Estética, Filosofía Barroca, Hermenéutica

La hermenéutica ha jugado un papel importante dentro de la historia de la teología, y particularmente de las interpretaciones exegéticas, de allí la relevancia que adquiere el estudio y análisis histórico acerca de cómo se fue construyendo la hermenéutica como disciplina. El artículo presenta un panorama histórico filosófico en que se destacan los hitos más significativos del desarrollo de la hermenéutica como disciplina componente de las ciencias del espíritu. El análisis se focaliza en el aporte hecho por Hans-Georg Gadamer a la disciplina, con quien ésta adquirió su mayor y definitivo impulso en pleno siglo XX (el llamado “giro hermenéutico” de la filosofía). Además se analiza el concepto de hermenéutica en sus predecesores o compañeros de ruta intelectual (Hegel, Schleiermacher, Dilthey, Spranger, Heidegger), especificando las regiones del saber en que estos pensadores la aplicaron y aportaron en su desarrollo. También se examinan los orígenes más remotos de la disciplina, con Platón y Aristóteles. Finalmente, se explicita la función que cumplen las hermenéuticas regionales –incluyendo la bíblica o teológica— y la relación que guardan éstas con la hermenéutica general, para concluir con una breve y concisa exposición acerca del rol pedagógico que cumple hoy la hermenéutica.

Este libro contiene dos escritos fundamentales para conocer la relación de Sor Juana Inés de la Cruz con la jerarquía de la Iglesia católica: la "Carta de Puebla" (1691), que es la inmediata y afectuosa contestación del obispo de esa diócesis, Manuel Fernández de Santa Cruz, a la célebre "Respuesta a Sor Filotea de la Cruz", así como la "Carta de San Miguel" (1692), del mismo autor, las cuales forman parte del entrañable intercambio epistolar que, según hemos descubierto, existió entre la poetisa y el prelado.
    Ambas cartas pertenecen al acervo de la Biblioteca Palafoxiana. Alejandro Soriano Vallès las presenta en una cuidada edición que incluye introducción, estudio liminar y anotaciones detalladas.

La génesis literaria de Einbahnstrasse de Walter Benjamin constituye un caso muy especial de utilización de los procedimientos del surrealismo en la producción filosófico-literaria del autor, cuyo verdadero carácter devela la movediza frontera que históricamente ha dividido a la literatura y la filosofia. Einbahnstrasse es una obra escrita para generar en el lector una mirada que sospecha, y el proceso de evolución de pensamiento que desembocó en la escritura de la obra se revela a través del presente análisis como un gesto a la vez de renuncia y de recomienzo, como la apertura de una nueva dimensión productiva en la carrera de uno de los filósofos mas importantes del siglo XX y también uno de los mas incomprendidos. Más que iluminar desde lo literario una pequeña obra maestra de filosofía, o desde lo filosófico analizar cómo se constituye una pequeña obra maestra de la literatura, se problematiza justamente la división entre las disciplinas, cultivada o figurada a lo largo del tiempo. En la obra analizada existen diferentes formaciones de uno y otro campo que se trasvasan y nos señalan directa o indirectamente la forma en la cual hemos sembrado esa permeable y viviente marca divisoria. Este trabajo pretende rescatar lo indisoluble de la labor filosófico-literaria de Walter Benjamin y esbozar una posible reconfiguracion del campo de trabajo interdisciplinario que podría contribuir a la comprensión del problema que Jacques Derrida llama "la retirada de la metáfora".

El presente estudio expone algunos lineamientos generales de la filosofía del padre jesuita Ildefonso de Peñafiel y Araujo (1594-1657) e intenta explicar los aspectos más relevantes que la sustentan. El análisis de dichos aspectos nos conduce a caracterizar su pensamiento como un conceptualismo peculiar, en el que se entrelazan elementos modernos del nominalismo ockhamista, del realismo escotista, del tomismo suareziano, de la teoría del signo y del providencialismo agustiniano, así como del neoplatonismo renacentista.

Le milieu du xvi e siècle constitue un épisode important de l’histoire du récit en prose. L’autre grand moment d’effervescence se produit au tout début du xvii e siècle (peu avant la publication de l’Ingenioso hidalgo) à cause d’un événement éditorial sans précédent. On doit à Micó (in Cerdan, 1994, p. 827-848) d’avoir mis en lumière l’étonnante accélération du tempo des éditions d’œuvres narratives à ce moment précis de l’histoire littéraire. Deux phénomènes opèrent en coulisse : d’une part, la création de nouvelles histoires que les auteurs faisaient circuler de manière manuscrite (voir les allusions mutuelles entre La pícara Justina et l’Ingenioso hidalgo), puis, rapidement, la remise souvent dans l’urgence de ces textes aux imprimeurs (Martín Jiménez, 2010). Apparaissent ainsi de façon quasi concomitante la Segunda parte de Guzmán de Alfarache dans la version apocryphe de 1602, celle, autorisée, de Mateo Alemán (1604), le Buscón en version manuscrite (avant 1604 ?), El peregrino en su patria (1604), La pícara Justina (1605, « Privilège royal » de 1604) et, enfin, en 1605 , la Primera parte de Don Quijote. Bien plus qu’à un Siècle d’or ou à une décade áurea, on peut parler d’un lustre exceptionnel, situé entre 1600 et 1604.
Que s’est-il passé pour qu’une telle frénésie s’empare du monde des Lettres et de l’édition ? Pour le dire avec les mots de Micó, “es posible que el hecho más trascendente para la prosa del siglo xvii fuese la publicación de la Primera parte de Guzmán de Alfarache” (in Cerdan, 1994, p. 827-848). Ce jugement peut sembler inconvenant tellement la pente naturelle du cervantisme le porte à privatiser la « modernité » romanesque rejetant dialectiquement et subrepticement la prose « sordide » d’Alemán du côté du passéisme moyenâgeux. La réalité pourtant est bien différente du cliché. La première partie du Guzmán devient brutalement « el punto de referencia más importante de la prosa narrativa posterior » [ibid.] et, pire, un phénomène de lecture tel qu’il vient satisfaire un lectorat dépassant largement le milieu aristocratique. Dans la Vie en deux parties de Guzmán (1599 et 1604), Mateo Alemán poursuit le travail amorcé par les auteurs du premier et du second Lazarillo (1554, 1555). Reprenant la veine de la satire ménippée héritée des fictions de Lucien de Samosate, Alemán construit dans son récit souvent dénommé El Pícaro, une fable pseudo-autobiographique ancrée dans le courant européen des livres de gueuserie qui décrivait les bons et les mauvais tours des mendiants (Geremek, 1991). Il prend aussi un risque important car les textes lucianesques, souvent anonymes (le Lazarillo en fut l’une des émanations), ont été mis à l’Index. Le succès du Guzmán, immense, le propulse au niveau des meilleures ventes du siècle, tout juste derrière les Fables d’Esope et La Célestine de Rojas, les deux best-sellers du temps mais qui étaient des rééditions de textes plus anciens. Auprès des lettrés d’alors et sur ce fond de lectures datées, la fascination inouïe qu’exerce la Vida del pícaro s’accompagne d’une réaction gênée et d’une « tácita conspiración de silencio » (Márquez Villanueva, 1990, p. 564). Si l’on en croit les allusions parfois acerbes placées dans « Colloque des chiens », Cervantès compte parmi les auteurs les plus critiques du Pícaro. Pourtant, il pourrait être aussi l’auteur qui en fut le plus marqué et qui tirera pleinement partie des innovations alémaniennes. Il est donc indispensable de comprendre la portée du Guzmán du point de vue cervantin afin de mieux distinguer le lien distancié qui existe avec DQ.
Lorsqu’il sort des presses, Guzmán de Alfarache a tout pour séduire le public exigeant des lettrés. En premier lieu, l’histoire du héros narre les aventures d’un jeune homme désireux de connaître le monde. Son voyage le mène à Gênes : Guzmán est désireux de connaître sa famille paternelle et suit un capitaine qui le mènera jusque sur la péninsule italienne. Plus tard, à Rome, il servira un cardinal, puis un ambassadeur. De retour en Espagne, il se préparera à Alcalá à entrer dans les ordres. Enfin, sur une galère (qui fait office d’allégorie du pays), Guzmán fera l’éloge d’une vie au service des autorités du royaume contre les assauts des barbaresques. Ce livre qui reprend les thèmes obsessionnels cervantins a dû causer une forte impression à l’auteur de la Galathée. La vie de Guzmán offrait à Cervantès un miroir de sa propre existence : il y a retrouvé son expérience de domestique à Rome pour un cardinal, le péril Turc sur la galère, les jeux sur les patronymes, les aléas du destin à Séville, entre les affaires financières, les missions en qualité de fonctionnaire du Roi et les moments d’enfermement dans la prison royale de Séville, etc. L’un des thèmes de prédilection de Cervantès, la reconnaissance du mérite et du subordonné, structure la fable picaresque de bout en bout. Guzmán, qui demande à la fin du récit au roi quelque récompense pour avoir sauvé la galère contre un soulèvement, réactualise le message de Lázaro de Tormes qui semblait adresser son curriculum à Vuestra Merced comme s’il espérait de cette haute autorité une place plus avantageuse encore que celle offerte par l’archiprêtre de Tolède (Núñez Rivera, 2002). Concernant cette question sociale, le point soulevé par le discours satirique de Lázaro et de Guzmán est celui du rapport entre maîtres et domestiques. Guzmán fait souvent remarquer que les maîtres paient insuffisamment leurs valets (I, 2, 5-6). Le Q est l’occasion pour Cervantès d’abonder dans la direction d’Alemán. Alonso Quijano assure d’emblée à Sancho que son aide en qualité d’écuyer trouvera une juste récompense : la fameuse ínsula Barataria. Sancho lui-même est guidé par une intention identique à celle de Lázaro (« el servir a los buenos », II, 24). De même, l’une des premières séquences de la Primera parte reconduit la réflexion picaresque. L’« aventure » manchègue qui place le chevalier devant un différend entre Andrés et son maître Juan Haldudo (I, 4) convoque le lecteur sur le terrain borné par la picaresque (“este muchacho que estoy castigando es un mi criado, que me sirve de guardar una manada de ovejas que tengo en estos contornos, el cual es tan descuidado, que cada día me falta una; y, porque castigo su descuido, o bellaquería, dice que lo hago de miserable, por no pagalle la soldada que le debo, y en Dios y en mi ánima que miente”). Cervantès choisit une voie différente d’Alemán, mais le discours est sensiblement le même. La faute initiale est imputée au puissant « Haldudo el rico », qui est accusé d’être « ruin villano ». Cervantès ne pouvait pas rester indifférent à l’histoire et au discours de Guzmán. Pour les doctes du Siècle d’or, le Guzmán présentait aussi un deuxième atout, car Alemán a structuré son récit sur le modèle tant célébré de l’Odyssée. Le livre d’Alemán offre un récit épique renouvelé. Comme Ulysse parti de Troie pour rentrer à Ithaque, le protagoniste cherche à retrouver les siens. Pour couronner le tout, Guzmán de Alfarache reprend le schéma qui avait séduit maints poéticiens : pas moins que chez Homère, la geste du héros obéit à une structure tragique. L’enfermement de Guzmán sur la galère est son châtiment pour être devenu un « ladrón famosísimo ». La troisième vertu du Guzmán concerne le provecho des lecteurs. Alemán décrit le parcours initiatique d’un hijo del ocio pour mieux avertir la jeunesse des dangers d’une éducation « libre » (voir l’éloge de Barros). L’éloge de la vie de mendiant (I, 2, 2) résonne tel un paradoxum enkomium qu’il convient de lire (entre autre) comme une diatribe de cette existence (voir Lucien, Le parasite). Bien que réduit au rôle de forçat sur la galère de Sa Majesté, Guzmán affirme –et l’auteur avec lui (« Declaración »)– sa condition d’« homme de claro entendimiento, ayudado de letras y castigado del tiempo ». Guzmán, en effet, assure s’être repenti de toutes ses années de vice à la fin de son récit. Pour terminer, on distinguera une quatrième vertu, car, fort de la valeur universalisante de la « poésie » selon Aristote (la Vida de Guzmán est une « poética historia »), l’initiation du personnage est censée devenir celle des lecteurs. Le Guzmán est un apologue (genre prisé des savants du siècle) qui repose sur un vaste discours démonstratif* (fait d’éloges et de blâmes) : l’itinéraire du héros (« mozo de muchos amos ») n’est pas à lire de manière littérale et sert plutôt de cadre lucianesque destiné à passer en revue les groupes sociaux et en dresser une satire, comme le fera Cervantès dans son « Coloquio de los perros ».

Presentación de mi tesis doctoral: «Las Ermitas del Desierto de Las Palmas. Historia y actualidad de una idea». Departamento de Proyectos Arquitectónicos. Escuela Técnica Superior de Arquitectura (ETSAV), Universidad Politécnica de Valencia (UPV). Valencia 2016. 1.140 fols. Inédita.

Durante la primera mitad del siglo XX surgieron dos formulaciones enigmáticas que han hecho carrera: la idea del barroco americano o de Indias y la idea de América como barroco. Es como si el concepto hubiera adquirido de repente un alto grado de utilidad previamente no disponible. En este ensayo me interesa el modo en que una irrefrenable provocación, una cierta calidad paradójica y una innegable alteridad han sido constitutivas del barroco colonial americano. Esta “utilidad súbita” depende de una capacidad espectral para intimar una relación estrecha entre grandes temas contemporáneos y un momento epistémico colonial, anterior a la Ilustración. Le doy el atributo de espectral porque en sus múltiples manifestaciones el barroco signi7ca siempre el regreso recurrente e impertinente del pasado. Es por eso que los retornos del barroco son más importantes por el valor analítico que ofrecen que por aquello que enuncian, es decir, por su doctrina estética o por su programa político. Esbozo la historia densa y contradictoria de sus recurrentes retornos. Mi intención será apuntar hacia lo que queda velado tras el paso del fantasma, aquello que no le es permitido decir al campo pero que es la razón misma del campo.

Comprender para Gadamer es ponerse de acuerdo en la cosa (Sache). En este sentido, no es posible comprender una situación humana cuando hay una incapacidad para dialogar. El diálogo es aquella forma del lenguaje en la que entramos, en la que creamos tejidos de palabras y nos enredamos porque nos dejamos llevar por la cosa (sache) o la situación hermenéutica. La tesis del escrito es la siguiente: El diálogo en Gadamer es un medio para llegar a la fusión de horizontes y a la comprensión hermenéutica. La conclusión es que la hermenéutica solo puede lograrse y llevarse lejos si los dialogantes tienen disposición para ello y si reconocen la importancia de la opinión del otro como un acto de razón. Es decir, no como una abdicación de la propia razón.

En el origen del conflicto de los siglos, en lo que toca a la entrada del pecado en el mundo, encontramos el motivo central que da título al presente trabajo. Aquél “no moriréis” con el cual Satanás engañó a los habitantes del Edén fue conformando un paradigma de interpretación de toda la realidad existente (Dios inclusive). El origen geográfico de este paradigma que atraviesa toda la cultura occidental, curiosamente, no nace en el seno de ésta, si bien debemos dar crédito a quienes más lo elaboraron, a saber, los filósofos griegos, particularmente Pitágoras y Platón, sino que proviene de la cultura oriental, fuente principal de donde ambos filósofos bebieron intelectual y místicamente. Los griegos, con su mentalidad especulativa-racional, lograron darle forma y coherencia, hasta que finalmente una antropología dualista queda definitivamente instalada en nuestra cultura. Hoy, ya sin divisiones geográfico-culturales, producto de la vigencia de un “Nuevo Orden Internacional” que se impone en todos los ámbitos del saber y el hacer, este dualismo, y particularmente la cuestión sobre la inmortalidad del alma, han quedado definitivamente incorporados al patrimonio de la cultura universal, dejando así a un lado la verdad antropológica que se extrae de una hermenéutica pura y exclusivamente bíblica, al modo genuino del hebreo antiguo y fundado en las palabras mosaicas de Gén. 2:7.

Una famosa definición reza: el estilo es el hombre. El Barroco, en principio definido como estilo artístico, desplegó un abanico mucho más amplio de manifestación. Fue la corriente del pensamiento y de las artes que signó el periodo de transición, iniciado con el Renacimiento, entre dos grandes eras en la historia de la civilización, la Edad Media y la Moderna. Como tal, se objetivó en diversas prácticas de la especie humana, las artes, la ciencia, la filosofía e incluso la religión, esferas que acompasadas unas con otras, formaron el andamiaje de la cosmovisión de la humanidad en una época determinada. Por lo tanto, si cabe hablar de un estilo barroco, también habrá un hombre barroco y más, una cosmovisión barroca. Pero en este caso hablaremos de una mujer, la primera gran poeta de la América Latina, filósofa y escritora, moglie universale, monja por opción más que por convicción, figura destacada en su medio y tiempo, sobresaliente a pesar de su menospreciada condición de género en una época en la cual la mujer, era aquel ser a medio camino entre lo animal y lo demoníaco que traficó con la serpiente.

En este trabajo se analiza el concepto de violencia dentro de la obra filosófica de Bolívar Echeverría, ello con la intención de poder definir el carácter de la modernidad capitalista en América Latina. Se establece que la violencia es un aspecto intrínseco a los respectivos procesos de constitución histórica, antropológica y cultural. Finalmente, se concluye que la condición barroca de las identidades múltiples del ser latinoamericano hace patente esta situación.

Esta es la primera traducción directa del latín de algunas cuestiones correspondientes a la Disputa II De natura et essentia universalis del jesuita Ildefonso de Peñafiel y Araujo (1594-16557), inserto en el tomo primero de su Cursus integri philosophici (1632) que fue impreso en Lyon en 1553 y sirvió de texto de estudio tanto en el Colegio Máximo de San Pablo de Lima y en la Universidad San Marcos durante el Virreinato del Perú.

Le milieu du xvi e siècle constitue un épisode important de l’histoire du récit en prose. L’autre grand moment d’effervescence se produit au tout début du xvii e siècle (peu avant la publication de l’Ingenioso hidalgo) à cause d’un événement éditorial sans précédent. On doit à Micó (in Cerdan, 1994, p. 827-848) d’avoir mis en lumière l’étonnante accélération du tempo des éditions d’œuvres narratives à ce moment précis de l’histoire littéraire. Deux phénomènes opèrent en coulisse : d’une part, la création de nouvelles histoires que les auteurs faisaient circuler de manière manuscrite (voir les allusions mutuelles entre La pícara Justina et l’Ingenioso hidalgo), puis, rapidement, la remise souvent dans l’urgence de ces textes aux imprimeurs (Martín Jiménez, 2010). Apparaissent ainsi de façon quasi concomitante la Segunda parte de Guzmán de Alfarache dans la version apocryphe de 1602, celle, autorisée, de Mateo Alemán (1604), le Buscón en version manuscrite (avant 1604 ?), El peregrino en su patria (1604), La pícara Justina (1605, « Privilège royal » de 1604) et, enfin, en 1605 , la Primera parte de Don Quijote. Bien plus qu’à un Siècle d’or ou à une décade áurea, on peut parler d’un lustre exceptionnel, situé entre 1600 et 1604.
Que s’est-il passé pour qu’une telle frénésie s’empare du monde des Lettres et de l’édition ? Pour le dire avec les mots de Micó, “es posible que el hecho más trascendente para la prosa del siglo xvii fuese la publicación de la Primera parte de Guzmán de Alfarache” (in Cerdan, 1994, p. 827-848). Ce jugement peut sembler inconvenant tellement la pente naturelle du cervantisme le porte à privatiser la « modernité » romanesque rejetant dialectiquement et subrepticement la prose « sordide » d’Alemán du côté du passéisme moyenâgeux. La réalité pourtant est bien différente du cliché. La première partie du Guzmán devient brutalement « el punto de referencia más importante de la prosa narrativa posterior » [ibid.] et, pire, un phénomène de lecture tel qu’il vient satisfaire un lectorat dépassant largement le milieu aristocratique. Dans la Vie en deux parties de Guzmán (1599 et 1604), Mateo Alemán poursuit le travail amorcé par les auteurs du premier et du second Lazarillo (1554, 1555). Reprenant la veine de la satire ménippée héritée des fictions de Lucien de Samosate, Alemán construit dans son récit souvent dénommé El Pícaro, une fable pseudo-autobiographique ancrée dans le courant européen des livres de gueuserie qui décrivait les bons et les mauvais tours des mendiants (Geremek, 1991). Il prend aussi un risque important car les textes lucianesques, souvent anonymes (le Lazarillo en fut l’une des émanations), ont été mis à l’Index. Le succès du Guzmán, immense, le propulse au niveau des meilleures ventes du siècle, tout juste derrière les Fables d’Esope et La Célestine de Rojas, les deux best-sellers du temps mais qui étaient des rééditions de textes plus anciens. Auprès des lettrés d’alors et sur ce fond de lectures datées, la fascination inouïe qu’exerce la Vida del pícaro s’accompagne d’une réaction gênée et d’une « tácita conspiración de silencio » (Márquez Villanueva, 1990, p. 564). Si l’on en croit les allusions parfois acerbes placées dans « Colloque des chiens », Cervantès compte parmi les auteurs les plus critiques du Pícaro. Pourtant, il pourrait être aussi l’auteur qui en fut le plus marqué et qui tirera pleinement partie des innovations alémaniennes. Il est donc indispensable de comprendre la portée du Guzmán du point de vue cervantin afin de mieux distinguer le lien distancié qui existe avec DQ.
Lorsqu’il sort des presses, Guzmán de Alfarache a tout pour séduire le public exigeant des lettrés. En premier lieu, l’histoire du héros narre les aventures d’un jeune homme désireux de connaître le monde. Son voyage le mène à Gênes : Guzmán est désireux de connaître sa famille paternelle et suit un capitaine qui le mènera jusque sur la péninsule italienne. Plus tard, à Rome, il servira un cardinal, puis un ambassadeur. De retour en Espagne, il se préparera à Alcalá à entrer dans les ordres. Enfin, sur une galère (qui fait office d’allégorie du pays), Guzmán fera l’éloge d’une vie au service des autorités du royaume contre les assauts des barbaresques. Ce livre qui reprend les thèmes obsessionnels cervantins a dû causer une forte impression à l’auteur de la Galathée. La vie de Guzmán offrait à Cervantès un miroir de sa propre existence : il y a retrouvé son expérience de domestique à Rome pour un cardinal, le péril Turc sur la galère, les jeux sur les patronymes, les aléas du destin à Séville, entre les affaires financières, les missions en qualité de fonctionnaire du Roi et les moments d’enfermement dans la prison royale de Séville, etc. L’un des thèmes de prédilection de Cervantès, la reconnaissance du mérite et du subordonné, structure la fable picaresque de bout en bout. Guzmán, qui demande à la fin du récit au roi quelque récompense pour avoir sauvé la galère contre un soulèvement, réactualise le message de Lázaro de Tormes qui semblait adresser son curriculum à Vuestra Merced comme s’il espérait de cette haute autorité une place plus avantageuse encore que celle offerte par l’archiprêtre de Tolède (Núñez Rivera, 2002). Concernant cette question sociale, le point soulevé par le discours satirique de Lázaro et de Guzmán est celui du rapport entre maîtres et domestiques. Guzmán fait souvent remarquer que les maîtres paient insuffisamment leurs valets (I, 2, 5-6). Le Q est l’occasion pour Cervantès d’abonder dans la direction d’Alemán. Alonso Quijano assure d’emblée à Sancho que son aide en qualité d’écuyer trouvera une juste récompense : la fameuse ínsula Barataria. Sancho lui-même est guidé par une intention identique à celle de Lázaro (« el servir a los buenos », II, 24). De même, l’une des premières séquences de la Primera parte reconduit la réflexion picaresque. L’« aventure » manchègue qui place le chevalier devant un différend entre Andrés et son maître Juan Haldudo (I, 4) convoque le lecteur sur le terrain borné par la picaresque (“este muchacho que estoy castigando es un mi criado, que me sirve de guardar una manada de ovejas que tengo en estos contornos, el cual es tan descuidado, que cada día me falta una; y, porque castigo su descuido, o bellaquería, dice que lo hago de miserable, por no pagalle la soldada que le debo, y en Dios y en mi ánima que miente”). Cervantès choisit une voie différente d’Alemán, mais le discours est sensiblement le même. La faute initiale est imputée au puissant « Haldudo el rico », qui est accusé d’être « ruin villano ». Cervantès ne pouvait pas rester indifférent à l’histoire et au discours de Guzmán. Pour les doctes du Siècle d’or, le Guzmán présentait aussi un deuxième atout, car Alemán a structuré son récit sur le modèle tant célébré de l’Odyssée. Le livre d’Alemán offre un récit épique renouvelé. Comme Ulysse parti de Troie pour rentrer à Ithaque, le protagoniste cherche à retrouver les siens. Pour couronner le tout, Guzmán de Alfarache reprend le schéma qui avait séduit maints poéticiens : pas moins que chez Homère, la geste du héros obéit à une structure tragique. L’enfermement de Guzmán sur la galère est son châtiment pour être devenu un « ladrón famosísimo ». La troisième vertu du Guzmán concerne le provecho des lecteurs. Alemán décrit le parcours initiatique d’un hijo del ocio pour mieux avertir la jeunesse des dangers d’une éducation « libre » (voir l’éloge de Barros). L’éloge de la vie de mendiant (I, 2, 2) résonne tel un paradoxum enkomium qu’il convient de lire (entre autre) comme une diatribe de cette existence (voir Lucien, Le parasite). Bien que réduit au rôle de forçat sur la galère de Sa Majesté, Guzmán affirme –et l’auteur avec lui (« Declaración »)– sa condition d’« homme de claro entendimiento, ayudado de letras y castigado del tiempo ». Guzmán, en effet, assure s’être repenti de toutes ses années de vice à la fin de son récit. Pour terminer, on distinguera une quatrième vertu, car, fort de la valeur universalisante de la « poésie » selon Aristote (la Vida de Guzmán est une « poética historia »), l’initiation du personnage est censée devenir celle des lecteurs. Le Guzmán est un apologue (genre prisé des savants du siècle) qui repose sur un vaste discours démonstratif* (fait d’éloges et de blâmes) : l’itinéraire du héros (« mozo de muchos amos ») n’est pas à lire de manière littérale et sert plutôt de cadre lucianesque destiné à passer en revue les groupes sociaux et en dresser une satire, comme le fera Cervantès dans son « Coloquio de los perros ».