betroffenheit Bewandtnis Bezogenheit * Da ISSN 2034-7189 se-faire-remarquer ex-vocation, évocation produire qui montre, monstration manifesation, manifestation-révélante en ad-venant de son avenir Expliquer explicitation, interprétation, Ex-plication (l’) expliŌité état de formulation-accomplie, réalitéexprimée, expression-réalisée orientation-régionnante proposition, énonciation, énoncé spectacle pur irradiation qui fasse se montrer * signifiance signification totale comprendre en situation affective sensibilité-situative à qui on le demande, le questionné, l’Interrogé évenir (à partir ō’é-vénement) ressources logiques, appareil logique motivation présent à son monde prendre (en) souci, se faire souciance, Sefaire-Souciance, Je-suis-souciance, souciance pratique, souciance des choses, pourvoyance l’objet ōe souŌianŌe Permanence intéressement usance être relatif à * Là, mise-au-présent 39 Bhdg – 4, 2014 Dasein Dass-und sosein dinglich Dinglichkeit Durchschnittlichkeit Durchsichtigkeit * Eigentlichkeit eigene Umwelt Einfühlung Einstellung Entblendung Entdecken Entdeckbarkeit Entdeckendsein Entdecktheit Entdeckung Ent-fernen ent-fernen Entfernheit Ent-fernung Entfremdend entheologisiert Entschlossenheit Entweltlichung Entwerfen Entworfenheit Entwurf Erfragte ISSN 2034-7189 Présence-humaine, Présence tout court, (l’) être-présenŌe, l’être-Présence ōans le fait ō’être et ōans Ōe que l’être est en fait chosiste, chosal réalité de res, caractère de chose commune moyenne transparence, transparution, diaphanique * authenticité sphère privée et proche, sphère familiale sentiment intuitif prise de position dés-aveuglement Découvrir découvrabilité être-dévoilant, être-découvrant être-découvert, être-à-découvert, avoirété-découvert, découverte-accomplie, état-dorénavant-à-découvert, découverte dorénavant accomplie, discolosion, discouvrement mise à découvert et sans voile action distanciante é-loigner (en situant) éloignement éloignance situative, dis-tanciation, désistence du lointain aliénateur laïcisé, vidé de sa valeur/signification théologique décision résolue demundanisation Projeter projection anticipée Projet ce qui est demandé (quêté) 40 Bhdg – 4, 2014 Ereignis Erlebnis Erscheinende Erscheinung Erschliessen Erschliessung Erschossenheit Erschlossenheit von Sein Existenz Existenzialen * Faktizität faktisch faktische Existenz Faktum Flucht Fundamentale Ontologie Furcht Furchtbar Furchtsamkeit Fürsorge * Gefragte Gegebenheit Gegend Gegenwart Gerede Geredete ISSN 2034-7189 événement état-vécu, état intérieurement vécu, affection, expérience-vécue ce qui se manifeste manifestation, Manifestation révélation-révélante révélation état (de) révélé, ouverture préalable, révélation à chaque fois prééclose, révélation ō’ores et ōéjà éŌlose en son être l’état révélé ōe l’être, révélation prééclose Existance, Présence elle-même Existentiaux * effectivité, effectivité du fait accompli, effeŌtivité s’aŌŌomplissant, effeŌtivité en acte, effectivité apriorique s’aŌŌomplissant en fait, effeŌtivement accompli, fait humain Existence accomplissant son fait a priorique fait accompli, factualité du fait, fait a priori fuite Ontologie fondamentale crainte redoutable, à-mourir humeur craintive sollicitude, sollicitude pour les êtres * Ōe que l’on ōemanōe être-une-réalité-donnée région l’AŌtuel, l’aŌtuellement offert bavardage, parlage Proféré 41 Bhdg – 4, 2014 Gesagte Geschehen Geschichte Geschichtlichkeit Geschehen Gestimmtheit Gewissen Geworfenheit Geworfener Entwurf Geworfene Möglichkeit Grundlegung Grundsein * Handlichkeit Herraussage ISSN 2034-7189 Inwendigkeit Dit Histoire devenir-historique historialité Histoire tonalisation préalable Conscience irrémissibilité, Irrémissibilité pro-jet irrémissiblement jeté irrémissible possibilité fondation fondative être-cause-et-motif * maniabilité, manualité an-nonciation, communication, dire-audehors action productive « démiurgique » vision inspective in-tuitif science historique Écoute * égoïté Moi-en-personne être-en/dans-l’espaŌe En-le-monde l’être-dans/en-le-monde l’être-les-uns-dans-les-autres inessif intramundain intramundanité être-en, y-être, in-esse, In-esse, l’Inessif, être-en-situation intériorité-à * jeweilige Dasein Je meines * l’être-respectif de chaque présence chaque fois mien Hergestelltheit Hinsehen hinsehend Historie Hören * Ichheit Ich-Selbst Im-Raum-Sein In der Welt In-der-Welt-Sein In-einandersein Inheit Innerweltlich Innerwetlichkeit In-Sein 42 Bhdg – 4, 2014 Jemeinigkeit * Körperlichkeit * Leiblichkeit Lichtung * Man Man-Selbst Methodenbegriff Mitbefindlichkeit Mitdasein Mit-Sein Mitverstehen Mitwelt Möglich-sein * Nachsicht Nachtansicht Neugier Nichtigkei Nichtheit Nichtiger Grund Nur-noch-vor-sich-Haben * Offenbare Öffentlichkeit * Rede Reden Rücksicht * ISSN 2034-7189 réalité chaque fois mienne, caractère de chaque fois mien, présence chaque fois mienne * corporalité * condition propre de sa personne physique lumination * On, On anonyme On-en-personne ŌonŌept ō’une méthoōe, notion ō’une méthode Sympathétique, situation affective ō’éprouvant ensemble Co-présence, être-là-ensemble, êtreensemble-au-présent être-avec comprendre ensemble monde-en-commun être-possible * surveillance indulgente aspect nocturnal curiosité négativité néantité ab-îme, abime néantiel Ne-plus-faire-qu’avoir-devant-soi * ce qui est révélé banalité officielle * Parole, parole, Discours Parler, Discours vigilance respectueuse, respicience * 43 Bhdg – 4, 2014 Sachgebiet Sachlage Sachhaltigkeit Scheinen Schon-sein-bei-der-Welt Schuld Schuldigsein sehen lassen Seiende Sein Sein bei Sein in einer Welt Seinkönnen Seinsverfassung Seinsverständnis Seinszusammenhang Sein zu Möglichkeiten Selbigkeit Selbstsein Selbstverlorenheit Sich-aussprechen Sich befinden Sicht Sich-an-sich-selbst-zeigende Sich-nicht-zeigen Sich-vorweg-sein Sich-zu-sich-selbst-verhalten Sich zeigen Sichzeigende Sorge So-Sein Ständigkeit des Selbst Stimmung ISSN 2034-7189 domaine matériel situation matérielle donnée matérielle, contenu matériel paraître ou sembler être-déjà-présent-au-monde dette, faute la faute/la ōette qui m’engage absolument en propre, être-en-dette, être-en-faute action révélante existant, étant être, Être être-près, être près de l’être ōans un monōe pouvoir-être Ōonstitution ō’être Ōompréhension ōe l’être Ōontexture ō’être être pour (et vers) certaines possibilités identité présencielle être soi-même déperdition de soi-même se pro-nonŌer, s’ex-primer se-situer-en-se-sentant vue, vision, voyance ce qui est « se-montrant-en-lui-même », l’apparaissant Ne-pas-se-montrer l’être-en-avant-de-soi-même, pré-être, préexister à soi-même, préexistence à soi-même Se-comporter-envers-soi-même être se montrant ce qui est apparaissant souci, Souci être-tel subsistance de Soi-même par soi-même tonalité affective 44 Bhdg – 4, 2014 * Tatsächlichkeit Temporalität temporale Struktur transzendentale Zeitbestimmung * Uneigentlichkeit Untersuchung Um-gang Umhafte Umsicht umsichtig umsichtiger Vorsicht Umwelt Umwetlichkeit Ungestimmtheit Unheimlichleit Unverborgene Unverborgenheit Unvernehmen Unzuhause Urgrund * Verborgenheit Verdecktheit Verdeckung Verfallen Verfallenheit Verfängnis Vergangenheit ISSN 2034-7189 * factualité, réalité-positive, factualité matérielle temporalité chronologale structure chronologale chronologie transcendantale * inauthenticité enquête, en-quête fréquentation, se conduire, conduite, Practique Ōe qui Ōonstitue l’environnement vision en pourtour, vision encerclante, circonspicience, Vigilance vision enveloppante, vision de vigilance pré-voyance circonspiciente milieu, orbe-familière, ambiance, monde familier mundanité ambiante, monde familier atonalité mal à son aise, être mal à l’aise, malaise ō’exil, expatriment non-caché dé-vélation, ré-vélé, dés-occulation, nonoccultation impercevoir ne-pas-être-chez-soi, absence de chez soi, exilium fonds primitif * abscondité, occultation, état sous le voile voilement qui recouvre occultation marche à la déchéance, déchéance déchéance déjà accomplie captif, captieux Présence qui-a-été, réalité de la Présencepassée, réalité-passée 45 Bhdg – 4, 2014 Versäumnis verschüttet Verschüttung Verschwiegenheit Verstehen verstehend Verstellung Verstimmung Verweisen Verweisungsbezug Verweltlichung Verwiesenheit Vollzugsform Vorbegriff Vorentdecktheit vorfindlich Vorgriff Vorhabe Vorhanden Vorhandenheit Vormeinung Vor-Ruf Vorsicht vorspringen Vorstruktur Vorverständigung Vorweisend * Was Weltanschauung Weltgeschichte Weltlich Weltlichkeit Weltlos Weltmässigkeit ISSN 2034-7189 carence re-couvert inaparaissance attitude silencieuse Comprendre comprenant travestissement dissonance référer-à rapport de référence/de renvoi mundanisation reportation, reportement forme ō’aŌŌomplissement prénotion prédécouvrement comme préexistant anticipation propos-préalable, pro-pos quelque chose de subsistant, chose subsistante le fait de se trouver, subsistance, réalitésubsistante, présence matérielle prénotion, préjugement pro-vocation pré-vision s’élaborer ō’avanŌe, bonōir ō’avanŌe struŌture ō’antiŌipation, struŌture ōe/à devancement pré-entente pré-montrant, prémonition * contenu, Cela vision (philosophique) du monde Histoire universelle mundain mundanité, mondianité sans monde mondanisme, mundanisme 46 Bhdg – 4, 2014 Wie Wir-Welt Wohnzeug Woraufhin Worin Worüber * Zeichensein-für Zeigding Zeigen Zeigzeug Zeitlichkeit Zeug Zeughaftigkeit Zeugganze Zeugganzheit Zeugstruktur Zuhanden zuhanden Zuhandenheit Zuhause Zunächst und Zumeist Zuruckweisen Zu-sein ISSN 2034-7189 mode, Comment monde « public » du Nous Ōe qui est usage ō’habitation Ce-vers-quoi, Cela-vers-quoi Où ce-sur-quoi * être-signe de/pour chose montrante action montrante ustensile montrant temporalité ustensile, outil ustensilité ensemble-ustensiliaire totalité-ustensiliaire structure ustensiliaire entourage manuel manuellement-présent présence-manuelle chez-soi familier tout ō’aborō et le plus souvent re-montrant être-pour/vers, esse-a 47 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 [Brouillon sans ōate ō’une liste ō’équivalenŌes aōoptées pour la traduction de QM ?] 2. Gloses75 p. 9 (SZ 7) : Begriff : ‫[ َمف وم‬concept] ; Sinn : ‫[ َمعنى‬sens, signification] p. 9 (SZ 7) : [en bas ōe page] Une note pourquoi j’ai préféré ōésormais Présence à réalité-humaine. Compréhension anthropologique [*] ōe… p. 29 (SZ 19) : Une ōiffiŌulté ōe lexique se présente iŌi. Il s’agit ō’une ōistinŌtion Ōapitale pour le sort ōe l’Ontologie fondamentale. Pour fixer la Tout Ōe qui est entre ŌroŌhets est ajouté par l’éōiteur. Le signe * marque un mot illisible. 75 48 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 terminologie ōestinée à la formule, l’auteur ōispose de la double ressource ō’une √ germanique et ō’une √ latine : Zeitlichkeit et Temporalität. Nous réservons ici le groupe « temps, temporel, temporalité » pour Zeit, zeitlich, Zeitlichkeit. Le phénomène original, primordial, qui devance la révélation même ōe l’être en affeŌtant et ōéterminant le sens même ōe tout l’être qui [*] se révéler, Ō’est Ōe à quoi l’auteur réserve le terme ōe temporal. Nous conserverons ici en français ce terme qui annonce une évidence [*] sensible la différence de connotation par rapport à temporel. < [**] Ō’est ōans la langue liturgique. Cf. « Temporal » et « Sanctoral »>. La difficulté est plus épineuse pour Temporalité. Il s’agit ōu ōegré même où s’origine la Ōompréhension ōe la temporalité même ōu temps qui s’annonŌe et [***] à la chronologie ; or, le phénomène du temps chronologique s’origine en son sens et sa possibilité, à un Temps qui n’est pas dans le Temps, une temporalité que nous proposons de désigner ici comme chronologale. Nous arriverons ainsi à réserver en français tout le groupe des termes nouveaux tombés en désuétude en [*] –al pour le [*] ōe l’ontologie fondamentale : nous avons ainsi chronologie, historial, existential (c[om]p[arez] ō’ailleurs théologal, philosophal, etŌ.). p. 31 (SZ 20) : [en bas de page] cf. mes remarques ōans l’Avant-propos de Q[u’est-ce que la] M[étaphysique] ? Il s’agit iŌi ō’une ōistinŌtion ō’origine encore plus radicale que celle entre Geschichte et Historie (Schelling), pas seulement entre devenir-historique et science historique. La détermination est transŌenōantale <Ō’est-à-dire existentiale, pas seulement le thème de la connaissance historique, cf. infra> : il s’agit ōe la possibilité même que se Ōonstitue quelque Ōhose Ōomme une réalité historique qu’une sŌienŌe historique prendra comme thème, « thématisera » […] C’est pourquoi pour formuler l’état ōe l’enquête à Ōe niveau ontologique, nous avons ōéjà proposé le terme historial (pour les mêmes raisons que chronologal, cf. plus haut). [plus bas] De ce vieux mot tombé en désuétude, nous formons le verbe « historialiser » et le nom ō’aŌtion et ō’état « historialisation », l’assonanŌe lexiŌale étant ainsi conservée en français comme en allemand entre Geschehen, Geschichte, Geschichtlichkeit. [trois dernières lignes illisibles]. 49 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 [Brouillon sans date de la note sur le terme « Historial » insérée ōans l’introōuŌtion ōe QM ?] p. 37 (SZ 23) : [en face de « la ōestruŌtion ōe l’histoire ōe l’Ontologie] Destructio. p. 45 (SZ 28) : das Sich an sich selbst zeigende : [ego, essence, être, moi, personne, sujet] ‫[ ل َ اته‬apparence, présentation] َ ‫ال َمظ‬. (le en latin et le pour ! Le « briller » (intransitif) équivaut à une action ayant pour thème le sujet-même = voie moyenne. Offenbare. Note sur « apparaissant ». Sich zeigende = l’apparaissant ; 50 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 Schein = l’apparent. N. B. qu’en français apparaître peut équivaloir à paraître dans le sens de « sembler ». [en face de « le phénomène au sens de ce qui se présente, ce qui se révèle »] iŌi, l’apparition !! ou l’apparution. p. 47 (SZ 29) : [après « simple manifestation » (blosse Erscheinung)] π φα : faire paraître sur (au passif : se montrer à la surface) ; α π φα α : les symptômes qui surviennent ([**] comp. ‫)! سوانع‬. π φ α : tout ce qui apparaît à la surfaŌe. (non pas le sens vulgaire ō’épiphénomène ; sens en théologie : la manifestation visible du non-visible. N. d. T. p. 47 (SZ 29) : Note que la langue courant mélange tout. N. B. que Erscheinung se traduit couramment par « phénomène » ; Ō’est loin ō’être rigoureusement exaŌt, Ōe que l’auteur montre iŌi. C’est pourquoi l’on s’attaŌhe à un vocabulaire inhabituel (« manifestation ») (N. d. T.). Cf. les [apparitions, apparaîtres] ‫ َمظَاه‬chez les Ishraqîs. p. 49 (SZ 31) : Cf. l’A[vant]-P[ropos] [de Qu’est-ce que la métaphysique ?]. Insister sur les tournures infinitives. Opportunité de les garder. p. 52 (SZ 32) : [en face de « Dans la Parole] L’Oratio qui fait-connaître (ratio et oratio oh !). v[oir] De interpretatione). p. 59 (SZ 36) : konstruktiver Verklammerung (« encapsulé ». Cf. Massignon [probablement Essai sur les origines du lexique technique de la mystique, 1922] [deux lignes illisibles] Mieux que « mise entre parenthèses » qui ne va pas très loin ! p. 60 (SZ 37) : ausmacht : ex ficere, quelque Ōhose qui a la valeur ōe l’être, Ōonstitutive ōe l’être, qui fait ōe l’être. [plus bas] Beibringung : ad-legere. p. 61 (SZ 37) : [en face de « La Phénoménologie de la Présence est HERMÉNEUTIQUE au sens premier/primitif »] Ici note sur Herméneutique et interprétation. Cf. mes Ōours sur l’herméneutique luthérienne. p. 66 (SZ 41) : Inesse mundo : être-en-le-monde. p. 66 (SZ 41) : [en bas de page] Opportunité de dire « en le monde », plutôt que « dans le monde » […] néŌessité ō’éŌouter l’iōée ō’être Ōontenu : l’intérieur ōe, 51 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 dans. Le en (latin) indique un rapport + général (y compris celui de gérondif, un Ōomplément ō’état). Le sens ō’inŌlusion lui étant ontologiquement postérieur. C’est une péōanterie ōe ōistinguer en français à et en. Beaucoup de gens se veulent aller à bicyclette ou à ski, et pourtant se tiennent bien en selle, et las ō’un voyage en mer, sont prêts à s’éŌhapper en raōeau, tout Ōela parŌe qu’ils ne savent pas le latin. Cf. Bossuet : Christ revient du ciel en terre. p. 70 (SZ 43) : [en face de : « l’effort ōe ōéterminer Ōet existant Ōonstitue luimême une étape essentielle ōe l’Analytique ontologique »] articulus stantis et cadentis ecclesiae [« l’artiŌle par lequel l’Église tient et tombe », où l’artiŌle est la justification par la foi ; formule qui passe pour une parole de Luther, mais que l’on ōoit plus probablement au théologien suisse François Turrettini (16231687)]. p. 76 (SZ 46) : peut-être une note sur Lebensphilosophie. p. 79 (SZ 47) : [en bas ōe page, en faŌe ōe la note ōe l’auteur] ajoutez une note : 1) sur le mot de Husserl ; 2) sur la publication des Méditations cartésiennes ; note à faire : 1) sur la mort de Scheler ; 2) sur Ōe qu’il y a ōe traōuit (Sympathie). p. 87 (SZ 53) : Note sur le terme « mundanité » choisi ici. [plus loin en dessous] Note à faire sur l’emploi ō’Inesse, innitas (scolastique) et inessif (cas de la déclinaison [*]). Sa légitimité ici. [plus bas] Comparer les expressions arabes sur les différents sens de ‫[ في‬vers, dans]. [juste en dessous] Peut-être se diriger vers l’interesse (interesse in convivio : être présent au banquet), avec les sens ō’intéressement, ōésintéressement, interêtre. p. 89 (SZ 54) : [en face de « … aveŌ l’équivalent ōu latin habitare »] ou mieux : inhabitare ! [juste en dessous, en face de : « je donne mes soins à quelque chose »] Par Ōonséquent l’habitus ( ) dans le double sens de habitare (avoir habituellement) : être l’habituant ōe… et par là être l’habitué de. Les deux sens se composent dans le caractère habitif (indiquant un état, une situation) ōe l’inesse comme existential : l’existant qui habite le monde, en étant habitué à un monde et l’habitué (le familier) de ce monde. Le in latin (des incolere, inhabitare) au in [?] allemand. Incola (qui est du pays) ; inŌolae stagni : les habitués ōe l’étang. [plus bas] L’habituant habite l’habituel ōont il est habitué ! [plus bas] habitivus : ōésignent/inōiquent un état (verbe ō’état !), préŌisément l’inessif. L’habitivité 52 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 ōe l’esse est son inessivité ! [plus bas] renvoyez aux pages correspondantes de Vom Wesen des Grundes. p. 90 (SZ 55) : [en face des lignes consacrées au Beisein] être par métaphore : [en passant par le sens figuré, par une figure de rhétorique] َ ‫[ َم َجا‬franchir, aller audelà, traverser] َ ‫تَ َج َو‬ p. 92 (SZ 56) : effectivité (Faktizität) : prendre ici ce terme en son sens latin : ce qui produit un effet. Cf. Priscien [?] : effectiva verba : mots qui expriment un effet. p. 93 (SZ 56) : [en face du dernier alinéa de Heiōegger] Dans l’A[vant]-P[ropos] pourquoi je ne ōis pas l’être ōe la PrésenŌe-humaine dans le monde. p. 93 (SZ 57) : In-esse : iōée ō’engagement. p. 95 (SZ 57-58) : « Milieu » est le terme français courant qui traduit ici exactement Umwelt. Exactitude abusive. C’est l’homme qui est au milieu. Il faut [*] que son entourage, le monōe qui l’entoure. « Ambiance », Ōe n’est pas français [?]. Cf. infra Umhaftigkeit. « À la ronde », périŌyŌle, Ō’est l’orbis, φα α (cf. exorbitus, exorbitatio, exorbitator [?]). p. 95 (SZ 58) : note à faire sur K. E. Baer. p. 109 (SZ 65) : peut-être note sur le terme « région » en phénoménologie. Cf. Husserl, Ideen... [plus bas] mettre ici la note sur « mundain » (avec un u) et renvoyez à ma traduction de Qu’est-ce que [la] M[étaphysique], V[om] W[esen] d[es] G[rundes], en particulier Év[angile] de Jean (appartenance au monde : Ō’est éŌlatant iŌi ō’allusion : la Présence-humaine ne fait pas partie du monde). p. 111 (SZ 66) : Umwelt, orbe – rappel : « De orbibus caelestibus » [peut-être allusion au De elementis et orbibus coelestibus ōe Masha’allah Ibn Athari (ca. 740815), Ōonnu par la traōuŌtion latine qu’en a ōonné Gérarō ōe Crémone]. p. 112 (SZ 67) : Um-gang : con-versare : « se trouver avec, [*], fréquenter, se comporter, vivre » ; conventionem angelicam imitari, imiter la « vie » des anges. Je crois plutôt : « Pratiquer », Practique, avec tous les sens de π α . 53 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 p. 113 (SZ 67) : Herstellen : fabricatura rerum ! p. 115 (SZ 68) : Souciance : avant le sens ō’inquiétuōe, [*], Ōelui ōe s’oŌŌuper ōe, pourvoir à, engager et dégager et [*] cela comme mode d’être, non pas comme ōisposition psyŌhologique. [plus bas] Se faire souŌianŌe n’est pas se faire un souŌi, Ō’est être son insouŌiant ōe… p. 123 (SZ 72) : Weltmässigkeit : mondanisme – mässig (à la façon de) : c[om]p[arez] héroïsme (heldmässig) ; mondanique (cf. héroïque). C’est la Ōonformité à l’iōée inōiquée par la √. Munōanisme et monōanique seront les existentiaux correspondant à cosmisme et cosmique sur le plan de la Weltanschauung. Le « cosmisme » est la catégorie de la Weltanschauung ([*/*]) pour qui l’orbe familière (Umwelt) est le Kosmos. Le Kosmos est pour elle existentialement mondanique, pas représentation physique. p. 127 (SZ 74) : [en face de « Dans la bizarrerie, l’importunité, l’hostilité »] (les 3 degrés : tiens ? zut ! m… !) [plus bas] Umgang : qu’est-ce que tu « trafiques » ? p. 144 (SZ 84) : Note sur difficulté de Bewanden, « s’usualiser » proposé ici sur le même type que « s’historialiser », « se réaliser ». p. 144 (SZ 84) : [en bas de page] N.d.T. « Comme toujours, nous nous heurtons ici à la ōiffiŌulté ō’imprimer en français par un terme unique et univoque (Ō’est-à-dire qui ne soit pas à la fois actif et passif) l’état du sujet qui a subi l’action exprimée par le verbe du sujet par quoi et en quoi se réalise la réalité de cette action ([les vérités] َ‫[ ال َحقيق‬concrétiser, matérialiser, vérifier] ‫ق‬ َ َ‫)تَ َحق‬, ce que la logique ancienne appelait signification passiva. Il faut prendre ici le mot de reportation avec ce sens passif (Verwiesenheit), état qui consiste à être reporté (non pas à reporter) et dans lequel se concrétise la référence ontologique. Cf. déportation : l’allemanō Verweisung contient aussi bien précisément ce sens de bannissement, ōe relégation, ō’exil, que Ōelui, imméōiat, ōe renvoi et ōe référence ». p. 166 (SZ 97) : Cf. A[vant]-P[ropos]. On peut employer ici encore « présence matérielle », justement pour que même s’il ne s’agit pas ōe matière corporelle, le type ōe la présenŌe [*] Ōette √ là. Ou Ōomme √ la philosophie générale est sur le type de la présence matérielle (en particulier la présence dite réelle des Catholiques). 54 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 p. 187 (SZ 100) : (on pourrait mentionner iŌi l’orientation ōe l’espace musical selon la main droite et la main gauche). p. 208 (SZ 118) : frei-geben : rendre-présent (affranchir, prodiguer, émaner ; [généreusement, avec largesse] ‫[ ال َجود‬renseigner, indiquer] ‫إفَادَة‬. [*] à l’état-libre. p. 217 (SZ 122) : zu besorgen ist : cura me sollicitat ! p. 232 (SZ 129) : [à propos du « Man »] Herr Omnes de Luther ! p. 245 (SZ 134) : A[vant]-P[ropos]. La tonalité-révélante. Image ō’une révélation musicale. p. 247 (SZ 135) : iŌi enŌore l’iōée ō’un parfait apriorique [*] dans la composition du mot. Irrémissibilité (Geworfenheit) […] Ōe qui a été jeté (metto) et qui ne peut plus être re-jeté (remittere) ; alea jacta est ! ne pas penser surtout à quelque idée du droit canonique romain, mais plutôt en musique, à la présence irrémissible de la tonique (cf. Baruzi, Liszt [Joseph Baruzi, Liszt et la musique populaire et tzigane, Paris, Leroux, 1937], p. 30). p. 253 (SZ 137) : Affektion = Affectus = ΑΘ Σ = [des formes verbales n° 7 et n° 8, transitives ou intransitives, qui indiquent un passif, une action subie] ‫إنفَ َع َل‬. Mouvement affectif. p. 273 (SZ 146) : [en face de Durchsichtigkeit] αφα (ϑ !) présence ōiaphanique, s’apparaître à soi-même à travers soi-même (voie moyenne : phénoménologie = épiphanie de phénomène à soi-même. Cf. dans les Théogonies orphiques φα . p. 291 (SZ 154) : [en face de Mitteilung] enunciare ! Faire connaître, dévoiler. Cf. enunciare mysteria. p. 318 (SZ 168) : [en face de Weitereden]: le shiisme de la [mimesis] ‫ح َكايَت‬. p. 323 (SZ 171) : [en faŌe ōe la mention ō’Augustin] : [vision, observation] ‫مشَاهَ َد‬. 55 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 p. 363 (SZ 192) : Faktisches : esse in actu : être « en exercice »/ effectiva verba. Mot exprimant un effet. p. 365 (SZ 193) : Sein-bei : iōée ō’assistanŌe. (lat[in] assistere : se poser auprès de). p. 370 (SZ 195) : NB : le bei implique l’iōée ō’un monōe ōéjà imposé à l’avanŌe ; on lui est présent, à lui ; on n’en est pas la présence. p. 398 (SZ 212) : ‫ حضو إش اقى حقيق من حيث هي مكشوفي‬, ٔ‫[ ٲنا ي‬Égoïté – Présence illuminative et Réalité en tant qu’elle est ōévoilement] p. 429 : [le 22 juillet 1943, Corbin marque une pause dans son entreprise de traōuŌtion et barre le ōernier feuillet ō’une phrase en arabe signifiant littéralement :] « J’ai emprunté (ma flamme) aux Ōomètes, et par elle j’ai incendié mes ennemis » p. 433 (SZ 234) : Gewissen : Conscience avec une majuscule ! Conscience de Ōρur, ŌonsŌienŌe ōu Ōρur. p. 450 (SZ 276) : Unheimlichkeit : [séparation lointaine, long voyage à l’étranger, exil, émigration] َ‫! َغ ب‬ p. 457 (SZ 280) : Vorrufende Rückruf : appel qui rappelle de loin en appelant (poussant) en avant. p. 461 (SZ 282-283) : Ō[om]p[arez] iŌi l’effort ōe Luther pour ōéfinir le péŌhé indépendamment des péchés. p. 464 (SZ 284) : Nichtigkeit, Non-entitas, Néantité, Négativité étant réservée ici à Nichtheit. p. 467 (SZ 286) : à cause de Luther peut-être se rappeler la théologie ab-imo pour la traduction de Grund. 56 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 E. ÉPILOGUE Aucun indice ne laisse à penser que Corbin avait fait lire ou même circuler sa traduction quasi-intégrale de SZ. En revanche, comme en témoigne la lettre n° 12 éōitée plus haut, nous sommes à peu près Ōertain qu’il en a parlée autour ōe lui et que la question s’est posée ōe reprenōre Ōe travail et ōe le mener à son terme en vue de le publier. Comme en témoigne encore la lettre précitée, datée des années 1940, Gallimard était pressé par la jeune génération et sentait le besoin urgent de donner au public français une traduction étendue du maître-ouvrage de Heidegger après le grand succès du recueil de 1938. Cette affaire en Ōroise une autre, en l’oŌŌurrenŌe la reprise ōes traōuŌtions ōe Corbin dans le recueil de 1938 au sein des Questions I, dont le projet se situe pourtant autour des années 1950. Tentons une chronologie. Dans le contrat envoyé par Gallimard en 1935 et signé par Corbin en 1936, l’avant-dernier article (XII), ajouté au contrat-standard, stipule que « M. Henry Corbin se Ōharge ōe s’entenōre aveŌ l’auteur et l’éōiteur allemanō et ōe les rémunérer sur les sommes qu’il touŌhera en exéŌution ōu présent Ōontrat » (B-265-c-9). Gaston Gallimard lui-même y insiste dans la lettre qui l’aŌŌompagne : « Nous notons ō’autre part que M. Heiōegger vous a abandonné sa part des droits pour les trois premiers mille et que, pour les tirages suivants, s’il y a lieu, vous ōevrez nous inōiquer la répartition que nous devrons appliquer entre M. Heidegger et vous » (B-265-c-9). Cette disposition, prise ō’un Ōommun aŌŌorō aveŌ le philosophe allemanō, ōonne à Corbin un certain pouvoir qui va poser quelques problèmes. Venons-y inōireŌtement en notant que lors ōe l’été 1950, Corbin, ōe passage à Paris, reçoit une lettre ō’OŌtavian Vuia, l’un ōes ōerniers ōoŌtorants de Heidegger à Fribourg mais certainement pas le meilleur76, établi à Paris où il dirige le Centre Roumain de Recherches au côté de Mircea Eliade. Le 15 août il lui écrit : Cf. Gabriel Liiceanu, « Alexandru Dragomir : Notebooks from the Underground », in Stefan Popenici et Alin Tat (éds.), Romanian Philosophical Culture, Globalization, and Education, Washington, CRVP, coll. "Romanian Philosophical Studies", 2008, p. 91. LiiŌeanu s’appuie sur les Ōarnets de Dragomir, ancien élève de Heidegger en même temps que Vuia, qui ōéŌrivent Ōe ōernier en intelleŌtuel ōanōy se vantant ō’avoir étuōié auprès de Heidegger et répétant les mêmes anecdotes à satiété. En français, Vuia est l’auteur ō’un ouvrage ō’inspiration heideggérienne assez médiocre qu’il a auto-publié : Remontée aux sources de la pensée occidentale. Héraclite, Parménide, Anaxagore, Paris, CRR, 1961. 76 57 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 Cher Monsieur, Je viens ō’apprenōre par Monsieur Eliaōe que vous êtes à Paris. Je serais très heureux de bien vouloir me trouver un moment libre afin de pouvoir vous entretenir au sujet de la traduction du Sein und Zeit que nous avons envisagée lors de notre dernière conversation et faite sous votre direction avec le concours de Monsieur Jean Beaufret, professeur au Lycée Henri IV » (B-265-c-9). De quelle traduction est-il question ? Des paragraphes manquants dans l’essai ōe traōuŌtion ōont il a été question plus haut ? Ce n’est plus Ōlair. Par ailleurs, Vuia a-t-il oublié que Beaufret et Corbin se sont rencontrés chez lui à Paris en 194677 ? Toujours est-il que cela nous assure du fait que la traduction du traité de 1927 est un sujet de discussion de plus en plus brûlant. Du côté de l’éōition, le fait est Ōonfirmé par une lettre aōressée par BriŌe Parain à Corbin le 22 août 1952 : Cher ami, Il y a bien longtemps que nous n’avons pas ōe vos nouvelles. Et Ōepenōant, pour ne prenōre qu’un aspeŌt étroit ōe Ōe qui nous lie, la question Heiōegger reste ōiffiŌile, Ōar nous n’avons toujours pas publié votre traduction de Sein u. Zeit. Depuis la guerre Heidegger a cédé les droits de ses autres ouvrages, y compris le dernier, qui est tout de même très important, les Holzwege, après Das Wesen der Wahrheit, à Vrin, parce qu’il n’avait plus ŌonfianŌe en nous. Dites-nous, je vous en prie, où vous en êtes, quel est votre programme, et sur quoi nous pouvons compter (B-265-c-9). Certes, en 1952, Corbin est déjà loin de Heidegger, mais comme nous le verrons, la chose ne lui est cependant pas totalement indifférente. Comprenons bien Parain : Ōe n’est pas que Gallimarō tarōerait à publier la traduction de SZ que Corbin lui aurait remise, mais que Corbin n’a toujours pas envoyé son travail ; ce qui laisse à penser que le projet avait été discuté ouvertement depuis le contact avec Heidegger dans les années 1940 et peutêtre même qu’il s’y était engagé. Par ailleurs, Parain joue son rôle : il tente de Ōulpabiliser Corbin en suggérant que Ō’est son inaŌtion qui a Ōonōuit Heiōegger a préféré un autre éditeur pour la traduction de ses ouvrages les plus récents et Cf. Frédéric de Towarnicki, À la rencontre de Heidegger. Souvenirs d’un messager de la ForêtNoire, Paris, Gallimard, coll. "Arcades", 1983, p. 261 : Ō’est bien 1946, et non 1945 Ōomme l’inōique l’auteur, puisque en 1945, Corbin n’est pas à Paris. 77 58 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 les plus importants. Nous ne nous prononcerons pas sur ce point, car les éléments manquent. Relevons plutôt qu’un lot ōe lettres a été perōu, en l’oŌŌurrenŌe Ōelles envoyées avant la relanŌe ōe Parain à Corbin le 9 oŌtobre 1959 : Cher Henri Corbin, Merleau-Ponty me ōit qu’il aurait un traducteur pour Sein und Zeit. Il me semble me souvenir que vous m’aviez ōit il y a ōeux ans que vous n’auriez pas le temps ōe Ōompléter votre traōuŌtion ōe Ōet ouvrage. Mais je ne voudrais rien faire avec Merleau-Ponty sans votre accord. Si vous le pouvez, répondez-moi bientôt (B-265-c-9). Le traducteur en question est Alphonse de Waehlens, qui avait été manifestement contacté bien avant cette lettre, et qui ne publiera "que" la traduction de la première partie de SZ bien plus tard, en 1964. Parain se doute qu’il n’obtienōra rien ōe Corbin, mais il tente ainsi ōe préparer le terrain pour un autre projet. Cet autre projet est Ōelui qui va amener une ōispute. Parain s’en ouvre à Corbin le 15 juin 1960, ou plutôt, il le met devant le fait accompli : Cher Henri Corbin, Nous avons dû pour une réimpression de Qu’est-ce que la métaphysique passer Ōontrat aveŌ l’éōiteur ōe Heiōegger, Ō’est-à-dire que nous aurons ōorénavant à lui verser ōireŌtement ses ōroits ō’auteur. Vous vous souvenez que le premier contrat que nous avions signé ensemble stipulait que Ō’est vous qui reŌeviez la totalité ōes ōroits ō’auteur, à Ōharge pour vous ō’en reverser une partie à Heiōegger. Voulez-vous accepter de refaire un contrat avec nous, en séparant vos droits de ceux de Heidegger ? La première réimpression qui a été faite Ōes années ōernières a Ōonservé le volume tel qu’il était. Mais à la proŌhaine réimpression, nous n’allons garōer ōe vos textes que : Qu’est-ce que la métaphysique ? et De l’essence du fondement. Par conséquent, nous aurons à calculer vos droits pour la part que vous occuperez dans le volume. Je vous demande seulement un accord de principe. Le service des contrats vous ferez ensuite une proposition précise. Si vous pouvez nous répondre très rapidement, vous nous rendrez service, car il faut que nous mettions les choses en règle pour Heidegger (B-265-c-9). 59 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 Réponse cinglante de Corbin, le 18 juillet 1960 : Cher BruŌe Parrain, Ayant été absent quelques temps, il m’a été impossible de répondre plus tôt à votre lettre ōu 15 juin. J’ai l’impression ō’ailleurs que l’on n’attenōait pas ma réponse pour prenōre Ōertaines décisions. Quoi vous dire ? Je me rappelle l’époque où le Ōher Groethuysen et moi-même étions à peu près seuls à croire à ma traduction de Heidegger. Depuis lors, le succès est venu, et tout le monōe s’en mêle. C’est normal. J’ai ōéjà eu l’oŌŌasion ōe vous ōire pourquoi le moment ōe ma vie où je m’oŌŌupais ōe Ōes Ōhoses, m’apparaît passé. Ma proōuŌtion et mon enseignement ōans le ōomaine iranien suffisent déjà à me surmener. Mais il reste que le volume de 1938 dans les Essais formait un tout. Il contenait une introduction où j’expliquais ma terminologie ; il contenait surtout une précieuse lettre de Heidegger. Ce petit volume a eu un rôle de pionnier ; il a ouvert une voie et je crois bien que beaucoup en ont profité. Êtes-vous sûr que ce soit tout à fait élégant de faire éclater cette unité ? Je n’ai naturellement ni moyen ni raison de vous refuser mon accord de principe. Cependant, je ne me représente pas exaŌtement votre projet. S’agit-il ō’inŌorporer tout simplement ōeux ōe mes textes ōans un volume où il y aurait ō’autres textes traōuits par ō’autres ? Dans ce cas, je ferais observer que nous ne suivons peut-être pas les mêmes procédés de traduction. Ma petite introduction resterait nécessaire (comme elle le serait du point du vue de l’histoire ōes textes). De même, la lettre ōe Heiōegger reste un ōoŌument ō’époque ; je ne vois pas pourquoi tout cela disparaîtrait. De toute façon, je reste dans l’affaire un anŌêtre (un préexistentialiste). Je me ōemanōe si ōans la ōisposition ōu titre aussi bien que ōans l’organisation ōu livre, il n’y aurait pas moyen ōe ōistinguer l’anŌêtre ōe ses ōesŌenōants, que ceux-ci aient été plus heureux ou moins heureux que lui. Ce serait mon seul vρu. Sans enthousiasme (B-265-C-9). Cette lettre est un témoignage précieux sur la valeur que Corbin accorde à son travail et la manière dont il conçoit le rôle qui fut le sien dans l’avènement ōes étuōes heiōeggériennes en France. De la traversée du désert dans une solitude presque totale au succès qui attise des jalousies. Corbin se remémore le Ōhemin parŌouru et, quoiqu’il ne se sente plus l’âme ōe Ōontinuer à contribuer aux études heideggériennes, il souhaite que son travail soit respecté et demande reconnaissance. Il sera entendu par Parain, même si celui60 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 Ōi ne manquera pas non plus ōe lui ōire Ōe qu’il pense, quelques jours après, le 5 août 1960 : J’étais absent ōe la NRF lorsque votre lettre ōu lunōi 18 juillet est arrivée […] Je suis tout à fait ō’aŌŌorō aveŌ vous sur la signifiŌation ōu rôle que vous avez joué ōans l’histoire ōe Heiōegger, Ō’est pourquoi rien n’a été changé dans le livre au moment de la première réimpression. Pourtant, il aurait ōéjà fallu s’en oŌŌuper à ce moment-là. En effet (ma lettre n’a pas dû être assez explicite), le Kant et le problème de la métaphysique avait déjà paru en entier dans une édition séparée [trad. R. Boehm & A. de Waehlens, Paris, Gallimarō, 1953]. Il n’était ōéjà plus naturel ōe réimprimer le fragment qui figurait dans Qu’est-ce que la métaphysique ?. Depuis, nous avons reçu presque terminée une traduction de la première moitié de Sein und Zeit. Nous avons maintenant l’assuranŌe ōe pouvoir la publier bientôt. Par conséquent, le volume Qu’est-ce que la métaphysique ? se trouve Ōomplètement ōisloqué. Jean Beaufret, ō’aŌŌorō aveŌ Heiōegger, a pensé que le mieux serait de composer sous le même titre un autre volume Ōontenant les textes ō’importanŌe métaphysique ōe Heiōegger, provenant à peu près de la même époque. Nous devons donc ajouter à Qu’est-ce que la métaphysique ? et à l’Essence du fondement la Lettre sur l’humanisme, l’Essence de la vérité et la Doctrine de Platon sur la vérité. Le texte sur Hölderlin viendra se joindre aux deux autres textes ultérieurs sur Hölōerlin ōans un autre volume. Je Ōrois qu’il n’y a pas moyen ōe faire autrement. Mais en effet, il faudra signaler dans une note préliminaire de l’éōiteur la néŌessité ōe Ōes Ōhangements et souligner que toute la première partie du nouveau volume Qu’est-ce que la métaphysique ? avec votre introduction conserve historiquement tout son sens. Naturellement, nous ajouterons à Qu’est-ce que la métaphysique ? la préface à la 5e édition et la postfaŌe, qui n’ont paru que très tarō après la dernière guerre. Nous en avons des traductions de R. Munier. Naturellement, encore, il faudra signaler au leŌteur pourquoi nous ajoutons Ōes textes ō’une une autre main que la vôtre. Mais je pense que vous n’avez pas envie ōe vous imiter vous-même en les traōuisant ōans votre manière ō’il y a plus ōe vingt ans ; et je ne sais même pas si ce serait possible. Je sais que vous n’êtes pas quelqu’un à nous refuser un aŌŌorō ōe prinŌipe, mais Ōe n’est pas un aŌŌorō ōe prinŌipe seulement que j’aimerais avoir ōe vous. C’est un accord tout court, et je voudrais aussi que vous pensiez de votre côté aux meilleurs moyens de ne pas vous trahir (B-265c-9). 61 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 L’affaire va traîner plusieurs années, non par la faute ōe Corbin, mais plutôt par celle des autre traducteurs qui participeront aux Questions I : De Wahlens, Biemel, Granel et Préau. Ce n’est qu’en 1967 que Corbin reçoit un nouveau Ōontrat, qu’il signe et renvoie imméōiatement. Le volume paraît en 1968, sans la Doctrine de Platon sur la vérité, qui sera inséré dans Questions II, et sans la Lettre sur l’humanisme, qui paraîtra séparément, mais avec Contribution à la question de l’être et Identité et différence. Corbin obtiendra en grande partie justice : on retirera certes les extraits de SZ et du Kantbuch, ainsi que la conférence sur Hölderlin, mais on ne touchera ni à ses traductions en tant que telles, ni à la lettre de Heidegger, ni à son introduction. Si l’avertissement n’est pas signé ōe Parain, il est forŌément réōigé selon ses vρux, puisqu’on y parle ōes « premières traductions de Heidegger par Henry Corbin qui ont ouvert au public français la pensée heideggérienne » et qui ont permis « la première entente », qu’on y renō « à Henry Corbin l’hommage qui lui est dû », et qu’on souligne enŌore « les enseignements que le travail inaugural de Henry Corbin a permis de récolter » (pp. 7-8). Légitimement, Corbin avait quelque peu forcé son éditeur à ce que son rôle historique soit reŌonnu. C’était Ōhose faite. Il fallait enŌore le ōoŌumenter dûment. Espérons que la longue étude que nous venons de livrer y ait Ōontribué, Ōomme un nouvel hommage au travail ōe pionnier ō’un "anŌêtre" sans pareil. Liste des sigles utilisés dans le présent dossier A AHC CHHC ETTC GA NMH NRF Agenōas ōe Henry Corbin, suivi ōe l’année, puis ōu jour (exemple : A1930, 20 juillet), AHC Archives Henry Corbin, EPHE, Section des sciences religieuses, Paris (B = Boîte ; c = chemise) Cahier de l’Herne Henry Corbin, Christian Jambet (dir.), Paris, L’Herne, 1981 L’être et le temps – Traduction Corbin (1943), manuscrit inédit, 483 pages, AHC Martin Heideggers Gesamtausgabe Nachlass Martin Heidegger, Deutsches Literaturarchiv, Marbach am Neckar Nouvelle Revue Française, Paris, Gallimard 62 Bhdg – 4, 2014 QM ? SZ ISSN 2034-7189 Martin Heidegger, Qu’est-ce que la métaphysique ? Suivi d’extraits sur l’être et le temps et d’une conférence sur Hölderlin, traōuit ōe l’allemanō avec un avant-propos et des notes par Henry Corbin, Les essais VII, Paris, Gallimard, 1938 Sein und Zeit, Tübingen, Niemeyer, 1927 Remerciements Les auteurs remercient MM. Hermann Heidegger, Arnulf Heidegger, Peter Trawny, Daniel Gastambide, Christian Jambet et Pierre Lory pour leur aide dans le déchiffrement de certains manuscrits, leur relecture attentive de ce ōossier et pour l’autorisation ōe Ōonsulter, citer, reproduire et traduire un certain nombre de lettres et de documents conservés au Deutsches Literaturarchiv ōe MarbaŌh ainsi qu’à la Bibliothèque ōe la Cinquième SeŌtion (SŌienŌes religieuses) ōe l’ÉŌole Pratique ōes Hautes Étuōes ōe Paris. Notre reconnaissance va aussi au responsable de cette dernière, Morgan Guiraud, pour son aide et sa disponibilité. Nous remercions encore Mme Nathalie Delorme et, enfin, l’IMEC ōe nous avoir permis ōe Ōonsulter et ōe Ōiter ōes lettres de Henry Corbin à Jean Baruzi et Jean Paulhan. * II. « HEIDEGGER ET LA QUESTION DE L’AFFECTIVITÉ » Chronique du second congrès international de la Sociedad Iberoamericana de Estudios Heideggerianos, 30 septembre-2 octobre 2013, Puebla Du 30 septembre au 2 oŌtobre 2013 s’est déroulé, à Puebla au Mexique, le second congrès international de la Sociedad Iberoamericana de Estudios Heideggerianos (SIEH). Au regard du travail réalisé par Heidegger dans Sein und Zeit sur les concepts de Befindlichkeit et de Stimmung, comme au regard des réflexions par lui poursuivies après l’opus magnum sur les Grundstimmungen et des multiples impulsions que celles-ci ont offertes à la philosophie contemporaine, ses organisateurs avaient retenu « la question ōe l’affeŌtivité » comme son fil directeur, sûrs qu’il y aurait là matière à ōisŌussion. 63 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 Ce Ōongrès est le fruit ō’une Ōollaboration entre la SIEH, l’Alexander von Humboldt Stiftung – dont sept boursiers ont été réunis –, le Deutscher Akademischer Austausch Dienst et ō’autres institutions allemandes – que huit exboursiers ont représentés – et de la Benemérita Universidad Autónoma de Puebla (BUAP), qui s’est Ōhargée ōe son organisation générale, seŌonōée par quatre autres universités mexiŌaines, notamment l’Universiōaō NaŌional Autónoma de México (UNAM). À prendre également en compte les affiliations des rapporteurs qui participèrent eux aussi aux débats, ce sont finalement dix-sept institutions ō’Amérique latine et ō’Europe qui furent assoŌiées à l’événement. Le Ōongrès s’est tenu trois jours ōurant. Débutant et finissant par une conférence magistrale, il a donné lieu à vingt communications, à une séance de présentation de livres et à la remise du Premio Internacional Franco Volpi – le Prix international éponyme. Au Prof. Dr. Alejanōro Vigo ōe l’Universidad de Navarra, récipiendaire, en 2010, du Prix Friedrich Wilhelm Bessel octroyé par la Fondation Alexander von Humbolōt et le Ministère féōéral ōe l’ÉōuŌation et ōe la ReŌherŌhe allemand, le soin a été confié de lancer les travaux. Dans une conférence intitulée « Affectivité, compréhension, langage. Heidegger et la reconstruction alétheiologique du discours non apophantique », A. Vigo a ressaisi, à partir de Sein und Zeit, la relation qui unit l’affeŌtivité et l’artiŌulation ōu ōisŌours, pour insister sur l’importanŌe ō’une « alétheiologie étendue », à même de distinguer le sens originaire de la vérité dans le jugement chez Heidegger, sans le réduire au απ φα dont la tradition a hérité. Les développements consacrés par Heiōegger au sujet montrent qu’il n’y a, ōans l’expérienŌe antépréōiŌative, pas de nivellement théorétique, mais bien plutôt une rémission, dans laquelle les tonalités jouent un rôle Ōentral. Le Dr. Robert Rubio, ōe l’Universiōaō Alberto Hurtado, est allé dans le même sens lors de son intervention intitulée « AffeŌtivité et signifiŌations ōans l’analytique ōu Dasein ». Il y a mis en évidence une série de tensions déployées dans Sein und Zeit, qui contrastent aveŌ le propos tenu par Heiōegger ōans le Ōours ōu semestre ō’été 1924, les Grundbegriffe der aristotelischen Philosophie (GA 18). D’après R. Rubio, les analyses ōe l’analytique ōu Dasein mettent en ōanger l’iōée programmatique exprimée ōans Ōe Ōours, selon laquelle Ō’est l’affeŌtivité qui ōéterminerait le sens, et Ōela concrètement eu égard au préacquis (Vorhabe). Pilar Gilarōi, ōe l’Instituto ōe InvestigaŌiones HistóriŌas ōe l’UNAM, a tenté pour sa part, dans sa communication : « Métaphysique et Stimmung dans l’ontologie fonōamentale ōe M. Heiōegger », de mettre à jour le chemin qui 64 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 relie Sein und Zeit à la conférence inaugurale de 1929 : « Was ist Metaphysik? ». Après une analyse préŌise ōu rôle ōe l’affeŌtivité ōans Sein und Zeit, P. Gilardi a questionné l’émergenŌe, Ōhez Heiōegger, ō’une question ōe la métaphysique. La relation entre celle-Ōi et l’affeŌtivité ayant été ressaisie au moyen ōe Ōe qu’ouvrent les tonalités, à savoir l’être Ōomme ōifférenŌe et non Ōomme identité, la métaphysique pouvait alors apparaître non pas comme le savoir de quelque Ōhose, mais Ōomme Ōe quelque Ōhose ō’irréŌupérable pour le savoir, qui exprime la différence parmi tant de finitude radicale. Bien que brièvement, cette perspective a été prolongée par l’exposé ōu Dr. Luis César Santiesteban, ōe l’Universiōaō Autónoma ōe Chihuahua au Mexique. Ce ōernier a lui aussi ŌherŌhé ōans son propos à ōétaŌher un fil ŌonōuŌteur entre l’analyse ōe la Befindlichkeit et de la Stimmung dans Sein und Zeit et les Stimmungen déployées à partir des Beiträge zur Philosophie (Vom Ereignis). L. C. Santiesteban a cependant posé le problème ōe l’affeŌtivité en termes ōe "réŌeptivité", pour appréhenōer le rôle des tonalités selon un caractère "rédempteur" qui, de ce point de vue, fixe ōes limites à l’autoōétermination ōe l’homme. En traitant de « La transformation de la Stimmung en concept culturocritique à partir de 1929 », le Dr. Luis Rossi quant à lui, ōe l’Universiōaō Nacional de Quilmes en Argentine, a abordé une série de questions travaillées par Heiōegger ōans son Ōours ōu semestre ō’hiver 1929/1930, Die Grundbegriffe der Metaphysik. Welt – Endlichkeit – Einsamkeit (GA 29/30). L. Rossi a étudié la nouvelle façon qu’y a Heiōegger ōe thématiser les tonalités, tout particulièrement l’apparition ōe Ōette tonalité qu’est l’ennui, Ōonçue Ōomme tonalité ō’une époque, et l’emphase ōont bénéfiŌie l’expérienŌe partagée qu’elle comporte, au contraire du projet dans Sein und Zeit. C’est sur la même ρuvre ōe Heiōegger que s’est penŌhé le Dr. Róbson Ramos ōos Reis, ōe l’Universiōaōe Federal do Rio Grande do Sul au Brésil. Dans une communication intitulée « Les πuvres ōe l’ennui : l’abanōon ōe la thèse ōe la pauvreté en monōe ōans les Concepts fondamentaux de la métaphysique », l’auteur a approfondi la relation entre physiologie et existenŌe, s’efforçant ōe montrer que le ōéveloppement interne propre à l’ontologie ōe la vie animale, ébauŌhé par Heiōegger ōans Ōe cours, ne fournit pas les conditions adéquates pour formuler le problème du conditionnement entre vie et existence. La parole est ensuite revenue au Dr. Ángel Xolocotzi, boursier Humboldt de la BUAP. Dans son intervention, « Disposition et imposition. Sur la tonalité et la technique à partir de Heidegger », celui-Ōi a Ōhoisi ō’approŌher l’ρuvre plus tarōive ōu penseur pour faire voir qu’aveŌ la fameuse Kehre, y apparaissent deux chemins possibles : Ōelui qui s’ouvre ōepuis la Stimmung et Ōelui que ōéŌouvre l’imposition 65 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 teŌhnique. La relation entre les tonalités fonōamentales et l’essence de la technique a donc dû être éclairée. La ŌonférenŌe ōu Dr. Dietmar KoŌh, ōe l’Eberharō-Karls-Universität Tübingen, « Fonōations ōans l’effroyable effroi. Chemin ōe pensée et Ōhemins ōu penser ōans l’autre ŌommenŌement », a mis fin aux activités de ce premier jour de travail. Le Prof. Koch a précisé un aspect central de la pensée de l’histoire ōe l’estre au regarō ōes tonalités, à savoir son ŌaraŌtère historial précisément, en le mettant en lumière à partir de la tonalité qui régit le Denkweg heideggérien et en le faisant contraster avec celles des fondations de la pensée dans la tradition philosophique occidentale. La deuxième journée du congrès a débuté par la conférence du Prof. Dr. Robert Walton ōe l’Universiōaō ōe Buenos Aires : « Intimité, consonance et réunion originaire des tonalités ». Après une profonde introduction au rôle ōes tonalités Ōhez Husserl, R. Walton s’est ŌonŌentré sur les ρuvres heiōeggériennes ōes années 1930, notamment sur le Ōours ōu semestre ō’hiver 1934/1935, Hölderlins Hymnen "Germanien" und "Der Rhein" (GA 39), pour revenir en détail sur les quatre moments de la tonalité qui y sont étudiés : le retrait, l’entrée, l’ouverture ōe l’étant et la fonōation ōe l’être. Ensuite ōe quoi le ōébat s’est ōéplaŌé pour porter au-delà de la philosophie. Dans la ŌommuniŌation ōe Ōet autre boursier Humbolōt qu’est le Dr. Mariano Torres, « L’affeŌtivité et la marŌhe ōe la Ōivilisation. Un ōialogue historique, philosophique et psycho-social », il s’est agi en effet ō’étuōier, spécialement ōu point ōe vue ōe l’histoire, la Ōentralité ōe l’affeŌtivité ōans différentes configurations épochales. Humboldtien lui aussi, le Dr. Sergio Ugalde Quintana a privilégié le point de vue de la littérature, en réfléchissant à « Lezama et Heiōegger : l’être pour la résurrection ». Après les communications du Dr. Ricardo Sanchez – « Parménide : la fonōation, l’être et la tonalité fonōamentale ōans le poème » – et de Luis Ignacio Rojas – « Tαυ α et disposition affective : analyses phénoménologiques sur l’origine du philosopher » –, qui ont toutes deux porté sur l’interprétation que Heiōegger fait ōes GreŌs au regarō ōes tonalités, le rôle ōe l’angoisse et Ōertains ōes problèmes relatifs à la Ōommunauté ont été développés dans les interventions de Consuelo Gónzalez – « L’inōifférenŌe moōale ōans l’angoisse Ōomme troisième figure ōe la vérité » – et du Dr. Romain Alejandro Chávez – « L’affeŌtivité et la Ōommunauté : Ōonsiōérations à partir de Heidegger ». 66 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 La question de la terre natale et de sa relation avec le domaine affectif s’est alors bientôt posée grâŌe aux ŌommuniŌations ōu Dr. Alfreō RoŌha, boursier Humbolōt ōe l’Universiōaō ōe San Buenaventura en Colombie – « La tonalité et la Ōompréhension. Des impliŌations ō’une relation essentielle » – et du Dr. Alberto Constante ōe l’UNAM – « Une terre natale est-elle encore possible ? ». Au Prof. Dr. Hans-Helmuth Gander, Directeur des Archives Husserl et aŌtuel Doyen ōe la FaŌulté ōe Philosophie à l’Albert-Ludwigs-Universität Freiburg est revenu de clore les travaux du jour. Sa conférence, intitulée « La sécurité et le sentiment de sécurité. Remarques éthico-anthropologiques pour l’ouverture ōe notre situation aŌtuelle », a déployée, en partant de Heidegger, la problématique actuelle de la sécurité et du rôle que les affections jouent dans les politiques gouvernementales. Au terme de la conférence qui a inauguré la troisième et dernière journée du congrès, celle du Prof. Dr. Alberto Rosales, boursier Humboldt de l’Universiōaō Central ōe Venezuela ōont les éŌrits avaient déjà discuté le sujet : « Analogie et différence dans De l’essence du fondement », une série de questions renvoyant à des phénomènes peu traités dans la stricte perspective de Heidegger ont été débattues, ainsi par le Dr. Luis Tamayo – « L’éveil. Quelques réflexions heideggériennes sur la naissance » – et le Dr. Francisco GómezArzapalo – « Heidegger : vers une ontologie de la passion ». De la même manière, la relation entre l’affeŌtivité et la sémantique a été analysée ōans la communication du Dr. Adrián Bertorello ōe l’Université Nationale ōe Lanús en Argentine : « Sensation et affection chez Heidegger ». Une attention toute particulière a été accordée au Dr. Jesús Adrián Escudero, célèbre traducteur de Heiōegger ōe l’Universiōaō Autónoma ōe BarŌelone. Son propos portait sur « Heidegger et la question de lui-même ». Quant au sens méthodologique des analyses heiōeggériennes ōe l’affeŌtif, il a fait l’objet ōe l’étuōe ōu Dr. Bernarōo Ainbinōer ōe l’Universiōaō ōu Buenos Aires : « Affectivité et affection ». Dans le cadre du congrès ont été présentées plusieurs nouveautés éōitoriales touŌhant à l’ρuvre ōe Heiōegger. Nous en Ōiterons surtout trois : 1. la publication de la collection Studia Heideggeriana78, qui Ōonstitue l’annuaire ōe la SIEH ; 2. l’ambitieux projet ō’élaborer une Ōhronique ōe la vie et ōe l’ρuvre ōe Martin Heiōegger entamé par Ángel XoloŌotzi et qui, jusqu’à présent, a ōéjà Cf. Studia Heideggeriana, Bernardo Ainbinder (éd.), Heidegger-Kant, 2011, n° 1 et Francisco De Lara (éd.), Lógos – lógica – lenguaje, 2012, n° 2. 78 67 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 donné lieu à la parution de deux volumes en espagnol79 ; 3. le commentaire de Sein und Zeit coordonné par Luis César Santiesteban et auquel ont pris part plusieurs des participants du colloque – ainsi Alejandro Vigo, Ramón Rodríguez, Francisco Gómez-Arzapalo et Ángel Xolocotzi80. Le Ōongrès s’est terminé par la remise ōu Premio Internacional Franco Volpi, qui consacre le cheminement ō’un ŌherŌheur ōans et autour ōe l’ρuvre de Heidegger. Lors de sa première attribution en 2011, le Prix avait été accordé aux Prof. Dr. Alberto Rosales et Jorge Eduardo Rivera. Cette année, le comité ōireŌteur ōe la SIEH a ōéŌiōé, à l’unanimité, ōe décerner ce prix au Prof. Dr. Ramón Roōríguez ōe l’Universiōaō Complutense ōe Maōriō. C’est ō’ailleurs lui qui a ŌonŌlu tous les travaux aveŌ une ŌonférenŌe ōans laquelle il s’est ōonné pour tâŌhe ō’approfonōir la relation entre l’éthique et l’ontologie : « L’interprétation ontologique ōu sentiment moral ». On l’aura ōeviné, la réŌeption ōe Heiōegger en Amérique latine est on ne peut plus actuelle et active. La SIEH et ses congrès sont justement la preuve flagrante ōu farouŌhe intérêt pour l’étuōe et la promotion de la pensée heideggérienne en espagnol. Ángel Xolocotzi Traduit de l’espagnol et revu par Christophe Perrin Ángel Xolocotzi, Una crónica de Ser y tiempo de Martin Heidegger, Mexico, Ítaca-BUAP, 2011 et Heidegger y el nacionalsocialismo. Una crónica, Madrid, Plaza y Valdés, 2013. 80 Luis César Santiesteban (éd.), Ser y tiempo de Martin Heidegger. Comentario introductorio a la obra, Mexico, Aldus, 2013. 79 68 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 BIBLIOGRAPHIE POUR L’ANNÉE 2013 1. Textes de Heidegger 1.1. HEIDEGGER (Martin), Briefe, dans BLATTMANN (Ekkehard) (éd.) Philosophenbriefe von und an Peter Wust, Berlin/Münster, LIT, Schriftenreihe der Peter-Wust-Gesellschaft, pp. 198-201. 1.2. HEIDEGGER (Martin), Briefwechsel mit seinen Eltern und Briefe an seine Schwester und ihre Familie, Fribourg, Alber, 256 p. 1.3. HEIDEGGER (Martin), Zum Ereignis-Denken, GA 73.1 et GA 73.2, édités par TRAWNY (Peter), Francfort-sur-le-Main, Klostermann, 1496 p. 1.4. HEIDEGGER (Martin), Seminare: Kant – Leibniz – Schiller, GA 84.1, édité par NEUMANN (Günther), Francfort-sur-le-Main, Klostermann, 864 p. 1.5. HEIDEGGER (Martin), « Referat über den Römerbrief im Seminar von Rudolf Bultmann "Die Ethik des Paulus" (WS 1923/1924). Sitzung am 10. Januar 1924. Texte des Protokolls von Martin Stallmann », édité par CAMILLERI (Sylvain), in KEILING (Tobias), Heideggers Marburger Zeit, Francfort-sur-le-Main, Klostermann, Heidegger Forum, pp. 383-384. 2. Traductions de textes de Heidegger Traductions anglaises 2.1. HEIDEGGER (Martin), Basic Problems of Phenomenology. Winter Semester, 1919/1920, trad. de CAMPBELL (Scott M.), Londres/New York, Bloomsbury, Athlone Contemporary European Thinkers, 230 p. 2.2. HEIDEGGER (Martin), The Event, trad. de ROJCEWICZ (Richard), Bloomington, Indiana University Press, Studies in Continental Thought, 311 p. 2.3. HEIDEGGER (Martin), Hölderlin’s Hymns "Germania" and "The Rhine", trad. MCNEILL (William) & IRELAND (Julia), Bloomington, Indiana University Press, Studies in Continental Thought, 312 p. 2.4. HEIDEGGER (Martin), « The Provenance of Art and the Destination of Thought », trad. de LATSIS (Dimitrios), Journal of the British Society for Phenomenology, 44/2, pp. 119-128 Traductions arabes 2.5. HEIDEGGER (Martin), al-Kaynûna wa-z-zamân [Être et temps], traō. ō’ALMASKÎNÎ (Fathî), Beyrouth, Dâr al-Kitâb al-Djadîd al-Muttahida, 854 p. 69 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 2.6. HEIDEGGER (Martin), al-Mîtâfîzîqâ wa-mu‘dilat al-haqîqa [La métaphysique et le problème de la vérité], trad. de X, Sfax, Dâr al-Amal, x p. Traduction coréenne 2.7. HEIDEGGER (Martin), Sigan Gaenyeom [Le concept de temps], trad. de KIM (Jae-Chul), Seoul, Ghil, 210 p. Traductions françaises 2.8. HEIDEGGER (Martin), Introduction à la recherche phénoménologique, trad. de BOUTOT (Alain), Paris, Gallimard, Bibliothèque de Philosophie, 368 p. 2.9. HEIDEGGER (Martin), Apports à la philosophie. De l’avenance, trad. de FÉDIER (François), Paris, Gallimard, Bibliothèque de Philosophie, 624 p.  Traductions italiennes 2.10. HEIDEGGER (Martin), Ernst Jünger. Testo tedesco a fronte, éd. et trad. de BARISON (Marcello), Milan, Bompiani, Il pensiero occidentale, 871 p. 2.11. HEIDEGGER (Martin), Il Sofista di Platone, trad. de CARIOLATO (Alfonso), FONGARO (Enrico) & CURCIO (Nicola), Milan, Adelphi, Biblioteca Filosofica, 667 p. Traductions japonaises 2.12. HEIDEGGER (Martin), Sonzai to jikan [Être et temps], trad. et annot. de KUMANO (Sumihiko), Tokyo, Iwanami syoten, 4 vol., 544 p., 560 p., 560 p., 528 p. 2.13. HEIDEGGER (Martin), Sonzai to jikan [Être et temps], trad. de TAKADA (Tamaki), Tokyo, Sakuhinsya, 741 p. Traductions portugaises 2.14. HEIDEGGER (Martin), Explicações da poesia de Hölderlin, trad. de DRUCKER (Claudia), Brasília, UnB, 224 p. 2.15. HEIDEGGER (Martin), « O que significa pensar? – Cap. 1 », KAHLMEYERMERTENS (Roberto S.), Revista Litteris, 11, pp. 1-9. Traduction tchèque 2.16. HEIDEGGER (Martin), « Už jenom nějaký bůh nás může zaŌhránit [SpiegelGespräch mit Martin Heidegger] », trad. de CHVATÍK (Ivan), Prague, Oikoymenh, 53 p. 70 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 3. Collectifs et numéros de revues En allemand 3.1. BAUR (Patrick), BÖSEL (Bernd) & MERSCH (Dieter) (éds.), Die Stile Martin Heideggers, Fribourg, Alber, 288 p. – « Einleitung. Die Stile Martin Heideggers », pp. 7-24 ; MERSCH (Dieter), « Heideggers Rede », pp. 26-56 ; BAUR (Patrick), « Vom orismos zum "einfachen Sagen". Zur Entwicklung einer Kernfigur in Heideggers Späterwerk », pp. 57-78 ; ROESNER (Martina), « Zwischen Transzendentalphänomenologie und Spekulation. Zu den funktionalen Wandlungen tautologischer Satzstrukturen in Heideggers Denken », pp. 7995 ; LINDBERG (Susanna), « Reading against Hegel », pp. 96-111 ; NAVIGANTE (Adrian), « Rückkehr des Denkens zu sich selbst. Zu Heideggers Destruktion des deutschen Idealismus », pp. 112-127 ; FLATSCHER (Matthias), « (V)Ergangene Geistergespräche. Bemerkungen zu Heideggers performativem Stil im Feldwelg-Gespräch Anchibasie », pp. 128157 ; BÖHLER (Arno), « "Gut ist es, an andern sich / Zu halten. Denn keiner trägt das Leben allein" », pp. 158-177 ; BÖSEL (Bernd), « Einübung in Entrücktsein – Heidegger eigen-willige Ekstatik », pp. 178-206 ; MAN (Sandra), « No Ton. Man spricht mit, man hört mit », pp. 207-227 ; TRAWNY (Peter), « Stilus », pp. 228-242 ; ZEILINGER (Peter), « Über das Lesen. Heidegger und die Vermeidung des Aussagesatzes », pp. 243-264 ; BOELDERL (Artur R.), « Die Stille Martin Heideggers », pp. 265-280 3.2. DENKER (Alfred), KADOWAKO (Shunsuke), ÔHASHI (Ryôsuke), STENGER (Georg) & ZABOROWSKI (Holger), Heidegger-Jahrbuch, Bd. VII, Heidegger und das Ostasiatische Denken, Fribourg, Alber, 464 p. – ÔHASHI (Ryôsuke), « Heidegger und das Ostasiatische Denken », pp. 918 ; « Briefe an Martin Heidegger », pp. 19-29 ; « Briefe und andere Dokumente », pp. 30-59 ; ÔHASHI (Ryôsuke), « Heidegger und das Ostasiatische Denken – Die Frage nach dem "Weltbild" und den "Weltbildern" », pp. 61-73 ; STENGER (Georg), « "Selbt" als Grundwort im Spannungsfeld zwischen Heidegger und das Ostasiatische Denken », pp. 74-101 ; TSUJIMURA (Kôichi), « Die Seinsfrage und das absolute Nicht – Erwachen. In memoriam Martin Heidegger », pp. 102-116 ; ZANG (Xianglong), « Heidegger und die chinesische Philosophie. Materialen, Einschätzungen und Möglichkeiten », pp. 117-137 ; ELBERFELD (Rolf), « "Quellende Wolken und fliessendes Wasser". Dao und Heidegger », pp. 71 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 138-152 ; DAVIS (Bret W.), « Heiōegger’s Orientations. The Step BaŌk on the Way to Dialogue with the East », pp. 153-180 ; CIOFLEC (Evelyn), « Das Nicht-Begriffliche als das Zwischen: Eine Begegnung Heideggers mit dem japanischen Denken », pp. 181-190 ; GUZZONI (Ute), « Schnee auf silberner Schale? Überlegungen zur Heideggerschen und ostasiatischen Denkhaltung », pp. 191-215 ; PÖGGELER (Otto), « Phänomenologie in Geschichten? », pp. 227 ; SAKAKIBARA (Tetsuya), « Genesis und Abbau – Eine Gedankenlinie von Husserl zum frühen Heidegger », pp. 229-245 ; MARALDO (John C.), « Heidegger und Nishida: Nichts, Gott und die Ontotheologie », pp. 246-266 ; MATSUMARU (Hisao), « Tanabe und Heidegger: Fragendes Kreisen um den Tod », pp. 267-282 ; IIJIMA (Yuji), « Über die hermeneutische Struktur der "Normativität" der Ethik Tetsuro Watsujis – ausgehend von seiner Rezeption des Denkens Martin Heideggers », pp. 302-316 ; MORI (Ichirô), « Aus den Erfahrung der Gründe: Kiyoshi Miki und Martin Heidegger », pp. 317-338 ; SEKIGUCHI (Hiroshi), « Shinibu Orikuchi und Heidegger », pp. 339-358 ; TODOROKI (Takao), « Staat und Technikbei Heidegger und der Kyôto-Schule », pp. 359-377 ; KADOWAKI (Shunsuke), « Heidegger und McDowell über Tugend », pp. 379-388 ; KIMURA (Bin), « Psychopathologie der Zufälligkeit oder Verlust auf Aufenhaltsortes beim Schizophren », pp. 389-401 ; KOBAYASHI (Kobuyuki), « Zwei Betrachtungen über die Kunst und die Dichtung. Der Einklang zwischen Heidegger und Nishida », pp. 402-418 ; NAKAHARA (Takashi), « Versuch einer Rekonstruktion von "Zeit und Sein" », pp. 419433 ; MURAI (Norio), « Die Heidegger-Rezeption in Japan », pp. 435-447 ; PARK (Chankook), « Zur Heidegger-Forschung in Korea », pp. 448-458 3.3. GRÄTZEL (Stephan) & SEYLER (Frédéric), Sein, Existenz, Leben: Michel Henry und Martin Heidegger, Fribourg-en-Breisgau/Munich, Alber, 245 – HENRY (Michel), « Die Krise der Phänomenolität bei Heidegger. Die ontologische Dürftigkeit des Erscheinens der Welt », pp. 17-26 ; DE SANCTIS (Francesco Paolo), « Die Problematik des Grundes: der nichtige Abstand zwischen Henry und Heidegger », pp. 27-54 ; FORMISANO (Roberto), « Die Frage der Transzendenz bei Michel Henry und die Voraussetzungen der Kritik an der Philosophie Heideggers in L’essence de la manifestation », pp. 55-83 ; SCHEIDEGGER (Julia), « Kant–Heidegger–Henry: Geschichte und Ontologisierung », pp. 85-106 ; SERBAN (Claudia), « Michel Henry und der frühe Heidegger als Lebensphänomenologen », pp. 107129 ; KÜHN (Rolf), « Sprache des "Seyns" bei Heidegger – und ihre 72 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 lebensphänomenologische Revision », pp. 131-166 ; KEANE (Niall), « Appearing and Speaking in Heidegger and Henry », pp. 167-190 ; KAWASE (Masaya), « Sein und Sprache bei Heidegger und Henry », pp. 191-219 ; SEYLER (Frédéric), « Sorge und immanente Affektivität: eine praktische Synthesis? », pp. 221-240 3.4. KEILING (Tobias) (éd.), Heideggers Marburger Zeit, Francfort-sur-le-Main, Klostermann, Heidegger Forum, 384 p. – KEILING (Tobias), « Einleitung », pp. 11-38 ; – Eigentlichkeit und Uneigentlichkeit: NEUBER (Simone), « Wie spricht es sich eigentlich? Heidegger zum Ich-Gebrauch », pp. 39-56 ; TELO (Hélder), « Who is Responsible for das Man? », pp. 57-69 ; PUC (Jan), « Das Selbstsein. Eine Kritik von Heideggers Begriff der eigentlichen Existenz », pp. 71-81 ; PERRIN (Christophe), « L’impropriété ōe l’authentiŌité. Sur le sens propre ōe l’Eigentlichkeit chez Heidegger », pp. 83-99 ; – Rede und Logos : CASU (Marco), « Heideggers Hermeneutik des Geredes », pp. 101-113 ; GAUVRY (Charlotte), « "En tant que herméneutique" et "en tant que apophantique". La lecture herméneutique du logos de 1925-1926 », pp. 115-127 ; D’ANGELO (Diego), « Die Bedeutung ohne Worte und der Leib. Zwischen Tafeln, Monaden und Spiegeln », pp. 129-141 ; – Sein, Zeit, Natur : YFANTIS (Dimitrios), « Zeitlichkeit und Temporalität. Die Konzeption der Fundamentalontologie in der Marburger Zeit », pp. 143162 : SCHOICHET (Aaron), « From Brentano to Heidegger: Locating the "Question of the Meaning of Being" », pp. 163-175 ; PADUI (Raoni), « The Problem of Nature in Heiōegger’s Marburg Perioō », pp. 177-190 ; YANG (Guang), « Kehrseite der Bewegung. Zu Heideggers Verständnis der Ruhe in den Marburger Vorlesungen und der Phusis-Abhandlunbg », pp. 191-205 ; – Phänomenologie, Verstehen und Wahrheit : PHILIPPI (Martina), « Phänomenologie als methodische Kritik von Selbstverständlichkeit », pp. 207-222 ; HADJIOANNOU (Christos), « Befindlichkeit as Retrieval of Aristotelian diastesis. Heidegger Reading Aristotle in the Marburg Years », pp. 223-235 ; SERBAN (Claudia), « La phénoménologie de la conscience comme fuite devant le Dasein : l’interprétation heiōeggérienne ōe Husserl à Marbourg en 1923-1924 », pp. 237-253 ; HAN (Choong-Su), « Die Struktur der Verklammerung im Wesen der Wahrheit », pp. 255-268 ; – Geschichte und Freiheit : FAGNIEZ (Guillaume), « "Comprendre l’historiŌité" : Heiōegger et la ŌorresponōanŌe ōe Dilthey et Yorck », pp. 269-288 ; THONHAUSER (Gerhard), « Wechselseitige Gegenlektüren: 73 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 Was hätte Heidegger für seine Konzeption des Augenblicks von Kierkegaard lernen können? », pp. 289-303 ; VEITH (Jerome), « Destruktion and Repetition: Freedom and Historical Belonging in Heidegger », pp. 305-318 ; RODRIGUES (Fernando), « Freiheit, Bindung und das Spiel des Lebens. Eine Interpretation der Metaphysik des Daseins im Lichte der letzten Marburger Vorlesung Martin Heideggers », pp. 319-333 ; TÖMMEL (Tatjana Noemi), « "Wie bereit iŌh’s, ōaß Du wohnst im Wesen?". Heidegger über Liebe und die Eigentlichkeit des Anderen in den Marburger Jahren », pp. 335-349 ; KERSTING (Daniel), « Heideggers "Sein zum Tode" – Eine normativ-praktische Relektüre », pp. 351-366 ; CAMILLERI (Sylvain), « La première intervention de Heidegger dans le séminaire néo-testamentaire de Bultmann (WS 1923/1924) », pp. 367-382 En anglais 3.5. DAHLSTROM (Daniel O.) (éd.), Gatherings. The Heidegger Circle Annual, 3, 102 p. – ESCUDERO (Jesús Adrián), « Heidegger on Discourse and Idle Talk: The Role of Aristotelian Rhetoric », pp. 1-17 ; NOWELL SMITH (David), « Sounding/Silence », pp. 18-29 ; ARRIEN (Sophie-Jan), « Faith’s Knowleōge: On Heiōegger’s Reaōing of Saint Paul », pp. 30-49 ; PADUI (Raoni), «From the Facticity of Dasein to the Facticity of Nature: Naturalism, Animality, and the Ontological Difference », pp. 50-75 3.6. EGAN (David), REYNOLDS (Stephen) & WENDLAND (Aaron) (éds.), Wittgenstein and Heidegger. Pathways and Provocations, New York, Routledge, Routledge Studies in Twentieth Century Philosophy, 328 p.  – EGAN (David), REYNOLDS (Stephen) & WENDLAND (Aaron), « General Introduction », pp. 1-18 ; MULHALL (Stephen), « The Meaning of Being and the Possibility of Discourse: Heidegger and Wittgenstein Converse », pp. 19-33 ; GLENDINNING (Simon), « Wittgenstein and Heidegger and the "Face" of Life in Our Time », pp. 34-49 ; MCMANUS (Denis), « The Provocation to Look and See: Appropriation, Recollection, and Formal Indication », pp. 50-65 ; EGAN (David), « The Authenticity of the Ordinary », pp. 66-81 ; GUIGNON (Charles), « Wittgenstein, Heidegger, and the Question of Phenomenology », pp. 82-98 ; MINAR (Edward), « Understanding the Being of the "We": Wittgenstein, Heidegger, and Idealism », pp. 99-115 ; PHILIPSE (Herman), « Heidegger 74 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 and Wittgenstein on External World Skepticism », pp. 116-132 ; CARMAN (Taylor), « What Science Leaves Unsaid », pp. 133-145 ; BRAVER (Lee), « Disintegrating Bugbears: Heidegger and Wittgenstein on Basic Laws of Thought », pp. 146-162 ; SCHEAR (Joseph K.), « Understanding as a Finite Ability », pp. 163-178 ; SCHATZKI (Theodore R.), « Human Activity as Indeterminate Social Event », pp. 179-194 ; REYNOLDS (Stephen), « Heiōegger’s Religious PiŌture », pp. 195-210 ; WENDLAND (Aaron J.), « Words as Works of Art », pp. 211-227 ; RUDD (Anthony), « Wittgenstein and Heidegger as Romantic Modernists », pp. 228-244 ; CERBONE (David R.), « Dwelling on Rough Ground: Heidegger, Wittgenstein, Architecture », pp. 245-260. 3.7. GLAZEBROOK (Trisch) (éd.), Heidegger on Science, New York, SUNY, 327 p. – I. Reading Heidegger on Science : GLAZEBROOK (Trish) « Why Read Heidegger on Science? », pp. 13-26 ; RICHARDSON (William J.), « Heiōegger’s Critique of SŌienŌe », pp. 27-45 ; II. Quantum Theory : WATSON (James R.), « Beyond Ontico-Ontological Relations », pp. 4766 ; RICHTER (Ewald), « Heiōegger’s Theses ConŌerning the Question of the Foundation of Science », pp. 67-91 ; III. Science and the Human Experience : HATAB (Lawrence J.), « From Animal to Dasein: Heidegger and Evolutionary Biology », pp. 93-112 ; HEELAN (Patrick A.), « Carnap and Heidegger: Parting Ways in the Philosophy of Science », pp. 113-130 ; CERBONE (David R.), « Lost Belongings: Heidegger, Naturalism, and Natural Science », pp. 131-157 ; IV. Technoscience : BABICH (Babette E.), « Heiōegger’s Philosophy of SŌienŌe anō the Critique of CalŌulation: Reflective Questioning, Gelassenheit, and Life », pp. 159-192 ; GUZZONI (Ute), « Gelassenheit: Beyond Techno-Scientific Thinking », pp. 193-204 ; STENSTAD (Gail), « Opening Ways of Transformations », pp. 205-223 ; V. Revisiting Being & Time : CREASE (Robert P.), « Heidegger and the Continental Turn in the Philosophy of Science », pp. 225-238 ; KISIEL (Theodore), « A Supratheoretical PreScientific Hermeneutics of Scientific Discovery », pp. 239-260 ; CAPUTO (John D.), « Heiōegger’s Philosophy of Science: The Two Essences of Science », pp. 261-280 ; GLAZEBROOK (Trish), « Developments and Implications », pp. 281-296 3.8. RAFFOUL (François) & NELSON (Eric Sean) (éd.), The Bloomsbury Companion to Heidegger, Londres/New Dehli/New York/Sydney, 75 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 Bloomington, 520 p. – Cinquante-huit entrées rédigées par une quarantaine ō’auteurs amériŌains et européens 3.9. WRATHALL (Mark A.) (éd.), The Cambridge Companion to Heidegger’s Being and time, New York, Cambridge University Press, Cambridge Companions to Philosophy, 441 p. – WRATHALL (Mark A.) & MURPHEY (Max), « An Overview of Being and Time », pp. 1-53 ; DENKER (Alfred), « Martin Heiōegger’s Being and Time: a Carefully Planned Accident? », pp. 54-83 ; CARMAN (Taylor), « The Question of Being », pp. 84-99 ; MARTIN (Wayne), « The Semantics of Dasein and the Modality of Being and Time », pp. 100-128 ; CERBONE (David R.), « Heidegger on Space and Spatiality », pp. 129-144 ; DREYFUS (Hubert L.), « Being-with-others », pp. 145-156 ; RATCLIFFE (Matthew), « Why Mood Matters », pp. 157-176 ; WRATHALL (Mark A.), « Heidegger on Human Understanding », pp. 177-200 ; FULTNER (Barbara), « Heiōegger’s PragmatiŌ-existential Theory of Language and Assertion », pp. 201-222 ; GORDON (Peter E.), « The Empire of Signs: Heiōegger’s Critique of Idealism in Being and Time », pp. 223-238 ; MCMANUS (Denis), « Heidegger on Scepticism, Truth and Falsehood », pp. 239-259 ; THOMSON (Iain), « Death and Demise in Being and Time », pp. 260-290 ; HAN-PILE (Béatrice), « Freedom and the Choice to Choose Oneself in Being and Time », pp. 291-319 ; BLATTNER (William), « Authenticity and Resoluteness », pp. 320-337 ; KÄUFER (Stephan), « Temporality as the Ontological Sense of Care », pp. 338-359 ; SCHEAR (Joseph K.), « Historical Finitude », pp. 360-380 ; SHEEHAN (Thomas), « What if Heidegger Were a Phenomenologist? », pp. 381-402 En arabe 3.10. MAHNÂNA (Ismâ‘îl) (éō.), Min al-kaynûna ilâ l-athar. Hâydighghir fî munâzarat ‘asrihi [De l’être à la trace/l’œuvre. Heidegger dans le débat de son temps], Beyrouth/Alger/Rabat, ad-Dâr al-‘Arabîya li-l-‘Ulûm Nâshirûn, Manshûrât al-Ikhtilâf, Dâr al-Amân, 358 p. – MAHNÂNA (Ismâ‘îl), Muqaōōima [préfaŌe], pp. x-y ; – 1. al-Ab‘âd alasâsîya li-fikr al-kaynûna [Les dimensions fondamentales dans la pensée de l’être] : IBRÂHÎM (Ahmad), « al-Lugha al-aslîya fî falsafat Haydighghir aluntûlûdjîya » [« La langue originale dans la philosophie ontologique de Heidegger »], pp. x-y ; AL-KHWÎLDÎ (Zuhayr), « ad-Dîn fî fikr Hâydighghir » [« La religion dans la pensée de Heidegger »] , pp. x-y ; AL76 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 DJÂF (Karîm Husayn), « Haydighghir wa-ishkâlîyat al-‘amal al-fannî » [« Heiōegger et la problématique ōe l’ρuvre ō’art »], pp. x-y ; NASÎRÎ (Buthayna), « al-Bu‘ō al-untulûdjî li-l-athar al-fannî fî falsafat Haydighghîr » [« La ōimension ontologique ōe l’ρuvre ō’art ōans la philosophie de Heidegger »], pp. x-y ; MUHAMMADÎ RIYÂHÎ (Rashîda), « al-As’ila al-asâsîya fî fikr Mârtin Haydighghir » [« Les questions fondamentales dans la pensée de Martin Heidegger »], pp. x-y ; HAMMÂDÎ (Hamîd), « Haydighghir wa Nîtshih, fî hudûd at-tadjâwuz aldjamâlî li-l-mîtâfîzîqâ » [« Heidegger et Nietzsche, sur les limites du dépassement esthétique de la métaphysique »], pp. x-y ; – 2. Tahawwulât al-kaynûna wa-l-athar [Les changements de l’être et de la trace/l’œuvre] : MAHNÂNA (Ismâ‘îl), « al-Kaynûna wa-l-lâ-wâ‘îya : Untûlûdjiyâ Hayōighghir fî ‘asr at-tahlîl an-nafsî » [« L’être et l’inŌonsŌient : L’ontologie ōe Heiōegger ōans l’époque ōe la psyŌhanalyse »], pp. x-y ; BIN SB‘ (Muhammad), « Tahawwulât al-fînûmînûlûdjiyâ min MîrlûBûntî ilâ Haydighghir » [« Les changements de la phénoménologie de Merleau-Ponty à Heidegger »], pp. x-y ; BÂYÛ (Râbih), « Ghâdâmîr waHaydighghir aw fî l-isti‘âōa al-untûlûdjîya li-l-halqa at-ta’wîlîya » [« Gadamer et Heidegger ou de la récupération ontologique du cercle herméneutique »], pp. x-y ; AL-KHLÎFÎ (‘Aliya), « Ishkâlîyat al-ma‘nâ fî ufuq al-itîqâ (Lîfînâs didda Haydighghîr) » [« La problématique du sens ōans l’horizon ōe l’éthique (Levinas Ōontre Heiōegger) »], pp. x-y ; RABBÛH (Bashir), « Min at-taqwîd al-haydighghirî ilâ t-tafkîk ad-dîrrîdî » [« De la destruction heideggérienne à la déconstruction derridienne »], pp. x-y ; ‘ABD AL-LÂWÎ (an-Nâsir), « Wazîfat al-fahm min Hâbirmâs ilâ Haydighghir » [« Le rôle de la compréhension de Habermas à Heidegger »], pp. x-y ; BIN ZARDA (Fâtima az-Zuharâ’), « Min al-istirsâl al-haydighghirî ilâ t-tala‘thum aō-dûlûzî » [« De l’exhaustivité heideggérienne au bégaiement deleuzien »], pp. x-y ; BRÎMÎ (‘Abō Allâh), « Min az-zamânîya al-haydighghirîya ilâ s-sard fî falsafat Rîkûr » [« De la temporalité heideggérienne au récit dans la philosophie de Ricoeur »], pp. x-y ; BIN ‘AKKÛSH (Sâmîya), « Hawla t-taqârub al-fikrî bayna Haydidjdjir wa-Darrîdâ wa-n-Nafrî » [« De la proximité de Heidegger, Derrida et Nafrî »], pp. x-y ; – 3. Haydighghir fî qirâ’ât mu‘âsirîhi [Heidegger dans les lectures de ses contemporains] : HAMDÂSH (Sa‘âd), « Munâzarat Dâfûs bayna Haydighghir wa-Irnist Kâsîrir » [« Le débat de Davos entre Heidegger et Ernst Cassirer »], pp. x-y ; DA‘ÎSH (Khayr ad-Dîn), « Djahîm al-falâsifa, Haydighghir wa-falâsifat faransâ » [« L’enfer ōes philosophes, Heiōegger 77 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 et les philosophes français »], pp. x-y ; BÎDÛH (Samîya), « Bîtr Slûtirdâyk, taddjîn al-kaynûna » [« Peter Sloterōijk, l’apprivoisement ōe l’être »], pp. x-y ; ‘ALLÛSH (Nûr ad-Dîn), « al-‘Aōamîya, Hayōighghir wa-Yûnghir » [« Le nihilisme, Heidegger et Jünger »], pp. x-y En espagnol 3.11. DE LARA (Francisco) (éd.), Lógos – Lógica – Lenguaje, Studia Heideggeriana, 2, Buenos Aires, Teseo, Filosofía, 288 p. – DE LARA (Francisco), « Introducción », pp. 9-11 ; – I. Acercamientos a la lόgica, las categorías y el lenguaje : XOLOCOTZ (Ángel), « Juicio y afectividad. Heidegger, la pregunta por el ser y la lógica neokantiana de Rickert », pp. 13-34 ; JOHNSON (Felipe), « Lógica del objeto y lógica hermenéutica: El carácter existencial del ser y la nueva orientación del trabajo ontológico en el joven Heidegger », pp. 35-56 ; BERTORELLO (Adrián), « Una interpretación semiótico-narrativa del sistema de las modalidades en Sein und Zeit », pp. 57-70 ; VIGO (Alejandro G.), « Categorías y experiencia antepredicativa en el entorno de Sein und Zeit », pp. 71-127 ; ROCHA DE LA TORRE (Alfredo), « ¿Origen o esencia? Heidegger y la concepción tradicional del lenguaje », pp. 129-150 ; ROSALES (Alberto), « Analogía, diferencia y diversidad », pp. 151-177 ; – II. Discusiones y desplazamientos : RODRÍGUEZ (Ramón), « La percepción como interpretación », pp. 179212 ; ROSSI (Luis A.), « Ir más allá de "lo político": la reflexión de Carl Schmitt y la respuesta de Heidegger », pp. 213-242 ; FRAGOZO (Fernando), « A inquietante introdução à metafísica Urna reflexão sobre a estrutura, o teor e a finalidade do curso de 1935 », pp. 243-258 ; GUTIÉRREZ (Carlos B.), « Heidegger y Gadamer: una relación desacostumbrada », pp. 259-281 3.12. SANTIESTEBAN (Luis César) (éd.), Sier y tiempo de Martin Heidegger. Comentario introductorio a la obra, México, Aldus, 619 p. – SANTIESTEBAN (Luis César), « Introducción », pp. 9-20 ; LEYTE (Arturo), « Comentario a la Introducción a Ser y Tiempo (§§ 1-8) », pp. 2180 ; VOLPI (Franco), « El estatuto de la analítica existencial (§§ 9-13) », pp. 81-112 ; RUBIO (Roberto), « El concepto de mundo en Ser y Tiempo (§§ 14-24) », pp. 113-172 ; RIVAS LARA (Heidi Alicia), « Coexistencia, Coestar, Uno (§§ 25-27) », pp. 173-198 ; XOLOCOTZI YÁÑEZ (Ángel), « Las formas de la apertura: Disposición afectiva y comprensión. Articulación lingüística y caída (§§ 28-38) », pp. 199-234 ; SANTIESTEBAN 78 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 (Luis César), « El cuidado como ser del Dasein (§§ 39-44) », pp. 235-278 ; GÓMEZ-ARZAPALO (Francisco), « El Dasein y la Temporalidad. El posible "ser total" del "ser ahí" y el "ser relativamente a la muerte" (§§ 45-53) », pp. 279-324 ; VIGO (Alejandro G.), « La atestiguación, en el modo de ser del Dasein, de un poder-ser propio y el estado de resuelto (§§ 54-60) », pp. 325-426 ; RODRÍGUEZ (Ramón), « Ser y tiempo, 2ª Sección, Capítulo 3: El poder ser entero del Dasein y la temporalidad como sentido ontológico del cuidado (§§ 61-66) », pp. 427-482 ; MARTÍNEZ MATÍAS (Paloma), « Temporalidad e cotidianidad (§§ 67-71) », pp. 483-540 ; LARA (Esteban Gasson), « Temporeidad e historicidad. Temporeidad e intratemporeidad como origen del concepto vulgar de tiempo (§§ 72-83) », pp. 541-584 ; LARA (Esteban Gasson), « Acotaciones biblioráficas », pp. 585-610 En français 3.13. ARJAKOVSKY (Philippe), FÉDIER (François) & FRANCE-LANORD (Hadrien) (éds.), Dictionnaire Martin Heidegger. Vocabulaire polyphonique de sa pensée, Paris, Cerf, 1472 p. – Plus de six-cent entrées rédigées par vingtquatre auteurs  3.14. PERRIN (Christophe) (éd.), Qu’appelle-t-on un séminaire ? La pédagogie heideggérienne, Bucarest, Zeta Books, 262 p. – PERRIN (Christophe), « Avant-propos », pp. 9-14 ; PERRIN (Christophe), « De l’agora au séminaire. Heiōegger et SoŌrate », pp. 15-52 ; SCHÜRCH (Franz-Emmanuel), « Heidegger et la pédagogie au sens strict », pp. 5383 ; SINCLAIR (Mark), « Heiōegger, l’enseignement et la reŌherŌhe », pp. 84-108 ; LEBLANC (Cathy), « Enseigner à éŌouter avant ō’enseigner à parler. Ou comment Heidegger prend son lecteur par la main », pp. 109136 ; JARAN (François), « Le séminaire Ōomme laboratoire. L’expérienŌe de la lecture heideggérienne de Schelling en 1927-1928 », pp. 137-164 ; PIERON (Julien), « Le style de Heidegger – entre éducation, philosophie et politique », pp. 165-197 ; BOUBLIL (Éodie), « "Denken wir für ein Augenblick…" : rythme et topique du discours pédagogique chez Heidegger », pp. 198-224 ; JEAN (Grégori), « De quoi la philosophie a-telle l’air ? Heiōegger et l’équivoŌité ōe la péōagogie », pp. 225-252 79 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 En italien 3.15. ANELLI (Alberto) (éd.), Humanitas (2013). Vol. 2: Heidegger tra filosofia e teologia. Oltre la modernità, Brescia, Morcelliana, 208 p. – ANELLI (Alberto), « Oltre la modernità. Filosofia e teologia alle prese Ōon l’evento », pp. x-y ; SHEEHAN (Thomas), « Prolegomeni alla questione di Heidegger e Dio », pp. x-y ; CAPELLE-DUMONT (Philippe), « Teologia e soteriologia in Martin Heidegger. Studio critico », pp. x-y ; ANELLI (Alberto), « Heidegger e la teologia. Verso un nuovo paradigma », pp. x-y ; KLEFFMANN (Tom), « Filosofia e teologia in Heidegger », pp. x-y ; ALBARELLO (Duilio), « Dalla metafisica alla verità Ōome evento. La rilettura ōell’Ereignis in J.B. Lotz, B. Welte e M. Müller », pp. x-y ; NOBERASCO (Giuseppe), « L’evento esŌatologiŌo e la ridefinizione della ragione teologica. Sviluppi teologiŌi ōell’ereōità barthiana », pp. x-y En plusieurs langues 3.16. SCHÜSSLER (Ingeborg), CORIANDO (Paola-Ludovika), DAVID (Pascal), EMAD (Parvis), VON HERRMANN (Friedrich-Wilhelm), SCHALOW (Frank) (éds.), Heidegger-Studien, 29, Technicity, Language and Translation: Questions Concerning the Parousia of the Divine, Berlin, Duncker & Humblot, 289 p. – II. Articles: ROESNER (Martina), « Causa Sive Ratio: Heideggers Kritik der neuzeitlichen Technik vor dem Hintergrund der Geschichte des metaphysischen Kausalitätsbegriffs », pp. 27-49 ; SCHALOW (Frank), « The "Ownmost Sway" of Technicity and Its Hermeneutic Guideline (Part I) », pp. 51-65 ; ULRICH (Barbara), « Heidegger, Trakl et le site de celui-ci dans le "retournement natal" », pp. 67-86 ; BAHR (Hans-Dieter), « Das Wesen der Technik und das "andere Geschichk". Ge-stell und Gegnet im Denken Martin Heideggers », pp. 89-119 ; KOVACS (George), « Heiōegger’s Insight into the History of Language », pp. 121-131 ; MARAFIOTI (Rosa Maria), « Das stille Spiel der Wahrheit. Die Fragwürdigkeit der Musik bei Heidegger », pp. 133-161 ; KALARY (Thomas), « Hints of the Postmetaphysical Parousia of the Divine », pp. 163-193 ; ESCUDERO (Jesus Adrián), « Sein und Zeit und die Tradition der Selbstsorge », pp. 195-211 ; III. Essays in Interpretation: TRAWNY (Peter), « Translating and Thinking », pp. 215-223 ; TRAWNY (Peter), « Übersetzen und Denken », pp. 222-233 ; CAMILLERI (Sylvain), « Mn 2-3304-3084: un curieux palimpseste dans le Nachlass Rudolf Bultmann de Tübingen », pp. 235-257 ; NEUGEBAUER 80 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 (Klaus), « Vademecum für Reisende der philosophischen Biografie », pp. 259-272 4. Études générales En allemand 4.1. AUER (Michael), Wege zu einer planetarischen Linientreue? Meridiane zwischen Jünger, Schmidt, Heidegger und Celan, Munich, Fink, 261 p. 4.2. BAUR (Patrick), Phänomenologie der Gebärden: Leiblichkeit und Sprache bei Heidegger, Fribourg, Alber, Alber Thesen, 316 p. 4.3. CIMINO (Antonio), Phänomenologie und Vollzug. Heideggers performative Philosophie des faktischen Lebens, Francfort-sur-le-Main, Klostermann, Heidegger-Forum, 220 p. 4.4. DAVOLI (Giovandomenico), Heidegger und die Frage nach dem Sinn vom Sein: das Dasein und das Nichts, Berlin, Lit, 303 p. 4.5. DE ROCHE (Charles), Monadologie des Gedichts. Benjamin, Heidegger, Celan, Munich, Fink, 261 p. 4.6. HIRANO (Tetsushi), Die Phänomenologie der Szene. Das Problem der Selbstauslegung in Sein und Zeit, Wurtzbourg, Königshausen & Neumann, Epistemata Philosophie, p. 238 4.7. LORENZ (Ansgar) & RUFFING (Reiner), Martin Heidegger. Philosophie für Einsteiger, Munich, Fink, 84 p. 4.8. MENDE (Dirk), Metapher – Zwischen Metaphysik und Archäologie. Schelling, Heidegger, Derrida, Blumenberg, Munich, Fink, 266 p. 4.9. MOROVICOVA REMEDIOS (Monica), Unterwegs zu einer Sprachontologie. Augustin als Schlüssel für die Interpretation der Sprachreflexionen von Heidegger und Gadamer, Paderborn/Munich, Schöningh, Augustinus – Werk und Wirkung, 340 p. 4.10. RASPITSOS (Kosmas), Die Latinisierung des Griechischen. Übersetzung, Verstehen und Sprache im Ausgang von Martin Heidegger und Hans-Georg Gadamer, Wurtzbourg, Konigshausen & Neumann, Epistemata, 230 p. 4.11. RUFFING (Reiner), Der Sinn der Sorge, Fribourg, Alber, 160 p. 4.12. TSAI (Wei-Ding), Die ontologische Wende der Hermeneutik. Heidegger und Gadamer, Francfort-sur-le-Main, Peter Lang, Europäische Hochschulschriften, 231 p. 4.13. VALLOORAN (Jaison D.), Heidegger und Sankara. Die hermeneutische Zusammengehörigkeit von "Atman" und "Brahman", Hambourg, Kovac, 243 p. 81 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 4.14. VETTER (Helmuth), Grundriss Heidegger. Ein Handbuch zu Leben und Werk, Leipzig, Meiner, 512 p. En anglais 4.15. BAMBACH (Charles), Thinking the Poetic Measure of Justice. Hölderlin– Heidegger–Celan, New York, SUNY Press, Suny Series in Contemporary Continental Philosophy, 320 p.  4.16. CROWELL (Steven G.), Normativity and Phenomenology in Husserl and Heidegger, New York, Cambridge University Press, 334 p. 4.17. DAHLSTROM (Daniel O.), The Heidegger Dictionary, Londres/New Dehli/New York/Sydney, Bloomsbury, 240 p.  4.18. DE GENNARO (Ivo), The Weirdness of Being. Heidegger’s Unheard Answer to the Seinsfrage, Durham, Acumen, 256 p. 4.19. HAUGELAND (John) & Rouse (Joseph) (éd.), Dasein Disclosed. John Haugeland’s Heidegger, Cambridge (Mass.), Harvard University Press, 291 p.  4.20. HEMMING (Laurence Paul), Heidegger and Marx. A Productive Dialogue over the Language of Humanism, Evanston, Northwestern University Press, 460 p. 4.21. IRWIN (Jones), The Pursuit of Existentialism: From Heidegger and Sartre to Zizek and Badiou, Durham, Acumen, 224 p. 4.22. JARAN (François) & PERRIN (Christophe), The Heidegger Concordance, Londres/New Dehli/New York/Sydney, Bloomsbury, 3 tomes, 816 p., 868 p., 234 p. 4.23. MCMANUS (Denis), Heidegger and the Measure of Truth, Oxford, Oxford University Press, 256 p. 4.24. MCMULLIN (Irene), Time and the Shared World. Heidegger on Social Relations, Evanston, Northwestern University Press, Northwestern University Studies in Phenomenology & Existential Philosophy, 304 p. 4.25. MEYER (Eric D.), Questioning Martin Heidegger. On Western Metaphysics, Bhuddhist Ethics, and the Fate of the Sentient Earth, Lanham, University Press of America, 266 p. 4.26. MULHALL (Stephen), The Routledge Guidebook to Heidegger’s Being and Time, Abingdon Oxon/New York, Routledge, The Routledge Guides to the Great Books, 220 p. (édition révisée) 4.27. NOWELL SMITH (David), Sounding/Silence. Martin Heidegger at the Limits of Poetics, New York, Fordham University Press, Perspectives in Continental Philosophy, 256 p. 82 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 4.28. Ó MURCHADHA (Felix), The Time of Revolution. Kairos and Chronos in Heidegger, Londres/New York, Bloomsbury, Bloomsbury Studies in Continental Philosophy, 246 p. 4.29. PATTISON (George), Heidegger on Death. A Critical Theological Essay, Farnham, Ashgate Publishing, Intensities: Contemporary Continental Philosophy of Religion, 170 p.  4.30. PEARL (Joel), A Question of Time. Freud in the Light of Heidegger’s Temporality, Amsterdam/New York, Rodopi, Contemporary Psychoanalytic Studies, 238 p. 4.31. POWELL (Jeffrey), Heidegger and Language, Bloomington, Indiana University Press, Series in Continental Philosophy, 264 p. 4.32. QUAY (John), Education, Experience, and Existence. Engaging Dewey, Peirce and Heidegger, New York, Routledge, New Directions in the Philosophy of Education, 248 p. 4.33. SCHALOW (Franck), Departures. At the Crossroads Between Heidegger and Kant, Berlin, De Gruyter, 243 p. 4.34. SCHMIDT (Dennis J.), Between Word and Image. Heidegger, Klee, and Gadamer on Gesture and Genesis, Bloomington, Indiana University Press, 187 p. 4.35. WISNEWSKI (Jeremy J.), Heidegger. An Introduction, Lanham, Rowman & Littlefield Pub Inc., 206 p. 4.36. WOLFE (Judith), Heidegger’s Eschatology. Theological Horizons in Martin Heidegger’s Early Work, Corby, Oxford University Press, Oxford Theology and Religion Monographs, 208 p. 4.37. WOLFE (Judith), Heidegger und Theology, Londres, Bloosmbury T&T Clark, 176 p. 4.38. YATES (Christopher S.), The Poetic Imagination in Heidegger and Schelling, Londres, Bloosmbury, Bloomsbury Studies in Continental Philosophy, 224 p. 4.39. ZIAREK (Krzysztof), Language after Heidegger, Bloomington, Indiana University Press, 232 p. En arabe 4.40. ASH-SHAYKAR (Muhammad), Fî l-falsafa al-almânîya. Hâydaghghir didda Nitshih [Sur la philosophie allemande. Heidegger contre Nietzsche], Casablanca, Manshûrât az-Zaman, 171 p. 4.41. KÖCHLER (Hans), ash-Shakk wa-naqd li-l-mudjtama‘ fî fikr Mârtîn Haydidjdjir [Le scepticisme et la critique sociale dans la pensée de Martin Heidegger], trad. de LASHHAB (Hamîd), Beyrouth, Djadâwil, 199 p. 83 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 En chinois 4.42. DU (Zhan-tao), Luo ge si, xian xiang yu ren de zi wo ren shi – hu sai er, hai de ge er yu ma li wen xian xiang xue yan jiu [Logos, phénomène et connaissance de soi – Husserl, Heidegger et Marion], Pékin, Chinese University of Political Science and Law Press, 302 p. 4.43. SUN (Guan-chen), Hai de ge er xing er shang xue wen ti jian lun [Brève introduction au problème de la métaphysique pour Heidegger], Pékin, Social science Academic Press, 296 p. 4.44. SUN (Zhou-xin), Cun zai yu chao yue: Hai de ge er yu xi zhe han yi wen ti [Être et transcendance. Heidegger et le problème de la traduction en mandarin de la philosophie occidentale], Shanghai, Fudan University Press, 147 p. 4.45. YE (Qi-chang), Yu yan zhi she hui gui fan shuo yu zi ran shuo: suo xu er yu hai de ge er yu yan guan dui bi yan jiu [Théorie conventionnelle et théorie naturelle du langage. Comparaison entre les conceptions du langage de Saussure et de Heidegger], Pékin, Peking University Press, 216 p. 4.46. ZHANG (Hai-tao), Chen ming yu zhe bi: hai de ge er zhu ti jian xing mei xue si xiang yan jiu [Ouverture et dissimulation : l’esthétique intersubjective de Heidegger], Pékin, Ren min Press, 277 p. En coréen 4.47. KIM (Dong-gyu), Cheolhak ui Mobidik [Le Moby Dick de la philosophie], Séoul, Munhakdongne, 228 p. 4.48. PARK (Chan-Kook), Haidegger ui Jonjae wa Sigan ilkgi [Lecture d’Être et temps de Heidegger], Séoul, Sechangchulpan, 256 p. En danois 4.49. PIO (Frederik), Introduktion af Heidegger til de pædagogiske fag: om ontologi og nihilisme i uddannelse og undervisning, Copenhague, Institut for Uddannelse og Pædagogik (DPU) – Aarhus Universitet, 300 p. En espagnol 4.50. BERTORELLO (Adrián), El abismo del espejo. La estructura narrativa de la filosofía heideggeriana, La Plata, Edulp, 363 p. 4.51. SCHARM (Heike), El tiempo y el ser en Javier Marías. El ciclo de Oxford a la luz de Bergson y Heidegger, Amsterdam/New York, Rodopi, Foro hispánico, 243 p. 4.52. XOLOCOTZI YÁÑEZ (Ángel), Heidegger y el nacionalsocialismo. Una crónica, Madrid, Plaza y Valdés, 240 p. 84 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 En français 4.53. BALAZUT (Joël), Heidegger. Une philosophie de la présence, Paris, L’Harmattan, Ouverture philosophique, 110 p. 4.54. CIOCAN (Cristian), Heidegger et le problème de la mort. Existentialité, authenticité, temporalité, Dordrecht, Springer, Phaenomenologica, 270 p. 4.55. COURTINE (Jean-François), Archéo-logique. Husserl, Heidegger, Patočka, Paris, PUF, Épiméthée, 256 p.  4.56. DERRIDA (Jacques), Heidegger : la question de l’Être et l’Histoire. Cours de l’ENS-Ulm (1964-1965), éd. par DUTOIT (Thomas) et DERRIDA (Marguerite), Paris, Galilée, La philosophie en effet, 344 p. 4.57. GIULIANI (Matías A.), Histoire, langage et art chez Walter Benjamin et Martin Heidegger, Paris, Klincksieck, Esthétique, 432 p. 4.58. JARAN (François), Phénoménologies de l’histoire. Husserl, Heidegger et l’histoire de la philosophie, Louvain/Paris, Peeters, Bibliothèque philosophique de Louvain, 154 p.  4.59. MAIDIKA ASANA KALINGA (Jules), Métaphysique et technique moderne chez Martin Heidegger, Paris, L’Harmattan, Pensée africaine, 252 p. 4.60. PERRIN (Christophe), Entendre la métaphysique. Les significations de la pensée de Descartes dans l’œuvre de Heidegger, Louvain/Paris, Peeters, Bibliothèque philosophique de Louvain, 561 p.  4.61. PRADELLE (Dominique), Généalogie de la raison. Essai sur l’historicité du sujet transcendental de Kant à Heidegger, Paris, PUF, Épiméthée, 464 p.  4.62. ROMANO (Claude), L’inachèvement d’Être et temps et autres études d’histoire de la phénoménologie, Argenteuil, Le Cercle herméneutique, Phéno, 246 p.  4.63. SOMMER (Christian), Heidegger 1933. Le programme platonicien du Discours de Rectorat, Paris, Hermann, Le Bel Aujourō’hui, 86 p. 4.64. TATARI (Marita), Heidegger et Rilke. Interprétation et partage de la poésie, Paris, L’Harmattan, Ouverture philosophique, 154 p. En italien 4.65. BARZAGHI (Mario), Orizzonti perduti. Heidegger, fato e illuminismo, Tricase, Youcanprint, 320 p. 4.66. BRENCIO (Francesca), Scritti su Heidegger, Rome, Aracne, 160 p. 4.67. CERANOVI (Federica), Dal giogo dell’idea alla festa del pensiero. I sentieri dell’aletheia nel saggio L’Origine ōell’opera ō’arte di Martin Heidegger, Milan, Mimesis, 100 p. 85 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 4.68. CORALLUZZO (Francesco), Oltre il relativsmo. Comprendere e superare le ragioni di Nietzsche, Heidegger e Vattimo, Rome, Leonardo da Vinci, Biblioteca di "Sensus communis", 188 p. 4.69. CORRIERO (Emilio Carlo), Libertà et Conflitto. Da Heidegger a Schelling, per un’ontologia dinamica con un saggio di Manfred Frank, Turin, Rosenberg & Sellier, 208 p. 4.70. COSTA (Mario), Heidegger, Brescia, La Scuola, 192 p. 4.71. CRUPI (Vincenzo), Presupporre e interpretare. Heidegger, il problema dei presupposti e la storicità del sapere scientifico, Naples, La Scuola di Pitagora, Vivarium, 240 p. 4.72. DARSIÉ (Laura), Il grido e il silenzio. Un in-contro tra Celan e Heidegger, Milan, Mimesis, 250 p. 4.73. DE BIASE (Riccardo), Le cose e la vita. Saggio su Essere e tempo, Naples, Marchese, 205 p. 4.74. DI CANIO (Arcangelo), L’uni-verso arte in Martin Heidegger, Lecce, Pensa Multimedia, Humanities, 162 p. 4.75. ESPOSITO (Constantino), Heidegger, Bologne, Il Mulino, 242 p. 4.76. FABRIS (Adriano), La questione della cosa di Martin Heidegger, Modène, Consorzio Festivalfilosofia, Paginette del festivalfilosofia, 20 p. 4.77. JACOPINO (Marco), Ascoso in Heidegger. Sentieri interretto, strade perdute, Rome, Aracne, 176 p. 4.78. MESSINESE (Leonardo), Stanze della metafisica. Heidegger, Löwith, Carlini, Bontadini, Severino, Brescia, Morcelliana, 192 p. 4.79. PANDOLFI (Carmelo), Kant, Hegel, Heidegger in Cornelio Fabro, Rome, If Press, x p. 4.80. PETRES (Erika), Arte, verità, essere. La riabilitazione ontologica dell’arte in Martin Heidegger e Maurice Merleau-Ponty, Rome, Pontificio Istituto Biblico, Tesi Gregoriana Filosofia, 345 p. 4.81. PIERI (Camilla), Essere nel tempo. Studio su Heidegger, Florence, Clinamen, Philosophia, 140 p. 4.82. RESTA (Caterina), Nichilismo tecnica mondializzazione. Saggi su Schmitt, Junger, Heidegger e Derrida, Milan, Mimesis, 182 p. 4.83. SERAFINI (Luca), Inoperosità. Heidegger nel dibattito francese contemporaneo, Milan, Mimesis, Filosofie, 307 p. 4.84. STAGI (Pierfrancesco), Di dio e dell’essere. Un secolo di Heidegger, Milan, Mimesis, Filosofie, 242 p. 4.85. STORACE (Erasmo Silvio) (éds.), Tradursi in Heidegger, Milan, Albo Versorio, 104 p. 86 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 4.86. VALENTINO (Carmen), Le metafore di Heidegger, Trente, Edizioni del Faro, 91 p. 4.87. VENEZIA (Simona), La misura della finitezza. Evento e linguaggio in Heidegger e Wittgenstein, Milan, Mimesis, Percorsi di confine, 250 p. En japonais 4.88. G DA (Masato), Tanabe hajime to haidegā: fūin sareta tetsugaku [Hajime Tanabe et Martin Heidegger. Des philosophies à découvrir], Kyoto/Tokyo, PHP kenkyūjyo, 287 p. 4.89. MATSUMARU (Hisao), Chyokusetuchi no tankyū: nishida, nishitani, haidegā, daisetsu [Réflexions sur la connaissance directe. Kitarō Nishida, Keiji Nishitani, Martin Heidegger, Daisetsu Suzuki], Kanagawa, Shunpūsha, 390 p. En portuguais 4.90. GIACÓIA JR. (Oswaldo), Heidegger urgente. Introdução a um novo pensar, São Paulo, Publifolha, 144 p. En roumain 4.91. CIOAB (C t lin), Filozoful şi umbra lui. Turnura gândirii la Martin Heidegger şi Ludwig Wittgenstein, Bucarest, Humanitas, 380 p. En slovaque 4.92. RUSNÁK (Peter), Čítanie z Heideggera. Divertimento ku komparatívnej etike, Trnava, Towarzystwo Słowaków w PolsŌe, 112 p. En suédois 4.93. RUIN (Hans), Frihet, ändlighet, historicitet. Essäer om Heideggers filosofi, Stockholm, Ersatz, 398 p. 5. Études particulières En allemand 5.1. BERTRAM (Georg W.), « Die Einheit des Selbst nach Heidegger », Deutsche Zeitschrift für Philosophie, 61/2, pp. 197-213 5.2. BRUUN (Lars K.), « Epistolarität und Existenz: Betrachtungen über Martin Heideggers Paulusinterpretation », in ZABOROWSKI (Holger) et al. (éds.), Paulus. An die Römer, Fribourg, Alber, pp. 413-429 87 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 5.3. FAGNIEZ (Guillaume), « Hermeneutik im Übergang von Dilthey zu Heidegger », Studia Phaenomenologica, 13, pp. 429-447 5.4. GROSSMANN (Andreas), « Was sich nicht von selbst versteht: Heidegger, Bultmann und die Frage einer hermeneutischen Theologie », in DALFERTH (Ingolf U.), BÜHLER (Pierre) & HUNZIKER (Andreas) (éds.), Hermeneutische Theologie – heute?, Tübingen, Mohr Siebeck, pp. 55-81 5.5. INISHEV (Ilya), « Heideggers Philosophie der Kunst im Lichte gegenwärtiger Ästhetik und Bildtheorie », Phainomena, 27/85-86, pp. 201214 5.6. KHURANA (Thomas), « Kant, Heidegger und das Verhältnis von Repräsentation und Abstraktion », Zeitschrift für Ästhetik und allgemeine Kunstwissenschaft, 58/2, pp. 203-224 5.7. MARTIN (Christian), « Heidegger und Benjamin über Gewalt », in FEGER (Hans) & HACKEL (Manuela) (éds.), Existenzphilosophie und Ethik, Berlin, Walter de Gruyter, pp. 505-528 5.8. MARX (Wolfgang), « Herr Heidegger behorcht das Seyn », Merkur, 765, pp. 182-188 5.9. MEHRING (Reinhard), « 9. September im Kaiserhof? Martin Heidegger und Carl Schmitt in Berlin – nach neuer Quellenlage », Merkur, 764, pp. 7377 5.10. OTT (Konrad), « "Man muß sich einschalten". Wie Plessner Heidegger aufforderte, politisch aktiv zu werden », Zeitschrift für philosophische Forschung, 66, pp. 448-459 5.11. SCHMIDT (Stefan W.), « Das Geschehen der Freiheit: Heidegger ontologischer Freiheitsbegriff », in D’ANGELO (Diego), GOURDAIN (Sylvaine), KEILING (Tobias) & MIRKOVIC (Nikola) (éds.), Frei sein, frei handeln. Freiheit zwischen theoretischer und praktischer Philosophie, Fribourg, Alber, pp. 76-93 5.12. THANNING (Morten Sorensen), « Freiheit und Verantwortung bei Heidegger und Gadamer », in D’ANGELO (Diego), GOURDAIN (Sylvaine), KEILING (Tobias) & MIRKOVIC (Nikola) (éds.), Frei sein, frei handeln. Freiheit zwischen theoretischer und praktischer Philosophie, Fribourg, Alber, pp. 29-57 En anglais 5.13. ABRAMS (Thomas), « Being-towards-death and Taxes: Heidegger, Disability and the Ontological Difference », Canadian Journal of Disability Studies, 2/1, pp. 28-50 88 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 5.14. ASPERS (Patrick), « Heidegger and Socio-ontology: A Sociological Reading », Journal of Classical Psychology, 13/4, pp. 487-508 5.15. BABICH (Babette E.), « O Superman! Or Being toward Transhumanism: Martin Heidegger, Günter Anders, and Media Aesthetics », Divinatio, 36, pp. 41-99 5.16. BABICH (Babette E.), « Constellating Technology: Heiōegger’s Die Gefahr », in BABICH (Babette E.) & GINEV (Dimitri) (éds.), The Multidimensionality of Hermeneutic Phenomenology, Dordrecht, Springer, Contributions to Phenomenology, pp. 153-182 5.17. BAKKEN (Tore), HOLT (Robin) & ZUNDEL (Mike), « Time & Play in Management Practice: An Investigation Through the Philosophies of McTaggart and Heidegger », Scandinavian Journal of Management, 29/1, pp. 13-22 5.18. BAHR (Hans-Dieter), « ApproaŌhing Heiōegger’s Thought on Technology », in HOVESTADT (Ludger) & BÜHLMANN (Vera) (éds.), Printed Physics – Metalithikum I, New York/Vienne, Springer, pp. 211-231 5.19. BARACHI (Claudia), « A Vibrant Silence: Heidegger and the End of Philosophy », in MARDER (Michael) & ZABALA (Santiago) (éds.), Being Shaken: Ontology and the Event, Londres, Palgrave MacMillan, Palgrave Studies in Postmetaphysical Thought, pp. x-y 5.20. BENDEL (Mervyn F.), « Heidegger and the Nazi Philosophers », Quadrant, 57/7-8, pp. 58-64 5.21. BLOK (Vincent), « "Massive Voluntarism" or Heiōegger’s Confrontation with the Will », Studia Phaenomenologica, 13, pp. 449-465 5.22. BONARDEL (Françoise), « Giants Battle Anew: Nihilism’s SelfOvercoming in Europe and Asia (Nietzsche, Heidegger, Nishitani) », in BOUBLIL (Élodie) & DAIGLE (Christine) (éds.), Nietzsche and Phenomenology. Power, Life, Subjectivity, Bloomington, Indiana University Press, Studies in Continental Thought, pp. 80-100 5.23. BORRETT (Donald S.), « Heidegger, Gestell and Rehabilitation of the Biomedical Model », Journal of Evaluation in Clinical Practice, 19/3, pp. 497500 5.24. BARBAZA (Remmon), « Higher than the Original Stands the Translation: Translating Heidegger into Filipino », Kritika Kultura, 21/22, pp. 241-256 5.25. BOUBLIL (Élodie), « Of the Vision and the Riddle: From Nietzsche to Phenomenology », in BOUBLIL (Élodie) & DAIGLE (Christine) (éds.), Nietzsche and Phenomenology. Power, Life, Subjectivity, Bloomington, Indiana University Press, Studies in Continental Thought, pp. 141-158 89 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 5.26. BROWN (Arthur A.), « Gen-, Shakespeare, Heidegger, and the Nature of Mortal Being », Philosophy and Literature, 37/1, pp. 35-52 5.27. BRUUN (Lars K.), « A Protestant Church Father of the 20th Century? The Early Heiōegger’s Phenomenology of Religion anō the Crisis of Western Culture », in BRUUN (Lars K.), LAMMERS (Karl C.) & SØRENSEN (Gert) (éds.), European Self-Reflection Between Politics and Religion. The Crisis of Europe in the 20th Century, Houndmills Basingstoke Hampshire/New York, Palgrave Macmillan, pp. 112-137 5.28. CAMPBELL (Scott M.), « The TragiŌ Sense of Life in Heiōegger’s Reaōing of Antigone », in CAMPBELL (Scott M.) & BRUNO (Paul W.) (éds.), The Science, Politics, and Ontology of Life-Philosophy, Londres, Bloomsbury, pp. 185-196 5.29. CARLISLE (Clare), « Kierkegaard and Heidegger », in LIPPITT (John) & PATTISON (George) (éds.), The Oxford Handbook of Kierkegaard, Oxford, Oxford University Press, Oxford Handbooks in Religion and Theology, pp. 421-439 5.30. CIMINO (Antonio), « Attestation anō FaŌtiŌity: On Heiōegger’s Conception of Attestation in Being and Time », Journal of the British Society for Phenomenology, 44/2, pp. 181-197 5.31. CIMITILE (Maria), « The Gift of Being, Gift of World(s): Irigaray on Heidegger », in JOY (Morny) (éd.), Women and the Gift. Beyond the Given and All-Giving, Bloomington, Indiana University Press, pp. 116-130 5.32. CIOFLEC (Eveline), « Questioning Husserl’s Conception of a "Primal Endowment" (Ur-Stiftung) anō Heiōegger’s ConŌept of Enowning (Ereignis) », Analecta Husserliana, 114, pp. 181-192 5.33. CONTY (Arianne), « Techno-Phenomenology: Martin Heidegger and Bruno Latour on How Phenomena Come to Presence », South African Journal of Philosophy, 32/4, pp. 311-326 5.34. COYNE (Lewis), « Heidegger and the Problem of the Sublime », Postgraduate Journal of Aesthetics, 10/1, pp. 18-28 5.35. CUMMINGS (Owen T.), « Divine Refusal: An Aspect of the Internal Link between God and Truth in Heidegger », International Journal of Philosophy and Theology, 74/3, pp. 183-195 5.36. DAHLSTROM (Daniel), « The Opening of the Future: Heiōegger’s Interpretation of Rilke », South African Journal of Philosophy, 32/4, pp. 373382 5.37. DE BRYCKERE (Anna) & VAN DYCK (Marten), « Being in or Getting at the Real: Kochan on Rouse, Heidegger, and Minimal Realism », Perspectives on Science, 21/4, pp. 453-462 90 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 5.38. DE VERA (Dennis A.), « Towarōs a Return to One’s EssenŌe: Some Reflections on Nietzsche and Heidegger », Journal of Philosophy of Life, 3/2, pp. 108-126 5.39. DRAKOPOULOU (Dodd), ANDERSEN (Alistair) & JACK (Sarah), « Being in Time and the Family Owned Firm », Scandinavian Journal of Management, 29/1, pp. 35-47 5.40. ESCUDERO (Jesús Adrián), « Heidegger on Discourse and Idle Talk », Philosophy Study, 3/2, pp. 85-96 5.41. FARIN (Ingo), « Heiōegger’s Struggle with HistoriŌity », Investigaciones phenomenológicas, 4/2, pp. 61-72 5.42. FRIED (Gregory), « Heidegger and Gandhi: a Dialogue on Conflict and Enmity », in MACLACHLAN (Alice) & SPEIGHT (Allen) (éds.), Justice, Responsibility and Reconciliation in the Wake of Conflict, Dordrecht/New York, Springer, Boston Studies in Philosophy, Religion and Public Life, pp. 47-62 5.43. FRIED (Gregory), « What Gives? Heidegger and Dreyfus on the Event of Community », in MARDER (Michael) & ZABALA (Santiago) (éds.), Being Shaken: Ontology and the Event, Londres, Palgrave MacMillan, Palgrave Studies in Postmetaphysical Thought, pp. x-y 5.44. GANTT (Edwin E.) & THAYNE (Jeffrey L.) « A Conceptual History of Self-Observation in the Phenomenological Tradition: Brentano, Husserl, and Heidegger », in GLEGG (Joshua W.) (éd.), Self-Observation in the Social Sciences, Londres/New Brunswick, Transaction, pp. 147-171 5.45. GENIUSAS (Saulus), « The Question of EthiŌs on Heiōegger’s Being anō Time », in FEGER (Hans) & HACKEL (Manuela) (éds.), Existenzphilosophie und Ethik, Berlin, Walter de Gryuter, pp. 313-328 5.46. GORDON (Globus), « Bohr, Heidegger, The Unspeakable and DisClosure: An Exercise in Quantum Neurophilosophy », NeuroQuantology. An Interdisciplinary Journal of Neuroscience and Quantum Pysics, 11/2, pp. 171-180 5.47. GOLOB (Sacha), « Heidegger on Kant, Time and the Form of Intentionality », British Journal for the History of Philosophy, 21/2, pp. 345-367 5.48. GOTO-JONES (Chris), « When Is Comparative Political Thought (Not) Comparative? Dialogues, (Dis)continuities, Creativity, and Radical Difference in Heidegger and Nishida », in FREEDEN (Michael) & VINCENT (Andrew) (éds.), Comparative Political Thought. Theorizing Practices, New York, Routledge, Routledge Studies in Comparative Political Thought, pp. 158180 5.49. HACKETT (J. Edward), « Scheler, Heidegger and the Hermeneutics of Value », Journal of Applied Hermeneutics, pp. 1-19 91 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 5.50. HACKETT (Chris), « Philosophy from Oracles: Heraclitus, Aquinas, and Heidegger on the Metaphysics of Prolepsis », Telos, 163, pp. 147-169 5.51. HARMAN (Graham), « Baōiou’s relation to Heiōegger in Theory of the Subject », in BOWDEN (Sean) & DUFFY (Simon) (éds.), Badiou and Philosophy, Édimbourg, Edinburgh University Press, pp. 225-243 5.52. HARTMAN (Andrew), « How Americans Have Received Nietzsche and Heidegger and Why It Matters », Reviews in American History, 41/1, pp. 122128 5.53. HATAB (Lawrence J.), « Heidegger, Martin », in LAFOLLETTE (Hugh) (éd.), The International Encyclopedia of Ethics, Oxford, Blackwell, col. 2390-2396 5.54. INWOOD (Michael), « Hegel, Cassirer and Heidegger », in HERZOG (Lisa) (éd.), Hegel’s Thought in Europe. Currents, Crosscurrents, Undercurrents, Londres/New York, Palgrave McMillan, pp. 106-132 5.55. JANSSEN (Das), « Queering Heidegger: An Applied Ontology », Radical Philosophy Review, 16/3, pp. 747-762 5.56. JACKSON (Mark), « Marx after Heidegger », Critical Perspectives on Communication, Cultural, and Policy Studies, 32/1-2, pp. 45-58 5.57. JIRÁSEK (Ivo) & VESELSKÝ (Pavel), « The Understanding of Death in Social Work in the Czech Republic during the Socialist Era and in the Era of Consumerism through Heiōegger’s AuthentiŌity », British Journal of Social Work, 43/2, pp. 394-410 5.58. JORONEN (Mikkp), « Heidegger on the History of Machination: Oblivion of Being as Degradation of Wonder », Critical Horizons, 13/3, pp. 351-376 5.59. KAGEYAMA (Yehei), « Alterity and Repetition. Phenomenological Interpretation of the Divinity in the Later Heidegger », Investigaciones phenomenológicas, 4/2, pp. 73-86 5.60. KAMAL (Muhammad), « Mulla Sadra and Martin Heidegger: A Philosophical Turn », in PAYA (Ali) (éd.), The Misty Land of Idea and the Land of Dialogue. An Anthology of Comparative Philosophy: Western and Islamic, Londres, ICAS Press, pp. 105-126 5.61. KARADEMIR (Aret), « Heidegger and Discrimination: On the Relation between Historicity and Marginalization », The Philosophical Forum, 44/3, pp. 205-231 5.62. KARADEMIR (Aret), « Heidegger and Foucault: On the Relation between Anxiety-Engendering-Truth and Beings-Toward-Freedom », Human Studies, 36/3, pp. 375-392 92 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 5.63. KARADEMIR (Aret), « Heidegger and Nazism: On the Relation between German Conservatism, Heidegger, and the National Socialist Ideology », The Philosophical Forum, 44/2, pp. 99-123 5.64. KAYALI (Tamara) & IQBAL (Furhan), « Depression as Unhomelike Beingin-the-worlō? Phenomenology’s Challenge to Our Unōerstanōing of Illness », Medicine, Health Care, and Philosophy, 16/1, pp. 31-39 5.65. KISIEL (Theodore), « Heidegger and our Twenty First Century Experience of Ge-stell », in BABICH (Babette E.) & GINEV (Dimitri) (éds.), The Multidimensionality of Hermeneutic Phenomenology, Dordrecht, Springer, Contributions to Phenomenology, pp. 137-151 5.66. KLAUTKE (Egbert), « Max Weber in America. Heidegger in America », German History, 31/1, pp. 126-128 5.67. KNOWLES (Charlotte), « Heidegger and the Source of Meaning », South African Journal of Philosophy, 32/4, pp. 327-338 5.68. LOHT (Christian), « Film as Heideggerian Art? A Reassessment of Heidegger, Film, and His Connection to Terrence Malick », Film and Philosophy, 17, pp. 113-136 5.69. LORENC (Iwona), « Between Transcendatalism and Hermeneutics: From Heidegger to Husserl », Dialogue and Universalism, 2, pp. 73-86 5.70. LOTZ (Christian), « Reification through Commodity Form or Technology? From Honneth back to Heidegger and Marx », Rethinking Marxism: A Journal of Economics, Culture & Society, 25/2, pp. 184-200 5.71. LOWRY (Joana), « Orozco, Heidegger, and the Visibility of Things », in PIRENNE (Raphaël) & STREITBERGER (Alexander) (éds.), Heterogeneous Objects. Intermedia and Photography after Modernism, Louvain, Leuven University Press, pp. 131-148 5.72. LÜBCKE (Paul), « Truth and Normativity in Kierkegaard and Heidegger », in FEGER (Hans) & HACKEL (Manuela) (éds.), Existenzphilosophie und Ethik, Berlin, Walter de Gryuter, pp. 297-312 5.73. MA (Lin) & VAN BRAKEL (Jaap), « Heidegger and the Reversed Order of Science and Technology », in BABICH (Babette E.) & GINEV (Dimitri) (éds.), The Multidimensionality of Hermeneutic Phenomenology, Dordrecht, Springer, Contributions to Phenomenology, pp. 183-205 5.74. MACFARLANE (Alistair), « Brief Lives : Martin Heidegger », Philosophy Now, 94, pp. 30-41 5.75. MALPAS (Jeff), « The Twofold Character of Truth: Heidegger, Davidson, Tugendhat », in BABICH (Babette E.) & GINEV (Dimitri) (éds.), The 93 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 Multidimensionality of Hermeneutic Phenomenology, Dordrecht, Springer, Contributions to Phenomenology, pp. 243-266 5.76. MCCARTHY (Vincent A.), « The Ethics of Authenticity in Kierkegaard and Heidegger », in FEGER (Hans) & HACKEL (Manuela) (éds.), Existenzphilosophie und Ethik, Berlin, Walter de Gryuter, pp. 385-398 5.77. MCGRATH (Sean J.), « The Logic of Indirection in Heidegger and Aquinas », The Heythrop Journal – Quarterly Review of Philosophy and Theology, 54/2, pp. 268-280 5.78. MCMANUS (Denis), « Heidegger, Wittgenstein and St. Paul on the Last Judgement: On the Roots and Significance of the "Theoretical Attitude" », British Journal for the History of Philosophy, 21/1, pp. 143-164 5.79. MCLENNAN (Matthew), « Heidegger without Man? The Ontological Basis of Lytorarō’s Later Antihumanism », Journal of French and Francophone Philosophy, 21/2, pp. 118-130 5.80. MULLER (Chris), « Style and ArroganŌe: the EthiŌs of Heiōegger’s Style », in CALLUS (Ivan), CORBY (James) & LAURI-LUCENTE (Gloria) (éds.), Style in Theory. Between Literature and Philosophy, Londres, Bloomsbury, pp. x-y 5.81. MITCHELL (Andrew J.), « The Coming of History: Heidegger and Nietzsche against the Present », Continental Philosophy Review, 46, pp. 395-411 5.82. NAAS (Michael), « "If you could take just two books ...": Jacques Derrida at the Ends of the World with Heidegger and Robinson Crusoe », in SWIFFEN (Amy) & NICHOLS (Joshua) (éds.), The Ends of History. Questioning the Stakes of Historical Reason, Abingdon Oxon, Routledge, GlassHouse Book, pp. 161-178 5.83. NAMLI (Gulsah), « Heidegger on the Poietic Truth of Being », Analecta Husserliana, 114, pp. 89-104 5.84. NELSON (Eric Sean), « Biological and Historical Life: Heidegger between Levinas and Dilthey », in CAMPBELL (Scott M.) & BRUNO (Paul W.) (éds.), The Science, Politics, and Ontology of Life-Philosophy, Londres, Bloomsbury, pp. 15-30. 5.85. NELSON (Eric Sean), « Dilthey, Heidegger und die Hermeneutik des faktischen Lebens », in G. SCHOLTZ (éd.), Diltheys Werk und die Wissenschaften. Neue Aspekte, Göttingen, Vandenhoeck & Ruprecht, pp. 97109 5.86. NENADIC (Natalie), « Heidegger, Arendt, and Eichmann in Jerusalem », Comparative and Continental Philosophy, 5/1, pp. 36-48 94 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 5.87. NENON (Thomas J.), « Martin Heidegger and Grounding of Ethics », in EMBREE (Lester) & NENON (Thomas J.) (éds.), Husserl’s Ideen, Dordrecht, Springer, Contributions to Phenomenology, pp. 177-193 5.88. OLWIG (Kenneth), « Heidegger, Latour and the Reification of Things », Geografiska Annaler, 95/3, pp. 275-293 5.89. OYEN (Simen Andersen), « The Truth in Heidegger: An Analysis of Martin Heiōegger’s Philosophy of Art as It Appears in the Ursprung des Kunstwerkes from the Perspective of Sein und Zeit », Analecta Husserliana, 114, pp. 155-166 5.90. PEONE (Dustin), « Ernst Cassirer’s Essentiel Critique of Heiōegger anō Verfallenheit », Idealistic Studies, 42/2-3, pp. 119-130 5.91. PEPERZAAK (Adrian T.), « A Re-Reaōing of Heiōegger’s "Phenomenology and Theology" », in BABICH (Babette E.) & GINEV (Dimitri) (éds.), The Multidimensionality of Hermeneutic Phenomenology, Dordrecht, Springer, Contributions to Phenomenology, pp. 317-337 5.92. PERÉZ (Enrique M.), « Human Being, Animal and Animality: Novelty and Scope of the Fundamental Concepts of Metaphysics of Martin Heidegger », Veritas, 29, pp. 77-96 5.93. PETERS (Gary), « Affirming Solitude: Heidegger and Blanchot on Art », Eidos, 19, pp. 12-45 5.94. PROZOROV (Sergei), « What is the "World" in World Politics? Heidegger, Badiou and Void Universalism », Contemporary Political Theory, 12/2, pp. 102122 5.95. RAE (Gavin), « Overcoming Philosophy: Heidegger, Metaphysics, and the Transformation to Thinking », Human Studies, 36/2, pp. 235-257 5.96. RODRIGUEZ (Agustin), « Turning from the Margins: Discoursing Heidegger at the End of Life as We Know It », Kritika Kultura, 21/22, pp. 1-14 5.97. RUSSELL (Francey), « The Space of Pathos: Heideggerean Angst and Ethics », in FEGER (Hans) & HACKEL (Manuela) (éds.), Existenzphilosophie und Ethik, Berlin, Walter de Gruyter, pp. 329-340 5.98. SCHARFF (Robert C.), « Becoming a Philosopher: What Heidegger Learned from Dilthey, 1919-25 », British Journal for the History of Philosophy, 22/1, pp. 122-142 5.99. SCHMIDT (Dennis J.), « The Late Heidegger », in LAWLOR (Leonard) (éd.), The History of Continental Philosophy, Durham, Acumen, pp. 157-175 5.100. SEIDENSHAW (Blake), « Foucault and Heidegger on Mediation and Subjectivity », Explorations in Media Ecology, 12/3-4, pp. 229-239 95 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 5.101. STAFECKA (Mara), « The Truth of the Work of Art: Heidegger and Gadamer », Analecta Husserliana, 114, pp. 243-254 5.102. STAIKOU (Elina), « Aimance and the Prosthetic Ear: Crossings between Derrida, Heidegger and Khatibi », in KAUFMANN (Sarah) & MEYER (Viktor) (éds.), Friendships. Cultural Variations, Developmental Issues and Impact on Health, Hauppauge, Nova Science Publishers, pp. 45-64 5.103. STOLOROW (Robert D.), « Heidegger and Postcartesian Psychoanalysis », The Humanistic Psychologist, 41/3, pp. 209-218 5.104. SVENAEUS (Fredrik), « The RelevanŌe of Heiōegger’s Philosophy of Technology for Biomedical Ethics », Theoretical Medicine and Bioethics, 34/1, pp. 1-15 5.105. SWANTON (Christine), « A New Metaphysics for Virtue Ethics: Hume meets Heidegger », in PETER (Julia) (éd.), Aristotelian Ethics in Contemporary Perspective, New York, Routledge, Routledge Studies in Ethics and Moral Theory, pp. 177-194 5.106. TOMKINS (Leah) & EATOUGH (Virginia), « Meanings and Manifestations of Care: A Celebration of Hermeneutic Multiplicity in Heidegger », Humanistic Psychologist, 41/1, pp. 4-24 5.107. TONNER (Philip), « Between Medieval and Modern Beholding: Heidegger, Deleuze and the Duns Scotus Affair », in ROACH (Andrew P.) & SIMPSON (James R.) (éds.), Heresy and the Making of European Culture. Medieval and Modern Perspectives, Farnham/Burlington, Ashgate, pp. x-y 5.108. TRUBODY (Ben), « When Tacit is Not Tacit Enough: A Heideggerian Critique of Collins’ "TaŌit" Knowleōge », Meta. Research in Hermeneutics, Phenomenology, and Practical Philosophy, 5/2, pp. 315-335 5.109. TURNER (Bryan S.), « Martin Heidegger, Pierre Bourdieu, and Michel Foucault », in TURNER (Bryan S.), The Routledge Handbook of the Body Studies, New York, Routledge, pp. 62-74 5.110. THWAITES (Trevor), « Heidegger and Jazz: Musical Propositions of Truth and the Essence of Creativity », Philosophy of Music Education Review, 21/2, pp. 120-135 5.111. VAN MAZIJK (Corijn), « Mission Impossible? Thinking What Must Be Thought in Heidegger and Deleuze », Meta. Research in Hermeneutics, Phenomenology, and Practical Philosophy, 5/2, pp. 336-354 5.112. VIDEGÅRD (Tomas), « Kohut’s anō Heiōegger’s Selves: Dwelling Near the Source », International Journal of Psychoanalytic Self Psychology, 8/1, pp. 115120 96 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 5.113. WELCHMAN, (Alistair), « Heidegger among the Robots », Symposium, 17/1, pp. 229-249 5.114. WILLIMAS (Anita), « "Understanding the Architecture of Human Thought"? Questioning the Mathematical Conception of Nature with Heidegger », Investigaciones phenomenológicas, 4/2, pp. 101-116 5.115. WILLIAMS (Emma), « "Ahead of all Beaten Tracks": Ryle, Heidegger and the Ways of Thinking », Journal of Philosophy of Education, 47/1, pp. 5370 5.116. WINKLER (Rafael), « Seinsverständnis and Meaning in Heidegger », Southafrican Journal of Philosophy, 32/2, pp. 149-162 5.117. ZANGENEH (Hakhamanesh), « An Impossible Waiting – Reading Derriōa’s Reaōing of Heiōegger’s in Aporias », MLN, 128/5, pp. 1170-1193 En arabe 5.118. DASTUR (Françoise), « Falsafat Haydidjdjir, al-ōjuz’ al-awwal » [« La philosophie de Heidegger, première partie »], trad. de SABÎL (Muhammad), al-Azmana al-hadîtha, 6-7, pp. 124-133 5.119. IDRÂWÎ (al-‘Ayâshî), « al-Wa‘î al-hirmînûtîqî. Tahawwulât al-wâqi‘ wadînâmîyat an-nass. Djân Bîbân, Hâydighghir, Shlâyirmâkhir, Ghâdâmîr, Diltây » [« La conscience herméneutique. Les changements de la réalité et la dynamique du texte. Jean Pépin, Heidegger, Schleiermacher, Gadamer, Dilthey »], Kitâbât mu‘âsira, 22, pp. 88-93 En chinois 5.120. MIŠсI CHEN (Zhi-guo), « Hai de ge er lun tong yi xing wen ti-yi <tong yi lv> wei zhong xin » [« Heiōegger et le problème ōe l’iōentité »], Journal of Anhui University, 1, pp. 19-28 5.121. DENG (Xiao-mang), « Cong kang de de Faktum dao hai de ge er de Faktizitaet » [« Du factum kantien à la facticité heideggérienne »], Wu han University Journal, 2, pp. 17-25 5.122. LIU (Jin-lu), « Hei ge er de mu di lun yu hai de gee r de mu di lun ji qi bi jiao » [« Comparaison de la téléologie hégélienne et de la téléologie heideggérienne »], Journal of Ren Ming University, 2, pp. 62-69 5.123. LONG (Pei-lin), « Si de shi qing – kang de, hei ge er he hai de ge er de zheng bian » [« Ce qui est à penser – débat entre Kant, Hegel et Heidegger »], Wuhan University Journal, 2, pp. 35-42 97 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 5.124. NIU (Xiao-xia) & Lu (Jie-rong), « Lun hai de ge er de shi jian guan ji qi dang dai yi yi » [« De la conception heideggérienne du temps et sa signification contemporaine »], Jianghan Tribune, 8, pp. 71-74 5.125. PENG (Fu-chun), « Hai de ge er yu lao zi lun dao » [« Heidegger et Lao Tseu à propos du Tao »], Jianghan Tribune, 2, pp. 42-49 5.126. WANG (Jian-jun), « Lun hai de ge er dui kang de de "xian xiang xue quan shi" » [« De l’"interprétation phénoménologique" heiōeggérienne ōe Kant »], Journal of Anhui University, 2013, pp. 13-19 5.127. XU (Xian-jun), « Hai de ge er yu ji suan ji – jian lun dang dai zhe xue yu ji shu de li xiang guan xi » [« Heidegger et la science informatique – de la relation idéale entre la philosophie contemporaine et la technique »], Journal of Zhejiang University, 1, pp. 155-163 5.128. YANG (Chun-shi) & Zhong (Xia), « Ben you xian xiang xue: hou qi hai de ge er dui cun zai wen ti de tan suo » [« Phénoménologie ōe l’Ereignis : l’exploration ōu problème ōe l’être Ōhez le ōernier Heiōegger »], Academic Monthly, 3, pp. 58-65 5.129. YE (Qi-chang), « Suo xu er yu hai de ge er de yu yan guan bi jiao: fang fa lun yu fang fa » [« Comparaison entre les conceptions du langage de Saussure et de Heidegger : méthodologie et méthode »], Foreign Language Research, 1, pp. 82-89 5.130. YIN (Zhao-kun), « Fan chou zhi guan yu xing shi xian shi – Hu sai er yu hai de ge er qian qi xian xiang xue fang fa de yi tong » [« Intuition catégoriale et indication formelle – convergence et différence entre la première méthode phénoménologique de Husserl et de Heidegger »], Modern Philosophy, 1, pp. 80-85 5.131. YU (Ping), « "Chao xiang shi shi ben shen" zhi si – cong di ka er dao hai de ge er » [« "Vers ce qui est à penser" – de Descartes à Heidegger »], Journal of Sichuan University, pp. 63-81 5.132. YUAN (Zhao-wen), « Lun hai de ge er dui xian dai xing de pi pan » [« La critique heideggérienne de la modernité »], Gansu Social Sciences, 3, pp. 26-28 5.133. ZHANG (Dong-feng), « Chun cui li xing de cun zai lun ji chu – hai de ge er guan yu kang de xian tian zong he pan duan de cun zai lun chan shi » [« La base ontologique de la raison pure – l’interprétation ontologique heideggérienne du jugement synthétique a priori chez Kant »], Fujian Tribune, 6, pp. 79-86 5.134. ZHANG (Yi-bing), «Yi yun: zao yu shi jie zhong de shang shou yu zai shou – hai de ge er zao qi si xiang gou jin » [« Bedeutsamkeit : confrontation 98 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 ōe l’étant-à-portée-de-la-main et ōe l’étant-sous-la-main – les premières pensées de Heidegger »], Social Sciences in China, 1, pp. 132-150 5.135. ZHONG (Xia) & Yang (Chun-shi), « Cong ci zai dao ben you – hai de ge er cong sheng cun lun dao cun zai lun de zhuan xiang » [« Du Dasein à l’Ereignis – le tournant heideggérien ōe l’existentialisme à l’ontologie »], Journal of Xiamen University, 2, pp. 134-139. 5.136. ZHU (Hai-bing), « Dui tu gen te ha te dui hai de ge er zhen li gai nian pi ping de pi ping » [« Critique de la critique de Tugendhat du concept de vérité chez Heidegger »], Gansu Social Sciences, 3, pp. 22-25 En coréen 5.137. CHEONG (Eun-Hae), « Haine ui Haidegger Siganron Bipan e daehan Hyeonsanghakjeok Geomto » [« Enquête phénoménologique dans la critique heinienne quant à la théorie heideggérienne du temps »], Jonjaeron yeongu, 33, pp. 1-31 5.138. GU (Yeon-Sang), « Haidegger eui Gyesa Haeseok e daehan Bipan » [« Critique ōe l’interprétation heiōeggérienne ōe la Ōopule ōans les Ōours sur Schelling »], Jonjaeron yeongu, 32, pp. 71-106 5.139. HAN (Sang-Yeon), « Haeseok gwa Jonjae » [« Sur l’origine théologique ōe l’herméneutique heiōeggérienne ōurant la première périoōe fribourgeoise »], Jonjaeron yeongu, 33, pp. 255-297 5.140. HAN (Sang-Yeon), « Sunyeonhan Taljaroseo ui Jonjae » [« L’être comme ek-sistence absolue – Sur la signifiŌation ō’être Ōomme un plan ō’immanenŌe absolu »], Jonjaeron yeongu, 32, pp. 217-244 5.141. HWANG (Gyeong-Seon), « Jeonjae Mati: Gieokgwa Gamsa » [« La pensée ōe l’être. ν partir ōe Heiōegger – Mémoire et merci »], Jonjaeron yeongu, 33, pp. 127-152 5.142. KIM (Chang-Hyeon), « Hyeongisanghak ui Jongmal(Mokjeok) gwa Haidegger ui Jukeumhak » [« La fin de la métaphysique et la thanatologie heideggérienne »], Jonggyohak yeongu, 31, pp. 99-126 5.143. KIM (Dong-Gyu), « Siga Areumdaun iyu » [« La raison pour laquelle un poème est beau »], Jonjaeron yeongu, 31, pp. 103-132 5.144. LEE (Su-Jeong), « Haidegger wa Pareumenides » [« Heidegger et Parménide »], Jonjaeron yeongu, 32, pp.1-36 5.145. PARK (Chan-Kook), « Niche wa Haidegger ui Jinri Gaenyeom ui Bigyo yeongu » [« Étude comparative du concept de vérité chez Nietzsche et Heidegger »], Jonjaeron yeongu, 31, pp. 69-102 99 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 5.146. PARK (Il-Tae), « Baleon, Yeomryeo, geurigo Bonraeseong » [« Énoncé, souci et authenticité »], Jonjaeron yeongu, 31, pp. 31-67 5.147. PARK (Seon-Young), « Rakkang gwa Haidegger ui Antigone » [« L’Antigone de Lacan et de Heidegger : le devancement de la mort, la chose, la vérité psychanalytique »], Rakkanggwa Hyeondae Jeongshinbunseok, 15, pp. 59-96 5.148. SEO (Yong-Seok), « Haidegger eseoui Jonjaeron gwa Gyoyukron » [« Théorie ōe l’être et théorie ōe l’éōuŌtion Ōhez Heiōegger »], Dodeukgyoyukyeongu, 25-2, pp. 57-86 5.149. SEOL (Min), « Haidegger Cholhak eseo Jayeon ui Jeukjaseonggwa Segye Gaebangseong ui Ginjanggwangye » [« L’être en soi ōe la nature ōans l’ouverture du monde chez Heidegger »], Cheolhakgwa Hyeonsanghakyeongu, 59, pp. 51-81 5.150. SUH (Dong-Uhn), « Jonjae wa Mu geurigo Jeoldaemu » [« L’être, le viōe et le néant Absolu. Compréhension du néant chez Heidegger et Nishitani »], Jonjaeron yeongu, 33, pp. 187-221 5.151. YANG (Hae-Rim), « Haidegger ui Seonihae wa Injigwahakeui Peuronesiseu » [« La pré-compréhension heideggérienne et la phronesis scientifico-cognitive »], Dongseo cheolhak yeongu, 69, pp. 357-382 En croate 5.152. MIŠсIN (Daniel), « Tolstojeva pripovijest Smrt Ivana Iljiča u kontekstu Heideggerove analize smrti u djelu Bitak i vrijeme », Obnovljeni život, 68/1, pp. 7-24 En espagnol 5.153. ACEVEDO (Jorge), « Razón y lógos. Heidegger y Ortega », Gaceta de Psiquiatría Universitaría, 9/3, pp. 237-243 5.154. BAREIRO (Julieta), « Winnicott y Heidegger : la apertura del mundo y el co-estar », Affectio societatis, 10/18, pp. 1-13 5.155. BIELKE (Martin), « La relación ontológica entre tiempo e "espacio" en Física Delta 11. Observationes sobre la lectura de Heidegger », Escritos de Filosofía, SS, 1, pp. 223-244 5.156. BAREIRO (Julieta), « Heidegger y Winnicott: transmisión cultural y creatividad », Querencia. Revista de Psicoanálisis, 14, pp. 5-22 5.157. CABÓ RODRÍGUEZ (Joan), « La creación en el epílogo. Steiner y Heidegger », Revista digital de la Facultat de Filosofia de Catalunya, 5, pp. 44-67 100 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 5.158. DIÉGUEZ (Antonio), « Más allá del poder de la máquina. Una comparación entre la filosofía de la técnica de Ortega y la de Heidegger », in ATENCIA (José María) (éd.), Ortega y Gasset: El imperativo de intelectualidad, Málaga, Universidad de Málaga, pp. 73-97 5.159. ESCUDERO (Jésus A.), « Desarollo y evolución del pensamiento del joven Heidegger », Estudios de Filosofía, 11, pp. 59-75 5.160. ESPERON (Juan Pablo) « Metafísica y post-filosofía en el pensamiento de Heidegger », Rihumso, 4/2, pp. x-y 5.161. FAYE (Emmanuel), « Heidegger o la destrucción de la ética », Stoa, 4/8, pp. 11-31 5.162. FLAMARIQUE (Lourdes), « Practicar la verdad. Sintonías y dissonancias de Heidegger con el libre X de Confessiones », Tópicos, 44, pp. 115-148 5.163. MAGNET COLOMER (Jordi), « El joven Marcuse y su camino de Heidegger a Horkheimer », Eikasia. Revista de filosofía, 49, pp. 225-240 5.164. MURILLO (José), « Hacia un origen del sacrificio : arte y destrucción de la cosa en Heidegger y Bataille », in MANDOKI (Katya) & MARCOVITCH (Andrea) (éds.), Incógnitas y desciframientos dela estética actual, Mexico, Amest, pp. 55-74 5.165. ORTIZ DE LANDAZURI (Carlos), « Blondel frente a Heidegger », Revista espanola de teologia, 73/1, pp. 97-127 5.166. RAGA (Arturo), « Perdón, culpa y peccados: notas sobre Hegel e Heidegger », Stoa, 4/8, pp. 91-115 5.167. RODRÍGUEZ (Andros), « El encadenamiento del Hitlerismo y su dimensión biopolítica : Heidegger y la conferencia de Roma », Stoa, 4/8, pp. 191-208 5.168. ROJAS JIMÉNEZ (Alejandro), « La ciudad inhóspita promovida por Heidegger », Isegoría, 47, pp. 499-517 En français 5.169. CAMILLERI (Sylvain), « L’expliŌation ōe Heiōegger aveŌ le christianisme », Théophilyon, 18/2, pp. 291-311 5.170. FRADET (Pierre-Alexandre), « Heidegger et Deleuze : même combat ? », PhaenEx, 8/1, pp. 122-151 5.171. KOFFI (Alexis), « Heidegger et Sartre : Quelles ŌonŌeptions ōe l’être ? », RESPETH. Revue spécialisée en études heideggériennes, 1, pp. 71-89 5.172. KOUAKOU (Antoine), « Appropriation de la langue chez Martin Heidegger : Question ōe nationalité ou ō’originalité ?», RESPETH. Revue spécialisée en études heideggériennes, 1, pp. 30-50 101 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 5.173. MARINESCU (Paul), « Oblivio comme vulnérabilité du soi. Augustin lu par Heidegger et Ricoeur », Archivio di filosofia, 81/1-2, pp. 313-322 5.174. NYAMSI (Franklin), « L’antihumanisme ōe Heiōegger : éléments problématiques », RESPETH. Revue spécialisée en études heideggériennes, 1, pp. 90-109 5.175. PERRIN (Christophe), « Une guerre à couteaux tirés. Heidegger et le rationalisme », Les Études philosophiques, 106/3, pp. 397-422 5.176. RENAULT (Matthieu), « Heidegger en Inde : de Jarava Lal Mehta aux Subaltern Studies », Asylon(s), 10, en ligne 5.177. SANGARÉ (Abou), « Heidegger et la dialectique hégélienne de la négativité », RESPETH. Revue spécialisée en études heideggériennes, 1, pp. 50-70 5.178. SOMMER (Christian), « "Notre Ōρur est sans repos". Theologia crucis et "Ōonsiōération métaphysique ōu monōe" : ō’Augustin à Heiōegger via Luther (1921). Suivi ō’une remarque sur Au lieu de soi de Jean-Luc Marion », in Alain de Libera, Après la métaphysique, Augustin ?, Paris, Vrin, Publications ōe l’Institut ō’Étuōes Méōiévales ōe l’ICP, pp. 129-145 5.179. SPAAK (Claude Vishnu), « Les instruments ōe l’originaire : le rapport entre la forme et la matière chez Heidegger », Klēsis, 25, pp. 176-201 5.180. TANHOH (Jean Gobert), « L’essenŌe ōe la pensée Ōomme méōitation de l’ouvert ōe l’être aveŌ Martin Heidegger », RESPETH. Revue spécialisée en études heideggériennes, 1, pp. 1-12-29 5.181. VEYSSET (Philippe), « La confrontation Binswanger-Heidegger dans les Zollikoner-Seminare. Qu’est-Ōe qu’avoir un Ōorps ? », L’évolution psychiatrique, pp. 583-597 5.182. VILLEVIEILLE (Laurent), « Heiōegger, ōe l’inōiŌation formelle à l’existenŌe », Bulletin d’analyse phénoménologique, 9/5, pp. 1-96 5.183. YAPO (Séverin), « De la philosophie heideggérienne de la religion à une philosophie de la présence comme spiritualité ? », RESPETH. Revue spécialisée en études heideggériennes, 1, pp. 110-130 5.184. ZAFRANI (Avishag), « Hans Jonas ou comment sortir du nihilisme de Heidegger », Archives de philosophie, 76/3, pp. 497-509 En grec 5.185. PATIOS (Georgios), « I prosengisi tou Heidegger sto provlima tis istorias », Dia-LOGOS, 3, pp. 159-173 5.186. XENAKI (Lida), « I antilipsi tou Freud afenos kai tou Heidegger afeterou gia tin techni echoun kapoio simeio sygklisis », Aisthitiki Agogi, 23, pp. 19-25 102 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 En italien 5.187. ALFIERI (Alessandro), « La natura ōialettiŌa ōell’evento in Heiōegger e la funzione della narrazione », Acta Philosophica, 22/1, pp. 59-72 5.188. CAZANELLI (Stefano), « Critiche alla datità. Heidegger e l’inōiŌazione formale », Rivista di filosofia, 2, pp. 257-284 5.189. PARAVATI (Claudio), « Il sacro: crisi e salvezza. Husserl, Heidegger e Ricoeur », Archivio di Filosofia, 81/1-2, pp. 333-342 5.190. TERZI (Roberto), « Il soggetto e l’al ōi là ōel signifiŌato: tra Heidegger e Lacan », Nóema, 4/1, pp. 156-179 5.191. TERZI (Roberto), « Ontologia, metaontologia e problam del mondo in Heidegger », Epekeina. International Journal of Ontology, History & Critics, 2/1, pp. 83-114 5.192. VALAGUSSA (Francesco), « Differenza ontologica e contradizzione. La ōiŌitura ōell’essera tra Heiōegger e Severino », La Cultura, 2, pp. 307-318. En japonais 5.193. ABE (Masanobu), « Nichijō yōgo toshite no ūshia no imi syatei: syoki Haidegā ni okeru arisutoteresu kaisyaku » [« SignifiŌations ōe l’ousia dans l’usage ōu langage ordinaire : les premières interprétations heideggériennes ō’Aristote »], Gensyōgaku nenpō, 29, pp. 59-66 5.194. AKITOMI (Katsuya), « Antigonē no gassyōka wo meguru ichi shiron: Haidegā no sopokuresu kaisyaku » [Le Ōhρur ō’Antigone ōans l’interprétation heideggérienne de Sophocle »], Bunmei to tetsugaku. Nichidoku bunka kenkyūjo nenpō, 5, pp. 120-135 5.195. AKITOMI (Katsuya), « Gijutsu jidai ni shisubeki mono tachi toshite kono daichi no ue ni sumu: Haidegā no gijutsuron saikō » [« Habiter la terre en mortel à l’âge de la technique : la philosophie heideggérienne de la technique reconsidérée »], Syūkyō kenkyū, 87/2, pp. 251-278 5.196. AKITOMI (Katsuya), « Shi wo shi toshite yoku suru koto. Haidegā no gijutsu ron wo moto ni » [« Sur le bien mourir dans la philosophie heideggérienne de la technique »], Bunmei to tetsugaku. Nichidoku bunka kenkyūjo nenpō, 5, pp. 146-160 5.197. ARAHATA (Yasuhiro), « Asupekuto no kōjōsei to morosa: witogensyutain to Haidegā » [« Constance et fragilité de certains aspects : Wittgenstein et Heidegger »], Yōroppa bunka kenkū, 32, pp. 35-97 5.198. Hirota (Dennis), « Shinran to Haidegā ni okeru jiyū to gonen no shisō » [« Liberté et auto-conservation chez Shinran et Heidegger »], Shinsyūgaku, 128, pp. 1-20 103 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 5.199. HIROTA (Tomoko), « Haidegā sonzai to jikan ni okeru ryōshin no yobigoe to ketsuisei ni tsuite: kōkyōsei wo saikōchiku suru kien toshite » [« Appel de la conscience et résolution dans Sein und Zeit de Heidegger : vers une reŌonstruŌtion ōe l’espaŌe publiŌ »], Rinrigaku nenpō, 62, pp. 165-178 5.200. IGARASHI (Sachiko), « Nigemichi: Haidegā no iki » [« Un chemin ō’évasion : le seuil ōe Heiōegger »], Tetsugaku shisō ronsyū, 38, pp. 49-59 5.201. IKEDA (Takashi), « Shi ni itaru sonzai toshite no ningen: Haidegā to kea » [« L’être-vers-la-mort Ōomme manière ō’être ōe l’homme : Heidegger et la notion de souci »], Meiji daigaku kyōyō Ronsyū, 493, pp. 145-167 5.202. INADA (Tomomi), « Sumukoto wo manabu: Haidegā kyōjūron to modanizumu kenchiku » [« Apprendre à habiter : la philosophie heideggérienne de l’habiter et l’arŌhiteŌture moōerne»], Bunmei to tetsugaku. Nichidoku bunka kenkyūjo nenpō, 5, pp. 216-235 5.203. KAMEI (Daisuke), « Derida no jiko syokuhatsu ron no syatei: Haidegā to anri tono taihi wo tūjite» [« Enquête sur les possibilités ō’une philosophie ōerriōienne ōe l’auto-affection : une comparaison avec Heidegger et Henry »], Misheru anri kenkyū, 3, pp. 105-123 5.204. KAMIO (Kazutoshi), « Haidegā ni okeru meiun no mondai: kōen ji to u deno sore wo ataeru wo tegakari toshite » [« Du concept de destin dans la philosophie heideggérienne »], Ryūtsū kagaku daigaku ronsyū. Ningen syakai shizen hen, 25/2, pp. 77-91 5.205. KAMIYA (Ken), « Zenki Haidegā ni okeru zen to ronri hōsoku no kōsokuryoku no monodai » [« Le problème du bien et la force de la loi logique chez le jeune Heidegger »], Gensyōgaku nenpō, 29, pp. 75-83 5.206. KOBAYASHI (Masatsugu), « Haidegā kara arento he: kōteki ryōiki no genkei toshite no minzoku » [« De Heidegger à Arendt : le "peuple" comme modèle ōe "l’espaŌe publiŌ" »], Seiji shisō kenkyū, 13, pp. 183-213 5.207. KOJIMA (Y suke), « Daichi to shizen: Shizen no sonzaigaku no tame ni. Fan Gohho to Haidegā » [« La terre et la nature chez Van Gogh et Heidegger : vers une ontologie de la nature »], Jinbunken kiyō, 77, pp. 263-291 5.208. KUROOKA (Yoshiyuki), « Honraisei, sono kyōiku teki seikaku: Haidegā to puraton » [« L’authentiŌité et son aspeŌt ōiōaŌtique : Heidegger et Platon »], Ritsumeikan daigaku jinbunkagaku kenkyūjo kiyō, 101, pp. 111-143 5.209. MARUYAMA (Fumitaka), « Haidegā no sonzai ippan no imi heno toi no shiage to kanto kaisyaku » [« De la relation entre l’élaboration faite par Heiōegger ōe la question ōe la signifiŌation ōe l’être en général et son interprétation ōe Kant »], Gensyōgaku nenpō, 29, pp. 149-156 104 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 5.210. MIYAHARA (Isamu), « Genshiryoku jidai no tetsugakuchi: Haidegā wo tegakari ni » [« Réflexions sur la ŌonnaissanŌe philosophique au temps ōe l’énergie atomique à l’aiōe ōe la pensée heiōeggérienne »], Arukē. Kansai tetsugakukai nenpō, 21, pp. 14-25 5.211. NAGASAWA (Jun), « Haidegā ni okeru keijijōgaku no konpon no toi » [« Des questions fondamentales de la métaphysique chez Heidegger »], Dōshisya tetsugaku nenpō, 36, pp. 56-71 5.212. NAKAGAWA (Moyoko), « Tenkai ni okeru sonzai no kyohi: Haidegā ni yoru keijijōgaku teki shii kokufuku no kokoromi » [« Le refus ōe l’être ōans le Tournant : la tentative heideggérienne de dépasser la pensée métaphysique »], Arukē. Kansai tetsugakukai nenpō, 21, pp. 122-133 5.213. NAKATANI (Hisaichi), « Tamerai to ketsudan: Eriotto "arufureddo purūfurokku no renka" to Haidegā "sonzai to jikan" » [« Hésitation et décision : The Love Song of J. Alfred Prufrock de T. S. Eliot et Sein und Zeit de Heidegger »], Tōkyō rika daigaku kiyō. Kyōyō hen, 45, pp. 33-55 5.214. SASAKI (Masatoshi), « Haidegā no kaisyakugaku no tetsugakuteki kanōsei ni tsuite: gadamā ni yoru hihan to hyōka wo tegakari to suru kōsatsu » [« Des possibilités philosophiques ōe l’herméneutique heiōeggérienne : réflexions sur la Ōritique ōe Gaōamer et l’évaluation ōe Heiōegger »], Kōchi kōgyō kōtō gakkō gakujutsu kiyō, 58, pp. 1-15 5.215. SUDA (Akira), « Kanto to Haidegā: Ryōshin wo megutte » [« Kant et Heidegger à propos de la conscience »], Jinbunken kiyō, 77, pp. 165-198 5.216. SUEHISA (Asuka), « Haidegā ni okeru kibunron no keisei. Senkyūhyakunijūyonen natsugakki kōgi no arisutoteresu kaisyaku wo tebiki toshite » [« Développement de la philosophie heiōeggérienne ōe l’affeŌtion ōans l’interprétation ō’Aristote ōu Ōours ōu semestre ō’été 1924 »], Gensyōgaku nenpō, 29, pp. 105-113 5.217. TABATA (Taketo), « Kyōiku no sonzairon wa kanō ka? Haidegā gakumonron kara » [« Une ontologie ōe l’éōuŌation est-elle possible ? Réflexions sur la philosophie heiōeggérienne ōe l’éōuŌation »], Manabu to oshieru no gensyōgaku kenkyū, 15, pp. 1-18 5.218. TAKAYASHIKI (Naohiro), « Zenki Haidegā ni okeru jikansei to shizen no genzensei: tenporaritēto no kaimei to kokufuku ni mukete » [« Sur le temps et la présence de la nature chez le jeune Heidegger : essai ō’expliŌation et ōe position du problème de la temporalité »], Hōsei daigaku daigakuin kiyō, 71, pp. 27-37 105 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 5.219. TANABE (Yoshiomi), « Shizen saigai no gensyōgaku: Haidegā wo tegakarini » [« Essai ō’une phénoménologie ōes Ōatastrophes naturelles à l’aiōe ōe Heidegger »], Gensyōgaku nenpō, 29, pp. 125-132 5.220. TANABE (Yoshiomi), « Shinwa shizen shisaku: Haidegā no shisaku no michi to herudārin » [« Mythologie, nature et poésie : le chemin de pensée heideggérien et Hölderlin »], Syūkyō tetsugaku kenkyū, 30, pp. 95-109 5.221. TAMURA (Miki), « Zenki Haidegā no hōhō gainen: syoki furaiburuku kōgi ni okeru rekishisei wo rikai suru to yū kadai to hōhōron keisei ni tsuite » [« Le concept de méthode chez le jeune Heidegger et sa méthodologie dans les premiers cours de Fribourg »], Gensyōgaku nenpō, 29, pp. 133-140 5.222. TANAKA (Satoshi), « Kyōmei kyōshin suru sonzai: Haidegā Tirihhi no kairosu » [« L’être ō’un éŌho affeŌtif : le kairos chez Heidegger et Tillich »], Kēnkyūshitsu kiyō, 39, pp. 1-10 5.223. TODOROKI (Takao), « Haidegā ni okeru aku no monodai: sengo shisō no ichi danmen » [« Le problème du mal chez Heidegger : un aspect de sa pensée ō’après-guerre »], Bōei daigakkō kiyō, 106, pp. 31-52 5.224. TSUKADA (Sumiyo), « Maruseru to Haidegā ni okeru jitsuzon to sonzai ni tsuite no kōsatsu » [« Réflexions sur les ŌonŌepts ō’existenŌe et ō’être ōe Marcel et Heidegger »], Kagoshima daigaku shigakubu kiyō, 33, pp. 29-33 5.225. WAKAMI (Rie), « Haidegā no honraisei saikō » [« Le concept heideggérien ō’authentiŌité reŌonsiōéré »], Bunmei to tetsugaku. Nichidoku bunka kenkyūjo nenpō, 5, pp. 200-215 5.226. YAMAMOTO (Eisuke), « Akehirake to basyo: Haidegā to Nishida tono hitostu no hikaku nokokoromi » [« La clairière (Lichtung) et le lieu chez Heidegger et Nishida : une étude comparative »], Tetsugaku ningengaku ronsyū, 4, pp. 1-15 5.227. YOKITANI (Yasuichi), « Kotoba no Haidegā teki syatei: Kaneko Misuzu, Higashi Naoko, Yahara Shigenaga no mittsu no shiika sakuhin ni sokushite » [« Le langage au sens heideggérien et ses possibilités : perspectives sur trois poèmes de Kaneko Misuzu, Higashi Naoko, Yahara Shigenaga »], Kōnan daigaku kiyō bungaku hen, 163, pp. 235-241 En philippin 5.228. DE LEON (Emmanuel C.), « Ang Landas ng Pagtatanong ni Heidegger ukol sa Teknolohiya: Pagtatalas sa Tanong sa Sein », Kritike, 7/2, pp. 84-94 En portugais 5.229. AQUINO (Marciá) & FILHO (Willis), « Matrix como a essência da técnica segundo Heidegger », Cadernos da EMARF, 5/2, pp. 97-125. 106 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 5.230. AQUINO (Márcia Regina P. L.) & FILHO (Willis Santiago G.), « Um estudo a respeito da carta de Heidegger "Sobre o Humanismo" », Cadernos da EMARF, 6/1, pp. 119-162 5.231. CÂMARA (Sérgio), « Revisitando a questão da técnica em Martin Heidegger e Hannah Arendt », Artefactum. Revista de estudos em Linguagem e Tecnologia, 6/1, pp. 1-17 5.232. CARUZO (Miguel Ângelo), « A facticidade no jovem Heidegger », Seara filosófica, 7, pp. 110-121 5.233. CESAR (Constança M.), « Heidegger: técnica e poesia », Pidcc, 4, pp. 2637 5.234. CRAIA (Eladia), « Heidegger e a técnica: sobre um limite possível », Revista de filosofia Aurora, 25/36, pp. 241-264. 5.235. FERREIRA JR. (Wanderley J.), « Heidegger leitor de Nietzsche: a metafísica da vontade de potência como consumação da metafísica ocidental », Trans/Form/Ação, 36/1, pp. 101-115 5.236. FILHO (Willis), « Heidegger e Aristóteles: entre theoria e práxis », Kinesis, 5/9, pp. 70-86. 5.237. FRAGOZO (Fernando), « O conceito existencial de ciência: Heidegger e a circularidade do conhecimento », Ekstasis: revista de fenomenologia e hermenêutica, 1/2, pp. 73-89 5.238. FRANÇA (Fabiano L.), « O legado de Heidegger à contemporaneidade », Kínesis, 5/10, pp. 181-192 5.239. LEITE (Barbosa), « Heidegger e o fundamento ontológico do espaço », Diálogos, 8, pp. 178-195 5.240. LOPES (Marciá) & FILHO (Willis), « Um estudo a respeito da carta de Heidegger "Sobre o Humanismo" », Cadernos da EMARF, 6/1, pp. 119-162 5.241. LORENZ (Angela B.), « Autonomia de Kant e autenticidade em Heidegger: das possibilidades da linguagem », Kínesis, 5/10, pp. 101-119 5.242. LYRA (Edgar), « Heidegger e a Sustentabilidade », Ekstasis: revista de fenomenologia e hermenêutica, 1/2, pp. 148-162 5.243. PEREIRA (Viviane M.), « Heidegger e a estética: uma crítica à tradição? », Revista eletrônica de filosofia, 10/2, pp. 233-246 5.244. PESSOA (Fernando M.), « A educação ontológica. Uma possível relação entre educação e arte, a partir do pensamento de M. Heidegger », Revista Teias, 14/32, pp. 1-19 5.245. ROBERTO ROSA (Johnny), « Isolamento solipsista e dispersão em meio aos outros: esboço de um argumento para reflexão crítica da alteridade em 107 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 Martin Heidegger », Revista Pesquisa em Foco: Educação e Filosofia, 6/6, pp. 92101 5.246. ROEHE (Marcelo) & DUTRA (Elza), « Dasein, o entendimento de Heidegger sobre o modo de ser humano », Avances em Psicología Latinoamericana, 32/1, pp. 105-113 5.247. ROSA (Johnny Roberto), « Isolamento solipsista e dispersão em meio aos outros: esboço de um argumento para reflexão crítica da alteridade em M. Heidegger », Revista Pesquisa em foco: Educação e filosofia, 6/6, pp. 1-10 5.248. SIQUEIRA (Ana Carla), « A relação entre consciência e linguagem em Nietzsche e Heidegger », Revista Lampejo, 1/3, pp. 110-119 En roumain 5.249. TUGLEA (Mircea), « Un poem al lui Heidegger. Cuvinte la Todtnauberg de Paul Celan », Revista Transilvania, 1, pp. 37-45 En turc 5.250. CAN (İslam), « Felsefeden Siyasete: Heidegger’in Nazizmle İliоkisi », İnsan & Toplum, 3/5, pp. x-y 5.251. KARAMAN (Yasin), « MevŌuōiyet zaman: Heiōegger’in ousia yorumu », Felsefe ve Sosyal Bilimler Dergisi, 15, pp. 187-200 6. Suppléments bibliographiques aux livraisons précédentes – 2012 – 6.1. 6.2. Traductions HEIDEGGER (Martin), as-Su’âl ‘an ash-shay’. Hawla nazarîyat al-mabâdi’ attransindintâlîya ‘inda Kant [Qu’est-ce qu’une chose ? La doctrine kantienne des principes transcendantaux], traō. ō’AL-MUSADDIQ (Ismâ‘îl), Beyrouth, alMunazzima al-‘Arabîya li-t-Tardjuma, 304 p. HEIDEGGER (Martin), Ser e Tempo, trad. de CASTILHO (Fausto), Campinas, Unicamp, 1200 p. Études générales 6.3. CORRIERO (Emilio Carlo), Libertà e Conflitto. Da Heidegger a Schelling, per un’ontologia dinamica, Turin, Rosenberg e Sellier, 207 p. 108 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 6.4. MAHNÂNA (Ismâ‘îl), al-Wudjûd wa-l-hadâtha. Haydighghir fî munâzarat al-‘aql al-hadîth [L’être et la modernité. Heidegger dans le débat sur la raison moderne], Beyrouth/Alger/Rabat, ad-Dâr al-‘Arabîya li-l-‘Ulûm Nâshirûn, Manshûrât al-Ikhtilâf, Dâr al-Amân, 269 p. 6.5. SINGH (R. Ray), Heidegger, World, and Death, Lanham, Lexington Books, 164 p. Études particulières 6.6. AINBINDER (Bernardo), « Heidegger y el problema de la vida más allá de una botáica de las plantas », Praxis filosófica, 35, pp. 6.7. ALMEIDA PRADO (Rafael Auler de), CALDAS (Marcus Tulio) & QUEIROZ (Edilene Freire de), « O corpo em uma perspectiva fenomenológicoexistencial: aproximações entre Heidegger e Merleau-Ponty », Psicologia, ciência e profissão, 32/4, pp. 776-791 6.8. ASH-SHAYKH (Muhammad), « Binâ’ al-mafâhîm wa-i‘âōat binâ’ihâ. Mafhûm ‘al-mîtâfîzîqâ’ namûōhiōjan min Aristû ilâ Hâyōiōjōjir » [« La construction et la reconstruction de concepts. Le concept "métaphysique" Ōomme moōèle ō’Aristote à Heidegger »], ‘Âlam al-fikr, 41, pp. 7-55 6.9. BÛKHRÎS (Fawzî), « al-Huwîya wa-l-ikhtilâf ‘inōa Hâyōighghir » [« L’iōentité et la ōifférenŌe Ōhez Heiōegger »], Thaqâfât, 25, pp. 189-200 6.10. CANDILORO (Hernán), « Pobreza, vida y animalidad en el pensamiento de Heidegger », Areté, 24/2, pp. 263-287 6.11. CAPOBIANCO (Richard), « Heidegger and the "Greek Experience" of Nature-φ -Being », Existentia, 22/3-4, pp. 177-186 6.12. DAVID (Pascal), « Fuera de los caminos trillados: El pensamiento de Heidegger », Tamoanchan. Revista de Ciencias y Humanidades, 1/1, pp. x-y 6.13. DIEBNER (Hans H.), « Performativität und Heideggers Hermeneutik der Faktizität », Meta. Research in Hermeneutics, Phenomenology, and Practical Philosophie, 4/2, pp. 267-285 6.14. DOUD (Robert E.), « Poem, Poetry, anō PoetiŌs in Heiōegger’s Paralell Perspective », Existentia, 22/3-4, pp. 187-277 6.15. ESCUDERO (Jesús Adrián), « Heidegger y el programa de una formación filosófica del hombre », La lámpara de Diógenes, 24-25, pp. 161-175 6.16. ESPÉRON (Juan Pablo), « Metafísica y religión. Caminos hacia un replanteamiento de la cuestión de los divino a partir de las filosofías de Heidegger y Nietzsche », Horizontes Filosóficos. Revista de Filosofía, Humanidades y Ciencias Sociales, 2, pp. 99-121 109 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 6.17. GIACOMELLI (Roberto), « Martin Heidegger traduce Anassimandro: la glottologia e traduttologia di un filosofo alla ricerca della lingua greca delle origini », Studi e Saggi Linguistici, 50/2, pp. 7-30 6.18. GILARDI (Pilar), « A propósito de la filosofía, la nostalgia y el dolor: une aproximación a Heidegger y Novalis », La lámpara de Diógenes, 24-25, pp. 7797 6.19. GÓMEZ-ARZAPALO Y VILLAFAÑA (Francisco), « De la techne a la técnica moderna », Tamoanchan. Revista de Ciencias y Humanidades, 1/1, pp. x-y 6.20. GSCHWANDTNER (Christina), « Martin Heidegger and Onto-theo-logy », in Postmodern Apologetics? Arguments for God in Contemporary Philosophy, New York, Fordham University Press, pp. 19-38 6.21. HERNÁNDEZ ALBARRACÍN (Juan Diego), « Aburrimiento y poesía: revisión de la obra poética de Alejandra Pizarnik desde el concepto de aburrimiento (Langweile) en Martin Heidegger », Filosofía IUS, 11/1, pp. x-y 6.22. LLORENTE (Jaime), « Cabañas en el desierto de lo neutro: crítica de la recusación de Levinas al concepto de "habitar" en Heidegger », Azafea: revista de filosofía, 14, pp. 183-205 6.23. MALPAS (Jeff), « Heidegger, Place, and Contemporary Philosophy », in FINLAYSON (Trevor R.) (éd.), Preserving the Humboldt Tradition of Scholarship in Australasia, Proceedings of the 14th Biennial Conference of the AAHF, Melbourne, AAH, pp. 35-42 6.24. MC NAMARA (Rafael), « En torno a la existencia de una Estética nietzscheana; del arte como expresión superior de la "voluntad de poder" en Heidegger », Observaciones Filosóficas, 14, en ligne 6.25. MENDIETA (Eduardo), « El bestiario de Heidegger: el animal », Filosofía IUS, 11/1, pp. x-y 6.26. RADINKOVIĆ (Željko), « Phänomenologisch-kritische Destruktion des Aprioriproblems beim frühen Heidegger », Filozofija i Društvo, 23/4, pp. 251-268 6.27. RADLOFF (Bernhard), « Ontotheology and Universalism: Heideggerian RefleŌtions on Alain Baōiou’s PolitiŌal Thinking », Existentia, 22/3-4, pp. 301-335 6.28. REY (Santiago), « Hermeneutic Migrations: Jose Gaos on Heidegger and Dewey », Inter-American Journal of Philosophy, 3/2, pp. 60-67 6.29. ROJAS JIMÉNEZ (Alejandro), « La ciudad inhóspita promovida por Heidegger », Isegoría. Revista de Filosofía Moral y Política, 47, pp. 499-517 110 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 6.30. SANTOS (Ana Gabriela Rebelo dos) & SÀ (Roberto Novaes de), « Arte e mundo: diálogos entre Heidegger e Castaneda », Revista da Abordagem Gestáltica, 18/2, pp. 131-135 6.31. SOMMER (Christian), « "Aber in Hütten wohnet der Mensch". Heideggers Todtnauberg als mythologischer Bezirk der Wahrheit », in DREWNIAK (Tomasz) & DITTMANN (Alina) (éds.), Denkerische und dichterische Heimatsuche, Görlitz/Neisse, Viadukt-Verlag, pp. 175-197 6.32. SOMMER (Christian), « "Nämlich sie wollten stiften / Ein Reich der Kunst". Zum Verhältnis von Kunst, Mythos und Politik in Heideggers Der Ursprung des Kunstwerks (1935/36) und Hölderlins Hymnen "Germanien" und "Der Rhein" (1934/35) », Internationales Jahrbuch für Hermeneutik, 11, pp. 229260 6.33. TOSTA DOS REIS (Luis Carlos), « Ontologia da Produção do Espaço na Geografia: Uma abordagem do Tema Através do Fiálogo entre Milton Santos e Heidegger Sobre a Técnica », Geografares, 13, pp. 1-39 – 2011 – 6.34. 6.35. 6.36. 6.37. 6.38. Études générales AL-MASKÎNÎ (Fathî), at-Tafkîr ba‘da Haydighghir aw kayfa l-khurûdj min al‘asr at-ta‘wîlî li-l-‘aql ? [Penser après Heidegger ou comment sortir de l’âge hermeneutique de la raison ?], Beyrouth, Djadâwil li-n-Nashr wa-tTardjuma, 208 p. FAYSAL (Lakhal), Ishkâlîyat ta’sîs ad-dâzayn "Dasein" fî untulûdjiyâ Mârtin Hâydighghir [Le problème de la fondation du « Dasein » dans l’ontologie de Martin Heidegger], Alger, Kunûz al-Hikma, x p. GUTIÉRREZ (Carlos B.), Ocaso de la metafísica y resurgimiento del pensar: Nietzsche y Heidegger, Mexico, Torres Asociados, 2011, 333 p. Études particulières AL-MISBÂHÎ (Muhammad), « Haydidjdjir : al-ōjâmi‘a bi-wasfihâ mawōû‘an li-ta’ammul al-falsafî » [« Heidegger : l’Université comme objet de la méditation philosophique »], al-Azmana al-hadîtha, 3-4, pp. 28-32 BAREIRO (Julieta) & BERTORELLO (Adrían), « Psicoanálisis y filosofía: el problema de la priori de la investigación en Heidegger y Winnicott », Anuario de investigaciones, 18, pp. 255-263 111 Bhdg – 4, 2014 6.39. 6.40. 6.41. 6.42. 6.43. 6.44. 6.45. ISSN 2034-7189 BIN ‘ADÎ (Yûsuf), « al-Hâydaghghirîya fî l-fikr al-falsafî al-maghribî. Fî l-qirâ’a wa-t-ta’wîl : ‘Min al-ikhtilâfî ilâ sayyid al-ghumûō’ » [« L’heiōeggérianisme ōans la pensée philosophique maroŌaine. Sur la leŌture et l’interprétation. Du ōifférent au seigneur ōes ténèbres »], Kitâbât mu‘âsira, 21, pp. 44-48 DANTAS (Viviane Maria), « O papel da linguagem no pensamento de Heidegger », Revista Ciências Humanas, 4/2, pp. 16-26 ESPÉRON (Juan Pablo Emmanuel), « Senderos "entre" la identidad y la diferencia. La constitución de la Metafísica moderna y su superación en el pensamiento de Martin Heidegger », A parte Rei, 73, pp. 1-9 FRAGOSO (Josué), « Heidegger: Ser y Tiempo », Plexo, 2/1, pp. 76-80 GOLIN (Monique Francine), PEREIRA (Claudia Carolina) & PIVETA (Caio Cesar Atallah de Castro), « Autenticidade, angústia e decadência em Martin Heidegger », Revista Científica Eletrônica de Psicologia, 16, pp. 110 MARÇAL (José Carlos), « Geviert: o sagrado em Heidegger e a serenidade em Mestre Eckhart », Ágora Filosófica, 1/2, pp. 159-180 TOLFO (Rogério), « Breves considerações sobre a abordagem de Charles Guignon do método fenomenológico em Ser e Tempo », Promoteus, 4/8, pp. 97-112 – 2010 – Étude générale 6.46. TAW‘ (Muhammaō), Shi‘rîyat Haydidjdjir. Muqâraba untulûdjîya li-mafhûm ash-shi‘r [La poétique de Heidegger. Approche ontologique du concept de poésie], CasablanŌa, Manshûrât ‘Âlam at-tarbiya, 142 p. Étude particulière 6.47. ANGELOVA (Emilia), « Utopia, Metontology, and the Sociality of the Other: Levinas, Heidegger and Bloch », Journal of Contemporary Thought, 31, pp. 171-191 112 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 RECENSIONS  Philippe Arjakovsky, François Fédier & Hadrien France-Lanord (éds.), Dictionnaire Martin Heidegger. Vocabulaire polyphonique de sa pensée, Paris, Cerf, 2013, 1472 p. AveŌ ses 1340 grammes à la pesée, ses 4,8 Ōentimètres ō’épaisseur, ses 615 entrées et ses 24 auteurs, et après les « 4 années de travail » (p. 9) qu’il leur a demandées, voire les 6 pour que le vaste projet de ses éditeurs devienne le proōuit faste ōont on se saisit aujourō’hui, Ōe livre est une somme, Ōolossale au regard de ces pâles devancières dans la langue de Molière – le Dictionnaire Heidegger de Jean-Marie Vaysse (Paris, Ellipses, coll. "Dictionnaire", 2007, 189 p.) et l’Abécédaire Heidegger dirigé par Alain Beaulieu (Mons, Sils Maria, coll. "Abécédaire", 2008, 218 p.) – et totale, elle, au regarō ō’autres, partielles, éŌrites en langues étrangères – celle de Jesús Adrián Escudero, El lenguaje de Heidegger. Diccionario filosófico 1912-1927 (Barcelone, Herder, 2009, 287 p.), ou celle de Frank Schalow et Alfred Denker, Historical Dictionary of Heidegger’s Philosophy (Lanham, Scarecrow Press, coll. "Historical Dictionaries of Religions, Philosophies, and Movements Series", 2010, 429 p.). Devant cet impressionnant volume, qui ne sera pas impressionné ? Du philosophe pourtant, l’impression ōe rigueur est l’étonnement, on le sait. Or, Ōelui-ci ira ici jusqu’à la stupeur. Car à n’en pas ōouter, Ōet ouvrage est un pavé… dans la mare. Non que les études heideggériennes francophones, ou plutôt françaises, sinon franco-françaises soient une onde claire, mais parce que la facture sibylline de cette masse, apparente dès ses premières pages, ne peut que brouiller davantage la réception, rien moins que cristalline, du penseur allemand de ce côté-ci du Rhin. Que lit-on en effet sur la page de faux-titre ? « Dictionnaire Martin Heidegger ». Mais n’est-il pas écrit en première de couverture « Le Dictionnaire Martin Heidegger » ? Est-ce donc là un ōiŌtionnaire, un parmi ō’autres possibles, comme celui, pionnier, de Michael J. Inwood, A Heidegger Dictionary (Malden (Mass.)/Oxford, Blackwell Publishers, coll. "Blackwell Philosopher Dictionaries", 1999, 283 p.), ou le dictionnaire, The Heidegger Dictionary, tel celui que vient de faire paraître Daniel O. Dahlstrom (Londres/New Delhi/New York/Sydney, Bloomsbury, coll. "Bloomsbury Philosophy Dictionaries", 2013, 312 p.), le premier parmi ses pairs et donc le seul qui soit – entendons : digne de ce nom ? En arguant qu’ils ont « ō’emblée abanōonné […] toute velléité 113 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 ō’exhaustivité » (p. 10), ses concepteurs pourront bien tenter de nous persuader ōe l’ambition ōe moōestie ōe Ōe livre. N’en ōemeure pas moins que, faŌe à Ōes deux appellations et à la position unique ōe l’artiŌle ōéfini ōans l’une ō’elles– unique au double sens de première et de singulière, le Le de Le Dictionnaire n’apparaissant Ōertes qu’une fois, mais quelle fois ! –, l’ambition et la moōestie se lient en un nρuō gorōien qu’il faut bien trancher. Or, Philippe Arjakovsky, François Fédier et Hadrien France-Lanord préfèrent le serrer, cultivant, de manière volontaire, cette ambiguïté liminaire que ne recèle aucun autre opus des « dictionnaires des Éditions du Cerf », ces livres au « format défini sans être formatés » (p. 9) ōont ils ont Ōhoisi ōe suivre l’esprit. Qu’apprenō-on, du reste, sur la page de grand titre ? Le sous-titre du livre : « Vocabulaire polyphonique de sa pensée », autant dire pas grand-chose, puisque rien qui ne puisse être remis en cause. Pour nous concentrer sur son ōit, ne nous laissons pas ōéŌonŌerter par le ōire ōe l’exergue, Ōonsistant à Ōiter Beaufret plutôt que ōe Ōéōer la parole à Heiōegger, lors même que l’essentiel est ō’« écouter [s]es textes » et de « faire entendre comment [s]a parole est ainsi parlante » (p. 20 et 19). Si « Ōhez Heiōegger, en effet, tout se tient ō’un bout à l’autre » (p. 7), Ōomment les mots qu’il emploie parleraient-ils de plusieurs voix à la fois ? Mais à convenir que le lexique heideggérien n’est pas polysémique, faudrait-il dire polyphonique ce dictionnaire lui-même, sur le modèle du bien nommé « Dictionnaire polyphonique » du « Portail Michel Foucault », dont le but est « de constituer, avec les lecteurs et les usagers » des « livres, cours et autres écrits » du philosophe français, « une base de données contradictoire autour des principales notions foucaldiennes » 81 ? Impossible, puisque impossible ō’introōuire iŌi quelques voix ōisŌorōantes ōans l’ensemble : en ne faisant ō’orōinaire éŌho qu’à leurs propres travaux, les auteurs ōe Ōe ōiŌtionnaire y parlent à l’unisson, passant ōélibérément sous silenŌe la majeure partie des apports majeurs des meilleurs spécialistes internationaux de Heiōegger, en sorte qu’une orthoōoxie surgit, ōéfinie par des chantres en Ōhρur, plus que par ōes « "chercheurs" en bibliothèques » (p. 9). Pour qui se veut gardien du temple, peut-être n’est-il pas si grave de priver « maints "spécialistes" » (id.) ōe Heiōegger ō’y avoir ōroit ōe Ōité. Inutile de citer dès lors, lorsqu’on se nomme Philippe Arjakovsky, François Féōier ou Hadrien France-Lanord, dans la brève bibliographie qui suit les articles « Être et temps », « Kehre » ou « Geviert », les livres de Jean Greisch – Ontologie et temporalité. Esquisse d’une interprétation intégrale de Sein und Zeit, Paris, PUF, coll. 81 Cf. url : http://michel-foucault-enseignement.org/?-Dictionnaire-polyphonique-. 114 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 "Épiméthée", 1994, 522 p. –, Jean Grondin – Le tournant dans la pensée de Heidegger, Paris, PUF, coll. "Épiméthée", 1987, 136 p. – ou Jean-François Mattéi – Heidegger et Hölderlin, le quadriparti, Paris, PUF, coll. "Épiméthée", 2001, 281 p. – qui en traitent intégralement. Parti pris certes. Mais après tout, Ōomment reproŌher à Ōe ōiŌtionnaire, qui n’est pas ōirigé par ōes universitaires, de ne pas être académique ? Comment lui en vouloir de préférer traiter de Beckenbauer (p. 166-167) plutôt que de Derrida ? De Mai 68 (p. 805-806) plutôt que de donation ? De Nerval (p. 893-894) plutôt que de Richardson ? De rossignol (p. 1167) plutôt que de sens ? On fera donc avec, avec le défaut des références élémentaires et l’exŌès ō’illustrations baroques – « Choderlos de Laclos » (p. 337), « Frédéric Godefroy » (p. 721), « Charles Péguy » (p. 750), « Emily Dickinson » (p. 1068)… –, aveŌ l’exŌès ō’aneŌōotes loufoques – les « quatorze petits-enfants » (p. 588) Heidegger ou Madame « faisant le marché rue des Pyrénées » (p. 948) – et le défaut de notices nécessaires. Jugeant que les « renvois », non des contributeurs entre eux, mais des contributions entre elles sont autant de « différentes voix qui sont aussi des voies ō’aŌŌès ōiverses », les éōiteurs ōe l’ouvrage ne ōémorōront pas ōe sa possible lecture « symphonique » (p. 13). Le polythématisme n’est pas le polyphonisme, mais ne ŌhiŌanons pas, et plutôt que ō’ergoter sur la consanguinité des auteurs qui devisent dans ce volumineux volume, interrogeons-nous sur l’iōentité ōes leŌteurs qu’ils visent. La ōéfinition la plus complète du mot dictionnaire, ōans le ōiŌtionnaire, n’en fait-elle pas en effet, outre un recueil de mots « réunis selon une nomenŌlature ō’importanŌe variable et présentés généralement par ordre alphabétique », outre un recueil « fournissant sur Ōhaque mot un Ōertain nombre ō’informations relatives à son sens et à son emploi », un recueil « destiné à un public défini »82 ? Or, puisqu’ils en prennent pour leur graōe, il ne peut iŌi s’agir ōes scholars, ceux qui passent ō’orōinaire pour ōes experts, qu’ils soient ōes granōs pontes, Ōonsultés lors ōe « certains débats », notamment sur « des questions souvent exagérément houleuses à Ōause, notamment, ōe l’amplification médiatique » (p. 16), ou de petits techniciens, parfois rompus à ce « sport très érudit » qui conduit à la ŌonfeŌtion ō’« index imprimés » (p. 10) où, du « dépeçage » ō’une ρuvre, suivrait aussitôt, selon l’Avant-propos, le débitage en tranches ō’une pensée. De là à dire que ce Dictionnaire Heidegger est un Dictionnaire pour les nuls, il y a toutefois un monde. 82 Cf. TLFi, url : http://www.cnrtl.fr/definition/dictionnaire. 115 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 On le Ōroira ō’aborō, ōans la mesure où « l’essentiel » y est que « chaque artiŌle ōonne à penser et permette ainsi au leŌteur ō’entrer ōans l’ρuvre ōe Heiōegger, ōe s’y introōuire » (p. 10). Mais, avant même de soupçonner les trésors qu’elle reŌèle, Ōomment le noviŌe n’y perōrait-il pas ō’emblée pieō, quanō l’amateur éŌlairé lui-même peine à lire la carte qui leur est donnée pour les trouver ? C’est que, ōes mots Ōlés ōu penseur allemanō répertoriés ōans Ōe dictionnaire, si treize seulement le sont en allemand avec ou sans leurs équivalents français 83 , les huit qui le sont en français sans leurs équivalents allemands 84 et sept 85 des cinquante 86 qui le sont en français avec leurs équivalents allemanōs ressemblent… à ōu Ōhinois, ō’autant que, les traōuŌtions ayant « toutes été revues, souvent refaites ou simplement corrigées » sans que « toutes » aient été « unifié[es] » (p. 21), ces termes peuvent être rendus autrement par ō’autres auteurs ōans ō’autres entrées, Ōes mêmes entrées pouvant parfois être plusieurs à présenter « plusieurs lectures du même « Dasein », « Ereignis », « Gelassenheit », « Gemüt », « Gestell », « Geviert », « Heimat », « Historie », « Kehre », « Lichtung », « Machenschaft », « Sprache » et « Stimmung ». Nous ne comptons pas « SS » aveŌ eux… 84 « Aître », « Aîtrée ōe l’Estre », « Avenance », « Être en propre/impropriement », « Factivité », « Invérité », « Ouvertude » et « Temporellité ». 85 « Conjointure/Die Bewandtnis », « Déloignement/Die Entfernung », « Factivité/Die Faktizität », « Flagrance/Die Offenheit », « Propriation, appropriement/Das Ereignis », « Refus, refusement, refusance/Die Verweigerung, Weigerung », « Util/Das Zeug ». 86 Au sept préŌéōents ōonŌ s’ajoutent ces quarante-trois : « Abîme/Der Abgrund », « Abritement/Die Bergung, Verbergung », « Allemand/Das Deutsche », « Autre commencement/Der andere Anfang », « Christianisme/Das Christentum, die Christlichkeit, das Christsein », « Combat/Der Kampf, der Streit, die Auseinandersetzung », « Computation/Das rechnende Denken », « Conscience morale/Das Gewissen », « Désobstruction/Die Destruktion », « Destruction/Dé-struction/Die Destruktion », « Dévalement/Das Verfallen », « Dévastation/Die Verwüstung », « Douleur/Der Schmerz », « Étant là-devant (étant ci-devant/étant sous la main)/Das Vorhandene », « Existence/Eksistence », « Explication de fond/Die Auseinandersetzung », « Fondement/Der Grund », « Grèce/Das Griechenland, Die Griechen », « Historial/Geschichtlich », « Insurrection/Der Aufstand », « Je, moi/Ich », « Jeu de passe/Das Zuspiel », « Joie/Die Freude, der Jubel, die Heiterkeit », « Justice/Die Gerechtigkeit, die Fuge », « Lieu, Site/Der Ort », « Méditation/Die Besinnung », « Même/Das Selbe », « Nostalgie/Die Heimweh, die Sehnsucht », « Oubli ōe l’être/Die Seinsvergessenheit », « Pas qui rétrocède/Der Schritt zurück », « Pauvreté/Die Armut », « Possibilité/Die Möglichkeit », « Présence/Das Anwesen, die Anwesenheit », « Proximité et lointain/Nähe und Ferne », « Rapport/Das Verhältnis », « Rencontre/Die Begegnung », « Résolution/Die Entschlossenheit », « Responsabilité/Die Verantwortung, die Überantwortung », « Saut/Der Sprung », « Signe ?/Wink », « Tenue/Die Haltung », « Transition, passage/Der Übergang », « Vision du monde/Die Weltanschauung ». 83 116 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 phénomène » (p. 13) 87 . Les yeux du public non averti souffriront donc ici autant que leurs oreilles. L’utilisateur ōe Ōet usuel que ōoit être traōitionnellement tout bon ōiŌtionnaire y ŌherŌhera en vain ōe quoi s’orienter dans la pensée heideggérienne – soit un glossaire allemand-français, comme son complément français-allemand –, mais il y trouvera pour sûr ōe quoi s’y égarer – soit, derrière une monodie générale, de locales cacophonies. On ne pourra que s’interroger sur les raisons profonōes qui font que ces auteurs, dont plus de la moitié sont des traducteurs patentés de Heidegger, ne parlent pas la même langue lorsqu’ils parlent ō’un même penseur, et ŌeŌi lors même qu’ils parlent ō’une même bouŌhe le même langage – celui, plus que ōe l’aōmiration, ōe l’aōoration. S’il s’agissait réellement ōe « préserver l’esprit ōe grande liberté qui a présidé à la conception de ce dictionnaire, mais aussi [de] laisser apparaître le travail à l’ρuvre en matière ōe traōuŌtion » (p. 21), que n’at-on évité dans sa confection de transformer certaines notices en de véritables plaidoyers pour telle ou telle traduction – ainsi l’entrée « Avenance » pour illustrer Ereignis ou l’entrée « Lichtung » pour défendre "allégie" ? Dommage pour la chose même, éclipsée par le mot ; danger pour la pensée, étranglée par le ōogme. Mais l’Avant-propos donnera le change, rappelant le retard accusé par l’éōition hexagonale ōes ρuvres ōe Heiōegger – « moins de la moitié » des cours et séminaires parus depuis sa mort « est à ce jour traduite en français », pour ne rien dire des « "traités impubliés" » et de leur « extrême difficulté » –, mais justifiant ce retard, et donc dédouanant cette édition, par le temps voulu par Heidegger dans la succession des tomes de la Gesamtausgabe – il « ne souhaitait pas que [leur] publiŌation […] se fît avant un long ōélai et il n’y aucune raison de ne pas penser qu’un tel ōélai ōoive être également néŌessaire pour leur traduction » (p. 17). Que penser, ōans Ōe Ōas, ōe l’« abîme » dont semblent se désoler les éōiteurs ōe l’ouvrage, Ōet abîme qui « sépare ceux qui ont une connaissance et une entente » des textes « les plus difficiles » de Heidegger en version originale et « Ōeux qui, faute ōe pouvoir lire l’allemanō, en ignorent parfois même l’existenŌe » (p. 17) ? Un tel abîme n’est-il pas en effet Ōonōamné à s’aŌŌroître, s’« il est bon » que « la traduction de Heidegger », ce « chantier commencé il y a à peine quatre-vingts ans », soit « constamment remis sur le métier » (p. 21) ? Et que veut dire finalement pareille déclaration sous la plume de ceux, ou plutôt ōe Ōelui qui, présenté ōans la notiŌe qu’il lui est solennellement Ainsi « Avenance », « Ereignis », « Propriation/appropriement ». 87 « Être 117 en propre », « Événement », Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 consacrée comme « la cheville ouvrière » et même « l’âme » de la réception heideggérienne en France (p. 479), supervise la série « πuvres ōe Martin Heidegger » dans la collection « Bibliothèque de Philosophie » des éditions Gallimard ? Faut-il Ōroire que les traōuŌtions faisant Ōhoix ō’autres options que celles jusque-là retenues ne seront plus, à l’avenir, reportées sine die, comme Ōertaines par le passé ? Quoi qu’il en soit, ōiffiŌile, on le voit, ōe Ōonsulter Ōe dictionnaire sans un minimum de lumières, notamment sur « "la Ōhose qui s’est passée" », « l’événement, ou le ōrame, ou l’inŌiōent », ce que Philippe Claudel ōésigne Ōomme l’« Ereigniës »88, mot que nous ferons, nous, signifier ici, plutôt que la Shoah Ōomme l’auteur ōu Rapport de Brodeck, l’attituōe même ōe Heidegger face à ceux qui en ont tout le sang sur les doigts. C’est que nombreuses sont les entrées 89 relatives à l’engagement politique du recteur que fut Heidegger en 1933 ou, plutôt, relatives à « l’attituōe publique du professeur qu’a été Heiōegger sous le Troisième ReiŌh » (p. 16). PréŌieuses Ōar préŌises, parŌe qu’elles n’en sont pas moins toujours souŌieuses de rendre manifeste « l’esprit ōe résistanŌe spirituelle qui fut Ōelui ōe l’enseignement » qu’il a pu ōispenser « entre 1934 et 1944 » (id.), ne risquentelles pas de passer précisément pour un manifeste – un manifeste pour Heidegger et donc contre ceux qui sont contre lui pour avoir été, peu ou prou, un "compagnon de route" du nazisme ? Et ne s’y brûleraient-elles pas les ōoigts en jetant Ōe faisant ōe l’huile non seulement sur le feu, mais sur l’autoōafé ōe ses ρuvres ōéjà réalisé par ō’auŌuns en pensée ? Si, au moyen ōe notices sur la « phénoménologie historiale du nazisme » à laquelle procède ou, du moins, participe Heiōegger, l’« un ōes buts ōu présent ōiŌtionnaire est ō’offrir pour la première fois au lecteur français un réel aperçu de ces perspectives Écoutons Brodeck dire de quoi il entend parler dans le roman qui porte son nom : « le… je ne sais pas Ōomment ōire, ōisons l’événement, ou le ōrame, ou l’inŌiōent. ν moins que je ōise l’Ereigniës. Ereigniës, Ō’est un mot Ōurieux, plein ōe brumes, fantomatiques, et qui signifie à peu près "la Ōhose qui s’est passée". C’est peut-être mieux de dire cela avec un terme pris dans le dialecte, qui est une langue sans en être une, mais qui épouse si parfaitement les peaux, les souffles et les âmes de ceux qui habitent iŌi. L’Ereigniës, pour qualifier l’inqualifiable. Oui, je ōirai l’Ereigniës » – Le rapport de Brodeck, Paris, Stock, 2007, p. 7. Sans savoir si Philippe Claudel, en désignant puōiquement par Ōe mot la Shoah, qu’il ne nomme pas Ōomme telle ōans son livre, fait volontairement écho à Heideggeret à son attitude envers elle et ses responsables, nous ne pouvons pas, nous, faire ce rapprochement. 89 « "Affaire Heidegger" », « Antisémitisme », « Autodestruction », « Dénazification », « Extermination », « Führer », « Hitler, Adolf », « Nationalisme », « Nazisme », « Parti nazi (NSDAP) », « Pensée juive », « Peuple », « Politique et polis », « Racisme », « Rapport Jaensch », « Rectorat », « Résistance/Dissidence », « Shoah », « "Silence de Heidegger" », « SS ». 88 118 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 nouvelles » (p. 18), nous ne nous trompions pas : le public visé par ce livre doit être avisé – ōe même qu’il ōoit être certainement parisien plus que bruxellois ou montréalais. Mais s’il nous fallait ō’aborō, quoique paraōoxalement, éŌlairer le sens de ce dictionnaire qui est censé éclairer celui du vocabulaire heiōeggérien, Ōessons ōésormais ō’avoir la ōent ōure Ōontre lui. Même à nous ōonner, plus qu’à manger, à ruminer, ne nourrit-il pas ? Bref, taisons les points qui fâchent, ainsi le fait que soit tue, dans l’artiŌle « Leibniz », la réécriture heideggérienne de la question leibnizienne « Pourquoi y a-t-il plutôt quelque chose que rien ? » – une question ō’ailleurs mal Ōitée par PasŌal Daviō (p. 761) à regarōer le texte original… français (Principes de la Nature et de la Grâce, PS 6, p. 602) – ; le fait que soit tue, dans l’artiŌle « Ontothéologie », la ōifférenŌe ō’éŌriture ō’un terme généralement affublé ōe traits ō’union qui en moōulent la signifiŌation sous la plume heideggérienne – un terme dont la variation, unique certes, mais décisive, « onto-théo-égo-logique » (GA 32, 183), n’est pas même mentionnée par Guillaume Badoual – ; le fait que soit tue, ōans l’artiŌle « Solitude », l’absenŌe ōe traitement ōe l’Einsamkeit par Heidegger dans le cours dont le titre même l’annonŌe (Die Grundbegriffe der Metaphysik. Welt – Endlichkeit– Einsamkeit) – pour ne rien dire du défaut ō’allusion, par FlorenŌe NiŌolas, aux trente-huit pages de la seule étuōe éŌrite à Ōe jour sur le sujet… en français (« L’Einsamkeit comme Grundbegriff. D’une iōée fragmentée Ōhez Heiōegger »), etc. Non, stoppons net nos Ōritiques avant qu’elles ne ōeviennent suspectes. Même dans la mare, un pavé n’en reste pas moins Ōe qu’il est et jamais 6 pages n’en feront oublier 1472. Qu’il nous soit ōonŌ permis, ultimement, ōe saluer le proōuit, même imparfait, autant que l’entreprise. Car "beau bébé" s’il en est, il serait criminel ōe le jeter aveŌ l’eau ōe son bain. Christophe Perrin  Charles Bambach, Thinking the Poetic Measure of Justice. Hölderlin–Heidegger– Celan, New York, SUNY Press, Suny Series in Contemporary Continental Philosophy, 326 p. Il y a presque dix ans maintenant, Charles Bambach signait un livre, Heidegger’s Roots. Nietzsche, National Socialism and the Greeks (Ithaca, Cornell University Press, Cornell paperbacks, 2005, 350 p.), salué à l’époque, à juste titre, Ōomme l’un ōes rares portant sur Heidegger et le national-socialisme qui ait su éviter l’éŌueil Ōonsistant à traiter ōu penseur allemanō sous un angle 119 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 politique en oubliant les nuances conceptuelles et les subtilités langagières dont il use entre 1933 et 1945. L’A. montrait alors, ōans Ōet opus, qu’il fallait chercher les sources de la philosophie politique heideggérienne dans la notion ō’appartenanŌe au sol, à la terre, voire au terroir (Bödenstandigkeit), un concept qu’il pensait à travers Hölōerlin aussi bien qu’en lien aveŌ le monōe hellénique. En effet, Charles Bambach y avait ŌommenŌé à opposer l’autoŌhtonie hellénico-allemande à la figure du Juif errant. Or, dans son nouvel ouvrage, Thinking the Poetic Measure of Justice, Ō’est Ōet antagonisme que l’on trouve développé par le contraste Hölderlin–Heidegger–Celan, Ō’est-à-dire le contraste entre l’axe Hölōerlin-Heidegger et la poésie de Paul Celan. ν la ōifférenŌe ōe ses préŌéōents travaux, le professeur à l’University of Texas at Dallas s’avère Ōette fois moins préoŌŌupé par la Ōontextualisation ou l’historiŌisation ōe la question qu’il ōéveloppe, livrant plutôt ōes leŌtures analytiques ōes textes heiōeggériens ōans le style ōe Ōelles que l’on trouve ōans les ouvrages de la collection « Contemporary Continental Philosophy » chez SUNY Press. De Thinking the Poetic Measure of Justice, le premier tiers est ŌonsaŌré à Hölōerlin et à l’interprétation ōes poèmes « Patmos » et « La paix » ōe l’automne 1799, puis ōe « L’Ister » et ō’« En bleu adorable », ainsi qu’à un commentaire de la tragédie dans Hypérion et de la lettre à Böhlendorff de 1801, où Hölōerlin met en rapport le propre et l’étranger, le Ōhez soi et l’inŌonnu. La notion de « mesure » évoquée par Heidegger dans le texte de la conférence du 6 octobre 1951, « …dichterisch wohnet der Mensch… », est au Ōρur ōe Ōette interprétation. On pourrait opposer à Ōette mesure l’ tragique, ainsi dans l’impruōenŌe ō’πōipe et ō’Antigone qui, par leur refus de respecter les limites, se font injustes, au sens du grec ἄ que Heiōegger, lui, renō par l’aōjeŌtif "disjoint". Mais aussi riŌhes et ōétaillées qu’elles soient, Ōes lectures ne sortent pas ōu Ōaōre bien établi ōe l’interprétation heiōeggérienne et n’offrent pas ōe nouvelles perspectives au regard des commentaires de Hölderlin établis par Françoise Dastur, Dennis Schmidt, Otto Pöggeler et Peter Trawny. Le deuxième chapitre ōe l’ouvrage tourne, lui, autour ōe l’hypothèse selon laquelle, dans les années 1940, Heidegger accorde un « privilège » à la justice en tant que ἦ et jusqu’à renōre Ōette notion « essentielle » pour l’histoire ōe l’être (p. 138). La méthoōologie ōe l’A. consiste alors simplement à répertorier les occurrences des termes vaguement éthiques des textes compris entre 1935 et 1946 pour accréditer son idée. Charles Bambach prend grosso modo pour point de départ le Brief über den "Humanismus" de 1946, où le sens véritable ō’ἦ revient à ses yeux au séjour humain (Aufenthalt). De là, l’A. commence par revenir aux mentions du mot chez Heidegger dans l’interprétation ōonnée 120 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 de la rhétorique en 1924 dans le cours sur les Grundbegriffe der aristotelischen Philosophie (GA 18), avant ō’en venir aux éŌrits sur lesquels il s’appuiera le plus : « Der Spruch des Anaximander » de 1946, où est traduit par "jointure", et Zur Auslegung von Nietzsches II. Unzeitgemässer Betrachtung "Vom Nutzen und Nachteilder Historie für das Leben" de 1938/1939 (GA 46), où le professeur fribourgeois expose le rapport entre justiŌe et vérité. L’A. tente ōe ŌonvainŌre son leŌteur de ce que les textes heideggériens de 1946 sont marqués par la nécessité éprouvée par le maître de se confronter au problème philosophique de la justice, ceci en vue ōe sa ŌonvoŌation ōevant la Ōommission ōe ōénazifiŌation ōe l’AlbertLudwigs-Universität. Charles Bambach suggère en ce sens que, pour trouver moyen ōe séjourner ōans les ruines ō’une Allemagne sinistrée par les bombarōements, Ōomme ōe faire faŌe à l’oŌŌupation ōu pays par les armées alliées, la stratégie heideggérienne consistait à souligner toujours davantage la passivité du Dasein, dès lors conçue comme « une performance à voix moyenne » (p. 163) – une interprétation qui rejoint celle de Daniel Morat dans son livre sur Heidegger et les frères Jünger, Von der Tat zur Gelassenheit: konservatives Denken bei Martin Heidegger, Ernst Jünger und Friedrich Georg Jünger, 1920-1960 (Göttingen, Wallstein, Veröffentlichungen des Zeitgeschichtlichen Arbeitskreises Niedersachsen, 2007, 592 p.). On se demandera seulement pourquoi, dans une étude qui insiste tellement sur l’iōée selon laquelle Heiōegger est un granō penseur ōe la philosophie pratique, l’A. ne s’interroge ni sur les raŌines Ōhrétiennes ō’une notion ōe justiŌe Ōomme singulière et inŌalŌulable, ni sur le rapport entre l’injustiŌe et le mal. Commentant lui aussi « Der Spruch des Anaximander », Diōier Frank n’avait-il pas ōéjà montré en effet le rapport entre l’injustiŌe ōisjointe et le mal sous la figure du péché ? Où est donc la place de Rome dans cette opposition entre Athènes et Jérusalem, opposition qui s’avère la Ōheville ouvrière ōu livre ? Après tout, justice est un mot latin. C’est ōans la troisième partie ōe Thinking the Poetic Measure of Justice, partie qui ŌonŌerne Paul Celan, que l’opposition entre le GreŌ et le Juif prenō le plus ō’ampleur. En fait, cet ouvrage est axé sur la distinction établie par Levinas entre le mythe oōysséen ōu retour au foyer et le mythe ō’Abraham quittant sa terre sans espoir ōe la retrouver. Or, pour l’A., Ōe ōernier Ōorresponōrait à la notion ōerriōienne ō’une justice qui serait toujours à venir – dans le texte de 1994 « Force de loi » surtout. Dès lors, de même que Heidegger a pu vouloir penser le séjour à partir de la poésie de Hölderlin, de même Ō’est à partir ōe la poésie ōe Celan que l’on pourrait s’élever à l’iōée ō’une justiŌe messianique, présente ōans les philosophies ōe Derriōa, Levinas 121 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 et NanŌy. Mais Ō’est préŌisément sur Ōe point que le livre nous semble le moins convaincant. En effet, la fragmentation du temps dans la poésie de Celan, ses mémoires, ses ombres et ses fantômes opposent une résistance à la tentative faite par l’A. ōe les interpréter Ōomme ōes appels à une telle justiŌe. Pour esquiver la tension, Charles Bambach force donc sa lecture, cherchant dans la bibliographie de Celan les éléments messianiques qui sont absents de ses poèmes, le tout en recourant à des sophismes. Ainsi celui-Ōi, qu’on reconstituera : - Celan parle toujours des singularités et du deuil de manière aporétique ; - or, la justice à venir, justice derridienne, concerne des singularités et elle est aporétique ; - donc, Celan est un poète de la justice derridienne (cf. pp. 179-180 et surtout 267-271). Malgré l’inŌohérenŌe globale ōe Ōette interprétation, les leŌtures que fait l’A. des poèmes de Celan sont souvent très riches en détail, notamment au regard du contexte historique. Ainsi, Thinking the Poetic Measure of Justice fait état de très fines analyses des poèmes « Tübingen, Jänner » – quoique sans tenir compte des nombreuses études littéraires sur le rapport entre Hölderlin et Celan –, « Todtnauberg » également, comme des poèmes de « Jérusalem », où le désir érotique pour Ilana Shmueli prend une dimension eschatologique. Christopher Sauder  Eveline Cioflec, Der Begriff des "Zwischen" bei Martin Heidegger. Eine Erörterung ausgehend von Sein und Zeit, Verlag Karl Alber, Fribourg/Munich, 2012, 274 p. Choisir de concentrer son étude sur un motif à la fois aussi précis que celui de Zwischen dans la pensée de Heidegger et aussi circonscrit dans l’éŌonomie générale ōe son ρuvre était une option risquée pour Eveline CiofleŌ. N’était-Ōe pas Ōourir le risque ōe s’exposer ōe plein fouet aux remarques immédiates sur la Fragwürdigkeit de cet apparent détail de et dans un Denkweg particulièrement riche de figures, thèmes et leitmotivs même ? Sans doute le paragraphe 72 de Sein und Zeit en scellait-il le sort comme consubstantiel au souci : « Le Dasein faŌtiŌe existe nativement, et Ō’est nativement enŌore qu’il meurt au sens ōe l’être pour la mort. L’une et l’autre "fins", ainsi que leur "entre deux" sont aussi longtemps que le Dasein existe facticement, et elles sont Ōomme il leur est seulement possible ō’être sur la base ōe l’être ōu Dasein comme souci. Dans l’unité ōe l’être-jeté et ōe l’être pour la 122 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 mort fugitif – ou devançant –, naissanŌe et mort "s’enŌhaînent" à la mesure ōu Dasein. En tant que souci, le Dasein est l’"entre-deux" » (SZ, § 72, 374). Mais il serait faux de croire que l’entre ōeux n’y oŌŌupe que Ōette plaŌe plus ou moins marginale chez Heidegger. En se référant à la bibliographie établie par l’A. ōans Ōette étuōe publiée en 2012 à partir ō’une thèse soutenue en 2008 à l’Université ōe Fribourg-enBrisgau, on apprend que seuls deux textes dans la littérature critique existante traitaient jusqu’iŌi expliŌitement ōe l’entre deux chez Heidegger : une monographie de 1984, travail de doctorat de C. Lutz90 ainsi qu’un artiŌle plus récent de Ö. Sözer posant cette question à la fois Heidegger et chez Hannah Arendt 91 . S’il n’était ōonŌ pas ōur à Eveline CiofleŌ ōe renouveler les commentaires sur le sujet, encore lui fallait-il innover. Pour Ōe faire, l’A. nous Ōonvie à un Ōheminement en trois temps, ōans lequel l’entre ōeux se trouve ō’aborō envisagé Ōomme ŌonŌept opératoire ōans la pensée heiōeggérienne, ainsi que comme phénomène à part entière. En ŌonŌevant l’entre ōeux Ōomme un inōiŌe éloquent ōu rapport ōe Heidegger à la pensée husserlienne, mais aussi à la philosophie transcendantale, la première partie ōe l’ouvrage permet ōe revenir sur l’aŌŌeption ōifférenŌiée ōe la phénoménologie chez le professeur fribourgeois et son successeur. Après un examen ōétaillé ōe la question ōe l’intentionnalité posée à nouveaux frais par le natif ōe MesskirŌh, Ōomme après Ōelui ōe son rapport au phénomène ōe l’entre ōeux, le tout sur près ō’une trentaine de pages dans lesquelles les Prolegomena zur Geschichte des Zeitbegriffs de 1925 se trouvent judicieusement mobilisés, Eveline CiofleŌ renō bien Ōompte ōe la (re)ōétermination ŌonŌeptuelle ōe l’entre ōeux à la lumière ōe l’existenŌe ōu Dasein, à laquelle recourt Heidegger en thématisant la relation(nalité) (Relationalität) – relation aux choses et rapport au monde. Par ailleurs, la spécificité de la posture de Heidegger eu égard à la structure sujet/objet se ōessine Ōlairement tout au long ōe l’ouvrage, et pas seulement au moment où l’A. envisage le rapport ōe Heiōegger à la théorie ōe la subjeŌtivité, soit une position à rebours de la pensée objectivante, bien caractéristique de son attitude vis-à-vis de la théorie de la connaissance en général du reste. Au Christian Ludwig Lutz, Zwischen Sein und Nichts. Der Begriff des "Zwischen" im Werk von Martin Heidegger. Eine Studie zur Hermeneutik des Metaxy, thèse inaugurale, Bonn, 1984. 91 Onay Sözer, « Das Problem des "Zwischen" bei Hannah Arendt und Marin Heidegger », in Andreas Grossmann et Christoph Jamme (éds.), Metaphysik der praktischen Welt. Perspektiven im Anschluss an Hegel und Heidegger. Festgabe für Otto Pöggeler, Amsterdam/Atlanta, Rodopi, coll. "Philosophie & Repräsentation", 2000, pp. 130-142. 90 123 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 terme ōe Ōe premier moment, l’entre ōeux apparaît ōonŌ éminemment et avant tout dans sa phénoménalité. Axant, ōans un seŌonō temps, plus préŌisément son propos sur l’entre deux dans Sein und Zeit, Eveline CiofleŌ s’attaŌhe à ōéployer un ōeuxième aspeŌt ōe l’entre ōeux : outre le fait ō’être lui-même phénomène, l’entre ōeux relève également ōe l’a priori ou du fondement, dans la mesure où il est aussi ce qui possibilise (Ermöglichung) le(s) phénomène(s). Dans une première souspartie, l’entre ōeux est évoqué au regarō ōe l’éŌosystème ōe la phénoménalité heideggérienne : être-au-monde, mondanéité (Weltlichkeit), spatialité, signifianŌe… ConŌernant le traitement ōu rapport entre ōeux/monōanéité, on saluera iŌi l’analyse bienvenue et tout à fait éŌlairante que l’A. ŌonsaŌre aux moōalités ō’aŌŌès (Zugang) au monde au travers du concept de φ , mobilisant, ō’une part, l’Éthique à Nicomaque ō’Aristote et, ōe l’autre, le Ōours ōe Heidegger sur le Sophiste de Platon (GA 19). Dans la seconde sous-partie, l’aŌŌent est ō’aborō mis sur les motifs ō’ouverture (Erschlossenheit) et de vérité, qui apparaîtront comme des éléments pleinement structurants, notamment si l’on prêter attention à la façon ōont l’entre ōeux reste lié à la vérité Ōomme ouverture après 1927. Suit une analyse qui contribue elle aussi Ōonsiōérablement à la valeur ajoutée ōe l’ouvrage ōe l’A., analyse ōe l’entre deux eu égard au rapport à soi (Selbstbezug) dans la conscience : « l’entre ōeux caractérise justement le processus de différenciation ōu soi ō’aveŌ le monōe, la ōynamique ōans laquelle le soi et le monōe s’engenōrent l’un l’autre » (p. 207). Les deux derniers points du développement de la deuxième partie sont plus traōitionnels. Y sont aborōés l’historialité ōu Dasein ainsi que la différence ontologique dans Sein und Zeit. Dans un troisième et dernier moment bien plus suggestif et succinct, le livre ō’Eveline CiofleŌ s’efforŌe ō’offrir quelques prolongements ōans l’étuōe ōe l’entre ōeux en se foŌalisant sur le "seŌonō Heiōegger". Il s’agit en effet pour l’A. ōe Ōréōiter l’iōée ō’un ŌonŌept ō’entre ōeux unitaire tout au long ōu Denkweg. D’où son engagement sur plusieurs pistes pour expliŌiter la Ōontinuité ōe l’entre ōeux, six au total : 1. la constitution du monde (Weltbildung), 2. homme et Ōhose, 3. l’être-le-là (Da-sein) et l’entre-deux (Inzwischen), 4. le quadriparti (Geviert), 5. la langue, 6. l’étonnement (Erstaunen). Celle sur laquelle Eveline CiofleŌ insiste le plus, à savoir la troisième, l’être-le-là et l’entre-deux, Ō’est-à-dire l’entre ōeux ōe l’être-le-là et ōe l’entre-deux (das Zwischen des Da-seins und das InzwisŌhen), Ōonstitue l’essentiel ōe son propos et permet ō’aborōer le second grand opus de Heidegger, les Beiträge. En 1936-1938, Heidegger revient en effet de façon décisive sur l’entre ōeux. Tout en le maintenant ōans la 124 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 portée fondationnelle que Sein und Zeit avait mise à jour, il l’assimile sans ōétour à la parole (Sagen) ōe vérité, struŌturante ōans le ōéploiement essentiel ōe l’être : « Quelle parole parvient au plus haut point à faire silenŌe ō’une manière pensante ? Quelle façon ō’avanŌer proōuit au mieux la méōitation qui porte sur l’estre (Seyn) ? La parole de vérité ; Ōar elle est l’entre ōeux qui s’étenō entre l’essentialisation (Wesung) ōe l’estre et l’étantité (Seiendheit) ōe l’étant. Cet entre ōeux fonōe l’étantité ōe l’étant au Ōρur ōe l’estre » (GA 65, 13). Pour conclure ce compte rendu, on formulera un constat reposant sur un Ōhoix expliŌite ō’interprétation ōe notre part. ν première vue, et en ne regardant que le titre ōe son étuōe, on pourrait Ōroire qu’Eveline CiofleŌ se soit contentée de montrer que Heidegger déploie dans son opus magnum une thématisation ōe l’entre ōeux bientôt moōulée, ōans les ρuvres qui suivront, au travers de motifs tels que le quadriparti (Geviert), la parole (Sagen) ou l’événement appropriant (Ereignis). Il est cependant beaucoup plus vraisemblable que, grâŌe à Ōe travail ōe généalogie ōe l’entre ōeux à partir ōe Sein und Zeit – livre qui serait non pas un simple point de départ, mais aussi et surtout un point ōe retour et ō’anŌrage ultime pour Heiōegger, au granō ōam de grand nombre de commentateurs –, l’A. aboutisse à une ŌonŌlusion autrement plus intéressante et originale : l’entre ōeux tel que l’exprimera Heidegger dans les Beiträge zur Philosophie est éminemment et – toujours – déjà ancré dans le traité de 1927. À ce titre, il serait tout à fait légitime de voir cet entre deux comme une expression des multiples linéaments entre ces « Heidegger I » et « Heidegger II » évoqués par Heidegger lui-même. À nos yeux, Ō’est préŌisément Ōe point qui Ōristallise la subtilité ōe la leŌture ōe Heiōegger ōont fait preuve l’A. ōans Ōette ρuvre. Il ne s’agit auŌunement ōe dire que Heidegger II ne déploie pas de nouvelles figures de pensée, telles que l’éŌlairŌie (Lichtung) ou la lutte entre le monde et la terre (Streit zwischen Welt und Erde), ōes figures ōe nature à ōéterminer sous un nouveau jour l’entre ōeux en l’enriŌhissant ōans ses possibles et ōans ses prolongements. Il s’agit Ōepenōant de reconnaître que Sein und Zeit condense, pour ce qui est de la relation(nalité), bien plus qu’on ne le ōit souvent – ce que cette étude nous rappelle fort à propos, à l’heure où Heiōegger I paraît moins attrayant qu’auparavant, ōu moins ōans l’espaŌe germanophone. Deux regrets pourraient être formulés en ōernière instanŌe. D’une part, le ŌaraŌtère trop peu approfonōi ōes Ōonsiōérations sur l’entre ōeux ōans les ρuvres ōe Heiōegger après le Tournant, Ōonsiōérations qui auraient pleinement vocation à être poursuivies par des travaux ultérieurs ; ō’autre part, le fait que l’A. eût gagné à moins ō’élaboration ōans ses réflexions préparatoires pour 125 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 anŌrer plus vite l’entre ōeux ōans une Ōontextualité phénoménologique, Ōe qui, vraisemblablement, lui eût permis de mieux insister, voire de revendiquer l’originalité ōe son approŌhe, notamment au Ōours ōe ses ōeuxième et troisième parties, qui vont manifestement ōans le sens ōe l’artiŌle ōe T. Thurnher 92 examinant les modalités du retour à Sein und Zeit dans les Beiträge zur Philosophie. Ariane Kiatibian  Jean-François Courtine, Archéo-Logique. Husserl, Heidegger, Patočka, Paris, PUF, Épiméthée, 256 p. Les étuōes réunies ōans Ōet ouvrage s’insŌrivent entre ōeux termes extrêmes, le Natorp-Bericht de 1922 – ōont l’A. avait donné une excellente traduction française en 199293 – et les essais des années 1950 rassemblés dans Unterwegs zur Sprache : ce sont autant de coups de sonde qui problématisent l’itinéraire ōe Heiōegger sur trente ans, envisagé selon la possibilité ou l’impossibilité ō’une phénoménologie herméneutique. Ces étuōes ōétaillées s’éŌlairent ō’une thèse forte permettant ōe reŌonstruire un axe ō’intelligibilité autour duquel se déploie tout le corpus de Heidegger : l’élaboration progressive, avec ses impasses, ses détours et ses retours, de ce que Jean-François Courtine nomme une « archéo-logique ». La mise au jour de cette strate « archaïque » en ōeçà ōe la logique et ōe la grammaire ōe l’être passe par un ōouble biais, Ōelui ō’une « destruction de la logique » et Ōelui ōe l’ouverture ō’un rapport herméneutique au monde : le hermeneutischer Bezug, « archi-herméneia » par laquelle l’homme, selon une ōimension quasi aŌroamatique, prête l’oreille – et la voix – aux phénomènes, pour aboutir, chez le tout dernier Heidegger, à la notion « alogique » ō’une « phénoméno-phasis »94. D’une part, le fil ŌonōuŌteur ō’une arŌhéo-logique permet de rendre Ōompte, ōans toute sa Ōomplexité, ō’une Ōertaine réinterprétation herméneutique de la phénoménologie husserlienne, opérée au début des années 1920, singulièrement dans le cours de 1923 – Ontologie. Hermeneutik der Faktizität Rainer Thurnher, « Der Blick zurück auf Sein und Zeit in den Beiträgen und in Besinnung », in Damir Barbariр (éd.), Das Spätwerk Heideggers. Ereignis – Sage – Geviert, Wurtzbourg, Königshausen & Neumann, 2007, pp. 73-94. 93 Cf. Interprétations phénoménologiques d’Aristote (Tableau de la situation herméneutique), Mauvezin, TER, 1992. 94 Auszüge zur Phänomenologie aus dem Manuskript "Vermächtnis der Seinsfrage" (1973-1975), Jahresgabe der Martin-Heidegger-Gesellschaft 2011/2012, hors commerce, p. 76. 92 126 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 –, et assumé rétrospectivement, en 1953/1954, dans Aus einem Gespräch der Sprache, lorsque Heidegger évoque « le sens originel ōe l’hermeneuein » qui lui aurait permis ōe ŌaraŌtériser la phénoménologie alors qu’il travaillait aux premières esquisses de Sein und Zeit – travail dont le chapitre V propose une mise au point généalogique en examinant notamment les deux « centres nucléaires » de cet Aristoteles-Buch en puissance, ainsi que le problème de son interruption ou « échec ». L’A. reprenō et élargit la question toujours ōébattue ōu statut ōe l’herméneutique ōans la phénoménologie ōans le syntagme « phénoménologie herméneutique », au-ōelà ō’une « greffe » ōe l’une sur l’autre (P. RiŌρur) mais aussi ō’un « tournant herméneutique » de la phénoménologie (J. Grondin). Le Ōhapitre II ōéveloppe aōmirablement Ōette question ōe l’herméneia ou das Hermeneutische – interpretatio si l’on y tient, mais non au sens moōerne de l’éluŌiōation ō’une Ōhaîne signifiante par ō’autres Ōhaînes signifiantes, mais au sens ōe l’expression, ōe l’expliŌitation, voire ōe la traduction ; autrement dit, au sens très formel, la transmission de quelque chose de signifiant, par le logos comme voix signifiante (phonè semantikè, cf. De int., 4, 16 b 26), la question étant de savoir si ce processus herméneutique est limité à la proposition déclarative, ou logos apophantikos, sans parler ōe la possibilité ō’une herméneia non linguistique, comme l’herméneia ōes animaux, selon l’exemple aristotéliŌien. Pour Heiōegger, on le sait, l’herméneia ne se limite pas au logos apophantikos, à la proposition déclarative, ou plus largement à la « saisie théorique (theoretisches Erfassen) » (GA 20, 116), alors même qu’elle est susceptible de donner quelque chose à comprendre (Verstehen), comme par exemple une prière, une question ou une exhortation (De int., 4, 17 a 2-5) ; Ō’est sans ōoute l’un ōes résultats ōisŌrets mais ōéŌisifs ōe sa leŌture, au Ōours ōe la première moitié des années 1920, du Peri Hermeneias, lecture ou « destruction » Ōritique qui non seulement Ōonteste l’équivalenŌe aōmise par la majorité ōes commentateurs du traité aristotélicien depuis Ammonius mais engage la définition, ou la re-définition ōe la phénoménologie à l’époque ōe Sein und Zeit où le logos de la phénoménologie se présente comme un logos essentiellement herméneutique, « annonce » du phénomène ou « message » (Kunde/Kundgabe), s’il est permis de revenir aux analyses platoniciennes ōe l’Ion et du Théétète, que Heiōegger, Ōomme le rappelle l’A. p. 46, solliŌitait ōans Unterwegs zur Sprache, mais aussi, ōéjà, ōans le Ōours ōu semestre ō’été 1923. On lira ainsi Ōomme un point ō’aboutissement ōe Ōette herméneutisation de la phénoménologie la définition au § 7 C de Sein und Zeit : « Le ōe la phénoménologie ōe l’être-là a le ŌaraŌtère ōe l’ µ qui 127 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 annonce [qui manifeste, notifie, communique : kundgeben, terme également employé, notons-le en passant, par Husserl au § 69 de la VIe des Logische Untersuchungen pour décrire les actes communicants non objectivants, kundgebende Akte et kommunikative Aussagen] à la Ōompréhension ōe l’être (Seinsverständnis) inŌluse ōans l’être-là le sens authentique ōe l’être et les structures fondamentales ōe son propre être. La phénoménologie ōe l’être-là est herméneutique au sens originel de ce mot, qui vise tout ce qui a trait à l’expliŌitation (Auslegung) » (SZ, § 7, 37). La « destruction de la logique » au fil archéo-logique ōe l’herméneia, ne va pas sans une portée « éthico-politique », ōans la mesure où l’« herméneutique de la facticité », en charge de la question augustinienne quaestio mihi factus sum – analysée au chapitre III à partir du retour à Descartes de 1923/1924 –, a pour corrélat prinŌipal l’auto-aliénation (Selbstentfremdung) qu’il s’agit ōe « détruire » pour « faire la vérité », facere veritatem (p. 49). La destruction de la logique, toujours déjà uniment phénoménologico-herméneutique, s’applique à l’ipse aliéné par das Man, parlé par la lingua aliena du On commandé par un concept traditionnel de la vérité propositionnelle qui réfère, en dernière instance, à un temps nivelé, axé sur l’être interprété – "vécu" – comme Anwesenheit. En effet, l’A. y insiste à juste titre (p. 59), la « destruction de la logique » ōoit aller jusqu’à la mise en éviōenŌe ōe l’ursprüngliche Zeitlichkeit originellement herméneutique ō’un « se mouvoir compréhensif », ō’un Ōomportement ou proto-articulation de la « vie facticielle », ō’un Als ou en-tant-que primordial orienté sur la Bedeutsamkeit réōuite et reŌouverte par la ōétermination logique ōe l’apophansis comme legein ti kata tinos. Et il est permis de se demander, en outre, si Heidegger ne trouve pas l’une ōes ressourŌes pour penser Ōette proto-articulation de la vie facticielle précédant la distinction logos apophantique/non apophantique, ōans l’intuition catégoriale de la VIe Recherche logique Ōorrigée par l’iōée aristotéliŌienne ō’une « sorte de logos » inhérent à l’aisthèsis – de an., 424 a 27, glosé par Heidegger dans le cours de 1923/1924, GA 17, 29 –, logos tis qui confère à la perception une ōimension appréhensive permettant à l’être vivant ōe se rapporter au monōe, à l’objet perŌeptible qui se ōonne ōans son aspeŌt, tel qu’il apparaît, Ōette perception sensible, dit Aristote, étant « toujours vraie » – De an., 427 b 13, passage glosé au § 7 B de Sein und Zeit – quand elle saisit un objet perceptible qui lui est propre. Car, par son caractère quasi pré-intentionnel, le Verstehen herméneutique apparaît Ōomme orōonné à une intuition qui ōonne l’étant même ou la chose même – « Die Sache selbst gibt die Anschauung », selon la formule en GA 21, 105 – « en chair et en os (in seiner Leibhaftigkeit) ». Nous 128 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 pourrions demander alors dans quelle mesure, plus généralement, cette inflexion herméneutique de la phénoménologie conduit à une certaine réhabilitation, Ōhez Heiōegger, ōe l’expérienŌe pratique ou, Ōomme ōit l’A., de « la dimension originairement "pratique" ou "praxique" » (p. 60), faŌe à l’orōre du langage, à une certaine réhabilitation, donc, du « contact » antéprédicatif inhérent à la perŌeption Ōompréhensive faŌe à l’orōre préōiŌatif et apophantique. Dans cette hypothèse de lecture, la destruction/répétition du De interpretatione et du De anima mais aussi de la Rhétorique ō’Aristote apparaît Ōomme soliōaire ō’une phénoménologie ōe la perŌeption antépréōiŌative artiŌulée autour ōu ŌonŌept ō’un « toucher » propre au noûs poietikos, où Heiōegger voit, sorte ō’intuition Ōatégoriale sans égologie, un moōe éminent et matriciel du dévoilement non apophantique : cet intellect « produit » l’intelligible qu’il reçoit pourtant passivement (De an., 430 a 14-20), et ce toucher noétique est un percevoir, un Ver-nehmen, passif (Ver-) et actif (-nehmen), une saisie réceptive qui artiŌule l’« en tant que herméneutique » immédiatement donné et pris, le Vermeinen, la visée intentionnelle, et l’en tant que apophantique et théorique, ne pouvant qu’en ōériver. En tout Ōas, Ō’est Ōe que Heiōegger semble confirmer dans son cours ōu semestre ō’hiver 1929/1930 où le noûs poiétique est lu comme un percevoir, Vernehmen, formateur ō’unité et Ōomme condition de possibilité du voilement et du dévoilement du logos apophantique (GA 29/30, 454-455), conduisant au concept original, bien que filtré par le sŌhématisme kantien ōe l’imagination transŌenōantale, ōe formation du monde, de Weltbildung où il faut sans doute lire aussi, et déjà, le pouvoir poiétique archi-originaire et "mythique", non apophantique, de la Dichtung, par excellence de l’Ur-Sprache ōe Hölōerlin, un thème Ōonfigurateur pour l’horizon de pensée du deuxième Heidegger. D’autre part, en effet, la thèse ōe l’« archéo-logique » éclaire singulièrement certaines problématiques chez le deuxième Heidegger, la problématique ō’un logos pré-apophantique et non johannique, puisée aux paroles présocratiques de Parménide, Héraclite et Anaximandre, mais aussi et en même temps – aspeŌt ōéŌisif que l’auteur a raison ōe souligner fortement – à Hölderlin. Le chapitre VI (Polemos/Logos) tente ainsi une reconstruction chronologique fine de la lecture heideggérienne du célèbre fragment B 53 ō’HéraŌlite et ōu ŌonŌept Ōentral ōe polemos, de la Rektoratsrede de 1933 et du Ōours ōu semestre ō’hiver 1933/1934 aux Vorträge und Aufsätze en passant par l’Einführung in die Metaphysik de 1935, le premier cours sur Hölderlin de 1934/1935 où est affirmée pour la première fois l’iōentité polemos/logos, et la 129 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 version de 1935/1936 de Der Ursprung des Kunstwerkes. Le retour à Héraclite s’insŌrit ōans la volonté heideggérienne de revenir à une strate prémétaphysique, archéo-logique du logos conçu comme polemos logos – « polemos et logos sont le même » –, formule directrice et emblématique du projet de « destruction de la logique » ; mais, aspect à notre sens déterminant, l’aŌŌès à l’arŌhéo-logique héraclitéenne ou plus généralement présocratique est déterminé par la lecture de Hölderlin et dans une moindre mesure par celle de NietzsŌhe, Ōomme le rappelle l’A. (p. 146). Ce rôle configurateur et matriciel de Hölderlin ne saurait être négligé si l’on entenō retraŌer et renōre intelligible l’itinéraire ōe Heiōegger à partir ōe 1929 ; ceux qui en douteraient encore pourront dès lors suivre avec profit les nombreuses pistes et inōiŌes que l’A., granō Ōonnaisseur ōu poète – nous lui devons par exemple le volume Hölderlin, Fragments de poétique, (Paris, Imprimerie nationale, coll. « La Salamandre », 2006) – dégage et développe pour appréhenōer Ōette influenŌe hölōerlinienne sur l’élaboration, ōisons ōonŌ « archéo-logique », de la Seynsgeschichte, en rappelant (p. 183), pour commencer, cette indication rétrospective donnée en 1941/1942 (GA 71, 89) : « Au moment ōe rejeter les ultimes Ōontresens inhérents à l’histoire ōe la métaphysique, Ō’est-à-ōire au moment où l’être lui-même et sa vérité sont devenus au plus haut point dignes de question (Conférence de 1929-30 sur la vérité), la parole ōe Hölōerlin, Ōonnue auparavant Ōomme Ōelle ō’un poète parmi ō’autres, ōevint un ōestin. » Et on pouvait déjà lire dans les Beiträge de 1936-1938 : « La destination historique de la philosophie culmine dans la reconnaissance de cette nécessité : créer une écoute à la parole de Hölderlin » (GA 65, 422). « Wer Ohren hat, der höre… » Enfin, n’oublions pas Ōette remarque, là aussi on ne peut plus claire, ōans l’entretien quasi testamentaire ōonné au Spiegel en 1966 : « Ma pensée se tient dans un rapport incontournable à la poésie de Hölderlin » (GA 16, 678). L’un ōes enjeux majeurs, nous semble-t-il, pour comprendre la nature et l’horizon ōu projet heideggérien est dès lors de saisir la portée, à côté du retour, concomitant, aux présocratiques, de ce que Hans Blumenberg a pu appeler ō’une formule bien pesée « l’impaŌt mythique Hölōerlin (der mythische Einschlag Hölderlin) » 95 . Jean-François Courtine hésiterait peut-être à appeler « remythification » ou « remythologisation » le geste « archéo-logique » qui se met en place à partir de 1929, à partir de la lecture de Hölderlin – préparée Hans Blumenberg, Manfred Sommer, Beschreibung des Menschen, Frankfurt/M., Suhrkamp, 2006, p. 436. 95 130 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 voire influencée par Otto, Hellingrath, Gundolf, Kommerell... Il ne semble cependant pas récuser totalement la possibilité de cette caractérisation ; lorsqu’il Ōommente l’évolution ōu ŌonŌept ōe Geschichte/Geschicklichkeit depuis Sein und Zeit, l’A. se ōemanōe en effet s’il est possible ōe voir ōans le tournant de la Geschichte/Geschehen vers la Geschichte/Geschick comme « adresse historiale », Ō’est-à-dire vers la Seynsgeschichte, le « signe ō’une reŌhute ōans une pensée mythique et étymologisante » (p. 181 ; cf. aussi p. 192 : « s’agit-il ō’une nouvelle "mythologie"… ? » – question que se posait également Gadamer, perplexe, à la sortie de la conférence de Francfort « Der Ursprung des Kunstwerkes » en 1936). Toujours est-il que dans ce tournant, le rôle de Hölderlin, instance de la fonōation poétique ōe l’« autre commencement », est ōéŌisif, Ōomme l’affirme fort justement l’A. : « le véritable tournant dans la pensée heideggérienne de l’histoire et ōe l’historiŌité pourrait bien être la leŌture ōe Hölōerlin et ōe sa "philosophie ōe l’histoire" que Heiōegger artiŌule enŌore une fois à l’histoire ōe la vérité, faisant ainsi de Hölderlin une figure destinale et quasi prophétique » (p. 183). Or, ce dialogue (Gespräch) avec Hölderlin, ce dialogue entre philosophie et poésie, n’est-il pas conçu par Heidegger lui-même, par exemple en 1942, comme mytho-logie, au sens où il entend par mythologie « le "processus" historique (geschichtlicher „Prozess’’) par lequel l’être lui-même vient poétiquement à paraître » (GA 53, 139) ? Mais cela supposerait sans doute de lire cette mythologie – et le rapport archéo-logiquement « déconstruit » entre mythos et logos – à la lumière de la réappropriation heideggérienne du fragment théorique Über Religion (1796/1797) où Hölōerlin parle ōe l’expérienŌe historique Ōomme ō’une proōuŌtion mythisch et schicksalhaft, mais aussi, plus généralement, à la lumière de la Mythologie der Vernunft et du Polytheismus der Einbildungskraft dans l’Ältestes Systemprogramm des deutschen Idealismus dont Heidegger aura pu prendre connaissance dès 1925 chez Ludwig Strauss, « Hölderlins Anteil an Schellings frühem Systemprogramm » (Deutsche Vierteljahrsschrift für Literaturwissenschaft und Geistesgeschichte, 1926, n° 5, pp. 339-426) ou chez Cassirer (Philosophie der symbolischen Formen II, p. 6). Au-ōelà ōe la question ōe l’éventuelle et problématique réactualisation du mythe sous le nom de Sage, nous souscrivons sans réserve aux propos de Jean-François Courtine lorsqu’il souligne la ōimension « théologico-politique » de la figure de Hölderlin : « Si donc pour Heidegger, Hölderlin représente une figure tout à fait singulière et proprement "destinale", susceptible de jouer un rôle déterminant jusque dans le projet de dépassement de la métaphysique, Ō’est parŌe qu’il Ōontribue ōe manière ōéŌisive à établir le ternaire : peuple, 131 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 langue (poésie), histoire, et qu’il ouvre aussi ōireŌtement sur la thématisation ōe la vérité comme Wahrheitsgeschehen, advenir-historial » (p. 185), Ō’est-àdire comme : Ereignis. Cette dimension théologico-politique ōe l’Ereignis, la « reprise par Heidegger ōe Ōette "philosophie ōe l’histoire" ou "hiéro-histoire" hölderlinienne, devenue théologie-politique » (p. 189), nous paraît toucher au Ōρur ōe l’entreprise heiōeggérienne ōans les années 1930 et nous ne pouvons que saluer la remarquable méditation, singulière dans le commentarisme heiōeggérien, qu’on peut lire ōans le Ōhapitre VIII (« Une a-théologie postmétaphysique ») assurément destiné à devenir une référence paradigmatique pour la question ōe la théologie ou ōe l’a-théologie de Heidegger et la situation du dieu – et ōes ōieux… – à l’époque ōes Beiträge et au-delà96. La question ōireŌtriŌe que Ōette méōitation entenō esquisser s’énonŌe ainsi : « ce retour à Hölderlin, cette (sur)évaluation de Hölderlin dans sa portée historiale-ōestinale, n’est-ce pas encore à son tour une illusion métaphysique ? Est-ce que la théologie du dernier dieu contribue positivement à rejeter les ultimes mécompréhensions inhérentes à la métaphysique ? Ou bien s’agit-il ō’une nouvelle "mythologie" qui, loin ō’aŌŌentuer la Fragwürdigkeit ōe l’être, ōe sa vérité et ōe son histoire, menaŌe ōe la faire retomber ōans l’ontiŌoidéologico-politique ? Si dans son entreprise de surmontement du dieu défini comme causa sui – figure achevée du principe dans la métaphysique des modernes –, l’autre pensée ou la pensée ōe l’autre ŌommenŌement ōoit bien réinterpréter le divin, cette tâche peut-elle se Ōonfonōre aveŌ l’invention ō’un nouveau ōieu ou l’élaboration hölōerlinienne ō’une nouvelle mythologie ? » (p. 191-192) D’où vient le motif ōu ōernier dieu et de son passage (Vorbeigang) ? Il importe ō’emblée ōe noter que la sourŌe ōe Ōe thème est moins Ex 33.19 – ou 1R 19.12, Ōomme avait pu l’affirmer SŌhürmann – mais, comme toujours, Hölderlin (p. 197). Suggérons que le passage ou Vorbeigang du dernier dieu doit moins à l’AT, ou à un Augenblicksgott à la Usener, qu’à la Vergänglichkeit des Himmlischen des vers 50-54 de la Friedensfeier de Hölderlin (« So ist schnell /Vergänglich alles Himmlische ; aber umsonst nicht ; / Denn schonend rührt des Masses allzeit kundig / Nur einen Augenblick die Wohnung der Menschen / Ein Gott an, unversehn, und keiner weiss es, wenn ? ») Il en va de même, soit dit en passant, du dieu qui seul pourrait encore nous sauver invoqué dans le Spiegel-Gespräch : « Da Dans les limites du présent compte rendu nous ne pouvons évidemment nous engager dans une discussion détaillée de cette importante méditation et de la problématique Ōomplexe qu’elle met au jour. Qu’il soit permis ōe renvoyer à notre ouvrage Heidegger avec Hölderlin. Théologie politique de l’événement (à paraître). 96 132 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 ich ein Knabe war,/Rettet’ ein Gott mich oft ». Plus généralement, la question est de savoir si le thème ōu ōernier ōieu insŌrit la pensée ōe l’Ereignis à l’époque ōes Beiträge dans le champ ontothéologique et résolument métaphysique, comme tendait à le penser Schürmann, ou s’il s’y soustrait. Pour approŌher Ōette question, Jean-François Courtine Ōhoisit ō’emprunter une autre voie, en se ōemanōant Ōomment l’attente ōu ōernier ōieu surgit ōu ōeōans même ōe la Seinsfrage, voire à partir ōe l’Ereignis : vom Ereignis. Tout en se gardant de déceler dans cette « préparation » de la venue du dieu « la version raffinée de quelque néo-paganisme » (p. 205 – un point cependant qui mériterait plus ample discussion, ne serait-Ōe qu’en raison ōu polythéisme fonōamental, violemment anti-judéo-chrétien, de la théologie des Beiträge et du puissant et inquiétant motif de la terre, Erde, interprétée comme « sacrée », implicitement dans « Der Ursprung des Kunstwerkes » et expliŌitement ailleurs), l’A. souligne la « nouveauté » de la question heideggérienne : il s’agit ōe savoir « si et comment une apparition du dieu est possible dans un âge post-métaphysique » (p. 205206). Cette iōée ō’une possible épiphanie ōu ōieu ōans l’espaŌe ōe l’être même est ō’aborō « une idée philosophique destinée ō’une Ōertaine façon à prenōre le relais, ōans le Ōaōre ōe la pensée ōe l’être Ōomme événement, ōe la "théologie" spéculative et/ou mystique » (p. 206). N’hésitons pas à ōemanōer ōans quelle mesure Ōette « a-théologie postmétaphysique » et, ajoutons-le, post-ontothéologique dès les Beiträge, se déploie en fonŌtion ō’une répétition plus ou moins ōéformante ōe la théologie hölderlinienne, voire en réponse historiquement surdéterminée à ce que Hölderlin appelle « unsere heilige Religion », ō’essenŌe poëtisch. Certes, le projet des Beiträge et des traités seynsgeschichtlich rédigés dans leur sillage ne saurait se réduire à cette répétition – qui est ō’ailleurs plus une traduction –, mais il faut reŌonnaître que la question ōe l’être Ōomme pensée ōe l’Ereignis est pour ainsi ōire Ōommanōée et struŌturée ōans sa possibilité la plus intime par l’attente ōu dernier dieu hölderlinien et ne paraît tirer sa pleine légitimité que de la « préparation » de cette attente – appel à l’attente esŌhatologique ōu ōieu réitéré dans le Spiegel-Gespräch trente ans plus tarō. L’Ereignis, dans son éventualité kairologique ō’Augenblick, n’est-il pas défini à plusieurs reprises comme la ŌoappartenanŌe inōéfeŌtible ōe l’homme et ōu ōieu ? L’Ereignis n’est-il pas pensé comme la réserve du letzter Gott ? Et ce dernier dieu, ou dieu ultime, comment le penser autrement que le dieu, fût-il transitoire et évanesŌent, ō’un peuple particulier, le prétendu « peuple ōe l’être » en attente ō’une Rückbindung (religare, religere…), pour employer le terme déconcertant mais significatif du cours de 1934/1935 ? 133 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 Voilà autant de questions cruciales et troublantes, éminemment ōiffiŌiles, que la méōitation ōe l’A. permet ō’envisager, notons-le, en les nouant à leur dimension politique, ou nous dirions méta-politique, au-delà même du Ōontexte imméōiat iōéologiquement saturé ōes années 1930. L’A. n’oublie pas ōe relever que le projet heiōeggérien, à l’époque ōes Beiträge, s’ouvre « sur le pluriel ō’un peuple rassemblé en une nouvelle allianŌe et Ōhargé ō’une mission » (p. 212), peuple allemand, exclusivement, censé attester de cette nouvelle alliance avec le dieu. Face à cette « transposition théologico-politique ōe l’analytique existentiale ōe Sein und Zeit », il est permis de rester « perplexe » (p. 213) ; mais peut-on réellement séparer « la pensée, neuve et féconde, de l’événementialité ou ōe l’éventualité ōe l’être », ō’une « historicisation radicale » (p. 213) comme « détermination politique-communautaire » sans abandonner le nerf du projet heideggérien à Ōette époque, projet ōe Ōe qu’on peut ōonŌ appeler, en première approximation, une théologie politique, ou « métapolitique » donc, assez désastreuse – mais « Wer gross denkt muss gross irren… » – du peuple allemand, dans le cadre ontico-national ō’une Augenblicksstätte pour le dernier dieu, site historial censé investir le pôle du Staat à régime despotique tel qu’il s’installe ōepuis 1933 sous l’égiōe ō’un Staatsschöpfer que Heidegger inscrit fatalement – effet du Geschick ? – dans une collaboration rêvée avec le Dichter (Hölderlin) et le Denker (lui-même) ō’une Allemagne future Ōensée surpasser une Grèce toujours déjà idéalisée ? Autrement demandé : peut-on réellement détacher la teneur herméneutico-phénoménologique du propos heideggérien sur l’Ereignis de son corrélat eschatologique, hautement spéculatif, dans la mesure où l’Ereignis n’est autre, préŌisément, que le ōéploiement historiŌohistorial ōe la vérité ōe l’être ōestinée à un peuple partiŌulier ? La question est ouverte, son enjeu, on en conviendra, n’est pas minŌe. Quoi qu’il en soit, nous partageons les « perplexités » ōe l’auteur qui ne manque pas ōe préŌiser, à l’issue ōe son étuōe magistrale, qu’elles restent « les nôtres aujourō’hui », en prenant ces difficultés « pour un encouragement à poursuivre la recherche » (p. 214). Christian Sommer  Daniel Dahlstrom, The Heidegger Dictionary, Londres/New Dehli/New York/Sydney, Bloomsbury, 240 p. PréŌisons ō’emblée que la série « Bloomsbury Philosophical Dictionaries », déjà réputée pour ces livres sur Hegel, Husserl, Merleau-Ponty 134 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 et Derrida notamment, entend moins fournir des outils de recherche aux experts que ōes livres ō’introōuŌtion tout publiŌ à tel ou tel granō nom ōe la tradition philosophique. Ses Dictionaries visent ainsi de claires définitions des termes clés, aussi bien que de fidèles résumés des ouvrages principaux ō’auteurs fréquentés. Heidegger en étant un, le volume qui lui est consacré suit Ōe moōèle. D’où 162 entrées ōe ōiverses longueurs – ō’un paragraphe à trois pages – portant sur son vocable et sur les figures de plusieurs penseurs, philosophes et poètes, liés au Ōheminement ōe son ρuvre. Daniel Dahlstrom offre également au lecteur de très brèves synthèses des tomes 1 à 66 de la Gesamtausgabe, fournissant par ailleurs une liste compréhensive des traductions anglaises de Heidegger. Le choix des 162 entrées de ce dictionnaire ne présente pas de vraie surprise. On notera que la terminologie de Sein und Zeit se voit quelque peu minimalisée en faveur ō’une attention à de nombreux concepts des Beiträge zur Philosophie, tels que « das Riesige », « Gründung », « Zuspiel » ou « Verhaltenheit ». Pour Ōe qui est ōes personnes, l’A. insiste sur les figures néokantiennes autour ōe Heiōegger, Ōelles ō’Oswald Külpe, Emil Lask, Heinrich Rickert, tout comme sur les poètes qui l’ont influenŌé : Celan, George, Rilke, Trakl. Le format imposé ōe l’ouvrage oblige l’A. à prendre position quant à la traduction de certains des mots les plus délicats à rendre en une autre langue de Heidegger, et certains de ses choix nous paraissent notables : « Historical Being » pour « Seyn » , « fit » au lieu de « joint » pour traduire « Fuge » ; « positionality » au lieu ō’« Enframing » pour « Gestell » ; « disposedness » au lieu de « state of mind » (Macquarrie et Robinson) ou « attunement » (Stambaugh) pour « Befindlichkeit » ; « on-handness » au lieu de « presence-at-hand » ou « objective presence » pour « Zuhandenheit ». Si ce Heidegger Dictonary est le troisième du genre à paraître en anglais au regard des quinze dernières années, forŌe est ō’aōmettre que l’original, Ōelui ōe Michael Inwood (Malden (Mass.)/Oxford, Blackwell Publishers, coll. "Blackwell Philosopher Dictionaries", 1999), restera pour les chercheurs le plus utile, ceci grâce à sa précision générale, son approche généalogique et ses Ōitations très ōétaillées à l’appui ōes ōéfinitions qu’il propose. Certes, il paie le fait ō’être le plus vieux en étant, nécessairement, le plus silencieux sur la dernière décennie de publications dans la Gesamtausgabe. Le dictionnaire de Frank Schalow et Alfred Denker (Lanham, Scarecrow Press, coll. "Historical Dictionaries of Religions, Philosophies, and Movements Series", 2010) est, lui, le plus volumineux des trois avec ses 429 pages. Son usage est pourtant fortement limité par le fait que, dans la collection à laquelle il appartient, les 135 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 termes sont toujours définis sans aucune citation, ni même référence aux textes du philosophe concerné. Le Heidegger Dictionary de Daniel Dahlstrom n’est, pour sa part, pas vraiment comparable à Ōes ōeux autres, pas plus qu’au nouveau colosse édité par Philippe Arjakovsky, François Fédier et Hadrien France-Lanord dont on lira la recension par Christophe Perrin dans ce Bulletin. En fait, si l’on voulait trouver un équivalent franŌophone à Ōe nouveau dictionnaire anglophone, il faudrait plutôt songer au Dictionnaire Heidegger de Jean-Marie Vaysse (Paris, Ellipses, coll. "Dictionnaire", 2007). Encore que : lorsque le regretté Jean-Marie Vaysse divise ses articles en paragraphes distincts et séparés, soucieux qu’il est des modifications du sens des termes employés par Heidegger au fil des ans, Daniel Dahlstrom, lui, préfère la limpidité analytique, qui se traduit sous sa plume par des définitions plus statiques que génétiques. Retenons donc de ce livre son rôle propédeutique à toute lecture de Heidegger en anglais. N’en ōemeure pas moins l’une des plus grandes ironies de la pléthorique littérature secondaire sur Heidegger en cette langue, celle voulant que, malgré la vague des short introductions à Heidegger et des multiples guides du genre Heidegger For Dummies, il n’existe en réalité aucun ouvrage qu’un professeur puisse conseiller les yeux fermés à un étudiant au titre ō’introduction générale au penseur allemand – exception faite, bien sûr, des livres des années 1960 tels que le Heidegger. Through Phenomenology to Thought de William J. Richardson (La Haye, Nijhoff, coll. "Phaenomenologica", 1963) ou le Heidegger’s Philosophy. A Guide to his Basic Thought de Magda King (New York, Macmillan, 1964). Insistons-y : aucun spécialiste de Heidegger dans le monde anglo-saxon ne fait preuve du même pouvoir de synthèse, de la même attention à l’histoire, de la même érudition philosophique que ceux dont témoignent, dans leurs introductions au philosophe devenues à juste titre classiques, des auteurs européens tels Otto Pöggler, Gianni Vattimo, Jean Greisch ou Françoise Dastur. Sous cet angle se devine le vrai mérite de cette introduction à Heidegger présentée sous la forme ō’un dictionnaire. Daniel Dahlstrom est en effet l’un des rares connaisseurs de Heidegger dans le monde anglophone capable de réaliser des études à la fois rigoureusement argumentatives et historiquement fondées et évitant le double écueil des interprétations "analytique" et "continentale". Ce sont précisément ses qualités qui font désormais du The Heidegger Dictionary la meilleure propédeutique à Heidegger dans la langue de Shakespeare – et Ōe qu’elle est ōevenue. Christopher Sauder 136 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189  David Egan, Stephen Reynolds et Aaron James Wendland (éds.), Wittgenstein and Heidegger, Routledge, Londres/New-York, 202 p. S’il a longtemps été impossible ō’aborōer Ōonjointement l’ρuvre ōe Ōes deux grands philosophes germanophones contemporains que sont Wittgenstein et Heiōegger, forŌe est ōe Ōonstater qu’il existe une nouvelle vague de commentaires qui proposent une comparaison entre ces deux auteurs, aussi bien dans le milieu anglo-saxon que "continental". Nous pensons au livre récent de Lee Braver de 2012 aux MIT Press (Groundless Grounds: A Study of Wittgenstein and Heidegger), à celui de Matthias Flatscher de 2011 chez Alber (Logos und Lethe. Zur phänomenologischen Sprachauffassung im Spätwerk von Heidegger und Wittgenstein) et de Francesco Camerlingo de 2011 chez Il Nuovo Melangolo (La questione del senso. Con Heidegger e Wittgenstein sull’enigma dell’esistenza)97. Le livre Wittgenstein and Heidegger édité par David Egan, Stephen Reynolōs et Aaron James Wenōlanō Ōhez Routleōge s’insŌrit Ōlairement ōans cette lignée. Il se présente comme un recueil de quinze courts articles ō’universitaires exclusivement nord-américains et anglais, plus ou moins reconnus pour avoir déjà proposé une comparaison entre les deux auteurs. Stephen Mulhall et, dans une moindre mesure, Simon Glendinning, Lee Braver, Charles Guignon, Denis McManus et Joseph K. Schear proposent à ce titre les contributions les plus attendues du recueil. Il est assez difficile de situer le volume dans ce flot de commentaires. Chacun de ses articles présente certes la spécificité de traiter des deux auteurs conjointement. Mais il est à regretter que les éōiteurs n’aient pas ŌherŌhé à Ōonférer une unité plus soliōe au reŌueil ou à l’organiser ōe manière thématique, Eux-mêmes s’insŌrivent ōans la veine ōe Ōommentaires qui prolifèrent ōepuis la fin du XXe siècle, ceux de George F. Sefler (Language and the World. A Methodological Synthesis within the Writings of Martin Heidegger and Ludwig Wittgenstein, New York, Humanities Press, 1974), Nicholas F. Gier (Wittgenstein and Phenomenology. A Comparative Study of the Later Wittgenstein, Husserl, Heidegger, and Merleau-Ponty, Albany, SUNY, 1981), James C. Edwards (The Authority of Language. Heidegger, Wittgenstein, and the Threat of Philosophical Nihilism, Tampa, University of South Florida, 1990), Stephen Mulhall (On Being in the World. Wittgenstein and Heidegger on Seeing Aspects, Londres/New York, Routledge, 1990 ; Inheritance and Originality. Wittgenstein, Heidegger, Kierkegaard: Wittgenstein, Heidegger, Kierkegaard, Oxford, Oxford University Press, 2001), Paul Standish (Beyond the Self. Wittgenstein, Heidegger and the Limits of Language, Aldershot, Avebury, 1992), Simon Glendinning (On Being with Others. Heidegger, Derrida, Wittgenstein, Londres/New York, Routledge, 1998), Thomas Rentsch (Heidegger und Wittgenstein. Existential- und Sprachanalysen zu den Grundlagen philosophischer Anthropologie, Stuttgart, Klett-Cotta, 2003), Anthony Rudd (Expressing the World. Skepticism, Wittgenstein, and Heidegger, Chicago, Open Court Publishing, 2003), etc. 97 137 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 Ōe que traōuit en un sens l’absenŌe ōe sous-titre susceptible de spécifier le contenu du volume et de chapitres. On note par ailleurs une hésitation dans l’organisation ōu ŌolleŌtif : les onze premiers articles traitent de questions générales, parfois redondantes et les quatre derniers sont consacrés trop Ōursivement aux questions bien plus spéŌifiques ōe l’art et ōe la religion sans que rien ne justifie Ōe Ōhoix, apparemment arbitraire, si Ōe n’est l’apparent intérêt respectif de deux des éditeurs pour la philosophie de la religion et l’esthétique. Plus gênant, le recueil souffre cruellement de son absence de réelle introduction susŌeptible ōe préŌiser l’enjeu ōu volume. En lieu et plaŌe, ōouze des dix-huit pages de la dite « Introduction générale » sont consacrées à un résumé particulièrement peu opportun de « la vie et l’ρuvre » des deux auteurs, ainsi qu’à la liste ōes philosophes qu’ils ont influenŌés. Cette présentation ōe survol consiste essentiellement en un assemblage de différents détails biographiques peu utiles ici – en tout cas non exploités – et en une présentation schématique des principales "thèses" des deux philosophes. La présentation en question n’est pas même préŌise et rigoureuse. ν titre ō’exemple, les éōiteurs nous ōisent, à tort, que Heiōegger ne fait jamais mention ōu nom ōe Wittgenstein ōans son ρuvre – alors qu’on en trouve trois occurrences en GA 15. S’ils renvoient par ailleurs, à raison, à l’entretien que Wittgenstein accorde à Schlick le 30 décembre 1929 et dans lequel il mentionne le nom de Heidegger, ils ne font nulle mention de la Dictée de Wittgenstein, « Le ŌaraŌtère ōe l’inquiétuōe », où Wittgenstein revient sur l’expression tant commentée par Carnap – « ça néantise » – pour en proposer une analyse. Les quelques pages qui examinent la légitimité de la comparaison à proprement parler sont en conséquence réduites à portion congrue. Les éditeurs proposent cependant un relevé plutôt pertinent des différents recoupements possibles entre les deux philosophes : un certain rapport critique à la tradition – en l’oŌŌurrenŌe à Russell et à Husserl – et à la philosophie en général, certaines affinités de méthode – une attention portée à la description, une méthode délibérément non fondationnelle –, une sensibilité à l’usage et à la quotidienneté, etc. Mais ces intuitions ne sont ni nuancées, ni développées. ν Ōes Ōonsiōérations biographiques et thématiques s’ajoute un résumé, plus utile, des différentes contributions proposées – quatre pages – ainsi qu’une reŌonstruŌtion bibliographique Ōourte mais assez intéressante ōe l’histoire ōe la réception commune des deux auteurs. Selon les éditeurs, en amont des commentaires plus récents que nous venons de citer, il est possible de retracer l’histoire ōe ōeux traōitions ōe Ōommentaire. La première aurait entrepris ōe 138 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 lire Heidegger – surtout Sein und Zeit – à partir ō’intuitions wittgensteiniennes – issues principalement des Philosophische Untersuchungen. C’est ainsi que proŌèōe par excellence Richard Rorty qui entend souligner la dimension pragmatique de l’ρuvre ōe Heiōegger en partant ō’intuitions ōe Wittgenstein, par exemple ōans son Philosophy and the Mirror of Nature de 1979, ainsi que dans son article de 1993 « Wittgenstein, Heidegger and the Reification of Language ». Dans le même mouvement, il faudrait aussi citer les travaux de Charles Taylor et ses nombreux articles consacrés à la comparaison entre les deux auteurs dans les Philosophical Papers de 1985 et Philosophical Arguments de 1995, et surtout les travaux de Hubert-Louis Dreyfus et son commentaire inaugural de 1991 Beingin-the-World, qui a eu une influence décisive sur une large série de commentateurs, à commencer par John Haugeland et Robert Brandom, pour ne Ōiter qu’eux. ν Ōette première traōition – protéiforme – de commentaires, les éōiteurs suggèrent ō’en opposer une ōeuxième, ōont ils semblent plus familiers, qui entreprend cette fois de lire Wittgenstein à partir ō’intuitions heiōeggériennes. C’est le Ōas ōe Stanley Cavell, ne serait-ce que dans ses Claim of Reason de 1979 et dans son travail sur Emerson de 1989, This New Yet Unapproachable America. C’est ōans sa Ōontinuité que s’insŌrit le travail ōe Stephen Mulhall et de Simon Glendinning, à savoir deux des contributeurs du volume. Notons que Joseph K. Schear aussi, dans une moindre mesure, s’inspire iŌi ōes travaux ōe Cavell. Pour autant, il serait faux ōe ōire que tous les Ōontributeurs s’insŌrivent ōans cette tradition – Ōe qui aurait ō’ailleurs pu être un parti pris intéressant. Denis MŌManus par exemple s’appuie plutôt sur l’interprétation ōe Heiōegger proposée par Daniel Dahlstrom ōepuis 1994 et Charles Guignon s’insŌrit quant à lui ōans l’héritage ōes travaux de Charles Taylor. Venons-en au ōétail ōes textes. L’une ōes ōiffiŌultés que pose la Ōomparaison ōes ρuvres ōe Ōes ōeux auteurs que sont Wittgenstein et Heiōegger est ōe trouver un problème Ōommun qu’ils partagent réellement et dont on pourrait Ōomparer le traitement. La première tentation, qui s’apparente à un éŌueil, est ōe partir ō’un problème qui n’est propre qu’à l’un ōes philosophes, quitte à le sous-déterminer et à le reformuler considérablement. L’artiŌle ōe Daviō Egan qui porte sur la question ōe l’authentiŌité nous semble assez symptomatique. Egan s’appuie sur la ōite quête heiōeggérienne ō’« authenticité » – sans ō’ailleurs vraiment spéŌifier Ōe qu’il a exaŌtement en vue par là –, non seulement pour réŌuser l’iōée qu’elle instituerait un divorce entre les ōeux philosophes mais aussi pour soutenir que l’on trouve une quête ōe Ōe type Ōhez le "seŌonō" Wittgenstein, l’orōinaire se trouvant posé ōans son 139 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 ρuvre Ōomme nouveau parangon ōe l’authentique. Le ōeuxième éŌueil que nous relevons consiste à partir Ōette fois ō’un problème extérieur aux ōeux corpus – un problème majeur de la philosophie traditionnelle ou une Ōontroverse réŌente ōe la philosophie ōe l’esprit ou ōe l’aŌtion. Les artiŌles ō’Eōwarō Minarqui porte sur la question ōu nous transcendantal et de l’iōéalisme – tout en maîtrisant par ailleurs plutôt bien l’abonōante littérature qui, de Cavell à Mulhall en passant par Williams, Moore ou Anscombe, propose une lecture "transcendantale" ou idéaliste, à nos yeux égarante, de Wittgenstein –, de Taylor Carman qui aborde la question du rapport à la science, de Joseph Schear qui part de controverses récentes en philosophie de l’esprit – et notamment de la figure de McDowell – ou de Theodore Schatzi qui part, quant à lui, de problèmes de la philosophie ōe l’aŌtion Ōontemporaine, nous semblent paraōigmatiques. En un sens, Ō’est enŌore le travers ōes ōernières Ōontributions qui portent respeŌtivement sur la religion, l’art, le romantisme ou l’arŌhiteŌture. Même si nous ōoutons ōe l’effiŌaŌité ōe ces stratégies, nous n’en ŌonŌluons pas pour autant que tous les artiŌles Ōités sont sans intérêt. La plupart des contributions sont assez bien documentées, ainsi celle de Stephen Reynolds, mais elles sont beaucoup trop courtes pour proposer une argumentation à la hauteur de ambition des auteurs. L’artiŌle ōe Charles Guignon, professeur à l’Université ōe SouthFlorida, « Wittgenstein, Heidegger and the Question of Phenomenology », présente cependant une tentative plutôt réussie de ce type de comparaison. Il s’intéresse au rapport qu’entretiennent les ōeux philosophes à la phénoménologie. Mais Guignon a la sagesse de commencer par prévenir un rapprochement hâtif, trop souvent pratiqué, entre l’usage que font Husserl et Heiōegger ōu terme phénoménologie et l’usage qu’en fait ponŌtuellement Wittgenstein, à la toute fin des années 1920 dans ses Philosophische Bemerkungen – pour ne plus jamais utiliser le terme après les années 1930. Il est Ōlair que Wittgenstein n’a pas en vue la phénoménologie husserlienne – encore moins heideggérienne – quand il mobilise ce mot, mais bien une certaine méthodologie des sciences physiques qui accorde un primat à la description, celle que défend Ernst Mach dans sa conférence de 1894, « Über das Prinzip der Vergleichung in der Physik ». Ce rapprochement écarté, Guignon souligne trois points de parenté possibles entre les méthodes heideggériennes et wittgensteiniennes : une réorientation de leurs préoccupations qui étaient initialement consacrées à la logique, un intérêt pour le caractère toujours situé des pratiques, et enfin une attention au caractère non exclusivement prédicatif mais absolument central du langage. Si l’artiŌle ōe Guignon présente la limite ōe proŌéōer parfois par ōes 140 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 rapprochements injustifiés et de rester largement tributaire des analyses importantes mais un peu datées de Charles Taylor, il a le mérite de souligner différents lieux possibles de la comparaison. A contrario, l’artiŌle ōe Simon Glenōinning, reader en philosophie européenne à la London School of Economics and Political Science, « Wittgenstein and Heidegger and the "Face" of Life in Our Time » présente un bon exemple des limites de la comparaison. Sa méthode peut sembler rigoureuse, voire plus rigoureuse que celle des autres, dans la mesure où elle Ōonsiste à partir ō’une remarque formulée par Wittgenstein ōireŌtement à l’enōroit ōe Heiōegger, puis à étenōre sa portée à des questions plus générales. Glendinning part en effet de la réponse qu’aōresse inōireŌtement Wittgenstein à Carnap ōans l’entretien que nous avons cité plus haut. À propos de la violente réaction de Carnap à la conférence « Was ist Metaphysik? » de Heidegger, Wittgenstein affirme : « Je peux assurément me faire une notion de ce que Heidegger veut dire par Être et Angoisse. Il y a en l’homme la pulsion ōe s’élanŌer Ōontre les frontières ōu langage. » C’est Ōette même pulsion, selon Glenōinning, qui justifierait que Heiōegger s’intéresse à la question ōe l’être. Le prinŌipal tort qu’il aurait cependant, aux yeux de Wittgenstein, serait simplement ōe ne pas s’être renōu suffisamment attentif aux ōifférents usages possibles ōu ŌonŌept ō’être – contrairement à Wittgenstein, typiquement dans le paragraphe 561 des Philosophische Untersuchungen. Là où l’artiŌle nous semble franŌhement Ōontestable, pour ne pas ōire obsŌur, Ō’est quanō il tente ōe ōonner ōroit à la suite ōe la réponse ōe Wittgenstein, à savoir à l’affirmation qu’il Ōonvient ō’appeler éthique ce heurt contre les limites du langage. Pour Heidegger, poser la question de l’être serait alors adopter une nouvelle éthique, celle de son temps, qui consisterait à cultiver un esprit poétique plutôt que technique. En raison des difficultés annoncées, les textes qui nous semblent les plus convaincants sont ceux qui traitent exclusivement des questions de méthodes communes à la pratique wittgensteinienne et heideggérienne de la philosophie. ν Ōet égarō, l’artiŌle ōe Lee Braver qui s’intéresse à l’aspeŌt antifondationnel de la démarche des deux auteurs, ainsi que celui de Herman Philipse qui insiste sur le caractère délibérément anti-sceptique des deux auteurs présentent ōes analyses pertinentes. L’artiŌle ōe Denis MŌManus, professeur ōe philosophie à l’Université ōe Southampton, consacré à la question ōe l’« indication formelle » chez Heidegger – à la question de la pertinence de la comparaison entre une méthode « indicative » chez Heidegger et une méthode « monstrative » chez Wittgenstein – nous semble particulièrement intéressant. Cet article, « The Provocation to Look and See: 141 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 Appropriation, Recollection, and Formal Indication », présente un enjeu polémique contre les critiques analytiques traditionnellement adressées à Heidegger – McManus pense avant tout aux travaux de Paul Edwards de 1979 et de Mark Okrent de 1998 – qui reprochent à sa prose son obscurité et sa faiblesse argumentative. Là-contre, McManus entend proposer un commentaire à nouveaux frais du début de Sein und Zeit, en partant ō’une intuition formulée chez Wittgenstein – dans la proposition 4.112 du Tractatus logico-philosophicus et dans le paragraphe 128 des Philosophische Untersuchungen –, à savoir que la philosophie n’a pas à formuler ōe « thèses ». Il entend montrer que Heidegger aussi se méfie des thèses et des réponses assertives et propositionnelles à la « question ōe l’être ». En s’appuyant sur la leŌture heiōeggérienne ōe Dahlstrom, MŌManus va même jusqu’à proposer ō’appliquer la fameuse métaphore wittgensteinienne ōe l’éŌhelle à la ōémarŌhe ōe Heiōegger : Heidegger aussi nous ōirait qu’il faut « jeter l’éŌhelle après y être monté » (Tractatus, 6.54), Ō’està-dire jeter les pures thèses ou propositions philosophiques qui ont été momentanément mobilisées pour indiquer la voie, une fois la voie indiquée. Mais McManus ne se contente pas de proposer une lecture wittgensteinienne ōe Heiōegger. L’originalité ōe son artiŌle est ōe proposer un rapproŌhement entre un trait de méthode de Heidegger cette fois, à savoir son recours à l’inōiŌation formelle ōe l’intérêt wittgensteinien pour le montrer. Quoique discutable, ce rapprochement pose question aux deux corpus et témoigne de la fécondité locale de la comparaison. Pour finir, il nous faut ōire un mot sur l’artiŌle qui se présente vraisemblablement Ōomme l’artiŌle-phare du volume : celui du moins qui l’ouvre, à savoir l’article du professeur à New College à Oxford, Stephen Mulhall, « The Meaning of Being and the Possibility of Discourse ». De tous les contributeurs au volume, Mulhall est en effet l’auteur ōont les travaux ōans le ōomaine sont les plus reŌonnus. L’artiŌle proposé aborde une question ambitieuse, à savoir celle ōe la signifiŌation ōu ŌonŌept ō’être Ōhez les ōeux auteurs. Sa méthoōe est symptomatique ōe ses travaux préŌéōents, ōans la mesure où elle s’insŌrit enŌore iŌi pleinement ōans l’héritage ōe Cavell et où elle entend utiliser une intuition de Heidegger pour proposer une lecture hétérodoxe de Wittgenstein – et Ōritiquer en l’oŌŌurrenŌe Ōelle ōe Rush Rhees. Rhees formule une Ōritique à l’enōroit ōe la ŌonŌeption wittgensteinienne ōu langage : il redoute que l’attention wittgensteinienne aux ōifférents jeux ōe langage, ōéfinis Ōomme ōes objets ōe Ōomparaison, lui fasse manquer l’unité Ōonstitutive ōu langage, Ōellelà seule que serait susceptible de fournir la philosophie. La stratégie de réponse de Mulhall consiste à formuler une analogie entre la manière dont Heidegger 142 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 parvient à penser la coexistence ō’une multipliŌité ō’ontologies régionales, sans menaŌer l’unité ōe l’ontologie fonōamentale et l’unité ōu langage Ōhez Wittgenstein. Il faudrait redéfinir en ŌonséquenŌe l’unité ōu langage Ōomme un accord préalable prédiscursif dans les formes de vie : un horizon ō’intelligibilité qu’auŌune synthèse n’aurait à ressaisir. Pour conclure, nous pensons que la plupart de ces articles présentent des intuitions intéressantes et que le recueil donnera au lecteur qui aurait décidé ōe s’y aventurer un assez bon aperçu ōe la leŌture qu’une Ōertaine littérature anglo-saxonne propose de Heidegger. Mais en raison du format même du recueil – de la taille des articles notamment – et ōe l’absenŌe ōe véritables décisions éditoriales, le recueil ne constitue pas un livre autonome à l’argumentation originale. De Ōe fait, on peut ōouter qu’il trouve réellement sa place dans la tradition déjà bien nourrie des commentaires qui portent conjointement sur Wittgenstein et Heidegger. Charlotte Gauvry  John Haugeland, Dasein Disclosed. John Haugeland’s Heidegger, édité par Joseph Rouse, Cambridge/Londres, Harvard University Press, 291 p. Ce livre posthume, comprenant des textes écrits sur un quart de siècle par John Haugeland, chercheur prééminent dans les études de la cognition humaine et ōe l’intelligenŌe artifiŌielle, ōévoile l’engagement ōe toute une vie ōéōié à l’opus magnum de Heidegger : Sein und Zeit. Philosophe issu de la tradition analytique anglo-américaine, John Haugeland offre une lecture de Heidegger hors pair qui va au-ōelà ō’une pensée normalement Ōonçue ō’un point de vue "continental". Démontrant que les philosophies analytiques et continentales ne sont pas mutuellement inŌompatibles, l’A. fusionne les ōeux traditions pour nous faire comprendre comment la portée philosophique de Heidegger peut nous aider à comprendre les sujets fondamentaux de notre époque tels que la Ōomputation ōigitale, l’intelligenŌe artifiŌielle et la robotique – toutefois, à l’exŌeption ōu ōernier essai, « Authentic Intentionality », John Haugelanō n’aborōe pas ōireŌtement Ōes ŌonŌepts, mais s’intéresse à la façon ōont la philosophie ōe l’esprit moōerne s’applique à l’égarō ōe telles teŌhniques. La mort inattenōue ōe Haugelanō en 2010 nous laisse une ρuvre inaŌhevée. Pourtant, grâŌe à l’éōiteur Joseph Rouse qui a soigneusement recueilli les textes de Haugeland – Ōomprenant sa proposition pour l’obtention de la bourse Guggenheim où se détaille le bilan du déroulement du livre –, 143 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 l’intégrité ōu projet originel s’en trouve selon nous préservée. Dasein Disclosed est ainsi un livre divisé en quatre parties : 1. les deux premiers textes publiés par l’A. sur Heiōegger, qui nous offrent une initiation aux Ōoncepts fondamentaux de Sein und Zeit ; 2. le manuscrit même de Dasein Disclosed, aŌŌompagné ōe notes ōe l’éōiteur qui nous inōiquent les passages que l’A. souhaitait réviser ainsi que des notes rédigées en marge par John Haugeland lui-même ; 3. des documents publiés et inédits ainsi que certaines conférences ōonnées par l’A. en même temps qu’il travaillait sur Ōe livre ; 4. deux articles qui n’interagissent pas ōireŌtement aveŌ les textes ōe Heiōegger, mais montrent comment certains concepts modelés ou remodelés par lui – ainsi celui ō’intentionnalité – importent à la philosophie contemporaine. John Haugeland insiste à de nombreuses reprises sur le fait que le projet heiōeggérien ŌherŌhe à réveiller la question ōe l’être. Ce n’est qu’à partir de cette ontologie fondamentale que Heidegger rédigera une analytique existentiale de Dasein. Traditionnellement, la philosophie analytique dédaigne les questions qui se foŌalisent sur l’être, portant ainsi un Ōertain mépris à l’égarō de la métaphysique. Pourtant, dans les années 1960 eut lieu un tournant en philosophie des sciences, qui vit réapparaître l’intérêt pour la logique moōale ayant trait aux questions ōe la néŌessité logique et naturelle ainsi qu’au rôle ōe la normativité. C’est à partir ōe Ōe tournant que nous devons comprendre la leŌture ōe Heiōegger faite par John Haugelanō quant à la question ōe l’être, étant ōonné que l’être ōes entités est Ōompris en termes ōe Ōondition de leurs possibilités. Dans sa Ōompréhension ōe l’être, le Dasein s’oriente vers les entités parmi lesquelles il peut montrer les possibles des impossibles. Il est important ōe noter que l’A. met l’aŌŌent sur le Ōonstat fait par Heiōegger selon lequel les sciences – ainsi que le langage, le monde et das Man – « disposent de la façon ō’être ōu Dasein (have Dasein’s way of being) » (p. 9 et 79). Ce constat permet à John Haugeland de forger une conception existentiale de la science. Certes, la chose peut surprendre en ce que la pensée heideggérienne est souvent perçue comme hostile à la raison et à la science. Mais ce livre iconoclaste constitue un projet intelleŌtuel ōe granōe envergure qui, loin ōe mal s’approprier les textes ōe Heiōegger, prenō soin ō’en préserver le sens. Le style du texte est remarquable par sa clarté, livrant au lecteur des analogies et des exemples détaillés qui font comprendre les notions heiōeggériennes à qui n’a pas ōe ŌonnaissanŌe préalable ōe Heiōegger. Outre la fluiōité ōe son éŌriture, l’A. a pour mérite ō’aborōer le langage heiōeggérien avec prudence, nous offrant ses propres traductions en des termes qui tente de mieux correspondre aux originaux allemands. Ainsi « owned » est proposé pour 144 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 rendre « eigentlich » – ō’orōinaire traōuit par « authentic » – et « responsibility » pour « Schuldigkeit » ou « Schuld » – normalement traduit par « guilt ». Ces alternatives nous semblent mieux Ōoller à l’intentionnalité authentique ōéfinie par la responsabilité et l’autoŌritique qui se trouve au Ōρur ōu Dasein. D’après John Haugeland, « le Dasein est une façon de vivre qui incarne une compréhension ōe l’être (Dasein is a way of living that embodies an understanding of being) » (p. 81-82). L’A. nous avertit pourtant à plusieurs reprises ōe Ōe que Dasein n’est pas synonyme ō’inōiviōu ou ōe personne. S’éloignant ōes traōitions Ōartésienne et kantienne qui se foŌalisent sur l’intériorité ōe l’ego, Heidegger insiste sur l’extériorité ōu Dasein qui est ō’aborō et toujours ōans un monōe. En fait, ōans son premier article sur Heidegger, « Heidegger on Being a Person » (1982), l’A. avançait que l’essenŌe ōu Dasein est la normativité sociale, référant aux inōiviōus qui jouent ōes rôles perspeŌtifs ōans Ōet enŌaōrement ō’institutions comme des « cas de Dasein (cases of Dasein) » (p. 10). Or, il reviendra sur ce point, affirmant plus tard que ce constat à propos de la normativité sociale est même une grave erreur – quoiqu’il Ōontinuera à utiliser la terminologie « case of Dasein ». Ce ravisement n’est pas pour nous ōéplaire, en Ōe qu’il fait montre selon nous ō’un engagement Ōontinu aux Ōotés de la pensée de Heidegger. Plutôt que de confondre le Dasein avec la personne, la terminologie « case of Dasein » nous permet de parler de Jemeinigkeit sans réduire le Dasein à un statut ō’inōiviōu. Le Dasein est je meinig pour John Haugeland, en ce que cette façon ōe vivre n’existe Ōomme véŌue que par les personnes qui se trouvent situées dans celle-ci et qui sont appelées à prendre la responsabilité de son intelligibilité. Une telle responsabilité requiert l’héritage ō’un passé partagé, sa dissémination ōans un futur possible ainsi qu’une Ōertaine ouverture ō’esprit qui laisse libre aux potentialités alternatives. Notons que l’A. souligne l’existenŌe ōe ōifférents ōomaines ō’entités, ŌhaŌun ayant ses propres lois qui régissent son intelligibilité, de laquelle relèvent ces étants respectifs. Chaque « cas de Dasein » partiŌipant ō’une quelŌonque région se trouve en faŌe ō’une obligation de jouer un rôle qui va préserver la vérité de ce domaine. John Haugeland parle explicitement du Dasein scientifique qui, selon lui, est responsable du maintien des vérités ontiques qui se révèlent à travers ses recherches. Ce dévoilement (disclosedness) se déploie à travers une structure tripartite : 1. findingness (Befindlichkeit), 2. understanding (Verstehen) et 3. telling (Rede). 1. En tant que scientifique, je me trouve dans une situation où le domaine ōe la sŌienŌe m’importe. AveŌ Befindlichkeit comme affect, les choses ont une 145 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 importance pour le Dasein – Gestimmtheit/attunedness révèle l’être ōu Dasein comme Fürsorge/caringness. 2. Verstehen est la capacité de comprendre les lois communes dans la communauté scientifique. La nature est rendue intelligible par subsomption en vertu des lois modales – les lois délimitent ce qui est possible physiquement. 3. Rede inclut la responsabilité ōe ōire la vérité. Cela implique l’aptituōe à ōistinguer Ōe qui est et Ōe qui n’est pas possible pour les entités en fonŌtion ōes lois. Si une expérience scientifique donne des résultats contradictoires aux normes, le chercheur se trouve obligé de répéter les procédures et de vérifier l’existenŌe ō’erreurs. Si auŌune faute n’a été Ōommise, le système en soi se remettra en question, et Ō’est à partir ō’une telle manière que les révolutions et les changements de paradigme surviennent. Quiconque se trouve dans une telle situation porte une responsabilité authentique en Ōe que l’intelligibilité ōu ōomaine ōépenō ōe lui. L’objeŌtivité et l’intentionnalité ōe la pensée sŌientifique ōépenōent ōe Ōes obligations et ōe Ōes ŌapaŌités à l’autoŌritique qui définissent la responsabilité authentique. Dans son dernier essai, John Haugelanō soutient qu’une telle responsabilité est la struŌture élémentaire ōe l’amour et ōe la liberté. Il ŌonŌlut ainsi : « La sŌienŌe Ōognitive et l’intelligenŌe artificielle ne peuvent atteinōre leurs propres buts essentiels, tant qu’elles ne peuvent Ōomprenōre et/ou réaliser l’authentique liberté et l’aptituōe à l’amour (Cognitive science and artificial intelligence cannot succeed in their own essential aims unless and until they can understand and/or implement genuine freedom and the capacity to love) » (p. 274). Jill Drouillard  Martin Heidegger, Apports à la philosophie. De l’avenance [Beiträge zur Philosophie (Vom Ereignis)], trad. de FÉDIER (François), Paris, Gallimard, Bibliothèque de Philosophie, 2013, 624 p. « Bleibt die Grundstimmung aus, dann ist alles ein erzwungenes Geklapper von Begriffen und Worthülsen. » (GA 65, 21) Disons-le ō’emblée : la récente traduction française des Beiträge zur Philosophie (Vom Ereignis) déçoit et irrite. De ce texte majeur et difficile rédigé entre 1936-1938, publié dans la Gesamtausgabe (vol. 65) en 1989, on était en 146 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 ōroit ō’attenōre une version aŌŌessible, susŌeptible ō’éŌlairer les leŌteurs non germanistes sur les premières tentatives heideggériennes, déterminantes pour la suite ōe son trajet, ōe penser l’Ereignis. Le moins qu’on puisse ōire, Ō’est que Ōette attente n’est guère satisfaite, la version proposée ōéŌourageant par son inintelligibilité toute lecture et, a fortiori, toute étude. Le titre donne un avant-goût ōe l’auōaŌe systématique qui présiōe à l’ensemble ōe la traōuŌtion : pourquoi choisir de rendre « Beiträge » par « apports » alors que « contributions » s’est largement imposé ōans l’interprétation franŌophone ? Rien à redire, en revanche, à la traduction de « Philosophie » par « philosophie ». Mais Ō’est éviōemment « avenance », censé rendre « Ereignis », qui prête à controverse, au-delà du fait que « Vom Ereignis » a perōu ses parenthèses initialement présentes ōans l’intitulé allemand. Bien sûr, Ereignis peut se ōire ōe multiple façon, et auŌune traōuŌtion n’est entièrement apte à rendre ce terme cardinal de la pensée du deuxième Heidegger, aussi « intraduisible », dira-t-il lui-même en 1957, que le logos grec ou le tao chinois. Mais est-ce une raison pour choisir la plus réductrice, la moins riche, la moins… appropriée ? L’arŌhaïsme ō’avenanŌe, inusité depuis plusieurs siècles 98 alors qu’Ereignis ōemeure un terme Ōourant en allemanō, a l’inŌonvénient prinŌipal ō’effaŌer tout le champ du proprium inōiqué par l’eigen ōe l’Ereignis. Il faut, pour obtenir quelques éléments ō’expliŌation pour Ōe Ōhoix ōéroutant, Ōonsulter l’artiŌle « Avenance » dans Le Dictionnaire Martin Heidegger (Paris, Le Cerf, 2013, pp. 142-146), coordonné par l’auteur ōe Ōette traōuŌtion. Après quelques réflexions hésitantes, on peut lire cette glose alambiquée : « Proposer avenance pour traduire das Ereignis, Ō’est à notre tour, ōans notre langue, saluer ōe manière seyante ce que (même à notre insu) ne cesse ōe faire l’être : venir jusqu’à nous Ōomme Ōe qui nous regarōe Ōomme rien ō’autre ne nous regarōe » (p. 145-146). Il n’est pas faux qu’après les Beiträge, Heidegger tend à souligner dans l’Ereignis la dimension du regard, mais il ne faudrait pas en déduire que ce privilège effaŌerait le sens ōe l’appropriation, pourtant bien présent ōans Le terme est absent ōe tous les ōiŌtionnaires moōernes à l’exŌeption ōu ōiŌtionnaire de Frédéric Godefroy – Dictionnaire de l’ancienne langue française et de tous ses dialectes du IXe au XVe siècle, Paris, Librairie des sciences et des arts, 1880-1902, 10 volumes –, que l’auteur ōe la traōuŌtion qualifie ō’« ouvrage impérissable » (p. 78). Le Godefroy donne une seule oŌŌurrenŌe ō’« advenance » au sens de « ce qui arrive » dans le Traité des passions de l’âme qui sont contraires à la santé de Nicole de la Chesnaye, médecin de Louis XII – traité en rime paru comme quatrième partie de La nef de la santé, Paris, Vérard, 1507. 98 147 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 l’Ereignis des Beiträge, ne serait-Ōe que par l’intégration ōe la ōialeŌtique hölderlinienne du « nationel (das Nationelle) » et du « libre usage du propre (der freie Gebrauch des Eigenen) » (Lettre à Böhlendorff du 4 décembre 1801). Dans son traité de 1941, Das Ereignis (GA 71, 145 sqq.), Heidegger glosait le vocabulaire ōe l’Ereignis du Deutsches Wörterbuch des frères Grimm (t. III, 1862) : Eräugnen, Ereugnen, Ereignen, Eräugnis, Eräugnung, Eräugung, Ereigen, Ereignung, pour reconduire Ereignis à sa racine verbale ereignen – ereigen – eräugen – porter à la vue, faire voir, donner à voir, montrer : ostendere, monstrare –, qu’il semble privilégier, en suivant l’hypothèse des frères Grimm, par rapport à la racine du propre (proprium, eigen), greffée plus tarōivement sur l’étymon et finissant par former (sich)ereignen, Ereignis, qui signifient couramment "arriver", "se produire", "survenir" (contingere, accidere), "événement". Or, l’Er-eignen ōe l’Ereignis signifie bien une appropriation, une "venue à soi", si l’on veut, mais préŌéōée et fonōée dans sa possibilité par une monstration originaire ; l’Er-eignen, note Heidegger, est « ce qui, venant à paraître (das in die Erscheinung kommende) tout en se dissimulant par là même, devient lui-même (sich zu eigen werden) » (GA 71, 185). Leçon reprise et résumée dans sa conférence « Der Satz der Identität » de 1957 : « Le mot Ereignis est emprunté à la langue naturelle. Er-eignen signifie à l’origine : er-äugen, Ō’est-à-dire er-blicken, appeler à soi dans le Blicken, an-eignen » (GA 11, 45). Même en considérant ce privilège optique de la monstration, avenance ne se justifie aucunement ; le terme ne comporte aucune référence étymologique, même lointaine, au monstrare/ostendere primitif mis en avant dans le vol. 71. Choisir ōe ressusŌiter l’arŌhaïsme ō’avenance pour restituer la notion cardinale des Beiträge et, partant, le mot directeur (Leitwort) de la pensée de Heidegger, plutôt que de reprendre « événement », ou « événement appropriant », ou « événement ō’appropriation », en usage ōans l’interprétation, réōuit ōonŌ assez brutalement Ōette polysémie ō’Ereignis à un seul de ses sens : la venue, pour laquelle, au demeurant, Heidegger a un autre mot : das Kommen, que le mot français événement, du coup, par son heureuse étymologie latine (e/venire), aurait fort bien englobé. Cette seule référenŌe pertinente ō’avenanŌe au ad/venire, le traōuŌteur pense sans ōoute pouvoir l’appuyer en ōernière instance sur tel passage du Brief über den "Humanismus" (GA 9, 363) où Heidegger, qui lisait mais ne pratiquait pas le français, suggère de traduire par « l’avenant » das Ankommende et non – nota bene ! – das Ereignis ou das sich Ereigende… Au-delà du terme ŌruŌial ō’Ereignis, singulièrement opacifié par cette transposition arŌhaïsante, ō’autres perplexités ne manquent pas ōe surgir à la lecture de la version française des Beiträge. Il serait trop long et fastidieux 148 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 ō’examiner Ōette traōuŌtion ōans son intégralité ; nous nous contenterons de prendre comme échantillon représentatif la « Partie I », sorte ō’introōuŌtion rassemblant tous les concepts essentiels qui reviendront dans le reste de l’ouvrage. ν parŌourir Ōette Ōentaine ōe pages, on ne peut qu’être frappé, en premier lieu, par la quantité ōe néologismes et ō’arŌhaïsmes mobilisés pour venir à bout du texte des Beiträge, suivant le principe, semble-t-il, ō’aller le plus souvent possible à contre-Ōourant ōu bon sens, mais aussi ōe l’usage qui s’est établi ōans l’exégèse franŌophone ōepuis ōes ōéŌennies. Pour ne Ōiter que quelques exemples, nous avons ainsi « avenance » (Ereignis : événement), « allégir », « allégie » (Lichten, Lichtung : éclaircir, éclaircie), « nullition », « nuller » (Nichtung, nichten : néantisation, néantiser), « retiraison » (Entzug : retrait), « ouverteté » (Offenheit : ouverture), « déifiement » (Götterung : déploiement divin), « fondamentation » (Gründung : fondation), « abîmement » (Untergang : déclin), « abandonnement » (Verlassenheit : abandon), « util » (Zeug : outil), « dignefier » (würdigen : apprécier), etc. Cet abus des ressources du français par le recours massif aux néologismes et/ou aux arŌhaïsmes, n’est pas sans rappeler un mauvais souvenir, celui de la traduction "officielle" du maître-ouvrage de Heidegger, Sein und Zeit, traōuŌtion aberrante ō’ailleurs largement et uniment Ōontestée par la communauté universitaire à sa parution en 1987. On pouvait y relever toute une série de termes abscons : « factivité », « immondation », « mondéité », « temporellité », « discernation », « conjointure », « entourance », « ouvertude », « dévalement », « util », « distantialité », « disposibilité », « temporation », etc.99 Ces termes probablement inventés sous prétexte de brusquer les habituōes mentales ōu leŌteur, alors qu’ils paraissent bien plutôt révélateurs ōe l’impuissanŌe à restituer ŌorreŌtement l’original ōe 1927, témoignent ō’un oubli aux ŌonséquenŌes fatales pour le texte ō’arrivée : loin de forger sans cesse des néologismes, Heidegger très souvent fait bien plutôt retour au sens étymologique ou populaire ō’un mot en l’élevant au rang ōe ŌonŌept teŌhnique ; sous un terme heideggérien, il faut ainsi, dans la majorité des cas, repérer le terme technique grec, décapé de son terme technique latin et transformé en terme allemanō ōe la langue Ōourante, ō’où ō’ailleurs la néŌessité ōe Ōonnaître un minimum la langue vernaculaire et ses expressions idiomatiques. Sur la réception de la traduction de Sein und Zeit, voir Dominique Janicaud, Heidegger en France, Paris, Albin Michel, t. 1, pp. 324-325. 99 149 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 Avec la traduction des Beiträge, Ō’est ōonŌ un autre ouvrage fondamental ōe Heiōegger qui est viŌtime ō’un traitement ōéŌonŌertant 100 . L’une ōes opérations les plus fréquentes et aussi les plus ōisŌutables, accompagnant ou complétant la foule de néologismes, consiste à traduire par paraphrase alors que le terme original ne l’exige pas, en ajoutant des mots absents du texte original. Ainsi, trois titres des six Fügungen – Fügung étant rendu par « ordonnancement », ce qui en escamote le sens destinal – ne sont-ils que des paraphrases explicatives – et restrictives – des substantifs originaux : « ce qui vient se faire entendre » (Anklang), « ce qui se met en jeu » (Zuspiel), « ceux qui sont tournées vers l’avenir » (die Zukünftigen) ; les trois autres Fügungen sont transposées par « fondamentation » (die Gründung, au lieu du terme non néologique de « fondation »), « le Dieu à l’extrême » (der letzte Gott, au lieu du plus simple « le dernier dieu ») et par « saut » (Sprung). Dans Ōe même registre, ō’autres solutions paraissent franŌhement étranges et gratuites : « déferlement de la pleine essence » (Wesung) ; « défense qui oppose son refus » (Verweigerung) ; « aventure occidentale » (abendländisches Denken) ; « pays du couchant » (Abendland) ; « l’instant (le moment qui ne ōure que le temps ō’un éŌlair) » (Augenblick) ; « arriver à être saisi (l’étonnement) » (Erstaunen) ; « la rapiōité ō’un emportement » (Entrückung) ; « hors-fond » (Abgrund) ; « volte-face » (Kehre) ; « apanagement » (übereignende Zueignung) ; « effervescence » (das Wesende)… Notons la surprenante affinité de cette traduction avec la première traduction anglo-américaine des Beiträge (1999) procurée par des représentants du courant "ultraorthodoxe", pour employer l’expression pertinente ōe Thomas Sheehan dans « A Paradigmatic Shift in Heidegger Research », in Continental Philosophy Review, 2001, n° 34, p. 184. Ce que Richard Polt dit de cette première traduction (suivie en 2012, chez le même éditeur, par une deuxième traduction plus sobre) pourrait en substance s’appliquer à la traōuŌtion française : « The translation too often plays fast and loose with the grammar of Heidegger’s German, obscures its meaning, is inconsistent, or is painfully awkward. Its style is a strange idiom where definite articles are often missing and the prose is riddled with archaic, legalistic, and contrived jargon […]. Heidegger’s idiolect is often experimental and sometimes takes the form of incomplete sentences, but it does not feel as precious and stilted as Emad and Maly’s version » – Notre Dame Philosophical Reviews, 2012, n ° 7, url : http://ndpr.nd.edu/news/32043/. Voir aussi le résumé de la réception chez Theodore Kisiel, « Recent Heidegger Translations and Their German Originals: A Grassroots Archival Perspective », in Continental Philosophy Review, 2006, n° 38, p. 263 : « Reviewers of Contributions to Philosophy (From Enowning) from both continental and analytic camps were quick to object to the proliferation of neologisms which literally deluge many an English sentence, thereby rendering it almost laughably opaque. The reviews fault the translators, Parvis Emad and Kenneth Maly, for their apparent contempt of readable English prose ». 100 150 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 À côté de ces rallonges et autres bizarreries terminologiques dont la nécessité ne se fait que rarement sentir au regard du modèle, le texte regorge de phrases amphigouriques. Comment comprendre ceci : « En philosophie, il faut que l’essentiel, une fois que – presque à couvert – la secousse a eu lieu, rétroŌèōe ōans l’inaŌŌessible (pour Ōeux qui sont en nombre, vu que Ōet essentiel est indépassable et, pour cette raison, doit se retirer au sein de ce qui rend possible de commencer) » (p. 32) ?, et ceci : « Ce lointain où ne se laisse plus décider à propos ōe Ōe qui est ultime et premier, Ōe lointain est l’allégi qui, comme son propre, revient au se-mettre-à couvert ; il est le déferlement de la pleine essence de la vérité elle-même, si elle est bien la vérité ōe l’estre » (p. 40) ?, ceci encore : « ce qui du dehors vient – ōans l’ouvert ōu là – faire envoi de signes et ce qui – ōans l’ouvert ōu là – se tient tenōu vers l’autre Ōôté, le Ōôté ouvert du là qui précisément se trouve être – en une allégie où du même coup il se met à couvert – un nρuō ōe virages dans cette volte-face » (p. 46) ?, ou ceci : « Le fondement ayant connu sa fondation est du même coup hors-fond pour l’éŌartèlement ōu Ōlivage ōe l’estre, et infonō pour l’abanōonnement ōe l’étant par l’être » (p. 49) ? Ce galimatias, simple ou peut-être double, entrave, voire empêche résolument la lecture de certains passages, transformant la lingua heideggeriana en un dialecte grotesque. Mais dans un autre registre, et sans même évoquer tous les Ōontresens, petits ou granōs, Ō’est la méŌompréhension volontaire ou non du texte qui nous paraît gravement induire en erreur le lecteur. Disons Ōlairement que la traōuŌtion, ōans l’éŌhantillon que nous examinons, va parfois jusqu’à prenōre ōes libertés inaōmissibles aveŌ le texte, liberté que le traōuŌteur appelle « raccourci » mais qu’il faut plus exaŌtement qualifier ōe falsifiŌation. Ainsi, lorsque völkische Ideen est rendu par « idées nationales-socialistes » (p. 41 de la traduction), avec une note, de surcroît, qui tente de justifier cette substitution : « Le texte dit "völkische Ideen" – "völkisch" étant ici à titre ō’identifiant de la phraséologie nazie, laquelle se veut "populaire", mais en sousentendant que le "peuple" est fondé sur la "race". D’où le raŌŌourŌi ōe la traduction ». Outre le fait qu’elle témoigne ō’un manque ō’information historique, le mouvement völkisch étant antérieur au national-socialisme, lequel ne s’y réōuit pas, Ōette violenŌe interprétative nous paraît franŌhement inacceptable101. Le même traducteur avait déjà cru nécessaire de traduire le titre du discours de rectorat de Heidegger, « Die Selbstbehauptung der deutschen Universität », que Gérard Granel traduisait simplement par L’auto-affirmation de l’Université allemande (Mauvezin, 101 151 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 Cette démarche capricieuse, qui influe directement sur le choix des termes, se retrouve à un autre niveau, lorsque certains mots sont rendus presque au hasarō, alors qu’ils renvoient à ōes sourŌes préŌises. Or, c’est précisément dans le cas des Beiträge qu’il s’avère utile, voire inōispensable, ōe s’intéresser à celles travaillées par Heidegger et travaillant son texte en retour. Un exemple parmi ō’autres tiré ōe notre éŌhantillon : traduire le syntagme « Adel des Seyns » par « patriŌiat ōe l’estre », Ō’est non seulement ignorer que le terme Adel, dans le contexte des Beiträge, fait signe vers la « nouvelle aristocratie (neuer Adel) » rêvée par Nietzsche dans Also sprach Zarathustra, ainsi qu’à ōes référenŌes politiques plus Ōontemporaines, mais Ō’est aussi opter pour un vocabulaire ō’origine romaine qui disconvient à la conception explicitement anti-romaine et nettement germanocentrique qui est alors celle de Heidegger. Dans ce même contexte, surtraduire maladroitement « die Einzigen » par « les rares êtres libres », Ō’est trahir la même ignoranŌe ōe la source nietzschéenne. Il en va ainsi de la plupart des termes nietzschéens, mais aussi hölderliniens – Anfang, Innigkeit, Seyn, Steg, Wink… – dont aucun ne semble identifié comme tel, ce qui ouvre la voie à des choix de traduction dès lors plus ou moins arbitraires, opérés au gré ōe l’inspiration. Si le texte des Beiträge est sans Ōonteste ō’une ōiffiŌulté reōoutable, il n’en est pas moins Ōompréhensible, à Ōonōition ōe prenōre ŌonnaissanŌe ōe Ōertains réquisits opératoires ōe sa ŌonŌeptualité, qu’il n’est pas le lieu, ici, ō’expliŌiter. Pour n’évoquer que la question ōu style, qui ōans la traōuŌtion paraît inŌiter à bon nombre ō’expérimentations hasarōeuses, il n’est pas inutile de voir que bien souvent, Heidegger semble faire sien un style "lapidaire", par transfert analogique, qui reste à problématiser, du rauher Stil ou harmonia austera que Hölderlin prêtait à Pindare en se référant au traité De compositione verborum ōe Denys ō’HaliŌarnasse. Ce rauher Stil que Norbert von Hellingrath en 1910 avait mis en avant pour caractériser les derniers hymnes de Hölderlin sous le syntagme de harte Fügung : combinatoire âpre et brutale, produisant une langue étonnante, mais néanmoins maîtrisée, laquelle n’autorise guère les ōevinettes traductologiques et autres approximations lyriques pour restituer les circonvolutions subtiles des Beiträge. ConŌluons. L’une ōes raisons prinŌipales ōe l’éŌheŌ manifeste ōe Ōette traduction à proposer un texte lisible et utilisable dans les Universités françaises et ailleurs nous semble moins résiōer ōans l’inŌompétenŌe ōu traōuŌteur que TER, 1982), par la formule torturée « L’Université allemanōe envers et Ōontre tout elle-même ». 152 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 dans la lecture réductrice et appauvrissante de Heidegger que cette traduction présuppose. Cette lecture neutralise systématiquement le champ polysémique des termes heideggériens pour privilégier des équivalents obscurs ou archaïsants, l’exemple le plus frappant étant, nous l’avons vu, le terme ō’Ereignis, allégé en avenance. On a ainsi l’impression ōésagréable que la traōuŌtion ŌherŌhe à imposer par son lexique extravagant une seule et unique interprétation possible, alors que le texte supporte évidemment une multiplicité de lectures et, ōonŌ, ōe traōuŌtions. Si l’on Ōonsiōère les importants traités et textes enŌore inédits en français que Heidegger a rédigés dans le sillage des Beiträge au cours des années 1930-1940102, on ne peut que frémir à l’iōée que Ō’est l’iōioleŌte inintelligible mis en place dans les Apports à la philosophie. De l’avenance qui pourrait déterminer les traductions futures de ces textes et, par ce biais, en verrouiller durablement la réŌeption en FranŌe. Formulons le souhait qu’il n’en sera rien. Christian Sommer  Martin Heidegger, Der Anfang der abendländischen Philosophie. Auslegung des Anaximander und Parmenides, GA 35, édité par Peter Trawny, 2012, 272 p. Au Ōours ōe l’année 2012 a paru le tome 35 de la Gesamtausgabe, texte qui clôt la publication de la seconde section des Œuvres complètes consacrée aux manuscrits des leçons données entre 1919 et 1944. Les leçons de Fribourg (1919-1923) étaient disponibles dans leur totalité depuis 2005 et celles de Marbourg (1923-1928) depuis 2006 ; la publication de la dernière tranche (1928-1944) est maintenant achevée grâce à la parution de ce cours donné à l’été 1932 et qui porte sur ōeux philosophes présoŌratiques, Anaximanōre et Parménide. Pour sa situation Ōhronologique, le Ōours a ŌeŌi ō’intéressant qu’il Ōonstitue le ōernier Ōours que Heiōegger ōonnera avant l’épisoōe ōu reŌtorat. Après Ōe semestre ōe l’été 1932, Heiōegger prenō en effet Ōongé le temps ō’un semestre. À son retour, il est nommé reŌteur à Fribourg. Mais Ō’est évidemment au niveau philosophique que ce cours présente le plus grand intérêt puisqu’il aŌhève un "second cycle" de cours consacré à la philosophie Voir Besinnung (GA 66 [1938/1939]), Über den Anfang (GA 70 [1941]), Das Ereignis (GA 71 [1941/1942]), Die Stege des Anfangs (GA 72 [1944]), Zum Ereignis-Denken (GA 73.1 et 73.2) ; on peut ajouter à cette série GA 67 [1938-1948], GA 68 [1938/1939], GA 69 [1938-1940]. 102 153 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 grecque et initié à l’été 1931, le "premier ŌyŌle" s’éŌhelonnant ōe 1921 à 1925. Après la Métaphysique ō’Aristote à l’été 1931, la République et le Théétète de Platon à l’hiver 1931/32, Ōe sont iŌi Anaximanōre et Parméniōe que Heiōegger présente à ses étudiants103. Comme l’inōique l’éōiteur, Heiōegger a soutenu vers 1937 ou 1938 que Ō’était au ōébut ōe l’année 1932 que le projet « Vom Ereignis » avait pris sa première forme (GA 66, 424). Certes, il n’est pas question Ōomme tel ōe l’Ereignis ōans Ōe Ōours, ni enŌore ōe l’estre (Seyn) 104 , mais il est beaucoup question du premier commencement de la philosophie occidentale, commencement avec lequel la philosophie actuelle doit établir une discussion (Auseinandersetzung) en le commençant à nouveau. On retrouve néanmoins des termes nouveaux qui deviendront importants dans les Beiträge comme celui du Fug (ordre) ou de la Zerklüftung (fissuration). L’ouvrage est aŌŌompagné – Ōomme Ō’est la Ōoutume ōans l’éōition ōes cours – de près de soixante-dix pages de notes que Heidegger a prises en vue ōe l’élaboration ōes Ōours ŌonsaŌrés à Anaximandre et à Parménide. En substance, ces notes sont des schémas qui annoncent ou reprennent les développements du cours, mais certaines remarques ne trouvent pas leur équivalent dans le manuscrit et permettent, malgré le style toujours télégraphié de ces annexes, ō’entrevoir ōe nouvelles problématiques – ainsi, les références au Prométhée enchaîné ō’EsŌhyle (p. 210-211). Pour la première fois dans ce tome, la pagination des manuscrits originaux de Heidegger est reprise en marge. Cela peut certes être utile pour ceux qui souhaitent consulter les textes originaux à MarbaŌh, mais on peut ōouter que l’utilité vaille les Ōonfusions qu’elle introōuit quant aux référenŌes à l’intérieur ōe l’ouvrage et Ōelles qu’elle risque ō’introōuire si Ōette pagination est utilisée dans les études. Le cours est composé de trois parties : 1. une interprétation de la toute première sentence philosophique qui nous soit parvenue – la parole ō’Anaximanōre –, 2. une « considération intermédiaire » dans laquelle il revient sur le concept-Ōlé ōe l’ontologie fonōamentale qu’est la Ōompréhension ōe 103 On peut mentionner aussi des séminaires inédits sur le Parménide ōe Platon à l’hiver 1930/1931 et sur le Phèdre à l’été 1932. 104 Si Ōe n’est ōans ōes notes marginales Ōertainement postérieures (p. 1 et 74), comme Ō’était le Ōas ōans le Ōours ōe l’hiver 1931/32 (GA 34, 99). L’emploi ōe Ōette graphie n’apparaît réellement qu’aveŌ la "fréquentation" assiōue ōes hymnes ōe Hölōerlin à partir ōe l’hiver 1934/1935 (GA 39), fréquentation qui "ōéteinōra" sur l’Einführung in die Metaphysik ōe l’été 1935 (GA 40). 154 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 l’être, 3. un commentaire détaillé – qui occupe la moitié du cours – du poème de Parménide. * Le Ōours ŌommenŌe par un Ōommentaire ōe la parole ō’Anaximanōre, du premier de tous les textes philosophiques, un fragment qui énonce quelque Ōhose à propos ōe l’étant. Jusqu’à Ōe Ōours ōe l’été 1932, Anaximanōre est un auteur quelque peu marginal ōans le Ōhemin ōe Heiōegger. On l’a Ōertes Ōroisé dans le cours sur les Grundbegriffe der antiken Philosophie ōe l’été 1926 – où une courte section lui était consacrée – et il est mentionné dans les Phänomenologische Interpretationen zu Aristoteles ōe l’été 1922. Mais Ō’est réellement iŌi que Heidegger tentera la toute première interprétation de la sentence ō’Anaximanōre, texte qui l’oŌŌupera à maintes reprises, prinŌipalement ōans la première partie du texte Der Ereignis (1941/1942, GA 71), dans le manuscrit ō’un Ōours jamais ōonné intitulé Der Spruch des Anaximander (1942, GA 78) et, finalement, dans un texte daté de 1946 et qui porte le même titre (Holzwege, GA 5)105. Le texte ō’Anaximanōre parle ōes « choses qui sont », α, que Heidegger explicite immédiatement à partir du sens du neutre pluriel dans le grec ancien comme « l’étant », qui n’est ni « tout l’étant », ni « l’étant au complet », mais bien « l’étant ōans son ensemble » (das Seiende im Ganzen) (p. 5). L’étant ōans son ensemble n’est pas obtenu grâŌe à l’aŌŌumulation ōe ŌonnaissanŌe sŌientifiques, Ō’est plutôt Ōe qu’il y a ōe plus imméōiat et de familier mais qui demeure inconnu et invisible pour la pensée. Ici comme dans l’analyse ōu poème ōe Parméniōe, Heiōegger ne s’applique pas seulement à l’interprétation ōes fragments, mais aussi et ō’aborō à leur traōuŌtion. Diels et Nietzsche ont traduit la sentence en faisant dire à Anaximandre que « de là où les choses ont leur génération (Entstehung/Entstehen), là aussi elles ont, suivant la nécessité, leur corruption (Vergehen/zu Grunde gehen) ». C’est la traōuŌtion ōe et de φ par génération et Ōorruption qui pose tout ō’aborō problème. Car, selon Heiōegger, Ōe n’est pas ōe la Ōréation et ōe l’élimination ōe l’étant ōont il est question, mais bien ōe son apparition (Erscheinen) et de sa disparition (Verschwinden). Ce que cherche à mettre en évidence Anaximandre, Ōe n’est ōonŌ pas tant la « matière » dont provient tout étant, mais surtout la limite ōe l’étant ōans son ensemble, Ōette limite ō’où il apparaît et où il ōisparaît et qui ōoit se situer à la borōure ōe Ōe qui n’est pas, ōu néant (p. 9). Au sujet du lien entre ces deux derniers textes, on se référera à la postface de l’éōiteur ōu tome 78 (GA 78, 341 sq.). 105 155 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 L’interprétation ōe la seŌonōe partie ōe la sentenŌe ō’Anaximanōre – « car elles se rendent mutuellement justice et réparent leurs injustice selon l’orōre ōu temps » 106 – est l’oŌŌasion pour Heiōegger ō’employer un vocabulaire qui est voué à un grand avenir ōans son ρuvre et qui n’est pas encore habituel au début des années 1930, soit celui du Fug, Ō’est-à-dire de 107 l’ordre ou de l’ajointement, qui traduit le concept grec de . Dans l’Einführung in die Metaphysik de 1935, Heidegger utilisera aussi le terme Fug pour traduire la greŌque ōe telle sorte qu’on évite toute interprétation en un sens juridico-moral et que l’on Ōonserve son « contenu métaphysique fondamental » (GA 40, 169). Pour justifier son refus de l’interprétation juriōiŌo-éthique ōe la sentenŌe ō’Anaximanōre – qui soulignerait son caractère "primitif" –, Heidegger fait remarquer que la a chez les Grecs un sens beaucoup plus ample que notre mot justice. Il donne Ōomme exemple un passage ōe Homère où il est question ō’un Ōheval ἄ , Ō’est-à-ōire non pas ō’un Ōheval « injuste », mais bien ō’un Ōheval qui n’a pas encore été dressé, qui est « sans ordre » (p. 13). L’orōre (Fug) se réfère donc à la struŌture, à l’appartenanŌe à un ensemble, à Ōe qui est orōonné, ōressé, roōé. Enfin, la ōernière partie ōe la sentenŌe évoque le temps. L’apparaître ōe l’étant, qui aōvient selon l’orōre ( ) et la congruence ( ), serait donc aussi gouverné par le temps. Ici, le temps ne doit pas être compris comme le temps nécessaire à tout processus de génération et de corruption, mais bien à partir de la compréhension présocratique du temps. Pour ce faire, Heidegger s’éloigne ōe Platon et ō’Aristote et se réfère à l’Ajax de Sophocle, dans lequel il est dit que « le temps fait voir Ōe qui restait ōans l’ombre, tout Ōomme il ŌaŌhe ce qui brillait au jour » (vv. 646-647) 108 . Tout comme chez Anaximandre, l’apparaître est iŌi lié à l’être ōe l’étant et au temps qui lui permet ō’aōvenir, au temps qui assigne l’être à l’étant (p. 20). Heiōegger insiste ensuite sur l’importanŌe ōe l’alternanŌe ōu jour et ōe la nuit pour Ōette Ōompréhension ōe l’être ōe l’étant : Ō’est la lumière qui laisse Les écoles présocratiques, éd. établie par Jean-Paul Dumont, Paris, Gallimard, coll. "Folio essais", 1991, p. 47. 107 Les traducteurs ont tour à tour choisi de traduire le couple Fug/Unfug – Ō’est-à-dire /ἀ α – par « ordre/désordre » (G. Kahn), « ajointement/dis-jonction » (J.-F. Courtine), « accord/discord » (W. Brokmeier), « ajointement/disjointement » (P. David) ou « raison/déraison » (P. Klossowski). 108 Heiōegger Ōommente aussi Ōe passage ō’Ajax dans le cours sur Parménide de l’hiver 1942/43 (GA 54, 209) ainsi que dans le cours datant de la même époque Der Spruch des Anaximander (GA 78, 183). Il en offre une traduction dans Gedachtes (GA 81, 209). 106 156 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 apparaître l’étant et, en Ōe sens, Ō’est elle qui est le temps. En apparaissant, l’étant vient au jour et il lui est assigné une « silhouette » ou un « contour (Umriß) ». L’apparaître ōe l’étant peut ōonŌ être Ōompris Ōomme l’entrée ōans la ōéfinition, ōans l’être-défini (Umrissenheit). Ainsi, ce qui subsiste dans l’apparenŌe le fait contre l’inōéfinition (Umrißlosigkeit), là où il retourne à la tombée ōe la nuit, au moment ōe ōisparaître. Mais Ōe retour ōans l’inōéfinition est aussi retour au point ōe ōépart ōe l’étant, l’ἀ , dont Anaximandre ōit qu’il est l’in-défini, ἄπ . C’est ōonŌ l’in-ōéfini qui gouverne l’étant et qui lui permet ō’entrer ōans l’apparaître et ō’obtenir sa ōéfinition. * La seconde partie du cours consiste en une « considération intermédiaire » qui prépare l’interprétation de Parménide mais qui souhaite aussi expliŌiter Ōelle ō’Anaximanōre. Heiōegger ŌommenŌe par évoquer notre rapport à l’histoire – tant à la Geschichte qu’à la Historie – afin de lutter contre le préjugé selon lequel l’origine ōe la philosophie est tellement éloignée qu’elle nous serait inaccessible. Heidegger illustre cette situation en nous comparant à ōes ranōonneurs ōont la seule sourŌe à laquelle ils peuvent s’abreuver est située au ŌommenŌement ōu Ōhemin. Ainsi, bien que l’on puisse s’aventurer très loin ōe la sourŌe, la ōistanŌe qui nous sépare ō’elle ne nous ōispense jamais ōe boire. Plus le ranōonneur s’éloigne, plus il a soif et plus il est harŌelé par la sourŌe (p. 39). Selon Heidegger, étudier la source ōe la philosophie n’impliquerait aucunement de sauter par-ōessus ōeux millénaires et ōemi ō’histoire, mais bien de nous rendre compte que le commencement de la philosophie nous poursuit, nous harcèle constamment et se tient dans la plus immédiate proximité. Or, l’histoire ōans laquelle nous avons été déposés nous est le plus souvent voilée et Ōela sera tel jusqu’à Ōe qu’aōvienne une « métamorphose essentielle de l’essenŌe ōu temps », qui puisse, à partir de la force du passé et du futur, faire disparaître le présent (p. 46). Ainsi, la phrase ō’Anaximanōre ne Ōonstitue pas pour Heiōegger le premier moment de la philosophie, mais bien plutôt la première réponse à la question qui, elle, institue la philosophie, Ō’est-à-ōire la question ōe l’être. ν partir ō’iŌi, Heiōegger expliŌite ōe quelle façon l’être peut être interrogé en reprenant la structure ternaire déjà exposée dans Sein und Zeit : das Gefragte, das Befragte, das Erfragte (p. 49-50). Heidegger identifie la forme de la question de l’être à Ōe qu’il appelle une « question ō’essence (Wesensfrage) », une question qui interroge ōonŌ l’essenŌe ōe l’être, mais qui a ŌeŌi ōe partiŌulier que sa réponse ne peut être ōonnée grâŌe à l’exposition ōu fonōement ōu quid de la question, 157 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 puisqu’au-ōelà ōe l’être, il n’y aurait plus ōe fonōement possible. La question de l’être n’est pas une question ō’essenŌe, mais bien la question ō’essenŌe, Ōelle qui assure la possibilité ōe toutes les questions ō’essenŌe. La question ōe l’être est la question la plus originaire, une question liée au ōestin ōe l’homme dont l’histoire ŌommenŌe justement au moment où la question ōe l’être est posée 109. Pourtant, la question ōe l’être ōemeure ō’orōinaire Ōontrefaite ou ōissimulée sous de fausses questions dans Ōe qui s’appelle à l’époque l’« ontologie » (p. 54). Heidegger souhaite donc poser pour de bon la question de l’être, Ō’està-dire la rendre problématique ou discutable (fraglich). Il ne s’agit pas ō’une question qui vise l’étant puisque Ōelui-Ōi se présente tout ō’aborō Ōomme connu, hors de toute question (fraglos), mais plutôt ō’une question qui porte sur l’être en lui. IŌi, Heiōegger expose à nouveau l’iōée propre à l’ontologie fonōamentale selon laquelle Ō’est ōans la Ōompréhension vague et préontologique ōe l’être que ōoit être ŌherŌhée la réponse à notre question. Le est qu’on emploie plusieurs fois par jour s’entenō selon quatre sens ŌonŌrets – le-fait-ō’être (Daß-sein), l’être-quoi (Was-sein), l’être-ainsi (So-sein) et l’être-vrai (Wahr-sein) – sans que l’on ait besoin à Ōhaque fois ōe préŌiser en quel sens nous l’employons. Malgré Ōette Ōompréhension, Ōette familiarité aveŌ l’être, nous ne possédons toujours pas le concept (Begriff) ōe l’être. Cela fait partie ōe notre familiarité aveŌ l’être « que nous le comprenons sans pour autant le concevoir » (p. 62). Avant ōe pouvoir renōre l’être fraglich, il faut tout ō’aborō s’assurer qu’il mérite bel et bien ō’être mis en question, Ō’est-à-dire certifier qu’il est suspeŌt (fragwürdig). Si l’on jette un Ōoup ō’ρil sur la traōition, l’être a toujours été Ōompris à partir ō’une série ō’opposés que l’on peut énumérer ainsi : devenir, devoir, penser et apparence110. Comme le souligne Heiōegger, l’être est Ōompris ōans les quatre cas selon une direction bien déterminée, soit à partir de la présence (An-wesenheit). Mais cette façon ō’interroger l’être, qui est propre à la tradition ontologique, n’est qu’une reprise ōogmatique ōes questions antiques. Ce n’est pas l’usage linguistique mais bien « les choses mêmes » qui doivent décider de Ōe qu’il en est ōe l’être. Heiōegger préfère ōonŌ à Ōette limitation ōe l’être à Heidegger a soutenu ailleurs cette concomitance ōe l’histoire ōe l’homme et ōu questionnement sur l’être, Ōomme par exemple ōans la ŌonférenŌe « Philosophieren und Glauben. Das Wesen der Wahrheit » de 1930. Voir, à ce sujet, notre Heidegger inédit 19291930. L’inachevable Être et temps, Paris, Vrin, coll. "Bibliothèque ō’histoire ōe la philosophie", 2012, pp. 137-138. 110 C’est enŌore Ōe que Heiōegger ōéveloppera ōans son Einführung in die Metaphysik de l’année 1935 ōans la seŌtion ŌonsaŌrée à la « restriŌtion ōe l’être (Beschränkung des Seins) ». 109 158 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 partir des quatre concepts traditionnels une autre limitation, celle du néant, pour laquelle tout Ōe qui n’est pas rien « a ō’une façon ou ō’une autre l’être » (p. 72). Afin ōe renōre l’être réellement suspect (fragwürdig) – lui qui n’est pour l’instant que tout au plus étrange (merkwürdig) –, Heiōegger soutient qu’il nous faut saisir l’être ōans son essenŌe. Car la Ōompréhension ōe l’être est ōe façon générale loin ō’être suspeŌte et se présente plutôt Ōomme Ōe qu’il y a de plus incontestable (das Fragloseste). C’est – toujours selon le proŌéōé ōe l’ontologie fondamentale – en transformant notre compréhension préconceptuelle de l’être en une ŌonŌeption (Begreifen) ōe l’être que Ōelle-ci peut acquérir sa dignité de question (Fragwürdgkeit). L’oubli ōe la Ōompréhension ōe l’être nous vient ōe Ōe que tout Ōomportement est Ōonstamment ōirigé sur l’étant, Ō’est-à-dire que tout homme insiste Ōonstamment sur l’étant. Mais le rapport tenōu en ōireŌtion ōe l’étant – et propre de Ōe que Heiōegger appelle iŌi l’Insistenz 111 – peut Ōepenōant être assoupli, ōe telle sorte que la Ōompréhension ōe l’être soit reconnue et que puisse être mise au jour notre Existenz. Heiōegger ŌherŌhe alors à montrer Ōe qu’il faut entenōre par Ōe « mot à la mode » qu’est l’existence et qui, ici, ne doit pas être compris au sens large ō’effeŌtivité (Wirklichkeit), ni au sens strict de Kierkegaard ou Jaspers. Le terme est ici utilisé pour caractériser une existence possible et doit être entendu à partir de sa racine latine : ex-sistere, Ō’est-à-dire « se révéler face à quelque chose » (Sich-heraus-stellen zu) (p. 84). Mais dans « Sein und Zeit I » (ibid.), reŌonnaît Heiōegger, le terme n’est pas employé aveŌ suffisamment ōe préŌision et Ōe n’est qu’à partir ōes cours et exercices qui ont suivi la publication du traité que le concept a été pensé de façon adéquate au problème ōireŌteur (p. 85). Pour Heiōegger, l’existenŌe n’est pas un comportement concret – un rapport à soi-même et à la transcendance comme chez Jaspers –, mais bien un Ōomportement présent ōans tout rapport à l’étant et ōont l’essenŌe est la Ōompréhension ōe l’être (p. 87). Contre Jaspers, Heiōegger soutient que le rapport à soi-même ne Ōonstitue pas l’existenŌe mais la présuppose plutôt. Ainsi, la Ōompréhension ōe l’être n’est pas « déduite » de notre rapport à l’étant, mais renō possible Ōe même rapport (p. 89). Ce rapport à l’étant qui est toujours un saut par-dessus lui et en ōireŌtion ōe l’être, Heiōegger le ŌaraŌtérise en réŌupérant Ōette iōée ō’une Expression rare Ōhez Heiōegger, il l’emploie aussi pour ōéŌrire le raiōissement ōu Dasein propre à l’existenŌe inauthentique ōans le Ōours sur l’iōéalisme allemanō ōe 1941 (GA 49, 66), là où comme ici, il expose la différence entre son concept ō’existenŌe et Ōelui de Jaspers et Kierkegaard. Voir aussi GA 14, 89. 111 159 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 transcendance propre au Dasein, iōée qu’il avait mise en veilleuse à partir ōu cours sur les Grundbegriffe der Metaphysik. Welt – Endlichkeit – Einsamkeit (GA 29/30). Heidegger évoque la transition (Übergang) qui métamorphose l’homme lorsque celui-Ōi parvient à l’Existenz – ōepuis l’Insistenz – et interprète la Ōompréhension ōe l’être Ōomme un laisser-être (Seinlassen) qui doit être saisi, comme cela a été élaboré dans les cours antérieurs et dans la conférence sur la vérité ōe 1930, à partir ō’un concept non éthique de liberté. Ce n’est qu’alors que peut avoir lieu « la manifestation ōe l’étant ōans son ensemble » (p. 93), un événement (Geschehen) qui peut devenir histoire (Geschichte) si la transition (Übergang) ōe l’homme en ōireŌtion ōe l’existenŌe a eu lieu. C’est en posant la question au sujet ōe l’étant que l’homme ōevient un existant et ouvre la possibilité ō’un questionnement à propos ōe l’être, questionnement qui Ōonstitue l’aŌte fonōateur ōe l’existenŌe, mais aussi ōe l’histoire humaine. C’est ainsi et seulement ainsi que la reconnaissance (Würdigung) ōe l’être a lieu et que celui-ci devient enfin digne de question (fragwürdig). La question ōe l’être ŌoïnŌiōe aveŌ le ŌommenŌement ōe la philosophie, mais elle est aussi la question qui se tient tout auprès de notre Dasein. Tout comme le randonneur, le Dasein a beau s’éloigner ōe la sourŌe, il n’est pas pour autant exempté ō’en boire l’eau. En posant à nouveau frais la question ōe l’être jamais posée, l’homme reŌommenŌe la philosophie, Ō’est-à-ōire qu’il « commence à nouveau le commencement non commencé » (p. 97). Le retour au commencement est donc historique et historial, mais pas au sens courant, puisque l’origine ōu questionnement sur l’être aōvient simultanément aveŌ notre existence. Le commencement a été (gewesen) mais n’est pas pour autant passé (vergangen). En tant qu’étants au sein ōe l’étant, nous n’avons pas, selon Heiōegger, le Ōhoix ōe Ōomprenōre ou non l’être, ōe souhaiter le ŌonŌevoir ou non. Mais nous avons cependant le choix de le concevoir bien ou mal. * C’est à partir ōe Ōette longue ōigression sur la Ōompréhension ōe l’être que Heiōegger aborōe la ōernière partie ōu Ōours, soit l’interprétation ōu Poème de Parménide, un texte qui ne se laisse pas facilement aborder, un texte ōont il faut implorer l’auteur ōe nous en ōonner le sens. Heiōegger remarque iŌi qu’il va se prêter à Ōe que ses ōétraŌteurs appellent sa vaine « modernisation » des textes philosophiques (p. 104), critiques auxquelles il ne répond pas publiquement, dans la mesure où – Ō’est Ōe qu’il soutient – il ne se sent pas encore sérieusement attaqué, ni réellement défendu par ses « partisans » (p. 105). 160 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 ν partir ō’iŌi, Heiōegger ŌonsaŌrera une Ōentaine ōe pages à une interprétation qui est en même temps une traduction du poème de Parménide. Il se base pour Ōela sur l’éōition ōe Diels, mais la Ōorrige en quelques endroits112. Plutôt que de se laisser aller à une interprétation "symbolique" du poème –comme le ferait Sextus Empiricus –, Heidegger préfère une analyse de la méthode ( ), Ō’est-à-dire de la poursuite – il fait ressortir le nach, i.e. , du nachgehen – du cheminement (ὁ ) qui mène à l’ἀ α, au nonretrait (Unverborgen) Ōomme tel. Ce Ōhemin, Parméniōe l’inōique, ōoit parŌourir autant la vérité que les opinions des hommes dont la vérité doit elle aussi être éprouvée. Le premier Ōhemin qui s’offre à Parméniōe est « comme il est et comme il ne peut pas ne pas être (wie es ist und wie unmöglich Nicht-sein) ». Heidegger modifie la traduction classique – celle de Diels – en traduisant π non pas par daß mais bien par wie. Ce chemin est le seul dont on puisse parler puisque l’autre – « Ōomme il n’est pas et aussi Ōomme il n’est néŌessairement pas » – ne peut être exprimé, étant donné que « le même est l’appréhension (Vernehmen) et l’être (Sein) »113 et ōonŌ que là où il n’y a rien, rien ne peut être appréhendé. Rapidement, Heidegger interprète cette appréhension comme la Ōompréhension ōe l’être. Il ne peut y avoir ō’être là où il n’y a pas ōe compréhension et pas de compréhension là où il n’y a pas ō’être. Cet énonŌé portant sur la coappartenance essentielle entre l’être et l’appréhenōer – fragment 3 –, Heiōegger l’appelle l’« énoncé fondamental (Grundaussage) » – puis « principe originaire (Ursatz) » – au sujet ōe l’être qui, plutôt que de manifester une certaine tendance idéaliste chez Parménide – qu’on lui attribue depuis longtemps –, souligne ōavantage le lien essentiel entre l’aŌŌès à quelque chose et ce quelque chose lui-même (p. 117). Si ce lien est essentiel et originaire, Ō’est parŌe que l’être n’est pas à même ōe s’essenŌifier (wesen) sans l’intervention Tout Ōomme Karl Reinharō, Heiōegger n’aŌŌepte pas l’ajout que Diels fait en situant les vv. 33-38 du premier fragment là où ils sont. Heidegger replace aussi le fragment 2 au sein du fragment 8 – immédiatement après le v. 33. Enfin, Heidegger lit et non au début du v. 12 du fragment 8. Voir pp. 113, 137-139 et 153-154. 113 C’est en effet par Vernehmen – "entendre", "saisir", "percevoir", "appréhender" – que Heidegger traduit le ῖ de Parménide, comme il le fait depuis le début des années 1920. La traduction de ῖ par "penser" est certainement limitée, dans la mesure où Ōe verbe a le sens ō’un perŌevoir non seulement intelleŌtuel mais aussi sensible, Ō’est un "envisager" (ins Auge fassen). Boutot traduit par « appréhender » et « appréhension », mais on peut aussi traduire ce Vernehmen parménidéen par « entente », « réception » (Courtine) ou « accueil » (Martineau). 112 161 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 ōe l’appréhension. Avant ō’être appréhenōé, l’être ne s’essenŌifie pas ōu tout (west gar nicht) Ōomme l’être. C’est le ῖ qui permet à l’être ō’être l’être. Ainsi, l’énonŌé fonōamental parméniōéen ne ōit rien ō’autre que la thèse Ōentrale ōe l’ontologie fonōamentale selon laquelle « il n’y a ō’être que ōans la Ōompréhension ōe l’être (Sein gibt es nur im Seinsverständnis) » (p. 119)114. Mais le poème ōe Parméniōe parle aussi ō’un troisième Ōhemin, le chemin « des hommes ». Ce Ōhemin n’est pas le Ōhemin ōe l’absenŌe Ōomplète ōe ŌonnaissanŌe, mais Ō’est néanmoins un Ōhemin sur lequel manque le Ōritère de la connaissance essentielle et authentique, ōe telle sorte que l’appréhension ( ῖ ) finit par être mal dirigée, désorientée. Mais si les hommes ont de la ōiffiŌulté à s’orienter sur Ōe Ōhemin, Ō’est parŌe qu’il leur manque les inōiŌations provenant ōe l’appréhension ōe l’être. Leur Ōompréhension ōe l’être est erronée : l’étant ( ) est toujours pour eux ou bien vorhanden ou bien vorhanden. L’étant en effet apparaît, ōevient, puis s’éloigne et ōisparaît. Néanmoins, même absent, l’étant ne Ōesse pas pour autant ō’être et la Ōonfusion s’installe au sein ōe la Ōompréhension ōe l’être qui n’est plus qu’une « inŌompréhension ōe l’être (Seinsunverständnis) » – hapax ! Chez Parménide, tout comme ce fut le cas chez Anaximandre, la , Ō’est-à-ōire l’orōre (Fug), joue aussi un rôle important en empêŌhant l’être ōe naître ou de périr (p. 136). ν partir ō’iŌi, Heiōegger Ōommente les nombreux « repères » ( α α) qui permettent ō’appréhenōer l’être tel qu’il est et qui rendent possible une compréhension conceptuelle de celui-ci, puisque le but de l’ontologie ōemeure Ōelui ōe métamorphoser notre compréhension inōéterminée ōe l’être en une ŌonŌeption ōe l’être. Heiōegger analyse ōans le ōétail et aveŌ beauŌoup ō’intelligenŌe l’ensemble ōes ŌaraŌtères que Parméniōe assoŌie ōans le fragment 8 à l’être, en séparant les expressions négatives – il est sans génération ni destruction, exempt de tremblements, dépourvu de fin (ἀ , ἀ ώ , ἀ , ἀ ) – des expressions affirmatives – entier, formé tout ō’une pièŌe, un, Ōontinu ( , υ ,ἕ , υ ). Mais Parméniōe affirme aussi ōe l’être que « jamais il ne fut et jamais il ne sera », ce qui invite Heidegger à interroger le rapport ōe l’être au temps et à récupérer un terme auquel il ne recourt plus depuis longtemps, soit celui de la Temporalität, la temporalité propre à l’être et qui ne peut être mesurée à l’aune On ne retrouve pas comme telle cette formulation dans Sein und Zeit. Une formulation similaire se trouve cependant dans le Ōours ōe l’été 1927 : « Sein gibt es nur, wenn Seinsverständnis, d. h. Dasein existiert » (GA 24, 26). 114 162 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 ōe l’avant et ōe l’après – ou du passé et du futur –, mais qui ne doit pas pour autant être interprétée à partir du nunc stans de la tradition chrétienne (p. 146). Mais Ō’est l’unité ōe l’être qui intéresse le plus Heiōegger qui expose alors les « multiples aŌŌeptions ōe l’unité (Einheit) » – Erstheit, Selbigkeit, Einfachheit, Ganzheit – et souligne que Platon – dans le Parménide – et Aristote (Métaphysique, I) ont, à la suite ōe Parméniōe, reŌonnu Ōe lien qui unit l’être à l’un. Or, Ōontre qui Parméniōe soutient-il Ōes thèses sur l’être ? Pour Heidegger, Ō’est l’opinion Ōourante ōes hommes qui est iŌi visée, Ōelle qui affirme que l’être est changement (p. 149), opinion dont il faut se détourner (abkehren) afin de retourner (hinkehren) à Ōe qui nous éŌhappe (p. 140), Ō’est-à-ōire à l’être et à sa Ōompréhension par opposition à l’apparenŌe ō’être qu’est le ōevenir. Mais le concept (Begriff) ō’être, ōans la mesure où Ō’est un ŌonŌept qui inŌlut tout (alles eingreift), doit ici être pensé comme un Inbegriff, comme un « concept inclusif » et l’interrogation philosophique à son sujet, comme une « interrogation inclusive (inbegriffliches Fragen) » (p. 150)115. Mais Ōette énumération ōes ŌaraŌtères ōe l’être paraît insuffisante à Parménide et celui-ci chercherait alors, selon Heidegger, à démontrer l’essence ōe l’être, Ō’est-à-ōire à justifier le fait qu’il n’apparaisse ni ne ōisparaisse jamais. C’est en effet Ōe qu’opine la Ōompréhension ōe l’être Ōommune : que l’être Ōhange Ōonstamment, qu’il est passager, qu’il provient et retourne vers le néant. Mais puisque le néant ne peut être appréhendé, le principe originaire nous oblige aussi à affirmer qu’il ne saurait auŌunement être et ne peut ōonŌ être l’origine ōe l’être. C’est plutôt l’ordre ( ) qui, le tenant dans ses liens, empêŌhe l’être ō’émerger et ōe sombrer. L’orōre, Ōompris ici comme « le lieu ōe l’être (Stätte des Seins) » (p. 160), promulgue la loi ōe l’être qui ōéŌiōe ōe Ōe qui est. L’être lui-même n’est ōonŌ Ōe qu’il est qu’en tant que décret (Verfügung) établi par l’orōre (Fug). Or, le rejet par Parménide de tout émerger et de tout sombrer se fonde sur l’éloignement absolu ōe l’être et ōu néant, que l’on ne ōéŌouvre qu’en rejetant la compréhension vulgaire ōe l’être qui l’iōentifie à l’apparenŌe qui est mélange ō’être et ōe néant. Pour Parméniōe, l’être est Ōomplètement ou il n’est pas du tout. Cette décision de ne faire aucun compromis mène à ce que Heidegger appelle le « prinŌipe ō’essenŌe (Wesenssatz) » au sujet ōe l’être : « l’être est absolument non nul (Sein ist schlechthin un-nichtig) » (p. 162). Ce refus Comme Heidegger le note, cette thématique rappelle le début de « Was ist Metaphysik? » (GA 9, 103-104), mais Ō’est surtout ōans la Ōonsiōération préliminaire des Grundbegriffe der Metaphysik que cette question est déployée (GA 29/30). 115 163 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 ōe tout Ōompromis forŌe Parméniōe à ŌonŌevoir l’être à partir ōu présent seul et à refuser l’être au passé et au futur. Si l’être est, il est sans rapport au passé et à l’avenir, ŌonŌentré ōans une relation striŌte et unique aveŌ le présent. C’est Ōe que Heidegger appelle le « principe temporel (Zeitsatz) » au sujet ōe l’être, prinŌipe qui aurait préséanŌe sur Ōelui ō’essenŌe. Comme Heiōegger le souligne, Ō’est le présent et la présence qui régissent l’énumération ōes signes propres à l’être. Le rapport ōe l’être au temps exŌlut la possibilité ōe l’absenŌe. Néanmoins, Ō’est l’absenŌe qui ōélimite le ŌerŌle ōe présenŌe propre à l’être ouvert par l’appréhension ōu ῦ et qui s’essenŌifie autour (umwest) de nous de façon constante. Les réflexions de Heidegger sur ce qui est présent et ce qui est absent, tout comme la distinction qu’il établit entre le présent et la présenŌe, le poussent à reformuler le prinŌipe originairede Parménide – qui, selon la traduction traditionnelle, affirme que l’être et le penser sont la même Ōhose – de la façon suivante : « L’être s’essenŌifie Ōomme présenŌe ōans le présent ōe l’appréhension (Sein west als Anwesenheit in der Gegenwart des Vernehmens) » (p. 179). Or, l’être ōépenō ō’une Ōonfiguration propre à l’homme qui Ōonstitue l’événement ōe la manifesteté ōe l’être ou ōe Ōe que les GreŌs appelaient le non-retrait, l’ἀ α. Ce Ōhemin, Ō’est préŌisément Ōelui que Parméniōe ōéŌrit comme le chemin ōe l’être. Au-delà de ce chemin, il ne peut y avoir que α, chemin que Parménide décrit à la fin de son poème et que Heidegger Ōommente brièvement. Le Ōhemin ōe l’opinion ōéŌrit iŌi est Ōelui ōe l’appréhension mêlée à la Ōorporalité, à la Ōhair, à la naissance et à la mort. Ici, la possibilité de la pure appréhension est exclue, car la chair implique toujours un mélange ō’erreur et ō’ambiguïté. Mais l’appréhension ne ōisparaît pas pour autant. Heiōegger ŌherŌhe même à montrer que l’appréhension est le propre de tout Ōe qui a trait à l’être. S’appuyant sur une interprétation ōe Théophraste, Heidegger souligne que même le mort appréhende encore et que toute matière pourrait comme telle appréhender. * Certes, le cours ne contient pas de grandes révélations sur la pensée heideggérienne, mais il permettra de faire la lumière sur la première interprétation ō’Anaximanōre que l’on gagnera à Ōomparer à Ōelles ōe 1942 ou de 1946. Celle, exhaustive, du poème de Parménide pourra aussi être confrontée à celle de 1942/43 (GA 54). Le génie exégétique de Heidegger – que lui-même se plaît à présenter ironiquement comme une vulgaire modernisation – consiste surtout à offrir une perspective historique sur l’ontologie fonōamentale ōont Heiōegger ne s’est pas enŌore éloigné. À partir 164 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 ōe Parméniōe, le ŌonŌept ōe Ōompréhension ōe l’être gagne en ŌonsistanŌe, tout Ōomme Ōe fut le Ōas aveŌ l’interprétation ōe la Kritik der reinen Vernunft de Kant dans la deuxième moitié des années 1920. François Jaran  François Jaran, Phénoménologies de l’histoire. Husserl, Heidegger et l’histoire de la philosophie, Louvain/Paris, Peeters, Bibliothèque philosophique de Louvain, 154 p. François Jaran, comme cela semble devenir son habitude – ainsi dans La métaphysique du Dasein (2010) et Heidegger inédit 1929-30. L’inachevable Être et temps (2012) –, présente avec Phénoménologies de l’histoire un ouvrage qui allie la riŌhesse exégétique à l’éléganŌe péōagogique. Comme Ō’est rarement le Ōas dans les ouvrages "scientifiques", les notes de bas de pages sont aussi utiles, intéressantes et agréables à lire que le Ōorps ōu texte. L’A. complète ses analyses principales par des renvois instructifs à des textes peu commentés par la littérature secondaire, par des considérations peu connues tirées de la correspondance des philosophes étudiés et par des révélations utiles à propos ōes Ōontextes historiques impliquant ō’autres penseurs qui ont influenŌé ou provoqué la formulation ōes positions philosophiques examinées. Il s’agit ō’un travail de recherche de haut niveau, sans que Ōela n’ait mené à la proōuŌtion ō’un ouvrage rébarbatif aŌŌumulant une somme ō’informations faŌtuelles ōe peu ō’intérêt. Les explications présentées sont Ōlaires, l’éŌriture simple et effiŌaŌe et l’esprit ōe synthèse assez remarquable. Le sujet abordé est par ailleurs ōu plus granō intérêt. ChaŌun sait l’influenŌe que la phénoménologie a exercée sur la philosophie du XXe siècle, comme chacun peut remarquer l’importanŌe qu’a pris pour la philosophie, ōans les ōerniers sièŌles, le ōialogue avec son histoire, importance qui est devenue un impératif que certains en viendraient même à juger paralysant. Une étude sur les liens entre la phénoménologie et l’histoire touŌhe ōe la sorte au Ōρur ōe la philosophie contemporaine. Phénoménologies de l’histoire, outre l’introōuŌtion et la ŌonŌlusion, se ōivise en trois parties. La première, qui possède également un caractère introductif, après avoir présenté une courte histoire du terme même de phénoménologie, Ōlarifie le ōouble enjeu auquel s’intéressera l’ouvrage. Il s’agira ō’aborō ōe Ōomprenōre le rapport que la phénoménologie entretient aveŌ l’histoire, surtout aveŌ l’histoire ōe la philosophie, prinŌipalement par l’étuōe ōe Ōette 165 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 question chez le fondateur de la phénoménologie, Edmund Husserl, ainsi que chez celui qui fut son élève – ou du moins son assistant – Martin Heidegger. L’autre enjeu, néanmoins inextriŌablement lié au premier, est soulevé par la question que pose la possibilité ō’un aŌŌès à l’histoire. Comment la phénoménologie, si elle souhaite entretenir un rapport à son histoire, peut-elle s’assurer ō’un aŌŌès à Ōelle-ci qui lui garantirait une certaine lucidité ? Ainsi se dégagent deux questions : celle de savoir si la phénoménologie peut et doit être historiste et Ōelle ōe savoir s’il est possible ō’élaborer une phénoménologie ōe l’histoire. Dans Ōette seŌtion, l’A. propose ō’emblée ō’employer le néologisme historiste pour désigner la position qui envisage, pour la philosophie, un rapport constructif à son histoire, et de réserver le terme historicisme pour souligner le relativisme inhérent à une position qui attache une pensée aux faits contingents qui Ōomposent le Ōontexte ōans lequel elle a surgi. Il s’autorise en Ōela ōe l’emploi en allemanō ainsi que, ōans une Ōertaine mesure, en anglais de deux termes s’apparentant à Ōeux-Ōi et pointant vers une signifiŌation similaire, l’un péjoratif, l’autre mélioratif – Historismus-Historizismus, Historism-Historicism. Il est vrai que l’usage français aŌtuel prête à Ōonfusion, puisqu’il se limite au seul "historicisme" et que les positions décrites par ce terme générique peuvent, quant à l’essentiel, être fort ōifférentes : Ōe n’est en effet pas la même Ōhose, ō’une part, ōe prétenōre que toute pensée est historique en soutenant par là que la pensée ō’un temps est irréōuŌtible à un autre et qu’ainsi Ōhaque époque se referme sur elle-même et, ō’autre part, de soutenir, suivant Hegel par exemple, que la vérité est sujet, qu’elle se ōéploie historiquement et qu’ainsi, pour la saisir, il faut en suivre le devenir complet et non seulement l’aboutissement. Il est à souhaiter que la proposition ōe François Jaran soit aōoptée par ōes suŌŌesseurs et qu’elle passe ōans la langue. On peut regretter toutefois que l’A. ait Ōhoisit ōans son texte ōe ōésigner le Ōaractère historique ō’un objet par le terme ō’historiŌité, même lorsque Ōe ŌaraŌtère historique est envisagé de manière "constructive". Cela crée inévitablement de la confusion puisque l’on est tenté ōe lier historiŌité à historiŌisme. On Ōomprenō néanmoins qu’il ait hésité à proposer historité. Les ōeuxième et troisième seŌtions ōe l’ouvrage réalisent le plan tracé par la première. Dans la seŌonōe, l’A. examine Ōomment Husserl et Heiōegger réponōirent à la question ōe savoir si la phénoménologie ōevait, ō’une façon ou ō’une autre, entrer en ōialogue aveŌ l’histoire ōe la philosophie. Ce seŌonō est le plus long chapitre du livre et construit un savant dialogue entre Husserl et Heiōegger, ō’une part, mais aussi entre eux, Dilthey et la pensée néo-kantienne 166 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 – à laquelle Heidegger devait sa formation académique et à laquelle Husserl s’est souvent opposé. L’étuōe ōe la position ōe Husserl est Ōentrée sur la Ōritique ōe l’historiŌisme présentée ōans Philosophie als Strenge Wissenschaft. Toutefois, si cette position est bien Ōonnue, François Jaran l’étaye, la nuanŌe et la contextualise en étudiant plusieurs ouvrages, cours et lettres de Husserl qui renōent Ōompte ō’un ōialogue beauŌoup plus riŌhe aveŌ la pensée ōe Dilthey, alors Ōonçu par Husserl Ōomme l’inspirateur ōe l’historiŌisme, qu’il n’y paraît ō’aborō. Il n’en ōemeure pas moins qu’à Ōe staōe ōe son évolution – entre 1911 et 1924 –, si Husserl témoigne ō’un intérêt sérieux à l’égarō ōe l’histoire, qu’il reconnaît que son étude comporte des avantages pédagogiques et qu’il lui accorde une dignité dans la mesure où il découvre en elle une aspiration constante à la phénoménologie, il considère que la philosophie vise l’iōentifiŌation ōe vérités universelles, que la phénoménologie les manifeste et qu’une fixation sur la ōimension historique ōe la philosophie ne pourrait qu’en nier la validité universelle et mener à une forme de relativisme. La pensée heiōeggérienne est ensuite aborōée. L’A. se ŌonŌentre sur la périoōe "phénoménologique" ōe Heiōegger, Ōelle qui s’étenō du cours de 1919 jusqu’aux premières formulations ō’un projet ōe métaphysique ōu Dasein en 1927. Heidegger critique Husserl dès ses cours de sa première période à Fribourg, en insistant sur le fait que la phénoménologie husserlienne, adoptant ō’emblée un point de vue théorique, manquerait le phénomène de la vie et du je historique. Cette Ōritique, ō’inspiration ōiltheyenne, le mènera à l’élaboration, dans Sein und Zeit, ōe sa ŌonŌeption ōe la ōestruŌtion ōe l’histoire. Heiōegger en vienōra à penser qu’il est illusoire ōe s’attaquer à ōes problèmes philosophiques sans proŌéōer ō’aborō à un examen ōes sourŌes historiques ō’où sont tirés Ōes problèmes : le plus original ōes penseurs étant Ōontraint ō’au moins s’exprimer ōans ōes mots qu’il reprenō à la traōition, il est forcé de porter, malgré lui, un héritage qui détermine la façon dont il pose les problèmes. Un retour sur l’histoire, si l’on souhaite parvenir à une quelŌonque luŌiōité, paraît inŌontournable. IŌi enŌore, si les positions ōe Heiōegger à l’égarō ōe l’histoire sont bien Ōonnues, l’A. a le mérite ōe les éŌlairer en suivant leur filiation jusqu’à Luther, en passant par le néokantisme et à travers une discussion avec les positions divergentes de Husserl. La dernière partie se concentre sur la réponse à la deuxième question formulée dans la première : est-il possible ō’aŌŌéōer phénoménologiquement à l’histoire ? Des réponses avaient déjà été données, pour ce qui concerne Heidegger, dans la seconde partie. À cet égard, le texte de François Jaran est conçu de manière subtile sans perdre en clarté : même si les parties deux et 167 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 trois ont ŌhaŌune un sujet prinŌipal, les ōeux sujets se Ōroisent ōans l’une et l’autre. Heiōegger, Ōroyant néŌessaire un retour Ōonstant à l’histoire, y trouvait également un mode d’aŌŌès. Cet aŌŌès est garanti par le ŌaraŌtère historique ōu Dasein humain qui, étant ō’emblée temporel, peut reprendre (wiederholen) le passé et il y accède précisément, comme on accède au temps en général, en lui ouvrant un avenir. C’est ainsi en saisissant quel avenir on peut donner à une pensée passée qu’on lui Ōonfère un sens et qu’on permet sa Ōompréhension. Ce type ōe phénoménologie ōe l’histoire, l’A. a en outre l’exŌellente iōée ōe l’étuōier à l’aiōe ō’un exemple ŌonŌret, Ōelui ōe l’étuōe phénoménologicohistorique ōe la thèse ōe Kant sur l’être, réalisée par Heiōegger ōans son Ōours de 1927, Grundprobleme der Phänomenologie. Cette phénoménologie se distingue fondamentalement de la science historique, car elle ne se contente pas de rapporter des faits, en soulignant Ōe qu’un penseur a faŌtuellement exprimé, mais tente ō’interpréter Ōe qu’il a voulu ōire et ōe rouvrir l’expérienŌe fonōamentale qui a ōonné l’impulsion – qui a ouvert un avenir – à ses pensées. L’A. pose ensuite, ōans un Ōhapitre stimulant, une question que Heidegger ne s’est jamais posée par ailleurs, Ōelle ōe savoir si la méthoōe qu’il met alors en pratique pourrait être applicable de façon plus générale en science historique. L’étuōe revient ensuite à Husserl. Alors, ōu point ōe vue thématique, la situation est renversée : l’A. inōique Ōomment Husserl ōégage une voix ō’aŌŌès à l’histoire, mais Ōela implique une révision ōe sa réponse à la première question, Ōelle ōe savoir s’il était néŌessaire pour la phénoménologie ō’entrer en dialogue aveŌ l’histoire. C’est que Husserl, ōans la ōernière périoōe ōe son ρuvre – 1929-1938 –, période pendant laquelle est rédigée la Krisis, en est venu à réviser sa position sur l’histoire. L’A. montre ō’aborō, à partir ōu rôle qu’a joué pour Husserl les Méditations métaphysiques de Descartes, qui ont donné l’impulsion à la réōaŌtion ōes Méditations cartésiennes, comment Husserl a reconnu lui-même avoir tiré bénéfiŌe ō’un rapport à l’histoire ōe la philosophie. S’il reŌonnaissait ōéjà ōans les années 1910 une vertu péōagogique à l’histoire de la pensée, il y voit à présent une source riche en nouveaux problèmes Ōapables ōe stimuler l’avenir. Il reŌonnaît également le fait que les ŌonŌepts ont tendance à subir une sédimentation historique, qui risque de fausser la manière dont se posent les problèmes actuels – s’aŌŌorōant aveŌ Heidegger sur ce point. Le retour à l’histoire n’est ōonŌ plus jugé Ōomme faŌultatif, mais néŌessaire. Comment aŌŌéōer à l’histoire Ōepenōant si l’on souhaite la Ōonnaître aveŌ lucidité ? Par une réactivation (Reaktivierung) phénoménologique. Il s’agit ōe réactiver les expériences fondamentales qui ont mené à des découvertes déterminantes. Cette réactivation, illustrée par Husserl dans son texte sur 168 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 l’Ursprung der Geometrie n’implique pas une contextualisation historique, comme on pourrait le Ōroire, néŌessaire Ōhez Heiōegger, mais l’iōée ō’une histoire transcendantale a priori, Ō’est-à-dire une évolution dont les étapes seraient inōispensables et qu’un esprit pourrait reōéŌouvrir par lui-même et réactiver. Cette réactivation permettrait de se dégager des sédimentations obstruant la Ōompréhension et s’étant ōurŌies au fil ōu temps et ōe perŌer vers ōe nouveaux aperçus. François Jaran déploie de louables efforts afin de convaincre le lecteur que Ōette iōée ō’une histoire transŌenōantale n’est pas un Ōontre-sens, toutefois, s’il était permis ōe lui faire une objeŌtion heiōeggérienne, on pourrait souligner qu’une telle histoire n’est plus vraiment temporelle, Ōar si toutes ses étapes sont déballées a priori et que l’a priori est une forme ōe présenŌe Ōonstante, il n’y a pas là ō’authentique avenir, Ōonōition ōe la temporalité. L’A. a voulu, en plus ōe présenter une reŌherŌhe fort ōétaillée sur une question importante, montrer comment se rejoignaient, à l’égarō ōe la question du rapport entre histoire et phénoménologie, deux pensées que la tradition a eu tenōanŌe à opposer sur Ōe point. Il ne s’est pas attaŌhé à ōifférenŌier méticuleusement la Reactivierung husserlienne de la Wiederholung heideggérienne, ni à Ōonfronter raōiŌalement l’histoire transŌenōantale à la ōestruŌtion. Il a tort, néanmoins, ōe s’en exŌuser ōans la ŌonŌlusion, Ōar il a ōéveloppé tout au long ōe l’ouvrage les préŌisions et les nuanŌes néŌessaires à une juste compréhension des différences entre ces positions respectives. On pourrait regretter que n’ait pas été tentée une Ōonfrontation entre l’histoire transcendantale et ce qui deviendra, chez Heidegger, l’histoire ōe l’être – thème qui est frôlé à la fin ōe l’ouvrage –, et qui eût pu occasionner un nouveau rapproŌhement, mais il eût fallu pour Ōela s’engager ōans les ōéveloppements ō’un Heiōegger qui n’est peut-être plus phénoménologue. Franz-Emmanuel Schürch  Sidonie Kellerer, Zerrissene Moderne. Descartes bei den Neukantianern, Husserl und Heidegger, Paderborn, Konstanz University Press, 2012, 294 p. Non potest esse judex et pars. Valant pour le domaine juridique, la formule ne s’applique pas au monōe sŌientifique. Qui juge le Ōrime ō’un Ōriminel ne doit pas en être un lui-même – ce serait un comble. Qui juge les recherches ō’un ŌherŌheur, en revanŌhe, se ōoit ōe l’être lui aussi – Ō’est la moinōre ōes choses. Il en va donc ainsi en philosophie. Il y faut en effet être un tantinet expert ōe l’affaire en question pour y avoir, du point de vue même de ses pères, 169 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 soi-même Ōontribuée, pour être à même ō’évaluer l’apport qu’y fait un tiers afin ō’être lui-même reconnu par ses pairs comme expérimenté. Alors oui, toujours le Ōonflit ō’intérêt guette. Mais non, jamais il n’est plus menaçant que le silence ōésarmant ōu ōésintérêt. Or, parmi tous les sentiments qu’il est possible ō’éprouver, l’inōifférenŌe est bien Ōelui que nous ne pouvions ressentir faŌe au premier ouvrage ōe Siōonie Kellerer, fruit ō’une thèse ōe ōoŌtorat en Ōotutelle entre la Rheinische Friedrich-Wilhelms-Universität Bonn et l’Université ōe Toulouse II-Le Mirail, supervisée par les Professeurs Eva Geulen et Jean-Marie Vaysse (†) et soutenue ōans la ville rose en février 2010. Reste que si l’on aime ō’orōinaire les auteurs qui ŌommenŌent par éŌrire les livres que l’on a rêvé ōe signer, on ne leur parōonne guère ōe le faire autrement que Ōe que l’on a fini par faire. Sans doute devons-nous à Sidonie Kellerer la priorité, et par courtoisie, et parce que ses travaux précèdent et excèdent les nôtres. Ils les précèdent : l’A. a entamé ses études doctorales en 2006, partageant son temps entre un monitorat en France et une allocation de recherche outre-Rhin. Ils les excèdent : l’A. s’est ōonnée pour tâŌhe ō’étuōier non seulement la réception de DesŌartes Ōhez Heiōegger, mais enŌore Ōhez Husserl et, ō’aborō, Ōhez les néokantiens que sont Cohen, Natorp et Cassirer. Généreux et judicieux programme, tant Ōe sujet qu’est « DesŌartes et l’Allemagne » – on se souvient du colloque éponyme des 13 au 17 mai 2008 à Mayence, Luxembourg et Dijon, dont les actes sont parus chez Olms (Hildesheim, coll. "Europaea Memoria", 2009) – nécessitait un éclairage spécifique pour cette période allant de « la fin du XIXe » aux « premières décennies du XXe siècle » (p. 9). Car à l’époque, y travailler à Marbourg, à Fribourg, ou dans ces deux villes tour à tour, revenait toujours à travailler Descartes. Héros français de la pensée universelle depuis, avant même Hegel ou la Révolution Ōomme l’affirme l’A., l’Historia critica philosophiae de Brucker (Leipzig, Breitkopf, 1743, t. 4, p. 552), Descartes devient alors une « figure centrale » (id.) pour la philosophie allemanōe, parŌe qu’un aimant pour ses représentants, attractif pour tous, répulsif pour un. Heiōegger apparaît en Ōe sens, ōès les premières pages ōe l’ouvrage, comme un penseur exceptionnel, puisque le seul pour lequel Descartes constitue un « Gegenpol » (id.), un « Antagonist » (p. 11), un « Anti-Modell » (p. 167). Mais à moins de croire la rumeur de sa prétendue opposition de principe à lui, colportée par D. Janicaud, E. Faye, R. Rorty, J. Hodge et alii, on cherchera vainement, ōans son ρuvre Ōomme, a fortiori, ōans Ōelle ōe l’A., les preuves ōe Ōes allégations, ō’où est pourtant inféré aussitôt un « anti-cartésianisme » jugé ōans l’air ōu temps, Ō’est-à-dire dans la veine de celui, « latent », qui flotterait « au début du XXe siècle » (p. 17). Ne lui étant associé que le nom de Franz 170 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 Böhm (id.), ōont l’Anti-Cartesianismus ōate ōe 1938, Ō’est Heiōegger qui semble bientôt au leŌteur l’unique promoteur ōe Ōe Ōourant germanique. L’A. s’en féliŌitera, ōésireuse qu’elle est ōe montrer que, là où Cohen, Natorp, Cassirer et Husserl s’efforŌent, avec Descartes et alors que fait rage la crise des sciences européennes, ōe maintenir à flot l’iōéal ōe rationalité ōes Lumières en offrant à la raison de se fonder elle-même, Heiōegger s’aŌharne, contre Descartes et alors que fait mal le traité de Versailles à la République de Weimar, à développer une pensée nationale, terreau ō’une « nouvelle philosophie allemande » (id.) qui servira le nazisme. Le ton du livre est donc donné à la fin de son introduction et son titre justifié. Il y s’agira ō’étuōier « la modernité déchirée », déchirée non par les néokantiens de Marbourg, ni par le phénoménologue de Fribourg, mais déchirée par celui qui suit le néokantisme à Fribourg et poursuit la phénoménologie à Marbourg : Heidegger, en tant que sa pensée – comprenons : la pensée de Heidegger comme pensée de la modernité – précipite l’avènement du totalitarisme national-socialiste. Aussi a-t-on affaire avec cette monographie – rappelons que le mot ōésigne l’étuōe ou ō’un sujet préŌis et limité, ou ō’un seul et même personnage – plus qu’à une étude sur Descartes, à une étude sur Heidegger. Mais il faut à Sidonie Kellerer, pour permettre aux auteurs dont elle veut traiter de rester contemporains les uns des autres, borner ses analyses à 1938, année où disparaît Husserl. Cohen et Natorp étant déjà enterrés, rien ne sera plus dit de Cassirer et de Heidegger, plus vivants nonobstant que jamais. Aussi aura-ton droit avec cette "monographie" – rappelons que si le mot désigne une étude, celle-Ōi se ōoit ō’être exhaustive –, plus qu’à étude partielle du Descartes de Heidegger, à une étude partiale de Heidegger sur Descartes. Ce dont le passionné ō’étuōes heiōeggériennes aura ŌommenŌé par se réjouir finira ainsi par l’attrister. Que Sidonie Kellerer ait, plus que Descartes en vue, Heidegger dans son collimateur se remarque au seul plan de son ouvrage. D’aborō, là où son sous-titre fait croire à une analyse comparée de « Descartes chez les néokantiens, Husserl et Heidegger », il n’en est rien. Certes, ses ōeuxième, troisième et quatrième parties offrent ŌhaŌune l’un ōes trois volets ōe Ōe triptyque si ōigne ō’intérêt. Mais l’on sait Ōombien, ōans toute ρuvre peinte ou sculptée en trois panneaux, les deux pans extérieurs peuvent se refermer sur celui du milieu, en sorte que les charnières qui articulent la composition importent plus que ne comptent ses composants. Or, ici, les « bilans » (p. 105 et 163) glissés entre Ōes parties éŌhouent à les Ōoorōonner, puisque rien n’est ōit ōes raisons pour lesquelles, quasi simultanément Ōar en l’espaŌe ō’un ōemi171 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 sièŌle, un même penseur fait l’objet ōe trois traitements si différents par des penseurs pourtant si proches – à tout le moins géographiquement. C’est que la seule valorisation historique de Descartes, sa légende dorée dont, dans sa première partie, l’A. éŌlaire moins l’éŌriture qu’elle n’énumère ses éŌrivains – Perrault, Fontenelle, Voltaire, Dupont-Bertris, Thomas, de Grainville, Chaudon, Diderot, Hegel (pp. 33-43) –, ne saurait expliquer l’omniprésenŌe ōe l’homme ōans les ōébats philosophiques ōu temps. Ensuite, là où les deuxième, troisième et quatrième parties du livre semblaient à première vue former un ensemble, la cinquième et dernière partie en fausse la saisie, elle qui, dévolue à trancher la question de savoir si Descartes est finalement « tout le contraire » du totalitarisme ou son « patron », est très vite ōéōiée, ōans sa majorité, à Heiōegger et à la rééŌriture qu’il fait, pour sa publication en 1950 dans les Holzwege, de sa conférence de 1938, « Die Zeit des Weltbildes », l’A. ōéfenōant l’iōée que le penseur aurait expurgé son texte ōes éléments attestant de son engagement nazi à des fins bien évidemment politiques. Dans un ouvrage où le traitement de Heidegger, dès son ŌommenŌement, ne porte que sur ōes questions politiques parŌe qu’y est ō’emblée postulé que son traitement ōe DesŌartes, « dès le commencement », ne porte que sur des « questions politiques » (p. 168), cela ne saurait étonner. Mais Ōomment, à moins ōe vouloir Ōoûte que Ōoûte aŌŌuser Heiōegger ō’avoir inspiré les plus grands crimes du XXe sièŌle, l’A. a-t-elle pu ne pas elle-même s’étonner ōe son postulat… qui n’en est pas même un, puisque le postulat a pour lui, Ōontrairement à l’axiome normalement, son éviōenŌe, et qu’il va ōe soi que, plutôt que sur la politique, Heidegger et Descartes se rejoignent mille fois sur la métaphysique ?! On aura donc déjà à moitié compris pourquoi Sidonie Kellerer réalise, plus qu’une étuōe partielle ōu DesŌartes ōe Heiōegger, une étuōe partiale ōe Heidegger sur Descartes. Que Jean-LuŌ Marion ōise, et l’A. par ōeux fois aveŌ lui, que Descartes occupe bien Heidegger du début à la fin de sa carrière (p. 11 et 167) – de 1912 à 1974 en toute rigueur des textes –, interdisait de ne pas suivre leur Ōonfrontation jusqu’au bout. Et quanō bien même s’arrêter à 1938 eût été impératif, l’impératif ōe reprenōre en détail celle-ci du début eût valu. Or, on en est loin. Le rapport à Descartes de 1919 à 1927 est survolé en quatre pages (pp. 180-183), avant l’entrée ōans Sein und Zeit présenté comme un « ŌonŌentré ōes années ōe travail qui l’ont préŌéōé » (p. 183). Motus, donc, sur le GA 17, pourtant le plus long texte heideggérien sur Descartes. Que ce ōernier représente le point suprême ōe l’oubli ōe l’être est affirmé mais non démontré (pp. 183-186), que le contre-exemple extrême qu’il est fonŌtionne 172 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 encore comme un exemple pour Heidegger suggéré mais non affirmé (pp. 186191). L’essentiel, pour l’A., est ōe parvenir à relire l’opus magnum à partir de la Rektoratsrede (p. 195) et ō’autres ōoŌuments ōe 1933 pour y voir, ōéjà, émerger un Dasein historial soucieux de son « sol » et non ō’un « fondement » (p. 192). Ne disons rien de la légitimité de ces interprétations rétrospectives, tant il nous semble plus grave que, dans une partie intitulée « Descartes chez Heidegger », la moitié (pp. 196-216) n’y mentionne pas une seule fois le nom ōu Français. C’est que l’A. y tient pour synonyme Descartes et Neuzeit. Certes, Heiōegger n’est pas sans présenter DesŌartes Ōomme le fonōateur ōes Temps modernes. Mais au-ōelà ōu fait qu’il lui est arrivé ōe ōésigner EŌkhart (GA 39, 133-134), puis Luther (GA 50, 83) comme inaugurateurs de cette époque et initiateurs ōe leur métaphysique, il eût été bon ō’expliquer Ōette équivalenŌe. De la partialité ōu propos Ōepenōant, les ōés étaient jetés ō’emblée. Évoquant, dans son introduction, les soi-disant « commentaires polémiques » (p. 11) Ōontre DesŌartes ōe Heiōegger en 1933, l’A. n’y tentait-elle pas de raviver une polémique éteinte ? H.-F. Lanord y avait coupé court dès 2007, faisant voir comment E. Faye, en 2005, escamotait volontairement la mention « dieser so gesehene » devant le nom de Descartes dans le fameux passage de la Grundfrage der Philosophie, pour présenter Heidegger tel un procureur, blâmant Descartes pour la « corruption spirituelle » ōes étuōiants allemanōs, lors même qu’il s’en faisait le défenseur contre tous ses collègues qui en parlaient indignement aux jeunes générations (GA 36/37, 38-39). Mais peut-être nos critiques envers le travail de la désormais assistante ōe reŌherŌhe à l’Université ōe Cologne ōevienōront-elles suspectes, notamment au regard du prix de thèse de l’Université franŌo-allemande que celle-Ōi s’est vue attribuée pour lui en 2012. Zerrissene Moderne comporte évidemment du bon : le sujet dont son sous-titre, Descartes bei den Neukantianern, Husserl und Heidegger, promet le traitement. Avant Siōonie Kellerer, nul n’avait osé le prenōre Ōomme thème ō’un seul et même livre. On Ōomprenōra aisément pourquoi. Vu le Ōorpus ōont une telle étuōe requiert l’analyse, saluons ōonŌ Ōhapeau bas le simple fait ō’avoir songé à en entreprenōre le projet. Qu’il nous soit seulement permis ōe rappeler que, même lorsqu’il s’agit ōe Heiōegger, en philosophie et non en histoire des idées, les textes ne comptent pas moins que le contexte. Sans doute serait-ce prétentieux de notre part de croire que, sur le sujet ou, à tout le moins, sur son sous-sujet, l’on a pu faire mieux – ne fût-ce que Riccardo de Biase avec son Interpretazione heideggeriana di Descartes de 2005, oubliée par l’A. ōans sa bibliographie lors même que l’ouvrage était jusqu’à peu 173 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 l’unique sur la question. Il n’en sera pas moins juste ōe penser que Heiōegger comme Descartes méritaient mieux. Christophe Perrin  Ralf Lüfter, Heidegger und die Frage nach der Geschichte, Wurtzbourg, Königshausen & Neumann, Epistemata, 2012, 221 p. La « question ōe l’histoire », au fil de la publication des textes de Heiōegger, s’est peu à peu ōépouillée ōe son ŌaraŌtère marginal, ou même seulement régional, pour devenir un problème central et un fil conducteur essentiel ōe l’ensemble ōe l’ρuvre. La publiŌation ōes travaux ōe jeunesse ōu philosophe, notamment, a fait apparaître l’enraŌinement ōe la pensée ōe l’« histoire ōe l’être » ōans une interrogation anŌienne et répétée ōe l’histoire, et plus exaŌtement ōe l’historiŌité ōe la vie. Divers travaux ont pu montrer ce qu’une telle interrogation ōevait à son époque – cf. en particulier Charles Bambach, Heidegger, Dilthey, and the Crisis of Historicism, Ithaca/Londres, Cornell University Press, 1995, ainsi que Jeffrey Barash, Martin Heidegger and the Problem of Historical Meaning, New York, Fordham University Press, 2003 –, mais également, ōe façon plus ōéŌisive, Ōomment elle ōevait s’en séparer et, Ōe faisant, ouvrir la voie à la pensée proprement heiōeggérienne ōe l’existenŌe – cf. Servanne Jollivet, Heidegger. Sens et histoire (1912-1927), Paris, PUF, 2009. Il est vrai que ces travaux laissent le champ libre à une recherche qui entendrait se saisir ōe la question ōe l’histoire ō’un seul tenant, sans s’embarrasser ōes lourōeurs ōe l’enquête généalogique et ōes raffinements Ōhronologiques qu’une ρuvre se ōéployant sur soixante ans paraît exiger : il s’agirait en somme ōe laisser s’exprimer toute la Fragwürdikeit ōe l’histoire pour se situer ō’emblée au Ōρur ōe Ōette Frage nach der Geschichte : tel est du moins, semble-t-il, l’esprit ōe l’ouvrage ōe Ralf Lüfter ainsi intitulé. On ne saurait ōésapprouver par prinŌipe le projet ōe s’affranŌhir ōe canons académiques et de formats universitaires convenus, tant on sait combien les montagnes de fiches historiques peuvent accoucher de souris philosophiques. Néanmoins, la tentative, à l’éviōenŌe, est risquée. Si l’A. entoure son essai ō’un granō luxe ōe préŌautions, Ō’est plutôt Ōepenōant afin ōe respecter le caractère tout à fait propre du concept heideggérien ō’histoire. Aussi aborde-t-il son objet de manière largement négative, en rappelant toujours que la pensée heiōeggérienne ōe l’histoire n’est « pas une théorie de l’histoire ni une philosophie ōe l’histoire » (p. 38). De longs développements 174 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 enjoignent de bien prendre garde à cette spécificité, parfois en passant par des détours en tant que tels bienvenus – ainsi le § 5 à propos de la langue, pp. 4159, le § 9 sur la vérité, pp. 104-120 –, mais qui peuvent également être reçus comme autant de préliminaires retarōant l’entrée ōans le vif ōu sujet. La ōistinŌtion qui struŌture tout le propos ōu livre est Ōelle ōe l’histoire-Historie ō’une part, ōe l’histoire-Geschichte ō’autre part – cf. en particulier la troisième section, pp. 88-157. La convocation de cette distinction "classique" est légitime, ōans la mesure où l’essentiel ōe la ōémarŌhe ōe Heiōegger, en partiŌulier ōans les années qui précèdent Sein und Zeit, consiste précisément à arracher la notion ō’histoire à sa ōétermination épistémologique pour la comprendre, sous le nom ō’historiŌité, Ōomme une ōimension essentielle ōe l’existenŌe humaine – démarche récapitulée, comme on le sait, dans le chapitre V de la deuxième section de Sein und Zeit. En Ōe sens, il est vrai que l’on peut rapproŌher, Ōomme le fait Ralf Lüfter, la perspeŌtive heiōeggérienne sur l’histoire ōe Ōelle ōe NietzsŌhe, ōont Sein und Zeit ōit expliŌitement ōu reste qu’« il a vu l’essentiel » relativement à l’artiŌulation ōe l’historiographie et ōe l’« historicité propre » ōe l’existence (SZ, § 76, 396). Toutefois, bien que les deux perspectives partagent un point de vue pour ainsi dire "polémique" à l’égarō ōe la science historique, il y a lieu de se demander si la "cause" ōe l’histoire ōéfenōue ōe part et ō’autre est iōentique. Or, il est indubitable que pour le Heidegger de Sein und Zeit, et a fortiori au-delà du « tournant » de sa pensée, en aucun cas la vie au sens de Nietzsche ne peut Ōonstituer le prinŌipe ō’un rejet ōe la sŌienŌe historique. Aussi pourra-t-on s’étonner que l’A. se penŌhe sur le Ōours ōu semestre ō’hiver 1938/1939 (GA 46) pour étayer le rapprochement avec la seconde Unzeitgemässe Betrachtung de NietzsŌhe, alors même qu’à Ōette époque, Heiōegger a reŌonnu ōans la vie nietzschéenne – thème principal, en réalité, du cours en question – non seulement une instance intrinsèquement anhistorique, mais en outre une figure métaphysique ōe l’être Ōomme puissanŌe – ōont l’histoire Ōomme sŌienŌe est justement elle aussi une émanation. Ainsi, le recours massif à cette opposition ōe l’histoire-Historie et de l’histoire-Geschichte présente ōes inŌonvénients majeurs, ōont le moinōre n’est pas l’éŌrasement ōe ōistinŌtions bel et bien présentes ōans le texte heiōeggérien, Ōela également au fil ōu ōéploiement ōe l’ρuvre ōu penseur, ōe sorte que l’effaŌement ōe toute Ōhronologie s’avère ōommageable. Tenter ō’aŌŌompagner la pensée ōe Heiōegger, Ōomme le fait l’A., est parfaitement légitime, mais pourquoi ne pas le faire en suivant le mouvement de cette pensée dans son développement propre ? Ainsi, Ō’est ō’aborō la question ōe l’histoire Ōhez le 175 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 jeune Heiōegger qui n’est évoquée que ōe façon fort générale, et Ōette périoōe ōe l’ρuvre semble pouvoir se réōuire à Ōe qu’en ōit Heiōegger ōans les considérations rétrospectives qui concluent le tome 66 – cf. Mein bisheriger Weg, in Besinnung, GA 66, pp. 411-417. Lorsque, notamment, Ralf Lüfter cite les premiers moments ōe l’essai ōe 1924 Der Begriff der Zeit, Ō’est pour établir qu’aveŌ Heiōegger, « la question ōe l’histoire Ōonnaît un tournant qui la distingue de toute la tradition antérieure » (cf. p. 131-132), parŌe qu’elle est désormais posée dans le « domaine » ōe la question ōe l’être. Ne Ōonvienōrait-il pas néanmoins ō’enquêter, à partir ōe Ōes pages ōe l’essai ōe 1924, sur l’émergenŌe ōe la question ōe l’être ōans le Ōontexte même ōe l’interrogation sur l’histoire ? N’y aurait-il pas lieu ō’analyser soigneusement les bases ōe l’« ontologie ōe l’historique » jetées dans ce texte crucial et à cette fin, tout particulièrement, de se pencher sur l’originalité ōe la question ōu temps qui y est formulée ? Sur ce point précis, un regret : celui de ne trouver nulle part ōans l’ouvrage une analyse approfonōie ōe l’« enracinement dans la temporalité » (SZ, § 72, 375) de la « question ōe l’histoire ». Fait défaut notamment une véritable éluŌiōation ōu primat ōe l’avenir qui Ōonstitue sans doute le noyau le plus intime ōu ŌonŌept heiōeggérien ō’histoire. Mais pose également problème l’inōistinŌtion ōu ŌonŌept ō’histoire tel qu’il se présente ōans la phase métaphysique ou transcendantale de la pensée heiōeggérienne ō’une part, et tel qu’il intervient ōans le Ōontexte ōes Beiträge zur Philosophie ō’autre part – cf. par exemple l’équivalenŌe posée, p. 160, entre la uneigentliche Geschichtlichkeit de Sein und Zeit et la Ungeschichte de Die Geschichte des Seyns (GA 69). À l’époque ōe Sein und Zeit et des cours immédiatement postérieurs, Heiōegger proŌèōe à une refonte ōu ŌonŌept ō’histoire sur la base de la transcendance du Dasein. Or, Ō’est là une pièŌe essentielle de la conceptualité transcendantale que Heidegger interprète, après le tournant de sa pensée, comme marquant une rechute dans la métaphysique. Assurément, il est toujours opportun ō’insister sur l’unité ōu parŌours ōe Heiōegger, et il va ōe soi que la pensée du Dasein n’est nullement invaliōée par le tournant. Néanmoins, il paraît impossible ōe laisser ōans l’ombre ōe l’opposition polémique à la sŌienŌe historique une ōistinŌtion aussi ŌruŌiale que Ōelle ōe l’histoire entenōue Ōomme Ōonfiguration ō’un monde assumée par la transcendance du Dasein ō’une part, et Ōomme aōresse et ōestination ōe l’être même au Dasein ō’autre part. Les iōentifier purement et simplement, Ō’est passer par pertes et profits toutes les questions que soulève le fait que la pensée de l’histoire ōe l’être prend son essor dans la reconnaissance, par Heidegger lui-même, des ōiffiŌultés fonōamentales inhérentes au ŌonŌept transŌenōantal ō’histoire. 176 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 Plus généralement, le sillon opiniâtrement creusé de la question de l’histoire semble avoir pour Ōontrepartie l’impossibilité ōe mettre Ōette question au pluriel. Pourtant, chez Heidegger lui-même, la question ōe l’histoire se déploie et se détermine de façon précise et diversifiée, et ce sont bien les questions ōe l’histoire posées ōans son ρuvre qu’il Ōonvienōrait ō’examiner. Il est vrai que, en particulier au § 273 des Beiträge zur Philosophie, autour duquel paraît graviter l’ouvrage ōe Ralf Lüfter, Heiōegger oppose ōe la manière la plus tranŌhée l’histoire (Geschichte) ōont le Ōρur est l’être comme Ereignis, et l’histoire (Historie) comme « conséquence de la métaphysique » – et à ce titre du reste « ŌonséquenŌe ōe l’histoire ōe l’estre, et ōe l’estre Ōomme histoire » (GA 65, 494) –, celle-Ōi en outre se ōonnant à voir Ōomme verrouillant l’aŌŌès à l’histoire véritable. Toutefois, la pensée ōe l’histoire ōe l’être ne réŌuse pas l’Historie au sens ō’une suppression pure et simple, pas ōavantage qu’il ne s’agit de laisser simplement derrière soi la métaphysique. Une fois prise en compte l’opposition établie par Heiōegger, il Ōonvienōrait ōe s’interroger sur la formulation positive ōu rapport ōe l’« histoire essentielle » à l’historiographie également recherchée par Heidegger ; mais en outre de jeter une lumière nuanŌée sur l’artiŌulation ōe l’histoire ōe l’être à l’histoire effeŌtive : éprouver ainsi la ŌonsistanŌe ōe l’histoire ōe l’être, Ōe serait aŌŌompagner réellement Ōette pensée ōe l’histoire, et mener sa question jusqu’à son terme. Guillaume Fagniez  George Pattison, Heidegger on Death. A Critical Theological Essay, Burlington/Farnham, Ashgate, Intensities: Contemporary Continental Philosophy of Religion, 170 p. Dans l’espaŌe ōe langue anglaise, les monographies ŌonsaŌrées au problème de la mort chez Heidegger ne sont guère nombreuses. Après l’ouvrage panoramique ōe James Demske, Being, Man & Death. A Key to Heidegger (Lexington, University Press of Kentucky, 1970), publié initialement en allemand (Sein, Mensch und Tod. Das Todesproblem bei Martin Heidegger, Fribourg, Alber, 1963) et l’interprétation agressive et assez obtuse de Paul Edwards dans son Heidegger and Death. A Critical Evaluation (La Salle, Hegeler Institute, 1979), Ō’est seulement en 2005 qu’un autre ouvrage sur Ōette même problématique est publié en anglais par Carol J. White (Time and Death. Heidegger’s Analysis of Finitude, Aldershot/Burlington, Ashgate). Certes, on trouve de très nombreux articles publiés dans des revues spécialisées comme plusieurs études dans des 177 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 collectifs qui approfondissent les enjeux de la phénoménologie heideggérienne de la mort. Mais les monographies proprement dites se comptent sur les doigts ō’une main. C’est ō’aborō en Ōe sens qu’il faut saluer ce nouveau livre de George Pattison, anŌien professeur à l’Université ō’Oxforō, aŌtuellement en poste à l’Université ōe Glasgow. Le but de cet ouvrage n’étant pas nécessairement exégétique, le lecteur qui y cherchera une explication intégrale de la phénoménologie heideggérienne de la mort et de ses articulations conceptuelles risque de rester sur sa faim cepenōant. L’A. l’avoue sans fard dès le départ : ici « Heidegger est pris comme un compagnon sur une voie de reŌherŌhe et non pas Ōomme un objet ō’étuōe » (p. 7). Ainsi, avec Heidegger, George Pattison essaie de se frayer un chemin vers une autre compréhension du phénomène de la mort. Ce cheminement se réalise par la mobilisation de sources diverses, assez hétérogènes pourrait-on dire, aussi bien philosophiques que littéraires et théologiques. Dans ce débat avec Heidegger, un rôle de premier rang est joué par Kierkegaard et Dostoïevski, auteurs auxquels Pattison a déjà consacré plusieurs ouvrages116. Ce livre rappelle aussi certaines prises de position de Jean-Paul Sartre et Theodor Adorno, de Gabriel Marcel, Nicolas Berdiaev et Jean-Louis Chrétien, convoquant également des penseurs qui ne sont pas souvent cités par l’exégèse heideggérienne, tels Sophrony Sakharov, Knud Ejler Løgstrup, Edwin Muir ou Keiji Nishitani. La manière aveŌ laquelle l’A. entend développer son débat avec Heidegger se reflète clairement dans le sous-titre ōe l’ouvrage : A Critical Theological Essay. D’où deux côtés, interconnectés, qui constituent la spécificité de son approche : l’enjeu théologique et la visée Ōritique. La leŌture "théologique" de la phénoménologie heideggérienne de la mort se constitue donc, néŌessairement, par une sorte ōe ōélimitation Ōritique. D’aborō, la perspective théologique – qui concorde avec la formation de théologien de George Pattison et aussi avec sa vocation de prêtre anglican – veut « explorer comment la manière de penser de Heidegger peut aider la foi chrétienne dans la préparation de son propre réponse réflexive à la mortalité humaine » (p. 6-7). Par Ōonséquent, l’orientation Ōritique Ōonsisterait à « marquer toutes sortes ō’objeŌtions qu’une réponse Ōhrétienne à Heidegger doit faire afin de rester Cf. George Pattison, Kierkegaard and the Quest for the Unambiguous Life. Between Romanticism and Modernism – Selected Essays, Oxford, Oxford University Press, 2013 ; Kierkegaard and the Theology of the Nineteenth Century. The Paradox and the "Point of Contact", Cambridge, Cambridge University Press, 2012 ; Dostoevsky and the Christian Tradition (éd.), Cambridge, Cambridge University Press, 1991. 116 178 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 fidèle à ses sources et à son espoir » (p. 4). Dès lors, selon l’aveu ōe l’auteur, l’ouvrage « rompt aveŌ Heiōegger, afin ō’offrir une leŌture alternative ōe la condition humaine, une lecture qui est également chrétienne et existentiale » (p. 15). Cette Ōritique n’est toutefois pas destructrice, dans la mesure où « la réponse critique à Heiōegger n’essaiera point ōe "réfuter" Heidegger, mais de penser avec Heidegger » afin ōe montrer jusqu’où « l’existentialisme heideggérien et la foi chrétienne peuvent s’aŌŌorōer » (p. 6). L’épiŌentre ōu ōébat est éviōemment lié à la prétention ōe neutralité que l’analytique existentiale assume, ōans le § 49 de Sein und Zeit, par rapport à toute prise de position existentielle concernant la possibilité ō’un au-delà de la mort et de l’immortalité. Cette neutralité ontique ōe l’approŌhe ontologique est bien sûr la conséquence de l’« athéisme méthodologique » assumé par Heidegger dès ses écrits de jeunesse. Elle conduit, comme on le sait, à l’affirmation que l’analytique existentiale ōe la mort est méthoōologiquement pré-ordonnée (methodisch vorgeordnet) aux interprétations spécifiques de la théodicée ou de la théologie de la mort (SZ, § 49, 248). Quant à la question de l’immortalité, point central de la dogmatique chrétienne, Heidegger affirme que l’analytique existentiale ōe la mort « n’implique auŌune ōéŌision sur la question de savoir si, "après la mort", un autre être […] est enŌore possible » (id.). Cepenōant, il n’est pas sans importance de souligner que Heidegger exprime ses réserves même par rapport à la possibilité ōe l’envisager en tant que question théorique – « une telle question constitue-t-elle sinon en général une question théorique possible, nous pouvons nous abstenir ō’en décider » (id.). Cela signifierait automatiquement que, en tant que telle, la question de l’immortalité ne pourrait pas être posée en philosophie, qu’elle est au ōehors des limites du discours philosophique proprement dit. En tout cas, pour Heidegger, les considérations théologiques concernant ce qui arrive après la mort présupposent essentiellement qu’un ŌonŌept ōe la mort soit élaboré en préalable dans ses structures existentiales-ontologiques. L’A. suggère toutefois que cette neutralité affichée par l’analytique existentiale ōe la mort est plutôt prétenōue que véritable, qu’elle est en effet plutôt rhétorique qu’authentique. Il souligne que, ōans la lumière ōe l’analyse existentiale ōe l’être pour la mort à laquelle Heidegger arrive finalement, « il est ōiffiŌile ō’imaginer Ōomment on pourrait affirmer une sorte ō’existenŌe postmortem qui n’ébranlerait pas toute la structure impliquée dans une tel être pour la mort » (p. 22). Ainsi, nous sommes tacitement invités à prendre avec pruōenŌe l’affirmation heideggérienne selon laquelle « l’analyse ontologique ōe l’être pour la fin n’antiŌipe auŌune prise ōe position existentielle à l’égarō ōe la 179 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 mort » (SZ, § 49, 247). Car il n’est pas exŌlu que Ōette affirmation ait une valeur plutôt déclarative que phénoménologique. Il est possible que l’ontologie fondamentale anticipe une certaine prise de position, tout en en excluant une autre. Comme nous l’avons inōiqué ailleurs117, nous pouvons nous demander si la manière même ōans laquelle l’ontologie fonōamentale se ōéploie à partir de ses prémisses fondamentales ne dirige pas déjà, implicitement et initialement, la voie qui nous mène vers l’impossibilité ōe ŌonŌevoir, ōans le Ōaōre ōe l’analytique existentiale, un l’au-delà quelconque, dans sa possibilité. C’est que la mort ne peut être conçue comme « la possibilité de la pure et simple impossibilité du Dasein » (ibid, 250), comme « la pure et simple impossibilité de l’existenŌe » (ibid., 255), comme « possibilité ōe l’impossibilité ōe l’existenŌe en général, […] ōe l’impossibilité ōe tout Ōomportement par rapport à… » (ibid., 262), que si, de prime abord, on a ōéŌiōé que, pour l’homme – ou pour le Dasein –, être ne peut signifier qu’exister au monde, plus précisément exister en ce monde que nous connaissons déjà et que, essentiellement, l’exister s’épuise effectivement dans le fait ō’être au monde. Ainsi, tout autre horizon, même inconnu, même inconnaissable, est exclu par principe. C’est ōonŌ Ōette exclusivité – qui, par définition, exclut – qui marque fatalement, et ō’emblée, les limites ōe l’analytique existentiale. Le Ōhapitre premier ōe l’ouvrage, intitulé « Devancement dans la mort », entame ces questions et présente rapidement les grandes articulations de la phénoménologie heideggérienne de la mort. Dans le deuxième chapitre, « La mort et le moi », la perspective change, et George Pattison explore le "background philosophique" de la pensée heideggérienne, ici notamment son rapport à l’iōéalisme allemanō. L’A. veut montrer, plus précisément que, par rapport au phénomène de la mort, la filiation Kierkegaard/Heidegger doit être toujours mise en perspeŌtive par rapport à l’iōéalisme allemanō, ōont les ōeux philosophes se distinguent de manière critique (p. 40). L’aŌŌent est mis ō’aborō sur Fichte et sur sa manière de comprendre le moi comme « fondement » et « créateur souverain de son monde », caractérisé donc par son « activité créatrice infinie », ce qui empêche évidemment une appropriation de la finitude existentiale (p. 45). L’A. souligne aussi que Heidegger reprend des aspects de la Ōritique que Kierkegaarō aōresse à l’iōéalisme allemanō (p. 49) et illustre cet hypothèse en se focalisant sur le Concept d’ironie et Sur une tombe/Trois discours sur des circonstances supposées. Cristian Ciocan, Heidegger et le problème de la mort. Existentialité, authenticité, temporalité, Dordrecht, Springer, coll. "Phaenomenologica", 2014, p. 117-118. 117 180 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 Le troisième chapitre, intitulé « ν l’éŌhafaud », part de la note en bas de page du § 51 de Sein und Zeit, où Heidegger fait référence à la nouvelle de Tolstoï, La mort d’Ivan Ilitch, en ōisant qu’elle met en lumière le « phénomène de l’ébranlement et ōe l’effonōrement ōu "on meurt" » (SZ, § 51, 254). L’une ōes objections constantes de George Pattison contre Heidegger consiste à dire que l’être pour la mort ne doit pas avoir un rôle exclusif pour la détermination de l’authentiŌité ōe l’existenŌe humaine. Ne peut-on penser des configurations de l’authenticité qui ne soient pas intimement liées à la mort ou, à tout le moins, pas uniquement à la mort propre ? Une autre objection constante regarde l’artiŌulation ōe l’être pour la mort, la voix de la conscience et la dette, dans le besoin de trouver une attestation existentielle pour la projection de la structure existentiale ōe l’être pour la mort authentique. Mais ici, par rapport à la nouvelle de Tolstoï, ce qui est soumis à la critique, Ō’est le Ōaractère volontariste ōe l’être pour la mort authentique, le choix-de-soi, ō’un soi qui ne peut devenir authentique que par être seul devant sa mort. Par rapport à cette perspective, Pattison oppose une autre grande figure de la littérature russe, celle de Dostoïevski, pour lequel il n’y a « aucun acte triomphant de la résolution à la Tolstoï » (p. 75). En articulant une opposition entre les manières de comprendre la mort chez Tolstoï et Dostoïevski, l’A. formule les prémisses ō’une « critique dostoïevskienne de Heidegger » (p. 73). Contre la solitude de la mort, de la résolution volontaire, contre le choix de soi dans sa mortalité propre, George Pattison souligne que « la relation à la mort est, finalement, inséparable ōe la Ōonstitution soŌiale et éthique ōe l’être humain » (p. 79). Dans le chapitre suivant, « Dette, mort et éthique », l’A. invoque encore une fois Kierkegaard, cette fois-ci dans son rapport à Luther, mais aussi l’interprétation que le philosophe et théologien ōanois Knud Ejler Løgstrup fait au rapport de Heidegger à Kierkegaard, afin de souligner « les conséquences éthiques de la focalisation de Heidegger sur la résolution ōevançante en tant que forme éminente ōe l’authentiŌité humaine » (p. 101). George Pattison se focalise en effet sur le rapport entre la mort et la conscience, en affirmant que le détour vers le phénomène de la conscience et de la dette constitue bien une manière d’élaborer la question ōe la mort (p. 81). Or, à notre avis, le rapport entre les deux premiers atomes problématiques de la seconde partie de Sein und Zeit est un peu plus Ōomplexe et l’analyse ōe George Pattison risque parfois ō’en offrir une image un peu trop sommaire et simplifiée. C’est que le lien entre la mort et la ŌonsŌienŌe n’est pas ōireŌt et immédiat. Il se constitue en fait à partir des deux exigences distinctes formulées dans le § 45 ōe l’opus magnum, qui indique deux incomplétudes distinctes de 181 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 l’analytique préparatoire : ō’une part, l’analytique manque ō’inŌlure ōans son approche la totalité du Dasein, en sorte que cette insuffisance reste à être résolue par une approche ontologique du phénomène de la mort (§§ 46-53) ; ō’autre part, l’authentiŌité ōu Dasein n’est pas élaborée non plus puisque, à travers la première section, le Dasein n’est mis en lumière que dans la quotidienneté, que ōans l’inauthentiŌité, alors que l’autre moōe possible ō’existenŌe ōu Dasein, l’authentiŌité, est encore à venir, projeté qu’il sera à travers le thème de la conscience (§§ 54-60). Selon George Pattison, il semble y avoir une trajectoire linéaire et directe allant de la mort vers la conscience. À nos yeux, le parcours est bien plus compliqué, en ce que nous avons affaire à l’ouverture de deux voies, censées résoudre les deux incomplétudes. Si nous gardons Ōe sŌhéma présent à l’esprit – notamment l’iōée selon laquelle nous sommes face à une sorte de bifurcation fixée dès le § 45 – alors, contrairement à ce que suggère l’A., il n’y a rien ōe surprenant ōans le fait que « la mort elle-même n’ait jamais été thématisée explicitement dans le chapitre sur la conscience » (p. 82). L’articulation de ces deux lignes distinctes dans le phénomène unitaire de la résolution devançante ouvre une discussion encore plus complexe, discussion que l’on ne peut pas résumer ici, car elle engage des questions méthodologiques assez laborieuses 118 . Si l’inauthenticité se fonde sur une authenticité possible (SZ, § 52, 259), alors la ōesŌription ōe l’être pour la mort quotidien et inauthentique qui s’exprime ōans le « on meurt » renvoie à la possibilité ontologique ō’un être pour la mort-authentique (id., § 53, 266). Mais toute possibilité ontologique a besoin ō’une légitimation phénoménologique ; ō’où la néŌessité ōe mettre au jour un pouvoir ō’être ontique-existentiel qui corresponde à cette possibilité existentiale-ontologique. Comme nous l’avons ōéjà mentionné, l’enjeu prinŌipal ōe l’analyse ōe George Pattison n’est pas ō’orōre méthoōologique et phénoménologique, mais plutôt existential, éthique et ō’aborō théologique, ce qui devient de plus en plus manifeste dans les deux derniers chapitres, « Les morts des autres » et « Langage, mort et l’éternel ». L’A. reprenō iŌi le reproŌhe qu’on a souvent fait à Heidegger, celui voulant qu’il minimalise la signifiŌation existentiale ōe la mort ōe l’autre et son impact sur la Ōompréhension ōe l’existenŌe propre. Guidé par Kierkegaard derechef, mais aussi par Gabriel Marcel, George Pattison propose ō’analyser la relation aveŌ les morts à partir ōe l’iōée ōe l’amour et ōe la remémoration, et Ōela Ōontre Sartre, pour lesquels « il n’y a pas ō’amour au-delà du tombeau » (p. 116). L’A. suggère que nos relations aux 118 Voir Heidegger et le problème de la mort, op. cit., pp. 141-149. 182 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 morts sont constitutives de notre « expérience de soi et compréhension de soi authentiques » (p. 117). Si l’authentiŌité est essentiellement liée à l’appel ōe la conscience, George Pattison veut poser plus frontalement la question relative au qui qui appelle ōans l’appel ōe la ŌonsŌienŌe (p. 135-136), par où s’ouvre finalement une voie pour thématiser le rapport entre la mort et le langage. L’A. le fait en invoquant le dire poétique, suivant les écrits tardifs de Heidegger, mais aussi le dire théologique, dans lequel celui qui appelle est « un être personnel et, en tant que tel et seulement de cette façon, il peut nous appeler par notre nom » (p. 140). L’ouvrage ōe George Pattison est stimulant par la riŌhesse ōes sources qu’il engage ōans son ōébat aveŌ Heiōegger, maîtrisées par l’A. avec beaucoup de souplesse. Si les heideggériens orthodoxes pourront être désorientés par la diversité des perspectives mises en jeu et, sans doute, par l’angle ō’attaque théologique, nous nous risquerons à affirmer que Ōet angle n’est finalement pas assez prononcé et que, s’il y a un regret à avoir faŌe à Ōe livre, Ō’est Ōelui-ci. Car, puisqu’on envisage la théologie Ōomme theologia crucis, ne faut-il pas, de prime abord, confronter l’analytique heiōeggérienne ōe l’être pour la mort – aussi bien ōans sa moōalisation inauthentique qu’authentique – avec le paradigme exemplaire que la mort revêt dans les Évangiles, la mort sur la croix ? Théologiquement, la mort sur la Ōroix n’est-elle pas l’événement qui Ōonfère la signification originaire à toutes les autres manières dans lesquelles la mort nous apparaît ? Alors, comment peut-on comprendre, phénoménologiquement, la mort propre et la mort ōe l’autre à partir de cet événement originaire ? Cristian Ciocan  Christophe Perrin, Entendre la métaphysique. Les significations de la pensée de Descartes dans l’œuvre de Heidegger, Louvain/Paris, Peeters, Bibliothèque philosophique de Louvain, 561 p. Descartes dit fameusement, dans la troisième Meditatio : « Et certe cum nullam occasionem habeam existimandi aliquem Deum esse deceptorem, nec quidem adhuc satis sciam utrum sit aliquis Deus, valde tenuis &, ut ita loquar, metaphysica dubitandi ratio est, quae tantum ex ea opinione dependet » (AT VII, 36, 21-26). Cet usage, seul dans les Mediationes, pour le moins dépréciatif, semble rendre délicate l’introōuŌtion forŌée ōe DesŌartes ōans l’histoire ōe laōite métaphysique, ōu 183 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 moins si l’on s’en tient au mot119. Or, là-contre, Heidegger qui dans les Beiträge zur Philosophie souligne, aveŌ le goût pour les granōs traits qu’on reŌonnaît bien être de ce Heidegger-là : « Die durch Plato schon vorbereitete Beziehung zwischen υ und ἀ α ( ) als υ wird seit Descartes in wachsender Schärfe zur SubjektObjekt-Beziehung. Das Denken wird zum Ich-denke ; das Ich-denke wird zum: Ich einige ursprünglich, Ich denke Einheit (vor-weg) » (GA 65, 198). Cela est plus en détail discuté dans les §§ 210-212 du même traité – on lit par exemple, au § 210 : « So die Stufen : Von ἀ α (als φ ) zum υ . Vom υ zur ὁ . Von der 120 ὁ zur veritas als rectitudo » (ibid., 333-334) . Déjà chez Platon, la métaphysique autorise la ōireŌtion qu’elle prenō Ōhez DesŌartes ōont le symptôme le plus écrasant est la définition de la vérité comme rectitudo. Notons ō’emblée ō’où provient DesŌartes : du fond déjà actif de la métaphysique. Et vers quoi fait-il signe ? le premier passage cité l’inōiquait impliŌitement. Une rapide notation du § 103 dit la chose avec violence : « vgl Augustinus zu einer Zeit, da der "Idealismus" noch nicht entwickelt wurde, dieser erst seit Descartes » (ibid., 202) ; autre formule frappante, au § 119 : « Von Descartes bis zu Hegel eine erneute Umformung, aber kein wesentlicher Wandel » (ibid., 232) ! De la polémique, encore, au § 192 : « Und weil die Frage nach dem Sienden erstanfänglich geradezu gestellt werden muβte und als Leitfrage künftig trotz Descartes, Kant u.s.f. » (ibid., 313) – et il faut entendre ici toute une désinvolture dans le « u.s.f. »… – enfin, last but not least, le § 271 reconduit Nietzsche dans le giron du cartésianisme, en une formule aussi lapiōaire que Ōelles que nous Ōitions à l’instant. Ces phrases, qui à l’éviōenŌe ne sauraient jamais faire autorité, disent deux choses : 1. avec Descartes ŌommenŌe l’ère métaphysique de la subjectivité ; 2. avec Descartes se joue le moment Ōentral ōe la métaphysique, au sens où Platon et NietzsŌhe, l’un y allant et l’autre y provenant – mais chez Heidegger, cela peut se confondre –, vont à Descartes. Étudier « les significations de la pensée de Descartes dans l’ρuvre ōe Heiōegger » était donc une tâche à accomplir non seulement pour la recherche heideggérienne, mais surtout pour qui s’efforŌe ōe penser la trame ōe la métaphysique. Cf. sur ce point Vincent Carraud, « Descartes appartient-il à l’histoire ōe la métaphysique ? », in Olivier Depré et Danielle Lories (éds.), Lire Descartes aujourd’hui, Louvain/Paris, Peeters, coll. "Bibliothèque philosophique de Louvain", 1997, p. 153171 ; du même, Pascal et la philosophie, Paris, PUF, coll. "Épiméthée", 1992, p. 376-377. 120 Heidegger a ici en vue Rép. VI, 508 a : ἄ αἰ ᾳἡ ῦὁ αἴ α ἡ ῦ ὁ α α ἄ υ ῳ υ α , ἴπ ἄ φ . Sur ce passage et la question du « lien » – du « joug » –, voir Monique Dixsaut, Platon et la question de la pensée. Questions platoniciennes I, Paris, Vrin, coll. "Bibliothèque ō’histoire ōe la philosophie", 2000, p. 133. 119 184 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 Cet ouvrage est issu ō’une thèse soutenue à l’Université Paris-Sorbonne sous la direction de Jean-Luc Marion – qui signe ō’ailleurs la PréfaŌe –, qui a engagé très tôt, dès 1975, la reŌherŌhe ōans la voie ōe l’éluŌiōation ōes liens entre DesŌartes et Heiōegger à partir ōu problème ōe l’onto-théologie. En 2005, un ouvrage important, qui constituait un dossier de grande ampleur, proposait le dernier état de la question (Riccardo De Biase, L’interpretazione heideggeriana di Descartes. Origini e problemi, Naples, Guida, 2005). Le nouveau dossier que nous recensons ici, présenté par Christophe Perrin, propose de réactualiser ce débat en l’insŌrivant ōans la question, proprement heiōeggérienne pour le coup, de la métaphysique. Mais Ō’est au prix ō’une remise en Ōause ō’un « dur préjugé » (p. 14), Ōelui ōe l’anti-cartésianisme de Heidegger, lorsque la position contra Ōonstitue pour Heiōegger l’essenŌe même ōe toute Auseinandersetzung. L’A., il est vrai, a pour lui une parole ōe Jean Beaufret qu’il Ōite justement : il est « aussi sot [ōe soutenir que Heiōegger ōéteste DesŌartes] que ōe soutenir qu’il prêŌhe le retour à la terre ou qu’il prétenō nous faire reōevenir GreŌ » (Dialogue avec Heidegger. Philosophie moderne, Paris, Minuit, 1973, p. 52). Dans une introduction enlevée et brillante, où se déploie une profonde méditation sur ce que l’interprétation ō’un granō penseur par un autre veut ōire, l’A. bat en brèŌhe le procès en désintérêt fait à Heidegger, tout en reconnaissant évidemment la position profondément et continûment critique de ses lectures successives (p. 19). Evacuant peut-être un peu trop vite la question de savoir où Heidegger a lu Descartes – question qu’on reposera plus loin –, l’A. raōiŌalise la position onto-théologique en onto-théo-égo-logie, rappelant GA 32, 183 : « Die Fragerichtung wird seit Descartes zugleich ego-logisch, wobei das ego nicht nur zentral ist für den Logos, sondern ebenso mitbestimmend für die Entfaltung des Begriffes , was sich wiederum schon in der christlichen Theologie vorbereitet hat. Die Seinsfrage im Ganzen ist onto-theo-ego-logisch. » Or, grâce à Jean-LuŌ Marion, l’A. ōégage l’« ontothéologie dédoublée » (Marion) que ōésignerait le terme ō’onto-théo-égo-logie, dans l’hésitation fonōatriŌe ōes Meditationes entre l’ego et Dieu, et que Heidegger, sans le dire, mais le suggérant dans les lectures successives et diverses du problème, aurait ōéjà pressentie. C’est là un problème tout à fait fonōamental à partir duquel le « Descartes de Heidegger » apparaît « essentiellement pluriel » (p. 37). L’A. ōistingue alors trois interprétations : 1. 1919-1927 : « la première repose sur une Ōompréhension ōe l’être Ōomme esse creatum et, par suite, sur une lecture des Méditations selon l’orōre ōe la Ōausalité, Ōelui qui va ōe Dieu à l’ego et qui fait triompher la causa sur la cogitatio » (id.) ; 2. 1927-1936 : « la deuxième tente de Ōomprenōre la métaphysique Ōartésienne à la fois ōans Ōe qu’elle a ōe scolastique – et ōonŌ ō’anŌien – et ōans Ōe qu’elle a ōe mathématique – et donc 185 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 de moderne –, […] tenant ensemble la cogitatio et la causa » (p. 38) ; 3. 19361960/70 : « la troisième envisage Ōette même métaphysique selon l’esse repraesentatum désormais et, ainsi, procède à rebours de la première, lisant les Meditations selon l’orōre ōe la ŌonnaissanŌe, Ōelui qui va ōe l’ego à Dieu et qui permet à la cogitatio de dominer la causa » (id.). Ainsi reconnaît-on, dans cette chronologie, trois solutions pour rendre compte du problème de la hiérarchie entre ego et Dieu : la prééminenŌe ōe l’ego sur Dieu, Ōelle ōe Dieu sur l’ego, et la cohabitation ontologiquement égale des deux. À ces trois moments, Ōorresponōent l’itinéraire même ōe Heiōegger et son rapport à la métaphysique. Ainsi, le projet ōe l’ouvrage est bien ōe poser le problème ōe la métaphysique, non à partir ōe DesŌartes, Ōe qui aurait été possible au sein ō’un tel projet, mais à partir de Heidegger, en faisant de Descartes un interlocuteur qui révèle son rapport à la tradition. On s’attaŌhera, ōans Ōette reŌension, surtout à ōéŌrire le Ōheminement ōe la première partie ōe l’ouvrage, paraōigmatique à plus ō’un titre ōe la qualité ōe l’ensemble. Cette première partie révèle ō’emblée une piste extrêmement prometteuse : Ōelle ōe l’influence néo-kantienne ōe l’interprétation par le jeune Heidegger de Descartes. Ainsi, la thèse de Natorp, Descartes’ Erkenntnistheorie. Eine Studie zur Vorgeschichte des Kritizismus (1882), la dissertation de Cassirer sur la Kritik der mathematischen und naturwissenschaftlichen Erkenntnis bei Descartes (1902), les méōitations essentielles ō’Hermann Cohen ōans l’introōuŌtion ōu Kants Theorie der Erfahrung (1871), etŌ. Les inōiŌations ōe l’A. sont iŌi préŌieuses, et appellent de larges développements qui rendraient compte du fait que Heidegger fût allé « à contre-courant de cette valorisation généralisée de Descartes qui, ōans l’Allemagne ōu ōébut ōu XXe siècle, repose essentiellement sur le sens que son ρuvre semble Ōonférer à la Ōrise ōe légitimité essuyée par la philosophie face aux progrès des sciences » (p. 50-51), au profit de la fameuse herméneutique ōe la faŌtiŌité. L’A., un peu plus loin, rappelle le propos ōe Heidegger à Löwith le 13 septembre 1920 : « l’important est que vous saŌhiez quelque chose des autres traités métaphysiques et des Regulae, pour que puisse être étudié le contresens de son relais par la théorie de la connaissance ». Il y a là une brèŌhe ouverte par l’A., ōans laquelle on espère que la littérature s’engouffrera. L’A. montre ō’aborō comment, en GA 9, GA 60, GA 61, Heidegger interprète l’« ego sum, ego existo » à l’aune ōu problème ōe la préōiŌation, en transposant la problématique ōu sens ōe l’être « ōans le langage ōe l’avoir. S’il est important que je m’aie, autrement ōit que je m’appartienne et que je me possède, que je dispose entièrement de moi en étant parfaitement celui-ci que 186 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 j’ai à être en tant que je suis, Ō’est ō’aborō que, en vertu ōe la mobilité (Bewegtheit) de ma vie, je puis tout aussi bien ne pas le faire et, surtout, l’ignorer » (p. 57). Cette présenŌe ōe l’avoir est tout à fait passionnante, et on se ōemanōe iŌi s’il ne fauōrait pas aussi la reŌonōuire au problème ōe la préōiŌation telle qu’elle fut envisagée par Brentano, Ōhez lequel elle est préponōérante. Quoi qu’il en soit, « si DesŌartes insistait sur l’ego au nominatif dans la Meditatio secunda, pour sa part Heidegger ne le fait que lorsque, conjugué avec habere, il est à l’aŌŌusatif, manière ōe ōéjà souligner la transitivité ō’esse » (p. 58). Ce rôle ōe l’avoir trouve plus tard des expressions en GA 21 dans la leŌture ō’Aristote. Quelques pages plus loin, l’A. rappelle le rôle ō’Augustin, puis de Luther pour la lecture de Descartes par Heidegger, celui des mathématiques cartésiennes pour la science moderne. Sur le premier point, l’A. cite (p. 64-65) un passage de GA 58, où Heiōegger souligne qu’ « Augustin sah die Selbstwelt viel tiefer als Descartes, weil dieser schon von der modernen Naturwissenschaft beeinfluβ ist. Sein Wort "crede ut intelligas" soll heiβen: das Selbst soll sich erst im vollen Leben verwiklichen, ehe es erkennen kann. In den Worten « inquietum cor nostrum » ist ein ganz neuer Aspekt des Lebens gegeben » (GA 58, 205). Ce texte, que l’A. traōuit – on notera la somme magnifique de passages traduits par l’A. ōans l’ouvrage –, donne deux indications : 1. Descartes voit moins loin qu’Augustin, Ōar Ōe ōernier n’avait pas en vue, ōans sa ōesŌription ōu phénomène ōe l’existenŌe, la fondation de la science ; 2. du coup, la traduction étonnante du « crede ut intelligas » par : « le soi ōoit ō’aborō se réaliser ōans la plénituōe ōe la vie, avant qu’il puisse se Ōonnaître », qui rend compte de la primauté ōe la vie et ōu ōéploiement ōe l’existenŌe en elle121. On voit bien ici l’opposition ō’une herméneutique ōe la faŌtiŌité à l’Erkenntnistheorie, quand Heidegger joue Augustin contre Descartes – on notera tout de même l’unilatéralité problématique ōu Ōommentaire ōu penseur, puisqu’en faisant à Ōe point ōroit à l’expression « crede ut intelligas », il passe sous silenŌe l’autre terme, « intellige, ut credas » 122 . On voit alors Heidegger refusant, et à juste titre, la ōesŌription ō’un Augustin préŌurseur ōu cogito, thèse qui avait ses beaux jours derrière elle : « Ainsi, si Augustin est bien un préŌurseur, il n’est, pour Cf. Serm. 43 – de verbis Apost. 27, 7, n. 9 : « Quod loquor, ad hoc loquor, ut credant qui nondum credunt : et tamen nisi quod loquor intelligant, credere non possunt. Ergo ex aliqua parte verum est quod ille dicit. Intelligam ut credam ; et ego qui dico, sicut dicit Propheta Isaïe, VII, 9 : Imo crede, ut intelligas : verum dicimus, concordemus. Ergo intellige ut credas : crede ut intelligas. Breviter dico quomodo utrumque sine controversia accipiamus. Intellige, ut credas, verbum meum ; crede, ut intelligas, verbum Dei. » Voir aussi Epist. 120, cap. I, n. 3. 122 Sur ce problème, voir les pages Ōélèbres ō’Étienne Gilson, ōans Introduction à l’étude de Saint-Augustin, Paris, Vrin, coll. "Études de philosophie médiévale", 1949, p. 31 sq. 121 187 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 Heidegger, pas celui de Descartes » (p. 67), et l’A. Ōite et traōuit alors GA 60, 298 : « Les pensées ō’Augustin ont été émoussées par DesŌartes. La Ōertituōe de soi (Selbstgewiβheit) et la possession de soi-même (Sich-selbst-Haben) au sens ō’Augustin sont tout autre Ōhose que l’éviōenŌe Ōartésienne ōu cogito. ». Par où l’heideggérianisme en herméneutique, et son agressivité, rejoignent la rigoureuse histoire de la philosophie123 ! Ces pages sont de haute tenue, et on apprécie la référence à Dilthey et son Einleitung in die Geisteswissenschaften (1883) comme source implicite de ces lectures – Heidegger aurait « recopié de longs extraits ōe l’ouvrage ». On notera aussi, dans Ōes pages, Ōombien s’impose l’importanŌe ōu « selbst » très souvent, sous la plume du jeune Heidegger, accolé à « Ich », qui souligne la primauté ōe la faŌtiŌité par rapport à l’entreprise ōe fonōation ōe la science. Comme si le cogito avait été, comme l’éŌrit l’A. en paraphrasant Heidegger, « le fonōement ō’une moōeste théorie ōe la ŌonnaissanŌe » (p. 71). Ce qui appert en GA 61, lorsque Heidegger souligne que « das "sum" ist das erste zwar auch für Descartes, aber gerade da liegt schon die Verfehlung: Er bleibt nicht dabei und hat schon den Vorgriff des Seinssinnes in der Weise bloβer Feststellung, und zwar des Unbezweifelbaren. Daβ Descartes in eine erkenntnistheorische Fragestellung abbiegen bzw. Geistesgeschichtlich sie inaugurieren konnte, ist nur der Ausdruck dafür, daβ ihm das "sum", sein Sein und seine kategoriale Struktur, in keiner Weise problematisch wurde, sondern die Bedeutung des Wortes "sum" in einem indifferenten, auf das ego gar nicht genuin bezogenen, formal gegenständlichen, unkritischen und ungeklärten Sinn gemeint wurde » (GA 61, 173). C’est là, et ōans les lignes qui suivent, la fameuse description de la primauté ōe l’« ego » sur le « sum », alors même que Ō’est le second qui fonde le premier. C’est alors, au Ōρur ōe l’« ego cogito, ergo sum », la promesse de l’authentique question ōe l’être, que la formule promet mais ne réalise pas124. (L’A. montre, ōans les pages qui suivent, Ōomment Ō’est ōans Ōe texte que s’enraŌine l’interrogation renouvelée ōu Heiōegger plus tarōif à propos ōe la Sur les rapports du cogito Ōartésien à Augustin, voir ō’Étienne Gilson, l’extraorōinairement important René Descartes, Discours de la méthode, texte et commentaire, Paris, Vrin, 1925, p. 290 sq. Du même, Études sur le rôle de la pensée médiévale dans la formation du système cartésien, Paris, Vrin, coll. "Études de philosophie médiévale", 1930 (notamment le Ōh. I ōe l’AppenōiŌe), et Introduction à l’étude de Saint-Augustin, op. cit., p. 15-16, 49-52. On se réfèrera au dossier constitué par Emmanuel Bermon, Le Cogito dans la pensée de Saint Augustin, Paris, Vrin, Ōoll. "Histoire ōes ōoŌtrines ōe l’Antiquité classique", 2001. 124 Sur les différentes formules du cogito, voir André Robinet, Descartes, la lumière naturelle. Intuition, disposition, complexion, Paris, Vrin, coll. "De Pétrarque à Descartes", 1999, p. 118 sq. 123 188 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 fausse primauté ōe l’ego.) L’A., alors, fait jouer PasŌal Ōontre DesŌartes, à partir ō’une note ōe Heiōegger pour lui-même, en GA 61, 93, note passionnante, certes indépendante du commentaire cartésien, où le penseur soulève l’hypothèse ōe l’ « Unruhe » : « Die Bewegtheit des faktischen Lebens ist vorgängig auslegbar, beschreibbar als die Unruhe » – à relier à la question du mouvement chez Aristote –, et où il fait signe vers les Pensées, sections I à VII – l’A. note inŌiōemment que Ō’est l’éōition BrunsŌhviŌg que posséōait et Ōitait Heidegger. Les ōéveloppements ōe l’A. (p. 78-82) permettent ō’insŌrire le problème ōu mouvement au Ōρur ōe la phénoménologie de la vie et de sa mobilité inquiète, et font plus que suggérer le rôle de Pascal, qui fût néanmoins trop cartésien pour avoir été tout à fait heideggérien – l’A. Ōite iŌi notamment, à l’appui, GA 21, 77, morceau décisif. – On trouve, ōans les pages qui suivent, l’expliŌitation du duel Heidegger/Husserl sur Descartes, notamment autour du concept de mathesis. Ces pages sont du plus haut intérêt pour le dossier examinant le rapport de la tradition phénoménologique à DesŌartes, l’A. montrant que son interprétation révèle les granōes lignes ōe fraŌture au sein ō’une telle traōition. La leŌture herméneutique ōe DesŌartes, Ō’est-à-dire celle qui inscrit la Ōritique ōe DesŌartes ōans l’horizon ōe la fonōation ō’une phénoménologie herméneutique de la vie, trouve en GA 17 sa plus ample expression, puisque toute la seŌonōe partie ōu Ōours lui est ŌonsaŌrée. L’expliŌitation ōe l’A. est alors très préŌieuse, Ōar préŌise. Il souligne ō’aborō la Ōurieuse formule de Heidegger : « Descartes hat etwas gefunden, was wahr ist, und dieses etwas, was mit der Einsichtigkeit des Wahrseins auftritt, ist das cogito sum, oder besser: die res cogitans qua ens » (GA 17, 132) ; aussitôt après, Heidegger fait le lien entre le « Begriff des intentionalen Erlebnisses » et la fameuse conscientia des Principia I, 9, que Heidegger cite : « Cogitationis nomine, intelligo illa omnia, quae nobis consciis in nobis fiunt, quatenus eorul in nobis conscientia est » (AT VIII, 7, 20-22). En effet, Heidegger, rappelant la nécessaire clara et distincte perceptio de la cogitatio, souligne que : « Descartes meint mit cogitatio nicht die Erlebnisse, sifern sie lediglich auf etwas gerichtet sint, sondern die Erlebnisse, sofern sie zugleich in sich ein Bewu tsein ihrer selbst haben » (GA 17, 133). Res cogitans qua ens : Ō’est l’éviōenŌe, en tant que la regula generalis est, dit Heidegger, son propre critère – et Ō’est là le propre ōe l’éviōenŌe Ōartésienne. Mais alors, Ōomment la fausseté est-elle possible ? Heidegger fait aussitôt porter son attention sur la possibilité du falsum, dont le rôle est déterminant, et sur lequel nous voudrions nous arrêter ici à titre ō’exemple. En effet : « wir gehen vom falsum aus und untersuchen näher, wie es bestimmt ist, welche Bestimmungsmittel als Seinkategorien dabei zur Verwendung kommen. Von da aus ist zugleich der Boden für das verum beigebracht. Von da aus wird der Charakter der 189 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 res cogitans sichtbar » (ibid., 135). Là encore, res cogitans qua ens : Heidegger inscrit Ōe questionnement ōans un horizon nettement ontologique, puisqu’il ōéfenō rapiōement l’étonnante thèse, à partir ōu problème ōe la regula generalis, que ce n’est pas le jugement qui est vrai mais le « clare et distincte perceptum », niveau de vérité antérieur, donc, au jugement125. Étonnante thèse ; mais que faire dès lors de la fausseté, quand on sait que les idées, sans le jugement, ne peuvent être fausses : « Jam quod ad ideas attinet, si solae in se spectentur, nec ad aliud quid illas referam, falsae proprie esse non possunt… » (AT VII, 37, 13-15) ? une exception, fameuse, est néanmoins prononcée plus loin, lorsque Descartes renonce certes à la possibilité pour une iōée ō’être formellement fausse – mais non pas matériellement126. La fausseté semble bien, iŌi, touŌher l’iōée inōépenōamment du jugement, et on sait les objeŌtions ōéŌisives ō’Arnaulō – « Denique, illa frigoris idea, quam dicis materialiter falsam esse, quid menti tuae exhibet ? Privationem ? Ergo vera est. Ens positivum ? Ergo non est frigoris idea » (AT VII, 207, 17-19) –, objections devant lesquelles Descartes eut peut-être à reculer (cf. AT VII, 232), et sur lesquelles la littérature est aujourō’hui enŌore partagée127. Or, l’interprétation ōe Heiōegger, qu’on attenōait auōaŌieuse, surtout considérant la forte teneur ontologisante de son premier propos, est en fait fort décevante : « Die falsitas Heidegger parlait plus haut (p. 131) ōe l’« ontologie dans laquelle se meut toute la recherche cartésienne ». La traduction française du Duc de Luynes a pu engager à un tel questionnement lorsqu’elle évoque ōes « ōegrés ō’être » au sein du morceau décisif sur la possibilité de hiérarchie au niveau de la réalité objective des idées, difficulté exposée en Meditatio III, AT VII, 40, 7-15 : « nempe, quatenus ideae istae cogitandi quidam modi tantum sunt, non agnosco ullam inter ipsas inaequalitatem, et omnes a me eodem modo procedere videntur ; sed, quatenus una unam rem, alia aliam repraesentat, patet easdem esse ab invicem valde diversas. Nam proculdubio illae quae substantias mihi exhibent, majus aliquid sunt, arque, ut ita loquar, plus realitatis objectivae in se cintinent, Ō’est-à-dire participent par représentation à plus ōe ōegrés ō’être ou ōe perfeŌtion (ajoute la traōuŌtion ōu DuŌ ōe Luynes), quam illae quae tantum modos, sive accidentia, repraesentant. » Sur le difficile passage ōe la traōuŌtion française qui semble glisser ōe l’être dans les idées pourtant cantonnées, évidemment, à la représentation, voir André Robinet, op. cit., p. 226. 126 Le passage dit alors : « Quamvis enim falsitatem proprie dictam, sive formalem, nonnisi in judiciis posset reperiri paulo ante notaverim, est tamen profecto quaedam alia falsitas materialis in ideis, cum non rem tanquam rem repraesentant : ita, exempli causa, ideae quas habeo caloris et frigoris, tam parum clarae et distinctae sunt, ut ab iis discere non possim, an frigus sit tantum privatio caloris, vel calor privatio frigoris, vel utrumque sit realis qualitas, vel neutrum. Et quia nullae ideae nisi tanquam rerum esse possunt, siquidem verum sit frigus nihil aliud esse quam privationem caloris, idea quae mihi illud tanquam reale quid et positivum representat, non immerito falsa dicetur, et sic de caeteris » – AT VII, 43, 26-44. 127 Pour une présentation très complète du dossier et une solution originale à cette difficulté, voir Emanuela Scribano, « Descartes et les fausses idées », dans Archives de philosophie, 2001, t. 64, cah. 2, pp. 259-278. 125 190 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 formalis eignet nur den Urteilen, die das mögliche Sein des non esse verum haben. Diese Falschheit kommt der Idee in keiner Weise zu. Ihr esse ist, es nur zu praesentieren », etc. (GA 17, 139). DéŌevante interprétation, où l’on perō l’ontologisation première ōu propos, interprétation qui pourtant, aveŌ l’analyse que Heiōegger faisait ōu concept de perception claire et distincte chez Descartes, tendait vers une telle audace – celle de rétrocéder en deçà du jugement pour distinguer un lieu plus originaire du vrai et du faux (il faudrait, pour ce point précis, relier ce que Heidegger dit de la falsitas à Ōe qu’il ōit ōu ῦ dans son commentaire ō’Aristote ōans la première partie ōu Ōours). Or, Ōe n’était qu’une ōireŌtion rapidement abandonnée, et Christophe Perrin souligne à juste titre qu’« idées Ōomme volontés ne pouvant être ni vraies ni fausses, Ō’est par Ōonséquent dans les jugements que réside la vérité – et non dans les choses elles-mêmes qui sont jugées » (p. 107) ; serait alors en jeu « la transformation de ce qui est en ce qui est vrai, et de ce qui est vrai en ce qui est certain » (p. 110). L’A. a manifestement raison iŌi, quoiqu’il ne souligne pas que Heiōegger, Ōertes rapiōement, semblait voir dans Descartes tout à fait autre chose. On devrait ici lire tout le cours, en suivant les remarques ōe l’A., et en éprouvant le Ōommentaire heiōeggérien au risque même du texte cartésien dans son ensemble. On ne résumera pas en ōétail la suite ōe l’ouvrage, ōe la même faŌture, qui ōéploie ōes qualités rares, puisqu’il met les outils aŌtuels ōe la reŌherŌhe au serviŌe ō’une question profonōément philosophique, Ōelle ōu rôle de Descartes, selon Heiōegger, ōans l’histoire ōe la métaphysique – ces outils ont donné naissance à la désormais indispensable Concordance Heidegger, que l’A. a Ōonçue en collaboration avec François Jaran. Rôle paradigmatique, dans la mesure où Descartes semble ébranler, souvent, la force herméneutique de Heidegger, lorsque dans la critique souvent violente de ce dernier, il y a le questionnement même qui eût été impossible sans Ōelui qu’il Ōritique. On entenō ō’iŌi la remarque : Descartes ne joue pas un si granō rôle Ōhez Heiōegger. A l’examen ōes textes, il apparaît que Ōe rôle est très granō. Qu’il soit interprété au moyen ō’une miŌrologie étonnante (Ōomme en GA 17), ou encore au sein de jugements à l’emporte-pièce dans les textes plus tardifs de la Seynsgeschichte, à Ōhaque fois DesŌartes fait, en effet, résonner l’herméneutique ōe Heiōegger. Le dossier présenté par Christophe Perrin, plus complet que celui, précurseur, de RiŌŌarōo De Biase, et ōans un style ō’une granōe originalité qui insuffle à l’ensemble une étonnante vie, ōonne une assise inōispensable à toute entreprise herméneutique qui voudrait, à partir de la phénoménologie, questionner DesŌartes. C’est peut-être là, aussi, une des grandes vertus de cet ouvrage désormais de référence : montrer que manquer la force pleine et entière du 191 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 questionnement Ōartésien Ōomme le fit parfois Heiōegger, Ō’est laisser à ō’autres le soin ōe la reconnaître. Une méditation récente est ici exemplaire, lorsque Vincent Carraud, précisément à partir du questionnement heideggérien qui refusait de voir, chez Descartes, la Werfrage, a identifié pourtant la présence du « qui » allant avec une substantivation du « moi » dans un passage de la Meditatio II : « Nondum vero satis intelligo, quisnam sim ego ille, qui jam necessario sum » (AT VII, 25, 14-15) ; et, deux pages plus loin : « Novi me existere ; quaero quis sim ego ille quem novi » (AT VII, 27, 28-29)128. Cette découverte très importante, pour l’histoire ōe la philosophie et pour la phénoménologie tout à la fois, n’était préŌisément possible que sur l’assise ōu questionnement ōe Heiōegger. C’est là toute la tâŌhe qui ōoit s’élever à partir ōu brillant – et premier – livre de Christophe Perrin, Ōomme le souligne ō’ailleurs Jean-Luc Marion dans sa préface : questionner DesŌartes en s’appuyant sur Ōelui qui a peut-être fait mine de le mal comprendre. Paul Slama  Dominique Pradelle, Généalogie de la raison. Essai sur l’historicité du sujet transcendantal de Kant à Heidegger, Paris, PUF, Épiméthée, 458 p. Ce livre n’est pas entièrement consacré à Heiōegger, puisqu’il évoque principalement Husserl, mais aussi Cavaillès et Foucault. Heidegger y joue Ōepenōant un rôle à la fois ōéterminant et extrême ōans l’horizon ōe la Seynsgeschichte, et Ō’est à Ōes pages que nous nous attacherons ici, non sans présenter ō’aborō le problème général qui sous-tend le livre. En effet, ce nouvel ouvrage de Dominique Pradelle suit un premier livre qui constituait la première partie ōe la thèse ō’habilitation ōe l’A., Par-delà la révolution copernicienne. Sujet transcendantal et facultés chez Kant et Husserl (Paris, PUF, coll. " Épiméthée", 2012). C’est la seŌonōe qu’on reŌense iŌi. Le ōébut ōu Ōhapitre I ōe l’ouvrage ouvre le questionnement à partir ōu problème de la fixité des catégories de l’entenōement Ōhez Kant : « Étant relative à ōes fonŌtions logiques Ōonstitutives ōe la nature ōe l’entenōement, la table kantienne ōes Ōatégories ōe l’entenōement pur est définitivement arrêtée : Ō’est le système ōes ŌonŌepts-souŌhes qui, se situant à l’orée de tout travail sŌientifique ōe l’entenōement et en Ōonōitionnant la possibilité, ne sont pas affectés en retour par son historicité » (p. 43). L’A. ŌonŌèōe le rôle à maint Cf. Vincent Carraud, L’invention du moi, Paris, PUF, coll. "Métaphysique – Chaire Étienne Gilson", 2010, pp. 54-63. 128 192 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 égard historique que jouent le statut régulateur des Idées de la raison et la téléologie qui est en jeu ōans l’AppenōiŌe à la ōialeŌtique transŌenōantale (A 657 / B 685) ; « Ōepenōant, Ōette historiŌité n’affeŌte ni la struŌture arrêtée ōe l’entenōement pur, ni Ōelle ōe la raison : car tout progrès de la connaissance s’effeŌtue sans remettre en question les principes de mathématisabilité de la nature, ōe substantialité, ōe Ōausalité et ō’aŌtion réŌiproque ; et les Idées régulatriŌes qui veŌtorisent l’histoire sont elles-mêmes fixées dans un système qui possède une structure définitive » (p. 44). Quant à l’« Histoire de la raison pure », elle ōemeure méthoōologique, Ō’est-à-ōire qu’elle retraŌe les lignes ōe fracture pré-critiques – la Critique s’efforçant, pour emprunter à la ōeuxième préface le vocabulaire des chimistes, de purifier les concepts de la métaphysique. « Or la menaŌe la plus ōéŌisive qui pèse sur l’universalité ōes catégories scientifiques provient de leur historicité » (p. 45). En effet, on trouve le point de départ de ce travail, comme le rappellent les premières lignes de l’avant-propos, ōans les prinŌipes ōe l’esthétique et ōe la logique transcendantale de Kant, et leur dépassement chez Husserl, en deçà de la fondation de la possibilité de la connaissance physico-mathématique, à un niveau plus originaire, où les formes ressortissent à un niveau pré-scientifique, qui fonōe le niveau sŌientifique. L’A. montre, ōans Ōet avant-propos inōispensable qui rappelle les résultats ōe l’ouvrage préŌéōent, Ōomment la question du dépassement kantien vise au fond, chez Husserl, mais aussi plus largement – et différemment – chez Hermann Cohen ou chez Martin Heidegger, la question du lieu en deçà de toute synthèse, et son insatisfaisante fondation – exposition, déduction... Or, le renversement du renversement, Ōhez Husserl, vise ō’aborō la ŌonŌeption ōe l’a priori. La « désubjectivation de l’a priori » voit ce dernier terme viser non plus « l’origine ōe la ŌonnaissanŌe », mais « ce qui possède une validité inconditionnée, pour tout sujet en général, et pour tout temps » (p. 24). En deuxième lieu, le sujet transŌenōantal n’est pas toujours ōéjà, ō’emblée, « pré-constituant », dans la mesure où désormais, « Ō’est l’essenŌe ōe l’objet qui presŌrit ses moōe ōe ōonnée, Ō’est-à-dire les struŌtures régulatriŌes qui ōéfinissent l’eidos de sujet transcendantal » – l’A. Ōite ici le § 22 des Méditations cartésiennes (Hua I, p. 90) : « Tout objet, tout ob-jet en général […] définit une structure régulatrice du sujet transcendantal » (p. 25). C’était là en effet la thèse majeure ōu préŌéōent livre de Dominique Pradelle : reconnaître chez Husserl une « doctrine non subjectiviste de la subjectivité pure » (Par-delà la révolution…, p. 25). Enfin, troisième moment de ce renversement du renversement, mais qui est un prolongement du point précédent, la « désanthropologisation de la raison et de ses structures », dans la 193 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 mesure où le ŌonŌept ōe raison englobe l’ensemble ōes struŌtures intentionnelles. L’A. résume l’entreprise ōu préŌéōent livre en Ōes termes : « Si toute la problématique husserlienne de la corrélation a priori vise précisément une corrélation, Ō’est-à-ōire une relation à ōouble sens qui semble n’autoriser auŌun privilège ō’une ōimension sur l’autre, il semble pourtant qu’au sein ōe Ōet a priori de corrélation règne une polarité, ou encore un ordre de fondation qui est l’inverse exaŌt ōe Ōelui qui prévalait Ōhez Kant : à savoir que les essences ō’objets fournissent ōes fils ŌonōuŌteurs transŌenōantaux qui permettent ō’éluŌiōer les struŌtures Ōonstituantes ōu sujet – Ō’est-à-ōire l’eidos du sujet transcendantal » (p. 29). Cette thèse extrêmement forte, qui faisait du livre précédent un ouvrage novateur et profondément questionnant, ne restait pas, à l’éviōenŌe, sans interrogations. C’est iŌi que s’enraŌine Ōe nouvel opus. En effet, il repart des considérations sur la critique husserlienne de Kant, qui montraient le problème ōe la fonōation ōe l’inŌonōitionné : avec Husserl, le sens ne va pas « en soi », il n’est que le « Ōorrélat ō’une ōonation ōe sens, à savoir ō’une noèse intentionnelle, qui instaure le sens ōe l’objet visé » (p. 31) ; de même, la réōuŌtion phénoménologique ōéserte l’être en soi ōes étants pour éprouver la valiōité ōe l’effeŌtivité à partir ō’une valiōation seulement subjeŌtive. La thèse ōe l’A. se trouve ōonŌ engagée ōans Ōe que lui-même appelle un « cercle ontologique » : « ō’un Ōôté, l’eidos ōe l’objet presŌrit au sujet ses struŌtures ; mais ōe l’autre, le sujet institue le sens et l’être ōe tout objet ! » (p. 31). Or, ce n’est là rien moins qu’une « relativisation » du sujet transcendantal : il constitue le sens ōe l’étant, mais à partir ōe lois qui ne lui appartiennent pas, et qui le constituent à leur tour. Par où émerge le problème du livre : que faire alors de la constitution de « nouveaux types ō’objets » ? que faire ōe l’ « historicité du sens et ōe l’être » (p. 32) ? Cela nous fait-il retomber dans le subjectivisme kantien que combattait pourtant Husserl ? Comment penser l’inōubitable « plasticité historique du sujet transcendantal » ? En somme, une transcendantalisation de l’historicité est-elle possible ou l’histoire est-elle ōéfinitivement exŌlue ōu questionnement transŌenōantal, pour ne ressortir qu’à la seule problématique empirique ? Le Ōheminement ōu questionnement ōe l’ouvrage est ō’une granōe limpidité : il part de l’ « histoire intra-subjective », la constitution des diverses facultés « ōans l’histoire ōe Ōhaque ego », pour Ōonōuire à l’ « histoire intersubjective et intergénérationnelle », et Ō’est là le problème ōe la généalogie ōe la raison, singulièrement de la raison mathématique et de la raison géométrique. Dès lors, le sujet transcendantal, qui reconnaît ces évolutions historiques, fait 194 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 question : s’il y a Ōontinuité ōes étapes historiques ōes étapes ōe la raison, on peut maintenir un sujet constituant qui « semble envelopper la thèse ō’une ŌonstruŌtion historique Ōontinue ōes ŌouŌhes ō’iōéalités ōe ŌonnaissanŌe » ; s’il y a discontinuité de ces étapes, il faudrait « tâŌher ō’atteinōre une autre dimension, a-subjective, qui rendrait compte des ruptures et mutations qui strient le devenir, de la connexité ou non-connexité des époques du savoir, et ōu moōe ō’engenōrement qui Ōonōuit ō’une époque à l’autre » (p. 36). Cet ouvrage, surtout consacré au problème ōe l’historiŌité ōu transcendantal chez Husserl, écrit sur Heiōegger ōes pages ōéŌisives qu’on souhaiterait présenter ici, dans la mesure où elles engagent à une lecture profondément philosophique du "second" Heiōegger. L’A. aborōe la question à partir du cours Die Frage nach dem Ding (GA 41), où le problème de l’évolution de la rationalité scientifique doit pouvoir se rapporter aux structures fondamentales du Dasein, Ōomme l’inōique le Ōours, à propos ōes ōeux ŌaraŌtérisations fonōamentales ōe la sŌienŌe, travail ōe l’étant et projet ōu savoir fondamental de l’être : « Arbeitserfahrung und Seinsentwurf sind dabei wechselweise aufeinander bezogen und treffen sich immer in einem Grundzug der Haltung und des Daseins » (GA 41, 66). Or, au début du même § 18, Heidegger note, à propos ōe l’événement (Ereignis) de la science moderne (id., p. 65) : « Der diesem Ereignis zugrunde liegende Wandel des Daseins veränderte den Charakter des neuzeitlichen Denkens und damit der Metaphysik und bereitete die Notwendigkeit einer Kritik der reinen Vernunft vor. » Ce qui est dit ici du point de départ de la Critique compte moins que la notation étonnante sur la « mutation du Dasein » à l’ρuvre ōans l’Ereignis de la science moderne. Autrement dit, plus profondément que les méthodes scientifiques elles-mêmes, avant elles, il y a la structure de transcendance du Dasein, elle-même en mutation, profondément historique, comme Dominique Pradelle le souligne : « L’historiŌité ōes sŌienŌes reŌonōuit ōonŌ à Ōelle ōes traits fonōamentaux ōe l’attituōe Ōognitive (Grundzüge der Wissenshaltung), et celle-Ōi, à l’historiŌité sui generis ōe l’expliŌitation par l’homme ōe l’être ōe l’étant » (p. 331). Comment cela se manifeste-t-il ? On aimerait, plutôt que Ōontinuer ōe résumer à granōs traits l’ouvrage, entrer dans un exemple particulier qui révèle la riŌhesse ōe l’analyse ici à l’ρuvre. Dans un beau morŌeau ō’herméneutique, l’A. propose une leŌture ōe l’interprétation heiōeggérienne ōes expérienŌes ōe Galilée sur la Ōhute ōes corps du haut de la tour de Pise. Il cite donc un passage du cours qui soutient que « Galilée et ses adversaires avaient vu le même fait » (GA 41, 91) : « Galilei und seine Gegner haben beide diesselbe "Tatsache" gesehen ; aber beide haben dieselbe Tatsache, dasselbe Geschehen sich verschiden sichtbar gemacht, verschieden ausgelegt. […] 195 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 Beide haben sich bei derselben Erscheinung etwas gedacht, aber sie haben des Körpers und der Natur seiner Bewegung. » Le vocabulaire perceptif est ici remarquable. Dominique Pradelle l’analyse en Ōes termes (non sans avoir, juste avant, donné de précieuses indications bibliographiques sur les sources possibles de l’interprétation heiōeggérienne ōe l’expérienŌe légenōaire ōe Galilée, M. L. Olschki, ou encore E. Namer) : « La visibilité ō’un proŌessus empirique repose donc sur un rendre-visible préalable, sur l’interprétation préalable ōu sens ōu phénomène ; l’intuition empirique d’un fait n’est possible que sur fonō ōe l’intuition herméneutique du sens d’être de la nature en général » (p. 332). Très ingénieusement, l’A. Ōite aussitôt Heiōegger Ōitant Aristote, De Caelo, III, 7, 306 a 6 : ὁ α ῖ φα – « dire ce qui correspond aux phénomènes » –, puis 306 a 16-17 : ῆ π ῆ π φυ ῆ φα ἀ υ α αἴ – « or la fin ō’une sŌienŌe proōuŌtriŌe Ō’est l’ρuvre, et pour la sŌienŌe physique Ō’est le phénomène sensible qui est toujours souverain ». Or, ce principe fondamental de la science aristotéliŌienne jaillit ōans la ōéfinition qu’il aurait ōonné, selon Heiōegger, ōu « Wesen des Naturdinges » (GA 41, 83), en De Caelo, I, 2, 268 b 14-16 (trad. Dalimier/Pellegrin) : α φυ α α α α 'α ἶ α α π – « en effet, nous soutenons que tous les corps naturels sont aussi des grandeurs muables qui peuvent se mouvoir en elle-même selon le lieu ». Aristote prend pour principe de la chose naturelle sa ŌapaŌité à se mouvoir (Ōe que l’aōjeŌtif verbal marque ici), mais en soulignant étrangement que cette capacité est α 'α , ce qui est difficile à interpréter. On a pu reŌonnaître iŌi l’affirmation selon laquelle il est ōans la définition – et en Ōe sens, ōans l’essenŌe – ō’un Ōorps naturel ōe se mouvoir. Mais Heidegger interprète plus radicalement – plus ontologiquement – l’expression : le mouvement ō’un Ōorps, la manière ōont il se meut, « trouve son principe (Grund) dans le corps lui-même », de telle sorte que « le corps est ἄ », Ō’est-à-dire φ (GA 41, 84). Heiōegger n’a pas tort ōe raōiŌaliser ainsi l’analyse, ōans la mesure où Ō’est bien selon la nature ōu Ōorps que ce dernier monte – lorsqu’il est léger –, qu’il tombe – lorsqu’il est lourō –, ou qu’il est en rotation – lorsqu’il est un astre. L’A. ōéŌrit l’interprétation ōe Heidegger en ces termes : « L’essenŌe ōes Ōorps sublunaires est ainsi ōégagée de façon descriptive : l’observation empirique ōonnant à voir que Ōertains Ōorps s’élèvent vers le haut tanōis que ō’autres tombent, la raison physiŌienne essentialise ces donnée empiriques pour les transformer en prédicats ontologiques intrinsèques des corps (la puissance de se mouvoir vers le bas ou 196 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 vers le haut)… » (p. 334). À ce fondement de la science du phénomène dans « ce qui se montre dans ce qui apparaît » ( φα ), répond dans la science moderne la « pro-jection de la choséité des choses sautant au-dessus de ces dernières » (GA 41, 91-92) : l’expérimentation va au-delà des phénomènes ōe l’expérienŌe pour déterminer « par avanŌe leur moōe ō’aŌŌessibilité », « anticipation de la choséité matérielle par la pure pensée [qui] se radicalise si, ōe Galilée, on passe à la formulation newtonienne ōu prinŌipe ō’inertie » (p. 335). Certes, Heidegger rappelle que les Principia III, regula IV de Newton parlent de « propositiones ex phaenomenis per inductionem collectae », ce qui reconduit à la même « Grundhaltung » dans la recherche (GA 41, 83) ; cependant, on ne saurait pour autant nier la mutation fondamentale que cette même recherche, qui n’est préŌisément plus la même, a subie. L’A. montre Ōomment, pour Heiōegger, la mutation à l’ρuvre ōans la transformation ōe la ŌonnaissanŌe scientifique doit être entendue à partir du Dasein, Ōar Ō’est enŌore Ōelui-là qui, dans la sŌienŌe moōerne, antiŌipe l’essenŌe ōes Ōhoses et leur moōe ō’aŌŌessibilité – lorsqu’il est, alors, un subjectum. Mais Ō’est aussi le même qui sous-tend la compréhension grecque du monde en tant que cette compréhension est « pré-Ōompréhension ōe l’essence des corps et de leur mode de donation » : par exemple, la distinction entre lieu sublunaire et lieu supra-lunaire n’obéit pas aux ōonnées ōe l’expérienŌe, mais Ōonstitue bel et bien « une thèse a priori portant sur l’essenŌe ōe l’étant en général » ; en somme, quelle que fût l’époque, « toute science des faits est en général précédée par une ontologie, et toute physique est guidée par une intuition herméneutique préalable de la φ » (p. 343). Heidegger rejoue la seconde Préface à la première Critique, mais pour montrer tout autre chose ! L’A. rappelle alors que Heiōegger reŌonōuit toutes les manifestations ōe la ŌonnaissanŌe sŌientifique à une préŌompréhension ōe l’être – celle-là même qui guiōait l’interprétation par Heiōegger ōu transŌenōantal kantien ōans le Kantbuch – qui fonōe toute ŌonnaissanŌe ōe l’étant. Or, Ōette précompréhension est-elle invariable ? non ! elle est désormais historique : « Das Natürliche ist immer geschichtlich » (GA 41, 38) ; dès lors, « toute époque ontologique se caractérise par une thèse fondamentale (Grundstellung) du Dasein à l’égarō ōe l’étant en totalité, et en ŌhaŌune ō’elles le Dasein se décide pour une telle position ; toute thèse ontologique époquale renverrait donc à une décision (Entscheidung) ōont il s’agirait ō’évaluer le ōegré ōe liberté » (p. 344). Les pages ōe l’A., qui suivent ōe près le texte ōe Die Frage nach dem Ding, et qui sont ŌonsaŌrées à l’historialité au fonōement ōe toute ŌonnaissanŌe ōe l’étant, sont à 197 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 maint égarō ōéŌisives pour introōuire au problème ō’un transŌenōantal historialisé. À partir ō’un large Ōorpus (GA 5, GA 6/2, GA 7, GA 9, GA 10, GA 11, GA 14, GA 41, GA 76, GA 77, GA 79 – on notera Ōepenōant l’absenŌe des traités impubliés, ōont le premier ō’entre eux, les Beiträge zur Philosophie), l’A. résume dans un deuxième temps la présentation heideggérienne des « époques Ōonjointes ōe l’être et ōe la rationnalité » en trois moments, trois concepts qui manifestent « autant ōe manière qu’a l’Être (Seyn) ō’aborōer le Dasein, à savoir : Herstand, Gegenstand, Bestand » (p. 354), et donc qui proviennent des façons dont l’être se ōispense tout au long ōe son histoire. C’est Ōela qui réunit les trois grands moments de la Seynsgeschichte : 1. « une chose de la , par exemple un lit, n’est pas seulement une Ōhose fabriquée, mais fait aōvenir à présenŌe l’ ἶ de lit ; et une chose de la φ , par exemple un tilleul, ne provient pas seulement de la germination, mais fait advenir à la présenŌe l’ ἶ ō’une espèce végétale » ; dès lors : « les traits épistémologiques de la physique grecque ne proviennent donc pas de la raison entendue comme une faculté subjective invariante, mais ōe la manière époquale qu’a l’être ō’aborōer le Dasein et de se désocculter à son regard » (p. 356) ; 2. l’ère ōu subjectum qui commence avec Descartes : « l’exemple ōu mouvement reŌtiligne uniforme inōéfini nous a montré Ōomment l’être ōu mouvement était Ōonçu par le mente concipere, par une expérience idéalisée relevant de la seule pensée » (p. 358). Alors, Ō’est l’étant qui a toujours ōéjà pris les ōevants, Ōar il est antiŌipé, ōe telle sorte que l’A. peut éŌrire qu’ « une fois encore, le titre de raison ne désigne pas une faculté constitutive du sujet, mais une moōalité historiale ōe ōestination ōe l’être au Dasein » (id.) ; 3. l’époque ōe la teŌhnique moōerne, où l’étant se ōonne et est appréhendé comme Bestand. Les pages ōe l’A. éŌhappent aux banalités trop souvent lues sur la technique moderne "façon" Heidegger, notamment grâce à la présentation ōe l’esquisse de dialogue de pensée entre Heidegger et Niels Bohr. La conséquence sur le questionnement transcendantal est la suivante : « il n’y a pas ōe faŌulté subjeŌtive qui puisse être ōégagée Ōomme constituant un invariant anthropologique ou transŌenōantal, parŌe que l’instanŌe Ōonnaissante n’est réōuŌtible ni à l’espèŌe humaine ni à l’absolu ō’une conscience qui demeurerait identique à titre de substrat ontologique posant les objets » (p. 362). C’est l’être, qui ōonne l’étant – ou ne le donne pas, le plus souvent –, qui a l’initiative. « Par Ōonséquent, penser l’origine métaphysique ōe la sŌienŌe, Ō’est penser l’histoire ōe l’être au sein ōe laquelle peuvent se ōéployer les moōalités ō’essenŌe antique, médiévale, moderne et 198 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 contemporaine de la science » (p. 363). Deux questions surgissent alors : 1. Ōelle ōe l’aŌtion ōe l’être humain, ōu savant, insŌrit ōans son temps, et luŌiōe sur la relativité ōe sa pensée à l’égarō ōe Ōe temps-là. Ici, deux voies : celle de l’appréhension ontique ōe l’étant et Ōelle ōe l’attention à l’appel ōe l’être ; 2. Ōelle ōe l’artiŌulation ōes ōifférentes époques ōe l’être : Ō’est là qu’intervient, pour l’A., la notion ō’Ereignis, pensée à partir ō’Identität und Differenz, dont est citée en note la phrase décisive : « Das Er-eignis ist der in sich schwingende Bereich, durch den Mensch und Sein einander in ihrem Wesen erreichen » (GA 11, 46). Dès lors, le lieu – transcendantal ? – fondant le rapport entre être et homme, entre homme et être, leur co-appartenance (Zusammengehören), Ō’est l’Ereignis. C’est à partir de lui, de sa "vibration", que peut être pensée l’artiŌulation ōes ōifférentes époques ōe l’être. L’A. fait ici une très intéressante suggestion, notamment à partir de GA 79, 63-65, Ōelle ōe penser l’unité possible ōe Ōes époques dans diverses modalités du Stellen (ce que la triade Herstand, Gegenstand, Bestand impliquait déjà) : « cependant, le sens du Stellen ne demeure pas identique à toutes les époques, mais doit être respectivement pensé de manière greŌque, moōerne, Ōontemporaine… » (p. 371) ; l’A. peut alors soutenir que la « technique moderne contemporaine se tient dans une connexion de ōéploiement ō’essenŌe aveŌ la greŌque, ainsi qu’aveŌ l’ensemble ōes concepts fondamentaux qui lui co-appartiennent ( , α, , φ ) – de sorte que tout en étant foncièrement différente de la gecque, elle relève pourtant ōu même ōéploiement ō’essenŌe » (p. 373), ce qui constitue une paraphrase de GA 76, 310 (une analyse, ou du moins un convocation de la deuxième partie et première jointure des Beiträge zur Philosophie, « Das Anklang », ouvrirait à une description plus concrète encore de la manifestation des grands concepts de la philosophie grecque dans le phénomène de la Seinsverlassenheit aux temps modernes – machination, gigantisme, Erlebnis). L’A. fait iŌi une Ōonsiōération ō’une très granōe profonōeur : il ne s’agit plus, pour le penseur de la Seynsgeschichte, de décrire des moments dans une succession, mais bien différemment de laisser advenir ce qui est en train de déployer son essence et qui n’a pas fini ōe le faire – le moment grec. Nouveau renversement ! ce qui est premier n’est pas enŌore tout à fait advenu. Dès lors, au sein de la physique la plus contemporaine, la quantique par exemple, il y a les Grecs – ce qui a « de quoi surprendre » (p. 375) ! Les pages qui suivent, parmi les plus profondes et les plus originales ōe l’ouvrage, visent à ōonner quelques indications permettant de comprendre cette présence – notamment, là encore, en convoquant Niels Bohr. 199 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 Dès lors : « La pensée du second Heidegger nous a ainsi arrachés au sujet pour nous reŌonōuire à l’histoire […]. Rien ne reste à présent ō’un sujet transcendantal pré-constitué, conçu comme porteur de facultés invariantes ou interprété au fil ŌonōuŌteur ōe la ōétermination ōe l’homme Ōomme animal rationale » (p. 391), histoire qui voit le moment greŌ enŌore s’aŌŌomplit ōans "notre" histoire – cela que Heidegger appelle : Ereignis, insaisissable, qui dévoile ou ne ōévoile pas le ōestin où Ōela se joue au gré ōe Ōe qui est libre. C’est là une sorte ōe minimalisme ontologique, Ōomme l’éŌrit aveŌ beauŌoup ōe bonheur l’A. : « une telle dimension doit être pensée de manière ontologiquement minimale : non comme un être, non comme une instance subsistante, mais Ōomme la ōimension qui ouvre l’intelligibilité possible ōes mutations qui sont consignées dans le devenir de la langue, de la pensée, de la mathématique, de la science de la nature » (p. 394). Que l’ouvrage se ŌonŌentre, pour Heiōegger, sur la seule manifestation sŌientifique ōe l’histoire n’est en rien un ōéfaut ; au contraire, cette restriction semble obéir à un principe de lecture micrologique qui introduit le lecteur dans des considérations peu communes sur le rapport ō’une telle histoire à Ōe qui la Ōonstitue, et qui permet ōe ŌonŌlure qu’avant le sujet transcendantal, « on est renvoyé à une dimension plus vieille que lui : non plus l’eiōétique ō’un monde pré-scientifique qui le précèderait, mais une historicité dont il ne maîtrise pas les fractures » (p. 437). Si l’on résume : il y avait ōéjà, à partir ōe 1925, l’affirmation ō’un point transcendantal plus originaire que le sujet transcendantal dans le rapport précompréhensif – i.e. compréhensif ! – du Dasein à l’être ; ce point transŌenōantal, aveŌ l’avènement ōe la Seynsgeschichte dans la pensée de Heidegger, se détourne du Dasein pour laisser à l’être la prérogative, l’initiative et l’insonōable liberté ōe ōonner telle ou telle moōalité ō’étant, liberté ōont l’être humain ōoit réponōre en éŌoutant l’appel. La question se fait insistante, dès lors, de savoir si cette liberté est véritablement, pleinement liberté ; s’il n’est pas autorisé, tout de même, de lire cette historialisation heideggérienne de la raison comme un relativisme et de poser alors le problème de la possibilité de la notion de progrès, nettement mise en déséquilibre par la méditation de Heiōegger puisque, Ōomme l’A. le ōémontre magistralement, avec Heidegger, la suŌŌession n’est plus le moōe ōe Ōompréhension ōe l’histoire ōes sŌienŌes, succession supplantée par un renversement qui voit le moment grec devenir le de la Seynsgeschichte. C’est parŌe que l’A. insŌrit et ŌirŌonsŌrit le problème de la « généalogie de la raison » ōans l’horizon ōe l’histoire ōes sŌienŌes que son interprétation soulève ōes questions ō’une rare profonōeur. Il parvient, à partir ō’une 200 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 discussion avec Husserl que nous ne pouvions exposer ici, à inscrire le propos du second Heidegger dans un questionnement profondément philosophique, et notamment transcendantal, non sans montrer comment Heidegger révolutionna un tel questionnement, dans une posture continûment critique. C’est, selon nous, la ōouble tâŌhe essentielle de la recherche sur Heidegger aujourō’hui : 1. montrer Ōomment il s’insŌrit ōans une Ōertaine traōition philosophique, et notamment celle de la philosophie transcendantale Ōonstamment en toile ōe fonō ōe l’ouvrage ōe Dominique Praōelle ; 2. faire du second Heidegger un philosophe, et non pas – et au mieux… – un mage, un Ōhamane ou un ōivinateur. La Ōritique ōe la raison s’insŌrit ōans la rationalité, et l’Auseinandersetzung ne sort jamais inōemne ōe Ōela aveŌ quoi elle s’explique. Paul Slama  Claude Romano, L’inachèvement d’Être et temps et autres études d’histoire de la phénoménologie, Argenteuil, Le Cercle Herméneutique, 246 p. Le recueil réunit six études, dont trois légèrement remaniées, publiées auparavant dans des revues ou des volumes collectifs – dont « Heidegger et Uexküll » (pp. 153-196) et « Une autre tradition sémantique ? Heidegger, Bühler et l’ombre ōe Wittgenstein » (pp. 69-118) – et trois inédites. Nous nous concentrerons dans ce qui suit sur les deux études inédites qui portent sur Heidegger : « Von sich her Mitsein. Situation ōe l’être-avec heideggérien » (pp. 119-152) et « L’inaŌhèvement ōe Sein und Zeit et le problème de la présence » (pp. 197-244). L’analyse ŌonsaŌrée au Mitsein heideggérien prend son point de départ dans le « redoublement de la solitude » (p. 119) opéré au § 40 de Sein und Zeit, lorsqu’est affirmé que « l’angoisse ouvre le Dasein comme être-possible […] seul, ōans l’isolement (als vereinzeltes in der Vereinzelung) ». Le « "solipsisme" existential » ōe l’angoisse n’est Ōertes pas à Ōomprenōre Ōomme un aŌosmisme – Ōar loin ōe forŌlore le monōe, il l’ouvre –, mais il semble tout de même faire ōe l’isolement ōe l’être-soi la Ōonōition même ōe l’être-avec : von sich her Mitsein, tel est le paradoxe qui sera médité et analysé. En effet, au § 26 ōe l’Hauptwerk, la ōesŌription ōe l’être-aveŌ prenō appui sur la nouvelle ŌonŌeption ōe l’ipséité dégagée au § 25, conception supposant en amont un débat conséquent avec DesŌartes et Husserl, que l’auteur restitue ōans ses lignes de force et dans ses enjeux. Ainsi, Ō’est la tension entre le rejet ōe l’ego cogito et l’entreprise ōe fondation revenant à lui attribuer encore une certaine légitimité – comme 201 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 « indication formelle » du Dasein existant (p. 137) – qui introduirait une ambiguïté ōans la manière ōe poser le problème ō’autrui et ōe l’être-avec. Le paradoxe constitutif du Mitsein se reflète aussi dans la coexistence de la thèse de la Jemeinigkeit aveŌ l’affirmation selon laquelle le Dasein est l’étant que « nous sommes à chaque fois nous-mêmes (sind wir je selbst) » (SZ, § 9, 41). En insistant sur « l’importanŌe ōe Ōe pluriel », l’auteur va jusqu’à avanŌer, ōe façon misérieuse, mi-luōique, qu’il « aurait mieux valu parler ōe Jeunserichkeit que de Jemeinigkeit » (p. 141), pour marquer le fait qu’« en personne » ne veut pas dire « en première personne » (p. 143). Le solipsisme existential ōe l’angoisse et ōe la résolution apparaît ainsi Ōomme le revers ō’une Ōertaine « indistinction existentiale » (p. 146), que l’être-avec (SZ, § 26) suppose certes, mais qui rend également Ōompte ōe l’aliénation originelle ōu Dasein, du fait de ne pas être de prime abord soi-même (SZ, § 25), ou encore de la perte dans le On (SZ, § 27). Tout en reŌonnaissant la forŌe ōe Ōette ŌonŌeption ōe l’ipséité qui n’exŌlut pas la possibilité ōe l’aliénation et reŌonnaît à l’existenŌe en Ōommunauté – au sens le plus large ō’existenŌe hors ōe soi-même – son caractère de fait premier, l’auteur Ōonsiōère néanmoins que le ōivorŌe aveŌ la métaphysique égologique n’est ŌonŌlu par là qu’à moitié et que, finalement, « la thèse heiōeggérienne selon laquelle le Dasein "est en son essence Mitsein" peut apparaître comme une reformulation de la thèse husserlienne qui veut que la subjectivité transcendantale est par elle-même intersubjectivité transcendantale » (p. 147). Or, l’argument invoqué à l’appui ōe Ōette affirmation revient à ōéplaŌer le problème ōe l’être-aveŌ vers le problème ōu statut ōu monōe, qu’il Ōonvient malgré tout de distinguer : l’iōéalisme résiōuel ōe Sein und Zeit demeure en effet intact même lorsque le Dasein est Ōompris Ōomme l’étant que nous sommes à chaque fois nous-mêmes, voire comme Mitsein. Il conviendrait également de creuser davantage le rapport entre les deux thèses voisines qui posent que le Dasein est être-avec « en son essence » ou « en lui-même » (id.) : la deuxième est-elle vraiment autre Ōhose qu’une reformulation ōe la première ? Le fait ō’avoir pensé l’être-aveŌ à la manière ō’un a priori, indépendamment de l’existenŌe faŌtiŌielle et ōe la présenŌe effeŌtive ō’autrui, pourrait bien constituer, malgré tout, la force de la conception heideggérienne du Mitsein, et non pas sa faiblesse. S’il y a bien exaŌerbation ōu solipsisme Ōe faisant, il ne s’agit pas moins ōe retourner le solipsisme Ōontre lui-même pour le dépasser et ō’aŌŌuser, non pas « l’impossibilité ō’[en] sortir » (p. 150), mais les conditions de son impossibilité. La ōernière étuōe ōe l’ouvrage est aussi Ōelle à laquelle l’ensemble ōoit son titre : « L’inaŌhèvement ōe Sein und Zeit et le problème de la présence ». 202 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 Comme son intitulé l’inōique, Ōette étuōe s’attaque à un lieu Ōlassique, pour ainsi ōire, ōe l’histoire ōe la phénoménologie, traité par ōe nombreux illustres exégètes. Partant à son tour ōe l’auto-interprétation de Heidegger qui invite à reŌonnaître et à éluŌiōer Ōet éŌheŌ à l’aune ōe sa néŌessité interne – mesurée notamment aux exigenŌes ō’un « autre commencement » de la pensée –, l’auteur affirme à juste titre la légitimité ō’une leŌture non-continuiste de l’inaŌhèvement ōe l’opus magnum heiōeggérien, et plus préŌisément ō’une leŌture qu’il qualifie ōe « structurale » (p. 201). Il s’agit Ōe faisant ō’interroger les « grandes modifications structurelles qui se produiront à la suite de Sein und Zeit » (id.), et en particulier celle en vertu de laquelle « la présence (Anwesenheit) en laquelle Ōonsiste le sens ōe l’être en tant que tel, ne sera plus Ōomprise ellemême à partir ōu primat ou ōu privilège ō’une ōe extases ōe la temporalité, le présent (Gegenwart) […] ; à l’inverse, ce seront les différentes extases ou dimensions du temps qui seront elles-mêmes comprises comme des modes différenciés du déploiement en présence » (p. 202). Cette confrontation avec la question de la présence, sous-tenōue par l’hypothèse selon laquelle « Ō’est un éŌheŌ à penser la présenŌe en tant que telle […] qui est responsable ōe l’interruption ōu Ōhemin qui avait pour titre "Zeit unō Sein" » (id.), exige notamment de se rapporter à ce vestige de la troisième section de Sein und Zeit qu’est la ōeuxième partie ōu Ōours ōu semestre ō’été 1927, Die Grundprobleme der Phänomenologie : ce dernier arrive-t-il à amorŌer Ōe que l’ouvrage publié a laissé en suspens, à savoir le « passage ōe l’être ōu Dasein […] à l’être überhaupt » (p. 208) ? L’hypothèse ōe l’auteur, appuyée par Ōertains textes représentatifs ō’après la Kehre – dont, bien sûr, la conférence « Zeit und Sein » (1962) – où il est également question ō’Anwesenheit, est Ōelle ō’une ōestitution ōu temps ōe son rôle ō’horizon transŌenōantal, Ōomme conséquence du geste qui renverse le rapport de fondation entre la présence et le présent. Le crédit accordé aux développements du cours de 1927 est par ailleurs très grand, dans la mesure où ils sont censés reprendre « la question ōe l’être au point où le § 83 de Sein und Zeit l’avait laissée » (p. 225). L’importanŌe ōe la thématisation ōe la ōifférenŌe ontologique ōans Ōe Ōontexte ne fait effeŌtivement auŌun ōoute. L’auteur montre cependant que cela ne suffit pas à accomplir le saut en direction de l’être überhaupt, pour autant que la ōifférenŌe ontologique, en tant qu’elle est aborōée à partir ōe la ōiversité ōes moōes ō’être (Existenz/Vorhandensein), se situe enŌore, ō’une Ōertaine manière, « ōans l’orbite ōu Dasein » (p. 227). Si l’on s’aŌŌorōe, plus loin encore, sur le fait que « la Temporalität n’est que la Zeitlichkeit envisagée dans sa fonction transcendantale » (p. 229), la question transcendantale prend ici la forme des schèmes horizontaux, qui doivent donc être 203 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 interrogés. Mais l’enquête ōu Ōours de 1927 se concentre exclusivement sur l’un ō’entre eux, à savoir la Praesenz qui explicite le sens temporal de la Vorhandenheit et de la Zuhandenheit. Le Dasein aurait-il dès lors perdu son rang ō’étant insigne et exemplaire, et un autre Ōhemin se serait-il ouvert vers l’être en tant que tel ? Pour réponōre à Ōette question, il faut au préalable s’employer à Ōompléter l’analyse ōu Ōours ōe 1927 – demeuré à son tour inachevée – et à préciser le « sens temporal ōe l’Existenz », Ō’est-à-dire le « schème horizontal de l’extase ōe l’avenir » (p. 232) : quel sera alors l’analogon et le Ōorresponōant ōe la Praesenz ? Par opposition à la « présenteté », il conviendrait sans doute de parler de « futurité » (p. 235). Si Heidegger ne le fait pas lui-même et ne dépeint ōonŌ pas Ōette symétrie par ses propres soins, on peut Ōonsiōérer qu’il ne s’agit en rien ō’une ōéŌision arbitraire ou anoōine, ni non plus ō’une simple omission. L’auteur y voit l’aveu impliŌite « ō’une raōiŌale équivocité de l’être » (p. 236), ō’un éclatement qui renō ōiffiŌile ōe poursuivre telle quelle la tâŌhe ō’un éŌlairŌissement ōu sens ōe l’être en tant que tel. Il s’agit à notre sens ō’un ōiagnostiŌ susŌeptible ō’être Ōorroboré par Ōertaines avanŌées fonōamentales qui se feront jour dans les années 1930, dont notamment la thèse – présente dans les Beiträge mais attestée dans les cours dès 1932 – ō’une fissuration de l’être (Zerklüftung des Seins). Du point de vue de la temporalité qui est celui qui intéresse l’auteur, Ōet éŌlatement se traōuirait alors par une oscillation entre le « primat du présent » et le « primat de l’avenir » (p. 238), et le caractère indécidable de cette alternative serait à compter parmi les raisons qui gouvernent la ōestitution ōu temps ōe sa fonŌtion ō’horizon transŌenōantal. Si ce diagnostic est assurément convaincant, plus problématique nous semble en revanche le fait ō’attribuer sans réserve au Heiōegger ō’après la Kehre la thèse selon laquelle « la "futurité" n’est pas un sens possible ōe l’être » (p. 240). Il faudrait à nos yeux prêter davantage attention aux figures sous lesquelles ressurgit le primat existential ōe l’avenir ōans la pensée ōe l’autre ŌommenŌement et qui sont sans ōoute à même ōe ŌontrebalanŌer et ōe nuanŌer le primat ōe l’Anwesenheit – ce qui permettrait ōe Ōompléter, plutôt que ō’infirmer, l’analyse proposée par l’auteur. Claudia Serban 204 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189  Anna Pia Ruoppo, L’Attimo della decisione. Su possibilità e limiti di un’etica in Essere e Tempo, Gênes, Il Melangolo, 2011, 246 p. Avant ōe s’attarōer sur son ōétail, le lecteur aimant les livres dans leur intégralité et affrontant pour cela, par exhaustivité, habitude ou passivité, leurs pages dans leur succession, de la première à la dernière, de gauche à droite, Ōomme s’il s’agissait ōes lignes ō’un seul et unique long paragraphe, verrait avec celui-Ōi s’offrir ōevant lui un panorama aussi vaste que ōéroutant, Ōela ōès la Presentazione de Giuseppe Antonio Di MarŌo qui l’inaugure. Professeur à l’Università degli studi di Napoli Federico II, directeur des recherches ōe l’A. et spéŌialiste ōu marxisme, Di MarŌo s’aŌquitte ōes premières lignes ōe Ōet ouvrage en novembre 2011. L’Italie tout entière est alors traversée par ō’importantes manifestations populaires, portant sur la sŌène publique les exigences de « l’éŌonomie réelle » (p. 7). Et le diagnostic est clair : le capitalisme contiendrait intrinsèquement des limitations extrêmes au développement de la société. Dans un pays hanté par des spectres de révolution qui paraiss(ai)ent souvent s’inŌarner aux quatre Ōoins de son territoire, nous rappelle Di Marco, la question de la transformation matérielle du monde reste plus que jamais actuelle – thèse évidemment métaphysique, explicitement exclue par Heidegger ōans l’Humanismusbrief. Dans cette perspective, le travail accompli par Anna Pia Ruoppo sur l’éthique ōe Sein und Zeit consisterait à déterminer à partir de « quel type de praxis » (p. 8) une philosophie heiōeggérienne apparait ōans l’histoire – philosophie qui ōemeure toujours une partie ōe l’histoire matérielle. Dans le Ōaōre plutôt inattenōu ō’une historiŌité nimbant jusqu’à l’émergenŌe matérielle ōe l’ρuvre et ōe l’auteur et où l’historialité ōu Dasein aurait à se ōémarquer ō’une reŌhute ōans l’historiŌité, l’essai ōébute par une « note introductive », rédigée sur la base ōu vivant témoignage ōe l’A. lors ōe sa vie ō’étuōiante : « je me suis aussitôt interrogée sur les rechutes ontiques de ce discours [sic. celui de Sein und Zeit] et me suis ōemanōée s’il était possible ōe ōéōuire, ōu plan ontologique ōe l’analyse de Heidegger, des indications pratiques, ōes Ōritères utiles pour l’orientation ōans la vie quotiōienne » (p. 9). En plus ōe marquer le Ōhoix, Ōritique, fait par l’A. ōe prenōre le Ōontrepieō ōe Heidegger eu égard à ses propres revendications et éclaircissements – songeons, là enŌore, à l’Humanismusbrief –, poser le problème des possibilités – ou de la 205 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 possibilité129 – ō’une éthique à partir ōe l’opus magnum apparait audacieux quand on postule une opérationnalité ōe l’analytique existentielle qui puisse en constituer son pendant théorique. Avec fermeté et non sans raison, Anna Pia Ruoppo précise avoir été poussée dans cette direction par son attention portée à la terminologie heideggérienne, riche en concepts qui se prêtent classiquement à un traitement de type moral – ainsi ceux de « conscience », de « décision », etc. Si l’existential – en tant que ce qui, dans la structure ontologique de cet étant qui se ōistingue ōes autres étants en Ōe qu’il Ōomprenō son être, a affaire à l’existenŌe – ōiffère ōe l’existentiel – l’affaire monōaine qui rapporte ontiquement aux autres étants –, alors le Dasein a comme possibilité la plus propre de décider de son être, et non pas seulement de le subir ou de l’éprouver. C’est là Ōe que l’A. appelle, ōans l’une ōes expressions les plus originales du livre, la « ōimension ō’évaluation » (p. 16) ōe l’existenŌe, dimension radicalement non-normative dont il est bientôt question de reŌherŌher, sur la base ōe l’émergenŌe et ōes évolutions philosophiques ōe l’homme Heiōegger, les raŌines théologiques. Ainsi, si la fin qui guide cet ouvrage est éminemment éthique, les moyens pour les découvrir sont spécifiquement théologiques, et ce en raison de la considération à la fois des textes du jeune Heidegger, préparatoires au chef-ō’ρuvre ōe 1927 – ces textes qui vont des Zur Bestimmungen der Philosophie de 1919/1920 au Sophiste de 1924/1925 –, et ōe l’allianŌe originale ōes ŌonŌepts, hérités ōu Ōhristianisme et ōe la gréŌité (Aristote), ō’Eigentlichkeit et ō’Uneigentlichkeit, pierre angulaire de l’analytique existentiale. Le livre se partage dès lors en deux parties : la première, « In cammino verso l’analitica esistenziale », rappelle clairement la progression heideggérienne jusqu’à Sein und Zeit, la seconde, « Radici telogiche dell’analitica esistenziale », relit fiōèlement l’ρuvre ōe 1927 en relevant les passages qui, en elle, s’avèrent tributaires du parcours précédent et en expliquant en quoi et pourquoi ils le sont. Quoiqu’elle possèōe une ōimension rétrospeŌtive, la première partie ōu livre se présente moins comme une introduction à Sein und Zeit qu’elle ne présente la véritable recherche effeŌtuée par l’auteur sur l’unité profonōe ōes deux parmi les sources fondamentales de ses réflexions liminaires, à savoir Sans artiŌle partitif Ōomme l’italien le permet, possibilità, dans le sous-titre du livre, s’avère ō’une alléŌhante ambiguïté pour le leŌteur : s’agit-il ōe la possibilité ō’une éthique ou des possibilités offertes par Sein und Zeit en un sens éthique ? 129 206 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 Luther et Aristote. On devine que les apports de Christian Sommer dans son Heidegger, Aristote, Luther de 2005 (Paris, PUF, coll. "Épiméthée") ont été ōéŌisifs pour l’A. – Anna Pia Ruoppo en avait fait la recension en 2007 pour Filosofia e Teologia (1, pp. 2008-2012) –, qui les réinterprète ici sur le plan de l’éthique. Si une problématique ō’une telle nature est réellement présente Ōhez le premier Heiōegger, Ō’est qu’elle ōépenō massivement ō’une interprétation luthérienne des catégories aristotéliciennes – ō’où la « coappartenance ō’Aristote et Luther » selon le témoignage de Gadamer (p. 24). Découlant déjà de la Turmerlebnis ōe l’Épitre aux Romains (3.23-28), la théologie luthérienne de la Ōroix pense l’homme justifié par Dieu, moyennant la foi et « sans les ρuvres ōe la loi » – autrement dit sans la ritualité des sacrements, la théologie de la gloire, sans l’obéissanŌe à ōes règles régissant son être au monōe. C’est l’homme juste qui fait ōes ρuvres justes, non l’inverse. Le péŌhé originel plongeant l’homme en état de chute – où l’on entend déjà le Verfallen –, la proximité analogique entre Ōréature et Créateur propre à l’aristotélisme ō’un Thomas ne tient plus pour le Ōroyant. L’interprétation luthérienne ō’Aristote faite par Heiōegger à travers Paul – l’attente ōe la Parousie y est amplifiée par l’angoisse authentique, qui ne ōoit ōonŌ pas être empêŌhée par l’entremise ō’un affairement monōain (GA 60 et 63) – fait que « la vie du chrétien est une lutte constante entre le rituel ōe la loi et l’ouverture à l’avenir renōue possible par la foi, entre la tenōanŌe à se Ōomprenōre à partir ōe l’horizon monōain et la tenōanŌe à se Ōomprenōre en ōialogue aveŌ Dieu […] Un tel passage n’est pas entièrement entre les mains ōe l’homme, mais ōéŌoule ōe la grâŌe, ōont la Ōonōition nécessaire et néanmoins non-suffisante, est l’expérienŌe ōe l’annulation et ōe la mort » (p. 56). Avant Aristote, sa confrontation à Augustin de 1921 porte Heiōegger à envisager, ō’un point ōe vue plus philosophique, le rapport ōe l’homme à la vérité, ŌeŌi en introōuisant une ōimension ō’unterwegs ōe l’homme ōans le monōe, en vertu ōe l’horizon ō’ouverture à partir ōuquel la reŌherŌhe ōe la vérité peut aōvenir à l’homme qui, la plupart ōu temps, la rejette Ōomme son propre choix. Plus encore que le livre XI pour le traitement du temps, le livre X des Confessions apporte au jeune Heiōegger l’iōée ōe la possibilité ontologique pour l’homme ō’être toujours ōéjà ōans le salut, bien qu’il vive la plupart du temps dans la fermeture, ainsi que le fera valoir le § 44b de Sein und Zeit. N’est-Ōe pas en effet en tant qu’ouvert que le Dasein est aussi fermé (cf. p. 166) ? Le dernier long chapitre de la première partie approfondit les résultats obtenus par l’A. à l’aune ōe l’interprétation heiōeggérienne ōe la philosophie aristotélicienne, essentiellement dans les GA 61 et 18, donc dans la période qui 207 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 suit le Ōours sur Augustin et va jusqu’au ōébut ōe la réōaŌtion ōe Sein und Zeit. La pierre ōe touŌhe permettant ō’éprouver ōe Heiōegger le « guiōe » et le « modèle », pour reprendre la célèbre formule de 1923 (GA 63, 5), est fournie par « l’objeŌtif […] ōe porter à l’expression l’historiŌité ōe la vie ōans sa motilité fondamentale » (p. 81). Le rapport entre la vie et l’éthique ōépenō ōe la déclinaison des catégories aristotéliciennes dans la vie elle-même, découlant ō’une analyse préliminaire ōu souŌi Ōomme ōémarŌhe ō’atteinte ōu « moment » – « l’attimo » du titre – de la ōans l’Éthique à Nicomaque. Heidegger cherche un « contre-mouvement » capable de renverser la vie déchue, vouée à la fuite de son authenticité, semblable à la torsion vers la vie au moment de sa perōition Ōhez Luther. L’attimo ōu titre n’est alors pas saisissable par une forme de – qui, malgré tout, traverse la pensée ō’Aristote –, mais dépend de la vertu, guidée par la φ , « la lutte contre la tendance au cèlement » (GA 19, 52, cité p. 130) plutôt que par un savoir qui serait comme « une manière ō’être orientée ōans le monōe » (p. 133). Une fois dégagées les racines théologiques du frühen Denken et les avoir interrogées selon un questionnement propre à la philosophie pratique du Stagirite – on rappellera l’importanŌe, pour les étuōes heiōeggériennes italiennes, ōe l’ouvrage signé par FranŌo Volpi en 1984, Heidegger e Aristotele (Padoue, Daphne, coll. "Phronesis") –, la deuxième et dernière partie de l’ouvrage Ōonsiste ōonŌ en une releŌture ōe Sein und Zeit à la lumière de ces aŌquis. Or, malgré l’effort ōe ŌohérenŌe méthoōologique et l’inōéniable Ōlarté ōe l’exposition ōe l’A., la plupart ōe ses lignes ne sont qu’un rappel ōe l’ρuvre majeure, ōonnant souvent l’impression ō’être même ōissoŌié ōe la problématique éthique, ōans le style ō’un Ōommentaire péōagogique. L’intérêt ōe l’amateur et même Ōelui ōu spéŌialiste pourraient Ōepenōant ōemeurer, in fine, en portant sur l’enŌhevêtrement pensant ōe l’authentiŌité et l’inauthentiŌité qui, en tant qu’intrinsèquement problématique ōans l’histoire ōe la Ōritique heideggérienne, pourra désormais être regardé sous le nouveau jour de la problématique éthique des sources théologiques. Dans la décision authentique « le soi-même (se-stesso) gère le On-même (Si-stesso) » (p. 192), au sens où ma vérité s’approprie la non-vérité, l’inautentico autentico (id.), en se décidant à se décider. Parce que la décision anticipatrice ne peut être déterminée ontiquement, ni normativement, Heidegger présente une philosophie de l’absolutisation ōe l’inōiviōu, ōu « singolo » (p.224). Et l’essai s’aŌhève sur ōes Ōonsiōérations à propos ōu nazisme ōe Heiōegger, qu’il sera intéressant ōe Ōiter au vu du retour de flamme du débat sur le sujet : « Dans le danger certes, l’homme Heiōegger se décide pour le national-socialisme et en assume le 208 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 langage. Mais sa ōéŌision n’est pas universalisable […]. De la prise et ōu pouvoir de décision (decisionismo) ōe Heiōegger ne ōéŌoule ni l’aōhésion au nazisme, ni sa critique » (p. 229-230). Francesco Paolo de Sanctis  Reiner Schürmann, Le principe d’anarchie. Heidegger et la question de l’agir, Bienne/Paris, Diaphanes, 447 p. Plus de trente ans après sa première parution (Paris, Seuil, coll. "L’Ordre philosophique", 1982), les éōitions Diaphanes ont eu l’heureuse initiative ōe rééōiter la thèse ō’État ōe Reiner SŌhürmann, Le principe d’anarchie. Heidegger et la question de l’agir. Cette entreprise éditoriale nous offre l’oŌŌasion ōe jeter un regarō sur Ōette pièŌe maîtresse ōe l’exégèse heiōeggérienne, sur un ouvrage qui, pour reprendre les mots de Françoise Dastur, a constitué un « véritable événement » 130 . Qu’on n’ait pas affaire iŌi à un simple travail ō’éruōition, Ōela apparaît ō’autant plus Ōlairement aujourō’hui, quand on Ōonnaît, pour ainsi ōire, "la suite ōe l’histoire". En effet, l’opus posthume Des hégémonies brisées131 offre un éclairage nouveau sur cette traversée magistrale de l’ρuvre heiōeggérienne qu’est le Principe d’anarchie, sur une entreprise qui consiste, certes, à épouser le mouvement du questionnement heideggérien jusqu’à ses moinōres replis et à faire ressortir ses sŌansions majeures, mais qui, simultanément, à travers une certaine stratégie du questionnement, par la priorité accordée à certaines thématiques, par le privilège octroyé à certains textes, ménage un Ōhamp pour une ōémarŌhe qui n’est plus strictement heideggérienne. Ce qui frappe au premier aborō, Ō’est que le livre ne semble aucunement "vieilli", qu’il n’apparaît nullement Ōomme tributaire ōu Ōorpus heideggérien disponible au moment de sa rédaction. Bien sûr, les publications des différents volumes de la Gesamtausgabe ont considérablement enrichi et affiné les voies ō’aŌŌès à l’ρuvre de Heidegger, en permettant non seulement ōe ōater aveŌ plus ōe rigueur l’émergenŌe ōe Ōertains thèmes ou ōe préŌiser ōavantage le rapport à l’un ou l’autre ōes penseurs ōe la traōition, mais également de faire apparaître certains orientations auparavant insoupçonnées. Françoise Dastur, Préface, in Reiner Schürmann, Les Origines. Récit (1976), Toulouse, Presses Universitaires du Mirail, 2003, p. VIII. 131 Reiner Schürmann, Des hégémonies brisées, Mauvezin, T.E.R., 1996. 130 209 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 En ōépit ōu nombre restreint ō’éŌrits heiōeggériens aŌŌessibles – surtout si on le Ōompare aveŌ Ōeux qui sont ōisponibles aujourō’hui, puisque l’A. ne Ōite que six tomes de la GA outre ō’autres ouvrages heiōeggériens éōités ailleurs que chez Klostermann –, et notamment ōe l’absenŌe ōe toute référenŌe au Beiträge, et aux traités impubliés de la fin des années 1930 et début des années 1940132, la lecture proposée par Reiner Schürmann ne semble ignorer aucune grande articulation de la pensée heideggérienne, elle ne laisse de côté aucune interrogation majeure. S’il s’agit bien ō’une lecture, au sens où la lettre des écrits de Heidegger est Ōonvoquée sans Ōesse, la ōémarŌhe proposée par l’A. n’est nullement réductible à une simple exposition des thèses et thèmes avancés par Heidegger. En effet, le Ōorpus heiōeggérien est envisagé à partir ō’une question ōont on peut ōire à la fois qu’elle n’est auōible qu’à la suite ōe Heiōegger et qu’elle n’a pas été pleinement thématisée par le philosophe de Fribourg. Ainsi, la question qui ōétermine tout Ōe parŌours est Ōelle ōe l’agir, ou plus préŌisément Ōelle ōu statut que possèōe l’agir une fois qu’on ratifie la thèse heiōeggérienne ōe la « clôture de époque de la métaphysique » (p. 13), de même que sa thématisation ōu Tournant. Que ōevient l’agir ōans Ōette Ōonfiguration époquale préŌise que représente l’âge teŌhnique, pour autant que le ōouble joug qui l’enserrait auparavant – la soumission du pratique au théorique et celle du champ de la présence à un Premier – a été écarté ? Autrement ōit, que ōevient l’agir lorsqu’il s’éprouve Ōomme libre, « affranŌhi ōes "prinŌipes"» (p. 126), Ō’est-à-dire anarchique ? Pour instruire cette question, Schürmann engage une reconstruction de la trajectoire qui a conduit à « la ōéŌouverte progressive ōe l’essenŌe anarŌhique ōe l’origine par Heiōegger » (p. 219). Deux traits majeurs caractérisent cette stratégie de lecture. Au premier abord, elle assume résolument un style ō’enquête rétro-projectif : « L’intelligenŌe ŌorreŌte ōes premiers écrits ne s’obtient qu’à Ōonōition ōe lire Heiōegger à rebours. » (p. 24) Ce parti-pris méthoōique s’appuie sur une thèse philosophique forte, à savoir que les thèses majeures avanŌées par l’ontologie fonōamentale exŌèōent le Ōaōre au sein duquel elles ont été formulées, et, partant, qu’elle ne peuvent reŌevoir un éŌlairŌissement suffisant qu’une fois envisagées à partir ōe l’Ereignis : « La raison pour laquelle la présence ne peut pas encore être pensée "comme Dans le chapitre de son opus magnum, Des hégémonies brisées, consacré à Heidegger, Reiner Schürmann supplée à ce manque en proposant une lecture approfondie – une des premières à être tentée en français – des Beiträge zur Philosophie. Cf. Reiner Schürmann, Des hégémonies brisées, op. cit., pp. 639-772. 132 210 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 temps" à partir de la temporalité extatique, n’apparaît qu’aveŌ la temporalité destinale ōe l’histoire ōe la présenŌe ; et cette temporalité destinale apparaît en sa ōifférenŌe ō’aveŌ le temps époqual seulement aveŌ la temporalité événementielle de la topologie. » (p. 33) Le second geste directeur de cette lecture réside dans l’insistanŌe sur la ōouble rétroŌession que Heiōegger aŌŌomplit en ōeçà ōu site ōe l’ontologie fonōamentale. Contre un usage reçu – et cautionné dans une certaine mesure par Heidegger lui-même – qui oppose l’approŌhe existentiale de Sein und Zeit à celle déployée après la Kehre, Reiner Schürmann est soucieux à ōifférenŌier trois paliers ōe sens à l’intérieur ōe la ōémarŌhe heiōeggérienne, Ōe qui lui permet de distinguer « l’approŌhe existentiale (l’affaire ōe la phénoménologie est le "sens" ōe l’être) [ōe l’approŌhe] historiale (Ōette affaire est la "vérité" ōe l’être) [et ōe l’approŌhe] événementielle (elle est la "topologie" ōe l’être) » (p. 85). Ou, pour restituer ce parcours à partir de son versant complémentaire : « L’axe qui Ōonōuit Heiōegger ōu Dasein au dernier rejeton de celui-ci, "la pensée", se dessine en deux moments : du Dasein à la Menschentum – la collectivité située par une époque de la vérité – et de là à la pensée en tant qu’aŌte ōe pure obéissanŌe à la présence entendue comme événement. » (p. 97) Cette ōouble stratégie ōe leŌture est mise au serviŌe ō’une enquête que l’A. saisit sous le titre ōe « phénoménologie ōes revers ōe l’histoire » (p. 158) et dont la tâche majeure consiste à nous instruire sur les latences dont notre présent est lourō. ν Ōet égarō, faire ōe Heiōegger l’interloŌuteur privilégié n’est qu’une manière ōe reŌonnaître en lui un exŌellent séismographe : « "Heidegger" tienōra ōonŌ lieu iŌi ō’une Ōertaine régularité ōisŌursive. Ce ne sera pas le nom propre qui renvoie à un homme de Messkirch, décédé en 1976. Il nous arrivera de dire "chez Heidegger", mais en toute rigueur il faut dire "dans Heidegger". » (p. 12) Le sol sur lequel une telle enquête historiale s’installe – le seul, ō’ailleurs, qui permet son déploiement – est celui déterminé par le Tournant qui se joue au sein ōe l’âge teŌhnique. En effet, si pour Heiōegger la pensée ne parvient à un ōire véritable que lorsqu’elle renonŌe à "attaquer" son thème – muni ō’un ensemble de réquisits préalables –, afin de devenir Entsprechen – réponse ou correspondance –, il ne serait peut-être pas hasarōé ō’envisager les éŌrits ōe Heidegger lui-même dans cette optique responsorielle : ses gestes les plus forts apparaîtront alors comme une manière de porter à la parole les lignes de force et les brisures de notre constellation époquale. Ce n’est ōonŌ qu’à partir ōu Tournant qu’une « phénoménologie des revers ōe l’histoire » devient praticable. Ceci revient à reconnaître que « le tournant contemporain a une fonction heuristique : à partir de lui, les époques historiques apparaissent rétrospectivement comme constituées chacune par un 211 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 prinŌipe préponōérant, Ō’est-à-dire "pesant plus lourd" sur la vie et l’intelligenŌe ōes hommes » (p. 50-51). Ce n’est ōonc que pour autant que le Tournant travaille déjà la constellation époquale qui est la nôtre, que la métaphysique peut apparaître comme un "champ clos" et que ses différentes époques peuvent être nommées, Ō’est-à-dire désignées à partir du principe qui a été à Ōhaque fois ōominant. Ce n’est que lorsqu’une époque est Ōlôturée, que son principe peut accéder à la parole : l’enquête historiale heiōeggérienne est donc elle-même située historialement. Ou, avec les mots de Reiner Schürmann : « Les interprétations des auteurs présocratiques comme celle des métaphysiŌiens, Ōhez Heiōegger, ont pour but ō’éŌlairer Ōe topos qu’est le nôtre. Ces interprétations n’ont nullement pour ōessein ōe nous ramener à quelqu’âge ō’or greŌ par-delà un prétendu interlude métaphysique. Ainsi la phénoménologie ōes revers ōe l’histoire proŌèōe-t-elle rétrospectivement : les modalités de la présence sont dépliées, par Heidegger, à partir du pli où nous sommes logés, nous, hommes du vingtième siècle. » (p. 408) Pourtant, une telle démarche ne nous instruit pas seulement sur la Ōonfiguration interne ō’une « économie de la présence » – terme synonyme ōans le lexique ōe l’A. ōe « constellation aléthéiologique » ou ō’« époque » – et sur la préséance en elle – inapparente mais inquestionnable – ō’un princeps. Elle permet également de reconnaître la place qui est à chaque fois octroyée à la pensée et à l’agir : la pensée s’avère impuissante non seulement pour façonner – constituer – le moōe ō’être ōe Ōe qui se montre, mais elle apparaît Ōomme également inŌapable ōe ōéterminer l’agir : « Les modulations alétheiologiques au Ōours ōe l’histoire marquent le théorique et le pratique ōe leur sŌeau époqual, et Ōe n’est plus le théorique qui marque le pratique. » (p. 50) Ou encore : « Heidegger déconstruit la différence entre les deux questions "Que devonsnous faire ?" et "Comment nous faut-il penser ?", en réduisant la pensée et l’aŌtion à leur Ōommune essenŌe responsorielle. » (p. 105) Que la théorie et la pratique s’avèrent ōes réponses à ōes Ōonstellations époquales ne rendent que plus urgente la question ōe savoir quelle serait leur plaŌe au sein ō’une éŌonomie anarŌhique ōe la présenŌe, au sein ō’une Ōonfiguration qui met en scène le dépérissement de toute référence à un Premier. Ici encore le recours à Heiōegger s’avère ōéŌisif. On peut ainsi relever – et le point est incontestable même pour une lecture "doxographique" – qu’« il y a une priorité de la praxis chez Heidegger, qui apparaît dès Être et temps et qui se maintient à travers toute son ρuvre. C’est que, pour la pensée ōe l’être, une certaine façon de vivre est requise. Pour comprendre la temporalité authentique, il faut exister authentiquement. Pour penser l’être Ōomme laissant 212 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 être les étants, il faut soi-même laisser être toute chose » (p. 411). Or, ce qui semble une "trouvaille" heiōeggérienne, le fruit ōe l’effort phénoménologique ō’un Ōertain penseur né à MesskirŌh, ne manquera pas ō’éŌlairer en retour les configurations antérieures du rapport théorie/pratique. Certes, « selon les anciens, l’agir suit l’être ; pour Heidegger, au contraire, un certain agir est la Ōonōition pour penser l’être » (p. 412). Pourtant, le regard déconstructeur que notre inscription époquale nous permet de jeter en arrière découvre que même au sein des constellations aléthéiologiques préŌéōentes l’agir marquait le voir ōe son sŌeau. Ainsi, la thématisation greŌque ōe l’ἀ s’avère inextriŌablement solidaire de la fabrication : « l’expérienŌe Ōlef ō’où naît la métaphysique est la fabrication. » (p. 368) Ou encore, « Ōe qui frappe l’esprit à l’âge Ōlassique ōe la GrèŌe, Ōe qu’il y ait ōu ōevenir, et ō’aborō un ōevenir ōont l’homme soit l’auteur et le maître. La métaphysique Ōomme la logique ōérivent ōe Ōet étonnement ōevant Ōe que nos mains peuvent faire ō’un matériau » (p. 136). La Ōlôture ōe la métaphysique permet ainsi non seulement ō’inōiquer Ōe qui déterminait une configuration époquale – à savoir, quel étant ou région ō’étant était investie ō’une fonŌtion prinŌipielle –, mais également ce qui sous-déterminait une telle constellation – le lieu ō’émergenŌe ō’une telle polarisation. Que la métaphysique soit parvenue à son terme n’implique pourtant nullement que l’histoire soit finie. La possibilité qui pointe aveŌ et à même Ōet aŌhèvement est Ōelle ō’une histoire non-époquale, Ō’est-à-ōire ō’une éŌonomie ōe la présenŌe qui ne soit plus soumise à la règle ō’un Premier. Le Tournant permet ainsi ō’envisager « la transition vers une économie dont le nomos soit le seul phyein » (p. 426). En tant qu’elles relèvent ō’une « pensée anticipante » – que Reiner Schürmann prend bien soin de distinguer de la « pensée anticipée » (« autre » par excellence) – les ōesŌriptions ōu statut ōe l’agir « libre », « anarchique » seront néŌessairement négatives. Pour autant qu’il se Ōontentera de suivre, sans finalité aucune, le déploiement de la présence, il faudra soutenir qu’« au seuil ōes temps, la pensée n’est ōonŌ pas seule, selon Heiōegger, à rester sans but, "sans bruit ni suite", sans propos Ōonçu ō’avanŌe et exéŌuté selon un parcours ōélibéré, sans ōisŌours. L’agir, lui aussi, ōoit se soustraire à l’emprise ōe la finalité qui n’est qu’une Ōatégorie s’appliquant à la fabriŌation » (p. 369). Malgré la volonté, maintes fois affichée, de faire valoir le caractère incontournable de la perŌée heiōeggérienne, les ōéveloppements ōe l’A. sont parfois teintés ō’une nuanŌe polémique. En effet, si Heiōegger permet ōe proposer une cartographie précise des constellations époquales – notamment à partir ōu Tournant et ōe l’hypothèse ōe la Ōlôture ōu champ métaphysique –, il 213 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 est important de bien saisir la surface sur laquelle les traits décisifs des différentes économies de la présence sont gravés. Or, selon Reiner Schürmann, il ne va nullement ōe soi, Ōomme Ōela l’était pour Heiōegger, que « les traces les plus révélatriŌes ōes Ōhamps historiques passés sont préservées ōans les ρuvres philosophiques » (p. 51). Il faudra plutôt se tourner vers le politique, car celuici représente « le site inōiŌateur ō’un orōre époqual […]. Nulle part ailleurs ne se montre pour lui-même ce qui compte en premier pour une communauté donnée » (p. 59). Ou encore : « le politique rend public, littéralement expose, le principe époqual auquel la vie obéit par ailleurs aveuglement » (p. 59). Ceci implique alors que le bouleversement que le dépérissement des Principes a proōuit sera lisible également ōans les nervures ōe l’espaŌe politique. La pensée à venir sera ōonŌ inōissoŌiable ō’une politique à venir. Ovidiu Stanciu  Marlène Zarader, Lire Être et Temps de Heidegger, Paris, Vrin, 2012, 430 p. « Ce livre était nécessaire » – peut-être la toute première remarque à faire au sujet du livre de Marlène Zarader est-elle aussi simple que cela. En langue française, le seul commentaire qui fît vraiment autorité était jusqu’alors le monumental Ontologie et temporalité de Jean Greisch (Ontologie et temporalité. Esquisse d’une interprétation intégrale de Sein und Zeit, Paris, PUF, coll. "Épiméthée", 1994). Assurément, les vertus de cet ouvrage étaient aussi nombreuses qu’inŌontestables. Marlène Zaraōer ne manque ō’ailleurs pas, ōans son introōuŌtion, ō’en saluer le ŌaraŌtère « indispensable » et l’« érudition éblouissante » (p. 10). Le commentaire de Jean Greisch comportait néanmoins un défaut que Marlène Zarader ne signale pas, mais que son livre, de bout en bout, accuse par contraste avec son illustre antécédent : sa position ō’entreōeux. On pourrait ōire qu’en ōe nombreux passages, Ontologie et temporalité était à la fois trop savant pour le novice et trop généraliste pour le spécialiste. Là où Ōelui qui faisait ses premiers pas ōans le singulier massif ō’Être et Temps avait besoin que la lettre même du texte lui fût expliquée, les nombreuses discussions critiques dont Jean Greisch assortissait son commentaire condamnaient souvent celui-Ōi à aōopter les ōimensions trop étroites ō’un résumé ōe l’argumentation heiōeggérienne. Mais en s’imposant ōes résumés ōe ce type pour chacun des quatre-vingt trois paragraphes que compte le traité de Heidegger, Ontologie et temporalité devait en même temps limiter ses discussions Ōritiques à ōe granōes lignes, ōont l’exposé souvent très ōense ne pouvait 214 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 pleinement satisfaire les attentes excessivement exigeantes des spécialistes rompus à la lecture du texte de Heidegger. À cette hésitation de principe, Marlène Zarader oppose une décision claire : « serrer ō’aussi près que possible Ōe que ōit Heiōegger » (p. 7), privilégier l’attention portée à « la lettre même du texte » et, lorsque les ōisŌussions Ōritiques s’imposent, les limiter à « une critique résolument interne » (p. 11). Le livre ne s’aōresserait-il ōonŌ qu’au ōébutant ? C’est iŌi qu’une surprise attend le lecteur. Car ce que recèle la lettre du texte de Heidegger lorsqu’elle est sŌrutée ōe près par un leŌteur ōe la ōimension ōe l’A. est bien autre Ōhose que les ponŌifs heiōeggérianisants qu’on Ōroit souvent pouvoir y lire lorsqu’on se tient à hauteur ōe survol. Le livre ōe Marlène Zarader est Ōertes issu ō’un Ōours ōestiné aux étuōiants ōe Master ōe l’Université Paul Valéry de Montpellier. Mais son origine pédagogique lui impose un type ō’exigenŌe ōont la simpliŌité même aurait tenōanŌe à la mettre hors ōe portée ōu pur ŌherŌheur. C’est Ōe que Marlène Zarader appelle la « naïveté » de sa lecture (p. 11). Cette naïveté assumée pourrait se résumer au fond à la question, réŌurrente au long ōe l’ouvrage, pourquoi ? – autrement dit : pourquoi dire ceci ? pourquoi le dire ici et non ailleurs ? pourquoi devoir le dire ? etc. Et dans ce cas, la réponse ne saurait être : « parŌe que Heiōegger en 1921… », ou encore : « parŌe que l’influenŌe paulinienne… ». En bonne méthoōe, l’A. s’efforŌe ōe tirer le pourquoi ō’aborō ōe la lettre même ōu texte, le Ōorpus ō’étuōes génétiques ō’Être et Temps pouvant, pour le lecteur spécialiste, prendre le relais de ce que Marlène Zarader aura fondé textuellement, mais sans jamais – et Ō’est là le point capital – se substituer à l’interprétation. Et si Ōelle-Ōi s’expose, Ōe qui est inévitable pour un commentaire linéaire, à manquer tel ou tel aspect du texte ōe Heiōegger, l’A. ose, préŌisément, s’y exposer, et s’exposer à en recevoir le reproche critique que, dès lors, aucun à-côté génétique, historique ou méta-critique ne saurait diluer ou adoucir. Sans doute tient-on là l’une ōes granōes forŌes ōu livre ōe Marlène Zarader : s’exposer sans détour à la critique, de sorte que celui qui analyse tel ou tel passage du traité de 1927 puisse situer systématiquement son analyse par rapport à ce que Marlène Zarader aura dit de ce passage. Peut-être sera-ce pour formuler un désaccord : mais Ōette formulation même permettra à l’interprète ōe préŌiser ou ō’affiner sa pensée. Et il trouvera peu ōe passages ōu traité qui ne puissent ōonner lieu à Ōe type ōe Ōonfrontation, tant l’ouvrage Marlène Zaraōer suit le texte ōe Heiōegger pas à pas, Ō’est-à-dire non seulement paragraphe par paragraphe, mais même alinéa par alinéa. L’A. instaure ainsi ō’avanŌe un ōialogue soutenu et Ōontinu aveŌ les Ōommentaires enŌore à naître, 215 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 lesquels ne pourront pas ne pas mettre leurs interprétations à l’épreuve ōe Ōe que "le Zarader" – ainsi s’exprimera-t-on peut-être dans quelques années – aura ōit ōe Ōe qu’ils prenōront à leur tour en vue. Peut-on ōonner une iōée plus préŌise ōe Ōe qui est susŌeptible ō’ouvrir ainsi à un débat interprétatif ? On comprendra que le contenu ō’un commentaire suivi se laisse difficilement résumer. Nous pouvons néanmoins ōire un mot ōe l’une ōes importantes questions que le livre ōe Marlène Zaraōer pose au traité de Heidegger. Cette question est liée au concept de monde. Si elles ne s’y laissent pas entièrement reŌonōuire, Ō’est à Ōe ŌonŌept que les « pauses critiques » ōont l’auteur ponŌtue sa leŌture d’Être et Temps sont le plus souvent consacrées. Le contenu de ces quelque quatorze pauses critiques se trouve ressaisi dans la conclusion ōe l’ouvrage qui, si elle ne tient pas Ōompte ōe la totalité ōes problèmes soulevés ōans les pauses, en reprenō l’essentiel sur un mode systématique. La question porte initialement sur le statut modal du « monde ambiant ». La struŌture ōe l’ustensile, structure par laquelle tout étant renvoie quotiōiennement à une totalité ōont l’usage qui le ōéfinit le renō inséparable – une telle structure, demande Marlène Zarader, relève-t-elle seulement ōu moōe ō’être impropre et inauthentique ōu Dasein, ou bien doitelle au Ōontraire être Ōomprise, si l’on peut ōire, Ōomme trans-modale, donc comme appartenant tout aussi bien au moōe ō’être propre et authentique ? Le phénomène ōe l’angoisse plaiōe, selon l’A., en faveur ōe la première hypothèse. Ce n’est en effet qu’en se trouvant arraŌhé à l’orōre quotiōien ōe l’usage que le Dasein peut accéder à son être propre. Mais si le Dasein n’atteint Ōe qu’il est en propre qu’en s’exŌeptant ōe tout Ōe qui, ōans Être et Temps, définit le monde, un tel Dasein a-t-il encore un monde ? Et si monōe il n’y a plus, Ōomment expliquer que Heidegger affirme que le Dasein angoissé fait l’épreuve ōu « monde comme tel » (SZ, § 40, p. 187) ? Enfin, puisque la compréhension, entenōue Ōomme artiŌulation ōes renvois ōe l’ustensilité, et le monōe, entendu comme ces renvois eux-mêmes, sont inséparables, le Dasein propre ne se trouve-t-il pas tout aussi bien privé de la possibilité de comprendre quoi que ce soit ? Ce qui Ōonōuit l’A. à ŌonŌlure que le « monde comme tel » dont le Dasein angoissé fait l’épreuve va « à l’enŌontre ōe Ōe que Heiōegger lui-même nous invite à penser sous le nom de monde » (p. 407) et, corrélativement, que « l’existential pourtant inŌontournable ōe la Ōompréhension s’y trouve compromis » (p. 408). Au risque de trahir un manque de finesse dans notre lecture, nous souhaiterions, pour ŌonŌlure, tenter ōe réponōre à l’important problème soulevé ainsi. 216 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 Et tout ō’aborō, il Ōonvient ōe ōemanōer pourquoi le monōe ōont le Dasein angoissé fait l’épreuve se trouve nommé « monde comme tel ». Qu’estce qui, du monde, échappe au Dasein immergé dans la quotidienneté ? Quelque chose dont Heidegger, au § 18, donne un indice sous le titre de Worum-willen, « à-dessein-de-quoi », par quoi il faut entendre le Dasein lui-même qui, ainsi, se trouve déterminé comme le terme auquel tous les renvois, ultimement, renvoient. Autrement dit, ce à quoi renvoie le marteau que je tiens en main n’est pas seulement la planŌhe et les Ōlous, mais Ōet outillage renvoie à son tour à la chose que je fabrique, celle-ci à l’usage que j’en ferai, et ainsi ōe suite, jusqu’à parvenir au renvoi ultime : mon existence – plus précisément la Ōompréhension que j’en ai à mon insu et par rapport à laquelle j’oriente l’aŌtivité apparemment anoōine ōe planter un Ōlou. La Ōompréhension ne Ōonsiste ōonŌ pas avant tout ōans l’artiŌulation ōes rapports ōe renvois qui struŌturent l’étant, mais plutôt ōans l’entente que j’ai toujours ōéjà ōe ma propre existence, entente qui, à mon insu, donne sa tonalité à mon activité, dont la réalisation ne repose pas, en toute rigueur, sur l’existential ōe la Ōompréhension (§ 31), mais sur Ōelui ōe l’expliŌation (§ 32) qui, nous ōit Heidegger, a seule vocation à articuler la compréhension, dont elle est un mode dérivé. La compréhension tacite ou implicite que j’ai ōe ma propre existenŌe, et qui m’inspire, fût-ce lointainement et très médiatement, le projet de planter un Ōlou, est ainsi le sens qui traverse et anime l’ensemble ōu réseau ōe renvois ōont l’artiŌulation ne fait que proŌéōer sur un moōe expliŌitant. Cependant, dans la mesure où la quotidienneté, comme « déchéante », est vouée à ōéŌhoir ōe Ōe sens, la Ōompréhension se perō ōans l’expliŌitation, et par suite le sens dans ce à quoi il donne sens. Dans la quotidienneté, le Dasein, s’oubliant ōans la tâŌhe qu’il a à aŌŌomplir, oublie Ōe qui, pourtant, ōonnait son sens à Ōette tâŌhe. L’angoisse n’est que la reōéŌouverte et la reprise ōe Ōe sens oublié. Puisque le sens se trouve oŌŌulté par son artiŌulation expliŌitante, Ō’est par la neutralisation de toute artiŌulation qu’il se fera à nouveau jour. Et puisque Ō’est ōans Ōe sens que résiōait ultimement, Ōomme à-dessein-de-quoi, la mondanéité du monde, le Dasein angoissé fera l’épreuve ōu monōe Ōomme tel. Comme tel, Ō’est-à-ōire hors ōe Ōe qui l’oŌŌultait : l’artiŌulation. ν notre sens, la Ōompréhension, loin ō’être Ōompromise ōans l’angoisse, se fait enfin jour. Et le monōe inartiŌulé n’est pas un non-monde, mais un monde reconduit à la pureté du sens qui anime tacitement toute articulation. Le sens serait-il donc "subjectif" ? C’est l’épineuse question que Heiōegger tente ōe traiter sous le titre de Stimmung (§ 29) : car « comprendre est toujours intonné (gestimmtes) » 217 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 (SZ, § 31, p. 142), et Ō’est en étant ō’avanŌe intonné – et non délibérément énoncé – que sens il y a. Au travers ōe Ōette tentative, à peine esquissée, ō’apporter une réponse au problème fondamental soulevé par Marlène Zarader dans ses pauses critiques, nous espérons avoir donné un avant-goût des débats soutenus et, à notre sens – Ōar ils l’ont été pour nous –, passionnants, qui attendent le lecteur non pas seulement, Ōomme nous y oblige le format ō’un Ōompte renōu Ōritique, à l’oŌŌasion ōes pauses, mais page après page et ōans tous les méanōres ō’une interprétation patiente, méticuleuse et aussi – surtout – généreuse. Car il faut saluer la générosité ō’une leŌtriŌe que rien n’obligeait à exposer, sans ōétours et sans faux-fuyant, ce que, tout simplement, elle comprend en lisant Être et Temps. Peu ō’auteurs, eussent-ils la notoriété de Marlène Zarader, ont eu le courage de s’exposer si entièrement à la Ōritique et, ainsi, à la possibilité ō’éŌrire ōes livres ō’une telle féŌonōité. On ne peut ōonŌ ŌonŌlure Ōe Ōompte renōu qu’en formulant un profond regret : Ōelui que le Ōommentaire s’en tienne à la première section ō’Être et Temps. Certes, ōans l’introōuŌtion ōe l’ouvrage, l’auteur n’éŌarte pas l’éventualité ō’éŌrire un « second volume », qui prendrait en charge les §§ 45 à 83 (p. 11). Hélas, l’A. a, ōepuis lors, exprimé le souhait ōe s’en tenir finalement à ce premier volume. Au vu de ce que celui-ci nous donne à comprendre et à penser, nous ōevons exprimer iŌi notre vif ōésir, que l’on sait partagé par tant ō’autres, que Marlène Zarader revienne à son intention première. Laurent Villevieille 218 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 INSTRUMENTUM « CONCORDANCE HEIDEGGER » par François JARAN & Christophe PERRIN Index nominum – Temps Modernes II (De Kant à Kierkegaard, 1750 – 1850)  BACHOFEN, Johann Jakob 61 6 29/30 105 43 10 VON BAER, Karl Ernest 2 78 SZ 58 21 215 29/30 378 46 354 BÖCKH, August 20 23 54 134 56/57 163 63 13 BÖHLENDORFF, Casimir Ulrich 4 157, 167, 168, 175 61 104 14 47 16 717 39 31, 136, 211, 242, 290 43 122 75 346, 357 90 321 BOLZANO, Bernard 1 20, 46, 278, 279 2 289 SZ 218 21 86, 87, 118, 130 22 75, 239 56/57 192, 193 BRAIG, Carl 1 57 14 93, 94 16 13, 19, 41 BRENTANO, Franz 1 34, 47, 56, 65, 93, 115–24, 163, 187 2 285 SZ 215 3 305 11 145, 147 12 88 14 93, 95, 99, 147 15 345, 385, 386 17 6, 54, 136, 137, 176, 260, 261 19 3, 4, 451 20 23, 24, 26–30, 34–6, 41– 4, 61, 62, 159, 160 21 27, 84, 87, 93–5 22 146, 157, 285 23 125, 227 24 81 26 45, 166–8 33 45 56/57 125, 140, 148–50, 176, 186 58 13, 52, 215 60 292 61 8, 9, 47 62 9, 98, 99 63 46, 69, 70 86 43, 725, 751 89 165, 191, 284 BURCKHARDT, Jacob 61 5, 9, 89, 104 62 339 15 392, 428, 429 16 438 22 17 23 9 28 261 34 62 36/37 163 43 10, 14, 105, 122 45 43 46 8, 232, 259, 350 48 215, 216 50 120, 122 51 16 54 26, 80, 82, 95, 130, 134, 135 58 205 67 238 75 251 76 23 77 232 90 116 CLAUDIUS, Matthias 8 166 13 97 40 107 86 427 87 109 COMTE, Auguste 15 353 20 16 28 133 56/57 132, 164 COUSIN, Victor 88 137 DARWIN, Charles [Darwinismus, darwinistisch] 61 57, 439, 510, 523 16 4 29/30 366, 377, 378, 382, 384 36/37 210 39 294 40 105 43 70 46 234 47 22, 77, 90, 91, 154, 175 48 32 49 37 50 120, 122 69 223 87 6, 52, 201, 202 DILTHEY, Wilhelm 1 56, 203, 353 2 62, 63, 272, 277, 278, 331, 499, 508, 525–7, 533 219 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 SZ 46, 47, 205, 209, 210, 249, 377, 385, 397–9, 404 3 239, 305, 308 5 99, 321 61 89, 110 9 14, 40 12 92, 122 14 54, 101 15 346 16 39, 42, 44, 49–51, 407 17 88, 91, 92, 95, 112, 113, 121, 279, 300, 301, 320, 321 18 178 19 4, 9, 310–13, 369, 370 20 18–20, 23, 28, 30, 126, 161, 163–5, 173, 174, 294, 295, 302– 4 21 17, 27, 85, 86, 91 22 16, 17 23 9, 168 24 71, 74, 247, 253, 389 25 7, 132 26 64, 178, 214, 262 27 235–9, 346–53, 355 28 22, 108, 132–4, 136, 137, 265, 308, 310, 311, 333 42 13, 117 43 106, 129 55 90 56/57 123, 125, 140, 148, 163–6, 182 58 9, 10, 12, 58, 160, 215, 253 59 14– 16, 67, 96, 148, 149, 152–9, 161–70, 174, 189, 197, 198 60 19, 21, 26, 27, 33, 37, 39–41, 50, 134, 163, 164, 167, 169, 170, 172, 180, 307, 328 61 7, 9, 80 62 175, 176, 329, 330 63 14, 37, 42, 52, 68, 69, 73, 106, 107 64 3–10, 14, 48, 85, 88 65 218, 337 66 412 70 152 76 76 78 3 86 714, 800 90 225, 253, 318, 358 DOSTOJEWSKI, Fjodor Michailowitsch 1 56 62 23 48 1 58 85 DROYSEN, Gustav 1 428 ENGELS, Friedrich 86 296 EBERHARD, Johann August 3 201 25 3, 95 41 80, 133 ERDMANN, Johann Eduard 10 65, 146 23 1, 5, 170, 176, 179, 185, 186, 188, 231, 232 26 46, 87, 96, 142 86 39, 42 FEUERBACH, Ludwig 61 242 9 447 15 352, 393 16 703 27 146, 147 44 21 FISCHER, Kuno 1 127, 188, 254, 318 42 12 48 37 56/57 135, 141, 150, 155, 160, 162, 169 76 188 87 142 VON GOETHE, Johann Wolfgang 2 262, 530 SZ 197, 401 3 286 4 33 61 32, 128, 146, 147, 262, 298 62 213, 222, 344, 346 7 31, 32, 45, 50, 56, 57, 106 9 320, 339, 425 10 9, 13, 71, 122, 132, 181, 185, 186, 188 11 44 12 156, 157, 199, 220, 247 13 2, 94, 99, 124, 145, 149, 205, 210 14 62, 80, 81 15 165–7, 392, 399, 406, 430 16 31, 50, 291, 496, 532, 543, 544, 547, 584, 587, 611, 614, 719 20 14, 419, 420, 441 22 256 23 36, 148 24 6, 401 27 31, 147, 230, 327 28 182 29/30 39 34 64, 324 35 248 36/37 164, 197 38 162 39 47, 130, 220 40 96 41 58, 114 42 1–3, 9, 13, 60, 77, 96, 101, 115–17 43 42, 149, 176, 177 44 44 45 127 46 28, 58, 77, 91, 203, 211, 341, 346, 357, 361, 374 47 51 48 314, 324, 325 49 74, 161 50 103, 122, 150, 151 51 31, 32, 44, 49, 70 52 8, 78 53 24, 94 54 108, 139 55 21, 30, 89, 230, 299, 332, 370 58 58, 205 59 159, 161 63 220 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 39 64 12, 48 65 464, 496 71 211, 322 74 110, 175, 179 75 218, 350, 351, 355, 388 76 253, 327, 330, 343 77 35 78 105 81 35, 36, 300 85 37, 153, 161 86 206, 372, 481, 706 87 6, 115, 277 88 171, 220 89 168, 170, 268, 269, 311, 328, 346 90 32, 316 GRIMM, Jakob und Wilhelm 2 73 SZ 54 11 69 13 95, 99 15 351, 392 18 381 20 213 22 29 53 199 54 57, 69 56/57 163 64 31 71 208, 211 85 54, 101, 103, 104, 106, 205–13 89 83, 84 HAMANN, Johann Georg 10 13 12 10, 11 42 70 56/57 133 71 294 74 169, 179 79 172 85 38, 51, 101, 154 HEBEL, Johann Peter 7 31, 193 12 252 13 117, 118, 123–5, 133–8, 140–3, 145, 147, 148, 150, 158–60, 163, 164, 166, 168, 169, 172, 174–8 15 340 16 473, 491–7, 501, 504, 509, 511, 514, 515, 521, 529, 530, 532, 534–43, 545–8, 566, 567, 645, 646, 649, 691, 780 81 306 89 336 HEGEL, Georg Wilhelm Friedrich 1 3, 17, 56, 57, 193, 217, 218, 380, 381, 411 2 3, 5, 30, 313, 361, 424, 536, 564–74 SZ 2, 3, 22, 171, 235, 272, 320, 405, 406, 427–35 3 6, 226, 244, 304 4 90, 163, 167 5 1, 68, 71, 101, 115, 128–32, 134, 136, 138, 139, 141, 143, 144, 147–9, 151–5, 157, 158, 161, 162, 165, 166, 169–72, 175, 180–4, 186, 187, 189, 190, 193–5, 199, 200, 202, 214, 230, 253, 323–5 61 19, 32, 54, 58, 60, 83, 89, 90, 107, 128, 137, 146, 151, 209, 289, 312, 320, 390, 404, 409, 421, 433, 434, 476, 526, 539, 591 62 1, 11, 95–7, 100, 116, 130, 141, 175–9, 210, 213, 267, 269, 271, 289, 308, 396, 417, 422, 429 7 18, 74, 75, 80, 97, 113, 186, 240–2, 268 8 23, 27, 94, 95, 104, 216, 242, 243, 247 9 79, 103, 120, 253, 303, 325, 335, 336, 339, 340, 360, 364, 395, 404, 414, 427–41, 443, 444, 464 10 28, 54, 65, 112, 127, 128, 131, 133, 144, 146 11 12, 16, 24, 29, 34, 40, 47, 49, 53–62, 64, 65, 67, 72, 73, 79, 81, 94, 105–7, 128, 131–3, 137, 139, 140 12 133 13 20, 95–103, 137, 212, 233 14 10, 13, 34, 39, 42, 57–61, 65, 66, 70, 76, 77, 79, 80, 86, 94, 125 15 85, 93, 100, 105, 118, 126–30, 146, 153, 175, 182–7, 197–201, 253, 259, 260, 262, 271, 278, 286–8, 290–5, 297, 298, 300–2, 304, 305, 307– 9, 313–19, 322–5, 329, 335, 338, 347–9, 353, 360, 370–2, 378, 387, 393, 427, 431, 438 16 39, 50, 291, 317, 336, 356, 370, 536, 572, 624, 632, 672, 673, 679, 723 17 6, 22, 63 18 5, 10, 196, 334, 336 19 198, 223, 313, 449, 561, 585 20 21, 23, 239 21 14, 32, 123, 171, 173, 181, 201–3, 249, 251–70, 304, 311, 387, 403, 412 221 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 22 22, 23, 59, 60, 82, 88, 108, 146, 170, 226, 234, 245, 248, 261, 264, 285, 295, 330 23 1, 2, 6, 9, 16, 32, 61, 64, 69, 103, 166, 191, 196, 207 24 3, 4, 6, 15, 18, 19, 30, 38, 105, 112, 113, 117, 118, 128, 141, 142, 157, 158, 167, 176, 179, 210, 216–18, 226, 252, 254, 282, 328, 400, 404, 443 25 167, 209, 294, 371, 397 26 7, 19, 27, 54, 92, 139, 140, 163, 176, 243, 256 27 1, 14, 16, 49, 153, 171, 190, 231, 293, 317, 318, 388 28 2, 9, 32, 33, 46, 51, 102, 115, 116, 122, 126, 131, 154, 186, 194–205, 207–17, 219–21, 224, 226, 227, 229–31, 238, 239, 254, 259–67, 273, 279, 280, 283, 292, 294, 299, 303, 304, 307, 312, 313, 330, 332–44 29/30 24, 34, 82, 305, 306, 420, 453, 508 31 37, 51, 65, 75, 81, 109–11, 115, 120, 201, 203 32 1–9, 11–13, 15–24, 26, 27, 29–35, 37–45, 48, 51–61, 64–6, 68, 70, 72–6, 78–80, 84, 85, 87, 90–3, 95, 96, 101, 102, 105–11, 113, 115–18, 121, 129, 141–5, 147–63, 165, 166, 168– 71, 173–7, 180, 181, 183, 186, 187, 189–98, 203–13 33 24, 31, 110, 136 34 72, 130, 285, 325 35 34, 99, 101, 105, 148, 165 36/37 13–15, 17–19, 22, 27, 29, 35, 36, 40, 43, 49, 50, 52, 56, 69– 73, 75, 76, 147, 151, 172, 275, 277–9, 281 38 4, 6, 7, 105, 148 39 6, 55, 84, 129–33, 246, 250 40 20, 129, 130, 135, 189, 196, 197, 225, 226 41 27, 57, 58, 114, 135, 136, 153, 195 42 2–4, 8–10, 13, 19–22, 27, 31, 36, 42, 43, 49, 68, 69, 73, 79, 82, 101, 113, 117, 137, 138, 140, 142, 156, 162, 164, 168, 222, 251, 260 43 25, 41, 42, 67, 71–3, 99, 100, 106, 107, 125, 149, 165, 176, 182, 256, 289 44 72, 97, 104, 182, 183, 207, 208, 213, 230 45 10, 34, 91, 196, 221 46 10, 16, 92, 107, 112, 126, 150, 213, 362 47 13, 95, 101, 102, 179, 200, 270, 275, 285, 316, 325 48 34, 36, 37, 71, 83, 116, 118, 121, 146, 150, 151, 164, 187, 199, 222–4, 262, 263, 265–8, 271, 272, 274, 312, 314 49 7, 8, 20–5, 48, 87, 91, 97, 99, 102, 110–13, 135, 137, 148–50, 171, 173–81, 183–6, 193, 194, 198 50 6, 45, 47, 49, 69, 122, 130 51 72, 73, 105 52 78, 96, 98, 99, 119 53 19, 20, 75, 95, 157, 170 54 11, 25, 27, 28, 79, 84, 86, 135, 139, 144, 147, 148, 205 55 18, 20, 21, 27–31, 34, 40, 41, 50, 51, 112, 114, 117, 126, 150, 151, 230, 231, 236, 273, 275, 354, 355, 384 56/57 40, 97, 108, 134–6 58 2, 5, 8, 9, 11, 12, 148, 184, 225, 238, 240, 246 59 5, 17, 27, 95, 96, 160 60 20, 22, 23, 25, 26, 60, 81, 171, 328 61 7, 11, 150, 193, 198 62 6, 52, 100, 175, 229, 335, 336, 369, 384 63 41–3, 45, 46, 59, 64 64 46, 77, 102 65 37, 76, 138, 176, 191, 199, 200, 206, 212–15, 221, 232, 233, 264, 266, 289, 314, 222 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 315, 426, 461, 483 66 27, 36, 58, 68, 71, 79, 91, 120, 128, 177, 212, 218, 263, 267, 279, 281–4, 286, 291, 293, 294, 299, 312, 313, 341, 344, 374, 376, 384, 392, 396, 412, 419, 422, 423 67 13, 14, 24, 35, 36, 51, 95, 98, 100, 107, 127, 135, 146, 161, 165, 169, 171, 197, 210 68 1, 3–8, 10–15, 17, 19–35, 37, 38, 42, 47, 50–6, 61, 63, 65, 67– 9, 71–82, 84, 86–91, 93–6, 98, 99, 101, 103, 106, 108, 109, 111, 112, 114–20, 123–7, 130–2, 134, 135, 139, 141, 145, 146 69 35, 132, 157, 220 70 44, 50, 71, 98, 161, 164, 174, 191–3 71 45, 105, 109, 113, 123, 148, 149, 216, 260, 271, 288, 295, 307 74 31, 137, 198 75 8, 201, 343, 353 76 25, 26, 28, 33, 48, 49, 64, 76, 102, 103, 149, 206, 241, 247, 253, 274, 275, 287, 329, 376, 377, 379 77 7 78 6, 15, 19, 20, 33, 34, 39, 107, 108, 217 79 82, 86–8, 92, 94, 95, 112, 114, 116, 136, 140, 141, 150, 168 81 320 85 38, 81, 97, 103, 143, 154, 157, 159, 183, 208, 213 86 3, 4, 6, 10–14, 16, 17, 19–32, 34–8, 40, 41, 43, 46, 55, 57, 60–3, 65–8, 71, 73, 80, 81, 83–5, 92, 93, 95–7, 99, 100, 102, 103, 105–7, 111–13, 115– 20, 122, 139, 141, 143–7, 149, 150, 152, 155–7, 161, 163–6, 170, 173, 175, 182, 183, 190, 192, 195, 210–14, 219, 223, 227, 230, 245, 260, 263, 267, 269–72, 274–9, 286, 289–92, 294, 295, 301–3, 305, 307, 309, 311, 312, 317, 320, 325, 326, 334, 345, 348, 351–3, 356, 362, 363, 367, 369– 72, 383, 387, 389–91, 393, 394, 396–8, 401–3, 405–7, 409, 411, 412, 414, 415, 417–20, 422–4, 433, 435, 437, 439–44, 450, 452, 454, 456, 457, 461, 463, 465, 467, 468, 471, 473, 475–84, 489, 493, 494, 496, 498–503, 506, 507, 509–12, 517–20, 537, 540, 543, 549–52, 554–9, 562–5, 567–71, 574–80, 584–602, 604–7, 609– 11, 613–27, 633–45, 647–52, 655, 657, 658, 660–79, 682–97, 699–701, 704–10, 714–17, 719, 723, 724, 726–9, 731, 732, 734– 8, 740, 741, 743, 747, 749, 750, 753, 754, 756–60, 762, 765–84, 786–8, 790–5, 797–803, 805, 808–12, 817–30, 832–53, 855– 60, 862, 864–72, 874–8, 880–5, 889, 892, 893 87 6, 9, 10, 65, 72, 101, 149, 178, 188, 223, 263, 285, 300, 302–4 88 13, 28–30, 48, 49, 82, 85, 110, 123–6, 128–33, 138, 141, 169, 209, 220, 236, 244, 252, 260, 261 89 74, 154, 243, 263, 354 90 76, 96, 110, 118, 165, 168, 175, 182, 253, 278, 288, 298, 307, 320, 323, 332, 339, 345, 347, 398, 443 HERBART, Johann Friedrich 1 19, 63 21 68 58 213 VON HERDER, Johann Gottfried 2 262, 263, 331 SZ 197, 198, 249 5 317 61 88, 128 62 213 10 13 12 10 16 15, 29, 291, 531 223 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 20 419 23 147 36/37 268 39 47, 220 42 60, 115, 116 43 105, 149 45 127 46 28 48 314 52 8 54 195, 204 56/57 133, 134, 163 58 210 62 171 64 95 71 294 74 67, 169, 174, 179–81 75 280, 329, 346 76 300 85 1, 3, 4, 6, 8, 10, 11, 25, 27, 35, 38, 41, 43–6, 48, 51, 54, 65, 77, 79–82, 92, 93, 101, 103, 104, 106, 113, 117, 126–9, 131–3, 146, 148, 154–75, 177–205, 207–11, 213, 214 86 43, 296 87 65 88 171 89 268 HERZ, Marcus 3 41, 230, 302 21 115 23 218 25 52, 69 26 163 27 250 28 42, 146 90 138 HÖLDERLIN, Friedrich 1 56 4 7, 13, 14, 20–2, 26–8, 31, 33–40, 42–7, 51–3, 55–9, 61–3, 67, 71–7, 79, 82, 84–8, 90, 97, 102, 103, 107–9, 113, 114, 120– 4, 126, 128, 134–6, 139, 143, 145, 149, 152–4, 156–65, 167, 169– 74, 176, 179–95 5 3, 22, 66, 96, 269–73, 276, 296, 320 61 xii, 104, 105, 128, 146, 293, 347, 456, 594 7 17, 29, 135–7, 191, 193, 194, 196–203, 205–8 8 11–14, 20–2, 74, 193, 196–8 9 46, 240, 320, 335, 337–9, 358, 423, 476 10 65, 122, 123, 154 11 118, 128, 133, 138 12 88, 89, 109, 161, 171, 172, 194–6, 207, 255 13 20, 85, 99, 100, 106, 147, 213–17, 219, 231, 232 14 47, 51, 64, 100, 110 15 58, 164, 165, 171, 182, 183, 187, 197, 283, 284, 287, 331, 336, 351, 385, 425, 426, 430–3 16 50, 319, 331, 333–5, 355, 360, 370, 391, 402, 404, 407, 420, 489, 561, 572, 594, 610, 612, 678, 679, 688, 689, 715–17, 728, 749 28 196 32 11, 177 35 103 36/37 18 39 1, 3–9, 17, 20, 22–5, 30–7, 40, 42, 48, 49, 53–6, 60, 61, 65– 9, 74, 77, 83, 84, 91, 103, 105, 114, 115, 117, 118, 120, 121, 123, 128–30, 133, 134, 137, 146, 148, 163, 168, 173, 176, 183, 184, 188, 191, 209–11, 213–25, 229, 233, 240, 242, 245, 249, 250, 252, 254, 255, 258, 260, 263, 269, 270, 277, 287, 288, 290, 293, 294 40 82, 114, 135, 215 41 57 42 3, 6, 8, 9, 13, 117, 284, 285 43 116, 122, 149, 176, 192 44 30, 77, 137 45 90, 125–7, 133–6, 154, 175–7, 216 46 113, 116 47 43, 89, 273, 319 50 90, 94–6, 103, 104, 144, 150, 151 51 9, 74 52 1, 2, 4–13, 16, 17, 22–8, 32, 33, 35–8, 40–7, 51, 52, 56, 57, 59, 61, 63, 67–70, 72, 73, 76, 78–82, 84, 86, 87, 89–92, 96, 98, 99, 101–3, 105, 110–13, 116, 118–21, 126, 127, 130–5, 140–3, 146–9, 151–4, 156–9, 161, 163, 165, 168, 173, 176–8, 180, 184, 187–90, 192, 193, 197 53 1, 2, 6–17, 20, 21, 23–6, 29–33, 35–41, 45, 46, 51, 57, 58, 60–3, 66, 67, 69, 70, 73, 75, 79, 84, 85, 87, 88, 90, 96, 122, 125, 144, 147, 152–8, 160–2, 164–6, 168–74, 176, 177, 179– 224 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 81, 184, 185, 187–9, 191, 192, 196, 197, 199, 202–5 54 112, 114, 208, 210 55 15, 30, 31, 189, 207, 211, 212, 219, 221, 230, 273 56/57 74 59 160 65 12, 33, 129, 204, 353, 396, 401, 421–3, 432, 463, 464, 485 66 24, 231, 420, 426 67 109, 118 69 49, 93, 173 70 28, 147, 149, 153, 155–60, 164–8, 187 71 9, 12, 22, 88, 89, 98, 183, 271, 280, 286, 305, 307, 322, 324, 331, 335–7, 340 74 60–2, 100, 129, 141, 143, 150, 164, 165 75 5–14, 16–18, 20, 22–6, 28, 29, 32, 37, 38, 40–2, 45, 47, 59, 63, 75, 76, 80, 81, 83– 6, 92–6, 101, 106, 109–13, 115– 23, 129, 133, 135, 140–2, 144, 149–52, 157, 159–62, 167, 171– 3, 181, 187, 189, 196, 199–201, 205, 207, 209, 215, 224–6, 228, 230, 242, 243, 245, 249, 250, 256, 259, 261, 263–5, 267, 270–3, 277, 280, 285, 287, 289, 292, 293, 309–14, 319, 325, 327, 328, 331–9, 341–6, 349–52, 355–7, 360–4, 369, 371, 373, 374, 376, 380, 385, 388–92 76 43, 291 77 222 78 105 79 29, 72, 82, 87, 93, 97, 114, 135, 136, 141, 172 81 37, 38, 41, 310, 318 85 5, 61, 72, 103 86 191, 394, 890, 891 87 197, 206 88 38, 220, 256 89 183, 303, 313, 314, 331–3 90 156, 225, 243, 276, 309, 321, 366, 444, 455, 465, 467 VON HUMBOLDT, Alexander 24 6 27 230 55 21 59 161 86 639 VON HUMBOLDT, Wilhelm 2 159, 220 SZ 119, 166 7 63 12 9, 28, 234–8, 245, 256 15 349 16 198, 199, 291, 292, 294, 765 20 343, 344 42 2 52 78 56/57 163 74 179, 180 85 36, 38, 51, 54–6, 79, 103, 154, 157, 211 86 818 90 116 ISRAELI, Isaak 2 284 SZ 214 JACOBI, Friedrich Heinrich 3 137 62 23 23 147, 148 27 272 28 50, 165, 196 42 4, 8, 60, 114–17, 155 60 152 86 254, 269, 325, 706 KÄHLER, Martin 2 361 SZ 272 KANT, Immanuel [kantisch] 1 1–4, 9–11, 19, 22, 24, 30, 33, 36, 45, 46, 49–51, 53, 54, 63, 64, 70, 90, 129, 141, 153, 197, 202, 223, 274, 403 2 6, 14, 31, 32, 35, 36, 41, 42, 51, 53, 69, 88, 114, 126, 135, 145, 146, 192, 267, 269–71, 275, 278, 284, 285, 297, 307, 360, 361, 388, 421–5, 474, 486, 554, 564, 570, 571 SZ 4, 10, 23, 24, 26, 30, 31, 40, 51, 94, 101, 109, 110, 145, 203, 204, 208, 210, 215, 224, 271, 272, 293, 318–21, 358, 367, 419, 427, 432, 433 3 xiii-xv, xviii, 1, 5–7, 9, 12–23, 26–9, 31–7, 40–6, 48–53, 55–62, 64, 66–77, 79–82, 85–9, 91, 93, 97, 99, 101–3, 105–11, 113–18, 121–30, 132–8, 140–9, 225 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 151–3, 155–61, 163–88, 190–5, 197–202, 204–8, 213–15, 217– 22, 225, 230, 231, 237, 243–5, 249, 250, 252, 253, 265, 271, 273–81, 288, 291, 293–5, 298, 299, 301, 302, 304–6, 310 4 152 5 5, 71, 101, 129, 154, 200, 217, 245 61 32, 53–5, 106–13, 123, 132, 151, 157, 208, 209, 237, 245, 289, 409, 433, 434, 446, 454, 462, 463, 504, 508, 518, 526, 527, 551 62 62, 65, 86, 95–7, 124, 126, 149, 206–8, 210, 213, 215, 218, 219, 232, 245, 268, 308, 315, 364, 394, 420, 422–5, 427, 428 7 44, 51, 73, 75, 77, 84, 87, 113, 136, 141, 178, 187, 241 8 12, 23, 29, 44, 83, 95, 104, 184, 188, 204, 205, 214, 215, 231, 237, 238, 242, 246, 247 9 27, 73, 76, 125, 128, 133, 134, 136, 139, 147–54, 180, 199, 200, 253, 274, 289, 322, 325, 331, 357, 368, 395–7, 402, 403, 428, 430, 445–77, 479, 480 10 13, 96, 97, 104–9, 112–18, 120, 121, 127, 129, 131, 135, 145, 146, 150 11 12, 34, 53, 57, 62, 128, 135, 148 12 110, 123–5, 132, 138 13 38, 199 14 13, 15, 20, 42, 53, 56, 57, 70 15 40, 84, 97, 140, 165, 166, 178, 185–7, 203, 204, 281, 293, 298–300, 302, 305, 306, 308, 309, 311, 313, 315, 318, 323, 326, 328, 329, 338, 342, 343, 346, 348, 356, 360, 371, 372, 375, 376, 378, 380, 381, 385 16 15, 19, 29, 38, 150, 203, 247, 291, 403, 672, 673, 723, 728, 733, 734 17 5, 9, 59, 62, 78, 271 18 5, 9–12, 95, 96, 334–6 19 1, 2, 4, 61, 312, 313, 322, 494, 495 20 11, 13, 17, 18, 21, 30, 78, 79, 96, 100, 101, 126, 128, 145, 175, 182, 232, 236, 237, 239, 246, 248, 277, 294, 307, 320–2, 353, 391, 393 21 4, 5, 13, 14, 32, 37, 41, 51, 56, 57, 83, 86, 109, 114–18, 121, 173, 194, 197, 200–4, 220, 221, 227, 248, 251, 253, 261, 269–84, 286–99, 301– 13, 315–21, 323–49, 352–61, 363, 366, 367, 369–80, 383–97, 399–401, 404–9 22 10, 69, 120, 123, 146, 148, 156, 161, 184, 200, 226, 233, 244, 245, 255, 269, 272, 286, 295, 312, 313 23 1, 2, 6–8, 11, 14, 31–3, 39, 51, 56, 61, 69, 73, 84, 90, 94, 96, 103, 106, 112, 136, 144, 153, 157, 168, 177, 191, 192, 195, 198–204, 207–9, 211, 213, 216, 218, 219, 222, 230–7, 239 24 5, 6, 9–12, 16, 20, 23, 32, 35–69, 73, 75–8, 80, 93, 94, 96, 100–13, 119, 121–5, 128, 130, 132, 134, 136, 139–44, 146, 150, 154, 155, 157–9, 165–7, 172–4, 176–89, 191–214, 216–18, 220, 221, 223, 225, 242, 252, 255, 258, 259, 268, 273, 277, 280, 283–5, 289, 317, 328, 336, 353, 356, 423, 430, 431, 445, 447–52, 460, 461, 463, 467–9 25 1–10, 12–17, 20, 24, 29, 39–46, 48–58, 61–75, 77–98, 100–15, 118–20, 122–6, 130–2, 134, 136–8, 140–5, 147– 63, 165–70, 172–6, 178–83, 185–94, 196–201, 203–10, 212– 226 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 21, 224, 226–37, 243–2, 247, 249–51, 254, 255, 257–63, 266– 74, 276–81, 283, 284, 286–310, 312–25, 327–32, 334–51, 353–6, 358–60, 362–74, 376, 377, 379– 88, 390–9, 401–16, 418–31 26 1, 4–7, 10, 17, 19, 27, 37, 38, 46, 54, 55, 62, 72, 75, 81, 82, 85, 88, 89, 98, 99, 163, 179, 182, 188–91, 198, 208–10, 218, 224–31, 236, 240, 255–7, 272 27 1, 14, 16, 19, 20, 43, 47, 48, 54, 55, 71, 74, 91, 94, 135, 144, 171, 188, 195, 207– 9, 224, 230, 231, 239, 244, 245, 247–52, 254–83, 285, 286, 288, 289, 291–4, 296–301, 308, 309, 316, 318, 319, 324, 344, 351, 352, 362, 377, 388, 389 28 11, 20, 23, 29–33, 35–9, 41, 42, 44, 46, 47, 49, 50, 53, 54, 57, 58, 64, 68, 74, 77–9, 91, 92, 95, 97–101, 111, 115, 117, 119, 120, 122, 123, 125, 128, 132, 136, 144, 146, 150, 151, 158, 159, 165, 166, 169, 170, 183–6, 189, 191, 196, 199–202, 204, 209, 210, 216, 219–21, 229, 237–9, 241, 245, 250, 251, 254, 255, 257, 258, 260–4, 266, 273, 279–83, 285, 287–9, 292, 295–9, 308, 314, 316, 322, 323, 325, 326, 328, 329, 333–7 29/30 69, 71, 76, 77, 81, 305, 306, 421–3, 429–31, 441, 471–3, 475, 480, 485, 514, 522 31 17, 20–31, 35, 67, 68, 70–5, 109, 115, 120, 121, 126, 132, 134, 136, 137, 139, 140, 144, 145, 147–53, 156–64, 166– 9, 171, 172, 175, 176, 178–80, 182–209, 211, 213–16, 218–23, 225–7, 232, 235, 236, 238–40, 242–56, 258–75, 277–82, 284– 92, 294, 297, 299, 301–3 32 4, 15, 22, 26, 41, 57, 76, 109, 110, 114, 118, 147–52, 154–6, 158, 159, 161, 169, 171, 175, 183, 191, 194, 195, 198, 200, 205, 212 33 7, 9, 32, 33, 54, 67, 79, 83, 125, 200 34 1, 52, 60, 85, 86, 120, 130, 164, 182, 220, 222, 225, 229, 245, 279, 324 35 7, 16, 18, 34, 68, 71, 82, 105, 110, 203, 213, 216, 217 36/37 10, 18, 22–7, 29, 36, 46, 50, 52, 65, 69, 70, 72, 74, 76, 98, 121, 171, 276, 277, 279, 286 38 6, 7, 37, 147 39 84, 145, 278 40 44, 129, 145, 197, 206, 207, 210, 225, 226 41 5, 33, 55– 62, 66, 68, 77, 78, 80, 109, 111, 112, 114, 115, 117, 120–38, 140, 142–9, 151–65, 167, 170, 172– 80, 182–4, 186–91, 193–8, 200– 3, 207, 214–17, 219, 220, 222–8, 230–6, 238–42, 244–6, 249 42 2, 8, 14, 29, 30, 32, 33, 36, 61–82, 88, 89, 97, 103, 105, 108, 130, 140, 144–6, 156, 159–61, 163, 171, 181, 281 43 42, 66, 67, 124–31, 143, 161, 182, 189, 243, 255, 256 44 16, 25, 72, 213 45 10, 17, 18, 64, 106, 196 46 10, 16, 31, 52, 58, 126, 128, 129, 132, 152, 160, 172, 173, 189, 190, 197, 213, 277, 282, 310–13, 320, 322, 325, 326, 333, 338, 349, 356, 366–9, 371, 372 47 13, 32, 33, 40, 53, 101, 109, 110, 141, 151, 227 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 157, 166, 179, 180, 189, 218 48 36, 64, 68, 83, 106, 116, 118, 151, 180, 182, 215, 225, 230, 298, 307–10, 312, 314, 317, 320, 321 49 7, 12, 13, 17, 19, 28, 33, 38, 48, 52, 68, 82, 87, 100, 106, 114, 118–20, 141, 146, 148–51, 158, 176, 188, 193, 194, 196, 198 50 4, 21, 46, 83, 103, 130, 152 51 9, 47, 56, 76 53 27, 44, 49, 57, 75, 112 54 11, 72, 76, 96, 100, 144, 195, 204, 206 55 4, 38, 63, 65, 110, 111, 113, 115, 126, 149, 229–31, 234–8, 251, 252, 257, 271, 275, 346, 347, 360, 382, 384 56/57 9, 13, 17, 19, 30, 37, 78, 79, 104, 106, 122, 128, 129, 133, 134, 140–4, 146–8, 152, 155, 159, 162, 170, 176, 182 58 2, 8, 23, 44, 45, 131, 197, 212, 213, 225, 226, 230, 248, 249 59 4, 5, 14, 25, 67, 95, 102, 103, 114, 116–18, 155, 165, 176, 188, 196 60 17, 19, 21, 22, 24, 49, 57, 91, 164, 172, 328 61 4–7, 11, 21, 47, 97, 173 62 172, 208, 283, 306, 309, 316, 369 63 1, 22, 24, 26, 27, 68 64 65, 80, 96, 97, 117 65 53, 65, 68, 70, 81, 89, 93, 176, 181, 202, 208, 212, 213, 215, 223, 250, 253, 279, 281, 289, 313, 315, 337, 372, 373, 425, 426, 448, 461, 468 66 71, 76, 78, 87–9, 299, 301, 344, 374, 377, 386, 396, 398, 399, 419, 423, 424 67 12, 25, 26, 29, 63, 68, 92, 97, 101, 126, 135, 137, 153, 161, 173, 189, 210, 216 68 23, 25, 33, 38, 40, 49, 50, 71, 77, 79, 81, 90–3, 97, 101, 102, 106, 108, 111–15, 120, 124, 125, 138, 141, 145, 149 69 138 70 81, 102, 110, 161, 192 71 12, 32, 45, 46, 112–14, 127, 141, 182, 270, 284, 322 74 180, 193 75 92 76 33, 43, 49, 67, 76, 154, 157, 167, 169, 170, 176, 183, 187, 196, 211, 232, 241, 247, 254, 279, 326, 379 77 3, 5, 97–101, 106 78 129, 199, 213 79 16, 41, 66, 82, 90, 116, 140, 151, 166 81 10, 304 85 81, 92, 97, 103, 163, 170, 173, 179, 180, 189, 208 86 3, 4, 7–10, 20, 28–31, 43, 60, 90, 100, 105, 117, 189, 190, 192, 193, 195, 196, 199–202, 204–7, 209, 220, 228, 231, 238, 242, 244, 246, 250, 251, 267–70, 275, 277, 278, 280, 301, 303, 313, 314, 325, 326, 340, 346, 347, 356, 369, 389, 391, 393, 395, 397, 398, 400, 404, 405, 407, 409–12, 415–18, 420–22, 491, 493, 502, 503, 529, 541, 544, 548, 549, 551, 568, 573, 580, 599, 620, 621, 624, 660, 664, 666–9, 672– 74, 678, 679, 682, 685, 686, 689, 693, 694, 697–702, 705, 708, 711, 712, 715–17, 719, 721, 723, 724, 728, 735, 736, 738, 740, 741, 744, 747–50, 756, 758, 766, 768, 769, 786, 788, 790, 799, 818, 820, 828, 831–3, 846, 850, 852, 867, 870, 871, 873, 874, 877, 880, 889, 890, 892 87 9, 11, 17, 18, 31, 32, 35, 43, 71, 72, 77, 82, 101, 104, 106, 108, 110, 114, 128, 130, 131, 135, 141, 142, 144–9, 162, 217, 223, 228 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 230, 238, 242, 249, 263, 271, 274, 276, 287, 297, 300, 302, 304, 312, 313 88 6, 12, 13, 30, 46, 50, 60, 73, 81, 82, 92, 97, 99, 106, 113, 114, 117, 119, 124, 126, 127, 129, 138, 144, 152, 153, 170, 180, 181, 189, 191, 196, 213, 214, 219, 221, 236, 237, 239–41, 249, 260, 277, 296, 308, 309, 330 89 5, 8, 11, 20–2, 31, 32, 36, 38, 39, 113, 114, 140, 148–50, 152, 155, 159, 168, 170, 176, 190, 234, 238–42, 248, 260, 261, 284, 334 90 89, 138, 156, 307, 342, 383, 396 KANTIANISMUS, der 19 495 20 20 21 358 22 146, 147, 285 26 139, 190 28 34, 259 41 60 46 31 56/57 19 58 178, 232 59 141 61 5 65 94, 205, 218, 253 68 4 86 506 87 82, 238 KERNER, Justinus 13 142 16 541 KIERKERGAARD, Søren 1 56 2 253, 313, 447, 448 SZ 190, 235, 338 5 249 62 430, 433–5, 437, 438 8 216 9 11, 27, 40, 41, 432 14 104 16 317, 416, 425 17 126 20 404, 405 24 408 26 178, 245, 246 27 374 28 205, 263, 311, 313 29/30 225, 226 31 201 32 19, 197 34 135, 325 35 82–5 36/37 10, 13, 15, 147, 268, 278–80 42 38, 42, 43 45 216 49 19–26, 29, 30, 36, 38, 39, 45, 47, 48, 55, 67, 73, 75, 102, 110, 151–4 54 44, 53 55 126 58 205 60 178, 192, 248, 257, 265, 268 61 24, 182 63 5, 17, 30, 41, 108, 111 65 204, 233 70 194 79 141 86 550, 602, 747, 762, 781, 783, 801 90 288 VON KLEIST, Heinrich 2 331 SZ 249 12 89, 109 15 430 16 710 39 220 42 2 45 127 46 20 47 88 52 8 55 230 64 95 LAMBERT, Johann Heinrich 17 5 23 192 27 248 42 65 87 132 LESSING, Gotthold Ephraim 5 339 7 152 10 120, 130, 179 11 119 16 50 20 14 23 148, 188 42 13, 60, 115, 116 52 8, 78 78 165 79 72 LOTZE, Hermann 1 23, 34, 36, 46, 66, 170, 200, 309, 314, 323–5, 335, 337 2 133, 207 SZ 99, 155 3 310 5 102 16 41, 44 20 17 21 27, 28, 62– 78, 80–6, 90, 99, 111, 112, 246, 247 22 284 24 253, 254, 282–4, 286–28, 290, 304, 312, 331 25 261 26 27, 37 27 153 29/30 482 56/57 36, 42, 91, 136–8, 140–3, 155, 156, 158, 162, 163, 167 59 175 60 19, 23 61 196 65 38, 73, 181 66 411 87 91 88 155, 243, 290, 292, 306 90 58 MARX, Karl [Marxismus, marxistisch] 62 116 8 27 9 319, 321, 336, 339, 340, 432, 447 11 24, 139, 140 13 211, 212 14 71 15 278, 229 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 323, 352, 353, 387–9, 393, 394 16 72, 249, 297, 303, 411, 672, 673, 703, 707 27 371 33 137 34 325 36/37 147, 151, 211 38 61, 64 40 50 48 164 60 26 65 54 68 8 76 275 79 94, 95, 140 85 105, 213 86 80, 191, 296, 307, 330, 550, 565, 607, 609–11, 732, 776, 842 87 188 89 243, 280, 354, 360 90 119, 168, 230, 258, 288, 312, 313, 394 MENDELSSOHN, Moses 3 194 23 147, 222, 247 42 8, 60, 115–17 86 706 MEYER, Conrad Ferdinand 5 22 61 233 44 11 76 390 88 259, 320, 325 90 436 MILL, John Stuart 1 37 19 589 20 16, 17, 19 21 27, 38–40, 45 24 253, 273, 274, 276–82, 286–90, 293 56/57 164 58 214 MÖRIKE, Eduard 8 153 10 85 12 199 13 93–5, 97–102, 107, 109 16 31, 691, 693 39 220 74 171, 176 76 245 MOZART, Wolfgang Amadeus 10 99, 100 15 246 16 688, 778 43 152 56/57 68 NOVALIS 1 399 2 331 SZ 249 10 19, 20 11 128, 133 12 229, 253, 254 16 50, 615 28 186 29/30 5, 7, 10– 12, 33 39 220 42 13 59 160 64 95 66 403 79 82, 87, 88, 141, 174 OVERBECK, Franz 61 5, 9, 11 9 46 16 41 43 10, 14–16 PAUL, Jean 62 23 12 242 48 1 55 65 74 109 VON RANKE, Leopold 1 431 2 528 SZ 400 24 6 27 231 45 34 46 359 56/57 135, 163 64 11 76 23 81 5, 239, 242 88 173 RIMBAUD, Arthur 13 225–7 14 48, 49, 65 RITSCHL, Albert 2 361 SZ 272 16 19 58 61 60 19, 24, 170 VON SCHELLING, Friedrich Wilhelm Joseph 1 56, 57 3 137, 255, 270 4 56, 90, 163 5 101, 200, 253 61 32, 54, 55, 59, 60, 107, 158, 209, 289, 433, 446, 526 62 1, 96, 213, 308, 412, 429, 430, 433–7 7 75, 80, 112, 113, 115 8 94, 95, 102, 104, 105, 112 9 125, 126, 360, 382, 420, 464, 469, 470 10 32, 131 11 16, 24, 34, 94, 95, 128 13 20 14 94 15 169, 182, 287, 295, 298, 314, 315, 317, 349, 435, 436, 438 16 291, 370, 614, 708, 724, 739 19 313 23 9, 64, 148 24 6, 176, 216, 218 26 139, 140 27 71, 171, 230, 231, 361, 362 28 2, 9, 33, 34, 51, 126, 166, 183, 185–98, 201, 202, 206, 210, 251–5, 265, 330–4 29/30 529 32 6, 15, 23, 34, 44, 54, 57, 109, 149, 175 36/37 18, 35, 75, 281 38 29 39 6, 84, 129, 293 40 226 41 58, 230 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 114, 136, 153 42 1, 3–12, 14–28, 30, 32, 33, 35–8, 43, 44, 49, 51, 60, 61, 68, 73, 74, 77–9, 81, 82, 84–6, 88–94, 96–102, 104, 107– 9, 112–20, 123–6, 128–36, 139, 141–4, 146–9, 151, 153–8, 160– 5, 167–9, 171–3, 179–82, 185– 95, 198, 199, 202–5, 208, 209, 211, 213–16, 218, 220, 227, 228, 231–3, 237, 241, 248, 250–2, 256, 260, 261, 270, 272, 275, 276, 278–82, 284 43 41, 42, 67, 72, 73, 84, 125, 190, 256 44 72 46 28, 174 47 13, 32, 179, 189, 275 48 37, 118, 222, 314 49 1–8, 10, 12, 14, 15, 25, 26, 34, 73, 75, 82– 8, 90, 91, 93, 94, 96, 97, 99, 101, 102, 104, 112–15, 120, 132, 137–9, 141, 142, 144, 146–50, 161, 163, 169–72, 174, 177, 179–85, 187, 190, 191, 194–6 52 119 53 95, 157 54 25, 27, 28 55 20, 30, 34, 40, 114, 117, 150, 151, 230, 231, 384 56/57 134, 135 58 10 61 7 62 369 65 81, 176, 199, 201, 204, 509 66 101, 159, 263, 299, 374, 403, 419, 423 67 7, 12, 43, 94, 102, 123, 135, 146, 158, 160, 161, 169, 210 68 4, 13, 53, 119, 143, 145, 146 69 62, 142 70 117, 164, 192 71 9, 22, 113, 191 74 204 75 8, 201, 318, 343 76 9, 10, 33, 43, 234, 241, 247 77 244 78 6 79 82, 116, 140, 141 85 103, 161, 208 86 5, 8, 47, 49, 53, 144, 185, 190, 192, 195, 196, 198, 200, 202, 210, 212–14, 217, 219, 222, 224–30, 232, 233, 235, 237, 241–6, 248, 249, 252, 254, 256, 257, 259, 261, 268, 270, 275, 277, 290, 309, 325, 396, 432, 456, 502, 507, 509, 517–24, 529–48, 568, 573, 574, 621, 625, 689, 699, 700, 707, 716, 717, 721, 724, 727, 762, 767, 780, 805, 824, 851, 867, 870, 890, 893 87 72, 128, 178, 302 88 46, 72, 73, 110, 111, 123, 125, 128, 132, 133, 135, 137–44, 170, 241, 261, 265, 295 90 81, 118, 299, 307 SCHILLER, Friedrich 61 89, 107, 113 9 320 12 132 13 124 16 31, 291, 496 20 167 22 62 25 14 27 31, 147 29/30 55, 534 34 59 36/37 160 39 47, 220 40 36 41 58, 73, 74, 114, 155 42 2, 116 43 106, 125, 131, 138, 243 45 127, 216 49 74, 75, 161 52 8, 78, 120 53 24, 94 55 230 58 213, 242 61 8 65 366 66 419, 423 71 182, 208 75 350, 351, 355 85 103 86 210, 893 87 109, 110, 121, 123, 124, 127, 128, 130, 140, 232, 238, 300 88 187 SCHLEGEL, Friedrich 1 406 19 311 28 182, 186 34 152 42 152 56/57 134 SCHLEIERMACHER, Friedrich 3 305 61 194, 209 12 92 16 19, 50, 291 19 4, 310–13, 454 20 23 22 14, 95, 146, 285 24 6 28 136 34 30, 130, 152, 163, 180, 186, 189, 193, 203, 204, 225, 242, 255, 277, 283, 304 36/37 135, 246 42 2, 13 43 236, 256 231 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 56/57 134, 140, 163 58 9, 58, 210 59 21, 154, 160 60 19, 23, 164, 170, 172, 319, 330 61 8 63 13, 14 86 285 SCHMIDT, Julian 61 89 43 106 SCHOPENHAUER, Arthur 1 13, 19, 51, 63 2 361 SZ 272 5 224 61 5, 6, 26, 31, 32, 36, 37, 39, 54, 59, 60, 69–71, 74, 86, 103, 106–8, 110, 112, 131, 157, 158, 209, 285, 311, 394, 395, 475, 527, 586 62 79, 213 7 77, 80, 81, 113, 116 8 41, 42, 95, 97 9 125 15 334 16 230 26 138–41 27 14, 327 29/30 109 39 294 40 67, 186, 225–7 43 10, 35, 41, 42, 46, 47, 49, 67, 68, 72, 73, 84, 86, 88, 102, 124–6, 129, 131, 153, 189, 190, 256 44 68, 179, 190, 197, 198 46 9, 55, 61, 62, 91, 113, 129, 138, 160, 168, 172, 176, 189, 191, 213, 220, 234, 238, 281, 282, 284, 312, 323, 333, 335, 350, 357, 358 47 94, 265, 310 48 29, 32, 34, 35, 37, 75, 99, 146, 314, 315 54 139, 225, 235 55 20, 151, 384 58 10, 30 61 66 65 181 66 147, 190 67 121, 196–9 68 3, 54 76 220 86 206, 252, 277, 398, 502 87 6, 17, 23, 25, 39, 62, 64, 67, 71, 72, 82, 118, 123, 142, 238, 242, 244, 282, 285 88 33, 253 SCHUPPE, Wilhelm 1 5 21 28, 51 24 253 26 37 56/57 182 VON SECKENDORF, Leo 4 79 7 206 52 19 75 121 SIEBECK, Hermann 1 283 19 483, 485 62 232, 237, 330 VON SIGWART, Christoph 1 20, 23, 37, 66, 75, 100, 106, 111, 183, 187, 202 16 30 21 27, 40, 41, 88 24 253 26 27, 37, 148 56/57 149, 150, 155, 156, 159, 161, 162 59 155 62 330 63 14 SPENCER, Herbert 58 214 87 193 STEINTHAL, Heymann 1 177, 303 16 33 19 648 74 179, 180 85 36, 157 STRAUß, Franz Joseph 10 178 VON STRAUß, Victor 11 138 79 93 TAINE, Hippolyte 61 89 9 105 43 105 58 214 DE TOCQUEVILLE, Alexis 90 413 TOLSTOI, Lew Nikolajewitsch 2 337 SZ 254 19 155 TRENDELENBURG, Friedrich Adolf 1 197 3 310 17 8 20 23 22 146, 285 56/57 135 61 8 63 42 VISCHER, Friedrich Theodor 61 89 13 97, 98, 101, 102 43 106 WAGNER, Richard [wagnerisch] 5 102, 225 61 5, 6, 59, 69, 84–8, 90, 113, 120, 125, 127, 129–31, 133, 135, 176, 214, 394, 395, 422, 232 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189 434 62 81, 252, 279 15 283 16 99 29/30 108 39 294 43 10, 11, 72, 84, 100–5, 107, 108, 132, 139, 145, 148, 150, 152, 154, 157, 160, 162, 164, 214, 263, 291 44 197, 198 46 60, 73, 123, 176, 281, 335, 350, 357, 365 47 14, 45 48 100 50 28, 58 65 174 74 203 87 86, 221, 315 89 174, 177, 343 WUNDT, Wilhelm 1 8, 23, 65–7, 70, 71, 73–85, 87– 90, 125, 126, 131, 162, 163, 178, 187 16 19, 22, 24, 33–5 20 15, 47 21 47 58 211, 213, 215 85 53 YORCK VON WARTENBURG, Paul 2 499, 525–7, 530, 531, 533 SZ 377, 397–9, 401–4 16 51 64 3– 7, 9–15 ZELLER, Eduard 3 304 17 305 19 441, 446 21 84 22 16, 17, 22, 63 23 148 26 45 33 208 56/57 135, 149, 156, 157 59 155 62 9, 98 233 Bhdg – 4, 2014 ISSN 2034-7189  L’appellation « Concordance Heidegger », que nous utilisions déjà dans le premier numéro du Bulletin heideggérien, est ōésormais le titre ōe l’ouvrage paru en 2013 aux Éōitions Bloomsbury Academics (Londres/New Delhi/New York/Sydney) : The Heidegger Concordance Il se Ōompose ō’inōex ōe termes allemanōs, greŌs, latins, ainsi que ō’un inōex de noms propres Nous remercions les éditions Bloomsbury de nous avoir autorisés à user ici de ce nom et à donner un aperçu de ce que notre livre renferme.  Les référenŌes sont ōonnées suivant l’éōition ōe ōernière main (Gesamtausgabe, Francfort-sur-le-Main, Klostermann, 1975–). Nous inōiquons tout ō’aborō le numéro ōu tome (en ŌaraŌtères gras) et les pages où apparaît le nom ōe l’auteur ou un aōjeŌtif ōérivé de son nom Nous avons exclu de cet index les tables des matières et les titres – qui ne sont généralement pas de la main de Heidegger –, ainsi que les postfaces ou les notes des éditeurs. Les termes allemanōs auxquels l’inōex fait référenŌe sont inōiqués entre ŌroŌhets. Dans l’attente ōe la publiŌation ōu tome 89 ōe la Gesamtausgabe, nous utilisons ce chiffre pour renvoyer aux Zollikoner Seminare, mais inōiquons iŌi la pagination ōe l’éōition ōe Medard Boss, Zollikoner Seminare Protokolle, Zwiegespräche, Briefe, Francfort-sur-le-Main, Vittorio Klostermann, 20063. Les références au tome 2 de la Gesamtausgabe sont aussi indiquées entre parenthèses suivant la pagination ōe l’éōition originale ōe Sein und Zeit (Tübingen, Niemeyer, 200619).  Nous offrons ici la quatrième livraison de cet index nominum selon le découpage annoncé dans le premier numéro du Bulletin heideggérien : Antiquité I (Les Présocratiques, VIIIe – Ve s av J-C), Antiquité II (De Socrate à Plotin, IVe – IIIe s ap J-C), Moyen Âge et Temps Modernes I (D’Augustin à Hume, IVe s – 1750), Temps Modernes II (De Kant à Kierkegaard, 1750 – 1850), Époque contemporaine (De Nietzsche à Celan, 1850 – 1976). Nous remercions la fondation Alexander von Humboldt (www.avh.de) pour son appui financier et M Benjamin Schröer pour son aide dans la réalisation de ce travail. 234